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69 Cahier de Mathématiques Appliquées n o 14 Files d’attente B. Ycart La théorie des files d’attente a de nombreuses applications, en particulier dans les réseaux de communication et les réseaux informatiques. Nous insis- terons surtout sur les modèles markoviens, en supposant acquises les notions de base sur les chaînes de Markov et les processus markoviens de saut, qui ont fait l’objet de cahiers dans la même collection. L’objectif est de donner une compréhension concrète des phénomènes, tout en présentant les résultats mathématiques de base de la théorie, sans insister sur les détails techniques. Pour compléter ce qui suit, on pourra se reporter aux ouvrages suivants. E. Gelenbe et G. Pujolle Introduction aux réseaux de files d’attente. Eyrolles, Paris, 1985. L. Kleinrock Queuing systems, vol. 1: theory. Wiley, New York, 1975. L. Kleinrock Queuing systems, vol. 2: computer applications. Wiley, New York, 1976. P. Robert Réseaux et files d’attente : méthodes probabilistes. Springer-Verlag, Berlin, 2000. Ce “cahier de mathématiques appliquées” doit beaucoup aux relectures scrupuleuses de Jean-Stéphane Dhersin et Dominique Seret, au dynamisme de Sylvie Sevestre-Ghalila, au soutien de l’Ecole Supérieure de la Statistique et de l’Analyse de l’Information de Tunisie, par son directeur Makki Ksouri, ainsi qu’à la compétence de Habib Bouchriha, directeur du Centre des Pu- blications Universitaires de la Tunisie.

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  • 69

    Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    Files dattente

    B. Ycart

    La thorie des les dattente a de nombreuses applications, en particulierdans les rseaux de communication et les rseaux informatiques. Nous insis-terons surtout sur les modles markoviens, en supposant acquises les notionsde base sur les chanes de Markov et les processus markoviens de saut, quiont fait lobjet de cahiers dans la mme collection. Lobjectif est de donnerune comprhension concrte des phnomnes, tout en prsentant les rsultatsmathmatiques de base de la thorie, sans insister sur les dtails techniques.Pour complter ce qui suit, on pourra se reporter aux ouvrages suivants.

    E. Gelenbe et G. Pujolle Introduction aux rseaux de les dattente.Eyrolles, Paris, 1985.

    L. Kleinrock Queuing systems, vol. 1: theory.Wiley, New York, 1975.

    L. Kleinrock Queuing systems, vol. 2: computer applications.Wiley, New York, 1976.

    P. Robert Rseaux et les dattente : mthodes probabilistes.Springer-Verlag, Berlin, 2000.

    Ce cahier de mathmatiques appliques doit beaucoup aux relecturesscrupuleuses de Jean-Stphane Dhersin et Dominique Seret, au dynamismede Sylvie Sevestre-Ghalila, au soutien de lEcole Suprieure de la Statistiqueet de lAnalyse de lInformation de Tunisie, par son directeur Makki Ksouri,ainsi qu la comptence de Habib Bouchriha, directeur du Centre des Pu-blications Universitaires de la Tunisie.

  • 70 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    Table des matires

    1 Processus de naissance et de mort 71

    1.1 Dnitions et exemples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 711.2 Comportement asymptotique . . . . . . . . . . . . . . . . . . 741.3 Equations de Chapman-Kolmogorov . . . . . . . . . . . . . . 77

    2 Files markoviennes 80

    2.1 Modles dattente . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 802.2 File M/M/1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 832.3 File M/M/s . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 872.4 Files capacit limite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 902.5 Files arrives ou services groups . . . . . . . . . . . . . . . 92

    3 Files quasi-markoviennes 97

    3.1 File M/GI/1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 973.2 File GI/M/1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102

    4 Rseaux de files dattente 105

    4.1 Rseaux de Jackson ouverts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1054.2 Rseaux de Jackson ferms . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1104.3 Rseaux de Petri . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113

    5 Exercices 117

  • Files dattente 71

    1 Processus de naissance et de mort

    1.1 Dfinitions et exemples

    Un processus est une collection de variables alatoires {Zt , t 0}, indicepar le temps. Ici, il nous servira dcrire lvolution alatoire au cours dutemps dun nombre dindividus, dans une population ou un systme dattente.Les variables alatoires Zt prennent donc leurs valeurs dans lensemble desentiers IN. Le processus volue comme un processus markovien de saut : lenombre dindividus reste constant pendant une certaine dure exponentielle,puis il saute vers une autre valeur. Sagissant dune population ou dune ledattente, nous ne considrerons que des sauts vers les deux valeurs voisines :la taille de la population peut soit augmenter de 1 (naissance ou arrive) soitdiminuer de 1 (mort ou dpart). Lintensit de ces sauts est gouverne pardeux suites de rels positifs, (n)nIN (taux de naissance) et (n)nIN (tauxde mort). Pour viter les cas particuliers, nous supposerons dans un premiertemps que ces taux sont tous strictement positifs.

    Dfinition 1.1 Soient (n)nIN et (n)nIN deux suites de rels strictementpositifs. Un processus de naissance et de mort de taux de naissance (n) ettaux de mort (n) est un processus markovien de saut {Zt , t 0} valeursdans IN tel que pour tout n 0 le taux de transition de n vers n+ 1 est n,et pour tout n 1, le taux de transition de n vers n1 est n. Aucune autretransition nest possible.

    Le diagramme de transition de la gure 1 illustre cette dnition.

    n+1nn11

    n n+1

    n1 n

    1

    0

    0

    Figure 1 Diagramme de transition dun processus de naissance et de mort.

    Pour comprendre la dynamique dun processus de naissance et de mort,on peut revenir la construction dun processus de saut par sa chane incluse.Ici cest une chane de Markov valeurs dans IN, qui saute de n vers n + 1avec probabilit n

    n+net de n vers n1 avec probabilit n

    n+n. Le passage

    de la chane au processus se fait en rajoutant des temps de sjour alatoires,indpendants entre eux et indpendants de la chane, dont la loi dpendde ltat courant : le temps de sjour dans ltat n suit la loi exponentielleE(n + n). En dautres termes, on peut simuler un processus de naissanceet mort par lalgorithme suivant.

    t 0Initialiser Z dans IN

  • 72 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    Rptern Z (tat prsent)Si n = 0 alors Z 1 ; t t log(Random)/0

    sinonSi Random < n

    n+nalors Z n+ 1sinon Z n 1

    finSit t log(Random)/(n + n)

    finSiJusqu (arrt de la simulation)

    La famille des lois exponentielles possde une proprit de stabilit qui serasouvent invoque dans ce qui suit.

    Proposition 1.2 Considrons k variables alatoires indpendantesX1, . . . , Xk, de lois respectives E(1), . . . , E(k). Posons :

    Y = min{X1, . . . , Xk} .

    Alors Y suit la loi E(1 + + k) et pour tout i = 1, . . . , n :

    IP[Y = Xi] =i

    1 + + k.

    Considrons alors un processus de naissance et de mort arrivant dans un tatn > 0. Nous pouvons envisager deux variables alatoires indpendantes A etD, de lois E(n) et E(n), que nous interprterons respectivement comme letemps dattente avant une prochaine naissance (arrive) et le temps dattenteavant une prochaine mort (dpart). Si A < D, alors le prochain vnementsera une naissance, et le processus passera de n n+1. Si A > D, le prochainvnement sera une mort et le processus passera de n n 1. La proposition1.2 montre que le plus petit des deux temps dattente suit la loi E(n + n),et que le prochain saut ira de n n+ 1 avec probabilit n

    n+n. En dautres

    termes, on peut remplacer lalgorithme de simulation par la chane inclusepar le suivant, qui est strictement quivalent du point de vue probabiliste.

    t 0Initialiser Z dans INRpter

    n Z (tat prsent)Si n = 0 alors Z 1 ; t log(Random)/0

    sinonA log(Random)/nD log(Random)/nSi A < D

  • Files dattente 73

    alors Z n+ 1 ; t t+Asinon Z n 1 ; t t+D

    finSifinSi

    Jusqu (arrt de la simulation)

    Une autre proprit des lois exponentielles joue un rle fondamental dans lamodlisation par les processus de naissance et de mort, la proprit dabsencede mmoire.

    Proposition 1.3 Une variable alatoire X valeurs dans IR+, de fonctionde rpartition continue suit une loi exponentielle si et seulement si pour toutt, h 0,

    IP[X > t+ h |X > t] = IP[X > h] .

    Son interprtation est la suivante. Si lattente dun vnement a dbut dansle pass, et que celui-ci ne sest pas encore produit linstant t, alors la durequi reste attendre aprs t suit la mme loi que la dure totale, si celle-ci est exponentielle. Nous retrouverons cet argument plusieurs fois dans lesexemples qui suivent.

    Exemple 1 : Processus de naissance pure

    Lhypothse que les taux de naissance et les taux de mort sont tous stricte-ment positifs assure que le processus est irrductible : la probabilit de passerdun tat n un tat m entre deux instants distincts est toujours strictementpositive. Si un taux de naissance est nul, le processus ne peut pas dpasserltat correspondant. Ce sera le cas pour des les dattente capacit limite.Si un taux de mort est nul, le processus ne peut pas revenir en arrire. Dansle cas particulier o les taux de mort sont tous nuls, on parle de processus denaissance pure. Un tel processus reste dans ltat n un temps exponentiel deparamtre n, puis passe ltat n+1. Si de plus tous les taux de naissancesont gaux , cest un processus de Poisson dintensit .

    Exemple 2 : La file M/M/1

    La notation M/M/1 sera justie plus loin. Il sagit du modle le plus simplede le dattente. On suppose que des clients arrivent dans une le un seulserveur, et reoivent chacun leur tour un service dune certaine dure. Si unclient arrivant trouve le serveur libre, il passe immdiatement au service. Sile serveur est occup, il attend son tour. Les hypothses probabilistes sontles suivantes.

    Les clients arrivent un par un selon un processus de Poisson dintensit : le temps sparant deux arrives successives suit la loi E().

    Le temps de service de chaque client suit la loi E(). Les temps sparant deux arrives successives et les temps de servicesont des variables alatoires indpendantes dans leur ensemble.

  • 74 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    Nous examinons le nombre Zt de clients dans le systme (quils soient en traindattendre ou dtre servis). Supposons quil y en ait n > 0 linstant t. Par laproprit dabsence de mmoire, le temps qui spare t de la prochaine arrivesuit la loi E(), et le temps rsiduel du client en train dtre servi suit la loiE(). Par la proposition 1.2, le prochain vnement modiant la compositionde la le surviendra au bout dun temps exponentiel de paramtre + . Cesera une arrive avec probabilit

    + , ou un dpart avec probabilit

    + . En

    dautres termes, {Zt , t 0} est un processus de naissance et de mort de tauxde naissance constants n = n 0, et taux de mort galement constantsn = n 1.

    Exemple 3 : Croissance de population

    Considrons une population de bactries sur laquelle on fait les hypothsessuivantes.

    La dure de vie de chaque bactrie est exponentielle de paramtre . Chaque bactrie vivante donne naissance une autre au bout duntemps exponentiel de paramtre .

    Des bactries arrivent de lextrieur selon un processus de Poisson din-tensit .

    Toutes les variables alatoires considres sont indpendantes.Nous examinons le nombre Zt de bactries vivantes linstant t. Supposonsquil y en ait n. Chacune dentre elles a deux horloges : sa dure de vie et sontemps de reproduction. Par la proprit sans mmoire, la dure de vie au-delde t suit la loi E() et le temps au bout duquel elle donnera naissance uneautre (si elle nest pas morte) suit la loi E(). Le temps qui spare t de laprochaine immigration suit la loi E(). Par la proposition 1.2, le prochain v-nement modiant la population surviendra au bout dun temps exponentielde paramtre n+ + n. Cet vnement sera une naissance ou une arriveavec probabilit n+

    n++n , ce sera une mort avec probabilitn

    n++n . Lvo-lution du nombre de bactries peut tre dcrite par un processus de naissanceet de mort de taux de naissance n = n+ , et de taux de mort n = n.

    1.2 Comportement asymptotique

    Etudier le comportement asymptotique des processus de naissance et demort en toute gnralit est assez compliqu. Nous nous contenterons dedgager quelques ides gnrales, les plus importantes pour les applications.

    Nous commenons par carter un cas pathologique que lon ne rencontrepas en pratique, celui de lexplosion temps fini. Pour comprendre ce phno-mne, considrons un processus de naissance pure, dont les taux de naissancen sont tous strictement positifs. On suppose quil part de 0 linstant 0.On peut construire ce processus partir dune suite de variables alatoiresindpendantes (Xn), o pour tout n 0, Xn suit la loi exponentielle E(n).La variable Xn est le temps de sjour dans ltat n, la suite duquel le pro-cessus saute vers ltat n+ 1. Le temps que le processus met parcourir les

  • Files dattente 75

    tats 0, . . . , n est donc X0+ +Xn. La somme de la srieXi est le temps

    total que le processus passe dans IN. En tant que srie de variables indpen-dantes,

    Xi converge ou diverge presque srement (consquence de la loi

    du zro-un de Kolmogorov). Si elle diverge, le processus reste un temps innidans IN, et la valeur de Zt reste nie pour tout t. Mais si la srie converge, letemps de sjour dans IN est presque srement ni, et le processus {Zt , t 0}nest dni que pour t

    Xi. Lesprance de Xn est

    1n

    . Si la srie

    1n

    converge, alors le temps moyen de sjour du processus dans IN est ni. Il setrouve que cest aussi la condition ncessaire et susante de convergence pourla srie

    Xi : la proposition suivante se dduit du thorme de convergence

    des sries alatoires, consquence de la thorie des martingales.

    Proposition 1.4 Soit (Xn)nIN une suite de variables alatoires indpen-dantes, telles que pour tout n 0, Xn suit la loi E(n). La srie

    Xn

    converge presque srement si et seulement si

    1n

    < +.

    La gure 2 illustre une situation dexplosion temps ni, pour un processusde naissance pure, de taux de naissance n =

    1(n+1)2 .

    0.2 0.4 0.6 0.8 1.0 1.2 1.4 1.6 1.8 2.00

    10

    20

    30

    40

    50

    60

    70

    80

    90

    100

    .

    Explosion temps fini

    0.0

    Z

    t

    t

    Figure 2 Trajectoires indpendantes dun processus de naissance pure, detaux de naissance 1(n+1)2 : les trajectoires explosent temps ni.

    Lexplosion temps ni peut se produire pour un processus de naissanceet de mort dans le cas gnral, mais il nest pas aussi facile de donner unecondition ncessaire et susante. Nous nous contenterons dadmettre que sila srie

    1n

    diverge, alors le temps total pass dans IN est ncessairementinni. Ceci fournit une condition susante dexistence dans le cas gnral.

    Proposition 1.5 Soit {Zt , t 0} un processus de naissance et de mort detaux de naissance n > 0. Si la srie

    1n

    diverge, alors le processus estdfini pour tout t 0.

  • 76 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    La condition

    1n

    = + est satisfaite dans tous les modles dintrt pra-tique. Nous la supposons vrie dsormais.

    Une fois le processus {Zt} dni pour tout t, se pose la question deson comportement quand t tend vers linni. Pour un processus irrductible,comme pour une chane irrductible apriodique, trois cas sont possibles enfonction du retour dans un tat donn.

    Si le processus, partant dun tat donn, a une probabilit non nulle dene jamais y retourner, il est dit transient. En pratique cela signie que lenombre que lon tudie (taille de population ou nombre de clients) tendvers linni. Nous interprtons cette situation comme une saturation dusystme.

    Si le processus, partant dun tat donn, y revient ncessairement aubout dun temps ni en moyenne, il est dit rcurrent positif. Dans cecas, il converge en loi vers sa mesure stationnaire, interprte commeune situation dquilibre du systme tudi.

    Si le processus, partant dun tat donn, y revient avec probabilit 1mais que lesprance du temps de retour est innie, il est dit rcur-rent nul. Dans les applications, ce cas, frontire entre lquilibre et lasaturation, ne sera pas distingu du cas transient.

    Nous allons montrer que le comportement asymptotique dun processus denaissance et de mort dpend de rapports des taux de naissance aux taux demort. Pour cela, nous commenons par examiner la probabilit de retour en0. Un processus de naissance et de mort partant de 0 linstant 0 atteintltat 1 son premier saut. La question est de savoir sil peut revenir de 1vers 0. Pour tout n 0, notons pn la probabilit de retour en 0 partir deltat n. Pour tout n > 0, la dynamique de la chane incluse permet dcrirelquation de rcurrence suivante.

    pn =n

    n + npn+1 +

    nn + n

    pn1 .

    On en dduit lexpression de pn en fonction de p1.

    pn = 1 (1 p1)

    (1 +

    11

    + +1 . . . n11 . . . n1

    ).

    Si la srie de terme gnral 1...n11...n1

    diverge, alors ncessairement p1 = 1, le

    retour en 0 est certain, et le processus est donc rcurrent.Examinons maintenant le temps moyen de passage de n n1, que nous

    notons en. Lquation de rcurrence est la suivante :

    en =1

    n + n+

    nn + n

    (en+1 + en) .

    On en dduit la relation suivante entre en+1 et e1.

    en+11 . . . n1 . . . n

    = e1 1

    0

    (01

    + +0 . . . n11 . . . n

    ).

  • Files dattente 77

    Si la srie de terme gnral 0...n11...n

    diverge, alors ncessairement e1 doit treinni : le processus est soit rcurrent nul, soit transient. Nous admettronsrciproquement que si la srie de terme gnral 0...n1

    1...nconverge, alors le

    processus est rcurrent positif. Nous retrouverons cette srie dans le calculde la mesure stationnaire au paragraphe suivant.

    Nous rsumons les conditions obtenues sur le cas particulier de la leM/M/1.

    Proposition 1.6 Soit Zt le nombre de clients linstant t dans une fileM/M/1 pour laquelle les temps sparant deux arrives sont exponentiels deparamtre et les temps de service sont exponentiels de paramtre . Leprocessus {Zt , t 0} est :

    transient si > rcurrent positif si < rcurrent nul si = .

    Dmonstration : Pour une le M/M/1, {Zt , t 0} est un processus de nais-sance et de mort, pour lequel les taux de naissance et les taux de mort sontconstants : n = n 0 et n = n 1. Les rapports

    1...n1...n

    et 0...n11...n

    valent respectivement ()n et (

    )n. Si > , la srie

    ()n converge, la

    srie

    ()n diverge. Si < cest le contraire. Si = , les deux sries

    divergent.

    Revenons linterprtation des paramtres : 1est le temps moyen qui spare

    deux arrives conscutives, et est le nombre moyen de clients qui arriventdans la le par unit de temps. Cest lintensit du processus de Poisson desarrives, nous parlerons de taux darrive. De mme 1

    est la dure moyenne

    dun service. Donc est le nombre moyen de clients que le serveur traiteraitsil fonctionnait sans interruption, autrement dit la capacit moyenne maxi-male du service. Nous parlerons aussi de taux de service. Si le nombre declients arrivant par unit de temps est strictement suprieur la capacitmaximale, le serveur ne peut pas faire face : les clients saccumulent en at-tente, et la le sature : en moyenne, on y trouvera pau prs ()t clientsau temps t. Si le nombre de clients arrivant par unit de temps est infrieur la capacit du serveur, celui-ci peut faire face toutes les demandes, et lale sera quilibre. La gure 3 montre une simulation dune le M/M/1 dansles trois cas possibles.

    Le raisonnement ci-dessus est tout fait gnral et nous le retrouveronssouvent dans la suite : lquilibre dune le dattente dpend du rapport dutaux darrive au taux maximal de service. Une le dattente est quilibresi et seulement si est strictement infrieur 1.

    1.3 Equations de Chapman-Kolmogorov

    Nous commenons par une description des mouvements possibles dunprocessus de naissance et de mort sur un petit intervalle de temps. On consi-

  • 78 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    0 1000 2000 3000 4000 5000 6000 7000 8000 9000 100000

    50

    100

    150

    200

    250

    300

    350

    400

    450

    500

    .

    (a) File M/M/1 transiente Z

    t

    t

    0 1000 2000 3000 4000 5000 6000 7000 8000 9000 100000

    10

    20

    30

    40

    50

    60

    70

    80

    90

    100

    .

    (b) File M/M/1 rcurrente positive Z

    t

    t

    0 1000 2000 3000 4000 5000 6000 7000 8000 9000 100000

    10

    20

    30

    40

    50

    60

    70

    80

    90

    100

    .

    (c) File M/M/1 rcurrente nulle Z

    t

    t

    Figure 3 Simulation dune le M/M/1 dans les trois cas transient (a),rcurrent positif (b) et rcurrent nul (c). Le taux de service vaut 1 dans lestrois cas, les taux darrive valent respectivement 1.05, 0.95 et 1.

    dre un processus de naissance et de mort {Zt , t 0}, de taux de naissance(n)nIN et taux de mort (n)nIN . Supposons que le processus soit dansltat n > 0 linstant t. Le prochain saut lamnera soit en n + 1, soit enn1. Les direntes probabilits de localisation de Zt+h, pour h petit, sontdonnes ci-dessous.

    IP[Zt+h = n+ 1 |Zt = n] = nh+ o(h)IP[Zt+h = n1 |Zt = n] = nh+ o(h)IP[Zt+h = n |Zt = n] = 1 (n + n)h+ o(h) .

    On en dduit la relation suivante entre la loi de Zt+h et la loi de Zt.

    IP[Zt+h = n] = n1hIP[Zt = n1]+n+1hIP[Zt = n+ 1] + (1 h(n + n))IP[Zt = n] + o(h) .

    Soit en rarrangeant les dirents termes :

    1

    h

    (IP[Zt+h = n] IP[Zt = n]

    )= n1IP[Zt = n1]

    (n + n)IP[Zt = n] + n+1IP[Zt = n+ 1] +o(h)

    h.

    Posons pn(t) = IP[Zt = n]. En passant la limite quand h tend vers 0, onarrive lquation direntielle suivante.

    pn(t) = n1 pn1(t) (n + n) pn(t) + n+1 pn+1(t) .

  • Files dattente 79

    Pour ltat n = 0, lquation est lgrement dirente.

    p0(t) = 0 p0(t) + 1 p1(t) .

    Le systme dquations direntielles ainsi obtenu est le systme de Chapman-Kolmogorov.{

    p0(t) = 0 p0(t) + 1 p1(t)pn(t) = n1 pn1(t) (n + n) pn(t) + n+1 pn+1(t) , n 1 .

    (1.1)

    Sauf dans quelques cas trs particuliers, il est hors de question de le r-soudre explicitement. La thorie dit que pour une loi de probabilit initiale(pn(0))nIN donne, le systme (1.1) admet une solution (pn(t))nIN unique,et que dans le cas o il ny a pas explosion temps ni, cette solution estune loi de probabilit pour tout t.

    Une mesure stationnaire est une loi de probabilit pi = (pin)nIN telleque si la loi de Z0 est pi, alors la loi de Zt reste pi pour tout t > 0. Unetelle mesure est donc ncessairement une solution constante du systme deChapman-Kolmogorov :{

    0 = 0 pi0 + 1 pi10 = n1 pin1 (n + n)pin + n+1 pin+1 , n 1 .

    (1.2)

    Il est facile de rsoudre ce systme, en vriant par rcurrence que pour toutn 1 :

    npin n1pin1 = 0 .

    On en dduit immdiatement lexpression de pin en fonction de pi0.

    pin = pi00 . . . n11 . . . n

    . (1.3)

    Le systme (1.2) admet donc toujours une solution, unique un coecientmultiplicatif prs. Mais pour que ce soit une loi de probabilit, il est nces-saire que la somme des coecients soit 1. Cest le cas si et seulement si lasrie de terme gnral 0...n1

    1...nconverge. Nous avons dj vu que cest aussi

    la condition pour que le processus soit rcurrent positif. Nous rsumons dansle thorme suivant, que nous admettons pour lessentiel, les dirents com-portements dun processus de naissance et de mort qui nous intressent enpratique.

    Thorme 1.7 Soit {Zt , t 0} un processus de naissance et de mort, detaux de naissance (n)nIN et taux de mort (n)nIN , supposs strictementpositifs. Notons (pn(t))nIN la loi de Zt, posons 0 = 1 et pour n 1 :

    n =0 . . . n11 . . . n

    .

  • 80 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    1. Si la srien diverge, alors le processus est rcurrent nul ou tran-

    sient. Pour tout n IN, pn(t) tend vers 0 quand t tend vers linfini, etdonc Zt converge en probabilit vers +.

    2. Si la srien converge, alors le processus est rcurrent positif. Po-

    sons :

    pin =

    (

    m=0

    m

    )1n . (1.4)

    La loi de probabilit pi = (pin)nIN est la mesure stationnaire du proces-sus. Pour tout n IN, pn(t) tend vers pin et donc Zt converge en loivers pi. De plus si f est une fonction quelconque de IN dans IR, on a :

    lim

    1

    0

    f(Zt) dt =iIN

    f(i)pii , p.s. (1.5)

    Pour comprendre la condition dquilibre dun processus de naissance et demort, utilisons le critre de dAlembert. Le rapport de deux termes conscutifsde la srie

    n est :

    n+1n

    =nn+1

    .

    Si ce rapport reste infrieur c < 1 pour n assez grand, la srie converge.Sil est suprieur 1, elle diverge. Nous retrouvons donc linterprtation djmentionne pour le cas particulier de la le M/M/1. Si les taux darriven lemportent sur les taux de dpart n, le nombre de clients tend aug-menter, et le processus tend vers linni. Dans le cas contraire, un rgimestationnaire peut stablir, et ce rgime stationnaire est toujours atteint aubout dun temps susamment long, quelle que soit la loi de Z0 (ltat ini-tial du systme). La dernire assertion du thorme sinterprte comme suit.Comprenons f comme le cot du sjour dans n : le concepteur du systmeverse f(n) par unit de temps passe dans n. Lintgrale

    0f(Zt) dt est le

    cot total de la trajectoire jusqu linstant . En divisant par , on obtientle cot moyen par unit de temps de cette trajectoire. La formule (1.5) ditque ce cot moyen, qui varie a priori dune trajectoire lautre, est en faitassez stable sur le long terme, puisquil converge vers la valeur moyenne def pour la mesure stationnaire pi. Si on prend comme cas particulier pour fla fonction indicatrice de ltat n, alors le membre de gauche de (1.5) estla proportion de temps pass dans ltat n par une trajectoire entre 0 et .Quand tend vers linni, cette proportion tend vers pin.

    2 Files markoviennes

    2.1 Modles dattente

    Dans un systme dattente, des clients arrivent de manire alatoire dansun systme do ils partiront aprs avoir reu un service, dont la dure est elle-

  • Files dattente 81

    mme alatoire. Historiquement, la recherche sur les les dattente a dbutavec les travaux dErlang (1909) sur les rseaux tlphoniques. Les clientsdans ce cas sont des appels tlphoniques arrivant un central, et les tempsde service sont les dures des communications. Mais beaucoup dautres situa-tions pratiques relvent des modles dattente. Dans un aroport, les avionssont les clients, le temps de service est la dure ncessaire un avion pour at-terrir et dgager la piste. Lattente pour un avion consiste tourner au-dessusde laroport avant le feu vert de la tour de contrle. La mme situation seretrouve dans un port de commerce o les cargos attendent un quai librepour dcharger. Dans une usine, les clients peuvent tre des machines, immo-bilises pendant le temps ncessaire leur maintenance ou leur rparation.Avec lessor de linformatique, on a assist un regain dintrt pour les lesdattente, d leurs applications dans la gestion des rseaux. L les clientssont des programmes traiter ou des paquets de donnes acheminer. Evi-demment les modles une seule le sont trop simplistes pour rendre comptede toute la complexit dun rseau informatique.

    La gure 4 est le schma classique dun modle dattente. On peut lecaractriser par les lments suivants.

    Arrive Attente Service Sortie

    Figure 4 Schma dune le dattente.

    1. Le processus darrive : il est dtermin en gnral par la loi conjointedes intervalles de temps sparant deux arrives conscutives, que lonappelle des temps dinterarrive. En gnral, on suppose que leur loine dpend pas des clients. Souvent, on est conduit pour des raisons desimplication supposer que les temps dinterarrive sont indpendantsentre eux. Le cas le plus facile traiter mathmatiquement est celuio ils suivent tous la mme loi exponentielle. Dans ce cas, les clientsarrivent selon un processus de Poisson.

    2. Les dures de service : ce sont des variables alatoires que lon considreen gnral comme indpendantes et de mme loi. L encore, cest laloi exponentielle qui donne le traitement mathmatique le plus simple.Dautres familles de lois sont parfois utilises (masse de Dirac pour destemps de service constants, loi dErlang pour des services en srie, loide Weibull, etc. . . ).

    3. Le nombre de serveurs : dans un premier temps, on considrera toujoursune le unique, ayant ventuellement plusieurs serveurs. Mais tous lesserveurs seront identiques, et chaque client naura aaire qu un seul

  • 82 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    dentre eux. Nous aborderons dans la quatrime partie des modles pluscomplexes, o plusieurs les dattente sont connectes en rseau.

    4. La capacit maximale du systme : mme si nous considrerons sou-vent pour simplier que la le peut contenir un nombre arbitraire declients, ce nest pas raliste. Certains modles prennent en compte lenombre maximal de clients qui peuvent sjourner simultanment dansle systme.

    5. La population des usagers : dans certains modles (comme par exemplela maintenance des machines dune usine), le nombre total de clientsest x.

    6. La discipline de service : cest lordre dans lequel les clients en attentesont traits. Par dfaut, on considrera que les clients sont servis dansleur ordre darrive : cest la dicipline PAPS (premier arriv premierservi) ou FIFO en anglais (rst in rst out). Dautres disciplines sontcouramment envisages selon les applications :

    Dernier arriv premier servi (ou LIFO : last in rst out). Cest ce quiest pratiqu en informatique pour les piles de donnes.

    Alatoire (ou FIRO : rst in random out). Le serveur choisit au ha-sard parmi les clients prsents le prochain qui sera servi.

    Temps partag (ou PS : processor sharing). Quand plusieurs pro-grammes sont prsents simultanment dans une unit centrale, ilsreoivent chacun leur tour une partie de leur traitement, jusqu ach-vement de toutes les tches.

    Dautres paramtres peuvent galement entrer en ligne de compte, par exem-ple dans les cas o les clients arrivent ou sont servis par paquets, nous enverrons plus loin des exemples. La notation de Kendall rsume par des sym-boles, spars par des barres obliques les dirents paramtres de dnitiondu modle.

    Arrives / Services / Serveurs / Capacit / Population / Discipline

    Ainsi la le M/M/1 a des temps dinterarrive et de service exponentielset indpendants (le M signie markovien), un seul serveur, et les autresparamtres sont xs par dfaut : + pour la capacit et la population,PAPS pour la discipline. Nous tudierons aussi la le M/M/s (s serveurs),la le M/M/1/N (capacit limite N), la le M/GI/1 (les services sontindpendants mais leur loi est gnrale), etc. . .

    Par exemple, la le E2/D/5/100/FIRO aurait des temps dinterarrivesuivant une loi dErlang de paramtre 2 (somme de deux exponentielles ind-pendantes), des services constants (D pour Dirac), 5 serveurs, une capacitlimite 100 clients et fonctionnerait selon la discipline alatoire.

  • Files dattente 83

    2.2 File M/M/1

    Nous avons dj vu plusieurs caractristiques du modle le plus simple.Cest un processus de naissance et de mort dont les taux sont constants :n = n 0 et n = n 1. Son comportement asymptotique dpenddu rapport

    (voir gure 3). Si ce rapport est suprieur ou gal 1, la le

    sature, sil est strictement infrieur 1, elle admet un rgime stationnaire.Dans ce cas, la mesure stationnaire pi = (pin) est donne par :

    pin =

    (1

    )(

    )n.

    La loi pi est la loi du nombre de clients prsents dans le systme en rgimestationnaire. Nous noterons Z la variable alatoire correspondante. Son es-prance est le nombre moyen de clients prsents dans le systme en rgimestationnaire :

    IE[Z] =

    1

    =

    . (2.6)

    Comme on pouvait sy attendre, le nombre moyen de clients dans le systmeaugmente quand se rapproche de .

    Sous la loi pi, la probabilit que le serveur soit occup est IP[Z > 0] =1 pi0 =

    . On peut donc interprter le rapport

    comme la probabilit

    que le serveur soit occup lquilibre, ou comme la proportion moyenne dutemps quil passe servir les clients. On parle de coefficient doccupation duserveur.

    Notre but ici est dune part dtudier le temps pass par un client dansle systme en rgime stationnaire, dautre part dtudier le rgime transi-toire en prsentant deux techniques de rsolution du systme de Chapman-Kolmogorov (1.1). Plus que le traitement de la le M/M/1, qui est un modletrop simple pour tre raliste, lintrt de ce qui suit est de mettre en placedes mthodes mathmatiques utiles dans beaucoup dautres contextes.

    Nous commenons par tudier le rgime stationnaire. Nous supposonsdonc que est strictement infrieur et que la loi de Z0 est pi. Nous dironsque la le est lquilibre, ce qui ne se produit en pratique quapproxima-tivement, au bout dun temps susamment long. Considrons alors un client linstant de son arrive et notons T le temps total quil passera dans lesystme.

    Proposition 2.1 La loi du temps de sjour T dun client arrivant en rgimestationnaire est la loi exponentielle de paramtre .

    Dmonstration : Si le systme est vide quand le client arrive, son temps desjour est gal son temps de service, et il suit la loi E(). Sil y a n 1clients quand il arrive, son temps de sjour est la somme :

  • 84 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    du temps de service rsiduel du client en train dtre servi, qui suit laloi E() par la proprit dabsence de mmoire.

    des n1 temps de service des clients en attente devant lui (chacun suitla loi E()).

    de son propre temps de service, toujours de loi E().Au total, la loi conditionnelle de T sachant que n clients sont prsents est laloi de la somme de n + 1 exponentielles indpendantes, autrement dit la loigamma G(n+ 1, ), appele aussi loi dErlang. Elle a pour densit :

    n+1tn

    n!et 11IR+(t) .

    Connaissant la probabilit pin que n clients soient prsents en rgime station-naire, on peut donc crire la densit de T sous la forme suivante.

    fT (t) =

    n=0

    pinn+1tn

    n!et 11IR+(t)

    =

    n=0

    (1

    )(

    )nn+1tn

    n!et 11IR+(t)

    = ( )e()t 11IR+(t) .

    La loi du temps de sjour dun client arrivant en rgime stationnaire est doncbien la loi exponentielle E( ). Son esprance vaut :

    IE[T ] =1

    . (2.7)

    La comparaison de (2.6) et (2.7) fait apparatre une relation qui est valabledans des situations beaucoup plus gnrales que celle de la le M/M/1. Cestla formule de Little.

    Proposition 2.2 Dans une file dattente en rgime stationnaire, le nombremoyen de clients est le produit du taux darrive par le temps moyen de sjourdun client dans le systme.

    IE[Z] = IE[T ] . (2.8)

    Une dmonstration rigoureuse de ce rsultat sous des hypothses gnralesdpasse le cadre restreint de ce cours. Nous nous contenterons de le vriersur des cas particuliers dans ce qui suit.

    Nous nous intressons maintenant au rgime transitoire de la le M/M/1,cest--dire la rsolution du systme direntiel de Chapman-Kolmogorov

  • Files dattente 85

    (2.9). {p0(t) = p0(t) + p1(t)pn(t) = pn1(t) (+ ) pn(t) + pn+1(t) , n 1 .

    (2.9)

    Ce sera loccasion de mettre en uvre deux outils mathmatiques importantspour ltude des modles dattente markoviens, les transformes de Laplaceet les fonctions gnratrices.

    Commenons par les transformes de Laplace. Si est une fonction deIR+ dans IR, sa transforme de Laplace, qui sera note est la fonctiondnie pour tout s 0 par :

    (s) =

    +0

    est(t) dt .

    Si X est une variable alatoire, sa transforme de Laplace (ou plutt celle desa loi) est la fonction qui s associe :

    IE[exp(sX)] .

    Dans le cas o X admet pour densit f , sa transforme de Laplace est cellede sa densit :

    IE[exp(sX)] =

    +0

    estf(t) dt = f(s) .

    Lusage que nous ferons des transformes de Laplace est justi par les pro-prits suivantes.

    Proposition 2.3

    1. La transforme de Laplace est linaire : si et sont deux fonctionsde IR+ dans IR, et sont deux constantes, alors la transforme deLaplace de + est + .

    2. La transforme de Laplace de (t) est s(s) (0).

    3. La fonction (t) admet une limite en + si et seulement si s(s)admet une limite en 0, et si elles existent ces limites sont gales.

    limt

    (t) = lims0

    s(s) .

    4. Soit X une variable alatoire, f sa transforme de Laplace et k unentier tel que IE[Xk]

  • 86 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    Nous ne dmontrerons pas cette proposition, pas plus que nous ne justieronspar la suite les nombreux points techniques lis lutilisation des transfor-mes de Laplace et des fonctions gnratrices : dans tout ce qui suit, lesconvergences de sries et dintgrales, les drivations sous le signe somme, lesinterversions de sommes ou dintgrales seront armes sans dmonstration.

    Pour rsoudre le systme de Chapman-Kolmogorov (2.9), lide est deremplacer la fonction inconnue pn(t) par sa transforme de Laplace p

    n(s).

    Grce au point 2 de la proposition 2.3, remplacer les pn(t) par leurs trans-formes de Laplace permet de supprimer le caractre direntiel du systme.{

    s p0(s) p0(0) = p0(s) + p

    1(s)

    s pn(s) pn(0) = pn1(s) (+ ) p

    n(s) + p

    n+1(s) , n 1 .

    Comme condition initiale, nous supposerons que la le est vide linstant0, soit p0(0) = 1 et pn(0) = 0 pour n 1. Les p

    n(s) sont donc solution de

    lquation de rcurrence :

    spn(s) = pn1(s) (+ )p

    n(s) + p

    n+1(s) .

    La solution gnrale de cette quation est :

    pn(s) = A(s)(s)n +B(s)(s)n ,

    o (s) et (s) sont les racines de lquation caractristique associe, savoir :

    (s) =1

    2

    (s+ + +

    (s+ + )2 4

    ),

    et

    (s) =1

    2

    (s+ +

    (s+ + )2 4

    ).

    On vrie facilement que 0 < (s) < 1 < (s). Par linarit de la transformede Laplace,

    pn(t) = 1 entrane

    pn(s) = 1/s. Comme

    pn(s) est une

    srie convergente, ncessairement A(s) doit tre nul. La conditionpn(s) =

    1/s donne :

    B(s) =1

    s(1 (s)) ,

    do lexpression de pn(s) :

    pn(s) =1

    s(1 (s))((s))n .

    Le retour de pn(s) pn(t) est plus dicile. Il existe des mthodes numriquesde calcul des transformes de Laplace inverses, ainsi que des tables formelles.On peut tudier le comportement asymptotique de pn(t) laide du point 3de la proposition 2.3.

    limt

    pn(t) = lims0

    spn(s) = (1 )n ,

  • Files dattente 87

    o

    = lims0

    (s) =1

    2(+ | |) .

    Si (saturation) alors = 1, donc pour tout n, lim pn(t) = 0. Si < (quilibre) alors = /, donc lim pn(t) = pin. On retrouve ainsi, pour la leM/M/1, les deux cas du thorme 1.7.

    Prsentons maintenant la technique des fonctions gnratrices. Lide estde remplacer les fonctions pn(t) par leur srie entire G(z, t), dnie pour|z| < 1 et t 0 par :

    G(z, t) =n=0

    zn pn(t) .

    En multipliant la n-ime quation du systme (2.9) par zn et en sommant,on obtient lquation aux drives partielles suivante.

    zG(z, t)

    t= G(z, t)(z2 (+ )z + ) + p0(t)(z 1) .

    Dans ce cas lquation obtenue dpend de p0(t) = G(0, t), et elle na pas desolution explicite. On peut, en utilisant nouveau la transforme de Laplace,en dduire aussi le comportement asymptotique de la le. Nous verrons dansla suite plusieurs exemples dapplication de cette technique.

    2.3 File M/M/s

    Le modle que nous tudions ici est lextension la plus simple de la leM/M/1 : les hypothses probabilistes sont les mmes, seul change le nombrede serveurs.

    Les clients arrivent un par un selon un processus de Poisson dintensit : le temps sparant deux arrives successives suit la loi E().

    Les s serveurs sont identiques. Si un client arrivant dans la le trouveun serveur libre, il loccupe. Si les s serveurs sont occups, le nouvelarrivant attend. Le temps de service de chaque client suit la loi E().

    Toutes les variables alatoires considres (temps sparant deux arrivessuccessives et temps de service) sont indpendantes dans leur ensemble.

    Nous notons encore Zt le nombre de clients prsents dans le systme (enattente ou au service) linstant t. Supposons que ce nombre soit n. Leprochain vnement peut tre une arrive ou bien la n de lun des services.Le temps qui spare t de la prochaine arrive est exponentiel de paramtre, par la proprit dabsence de mmoire. Si n s, alors n serveurs sontoccups (personne nest en train dattendre), et les temps rsiduels de ces nservices sont exponentiels de paramtre . Le temps qui spare t du prochainsaut est exponentiel de paramtre + n, ce prochain saut sera une arriveavec probabilit

    +n , ou un dpart avec probabilitn

    +n (proposition 1.2).

    Le cas o n est plus grand que s (tous les serveurs sont occups et des clients

  • 88 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    sont en attente), est dirent, puisqualors le prochain dpart ne peut treque celui dun des s clients en train dtre servi. Dans ce cas le temps quispare t du prochain saut est exponentiel de paramtre + s, ce prochainsaut sera une arrive avec probabilit

    +s , ou un dpart avec probabilits

    +s . En rsum, {Zt , t 0} est un processus de naissance et de mort, detaux de naissance constants n = n 0, et de taux de mort n tels que :

    n =

    {n n = 1, . . . , ss n s .

    Daprs le thorme 1.7, la condition dquilibre du systme est la convergencede la srie de terme gnral n =

    0...n11...n

    , avec :

    n =

    n

    n!nn = 0, . . . , s

    n

    s!snsnn s .

    La srien converge si et seulement si < s, comme on pouvait le

    prvoir. Si chacun des s serveurs fonctionnait en continu, ils traiteraient sclients par unit de temps, donc s est la capacit maximale du service, quidoit tre suprieure au nombre de clients arrivant par unit de temps. Si lacondition dquilibre est ralise, alors la mesure stationnaire (pin) est donnepar (1.4), savoir pin = (

    n)

    1n, avec :

    n=0

    n =

    (s1n=0

    n

    n!n

    )+

    s

    s!s1

    1 s

    .

    Ayant lexpression explicite des pin, on peut calculer le nombre moyen declients dans le systme en rgime stationnaire, soit IE[Z] =

    npin. Il est

    plus simple de lexprimer en fonction de la probabilit pis. On trouve :

    IE[Z] =

    +

    piss

    (s )2. (2.10)

    Nous allons maintenant tudier la loi du temps dattente dun client arrivantdans le systme en rgime stationnaire. Nous supposons donc que < s etque la loi de Zt est pi, pour tout t.

    Proposition 2.4 La loi du temps dattente dun client en rgime station-naire est un mlange

    1. de la masse de Dirac en 0, avec probabilit 1 pis1

    s

    ,

    2. de la loi exponentielle E(s ), avec probabilit pis1

    s

    .

  • Files dattente 89

    Dmonstration : Tout dabord, un client nattend que si tous les serveurs sontoccups, donc si au moins s clients sont dj prsents quand il arrive. Cecise produit avec probabilit :

    pis + pis+1 + = pis

    k=0

    k

    skk=

    pis

    1 s

    .

    Sil y a n s clients dj prsents dans le systme, celui qui arrive trouvens clients en attente avant lui. Il devra attendre (ns + 1) librationsde serveurs, chaque libration survenant au bout dun temps exponentiel deparamtre s. La loi conditionnelle du temps dattente sachant quil y a n sclients dj prsents dans le systme est donc la loi gamma G(ns+ 1, s),de densit :

    (s)ns+1tns

    (n s)!est 11IR+(t) .

    La loi du temps dattente est un mlange de la masse de Dirac en 0 (sil nya pas attente) et dune loi sur IR+, dont la densit est :

    1 s

    pis

    n=s

    pin(s)ns+1tns

    (n s)!est 11IR+(t) .

    Aprs simplications, on vrie que cette densit est bien celle de la loi ex-ponentielle de paramtre s .

    Lesprance du temps dattente est donc :

    pis

    1 s

    1

    s =

    piss

    (s )2.

    Pour obtenir le temps moyen de sjour dun client arrivant en rgime station-naire, il faut ajouter le temps de service au temps dattente :

    IE[T ] =1

    +

    piss

    (s )2. (2.11)

    En comparant (2.10) et (2.11), on retrouve la formule de Little, savoirIE[Z] = IE[T ]. On peut aussi obtenir dautres quantits (toujours pour lergime stationnaire), comme :

    la longueur moyenne de la le : IE[Z] ,

    le nombre moyen de serveurs occups : IE[O] = = s

    s.

    Dans cette dernire formule, on retrouve linterprtation du rapport s

    (rap-

    port du taux darrive la capacit de service) comme un coecient doccu-pation.

    Comme nouvel exemple dutilisation des fonctions gnratrices, nous trai-tons maintenant le cas de la le M/M/. Mme si supposer quil y a une

  • 90 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    innit de serveurs nest pas vraiment raliste en pratique, cela peut consti-tuer une bonne approximation de la le M/M/s dans le cas o le coecientdoccupation

    sest faible. Une le M/M/ est un processus de naissance et

    de mort de taux de naissance constants n = n 0, et de taux de mortlinaires n = n n 1. Il ne peut pas y avoir de saturation dans une tellele. Elle est toujours rcurrente positive, avec pour mesure stationnaire la loide Poisson P(

    ).

    pin = e

    ()n

    n!.

    Le systme de Chapman-Kolmogorov est le suivant.{p0(t) = p0(t) + p1(t)pn(t) = pn1(t) (+ n) pn(t) + (n+ 1) pn+1(t) , n 1 .

    (2.12)

    Posons G(z, t) =zn pn(t), multiplions la n-ime quation par z

    n et som-mons. En remarquant que :

    G(z, t)

    t=

    n=0

    znpn(t) etG(z, t)

    z=

    n=1

    nzn1pn(t) ,

    on arrive lquation aux drives partielles suivante.

    G(z, t)

    t= (z 1)G(z, t) + (1 z)

    G(z, t)

    z. (2.13)

    Cette quation admet pour solution particulire la fonction gnratrice de laloi de Poisson de paramtre (t) :

    G(z, t) = e(t)(z1) ,

    avec

    (t) =

    +

    ((0)

    )et .

    Cela signie que si la loi du nombre de clients dans la le linstant 0 est uneloi de Poisson, alors il en sera de mme chaque instant : seul le paramtre(t) dpend du temps. Quand t tend vers linni, (t) converge vers

    , qui est

    le paramtre de la mesure stationnaire pi. On retrouve donc la convergence enloi vers la mesure stationnaire. De plus ici, cette convergence a lieu vitesseexponentielle (en et), ce qui signie en pratique que lquilibre sera atteintrapidement.

    2.4 Files capacit limite

    Nous allons examiner trois modles particuliers, pour lesquels le nombrede clients dans le systme est un processus de naissance et de mort nombredtats ni.

  • Files dattente 91

    Le premier est la le M/M/1/N , qui fonctionne comme la le M/M/1, saufque le nombre maximal de clients dans le systme est limit N : un clientqui arrive lorsque la le est pleine est rejet. Ceci revient annuler le taux detransition de N vers N +1. On obtient un processus de naissance et de mortsur {0, . . . , N}, dont les taux de naissance valent n = n = 0, . . . , N1,et les taux de mort n = n = 1, . . . , N . Tout processus de saut surun ensemble ni est rcurrent positif, il nest videmment pas question desaturation ici. La mesure stationnaire pi sur {0, . . . , N} est donne par laformule (1.3), savoir :

    n = 1, . . . , N , pin = pi0

    (

    )n.

    On calcule pi0 par la conditionN

    n=0 pin = 1.

    pi0 =

    1

    1()N+1

    si 6= 1

    1N+1 si

    = 1 .

    On peut en dduire le nombre moyen de clients dans le systme en rgimestationnaire.

    IE[Z] =

    Nn=0

    npin =

    1

    (N+1)(

    )N+1

    1()N+1

    si 6= 1

    N2 si

    = 1 .

    Comme on pouvait sy attendre, lorsque le rapport tend vers 0, la le est

    le plus souvent vide, et se comporte comme une le M/M/1. Par contre si

    tend vers linni, piN tend vers 1 et IE[Z] vers N : la le est pleine la plusgrande partie du temps.

    Examinons maintenant la le M/M/s/s qui a une capacit limite aunombre de ses serveurs : cest une le sans attente possible, puisquun clientarrivant lorque tous les serveurs sont occups est rejet. Cest le premiermodle introduit par Erlang pour les rseaux tlphoniques : les clients sontdes appels et les serveurs des lignes. Si un usager appelle lorsque toutes leslignes sont occupes, il nest pas mis en attente. Le nombre de clients dansle systme est un processus de naissance et de mort sur {0, . . . , s}, dont lestaux de naissance valent n = n = 0, . . . , s 1, et les taux de mortn = n n = 1, . . . , s. Ici encore il ny a pas de staturation possible. Lamesure stationnaire est donne par :

    pin = pi0n

    n!n,

    avec

    pi0 =

    (s

    n=0

    n

    n!n

    )1.

  • 92 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    La valeur de pis est la probabilit de perte, savoir la probabilit quunclient arrivant en rgime stationnaire soit rejet. Son expression en fonctionde , et s est la formule dErlang ou formule des tlphonistes. Avant lesordinateurs, les abaques dErlang traduisaient graphiquement cette formulean de faciliter le calcul approch de pis.

    pis =s

    s!s

    (s

    n=0

    n

    n!n

    )1.

    On peut exprimer le nombre moyen de lignes occupes en fonction de pis :

    IE[Z] =

    (1 pis) .

    Si le rapport tend vers 0, tout appel trouve une ligne et la probabilit de

    perte tend vers 0. Sil tend vers linni, la probabilit de perte tend vers 1 etIE[Z] tend vers s.

    Nous examinons pour nir un modle de maintenance o la population desusagers est nie. Supposons quil y ait dans une usine m machines du mmetype. Quand lune dentre elles tombe en panne, elle entre dans lun des sateliers de rparation, sil y en a un de libre. On suppose que les temps defonctionnement des machines avant une panne sont exponentiels de paramtre, et que les temps de rparation sont exponentiels de paramtre , tous cestemps tant indpendants dans leur ensemble. Notons Zt le nombre total demachines immobilises linstant t. Des raisonnements analogues ceux quenous avons dj mens pour les modles prcdents montrent que {Zt , t 0}est un processus de naissance et de mort sur {0, . . . ,m}, avec n = (m n) n = 0, . . . ,m 1, les taux de mort n tant ceux de la le M/M/s :

    n =

    {n n = 0, . . . , ss n = s, . . . ,m .

    On obtient encore la mesure stationnaire pi par la formule (1.3). Le respon-sable de lusine connat les cots associs aux dirents tats : il sait combienlui rapporte une machine en fonctionnement, combien lui cote une rpa-ration, quels sont ses cots xes. Connaissant le cot f(n) associ chaquetat n ainsi que sa probabilit stationnaire il peut donc valuer le cot moyenf(n)pin. Daprs le thorme 1.7, cette quantit est une prdiction de ce

    que son usine lui rapportera en moyenne par unit de temps. Il peut utilisercette prdiction, par exemple pour optimiser le nombre dateliers de rpara-tion.

    2.5 Files arrives ou services groups

    La caractristique des processus de naissance et de mort est dvoluerpar sauts de +1 ou 1. Pour un tel modle, les arrives et les dparts sont

  • Files dattente 93

    donc individuels. Or dans de nombreuses situations pratiques, cette hypothsenest pas raliste. Pour les arrives, pensons lentre dun thtre, o lesspectateurs arrivent en couple ou en famille. Pour les services, prenons untlphrique, qui monte dun coup tout un groupe de touristes. Nous allonsexaminer un modle darrives groupes, puis un modle de services groups.

    Le premier est la le M(X)/M/1. Comme pour la le M/M/1, les tempsdinterarrive sont exponentiels de paramtre . Mais chaque instant dar-rive, cest non pas 1, mais un nombre alatoire X de clients qui arrivent. Lesautres hypothses sont celles de la le M/M/1 : il ny a quun seul serveur,qui sert les clients un par un. Les temps de service sont exponentiels de pa-ramtre . Toutes les variables alatoires considres (temps dinterarrive,temps de service et nombres de clients chaque arrive) sont indpendantesdans leur ensemble.

    Les tailles alatoires des paquets de clients sont de mme loi, et cetteloi est suppose connue. On peut supposer sans perte de gnralit que lespaquets contiennent tous au moins un client (IP[X = 0] = 0), et on noteqk la probabilit quun paquet contienne k clients. Nous utiliserons aussi lafonction gnratrice de la loi de X, note g.

    g(z) =

    k=1

    zk qk .

    Le nombre moyen de clients dun paquet est la drive en 1 de la fonction g :

    IE[X] =

    k=1

    k qk = g(1) .

    Puisquil y a en moyenne arrives de paquets par unit de temps et quechaque paquet contient en moyenne g(1) clients, il y a g(1) clients entrantdans le systme par unit de temps. On peut donc sattendre ce que lacondition dquilibre soit g(1) < . Cest ce que nous allons vrier par lecalcul.

    La variable dintrt est encore le nombre total de clients prsents dans lesystme linstant t, not Zt. Comme pour la le M/M/1, si n clients sontprsents dans le systme, le prochain vnement surviendra au bout duntemps exponentiel de paramtre + . Ce sera une arrive avec probabilit

    + , ou un dpart avec probabilit

    + . Mais si cest une arrive, le processusne saute pas ncessairement vers n + 1. Il saute vers n + k avec probabilitqk+ . Le processus {Zt , t 0} est un processus markovien de saut sur IN. Lagure 5 reprsente son diagramme de transition.

    Posons pn(t) = IP[Zt = n]. On crit le systme de Chapman-Kolmogorov

  • 94 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    q1 q1 q1n+1nn110

    q

    q

    n

    n1

    Figure 5 Modle arrives groupes : diagramme de transition de la leM(X)/M/1.

    partir du diagramme de transitions.p0(t) = p0(t) + p1(t)

    pn(t) =n

    j=1

    qj pnj(t) (+ ) pn(t) + pn+1(t) , n 1 .(2.14)

    Nous cherchons seulement dterminer la solution constante, note pi =(pin)nIN .

    0 = pi0 + pi1

    0 =

    nj=1

    qj pinj (+ )pin(t) + pin+1 , n 1 .

    Pour rsoudre ce systme, on utilise la technique des fonctions gnratrices.Posons donc :

    f(z) =

    n=0

    zn pin .

    On multiplie la n-ime quation par zn, et on somme pour obtenir :

    0 = g(z)f(z) f(z) (f(z) pi0) +

    z(f(z) pi0) ,

    soit,

    f(z) = pi0(1 z)

    (1 z) z(1 g(z)).

    Pour dterminer pi0, il reste crire que la somme des pin vaut 1, soit f(1) =1. Un dveloppement limit lordre 1 du dnominateur permet de leverlindtermination : g(z) = 1 (1 z)g(1) + o(1). On trouve :

    pi0 = 1g(1)

    .

    Evidemment cette solution nest acceptable que si g(1) < , comme nouslavions prvu. La le M(X)/M/1 nadmet de mesure stationnaire que si le

  • Files dattente 95

    nombre moyen de clients entrant par unit de temps est infrieur la capacitde service.

    Comme cas particulier, si un seul client arrive chaque instant, alorsg(z) = z, et on retrouve bien sr la mesure stationnaire de la le M/M/1 :

    f(z) =1

    1 z

    =n=0

    (1

    )(

    )nzn .

    Comme modle services groups, nous aurions pu choisir des servicespar paquets de taille alatoire, et traiter lanalogue du modle prcdent. Lemodle ci-aprs nous parat plus proche des applications ; il sagit de la leM/M(a,b)/1. Les clients arrivent un par un, selon un processus de Poissondintensit . Les temps de service sont exponentiels de paramtre . Lestemps dinterarrive et les temps de service sont indpendants dans leur en-semble. La discipline de service est la suivante. Si immdiatement aprs unservice, le serveur trouve moins de a clients dans la le, il attend jusqu cequil y en ait a, et les prend tous ; sil en trouve plus de a, mais moins de b, illes prend tous ; sil en trouve plus de b, il en prend b, pendant que les autrescontinuent dattendre. En dautres termes, chaque service est une fournequi doit contenir au moins a clients, mais ne peut pas en contenir plus de b.La capacit maximale du service est de b clients. La condition dquilibresera donc < b, ce que nous allons vrier mathmatiquement.

    Ce modle est sensiblement plus compliqu que les prcdents, dans lamesure o le nombre total de clients dans le systme nest pas un processusmarkovien de saut. Pour comprendre pourquoi, il sut de considrer un casparticulier. Prenons a = 2 et b = 3, et supposons qu linstant t il y ait 3clients dans le systme. Cela peut se produire dans deux cas :

    soit deux clients sont au service et un en attente, soit trois clients sont au service et personne nattend.

    Mais si le prochain vnement est une n de service, alors aprs le saut, ilrestera un client dans le premier cas, personne dans le second.

    Pour obtenir un processus markovien de saut, nous allons devoir prendreen compte ltat du serveur. Les tats possibles du systme seront donc descouples (0, n) ou (1, n).

    (0, n) : le serveur est libre et n clients attendent (n = 0, . . . , a1) (1, n) : le serveur est occup et n clients attendent (n 0).

    La gure 6 reprsente le diagramme de transition du processus entre ces tats.

    On note :

    p0,n(t) la probabilit qu linstant t le serveur soit libre et n clientsattendent (n = 0, . . . , a1)

    p1,n(t) : la probabilit qu linstant t le serveur soit occup et n clientsattendent (n 0).

  • 96 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    0,0 0,1

    1,b1,0 1,1 1,a1 1,a 1,nb 1,n

    0,a1

    Figure 6 Modle services groups : diagramme de transition de la leM/M(a,b)/1.

    Le systme de Chapman-Kolmogorov correspondant au diagramme de tran-sition de la gure 6 est le suivant.

    p0,0(t) = p0,0(t) + p1,0(t)p0,n(t) = p0,n1(t) p0,n(t) + p1,n(t) , n = 1, . . . , a1

    p1,0(t) = p0,a1(t) (+ ) p1,0(t) + b

    n=a p1,n(t)p1,n(t) = p1,n1(t) (+ ) p1,n(t) + p1,n+b(t) , n 1 .

    (2.15)

    Bien entendu, nous ne calculerons que la solution constante de ce systme,en notant pi0,n et pi1,n les probabilits stationnaires des dirents tats.

    (a) 0 = pi0,0 + pi1,0(b) 0 = pi0,n1 pi0,n + pi1,n , n = 1, . . . , a1

    (c) 0 = pi0,a1 (+ )pi1,0 + b

    n=a pi1,n(d) 0 = pi1,n1 (+ )pi1,n + pi1,n+b , n 1 .

    (2.16)

    Considrons lquation de rcurrence linaire (d). Lquation caractristiqueassocie est la suivante.

    0 = (+ )z + zb+1 . (2.17)

    Le lemme suivant se dmontre par des techniques danalyse complexe (tho-rme de Rouch).

    Lemme 2.5

    1. Si b, lquation (2.17) nadmet aucune racine de module stricte-ment infrieur 1.

    2. Si < b, lquation (2.17) admet une unique racine de module stricte-ment infrieur 1. Cette racine est relle et strictement comprise entre0 et 1.

    Il est facile de vrier, en tudiant le graphe du polynme (+)z+zb+1,que (2.17) admet une racine relle comprise entre 0 et 1 si < b. Nousla noterons r. Remarquons que r peut se calculer numriquement avec uneexcellente prcision (par exemple avec la mthode de Newton).

  • Files dattente 97

    Rappelons quune mesure stationnaire est une loi de probabilit. La solu-tion de lquation (d) que nous cherchons doit tre une srie convergente. Ortoute solution de (d) est une combinaison linaire des puissances de racines delquation caractristique associe (2.17). Dans le cas b, les puissancesde racines ne peuvent pas tre les termes gnraux de sries convergentes. Leprocessus nadmet pas de mesure stationnaire, le systme sature. Dans le cas < b en revanche, la solution que nous cherchons vrie ncessairement,pour tout n 0 :

    pi1,n = pi1,0 rn .

    Reste calculer les autres probabilits. Nous les exprimons toutes en fonctionde pi0,0 et r. En combinant les quations (a), (b) et (c) de (2.16), on trouve :

    pi0,n = pi0,01 rn+1

    1 r, n = 1, . . . , a1 ,

    pi1,n = pi0,0(1 rb)rn+1

    1 r, n 0 .

    On calcule ensuite pi0,0, en crivant que la somme de toutes les probabilitsvaut 1. On trouve :

    pi0,0 =

    (a

    1 r+r(ra rb)

    (1 r)2

    )1.

    3 Files quasi-markoviennes

    Les traitements mathmatiques des modles tudis jusquici taient tousbass sur les processus markoviens de saut, et donc sur lhypothse de duresexponentielles. Or supposer que des temps dinterarrive ou des temps deservice sont exponentiels nest pas toujours raliste dans les applications.Lintrt des modles markoviens est que beaucoup des rsultats que lon ydmontre sont robustes aux changements de loi, au sens o ils restent vraisquand on remplace les lois exponentielles des services ou des interarrives pardautres lois. Pour donner une base concrte cette intuition, nous allonsreprendre le cadre le plus simple de la le M/M/1, en gnralisant dabordla loi des temps de service, ensuite celle des temps dinterarrive.

    3.1 File M/GI/1

    Nous commenons par une description dun modle moins prcis que celuide la le M/M/1. Considrons une le dattente un seul serveur. Les clientssont servis un par un, et le temps de service de chaque client est alatoire, maisde loi inconnue. Le nombre de clients arrivant dans la le pendant le n-imeservice est aussi une variable alatoire, que nous noterons An. Lhypothseessentielle est que les An sont indpendantes et de mme loi sur IN. Nous

  • 98 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    notonsXn le nombre de clients prsents dans le systme immdiatement aprsle n-ime service. Si Xn est strictement positif, alors Xn+1 = Xn 1+An+1(un client est parti, et An+1 sont arrivs). Si Xn est nul, alors Xn+1 = An+1.On peut donc crire :

    Xn+1 = Xn 11IN(Xn) +An+1 , (3.18)

    ce qui montre que (Xn) est une chane de Markov, valeurs dans IN.Nous noterons q = (qk)kIN la loi commune des nombres de clients arri-

    vant pendant un service, g sa fonction gnratrice et son esprance.

    g(z) =k=0

    zk qk ; =k=0

    k qk = g(1) .

    Le paramtre est le nombre moyen de clients qui arrivent pendant untemps de service. Cest le coecient doccupation de la le. Le comportementasymptotique de la chane (Xn) est facile deviner intuitivement. Si < 1, leserveur peut faire face toutes les demandes : les clients ne saccumulent paset un rgime dquilibre peut stablir ; la chane (Xn) est rcurrente positive.Si > 1, les clients sont trop nombreux et la le sature : Xn crot en moyennecomme n( 1) ; la chane (Xn) tend presque srement vers + et elle estdonc transiente. On dmontre que la chane est rcurrente nulle pour = 1.Nous donnons ci-aprs les justications les plus faciles.

    Proposition 3.1 Si > 1, la chane (Xn) tend vers linfini presque sre-ment, elle est donc transiente. Si < 1 la chane est rcurrente.

    Dmonstration : A partir de la dnition (formule (3.18)), on peut crireimmdiatement :

    Xn n+n

    m=1

    Am = n( 1 +

    1

    n

    nm=1

    Am

    ).

    Daprs la loi forte des grands nombres, 1n

    nm=1Am converge presque sre-

    ment vers , do le rsultat dans le cas > 1.Si X0 = i, on voit aisment partir de la mme formule (3.18), quen

    m=1Am < n entrane que parmi X1, . . . , Xn, au moins une des valeurs estgale i. La probabilit de retour en i est donc minore par IP[

    nm=1Am 0, la probabilit de transition dei j est qji+1 si j i1, 0 sinon. Notons pi = (pin) la mesure stationnaire.Si elle existe, elle vrie le systme dquations suivant :{

    pi0 = pi0 q0 + pi1 q0pin = pi0 qn + pi1 qn + + pin+1 q0 , n 1 .

    La fonction gnratrice de pi est dnie par f(z) =zn pin. Pour la faire

    apparatre, on multiplie par zn la n-ime quation du systme et on somme :

    f(z) = pi0 g(z) + pi1 g(z) + + pin+1zn g(z) +

    =g(z)

    z

    (pi0z pi0 + f(z)

    ).

    On en dduit lexpression de f(z) en fonction de pi0 et g(z) :

    f(z) = pi0(1 z)g(z)

    g(z) z.

    Pour dterminer la valeur de pi0, il faut utiliser le fait que pi doit tre unemesure de probabilit et que donc f(1) doit valoir 1. Or z = 1 annule lenumrateur et le dnominateur de lexpression ci-dessus. Pour lever lind-termination, on crit :

    g(z) = 1 + (z 1)+ o(z 1) .

    On en dduit facilement que pi0 = 1. Donc la mesure stationnaire ne peuttre une loi de probabilit que si < 1.

    De manire plus spcique, supposons que les temps dinterarrive soient ex-ponentiels de paramtre . Les temps de service ont une loi commune noteG sur IR+. Les temps dinterarrive et de service sont indpendants dans leurensemble. La notation de Kendall correspondant ce modle est M/GI/1.Nous allons voir que les quantits intressantes relatives au rgime station-naire (loi du nombre de clients mais aussi du temps de sjour) sexprimentde manire explicite laide de la transforme de Laplace de la loi du tempsde service, note G, et dnie pour s > 0 par :

    G(s) =

    0

    est dG(t) .

    Par exemple, pour la le M/M/1, la dure de service est exponentielle deparamtre , la transforme de Laplace de cette loi est G(s) =

    +s .Nous utiliserons les deux premiers moments de la loi G, qui sexpriment

    laide des drives de G en 0. Lesprance dun temps de service est : 0

    t dG(t) = G(0) .

  • 100 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    Pour conserver des notations homognes avec la le M/M/1, nous noterons1cette esprance. La drive seconde de G en 0 est lesprance du carr du

    temps de service : t2 dG(t) = G(0) .

    Nous noterons v la variance dun temps de service :

    v = G(0)1

    2.

    Les rsultats qui suivent sont dus Pollaek et Khintchine.

    Proposition 3.3 Considrons la file dattente M/GI/1, et supposons-la enrgime stationnaire. Soit f la fonction gnratrice du nombre de clients aprsun service, W la loi du temps de sjour dun client, et W sa transforme deLaplace. Alors :

    1.

    f(z) =(1 )(1 z)G( z)

    G( z) z. (3.20)

    2.

    W (s) =s(1 )G(s)

    s (1G(s)). (3.21)

    3.

    IE[W ] =1

    +

    2(1 )

    (v +

    1

    2

    ). (3.22)

    Dmonstration : Le processus darrive est un processus de Poisson dintensit. Le nombre darrives pendant un intervalle de temps damplitude t suitdonc la loi de Poisson de paramtre t. La probabilit que k clients arrivent

    pendant cet intervalle est donc et (t)k

    k! . Pour obtenir la probabilit que kclients arrivent pendant un temps de service, il faut intgrer cette expressionpar rapport la loi G :

    qk =

    0

    et(t)k

    k!dG(t) .

    La fonction gnratrice de la loi q scrit donc :

    g(z) =

    k=0

    zk qk

    =

    0

    (k=0

    et(t)kzk

    k!

    )dG(t)

    =

    0

    et+zt dG(t)

    = G( z) .

  • Files dattente 101

    On dduit donc (3.20) de (3.19).Par la mme technique, on peut relier la transforme de Laplace du temps

    de sjour dun client arrivant en rgime stationnaire la fonction gnratricede la mesure stationnaire f . Considrons la probabilit pin. Par dnition,cest la probabilit de lvnement la n dun service en rgime stationnaire,il reste n clients dans le systme. Mais comme la discipline de service estFIFO, ces n clients sont exactement ceux qui sont arrivs pendant le tempsde sjour du client qui vient de partir. Notons W la loi de ce temps de sjour.On a :

    pin =

    0

    et(t)n

    n!dW (t) .

    Et donc par le mme calcul que prcdemment :

    f(z) =

    n=0

    zn pin =W( z) ,

    en notant W la transforme de Laplace de la loi W . En revenant lexpres-sion de f(z) (formule (3.20)), on obtient lexpression suivante :

    W ( z) =(1 )(1 z)G( z)

    G( z) z.

    Soit (3.21), en remplaant formellement z par s.Le coecient doccupation sexprime simplement. Nous lavons dni

    comme le nombre moyen de clients arrivant pendant la dure dun service.

    =

    k=0

    k qk = g(1) = G(0) .

    Or G(0) = 1est lesprance dun temps de service. On a alors, comme

    pour la le M/M/1 :

    =

    .

    Le nombre moyen de clients prsents la n dun service en rgime station-naire est lesprance de la loi pi, savoir f (1). De mme le temps moyende sjour dun client arrivant en rgime stationnaire est lesprance de la loiW , soit W (0). Comme f(z) = W ( z), on a f (1) = W (0). Onretouve donc la formule de Little : le nombre moyen de clients dans le sys-tme est le produit du nombre moyen de clients arrivant par unit de tempspar le temps moyen de sjour. Lexpression du temps moyen de sjour (3.22)sobtient en drivant (3.21).

    On constate que le temps moyen de sjour est minimal lorsque la variancedes temps de service est nulle, savoir lorsque ceux-ci sont constants : pouroptimiser une le dattente, on a donc intrt standardiser les temps deservice.

  • 102 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    Comme cas particulier, si G est la loi exponentielle de paramtre , satransforme de Laplace est G(s) =

    s+ . La fonction gnratrice de la mesurestationnaire est :

    f(z) =

    z.

    La transforme de Laplace du temps de sjour est :

    W (s) =

    + s.

    Ce sont bien les rsultats que nous avions trouv pour la le M/M/1.

    3.2 File GI/M/1

    Nous commenons par une description assez peu raliste du modle. Onconsidre une le dattente un seul serveur. Les clients arrivent un parun. Lors de la n-ime arrive, on donne au serveur un quota alatoire Dn declients servir. Si moins de Dn clients sont prsents, ils sont tous servis, sinonDn sont servis. Les quotas Dn sont des variables alatoires indpendantes etde mme loi q = (qk) sur IN. La fonction gnratrice de cette loi est noteg. Le nombre de clients prsents dans le systme immdiatement avant lan-ime arrive est not Xn. Il est dni par :

    Xn+1 = max{0, Xn + 1Dn} , (3.23)

    donc (Xn) est une chane de Markov.Notons le coecient doccupation de la le, savoir le rapport du

    nombre darrives au nombre de services par unit de temps. Comme Dnest un nombre de services pour une arrive, son esprance doit tre 1/.

    k=1

    k qk = g(1) =

    1

    .

    Le comportement asymptotique de la chane est toujours le mme : si 1la le sature, si < 1 un rgime dquilibre peut stablir. Ici encore, nousne proposons que les dmonstrations les plus faciles.

    Proposition 3.4 Si > 1, la chane (Xn) tend vers linfini presque sre-ment, elle est donc transiente. Si < 1 la chane est rcurrente.

    Dmonstration : A partir de la dnition (formule (3.23)), on vrie im-mdiatement que pour tout n 1, Xn X0 + n (D1 + + Dn). Parla loi des grands nombres (D1 + + Dn)/n converge vers 1/. Si > 1,n (D1+ +Dn) tend vers + presque srement, donc la chane est tran-siente. Inversement, supposons < 1. Le mme raisonnement indique que

  • Files dattente 103

    lvnement D1 + +Dn > n a une probabilit qui tend vers 1 quand ntend vers linni. Or si X0 = 0, cet vnement implique quil existe m ntel que Xm = 0. La probabilit de retour en 0 tend donc vers 1 et la chaneest rcurrente.

    Dans le cas o un rgime dquilibre stablit, il est possible de calculerexplicitement la mesure stationnaire.

    Proposition 3.5 La chane (Xn) admet une mesure stationnaire si et seule-ment si le coefficient doccupation est strictement infrieur 1. Dans cecas, lquation g(z) = z admet une unique solution de module infrieur 1.Cette solution, note r, est relle et strictement comprise entre 0 et 1. Lamesure stationnaire pi = (pin)nIN est dfinie par :

    pin = (1 r)rn . (3.24)

    Dmonstration : A partir de la formule de dnition (3.18), il est facile dcrireles probabilits de transition de la chane. La probabilit de transition de ivers j = 1, . . . , i + 1 est qij+1. La probabilit de transition de i vers 0est

    k=i+1 qk. Si la mesure stationnaire existe, elle vrie pour tout n > 0lquation suivante.

    pin =

    k=0

    qk pin+k1 .

    Cette quation de rcurrence linaire ne peut admettre comme solution uneloi de probabilit que si lquation caractristique associe admet une racinede module strictement infrieur 1. Or lquation caractristique associeest g(z) = z. Il est facile de vrier, en tudiant le graphe de la fonction,quelle admet une racine relle strictement comprise entre 0 et 1 (note r) siet seulement si g(1) > 1, soit < 1. En utilisant le thorme de Rouch, ondmontre quil ny a pas de racine de module < 1 si 1, et que r est la seuleracine de module < 1 si < 1. Donc il nexiste pas de mesure stationairesi 1 (la le sature), et si < 1, la mesure stationnaire est donne par(3.24).

    Voici une dnition plus prcise du modle GI/M/1. Les clients arrivent unpar un et leurs arrives sont spares par des dures indpendantes et demme loi, note G. Ils sont servis un par un et les services sont exponentielsde paramtre . Les temps dinterarrive et de service sont indpendants dansleur ensemble. Le quota de clients que le serveur peut traiter pendant untemps dinterarrive est le nombre de clients quil traiterait sil fonctionnait encontinu. Si ctait le cas, le nombre de clients servis au cours du temps seraitun processus de Poisson dintensit . Sur un intervalle de temps damplitude

    t, la probabilit de traiter k clients serait et (t)k

    k! . Pour obtenir la probabi-lit dun quota de k clients, il faut intgrer cette expression par rapport la

  • 104 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    loi G :

    qk =

    0

    et(t)k

    k!dG(t) .

    La fonction gnratrice de la loi q scrit donc :

    g(z) =k=0

    zk qk

    =

    0

    k=0

    et(t)kzk

    k!dG(t)

    =

    0

    et+zt dG(t)

    = G( z) ,

    en notant G la transforme de Laplace de la loi G. Remarquons que g(1) =G(0). Si lesprance dun temps dinterarrive est G(0) = 1

    , alors la

    taille moyenne dun quota de clients est 1=

    .

    La dtermination de la dure de sjour dun client dans le systme enrgime stationnaire se fait exactement de la mme faon que pour la leM/M/1.

    Proposition 3.6 Supposons que la chane (Xn) soit en rgime stationnaire.Notons T la dure de sjour dun client. La loi de T est la loi exponentiellede paramtre (1 r), o r est la racine de z = g(z) strictement compriseentre 0 et 1.

    Dmonstration : elle est identique celle de la proposition 2.1. La probabilitque le client qui arrive trouve n clients arrivs avant lui dans le systmeest pin = (1 r)r

    n. Si cest le cas, son temps de sjour sera la somme den + 1 temps de service indpendants, exponentiels de paramtre . La loiconditionnelle de T sachant quil y a n clients dans le systme est donc la loidErlang ou loi gamma G(n+ 1, ). La densit de T peut donc scrire :

    fT (t) =

    n=0

    pinn+1tn

    n!et 11IR+(t)

    =

    n=0

    (1 r) (r)n

    n+1tn

    n!et 11IR+(t)

    = (1 r)e(1r)t 11IR+(t) .

  • Files dattente 105

    Remarquons que lesprance du temps de sjour est 1(1r) , alors que le

    nombre moyen de clients dans le systme estnpin =

    r1r : la formule de

    Little ne sapplique pas dans ce cas. Ceci est d au fait que lon nobserve lale qu certains instants particuliers, juste avant une arrive.

    4 Rseaux de files dattente

    Pour donner une petite ide de la complexit des problmes dattente lis linformatique, examinons le trajet dune tche dans une unit centrale. Sontraitement peut tre interrompu soit par un dfaut de pagination, auquel caselle sera envoye dans le tambour de pagination, soit par une entre-sortie,auquel cas elle se placera dans une mmoire tampon. Elle reviendra plustard dans lunit centrale pour poursuivre son traitement. Si on voit cettetche comme un client qui doit recevoir un certain service, ce sont trois lesdattente (lunit centrale, le tambour de pagination et la mmoire tampon)quelle visite peut-tre un grand nombre de fois chacune avant de terminerson excution. Les rseaux de le dattente sont des modles dcrivant leparcours dun client dans un systme o il doit visiter successivement plu-sieurs les avant de sortir. Nous traiterons dabord les modles markoviensles plus simples qui sont les rseaux de Jackson, avant de prsenter le cadreplus gnral des rseaux de Petri.

    4.1 Rseaux de Jackson ouverts

    Un rseau de Jackson ouvert se compose de K les dattente, que lesclients parcourent de manire alatoire. La description du modle est la sui-vante. Elle est illustre par la gure 7.

    1. Les clients arrivent un par un dans le systme, selon un processus dePoisson dintensit .

    2. Un client qui arrive se dirige vers la le numro i avec probabilit p0,i.Ces probabilits vrient :

    Ki=1

    p0,i = 1 .

    3. Les clients sont servis un par un dans chaque le. Le i-ime serveurfonctionne de manire markovienne, avec un taux de service i(ni) quidpend du nombre ni de clients prsents dans la le. Autrement dit,lorsque ni clients sont prsents dans la le, le temps de service dunclient est exponentiel de paramtre i(ni). Ceci permet en particulier deprendre en compte des serveurs multiples du type M/M/s ou M/M/.

  • 106 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    p0,1

    (n )ii

    p0,j

    p0,i

    p0,K

    pK,K+1

    pj,K+1

    pi,j

    pi,K+1

    p1,K+1

    j (n )j

    Figure 7 Schma dun rseau de Jackson ouvert.

    4. Un client sortant de la i-ime le se dirige soit vers la le numro j avecprobabilit pi,j , soit vers lextrieur (il quitte dnitivement le systme),avec probabilit pi,K+1. Pour tout i = 1, . . . ,K, ces probabilits, ditesde routage, vrient :

    K+1j=1

    pi,j = 1 .

    5. Les temps dinterarrive, les temps de service et les choix alatoires desclients en entre et en sortie de chaque le, sont des variables alatoiresindpendantes dans leur ensemble.

    Les les tant numrotes de 1 K, un client arrive de lextrieur, not commeune 0-ime le, parcourt un certain nombre de les de manire alatoire, puisse dirige vers lextrieur, not comme une (K + 1)-ime le. La suite desles parcourues par un client est une chane de Markov sur {0, . . . ,K + 1},partant de 0 et telle que K + 1 est un tat absorbant. Nous supposons quecette le na pas dautres composantes irrductibles rcurrentes, cest--direquun client qui rentre dans le systme ne peut pas y rester bloqu : il ensortira forcment.

    Ltat du systme sera cod par un vecteur dentiers n = (n1, . . . , nk),dont la i-ime coordonne reprsente le nombre de clients prsents dans lale numro i. Les hypothses du modle pemettent de dcrire lvolution de

  • Files dattente 107

    ltat du systme comme un processus markovien de saut, valeurs dans INK .Comme pour un processus de naissance et de mort, les sauts vont dun tatvers un tat voisin. Ils sont de trois types.

    1. Arrive : un client est arriv de lextrieur dans la le numro i ; lai-ime coordonne du vecteur dtat est augmente de 1. Nous notonsa(n, i) le nouveau vecteur dtat :

    a(n, i) = (n1, . . . , ni + 1, . . . , nk) .

    La transition de n vers a(n, i) se produit avec un taux gal p0,i.

    2. Dpart : un client a quitt la le numro i pour se diriger vers lext-rieur ; la i-ime coordonne du vecteur dtat est diminue de 1. Nousnotons b(n, i) le nouveau vecteur dtat :

    b(n, i) = (n1, . . . , ni1, . . . , nk) .

    La transition de n vers b(n, i) se produit avec un taux gal i(ni)pi,K+1.

    3. Changement de file : un client a quitt la le numro i pour se diri-ger vers la le numro j ; la i-ime coordonne du vecteur dtat estdiminue de 1, la j-ime est augmente de 1. Nous notons c(n, i, j) lenouveau vecteur dtat :

    c(n, i, j) = (n1, . . . , ni1, . . . , nj + 1, . . . , nk) .

    La transition de n vers c(n, i, j) se produit avec un taux gal i(ni)pi,j .

    Notons pn(t) la probabilit que le systme soit dans ltat n linstant t.En examinant les transitions qui conduisent ltat n, on crit lquation deChapman-Kolmogorov relative cet tat.

    pn(t) =

    Ki=1

    i(ni + 1)pi,K+1 pa(n,i)(t)

    +

    Ki=1

    p0,i pb(n,i)(t)

    +K

    i6=j=1

    j(nj + 1)pj,i pc(n,i,j)(t)

    (+

    Ki=1

    i(ni)(1 pi,i)

    )pn(t) .

    (4.25)

    Cette quation est valable pour tout tat n, condition de poser i(0) = 0,et pn(t) = 0 ds que n a une coordonne ngative.

    Il nest videmment pas question de chercher une solution gnrale lquation (4.25). Il est dj assez tonnant que lon puisse dterminer expli-citement la mesure stationnaire. Elle est donne par le thorme de Jackson.

  • 108 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    Thorme 4.1 Soit (ei)i=1,...,K la solution du systme linaire suivant :

    i = 1, . . . ,K , ei = p0,i +

    Kj=1

    ejpj,i . (4.26)

    Pour tout i = 1, . . . ,K, posons i,0 = 1 et pour tout n 1, notons i,n leproduit :

    i,n =

    nm=1

    eii(m)

    . (4.27)

    Le systme est rcurrent positif si et seulement si pour tout i = 1, . . . ,K,i,n est le terme gnral dune srie convergente. Si cest le cas, notons pinla mesure stationnaire de ltat n = (ni). Elle sexprime en fonction de lamesure stationnaire de ltat 0 o toutes les files sont vides, de la faonsuivante.

    pin = pi0

    Ki=1

    i,ni , (4.28)

    avec :

    pi0 =

    nINK

    Ki=1

    i,ni

    1 .Nous allons donner une interprtation concrte de ce thorme. Si le systmeest en quilibre, alors chacune des K les doit galement tre en quilibre,au sens o le nombre de clients qui y rentrent par unit de temps doit tregal en moyenne au nombre de clients qui en sortent. Les quations (4.26)doivent tre comprises comme des quations dquilibre de ux : ei est lenombre moyen de clients qui passent dans la le numro i par unit de temps.Multiplions la i-ime quation par :

    ei = p0,i +

    Kj=1

    ejpj,i .

    Le nombre de clients qui entrent dans la le numro i est la somme du nombrede clients venant de lextrieur, et des nombres de clients sortant des autresles et qui se dirigent vers i. Or il entre clients dans le systme par unitde temps. Parmi ceux-l une proportion p0,i se dirige vers la le numro i. Ilarrive donc dans cette le en moyenne p0,i clients venant de lextrieur. Siles les sont en quilibre, il sort ej clients de la le numro j, parmi lesquelsune proportion pj,i se dirige vers la le numro i. Il entre donc ejpj,i clientsvenant de la le j. La somme de tous ces nombres doit tre le ux de la lenumro i, soit ei. Lexpression de la mesure stationnaire sous forme produitest trs particulire : la probabilit dun tat est le produit des probabilitsde ses coordonnes. Tout se passe donc comme si lquilibre les K les

  • Files dattente 109

    fonctionnaient de manire indpendante. De plus la probabilit quil y ait nclients dans la i-ime le, proportionnelle i,n, est la mme que pour unprocessus de naissance et de mort, de taux de naissance ei, et taux de morti(n). Donc la mesure stationnaire donne par le thorme 4.1 est la loi dunK-uplet de les dattentes indpendantes, telles que les clients arrivent dansla i-ime le selon un processus de Poisson de paramtre ei, et y sont servisavec un taux i(n).

    Dmonstration : Nous nous contenterons de vrier que la mesure stationnairepropose dans le thorme 4.1 est bien solution constante de lquation deChapman-Kolmogorov (4.25). Commenons par crire lquation que doitvrier la mesure stationnaire, relative ltat n, en la divisant par pin.(

    +Ki=1

    i(ni)(1 pi,i)

    )=

    Ki=1

    i(ni + 1)pi,K+1pia(n,i)

    pin

    +

    Ki=1

    p0,ipib(n,i)

    pin

    +

    Ki6=j=1

    j(nj + 1)pj,ipic(n,i,j)

    pin.

    (4.29)

    Etant donne la forme produit de la mesure stationnaire propose, les rap-ports de probabilits se simplient notablement. A partir des expressions(4.27) et (4.28), on trouve :

    pia(n,i)

    pin=

    eii(ni + 1)

    ,pib(n,i)

    pin=i(ni)

    ei,

    pic(n,i,j)

    pin=

    ejj(nj + 1)

    i(ni)

    ei.

    Donc : (+

    Ki=1

    i(ni)(1 pi,i)

    )=

    Ki=1

    ei pi,K+1

    +

    Ki=1

    i(ni)

    eip0,i

    +K

    i6=j=1

    i(ni)ejeipj,i .

    En reportant les termes en i(ni)pi,i dans le membre de droite on obtient :

    +Ki=1

    i(ni) =Ki=1

    eipi,K+1 +Ki=1

    i(ni)

    ei

    p0,i + Kj=1

    pj,iej

    .Dans la dernire parenthse, on reconnat le membre de droite de lquationdquilibre des ux (4.26). Les termes en i(ni) se simplient donc et il reste :

    =

    Ki=1

    ei pi,K+1 . (4.30)

  • 110 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    Cette dernire quation exprime lquilibre global du systme : est lenombre moyen de clients entrant par unit de temps, ei est le nombre moyende clients qui sortent de la le numro i, parmi lesquels une proportion pi,K+1sort dnitivement du systme. Pour vrier (4.30), il sut de sommer toutesles quations de (4.26). On obtient :

    Ki=1

    p0,i =

    Ki=1

    ei Kj=1

    ejpj,i

    ,soit en intervertissant les deux sommes dans le membre de droite :

    1 =

    Ki=1

    ei

    1 Kj=1

    pi,j

    = Ki=1

    ei pi,K+1 .

    4.2 Rseaux de Jackson ferms

    On simplie le modle prcdent en supprimant les changes avec lext-rieur : aucun client ne rentre dans le rseau ( = 0) ni nen sort (pi,K+1 = 0).Le nombre total de clients reste donc xe, et nous le notons N . Nous justie-rons intuitivement plus loin par un exemple quun rseau ouvert capacitlimite peut tre remplac par un rseau ferm, ce qui lgitime le modle desrseaux de Jackson ferms. Par rapport au paragraphe prcdent, on dnitmaintenant un processus markovien de saut sur un ensemble fini dtats.

    E =

    {n = (ni) IN

    K ;

    Ki=1

    ni = N

    }.

    Mme sil est ni, le nombre dtats peut tre trs grand. Le cardinal de Evaut en eet :

    |E| =

    (N +K 1

    K 1

    ),

    qui est de lordre de NK1 quand N tend vers linni. Nous examineronsplus loin les consquences algorithmiques de cette explosion combinatoire.

    La suite des les visites par un client est une chane de Markov, dont noussupposons quelle est irrductible : chaque le peut tre visite partir denimporte quelle autre. Le thorme suivant, galement d Jackson, donnela mesure stationnaire du rseau.

    Thorme 4.2 Soit (ei)i=1,...,K une solution du systme suivant.

    i = 1, . . . ,K , ei =Kj=1

    ej pj,i . (4.31)

  • Files dattente 111

    Pour i = 1, . . . ,K, posons i,0 = 1 et pour n 1, notons i,n le produit :

    i,n =

    nm=1

    eii(m)

    . (4.32)

    Le rseau de Jackson ferm admet pour mesure stationnaire la mesure pi =(pin)nE, dfinie pour n = (ni) E par :

    pin = (N,K)1

    Ki=1

    i,ni , (4.33)

    avec :

    (N,K) =nE

    Ki=1

    i,ni . (4.34)

    On vrie que la mesure stationnaire pi ainsi dnie est solution constantedes quations de Chapman-Kolmogorov, tout comme dans la dmonstrationdu thorme 4.1.

    Linterprtation est lgrement dirente. Le systme linaire (4.31) estcelui que vrie la mesure stationnaire dune chane de Markov de matricede transition (pi,j). Ses solutions sont dtermines une constante prs, quislimine dans lexpression de pin avec la constante de normalisation (N,K).Nous pouvons donc arbitrairement dcider que (ei) est une loi de probabilitsur {1, . . . ,K} : cest la mesure stationnaire de la chane de Markov des visitesdun client. A lquilibre, ei reprsente la proportion des N clients qui visitentla le numro i. Comme chacune des les doit tre en quilibre, le nombrede clients qui entrent dans la le i par unit de temps et le nombre de clientsqui en sortent doivent tre gaux, et proportionnels ei. Lquation relative la le i est encore un quilibre de ux : les clients entrant viennent duneautre le j, et se dirigent vers i avec probabilit pj,i. Une fois que les ei ontt xs, la mesure stationnaire de chaque le est proportionnelle aux (i,n) :cest la mesure stationnaire dun processus de naissance et de mort de tauxde naissance constants gaux ei et de taux de mort i(n). A lquilibre,tout se passe comme si les K les taient indpendantes. Chacune des lesa une capacit limite N . Pour la i-ime le, les arrives se font selon unprocessus de Poisson dintensit ei, le taux de service est i(n).

    A titre dexemple, considrons un processus deux les, avec bouclage :les clients sortant de la le 1 se dirigent forcment vers la le 2, et rcipro-quement. Les probabilits de routage pi,j sont donc les suivantes.

    p1,1 = 0 , p1,2 = 1 , p2,1 = 1 , p2,2 = 0 .

    Nous supposons que les taux de service des deux les sont constants, pourla premire, et pour la seconde. Les tats du systme sont les couples

  • 112 Cahier de Mathmatiques Appliques no 14

    (n,N n), pour n = 0, . . . , N . Nous noterons pin la probabilit stationnairede ltat (n,Nn). En appliquant le thorme 4.2, on trouve :

    pin = (N, 2)1nnN =

    1

    1 ()N+1

    (

    )n.

    Cest exactement la mesure stationnaire dune le M/M/1/N (voir para-graphe 2.4). On peut gnraliser cet exemple de la faon suivante. Consid-rons un rseau de Jackson ouvert, de capacit limite N clients au total.Ajoutons-lui une (K +1)-ime le, de taux de service constant. Les clientssortant de cette (K + 1)-ime le se dirigent vers la i-ime avec probabi-lit p0,i. A un tat n = (n1, . . . , nK) du systme initial, correspond ltat(n1, . . . , nK , N

    ni) du nouveau systme. Les probabilits stationnaires

    de ces tats pour leurs systmes respectifs sont les mmes. Dans les appli-cations, les capacits innies nexistent pas. Ceci justie donc ltude desrseaux ferms, comme alternative aux rseaux ouverts capacit limite.

    Nous revenons maintenant sur le calcul algorithmique de la constante denormalisation (N,K). Calculer directement les |E| termes et les sommer estimpensable, pour peu que N et K soient un peu grands. Une astuce base defonctions gnratrices conduit un algorithme dont le nombre doprationsest dordre N2, au lieu de NK1 pour une application nave de la formule(4.34). Lide consiste introduire une fonction gnratrice gi, pour la mesurestationnaire de la i-ime le.

    gi(z) =

    Nn=0

    zn i,n .

    Dnissons ensuite les hi comme les produits cumuls des gi :

    hi(z) = g1(z) gi(z) .

    Observons que la constante (N,K) est le coecient de zN dans le dvelop-pement de hK en srie entire. Plus gnralement, pour tout n = 1, . . . , Net pour tout j = 1, . . . ,K, (n, j) est le terme en zn dans le dveloppe-ment de hj en srie entire. Mais la relation hj = hj1gj se traduit sur lesdveloppements en srie entire par la relation de rcurrence suivante.

    (n, j) =n

    m=0

    (m, j 1)j,nm . (4.35)

    Cette rcurrence est initialise par :

    (n, 1) = 1,n et (0, j) = 1 .

    Lalgorithme itratif qui implmente cette rcurrence pour l