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Fiche 1212 – La mesure de la mobilité sociale Sociologie 1.2 Comment rendre compte de la mobilité sociale ? Acquis de première: Acquis de première : groupe d’appartenance, groupe de référence, socialisation anticipatrice, capital social Notions Mobilité I –Classes, stratification et mobilité sociale I. Présentation des tables de mobilité sociale A. La construction des tables de mobilité : la table des données brutes La plupart du temps, les tables de mobilité sont des tables intergénérationnelles, concernant uniquement les hommes actifs de 40 à 59 ans. Ce choix s’explique par plusieurs raisons : Les hommes sont plus souvent actifs que les femmes Entre 40 et 59 ans, leur statut social est maximum On pose 2 questions à ces hommes : Quelles sont votre profession et PCS ? Quelles sont celles de votre père ? On construit alors un tableau à double entrée : Dans la première colonne, la CSP de l’individu Dans la première ligne, la CSP du père Dans certaines tables, ligne et colonne sont interverties A chaque intersection d’une ligne et d’une colonne, on obtient le nombre d’individus appartenant à une CSP x dont le père appartenait à une CSP y. On obtient alors la table de données brutes exprimées en milliers

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Fiche 1212 – La mesure de la mobilité socialeLes tables de mobilité sociale

Sociologie

1.2 Comment rendre compte de la mobilité sociale ?Acquis de première: Acquis de première : groupe d’appartenance, groupe de référence, socialisation anticipatrice, capital socialNotions Mobilité intergénérationnelle /intragénérationnelle , mobilité observée, fluidité sociale

I –Classes, stratification et mobilité sociale

I. Présentation des tables de mobilité sociale

A. La construction des tables de mobilité   : la table des données brutes

La plupart du temps, les tables de mobilité sont des tables intergénérationnelles, concernant uniquement les hommes actifs de 40 à 59 ans. Ce choix s’explique par plusieurs raisons :

Les hommes sont plus souvent actifs que les femmes Entre 40 et 59 ans, leur statut social est maximum

On pose 2 questions à ces hommes : Quelles sont votre profession et PCS   ? Quelles sont celles de votre père   ?

On construit alors un tableau à double entrée : Dans la première colonne, la CSP de l’individu Dans la première ligne, la CSP du père Dans certaines tables, ligne et colonne sont interverties

A chaque intersection d’une ligne et d’une colonne, on obtient le nombre d’individus appartenant à une CSP x dont le père appartenait à une CSP y. On obtient alors la table de données brutes exprimées en milliers

7 047 000 hommes actifs de 40 à 59 ans en 2003 ont été interrogés La dernière ligne donne la répartition socioprofessionnelle de l’origine des hommes de 40 à 59 ans en

2003. C’est le nombre de fils selon la CSP du père : en 2003, il y a 1million 143 mille hommes âgés de 40 à 59 ans fils d’agriculteurs exploitants

La dernière colonne indique la répartition socioprofessionnelle des hommes de 40 à 59 ans en 2003. C’est le nombre d'actifs de chaque catégorie dans la génération des fils : il y a 285 000 hommes actifs agriculteurs de 40 à 59 ans en 2003

Pour opérer des comparaisons pertinentes, on va passer des nombres aux pourcentages . On calcule alors 2 autres tables :

la table de destinée la table de recrutement

B. La table de destinée

La table de destinée donne, comme son nom l’indique, le destin des individus : pour chaque CSP, on se demande ce que sont devenus les fils

A la fin de chaque colonne de la table de donnée brutes, on a le nombre de fils pour chaque CSP des pères  : en 2003, il y a 871 000 hommes actifs de 40 à 59 ans fils d’artisans, commerçants, chefs d’entreprise

En divisant chaque colonne, par le total de la colonne (pour la table de données brutes), on obtient le pourcentage d’individus dont le père appartenait à une CSP et qui appartiennent à telle ou telle CSP

C’est la table de destinée; elle se lit en colonne : 0.7% des hommes de 40 à 59 ans en 2003 fils d’artisans, commerçants, chefs d’entreprise sont

devenus agriculteurs 20,1% des hommes de 40 à 59 ans en 2003 fils d’artisans, commerçants, chefs d’entreprise sont

devenus artisans, commerçants, chefs d’entreprise 21.2% des hommes de 40 à 59 ans en 2003 fils d’artisans, commerçants, chefs d’entreprise sont

devenus cadres et professions intellectuelles supérieures Les marges donnent :

la dernière ligne donne la clé de lecture (100) : elle indique quel est le groupe de référence qui sert de base au calcul du pourcentage. On prend comme dénominateur le nombre de fils de chaque catégorie

la dernière colonne donne la part des actifs de chaque catégorie dans la génération des fils en 2003 : 4% des hommes de 40 à 59 ans actifs en 2003 sont agriculteurs exploitants.

C. La table de recrutement (origine)

la table de recrutement donne l’origine sociale des individus de chaque CSP

A la fin de chaque ligne de la table des données brutes (première ligne), on a le nombre d’individus de la génération des fils par CSP : 619 000 hommes actifs de 40 à 59 ans sont artisans, commerçants, chefs d’entreprises en 2003.

En divisant chaque ligne par le total de la ligne (pour la table des données brutes), on obtient le pourcentage d’individus d’une CSP dont le père avait telle ou telle CSP

On obtient la table de recrutement; elle se lit en ligne : 11.6% des hommes de 40 à 59 ans artisans ,commerçants, chefs d’entreprise en 2003 sont fils

d’agriculteurs 29.4% des hommes de 40 à 59 ans artisans, commerçants, chefs d’entreprise en 2003 sont fils

d’artisans, commerçants chefs d’entreprise 6% des hommes de 40 à 59 ans artisans, commerçants, chefs d’entreprise en 2003 sont fils de cadres

Les marges donnent : la dernière colonne donne la clé de lecture (100) : la colonne indique quel est le groupe de référence

qui sert de base au calcul du pourcentage. On prend le nombre d’actifs par CSP en 2003 La dernière ligne donne la répartition socioprofessionnelle de l'origine sociale des hommes

d'aujourd'hui : 16,2% des hommes actifs âgés de 40 à 59 ans sont fils d’agriculteurs exploitants.

III. Les indicateurs d’analyse de la mobilité sociale

A. Le degré d’immobilité sociale

L’immobilité sociale consiste à rester dans le même groupe : le fils reste alors dans la même CSP que son père. On parle aussi de reproduction ou de viscosité sociale Elle se mesure en analysant la diagonale des tables de mobilité.

la table de données brutes : pour connaître le nombre d'individus immobiles, il suffit d'ajouter les chiffres de la diagonale. Il y alors 2, 488 millions d’hommes immobiles soit 1/3 des hommes de 40 à 59 ans (2.488 /7047).

La table de recrutement : l'autorecrutement (de père en fils) paraît limité, excepté pour les agriculteurs et les ouvriers (88,4% des agriculteurs de 40 à 59 ans en 2003 ont un père agriculteur). Pour les autres catégories, seuls 20% des individus avaient un père ayant la même catégorie qu’eux.

La table de destinée : l'immobilité paraît plus forte puisque les chiffres sur la diagonale sont plus élevés que dans la table de recrutement. Un tiers de fils de professions intermédiaires sont des professions intermédiaires. On parle d’hérédité sociale

B. Le degré de mobilité sociale   : la mobilité sociale brute

Mobilité observée ou mobilité brute = Pourcentage total des hommes de 40-59 ans qui n’ont pas le même statut social que leur père

La table de donnée brute permet de mesurer le pourcentage de mobiles. Ici, 67% des hommes sont mobiles (100-33).

1. Intensité de la mobilité sociale

On nomme intensité la part d’une population originaire d’une catégorie susceptible de passer dans une autre.Que ce soit pour la table de destinée ou de recrutement, l'intensité de la mobilité est forte :

Table de destinée : 88% des fils d’agriculteurs ne sont pas devenus agriculteurs Table de recrutement : 76.5% des cadres ne sont pas fils de cadres

2. Amplitude de la mobilité sociale

L’amplitude c’est la distance parcourue par des acteurs sociaux entre deux catégories sociales. Elle peut être : faible lorsque ces catégories sont très proches, fortes si elles sont éloignées.

Cette distance est à la fois: subjective : accéder à des conditions de vie meilleures peut être une satisfaction lorsqu’il figure le seul

horizon possible historique : la distance entre catégories n’est pas fixe dans le temps. La mobilité sociale obéit à une logique

de proximité ainsi décrite 

Que ce soit pour la table de destinée ou de recrutement, l'amplitude est faible. table de destinée : 83% des fils d'employés ne sont pas devenus employés, ils sont devenus pour ¼ ouvriers

pour ¼ professions intermédiaires. table de recrutement : 84% des professions intermédiaires ne sont pas fils de professions intermédiaires. Pour

40% leur père était ouvrier, pour 11% il était employé.

C. L’origine de la mobilité sociale : mobilité structurelle / mobilité nette

Cette distinction, introduite par R.Aron, peut inciter à dissocier : les causes économiques (la mobilité structurelle résulte du changement de la structure sociale,

c’est-à-dire l’évolution de la répartition des professions), des causes sociales (la mobilité nette s’explique par une plus grande fluidité de la société)

A.Touraine différencie alors la mobilité dont : « l’initiative n’est pas venue de l’individu lui-même, mais résulte d’une contrainte externe (mobilité structurelle), (…) de la mobilité où l’individu qui quitte son milieu social d’origine, est dirigée par une volonté ou une perspective d’ascension »

La distinction entre mobilité structurelle (ou mobilité forcée) et mobilité nette (ou pure ou de circulation) consiste à envisager la mobilité totale comme la somme de 2 composantes :

mobilité totale = mobilité structurelle + mobilité nette

Cette distinction est importante pour l’évaluation qu’on peut faire des flux de mobilité : En effet, si la distribution sociale des positions ne changeait pas, il n’y aurait pas de mobilité

structurelle ; toute la mobilité observée serait nette. Dans ce cas et seulement dans ce cas, une immobilité totale est possible.

La mobilité nette suppose que les flux s’équilibrent : si quelqu’un connaît une mobilité sociale ascendante, un autre connaît une mobilité sociale descendante

Tandis que, si la distribution des catégories a changé, il est nécessaire qu’une quantité minimale de mobilité, dite structurelle, se soit produite. Dans la mobilité structurelle, il n y a pas forcément de compensation : tous peuvent avoir une mobilité sociale ascendante ou descendante.

Pour distinguer la mobilité structurelle de la mobilité nette : On peut partir de la table de données brutes :

La dernière ligne donne la répartition socioprofessionnelle des hommes de 40 à 59 ans actifs en 2003 La dernière colonne donne leur origine socioprofessionnelle. Cela peut être un indicateur de la

répartition socioprofessionnelle de la génération des pères. Mais ce n’est qu’un indicateur, ce ne sont pas les chiffres exacts : un père peut avoir au plusieurs fils

En comparant ces deux marges, on peut voir l’évolution des effectifs de chaque catégorie :o 3 groupes ont vu leurs effectifs baisser (agriculteurs, artisans, ouvriers) o 3 ont vu leur nombre augmenter (cadres, professions intermédiaires et employés).

On peut opérer les mêmes conclusions en comparant : La dernière ligne de la table de recrutement qui donne la répartition en % de l’origine sociale des

hommes actifs de 40 à 59 ans en 2003 La dernière colonne de la table de destinée qui donne la répartition en % par CSP des hommes actifs

de 40 à 59 ans en 2003

D. La fluidité sociale

Cette idée qu’il existerait 2 types de mobilité est contestable. Une nouvelle distinction a donc été établie qui considère que les phénomènes de mobilité sociale doivent être étudiés selon 2 points de vue différents et complémentaires : celui des taux absolus de mobilité, encore appelés mobilité observée consiste à analyser la mobilité telle

qu’elle est affectée par l’évolution de la distribution socioprofessionnelle des fils comparativement à celle des pères

celui de la fluidité sociale ou taux relatif de mobilité vise à étudier la force du lien entre l’origine et la position sociale indépendamment de l’évolution de la distribution socioprofessionnelle des fils comparativement à celle des pères. Afin de mesurer la fluidité sociale, les sociologues calculent le rapport des chances relatives (ou odds ratios) : supposons que sur 100 fils de cadres, 80 deviennent cadres et 20 ouvriers, que sur 100 fils d’ouvriers , 75 deviennent ouvriers et 25 deviennent cadres , alors :

le rapport des chances relatives = 80   / 20 = 12 25 / 75

Cela signifie que les fils de cadres ont 12 fois plus de chances de devenir cadres qu’ouvriers que les fils d’ouvriers.

Le calcul des odds ratios se fait obligatoirement à partir de la table de destinée. Pour 100 fils de cadres, 52 sont devenus cadres, 9 ouvriers. Un fils de cadre avait donc 6 fois plus de chances de devenir

cadres qu'ouvrier. Pour 100 fils d'ouvriers, 10 sont devenus cadres, 46 sont devenus ouvriers. Un fils d'ouvrier a donc 0,2 fois plus de chance d'être cadre plutôt qu'ouvrier. Si on mesure le rapport de probabilité, un fils de cadre a 30 fois plus de chance qu'un fils d'ouvrier de

devenir cadre plutôt qu'ouvrier.