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  • Extrait de la publication

  • De l’emprise à la résilience

    COLLECTION PSYCHOTHÉRAPIES CRÉATIVES

    Extrait de la publication

  • Du même auteur

    � LivresAvec Jean-Pierre Bonafe Schmitt, Jocelyne Dahan,

    Marianne Souquet, Jacques Salzer, La médiation, les médiations ?Éditions Érès, 1999.

    L’étoile (poèmes), Éditions FREI, Paris, 2008.

    Myster of Nãtyashastrã 5th Veda. Où meurent les rêves ?Éditions FREI, Paris, 2009.

    � Films DVD-RomVivre sa vie : un rêve, ne pas arrêter le voyage !, Concept-Image, 2005.

    Massoud, le lion du Panjshir, ONG : Aide Psychologique Sans Frontières, septembre 2001.

    Collections chez le même éditeur

    Bibliothèque citoyenneChant du regardChoisir son écoleDroits de l’enfant

    Éducation et SciencesL’école autrementMa vie en marche

    Pédagogues du monde entierPenser le monde de l’enfant

    Profs en libertéPsychothérapies créatives

    Pour en savoir plus :www.fabert.com

    Éditions Fabert107, rue de l’Université – 75007 Paris – France

    Tél. : 33 (0) 1 47 05 32 68 – Fax : 33 (0) 1 47 05 05 61e-mail : [email protected]

    Extrait de la publication

  • Jean-Pierre Vouche

    De l’emprise à la résilience

    LES TRAITEMENTS PSYCHOLOGIQUES

    DES VIOLENCES CONJUGALES :AUTEURS, VICTIMES, ENFANTS EXPOSÉS

    ASSISTÉ PAR MARC CLÉMENT-HINGER

    PRÉFACE DE BORIS CYRULNIK

    POSTFACE D’ANDRÉ MC KIBBEN

    Extrait de la publication

  • Extrait de la publication

  • Psychothérapies créatives

    Collection dirigée parJean-Paul Mugnier

    Cette collection se propose de faire connaître les psychothé-rapies qui s’attachent à la question de l’interactivité entre thé-rapeutes, patients et familles. Cette interactivité est créatrice deliens dans un contexte qui est à la fois défini par des règles com-munément admises, reconnues, et par des singularités liées aucaractère de chaque « histoire thérapeutique ».

    Il y sera donc question de « création » au sens esthétique, d’ap-pa ritions de représentations plus riches, plus complexes, sourcesd’échanges inattendus favorisant les changements et l’évolutiondes partenaires de ces jeux relationnels thérapeutiques. Si la psy-chothérapie est l’art de la relation qui mène à la réduction de lasouffrance, il y a lieu de faire une large place à la réflexion sur« les outils » de cet art.

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  • … à Déborah… à Laila… à Belkys

    … à Aimatallah… au Ché !

    Extrait de la publication

  • 7

    SOMMAIRE

    Préface de Boris Cyrulnik ..................................................................... 11

    INTRODUCTION ............................................................................ 13Faits de société .................................................................................. 14Quelques chiffres significatifs ............................................................. 16L’enquête nationale sur les violences envers les femmes en France ......... 16La presse et les médias s’engagent ........................................................ 17Les chiffres de la violence conjugale .................................................... 21

    1. LES CONCEPTS D’EMPRISE ET DE RÉSILIENCE .................. 27Concept : l’emprise ............................................................................ 27

    La psychanalyse .......................................................................... 33Modèle systémique .................................................................... 45Le modèle cognitivo-comportemental ....................................... 57La psychologie sociale ................................................................ 65

    Concept : la résilience ........................................................................ 69Éclairage sur un nouveau concept .............................................. 69Contexte de l’émergence de ce concept ...................................... 69Définition et réflexions .............................................................. 70Distinction de concepts voisins .................................................. 71La notion dynamique de la résilience ......................................... 72La résilience n’est pas l’invulnérabilité ....................................... 72La défaillance de la résilience ..................................................... 73Les éléments de la résilience ....................................................... 73La clinique de la résilience ......................................................... 74Esquisse d’une psychogenèse de la résilience .............................. 77Conclusion ................................................................................. 78

    2. PRISE EN CHARGE CLINIQUE DES SUJETS VIOLENTS ...... 81Les auteurs de violences conjugales et les dispositifs thérapeutiques ....... 81

    Introduction .............................................................................. 81Les violences intrafamiliales ....................................................... 83L’évaluation des auteurs de violences familiales, les diverses propositions thérapeutiques ....................................................... 96L’animation de groupes de parole des auteurs de violences conjugales .................................................................................. 144

    Extrait de la publication

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    Étude d’un fonctionnement de groupe de parole d’hommes violents ..... 157Présentation ................................................................................ 157Évolution des patients................................................................. 157Thématiques du groupe de parole............................................... 179Analyse sur l’axe : « Sur quoi peut-on mesurer l’avancée des patients en thérapie de groupe ? »................................................ 183Conclusion.................................................................................. 187

    3. SOUTIEN PSYCHOLOGIQUE DES VICTIMES DE VIOLENCESCONJUGALES ................................................................................... 189

    Fondement de notre approche clinique des femmes victimes de violences conjugales........................................................................ 189

    Définition des violences sexistes et familiales .............................. 189Les violences faites aux femmes – Insee 2008 ............................. 190Évolution et séquelles d’une relation d’emprise .......................... 196S’extraire de la relation d’emprise par la résilience ...................... 198

    L’aide psychothérapeutique pour les victimes d’emprise violente dans le couple .................................................................................... 200Dispositif d’évaluation et de suivi des femmes victimes de violences conjugales (expérience de la consultation de Beauvais – Oise) .............. 201

    Les objectifs de nos dispositifs cliniques ..................................... 201Trame d’animation d’un groupe de parole de femmes victimes de violences conjugales ............................................................... 207Analyses et perspectives............................................................... 228

    Fiche clinique de suivi psychologique individuel d’une femme victime de violences conjugales............................................................ 229

    4. LES ENFANTS EXPOSÉS AUX VIOLENCES DOMESTIQUES(CONJUGALES ET FAMILIALES) ................................................... 235Avant-propos .......................................................................................... 235

    Définition du concept d’exposition des enfants à la violence conjugale et familiale ......................................................................... 237Les statistiques : combien d’enfants sont exposés aux violences conjugales ? ........................................................................................ 239Aperçu des effets sur les enfants de l’exposition à la violence conjugale ........................................................................................... 240Pourquoi intervenir .......................................................................... 241Espaces cliniques pour enfants – adolescents exposés aux violences conjugales ............................................................................ 243

    Extrait de la publication

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    Évaluation de l’impact des violences conjugales sur les enfants et adolescents .................................................................................. 243Évaluation de la situation des parents ......................................... 261Les réponses thérapeutiques élaborées......................................... 262

    Vignettes cliniques d’enfants exposés aux violences conjugales ............... 264Vignette clinique « Steven » ....................................................... 264Vignette clinique « Izhara » ........................................................ 265

    5. LES CONDUITES TRANSGRESSIVES ET LES ORGANISATIONSFAMILIALES DYSFONCTIONNANTES ......................................... 267

    Les violences intrafamiliales et les violences sexuelles dans les familles ... 267Présentation des axes et outils thérapeutiques systémiques..................... 269Les dispositifs thérapeutiques du système familial – L’approche systémique ........................................................................................ 271

    Illustration : la consultation ambulatoire pour familles en difficultés et des violences conjugales de Beauvais (60) ............................... 271Illustration : la consultation thérapeutique familiale pour des violences parentales et sexuelles du CMP de La Garenne-Colombes (92) ........................................................ 279

    Les autres modèles d’organisation familiale à risques violents et incestueux ..................................................................................... 283

    6. LA FORMATION ET LES INTERROGATIONS DES FUTURS CRIMINOLOGUES DES SPIP CONCERNANT LES GROUPES DE PAROLE DES SUJETS VIOLENTS ........................................... 287

    Définition des SPIP ........................................................................... 287Présentation ................................................................................ 287Deux missions............................................................................. 288

    Groupes de parole dans le cadre de la prévention de la récidive des violences intrafamiliales ........................................... 289

    Contexte général du programme de prévention de la récidive (P.P.R.) ........................................................................................ 289La prise en charge des violences intrafamiliales ........................... 289Création d’un groupe de parole SPIP ......................................... 289Modalités concrètes de constitution du groupe de parole ........... 290Animation du groupe de parole SPIP ......................................... 290La formation des personnels du SPIP ......................................... 292Régulation d’équipe – Réflexion sur la pratique des CIP............ 294

  • Les interrogations des conseillers d’insertion C.I.P. œuvrant au sein des SPIP ........................................................................................... 296

    CONCLUSION .................................................................................. 297Repérage et présentation de la violence conjugale ................................ 298Violence transgénérationnelle et la question des enfants exposés aux violences domestiques ........................................................................ 299Lettre de reconnaissance de dettes affectives ......................................... 300

    Postface d’André Mc Kibben................................................................. 307

    ANNEXESI. Rapport Roger Henrion – février 2001.............................................. 310II. Institut National de Santé Publique du Québec – 2004................... 311III. Rapport 2006 de l’O.N.E.D ........................................................... 313IV. Séminaire Francophone de Psychiatrie et Psychologie Légales de Val d’Isère – mars 2003..................................................................... 321V. Bilan statistique de la consultation psychothérapeutique de Beauvais – 2007 .................................................................................... 332VI. Article de presse, extrait de Paris-Match document« Non, être une femme battue n’est pas une fatalité »............................ 334

    BIBLIOGRAPHIE ............................................................................... 341

    Extrait de la publication

  • PRÉFACEde Boris Cyrulnik

    Dans la relation d’emprise, c’est bien simple : l’un des deux, pour son profitou son plaisir, néantise le monde mental de l’autre. S’il néantisait le monde phy-sique de l’autre, nous n’aurions pas de peine à nommer « crime » une telle rela-tion. Mais pour le monde mental, il a fallu de longs débats, pour comprendreque la néantisation du monde mental d’un autre est un crime dont il faut ana-lyser les processus de destruction et de reprise de néo-développement résilient,comme l’a fait Jean-Pierre Vouche.

    La violence conjugale n’est pas apparue hier. Elle existe probablement depuistoujours. Mais dans un contexte écologique, social et relationnel où les rapportsde violence étaient intenses et quotidiens, la violence conjugale était à peinepensée tant elle paraissait banale. Aujourd’hui nous maîtrisons mieux la violenceécologique (famines, habitats, épidémies), nous diminuons la violence sociale(meurtres, sécurité dans la rue, combats régionaux et nationaux), nous désironsfaire disparaître la violence conjugale afin d’apprendre à vivre ensemble avecmoins de souffrance.

    Afin de mieux réaliser ce programme Jean-Pierre Vouche et son équipe réa-lisent des investigations cliniques qui révèlent à quel point, une relation d’em-prise à laquelle nous attachions peu d’importance jusqu’à maintenant, est en faitune véritable destruction mentale, un meurtre d’âme.

    L’évaluation épidémiologique me pose un problème. Elle est nécessaire afind’évaluer l’ampleur du phénomène psychosocial de la maltraitance conjugale,mais elle prend un tel enjeu passionnel que les chiffres des enquêtes sont éton-nement variables, selon les méthodes, les pays et les époques (de moins de 1 %à plus de 50 %). Il est bien évident qu’une telle variation de résultats ne peutêtre attribuable qu’à une naïveté méthodologique ou à une magouille sexistetendant à minorer ou à majorer les chiffres.

    Une enquête réalisée par un questionnaire honnête donne des résultats plusfiables, où l’on découvre que les femmes aussi peuvent être violentes. La majo-rité des femmes battues ne va pas au commissariat. Là encore, les chiffres peu-vent être trafiqués mais, dans l’ensemble, je pense que 5 % ou 6 % des couplessont violents, que les hommes sont responsables de plus trois pour cent desagressions et donc les femmes de moins de deux pour cent. Ces chiffres sonténormes, même s’ils ne correspondent pas à certains délires inflationnistes.

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    Extrait de la publication

  • Mais, ce qui me paraît utile, honnête et nouveau dans ce livre, c’est l’analysepsychologique de la relation d’emprise, et, après des faits de destruction qui tou-chent majoritairement les femmes, que Jean-Pierre Vouche cherche à com-prendre les processus de néo-développement résilient.

    Dans une attitude intellectuelle ouverte, il nous explique que la relationd’emprise est une perversion où le prédateur ne tient compte que de son seulmonde mental, ses pulsions, ses désirs. L’autre, n’existe que sous forme de proieet non pas de personne. Le pervers narcissique n’éprouve pas le plaisir de latransgression puisqu’il n’y a pas de lois qui interdit d’écraser un moustique oude briser un morceau de bois. L’autre existe à peine, on peut donc la violer, labattre, l’isoler, la réduire en esclavage sans aucune culpabilité.

    Cette manière de comprendre la perversion explique pourquoi la victime selaisse si souvent dominer. En fait, elle s’attache au pervers qui, comme tout bonchasseur sait ce qu’il doit faire ou dire pour immobiliser sa proie. Traumatisée,hébétée par la violence de l’homme qu’elle aime encore, elle pardonne souventafin de garder un lien affectueux avec celui qui, auparavant, l’avait séduite. Leprédateur interprète ce désir de maintenir un lien, comme une acceptation desa violence et c’est ainsi que la relation d’emprise donne aux partenaires de laperversion une illusion de complicité.

    Une réflexion sur la résilience permet d’affronter cette situation en termessystémiques : évaluer les ressources de la femme blessée après sa dépersonnali-sation et contrôler l’agresseur en disposant autour de la victime des tuteurs dereprise d’un développement résilient. En praticien expérimenté Jean-PierreVouche propose une série de questionnaires et de conduites à tenir. Un dispo-sitif thérapeutique est proposé au lecteur sous forme de conduites d’entretienset de groupes de parole.

    De nombreuses illustrations cliniques rendent la lecture de ce livre agréableet permettent d’assimiler sans difficulté l’analyse systémique, nécessaire à lacompréhension d’un tel problème.

    Ce livre pour praticiens permet enfin de ne plus dénier le phénomène ni de le majorer dans une guerre sexiste, mais au contraire, de le décrire, d’analy-ser les moyens de destruction de la relation d’emprise et de reprise évolutive résiliente.

    DE L’EMPRISE À LA RÉSILIENCE

  • INTRODUCTION

    Nous abordons le traitement psychologique des auteurs et victimes desviolences conjugales, mais aussi des repérages cliniques des impacts des vio-lences domestiques sur les enfants qui y sont exposés.

    Nous nous penchons dans cet ouvrage sur les mouvements psychiques quiparcourent les familles à transactions violentes. L’attention du clinicien balaieun spectre large allant de l’inconscient du sujet singulier aux espaces psychiquespartagés dans la vie familiale, incluant les rapports à l’histoire familiale et à l’ave-nir. Avenir des violences, avenir des victimes, avenir des témoins, enfants et ado-lescents, et les transformations possibles des auteurs.

    Les violences physiques laissent dans l’ombre les violences psychologiquesqui témoignent de cette relation d’emprise sur l’autre.

    La relation d’emprise est plus le fait du processus d’installation de la vio-lence au sein du couple. Notre regard, en conséquence, doit se focaliser surune analyse processuelle du mode opératoire des sujets violents. Ce processusest enregistré par les témoins de ces violences domestiques, enfants et autresadultes présents. De la résilience de la victime naîtra cette identification rési-liente des enfants.

    Sinon, pour les garçons, le risque est l’identification au père ou beau-pèreagresseur, ou à l’identification compassionnelle à la mère brisée, s’affaissantdevant la force des coups et des humiliations. La ligne de démarcation identifi-catoire sépare la rébellion, le refus de la violence subie par les résilientes, del’autre espace, qui lui, est marqué par l’acceptation de l’oppression pour ledominateur violent. Une métaphore historique et politique nous indique aussiles deux types de postures humaines face à la barbarie et à l’extermination ;l’homme résistant résilient et l’homme acceptant son statut d’esclave, passif etrésigné, hypnotisé, fantôme glissant lentement vers la mort. D’un côté la forcede vie, de l’autre l’abandon à la mort.

    La toile de fond de ces violences conjugales, c’est l’échec de la relationd’amour. Le mirage de l’amour pour des êtres en difficultés identificatoires eten carence narcissique précoce !

    « Si l’emprise n’est pas totale, n’a pas éliminé le corps au seul bénéfice de la tête,la victime conserve une chair réduite aux seules sensations injectées par l’agresseur.Celles-ci constituent un corps étranger fiché dans la chair, dont la victime ne peut se

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    Extrait de la publication

  • défaire, mais surtout, elles sont une source qui impose des sensations exaspérées et desémotions irrépressibles 1. »

    La victime a donc un combat à mener avec la culpabilité. Grâce à elle, la vic-time entrera dans la relation à l’autre, mais après avoir été un nœud central, dela réactivité thérapeutique, elle annoncera un renouveau puisé dans les res-sources de son âme. La restauration symbolique transformera la représentationde soi masquée temporairement par les humiliations, le rabaissement de l’agres-seur, son « meurtre psychique ».

    Faits de société

    Les médias français diffusent en continu les images de reportages des conflitset faits de société, où la violence règne en maître. Alors que les confessions decouples et les révélations morbides ou déviantes étaient auparavant diffusées enfin de soirée, – quand les enfants étaient couchés, ces émissions sont maintenantproposées en « prime-time » ou début de soirée. Accroissement également notabledes reportages et fictions où les forces de l’ordre, tant de police et de gendarmerieque de la justice, et les services de secours, urgentistes et sapeurs-pompiers, nousdévoilent les côtés obscurs de la violence conjugale côtoyée journellement par cesacteurs sociaux. Le héros de premier plan est bien le défenseur du droit, cepen-dant, l’asocial est le deuxième personnage sombre du scénario proposé…

    La violence fascine, semble-t-il ; l’être violent est le personnage obscur ensecond, mais la violence en est bien le sujet principal. Elle génère un bon Audi-mat, le nouveau Dieu de la communication. L’agressivité de bon aloi côtoie ledébordement et l’acte de violence. L’autre n’existe plus en tant que personne, ilest nié, agressé, violé, maltraité, effacé. L’autre est devenu élément de décor,partie du scénario, part abstraite dont la souffrance paraît convenue, non réelle,image cinématographique.

    Les microviolences et l’incivilité se constatent un peu plus chaque jour. Leseuil de tolérance à l’autre diminue inversement à ces accroissements d’agressi-vité. Dans une culture où règnent l’image et la sensorialité qu’elle appelle, lavaleur des représentations et de la pensée s’estompe. Notre œuvre est de rame-ner sur le devant de la scène, pensées et réflexion sur ces phénomènes.

    Cette augmentation notable des faits violents est démontrée dans les diffé-rentes études menées en France depuis les années 90, mais aussi aux États-Unis(année 1992).

    1. Liliane Daligand, « Les violences conjugales », in Le journal des Psychologues, n° 255,mars 2008, page 52.

    DE L’EMPRISE À LA RÉSILIENCE

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  • Ces statistiques, en hausse sensible par rapport aux années précédentes,démontrent ainsi un accroissement notable des faits violents commis dans notresociété. Il est à remarquer, dans ces chiffres alarmants, une heureuse évolution.En effet, si on peut déduire une augmentation des faits par eux-mêmes, forceest de reconnaître une prise de conscience maintenant collective, grâce aux cam-pagnes et textes de lois, et aux associations militantes. Les délégations aux Droitsdes Femmes et à l’Égalité sont très actives pour une sensibilisation et un traite-ment de ces violences domestiques.

    Les victimes osent enfin se déclarer « victimes de violence ».

    La violence conjugale est distincte de la dispute de couple ou de conflit surdes sujets touchant l’organisation familiale. Elle suppose un rapport de force,accompagné d’agressions physiques ou mentales, afin de faire céder l’autre, leplus souvent la femme. Selon l’enquête réalisée en 2000, 9 % des couples viventune situation de violence conjugale. Parmi les causes, l’adultère de la femmedéclenche une agressivité maximale. La vulnérabilité (économique, sociale, psy-chologique) accroît le risque de devenir victime. En réalité, les violences conju-gales sont un des aspects, sans doute le plus caché, de l’ensemble des violencessubies par les femmes. Dans son acception moderne, le concept de violencesconjugales recouvre une réalité multiforme, dont la perception n’est pas tou-jours immédiate, tant pour les auteurs que pour les victimes. Entre tensions,violences et conflits, l’analyse du phénomène s’avère délicate.

    Elle l’est d’autant plus que deux courants antagoniques coexistent : lemodèle psycho-pathologique considère que les violences résultent de com-portements déviants propres à quelques individus dont l’histoire personnelle estgravement perturbée ; l’analyse féministe relie ces violences à la permanencede la domination masculine dans les rapports sociaux de sexe, y compris dansla sphère privée. Toutefois, les tenants des deux approches s’accordent sur plu-sieurs points, dont l’importance des violences privées, et la nécessité de mesu-rer leur ampleur ainsi que de les traiter juridiquement et psychologiquement.

    L’Enquête nationale sur les violences envers les femmes en France(ENVEFF1), réalisée en 2000 à la demande des pouvoirs publics, répond à cesobjectifs. Novatrice à bien des égards, elle permet de cerner le phénomène dansson ampleur et sa complexité. Il est donc important à partir des résultats de cetteenquête, de démêler l’enchevêtrement de tensions, d’affects, et de rapports deforce qui enserrent la relation de couple.

    1. Enquête Nationale sur les Violences Envers les Femmes en France (ENVEFF), réalisée en2000 par des chercheurs du CNRS, de l’INED, de l’Inserm et des Universités.

    INTRODUCTION

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    Extrait de la publication

  • Quelques chiffres significatifs extraits de l’étude récente sur laCriminalité en France menée par l’Observatoire National de

    la Délinquance en 2008 1

    Main courante de la Préfecture de Paris• victimes de violences conjugales légères (2e semestre) ............................. 732

    Violences entre conjoints• décès par homicide volontaire.................................................................. 168• viols ......................................................................................................... 567• violences non mortelles ....................................................................... 40 507• plaintes de femmes ou d’hommes ......................................................... 1 972• viols sur des femmes majeures ............................................................... 2 579• viols conjugal, plaintes ............................................................................. 236

    Chiffres nationaux• violences volontaires sur femmes majeures, de 2004 à 2007............. +31.3 %• violences conjugales à l’encontre des personnes de 15 ans et plus.... + 25.8 %• taux de violence conjugale en France, pour 10 000 femmes,nombre de faits.......................................................................................... 18,7 en tête de ce palmarès, la Seine Saint-Denis, faits pour 10 000 femmes .... 50.1en Creuse, où la sensibilisation et les actions sont plus nombreuses qu’ailleurs, faits pour 10 000 femmes ...........................................................6.1• femmes déposant plainte suite à agression d’un conjoint ........................ 9 %• femmes déposant plainte suite à agression d’un ex-conjoint...................50 %• départements les plus touchés par la violence conjugale : Val d’Oise, Somme,Bouches du Rhône, Pas de Calais, Eure.• régions les moins touchées par la violence conjugale : Bretagne, Côte Atlan-tique, Auvergne, Corse.

    L’enquête nationale sur les violences envers les femmes en France 2

    L’enquête ENVEFF, commanditée par le secrétariat d’État aux Droits desFemmes, est la première – et la seule – enquête statistique nationale réalisée en

    1. Étude sur la criminalité en France, réalisée en 2008 par l’ONED (Observatoire National del’Enfance en Danger).2. ENVEFF, 2000.

    DE L’EMPRISE À LA RÉSILIENCE

    16

  • France sur ce thème. D’où l’impossibilité d’une mise à jour des données de cetteréflexion, sauf partielle. Son objectif était de mesurer pour l’ensemble de la popula-tion, dans ses différents cadres de vie (couple, famille, travail, lieux collectifs), lesdivers types de violences interpersonnelles (verbales, psychologiques, physiques etsexuelles), afin de mieux cerner le phénomène social des violences envers les femmes.

    La collecte des données a été menée en 2000, auprès d’un échantillon repré-sentatif de 6 970 femmes âgées de 20 à 59 ans et résidant, hors institution, enmétropole. Un questionnaire d’une durée moyenne de 45 minutes a été passépar téléphone. Les questions concernant les actes de violence ne viennent qu’àl’issue d’un module recueillant des données contextuelles (caractéristiques fami-liales, économiques, sociales, résidentielles…), ainsi que des éléments biogra-phiques et d’état de santé. Les modules suivants appréhendent les faits deviolence subis pendant les douze derniers mois dans les différents cadres de vie :espaces publics, sphère professionnelle, couple, famille. La dernière partie duquestionnaire mesure les agressions physiques endurées depuis l’âge de 18 anset les agressions sexuelles subies au cours de la vie. Dans les questions, les mots« violence » ou « agression » ne sont pas utilisés ; seuls des « faits » décrits avecprécision, afin de limiter la part de subjectivité des réponses, sont évoqués.

    Au-delà de l’ampleur du phénomène, l’enquête a montré l’importance dusilence accablant les violences privées. Deux résultats ont fait l’objet de débats :la mise en avant de la gravité des violences psychologiques, et l’affirmation quele phénomène touche tous les groupes sociaux. Enfin, un des enseignements del’enquête est que le terme de « femmes battues », couramment utilisé, ne rendpas compte de la réalité des violences conjugales. Dans un contexte social où laviolence physique est prohibée, les violences psychologiques apparaissentcomme une forme moderne de la domination d’un sexe sur l’autre. Cetteenquête a ainsi contribué à changer l’image de la violence conjugale, en mon-trant l’ampleur du harcèlement psychologique, par ailleurs décrit par des clini-ciens (M.-F. Hirigoyen, 1998 et L. Daligand, 2006).

    La presse et les médias s’engagent

    Diane Cambon, Le Figaro, 24 décembre 2008 (extraits)La violence conjugale mine l’Espagne. La pose de bracelets GPS aux marisviolents n’a pas empêché le meurtre de trois épouses. Un échec pour le prési-dent Zapatero. Madrid.

    « Maximo Couto a pu sans trop de mal esquiver les mesures de sécurité pouratteindre sa cible. Début décembre, ce Galicien d’une cinquantaine

    INTRODUCTION

    17

    Extrait de la publication

  • d’années, faisant objet d’une mesure d’éloignement de sa compagne à la suite demauvais traitements et doté d’un bracelet à système de navigation GPS relié auposte de police, a assassiné de quinze coups de couteau son amie. Depuis ce crime,trois autres épouses ont été tuées en Espagne, élevant le nombre de femmes mortessous les coups de leurs compagnons à 69 depuis le début de l’année. C’est presqueautant qu’en 2007, avec 74 femmes décédées.

    « Alors que Madrid multiplie les initiatives pour lutter contre la violence conju-gale, le nombre de femmes tuées par leur conjoint ne parvient pas à baisser. Etpourtant l’Espagne s’est dotée de la législation contre les mauvais traitementsenvers les femmes la plus sévère d’Europe. Approuvée en 2005, la loi chère auPremier ministre socialiste, José-Luis Zapatero, à l’origine d’un ministère de l’É-galité, a permis la création de tribunaux spécialisés et de centres d’attention juri-dique et psychologique pour les victimes. Surtout, plusieurs mesures ont étéadoptées pour renforcer la sécurité des femmes menacées de mort par leur com-pagnon. Un numéro d’attention spéciale fonctionnant 24 heures sur 24 est des-tiné aux femmes menacées. Et, pour les hommes souhaitant “canaliser leuragressivité”, un autre numéro a été mis en place. »

    Failles dans le système de protection

    « La dernière mesure en date est celle du bracelet GPS, dotée d’un budgetde 5 millions d’euros. L’utilisation du bracelet est ordonnée par les juges, puiscontrôlée par la police. Un signal rouge se déclenche sur l’ordinateur du poli-cier lorsque l’homme s’approche de moins de 200 mètres de la femme. Or,depuis la mise en place de ce système de protection, des failles n’ont cessé d’ap-paraître. L’un des principaux points noirs est l’absence de formation des agentsde police pour contrôler le GPS. Ce fut notamment le cas dans l’affaire MaximoCouto. Le gardien du jour a cessé de réviser les alarmes, ne sachant pas com-ment maîtriser le système informatique. »

    Alain Salles, Le Monde, 8 juilllet 2008 (extraits)Les violences conjugales restent de moins en moins dans l’intimité ducouple.

    « En 2007, 47 573 faits de violences volontaires sur des femmes majeures parleurs conjoints (ou ex-conjoints) ont été déclarés à la police ou à la gendarmerie,contre 36 231 en 2004, selon le bulletin de l’Observatoire National de la Délin-quance (OND), publié le mardi 8 juillet 2008. Cette hausse de 31,1 % s’inscritdans le mouvement d’augmentation des actes de violences depuis dix ans. Depuis2004, les violences volontaires contre les personnes ont augmenté de 28 %. Les vio-lences conjugales représentent plus du quart de l’ensemble des violences enregistrées.

    DE L’EMPRISE À LA RÉSILIENCE

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