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Exceptions aux règles de lʹOMC: Exceptions générales, exceptions concernant la sécurité, accords commerciaux régionaux (ACR), balances des paiements et dérogations
MODULE
8
DURÉE ESTIMÉE: 4 heures
OBJECTIFS DU MODULE 8
Expliquer les exceptions générales que les Membres peuvent invoquer aux
termes des Accords de l'OMC et les conditions de leur application;
Présenter les exceptions destinées à la protection des intérêts essentiels de
la sécurité des Membres;
Expliquer les règles relatives à l'intégration régionale énoncées dans les
Accords de l'OMC;
Présenter l'exception et les dérogations concernant la balance des
paiements.
1
I. INTRODUCTION
Comme cela est indiqué dans les modules 1 à 3, les Membres de l'OMC doivent respecter plusieurs obligations
générales énoncées dans l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (GATT de 1994).
Le principe de la nation la plus favorisée (NPF) veut que les Membres ne fassent pas de discrimination entre les
produits importés en provenance des autres Membres. Le principe du traitement national veut que les
Membres ne fassent pas de discrimination entre les produits importés et les produits nationaux. S'agissant de
l'accès aux marchés pour les marchandises, les Membres sont tenus d'agir en conformité avec les
engagements tarifaires qu'ils ont inscrits dans leurs Listes et de ne pas appliquer des droits de douane
supérieurs aux niveaux "consolidés", à moins que ceux-ci ne soient renégociés. En outre, les Membres ne sont
généralement pas autorisés à imposer des restrictions quantitatives à l'accès aux marchés pour les
marchandises. Ils sont en outre tenus de faire en sorte que les obstacles non tarifaires (ONT) (tels que les
formalités douanières) ne constituent pas des obstacles non nécessaires au commerce.
Toutefois, dans certaines circonstances, les Membres de l'OMC peuvent déroger à ces obligations, pour
autant qu'ils respectent certaines conditions. Ces exceptions, qui sont examinées dans ce module, sont
les suivantes:
Exceptions générales – droit de prendre les mesures nécessaires, par exemple, à la protection de
la santé et de la vie des personnes et des animaux ou à la préservation des végétaux, qui peuvent
restreindre le commerce des marchandises (GATT de 1994). De telles mesures ne peuvent pas
constituer soit un moyen de discrimination arbitraire ou injustifiable entre les pays où les mêmes
conditions existent, soit une restriction déguisée au commerce international. Des exceptions
générales analogues s'appliquent aussi au commerce des services (Accord général sur le commerce
des services (AGCS)), alors qu'il n'y a pas d'exceptions générales en tant que telles dans l'Accord sur
les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (Accord sur les ADPIC);
Exceptions concernant la sécurité – droit de prendre les mesures nécessaires à la protection des
intérêts essentiels de la sécurité nationale qui peuvent restreindre le commerce des marchandises
(GATT de 1994). Des exceptions analogues sont prévues dans l'AGCS et l'Accord sur les ADPIC;
Exceptions pour les accords commerciaux régionaux (ACR) – droit de déroger au principe NPF
afin d'accorder un traitement préférentiel aux marchandises (GATT de 1994) ou aux fournisseurs de
services (AGCS) des partenaires commerciaux au sein d'une union douanière ou d'une zone de
libre-échange sans accorder ce traitement à tous les Membres de l'OMC;
Exceptions concernant la balance des paiements – droit de prendre des mesures pour
sauvegarder la position financière extérieure d'un Membre et l'équilibre de sa balance des paiements;
et
Dérogations – dérogations temporaires accordées avec l'autorisation des autres Membres, dans des
circonstances exceptionnelles.
EXCEPTIONS ARTICLES
Exceptions générales Article XX du GATT de
1994
Article XIV de l'AGCS L'Accord sur les ADPIC ne
contient aucune
disposition prévoyant des
exceptions générales.
Exceptions concernant
la sécurité
Article XXI du GATT de
1994
Article XIVbis de l'AGCS Article 73 de l'Accord sur
les ADPIC
ACR Article XXIV du GATT de
1994; et
"Mémorandum d'accord sur
l'interprétation de
l'article XXIV du GATT de
1994"
Paragraphe 2 c) de la
Clause d'habilitation*
Article V de l'AGCS L'Accord sur les ADPIC ne
contient aucune
disposition concernant les
ACR.
Balance des paiements Articles XII & XVIII:B du
GATT de 1994; et
"Mémorandum d'accord sur
les dispositions du GATT de
1994 relatives à la balance
des paiements"
Article XII de l'AGCS L'Accord sur les ADPIC ne
contient aucune
disposition relative à la
balance des paiements.
Dérogations Article IX:3 de l'Accord de Marrakech instituant l'OMC
(Accord sur l'OMC)
En outre, les Membres sont autorisés à appliquer des mécanismes de défense commerciale – voir le
module 5 – pour remédier à une situation de concurrence déloyale (mesures antidumping et mesures
compensatoires) ou à une poussée des importations (mesures de sauvegarde) lorsque celles-ci causent un
dommage, à certaines conditions. Même si ces mesures ne sont pas qualifiées d'exceptions, elles permettent
aux Membres d'imposer, par exemple, des droits de douane supérieurs aux niveaux consolidés ou des
restrictions quantitatives (selon la mesure).
Dans le module 9, nous présenterons les règles relatives au traitement spécial et différencié en faveur des
pays en développement et des pays les moins avancés (PMA) Membres de l'OMC, qui tiennent compte des
difficultés particulières auxquelles ces pays peuvent être confrontés dans la mise en œuvre des Accords de
l'OMC.
* Le paragraphe 2 c) de la Décision de 1979 sur le traitement différencié et plus favorable, la réciprocité et la
participation plus complète des pays en voie de développement (la "Clause d'habilitation") autorise les pays en
développement Membres de l'OMC à conclure entre eux des ACR sur le commerce de marchandises.
3
II. EXCEPTIONS GÉNÉRALES
EN BREF
L'article XX du GATT de 1994 régit le recours aux exceptions générales pour le commerce des
marchandises. Il reconnaît que les Membres peuvent avoir besoin d'appliquer des mesures à des
fins telles que la protection de la moralité publique, la protection de la santé et de la vie des
personnes et des animaux ou la préservation des végétaux, et la conservation des ressources
naturelles épuisables.
Cependant, toute mesure adoptée au titre de la disposition relative aux exceptions générales doit
satisfaire aux conditions énoncées dans les alinéas de l'article XX – selon l'objectif de la mesure –
et dans son "texte introductif". Aux termes du texte introductif de l'article XX, la mesure ne doit pas
être appliquée de façon à constituer soit un moyen de discrimination arbitraire ou injustifiable entre les
pays où les mêmes conditions existent, soit une restriction déguisée au commerce international.
II.A. EXCEPTIONS GÉNÉRALES ÉNONCÉES DANS LʹACCORD GÉNÉRAL SUR LES TARIFS DOUANIERS ET LE COMMERCE (GATT) DE 1994
L'article XX du GATT de 1994 permet aux Membres de prendre certaines mesures, par ailleurs interdites par
d'autres dispositions du GATT de 1994, sous réserve des conditions stipulées. Son but est de faire en sorte
que les engagements contractés par les Membres dans le cadre des accords visés n'entravent pas la réalisation
d'objectifs légitimes, comme la protection de la santé ou de la vie des personnes et des animaux ou la
préservation des végétaux ou encore la conservation des ressources naturelles épuisables. En outre, les
mesures prises au titre de l'article XX doivent être appliquées par les Membres d'une manière qui soit
compatible avec le texte introductif dudit article.
À cet égard, l'Organe d'appel a indiqué dans son rapport que les exceptions énumérées à l'article XX
– alinéas a) à j) – se rapportent à toutes les obligations découlant du GATT de 1994 (et pas
seulement aux principes du traitement de la nation la plus favorisée et du traitement national) (États-Unis –
Essence, rapport de l'Organe d'appel, page 27; États-Unis – Crevettes, rapport de l'Organe d'appel,
paragraphe 121).
NOTE
Un résumé de l'affaire États-Unis – Essence figure à la fin de cette section.
II.A.1. STRUCTURE DE LʹARTICLE XX – DOUBLE CRITÈRE
Article XX du GATT de 1994: double critère
Pour être justifiée au regard de l'article XX, une mesure incompatible avec le GATT de 1994 doit satisfaire
à un double critère:
la mesure doit relever de l'une des exceptions énoncées aux alinéas a) à j) de l'article XX
– chaque alinéa a trait à des objectifs différents et contient des conditions différentes; et
la mesure doit être appliquée de manière à satisfaire aux conditions du texte introductif de
l'article XX.
(États-Unis – Essence, rapport de l'Organe d'appel, page 25).
L'ordre d'examen ne peut pas être inversé parce qu'il dénote la structure et la logique fondamentales de
l'article XX du GATT de 1994 (États-Unis – Crevettes, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 119). Ainsi,
lorsqu'ils évaluent une allégation présentée au titre de l'article XX, les groupes spéciaux devraient toujours
commencer l'analyse par l'exception particulière invoquée par une partie (alinéa(s)) et c'est seulement après
avoir constaté que la mesure en cause relève bien de l'exception ou des exceptions invoquée(s), qu'ils doivent
se demander si l'application de la mesure satisfait aux conditions du texte introductif (CE – Amiante, rapport
du Groupe spécial, paragraphe 6.20; États-Unis – Crevettes (article 21:5), rapport du Groupe spécial,
paragraphes 5.27 et 5.28).
II.A.2. APPLICATION ET INTERPRÉTATION DES EXCEPTIONS – ARTICLE XX B), D) ET G)
Comme cela est dit dans le rapport de l'Organe d'appel, les alinéas a) à j) concernent les mesures qui
constituent des exceptions aux obligations de fond établies par le GATT de 1994 parce que les politiques
internes incorporées dans ces mesures ont été reconnues comme ayant un caractère important et légitime
(États-Unis – Crevettes, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 121). Les Membres de l'OMC ont invoqué les
exceptions prévues à l'article XX pour justifier des politiques visant, entre autres, à protéger la santé et la vie
des personnes et des animaux ou à préserver les végétaux (alinéa b)), à assurer le respect des lois et
règlements (alinéa d)) et à conserver les ressources naturelles épuisables (alinéa g)). La jurisprudence dans le
cadre du GATT de 1994/de l'OMC a défini des critères pour l'interprétation de ces alinéas. Notre étude de
l'article XX portera sur les exceptions prévues aux alinéas b), d) et g).
Dans son rapport, l'Organe d'appel a statué que, en vertu du GATT de 1994, un Membre de l'OMC a la faculté
de fixer les objectifs en matière de santé publique ou d'environnement qu'il veut atteindre (États-Unis –
Essence, rapport du Groupe spécial, paragraphe 7.1; rapport de l'Organe d'appel, page 30); ainsi que le
niveau de protection qu'il veut obtenir au moyen de la politique qu'il décide d'adopter (CE – Amiante, rapport
de l'Organe d'appel, paragraphe 168; Brésil – Pneumatiques rechapés, rapport de l'Organe d'appel,
paragraphe 140). Toutefois, les Membres sont tenus de réaliser ces objectifs au moyen de mesures
compatibles avec les prescriptions de l'article XX du GATT de 1994.
5
En général, l'application des exceptions prévues à l'article XX comporte deux étapes (avant
l'évaluation au regard du texte introductif):
a) Identifier si la politique poursuivie au moyen de la mesure entre dans le cadre des
politiques prévues aux alinéas a) à j) de l'article XX, visant, par exemple, à protéger la santé et la
vie des personnes et des animaux ou à préserver les végétaux (XX b)), à assurer le respect des lois et
des règlements qui ne sont pas incompatibles avec les dispositions du GATT de 1994 (XX d)) ou à
conserver les ressources naturelles épuisables (XX d)) (voir aussi l'encadré ci-dessous).
Article XX du GATT de 1994: Exceptions générales
Sous réserve que ces mesures ne soient pas appliquées de façon à constituer soit un moyen de
discrimination arbitraire ou injustifiable entre les pays où les mêmes conditions existent, soit une restriction
déguisée au commerce international, rien dans le présent Accord ne sera interprété comme empêchant
l'adoption ou l'application par toute partie contractante des mesures:
a) nécessaires à la protection de la moralité publique;
b) nécessaires à la protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou à la
préservation des végétaux;
c) se rapportant à l'importation ou à l'exportation de l'or ou de l'argent;
d) nécessaires pour assurer le respect des lois et règlements qui ne sont pas incompatibles avec les
dispositions du présent Accord, tels que, par exemple, les lois et règlements qui ont trait à
l'application des mesures douanières, au maintien en vigueur des monopoles administrés
conformément au paragraphe 4 de l'article II et à l'article XVII, à la protection des brevets,
marques de fabrique et droits d'auteur et de reproduction et aux mesures propres à empêcher les
pratiques de nature à induire en erreur;
e) se rapportant aux articles fabriqués dans les prisons;
f) imposées pour la protection de trésors nationaux ayant une valeur artistique, historique ou
archéologique;
g) se rapportant à la conservation des ressources naturelles épuisables, si de telles mesures sont
appliquées conjointement avec des restrictions à la production ou à la consommation nationales;
h) prises en exécution d'engagements contractés en vertu d'un accord intergouvernemental sur un
produit de base qui est conforme aux critères soumis aux PARTIES CONTRACTANTES et non
désapprouvés par elles ou qui est lui-même soumis aux PARTIES CONTRACTANTES et n'est pas
désapprouvé par elles; et
i) comportant des restrictions à l'exportation de matières premières produites à l'intérieur du pays
et nécessaires pour assurer à une industrie nationale de transformation les quantités essentielles
desdites matières premières pendant les périodes où le prix national en est maintenu au-dessous
du prix mondial en exécution d'un plan gouvernemental de stabilisation, sous réserve que ces
restrictions n'aient pas pour effet d'accroître les exportations ou de renforcer la protection
accordée à cette industrie nationale et n'aillent pas à l'encontre des dispositions du présent Accord
relatives à la non-discrimination; et
j) essentielles à l'acquisition ou à la répartition de produits pour lesquels se fait sentir une pénurie
générale ou locale; toutefois, lesdites mesures devront être compatibles avec le principe selon
lequel toutes les parties contractantes ont droit à une part équitable de l'approvisionnement
international de ces produits, et les mesures qui sont incompatibles avec les autres dispositions
du présent Accord seront supprimées dès que les circonstances qui les ont motivées auront cessé
d'exister. Les PARTIES CONTRACTANTES examineront, le 30 juin 1960 au plus tard, s'il est
nécessaire de maintenir la disposition du présent alinéa.
b) Déterminer si les éléments juridiques de l'alinéa pertinent sont respectés. Cet examen
porte, par exemple, sur le "critère de la nécessité" pour les alinéas b) et d) et sur le point
de savoir si une mesure "se rapporte à" pour l'alinéa g).
TEXTE JURIDIQUE ÉLÉMENTS JURIDIQUES
Article XX b): nécessaires à la
protection de la santé et de la vie
des personnes et des animaux ou
à la préservation des végétaux
1) la politique dans laquelle s'inscrivent les mesures pour
lesquelles la disposition est invoquée entre dans la catégorie
des politiques destinées à protéger la santé et la vie des
personnes et des animaux ou à préserver les végétaux;
et
2) les mesures incompatibles pour lesquelles l'exception est
invoquée sont "nécessaires" pour atteindre l'objectif de ladite
politique.
(États-Unis – Essence, rapport du Groupe spécial,
paragraphe 6.20)
Article XX d): nécessaires pour
assurer le respect des lois et
règlements qui ne sont pas
incompatibles avec les
dispositions du présent accord,
tels que par exemple (…)
1) la mesure doit viser à assurer le respect des lois et
règlements qui ne sont pas en soi incompatibles avec
certaines dispositions du GATT de 1994; et
2) la mesure doit être "nécessaire" pour assurer ce respect.
(Corée – Bœuf, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 157)
Article XX g): se rapportant à la
conservation des ressources
naturelles épuisables, si de telles
mesures sont appliquées
conjointement avec des
restrictions à la production ou à la
consommation nationales
1) la mesure concerne la conservation des ressources
naturelles épuisables;
2) la mesure "se rapporte à" la conservation des ressources
naturelles épuisables; et
3) la mesure est appliquée conjointement avec des
restrictions à la production ou à la consommation
nationales.
(États-Unis – Crevettes, rapport de l'Organe d'appel,
paragraphes 127, 135, 143 à 145)
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a IDENTIFICATION DE LA POLITIQUE POURSUIVIE AU MOYEN DE LA MESURE
1. PROTECTION DE LA SANTÉ ET DE LA VIE DES PERSONNES ET DES ANIMAUX OU
PRÉSERVATION DES VÉGÉTAUX – ARTICLE XX B)
Dans plusieurs affaires, les Groupes spéciaux et l'Organe d'appel ont déterminé que certaines mesures
entraient dans la catégorie des politiques destinées à protéger la santé et la vie des personnes et des animaux
ou à préserver les végétaux; quelques exemples sont donnés dans l'encadré suivant.
Exemples de mesures relevant de l'article XX b) du GATT de 1994
Dans l'affaire Thaïlande – Cigarettes, le Groupe spécial du GATT a admis que:
"l'usage du tabac constituait un risque sérieux pour la santé des personnes et qu'en conséquence,
les mesures destinées à réduire la consommation de cigarettes entraient dans le champ
d'application de l'article XX b)" (Thaïlande – Cigarettes, rapport du Groupe spécial du GATT,
paragraphe 73).
Dans les deux différends concernant le thon, le Groupe spécial du GATT et les parties ont admis
– implicitement dans l'affaire États-Unis – Thon (Mexique), explicitement dans l'affaire États-Unis – Thon
(Communauté économique européenne (CEE)) que:
la protection de la vie et de la santé des dauphins était une politique qui pouvait relever de
l'article XX b) (États-Unis – Thon (Mexique), rapport du Groupe spécial du GATT, non adopté,
paragraphes 5.24 à 5.29; États-Unis – Thon (CEE), rapport du Groupe spécial du GATT, non
adopté, paragraphe 5.30).
Dans l'affaire États-Unis – Essence, le Groupe spécial et les parties sont convenus qu':
"une mesure destinée à réduire la pollution de l'air résultant de la consommation d'essence entrait
dans la catégorie des mesures concernant la protection de la santé et de la vie des personnes et
des animaux ou la préservation des végétaux mentionnées à l'article XX b)" (États-Unis – Essence,
rapport du Groupe spécial, paragraphe 6.21).
Dans l'affaire CE – Amiante, le Groupe spécial a constaté et l'Organe d'appel a ensuite confirmé que:
"les produits en chrysotile-ciment présentaient un risque pour la santé des personnes" si bien que
"la politique d'interdiction de l'amiante chrysotile mise en œuvre par les CE rentrait dans la
catégorie des politiques destinées à protéger la vie et la santé des personnes" (CE – Amiante,
rapport du Groupe spécial, paragraphes 8.186, 8.193 et 8.194; rapport de l'Organe d'appel,
paragraphe 162).
Dans l'affaire Brésil – Pneumatiques rechapés, le Groupe spécial a constaté et l'Organe d'appel a ensuite
confirmé que:
la politique du Brésil qui était de réduire l'exposition aux risques pour la santé et la vie des
personnes et des animaux et la préservation des végétaux découlant de l'accumulation de
pneumatiques de rebut relevait de l'éventail des politiques visées par l'article XX b) (Brésil –
Pneumatiques rechapés, rapport du Groupe spécial, paragraphe 7.115; rapport de l'Organe
d'appel, paragraphe 134).
2. ASSURER LE RESPECT DES LOIS ET RÉGLEMENTS QUI NE SONT PAS INCOMPATIBLES AVEC
LES DISPOSITIONS DU GATT DE 1994 – ARTICLE XX D)
Pour qu'une mesure entre dans la catégorie des politiques visées par l'article XX d), elle doit être destinée à
assurer le respect des lois et règlements qui ne sont pas incompatibles avec les dispositions du GATT de 1994.
Dans l'affaire CEE – Pièces détachées et composants, un groupe spécial du GATT a interprété l'expression
"assurer le respect" des lois et règlements comme signifiant "faire exécuter les obligations découlant des lois
et règlements" (paragraphe 5.17). L'Organe d'appel a ensuite précisé que l'on peut dire qu'une mesure est
destinée à "assurer le respect" quand elle est appropriée ou capable d'assurer le respect des lois et règlements
pertinents, même s'il n'est pas possible de garantir qu'elle atteindra son résultat avec une certitude absolue.
L'Organe d'appel a noté en outre que le ''recours à la coercition'' n'est pas un élément nécessaire de la mesure
(Mexique – Taxes sur les boissons sans alcool, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 74).
S'agissant de l'expression ''lois et règlements'', l'Organe d'appel a indiqué que l'utilisation des mots "tels
que, par exemple" indiquait clairement que l'article XX d) était susceptible d'application au titre d'un très grand
nombre de lois et règlements à appliquer (Corée – Bœuf, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 162). Cette
expression couvre les règles qui font partie du système juridique intérieur d'un Membre de l'OMC, y compris les
"règles découlant des accords internationaux qui ont été incorporés dans le système juridique intérieur d'un
Membre de l'OMC ou qui ont un effet direct selon le système juridique de ce Membre" (Mexique – Taxes sur les
boissons sans alcool, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 79).
3 CONSERVATION DES RESSOURCES NATURELLES ÉPUISABLES – ARTICLE XX G)
L'article XX g) concerne des mesures prises en vue de la conservation des ressources naturelles épuisables.
Dans l'affaire États-Unis – Crevettes, l'Organe d'appel a estimé que le texte de l'article XX g) ne se limitait
pas à la conservation des ressources naturelles "minérales" ou "non vivantes" mais visait aussi les
espèces vivantes, qui sont en principe "renouvelables", mais peuvent dans certaines circonstances se
raréfier, s'épuiser ou disparaître, bien souvent à cause des activités humaines (États-Unis – Crevettes, rapport
de l'Organe d'appel, paragraphe 128).
Exemples de mesures relevant de l'article XX g) du GATT de 1994
Dans plusieurs affaires portées devant le GATT/l'OMC, il a été constaté que diverses mesures entraient
dans la catégorie des politiques visées par l'article XX g), y compris celles visant à préserver: le thon
(États-Unis –Thon canadien, rapport du Groupe spécial du GATT, paragraphe 4.9); les stocks de
saumon et de hareng (Canada – Hareng et saumon, rapport du Groupe spécial du GATT,
paragraphe 4.4); les dauphins (États-Unis – Thon (CEE), rapport du Groupe spécial du GATT, non
adopté, paragraphe 5.13); l'air pur (États-Unis – Essence, rapport du Groupe spécial, paragraphe 6.37);
et les tortues marines (États-Unis – Crevettes, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 134).
b PRESCRIPTIONS SPÉCIFIQUES AU TITRE DE LʹARTICLE XX B), D) ET G)
Des termes différents sont utilisés pour les différentes catégories de mesures décrites aux alinéas a) à i) de
l'article XX. Selon l'Organe d'appel, l'utilisation de termes différents tient au différent type ou degré de
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lien ou relation entre la mesure considérée et l'intérêt ou la politique que l'on cherche à promouvoir
ou à réaliser (États-Unis – Essence, rapport de l'Organe d'appel, pages 19 et 20).
1. "CRITÈRE DE LA NÉCESSITÉ" AU SENS DE L'ARTICLE XX B) ET D) – PROCESSUS
CONSISTANT À SOUPESER ET METTRE EN BALANCE
Les alinéas b) et d) de l'article XX énoncent un "critère de nécessité": les mesures en cause doivent être
nécessaires "à la protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou à la préservation des
végétaux" (alinéa b)) ou pour "assurer le respect des lois et règlements" (alinéa d)). Dans l'affaire Thaïlande –
Cigarettes, le Groupe spécial a conclu que le terme "nécessaire" a le même sens aux alinéas b) et d)
(Thaïlande – Cigarettes, rapport du Groupe spécial du GATT, paragraphe 74).
Le sens ordinaire du mot "nécessaire" a été précisé dans l'affaire Corée – Bœuf, où l'Organe d'appel a indiqué
que la portée de ce mot n'est pas limitée à ce qui est "indispensable", "d'une nécessité absolue" ou
"inévitable". Le terme "nécessaire" désigne des nécessités d'ordre différent. À une extrémité du champ
sémantique, on trouve "nécessaire" dans le sens d'"indispensable"; à l'autre extrémité, on trouve "nécessaire"
pris dans le sens de "favoriser". Dans ce champ sémantique, une mesure "nécessaire" se situe beaucoup plus
près du pôle "indispensable" que du pôle opposé "favoriser" (Corée – Bœuf, rapport de l'Organe d'appel,
paragraphe 161). L'Organe d'appel a en outre expliqué que pour déterminer si une mesure est "nécessaire" au
sens de l'article XX d), ''il faut dans chaque cas soupeser et mettre en balance une série de facteurs'' (Corée –
Bœuf, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 164) (voir l'encadré ci-dessous).
Le "critère de la nécessité" au sens des alinéas a), b) et d) de l'article XX du GATT de 1994
Le "critère de la nécessité" consiste à soupeser et mettre en balance une série de facteurs pertinents,
en particulier:
la contribution de la mesure à la réalisation de son objectif;
l'importance des intérêts ou des valeurs en jeu;
le caractère restrictif de la mesure pour le commerce.
(Brésil – Pneumatiques rechapés, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 178)
En outre, il faut comparer la mesure avec les solutions de rechange possibles et disponibles, qui
peuvent être moins restrictives pour le commerce tout en apportant une contribution équivalente à la
réalisation de l'objectif poursuivi (Brésil – Pneumatiques rechapés, rapport de l'Organe d'appel,
paragraphe 156).
Le fait de soupeser et mettre en balance est une opération globale qui consiste à rassembler toutes les
variables de l'équation et à les évaluer les unes par rapport aux autres après les avoir examinées une par une,
afin de parvenir à un jugement global (Brésil – Pneumatiques rechapés, rapport de l'Organe d'appel,
paragraphe 182).
L'Organe d'appel a expliqué qu'une contribution existe "lorsqu'il y a une véritable relation entre l'objectif
poursuivi et la mesure en cause pour ce qui est de la fin et des moyens" (Brésil – Pneumatiques rechapés,
rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 210). La contribution ne doit pas être "marginale ou insignifiante"; la
mesure doit être "à même d'apporter une contribution importante à la réalisation de son objectif" (Brésil –
Pneumatiques rechapés, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 150).
L'Organe d'appel a observé que plus l'intérêt commun ou les valeurs poursuivis étaient vitaux ou importants,
plus il serait facile d'admettre la "nécessité" d'une mesure destinée à atteindre ces objectifs (Corée – Bœuf,
rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 162). À cet égard, l'Organe d'appel a noté que la préservation de la
vie et de la santé des personnes est d'une valeur à la fois "vitale" et "importante au plus haut point"
(CE - Amiante, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 172).
2. QU'IMPLIQUE L'ANALYSE DES "SOLUTIONS DE RECHANGE POSSIBLES ET DISPONIBLES"? –
ARTICLE XX B) ET D)
Pour être considérée comme une solution de rechange, une mesure doit non seulement être moins
restrictive pour le commerce que la mesure en cause, mais aussi "préserver le droit du Membre
défendeur d'assurer le niveau de protection qu'il souhaite pour ce qui est de l'objectif poursuivi"
(États-Unis – Jeux, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 308).
L'Organe d'appel a observé qu'un aspect important de la détermination sur le point de savoir si une mesure de
rechange compatible avec les règles de l'OMC est "raisonnablement disponible" est la mesure suivant laquelle
elle favorise la réalisation de l'objectif poursuivi (Corée – Bœuf, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 166).
En outre, une mesure de rechange qu'il est impossible d'appliquer n'est pas une mesure de rechange
"raisonnablement disponible". Dans l'affaire États-Unis – Jeux, l'Organe d'appel a indiqué qu'il peut être
constaté qu'une mesure de rechange n'est pas "raisonnablement disponible" "lorsqu'elle est de nature
purement théorique, par exemple, lorsque le Membre défendeur n'est pas capable de l'adopter ou lorsque la
mesure impose une charge indue à ce Membre, par exemple des coûts prohibitifs ou des difficultés techniques
substantielles" (États-Unis – Jeux, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 308).
3. ''SE RAPPORTANT À ...'' ET ''... APPLIQUÉE CONJOINTEMENT AVEC DES RESTRICTIONS À LA
PRODUCTION OU À LA CONSOMMATION NATIONALES'' AU SENS DE L'ARTICLE XX G)
''Se rapportant à ...''
L'article XX g) exige que la mesure qu'on cherche à justifier soit une mesure "se rapportant à" la conservation
des ressources naturelles épuisables. Cette expression impose un critère moins rigoureux que
l'expression "nécessaire pour" (autrement dit, le "critère de la nécessité" est plus difficile à démontrer).
Pour établir cette détermination, l'Organe d'appel étudie essentiellement la relation entre la mesure en cause
et la politique légitime de conservation des ressources naturelles épuisables. En particulier, l'Organe d'appel a
indiqué qu'une mesure serait considérée comme "se rapportant à la conservation des ressources naturelles
épuisables" si elle avait une "relation substantielle" avec la conservation des ressources naturelles épuisables
et n'y visait pas qu'"incidemment ou accidentellement" (États-Unis – Essence, rapport de l'Organe d'appel,
page 21). Le fait que la portée et l'étendue de la mesure ne sont pas excessives au regard de l'objectif de
protection et de conservation des ressources naturelles épuisables corroborerait la constatation selon laquelle
la relation fin/moyens qui existe entre la mesure en cause et l'objectif poursuivi est une relation étroite et
réelle (États-Unis – Crevettes, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 141).
"… appliquée conjointement avec des restrictions à la production ou à la consommation nationales"
L'article XX g) contient une condition supplémentaire, à savoir que la mesure en cause doit être "appliquée
conjointement avec des restrictions à la production ou à la consommation nationales". Selon l'Organe d'appel,
cette condition signifie que les mesures concernées doivent imposer des restrictions non seulement pour les
produits importés en question mais aussi pour les produits nationaux en question. Cette obligation
d'impartialité ne signifie pas nécessairement le traitement identique des produits nationaux et des produits
11
importés en question. La clause "si de telles mesures sont appliquées conjointement avec des restrictions à la
production ou à la consommation nationales" n'est pas destinée à établir un "critère fondé sur les effets"
empirique pour déterminer s'il est possible de se prévaloir de l'exception énoncée à l'article XX g) (États-Unis –
Essence, rapport de l'Organe d'appel, page 24).
II.A.3. INTERPRÉTATION ET APPLICATION DE LʹARTICLE XX – TEXTE INTRODUCTIF
Dès lors qu'une mesure satisfait aux conditions fixées par un ou plusieurs des alinéas de l'article XX, le groupe
spécial ou l'Organe d'appel examinera l'application du texte introductif de l'article XX. Le texte introductif
exige que, pour être justifiées au regard d'un des alinéas de l'article XX, les mesures ne doivent pas être
"appliquées de façon à constituer soit un moyen de discrimination arbitraire ou injustifiable entre les pays où
les mêmes conditions existent, soit une restriction déguisée au commerce international".
Texte introductif de l'article XX du GATT de 1994
Le texte introductif de l'article XX exige que les mesures couvertes par une exception ne soient pas
administrées de façon à constituer:
1. une discrimination arbitraire entre les pays où les mêmes conditions existent;
2. une discrimination injustifiable entre les pays où les mêmes conditions existent; ou
3. une restriction déguisée au commerce international.
(États-Unis – Crevettes, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 150)
Dans l'affaire États-Unis – Essence, l'Organe d'appel a estimé que les expressions "discrimination arbitraire",
"discrimination injustifiable" et "restriction déguisée" au commerce international peuvent se lire parallèlement;
chacune influe sur le sens des autres (États-Unis – Essence, rapport de l'Organe d'appel, page 28).
Le but et l'objet du texte introductif sont généralement de prévenir l'abus des exceptions énumérées à
l'article XX. En outre, le texte introductif s'applique expressément non pas tant à la mesure en cause ou à sa
teneur spécifique proprement dite, mais plutôt à la manière dont la mesure est appliquée. Le texte introductif
sert à garantir que le droit des Membres de se prévaloir d'exceptions est exercé de bonne foi pour protéger des
intérêts jugés légitimes au sens de l'article XX, et non comme un moyen de contourner les obligations d'un
Membre à l'égard des autres Membres de l'OMC (Brésil – Pneumatiques rechapés, rapport de l'Organe d'appel,
paragraphe 215).
a UNE ʺDISCRIMINATION ARBITRAIRE OU INJUSTIFIABLE ENTRE LES PAYS OÙ LES
MÊMES CONDITIONS EXISTENTʺ
Pour qu'une mesure soit appliquée de façon à constituer "une discrimination arbitraire ou injustifiable entre les
pays où les mêmes conditions existent", il faut trois éléments. Premièrement, l'application de la mesure doit
entraîner une discrimination. Deuxièmement, la discrimination doit être de nature arbitraire ou injustifiable.
Troisièmement, cette discrimination doit se produire entre les pays où les mêmes conditions existent
(États-Unis – Crevettes, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 150).
Concernant la prescription relative à la discrimination, l'Organe d'appel a déclaré que, de par sa nature et sa
qualité, cette discrimination ne peut pas, logiquement, se référer aux mêmes critères que ceux utilisés pour
déterminer qu'il y a eu violation d'une obligation de fond du GATT de 1994 (par exemple au regard de
l'article Ier – principe NPF – ou de l'article III – principe du traitement national – du GATT de 1994). La
question de savoir s'il y avait une incompatibilité avec une règle de fond diffère de la question soulevée au titre
du texte introductif de l'article XX, qui était de savoir si cette incompatibilité était néanmoins justifiée
(États-Unis – Essence, rapport de l'Organe d'appel, pages 26 et 27).
S'agissant du membre de phrase "entre les pays où les mêmes conditions existent", l'Organe d'appel a
constaté que la notion de discrimination au sens du texte introductif de l'article XX renvoie aux conditions qui
existaient dans les pays importateurs et exportateurs (discrimination entre les pays étrangers, d'une part, et le
pays d'origine de l'autre) ou seulement aux conditions qui existaient dans divers pays exportateurs (États-Unis
– Crevettes, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 150).
Dans l'affaire Brésil – Pneumatiques rechapés, l'Organe d'appel a indiqué que pour analyser si l'application
d'une mesure donne lieu à une discrimination arbitraire ou injustifiable, il faut procéder à une analyse qui porte
essentiellement sur la cause ou la raison d'être de la discrimination (Brésil – Pneumatiques rechapés, rapport
de l'Organe d'appel, paragraphe 225). En outre, il a estimé qu'il y a discrimination arbitraire ou injustifiable
lorsque les raisons données quant à cette discrimination n'ont pas de lien rationnel avec l'objectif relevant d'un
alinéa de l'article XX, ou iraient à l'encontre de cet objectif (Brésil – Pneumatiques rechapés, rapport de
l'Organe d'appel, paragraphes 226 à 230). Les effets de la discrimination pourraient être pertinents mais ne
sont pas le facteur déterminant.
Exemple: Constatation concernant la "discrimination arbitraire ou injustifiable" – affaire
États-Unis – Crevettes
Dans l'affaire États-Unis – Crevettes, les États-Unis ont imposé une interdiction d'importer des crevettes ou
des produits à base de crevettes en vertu de l'article 609, à l'exception de ceux obtenus, soit dans des
conditions qui n'affectaient pas les tortues marines, soit dans les eaux relevant de la juridiction d'un pays
actuellement certifié au titre de l'article 609. L'Organe d'appel a constaté que la mesure "se rapportait à" la
conservation des ressources naturelles épuisables et relevait donc de l'article XX g). Toutefois, en vérifiant
si la mesure des États-Unis satisfaisait aux prescriptions du texte introductif de l'article XX, l'Organe
d'appel a constaté, dans son rapport, que l'interdiction constituait une discrimination "arbitraire"
et "injustifiable". Dans sa constatation de l'existence d'une discrimination "injustifiable" (question de
savoir si la mesure en cause établissait une discrimination entre les pays qui avaient été certifiés et, par
conséquent, avaient le droit d'exporter des crevettes aux États-Unis, et les pays non certifiés qui étaient
visés par l'interdiction d'importer), l'Organe d'appel a relevé les omissions suivantes:
1. Le fait que les États-Unis n'avaient pas engagé de négociations générales sérieuses – les
États-Unis n'avaient pas engagé de négociations sérieuses avec tous les autres Membres qui expédiaient
des crevettes vers leur marché dans le but de conclure des accords bilatéraux ou multilatéraux pour la
protection et la conservation des tortues marines. Avant de mettre l'interdiction d'importer à exécution, les
États-Unis avaient négocié avec certains Membres, mais pas avec d'autres (États-Unis – Crevettes, rapport
de l'Organe d'appel, paragraphes 166 à 172). L'obligation de mener des négociations sérieuses n'implique
pas la conclusion d'un accord (États-Unis – Crevettes (article 21:5), rapport de l'Organe d'appel,
paragraphe 134);
13
2. Le manque de flexibilité de la mesure – la mesure ne tenait pas compte des diverses situations
pouvant exister dans les différents pays exportateurs. Elle imposait aux Membres exportateurs un
programme de réglementation "essentiellement identique" à celui qu'avaient adopté les États-Unis, sans
examen du bien-fondé ou de l'effectivité de ce programme (États-Unis – Crevettes, rapport de l'Organe
d'appel, paragraphes 163 à 165).
b ʺUNE RESTRICTION DÉGUISÉE AU COMMERCE INTERNATIONALʺ
La jurisprudence du GATT/de l'OMC a progressivement établi trois critères pour déterminer si une mesure
constitue une restriction déguisée au commerce international:
examen de la question de savoir si la mesure contestée est publiée ou non – dans l'affaire
États-Unis – Essence, l'Organe d'appel a estimé qu'une restriction cachée ou non annoncée dans le
commerce international n'épuise pas le sens de l'expression "restriction déguisée" (États-Unis –
Essence, rapport de l'Organe d'appel, page 28);
examen de la question de savoir si l'application d'une mesure équivaut à une
discrimination arbitraire ou injustifiable – la décision sur la question de savoir si l'application
d'une mesure particulière équivaut à une "discrimination arbitraire ou injustifiable" peut aussi être
prise en compte pour déterminer l'existence d'une "restriction déguisée au commerce international".
En outre, la restriction déguisée englobe les restrictions qui équivalent à une discrimination arbitraire
ou injustifiable dans le commerce international (États-Unis – Essence, rapport de l'Organe d'appel,
page 28);
examen de "la conception, des principes de base et de la structure révélatrice" de la
mesure en cause – dans l'affaire CE – Amiante, le Groupe spécial a examiné comme prescription
supplémentaire la "conception, les principes de base et la structure révélatrice" de la mesure afin de
déterminer l'application de la mesure à des fins de protection (CE – Amiante, rapport du Groupe
spécial, paragraphe 8.236).
II.B. EXCEPTIONS GÉNÉRALES PRÉVUES DANS LʹACCORD GÉNÉRAL SUR LE COMMERCE DES SERVICES (AGCS)
Dans l'AGCS, les exceptions générales sont énoncées à l'article XIV qui autorise les Membres à maintenir des
mesures incompatibles, y compris concernant les services et les fournisseurs de services si lesdites mesures
satisfont aux conditions se rapportant à l'un des objectifs mentionnés aux alinéas a) à e).
L'article XIV de l'AGCS est comparable à l'article XX du GATT de 1994, malgré quelques différences.
Tous deux confirment le droit des Membres d'adopter des mesures qui sont par ailleurs incompatibles avec les
obligations au regard de l'OMC énoncées dans d'autres dispositions, à condition qu'il soit satisfait à certaines
conditions. Un libellé similaire est utilisé dans les deux dispositions, notamment le terme "nécessaires"
(alinéas a), b) et c)) et les conditions énoncées dans le texte introductif.
En raison des similitudes qui existent entre l'article XX du GATT de 1994 et l'article XIV de l'AGCS, l'Organe
d'appel a estimé que des décisions antérieures au titre de l'article XX du GATT de 1994 étaient pertinentes
pour l'analyse au titre de l'article XIV de l'AGCS (États-Unis – Jeux, rapport de l'Organe d'appel,
paragraphe 291). Ainsi, l'article XIV de l'AGCS, comme l'article XX du GATT de 1994, prévoit un double
critère:
Double critère prévu à l'article XIV de l'AGCS
Une mesure incompatible avec l'AGCS doit satisfaire au double critère suivant:
la mesure contestée doit entrer dans le champ d'application de l'un des alinéas de
l'article XIV – il faut que la mesure traite l'intérêt particulier spécifié dans cet alinéa et qu'il
existe un lien suffisant – ou "degré de connexion" – entre la mesure et l'intérêt protégé (le lien
requis est spécifié dans le libellé des alinéas eux-mêmes, avec l'emploi de termes tels que
"nécessaires à"); et
la mesure doit satisfaire aux conditions du texte introductif de l'article XIV.
(États-Unis – Jeux, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 292)
Les alinéas a), b) et c) de l'article XIV de l'AGCS précisent, à peu près dans les mêmes termes que l'article XX
du GATT de 1994, que les mesures doivent être "nécessaires" à la protection de la moralité publique, au
maintien de l'ordre public (expression définie dans une note de bas de page), à la protection de la santé
et de la vie des personnes et des animaux ou à la préservation des végétaux, ou pour assurer le
respect des lois et réglementations qui ne sont pas incompatibles avec les dispositions de l'AGCS.
Ainsi, le "critère de la nécessité", expliqué pour l'article XX du GATT de 1994, s'applique aussi pour les
alinéas a), b) et c) de l'article XIV de l'AGCS. Jusqu'à présent, seul l'article XIV a) a été interprété par les
organes juridictionnels de l'OMC (voir l'encadré ci-dessous).
Exemple: États-Unis – Jeux – Mesure nécessaire à la protection de la moralité publique ou au
maintien de l'ordre public (article XIV a) de l'AGCS)
Dans le module 6, nous avons vu, au travers d'une étude de cas sur l'affaire États-Unis – Jeux, que l'Organe
d'appel a confirmé la constatation du Groupe spécial selon laquelle les mesures des États-Unis se rapportant
aux services de jeux et paris étaient incompatibles avec les articles XIV:1 et XIV:2 de l'AGCS. Les États-Unis
ont cependant défendu leurs mesures comme étant "nécessaires à la protection de la moralité publique ou
au maintien de l'ordre public" au sens de l'article XIV a). L'Organe d'appel a appliqué le double critère
expliqué ci-dessus et examiné les décisions pertinentes au regard de l'article XX du GATT de 1994:
Article XIV a) – défense de la moralité publique: l'Organe d'appel a confirmé la constatation du
Groupe spécial selon laquelle les mesures prises par les États-Unis étaient destinées "à la
protection de la moralité publique ou au maintien de l'ordre public" au sens de l'article XIV a), mais
a infirmé la constatation selon laquelle les États-Unis n'avaient pas montré que leurs mesures
étaient "nécessaires" (le Groupe spécial a fait erreur en considérant que les consultations avec
Antigua constituaient une mesure de rechange "raisonnablement disponible"). Au lieu de cela,
l'Organe d'appel a constaté que la mesure était "nécessaire" et que les États-Unis avaient fourni
des éléments prima facie établissant la "nécessité" tandis qu'Antigua n'avait pas identifié d'autres
mesures de rechange qui pourraient être "raisonnablement disponibles".
15
Toutefois, les exceptions énoncées à l'article XX du GATT de 1994 ne figurent pas toutes à l'article XIV de
l'AGCS. Inversement, l'article XIV de l'AGCS énonce des exceptions générales qui ne sont pas mentionnées à
l'article XX du GATT de 1994. Il s'agit notamment des exceptions prévues aux alinéas d) et e), qui sont
spécifiques au commerce des services.
Article XIV de l'AGCS – alinéas d) et e)
d) mesures incompatibles avec l'article XVII de l'AGCS, à condition que la différence de traitement vise
à assurer l'imposition ou le recouvrement équitable ou effectif d'impôts directs pour ce qui est des
services ou des fournisseurs de services d'autres Membres;
e) mesures incompatibles avec l'article II de l'AGCS, à condition que la différence de traitement découle
d'un accord visant à éviter la double imposition ou de dispositions visant à éviter la double imposition
figurant dans tout autre accord ou arrangement international par lequel le Membre est lié.
L'alinéa d) autorise les Membres à prendre des mesures, par ailleurs non conformes au principe du traitement
national (article XVII de l'AGCS), si elles facilitent le recouvrement d'impôts directs. Ce traitement différencié,
qui paraît moins favorable aux fournisseurs de services étrangers qu'aux services ou fournisseurs de services
nationaux, n'est autorisé que lorsqu'il a pour objet d'assurer l'imposition "équitable ou effective" d'impôts
directs.
En ce qui concerne l'alinéa e), il est possible de prendre des mesures qui ne sont pas conformes au principe
NPF (article II de l'AGCS) si leur but est de mettre en œuvre des accords visant à éviter la double imposition.
II.C. ACCORD SUR LES ASPECTS DES DROITS DE PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE QUI TOUCHENT AU COMMERCE (ADPIC)
Il n'y a pas d'exceptions générales en tant que telles dans l'Accord sur les ADPIC. Toutefois, comme nous
l'avons étudié dans le module 7 (Accord sur les ADPIC), certaines dispositions peuvent s'appliquer à des
situations particulières dans lesquelles une protection n'est pas requise. Voir, par exemple, l'article 13 (droit
d'auteur et droits connexes), l'article 17 (marques de fabrique ou de commerce) et les articles 27:2, 27:3, 30
et 31 (brevets).
ÉTUDE DE CAS
ÉTUDE DE CAS: ARTICLE XX DU GATT DE 1994
États-Unis – Essence (États-Unis – Normes concernant l'essence nouvelle et ancienne formules) (DS2)
PARTIES ACCORDS ÉTAPES DU DIFFÉREND
Établissement du Groupe spécial Venezuela Articles Plaignants Brésil et III
Venezuela Distribution du rapport du Groupe spécial 31 mai 1995 (Brésil)
et XX
Distribution du rapport de l'Organe d'appel 29 janvier 1996
du
GATT de
1994 Défendeur États-Unis
Adoption 29 avril 1996
Tableau 1 États-Unis – essence (États-Unis – normes concernant l'essence nouvelle et ancienne formules)
EN BREF
Ce différend concerne la Loi sur la lutte contre la pollution atmosphérique (Clean Air Act), loi qui vise à
éliminer et à maîtriser la pollution atmosphérique aux États-Unis. À la suite d'une modification apportée à
cette loi en 1990, l'Agence pour la protection de l'environnement (EPA) a promulgué la Réglementation sur
l'essence concernant la composition et les effets polluants de l'essence afin que la pollution imputable à la
combustion d'essence ne dépasse pas les niveaux de 1990. À partir du 1er janvier 1995, cette
Réglementation autorisait uniquement la vente d'essence présentant un certain degré de propreté ("essence
nouvelle formule") dans les régions où la pollution atmosphérique était la plus élevée. Dans le reste du
pays, on ne pouvait vendre que de l'essence qui n'était pas plus polluante que celle qui avait été vendue
pendant l'année de base 1990 ("essence ancienne formule"). La Réglementation sur l'essence s'appliquait à
tous les raffineurs, mélangeurs et importateurs d'essence des États-Unis. Elle énonçait deux séries de
normes de base en matière d'émission. Premièrement, chaque raffineur national était tenu d'établir un
"niveau de base individuel" représentant la qualité de l'essence qu'il avait produite en 1990.
Deuxièmement, la Loi sur la lutte contre la pollution atmosphérique établissait un "niveau de base
réglementaire" destiné à refléter la qualité moyenne de l'essence en 1990 aux États-Unis.
Les raffineurs qui n'avaient pas été en activité pendant au moins six mois en 1990 étaient soumis au niveau
de base réglementaire, de même que les importateurs et mélangeurs. Le Venezuela et le Brésil ont allégué
que la Réglementation sur l'essence portait préjudice à leurs exportations vers les États-Unis et favorisait
les producteurs nationaux en ce qu'elle imposait une charge plus lourde aux producteurs d'essence
étrangers. Elle était donc incompatible avec l'article III du GATT de 1994 et n'était pas couverte par
l'article XX.
Le Groupe spécial a constaté que la mesure prise par les États-Unis soumettait l'essence étrangère à un
traitement moins favorable que l'essence nationale "similaire", en violation de l'article III:4 du GATT de
1994, et qu'elle n'était justifiée au titre d'aucune des trois exceptions prévues par l'article XX (alinéas b), d)
et g)) du GATT de 1994 invoquées par les États-Unis. Les États-Unis ont fait appel du rapport du Groupe
spécial, en limitant toutefois leur appel à l'interprétation de l'article XX du GATT de 1994 donnée par le
Groupe spécial.
En appel, l'Organe d'appel a modifié l'argumentation du Groupe spécial, constatant que la loi des États-Unis
entrait dans le cadre de l'article XX g). Toutefois, il a ensuite constaté que la loi n'était pas justifiée
au titre de l'article XX car elle ne satisfaisait pas aux conditions du texte introductif.
17
RÉSUMÉ DES CONSTATATIONS DE FOND DU GROUPE SPÉCIAL ET DE L'ORGANE D'APPEL
1. Caractéristiques
générales de
l'article XX
Double critère: 1. la mesure en cause ne doit pas seulement relever de l'une ou
l'autre des exceptions particulières – alinéas a) à j) – énumérées à l'article XX; et 2.
elle doit aussi satisfaire aux conditions du texte introductif de l'article XX (rapport de
l'Organe d'appel, page 25);
Termes différents ("nécessaire" ou "se rapportant à"): utilisés dans différents
paragraphes de l'article XX, ils indiquent différents types ou degrés de lien ou
relation entre la mesure considérée et l'intérêt ou la politique d'État que l'on cherche
à promouvoir ou à réaliser (rapport de l'Organe d'appel, page 20);
Charge de la preuve: il incombe à la partie qui invoque l'exception de démontrer
qu'une mesure provisoirement justifiée entre dans le cadre de l'une des exceptions
prévues à l'article XX (rapport de l'Organe d'appel, page 26).
2. Justification
provisoire au sens
de l'article XX g)
Une politique visant à réduire l'épuisement de l'air pur était une politique visant à la
conservation d'une ressource naturelle au sens de l'article XX g) (rapport du Groupe
spécial, paragraphe 6.37);
Une mesure serait considérée comme "se rapportant à la conservation des
ressources naturelles" si elle présentait une "relation substantielle" avec la
conservation des ressources naturelles épuisables et n'y visait pas qu'"incidemment
ou qu'accidentellement" (rapport de l'Organe d'appel, page 20);
L'expression "appliquée conjointement avec des restrictions à la production ou à la
consommation nationale" implique que les mesures concernées doivent imposer des
restrictions non seulement pour les produits importés en cause mais aussi pour les
produits nationaux en cause. Toutefois, elle ne signifie pas nécessairement un
traitement identique des produits nationaux et importés (rapport de l'Organe
d'appel, pages 22 et 23).
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3. Texte introductif
de l'article XX
Objet et but du texte introductif: sont généralement de prévenir l'abus des
exceptions énumérées à l'article XX. Le texte introductif concerne l'application de la
mesure en cause plutôt que la mesure elle-même (rapport de l'Organe d'appel,
page 25);
Trois éléments: a) "discrimination arbitraire" (entre les pays où les mêmes
conditions existent); b) "discrimination injustifiable" (entre les pays où les mêmes
conditions existent); ou c) "restriction déguisée" au commerce international
(rapport de l'Organe d'appel, page 26);
Discrimination injustifiable: serait une discrimination qui devait avoir été "prévue"
et qui n'était pas "purement accidentelle ou inévitable" (rapport de l'Organe d'appel,
page 33); et
Restriction déguisée: la question de savoir si l'application d'une mesure particulière
équivaut à une "discrimination arbitraire ou injustifiable" peut aussi être prise en
compte pour déterminer la présence d'une "restriction déguisée" au commerce
international (rapport de l'Organe d'appel, page 28).
Tableau 2 Résumé des constatations de fond du groupe spécial et de l'Organe d'appel
EXERCICES
1. Décrire brièvement les différentes exceptions aux règles de l'OMC étudiées dans le présent module.
2. Expliquer la structure de l'article XX du GATT de 1994 (Exceptions générales).
3. Expliquer la différence entre le terme "nécessaire" au sens de l'article XX b) et d) et "se rapportant à" au
sens de l'article XX g) du GATT de 1994.
4. Vanin (un Membre de l'OMC) peut-il appliquer une mesure au titre de l'article XX du GATT de 1994
interdisant les importations en provenance de certains Membres de l'OMC, mais pas de tous?
5. Expliquer l'objet et le but du texte introductif de l'article XX du GATT de 1994.
19
III. EXCEPTIONS CONCERNANT LA SÉCURITÉ
EN BREF
Un Membre de l'OMC est autorisé à prendre les mesures qu'il estime nécessaires à la protection des
intérêts essentiels de sa sécurité ou en application de ses engagements au titre de la Charte des
Nations Unies, en vue du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Les Membres ne sont pas
obligés de fournir des renseignements dont la divulgation serait contraire aux intérêts essentiels de leur
sécurité.
III.A. EXCEPTIONS CONCERNANT LA SÉCURITÉ DANS LʹACCORD GÉNÉRAL SUR LES TARIFS DOUANIERS ET LE COMMERCE (GATT) DE 1994
S'agissant du commerce de marchandises, l'article XXI du GATT de 1994 ("Exceptions concernant la sécurité")
permet aux Membres de prendre certaines mesures qui sont par ailleurs interdites par le GATT de 1994, pour
protéger les intérêts essentiels de leur sécurité. L'article XXI comporte trois alinéas, a), b) et c), qui disposent
ce qui suit:
l'alinéa a) traite de la divulgation de renseignements qu'un Membre de l'OMC considérerait comme
contraire aux intérêts essentiels de sa sécurité.
l'alinéa b) indique à quel moment un Membre peut prendre des mesures qu'il estime "nécessaires à la
protection des intérêts essentiels de sa sécurité" y compris des mesures:
se rapportant aux matières fissiles ou aux matières qui servent à leur fabrication;
se rapportant au trafic d'armes, de munitions et de matériel de guerre et à tout commerce
d'autres articles et matériel destinés directement ou indirectement à assurer l'approvisionnement
des forces armées;
appliquées en temps de guerre ou en cas de grave tension internationale.
l'alinéa c) autorise les Membres à prendre des mesures en application de leurs engagements au titre
de la Charte des Nations Unies, en vue du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Il fait
référence au chapitre VII de la Charte des Nations Unies.
L'article XXI n'énonce aucune obligation de notifier les mesures prises en vertu des exceptions concernant la
sécurité. Toutefois, une décision adoptée en 1982 par les PARTIES CONTRACTANTES du GATT (décision de
1982) dispose que "sous réserve de l'exception prévue à l'article XXI, paragraphe a), les Membres de l'OMC
devraient être informés autant que possible des mesures commerciales prises au titre de l'article XXI" (L/5426
– seulement en anglais).
III.B. EXCEPTIONS CONCERNANT LA SÉCURITÉ DANS LʹACCORD GÉNÉRAL SUR LE COMMERCE DES SERVICES (AGCS)
Dans le cas du commerce des services, la disposition pertinente est l'article XIVbis de l'AGCS. Le libellé de
l'article XIVbis de l'AGCS est presque identique à celui de l'article XXI du GATT de 1994 (expliqué ci-dessus),
qui régit les exceptions concernant la sécurité pour le commerce des marchandises, et les principes sont les
mêmes dans les deux cas.
Toutefois, à la différence de l'article XXI du GATT de 1994, l'AGCS impose l'obligation de notifier les mesures
prises au titre des exceptions concernant la sécurité en ce qui concerne le commerce des services. À cet
égard, le deuxième paragraphe de l'article XIVbis de l'AGCS dispose que le Conseil du commerce des services
sera informé dans toute la mesure du possible des mesures prises au titre des paragraphes 1 b) et c) et de
leur abrogation.
III.C. EXCEPTIONS CONCERNANT LA SÉCURITÉ DANS LʹACCORD SUR LES ASPECTS DES DROITS DE PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE QUI TOUCHENT AU COMMERCE (ADPIC)
En ce qui concerne les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, la disposition
qui régit le recours aux "exceptions concernant la sécurité" figure à l'article 73 de l'Accord sur les ADPIC.
Comme dans le cas de l'AGCS, le libellé de l'article 73 de l'Accord sur les ADPIC est identique à celui de la
disposition régissant le commerce des marchandises (article XXI du GATT de 1994) et le concept est appliqué
de la même manière pour le commerce des marchandises et pour le commerce des services. Il n'y a aucune
obligation expresse de notifier les mesures prises en vertu de l'article 73 de l'Accord sur les ADPIC.
EXERCICES
6. Expliquer brièvement dans quelles circonstances un Membre peut invoquer l'article XXI du GATT de 1994.
21
IV. INTÉGRATION RÉGIONALE
EN BREF
Les Membres de l'OMC sont autorisés, sous certaines conditions, à déroger au principe NPF afin
d'accorder un traitement préférentiel à leurs partenaires commerciaux au sein d'une union
douanière ou d'une zone de libre-échange sans accorder ce traitement à l'ensemble des Membres.
Par définition, les parties à un ACR s'accordent mutuellement un traitement plus favorable en matière de
commerce que celui qu'ils accordent au reste du monde (y compris aux Membres de l'OMC). L'ampleur et
l'importance d'un tel traitement préférentiel varie d'un ACR à un autre. La plupart des ACR vont au-delà de la
suppression des droits de douane et incluent des règlements relatifs aux obstacles non tarifaires et à d'autres
questions de politique commerciale comme les questions douanières, les normes, les mesures correctives
commerciales et le règlement des différends; plusieurs accords portent aussi sur les services et la propriété
intellectuelle ainsi que sur des questions qui ne sont pas encore visées par les Accords de l'OMC, telles que la
politique de la concurrence, les marchés publics, l'investissement, l'environnement et le travail. En fonction de
la disposition juridique de l'OMC utilisée pour notifier un ACR, les obstacles au commerce peuvent être
totalement abolis entre les parties ou simplement réduits.
L'article XXIV du GATT de 1994 et l'article V de l'AGCS autorisent les Membres de l'OMC à déroger, sous
certaines conditions, à la règle NPF afin d'accorder un traitement plus favorable à leurs partenaires
commerciaux au sein d'une union douanière ou d'une zone de libre-échange sans accorder ce traitement à
l'ensemble des Membres de l'OMC.
En outre, le paragraphe 2 c) de la Décision de 1979 concernant le traitement différencié et plus
favorable, la réciprocité et la participation plus complète des pays en voie de développement (la
"Clause d'habilitation") autorise les pays en développement Membres de l'OMC à conclure entre eux des
ACR sur le commerce des marchandises à des conditions plus souples que celles qui sont énoncées à
l'article XXIV du GATT de 1994. La Clause d'habilitation prévoit en outre des régimes préférentiels, autres que
les ACR, dans certaines circonstances (nous étudierons la Clause d'habilitation dans le module 9).
Le 6 février 1996, le Conseil général a établi le Comité des accords commerciaux régionaux (CACR).
Accords commerciaux régionaux: quelques chiffres ...
Le nombre d'ACR conclus entre les Membres de l'OMC a augmenté ces dernières années. En
novembre 2008, 418 ACR avaient été notifiés au GATT ou à l'OMC, dont 227 sont actuellement en vigueur,
contre seulement 101 en 2005*. On estime cependant que le nombre total d'ACR actuellement en
vigueur, conclus entre des Membres de l'OMC, est beaucoup plus élevé car tous les ACR n'ont pas été
notifiés. En novembre 2008, plus de la moitié des Membres de l'OMC étaient parties à au moins trois ACR.
Les zones de libre-échange sont plus répandues que les unions douanières et représentent 82 pour cent
des ACR actuellement en vigueur. Les accords commerciaux régionaux (ACR) entre pays en
développement représentent 36 pour cent du total.
* Ce chiffre tient compte des notifications présentées au titre de l'article XXIV du GATT de 1994, de la
Clause d'habilitation (examinée dans le module 9) et de l'article V du GATT de 1994.
IV.A. LES EFFETS DE BIEN‐ÊTRE DES ACCORDS COMMERCIAUX RÉGIONAUX (ACR)
La réduction des obstacles au commerce intrarégional stimule les échanges entre les parties à l'accord, qui
vont forcément augmenter ("création d'échanges"). Dans la mesure où ils favorisent le remplacement des
produits nationaux par des produits importés moins chers, les accords commerciaux régionaux accroissent
l'efficience économique. Toutefois, l'expansion des échanges intrarégionaux peut se faire en partie au
détriment des fournisseurs de pays tiers dont les produits sont moins coûteux (provoquant un "détournement
des échanges").
Si l'accroissement des échanges entre les partenaires résulte d'un détournement des échanges, il se peut que
le bien-être d'un pays diminue. Les gains ou les pertes résultant, pour un pays, de la participation à
un ACR dépendent de l'importance relative des effets de création et de détournement d'échanges
de l'accord. Pour en savoir plus, voir l'exemple donné dans l'encadré ci-dessous.
POUR EN SAVOIR PLUS ... SUR LES ACCORDS COMMERCIAUX RÉGIONAUX: CRÉATION ET DÉTOURNEMENT DʹÉCHANGES
Considérons un modèle comportant trois pays, dans lequel le pays importateur (Medatia) est petit par
rapport au pays partenaire (Vanin) et au reste du monde (W). Pour Medatia, l'élasticité de l'offre aux prix
pp et pw est illimitée, c'est-à-dire que Medatia peut importer à ces prix n'importe quelle quantité, mais il ne
peut pas influer sur les prix. On suppose qu'avant la conclusion d'un accord de libre-échange (ALE),
Medatia applique aux importations un droit ad valorem non discriminatoire, et que Tristat est le
fournisseur étranger le moins coûteux. Dans ces conditions, Medatia importera Do-Qo au prix Ph =
Pw(1+t).
Price
Quantity
S D
Ph Pp
0 Q1 Qo Do D1
A B C D Tariff G Pw Tariff
Prix
Droit de
douane
Quantité
23
Supposons maintenant que Medatia et Vanin concluent un ALE. Désormais, Medatia importera de Vanin,
puisque pp est inférieur à ph (vu que du fait de l'ALE, les produits de Medatia sont exempts de droits de
douane quand ils sont importés à Vanin). Le prix payé par les consommateurs sera désormais pp et les
importations augmenteront pour atteindre D1-Q1. Du fait de la conclusion de l'ALE, les importations totales
augmentent de Qo-Q1 plus D1-Do et le prix intérieur diminue.
Les consommateurs sont gagnants puisqu'ils peuvent consommer davantage pour un prix plus bas
(la zone A+B+C+D représente ce gain).
Les producteurs sont perdants (espace A).
Les recettes douanières diminuent (espace C+G).
L'espace B + D représente le gain de bien-être résultant de la création d'échanges induite par l'ALE.
MAIS qu'en est-il de la perte représentée par l'espace G?
L'espace G représente la perte de bien-être résultant du détournement des échanges causé par
l'ALE.
L'espace G représente le surcoût de l'importation de Do-Qo au prix du partenaire dont les coûts sont plus
élevés (pp) plutôt qu'au prix plus bas (pw) du marché mondial.
L'effet de bien-être global de l'ALE dépendra donc de la différence entre le gain de bien-être
résultant de la création d'échanges (espaces B + D) et la perte de bien-être résultant du
détournement des échanges (espace G). Dans cet exemple, l'ALE entraîne une augmentation du
commerce global, mais son effet sur le bien-être est ambigu.
Source: Organisation mondiale du Commerce (OMC), Rapport sur le commerce mondial 2007, Genève:
OMC, pages 147 à 149.
IV.B. LʹINTÉGRATION RÉGIONALE DANS LʹACCORD GÉNÉRAL SUR LES TARIFS DOUANIERS ET LE COMMERCE (GATT) DE 1994
S'agissant du commerce des marchandises, l'article XXIV du GATT de 1994, complété par le Mémorandum
d'accord sur l'interprétation de l'article XXIV du GATT de 1994 ("le Mémorandum d'accord"), énonce les règles
et disciplines applicables aux unions douanières et aux zones de libre-échange, ainsi qu'aux accords provisoires
conclus en vue de l'établissement d'une union douanière ou d'une zone de libre-échange.
L'article XXIV:4 dispose que les unions douanières, les zones de libre-échange ou les accords provisoires
devraient avoir pour objet de faciliter le commerce entre les territoires constitutifs et non d'opposer
des obstacles au commerce des tierces parties. Choisi à dessein, le libellé de l'article XXIV:4 énonce deux
conditions principales que les parties à un ACR doivent remplir pour que leur accord profite de la dérogation au
principe NPF; la première est une condition interne ayant trait à ce qu'on attend des parties pour ce qui
concerne la libéralisation des échanges; la seconde est une condition externe liée au souci d'éviter les effets
négatifs, sur les tierces parties, de la conclusion d'un ACR.
IV.B.1. CONDITIONS DʹÉTABLISSEMENT DʹUNIONS DOUANIERES ET DE ZONES DE LIBRE‐ÉCHANGE DANS LE CADRE DU GATT DE 1994: CONDITIONS INTERNES
Conditions de la conclusion d'ACR au sens de l'article XXIV du GATT de 1994: conditions internes
L'article XXIV permet aux Membres de l'OMC de déroger au principe NPF afin d'accorder un traitement
préférentiel à leurs partenaires commerciaux au sein d'une union douanière ou d'une zone de
libre-échange, sous réserve des conditions internes suivantes:
Pour les zones de libre-échange et les unions douanières: hormis quelques exceptions autorisées
aux termes de certains autres articles du GATT de 1994 (articles XI, XII, XIII, XIV, XV et XX), les
droits de douane et autres réglementations commerciales restrictives doivent être éliminés pour
l'essentiel des échanges commerciaux entre les membres d'une union douanière ou d'une zone
de libre-échange, ou tout au moins pour l'essentiel des échanges commerciaux portant sur les
produits originaires de ces territoires (article XXIV:8).
Pour les unions douanières uniquement: en outre, pour qu'il y ait une union douanière, il faut
que les droits de douane et les autres réglementations commerciales appliqués par les membres
de l'union aux échanges avec des non-membres soient "identiques en substance".
L'article XXIV:8 dispose que, hormis quelques exceptions autorisées en vertu de certains autres articles du
GATT de 1994 (articles XI, XII, XIII, XIV, XV et XX), les droits de douane et autres réglementations
commerciales restrictives doivent être éliminés pour l'essentiel des échanges commerciaux entre les
membres d'une union douanière ou d'une zone de libre-échange, ou tout au moins pour l'essentiel des
échanges commerciaux portant sur les produits originaires de ces territoires. En outre, pour qu'il y ait une
union douanière, il faut que les droits de douane et les autres réglementations commerciales appliqués
par les membres de l'union aux échanges avec des non-membres soient "identiques en substance". Dans la
pratique, cette condition suppose l'application d'une politique commerciale et d'un tarif extérieur communs.
Il n'y a pas d'accord sur ce que les parties à un ACR doivent faire pour remplir les conditions énoncées à
l'article XXIV:8. En effet, il subsiste un désaccord sur le sens précis de "l'essentiel des échanges commerciaux"
et sur ce qui constitue les "autres réglementations commerciales restrictives" vu que ni l'article XXIV ni le
Mémorandum d'accord ne définissent ces concepts. S'agissant de la seconde expression, il est clair que l'ACR
doit éliminer les réglementations restrictives pour le commerce entre les parties, mais les Membres ne sont pas
d'accord sur la question de savoir si la liste d'exceptions entre parenthèses est exhaustive ou simplement
exemplative. En particulier, le fait que l'article XIV concernant l'imposition de mesures de sauvegarde
(étudiées dans le module 5) n'est pas inclus a été interprété par certains Membres comme signifiant que les
mesures de sauvegarde ne sont pas autorisées dans les ACR (ni, par extension, les autres mesures correctives
commerciales, comme l'antidumping). Néanmoins, tous les Membres ne partagent pas cet avis et la pratique
montre que la plupart des ACR contiennent bien des dispositions relatives aux mesures correctives
commerciales entre les parties.
S'agissant de l'expression "l'essentiel des échanges commerciaux", il n'y a pas de définition convenue du
pourcentage des échanges commerciaux devant être visé par un ACR compatible avec les règles de l'OMC ni de
méthode de calcul convenue, c'est-à-dire qu'il n'est pas précisé si l'évaluation doit être faite sur la base d'un
pourcentage de lignes tarifaires libéralisées, de valeurs commerciales ou des deux à la fois. Un autre point de
désaccord a trait à la question de savoir si cette expression implique qu'il ne faut exclure aucun secteur
25
particulier – ou secteur majeur; le Cycle d'Uruguay a ajouté, dans le préambule du Mémorandum d'accord,
une référence au fait que la contribution des accords commerciaux régionaux à l'expansion du commerce
mondial est "plus grande si l'élimination des droits de douane et des autres réglementations commerciales
restrictives entre les territoires constitutifs s'étend à tout le commerce, et plus petite si un secteur majeur du
commerce est exclu". Toutefois, la pratique consistant à exclure les secteurs sensibles de la libéralisation dans
le cadre des ACR se poursuit et le problème n'a pas encore été réglé.
De même, l'interprétation de l'expression "l'essentiel des échanges commerciaux" reste une question en
suspens, malgré la clarification apportée par l'Organe d'appel dans l'affaire Turquie – Textiles, où il a indiqué
que "l'essentiel des échanges commerciaux" n'est pas la même chose que la totalité des échanges
commerciaux mais quelque chose de beaucoup plus important que simplement une certaine partie des
échanges (Turquie – Textiles, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 48).
La question de l'interprétation et de la clarification du texte juridique de l'OMC sur les ACR, et en particulier des
expressions susmentionnées, est un sujet de discussion entre les Membres dans le cadre des négociations du
Cycle de Doha.
IV.B.2. CONDITIONS DʹÉTABLISSEMENT DʹUNIONS DOUANIERES ET DE ZONES DE LIBRE‐ÉCHANGE DANS LE CADRE DU GATT DE 1994: CONDITIONS EXTERNES
Conditions de la conclusion d'ACR aux termes de l'article XXIV du GATT de 1994: Conditions
externes
L'article XXIV autorise les Membres de l'OMC à déroger au principe NPF pour accorder un traitement
préférentiel à leurs partenaires commerciaux au sein d'une union douanière ou d'une zone de
libre-échange, sous réserve des conditions externes suivantes:
dans le cas des zones de libre-échange: les droits applicables aux tierces parties lors de
l'établissement de la zone de libre-échange ou de la conclusion d'un accord provisoire en vue de
l'établissement de la zone ne doivent pas être plus élevés, ni les autres réglementations
commerciales plus rigoureuses que ne l'étaient les droits ou réglementations en vigueur avant
l'établissement de la zone ou la conclusion de l'accord provisoire (article XXIV:5 b)).
Dans le cas des unions douanières: les droits de douane ne seront pas d'une incidence générale
plus élevée, ni les autres réglementations commerciales plus rigoureuses que ne l'étaient les
droits et les autres réglementations commerciales appliqués avant leur établissement
(article XXIV:5 a)).
Comme indiqué précédemment, l'article XXIV:4 prévoit que l'établissement d'une union douanière ou d'une
zone de libre-échange doit avoir pour objet de faciliter le commerce entre les territoires constitutifs et non
d'opposer des obstacles au commerce d'autres Membres. Dans l'affaire Turquie – Textiles, l'Organe d'appel a
estimé que l'article XXIV:4 éclaire les autres paragraphes pertinents de l'article XXIV, y compris le
paragraphe 5 (Turquie – Textiles, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 57). Le Mémorandum d'accord sur
l'interprétation de l'article XXIV réaffirme explicitement ce but et dispose que les membres constitutifs
devraient "dans toute la mesure possible éviter que des effets défavorables n'en résultent pour le commerce
d'autres Membres".
Concernant les unions douanières, le Mémorandum d'accord prévoit que la comparaison au sens de
l'article XXIV:5 a) du niveau de protection sera établie sur la base d'une évaluation globale des taux de droits
moyens pondérés et des droits de douane perçus avant et lors de l'établissement de l'union douanière ou de la
conclusion d'un accord provisoire en vue de l'établissement d'une union douanière. À cette fin, les droits de
douane et impositions à prendre en considération seront les taux de droits appliqués. Quant aux autres
réglementations commerciales qu'il peut être difficile de quantifier et d'agréger, l'examen de chaque mesure,
réglementation, produit visé et flux commercial affecté pourra être nécessaire.
IV.B.3. AUTRES CONDITIONS RÉGISSANT LʹÉTABLISSEMENT DʹUNIONS DOUANIERES ET DE ZONES DE LIBRE‐ÉCHANGE DANS LE CADRE DU GATT DE 1994
Outre les conditions énoncées à l'article XXIV:8 et XXIV:5, d'autres dispositions concernent les accords
provisoires et les périodes de transition, les renégociations tarifaires dans le contexte de
l'établissement d'une union douanière et la transparence (voir ci-après).
S'agissant des premières, l'article XXIV:5 c) dispose qu'un accord provisoire doit comprendre un plan et un
programme pour l'établissement, "dans un délai raisonnable" (défini au paragraphe 3 du Mémorandum
d'accord comme ne dépassant pas dix ans, sauf circonstances exceptionnelles), de l'union douanière ou de la
zone de libre-échange.
Quant aux renégociations tarifaires dans le contexte de l'établissement d'une union douanière, l'article XXIV:6
stipule que si, dans le contexte de l'établissement d'une union douanière, un Membre se propose de relever un
droit consolidé, la procédure de modification des listes prévue à l'article XXVIII sera applicable. Comme le
précise le Mémorandum d'accord, les conditions suivantes s'appliquent:
le processus de négociation doit être engagé avant que des concessions tarifaires ne soient modifiées
ou retirées lors de l'établissement d'une union douanière ou de la conclusion d'un accord provisoire
en vue de l'établissement d'une union douanière (paragraphe 4);
les négociations seront engagées de bonne foi en vue d'arriver à des compensations mutuellement
satisfaisantes (paragraphe 5);
les Membres affectés tiendront dûment compte des réductions de droits de douane sur la même ligne
tarifaire faites par d'autres parties à l'union douanière. Seulement au cas où ces réductions ne
constitueraient pas les compensations nécessaires, l'union douanière offrirait des compensations, qui
pourront prendre la forme de réductions de droits sur d'autres lignes tarifaires (paragraphe 5); et
si un accord n'intervient pas dans un délai raisonnable, l'union douanière sera libre de modifier ou de
retirer les concessions et les Membres affectés seront alors libres de retirer des concessions
substantiellement équivalentes (paragraphe 5).
Le paragraphe 12 du Mémorandum d'accord dit que les dispositions concernant le règlement des différends
pourront être invoquées pour ce qui est de toutes questions découlant de l'application des dispositions de
l'article XXIV relatives aux unions douanières, aux zones de libre-échange ou aux accords provisoires.
27
POUR EN SAVOIR PLUS ... SUR LʹINTERPRÉTATION DE LA PORTÉE DE LʹEXCEPTION AU TRAITEMENT NPF PRÉVUE À LʹARTICLE XXIV DU GATT DE 1994 CONCERNANT LES UNIONS DOUANIÈRES: TURQUIE – TEXTILES
Dans l'affaire Turquie – Textiles, l'Organe d'appel a examiné la constatation du Groupe spécial selon
laquelle l'article XXIV ne justifiait pas l'imposition par la Turquie de restrictions quantitatives sur les
importations de certains textiles et vêtements en provenance d'Inde à la suite de l'établissement d'une
union douanière avec les Communautés européennes.
Aux termes du texte introductif de l'article XXIV:5, les dispositions du GATT de 1994 ne feront pas
obstacle, entre les territoires des parties contractantes, à la conclusion d'ACR conformes aux conditions qui
y sont stipulées.
À cet égard, l'Organe d'appel a estimé, dans cette affaire, que l'article XXIV ne pouvait justifier l'adoption
d'une mesure incompatible avec d'autres dispositions du GATT de 1994 (paragraphes 58 et 59):
i) que si la mesure est adoptée au moment de l'établissement d'une union douanière qui satisfait
pleinement aux prescriptions des paragraphes 5 a) et 8 a) de l'article XXIV; et
ii) seulement dans la mesure où il serait fait obstacle à l'établissement de l'union douanière si
l'adoption de la mesure n'était pas autorisée.
IV.C. LʹINTÉGRATION RÉGIONALE DANS LʹACCORD GÉNÉRAL SUR LE COMMERCE DES SERVICES (AGCS)
L'article V de l'AGCS, qui prévoit la conclusion d'"accords d'intégration économique", est calqué dans une large
mesure sur l'article XXIV du GATT de 1994. L'article V:4 de l'AGCS dispose que tout accord qui libéralise le
commerce des services doit être destiné à "faciliter les échanges entre les parties".
CONDITIONS DE LA CONCLUSION DʹACCORDS DʹINTÉGRATION ÉCONOMIQUE AU SENS DE LʹARTICLE V DE LʹAGCS
Conditions de la conclusion d'accords d'intégration économique au sens de l'article V de l'AGCS
L'article V autorise les Membres de l'OMC à conclure un accord pour libéraliser davantage le commerce de
services, pour autant que cet accord remplisse les conditions suivantes:
une couverture sectorielle substantielle – en termes du nombre de secteurs, du volume des
échanges affectés et des modes de fourniture. En particulier, l'accord ne devrait pas prévoir
l'exclusion a priori d'un mode de fourniture quel qu'il soit (article V:1 a) et note de bas de page 1);
l'absence ou l'élimination pour l'essentiel de toute discrimination entre les parties à l'accord dans les
secteurs visés en éliminant les mesures discriminatoires existantes et/ou en empêchant l'adoption
de nouvelles mesures discriminatoires ou de mesures plus discriminatoires (article V:1 b)); et
l'accord ne doit pas créer de nouveaux obstacles au commerce des autres Membres de l'OMC et il
facilitera les échanges entre les parties et ne relèvera pas, à l'égard de tout Membre de l'OMC en
dehors de l'accord, le niveau général des obstacles au commerce des services dans les secteurs ou
sous-secteurs respectifs par rapport au niveau applicable avant un tel accord (article V:4).
L'article V:3 ménage une certaine flexibilité en faveur des pays en développement parties à un accord
d'intégration économique pour évaluer s'il est satisfait à toutes les conditions dudit accord. En particulier,
l'article V:3 a) prévoit une certaine flexibilité pour ce qui est des prescriptions du paragraphe 1, notamment en
ce qui concerne l'absence ou l'élimination de toute discrimination entre les parties. L'article V:3 b) prévoit une
flexibilité dans le cas des ACR auxquels ne participent que des pays en développement eu égard aux conditions
de l'article V:6 concernant les "opérations commerciales substantielles".
L'article V:5 et V:8 dispose que, si la conclusion de l'ACR, ou son élargissement ultérieur, conduit une partie à
l'accord à retirer des engagements spécifiques inscrits dans sa Liste, ladite partie devra engager des
négociations en vue d'accorder une compensation aux autres Membres (non parties à l'accord). En revanche,
aucune compensation n'est due par les non-parties pour les avantages commerciaux qu'elles peuvent tirer de
l'accord.
article VbisPar ailleurs, l' traite des accords d'intégration des marchés du travail et prévoit une couverture
juridique similaire. Il dispose essentiellement que les citoyens des pays concernés sont exemptés des
prescriptions concernant les permis de résidence et de travail.
29
IV.D. LES ACCORDS COMMERCIAUX RÉGIONAUX (ACR) ET LE SYSTÈME COMMERCIAL MULTILATÉRAL
Les ACR et le système commercial multilatéral
La question de savoir si les ACR sont des "pierres d'achoppement" ou des "pierres angulaires" du SCM
fait encore l'objet d'un vif débat.
D'une part, par leur nature même, les ACR ont un caractère discriminatoire; ils s'écartent du principe NPF,
pierre angulaire du SCM. Les ACR risquent de favoriser le détournement plutôt que la création d'échanges
(encadré sur les ACR: création et détournement d'échanges). En outre, ils peuvent renforcer les intérêts
particuliers de ceux qui veulent maintenir des marges de préférence.
D'autre part, la multiplication des ACR a entraîné le chevauchement des zones qu'ils couvrent – la
coexistence dans un même pays de règles commerciales différentes s'appliquant à différents partenaires
dans le cadre d'ACR. Cette situation peut entraver les flux commerciaux du simple fait des coûts
qu'implique pour les négociants l'application d'ensembles multiples de règles commerciales. La
prolifération des ACR, surtout lorsqu'ils sont élargis au point d'englober des domaines politiques non
réglementés au niveau multilatéral, renforce les risques d'incohérence entre les règles et procédures des
ACR eux-mêmes, et entre les ACR et le cadre multilatéral. Enfin, la prolifération des ACR risque d'absorber
les ressources nécessaires à la conduite de négociations pour poursuivre la libéralisation multilatérale.
Mais les ACR peuvent aussi compléter le SCM et servir de catalyseur à la poursuite de la libéralisation. Ils
peuvent être des laboratoires de coopération internationale, réduisant l'opposition politique à la
libéralisation multilatérale au niveau national. Les ACR ont permis à des groupes de pays de négocier des
règles et des engagements qui vont plus loin que ce qui était possible alors au niveau multilatéral.
Certaines de ces règles ont ouvert la voie à un accord à l'OMC. Les services, la propriété intellectuelle, les
normes environnementales, les politiques en matière d'investissement et de concurrence sont autant de
questions qui ont été soulevées au cours de négociations régionales et qui ont ensuite donné lieu à des
accords ou à des discussions à l'OMC. Il faut cependant noter qu'il y a des domaines importants du
commerce international qui ne peuvent pas être abordés dans le cadre d'ACR (par exemple l'élimination de
subventions à l'exportation).
Les effets des ACR sur la libéralisation du commerce mondial et la croissance économique ne sont pas
clairs car leur impact économique régional est, ex ante, foncièrement ambigu. Leur impact économique
net dépend sans aucun doute de leur conception et du choix de leurs principaux paramètres internes (en
particulier, l'ampleur de la libéralisation des échanges et le nombre de secteurs visés). Pour que les ACR
soient des pierres angulaires du SCM plutôt que des obstacles, ils doivent favoriser la
libéralisation des échanges entre les pays participants sans créer d'obstacles au commerce avec
le reste du monde.
Source: Organisation mondiale du commerce (OMC), rapport sur le commerce mondial 2007, Genève:
OMC, pages 339 à 348.
IV.E. ACCORDS COMMERCIAUX RÉGIONAUX (ACR) ET TRANSPARENCE
Dans le cadre des négociations du Cycle de Doha, le Conseil général a adopté, le 14 décembre 2006, la
décision sur un "mécanisme pour la transparence des accords commerciaux régionaux" (WT/L/671).
L'adoption par le Conseil général de ce nouveau mécanisme pour la transparence des accords commerciaux
régionaux a donné lieu à un certain nombre de changements de procédure importants dans le traitement des
ACR dans le cadre de l'OMC. Le mécanisme pour la transparence, qui s'applique à tous les ACR, qu'ils soient
notifiés au titre de l'article XXIV du GATT de 1994, de l'article V de l'AGCS ou de la Clause d'habilitation, est
appliqué à titre provisoire conformément au paragraphe 47 de la Déclaration ministérielle de Doha, et sera
remplacé par un mécanisme permanent qui doit être adopté dans le cadre du Cycle de négociations de Doha.
On trouvera ci-après une explication des principaux éléments du mécanisme pour la transparence et une
évaluation de sa première année de fonctionnement.
Le mécanisme pour la transparence clarifie les prescriptions en matière de transparence figurant dans les
dispositions de l'OMC relatives aux ACR, comme la notification des ACR, leur examen par l'OMC, les
notifications ultérieures et la présentation de rapports. Il ajoute aussi de nouveaux éléments comme
l'obligation d'annonce préalable des ACR en cours de négociation ou signés, mais pas encore entrés en vigueur.
Pour ce qui est de la notification, le mécanisme pour la transparence renforce les dispositions existantes en
stipulant que la notification doit avoir lieu "le plus tôt possible ... et ... avant l'application du traitement
préférentiel entre les parties" (pas de guillemets dans l'original).
Mais le changement le plus notable est que le Secrétariat de l'OMC est chargé d'établir une présentation
factuelle de tous les ACR notifiés concernant le commerce des marchandises et des services. La présentation
factuelle, qui remplace la présentation type fournie par les parties à un ACR, est un résumé détaillé de l'accord
qui contient des données sur l'environnement commercial des parties à l'ACR, une description des aspects
réglementaires de l'ACR et des renseignements détaillés sur la libéralisation des droits de douane, des
échanges et de la réglementation qui est envisagée pendant la période de transition prévue par l'accord. La
présentation factuelle est établie sous la responsabilité du Secrétariat, en pleine consultation avec les parties,
et elle ne peut pas être utilisée pour servir de base à une procédure de règlement des différends ou pour créer
de nouveaux droits et de nouvelles obligations pour les Membres. Elle a pour but de fournir des informations
objectives et homogènes, sans jugement de valeur, pour permettre aux Membres d'"examiner" tel ou tel ACR.
S'agissant des "notifications ultérieures et de la présentation de rapports", le mécanisme pour la transparence
remplace le système de présentation de rapports biennaux, qui était largement inopérant, en prévoyant que la
notification requise des modifications affectant la mise en œuvre ou le fonctionnement d'un ACR se fera dès
que possible après que les modifications seront intervenues. À la fin de la période de mise en œuvre d'un ACR,
les parties devraient présenter un bref rapport écrit sur la réalisation des engagements de libéralisation
énoncés dans l'ACR.
Dans le cadre du nouveau mécanisme, le CACR est l'organe chargé des ACR notifiés au titre de l'article XXIV du
GATT de 1994 ou de l'article V de l'AGCS. Les ACR concernant le commerce des marchandises conclus entre
des pays en développement uniquement peuvent être notifiés au titre de l'article XXIV du GATT de 1994 ou de
la Clause d'habilitation. Les ACR notifiés au titre de la Clause d'habilitation relèvent du Comité du commerce et
du développement (CCD), réuni en session spécifique (comme nous le verrons dans le module 9).
31
NOTE
Pour en savoir plus sur le Mécanisme pour la transparence et les présentations factuelles établies
par le Secrétariat de l'OMC, voir: http://www.wto.org/french/tratop_f/region_f/trans_mecha_f.htm.
EXERCICES
7. Quel est le but des ACR d'après l'article XXIV:4 du GATT de 1994?
8. Expliquer brièvement les conditions applicables pour conclure un ALE au titre de l'article XXIV du GATT de
1994.
9. Quelle est la différence entre la "création d'échanges" et le "détournement d'échanges"? En quoi ces
expressions se rapportent-elles aux ACR?
10. Expliquer les principaux objectifs du mécanisme pour la transparence des ACR.
V. EXCEPTIONS CONCERNANT LA BALANCE DES PAIEMENTS
EN BREF
Conformément aux règles de l'OMC, les Membres sont autorisés, dans certaines circonstances et sous
certaines conditions, à imposer des restrictions à l'importation par ailleurs incompatibles avec les règles de
l'OMC en vue de sauvegarder leur position financière extérieure et l'équilibre de leur balance
des paiements.
V.A. BALANCE DES PAIEMENTS DANS LE GATT DE 1994
L'article XII et l'article XVIII:B du GATT de 1994 ainsi que le Mémorandum d'accord sur les dispositions du
GATT de 1994 relatives à la balance des paiements autorisent les Membres de l'OMC à prendre des mesures en
vue de sauvegarder leur position financière extérieure et l'équilibre de leur balance des paiements. Si la
condition fondamentale pour qu'un Membre puisse invoquer l'article XII est la nécessité de sauvegarder sa
position financière extérieure et l'équilibre de sa balance des paiements, l'article XVIII:B fait référence aux
Membres (entrant dans le cadre du paragraphe 4) qui éprouvent, pour équilibrer leur balance des paiements,
des difficultés qui proviennent principalement de leurs efforts pour élargir leur marché intérieur ainsi que de
l'instabilité des termes de leurs échanges. À cet égard, le paragraphe 2 de l'article XVIII:B fait référence à la
nécessité pour ces Membres de sauvegarder leur situation financière extérieure et d'assurer un niveau de
réserves suffisant pour l'exécution de leur programme de développement économique. L'article XII peut
être invoqué par tous les Membres et l'article XVIII:B seulement par les pays en développement
Membres. Les critères énoncés à l'article XVIII:B sont moins stricts que ceux de l'article XII.
L'article XII:2 – qui peut être invoqué par tous les Membres – dispose que les restrictions à l'importation
appliquées par un Membre "n'iront pas au-delà de ce qui est nécessaire: i) pour s'opposer à la menace
imminente d'une baisse importante de ses réserves monétaires ou pour mettre fin à cette baisse"; ou ii) "...
pour relever ses réserves monétaires suivant un taux d'accroissement raisonnable, dans le cas où elles seraient
très basses". Au contraire, à l'article XVIII:B:9 – qui ne peut être invoqué que par les pays en développement
Membres –, le terme "imminent" est absent de la première condition, et il est question d'un niveau de réserves
"insuffisantes" et non "très basses" (par "suffisant", on entend "suffisant pour l'exécution de son programme
de développement économique"). Les deux articles exigent que les Membres assouplissent progressivement
les restrictions à mesure que la situation s'améliore et les éliminent lorsque la situation ne justifie plus leur
maintien.
En général, les mesures prises à des fins de balance des paiements doivent être temporaires, de préférence
fondées sur les prix et administrées de manière transparente et elles doivent s'appliquer au niveau général des
importations (c'est-à-dire éviter toute spécificité sectorielle).
33
Qui détermine quand les réserves monétaires d'un Membre ont subi une baisse importante?
Lorsqu'elles auront à prendre leur décision finale dans le cas où entreront en ligne de compte les critères
établis à l'alinéa a) du paragraphe 2 de l'article XII ou au paragraphe 9 de l'article XVIII, les PARTIES
CONTRACTANTES accepteront les conclusions du Fonds monétaire international (FMI) sur le point de savoir
si les réserves monétaires de la partie contractante ont subi une baisse importante, si elles se trouvent à
un niveau très bas ou si elles se sont relevées suivant un taux d'accroissement raisonnable, ainsi que sur
les aspects financiers des autres problèmes auxquels s'étendront les consultations en pareil cas.
POUR EN SAVOIR PLUS ... SUR LE MÉMORANDUM DʹACCORD SUR LES DISPOSITIONS DU GATT DE 1994 RELATIVES À LA BALANCE DES PAIEMENTS
Dans le Mémorandum d'accord sur la balance des paiements, les Membres ont confirmé les principaux
engagements suivants:
annoncer publiquement, aussitôt que possible, des calendriers pour l'élimination des mesures
de restriction des importations prises à des fins de balance des paiements et donner une
explication s'ils ne le font pas (paragraphe 1);
donner la préférence aux mesures qui perturbent le moins les échanges – ces mesures,
dénommées mesures fondées sur les prix, peuvent être appliquées à des fins de balance des
paiements nonobstant les dispositions de l'article II du GATT de 1994 – Liste de concessions –
(paragraphe 2);
justifier pourquoi les mesures fondées sur les prix ne sont pas adéquates s'ils ont choisi
d'imposer des restrictions quantitatives, et ne pas appliquer au même produit plus d'un type de
mesure de restriction (paragraphe 3); et
ne pas appliquer de mesures de restriction des importations dépassant ce qui est
nécessaire pour remédier à la situation de la balance des paiements, et administrer les
restrictions d'une manière transparente (paragraphe 4).
Les Membres sont tenus de notifier au Conseil général l'introduction de mesures de restriction des
importations prises à des fins de balance des paiements ou toute modification apportée à leur application, ainsi
que toute modification apportée aux calendriers annoncés pour l'élimination de ces mesures, 30 jours au plus
tard après leur annonce. Ils devraient entrer en consultation avec le Comité des restrictions appliquées à des
fins de balance des paiements immédiatement après avoir pris les mesures ou, dans le cas où des
consultations préalables sont possibles dans la pratique, avant de l'avoir fait (articles XII:4 et XVIII:12). Un
Membre qui maintient de telles restrictions est tenu de procéder à des consultations annuelles ou biennales.
Un Membre affecté par ces restrictions peut engager des consultations si elles sont incompatibles avec les
dispositions pertinentes de l'OMC relatives à la balance des paiements.
V.B. LA BALANCE DES PAIEMENTS DANS LʹACCORD GÉNÉRAL SUR LE COMMERCE DES SERVICES (AGCS)
En vertu de l'article XII de l'AGCS, les Membres peuvent imposer des restrictions au commerce des services, à
titre exceptionnel et nonobstant tous engagements spécifiques contractés, pour protéger la position de leur
balance des paiements. Le recours à cette disposition est possible dans le cas où la balance des paiements et
la situation financière extérieure d'un Membre posent ou menacent de poser de graves difficultés. De telles
restrictions peuvent comprendre les restrictions aux paiements ou transferts qui seraient normalement
interdites au titre de l'article XI de l'AGCS (paiements et transferts).
Il est reconnu que des pressions particulières s'exerçant sur la balance des paiements d'un Membre en voie de
développement économique ou engagé dans un processus de transition économique pourront nécessiter le
recours à des restrictions pour assurer, entre autres choses, le maintien d'un niveau de réserves financières
suffisant pour l'exécution de son programme de développement économique ou de transition économique.
Pour invoquer l'article XII et recourir à des restrictions afin de sauvegarder l'équilibre de la balance des
paiements, un Membre doit remplir les conditions suivantes (article XII:2): i) ne pas établir de discrimination
entre les services et fournisseurs de services de différents Membres; ii) prendre des mesures compatibles avec
les statuts du Fonds monétaire international (FMI); iii) éviter de léser inutilement les intérêts commerciaux,
économiques et financiers des autres Membres et ne pas dépasser le niveau nécessaire pour remédier à la
situation de la balance des paiements; et iv) prendre des mesures temporaires, et les supprimer
progressivement à mesure que la situation de la balance des paiements s'améliorera.
Enfin, comme dans le cadre du GATT de 1994, les Membres sont tenus de notifier dans les moindres délais
au Conseil général de l'OMC les restrictions qu'ils adoptent pour sauvegarder l'équilibre de leur balance des
paiements dans le cadre de l'AGCS. En outre, ils entreront en consultation dans les moindres délais avec le
Comité des restrictions appliquées pour des raisons de balance des paiements au sujet des restrictions
adoptées (article XII:5).
35
VI. DÉROGATIONS
Comme nous l'avons vu dans le module 1, dans des "circonstances exceptionnelles", un Membre de l'OMC peut
être autorisé par les autres Membres à déroger, pendant une certaine période et sous certaines conditions, à
une disposition de l'Accord instituant l'OMC ou d'un des Accords commerciaux multilatéraux. Ces dérogations
s'appliquent au commerce des marchandises, au commerce des services, et aux aspects des droits de propriété
intellectuelle qui touchent au commerce. Elles sont régies par l'article IX:3 de l'Accord instituant l'OMC. La
"dérogation" est en principe utilisée lorsqu'il n'y a aucune autre disposition qui permettrait à un Membre de
déroger à l'un des principes du GATT ou à l'une de ses dispositions particulières.
S'il n'est pas nécessaire d'engager des négociations avant de recouvrir à une exception générale au titre de
l'article XX du GATT de 1994 ou de l'article XIV de l'AGCS, toute dérogation doit être octroyée par les trois
quarts des Membres en vertu d'une décision de la Conférence ministérielle (voir le module 1). En
conséquence, contrairement aux exceptions, une dérogation peut être considérée comme un "droit négocié".
Une dérogation est temporaire. Elle est donc accordée pour une période donnée. En outre, une dérogation
accordée pour une période de plus d'un an doit être réexaminée chaque année pour déterminer si les
circonstances exceptionnelles qui l'avaient justifiée existent encore.
EXERCICES
11. Quelle est la différence entre une "dérogation" et les autres exceptions étudiées dans ce module?
ILLUSTRATION
SCÉNARIO
Supposons que Vanin et Tristat sont Membres de l'OMC. Récemment, Vanin a promulgué un règlement qui
interdit les voitures dont la consommation est supérieure à 18 litres/100 km.
Tristat exporte des voitures à Vanin, son principal importateur. La plupart des voitures produites à Tristat
ont une consommation supérieure à 18 litres/100 km. Vanin ne produit pas de voitures dont la
consommation est supérieure à 18 litres/100 km.
Tristat estime que le règlement de Vanin est incompatible avec l'article XI du GATT de 1994 (Élimination
générale des restrictions quantitatives).
Vanin soutient que sa mesure vise à protéger la vie et la santé des personnes et à réduire la pollution
atmosphérique.
QUESTION
Supposons que vous êtes un expert juridique en droit de l'OMC. Quels moyens de défense ou quelle(s)
exception(s) de l'OMC Vanin peut-il invoquer et quels arguments pourrait-il avancer au titre de ces
exceptions?
CONSEILS PROPOSÉS
Vanin peut invoquer l'article XX du GATT de 1994 (Exceptions générales) pour justifier sa mesure dans le
cas où elle est jugée incompatible avec l'article XI du GATT de 1994 (Élimination générale des restrictions
quantitatives) – étudié dans le module 3.
En vertu de l'article XX, Vanin doit établir premièrement que son règlement est provisoirement justifié au
regard de l'article XX b) et/ou de l'article XX g); et deuxièmement que l'application du règlement est
conforme au texte introductif de l'article XX.
ARTICLE XX DU GATT DE 1994 – EXCEPTIONS GÉNÉRALES
ARTICLE XX B) - "NÉCESSAIRES À LA PROTECTION DE LA SANTÉ ET DE LA VIE DES PERSONNES ET DES
ANIMAUX OU À LA PRÉSERVATION DES VÉGÉTAUX"
Vanin est tenu d'établir que: 1. la politique dans laquelle s'inscrivaient les mesures pour lesquelles la
disposition était invoquée entre la catégorie des politiques destinées à protéger la santé et la vie des
personnes et des animaux ou à préserver les végétaux, et 2. les mesures incompatibles pour lesquelles
l'exception est invoquée sont "nécessaires" pour atteindre l'objectif de ladite politique (États-Unis –
Essence, rapport du Groupe spécial, paragraphe 6.20).
37
Ainsi, Vanin peut alléguer que son règlement poursuit l'objectif de protection de la santé des personnes en
réduisant les émissions des véhicules. Comme on l'a vu dans ce module, le "critère de la nécessité"
consiste à soupeser et mettre en balance une série de facteurs, en particulier: i) la contribution apportée
par la mesure à la réalisation de ses objectifs, à savoir la protection de la santé et de la vie des personnes
et des animaux ou la préservation des végétaux; ii) l'importance des intérêts ou des valeurs en jeu; et
iii) le caractère restrictif de la mesure pour le commerce (Brésil – Pneus rechapés, rapport de l'Organe
d'appel, paragraphe 178). À cet égard, Vanin peut faire valoir que la mesure contribue à la réalisation de
l'objectif puisque son application réduit la pollution sous forme d'émissions présentant un risque pour la vie
et la santé des personnes. En outre, Vanin peut arguer que l'interdiction est appliquée en vue de la
préservation de la vie et de la santé des personnes, jugée d'une valeur à la fois "vitale" et "importante au
plus haut point" (CE – Amiante, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 172).
S'agissant des mesures de rechange possibles (moins restrictives pour le commerce) que Tristat pourrait
proposer, Vanin devrait montrer que ces mesures n'apportent pas une contribution équivalente à la
réalisation de l'objectif poursuivi (la protection de la santé des personnes grâce à la réduction des
émissions des véhicules). Pour être considérée comme une mesure de rechange, une mesure doit non
seulement être moins restrictive pour le commerce que la mesure en cause, mais aussi "préserver le droit
du Membre défendeur d'assurer le niveau de protection qu'il souhaite pour ce qui est de l'objectif
poursuivi" (États-Unis – Jeux, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 308). En outre, en fonction des
mesures de rechange proposées par Tristat, Vanin peut arguer que ces mesures lui imposent une charge
indue, par exemple des coûts prohibitifs (États-Unis – Jeux, rapport de l'Organe d'appel, paragraphe 308).
ARTICLE XX G) "SE RAPPORTANT À LA CONSERVATION DES RESSOURCES NATURELLES ÉPUISABLES"
En application de l'article XX g), Vanin doit démontrer que la mesure en cause: 1) concerne la
conservation des ressources naturelles épuisables, 2) "se rapporte à" la conservation des ressources
naturelles épuisables et 3) est appliquée conjointement avec des restrictions à la production ou à la
consommation nationales.
Vanin peut alléguer que son règlement concerne la conservation des ressources naturelles épuisables
puisqu'il vise à la conservation de l'air pur, politique qui relève de l'article XX g) (voir États-Unis – Essence,
rapport du Groupe spécial, paragraphe 6.37). Vanin doit aussi démontrer que la mesure en cause
présente une "relation substantielle" avec la conservation de l'air pur et qu'elle n'y vise pas
qu'"incidemment ou qu'accidentellement" (États-Unis – Essence, rapport de l'Organe d'appel, page 21).
Enfin, pour remplir la troisième condition, Vanin devra montrer qu'une restriction analogue s'applique aux
voitures produites à Vanin.
TEXTE INTRODUCTIF DE L'ARTICLE XX DU GATT DE 1994
Vanin doit aussi démontrer que son règlement satisfait à la prescription du texte introductif. À cet égard, il
démontrera que celui-ci n'est pas appliqué de façon à constituer: 1. une "discrimination arbitraire" entre
les pays où les mêmes conditions existent; 2. une "discrimination injustifiable" entre les pays où les
mêmes conditions existent; ou 3. une "restriction déguisée" au commerce international.
Une mesure serait considérée comme étant appliquée de façon à constituer "une discrimination arbitraire
ou injustifiable entre les pays où les mêmes conditions existent" si: 1. son application entraîne une
discrimination; 2. cette discrimination est de nature arbitraire ou injustifiable; 3. cette discrimination a
lieu entre les pays où les mêmes conditions existent (États-Unis – Crevettes, rapport de l'Organe d'appel,
paragraphe 150).
VII. RÉSUMÉ
Dans certaines circonstances, les Membres de l'OMC sont autorisés à adopter des mesures qui sont par
ailleurs incompatibles avec leurs obligations dans le cadre de l'OMC, sous certaines conditions.
Les exceptions générales prévues à l'article XX du GATT de 1994 et à l'article XIV de l'AGCS autorisent
les Membres à prendre les mesures nécessaires pour réaliser des objectifs légitimes, comme la protection
de la moralité publique, la protection de la santé ou de la vie des personnes et des animaux ou la
préservation des végétaux ou encore la conservation des ressources naturelles épuisables. À cet égard, il
a été reconnu que les règles de l'OMC n'avaient pas pour objectif d'empêcher les Membres de poursuivre
ces objectifs légitimes ou de choisir le niveau approprié de protection. Toutefois, les mesures adoptées
pour atteindre ces objectifs doivent être conformes aux conditions énoncées à l'article XX du GATT de 1994
et à l'article XIV de l'AGCS. En général, ces mesures doivent avoir un lien avec les objectifs poursuivis (le
degré de connexion et les conditions varient selon chaque disposition des articles XX et XIV), et ne doivent
pas aboutir à une discrimination arbitraire ou injustifiable entre les pays où les mêmes conditions existent
ni constituer une restriction déguisée au commerce (conditions énoncées dans le texte introductif des deux
articles).
Contrairement aux exceptions générales, les exceptions concernant la sécurité s'appliquent non
seulement aux marchandises et aux services mais aussi aux aspects des droits de la propriété intellectuelle
qui touchent au commerce (ADPIC). Conformément aux exceptions concernant la sécurité, un Membre de
l'OMC peut prendre les mesures nécessaires à la protection des intérêts essentiels de sa sécurité même si
ces mesures sont incompatibles avec ses obligations dans le cadre du GATT de 1994, de l'AGCS ou de
l'Accord sur les ADPIC.
En outre, en vertu de l'article XXIV du GATT de 1994 et de l'article V de l'AGCS, les Membres de l'OMC
sont autorisés à déroger au principe NPF afin d'accorder un accès plus favorable à leurs partenaires
commerciaux dans le cadre d'accords commerciaux régionaux (ACR) – "unions douanières" ou "zones de
libre-échange" (pour le commerce de marchandises) ou accords d'intégration économique (pour le
commerce de services). La conclusion d'ACR est soumise à certaines conditions internes et externes,
notamment celle de faciliter le commerce entre les territoires constitutifs et de ne pas élever d'obstacles
au commerce des autres Membres (tierces parties) plus élevés ou plus rigoureux qu'ils ne l'étaient avant la
conclusion de l'ACR. Parmi les autres prescriptions figurent les dispositions sur les accords provisoires et
les périodes de transition, les renégociations tarifaires dans le contexte de l'établissement d'une union
douanière et les dispositions concernant la transparence (dont le mécanisme pour la transparence des
ACR).
En outre, les Membres sont autorisés à appliquer des restrictions à l'importation afin de sauvegarder leur
position financière extérieure et l'équilibre de leur balance des paiements. Enfin, dans des "circonstances
exceptionnelles", un Membre de l'OMC peut être autorisé par les autres Membres à déroger, pendant une
certaine période et à certaines conditions, à une disposition de l'Accord instituant l'OMC ou de l'un des
accords commerciaux multilatéraux. Ces dérogations s'appliquent au commerce des marchandises, au
commerce des services, et aux aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce.
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RÉPONSES PROPOSÉES
1. Dans ce module, nous avons étudié les principales exceptions horizontales applicables au GATT de 1994
et à l'Accord sur les ADPIC, à savoir:
les exceptions générales (article XX du GATT de 1994 et article XIV de l'AGCS) – droit de prendre
des mesures nécessaires, par exemple, pour protéger la santé et la vie des personnes et des
animaux ou préserver les végétaux. De telles mesures ne peuvent pas constituer soit un moyen de
discrimination arbitraire ou injustifiable entre les pays où les mêmes conditions existent, soit une
restriction déguisée au commerce international. Il n'y a pas d'exceptions générales en tant que
telles dans l'Accord sur les ADPIC;
les exceptions concernant la sécurité (article XXI du GATT de 1994, article XIVbis de l'AGCS et
article 73 de l'Accord sur les ADPIC) – droit de prendre des mesures pour protéger les intérêts
essentiels liés à la sécurité nationale;
les exceptions aux accords commerciaux régionaux (ACR) (article XXIV du GATT de 1994 et article V
de l'AGCS) – droit de déroger au principe NPF afin d'accorder un traitement préférentiel aux
marchandises (GATT de 1994) ou aux fournisseurs de services (AGCS) de partenaires commerciaux
au sein d'une union douanière ou d'une zone de libre-échange (pour les marchandises) ou d'un
accord d'intégration économique (pour le commerce des services) sans l'accorder à l'ensemble des
Membres de l'OMC. Ce droit est soumis à certaines conditions;
les exceptions concernant la balance des paiements (articles XII et XVIII du GATT de 1994 et
article XII de l'AGCS) – droit de prendre des mesures pour sauvegarder la position financière
extérieure d'un Membre et l'équilibre de sa balance des paiements; et
les dérogations (article IX de l'Accord instituant l'OMC) – dérogation temporaire accordée avec
l'autorisation des autres Membres, dans des circonstances exceptionnelles.
2. L'article XX contient dix alinéas et une clause introductive (le texte introductif). Il prévoit un double
critère: A. la mesure en question doit relever de l'une des exceptions – alinéas a) à j) – énumérées à
l'article XX – chaque alinéa concernant des objectifs différents et énonçant des conditions différentes; et
B. la mesure doit aussi satisfaire aux prescriptions du texte introductif de l'article XX. L'ordre des deux
éléments de ce critère ne peut pas être inversé.
3. Selon l'Organe d'appel, le "critère de la nécessité" au sens de l'article XX b) et d) consiste à soupeser et
mettre en balance une série de facteurs, parmi lesquels figurent au premier plan: A. la contribution de la
mesure à la réalisation de son objectif; B. l'importance des intérêts ou des valeurs en jeu; et C. le
caractère restrictif de la mesure pour le commerce. En outre, il faut comparer la mesure avec les
solutions de rechange possibles, qui peuvent être moins restrictives pour le commerce tout en apportant
une contribution équivalente à la réalisation de l'objectif poursuivi.
À l'instar du "critère de la nécessité", le critère "se rapportant à" énoncé à l'article XX g) suppose aussi
l'évaluation de la relation entre la mesure en question et l'objectif visé. Il est moins rigoureux que le
"critère de la nécessité". Une mesure sera considérée comme "se rapportant à la conservation des
ressources naturelles épuisables" si la mesure présente une "relation substantielle" avec la conservation
des ressources naturelles épuisables et n'y vise pas qu'"incidemment ou qu'accidentellement".
4. En principe, la réponse est NON (sauf s'il y a une raison objective d'établir une telle distinction – voir
aussi Brésil – Pneumatiques rechapés, rapport de l'Organe d'appel, paragraphes 225 à 230). Aux termes
du texte introductif, la mesure visée à l'article XX ne doit pas être "appliquée de façon à constituer soit un
moyen de discrimination arbitraire ou injustifiable entre les pays où les mêmes conditions existent", soit
une restriction déguisée au commerce international.
5. L'objet et le but du texte introductif sont généralement de prévenir le recours abusif aux exceptions
énumérées à l'article XX. Le texte introductif sert à garantir que le droit des Membres de se prévaloir
d'exceptions est exercé de bonne foi pour protéger des intérêts jugés légitimes au sens de l'article XX, et
non comme un moyen de contourner les obligations d'un Membre à l'égard des autres Membres de l'OMC.
Il ne concerne pas la mesure en question ou sa teneur particulière, mais il concerne plutôt la manière
dont la mesure est appliquée.
6. Un Membre de l'OMC est autorisé à prendre les mesures qu'il estime nécessaires à la protection des
intérêts essentiels de sa sécurité (comme celles se rapportant aux matières fissiles; ou au trafic d'armes,
de munitions et de matériel de guerre; ou celles appliquées en temps de guerre ou en cas de grave
tension internationale); ou en application de ses engagements au titre de la Charte des Nations Unies, en
vue du maintien de la paix et de la sécurité internationales. En outre, les Membres ne sont pas obligés de
fournir des renseignements dont la divulgation serait contraire aux intérêts essentiels de leur sécurité.
7. L'article XXIV:4 du GATT de 1994 dispose que l'établissement d'une union douanière ou d'une zone de
libre-échange doit avoir pour objet de faciliter le commerce entre les territoires constitutifs et non
d'opposer des obstacles au commerce d'autres Membres. Le Mémorandum d'accord sur l'interprétation
de l'article XXIV réaffirme explicitement cet objectif et dispose que les membres constitutifs devraient
"dans toute la mesure du possible éviter que des effets défavorables n'en résultent pour le commerce
d'autres Membres".
8. L'article XXIV du GATT de 1994 autorise la conclusion d'accords de libre-échange sous certaines
conditions internes et externes: 1) s'agissant des conditions internes, l'article XXIV:8 dispose que,
hormis quelques exceptions, les droits de douane et autres réglementations commerciales restrictives
doivent être éliminés pour "l'essentiel des échanges commerciaux" entre les parties; ou tout au moins
pour l'essentiel des échanges commerciaux portant sur les produits originaires de ces territoires; et 2)
s'agissant des conditions externes, les droits appliqués aux tierces parties lors de l'établissement d'une
zone de libre-échange ou de la conclusion d'un accord provisoire en vue de l'établissement d'une telle
zone ne devraient pas être plus élevés ni les autres réglementations commerciales plus rigoureuses que
ne l'étaient ceux qui existaient avant l'établissement de la zone de libre-échange ou la conclusion de
l'accord provisoire (article XXIV:5 b)).
Outre les conditions énoncées à l'article XXIV:8 et XXIV:5, d'autres prescriptions sont énoncées dans les
dispositions relatives aux accords provisoires et aux périodes de transition ainsi que dans les dispositions
concernant la transparence.
9. La création d'échanges fait référence à l'augmentation du commerce dans le cadre d'ACR due à la
réduction des obstacles au commerce intrarégional. Dans la mesure où cette augmentation permet de
substituer des produits importés à des produits nationaux plus chers, l'efficience économique est accrue.
Toutefois, la conclusion d'ACR peut aussi entraîner un détournement d'échanges, lorsque les fournisseurs
de marchandises ou de services les plus efficients extérieurs à l'ACR sont remplacés par des fournisseurs
moins efficients de parties à l'ACR. Par conséquent, si l'accroissement des échanges entre les partenaires
résulte d'un détournement des échanges, il se peut que le bien-être d'un pays diminue. Les gains ou les
41
pertes résultant, pour un pays, de la participation à un ACR dépendent de l'importance relative des effets
de création et de détournement d'échanges de l'accord.
10. Le mécanisme pour la transparence, adopté par le Conseil général le 14 décembre 2006, prévoit
l'annonce préalable de tout ACR et indique les renseignements devant être communiqués par les Membres
de l'OMC. Le mécanisme, qui s'applique à tous les ACR, est mis en œuvre à titre provisoire
conformément au paragraphe 47 de la Déclaration ministérielle de Doha. Les Membres examineront les
ACR notifiés sur la base d'une présentation factuelle établie par le Secrétariat de l'OMC sous sa propre
responsabilité et en pleine consultation avec les parties. La présentation factuelle a pour but de fournir
des renseignements objectifs et homogènes, ne contenant aucun jugement de valeur, qui sont utilisés par
les Membres lors de l'examen d'un ACR.
11. Il y a quatre grandes différences entre les dérogations et les autres exceptions horizontales:
Exception négociée – les dérogations sont accordées par l'ensemble des Membres de l'OMC, par
décision de la Conférence ministérielle. Une "dérogation" peut donc être considérée comme un
"droit négocié", tandis que les exceptions générales énoncées à l'article XX du GATT de 1994 et à
l'article XIV de l'AGCS ne font pas l'objet d'une négociation (ces dernières sont toutefois soumises
aux conditions énoncées dans chaque disposition).
Non contestable – alors qu'une disposition relative aux exceptions générales peut être invoquée pour
justifier une mesure par ailleurs incompatible avec le GATT de 1994 ou l'AGCS, une dérogation ne
doit pas être contestée en général, à moins que le Membre concerné ne respecte pas les conditions
de la dérogation.
Limitée dans le temps – une dérogation est généralement temporaire. Elle est donc accordée pour
une période déterminée.
Soumise à un réexamen annuel – une dérogation accordée pour une période de plus d'un an doit
être réexaminée chaque année pour déterminer si les circonstances exceptionnelles qui l'avaient
justifiée existent encore.