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Mai 2013 Édition spéciale Assemblées annuelles eVALUatiOn Matters Un bulletin d’information trimestriel du Département de l’évaluation des opérations du Groupe de la Banque africaine de développement NEA ONNIM NO SUA A, OHU « Celui qui ne sait pas peut en connaitre d’avantage par l’apprentissage » Symbole de connaissance, d’éducation permanente et de quête obstinée du savoir Source: Cloth As Metaphor by G.F. Kojo Arthur Adinkra Symbols of West Africa (http://www.adinkra.org/htmls/adinkra/neao.htm) gestion des La connaissances Avons-nous atteint notre objectif ? Rakesh Nangia, BAD 6 La gestion des connaissances à l’ACBF, la BAD et la BAsD Frannie Leautier, ACBF 12 Mthuli Ncube, Zuzana Brixiova, Basil Jones, BAD Vinod omas, AsDB Pratiquez ce que vous prêchez : Leçons apprises Carla O’Dell, APQC 30 Lowell L. Bryan, McKinsey & Company Chris Collison, consultant en gestion des connaissances Avant toute chose : la stratégie de gestion des connaissances Carla O’Dell et Lauren Trees, APQC 49 Kapil Kapoor et John Phillips, BAD Choisissez avec prudence : La technologie, l’outil facilitant le succès David Wu, Alexandre Samarin, Moez Charfeddine, BAD 62 Abel Usoro, University of the West of Scotland Démontrez la valeur : Mesurez vos efforts de gestion des connaissances Chris Collison, consultant en gestion des connaissances 75 APQC La gestion du savoir en pratique à la BAD Ebrima Faal, BAD 81 Mohamed Manai et Felicia Avwontom, BAD

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Mai 2013Édition spéciale Assemblées annuelles

eVALUatiOn MattersUn bulletin d’information trimestriel du Département de l’évaluation

des opérations du Groupe de la Banque africaine de développement

NEA ONNIM NO SUA A, OHU« Celui qui ne sait pas peut en connaitre d’avantage

par l’apprentissage »Symbole de connaissance, d’éducation permanente et de quête obstinée du savoir

Source: Cloth As Metaphor by G.F. Kojo ArthurAdinkra Symbols of West Africa (http://www.adinkra.org/htmls/adinkra/neao.htm)

gestion desLa

connaissancesAvons-nous atteint notre objectif ?

Rakesh Nangia, BAD 6

La gestion des connaissances à l’ACBF, la BAD et la BAsD

Frannie Leautier, ACBF 12

Mthuli Ncube, Zuzana Brixiova, Basil Jones, BAD Vinod Thomas, AsDB

Pratiquez ce que vous prêchez : Leçons apprises

Carla O’Dell, APQC 30

Lowell L. Bryan, McKinsey & Company

Chris Collison, consultant en gestion des connaissances

Avant toute chose : la stratégie de gestion des connaissances

Carla O’Dell et Lauren Trees, APQC 49

Kapil Kapoor et John Phillips, BAD

Choisissez avec prudence : La technologie, l’outil facilitant le succès

David Wu, Alexandre Samarin, Moez Charfeddine, BAD 62

Abel Usoro, University of the West of Scotland

Démontrez la valeur : Mesurez vos efforts de gestion des connaissances

Chris Collison, consultant en gestion des connaissances 75

APQC

La gestion du savoir en pratique à la BADEbrima Faal, BAD 81

Mohamed Manai et Felicia Avwontom, BAD

2 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

UN BULLETIN D’INFORMATION TRIMESTRIEL DU GROUPE DE LA BANQUE AFRICAINE DE DÉVELOPPEMENTMai 2013

3 Pourquoi la gestion des connaissances?Felicia Avwontom, Département de l’évaluation des opérations, BAD

6 Avons-nous atteint notre objectif ?Rakesh Nangia, Directeur, Département de l’évaluation des opérations, BAD

12 La gestion des connaissances à l’ACBF, la BAD et la BAsD13 Savoir et développement : le rôle du suivi et de l’évaluation Frannie Leautier, secrétaire exécutive, ACBF

20 La Banque africaine de développement – une institution du savoir efficaceMthuli Ncube, Zuzana Brixiova, Basil Jones

27 Solutions du savoir pour de meilleurs résultats de développement Vinod Thomas, Director General, Independent Evaluation Office, AsDB

30 Pratiquez ce que vous prêchez : Leçons apprises31 Leçons tirées de la gestion des connaissances : Avis de l’APQC

Carla O’Dell, CEO, American Productivity and Quality Center (APQC)

35 Créer un marché du savoir Lowell L. Bryan, McKinsey & Company

44 Interaction de l’évaluation et de la gestion des connaissances : marchés, rivières et escaliers ! Chris Colison, consultant en gestion des connaissances

49 Avant toute chose : la stratégie de gestion du savoir50 Développer une stratégie de connaissances à laquelle les hauts dirigeants

peuvent se rallier Carla O’Dell et Lauren Trees, APQC

55 Banque africaine de développement – le courtier du savoir… la banque de la transformation ? Kapil Kapoor, Directeur, Stratégie; John Phillips, Conseiller principal

en communication stratégique, Stratégie, Banque africaine de développement

62 Choisissez avec prudence : La technologie, l’outil facilitant le succès

63 Étude des systèmes informatiques en charge de la gestion des connaissancesDavid Wu, Directeur, Alexandre Samarin, et Moez Charfeddine, CIMM, BAD

70 Comment les institutions de développement peuvent mieux utiliser les médias sociaux dans le cadre du partage des connaissances, de la collaboration et de la communication en Afrique

Abel Usoro, Maître de conférences, Université de West of Scotland, Royaume-Uni

75 Démontrez la valeur : Mesurez vos efforts de gestion des connaissances

76 Pouvez-vous dire à quoi on le saura ? Chris Colison, consultant en gestion des connaissances

79 Pour une gestion efficace de mesures de programmes de gestion des connaissances, APQC

81 La gestion des connaissances en pratique à la BAD82 Gestion du savoir, changement, populations et décentralisation

Ebrima Faal, Directeur régional Banque africaine de développement, Centre de Ressources d’Afrique australe

87 Évaluation de la gestion des connaissances au sein de la BAfD Ce que nous devrions savoir

Mohamed Manai et Felicia Avwontom, Département de l’évaluation des opérations, BAD

La gestion des connaissances

est une edition spéciale preparée pour les Assemblées annuelles 2013.

Coordonnatrice de la publication : Felicia AvwontomPublié sous la direction de Rakesh Nangia, Directeur, Département de l’évaluation des opérations, BAD

Participation spéciale à la publication : Jessica Kitakule, Pierre Joseph Kingbo, Henda Ayari, Mireille Cobinah-Ebrottie, Emmanuel Kouassi Koudio.

Conception : Phoenixdesignaid et Felicia Avwontom (AfDB)

Mise en page et impression : Phoenixdesignaid

Group de la Banque africaine de développement15 Avenue du Ghana,BP 323, 1002 Tunis Belvédère Tunisie

La mission d’OPEV est d’aider la Banque africaine de développement à promouvoir la croissance durable et la réduction de la pauvreté en Afrique par le biais d’évaluations indépendantes et marquantes.

Directeur: Rakesh Nangia, [email protected] de division, Évaluation des projets et programmes : Mohamed Manai, [email protected] Téléphone: (216) 71 102 841Fax: (216) 71 194 460

http://operationsevaluation.afdb.orgAdressez toutes vos questions à :[email protected]

Copyright: © 2013—Banque africaine de développement (BAfD)

La gestion desconnaissances

3Édition spéciale Assemblées annuelles

Bienvenue à cette édition spéciale d’Evaluation Matters !!

Pourquoi la gestion des connaissances?La Gestion des connaissances pour l’efficacité

du développement était l’une des sessions clef de la

semaine de l’évaluation 2012 (du 3 au 6 décembre

2012).

La discussion au cours de cette session avait porté

sur le type de savoirs qu’une institution de dévelop­

pement devrait utiliser comme levier. Pourquoi? Et,

comment?

Le panel était conduit par Vincenzo Zezza (Admini­

strateur de la BAD) avec comme panélistes (Frannie

Léautier, Directrice exécutif de la Fondation pour le

Renforcement des Capacités en Afrique), Mukesh

Chawla (de la Banque Mondiale), et Temi Abimbola

(de la Banque Africaine de Développement). Les

panélistes ont enrichi l’auditoire de leurs expériences

respectives sur le terrain.

Une des conclusions de la discussion est que des

changements profonds sont en train de s’opérer en

Afrique. Cela demande des actions plus rapides pour

fournir des solutions aux problèmes de développe­

ment. Par conséquent, les organisations multilatérales

et bilatérales doivent s’ajuster a la rapidité des chan­

gements en cours afin de demeurer véritablement

efficaces Frannie Léautier.

Cette édition spéciale nous offre un espace pour

continuer la discussion qui avait été amorcée pendant

La Semaine de l’Evaluation, 2012. Le contexte de cette

conversation est le même que celui de la Semaine de

l’Evaluation 2012. Les institutions de développement

font face aux mêmes défis que les autres institutions :

Manque de compréhension commune du concept

de gestion des connaissances, difficultés pour obtenir

le soutien total de la direction ainsi que l’adhésion

du staff, contraintes budgétaires. Une contrainte

supplémentaire des organisations de développement

est que le développement implique plusieurs parte­

naires devant travailler ensemble et partager le savoir

à travers différents contextes, cultures et réalités. Cela

4 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

est aggravé par la complexité de l’environnement

du développement qui change souvent aux plans

politique, économique et social.

Ce contexte en mouvement est très bien décrit dans

l’article de Frannie Léautier «Savoir et développe­

ment, le rôle du Suivi & Evaluation ». Dans cet article,

elle parle des changements importants en cours en

Afrique et comment ces changements rendent

encore plus nécessaire d’apprendre des évaluations.

Ces changements clefs impliquent un changement

du rôle du citoyen moyen, des leaders et des medias.

Pour rester efficace, les institutions multilatérales et

bilatérales doivent s’adapter spécialement par rapport

à la rapidité des changements et aux cycles de chan­

gement pour agir et décider au fur et à mesure qu’elles

évaluent leurs actions sur le terrain. C’est le cœur du

sujet. La gestion de la connaissance n’est pas vraiment

nouvelle au sein des institutions de développement.

En fait, dans ce numéro, nous avons une vue appro­

fondie de la gestion de la connaissance en pratique à

la Banque Africaine de Développement, à la Banque

Asiatique de Développement et à la Fondation pour

le Renforcement des Capacités en Afrique.

Mais, comme Rakesh Nangia, le directeur de l’évalua­

tion des opérations à la BAD l’écrit dans ce numéro

spécial, il faut se poser la question de savoir si en

matière de gestion du savoir, on a atteint l’objec­

tif. Les articles dans ce numéro nous offrent des

suggestions sur comment y parvenir. Nous avons

élargi la conversation pour y inclure des praticiens

du développement et du domaine de la gestion des

savoirs venus des universités, d’autres institutions et

du secteur privé.

Carla O’Dell, Co­auteur de If Only We Knew What

We Know: The Transfer of Internal Knowledge and

Best Practice (The Free Press 1998) (“si seulement

nous savions ce que nous savons: Le transfert

du savoir interne et les pratiques optimales’) ; et

auteur de New Edge in Knowledge (Wiley 2011) (“A

la pointe du progrès en matière de connaissance’’)

nous fournit un mode d’emploi utile sur comment

y arriver dans “Leçons apprises sur la gestion des

savoirs”, dont la version originale anglaise s’intitule

“Knowledge Management Lessons Learned” et dans

son ouvrage” Développer une stratégie de gestion

de la connaissance que les haut­dirigeants peuvent

s’approprier’’ dont la version originale en anglais s’in­

titule “Developing a Knowledge Strategy that Senior

Leaders can get Behind.”

Chris Collison, co­auteur de ’Learning to Fly. Practical

Knowledge Management from Leading and Learning

Mais, comme Rakesh Nangia, le directeur de l’évaluation des opérations à la BAD l’écrit dans ce numéro spécial, il faut se poser la question de savoir si en matière de gestion du savoir, on a atteint l’objectif. Les articles dans ce numéro nous offrent des suggestions sur comment y parvenir.

5Édition spéciale à l’occasion de la réunion annuelle

Organizations. (Wiley 2001)” (Apprendre à prendre

son envol—Gestion pratique de la connaissance

de la part des organisations faisant preuve de lea­

dership et ayant une culture d’apprentissage” a écrit

‘’Là où l’évaluation et la gestion de la connaissance

se rencontrent’’ en anglais “Where Evaluation and

Knowledge Management“ nous apprend qu’un mar­

ché de la connaissance réussi nécessite aussi une offre,

des sources de connaissances, le tout bien présenté

et accessible et peut­être encore plus, il faut aussi

une demande active.

Dans “Pouvez­vous dire si nous y sommes déjà (“Can

you tell what it is yet,”) Chris écrit “Vous savez si la

connaissance est effectivement bien gérée si et seu-

lement si…’’

Alors, qu’en pensez­vous? En matière de gestion de

la connaissance, avons­nous atteint le but? Peut­on

dire et écrire ce qu’il en est?

Felicia Avwontom

Dans “Pouvez-vous dire si nous y sommes déjà “Can you tell what it is yet,” Chris écrit “Vous savez si la connaissance est effec-tivement bien gérée si et seulement si…’’

Alors, qu’en pen-sez-vous? En matière de gestion des connais-sances, avons-nous atteint le but? Peut-on dire et écrire ce qu’il en est?

6 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

De l’expérience a la connaissance,de la connaissance à l’action

… De l’action à l’impact

La Gestion de la connaissance à la BAD: Avons-nous atteint l’objectif?

L’odyssée

L’objectif est-iL déjà atteint? Les parents d’en­

fants en partance pour une destination de vacances

très anticipée s’attendent toujours à ce genre de

question et en général, ils disposent d’une réponse

déjà toute préparée. Cependant, soulignons que le

lecteur averti de cette publication remarquera qu’il

s’agit bien d’une question piège. En effet, on n’attein­

dra jamais le but ultime en matière de gestion de la

connaissance, parce que si nous avons la faiblesse de

penser que nous savons tout, nous n’apprendrons

plus rien. La quête du savoir doit être constante et

l’ultime but doit être dans la démarche permanente

d’aller vers la connaissance.

Comme pour toutes les quêtes de longue haleine,

il est important de savoir marquer des pauses. Une

pause constitue une occasion de prendre le temps

de réfléchir et bien comprendre la direction à suivre.

Qu’est­ce que c’est que la Gestion de la connaissance

(GC)? Comment est­ce que certaines institutions y

excellent et que d’autres n’y arrivent pas? Est­ce que

c’est la nature de l’activité qui induit la gestion de la

connaissance (nécessité faisant force de loi) ou bien

y­a­t­il des facteurs culturels et sociaux qui jouent

un rôle? Quels types d’institutions ont besoin d’être

des instructions du savoir? Et quelles sont les étapes

prudentes qu’il faut franchir pour y arriver? Alors

que certaines de ces questions sont abordées dans

ce numéro d’eVALUation Matters, le présent article

s’intéresse plutôt à notre institution – la Banque

Africaine de Développement et humblement suggère

quelques idées qui peuvent l’aider à définir sa propre

voie et stratégie de gestion de gestion la connaissance.

Rakesh Nangia, Directeur, Département de

l’évaluation des opérations, BAD

7Édition spéciale Assemblées annuelles

Pour devenir une institution du savoirLe concept de gestion de la connaissance semble flou

intangible et cependant il est bien réel lorsqu’il s’agit

de faire la différence aussi bien dans le monde de

l’entreprise que dans celui du développement. Mais

qu’est­ce que cela signifie exactement que d’être une

institution du savoir? Toutes les organisations ne sont­

elles pas à un certain niveau ou à un autre des insti­

tutions du savoir? S’agit­il d’un phénomène nouveau

ou bien d’un concept ancien présenté différemment?

Quand on se réfère au concept d’institutions du

savoir, plusieurs institutions nous viennent à l’idée.

Une réflexion plus approfondie nous amène à penser

à plusieurs think tanks réputés et célèbres institutions

universitaires. On peut aller plus loin et évoquer des

firmes dans plusieurs secteurs d’activités qui sont bien

reconnues pour leurs produits innovants. Mais, on ne

pense pas nécessairement aux banques multilatérales

de développement quand on veut citer les institu­

tions du savoir. Et oui, les banques multilatérales de

développement (BMD) ont réalisé de sérieux efforts

dans ce domaine. Bien que certaines de ces institu­

tions se consacrent à la gestion des connaissances

depuis déjà deux décennies et y ont même établies

de nouvelles structures spécialement dédiées à cet

effet, les progrès ont été lents et décevants.

Avant de se demander pourquoi les progrès ont été

lents et comment on peut les accélérer, commençons

par un modèle simple de gestion de la connaissance.

Alors que le savoir sera toujours explicite ou tacite, les

types d’audience et les modèles pédagogiques eux,

varient. Un modèle simplifié de gestion de la connais­

sance devrait avoir trois caractéristiques de base. (i)

création; (ii) dissémination; (iii) utilisation du savoir.

La plupart des banques multilatérales de développe­

ment sont performantes dans la première catégorie.

La connaissance générée est souvent expérimentale

et très peu orientée vers les nouvelles recherches.

Devant le grand nombre d’initiatives et d’oppor­

tunités dans le champ du développement à notre

portée, cela n’est pas surprenant du tout. Mais la

dissémination de ce savoir utile et par conséquent

son application pour améliorer les résultats du déve­

loppement est faible dans le meilleur des cas. La

plupart des modèles de dissémination ne prennent

pas du tout en compte les modèles pédagogiques

d’enseignement pour adultes, ni les besoins des diffé­

rents types d’audience. Le manque de précision et de

sélectivité fait souvent aussi partie du problème. Bien

que la sélectivité soit comme une incantation pour

les BMD, rarement font­elles des choix difficiles. Les

BMD s’attaquent à trop de problèmes à la fois (aucune

institution ne pourra résoudre toute seule tous les

problèmes) et c’est ainsi qu’elles se retrouvent avec

un problème de confusion de la mission, de mandats

non financés et bien­entendu d’absence de focus. La

métaphore du généraliste qui n’a aucune expertise

particulière nous vient alors à l’esprit.

Alors, à mesure que nous allons aborder le cas du

groupe de la Banque Africaine de Développement

et son désir de devenir leader en tant qu’institution

du savoir, il faut garder à l’esprit les enseignements

ci­dessus et aussi analyser profondément les réussites

des organisations du savoir, ainsi que leurs structures

internes. Nous étant faits l’avocat de la nécessité

Le concept de gestion de la

connaissance semble flou et intangible

et cependant il est bien réel lorsqu’il

s’agit de faire la différence aussi bien

dans le monde de l’entreprise que dans

celui du développement. Mais qu’est-ce

que cela signifie exactement que d’être

une institution du savoir?

8 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

de rester focalisé sur un nombre limité d’objectifs,

cet article mettra en pratique ce qu’il prêche et se

limitera à seulement quelques idées à prendre en

considération.

Notre Boule de Cristal

Comme un vieil adage le dit si bien, « il ne faut jamais

se risquer à essayer de prédire l’avenir ». Cependant,

des projections informées dans le futur sont essen­

tielles à toute réussite en affaires.

Alors, lorsque nous regardons dans notre boule de

cristal, il y a quelques éléments qui apparaissent très

clairement. L’Afrique est l’une des régions du monde

qui croit le plus rapidement et beaucoup de signes

laissent à penser que cette tendance va se maintenir

et s’accélérer. A terme la vitesse de croissance de

l’Afrique sera supérieure à celle de l’Asie.

L’Afrique est bien connue pour l’abondance de ses

ressources naturelles et de nouvelles découvertes

de pétrole et de gaz naturel ne devraient pas nous

surprendre.

Tous les modèles démographiques indiquent que

l’Afrique demeure le continent le plus jeune et le

restera encore pour plusieurs décennies avant que

la population ne se stabilise avec la réduction des

taux de natalité et de mortalité. Le revers de la

médaille est que l’Afrique est aussi malgré d’im­

portants progrès, le continent qui abrite 19 états

fragiles. Cela est plus que partout ailleurs dans le

monde. La situation risque de demeurer imprévisible.

En effet, qui aurait pu prédire le récent conflit au

Mali? La promesse d’un futur meilleur alimentée

par une forte croissance et une population jeune

peut aussi malheureusement se transformer en

cauchemar alimenté par la frustration de ne pas

pouvoir trouver un emploi décent et par de l’insta­

bilité politique. Même si le commerce régional s’est

accru, l’Afrique est le continent le moins intégré

au plan économique. Cela devrait évoluer, mais

les contraintes en infrastructures sont bien réelles.

Cela nous montre que la Banque Africaine de

Développement doit couvrir plusieurs aspects et

domaines d’intervention pour aider les pays membres

régionaux. Une expertise en matière de commerce

international et d’accords de libre­échange, ainsi

qu’en intégration régionale est requise, et on a aussi

besoin d’un cadre pour créer des emplois, adresser

la question du genre, les besoins infrastructures et le

savoir pour développer des partenariats publics­privés

efficaces. Il faut aussi aider les états­fragiles à retrouver

la voie de la stabilité et de la croissance. La demande

de connaissance et d’expertise est illimitée. Et c’est

pour cela qu’une gestion stratégique des priorités est

essentielle pour réussir.

La Banque ne peut pas tout faire et devrait se concen­

trer sur peu et faire ce peu très bien. Etre la meil­

leure institution dans ce qu’elle fait. Mais dans quels

domaines, la Banque doit­elle intervenir?

Faire des Choix Difficiles

Je pense qu’au lieu de se disperser, la Banque devrait

cibler trois domaines et regrouper ses experts autour

de ceux­ci afin que la Banque soit mondialement

reconnue comme ayant de l’expertise dans ces

domaines. Le choix des domaines d’intervention de

la Banque doivent répondre aux critères suivants: Les

9Édition spéciale Assemblées annuelles

besoins des clients et les avantages comparatifs de

la Banque. Cela n’est ni statique ni immuable, mais

implique une action rapide de la part de l’institution.

Les trois domaines proposés sont les suivants: (i) Etats

Fragiles. (ii) Intégration régionale. (iii) la gestion des

ressources naturelles

Les Etats FragilesMalgré leur stigmatisation qui est regrettable, les

états fragiles ont des besoins spécifiques La Banque

a reconnu cela et a préparé des guides d’action pour

aider les états en situation post conflictuelle depuis

2001, suivi en 2008 par l’adoption de sa première

stratégie. Parallèlement, la Banque a mis sur pied la

Facilite pour les états fragiles qui lui permet de mettre

en œuvre cette stratégie. La Banque a alloué des fonds

supplémentaires pour répondre aux besoins des états

fragiles. La Banque a un solide avantage comparatif

ici. Un pays sur trois en Afrique est considéré comme

étant en situation de fragilité. Etant donné que la

vulnérabilité peut entrainer des débordements de

violence qui ne se limitent pas seulement aux fron­

tières, se préoccuper des besoins spéciaux des états

fragiles, cela doit être une priorité pour le continent.

Intégration Régionale

L’Afrique est le continent le moins intégré de la pla­

nète et c’est aussi le continent qui peut le moins se

le permettre. Bien qu’il y a des signes positifs dus à la

levée des barrières au commerce intra régional dans

certains regroupements économiques régionaux, le

commerce intra­africain s’est accru marginalement au

cours de ces 10 dernières années – et cela s’est fait à

partir d’une base de départ qui était très faible. La part

du commerce intra­africain est de 10% à peu près,

alors qu’en Asie, elle est de 17% et en Europe de 60%

nous montre bien les défis à relever pour l’Afrique.

Cependant, il existe des analyses qui indiquent que le

commerce intra régional informel lui n’est pas capturé

par les statistiques officielles et c’est une part très impor­

tante. L’Ouganda par exemple a exporté des biens pour

une valeur de 231 millions de Dollars dans 5 pays africains.

Cela représente 86% des exportations totales formelles

vers ces mêmes pays. (Lesser et Moisé­Leeman 2009).

Plus de connaissances sont nécessaires pour mieux

appréhender le phénomène du commerce informel.

Quel est sa taille? Comment le rendre plus formel?

Et faire en sorte qu’il profite aux gouvernements

concernés par des recettes fiscales et des rentrées

de devises?

L’intégration régionale devient une urgence quand

on se rend compte qu’un tiers des états africains

sont enclavés. L’enclavement rallonge de quatre jours

la distribution des exportations et de neuf jours les

importations comparé aux mêmes distances dans

les pays côtiers.

D’importants investissements en infrastructures

régionales vont produire des résultats mitigés s’ils

ne vont pas de pairs avec la prise en compte des

problèmes liés aux aspects institutionnels de manière

simultanée.

La gestion des ressources naturelles

L’histoire de ce que les économistes qualifient comme

étant «la maladie hollandaise» remonte à il y a plus

de 50 ans. Et pourtant, l’histoire récente nous montre

que beaucoup de pays ont échoué en étant inca­

pables d’incorporer les leçons de cette expérience

S’assurer que les revenus de cette manne provenant

10 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

Rakesh Nangia dirige le département de l’évaluation des opérations de la Banque afric­aine de développement. Avant de rejoindre la Bad, il a passé 25 ans à la Banque mondiale, où il a occupé plusieurs postes, notamment celui de directeur de la stratégie et des opérations pour le réseau du développement humain et Vice ­ Président par intérim de l’Institut de la Banque mondiale.

Il a fait sa formation à l’Institut indien de tech­nologie de Delhi et à L’Université Harvard des Etats­Unis. Il est diplômé en administration des affaires et ingénierie.

des ressources naturelles nouvellement découvertes

et mises en productions ne soient bien investies et ne

produisent pas des déséquilibres structurels dévas­

tateurs(non désirés) sur les économies locales, cela

constitue un réel défi même lorsqu’on opère dans

le cadre d’une bonne gouvernance. Dans beaucoup

de pays membres régionaux, le secteur industriel

est dans sa phase primitive et pourrait être fragilisé

si des mesures appropriées ne sont pas prises avant

que des volumes importants de flux financiers ne

rentrent dans le circuit économique local. Nos pays

membres régionaux auront besoin de conseils dans

les domaines législatifs et fiscaux. C’est un domaine

dans lequel il y a un déficit de connaissance et pour

lequel la Banque ne semble pas être très bien outillé.

Bien qu’il y ait un volume accumulé de connaissances

explicites sur tous ces sujets, la Banque aura besoin

de réunir tout le savoir tacite et le savoir qui découle

de l’expérience du terrain pour aider à définir des

solutions concrètes et pragmatiques.

Tout Risquer

Même si vous n’êtes pas d’accord avec les priorités

ci­dessus et que votre propre analyse prospective

vous aurait amené à définir d’autres priorités, cela n’est

pas un problème. Il n’en demeure pas moins que la

stratégie qui consiste et à ne pas se disperser et à se

focaliser sur un nombre limité de domaines d’inter­

vention pour y établir une bonne réputation et créer

un élan ou effet d’entrainement, est très importante.

Cependant, de mobiliser et constituer son expertise

en se focalisant seulement sur trois domaines d’inter­

vention comporte aussi des risques. L’environnement

qui évolue sans cesse peut vite rendre obsolète les trois

domaines d’interventions choisis avant même que les

équipes de la Banque n’aient pu y faire la différence.

Les thèmes choisis peuvent ne pas nécessairement

contribuer directement aux thèmes de la croissance

inclusive et de la croissance verte qui sont contenus

dans la stratégie de 10 ans. Les équipes d’experts de la

Banque peuvent être trop dispersées, et pire, nos pays

membres peuvent ne pas tenir compte des efforts de

la Banque et faire appel à d’autres sources, y c compris

toutes ces grandes firmes de consulting. L’expertise et

le savoir tacite de ces équipes piliers peuvent ne pas

aller au­delà d’un petit noyau ou réseau d’initiés au

lieu d’être largement diffusés. Bien­entendu, la Banque

fera tout son possible pour tenir compte des risques,

mais il n’existe aucune garantie à 100% que tous les

risques peuvent être pris en compte et gérés. Mais en

définitive, il serait préférable pour notre institution de

susciter un élan et un effet d’entrainement en tant

que l’institution sur qui on peut compter pour un

nombre limité de domaines d’intervention plutôt

que de chercher à faire du saupoudrage pour lequel

dans le meilleur des cas, on se demandera quels sont

les résultats que nous avons atteints en faisant cela.

11Édition spéciale à l’occasion de la réunion annuelle

12 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

à l’ACBF,la BAD

et la BAsD

desLa gestion

connaissances

Connaissances et développement : le rôle du suivi et de l’évaluation

La Banque africaine de developpement—une institution du savoir efficace

Solutions du savoir pour de meilleurs résultats de développement

13Édition spéciale Assemblées annuelles

PLusieurs chanGements majeurs sur­

viennent en Afrique, et l’accent est mis sur les ensei­

gnements tirés des résultats de l’évaluation. Parmi les

principales mutations figure l’évolution du rôle joué

par le citoyen moyen, les responsables politiques et

les médias dans la gouvernance de l’apprentissage et

dans le partage du savoir. Pour rester efficaces, les ins­

titutions multilatérales et bilatérales doivent s’adapter

à cette nouvelle donne, au regard notamment de la

rapidité et des cycles du changement ; elles doivent

mettre en pratique les leçons apprises et prendre des

décisions au fil des évaluations. Les pays ont mis au

point des approches différentes de l’apprentissage

et du partage du savoir pour parvenir à des résultats

de développement. Des entités comme la Fondation

pour le renforcement des capacités en Afrique (ACBF)

qui appuient le renforcement des capacités en Afrique

ont un rôle essentiel à jouer en tant que partenaires

dans cet environnement.

Principales mutations en cours en Afrique

Depuis deux décennies, l’Afrique est en train de subir

une transformation induite par un certain nombre de

facteurs, dont quatre majeurs, à savoir les personnes,

la structure économique, les ressources naturelles et

la technologie.

Les personnes sont le premier facteur de cette trans­

formation. L’urbanisation a entraîné une concen­

tration de consommateurs de la classe moyenne

dans les mégapoles, les grandes villes ou les villes

secondaires, où la demande de prestations de

qualité accentue la pression en faveur de l’amélio­

ration des performances des services publics. La

demande de services efficients dans le domaine des

produits alimentaires est plus intense dans les villes

que partout ailleurs, les questions liées à la sécurité

alimentaire ayant, à diverses époques, engendré de

nombreuses études sur le mode de fonctionnement

Plusieurs changements majeurs

surviennent en Afrique, et l’accent est

mis sur les enseignements tirés des

résultats de l’évaluation. Parmi les

principales mutations figure l’évolution

du rôle joué par le citoyen moyen, les

responsables politiques et les médias

dans la gouvernance de l’apprentissage

et dans le partage du savoir.

Connaissances et développement : le rôle du suivi et de l’évaluation

Frannie A. Léautier, secrétaire exécutif, ACBF

à l’ACBF,la BAD

La gestion

connaissances

14 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

des systèmes de distribution alimentaire dans les

grandes villes africaines (Guyer, 1987). Les familles de

la classe moyenne recherchent une meilleure qualité

d’éducation pour leurs enfants, et l’allongement

de l’espérance de vie a accru la demande de soins

de santé de pointe. Les paysans éduqués, qui ont

passé au moins quatre années à l’école, utilisent les

intrants agricoles en recourant à des méthodes plus

modernes, accroissant ainsi la productivité agricole

(Weir, 1999). Les paysans sont également mieux infor­

més des opportunités du marché avec l’émergence

de l’échange de produits dans un certain nombre de

pays (Everitt, 2012). Il est attesté que les informations

sur la santé et la nutrition sont aussi mieux utilisées,

les mères étant mieux informées, avec au moins un

niveau d’instruction primaire (Hobcraft, 1993). La

taille des villes africaines augmente, tout comme le

nombre de villes, ainsi que la demande d’infrastruc­

tures durables (ONU­HABITAT, 2010). La demande

de services de transport pleinement fonctionnels est

par ailleurs manifeste, dans la mesure où la densité

du trafic résultant de l’explosion du taux de posses­

sion d’automobile provoque des retards et accroît

le coût de la distribution de produits et du respect

des normes de service.

En conséquence, les autorités municipales et les

pouvoirs publics ont relevé leurs performances

pour combler les attentes croissantes en volumes

et niveaux de service. Les organismes régionaux et

continentaux doivent également rehausser le niveau

de leurs prestations pour régler les multiples pro­

blèmes transfrontaliers. De même, les institutions

multilatérales et bilatérales doivent se doter de

meilleures méthodes d’évaluation de l’efficacité

des différentes approches de prestation de ser-

vices, afin d’accélérer le processus d’atteinte des

résultats de développement.

La deuxième dynamique est engendrée par le change­

ment de la structure de l’économie dans de nombreux

pays africains. De tels changements sont particuliè­

rement perceptibles dans le flux accru et l’échange

d’idées, alimenté par l’utilisation facile et rentable

des communications mobiles. Mais on peut égale­

ment percevoir ces mutations dans le niveau accru de

fabrication de faible et moyenne échelle et dans les

divers types de trafic sur les axes routiers importants

et autres grands corridors de transport. Les écono­

mies africaines comptent désormais sur les nouveaux

apports du savoir, non seulement pour transformer

l’agriculture mais également pour exploiter judicieuse­

ment les ressources naturelles. Partout en Afrique, les

sociétés appliquent de nouveaux modèles d’affaires

et utilisent toutes sortes de combinaisons de connais­

sances multisectorielles pour réussir. Cela transparaît

mieux dans l’innovation croissante résultant de l’uti­

lisation de plateformes mobiles pour toutes sortes

de solutions dans le domaine des services.

L’intégration régionale et les échanges commerciaux, y

compris les échanges Sud­Sud, reposent sur la réduc­

tion des asymétries et la cohérence des politiques.

Les outils d’établissement de normes de référence

des pays permettent aux analystes d’effectuer des

comparaisons appropriées, car l’on peut accéder à des

connaissances approfondies sur les pistes de déve­

loppement mises en application dans le contexte de

chaque pays. Une question essentielle à résoudre

De même, les institutions multilatérales

et bilatérales doivent se doter de

meilleures méthodes d’évaluation de

l’efficacité des différentes approches de

prestation de services, afin d’accélérer

le processus d’atteinte des résultats de

développement.

15Édition spéciale Assemblées annuelles

est de savoir comment et avec qui établir des

normes de référence dans l’évaluation des résul-

tats de développement et dans le domaine où

les experts de l’évaluation doivent être de plus

en plus versés.

Le troisième facteur tient à l’abondance de res-

sources naturelles, au regard notamment des

récentes découvertes. Le changement dans la loca­

lisation géographique de la richesse en ressources

naturelles et la pression que cela comporte pour l’agri­

culture et la diversification économique entraîne des

changements dans les modes de stabilité sociale et

de prospérité économique des pays. Le rôle du savoir,

et bien entendu la capacité à gérer efficacement de

telles ressources, sont contraignants (ACBF, 2013).

Facteurs de changement : capacité à transformer l’agriculture

Les modes de production alimentaire évoluent par­

tout en Afrique en raison de la capacité accrue des

pays à appliquer des stratégies agricoles efficaces. La

façon d’utiliser la production agricole pour équilibrer

la dépendance à l’égard de ressources naturelles revêt

également une importance accrue pour les décideurs,

car elle requiert des capacités supérieures à concevoir

et à gérer des aspects comme les marchés alimen­

taires, l’information sur les produits alimentaires et

les données agro­écologiques. Si les pays ont réalisé

des progrès dans la fourniture de l’accès à l’informa­

tion et la participation effective du secteur privé à

la transformation des produits agricoles (comme les

forêts en produits ligneux et en mobilier), des défis

restent à relever pour mobiliser les compétences

requises et pour soutenir la formation et l’innovation

globales susceptibles de favoriser une diversification

des économies (ACBF, 2012). En effet, la capacité à

gérer l’accès à la terre, à l’eau et à l’énergie fait

ressortir l’importance des connaissances scien-

tifiques et politiques, et passe par l’utilisation

de méthodes artisanales pour évaluer ce qui

fonctionne et ce qui ne marche pas.

Le quatrième moteur est la technologie. Les avan­

cées dans les technologies de la communication,

les approches de l’économie du savoir et les progrès

dans l’utilisation de la science et de la technologie

pour promouvoir le développement évoluent en

Afrique. La capacité à accéder facilement à l’infor­

mation influe sur les marchés de la publicité et des

télécommunications, tout en étant perceptible dans

les innovations bien pensées introduites dans le

secteur bancaire. La technologie donne une réalité

au concept d’« économie de l’expérience », comme

en atteste la différenciation entre les groupes de

consommateurs et les pays, selon le goût et la

préférence des biens plus facilement disponibles

grâce à la grande distribution (Léautier, 2012). La

différenciation est visible dans les divers modes de

consommation du chocolat en Afrique, dans des

pays comme l’Algérie et l’Afrique du Sud (Redruello,

2010). Il existe également un parallèle dans la crois­

sance de la demande en produits issus de l’agriculture

biologique destinés à la consommation locale et à

l’exportation, parce que l’information sanitaire est

facilement disponible. Dans les villes, la publicité par

le bouche­à­oreille au téléphone et par texto (SMS)

est en train de créer des marchés pour les produits

locaux précédemment considérés comme propriétés

exclusives, ce qui accélère davantage les modes de

changement. De même, l’utilisation des systèmes de

messagerie pour propager l’information accentue

également la pression sur la performance du ser­

vice public, au fur et à mesure que les formulaires

à remplir par les citoyens deviennent « mobiles ».

À Johannesburg, les automobilistes qui traversent

un nid­de­poule peuvent le signaler en ligne, en

16 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

utilisant un téléphone cellulaire ou un site mobile

(Madumo, 2011). L’implication de tels changements

sur le rôle des citoyens est l’importance accrue de la

recherche, des données et du dialogue afin d’amélio­

rer le discours, le débat de politique et la gouvernance

économique dans les communautés économiques

qui produisent les produits primaires et dans les

communautés qui consomment ces produits dans

les villes ou les destinations des exportations. Le raf-

finement dans l’utilisation de la technologie met

également la pression sur les évaluateurs, car

la marge d’erreurs est réduite et les jugements

concernant les résultats tombent rapidement

avant qu’on ne puisse les mesurer ou les évaluer.

Changement de rôle du citoyen : du consommateur au régulateur de services

Que signifient tous ces changements pour le rôle du

citoyen moyen dans la gouvernance de l’apprentissage

et le partage de connaissances, en particulier pour

tirer des enseignements du suivi et de l’évaluation ?

Aujourd’hui en Afrique, les citoyens ont un meilleur

accès à l’information et peuvent de ce fait jouer le

rôle important qui consiste à tenir les responsables

politiques comptables de leurs actes. Une étude

réalisée par l’ACBF (2012) montre que la plupart des

pays disposent désormais d’un mécanisme institu­

tionnalisé de dialogue établissant l’interaction entre

les institutions nationales, la société civile et le sec­

teur privé au sujet d’une grande variété de questions

de développement. Les citoyens peuvent creuser

pour extraire dans la grande masse d’informations

qu’ils reçoivent actuellement ce qui est vital pour

eux et pour la prise de décision. Les jeunes adeptes

des nouvelles technologies (la société numérique)

coexistent avec la génération « visuelle » et la société

de l’« oralité », ce qui constitue une représentation

complexe de la façon dont les décideurs peuvent

facilement accéder à la société pour des besoins

de développement. Il existe également des niveaux

d’alphabétisme différents, de l’élite économique à

l’élite financière en passant par les personnes ayant

une bonne connaissance des médias, avec lesquels

décideurs sont en contact au quotidien. Les regrou­

pements de citoyens actifs peuvent stimuler le chan­

gement plus rapidement que par le passé, avec des

conséquences pour les gestionnaires des processus

de développement. L’exemple donné par Madumo

(2012) sur la « le service d’assistance de la brigade

des nids de poule » en Afrique du Sud confère une

autre dimension à la participation des citoyens à la

prestation de services, une dimension dans laquelle les

institutions du secteur privé coopèrent avec l’adminis­

tration provinciale et locale pour trouver une solution

à un problème commun. Une telle subtilité chez

les citoyens requiert des dirigeants qu’ils fassent

preuve de solidarité, et qu’ils mettent en place

des dispositifs de consultation et d’évaluation

incorporant des mécanismes de dialogue et de

participation.

La responsabilité des médias s’accroît à la lumière de ces mutations

Les changements déjà évoqués ont également un

impact sur les médias. Ces derniers ont plusieurs rôles

à jouer en matière de développement (Islam, 2002).

Ces rôles comprennent la nécessité d’informer, édu­

quer, connecter, façonner, observer et rapporter. Les

médias ont aussi une fonction primaire, qui consiste à

créer des plateformes ou à jeter les ponts d’un débat

fructueux et de discussions permettant d’instau­

rer la cohésion et de trouver un consensus sur des

questions essentielles. Les médias constituent par

17Édition spéciale Assemblées annuelles

ailleurs des canaux de diffusion des idées principales

visant à améliorer le discours, le débat sur les poli­

tiques et la gouvernance économique. Les maisons

de presse doivent prendre des actions de promotion

et de collaboration avec des champions (y compris

les champions des médias) susceptibles d’accroître

l’engagement des citoyens, tout en proposant des

informations « digestes » à la société.

Deuxièmement, il faut élaborer un code de conduite

et des normes d’éthique contraignantes pour l’en­

semble des parties prenantes des médias. La troi­

sième action consiste à faire un effort spécial pour

fournir des informations et débattre sur des questions

primordiales pour le développement – telles que

l’intégration régionale, le changement climatique, le

rôle des femmes, de nouvelles idées pour accroître

la productivité, etc.

Vitesse du changement contre cycles du changement : leçons tirées du printemps arabe

Le mode de changement en Afrique du Nord

a également fait ressortir une faiblesse dans la

mesure des résultats de développement. La dépen­

dance excessive à l’égard de l’évaluation de la crois­

sance économique au détriment de la création

d’emplois a donné l’illusion que les indicateurs de

succès étaient réunis. Après la crise financière de

2008, plusieurs questions se posent sur les don­

nées qu’il faut collecter pour évaluer le niveau de

développement économique ou sur les stratégies

qu’il faut suivre pour générer des emplois (Fulton,

2010), car les choix peuvent avoir des implications

politiques différentes. Le perfectionnement des

méthodes d’évaluation mérite également d’être

pris en compte, car une ventilation selon les types

d’emploi s’avère essentielle pour saisir la dyna­

mique des divers groupes d’intérêt – comme les

travailleurs éduqués au chômage, ainsi que la part

et l’importance des personnes en auto­emploi. Le

genre de partenariats qui doit être établi entre

les universités et le secteur privé est également

déterminant dans les lacunes observées en matière

d’évaluation de la relation qui existe entre les

systèmes d’évaluation et les outils de gestion du

marché du travail.

Les institutions de développement doivent élargir les

résultats à atteindre et renforcer le lien entre les acti­

vités et les résultats. Par exemple, il faut tenir compte

de l’accès différencié à l’emploi par genre ou du fait

qu’une forte croissance ne se traduit pas toujours

sur le plan économique par une capacité accrue à

générer des emplois. L’accès à l’information sur les

résultats de développement en Afrique du Nord et

la capacité à établir des comparaisons avec d’autres

pays ont permis aux jeunes de s’organiser spontané­

ment et dans la cohésion. Le secteur privé réagissait

rapidement au début de l’adaptation à l’évolution

des marques, mais la réaction a été plus lente dans le

contexte de l’économie politique. Les institutions

de développement doivent apprendre des autres

disciplines à être plus spontanées et à s’adapter

à des phénomènes qui évoluent rapidement,

surtout en ce qui concerne l’évaluation de l’im-

pact des événements à faible probabilité sur un

changement à grande échelle.

Que signifient tous ces changements

pour le rôle du citoyen moyen dans

la gouvernance de l’apprentissage

et le partage de connaissances, en

particulier pour tirer des enseignements

du suivi et de l’évaluation ?

18 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

Exemples de changement d’approche par des institutions de développementUn certain nombre d’organisations ont intégré le défi

qui consiste à mettre en place les écosystèmes d’ap­

prentissage les mieux adaptés à l’évaluation des pro­

grammes de développement. Sous l’impulsion de son

nouveau président, la Banque mondiale a mis au point

le concept de « banque de solutions », qui reconnaît

que les meilleures solutions aux problèmes écono­

miques et sociaux reposent souvent sur le fait que, dans

la vie de tous les jours, les individus et les communautés

s’adaptent aux enjeux (Banque mondiale, 2012). La BAD

a tiré des enseignements de l’évaluation de son appui

aux États fragiles et intègre l’apprentissage dans les «

conseils à point nommé », ainsi que l’apprentissage

dans tous les pays et les expériences différentes (BAD,

2012). L’ACBF est en train d’expérimenter les systèmes

d’apprentissage qui peuvent être utilisés pour l’évalua­

tion et la correction à mi­parcours. Un de ces modèles

est le réseau de 96 universités soutenues par l’ACBF.

Ces universités travaillent de concert pour réformer

leurs programmes d’études en utilisant un écosystème

d’apprentissage conjoint. L’écosystème est dénommé

EPMAN, ce qui signifie réseau de politique économique

et de gestion. En partenariat avec Sciences­Po, Paris,

l’ACBF propose aussi une formation au leadership,

intitulée « Leadership dans un monde globalisé »,

qui connecte Sciences­Po à cinq universités d’Afrique.

Les participants mettent au point conjointement des

solutions pour de nombreux cas d’étude tirés de la

vie réelle, en utilisant des méthodes comme la plani­

fication de scénarios, les jeux de négociation et une

vision participative.

Les autres organisations qui ont amélioré les écosys­

tèmes destinés à l’évaluation et à l’apprentissage sont

le réseau d’innovateurs ou d’entrepreneurs sociaux

qui recherchent des solutions aux problèmes de

développement, appelé Ashoka Fellows (Drayton,

2006). Il existe également plusieurs réseaux de déci­

deurs – qui apprennent ensemble en échangeant

des connaissances tacites de pair à pair – tels que

le portail d’échange de connaissances Sud­Sud de

l’Institut de la Banque mondiale (IBM, 2012). D’autres

exemples sont le Réseau de développement de solu­

tions durables (SDSN), qui est un réseau d’experts

qualifiés de diverses disciplines qui transcendent les

barrières, afin de résoudre des conflits et de résoudre

des problèmes tels que le changement climatique

(http://unsdsn.org/).

Les écosystèmes d’apprentissage réussis partagent cinq

caractéristiques : balayage de solutions, questionne­

ment, échange de connaissances tacites, création de

nouvelles méthodes de travail et orchestration active

utilisant du temps et des efforts (Senge et al, 2008).

De tels environnements d’apprentissage associent

des approches orientées et guidées efficacement,

mais les processus ne sont pas contrôlés à partir d’un

point central. L’ACBF collabore avec la BAD pour

gérer un écosystème dans ce qui constitue une com­

munauté de pratiques pour l’évaluation et l’appren­

tissage en matière de développement en Afrique,

appelée AFCOP. Le rôle de l’ACBF dans l’AFCOP est

de connecter les sources de savoir et l’innovation,

tout en élaborant des études de cas, des directives et

des outils analytiques sur les bonnes pratiques émer­

gentes sur la gestion des résultats de développement.

De telles pratiques sont recueillies en utilisant une

combinaison de plateformes, y compris en ligne, et

sont partagées dans des forums annuels, ainsi que sur

une base quotidienne.

Par conséquent, que doit-on faire pour

que les médias jouent un rôle efficace

d’appui au suivi-évaluation dans ce

nouvel environnement ?

19Édition spéciale Assemblées annuelles

Que peuvent faire des entités comme l’ACBF pour appuyer les citoyens, l’État et les médias en Afrique ?Les partenaires au développement et des acteurs

comme l’ACBF peuvent appuyer les processus et

les plateformes qui engagent les citoyens, les déci­

deurs et les médias dans des aspects clés comme la

stratégie de développement, la réforme politique et

l’innovation. Il s’agit notamment de l’appui d’orga­

nisations faîtières telles que le Conseil de coordina­

tion non gouvernementale (NGOCC) en Zambie,

dont la responsabilisation a été établie en dépit des

problèmes de coordination et de communication

(Mufane et al, 1996), et qui sont efficaces pour

rapprocher la politique des populations. L’ACBF

peut aussi mener la recherche et faire en sorte

que les données et les points de repère soient

disponibles pour améliorer le discours et le débat

sur les politiques. Le travail consistant à publier

le rapport des indicateurs de capacité en Afrique

(ACIR) chaque année et la diversité des documents

de travail sur les sujets d’intérêt pour le dévelop­

pement constituent un bon exemple d’échange de

connaissances réalisé par l’ACBF. Les politiques et

plateformes d’appui qui améliorent le dialogue et

le débat et améliorent la prise de décision et les

résultats de développement sont un autre domaine

d’intervention possible. Par exemple, à l’Union

africaine, l’ACBF a appuyé l’achat de systèmes de

vote, ce qui a favorisé une prise de décision plus

intégrée et transparente.

Frannie Léautier est le Secrétaire exécutif de la Fondation Africaine pour le Renforcement des Capacités. Elle est une ancienne vice­présidente et directrice de l’Institut de la Banque mondiale. Elle est titulaire d’un Licence en génie Civil de l’Université de Dar es­Salaam ; d’une maîtrise en transport et d’un doctorat en systèmes d’Infrastructure, MIT

20 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

La Gestion du savoir continue d’être une partie

importante du programme de développement de

la Banque. Cependant, la conception et la mise en

place d’un système de gestion du savoir efficace à la

Banque (et en général) est complexe et commande

l’adoption d’une approche à l’échelle de la Banque.

Le présent article cherche à améliorer notre compré­

hension de la Banque africaine de développement

en tant qu’institution du savoir efficace et à mettre

en évidence l’importance de la gestion du savoir, en

discutant de trois points : i) quelles sont les caracté­

ristiques de la Banque en tant qu’institution du savoir

efficace ? ii) quelle est l’importance de cet objectif ?

iii) comment cet objectif sera­t­il atteint ?

1. La BAD en tant qu’institution du savoir efficace

Pour la Banque africaine de développement, la pra­

tique de la gestion du savoir, qui signifie produire,

mobiliser, diffuser et appliquer le savoir est tout

sauf une nouveauté. Depuis la création de la BAD

en 1964, son personnel mène des activités comme

l’analyse de projets, le partage d’expériences au plan

interne et avec des parties prenantes externes, sans

oublier la préparation et la diffusion de rapports et

publications phares. Cependant, il a fallu attendre

2005 pour que le processus de gestion du savoir

soit formalisé, avec l’approbation de la première

stratégie de gestion du savoir (2005–2007). La dyna­

mique ainsi enclenchée s’est amplifiée en 2006 avec

la création du Bureau de l’Économiste en chef, dont

le mandat consiste à renforcer la gestion du savoir

au sein de l’institution et de transformer la BAD en

une « banque du savoir ». La vision articulée par la

Banque dans sa deuxième stratégie de gestion du

savoir (2008–2012) était de devenir la « principale

Banque du savoir en Afrique ».

Au fur et à mesure que l’acception du terme évolue,

nous devons réfléchir à ce à quoi pourrait ressem­

bler « la Banque en tant qu’institution du savoir

efficace » – conformément à la stratégie à long

terme (2013–2022). En tant qu’institution du savoir,

la Banque doit aussi être une institution fondée sur

l’apprentissage. Autrement dit, elle doit renouve­

ler et renforcer constamment sa propre capacité à

générer une recherche pointue et pertinente pour

les décideurs des PMR et/ou pour ses opérations de

financement. À ce titre, le concept de « banque du

savoir » est une vision qui a pour but d’engager le

personnel et les parties prenantes dans l’action, sans

être uniquement une cible fixe mesurable à atteindre

à une date spécifique.

La Banque africaine de développement— une institution du savoir efficace

Mthuli Ncube, Économiste en chef et Vice-

président, BAD; Zuzana Brixiova, conseiller du

Vice-président; et Basil Jones, l’assistant du

Vice-président

21Édition spéciale Assemblées annuelles

Essayer de devenir une institution du savoir efficace

ne signifie pas forcément que la Banque compte

exclusivement sur le savoir généré « en interne ».

Le rôle de la Banque en tant qu’institution du savoir

efficace doit être complété par le fait qu’elle est aussi

un courtier du savoir, autrement dit une institution

qui établit le lien entre des entités différentes ou

des individus (producteurs et utilisateurs du savoir),

qui autrement ne seraient jamais entrés en contact

l’un avec l’autre et les connecte pour partager et

échanger des connaissances. La Banque possède

toutes les caractéristiques essentielles de courtage

des connaissances dans l’espace politique africain,

notamment la crédibilité, la viabilité, la neutralité

politique, l’expertise technique et une connaissance

approfondie du continent.

La question fondamentale que pose le courtage

des connaissances est de savoir comment la BAD

doit réaliser à la fois le travail qui consiste à com­

muniquer, à assurer la médiation et à traduire la

recherche en politique et en actes concrets. En

étant un « courtier du savoir », la Banque peut ser­

vir d’interface entre les chercheurs qui produisent le

savoir et les décideurs qui en sont les consomma­

teurs potentiels. Le courtage des connaissances est

un moyen de résorber le déficit d’information des

utilisateurs, qui résulte probablement du fait que

ces utilisateurs ignorent qu’il existe des informa­

tions potentiellement utiles susceptibles de leur

permettre de résoudre leurs problèmes. En tant que

courtier du savoir, la Banque pourrait jouer le rôle

de facilitateur, qui compulse, synthétise et transfère

des informations. Ce rôle ne doit pas être en porte­

à­faux avec ses ambitions de production du savoir.

Au contraire, les deux sont complémentaires et se

renforcent mutuellement.

2. Pourquoi la Banque devrait-elle rester une institution du savoir efficace ?

La décision de la Banque de devenir une institution

du savoir reflète aussi bien la demande émanant des

PMR que son ambition d’être la « principale institu­

tion de développement du continent » et de trans­

former sa connaissance de l’Afrique en une source

pérenne d’avantage comparatif. Au cours des récentes

années, la gestion du savoir a été l’objet d’une attention

plus soutenue, y compris au niveau des complexes

opérationnels de la Banque. Cette tendance devrait

se poursuivre et même s’accélérer. Du « côté de la

demande », la tendance sera soutenue par l’évolution

de l’Afrique vers un marché émergent, l’émergence

de la classe moyenne, l’adoption des technologies et

l’innovation. Une Afrique émergente demandera de

plus en plus à la Banque de lui proposer des services

fondés sur le savoir tels que la recherche sur les poli­

tiques, des conseils et le dialogue, en lieu et place des

financements. Du « côté de l’offre », les contraintes

budgétaires internationales et le financement accru

du développement du continent par le secteur privé

sont en train de rééquilibrer les rôles de la Banque, de

l’octroi de prêts à la production de savoir.

Jusqu’à présent, l’écart qui sépare les chercheurs

d’Afrique et d’ailleurs et les décideurs africains a

semblé apparent et considérable. Pour la Banque

La question fondamentale que pose

le courtage des connaissances est de

savoir comment la BAD doit réaliser

à la fois le travail qui consiste à

communiquer, à assurer la médiation

et à traduire la recherche en politique

et en actes concrets.

22 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

africaine de développement, il s’agit là d’une opportu­

nité de poursuivre sa vision du savoir en sa qualité de

principale banque du savoir en Afrique, et de jouer un

rôle catalyseur dans le comblement de cet écart. La

BAD peut apporter sa contribution en encourageant

et en soutenant la production, la diffusion et l’applica­

tion de la recherche, avec pour corollaire l’adoption de

politiques et de technologies qui améliorent le vécu

quotidien des populations sur le continent.

L’avantage comparatif utilisé par la Banque pour deve­

nir la « principale institution du savoir en Afrique »

provient de son implication avec les pays dans le

projet et de plus en plus également de sa politique

en amont. Outre le fait d’être implantée en Afrique,

cet engagement auprès des pays donne à la Banque

des perspectives uniques sur le fonctionnement des

économies africaines et sur les besoins de ses clients

en matière d’évolution. Au­delà de sa compréhen­

sion profonde de l’Afrique, la Banque recèle, dans

ses effectifs, des personnes capables de générer une

recherche pertinente sur les politiques, de diffuser

une telle recherche et de la mettre en application. Le

courtage des connaissances complète la production

du savoir en encourageant les décideurs à faire preuve

de plus d’ouverture dans l’utilisation des constatations

de la recherche. Il encourage aussi les chercheurs à

entreprendre une recherche pertinente pour la prise

de décision et à communiquer avec les décideurs

pour permettre à ces derniers de tirer profit des

conclusions de cette recherche.

Le rôle accru du savoir dans les activités de la Banque

est en phase avec la tendance actuelle au niveau

de l’économie mondiale et en Afrique, où le savoir

est en train de devenir une source de création de

richesses. Parallèlement, la Banque restera une ins­

titution d’octroi de prêts. Lorsqu’on compare le rôle

de financement et le rôle de savoir, on constate que

l’octroi de prêts a jusqu’à présent occupé une place

plus importante dans les activités de la Banque,

mais cette situation doit changer au regard des

besoins croissants des pays africains. Chaque jour,

l’importance de chaque aspect dépendra des défis

du développement à relever par un pays ou une

région donnée. À terme, c’est la combinaison unique

de son savoir, des ressources financières qu’elle est

capable de fournir ou de mobiliser, et de la confiance

que les pays africains lui témoignent, qui permet à

la Banque d’être particulièrement bien positionnée

pour avoir un impact majeur sur le développement

du continent.

3. Comment la Banque peut-elle devenir une institution du savoir plus efficace ?

Pour qu’une institution du savoir soit efficace, l’on

insistera jamais assez sur le rôle d’une gestion du savoir

parfaitement codifiée, à savoir créer, collecter, diffuser et

utiliser le savoir. Cependant, les trois types de connais­

sances qui coexistent à la Banque (explicites, tacites

et intrinsèques) et leurs audiences différentes (par

exemple, interne, externe pour une audience choisie,

et externe pour tous) rendent cette gestion simple en

principe mais complexe dans les faits1. Si la responsabi­

1 Les connaissances explicites sont codifiées et enregistrées, les connais­

sances tacites sont acquises de l’expérience de développement, à travers

l’interaction avec des partenaires, des clients et des collègues, alors que la

Le rôle accru du savoir dans les

activités de la Banque est en phase

avec la tendance actuelle au niveau

de l’économie mondiale et en Afrique,

où le savoir est en train de devenir une

source de création de richesses.

23Édition spéciale Assemblées annuelles

lité principale de la gestion du savoir à l’intérieur et en

dehors de la Banque incombe au Bureau de l’écono­

miste en chef, les activités dans le domaine du savoir

ont fait tache d’huile dans d’autres départements.

Progrès réalisésLa Banque a déjà réalisé des progrès remarquables sur

certains aspects de la gestion du savoir, en particulier

la production et la diffusion des connaissances expli­

cites en tant que bien public (des produits partagés

librement avec une audience extérieure), comme le

montrent les exemples ci­après :

• laBanqueafaitpreuvedeleadershipéclairéen

soumettant les questions émergentes d’impor­

tance stratégique à l’attention des décideurs dans

les PMR et ailleurs. On peut citer à titre d’illustra­

tion les actions à destination de la classe moyenne

en Afrique, sur l’emploi des jeunes et sur les flux

financiers illicites hors du continent ;

• laBanqueaaccrulenombre,laqualitéetlaper­

tinence des rapports analytiques et des dialogues

d’orientation politique entrepris au cours des

dernières années, en particulier dans les pays à

revenu intermédiaire d’Afrique. Cela atteste de

sa capacité à anticiper et répondre aux divers

besoins des clients ;

• laBanqueasoutenulamisesurpiedd’uncomité

de dix ministres africains des Finances et gouver­

neurs de banques centrales chargé d’aider les PMR

à contrer les effets de la crise financière mondiale ;

• unportailstatistiqueconvivialetdelibre-accès

couvrant tous les principaux domaines de déve­

loppement a été créé ;

• la Banque a renforcé la capacité des PMR à

conduire une analyse et une conception écono­

miques de qualité, et à appliquer des politiques

connaissance intrinsèque est développée lors de la préparation des documents

de projets ou de l’évaluation des opérations de prêt.

efficaces grâce aux formations dispensées par

l’Institut africain de développement.

La Banque a également réalisé des progrès dans la

mise en œuvre de la recherche. Par exemple, les

notes d’information économique produites par le

Département de la Recherche émanaient des opéra­

tions de la Banque ou portaient sur ces opérations. Les

économistes pays sont devenus les principaux auteurs

des notes de pays publiées dans les Perspectives éco­

nomiques en Afrique. Ils ont également contribué à

la création d’une base de données statistiques sous­

jacente. De cette manière, les connaissances tacites

et intrinsèques que l’on retrouve principalement dans

les départements opérationnels sont intégrées dans

l’une des publications phares de la Banque.

Perspectivesa. Formuler une stratégie de gestion du savoir

En vue de renforcer le rôle de la Banque afri­

caine de développement en tant qu’institution

du savoir, le Bureau de l’économiste en chef a

récemment mis en place un comité de gestion du

savoir (KMC) couvrant les différents complexes,

qui agit comme conseiller et comme organe de

réflexion stratégique sur la gestion du savoir.

En 2013, la stratégie de gestion du savoir sera

élaborée, afin d’arrimer la gestion du savoir aux

piliers de la stratégie à long terme – croissance

La Banque a également réalisé des

progrès dans la mise en œuvre de

la recherche. Par exemple, les notes

d’information économique produites

par le Département de la Recherche

émanaient des opérations de la Banque

ou portaient sur ces opérations.

24 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

inclusive et transition vers une croissance verte

– et d’accroître l’importance de l’efficacité du

développement dans les opérations de la Banque.

Étant donné que la gestion du savoir, en tant

que processus conscient, est toujours nouvelle à

la Banque, l’institution doit formuler un modèle

approprié permettant de l’aborder à l’échelle du

système. Les expériences d’autres institutions

indiquent que, jusqu’à présent, deux principaux

modèles de gestion du savoir ont émergé, dont

l’application dépend du modèle opérationnel glo­

bal et de l’avantage comparatif d’une organisation

donnée (Hansen et al., 1999). Ces deux modèles,

qui reconnaissent que le défi majeur de la gestion

du savoir est le transfert de connaissances tacites

et intrinsèques, sont les suivants :

• lastratégiedecodification,axéesur lesTICet

les bases de données/fichiers. Elle est générale­

ment utile à des organisations qui remplissent des

tâches systématiques et qui doivent résoudre des

problèmes communs, répétitifs et sont dotés de

systèmes de TIC bien développés ;

• lastratégiedepersonnalisation,fondéesur les

interactions personnelles. Elle convient plus aux

institutions qui accordent une place importante

à l’innovation dans leurs activités, aux institu­

tions dans lesquelles les clients rencontrent des

problèmes uniques et où le même savoir ne peut

pas s’appliquer à des problèmes différents.

Dans le contexte de la Banque, où la production de

savoir et l’innovation sont cruciales, le second modèle

(fondé sur l’interaction face­à­face) paraît plus adapté.

Le savoir le plus précieux se trouve dans l’esprit des

personnels de la Banque, et cela ne peut pas être

codifié facilement. L’expérience des autres institutions

fondées sur le savoir (les bureaux d’études sont les

plus expérimentés) qui ont essayé de codifier leur

savoir­faire a montré que, en l’absence de mesures

d’incitation, les gens ont tendance à enregistrer leurs

expériences partiellement, conservant les meilleures

parties pour eux­mêmes. En revanche, le transfert

personnalisé de connaissances est bien plus approprié

pour la Banque, au regard notamment de l’environ­

nement politique et économique en mutation rapide

en Afrique comme partout ailleurs. Toutefois, l’instau­

ration de la confiance et les groupes qui poursuivent

les mêmes objectifs constituent des conditions sine

qua non au bon fonctionnement de la stratégie de

personnalisation du transfert des connaissances.

b. Créer une culture du savoir

Il a été reconnu que le savoir le plus précieux de

la Banque est la connaissance tacite, qui se trouve

dans les têtes des membres du personnel, et qui

est généralement acquise à travers l’expérience

opérationnelle ou les leçons tirées de l’évalua­

tion. La « culture du savoir », qui permet aux

employés de percevoir l’utilité de la production,

de la collecte, de la diffusion et de l’application du

savoir dans leurs activités quotidiennes, est donc

requise pour exploiter cette ressource inestimable.

La culture du savoir est aussi sous­tendue par la

prise de risque, l’esprit d’innovation et l’appren­

tissage continu. Dans le contexte de la Banque

africaine de développement, qui doit régler des

problèmes de la vie réelle, l’apprentissage n’est

Dans le contexte de la Banque, où la

production de savoir et l’innovation

sont cruciales, le second modèle (fondé

sur l’interaction face-à-face) paraît

plus adapté. Le savoir le plus précieux

se trouve dans l’esprit des personnels

de la Banque, et cela ne peut pas être

codifié facilement.

25Édition spéciale Assemblées annuelles

utile que lorsqu’il est utilisé dans le cadre de

l’action.

En tant qu’institution fondée sur le savoir et l’ap­

prentissage, la Banque devrait également revisiter

ses propres hypothèses et pratiques, en particulier

dans ses opérations, pour voir si des « solutions

rapides » – en phase avec la stratégie à long

terme – peuvent être adoptées. La décentrali­

sation vers les bureaux extérieurs et le retour au

siège constituent de grandes opportunités de

revoir certaines de nos méthodes et d’actualiser

les processus opérationnels et de TIC.

Les approches descendantes de la gestion du savoir

fonctionnent rarement—on a plutôt besoin d’inci­

tations récompensant les membres du personnel

qui contribuent à la gestion du savoir (Hauschild

et al., 2001). Cependant, dans de grandes organisa­

tions décentralisées comme la Banque, la hiérarchie

fonctionnelle peut entraver la coopération entre

les secteurs et les unités. Il est particulièrement

important d’encourager la collaboration entre les

employés des différents domaines d’activités de

la Banque, soit au moyen de la rotation du per­

sonnel, soit par des congés sabbatiques ou par la

constitution d’équipes comprenant des personnes

en service dans diverses unités.

c. Encourager l’innovation

Le concept d’innovation a évolué, passant de

la notion classique de l’invention fondée sur la

science et la technologie à la compilation des

connaissances existantes en plus de la mise au

point de quelque chose de nouveau. Pour stimu­

ler cette innovation, le rôle de la Banque a aussi

évolué. De nos jours, la portée de l’innovation et

ses origines géographiques se sont nettement

élargis (Doz et Wilson, 2012). L’Afrique a déjà*

prouvé sa capacité à innover et est devenue en

fait un leader mondial dans l’application de la

technologie mobile aux opérations bancaires,

à l’agriculture, à la santé et même aux activités

gouvernementales (m­banque, m­agriculture,

m­santé et m­gouvernement).

Comme le montre l’exemple de l’application des

m­technologies, les innovations réussies d’au­

jourd’hui résultent souvent de la nécessité de

combler des attentes de clients dans les marchés

émergents. À cet égard, la coopération Sud­Sud

peut réellement aider les marchés africains émer­

gents, entre autres, à devenir des sociétés fondées

sur le savoir auxquels ces pays aspirent.

Pour la Banque africaine de développement, compte

tenu de sa présence accrue sur le terrain dans les

PMR, la nature changeante de l’innovation crée une

opportunité de doper la créativité et le potentiel

d’innovation, tant au niveau des pays qu’au niveau

régional. La Banque peut produire, mobiliser et parta­

ger un savoir de pointe sur les principaux enjeux de

développement auxquels le continent est confronté,

et continuer à travailler pour devenir la principale

institution du savoir en Afrique.

d. Établir des partenariats stratégiques

Compte tenu de ses ressources limitées et de ses

priorités stratégiques bien définies, la Banque à

Le concept d’innovation a évolué,

passant de la notion classique de

l’invention fondée sur la science et

la technologie à la compilation des

connaissances existantes en plus de

la mise au point de quelque chose de

nouveau.

26 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

elle seule ne doit et ne peut pas fournir tout le

savoir dont l’Afrique a besoin. Les frontières entre

les régions et les secteurs étant de moins en moins

étanches, la Banque comptera sur la coopération

avec des partenaires appropriés du secteur public

et du secteur privé, des ONG, des organisations

internationales, d’autres BMD et des universités.

Par exemple, un groupe de travail sur la gestion

du savoir pourrait être crée pour partager des

expériences et les meilleures pratiques.

De tels partenariats stratégiques, fondés sur les

principes de la similitude des objectifs et de la

complémentarité des points forts, devraient per­

mettre à la Banque de centrer ses efforts d’inno­

vation sur les principaux piliers de la stratégie à

long terme, ainsi que sur le financement innovant

destiné aux PMR. Le résultat ultime devrait être

un plus grand impact en termes de développe­

ment, et des améliorations dans les conditions

de vie des populations.

Mthuli Ncube est Économiste en chef et Vice­président, ECON, de la Banque africaine de développe­ment. Il etait doyen du Faculty of Commerce Law and Management; Doyen et professeur de Finance au Wits Business School, University of the Witwatersrand, South Africa; et professeur de finance au London School of Economics, Royaume Uni. Il est l’auteur du: “Mathematical Finance,” “Financial Systems and Monetary Policy in Africa”

Zuzana Brixiova est le conseiller du Vice­président. Avant la BAD, elle a travaillé pour le PNUD, le FMI et l’OCDE. Elle est titulaire d’un doctorat en économie (University of Minnesota) et d’ une licence en finance du Prague University of Economics.

Basil Jones est l’assistant du Vice­président. Avant la BAD, Il a travaillé pour le Centre de recherche pour le développement international (CRDI). Il est titulaire d’un doctorat en economie.

De tels partenariats stratégiques,

fondés sur les principes de la similitude

des objectifs et de la complémentarité

des points forts, devraient permettre

à la Banque de centrer ses efforts

d’innovation sur les principaux piliers

de la stratégie à long terme, ainsi que

sur le financement innovant destiné

aux PMR.

27Édition spéciale Assemblées annuelles

Les banques de développement évoluent et s’ef­

forcent de répondre aux défis de développement

émergents et aux besoins des gouvernements clients.

Cela est particulièrement évident dans la demande

en produits et services du savoir. Si, à une certaine

époque, les gouvernements clients avaient principale­

ment besoin de ressources financières, ils demandent

de plus en plus aux banques de développement

de leur fournir un appui en matière d’acquisition

de connaissances, afin de leur permettre de réduire

la pauvreté et de parvenir à une croissance solide,

durable et inclusive.

Pour satisfaire cette demande, il faut un savant dosage

entre savoir­faire et ressources financières, et la per­

formance des banques de développement sera de

plus en plus évaluée à l’aune de leur efficacité dans

ce domaine.

La Banque asiatique de développement (BAsD) est

devenue une institution plus axée sur le savoir – en

particulier depuis l’adoption d’un programme de ges­

tion du savoir en 2004. D’importantes ressources en

personnel et budgétaires sont actuellement allouées

aux activités liées à l’acquisition de connaissances,

car les solutions du savoir sont l’un des cinq piliers

du changement pour le développement identifiés

pour renforcer l’accent mis sur les opérations dans

la stratégie à long terme de la BAsD pour 2020, qui

fut approuvée en 2008.

Tout ce travail est en cours – comme le montre

l’étude réalisée récemment par le Département de

l’évaluation indépendante sur la performance de la

BAsD en matière d’acquisition du savoir . Les banques

de développement ont beaucoup à apprendre de

leurs expériences respectives concernant ce qu’il

faut faire pour devenir des institutions du savoir plus

efficaces. Les résultats de l’étude – les succès et les

domaines à améliorer – pourraient intéresser les

praticiens qui utilisent les solutions du savoir pour

améliorer les résultats de développement. Cinq leçons

sont présentées ci­dessous.

Solutions du savoir pour de meilleurs résultats de développement

Vinod Thomas, directeur général,

Département de l’Évaluation indépendante

à la BAsD

Pour satisfaire cette demande, il

faut un savant dosage entre savoir-

faire et ressources financières, et

la performance des banques de

développement sera de plus en plus

évaluée à l’aune de leur efficacité

dans ce domaine.

28 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

1. L’élargissement des programmes d’acquisition

du savoir requiert une orientation stratégique

de haut niveau. La BAsD a adopté plusieurs

approches de gestion du savoir sans une coor­

dination et une cohérence suffisantes, et il man­

quait de clarté et de consensus sur les rôles des

différentes unités de l’institution concernant la

gestion du savoir. La faiblesse de l’orientation et

de l’appropriation stratégiques de haut niveau a

entravé le développement de la gestion du savoir

à la BAsD.

2. Les besoins prioritaires des pays et des clients

sont des facteurs déterminants dans la formula­

tion de stratégies d’acquisition du savoir. Il s’agit

là d’un défi, au regard des mutations rapides qui

s’opèrent dans les environnements physiques,

financiers et économiques. L’identification des

besoins en connaissances, en particulier au

niveau des pays, doit être efficace et soutenue

par des mécanismes de retour d’information

permettant de déterminer les besoins et les

demandes des clients. Une coordination étroite

avec les principaux partenaires peut permettre

d’atteindre ce niveau en réduisant les écarts

en matière de connaissances et en évitant le

chevauchement des efforts dans le domaine

des connaissances.

3. Une répartition plus efficace des produits et

services du savoir peut renforcer l’utilisation de

la connaissance. Cela peut se faire à travers les

médias traditionnels et sociaux, à travers des

séminaires et d’autres fora et par l’utilisation du

suivi et du retour d’information pour évaluer le

degré de satisfaction des clients et leur volonté

d’utiliser les connaissances acquises. Les produits

du savoir doivent être facilement accessibles. Par

exemple, les publications de la BAsD (et celles du

Département de l’évaluation indépendante) sont

disponibles en téléchargement gratuit.

4. Il est important d’évaluer ce qui a marché et ce

qui n’a pas marché. Les mécanismes de suivi et de

retour d’information destinés à évaluer la satisfac­

tion des clients – la principale audience des pro­

duits et services du savoir – sont essentiels pour

générer des produits du savoir influents. La qualité

des produits du savoir doit être suive avec pré­

caution et les impacts doivent être évalués. Une

revue externe de 85 % des publications récentes

de la BAsD a révélé qu’un tiers de ces publications

sont bonnes ou de qualité supérieure.

5. Une meilleure acquisition des connaissances

tacites peut permettre de renforcer le partage du

savoir. Les organisations de développement sont

des carrefours et des dépôts de connaissances

tacites de grande valeur accumulées à travers

des années d’apprentissage et grâce à l’expérience

du personnel. Le renforcement des intranets,

des outils de médias sociaux, des fora en ligne

et des plateformes similaires est encouragé pour

la production et le partage des connaissances. À

la BAsD, les communautés de pratique établies

à cette fin ont abrité plus de 400 séminaires et

événements au cours de la période 2009­2011.

Cela étant, l’évaluation a permis de découvrir que

Tout le monde reconnaît désormais

que le savoir est essentiel pour lier

les initiatives de développement

distinctes, obtenir de meilleurs

résultats et générer un plus grand

impact à l’aide des ressources de

développement.

29Édition spéciale Assemblées annuelles

nombre de connaissances tacites de la BAsD ne

sont pas suffisamment exploitées, ce qui entrave

les efforts visant à générer un avantage concur­

rentiel pour ses produits et services du savoir

entre les pays membres en développement. Un

registre de compétences techniques du person­

nel, fonctionnant correctement, peut donner

une image plus claire du stock de connaissances

tacites disponibles au sein de l’institution.

De bons produits et services du savoir enrichissent

le débat sur les questions de développement et

favorisent la prise de décision. Perspectives de déve­

loppement en Asie, le rapport économique phare

de la BAsD, qui fournit une telle contribution, est

devenu une importante ressource dans le débat sur

la stratégie de l’Asie après la crise mondiale. Dans

tous ces produits, la participation et la collaboration

des parties prenantes sont essentielles pour produire

des ressources de connaissances utiles et influentes.

Tout le monde reconnaît désormais que le savoir est

essentiel pour lier les initiatives de développement

distinctes, obtenir de meilleurs résultats et générer un

plus grand impact à l’aide des ressources de dévelop­

pement. Cependant, pour nombre d’organisations,

la gestion du savoir reste un domaine complexe, qui

se développe. L’étude d’évaluation recommande à

la BAsD de réaliser des progrès stratégiques en ce

qui concerne la gestion du savoir – au lieu de se

contenter de l’affiner – pour tirer parti des gains

obtenus récemment dans son programme de gestion

du savoir et instaurer une culture du savoir au sein

de l’institution.

Vinod Thomas est le direct­eur général du Département Évaluation indépendante à la BAsD, depuis août 2011. Il a occupé auparavant les postes de directeur général et vice­président principal du Groupe d’évaluation indépendante, à la Banque mondiale. Il est titulaire d’un doctorat en économie de University of Chicago. Il est co­auteur de Multilateral Banks and the Development Process: Vital Links in the Results Chain publié récem­ment.

30 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

apprises

ce que vous prêchez :Pratiquez

Leçons

Leçons tirées de la gestion des connaissances : Avis de l’APQC

Réaliser un marché du savoir

Interaction de l’évaluation et de la gestion des connaissances : marchés, rivières et escaliers !

31Édition spéciale Assemblées annuelles

L’aPqc étudie et met en œuvre des approches

en matière de gestion des connaissances (GC) depuis

plus de 15 ans auprès de plus de 400 organisations.

Cet article résume une partie des conclusions de

l’APQC en la matière en sept leçons.

Leçon 1. Garantir le soutien des cadres supérieurs en matière de gestion des connaissances en établissant un solide bilan de rentabilité

La gestion des connaissances (GC) est un pro­

cessus systématique visant à interconnecter les

gens, leurs connaissances et les informations qu’ils

détiennent pour obtenir des résultats. Quiconque

se lance dans une stratégie de GC est confronté

à des questions types que tout bon dirigeant

doit se poser lorsqu’il opte pour une nouvelle

initiative, à savoir :

Pourquoi devrions­nous le faire (par exemple, quel

est le bilan de rentabilité) ?

Qui sera responsable (par exemple, de quels postes

et de quelles ressources avons­nous besoin) ?

Comment saurons­nous si cela fait une différence

(par exemple, Comment mesure­t­on les résultats) ?

Les cadres savent souvent combien la résolution des

problèmes de connaissances est facteur de réussite

future pour l’organisation. Ils savent faire le lien entre

la GC et leurs besoins et objectifs spécifiques et ne se

contentent pas d’un plan général visant à « simplifier

le partage de connaissance entre les employés ».

Leçon 2. Dépasser le besoin d’accumuler des connaissances comme une fin en soi

L’objectif de la GC ne consiste pas à poursuivre la

connaissance comme une fin en soi, bien que ce

soit une fin louable Définissez les problèmes ou les

opportunités de l’entreprise, puis identifiez les pro­

cessus qui semblent être à l’origine du « problème de

connaissance ». Par exemple, nous avons rencontré

des problèmes signalés par de nombreuses plaintes

récurrentes de clients concernant un processus qui n’a

toujours pas été résolu : erreur récurrente reproduite

dans l’ensemble des unités opérationnelles, la perte

de connaissances due au départ à la retraite de colla­

borateurs clés, difficultés à embaucher de nouvelles

recrues, commerciaux n’accédant pas suffisamment

aux conseils avisés d’experts lors de la réalisation de

ventes complexes.

Choisissez au maximum trois grands projets pour

commencer. Dressez un bilan de rentabilité ou

Leçons tirees de la gestion des connaissances : avis de l’ApqC

Carla O’Dell

32 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

définissez un plan d’action en fonction des résultats

mesurables et évitez de concevoir une plate­forme

tant que vous ne disposez pas d’un processus de

GC qui a fait ses preuves. Ainsi vous ne perdrez ni

votre temps, ni votre argent avec quelque chose qui

risquerait d’entraver les efforts que vous accomplirez

plus tard en termes de GC. Testez le processus avant

de tenter de l’informatiser.

Leçon 3. Déterminer quelles sont les connaissances importantes

Généralement, les organisations brassent des quan­

tités énormes de connaissances tacites et explicites,

dont seule une partie est précieuse et suffisamment

durable pour offrir à l’avenir un avantage concur­

rentiel et justifier un coût de conservation et de

transfert. La construction de grands référentiels et

de systèmes de gestion de contenu pour héberger

toutes les connaissances possibles et inimaginables

est une entreprise vaine.

Les connaissances sont de deux types : explicites

et tacites, également appelées connaissances

formelles/codifiées et informelles/non codifiées.

Les connaissances explicites sont faciles à mettre

sur papier et se présentent sous la forme de

livres et de documents, de formules, de rap­

ports de projets, de contrats, de diagrammes

de processus, de listes de leçons tirées, d’études

de cas, de livres blancs, de guides de politique,

etc. Certaines connaissances explicites peuvent

ne pas être utiles sans le contexte fourni par

l’expérience.

Les connaissances tacites peuvent résulter d’interac­

tions avec les employés et les clients. Les connais­

sances tacites sont difficiles à consigner, requièrent

un haut niveau d’expérience, sont difficiles à docu­

menter dans le détail, sont éphémères et transitoires.

Elles constituent également la base des jugements et

actions éclairées. Les organisations s’intéressant à la

perte de connaissance craignent généralement que

les connaissances tacites ne soient pas comprises

(rendues explicites) ou transférées afin que d’autres

puissent en profiter.

Les approches de GC concernant la gestion des

connaissances explicites peuvent être plus méca­

niques que les connaissances tacites qui restent plus

difficiles à assimiler et à réutiliser. Certaines approches,

comme les pratiques communautaires bien pensées,

peuvent s’adresser à ces deux types de connaissances.

L’astuce consiste à déterminer précisément quelles

sont les connaissances, où se trouvent­elles et de

quelles manières peuvent­elles être assimilées et

transférées.

Leçon 4. La conservation des connaissances

la conservation des connaissances : sans processus

systématique, sans personnes dévouées à la collecte

et sans infrastructure solide, les connaissances ne

peuvent pas être consignées. Il ne faut pas adopter

d’approche de GC (comme des pratiques communau­

taires ou un système d’entraide) avant d’avoir compris

le flux que vous essayez d’établir. La première étape de

toute initiative de GC réside dans la compréhension

du flux de connaissances souhaité. Une fois que vous

savez comment utilisez les connaissances et de quelles

connaissances vous avez besoin (de qui l’information

doit venir et à qui elle doit profiter), vous pouvez acti­

ver le processus à l’aide d’approches de GC standard

telles que des pratiques communautaires, le transfert

de bonnes pratiques, des programmes enseignant les

conclusions tirées, etc.

33Édition spéciale Assemblées annuelles

Leçon 5. L’informatique ne fait pas tout Les applications technologiques ne motivent pas les

gens à partager leurs connaissances ou à changer leur

comportement. La technologie est indispensable

pour la GC dans les organisations modernes, mais

la route vers un partage efficace des connaissances

est jonchée de « solutions de GC » abandonnées

parce qu’elles ont été mises en œuvre trop tôt. Ces

véhicules tombent vite en panne, s’ils prennent

tous leur départ en même temps. Il est essentiel de

choisir une technologie et de la mettre en œuvre

dans le cadre d’une initiative de changement de GC

systématique à plus grande échelle permettant un

flux de connaissances avérées entre les personnes

intrinsèquement intéressées par le partage des

connaissances.

Cela dit, il existe des outils merveilleux qui favorisent

la collaboration et aident à entretenir la mémoire

et les connaissances d’une organisation : logiciels

de collaboration d’entreprise, applications Web 2.0

comme wikis, blogs et réseaux sociaux. Utilisez­les

à bon escient.

Leçon 6. Faire tomber les barrières structurelles pour libérer le flux de connaissance et ne pas chercher à changer la « culture »

La gestion des connaissances consiste à permettre à

la plupart des gens de partager naturellement leur

savoir et d’apprendre des autres. Les obstacles au

partage des connaissances sont souvent structurels

: le temps manque, le processus est lourd, les gens

ne connaissent pas la source ou les destinataires et

ne sont pas certains de la confiance qu’ils peuvent

accorder aux informations ou les gens savent ins­

tinctivement que les connaissances tacites sont plus

riches que les connaissances explicites.

Pour garantir la réussite de vos initiatives de GC,

concentrez­vous sur ces obstacles, plutôt que sur la

psychologie de vos employés ou de votre « culture

». Chaque fois que cela est possible, l’intégration, la

consignation et la réutilisation des connaissances par­

tagées dans le travail lui­même donnent de la valeur

à ceux qui prennent part à des initiatives de GC. Les

employés doivent comprendre que leur évolution

professionnelle a été accélérée et prendre conscience

que leur travail a été simplifié. Les récompenses et

la reconnaissance sont importantes, même si elles

ne doivent pas remplacer les approches en matière

de partage des connaissances qui fonctionnent, et

doivent donner de l’importance à ceux qui en béné­

ficient. Une culture de partage des connaissances

constitue le résultat, plutôt que la condition préalable,

d’une stratégie de GC réussie.

Leçon 7. Mesure

L’APQC souligne l’importance de commencer par des

mesures organisationnelles probantes, c’est­à­dire de

comprendre les résultats opérationnels escomptés,

puis de travailler en tenant compte de ceux­ci pour

concevoir des activités de GC et des mesures axées

sur les résultats.

Généralement, les organisations

brassent des quantités énormes de

connaissances tacites et explicites,

dont seule une partie est précieuse

et suffisamment durable pour offrir

à l’avenir un avantage concurrentiel

et justifier un coût de conservation

et de transfert.

34 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

L’APQC propose de mesurer la chaîne de valeur conti­

nue, en commençant par les entrées ou les coûts, puis

en mesurant la participation/activité et en mettant en

corrélation les sorties avec les résultats professionnels.

Le cadre de mesure APQC illustre la relation entre les

entrées (investissements), le processus (les activités et

les comportements liés à la GC), et les résultats (les

objectifs de l’organisation). Les entrées comprennent

le temps, les salaires, et les coûts informatiques. Les

changements de processus incluent la durée du cycle,

la participation et la contribution à un ensemble

de connaissances. Les résultats importants pour

l’organisation incluent le maintient des employés et

la fidélisation des clients, la réduction des coûts par

transaction et l’augmentation des revenus.

Les mesures doivent également être adaptées à l’ap­

proche particulière de la GC, à ses objectifs et à son

stade de développement. Une approche de GC qui

s’intéresse principalement aux pratiques communau­

taires permettrait de mesurer différemment les coûts

et l’impact par rapport à une approche reposant sur

l’utilisation d’un système de gestion de contenu. Une

initiative de GC dont le but est d’améliorer l’efficacité

de l’équipe commerciale mesure les propositions

et les ventes. Ces mesures ne sont pas pertinentes

pour une initiative axée sur la création de nouvelles

connaissances dans une discipline spécifique.

Outre des mesures quantitatives, les organisations

doivent pouvoir citer des réussites illustrant le flux de

connaissances sur le plan humain et sur lesquelles ils

peuvent s’appuyer pour justifier leurs investissements

passés et futurs et pour montrer aux cadres la mesure

de ce qui est réalisable.

Carla O’Dell est PDG de l’APQC, un organisme à but non lucratif qui aide les organisations à trouver et à utiliser les meilleures pratiques, à s’adapter aux environnements en constante mutation et à définir de nouvelles et de meilleures méthodes de travail. (www.apqc.org). Elle est considérée comme l’un des experts mondiaux en matière de gestion des connaissances (GC).

Elle a co­écrit avec C. Jackson Grayson, If Only We Knew What We Know: The Transfer of Internal Knowl-edge and Best Practice (The Free Press 1998) et American Business: A Two Minute Warning (The Free Press 1988), que Tom Peters décrit comme « le meilleur ouvrage professionnel de 1988 ».

Son dernier livre, New Edge in Knowledge, a été publié par Wiley en mars 2011. Elle écrit régulièrement pour de grands journaux et magazines spécialisés ainsi que pour le site Web de l’APQC.

L’APQC propose de mesurer la

chaîne de valeur continue, en

commençant par les entrées ou

les coûts, puis en mesurant la

participation/activité et en mettant

en corrélation les sorties avec les

résultats professionnels.

35Édition spéciale Assemblées annuelles

Pour les entreprises et leurs employés, savoir c’est pouvoir... et profitTout comme les personnes, les entreprises dans l’éco­

nomie d’aujourd’hui constatent que leur principal

atout réside dans les connaissances particulières qu’ils

possèdent. Les entreprises et les individus peuvent

avoir le même talent et le même accès aux connais­

sances publiques, mais la valeur spéciale d’une com­

préhension unique est un réel avantage. Le courtier en

obligations qui est le premier à saisir l’opportunité de

négocier des titres sur deux marchés différents peut

obtenir des rendements extraordinaires jusqu’à ce que

les autres courtiers percent le secret. Une entreprise

qui maîtrise très bien un certain marché—disons la

Chine,—a d’énormes avantages sur ses concurrents

qui n’ont pas cette maîtrise.

En somme, il est très important de partager, au sein d’une

entreprise, des informations exclusives sur les clients, les

concurrents, les produits, les techniques de production,

les recherches émergentes, etc.. En pratique, il est évidem­

ment beaucoup plus difficile pour les entreprises que

pour les particuliers de profiter de toutes ces connais­

sances. Les connaissances d’un individu sont autonomes,

toujours disponibles. Mais pour les entreprises (y compris

les petites), il peut être difficile d’exploiter les précieuses

connaissances dont disposeraient même des centaines

d’employés, surtout s’ils sont éparpillés dans différents

endroits. Dans une entreprise grande et diversifiée, il s’agit

de couvrir des milliers professionnels et de gestionnaires

très qualifiés dans une variété de domaines, de lieux, et

même de pays.

Malgré la difficulté de profiter de cette connaissance

diffuse, la puissance de cette vaste interaction peut

éclipser la production des individus ou des petites

équipes, quelle que soit leur intelligence ou leur

efficacité.

Gestion malavisée

Depuis longtemps, de nombreuses entreprises par­

viennent assez bien à diffuser des connaissances avec

des technologies pas plus avancées que le téléphone

et le télécopieur. Dans la dernière décennie, les progrès

de la communication, des logiciels et des ordinateurs

ayant ouvert de nouvelles possibilités de partage

rapide et efficace des connaissances, bien des entre­

prises, universitaires, et consultants en gestion de

premier plan sont arrivés à la conclusion que l’avenir

appartient aux grandes sociétés qui pourront gérer la

connaissance. La possibilité pour une entreprise d’uti­

liser son savoir exclusif pour résoudre leurs problèmes

a amené les dirigeants à investir des milliards de dollars

dans ce qu’on appelle la gestion des connaissances.

Bien sûr il y a eu des progrès. Mais si le but était

d’utiliser le meilleur savoir exclusif de l’entreprise

pour résoudre chaque problème auquel il fait face,

la gestion des connaissances, dans son application

générale, a à peine commencé à remplir sa fonction.

Créer un marché du savoir

Lowell L. Bryan, McKinsey & Company

36 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

La plupart des entreprises ont essayé l’une des trois

approches de la gestion des connaissances, avec un

succès mitigé. En effet, de nombreuses entreprises

ont essayé toutes les trois.

1. Construire et laisser utiliserCertaines entreprises ont misé exclusivement sur de gros

investissements dans les systèmes de gestion de docu­

ments, des serveurs partagés et d’autres solutions tech­

nologiques, croyant que cette approche serait suffisante

pour laisser les employés libérer leurs connaissances. Les

résultats ont tout simplement apporté l’inefficacité.

Le volume de documents dans les grandes sociétés

aujourd’hui est écrasant, et beaucoup de ces docu­

ments sont dépassés, mal écrits, ou autrement difficiles

à analyser. Même une recherche diligente menée par un

chercheur déterminé en quête de connaissances risque

de produire peu d’informations utiles et accessibles.

2. Approche descendanteLes entreprises ayant un grand nombre d’employés

essaient d’apporter les connaissances aux utilisateurs,

souvent par l’intermédiaire des sites Web internes. Cela

peut être utile s’il s’agit, par exemple, de communiquer

du haut vers le bas des messages sur les meilleures pra­

tiques ou sur de nouvelles fonctionnalités d’un produit.

Mais cette approche présente les limites de la planifica­

tion centralisée. Les auteurs des documents savent­ils ce

que les demandeurs de connaissances veulent vraiment,

ou se contentent­ils de le deviner? Les producteurs

de contenu sont­ils les vrais experts? Le personnel de

l’entreprise sait­il même qui sont les experts? Résultat

classique: les connaissances produites de cette manière

ne sont pas très utiles pour la plupart des employés de

première ligne et certainement pas à ceux qui ont les

meilleures compétences et connaissances.

3. Des sites Web à profusionUne troisième approche a eu un peu plus de suc­

cès, en particulier pour les entreprises qui acceptent

de décentraliser les dépenses de technologie. Il est

important de laisser chaque unité organisationnelle

résoudre ses propres problèmes de connaissances.

Quelle grande société n’a pas de groupes de quelques

centaines de personnes ayant des intérêts communs,

tels que les employés qui travaillent dans une catégorie

de produits ou sur un problème de conception com­

mune ou professionnels de la vente desservant le même

secteur d’activité? Les créateurs de connaissance et les

chercheurs dans ces unités se connaissent générale­

ment entre eux et échangent facilement des idées. Les

unités en retour utilisent toutes les solutions technolo­

giques qu’elles favorisent afin de développer des petites

approches spécialisées à la gestion des connaissances.

Les auteurs gagnent la reconnaissance par les pairs, ce

qui les incite à produire et à partager plus de contenu.

Habituellement, une personne âgée dans le groupe se

soucie assez sur l’échange d’investir dans la technologie

et le personnel nécessaire pour construire un Site Web

ou un portail de haute qualité interne et efficace qui

donne aux demandeurs de connaissances un accès facile.

L’approche décentralisée fonctionne parce qu’il facilite

l’échange entre petits groupes de travailleurs ayant des

intérêts communs. Néanmoins, comme une solution à

l’échange des connaissances à travers une organisation

plus large, il a souvent produit des résultats mitigés. Pour

chaque exemple d’une petite unité organisationnelle

avec un succès formidable de partage de connaissances

spécialisées au sein d’un groupe restreint de personnes,

il y a généralement un grand nombre d’échecs inévi­

table et souvent coûteux. La faille évidente est que les

approches et outils technologiques qui prolifèrent ont

peu de protocoles ou de normes communes et restent

généralement utile que pour de petits groupes de tra­

vailleurs qui s’intéressent à des sujets très spécialisés. Pour

la plupart des entreprises, cette approche ne fournira

seulement qu’une fraction des avantages potentiels

d’échange de connaissances à l’échelle de l’entreprise.

37Édition spéciale Assemblées annuelles

Un problème de marchéLa vérité est que la valeur réelle vient moins de la

gestion des connaissances que plus­beaucoup plus­de

la création et de l’échange. Et la clé pour atteindre

cet objectif est de comprendre que la connaissance

précieuse de l’entreprise réside en grande partie dans

la tête des employés les plus talentueux. En outre, ils

seront peu enclins à échanger leurs connaissances

sans une juste rétribution du temps et de l’énergie

qu’ils dépensent dans sa mise en forme de laquelle

les changes peuvent se faire. Ensuite, il doit être aussi

valorisé pour la recherche effectuée.

En bref, l’échange efficace des connaissances dans

une entreprise de façon large est beaucoup moins un

problème technologique qu’organisationnel : encou­

rager les personnes qui ne connaissent pas à travailler

ensemble pour leur intérêt mutuel. Il y a, bien sûr,

une solution bien connue et testée qui rend possible

l’échange des objets de valeur entre les parties qui ne

se connaissent pas. Nous appelons cela un marché.

Alors comment les entreprises arrivent t’elles à créer

un marché interne efficaces lorsque le produit est

quelque chose d’aussi intangible que les précieuses

connaissances acquises par l’expérience de réflexion

personnelle? Les Marchés qui marchent ont besoin,

entre autres choses, des objets précieux pour le

commerce, les prix, les mécanismes d’échange, et

la concurrence entre les fournisseurs. Souvent, il y a

aussi des normes, des protocoles et des règlements,

et les animateurs du marché pour permettre aux

marchés de mieux fonctionner.

Un objet précieux au commerceLes marchés vont former seulement autour des élé­

ments assez précieux pour justifier le temps et les

efforts des acheteurs et des vendeurs. La connais­

sance commune, par définition, n’a guère besoin de

commerce. L’opportunité réside dans le commerce de

connaissances distinctives (voir l’encadré «La connais­

sance ou d’information?»).

Du point de vue de l’acheteur, les connaissances

nécessaires qui doivent être acquises sur le marché

doivent être plus perspicaces et pertinentes, et plus

facile à trouver, à acquérir à trouver accès et à assi­

miler­que les sources alternatives. Habituellement,

les connaissances internes disponibles à travers les

différents systèmes de gestion des connaissances

échouent à ce test.

L’astuce est de motiver les auteurs à produire des

contenus qui répondent à cette norme. Presque

tous les contenus produits par la plupart des entre­

prises (que ce soit les courts mémos internes ou des

documents contenants des graphiques) ont besoins

d’être soutenue par une discussion orale. Les entre­

prises doivent donner aux lecteurs qui n’ont pas la

possibilité de parler aux experts, des connaissances

plus perspicaces, plus pertinentes et plus accessibles.

La réponse est une nouvelle équivalence interne d’un

article signé, dans lequel l’auteur est motivé pour

produire un document de qualité qui est facilement

accessible à tout utilisateur. Une fois que la connais­

sance est dans cette forme, il peut être échangé sur le

marché. Cet «objet de connaissances «permet à un«

acheteur »de connaissances de comprendre la pensée

de l’auteur sans que les parties aient à se parler à l’un

à l’autre. Les mauvaises nouvelles pour la plupart des

entreprises est que ces documents ne parviennent

généralement pas à satisfaire à cette norme.

Tarification de la connaissance Définir le produit à être échangé crée les conditions

nécessaires à la fixation du prix de l’échange. Les

auteurs, qui sont les fournisseurs du marché, ont

besoin de quelque chose qui justifie leurs «coûts»,

ou l’effort, en échange de la création du produit de

38 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

Connaissances ou informations?

La gestion efficace des connaissances com­

mence avec l’établissement d’une distinction

entre l’information et de la connaissance, parce

que ces termes sont souvent utilisés de façon

interchangeable. Si l’information est la matière

première (l’intrant) utilisé pour prendre des

décisions, la connaissance est ce qui fournit le

contexte de comment les gens pensent. Quand

les gens s’approchent d’un feu tricolore qui a

viré au rouge, ils prennent cette information

et décident de s’arrêter. Ils le font parce qu’ils

ont une connaissance de ce que rouge, vert et

jaune veulent dire.

Les entreprises acquièrent un avantage concur­

rentiel à partir de l’information en fournissant

la bonne information aux bons gestionnaires

et au bon moment. Si l’information n’est pas

donnée à temps, il est souvent inutile. Au

cours de ces dernières décennies, les inves­

tissements des entreprises dans les TI four­

nissent aux employés les informations utiles à

leur travail. Ces investissements se sont avérés

payants pour la plupart. Ce n’a pas été le cas

pour les investissements dans la gestion des

connaissances.

Dans une grande entreprise, l’avantage concur­

rentiel issu de la connaissance est acquis grâce

à la production d’échanges internes des idées

qui aident les employés à penser différemment

quand ils prennent des décisions et entre­

prennent des actions. Cela est très au­delà de

celui de l’échange d’information, parce que les

gens doivent être convaincus par la qualité de

la pensée, des faits et de la logique présentée

et que les connaissances dont ils sont invités

à acquérir sont supérieures à ce qu’ils savent

déjà. Au­delà de son expérience personnelle, les

gens acquièrent des connaissances par la for­

mation formelle, le dialogue avec d’autres, ou la

lecture, la visualisation et l’écoute pour codifier

le contenu de la connaissance. «La gestion des

connaissances »se réfère généralement à une

entreprise de investissement pour améliorer

l’échange interne de savoir­faire exclusif, par

le dialogue ou codifié contenu. Le travail de

McKinsey dans la construction des marchés

du savoir se concentre sur cette dernière forme

d’échange de connaissances, en particulier le

échange électronique de connaissances par

le biais de contenus codifiés entre les gestion­

naires et les personnels professionnels.

La connaissance a de par sa nature une durée

de vie beaucoup plus longue que l’informa­

tion. Les connaissances sur comment agit un

concurrent sur le marché, par exemple, peuvent

être utiles à une société pendant des années.

Mais même le savoir­faire les plus distinctif et

exclusif, tel que celui détenu par les meilleurs

professionnels de l’entreprise, subit une courbe

de décroissance éventuelle qui se termine au

point où il devient notoriété publique. Un

professionnel possédant des secrets sur les

activités clés de l’entreprise peut initialement

avoir peu d’incitation à le partager. Mais plus

les autres agents apprennent le secret, il arrive

finalement un point au cours de la moitié de

la vie du savoir­faire exclusif de l’entreprise que

ces idées deviennent facilement et largement

disponibles partout dans l’organisation.

39Édition spéciale Assemblées annuelles

la connaissance. Sur les marchés de connaissances

internes, le prix que les auteurs reçoivent est générale­

ment fonction de l’amélioration de leur propre réputa­

tion personnelle et interne. Fournir des connaissances

qui attire l’attention des pairs et des supérieurs et aide

l’auteur à construire une réputation peut fournir beau­

coup d’incitation. Les acheteurs (ceux qui cherchent

la connaissance) auront la motivation d’aller sur le

marché s’ils croient qu’ils vont trouver connaissances

précieuses à un prix, dans le temps et pour l’effort, qui

est plus faible que, par exemple, faire de nombreux

appels téléphoniques pour localiser un expert.

Le rôle de l’entreprise est désormais de fournir un

mécanisme d’échange afin que les auteurs et les

demandeurs de connaissances viennent sur le marché

sans une recherche mutuelle d’intérêts individuels.

La réalisation de cet objectif nécessite des investis­

sements dans une infrastructure technologique et

dans le personnel pour le maintenir afin de rendre

l’échange possible.

Un marché de la connaissance interne présente des

caractéristiques particulières. Pour commencer, l’en­

treprise le bénéficiaire ultime des efforts consentis

pour former et maintenir un marché des connais­

sances. Par conséquent, l’entreprise, plutôt que d’être

un acheteur de savoir a plutôt pour responsabilité

de récompenser les auteurs pour s’assurer qu’ils sont

motivés à produire des produits de connaissances

précieux.

Veiller à ce que les auteurs sont rémunérés conve­

nablement pour leur connaissance est souvent la

partie la plus difficile de cette équation. La connais­

sance interne peut permettre à l’employé d’avoir

un avantage de performance sur ses pairs. Mais une

fois que la connaissance est codifié, d’autres peuvent

l’assimiler niant ainsi l’avantage de l’auteur. L’astuce,

par conséquent, est de fournir des incitations pour

que les personnes qui apportent leurs contributions

distinctives et précieuses aient une plus grande recon­

naissance interne et le succès qu’ils n’auraient pas

connu s’ils avaient gardé leurs connaissances pour

eux­mêmes. Ainsi, l’entreprise doit créer une culture

ou les personnes intelligentes sont appelés à contri­

buer à la production de connaissances codifiées. Une

partie de cette culture est la structure des récom­

penses (reconnaissance, rémunération, promotion)

où les plus performants qui apportent leurs connais­

sances gagnent plus que leurs pairs non contributifs.

Cette exigence signifie également que les entreprises

doivent protéger les droits de propriété intellectuelle

individuels. Ceux qui développent des connais­

sances (pas les gens à qu’ils reportent ou ceux qui

empruntent les connaissances nécessaires pour faire

des présentations) doivent être identifiés et reconnus

comme auteur. Cette disposition est importante non

pas seulement pour l’équité, mais aussi pour fournir

des incitations pour les meilleurs penseurs, quelle

que soit leurs anciennetés ou leurs positions, afin de

produire plus de contenu de haute valeur dans le

futur. Il n’y a rien de plus démotivant pour les jeunes

en quête de reconnaissance qu’une personnalité de

premier plan prenne le bénéfice de leur pensée.

Maintenir la concurrenceAu sein des entreprises, le dialogue est la méthode

préférée pour échanger de précieux savoir­faire. Si les

demandeurs de connaissances trouvent un expert

motivé, ils peuvent repérer rapidement et acquérir les

connaissances dont ils ont besoin. Que les rencontres

se fassent en tête­à­tête ou en groupe, le fournisseur

de connaissances a généralement le sentiment que

la rétribution viendra sous une forme appropriée

de reconnaissance de ses pairs et de ses supérieurs.

Alors pourquoi les entreprises ne peuvent pas comp­

ter seulement sur dialogue? Souvent l’expert ne

40 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

pense pas rigoureusement au problème ou converti

la connaissance en une forme qui n’aide pas suffi­

samment le demandeur de la connaissance. Un pro­

blème encore plus récurrent est que les demandeurs

de connaissances peuvent ne pas savoir comment

trouver la bonne personne. Mais le plus gros pro­

blème en s’appuyant uniquement sur le dialogue,

c’est qu’il faut le temps, notamment de la part de

la personne détenant la connaissance. Si les sujets

génèrent un grand intérêt, les experts au sein d’une

grande entreprise n’ont tout simplement pas le

temps à la fois de faire leur travail et de parler à

toutes les personnes intéressées par les discussions

sur la connaissance. Cependant, en produisant un

produit de la connaissance accessible à tous, un

expert est libéré de ce fardeau lié au temps. Un

produit de la connaissance peut au moins servir

comme élément de base lorsque des discussions

de plus haut niveau se tiennent.

Le dialogue sera toujours une source primaire

d’échanges de connaissance dans les entreprises. Mais

la promesse du marché de la connaissance réside

dans sa capacité à augmenter considérablement la

portée de la connaissance distinctive, au bénéfice

de l’ensemble de l’entreprise plutôt que de quelques

individus. Même si les acheteurs de connaissances

peuvent obtenir ce dont ils ont besoin à partir de plu­

sieurs sources, cependant, un marché de la connais­

sance ne peut fonctionner que si elle peut offrir un

produit satisfaisant. Cette exigence signifie à son tour

que maintenir les auteurs motivés pour produire des

contenus de haute qualité. En pratique, ce stimulant

va prendre la forme de concurrence entre les auteurs

pour la reconnaissance.

Tous les marchés, notamment les marchés de la

connaissance, se développent sur la concurrence.

Comme avec n’importe quel type de propriété

intellectuelle, les objets de connaissance rivalisent

pour l’attention au niveau de la qualité et de la popu­

larité. L’expérience montre que les entreprises offrant

une reconnaissance pour ceux qui produisent les

objets de la connaissance de haute qualité (à en

juger par les experts et les cadres supérieurs) ou les

plus populaires (tel que mesuré par le volume de

téléchargement) veille à ce que les auteurs internes

seront motivés pour rivaliser avec d’autre sur les

deux dimensions.

Un ensemble de normesLes coûts de transaction sur le marché; le temps et

les efforts mis dans la création et la recherche de la

connaissance ; doit être supportable. Pour que les

marchés internes de connaissances puissent passer

ce test, les entreprises doivent élaborer des normes,

des protocoles et règlements pour réduire les coûts

qui agissent comme un effet dissuasif sur les acheteurs

et les vendeurs. Les normes peuvent inclure tous les

modèles utilisés pour définir le contenu qui va dans

un objet de connaissance à tous documents utilisée

pour définir la façon dont sont classées de sorte

qu’un processus de recherche se tournera jusqu’à

un contenu pertinent. Les protocoles comprennent

tout : à partir de règles qui déterminent quels types

de connaissances seront négociées sur le marché pour

ce genre de document considéré comme un objet de

connaissance qui peut être échangé là­bas. Les règle­

ments comprennent n’importe quels mécanismes

internes de conformité mis en place pour renforcer

ces normes et protocoles.

Animateurs du marchéÀ ce jour, la majeure partie de l’investissement des

entreprises dans la gestion des connaissances ont

été consacrés à fournir au personnel les atouts pour

construire et maintenir la plate­forme technologique.

Mais cela ne suffit pas. Dans un véritable marché de

la connaissance, les personnes ont besoin d’appliquer

les normes et protocoles et faire preuve de jugement

41Édition spéciale Assemblées annuelles

dans l’application des règlements. Ces personnes

deviennent des initiés du marché, comme les cour­

tiers et spécialistes dans une bourse, qui facilitent

le fonctionnement du marché grâce à la familiarité

avec le mécanisme. Ils ne doivent pas constituer une

grande bureaucratie, pas plus de deux douzaines de

facilitateurs sont nécessaires pour faire fonction­

ner et réguler un marché de connaissance interne,

disons, pour une grande banque d’investissement.

L’alternative­ s’appuyer sur les auteurs et les deman­

deurs de connaissances pour suivre des protocoles

et des normes et réglementer eux­mêmes, ne fonc­

tionne tout simplement pas: ils n’ont pas la familiarité,

l’intérêt, ou le temps.

Un groupe d’animateurs de marché comprend les

employés des services de connaissances au centre

du marché. Ils peuvent, par exemple, s’assurer qu’à

chaque documents échangés, il y a une étiquette

référencée fournissant les informations permettant le

processus de recherche d’être efficace, ainsi que suffi­

samment de contexte pour permettre aux lecteurs de

pré­visualiser un document avant de télécharger ou

de lire. Il est également utile d’avoir des éditeurs qui,

grâce à un peu dialogue avec les auteurs, sont effi­

caces pour l’ajout de texte d’un ensemble de pièces,

afin de les convertir en un objet de connaissance

d’une qualité suffisante

Un autre groupe d’animateurs du marché se compose

de «Propriétaires de domaine de connaissance.» Dans

une grande entreprise, il peut exister des centaines

de ces domaines, chacun représentant différents

sous­ensembles d’utilisateurs ayant une connais­

sance commune d’intérêts. Ce sont ces types d’uni­

tés décentralisées dont les efforts pour servir leurs

intérêts communs ont produit les succès limités dans

le partage des connaissances discuté plus tôt. La

définition d’un domaine de connaissances est une

façon d’essayer de reproduire les conditions qui ont

conduit à ces succès décentralisées mais par une

approche qui utilise les normes communes et des

protocoles d’une entreprise à l’échelle du marché.

Le «Propriétaire» d’un domaine de connaissance

est habituellement un ancien dirigeant qui pourrait

responsabiliser les travailleurs spécifiques de l’unité

responsable du contenu répertorié dans le marché

de la connaissance. Ils déterminent ce qui répond à

la norme en tant que objet de connaissance ou si

mise à niveau pourrait répondre à ce standard. Ils

sont également chargés de stimuler la création et la

codification du nouveau contenu par des experts.

Les marchés du savoir au travail

L’idée d’appliquer rigoureusement les principes du

marché aux activités de gestion des connaissances

est relativement nouvelle. En conséquence, il y a peu

d’exemples d’entreprises qui ont pleinement adopté

ce concept. Parmi ceux qui ont, toutefois appliqué,

le potentiel semble être grand.

Prenons le cas de JM Huber, un grand groupe privé

américain intervenant dans trois secteurs diversifiés

d’activités. En 1995, sa direction a présenté un «pro­

cessus de révision après action» pour capturer les

leçons tirées des projets et des événements en vue

d’améliorer son rendement futur. Les leçons peuvent

être spécifiques à un secteur d’activité particulier

ayant trait à des domaines tels que les procédés de

fabrication et les procédures. D’autres enseignements

par exemple, ceux relatives à la stratégie, à la sécurité

ou au marketing peut être utile aux trois secteurs

d’activité à la fois. Les membres des équipes de pro­

jet organisent des réunions post projet en vue de

répondre à trois questions fondamentales: Qu’est­il

arrivé? Pourquoi est­ce arrivé? Que pouvons­nous

42 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

faire à ce sujet? À la fin de la réunion, l’équipe émerge

avec un plan d’action et une liste des leçons apprises

afin d’améliorer les rendements dans le futur. Ces

résultats sont soumis à une bibliothèque électronique

de documents communs accessible à tous employés

par le biais d’un portail.

Aujourd’hui, le processus est devenu partie inté­

grante de la culture d’Huber, et la banque de don­

nées contient plus de 8000 rapports. Pourquoi?

Parce que les gestionnaires peuvent atteindre les

demandeurs de connaissances intéressés par les

mêmes sujets tout en construisant une réputation

avec les collègues des autres divisions et la direc­

tion. Une fois le marché formé, l’intérêt individuel

des créateurs de connaissances et les demandeurs

de connaissances disparait. La direction de Huber

soutient que cet échange d’connaissances a contri­

bué fondamentalement à l’amélioration des perfor­

mances de la société.

Il y a un autre type de situation qui illustre l’appel

des marchés de connaissances pour les groupes de

professionnels hautement qualifié dont le travail

repose presque entièrement sur connaissance. Ce

type de situation peut être trouvée, par exemple,

dans les unités de R & D de produits des entreprises

pharmaceutiques, dans les unités d’exploration et de

production des compagnies pétrolières, des banques

d’investissement, et dans les organisations de services

professionnels tels que les cabinets d’avocats et d’ex­

pertise comptable.

De telle entreprise ont longtemps utilisé ce système

pour partager les connaissances au sein de son per­

sonnel professionnel. Plus la firme fait un effort rigou­

reux pour appliquer les principes du marché à ce

système, le contenu s’est amélioré et les vieux matériel

reformés, les propriétaires des domaines de connais­

sance ont été nommés, les animateurs de marché ont

été introduits, et la plate­forme technologique a été

mis à niveau. Les signes de gains de productivité ont

commencé à apparaître presque immédiatement.

En quelques mois, le nombre moyen de télécharge­

ments mensuels de documents par professionnel a

plus que doublé, de trois à sept. Le nombre moyen

de recherches par document téléchargé, cependant,

a chuté de 5 à 1,2, ce qui signifie que les utilisateurs

ont à présent trouvé ce qu’ils voulaient avec presque

chaque recherche.

Un fort potentiel

Anecdotiques que cela puissent être mis au compte

des premiers efforts puissent être, le potentiel de

partage des connaissances et des gains de producti­

vité est clairement là. Quelques 48 millions des 137

millions de travailleurs aux États­Unis seul peuvent

être classés comme travailleurs du savoir; une seule

entreprise peut employer 100.000 ou plus. Même

les petites entreprises qui emploient pas plus de

cent travailleurs du savoir ont le potentiel de créer

des marchés à l’échelle des grandes entreprise pour

faciliter la création et l’échange de connaissances. Mais

logiquement, les plus grandes possibilités semblent

résider dans les entreprises, les plus grandes, les plus

diversifiées, les plus géographiquement éloignés qui

emploient un nombre important des professionnels

qui sont peu susceptibles de se rencontrer­ laissez­

seul pour échanger de connaissances pertinentes.

Cela dit, le défi de créer une entreprise marché de

la connaissance large est de taille. Il peut prendre 20

millions de dollars à 30 millions en dépenses sup­

plémentaires annuelles pour lancer un marché de la

connaissance initiale de prototype dans une grande

entreprise. La plupart de cette somme iront en créant

43Édition spéciale Assemblées annuelles

le personnel de la connaissance des services dont les

membres agirait en tant que facilitateurs de marché.

Le rapport coût­bénéfice effectué pour ce genre de

dépense serait confronté aux mêmes problèmes de

mesures subjectives auquel les cadres sont confron­

tés dans leurs efforts visant à évaluer l’impact des

dépenses informatiques. Mais avec des entreprises

américaines qui dépensent des milliards de dollars

par an sur les salaires des travailleurs du savoir, sans

parler de la technologie qui les supporte, tout ce qui

pourrait augmenter leur productivité de même 1

pour cent pourrait justifié cet investissement.

Concrètement, les premiers pas vers la construction

d’un marché de la connaissance nécessitent la for­

mation d’un marché initial à l’échelle de l’entreprise

dans au moins un domaine de la connaissance. Il

pourrait s’agir des connaissances stratégiques sur le

comportement des concurrents, par exemple, ou

connaissance fonctionnelle exclusive concernant la

commercialisation ou des questions de ressources

humaine.

Vient ensuite l’établissement d’une bibliothèque

qui a au moins certains produits de connaissances

de haute qualité. Sans ce minimum, les utilisateurs

ne trouveront pas la peine de passer leur temps

pour aller sur le marché de la connaissance pour

rechercher du contenu. La valeur d’un marché

de la connaissance dépend essentiellement sur la

quantité et la qualité du contenu disponible pour

attirer la demande. Qui fait usage d’une bibliothèque

avec seulement dix livres mal écrits sur l’étagère?

Toutefois, l’expérience montre que même avec

quelques 750 à 1.000 documents de haute qualité

peuvent attirer une demande suffisante pour démar­

rer un marché efficace. Habituellement, démarrer

impliquera une approche systémique pour trouver

et mettre à niveau le meilleur contenu existant dans

le domaine de la connaissance et un effort pour

fournir de nouveau contenu qui répond à la norme

de qualité et avec des potentiels d’amélioration.

Cet effort nécessite du top management, grâce à

la reconnaissance visible, un mandat, ou les deux

pour motiver les employés avec des connaissances

distinctives et les meilleurs atouts de communica­

tions pour produire du contenu de haute qualité.

Heureusement, une fois un marché de la connais­

sance dynamique est créé, il prend son propre envol,

même si elle commence tout petit.

Le savoir­faire exclusif qui réside dans l’esprit des

hauts cadres de l’entreprise est une source d’avantage

concurrentielle. Un système efficace, efficient de mar­

chée de la connaissance à l’échelle de l’entreprise peut

fournir cette énergie d’une manière que les efforts

du passé dans la gestion des connaissances ont omis

de le faire. En créant un mécanisme de marché pour

les connaissances et une culture qui encourage les

employés de partager les connaissances utiles avec

leurs pairs, les entreprises peuvent agréger la demande

et l’offre interne de petits system de gestion des

connaissances qui existent déjà en leur sein.

Bryan Lowell est directeur au bureau de New York de McKinsey.Copyright © 2004 McKinsey & Company. Tous droits réservés.

Cet article a été publié par Mc­Kinsey & Entre­prise http://www.mckinsey. com/idées. Copy­right (c) 2004 McKinsey & Entreprise. Tous droits réservés. Reproduit avec la permission.

44 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

Pour qu’un marché prospère, quatre éléments

sont essentiels :

• l’offre:quelqu’unaquelquechoseàvendre.

• lademande:lesclientsquis’intéressentàceque

le fournisseur propose.

• unemonnaiecommune:quipermetleséchanges

qu’il s’agisse de troc, de liquidités ou d’une mon­

naie virtuelle.

• unlangagecommun:detellesortequel’acheteur

et le vendeur se comprennent et qu’ils puissent

s’entendre sur le niveau de qualité et le prix avant

que la transaction soit effectuée.

Il en est de même lorsqu’il s’agit d’échange de connais­

sances. La réussite d’un marché où s’échangent des

connaissances exige également une offre, c’est­à­dire

des sources de connaissances présentées de manière

attrayante et accessible. Plus important encore, ce

type de marchés requiert une demande pour ce type

de connaissances. Il s’agit souvent là d’un point clé

notamment lorsque des comportements innovants

sont en jeu.

Quand le corps humain doit faire face à une greffe

d’organe, il produit naturellement des anticorps qui

tentent de rejeter ce « corps étranger ». Parfois, nos

comportements s’apparentent à cela notamment

lorsque nous sommes confrontés à une idée ou

une bonne pratique émanant d’un autre membre,

voire d’une structure indépendante, de l’organisa­

tion. Nos anticorps se traduisent par des réflexions

telles que :

« Vous ne comprenez donc pas que nous sommes

différents de vous et que vous ne pouvez pas nous

venir en aide ! »

« Cela a peut-être fonctionné pour vous dans un

contexte similaire, mais cela ne fonctionnera jamais

chez nous ! »

« Nous avons notre propre culture et nos propres

problèmes. »

Parfois, derrière cet état d’esprit, se cache une réalité

que nous ignorons pour trouver une solution unique

à notre problème. Il est beaucoup plus valorisant

de trouver soi­même une solution plutôt que de

s’inspirer et d’adapter des solutions déjà existantes.

Où est le plaisir dans tout cela ?

L’offre et la demande sont donc deux paramètres

importants entre lesquels il existe souvent un désé­

quilibre. J’entends souvent des organisations me dire

Interaction de l’évaluation et de la gestion des connaissances : marchés, rivières et escaliers !

Chris Colisson, consultant en gestion des

connaissances

45Édition spéciale Assemblées annuelles

désespérément: « Chris, nous avons un problème de

partage des connaissances. Pouvez­vous nous aider ?

». Je commence toujours par évaluer si l’organisation

parvient à demander de l’aide lorsqu’elle rencontre

un problème et si elle est en mesure d’intégrer une

manière simple, sûre et attractive de demander. Si

la réponse est oui, alors le partage va se faire de

lui­même.

Une monnaie commune ? Les normes d’échange

se faisant de moins en moins contraignantes, une

monnaie d’échange n’est désormais plus nécessaire,

tout au moins en ce qui concerne le partage de docu­

ments. Pour le partage de savoir­faire par le biais de

la conversation, la monnaie commune est le temps

c’est­à­dire le temps nécessaire pour que la commu­

nication s’établisse.

Cela nous amène donc à la question d’un langage

commun. Combien de fois avons­nous manqué des

occasions de partager et d’apprendre parce que nous

percevons le monde de manière différente et que

nous ne disposons d’aucun cadre pour définir ce

qu’est une bonne pratique, ce que sont les niveaux

de compétence de base ? Cela donne lieu à des dia­

logues de sourds ou nous mène à tisser des liens sur

des suppositions ce qui se révèle toujours infructueux.

L’heureux hasard n’a jamais été une stratégie fiable !

C’est sur cela que repose la technique de partage des

connaissances de BP qui a été rapidement adoptée par

le programme ONUSIDA des Nations Unies. Geoff

Parcell, qui a travaillé avec moi au sein de la première

équipe de gestion des connaissances de BP, a été déta­

ché au conseil de l’équipe d’ONUSIDA pour l’introduc­

tion des techniques de gestion des connaissances afin

d’améliorer l’efficacité du programme de l’organisation.

Sa première mission a consisté à aider les différents

acteurs (responsables de l’ONU et experts, organisa­

tions non gouvernementales et personnes atteintes

du sida) à discuter et s’accorder sur un modèle com­

mun. Ce modèle (ou outil d’auto­évaluation) décrit

les compétences clés et les pratiques essentielles dont

une communauté ou une ville doit disposer pour

répondre au problème du VIH/sida.

Les dix pratiques choisies furent les suivantes :

Reconnaissance, Inclusion, Soins et prévention, Accès

aux traitements, Identification des vulnérabilités,

Apprentissage et transfert, Évaluation du change­

ment, Réponse adaptée, Méthodes de travail et

Mobilisation des ressources.

Pour chaque pratique, cinq niveaux de compétences

ont été définis allant du niveau minimal à une très

grande maturité. Un modèle d’auto­évaluation a

ainsi pu être créé, utilisant un langage simple (facile

à traduire) et basé sur des conditions validées d’un

commun accord. L’ensemble du modèle devait tenir

sur une seule page.

L’image ci­dessous (en médaillon) montre un groupe

de pêcheurs ougandais examinant l’auto­évaluation

et la notation de leur communauté sur une échelle

de 1­5 conformément aux 10 pratiques.

Chaque communauté impliquée dans le programme

discute et s’entend sur son score pour l’ensemble des

dix pratiques, ainsi que sur tous les points à amélio­

rer dans l’immédiat en établissant un score cible à

atteindre à l’avenir.

Fort de cette information, le programme ONUSIDA

a pu facilement identifier les forces et les faiblesses de

chacun, les « déviants positifs » qui pourraient l’in­

former des pratiques étonnamment efficaces et des

communautés particulièrement avides d’apprendre.

Plutôt que d’être ceux qui prêchent la politique et

les meilleures pratiques, ils deviennent à présent

les facilitateurs d’échange de bonnes pratiques, en

46 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

soutenant l’adaptation locale et l’apprentissage. Ce

fut une révolution !

Afin d’accélérer cette révolution de partage, l’équipe

de l’ONUSIDA a utilisé une technique de visualisa­

tion appelée diagramme en rivière. Le diagramme en

rivière illustre tout simplement la plage des scores

(minimum et maximum) pour chaque pratique, en

utilisant la métaphore de la rivière bleue (qui est

l’enveloppe de performance) et des berges vertes

(qui sont en dehors de l’expérience de ceux qui ont

été évalués et qui représentent les compétences qui

sont actuellement hors de portée ou les compétences

que tout le monde possède). L’exemple ci­dessous

illustre cette « étendue de compétences » bleue et

les notes de la communauté Mae Chan en Thaïlande.

Il est facile de déterminer les points forts et les points

faibles de la communauté Mae Chan par rapport

aux autres communautés dont les données ont

été incluses dans la notation, notamment dans les

domaines de la reconnaissance et de la mobilisation

des ressources.

Au­delà des notes de la communauté Mae Chan,

la forme de la rivière elle­même transmet un mes­

sage important. La section la plus large de la rivière

représente la plus grande opportunité de partage et

d’apprentissage entre les groupes. Une conférence,

une réunion avec des pairs ou un réseau pourraient

peut­être faciliter ce partage ? Là où la section de la

rivière est la plus étroite (par exemple, Mobilisation

des ressources et Intervention centrale) un pro­

gramme de formation peut se révéler pertinent afin

de permettre à chacun de mettre en avant ses com­

pétences au profit de la communauté. De plus amples

détails concernant la réalisation d’un diagramme en

rivière sont disponibles sur YouTube en entrant les

mots­clés « diagramme en rivière ».

Pour capitaliser davantage sur les opportunités de par­

tage et d’apprentissage découlant de cette évaluation

47Édition spéciale Assemblées annuelles

commune, une autre visualisation a également été

utilisée : le diagramme en escalier. Ce modèle place

différentes villes sur un « escalier des compétences

» à l’aide de deux données numériques : la hauteur

(axe des y) est indiquée par le niveau de capacité sur

l’auto­évaluation comme sur le diagramme en rivière

; l’axe des x représente le désir de s’améliorer et révèle

combien une ville souhaite améliorer sa situation.

Il s’agit de la taille de l’écart entre leurs capacités

actuelles et les capacités qu’ils espèrent atteindre.

Le tableau ci­dessous illustre ce modèle de distribu­

tion appliqué à plusieurs communautés ougandaises.

On identifie de suite les groupes qui devraient se

réunir pour partager et apprendre ensemble en fonc­

tion de leur soif d’apprentissage et de leur aptitude à

partager. Dans cet exemple (qui utilise des données

fictives), Arua et Moroto ont beaucoup à apprendre

de Mbarara et de Kibaale, Pallisa et Busia.

Ces outils d’évaluation, basés sur une auto­éva­

luation et la visualisation des mécanismes sur des

diagrammes en rivière et en escalier convenus au

niveau international, ont permis un changement

important dans la manière dont les collectivités

locales réagissent face à la menace du VIH/SIDA. Ils

les ont mises en relation avec d’autres communautés

pour apprendre et partager de manière encore mieux

ciblée qu’auparavant.

Le programme ONUSIDA organise des activités

régulières de partage des connaissances et a créé

un espace en ligne « AIDS Constellation » où les

différentes communautés partagent des histoires et

des vidéos sur leurs expériences ayant toutes un lien

avec le modèle d’évaluation. L’évaluation (en grande

partie une auto­évaluation dans ce cas) est devenue

un catalyseur pour le partage des connaissances. Il

ne fait aucun doute que des vies ont été sauvées

grâce à elle.

Outre dans le cadre du programme ONUSIDA, cette

technique a été utilisée par un grand nombre d’entre­

prises et d’organisations, y compris pour le contrôle

des infections dans les hôpitaux au Royaume­Uni, la

maintenance d’une centrale nucléaire et la gestion de

48 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

la sécurité à travers l’Europe, la fabrication de pro­

duits chimiques dans les entreprises agroalimentaires

internationales, l’efficacité de la chaîne d’approvision­

nement dans une banque au Royaume­Uni et la lutte

contre le paludisme par l’Organisation mondiale de

la Santé.

Que pourrait apporter cette évaluation à une banque

de développement ?

Certains la surnomment « la rivière de la vie », d’autres

« l’escalier de l’excellence ». À mon sens, c’est sim­

plement un outil qui permet de mesurer de manière

holistique et efficace l’impact que peut avoir la gestion

des connaissances sur les performances et un outil

que tout le monde s’arrache !

Crédits photos : Geoff Parcell, Practical KM.

49Édition spéciale Assemblées annuelles

La stratégieAvant toute chose :

de gestion

Développer une stratégie du savoir à laquelle les hauts dirigeants peuvent se rallier

Banque africaine de développement – le courtier du savoir… la banque de la transformation ?

desconnaissances

50 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

Comment créer, évaluer et améliorer votre stratégie de GC au fil du temps

iL y a 15 ans, lorsque la gestion des connaissances

était encore une idée nouvelle, les entreprises ont

lancé des programmes de gestion des connaissances

(GC) reposant uniquement sur la vision et la pro­

messe. Mais dans un climat qui met de plus en plus

l’accent sur la productivité et l’efficacité dans tous les

aspects de l’entreprise, la GC n’est pas exemptée d’un

examen approfondi. Pour recevoir un soutien et un

financement, votre programme de GC doit reposer

sur une stratégie solide et un bilan de rentabilité qui

démontrent une bonne compréhension des besoins

de connaissances de votre organisation.

Malgré le rôle fondamental que joue la stratégie, de

nombreuses organisations se battent encore avec la

stratégie ou négligent ce volet de leurs programmes.

Lorsque l’APQC a interrogé un public de profession­

nels au sujet de la GC, en 2011, plus de la moitié ont

déclaré que leur organisation n’avait pas réalisé de

bilan de rentabilité pour la GC ou que celui­ci n’était

pas adapté à leurs besoins (Figure 1).

Dans quelle mesure le bilan de rentabilité en matière de GC est-il adapté à votre organisation ?

Carla O’Dell et Lauren Trees, APQC

Page 1 of 5

Research provided by APQC, the international resource for benchmarks and best practices

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Developing a Knowledge Strategy That Senior Leaders Can Get Behind

How to create, evaluate, and improve your KM strategy over time

15 years ago when knowledge management was still a new idea, companies launched knowledge management (KM) programs based solely on vision and promise. But in a climate that increasingly emphasizes productivity and effectiveness in all aspects of business, KM is not exempt from scrutiny. To receive support and funding, your KM program must be founded on a solid strategy and business case that demonstrate a deep understanding of your organization’s critical knowledge needs.

Despite strategy's role as a fundamental building block, many organizations still struggle with or neglect this component of their programs. When APQC polled an audience of KM practitioners in 2011, more than half said that their organizations either didn't have business cases for KM or that their business cases weren't adequate for their needs (Figure 1).

How Well Is Your Organization’s Business Case for KM Working?

Figure 1

Even those who know they need to improve their strategies often go about it the wrong way. Clients routinely come to APQC and say, "My business unit wants to implement communities of practice. Can you help us build a strategy around that?" Their intentions are good, but selecting

31.3%

28.2%

18.3%

16.0%

6.1%

Adequate We don’t have one yet Not quite good enough Great PoorN=131

N=131

How will we get there? The Way Forward

Développer une stratégie de la gestion des connaissances a laquelle les hauts dirigeants peuvent se rallier

51Édition spéciale Assemblées annuelles

Même ceux qui savent qu’ils doivent améliorer leurs

stratégies font souvent fausse route. Les clients

s’adressent souvent à l’APQC en disant : « Mon

unité opérationnelle veut instaurer des pratiques

communautaires. Pouvez­vous nous aider à dévelop­

per une stratégie dans ce sens ? » Leurs intentions

sont bonnes, mais en choisissant une approche de

GC, comme les communautés, avant d’avoir fixé vos

objectifs vous vous comportez comme un médecin

qui prescrirait des médicaments avant même d’avoir

examiné le patient. Vous devez définir le problème

avant de penser à la solution.

Commencez par vous demander « pourquoi ? »

Lors de la définition d’une stratégie de connaissance

et de la réalisation d’un bilan de rentabilité, la pre­

mière étape consiste à déterminer pourquoi la GC

arrive en tête de votre classement. Quel problème

votre organisation essaie­t­elle de résoudre et quels

avantages les outils et approches de partage des

connaissances offrent­ils ?

Vous devriez examiner attentivement les objectifs

stratégiques de votre organisation et demander aux

dirigeants ce qui les empêche de dormir la nuit. Les

cinq questions suivantes peuvent vous guider dans

vos conversations avec les hauts dirigeants et attirer

l’attention sur les vrais problèmes et opportunités.

• Nosconnaissancesactuellesnouspermettent-elles

de rivaliser avec nos concurrents sur le court

terme ?

• Quellesconnaissancesdevons-nousacquérirpour

innover et satisfaire les attentes de nos clients sur

le long terme ?

• Quel(s)différenciateur(s)demarchéest-ilpossible

d’améliorer si les connaissances et l’expertise sont

mieux partagées et transférées ?

• Ya-t-ildesdéfisencoursouenattentequisont

liés à nos connaissances ?

• Àquoivoit-onqu’uneffortenmatièredeGCa

porté ses fruits ?

Les réponses que vous apporterez à ces questions

vous aideront à définir le raisonnement que vous

devez adopter pour votre programme de GC ainsi

que les attentes des dirigeants, les opportunités et

les éventuels défis à court et long terme. En retour,

vous saurez vers quels outils et approches de GC

vous tourner. Par exemple, si votre organisation est

vulnérable à la perte de connaissances en raison de

départs à la retraite, de fusions ou de réductions

d’effectifs, vous voudrez sans doute développer des

approches pour assimiler et conserver vos connais­

sances essentielles. Mais si votre organisation est en

plein essor, il peut être plus judicieux de vous concen­

trer sur les communautés virtuelles qui permettent

aux nouvelles recrues d’entrer en contact avec des

experts et d’acquérir des expertises. Peu importe les

objectifs de votre organisation en termes de connais­

sances, vous devez vous assurer que les tactiques de

GC mises en œuvre sont liées à des objectifs ciblés

et conformes à l’orientation stratégique globale de

votre organisation.

Créer un plan d’action

Une fois que vous avez défini l’objectif de votre

programme de GC et les approches de partage des

connaissances les mieux adaptées à cet objectif, vous

pouvez réaliser un bilan de rentabilité. Un bon bilan de

52 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

rentabilité répond aux questions : qui, quoi, quand, où,

pourquoi et comment qui caractérisent toute écriture

informative. Expliquez dans le détail ce que vous

proposez de faire, pourquoi il est important de le faire

et quelle méthode vous comptez adopter. Dressez

la liste des personnes et des ressources impliquées,

décrivez les avantages et les risques et élaborez un

calendrier avec des échéances claires. Vos dirigeants

sont plus susceptibles d’appuyer votre proposition

si vous la documentez avec des données solides et

des estimations réalistes.

L’APQC recommande de définir clairement la por­

tée de votre programme. Bien qu’il soit possible de

réaliser un bilan de rentabilité pour la GC au niveau

local, cette stratégie n’aide pas au développement

des connaissances à l’avenir. Vous avez besoin d’une

base centralisée pour reproduire vos modèles et ainsi

éviter tout effort redondant. (« Créer une fois, utiliser

à l’infini » est le mantra des meilleurs programmes de

GC.) Plaider en faveur d’un programme de GC avec

des approches normalisées, pas une série d’initiatives

de GC locales et irréalisables.

Votre bilan de rentabilité doit également mettre

l’accent sur la façon dont l’organisation profitera du

partage des connaissances et de la collaboration. Au

lieu de faire des déclarations vagues ou d’énumérer

tous les avantages possibles de la GC, intéressez­vous

aux objectifs et aux problèmes spécifiques que vous

avez identifiés plus tôt. Assurez­vous de mettre l’ac­

cent sur la façon dont les connaissances seront uti­

lisées, et pas uniquement sur la manière dont elles

seront collectées et partagées. Peu importe la quantité

de connaissances dont dispose une organisation.

Cette quantité ne fait la différence que lorsqu’une

organisation doit innover, améliorer ses produits et

services, réduire ses coûts et la durée de ses cycles, etc.

L’utilisation de nombres fixes peut donner plus de

conviction à votre bilan de rentabilité, alors assu­

rez­vous de préciser le montant de vos entrées en

dollars, les résultats escomptés, l’impact de la GC

sur votre productivité et vos revenus. Lors de votre

estimation, n’oubliez pas que toutes les approches en

matière de GC, et notamment celles impliquant des

composants informatiques, requièrent une mainte­

nance, des mises à jour régulières et la formation du

personnel. Si vous voulez que votre calcul du retour

sur investissement soit le plus réaliste possible, évaluez

vos capacités informatiques actuelles pour vérifier que

les coûts prévus en termes d’assistance sont réalistes.

Mesurer et valider progressivement

Une fois que votre programme est prêt et mis

en œuvre, vous devez prouver que vos outils et

approches de GC permettent réellement d’atteindre

les objectifs que vous avez avancés. Pour ce faire,

mesurez les investissements réalisés en termes de

GC ainsi que les résultats obtenus.

De nombreuses mesures différentes peuvent être

utilisées pour suivre les performances de GC et celles

que vous choisirez dépendront de vos approches et

objectifs en termes de GC. Si votre bilan de rentabilité

s’intéresse à la diminution du temps de formation

pour les nouveaux employés, alors vous suivrez la

fréquence à laquelle les nouveaux employés ont

recours aux systèmes de GC et s’ils enrichissent et

développent leurs compétences plus rapidement

qu’auparavant. De même, si votre objectif est d’amé­

liorer l’efficacité des ventes, vous suivrez les ventes et

les indicateurs de la durée des cycles.

Quel que soit le raisonnement stratégique caché

derrière votre bilan de rentabilité, vous devez choisir

53Édition spéciale Assemblées annuelles

vos mesures en fonction de vos principaux objec­

tifs. L’APQC a constaté que de nombreuses grandes

organisations fondent leurs bilans de rentabilité sur

un sous­ensemble de mesures clairement associées

à la réduction des coûts ou la génération de revenus,

en gérant des avantages intangibles ou plus difficiles à

mesurer (comme l’amélioration de la communication,

la diminution des formations ou la hausse de la qualité

des relations clients) comme corrélats significatifs de

gain financier.

Si l’équipe de GC peut vous fournir des données

concrètes pour valider votre bilan de rentabilité et

démontrer l’impact de la GC sur la performance, il

sera intéressant de garantir un financement continu

et/ou de plaider en faveur de l’expansion du pro­

gramme en cours

Faire avancer les choses : analyse des connaissances

Si vous êtes en plein lancement d’une GC ou si

votre ancien programme est en perte de vitesse,

le retour à zéro et la réorganisation totale de votre

stratégie peuvent vous sembler titanesques. Nos

recherches et notre expérience confirment toute­

fois que les résultats qui en découlent en valent

la peine, surtout si vous faites bon usage d’outils

pratiques. L’un des outils les plus récents et les

plus révolutionnaires est AnalyticsSM, un cadre

pour le développement, l’exécution et l’évaluation

de la stratégie de GC, mis au point par l’APQC en

partenariat avec son groupe de travail avancé sur

la GC en 2011­2012.

L’analyse des connaissances est un processus en sept

étapes (figure 2) qui vous indique comment réaliser

des investissements intelligents en combinant des

données de la GC à celles d’autres unités opération­

nelles de l’organisation. Au cours des deux premières

étapes, vous perfectionnez votre stratégie et votre

bilan de rentabilité conformément aux directives dont

nous avons parlé. Vous pouvez également faire des

hypothèses sur la manière dont les investissements

prévus en matière de GC auront un impact sur les

besoins de l’organisation. Les deux étapes suivantes

concernent la mise en œuvre : la préparation et la

mise en œuvre de vos outils et approches de GC ainsi

que la collecte des données pour alimenter votre

analyse. Les données appropriées peuvent provenir de

n’importe quel endroit de l’organisation, en fonction

de vos hypothèses de départ.

C’est à la cinquième étape que les choses deviennent

vraiment intéressantes. Vous mettez plusieurs tech­

niques analytiques en application pour identifier

les tendances pertinentes pour le programme de

GC, les moteurs d’activité et la relation supposée

entre les deux. La sixième étape est une réflexion

critique sur l’évaluation des modèles que vous avez

découvert et la détermination de leur importance

dans le cadre du programme de GC et de l’organi­

sation. Dans la dernière étape, vous retrouvez vos

dirigeants et leur parlez des conséquences de ces

conclusions.

Outre les chiffres, cette nouvelle façon de penser

peut révéler comment les approches de GC intera­

gissent et révèlent un spectre beaucoup plus large

Quel que soit le raisonnement

stratégique caché derrière votre bilan

de rentabilité, vous devez choisir vos

mesures en fonction de vos principaux

objectifs.

54 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

concernant les questions que se posent les organisa­

tions aujourd’hui. Par exemple, pouvez­vous détecter

les tendances générales lors des conversations qui

se tiennent dans votre communauté ? Pouvez­vous

comprendre les nouvelles demandes de vos clients

en consultant les recherches de vos employés ? Les

données démographiques et les modes de partage de

vos employés peuvent­ils vous aider à prévenir toute

perte de connaissances critiques ? Et pouvez­vous

identifier des personnes ayant une expertise non

explicite sur leur CV ?

En rassemblant des sources de données disparates, les

analyses de connaissances vous aident à prendre les

bonnes décisions en matière de partage de connais­

sances et d’investissements collaboratifs. Elles vous

permettent également de prédire les résultats futurs

en fonction de schémas de comportement et de

performance. Si vous utilisez les analyses de connais­

sances efficacement, vos dirigeants seront en mesure

de repérer plus rapidement des opportunités et d’en

saisir certaines auxquelles ils n’auraient pas prêté

attention.

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Research provided by APQC, the international resource for benchmarks and best practices

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GETTING IT DONE: KNOWLEDGE ANALYTICSS M

If you're in the midst of launching KM or you have an older program that's stalled, it may sound like a lot of work to go back to the starting gate and revamp your strategy. But our research and experience confirm that the rewards are worth it, especially if you take advantage of practical tools to help you along the way. One of the newest and most revolutionary tools is Knowledge AnalyticsSM, a framework for KM strategy development, implementation, and assessment created by APQC in partnership with its 2011−2012 KM Advanced Working Group.

Knowledge Analytics is a seven-step process (Figure 2) that shows you how to make smart investments by combining data from KM and other parts of the business. In the first two steps, you hone your strategy and business case along the lines we've discussed. You also make hypotheses about how planned KM investments will impact business needs. The next two steps are all about implementation: getting your KM tools and approaches up and running and collecting the data to fuel your analysis. Appropriate data may come from anywhere in the organization, depending on your original hypotheses.

Knowledge Analytics Process

Figure 2

The fifth step is where things get really interesting. Here, you apply a variety of analytic techniques to identify patterns relevant to the KM program, the business drivers, and the hypothesized relationship between the two. The sixth step is critical thinking to evaluate the patterns you've uncovered and determine their significance to the KM program and the

L’analyse des connaissances a été développée en collaboration avec le groupe de travail avancé sur la GC de l’APQC en 2011­2012 qui comprenait des représentants de l’APQC, de Baker Hughes Inc., de Conoco­Phillips, de Deloitte Touche Tohmatsu Limited, de la Federal Reserve Bank de Cleveland, du Marathon Oil Corp, de Rockwell Collins et de l’U.S. Army ARDEC. Pour plus d’informations, consultez le livre blanc de l’analyse des connaissances de l’APQC : A Fresh Way of Thinking About an Old Problem. Article reproduit avec la permission.

55Édition spéciale Assemblées annuelles

au moment où nous rédigeons le présent article,

28 grandes caisses en carton sont empilées au couloir,

arborant le slogan de la société de déménagement :

« Vous méritez le meilleur ». Dans ces cartons se

trouvent de très nombreux documents imprimés

du département qui occupait l’espace de bureaux

dans lequel l’équipe de Stratégie a emménagé. Au

milieu des décombres, nous savons que l’on peut

trouver des perles de grand prix. Que faire ? Comment

gérons­nous ce savoir ?

D’aucuns continuent d’assimiler la gestion du savoir à

l’archivage au sens classique du terme – ou, plus exac­

tement, « tout ce que vous avez toujours su au sujet

de l’archivage, mais que vous n’avez presque jamais

réussi à réaliser ». Ils se souviennent vaguement

de conseils qui remontent à leur premier emploi.

« Gardez tout en bon ordre – tout ce qui se fait

actuellement, tout ce qui a été réalisé auparavant.

Pas seulement ce que vous avez réalisé, mais aussi

ce que les autres ont accompli. Ne laissez pas les

gens trop archiver de leur propre initiative : essayez

de construire quelque chose qui appartienne à la

collectivité, une chose accessible à tous. Sachez où

trouver ce que vous cherchez – dans des armoires

peut­être, mais, mieux encore, dans des ordinateurs

– et, chose plus importante, sachez utiliser les don­

nées lorsque vous les avez trouvées. Et, pendant que

vous y êtes, pourquoi ne pas partager une partie de

ces données, sinon toutes, avec d’autres personnes,

avec des étrangers – en fait avec le maximum de

personnes possible ? Pourquoi faut­il diffuser une

bonne information au plus grand nombre ? Chacun

y trouve son compte. »

D’autres publient des magazines sur la gestion du

savoir, créent des sites web dédiés au sujet, diffusent

des articles éminemment savants et foisonnant de

références sur cette thématique.

Les uns et les autres ont sans doute raison. La gestion

du savoir est à la fois un art et une science, simple

en théorie mais complexe en pratique. La gestion

du savoir consiste en effet à connaître des choses ou

à savoir là où il faut aller les chercher, puis à utiliser

ces connaissances en vue d’obtenir le meilleur effet

possible. Il convient de distinguer les banquiers et

les courtiers du savoir, les producteurs de savoir et

ceux qui partagent ce savoir. Cependant, lorsque la

vocation du savoir est de transformer des vies, c’est

pratiquement un crime que de ne pas l’utiliser et le

partager afin d’en maximiser les effets bénéfiques. Il

s’agit là, après tout, de connaissances sur la manière

de traiter une maladie, fournir un appui aux petites

entreprises, produire des cultures. D’effectuer le travail

Banque africaine de developpement—le courtier du savoir... la banque de la transformation ?

Kapil Kapoor, Directeur, Stratégie; John Phillips,

Conseiller principal en communication

stratégique, Stratégie, Banque africaine de

développement

56 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

préparatoire pour lever des financements afin de

construire une route… en vue de relier des villes

pour réunir des pays afin de construire la région

pour changer le continent. Il s’agit de la route que

les enfants empruntent pour aller à l’école, que les

femmes enceintes utilisent pour aller à l’hôpital, par

laquelle les récoltes sont acheminées vers les marchés,

et sur laquelle des camions chargés de marchandises

circulent pour transporter des biens d’un pays A à

un pays B, en passant par un pays C.

Voilà la raison fondamentale pour laquelle la Banque

africaine de développement aspire à devenir la prin­

cipale institution du savoir en Afrique, car ce savoir

doit être utilisé pour transformer des vies.

La « transformation » est le thème central de la

nouvelle stratégie à long terme de la Banque pour la

période 2013­2022, qui propose la vision d’une Banque

transformée et en transformation au service d’un

continent transformé et en transformation.

Un élément clé de la stratégie est sa nouveauté dans

la réponse à ce que nous ferons et pourquoi ; un

autre élément répond à la question « pourquoi ? ».

La stratégie défend l’idée que si la Banque doit

demeurer le partenaire de choix du développement

de l’Afrique – à travers le financement de projets

innovants dans les pays et les régions, surtout dans

les infrastructures, où notre réputation et notre statut

sont incontestés –, notre fondation doit être plus

solide, tout comme les principes et les pratiques qui

nous guident. La croissance économique n’induit pas

de transformation véritable tant qu’elle n’est pas par­

tagée par tous et qu’elle ne s’inscrit pas durablement

dans la protection de la nature, d’où les objectifs

globaux de la stratégie. D’un, la stratégie indique

clairement que notre action doit « profiter à tous

» – femmes et hommes, jeunes et vieux, commu­

nautés rurales et communautés urbaines, économies

fragiles et économies plus développées. De deux, la

stratégie dans son ensemble doit appuyer la transition

progressive vers une « croissance verte ». Ainsi, en

utilisant notre savoir pour améliorer la qualité de la

croissance – en la rendant plus inclusive et progres­

sivement verte –, nous épouserons la vision africaine

de la stabilité et de la prospérité.

La stratégie indique également que si la Banque

doit continuer à accorder des prêts et des dons, elle

doit parallèlement faire d’autres choses – l’une des

raisons et non des moindres étant les limites de ses

propres financements (environ 5 milliards de dollars

ÉU par an dans une économie continentale dont la

valeur totale se chiffre à 2 000 milliards de dollars

ÉU). Compte tenu de son caractère africain et de ses

compétences et réseaux uniques, cela signifie que,

de plus en plus, au­delà de ses propres ressources,

la Banque doit s’efforcer de mobiliser des finance­

ments auprès d’autres partenaires (secteurs public

et privé, pays et autres partenaires internationaux).

Son savoir accumuler lui sera bien utile à cet effet.

Cela signifie également que la Banque doit porter

la voix de l’Afrique et du développement de ce

continent, et que, pour y parvenir efficacement,

elle doit compter sur l’élément principal de son

caractère africain : son expérience et ses réseaux.

Ainsi, en utilisant notre connaissance pour être à

la fois un courtier et un défenseur du savoir, nous

Voilà la raison fondamentale pour

laquelle la Banque africaine de

développement aspire à devenir la

principale institution du savoir en

Afrique, car ce savoir doit être utilisé

pour transformer des vies.

57Édition spéciale Assemblées annuelles

appuierons une fois encore la transformation éco­

nomique de l’Afrique.

Aussi la BAD ambitionne­t­elle de ne pas seule­

ment être une banque de développement, mais un

courtier du savoir, certainement, et mieux encore,

un gestionnaire du savoir, un producteur de savoir,

un leader d’opinion, un agent de la transformation

– et, pourquoi ne pas oser le dire, une banque de

transformation.

C’est pourquoi il est nécessaire de mettre en place

un système définitif de gestion du savoir bien éta­

bli, maintenu, entretenu et diffusé à grande échelle.

Cette science qui a vu le jour avec des théoriciens

de la gestion comme Peter Drucker dans les années

1960 et Ikujiro Nonaka dans les années 1990 mérite

la pleine attention de la Banque, qui, en 2013, affinera

encore sa stratégie de gestion du savoir.

Le savoir, nous le savons, c’est le pouvoir, et – dans

les sociétés démocratiques auxquelles nous aspi­

rons en Afrique –, en tant que Banque spécialisée

dans les infrastructures, nous pouvons combiner

des métaphores en disant que le pouvoir devrait

être partagé par tous. Ce pouvoir mobilise toutes les

prépositions en étant le pouvoir des populations, par

les populations et pour les populations. L’acquisition

et l’utilisation du savoir ne se limitent pas aux confins

de l’école : à l’instar de la science du développement

humain qui croit fermement au pouvoir de l’éduca­

tion, la science du développement économique est

adossée sur des processus d’apprentissage continu et

de partage d’expériences et de la sagesse.

Une révolution cosmique et très rapide des tech­

nologies de l’information a fourni de nombreuses

opportunités pour que cela se produise, et, pourtant,

il n’y a aucune garantie que cela se produise un jour.

Le réseau internet est un peut­être un microcosme

de la vie : un don d’une indicible merveille recelant un

potentiel énorme, qui est invariablement peu utilisé

et matière à des abus. La technologie va également

de pair avec le sérieux problème de la surcharge d’in­

formations : un programme américain de recherche

académique a conclu, il y a deux ans, que le « pilon­

nage » quotidien de données techniques équivaut

en moyenne au flux d’informations générées par 174

journaux. Face à cette réalité, le discernement est

un facteur majeur dans la gestion, la présentation,

le partage, et par­dessus tout l’utilisation du savoir.

L’idée est d’utiliser entièrement la technologie et le

jugement en s’adossant sur le pouvoir démocratisant

et la force vivifiante du savoir.

La plus simple définition de la gestion du savoir est qu’il

s’agit de la manière dont une organisation gère mieux

son savoir, pour son propre avantage et pour celui de

ses parties prenantes, ces dernières étant internes et

externes. Et, lorsque ces parties prenantes représentent

plus d’un milliard de personnes en Afrique – et par

extension leurs relations avec les autres six milliards

d’habitants de la planète –, alors les enjeux de la ges­

tion du savoir sont extrêmement grands.

Au plan interne, qu’est-ce que la Banque compte faire de son savoir ?

Premièrement, collecter et recueillir tout le savoir et

l’expérience accumulés en cinquante ans. Combien

d’organisations de développement peuvent mettre

la main sur le document de stratégie pays d’il y a 20

ou 30 ans en préparant celui d’aujourd’hui ? Combien

d’organisations ont perdu l’accès à des années de

savoir­faire précieux lorsque des individus sont par­

tis, emportant avec eux leur sagesse? L’enjeu ici est

l’emploi optimal de nos immobilisations incorporelles

et de notre capital intellectuel.

58 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

Deuxièmement, garantir la coordination de tous nos

différents canaux et corps d’information. Combien

d’organisations de développement maintiennent des

bases de données séparées pour les projets, les don­

nées financières ou les données d’évaluation, sans

aucune relation entre ces différentes bases, qui ne sont

connues que d’elles­mêmes ? Combien d’organisations

n’arrivent pas à connecter et à créer des communautés

de savoir entre le siège et les bureaux extérieurs, ou

entre les différents départements qui doivent relever

les mêmes défis en matière de développement ?

Troisièmement, évaluer le savoir dont nous dispo­

sons, ce qui nous permet de voir et de combler les

lacunes. Au­delà de tout, cela rend indispensable le

travail intellectuel nécessaire pour éclairer les déci­

sions d’investissements chiffrés en millions de dollars,

en fondant ces décisions sur les données les plus

exactes et actualisées de l’analyse économique, sociale

et politique. De cette manière, nos sites internet et

intranet doivent être des viviers très importants, des

dépôts vivants et organiques d’un savoir et d’une

sagesse dont tous les 2 000 employés de la Banque

s’approprient et dont ils sont fiers.

Au plan extérieur, qu’est-ce que la Banque compte faire de son savoir ?

Nous voulons faire en sorte que chaque bribe de

connaissance, que chaque dollar que nous dépen­

sons, ait le plus grand impact possible. Les cinquante

dernières années foisonnent d’exemples de déve­

loppement fondé sur des connaissances vagues ou

insuffisantes, et nous savons pertinemment que la

tâche est loin d’être une sinécure.

Premièrement, et surtout, nous voulons contribuer à

l’établissement du canon de connaissances en déve­

loppement qui profitera au continent. Notre propre

travail de recherche et notre programme de publi­

cations – avec ses matières premières, sa dynamique

économique, ses notes d’information sur les marchés

et les politiques – est en train de défricher de nou­

veaux territoires. La publication intitulée Perspectives

économiques en Afrique (PEA) bénéficie déjà d’une

grande attention, et peut devenir, avec le Rapport

sur le développement en Afrique (RDA), la grande

référence en matière de développement africain, à

l’image de ce que les rapports sur le développement

dans le monde publiés annuellement par la Banque

mondiale sont pour la communauté mondiale du

développement. Les récents PEA et RDA ont induit

une nouvelle recherche et de nouvelles interpré­

tations des défis auxquels l’Afrique est confrontée

dans des domaines tels que la logistique portuaire et

commerciale, l’emploi des jeunes et la gestion de ses

ressources naturelles. Les activités de l’Institut africain

de développement et les informations disponibles sur

le portail de données du site web de la Banque sont

autant de contributions notables de la Banque au

répertoire de connaissances sur l’Afrique. Il en est de

même pour tous nos rapports de pays et sectoriels,

nos données, ainsi que nos expériences sur le terrain

et dans des projets. Les études de cas et les histoires

Nous voulons faire en sorte que chaque

bribe de connaissance, que chaque

dollar que nous dépensons, ait le plus

grand impact possible. Les cinquante

dernières années foisonnent d’exemples

de développement fondé sur des

connaissances vagues ou insuffisantes,

et nous savons pertinemment que la

tâche est loin d’être une sinécure.

59Édition spéciale Assemblées annuelles

animées de manière créative émanant du terrain

– notre travail de communication extérieure peut

générer la substance du savoir, avec du style – sont

tout aussi importantes.

Deuxièmement, nous voulons être des courtiers

du savoir, maximiser la portée de notre influence

sur les gouvernements, les entreprises, les ONG, les

universités et d’autres communautés. La Conférence

économique africaine annuelle abonde en partie

dans ce sens, mais nous pouvons faire mieux. La

Banque a financé l’Université virtuelle africaine, les

établissements proposant un enseignement libre,

à distance et électronique dans plus de trente pays

d’Afrique subsaharienne. Les fora en ligne offrent des

opportunités extraordinaires de partage de connais­

sances. Les « D-groups » par exemple – des espaces

de développement en ligne construits autour des

listes de diffusion et d’un espace de travail partagé

en ligne – hébergent 2 500 groupes dans le monde,

pour 100 000 membres, dont plus de la moitié sont

issus des pays du Sud.

Peut­être le plus grand bond que la Banque pourrait

faire pour devenir un véritable courtier du savoir et

une force de transformation est de se doter d’un site

web qui soit un véritable portail du savoir. Son site

actuel recèle certes des connaissances de qualité,

mais il reste avant tout un site institutionnel, sur

lequel on peut lire : « La Banque a mené telle action

; la Banque pense que…. » En tant que site portail,

ce site web serait le forum définitif consacré au déve­

loppement de l’Afrique – une sorte de Google en

bien plus rapide, dans lequel une page échantillon

d’un portail web donnerait accès à dix autres pages

de sites web différents, reflétant une multiplicité de

points de vue et de sources d’information.

Une recherche aléatoire sur le site web montre

les limites d’un site institutionnel. Le site « Gabon

agriculture », par exemple, donne une idée rafraîchis­

sante, dans les règles de l’art, de l’engagement de la

Banque dans le secteur de l’agriculture au Gabon…

Cela est très important, sans aucun doute, mais ne

donne pas pour autant des indications claires sur le

contexte qui prévaut dans le secteur, sur le rôle du

gouvernement et des acteurs locaux (ministère de

l’Agriculture, Faculté d’Agriculture, coopératives pay­

sannes, associations communautaires, etc.), sur le rôle

d’acteurs internationaux, ni des données permettant

d’effectuer des comparaisons avec les pays voisins et

les autres pays, ni une idée de ce que pensent des

experts, des universitaires, des enseignants et des

formateurs dans le monde entier. Un portail web

est une entité qui vit, qui respire, qui grandit. Dix

pages web « institutionnelles » de la BAD pourraient

devenir le site définitif de 100 pages sur le sujet, et il y

a 100, sinon 1 000 sujets individuels qui mériteraient

un traitement « de portail » similaire. Cela serait

extrêmement coûteux en temps et en argent, et c’est

peut­être le plus grand test de la manière dont la

Banque est réellement engagée à devenir une véritable

institution du savoir. La Banque a commencé à avoir

recours au « portail » – par exemple avec les sites

web de la Facilité africaine de l’eau ou de la nouvelle

Initiative en faveur des marchés financiers en Afrique

–, mais elle vient à peine de commencer.

Premièrement, et surtout, nous voulons

contribuer à l’établissement du canon

de connaissances en développement

qui profitera au continent. Notre propre

travail de recherche et notre programme

de publications – avec ses matières

premières, sa dynamique économique,

ses notes d’information sur les marchés

et les politiques – est en train de

défricher de nouveaux territoires.

60 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

Troisièmement, nous voulons fournir directement

notre savoir aux pays que nous servons, en sachant

bien que la valeur nominale de ce savoir est souvent

supérieure aux fonds que nous mettons sur la table. La

présidente libérienne Ellen Johnson­Sirleaf a prononcé

une allocution devant la Banque en février 2013 pour

évoquer la valeur d’un partenariat avec une Banque

qui est aussi bien un partenaire de confiance qu’une

source de sagesse, et en même temps une source

de financements précieux. Elle a perçu l’essentiel de

l’engagement de la Banque au Liberia comme un

produit du savoir appliqué de la Banque et de son

pouvoir fédérateur, ce qui a par exemple permis à

son pays de trouver des solutions pour le secteur

énergétique, grâce auxquelles le prix de l’électricité

a fortement baissé (au Liberia, le prix de l’électricité

est 15 fois plus élevé qu’aux États­Unis), dans un

pays où seulement 2 % de la population ont accès

à l’électricité. Voilà le pouvoir de transformation du

savoir. De la même manière, la Présidente du Liberia

a considéré l’aide d’urgence fournie par la Banque lors

de l’invasion de chenilles ravageuses dans son pays

comme un résultat du savoir, couplé à la volonté et

à la rapidité de déployer ces connaissances, au même

titre que les financements.

L’Angola enregistre une production pétrolière annuelle

qui se chiffre en milliards – objectivement parlant,

qu’est­ce que la Banque peut apporter de plus à ce

pays ? Réponse : le savoir, dans la gestion et de la

gouvernance des ressources naturelles et des recettes

générées par ces ressources, un savoir acquis au fil des

générations. La Banque a jusqu’à présent fourni une

assistance à 10 pays pour leur permettre d’appliquer

l’Initiative pour la transparence dans les industries

extractives, et envisage de poursuivre l’intensification

de ses activités dans ce domaine.

Quatrièmement, nous voulons participer à l’échange

d’informations au niveau mondial, un échange dans

lequel le Sud peut continuer à partager avec le Nord

et à apprendre de lui, mais dans lequel le Nord

apprend également du Sud, et – fait probablement

le plus notable –, un échange dans lequel le Sud

apprend du Sud. Nous sommes convaincus qu’il

n’existe pas d’autre modèle uniforme et universel de

développement en dehors de l’autonomisation des

populations. La Banque a la capacité d’enseigner et

d’apprendre de ses amis du Sud en développement,

d’échanger des idées sur les différents modèles de

croissance – tirée par les marchés ou dirigée par

l’État, adossée sur les partenariats public­privé du

troisième secteur, fondée sur l’agriculture ou l’in­

dustrie ou la fabrication ou les services, voire sur

toute combinaison de ces facteurs. Le rôle de la

Banque est d’aller négocier sur le marché mondial

de l’information et de ramener le plus de produits

possible à la maison. La Banque produit déjà de la

recherche sur la manière dont les expériences ont

été partagées par l’Afrique et la Chine, puis l’Afrique

et l’Inde.

Cinquièmement, en qualité de porte­voix du

développement de l’Afrique, nous voulons utiliser

notre savoir pour être des avocats du continent et

des fédérateurs au niveau mondial. Nous l’étions,

La Banque africaine de développement

peut déjà à juste titre se targuer d’être

une institution du savoir en Afrique.

Sa politique de diffusion et d’accès à

l’information en est un élément clé –

mais sa stratégie de gestion du savoir la

conduira encore plus sur la route vers

une meilleure gestion et une meilleure

exploitation de son propre capital

intellectuel et du capital intellectuel des

autres.

61Édition spéciale Assemblées annuelles

par exemple, dans le sillage de la crise financière

mondiale qui a commencé en 2008, lorsque la

Banque a réuni le comité composé de dix (10)

ministres des Finances et gouverneurs de banques

centrales. La Banque a également joué le rôle de

porte­voix du continent en sa qualité d’ambassa­

deur de l’Afrique lors de la réunion du G20 tenue

à Seoul en septembre 2010, et dans l’action de

mobilisation qu’elle a menée dans le cadre du

Programme de développement des infrastructures

en Afrique tiré par le secteur public, ainsi que dans

le Consortium des infrastructures pour l’Afrique

tiré par le secteur privé et dans le corridor de

transport Nord­Sud.

La Banque africaine de développement peut déjà à

juste titre se targuer d’être une institution du savoir

en Afrique. Sa politique de diffusion et d’accès

à l’information en est un élément clé – mais sa

stratégie de gestion du savoir la conduira encore

plus sur la route vers une meilleure gestion et

une meilleure exploitation de son propre capital

intellectuel et du capital intellectuel des autres.

Dans tous ces domaines, son action s’inscrit dans

l’objectif global de transformation économique

de l’Afrique. En s’adossant sur les principes les

plus fermes du savoir, la Banque est en mesure

d’accomplir cette mission consistant à incarner la

sagesse pour l’Afrique.

Kapil Kapoor est le Directeur de la stratégie du Groupe de la Banque africaine de développement. Avant de rejoindre la Banque, il était le représentant de la Banque mondiale pour l’Ouganda et la Zambie. En tant que gestionnaire, économiste du développement et spécialiste de la gouvernance de la Banque mondiale depuis plus de vingt ans, il a géré un portefeuille de projets de plus de 1 milliard de dollars.Il a dirigé de nombreuses initiatives de développement multi­sectorielles dans divers contextes nationaux. Il est titulaire d’un doctorat en économie et d’un MBA en finance

John Phillips est conseiller principal en communications stratégiques au sein du groupe de la Banque afri­caine de développement. Depuis 1995, il travaille au service des affaires internationales et des affaires pu­bliques de l’Union européenne, le Royaume­Uni et le Commonwealth. Au cours des 10 dernières années, il a été conseiller en affaires publiques pour le ministère britannique du Développement international, deux secrétaires généraux du Commonwealth et le Haut Représentant de l’UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Il a étudié l’histoire à l’Université de Cambridge.

62 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

l’outilfacilitant

le succès

Laprudence :

Choisissez avec

technologie,

Étude des systèmes informatiques en charge de la gestion des connaissances

Comment les institutions de développement peuvent mieux utiliser les médias sociaux dans le cadre du partage des connaissances, de la collaboration et de la communication en Afrique

63Édition spéciale Assemblées annuelles

Les connaissances sont aujourd’hui consi­

dérées comme le capital le plus important pour les

entreprises et les institutions. Elles sont devenues

les ressources les plus importantes, un vecteur d’in­

novation et un avantage concurrentiel. L’objectif

principal de la gestion des connaissances consiste

à « améliorer la performance organisationnelle en

permettant aux individus de collecter, partager et

appliquer les connaissances collectives afin de prendre

des décisions éclairées » (Smith et Farquhar, 2000).

La gestion des connaissances (GC) compte différents

composants et aspects stratégiques, organisation­

nels, sociaux, culturels et technologiques. Cet article

s’intéresse à l’aspect technologique et donne, plus

particulièrement, un aperçu des types de systèmes

et outils d’information disponibles sur le marché et

dans une banque exerçant des activités de gestion des

connaissances variées afin d’examiner leur rôle dans la

GC. Cet article traite, notamment, de l’utilisation de

la plate­forme SharePoint (@baobab) comme facteur

de déploiement de la plate­forme de connaissances

de la Banque, un espace de travail collaboratif person­

nalisé/référentiel de documents, et comme moyen de

développement de documents collaboratifs.

1. Introduction

Le gestion des connaissances (GC) implique l’identifi­

cation, la création, la collecte, l’organisation, le partage

et la diffusion des informations et des connaissances

que nous pouvons utiliser pour créer, prendre des

décisions éclairées et améliorer la performance orga­

nisationnelle. La gestion des connaissances joue un

rôle important dans la stratégie de développement

de la Banque. Elle agit comme un catalyseur pour

les opérations de la Banque, aidant celle­ci à exceller

en tant qu’institution du savoir et de l’enseignement

en Afrique. Les connaissances doivent être gérées

comme une plate­forme complète (fig. 1) afin de

permettre à la Banque de générer des connaissances

par le biais de partenariats et de réseautage, de pré­

server et d’accroître le capital intellectuel de l’Afrique

et de l’employer dans le cadre du développement

de l’Afrique, comme l’ultime avantage concurrentiel

pour la Banque.

2. La nécessité des systèmes informatiques dans la gestion des connaissances

Les connaissances doivent être préservées et appor­

tées par les individus à l’organisation. Les éléments de

connaissances que la Banque doit gérer sont de types

(manuels, correspondance, documents de projets,

publications, etc.) et de formats (textes, images, audio/

vidéo, etc.) différents. La quantité d’informations et

Étude des systèmes informatiques la gestion des connaissances

David Wu, Alexandre Samarin et

Moez Charfeddine

technologie,

64 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

de connaissances devant être assimilées, stockées et

partagées, la répartition géographique des sources et

des consommateurs dans le contexte de la décen­

tralisation et l’évolution dynamique de l’information

confèrent une nécessité à l’utilisation des systèmes

informatiques (Lindvall, 2003). Par conséquent, tout

système informatique efficace joue un rôle important

dans la réalisation de ce qui suit :

• permettre au personnel de collaborer et de

communiquer, notamment lorsque le travail est

réparti sur plusieurs sites et accompli à différentes

plages horaires ;

• promouvoiruneapprochecollaborativeetinté­

grée de la création, la collecte, l’organisation, l’ac­

cès et l’utilisation des ressources d’information, y

compris des connaissances tacites et non assimi­

lées des collaborateurs ;

• accroîtrelavaleurdelagestiondecontenusde

l’organisation en s’assurant que les utilisateurs

ont entre les mains la bonne information, au bon

moment et le plus rapidement possible ;

• favoriseruneintégrationentrelestechnologies

et les mécanismes développés pour soutenir les

processus de gestion des connaissances ;

• gérerdemanièrecentraliséelecapitaldeconnais­

sances clé de la Banque et assurer la fourniture

homogène ainsi que le suivi de ce capital ;

• transformer les connaissances en un actif

électronique, normalisé et exploitable afin

qu’elles puissent être intégrées aux pratiques

de travail.

3. Types de systèmes informatiques favorables à la gestion des connaissancesPour atteindre son objectif, le processus de gestion

des connaissances devrait être accompagné de plu­

sieurs systèmes informatiques qui joueraient des rôles

différents dans les méthodes de GC. Les systèmes

informatiques disponibles sur le marché et au sein

de la BAfD peuvent être classés selon huit (8) prin­

cipaux types :

65Édition spéciale Assemblées annuelles

(1) Les systèmes collaboratifs : partage des connaissances explicites et création de nou-velles connaissances La gestion des connaissances est fondamentale­

ment collaborative. Par conséquent, les outils qui

permettent aux gens de partager et de co­écrire

des documents, de faire des commentaires, d’en­

gager des discussions, etc. peuvent constitué une

aide précieuse pour la gestion des connaissances et

l’enseignement organisationnel (Jones, 2001). Plus

précisément, grâce à l’utilisation de systèmes col­

laboratifs dans le cadre des projets, les membres

de l’équipe créent de nouvelles connaissances en

cherchant à comprendre les projets tout en gardant

le contrôle des versions des documents, en diffusant

les informations et en sensibilisant les collaborateurs

aux problèmes qui peuvent affecter l’exécution des

projets (Petter et coll., 2007). La plate­forme @baobab

basée sur le logiciel Microsoft SharePoint software

est la principale solution collaborative mise en œuvre

par le CIMM depuis 2011. Elle offre des espaces

de travail personnalisables aux équipes ainsi que

des fonctionnalités avancées pour le partage des

connaissances et le développement de documents.

Ces caractéristiques seront présentées plus en détail

dans la section suivante.

(2) Les systèmes de communication : partage des connaissances tacites dans le temps et qu’importe la distance Ces systèmes informatiques permettent aux gens

d’entrer en contact virtuellement pour se rencon­

trer, discuter, s’activer les méninges et partager des

connaissances tacites. Par exemple, le logiciel de

conférence Microsoft Lync web comprend des outils

comme les tableaux blancs, des services audio/vidéo,

une messagerie instantanée (chat) et une application

de partage du bureau qui permettent aux utilisateurs

non seulement de communiquer, mais aussi de tra­

vailler ensemble sur le capital de connaissances grâce

à leur collaboration. Microsoft Lync est actuellement

testé par le CIMM en partenariat avec les unités

opérationnelles et sera déployé dans toute la Banque

au cours du deuxième trimestre 2013.

Microsoft Outlook est également un outil de

communication commun pour les courriers élec­

troniques, certainement la forme plus utilisée

aujourd’hui pour transmettre des informations. Cette

forme universelle de communication a toutefois

de nombreuses limites. L’utilisation inappropriée

de listes de diffusion submerge de messages indé­

sirables ceux qui ne sont pas intéressés et ignore

certaines personnes intéressées. Même les messages

électroniques correctement distribués coûtent du

temps et de l’argent au destinataire et nécessitent

un stockage local (5). En outre, le caractère per­

sonnel des messageries électroniques complique

l’accès aux informations historiques des nouveaux

membres d’un projet. Ainsi, l’association de Outlook

et SharePoint, par exemple, est une fonctionnalité

utile pour préserver des connaissances partagées

par le biais de courriers électroniques.

(3) La gestion de contenus et de documents, les portails d’information et les bases de connaissances : collecte et gestion des connaissances explicites. Les technologies de gestion de contenus et de

documents permettent de collecter, de codifier et

d’organiser des documents, des expériences et des

idées dans des référentiels centralisés offrant un accès

intuitif et fluide à l’ensemble de la Banque. SharePoint

@baobab permet de classer, de publier et gérer des

documents et du contenu. Il prend également en

charge les contenus du flux de travail comme la

gestion des versions, les approbations, les alertes/

notifications et l’acheminement. Le système DARMS,

basé sur les logiciels IBM FileNet, propose également

une solution d’archivage des documents de la BAfD.

66 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

(4) Les réseaux sociaux professionnels et les portails communautaires spécialisés : col-lecte, recherche et fourniture – Mettre les connaissances à disposition des équipes et des communautés La mise en relation de personnes pour tirer pro­

fit de leur capital intellectuel constitue une autre

manière d’utiliser les systèmes informatiques dans

le cadre de la gestion des connaissances. Les réseaux

sociaux sont une ressource éprouvée pour la création

d’équipes ainsi que pour le transfert et le maintien

des connaissances au sein d’une organisation (Jones,

2001). Les réseaux et communautés spécialisés sont

généralement créés pour partager et développer des

compétences, des connaissances et une expertise

courantes, à l’instar de la communauté de pratiques

sur l’évaluation de la BAfD. On les trouve au sein d’un

service dans une organisation, au sein d’une division,

voire au sein de plusieurs organisations, en fonction

de leurs objectifs.

Créer des réseaux sociaux et des communautés au

sein d’une organisation décentralisée est possible

en utilisant de manière personnelle les sites Web

créés, les wikis, les blogs, les moteurs de recherche

principaux, le partage de dossiers publics, etc. Ces

systèmes offrent aux membres de la communauté

un espace d’échange d’idées et de connaissances,

généralement organisé par thèmes. Grâce aux fonc­

tionnalités blogs, wiki d’entreprise, repérage (J’aime),

conversation de groupe et site personnel (Mon site),

SharePoint @baobab prend en charge la création de

réseaux sociaux et de communautés professionnels

spécialisés.

(5) Les systèmes de gestion de la formation en ligne : diffusion de connaissances explicites dans le temps et qu’importe la distance La gestion des connaissances vise à aider les gens

à acquérir de nouvelles connaissances, mais aussi

à rassembler des connaissances existantes et à les

diffuser via des formations en ligne. Les systèmes de

formation en ligne incluent des outils informatiques

de formation en ligne. Le CIMM, en collaboration

avec l’EADI, a mis en place un nouveau système de

gestion des formations basé sur Moodle, une solution

logicielle libre.

(6) La veille stratégique : la transformation des données professionnelles en connaissances La capacité à repérer rapidement les tendances

financières et les données du secteur permettent

aux décideurs de planifier de meilleures straté­

gies. Les fonctionnalités de stockage des données

et de veille stratégique permettent aux intellec­

tuels, à tous les niveaux de la Banque, de mieux

comprendre leurs activités. Par exemple, SAP BW

regroupe des informations provenant de systèmes

de financement, de projets et de traitement afin

de permettre la transparence des opérations au

sein de la Banque. Les services de SharePoint BI

permettent aux utilisateurs d’analyser facilement

de grandes quantités de données dans l’environ­

nement familier de leur navigateur. En fonction

de ces systèmes, le CIMM a développé le centre

de ressources virtuel pour l’ORCE qui fournit un

tableau de bord des projets facilement accessible

depuis @baobab.

(7) Les systèmes de gestion des processus opérationnels et des flux de production : exé-cution des processus, assimilation et renforce-ment des bonnes pratiques Les systèmes de gestion des processus opérationnels

ou des flux de production permettent de créer des

applications axées sur les processus qui s’assurent

que les pratiques sont suivies et mesurées. Ils se sont

révélés être un outil efficace dans l’automatisation des

processus opérationnels contribuant à l’amélioration

des connaissances des employés et de la productivité

67Édition spéciale Assemblées annuelles

organisationnelle (Sarnikar et Deokar, 2010). SAP et

SharePoint sont deux exemples de systèmes puissants

et flexibles pour la création d’applications axées sur

les flux de production. L’exécution des processus

opérationnels permettra à la Banque de 1) réaliser

et surveiller de manière proactive des opérations

dans l’ensemble du cycle de projet, et 2) fournir des

informations sur les activités clés émanant de diffé­

rents points de vue (performance, finances, résultats,

achats, risques, conformité, etc.). Le CIMM travaille,

par exemple, sur l’automatisation complète des

processus d’appel d’offre gérée par l’ORPF au sein

de la plate­forme SharePoint.

(8) Les systèmes spécialisés, les outils de simulation et les systèmes d’aide à la prise de décisions : utilisation des connaissances dans le processus de prise de décision et de résolu-tion des problèmesCes systèmes informatiques avancés permettent

l’application des connaissances dans les processus

de décision et de résolution de problèmes.

4. La plate-forme collaborative @baobab (SharePoint)

SharePoint est un produit du portail Microsoft qui per­

met la création d’une plate­forme professionnelle per­

sonnalisée. Il offre un accès sécurisé à plusieurs niveaux

et un grand nombre de fonctionnalités à travers une

gamme d’applications des connaissances/de gestion

de documents et de collaboration (Schaeflein, 2005).

Le CIMM a développé une plate­forme SharePoint

appelée @baobab (www.baobab.afdb.org). Le nom @

baobab fait référence au célèbre arbre vénéré dans la

culture africaine : dans l’Antiquité, les rois, les aînés et

les dirigeants se réunissaient sous d’énormes baobabs

pour discuter de questions importantes.

Une fois créés, les documents peuvent être collectés

et classés selon plusieurs taxonomies (sites, biblio­

thèques de documents, hiérarchies de dossiers, types

de contenu et métadonnées de document). Le centre

de recherche permet aux utilisateurs de retrouver des

documents indépendamment de leur emplacement

(Millett et al., 2005).

L’une des caractéristiques essentielles du portail

SharePoint réside dans le fait qu’il s’agit d’un réfé­

rentiel Web centralisé renfermant toutes les infor­

mations professionnelles, y compris les documents,

les annonces, les calendriers, les contacts, les tâches

et les discussions. Par conséquent, il favorise l’effi­

cacité de l’environnement de travail en équipe ou

virtuel en couvrant un large éventail de processus

opérationnels et d’opérations pertinents (Chaffey,

1998). Il s’adresse aux grands groupes de travail qui

cherchent à gérer leurs informations et à élaborer des

documents. Comme tout portail Web d’entreprise

personnalisable, il offre un niveau de flexibilité élevé

qui permet aux groupes de travail de développer

des solutions locales adéquates en fonction de leurs

exigences en matière de gestion des connaissances

En outre, les capacités collaboratives intégrées de

SharePoint, Microsoft Office et Microsoft Exchange

(Outlook) permettent aux utilisateurs de travailler

ensemble dans un environnement de travail qui leur

est familier. Ces outils incluent des fonctionnalités

telles que le partage de calendrier et de tâche, des

discussions de groupe, la création simplifiée d’un

espace de travail et la gestion des documents pour

faciliter le travail d’équipe.

SharePoint @baobab permet également la création de

réseaux sociaux professionnels et de communautés spé­

cialisées grâce à ses fonctionnalités blogs, wikis d’entre­

prise, discussion de groupe et site personnel (Mon site).

68 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

5. Les défis d’un système de gestion efficace et intégré des connaissances Plusieurs études sur les processus de GC (voir

Gammelgaard et Ritter, 2005) ont analysé les obstacles

au transfert et à la récupération des connaissances

et ont détecté les problèmes suivants :

(1) absence d’un lieu unique pour stocker et récu­

pérer des connaissances (fragmentation), lorsque

les connaissances sont éparpillées dans plusieurs

systèmes informatiques, ce qui complique l’accès

aux connaissances ;

(2) surcharge de connaissances lorsqu’une énorme

quantité de connaissances est disponible entraî­

nant par conséquent un problème évident de

gestion ;

(3) dé­contextualisation, lorsque les connaissances

peuvent être localisées, mais ne peuvent pas être

récupérées en raison de difficultés à comprendre

le contexte ;

(4) difficultés à identifier les connaissances utiles, car

elles se cachent derrière des noms de fichiers ou

des dossiers cryptés ;

(5) manque de motivation de la part des employés

à mettre les connaissances à disposition de l’or­

ganisation, empêchant ainsi la mise à jour des

référentiels.

En outre, la possibilité de mettre en place une plate­

forme efficace et intégrée de gestion des connais­

sances au sein de la Banque exige de relever les défis

suivants :

• l’utilisationexclusivedeformatsnumériques(ima­

gerie et capacités d’analyse) ;

• l’organisationlogiquestandardiséededocuments

commerciaux et d’informations (taxonomies, plan

de classement, etc.) ;

• lanormalisationet lamaîtrisedesfluxetdes

processus au sein et au­delà des frontières de

l’organisation (manuel d’exploitation, référentiels

des processus, etc.) ;

• uneinfrastructuresolidedanslesdifférentsser­

vices pour pouvoir accéder aux connaissances à

tout moment, de n’importe où et depuis n’im­

porte quel appareil ;

• l’instaurationd’incitationsetdemoyensenfaveur

de l’automatisation du travail manuel ;

• lapossibilitédetravailleràunmomentopportun.

La construction d’une plate­forme efficace de ges­

tion des connaissances est parfaitement réalisable en

utilisant SharePoint. La Banque doit toutefois faire

des efforts et appliquer les meilleures pratiques en

matière de gouvernance de la plate­forme, la gestion

du changement, l’intégration, etc. Il faut également

accorder du temps à la formation du personnel

concernant les avantages potentiels de l’informa­

tisation de leurs modes de travail. L’intégration de

nouvelles technologies dans les activités profession­

nelles prend du temps et demande des efforts. Il est

recommandé aux gestionnaires d’identifier les avan­

tages de l’informatisation et de mettre en œuvre des

changements en fonction des exigences spécifiques

de leurs unités opérationnelles. Cette mise en œuvre

doit être accompagnée d’une formation adéquate

du personnel afin de garantir l’utilisation efficace des

technologies d’information.

Les utilisateurs expérimentés de SharePoint savent

que SharePoint est un excellent référentiel et envi­

ronnement de gestion des connaissances une fois

que les documents sont au bon endroit et dotés des

bonnes métadonnées. Le défi consiste donc souvent

à organiser correctement ces documents dans le réfé­

rentiel SharePoint. Un système de gestion efficace des

connaissances doit permettre à un employé de dépla­

cer très simplement un document dans le référentiel.

69Édition spéciale Assemblées annuelles

David Wu est le directeur du département Informatique (CIMM) à la BAD. Avant de rejoindre la BAD, il a été Chef des services de la gestion des Infrastructures à l’Office des Nations Unies à Genève

Alexander Samarin est architecte d’entreprise à la BAD. Avant de rejoindre la BAD, il a travaillé pour divers clients internationaux en Suisse, France et Royaume­Uni. Il est l’auteur de «Improving Enterprise Business Process Management Systems ». Il est titulaire d’un doctorat en infographie.

Moez Charfeddine est chef de projet du SharePoint @baobab projet à la BAD. Avant de rejoindre la Bad, il a travaillé dans les télécommunications et le secteur des technologies de l’information au Canada. Il est titulaire d’un diplôme d’Ingénieur et d’un MBA en gestion des technologies d’informations. Il est en train de finaliser son doctorat en systèmes d’exploitation et de décision.

6. ConclusionPour résumer, les systèmes informatiques peuvent

aider à gérer efficacement des connaissances en

fournissant des outils récurrents et bien indexés

pour la collaboration, la communication, la gestion

de contenus/documents, les réseaux sociaux, etc.

Toutefois, les outils ne suffisent pas : une organi­

sation doit adopter des procédures systématiques

qui utiliseront les outils de manière appropriée

pour surveiller les processus de connaissance, anti­

ciper et participer aux évaluations et mesures des

résultats, développer des améliorations et prendre

des mesures efficaces. Le développement d’une

technique de gestion des connaissances efficace

nécessite donc une approche équilibrée. Il s’agit là

d’un prérequis pour gérer un capital de connais­

sances et rassembler les employés de plusieurs sites.

Dans le même temps, la création d’incitations au

partage des connaissances et la définition d’objec­

tifs clés permettent de contourner de nombreux

obstacles communs aux plates­formes de gestion

efficace des connaissances. Tandis que la gestion des

connaissances permet de réaliser des économies, la

valeur réelle est visible dans les perspectives d’avenir

et la capacité d’adaptation de l’organisation. Les

entreprises constatent les avantages au niveau de

la vitesse de développement des produits, l’amé­

lioration de la prise de décision, les plus grandes

compétences de leurs employés et les services per­

mettant de mieux répondre aux besoins des clients.

Ces avantages transparaissent dans des mesures

telles que la réduction de la durée du cycle, une

meilleure rentabilité des ressources, de meilleurs

indices de satisfaction des produits et une hausse

des niveaux de formation des employés.

70 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

Introduction

avant de voir comment les institutions œuvrant

en faveur du développement africain peuvent utiliser

les médias sociaux pour partager des connaissances,

il peut être opportun de définir qui sont ces institu­

tions, pourquoi elles partagent leurs connaissances

et pourquoi les médias sociaux sont appropriés à

leur situation.

Les institutions de développement

Ce sujet me replonge dans le sujet d’un devoir uni­

versitaire, en 1983, qui traitait de l’impact de la NACB

(Nigeria Agriculture and Development Bank) sur le

secteur agricole de l’État de Cross River. J’ai compris

que les contributions commerciales en faveur du

développement économique sont limitées en raison

de leur vision des prêts à court terme. Les banques

d’investissement améliorent leurs conventions de

prêt, mais ces efforts restent insuffisants peut­être

en raison de l’appât du gain dont ces banques font

preuve. Parfois, les fonds publics se révèlent aussi

insuffisants pour les prêts à long terme nécessaires

pour le développement économique requis. C’est

pourquoi l’arrivée des banques de développement

comme la NACB attire des financements d’orga­

nismes internationaux comme la Banque mondiale

dans les zones qui en ont le plus besoin. Parmi les

clients de la NACB auxquels je m’étais intéressée lors

de mes premières recherches, il y avait un retraité

ancien directeur de programmes gouvernementaux

dans l’industrie de la pêche, des éleveurs de volaille,

des producteurs d’aliments pour animaux et d’autres

agriculteurs. Je l’ai vu intervenir dans un domaine où

non seulement la production alimentaire est accrue,

mais où des emplois sont également créés pour la

population.

Les banques de développement ne sont pas les seuls

établissements figurant sur la liste des institutions de

développement. Le document http://www.devdir.

org/files/AfricaA.PDF est un répertoire de 1 155 pages

qui recense les institutions de développement en

Afrique. Les institutions comptent des organisations

internationales, des institutions gouvernementales,

des organisations de soutien privées (y compris le

commerce équitable), des cabinets de conseil en déve­

loppement (y compris des références à des opportu­

nités d’emploi et des annonces de postes vacants),

des fournisseurs d’information (lettres d’information

et revues sur le développement) et des donateurs.

Comment les institutions de développement peuvent mieux utiliser les médias sociaux dans le cadre du partage des connaissances, de la collaboration et de la communication en Afrique

Abel Usoro, Maître de conférences, Université

de West of Scotland, Royaume-Uni

71Édition spéciale Assemblées annuelles

L’éventail des institutions est si large qu’il serait difficile

de détailler comment chacune des institutions peut

utiliser les médias sociaux pour le partage des connais­

sances et la collaboration. Néanmoins, le dénomina­

teur commun des institutions de développement

est le but de combattre la pauvreté et d’améliorer

le quotidien de ces populations. Les banques de

développement, par exemple, ont joué un rôle crucial

dans le processus d’industrialisation rapide de l’Eu­

rope continentale et du Japon (Aghion, 1999). Elles

ont neutralisé le sous­investissement et remédié au

manque de transmission du savoir­faire en matière

de financement industriel (et agricole en mon sens)

à long terme. Comment le partage des connaissances

s’intègre­t­il à leurs activités ?

Pourquoi le partage des connaissances ?

Les connaissances et le capital intellectuel sont de

plus en plus reconnus comme de meilleurs contri­

buteurs à la richesse de l’organisation que les biens

matériels (Hislop, 2013). La meilleure manière de

gérer ce capital réside peut­être dans le partage. Les

connaissances explicites sont plus faciles à partager

parce qu’elles ont été codifiées dans des bases de

données informatiques, par exemple, mais les connais­

sances tacites restent si implicites que même leurs

propriétaires peuvent ne pas soupçonner combien

elles sont précieuses. Conscients de l’importance

des connaissances tacites, les systèmes modernes de

gestion des connaissances ne s’arrêtent pas à l’élabo­

ration de bases de données ou de connaissance, ils

offrent également des outils de collaboration et de

communication. Le système de messagerie de base

et les intranets facilitent le partage des connaissances.

Toutefois, pour profiter des installations interactives

innovantes et des installations de partage de conte­

nus du Web 2.0 lancé au début des années 2000, les

médias sociaux ont émergé et se sont révélés être

des outils très importants.

Pourquoi les médias sociaux ?

Les médias sociaux peuvent être définis au sens large

comme un service en ligne qui permet aux utilisa­

teurs de concevoir, de créer, d’éditer et de partager

une grande variété de contenus. Parmi les caracté­

ristiques communes des médias sociaux, on peut

citer (Li, 2011) :

• leblogging:lesutilisateurspeuventtélécharger

des matériaux (photos, agendas, vidéos, etc.) qui

sont organisés de manière chronologique ;

• le regroupement : lesutilisateurspeuvent se

joindre à un groupe de personnes ayant quelque

chose en commun, comme l’université dans

laquelle ils ont étudié, l’entreprise dans laquelle

ils travaillent ou la ville dans laquelle ils vivent ;

• leréseautage:lesutilisateurspeuventajouterou

supprimer des amis à tout moment ;

• lamessagerieinstantanée:lesutilisateurspeuvent

envoyer des messages instantanés à leurs amis.

À l’origine les médias sociaux ont été créés pour le

divertissement, mais le dynamisme, l’interaction, la

collaboration, la participation et l’environnement de

confiance dont ils bénéficient les ont transformés en

outils professionnels et organisationnels normaux. Le

soutien technologique des réseaux sociaux Web 2.0 et

des communautés virtuelles sont une réelle opportu­

nité pour ceux qui ont soif d’apprendre en groupe et

de partager leurs expériences (Elia et al, 2009). En uti­

lisant le pouvoir engagé des médias sociaux dans les

72 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

relations virtuelles, les organisations se plongent dans

« l’Internet populaire » et apprennent à transformer

les « J’aime », les « Je partage » et les « commentaires

» en connaissances utiles pour la clientèle (Andriole,

2010). Il est donc fréquent de voir des entreprises

créer des pages Facebook, des comptes Twitter, des

chaînes YouTube et des blogs pour s’efforcer de faire

mieux que la concurrence et pour créer et renforcer

les liens avec les clients (Mitic et Kapoulas, 2012).

Facebook était à l’origine conçu pour partager des

renseignements personnels principalement via la

méthode du blogging, mais les organisations l’utilisent

aussi. Linkedin s’adresse essentiellement au partage

d’informations professionnelles. YouTube permet

de partager des vidéos, Flickr des photos, Docstoc

des documents et SlideShare des présentations. Ces

plates­formes permettent également aux visiteurs de

noter et de donner leur avis sur les données partagées.

Les flux RSS (Really Simple Syndication), le podcas­

ting, Atom (un langage de publication sur le Web)

et les widgets sont quelques­uns des nouveaux

modes de diffusion en temps réel de messages texte,

d’informations vidéo et audio à des clients ou des

actionnaires.

Les sites Wikis sont des sites Web spéciaux qui per­

mettent d’entrer et d’éditer des informations. Le meil­

leur exemple n’est autre que Wikipedia (http://www.

wikipedia.org/) un site international au contenu libre

qui a pour objectif de créer une mémoire collective

précise et actualisée.

Selon Bonson et Flores (2011), les médias sociaux

favorisent le dialogue dans les entreprises, même au

sein des institutions financières à l’heure où plus de

transparence est exigée des organisations.

Comment les médias sociaux peuvent-ils être utilisés pour le partage des connaissances au sein des institutions africaines de développement ?

De nombreuses organisations comme IBM, General

Electric et Shell ont remplacé les systèmes de ges­

tion des connaissances lourds par les applications de

médias sociaux comme les blogs (les sites de publica­

tion individuels qui permettent aux autres de déposer

des commentaires en ligne par ordre chronologique)

et les wikis parce qu’ils partagent l’avis que les médias

sociaux sont l’antidote à de nombreux obstacles au

partage des connaissances (Grace, 2009). Comment

les médias sociaux peuvent­ils être utilisés pour le

partage des connaissances au sein des institutions

africaines de développement ? Les médias sociaux

sont un moyen de communication bidirectionnel,

mais qui sont leurs interlocuteurs ? Nous avons décelé

trois principaux groupes :

Les clientsLes institutions de développement comptent des

clients individuels et organisationnels. Par exemple,

comme nous l’avons déjà expliqué, une banque de

développement peut avoir des clients particuliers et

des entreprises à qui elle prête de l’argent. Une ins­

titution de développement peut utiliser les flux RSS

pour informer ses clients des nouvelles informations

disponibles sur son site Web. Les tweets peuvent éga­

lement être utilisés. Dans un sens plus large, chaque

Les institutions de développement

peuvent également mettre en place

des wikis pour permettre un retour

immédiat et simple sur des idées et des

services. Ils peuvent être utilisés pour

surveiller la responsabilité sociale des

entreprises

Édition spéciale Assemblées annuelles 73

citoyen est potentiellement un consommateur d’une

institution de développement qui veut peut­être

le sortir de la pauvreté et améliorer son quotidien.

Les périphériques mobiles (téléphones, tablettes et

ordinateurs portables) étant de plus en plus courants,

y compris dans les économies en développement,

et se révélant être des vecteurs importants pour

les médias sociaux, les communications entre les

citoyens de groupes divers et variés sont nombreuses.

En puisant dans ces communications (par exemple,

via l’adhésion à des groupes), sous la forme de blogs

ou de tweets, les institutions de développement

peuvent deviner les besoins des consommateurs et

anticiper leur réaction face aux services fournis. Cette

information utile peut les aider à créer de nouveaux

produits et services ou à revoir les produits et services

existants. Les médias sociaux peuvent également

les aider à acquérir des connaissances précises sur le

profil de leurs clients, des informations importantes

pour la survie de l’organisation (cf. Cader et al, 2013).

Les institutions de développement peuvent égale­

ment mettre en place des wikis pour permettre un

retour immédiat et simple sur des idées et des ser­

vices. Ils peuvent être utilisés pour surveiller la respon­

sabilité sociale des entreprises (Anonyme,

2012). Les médias sociaux

peuvent également être

utilisés pour réaliser faci­

lement des vidéos et les

publier sur YouTube : un

moyen plus efficace que les textes pour communi­

quer avec les clients !

Le personnel (interne)Les membres de l’or­

ganisation constituent

une importante source de capital intellectuel en

raison de leurs qualifications, leurs compétences et

leur expérience. Les organisations qui réussissent

sont celles qui peuvent orchestrer ces ressources

d’une manière qui contribue à l’optimisation des

buts et objectifs. Les médias sociaux offrent une

approche simple et informelle pour débloquer ce

capital essentiellement composé de connaissances

tacites. L’Université de West of Scotland, par exemple,

utilise la plate­forme Yammer. L’utilisation interne des

médias sociaux n’a pas séduit autant de monde que

les plates­formes externes. Les institutions de déve­

loppement ont pu observer que les personnes qui

s’y connaissent en matière de nouvelles technologies

ont créé un média social qui leur permet de partager

leurs problèmes et leurs solutions (Anonyme, 2013).

Dans le temps, ils peuvent prolonger cet effort et

dépasser les barrières organisationnelles. Les gestion­

naires devraient en profiter et encourager les efforts,

y compris l’utilisation professionnelle de LinkedIn,

pour exploiter les connaissances internes et externes.

Concernant les médias sociaux internes mis en

place par les établissements professionnels, les ins­

titutions doivent d’abord adopter les avantages

74 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

d’un établissement d’enseignement qui permet

aux membres de s’exprimer librement. Cependant,

pour éviter toute perturbation d’une telle liberté,

des limites raisonnables doivent être fixées. Par

exemple, des attaques personnelles déraisonnables

(diffamations) peuvent être interdites. Les médias

sociaux professionnels peuvent également être

utilisés pour faire appliquer, renforcer ou introduire

la culture organisationnelle utile. Il s’agit du défi

bien connu qui consiste à obtenir des membres

qu’ils partagent leurs connaissances. Le caractère

social du réseau devrait engendrer une volonté

de partage. En outre, les gestionnaires devraient

envisager différentes récompenses (intrinsèques

et extrinsèques).

L’organisationLa plupart des institutions de développement ont

besoin de collaborer avec des organisations sœurs

avec lesquelles ils co­investissent ou travaillent et

d’autres organisations comme des donateurs. Un

wiki peut aider les organisations à exprimer leurs

points de vue sur un problème de financement com­

mun, par exemple. Des réseaux sociaux axés sur les

pratiques communautaires peuvent également être

mis en place sur une base individuelle, bien qu’ils

transgressent certaines barrières organisationnelles.

Par exemple, les membres de l’ensemble des institu­

tions en charge de l’organisation et de la gestion des

événements peuvent partager via un média social

axé sur les informations et leur permettant de faire

connaître leurs activités. Le même média social, par

exemple, Facebook, peut recueillir des informations

émanant de blogs (informations) pour ses clients.

Vuori et Okkonen (2012) ont découvert au fil de

leurs recherches que la principale motivation des

utilisateurs de médias sociaux intra­organisation­

nels réside dans la simplification de la réalisation des

tâches quotidiennes et dans la facilité d’utilisation

des médias. Par exemple, non seulement il est facile

d’envoyer des messages instantanés, mais aussi facile

de réaliser des vidéos de haute qualité et de les par­

tager sur YouTube.

Les institutions de développement peuvent éga­

lement utiliser les médias sociaux pour le recrute­

ment. Les tweets peuvent être utilisés pour la publi­

cité et LinkedIn pour dénicher d’éventuels futurs

collaborateurs.

Conclusion

L’Afrique peut être considérée comme un continent éco­

nomiquement plus pauvre que les régions développées

du monde. Toutefois, les médias sociaux ont réussi à s’y

implanter, car sur ce continent les technologies (appareils

mobiles et Web 2.0) ont un sens économique pour les

individus et les organisations. Les institutions africaines

de développement peuvent utiliser leur pouvoir de mise

en réseau et de partage de connaissances collaboratives

pour communiquer en interne et en externe depuis et

vers les clients et les parties prenantes.

Abel Usoro est maître de conférences et chercheur en systèmes d’information pour les économies en développement, la gestion des connaissances et le réseautage social. Il a publié de nombreux articles dans des revues internationales, des conférences et des livres. Il est rédacteur en chef et co­auteur du livre Leveraging Developing Economies with the Use of Information Technology: Trends and Tools (pp. 1­399).doi:10.4018/978­1­4666­1637­0 http://www.igi­global.com/book/leveraging­developing­economies­use­information/61661 published in May 2012.

75Édition spéciale Assemblées annuelles

de gestiondes

connaissances

MesurezDémontrez la valeur :

vos efforts

Pouvez-vous dire à quoi on le saura ?

Pour une gestion efficace de mesures de programmes de gestion des connaissances

76 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

« Can you tell what it is yet ».

Je me surprends parfois à utiliser ce slogan dans les

ateliers où les clients ont du mal à s’entendre sur une

définition de la gestion des connaissances pour leur

organisation. Il est très rare de trouver une définition

pour la GC contenant moins de quatre virgules, pou­

vant être lue à haute voix sans plus d’une pause pour

reprendre son souffle.

« Can you tell what it is yet ? ». Je ne suis pas certain

qu’une définition soit la meilleure manière de décrire

la GC.

Les définitions expliquent, mais n’inspirent pas.

Même les énoncés de vision peuvent être un peu

banals et importants à la fois.

Il y avait un fil de discussion intéressant sur le forum

sikm­leaders la semaine dernière : quelqu’un a

demandé dix propositions pour compléter la décla­

ration « Vous savez que des connaissances sont cor­

rectement gérées quand vous... »

J’ai pensé qu’il s’agissait vraiment d’un moyen pratique

pour comprendre comment les gens se sentent et se

comportent lorsqu’une stratégie de GC fonctionne.

Voici mes dix suggestions :

Vous savez que des connaissances sont correctement gérées quand...

Vous dirigez. Dans une organisation, les dirigeants

sont les modèles. Ils mettent les autres au défi de

demander de l’aide, de s’interroger sur les bonnes

pratiques, de partager leur réflexion et de mettre

en application les bonnes pratiques ce qui suscite la

curiosité et invite à faire des progrès. L’organisation

apprend en permanence !

Vous apprenez. Les gens cherchent instinctivement à

apprendre avant d’agir. Les leçons que l’on peut tirer des

réussites et des erreurs sont expliquées efficacement

et partagées ouvertement avec les autres personnes

avides d’apprendre, d’appliquer et de progresser. Les

leçons conduisent à l’action et à l’amélioration.

Vous réseautez. Les gens réseautent activement,

en toute transparence sur des réseaux officiels et

informels pour obtenir de l’aide, partager des solu­

tions, des enseignements et des bonnes pratiques.

Les barrières entre les réseaux internes et externes

sont floues et tous les employés comprennent les

avantages et assument les risques.

Chris Colisson, consultant en gestion des

connaissances

pouvez-vous dire à quoi on le saura ?

Vous naviguez. Il n’y a pas d’obstacles inutiles à

l’information, qui est partagée par défaut et limitée

aux seuls cas échéants. Les outils et les protocoles

de gestion de l’information sont intuitifs, simples

et bien compris par tout le monde. Il en résulte un

capital navigable, interrogeable, intelligemment balisé

et classé de manière appropriée pour l’ensemble de

l’organisation, avec un accès sécurisé pour les parte­

naires de confiance.

Vous collaborez. Les gens ont l’envie et la capacité de

collaborer ensemble, en utilisant une variété d’outils

technologiques en toute confiance. La collaboration

est un acte naturel, qu’elle soit spontanée ou planifiée.

Les gens travaillent en connaissant leurs collègues et

utilisent des outils en ligne aussi instinctivement que

le téléphone pour accroître leur productivité.

Vous consolidez. Les gens savent où la connaissance

revêt une importance stratégique et la considère

comme un atout. Beaucoup de leçons pertinentes

sont tirées de l’expérience et transformées en lignes

directrices. Elles prennent vie dans des histoires et

des récits, des documents et des modèles utiles et

des liens vers des personnes ayant de l’expérience

et de l’expertise. Ce « capital de connaissances »

vivant est actualisé et mis à jour régulièrement par

une communauté de praticiens.

Vous utilisez les médias sociaux. Tout le monde

comprend comment tirer le meilleur parti des outils

et canaux disponibles. Les médias sociaux sont une

partie seulement des activités habituelles, les gens ne

font plus la distinction. L’heureux hasard, l’authenticité

et l’intimité de la clientèle sont à la mode. Les gens

ne sont plus timides et sont encouragés à innover

et à faire de nouvelles expériences. Les vieux singes

apprennent de nouvelles grimaces ! Les politiques

sont favorables et en constante évolution, au rythme

de l’innovation du secteur.

Vous transmettez. On raconte des histoires que

d’autres écoutent, puis racontent à leur tour. Ainsi,

l’expérience est­elle partagée. Les gens savent com­

ment utiliser le pouvoir influant de la narration. Le

récit est évalué, assimilé, analysé et utilisé pour iden­

tifier les tendances émergentes qui renseignent sur

la future stratégie.

Vous vous trouvez dans le bon environnement.

Le lieu de travail reflète une culture d’ouverture et de

collaboration. Tout le monde se sent concerné par

ce qui se passe dans l’entreprise Des réunions for­

melles et informelles sont facilement organisées sans

contraintes d’espace et la technologie est toujours

à portée de main pour améliorer la productivité et

impliquer des participants qui peuvent être physi­

quement présents.

Elles sont intégrées. La gestion des connaissances

est entièrement intégrée dans la gestion et le déve­

loppement des personnes, ce qui influence le recrute­

ment et la sélection. Les comportements de partage

des connaissances sont intégrés dans les programmes

d’insertion et sont clairement indiqués dans les valeurs

de l’entreprise et les compétences individuelles. Le

Il n’y a pas d’obstacles inutiles à

l’information, qui est partagée par

défaut et limitée aux seuls cas échéants.

Édition spéciale Assemblées annuelles 77

transfert des connaissances fait partie du programme

stratégique des RH. Les risques de perte de connais­

sances sont abordés de manière proactive. Les efforts

de récupération des connaissances au cours des

rapides entretiens de départ appartiennent au passé.

Votre top dix sera probablement différent du mien

(même si vous êtes libre d’emprunter et d’adapter

mes propositions).

Ce type d’approche nous encourage à nous projeter

au­delà de la technologie qui accapare toute notre

attention souvent de manière disproportionnée.

Comme Rolf aurait pu le dire, si deux petits garçons

ont trop de jouets, l’un des deux risque de tomber

de cheval !

Tiré de Consulting Collison Column dans une prochaine

édition de Inside Knowledge

Comme Rolf aurait pu le dire, si deux

petits garçons ont trop de jouets, l’un

des deux risque de tomber de cheval !

78 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

Chris Collison est consultant indépendant en gestion et auteur d’ouvrages professionnels. Il a plus de 17 ans d’expérience dans la gestion des connaissances, les réseaux et l’apprentissage organisationnel.

Il a fait partie du programme de GC de BP, une équipe accréditée de plus de 200 millions de dollars pour sa gestion des connaissances avant­gardiste. Il fut également directeur du Groupe de la gestion des con­naissances et du changement chez Centrica.

En 2005, il a créé Knowledgeable Ltd. qui propose des conseils en matière de gestion des connaissances et d’apprentissage organisationnel. Il a conseillé plus de 100 organisations à travers le monde.

Chris est surtout connu comme le co­auteur du best­seller « Learning to Fly. Practical Knowledge Manage-ment from Leading and Learning Organizations » (Wiley), aujourd’hui l’un des ouvrages de référence en matière de gestion des connaissances. Son deuxième livre, co­écrit avec Geoff Parcell et (bizarrement !) intitulé « No More Consultants », a été publié en octobre 2009.

Plus d’informations sur www.chriscollison.com

79Édition spéciale Assemblées annuelles

pour une gestion efficace de mesures de programmes de gestion des connaissances

Un aperçu — APQCPLusieurs orGanisations ont toujours du

mal à mesurer les gains que la gestion des connais­

sances (KM) promet d’offrir. À juste titre, les hauts

dirigeants se demandent « Comment qualifier nos

investissements en matière de gestion des connais­

sances. Assez ? Trop ? Quelle est la rentabilité de ces

investissements ? » La nature intangible de la connais­

sance elle­même mène les praticiens en matière de

KM à présumer que les effets de la KM seront éga­

lement intangibles. Cependant, telle n’a pas été la

constatation de l’APQC.

Selon notre étude, une entreprise peut efficacement

mesurer l’impact de la KM. En fait, ceux qui inves­

tissent le plus et mesurent de façon la plus rigoureuse

obtiennent une rentabilité de leur investissement (ROI)

d’environ deux dollars pour chaque dollar investi par un

employé participant ­­ un ROI tout à fait acceptable.

Cette rentabilité est ajoutée aux biens incorporels, tels

que le renforcement du sentiment d’appartenance chez

les employés, une socialisation plus rapide de questions

et du changement, un brassage d’idées et ainsi de suite.

Ci­après suivent cinq conseils pour créer et maintenir

des programmes fructueux.

Conseil No 1

Commencer avec un paradigme pour la mesure

qui lie les efforts en matière de gestion des don-

nées aux besoins opérationnels.

Un trop grand nombre de tentatives de mesures

en matière de KM se restreignent à des mesures de

l’activité, telles que le nombre de communautés, le

nombre de documents téléchargés et le nombre de

participants. Bien qu’ils soient des indicateurs cruciaux

de la santé et de l’adoption de la pratique de partage

d’informations, ils ne sont pas une fin en soi.

L’APQC propose une autre démarche : un système de

mesure de KM devrait placer les résultats commerciaux

au comme point focal de la stratégie et afin de mesurer

son efficacité. Une fois qu’une organisation a défini les

résultats commerciaux pour la KM, les processus de flux

de connaissances, tels que les communautés, doivent être

établis et leurs niveaux d’activité contrôlés. L’objectif est de

lier les tendances dans les mesures d’activité aux résultats

commerciaux. Des résultats commerciaux clairs génèrent

le ROI qui justifie l’investissement en des démarches de

KM ciblé, ainsi que dans l’infrastructure, les personnes et

la technologie dont toute initiative fructueuse a besoin.

Conseil No 2

Choisir des mesures qui sont conformes à la

démarche de KM particulière, aux objectifs et

au stade de développement de votre entreprise.

Au cours des stades précoces de son déploiement,

une démarche de KM a besoin de mesures qui éva­

luent la conformité à la stratégie de l’entreprise, l’ac­

ceptation, le changement de comportement. Elle

a aussi besoin d’une méthode qui peut prédire les

résultats commerciaux et commencer à les contrôler.

Cependant, la façon dont une organisation mesure les

couts et impacts particuliers de son programme de

KM dépend de la/les démarches (s) de KM adopté.

80 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

Par exemple, un programme de KM axé sur l’amélio­

ration de l’efficacité de la force de vente contrôlerait

la réutilisation de propositions applicables (activités)

et de ventes (résultats). Mais de telles mesures ne

seraient pas pertinentes pour un programme de

KM axé sur l’élaboration d’un nouvel ensemble de

connaissances dans une discipline d’ingénierie. De

la même façon, une entreprise dont l’objectif est

d’établir des communautés de pratique mesurerait la

réussite différemment que le ferait une organisation

qui veut installer un système de gestion du contenu.

Conseil No 3

Comprendre les relations entre les intrants,

les changements de processus et les résultats

escomptés.

Le modèle du chemin de valeur de l’APQC montre

les relations entre les intrants (les investissements),

les processus (activités et comportements relatifs à la

KM) et les résultats (objectifs de l’organisation). Selon

les activités de KM en cours, des exemples d’intrants

pourraient comprendre le temps, les salaires et les

couts informatiques. Les changements de processus

pourraient comprendre le temps de cycle, la partici­

pation et la contribution a l’ensemble des connais­

sances. Des exemples de résultats qui importent

pour l’entreprise pourraient inclure la rétention des

employées et des clients, la réduction du cout par

transaction, ou l’augmentation du revenu.

Conseil No 4

Créer un système de mesure qui fonctionne

vraiment.

Plusieurs organisations ont des listes de mesures,

mais ne disposent pas des processus et responsabi­

lisations nécessaires pour la collecte, l’organisation, le

suivi et l’utilisation de ces mesures afin d’améliorer

leurs programmes de KM et d’orienter le finance­

ment et l’investissement. Par ailleurs, un système de

mesure qui saisit les avantages intangibles, tels que la

cohésion sociale, la satisfaction au travail et le temps

d’acquisition des compétences, fournira une vue plus

complète de la réussite des efforts de la KM.

Conseil No 5

En plus des indicateurs, fournir des exemples

de réussite irréfutables.

À tout stade du déploiement de KM, les organisations

ont besoin de réussites concrètes qui peuvent aider a

justifier les investissements passés et futurs et fournir

à la direction une vision de ce qui est possible. Il s’agit

de rassembler les histoires de réussite qui illustrent

le chemin de valeur, des intrants jusqu’aux résultats.

En un mot

La mesure de KM est comme une belle automobile.

Bien que la mesure a une esthétique et une valeur

sociale inhérentes, sa valeur d’utilisation vient quand

elle nous propulse du point A au point B — de l’igno­

rance vers la compréhension ou vers l’action éclairée.

Un système de mesures qui lie les activités de KM à

l’impact commercial fournit une raison d’investir au­delà

des intangibles que la KM amène à une organisation.

a propos de aPqcDepuis plus de 30 ans, APQC a été à l’avant­garde de l’amélioration des performances et de la promotion de l’innovation dans le monde entier. APQC travaille avec des organisations dans toutes les industries pour trouver des pratiques, des solutions rentables pour piloter la productivité et l’amélioration de la qualité.

Cet article a été publié à l’origine par by APQC, http://www.apqc.org/knowledge­base/docu­ments/effective­ measurement­knowledge­management­initiatives­apqc­overviewReproduit avec la permission

81Édition spéciale Assemblées annuelles

à la BAD

La gestiondu savoir

en pratique

Gestion du savoir, changement, populations et décentralisation

Évaluation de la gestion des connaissances au sein de la BAfD ce que nous devrions savoir

82 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

« La gestion du savoir consiste à créer, générer,

répandre, partager et utiliser le savoir-faire. Ce

savoir- faire inclut les connaissances explicites et

les connaissances tacites. […] il ne s’agit ici pas

de livres de sagesse ni de meilleures pratiques,

mais plutôt de communautés qui préservent le

savoir-faire dans un domaine en partageant leurs

connaissances, en s’en inspirant et en les adap-

tant pour leur propre usage […] Vous pouvez

appeler cela «performance par l’apprentissage»,

«connaissances partagées» ou tout simplement

«travailler plus intelligemment «. »

(Learning to Fly, Chris Collison

and Geoff Parcell (2001)

Le partage du savoir n’est pas un concept nouveau. En

1945, Hayek écrivait déjà que l’atout le plus important

d’une entreprise était sa capacité à traiter l’informa­

tion. Plus de deux décennies plus tard, cette assertion

a trouvé écho chez Drucker (1969), qui a écrit que

« le savoir est le capital central, le centre de coût et

la ressource essentielle de l’économie ». Ce qui plus

important, c’est la dynamique de l’information et du

savoir, et la façon dont cette dynamique est adoptée,

échangée et combinée par les individus afin de créer

de nouvelles choses. Le but du présent article n’est pas

d’aborder une stratégie particulière, mais de nourrir

la réflexion sur la gestion du savoir, dans le contexte

d’un environnement mondial en mutation rapide et

d’une nouvelle dynamique en Afrique. De manière

plus spécifique, la gestion du savoir sera abordée dans

le contexte des projets pilotes mis en œuvre par le

Centre régional de ressources (CRR) de la Banque

africaine de développement (BAD).

Le contexte mondial en mutation

L’économie mondiale continue de subir des change­

ments tectoniques qui offrent de nouvelles opportu­

1 Cet article reflète l’opinion personnelle de son auteur et n’engage nulle­

ment la responsabilité de la Haute direction ou du Conseil d’administration

de la BAD.

nités et créent parallèlement de nouvelles menaces au

développement international. Au cours de la décen­

nie passée, les économies africaines ont suivi une

trajectoire de croissance plus solide et plus durable,

avec pour corollaire une réduction de l’incidence de

Gestion du savoir, changement, populations et décentralisation1

Ebrima Faal, Directeur régional Banque

africaine de développement, Centre de

Ressources d’Afrique australe

83Édition spéciale Assemblées annuelles

la pauvreté. Plus particulièrement, la libéralisation

du commerce ouvre progressivement l’accès aux

marchés, ce qui se traduit par l’accroissement des

échanges commerciaux dans le monde en général, et

en Afrique en particulier. Le commerce interafricain

a plus que doublé, passant de 49 milliards de dollars

É­U en 2005 à près de 109 milliards de dollars É­U

en 2011. Si ce développement est très favorablement

accueilli, il s’accompagne également de certains chan­

gements notables – notamment une forte demande

sur les systèmes d’infrastructures du continent, en

particulier les corridors commerciaux et les chaînes

d’approvisionnement logistique. L’agriculture est en

train d’être transformée, passant d’un système tiré

par l’État à un système de processus de chaîne de

valeur tirés essentiellement par la demande et le

secteur privé.

En outre, des défis majeurs sont apparus qui vont

rapidement dans le sens de la transformation du

paysage et de l’environnement des affaires en Afrique.

On peut notamment mentionner une augmentation

des économies tirées par les ressources, le dividende

de la démographie et une forte urbanisation. À cela

s’ajoutent l’adoption et la pénétration rapide de la

technologie mobile, une plus grande inclusion finan­

cière et l’explosion des envois de fonds. Qui est plus

est, les flux d’investissement de la Diaspora vers le

continent facilitent la diversification économique

et permettent à certaines personnes d’échapper à la

pauvreté. Cependant, ce n’est pas le cas pour tous, le

même phénomène ayant favorisé l’exclusion sociale

et divisé certaines communautés. Un rapport du

Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat

tire la sonnette d’alarme sur la crise imminente qui

devrait frapper les paysans pauvres de certaines zones

reculées, car leurs produits de base sont de plus en

plus vulnérables aux effets du changement climatique.

Dans le même temps, des connaissances émergent

au sujet d’approches nouvelles et plus durables de

gestion des ressources naturelles (agriculture de

conservation et culture organique, par exemple).

84 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

Ces changements rapides et souvent spectaculaires et

la surcharge de données dans le monde d’aujourd’hui

font de plus en plus ressortir l’importance de la ges­

tion du savoir. Le processus dynamique d’acquisition

du savoir et de création de richesses engendre de

multiples possibilités d’améliorer la productivité et

la compétitivité. Mais le risque existe également que

les entreprises et les organisations qui ne peuvent pas

suivre le rythme restent à la traîne. Le savoir est, par

conséquent, un atout crucial, qui s’avère primordial

pour remplir convenablement le mandat de la BAD.

On pourrait soutenir que l’efficacité de la BAD en

tant que catalyseur financier, partenaire et courtier du

savoir repose sur des capacités de savoir améliorées

et sur la façon dont la Banque gère activement le

savoir dans le contexte d’un environnement mon­

dial en mutation rapide. La capacité à gérer le savoir

dans un tel environnement est importante pour

trois raisons : premièrement, elle facilite la prise de

décision ; deuxièmement, elle renforce les institutions

d’apprentissage en systématisant l’apprentissage ; et

troisièmement, elle favorise les échanges culturels

et l’innovation.

Les personnes et la confiance

Comme l’indique à suffisance le folklore africain,

la gestion du savoir concerne les personnes et la

confiance. Le grand diplomate malien et auteur,

Amadou Hampâté Bâ, l’illustre à merveille dans sa

citation éloquente et célèbre : « En Afrique, quand un

vieillard meurt, c’est une bibliothèque qui brûle. » De ce

qui précède, il ressort que les individus souhaitent par

nature acquérir et partager le savoir : non seulement

les connaissances glanées lors des réussites mais aussi

les leçons tirées des échecs. Dans un article récent

(publié chez Arup Thoughts, en novembre 2011),

Andrew Trickett présente la gestion du savoir comme

étant la « conscience de l’organisation ». Il ajoute que

la gestion efficace du savoir dépend d’un sens et d’une

synergie d’obligation morale pesant sur l’employeur et

sur l’employé2. Trickett note que les organisations ont

maille à partir avec le système classique de comman­

dement et de contrôle et doivent reconnaître que le

travailleur d’aujourd’hui, qui a acquis le savoir, est bien

différent de l’ancien employé de la chaîne de produc­

tion. Il fait valoir que la confiance constitue l’élément

moteur de cette relation employeur­employé, et que

la gestion du savoir prospère dans des organisations

2 “Knowledge management: a question of trust”, http://thoughts.arup.

com/post/details/255/knowledge­management­a­question­of­trust

où s’est instauré un niveau élevé de confiance entre

les individus. L’argument central de Trickett est que

les individus sont naturellement enclins à partager

les connaissances, mais les organisations tendent à

ériger des barrières entre eux.

Ce que cela implique pour nous à la BAD, dans notre

quête pour devenir la première institution finan­

cière et le premier courtier du savoir en Afrique,

c’est que nous devons comprendre que le partage de

connaissances et une éthique de travail élevée seront

reconnus et récompensés. Un autre point impor­

tant à retenir est que si nous devons nous efforcer

de partager les leçons tirées de nos réussites, nous

devons aussi partager les enseignements tirés de nos

échecs. La Banque mondiale a récemment amorcé

cette dynamique avec ce que l’on a appelé les « foires

aux échecs », qui sont des débats sur les causes de

l’échec de certains projets dont l’objectif est d’aider

des collègues à apprendre de leurs échecs respectifs.

Marcia Stepanek3 écrit que l’échec – ou la notion que

nous devrions partager publiquement nos histoires

3 “Failure: The New Cool in Social Innovation?”, Social Enterprise, 27 mars

2010

85Édition spéciale Assemblées annuelles

sur ce qui ne marche pas dans notre volonté d’inno­

vation – est en train de devenir le « New Cool », le

nouveau concept à la mode. Au lieu de déclencher

une guerre perdue d’avance contre l’échec, certains

dirigeants du secteur social estiment que nous

devrions utiliser ce que nous avons appris pour mieux

échouer, pour tirer des enseignements du passé afin

que nous puissions, collectivement, relever nos défis

communs. Autrement dit, nous devrions rechercher

« ce qui doit mourir pour que de nouvelles initiatives

puissent vivre ». En clair, parler d’échec peut démysti­

fier le succès et dé­stigmatiser le risque, avoir un effet

catalyseur sur les innovateurs internes et inspirer un

plus grand nombre d’entre nous à bâtir des systèmes

qui échouent mieux. Réussir à parler de l’échec dans

tous ses aspects est également une belle façon de

mettre en valeur la notion de gestion du savoir.

L’échec n’est pas permanent. C’est une condition

provisoire dans laquelle une chose peut ne pas mar­

cher maintenant, mais quelque chose d’autre pourrait

fonctionner. Les tenants de cette forme de partage

du savoir sont d’avis qu’il est possible d’échouer, mais

il faut échouer dans un environnement contrôlé où

vous êtes préparés à l’éventualité que les choses ne

démarrent pas et où vous savez que vous ne pourrez

pas nager dans une mare de crocodiles tant que

vous n’avez pas vérifié et compris la vie biologique

au niveau de la crique.

Gestion du savoir et projets pilotes par le Centre régional de ressources de la BAD

Évoquons brièvement le rôle de la gestion du savoir

dans la réussite des projets pilotes du Centre régional

de ressources. S’ils sont exécutés convenablement,

ces projets fournissent par définition l’essence et

l’exemple même d’une gestion du savoir réussie. Un

projet pilote est défini comme une activité plani­

fiée à un titre expérimental, ou comme un test. Les

expérimentations pilotes, qui fournissent potentiel­

lement une vue d’ensemble du projet, sont généra­

lement réalisées avant le démarrage à grande échelle

du projet pour éviter de gaspiller du temps et de

l’argent sur une activité qui n’a pas été conçue de

manière appropriée. Un projet pilote est habituelle­

ment exécuté dans le droit fil du fameux proverbe

néerlandais qui demande de réfléchir avant d’agir et

de continuer à réfléchir lorsqu’on agit. Si un aspect

semble manquer pendant l’étude pilote, on peut

l’ajouter lors de l’expérimentation à grande échelle (et

plus onéreuse) du projet pour améliorer les chances

d’obtenir un résultat positif. L’objet du projet pilote

est de produire un ensemble de recommandations

intelligentes pour le projet.

Quel est le lien entre la gestion du savoir et les projets

pilotes dans les CRR ? La stratégie de décentralisa­

tion de la BAD est claire et simple – elle veut que

la Banque soit proche de ses clients et qu’elle leur

propose des produits de qualité en temps voulu,

ainsi que des services et des conseils. Les CRR en par­

ticulier réunissent une masse critique de personnels,

basés pour le moment à Nairobi et à Pretoria, pour

remplir ces objectifs. Au cas où la donne viendrait

à changer, le modèle de CRR devrait aussi subir des

changements notables en termes de comportements

et de ressources, et c’est là que résident les risques.

Pour atténuer ces risques, les CRR doivent disposer

L’échec n’est pas permanent. C’est une

condition provisoire dans laquelle

une chose peut ne pas marcher

maintenant, mais quelque chose

d’autre pourrait fonctionner.

86 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

Ebrima Faal est le directeur régional pour le centre de ressources régional Afrique du Sud à la Banque africaine de développement. Il est en charge de la stratégie, des opérations et des travaux d’analyse de la Banque dans la région. Il était un membre du personnel du FMI pendant 17 ans (1992­2009). Pendant ce temps, ses travaux ont porté principalement sur les questions économiques, des pays d’Asie, d’Amérique latine et des Caraïbes. En 1997­1998, il a été conseillé auprès du ministre des finances et plus tard Prési­dent de la République du Guyana.

M. Faal a obtenu un diplôme en commerce de l’Université Mount Allison (Canada) et a fait sa maitrise et son doctorat à l’Université McGill au Canada.

d’une grande latitude pour opérer. Cette latitude

devrait également permettre de combler le besoin

accru de nouveaux types de savoir, de fournir une

gamme diversifiée de services et de traiter des facteurs

divers et complexes qui détermineront l’efficacité

du développement de la BAD et des CRR. Il impor­

tance de souligner que ces mutations et nouvelles

exigences sont tirées par la demande. Les gouverne­

ments bénéficiaires et les partenaires sur le terrain

indiquent de plus en plus que l’importance qu’ils

attachent à la décentralisation dépend de la capacité

de cette dernière à renforcer l’innovation, le partage

de connaissances et l’apprentissage.

Les CRR devront acquérir et générer de nouvelles

connaissances pour répondre efficacement à ces

pressions et aux changements rapides et souvent

spectaculaires induits par ce savoir. Là où les modes

et méthodes anciens ne donnent plus de résultats

satisfaisants face à la réalité qui prévaut sur le terrain,

les CRR doivent faire preuve d’innovation pour mieux

servir leurs clients et leurs partenaires. Cela signifie

par ricochet que la BAD doit devenir plus souple ;

elle doit savoir améliorer ses systèmes et son état de

préparation institutionnels en vue d’un apprentissage

et d’un partage continus.

Enfin, l’aspect « populations » des projets pilotes

mis en œuvre par les CRR revêt une importance

capitale. Les changements d’état d’esprit et l’obli­

gation morale que le projet impose à tout le per­

sonnel et à la direction indiquent que la gestion du

savoir dans le contexte de la stratégie de décentra­

lisation n’est pas considérée comme un exercice de

respect de la conformité, mais plutôt une partie

intégrante d’un nouveau modèle opérationnel

adopté par la BAD dans son ensemble et souhaité

par ses clients.

87Édition spéciale Assemblées annuelles

Évaluation et gestion des connaissances au sein de la BAD—ce que nous devrions savoir

IntroductionLa Gestion des connaissances est au cœur du

travail du Département de l’évaluation (OPEV) de la

BAD. Et pour raison. Pour l’essentiel, le travail d’éva­

luation est un travail de la connaissance. En fait, on

peut décrire le processus d’évaluation comme un

processus de gestion de connaissance, ou plusieurs

acteurs—l’évaluateur, l’assistant de recherche, le chef

de division, le responsable de communication—joue

des rôles différents à des moments différents du pro­

cessus. De la même manière, l’évaluateur peut être

considéré comme un gestionnaire de connaissances

qui utilise, réutilise, crée, gère et partage des connais­

sances à travers les différentes tâches d’évaluation

(revues de littérature, séminaires de dissémination,

réunions des groupes de références, préparation de

contenu, et d’autres activités de dissémination.

Etant donné qu’il y a partage des connaissances

explicites et non­explicites tout au long du proces­

sus d’évaluation, OPEV est en train d’adopter une

approche plus globale et systématique de gestion

de connaissances issue de l’évaluation; une approche

ou les activités de gestions de connaissances sont

bien intégrées dans le processus de l’évaluation du

début à la fin. Ceci permettrait au Département de

profiter pleinement de la puissance de la gestion

des connaissances pour atteindre ses objectifs stra­

tégiques. Pour OPEV, la gestion des connaissances

est plus que la diffusion des connaissances à la fin

d’une évaluation.

Pour une stratégie de gestion des connaissances solide

L’atout stratégique d’OPEV réside dans ses connais­

sances des opérations de la Banque et de l’évaluation.

En fait, à force d’évaluer en profondeur les politiques,

stratégies et opérations de la Banque, OPEV est un

riche référentiel de connaissances sur le développe­

ment. Pour accomplir sa mission, OPEV doit partager

cette connaissance avec les parties prenantes de la

Banque de manière à favoriser son intégration dans

les opérations de l’institution ainsi que son utilisation

lors de la prise des décisions. Ce n’est pas une tâche

facile. Néanmoins, OPEV a réussi à rendre plus facile

l’accès aux connaissances qu’elle génère. Certes, il y lieu

de diversifier les produits pour mieux répondre aux

besoins de ses diverses audiences. Cependant, la plus

grande partie des connaissances générées à travers

les évaluations est disponible sous forme de rapports

d’évaluation accessibles à travers différents voies de

communications. En ce qui concerne le partage des

connaissances tacites, OPEV fait des progrès: Il multi­

plie les occasions pour encourager des échanges face

Felicia Avwontom et Mohamed Manai

88 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

à face, notamment à travers le ECoP (Communauté

des praticiens) et il y a plus d’engagement avec les

parties prenantes pendant le processus d’évaluation.

Il est évident que la gestion des connaissances va

permettre à OPEV d’en faire davantage pour s’as­

surer que ses évaluations sont influentes et qu’elles

sont utilisées—ce qui est l’objectif de la plupart des

services d’évaluation.

Fort de la grande expérience collective de son person­

nel dans l’évaluation, OPEV dispose d’une multitude

de connaissances en matière d’évaluation qu’il pour­

rait mieux partager et maximiser pour renforcer sa

capacité interne, afin de mieux accomplir sa mission.

Il pourrait également partager les connaissances en

matière d’évaluation avec d’autres praticiens, contri­

buant ainsi à sa progression dans le domaine

Dans un livre, intitulé à juste titre « If Only we Knew

what we Know »1 , O’Dell et Grayson affirment que

la plupart des organisations n’ont pas conscience de

leurs connaissances et sont « assises sur des puits de

connaissances, des réservoirs cachés comme il en

existe dans toutes les organisations, souvent inexploi­

tés et insoupçonnés ». Ils notent cependant que de

plus en plus d’organisations apprennent « à détecter

des connaissances à l’aide d’un outil que l’on appelle

la gestion des connaissances ». Elles puisent dans ce

capital insoupçonné, collectent, organisent, transfèrent

et utilisent les connaissances pour créer de la valeur

commerciale, une excellence opérationnelle et de l’in­

novation en termes de produits tout en accroissant les

bénéfices et l’efficacité. La gestion des connaissances

internes est donc tout aussi importante pour OPEV.

Mieux qu’une stratégie de gestion de connaissance

qui met l’accent sur le retour d’information et la

1 «Si seulement nous étions conscients de nos connaissances», O’Dell et

Grayson

diffusion uniquement—à la fin de l’évaluation—

OPEV est en train d’adopter une stratégie globale

entièrement intégrée dans le processus d’évaluation,

du début à la fin. La stratégie mettra l’accent sur la

gestion des connaissances internes et externes.

Une gestion efficace des connaissances internes veil­

lera à ce qu’OPEV apprenne de ses activités et innove

pour rester un département pertinent et compétitif.

Une gestion plus efficace des connaissances vers l’ex­

terne facilitera l’accès à la richesse des connaissances

d’OPEV et stimulera l’intégration des enseignements

tirés des évaluations dans les opérations de la Banque.

Le Département cherche donc à renforcer la gestion de

ses connaissances critique internes pour s’assurer qu’il

apprend de ses propres expériences et innove dans

son travail pour rester compétitif—en créant « de la

valeur, de l’excellence opérationnelle et de l’innovation en

termes de produit. » En faisant cela, le Département s’as­

surera qu’avec le temps, il peut bien utiliser ses connais­

sances collectives pout améliorer ses opérations internes

pour mieux accomplir sa mission. En parallèle, il renforce

la gestion de ses connaissances vers l’externe pour s’as­

surer d’atteindre son objectif consistant à produire des

évaluations qui vont contribuer à l’apprentissage, fournir

une base pour la reddition de comptes et promouvoir

une culture de l’évaluation au sein de la BAD

De plus, un accès plus facile aux connaissances généré

par OPEV augmenterait la satisfaction des parties

prenantes et influencerait d’une manière positive, leur

perception d’OPEV. Le but ultime est de s’assurer que

le partage des connaissances devient une seconde

nature à OPEV. Cela exige que le Département défi­

nisse bien ce que la gestion des connaissances signifie

pour OPEV—y compris le genre de connaissances

qu’il doit gérer; qu’il définisse une stratégie globale et

se concentre sur la mise en œuvre de cette dernière

ainsi que sur comment mesurer son efficacité.

89Édition spéciale Assemblées annuelles

Cadre stratégique pour le partage des connaissances afin de soutenir la production d’éva-luations influentesLe département doit bien cibler son public. Pour être

plus efficace, pour chaque évaluation, il se concen­

trera sur les deux ou trois publics primaires ainsi que

sur le type de connaissances dont ils ont besoin.

Quel est l’audience d’’OPEV? Les dirigeants et les

directeurs exécutifs de la Banque, le personnel tech­

nique de la Banque—y compris le personnel d’OPEV,

les pays membres régionaux et non­régionaux; les

praticiens du développement au sens large, y compris

la communauté des évaluateurs.

Quel type de connaissances essentielles OPEV doit­il

gérer? les connaissances relatives aux opérations de la

Banque, et qui ont un impact sur l’accomplissement

de ses objectifs stratégiques; les connaissances rela­

tives au travail d’évaluation et les connaissances sur

les opérations internes d’OPEV.

Le cadre stratégique.

1. Favoriser une culture organisationnelle propice au partage des connaissances et au dialogueLe Département mettra en œuvre des actions stra­

tégiques coordonnées pour favoriser le développe­

ment d’une culture organisationnelle commune qui

aidera le Département à atteindre ses objectifs. Ces

mesures devraient principalement viser à changer la

mentalité du personnel, (ceux qui créent, partagent et

utilisent leurs connaissances), à instaurer une culture

du partage au sein du Département.

Des mesures doivent entre mises en œuvre pour

améliorer la communication interne et favoriser le

partage des connaissances. Des opportunités seront

créées pour encourager le transfert en face à face des

connaissances tacites au sein d’OPEV (communautés

des praticiens, Déjeuner­débats, formations, réunions

de fin de mission, apprentissage après l’action) et avec

les parties prenantes de la Banque (communautés des

praticiens, à l’échelle de la Banque, ateliers de feed­

back, etc.), de nouvelles plates­formes technologiques

intégrant des médias sociaux (SharePoint) seront

mises en œuvre pour faciliter le partage et l’accès

aux connaissances tacites et explicites. Des stratégies

seront appliquées pour renforcer la communication,

notamment la communication—interne (un élément

clé de tout effort visant à ouvrir davantage la culture

organisationnelle).

2. Renforcer les processus et pratiques professionnels pour soutenir la réalisation d’évaluations influentesLes processus sont importants pour une ges­

tion réussie des connaissances, car ils simpli­

f ient le partage, la validation et la dif fusion des

connaissances. OPEV doit veiller à la standardi­

sation des ses processus critiques (par exemple,

l’évaluation, la dif fusion, la communication),

en s’assurant que les processus informels sont

bien compris.

, et surtout, en renforçant des processus de connais­

sance d’OPEV (création de connaissances, gestion des

connaissances, partage des connaissances (diffusion)

90 eVALUatiOn Matters—La gestion des connaissances

et leur intégration dans les processus de travail),

Doit veiller à ce que les connaissances circulent vers

le haut, le bas, à l’intérieur comme à l’extérieur du

Département (feed­back, diffusion et communication

externe). Cela permettra d’assurer que OPEV peut

s’appuyer sur son expérience collective pour améliorer

ses opérations internes et mieux accomplir sa mission.

Les processus et pratiques en matière de connais­

sances doivent être intégrés dans le processus d’éva­

luation en identifiant les jalons d’évaluation spéci­

fiques où les connaissances seront partagées et les

points où les communications auront lieu avec les

parties prenantes et avec le personnel d ‘OPEV (pla­

nification de diffusion de l’évaluation).

En raison de l’importance de la communication des

résultats des évaluations pour les parties prenantes

de la Banque, le processus de diffusion sera clari­

fié pour s’assurer que tous les acteurs travaillent

ensemble pour développer systématiquement (dès

le début du processus d’évaluation) et mettre en

œuvre une stratégie de diffusion pour toutes les

évaluations. A cette fin, une approche de com­

munication &marketing intégré (ICM), basé sur

des principes de communication et de gestion

du savoir, sera utilisée par le Département afin de

permettre à un plus large public d’accéder aux

connaissances de l’évaluation. Ceci permettrait

au département d’utiliser les différentes voies de

communication disponibles à la Banque pour

mieux communiquer avec les audiences cibles.

Des mesures de gestion seront nécessaires pour

s’assurer que cela est fait et que la diffusion est

considérée comme partie intégrante du travail

d’évaluation…

3. Équiper OPEV avec une infrastructure technologique adéquate qui soutiendra la réalisation d’évaluations influentes La technologie est particulièrement importante pour

l’accès aux connaissances explicites, mais aussi pour le

partage des connaissances tacites, car elle contribue

à rapprocher les gens et à accroître les possibilités de

partage des connaissances (blogs, forums de discus­

sion, courriers électroniques, etc.). L’OPEV adoptera

utilisation de la plate­forme technologique robuste

fournie par la Banque pour garantir la connectivité

(Internet, intranet, plate­forme de collaboration) au

sein de l’OPEV et avec les clients, la collaboration,

la communication (SharePoint et technologies 2.0

connexes wikis, blogs, forums de discussion, etc.) et

la diffusion (email, Internet, intranet) qui aideront

à faire tomber les barrières créées par les tonnes

de connaissances, les divisions organisationnelles, la

distance géographique et favoriseront les échanges

au sein du personnel (tableau d’affichage, wikis).

Conclusion: Comment la gestion des connaissances aidera OPEV à accomplir sa mission consistant à produire des évaluations influentes

• Enrenforçantlacapacitéinterned’OPEV

pour mener à bien ses évaluations.

L’amélioration de la communication interne, le

partage des connaissances au sein du personnel et

l’accès facilité aux connaissances existantes feront

en sorte qu’OPEV sache les connaissances qu’il

possède ou doit acquérir pour mieux accomplir

sa mission. Le personnel saura où trouver des

91Édition spéciale Assemblées annuelles

informations et des connaissances existantes

importantes pour réaliser son travail plus rapi­

dement. Chacun saura ce que son collègue sait et

ensemble les employés partageront leurs connais­

sances. Le Département sera ainsi plus compétitif

et efficace.

• L’améliorationdeladiffusionetlepartage

des connaissances

L’intégration des processus de connaissance dans

les processus de travail, en particulier le processus

d’évaluation garantira le transfert systématique

des connaissances dans les différentes phases de

l’évaluation aux clients de l’OPEV (les parties pre­

nantes de la Banque). Cette action sera complétée

par la planification de la diffusion systématique

pour toutes les évaluations.

• Lapréservationdelamémoireinstitution-

nelle Une solide infrastructure de technologie de

l’information facilitera la collecte et le partage des

connaissances, l’accès et l’utilisation des connais­

sances existantes, encouragera le partage (forums

de discussion, blogs, wikis) et facilitera la diffusion

(intranet, Internet). Ceci ajouté à l’élaboration d’un

référentiel de connaissances centralisé contribuera

à la centralisation de la collecte et du stockage

des connaissances de l’OPEV et à la réduction

du risque de pertes de connaissances à chaque

départ d’employé. Cela permettra également

d’assurer la continuité des activités en cas d’évé­

nements imprévus.

• Assurerlaparticipationetlefeed-backdes

parties prenantes ainsi que la diffusion des

conclusions et des recommandations des

évaluations pour veiller à ce que les évalua-

tions soient influentes

L’intégration des efforts de communication et

de feed­back dans le processus d’évaluation, en

tenant les parties prenantes pleinement informées

de la progression de l’évaluation et de la probabi­

lité des résultats veillera à ce que les évaluateurs

entretiennent de bonnes relations avec les prin­

cipaux intervenants. Cela aidera l’organisation à

instaurer des relations solides avec les intervenants

et favorisera la participation et l’intérêt de ces der­

niers pour l’utilisation des résultats de l’évaluation

et des enseignements tirés.

• Encouragerl’apprentissageetl’innovation

En mettant les gens en relation entre eux et en

leur donnant accès aux informations, la straté­

gie de GC offrira des canaux pour la diffusion

des connaissances au sein de d’OPEV et avec ses

clients. Au sein d’OPEV, ces mesures permet­

tront de stopper immédiatement la réalisation

de doublons. Cela laissera plus de temps pour

l’apprentissage et l’innovation. La collaboration

avec d’autres évaluateurs et la consultation des

parties prenantes permettront de résoudre des

problèmes courants.

Felicia Avwomtom est Chargée Principal en gestion du Savoir à OPEV. Avant de rejoindre la BAD, elle a travaillé dans les secteurs public, privé et du développement international, of­frant des services de gestion du savoir, d’édition et de traduction. Elle est titulaire de maîtrise en gestion du Savoir et en traduction, en plus d’un certificat d’études supérieures en Relations publiques. Elle poursuit un diplôme MBA.

Mohamed Manai est Chef de Division dans le Département de l’évaluation des opérations de la BAD. Avant de rejoindre la Banque, Mohamed Manai a travaillé comme conseiller en gestion pour Price­Waterhouse au Koweït, Tunisie et Maroc. Il est formé à la Finance et est titulaire d’un diplôme MBA.

De la connaissance à l’action …De l’action à l’impact

eVALUatiOn Matters

De l’expérience à la connaissance …

À propos de la BAD : L’objectif primordial du Groupe de la Banque africaine de développement (BAD) est de promouvoir le développement économique et le progrès social durables de ses pays membres régionaux (PMR), contribuant ainsi à la réduction de la pauvreté. Le Groupe de la Banque s’attache à réaliser cet objectif en mobilisant des ressources et en affectant celles-ci à l’investissement dans les PMR, ainsi qu’en fournissant des services consultatifs et une assistance technique pour appuyer les efforts de développement.

Le Département de l’évaluation des opérations a pour mission d’aider la Banque à promouvoir la croissance durable et la réduction de la pauvreté en Afrique par le biais d’évaluations indépendantes et marquantes. Ces évaluations examinent les politiques, procédures et opérations du Groupe de la Banque, passent en revue la performance et établissent des rapports sur les résultats afin d’en tirer des enseignements utiles et de promouvoir l’obligation de rendre compte.

Département de l’évaluation des opérations, Banque africaine de développementSite web : www.afdb.org/opev

Service d’assistance : [email protected]