essai sur la métaphysique d'aristote i / par félix ravaisson

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Essai sur la métaphysique d'Aristote / par Félix Ravaisson Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

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Page 1: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

Essai sur lamétaphysique d'Aristote

/ par Félix Ravaisson

Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

Page 2: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

Ravaisson, Félix (1813-1900). Essai sur la métaphysique d'Aristote / par Félix Ravaisson. 1837-1846.

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Page 3: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

R

L0&rn

Page 4: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

ESSAISORM

MÉTAPHYSIQUE

D'A'RISTOTE

i

Page 5: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

~f

ESSAï

METAPHYSIQUE

D'ARISTOTE

OUVRAGECOURONNÉPARL'ÎNSTFTUT(ACADEMtEDESSCIENCESMORALESETPOUTtQCEs)

FA)!FÉLIX RAVAISSON

ËOTtf )~ fOt)<T« fc~<Te&'< t«~)<T<:r.

MtTtFBMtQCE.t.XH.

PARIS

tMPMME PAR ACTCE!SATtOX DC ROt

A L'IMPRIMERIE ROYALE

M DCCC XXXVtt

St;tt LA

Page 6: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

a

AVANT-PROPOS.

Cet ouvragea été couronné par l'Académie

des sciences morales et politiques il y a déjà plus

de deux années, au mois d'avril t835. Depuis,

j'ai consacré tous mes loisirs à le revoir et à Fa

méliorer. L'Académie m'avait donné par l'organe

de son illustre rapporteur 1, des témoignages

d'approbation qui m'ont encouragé à développer

l'essai qu'elle avait jugé digne de son suffrage.

C'était un mémoire, maintenant c'est un livre

qui ne formera pas moins de deux volumes.

Voyez le Rapport de M. Cousin, p. go t ta.

Page 7: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

ij AVANT-PROPOS.

Le sujet mis au concours comprenait les ques-

tions suivantes

i° Faire connaître l'ouvrage d'Anstote Intitulé ~M~-

taphysique, par une analyse étendue, et en déterminer

le plan;2" En faire l'histoire, en signaler l'influence sur les

systèmes ultérieurs dans l'antiquité et les temps mo-

dernes.

3" Rechercher et discuter la part d'erreur et la partde vérité qui s'y trouvent, quelles sont !es idées qui en

subsistent encore aujourd'hui, et celles qui pourraiententrer utilement dans la philosophie de notre siècle.

Le premier volume répond à la première de

ces trois questions; le second, qui suivra de près

celui-ci, contiendra la réponse à la seconde et à

la troisième. L'analyse de laMétaphysique

supposaitla solution préalable de diHérentes

questions,souvent controversées, sur l'authen-

ticité de cet ouvrage et l'ordre dans lequel les

parties en sont disposées. En outre, la Méta-

physique nous étant parvenue plus ou moins in-

complète et en désordre, unesimple analyse ne

pouvaitsuffire pour en dévoiler le plan et faire

connaître à fond la doctrine qui y est contenue.

Le premier volume se partage donc en trois par

ties, dont la première, qui sert d'introduction,

Page 8: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

AVANT-PROPOS, .ij

traite de l'histoire et de l'authenticité de la Mé-

taphysique la seconde en renferme l'analyse,

livre par livre, et même, la plupart du temps,

chapitre par chapitre; la troisième, et la plus

considérable de beaucoup, est une tentative de

restitution de la théorie d'Aristote sur la méta-

physique ou philosophie première.

Cette dernière partie se divise elle-même en

trois livres, dont le premier est encore une sorte

d'introduction aux deux autres on y trouvera

la détermination de la place que laMétaphysique

occupe dans l'ensemble de la philosophie d'Aris-

tote, tant par rapport à la méthode et à la forme

de la science que par rapport à son objet. Le

second livre contient l'histoire critique des anté-

cédents de la Métaphysique d'Aristote d'après

Aristote lui-même, et principalement celle de la

philosophie platonicienne. Le troisième, enfin,

renferme le système métaphysique d'Aristote.

Dans le second et le troisième livre et principa-

lement dans ce dernier, j'ai préféré &la forme de

la dissertation celle de l'exposition, qui a l'avan-

tage de ne pas interrompre la suite et le mou-

vement des idées. Je renvoie dans les notes les

principaux passages sur lesquels je m'appuie, et

dont le simple rapprochement m'a paru suffire,

Page 9: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

iv AVANT-PROPOS.

le plus souvent, à la justification du texte; je n'yai ajouté qu'un petit nombre d'éclaircissements

sur les points les plus controversés ou les plus

difficiles.

Dans la pensée d'Aristote, la philosophie pre-

miere contient en quelque façon toute la philo-

sophie, et réciproquement, dans l'ordre de l'é-

ducation de l'esprit, l'étude des autres partiesde la philosophie doit précéder celle de la phi-

losophie première. J'ai donc cru devoir faire entrer

dans l'exposition de son système métaphysiqueles principes généraux de sa

Physique, de sa

Morale, avec la Politique qui en est inséparable,et de sa Logique. Le troisième livre de la troi-

sième partie se divise ainsi en trois chapitres. Le

premier contient la détermination de l'objet de

la Métaphysique. Le second est le développementdes deux systèmes opposés et parallèles de la

nature et de la science, par la physique et la

morale d'une part, et de l'autre par la logique,dans leur double rapport entre eux et avec l'ob-

jet de lamétaphysique, principe supérieur de ia

nature et de la science. Le troisième et dernier

chapitre contient la théorie de l'objet propre de

lamétaphysique, ou du premier principe. En

d'autres termes, le premier chapitre présente

Page 10: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

AVANT-PROPOS, v

l'objet de lamétaphysique comme l'être en gé-

néral le second développe l'opposition de l'être

et de la pensée, ou, si ron veut, du réel et de

l'idéal; le troisième montre l'identification de la

pensée et de Fêtre en Dieu. Les trois chapitres

réunis doivent offrir le tableau de la philosophie

d'Aristote dans le cadre et sur le fonds de la

philosophie première.

La philosophie d'Aristote, tombée depuis deux

siècles environ dans un discrédit général et

presque dans l'oubli, commence à s'en relever.

Mais elle ne neut reparaître dans son vrai jour

qu'à la lumière de lamétaphysique dégagée des

voiles épais dont la scolastique Pavait enve-

loppée. D'abord, toutes les parties de ce vaste

ensemble ne peuvent être appréciées à leur juste

valeur que par lesrapports intimes qu'elles ont

les unes avec les autres et avec la pensée géné-rale qui les tient étroitement unies; par exempleles lois de la pensée, qu'Ari~ote a nxées le

pre-,

mier, ne peuvent être entendues en leur véritable

sens que par l'analogie et l'opposition qu'elles

offrent avec les lois de la nature; et les lois de

la nature et de la pensée ne trouvent que dans

la métaphysique leur commune explication et

leur raison dernière. Ensuite, c'est dans la mé-

Page 11: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

vj AVANT-PROPOS.

taphysique que se révèlent le caractère et l'esprit

propre de l'aristotélisme en général. On s'est

représenté l'aristotélisme, depuis la chute de la

scolastique, tantôt comme un système d'abstrac-

tions sans réalité et classifications logiques ou

même purement verbales, tantôt comme un sys-

tème d'empirisme analogue, dans ses principes

psychologiques et dans ses conséquences mo-

rales, à l'épicuréisme antique ou au sensualisme

moderne. Ce sont deux erreurs qui ne peuvent

se dissiper entièrement que devant une exposi-

tion complète de la Métaphysique. On verra

qu'Aristote ne s'est renfermé ni dans la sphère

de la sensation ni dans celle du raisonnement;

que ce ne sont au contraire à ses yeux que deux

pègres où laphilosophie s'était successivement

arrêtée avant lui, et qu'elle a dû franchir pour

s'élever à ce point de vue supérieur de la raison

pure où le réel et Fidéal, l'individuel et l'uni-

versel se confondent dans l'activité de la pen-

sée. Or ce point de vue, c'est celui de la phi-

losophie première.

Dans ce premier volume, où nous nous bor-

nons à rétablir lapensée d'Aristote, nous nous

sommes abstenu d'énoncer aucun jugementsur

Page 12: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

AVANT-PROPOS. vij

les doctrines que nous exposions, et même, en

général, de signaler au lecteur les rapports nom-

breux qu'elles présentent avec des doctrines pos-

térieures. Dans la première partie du second vo-

lume, nous ferons l'histoire de l'influence quela métaphysique péripatéticienne a exercée sur

l'esprit humain, et des fortunes diverses qu'elle a

subies pendant plus de vingt siècles. Dans la se-

conde partie, qui formera la conclusion de tout

l'ouvrage, nous essayerons d'apprécier la valeur

de cette grande et célèbre doctrine, et de déter-

miner le rôle qu'elle est appelée à jouer encore

dans la philosophie.

Page 13: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

PREMIÈRE PARTIE

tNTRONJCTKHf.

Page 14: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson
Page 15: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

.t.

ESSAI

SCRLA

MÉTAPHYSIQUE

D'ARtSTOTE.

PREMIÈRE PARTIE.

INTRODUCTION.

DE L'HtSTOtRE ET DE L'ACTHENT!CtTE T)E LA METAPHYStQUK

D'ARISTOTE.

LIVRE PREMIER.

DE L'HtSTOtRE DE LA MÉTAPHYSIQUE D'ARtSTOTE.

CHAPITRE

De l'histoire des ouvrages d'Aristote en généra!, jusqu'au temps

d'ApeUicon de Téos et d'Andronicus de Rhodes.

Avant d'entreprendre l'étude de laMétaphysique

d'Aristote, nous avons à traiter des questions histo-

riques qui nous arrêteront quelque temps.

Page 16: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

4 PARTIE L-INTRODUCTION.

Tous les doutes qu'on a élevés sur le grand poëme

de l'antiquité, on les a élevés pareillement sur le plus

grand monument, peut-être, de la philosophie an-

cienne la Métaphysiquea eu le sort de l'Iliade. La

Métaphysique a-t-elle pour auteur Aristote, ou du

moins est-elle de lui tout entière? N'est-ce qu'un

assemblage de traités différents réunis, à tort ou à

raison, sous un titre commun? Est-il vrai enfin, si

c'est un seul et même livre, et un livre authentique

dans toutes ses parties, que diverses circonstances,

du vivant d'Aristote ou après lui, soient venues en

altérer le plan original, et qu'on y puisse rétablir un

ordre plus conforme au dessein de l'auteur ? Les cri-

tiques se sont posé tous ces problèmes, et ne les ont

pas encore complètement résolus nous devons en

chercher à notre tour la solution.

La question de l'authenticité et de l'ordre de la

Métaphysique est liée à celle de l'histoire, encore

très-obscure, des ouvrages d'Aristote. C'est par cette

histoireque

nous commencerons. Nous y séparerons,

aussitôt que cela nous sera possible, l'histoire de ia

Métaphysique en particulier depuis le temps où elle

dut être composée, jusqu'à celui où on la trouve uni-

versellement connue et répandue dans le monde

philosophique.

Ce travail serait plus facile, sans doute, si nous

avions encore l'ouvrage d'Hermippus de Smyrne,

Htp! A~ertAouc,dont Diogène de Laërte avait fait

Page 17: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE I, CHAPITRE t. 5

usage, les livres d'ApeIlicon et d'Andronicus de Rho-

des, les commentaires d'Eudorus, d'Evharmostus,

d'Aspasius, celui de Simplicius, sans doute aussi abon-

dant que ses autres écrits en précieux renseignements

historiques, enfin le traité spécial qu'avait composé

Adraste d'Aphrodisée sur l'ordre des livres d'Aristote

(ntp<T?~V«~tMCT~f

Ap<$'OTt~euc e'U~~et~KtTHf).Tout

cela apéri nous sommes réduits à un petit nombre

de témoignages directs qu'il faut rendre féconds par

une comparaison et une discussion approfondies;

joignez-y une multitude d'indications plus ou moins

indirectes, dont le rapprochement peut fournir quel-

ques lumières.

Il n'est point de sujet qui ait provoqué dans les

temps modernes. de plus vives et de plus longues con-

troverses. Elles commencèrent avec la Renaissance,

au n~lieu des combats du platonisme et du péripa-

tétijmae; la critique naquit de la passion. François

Pic de la Mirandole avait entrepris de renverser l'au

torité d'Anstote il éleva des doutes sur l'authenticité

de tous ses écrits La discussion s'anima, sans faire

de progrès, entre Nizzoli~ et Majoragio~. Le premier

qui réunit les principaux textes et chercha à déter-

miner des règles de critique, fut Patrizzi, le savant

&Mf)MM<M MMttMM A~trMM' ~etttMM, IV, 5.

s~ttt~xth~M,

de MrMprincipiis

et MM M<Mnf pMoM~~MtFt Parmz,

t553,in A*

ihpt~'MMMtm libri <~M contra ~tMKfMt. Metitot. ) 549, !n-4*.

s

Page 18: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

PARTIE 1. INTRODUCTION.

maistrop partial auteur des DMCM~t'onM

Peripate-~<c~. Un siècle et demi plus tard parut en France

une dissertation anonyme où l'on en venait enfin

au nœud de la question on y ébranlait par une

argumentation ingénieuse le récit, si longtemps ad-

mis sans contestation, de Strabon et dePiutarque,

sur le sort des manuscrits d'Aristote. Ce livre ou-

blié depuis, signalé de nos jours par Stahr qui n'en

a connu qu'une analyse 3, était l'ouvrage du béné-

dictin D. Liron. Mais lacritique allemande,

ici comme ailleurs, a bientôt su reprendre l'avance.

Schneider renversa pour toujours la tradition vulgairedans les Epimetra de son édition de l'Histoire des

animaux; Brandis et après lui Kopp élargirent le

point de vue où il avait placé la question, en gé-

néralisant ce qu'il n'avait appliqué qu'à un seul

desouvrages d'Aristote. Enfin Stahr a récemment

traité à fond tout ce qui concerne l'histoire d'Aris-

tote et de ses écrits, avec non moins de sagacité

que d'érudition Tels sont les principaux tra-

Tomeî. [V.Basit. t583.

Dans les Aménités de lacritique, ou Dissertations et

Remarques

nouvelles sur divers points det'antiqnité ecclésiastique et profane.

Paris, chez Florentin Detaatne, in ta.

stnséree dans te Journal des Savants, juin t~t?

R&<MMc~.M<M<tM;/nr PAtM~te, Geschichte tHtd ~t'Mc~Mc~' Phi-

&MepMe, t{tSs?). 3, s. a36-s54; 4, s. :S9-a86.

Rt<'M. JMM.~PMoL ~e. m ('8:9). s. oS to4.

~ruMe~rn. Hattet t83o-3<

Page 19: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

L!\RE CHAPtTRE I. 7

vaux où nous avons dû prendre la base de recherches

ultérieures.

Commençons par reproduire intégralementles ré-

citsqui ont provoqué la controverse. Voici celui de

Strabon 1

AScepsis naquirent Consens et son ms Notée; disciple

d'Aristote et de Theophraste. Nélée hérita de. la bibliothèque

de Théophraste. dont celle d'Aristote faisait partie car Aristote

(le premier, que je sache, qui ait rassemblé des livres*, et

enseigné aux roisd'Égypte

à mettre en ordre une biblio-

thèque) avait laissé en mourant à Théophraste sabibliothèque

et son école.Théophraste

laissa donc les livres à Notée. Celui-

ci les ayant portés à Scepsis, les transmit à ses héritiers, gens

ignorants, qui les tinrent enfermés et entassés en désordre.

Lorsqu'ils vinrent à savoir quelle ardeur mettaient les Attales,

auxquels leur ville obéissait, à rassembler des livres pour la

bibliothèque de Pergame, ils cachèrent les leurs sous terre,

dans une cave, où ils furent gâtés par l'humidité et par les

vers. Longtemps après, leurs descendants vendirent, pour un

haut pnx, à Apellicon de Téos les livres d'Aristote et de Théo

phraste. Or, cet Apellicon était plus bibliophile que philosophe

(~Ao&~Àof~MAAe~ t) ~<~efcf). Voulant donc restituer ce qui

avait été rongé, il transcrivit les livres, en en comblant mala-droitement les lacunes, et les publia remplis de fautes. Ainsi

les anciens péripatéticiens, les successeurs de Théophrasie,

n'ayant point ces livres, à l'exception d'un petit nombre, et

encoredexotériques pour la plupart, ne pouvaient philosopher

Strab.X!H,6o8

Cee: est MHS erreur. Voyc: Stahr, ~r~to~ha, ~5; cf. A<!)f))

~<'yMt<M<~&M<. 3.

Page 20: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

8 PARTIE !.–INTRODUCTION.

sérieusement, et durent se borner à des amplifications sur un

thème donné'. Caux qui vinrent ensuite, lorsque ces livres

eurentparu, firent mieux dans la philosophie et l'aristotélisme

mais ils furent souvent forcés de parler par conjecture,à cause

de la multitude des fautes. Rome y ajouta beaucoup car,

aussitôt après la mortd'Apellicon Sylla prit

sabibliothèque

en prenant Athènes, et la transporta à Rome. Là elle passa

par les mains du grammairien Tyrannion', qui aimait fort

Aristote et qui avait gagné le bibliothécaire et les libraires

se servirent souvent de copies fautives qu'ils ne collationnaient

pas, ce qui arrive encore tous les jours pour les autres livres

qu'on met en vente, soit à Rome, soit à Alexandrie.

Passons maintenant au récit dePlutarque

Sylla prit pour lui labibliothèque d'Apellicon de Téos, oà

se trouvaient la plupart des livres d'Aristote et de Théophraste,

encore mal connus dupublic. On dit

que lorsqu'on l'eut trans-

portée à Rome, le grammairien Tyrannion en obtint la plus

grande partie; qu'Andronicus de Rhodes en acquit de lui des

copies qu'il publia, et écrivit les tables qui circulentaujour-

d'hui. Les anciens péripatéticiens paraissent avoir été des

hommes doctes et lettrés, mais n'avoir connu, encore d'une

manièreImpadalte, qu'un petit nombre des livres d'Aristote

et de Théophraste parce que l'héritage de Nélée deScepsis

SM~&t MM TiBfnejM~MW, T<W ft~f W~Ctt TOMfteTfi Qet!-

~paorro~ ~<M otht ~oum T~ j3<e~a, n~ oX~&w, <to<~tora T<Bf~6!

tep<<KSf,ft)t~ ~e<f pfXo<ro~ew irpcty~TOtM, tNM ~<reM X)t)tu0~e<f.

Ate~e~MtTo, ou plutôt ~e~e~MTo, leçon adoptée par Scha!er

(/iMm<M<e. ad Ph<an:t. V. t34), et par Stahr (Arist. ff, ,27).Schneider (Epim. II, p. LHXv) prêtre &e~e<p:<r<!To.

Piut. Mta ~H. c. t6.

T<Wj'ÂptOTOT~OtC xai eMppMTou yp~~TMt) OMT:M~OM O~TS

ttp<SB< ~TeTu~<eTef.

Page 21: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE CHAPITRE L 9

à qui Théophraste avait laissé ses livres, était tombé entre les

mains de gens insouciants et ignorants.

Avant d'aller plus loin, examinons le rapport de

ces deux récits l'un avec l'autre. Le second est évidem-

ment un abrégé du premier; mais il s'y trouve des

dinérences remarquables. Nous ne parlons pas du

silence de Strabon sur Andronicus on peut l'expliquer

avec Schneider en considérant la dernière phrase

comme mutilée nous parlons d'une différence géné-

rale dans la manière dont les deux auteurs exposent

les mêmes faits. Plutarque s'exprime avec une réserve

pleine de doute il ne prend pas sur lui la responsabi-

lité de la tradition ce n'est qu'un on dit, À{~T«<

il ne nie pas que la plupart des livres d'Aristote soient

jamais venus à la connaissance des successeurs de

Théophraste il se contente de dire qu'ils étaient peu

connus dupublic (ot~M TOTtM~Sc ~MMX~e/AtMtTC?C<B~Ào!{)

il n'accuse pas les anciens péripatéticiens de s'être

bornés à de frivoles déclamations, enfin ilglisse rapi-

dement sur l'histoire de Nélée et de ses héritiers, >,

comme pour se dispenser d'insister sur une chose si

peu vraisemblable. Au contraire les paroles de Strabon

sont empreintes d'une exagération qui en plusieurs

endroits semble quelque peu passionnée Or, nous

Il y a âne ironie évidente dans le ~<je« ~xuC~etf; Ciccr ff<~Al-

<<c. t, t4: nosti itias ~«!<~M. Sur ~~W~e<f, voyM Hei!:), f~rr .S~

/'t<M' Rfccfr tM~Antig.

s.")69; cf. Buhte '/r Mr. ~nj<. r.n)f

Page 22: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

10 PARTIE I.–INTRODUCTION.

savons qu'il avait reçu les leçons de Tyrannion et

qu'il avait étudié la philosophie péripatéticienne avec

Roëthus de Sidon, c'est-à-dire avec un élève, et peut-

être dans l'école même d'Andronicus de Rhodes

N'est-il pas tout simple qu'il cherche à rehausser le

mérite des travaux de ses maîtres enexagérant

l'ignorance où on aurait été avant eux des principaux

écrits des fondateurs du Lycée ? Peut-être même la

source de Strabon est-elle ici le livre qu'Andronicus

avait écrit sur Aristote et sesouvrages. Ce livre,

Plutarque le connaissait aussi, puisqu'il rapporte

ailleurs des lettres d'Aristote et d'Alexandre, lettres

qu'Aulu-GeIle, qui les rapporte également, déclare

tirer ex libro Andronici pM<Mo~t II se pourrait donc

que Strabon et Plutarque eussent puisé à une source

commune, un peu suspecte, mais dans laquelle le

premier devait être disposé à avoir confiance; le se-

cond est tout à fait désintéressé dans la question, et,

par cela seul, mérite plus de crédit.

<< esot. Ht /trMt. o~. t, n~; Schneider, t~tfn. Iî, p. nxxvn); Stahr,

n~7

Strab. XII, 82!4.

Ammom. inCate~. (ed. Ald.

t546), f. 8 BottCoS ~p oBf ~<r< &-

~!MMo«. o AJa<r)t<tXoî ajToCÂf~oof~fo:

o t*o&of. Strab. XV!,

tog6 Bot)9M re, <~ouM~otjo~~o~tef ~tte~ T<iÂp«yToT~eKt.

Dans la dernièrephrase

de Strabon, le btâme ne tombe pas sur

Tyrannion, mais seulement sur les libraires de Rome. Voyez Stahr,

11, *3~, no).

Ptnt. lIila Alr,r: ~<~nf.t-.tt).(.ft).Ao'<x,:).

Page 23: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE ï. CHAPITRE 1. H

Dion Cassius 1, qui rapporte ia même histoire d'après

Plutarque, imite sa prudence, en citant ses expressions

mêmes sur le point leplus délicat de la question

tI IV 'lp'Ot<!TM TO?C '~C~Xc! MC <p!)M n~CMTftp~O~, ~f~M~Mftt.

Suidas a copié littéralement le passage de Dion.

Nous allons voir maintenant une tradition toute

dinérente. L'abréviateur d'Athénée dit, au début du

Banquet des sophistes~

« Né!ée hérita des livres d'Aristote (et de Theophraste)Ptoiémëe Philadelphe les lui acheta tous, et les transportaavec ceux qui venaient d'Athènes et de Rhodes dans Alexan-

drie. ·

Cette tradition semble au premier abord contre-

dire absolument celle que nous avons rapportée plus

haut. Cependant la contradiction ne porte pas sur

l'histoire de toute la bibliothèque de Théophraste

car Strabon et Plutarque ne nous en disent rien, si-

non qu'eue passa aux mains de Néiée dans la suite

de leur récit, iîs neparlent que

des manuscrits d'A-

ristote et de son successeur; ce sont ces manus

Dio Cass. M jMiHt coMect. M<f. <cr~M. Romae, 1827, tn-A, If,

564.

Stud. w. M~.

Deyn<M<y<&. ï. a ÂpM'7or~t~ re ~f ~XJoo~of [xati 9e<

~MM?<tf] <Mtt T~ Tt TOt~MM' J«tn;pt{oa<'Tft ~<6X~a NtfM<t. HeM' 0~ ~ttTOt,

~t~, ~pM~tet~t ~jM&t~~ ~KnXe~$ UTo~e~[KM:, <J~~eX~o$ J' e~-

~it<~ ~erA MMt AN~f~Cef <MMT~f enro ~oJau CM f~f at~~f Â~e~tA~eo!'

(MT~<~e. Sur la vente forcéeque

ies Athéniens firent à Ptot~nee,

voy. Galen. de valgar. ma)~. V, 4' i (ed. Basit )

Page 24: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

12 PARTIE 1. INTRODUCTION.

crits seulement qu'achète ApeHicon et qu'emporte

Sylla.

Si on supposait avec Vossius que Nélée vendit à

Ptoiémée sabibliothèque à l'exception des manuscrits

d'Aristote et de Théophraste, les deux traditions pour-raient s'accorder. Mais cette

conjecture contredit

Athénée sur un point très-important, puisque, suivant

lui, les livres dont Nélée avait hérité furent tous ven-

dus à labibliothèque alexandrine; comment les écrits

même d'Aristote etde Théophraste, c'est-à-dire la

partie la plus importante de la collection, celle à la-

quelle Ptolémée surtout attachait le plus de prix,n'auraient-ils pas été compris dans le marché avant

tous les autres? Il ne reste donc que cette seconde

hypothèse 2 Nélée aurait vendu des copies à Ptoié-

mée et aurait transmis à ses descendants les manus-

crits originaux. Le récit d'Athénée s'accorde alors avec

la partie historique de celui de Strabon. Quant à ce

que Strabon ajoute sur le peu de connaissance qu'a-vaient eu les

péripatéticiens desprincipaux ouvrages

de leurs maîtres, c'est unesimple conclusion, que la

critique peut discuter et combattre. C'est ce qu'on a

fait, et, ce nous semble, avec succès.

Reprenons d'abord, dans Strabon. la phrase sur la-

quelle roule en réalité tout le débat Suf~x <~ ïcïc Ot

n<p<T«T«y, TO~ /M6f -M~eU Tc!c ~HT<t eM~C<Z$-M, S~ CU<6

1 Vossius. d~pl~~osopk. c. xv, ~9'

VoMKM, ~e &'<-t.~M<M<yA. p. xv.

8g

Patrie. ~ucttM.~patet. p. 37.

Page 25: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE 1. CHAPITRE I. 15

~o~M T<t~<ÛJ<t, Tr~xf o~~Mf, xot~jnetA<<: -rmf e~NTtpOtNf,

Strabon ne nous dit pas quel sens il attache à cette

expression d'e~o~r~oM; mais il est clair, et cela nous

sufut ici, qu'il entend par là les ouvrages les moins

importants soit par le fond soit par la méthode. Re-

marquons encore qu'il fait l'aveu implicite que les

livres exotériques ne furent pas absolument les seuls

que l'on connût avant Apellicon. <(Dans le petit

nombre de ceux que l'on possédait, /a plupart, dit-

il, étaient exotériques. Plutarque se sert de termes

plus vagues encore, et n'établit aucune distinction

de ce genre.

Or nous avons des preuves plus ou moins directes

que l'on connut à Alexandrie une grande partie des

ouvrages d'Aristote et de Théophraste. D'abord Stra-

bon lui-même dit « Aristote enseigna aux rois d'Égypte

à composer une bibliothèque. '< Cela ne veut pas dire

qu'il leur donna à ce sujet des instructions directes

car le premier Ptolémée ne put commencer à for-

mer la bibliothèque du Brucheion qu'après la bataille

d'Ipsus ( 3o i av. J.-C. ), qui suivit de vingt et un ans

la mort d'Aristote (Saa) Cela signifie donc qu'il ins-

truisit les roisd'Egypte par son exemple; par consé-

quent sabibliothèque ne leur resta pas inconnue.

Suivant plusieurs auteurs anciens, ce fut Démétrius

de Phalère qui fut, sous les deux premiers Ptolémées,

Stahr. Il, 57.

Page 26: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

14 PARTIE L–INTRODUCTION.

à la tête de la bibliothèque d'Alexandrie Il était

l'ami de Lagus dont il avait été généreusement ac-

cueilli2; il était aussi l'ami de Théophraste, et ce fut

lui peut-être qui conseilla au roi d'Egypte d'inviter ce

philosopheà se rendre à sa cour Comment n'eût-il

pas obtenu de son ami des copies de ses livres et de

ceux d'Aristote pour la collection qu'il était chargé

de former? a

Philadelphe mit, à enrichir sa bibliothèque, plus

d'ardeur encore que son père, et il recherchait par--

dessus tout, nous dit-on, les ouvrages d'Aristote, et les

payait un haut prix~. B avait recules leçons de Stra-

ton de Lampsaque 5, le successeur immédiat de Théo-

phraste dans la direction du Lycée, et qui certaine-

ment connaissait à fond les écrits de ses prédécesseurs.

Ptolémée dut recevoir ces écrits de lui directement,

ou entrer par son intermédiaire en relation avec Nélée.

Bien plus, selon le commentateur David' ce même

Ptolémée Philadelphe avait composé une biographie

d'Aristote où il donnait le catalogue de ses ouvrages.

VoM. de Hist. ynM. I, c. x, 6o-t, Stahr, H, 58.

Plut. de Exil. Vin, 3?4, Reistt.; Stahr, !I. 58.

Voyez Stahr, H, 59-6o.

AnfMnon. in Ca<< 3 a.

D!og. Laert. V. 58.

David, inCa<< ap. Brandis, Rhein. jM<M. t, 3, s.

2~9 :)T&)f

ApK~TOTe~MMBf O~y~M~M~TM' ~foXXcSf ~f'Mf ~t~&'PTôv

Wpt~Mf, &

~M !hoX~is!o~ ~fXs~sX~ot, afaypa~))~ aJrtSf ~M~e~c~eM: xa< Tof

~00 B~TOS <M~T))f JtttOeo~H'.

Page 27: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE CHAPITRE 15

Il en comptait, ajoute-t-on, plusieurs milliers. Ce

nombre absurde va trouver son explication, et de-

viendra une preuve de plus pour la thèse que nous

soutenons. Ammonius, Simplicius, Jean Philopon,

David, Galien nous apprennent que la libéralité de

Philadelphe encouragea les falsifications; qu'on lui ap-

portait de tous côtés des livres supposés sous ie nom

d'Aristote, et qui! se trouva ainsi dans la Grande Bi-

bliothèque deux livres de Catégories et jusqu'à qua-

rante d'Analytiques. Ptolémée avait sans doute en-

registré tout ce qu'on avait amassé à Alexandrie, peut-

être aussi tout cequ'on possédait à Pergame, tout ce

que d'autres catalogues avaient déjà pu énumérer.

Or, il sort de ces faits deux conséquences impor

tantes. La première, c'est qu'on avait à Alexandrie plu-

sieurs des principaux ouvrages d'Aristote: car on ne

peut nier que les Catégories et lesAnalytiques soient

de ce nombre la seconde, c'est que la bibliothèque de

Nelée n'était pas considérée comme la source unique

d'au l'on put tirer les livres d'Aristote car dans cette

hypothèse toute tentative de falsification eût été in-

utile. Aussi rien ne nous atteste t il qu'on ait jamais

été dans une semblable opinion. Jean Philopon semble

dire au contraire que ce fut dans diverses bibliothè-

ques qu'on recueillit les quarante livres d'Analytiques

Ammun. inCah~. CT.3 a, b Simplic.

inCftfe~. f. 1 b; PbHop.

in ~Mty<. pr. p. 4; Dav. ttwo laud.; Gaten. comm. H, <Va<. hum.

p. t:8.

Page 28: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

16 PARTIE I. – INTRODUCTION.

qui furent apportés à Alexandrie'. On voit aussi par

le Canon des grammairiens alexandrins2, qu'on ajouta

successivement, à mesure qu'on acquérait de nou-

veaux documents, à la liste des écrits d'Aristote.

D'un autre côté, les principaux disciples d'Aristote,

tels qu'Eudème et Phanias, écrivirent «à l'envi de

leur maître, a dit Ammonius, sur les sujets qu'il avait

traités, et sous les titres mêmes qu'il avait'choisis, sur

les Catégories, surl'Analytique, sur l'Interprétation~.

Eudème écrivit aussi sur la Physique~ et nous sa-

vons positivement qu'il possédait la <~u~K)t <ï!Mo<M-<c,

puisque Théophraste, dans une lettre dont Simplicius

nous a conservé un fragment, lui envoie une rectifi-

cation d'un passage du cinquième livre qu'il lui avait

Phitop.in

Analyt. pr., f. 4 0<"r! yap Te<y<Mtp<!]tofT<teup~T<5f

AfaXuTMMW jStëXnï &' TK& -saXefaM j3<6X<o~x<M~.

Stahr, H, 65; cf.Kopp,

im B~em. Mas. 111, ), s. too.

Ammon. MC<t<<

f. 3 a O!yap ~<tO<)T<~a~To? E~fM: <M-

M<):<xeJ6e~p<M?o<

<M:T<~~Xof ToC AJaKn«&ouyeypa~jMttK <MtT!tyo-

p/M «ep! ép~fetitt !Mt< af<t~uT<)tt(t). Cf. Brandis, tm RteM. ~f<M.

I, 4, s. 267. Théophraste écrivit desTopiques; Simplic. in C<t<e~.

f° to5a. Cicer. de FM. bon. et mal. ï, n: *Qu{d? Theophrastus

tnediocntente détectât, quumtractat !ocos ab Aristoteie ante tracta-

tos.' Boeth. M Htr. de Interpr. ed. secund. (ed. BasH., t5yo, f°L

p. :Qt tEt Theophrastas,ut in a!us solet, cum de similibus rebus

tractat, qua*sciMcet ab Aristotele ante tractata! sunt, in libro

quoque

de ACSrmatione et Negationeiisdem

atiquibus verb!s, quibus in hoc

libro (se. m libro deInterpr.)

Aristoteles usus est. –Pasiclès, neveu

d'Eud&me, écrivit sur les Catégories. (Galen. de Libr. pro~r ap.

~m<tM. ad ~MmoK. P&t ~rM<o<. not. 71.).)

V. Brandis, im Rt«n. JMtM. T, <v, s. 28t

Page 29: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE I, CHAPITRE I. 17

demandée Nous parlerons plus loin des traditions

relatives à laMétaphysique. – Straton « le

coryphéede i'écoie péripatéticienne~,)) Dicéarque, que Cicé-

ron met à côté d'Aristote et de Théophraste", ne

furent-ils pas versés dans la lecture des écrits de

leurs maîtres ? L'académicien Xénocrate, qui écrivit

plusieurs livres sous les mêmes titres qu'Aristote, et

dont celui-ci réfute maintes fois les doctrines; le

mégarique Eubulide qui intitula undialogue 'Ap<

ç-oTtAae; Hermachus, le successeurd'Épicure, qui

fit un livre contre Aristote npof 'A~s-oTtÂaf les

stoïciens qui le suivirent ou le combattirent si souvent

dans leur logique 5, et qui lui empruntèrent une partiede leur physique et de leur morale"; tous ces philo-

sophes de différentes sectes et de différentesépoques,

purent-ils ignorer les plus importants de sesouvrages

Au reste, nous ne pouvons qu'indiquer ici les prin-

cipaux points que Schneider, Brandis, Kopp, Stahr,

ont établis par des recherches nombreuses et d'inné0nieuses inductions. Contentons-nous donc d'énoncer

sommairement les résultats les livres d'Aristote sur

la Logique que nous avons cités, sesprincipaux traités

S!mp!ic. in Phys. f a t6 a.

Ptut. a<h. Colot. X, 687, Reisk.

Ctcer. de FM. bon. et mal,ap. Stabr, Il, i48.

Voy. Kopp.im R&em. Mus. IM, t, Qg; Stahr, ïr, <)t-2.

Brandis, im i{A<tt. Mus. rv, 9~6-7.

Gaten. de F<tett&. Mt. t. II, 1. ï, 8, Kuhn. Cicer. Fw !V,

v-vn; Stahr, H. 89-91.

Page 30: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

18 PARTIE L–INTRODUCTION.

sur la science de la nature, comme laPhysique,

l'Histoire des animaux, etc., la Morale, plusieurs de

ses écrits sur laPolitique, ses livres de

Rhétorique,furent connus, exploités, réfutés avant le temps d'A

pellicon de Téos.

CHAPITRE IL

Des travauxd'Apellicon

et d'Andronicus sur lesouvrages d'Aristote.

A quoi se réduisent donc les publications que Stra-

bon et Piutarque attribuent à Andronicus ?

Remarquons d'abord que Cicéron ne nomme une

seule fois ni fun ni l'autre, qu'il ne fait pas la

moindre allusion à la prétendue découverte des ou-

vrages d'Aristote et deThéophraste. Cependant il

parle en mille occasions de ces deuxphilosophes et

du mérite de leurs successeurs il dit mêmequelque

part queles péripatéticiens s'écartèrent à tel point

de la première doctrine duLycée (degenerarant)

«qu'ils semblaient être nés d'eux-mêmes'.a N'était-ce

pas le lieu d'en rappeler la cause, s'il l'avait vue, avec

Strabon, dans l'impossibilité de puiser aux sources

premières du péripatétisme ? H ne faut pas oublier

Cie. de Fin. V, w:Namque horum (se. Anat. et

Theopbraatt)

posteri.ita

degenerarunt, utipsi ex se nati esse v!deantur.t m

Page 31: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE I, CHAPITRE ït. 19

2.

qu'ilétait lié avec Tyrannion, qui donna des leçons a

son fils et lui mit en ordre sa bibliothèque et qu'il

avait reçu les leçons du stoïcien Diodote, trère de

Boëthus, le disciple d'Andronicus et le condisciple de

Strabon2. Si cependant les travaux d'Apellicon et

d'Andronicus n'ont pas obtenu de lui la moindre

mention, n'est ce pas une preuve qu'il n'y attachait

pas une grande importance ?a

Essayons maintenant de déterminer d'une manière

directe en quoi consistèrent ces travaux.

Nous avons dit que les récits différents, sinon oppo

sés, des historiens se concilieraient aisément dans 1 hv

pothèse où la bibliothèque d'Alexandrie n'aurait acquis

que des copies des manuscrits d'Aristote et de Théo

phraste, tandis que Nélée aurait transmis les originaux

à ses descendants. Or, Athénée nous apprend qu'Apel-

licon avait pour les autographes une telle passion, qu'il

viola le temple de la Mère des Dieux à Athènes, afin

d'en enlever des pièces antiques qui y étaient dépo-

1 Cicer. f~Mt. a~Q.~atr. H. cp. n; ÏH, ep. )v; <~ 4«tc. H.

fp. n; tV, ep. <v: Xtl, epp. H, VI. Schnetder (p. Lxxxv) pense qu'il

s'agtt daM cespMMges

de Tyranmon !e Jeune, discipie de t'Ancien,

i I

sagit dans ceapasstgea

de T~rannion ie .ieune, discipie de I'Ancien,

qui fut prMdans la guerre

d'Antotne et de César, et donné à Te-

fentia; mais lacomparaison

des dates de cet événement et des

lettres que nom venons de citerprouve qu'il

se trompe.

Cicer. de Nat. Deor. t. Ht <Diodotus, Philo, Antiochus, Posi-

donius, a quibus institut! sumus. Cf~ Epist. ad ~tHtc. lt, xx; ~eaJ.

tt~MXT. Strab. XVI, :096 B~Sot M, c«fE~~oco<~sapie~ ~~e?s

T~ A~7erAeM[, MM AtJJcDM <Me~~t aJroe.

Page 32: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

20 PARTIE !.–INTRODUCTION.

sées, et qu'il recherchait surtout les ouvrages d'Ans

tote et en général les monuments de la philosophie

péripatéticienne'. Ces anecdotes rendent vraisem-

blable la supposition que les manuscrits qu'il acheta

àScepsis étaient ou des autographes d'Aristote et de

Théophraste, ou du moins des copies d'une haute an-

tiquité mais ce qui n'est nullement vraisemblable,

c'est que toutes les œuvres d'Aristote et de Théophraste

y fussent comprises il est à croire, au contraire, qu'il

n'y en avait qu'une petite partie. En effet, aurapport

de Strabon, Apellicon transcrivit tout entiers les ma-

nuscrits qu'il avait achetés; entreprise immense, si

elle avait embrassé tous les écrits oupresque tous les

écrits d'Aristote et de Théophraste, ceux que nous

possédons comme ceux que l'antiquité connaissait et

que nous n'avons plus. De plus, ajoute-t-on, l'humidité

et les vers avaient détruit bien des passages, et Apelli-

con remplit toutes les lacunes. C'est ici surtout qu'il

devient impossible d'admettre que son travail ait em-

brassé un cercle fort étendue En second lieu, quelque

téméraire qu'on veuille supposer cecritique, dont

Aristoclès de Messène faisait cependant beaucoup de

cas 5, on ne peut croire qu'il aitentrepris un pareil

travail de restitution sans avoir eu sous les yeux

d'autres manuscrits qui vinssent au secours des siens.

Athen. DeyMMpt. V, LUI, ap. Stahr, ïï,3a, 118.

D. Liron, Aménit. de la crit.p. 4~3.

AristocLap.

Euseb. Pnapar. EtXHx~. XV, t Stahr, io.

Page 33: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE l, CHAPITRE H. ~l

Mais, ajoute Strabon, l'édition donnée par Apdii

con était tellement fautive que le lecteur, pour s'ex-

pliquerle texte, en était p&M $oHtCM~réduit aux con-

jectures (-n<.?n)~<t tctxoTK

~e~<f).A Rome, la

négligence

des copistes augmenta encore considérablement le

nombre des fautes. De ces deux assertions se tire

<me double conséquence.

D'abord, c'est qu'il n'est pas exact de dire, comme

on le répète toujours sans preuve, qu'Andronicus ait

donné une véritable édition d'Aristote'. Bien loin de

fixer au temps de Tyrannion et d'Andronicus l'époque

de la restitution du texte altéré par Apellicon, Strabon

dit que «Rome ajouta beaucoup aux fautes. a D'un

autre côté, le texte d'Aristote n'était pas, au temps

d'Alexandre d'Aphrodisée, en aussi mauvais état que

nous le représente Strabon. C'est donc dans le temps

qui s'écoula d'Andronicus à Alexandre que ce texte a

étécorrigé or, il n'a pu l'être qu'avec le secours de

nouveaux manuscrits, diSérents encore, selon toute

apparence, de ceux qu'avait collationnés Apellicon

Réunissons maintenant les témoignages qui nous

sont parvenus sur la nature et la valeur des travaux

d'Andronicus de Rhodes.

Plutarque dit seulement qu'il livra à la publicité les

Mm'y

a donc pas lieu à conjectureravec Brandis (Mcm ?«.

i, tn, t~<)) attAndMnicus sauta, pourson cditifm. <)< manuscrits

aleiandrins.

D. Liron, Aménit. de la criL p. 443

Page 34: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

22 PARTIEL–INTRODUCTION.

copies qu'il avait obtenues de Tyrannion, et qu'il corn

posa des tables, des index 1. Porphyre, qui partagea en

Ennéades les traités de Plotin, déclare imiter « Apollo-

dore, qui divisa en dix sections les comédiesd'Épi-

charme, et Andronicus le péripatéticien, qui classa parordre de matières des livres d'Aristote et de Théo-

phraste, en réunissant en un tout les traités partielssur un même sujet2. » Ainsi Andronicus de Rhodes

distribua les écrits des deux philosophes en n~

~eu; il réunit en corps les petits traités détachés; il

dressa lecatalogue du tout. Enfin il

consigna les ré-

sultats de son travail dans unouvrage en plusieurs

livres, où il traitait en général de la vie d'Aristote et

deThéophraste, de l'ordre et de l'authenticité de leurs

écrits. C'est ce qui résulte de diverstémoignages que

nousrapporterons tous pour en tirer ensuite

quelques

conséquences.

10On trouvait dans l'ouvrage d'Andronicus, au rap-

port d'Ammonius, le testament d'Aristote~; au rap-

Plut.Mht~Ma-,

e. XXV!Â~pOMXOf e~Op~MfTCt T&W <tfT<-

yptfpeM' C& ft~KW .&e<MM, xat<M'it~pC[~<MTO~t tW

~epO~fOMî C/MUMM.t

Porphyr. Ftta Plotint, c. M!V MtfJtt;<MffMt;of J'ÂiMM~wpof ~f

ÂOtnwbtt x<~ÂfJp<<M)tOf T~

!tept!raT<)H)to~ o(MfË~ap~ott T<~

Ke~oypotpop eM ~)t<t TOftout ~MW <n<ft<yo[~e, o J'Ap<<r7o7~oM «<t<

~eopp~7oM ~<6~~ etf ~p~tutte/at Ae~e, Tds o~e~t ~o9~eH eM

TftJï~ CM'ay<ty~.

Ammon. tï<a ~rMt. &t oet. <;T;<tM<<d.(éd. Bubie, in Jn<t.C~D.

59) .Et mortuus est m Chalcide, denuttens testamemutu scrit'-

tum. quod fertur ab Andronico et P~iemaM cum votunnntbMs suorum

tfaetatuun).

a

Page 35: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE: i. CHAPITRE H 53

port d'Aulu-Gelle, les fameuses lettres d'Alexandre à

Aristote et d'Aristote à Alexandre'. 2" Selon l'auteur

arabe de la Bibliothèque des philosophes, lecinquième

livre contenait des lettres d'Aristote, et la table de ses

écrits 3° Une glose qui se trouve dans les manuscrits

à la fin de laMétaphysique de Théophraste, nous ap-

prend qu'Andronicut. avait pareillement donné une

liste des ouvrages de ce philosopher /t° Dans l'arran-

gement des np<t~M7!«M il mettait la Logique en tête

de toutes les autres. 5° Dans la Logique elle-même, il

plaçait les Catégories Immédiatement avant les To-

piques~. 6° Enfin outre l'arrangement des H~~T~

en générai et des parties dont il les composait, il

chercha à déterminer l'ordre et la constitution de

chaque ouvrage en particulier. Ainsi il paraît résulter

de la comparaison de plusieurs passages de SimpliciusIl

(jue ce fut Andronicus qui réunit définitivement les

GeH. Noct. Attic. XX, v.

Casiri, Biblioth. ~m~!eo-F''tCMfMktM p. 3o8 Alias cpistotas XX

libris Andronicus recensuit, pncter illas qmc in libro V Andronici

memorantur, ubt et Aristotelis librorum index occurrit.

Ad caic. Tbeophr. j~ct~yt.ToCro ïo ,3<€Mof Af~pot'txo!; ~ep xaf

Kpf«)nrof <t~ooC<nf o~e f<t<e«!!f tfjTof <~<.M ~e!ro/t)"T<!M ef jïi at'ot-

)jMt~ T<Bp Qeo~p<~r7<w ~<6À~<Mf.

Ammon. in Caley. p. 8.

SimpHc. inCa(< f. 4 a; Boctb. <ft Pn<'</<t«t)). (Opp. cd. Busit.

';)46).p. t~ncf.tbid.p. ttt

Simpt. M P~ f. :n6 a; Eud~nc, dans saPhy~ifjnc, sorte de

paraphrase de laPhysique d Aristote. commentait le \t' tMrc

.!?:<s

te V K«ÂfdpOt'OtOt '!e TaUTttf TMf T<*&t' T~~tni-. !0ti. ~t6XM<<; a~)'

Page 36: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

2& PARTIE ï.–INTRODUCTION.

trois derniers livres de la Physique auxcinq premiers.

7° It rapportait ie fait des deux livres deCatégories

trouvés dans iabibliothèque d'Alexandrie c'est à lui

queDavid l'Arménien déclare

l'emprunter 1. 8° Il con-

sidérait commeapocryphe l'appendice des

Catégories

(u?n)8e&)p<a:)~,et le traité de

l'Interprétation~. 0°Il

avait écrit des commentaires sur la Physique et les

Catégories et un livre sur la Division dont Plotin

faisait cas

Il est probable qu'Andronicus de Rhodes se servit

pour la composition de la partie biographique et

bibliographique de son livre, des écrits des alexan-

drins Hermippus et Ptolémée on trouvait égalementchez ces deux auteurs le testament et la liste des écrits

d'Aristote* Il dutpuiser aussi à une source très-

~MH.––(MïM y<~p Âf~pOMXOî et; T~i Tp~ (3~~ TtBfÂp<ty7oTeXoM <Mp~

xH't!<yefMJK[T<Msr<M. Cf. ibid. ff. i b, 258 a.

1Dav. in Categ. ap. Brandis, <m Metft. Jt~M. I, m, 249.

Simpl. in C~. 95 b T<~ f~f yoip, & xaiÂ~poMKM ~7<,

~rap<i ï~f -6rp<Me<MfToS (3<~Qu -arpoo~eto~a~ ~cKTw ~[~ T<)'M TOtura.

Boeth. in Pnzd:cam. (BaHL i546), p. tQt <Amdromcus hanc esse

adjectionem Aristotelis non putat.

Ammon. in libr. de Jttfer~r.; Alex.Aphr. in

~ttfttvt. nr.i. t;

Boeth. in libr. deInterpr.

ed. secund. p. aga.

Simplic. M?~.f i o3 b, 216 a; id. tn Catey. f° 6 b, t5 b.

5Boeth. de Divis. (Opp. ed. Basil. i546), p. 638 «Andronici,

diligentissimi senis, de Divisione liber editus, et hic idem a Plotino,

gravissimo philosopho comprobatus, et in libri Platonis, qui Sophis-

tes inscribitur, commentariis aPorphyrio repetitus.

Hermipp. ap. Athcn.De~noM~ XIII, 58~; G~M. ad cale.

Theoph. Met<~)h.; Ammon. Vita Arisiot. ex !)ct. ttumu~tt.; in Buhle

Page 37: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE I, CHAPiTHE Il. ~5

récente, le livre d'Apellicon, livre estimé d'Aristo-

ciès, comme nous l'avons déjà dit.

Mais il paraît que ni ces auteurs ni sespropres re-

cherches ne lui fournirent un criterium sûr de l'au-

thenticité desouvrages d'Aristote. Jl ne se fondait pas,

pour rejeter le traité de l'Interprétation, sur des preu-

ves extérieures, historiques, mais sur un argument

tiré du fond même de l'ouvrage, sur l'inexactitude

prétendue d'une citation du traité de l'Ame et o

Alexandre d'Aphrodisée le réfuta victorieusement'.

Porphyre défendit pareillement contre luil'appen-

dice desCatégories Cependant si Andronicus ou

Apellicon avaient pu consulter les manuscrits tirés de

la bibliothèque d'Aristote et de ses disciples immé-

diats, c'eût été une autorité trop grave pour qu'on la

passât sous silence 3, à plus forte raison, si ces manus-

crits étaient uniques; aucun commentateur ne l'a

jamais invoquée. On est en droit de conclure de ce

silence que de tous les grands ouvrages sur lesquels

il nous reste des commentaires savants et étendus,

~rttt. Opp. t, 69; David, in Cotey ap. Brand. <mMon. MtM. I, n:,

249.

Boeth. in Mr. de Interpr. ed. secund. p. 392 'Andronicus

enim librum hune Aristotelis esse non putat, quem Alexander \cre

fortiterque redarguit. \on esse namquc proprium Aristotelis hinc

conatur ostenderequoniam quabdam Aristoteles in principio !ihr! ))n

jus de tnteHecdbus animi tractat, etc. »

3oetb. tnPtiiedtcitm. p. )gt; Simptic tM C«if< f t);) h.

Brandis, <))tJ}~tH. ~tu. m, 249

Page 38: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

PARTIE L–INTRODUCTION.

aucun ne fut découvert et publié pour la premièrefois par Apellicon ou par Andronicus. Ainsi, quandBoëce dit de celui-ci «

quem cum exactumdiligen-

temque Aristotelis librorum et judicem et reper-torem judicarit antiquitas, etc., H il ne faut pas s'exa-

gérer la portée de cette épithète de repertor. Si

Andronicus avait trouvé la Métaphysique, laPhy-

sique, ies Analytiques, les Topiques, ia Météorolo-

gique, les traités des Sophismes, de i'Ame, du Ciel,ou de la Génération et de la Corruption, certainement

Alexandre d'Aphrodisée, Simplicius, Ammonius, Phi-

lopon, ne nous l'auraient pas laissé ignorer. Peut-être

des recherches ultérieures révéleront-elles quelsfurent les opuscules ou les fragments qu'il put dé-

couvrir dans les bibliothèques des grands de Rome;

mais jusqu'à présent on n'a pas le moindre indice à

ce sujet.

Quant à l'ordre dans lequel il disposa les livres

d'Aristote, la trace en subsiste encore; ainsi son dis-

ciple Boëthus de Sidon pensa que la n~a ~u-

oMH devait être placée avant lan~~M~/et Âo~KH~;

l'opinion d'Andronicus a prévalu~ Mais est-il vrai,

comme Brandis le suppose que l'ordre et les di-

visions qu'avait adoptés Andronicus soient absolu

ment les mêmes qui servent de base à nos plus an-

Bocth. in Mr. A~tt~tpn't pd. sceund p. :<)2.

Ammon. inC«<<'M. 8 t3.

Braud. im ~t~tt Af<M. t% -i6&.

Page 39: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

1LIVRE t, CHAPITRE H. 27

ciennes éditions ? Stahr croit rencontrer la preuve de

cette conjecture dans une notice trouvée par Bekker

sur quelques manuscrits de la Rhétorique, et qui at-

teste l'existence de deux divisions différentes; l'une

(en quatre livres) en usage chez les Grecs, l'autre (en

trois) enusage chez les Latins 2; or, celle-ci est pré-

cisément la division reçue dans toutes les éditions.

Mais la dénomination de Latin, peut-elle s'appli-

quer à Andronicus ? Non, car Andronicus est un écri-

vain grec. On suppose donc que les Latins adoptèrent

`

sa division, tandis que les Grecs en suivaient une

diuérente:' Nous croyons pouvoir donner précisémentla preuve du contraire les plus anciennes éditions

partagent en deux livres le traité des Sophismes, et

d'après une note que nous trouvons en marge d'une

traduction latine, et qui est certainement tirée aussi de

quelque manuscrit, cette division était celle des La-

tins 5, tandis qu'Alexandre d'Aphrodisée ne fait de tout

l'ouvrage qu'un seul livre. De même les commenta-

teursgrecs ne comptent dans la

Métaphysique que

Stahr, ~fM<ot~« &et den Roemern(Leipzig, t83A, in-8") p. 99.

Aristot.Opp.

ed. Bekker (Berolini, t83t, in-4"), Rhetoric. I,

nt!, t368 b K<M~ ActT~fOM ~T< XOM TaaTOt TOM a ~<~0« e~f; ît,

init. tS~~ b K<tTA AeT~oM ~fTeuOEf t~erat To (3<6X~o~ xaï~ <?

Ë~fM <j~~eretïo y ~t6~o~; ÎU, iuit. ~o3 b ÊfTE~ef ~ofT<t<

Aa:TO'0< TOC Tp~TOU TSf ~TOpt~f ÂptcrroT~OU~ j3i~&)f.Alex.

Aphrodis.M Elench. sophist. ex vers. GiMM Dorothei

( Pa

"s, tS4:, in-f°), p. 2g, in marg Latini hic )acinnt initium sfeundi

libri ËtesehoruM. s

Page 40: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

28 PARTIE !.–INTRODUCTION.

treize livres; les Latins en comptent quatorze 1; i'<x des

Grecs est pour eux le II", et ainsi de suite. De même

enfin le traité de l'Interprétation est divisé en deux

livres dans plusieurs manuscrits et dans les éditions

de i Ao6, 15/t~, 155 15y8, etc., et comme cette di-

vision est admise par Boëce qui partage égalementen deux parties le traité des Sophismes 3, il est vrai-

semblable que c'est encore la division latine. Mainte-

nant n'est-il pas de la plus haute probabilité que la

division latine n'est pas celle d'Andronicus de Rhodes ?a

Nous nous fondons sur une preuve négative dont

nous nous sommes déjà servis et qui a, ici encore,

la force d'un argument direct si les commentateurs

grecs s'étaient mis en opposition avec Andronicus sur

la division des ouvrages d'Aristote, ils n'auraient pas

manqué de rappeler et de discuter son opinion, comme

nous les avons vus le faire sur les questions d'ordre et

d'authenticité. Remarquons aussi en passant que les

commentateurs grecs paraissent s'accorder générale-ment avec Adraste, l'auteur du Ilt~ w~c

Apt~'eittAeMf ou~xx~mTMf, et qu'Adraste, autant que

nous sachions, ne s'écartait pas de la manière de

voir d'Andronicus Ainsi, il semble qu'il faut em-

Voyez A!ex. Aphrodis. inJMetap~.

ex vers.Gen..S<'pt~e<<<c (Pa-

is, t536,in-f), titul. passim.

Boeth. in Mr. deL~pret. cd. prim. p. aSo.

Bueth. E~tM't.MntHtfc. xMto. p. 733, ~(i

Sur le fait de !'CMStcncc de deux livres de(~ategones (David, ioc.

Page 41: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE ï, CHAPITRE Il. 29

brasser une opinion opposée a celle de Stahr c'est

quela division

~r~Me était généralement conforme

à celle d'Andronicus. Resterait à déterminer l'origine

de la division latine; nous inclinerions à penser qu'il

la faut rapporter à une époque plus récente, à celle

des traducteurs et des commentateurs latins d'Aris-

tote, du ive au vr' siècle, de Victorinus à Boêce'.

On pourrait être tenté de croire que par le mot de

Latins, il ne faut entendre ici que les scolastiques,

et que les notices transcrites par Bekker ne sont dues

qu'à des copistes modernes. Mais la division en ques-

tion estantérieure au moyen âge, puisqu'elle se trouve

dans Boëce et qu'elle est suivie par les Arabes2 et

par les deux plus anciens commentateursscolastiques

d'Aristote, Albert le Grand et saint Thomas. En outre,

Albert le Grand discute en plus d'un endroit les inter-

prétations de certains philosophi &~K qu'il oppose aux

Grecs, et qu'il désigne comme postérieurs à Thémis-

tius3. Du reste, nous ne donnons encore notre con-

taud.;Simp!. in Cate~. f. 4 b); sur le vrai titre et la vraie place des

Catégories (SimpHc. M Catey. f. 4 a; Boeth. in Pr~cant. p. K)t);sur rordre des livres de la Physique (Simpiic. in PA~. f. t h.f6a.

Cependant la division de la Rhétorique en trois livres se trouve

dé}à dans Quintiiien, H, xtv.

Voyez ~fM<o<etMOpe'u,ht<ute~ctMt comm.~crrAoM Cordub. (Ve-net. i56o), t. ï, L VIM.

Albert. M. Opp. t. ni (Lugd. t65t), in J~top/y~. p. 4 .Sunt

autem quidam Latinorum locice (!e~.!ogica;) persuasi, dicentesDeum

esse subjectnm et primae sdentiz primun) subjcctum et dhina' <)ivi-

Page 42: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

50 PARTIEL–INTRODUCTION.

jecture que pour uneconjecture; il faut attendre de

nouveaux renseignements sur cette école latine que

l'histoire a presque oubliée et dont il serait intéres-

sant de retrouver les traces.

Si nous revenons à l'hypothèse de Brandis, nous

trouvons qu'elle exige quelque modification. H est

vrai que l'arrangement établi ou confirmé par Andro-

nicus de Rhodes paraît être le même en général que

l'arrangement de nos éditions, en ce sens que celui-

ci est généralement identique avec celui des com-

mentateurs grecs, qui de leur côté suivent Androni-

cus, et celui des Latins n'en diffère qu'en des pointsde peu d'importance. Mais quand il y a des différen-

ces, les anciennes éditions sont le plus souvent du

parti des Latins.

numetattisMmae atttssumum; et hujusmodi multaponuntsecandum

logicas et communesconse<{uentias; et hi more Latinorum, qui om-

nem distinctionem solutionem esse putant, etc. At libr. de ~ntM.

p. ) 42*3 a Latinorum autemphilosophorum plurimi cum

opinione

Platonis in maitM consentire videntur, etc.p. 106 «InteHectum

hune etiam mult; modernorum vei Latinorum hahuerunt ant? ha*c

tempora, sequentes Alexandri et Themistii errorem. Sed contra istos

est sententia Averrois. 9

Page 43: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE t. CHAPITRE 111. 31

CHAPITRE Ht.

t~e l'histoire de laMétaphysique d' Aristote.

Nous pouvons maintenant, de l'histoire des écrits

d'Aristote en général, passer à l'histoire de la Méta-

physique, et à la discussion des problèmes relatifs à

l'authenticité et a l'ordre de cetouvrage, dans son en-

semble et dans ses parties.

A quelle époque laMétaphysique fut-elle connue

pour la première fois ? Il résulterait des lettres d'A-

ristote et d'Alexandre dont nous avons déjà eu oc-

casion de parler, que le premier aurait de son vivant

!ivré à la publicité au moins une partie desouvrages

que l'on a désignés dans l'antiquité sous le nom d'acroa-

ma~H<M. Or, Plutarque prétend que par cette expres-

sion il faut entendre ici la Métaphysique Avant de

rien décider, citons les deux lettres

Alexandre à Aristote Ce n'est pas bien fait à toi d'avoir publié tes écrits acroamatiques. En quoi nous distinguerons-nousdes autres, si la doctrine dans ïaqueMe nous avons été élevés

devient commune à tous ? Moi, j'aimerais mieux l'emporter sur

les autres par la connaissance des choses les plus hautes quepar ie pouvoir. Aristote a Alexandre Tu m'as écnt au

Hut. Hht~te~. JMjt~M.c. vn.

Page 44: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

52 PARTIE L–INTHODUCTÎON.

sujet des traitésacroamatiques, pensant qu'il fallait les tenir

secrets sache donc qu'ils sont publiés et ne le sont pas carils ne sont intelligibles que pour ceux qui m'ont entendu.

Bien que cette correspondance fût rapportée par

Andronicus, et que les trois auteurs qui nous l'ont

transmise d'après lui', n'en révoquent pas en doute

l'authenticité, cependant le caractère de la pensée et du

style suffit pour la rendre fort suspecte, et elle pour-rait bien avoir été

fabriquée,comme la lettre

qui

Ibrme l'introduction de laRhétorique il Alexandre,

pour accréditer auprès des rois de Pergame ou d'Égypte

quelque ouvrage d'Aristote, vrai ou supposé, que l'on

voulait leur vendre. Mais il restera toujours que l'au-

teur de cette hypothèse aurait considéré comme vrai-

semblable le fait de la publication par Aristote de ses

traités acroamatiques, et qu'Andronicus, Plutarque,

Aulu-Gelle, Simplicius, en pensèrent de même 2.

Ainsi, que ces lettres soientauthentiques ou qu'elles

ne ie soient pas, il nous importe de savoir si c'est à la

Métaphysique qu'elles font allusion. Nous remarquons

d'abord qu'il y est question des livresacroamatiques

Évidemment Plutarque, Aulu-Gelle (~Vact. ~«tc. XX, v), Sim-

plicius (M Phys. pnKBM. sub fin.) ontpris ces lettres à la même

source; les varianteslégères qu'ils présentent se

compensent en

quelquesorte

:0<?)top8eM~o~<KM~«~<TO~ axpoaïtxo~fsic GeH.;

Plut. <Mtp<M~M[T«<K~; SimpMc. <Utpoa;M[T<KOt)f] TMf XoyttW TtMTtta

~Tt

[sic Ge!L; Ptut. Simplic. ~n} &o«To~:Ef, etc.

Kopp.Mt Rh<'«[. ~ftM. III, t, QQ; Stahr, Ht 47-8.

Page 45: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE CHAPITRE III 55

3

en général (To~c <x~of~M<tWK~c et nonsimplement

eM~o<~M<tWMucsans article), ce

qui semble devoir

s'étendre à tous les livres de cegenre qui auraient été

écrits parAristote jusqu'au temps de cette

correspon-

dance. Mais, ày

mieuxregarder, il ne faut prendre

ici <Lyo<~MMwcquedans le sens le

plus restreint, et ne

l'appliquer qu'àla science la

plus haute et laplus

dimcile; c'est ceque

donnent à entendre ces termes

Î dont se sert Alexandre: 'sr~< e~c-s, et toute la

réponsed'Aristote. M

pourrait donc êtrequestion

de la Métaphysiqueet du n~< ~ooBp~, qui avaient

également pour objetla Philosophie première, ou

seulement de l'un de ces deuxouvrages.

Nous allons voir pard'autres

témoignages qu'il nf

peut s'agirde la Métaphysique

On lit dans le commentaire, encore inédit, d'As

< lepius de Tralles sur laMétaphysique

Le présent ouvragen'a pas l'unité des autres écrits d'Aristote.

et manque d'ordre et d enchaînement. U laisse à désirer sous le

rapport de la continuité du discours; on y trouve des passages

empruntés à des traités sur d'autres matières souvent la même

chose y est redite plusieursfois. On allègue avec raison pour

justifier l'auteur, qu'après avoir écrit ce livre il l'envoya a Eu

dcme de Rhodes, son disciple, et que cetumi ne crut pas qu'H

Est-ce au ttep! ~Aoo~M ou à la Métaphysique que se rappor~-

ce mot que Julien attribue AAristote Âp«r7oTe~!< âè ~p~repot' ~otxe)'

et'tOtt<r<Me~etf- ~T<fti) fte<of auTy ~pofn~et ~poM:f eni T)) ~0~0~ <x)t

j~yps~t! T<wj:<tOe?~fTOtmf nep<yc5f ~if<f;'tt' ?

Page 46: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

34 PARTIEL–INTRODUCTION.

tutà propos de livrer au

public, dans l'état où elle était, une

œuvre siimportante; cependant Eudème vint à mourir, et le

livre souffrit enplusieurs endroits. Ceux

qui vinrent ensuite,

n'osanty ajouter de leur chef, puisèrent, pour

combler les

lacunes, dans d'autresouvrages, et raccordèrent le tout du

mieuxqu'ils purent

Ainsi, le livre d'Aristote ne parut qu'après la mort

d'Eudème, qui en avait accepté la révision. Asclepius

ajoute que plusieurs attribuaient le premier livre de la

Métaphysique à Pasiclès, fils de Boëthus, frère d'Eu-

dème, et lui-même disciple d'Aristote~. Cette partie

de son récit, nous la trouvons reproduite dans Jean

Philopon, avec quelques différences, il est vrai ici

au lieu du premier livre. A, c'est le second, a; au lieu

Sainte~roix a donné lepassage d'Asclepius dans le

Magasin ency-

clopédique (V. année, p. 36y), mais avec des fautes graves; nous le

reproduisons intégratement d'après le manuscrit t oo4 de la Bibl.roy.

de Paris Ôïporo~ T~? <T~fTa$E&)~ A'T<~(Tr<~ )) crapoC<ja ttpayfMtTe&

Ot!~ O~M!! T<tM<~X<Mt T<M< TOM Apt<r7oT~OMS <n<yxexpon)ft~, oJ~TO

e~TaxMf Te <«t< <n)fe~es ~e«' ~oxoCco:' aX~a! T<~a ~f ~e~e<~ f5:tMM ïo

<fMM~ ï)'< ~~ewt' Tft ~~a'f ~pey~M<Te«Mf oXoxXtfp<!t fteTe~f~OfH.

tMtt ~o~ vA aJïA ~etf atfoXoyoMfTM JeJjr~p TOMïo, «t~Nt

~oXoyOMPTM' t!ï<ypa~M T)!f -Sf!!tpoe<Taf -rpa[y(M[Tehf, ~re~Ett f[jT))f

E<?~~ T~ ~m~pa)<«?roS TM ~o3< e?Ta exe!fo~ sfJ~~e f<)) e!fa< xx~of

~t ~n~ef ~)[~o0~fa< e~ 'sd~o<~ Ttt~<x<Tt)~ 'Brpay~MTe/ao. Ëf T~) oSf

f~o~ xp< ~re~et~o~ «~Ae~Mpt;<~ T<f<t ToC j3t6X/ou' ftt) To~~f-

ret wfpooCeM'Mo)'xo9ef o< ~EMye~<j7epot <!<~ Tô ~oM -aft~M ~e~e~at

T~< TOC~f~p0< ~fO~M, ~Tt~yof Tmf <ÏXX&)f Ot~ToS

~pCty~MtTe~fT«

~et~ot~M, <M!ft~<ra<~e< ~f JHfa[T<!)'.

M. ibid. TAyalp ~e~of <~p<:t, isept oj ttu);

'BrpMTM; ~sr<«, o~

~K~tf e7<"M <tt?T<w, oÂ~~ naotx~~out ToC o!ou Bot)OoC, Toi a~e~CoS Eu<

MO~ TOC ~TattpOU auTOt?.

Page 47: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE t. CHAPITRE III. 35

3.

de Pasiclès, Pasicrate; au lieu de Boëthus, Bonacus';

mais les différences de nom propre n'ont aucune im-

portance, puisque nous ne connaissons encore le com-

mentaire de Philopon que dans une mauvaise tra-

duction latine; le texte original porte probablement

Pasiclès et Boëthus. Or les commentairesd'Asclepius

et de Philopon ne sont pas sans importance histo

rique; ce sont, de leur propre aveu, des rédactions

des leçons d'Ammonius, qui avait réuni de curieux

renseignements sur l'histoire des ouvrages d'Aristote~(

EnHn, si le récit d'Asclepius laissait quelque doute,

nous pourrions l'appuyer d'un passage d'Alexandre

d'Aphrodisée qui en fournit une confirmation indi-

recte, en nous apprenant qu'Eudème revit et corrigea

le texte de la Métaphysique~. Brandis avait déjà con-

jecturé que le récit d'Asclepius était emprunté au

commentaire d'Alexandre. Il se pourrait qu'il fût tiré

de quelque partie aujourd hui perdue de ce commen-

taire précieux dont nous n'avons plus que les cinq

premiers livres~.

Joann. Philop."t

JUetapA~.ex ffM. Pa<n<<t (Ferraria*, i583,

ia-f*), p. -y<ttuac librum aiunt

quidamesse Pasicratis i!Hi BotM i,

qui erat frater Eudemi. Auditor vero fuerat At istotetis. r

Alex. Aphrodis.in Mc~A~. Vit (Bibl. rc~.

Paris cod. ms. gr.

'~79' p. ~) o~MU «[t TaCTa exen'o~ ~?< <n<i'TaT7etTOat' xa<

<C<M MfO (t~P ÂCtO~OT~OUf(TM~T~TCtKT'M' Er ojjeft<][ y ~p

T<Ef ~X<.)f CtjTOM

<~Mty(M~e&tf eJp~<nter<t<To<ot?T<!f T< 'cenon;K<m o~o~ efTtC~ef Ça/MTOf,

~& ? teS E~~tae M~~pto~~t.

Voyez plus bas.

Page 48: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

36 PARTIE!.–INTRODUCTION.

Enfin, toute cette tradition n'a rien que de très-

vraisemblable. Eudème était leplus fidèle

disciple

d'Aristote, celuiqui reproduisit toujours le

plus exac-

tement ses doctrines'. H était nature!que

ce fût à lui

qu'Aristote confiât la révision de sonouvrage, comme

il lui confiaprobablement

la rédaction ou la révision

de l'une de ses Morales, qui porte encore le nom

d'Eudème~.

Ainsi, la première partie du récit d'Asclepius peutêtre considérée comme complètement authentique.Or elle établit l'authenticité de la

Métaphysique d'A-

ristote en général. Elle prouve en même temps quele principal ouvrage d'Aristote ne fut pas ignoré de

ses disciples, et achève la réiutation des exagérations

de Strabon.

Quant à la seconde partie, il y règne un vague et

une incertituderemarquables. Asclepius

ne détermine

Simpiic.in

P~. f ao 6 E~ftoî ry Apt<r7oT~Xe< c~fra ~ra

)toXo«0<5f.

Û&~ E~(te«~ Éthique d'Eudeme et nonpas à Eudeme; Fou

wage d'Ead&me~ep AfaXM<~f est

appelé par Alexandred'Aphro-

disée ( in 7'fpte. II) E~fteta Af~oTf~. Nunnesius, ad ~tHmon. vit.

~rM<o<. Pansch (De E<McM Nicomacheis. Bonna'. t833, :n-8°), setrompe

en diMnt que Nunnez croit que cetexemple est en faveur de la ver-

sionvulgaire, Éthique

d EnJ~nM'; Nunnez dit tout le contraire. Il

faut traduire de même Û0<~Nu<o~eM, par J?<A~<te de

A~coma~uf,eteeMidéfer cet ouvrage comme

rédigé, ou du moins revu et mis en

ordrepar le Bis d'Aristote. Petit, AfMceMaMM. ÏV. 60; Pansch, De Eth.

Nicom.p. 3t sqq.; Michelet (~n!<ot< E<At«t Nicomachea, p. n%

t835, in-8), PrMmt init.

Page 49: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE i, CHAPITRE Ill. 57

3.

ni ia cause ni la nature du dommage que sounrit le

manuscrit de la Métaphysique, ni l'époque ou on

tâcha d'y remédier. Il est évident qu'il n'a plus ici

d'autorité sur laquelle II s'appuie avec confiance. On

pourrait même être tenté de croire qu'il se contente

de donner un extrait rapide du récit de Strabon; mais

cette supposition ne saurait se concilier avec ce qui

précède. Si la Métaphysique fut envoyée à Eudème

par Aristote, elle ne dut point passer au pouvoir de

Nélée avec l'héritage de Théophraste, et rester en-

fouie jusqu'au temps de Sylla. Il est donc très vrai-

semblable que les ~erct~ft~-epef d'AsdepIus doivent

êtrerapportés à une époque antérieure a Apelllcon;

et il est très-vraisemblable, en e(!et, qu'Eudème coin-

muniqua l'ouvrage du maître à ses condisciples, et

qu'ils travaillèrent avec lui et après lui à en combler

les lacunes. Nous venons de dire qu'un livre fut attri-

bué à Pasiclès' c'était aussi une tradition chez les

Arabes qu'une partie du premier livre avait été ajou-

tée par Théophrasteenfm Théophraste écrivit une

Métaphysique dont un fragment nous est parvenu. Si

pourtant les pénpatéticlens n'ont point fait sur la Me

taphysique des travaux d'Interprétation aussi suivis que

sur laPhysique et la Logique, il ne faut pas s en éton

ner. D'un côté, la Métaphysique ne fut jamais ache-

vée de l'autre, le Lycée tendit chaque jour :'t s'éloigner

Atibert. M. w~e~f. ~<. t. < t. p ~x..

Page 50: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

~8 PARTIEL–INTRODUCTION.

davantage des hautes spéculations. Voilà pourquoi, de

puis le temps d'Eudème et de Théophraste jusqu'au

siècle d'Auguste, nous ne trouvons plus une seule

mention, directe ou indirecte, de laMétaphysique.

Il ne faut pas non plus conclure du silence de Cicé

ron, que, de son temps, ce livre fut absolument iné-

dit. Il ne parle pas davantage des Catégories et des

Analytiques. A cette époque, c'est lui qui nous l'atteste,

1;

lesphilosophes mêmes connaissaient à peine Aristote,

tandis que Platon et les Socratiques étaient entre les

mains de tout le monde 2. LesTopiques semblaient f

alors très-obscures5, les Topiques, que Simplicius t

compte avec raison parmi les plus faciles à entendre 6

de tous les ouvrages d'Aristote Cicéron ne voulait l,

d'ailleurs qu'appliquer laphilosophie à la pratique de f

la vie publique et privée, et ne se souciait guère de

tout livre qui ne se recommandait pas par le mérite lit-

téraire, la facilité et l'élégance de l'exposition5. Lors

même qu'il aurait eu entre les mains laMétapby-

Cie. Topic. I, init .«Quod quidem minime sum admiratus,eum philosophum rhetori non esse cognitum, qui ab ipsis philoso-

phis, pnpter admodum paucus, ignoretur. x I:

Cic. TtMctJ. H, n[; de O~e. l, xxtx, xxxvu. 1Cie. Topic. I, init. Sed a libris te obscuntas rejecit.

Simplic.in

C<ttey.f. a A~oo ~e xai e~ ~!f ef o!i; eëouX~ <nt~-

'f7f[Tit ~&t$ef, <&< To?~ Meref&potî x~ To~ Tox<xo<~ x~ ir<tM yft)<r/aM {

<:MToS'Bo~M~Mt. L. Ideler ( in ~mtof. Jfe~or. prŒtf. p. t2 ) proposede substituer ~moroX~ à ~o~tTe/fu?.. s

C'est à cause de t'impertection de la forme qu'I) parte avec tant d<*

Page 51: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE 1, CHAPITRE Ht. 39

sique,il eùt été sans doute

peu jaloux d'en sonder

tes obscuresprofondeurs il se contenta d'une lec-

ture rapide et d'uneintelligence superficielle

du neg~

<p~CJB<P<«f

Quant à Apelliconet Andronicus de Rhodes, rien

lie nous attestequ'ils

aient tait un travailspécial sur la

Métaphysique.Mais immédiatement

après Androni-

cus, arrivent les commentateurs. Ce fut d'abord Eu-

dorus, son disciple, quise livra à la

critiquedu texte;

ensuite un Evharmostus, que nous ne connaissons que

par la mention qu'en a faite Alexandre d'Aphrodisëe

enfin unphilosophe célèbre du

temps d'Auguste,

Nicolas de Damas, qui paraît avoircomposé

un livre

n:cpris des essais nombreux faits avant lui enphilosophie par tes Latins

il n<* daignait pasmême les lire; ïtMcttL It, )u *Est cnimquoddam

genus eorumqui

sephilosophes appe!)ari \otunt, quorum dicuntur

esse Latini sane mutti libri, quosnon contcmno equidem, tjuippequos

ounquatt~ legerim sed quia protitentur iHiipsi qui

cos scribunt se

neque distincte, neque distribute, nequc ctcgantcr, neque ornatc

scnberc, lectionem sine ulla delectatione neg)igo.x Cf. IV, m. Stahr,

Aristot. bei Jm ~nfnt. p 55. –Citons encore unpassage caractéris

tique que Stahr n'indique pas; Tuscitl. t, ut: "Muttijatn esse libri

dicuntur, scripti inconsiderate ab optimis ittis quidetn viris, sed non

satis eruditis. Fieri autempotest

ut recte (luis sentiat, et id quod sen-

t't polite e!oquinon

possit; sed mandare quemquam literiscogitatio-

ucs suas, quieas nec

disponere, nec illustrarepossit,

nec delectatione

atiqua allicere lectorem, hominis est intcmperauter attutcntis otio et

literis. »

Voyet plus bas.

Atex.Aphrodis. M

jMc~)A~ t, ap Brandis. ~</)t~<(M .tt~tofr

lis libris de Mf).< ri Jr ~ono Ht< ~'A<7Mf/)/t<« (Rnuoa'. )823, in-8'),

Page 52: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

40 PARTIE 1. INTRODUCTION.

intituléOtMp«t TNf Ae~c-oTtAouf ~Ttt '!& ~uot~ et c'est

ici que nous rencontrons pour la première fois ce titre

singulier de ~T~ Ta ~cM<t, que l'ouvrage d'Aristote

conserve encore.

Ce fait donne-t-il la preuve de ce qu'on a si sou-

vent répété depuis Patrizzi, que le titre de la Mé-

taphysique est dû à Andronicus de Rhodes? Il est

vrai que le titre qu'Aristote destinait a son livre était

celui de Philosophie première; mais le laissant inachevé,

il a pu y mettre cette simple inscription Ce ~m MCH~

après la physique; pour lui, en effet, la science de l'être

absolu est la fin et le couronnement de la science de

la nature. Ou, si l'on ne veut pas admettre avec Am-

monius que ce titre soit d'Aristote lui-même~, c'est du

moins parmi ses disciples immédiats qu'il faut en

chercher l'auteur. Le titre de~~ap~~ae se trouve

p. 22t<r7ope?

~e AoïKKnoî ~e/f~ ~f «p~Mor~Mî o~o~ T!!< y<M-

fteraypa~s&nx ~e Ta~~ ~<r7epofMtro

EuJmpou xa~ Et!ep~orou.

G&tM. ad eo& Tteo~. j&<<y~. (ed. Brandis, t8a3), p. 3a3.

Ammon. mCa<M. p. 6 K~ .&eo~oy<~ ~f e~f T~ ftera ~<T<-

~p <fp<tyfMTe.~ e[<!T~ yeype~~M' ~trep of~M ïA fterA ïot ~ttMxA ~po<r

t~opemref' T~ y<]<p~~p p<!<T<f ~t)M .~eoXoy&t! Metaxeto M<of.L'opi-

))ion d'Ammonius a été soutenue contre Patrizzi, mais sanspreuves,

par Ange!ucc! ( &K<en<m ~aoj Metophysica Mn< ea<~ent quant P~tca,

Venct. t584, in-&*); PattiHi répondit (Patnctt Apologia, Ferrar. t58~,

iH A°). La réplique d'Angctucc! n'est, comme son premier ouvrage,

qu'une vaine déclamation (Angetutii E-rc~ttattooM cum Pa<r<cM, .n

~fM de~i?<<!pA~jtc<B aac<ore, a~cMattone. dispositione, cfe.; Venet.

t588, in 4°). Je n'aipu

trouver la thèse de With Femcriin, De <tH(&<'tt-

fin et mjcr~)<tonc h&mntnt /ini<o!efM 'nffn/~MtcotTtm A!tdorui, t~to,

i r.

Page 53: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE ï, CHAPITRE I!L ~i

,1''11' f."nlV.n.f 1- 1- l.1.:1~

en tête dun fragment de rheophraste sur la philo-

sophie première, que citait Nicolas de Damas; or,

cette fois, il est impossible de l'attribuer à Androni-

cus, puisqu'il ne connut pas cet ouvrage. Ajoutons

que la dénomination de ~KT~ w ~oT<x<e présente dans

sa simplicité un caractère antique un commentateur

grecdu temps d'Auguste eût certainement choisi un

autre titre.

Nous allons entrer maintenant dans la question,

obscure et compliquée, de l'authenticité de la Méta-

physique.

Page 54: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

42 PARTIE L – INTRODUCTION.

LIVRE II.

DE AUTnEKTK.tTJÈDE !.A MKTAt'HYStQUED'ARtSTOTE

CHAPITRE I.

Du rapport de laMétaphysique avec d'autres ouvrages d'Aristote

considérés comme perdus.

On ne trouve pas la Métaphysique dans le catalogue

qu'a donné Diogène de Laërte des écrits d'Aristote;

mais cela n'est pas suJSsant pour la faire considérer

comme apocryphe. La source principale de Diogène

était, à ce qu'il semble, Hermippus de Smyrnc or, à

l'époque où écrivait Hermippus, laMétaphysique d'A-

ristote pouvait bien n'être pas encore sortie duLycée,

non plus que celle de Théophraste dont nous avons vu

que cet auteur ne faisait pas mention. Diogène, il est

vrai, vivant au n* siècte de l'ère chrétienne, aurait dû

être au courant des découvertes ou des travaux récents

sur Aristote; mais on' sait que c'était un compila-

teur sans critique, et le catalogue dont nous parlons

trahit une extrême négligence. Aussi aucun des com-

mentateurs d'Aristotc n'en a-t-il une seule fois invoqué

Page 55: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H. CHAPITRE I. ~3

l'autorité. Enfin, il n'y est pas non plus fait mention du

traité de l'Ame et de plusieurs autres écrits dont on

ne songe pas à suspecter l'authenticité. On ne peut

donc tirer du silence de Diogène de Laërte aucune

conclusion contre l'authenticité de la Métaphysique.

Mais cet ouvrage ne serait-il pas caché dans la liste

de Diogène sous un titre qui le rendrait méconnais-

sable, ou du moins n'en retrouverait-on pas les diffé-

rentes parties éparses sous des titres particuliers ?

Dans la première de ces hypothèses, on aurait une

preuve de plus pour l'authenticité de la Métaphysique

dans son ensemble dans la seconde, la question d'au-

thenticité ne serait pas encore complètement résolue

il resterait a déterminer le rapport des parties énu-

mérées par Diogène au tout que nous possédons, et

par suite, la manière dont ce tout a pu être composé,

refondu ou démembré dans un temps postérieur à ce-

lui de ia rédaction des parties.

La première hypothèse a été avancée par Titze et

Trendelenburg. Titze croit retrouver laMétaphy-

sique dans les A-nuMtt J~Juo. Mais ce nombre xn

ne répond pas à celui des livres de laMétaphysique,

et le titre d'A~M-nt ne serait pas suC&samment justi-fié par le désordre que présentent quelques parties.

Cette expression désignerait plutôt des mélanges,

tels que les M/~UKTa, TWTth~KnM Js'optcty, etc.~ Trende-

D<~nMot.OM.«'f'K'ftjMhn<'{j<!nc (Lipsia*, tSaC. "t-8°), p. ~o.

Woweri Poh'mtt~M. c. xm, p. )to Cf~ Bnhte, <u! 7))o~. L'!<

Page 56: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

PARTIEL–INTRODUCTION.

lenburg propose, à la place des M-rM'M, les e~t)~t)~~et

~.T!t ~foc T~ec~: K<!z~ mais le nombre xïv n'est(!J."JrI.7"icte% je jgro mais le nombre XIV n est

guère plus convenable que le nombre xn, puisque les

Grecs ne comptaient dans laMétaphysique que treize

livres. Quant au titre d'~H~~fet ~M ~oc, il ne pour-

rait convenir, ce nous semble, qu'à des discussions

de pure dialectique 2. – LaMétaphysique dans son

ensemble n'est donc comprise sous aucun titre géné-

ral dans le catalogue de Diogène de Laërte.

Passons à la seconde hypothèse, dont Samuel Petit

est le premier auteur, et qui a été développée dans

diiïérents sens par Buble 3 et surtout par Titze.

Un certain nombre des grands ouvrages d'Aristote

n'est pas cité dans Diogène de Laërte et dans l'Ano~

nyme de Ménage. Au contraire on y trouve une toute

de petits traités qui passent pour perdus, et dont les

titres se rapportent assez bien aux sujets de différentes

parties de ces grands ouvrages. H est naturel, a-t-on

dit, de les identitier avec ces parties idée ingénieuse

et simple, mais dont le défaut de documents rend

l'application très-hasardeuse. Dans la plupart des cas,

on ne peut arriver qu'à établir l'analogie plus ou

m Aristot. C~pp.ed. t. 39 Jean Philopon cite les ~raxTa de SuHon!de

(fnttnfKtMht.Comment. in ~taph. ).

P&thMtMtfe«<eMettMMt~rM~octnMaE~nïMe~ <MtM(ra<<t(Lipsia-,

tSaG, tn-8"), p. to.

Voyez plus bas, partieIII.

De H&rM jifMMf&y J<p<'n~M, tn CoxmenM.~ec!ff rea. GeMiRs.

t XV.

Page 57: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE I. 45

moins intime des ouvrages qui nous restent avec

ceux qu'cnumèrent sous d'autres titres lescatalogues

anciens mais de l'analogie à l'identité ily a un abîme

qu'on ne peut franchir sans péril. Dans l'ardeur de

la découverte, on a pu souvent l'oublier; mais nous

ne saurions trop insister ici sur cette distinction la

complication de la question que nous discutons exige

une prudence de méthode qui partout ailleurs pas-

serait pour excessive.

En second lieu, on a cru pouvoir établir la rela-

tion des ouvrages que nous avons encore auxouvrages

analogues que nous n'aurions plus, sur une nouvelle

supposition; celle de plusieurs rédactions ou refontes

des mêmes livres sous des titres différents. Elle ferait

perdre, si elle se vérifiait en général, un des princi-

paux avantages que la critique pouvait espérer de la

première hypothèse sagement employée, l'avantagede réduire le nombre incroyable auquel il faudrait

porter les écrits d'Aristote, si l'on ajoutait à ceux

que nous possédons ceux qui passent pour perdus.

Diogène de Laërte lui attribue près de cent cinquante

traités, dont un grand nombre composés de plusieurs

livres les historiens postérieurs ont encore beaucoup

enchéri sur ce calcul

H ne sera donc pas inutile, avant d'en venir à ce

qui concerne spécialement la Métaphysique et ses

L'anonyme deMénage attribue à Aristote pr' s <)c

quatre cents

"vre"; l'anonyme de Casiri en compte plus de cinq cents

Page 58: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

46 PARTIEL–INTRODUCTION.

parties, de fairequelques remarques sur les causes

qui ont pu concourir à grossir plus qu'il ne le fal-

lait les catalogues des écrits d'Aristote, et d'en tirer

quelques conséquences générales.

t° « Je pense, dit César Scaliger, que laplupart des

livres énumérés par Diogène de Laërte, sous le nom

d'Aristote, ne sont autre chose que des rédactions

de ses cours faites par ses disciples. Tels sont le

traité des Plantes et les petits livres sur Xénophaneet Zénon 1. Ces derniers traités sont en effet donnés

par un manuscrit à Théophraste; Galien rapporte au

péripatéticien Ménon les livres de médecine que l'on

attribuait à Aristote et que nous n'avons plus; plu-sieurs passages de Philodème, retrouvés dans les pa-

pyrus d'Hercuianum, ont restituél'Économique à

Théophraste 2. En outre, on peut expliquer jusqu'àun certain point, par la supposition de Scaliger,cette multitude de titres identiques ou

presque iden-

tiques que Diogène rapporte à autantd'ouvrages dif-

férents; ce seraient des rédactions de diCérents élèves

Comment. in Aristot. Ktr. de Plantis (i566, in-P), f, tt <Pte

FMque Mbros ab eodem Laertio enumeratos, adiscipulis excep-

tes ex dictantis oreatqne contactas esse

pute. Pneterea videmus

eadem argumentatum ab illo tractata

primum, tum ab aliispostea

repetita,aut aucta commentariis, etc. x

Brandis, tmi~M. illus. I, tv, 260.–Surt'Économique, voyez

Selineider, Comment. in Varron. (le Re n<~t. t, xvn, 3ot etseqq.;

Gôttling, pM~tt.«J~fMfot. OEcoMB). (Iena, t83o, tn-8°), p. '7;

Stabr, /(rMto(. bei den Roem. p. 943

Page 59: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H. CHAPITRE I. 47fItIt! 1 a

et de dmerentcs années. Telle serait unepartie de ces

nombreux traités deRhétorique' et de

Logique, peut-

être encore les 'H8<xetEuJ~o! et'H~xet dont

Diogènene

parle point.Les

Catégories quifurent trou

vées à Alexandrie, et qui ne différaient pas pour le

fond ni pour le style des Catégories que nous avons

n'étaient sans doutequ'une

autre rédaction des leçons

d'Aristote. On avait aussi deux septièmes livres de la

Physique, peu différents l'un de l'autre~ et ii se pour-

raitqu'Aristote

ne fût l'auteur immédiat ni de celui

que les commentateurs ont rejeté, ni de ~elui qu'ils

ont admise Enfin, au rapport de François de la Mi-

randole, on trouvait dans un manuscritgrec

assez

ancien de la bibliothèque de Florence une rédaction

du V* livre de laMétaphysique,

différente de celle

qui a été imprimée pour la première fois en grec par

Ainsi le T~t~f Ttt~ QeM~tToo ef<ray&)y~, que Quintilien (Institut.

oral. Il, xv, to) ne sait s'il doit rapporter à Aristote ou à Théo-

decte, son élève. Voy. Stahr, ~rM<o<. têt tkn Ro<*m.p. n5 /irMfote&a,

M, '54. 9:8.

Simplic.in

Ca< f 5 b 'Ï'eperiM xai <o T<Bfx<tT!tyop<tSf j3<

6~of <&<Ap<a7or~ott~ xai eMTo o!'

jSpa~xa< o~t'TOftOt' xttT~ T~ Xe$«',

&'Mp~ee<f o~ya« Aa~epJfteoof. Boeth. in Pr<pjM;f[m. ( éd. Basil.

'546), p. tt4.

Simplic.in

P~. VII, init. A<~M p~pera~ «~Ta T~ M&f

~Mtf ~<w oMyttf tWtiA<!t~OjM{f.

Eudème, dans Mparaphrase

de laPhysique,

ne faisaitpas men-

tion du VH* livre. Simptic.in

Physic. f. 2~2. – Si on excluait ce

livre de laPhysique,

onpourrait

retrouver dans le Vf et le VttP te

thpt tHt~OMtf <[ de Diogène de Laêrte.

Page 60: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

48 PARTIE 1. -INTRODUCTION.

Alde Manuce, et qu'ont seule reproduite toutes les

éditions. N'était-cepoint encore

l'ouvragede

quelque,

élève duLycée, ou quelque paraphrase d'un âge pos-

teneur? Il est permis de le penser*. 2° Souvent un

même ouvrage recevait plusieurs titres, soit d'Aristote

lui-même, soit des historiens ou des commentateurs.

Ainsi lesCatégories s'appelèrent

en mêmetemps ou

successivementnep<

Tc~ ~ySf Tcu ?y7sc, rhô)~f J~ M- j

fMV, K<t-n~ep«~ J~O~ KeM!~)/< n~ 'Tmy -Tc~Hf OU TMnx~f

le traité de l'Interprétation, n~ ~oTao~Mf lepré--

niier livre des Topiques, n~ ~f -Ta~f le huitième.

n~ ~M~c!N$ tt7n)~)~N?,et

n~ w~M~ tt~M~Nfi

les cinq premiers livres de la Physique, nep< <c~My et

~uMKMtuyo~M!~

et les trois derniers neet j~f~M~. Le

nep} p-o~Mf paraît identique avec lerie~ roS 't<f si

!tt7!M'6~, et le riept ~o~ttf 77. avec le premier livre dn

Franc. P!c. Mirand. Ecant. f<tnt<. doctr. ~cmt. IV, v Et quoad

pertinetad Graecos (se. codices), quintus liber aliter sese habet in

aliquibus antiquis, ac in hisqui

sunt formis stanneis excusa Venetiis

Mnd quoque sit Indicio quod in Marctana Florentina b)M!otheca ex ttt-

tat codex vetustus satis in quo repetuntur quaein

quinto !tbro dicta

sunt secus ac in atits. r

Simpitc.~tnjCate~.H 4 a.

H.iMd.

Aiex. Aphrodis.in

Topic.fF 5, 249; Brandis, De pcn!. Aristot

K6r. <(e.p. 7.

Joann. Philopon.in

P~tc.f. i b.

Simptic.in

P~tc. t i b

Â~p<M?« & T~ ~Ep< ttf! T~EMS TcBf Âp<tf7oT~OUS <TUyypaft~T<Bf ~T-

Tope? ~~pA f<ep TtffM' TMp< ap~eSt' eBtyeypof~af T! ~fp<ty~M[Te~;f u!

~XXcM' ~Mot~î axpoa<je<M' ï<f<}~ ~e ~t&.< T<}~t< ~fpMTa ~tcm~e ~ee<

<~p~~ ~inypd~etf ~cr/' Ta ~e Xottror Tp/« ~ep< x«t)!<Te<<)!.06'T<t) ~a~fe- ?

Page 61: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

HVRE II, CHAPITRE I. 49

traité de ia Génération et de la Corruption 1. Les

premières Analytiques se nommaient encorerhô;

.n/~o~oy<eu. et les secondes ne~ e~J~eM~. La rai-

son de cette pluralité de titres est facile à concevoir

Aristote, en citant ses propres ouvrages, n'en désigne

jamais les différents livres par le mot de j6<~X«x et par

le numéro qui leur assigne leur rang dans unouvrage

total il se contente de renvoyer à l'ouvrage entier ou

d'indiquer les parties par un titre qui enexprime. le

sujet3. Les historiens auront pris chacune de ces cita-

tions pour l'indication d'un traité spécial.

3° Enfin une circonstance tout extérieure dut con-

courir à la division des grands ouvrages en parties

et à la multiplication des titres. Les manuscrits étaient

rares et chers souvent on ne transcrivait pas intégra-

Mf X<~Âp«T?OT~Xt)$ ŒUTN!' TM~Xa~oS [tEftM?~fO!. Id. f. 2t6 a. C~ Aris-

tot. ~<ap~. IX, vm, t86, Brand. Et/t. Nicom. p. n~b, Bekk.

Aristot., de Anim. F, X!; Il, v; Brandis, De perd. Aristot. libr.

p. 7; cf. Boeth. in PrfB<ftc<tm.p. tgo.–Trendetenburg (Comm. in

Mr. de ~ntm. p. '93; deCa~. pro~ufo academ. p. 5) pense que le

ttept )sf~o'e<Nîx. pu. ne répond pas suffisamment au renvoi du traité de

t Amp,et que le Mep!<r7o~~a)f doit être considéré comme un ouvrage

séparé. Nous ne partageons pas ces deux opinions qui sont en contra-

diction avec un passage formel de Galien. Gaten. de Elem. ~cc f/tn-

pocr. t,!x,ap. Ideler, Comm. in Aristot. J~<"f<'oro~. H, 53~.

Galen. de Libr. propr. t. IV, 36~, ap. Buhle, De Mr. ~rM<o<. de-

perd. in Comm. Soc. reg. Gotting. XV, t.

Ëf TOK, ~f TOK ~OyOfS, xaT<Ï TOM ~0)0!<S, èv TOM S-eMp~aM ~ep<

<.T.Â. et jamais ef TM jStSXm, èv Toi. ~<6~<o< Patrie. Z)Mc«M.per)p<!fe<.

p. 63.

Page 62: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

50 PARTIE I. INTRODUCTION.

lement un ouvrage considérable on en copiait, se-

Ion le besoin, des fragments plus ou moins étendus,

quelquefois uri deux ou trois livres, quelquefois un

passage qui à lui seul faisait un tout. Or chaque frag-

ment ainsi séparé exigeait un titre. Ainsi quand Ptolé-

mée Philadelphe forma la bibliothèque d'Alexandrie,

il faisait enlever à tous ceux qui venaient en Égypte

les manuscrits dont ils étaient possesseurs, et ne leur

en laissait qu'une copie; « ensuite, ajoute Galien,

lesemployés écrivaient un titre en tête de chacun

des manuscrits qu'on avait mis à part car on ne les

plaçait pas immédiatement dans les bibliothèques

on les entassait d'abord dans un local provisoire*. )) On

attendait donc, pour ranger ces manuscrits, que

d'autres manuscrits vinssent les compléter, et que l'on

pût classer le tout dans l'ordre des matières, sous des

titres généraux. Mais les titres provisoires étaient sans

doute transcrits sur des catalogues les arrangements

provisoiresdurent souvent y devenir définitifs, etc.

Le catalogue de Diogène de Laërte pourrait bien,

Gaten. de PMy. morb. II (éd. Basil. t. V), p. A't <~<MT<~o))

<rep) j3<6M<tT<!fTe ~acA~t Tw A~ir7ou n7oXe~a!bf o~r&)y~earCa~~a-

<nf, <&< )t<t! T&!f «!MMrXe<!fT&)f aM~T&w Ta ~<6?~c[ xc~eCtMu tMOî <tJïOfn

xofJ{ea&M, <t<d TttCta e~ )MH!'o~< X~P"~ ~p~ofra, MoMH r~ ypa-

p~fTa TO& ~eon<!ra«, <5f jtaTfnAeM~fTmf ëtto~oû~araf at ~6~ot wpot':`;

a~ïo~, eft Jè Tttt ~Stë~toS~xafatroïNeoCcM Ta fo~tcû~M. Ë~ypapof oi

TOC ~3<M<)~M <!tntp~T<MT~ ~OfMt T<M< <t)tOT<Ce~OM 6~ T~ <tt[oC~a~' OM

y~pewO&tf CM Tas ~t6~oS!<XM aM ~pe<f, <~M

wp~tepef o~(o<~

Tt<T<:MtMtTt8eo~M ewptt~f..01

1

Page 63: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE f<)1.

.A.

comme on l'a dit, n'être en grande partie que la copie

ou l'extrait d'un catalogue semblable.

Tels sont les faits et les considérations qui nous

semblent pouvoir servir, sans hypothèses hasardées,

soit à réduire les uns aux autres les ouvrages analogues

entre eux que l'antiquité attribue à Aristote, soit à

en retrouver le rapport et par suite à en vériner

tauthenticité dans leur ensemble comme dans leurs

parties. L'hypothèse de deux rédactions, comme

moyen universel d'explication, nous paraît, sous les

diverses formes qu'on lui a données, non moins

inutile qu'arbitraire. Samuel Petit imagine que la pré

mière était exotérigue et servait de base à la seconde,

où Aristote reprenait le sujet en sous-œuvre, pour

traiter à fond et avec développement ce qu'il n'avait

d'abord qu'ébauché. Mais si de cette manière on

conçoit comment les traités primitifs auraient dû périr,

lœuvre achevée et complète faisant oublier la pré

mière ébauche, on ne conçoit pas pourquoi ce se-

raient, dans le plus grand nombre de cas, les ouvrages

les plus importants, les rédactions dénnitives, qui au-

raient été oubliées de Diogène de Laërte circons

tance qui s'explique au contraire, jusqu'à un certain

point, par les observations que nous avons présen

tées tout à l'heure les copies complètes devaient

être plus rares que les copies incomplètes.

Suivant Titze' Aristote ne composait pas tout

De ~fHtot. H6n)r. ser. ff <fMhnc<. n.

Page 64: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

52 PARTIE !.–INTRODUCTION.

d'une haleine ses grands ouvrages il en écrivait

d'abord des parties qui devaient lui servir de maté

riaux et qu'il publiait même séparément ensuite il

faisait un choix parmi ces essais, les assemblait, les

refondait, en y ajoutant unprologue, et formait ainsi

une ~t?t«t, telle que l'Éthique, laPhysique ou

taMétaphysique. Cette supposition n'est pas mieux

prouvée que celle de Samuel Petit; de plus, elle prête

à Aristote une manière peu en harmonie avec la

nature de son génie. Tout ce travail successif et

fragmentaire, puis cette agrégation de parties sé-

parées, ces additions d'introductions faites après coup. [:

tout cela n'est pas le procédé d'une pensée créatrice.

« Le tout est antérieur à ia partie, ? c'est unprincipe e

d'Aristote, et fexamende ses ouvrages fait assez voir

qu'il en est de même dans son esprit, et que c'est par€`

l'ensemble qu'il a conçu le détail. Les cinq premiers

livres de la Physique, l'Éthique et laPolitique dans

eur intime connexion, les trois livres de l'Ame, etc.,

KMat des compositions sorties chacune d'un même S

dessein; les Introductions n'en sont pas non plus des

additions plus récentes elles constituent une partie

essentielle du sujet, elles y marquent le point de dé- S

part et le premier pas de la méthode.

Ce que l'on conçoit très-bien et que l'on pourrait

presque affirmer sans preuve, c'est que quelquefois, 1 I

et sans que ce fût chez lui un système arrêté, Aristote

a dû reprendre un sujet déjà traité, pour ie resserrer j

Page 65: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE II, CHAPITRE H. 55

ou ie développer dans un nouvel ouvrage. Il en a été

ainsi de la Métaphysique. Aristote l'a refaite, comme

on l'a dit, sur ia base du n~ ~occ~a~; mais le rhc<

~Âo<~<«ï n'y est pas tout entier, précédé seulement

de traités accessoires, qui auraient déjà eu une exis-

tence à part; il a été converti en un traité plus

complet; celui-ci est resté inachevé, quelques livres

authentiques ou apocryphes y ont été intercalés plus

tard; mais la Métaphysique, abstraction faite de ces

additions, forme un corps véritable, et les membres

qu'on en pourrait retrouver dans Diogène de Laërte

ont dû en être séparés par l'une des causes acciden-

telles que nous avons énumérées c'est ce qui nous

reste à établir.

CHAPITRE Il.

Durapport

de laMétaphysique d'Aristote avec les traités sur la

Philosophie,sur le Bien, sur les Idées, etc.

si".

Da tMtt~ wr la Philosophie.

Leriepi ~Xc~<<~ fut écrit avant la

Physiqueet avant

le traité de l'Ame Mais des le dch'tt de laPhysique,

P~. tt, n; de Anim. t. u.

Page 66: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

54«

PARTIE I.–INTRODUCTION.

Aristote annonce le projet d'écrire de nouveau sur la

philosophie première, sous le titre plus explicite de

nep~ 7~ <M~c <p~o<nxp~ « Le principe de la forme

est-il un oumultiple ? c'est à la philosophie première

d'en décider; réservons donc ce problème pour un

autre temps'.)) Les derniers livres de la Physique et

le traité du Ciel, qui sont étroitement liés, forment,

par la théorie du mouvement éternel, la transition

de la science de la Nature à la science du premier

moteur Aristote commence à y faire entrevoir l'objet

de l'ouvrage qu'il méditait2. H s'y réfère également

dans la Morale, pour les questions de la Providence

et de la réalité des idées s. Enfin, dans ie traité du

Mouvement des animaux, il déclare qu'il a précédem-

ment traité du premier mobile et du premier moteur

1J*A~. I, sub fin.

Hep~ T~î xctT~ ro eHo< ap~î, ~torepof ~.a

'BM~Ot~ xa< T~ T/fM eial, &'<Mtpt6e/(M Tt;î ~p<UTt)$ ~0<TO~M ~pyof

e<!7<<Mop~r<H'

cSoPs eis ~e!pof T~~ xcupoo atrotte~M.

P~<. VIII, t; de Cce!. I, vn! (sur la question de savoir s'Hy

a

plusieurs cieux) ËT< Jè x<~ A~ T<Bf éx T%s cpe~s ~Xo<m~~ My&w

Je<~e<)! xd! x~~ea):, af<!ty!ta7ot< <M<ott oftofax ~f-

T<m9<[ eTfm jMt! ~f To« a~~oM xJcr~oM. Cf. JMetaB~. XII, a53-a58,

ed. Brandis. -De même, de Gener. et corr. t, n! To~raw~ept

T~< f[X<~o« ap~t, T)!~ ~ptî xal~poT~pM

Ae~eif ~< ~Xotyo~at

~pyop.

E<&. ~tcom. ï, vt, tx; II, vj. Cf. Pansch, de Eth. JV«'om. p. 20.

On peutciter encore ce

passage du deInterpret. c. v A«<T< J))

T< &t7<f oJ ~o~la t~ ~«f 'ce~of ~trouf; o<!y~p J~ T~! <n!feyyt<~

Mp~oCtu e& &/7<M' ~o?< ~)! TouTo~ptt)~<tTe<at e<!re!f. Cf Boeth. in

libr. de lnterpret. ed. prim. p. 23o; cd. secund.p. 3~ Metaphys.

VtH.vt.

Page 67: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE Il, CHAPITRE IL 55

dans le n<p< ??< ~M~c ~oo~c~ Ainsi, le traité de la

Philosophie première était alors achevé, tel du moins

qu'ilfut envoyé à Eudème.

Mais le premier ouvrage, le ne~ <p<Ao(n~< a-t-il

péri, ou en retrouve-t-on quelques débris dans la

Métaphysique, ou enfiny a-t-il été transporté tout

entier? La dernière opinion est celle de Petite de

Buhle et de Titze\ Le n:p< <p~ocB(p/~ paraît avoir été

composé de trois livres Petit les retrouve dans les

livres XMI, XIV et XII de la Métaphysique; Buhle.

dans les livres IV, VI et VII, XIII et XIV, et XII;

Titze, dans les livres I, XI et XII. Tous trois,

comme nous le disions plus haut, nous semblent

s'être trop hâtés de conclure de la ressemblance à

l'identité.~(

II est évident, et personne n'a songé à le nier, que

lesujet du rie~ ~coc~et? et du nep< -s~Tttc 'p~ooc<p/et$

était le même l'un et l'autre devaient contenir la

théorie de l'être absolu, et dans l'un et l'autre, cette

théorie devait être précédée ou suivie d'un examen

critique des doctrines auxquelles Aristote venait la

substituer, des doctrines platoniciennes et pythagori-

De Anim. mot. c. Vt !tep< ~f rou 'Bro~cu xtfou~fOM xai ae<

'HfOM~ttOO, T/MtTpJnof

!Ufe<T<M xai ~& «fe? TOCpcBroo

)ftfoi?f

~WpM<M ~p<<Mpop &) TOM ~fep! Tt!! ~fp6~n;î ~OfM~'M.

J&ecNtMM(ParM, 163o, :n-~°), IV, tx.D<' Libris ~rMtoteKî <ffnffïMM. tM co'xnx'Hf..Soc t<'< GoM<M«

'.Xv.

Loc. taud. p. et sqq

Page 68: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

56 PARTIE 1. INTRODUCTION.

ciennes. Si donc les témoignages del'antiquité fai-

saient voir l'analogie des deux ouvrages, on n'en serait

nullement autorisé à les confondre car quelque dif-

férents qu'ils pussent être, ils ne pouvaient pas ne passe ressembler. Ainsi il faut examiner de très-près ces

témoignages pour déterminer s'ils établissent une

véritable identité entre le ritp< p~aoetp/etf et des livres

entiers de la Métaphysique.

Les sources où l'on trouve des documents sur le

n<p< ~Ao<n~/et$ sont, dans l'ordrechronologique

Aristote lui-même, Cicéron, Diogène de Laërte,

Alexandre d'Aphrodisée, Syrianus, Michel d'Ëphèse,

Jean Philopon et Simplicius.

ï. Aristote cite deux fois le 11:0} p~oce<p«tf, et on

ne trouve rien dans laMétaphysique qui corresponde

exactement à ces citations. t" Dans le traité de l'Ame,

il rappelle qu'il a exposé dans le nep< <p<Ae<~<p/<~com-

ment la doctrine platonicienne forme les choses avec

les principes, par voie de composition, en compo-sant

par exemple l'Animal en soi(<tUTo%o')

de l'idée

de l'un, et de lalongueur, de la largeur et de la pro-

fondeur primordiales'. Nous ne retrouvons la même

idée dans la Métaphysique qu'exprimée d'une manière

De ~Mm. ï, n T~ <M:T~ <?rpoxof x<t! UXaMW <~ ry T<fM[~ r~

4t~ éx T&w<r7<u;~&w iro<er. e~ sois

~ep! ~<Xo<ro~<M

~eyO(t~OM &<Mp<0~t! <H?TO ttSO TO ~iot) T~ ToS ~0{ M~M TOU

cp~TM) ~xoM <M~ ~stoM xa< jSafCoM x.T.X. Cf.Trondeienburg, Com-

ment. ad toc. laud. p. 3: ( ( t834, in-8* ).

Page 69: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE II. 57

générale,sans l'exemple de l'cturo~o~ or, dans la

généralité,cette idée est un des éléments les plus es-

sentiels du Platonisme; et Aristote ne pouvait pas ne

pas y insister; partout où il voulait entrer à fond dans

l'examen de tout le système, a" Dans la Physique, il

renvoie au ne?} ~.o~~ pour la distinction de deux

sortes de causes finales2: or cette division, qui se re-

trouve dans la Morale et dans le traité de l'Amer ne

se retrouve pas dans la Métaphysique. 3° Enfin il se

ré&re aux T<t ~w <p<~coc<p/<M'pour la preuve de la divi-

sion du nécessaire en deux espèces~ cette division est

Indiquée dans les VIe et XII livres de la Métaphy-

sique5, mais elle l'est également dans le iP livre des

secondes Analytiques6, et dans ces trois passages elle

n'est, nous le répétons, qu'indiquée, et non pas dé-

montrée. De plus, dans ce même XII* livre de la Mé-

.M-ta~i~. (ed. Brandis), XIII, 283, 1. 12 et seqq. 288, L 9;

XtV,293,t.9.

M~. 11, H: A<M yapT~ oJ&exa'

d~Tcue~ TOM tfe~ ~o-

<TO~M.

E<&.Nicom. t, i; cf. Brand. De perd. ~rMto<.H6r. p. 9; de ~nfm.

H, iv: eE Trendel. Comment. p. 35~

De ~Ktft.anim. I, t îaM~J* T<î <Mtop~<refeco~tf A~'ouM~ «fc!y-«)f a!

MyMTM <!ff{yxt! Tt?f tdv ~p ~o Tp~Tr&tf o)!~epo!' <MOfTe

MM~eff TcSf~pto~fMf

~f TOM xar~ ~Xotro~etf.

JMe&!p~. VI, ïi, 124, 1. 3t, Brand. Ë~ ef~jt~ o~ T~~

xasâ sd ~3tauov aeyottétms, ar. ~jv aéyo~sev sp (LI) évaéxea8ou d)..ÀM".'M[T~ T~ ~a<of Xeyo~teMt~ o~' ~fX~yo~ef Ty (t~ ef<~M~<M d!~&)~.

M, vt, 2~, t. 2 (MC~f y<~ <&! ~TM~e x<ye<T<ï<, <tAXa ~e~ Tf ae<

~~e<~ <&T~ep t~f p<:<ye< fou <ï~ou <M~.

6~'M~t.n.xt.

Page 70: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

58 PARTIEL–INTRODUCTION.

taphysique, Aristote énumère trois sortes de nécessi-

tés'; or c'est dans ce XIIe livre surtout que paraît avoir

survécu le nep< <p~occ<p/ Cependant nous ne voulons

fonder sur ceci aucun argument, parce -que l'expres-

sion de Têt ~w <~oo~/tH' pourrait être une désignation

générique que l'on ne serait pas en droit de rapporter

au Ilep< ~e<n)~t{ plutôt qu'aux Analytiques.

IL Le passage de Cicéron a servi de fondement

principal aux hypothèses que nous discutons il faut

le citer tout entier 2

Aristoteles quoque in tertio de Philosophia libro multa tur-

bat, a magistro Platone non dissentiens modo enim menti

tribuit omnem divinitatem modo mundum ipsum Deum dicit

esse; modo quemdam alium prae6cit mundo, eique eas partestribuit, ut replicatione quadam mundi motum regat atque tuea-

tur tum cœ ardorem Deum esse dicit, non intelligens cœ!um

mundi esse partem, quem a!io ioco designârit Deum.

Ainsi l'épicurien Velleius, dans la bouche duquel

Cicéron met ces paroles, attribue à Aristote plusieurs

dogmes qui se contrediraient les uns les autres

l'identification de l'intelligence avec toute divinité

du monde avec Dieu de Dieu avec l'ardor ceeH;

l'hypothèse d'un être inférieurchargé de gouverner le

mouvement du monde en le ramenant sur lui-même.

La première de ces opinions est la vraie doctrine

~(<y~. XII, VII, 248, 1.27. Brand.

To ~p <tfayx<tM~ ïo-

MWT~tM, T~ ft~f ~a <~~Mpa Tt)f Opft~r, TO ~S où 0<?J[ ~SU Tô eBj Ta

~e ft]t efJe~tefOf <<X~<~ aX~' <t)r~MS.

Cicer. JeAat.Jeor t, \))t.

Page 71: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE II, CHAPITRE Il. 59

d'Aristote, développée par lui dans laMétaphysique.

Une lecture superficielle de traité du Ciel a pu con-

duire à lui attribuer les deux suivantes et il se pour-

rait que Velleius, frappé de la contradiction qu'elles

présentent avec la première, voulût dire seulement

que la doctrine du neet ~ooB<p/~ n'était pas d'accord

avec celle du traité du Ciel. On lit dans ce dernier

ouvrage que le ciel est éternel et divin; on a pu con-

clure de Seïcf à ~c. De plus, la matière des corps

célestes est, suivant Aristote, le cinquième élément,

l'éther~, que Cicéron a confondu avec l'éther enflam-

mé des anciens physiciens, et qu'il exprime par ardor

cceë. Cette explication paraît admissible mais elle

est sujette à des dINicultés peut-être insurmontables.

D'abord, il n'est pas dit dans le passage de Cicéron,

comme nous l'avons accordé un instant, qu'il s'agissede la contradiction où Aristote se serait mis avec lui-

même dans différents écrits au contraire, le multa

tardât in tertio de jP&î&Mop&!alibro ne permet pas d'aller

chercher les termes de cette contradiction hors du

Htp) ~Âc<n~Mt. En second lieu, si Cicéron avait connu

le traité du Ciei, il n'eût pas traduit là et ailleurs <~p

par ardor cecK~ car c'est dans ce traité même qu'Aris-tote

rejette l'étymologie donnée de ce mot par Anaxa-

Voyez sur cesujet !a savante d!ssertatton de Vater, TXeob~M'

~rMtofeKc<B BMMKcMp,LtpsuB, t7~5,in-8°

DeC~.t.m.

De~.Jeor. M, xt; Il, xxxvt, t.x «Ardor cœi!. qui aether vc)

Metum nominatur. x

Page 72: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

60 PARTIE I.–INTRODUCTION.

gore qui ie dérivait dWOM, brûler, et qu'il le fait venir

avec Platon d'em 9tM (courir toujours) Mais d'un autre

côté, Cicéron définit aussi le cinquième élément d'Aris-

tote par « le mouvement perpétuel 2. » Que conclure

de tout cela ? La conclusion la plus naturelle, ce me

semble, c'est que dans le n~p< <p~ooB<p«tfil était ques-tion de l'éther comme élément des corps célestes,

mobile éternel et divin, soumis à J'action du moteur

suprême; tout cela en termes rapides et obscurs, où

Cicéron se sera perdu. –Or maintenant, dans la Mé-

taphysique il n'est question ni de la nature divine du

ciel pris dans sa totalité, ni de l'éther. Enfin si nous

en venons au quatrième dogme tiré par Cicéron du

ne~ ~ooBp~, nous retrouverons bien la trace du

replicatio mundi dans les <npeMpeuetyt~/T?ouaa<du XIIe livre

de la Métaphysique un peu plus loin, dans ce même

livre, il est aussi question, d'une manière hypothé

tiquer de moteurs propres à chaque sphère céleste;

mais dans le tit~ ~ooB<p< on voyait, suivant Cicéron,

un être préposé à l'univers, une sorte dedémiurge

ou d'âme du monde, qui fait penser aux doctrines du

Timée; dans laMétaphysique, ce médiateur est sup-

De Ctft. t, m.JMfteom~. 1, m (ed. L. Ideler, p. 7). Cf Cicer. de

A'a<. Jear. H, xxv. L. Ideler, Comm. inJMeteoroby. t, 33~-8.

Par ânesingulière confusion, Cicéron

prend F~eX~eM pour

)'a~. Tuscul. t, x tQuintum genus adhibet vacans nomine; et

sicipsum animum &Te~eKw appellat novo nomine. quasi quam-

<tMm continuatam moticnem etperennem. L. Ideler, loc. iaud. p. 33?

Voyez plus bas.

Page 73: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE Il, CHAPITRE II. 6!

primé,il n'y a plus que le Dieu unique.-On a sup-

posé que Cicéron prête à dessein à Velleius, épicurien

présomptueux,une exposition inexacte de la théolo-

gie aristotélique mais un auteur ne met guère dans

la bouche de ses personnages de graves erreurs histo-

riques sans les relever plus tard de manière à s'en

laver lui-même d'ailleurs cette hypothèse ne résout

pas toutes les objections que nous venons d'indiquer.

-Toutefois, nous ne voulons pas nier l'analogie évi-

dente du passage cité du Mtp) ~eocp«!f avec une par-

tie du XII* livre de la Métaphysique mais il était

important de signaler les différences elles rendent

au moins très-probable que si un morceau étendu a

été transporté du premier de ces deux ouvrages dans

l'autre, ce n'a pas été sans subir des modifications

assez considérables.

III. No !s allons arriver à un résultat semblable

pour les deux premiers livres du n<~ ~a<~«~ et le

Xm' et le XIV de la Métaphysique.

t" On lit dans la prélace de Diogène de Laërte 2:

Aristote dit, dans ie premier livre sur la Philosophie, queles Mages sont plus anciens que les Égyptiens, et que suivant

eux, il y a deux principes, !e Dieu bon et ie Dieu méchant,

Zeus ou Oromaze, et Hades ou Arimane.

Or Aristote fait mention des Mages dans le XIV" livre

Titze, p. 85. Kindervater, ~nm<T~. une! /<M<tn<M. ~< Ctce~< /iMc/).

"mJer~.d'erGotter, t, 907.

ÂpMTOT~ttt WjM~T~ <:rep< ~~OtTO~Mt! (~<r<) xai~fpe<!€'UT~-

Page 74: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

62 PARTIE I.- INTRODUCTION.

de iaMétaphysique mais il se contente de dire qu'ils

faisaient du principe créateur l'être primordial et

excellente Remarquons en outre que ce passage se

trouve à la fin du XIV livre, lequel peut représenterle second ou le troisième des trois derniers livres,

mais jamais le premier. Ainsi cepassage y a été trans-

porté, mais abrégé, mais réduit à une simple allusion,

et mis en un lieu qui ne correspond plus à celui

qu'il occupait dans l'ouvrage primitif.

a" Suivant Cicéron, Aristoteenseignait quelque

part qu'Orphée n'avait pas existé 2. D'un autre côté,

Jean Philopon dit que dans le n~ <p<~coB<p«~Aris-

tote affirmait que les poëmes attribués à Orphée

étaient apocryphes il est très-probable que c'est au

mêmepassage du

nep< <p<~oo~~ que serapporte le

témoignage de Cicéron. Or nous croyons retrouver

encore la trace de cepassage dans le XIV livre de

laMétaphysique, immédiatement avant celui où il

est question des Mages. « Les vieux poètes, y est-il dit,

ne donnent pas la puissance et l'empire au primitif,

poos 6ÏMM(ïO~ tMyOUt) T<Bf A~MTT~ xai <Mo )t<tT* CtJïOt~ elvau âp-

xds, f~tMf &t~M)Mt xai XOtXOf A~OMt- xal T&) <M)0(M[ e7f<H ZeJ~ XOt!

~po~M~r~, T~ Â~ x~Ape~ffos.

Metaphys. XIV, !V, 3ot, i. ti 0!o~<î'epex~t;~ x<tt

~repo~ t<M<,

T~yef~<Tf6f -arp~TOf ~«TTOf ït~mn, xa! o! M~'ot.1 De ~tt. deor. I, 38 "Orpheum poetam docet Aristoteles nun-

'juam fuisse.

Philop. Ht M&r. <<e /inM). t, v Ôtt ft)) ~oxe?Ôp~s an M

xai «Jro~ (Âp«y7oT~X<n)sf Te!<rep<~<~o<yo~MÀéyel.

Page 75: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE Il. 65

tel quela Nuit, ou le Ciel, ou le Chaos, ou l'Océan,

mais à Zeus~. » En effet, le même Philopon, dans son

commentaire sur la Métaphysique, rapporte cette al-

lusion à des vers orphiques qu'il cite textuellement2.

Ainsi un passage explicite du rhp< ~ooop~, sur Or-

phée, a été converti dans laMétaphysique en une

allusion rapide d'où le nom d'Orphée a disparu.

3° En commentant le dernier chapitre du premier

livre de laMétaphysique, où on lit que les Platoni-

ciens formaient les longueurs, les surfaces et les so-

lides avec les espèces du grand et du petit5, Alexandre

d'Aphrodisée ajoute qu'Aristote exposait aussi cette

doctrine dans le nep< <p~coB~/a~. Le renvoi, cette fois,

s'appliquerait très-bien aux livres XIII et XIV de la

Métaphysique, où l'on trouve deux passages ana-

jUetap~. XIV, iv, 3oi, I. 5, Brand. O! Jè wo<!)T<~ oiap~a<o<

T<t)!n; o(to<&~ Tt j3<M~et!e<)' xal<~e~ ~<r~ oJ rojs

crp<~roM, oFbf

MjtM M<OuptïfOf Xdos ~eafo~ aX~c~ To~ Ala.

Ces vers ne se trouvent pas dans la collection d'Hermann. Nousne pouvons les donner que dans ie latin de Patrizzi, f 65 b: «Or-pheus namque, cum diceret bonum et optimum Jovem, posteriusbonum dicit:< Primo enim regnabat incHtus Hericepaeus, post quem< Xox,sceptrum habens decentissimum Heriefpa' Post quam Cœtun).

'qui primus regnavit deorum post matrem Xoctem. x

t, Tn, 32, 9, Brand. Bo~oftefo< T<~ ou~M

w<tye<t) eis T~<~<t< ftt~ ~f ï~e~ef èx

fM:xpo?xai

~pa~o~, lx Ttfo:

(Mxpoi? xai ~eyftXou, xf~ ~tre~of ex ~<tTeo~ xa< cr7e~oS, <rM~ J' M

~9eo: xoj TtmeffOt?.

Aiex. Aphrodis. ap. Brand. De perd. Aristot. libr. p. ~a !ÈKT<<?eTa!!T~

~pe<r<0tt ajTOK xo~ ef TOMo~ ~Xo<yo~M e~)!xe.

Page 76: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

6~t PARTIEL–INTRODUCTION.

logues à celui du F~. Mais Alexandre avait aussi com-

menté les XIIP et XIV" livres pourquoi ne s'y ré-

lère-t-il pas ? Souvenons nous que dans le traité de

rAme, Aristote renvoie également aunep< <p~ooB~

pour une question un peu différente. C'est donc dans

cet ouvrage qu'était contenue tout entière l'exposition

dont les fragments se retrouvent dans le traite de

l'Ame et dans laMétaphysique.

5° Syrianus n'a probablement pas eu entre les mains

le nep< ~coB~/<ty, ni lui ni les commentateurs qui

sont venus après lup. Mais il possédait le commentaire

d'Alexandre d'Aphrodisée sur les derniers livres de la

Métaphysique or, en commentant le passage du

livre XIII dont nous venons de parler, il cite aussi le

Mep< ~ooc<p/.a~. Ailleurs, il remarque l'analogie des

arguments employés par Aristote contre la théorie des°

idées et des nombres dans le XIIP livre de la Méta-

physique et dans le ritpi ~co'o'p/t~, sans dire que la

forme même de l'argumentation fût identique d'où

nous pouvons conclure qu'elle était différente.

6° Michel d'Ephèse, l'auteur du commentaire e

attribué à Alexandre d'Aphrodisée sur les derniers

iMeh~ XIH. M, 983, t. 12, Brand.; XIV, 11, 29~, i. 3i.

Brandis, De pen~rMtot.Mtr. pp. 5, ~Trendetenburg, P<a<on.

de Id. ftnnm. <bctr. p. 26.

Synan. ap. Brand. De perd. Aristot. libr. p. 4a.

Synan. ap. Brand. de perd. Aristot. libr. p. ~7 Cf. Trendelenb.,

Platon. de Id. et nttm. doctr. p. 'y6.

Page 77: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE II. 65

5

livres de laMétaphysique',

se contente decopier

le

premierdes deux

passagesde

Syrianus~, quilui-

même copiaitsans doute Alexandre.

y"Pour Jean

Philoponet

Simplicius,il est évident

qu'ils n'ont jamais vu len~< ~cotxp/etc. Quand Aristote

renvoie à cetouvrage pour

la distinction des deux

sortes de causes finales, Philopon prétend qu'ilne

s'agit quede la Morale. « Aristote, dit-il, l'appelle

ici

Le commentaire de Michel d'Éphese sur les livres Vt-XtV se

trouve dans un grandnombre de manuscrits, à la suite de celui d'A-

lexandre d'Aphrodiseesur les cinq premiers livres; dans

quelques-

nns, il n'en est pas distingué; dans d'autres, ilporte ce titre

S~o~t

M<ya[t!~OMË~e<y<of eis TMf ~erA Ta pt~txet é.Déjà Sepulveda, qui a

traduit te tout en latin sous le nom d'Alexandred'Aphrodisee, avoue

que ce nom manque,à

partir du VF livre, dans un grand nombre de

manuscrits. De plus, nous trouvons dans un autre commentaire de

Michel d'Éphese (inH6r. de

Respirat.ex vers. /at. 1552, in-f), f°4~ a:

tScripsi etiam nonnihil super sextum usque ad decimum tertium(leg.

quartum)transoaturalium (id est metaphysicorum). D'ailleurs il suf~

fit de jeter les yeux sur ces scolies pour voir combien elles sont infé-

rieures au commentaire sur les cinq premiers livresauquel on les as-

socie, etpeu dignes

d'Alexandre d'Aphrodisée. Letemps

où vivait

Miche!d'Éphese

n'a pu encore être déterminé; mais unpassage de

Philopon, où H est cité, nous autorise à le placer avant ce commenta-

'ear(Philop.

in JMehtp~f a5 a tEphesius antem proprie entia

dicitsingutares substantias, et recte. Cf. Mich.

Ephes. ConmMnf. in

A&<ap~. VI, sub fin.). Léon A!!atius se trompe donc en faisant de Mi-

chel d'Ëphèse un disciplede Michel Psellus (Allat. de P~eMM, p. 22).

Je reviendrai aiMeurs sur ce sujet, avec lespreuves ~'t les

dévelop-

pements nécessaires.

Voy. Brand. Deperd. Aristot. Mr.

p. 43. Brandis nomme Pseudo

Alexander l'auteur du commentaire sur les livres XIII et XIVque

nous restituons à Michel d'Éphese.

Page 78: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

66 PARTIE 1.-INTRODUCTION.

Philosophie, parce qu'il y enseigne ce que c'est quela morale

philosophique'. Simplicius s'exprime de

même, ou, pour mieux dire, ilcopie Philopon 2 qu'il

ne se fait jamais scrupule de copier, tout en l'injuriant t

à l'occasion Philopon lui-même ne fait icique copier

Themistius

Nous pouvons donc conclure de la discussion à

laquelle nous venons de nous livrer, que ce traité sur

laPhilosophie qu'Aristote cite en divers endroits et

dont les écrivains postérieurs mentionnent plusieurs

livres, était unouvrage réellement distinct de tous les

ouvrages qui nous sont parvenus qu'il avait servi de

base à laMétaphysique, mais qu'elle ne le contient pas

et ne leremplace pas pour nous tout entier.

U nous reste cependant àapporter une dernière

preuve, et qui paraîtra peut-être décisive c'est un

1Philop.

MPhys. f. t5 E~<r8<M -M <~<M T~ &<~pe<~ rct~ ToS

O? &MM X<t< TO&~Ep< ~0!TO~M- ~e< TOM t~MtOM, &

~e~ ~0-

CO~et, &OT< T~ ~0<T~O~ ~0< ai <tt?Taf<M(M[<MoMU.

Simplic. in Phys. f.67 b r~oM t; &a/pe<y~ ajï~ To~ N<-

M/Mf~OM ~«M~~a~ep: ~Ao<ro~a< x~e?, p~o<yop«tx t~Tepo~ xa-

Xaw ~&KW ~f ~<~t. -BrpayfMtTe~.–Vmoison (PM~.ad jHonM!

p. 38) fait naîtrePhilopon vers la fin du v* siècle; Saxius (Ono-

mastic. H, 89) le place vers l'an 535; Sturz(Empe~oc!. ~r~. p. 80)

le fait naître au Tu* siècle seulement. L. Ideler wJKeteorobo. DnB/<t<.

p. ao.–Mais Philopon lui-même nousapprend qu'H écrivait son

commentaire sur la Physique l'an 5?6 après J.-C. (Comment. inPhys.

MI, init.).

Themistius se contente derenvoyer à

FÉthique, sans identifier

Mpressément cetouvrage avec le

Hep~ ~o<ro~ ParonAr.Phys.

f. <4 b Kof! ~r<&~ ïo ï~Xo~ TOM tfO<!tOM~era< <Mt~[<t<T<f.

Page 79: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE II, CHAPITRE II. 67

.5.

passagedu traité même sur la Philosophie, que nous

avons découvert dans le commentaire de Simplicius

sur le traité du Ciel Cepassage

contient une démons-

tration de la nécessité d'unpremier principe,

le bien

absolu, ou le bienqui

est dans le monde trouve sa

mesure et sa raison, et de l'immutabilitéque confère

à ce principe sa nature même de bien absolu

At~t' 'B'tjMToJreu tf Te!f 'sr~ ~AOM~/e~'

KetBoACM~ey,

<f OIÇ t<fr< 70 ~tAT<oy, f TouTo<f t<r*!<Ta &D<<r~o~'

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auïc? !M[\M' eJ<f'tf<!f eu~TC< <w'<N

'E~cf TO~Mef,eït

*t)t< a~.

On sait, depuis que M. Am. Peyront'a démontré(Em~oc~ et

PamxnMM ~M~nMtttt, etc. simulagitur de

genuino grœco teïtu

commentantSimpiieM

in Arist. de Cœ et Mund.Lipsiœ, t8to.

'n-8° ), que le texteimprimé du commentaire de

Simplicius ne repré-sente

qu'âne version moderne de la version latine de Guili. de

Moërbeka. Mais le manuscrit de labibliothèque royale de Paris,

coté igio, d'une belle écnture du xv* siècle(t~~t), contient,

comme celui de Turin, le texteauthentique. C'est

d'après ce man us-ent ( fol. t36 a ) que nous citons le

passage du~ep< ~o<ro~<. Cf.

edit. Ald. foi. 67 b.

Ici on !it à iamarge <<r<MeMe~e<- ~eTKë/DtTOf apa e<TT<.

Page 80: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

68 PARTIE 1. -INTRODUCTION.

~vcf t'x&f t'auTef~t~"M 's'c/t?, ~tt)Tt t~{< T< ~tSAef ~.t)<~

c-y~ eH'tx TKf t<f ï<!~~cf jtttïet~eAMf'~)c<rtA<t6t.

On ne retrouve point ce passage dans laMétaphy-

sique elle ne conserve que la trace des idées que nous

venons de voir développées. Bien plus, l'esprit de la

Métaphysique n'est plus le même. La démonstration

que nous venons de citer est toute platonicienne, et

même empruntée en grande partie, selon la remarque

deSimplicius, au II" livre de laRépublique. Dans la

Métaphysique ce n'est plus de la seule idée du bien en

soi, mais plutôt de la nature de la pensée pure qu'esttirée la preuve de l'immutabilité du divin 1; point de

vue essentiellement propre à l'Anstotélisme. Rappe-

lons-nous maintenant ces propositions du ~ec< <p<Âo

<~«tc rapportées par Cicéron, oti nous avons fait voir

et où il avait noté lui-même l'empreinte encore visible

de lacosmologie platonicienne (a maître Platone non

dissentiens); nous arriverons d'une manière irrésis-

tible à cette conséquence que la Métaphysique n'offre

pas seulement une autre rédaction, moins dévelop

pée en plusieurs endroits, une forme différente du

~tp< <p~ca-<tc, mais que les doctrines y ont subi

une remarquable modification et que de l'un à

l'autre ouvrage on eût pu enquelque sorte suivre ia

marche et mesurer le progrès de l'Aristotélisme.

~Me<<~t. XII, 255, t. 4, Bt. ~AOf TOn'Xf ~T< TO.&E<OT<tTO!' xai

t<fUMT<tTof ooe?)«t! ot! fteraëc~ef- eis ~e:po~ y«p t; ftera& xft< <&

~f T« ){At TO TOfeCTOf.

Page 81: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE II, CHAPITRE Il. 69

Le catalogue de Diogène de Laërte fait mention

d'un ne~ Ttt~t8oM en trois livres, que Muret et récem-

ment Brandis ont considéré comme identique avec ie

n<p< ~co~e~. Cette opinion, qui semble avoir pré-

valu aujourd'hui, repose sur trois autorités celles de

Simplicius, de Philopon et de Suidas 2 mais ces au-

torités ne sont pas irrécusables. Pour Suidas, compila-

teur du x" siècle, il copie Philopon ou Simplicius, cela

est facile à voir; et quant à ces deux commentateurs,

que nous venons de voir confondre le n~< <p<Ao<nxp«~

avec la Morale, de quelle valeur est leur opinion,

quand ils viennent le confondre avec le n~ -~Oou ?a

!1 est vrai que tous les deux donnent en divers en-

Mnret, Var. !eet. VII. Brandis, De perd. Aristot. H6r. p. 7.

PhHopon. Etr. <~ ~Mnt. I, n Tct~ept Tay<~ou emyp~oftefa

~ep: 0~ooo<p~ ~e<- ef ~xe~oM râs a~p~ou! <nwo!«r(.M Tou mt{-

TtMfOt(.t7ope? Âp<o?oT~$- ~7, yp~~o~ ajTOM T~ pf~~o~. t<r7opey

oSf ~? ï~t; nMT<M'o< xal TM.ïM~ope~w -syepf TfSf ~Mf x<~ T<Bf

"PX~" <f ~J~. Simplic. ad toc. eumd.nep} ~.Xoco~M fuf

~4'e< ï~-Erg~ ~oB a~ou ajTM m~TM~o!

a~y~pa~~et <n.fOM-

O~M, orsMopB? T~ TE

IlM~/OpE/OM xai IDLaTNMXMCEp< TM!. t~TMf

~ë~. Suidas, c. v. Â~ou ~ftotto: ~Tt ~ep~ ~a8oi; ~ou~

<n<fT< ÂRM~OT~~ T~~pft~OUt TOU nMïmfOÏ <TUfO!«n'<M ef T~Ty

xaMT~7er x<u (t~Tot ToC <n<fT~<!tTot Ap«r7oT~!tf et. Ty «~pi ~u

X~ <wo~<~ aJroa'ep< ~o~o~t.

Des traités sur le Bien, sur les Idées, etc.

S!ï.

Page 82: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

70 PARTIE L–INTRODUCTION.

droits assez de détails sur ce dernier ouvrage, pour

faire voir que, s'ils ne l'avaient pas lu, ils en connais-

saient du moins par d'autres l'histoire et le sujet. Mais

aussi ne récusons-nous leur témoignage que sur ce

seul point l'identité du ne~ <p<Àooc<p/e~et dunep< -M-

~t8o5. Remarquons que l'ouvrage auquel ils rappor-taient à la fois ces deux titres ne portait, à en croire

Philopon, que le premier T~ -m~Sou e~~a~fft

~p< p~ooetp~ ~e~. De son côté, Simplicius dit Tct

<p<ÂooBp<6~ yuc ~6~< T<t !c< TN~tCou, etc.Pourquoi

yuf?

Parce qu'ailleurs Simplicius a identulé le Ile~ <p<~ooB-

~«tf avec la Morale. Ainsi le n~ ~~coep/a? est pour

Philopon et Simplicius quelque chose d'inconnu, qu'ils

confondent, selon l'occasion, tantôt avec un livre,

tantôt avec un autre.

Cherchons donc à déterminer directem< nt ce que

c'était que le Flep< T~Oou, afin d'en retrouver nous-

mêmes, s'il se peut, le vrai rapport avec le nec< ~o-

jc~/ttc et la Métaphysique. Ici on peut se servir des

renseignements fournis par les auteurs même dont

nous contestons les conclusions.

Le nep< TM~8oS contenait principalement une expo-

sition de la haute théorie platonicienne, qui n'est que

préparée ou ébauchée dans les Dialogues, et que

Platon développait de vive voix. Dans Aristote, on

trouve une mention expresse de ces a~~<t J~~MTm'.

P~.IV.u.

Page 83: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE II, CHAPITRE Il. 71

Un disciple immédiat d'Aristote, le musicien Aris

toxène, nous a laissé sur les leçons de Platon un récit

de la plus haute importance Il nous apprend qu'elles

avaient pour objet le bien, et que Platon entrait dans

son sujet sans préambules, sans tous ces détours où

s'égarent ses dialogues, et par une voie où le vulgaire

ne pouvait le suivre

On était venucroyant entendre parler de ce

qui s'appelle

biensparmi

les hommes, de richesse, de santé, de force, en un

mot, dequelque

merveilleuse félicité; etlorsqu'arrivaient les

discours sur les nombres et lesmathématiques,

et lagéométrie,

et l'astronomie, et la limite, identiqueavec le bien, tout cela

semblait fortétrange les uns ne

comprenaient pas, les autres

même s'en allaient. C'est làqu'Aristote conçut, de son

propre

aveu, la nécessité d'amenerpar des introductions aux diSIcultés

de la science.

Ainsi, dans ces leçons s'accomplissait ce que Platon

Anstox. Harm. H, 3o, e Meibom. – K<!< Xa~H~ t)~

<K?To~ tMpH!ro~t&!fot)Te!; T~<tpS~a, xa8a!trep Âp«r7oTeXt~ eM At;-

~e!ro To&f ~e~OM T<Sf <ufouer<tfT&w~Mpct ïtMTM'o~ T))f -srep!

Ta-

ye9ot? ax~Mtx-afaCeH''

~paa'f~ffM ftSf yâp &f<)[<r7of <!tro~<fjï6o!~o~Ta X~-

't'eaCa~ siTM'~t~~o~t&'&w <t«9pM~f<M' aya:6&!f, o!of ~OMTOp, <S~s<af,

~X~"j ~Xof eJ~M~MM'MM' T<f~ .&au~a<r7t(o' <)Te dé ~K'e~tTaf o< Myo<

eep! tMt~tt~T~tt tM~ <~tÛf«5f, !M~ yeat~tETpti: xai<MpO~Oy~<K,

X~ TO

~p<t< )~< <ïya~Jt< ~o?<p &<, 'safTeX<Bî o~MM <MpcMo~o~Tf ~~ct/feTO au-

Tois' eN* o! t~' <~0<M[Te~p<!fOM<'T<tS

~~{MtTOi;,0< Jè Kf[Teft~ft~OfTO.

Btpo~Xeye ~t~f <~f )M~ ajr~ Apf<T7oT~t!î&' ctUTM ra~Tas T<it$ <MT/M,

~t~Pttf', T<M< ~X~OtXTtf Otpomo~Ctt ~ap* CtUTOCcept T/fN~ T' ~<TT<tt n

~p~y~MtTe~a xal T~.– Ce passage a été cité par Kopp.im N~M..?'

M!94.

Page 84: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

72 PARTIEL–INTRODUCTION.

a fait entrevoir dans le VIP livre de la République,

1

la réduction des idées à l'idée du bien absolu comme

à leur plus haut principe. « Ces leçons, dit Simpli-

cius d'après Alexandre d'Aphrodisée\ furent rédi-

gées par les principaux disciples de Platon, Speusippc,

Xénocrate, Héraclide, Hestiée et en6n Aristote.

Telle est l'origine du nep< -7~60~ Maintenant nous

pouvons nous adresser, pour en connaître le con-

tenu, à Alexandre d'Aphrodisée, qui, de tous les com-

mentateurs qui en font mention, paraît seul l'avoir

eu entre les mains. Alexandre nous apprend qu Aris-

tote y exposait la théorie des idées et des nombres

dans leur dérivation de l'opposition de l'un et de la

dyade in&nie~, ce que nous retrouvons dans les li-

vres I, XIII et XIV de laMétaphysique, et qu'on re-

trouvait probablement aussi dans le n~ <p~6cc~<

Mais voici ce qui est propre au nep< T~ûc?. Alexandre

se rétere toujours au lIe livre de cet ouvrage pour

la théorie des contraires et de leur réduction à l'un

et au multiplet C'est qu'en effet cette opposition,

Simp! m P~tc. f 3 b A~et c ÂM~po:, etc. f ici b:

Porphyre expliquait dans un commentaire sur te Philèbe des pas-

sages obscurs duHep! M~9o? Â~eyp~afM T<i pt~fTtt MM~Mt-

MABf, <~ ~)' noppt!p<oe ~Mp~poCf aurct M~yye~o~fo~ T~e

~fep! aJT~f y~pctpef T~! ~<Xt!6y, x.T.

Alex. Aphrodis. in Mch~ I, ap. Brand. De perd. ~t-Mt. libr.

p. Sa M ToMtCra ~f T<f<tap~M T<5f Te apf9ft<5tf T<5f d!tT&)f

~apTMp ~Oero nXttMW T<! Te ëf xai T~f ~ua<!a, f5~ dv To& ~ep! T<ty<t0ou

Ap<c7eT~X~Mye<.

Atex.Aphrodis. in tib. tV, ap. Brand. De perd. Aristot. C~r. p. n

Page 85: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE II, CHAPITRE II. 75

qui est celle de l'un et de la dyade, de la limite et

de l'illimité, est le fondement de la doctrine pla-

tonicienne~, et devait jouer un grand rôle dans les

leçons de Platon. Mais dans le nept <p~o<n«p/ets et la

Métaphysique, elle ne devait plus occuper que le

second plan, et n'y paraître que pour être combattue

et remplacée par une théorie nouvelle (X" livre de la

Métaphysique). Aussi Alexandre d'Aphrodisée ne con-

fond pas le nep< -T~ytOoS et le n~< ~o~<p/ecc c'est au

nep< T~Oou qu'il renvoie toutes les fois qu'il s'agit des

contraires; Michel d'Éphèse et Jean Philopon suivent

scrupuleusement cet exemple.-La critique devait

tenir peu de place dans le ne~ ra~ou Aristote y

faisait remarquer, il est vrai, que Platon avait passé

sous silence la cause efEciente et la cause finale2;

E~Jte dè'Eté?! T~ TOMt~T!~ SX~Oy~ XOt! Sf TM ~MT~pM ~ep! T~itSou.

–ÂMnr~nre< 'BKtX<~ 9~!& e<s ïA ~« T~ 'sfep! T~Œ~ou ~e~e<y~fct.

Micheld'Eph&se renvoie aussi pour le même objet au îîep~ T~aSo!?,

mais comme il ne le fait que sur la foi d'Alexandre d'Aphrodisée, et

sans avoir l'ouvrage sous les veux, il ne désigne aucun livre en par-ticulier. In

JMct< X, XI, cod. ms. Biblioth. reg. Paris. t876,

206 a: HetHMt{xedé &t~pEMf ~f TOM~ept TayaM; f. 2t~ a Etp~e

y~ Ttfet a~ro~ ef<T<f dv T~ -Brsp~ T~aSou ~<ypo[Soft~f&) aJrou jS<6X~.

Pbitopon cite avec Alexandre le H* livre du ÏIep! T<t~a[9oC(Comne.M JMehy~. t3 a); et dans les derniers livres, où Alexandre

lui manque, il imite la prudence de Michel d'Ëphese (C b,

46 a).

Voyez plus bas, partie ïïï.

Atex. Aphrodis. M Metaphys. I, vi (cod. ms. Bib!. reg. Paris.

t8~8, t3 a) (M~er~pM) T'K!TMf T&w c~T~f ~f)t~ofeu<re)~ o Âa«r7o-

r~)~ ~t; T~ Jo~ Tôt? nX~Tat~oî' ~T< ef 0~ ~ept a~T«H~ ~e~ et-, ou~efo~

Page 86: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

7~ PARTIE I. INTRODUCTION.

mais signaler une lacune, quelque considérable

qu'elle soit, ce n'est pas encore en rechercher les

causes et enseigner les moyens de la combler.

En général, il résulte de tous ces témoignages,

d'abord, que le nep< T~~cM n'était guère qu'une expo-

sition, et présentait un caractère presque exclusive-

ment historique (<o?opt!) tandis que dans le nep< <p<-

~c<~<et? et laMétaphysique l'histoire ne pouvait être

que la base de la critique et de la spéculation en

second lieu, que le nep< T<~8o5 avait pour objet prin-

cipal la doctrine de Platon, tandis que dans lenep<

~a<n)~/<tf et la Métaphysique il est question de tous

les systèmes platoniciens et pythagoriciens qui do-

minaient au temps d'Aristote.

Il ne faut pas confondre non plus avec aucun de

ces trois ouvrages le nep< e<JËf, traité en deux livres,

où, suivant Syrianus, Aristote opposait à la théorie des

idées et des nombres à peu près les mêmes argu-

ments que contiennent les XIII* et XIV livres de la

Métaphysique, mais avec plus ou moins de dévelop

pement~. Michel d'Ephèse, et après lui Philopon, 1

T<M!ï<tW~ftMfM, fM &' TO&TMp~ M:y<t9oC J~eMTM <tt< t~ yM~<re<

xod ~op~ oj T~eT<H MpMc ajPnft.

Voyez ptus hant, p. 69, note a.–Ce caractèrehMtotitpjte

est

encore indtqné dans cettephrase de

Philopon (in t!6r. de Gen. e{ cotr.

50 b) Ëf ~~f0« TO/fMf 0 H~~T~f TO ~y<[ t«Xp~t )tid TO

f<eta6ù Tout~t &MT~era<. CC SumpHc. mP~. f. Sa b.

Syrian. injM<'t<<. XtV, sub fin.

ap. Brand. Depen~. ~~tot. ?.

p. t4. – Hy a un antre

passage plus précis, dont Brandis ne faitpas

Page 87: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H. CHAPITRE III. 75

distinguent expressément le rhp< «<?<' des deux der-

niers livres de laMétaphysique*.–Le nep< <~<~

était encore un ouvrage différent du Iltpt -r~Sou, du

nep< ~~ooB<p/<te et même dunep< etJË'y; c'était, comme

le dernier, un ouvrage depolémique, mais en quatre

livres au moins, puisqu'Alexandre d'Aphrodisée en

cite le IVe2 de plus on ne peut pas identifier à la légère

ce que distingue un commentateur d'une si grave

autorité. S'il ne faut pas multiplier les êtres sans né-

cessité, il ne faut pas non plus les supprimer sans

raison suffisante. Qu'on ne s'étonne pas d'ailleurs de

voir tant de livres sur le même sujet ce sujet, c'était

le fond même du problème philosophique, tel qu'on

le posait alors Aristote ne se lassait pas d'y revenir.

En résumé, le rtepi -M~ou, écrit, selon toute appa-

mention;inttbr.Xin,v,sub6n.(cod.ms.BiM.reg.Paris.t8<)5,C 6t b)

On fteo Tot!rMf o<?~f -erXeof e~rEïf ~e< 'c~M Tt)f T&w ef~w u~JSeo~

e);~ofxa~ Ta ~iFpMTOP T~Ttfî T~î -BpftyfMtTe~$ ~i~of xa~ Ta<TEp< ~5~

e~Mt <M!TyCB~payfMtTeM~ttefttJt{o

~<6X<<[' o~e~f y<!tpTojTa T<!t?T~-Eraf-

M~oC ~~p~tMTft tter<t0~BMy, xa/ -etOTE ft~f ajra«tTOtxepfMtï~r

<~~o~Mt~aw, ~oï~ J~ cufMfMttrepof <tTT<t~y~X~&)f, ~etpaTM TOM

opM&r~poMt ~t~roS ~Aoo~out eJMfet!

Micb.Ephes.in lib. XIV, sub fin. (Cod. Coislin. t6i, f. 4o5 a) x<in'v

~ï' t~e~M <T«p<![~6e~' TA'efep!

Tf.?f e~&wyp!t~fTa ajTm ~uo

~<a,

~~t ~Ttt'aapA

T~ MC <M[<NC, Ka< ~tTO< T!?î fteTOt Ta pu<KX(i <T<WT~e&)î.

Philopon. mJMehy~. 67 b «Subindicat autem(Aristot.) per

hoc eaque de Ideis contra

ipsos scripstt libris duobus, aliisquam

MMt hi XIII et XIV, et extra metaphysicorum conscrjptîonem. – Mt-

cheld'Ephese se fonde sans doute sur les deux passages de

Synauus;

pour philopon, il copie toutsimplement Michel d'Ephese.

Sur ie Bep< M~)f, voy. Brandis, De perd. ~rM<of. Mr. pn. t~-xo.

Page 88: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

76 PARTIE I.- INTRODUCTION.

rence, peu de temps après la mort de Platon, a été

la basehistorique de la

polémique soutenue parAristote contre les idées, dans le

IIepie«<Sfx~ ~y~,

lenep< ~Mf, le n~ <p~ao!xp/«c et la

Métaphysique.

Quant aux diverses hypothèses qui ont été avan-

cées pour identifier d'autres traités énumérés par

Diogène de Laërte avec les dinérents livres de la

Métaphysique, la plupart ne peuvent être admises

que dans le sens dont nous avons parlé plus haut.

Ainsi, s'il était vrai que le n<~ <~Nf dût être Men-

tifié avec les I" et HP livres, le nep< <!B~Mf avec le

? et le IVe, le n~ ~~c avec le XIe, le nep}et le mp) ~ep~~s avec le VHP et le ÏX~, il ne s'en-

suivrait pas que ces titres fussent les titres primitifs ce

ne seraient, selon nous, que des noms donnés à des

parties détachées d'un tout. Du reste, nous ne discu-

terons pas ces suppositions et d'autres semblables plus

ou moins hasardées, fondées sur de simples titres

mentionnés par un auteur peu grave nous ne pen-

sons pas qu'elles puissent conduire àquelque conclu-

sion importante.

Sam. Petit, jMttceHan. IV, t.

Page 89: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE II, CHAPITRE IU. 77

CHAPITRE III.

De Fauthenticité et de l'ordre de laMétaphysique

et de sesparties.

Cependant si les hypothèses qui présentent les ou-

vrages d'Aristote comme des assemblages de traités

partiels sontinexactes dans leur généralité et prises d'un

faux point de vue, on ne peut nier qu'une partie de la

Métaphysique ne les Justine jusqu'à un certain point.

Quelques livres se rattachent à peine à l'ensemble

dans d'autres, on est arrêté à chaque pas par des épi-

sodes historiques ou di&iectiques, par de longues et

confuses réfutations, par des redites continuelles. Le

sujet semble plus d'une fois recommencer; les ques-tions se reproduisent presque au hasard, et les plus

importantes sont souvent les plus brièvement énon-

cées et résolues en passant en un mot, il y a absence

presque complète de proportion et de systématisation.

Cependant on ne peut renvoyer laMétaphysique aux

«sc/~MHHMt que les commentateurs opposent aux

ct/y~a~Mnxet les uT~~tM~MMrxftn'étaient que des notes,

des matériaux encore épars Mais Aristote n'avait

ttmmon. inCatey.

f. 6 b Qî ~X~f TfSf otjfe<&)f ouYypctMtMT&w.Simplic. in

Cs~. t b ~<H(ef J~ Ta uxo~t<t;~T«<i( tMt)ï!! <nroM<~

~<t e~MM J<0 Ot!Je ~MTOMTOH <t!T' aUT&)f TOt TOU ~OCTO~OU Jo~~M(T<!(- 0

Page 90: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

78 PARTIE 1. -INTRODUCTION.

pas tout écrit d'une haleine tel sujet avait pu être

repris plusieurs fois, tel autre rester ébauché; enfin

on a pu, comme ie raconte Asclepius, remplir des la-

cunes avec des morceaux empruntés à d'autres livres

d'Aristote, ou même y insérer dessuppléments apo-

cryphes. Il faudrait pouvoir retrouver dans la Mé-

taphysique telle qu'elle est ce qu'elle devrait être, en

dégager le plan primitif, écarter ou remettre à sa

place tout ce que des mainsétrangères ont pu y

jeter pêle-mêle.

La première chose à faire serait de séparer l'apo

cryphe del'authentique mais les documents que

nous avons à cesujet sont insuffisants. Selon Jean

Philopon 1 et une note que l'on trouve dans plusieurs s

manuscrits2, on aurait attribué assez généralement le

Ile livre à un disciple d'Aristote, neveu d'Eudème

ainsi que nous l'avons déjà dit, à Pasiclès, qui écrivit

aussi sur les Catégories~. Mais, s'il eût voulu ajouterun livre à la

Métaphysique, Pasiclès ne l'eût pas formé

f~TOt A~H~pM ïA ~rofM')~M[T<~ <ruftwe~«p~<!t ~t~f e!xft<~ xai ftt)

<~< &t <nt<Mf~aM~pEtT&'Sf.

1Voyez plus haut, p. 35, note i.

Ap. Bekker, Aristot.JMehy~. Mb. c! ToSTo T~

~<6Mof <M <~oM

~M~f e&W I!<!KWfX<<OMTOU~O~OU, aj(po~e ÂpM?<~OM, U~

Bo~oS ToC E~ftou <Me~oC- ÀX~afJpot o <~p<~«ne~ ~tMC el-

ajTo ToS Âp«~oT~<we. -Cette note avaitd~à été donnée, mais

avecplusieurs fautes, par Buhle, de /<rM<ot. co<M. mss. Mt ~fMf. 0~.

<<fA.f, t-~5.

Galeo. Je~r.propr. ap. Ntumes. ad Ammon. Vit. Arisiot. not. n.

Page 91: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE Hï. 79

defragments

décousus telsque

ceux dont ce H' livre

se compose;ii est

plus naturel desupposer qu'il les

tira de quelque cahier de son maître, et que cette

circonstance les lui fit attribuer.

SuivantAsclepius,

ce serait le f* livreque

l'on

auraitrapporté

à Pasiclès'. Alexandred'Aphrodisée

et Syrianusdisent aussi

quel'on contesta l'authenticité

du F livre2; par quels motifs? c'est ce qu'ils nous

laissentignorer.

Albert le Grand nousapprend

qu'une tradition reçue chez les Arabes l'attribuait

àThéophraste,

etque par

cette raison ils ne le

comprenaient pasdans leurs versions 3 Avenoës,

du moins, en omet les cinq premiers chapitres en-

viron~. Ces. traditionsacquièrent

de la forcepar

Voyez plus haut, p. 34, note a.

Atex. Aphrodis. inMetaphys. III, e vers.

&p!t/t.'cJ. eonmt. aq. Sy-

'anusHtJMi'<ap~.IH,<'epM. Hieron.Bayolini (Venet. t558, in-4"),

<7 a.-Stahr (Aristotelia, ït, 103, note 4) et Pansch (de E<A. Mcom.

p. 2) renvoient à tort, d'après Fabricius (III, 256, Harles), à Alexan-

dred'Aphrodisée,

mSoph. EktteA. Il, 69, (Venet. tSao), et à

Sy

rianus, inMetaph. f. t~, pour la question de l'authenticité du

n' !ivre. Dans lepassage de Syrianus, c'est du I" livre qu'il est

ques.

tion; quant à AteMndff, son commentaire s~; le Traité des So-

phismes (Venet. tS~n) ne contientque 6t feuillets; je ne trouve

qu'au feuillet 6* unesimple mention du IH* !nre; rien sur le M*.

Albert. M. in~M</f. poster. t

(Opp. I, 595) Theopbras-

tus, qui etiamprimum librum (qui incipit

Omnes homines Mtrc elesi-

derant) Metaphysic~ Aristotelis traditur addidisse; et ideo in arabicis

translationibus primus liber non habetur.

Son commentaire ne commence qu'à à Ex ~ef o!f T~fe~pmtst'Mt'

(c. v, MbSn.p. t8, t. 3t. Brand.).–C'est la aussi que commencent

Page 92: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

80 PARTIEL–INTRODUCTION.

leur désaccord même. H iaiiait que ce I" livre fût

suspect par plus d'une raison, pour devenirl'objet

de tant d'attaques de divers côtés; il est signalé par

cela seul à l'attention des critiques une étude appro-

fondie du texte pourra peut-être jeter quelque joursur la question. 11 ne faudrait pas croire que l'authen

ticité du P* livre fût suffisamment prouvée par un pas-

sage du XP où Aristote se réfère à ce qu'il a dit, « au

commencement, touchant les opinions des anciens sur

les principes a sans doute, il en traite fort au lonc

dans le I" livre mais le XIe ne peut faire partie de la

Métaphysique, ainsi que nous le verrons bientôt, et

ce renvoi pourrait se rapporter à une introduction

historique simplement semblable à celle que renferme

le r* livre, mais qui ne nous serait pas parvenue, ou

qui même n'aurait jamais été écrite. Toutefois les

preuves intérieures, celles qui se tirent du contenu

et de la forme, nous semblent, sauf l'opinion de

juges plus éclairés, tout en faveur de l'authenticité du

P" livre. Les arguments par lesquels Buhle a soutenu

l'opinion contraire2 ne sont nullement concluants.

les traductions arabes de laMétaphysique qui se trouvent à la Bibtio

thèque royale de Paris. Jourdain, Recherches critiques sur !'âge et Fo

rigine des traductions latines d'Aristote, etc. (Paris, 1819, M~8°), p. i a t.

XI, init. Ôn {~f co~/a -erep< ap~ ~"o~ftt TM ~o?<, ~of

&t TtSf 'Bpf5t6M&' 0&

&p!)T<M ~p~tTa )S~ Taw <<XXM<

e~)t)~<t ~6p<

T<5f ep~f.

Voy. Buhte, tiAer<Ce ~<'cAt<M't( derJletaphysik. in der Biblioth. der

<tt<<n Literatur tmJ XtMMf (Gotting. ~86), p. 29 etsqq.

Page 93: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE Il, CHAPITRE III. 81

6

Alexandre d'Aphrodisée nous apprend que l'on

attaqua aussi l'authenticité du V livre, mais par d'as-

sez faibles arguments.

Les traductions arabes dont se servit Averroës ne

comprenaient pas les XIe, XIIP et XIV* livres. On

ne trouve pas non plus le XIe dans le commentaire

d'Albert le Grand, ni les XIIP et XIV' dans le com-

mentaire de saint Thomas, qui fit faire sur des manus-

crits grecs une nouvelle version d'Aristote. Les deux

derniers livres manquent également dans la traduc-

tion faite au xve siècle par le grec Argyropuie. Ces

omissions sont remarquables mais on n'en peut tirer

aucune conséquence contre l'authenticité des livres

XI, XIII et XIV. Averroës, par exemple, ne la nie

en aucune façon il connaissait ces livres par le

témoignage d'Alexandre d'Aphrodisée, et en donne

d'après lui une courte analyse 2. De plus, Avicenne

connaissait le XIIP et le XIV; il est facile de le voir

par sa Métaphysique~.

Au total, il n'y a pas de motifs suffisants pour

considérer comme apocryphe aucune des parties de

laMétaphysique.

La question d'authenticité se réduira

donc pour nous à celle de l'authenticité de l'ordre dans

lequel sont disposées ces parties. Avant de l'examiner,

nous pouvons rappeler un mot de Nicolas de Damas.

&tJMetop~t. V, init.

Avp~a 1_~le~~r~;ya,~ri.si. ei Arerr. Opp. t. VIIj, f. s3~ a.Aven-. Mj~e~ (~rt!t. <-t ~Mrr. Opp. t. VU), f i35 a.

A~cemn. OjperapMMopttca (t5o8, in-f), f. 96-7.

Page 94: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

82 PARTIE L–INTRODUCTION.

Ce péripatéticien célèbre déclarait dans son livre sur

laMétaphysique d'Aristote que « la Philosophie pre-

mière lui paraissait devoir être exposée dans un ordre

plus convenable, » et cet ordre il avait cherché à le

retrouvera Ainsi, et quel qu'ait été d'ailleurs le suc-

cès de cette première entreprise, si nous nous écar-

tons en certains points de la tradition vulgaire, nous

aurons un précédent dans l'antiquité.

Quelques critiques ont pensé que le 1~ livre de-

vrait être renvoyé dans la classe des livresphysiques.

En effet, il y est question de deux choses, de la nature

de la philosophie (<n)<p/~) et de son objet cet objet,

ce sont les principes. Or, d'un côté, c'est sur les

principes (n<p) «p~Mf) que roulent lescinq premiers

livres de la Physique; de l'autre, Aristote dit quelque

part que la considération de la nature del'intelligence,

de la science et de la philosophie appartient à ia mo-

rale et à la physique2. Mais pour arriver au principe

A~err. in Metaphys. XH,f/)nKfm. C i36 b <N:hH in eis in-

ordînatum repertum est, ut falso opinatus est Nicolaus Damascenus

qui se exactius banc tradidisse scientiam quam Aristoteies in quodameuo vohumne praesampsit.

~M~t.pM<er. I, xxxnt, sub fin Ta ~o<~ ~e? ~efe~MM,

Te Aewo~ foB, x~ ~r«r7~ x<t!T~f~ M: ~po~<reM, «[! ao-

~M, ftà' ~H<r< T<tJè ~xm .&e&)p~ ~Mt< &r7<f. Buhle,nh-r die Aechtheit der JH~pA. p. 27. –Cf. J&<<t~ XIH, a86,1..7

nept? Taw

-spf5M)f <mn' x<~ Tmf-sp~T~t) ctMtw <r7o<~e~w, ~oa

f~f ~.OMM' oi<ëp~ f~~î T~e ~e~T~t o~a< &o~cfret, Ta

rois<rep! ~<Te&tf e<p!!M<, Tf~ ot?x ~<y7< t! t pteO~ott T~< ))<y~.

Page 95: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE !t, CHAPITRE I!I. 85

6.

des principes, ne fallait-il pas aussi partir des prin-

cipes ~Pourdéterminer la nature de la philosophie

première,ne fallait-il pas se demander d'abord ce que

c'est que la science et la philosophie ? Le premier livre

est donc une introduction nécessaire qui for me la

transition de la Morale et surtout de laPhysique

à la Métaphysique c'est pour cela que les renvois

à la Physique y sont si multipliés. De même, dans le

VIÏ" livre, Aristote déclare qu'il lui faut traiter des

sujets qui rentrent ordinairement dans la science de

la nature, et que seulement il ne les traitera pas

en physicien'.

Mais sur cette limite des deux sciences, il est dif

Hcile qu'elles ne se confondent pas. Voilà pourquoi on

a placé après le I" livre les fragments dont se compose

l'et~TToy, qui, pour la plus grande partie, dépend

évidemment d'une introduction à la Physique~. D'a-

bord, la suite du I" livre, comme l'a déjà dit Alexandre

d'Aphrodisée, c'est le 111' le I" livre se termine

ainsi

iM<& Vit, tSa, t-7, Brand ÏIoTepo~ ~7< -empAn~

S~!)f Taw TMOtiï&w OMOMSf w < xa! ~e? ~Te?f ou~/af <t<!T<BfeTepaf

ï<Mt o!ot)a!p<0(<o~ Te rotOMTOf, cxe~~of '&'<r7epof'

To~Tou yetp X~P"~

*d~ept ~5~ a&t~ï&w oJ<n<Sf

~eM~EO):! &op~Eff.

Avetroês ptace le H* Uvre (a ~<tTrof) avant te I".

P. 35, Brand. OM ~sp! TfSfaJT<B~To~T&)faxop!{<Tete!'<{fT<

~mw~OM~tef«f&<<rT~<[ y~p auTMfe<!9rop){tfa<ftef 'spo: Ta<~o7e-

1

è'lrtlflA8œFU ..0. T4Xa: ')'1Ip &11ÈE aûsûrvetÎ7rOp¡ffnlf&eV zrpôs

sâs~Ya?e-

pef Atop~ff.

Page 96: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

84 PARTIEL–INTRODUCTION.

Examinons les questions qui peuvent se présenter sur les

choses dont nous venons de parler; peut-être nous fournirom-

elles les éléments de la solution des problèmes ultérieurs.

Maintenant voici le début du III*

H est nécessaire, pour la science que nous cherchons, d'arri-

ver aux questions qu'il faut préalablement examiner car pour

résoudre les problèmes, il faut d'abord les poser et les discuter

convenablement.

H est évidentque cette fin et ce commencement

secorrespondent exactement et doivent se toucher.

A ia vérité, l'<& ~<rrrof se termine par ces mots 2

H faut examiner si c'est à une seule et même science ou

bien à plusieurs sciences qu'appartient la considération des

principes et des causes.

Et cettequestion est précisément la première qu'é-

lève Aristote dans le 111° livre Maisqu'importe? Le

problème posé au début de ce livre ne se rattache

pas d'une manière moins immédiate aux discussions

du ï"; c'est de ces discussions mêmesqu'il sort en

lignedirecte. Aristote a

prissoin de le faire remar-

quer

P. &o, Br. ÂM~tt~ ~s T))f ~Mu~ ~~M~ ~reMe:f ~t&

~rpMTOf,~ep! &' <nMp:f<M!<Je?~p5rof' &T7<J~ roM eUwop~MM~ou~o-

tt~fOtt <M<t&~00 T~ &MK)p~oa<)M[Xf5~.

Ke! e~ {"& ~t~t ~e<oy&)~ r~ a~TMMf! T<~ap~a< ;9«t)p!)<r<~~7<f.

Page 97: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE Ht. 85

La première question qui se présente sur les matières que

nous avons agitées dans le préambule, est celle de savoir si

c'est à une même science ou à plusieurs qu'il appartient de

considérer les causes

La dernière ligne de l'a ~<tT7Bf ne nous autorise

donc pasà le laisser entre deux livres

quine souf-

frent pasde solution de continuité. Bien

plus, cette

dernière lignene se lie en aucune manière à ce qui la

précède,et

pourraitbien avoir été

ajoutéede la main

de Pasiclès ou dequelque autre, pour

établir uneap- n

parence de transition du prétendu ? livre au IIP.

La véritable fin de l'<x ~ecT~f, c'est cettephrase

H ne faut pas chercher dans la Physique la rigueur mathé-

matique car dans la nature il y a nécessairement de la ma-

tière (qui exclut cette rigueur). Par conséquent, il nous faut

d'abord examiner ce que c'est que la nature car c'est ainsi

que nous apprendrons sur quoi roule la physique

Non-seulement cette fin n'a aucun rapport avec le

!? livre, mais elle ne peut appartenirà la Méta

physique. Des trois chapitres ou plutôtdes trois

parties principales dont se compose l'<: ~<M-~f, lapre-

mière, quitraite de la vérité et de son double rap-

1 P. 4t, t. 4 ~< acop~c: ~p<~n? ft€t cep} & To!~'sre~po<~Ma<r-

~OM &t)Mp~<Ki{tef X.T.2 P. ~0, 1. 4 Tt)f axpt&~O~CW Tttf ~MtS~STMt!)!'ojx ef &K:<T<)'

<tMHT))T&w,<ïXX*~t<To& ~youa~f <~t!f ~<o~p ou 0«ctt[Ct o TpoTrot'«iMoa

y<tp ~M ~tiot~ ~e* t~t)f &o <rxeT?eot' ~fpMTOfT<e<r7~ ~!<K~-

~T~~ctp xai ~rep~ T~M' ~«M'<~ ~Xof ~r7<M, Ko e<(tM: <.r.

Page 98: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

86 PARTIE I.–INTRODUCTION.

port avec l'esprit humain et avec l'être en soi, n'est

pas sans relation par son objet avec la philosophie

première. Cependant on la rattacherait encore mieux

à des considérations sur la philosophie théorétique en

général; c'est l'opinion d'Alexandre d'Aphrodisée et

un passage du fragment en question' semble la con

firmer. Mais il y a plus le début de ces considéra

tions prouve qu'elles devaient se porter d'une ma-

nière spéciale sur la philosophie de la nature a

moins que l'on ne préfère partager encore tout ce

fragment, et n'en renvoyer à laPhysique que ce dé-

but, qui ne peut se rapporter qu'à cette science. C'est

le parti qui nous semblerait le plus convenable~.

Le second chapitre contient une démonstration

de ce théorème qu'il n'y a pas de série infinie de

principes; théorème que la métaphysique suppose.

sans nul doute, mais qui relève plutôt, dans Aristote,

de la science propre des principes, de la Physique.

Enfin le troisième chapitre se compose de consi-

dérations sur les diMerentes méthodes et sur la né-

P. 36, t. t5 ee<ap)tT<~î f~f yap r~o~ aX<Oe«ï,-srp<MtT<)t~< ~p

y0f X.T.X.

P. 35, t. 20 Xttftefof <!e ïo ~re a&<M: ~t!a Jt!f<t<~a< 'n<~e~ ettht~

(se. T!~ <tXt!Ce&tî), ~ttre ~fT<M <~roTu~a)'e< aX~' &M<7op ~'E<f T<

-awp}Ti!<~OBMf.

Nous partagerions ce t" chapitre en trois fragments distincts

i* depuis le commencement jusqu'à oJ ftOfoo X*P"' (p. 3S, L 4),s*

depuisoJ tM~of ~e jusqu'à op~ ~e<, 3* depuis "pCs~ ~e;

jusqu'à la 6n.

Page 99: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE H! 87

cessité pour la science naturelle d'une méthode spé-

ciale qui dérive de l'idée même de la nature.

Ainsi l'<t tAet-ncf ne doit pas seulement être distrait

de la place qu'il occupe, mais, à l'exception peut-

être des dernières phrases du troisième chapitre,

que l'on pourrait séparer du reste et considérer

comme étant du domaine de la Métaphysique, il faut

le renvoyer à la <a[~M~7t<e<. ~puo~M,à la science de la

nature

Après avoir fait dans le 1er livre une énumération

des principes et une revue critique des opinions des

philosophes sur ce sujet, Aristote agite dans le

livre suivant ( que nous continuerons de nommer le

111' pour nous conformer à l'usage ) tous les problèmes

qui peuvent s'élever sur la nature des principes et de

la science des principes~; il les énonce d'abord som-

mairement, et les développe ensuite sous dix-sept

chefs environ. La finit l'introductionproprement dite

de laMétaphysique.

Le IV livre commence à entrer dans le sujet. Il

Titze (toc. taud. p. ~) place l'a ~<T?of en tête du livre de la

Physique. Francesco Beati (in libr.3jfffap~.

Venet. t5A3, in-i°.

<nit,) avait proposé avec plus de fondement de le mettre en tète

du !F; NiHati (Df ffra r<thon<'p/«7oM/)A.tV, Y!, SSg) et Scayno(Co<w)t. M .ttf<~t<t~. Roma', t58y, in-f°, in !ihr. H) se rangent à to-

pinion de Beati. Mais si cetteplace convient parfaitement au m° chapinion de Beati. lliais si celte place convient parfaitement au nt° cha-

pitre de ta. elle ne convient,pas également

à ce qui leprécède

Il ne faut pas pour cela, dans ce passade du Xt! iivre (c.

'nu.) KaT*ap~a< ef TOM J«tBopt!~<t<T<t; e~e~Cn tt~~Tcpo)', traduire xar'

Page 100: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

88 PARTIE 1. -INTRODUCTION.

établit que les plus hauts principes étant les principes

de l'être, la science la plus haute est la science de

l'être en tant qu'être. Mais cette science est aussi la

science de la science ou des premiers principes

de la démonstration réponse à l'une des questions

comprises dans le premier problème du IIP livre'.

Le reste du IVe est consacré à la démonstration du

premier principe de la science, le principe de con-

tradiction. Tout ce livre forme le passage de l'Intro

duction au cœur de l'ouvrage on n'y entre pas en-

core dans le sujet propre de la Métaphysique 2, mais

on commence déjà à l'entrevoir. La conclusion3 fait

sortir à l'improviste d'une discussion toute logique le

théorème qui résume la Physiqueet fonde la Méta-

physique.

Ici nous sommes arrêtés tout à coup par le Ve livre.

Le Ve livre ne contient qu'une énumération et une

classification des sens des principales idées sur les-

quellesroule une métaphysique principe, cause

élément, nature, etc. C'est incontestablement le Mep~

TMfsBMt~c Ât~Mtw mentionné par Diogène de Laërte,

et qu'Aristote cite si souvent~. Mais ce livre est-il ici

ap~<K parde ~ruto~tM, comme le \cut Samuel Petit (loc. cit.), mais

par initio, au commencement. Voy. JMctap~. t, 35, t Ett Nicom.

tf, u, tto4 a Bekk.

m.n, 4A.t :o.Br.

Voyez plus bas, partie III.

IV, sub Cn.86, to ao, Br.

Buble (De Mr. Aristot.penf. p. 78) identifie le livre V ou Uepi

Page 101: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE II, CHAPITRE III. 89

à sa place, ou n est-il pas plutôt un traité séparé quise rattache à ia

Métaphysique sans en former une par-tie intégrante ? La première opinion, qui ne s'écarte

pas de l'ordre traditionnel, et qui est aussi celle d'A-

lexandre d'Aphrodisée, n'est pas en elle-même dé-

pourvue de fondement. Il se pourrait qu'Aristote eût

voulu placer l'explication des termes scientifiques im-

médiatement après l'Introduction, avant d'entrer dans

la profondeur du sujet; mais plusieurs raisons nous

font incliner à la seconde hypothèse. Nous commen-

çons par reconnaître que le n<p< '7~ pnxnt~ ~~Mfse rattache étroitement à la

Métaphysique indépen-damment des nombreux

passages de laMétaphysique

où ce livre est cité, Aristote à la fin du f livre, re-

proche à ses devanciers d'avoir prétendu découvrir

les éléments des êtres, sans avoir seulement énu-

méré les diverses acceptions du terme d'élément

énumération que nous trouvons en effet dès le

M!*chapitre du Ve livre. Mais au lieu de placer ce

livre dans le corps de iaMétaphysique, il faut le

reporter avant le t", comme une dissertation préli-minaire. En effet, Aristote, en

y renvoyant dans le

ïcwtMtM~Bf Xeyof~MMt avec les

~MMp&~M ~T<MM~ex<~ JKKperoMw aet

&MpeT<)t~ a citéspar Diogène

de Laërte. Mais le nombre ~Taxc~

~M ne répond pas à celui des paragraphes du V* livre de la Méta-

phystque; deplus, Simplicius cite les

~Mp~re~ comme un thredistinct de tout autre

(Simplic.M

Cn<< f .6 a).

J~<< t, m, 33, 26, Br. STo~eM ft)t &eXofMf, tro~a~t

~O~Mt.

26, Br. 2-roiXcîa 14ù ~x«X&ç

Page 102: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

90 PARTIEL–INTRODUCTION

cours de laMétaphysique, se sert presque constam-

ment de cetteexpression

cy a~ojc, <( ailleurs qui

nepeut s'appliquer à

unepartie proprement

dite de

l'ouvrageoù elle est

employée,et

qu'eneffet Aristote

emploie lui-même maintes foispour désigner

un ou-

vrage difïêrent; c'est une nuance affaiblie de e<' h~

Ily

a même unpassage

duprétendu V livre où se

trouve sous cette forme d'ef e7~<? un renvoiqui s'ap-

plique évidemment au VI*. Le n~-TNf ~nx~M? est

donc dans la pensée de son auteurquelque chose

de véritablement distinct de la Métaphysique. Ajou-

tons que les premiers livres de ce dernier ouvrage

IX, t, t~S, L 19 On ft~f oS~ ~o~a~& MyETCM T}~!)a(u< <!];< te

~fao&M, J<c5p«r7<M ~tf èv <ï~Xo<î. Cf. V, to4, !.6 etsqq.–X, m.

t99, t. 25 A«Mpt<T?tM J' ef <{XXo<~ -BMMtTp y~Mf T<!UT<i ~Tep<t.Cf.

V, 100-tOt. -X, JT, 20t, L t3 noX~at~&i: yàp ~)t TOUTO (sc. T)~

o?~p)!<T~) ~~o(tef,rep ~p~TM ~tf èv <ïX~o«. Cf. V. n3, t. 2~

etsqq.-De même, V, 99,1. 20 n~Te Je JufaTof xai ~ïe o~ec

<<ot< &op«r7< Cf. ÏX.

On nepeut

nier qu'ec ~poM nedésigne constamment a un ouvrage,

un traité autre,* ainsi~Keta~h. ï, v, t6, ig ~«upto~M Je ~t~'

TejTNf eféïepot: axp<~<r7epof; ce qui désigne,

selon Alexandre

d'Aphrodisée, le Cp~ ToCî n«Cc[yope~oM, que nous n'avonsplus;

de

même, de Gen. et corr. I, sub 6n.Â~X<~ ~ep~ ~f To~wf ~po~

~<nte~<M- ce qui s'appliqueau

Ilepi ~<!T&)f quiest

égatement perdu

(Cf. L. Ideler, tm ~rMt. ~fekon)~. t, u, 324., 495). On pourraitciter

beaucoup d'exemplesd'~f <ÏX~oM

employé dans le sens I~f ërepoM;

ainsi, Eth. Nicom. X, tv, S 3; cf.Phys. I, vm, VI, VII, VIII, et Eus-

trat. ad Eth. ibid.; de Anim. n, v; cf.P~. ÏH, n; de Gen. <mtnt. tt.

m; ef de ~HH.ÏL~e<<y&. XIV, p. 293, m; cf. de Ca' ei<

1

Meltlph. VH, ix, 145, n cf. de Gen. et corr. etc.

Page 103: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE 111. 91

supposent,tout aussi bien

queles suivants, le

nM<

wf Tnx~Se.Ne

supposent-ils pasla connaissance des

dIHérents sens du principe, comme le IXe livre celle

des sens différents de lapuissance? et en effet, c'est

par l'~px" quecommence le V' livre. Enfin le XI* qui

reproduiten

abrégéles livres III, IV et VI, les re-

produitdans cet ordre, sans

interruption,sans

que

le V'y ngure le moins du monde. Si maintenant on

demande pourquoi le Ilep< TNf 7nxnt~M$aurait été mis

dans laMétaphysique

aurang qu'il occupe encore

aujourd'hui,la raison en est fort

simplec'est

quele

VF livre est le premier où Aristote s'y réfère expres-

sément. On en a conclu que de ce traité préliminaire

il fallait faire le V* livre 1.

C'est ici le lieu de faire mention d'une opinion

remarquable de l'un des plus anciens interprètes de

laMétaphysique. On a souvent répété d'après Aver-

roës, cité par Patrizzi, que Nicolas de Damas n'ap-

prouvait pasl'ordre des livres de la

Métaphysique.

P. m, 1.6 A<!yo<~ TO<!To« (id est <TU{t6e~t«<<rof) ~f éï~po«.

Cf. VI, ts~, t. 9~. Lespassages des livres VII

(init.)et X (init.).

où Aristote renvoie aux nAwep~

rot? ~ooa~fM J«)pttft~Mt ~tpeTepof,

pourraient fairepenser que le V* livre (ait partie intégrante

de la série

des livres de laMétaphysique;

mais ia forme ~pJrepott ne s'applique

pas seulement à un livre antérieur de l'ouvragemême o& cette

expres-

sion estemployée;

elles'applique tout aussi bien à un

ouvragediffé-

Mnt, pourvu qu7il soit dans la même classe ou wpotypMtTe&t Ainsi, <ff

C<et. t: J~eottaMy~p ToBro ~pjTepof T<Mt ~ept «f~ean, ce qui

M rapporte anx derniers livres de la Physique.

Page 104: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

92 PARTIE L–INTRODUCTION.

Maisqu'y

trouvait-11 àreprendre?

C'est ceque

l'on

ignorait, et de quoi nous instruisent deux passages

quenous rencontrons dans le commentaire

aujour-

d'hui trop oublié de l'auteur arabe. Nicolas voulait

morceler chacun des deux livres in et V et en dissé-

miner les paragraphes par toute la Métaphysique

Dans laPhysique, disait-il, Aristote ne discute les problèmes

quesoulève

chaque sujet qu'au moment où cesujet

se présente

il fautrépartir

de même toutes lesquestions

du III' livre entre

les livres suivants de laMétaphysique.

De même aussi il neplaçait

la classification des sens

de chaque notion scientifique qu'à l'endroit où arrivait

l'étude approfondie de la notion en elle-même~. Cet

arrangement ne peut être admis dans aucune hypo-

thèse. Nicolas de Damas a-t-il voulu dire que c'était la

disposition adoptée par Aristote et changée après lui?

Cela serait en contradiction avec plusieurs passages de

la Métaphysique, où le IIP livre est cité sous le titre

Averr. in Metaphys. HI (Arist.et Averr.

Opp. Vil), f. t8 a *Ni

colaus autem ordinavit sermonem contra illud quodfecit Aristoteles

in istis duabus intentionibus, scilicet quod ordinavit eam eum)

secundum quod fecit Aristoteles in scientia naturaii.'–In tibr. V.

f. 4? b: tEtcum hoc latuit Nico!amn,videbit (t~. credidit) quod

melior ordo est in bac scientia exponere nomenapud

considerationem

de intentione illius nominis, non utponatur pars

istius scientMB per se;

sicut latuit illum dispositioet ordo sermonum logicorum.

Nous

recueillerons ailleurs ce quel'on sait sur tes écrits de Nicolas de

Damas.

Page 105: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE II, CHAPITRE III. 95

J'MtTN.ou J~ncp~Ttt et le V* sous celui de lYtp~

7~ 7!cet%Mc~t~~Mfw~, comme formant chacun un tout

complet et séparé. La pensée de Nicolas était-elle seule-

ment qu'Aristote eût mieux fait de les diviser, et quela Métaphysique y eût gagné ? Nous répondrons avec

Averroës, en nous réservant de le prouver plus loin,

que la constitution actuelle de ces deux livres, et sur-

tout du HP, est infiniment meilleure et plus justedans l'esprit de la philosophie et de la méthode aris-

totélique. C'est tout ce qui nous importe ici.

Les livres VI, VII VIII et IX se suivent parfaite-

ment. Le VI* livre reprend le sujet traité dans la

première partie du IV", pour l'élever à un nouveau

point de vue: dans le IVe, la philosophie première a

été identifiée avec la science de l'être en tantqu'être

maintenant l'être en tant qu'être est identifié avec

l'êtresupérieur à la nature et au mouvement, avec

Dieu, et la philosophie première avec lathéologie.

Mais pour arriver à l'être par excellence, il faut en

trouver d'abord la caractéristique, afm de le re-

connaître entre tous. D'où, division de l'être en ses

quatre espèces fondamentales t° être par accident;

2° être en soi 3° être selon les catégories 4" être, en

tantqu'identique avec le vrai, et opposé au faux

comme au non-être. Aristote exclut d'abord l'accident

et le vrai; puis il passe à l'être selon h.s catégories,

~<ap~.ïV,M,6A.t.a;XUI,H. 259, i.3i; x, 987, M.

Mehy~. VI, sub fin.; VIII, :n:t.; X, init.

Page 106: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

94 PARTIE t.–INTRODUCTION.

et en dégage iacatégorie suprême de l'essence.

o~<n<&, ou de l'être en tant qu'être, qui n'est autre

chose que l'être en soi.

Le VIF livre traite de l'être ou de l'essence. Aris-

tote endistingue encore quatre sortes l'essence pro-

prement dite, ou la forme; la matière; le devenir

dans l'existence et dans la pensée, enfin l'universel,

et il les considère successivement. La conclusion

du livre, c'est que le véritable être n'est pas l'uni

versel, ni la matière, ni tout ce qui est sujet au

devenir, mais le principe de tout devenir, de toute

existence et de toute science, la forme l'être simple

absolu.

Le ViH* livre résume d'abord les résultats précé-

demment obtenus, et commence une théorie nou-

velle. On a trouvé qu'il y a trois sortes d'être pro-

prement dit ie concret, la matière et la forme.

Maintenant la matière est identifiée avec la puissance

et la forme avec l'acte le concret est l'être passant

de la puissance à l'acte, et c'est dans acte qu'il a son

unité. D'où unité de la défmition comme du défini.

de l'objet comme de la connaissance.

Le ÏX* livre est consacré au développement des

idées de puissance et d'acte. Le mouvement, qui en

est l'intermédiaire, mène le monde et en même temps

la pensée du philosophe à l'être absolument actuel

et immobile. Enfin, Aristote élève défmitivementcet

1

être absolu et simple au-dessus de ce qu'on appelle

Page 107: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE HL 95

le vrai le vrai n'a d'existence que dans la combinai-

son de la pensée.

Ici nous nous trouvons arrêtés encore une fois.

Le Xe livre, pour la plus grande partie, est un traité

étendu sur l'un et sur l'opposition de l'un et du multiple.

Des considérations sur ce sujet ne seraient pas dépla-

cées, il est vrai Aristote avait mis au nombre des

plus importants problèmes la question du véritable

rapport de l'être et de l'un, que certaines écoles iden-

tifiaient. Mais cette question est ici dépassée de trop

loin, et le X* livre, dans son développement, forme

un véritable épisode. Nous le considérons comme une

étude qui devait être fondue dans la Métaphysique,

et qui n'a pas subi cette opération~. De plus, après la

conclusion de toute la discussion, savoir que l'unité

ne présente avec la multitude qu'une opposition de

relation, celle de la mesure au mesuré, et non pas,

comme le prétendaient les Platoniciens et les Pytha-

goriciens, une opposition de contrariété, nous trou-

vons (c. vn-x) une dissertation sur la contrariété et sur

les espèces de l'opposition 2, qui est encore plus mani-

festement épisodique et qu'il faut bien éliminer du pian

Ce nepent être, comme le croit Bulile (De Mr. Arist.

MrJ.t,

leHep! ~~M~ menticnné par Diogene

de Laërte. La fMi~ n'est

qu'une des quatre sortes d'unités qu'Aristote considère; voy. to3,

'9;cfl Itl, 56, t. 5; XIII, 28:, t. t9, etc. Le vrai titre de !a pre-

mièrepartie du X. livre serait Uep< A'M, dont

Uep< ~of<Mo< n'est

point du toutsynonyme.

C'en peuKtre te Uep< ~Mtft~f de Diogène de Laêrte.

Page 108: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

96 PARTIE !.–INTRODUCTION.

général de l'ouvrage, de quelque intérêtIntrinsèqof

qu'elle puisse être. Remarquons que toute cette fin

manque dans le commentaire de Michel d'Éphëse.

Si le X" livre fait perdre de vue l'enchaînement de

laMétaphysique, le XIe le rompt absolument. Ce

livre est composé de deux parties très-distinctes, dont

la première est un abrégé des livres ÏII, IV et VI de la

Métaphysique et la seconde un abrégé des IIP et

et V* livres de la Physique 2 et les douze chapitres

dont se composent ces deux parties ne font pas faire

un pas de plus dans laphilosophie première. D'un

autre côté, il est évident, à la première lecture, que

ce n'est pas, comme le commencement du VHP livre,

un simple résumé qui prépare à une nouvelle re-

cherche c'est une rédaction différente d'une partie

de la Métaphysique, augmentée d'une rédaction nou-

velle d'une partie de la Physique. Il est impossible

de supposer avec Titze~ que le tout ne soit autre

chose que le II* livre dufitp~ ~Ao~p/ete la seconde

partie appartient, comme nous venons de le dire,

à la science de la nature; et quant à la première,

elle ne peut pas non plus se rapporter à ce que nous

savons du second livre du ne~ ~Ao~/eec. On pom

rait ajouter que dans ce dernier ouvrage la philoso

phie première n'avait pas encore d'autre dénomina-

C. t. n, cK Ht, Ht, tv, v. xt; cf. IV, vu; cf. Vî.

C. TH, vn!, tx, x, xt, xn.

Pe~irMtot. Opp.ser. et ~M<. p. 8:.

Page 109: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE TIL 97

7

tion quecelle de p~o'nxp/ft qui

formait le titre de l'ou-

vrage.tandis

quedans le XP livre de la

Métaphy-

sique,on trouve l'expression spécifique

etprécise

de

'!MMW ~ao~& Mais surtout lapremière partie

du

\P livre a bien l'air d' résumé et nonpas

d'une

ébauche des livres Hï, IV et VI de laMétaphysique.

Plusieurs passagesont sur les

passages correspon-

dants de ces livres une supériorité dans l'expression

et même dans les idées, quine

peuventêtre

quele

si~ne d'une rénexion plus profonde, d'une condensa-

tion ultérieure de la pensée~. Nous croyons donc

pouvoirconsidérer les huit

premiers chapitresdu

\P livre comme une seconde rédaction de trois livres

de laMétaphysique, qui

n'était pas pourcela desti-

ncc& remplacer

lapremière,

maispeut-être

a servir

C. IV, 2t8,t. 23.

Ainsi, p. 2t3, t. 3-11; 215, t. 18-25. questions importantes

omises dans le In' livre; celle qui est posée p. 9t5 l'est aussi dans !e

Vtr. p..57. i. 7. et le YIH'. p. t73. t. t.–Dans le m'livre (p. 7;).

Ltg), la doctrine de la mutabilité insaisissable de ta natHre est ré-

futéepar cette distinction <que les choses changent en quantité,

mais nonpas en qualité; dans le XI'

(p. 2 23, t. 8),Aristote fait voir, en

ajoutant un mot, toute la portée de cette distinction « Laquatité, c'est

essence qui détermine l'être; laquantité

n'est que t indéfini, etc.

– !Je même, dans le VF livre Aristote a ditque

« laphilosophie prc

mi&re n'apas pour objet le vrai et le faux, qui

ne sont que dans la

combinaison de lapensée;'

dans le XI* (p. 328, t. 26), est ajoutée

cette belle tbrmute: < l'objet de la philosophie première est rctrc<]fM:

est

"!<!fAor! dela pensée, T~ ~ë~ ~f xot

~<Hp«T7of." Voy. aussi le passage

< vient ensuite sur te hasard et la pensée. – On pourrait {aci'c-

'"cntpousser plus loin cette comparaison.

Page 110: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

98 PARTIEL–INTRODUCTION.

de base à un nouveau cours sur la science de t'être.

En l'intercalant dans laMétaphysique, immédiate

ment avant les derniers livres, où commence un non

vêt ordre de considérations, on aura cru pouvoir y

joindre le fragment dephysique qui forme les quatre

derniers chapitres, et dont le commencement a d.

l'analogie avec le IX" livre de laMétaphysique.

C'est dans les trois derniers livres que l'on touche

entm le but de la philosophie première, la thco

rie de l'être immobile et Immatériel le XIf livre

contient cette théorie ou science de Dieu; le XIÏÎ

et le XIVe renferment la réfutation des doctrines

des Platoniciens et des Pythagoriciens sur les autres

êtres immobiles et immatériels qu'ils prétendaient éta

blir, c'est-à-dire, les idées et les nombres. Mais cc~

trois livres doivent-ils rester entre eux dans l'ordn

où l'antiquité nous les a transmis? ou ne doit-on pas

renvoyer à la fin celui qui est maintenant en tête des

deux autres ? Le premier qui proposa cette correction

fut Scayno l'ingénieux auteur des dissertations sur la

Politique d'Aristote; Samuel Petit, Buhle.Titze l'ont

adoptée, et il est dimcile de ne pas l'admettre avec

eux. De l'aveu même des commentateurs anciens, le

livre XJI est incontestablement la conclusion de la

Métaphysique, seulement ils ont considéré les do).\

autres livres comme formant une sorte d'appendice

P«t-a~tr<M. <M irMhtf. MirM Jf rrfm.f~~Mo~M ~):jji;j. j\

')) f), (' '<)-t

Page 111: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LtVRE H, CHAPITRE !U. 9<)

Atexandre d'Aphrodisée tondait cette opinion sur <'<'

queces deux livres «ne contenaient que des doutes,

des réfutations, de la critique, et point de dogma-

tique'.a Mais, sans parler de l'inexactitude de cette

assertion, Aristote ne place-t-il pas toujours l'examen

des opinions de ses devanciers avant l'exposition de sa

propre doctrine? Ne donne-t-il même pas cette marche

comme la seule rationnelle, et n'en fait-il pas un des

principes de sa méthode~? C'est donc précisément

parce qu'un livre a un caractèrecritique et négatit.

([u'i! doit venir avant la spéculation et l'enseignement

positif Ainsi la remarque d'Alexandre d'Aphrodisée

<onduit à une conséquence tout opposée à celle qu'il

en tire, et prouve l'opinion de Scayno. Cette preuve, qui

serait sumsante dans sa généralité, reçoit ici une con

tirmation directe de la seconde phrase du XÏM" livre

Averr. inJMe<<u)tv<.

f. t35 a *A)exaHder igitur in banc dictio

tcm exorsus, inqu!t: quod haec dictio descripta per Uteram Lamech.

'scitteet t z*litera alphabeti), continet, est ultimum hujus scientia; et

finis. tn ams enim dictionibus dubitationes et earumdem solutiones

'tadidit; quod ipse in his quae deinceps sunt duabus d!ction!bu9 ad-

'mpiettt. DtMenamque sequentes dictiones nthit primaria intentione

"Mettant, nec quicquam propriis rationibus demonstrant; sed nihi[

'ud quam eorum qui entium principia formas numerosque statunnt.

~ntentiam re&Here motiunhtr.

Jtfta~ t.tu, to, 2 et sqq.,Rrand. Jp )n<m. l, n, ini) <[

~))H. Voy. plus bas, partie HL

P. ~58, 20, Brand. Ëtre< <rxe~« e<r7<~t<!Tep«f

~<r7t w ~tp~

~M ~<~T<[t ojt~af <u[~M)TOt xc~ tM<o: «ux ~<r7<, )f~t el ~<r7) T« f'

S~tSTOf TtOtt(M TMf A~&'tt ~f~0tte«<! ~MpttTCf)'

Page 112: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

100 PARTIE L- INTRODUCTION.

Puisque le but de notre recherche est de savoir s'il y a au

non outre les êtres qui tombent sous les sens, quelqu'être humobile et éternel, et s'iien existe, quel il est, il faut considérerd'abord ce qui a été dit par les autres, etc.

En outre, plusieurs passages des livres précédents, ou

Aristote annonce une discussion approfondie sur la

nature des idées, des nombres et des objets des ma-

thématiques engénéral', prouvent que la

polémique

qui est contenue dans les XIIP et XtV livres devait

faire partie intégrante de laMétaphysique. Enfin )<'

XIII* livre, par son début, se rattache immédiatement i

aux livres VII, VIII et IX, tandis que nous ne trou

vons pas dans le XIIP ni dans le XIV une seule aliu

sion au contenu du XIP.

Cependant l'autorité seule de la tradition mérita

qu'on ne la rejette pas sans rechercher d'où eHc

est venue, sans faire voir ce qui la justifie ou l'ex-

plique du moins. C'est ici que nous trouvons une

réserve à mettre au changement que nous sommes

obligés de faire dans l'ordre des trois derniers livres.

Nous avons rétabli avec Scayno ladisposition conçue

et voulue par l'auteur mais l'ordre vulgaire repré-sentait celui dans lequel Aristote avait écrit les XIIP

et XÏV* livres sont d'une date postérieure au XIP, et la

VI, t. t22. L 25, Br. ÂXX' &r7t )t~ fM~~Tf~ S-M~TtX))<tXX' el c~Mtï&w «<M

~&)p«!T<B~ &T?<, )w <Mt)~. Vtîf, t, t65, )3

tie~ d6 Mtf Me~f fM~~fMTM~ ~7epot' <r«e~ot.- ~apct yo;pT~

<~<TM Ot!~M T~TOtt ~~<~<T/ T<fM e!fat.

Page 113: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE H!. 101

tradition conservait en quelque sorte l'ordre chronolo

giquc aux dépensde l'ordre

méthodique.Le motif prin-

cipal quinous

paraîtautoriser cette

hypothèse,c'est

quele XIT livre ne

présenteaucune allusion véritable

auxXÏÏI" et XIVe livres', où se trouventcependant

Scayno,il est vrai, prétend démontrer le contraire; mais ses ar-

gumentsne nous paraissent pas suitisants. 1° Selon lui, dans cette

phrasedu XHt* tivre (p. 287, z3) E< tsèv yap Tts ft~ -9i<<ret TM ou-

T<K eI~M xe~&MM~SMM,!t<t< TOf TpOKOf TOUTOt) râs ~~yeTOt Ta xa6'

~<~7a T<Bf ~fTMf~afMo~et T~f oJc/ay, f&î ~ouXo(tE0a Myetf, les der-

niers mots annoncent le XII* livre; mais si nous retrouvons dans ie

XH* la pensée générale quecette

phrase exprime (XII, a 43, 1. B~;

~45, 1. 6, i4), et qui est partout dans la Métaphysique (par M. VIII,

t5~, 1.ti),

nousn'y trouvons pas

la démonstrationque Scayno croit

toir annoncée dans <tfa<p!(<rE<M: j3ou~ofte0a Xeye<f. Elle serait plu-

tôt dans les I" et Hl' livres. Si donc j3o~o~e9a[ indiquait ici un fu-

tur, cela tournerait en faveur de notrehypothèse.

a°Dans le XIV* livre

(c. n, 29~, L s3), ditScayno,

le ~f est divisé en trois sortes,

<) dans le XÏP (p. s4i, t3) il ya une allusion à cette division

commedéjà connue. Il est vrai que cette division n'est nettement

(brmutéeque

dans le XIV* livre de la Métaphysique; mais elle est

déjà enpuissance

etpresque exprimée dans la division

correspondante

de t'être au V* livre et surtout au VU' (p. 28, 1. 5, cf. 204, l. t3-4

['. t28, 1. 9, cf. 294, 1. 25-6). –3° Il est dit dans le XHr livre

(p. 265, t. aa), sur la question de savoir si le bon et le beau sontpour

quelque chose dans les mathématiquesMtt~of yfMp~MM ~~o«

cep! <n!Mw ~poC~et;, Scayno croit trouver cette question résolue aH!r

mativement au vie chapitre du XIIe livre(p. a48, t5)

Ôit s<fT< ïo

0~ &'eM & rois <!)MM!ïo<e t! &<pe<TM J~o?. Mais cepassage,

entendu

«'mme t'entend Scayno, serait en contradiction formelle avec d'autres

j'assages (III, 43, M. 5, t2; XIII, p. a65, <- t ') H signifienon

pas

que fimmobile a une fin, mais que la fin, à laquelletend seul le mo-

bile, est eHe-même du nombre des choses immobites. DaHicurs ef

MAeM neptHtMMt~s'apptiqucr

au XH* ti~tc (voy ptus haut, p.oo,

Page 114: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

102 PARTIE 1. INTRODUCTION.

des déterminations de la plus haute importance pour h<

théorie qui se résume à la fois et s'achève dans le XIP.

ie XIP continue et termine la chaîne des livres VI

VII, VIII et IX, que le XIIP continue aussi cependant n'est-ce pas une preuve qu'Aristote rédigea le

XIIP et le XIV plus tard que le XII", et n'eut pas le

temps de fixer ce dernier à sa véritable place, en !<

rattachant aux deux livres qui devaient précéder

C'est ce défaut de liaison du XIV au XIT qui aura

porté les commentateurs anciens à considérer le XIH

et le XIVe comme un appendice ajouté après coup

ils ont senti qu'un simple déplacement ne suffirait pas

pour rétablir entre les trois derniers livres l'encha!

nement et l'harmonie.

Quoi qu'il en soit, le XIIP et le XIV livre sont au

nombre des plus riches, des plus achevés, et même

d'une manière relative, des plus clairs de laMétapbv

sique. Le XIIe est plus embarrassant; Michel d'Éphèst

va jusqu'à dire '< Tout ce que renferme ce livre est

plein de confusion aucun ordre, aucune suite n'y est

observée, a H en cherche la raison dans l'obscurité

dont l'auteur auraitenveloppé &dessein sa pensée; sup

position favorite des commentateurs de cette époque

et que Themistius, Ammonius, Simplicius, Philopo'~

n. <). Ce renvoi se rapporte pcut~tre au nep< «t~oStque

nous n a~c"

p!us, mais non)<as

au ttept rou x~oS rnmn)'' )< pense Sant P't't

.WMr<*M. tV. xm; ttfpt Tôt; ttofX~C signif)'~ f~ ~on~tn ptutôt qor<

nH~r~Mt 1

Page 115: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

UVME H. CHAPtTKE Ili. 105

(t-nétcnta satiété Sans s'arrêter a la rétutct, il est ia

tde de voir, pour le XH" livre du moins. qu'il n'est

"ufrc obscur que parce qu'il est incomplet et encore

dans l'enveloppement d'une œuvre inachevée. Les

;)tx premiers chapitres peuvent être considérés comme

xn résumé de toute la doctrine d'Aristote sur la na-

tm'e et les rapports des principes constitutifs du monde

sensible, résuma rapide où les idées sont à la fois

resserrées et approfondies. Le vu" et le vnr' chapitre

comprennentla théorie du premier moteur, ou Dieu, >

el de son rapport avec le monde, et enfin de la na

turc de Dieu et de la pensée divine, le )x" contient

l'examen de questions importantes sur la nature de la

j)cnsée absoiue: enfin le tout se termine par une rc-

apitutation des objections qui détruisent les systèmes

mxquets i'aristotétisme vient se substituer. Dans !e

mr~ chapitre il ya une grave dinnutté le dogme

~ui couronne la théologie d'Aristote, est l'unité du

«totcur immobile et éternel or, dans ce chapitre,

~c trouve une théorielonguement déduite, selon

t.!quctte à chaque sphèrecéteste unespondrait tait

tuoteur immobite et éternel. Comment concilier c<'h

'icux doctrines L'antiquité ne s en est pas mise

en peine elle attribue à \ristote t hypothèse dunt

hiérarchie de dieux ré~mateurs dta mouvcmenk Ct

<<'stes; hypothèse toute (!:m. t< nttn< )<\()ta~"t')<)''tt

MichEntiCA

m~<<U!/)'<.

\i) ft. )h(it<t'.t P«tft~hi<t! .4<"<.)).1.

~FM f, ) ,); ~t)ttt)nn. toi <«<< ~f '-tt" f. <)< 't'

Page 116: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

10~ PARTIEL–INTRODUCTION.

et platonicien, et qui répugne absolument à la philo-

sophie péripatéticienne mais l'antiquité n'est pas le

temps de la critique. Au contraire, la contradiction

manifeste du XIIe livre avec lui-même a frappé à tel

point des savants modernes', qu'ils ont rejeté le livre

tout entier comme apocryphe; résolution un peu té-

méraire pour un livre qui porte d'ailleurs tant de

signes évidents d'authenticité, qui forme la clef de

la Métaphysique, et qui n'a pu être conçu et écrit que

par Aristote ou mi plus grand qu'Aristote.

La difEculté peut se résoudre en considérant le

XII* livre comme inachevé. Tout le passage où il est

question de la pluralité des moteurs immobiles n'est,

selon nous, qu'une hypothèse qu'Aristote propose un

instant~ et qu'il entoure de tous les arguments dont

elle pourrait s'appuyer, afin d'y substituer Immédiate

ment la vraie doctrine, la doctrine de l'unité~. Seu-

lcment il s'est contenté d'exposer la première théorie.

sans la faire précéder ou suivre d'unjugement en

forme, qui servît à distinguer clairement ce qu'il re-

jetait de ce qu'il voulait établir; c'est ce qu'il eût fait

sans doute en mettant la dernière main à son ouvrage

Buhte, Vater, L. Ideler.

De même, cettehypothèse (p. a53, t. 20) E< yatp

ro<~p<w

rc~

~epo(<~fou x'f"" ~s, hypothèse contraire à la doctrine d'Aristotf.

selon laquellec'est le moteur qui est !a cause finale du mobile.

P. 253. 27 ~ï' M! o<!pafo:~afepof. ocra aptSftM croA~

fA)t!' ~<&' <!p<t «M Xoy%) )tf!<

jpf0~ To ~peSrof tHfOMf a<~<;w

tt.T.À.

Page 117: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE Hi. !05

Nous voyons aussi par un passage de la Morale 1

qu'Aristote se proposait de traiter dans laMétaphy-

sique la question de la Providence; il ne l'a pas fait.

Enfin il est facile <!<*voir combien est incompléte-

ment traitée, dans le XIIe livre, la question fonda-

mentale de la nature de la pensée. Tout ce livre, en

un mot, qui roule sur les points les plus importants

de la philosophie, est bien loin du développement

qu'il devait atteindre.

Nous terminerons en concluant que la Métaphy-

sique en général doit être considérée comme un ou-

vrage authentique, un dans son plan, conçu et exé-

cuté d'ensemble mais que cet ouvrage est demeuré

imparfait et a subi après Aristote des remaniements

qui en ont changé l'ordre en quelques parties; que

l'on y a même intercalé des fragments et des livres

entiers qui ne se rapportaient pas à la philosophie

première, ou qui n'en devaient être que les prolégo-

mènes, ou enfin qui iioffrent-qu'une seconde rédac-

tion de quelques-uns des livres précédents. Le but

de toutes nos recherches était la restitution du vé-

ritable plan de la Métaphysique, problème difficile,

dont nous ne nous flattons pas d'avoir trouvé une

solution complète et dénnitive. Nous ne donnons

pas nos conjectures pour des démonstrations né-

cessaires

NA. Afc<MM. t, )\. Cf. Eustrat. ad h. tue

Page 118: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

i06 PARTIE !.–tNTRODL!CTtO~

To)'~< «y<t~)tcuo~ <t<pt«r6&' TO~~~07~0~ A~e~

Cependant les résultats auxquels nous venons d<

parvenir nous semblent amenés à un assez haut d<-

gré de probabilité pour servir de base al'analyse

de la Métaphysique.

Ainsi, en tête de l'ouvrage, nous mettrons le n~<

TMf-m~&ic ~e~MfSf ( V livre), en le considérant, ainsi

que nous l'avons dit, comme une sorte de traité préli-

minaire dont Aristote suppose la connaissance, ou au-

quel il se réiere expressément dans tout le cours de

la Métaphysique. Nous renverrons Kz ~<xT?of (II" livre) ')

dans mie note à la suite du 1er livre de la sorte il

ne rompra plus l'enchaînement de celui-ci avec i<

UF. Nous négligerons, pour les raisons que nous

avons exposées, l'analyse du XP en nous contentant

d'en relever, soit dans le texte, soit en note, mais

sans préjudice de nos conclusions, quelques passages

remarquables. Quant aux premiers chapitres du

Xe livre, bien qu'ils se rattachent mal à la Métaphy

sique, nous avons dit qu'on ne peut les en exclure

puisqu'ils devaient sans doute y être fondus en tout

ou en partie. Nous les laisserons au lieu qu'ils occu

peut, faute de pouvoir enassigner un plus convc

nable mais nous renverrons en note un court extrait

des quatre derniers chapitres. Nous placerons les XIII'

et XtV* livres avant le Xi! Ënun, il adanslcl"livt<

~ri~t.t/f<«~<t. \ii.

Page 119: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H. CHAPITRE Hi. ~7

un long passage sur la théorie des idées, qui est re-

produitau XIIP en des termes presque constamment

identiques Nous n'en ferons l'analyse qu'au XIIPlivre.

on l'histoire et la critique de lamétaphysique plato-

nicienne forment comme un traité à part, complet et

approfondi.

Dans notre exposition en général, nous nous enbr

cerons de reproduire non pas seulement la substance

et le fond des idées, mais le mouvement même de la

pensée, la méthode, en un mot, la manière de l'au-

teur autant que sa doctrine. Il nous faudra donc en-

trer quelquefois dans des développements qui feront

de notre analyse une véritable traduction

L. t, va, 28. t. 9; 3o. L 29; XIII, 266, t. aA; p. 269. t. 25

Principalement dans le t" et dans le XH* livre.

Page 120: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson
Page 121: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DEUXIEME PARTIE.

ANALYSE DE LA MÉTAPHYSIQUE.

Page 122: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson
Page 123: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DEUXIÈME PARTIE.

A\ALYSE DE LAMÉTAPHYSIQUE.

fi"; 1; "xX; .{, (Ve livre)1.n~<

T&)f'srcfot~Mf At~c~'M~ (V tivre)

Le ritp< TrS~!!B<n*~&~t~/MfMf est un traité, en trente

chapitres distincts, sur les diftérentes acceptions destermes philosophiques. Mais ce serait une erreur que

de n'y voir qu'une série de distinctions verbales, ou

même qu'une sorte de nomenclaturescientifique

c'est plutôt une énumération des différents modes,

des faces (~o7nx) que présente chaque chose dans

t'unité du mot qui l'exprime. Les significations de ce

mot y sont classées avec plus ou moins de netteté et

de rigueur, mais toujours sous le point de vue méta-

physique, et enfin expliquées par le sens primitif et

fondamental auquel elles se ramènent.

<' Onappelle principe le point de départ, ce par quoiil faut commencer pour arriver au but, ce dont les

choses sont &ites, ce qui en commence le mouve-

ment et le changement, ce à quoi l'on tend de prête

'ence, ce qui fait le mieux connaître. Ainsi, un ça

actère commun des principes, c'est <m'i!s sont le

De [M <jtM mnAt/<Mï<tHtJ<nM<ur

Page 124: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

112 PARTIE IL–ANALYSE

primitif, selon l'être, le devenir~ou la connaissance. Ils

se divisent en principes externes («c~z) cM~) et prin

cipes internes (~p~<c< cfu~p~uetM). La nature, l'ctc

ment, la pensée, la préférence, l'essence, la fin sont

donc des principes.

« On appelle cause la matière dont une chose se fait,

ou la forme et le modèle, c'est-à-dire la raison de l'es

sence (o ~o~pc TcS 77 ?f t~<t~), ou le principe duchange

ment et du repos, ou la fin lé but. – La cause peut

être négative, agir par son absence même; c'est alors

la privation. Elle peut aussi être accidentelle; ainsi.

dans cette proposition «Polyclète a fait cette statue »,

Polyclète n'est cause que par accident; la cause essen-

tielle, c'est le statuaire. -On peut distinguer dans les

causes six modes opposés deux à deux i" la cause

proprement dite peut être singulière ou générale; a" la

cause accidentelle peut être aussi singulière ou géné-

raie 3° Les causes proprement dites et les causes

accidentelles peuvent être simples ou combinées. En

fin toutes ces divisions sont dominées par celle de la

cause en acte et en puissance la cause en acte com-

menée et unit avec son effet; la cause en puissance

peut le précéder et lui survivre. »

L'analyse de l'~n~Ht n'offre rien de remarquable.

« Cinq sens du mot nature: t° la génération, la

naissance, et dans cette acception, ru de ~ue~ est

long;2° ce dont naissent les choses; 3° la cause du

mouvement primitif de chaque être de ia nature;

Page 125: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 115

8

la matière prochaine, qui était déjà un corps avant

de recevoir sa dernière forme, tandis que la matière

premièren'est rien qu'en puissance. C'est dans la ma-

tière prochaine,dans les éléments, que les anciens

philosophesont cherché la nature des choses 5° la

forme et l'essence, c'est-à-dire aussi la fin du devenir

(~ 7!~oc Wf )*fMtMc), et le principe du mouvement. On

ne parle pas de la nature des choses avant qu'elles aien t

revêtu leur forme. La nature, dans le sens primitif et

fondamental, est donc l'essence des choses qui ont en

pt!es mêmes le principe de leur mouvement*; la ma-' i

tière ne prend le nom de nature qu'en tant qu'elle

peut recevoir la forme.

«On appelle nécessaire 1° ce sans quoi on ne peut

vivre 2° ce sans quoi un bien ou un mal ne pourrait

se faire; 3° la violence, ou ce qui contraint la volonté

et résiste à la persuasion ce qui ne peut être autre-

ment qu'iln* est ainsi les choses éternelles sont d'une

nécessité absolue; toute autre nécessité est dérivée

de celle-là 5° la démonstration, quitire

également

sa nécessité de la nécessité absolue des prémisses.

Hn'y a donc de nécessaire en soi que le simple,

parce que le simple ne peut être que d'une manière~.

Ce qui est étemel et immuable n'est soumis à rien qui

P.92, L

9~ & <~t)t ~<M< <<t< XUp&M ~eyo~f!! Aï?'" OMT&t r~

TM- ~Mt~ t~~f JMM!<te<M & aMTOM <)<

P.94, L 3 ~7e te ~pa~of

xa! xup~ afayKaMf To e~eCt! ~7.

To~w~a e~ Mh«T« ~eotMY<?< ~ye~.

Page 126: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

114 PARTIE IL–ANALYSE

le contraigne et qui aille à l'encontre de sa nature.. l,

Nous omettons l'analyse de l'un, de l'être et de 1 es

sence, que nous retrouverons aux X*.VJ* et VIle livres

« Deux chosesidentiques par accident ne sont iden-

tiques qu'en tant qu'elles sont les accidents du même

sujet. Aussi une identité de ce genre ne peut être gé-néralisée ( de ce que homme et musicien sont iden-

tiques dans Socrate, on ne peut conclure qu'ils soient

universellementidentique ) car l'universel est par

soi et en soi dans les choses, tandis que l'accident n'yest pas en soi, et ne peut qu'être amrmé simplementdes individus 1. Les choses identiques en soi sont

celles dont la matière estidentique en espèce ou en

nombre, et qui ont même essence ainsi l'identité est

l'unité d'une pluralité, n

Suivent les définitions de l'autre, du différent et du

semblable, que nous retrouverons plus approfondies

dans le X* livre nous pouvons donc les omettre ici,

ainsi que celles desquatre espèces d'opposés et surtout

des contraires, pouriesquelles nousrenvoyons encore

au X* livre.

« Une chose est antérieure à une autre, quand elle

est plus près d'un commencement, d'unprincipe de

terminé, soit dans l'ordre de l'existence et de la na-

ture, soit dans le temps, dans l'espace ou dans

mouvement, soit enfin dans l'ordre de la connais-

P. too,i.20 Teyap jMtNoXou MtC* aura~Mpye<, T~ J~ ow<~f&'

woTe o<: <[<t<?'a~e~' ~< T~f MC* &M:<r7a <jM~ ~er<M.

Page 127: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. H5

8.

sance. Ainsi le général précède dans l'ordrelogique,

t

et le particulier dans la sensation'. La même oppo-

<.ition d'antériorité et de postériorité se retrouve entre

la puissance et l'acte. Par exemple, en puissance, la

partie précède le tout; mais en acte, le tout pré-

cède la partie or c'est aussi dans l'ordre logique que

la partie est antérieure au tout ".M1)

Nous omettons la puissance, qui sera sujet d'un

long examen au IX. livre. Disons seulement qu'Aris-

tote ramène ici toutes les acceptions de la puissance

à l'idée du principe (actif ou passif) du mouvement

ou du changement d'une chose en une autre en tant

qu'autre.

Suivent des analyses rapides des troiscatégories de

quantité, qualité et relation nous nous contenterons

encore de renvoyer au traité des Catégories, ïl faut

remarquer cependant qu'Aristote réduit la qualité à

deux modes principaux i ° la dinérence de l'essence

2° la dinérence des mouvements ou l'affection (~eOcc)

des êtres mobiles (physiques) en tant que mobiles.

De ces deux sens même, le premier est le sens primi-

tif et radical.

Le parfait, l'accompli ('y<«ef) est ce en dehors de

P. io3, t. t3 K<tM: ft~ yap TOf Myof T<txctSoXou ~rpoTepa, «Ta

T~ <~o6!t<nf T<i ]MO~)MKT7e.

P. io3, t. 28 Kaïot A!fa(Uf ~oeM Tf!~ <~M x~ vo~op<of

TOt ~ÂOM)te! ); < T~f ojo&tt' X<tT' ~MX~EMf 6'<T?epOf- &<~t;Se"Tsf

)!'p M~~t~eM~e<w &r7<)n.

Page 128: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

116 PARTIE IL–ANALYSE

quoi l'on ne peut plus rien prendre, à quoi il n.

manque rien et qui n'a rien detrop.

« La fin, la limite (~~) est l'extrémité des choses.

la forme de la grandeur et de tout ce qui a de la gran

deur, le but de toute action et de tout mouvement

Lorsque la fin coïncide avec le principe, elle coïncide

aussi avec l'essence c'est le dernier terme de la con.

naissance et par conséquent de la réalité

« Ce en quoi et par quoi est une chose(~6' X) a autant

d'acceptions que la cause. Le en soi en est une fbrn.c.

qui exprime l'essence de l'être auquel onl'applique.

Nous ne donnerons pas l'analyse des termes soi

vants, qui ont moins d'importance, et sur la plupart

desquels Aristote reviendra avec détail dans la Met.)

physique <~0t<n<, e~, 7nt8oc, $-ep<tw, TBt~ff, Te tx 77~,

~~Ct ~ec, <M~cCof.

«Le genre (~fe~) est constitué par la génératio:)continue d'êtres de même forme, ou par le picmier moteur de même forme, ou enfin c'est le suj<'tdes différences quaiificatives qui déterminent les c<

p&ces.

« Le faux, c'est d'abord une chose fausse, c'est:)

dire ce qui ne peut être uni, ce qui se refuse à la syn

thèse, comme cetteproposition le diamètre est cou)

mensurable avec la circonlérence secondemot)

P. m. 1.97 Ôre <j~ Mt < <,?Mt

eeo&t é)tA!'?ot<, «M T< e?t'<M~o!o?~' ï~f yt~ea~ ydpïc~

t~pat' e! <? Tttf y~f5<reMt, To6opt~aTof.

Page 129: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 117

c'est ce qui est, mais qui paraît autre qu'il n'est,

com'ne les illusions dessonges. Une chose est

(Ione fausse ou parce qu'elle n'est pas, ou parce

que l'imagination qu'elle produit est l'imagination

d une chose qui n'est pas. La pensée fausse est la

pensée du non-être en tant que fausse. La pensée

u;ne d'une chose peut être multiple et complexe,

mais celle de l'essence est une la pensée fausse, au

contraire, n'est jamais simplement la pensée d'une

chose C'est donc une simplicité à Antisthène de

croire qu'on ne fait jamais qu'affirme le même du

tncme; d'où il suivrait qu'on ne pourrait jamais rien

contredire, et jamais se tromper. L'homme faux

est celui qui aime le faux et le préfère pour sa fausseté

'nctue. »

Nous ne parlerons pas de l'accident, dont l'examen

termine len~

-n5f Tro<nt~f ~t~t~Nf; on en retrou-

tct'a au Vi*~ivre une analyse plus étendue.

Li~~pW iLIVRE î (A).

« Tous les hommes ont un désir naturel de con-

"aitre; nous aimons, même intérêt &part, lespercep

t'ons de nos sens, surtout celles de la vue, parce que

'est le sens par lequel nous apprenons davantage, et qui

nous montre le plus de différences. Tous les animaux

P. n~. Aoye< ~eu~ Taw M'ïfM' ~euJtM. o de

~~t Myo< o~e~f ~tf cM~ Xoyof.

Page 130: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

118 PARTIE Il-ANALYSE

sont doués de sensation, et plusieurs de mémoire.

ceux qui de plus ont Fouie peuvent apprendre mais

ceux-ci même ne sont guère capables d'expérience

L'homme seul a l'art et le raisonnement la mémoire

lui donne l'expérience l'expérience, l'art et la science.

L'art commence, lorsque de plusieurs notions expé.rimentales se forme une même conception généralesur toutes les choses analogues. L'expérience est donc

la connaissance du particulier, et l'art celle du géné-rail. L'art n'a point d'avantage sur l'expérience pour

l'action, la pratique, car l'action a pour objet le par-

ticulier mais il est supérieur dans l'ordre scienti-

fique l'homme d'expérience ne sait que le fait, le

que (~~r); l'homme d'art sait le pourquoi (-ro J~j

Aussi il peut enseigner, ce qui est le caractère de la

science, de la sagesse (<<e). La sensation ne peut

jamais être science, parce qu'eue ne dit jamais le

pourquoi d'aucune chose. Ainsi la sage.ne est indé-

pendante de l'utilité elle est même d'autant plus haute

qu'elle est moins utile, et elle a pour objet des prin-

cipes, des causes.

«Voyons donc de quelles causes s'occupe la

gesse.

Si nous nous en rapportons à l'opinion générale.

P. 4, i. t3 6 (tef ~tnetp&t TM~ x<tO~)Mt<~7of~7< yM5o<~ ~e re~

Taw <MtOo~o«. – L'art M rapporte au devenir et à faction, ta scie"ct-rtî~, xdômm. I:art se rapporte au devenir et à l'action, la scie,,«

à !*étre. ~m~. pM<. sub 6u Ê<tf~f ~rep! y~e<w, T~w sa!

<ept ïo ~f, ~)n~7~~e.

Page 131: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 119

le sage est celui qui sait tout, sans savoir les choses

particulièresc'est celui qui sait les choses les plus

déciles, et qui peut démontrer avec rigueur; enfin

la science la plus haute est celle qui n'a d'autre but

qu elle-mêmeet la connaissance pure. Or les choses

tes plus difficiles à connaître pour les hommes, ce

sont les plus éloignées des sens, c'est-à-dire, les plus

générales les sciences les plus rigoureuses sont celles

qui remontent aux principes les plus démonstratives,

celles qui considèrent les causes; la science qui se

donne pour fin à soi-même, c'est celle du connaissable

par excellence (~ ~MÀ«~ t!no?a'!Bu), c'est-à-dire, du

primitif et de la cause enfin, la science souveraine,

c'est celle du but et de la fin des êtres, qui est le bien

danschaque chose, et dans toute la nature le bien

absolu. Cette science est la seule libre, puisque seule

elle n'est qu'à cause d'elle-même elle est donc la

moins utile, et, par cela même, la plus excellente

de toutes les sciences C'est à la fois la science

la plus divine, comme dit Simonide, et celle qui

considère les choses les plus divines et Dieu lui-

même.

L'ignorant s'étonne que les choses soient comme

elles sont, et cet étonnement est le commence

ment de la science; le sage s'étonnerait au con-

P. 8, t. t4 A~y (~t<f) <&<fMM~ e~6«<~Mf oB<Mtf wf etno7t)

t~. Cf. îH {B}, 44. 3. – P. 9. ÂM~moMpat fMt. <~ ~t.

!T'M, t~Mtt O~ft~t.

Page 132: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

120 PARTIE!–ANALYSE

traire que les choses fussent autres qu'il ne les sait 1.

« Lasagesse est donc la science des causes or les

causes sont de quatre sortes Y" l'essence, ce quc

chaque chose est selon l'être; 2° la matière, le su-

jet 3" la cause du mouvement; A" la fin, le bien, qui

est l'opposé de la cause du mouvement. Bien que

ce sujet ait été suffisamment traité dans la Physique,

il faut y revenir en examinant les opinions des philo.

sophes qui nous ont précédés, afin de vérifier par ce

contrôle l'exactitude de rénumération que nous vc

nons de reproduire.

«La plupart des premiers philosophes ont consi-

déré comme les seules causes des êtres celles qui

rentrent sous la raison .de matière, c'est-à-dire ce

dont tout vient et en quoi tout se résout, la substance

qui dure sous la variété des formes. Thalès, qui com-

mence cette philosophie, prit l'eau pour principe

universel, comme les anciens théologiens, qui don-

nent à l'Océan et à Téthys le nom de pères de toute

chose, et font jurer les Dieux parleStyx. Hippon ne

mérite pas de mention. Anaximène etDiogène prirent

pour principe l'air; Hippasus et Héraclite, le feu.

Empédocle compte quatre éléments, en ajoutant la

terre aux trois autres dont nous venons de parler.

Platon avait dit (in T~~et. p. t55 d.) M<&«~7<ty<~ ~<Xo<jo~

zoûso zô ~os, 'tô :3auteai~eavs 0';y3~ IfÀÀ7I iPX4 etxoa0elas œunl.

Platon montre comment la o<! y~p ~XXt; <ip~ ~o<M~M i'utt;P!aton montre comment !a phitosophiese commence c!)e mcn~,

Aristote, comment elle s achevé.

Page 133: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 121

Anaxagore, qui vient avant bmpedocie selon letemps,

mais dont la pensée semble appartenir à un âge pos-

térieur', admit un nombre infini de principes, de

parties similaires, dont l'agrégation ou la séparation

constituent seules pour chaque chosehomogène la

génération et la corruption.

« Mais la route s'ouvrait d'elle-même devant eux,

et il leur fallut bientôt chercher plus loin. Quelle est

la raison de la naissance et de la mort ? le sujet ne se

change pas lui-même il faut donc admettre une se-

conde cause, celle que nous avons appelée le prin-

cipe du mouvement. Les premiers, qui avaient dit

qu'il n'y a qu'un élément, ne s'étaient pas fait cette

duïiculté. D'un autre côté, quelques-uns de ceux qui

proclamèrent l'unité, succombant pour ainsi dire sous

la question qu'ils avaient soulevée, dirent que l'an

est immobile, et par conséquent aussi toute la nature.

Ceux au contraire qui admettaient la pluralité et l'op-

position des principes purent trouver dans l'un d'eux,

par exemple dans le feu, un principe de mouvement;mais une pareille cause ne pouvait suCSre, et pourtant

il n'était pas possible d'attribuer au hasard une si

grande et si belle chose que l'univers. Aussi quand un

homme vint à dire qu'il y a dans la nature comme

chez les animaux une intelligence cause de l'ordre du

monde, il sembla qu'il fût seul en son bon sens, et

P. tt, t. t8 T)9(t~f )~X«~[ tTpOTepMtSf TOUTOUj fois: J' &)TO<f

!~7EpM.

Page 134: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

122 PARTIE !–ANALYSE

que les autres n'eussent fait que divaguer'. Ce fxt

Auaxagore, on le sait, qui toucha cet ordre de consi

dérations mais on dit qu'Hermotime de Clazomène

en avait parlé avant lui. Déjà Hésiode et Parménide

avaient fait de l'amour un principe actif; Empédocle,

frappé de l'opposition du bien et du mal, avait voulu

en trouver les principes dans l'amitié et la discorde

(~<~<<t, ft?<Mc).

« Ainsi jusque-là la philosophie a reconnu deux

causes, la matière et le principe moteur; mais elle

n'en a parlé que d'une manière vague et obscure.

comme des gens mal exercés peuvent dans un combnt

frapper parfois de beaux coups, mais sans avoir la

science de ce qu'ils font. Anaxagore se sert de l'intelli

gence comme d'une machine pour former son univers;

il la met en avant quand il ne sait à quelle autre cause

recourir. Empédocle fait plus d'usage de ses prin

cipes,mais non sans tomber dans de fréquentes cou-

traditions on voit souvent chez lui la discorde unh

et l'amitié désunir. Leucippe et Démocrite prirent

pour éléments le plein et le vide, qu'ils appelaient

l'être et le non-être de même que d'autres avaient

tiré les êtres d'une matière unique et de ses modifica-

tions, ils firent tout résulter des propriétés du plein

et du vide, savoir de la figure, de l'ordre et de la pu

sition. Mais d'ou et comment les êtres ont-ils le mou

P. t3. t. t 0!of ftf~Mf ~W <Mp' EMp X~OfTM TOÙ< ~pdtepOt

Page 135: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 125

vement, c'est une question qu'i!s négligèrent comme

l'avaient négligée leurs devanciers.

«Dans le même temps que tous ces philosophes,

et avant eux, les Pythagoriciens, nourris dans les ma-

thématiques, pensèrent que les principes de cette

science devaient être aussi les principes de toutes les

autres choses, ils virent dans les nombres les causes

universelles. Les réalités n'ont-elles pas plus de res-

semblance avec les nombres qu'avec la terre ou le

teu? Les nombres ne contiennent-ils pas les raisons

de l'harmonie ? ennn ne précèdent-Ils pas toutes choses ?a

Les principes des nombres sont le pair et l'impair,

le premier fini et le second innni à eux deux ils

forment l'unité, et de l'unité provient le nombre.

D'autres énumèrent dix principes dont chacun a son

contraire. Alcméon de Crotone se contente de parta-

ger toutes choses en une double série de contraires,

sans en assigner un nombre déterminé. Mais, en gé-

néral, les Pythagoriciens sont de ceux qui pensent

que les principes sent des contraires.

Quant à ceux qui ont dit que le tout est un (les

Eléates), ce n'est pas ici le lieu de discuter leurs opi-

nions avec détail, car ils parlent à peine de prin-

cipes et de causes; d'ailleurs, Xénophane et Melis-

sus sont par trop simples. Le premier, promenant

sesregards sur l'ensemble du monde, se contenta de

dire que Dieu est l'un, sans déterminer la nature de

cette unité Melissus établit une unité de matière et

Page 136: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

124 PARTIE H.–ANALYSE

d'infini. Parménide vit plus loin c'est de ce qu'il ne

peut rien y avoir hors de l'être, qu'il conclut que l'être

est un. Mais outre cette unité rationnelle, forcé d'ad-

mettre la pluralité sensible, il y reconnut comme

principes le chaud et le froid, qu'il rapporta, dans

leur opposition, à l'être et au non-être.

«Ainsi, encore une fois, jusqu'à l'école italique, la

philosophie avait reconnu deux principes,la matière

et le principe du mouvement. Les Pythagoriciensles

reconnurent également, en faisant de l'Infini, du fini

et de l'unité le fond même des choses; en outre ils

songèrent à l'essence, à la forme, principe de la défi-

nition mais ils ne considérèrent la définition et l'es-

sence que d'une manière bien superficielle, prenant

pour l'essence le premier caractère que présente

l'objet.

« Après ces théories vint celle de Platon, qui suivit

souventla philosophie italique, et eut aussi ses doctrines

propres. Ami de Cratyle et familier avec les opinions

d'Heraclite, il admit avec euxque

les choses sensibles

sont dans un flux perpétuel, et qu'il ne peut y en avoir

de science. De plus, Socrate avait négligé l'étude de

ta nature pour s'occuper de morale et y chercher i'u-

niversei par la définition. Platon le suivit dans cette

recherche du général, et pensa que la définition ne

porte pas sur les choses sensibles, qui changent per-

pétuelicment et échappent à toute détermination

commune, mais sur les idées des êtres, auxquelles

Page 137: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 125

sont relatives les choses sensibles; ainsi ce serait par

participation que la multitude des objets synonymes

deviendrait homonyme avec les idées Ce que Platon

appelle participation, les Pythagoriciens l'avaient

nommé imitation (~H)o~) il n'y eut que le nom de

changé. En outre, les principes des idées sont le

grand et le petit, qui en sont la matière, et l'un, qui en

est la forme, et par cette participation à l'unité, les

idées s'identifient avec les nombres. D'où il suit que

ies nombres sont les principes des choses, comme

dans la théorie pythagoricienne.

« En résumé, Platon ne s'est servi que de deux

causes, la matière et l'essence il n'a pas su trouver

la cause du mouvement car, de l'aveu des Platoni

ciens, les idées sont plutôt une cause de repos et

dimmohilité.

« Tous les philosophes ont reconnu le principe

matériel, quelques-uns,le principe du mouvement:

par exemple, Empédocle, Anaxagore,Parménide dans

saPhysique; pour l'essence, ~c'est le platonisme qui

en a traité le plus nettement mais quant à la cause

finale, on n'en a parlé que d'une manière accessoire

et accidentelle 2. On a fait de l'intelligence et de

P. 20, L i8 KftTct ft~Ce&f y<tpe!f<M Ta oroXM T<Mf <n<t'<Mt!fta)f

fftM'u~M T<M< e~e<K. Brandis et Bekker retranchent o~ft~Mt, leçon

'ionnéecependant par ta plupart

des manuscrits etpar Alexandre

't'Aphrodisée. C~ Trendelenburg,Platon. de Id. et MM'. doctr. e.t: Aris-

'"<. t~Mtr.(Ltpsue, t§26, in-8*), p.

32 et seqq.

P. aS, 1.15 <M yctp <~X<S<, aX~tt xaTM ou~e~Ko; X~'ou<T<f.

Page 138: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

126 PARTIE II.–ANALYSEaf 11Al'amitié des principes bons par nature; mais nul n

posé le bien en soi, comme but et fin de toute exis

tence et de tout devenir. -Du reste, personne n'a

parlé d'autres causes que de celles dont nous avons

fait l'énumération.

«h nous reste à discuter la valeur dessystèmes.

Ceux qui regardent l'univers comme un, et forme

d'une même matière corporelle et étendue, ne nous

parlent point des choses incorporelles; ensuite, ils

omettent et le principe du mouvement et celui de

l'essence. Enfin, quelle raison donnent-ils pour quetel élément précède tel autre, l'eau la terre, ou l'air le

feu? Le système d'Empédocle est sujet à des objections

semblables de plus, il supprime véritablement le

changement dans la nature outre ses quatre élé-

ménts contraires, il faudrait un sujet qui changeât

d'états en passant d'un contraire à l'autre. Quant à

Anaxagore, s'il est absurde de dire que toutes choses

étaient primitivement mêlées, puisque les essences

différentes ne se mêlent pas ainsi au hasard 1 cepen-

dant, en posant d'un côté l'unité et la simplicité de

l'intelligence, et de l'autre la multitude infmie, dans

le même rapport que nous apercevons entre la forme

P. s5, i. at tM ïo 'EfepMtefCtt r&i ru~ttrt fJyfMoûaf ro

~of. Cette objection, énoncée brièvement, apour base ridée fonda-

mentale <~ lapropriété,

de laspéciucité de toute nature. Cf. XH

a4', t. '4. deAnim. II, H, S t4-'5 (ed. Trendelenburg, t8~,in-8°)

Voyez plus bas, partie !tï.

Page 139: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. t27

et l'indéfini qui n'a pas encore reçu la forme, il a

voulu du moins ce qu'on a dit et fait voir depuis.

« Mais ce qui nous importe surtout, ce sent les opi-

nions de ceux qui ont distingué entre les objets sen-

sibles et les êtres supra-sensibies. Tels sont les Py-

thagoriciens. Quoique leurs principes ne soient pas

pris dans la nature, ils veulent s'en servir pour l'ex-

pliquer. Mais du fini et de l'infini, du pair et de l'im-

pair, comment passer au mouvement, à la génération

et à la corruption, ou même à la pesanteur et à la légè-

reté ? En outre, comment se fait-il que les nombres

qui sont les causes des choses, ne soient autres que

ceux dont le monde est formé ? Platon évite cette

diStculté en distinguant du nombre sensible (««rS~),

mêlé au monde réel, le nombre intelligible ou idéal

(Mo~ Mt/~rjMc), qui est seul doué de causalité.

Ici Aristote passe à l'examen critique de la théorie

de Platon, et cherche à démontrer, t° qu'on ne peut

admettre l'existence des idées; a" que cette hypo-

thèse n'explique pointle monde réel; 3" que l'hy-

pothèse de l'identité des idées avec les nombres

entraîne encore de nouvelles absurdités. Nous ren-

voyons, ainsi que nous en avons prévenu, à l'analyse

du XI! livre.

"Le Platonisme, nous l'avons déjà dit, ne touche

ni la cause du mouvement, ni la cause finale. Pour la

matière, il la voyait dans le grand et le petit respec-

tivement indéterminés, ou dyade indéfinie; mais cette

Page 140: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

128 PARTIE Il. -ANALYSE

dyade est un attribut, une différencemathématiqm

de la matière plutôt que la matière elle-même. Enfin

on n'explique pas même l'essence. On pose, il est vrai,

par l'hypothèse des idées, des essences autres que les

choses sensibles, mais on ne prouve pas que ce soient

les essences mêmes de ces choses. On prétend ran~

ner à l'unité tout ce qui est, mais on ne fait qu'établir

une certaine unité en dehors des objets particuliers;il reste à démontrer

qu'elle est l'unité même de ces

objets or c'est ce qu'on ne pourrait faire qu'en iden

tifiant l'universel avec le genre proprement dit, la

race (~foc), ce qui n'est pas toujours possible'.

« Avant de rechercher les éléments des êtres, il

aurait fallu reconnaître et clas~r toutes les acceptionsde ce terme d'élément. Semeurs, on ne peutrecher-cher les éléments de toute chose car d'abord la

science descendrait à l'infini d'élément en élément,

C'est le sens que je donne à toute cettephrase (p. 33,1.15)

<t(J

Te~MteT~&op e?MM, Je~ ~< a~MUT~ o<! y~erm- yap <~M~

oJ y~T<M ~M 6~, <m' <N?TOT< sis ~C~TOt- 0< TOMO.

el ft)) y~fo~ A&!Bt ïo jt<~<!Xo« e~a<' ToCro J' <f~M a~~o~. Ainsi

onpose l'animal en soi, a~To~o~, ou idée de ranima!, où t'en fait rc

sidsr rnnité de tous les animaux réets; mais on neprouve pas que

rM

animaux lui doivent et en tiennent véritaMement leur unité. La Yf

ritable unité des êtres naturels vivants est, selon Aristote, dans !ctr(

réel qui est leprincipe

de la race, qui seperpétue par

la perpétui'cde la génération, et qui devient

pour la pensée leprincipe

de ta gp')f

ralisation (y~eoCtH, ye<w). Mais il n'en est pas de même pourtoute

espèce d'être; ye~M et MC<tXo« ne sont donc pas nécessairement

identiques (voy. le VÎTlivre).

Cf XIV. 297. 1. 4.

Page 141: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 129

9

c< il faut pourtant quetoute science ait un commen-

remcnt, unprincipe;

en second lieu, onsuppose

ce

ouiest fn

questionen considérant les choses comme

es composés*;enfin, si tout se réduisait a des élé-

ments intelligibles,tels

queles idées, il suivrait de là

que1 on

pourraitconnaître les choses sensibles

par

l'intelligenceseule et sans la sensation 2.

« 11 résulte des recherchesqui précèdent que nos

devanciers ont parlédes

quatre principes,mais d'une

manière obscure et enquelque

sorte enfantine; de

sorteque

l'onpeut

dire en un sensqu'ils

n'en ont

)as parlé.–Revenonsmaintenant aux

questions qui

peuvents'élever sur les

principesen eux-mêmes;

)eut~tre y trouverons-nous les éléments de la solu-

tion desproblèmes

ultérieurs

Ainsi on suppose queles parties précèdent le tout et le consti-

tuentpar composition,

tandis quedans les êtres réets le tout

précède

les parties, quine sont que le résultat de la division du tout. Cette

idée est ici enveloppéesous forme d'exemple (p. 34, t6) Â~c&t-

Tttcaey<tp

<&'w, ~owepx~

<Mp}~<K co~at~ftt' <M~f y<tp To ~a ex

To3 a xe! x<d a ~<t<T~f eTfM, o( T<fe<~Tepo~ <p0o~of ~«r~ e~fM

<'H «J~e Tawy«mp<fMtf.

Cfl VIII (H), 168, 1. a6.

On nepeut s'empêcher

de se rappeter ici Jereproche que Kant

adresse avec raison à Laibnitz, d'avoir réduit le sensible à l'intelli-

pHe, et intellectualisé la sensation.

Livre n (<t).– t. La contemplation

de la vérité est facile en

un sens, et difficile en un autre. Ainsi tous lesphilosophes ont dit

quelque chose de vrai sur la nature, et on pourrait, en le recueiliant.,

former une certainequantité;

mais la part de chacun serait petite. La

cause de la dICScatté de la science n'estpourtant pas dans les

objets,

cHe est en nous-mêmes. La lumière de la vérité absolue fait sur t in-

Page 142: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

150 PARTIE Il.-ANALYSE

LIVRE Mi (B).

« Avant d'entrer dans une recherchescientiuquc

il faut discuter tous lesproblèmes qu'elle pourra pré-

senter on voit mieux ainsi le but où l'on doit tendre,

etaprès

avoir entendu les deuxparties,

on est mieux

prêtreà

porterun jugement, o

telligence humaine l'effet du jour sur lesyeux

de l'oiseau de nuit (vov

plus bas, partie III). On a appelé avec raison laphilosophie la

science de la vérité: car ta vérité est la Gn de la sciencethéoretinup

comme l'action celle de la sciencepratique. Mais nous ne savons p~

le vrai sans la cause; la chose laplus vraie c'est celle qui cause h

vérité des autres choses. Ainsi autantchaque chose a d'ètre, autant

elle a de vérité(<!ic8' &««r7o<'

<M ~e< Tou e~a<, o~TM ~ct! Tt~ aX<;Se<M.

(Platon, Tt«Bt. OTdv Te oSr a~)9e~<M T«~e!pj ft~ oJ~aî.)

iî. La série des causes a un commencement, et n'est pas infinie.

Elle n'est infinie ni selon la matière, ni selon la forme, ni selon la

cause motrice, ni selon la cause finale. Car s'il n'y avaitpas de eom-

mencement, ilm'y

auraitpas de cause, puisque c'est le

premier terme

d'une térie de causes qui est toujours la cause de toutes les suivantes

Ceux quiconsidèrent les causes comme infinies ne

s'aperçoivent

pM qn'Us supprimentie bien, la fin; or toute action tend à une fin;

c'est donc sapnrHner iome action. C'est aussisupprimer toute scient

puisquela science n'a

pour objet que le constant et le déEni, et ou')

est impossiblede

parcourirl'infini dans un

temps fini.

IH. e La méthode scientifique dépend de l'habitude. Tel préfère que

l'onparle par exemples; tel veut qu'on cite

tes poètes;l'un ne connaît

quela démonstration rigoureuse; l'autre n'aime pas la

rigueurà

cause de cette ténuité d'analyse qui ne permet pas les vues don

semble: car il y a ta quelquechose

qui enchaîne comme un contrat.

et où ptumemrs regrettentleur liberté. Il faut donc se demander

d'abord comment chaque science doit se démontrer. La méthode ma- ®

thématiquene

peutconvenir à la science de la nature, on it y

a

1

t" peut.i. A la. d. 1. not. .1> n

r

Page 143: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE 131

9-

Aristote pose alors rapidement un certain nombre

de questions qu'il développe ensuite sousdix-sept

chefs principaux.

t" Est-ce à une seule science ou à plusieurs qu'ap-

partientla considération de toutes les causes? Toutes

les sciences n'ont pas affaire aux mêmes causes, et

quelle sera alors, entre toutes, la science que nous

cherchons ? ïl semble que la plus haute est celle de la

fin, du bien, de ce pour quoi se font toutes choses.

Mais celle qui touche aux premiers principes et au

fond même des êtres, n'est-ce pas celle de l'essence? a

En effet on sait mieux une chose par ce qu'elle est que

par ce qu'elle n'est pas; on la sait mieux par ce qu'elle

est en elle-même (~ T? ~< ), que par sa quantité ou

sa qualité. La science de la forme serait donc plus que

toute autre ia sagesse. D'un autre côté c'est par la

cause du mouvement que l'on sait le mieux tout de-

venir et tout changement. Or elle différe de la fin et

lui est même opposée. La considération de chacune

de ces causes appartiendrait donc à une science dif

férente. Ensuite, la science de l'essence est-elle

aussi celle des pt&tcipes de la démonstration ou

axiomes? Si ce sont deux sciences différentes, la-

quelle des deux est la première et la plus haute ? –

Et si ce n'est pas au philosophe qu'appartient la

science de ces principes, à qui appartiendra t-elle:'

toqomt de la matière. C'est donc en examinant ce que c'est quela

"Mure, que l'oatpprendm

sur quoi route la science physique.

Page 144: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

152 PARTIE H.–ANALYSE

a" Est-ce une même science qui consiuure toutes

les essences ?

« 3° La science des essences est-elle aussi celle des

accidents? Si la science qui démontre les accidents

était aussi celle de l'essence, ily aurait donc aussi

une science démonstrative de l'essence; et cependant

l'essence, à ce qu'il semble, ne se démontre pas 1.« &° Existe-t-il, outre les êtres qui tombent sous les

sens, d'autres êtres encore, et ces êtres sont-ils de

plusieurs genres, comme ce qu'on appelle les idées

et les choses intermédiaires ( w ~K~~u ), objets des

sciences mathématiques ?a

«5" Peut-on admettre des choses intermédiaires

entre lesobjets sensibles et les idées de ces objets.1

Cela ne s'entend ni en astronomie, ni enoptique, ni

en musique. Quelques-uns identifient ces nombres et

figures intermédiaires avec les nombres et figures sen-

sibles mais cette hypothèse n'entraîne pas moins

d'absurdités.

« 6° Faut-il considérer les genres comme des éie

ments et des principes ? Les éléments et les principesd'un mot sont plutôt, à ce qu'i~ semble, les lettres

dont il se compose, que le mot en général. Mais,

dit-on, nous ne connaissons rien que par la défini

tion or le principe de la définition, c'est le genre.les genres sont donc aussi les

principes des définis

«y" Mais maintenant lesprincipes seront-ils les

P. ~6. i. 6 <M ~<eT~ TOM T~O~ <MT<~< e~MM.

Page 145: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE t.A MÉTAPHYSIQUE. t53

premiers genres ou les plus rapproches des mcuvmus.'

Il semble résulter de l'hypothèse que les genres seront

d'autant plus des principes qu'ils seront plus univer

sels. Ainsi, les premiers principes seraient l'u)) et

j'ctre, qu'on peut affirmer de tout. Mais il ne peut en

t tre ainsi car il est impossible d'affirmer des diuë

renées propres les espèces, ou le genre sans ses es-

peces; l'être et l'un ne sont donc pas des genres

ni par conséquent des principes. D'un autre côté,

le principe est plutôt dans la diSerence que dans le

genre car si l'unité est le caractère du principe, et

que l'indivisible soit un, les espèces étant moins di t~

visibles que les genres, seront plutôt des principes.-

Mais alors il y aura des principes en nombre infini.

Remarquons en outre que pour toutes les choses où

it y a un premier et un second, un avant et un après.

it n'y a pas de genre distinct des espèces Ainsi, point

de genre différent des nombres (deux, trois, etc.) non

plus que des figures;il en est de même pour les choses

où il y a du meilleur et du pire tout cela n'a donc

pas des genres pour principes.

« 8° Cependant le principe est essentiellement in

dépendant et séparé, et les genres sont plus indépen-

dants des individus queles espèces, puisqu'ils s'af

firment d'un plus grand nombre. Ainsi nous revenons

encore une fois à cette proposition que nous avions

P. 5o, f. ~t< Mf CM TOCpOTepOf

X<M<~7e~Mt'

~<t', OU~ fMOt'

M TO ~< TC~Ktf t!)~ T< ~M TaSM.

Page 146: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

134 PARTIE tl.–ANALYSE

démontrée impossible ies genres sont des principes

plus que les espèces.

« o° La question ia plus dunette, la plus nécessaire.

et dont toutes celles-là dépendent, c'est celle de savoir

s'il existe, outre les individus, des espèces et des genres ?

Il y a des raisons pour et contre. D'un côté, s'il n\ a

que des individus, comme le nombre en est infini, la

science est impossible, ou du moins elle se réduit à la

sensation. En outre, puisque tous les objets sensibles

sont sujets au mouvement et à la destruction, il n'y

aurait rien d'immobile et d'étemel; mais alors il n'y au-

rait pas non plus de devenir car il faut un sujet éter-

nel au changement, à tout mouvement il faut une fin.

« t o" S'il faut une matière non engendrée (t~f~f),

à plus forte raison la forme, l'essence est-elle néces-

saire sans l'une comme sans l'autre, rien ne serait.

Faut-il donc reconnaître une essence séparée des ob-

jets ? et en faut-il faire autant pour tous les êtres, et si-

non, pour lesquels? En outre, n'y aurait-il qu'une seule

essence pour plusieurs? Cela paraît absurde car tous

les objets dont l'essence est la même ne font qu'un1.

« 11" Les principes sont-ils seulement semblables.

ou bien chacun d'eux est-il un en nombre ? Dans ie

premier cas, il n'y a plus rien au monde qui soit un,

pas même l'être et l'un en soi dans le second, il ne

peut rien y avoir qui soit différent des éléments mêmes

des choses car l'un en nombre, c'est l'individu.

P. 5a, i. 8 Êfy<~p &Mpta <5f ]) ou<r&t ~a.

Page 147: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE 135

M) 2° Un problème non moins grave, et qu'aujour-

d'hui comme autrefois l'on a toujours négligé c'est

celui-ci les principes des choses périssables et des

choses impérissablessont-ils les mêmes ? Si on l'ad-

met, il faut le prouver. De tous les philosophes ce-

lui quiest peut-être le plus d'accord avec lui-même,

Empédocle,n'a pas distingué non plus deux sortes

de principes selon lui, tout est sujet à la dissolu-

tion, excepté les éléments.

« 13" Si l'on reconnaît la différence des principes,

assignera-t-on aux choses périssables des principes pé-

rissables eux-mêmes ? En ce cas il faudra toujours re-

monter à des premiers principes impérissables.

a 14" Mais voici la plus ardue de toutes les ques-

tions, et la plus nécessaire pour la connaissance de

la vérité l'être et l'un sont-ils les essences des êtres,

etsont-ils identiques, ou ne sont-ce que des accidents?

Platon et les Pythagoricienssoutenaient la première

opinion. Empédocle et les autres physiciens (oi <~p<

pwMc) étaient pour la seconde; Empédocle place

1 unité dans l'amitié les autres voyaient dans le feu,

dans l'air, etc., l'être et l'unité dont toutes choses pro-

viennent.-Mais si l'on exclut du nombre des essences

l'un en soi et l'être en soi, il faudra en exclure toute

généralité car c'est ce qu'il y a de plus général. Il en

résulterait aussi que le nombre ne serait pas une nature

séparée des objets réels, puisque f'ost t'unité qui

constitue le nombre.

Page 148: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

156 PARTIE Il -ANALYSE

« t5° Si l'un et l'être sont identiques, iln'y aura

rien autre chose; il faudra dire avec Parménide toutest un, et l'un est l'être car ce qui est hors de l'être

n'est pas or l'être est un, donc il n'y a au mondeque

l'un. Au reste, dans aucun cas, le nombre ne peutêtre une essence. En effet, i si l'un n'est pas une es

sence, le nombre, composé d'unités, doit être aussi

un accident car un composé d'accidents ne peut être

une essence; 2° si l'un est une essence, l'un et l'être

sont identiques; donc il ne peut y avoir que l'unité, et

pas de nombres. Mais lors même que l'on accorde

rait que le nombre provient de la combinaison de 1 un

avec quelque chose qui ne serait pas un, il resterait a

savoir comment on peut faire venir encore les graudeurs de ces mêmes principes.

« 1 6° Les nombres, les solides, les surfaces et les

points sont-ils ou ne sont ils pas des essences ? Les

corps, que tout le monde reconnaît pour des êtres vc

ritables, semblent cependant avoir moins d'être queles surfaces et les lignes qui les déterminent. Ainsi.

si ces surfaces et ces lignes ne sont pas des essences..

les corps, à plus forte raison, n'en seront pas; et querestera-t-il alors ? D'un autre côté, si les surfaces, les

lignes et les points sont des essences, il n'y aplus

de

génération ni de destruction car tout cela ne na!t ni

ne périt. Ce sont plutôt des limites, comme le pré

sent est la limite du temps.

w t y"Enfin pourquoi supposet-on, outre les t'ca

Page 149: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYStQ~E 137

lités sensibles et les chosesmathématiques, des es-

sences telles que les idées? N'est-ce pas parce que

dans les choses sensibles -et mathématiques il n'y a

(fu'unitéde forme, ci'espece, mais pluralité indéfinie

en nombre, et (lue les principes doivent être déter-

minés, finis en nombre comme en forme? Et pour-

tant si l'unité des principes n'est pas une unité gé-

nérique, mais une unité numérique, nous avons vu

quelle absurdité il en résulte(voy.

nequestion). A cette

question se rattache celle de savoir si les éléments

sont en puissance seulement, ou bien de quelque

autre manière s'ils n'étaient qu'en puissance, il en

résulterait qu'il se pourrait que rien ne fût ni ne de-

vînt.

« Toutes ces questions sur les principes ne seront

pas inutiles; il fallait nous demander si les prin-

cipes sont des universaux (~Oo~ou), ou s'ils sont de

la nature des choses Individuelles et particulières

Dans la première hypothèse, on a pour chaque être

une multitude immie de principes; dans la seconde

il semble que la science n'est plus possible. ')

Ainsi le problème fondamental auquel toute cette

discussion vient aboutir, et dont l'énoncé termine le

livre, c'est celui de la nature de l'essence. Est ce

dans l'individualité ou dans la généralité qu'il faut

chercher le principe de l'être ?

P. 60, L 19 Ta~Mf Te oBf ïAf <hmp~M ayK~<HOf Mopi~af ~ec< TfSn

*fX" ttOTBOOf «aCoXoM <&f Xe~O~tEf Ta M[<i~M<~7a.

Page 150: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

t58 PARTIE IL–ANALYSE

LIVRE IV (r).

«H y a une science qui considère l'être en tant

qu'être et ses propriétés essentielles. Aucune des

autres sciences ne considère l'être en tant qu'être,

mais seulement une espèce de l'être et de ses acci-

dents la science que nous cherchons ayant pour ob-

jet les premières et les plus hautes causes, est la

science des causes de l'être en tant qu'être.

«L'être, il est vrai, se dit de plusieurs choses;

mais c'est toujours relativement à un même principe

ce sont toujours ou essences, ou attributs de l'essence.

ou acheminement à l'essence (o<~c «< euaMf), ou entin

négation de l'essence, et tout cela, rentrant dans un

même genre, est toujours l'objet d'une seule et même

science. De plus, l'être est identique avec l'un car

l'être et l'un sont inséparables dans la réalité, et ne

se distinguent que par une diûérence logique 1. n y a

donc autant d'espèces de l'un que de l'être, et toutes

sont l'objet d'une même science.

«Comme cest à la même science qu'il appartient

de considérer les opposés, et qu'à l'un s'oppose la mul-

titude, la science qui fait l'objet de notre recherche

traitera de la multitude, et aussi par conséquentde

tout ce qui se ramène à 1 opposition de la multitude

P. 6a, 9: EF TO ~f tMU TO TaSïOf )MM ~<!<W, T~ cbtO~O"

~Mf a~tt~Mf <~wep <!p~ a~TMf <!XX'oux d< ~( ~oyM Jn~f*e<'a.

Page 151: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 159

et de l'unité, comme le semblable et le dissemblable,

t'égalet l'inégal, etc. Les contraires se partagent en

deux séries, dont l'une exprime la privation 1; le côté

négatif appartient donc comme le positif àla philo-

sophie. Ajoutons que tous les philosophes ont pris

des contraires pour principes le pair et l'impair, le

chaud et le froid, l'amitié et la haine toutes opposi-

tions qui se ramènent à l'opposition générale de l'u-

nité et de ia pluralité.

MLa science de l'être et de ses propriétés essen-

tielles est aussi ia science de ce que les mathématiciens

nomment axiomes car les axiomes se rapportent à

l'être même; ils en dominent toutes les espèces, et

chaque science en fait usage dans les limites de sa

sphère propre et selon ses besoins aucune n'en re-

cherche ia nature et la valeur absolue. Les physiciens

seuls en ont dit quelque chose, mais en manière d'in-

duction et de conjecture (t~xarMf). Or il est une science

plus haute que ia science naturelle, à savoir la philo-

sophie première et puisqu'ellea pour objet ce qu'il

y a de plus général et qui touche de plus près à fes-

sence première, c'est à elle qu'il appartient de traiter

des axiomes en eux-mêmes.

« Le philosophe connaîtra donc les plus fermes

principes des êtres et de la science. Or le plus ferme

principe, c'est celui qui ne peut jamais tromper; c'est

donc le principe le plus évident, un principe qui n'ait

P. 65. t. t En T<5f &MMTMM'4 crêpa <n«r7o~ <~pwt.

Page 152: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

1M PARTIE IL–ANALYSE

riend'hypothétique c'est celui-ci ~/ne chose f~ ne;

pas a b~OM être et ne pas être <?H«H H~e ~H~t et .<o!~

le TH~me report; toute démonstrations'y ramène, car

c'est leprincipe des autres axiomes

« Mais vouloir démontrer aussi ceprincipe, c'est

pure ignorance. Si l'on voulait tout démontrer, on irair

à l'innni de preuves en preuves, et il n'y aurait plus de

démonstration. On ne peut établir cet axiome que

par voie de rémtation; toute preuve directe serait une

pétition de principe Il ne faut donc pas ici de

mander à son adversaire s'il y a ou s'iln'y a pas

quelque chose, ce serait supposer ce qui est en qucs

tion, mais seulement, s'il attache un sens à ses parole;.

S'il dit que non, il ne mérite plus de réponse; ce

n'est pas un homme, mais une plante~. S'il dit oui,

il avoue donc quil y a quelque chose de détermine

car si les mots signinent que quelque chose est ou n'e~t

pas, il n'est pas vrai que l'amrmation et lanégatiof)

soient également légitimes. Autrementil ny aurait ni

P. 67. 3 Be6<NOT~ <~)t -SMMKSf, <Mp! <}f A<~eH<T6~<M <t~M

TOf yM.)p~<M~T)M) TCyfip <M«!t~M:<Of M'M T!~ TOMUT)~ XfH afu~o~

TOf-y<tj9 wat~iMOf ~eff T~f OTM~ ~UftefMt -r<5f ~TMy, TOUTO 0~

)!)ro0ew. ïo)<tp otMT~ ~{Mt Map~e~ Te x<H

t!irc{aye<f aA!faTa)) TB

a~ xe< <[<![T<tïo <tt?TO- ~t!<Tet yap < jMu r&ip d!XXaw a&MfMt~f a&n)

<MM'Taw.

P. 68, t5 To J' eXeyxT<x!B: fnr<~eïS<M ~eym Jt<tpeBe<f «M T"

tt<ro~e!6*<, ~)r< a~o~etx~atf ftef <!o$e<ep a<Te!o~a[<ïo e~ *pMt

1

? TOU TOfOÛToa !HT<0!< OPTOf ~e~~O~ Af eA! K<H o~x <ttroJe<&î.

P. 68, t. ti Ûf«MO< ytp ~«TM 0TOtOUTO~ Te«'HTes ~J~.

1

Page 153: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. m

penséeni tangage. En euet il faut que le mot signifie

une chose et non une autre, ou du moins un nombre

déterminé de choses car avoir une signification in-

définie, c'est n'en pas avoir; de même, ne pas pen-

ser une chose déterminée, c'est ne rien penser.

« Soutenir que la même chose est et n'est pas à la

fois, c'est aussi supprimer toute essence, toute exis-

tence substantielle car l'essence d'une chose, c'est

ce qui la fait être ce qu'elle est, à l'exclusion de ce

qu'elle n'est pas. Il n'y aurait donc plus que des acci-

dents, plus d'essences ni de genres, et on irait tou-

jours aCu'mant a l'infini l'accident de l'accident mais

cela est impossible, car l'accident ne peut être acci-

dent d'un accident 1.

Si les propositionscontradictoires sont vraies

d'une même chose, toutes les autres propositions en

seront vraies à plus forte raison ainsi tout sera un.

C'est aussi une conséquence de la doctrine de Prota-

goras si la sensation individuelle est la mesure de

toutes choses, les choses sont ou ne sont pas, suivant

la sensation. Il faudra donc dire avec Anaxagore, que

tout est ensemble, et il n'y aura plus rien de vrai.

Une semblable doctrine ne tient compte que de fin-

défini ils croient parler de l'être et ils parlent du non-

être car ce qui est en puissance et qui n'est pas en-

core en acte c'est l'Indénni~

P 72. L 3 TAyap <nt(t6e&txo< «J o~tëe€tt<oT< <n~e5t~of.

P 7*, t. t~ TA <M<Mo7of oBf ~OMMM Xeyetf, K<t< oto~efot X~eo'

Page 154: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

~2 PARTIE IL–ANALYSE

«D'ailleurs c'est une opinion qui se détruit elle.

même car dire que ies deux propositions contradic-

toires, qui s'excluent mutuellement, sont vraies en

même temps, c'est dire qu'elles ne sont vraies ni l'une

ni l'autre. Or voici la conséquence si l'afErmation ni

la négation ne sont vraies d'aucune chose, c'est qui)

n'y a rien et le sophiste même qui soutient les deux

contradictoires n'existe pas. Dans toutes ses actions,

il se donne & lui-même un démenti continuel. Pour

quoi marche-t-il plutôt que de se tenir en repos;

il croit donc que l'un est préférable à l'autre ? Tous

les hommes font ainsi preuve par leur conduite de leur

croyance à la simplicité, au moins pour le bien et le

mal 1. -Que si, chez ces sophistes, il n'y a point con

viction scientifique, mais pure opinion, qu'ils cher-

chent à acquérir la science, comme le malade cherche

le remède. Mais on ne peut refuser d'admettre des

degrés de vérité et d'erreur ily a donc un terme fixe

de comparaison. Ainsi nous voilà délivrés de cette

doctrine de confusion, qui ne permettrai pasà !a

pensée un objet déterminé2.

Ici Aristote reprend la discussion sous le pointdf

as, «p! MB (M) ~tt0< ~y<W<K y<~ Awt!~ M! ~T~E~"

tA tMpta'Mf ~<f.

P. ~5. t. 9 û<~7e <M &Mxe wû!fT« ~o~t&h'oMW ~e<f a)fX<M, e~

«ep! ~MMTe, <&M ~ep!T~ d~e<Mw xtM

~e!p<w.

P. ~@, 3 S~TC~JyoM thn~tty~M s~~eo toSMpatM

Ks

)MA<<W*A< T~ ~Mtt~t ~'MH.

Page 155: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 145

vue historique, afin d'attaquer dans ses racines l'o-

pinion qu'il combat.

«Toute l'erreur est venue de la considération du

monde sensible. Voyant que d'une même chose ré-

suitent des produits opposés, et ayant établi en prin-

cipe que rien ne sort du non-être, on en a conclu que

toute chose est à la fois les deuxopposés ainsi

Anaxagore, qui disait Tout est mêlé à tout; ainsi

Démocrite qui mettait partout le plein et le vide.

Mais leur principe n'était vrai qu'en un sens il est

vrai de l'être en puissance, mais non de l'être en acte;

or ce n'est que dans la puissance que s'identinent les

contraires. C'est aussi le monde sensible qui a

suggéré à Protagoras sa doctrine, que toute appa-

rence est vraie. Il la déduisit de la variété des sensa-

tions chez les hommes, et chez un même homme à

diderentes époques. Car d'un côté, il faisait résider

dans la sensation toute la connaissance, et par con-

séquent u considérait toute sensation comme vraie

de l'autre, il regardait la sensation comme un chan-

gement. Ainsi pensèrent Empédocle, Démocrite,

Parménide, Anaxagore même.

«Leur faute a été de ne reconnaître que des objets

sensibles où est pour beaucoup la matière, l'indénni.

fêtre en puissance. Héraclite et surtout Cratyle ne

virent dans le monde qu'une éternelle et universelle

mobilité. Cependant si tout change, il iaut bien au

changement une matière et une cause qui subsistent.

Page 156: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

tM PARTtE I!.–ANALYSE

D'ailleurs il suffit de remarquer que ce n'est pas

même chose de changer en qualité ou en quantité

La quantité varie sans cesse, mais c'est par la qu;~lité, par la forme, que nous connaissons tout 1.

« On pourrait ajouter qu'il y a aussi une nature im-

mobile mais ces philosophes ne doivent-ils pas aUpr

eux-mêmes bien plus loin, et croire à l'immobilité

universelle? Si tout est dans tout, comment y au-

rait-il du changement ?

« Mais c'est à tort qu'ils attaquent la sensation. Le

sens dit toujours vrai sur son objet propre; l'imagi-

nation n'est pas la sensation 2. -Si c'est la sensation

qui constitue uniquement la vérité des choses, il

s'ensuit que si les êtres qui sentent n'existaient pas,

iln'y aurait rien mais cela est absurde le sens ne

se sent pas lui-même, mais bien un objet extérieur

différent de la sensation car ce qui meut est anté-

rieur à ce qui est mu.

« On demande encore ce qui décidera entre la sa-

gesse et la folie. C'est demander ce qui décide entre

le sommeil et la veille c'est demander la raison de e

qui a sa raison en soi on ne peut démontrer les prin

cipes mêmes de la démonstration.

P. 79, L 20 Ou T<M!ïJf ~7< TO {tM<t&~E<f )MtT~ TO <M<KW X!t

MTft TO <MM< <MT~ ftEf o3f T~ ~Mt~ &r7a) ~Of <jM~ x<tT~ TO t'

dos ~t<MT<t y~M~yxottef. Cf~ XI (K), 2z3, 8.

P. 80, 1. 8 0!?y <~<~tt<r<! ~eu~: TOC M~M e<T7~, a~' 0afT)f-

<f&< oj TtJTOf T~ ato9t(<Te<.

Page 157: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 145

tO

MLes arguments que nous venons d'exposer peuvent

ta'"ener ceux qui se seraient laissé séduire par des

sophismes. Quant à ceux qui ne veulent que dispute et

violence, poussons-les jusqu'aux extrémités de leur

doctrine ils doivent dire non pas seulement que

toute apparence est vraie, mais qu'elle est vraie pour

cdui-ià seulement à qui elle apparaît, et dans le mo-

ment et de la manière qu'elle lui apparaît. Ainsi, il n'y

aura plus rien que de relatif. Or ce qui est relatif se

rapporte à une chose déterminée. Mais si rien n'est

que relativement à ce qui pense, l'homme n'est autre

chose que ce qui est pensé donc ce qui pense n'est

pas l'homme et la pensée n'étant jamais que par son

rapport au pensant, on remontera ainsi vainement à

l'infini 1.

«Ainsi le principe, que les propositions contra-

dictoires ne peuvent être vraies en même temps, est

véritablement le plus ferme principe. Il en dérive

deux conséquences t" les contraires ne peuvent co-

exister en un même sujet car l'un des deux contraires

est la privation, et la privation est la négation dans

P. 83, 1. 5 Upo~ J~ ?A ~o~of el TaJroa!fOp&Mrof xa< To ~o~a~o-

ftEfOf, <M?<(~7<M<Mp~!M< TO Jo~Of, f~m T<~ ~O~O~efOf. Et &m-

'j7of M?<M~p~

T~ ~o$<~<w, <~re«M[&T7<M TM e~< To ~o~~of. Anstot<'

tire ici du scepticisme des sophistes la conséquence que Hume a pro-fesséehardiment; c'est qu7il n'y a que des phénomènes sans substances,des rapports sans termes, enfin des idées sans sujet; et puisque rien

"est qu'en tant qm'i) apparaît à un sujet, l'apparence même s'é-

panouit,

Page 158: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

146 PARTIE IL–ANALYSE

un genre déterminé 2° iln'y a point de milieu entre

les deux contradictoires2. Cela est évident par la ua.

ture même du vrai et du faux car dire vrai, c'est dire

que ce qui est est, et que cequi n'est pas n'est pas

et de même qu'un milieu entre l'être et le non-être

ne serait ni être ni non être, de même uneproposi

tion intermédiaire entre une afErmation et une ne"a

tion contradictoires ne serait ni vraie ni fausse, ce quiest impossible. De plus, il y aurait encore un milieu

entre le milieu et chacun des deux extrêmes, et ainsi

de suite, à l'infini. Ainsi nier l'un des deux termes

contradictoires, c'est affirmer l'autre.

On peut tirer encore du principe une troisième

conséquence, c'est qu'il est également faux de dire quetout soit en repos et que tout soit en mouvement. Si

tout était en repos, tout serait à la fois vrai et iaux:

si tout était en mouvement, il n'y aurait rien de vrai.

Mais il y a un moteur qui meut ce qui est sujet au mou-

vement, et ce premier moteur est lui-même immo-

bile".

P.83,t.t9: Ê~d <Mt:M[TOt<Ttttt At~MKf difMttE~Oe~&M MT*

teC a<!roC, ~mep~'6n oJJ~ -r&'fWT&t

~K~ew &er<M T~! «JnS

Tf~ f~f y~p~MWT&M'

~TepOf 0~jM)<T~ &~ oj~ ~T?M'' Ot?<r&M

o?<p<t~f e?~M!<n$ chr<!pM~ ~7<f dso T<fot<5pt<!tt~f<w y~ou:.

P. 83, t. ai Â~~ ~f M~fteTa~ ~fTt~aMM &t~eT<M eîfm oâ-

O~f, ~A' <Myot H pt!Mt< ~op~at M6' ~fM ~w«~f.

P. 86. n El y<~ ~pe~~fTa, a~ T<tJïA <!X~ «M

Page 159: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LAMÉTAPHYSIQUE. t~7 î

tu.

LIVRE Vt (E).

"Ce que nous cherchons, ce sont les principes et

les causes des êtres en tant qu'êtres. Les autres sciences

aussi considèrent des principes et des causes, mais

non pas l'être en tant qu'être elles ne disent rien de

l'essence pure. Après avoir pris leur point de départ

les unes dans des sensations, les autres dans des hypo-

ihfses, elles démontrent les attributs du genre qu'elles

considèrent. Mais l'essence ne se démontre pas. Aussi

ne démontrent-elles pas même l'existence réelle du

genre qu'elles considèrent car la question de l'essence

et celle de l'existence appartiennent à la même sphère

de la pensée'. La science de la nature, la physique,

a pour objet les choses qui ont en elles mêmes le prin-

cipe de leur mouvement et de leur repos elle ne

considère donc l'essence que dans un sujet, que dans

!e mouvement et la matière. Les objets des mathé-

matiques sont au contraire immobiles; mais ils ne sont

pas séparés de la matière quoiqu'elles en fassent abs-

traction. Si doncily a quelque chose d'éternel, d'Immo

Ma< el 'mbtw )ttM?M<, o~f &~<M <3n! ~~radpa ~eu~

"~M ft~ 0<!Jâ Ot!fMt ~pef«T Jt<MtT<M- <MTS <M des J' 0!?~' &r7t ~p

ï' oe! Mfe7 Ta JMfoJ(*eMt' )Mt! To~fp~rof

xtyoCf a~ttro~ auro.

P. m, 94 6fo~f od3 e< &T7<f ft!{ 6ar7< Ta ~exoî iMp< «

~P*yf«~MfM< ~M~ MyMMM, JM T~ Ti;< auT~Î eït~M ~SPC~ T<! T6 T:

M?* ~M' «Metf xw! d ~o7<f.

Page 160: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

!48 PARTIE!–ANALYSE

bile et de séparé, ce sera l'objet d'une autre science.

Ainsi il y a trois sciences tbéorétiques Physique,

Mathématiques, Théologie. Celle-ci est la plus haute

et la plus noble; et comme l'essence immohile.

s'il y en a une, doit être la première, lathéologie

sera par conséquent la philosophie première et, par

conséquent encore, la philosophie universelle 1.

« Mais l'être a plus d'un sens. Il est nécessaire de

distinguer i l'être en soi et l'être par accident; 2° le

vrai, auquel le faux s'oppose comme non-être;

3" l'être selon les catégories essence, qualité, quan

tité, lieu, temps, etc.; &° l'être en acte et l'être cn

puissance.

« II faut écarter d'abord l'accident et le vrai.

« Aucune science ne s'occupe de l'accident c'est

presque le non-être, et lessophistes seuls fondent

tous leurs raisonnements sur l'accidentel. Aussi Platon

fait-il avec raison du non-être l'objet propre de la so-

phistique. La cause de l'accident esttoujours acci-

dentelle or la science ne s'occupe que de ce qui

arrive toujours ou le plus souvent.

« Quant au vrai et au faux, ils ne se trouvent que

dans les propositions. Le vrai et le faux ne sont donc

pas dans les choses, mais dans lapensée.–Ainst

l'accident ayant son principe dans l'indéfini, et le

P. t Z3, 1. 20 E~ &~M TM 0<M<t M~fttTOf, <t<?n! t~Wt&M )M<

ÀCOO~t ~M~ttT tMtt )Mt6<!Xo« O~MM <~M<fp<!)Ttt- )Kd

<eci Toi t~TOf S

Tet~f e<N .~eMptKMt, JM! &!?< )Mt}Ta~Kfe~O~Mt S ~f.

Page 161: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 1M

vrai (commele faux) dans la pensée, ni l'un ni l'autre

ne nous montrent la véritable nature de l'être.

1 I,IVRE Vit (z).

«L'être se dit de toutes les catégories mais avant

tout, c'est l'essence. Tout le reste n'est qu'à titre de

quantité, de qualité, d'attribut de l'essence. L'essence,

c'est ce qui constitue l'individu (-70~0' ~~) dont

s'affirment les attributs ce n'est plus une espèce

d'être, mais l'être d'une manière absolue (3f<x7rAMf);

qui seul subsiste par soi-même. Enfin l'essence est le

primitif dans l'ordre logique, dans la connaissance et

dans le temps. C'est donc l'essence que nous considé-

rerons surtout et d'abord, et pour ainsi dire exclu-

sivement.

«On donne au terme d'essence au moins les

quatre sens suivants t" la quiddité~ (la 77 ?y Jf<~);

2° l'universel (~ ~cÂou); 3" le genre, le principe

de lagénération,

du J~enir(~ ~oc)

4** lesujet (w

'~Mt~MMf). )

On nouspardonnera d avoir eu recours à ce terme scolastique,

le seulqui rende assez bien l'expression grecque.

Il a été imaginé pour

servird'équivatent à <AT~f e~M en

exprimantce qu une chose est

seton lequid, selon rêtre, et non pas selon ie '/ua~ le quantum, ou

toute autre catégorie. -Sur le ro T< ~f eM'M, vov. les t'~ctairfissc-

mcnts.

Page 162: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

150 PARTIE IL–ANALYSE

« t" Le sujet est ce dont on affirme tout, etque

l'on n'affirme de rien c'est la forme, la matière et le

tout concret; mais il semble que ce soit surtout la

matière, puisque de la matière s'amrme l'essence elle.

même. Le sujet est donc proprement la matière, et

je parle delà matière en soi, sans quantité, ni qua.

lité, ni rien de ce qui détermine l'être.

« 2° Passons à la quiddité, et parlons-en d'abord

d'une manière générale et logique. La quiddité, c'est

tout ce qui est par soi-même. Ainsi la quiddité n'est

pas proprement exprimée dans ces mots surface

blanche, mais bien dans le seul mot de surface car

dans la définition de la surface blanche, il faudra faire

entrer la surface. La quiddité est donc l'objet propre

de la définition. La quiddité et la dénnition app"!

tiennent d'abord à l'essence pure, puis, d'une mr

nière secondaire, aux choses considérées sous les

points de vue de la quantité, de la qualité et de toutes

les autres catégories. La quiddité est-elle iden

tique avec la chose même ? Oui, pour les choses qui

sont par elles-mêmes, car chaque chose est identique

avec son essence; non, pour les choses accidentelles,

car elles n'ont pas d'essencepropre

« 3° Tout ce qui devient devient par la nature, par

l'art ou par le hasard. Le devenir suppose trois élé-

ments une matière en laquelle se fonde la possibilité

du produit, une forme à laquelle il arrive et un prin-

cipe moteur. Le principe moteur, dans la nature

Page 163: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 151

c'est un être réel qui engendre son semblable. Dans

l'art, c'est l'artiste; mais ce n'est plus dans son corps,

c'est en son âme seule que réside la forme. Ainsi,

dans l'art comme dans la nature, c'est le semblable

quirésulte du semblable, mais ici du réel et là de

la pensée. Aussi, dans l'opération de l'art, il y a deux

Moments le premier est celui de la pensée, qui part

du principe, de la forme; le second est celui de l'exé

cution, qui commence où s'est arrêtée la pensée'.–

Le principe actif, dans la nature comme dans l'art,

ne produit ni la matière, ni la forme, car on remon-

terait à l'infini, sans pouvoir s'arrêter, de forme en

forme et de matière en matière ce qui <~ftgnt, c'est

le concours de l'une avec l'autre (<n!fe~).

«Mais faut-il encore qu'it y ait des formes en de-~

hors des objets particuliers, qu'il y ait des essences

séparées? S'il en était ainsi, jamais un être véritable

n arriverait à l'existence, mais seulement à la qualité;

car ces essences, telles qu'on imagine les idées, ne

signifient rien que qualité. Au contraire, dans la gé-

nération réelle, c'est un être qui, sans être lui-même

déterminé de qualité, fait passer l'indéterminé à une

détermination qualitative M

P. t~o, 12: 6 t~f a*~ T~t "px"**°~ ef~oM Mt)" d'

M~ To6 TeXeMtt&w T<f MMfceMf ~o~M.

P. t~3, Lj! nJrecoy oCf &~ T« <~a!JM zapaTMJe 4 oOtMt ~Mpat

T*f<M~ow, o)!J* otf wore ~ypero, <fo~T<M ~f, ro~e T<; <&~<~ T~

T<M<<~E<n!fM&te<, T<Me )M~ MjM<T~fO)) oJx ~7<f, <a ~otef xet yeM~

« Mt~e To«~~e' xfd ~M~ yefM~, ~7< T~e To«<f~.

Page 164: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

152 PARTIE II.–ANALYSE

Après avoir ainsi constitué l'être par le devenir,

Aristote pose deux questions étroitement liées entre

elles sur le rapport des éléments de l'essence dans

l'être concret ou réel.

«Faut-il que la définition du tout (concret, oufc~)tienne compte des parties ?P

« La partie précède-t-elle le tout, ou le tout la

partie a»

Aristote répond à la première «qu'il faut distin-

guer entre les parties matérielles et les parties de la

forme. La définition ne portant, à proprement parler,

que sur la forme, il est évident qu'elle ne doit tenir

compte que des parties formelles (la forme d'un

cercle est indépendante du bois ou du marbre dont il

est fait).

« Quant à la seconde question, il faut répondre en

s'appuyant sur la même distinction les parties de la

forme sont postérieures à la forme totale, mais ante

rieures au tout, au concret; le tout est à son tour an

térieur auxparties

matérielles. Par exemple, fâme

étant l'essence et la forme du corps, ses parties,

qu'on 'ne peut définir sans se réterer à son action

totale (la sensation), sont antérieures, dans la défi-

nition, aux parties de l'animal concret. Ainsi, l'âme

considérée & part de l'animal, la forme hors du con

cret, étant le général, tandis que le concret est le

particulier et le réel. qui ne tombe pas sous la dén

nition mais sous la sensation ou l'intuition, ce sont

Page 165: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 155

les partiesdu général seulement qui sont antérieures

au tout réel

« Maintenant ils'agit de compléter ce qui a été dit

dans les Analytiques sur la définition car cela est en

première ligne dans la question de l'essence.

« Comment l'objet de la dénnition est-il un, puis-

qu'on y distingue le genreet la différence? Pour ré-

soudre ce problème, il faut analyser la définition.

La dénnition se compose essentiellement du genre et

de la duïérence; on obtient celle-ci en descendant

de différence en diuérence jusqu'à la dernière qu'on

puisse apercevoir. Toutes les autres se joignent au

plus haut genre d'où l'on était parti; la dernière

seule reste différence, et exprime l'essence de l'ob-

jet2. Soit donc que le genre ne soit pas distinct de

ses espèces, soit qu'il joue ici comme nous le ver-

rons, le rôle de matière, c'est sur la dernière diffé-

rence que porte la définition, puisqu'elle cherche à

saisir l'essence de l'objet. ? Aristote abandonne ici la

question; il y reviendra au chapitre troisième du

livre suivant, et n'en donnera la solution qu'au cha-

pitre sixième de ce même livre. Il passe à l'examen de

l'être dans la dernière des significations énumérées au

commencement du Vtï* livre.

a A"n est impossible qu'aucun universel soit véri-

P.i48-9.

P. t5&, s'y ~wMo~ oT< Te~euTa~t ~a~opao<?<r« rof

~p~

~TM &r7tH )Mt! e ~M<~f.

Page 166: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

lb~ PART!E !–ANALYSE

tablement une essence car l'essence première de

chaque chose lui est propre, et par conséquent, ne

se trouve en aucune autre; au contraire, l'universel

c'est ce qui est commun à plusieurs choses. Aussi, si

l'universel était l'essence, tous les individus ne fe-

raient qu'un car tout ce qui a même essence est un.

En outre, si l'homme, en général, était l'essence de

Socrate, l'animal étant plus général encore, serait

l'essence de l'homme, et on aurait l'essence de les

sence. Les universaux ne peuvent donc avoir d'exis-

tence hors des chosesparticulières; rien de ce qu'on

affiririe de plusieurs choses n'exprime l'existence es-

sentielle déterminée, mais seulement la qualité.

Ajoutons qu'il est impossible qu'une essence soit

composée de plusieurs car deux essences en acte

ne peuvent jamais s'unir en une seule; l'acte divise'

De tout cela résulte clairement la nécessité de rejeter

la théorie des idées.

« Nous avons dit qu'on entend par essence et la

forme et t'ot~et sensible qui a forme et matière. L o!)

jet sensible ne se dénnit pas car, puisqu'ila de la

matière, u peut être autre qu'il n'est, et échappeà la

science par sa variabilité. En général, il n'y a point

de définition de l'individu en tant qu'individu;fi.

dée ne peut pas non plus être définie, puisqu'onla

donne pour individuelle et séparée. D'un autre côte

P.t5~,

t. 9 H y«p ~Te~«t ~Mpt~a.

Page 167: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 155

cependant,on compose d'idées les idées elles-mêmes,

de manière qu'elles tombent sous la définition comme

les formes du monde sensible. On n'a pas vu qu'il n'y

a point de composition dans les choses individuelles

et éternelles, et que la défmition ne peut les atteindre.

De plus, on a souvent pris pour des êtres beau-

coup de choses qui ne sont que des puissances.

«Ainsi, ni l'cm, ni l'être ne sont les essences des

êtres, pas plus que F~rn~ en général ou le prin-

cipe en général L'essence n'est pas ce qui est com-

mun à plusieurs choses. Ce n'est donc point dans le

général que nous pouvons trouver cette essence qui

est séparée des êtres sensibles.

« Voici le point d'où il faut partir c'est que l'es-

sence est principe et cause. Mais dans la recherche

dupourquoi d'une chose, il ne faut pas oublier qu'il

ne s'agit point de savoir pourquoi elle est ce qu'elle

est en soi ce serait une question vaine car ici le

pourquoi ne diSere pas du que ~); on demande la

raison de ce qu'elle a de relatif et par conséquent de

dépendant pourquoi elle a telle forme ou telle ma-

tière par quelle cause ou pour quelle fin elte a été

faite. nn'y a donc pas lieu à cette recherche pour

les essences simples, et il faut qu'il y ait quelqu'autre

manière d'arriver à les connaître. Quant aux êtres qui

tombent sous les sens, leur essence n'est pas dans les

P. t6t, i. t<&M<ep<~

~n oëte ro ëf o~re ro ~f ~i~e~eMt oMc<ef

e'M< -rwf~M~M[i-6w, ~!rep oJ~ To o-7o<~e~) eh'<u "PX'

Page 168: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

156 PARTIE II. -ANALYSE

éléments, car les éléments ne sont que matière mais I

dans la cause de leur unité.1

LIVRE VIII (H).

«Récapitulons, pour en finir avec ce sujet. Nous

avons dit que nous cherchions les causes et les élé-

ments des êtres qu'il y a des essences reconnues par

tout le monde 1 et d'autres que quelques philosophes

seulement prétendent établir, c'est-à-dire les idées et

les nombres et figures mathématiques. L'essence véri-

table étant la quîddité, et la quiddité étant ce que la

défmition exprime, nous avons dû parler de la défi-

nition, puis des parties de la forme et de la défhi

tion nous avons prouvé que l'universel et le genre

ne sont pas l'essence; nous considérerons plus bas les

idées et les objets des mathématiques. Parlons main

tenant des êtres reconnus de tous, c'est-à-dire des

objets sensibles.

« Tous les objets sensibles ont de la matière, sujet

immuable de toutes les qualités et de tous les chan-

gements. Or la matière, c'est ce qui n'est rien de reet

en acte, mais seulement en puissance 1.

« Passons donc à l'essence actuelle des objetssen

sibles, c'est-à-dire à la forme. Démocrite reconnut

P. t65, t. '8 t*t)f ~e XeyM f<tt r<a r< oB<KtËfepyet~, Jff~'

eo~< T<~e T<.

Page 169: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 157

trois différences de la matière la figure, la position

pt l'ordre; il y en a beaucoup d'autres. Ce sont ces

différences qui, en déterminant la matière, font les

choses ce qu'elles sont, et qui, par conséquent, en

constituent l'essence. Définir une chose par sa ma-

tière, c'est dire ce qu'elle est en puissance la définir

par sa forme, ou par ses différences, c'est dire ce

qu'elle est en acte; la dénnir par l'une et par l'autre,

c'est définir le concret. Il y a donc dans le monde sen-

sible la matière, la forme et leur produit.

<'Mais ce produitn'est pas le résultat de la compo-

sition des éléments matériels; il n'est pas la matière,

plus un certain assemblage; la syllabe ne consiste pas

dans les lettres et leur réunion; l'homme n'est pas fait

de l'animal et du bipède car c'est plutôt le tout qui

procède de la forme, que la forme du tout. Ce ne

sont donc pas les éléments qui font les êtres ce qu'ils

sont, ce n'est pas le simple résultat des éléments, c'est

quelque chose de plus, qui est l'essence, la forme.

'<La forme est quelque chose d'analogue au nombre

le nombre contient des unités, comme la forme, dans

la définition, contient le genre et les différences;

qu'on retranche ou qu'on ajoute une unité, une

différence, le nombre et la forme périssent: car leur

unité n'est pas une unité de collection, ni une unité

semblable à celle du point c'est une unité d'acte et.

de nature. Voilà pourquoi ni le nombre ni la forme

ne sontsusceptibles de plus et de moins.

Page 170: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

158 PARTIE IL–ANALYSE

« Quant à la matière, outre la matière universelle.

chaque chose a sa matière propre, ou même en aplu-

sieurs et lorsqu'on demande quelle est la cause d'une

chose, c'est toujours par la cause la plus prochaine

qu'il faut répondre c'est donc la matière la plus pro-chaîne qui est véritablement la matière de

chaquechose. Ainsi le devenir ne consiste pas dans le pas

sage d'un contraire à un contraire en général, mais

dans les alternatives de telle ou telle opposition

déterminée, relative à la nature de la matière pro-chaine. Pour les choses

physiques éternelles(corps

célestes), elles n'ont peut-être point de matière, ou

du moins la matière en est inaltérable, et seulement

mobile.

«Ici revient encore cette question pourquoi la

définition est-elle une et le nombre est il un C'est

que la définition n'est pas une par réunion, comme H

liade, mais comme expression d'une chose une 1. Qu'est

ce donc qui fait l'unité du défini, de l'homme, par

exemple, en qui il y a l'animal et le bipède ? Cette ques-tion est insoluble si l'on admet qu'il y a un animât en

soi et un bipède en soi (théorie desidées) car l'homme

étant par la participation à deux choses, ne serait pas

un, mais plusieurs. Mais si l'on distingue avec non~ la

matière et la forme, la puissance et l'acte, la solution

est facile car ily a une matière intelligible comme

P. 173. t. 7 Ôop<o~ Myos ~7<f e& oj CMMM~tM xaMif~

r

~M~, <&M T~ Mf e~ax. CfAnalyt. post. n, M. Poet. xx, sub fin.

Page 171: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 159

une matière sensible; dans la dénnition, le genre est la

matière, la diNérence est la forme'. Or c'est la forme

quiest cause que ce qui n'était qu'en puissance est

passéà l'acte. La forme est donc le principe de l'unité,

et ce qui n'a pas de matière ni intelligible ni.sensible,

est un par le fait même (~Ouc). Ainsi la cause de l'u-

nité n'est autre chose que la cause de l'être.

« Les uns ont vu le principe de l'unité dans une

participation qu'ils ne peuvent expliquer; les autres,

comme Lycophron, dans une copule qui n'est qu'un

mot vide de sens comme si la vie était la copule ou

le lien du corps et de l'âme. Ils cherchaient tous con

fusément la raison de l'unité de la puissance et de

l'acte, et la nature de leur différence. Nous l'avons dit,

ia matière dernière et la forme sont même chose, mais

lune en puissance, l'autre en acte. La raison de l'unité,

c'est donc le principe qui produit le mouvement de

la puissance à l'acte, et tout ce qui n'a pas de matière

est et est un par soi-même, et d'une manière ab-

solue 2. »

P.t~4, i. t Ë<~< ~X)!î f€f f0t)ï~ «M~ttT~- Mtt OC~TOt?

~o" T~ ~f «~t~ Ta J*à'~pyet~ eo~<«, oiov o «{xXoî o~f! ~rhre~of.

P.t~ L zS Ocre ofn<w o~C~f diXXo ~A~f etf T< <5: x<f~<K[f ~x ~u-

'tt<M e~f&tyeMW ~ea f~ ~e< ~t~ra a)A&

dxep~fra T~.

Page 172: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

t()0 PARTIE !L–ANALYSE

1

J/LIVRE IX (o).

Ce livre est consacré au développement des idées

de puissance et d'acte.

« On peut distinguer la puissance en active et en

passive; mais dans l'idée de l'une comme de l'autre

est contenue l'idée de la puissance primitive, qui est

le principe du changement dans l'autre en tant

qu'autre. Puisqu'on retrouve partout la puissance,

dans les choses inanimées comme dans les animaux.

et jusque dans la partie rationnelle de l'âme, il y a

des puissances raisonnables et des puissances irrai-

sonnables celles-ci ne peuvent qu'un effet détermine;

celles-là, comme les sciences et les arts, peuvent leur

effet naturel et de plus l'effet opposé, ou privation:

car les contraires rentrent sous la même idée (Ac~<.

raison, définition etc.), quoique d'unpoint de vue op-

posé. Cette idée enveloppe un seul et même prin-

cipe, qui produit les opposés par les puissances ir-

raisonnables

« Les Mégariques prétendaient que l'on ne peut que

lorsque l'on agit. Cette opinion est absurde. 1° On ne

serait donc pas architecte tant qu'on ne construirait

pas, et on cesserait de l'être en cessant de construire;

a" le chaud, le froid, ne seraient pas chaud et froid

P. ty7,t. ao Afo ïc: xarA Xoyof A~ara To!t d~eu ~oyou &<tWh

tM<e?Mh'm'T«[' y~9 ep~ ~ep<~eT<H T~) ~o~-

Page 173: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 161

t 1

tant qu'onne les sentirait pas on retombe ici dans

la doctrine de Protagoras; 3° on n'aurait pas de sens

tant qu'onne sentirait pas 4° enfin ce qui n'est pas

ne serait jamais; ainsi cette doctrine entraîne pour

conséquence l'immobilité universelle.

L'acte n'est donc pas la même chose que la puis-

sance. Une chose est possible si, au cas où elle pas-

serait à l'acte dont elle avait ia puissance, il n'en doit

résulter aucune impossibilité.–

Quant à l'acte, c'est

la réalisation (cfT~e;~) c'est la fin du mouvement

et aussi le mouvement lui-même. L'acte ne se définit

pas; on ne peut tout définir, mais on peut le conce-

voir par induction, en recueillant des analogies Ainsi

la iaculté de voir diffère de la vision; la moitié diffère

du tout où elle est contenue en puissance l'innni

n'est pas, et nous le concevons comme possible quoi-

qu'il ne doive jamaisse réaliser, par exemple dans la

divisibilité infinie.

« L'acte précède la puissance, i*'dans l'ordre lo-

gique car on ne peut concevoir la matière que comme

ce qui peut devenir actuel; on ne la connaît que par

l'acte; a° dans le temps, d'une manière absolue car

si dans le même individu la puissance est antérieure

à l'acte, il faut toujours remonter à un autre individu

de même espèce, autre par conséquent selon le

P. 182, 1. 3 A~Xof < ~n T<Bf x<t6* ~aar7a T~ e9r<ty<~ ~ouM-

fts9a[ ~ye<f, x<t! o~ ~e?<tMpr~ ~pof ~ttïe!f <~M xa:! T~ <M~oyof ow-

f".

Page 174: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

162 PARTIE Il-ANALYSE

nombre etidentique selon la forme, qui préexiste fn

acte et amène par le mouvement la puissance à l'acte:

3° selon l'essence car les choses ont dans le devenir

l'ordre inverse de celui qu'elles ont selon l'être 0)

tout ce qui devient tend à une fin, et la fin c'est l'acte

auquel va la puissance la puissance n'est qu'à cause

de l'acte, de la forme où elle a son essence. La fin est

donc le principe; et l'acte, qui est la fin, est le pri

mitif selon l'être. Or la forme l'essence, c'est l'acte

« Mais il y a une raison plus haute encore pour Fan

tériorité de l'acte les choses étemelles sont ante

rieures par essence à celles qui commencent et finis-

sent or rien de ce qui admet de la puissance n'est

éternel, parce que le possible contient les opposes.

et par conséquent de l'être et du non-être. En

outre, par cela seul que le possible contient les con

traires et par conséquent le bien et le mal, il estinte

rieur à l'acte. Tirons en passant cette conséquence.

qu'il n'y a point de mal en soi et hors des choses.

puisquele mal vient de la

puissance il n'ya donc

point de mal dans tout ce qui est éternel.

« Enfin c'estl'acte qui est la cause de la science: car

on ne connaît ce qui est en puissance qu'en le faisant

passer à l'acte c'est en quoi consiste le procédé ana-

lytique de la géométrie. La cause en est que l'acte

P. t86, L 14 UpeSrof fMf ~T< T« ï~ yef~H <~?eea ë~e< ~a: i

eu<T&[~porep*.

Cfp. 969, i. 6.

Page 175: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 165

1 j.

c'est la pensée;et voilà pourquoi c'est en faisant que

l'on connaît'.

«ï! nous reste à parler de l'être et du non-être

relativement au vrai et au faux.

<;Dire vrai, c'est affirmer d'une chose ce qu'elle est

réellement, et dire faux, c'est en afïirmer ce qu'elle

n est pas. Donc il n'y a ni vrai ni faux pour les choses

simples on les connaît ou on les ignore, mais on

ne peut s'y tromper. En effet il ne peut y avoir d'er-

reur sur l'être que par rapport à ses accidents. Or

l'essence simple, qui est toute en acte, est l'être même,

t'etre en soi. »

LIVRE X (ï).

On a vu dans le ne&t T~f acoa~Mc ~e~Ky~f que iH~

se dit de plusieurs choses; mais ses significations es-

sentielles peuvent se réduire à quatre t°le continu (?c

en~), et surtout ce qui est continu de sa nature, et

non par contact ou par un lien extérieur; 2° le tout

(?c X~ef), ce qui a une forme, ce qui a en soi-même le

P. t8g, 1. a 4 E<!p<<MtCM<M~ Ta

&ayp<~6[Ta Efepye~c' ~t<upouf-

'lesyap e<ip~nt<K«nf' ei ~f ~<mM){t~Mt~ pafepA ~w ~f M?f J'

eftorap~et

&f~t€< A~e~tMp~f

~T< T~ ~uf<!fte< ~ttï<t eM~f~pyEmf afayj~efa

~p!!fMT<H. AJfT<M~J* ~r< tMf)t<fM ~f~pyefa'<~<r7'

~epye<<[< )! ~<!f<tp[<e-

xzi dt3 sov"to =nroto'vtrses ytyv~Saxoueiv. Cortnaïire c'estfaite;

nous re-f< Jt~ Toii~o «M«B)tMf y<yff5<T<os<Kf. Co<U!<M<re c Mt ya<m; nous re-âgé -roi~o 'W~te ylypéaxou«lv. Colmaître c'est

faie;nous re-

~iendroM ptas bas sur !e sens et ta valeur'de cette propositionet sur

yrôle

qc'eUe a joué dans t'histoire de !aphilosophie,

etqu'elle doit y

jouer encore.

Page 176: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

t64 PARTIE IL–ANALYSE

principe de sa continuité dans cette première classe

se place ce dont le mouvement est indivisible dans le

temps et l'espace. En second lieu, on appelle un ce

dont la raison est une, l'objet d'une seule et même

pensée, c'est-à-dire 3° l'indivisible en nombre ou l'in-

dividu (<j3.8'e~ç-of), et ~"l'indivisible en forme ou i'u

niversel (~Oe~ou).

« Passons maintenant du nom de l'unité à son es

sence et à sa nature.

« Qu'est-ce que l'un ? D'abord, comme nous venons

de ie voir, c'est l'indivisible mais le caractère propre

de l'un, c'est d'être la première mesure dans chaque

genre, et, avant tout, la mesure de la quantité. Car

on ne mesure la quantité que par le nombre, et le

nombre que par l'unité; l'unité est la mesure du

nombre en tant que nombre. C'est même parce qui)

est la mesure, que l'un est indivisible en toute chose

le primitif ne se divise point. Ainsi en général ce

qui nous fait connaître une chose est pour nous une

mesure. Aussi n'est-ce pas la'science, comme l'a dit

Protagoras, qui est la mesure des choses; ce sont

plutôt les choses qui mesurent la science.

« Quant à la nature même de l'un, on peut deman

der si c'est une essence réelle, comme l'ont dit ks

Pythagoriciens,et après eux Platon, ou bien si ce

n'est qu'un catégorème. Mais nous avons démontre

qu'aucun universel n'est une essence; l'un ne peut

donc être qu'en un sujet.

Page 177: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 165

<( L'un s'oppose sous plusieurs rapports à la multi-

tude, mais principalement comme l'indivisible s'op-

poseau divisible. A cette opposition se ramène celle

du même et de l'autre, du semblable et du dissem-

blable, de l'égal et de l'inégal.

« Le même a plusieurs sens il y a l'identité en

nombre, c'est-à-dire en forme et en matière, et c'est

ainsi que je suis le même que moi; l'identité de ma-

dère; l'identité de forme ou d'essence, comme celle

de toutes les lignes droites égales.

« Le semblable est ce qui est autre par le sujet et

de forme identique. L'autre et le même sont contra-

dictoires et n'admettent pas de milieu aussi sont-ce

des universaux entre lesquels se partage tout ce qui est

et qui est un il n'en est pas de même de la différence.

'<Les choses diHerentes diSèrent par quelque

chose, qui est ou le genre ou l'espèce. D'un genre à

un autre il n'y a point de passage ni de génération

commune mais le plus haut degré de la différence dans

un~nme genre est la contrariété, qui est l'opposition

desespèces extrêmes~. Les contraires sont donc ce

qui diNère le plus en un même sujet car le genre ré-

pond à la matière c'est donc une même matière qui

contient en puissance les contraires, et ils tombent

P.t <)<), 1.3o *M (t~f y<!p y&'e< ~Kt~pofïa

oJ< ~e< ~~f e~ d~t~e,

<Mr~e< <~<M< jMt) &n!ft6XtfM' TOM e!~e< Aa~potxnffu ye~ce~

M Taw &<aM<fM' eMf <&< Aw~M'. TA T&w &~aT&w AtMttfMt f~y<-

<~e ]MMTo T~f ~ftf~a'f.

Page 178: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

166 PARTIE Il-ANALYSE

sous ia même puissance c'est pour cela que la cou

sidération des contraires appartient toujours à une

même science 1.

« La première contrariété est la possession et lapri-

vation (e~c, 5-6ptjc7c). Mais la premièredesquatre espèces

d'oppositions est la contradiction car la privation est

une sorte de contradiction 2. Ensuite, puisque tout

devenir est le passage d'un contraire à l'autre, c'est-à-

dire de la forme à la privation ou de la privation a

la forme, il est évident que toute contrariété est un

privation, mais la réciproque n'est pas vraie H en

est donc de même pour l'un et la multitude, si c'est là

la contrariété à laquelle toute autre se ramène.

« Mais l'un est-il en effet le contraire du multiple.

et l'égal le contraire du grand et du petit? Examinons

d'abord cette dernière opposition. L'égal n'est le con-

traire ni du grand ni du petit pris séparément, et il

ne peut l'être de tous deux car il est impossible

qu'une même chose ait deux contraires.Deolus,

P. aOO, t. 28 A yo~ Ctjïi) TOM ~MWT/<MSKO~ Td ~S~ T~f ~TM

~Mt~Mf ~\e!o?of Aap~ofm' xojyap Ar<o?~t; ~ep! ~f y&'os a

~f o~ Te~e&t Jtt~op~ fte~<r7~.

P. 20)t, L ~0 & <T~pt!~M <t~T~<MT~ T~ e<T?<

P. SOt, L 99 At!~0!' ~Tt <} ft~f ~attrr~MS~p!!<M~

sis Si' ~M'!

~pt!tn< <!TM<o<! ~&Mt ~MtfTf~Ttt:. En effet tty a des oppositions

<tt

poMesmomet de privation qui

n'admettentpas de milieu, comme le

pair et lunpair;d'autres en admettent, et celles-ci seules sont des

ceatTMiét~e, comme le bien et le mal; onpeut

n'être s! bon n*

chant (p M: t 3}

Page 179: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 167

i c~aiparaît être un milieu entre le grand et le petit

or le contraire n'est pas un milieu, mais un extrême,

une limite. L'égal n'est donc que la négation priva-

hve du grand et du petit à la fois il est donc inter-

médiaire entre ces deux extrêmes.

« On peut élever des dmicultés semblables sur l'un

et la multitude. N'oppose-t-on pas la multitude au

peu, et deux n'est-il pas déjà une multitude ? L'un et

le peu seraient donc identiques, et le peu étant indé-

terminé l'unité serait aussi indéterminée, c'est-à-dire

oue!le serait multitude. Mais il n'en est pas ainsi ce

mot de multitude a deux sens, celui de p&MK?Hr~('a~X

Se:), et celui de beaucoup (?n~u), a quoi s'oppose le

peu, et le peu d'une manière absolue, c'est deux; le

peu est la multitude en défaut, et le beaucoup lamuiti

tude en excès (~«"~f, u~). La multitude, d'une

manière absolue, ie plusieurs, le nombre, s'oppose à

)'un comme des unités à ftMH~ c'est l'opposition de la

mesure et du mesurable, opposition de pure relation,

comme celte de la science et de son objet*. Ainsi il

n'y aopposition de contradiction entre l'un et le

multiple que par l'opposition du divisible et de l'in

divisible, mais l'unité c'est la mesure~.

P. :to5,1.13 Éa?< yap ~M~ftot ~oOot éf! fterp~Tof,ad <M'T~f«-

T~ <KWt~ j~ <!pt0~~ «~ e~ ~t~tf~of, oX~' cS<y)rep etp)tTa<T<Bf

<fpM

&'Mt- yjp (~rpOW,T~ (teTptfT~f, T<![UTt;<tf~)te<T<U. ÔftOMM Xe- ·

}ef~t ~ao?~~ J< CC p. tQS, '7.

Ha~on): ici une analyse rapidedes trois chapitres, vx. vn), fx et x

Page 180: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

168 PARTIE Il. -ANALYSE

LIVRE XI (K).

Nous avons ditque

nous ne recommencerionspas

l'analyse de ce que l'on a déjà vu dans les IIP, I\'

et VP livres, etqui

estreproduit

dans le XP avec

quelques diuërencesde détail. Recueillons seulement

une proposition dont le développement va occuper

les trois derniers livres

t<II semble évident que la philosophie première est

(Hept ~MtfT~itw), qui, ainsi que nous l'avons dit, ne tiennent pas réel-

lement à cequi précède.

CC. vu, vm. « Ily

a un milieu entre les contraires, parce qu7ils sont

compris dans un même genre; un des termes extrêmes peut devenir

l'autre extrême, tandis qu'il n'y a point de passage d'un genre à un

autre. Les contraires sont lesespèces (brméesdugenreetde tadinërenM;

les milieux sont composés des contraires, etc.*–C. ïx: e Pourquoi la

différence des sexes ou celle des couleurs ne constituent-elles pasdes

espècesdifférentes? C'est

queles

oppositions qui résident dans if

principe,dans la raison génératrice (~ T~S ~oyy) établissent seules

des différences formelles et spécifiques. Celles quine se fondent que

dans la matière n'en peuvent pas constituer de semblables; la mat~rf

ne peut pas produirede la diSférence. Or les sexes sont des affections

(~Ctt) propresà t'animât il est vrai, mais qui viennent

d'une modi-

fication extérieure de la semence, de la matière, du corps, et non pas

de t'essence. *–C. x < Quant à t opposition du périssableet de t'impe

nssabte (~CepT~f, ~pC~pTOf),ce n'est pas seulement une contrariété

essentielle etpar conséquent spéciËque.

c'est une différence générique.

Ainsi non-seulement les idées impérissables ne peuvent pas être,

comme on leprétend,

de la même espèce que les individus périssables

auxquelselles

correspondent,mais elles ne

peuvent pasêtre du memf

1

genre.i>

1

Page 181: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 169

ia science de l'universel, etpar conséquent

de l'être

et de l'unité. Mais l'être véritable n'estpas l'universel,

c'est quelquechose d'actuel et

quiexiste en soi. S'il

n\avait pas

un être éternel, séparé, immuable, com-

ment yaurait-il de l'ordre dans l'univers ?

P. 213. 14 Ma~of af <M~e<e T.'5f xaSo~ou Je<M e7f<u T!)!? ~)!-

M~EM))' sm<r7!{ftt!f. HMyap ~Jyo~ xct! 'cr&ra €T:<(r7~ftt; T&)f xi~oXo'~ xal

«~ TNf eoT<aT&)f ~o?' e~ a~ o(?T&)TNf 'ypf&T&)f ~ef&jf' TauTC*~e y/fOtT'

M' TOTe ~f )Mt! T~ & P. 2l4, i. ag II<B! yap e<r7<ï<Ta$<! T<0?

6fTO! <HJ<0!<X<tt ~<Mp«T7ouXOtt~fO!)TO<

–– P. 2 1 6, 1. 6 Tt)f 0!?-

Ct!p {t~ T<BfXttOo~OM €M'<M, (tS?L?LO~~6 TO~S T< Xft!~<Mp«~7o~.

t

Nous tirons aussi de la seconde partie du XI* livre, qui présente

).)te rédaction un peu abrégée d'unepartie

de la Physique, un passage

o)) se trouvent des idées importantes pour l'intelligencede la théorie

tttftaphysique

"II y a autant d'espècesde mouvement qu'il y a de catégories; les

<trcschangent

en quantité, en qualité,dans

espace,dans le temps, etc.

Lechangement s'opère

d'un contraire à l'autre, du positifau

privatif

Deplus.

rétre se divise en possibleet actuel, et le mouvement est la

réa!:sation dupossible

en tant que possible.Ainsi le mouvement par

<t-quel l'airain devient statue n'est pasla réalisation de l'airain en

Mitqu atrain, ma!s en tant

quematière de la statue.-Les philosophes

avaient défini te mouvement parla diversité ou l'inégalité, parce qu'il

leur semblait êtrequelque

chose d'indéfini. Or lesprincipes

dont on

composait la série négative paraissentindéunis par

leur caractère pri-

Mtif(p. :3t, 8 Tit~ ~T~pM <nxyT<M;~<Ma! ap~a~ &~ T~

<r7ept)T<-

"M e~MMœ!pM?o<). D'un autre côté le mouvement est indéfini puisqu'il

t est nipure puissance

ni acte. Mais il fallait dire le mouvement

est un acte imparfait, indéfini, parce quele possible,

dont il est la

réalisation, est indéfini. C'est donc un acte et ce n'en est pas un;

chose difficileà comprendre,

mais non pasimpossible (p. 23t, 1. 20 ·

~Me Xe~rerM To ~evC~f e~MM x~ ~~pystaf!M~

ef~p~eMf t!)fw

<'P''(t~t~f, MgM<~t ~aXe~f, ~f~e~o~f<!f eM'm).–L'infini n'apoint

~tistence actuelle, et aucun être actuel n'est iunni (p. a3' 6

Page 182: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

1701

PARTIE IL–ANALYSE

LIVRE XIII (M)

«Nous avonsparlé

de l'êtrequi

tombe sous les

sens mais ils'agit pour

nous de déterminer s'ily

a

hors des choses sensibles une essence éternelle et

immobile, et, au cas où ily

en aurait une, d'en déter-

miner la nature. Examinons d'abord les opinions des

autres; nous verrons si l'on doit reconnaître comme

une essence de ce genre l'idée et la grandeur mathé-

matique.–Quelques-unsontidentiné l'idée avec le

nombre mais considérons d'abord lesgrandeurs

ma-

thématiques (~ ~60~77~)en elles-mêmes et indé-

pendamment de leur rapport aux idées nous pas-

serons ensuite aux idées en elles-mêmes. Mais nous

tC<d <~r<oJx &r7<fà'epye~t

e!fM To<~re<pot~ Jn~of. L. a4 Â~' a~

tWMf To <~teXe~e~[ ~s(po~). En effet si i'inSn! était divisible, ses

parties seraient infinies, ce qui estimpossible;

et d'un autre côté, il

nepeut

être indivisible car il faut bienqu'il

ait de laquanti)'

(~o<Mf y~ e!fa< fMy~)

On tirepeu

de fruitpour l'intelligence des livres XIII et XIV d"

commentaire deSyrianus, qui n'est encore puMié que

dans la tM

duction latine de Bagolini, très-incorrecte d'ailleurs et obscurcie ~r

de nombreuses fautes d'impression (t558, in-4°). Ce commentaire

précieuxdu reste pour l'histoire de la

philosophie,est une réfutation

qui, presque toujours, porte à faux.Syrianus mêle, sans aucune cri-

tique, les idées néoplatonicienneset

néopytmagoridenmes à celles des

Pythagoricienset de Platon. – Michel

d'Ephèse, dans son comme)'

taire sur ces deux livres, commentaire dont Brandisdésigne i'autcuf

par le nom de Pseudo-Atexaudre, copie souventSyrianus.

Page 183: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 171

nous étendrons surtout sur la question de savoir si les

nombres et les idées sont les principes et les essences

des êtres.

« Les grandeurs mathématiques sont dans les choses

sensibles, ou en sont séparées, ou sont de quelque

:tuuc manière; le doute ne porte pas sur la question

de l'être, mais de la manière d'être.

«Dans la première hypothèse', lescorps seraient

indivisibles: car si le solide mathématique est dans

ic corps sensible il se divisera avec ce corps comme

s'il était ce corps même. Ainsi le solide se diviserait

par la surface, la surface par la ligne et la ligne par le

point; en sorte que, si le point est indivisible, la ligne

le sera également, puis la surface puis le corps.

Si au contraire le solide mathématique existait séparé

des corps réels, il y aurait non-seulement des solides,

mais des surfaces existant séparément de plus ces

solides séparés ayant aussi des surfaces, et le simple

précédant le composé, on aura trois surfaces séparées

pour une surface sensible t" surface séparée anté-

rieure à la surface sensible a" surface du solide sé-

paré 3° surface antérieure aux surfaces du solide

séparé, et ainsi de suite. C'est un entassement ab-

surde. Et lesquels de ces éléments considérera la

science mathématique, qui doit s'attacher au pri-

Dansl'hypothèse où les fI4!J1'If14TU'II., ~ca9ryxsixa2 ~seyé8n (p, 262,

Dan< fhypoth~se corps, non pas seulement en puissance, cece~) aenuent <tMM !ex corps, non pas scutement en puissance, ce

T" estopinion d'Aristote, mais en acte.

Page 184: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

172 PARTIE IL–ANALYSE

mitif? Il en sera de même pour l'arithmétique, de

même aussi pour l'astronomie, pour l'optique, pourla

musique. Les grandeurs mathématiques n'ont donc

pas une existence séparée. Et en effet, qu'est-ce quien ferait l'unité? Si cette unité ne réside pas dans

l'âme, dans un principe intelligent, elles sont multi-

ples et vont se diviser à l'innni 1.

« Les grandeurs mathématiques ne sont donc ni

dans les objets ni hors des objets; il faut qu'ellessoient de quelque autre manière. En effet toute

science peut considérer une chose sous un point de

vue spécial, sans qu'il y ait autant de sortes d'exis-

tences séparées de cette chose qu'il y a de points de

vue différents. La physique spécule sur les êtres en

tant que mobiles, indépendamment de leur nature

et de leurs accidents, sans qu'il soit besoin de sup

poser des mobiles séparés des objets réels; de même

l'optique néglige la vue en elle-même, pour ne traiter

que des lignes, etc. et plus l'objet de la science est

primitif selon l'ordrelogique, c~est-à~lire, plus

il est

simple, plus aussi la science est exacte et rigoureuse~

Ainsi la science n'est pas pour cela dans le faux, car

ce n'est pas dans le choix du point de départ que

1 P. :6S, 1. 7 ÉT< slvi «~ 1MTE &r7<M T<t ~OMt ftey~t);

y<~ &~tS9ot ft~pe< ~X~ ~y eJX<)- e~e f~ «~

xtj JtaMerat.

P. 964. t. Ke<<~ <Ë<' cep! ~pot~p&w T~ Xo~M M< a)~

<~Mp!M', T<KM<!T&)(M~~Of ~et TO Mtp<

Page 185: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 175

réside jamaisl'erreur'. Le mathématicien est même

fondé a prétendre qu'ilconsidère des êtres, car il

y

a l'être enpuissance comme l'être en acte

« On nepeut pas dire non

plus queles mathéma-

tiquesne touchent ni au bon ni au beau il

n'va de

bien, il est vrai, que pour l'action et le mouvement;

mais l'ordre, lasymétrie,

la limitation, ne sont-cepas

les plus grandes formes du beau ( -n'u ~o~ ~e~<t

t!) ?

c Passons à la théorie des idées, et considérons-la

d'abord sans toucher à celle des nombres, mais telle

quela

conçurentceux

quien

parlèrent lespremiers.

P. 964, 1. 2~ 0<! ~ap Ef T<tM ITpOTOKTectTO ~EU~Oî.

P. ':65, 1. 8 Gc7e &A TouTOop8~î

o!ye<u~rpa< ~eyot«n, xai

trep!6MNp AftÀ~'ofTOM, JM! ~M~ ëo~' J<T7~t<

yapTÔ T~ f<~f efTe~eye~t

Te y~<x&.–Syrumus (f° 55 a) nous apprend qu'Alexandre d'Aphro-

disée et un autre commentateur, nommé Aristote le Jeune, donnaient

deuxinterprétations contraires de ce

passage. Le premier pensait quela figure mathématique

est en acte dans lecorps réel, et n'est

que

puissance désqu'on l'abstrait; le second, que

laligure n'est qu'en

puissance dans lecorps réel, et ne vient à l'acte que par l'abstraction.

Syrianus préfère la première de ces deux explications. L'une et l'autre

nous semblent à la fois vraies mais incomplètes. Lafigure, ainsi

quetatâtt dit Alexandre, n'a de réalité, n'est en acte

que dans uncorps

réel, et laligure abstraite n'est que l'expression d'une possibi!ité; mais

d'M autre côté, comme le disait Aristote le Jeune, elle n'est dans

lecorps même qne potentiellement, puisqu'elle n'y

estqu'imparfaite

etenveloppée :on l'a vu au livre IX

(voy. plus haut, p. t6a). Ainsi ta

figure mathématique n'estqu'en puissance

dans lecorps,

et elle n'est,

dans lapensée qui

la réalise, qu'une possibilité. Elle n'est donc, de

toutemanière, qu'en

pnissanc<

Page 186: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

I7& PARTIE IL–ANALYSE

«Cette doctrine naquit de celle d'Heraclite. On

admit avec lui que toutes les choses sensibles

sont dans un flux continuel si donc ily a de la

science, il fallait chercher hors du monde sensible

des natures immuables. Socrate se renfermant dans

la morale, avait le premier cherché l'universel par la

définition; mais il ne séparait pas les universaux

Ceux qui vinrent ensuite les séparèrent, et lesappe

lèrent formes ou idées des êtres ajoutant ainsi aux

réalités qu'il fallait expliquer des entités nouvelles,

comme si pour compter des objets on en doublait le

nombre. Les raisons sur lesquels on veut établir

la croyance aux idées ne sont pas démonstratives les

unes ne méritent pas l'examen, les autres conduisent

à admettre plus d'idées que ne le veut cette théorie

même. t° Si la preuve de l'existence des idées est

tirée de la nature de la science, il y aura des idées

de tout ce qu'on peut savoir. 2" Si on argue de ce que

les choses cnt toujours quelque chose de commun, il

il y aura des idées des négations mêmes. Ily aurait

encore, à y regarder de près, des idées des relations

dont il n'y a cependant pas de genre en soi on arrive

même à poser le troisième homme 1.-Enfin il faudrait

C est~dire qn it y auraun troisième homme outre i homme indu idu

et t homme génériqae ou idée de l'homme car thomme et ridée de

l'homme ne peuvent se ressembler que relativement à un troisième

terme quileur soit commun, etc. Sur les diverses formes données a

cet argument par le sophiste Potyxcnc. par Aristote dans te !ti"~

Page 187: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 175

admettre des termes et idées des accidents car ii n'y

a pas que les essences que l'intelligence conçoive d'une

même pensée; et pourtant, puisque dans cette doc-

trine la participation aux idées n'est pas accidentelle

niais essentielle, il ne devrait y avoir d'Idées que des

essences.

« Que servent les idées aux choses sensibles ? Elles

ne sont pas la cause de leur mouvement et de leur

changement.Elles n'en constituent pas non plus l'es-

sence puisqu'elles ne sont pas en elles. Les consti-

tueraient-elles par mélange? cette opinion, qui rap-

pelle les doctrines d'Anaxagore et d'Eudoxe, entraîne

trop d'absurdités. Dire que ce sont les modèles des

choses, ou ce à quoi elles participent, c'est se servir

de phrases vides et de métaphores poétiques. De plus,

il y aurait plusieurs modèles d'une seule chose :.ainsi,

pour l'homme, l'idée de l'animal, celle du bipède et

celle de l'homme. Enfin les idées elles-mêmes au-

raient leurs modèles et seraient à la fois types et images.

«Mais l'essence ne se sépare pas de ce dont elle

est l'essence. Si donc les idées sont les essences des

choses, il est impossible qu'elles en soient séparées~.

du!hp! ~eSf~ et par Eademe dans son

Hep! ~e&x, \oy. Alexandre

't'AphrodIsee, in JMi'(<y~. ï, TH.– Brandis a donné le texte de ce

passage d'Alexandre dans sa dissertation De perditis ~lrM<o<e!n MrM,

p. t8-M.

P :6g, L t5 ÉM ~~HM' ~f <!Jt!fNMf ~pMe~MH t)tf së<"a"

't MMt- ~7e ~itiif a! t~u ot!<~<MT<Bf ~payftaT<MfoSarM

~&'pM e!Ex

Page 188: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

176 PARTIE IL–ANALYSE

!1 est dit dans le Phédon que les idées sont les

causes de l'être et du devenir mais il ne suHitpas

de la forme, il faudrait encore une cause motrice.

« Arrivons aux nombres, à la doctrine qui les con.

sidère comme des essences séparées et comme les

premièrescauses des êtres.

Dans cette hypothèse, il y a trois cas possibles:

ou chaque nombre est différent des autres par sa

forme (v~ e!<~), et ses unités ne peuvent absolument

se combiner (eM~T~) avec les unités des autres:

ou bien ils se combinent entre eux et les unités

entre elles comme dans les nombres mathema

tiques, ou enfin les unités peuvent se combiner dans

un même nombre, mais non d'un nombre à l'autre.

De plus, il ya des philosophes (Platon) qui ont admis

deux sortes de nombre, les nombres idées, où il y aa

de ia priorité et de la postériorité, et les nombres

mathématiques D'autres ne reconnaissent que le

P. 2*7t, t. 6 0< ftSf oBf aftpor~COM <pM!f eîfCH TO~î <MM~tO~,Mt

f~ ~X<M T~ tMjTEBOftM~

&f7ep0fT<~ ~& T~f dé (ta9)~MtT<X~ ~~p~

T<M~t< T<t <H~Tc!. M. Trendelenburg (Pta<on.de id. et nilm.

<toc<r. p. 82 )trouve ceci en contradiction avec ce passage de l'Éthique

Nicom. ï, tv OJx ~o&Ktf ?« ors T~ ~Moreoo)' t~tf ïo ~<rrepct

~eyot~ &<!nep o< Tf5faptO(M5f

M~ef «[Te<ntet!a<Kw. En. conséquence

ilpropose d'ajonter

une négationdans le

passage de la Métaphy-

sique, et de lire T~f t~ f"t ~ofMf. Brandis ( Ueber die Zot~'i

<<'tM, etc. R~<M. MM. '828, p. 563) défend l'ancienne leçon

avec raison ce nous semMe. Mais nous nepouvons

admettre la su-

Page 189: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 177

11

(mele nombre mathématique, qu'ils considèrent

comme le premier des êtres, et le séparent des objets

iution qu'Hdonne de la contradiction que M.

Trendelenburg avait

cru trouver entre les deuxpassages

citésplus haut. Selon Brandis,

dans lepremier,

Aristote attribue aux nombres idées la priorité et la

jM~enorité,en ce sens qu'Us ont entre eux un ordre de dérivation

logiqueet essentIeHe*; et dans le second, au contraire, il en ex-

clut la prioritéet la

postériorité,en ce sens qu'ils ne se constituent

pasmutuellement et ne sont pas facteurs les uns des autres. On

pourrait répondre que cette explicationne rend

pas compte del'op-

positionétablie formellement dans la

phrasedu XIH* livre entre le

nombre idée et le nombre mathématique; car tes nombres mathé-

matiqucsont aussi entre eux un ordre de dérivation

logique et es-

sentielle. La suite du XIIF livre nous fournit uneexplication plus

simpledans les différents nombres idées les anités sont essen-

tiettement différentes; elles sont d'un nombre à un autre, dans le

même rapport queces deux nombres; ainsi les unités de ia dyade

sont antérieures paressence à celles de la triade, et il en est de même

des nombresqui

en sont respectivement composés; la dyade idéale

en soi a donc une antériorité d'essence et de nature(ro xotra ~umn

)M( e!M<M'opoTepof)

sur ia dyade contenue dans ia triade Idéale, dans

ia tétrade idéate, etc. C'est ce qui nousparaît

résulter surtout avec

évidence de la phrase suivante, p. 276, 1. 22 Kai ~fteM u~o~t-

ë&o~ef ~Xax ~f «t! ëf, x<ï) e<if /<Mt ~f~ct, ~uo e!f<M, o!bt) ïo ayaSof

<!HTO X<(~f, X«! ~pOpCMTOf)M~ i~Of oi < O~T<M~X~OttTe~ OU~ TM fM-

~M- e~Te ft~ &T7< -e<&)f aptCft~îo Tpt~oî ajï~ o T~: ~<xJo~,

~«{MKT?~' e~Te ~7~ ~Xe~f, ~t)Xof <)'T<xai !<T<H<~fe<r7< Tp <!ua& (si la

triade est plus grande que la dyade,elle contient un nombre égat à

ladyade)..6o7e

oSro< c~K~ooo: «tjT~ T~ ~u~t. ÂXX' o<?xe~eTat,

:< ~p~T<!< T~t ë<T7<f <p<Cf<6<xe< Je~Tepo:~ oj~ &TOfT<t<<tt M~at

~"9~. CK p. 273,i. t-2; 22. Les nombres

mathématiques au

CeUe explication pam!t se rapprocherde oeUe que donne en

passant Sv-

'MatM(ap. Brand. De perd.

~rMM. Htr. p. &5) E!fa< yap xai et~ïtxof

<<9fto« ~M~ero, T<t~<f ~JfT&w ~f ajTa) T<i5f e~mt'.

Page 190: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

178 PARTIE IL–ANALYSE

sensibles 1. Les Pythagoriciens en font l'élément même

des choses sensibles et ne l'enséparent point seuls,

ils ont attribué de la grandeur aux unités des nombres.

en sorteque

ce ne sontplus

des unités 2. Un autre

contraire ne diScrent pasies uns des autres en

qualité, mais en

quantité seulement, et par l'addition successive d'unités nouvelles

(XMI, 2~3,}.

3o).D'ouil suit qu'ils ne sont pas singuliers comme

les nombres idées(I, 20, 1. 26; XIII, 372, t4et

suiv.), et qu'ils

n'ont pas de formes différentes d'eux-mêmes car la forme c'est )a

qualité.De !à la

phrasecitée

plus haut de l'Éthique Xicom. EUe s'ex.

plique parfaitement parles deux suivantes qui tennineront ccHe

longue note ËT< èv <~o«J?rap~e<

To~porepof x<~

~7epo~. oux &7<

XOtfOf st'!MpZ

T!tCT<[X*! TOUTO~<Np«I?0~. (Eth. Eudem. I, Vt!t.) ËT< à

0~ TO ~pOTepOf X0!< &~7ep0f ~<r7< O!~ oMf TE TO TOUTMf eH'M r.

~MpO: TaCTf!, X.T. (J~?<0~~ ÏIÏ, U, 50, 1. t9.)

P. 2~t, LtO 0< TOf ~M6t)fttTtXOt' ~O~Of aptC~Ot) e!f<M TO!;

<B6~

TOVT&) ~fT&tf xe~<<)p«r(<eoofT&jf afo~!tTc!)t)' et

p. a85, L 26 0< ttef ) M

Tft ~M~(tC[T<xA ;tOf<W ~OtOUftS~ 'COfpiÏ Ta <M<709!Tt[,O'pMfTM T~f ~EC<T:

e!~<! ~MO~petCtfX<U -S~a~ff, a~o~af a~O

TOMeM~T<XOM<!p<9ttOS)i~

ïoy fMtCtffMtTMof eco~~af. C'est à Xénocrate qu'Alexandre d'Aphrodis.

rapportaitcette opinion, ainsi

que Syrianuspar qui nousl'apprenons:

Michel d'Ephèse qui copie Syrianus etPhilopon qui copie

Michel

d'Éphese.Brandis

(De perd. libr.p. 46) et Ritter ( Gesch. JerPAf~.

p. 483)!es ont suivis. Cependant, et

quelque grave que soit Fautoritt

d'Alexandre, nous croyons que l'opinion qu'i! attribue ici à Xénocrate

est celle de Speusippe, tandisque la vraie doctrine de XétMcrax

est celle de l'identité du nombre idéal et du nombre mathématique:

mais nous nepouvons développer ici les preuves sur

lesquellesnous

établissons cette opinion. Nous le ferons plus tard dans un Essai s"r

l'histoire et les doctrines de l'ancienne Académie.

P. 271, t. t4:T~f y<tp <~ofoMpttfof x<![Ta<M[eu<ott<y<f e$ *p'

CftMf. <!r~f oJ ft0faj<x<5f, c~XXotT<t~ (tOfa~M ~oXaft6~ou<T<f ~ye<f fJ'e:

Cof. Syrianus (f 97-8) commet une erreurgrave en identifiant ces

apt~ftoto<! ~o~<xo< avec les <ï<n!~6~<)To<. Trendelenb. toc. cit.

p. 73-77

Page 191: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 179

12.

ne reconnaît quele nombre primitif idéal'. Quel-

ques-unsidentifient ce même nombre avec le nombre

mathématique~, etc. Aucune de ces hypothèses ne peut

être admise.

1. « 1 Si les unités des nombres idéaux ne dif-

férent pas les unes des autres et peuvent se combiner,

ces nombres se réduisent aux nombres matbématit

ques. Alorslesidées ne seront pas des nombres carcom-

ment un pur nombre serait-il l'homme en soi et l'ani-

mal en soi? Et si elles ne sont pas des nombres, elles

ne* sont rien du tout, puisque le nombre comme l'idée

est formé de l'un et de la dyade Indéânie. – Si au

contraire les unités sont absolument différentes et ne

peuvent se combiner entre elles, le nombre qui en est

formé n'est pas le nombre mathématique et n'est pas

non plus le nombre idéal car la première dualité ne

pourra plus être formée de l'un et de ladyade indé-

finie. – Et pourtant, que les unités soient différentes

ou indifférentes entre elles, les nombres ne se for-

ment pas moins par addition successive. Mais si toutes

les unités sont toutes dinerentes et ont par conséquent

UH ordre entre elles et de l'antériorité les unes rela-

P. 271, t. t8. Nous ne savons à qui appartenait cette opinion

Mgntiere. Syrianus en donne une explication tout alexandrine et évi-

demment arbitraire (ap. Brand. De perd. libr. p. 47). Michel d'Ëpbèse

!'b)d.), sans citer aucune autorité, ta rapporte à unpythagoricien qu'il

ne nomme pas.

X~Mcrate.VeyetC)-desMM,p. t'y 8. note) s

Page 192: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

180 PARTIE IL–ANALYSE

tivement aux autres, comment tous les nombres

idéaux sortent-ils du même principe, l'un et ladyade

indénnie?– 3° Si les unités ne sont différentesque

d'un nombre à l'autre*, on arrive encore à des con-

tradictions ainsi, si les unités du nombrecinq sont

différentes de celles du nombre dix, la dizaine ne

sera pas formée du nombre deux fois cinq.« Les unités ne différent donc pas les unes des au

tres, ni en quantité, ni en qualité; tous les nombres

sont entre eux égaux ou inégaux. Il estétrange de

soutenir qu'une triade n'est pas plus qu'une dya~e;

or, d'un autre côté, si la triade est plus grande que la

dyade, c'est qu'elle contient un nombre égal à la

dyade, et qui, par conséquent, ne diSere pas de la

dyade même, ce qui est contre l'hypothèse des idées

nombres car alors les idées seraient contenues les

unes dans ies autres, et ne seraient que des parties

d'une idée totale.

Il. «Quelques-uns, sans admettre l'existence des

idées, ni comme idées, ni comme nombres, consi

dèrent les nombresmathématiques comme les prin

cipes des choses et l'un en soi comme leprincipe

des

nombres2. Mais si l'on suppose l'existence de cet un

primordial, différent désunîtesnumériques, ne iaudra

t-il pas reconnaître aussi avec Platon une première

dyade, une première triade, etc.?

Cette hypothèse est. celle de Platon. Cf~N<<ap&.p. ~78, 1. t*

Spensippe. Voyez plus haut, p. t~8, note t

Page 193: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTÂPHYStQUE. 181

ML Mais 1 hypothèse la plus absurde, c'est la troi-

sième celle de l'identité du nombre idée avec le

nombre mathématique; carles objections qui tombent

sur les deux autres, tombent à la fois sur celle-ci.

«La doctrine pythagoricienne échappe & quelques-

unes de ces difËcuItés mais il y en a d'autres aux-

quelles elle est seule sujette. Elle ne sépare pas le

nombre des choses sensibles mais comment les gran-

deurs pourraient-elles être formées d'atomes?') J)

Aristote élève ensuite une foule d'objections sur la

constitution du nombre dans tous ces systèmes. « Si

toute unité est le résultat de l'égalisation du grand et du

petit, comment la dyade du grand et du petit sera-t-

elle une, et si elle est une, en quoi dISere-t-elle d'une

unité? De plus, l'unité lui est antérieure car, si on

supprime l'unité, il n'y a plus de dualité.–Le nombre

idéal est-il indéfini ou fini? S'il est indéfini, il n'est

ni pair ni impair, ce qui est absurde; s~tl est fini,

jusqu'à quel nombre ? et il ne suffit pas d'affirmer, il

faut donner une raison. On s'arrête à la décade 1; mais

pourquoi ne pas aller plus loin ? Les dix premiers

nombres ne peuvent suffire pour tous les êtres. Les

idées vont donc manquer bien vite 2.

«Enfin, est-ce l'unité qui est antérieure au nombre

P. 280, L a3 E! f*~M T~e<!e<~o~o aptO~o~,<&nrepT<~ ~a<n,C'est à la doctrine de Platon

que ceci fait attusion. P~. tîl, ao6 b

MA.M~p< yap A~t~ wte? T~ ~(Mw. Cf. Met. XII, a5o. 18.

MH. ~8., iS.

~0, Ln~MT~ (t~ M~ ~<Ae<~« tt

Page 194: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

182 PARTIE Il. -ANALYSE

ou le nombre à l'unité ? L'unité est la partie, l'élé-

ment, la matière le nombre est la forme du tout; or.

la'partie et la matière précèdent dans le temps; le tout

la forme précèdent dans l'ordre logique (~~f ~~9;

Te <~~-nt~~fo)-). Mais les Platoniciens font à la fois

de l'unité la matière et la forme. Cette confusion est

venue de ce qu'on a pris les choses par l'universel et

par lesmathématiques à la fois; on a donc

composé

les êtres d'unités, d'atomes mathématiques, et en même

temps on leur a donné l'unité pour forme génératc.

Tout cela ne reçoit un sens vrai que par la distinc-

tion de l'unité en acte et de l'unité en puissance'.

«On peut faire des objections analogues sur les dé-

rivés des nombres, la ligne, la surface et le solide.

On les forme de l'un ou du point et d'une matière, di-

sent quelques-uns, telle que la multitude, d'une es

péce du grand et du petit, etc. Mais alors quelledit

férence y<at-U entre une ligne, une surface et un

corps? D'ailleurs, de ce que les nombres sont des

qualitésde ces grandeurs et s'en affirment, on ne de-

vait pas conclure qu elles sont constituées par les nom

bres. Ici comme pour les idées, on a séparé f uni-

versel du particulier, et ici encore on peut élever cette

questions'il y a un universel tel que l'animal en soi,

P. a8a, t. t5 Atïtof ~e Tt!< c<~t&m)ou<n)f a~tapï~M ~T< <~M ef

tJMtOttfM~MM' ~<h{pMOf«~ éx T<Sf Xo~Mf T<5tt <M[MXot<, ~7' ~te~W

f5t ~7<~tM<' TO tf <M T!!f "p~f ~}tMW. Aftt TO "aC~nu ~)Kit' M

<«!tn)yop<wf<eM<c ~f xai «ÙTM< <5~ ftepo< ~eyof, x. T. a.

Page 195: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 185

c~t-cc l'animal en soi qui est dans l'animât particulier,

on un animal différent? Et quand on pense l'unité

t)ans un nombre, est-ce l'unité en soi ou une unité

(JiHt')'pnte si au contraire on ne sépare pas l'univer

tt't. il n'y a plus dedunculté*.

Toutes ces théories sont donc fausses, et on con-

<oit aisément la divergence d'opinions de ceux qu<

s'\ sont engagés.

«Quant a la théorie des idées, il fallait se borner,

comme Socrate, à reconnaître l'existence des univer-

'.aux. sans lesquels il n'y a point de science; mais

il ne fallait pas les séparer du particulier. Si on les

sépare, et qu'on les compose d'éléments, ces éléments.

cesprincipes des idées seront particuliers ou géné-

raux particuliers, ils seront limités en nombre il n'y

en aura qu'un de chaque nom, et par conséquent il

)' aura pas non plus de pluralité dans leurs produits.

Bien plus, il n'y aura rien autre chose que les élé

nu'nts mêmes. Si au contraire ces principes sont des

universaux il en résultera que le non-être sera an-J.

téripur à t'être car les principes sont antérieurs aux

produits or l'universel n'est pas le véritable être

'<Telles sont les objections encourues par ceux qui

P. 983, t. 3o ÔMW T« $1jt te XtOoÂ&M, -EfOTepOtfTO !~5of <!UTOef T~

{M.)~Kpo« ajfou ~ow' Touro y<~p ft~ ~p<<r7ou (tëf <i!fTo< oJ~e~a~

~o"t<re<<t)Mp~f' t~Mf ~ap fo~ TM dv T~ A!of& ïo &' xai ~Xttf ~f ap<-

COTejMf tBMTOMefTt ~tpOf;

~88, t. t6 A~Xat ~nn* ei'ye ttaSoXou at<!p~a< )) < ex TOUT&))' ot?-

Page 196: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

184 PARTIE IL–ANALYSE

font de l'idée une unité séparée des choses sensibles.

etqui la composent d'éléments.–Mais, dit-on, puisquela science est de sa nature généralité., universalité,

ne faut-il pas que les principes des êtres soient

des universaux? La prémisse de ce raisonnement est

vraie en un sens et fausse en un autre car il y a la

science en puissance et la science en acte; la puis

sance, c'est la matière indéterminée, qui se rapporte

à l'universel, à l'indéterminé; l'acte, au contraire,

c'est l'essence réelle d'un être réel. Ainsi, ce que

nousvoyons, c'est telle couleur déterminée et parti-

culière, qui n'est une couleur en général que par

accident'. M

LIVRE XIV (N).

«En général, les philosophes dont nous venons de

discuter les hypothèses, posent comme premiers

principes des contraires, l'un et le grand et petit, ou

ia multitude, ou l'égal et l'Inégal, en faisant du pre-

mier des deux contraires la forme, et du second la

e&M <M<C<!X<w,~7<H o<!<r&t<rp<~epop otMwt. T~ ft~f yàp

xaO~oM e~

<M?o&t,T~ <y7o<~e!bf <M~«PX~ "~o~of'~tp~Tepof

? r~ o?o<~e!bf"N

<~X~ ~X~ ~7<Mxe!<!f ~<r7~.

P. 98~, 1. X &ydp ~ino7t{(t)t, <S<nt6p X<~ TO At~7<K~<M, Jtt?0t,

&' T~ t~' ~M~« T~ ~epye~[' t*~ oBx A!M~ue <&<< Tou xa6<&~

aSte !M< <t~aM?e~ roC <tft6oXoM xat <tep&y7<K<~<f, ~pyeM «p*

t~t~Mt 'M~ <&p<fOU TO~e Tt oB~tt TOt?~ TtttOt, X.T.X.

Page 197: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 185

matière. D'autres, généralisant davantage, opposent

à l'un l'autre et le différent, ou l'excès et le défaut

f M7!p~0t' X)TBJ~e~MfOf). )(7ù~mpéyr K\j7ù V7l£pe~[.ŒYOV

<(Mais l'un n'est pas le contraire de la multitude

car la multitude est le contraire du peu. Le vrai ca-

ractère de l'un, c'est que c'est la mesure des choses

c'est donc la mesure de la multitude, et le nombre

est à la fois une multitude mesurée et une multi-

tude mesurante~. Quant à l'égal et à l'inégal, au

grand et petit, au pair et à l'impair, ce sont plutôt les

accidents que le sujet des nombres; ce sont de pures

relations; or la relation n'a d'essence ni en puissance

ni en acte 2, et il est absurde de donner à l'essence des

éléments qui ne sont pas des essences. Mais il suf-

fit de faire voir, sans entrer dans la discussion, qu'il

est impossible que les choses éternelles soient formées

d'éléments; en effet, elles auraient de la matière or

tout ce qui a de la matière, c'est-à-dire du possible,

peut être ou ne pas être, et par conséquent n'est

point éternel.–Quant à ceuxqui prennent pour prin-

cipe contraire à l'unité une dyade indéfinie, sans en

faire une relation comme l'inégal, le grand et petit, etc.,

ilsn'échappent pas par là à toutes les objections.

P.2<)t, t. )6 Stf~M~fet yftû

sd &* Aï< {t~TOOf cXtjSoM T<t~0:, )MMP

fC~ ~ft <~0o< ttqMTpttft&WFX<t! <AttOo< f~TjM)f.

P.2<)9, t. 8 T~

-afootT{ tnh'MM' ~«r7<[ ~<t ït: o<Mct T&)f

")}op!5t! <s7f,~Mt! ~o~pa weC ~M«H? <<[<<to<yoB' To ~e wpof si ethre

~et eJ~M <~e ~epye~t.

Page 198: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

186 PARTIE Il-ANALYSE

« La cause principale qui produisit ces théories. « st

qu'on posa la question à la manière des anciens (~ a~

~<nM ~p~'xMc) on crut que tout se réduirait a i'unitc

absolue, si on n'allait pas au-devant de l'argumentation de Parménide; il fallait donc montrer qu'il y adn

non-être onexpliquerait alors la pluralité des être!.

en les tirant de l'être et dequelque autre chose. Mais

il y a autant de sortes d'êtres qu'il y a decatégories,

et il est absurde de poser unprincipe unique pour

l'essence, la quantité, laqualité, etc. Il en est de

même du non être, qui a autant de sens que l'être;

et de plus, ondistingue l'être en acte et l'être eo

puissance, qui constituent tout devenir dans le pas-sage de la puissance à l'acte. Ce n'était donc pas as-

sez de chercher les principes de l'être il fallait cher

cher ceux de la qualité, de la quantité, etc.; il fallait

chercher pourquoi les relations dont on pose en

principe la pluralité, et dont on énumère les espèces.

inégal, grand et petit, peu et beaucoup, large, pro-

fond, etc., pourquoi ces relations sont plusieurs et

ne se réduisent pas à une absolue unité; en un mot. il

fallait poser iaquestion non pour une seule catc

gorie, mais pour toutes les autres; et la solution

nérale c'est que la pluralité entre dans toutes les ca-

tégories par lesujet, la matière dont elles sont

inséparables Mais, à vrai dire, on n'a nullement

P ~9~. !i: ~M yàp TO~<t)p«f7a e?f<U ty TO ~0~;M'~

ero~a )<yM<~<u «! eiffu, <fo~ -re ~oX~a :![MH xt< no~a.

Page 199: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 187

approfondile problème pour la première et la plus

haute catégorie; on n'a pas dit comment il peut y

avoir plusieurs êtres, c'est-à-dire plusieurs essences

en acte. On n'a parlé que de la pluralité des quan-

titcs car le nombre, l'unité, etc., tout cela se rap-

porte a la quantité. Si donc l'essence est différente

(le la quantité,on n'a rien fait pour expliquer l'es-

sence

«Comment donc pourrions-nous croire que le

nombre, identique à l'idée, est la cause de l'être? a

Comment accorder au nombre une pareille vertu? Les

pythagoriciens y lurent conduits par l'observation du

;{!'and nombre de rapports numériques qu'on trouve

dans les corps, et dans la musique, et dans le ciel, et

en beaucoup d'autres choses. Mais for mer de nombres,

d'éléments qui n'ont ni légèreté ni pesanteur, des choses

pesantes et légères, ce n'est pas parler de ce monde,

mais de quelque ciel inconnu~.–Quelques-uns con-

cluent de ce quela ligne a nécessairement pour limite

le point, et la surface la ligne, etc.. que la ligne et le

point ont une existence séparée. Cela est absurde il

v a aussi une limite a tout mouvement, et il ne s'ensuit

pasque cette limite soit un être & part.

<!Pour ceux qui ne reconnaissent que les quantités

'natbématiques, quelque critique peu facile pourrait

leurobjecter encore que ces prétendus éléments ne

P~6. i. et aqq

'98.t.4

Page 200: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

188 PARTIE II. – ANALYSE

se servent de rien les uns aux autres car supprimez

le nombre, les grandeursn'en subsistent pas moins;

supprimez les grandeurs, l'âme et le corps subsistent.

Cependant la nature ne nous apparaît pas ainsi dé-

cousue comme une mauvaise tragédie'.

« La théorie des idées échappe à cette objection: car

elle forme les grandeurs du nombre et de la matière.

elle n'est pas obligée d'attribuer, par une pure hyno

thèse, le mouvement au nombre mathématique

Mais que devient-il ce nombre mathématique qu'eue

appelle moyen entre le nombre idéal et le nombre sen-

sible ? Composé des mêmes éléments que le nombre

idéal, de l'un et de la dyade, du grand et petit, com-

mente'endistinguera-t-il?, etc.

« Tout cela est déraisonnable ce ne sont que Ion

gues paroles, selon le mot de Simonide, longs dis-

cours comme ceux des esclaves qui n'ont rien de bon

à dire. Et ces éléments, le grand et le petit, il semble

les entendre crier comme des blessés, parcequ'ilsne

peuvent engendrer de nombres au delà de la dyade 2.

« Les Pythagoriciens voulaient expliquer le monde

P. 298,ËT< ~tn~m~e<ef ~f w {*))Xh« e~ep~

(Mf

~Mtte it ~nt ~eMwjKM!!f eB~ àt T&w <p<m'o(t~aw <S<Dtep fto~tp'

Tpay~h.

P. tg~, t. 3o r~feT<M y<tpô

(MUtpAt X~yos ~repô T<Bf

3~tM~~Mf ~M~Mf <~<~ X~yfM< ~fera< otJrA o~ot~e?*To

ttoJ To ftOte~f ~< <&<~t~fte~a. (M &!MtM< y~p o<!&<ff& yeM~)<T<uï<

<!p~~o~.3~' TOf~'

~oeA~aTM~oftewo~. Sur

ce dersterpoin!.

cf

p.t88.! 9.

'i'ÕsI tif' !rIÕs &tI'Àœœ~ÓJUI1OII. Sur ce dûrûier poinl.cf.

1

p. 288, 1.

9..

Page 201: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE 189

et parlerde physique; il ne fallait donc pas se tenir

dans les nombres et ie fini et l'infini.

« L'hypothèse d'une génération des nombres est con-

tradictoire on ne peut parler de génération et de

devenir pour l'éternel. Ainsi, on veut faire venir le

pair de l'égalisation du grand et du petit; mais si le

grand et le petit ont toujours été égaux dans le pair,

ils n'y ont jamais été inégaux, et le pair n'est pas en-

gendre, n'est pas devenu.

«Considérons maintenant la relation du bien et du

beau aux éléments et aux principes des nombres. Le

bien en soi est-il identique avec ces éléments, ou

n'est-ce qu'un résultat ultérieur? Car, suivant quelques

théologiens de notre temps, le bien ne se manifeste

que dans le développement des êtres*. Ils veulent

éviter les objections encourues par ceux qui font de

) un le bien et le principe 2. Mais l'erreur n'est pas de

considérer le bien comme appartenant essentiellement

auprincipe, c'est de prendre l'un pour un principe à

titre d'élément et d'en faire l'élément des nombres.

Oou il résulterait que toutes les unités seraient

P. 3oo, t. a~ AiMp&tf ;t~f (~e<) TaK~Tttf oMTepo!'~7~ T< exe~tof

cMf t~n~ofteCa Mye<f faM T~ <!y<t<Mf x<d T& d!p<~7of, oO, eM~'&r7epo-

y~'~Mtpft y(tp Mw &e«XoyaM' &Mxef <~to~o~e<e0a< TMf tt?f T«Hf,

~Mtf, <M~ <rpo<Mod<ntf Tttt Tf~ ~fT<M' ~aea~ <M~ T~ <!ya6~tt x<d

Ta MM,, ~~j~~e<~<M.

P- 3ot, t. T<& My<w<nf <&ntep &'«M, Ta ëfap~f. L enchainc-

'aentdM td~B semble demander «yOof au lieu deep~f. (~Pidiop

~W1and.

Page 202: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

190 PARTIE M.–ANALYSE

quelque chose de bon, et que si les idées sont des nom

bres, et que le nombre ait l'un pour principe, toute

idée aussi serait quelque chose de bon. Alors le mal

se trouve identifié avec le contraire de l'un, avec

l'inégal, ou le grand et petit, et tous les êtres par

ticipent au mal en tant qu'ils sont en dehors de

l'un. Ainsi le mal devient le lieu du bien, et par-

ticipe et aspire à ce qui le détruit. Pour nous qui

avons fait voir l'identité de la matière et du possible,

nous dirons que le mal est le bien ~lui-même en

puissance~.

«Il est donc évident qu'on s'est trompé sur le ran

port du bien avec les premiers principes. On allègue

que dans la nature le produit est toujours plus déter-

miné que ce qui le produit; mais en cela on se trompe

encore c'est l'animal qui précède et non pas la se-

menée.–II est absurde de parler également d'espace

et pour les solides et pour les choses purementma-

thématiques~.– Enfin si les nombres sont les éléments

des choses, ilfallait expliquer de quelle manière les

choses en résultent. Est-ce par mélange ? Mais alors

l'un n'existera plus à part. Est-ce par composition.

comme une syllabe ? Mais la pensée devrait aperce-

P. 3oa, t. t'y!M ei, <!t<!irep ~yof*ef, ~r< t} 0~ ~M T~ ~Mfa

~KM~Of, o!<M' <HpAeTOM &'epye~[ T~ ~M~tjMt «Cp, TO tMM~ ~7<M

T~ ~Mf~tet ~yf~Jf.

P. 3o3. i. t ÂTOirof M~ ïo wd~of <~M[ Te& o~epeoM)M< TO&

~MctMMtf ~.Mi~St* (t~ yâp T~XOf T~ XaiC* &t<M?ef ?&0<, &o ~Mpi~'

T<!)t~. T~ ? ~Mt9)tfMtT<)«t 0<! ~oC.

"Ó"os 'f&lll xœfJ' !x1l.â10p '&01, :,0 xœpit;Î,

1

Page 203: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQLiE. 191

voir séparément un et ta multitude. Est-ce par le pas-

M"e d'un contraire à l'autre ? Mais ce passage ne peut

avoir lieu que dans un sujet qui ne passe pas. D'ailleurs,

si tout ce qui est formé de contraires est périssable,

pourquoile nombre ne le serait-il pas ? C'est ce qu'on

n'a pas dit. Les nombres seraient-ils des principes à

titre de limites ou à cause des rapports numériques

quiconstituent dans chaque être la proportion des

éléments? Mais outre qu'on ne peut pas expliquer

ainsi les différences des qualités primitives, les nom-

bres ne peuvent être la cause formelle, c'est-à-dire

l'essence. Car ce ne sont pas les nombres qui forment t

les proportions mais les rapports des nombres. Le

nombre n'est donc que la matière, et la forme est tec·

rapport.- Ainsi les nombres ne sont pas des causes,

ni comme matière, ni comme forme, ni comme

principe moteur, ni comme fin.

Ajoutons que comme les nombres sont communs

tout, il arrivera souvent que plusieurs choses diffé-

Mntes tombent sous le même nombre; où sera donc,

dans ces théories des nombres, le principe de la dis-

tinction~?–Mais ce n'est pas le nombre sept, par

exemple, qui est la cause des sept voyelles, des sept

notes, des sept cordes, des sept Chefs, etc. Il en est

de même pour les autres vertus des nombres. On a

découvert que dans la classe du bien et du beau se

placent l'impair, le droit, l'égal; mais ce ne sont véri-

~<M, tct sjq.

Page 204: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

192 PARTIE Il. -ANALYSE

tablement que coïncidences qu'accidents, qui se l'a-

mènent, il est vrai, sous une unité d'analogie car dans

chaque catégorie de l'être se retrouvel'analogue

« On pourrait pousser l'argumentation plus loinque

nous ne l'avons fait mais en voilà assez pour faire

voir que les grandeurs mathématiques ne sont pas

séparées des choses sensibles, et qu'elles ne sont pas

les principes. M

)(LIVRE XII (A).

ML'objet de notre spéculation est l'Essence, puisque

nous cherchons les principes et les causes des es-

sences. Car toutes les autrescatégories ne sont des

êtres que relativement, et ne peuvent avoir d'cxis

tence hors d'un sujet. Il s'agit de savoir si l'essence

est le particulier, commel'entrevoyaient les anciens

philosophes, ou si elle est, comme on le ditaujour

d'hui, l'universel~.

u 11y

a trois sortes d'êtres l'être sensible et corrup~

tible, l'être sensible éternel, l'être éternel immobile.

Les êtres sensibles sont l'objet de la Physique;l'être

P. 3o6, 26 A<o <Mt}&M<e o~pMr'MfMMw ~7<yap <n~))Mn

t!~X' e~eMt <&~tfXo« <m~ra, ~f dé To aft&oyof. Ëf &MM!) yaj)w

~TM]MTttyOB<{[

&T7~ TO af<!Xoyof.

P. 240 i. 3 O! }~f oCf fCf ïA tM~oXo~ o~o~tM fMO~Of T<9ea<T''

y~ y~M! )MO<!X<K<~ Oa<r<f <~<M ttOti 0<!o&[<eïttH fMXXo~ &A T~ ~O~'tK

!~re~. 0~ <K!X<HT<ixa~' &t<M?af, e?o~ttup

xcd ~f, < ot? Ta "etr~

mB~Mt.

Page 205: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. i95

13

nntuobue est !'ob;et d'une science différente, s'il n'y`

pasentre ces êtres de principe commun.

L'être sensible est sujet au changement; le chan-

rement a lieu par ie passage d'un contraire à l'autre.

Or il y a quelque chose qui dure et persiste sous les

contraires, et cette troisième chose, c'est la matière~.

La matière a donc en puissance les contraires chan-

cer. devenir, c'est passer de l'être en puissance à l'être

en acte, et, en ce sens, du non-être & l'être~. C'est là

<ï que veulent dire l'unité d'Anaxagore, le mélange

dEmpedocle et d'Anaximandre. Ainsi trois causes,

trois principes, savoir: deux contraires, dont l'un est

la îbm'e et l'autre la privation, puis la tierce chose,

la matière.

« Man, de plus, pour que le changement se fasse,

il faut une caase de mouvement, et cette cause est

antérieur" aux choses; la forme, au contraire, en est

contemporaine. Pour quelques êtres cependant, il

n'est pas impossible que quelque chose survive au tout,

par exemple l'âme, non pas peut-être l'âme tout en-

tière, mais F intelligence~. Quant aux idées, il n'en est

pas besoin ici; c'est l'individu qui engendre l'Individu.

P. :4o, ). :t ËT< T~ (t~~ Mf0(t~e<, T~ ~MtfT~Of Ot~ MtOtt~fef

M<f<!pftT<

Tph M' ~MtpA M: &WfT&t, ~tt.

P. :io, !o Êwet A~f ro ~o, (tera6<tXXe<f aff~xtt ~faf ex

~&f)!{tet <!<tM.; eJt T~ ~feoye~f <ff. ~7e o:! {tofof xaTA <tv{t~e&;K~

M~erm y~e<9a< &t ft<) ~t~toe~ tQM xot! e$ ~fTo< y~fer~ ~~ra, Ju-

**fM' <te~ot ~To.f, &t ~M ~fepye~[.

P.94t .t. ) E~ &!?epop

T< uTro~eMt, c~e~~of s~' ~«f

Page 206: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

194 PARTIE!!–ANALYSE~i~

« Sans doute on peut considérer lesprincipes sous

un point de vue commun et générai mais ce ne sont

pas pour cela des universaux, et toutes choses n'ont

pas pour cela les mêmes principes. Les principes sont

particuliers, les principes internes et intégrants comme

les principes externes, (~ cw~eM~ctw, Ta <~T9$); e~

il ne faut pas non plus confondre les diSërentesespèces

de principes, en les réduisant toutes à celles de ieie

ment.Chaque espèce a donc un principe spécia! dans

chaque classe de principe, chaque individu a ses prin

cipes individuels.

« Parlons maintenant de l'être immobile. – H existe

nécessairement un être immobile. En effet, le mou

vement est étemel comme le temps, puisque le temps

est identique avec le mouvement, ou n'en est du moins

qu'un mode~. Or pour le mouvement, il ne suîE'

pas d'un mobile, il faut unprincipe moteur. Ce ne

serait pas assez d'une essence éternelle, telle qu'on

représente l'idée, il faut un principe moteur quisoit

tout en acte car cequi est en puissance peut ne pas

être, et le mouvement ne serait pas étemel. L'essence

de ce principe sera donc l'acte même, et par censé

quent il sera sans matière 2.

ym 0<!0~ JMtMet, e!of et TMOCrof, j.n) ~MMOt,fOA* fOM' 0!K*

y<tc fMMMtTOP/<M~.

P. :46, L 4 !M ~M!OM ~M o~<~ ewej~t <&nt€px<~ o ~po'M

y~p T~ aM?TO )MM!{~ec5<tt ~9o<.

P. a46, L tosqq.

(M6~~pa ~e~o~~ eiM* ~h* e~ <M"<m.

~(Mf, &)~<Bpeï T~ e~ e~

y~jB ~Mpy~oM, e~x ~7tH <«<<"<

Page 207: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA METAPHYSIQUE. 195

t3.

..Si au contraire le possible était antérieur à l'acte,

tout pourraitêtre et rien ne serait. Aussi

Leucippe et

Platon font l'acte, le mouvement, éternels. Mais par

quoise fait ce mouvement et quelle en est la cause,

c'est ce qu'ils ne disent point. Platon ne peut en rap-

porterle principe à cette âme du monde dont il parle

quelquefois', puisque, selon lui, le mouvement et

la matière seraient plutôt antérieurs à cette âme.

Anaxagore, avec son intelligence, donne aussi la prio-

rité à l'acte, comme Empédocle avec son amour et

sa discorde.

"Ce n'est donc pas la nuit, le chaos, la confusion

primitive, ie non-être, qui est le premier principe. H

faut que l'acte soit éternel. Or ily a quelque chose

qui se meut d'an mouvement éternel et continu,

c'est-à-dire circulaire c'est le premier ciel, qui est

par conséquent éternel. H ya donc aussi un étemel

moteur, essence et actualité pure il meut le monde

sans se mouvoir comme meut l'objet du désir et de

la pensée, ce qui t la même chose dans le primitif

et !e suprême. Cacwobjet du désir et de la volonté,

c'est ce que l'on croit bon et beau; la pensée est donc

leprincipe de ce mouvement c'est l'intelligible qui

meutl'intelligence; tout l'ordre du désirable est l'in

<f<<~M!e~

ap~x WMt~W < MK~T ~Mp~tM. ËTf TOtfXf TitUTM Jei

OM~f eLw <~M <OH!t.

P.aA~, t. 5 A~M fw ej~ nMr~ ys oFo~ re ~e~tttt ~f oterat eM-

~t~p~f e!fa<. Te <t<!re &tMt~ xt~oM'.

Page 208: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

196 PARTIE H.–ANALYSE

telligible en soi, où se place au premier rang i~

sence, et avant toute autre encore, l'essencesimple

et actuelle Le mobile pourrait être autrement

qu'il n'est, sinon selon l'essence, au moins selon le

lieu. Mais le moteur immobile, cause du premier de

tous les mouvements et de tous les changements, ne

peut, puisqu'il est tout en acte, être autre qu'il nés)

il est nécessaire.

« Tel est le principe d'oùdépend le monde et la na

ture C'est un être qui a la iélicité parfaite car ).

plaisir suprême est dans l'acte, par exemple dans la

veille, la sensation, la pensée c'est du plaisir de ces

actes que dérive celui de l'espérance et du souvent)

Or la pensée absolue, c'est la pensée du bien absolu.

làl'intelligence, en saisissant l'intelligible, se saisit

elle-même; car au contact del'intelligible, elle-

même s'intellectualise, en sorte que l'intelligence et

l'intelligible sont identiques. L'intelligence vit; car

l'acte de l'intelligence est de la vie; or l'intelligence

même est l'acte, et l'acte absolwude l'intelligence~

la vie parfaite et éternelle. Dice~ est donc un ètre

vivant, étemel et parfait; car cela même, c'est Dieu

P. '48,1. 4 KwT~ Me- T&opexï~ !M~ r~ <wfT~ «fe? ow 'Mt~

tM)M' w~Hw t<t~p~M

Ta fH?Tc!.ËmOu~mT~ y<tp ~tut~°"

PetAw~f OpBTM'T~ ~0' tM~Jf.

P. a4S, ~9 Ex TOMt~Dt< d!pa ap~ OpntT<M owpftfo:"N

~hnf.

P.949 J. 6 t~ots n «~' at~x To!? x<it6' <~tA<~)<<~o«,

ft~K~et ToC {M~to~e. A~f ? foef foS< MT~ fte~O~tf Toi? fon~

1

Page 209: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 197

.<Cet être n'a pas de grandeur, il est simple et in-

divisible. Eneffet, puisqu'il meut dans un temps in-

lini, et qu'une puissance infinie ne peut appartenir à

un être fini, il ne pourrait avoir une grandeur finie

~t d'un autre côté, une grandeur infinie est impos-

'.iHc'.

« Mais cet être est-il unique, ou bien y en a-t-il plu-

si< urs semblables? Le mouvement éternel et unique

du ciel) suppose un éternel moteur. Mais outre le

mouvement simple du tout, nous voyons les mouve-

ments également éternels des planètes chacun de ces

mouvements n'aurait-il pas pour cause un être immo-

hi!e. éternel et sans grandeur ? Ce serait donc à l'as-

tronomie qu'il faudrait demander le nombre de ces

<tres~–Mais il n'y a qu'un ciel; s'il y en avait

j'!u~ urs, il y aurait plusieurs premiers moteurs, et

on n'obtiendrait qu'une unité générique or les choses

qui sontplusieurs ont nécessairement de la matière

tandis que l'essence pure n'en a point, puisqu'elle est

toute en acte.

« Ces vérités nous ont été transmises par les an-

ciens, mais sous l'enveloppe du mythe et de l'an-

"WÂf y<;py~MMH &yy<~WM' M~fOSf.eTOtjTO~fOUOt~fO~T~"< !<~ ye t~f~er < y~p

<~~pyeM ?Mr. <&~e ?&~ xt~ <M&f <n<f-

M< <S~&M~et ~S. T<~<,

y<~ ~eot.

P~So, t. c~ P~. VU!, Mb fin.,p. 267 b. Bekk.r 25o-3. Snr le sent généfat de ce passage, voyez ptashaot.

f~g' «'3.

753, ).:g A~' ~<t tipt~ w~Xa, ~Hf ~e<.

Page 210: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

198 PARTIE ÏI.–ANALYSE

thropomorphisme. B fautrejeter les fables, et gard r

seulement cette parole que les Dieux sont les pré

mières essences et que le divin embrasse toute la tu

ture; il faut la garder comme un débris sauvé de la

ruine de quelque antique philosophie'.

« H nous reste à résoudre plusieurs questions sur

l'intelligence. Si l'intelligence ne pensait pas, eue se.

rait comme dans le sommeil; mais si elle pensent

que sa pensée ait un autre principe que soi-même, eu

sorte que son essence ne soit pas la pensée même,

mais la faculté, la puissance de penser, elle ne sen

pas l'essence première car c'est la pensée qui fait sa

dignité~. En outre, soit que son essence soit l'mtd

ligence ou la pensée, quel est l'objet de sa pensée

Elle ne doit contempler que ce qu'il y a de plus di-

vin elle ne doit point changer, car elle ne pourrai!

changer que du mieux au pis, et elle n'admet pasle

mouvementé Elle ne peut donc penser que la peu

sée, c'est-à-dire soi-même; elle est toute pensée,ft

sa pensée est la pensée de la pensée*. En gén~n!

P. a54, t. 5-~t o!ef Xe~Mt <MpMM)Be<~< {t~ptTeC Mf

P. a5&, i. 96 Efse we<, Te~Teu d' d!M~~pMf (o<! y<fp

&r7' T<~

~~<M~~<t'<hKM, &M~M<Mt), e<ht ~f <~7w

M y~ soif tM~tt T3 ~«e" w~ 'hH~~«. Qaoiqae pajreath~en~

pu ici la ËMnnecottdittennette m~n indiotttîve, die e'eet encore~le

déveio~emM~~et'hypoth&M. Sati~pMf, et tX, t3t, t. 65 P. <55. 1. 5. Cf. Plat., R<p fi, 380: A~<w~,

)~p<M', ~eeeMtOtswMH.

P. !t5S, L 6 tqq.Ë<t~w 4 ~M< t~~ewt fot<M<.

1

Page 211: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYStQUK. t99

t:t penséeest distincte de son objet; mais elle lui est.

identiquetoutes les fois que l'objet est une essence

pure.une forme sans matière, dans l'art comme

dans la science. Tout cequi

n'apas

de matière est

donc identique, et il n'y a qu'une pensée du pur in-

teuigible~. Enfin l'intelligible est-il composé (et alors

la pensée changerait dans les parties du tout), ou bien

tout ce qui est sans matière serait-il indivisible, ou

enfin, en est-il de la pensée de la pensée pendant t.

(éternité comme de la pensée dans l'humanité (où

elle a en général des composés pour objets) pen-

dant des instants fugitifs? Pour l'une et l'autre, au

lieu que le bien (~e t3) se trouve en telle ou telle

partie, ne serait-ce pas le bien suprême (ic a~eTw)

qui serait dans le tout et en même temps extérieur

autour?

P. t55, a: (My êr~pOMoBf ~fTO~ roC fooMft~ou <MMroC foS, A~

M <~t" <~e< ïA ft~rA &t7a<, <MdtMhtOK ToB foou~ou ft&t.

P. <55, 94 ~M ~*<Mt< <htop~t,ei <n!fCeTOf To foo<if*eMW (~e

!<St~o<yj~ To& ft~pe<n ToB ~Xo«) 0 <M«~perof

~ap To ft~ ~<w

~))~ Antepe

<[MM<Mm'o< tw?~ o ye Taw owfMMM', ~e< ef T<f<Xp<S"t'

(o! y<tp el sa « & t~, <!XX*~f n~ <<p«~of, ~f

~oT<), oth~f ~H a~ ft<k9< <M!tKK<Tof ~afT* <tMM[. Le texte de

B~adM et de BeUter porte t~M~pero~ w. T. ft. < ~)t", &nrepo

M6f < y. t. c. <. <. T. xp~od y- e. <L b.

T T. jL, <00~ M' o~<M <'<f.a.a.,)t.T.X.La phraseainsi écnte et ainsi

pMetnée nepMtît pu mtetiigtMe. Les cotrections légères que moue y

'MMM, en treportMt MM ïettM (tesecond <) de quatre mots en avant,

<"supprimant J* Mt~t o~MM, et en modifiant la ponctuation, don-

Otnt à lapensée un aem qui

se lieparfaitement

à ce qui suit, et un

'ranalogne à edai d'ene phrase

du vn* chapitre (p. ~49, 1. a),

Page 212: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

200 PARTIE Il. ANALYSE

« L'univers n'a pas son souverain bien et sa f!n

lui ni hors de lui simplement, mais de l'une et del'autre manière à la fois. Car tous les êtres ne sont

pas seulement ordonnés relativement à une unité

suprême, mais aussi relativement les uns aux autres:

et leur rapport au tout est d'autant plus déterminr

qu'ils sont placés plus haut dans l'échelle de la nature.

«Les autres systèmes mènent à toutes sortes d<

conséquences absurdes et impossibles. Tous les phi

losophes font toutes choses de contraires. To~c

choses cela est mal dit; eontraîTM, cela est mal dit

encore1 car les contraires n'ont pas d'action l'un sur

l'autre~. Nous avons donné la solution, en posant.

comme troisième terme, le sujet des contraires. On

faisait du mal l'un des deux éléments il en résulte o)

core qu'à l'exception de l'unité, toute chose partici-

perait au mal. D'autres excluent des principes le bien

et le mal; et cependant toutes choses ont leur principe

dans leur bien. Ceuxqui

ont reconnu le bienpour

un principe n'ont pas expliqué s'il en est un à titre

oà t'état de la divinité pendant t'etenuté est pareillement comparr

celui de t humanité pendant de courts instants Dans laphrase

sui

vante de ce même vn* chapitre (p. 949, t 6), on retrouve aussi «

passage rapidede Hdee de l'intelligible en tant que par inteMigib)f

cette de fintettigtMeen tant

que bien. Voyez ci-dessus, p n)6

1). t56,~t 90n<MftM )<!tp ~<t)T~f WtMoe<M WMf~a Ot!M Ji

~M~Tt 0!~e ~pe~~f OpC<M<.

P. :< t. ~3 AlM~f y<~ Ti ~ft~O! );ir' <tM~M'.

Page 213: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

DE LA MÉTAPHYSIQUE. 20!

(in. de cause motrice, ou de forme. Du reste.

nu! ne peutrendre raison de la différence du péris-

<.ahie et de l'impérissable, puisque l'on fait tout des

jnemes principes. Nul ne peut rendre raison du de-

<wr; car tous ceux qui veulent l'expliquer par l'op

position de deux principes sont obligés de recourir à

un troisième principe supérieur, qui détermine le

changement. Et cependant si l'on ne reconnaît pas

d'autres êtres que l'être physique perceptible par les

sens, on remontera à l'infini sans jamais atteindre à un

premier principe. 'Ce n'est pas dans les idées qu'on

trouvera le principe du mouvement, ni dans les

nombres, ce n'est pas non plus dans les contraires;

<ar les contraires, c'est le possible, et comment le

possible passera-t-il à l'acte? comment rendra t-ou

raison de l'unîté du nombre, de l'union de la forme

et de la matière, de celle de l'âme et du corps? Il faut

donc remonter avec nous au premier moteur. Que si

l'on pose comme primitif le nombre mathématique,

on n'obtient encoreque

desprincipes Indépendants

les uns des autres. Or la cité du monde ne veut pas

d'anarchie; il n'est pas bon, comme dit Homère, qu'il

} ait plus d'un chef

Of)t <t~<t6M')~eAMf<M~<t)' tta~cu'et.

Page 214: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson
Page 215: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

TROISIÈME PARTIE.

DE LA MÉTAPHYSIQUE D'ARISTOTE.

Page 216: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson
Page 217: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

TROISIÈME PARTIE.

!)h: ).A MÉTAPHYSIQUE D'ARISTOTE.

HVRE PREMIER.

)') RAKGDEt.A METAPHYS!QCEDANSL'ENSEMBLEDE t.A

PHtLOSOPHtED'ARtSTOTE.

CHAPITRE I.

De la division des ouvrages d'Aristote par rapport à ta forme.

Livres cxoténques et acroamatiques.

Dansl'analyse qu'on vient de lire, nous nous

sommes asservis, de crainte de dénaturer la pensée

d'Aristote, à la suivre dans sa marche avec une fidé-

litéscrupuleuse. Mais cette pensée, au contraire, ne

nous a-t-elle pas sans cesse échappé? Soit désordre

d'unecomposition inachevée, soit obscurité ordi-

naire du profond et subtil auteur de la Métaphy-

sique, le ni se rompt à chaque pas; à chaque instant

l'enchaînement des idées et l'unité de la doctrine se

Page 218: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

206 PARTIE III.–DE LA METAPHYSIQUE.

dérobent aux regards. Ce n'est point, comme dans

les dialogues de Platon, une allure négligée enap-

parence, mais que règlent toujours, à travers les dp

tours de la conversation, une unité secrète et une

progression soutenue ce sont des interruptions su-

bites, des épisodes dialectiques ou historiques qui se

mêlent et s'entrelacent les uns les autres, des ar-

gumentations épineuses où l'on reste engagé; les

idées se pressent et se succèdent avec une rapidité

qui ne laisse plus le temps de les saisir, ou elles

restent suspendues tout à coup pour ne s'achever

que plus tard, à un long intervalle et quand on les

a perdues de vue. Souvent même elles ne s'achèvent

et ne se complètent que par d'autresouvrages où il

en faudrait recueillir les parties dispersées. Les prin-

cipes les plus élevés, les formules les plus difficiles,

Aristote les suppose connus, les applique avant de

les énoncer; il se sert par avance des conclusions

qu'il tirera plus tard et que l'on n'attend qu'à la fin,

se démêle avec leur aide des analysès péniblesoù

on le croit arrêté, revient brusquement sur ses pas,

ou franchit, sans qu'on puisse le suivre, tous les

mtennédiaifes.

B en résulte que tout ce qu'il sème sur sa route

de nouveau, d'ingénieux ou de puissant, ne semble,

détaché des principes qui en font la force et la vie,

que vaine et creuse subtilité et toute la richesse de

sa science et de son génie qu'inutile fécondité de

Page 219: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE L CHAPITRE 1. 207

classifications logiques et dedistinctions grammati-

cales. L'unité spéculative disparait dans une confuse

variété. Il s'en faut bien pourtant que l'unité y

manque; tout y vient d'une même source et va vers

un même but; tout y respire un même esprit, et y

dépend, on peut le dire sans exagération, d'un seul

et même principe. Le détail n'y est rien que par l'en

semble, et la partie rien que pour le tout. Mais cet

ensemble il faut maintenant, autant qu'il nous sera

possible, le reconstruire par un nouveau travail, il faut

retrouver cette unité.rétablir l'un et l'autre au point de

vue le plus élevé de l'aristotélisme, et dans toute la

lumière du système. Dans une analyse, d'ailleurs, si

!'on éclaircit en supprimant ce qui ne semble qu'ac-

cessoire pour ne laisser en relief que les principes,

on retranche aussi nécessairement ce qui explique

lesprincipes, ies détails et les répétitions même où

ils sedéveloppent et se déterminent le livre se

comprend mieux, et la doctrine moins bien à cer-

tains égards. H nous faut donc reprendre dans un

autre but et d'une autre manière, ce que nous avons

fait.Après avoir exposé, pour ainsi dire, en abrégé

la lettre de la Métaphysique, il nous faut chercher

à en saisir l'esprit, et en épuiser le sens plus profon-

dément. Ce n'est qu'après l'avoir considérée sous sa

terme essentielle que nous pourrons entreprendre

d'en suivre Finnuence dans l'histoire, et enfin d'en

apprécier la valeur.

Page 220: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

208 PARTIE HL–DE LA MÉTAPHYSÏOUE

Mais de plus, cette doctrine que nous en vouions

extraire n'est pas née au hasard de la fantaisie th- son

auteur. La philosophie d'Aristote est sortie d'une on

naissance et d'une critique profonde desphilosophie;

qui l'avaient précédée; et laMétaphysique surtout en

contient l'histoire et l'appréciation c'est par ce rote

que nous la prendrons d'abord. Non-seulement c'est

une des gloires d'Aristote d'avoir fondé l'histoire de

la philosophie, et & ce titre seul la partie historiquede sa Métaphysique exigerait de notre part un exa

men spécial, mais sans cet examen on ne peut la

comprendre. LaMétaphysique, pour être jugée, veut

être prise dans le temps, considérée dans le propres

qu'elle marque sur le passé, dans ce qu'elle en reçoit

et qu'elle développe, dans ce qu'elle corrige avec

raison, comme dans ce qu'elle a tort de rejeter, et

que l'avenir saura relever unjour et lui opposer de

nouveau. En établissant ainsi préalablement les ante

cédents de l'aristotélisme d'après Aristote lui-même,

nous en rattacheronspar

avance l'histoire à sen pré

mier anneau s nous en préparerons l'intelligence et le

jugement.

Mais avant d'arriver à la Métaphysique en elle-

même, ne faut-il pas encore savoir ce quec'est

que cet ouvrage dans l'ensemble des ouvrages d'Ans

tote, ce qu'il a de commun avec tous les autres,

et quel est le caractère spécial qui le distingue ?Les

plus hautes questions y sont traitées, dans l'histoire

Page 221: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE I. CHAHTRE 1. 209

!~t

de la philosophie,comme dans la philosophie elle-

même il importe de savoir, pour cet ouvrage encore

plus que pouraucun autre, puisqu'il est seul de sa

classe, et, à ce qu'il semble, de la classe la plus im-

portante, quels rapports il soutient avec le reste de

oeuvre d'Aristote, pour le sujet comme pour la ma-

nière dont le sujet est traité pour la matière comme

pour la forme. De ces rapports dépend en partie le

)tus ou le moins de rigueuret de précision que l'au-

teur v a dû mettre, selon la méthode dont lia voulu se

!cn ir et le but qu'il se proposait et par conséquent

la valeur des témoignages historiques et des doctrines

qui! a déposés. Nous commencerons donc par étu-

dicr les divisions dIBérentes sous lesquelles se classent

les écrits d'Aristote. La première classification à la-

quelle nous nous attacherons sera même la plus ex-

térieure, et par suite la plus incertaine et la plus

contestée. Nous tâcherons de la ramener peu à peu

à ses principes, qui touchent à quelque chose de

plus essentiel et de plus certain, et où nous cher-

cherons la justification des détails, purement histo-

riques en apparence, par lesquels nous sommes con-

traints de débuter. C'estalors seulement que nous

pourrons passer à une classincation supérieure, fon-

dée sur ia considération de la nature et des rapports

des sciences philosophiques.

Les anciens partagent les ouvrages d'Aristote en

Page 222: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

210 PARTIE ÏH.–DE LA MÉTAPHYSIQUE

deux classes principales en M'o~r~NM et en (tcron

matiques. Les premiers, pour ne considérer d'abord

que le caractère le plus externe, le caractère littéraux

auraient été rédigés sous une forme plus popuiairc

et plus oratoire les autres auraient été écrits duo

style sévère, avec toute la rigueur scientifique C'est

à ceux-là sans aucun doute que s'appliquent leséloges

que Cicéron donne au style d'Aristote, quand il op-

pose « les flots d'or de son éloquence au «langa~

« monosyllabique'<des Stoïciens~, ou qu'il va même

jusqu'à parler de « ses grâces un peu fardées Ces

traits conviennent à un fragment, que Cicéron nous

a conservé d'un livre aujourd'hui perdu d'Aristote.

et qui contient un beau développement de la dé-

monstration d'une providence divine. Mais ils ne

s'appliquent en aucune façon à aucun des ouvrages

qui nous restent 5, et à la Métaphysique moins qu'àtout autre. La plupart, au contraire, portent à un

haut degré ces caractères qui auraient distinguéles 1

ouvrages acroamatiques c'est même ce ~Ma6ai)m

1Ctcer. de Fûe. bon. et m<~ V, v.

~ca<H. M, xMvm, S11<)

Ad ~M. tl, t, S Totum PMeratis ftwp<)He~ac nonnihii

etim AristoteMa pigmenta consnmpsit.Cf de Fin. t, v, S i4;

it, Il, S –Stahr, ~tM~te~M. tt. t46. Add. Quintit. Institut. "Mf

X.t.

De Wat. deor. M, XMvn, S 95

Nous nepadoM pas du traité du Monde, que nous tenons )'

apocryphe. Voyez L. Ideler, in Me<eor. ~Mt.paMim.

Page 223: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE CHAPITRE I. 2H

.4.

hMU' que Cicéron met en contraste avec l'abon-

dance d'Aristote dans ses morceaux oratoires; le

philosophe, pour nous servir des expressions de Ga-

lien, ne semble parler que par abréviations, et pour

ceux-là seuls qui l'ont déjà entendu et le com-

prennentà demi-mot 1. Tous les commentateurs re-

marquent que dans les Catégories, dans la Physique,

dans les Analytiques, dans la Métaphysique surtout,

!a pensée est serrée, la phrase ramassée et concen-

«trce à l'excès~) Mais ces caractères ne semblent

pasfournir une mesure assez exacte pour déterminer

avec précision quels sont parmi les ouvrages d'Aris-

Galen. de Sophism.tt Sufti~M J~ ro TOtouro

Te~o: T~? ~o<K~&),

M<x!:M![?p

~r< o~~e&M* ~m~pe<f ïA tto~M XM A~ T~ 'eroM TOM <Mm-

m<'TM ~tt yp<Hpeoû<[<.

Ammon. inCa~M. ~oacm. f. Q a.

Simplic.in

CahM. ctioa'm. 6 TMt'

!N'<MM' <m<tf<!Ttf~, )M~ T~<T~feo?pa~[~fOf T!!< (ptKKTeM: ~!tXo?, <eT~ T))f

Mep!tf To? Âp«T7oT~o«< ~po~ot~ot J<!fapw. Themist. P<u-a~~r. ytn<t/~f.

prc<rm. r* i a. Michel Ephe*. in ~fe<apt. XII, !i.– Nous citerons ici

un jugement tnteKMantsurte style d'Aristote.qaeM.

Kopp tire, dit-il,

d'uncritique ancien (N&etK. Mus. Ht, too)

t°Ka0epM

e<r7< r~f èp-

fttfMW <~t~, iMi! iMn~ ~f yX~TDtt, T~t :t«T* ~):e!f0f ~p0f0f ~<~<M-

ptt!o<!<n;t. AeM~M: <&ten! &t?<f AA TM' xup~M' Te xo<fMf «d ~f

ttMM )[e<~tt6M~ ~MpMhaw &t~po«o<t Ttt f00t!fteftt' ~«o?* rpo~x~ ~p~t

XptT<a, <Mt<Mp<TtA <Mt! oeftfA <Kd ptey<ïXct ~M<o8a< Ta

-er~Mit

<MfM To!f ]<0«M!T<{t<Mt J(p<S~«~!t OfO~MMn XM ~OOtT~tJ~t Ot!~ atrTO~efOt

<MM)[eeSt. Tp~t ~Mit <Mt~fce«t, o<? j~ew ~f To!< J~fMKMf, <

&'TO« ~pt~MMKtf- Mt y<~ Ttt xa< <fp<[y(MT<)~ ca~MM. Su)'-

M7p9!)f7<M ~t~ xat <B~M ;«!< <'e9n!xf<MTa< 'fois ~o~~[<r<. 4" Ter~Tt!

*peT~ <!Wt7p~Ot«M[ «t tMM~tftrat <M~ OTpOyJ <!Â<t)t eK~EpOU~Ot ~e5f, X.T.A

Plusieursphrases pttHMMent

imitée du passage(le

Simplicius que

"M venons de citer

Page 224: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

2t2 PARTÏE Ht–DE LA MÉTAPHYSIQUE

tote qui nous restent ou dont les auteurs ancif~

font mention, ceux qui doivent recevoir ia dcxp

mination d'exotériques ou celle d'acroamatiques. En

croirons-nous Cicéron ou les commentateurs ? Ccu\

ci opposent à l'obscurité de la Physique ou des Ana

lytiques, la clarté de la Météorologique et des To-

piques. Or Cicéron taxe ces mêmes Topiques d'un~

obscurité telle, quelle rebutait, dit-il, jusqu'au

philosophes Cherchons donc une règle de jugement

plus sûre; car celle qui se tire du caractère du st\L

est trop arbitraire le commentateur trouve pariai

tement clair ce que l'orateur et l'élégant écrivain, et

même les philosophesses amis, considèrent comme

rempli de dimcultés impénétrables.

Presque tous les auteurs anciens qui ont abordf

cette question, donnent pour raison de la diffé-

rence du style dans les deux classes des écrits d'Ans

tote, celle des lecteurs auxquels il les avait destinés.

Les ouvrages exotériques se seraient adressés au pu-

blic. les autres aux disciples, aux auditeurs du phi

losophe. Voilà pourquoi il se serait enveloppé dans

ses ouvrages acroamatiques d'une obscurité qui put

écarter le vulgaire, et cacher ses doctrines à tous ceux

qui ne les lui auraient pas oui développerde vnfe

voix. Ainsi en pensent Plutarque, Galien, Themis

tius, Ammonius, Simplicius, Michel d'Éphèse~,etc.

ShapiM.M Ca~. f Cicer. ïaptc. t, mit.

1

Mutarch. ~< tt!. Galeo. de F<Mn!<. natar. ap. Bnhte,

Page 225: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE L CHAPITRE I. 215

Ce a est !à que l'application d'un préjugé que l'on voit

prendre toujours plus de faveur, à mesure qu'on des-

cend dans les derniers siècles de la philosophie an-

cienne, la croyance à une double doctrine, l'une se-

crète, ou les philosophes anciens auraient déposé le

trésor de leur sagesse, l'autre extérieure et publique,

quin'aurait été que la forme la plus superficielle, l'I-

mage la plus imparfaite de la première, ou plutôt le

yoi!e qui devait servir à la mieux déguiser. Dans la

science comme dans la religion, chez les philosophes

comme chez les divins auteurs des oracles et des

mystères, partout on voulait retrouver un profond

époptisme, un soin superstitieux de cacher le sanc-

tuaire aux profanes. Les adorateurs un peu crédules

de l'antiquité, les Plutarque, les Jamblique et les

Proclus accueillaient ces idées avec ferveur. Les

sceptiques et les partisans de la religion nouvelle qui

était venue révéler les choses divines dans le langage

le plus simple et le plus populaire, s'empressaient

également de les répandre, pour en faire retomber

te ridicule sur l'antiquité. Ainsi Lucien, dans ses

Philosophes à l'encan, fait crier par Mercure deux

Mr. ~fM<. Mcat. et <tCtWM)t. p t*9–Themist. ParapAr. ~na~t. pMo'm.t a. Otmt. xxvt, 3tg, ed. Hard. Ammon. in

Ca< prootm. f. g a.

Sunptic. MCot< pnMMt.;

inP~.

f. s b. Mich.Ephes. MtJMi'ta~.

XH.f

Ptatarch. de f<Mt. et 0«r.: ~o :Mt! nMTaw «uAp<~7oT~: ~)ro]r7<-

<?" ToCrot~pe< T<< ~mw~M )MAou<TO'. Procl. in Parm~tJ. V. Ct

~)''n. ffe&yjtttm. ap.

Pttnc. Pn~tM. p<r~'<tt p 67.

Page 226: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

214 PARTIE IIÏ.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

Aristote en un seul, l'un exotérique, et l'autre ésote-

rique 1. S. Clément d'Alexandrie ne se contente p:~

d'attribuer la double doctrine à Pythagore, Platon p)

Aristote; il la trouve jusque chez les Stoïciens et che/.

les Épicuriens eux-mêmes 2. Ici l'absurdité devient

manifeste. Mais s'il faut reconnaître, du moins avec

Lucien, un double Aristote, serait-ce dans un dessein

exprès de dissimulation de la part du philosophe

qu'il faudrait chercher le principe d'une pareille dis-

tinction ? Remontons à des sources plus anciennes et

plus pures. Nous allons reconnaître que s'il y eut dan:

le Lycée deux doctrines ou deux enseignements, ce

n)6 fut sans doute ni mystère, ni mensonge, mais

simple résultat d'une diSérence fondée dans la nature

de la science ou de ses objets.

Nous avons déjà eu occasion de voir que la distinc

tion d'un double enseignement remonte, sinon am

premiers temps de la philosophie grecque,du moins

au maître d'Aristote; qu'indépendamment des pro-

menades de l'Académie, où il exposait la doctrine

qu'il nous a transmise dans ses écrits, il avait un autre

enseignement qu'il ne rédigea pas, et que recueillirent

seulement les plus distingués de ses disciples. Ce ne

taient point des dogmes secrets et une sagesse myste

rieuse c'était l'explication de la doctrine même qu't

proposait publiquement, l'analyse dialectique des der-

LadM. Ht. <met. 566. Reitt. Smhr, H. a&t.

Ctem. AtM..S<Mm.V. S~S, Sytbarg

Page 227: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE t. CHAPITRE t. 215

ttin~ cléments des idées, la recherche de leur plus

haut principe.I!

n'y avait pas entre ces deux ensei-

~icments d'oppositionà

proprement parler, de con

tradiction ily avait une différence de

degré.Cette

distinction acquit pius de précision dans t'école d'A-

nstote; elle acquit en même temps uneexpression

plus déterminée, et se traduisit en des termes tech-

))M;ues

Aristote avait partagé son enseignement et ses ouvrages

f!t deux classes, dont il nommait l'une exotérique et l'autre

«cn)«~<M. Lapremière comprenait la

rhétorique,l'art de

) argumentation la politique la seconde avait pour objet

les parties les plus ardues et les plus difficiles de la pliiloso-

jthie, telles que la physique et la dialectique. H consacrait

la matinée aux leçons acroatiques, et il n'y admettait per-

~ane dont il n'eût préalablement éprouvé le talent, les con-

naissances et le zèie. }tes leçons exotériques avaient lieu le

<cir; elles étaient ouvertes à la jeunesse sans aucune distinc

tion. Aristote appelait tes premières la promenade du matin

P) tes secondes la promenade du soir car toujours il ensei

gnait en se promenant. Et il divisa. semblablement ses livres,

qui traitaient de toutea ces matières différentes en exoté-

riques etacroat!que<

`

Nous trouvons une conËïmation de ce récit d'Aulu-

C<H.Noct. <t<t.XX, V &6ttrepMM[dicebantur, qu~ ad rhetoricM

'"fthtattOBM, &CMttatemqMea~ttMnun,ciYHiamq!)e rerum notiliam

~aducebant- A<p<xwM[~autem vocabantur, in quibus philosophia re-

"tie)'MbtiMeMtM aptabatur, qazque ad natur96 contemptatianM

"HM'ptationMve diateettcat pertmebant. Huic disciptin~p, quam dixi

Page 228: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

216 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

Geile dans un passage de Quintilien, où il nous dit

qu'Aristote enseignait la rhétorique dans la ieron

du soir'. Enfin avec le témoignage d'Aulu-Gelle sac

corde parfaitement celui de Plutarque, quand il op

pose à la morale et à la politique,dans l'ensei

gnement qu'Alexandre reçut de son précepteur « ces

sciences plus abstruses que l'on appelait acroama

tiques ou époptiques, et dont on ne faisait point

part au vulgaire ~.M/Voilà donc une tradition bien

établie, ce semble, dans toutes ses parties.Mais

cherchons à en retrouver l'origine. Le récit d'Auiu

tMpoenx~ tempusexercendae dabat in Lycio maturinum nec ad Mm

quemquamtemere admittebat, nisi quorum

ante ingeniumet érudition

nis etementa, atque in discendo studium laboremque explorasset.!))~

vero exotericas auditiones exercitiumquedicendi eodem in loco vesptn

faciebat, casque vu!go juvenibus sine delectu pnebebat, atqueeur~

~M~tw ~ep~MT<w appellabat,ilium altertm supra ~e<fop; utroque

enimtempère

ambutans disserebat, iMjMtMTM'.Lihros quoque

su~

earum omminm rerum commentarios, seorsum divisit, ut ahi eMtf

rici dicerentur, partimacroatici.

QmstHm' Jn~M. orat. Itï, t Pomer:d!ants scholis Aristotett

praecipen:artem oratoriam cœpît.

En générâttes pbUosophes

&

phistes ou rhétenm faisaient deux ieçons par jour. Aristod~me <)'

Nysa,maitM de Strabon, enseignait

le matin ta rhétoriqueet !e soir

la grammaire. Eunttpe enseignait,comme il le raconte lui-même J:I

CJby~mfA.),le matin ta rhétorique et le soir la philosophie.

C est t

contraire de ce quefaisait Aristote. Cresottius, y~atnMt fheton'm (P~

ns. t6M, in~*), IV, 392

P!utaceh. Mt. ~HM. v" Ëo'te J' AM$<M~po<o<: fM~fOf rof !M

Mt «t)KTt)t~ «tp<t~t6e?f XjyO~ fiM~ )M~ T&' <tW~<!MW<t<H~t6xt~'

Ma<nM&& &5 e! dMpMtJ&M Mp<MtMtTt)t~

xatl <woi[7<~ wp<

ce<}<w«f eJt ~~epof e~ w~o~, fterctt~e~.

xld i_1lJt4s 'pOU3;

1

Page 229: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE t, CHAPITRE 217

Cette est vraisemblablement emprunté à Andronicus

de Rhodes; car ce récit compose un chapitre des

Nuits attiques avec cette fameuse correspondance

d'Aristote et d'Alexandre, qu'Aulu-GeUe déclare tirer

du livre d'Andronicus. D'un autre côté, nous avons

déjà fait voir que Plutarque, dans le passage de la vie

d'Alexandre que nous venons de rappeler, ne s'était

servi également, selon toute apparence, que de l'ou-

vrage d'Andronicus de Rhodes. Quintilien, antérieur

a Plutarque comme à Aulu-Gelle, ne parle probable-

ment pas d'après une autre autorité. C'est donc à An-

dronicus que nous croyons pouvoir rapporter sans

trop de témérité, les trois témoignages de plus en plus

complets et précis de Quintilien, de Plutarque et

d'Aulu-Geue. Ces témoignages perdraient, si notre

conjecture était juste, l'autorité qu'ils paraissent tirer

de leur accord. H leur resterait encore celle d'une

tradition vraisemblable en elle-même, que l'éditeur

laborieux des œuvres d'Aristote n'a pas dû inventer,

mais recueillir à quelque source plus ancienne. Mais

nous sommes en droit de soupçonner qu'elle ne nous

a pas été transmise sans altération, soit par Plu-

tarque et Aulu-Gelle, soit même par Andronicus,

dont nous savons que l'antiquité ne reconnaissait

nullement l'imaiHibilité en matière de critique. La

tradition que nous venons de rapporter établit clai-

rement deux points importants, savoir, que la dis-

<m<'tion des livres cxotériques et acroamatiques ré-

Page 230: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

2i8 PARTIE ÏÏL–DE LA MÉTAPHYSIQUE. 1

pondait à celle de deux enseignements, et que ccth

ci à son tour répondait à une classification des

sciences philosophiques; voilà la part de la vérité.

Mais il y a aussi celle de ferreur c'est d'abord deJ

présentercette distinction de deux sortes de livres

et de leçons comme ayant son principe et sa règle

unique et constante dans une division des sciences

par leurs objets; et ensuite de dériver la dénomi-

nation même de ces deux classes d'ouvrages de i.)

différence des auditeurs auxquels l'enseignement se

serait adressé.

Essayons d'appliquer à la division des écrits d'A

ristote les indications fournies par Andronicus

nous rapgerions tout d'abord parmi les exotériques

ceux qui traitent de la politique et de la morale

Or un témoignage que les profondes connaissances

de son auteur dans l'histoire de la philosophie mo

raie rend tout à fait digne de confiance, et qm

porte dans .sa précision le caractère de l'exactitude

nous le défend formellement, et conduit à un tout

autre résultat; nous voulons parler de ce passage

connu de Cicéron

AnstoteetThéoparas!ene semblent pas toujours d'accord

avec eux-mêmes sur la question du souverain bien, et ceta

Cioer. <<<FM. V, v, S t a De summo autem bono, quia duo

nera Mbronum mnt, unumpopulariter scriptum, quod ~Mp"

<tppeH)thtnt,a!tenun!!mattus, quod

in commentariis re!tqt:er!

non semper idem dicere widentur.

Page 231: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE CHAPITRE I. 219

parce qu'ils l'ont traitée dans deux sortes de livres, les uns

cfrits d'une manière populaire, et qu'ils appelaient exoté-

riques les autres rédigés d'un style plus sévère, et qu'ils ont

jais~s sous forme de mémoires.

H y avait donc sur un même sujet, sur ia morale,

des écrits exotériques et d'autres qui ne l'étaient point.

Par conséquent, la différence de ces deux espèces de

inres ne résidait pas essentiellement dans la diffé-

rence du sujet, mais bien, outre quelques dissem-

blances au moins apparentes de doctrine, dans la diSe-

rence de forme et de manière. Mais ce caractère que

nous avions trouvé d'abord si vague et si msumsant,

ne reçoit-il pas maintenant du récit d'Andronicus de

Rhodes, un jour qui l'éclairé et le détermine davan-

tage ? L'expression de style populaire (populariter)

semble s'expliquer facilement par la destination des

livres exotériques, qui se seraient adressés au public

plutôt qu'aux philosophes. Mais en outre, les ouvrages

véritablement scientifiques reçoivent par opposition

la dénomina~om de mémoires (coMn~ntorn), qui

semble avoir ici une valeur presque technique. Les

!nresexotériques avaient donc aussi une forme spé-

ciale et bien, déterminée, qui les distinguait claire-

ment de tout livre acroamatique. Et en cfïet, Cicéron

le dit ailleurs, les livres exotériques étaient des dia-

logues 1. Nous lisons égalementdans Plutarque qui

Cicer. f~utt. a<fF<H~. l, tx: Scripsietiam. ArisKttetis more,

Page 232: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

220 PARTtEHÏ.–DELAMÉTAPHYSIQUE.1

oublie en cet endroit ce qu'il avait répété sans ré-

flexion d'après Andronicus, qu'Aristote traita un

même sujet, la critique de la théorie des idées, non

seulement dans ses mémoires de morale et dephy-

sique, mais encore dans ses dialogues exotériques

Ce témoignage s'accorde parfaitement avec celui

de Cicéron, en faisant des livres exotériques des

dialogues, et en les opposant aux mémoires scienti-

fiques.

Mais quel lien pouvait-il y avoir entre ces deux

Jormes et les deux espèces d'ouvrages et de leçons

auxquelles elles répondaient? Était-ce un rapport tout

à fait arbitraire et artificiel, ou n'était-ce pas plutôt

l'expression d'une connexion intérieure et profonde *:i

Si nous nous adressons aux commentateurs d'Aris-

tote, nous y trouverons des traces de cette dernière

hypothèse, mais indécises et obscures, et enveloppées

d'erreurs qui accusent le défaut d'un principe sûr de

critique.

Anunonius a consacré tout unchapitre

de l'intro

duction de son commentaire sur les Catégories,&t''

quemadmodmn quidem volui, tres libros in disputationeac diatogo

de Oratore. Ad Attic.IV, xvt (en parlant de sondialogue

de la Repu

blique) Qnoniam insingulis

libris utor proœmtis,ut Anstotetes in lis

quos <6MTepM<<~< vocat, etc. Cf. tM. XtU, ux.

Plutarch. a<!MM. Colot. X, 586-7, Reisk. T~t ye tJ~,

&' ~yitaXe? T~ nMmM't, ~MMOt~oC «fMf oÂpt<f7oT~X)!f,

~M*'

At~'M' <!<op&w <H?Ta«, du sois tf0«o« ~iro~Mf, &' sois CM<n"et<,

&<t M~' ~SttMptJMM' &aAeyfM'.

1

Page 233: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

HVRE t. CHAPITRE L 22t

<!assi(!catu)n des écrits d'Aristote'. t! lespartage d'a-

hofd en deux séries, dont rune comprend les recueils

d'extraits et de notes ( unc~ff~tTr~ ), et l'autre les ou-

vrages ou traités proprement dits (~7~). Ceux-

ci se divisent en deux classes, les ccroaMo~Mae~, où

Aristote parle en son propre nom ( <tJ'nM~o!Ma. ), et

les ~co~rt~HM ou dialogues. Les livres exotériques

furent ainsi nommés, continue Ammonius, parce

qu'ils avaient été écrits pour l'usage de la multitude

( d'~M, dehors, e~7tp~<z, choses du dehors ), tandis

que dans les autres, Aristote s'adresse à ses véritables

disciples. Ainsi Ammonius est d'accord avec Andro-

nicus, sur l'origine du mot exotérique, et il se trompe

comme lui, ainsi que nous le verrons tout à l'heure.

Mais, dans ce qu'il ajoute immédiatement, le commen-

tateur ouvre un point de vue tout nouveau, en nous

taisantsoupçonner

dans les deux classes d'ouvrages

une différence de méthode, et non plus seulement

de forme extérieure et littéraire

Dam tes livres actomMttques*. Aristote parlant à ses élèves,

démontre ce qui lui semble vrai par les arguments les plus

Amman. M Catej~. 6 b.

M. ttttï. Ê~ «~ y<tp«'& f~tMtpoo~roM,

~re~p~ yM!<~ou< <utp<M[-

My<w «M<~t<M<,tA ~MtoB~ Te aJ~ ~ye<, x~ &'

~<~ptt-

fM'M* &tp<6M?<(K~, sa e!< O~Xoi '~°~<" ~<y!<OAOu9t!<Ta<.

? W& &<t~oyt)M& ~M ~p~ ttOt~f xai T)!" T<5f ~O~~f <M<~eK[!'

~pa{<(t&wf tA JojMB~-a <tJ~ Myet, aXy ou A' <!eoJe«T<x~ em~et-

~Ko', M! o& oM e~Mf <~ <M~o! ~apaxo~o~ew.

Page 234: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

222 PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

rigoureux, et que la multitude n'eût pas été capable de

suivre dans les dialogues, au contraire, qui sont écrits pourle public, s'il ne dit encore que ce qui lui paraît être le vrai.il ne se sert, au lieu d'arguments démonstratKs, que de preuvesplus simples et que tout le monde peut comprendre.

Simplicius, élève d'Ammonius, reproduit à peu

près et en abrégé, dans son commentaire sur les Caté-

gories la même classification il s'en écarte, toute

fois, en un point de grande importance il ne dit

rien de l'identité des livres où Aristote parlait en son

nom avec les livres acroamatiques, et de celle des

dialogues avec les exotériques. Il est vrai qu'il ne fait

ici aucune mention de la division en exotériques et

acroamatiques, et que par conséquent on ne peut tirer

de son silence aucune conclusion certaine sur son

opinion à ce sujet. Mais ailleurs il parle des livres

exotériques, et range dans cette classe non-seulement

les dialogues, mais « les ouvrages d'histoire ou de

pure description, et tous ceux en général qui ne

portent pas sur les hautes dimcultés » H n'approuve

donc pas le sens trop étroit qu'attribuait Ammonms

à cette qualification, et s'il n'en faisait pas mention

dans son commentaire sur les Catégories, c'est sans

doute qu'il a mieux aimé se taire que de relever

la faute de son maître, Il est probable, d'ailleurs

SImptic.in Cete~. f. i b.

SHUpHc.in

P~. 2 b: Tft~TSp<ttA,

C& Ta{<T?<MM~

"M

JffAoyOtA, 'Ht! ~Xft~ Ta~[jMM Atp<6e~ ~MfT~OfTCt.

Page 235: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE ï. CHAPITRE 1. 225

out! ne fonde son opinion que sur une autorité plus

ancienne et plus grave, celle d'Alexandre d'Aphro-

disée,qu'il invoque sur un autre point, dans l'endroit

même où il suit pas à pas Ammonius. Mais en quoi il

s accorde avec Ammonius, c'est à reconnaître que

t'exotériquene dépasse point les preuves de proba-

bilité, tandis que ia démonstration appartientà l'a-

croamatique. Philopon, élève comme lui d'Ammo-

nius, s'exprime de même sur ce dernier point; et de

même aussi, tout en rangeant les dialogues dans la

classe exotérique, il donne à entendre que les dialogues

ne la constituent pas tout entière 1. Enfin Alexandre

d'Aphrodisée, dont nous n'avons plus les commen-

taires sur les Catégories ni sur la Physique, mais dont

ces témoignages nous représentent sans doute plus

ou moins exactement l'opinion, en confirme une

partie avec une précision supérieure, lorsqu'il dit,

dans le commentaire sur les Topiques 2

Ce traité même, avec ia Rhétorique, rentre dans la classe

emterique; dans cette classe se placent en outre beaucoup

d'ouvrages de physique et de morale. mais qui ne dépassent

pas rargumentatîoa par le probable, c est-à-d!re cette mé-

thode logique on dialectique qu'Aristote oppose toujours à la

méthode analytique et apodictique.

Philop. in tttr. de Anim. t38 Ta ~Mrep~ Myy~fMTa,t5f ef<n

M' Ot&'&oyo<.

A)e!.Aphrodis.

M Top. p.Sa

Page 236: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

22& PARTIE III.-DE LA MÉTAPHYSIQUE.1

Ainsi, en résumant tous ces témoignages, la dis.

tinction des livres exotériques et acroamatiques se

serait fondée immédiatement sur une différence de

forme qui avait dû correspondre en général à une

classi&cation des objets de l'enseignement, mais qui

constamment enveloppait une différence essentielle

de méthode. Maintenant où est le nœud de tout ceta?

Quel est le lien qui rattache tous ces caractères à leur

principecommun? Sans cette connaissance, nous

demeurons dans le vague, nous ne pouvons obtenir

avec précisioncette mesure que nous voulions ap-

pliquer au plus grand ouvrage d'Aristote, pour en

déterminer au moins la valeur relative. Il ne nous

reste donc quede nous adresser à Aristote lui-

même, et de chercher dans ses indications brèves

mais sûres ce criterium rigoureux que des traditions

incertaines nous cachent autant qu'elles nous le

montrent.

Le mot d'exotérique, qui se présente souvent dans

les ouvrages d'Aristote, n'y est pas borné à cette si

gnification technique où nous venons de le voir

prendre pardes écrivains plus récents. Dérivé di-

rectement d'ï~« (dehors), ce mot signiRe, d'une ma-

nière générale,extérieur ou même étranger. Ilsap-

pliqueaux membres des animaux par opposition

au

tronc, aux biens du corps par opposition aux biens

intérieurs de l'âme, a la domination de l'étranger

Page 237: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE L CHAPITRE L 225

.5

par oppositionau gouvernement national, etc. 1.

Lors donc quece mot est joint à ~o~ ou à tout

autre terme du même genre, et semble désigner

un ordre particulier d'ouvrages ou de recherches

scientifiquesil ne doit pas prendre d'acception

nouvelle et mystérieuse,mais conserver le sens

étymologique.Dans la sévère correction de son lan-

gage,Aristote ne détourne jamais un mot de sa si-

gnification originelle;il prélere créer des termes à

en altérer. Mais par l'indétermination même de l'é-

Mthëte, l'expression d'i~-repoMt ~o~< reste obscure et

prête l'équivoque.Par ces « discours du dehors H

faut II entendre, avec les commentateurs anciens,

des ouvrages faits pour le public? Ne faut-il voir,

au contraire, dans cette dénomination qu'unrenvoi

à des ouvrages étrangers par leur sujet à ceux où

le renvoi se rencontre. Saint Thomas l'a prétendu

le premier, et son opinion ne manque pas de par-

tisans~. Elle peut s'appuyer de plusieurs passages d'A-

ristote, où il désigne par les termes d'o< ~6~ ~<,

~MTtpom ox~c, etc. «des discours, des recherches

étrangères &la question~.» Enfin les e~rtpMM< ~o~ ne

De Gen. <MM<!t.V, Vt. Polit. VII, t. Ht; Il, vu. Cf. Buhte, De Mr.

~Mt. ezo(. ~acuMm.,~mt. Opp. I, ~7-9.

D. Thom. nt NL aRcoM. VI, tT. Weisse, ~mnte~. zurP~.

~'M'.(Le:pt, t8a9, in~*), p. 5<7. Stahr, ~ruMeHa, H, 273.

3FoCt. n. nï TA J' <C~t To& ~eef ~oyo< ~efr~p~xE T~ oy.

Mi nr A3M MBttt ft~ &Wt ~MptMtT~pM~7~ <T~C<Nt. -So~ ff.

M A~M'~M. Ht<!t. I, t 'M ~M TOC ~p~fMTO~.

Page 238: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

226 PARTIE III.-DE LA MÉTAPHYSIQUE

sont-ils pas, au moins dans le plus grand notnLr-

de cas, des recherches extérieures au sujet propttde chaque science 1, la partie superficielle et accès

soire, par opposition aux profondeurs et à l'Rs.sencf

de la discussion. Cette interprétation aurait sur la

première l'avantage d'être plus naturelle, plus con

forme à l'acception ordinaire du mot exotënouc.

elle aurait sur la seconde celui de s'accorder avec les

traditions historiques elle remplacerait ainsi i'inter

prétation des commentateurs sans attaquer leur te.

moignage. Mais est-elle justifiée par l'examen d~

passages d'Aristote où se trouvent les mots d'~r:pM< ~e~< ? Nous le pensons, et nous allons chercher a

le prouver.

Dans les passages ou Aristote renvoie à ses e~T!

p<M<~~<, il M'y renvoie jamais comme à des recher

ches futures où les questions devront être appro-

fondies, mais comme à des ouvrages de)à connu-.

où elles ont reçu des développements suffisants.

«Nous avons assez parlé de ce point, dit-il souvent.

dans les <~e<7tpMe< ~e~<, et nous nous en servirons

ici 2. Et cela ne veut pas dire que la question y a ctc

Ë~MrepMM~ oppMéà o&te!bf. Polit. VU, VI 6 -S~e~ xau c:! <

<MH~M~ o!< 0<!t eMf~~MT6pf)M~ <Mf~e« <MMt4

TC~ O~tte~tS <[t!T&'f Dieu

ne doit pas sa félicité à des biens extérieuM, mais à soi seul; P<"<

VU, t A<' o<!C~f <MT~f <~Tept)M!f <!ya6& ~M~et &' at~f <tJr<M.

Polit. VM, t No~<MHtTt[< 0?f <)[<MtM ~oM~ X~yea~Mxai TM

to« ~6~T<p"t"~ XoyMf ~ep< T~e ap~ar7tt< ~t~tt, )Md Mi~ ~ptt~~of~<

E<Vtc. t. MnA~'eT<M ~ep! <N?T~<(ï~t ~9<) K~ du ïo~ ~M~

Page 239: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE 1. CHAPITRE t. 227

5.

jiscntce à ïbnd, mais quelle y a été traitée longue-

ment, et n'exige pas d'être reprise en sous-œuvre.

Car ce n'est jamais pour un point dimcile qu'Aristote

renvoie son lecteur, ce n'est jamais pour une dé-

monstration rigoureuse,c'est presque toujours pour

des divisions élémentaires, communes à toutes les

nhibsophies,et que personne, ajoute-t-il quelque

part,ne voudrait contestera c'est pour la division

de tame en ses deux parties, raisonnable et irraison-

nahte~; pourcelle de l'autorité en ses trois espèces,

économique, politique et despotique~; pour celle

des biens en extérieurs et intérieurs, ou en biens du

dehors, du corps et de l'amer ennn pour la dis-

tinction de iau'e et d'agir Ce sont la des matières

sur lesquelles on peuts'en fier, selon ses propres

termes' aux Âo~< t~Ttp«ce/. Les développements

<{ueiles y ont reçus semblent même provoquer de sa

'MKAeyo«~M)~n« &Mt, )«dxpw~oe

<tJr<w. Cf. iMd. VI, nr. Sur !e

Kns d otMwt et d'<~<M<M<dams CM passages,

cf. E<A. ~c. t, xt T~

'w~. X. !)M~< To& t<hKM<. P~. Vnt, V!H A~ Mm: ~<

f~' T&f~TtBfM

&MM!e ~M. ~t ~{Mt)t~ ~~MW

'tMtfSt.

PoMt. VM, t <&<t6B< y<~ <fp<tf y s fM<tf~pe<Kf MMe!«t~«t-

~oe<tp )t. T.

m. ~.e. t, xm.

poHt.m, tv.

m.RMt.U.t.P~VH.t.

M. ?6. V!, !v; EA. End. V, 'v.Elit,NifJ.VI, l'r'. £Il. EuJ..V, l'.

Loce.tmtdd.:tt<aw ~7~~o~<H< xat <fpa$~. n«y7euofet' ~e

Mp' <~<iw )M< T<~ ~&Mtp<<M« ~OM. Lafoi

est ptusindétermtn~e

Page 240: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

228 PARTIE 111.–DE LA MÉTAPHYSIQUE

part une sorte de dédam philosophique. « Nous ne

nous étendrons pas, dit-il, sur la réfutation de b

théorie des idées, chose plus difficile cependant

que de simples divisions « cela a été assez rebattu

«dans les livres exotériques ? Ennn la seule ibrme

grammaticale de ces renvois nous révèle le caractère

et le rôle des livres exotériques. Aristotey renvoie

presque toujours par la forme du présent: «Nous

« disons dans ces livres (Âe~u ~), a et presque tou

jours il ajoute le mot «aussi (<~).» Ces circonstances

en apparence indiuerentes/nous indiquent assez clai-

rement d'abord que les mêmes matières sont corn

munes à la fois au livre exotérique et à celui où H est

mentionné; et en second lieu, que, destinés sans doute

à des usages différents, ils s'accompagnent en quelque

sorte dans le temps, ils sont contemporains l'un

quela <CMnc<; ittet. I, vm (M ~«of ai ~o?e« y~~r<M &' M<~a

<MMMBMyOt~ <RM xd A' ~O~tee Ty y<~~m«!f T<M ~M<~<M TM M

y<WM, <Mo~e<!otte~.

JM<&y~.Xm, ï, p. aSg, L tg Te6p<MntT<MyctpT<i~oXX<

M~~re~MM~ ~Jyaw. Potet. Ht, tv HoM~M. E<t. Ettd. I, vu! iïM

Wp<t)M<<.

Cependant cette forme n'est pas sans exception ni eMtusivemM!

aCectee, comme Stahr (jdfMhttetM, 11, a6&) paraît ie croire, aux M

voM à dee liïrea exotériques, t° Aristote renvoie deux fois à ces c"

vrages parla forme du parfait. E<&. Eud. I, VHt Ê~An<eit7a< xai à

soïs dF~mesep~xoFs7ldyors, xad ér soïs ~casa ~aoaof~far. Mdaph.loc. laud.~fa!f ~6Mreptte& Myot~ jMt) To« :t<tT~ ~ear<~&w. JMetont. toc.

tau<)

laTeNp~~XttTM.

a* n renvoiequelquefois à d'autres ouvrages par

la

forme du prêtent; Polit. VH, Mt ~a~ &"e& A&seh E't

Wi!e. Vt, m &H! ~~«t~rp<w&op<« ~f sois Ât~M~OM.

Page 241: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE CHAPITRE I. 229

de t'autre dans le doubie enseignement de leur au-

teur commun.

A tous les grands ouvrages philosophiques sem-

blent correspondre des livres exotériques, qui en

~ont comme des préludes ou des esquisses impar-

faites. Dans les uns et dans les autres, le sujet est

le même; mais le point de vue et l'exécution dif-

~rent là c'est la sciénce, ici une sagesse facile et

vulgaire.

Quelquefois même, par l'indétermination de sa na-

ture, un livre exotérique tient à la fois à deux sciences

différentes, qui lui empruntent des notions com-

munes. Après avoir transporté dans le VIle livre de

sa Politique quelques idées tirées d'ouvrages exoté-

riques qui traitaient du souverain bien, Aristote se hâte

d'ajouter: «En voilà assez pour nous servir de préam-

<u!e; ne rien toucher de cette question, cela n'était

pas possible, et nous ne pouvons pas non plus l'é-

puiser dans ce qu'elle a de propre; car c'est l'aNaire

d'une autre partie de l'enseignement C'est à la

Pettt. Vt!, t Nef~MftM eSf ttMtf~t ttoXX<iMyeoCcu<M<r&w

MM~MMpMM& My<M< <ept t~t ~0?t)< ?M)!<, <Mt! eSf ~p<t<r7~0)t <H?TOM.

~v

s~isiçfMepllcoh ~C'Hf ~rep? rits a'fJrFdJ~s ~'a~m"s,xaJ rill x pga9éor awroTs.

– A~My~p

TftSMt t<~f TtMwCrof &~?M <te<Ppo<t<«M~fa[ Ty X<&)

(f~re y~p .9<yy~MM' «Jtûf, ~MMtT~f, o~e ~~TM ro~ oMce~t ~<fe§-

~9eM'M~tt« Myaxf tT~MM y~)

~o?tf ~pyof fr~o~t Mi?ra). Stahr

[n. :~3) expliquemtt ce passage;

il en conclut au contraire que !a

Mondey est

déeMnéecomme un livre exotérique, et que par consé-

quent un~pe esetétiqae

a'est autre chose, engénérai, qu'un outrage

ettanger, par son sujet, à celui où il est cité.

Page 242: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

230 PARTIE III –DE LA MÉTAPHYSIQUE

morale de donner, sur la question du souverain bien

des démonstrations directes et spécinques, que l'on

ne pourrait transporter dans la politique sans con

fondre deux sphères distinctes de ia science; mais les

généralités trouvent leur place dans les livres exotc

riques, où des sciences distinctes, mais parentes

peuvent aller les puiser La spécialité les sépare. la

généralité les réunit.

Toute considération qui ne va pas au fond du su

jet, qui se tient aux généralités, est par cela même

extérieure, exotérique. Par exemple, pour établir la

légitimitéd'une distinction dans l'État entre une par-

tie qui commande et une partie qui obéit, on pour-

rait, à toute force, remonter jusqu'à la nature inani-

mée, où l'on reconnaît déjà la distinction du supérieur

et de l'inférieur. Mais peut-être serait-ce prendretes

choses de trop loin; «peut-être, dit Aristote, se

raient-ce des considérations trop exotériques;il vaut

mieux partir du rapport, plus rapprochéde nous, du

corps et de l'âme qui lui commande ?»

Ainsi, que l'épithète d'exotérique ne s'applique pus

exc!usivement dans Aristote à une classe particulière

de livres ou de leçons sur certains sujets, mais queo

riginairement,au contraire, elle s'applique

à un<

De même la morale emprunteaux livrée exotériques

des coM'

otératimM générate*sur rame. Et&. Wtc. 1. Hti.

PeKi. t, t AM~TaBM f~" <"<M~MTept~M~MM

~< <Ht~6<MM

~Of ~p~TOfaw~tttef ~X~ <MSfMT<'t, <t. T. A.

Page 243: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE t, CHAPITRE 25i

certaine manière générale de procéder dans les re-

<herches et dans l'exposition, c'est ce qui ressor)

<nani<estement du témoignage d'Aristote lui-même

peine est-il nécessaire. pour porter l'évidence au

combie, de signaler deux passages relatifs aux ~o~<

t~M7!6MM'~où ie seul tour de la phrase ne permet

d'entendre par là qu'un procédé, un moyen (<&<z,use

~f t~. ~.) Mais quel est le caractère propre, es-

scntiel, de cette méthode, et de la méthode supé-

rieure à laquelle elle semble ne faire que préludera

Sans s'être étendu nulle part sur cette question avec

ces termes techniques dont nous recherchons le sens

obscurci. Aristote n'en abonde pas moins en indi-

cations, qui nous permettront de retrouver sa pen-sée tout entière. n suffit de la suivre avec quelque

attention dans de légères transformations qui la dé-

veloppent sans l'altérer.

D'abord, au traité exotérique il oppose le traité

philosophique Et cette dernière expression ne dé-

signe pas exclusivement, comme on l'a prétendu,lm

ouvrage particulier, tel que le traité de la Phi-

losophie 3; elle a une signification plus générale,

puisque ailleurs Aristote fait mention de «traités

P~f. ÏV, x np<<f<M' )taMf ~e< ~<!t)top~<M< ~rep! ajroe xai Jt<i

~&*Mp«t&' My<M'. JMe<<y&. XIII, t TeOp~TM ~apTa wo~M

we T~~~ep<x<B~ Mya~.

Nt. Ead. vm )M ~f to?t ~MïeptxoM Xo~ o« xat ~f To« «tTft

~0<M~

Voyez plus haut, p. 5~.

Page 244: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

232 PARTIE III.-DE LA MÉTAPHYSIQUE.

philosophiques sur la morale 1. » nEn effet, dit-il o)

core ailleurs, il n'y a pas de sujet qui ne se puisse trai

ter de deux manières, l'une philosophique, l'autre non

philosophique 2.)) Il s'agit donc bien de deux me

thodes opposées, applicables à toute espèce de sujet.

Or ces deux méthodes, dont rune est, comme nous

venons de le voir, la méthode exotérique, Aristote

les a décrites souvent avec détail et de la manière la

plus précise~

La méthode opposée à la méthode philosophique

est celle qui prend son point de départ dans l'appa

rence, dans l'opinion~, et qui par conséquent ne

peut produire une certitude absolue. L'apparence,

ce sont les formes contraires sous lesquelles se ma-

nifestent les objets de la connaissance, qui peuvent

être au même titre, et entre lesquelles l'opinion con)

mune est l'unique ou le meilleur juge\ Le procède

naturel d'une pareille méthode doit donc être l'in-

terrogation, qui met successivement en question sur

1 Polit. III, XH ûftO~oyoSM T0« <MT~ ~<MM~tW X~yOM, à' 'M!

A~pt~MH <Mp!TaW ~OHMSf.

tN&. &«!. t, Tt AMt~MMM

ot MyM ~ep! &M!artt~ ~CoJof ai Te

~o<K~Mt Xey<!ftefM <t<d fti) ~otK~Mt.

T<y. t, t AMAeXTMt~t <7~0T'«Tft~ ~f~&<f OMXXoy~OfM

M~ etc. etpaMtm. JMehyA. 111, p. 4*, L :6 Hep~AMM'o! ~K~e)tT<i«"P«, etc. et panim. mewh. lU, p. 41, 1. 26: Depl iC70IP 013uù.exnxo¡

tMtpCt~M <MMit~, &t <Sf ~t'&~M' tt<<Mf ~MOOft~M ~f <nt~t'<f. Cf.

~M~.pr. H, xvm; Anal. poit I, xxv.

Soph. e1 1, n &M!)~e)tT<iM!J' o! (X<!yo<) T&' à~&M' <oy'

arotei ~Tt~toMM. Top.t. VtH ÔfM&M <MJ ïA TO?t à~&M< ~fa~.

JMtTft &T~ft<nf ~pOTeffOfteM~ &Jo6ft ~MMM.

Page 245: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE CHAPITRE i. 233

chaque sujet les déux hypothèses contradictoires

Sa forme propre est le dialogue où se provoquent

et s'enchaînent sansinterruption la demande et la

réponse.Mais quelque forme qu'elle revête, son nom

est celui de dialectique 2.

Tout au contraire de ladialectique, la méthode

philosophiquea pour point de départ et pour fin le

trai, le certain, le nécessaire. Elle ne prend pas son

point d'appui dans l'opinion des hommes, mais dans

des principes qui se justifient par eux-mêmes Elle

ne procède donc pas par interrogations, mais par dé-

monstrations. Or, démontrer c'est enseignera Le phi-

~Mt. pf. t, t AMt~Ttttt) <?(~p~TtM~) -Mf~M'Cft~ ~K&Ttt-

<ntafn~oeMf, o~o~o~fy Jè ~« roS ~Mfo(.t&~ x~ ~J< xa-

MKp& MM T<MKiM& e)'p~T<H. Top. VIII, t

ÊpMT!)f«itT~e<f ~<0f TO?

&t).e<T<)MM.&yt.

e!. Xt & ~MtXexTMtt} ~pa~TM)! ~7<p, x. T.

~M~. po<<. t, xn Tow To<~ AaAJyoM pour Taw AaXexTtXMf

~M'.

Top. VIII, t ~Meo~M opposé à AfAexT~. Cf. Met. IV, p. 64,i. 3o.

Top. t, HwnpAf f*~ oBf ~<Xo<r< <Mtr' <Sn{Oe«)w. opa~M-

Teer~, ~MtXe)tn)M!< Je~pe< &)§!w. ~n< pr. n, xn Ê<t7< ? ïo

<ttre~<M & ft&' Mt& thto~~e<K T~ <Ktr' e3n!0e<af o~M ~oyta- ~f

dé TB& JMXMMMto& )M~ A(&w. Cf.Top. VIII, xm, mit. Anal. post.

t. a A«M<t6w MyM <n~oy«r~tt ~n~fM'<W. <&'ay~

M~eMtt)t~ <!)B<!T<fftt~ < T' e~<M )Mt ~p<4rMX <~OMf xai

y'~pffM~pM'. Cf. R~. t. IV.

AMf.pr. t, t ô <!hM~eotM:M'

opposé à o~pter~. Top. VIII, Ht

~MMfH opposé à A&MHMM'M. &p&. < x Ôrt~repop T~ &A~xe<p Tc6

~~M&M, jMt) ~H J~T~ ftef AA~nM~a ~p<MT~, <B~' <tjr~ J~a

*"<&, ~MM~. ~aat. pr. t. tOJ y<)p ~pMT?, <SM ~6~e< <S

**<~NM~M).

Page 246: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

234 PARTIE IÎI.–DE LA MÉTAPHYSIQUE

losophe est un maître', dépositaire de principes dans

lesquelsie

disciplea foi 2, et

quilui en

développe

avec évidence les conséquences nécessaires. La mp

thode philosophique ou scientifique n'est donc autre

chose que la méthode démonstrative etdidactique

Sa forme ne peut être que la forme del'enseignement

oral, de la leçon (<M~<Mtf)\ et le nom qui lui con

vient le mieux celuid'acroama~oe. Si ce mot même

ne se rencontre pas dans Aristote comme chez les

auteursplus récents, on en trouve du moins chez lui

tous les équivalents; dans plusieurs de sesouvrages

Met. l, 1 Ô~&~ <n!;te«w ToS eM<!ïM ro A!MK!&H AJaKnMft' Mp

~tef. Ibid. n.

&)p&.el. t

Aefy~p <Mo?e<!e<f r~p fM[)'<Mwofta.3

Btct. ï, t: ~6tCJt!t~<M y<!p ~e7<~ 0 )!MT~ T~f ~«T?~tt~ ~Oi

EtA. ~<c. VI, m AfAum) ~Ma ~<o7~)t ~oxeT eIfM, «~ ïo e)r<~))M

tjMtO~f' <~M[ ëir<o?)(ft)t ~t)t g&< <!)ro~s<XT<)tt}. Ibid. n Tf

fH!f y<tp ~<MO?)fT~f <t~o3e<XT<!f. ~M~. post. t, tt ÂH<~e<$<P X~N

~<ty«T(<3f ~ttO~fMM'MMf. &yA. el. Il: AtJ<M!toX«0< XJ~Ot OppO~aut

AfAeitTOM~, <B<pM?<)M<et

~«~«< Top. Vttl, xi rM~ao&tt xm ea

ptt ~M"a~' ad ~<~[<nMt~M o! TO<Oti~MTt!f XJy~tt (JtaXettTfHof).

~M)

p0<t. !tUt. tt&Mt &&[<nMA&t )Mt<<5<H[ tM~Ott, X. T. À.

Nous avons vu les leçons de Platon sur le Bienappelées tUfpeMt

par AnetMene, disciple d'Aristote. Voyez plus haut, p 71. Gaien. t)<

en&. Mf.ap. Kopp.

NA<M. J&M. IH, toaÂpto~or~owe QeoppM?~

Tft ft~ M<f «Mo« ytypa~Mtf, ïAt J~a<tp<Mt<M<ete& <MM~o< Âxp<M

<y<fest le motpropre pour désigner tes !eco)M des

philosopheset fks

rhéteer*. CMaub. ad Sueton. De tHat<r. ~rmmtt. tt; Cresoll. ï~f

'A<t. m, t~ë (ParM. t6*o, in-8'). Les rédactions des élèves sap)t

laient aaast <hpo<f<M«. Mog. Laert. VI, xcv; Vit, MTtH, xn Stahr.

tt, 295. S~J~t) a également les denx sens, celui de leçon (Polit.V~

t) et celui de rédaction(Mog.

Laert VII, xvxt, ap Stahr, !oc )at"t

t

Page 247: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE CHAPITRE I. 255

il donne à entendre qu'il s'adresse à des auditeurs

et le mot de leçon est pour lui synonyme de celui

d'étude ou de science 2. Maintenant si la dialectique se

traduit d'ordinaire dans la forme de la conversation,

la forme de la méthode philosophique doit être au

contraire celle du discours direct (~uTc~otMw). Bien

plus, l'écriture ne doit servir ici qu'à garder le sou-

venir de l'enseignement. Le livre exotérique doit être

en général un dialogue, et le livre acroamatique une

collection de mémoires~. A l'opposition des deux mé-

thodes correspond l'opposition encore plus tranchée

des deux formes.

De tous les dialogues qu'Aristote avait composés

suivant la méthode dialectique, aucun ne nous est

parvenu. Nous ne pouvons plus montrer aucun

exemple de ce que c'était qu'un livre exotérique

dans l'école péripatéticienne. Mais nous en avons le

type originel dans les dialogues de Platon. C'était le

même procédé d'induction et de discussion, et le

même caractère de style sauf toutefois, on peut en

Efh. Nic. I, t T>~t'roJlssex~s oûx ~'a7iv oJxs7osâacpoas~s ô véor.Et&. AfM. t, t T<tf wXtrottft oJx &~<f e~(e<b<o!xp<Mtr~< o <~M

fM~ <{iM)~eKH A~eMit. Cf. ?<< X, x.&yh. <<. sub Sa.

Ae<~ e~ <MtMMf T<3f ~poa~f<Mp ~pyo", t.T.X. jfet. IV.

p. 66, 1. ~t? y<tp WMpt M~&w ~Mf isfpoetr«r7<t~fOMf, aM~~

*~M'w !~e&.

ttef. H, tu AJ e~tpoftoett jMfA T<[ ~tt c«(t6!~fouM~.

t*o(M~~MtMt; en htim ee<MMett<aMi. Voy. plus haut, p. 2t9.–Diog.

V, xtvnt t~<~M~~nM' ÂpM~oTe~MMiw 0 eso~p<t<y7e~p f'.

Athm. XIV, 654 Ap«~7<Mr~< 8eo~pa<r7<!<T<!« ):t<t~~<tc<.

Page 248: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

256 PARTIE III–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

croire saint Basile, les grâces inimitables du modèle' l,

En outre Aristote, considérant le dialogue comme

une expression inférieure de la philosophie, s'y était

peut-être enveloppé de plus de voiles et dedéguise

ments oratoires que n'avait fait son maître. Sans y

cacher sa pensée, il n'en montrait pas le fond, et les

dogmes de la providence divine et de la vie future,

si sombres dans ses ouvrages sérieux, brillaient dans

ses dialogues d'assez vives couleurs

Ainsi s'expliquent les traditions diverses que nous

avons d'abord réunies, qui semblaient souvent se

contredire, et qui maintenant, placées dans leur vrai

jour, s'éclaireront les unes par les autres.

Maispuisque la distinction des deux méthodes

n'est pas tout entière dans la forme extérieure, et

qu'elle repose sur une différence fondamentale, sus-

ceptible de plus ou de moins, elle doit se retrouver

encore entre les ouvrages tous acroamatiques eu

apparence, qui sont arrivés jusqu'à nous. Tous sont

dans la forme du discours direct; mais ils diu~rcut

Basil. Diod.e~Mt. cxxxv, 0~). III (Paris, t~So, m-P), p.

~ti

tM TfM' ~M~f ~<Xoj~Mf o! TO~ JM~O/OM <~uyyp<~<MTM, Ap'O~K

Xttf xat Oe<~MM~7<M~ eu<M< <n:T<Bp ~MTo Mw'afpeyfMhMf,

A!'

OW6t~&'<M &):MO& TMf IDKtTMMKMf~a~KtW T~ A'~SMH'.

Voyez sur la Providence lefragment rapporté par Cicéron,

deor. ïî, xxxvu sur l'Immortalité de l'âme, lesrenseignements quc

plusieurs auteurs nous ont transmis touchant le dialogueinh(u)e

EiM~s~oK~ f~sM. Cicef. de Divin. 1. xxv; Plut. CoMo~. eJ ~/)c~

1

MVtt; Themist.Philop. Simplic. in libr. de ~n. 1, U!. etc.

Page 249: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE î, CHAPITRE I. 237

par le sujet, et cette différence doit en commander

une dans ia méthode. Les livres qui roulent sur la

dialectique n'exigent pas des démonstrations de la

dernière rigueur il y suffit d'une haute vraisem-

blance. Les Topiques et le traité des Sophismes peu-

vent donc, du moins par opposition auxAnalytiques,

prendre place dans la classe exotérique'. A côté des

Topiques viendra se ranger la Rhétorique, ie pendant

et le complément de la Dialectique 2. Dans la même

classe rentrera encore cette partie de la Physique qui

ne dépasse guère l'observation des phénomènes, et

décrit plus qu'elle ne démontre la Météorologique

e! l'Histoire des animaux.

Au contraire, la Physique proprement dite, la Mo-

rate, les Analytiques présentent tous les caractères

acroamatiques. La Physique nous a même été trans-

mise sous le titre significatif de leçon, <t~o<t<n<.La Poli-

tique porte ia même désignation dans lecatalogue de

Diogène de Laërte. Nous avons dé}a vu l'Éthique citée

Top. ï, t, mb 6n. KaMXouef*eM' -sep!

~t~~f TMfa~Mt~f&w

M~MT~teT~t~CKt tM~fM~t~MM', TOtTOCTOf~!f &Mpjfo~M, Aoï<~60~

f~e~f ajraw r~<h[p<6~ My<w <!)to~oCf<«

~rp<Mup<M!fte9<ï,eXX' <;ow

wej)! f~e!t; ~M~~te&t Ae~8e<f, '~afTeX~f ~itafof ~<K!~ef<M xotTa

~f~po~tt~Mn; t~Oo&n' ïA &!fCK~<H

yM)p~e<f omtXTOMt &«[<r7cK a<?-

TM'. T~ <~ oppMé à t~ptëet, JTth. ~M-. t, t, t[; M, Y)[.

BA<t. t, imt. 6~ropot~ ~d?M' c!~<t7po~of T~ AaXeKT<«~- a~tpo-

MpM yJp ~eptTOtO~MM' Ttt~f e~tMf A )tO<M~TpO~Of TffA ainh'MW ~7<

y~!e<f, jMf!oJ~qu& &n<!7<<ft!K <~p«Fft~M;t. tbtd.)V Û~o/a J* ~7<Yv'dPl~v~ owIaNuQS éuo$tfp»s â~mprcwévrts.

Iiïïd. rv ~~cola ô' ~a7i

f~f AttÂOtT~ T0?< <M~7MMM< ~OM.

Page 250: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

258 PARTIE IÏL–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

par Aristote comme un livre philosophique. Enfin )(

sujet des Analytiques, la science de la dcmonstra

tion, est le sujet propre de l'enseignement scienti.

fique, puisque l'analytique s'oppose à ladialeciim),

comme la vérité à l'opinion. Mais ily a une science

plus profonde que ces sciences, et dont elles ne

forment que l'introduction. La science de la nature

c'est-à-dire du domaine de la contingence, ne peut

franchir toujours les limites de la vraisemblance et

de l'opinion~, et elle ne sait pas le secret de ses

propres principes. La morale, dont lapolitique est

l'expression la plus haute, ne dépasse pas la sagesse

humaine, qui dépend de l'opinion plutôt que de la

science2, et qui n'a son dernier fondement que dans

la sagesse et la raison absolues.L'analytique suppose

des principes dont elle n'a pas la clef, et qui veulent

une explication supérieure~. Le dernier enseigne-

ment qui appelle enfin le disciple dans le sanctuaire

de la philosophie, c'est la philosophie première, ou

la métaphysique. Lamétaphysique est la seule science

qui mérite, à proprement parler, le nom d'acroama

tique

~M~.p<Mt. I, MXnt.

m. Nie. VI, v.

~tM<. pMi. n. Met. IH, 44-A5.

Le pMMgeMivantpmaît désignef laMétaphysique comme a<TM

matique fetativement à l'Analytique. Met. IV, m, p. 66, L 2 Ô<M

~(efpoBa!T<3" XeyJfTWf w~<

«ept T%< <!X)t6~M, Tp~tof~f Me

~~<oCa<,&' alt<«3e<M!&[<' Tf«' ÂM~UTtXMf T05TO ~p«W &? y<tp ~P'

1

Page 251: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE t. CHAPITRE 259

Enfin, si l'opposition des deux méthodes est essen-

tjeUt'meut relative, si déjà, sous la forme scientifique

et acroamatique,nous avons retrouvé

enveloppéela

dialectique,la

dialectiquene

peut-elle pas pénétrer

({ueiquelbis jusque dans les sciences les plus élevées?

\p faut-il pas que le maître prenne ses auditeurs au

point où il les trouve, pour les conduire pas à pas,

par la discussion des hypothèses contradictoires, de

ignorance à la connaissance et de l'opinion à la cer-

titude!* Or n'est-ce pas là la plus haute fonction de

la dialectique?

Ladialectique

ne sertpas

seulement à l'exercice et à la con-

'ersation; elle sert aux sciencesphilosophiques;

carlorsque

"nusjMuvons agiter chaque question

dans les deux sens con-

traires, nous discernons plusfacilement la vérité et l'erreur.

Ce n'estpas une chose d'une médiocre utilité

pourla

philoso-

phie que depouvoir

considérer à la fois et d'une même vue

tesconséquences des deux hypothèses opposées C'est à la

dialectique d'essayerce

quela

philosophiedoit ensuite faire

connaître*.

MtiMw~Mf ~poMM?<f«fo<«, aAM axoiiopTOtt ~reM'.–BtMtofA.

fMat. ap. Catin, Btt<M<t. Arab. Etcur. [, So-y Metaphysicorum li-

M XHt, ocnMmattCt.

7<y. t, nnpA< yw~Mt~~ ~<HfM< ~~î T~t ~fTe<!$e<t,

'pM )Mtt~ ~t~aae~fM' ~<MO?)((M[t, ~T< ~«M~teiMM <erp~: ~t~Tepft

&Mopa<M< j~hw ~M~Mf MTo~<!ftea<t Tf~)tM< Te «d ~eB~oe. Vît!,

mnpJt Te yw&Mf t~f )MTat ~Xooap&tf ~p~~tnx T~ J<!M<~u

~0~ M~<«tpMtA'M

ri <tp' &MtT~pft< <~f<6~fWTCt ais MtroC~M 0<:

~~f ~pyo~M;.

Met. IV, p. 6$, t. 30 Ë<TT< ~MtXtXTM~ ~e<jM<M«n) <Mp~ r5

~eM~M y)wpt<~<

Page 252: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

240 PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE

L'office de ia dialectique est de poser et de discu-

ter tous les problèmes que la science devra résoudre.

« Le problème estl'interrogation dialectique qui met

en question l'une après l'autre les deux propositions

contradictoires; » laphilosophie répond à la demande

et donne la solution Or un double champ s'ouvre

ici aux recherches de ladialectique; celui de i'his-

toire et celui de la pure vraisemblance. L'histoire

est le dépôt des opinions des sages, dont l'autorité

mérite qu'on lesinterroge d'abord 2. Mais le philo

sophe ne se renferme pas dans le cercle de la tra-

dition il l'abandonne dès qu'il l'a épuisée, et se

pose de lui-même les problèmes qui ont échappe a

ses devanciers. Sur toute question il veut entendre,

comme un juge équitable avant de porter sa sen

tence, les parties opposées~.

Telle est la double expérience qui constitue dans la

Top. t, vm É<fT<~p<<TMM rdv JtaXexTM~ ~pc5rtt<n$.– V!H,

KA~p~tMt <n~oy«TftM ~Mi~MtTMtOt mPTt~ArMM. La SotutMB Mt

et~Mp&t, MaM. Met. III, init. ToM eJirop~KH ~ot~t~o~ ~po~yM

T~~Mt<Mp~or<M<M:XeM.

jMet.t, p. Ai, ï. i; XIII, p. ~59, t. de An. ï, H.

j<et. ni, p. 4o, i. 17 Ô<Mt Te~ep~ <iH!T<5)'~)re<?L~a<f~ T~K, xi!'

e~ T<XM~

ro<!rM!'wy~a~ -empeMps~of'

ËT< j3~XT<of aMy"!)

~«f ~p~fr~

)tpMW< TApAnfep f!t~<~)Mt)f xact M?o c~«~T<M!fT&

y~f <!)ttt<M<~<[oh~My. Ctcer. de Fw. V, tv Ab Artstotete de singut's

rebuein mtramqne partem dicendi eMPCttatto est instituta, ut non

contra omniasemper, meut Arcesilas, diceret, et tamen ut in otnoi

bm Mbusqmsqtud ex mtmque parte dici posset expromeret.

Cf

1

OMt m.

Page 253: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE CHAPITRE t. ~t

16

n))i)osophiel'élément cxotérique. C'est cet clément

quiforme dans les grands ouvrages d'Aristote ces

longuesintroductions dont il

remplit des livres en-

tiers'. Mais c'est encore dans laMétaphysique que

nous en trouvons le type le plus complet. La philo-

sophiedans la métaphysique atteint son

apogée; c'est

là que la dialectique doit expirer, mais après s'être

eicvée aussi a sa plus haute puissance. L'histoire, la

tradition, l'opinion, ce sont ici les doctrines fonda-

mentales des plus grands philosophes; les questions

sont les plus ardues que l'esprit puisse concevoir. Ce

n'était pas trop d'un livre pour l'histoire (t" livre),

et d'un autre livre pour le doute et la discussion di-

recte des problèmes (ni" livre). Ladialectique réu-

nit ses forces et concentre tous ses moyens. Ailleurs

Aristote dissémine souvent les questions pour les

résoudre à mesure et séparément; ici il les rassemble

et en forme un corps2; il fait le tour de la science

tout entière, et avant d'y pénétrer l'investit et la

Â~OC~M, <t*Opt!(M[M, &aMMp~M, &fMtOpt~MTM. J&<.p. 64, 2;

P. su. 1. M; p. a6t, t4; p. '96, i. 4; p. 95g, 1. 3a; p. 287,L 92. De An. I, n. Anal. pMt. n, vm, sub fin. Eudem.

ap. Simplic. in

Phys. f ig a: t~e< aJr~ ToSyo atrop~f ~&)Tep«!{f. Simplic. tbid.

t8 b t<MM ~n )} &M~e<M[ <hrop~: roC ~Jyou ~<Mep«~ T<e ~f,

&E~))~ ptt<K, ~MAMtïMtt (Mt~of oBoa. On sait qu'Eudeme fut, de

tons lesdisciples d'AtMtote, le plus fidèle au

langage comme à la doc-

'nne de son mattre. P<M't. xvnt T~ ~&~e~ l'exposition de la tra-

~ed)~ t'mtmdactMn, par oppositionà Ta &K~ef.

Voyei plus haut, p. 9 2.

Page 254: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

242 PARTÏE III.-DE LA MÉTAPHYSIQUE

presse d'une argumentation-en règle. Mais si! a

entre la philosoplue et ladialectique une

opposition

qui se prononce davantage à mesure qu'elles se rapprochent, il y en a une autre bien plus profonde M

core entre la sophistique et la philosophie. La dia

lectique se distingue de celle-ci, mais lui soi1'1

d'auxiliaire; elle marche en avant etprépare )c,

voies la sophistique est un ennemi à combattre, un

adversaire à réiuter. Or la réfutation ne dépend d'au

cune science en particulier; elle constitue un art

spécial qui relève de ladialectique. C'est donc :) h

dialectique que la philosophie commettra le soin de

repousser l'attaque des sophistes contre le prcmio

principe de la certitudescientifique et la

règle de lavérité Ce combat remplit le IV livre de la Meta

physique, qui achève l'introduction comme le traite

des Sophismes achève lesTopiques. Le champ de-

meure libre alors à l'enseignement, à la doctrine,

& la philosophie positive.

Cependant l'élément exotérique ne s'arrête pas en-

core là. Dans chaque recherche particulière, le phi-

JMM.ÏV, p. 64, t. ta sqq. Soph. et. xt Tp<hro<f<~foTf e~<f<M!f

t&' <M~tMt~ ~~«y ~< J* dast TOt? &<tXMtW(oe.&~eMp9<HMt~

T<M!ttM' )M~ JdMte~M Mptw <M<~f, od ~a~etf~ ~Je<~ y<b ~epif

tfpO«&M« (~a<~M AKMMW ~e< MWT))~ T])f J&<Np&W. E&. Eud. r. YH'

ÉMt oBf tAJMMMMMff «p! TtH~ T)!< A~t ~p« se jMTp'~

îi

Md T~ «t~A ~OyMMT~Mtt <My«ttt' 0<y<~ <~M[ AwpMMO~

xoM~) My<M Mt* otMeft&w eMf <<XX<t~~r«TT~f. On verra plus kx

que Aoy<)M<r~pM équivaut à &~exT<x~f.

1

Page 255: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE I, CHAPITRE I. 2~5

)(),

losophecommence par des généralités qui servent de

prélude;ces généralités sont encore au point de

rue du dehors et de l'apparence elles ne touchent

pasà l'intérieur des choses. La question même de

l'existence relève de la seule dialectique; car c'est une

interrogation qui ne veut d'autre réponse que oui ou

non, l'un des deux termes de la contradiction 1. Ainsi

savant de rechercher, dit Aristote dans saPhysique,

quelleest la nature du

temps, il convient d'examiner

par les considérations exotériques si le temps est ou

n'est pas H Retranchons de la philosophie pure toute

discussion, sinon toute assertion, sur l'existence réelle

deson objet (~~); retranchons-en toute partie né-

gativeet critique; retranchons-en toute généralité qui

ue va pas au fond; il ne reste que la question de la

cause ou de l'essence (re <~oT<, ror<). Or l'essence

pure, l'objet propre de la métaphysique, n'est acces-

sihie, dans lamétaphysique elle-même, qu'à l'intui-

non immédiate de l'esprit 3.

Ainsi vient se terminer, dans le livreacroamatique

par excellence, l'antagonisme des deux méthodes. La

dialectique s'est élevée graduellement, de science en

science et de livre en livre, en se dépouillant de sa

Tep. vm, M Ëer<yjtp -~pJrtKMt AaXe<T«)) ~pof ~f Arm' aM

'~M6t. Mt~ <

P~. IV, xnp&TM' itaX~t ~e< &<t<rop!!<M< crept a<?toC x<MAA

"f~~M-ep~aw MyM', w~pof T<Sf ~fT&w ~nvt' T&!f ft)t ~t.Tatf, f:Tx

~Mt< ~06.

?'< XII. M. De n~ Tt Voyet plus bas

Page 256: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

2~ PARTIE ît!–ï)E LA MÉTAPHYSIQUE

forme propre, jusqu'au seuil de laphilosophie prc

mière; elle le franchit encore, et ne vientexpirer

qu'à cette limite extrême qui sépare l'idée de l'être.

la science de l'objet, et sur les derniers confins de

l'intuition intellectuelle.

CHAPITRE II.

Division desouvrages d'Aristote relativement à la matière

Classification des sciencesphilosophiques.

La division célèbre que nous venons d'examiner

et d'appliquer aux ouvrages d'Aristote, est fondée sur

une considération de forme; car la méthode, sur la-

quelle elle repose en dernière analyse, et dont la forme

littéraire est l'expression, n'est elle-même autre chose

que la forme de la science. Nous nous transportons

maintenant à un point de vue ditférent de la forme

nous passons à la matière. Comment Aristote classe-

t-il ses ouvrages par rapport aux choses dont i}

traite en d'autres termes, comment classe t il les

sciences? Quel est, par conséquent, le rang de la me

taphysiqueet le rôle qu'elle doit jouer dans la philo

sophie Tel est le sujet de notre présente recherche

L'école de Platon partageait généralement la phi!~

1

Page 257: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE CHAPITRE H. 245

-.ophieen trois membres dialectique, physique et

morale. On a cru trouver dans deux passages d'Aris-

tote ia preuve qu'il adoptait cette division, en substi-

tuant avec Xénocrate, au nom de dialectique, celui

de logique.Dans les Topiques, en effet, il divise les

propositionsen trois espèces propositions morales,

togiques et physiques dans les secondes Analytiques,

il oppose aux recherches qui dépendent de l'analy-

tique sur la nature et les diuérents degrés de la science,

celles qui appartiennent à la physique et à la morale 2.

Dans le second de ces deux passages, il ne s'agit,

comme on voit, que du partage d'une question parti

entière entre plusieurs sciences auxquelles elle se rap-

porte en même temps. Le premier membre de la di-

vision qu'il exprime ne répond pas exactement, au

moins dans les termes, au premier membre de la di-

vision donnée dans les Topiques. Mais si celle-ci est

complète, elle doit le contenir, et l'analytique doit

êtreidentique avec la logique d'Aristote ou du moins

eo taire partie. Est-il donc vrai que la division énon-

cée dans le passage des Topiques doive être consi-

dérée comme une division complète de la philo-

Mphie?

7<'P. t, HT A! ft~ y<~ t!C«M~ ~pOTfMTtM etTtfj <M ~<K)fa~ Ctt

~oyMM~.

~Mt. pMf. t, MXMt T<t ÂO<trA ~cSt Jeî &<K'e?fKM ë)H M ~MfO/M

<oBM) AtM?)(~t~e )m< T~W JM!

~pOf!)<TM)fxai OC~'M, Ta ~t~t'

'"M, ta tt&~ ~«!fp<<tf (taM~- ~7<f.

Page 258: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

246 PARTIE IM–DE LA MÉTAPHYSIQUE

Sans parler des mathématiques, qu'ailleurs Ahsto~.

met expressément au nombre des sciencesphilosu.

phiques, que deviendrait, dans cette hypothèse,

métaphysique? Il faudrait donc la faire rentrer dans la

logique, comme dans une classe plus générale, c'est-

à-dire dans un genre plus élevé. Cette conséquence

que l'on a dû tirer 1, se concilierait mal avec les résul.

tats de notre précédent chapitre, où laphilosophie

première nous est apparue comme une science su-

périeure, au moins par sa méthode, à toute espace

de logique. Ce serait une contradiction diincite a

comprendre. Mais une critique attentive dupassage

en question nous conduira peut-être à une interptc

tation qui mettra Aristote mieux d'accord avec lui-

même.

Dans ce passage, il ne s'agit, de l'aveu d Austote

que d'une division superficielle des propositions

Les Topiques ne comportent pas, nous l'avons déjà

vu, l'exactitude et la profondeur philosophiques;il

ne s'agit qued'une division convenable à la nature

et aux besoins de la dialectique. Aristote ne prêter=

pas y comprendretoutes les propositions possibles

il a exclu préalablement « toutes celles dont la

preuve serait trop près ou trop loin, et qui se trou-

veraient par conséquent au-dessus ou au-dessous de

Par exemple Ritter, Hist. de la Philosophie, trad. &. t. ï! p

Top.toc. land. Êc7' <~ i~)~' ~fep~a~'

T&' <poiMf<reM''Mi TM

~oë~~TNf (i~M! Tp~.Ai

y~ ~Ma<, x.T.

Page 259: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE I, CHAPtTRE U 2<t7

jj ~))))t;)c propre de l'argumentation~. H A ce double

t)t)C. Il tarait exclure et les mathématiques et la mé-

ti'physiquc;en eilet les Topiques n'offrent pas un

sent problème emprunté à la première ni à la seconde

()c ces deux sciences. Il est donc impossible de les

envelopper l'une et l'autre dans le premier membre

()unc division dont Aristote les a exclues à dessein.

)!icn plus, les propositions logiques dont il parle

)t embrassent pas, à beaucoup près, tout ce que l'on

entend en général par Logique dans la philosophie

moderne. Le mot de logique n'est jamais pris subs

fautivement par Aristote, comme le nom d'une science

ou d'un art; c'est toujours une épithète qu'il applique

a im certain point de vue, à un certain degré de la

science. Ce point de vue, ce degré, c'est celui de la

gcnérauté indéterminée, qui ne va pas au coeur du

sujet, mais y conduit sans y pénétrer. La preuve /o

gique est la preuve de vraisemblance; les considéra-

fionsbâtons sont celles que l'on emprunte aux de-

ttors de la question, et qui ne doivent servir que

de préliminaires; en un mot le terme de ~t~M<? est

presque partout un synonymede celui.de dta~c~Me~,

tbid. t, H (MJ~ ~f <n!feyyM <!tro~e<$«, o< tSf ~w aroj~'

:t y~ ~j, fhrop~w, T<t ~Aef~ «[Tôt ~M~M<T7«n{f.

~'Mtt.po<<.H, vnt Aoyotot <n<X~oy«Tfto~,le syttogis<nc qui ttc

"MtatMfeMence d'une chose d'une man!~rc extérieure et supcrttcictie.non pas ~x T<Bff&M~ ce qui serait iMtpossib)p, puisque) csscm r

"estpas susceptible d'une ~critaMe démonstration ~e Gr" a~tm Il

'<?« ~e fMAAo« ~f Ai!~e<ef a)ro~e<&! c~f'" ct9<tfM TM' etpn~Ft'~i'

Page 260: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

248 PARTIE II!.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

et par conséquent d'eso~r~'ae Ainsi la partie Io~io))ede ia philosophie ne contient pas l'analytique, comme

on l'asupposé;

elle ne lui estpas

mêmeidentique;

elle s'y oppose comme l'opinion à la venté, la proba

bilité à la science elle s'y oppose comme l'inférieur

ausupérieur comment pourrait-elle contenir la me

taphysique? a

Elle ia contiendrait sans doute dans le système de

Platon, où la dialectique est la science la plus élevée

comme la plus générale. Mais le langage dudisciple

n'est plus celui du maître. Est-ce entre les deux phi

Xoy<X! A~yM ~oyM~f Jta T<WM, ~T< <MtS<!Xot<~[O~Of, tMppm~'

T<Bf o&te&tw à~f ap~Sf. Aoyot~f comme AaXe)t7<~f s'oppose à oM~M

et est synonyme de xaO~ou ftSXXo~. P~y~. VIII, vu! Ois {tef o~f !<

T« <5f o~tte&Mf -c«T7eo<T6<e X<}yoM, oSroi «~ rotoCrot T<f~ e~f ~<)[Màr«n«MtoC<H' ~n xa} ~x TMfJe ~tfepof )[<tOoXo« ~Mt~op. Ibid. ))!

V KaOoXou ~Tt!<nî fMOAof. Xoy<it&. EtA. ?0. VI, H, v To )e~ i-

<tTHt~ synonyme de T~ JoSM?'x<!f. Polit. tll, tx Aoyou x'4' opposéà

f3~6~. A<et. XIU, v: Ao~MM&Tepo< X<o< opposésà

fbtpt~7epo<,comme

xMt~~ qui s'emploie pour Xoy<~f (Ett. &td. I, vm). s'opposeà Mp

aM<K~(PoHf.nt.tv).

Voyez te chapitre précédent.Les considérations !og'q')M

ébauchent les questions.Met. Vïî~tV, p. tSa, n K<~ ~p~of

ftef &la «ep! aJroS ~oy«M?<. Comme ibid. III, p. t3o, t. 1 J t~~

itfM~MfewpMTM',et a6 T: efpttMu. Remarquons

en outre t<

nalogiede ce

toar~M<r<M' e~tM~tef &'«* avec celui de plusieurs passages

re!at!fs am ~&)rep'~ Xo~o<. Voyez plus haut, p. 996, a3t. De Cf"

amm. H, vnt AJyof «tOJXeu 3~w )M~; Ett. Eud. ï. vt ÂM<.

Tp&w< ~<w< ~p<tT(MT~Mxe~t. AXX<!rp<o~ qui s'oppose

a

<MM«w, répondtrès-bien à ~'TepM~f.

~~a!. pe~. t, xn, xxn Aoy<)t& opposéà M~M<x&, comme Mt

tcnrs &aAe*T<i<&1

Page 261: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE I, CHAPITRE IL 249

bsophcsune simple question de mots, et pour diffé-

rer dans l'extension qu'ils donnent à un même terme,

s'accordent-ils sur le fond? toujours est-il qu'ils dif-

tcrcut dans leur classification. Mais déjà on peut en-

trevoir une raison plus sérieuse de différence qu'un

changement arbitraire de terminologie. Le point de

vue dialectique est le point de vue logique, et celui-ci

le point de vue de la généralité. Dans une doctrine

où les principes universels sont les idées, la dialec-

tique devait être une science, et la première des

sciences. Elle devait descendre de ce haut rang dans

l'école péripatéticienne, qui regarde les généralités

comme le premier degré de la philosophie, et pré-

tend entrer plus avant dans la réalité. La dialectique

s'est élevée avec l'idéalisme elle s'abaisse avec lui.

Cependant il faut avouer que la division donnée

dans les Topiques conserve quelque apparence d'une

division complète. Par cela même que l'élément lo-

gique ne constitue pas une science à part, il reprend

l'universalité, il embrasse tout le domaine de la phi-

losophie J. Mais il l'embrasse sans y pénétrer; il a

Ladiatectique a toute l'extension et Fnniversatité de la

philoso-

phie première. A~t. tV, p. 64, 1. M; c~ ibid. Ht, p. &t, L a5; Jtta!.

ït. Voy. plusbM.–En outre, dans la

Rhétorique,tes mots

de<<~M et

dM&)c<(pte ont encore quelquefoisun sens un

peu pluslarge que leur sens propre la connaissance du

syllogismeen

général

'ett rapportée à !t dialectique, et le syllogisme engénéra! y est ap-

t*"e, par opposition aux tbrraes de la rhétorique, ~oyotoî <n<X~oyto~of.

~). 1.

Page 262: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

250 PARTIEML–DELA MÉTAPHYS!QUE

1

toute l'étendue, il a aussi tout le vide de la di~ct

tique'.

Nous arrivons maintenant à la véritable division

péripatéticienne des sciences philosophiques, à celle

qu'Aristote reproduit partout et jusque dans les To-

piques, toutes les fois qu'il s'agit d'une classification

sérieuse. IIy a trois modes possibles du

dévelop-

pement d'un être intelligent savoir, agir et faire; la

science, la pratique et l'art. Sciences de la produc-

tion, de l'action et de la spéculation, sciences noc

<MM, pratiques et spéculatives, telle sera donc aussi

la triple division de la philosophie

Les sciences poét'ques et pratiques ont pour oh

jet ce qui peut être autrement qu'il n'est, et qui, par

conséquent, dépend plus ou moins de la volonté. Les

sciences spéculatives ont pour objet ce qui est néces-

saire, su moins dans ses principes, et que la volonté

ne peut pas changer. – Mais l'art ne se confond pasnon plus avec la pratique; car il a sa fin dans um

chose placée en dehors de l'agent, et ou celui-ci doit

réaliser sa volonté la nn de lapratique

est dan"

Ke< etc. Sur ia force de cetteexpression appliquée

au point<!<

vuelogique

et dialectique, voy.le livre suivant.

sTop. VUÏ, t. Ef&.Me. VI, v. ~)~t.VI, p. !3t, 2; Xt, p -!M

t. 93. StM~ent Aristote ne divise qu'en ~p<MtT<x~ et~ewp!tTot~ ()b!<L )!

p. M, L ~8); c'eet cette division qu'mdtquent, dans !a C~nsotationJc

Boëce (éd. < 54e, p. 892),le n et le Q brodés sur la robe de la phit"

sophie.Titre (A <4rMt. 0~. «r. et ~Mf.

p. 14)se

'rompe en intcrprrta"

le n par ~ott;T«t!: cf. BfMth. mP(!<Atr. p 3.

Page 263: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE L CHAPITRE II. 251

le vouloir même et l'action intérieure del'agent',

Maintenant ces trois parties de la philosophie sont-

pties indépendantes les unes des autres, ou s'enchai-

Hcnt-elles au contraire d'une manière déterminée par

leur nature même? Il est évident d'abord qu'il y a un

ordre entre ces trois parties dans le développement

historique de la connaissance et de l'enseignement.

Ce que l'on connaît le mieux, c'est ce que l'on a fait

la science poétique doit être le premier sujet de notre

étude. La science pratique exige une maturité et une

réflexion supérieures; mais elle est plus facile encore

et plus claire que la spéculation, où l'obscurité aug-

mente en raison de la profondeur. Poétique, pratique,

spéculation, voua donc l'ordre chronologique 2. Mais

d'un autre côté, la science poétique a son principe

dans la science pratique; car l'art se propose un but,

une fin, et la science pratique est la science des fins 3.

A son tour, la pratique n'a son principe que dans la

spéculation; car si la raison pratique détermine le

but, c'est d'abord la pensée qui le conçoit De la

sorte, la science spéculative est la première dans

t'ordrescientifique; ia pratique vient ensuite, et au

dernierrang la poétique. L'ordre logique et l'ordre

Ett. ~V'c.Vt, n, v; JMa~t.Mor. t, MHV.

E~. Wtc.t, !;n, n; m. Bmt. ï, t; Met. L p. 5, Lait.

Rt. ?< VI, Il: A~nt ~p (~ ~p<UH<i~)<a< r~ ~oojT~~ ~'X~'

<MM y~p ~Mfef 0& 0 WM& )M~ od T~M <!<r~<M, OÂ~ft t~pM T<

~M~~MttT~.

M. Me. Vï. t. ttn.

Page 264: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

252 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE1

historique sont donc ici en sens contraires l'un del'autre.

Des grandes divisions descendons avec Aristote

aux divisions subordonnées: nous devrons y voir de

plus près les relations intimes des différents degrés de

la science, et leur rapport commun avec le point

le plus élevé vers lequel tendent toutes nos re-

cherches.

Dans la science poétique, nous distinguons d'ahon)

la poétique proprement dite ou théorie de la poésie;

ensuite la rhétorique, en troisième lieu la dialec.

tique. La poésie, qui tient de si près à la musique,

rentre à peine dans la sphère de la philosophie'; la

rhétorique est encore un art (Tt~fw ptTce~!); <~

lectique est un art et une méthode~ elle est linstru

ment, l'organe de la philosophie 3. Quant à l'anah

tique, ce n'est plus un art de trouver et de construire

les raisonnements, c'est une science, la science du ssf-

logisme et de la démonstration; ce n'est pas une me

thode, un instrument, et, à proprement parler,le

Polit. vm, vu.

Les Meûo~Mt~ d'Anstote traitaient probablement de la d!dectiq"f

(Met. t. 11), Cependantle mot ~oJo< a un sens

plus large quece)~

de M<t)M<~e; Aristotel'applique

am arts, aux sciences poétiquesen ?

néral. Bt<'t. t. n; E<A.FVtc.t, t.1

Top. YIH, HV np<!f Te yf&hn!' Mi T~f X'<tT~ ~<WO~<H' <~p<'t'

TO A~MM~tM<nWOMtf

)M~0~feM<M[X~a<

ïA <t~' ~MT&M< CC~t6~fOfMT*'

MtoCeoee~ o<?(M<pof op~e~f. tbid. t, xm Ta

6pyc[fadr <i'f M~e,

s

<'0tt€f Tf?f <n~oy«~MM' )ta? ï~ eat~&4*t'. ~c?' T~TtKpe,x. T. a.

1

Page 265: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE t. CHAPITRE ÏI. 253

nom d'~py~cf ne lui convient plus 1; c'est ia forme plu-

tôt que le moyen de la science. Quelle est maintenant,

des trois sciences poétiques, celle qui vient la pre-

mière dans le temps? La poétique proprement dite,

quis'associe à la musique dans l'éducation de la jeu-

nesse. Après la poétique, la rhétorique qui l'emporte

sur la dialectique en clarté populaire, comme l'entby-

meme sur le syllogisme et l'exemple sur l'induction 2.

Mais pour avoir l'ordre de la science, il faut renver-

ser l'ordre du temps. La dialectique est logiquement

antérieure à la rhétorique l'enthymème n'est qu'une

limitation du syllogisme dialectique, et l'exemple une

limitation de l'induction. La dialectique est le tout

dont la rhétorique n'est qu'une partie La rhéto-

rique, à son tour, a le pas sur la poétique, puisque

c'est de la rhétorique que découlent la connaissance

du vraisemblable, objet de l'imitation poétique, et

lesprincipes généraux de ta persuasion.

BA<t. I, n tbp! oJ~ep~f yap ~p«r~fou oJ~er~pa <M?M!p(se. 'n~

&~MtM[)~]!t~ ~~p, A~s,, ~js~ .ht~e<: T<f~ ToC

eop&TN Myow. La dialectique et la rhétonque sont plusieurs fois ap-

peXes des ~M~*e«. CCTop.

init. Soph. el. xxxm. Je ne m'arrête ni à la

Visiontnigmre qui compose l'O~afmm

desCatégories,

du tra!té de

'tnterprétatiom, des Analytiques, des Topiques et du traité des So-

phismes, ni l celle d'Ammomias et de Simplicius qui ptacent dans tes

'M~.(3* membre de leur classification en .&~e&)poT< ~p<utTM<ii et

~<M'<~) ces différents ouvrages joints à la Poétique et à la Rhéto-

rique.

M<t. I.

Ibid. tt E<~7<~ap ~topt~f T<Tiis JMtXe«T«~t o~o~Mt.

Page 266: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

254 PARTIE HI.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

il<ntre ia pmiosophie de l'art et laphilosophie des

choses humâmes, il n'y a pas seulement lerapport

général qui subordonne la première à la seconde

celle-ci a des relations spéciales avec chacune des

parties de celle-là la poétique se rattache à la pra.

tique non moins Immédiatement qu'à larhétorique,

et la rhétorique en dépend tout aussi bien que de la

dialectique Mais la philosophie des choses hu

maines 2 a aussi des parties, et elle en a trois comme

la philosophie de l'art sciences du gouvernement de

l'individu, de la famille et de l'état, morale, écono

mique et politique. Dans l'ordre du temps, la morale

vient la première et la politique la dernière; car si

la science pratique en général veut une expérience

dont l'art peut mieux se passer, l'économique en da

mande plus que la morale, et davantage encore la poli-

tique l'état est une plus grande chose que la famille,

la famille que l'individu; or c'est par la connaissance

du plus petit qu'on arrive à celle du plus grandeMais

Poet. vï ToBro d* eo'7< (~ &<M'o«t)sd ~e<f &!t~o&M

-rA ef~ M

T~ ap(f<!TTOfMt, ~repTMf ~oy&)f ïtjw ~roXtTMt~ x<d

~ttroptxi)f ~p)"'

&t'Mf. R~et. t, M Ôo~e <rH(t&[&'e< ~Topot~fo!b)' ~Mpa~~

Tf w

jMAMTMt~ e&w xd ~< -srep~ ïA «Stt ~rpoty~MTe~, ~f ~«aMif &r7<

~epe~e<f ~o~TMt~. Cf. E<&. ~Vtc. ï, t.

Eit. WtC. X, x & ~ep:TA

ae~wM ~Xocop~.

tbtd. I, t; JM<~t. jMor. t, i; Econ. ï, i ASXof ~T< ~pJtepo"

a&MMfM~ ~O~TM~t ~7<f. PoHt. t. Ht Âf<!t~<t<MOf ~6p< OMOfe~M

EHfe!if ~eJrepop' ~&M: y<~~oXf: o~x<c5f ouy<[S<T<M.

OEcon. t, t npf?t0fTOM ~0!~<r7o« Ct!<T<:ê<fC~J?OU~MpSfT'-

Polit. t.ttt.

Page 267: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE I, CHAPITRE Il. 255

menonsla science en elte-même; sa marche est toute

cot'trai~e. Si l'état ne peut être sans des familles, et les

familles sans des individus, d'un autre côté l'homme

na sa perfectionet par conséquent son principe mo-

rat que dans la famille, et en définitive dans l'état dont

il est citoyen;en sorte que dans l'ordre logique l'état

est antérieur à la famille, et la famille a l'individu, la

politique à l'économique et l'économique à la morale

Bien plus, la politique n'est pas seulement le vrai

principe des deux autres sciences pratiques; elle en

est le tout, et les enveloppe comme le tout ses par-

ties. a Selon moi, dit Aristote, le vrai nom de toute

la science pratique n'est pas le nom de morale, mais

de politique M Ce point de vue était aussi, comme

on sait, celui de Platon c'est le point de vue de toute

~antiquité grecque.

La politique embrasse donc toute la philosophie

de la vie humaine; mais, non plus que l'art, elle ne

se suffit pas à elle-même, et il faut qu'elle tire son

principe d'un ordre supérieur de sciences. Le bien le

plus éLevé auquel l'homme puisse atteindre, la féli-

cite, la fm dernière de la vie morale, est l'exercice

de la pensée pure; toutes les vertus réunies ne sont

St. Nic. VI, ix !<MM o&t ~7< To aJroB e3 <ÏMtt o«<tfo~M o<?J' ~e«

MltTe&tf. P~. I, n lï~MpOf T$ ~!<TS< tM~M 0&tMt &MKrr<M;

~M'&)T<t.

JMagtt. Af<M'.t, t To J* <C~O!' tM~T])!' ~iMM'<~C!f J«a/&~ ~0X6? ~f ~0<

~af~~pay~<t~[<tJ)t~<~<ajLa[iM~Tt)n!f.JR~(.T.n. Polit. t, n:

~of<fp<!MpM' e!fa< ToC ft~poue.

Page 268: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

256 PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

que des moyens pour préparer à la pensée le loisir

dont elle a besoin'. Ainsi la pratique aboutit et sp

termine à ia spéculation; l'humanité n'arrive à sa nofection que dans cette vie sublime de la pensée, qui

n'est plus humaine; c'est le complément et tout en-

semble la limite de sa sagesse. Or c'est là qu'on entre

dans la sphère de la véritable science; lapoétique

et la pratique méritent à peine ce nom car iln\

suffit pas de la connaissance et de la démonstration.

L'action ne peut pas rester dans la généralité des

formules; elle va au particulier, qui est la réalité, et

dès lors elle rencontre à chaque pas l'accident, que

la théorie n'a pu prévoir, et où l'agent viendrait

échouer, si l'habitude, en lui faisant de l'art et de la

vertu une seconde nature, n'avait fait venir l'instinct

au secours de la science 2. En ces matières, où la

connaissance n'est pas le but et n'est que le moyen

d'une action, la théorie n'est jamais qu'une approxi

mation, dont il ne faut pas attendre une rigueur et

une certitude parfaites II n'y a de véritable science

quela théorie non pas de ce que l'on doit faire,

mais de ce qui est, que la science dont le but n'est

pas une action dépendante à la fois de l'arbitraire du

sujetet du hasard des circonstances extérieures, mais

la seule venté, qui trouve dans la connaissance sa Ça

JMi~n-jMbr. ï, xxxtv Ett. Me. X, vn.

E&. ??. t. H; Ïï, n.

May". JMbr. XMtv; E~. Me. Ïï, t.

Page 269: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE I, CHAPITRE IL 257

comme son principe, et qui se renferme dans la par-

tie théorétique de l'âme et dans la spéculation

Cependantla science spécJative ne forme pas

non plus un tout indivisible; elle se partage comme

les sciences pratique et poétique en trois régions dis-

tinctes physique, mathématiques et philosophie pre-

mière ou théologie

La physique est la science de la nature, où il y a

de la matière, et par conséquent du mouvement.

Les mathématiques sont la science des nombres et

des figures, indépendamment du mouvement et de

la matière. La philosophie première est la science

de la cause immobile du mouvement, du principe

immatériel du monde 3. La philosophie première

vient la dernière dans l'enseignement philosophique

ce n'est qu'après avoir traversé les apparences et les

relations auxquelles s'arrêtent les sciences inférieures

que l'on peut s'élever jusqu'à l'être absolu, source

invisible des phénomènes~. Qu'elle soit, en revanche,

ait premier rang dans l'ordre de la déduction scienti-

fique, son nom l'indique assez; et comment la science

du premier principe ne serait-elle pas la première ?a

Mats dansquel ordre se succèdent les deux autres par-

~.ï.n;m.Wtc.Vï,v.

M<'t.VÏ,p.t:3,t;XI,p.s26,L 19.

~t.VI, p. n3, 1. a; XI, p. 218. to; p. 9*9, i. 5; p. a:6,'3o.

?{. X!t, p. :5o, i. [ Xin, init.; p. 286. i. :o.

Page 270: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

258 PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE

des de la spéculation ? ici ia question n'est pas auss)

simple que pour les sciences pratique etpoétioup.

il ya deux points de vue d'où Aristote semble la rc

soudre tour à tour dans deux sens opposés. Il faut t\

suivre et s'y placer successivement avec lui.

Au premier abord, les mathématiques semblent

avoir sur la physique une évidente supériorité. La

physique ne considère que des phénomènes dont

elle est forcée de demander les lois aux mathéma

tiques elle ne voit que le fait lesmathématique

donnent la raison du fait; la musique ne s'explique

que par l'arithmétique, l'optique par la géométrie.

l'astronomie par la stéréométrie Tandis que les

sciences physiques chancellent dans un monde de

mouvement, où l'accident intervient sans cesse d

trouble l'expérience, les mathématiques sont assises

dans l'immobile et l'immuable. Le monde physique

est un monde de corps perceptibles aux seuls sens

sujets à la corruption et à la mort ou du moins ao

changement;le monde mathématique est un monde

incorporel, intelligible, éternel~. La physiquefait

son étude de natures complexes dont les éléments

échappent à l'analyse logique. Les objets des mathe

~n<t!.BMt. ï, Xtu É~KtCCctyctp

T& (t~ ~tt Mw a~tfTMMM' eM~"

T~ &<< T&' (MtCnfMrWMW. T~ y~p~K ~XOMMS e<~M<, t~

~rtHtoB, x. T. À. C€ ibid. xtv.

Anal. iMtt. 1, XXV t; de Co't. n, V. TU!, XM; ?-<. ït. XI. T".

XMÏ. nt.

1

Page 271: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE I, CHAPITRE IL 259

manquessont simples, et d'autant plus simples que

les mathématiques sont plus pures. Or l'exactitude

et la rigueurd'une science sont en raison directe de

ta simplicitéde son objet. Les mathématiques sont

donc les sciences exactes par excellence elles n'em-

pruntentrien à l'opinion, elles ne sortent pas de la

démonstration elles présentent le type le plus parfait

de la méthode scientifique Mais ces avantages dé-

pendent d'une condition qui les compense tous, et qui

suint pour rendre à la physiquela supériorité c'est

que les objets des mathématiques sont des abstrac-

tions sans existence réelle. Les objets de la physique

sont des êtres mêlés de matière, il est vrai, chan-

geants et périssables, mais ce sont des êtres; ceux

des mathématiques ne sont que des accidents ce ne

sont pas des substances d'un ordre supérieur aux

substances qui tombent sous nos sens; ce sont des

attributs de celles-ci. Le mathématicien abstrait de

!a réalité les qualités sensibles, objets de la physique,

et se réserve seulement l'élément intelligible de la

quantité discrète et continue~. Mais, pour considé-

rera part la quantité,il ne peut pas faire qu'elle

Met.XJtt, p. :64, t. t5 Ô<~ Af ~ep! tfpor~paw Tp ~oy&)xa<

M).OMT~p<Mt, T<MW~y fMt~Of ~Et T~<!)tpt6~. t, p. 7. 5 Â)fp<~<yTJ-Œ7I).OIHJTfponl.soooGsgd pa'7Jtov ~ec 38âxpc6és. I, p. 7.1. 5

Alf.p,~él7TJ.-

n< tg~ ~)tt~rtt{~' <[! p~Xtara ttSf ~pf&MM' eMfM ~o[p eXctTTOMM'

Mpfg&nepM tMf &t -efpoeO&TefM ~ftp~fo~Mf,oM~

<tp<O~T<x~ yeM~e-

~.(~ VI, p. ~t, t. t4; n. m.

~'MiL~Mt.t,ï, XtV.

S!, M. :t~, 96 ô ~M~~MtTMOÎ <!fEp<ta S~ a~!Hpe<Tg<m T);f

Page 272: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

260 PARTIE HL–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

subsiste à part; il ne peut pas convertir une distinc-

tion logique en une séparation réelle, et son abstrac-

tion demeure toujours abstraction 1.

II n'est donc pas vrai que, d'une manière absolue

la physique ait sa raison dans lesmathématiques, et

que, où elle ne trouve que le fait, celles-ci donnent

la cause. Les mathématiques ne connaissent que des

formes, et c'est de là que viennent leur universaiite

et leur nécessité 2. Elles ne peuvent donc fournir que

des raisons formelles, extérieures, qui ne vont pas

au fond et au principe elles donnent la mesure des

phénomènes,mais non pas leur cause efficiente la

cause réside dans la nature intime, dans la qualité

essentielle que la géométrie nil'arithmétique ne sau

raient atteindre. La physique a donc plus de réa-

lité, plus d'être que les mathématiques Or le point

de vue de l'être est le point de vue le plus élevé,

auquel doit être subordonnée toute autre considéra

~e~p&w <M<e<M<' %ep<eX~f ~cp ~apra aM~rA .&-ea)pe?,o!or jS!

JM< JMt~dTtfM )Mt!<n[~)!p<)Tt!Ta

<M~ ToJfttfT~Of, ~Tt Jè !Kt! .&Ep(t<!T}!Tt

~o~pJr~Taxa! Tas <!X~ <~<TAf ~fWTM5<ye<f, )MMf xaTa~eJK' K

~MaA~ <M~ <Mfe~

PAy*. n, n Hep!TourM~ ~f oBf

'mM[~'ftCTe<!EMM xa~ o ~Sttf'~

~t, eM~ 0~ <Pu<T<ttoC Of&tTO< t~MM ~)t<!MTOf' OU~ T~ <TU~e6))MT!

~eatpe?X TO<o~TMf o~M cu~S~ttxef' &~ xa}

~Mp~et* ~&)ptOT~ y fp

fM!<ret ««~(oe<5f ~or<. Met. XI, p. ai3, t tXa)p«ft~f ~<tp

<tjT<Sf e<

< De ~n. t, t.

Ata!. p<M<. t, Xtn Tôt~p fMtN~~MTa ~ep~ e~)! €<TT/f ou ~"p

xj~

~tOXeW~tMKt MfM.

J&<.XM.p.25t.t .5.

1

Page 273: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE CHAPITRE H. 261

tion. Le caractère éminent de la philosophie première

n'est point qu'elle est la science des axiomes géné-

raux auxquels toute connaissance est soumise, mais

quciieest la science de l'être absolu La physique

viendra donc immédiatement après elle dans l'ordre

de dignité, puisquela physique roule encore sur

t'être elle sera la seconde philosophie 2 Dans le

temps, elle est l'antécédent de la philosophie pre-

mière, et celle-ci en reçoit le nom de métaphysique,

c'est a-dire science qui suit la physique. Les mathé-

matiques viennent au troisième rang, mais par con-

a'qucnt au premier échelon du développement histo-

rique de l'intelligence humaine. La jeunesse, l'enfance

même est propreà ces études; pour la physique,

science d'expérience,il faut de la maturité la mé-

taphysique veut des esprits achevés, des intelligences

parvenues au terme de leur développement.

Cependant les mathématiques et la physique ne

demeurent pas dans une opposition qui les tienne

toujours également éloignées; elles se rapprochent

dans l'astronomie. Ici l'élément matériel n'a plus son

.M<t XI, p. 9~6, t. 9t B~TtarTOf f~f oBf TO TfBf .~E&)p!)T<)M5f

M«m)~ y~ot, T<M!ï~f <~T<B« TeX~Tit/tt ~e~s~ot ~rep!To T~HM-

TKM-yjp ~r, MH' O~T<M'. VI, p. t':3, i. 11.

AeM~~<M<~t. JMet. VU, p. t5a, t. 6. Cf. W, p. 66, L 2 1;

~.p. n3,t. so.

E~VtC. VI, Ht: ToCT* TK <M<~<HTO, &<* T~ ~A fM8ttfM'T<X<M {tef

~e«otT' ae~M ~<K)tof < ~T' Ta fMf <t~<M~<reN<

~'f. T~ ai <'px<" ~'ap~

Page 274: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

262 PARTIE H!–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

insaisissable variabilité il n'est plus sujet à la mort

ni à l'altération, ni à la décroissance, le mouvement

simple dans l'espace est le seul qui lui reste; c'est

une réalité presque mathématique. Aussi la science

du ciel ou du monde est-elle, aux yeux d'Aristote,

la plus voisine de la science de Dieu 1, et pourtant

il est impossible quelle ait jamais la parfaite r!gueur

des mathématiques pures.

Platon, en essayant de déterminer la hiérarchie

des sciences, n'avait pas hésité à donner le milieu aux

mathématiques, entre la physique et la dialectique2.

A ses yeux,la réflexion et le raisonnement l'empor

tent de beaucoup sur les sens, la logique sur l'expe-

rience, les relations éternelles et nécessaires des

figures et des nombres sur les apparenceset les

vaines ombres des choses contingentes. Aristote ne

fait pas si, bon marché de la réalité; il connaît le prix

de la science, mais à la science il préfèreencore

t l'être. La nature n'est plus pour lui un fantôme et

une illusion, mais une tendance, un mouvement

continu vers~une existence de plus en plus parfaite.

L'apparence,c'est la forme détachée de son sujet,

la

quantité abstraite, la mesure sans la chose mesurée,

tMet. XH, p. 25t. t. t9 Ê!tt~ C~etOt~f ~<MK~M TM' ft~

tMttMM!!f ~t«M)t(MM' âei mM~f, <MTTp<~<<tt.C& de P<tTt. < I.

v; de Ça: H, m, xii.

B~. VI, p. 509 !sqq.; VM, p. 533 sqq. H appelait les objets<~

tsa'h&MattquM nMyfM (M (ter~)enh'e les choses sensiMes et )M

idées; voy. plus bas

1

Page 275: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE CHAPITRE Il. 265

).) notion sans l'objet. Cette forme abstraite, qu'exal-

tait le platonisme,n'est point l'être, n'est pas même

le passageà l'être, mais bien un idéal qui n'est rien

i.ii n'est pas rempli, une pure possibilité. De la pos-

sibilité à l'existence il y a encore l'intermédiaire du

mouvement. Tels sont les trois moments auxquels

doivent répondre dans le même ordre, selon les prin-

<incs les plus élémentaires de la doctrine péripatéti-

fieHnc, les mathématiques, la physique et la théo-

)ogie.

En arrivant à la théologie, on sort encore une fois

du mouvement et de la matière, mais pour entrer

<)ans l'existence absolue. L'élément de la différence

d du changement s'évanouit, non plus dans la sim-

pticité factice d'une abstraction, mais dans la simpli-

cité de l'être qui est être tout entier, et tout entier

parsoi-même. Ce n'est plus une espèce de l'être, mais

bien l'être d'une manière absolue', qui échappe à

toute relation et ne dépend de rien. Aussi, tandis que

les autres sciences spéculatives sont entre elles dans

unedépendance réciproque, la métaphysique seule,

n'ayant besoin ni d'une matière ni d'une forme étran-

gère, est d'une indépendance absolue.

Toutes les sciences, au contraire, dépendent de

cette science supérieure. Par quelque côté qu'on

prenne la physique, soit par le mouvement. soit par

Me!. !V. 1; Tt, t. Vî!. t; m,in. tÏEpt ~ef rou ~rp~T~ ofTo:, f.

Page 276: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

264 PARTIE Hï.–DE LA MÉTAPHYSIQUE. 1

le principe intérieur du mouvement, c'est-à dire par

l'âme, c'est à la métaphysique qu'il appartient de i r\

pli<pier; car de la métaphysique seule relève la con-

naissance et de la cause immobile du mouvement

et de cette partie immortelle et divine de l'âmequi

donne l'intelligence et la vie Lesmathématiques

ont besoin d'une donnée, d'une matière, dont elles

développent les propriétés les propriétés seules sont

de leur domaine; la connaissance de la matière ma-

thématique relève de la métaphysique 5. Si nms

descendons aux sciences pratiques, c'est encore la

métaphysique que nous y retrouvons comme leur

principe immédiate Car la spéculation qui constitue.

comme nous l'avons vu, la ~licite suprême, fin de

la vie morale ou politique, n'est point la connais-

sance, l'exercice de l'intelligence en général, c'est

l'action de la partie divine de l'âme dans l'intuition

directe de l'essence Enfin c'est sur la métaphysique

seule que s'appuie la première des sciences poétiques:

la dialectique et la métaphysique se touchent de si

près, qu'elles semblent par fois, à une vue superfi-

cielle, se confondre l'une avec l'autre Quant à a

nalytique, que l'on pourrait être tenté de placer sur

JMe<. XH. t.

~fet. VI, p. m2,1, a2.J&f.Vt.p. iaaj. 22.

3&t.Xt,p. 2.3. t. 4

m. ~tc. V!, vu; Met. Xtî, p. 2~9, I.

Voy. plus haut.

Page 277: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE I. CHAPITRE II. 265

la limite, ce n'est pas un art, nous l'avons déià dit

ni même une science à part, quoique Arist~

raissc, en certains endroits, ne pas lui refuser ce

titre c'est plutôt la forme de la science; mais dès

qu'elleest prise comme une science, à titre de théo-

rie abstraite du raisonnement et de la déunition, c'est

encore dans la métaphysique qu'il faut en chercher

les principes et l'explication définitive

Ainsi la métaphysique n'est pas seulement au faîte

de la plus élevée des trois parties de la science, elle

forme la limite ob aboutit et s'achève chacune des

deux autres. Elle leur est à toutes trois comme un

axe commun autour duquel elles s'échelonnent,

comme une tige puissante qui produit et supporte

toutes les branches de la connaissance, qui les ali-

mente de sa substance, et qui porte encore au-des-

sus d'elles la majesté de sa cime. L'être qu'elle a pour

objet n'est pas seulement le premier des êtres, mais

cet être absolu qui contient tout le reste la métaphy-

sique n'est donc pas non plus une science, une phi-

losophie, mais la science, la philosophie elle-même 3;

laphysique, les mathématiques, la pratique, l'art, ne

sont, on peut le dire, que ses parties~, et si elle est,

?<. XI, p. 2t3, T)j~ (emo-n~tt~) ono!rou<n)î ~sp< ohro~e:-

{e~ M xa!~«m!fttt<.

~t. IV, p. 66. t. 97; VII, p..53, 6.

~(.Xt,p. 9t8.t. to.etc.

Mfi X!. p. 9<g, t. g: A<0 XCMT<ti!Tt)t' (ï);t' ~«OtXXf) M< T~r ~Mt<?)!-

Page 278: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

266 PARTIE HI.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

au sens propre, la première philosophie, elle est, en

une acception plus large et non moins légitime, la

philosophie tout entière.1

(MtTttt~f ~tt<TT){~)f ~p!! T!J~ <TO~<M EWM .9-ET~Of. Cf. iV, {). 6),

p.63, 37.

Page 279: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE M, CHAPITRE 1. 567

LIVRE II.

HtSTOtRE DE LA MITAPHYSIQUE D'APRES ARISTOTE.

CHAPITRE I.

Ioniens, Pythagoriciens, Etéates, Sophistes, Socrate.

La première philosophie, la première pour l'im

portance et pour la dignité, tel est l'idéal dont nous

devons trouver la réalisation dans la métaphysique.

Aristote en a tout déterminé par lui-même, la ma-

tière comme la forme, sans recourir à l'autorité de

ses devanciers; il lui a imaginé, comme à une science

nouvelle, un titre nouveau, celui de philosophie

première, et il semble qu'il prétende en construire

de ses seules mains le système tout entier.

Mais n'avait-on, pas cherché aussi avant Aristote

une science des premiers principes? n'avait-on pas

cru découvnr avant lui la vraie philosophie? n'y a~til

donc à, ces prétentions aucun fondement, et tant d'ef~

forts ont-ils été entièrement ~ains? Peut-être la mé-

taphysique existe-t-elle dans la science du passé

Page 280: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

268 PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.1

sous d'autres formes et d'autres noms; peut-être du

moins y a-t-elle son germe et ses origines ? Cela vaut la

peine d'être recherché. Et Aristote n'a-t-il pas lui-même

érigeen

précepte l'expérience historique, et fait de ia

critique l'antécédent nécessaire de la doctrine et de

l'enseignement? L'histoire, dans son livre, précède

donc toujours la théorie, et c'est dans cet ordre seul

par conséquent que nous pouvons faire connaître et

apprécier la Métaphysique. Au lieu de nousplacer

d'abord et sans préparation au cœur de la philoso-

phie péripatéticienne, nous l'aborderons par le de-

hors, et nous y entrerons pas à pas par le chemin

que <son auteur nous trace. Nous allons donc suivre

avec Aristote la marche de la philosophie première

jusqu'au point où il l'a prise pour la porter plus

loin. On pourra, si nous ne noustrompons, appre

cier déjà, sur ces préliminaires,la sûreté de son ju-

gement, la force de sa critique et la hauteur de ses

vues..

Le premier regard de la philosophie se portasur

le monde sensible; elle fut d'abord une philosophie

de lanature. La physique, nous l'avons vu

tout à

l'heure, précède danslé

temps là métaphysique,der-

nier fruit; de là pensée. Le prémiëi' principe oùIon

chercha la cause de toutes les choses dé là nature fut

le principe matériel, ce dont tout vient par lanais-

sance, et où tout retourné par là ~ort~l~sujetiM

périssable des accidents et des modift(~ c'est

Page 281: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE 1. 269

dans la substance seule qu'on crut d'abord trouver la

cause, et dans la substance corporelle Mais dans

cette unité du pointde vue général, se manifeste

tout d'abord une opposition profonde qui dominera,

sous différentes formes, l'histoire entière de la philo-

sophie.Une partie des systèmes produits par les pre-

miers efforts de la spéculation ne reconnaît pour

principe qu'une seule matière, un seul élément; les

autres comptent plusieurs principes, plusieurs élé-

ments différents et contraires. Pour les uns, tous les

phénomènes s'expliquent par les transformations, la

dilatation ou la condensation de l'élément primordial;

seulement cet élément se raffine et se subtilise, avec

le temps et le progrèsde l'abstraction, de Thalès à

Anaximène et Diogène d'Apollonie, d'Anaximène et

Diogène à Héraclite; c'est d'abord l'eau, puis l'air,

puis le feu, le feu vivant et animé. Dans les autres

systèmes, dans ceux d'Anaximandre, d'Anaxagore et

dEmpédocte, le monde provient d'un mélange ou les

principes opposés coexistaient de toute éternité2; il

ny a point de transformation du contraire au con-

Jtet. p. io, t. 4 sqq.

My<. I, tv: < o! pt«H<o! 3~'ou<n,~t!o

Tpoxote~'f o< ftef yop

'MtjoMtret tA ~f <Miif«[ To ~roxe~M'of, T<Bf Tp:<Bf T< <~Xo.

T~tt yef~f!<n inxt~TttM xa! ~con~Tt~o~.Xe ~c<oBfTeî. TauTe ~<TT<f

~TM' o! y ~it TOC &<~f ~«OtiMtt T<!tt ~f<fT~OT!)TM ~XXp«'Ec6<M,<S<T-

Âta~tMwJpJf ~)KM <~M< J* ~f )f<~ <M~Xa p<Mff eTf<u, <S<nrep É~-

MAM&~ ÂMt6!ty~B<tt'TOS ~(MTOf yc~p 0?TO: e)t)fp~O«M

Cf. ibid. vt; JM~. 1. p. 7 sqq.; XII, p. s4', t. 5.

Page 282: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

270 PARTIE m–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

traire, de naissance ni de mort, dechangement de

qualité et de nature; il n'y a que réunion etsépara-

tion, changement de figure et de distances récipro-

ques, c'est-à-dire changement extérieur etmécanique

de position et de relation mutuelle dans l'espace

Cependant dans la physique mécanique commence

à se faire jour l'idée de la cause 2, et du sein de la

nature se dégage tout à coup l'élémentmétaphysique

Tandis que ses contemporains s'égarent dans l'obs-

curité de leurs cosmogonies matérialistes, un seul

hoMune a remarqué dans le monde l'ordre et la

beauté, et y a reconnu l'oeuvre de l'intelligence:

Anaxagore pose enun à l'origine des choses la pensée

souveraine, l'immortelle et immatérielle raison. C'est

de ce moment aussi que la raison semble se faire

entendre pour la première fois, et la sagesse com-

mencer Chez Empédocle se prononce la distinction

du bien et du mal et au-dessus du point de vue de

l'ordre s'élève le point de vue de la moralité. Mais

ce me sont encore làque

des élans sans suite et sans

haleine: Empédocle et Anaxagore retombent bientôt

au monde des corps et du mouvement, et aux hypo

thèses d'une physiquestérile, t

Met. ï, p. z5, p. Il. L 9t; p. t4, t. '8. P~ t. If,

vm; de Cm. et eorr. t, t, n.

Ket.1, p.n-n.

a ïMd. p. t5. t. t O~w M{~<m' ~<< wp' e~x~ Myet~a~ ToS!

<~<w.

Ibid. 1.18.

Page 283: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H. CHAPITRE L 271

Avec Empédocle, la physiquea poussé jusqu'au

bout l'idée de l'opposition des éléments matériels. fi

ne lui reste plus, pour atteindre le dernier période

de la théorie mécaniste, qu'un pas à faire, et ce pas

la ramène à l'unité de principe'. Les atomistes ré-

solvent les éléments en une infinité de parties homo-

senes,dont les différences seules sont les causes de

toutes choses; mais ces différences ne sont plus des

qualités intrinsèques, opposées entre elles, c'est la

forme, l'ordre et la position, trois accidents purement

extérieurs et relatifs. A l'élément primitif de Thalès et

de son école, succède l'abstraction du corps 2 divisé

à l'infini dans le vide de l'espace. La matière à la-

quelle les sens s'attachaient, recule devant eux dans

la région des origines où la pensée seule pourrait at-

teindre*, et s'enfonce dans une nuit impénétrable.

Cependant l'esprit spéculatif s'était engagé ailleurs

et depuis longtemps dans une recherche d'un ordre

plus élevé. En Italie, chez les Pythagoriciens, il pour-

suivait l'essence des choses, et il essayait l'instrument

légitime de la science, la définition La métaphy-

sique avait donc reconnu son vrai but, et trouvé sa

Mute? Mais t'école italique ne songe encore qu'à la

~'<.t,p.t5,i.S;vm,p. *66.t. t3.

UÏ, nr AtM sa <tM~ ~Mt tMh~M' <aT!ft~ ftey~e<

(tJpM a~MM Aa~M'.

itet. IV, p. 77. CC Sext. Empir. <t<<f.AT~m, Vtf, p. t63. Laert.

M.nr,H.v.

t. p..9. t.2 2.

Page 284: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

272 PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE

nature, elle n'aspire guère elle-même, avec ses prin-

cipes incorporelsen

apparence, qu'à expliquer )c

monde sensible. Dans ses essaisimparfaits de df'H

nition, elle prend pour l'essence le nombre; mais

elle ne fait du nombre qu'une matière, dont elle

compose les réalités « Son principe semblaitpropre,

ditAristote, à porter àce

qu'il ya de

plus hautparmi

les êtres, et elle n'en laitusage que

dans les limites

de l'existence visible. » Elle a de lamétaphysique

une inspiration secrète; son intention, sa volonté ne

dépassent pas la physique Bien plus, la théorie p\

thagoricienne n'est qu'une forme mathématique d'a-

tomisme. Elle résout les corps en nombres, les

nombres en unités, derniers principes de l'éten-

due, et eues-mêmes étendues 3. Ne sont- cepas

ta

les atomes de Démocrite~? Remontons aux principes

Ibid. p. 16, t. 23 *Mf<tp<8~of oo~oprs: ap~f e7fCMxe< M&m

To?< oB<H xa! Te )t<d ~e«. P. 17, t 96 Ëo~M[<K ef

e~Je< Ta aTM~eMt T~Tre<f' ~x To~r~py<~}

M:~fUMtp~fTMf

cMM<m!~

]Mt! -se~Mo~at ~ao~ T~ <K!a~!?. XIV, p. 2~8, t. 2 Tô 'Bfo<e!o

fMM' T~ ~U<n)Mt O~fMTW, X. T. Cf. XMI, p. 2~9, L t.

Ibid. I, p. 26, i 28 AMtMy<WTO< (t~TOt )M~~p!i~~MtTe<!ûftM

~ep) ~oeex. ~f ~{toXoyoiwTe~ To?< <&~o<t ~p«<noX<!yot<, ~T< Ta

ToSt* <!trn<' ~<Mf e~o~TJf ëyi-< <[<J~ep<e~)!~ef

o x~o~ttefo~ cJp~M

T<~ aMftt <Mt{Tat <M~<, ~oitep e~o~tef, «Mf~î X~ouoo' eTttf~&~s

Mt! Ta <!M<W~pMTC~ ~f~Mf, «!~ t"°" ~M ~Sp~ ~OSN~ ~'M

~tMTMt~OWt.CE XIV, p. 300, 12. 4,

Ibid. Xin, p. 271, t. t6 T~ (<OM~M ~<JH~6e!eoc<Hf ~e'f 'M~

8< tMd. L 30; p. 279, t3

De An. )[, tv ~J~e ~f oJO~' &a~petf (MM~M X~yeff )i o~

(tara ftMtp~.De C<B<. ÏH. tv (en partant des atomistes) Tp~rc"

Page 285: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE M, CHAPITRE I. 275

i8

les plus générauxde la philosophie italique; nous y

retrouvons encore, comme dans les origines de l'a-`

tomisme ionien, l'idée de l'opposition desprincipes

et de la combinaison mécanique des contraires le

monde partagé entre la lumière et les ténèbres, le

bien et le mal, et jusque dans le sein de l'unité,

source premièrede tout le reste, la contradiction du

pairet de l'impair, de l'infini et du fini

Les Éléates s'enferment dans l'unité. Ce n'est plus

) unité de matière des premiers physiciens, la subs-

tance d'où se développent les phénomènes, c'est l'u-

nité de l'être, hors duquel il n'y a rien, et qui de-

meure éternellement immobile dans son identité. La

nature, livrée au combat de principes contraires qui

se mêlent et se séparent sans changer, n'est plus

quune apparence, objetde l'opinion incertaine; la

raison ne reconnaît que l'unité absolue 2. La physique

se trouve donc enfin rabaissée au-dessous du pre-

mierrang; la pensée semble prendre son essor et

s'élever droit à l'essence éternelle, objet de la méta-

physique~. Mais l'être des Éléates n'est qu'une abs-

traction dont la métaphysique ne peut se contenter.

!'M xxi o~rot -seb~Mt Ta ~M -sofouortf ap<8(tOMtM[< e$ optOftfSf

«~yap

o~it ~cC<w, <%MM ToCro j3o<!Xo~T<M ~e<f.

3<<t.ï,p. t~;p. t9,t. t3.

tMd.p.t8.De Co't. III, t OJ ~MMta!t ye ~e7 fef~<T<M X~'e<f to yoip e&Mt< ~Tra

TM' ~«~ f!y~MfM <t<d ~<~ (M~tTa fMS~<!f ~<r7t!' ér~p<Kxo}

-spor~pat

t ~<Kjtf)f<nt&~eM.

Page 286: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

274 PARTIE 1:1–DE LA MÉTAPHYStQUE

Fini ou infini, que cet être soit l'unité d'une Ib) m,

rationnelle, comme dans Parménide, ou, eornn~

chez Melissus, celle d'une matière et d'un sujet indp

terminé ce n'est toujours que le résultat iiïusoirf

d'une stérile analyse, qui absorbe la réalité dans unp

généralité logique2. #

Tous ces systèmes, àl'exception peut-être du p\

thagorisme, viennent se rencontrer au bord d'un

abîme commun, la négation de la science. Ceux qui

ont soupçonné quelque chose de supérieur à la ma-

tière et au mouvement, l'ontrenvoyé trop loin ao

delà de ce monde, et hors de la portée de l'intejii

gence humaine. 11 ne leur reste à tous que le monde

des phénomènes et le jugement douteux de iopi

nion~. Dans la théorie de l'unité de principe, la sub'"

tance, en s'épurant et se subtilisant de plus en plus.

s'est dissipée en quelque sorte dans ses propres ma-

nifestations le feu vivant d'Heraclite n'est plus qu'un

mouvement sans repos, d'une rapidité insaisissable;

tout change et passe, tout ~coa~; telle est la formule

où Héraclite dépose, peut-être à son insu, le germe

du scepticisme~. Dans les systèmes qui reconnaissent

JM<<. ï, p. 18, 11 Ihtpt'c" y<tp&M<e ToS «[tc( To~ M

yof éf~ dMea~at~ M~X«w< ToB )MtTf~ T~ ~X~«' &~ o ftef es

sepa~~fo~,o

~Mtp~t' ~<n~ elfa< <tJt~.

Ibid. XfV. p. 294, n. P~. ï.

j~. ÏV. p. 78. i. 95.

UMd. p. 67, t. t6~ p. 79, L 6; p. 85, i. Xt, p. 9x0,

1

p.t93.<. t5.

Page 287: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE II, CHAPITRE I. 275

t8.

plusieurs principes, la certitude de la connaissance

jt'est pas mieux assurée, et on peut déduire le

scepticismede l'hypothèse qui leur sert de fonde-

ment, comme une conséquence irrésistible. Si les

principessont des contraires qui existent ensemble

et mêlés les uns avec les autres, tout est à la fois

Manc et noir, grand et petit, plein et vide; les con-

tradictoires peuvent être afïirmés à la fois d'une même

chose; le vrai se confond avec le faux 1. Par consé-

quent, plus de règle de jugement, hormis une seule,

!'apparence. La sensation individuelle est la seule

science possible FAomnM est la m~arg de tout. Telle

est la conclusion proclamée par Protagoras. Jusqu'a-

lors du moins la philosophie avait cherché la vérité

et espéré l'atteindre la sophistique y renonce for-

mellement et ne s'inquiète plus que de la renommée

et du gain. La pensée et la parole ne sont pour elle

qu'un moyen de se procurer le plaisir; la volonté

philosophique, la moralité a dispar u 2.

La philosophie périt dans le monde corporel où

elle s'est renfermée; dans cette région de mouve-

ment et de contradiction, elle n'a pas pu trouver

Mnpoint ferme et immuable, un principe incon-

testable où se reposer. Réduite à la sensation, à la

IV. p. 76, L a8.

tbtd. p. 64. i 9<) Afa~pa (d ~o<ro~<t). T~ (r~ <To~<er<-

TOC~M) T~ <fpMtp&M<. Cf Bt<'<. t, t. &yt.

t 6 <M~«rr~ ~pt?-

fT" «~ ~MMft~W <~M.

Page 288: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

276 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYStQUE.

représentation fugitive de phénomènes sans rea)ité

elle s'était abîmée, après de longs et inutiles efforts,

dans un scepticisme universel. Ce n'était plus désor

mais dans la nature que l'on pouvait espérer de trou-

ver ce principe de constance et d'uniformité dont la

science ne saurait se passer; la physique semblait a

bout. Mais la physique avait pensé entraîner la mo-

raie dans sa ruine; c'est de la morale que vint le

salut. Socrate établit son point dedépart dans la con

sidération du juste et de l'injuste, des vertus et des

vices, du bien et du mal; abandonnant la recherche

d'une explication générale des phénomènes naturels.

il s'attacha à l'éthique, et il y découvrit le véritable

objet de la science, indépendant de la sensation, c'est-

à-dire l'universel. Il le découvrit, en outre, par un

procédé général et uniforme, par l'emploi métho-

dique de l'induction et de la définition. Avant lui

on avait comparé les semblables et raisonné parana-

logie avant lui, les Pythagoriciens et les Atomistes

avaient essayé de définir. Mais il fut le premier qui

se servit d'une méthode constante et rénéchie, et qui

donna à la science la conscience d'elle-même

Mais Socrate ne prétendait-il qu'à donner à la

JMet. XtH, p. s66, 5 BaMtp~TOM <Mp} 0~ <~M:

~pt~MMeMft~fOH Mt~ <Mp!M<!MW

Op~eO&M<M<M~OM!t!TOMTOt CpNtM

(Mu' ftef y~p ~uoMMiW fUttpof A~ftcxptTO~ ~<~o ftOfOf xe! Mp<<rM<'

~t«f ïoa-ep{*of

xd T~ ~~p~f o< n~ey<!pe«w <pjrepof cepi

cMy<M', x.ï.X.p. to, t. 8

Page 289: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE I. 277

science une forme scientifique, et n'y cherchait-il

pasen même temps la vérité des choses? Il ne vou-

lait passeulement s'élever, à des notions générales,

il voulait les appliquer par le raisonnement et la dé-

monstration or la démonstration a son principe dans

l'essence des choses. C'était donc l'essence qu'il pour-

suivait, et s'il s'attachait en toutes choses à l'univer-

sel, c'était pour l'essence qu'il y croyait contenue'.

It cherchait, comme avant lui les Pythagoriciens, le

véritable objet de la métaphysique;mais il le chercha

aussi sans l'atteindre. L'école italique avait placé l'es-

sence dans les nombres; il la fit consister dans les

généralités, c'est-à-dire dans des genres ou dans des

attributs contraires dépourvus de réalité. La dialec-

tique était jeune et encore faible; elle ne pouvait pas

séparer l'être des formes opposées par lesquelles il se

manifeste, elle ne pouvait pas même avoir la raison

de l'unité de la science quiconsidère à la fois les con-

traires 2. Incapable de dominer les oppositions ni d'en

J&'t.XtIÎ, p. 266, 12 ÉMTtw e<!XoyM~ ~re: To ~<rr<' SwXXo-

y~M~n ~<tp ~re<' ap~T&w <n~oy'<T(ff To r~ e<rrt.

tbid. t. t~ AMAexTo~ y<~ M~ e~M tor' << <S<rre~MKt&M)«d

X~ TO? ATM «ÏMWT&t &M<nKMte<f, )Mt! T<5f ~f<tfT<<Mf St CUT~ SM-

~ftt;. Selon M. Retscher, ce jugement ne porterait que sur !a mé-

tMe platonicienne; Aristote donnerait à entendre que Socrate s'e-

'tarMte aux génemittesde t'abstraction réneHve, où les oppositions

MotencoM tiéett à un sujet )rée!, tandis que Platon les en rendit in-

'~pendanteset les considéra en eHes-mémes (~n<<opA<MMund sein

~'f~er; Berlin, tSa?, in-8°). Cette, interprétation est celle de Hcget

Page 290: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

278 PARTIE ML–DE LÀ MÉTAPHYSIQUE

découvrir le fondement et le lien intérieur, elle

arrête comme à la substance même des choses. Dans i

'moralesocratique, commence à se révéler cet amour

des abstractions, cepenchant

excessif a tout réduis

aux idées. Les vertus, pour Socrate, sont tout entiers

dans leur notion, et les savoir, c'est lespratiquer'. ))Il

méconnaît dans l'âme humaine leprincipe

naturel de

l'action, de la passion et des affections 2. Il croit f~<

rien n'est en vain, ilparaît soupçonner que

le moodt

marche à une fin raisonnable; mais il lui manque le

sentiment de la réalité de ce mouvement, et de la

réalité engénéral

H voit tout dans l'unmobuitc

l'idéal et de la forme logique.

tl n'y a guère, en définitive, q'~e deux choses don!

(Werke, XIV); M. Brandis en a fait voir !a fausseté (GrM<H<nt(fn''

Letre des Sucrates, Rhein. jftM. tSay). Le T< ~<nr< n'est pointdan~ )r

langage d'Aristote, comme M. R&tscher l'apensé,

la réalité sens!!

<u;ette aux contraires, mais l'essencequi

leur estsupérieure.

Se) )'

Afistete, la dialectique en général, chez Platon comme chez SocMt

a méconnu l'essence en la faisant consister dans les contraires, <t

ce n est que chez Aristote tui-mëmequ'elle a su se borner à la c"n

aidération des oppositions abstraites, pour laisser celle de cM<w

à la métaphysique.Cf. Syrian. w JM<!<.XMI, BiM. reg. Paris. cod n;

t8o3, f5t a.

JM«~n.Mor. t, xxxv <&<(<m&wt!MM ~f f!pe~f X<!yox~. Rt

t, t ~er' e~~w r~Xot To y~f&<n<e<f r~f .i~er~f' ~<tT!{~< yp

eÏMM T~ ape~. Cf. M~n. Mor. ï, H; E<A. ATc. Vit. m.

Mo~tt.Mor. t, t.

uad. (Mx op0& oJ~*Bwtpchtx <hKCT<(fM[f~<~e< TM "p~"

<itMM~y~

a~p~sro

~eff{M~t)f e?t~M, <x Je roS ï~t

~ptt«es:

fttt e&et< <Mf<6M< <K?T<!T~t aper~ fMtT)~ e!fN<' «.T.

Page 291: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE !1. CHAPHRE Il. 279

philosophie doive s'avouer redevable a Socratc.

t induction et la dénnition, deux choses relatives au

conunpncement de la science tjnc méthode, telle

t<;t la meilleure part de l'héritage qu'il laisse après

hn: c'est celle que, de tous ses disciples, le seul

Platon a su recueillir, et à laquelle il a donné une

txtoMÎon toute nouvelle. Nous pouvons donc passer

;i\f< Aristote du maître à l'élevé, pour considérer

maintenant le mouvement général et l'esprit de leur

méthode commune chez celui des deux qui l'a pous-

sce le plus loin, et le vaste système qu'elle a produit

mtre ses mains.

CHAPITRE 11.

P~tondialectique; théorie des idées; théorie des nombres Résumé

de l'histoire de !a métaphysiqueavant Aristotc.

Tout ce que je sais, disait Socrate, c'est que je ne J*~ts rien. Ce mot lc peint tout entier et donne le

secret de sa méthode. Il ne nie plus, comme le so

j't'isie, que ia science soit possible il croit qu'eite

"est pas encore; il ne le croit pas seulement, il le

Wtt. & p. s&S, t'y:A~o

y<[p~rnc Ttf ~t' a!:f<t X&MpaTS!

~MMitK, ToMt T' ~t)tT«<K)t ÀO~OM X<!<TO op<~E<rCa'Xa9~A«M.

Page 292: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

280 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

sait; il semble qu'il l'ait entrevue dans un idéal loin-

tain, et qu'il la compare à la connaissance humaine

comme une mesure qui la convainc de son néant

Avec cette ironie et ce demi-sourire qui le caracte

risent, il se rabaisse en apparence, dans un aveu

héroïque, au-dessous des savants de sontemps, et il

se relève, en effet, par la conscience de sapropre

ignorance. Il ne pense même pas que ses contem-

porains en sachent plus que lui; tous les hommes

sont ignorants, tous sont près de savoir, et celuiI:)

seul a quelque avantage sur les autres qui s'entend

à faire éclore les germes cachés dans leurs esprits, et

qui se consacre sans orgueil à cette tâche laborieuse

et à la recherche désintéressée de la vérité. Il dé-

clare qu'il ne sait rien; et il interroge les autres

s'informe auprès d'eux de ce qui lui est un sujetde

doute, les force par ses demandes-de réveiller leurs

souvenirs, de rappeler les idées de l'oubli et de lobs

curité à la lumière, d'en faire le dénombrement et te

discernement exacts, d'y démêler avec lui l'essence

des choses qu'elles représentent. La définition, où

elle doit être exprimée, n'est pas pour lui le com-

mencement mais le résultat de la discussion; il en

recueille avec son interlocuteur les éléments disper

sés, les dégage avec son aide d'une multitude de res-

semblances, et les réunit par l'analogie en une seule

&~A. <]mUt AMt TOt?TO XaMtp~t t~M,

< <K:t fhrMCn'H"

<oMye< y~p <~t '«te MM.

1

Page 293: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE II, CHAPITRE II. 281

et même notion 1. Cette notion n'est donc pas le pro-

duit d'une rénexion personnelle, l'œuvre d'un indi-

vidu c'est i'œuvre et le produit des choses, le son

qu'ellesrendent d'elles-mêmes, frappées au hasard

dans la conversation, l'étincelle jaillissant du frotte-

ment des analogies 2.

Telle est la méthode que Socrate mettait en action,

et dont Platon écrivit la théorie. C'est la méthode dis-

cursive ébauchée autrefois par Zénon, dont la forme

est le dialogue,et le nom la dialectique. Maintenant

si la dialectique est un moyen convenable pour con-

fondre la vanité des sophistes, et pour rendre aux

esprits la confiance modeste en leur force et l'amour

de la philosophie, est-il vrai que sa puissance s'é-

tende jusqu'à la découverte des premiers principes? a

Au milieu de l'opposition apparente de la nature avec

eUe-même, et de cette contradiction d'opinions qui

en est la conséquence et dont le scepticisme triomphe,

le dialecticien interroge; mais la réponse peut-elle

lui donner ia vérité qu'il cherche? Elle ne lui peut

rendre qdune vraisemblance De quelque manière

qu'il varie et multiplie ses demandes, etquelque

Plat. Pt<e<~r.p. a65 d E~ ft~tf re M~f o~fopcSfra d!ye<fTa ~roX

~? A«nK(pf~Mt.

Pht. Rep. tV, p. A35 a tM T< ~"P d~t~a OXO~OOfTSfxai

TptËMtKtAntep &t «<pe&M'&t~t'{fM ~M<<(<TOftEfT))f &X<!UOtn!fttf.

~M~. l, t AMAMfn<~ (wpJïa<r<!) <~f9!ïf0ftef&) ~ef ep<~nxrM

MTf~Mectt' <n<X~oy<!ot<A'~ ~t~M TOC ~MfOj.t~fOM XtM eo~O~OM..So/)A.

)! Èw T<S~ roc a~oiMffo~tefou Jo$&'f <n'~o~ f~~efet.

Page 294: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

282 PARTIE ÏIL–DE LA MÉTAPHYSIQLH

loin qu'il pousse l'analyse des questions, il ne peut

qu'augmenter de plus en plus la probabilite, sans

atteindre jamais la certitude absolue. H faut qui!se contente, en définitive, d'une apparence et d'une

opinion. Le but qu'il se propose est de retrouver

dans les existences particulières un élément degé-

néralité, et de ramener la diversité sensible à l'u-

nité intelligible de l'universel. Mais saisit-il bien, dans

ses universaux, la nature et l'essence des choses~'

En s'élevant de genre en genre, ils'éloigne de plus

en plus des réalités, il en perd de vue les limites

spécifiques, et il en confond les différences dans une

unité vaine. La dialectique a le droit et le pouvoir

de ne pas se renfermer dans un genre partiel; mai'-

elle n'est pas en droit et rien ne lui servirait de !e

duire tout à un même genre. Il n'est point de genre

qui contienne à la fois tous les objets de la pensée.

toutes les catégories de l'existence. La dialectique m

peut donc pas atteindre ce suprême universel auquel

elle aspirer Ce n'est pas.& elle, mais à une toute

autre méthode, qu'il appartient de trouver l'unité de

l'être et l'universalité véritable~. !1 reste, à son poin'

de vue, qu'elle le sache ou non, des classes au de!

&p&. et. u Nw J* odx ~T<f ô jMÀexTOt~ wept ~fofTI Mp's~

fM~ <MM~JetXTtxAt oJ~ett~t, ou~ To«K?To< oïot ô <Mt6oXoo. (Mre ~f

~or~ ~)MfTa & é~ nM y~e<. ~tt<d. p<M<. I, xt 6 Jè &a~MT<xt

&~<f c~r~t<&p«~t<~<tf TtftSf, oJJ~ y~fo«î Ttt~t ~o<. OJ ye~

~f ~p~'

«ede«w6t~<[ y<!p<M?)(&!T<<' ëp<tTaf.

Voyet le livre suivant.

Page 295: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H. CHAPITRE II. 285

desquelles eue ne peut remonter, qu'elle ne peut ré-

duire, comme elle le prétend, à un même principe,

et dont elle ne fait que parcourir et etneurer les som-

mets. Elle discourt sur les oppositions générales qui

soumettent les sciences les plus différentes aux mêmes

formes logiques (l'un et le multiple, le même et

l'autre, etc.); mais elle n'asseoit pas ces sciences sur

une base commune'. Toute véritable science part

d'un principe qui lui est propre, et qu'elle seule con-

naît. Elle ne le cherche pas par interrogation, elle

le possède et le produit tout d'abord. Elle ne se fie

j)as, sur l'essence de son objet propre, à l'opinion

commune et à la vraisemblance, mais à une cons-

cience certaine, à une intuition spéciale et directe,

et elle en tire des démonstrations infaillibles Loin

de là, la dialectique se perd dans une vague et in-

certaine spéculation elle se paye de notions géné-

Met. Ht, p. 4t. t. sa Hp~t T<~To<î ~ep< TaJroC )Mtt er~poo <a<

<!M~u )Mtt &t0(<o~w <Ht) ~MtfTtor~TOf, xat wep< wpor~pouxa< u<yr~po«

t~ TMt <~<Mt <!«(ttT<M' TfM' TOtOttr~f, '6!epS <<T&Woi &a~eXT<KO<tKM)f!)P-

tu (TJtOHeTt; T&' A~O~M!' ~~Of WtOfOU~e~Ot Tt)f <fi)!~tf. Cf.Soph.

el.

u,~na~.pott. ï, xt.

Soph.< M (MJe(J<t T~f~t Ta!f ~e«f~<M«ïMfT<fa~<w ~p~T)tn)t~~<f' ej yftp ~eartf ~ro'feoofoBp TMf(.top~MfJoCfM' <n<XXoy«T~otyap

y'~ertM ~t~o&. Û ~MtXexït~ ~pMnrrMtt~nf. E< ~Je/xfue)',

«*< (t~ o~Mt~ <~M Mt ye <fpMTtt!t<M TaK otxe~tf

ap~Atoùx

~p~ra-

ft)t ~<~&~a<yttp o<!< ~f ~T< e~e~ ~f AaX~era< ~poi: T))f &'<TTa<T<

Ve;et pint haut, p. t33, note 4. Cf. ~na~t. post. ï, tx; Soph. el. in'? EM. t. vt. vm; Met. V, p. 89, t. a6.

<<.x! Û9T: ~j.epo" ~H ot~efo< <&p«rftefou ~~ipse~es~

~TTti~it~<M~. R~~t. t, < (M~e~MM em<!irt){tt!< ~«'pt~ef~t.

Page 296: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

284 PARTIE HL–DE LA MÉTAPHYSIQUEw-n ~:a.&&01 aaa. a..a-. a~aa.n i aaaaa a va~l 1a1..

raies qui ne représentent jamais que les dehors et ia

surface des choses; elle serepaît

de formesqui n~

contiennent rien et d'abstractions vides 1.

Il faut avouercependant que

Platon ne s'arrête

point aux idées, qu'il en considère les plus hautes,

lesplus indépendantes de tout élément

sensibie

comme n'étant pour la dialectique que desh\po

thèsesqu'elle

doitrapporter

àquelque principe su-

périeur encore, c'est-à-dire à une idée suprême quine suppose rien, qui suffise à tout et à soi-même~ 2.

Mais ce terme où tend la dialectique reste hors de

De An. I. 1: ~M~eXTMMSt mi XSMSî. iMf:. I, p. 30, 8; p.

t. 3o (en parlant de la théorieplatonicienne de la

parttctpatto~) Ke

foXoye<f, <!to: !M)~ ~ye<f. Toute idéetrop générale

etqui

n'estpas

propre au sujet est etde; de Gen. an. II, vm OJvo~ oBf o ~M

xaOJXou ~<tf <Mt}<ce«o<. 0< yctp T~ o~xe~f<~<Bf ~oyot M~,

<&XA JottoBtKf elvat T&)f~(Myft~TM~

oJx ~fte< Je xefof ~oM<~

e!<~ T<, ~T< oeOef. E<A. Eud. I, Vt Â~Xorp~oo~ X<!yow~ cp:~

(Mtre&tf <M[t<tefM!t. E<A. ~Vtc. 11, vu Ê« yatp To« ~ep) ïAt ~pfi~

yo« o! ~f <Mt6o~o« ttef~repot e~<nf. D'après cespassages

et les f~

sultats abientM dans le livre précédent, onpeut mettre en équation,

d'unepart

les formules ~iMTepMOf, ~ÀJrptoy, ~tt ~p~<rof MyM

(Top. V!!t, 6; Phys. I, n cf. Simplic. in Phys. f° ~8 h), <M ~M,

)HM< iMtMÂOt) ~MtXXof, Xoyf)~ J<aXe<tT<x~f, &o~of, tteMf, et de

!'autfe les formules contraires o~efo~ ~<of, T<Bf~iMp~~TNf (Anal.

pMt. t, HX) &' OtJroB TOS ~p<~{MtTOt, <Mtp<6~, ~MM~f, (P~ IH,

v) <!MXw(Af, )MTtt 0Aeoo~Mtf, <!X~f. Ces rapports servent beaucoup

ài'imt~iigemce

d Aristote.

Plat. Ft~p.

KM e Ëw ~M !<MHf~' ~6o<t.Rep. Vt, p.

5" b:

Tf~ ~MtO~Mf WOfO~t~ ~PX~' ~M<Mo«<, t.<~

StOMt Te <Mt<Op(~f, AM f~M TOC <ht<)ro6~M!t ~< T~f TOM«Wt~ "PX"

<Af, jt.T.

Page 297: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE M. CHAPITRE U. 285

sa portée.Au delà des généralités et des oppositions

)o"iqucs,elle ne connaît

plusrien. Elle demeure,

en dépitde ses efforts, dans un monde vague et

sans limites, et flottant dans l'indénni. Bienplus,

pouravoir voulu en sortir et arriver à l'être néces-

saire, elle s'ôte à elle-même jusqu'à cette réalité

dapparence,dont elle aurait dû se contenter. Pour

trouver le vrai, ia dialectique platonicienne suppose

le faux; s'autorisant de l'exemple de la géométrie qui

suppose afin de démontrer, elle veut tirer l'être du

non-être. Mais le géomètre ne suppose pas la réalité

de son hypothèse; ce n'est pour lui qu'une défini-

tion, une thèse dont il déduit les conséquences H

ne prend donc pas le faux pour principe, mais bien le

?<. XiV, p. :<)4, t. 28 Ba~ertu (Platon n'est pas nommé dans

ce qui précède, mais évidemment désigné) f*€f J~ T~ ~eCJo$ xal Mn!-

ïm' t)~ ~<!om' Myew T~ oJx ~f, o~ t~ roC ~fTOt «MXXft T~ <tw. &<o

**<~eyere ~T< Jt? <~M~M If ~oS~e~M, <!(<r<rep!MMo~

ysatj~rpat T~ co-

~Mf e!MH T~f <M~M&tf. A&!faTOf T<ti~' o<!T&x e~en'. (Mreyap

01

~tB~T~N l}<eB~M M!Mf ~OT<C<~T<M (oj y<~p Ty <ro~Xoy«Tfty ~po-

"*?), odre &[ ToS <~<~ ~TOt ïA <<<~e y<y)'era< o<?~~9e<pera<. Ibid.

Mtt, p. :64, 23 M Kt S~(ttfo~ )te~Mp«T(~f<[TMf <Tu~e€~)K!Taw

'~e~M<Mp! t<~TM' TOMKi~a, oJC~f M ToCïo ~eC~o< ~e<!crer<M, <g~-

'tp Ct~* ~Mtf &' T~ y~t y<~? T~P ~O&tt&tf ~f (t)) ~M~M&H'. (Myotp

LrTM <poMfe'MM <A ~eC~oe. Analyt. pott. ï, x 0< oS~

<~M< oux

Mm"<!)re9~ee« (o~ ~~p e~M (t)) X~yocTon), <&X' ~f Ta&~poTt!<je<r<tt

"Mro<Mo«~ Te~t d'AmtM ~fof ~f/eo~a< Je?' o~y o

yeM~re~

~0~ <!<ot~tMt<~ dta~M? TM'tt ~fMaf, X~ot~ree <&<oJ TM ~e~Jet

itP<<M, T~f ?yMtj~Tpttf ~e~M~M MyofT<t <oJt<Mftf T))f oj ~o~to~tt'

~t~ t~); y~ptt~i~p)~o~e: eJSeMif oBcaf. 6 Je ye«fterpt;< o~ef

~'f~~<M< T~t~t tttwyp~tft~, <~ auTOt ~ey<T<H, o~X~ r~ Aa

Page 298: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

286 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

possible.Le dialecticien ne

peut pas davantage fain

sortir cequi

est de cequi

n'estpoint; s'il

part dp

l'hypothèse, il y reste nécessairement, et soit qu'il

descende auxconséquences,

soitqu'il remonte au\

principes que suppose l'hypothèse elle-même, il ne

fait qu'avancer ou reculer indéfiniment dans lechamp

d'une science idéale.

De ce point de vue, nous voyons avec Aristote la

dialectique se rapprocher peu àpeu de la sophistique

qu'elle avait vaincue. Elle s'en distinguait à peine par

les formes et les manières elle s'en était appropriée

jusqu'aux ruses et aux artifices'. A mesure qu'elle

prend dans le platonisme un vol plus élevé, elle s en

fonce davantage dans les espaces vides où se joueatles sophismes. L'être qu'elle croit saisir se dérobe

sous ses propres accidents 2, et ne lui laisse que le

T<M!TfM'~Xoti~efa. On pourrait voir dans ce dernier passage une a))u

sion à Protagoras, qui reprochait auxgéomètres de

partirde suppo-

sitions fausses, et prétendait les réfuter en montrant le désaccord de

cet suppositions avec la réalité (Met. lit, p. 47, 24; cf. Alex. Ap)<M-

du. ad h. !.)mais le

précepteo<?~t? T~ ~e~e< ~a~o~M

ne serait pastrea-Men

placédans la bouche du sophiste. Il me semble plus probahle

que ce passage se rapporte, comme celui du XJV* livre de la Métaptn

sique qae nous avons cité en tête de cette note, et avec lequelil a beau

coup d analogie,à !a méthode

platonicienne, et que, par conséquent.

au lieu de <&<û~ ~«~ il faut lire <Sf Je? Tp ~e<!3e< ~o~e&M.

Sur les stratagèmes que le dialecticien doit employer pour ca-

cher son dessein et surprendre son adversaire, voy. Top. VHf, <;

&BA. et. M.

Md. X!, p. '!t8, ). t: ? ye ft))f &a~e<T<i<~ )t<d )} <m~«rr<x))M'

Page 299: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE II. CHAPITRE Il. 287

néant d'apparencescontradictoires qui s'cntre-dé

truisent éternellement.

Ainsi loin d'être, comme Platon l'appelait, le faite

de la science', la dialectique n'est qu'une méthode

trompeuse, qui ne peut suffire à la philosophie. Le

vice en est reconnu et l'impuissance dévoilée. La

dialectique ne peut pas produire une science cer-

taine, une sèience réelle des principes; elle n'obtient

rien que .par conjecture et par divination 2. Instruite

par l'exemple récent du scepticisme à se défier de la

réflexion individuelle et des illusions de la personna-

lité qui ramène tout a soi-même, elle cherche ia vé-

rité au dehors; elle la cherche dans les formes géné-

nérales, et ces formes elles-mêmes dans leurs mani-

festations extérieures, dans leurs images sensibles.

Elle procède donc par figures et par paraboles 3. Elle

s'attache aux noms, dont elle espère faire ressortir les

idées Enfin elle s'abandonne au hasard du dialogue,

au vent de la conversation, au mouvement fatal du

discours~. EHe se laisse entraîner à l'aventure d'i-

<e&))«~TMf (<~f e&K TOif O~Mf Ot!~ ~Ta, 0< ~EptTO dv auTO

~0!M' ~)t &tT<

&!p.VU, p. 534 e Op~M< TOM(McS~eMf.

PM<&.p. 64 Ti ~OM &' Te ~8pf5tfM T~ ~t~< tJ~XS~ Ta-

~w, M:}~Mt <«af a~f e!~ tMte tM[preMT&)p.

~t. H, xx thtpa&~ SMXpaTt~.

VoyMie Cratyle.

R~). ÎH, n gn~ d OJyap ~t) ~<~e ~r~ oHat eXX' <~<n' ~f o Ao~ o~

"~p **<B<Mt T~Ttt <~of. Polit. p. 29: <! Ae~ T'otp J)} ~o<e:t'

Page 300: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

288 PARTIE III.-DE LA MÉTAPHYSIQUE

mages en images et de paroles en paroles, comme

sur un courant qui l'emporte elle se livre elle-même

avec une confiance aveugle. C'est l'âge héroïque de

la pensée; elle se fie encore aux symboles, et s'adore

dans ses propres signes. Aristote ne croira plus

ainsi aux apparences. Les formes opposées sous les-

quelles la nature se montre, ne sont à ses yeux que

des enveloppes auxquelles le dialogue doit s'arrêter,

mais que pénétrerala métaphysique. M dédaigne les

images et les allégories.Il ne croit plus à la puissance

mystérieusedes mots; le langage n'est à ses yeux

qu'un produit de l'art humain 2, une forme impar-

faite du langage intérieur, un symbole ambigu comme

tout symbole,source de l'équivoque et par conse

quent de l'erreur. Ce n'est donc pas à des signes m

certains qu'ilfaut désormais demander le secret de ia

nature. A la conjecture,à la crédulité enfantine, doit

succéder l'assurance réûéchie de la science; au dia-

logue, la solitude et le silence de la spéculation;aux

paroles et aux longs discours, la pensée qui pensela

chose avec la chose même~; à la lettre, le sens; aux

ToBro, Myof )}(Mf ~poe~pttMf.Tun.

p. 34 c ÂXM <KM xfM

~oM tteT~MTefTO? ~pOOTt~~TOt

Te Mi 6~tt! T<T~ K<~ ~0~

Pant. p. t36e TJt< ~«t *<~&'f ~e~Mou Te T~M~. P. '3~

a:

AMWeCMt TMoBtOf Te Mi T<MKM?~<WW~Oof ~oyMf. PM<< p. 338 a IM

H~<0< T~ Â<~M'. Les. X, p. 899 e 6 ft~XXM' <~ ~0$ O~oJpe~

pet, )M~ orye~f <<M«~6)tro< T~p )~yof ~)MM'Mt o<?TM&eSeX9e!f.

De Me'pref.n. j

&ph.< vu MNM~of )) a~T~ ~ferat fter* <~Nf <Mto<raMttM"'<s

Page 301: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE M, CHAPITRE H. 289

'9

<\mboies, l'esprit intérieur, principe, moyen et fin

tout à la fois de la philosophie.

Ainsi redescend la méthode dialectique au rang in-

férieur que nous lui avons vu prendre dans la philoso-

phiepéripatéticienne.Elle n'est plus une science, mais

proprement unart qui reste en dehors de la science.

~e n'est en elle-même qu'un jeu, un exercice un

préludeà l'oeuvre sérieuse de la métaphysique.

Avec la méthode platonicienne est condamné d'a-/

nnce le système qui en a dû provenir. Né de la

considération des formes logiques 2, il est aisé de pré-

voir qu'il ne sortira pas des formes, et qu'il n'aura de

la vérité que le semblant et les dehors.

La doctrine de Platon n'est pas, il est vrai, un

simple développement de celle de Socrate. Elle vient

de plus loin et vise beaucoup plus haut; elle a des ra-

cines profondes dans les doctrines antérieures, et elle

aspire à la solution générale de tous les problèmes

que laphilosophie s'était

proposés.Dès sa jeunesse,

imbupar Craiyle des opinions d'Héraclite, Platon avait

appris à la fois à arrêter ses regardssur le monde

physique, dont Socrate négligeait l'étude, et à n'en

"'S* tt~f (~ yjtp ~jte~ <6jLou <n<~« M XJy&)f, «![8' <~T<~

~tTOf &' a&MtJt?TOt?<Mt~(MtTOf)' ~f <T~ du Tt~ 0{MM01ttTOî,

e~~t &tK~f 3~6eM<.

r~Mts~ yt~ ~"P M'C~ Plat. P<!fm.p. t3S d; Soph.t b; Polit.

p. 957c.

M~.î,p.:H,t.t3:6

TSf eMc<We~ey~~ dia T)tf ~f TOtt X<!y0ft

~~o m~t~. IX, p. t88, 1. 98 O! TOM Xoyo«.

Page 302: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

290 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE. 1'.

rien attendre que de mobile et depassager pan,

la région supérieure des essences et de la raison, ij

rencontrait l'argumentation spécieuse des Éléates.oui

confondaient tous les êtres en une indivisible unitc

il fallut la prévenir en opposant à l'unité de t'être.

comme sa condition, unprincipe de différence et de

pluralité indénnie 2. Enfin, entre les deux élément

opposés, la pluralité indénnie d'une part, et de l'autre

l'unité. il fallait trouver le rapport c'était précise

ment le point de vue d'où l'écoleitalique avait oui

sagé la nature, et la question qu'elle s'était posée. La

philosophie pythagoricienne ne pouvait donc man-

quer d'exercer sur le platonisme une forte influence

et d'y jouer un grand rôle 3.

Mais il y a dans le platonisme un mouvement

général qui emporte tous ces éléments suivant une di

rection commune, et ce mouvement est toujours ce

lui de ~a dialectique. La résultante est encore, comme

chez Socrate, l'universel, qui embrasse dans son unité

la multitude des individus et les oppositions des pbf-

nomènes. Le but auquel marche tout le système~(

encore l'idée socratique du bien, considéré comme

ie principe souverain de la connaissance et de l'exis

tence, et où viennent se réunir laspéculation

et ta

pratique, la science et la vertu.

?<. I, p. se, 4; XHÎ, p. 265, t. 30.

ÏMd. XIV, p. 29~, 7.

1Ibid. t, p. ao, t. 2; p. 21, 5.

Page 303: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE M, CHAPITRE II. 291

'9-

CependantPlaton ne se contente pas de rattacher

la doctrine socratique aux doctrines qui l'avaient pré-

cédée, d'en approfondir Ie3 principes et d'en étendre

le champ, il la pousse sur la route même dans laquelle

ctte était entrée jusqu'à une extrémité ou elle passe tout

à coup dans un monde nouveau. Socrate avait placé

t'essence des choses dans les généralités distinctes

des choses particulières, que l'induction endégage,

et sous lesquelles les classe la définition. Platon ne

distingue pas seulement l'universel des chosesqu'il

domine; il l'en sépare et le pose, sous le nom d'M~,en dehors du monde sensible'. Ce n'est plus pour

lui, comme les généralités qui suSisaientà Socrate,

une unité logique, c'est une unité réelle dont l'unité

togique n'est que le résultat et le signe. L'idée n'est

pas seulement ce qui se trouve de commun dans

'me pluralité d'existences individuelles2, mais le prin-

cipe auquel elles participent toutes ensemble, d'où

elles tiennent leur ressemblance les unes avec les

?*<. XM, p. 266, L t<) A~X' ôB~xp~Ttu

Ta xa9o~o« ojyc~-

)KM< ~tro~M OtM~ T0~< ~ptO}MM!roi J'

~<5pMWf,xai T~ TOtaUTa TiBx <i!f-

'M' ?<!<opo~y<!peo<K[f.

P. tS~, L 8 ToMïo ~/f)t<Te ~n Sa).

''ptn;f A<t To~ ~p«y{M))<,«! ~f ~<&p«r~ ye T<5f xa9' &Mtcrof.

Eth. Eud. I, Ttn ~OT' o< dd ï~ tfOtfOp ayotOot~ T<tJï~ T~ <J~

CM<~t~~H

Mt~f. Cf. ?<- VIT, p. t55, t. a8; t, p. 99, 1. 30

~H e/A)) ~tt~oMf! T'e MM ~eT~w~ty. Cependant Plat. PA<cJ.

P 'o3 b &' &)~fMw ~e< ï~f ~aw«(J<ïp Ta ofo~o~M~ et Phileb.

P '6 d:Mpihteto y~p ~foC<Ktf~ Mais ici &e<fa< ne doit pas être

prisà la

rigueur comme t'~iM~~M!'d'Aristeie.

Page 304: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

292 PARTIE IM.–DE LA MÉTAPHYSIQUE

autres, et dont elles reçoivent le nom Elle n f,j

donc pas dispersée dans les individus; elle n'est pa~le simple attribut qui est tout entier dans les

sujet,

particuliers elle subsiste par elle-même et en elle-

même, d'une manière indépendante et absolue 2. En

elle même, par conséquent, l'idée, qui donne aux

choses particulières l'unité d'une forme général. !'i-

dée est une chose à part, singulière et individudie": 3;

elle est un être au sens le plus strict, une substance

une essence réelle

Tel est le dogme qui sépare Platon de Socrate, et

duquel va s'engendrer toute une philosophie nou-

velle c'est la réalisation de l'universel dans l'Idée, tt

suffisait pour la science considérée en elle même

c'est-à-dire dans sa forme, des unités générique& qui

fournissent les démonstrations 5. Pour l'explication

JMi*t. 1, p. 20. }. t8 KaT<~ ~Oe&f yap eÏMM rA <M~XA Tf5y <n:-

M~M' ~<fMt TOM eMe<r<. Plat. F~<eJ. p.toa b Er~ T< &<tcT<if

T~W et~M~t <M~ TO~TCM' T~XXct (teMX<t(t6t<MfTC( CtJïM' TO<!Taw ~)t&)M~M

~Mf. Ce iMd. p. to3 b; Pt~r. p. 34i b, 346 c; 358 a; TA~'

p.t3ae.

M'(. VII, p. t3y, 26 M~ M~ ~Mxe<~f<w.

Ibid. t, p. 90, L sy Td J~ e~oe aJt~ ~f &Mt<yro~ ~Mf.X!t)

p. 9~9, L t4 t~ yttp ft&tê~OTtW.VII, p. 169, I. 93 T&w)~

<MC' &MMTM' ~a, ~< ~< 'M~~p«TT){. Cf~ PMe&. p. t6 d; jR<p

p.696 a.

met. m, p. Sg, t. 29 K<dy~p ef )MX<M&<tpOpoe<Kfo! ~r

TM, <X* ~ar< ye ToS8* ~<M~o<fM<, xcd <!fc!y)t)t ToSM ~~e<« aMTOK,~f

T<Sf e~Sf oJt~Z &MMT<!« ~<m <ta! OtM~f )M[T<![OW~e&t~. Cf. Y~

p. )5~, i. p. t6t, L 9~; ÏX, p. t88,i. 27.

1

Anal. port. 1, xi EM)t ft~~ oB~ e~fu, &' T< ~rt~xi Ta coM<

Page 305: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

i

LIVRE H, CHAPITRE IL ~95

des objetsde la science, ou, en d'autres termes, de

I existence réelle, il faut trouver un principe réel,

existant par soi-même; et c'est ce que Platon a voulu

faire. Mais c'est aussi ce qui passe le pouvoir de la

dialectique. De la forme logique à la réaHté, du gé-

nera! à l'individuel, il y a un abîme qu'*l lui est in-

terdit de franchir se faire de la réalité avec ses

nniversaux, tel est le seul parti qu'elle puisse pren-

dre. Mais cette réalité factice ne peut pas se soute-

nir elle s'écroulera aux premiers coups de la cri-

tique, avecl'hypothèse qui lui sert de fondement.

D'abord, de quelles choses y a-t-U des idées, et de

quelles choses n'y en a-t-U pas? C'est ce que Platon ne

pouvait déterminer avec précision, sans se contredire

dès les premiers mots. Si au-dessus de toute plura-

lité, il faut une unité où réside la cause des ressem-

blances, il y aura des idées non pas seulement pour

tout ce qui est, mais aussi pour ce qui n'est pas; car les

négations elles-mêmes peuvent se ranger sous l'unité

togique. Cependant les Idées ne devraient pas même

setendre à tout ce que l'on comprend sous le nom

d'être, par exemple aux relations qu'il est impossible

"t, e! thnMe<&< ~or<M. E!fM p~tTOt ëf xaT<~ <M~X&w <&t)CM e~re<f

~<t. Met xm, p. 988, t. 28.'iPdYgn-àlet. XRI, P. 288, 1. 28.

M't. Vtï, p. 161, et O! ï~ e~!) ~o<TM eLw T~ ~f opS~

~<w<nj~p~MTet ftJrAj dfn<p <MK~MeM, Ttf oJx

opOeS:, ~n To ëf

WM~&; ~!of ~yowMf. A~nof ~< eux~ou<n~ AroJouMM T~eî at

!HtMtH «J<r/a< ai~CapTM ~tp~

TM )taC* &KMTC[ X~ M<~<)To!f.

Page 306: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

2~ PARTIE 111–DE LA MÉTAPHYSIQUE

de l'aveu des Platoniciens, de ramener à un genre

subsistant par soi-même Elles ne devraient se

tendre qu'à ce qui est d'une existence réelle, qu'aux

êtres proprement dits, aux essences en un mot, puisquee

c'est par l'essence que les choses doivent commu

niquer aveo les idées, et que c'est l'essence qu'eib

en reçoivent 2. Bien plus, parmi les choses qui e\is

tent d'une existence réelle, on ne peut pas compter

pour des êtres celles qui sont des produits de Fart

et dont toute l'essence réside, par conséquent, dans la

pensée de l'artiste. Il est donc impossible que )o!

ait voulu établir pour tout cela des idées absolue:.

II est vrai que dans les dialogues de Platon il es)

question de l'idée de la table, du lit, du battant a

tisser et que, dans son enseignement, il distinguât)

en etfet, s'il faut en croire Diogène de Laërte, la

<a&M~ et la coop~ des tables et des coupes pcr

ceptibles aux sens Mais on sait aussi qu'il nefaut

pas toujours dans Platon s'arrêter à la lettre; H prc

îere, conMne Socrate, la rigueur d'une <onu")

JM<t.l,p. :8.t. ao.

!Md. p. 99,1. 8 E< ~<w ~exTft Tôt e~tt, T<Bt<oJ~M' «M~M

<~<K e&<M fMh'w oJyàp

<MtT<i<Mft6e§tt~< t~eT~otmM,< ~< T~~

&MMTO)' (tet~Mf ft)) tM~* ~o)<e<~fOM ~yerfH.

R<y.X, p. 596 a; Cmt~. p. 389 b.

Diog. LaerL Vt, Hi tM~wM <Mp!~eSf &<Aeyo(t~'oM

M' o~

t~<wrot Tp<t~<{<ttT<t )tM&!n)T<[, x. T. La snite du récit est r~

vraisemMtbte et a t'mr d'une fable.

Page 307: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE Il, CHAPITRE Il. 295

t;\acte, le libre jeu des images et des comparaisons;

sous les formes dont il s'enveloppe, il faut savoir pé-

nétrer, avec les plus intelligents de ses disciples, sa

penséevéritable et sa doctrine sérieuse. Au fond il

a reconnu, comme après lui Aristote, que, dans le

monde duchangement

et de la mort, iln'y

a d'es-

sences que pour les choses seules de la nature et

les essences seules sont pour lui les idées Aristote

lui en rend témoignage~. Dans la nature elle-même,

il a encore écarté l'accidentel et le variable. Il n'a

entendu par ses idées, c'est la dénnition que lui attri-

buait Xénocrate, que« les causes

exemplairesde ce

qu'il y a de constant et de perpétuel dans la nature 3. n

J&f. Vtt, p. t6o, t. '5 tc&M ftèf oSf oJ~' o<!c/au e~f oJ~e aura

:)&?<(sc. of)t&[ <rxe<!o<) o<?~ r< T~f ~X?: ~<ra ~ost c~f~trrnxe.

fbid. XÏF, p. 2~9, i. 6 Ë~! ~f o3r T<f65f ïo ToJe T<o<!x ~ort'empa

n<f ONt~~f ot?<T~, o!btt o~aî ïo eHo~, el (<~ 'r~ftt. OJ3* ~ort yéve-

ott M~~ûop~ To<!ïMp, <R~' ~X~of Tpt!xof

eM )tc~ ojx eMf om~t Te ri

iMt~~y~e«[ iM~ 'erzf T~ xarA T~~f, eXX'e~ep,

éni T<Bf ~u<re<'

&e ~)) o)! <MUt~< BM~f <~ ~T< eMtt e<yTw oir<!<M ~<re<. p. 3o,

) 0!b)f o~tf&t tM~ At)tT<!X<of, &' o~ ~aftef eM~ ewat. IM, p. 5:, L 3

Il estvrai que dans ie lïl* Hwe (p. 46, t~) il dit des Platoniciens

A<My<q} MpM)r< ~MMf eL'<M )M~ ~nrof xot )!y/eMf. Mais, r~e<z, )a

santé, peut aussi bien être rapportéeà la nature qu'à

i art. D'ailleurs,

dans ce dernier paaMge,il n'y a pas

autant de précision que dans les

)"'ec<Menht.PMcL in P<MMa. ed. Cousin, V, i33 KaSe! ~Mf o

Eefo<tp<[Tt;<,

T~" M&W a~MMt «<T~ <Mtpf~e<yfM!T<~f T<Bf«tï~ ~tiMf <te< <n<f-

Mt~TMt. 6 (t~ ou StMXp~TtKTOUTOf <S< ap<~tOfTa Ty X<yefM!f<

<~pof ~< ~M <w~pt[~e, ~wp«~f<tt!~f xa~ ~e/M tMTMf TtO~

Mt.L'opinion d'AteinoM est

parfaitementd'accord avec le

témoignage

deXeaocrat.e, et Atcineus, qui

apuisé

à des sources anciennes et

Page 308: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

296 PARTIE 111.–DE LA MÉTAPHYSIQUE

Telles sont les limites où le platonisme a dû et ou

il a voulu se renfermer mais sa méthode ne le

lui permet pas. La dialectique ne démontre en au

cun cas la nécessité des idées car, de la nécessite

pour la science d'une unité de généralité, elle ne

peut pas conclure à une unité réelle. Mais, pour peu

qu'elle démontre, elle démontrera trop, et sa con-

clusion s'étendra d'eue-même, au delà de l'existence

réelle et de l'essence, à tout ce que la sciencepeut

comprendre, la pensée concevoir et jusqu'aux ian

tômes que l'imagination se forme des choses qui ne

sont plus

Que donnerait d'ailleurs cette conclusion, dan"

quelques limites qu'on la rentermât? Rien autre chose

que les généralités elles-mêmes, suivies d'un mot, en

soi (f<HMnu)~eft soi au lieu de fanu~a~), comme ces

pures,esten générai digne

de foi. Introd. in Platon. vnî Ôp~ofMt nr

<M' ~Mtp<He<y(MtMw xaT<i ~J<m' et~too (leg. ot&~aw?). (Mre yxp ~H

~)~e&~ro« MW e!~ nXc~T&wo~ f!p~te< TM~ Te~fMM!w eTMMM~a~, o!of

~o< Mp<t<'o<!re ~f TM' <Mpe ~!<m', oïbf <wper<M? <Mt) ~oX~p«

MH

Taw ~MtTa ~pM,0<0!' SMXpftTOMC tMTMtMM' <~Te TfSf e~T~M

T<<~<, e!<M' ~r<M<<Mt!<M{p~owf' o<<TeT&' ~p~ ï!, c!o' fte~ofoî Mt tixe~

~OMM. Diogène de Laërte semble aussi faire aMusion à la définition

rapportée par Xénocrate; ïïï, Mvn T<~ ?&:< ~twrat. atTf"

T<~ xa! ~M~TOMtSM eT~H T<t ~<!oe< <n<fe<rKSrft oH

«~p~<TT<f<~Tt

Enfin AïeMcdre d'Aphrodhée (ad Arist. tocc.taudd.) est d'accord en

ce pointmec Aristote et tous les Platoniciens; grand critique

et non

moins hostile qu'Aristotetui~aème à la théorie des idées, son opinion

a ici beaucoupde poids.

K<t t,p tS.t.aa.

Ibid. Xnt, p. zS~. t. t4 <M <~ f!Mty<Mt?o«, ~ep~onT<f T"~

1

Page 309: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE IL 297

dieux quele vulgaire se représente tout semblables

des hommes, mais à des hommes étemels~. La f

théorie des idées n'introduit donc pas un seul prin-

cipe nouveau; elle ne fait que doubler le nombre

des choses qu'il s'agit d'expliquer. Et commencer

par doubler, serait-ce le meilleur moyen de comp-

ter~?a

Mais l'idée platonicienne n'est pas seulement une

fiction inutile, c'est une contradiction qui se détruit

etie même. Si ridée est un universel, elle est en plu-

sieurs choses or comment peut-elle être en plusieurs

choses et en elle-même à la fois à la fois une et mul-

tiple ~Peut-être l'objection, dans cette généralité, se

laisserait-elle éluder facilement, et Platon, qui se la

pose en ces termes4, a bien pu n'y trouver que l'ap-

parence d'une diulculté. Mais les idées ne sont pas de

simples universaux, ce sont les essences des choses.

Or l'essence peut-elle être hors de la chose dont elle

M!e!M~MeA M~ «J~tfr~e <M)~6<K!<TM,~'P'< eTfM, d!XXa: (tef oJ< eY

~f, TttMow T<~ «aCJÀot 3~eyoft~fM ~Oeoaf, <3ore <Tu~6a/fe< o~eJop

Tâs tM?T~ ~M<M<t e!fM T<t< )M~JXo« XCt~T<~ XOÛ' &ta[<TTOf. VU, p. t6t.

t !6 n<xoCm~ oBp Ta)< <t)!te< T~ etdel TOM'pûaproM (Tm~a: yf~ ~~f),

e!r<MMpMrof )M< ftjr~~nto~, ~fpoartO~e~ TOM!aM<)t!TOM T~ ~!?fM( ïo

aLTÛ.a

'tTO.

M«. m, p. 46,1. t9-a4.

ïb:d.t.p.:8,t.8.

fbid. VII, p. t58, 1. 3 !M< T~ To& o!<r<x~P'~ ~'M< xai

s" n o<!Mt!Y«p!<

<«~oS ~9TM T~ !~ef ToBro,

Pafm.p. t3t < êp ~pw xat TeJro ef ~oX~off xai ~'pM oB<y~

~<~ t~ta ~f&yMM, xai o~ï~t !tt!ro m!ToC x&'pM ~f e<')! l'hileb. p. 15 h

Page 310: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

298 PARTIE !IL–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

est l'essence ? Peut-elle être en plusieurs ? Peut cite

être tout ensemble en soi et en plusieurs~ L'essence

est une, d'une unité de nombre aussi bienque de

forme elle ne se multiplie pas avec les individus

comme l'unité logique, elle est toute en soi même,

dans une inaltérable identité. Tout ce qui n'est pas

un attribut, un accident, tout ce qui existe, non pas

en un sujet étranger, mais en soi et par soi, n'a point

d'autre essence que soi-même~. Autrement qui cm

pêcherait que l'idée, cette chose subsistante en soi.

n'eût aussi hors de soi son essence, et qu'il n'y eût

ainsi l'essence de l'idée, c'est-à-dire l'idée de l'idée.

jusqu'à l'innni~Si donc l'objet sensible n'est pas sa

propre essence à lui-même, c'est qu'il n'est rien en

soi, et il n'y a plus alors d'être que dans les idées~;

l'idée n'est plus l'essence des choses, mais l'essence

d'une manière absolue, l'essence réduite à elle même,

et qui ne se communique à rien.

Ce n'est pas tout les individus dont l'idée, qui

Ëf T6& y<y<'o~<M< aB xai<!ire~MM

e~re Jtea~M~~f «~ -efo~t ) e~

MMw (te. tMf<H<t) .&er&w, eO' ttJr~f feMtt x~p~,

<MtWftt~KtT<W ~&'MT' TttMp )K~ ~f ~(Mt Te )M~ <M~eM M

<~<M.&~ p. s6t b.

JMet. p. 30, t. ao ËT< ~6<ef &f tA:MTo~ eï~M x<~T~

<r&tf M~ eS4 < VH, p. ~58, 1. 13.

IMd. VII, p. t36. t8; p..37. t. a t..9 À~y~

f~a~f ~«y~ eÏMtt, M~ !M~ MAy e!~<M, ~<t (Ht xaT' <

MyeMtt, tSAA <MtO'<t~rA wpMtft.

Ibid. p. tS?, t. 3-t4.

1

tbid. t :4 <M)t &rt<H to Mtfo<te<(t6f0f oJ<r~

Page 311: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE M. CHAPITRE Il. 299

fait leur unité spécifique, devrait constituer au même

titre l'unité essentielle, ne diffèrent les uns des autres

que parle nombre, comme des parties homogènes

d'une somme. Mais les espèces, qui doivent à leur

tour trouver leur essence dans une unité générique,

diffèrent entre elles par la forme. Elles se distinguent

)csunes des autres par des différences opposées. Com-

ment serait-il possible, si l'idée était une essence sub-

distant par soi-même, qu'elle fut a la fois en deux es-

peces? Ici il ne s'agit pas seulement de multiplier

une unité réelle, qui n'est plus rien si elle n'est plus

une; il s'agit de la revêtir en même temps d'attributs

qui s'excluent. Réunir les contraires en un même su-

jet, quoi de plus impossible'? Rien de plus simple,

"i ce sujet n'était qu'une unité logique qui ne fût pas

eu soi, et qui, diuerente en chaque espèce, n'arrivât

a la réalité que par les dinérenees mêmes. Mais l'i-

dée, encore une fois, est une unité d'essence, une

chose qui existe en soi; elle ne varie pas plus quelle

ne se divise ou qu'elle ne se multiplie. Partout où

f!te est, elle est la même. Or c'est le premier prin

e'pe de toute connaissance, que les opposés ne peu-

~ent pas se trouver ensemble en un seul et même

être D'un autre côté, il est impossible que le genre

ait en soi une diSerence de préférence à une autre

Jf<<. VU, p. tM, 1. 6 Â~far~c T< <n~€a~e<' TafWTM yap ~M

~M <t~ M M: Mt~ MM <<<T<.

LoC. taud. T~ TtM Oftt.

Page 312: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

300 PARTIE 111.–DE LA MÉTAPHYSIQUE j1

il faudrait donc qu'il n'en eût aucune. Nous avons vu

tout à l'heure l'idée de l'espèce se retirer des indivi

dus, dont on veut quelle forme l'ess~ce l'idée du

genre se retire pareillement de ses espèces. L'idée se

réduit donc à l'essence en soi, qui n'est l'essence de

rien, puis au genre sans ses différences dans une in

détermination absolue, qui exclut non-seulement

tout rapport avec les réalités, mais toute réalité m

trinsèque'.

Pour rapprocher les idées des choses sensibles sans

les faire sortir d'elles-mêmes, pour les mettre en com-

merce avec la réalité, sans compromettre leur indé-

pendance et sans altérer leur pureté, Platon a recours

à des métaphores poétiques 2. n appelle l'idée, comme

les Pythagoriciens le nombre, un type dont les choses

sont les imitations 3. Le monde inteUigible, queDieu

enveloppe dans son unité, est à ses yeux un modèle

accompli, dont le monde sensible n'est que la copie

imparfaite*. Au-dessous de la région des idées im-

muables se déploie la régiondu

changement, quien

imite, par ses révolutions périodiques, le repos inal-

térable au-dessous de l'étemel, le temps, limage

mobile de l'éternité 5. La nature répète l'idéal comme

Voyez te livre suivant.

JMet.I, p. 30, 7.tbid. p. :o, t. 90; VII, p. t43, L :6. C~ Plat. ParmM. p "7 a~

Tim. pp. <8 a, ~9 d.

T'Mt.p. 09 Ô~e 0 «O~tOf etXfiw TOC fOttTOt!! ;&~oB <!«r<h)!

!Md. p. 37 d.

Page 313: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE lI, CHAPITRE Il. 301

(j:u).sun miroir qui en réfléchit mais qui en adaibli)

~n môme temps l'éblouissante lumière'. Enfin Fart

rt-pcte la natu)ie. Dans le drame que joue le premier

des arts, la politique 2, dans ce petit monde de l'état

que règle la coutume et que gouverne la science, se

reproduit encore en abrégé la hiérarchie du monde

physique,et dans les périodes de l'histoire la révolu

tion universelle Dans la triple sphère des idées, de

la nature et des choses humaines, c'esttoujours

le

même ordre maintenu par la même justice, fondé

sur le même principe; mais c'est, d'une sphère à

l'autre, la dinerence de l'apparence à l'être, de l'ombre

à l'objet, de la copie au modèle

Maintenant cette théorie peut-elle passer pour une

explication scientifique? M est bien vrai que la nature

est constante dans ses opérations et se ressemble tou-

jours à elle-même; mais cette ressemblance n'exige

pas untype idéal sur lequel se façonnent les indivi-

dus. C'est le semblable qui, sans le savoir, engendre

VoyM, dans le VI!* livre de !aRépublique,

ta fameuse comparai-

son de la caverne-

Ley. p. 8*7 b. H~M «Bf ~<!f )t tM~tïe~t ~ear!)xe (JfHtw rou

<t!MtTM jM~~~Mu p~oe' At ~a~tef )}fte7t ye ~fT<M e~M Tpay~Mf

~f <&.tt0eorfh~.

Voyet, dans ieVu* !ivre de ta République,la

comparaisonde la

ht~mtchie civile et des degrésde t'education publique avec les diffé-

rents ordres d'êtres, et les deux mythes du Politiqueet de la

Répu-

'que (t. X).

& p. t4o b; B< VH~aMtm. X init.

Page 314: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

502 PARTIE Ht.–DE LA MÉTAPHYSIQUE

< son semblable, et le secret de la similitude est dans

le secret de la génération Pour toute imitation, il

ne faut pas seulement un type et une matière, il faut

un artiste qui délibère, qui veuille et qui exécute

Or quel serait cet artiste qui copierait l'Idée~ Ce ne

peut être la nature qui ne délibère et ne raisonne pas.

Faudrait-il donc prendre au sérieux les allégories du

Timée, et se représenter les dieux et les démons fa-

bricant, sur des types préexistants, les hommes, les

animaux et les plantes? chaque être contient plu-

sieurs éléments ou parties intelligibles, son espèce,

son genre, sa dinérence spécifique; il lui iaudt.nt

donc tout autant de modèles. Or comment serait-elle

la copie de plusieurs modèles à la tois~? L'idée même

de l'espèce contient un genre et une diHerence te

type de l'espèce ne serait donc à son tour quela

copie de deux idées. Et pourtant, si les idées suh

sistent toutes également par elles-mêmes et de toute

éternité, comment admettre entre elles non pasm'

ordre logique, mais une précession et une succes-

SMm réelles "'?

A l'hypothèse pythagoricienne,le platonisme

a

Met. XH, p. s4s, 21<&«f6pAf

~n o<M~ ~e7&f! yE wt?T'<!

MMT<~ M&[f Mp'Mire< y<!p &'6p<Mrof yeft~, o )Mt6* &MMT<w Tof T"'

Ibid. t, p 30, L te.

Ib!d. t, p. 3o, i. 9 Tl yf!p ~<!r< r~~py<~<!fte~f ~p~

T~

aM~X~KM',

s Ibid. t A Ë<rM< re o~e~M ~Mtpe~efy~nrM TeS eJroC

th!d 1. *7

Page 315: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE II. CHAPITRE II. 305

substitué le plus souvent la par~ctpa~oH, fiction non

mufis vaine', qui succombe sous les mêmes objec-

tions. Si les êtres tiennent leur essence de leur par-

ticipation aux idées, et si le genre et la différence ne

sont pas moins de l'essence d'un être que l'espèce

eitc-même, il faut bien que chaque être participe

d'abord à l'idée de l'espèce, puis à l'idée du genre et

de la différence, qui sont pourtant déjà contenues

dans l'espèce. L'idée de l'espèce, qui enveloppe le

~cnre avec la diuérence, participera à son tour, au

même titre, aux idées de la différence et du genre.

Que devient l'unité de l'être, si on le compose ainsi

d'éléments distincts 2 que devient surtout celle de

l'idée, de l'essence par excellence, qui devrait être la

simplicité même? En outre, pour la participation,

aussi bien que pour l'imitation, il faut une cause,

une cause distincte et de la nature et des idées, et

qui intervienne en toute occasion~. Et, avec cette

cause même, comment se représenter la participa-

tion ? C'est une métaphore encore plus indéterminée

que l'imitation, un mot encore plus vide\ Mais,

?(.t,p.3o,t.7

TA ~ye<f ~Mtpf~e~MtTt «tJra e!fa< xo~ fter-

~eo' ~TMt TjCjKc <(aw~~oye!f ~r' fter~opa~ X~eff TM~TM<

IbM. VM, p. t?3, i. t3 É<TMTaH )MtT<~~Se~Hf oidMjMtHTOt ojtf

~pt~w eJ~ef <D~~ &o~, 5t&ou <M~J~oJo~; xot! <~<~ oJx e!~

6~pMfe~ &' <3M ~rXe<M, ~Sof J~ou)'.

tb:d. ï, p. 3o, L 34; Xn, p. sBy, s4.

!M.t, p. 3*,

Ltg

0<B~ àteM'M TOt!T<t'f eJcjfM, &A teMMt

~eftef tAy<!p tteT~etf: o~~ ~orTtf.

Page 316: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

304 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

non-seulement c'est une figure vague, c'est encore

une insoluble contradiction. L'idée à laquelle on veut

que l'objet sensible participe n'est pas un accident

dont il est le sujet; c'est par son essencequ'i! parti

cipe à l'Idée. Mais cette essence même, d'où la tient

il, si ce n'est de l'idée? La participation suppose donc

l'essence qu'elle seule peut donner et se suppose elle-

même~

Cette contradiction, c'est celle que nous avons

trouvée à la racine de la théorie des idées, et que ra-

mènent inévitablement les hypothèses mêmes qu'on

veut faire servir à la dissimuler. Il n'est pas possible

que l'essence des choses soit hors d'elles et en elles

en même temps ce qui n'est pas son être à soi-même

n'est pas un être. Le monde sensible, où les idées

devraient faire leur apparition, s'évanouit donc, ou

plutôt se résout dans les idées. Plus de sujet pour

recevoir l'empreinte du type idéal, ou pour y parti-

ciper. Il ne reste que de mettre les idées en commet ce

immédiat les unes avec les autres, et de faire résulter

de leur mélange toute réalité; telle est la dernière

terme à laquelle doit se réduire le système platoni-

cien, et dont toutes les autres formes ne sont que

des enveloppes. Platon fait consister le monde intelli-

gible, en dernière analyse, dans les proportionsde

Met. VII, p. t37, t. a4 <Mx &yr<M ro ~KMte~efof o~- M~

y<!pouo~te ft~f apayxatMf e7<"M~ <eC' Mtoxetft~ou ? &MMTa'

xttTft (~Ce~tf.

Page 317: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE 305

20

iunio'~ des idées. Connaître les sons qui peuvent ou

()mlie peuvent pas s'allier, est ce qui constitue l'art

t)u musicien; connaître les idéesqui s'accordent et

a'tics qui se repoussent, en déterminer la mesure

commune et le tempérament, lesmélanger ensemble

-eio" oc justes rapports et dans une savante harmonie,

ccst t'œuvrc de la vraie musique, de la philosophie, de

la dialectique'. Au contraire, le monde sensible est le

mélange violent etirregulier des idées opposées, de la

grandeur et de la petitesse, de la mollesse et de la

(it]« te, de la légèreté et de la pesanteur. La sensation

les confond; la pensée seule lesdistingue 2. Enfin,

dans le monde de l'état, tout l'art du politique, c'est

d'appliquer au discernement des espèces une suhtite

dialectique, et de mêler les natures contraires dans le

sens et de la manière convenables, comme un tisse-

ramt habile les ills de son tissu

Da(..S<v<t. p. 25< d H ~M'Ta EM TaJr~f$u~&)~e~ f&t JufaT~

:M<)'t'Mtf <tX~ttXo<f; T<I ft~f, TOt âè ft!f; P. 253 b T<cepf T0<:<

HT t!<)f <mjSofpBaw ~o~yoot ~p* ou~ o~T&)~, o ~tEt' rot): $Myxepa)'<<t<-

1~1'~rv xai~apéarv ~ôyyovs âp' ou' o,isfias, ô flèt, TO'¡S

tivyxepanuv-

*n<it: Te )MJ (t~ T~yp!!f ~Mf y<yt'f&<y<e<f ~ou<r«oî, o ~e ttt) ~t~t

'!M<tMf,––T~~} ~]te<J~ <MM T~ y~f)! trp0< <!XXt?Xf[ X~T~ TauTa! M~SMî

t~c MftOAo~~Keftef, ~p'Ot? fET' ~fr«TT!(~)!î T<f0t afct~ Ka;!bt< Jttt T&;tt ~o-

?M' XOCEMM~M T~ Jp~Mt ft~~OfTa Je~$e<f KOM! tt0/0t< ~«~efo~ef T~x

}tf&' KM iroti): d!X~~[ od J~er<u – To «tra ~t'~ J<at!pe:<~t xai ~t<Te

~r&f eHot~Mpof t~~<Mt<~M ~6' é'Tepof

<!f Ta~Too ffiSf OM r~t ~a.

'Mn<n;{~t}<yo~tef~n~nf~ntt eYfa<;Cf. p. ~Sf) d; Parm. p, zq d.

R<p.VII, p. 5~3, 59~.

PotR.pamim, et particulièrement p. 306, Sog. Rep. V ~.<.<y.VI,'"r

m~ange des natures contraires dans te mariage.

Page 318: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

306 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE

Ainsi le système platonicien se résout tout entier

en une théorie de mélange. Il en arrive de i io~

comme du nombre pythagoricien c'était d'abord la

forme des choses, et, en définitive, ce n'en est quotalamatière. La logique est rentrée, à la suite des mathc

matiques, dans le point de vue matériaiiste, et entre

les mains d'un pythagoricien disciple de Platon, Eu-

doxus, la théorie des idées prend toute la forme dune

physique mécanique 1.

Cependant chaque idée doit être une unité essen-

tielle, absolue. Or, si ridée de l'espèce est mêlée des

idées du genre et de la difïérence, que devient son

unité? Une essence ne se compose pas d'essences, et

il n'est pas plus facile d'en fàire une de deux que d'en

faire deux d'une seule Composer une essence d~

sences mêlées les unes avec les autres, c'est l'assi-

miler à une collection d'éléments corporels qui se

touchent sans se pénétrer; mais ce n'est pas in

nité de l'être tout être est, en tant qu'être, ma~rf

le nombre et la variété de ses attributs, une ch(~

M<f. VH. p. ta8, i. 9; XIII, p. 288, at; XÏV, p

t. 9; p 29,L 3t (MTM f~f yctp

Af ~<r<M <dTM <!o$e<efe!M~!f- ~¡

To ~MtMf fte~ty~t~t'of T~ XM)t~. AXX' oCTOt ~f XJyo~ ~hi' ?'

«HTO~. ~f AMt~t~pt! (tEf irp<Bro! E~o~o~ J' ~in'epofxa< <jiMo'

~eyop.

Ibid. VH. p. 156, t. 28: ÂJJfttroy oJ~tt oJ<r«Bf e!t'm et~

~ou<ys5t' <&<~tTeXe~e~a' <S<TTee~ ou<r/<! ou<[ &TT<M oJ<yf~ A

Sp~O!i<!M~~KsS <[ST~ TOCrott TOf

TpOWOf X~ye< A~~tOXOtTOî OC~tM

f<[TOt' ~p e!f~ ~tm' éx ~<!o tfof A!o yef~o~tH..&1'01' 'Yip ell1«i q>Jrt111' lit Uo ÎJ1 lE bOl .uo

I

Page 319: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

UVRK CHAPITRE Il. 307

'ÏU.

<.i!npi<*et indivisible'. Quelle que soit d'aiiteurs la

rature t!u mélange, comment en faire résulter tout

~ntunde déjàsi vaste des intelligibles et l'inunité des

rjjoses sensibles? Les éléments sutnront-ils aux pro-

duits? Tout en reconnaissant que chaque idée est, dans

!a)< a!ité et pour la pensée pure, seule et unique de son

espèce,Platon suppose, que

«par son commerce avec

les choses, les actions et les idées elles-mêmes, elle

se multipliera en apparence, et semblera aux sens une

multitude M Mais si les idées sont réellement seules

chacune en son espèce, et si elles ont chacune l'unité

d'uo individu, il est impossible qu'elles se multipliant

dans leur mélange les unes avec les autres. Le com-

merce des corps et des actions ne fera pas davan-

tage que d'une l'idée devienne plusieurs; lescorps

et les actions ne se résolvent ils pas d'ailieurs en un

mélange d'idées? La multitude des êtres ne serait

donc qu'une vaine apparence, la sensation une illu-

sion. Mais cette illusion même est-elle possible? Si

tout cequi

existe se réduit à des élémentsintelligibles,

toute connaissance se réduit pareillement à l'intclii-

*Mtcc si les choses sensibles ne sont pas autre chose

'("une confusion d'idées, la sensation est une pensée

~t.p. ta~. t. to; p. t6a, t 6

R<p. Y, p. 4~5 C Kf~!fep~

&X~OU <Kt! f!~<XOU xai <Ï~<t9oC xai «MfoC

**<MM~t; T~H' et~~f <&M <t<!r0î M~Of, ftMTO ~Ef ~t' ~MfrTOf e~m, T~

t: T~Tjrpj~ s~jM~SP KS< ':XX~aH' XMfMfM MfT.o5 ~tttrs~-

M*' MAM ~M<~<n &t<t<n-of.

Page 320: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

508 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE

confuse Et si les éléments du mélange sont détennt

nés de nombre, la confusion de la pensée ne peut nup

les obscurcir, mais non pas les multiplier. Dans toute

théorie où les principes ne sont que des éléments intf

grants, et où le nombre de ces éléments est d< tpr

miné, fini, il ne peut rien y avoir que les princim's

eux-mêmes ~.Ennn, dans toute théorie semblante. L

science proprement dite est impossible car les dt

ments, ce sont des choses individuelles, et la scions

ne connaît que le général 3. Le platonisme, parti de ta

forme, aboutit donc à la matière; parti de la ~{'no.i

lité et de la notion scientifique, il aboutit à i'ahsorp

tion de toute généralité dans l'individualité des idffs.

fi est évident que dans un pareil système, ou ton)

se résout en une sorte de substance et de mati~f

logique, le mouvement et la cause motrice ne peuveo!

pas trouver place. Platon appelle les idées «les causf<

qui font être et devenir' mais rien ne changem<

ne devient sans quelque chose qui le meuve. Or b

idées sont plutôt des principes de permanence

de changement, <!e repos que de mouvement" Û!)

Mff. p. 34, :o. Voyesptus haut, p. tïg, note 2

tbid. Xin, p. a88, i. 9 (Mx &rr<M sepe orot~eKt ~'ep:'e:

aM~a ftofof sa oro~eMt. XI, p. a 16. t. 15 EnirJTepof

M ac~'

<!p<C~iai <tt!T< ef

yttp ap<6~,IMM' &!T<U T<tt!ïa. ttt, p. 52.) M

tbtd. XIII, p.988. t0 ËT< Je <M?< ~«r~Ttt T~ <TTot~M

Ke~~oo, emor~tt T&f )ta0o~o".

Pt~J. p. K)o-to3. Afct. p 3n, a:.Ph~d. p. ioo-~o3. ~~Ilef.I, p. 30, l. a~.

M~.t.p. a3,).

Page 321: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE Il. 5UU

uonsdit qu'elles produisent la naissance en se com-

muniquant,et la mort en se retirant; mais, en sup-

posant même qu'il puisse y avoir une matière en

dehors des idées, pourquoi, si les idées subsistent

perpétuellement d'une part et la matière de l'autre,

ja communication n'est-elle pas aussi perpétuelle et

uniibrmc? et pourquoi ces alternatives de la nais-

sance et de ta mort, qui viennent interrompre la

continuité de l'existence 1 ?

Bien loin d'expliquer la nature, la théorie des idées

la détruit; car elle en retranche le mouvement, la

naissance et ia mort, l'action et la causalité, et la ré-

duit à l'immobilité des notions abstraites. La cause

finale, c'est-à-dire le bien, ne peut pas figurer da-

vantage dans le système platonicien Il est vrai que

Platon nomme le bien le principe de l'être et de ta

vérité. de l'essence et de la connaissance, la cause et

la raison dernière des idées Mais qu'est-ce que le

bien d'un être, sinon la fin à laquelle il tend et où il

doit trouver la perfection de sa nature Le bien sup-

pose donc le mouvement et le progrès le bien, par

conséquent, n'est, dans le système platonicien, qu'un

'"ot dénué de sens Jt n'a pas de rôle à jouer dans

Cen. << t'MW. tî, tx A<a <'< oux ~et ~cft'~ (TffE~&'t, ~Aa ?roTe

~f xore y otS, ~MM' M< Tait e~Mf ~< xai Ta~ ~s9EXT«&'f

5o5,V!t.5t7,53:tM. Xt! p. 95~, 1. 2 A~Xa !T<5<TO ~!<9otf t~M

nu AE~OM~it'.

'MO. XI, n. ?<j, t. <! ToCïe (t~aStt)'; er T0!< 'cptXT'Xf ~):-

Page 322: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

510 PARTIE IH.–DK LA MÉTAPHYSIQUE

les mathématiques il n'en a pas à jouer dans )(;

monde immuable des idées. Dans la sphère des abs

tractions et des formes logiques,il ne peut être qups

tion que d'ordre et de symétrie, non pas de mou.

vement et de vie; le bien n'a rien à y faire, mais

uniquement la beauté'.

La beauté, l'ordre dans les idées, ne peut reposer

que sur les degrés de généralité. Le seul puncux

dont elles pussent dépendre, ce serait donc un prin-

cipe logique, une généralité suprême qui les en

velopperait toutes dans !'universalité de sa forme. Ce

serait l'être, ou l'un, qui s'affirment de toute chose

Tel est, en son essence, le principe souverain que

Platon considère comme le fondement des idées, et

dont il fait le bien; c'est le genre le plus élevé. et ce

genre est l'unité même, l'Un absolu, l'Un en soi 1,

Mais d'abord, l'un n'est pas un genre, et l'être pas

plus que l'un tout genre est plus étroit, moins étendu

que ses différences, et par conséquent ne s'en affirme

<tpye<)Mt< fois oS<Hf ef Xtftiow xai T«uTo

irp&iïop«M?. TotOMoc

T~ T~Xof. T~)rp<Brof «~Mf ovx f!<TT)fef roM <ht<f<(to«. tïï, p

t. H &tT' TOK <UM~TO« Otitt ~f ~f~~O<T« t<t<!Tt;f eftMH t' f

mid' eh~ T< <[uto<ty<t6<ff. Cf. Et~. Eud. t, vm.

Met. Xjn. p. 265. t0 Été! <? To ay<t9~f )t~ Ka~ ~ep"'

(tO )'<M)<tE' <f Tp<t~E<,

TO dê tM~Of !f<~ ~f TOM fittO~TOM)<" ?*

M~ret otM~' Mye<)' T<~ (MOttfMtT~t ~t«fn!fM[< <ep< <<~<w

~e«Jofta< to6 tMt~ou f<~«TT<: ef~tt ïf~tt tt~o~ft~erp~

f&p«yft~of.Cf. !bid. tH. p. 43, ). 5 Voyez plus haut, page

note.

Ibid. XtV. p. 3ot. t

Page 323: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE 1!. 3H

na:Lêtre et l'un s'amrment de tout, et il n'est pas

de dittërence dont ils ne soient attributs'. Autre

nent'e, autre sorte d'être et aussi d'unité. L'un et

tetf'c ne sont donc que des catégorèmes qui diffèrent

~ion les différents genres '2. L'un en soi et l'ètre en soi

t0:tt des conceptions ou H ne reste pas le plus petit

dcgic de réalité, ou, en d'autres termes, les plus

vides de toutes les abstractions. Rien de plus absurde,

par conséquent, que de les réaliser, d'en faire des

choses qui existent par elles-mêmes et en elles-mêmes,

et de les ériger en premiers principes~. Si l'un et

t'être étaient des choses subsistant de soi-même, c'est-

à-dire des essences réelles, tout ce qui est, et même

tout ce qui tombe sous la pensée, et qui par consé-

quent est dit un, serait essence et être Bien plus.

4i iêtre et l'un sont en soi et par soi, sans être rien de

plus que l'unité et l'être, rien ne peut être que l'être

en soi et l'un en soi; car tout est, et tout est un

JM~t.Ht, p. ~9, t. 23; XI, p. 2*3, L 22; X, p. t<)6, L <8.

tbid. XFV, p. 9~4, t9;p. 2g5, i~; p. 2f)6. t. xt X, p K)6,

L tt.

tbift. X, p. t<)6, L ~4 ÔXa~ ~r~of ri To ëf, ~<Tttepxai T< Ta

M<ot!~ ~<Mn'Af ~T< ToSro <[MTo ~<i~<f auïoC; tbid. p. 97, 15 X!,

p !<5, t. t9 ET (t)) T<Me T( <t6M o<!<T~tf ~«tTepofaMTc5f <n!ft~e<, ~cS:

<<MfTN~Mpter<t! jMt} jMO' e~r~f

tHd. XI, p. t5, t5 E~ye ~f ro~e ou<naf xaj Tt (te; roJe Tf

ttf<~<TMtf?) &<f!Mpe~

<n!t~ A~M, Tf~fT' e<yT~ ou<r<a< ta ~fT<t. KaTa

M~Mfyap Te tMtTttyope?T<M,

jMtT' ëf~'f Je xai To &

Ibid. IH, p. 56, g ÂAM (tttf et y' ~'TT9< Tf «~To <St' xa' a~To ~o,

ec/ strop~t n<S< ~~t<H T<«tpA

'MUTa ~TepOt'.

Page 324: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

512 PARTIE 111–DE LA MÉTAPHYSIQUE

Ainsi, toute différence, toute pluralité disparait:)~

idées, le monde sensible, les attributs, les relations

tout s'abîme dans l'unité absolue de Parménidc.

Il n'y a pour le platonisme qu'un moyen d(

chapper, au moins en apparence, a cette conctu

sion redoutable de la philosophie éléatique, rict)

n'est, que l'être en soi: n c'est d'introduire dans toute

existencequelque élément qui y annule l'être, < t (pi

la retienne en quelque sorte sur la pente de l'identi-

fication universelle. Voilà ce que la dialectique dot

faire et ce qu'elle exécute avec une facilité apparent'

Tout ce qui est est le même que ce qu'il est, et uutr'

que ce qu'il n'est pas; ce qui est n'est donc pas toute

autre chose que ce qu'il est, et, en ce sens, tout ef

qui est n'est point. Cependant, pour n'être pas f

qu'elle n est pas, toute chose n'est pas le non-être. )t.

a donc un non-être, à quoi tout participe, ou plutôt

qui est mêle et répandu dans tout 1. Le premier prio

cipe de Parménide, c'était que le non-être n'est point

ladialectique rétablit le non-être, en le faisant r<

sortir de la différence et de la relation. Elle le n tahti!

jusque dans l'être en soi, qui est aussi autre queto~f

Plat.A~t. p. s56 d É<mf

<i!pa <iMtyx!)$ To ft)) of e~ TE xnr

oeM e&'a< M~ <M!T~ «fTa T~ y~ftt' tara MffTa y<[p .&<tT~p~~s'-

~epof fnMpy~Oft~t~ ToC ~MOî ~xacro)' ovx <f if0te7. – H .S~T!~

ftot ~<n< ~ferM )MTe)te)tepfM[T<o&M.Rapport de cette théorie du niêtre avec la théorie du méiange des idéM, p. :59 a Ef{tfu~y'

1'&X~X~<~ Ta yefH «M To Te ~f «a< .&aTepof ~Mt ~fTMf xai &' !y~

~te~Â(~oïe;.

Page 325: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE II. CHAPITRE Il. 515

n luin'est pas Fêtre; elle pose enfin if non être en

toi comme un véritable être Nous l'avons déjà vue,

dans 1 ordre de la science, procéder du non être à

)ctro. en supposant le faux pour en tirer ic vrai; nous

la voyons maintenant, dans l'ordre des existences et

()< )u rc'ante, ériger le non-être en principe, et fonder

la nature sur ce néant~. Mais qu'est-ce que le non être

dune manière générale, et comment attribuer à une

abstraction semblable une ombre même d existence?

Si t't~rc de Parménide n'est qu'une idée vide. que

soM ce du HOM-c<re que Platon lui oppose? Ce non-

être n'existe pas, dit-on, n'est pas d'une manière ab

M))ue; il est non-être, et en tant que non-être. Subti-

lité logique, qui ne sauve pas la contradiction~.

Platon ne donne pas le non-être pour le contraire

positif de t'être mais il n'en (ait pas non plus, il faut

l'avouer, une pure négation. Le non-être, dans chaque

chose, est ce en quoi elle est autre que tout ce qu'elle

') est pas. Le non-être absolu est donc ce qui est autre

P)at.&M!&. p. 258 a H

&o:T~po« ~«n: e~aot) T&if <<'T&)f oC<ra.

(M~M~t TM) f~Mf <M?0~[< ~X~et~~efO! TO ft)) 6v ~eëa~Nt ~OT< Tttf

tT<x? ~<nf ~yof. t)fte« ye oU ;M)'of M!: &rr< Ta ft]? <<Ta[ j~eJe<

!ttf, <&~e itO~ T~ et!o< T<M< ~f TOU ft)) ~fTOf a'M~tf~eOa' T~f ~<itp

~poe ~<!o)f Am~e~MTet oS<M!f Te xcu )taTO[KexepfM[T«T~)')tf ~n

~Tt Ta ~)~f[<pA< ~X<t~, T~

irp0fTO <!f &[<MT<M' ~OptOf «MtT)< afTtït-

~fttM))' ~to~~Mt~tef e~e& <&<a<!To ToCro ~trnf ~fT&'< To ft)) dv.

?<. XtV. p. 995. 6.1 Ibid. VII, p. 13&, 1. 7 t1r; TOÛfllÎ 611T0sÀQ'Y'X&iS~4(1Í TllleSelll~1.IHtid.

VM. p. t3~, ). 7 Ë*< ToC (t)t JfTof ~«~<)«5< ~Mt Ttfe< e~9t<

f~ <M~ ~M< <B~<[ <ttt ~f. On a vu p!us haut <juette est !a force

de~<<[of, Xoytx&.

Page 326: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

31<t PARTIE IH–DE LA MÉTAPHYSIQUE

que 1 être. L'être est f~~e, toujours identique a

soi-même; le non-être est fatt~'e d'une manière

nérale*. Or toute chose n'est qu'une fois soi-même

et est autre qu'une infinité de choses 2. L'autre, ce

terme relatif, n'a donc ni Forme ni nombre détenni

nés. Tandis que l'être persiste dans son identité, le

non-être se multiplie et se diversité avec la ntutt)

tude indéfinie des êtres; il est sans limites propres

l'infini est sa nature.

L'un et l'infini, voilà les deux termes que contient

sous la terme logique, l'opposition de l'être et du

non-être, et que la dialectique en tait sortir. De la

contradiction de la plus haute des idées avec sa )n

gation, se dégagent les deux principes du pythago

risme. La philosophie du nombre ne peut pas toau

quer d'en découler encore une fois.

La théorie des idées, dès son point de départ,im-

pliquait l'opposition de l'un et de l'inGni. L idée est

l'unité essentielle d'une multitude indéterminée, la

forme qui limite et qui contient la quantité.Ce<t

il est vrai, une forme spécifique, qui constitue k

Saplt. p. t58 a 6 ï<f< crépon jMp~oo ~!<reMt xcM T<!t T<M'<

~pot ~M~M~ Awottt~Mf afT~otf oJ~ ~of, e< .9~f«f efitew, M~

To6 d"os <M!<~[ &tT!t, o~x tfft~o)' ~tte~fy <n)~<w«ra,ti~'i' Tc~e:

~fof, ~tepow ~)!e<f<Kt.– tMTepof, Tim. p. 35 a, 37 a. Anst 1.

p tt,t t6

& p. tS? a t~ Te ~f ttp' ~tUf, <)<MMMp e<nr< Te ~~<,

t<M~6t<t«<!)[~ttf' <)t«Mt y<tp w<[ of, ftM' aJro «ruf, a*ep*

TOf <MM@~Of t<&t~< CMtt ~<fT<f <t5.

Page 327: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

UVRE il. CHAPITRE II. 315

caractère des choses, leur nature propre, et non pas1

seulement leur unité logique. Mais les caractères spé-

cifiquess'enacent bientôt dans les relations mutuelles

des s idées. En se résolvant les unes dans les autres,

elles se fondent, en quelque sorte, dans des idées de

dusen plus générales et de plus en plus simples;

elles rentrent, par la marche naturelle de la méthode

dialectique,dans l'unité abstraite. De son côté, le

monde réel, dépouillé, par l'éloignemcnt progressif

des idées, de ses formes spécifiques, se disperse en

uuc multitude de moins en moins déterminée, il tend

à se résoudre dans la pluralité pure, dans la quantité

abstraite, dans l'infini en soi. Ce ne fut d'abord dans

la philosophie platonicienne qu'une tendance, néces-

saire sans doute, fatale, irrésistible, mais obscure et

peine comprise. Il fallut quelque temps pour que

ladialectique, à la poursuite de l'universel, en vînt à

toucher ce fond et y reconnût le pythagorisme. Ce ne

fut qu'assez tard qu'arrivé au bout de son analyse,

le platonisme s'arrêta sur cette hase. et qu'il entre-

prit d'y asseoir, à l'exemple de l'école italique, son

système du monde'. De cette œuvre rénexive de sa

maturité, peu de chose transpire dans les dialogues.

0«y entrevoit les principes;mais la déduction des

conséquences est à peine indiquée. Platon la ren-

~<t XtH p. <65. 26 npMTOf <!M!ntf T))" 'MtT~ T')" ~<'K

~Mn[MM<W, fttKt~ <n<MtT<MT<M *p0< T~" T<B" ~f"9<'MH" ~mf, <MA' «f

~<~tCM t~ft <M<p'Bro<t<M~e< ~ca~ef e!fat.

Page 328: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

316 PARTIE IM–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

ferma dans l'ombre de l'école, et presque dans le

mystère de l'enseignement privé; ce n'estqu'après lui

qu'elle en sortit et qu'elle parut au grand jour, dans les

écrits de ses disciples. Il ne nous reste rien des ouvra"es

de Speusippe et de Xénocrate, d'Héraclide, d'Hcstiee

et d'Hermodore; le livre même où Aristote avait re

cueilli les leçons sur le bien a péri, et nous n'en

avons plus que de très-rares fragments Mais <!nous

reste la Métaphysique. C'est là que nous trouvons en

core et l'histoire la plus authentique et le jugementle plus sûr du pythagorisme platonicien; c'est là que la

théorie, dont les dialogues nous représentent le mou

vement et les formes, se laisse voir enfin jusquau

tond, dans le secret de ses principes et l'enchaine

ment intime de ses conséquences;

Apparat domus intus. et a<r!a longa patescunt

L'UMMU est, dans Platon, ce qui est suscept'Me

d'augmentationet de diminution Ce n'est

plustin

fini simple de l'école d'Italie, mais l'infini résolu par

l'analyse logique en deux termes opposés,l'assem

blage des deux éléments contraires de la quantité,le

couple, la dualité ou dyade eht grand o<t fh pe<!<~

Voyotplus haut, p. 69

PHM-p ~Ae. P~. HI. tt.

jUet. I. p. st, t. 3 To ~fT<M ye ouMaf el~at, x<u M

t< ~t<~<n <f, wapit~tun~TOM tbO<ops«M< ~X<)e, xai M

Page 329: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE CHAPITRE II. 317

ce n'est pasune unité simple, comme l'infini des

Pythagoriciens,ce n'est pas non plus, comme leur

dvade, l'unité collective de deux unités numériques

distinctes; c'est un rapport de deux termes variables

quine sont rien que dans leur relation mutuelle.

L'innni n'est donc rien en soi, et tant que ses deux

termes ne sont pas soumis à une limite; il est donc

la matière à laquelle l'unité donne la forme. Le grand

et le petit d'une part et l'unité de l'autre, tels sont

les éléments qui concourent à la formation de l'idée.

Forme intelligible de la pluralité matérielle, l'idée à

tjM~Mtif tUTMUt e~MM To!< d~OM T)!< 0<!<T«M <&<T<tUT&)~~)tE<f<M<' TO <!e aUTt

isetpoM Mt ef&f Juc~t trott)<M< xo~ ro~xetpof

ex ~teyc&.ou xx<~txpoS,

"~T* !Aof. Cf. Phys. III, tv, vt. Treudeienburg (Platonis de ideis ~t

ftMtfrM JoftrMM ex Aristotele illustrata, p. 5o) pense qu'Aristote ne dé-

signe la dyade indéEn!p du grandet du

petitchez Platon, que comme

une dyade indéterminée (J~M oMjMoro~sans article), et qu'it réserve

pour les doctrines pythagoriciennesde ses successeurs l'expression dé-

<frn)inée de la dyade M~~nM ()} J«~ <ïop«rroî).Il

a!tègue, pour

j~reme de cette distinction, lepassage

suivant (Met. XtV, p. 2o5,

i '6) (M y<!p~C~ OMT/tt oJ~E TO ~ya xai TO ~KpOf TOM ~0

~M, x. T. Mais la forme 0)!y~p.

oj<!e. n'indique ici qu'une

mumcration des deuxpoints

de vue de l'infini platonicien, et non

pas uaeopposition (Brandis,

fêter J«'Z<tA~ft!e<trc, BAc<ft. J/tM.t8::8).

t~' plus, JtM~ est précédéde l'article dans ces passages qui se rap-

portent évidemment à Platon, XIII, p. 274, L 4 ÂJtifarof Tt; y~-

Mt<f e!fa< t~f &MC}M!f,<5t yefft5<Tff èx Ttjf ~A!oî xai Tôt? ~o:. Cf

tbid.p. 9~9, i. M Ô ~ap <!p<OfM< ~OT< TO? ~f0< XCtt T~~ Ju~-

Tuf tMp~oTee. Enfin on trouve Ju<tf successivement avec et sans

'~t'de dans des phrases tfès-rapprochées: XIII, p. 97 i, 1. 4. t3,

MCompatM de même les

passages indiqués, XH!. p. 979. et

M, avec XÏV. p. 299, t. <6.

Page 330: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

318 PARTIE HL–DE LA MÉTAPHYSIQUE

son tour a l'infini pour matière et l'unité pour forme' l,

Mais la quantité déterminée, où l'infini est soumis a

l'unité, n'est-ce pas le nombre? les principes consti-

tutîfs du nombre ne difïèrent donc pas desprincipes

constitutifs de l'idée, et, par une conséquence né-

cessaire, toutes les idées sont des nombres 2. Entre

les nombres et les idées il n'y a pas seulement une

analogie prochaine ou éloignée, il y a une identité

parfaite. Les éléments de l'idée ne sont pas, en effet,

une certaine unité et un certain infini qui expriment

le rapport d'une certaine grandeur avec une certaine

petitesse, mais bien l'unité en soi, le grand et le petit en soi, éléments purs et simples du nombre. L'i-

dée est donc un nombre, non pas en un sens de

tourné et symbolique, mais dans une acception

rigoureuse et tout à fait littérale.

Cependant c'est le propre de tout ce qui appartient

aux mathématiques, du nombre comme de la figure.

de pouvoir s'ajouter à soi-même et se répéter in-

définiment toute idée, au contraire, est une unité

singulière, qui ne se répète pas, qui n'est, pour ainsi

dire, qu'une fois pour toutes, et reste invariablement

dans son identité individuelle. Les nombres, dans les

j~ft. t, p. 20, 28 É~tB< O/TMt T~ e~tt Toi. <S~O«, TaXE~Mf 7T<"

Ye& aiKh~T&f ~t(Ctt Taf ~f?&w e!fcu oTOt~eM' t~ ft~ oBf <?Xtt~ To m?r

To pmfp~feTfûM &~Aîj ow~af ï~ Ibid. p. s t, sg

tbid. p. a t, i 2 ES ~xe~faw yap xaTi )~e&f Toi? efot Ta

e&MN T<~<tpt9fto< XH, p. 960, )6 ÂpiS~t yap X~'<!UM TM H~

Xtn. p 986. 9; XIV, p. -:97. t..4 i.

Page 331: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H. CHAPITRE H. 319

mathématiques, ne diffèrent les uns des autres que

parleur quantité; ce sont des collections d'unités

homogènes qui s'ajoutent, se retranchent, se multi-

plientet se divisent. Les idées sont des unités

spécifiques, qui ont chacune leur caractère propre

leur Individualité distincte, et qui ne peuvent

par conséquent ni se partager, ni se combiner en-

semble'. Les idées sont donc des nombres, mais

non pas des nombres mathématiques; ce sont des

nombres distincts les uns des autres par leur qualité

comme par leur grandeur, et qui constituent autant

d'unités essentielles. Mais les unités, dont se compose

le monde sensible, et les nombres concrets qu'elles

composent, ne sont guère plus homogènes que les

idées, et ne souffrent pas davantage la répétition in-

définie. Ce sont pareillement des existences réelles,

des natures séparées: seulement ce sont des natures

changeantes et périssables, tandis que les nombres

mathématiques sont éternels et immuables comme

les idées 2.

Ladialectique platonicienne ne prend donc plus

les nombres dans cette généralité où les avait laissés

V~. xm.vt. vu, xm.

!Md. t, p. zn.t. :3 Ér< J~

xapaïA a~T<[ <nt< Ta e<<!)) rot ~<t9n-

MT.~ TMfttpft~MT&'f

eÏf~ ~<n ft<Ttt~ J<a~pOfTf6 T&!f [t~f M~TMf

~M <jut~MtTa e!M!<, t<~ tt~aif T&! Ta ~f ~oXX' arra ë~o<a e~-

~,Te~sHo«JH!TO<)'&MM!T<M'ftOfOt'.Xïn,p. 2';9,L t6:0< (aptS~Otl'il, 'tâ ài itâog alh4à ir 6L"TOV XIII, P. 272,1. 16 01 à' (dpt0i£Og

"'?!)fMtT<i[<~) ~Mto< «d aAe~opot ~e<pc<- Sur la différence des unités

~"MM~et mathématique*, cf. Plat. PMet. p. 56 d ~p. VH, p. 5-t5 a.

Page 332: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

320 PARTH: HL–DE LA MÉTAPHYSIQUE

l'analyse encore grossière des Pythagoriciens elle en

distingue trois ordres qui se réuéchissent l'un l'autre

des hauteurs du monde intelligible au plus bas degré de

la nature le vrai nombre ou nombre idéal, le nombre

mathématique et le nombre sensible 1. Le nombre

idéal est l'unité essentielle, dont la multitude des

nombres sensibles reçoit la forme. Le nombre ma-

thématique se place au milieu; c'est le milieu par

excellence, le moyen qui intervient entre les deux

extrêmes, qui les sépare et qui les unit tout en-

semble 2. L'idée est l'unité, le monde sensible l'infini

qu'elle détermine; le nombre mathématique est le

nombre qui mesure le rapport de l'unité à l'infini

B<p. VM. p. 629 d Ty <t~9ff&! apfO~MSxai K&n TOM c!X~<r<

fMMTt. Met.t,p.3t,L

i. 6 <~ftapfO~t. XHI, p. a85, L 28; p.

''M.

t. XtV, p. 29~, I. 3; p. 299, t. 19 E~ïtxM apt~. XTV, p. 3o~.

1. a:0! TOM e~eer'f<!p<Sfto/. I, p. 28, 1. 3 Not;Toî aptC~<.$

Le

nombre sensible (Mo~T~~ était aussi appelé par les Platoniciens !c A~

nier. TB~eur<Mo<; Met. XIII, p. a';o, 2~ Tofpt)<~Ta

TeXe~T~Mt.–

Dans sn passage de la MpuMique (I. VIf, p. 52-y-53o),est indiquée

la distinction des trois ordres de nombres le vulgairedes mu''ni<w

et des astronomes s'arrête au premier (cf. PMkt. p. 56 d))< Pv'tM

goriciensau second; aux Ptatoniciens seuls appartient

la recherche

des nombres harmoniques, &&)fo<, qui amènent l'esprità Mee du

bien. P. 53o e 6~ irap~ira~a raCTa ~~oftef ~0 t!

!MM'; M)t irot' '):t:T<Bf t< <:TeX~ ~<xe'pM<nf <;fM)' f<afMye<f o~ S~

(<ef, «d oJ< ~xof &te«re i~ei, of aaMe des f!~Ken'.

TA ftera~, Met I, p. 3t, t. a4; Hï, p. 46, 1. 94.

PMM. p. t6d M~, <!r< trouât <<ne<p< ~<fT<, ~"of

jEÙLa jM< ~<!<M' toC<hre<po«

~~tf ~po~ *Xt;9<M xpo~efr.

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M

Page 333: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE H. 521

2 <

\tais le rapport de l'unité idéale à la pluraHté Indé-

finie des unités sensibles, c'est la relation logique du

oenre et de ses individus, et mesurer cette relation

c'est l'oeuvre et la fonction propre de la dialectique.

Le premier moment de la dialectique, nous l'avons

vu tout à l'heure, est l'unification qui ramène à une

même notion les individualités éparses; le second

est la division, qui partage le genre en ses indivi-

dus. Le nœud de l'unification et de la division, de

la synthèse et de l'analyse c'est donc le rapport

du genre aux individualités, dans l'idée moyenne de

l'espèce; voilà le centre par où la dialectique passe

et repasse sans cesse. La dialectique est l'art de la

mesure et du tempérament or c'est un nombre

qui donne la mesure, et ce nombre est l'espèce 2.

~ux trois ordres de nombres, qui ne sont rien

moins que les trois classes les plus générales des

ftres, répondent donc les trois ordres de la hiérar-

Mi hw rJre ~J<! To & ~.Morcf TfSf ~M~ï&w s~ ïo<~re<pof ~e9efTO!

~mpetf &ttt. Ibid. p. 18 aMoirée ya:p ~f OT<oCf et T~ ~ore ~~o<, Tou-

TM', iSt ~ct~tef, oJx ~r*aite<poM

Jû ~<T<f ~~e<f e~Mf, <tX/* ërri T<f<t

~{t0f, 0~&) )M~ T<K!MH'T~Of ~faf T<î TO ~TEfpOf <!fttyKXO~~ ttpfSTOf ~atft-

6tfe(~ eJMt, c!XX* ~ir' <tp<6~f aS TtM ~~Coî ~«[orof

~MtTft t< fMMwoeït~ TeXeoT~w Te éx ~f eis & Le nombre est donc

lemo~ettentre Fun et i'm6tu.

A<tMp&TM<<M~eMMtytfy~. P&~<fr. p. 965 b.

Porphyre, tttfw!. in ca< appette les genres et ics espèces

'My«M,ftet~, entre les extrêmes, ~jM, qui sont le ~K'fn&Mmp et

~'pectatm~. Ansts~ somme ans~i !'especp nM~ennc, f.:era~, enire

'e genre et !at individus; Met. tH, p. 50, tle genre et les indîvidus., àvet. 111, p. 5c, 1. 2.

Page 334: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

322 PARTIE Ht.–DE LA MÉTAPHYSIQUE

chie logique, les trois degrés que monte et redescend

la dialectique platonicienne. Aux trois ordres de

nombres correspondent enfin les troisépoques de la

science et de l'éducation L'intelligence commence

par le monde visible, où l'intelligible se réuéchit.

du fond de l'antre obscur des sens elle s'avance à

pas lents vers la pure lumière des idées. Mais, avant

d'y arriver, il lui faut traverser le demi-jour des ma

thématiques. C'est un lieu d'épreuve où elle se for-

tine, où elle se prépare par le raisonnement2 à ia

contemplationde 1 essence absolue, et s'exerce a

surprendre dans la science discursive les traces fugi-

tives des idées. Aux trois régions de la connaissance,

il faut quatre moments qui en déterminent les limites

comme quatre points dans l'espace déterminent les

trois dimensions, le triple intervalle de l'étendue

De ces quatre moments, le premier, qui est la science

absolue, répond à l'unité, le second, le raisonne

ment, répond à la dyade; le troisième A la triade

c'est la sensation; le quatrième à la tétrade, c'est

B~.VU.

At~fOMt. 0< ~rept yM)fterp<Mre tf~ ~o~t~M~t, « T. X.

Dans la doctrine pythagonctenEe,T&eot. ent&m. p. 56 MaOw

T<)t&f ft<ye9o< Tp'x~~'<MT< TMp<<-–Nous

n'avons tromvé ni <iaM

Aristote ni dans Platon l'indication précise du rapportde limites ¡

inteMaite* qae nous étabtisMM ici entre les quatre sortes de eonca''

sance et tee trois ordres d'êtres. Maie ce rapportnoua

paraitreMcrt'r

avec évidence et des doctrine* mêmes de Platon et de leur anatopt

avec tp!) doctrinespythagoriciennes

1

Page 335: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE CHAPITRE H. 525

2 )

taconjecture qui ne saisit que les reflets et les ombres

des choses sensibles'. Les quatre nombres réunis,

ajoutésles uns aux autres, donnent la décade

pytha-

goricienne,te nombre qui enveloppe tous les nom-

hrcs, l'unité compréhenshe de tous les êtres et de

toutes les idées. Tel est, dans son plan général, le

vaste mais ruineux édiHce du pythagorisme plato-

nicien.

Le monde des nombres idéaux doit contenir les

raisons ou les formes du monde sensible. Mais ce

monde n'est pas indéfini comme celui des mathéma-

tiques les nombres idéaux sont des choses en soi et

des essences réelles; il faut par conséquent qu'elles

soient finies quant au nombre 2. Cependant il est im-

possible de leur assigner leur limite d'une manière

scientifique et démonstrative; c'est donc par une hv-

pothèse arbitraire que les Platoniciens la fixent à la

décade. Mais comment dix nombres suffiront-ils à

l'explication de cette variété d'espèces que comprend

le monde sensible? Si l'on ne veut bientôt se trouver

<'ourt, il faudra rapporter aux mêmes nombres, c'est-

a dire aussi aux mêmes idées. les natures les plus dis-

De ~n. t, n NoSf ff~f T~ ~f, ~M~nf~ttf di Ta <!t!o ftofa~t yap

? < Mf & reB Amt~M ~ct0~« ~<~<tf, aMtxnf T~f ToC <TTepeoC'

O )M<'yttp ~<0~T~ e~tt «Jr~. A !a classification rapportée dans ce

passage, etqui

nous semble appartenir à la terminologie d'Aristote

{~at&t que de Platon, nous Mont cru devoir tntMtituer c<e de la

R~jMMtqap <<MTt~Mt &<h'Matj ~e~<, ~<rr<f e~e~a, A~a.

Nf<. Xm. p. 280, t. 8 ~q.

Page 336: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

324 PARTIE HL–-DE LA MÉTAPHYSIQUE 1

semblables, et négliger toutes les dinércnces C'eta))

la tendance irrésistible de la dialectique que de eon

fondre dans ses généralisations les caractères sneri

fiques la théorie des nombres doit finir par les ab

sorber tous dans ses dix éléments.

Qu'est-ce donc que ces nombres où doit se rcnfermer la diversité des essences ? Ce sont des produits

de l'unité et de la dyade indéfinie du grand et du

petit. Mais de quels autres éléments pourrait on

composer le nombre mathématique, sinon de l'in

fini et de l'unité, de la quantité illimitée et d'un prin

cipe de limitation? Formés des mêmes principes

le nombre mathématique et le nombre idéal rentrent

donc l'un dans l'autre2, comme l'idée dans !'u))i

versel; ou bien, comme l'idée, le nombre idéa) est

une pure fiction, réalisation arbitraire d'une notion

logique. Maintenant, de ces nombres réalisés, cha

cun enveloppe-t-il, comme le nombre mathéma-

tique, tous les nombres qui lui sont inférieurs? Cha

cun alors, hormis le dernier, existerait à la fois en

soi-même et en d'autres chacun serait plusieurs,et

cela est inconcevable d'un être réel Les idées

Met. t. a4 npaTOf (t~f Taxù <~n~e< T~ e~t). XIV, p. 3o5. ) 5

Afc~nt ~o~M o~tSc~'etf T<t adret, «<~<tp<0~f

rof <tuTOf T~E

<0~.

tbid. XtV, p. 299,1.t. t?.ÏMd. XIII, p. 983, aS !HfMw )to<fo~ T<~T<Hf ~ep

em !M

e~e~ TtM! y~t'OM ce~f&~fet jMuropE!<~Kw Ttif t~ xaSs~et;, so-

Tepoftô C<5of <t<!ï~ du Ta ~t~) ~repof at?r<M? ~<5<w. ToCro yap f"' X~

Page 337: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H. CHAPITRE 325

)n tant que nombres, seraient des parties les unes

des autres et des parties subsistant à la fois dans le

tout et hors du tout. li faut donc bien que la dyade

ne contienne pas l'unité, ni la triade la dyade, ni au-

cun nombre idéal les nombres qui ie précèdent. Or

ouest ce que des nombres qui diffèrent les uns des

autres par autre chose que par le nombre même de

leurs unités, dont le plus grand ne contient pas le

ptus petit, qui ne s'ajoutent ni ne se retranchent,

ne se multiplient, ni ne se divisent? Le nombre idéal

est une quantité qui échappe aux conditions essen-

tielles de toute quantité; ce n'est donc pas seulement

une notion, mais une fiction absurde et contradic-

toire

Les nombres mathématiques se forment par l'ad-

dition successive des unités 3; à l'addition, on substitue,

pour les dombres idéaux, une génération chimérique.

On fait de la dyade Indénnie une matière d'où se dé-

veloppe la série des cinq premiers pairs l'unité vient

d'abordimposer

sa forme à ladyade Indénnie il en

nait la dvade démue, le deux en sol; du commerce

de la dyade déRnIe avec l'Indéfinie, naît la tétrade, etc.

~"TTcC}tH'~rof oJJef~w wM))<re<Arco~f, x. T. X. Ibid. p. t8o, 1. 29.

At<t.p. 9~, t. 8 ËfMK!pSe< yctp er~pz

M~" ef eT~pat, M< tMfTat

~Jt) ~Of ft~.!btd.

p. 276, L 8 ÔX<M Je To ~Metf T<K ftOfa~M Jta~opouî o)r&)-

~(J!ÎJI ¿'TQ1rO.xa! lIIÀ«t1f14T&ides. P. 277, 1. 29.

~f <<T<MMc ~X<tcfMtT<SJ«.P. !77,L 29.

'bid. & p. 2~3. 3o. PA~.p..ot h.!b'd. t. p. 2t. !7; X.!V. p. 800, t t?.

Page 338: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

326 PARTIE HL–DE LA MÉTAPHYSIQUE

Quant aux impairs, ils ne s'engendrent pas, ils re-

sultent de l'intervention de l'unité entre les deux moi i.

tiés de chaque nombre pair'. Mais d'abord n'est-ce

pas une contradiction manifeste que de parler de la

génération, de la naissance de choses éternelles,

comme les idées ou les nombres idéaux? Si la dyade

définie résulte, comme on ie suppose, de l'équation

du grand et du petit par l'opération de l'unité, il y a

donc eu un temps où le grand et le petit n'étaient

pas égaux, et un temps où ils le sont devenus? Mais il

n'y a pas de temps, de succession dans l'éternel 2. Ex

outre, c'est dans la dyade indéfinie, c'est à-dire dans

la matière, qu'on cherche le principe unique de ta

pluralité; plusieurs formes, l'unité, la dyade définie,

la tétrade, viennent successivement s'unir & elle, et

n'en engendrent chacune qu'une seule fois. Au con-

traire, dans la nature, qu'on donne pour la copie du

monde intelligible, n'est-ce pas toujours le principe

formel qui donne successivement la même forme à

plusieurs matières? N'est-ce pas au principe mâle

qu'appartientl'activité productive qui féconde ptu

sieurs femelles, et qui ne s'épuise pas 5? Mais con

if<<. XM, p. t8o. 1. t4.

~hid. XIV, p. 3oo, t. 4 ÂTotMf ~e y~'e<Kf <M<t<f 'f <w

M~ A~yMt e!w Wp'~Mp'M' ~K<pX* << <M!TO& TOW'M

~Mtt. Et 'M <<M[f ~M~t~t, <~t Af <<Mtf <<M<MWp<{TepOfTOCY4

~x &T' wootepo)'o~f. Cf. <&'C~. t.

!M<t. p. 91, L ta 6fM<M< ~°

Page 339: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE 11. CHAPITRE M 527

sentons à faire de la dyade indénnie ia génératrice

des nombres idéaux. Toute sa vertu consiste à dou-

bler; unie à l'unité, elle produit le nombre deux, la

dyade définie; unie à la dyade, eUe donne la tétrade;

unie à ia tétrade, elle donne le nombre huit. Mais

d'où viendront le nombre six et la décade? La dyade

mdétuue, d'après les principes mêmes sur lesquels

repose l'hypothèse de la génération des nombres, ne

peut enfanter que les puissances successives de deux

Mais ira-t-on seulement jusqu'à la seconde puissance ?

Si la tétrade résultait de la duplication de la dyade

par la dyade indéfinie, elle renfermerait nécessaire-

ment deux dyades; ce seraient donc déjà trois dyades

idéales~. Or nous savons que toute idée doit être

seule de son espèce, et que c'est là ce qui la dis-

tingue du nombre mathématique. Naitra-t-il même de

la dyade indennie la première puissancede deux, la

dyade déunie? Il faudrait à celle-ci quelquechose qui

distinguât ses deux parties l'une de 1 autre, autre-

ment elle se réduit & une seule etunique

unité En

fin, puisque aucun nombre impair ne naît de l'infini,

d'où viendrait l'unité idéale e!Ie même? Elle se réduit

y<tp ~pm ftt& «Xttpwr" oj~M,ïo <e" w~ ~tpor

M~M M~Mt ;Mftt!fMtM W<?f ~p~M'~te~)" ~<~

6 < &<dKH~<<<*Mw. Met. XtV. p 3oo, t. t. X! p, a8o,

L '6. tHd. i. 7 & ytp ~~TM ~«!< Jw*o<A< ~f. Cf p. ~S. t. 'o0

Usd. X! p. 574,

8. Cf. p 975.t 8.

[bid. p. t~o, t. 3.

Page 340: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

328 PARTIE H!–DE LA MÉTAPHYSIQUE

nécessairement à l'un en soi', et il ne reste que les

deux principes, impuissants à engendrer un seul

nombre.

Cependant de ces deux principes on ne se conten-

tait pas de faire sortir les nombres idéaux, on eu

voulait tirer l'étendue avec ses trois dimensions. On

formait donc la ligne, la surface et le solide des es-

pèces du grand et du petit; la ligne du long et du

court, la surface du large et de l'étroit, le solide du

profond et de son contraire 2. Mais de deux choses

l'une ou ces espèces de la dyade forment, les unes

par rapport aux autres, des genres indépendants, ou

bien elles sont contenues les unes dans les autres.

Dans le premier cas, la superficie ne contiendra pas

la longueur,ni la solidité la superficie;

le corps n'aura

pas de surface, ni la surface de lignes. La longueur

est-elle au contraire le genre de la largeur, et celle-ci

de la profondeur,le corps devient une espèce

de la

surface, et la surface une espèce de la ligne Absur-

dité égaie des deux parts. C'est qu'il est absurde dc

Met.p. a8a, L 28; p. 984, t. '6.

!bid. t. p. 3a, t t0 Mt~ ft~f T~ef pMMpoC ~pa~M,t,

T<M< ftMCoB<Mt<fM~~OU,

~r~Of &< ~ÂaT~Ot <MM<TT6)'oC, <M'ft!!

M ~o<JM! Mnett~M. XHt, p. st83, 1. t5 TotuM &rt<f <~h M"

~ey~<w<MJ (UftpoC.

!Md. p. 39, t. '7 & < < <~<' < ~*p~'

to« x~. AMK ft~f o< y~'o<ïA ~<tT~ T<M? ~~o~ ~f yap

j<w T< M <wfMt. X!!i, p. :83, t. tg Âtt~eXuft~a Te y<~~~i!

<n<(t6Mf«, e~ <~)~<M~ou9<wM x<M apx<"~s e~<M Te ~«~ t"

Page 341: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE II, CHAPITRE II. 529

nrctendreobtenir l'étendue, par une analyse logique,

d'une abstraction telle que le grand et le petit. Si

) innni est le genre de toutes les étendues, il est l'é-

tendue en général; il est l'espace et la matière des

corps non moins que des idées et des nombres; Pla-

ton n'a pas reculé devant cette conséquence. Mais si

l'infini est l'espace,il

y a de l'étendue dans les idées

et les nombres, dont il est la matière; les idées et

les nombres se trouvent dans l'espace'. Nous avons

déjà vu que le nombre idéal ne peut être distingué

du nombre mathématique qui est-ce qui le distingue

maintenant du nombre sensible? Avec l'étendue on

rapporte encore le mouvement à la dyade indénnie.

Les nombres idéaux participeraient donc au mouve-

ment. Étendus et mobiles, en quoi diffèreraient-ils

des corps ~? Si le monde intelligible et le monde sen-

:-ihle sont formés des mêmes principes, ils se con-

fondent l'un avec l'autre.

Dans des notions et des formes générales, on ne

trouverajamais

les principes du mouvement, du

Mtxof t«d (MMtp~fJM~~%< El ~e ToSro, &rr<Mïo e~teJof ~pa~t)

M<!o crêper ~httAtf.

P~<. IV, H !D~tW< f<~ft<M Xe)tT&')' Aft T< 0~ TOtK~ Ta: ~<!)t

o<<~M~, e~)tep

w tM~exMxo~ô T<~ot, e~re ToC ftey<~ou «~ roC

!M<poi?~o< ToS fteOettTMtw, e~e n!~ ~!K, <S<Ttepec Ty T<{Mt/M y~pa

tbid. III, tt tRMhwf f)t~ w" eïf<M <t~T~ (ïM tJea~), ïo

f~rot<(te<pof <Mt &' TM< <Mttto« xai ef e)te<Mt<î eyf<f.

M~.t. 33. s Ns~ TS MMfce~, ei ftef ~<rra<Tt~i: ~f, ~S-

<!rt Mt~MMTtt<~<t.

Page 342: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

350 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE

temps ni de l'espace jamais on ne les dégagera dusein d'une matière idéale, ou on ne les composera

d'oppositions abstraites, dépourvues de réaiitë. La

nature ne peut pas être tirée de la logique'.

Vainement cherche-t-on aussi dans les deux éie-

ments de l'unité et de finfini les principes du bien

et du mal. Dans la théorie des idées, l'idée du bien

est le principe souverain de l'existence et de la con-

naissance l'essence du bien dans la théorie des prin

cipes mêmes des idées, c'est l'unité, à laquelle aspi-

rent tous les nombres2; la dyade du grand et du pe

tit est la source de la différence, de la discorde et du

mal. Dans ce système, chaque unité, chaque nombre

par conséquent et chaque idée est un bien. Le bien

n'y fait pas faute 3. Mais le mal, à son tour, n'y oc-

cupe que trop de place. Si le mal est posé, dans le

principe matériel, à l'origine des choses, c'est dans

les premiers êtres qu'il dominera le plus. L'un en soi

en sera seul exempt; mais les nombres en renferme

ront plus que les étendues, et la dyade définie plus

M<f. ). <t; E~e (J~, -a~ef ~6ef (); j~t~~); <~t yap

~<!<re«f <Tx~'« af~p~M.

Ibid. XtV. p. 3oi, t. t6 (M ft~f ~fMw aJTo To ro ~<teof

tÎMf 0<?0<a)' (f~TM TO <r<K? ~OPTO e~fU fM~«rMt. E<~ &M! ).

n~&~of~e <*< <t <hHMe<&<<<n ïo &' ttur~ TÔ ~<~of, ~n o! ap~

~<t~N.!b:d. XtV. p. 3ot, t. 99 Â<a<M< <M fto~~e~ y<y<~ï~

<yat~ tt, M< tM~tt w e~op<« ~C~. Éït « M M~ tptSfto',e~·~ds sr, xai ~sa~i~~ sis erisopla alya6a~vv. ~re aé sà si~n eip~ôf~o',,~£I;'

1<~T<[ o<rep <ty<tCef T<.

Page 343: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE M. CHAPITRE t!. 351

qu'aucunautre nombre; ainsi le mai augmente à

mesure qu'on se rapproche du bien. En outre, c'est

le mal tout seul qui est l'espace ou l'unité se mani-

feste, c'est-à-dire le lieu du bien; c'est ie mal qui

reçoit le bien et qui le désire. Quoi de plus étrange

qu'uncontraire désirant son contraire et aimant ce

quidoit le détruire~? Et qu'est-ce enfin qu'une ten-

dance, un désir, un mouvement dans le grand et le

petit, dans la dyade de l'infini, dans des nombres sans

tie"?

La seule chose que l'on pût attendre des deux prin-

cipes platoniciens, ce serait l'explication de la quan-

tité. Nous les avons pourtant convaincus d'impuis-

sance à engendrermême le premier nombre. L'union

des deux principesse bornerait-elle donc à un mé-

lange, comme celle des idées? D'un mélange, nous

t'avons déjà dit, il ne résulterait rien que les éléments

mêmes 3. Mais supposonsles nombres dé)à constitués.

Les nombres sont des composés d'unités. Les unités

en sont la matière. Qu'est ce donc qui unit dans

jM<-(.p. 3os, ta: Seft&t/ftt <MHT<tïA <!ft<t (tere~etf <oN )MUtow

Mf <M~oC TcC Mt, fMtM~ <!xpatTo« fter~etp10~

ap<6fto«î <

'ift~tt, ad sd tMJtAf TeB~O~Oi? ~(Mf e~MH, xal fteT~f xaiOp~-

~<0<OMToC~a~TOMe- ~OapT<~f yttp WU <~M'~M T<)~fttf~Of. Cf.FA~t.

H.

vi

Et&. EaJ. ï, vut K~ <!<w ~<~ ~f T« ~xoMSot ~f oIs

"tt,~t 3UV, g. 3Q3, i. to AA~' o~t ~M" (tt~t~" T<<se ~<yMf<efof

~tpex ~ir<tt.

Page 344: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

352 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

chaque nombre les unités dont il se compose? Si ne!)

ne les distinguait, tout nombre, disions-nous, se re

duirait à une seule unité. Mais si rien ne les unit, ie

nombre va se dissoudre il n'y aura plus que des

unités éparpillées, comme les atomes dans le chaos

de Démocrite et point de nombre. Tout nombre

doit former une unité de collection et surtout le

nombre idéal, composé d'unités qui ne se laissent pas

séparer, et doué d'une existence comme d'une essence

individuelles. L'unité dont il est question ne peut pas

être celle de la continuité, puisque le nombre est une

quantité discrète; ni celle de la contiguïté ou juxtaposition, qui supposerait d'abord la position dans l'es-

pace3. Ce ne peut être, par conséquent, qu'une unité

d'essence, autrement dit de forme. L'unité sera donc à la

fois la matière et la forme du nombre idéal. Or qu'une

même chose soit tout à la fois la forme d'une autre

et sa matière, c'est ce qui est absurde et impossible.

L'un est l'indivisible, et c'est à ce titre seul que les

Platoniciens l'avaient érigé en principe. Mais dans M

dée de l'indivisibilité, sous l'enveloppe d'une généra

tité superficielle, sont comprises et confondues deux

Met. t, p. 3t, t. 36 ËT< AA si &' ô <tp<<~t0t <Tu3A<tft6aO<!fMt!M;

VH.p. t57.L7;Xn,p. 258, i. ta.

Voyez plus haut, p. 2yz, note 4

jMet. XtV, p. 3d3, t. t3 A~X« <rut~<M<, <SsTrep o~XXa&ff;

~CM' Te !M'<~n) ~mp~e<f. Cf. VII, p tS~. 8; XIII, p a~S. t

p. 2814, 1. 25. Sur le sens de vov. ihid. V. p. 97t 1- 15;p. a84, t. 35. Sur ie sens d<*a~cM/voy. ib!d. V, p. a?. t5; X)!!

p. t8:, t. <<). ~n<t~. p<M( t, x\m, xnn. Cf.T~'oto~. onthm ""t

Page 345: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE H. 555

idées distinctes qui ne peuvent se développer sans se

contredire l'une l'autre, et sans s'exclure mutuelle-

ment l'indivisibilité matérielle de l'élément, de l'in-

finiment petit, et l'indivisibilité formelle de l'idée ou

de l'universel. L'indivisibilité matérielle est celle des

unités mathématiques, derniers éléments de la quan-

tité, des points et des atomes, ou individus, dont la

physique mécanique compose la nature. Quant à

) indivisibilité formelle, c'est celle de l'unité géné-

rique, où le logicien renferme une multitude d'u

nités individuelles. La dialectique ramène la phi-

losophie mécaniste, et les deux points de vue op-

posésde la logique et des mathématiques viennent

se rencontrer dans son abstraction indéterminée de

) unité~.

La théorie platonicienne, en général, compose les

êtres avec les attributs qui s'en affirment 2. Ce quelle

leur donne pour éléments intégrants, ce sont leurs

Jf<t X!H, p. z8t. t. a3 sqq. P. 282, 4 n<B< oSf ap~ ro &

~f eJ&<Mper<~ ~Mtf. Â~'

aJtt~petOfxai T~ xa<MXo« xai TÔ ~<

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Ot?tMtTt)~<tpE<T<M )'<'9' &. *a

CTM~emt.

Page 346: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

354 PARTIE H!.–DE LA MÉTAPHYSIQUE

formes; et elle prend pour matière première les

formes les plus générâtes de la matièreelle-même

ie grand et le petit, l'indénni. Du grand et du petit.

elle veut faire les nombres des espèces du grand et

du petit, les lignes, les surfaces, les corps et toute

la nature. Elle ne s'aperçoit pas qu'elle forme des

étendues avec leurs limites, qui les terminent mais

ne les constituent pas, des nombres et de la quantité

avec les prédicats de la quantité, qui la supposent

au lieu de la produire

ïl y a plus, laquantité ne peut pas avoir d'attri

buts absolus; le grand et le petit ne sont que des re-iations~. La vraie formule de l'infini de Platon, ce

devrait donc être la double relation de la quantité

dans son expression la plus générale, la dyade du

plus grand et du plus petit ou du plus et du moins

Les premiers principes, les idées, ne devraient pasêtre des nombres, mais des rapports de nombres.

puisque les nombres ne sont que la matière, dont les

Met. I, p. 33, t. 6 Ér< t~f ~oxet~e~f <M!<f&~<~ <H~f, fï~

tMKMMM~pM'A* Ttf titM~~M M< ~Mt~Xo~ )MtTtty<Mte!<~t< <K~ ~Kt~OMf

t!

MU T~t <<Xtt< < o!<M' T~ f~ya fM~ T~ttOtp~f. Xttt, p. 983, ) H

TaSmy~p <KNtf (tty~OoM ~c~tf, < ovx Te~TMf T~ ft~e~oî. XH.

p. 3Q<,t. t n<M<t tt

y<tptaCtat xai cwftSeSoiM~Mt ~~S~of tSito~ft"

soit <~<~M&tMd to& ftey~e~ <<rtt

IbML XIV, p. ~9:, t. 7 ïtp~ <h'<<y)ttt eyfa< T~ f~ya w fM

<~fM~ ~aw tMe!?M.

Quelques disciplesde Platon substituèrent en effet t'~Mp~o~ '?

«q~efMM"an (t~<t 'MU

fM~f.JMtt. XIV, p. :<)o, i. :&; ï, p

p.98, t. 30.

Page 347: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE II. CHAPITRE Il. 335

rapportssont la forme'. La matière ou l'innni se ré-

soudrait, en dernière analyse, non dans la quantité.

non pasmême dans ses attributs, mais dans un rap-

port absolument indéfini. Ainsi disparaît l'opposition

apparentedes deux principes. Ce non-être, qui doit

servir d'élément de dinérence et de pluralité, n'est

passeulement une existence entièrement relative,

comme l'indiquaitassez le nom que Platon lui avait

donné le différent ou l'autre; ce n'est pas seulement

l'autre et l'inégal, c'est l'inégalité en soi, l'idée abso-

lument abstraite d'une relation sans sujet.

Le problème que Platon s'était posé lui-même,

était d'expliquer la multitude des êtres. Il le résout

d'abord par la quantité pure, et par conséquent il ne

rend compte que de la multitude des quantités~. La

quantité à son tour se résout en relation, et, sous

t'apparence de quantités absolues, ne nous laisse que

desrapports. De l'être il va a l'attribut, et de l'attribut

a l'attribut de l'attribut~. Sous le sujet il cherche l'ac

cident, et sous l'accident même l'accident de l'acci-

dent, creusant de plus en plus, et descendant de plus

en plus dans le vide. C'est que le point de départ ne

'M<<- XtV. p. Sot, ûr' <~x 4' < o<~ ï~t

'p~ft «hMt, ~ef. 6 y<tp X<<yo< eMa, o y<~nC~ ~f.

tbid. p. 196. t. a* tqq. <M MyeM< wB< x~ J«t T~ w<3M

~*)[, ~M <<< «<aA <M~ Ùy~ ~MOftM <M~

«Kr<!f T< OtfMtA'tt,

t.T.1

ÏMd. p. t~<. t. to !M<ef et roe ~o~oC t~ ~p~ ï< <tX~'o~ <~)t,

ï'<repof.

Page 348: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

356 PARTIE UL–DE LA MÉTAPHYSIQUE

repose déjà point sur la réalité. C'est que i'ctrc n.)1

été, dès le commencement, conçu que dans sonidcp

abstraite et dans sa généralité; c'est qu'au lieu de le

considérer dans la diversité de ses manifestations, de

le séparer ensuite de ce qui se rapporte à lui, niais

qui n'est pas lui-même, et de l'aller saisir en son es-

sence propre, on l'a pris tout d'abord, comme les

Eléates, dans le vague de son universalitélogique. A

cet être abstrait a dû être opposée une abstraction

de non-être Supprimant toutes les dinérences, ef

façant tous les caractères, la dialectique a dû en venir

à envelopper toute pluralité dans un terme négatif.

qui ne renferme qu'une absolue indétermination' 2.

De ce terme, plus de retour à la région de l'exis

tence et de la réalité; il n'est plus au pouvoir de

li dialectique d'en faire ressortir la multitude et la va-

riété ce n'est que par une suite d'hypothèses que, dans

la notion générale du plus et du moins, elle distio

guerait des espèces 3, et que de ces espèces elle tirerait

les êtres, les quantités, les qualités, le temps, l'espace.

Met. p. Q 4, t. 5 ïto~M (t~f oBf TtictfïM T~< T<t<!ï<MT<~ <

~TptMnft, (M!X«TM J~ T~<MtOp!t<TMC~ttHMB:

Ka<TO<~p~TOf~tEfj

e' M

~f, ~oM~YMt. tïo~<[~f3î y<ip<MJ T~ ~te<A) xa! To ~f, x. T. n.

tbtd. p. 995, t, 2 t A~Ttt y~C ~Mp~t&Kne<[<T<C[xat TOUTO<tM'

~M~tet~f ?)tTOC'~M Ty ~fT< iM~ Ty é~, O? <K[! TO~TMf Ta: 0«M,

op~fxaf T~ ~Merof ~roCefMtt, edr* ~a~of o~ citrJpcKTtf e~'n'~

pk Te ~<ne T&w ~<M' ~)tepxa! T~ r~ x~ T~ 'a'o«!f.

Ibid. 1. 26 K<~ ?WTMf ~e< x<d T<wro 'a«M ~fo~Xat t~~p~t

e~ & x. T. X.

Page 349: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE n.CHAPH'HE Il. 357

22

!r mouvement. Le monde platonicien se réduit à ces

(feux principes chimériques, !'unité indéterminée et

)a rotation abstraite de la quantité pure, l'ètre qui

n'est rien en particulier et le non-être; deux notions

vaincs, deux mots vides de sens.

Ko dehors des nombres et des idées, reste en-

core, il est vrai, un principe que Platon a invoqué

plus d'une fois comme ia cause du mouvement et

le la vie universelle; et ce principe c'est l'âme. Ne

~prait-ce pas ià que se trouverait enfin, avec l'activité,

ftte réalité de l'être que nous cherchons en vain

<!ans la théorie des idées? Non; l'âme, dans Platon,

)H'st nullement un premier principe; elle n'est pas

une cause, mais un résultat. Contemporaine du

monde, elle est comme le monde un composé des

deuxprincipes, un mélange de l'infini et de l'unité

Lame ne serait donc, comme Platon l'appelle lui-

même quelque part, qu'une idée~, ou bien un nombre,

comme l'a dit depuis Xénocrate Mais si le carac-

tère de toute idée et de tout nombre est l'immuta

Mité et l'immobilité absolues, qu'est-ce qu'un nombre

ou une idée qui agit et qui souffre et qui se meut

M< XH, p. 2~, t. 5 ÂÂM ~)' o<!<~ nX'!T&)f< ye oKy reX~'e<f

~eriM &/ore~PX~" e~MM, T~ an!T~ ~UTo xt~oSf'

~<rrepof yttp ttoj ~~t<):

~oJpMp 4~X~< ~t<n. Of An. n nX<tï<Mf ~f TM T<j~<M~ T))t)

~'tx M Taw oro~e&M' xote?. Cf Tim. p. 3 e.

3~. p. tg~ <L

J[<t. I. tt.

Page 350: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

358 PARTIE iiL–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

soi-même? C'est une contradiction que d'attribuer A

une entité logique le mouvement ou la vie. L'âme.

avec son activité et sa spontanéité essentielles, est

dans le platonisme comme une étrangère venue on

ne sait d'où, et qui ne peut trouver de place dans ce

système de formes sans substance et d'abstractions

sans réalité.

Avec Platon semblent s'éteindre les derniers restes

de l'esprit socratique. Les doctrines pythagoriciennes

sortent de l'ombre dans laquelle il les renfermait

et étounent la dialectique où elles avaient repris

racine; les idées périssent sous les nombres. «Au

jourd hui, écrit Aristote, les mathématiques sont de-

venues la philosophie tout entière 1. Le successeur

de Platon, Speusippe, supprime le nombre idéatet

ne reconnaît plus que le nombre mathématique ¡.

L'Un est encore pour lui le principe de toutes choses;

mais l'Un n'est plus le bien et se réduit à une unité

numérique. Le bien n'est plus la cause des êtres. et

le centre qui les réunit comme au foyer commun

de la science et de la moralité il n'est que le ré-

sultat et la dernière expression de leurs développe

ments individuels 3. Sans doute l'Un en soi ne peut

pas être le bien mais se peut-il que le bien soit sé-

Attt. t. p. 33, t. 4 ÂXM y~OM T~ ~t!(M:T<ï T<Mt fW ri

<M~t.

tbid. 3Un. p. s85. 26. Voyez pins haut, p. ~8, note1

tbid. Xn. p. at9, 1. to; XIII, p. 3oo, ag; p. 3o:, t.

Page 351: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE Il. 359

tt.

parcdu premier principe? Speusippe ne laisse-t-il

pasici au premier principe ce qu'il en fallait exclure,

pt ne lui ôte-t-il pas au contraire ce qu'il fallait lui

laisser' En même temps il rompt l'harmonie qui

aisait le caractère du système platonicien. Il ne su-

tordonne plus les uns aux autres les principes du

nombre, de la ligne, de la surtace et du corps, il

les divise et les sépare~. C'éit~t une erreur, il est

vrai, quede vouloir tirer les unes des autres, de la

plus simple à la plus composée, ces formes qui ne

sont que des limitations ou des abstractions succes-

sives de la réalité, et que de prétendre les réduire

a de simples degrés d'une hiérarchie logique. Mais,

tout en persistant à chercher les principes dans des

oppositions abstraites, les séparer les uns des autres

comme des natures différentes, c'est renoncer en

pure perte à l'avantage de l'unité. Le monde n'est

pourtant pas un assemblage d'épisodes, comme une

mauvaise tragédie

Toutefois, après Speusippe,la philosophie platoni-

cienne a encore dans sa décadence une phase à par-

courir. Xénocrate ramène le nombre idéal; mais il

Met. XIII, p.30t, t. 2: É<TT< ~M~peMCt! Jta T~ T~ Op~

Te e! <ito&&(t<M <&< t~pYOf,aXAe Jfa ïo ïo ~f ap~f M: <TT<M~eMf

M< MfaptCftaf TOB ~M.

!b.d. XtV. p. 998. t. XIII, p. 984, i 11.

tbid. XtV, p. 998. 3o (M* &"te ~:<T<: ~etoc~~e

<~< TMc ~M~otteftw ~<rep {M~Stt~ rpot~M~.Cf. XH, p. a58,

L.à.

Page 352: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

340 PARTIE ÏIL–DE LA MÉTAPHYSIQUE

n'en distingue plus le nombremathématique t ) ;)

transporte à celui-ci les étranges propriétés duprc

mier. Le nombre idéal de Platon était, comme i'i

dée, une fiction contradictoire; mais, du moins, Pfa

ton avait laissé au nombrearithmétique, comme à

ia généralité logique, ses caractères constitutifs \e

nocrate attribue aux unités des dinerents nombres

l'hétérogénéitédes unités idéales; il en fait des es-

sences distinguées les unes des autres par des qua-

lités spécifiques 2. L'arbitraire envahit donc jus-

qu'aux mathématiques~ où la philosophie était des-

cendue et où elle cachait son impuissance; la science

tout entière est livrée à une contradiction inextri-

câble

Tout cela arrive aux platoniciens, parce qu'ils ra-

mènent toute espèce de principe à l'élément, parce

qu'ils prennent pour principes les contraires, parce

qu'ils font de l'Un un principe, parce qu'ils font des

nombres et des idées les premières essences, et qu'ils

leur attribuent une existence indépendante et sepa

rée A ces erreurs radicales, d'où dérivent toutes ifs

Voyet plus haut, p. t *y8, noie t

Met. XtH, p. 2~ t, 1. (MO* <MK)«MOM' fMMH<K M~ e?M<

îbxt. p. t79. 4 Â~' ~[< Mto0~<re<t ~oO~fo~ eif~x~ f"'

~fetf, ~Mt Te Tois e~ e~t tof <!p<6~f X~yotxn <n<~&~fe<, «fM T!M'

o'ftytMi&w ~~ye<

Ibid. p. 978. t. 3o Xe~fCTt X~er<[t Tp~ot rp~xot,x. T À.

s&td. XîV, p. 30S, t9

T<[Ct<[ ~en~<t <Tt<fëM)'H, TO ftet

p~f <fttM!f CT<M~KH' <ro<oS<H, T~ yTaM~Ct <!p~t,

TO ~< T

Page 353: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE I1, CHAPITRE II. 5~1

fonscquences absurdes qui accablent le platonisme.

)) a encore une racine commune c'est la confu-

sion de l'ordre logique avec l'ordre de l'être, et, par

une suite inévitable, des causes réeues de t'être avec

t. principesformels de la science'.

A partir de Socrate, la philosophie roule tout en-

tn-t'c sur les formes. La dialectique ne va pas plus loin.

Or tes formes ont toutes leurs contraires. La dialec-

tique ne pouvait manquer de ramener avec elle la

théorie de l'opposition des principes~. Seulement, au

iicu des éléments contraires d'Anaximandre, d'Anaxa

~ore ou d'Empédocle, ce ne sont plus ici que des

principes intelligibles; aux oppositions sensibles de la

matière succèdent les oppositions des notions 3. Les

formes des choses prennent la place des éléments;

la matière se résout dans une alliance ou un mélange

didées. Dès lors toutes les diuërenccs se réduisent

aux diNërences logiques desidées pures, et ces dnïë

rences logiques,à leur tour, dans les rapports et les

proportions des idées. Laqualité,

où l'on cherchait

<<*P~f, t~ ~T' TOM ap<6ftOM te< ~<WM<

OU<r<a< xai~~«JTtK

xai

Cf.XHI.p.~S.I.ao.Jftt. XIII, p. 262, ). ~6 Â~' o~ wotfTa <!<r9T&t~o~a) ~rpoT~st,

"*< T<0(!<~ ~p~Ttptt.

Ibid. XIV, p. 289. 1. 21 lIâvses Jè ~roruvar TaS ~ipxâr èyey~gl'*5,

tbid.256, p. 983. t. yàp n~t~Et ~e ~o<oC<T<TM"p~

e~tt~M<

~U, p. ï&6, t. 90: n<[)~TMy<M€$ ~MfTtMf WO<«U<T<~t~tTa

Ptyt. t, t AM!OU<Tt ft~XtJXMf TMTO))~ ~Ef ~tpOTepaf TOMf J'

''trept J~tMSzfe:~ Mu to~f Me~ yfN<M(tMTEp<t )f<MT~f ~o~ot' To!/< Je

t~' aM~Mf Cf. Afct. IV, p. 65, t 6

Page 354: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

342 PARTIE 111.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

t'être', disparaît dans la quantité, et laphilosophie,

reculant jusqu'au pythagonsme, va se perdre dans les

mathématiques. Dès lors aussi tous les êtres se résol.

vent dans les éléments indivisibles de la grandeur,

dans les unités numériques c'est l'atomisme ionien

sous une forme plus pure. Les deux mondes que la

dialectique avait commencé par distinguer si sévère-

ment, le monde sensible et l'intelligible, se confondent

ensemble dans l'espace, dans l'infini du vide que limi

tent les unités. Mais la philosophie platonicienne ne

peut pas se contenter de la pluralité indéfinie qui

suffisait à la physique ionienne. Ses éléments, formes

d'oppositions logiques, ne peuvent pas trouver dans

la juxtaposition, comme les atomes de Démocrite.

l'unité qui fait l'être; il leur faut donc encore un

unité formelle, Ici, les contraires ne sont plus, comme

dans les précédents systèmes de physique mécamste.

les agents dont l'unité matérielle subit tour à tour les

influences ce sont les contraires qui souffrent, et

l'unité qui agit~. La cause de l'univers, le bien en soi

Dieu en un mot est l'unité absolue qui domine et qu

règletoutes les oppositions. Mais si la matière est le

mélange indéfini des com'raires, la forme n'est-elle

pas aussi le contraire de la matière? Si l'Un est le

Met. VII, p. t56. t. a 5 (MS~f tn~fet T<5f xot~ M~opc~'M

T<Me n, fM~tt ï<M<Me. P. 157, i. 11.`

Pjt~. v 0< )< <~aKMi~ A!o ~f oMHf w ? &' <MK~e.ti,

M'

«M<p~' WM TojMtfT&M' TA f~ 'eo<~ Tft A:0 Wt{<~e<f ~M~ fM~M$ dorslrb» ftI'Cl1'OÚJHu1TIo" s8 fÙI' COItÍJl1'G ôè ôvo WÚXIllJl ~ael ¡W.),ot..

Page 355: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H. CHAPITRE II. 5~5

bien, et que le bien soit le contraire du mal si l'Un,

d'une manière générale, est le contraire de la multi-

tude, le premier principe, Dieu a son contraire, im-

mortel, éternel comme lui'. Ou le principe matériel

s anéantit devant la forme, et tout se réduit encore

une fois à l'unité de Parménide, ou le monde est

livré à un dualisme invincible de contraires sans

sujet, de contradictoires qui s'excluent, et qui pour-

tant subsistent l'un en face de l'autre, comme l'être et

le non-être~.

La philosophie, à sa naissance, avait pris pour

principe une existence individuelle, la substance ou

matière première. Elle ne partait pas, comme on le fit

plus tard, des attributs contraires, qui ne se suffisent

pas à eux-mêmes, mais de la réalité qui les porte.

Elle prenait pour principe, non pas, comme la doc-

trine atomistique, l'abstraction du corps, mais bien

un corps déterminé~; non pas, comme la dialec

tique, la qualité et la forme générale, mais une chose

existante, un être. EHe ne s'égare donc pas dans des

abstractions chimériques mais aussi elle ne franchit

pas les étroites limites de la sensation. Elle ignore

l'universel, seul objetde la science, et la réalité su-

Mtt. XH, p. t5~, t. tt ÂTOKO!'~6 ~M TO~tWTtOt' fitt WOt~tMUT~

~"CfS it~ T« )~, <t. T.

tbtd. t. tg.

tbid. VII, p. 940, 1. 3 Ot ft~f oBf fCf Ta <ta6oXo!< OU<rM< fM~Of

T<6M<r< Oi <Mt~a< T~ <Mt9' &MKTTOf, O~f Wp xai yt)"t f~ Ot? TO «H-

'w <tB~M[.ïbid. t, p. 3:, 9. Voyez plus haut, p. :y <, note a.

Page 356: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

544 PARTIE ÏÏL–DE LA MÉTAPHYSIQUE, 1

périeure de l'intelligible. La substance à laquelle elle

s'attache ne se suffit pas plus à soi-même que les

formes qui la manifestent; sans ces formes la subs

tance n'est rien; et qu'est-ce qui la fera passer de

son indétermination à la détermination de la forme,

de l'imperfection à la perfection, de la possibilitcde l'existence à la réalité ? Le vrai principe, c'est le

parfait, comme le disait la poésie antique; ce n'est

pas la Nuit ni le Chaos, c'est Jupiter lui-même

Après la philosophie de l'unité, la philosophie de

l'opposition est venue mettre en lumière la forme.

jusqu'alors sacrifiée à ia* matière. Elle est venue

soumettre les êtres à la mesure de l'universe

et dans l'universel manifester la raison souveraine

Mais ou elle s'arrête à l'opposition, quilui cache

l'unité intérieure de rêtre, ou elle prend pour 1 être

lui-même les nombres et les généralités qui n'e<t

sont que la limite et l'enveloppe. Sa plus haute réaute

n'est encore qu'une réalisation arbitraire de l'uni-

verse et elle ne connaît rien au delà de la contra-

tiété des idées. :¡

Ainsi des deux époques de la philosophie,ni une

ni l'autre n'a soupçonné le véritable .être, ic vrai

principe. L'être en soi n'est pas le corps, mais ce

n'est pas davantage l'universel, qui ne peut subsister

M~t. XH, p. a~6, t. a6.

1

fb!d. XtV, p.3ot. ). 5.

Page 357: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H, CHAPITRE II. 5~5

parsoi-même. Le premier principe n'est pas l'unité

matérielle de Thalès, unité indéterminée qui suppose

un principede détermination; mais ce n'est pas un

contraire non plus, puisque les contraires supposent

un sujet qui les contienne dans son unité'. Au-dessus

des réalités sensibles il y a les généralités, mais au-

dessus des formes généralesil

y a la réalité absolue;

an dessus de la sensation la science, mais au-dessus

de la science l'intuition de la pensée. Peut-être même

qu'à tout prendre la seconde époque est plus loin de

la vérité que n'était la première. Si la physique le cède

aux mathématiques dans l'ordre de la science, elle

i emporte dans l'ordre de l'être, et dans la métaphy-

sique c'est de l'être qu'il s'agit~. La réalité, quelle

qu'elle soit, est plus près, en ce sens, de la réalité

suprême que la notion logique, la forme abstraite,

l'idéal.

Partie de l'individuel, la philosophie première n'a

donc traversé les généralités que pour aller retrouver

~individualité. Elle a commencé par l'unité et après

avoir passé par l'opposition, le dualisme, elle va finir

par l'unité. Mais ce n'est pas un cercle qui se terme,

un retour sans progrès. Dans le troisième moment de

la science doivent se retrouver à la fois les deux mo-

ments qui le précèdent, élevés à leur plus haute

Met.p. 289, t. 30 Ad <ïpa <!MtfTt TafWT~! x<!C' utroxet~fou «:

~tf~MptCT~.

Voyezpt)M hMt, p. ïSg.

Page 358: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

346 PARTIE HL–DE LA MÉTAPHYSIQUE.-x-

puissance. A la réalité de l'individu s'unira dans la

Métaphysique la généralité des notions, à l'absolue

individualité l'universalité absolue, à l'existence tes

sence, à l'être la pensée.

Page 359: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

Ohjet de laMétaphysique les premiers principes, t'être en tant

quetre. Catégories. Oppositionsou

analogies. Principes propres et

principes communs.

Enseigner, démontrer, c'est le propre de la science;

démontrer, c'est prouver une conséquence par un

principe, un effet par une cause. L'expérience donne

les faits, ia science la raison des faits, et c'est la cause

qui est cette raison 1. Laphilosophie première est

donc, comme toute science, une science de causes ou

deprincipes. Et si aux principes de l'existence répon-

<!cHtceux de la connaissance, si aux degrés de l'échelle

~C<. I, p. t. 98 (M (t~f yA? ~t6MO<TO ~Tf (t€f i'<K[<n, &OT< J* 0(?x

~MMr o< & W~ &<~M iM~ <t~~Wyfa)p~0tt<r<.

P. 6, t. 22 ËT< T~

~S~Mpef <~ AJeMM&MM~repM'T<3~<MT~af <fo~repo!< e~fa< nfep<

<s~H~ ~tsg~. pee!. HL, t &~cra<~a< o~~a~ ~Mf 6:

~"«t~.

LIVRE ïtl, CHAPITRE 5<t7

LIVRE tH.

SYSTEMEMETAt'H~StQUE D'AtOSTOTf

CHAPITRE t.

Page 360: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

3<t8 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE

des causes correspondent, par conséquent, les de~'cs

de la science, la plus haute science ne peut êtreque

la science des causes les plus hautes, et laphilosophie

première la science des premiers principes'.

Cependant ne se pourrait-il pas que toute cause

fût l'effet d'une cause antérieure, et que la chaîne des

causes n'eût pas de un? Ne se pourrait-il pas aussique

l'effet d'une cause en fût la cause à son tour, et que

la chaîne des causes fît un cercle~? Dans la première

de ces suppositions, il n'y a pas de premier terme; le

commencement, le principe recule à l'infini. Dans la

la seconde, il n'y a qu'une réciprocité indéfinie d'action

et de réaction; pas davantage de premier terme et de

principe déterminé. Dans l'un ou rautre cas, plus de

causes premières, et plus de première philosopha.

Mais d'une série de termes, la cause, s'il y pn a

une, est toujours le premier; il est de l'essence de la

cause d'être avant son eSet~. Or il n'est pas possible

que deux choses se précèdent mutueUement dans le

même sens et selon le même rapport; N n'est donc

pas possible que deux choses soient le principe )une

de l'autre, et<[ue la série des causes revienne sur elle-

même Mais si les caases ne forment pas an cercle, elles

Met. 1, p. 7, L ~3 y<tp euT~f T&' 'spf&TWf ap~<Bfx~i WM

t~'oM J&«ep!tTMt)h'.

*IbidM,u;~)M<.p<Mt!,MX

i&t. H. p. S?, t. < j) T<Sfy<~ (JM~M~ A~M ?? ~<'T<"

wp~Ttpof, M'<~jMMop e~a< aowtp~Tapof aî~o~ T&tf (têt t6TJ.

Anal.pott. K~~y ~< <<!f<tto~ ct~e~o'M~M a~

Page 361: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

UVRE III, CH APURE i 349

~c peuvent pas davantage former une suite infinie !a

~u'.aHté suppose la priorité, et la priorité un commen-

cement. H y a donc un premier anneau auquel toute

lachaîne est comme suspendue. Il y en a aussi un der-

nier, auquel elle se terminer En euet, la suite des

rangementsne s'étend pas à l'infini elle va du con-

traire au contraire, et, dans le milieu qu'elle traverse,

de l'imperfection à la perfection. Or la perfection,

c'est la fin, et les contraires sont les extrêmes, les

limites où le changement vient aboutir tour à tour.

La succession alternative des contraires borne le

champ des phénomènes; les phénomènes marchent

d'un extrême à l'autre, d'un mouvement régulier, sui-

vant la loi constante de la périodicité~.

La science, par conséquent, a comme la nature

son commencement et sa fin. Si la suite des causes

n'avait pas de bornes, la démonstration, qui est la

preuve par les causes, irait à l'infini. Mais la pensée

ne finirait jamais de traverser l'infini. La science serait

doncimpossible Point de causes, sans des causes

premières dont tout vienne, et qui ne viennent de

ÂJ~MtTOf y<~p &tT< TA «MT~ TMf <tt?T<Bf BfMt ~p<<Tep9t JM~FfTTepa

M'M, elT~f <KpM' Tp~~OC.

Jfet. H, p. S'y. t. 9t ÂM~ ft~f o~e ex! T~ x~ra) o?of T' ~or~1

Il, p. 37, 1. 2.[Liv

oú3è ixi TO XdTr.J 0"Y T' doeriv dir'

~poe ~Mt, toB Aw ~ot~M ~px~

!bid. p. 38, L 11 Aft~or~pcM ?<M~faTOf eis ~tTEfpof <M. T<5f

f~ y~p At~f tteMt~ t!<~yit)t f~o~ eTfOM, Ta < eM :!X~~<t c!oKK~~Te<f'

~<t~M ~Co~ 9<'T~)oe Ay~ y~e<K<.

tbid. IV, p. 68, t. 6 ÔXctM ft~f y~p<nntfT&)f a~faTOf airoJet~f

Page 362: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

550 PARTIE HL–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

rien; point de science sans des principes d'où descend

la démonstration, et qui ne se démontrent pas'.

H n'y a donc pas de progrès à l'infini ni dans l'ordre

de t'être, ni dans celui de la connaissance. C'est dans

le temps, à la vérité, que les enets se succèdent, et

que se passe l'expérience et le temps est infini. Mas

la suite des causes et des démonstrations n'est pas

une suite homogène, qui s'écoule, comme la durée,

d'un cours toujours égal; c'est un ordre qui a ses

limites, quine se développe pas à l'infini, mais

qui

s'achève et se recommence sans fin d'individu en in.

dividu, de générationen génération, de période en

période, qui change de sujets et de lieux, mais sans

changer de forme 2. Ainsi se répète d'âge en âge la

double hiérarchie de la nature et de la science, entre

leurs premiers principes et leurs fins dernières, (lui

reposent-dansl'éternité.

En outre, les causes ne sont pas toutes contenues

dans une seule et unique série. En toute chose, en

tout événement, on reconnaît le concours de plusieurs

principes appartenantà des ordres distincts. Mais le

nombre de ces ordres ne peut pas non plus être infini.

Dans quelquesens qu'on prenne l'infini, soit dans la

e&w e~f <<<Mpof yap~f jM~o<, ~<rre ft~J* out<M< e!f<u <!)r<E<& !M~

pM< t, MU *M <~re<jM[o<!x &!T< &e$eX6e<f foeCfTs.

jMet. I, p. 34, 1. 8; IV, p. 68, L 6. ~m<d.pMt. ï, t. !n,

n..M.WtcVt,tn.

Ne~. Xîî,C<'H. et corr. n, to. De ~s. Tt. !?. ~ns!.

:t. Voyez plusbas.

Page 363: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE 111, CHAPITRE L 551

succession des causes similaires qui dérivent tes unes

(lesautres, soit dans des causes différentes, concou-

rant à la fois à un même résultat, il est impossible

uH'unemultitude infinie arrive jamais à un effet; et

d'un autre côté la pensée n'aurait jamais fait de les

comptera Toutes les causes doivent donc se ramener

a un nombre de classes déterminé.

Tout être qui n'est pas sa cause à lui-même est le

produit de quatrecauses. D'abord il se compose de

deuxéléments, une matière et une forme une matière

dont il est fait, une forme qui le caractérise, et qui

détermine sa nature et son essence propre. Ensuite,

t est dans le temps qu'il prend sa forme; c'est par

un changement, en d'autres termes, par un mouve-

ment qu'il devient ce qu'ildoit être. Le mouvement

suppose un principe moteur qui le commence, .une fin

àlaquelle il tende et où il vienne s'arrêter~. Il'y a donc

deux principes internes, dans lesquels les choses se

resotvent. et deux principesexternes qui déterminent

Met. Il, p. 3&t '9 Ot!" ~'e<jMtTa <t~f«!! T<5f <~T&)f, o~T' e~ e<

~Mf oj~e xe~ eHo<. P. 39,L 'o Â~ {*))!' xai e<

<re<p~ y' ~<Kw

~.ti9et Tt~ e~t TtB~ a~~ «Jjt Af ~f o~' ot~TM To y<yf~xe<f T<!ïeyap

~M OM~eO<t, dam <A <d~Mt y~Mp~&'ftM''T& ~!fe<p<W <M[T<~T)))' OpOtT-

<M!xAM~ «e<tep<t~(~~ ~<6~Cew.

fbid. t, p. Q, L tQ TA <d~M[ X~'ercu TeTp<t~<5:,Ji~ ft~~ ftef ai-

nM-~t~ eJtt&t~ JMt< T~ J!f e~a' ~paf T~ a'Xt)f xai

'"MCM<p~o)~Tptw ~ef 't< ~<Tea't, TeTŒpDtf Je T))y

"T<Mt;t6~ ttM~ Mt~, T~ 0? <f6M! X<~ T~<!t0of (T~Ot y<~ yef&TM)?

'"< 'H~Mt W~t ~<MM' ~').n'"t. V, H, H! Anal.

post. If, X.

Page 364: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

352 PARTIE IU.–DE LA MÉTAPHYSIQUE

l'union des premiers'. Les principes internes )x si,

séparent pas de l'être, qui n'est que l'assemblas~l'un avec l'autre. Ils commencent avec lui et (missent

avec lui; ils en forment, à tous les instants de son

existence, la réalité actuelle, et comme le perpétuel

présent. Les principes externes forment, l'un du cote

du passé, et l'autre du côté de l'avenir, la doubie

limite de sa durée~. H commence d'être en recevant

l'impulsion du premier; il achève d'être en recevant

du second sonaccomplissement et sa perfection.

Ainsi quatre principes déterminent et rempiissfnt

toutes les conditions de l'existence réelle la ma-

tière, la forme, la cause motrice et la cause finale.

Ce sont aussi, par conséquent, les principes de la

science et de la démonstration.

Cependant les quatre causes ne forment pasune

série dont le terme le plus élevé soit le principe d<~

termes inférieurs; ce ne sont pas non plus des con

traires, liés entre eux par une corrélation Iogiq"e

Commentpeuvent-elles

êtrel'objet

d'une même

science? C'est qu'elles expriment toutes des rela-

tions différentes avec une seule et même chose Ce

n'est pas une communauté de nature et d'essence qui

les réunit en un même système, mais c'est la coniniu-

nauté de direction vers un seul et même centre, ou

Met. V, p. 87, t. '9 To<iTa)f (tMt <~x") C~" ~n'PX"~

e~w, ed <i<T~f. XH, p. 9&3, 97.

nMd.XM.p.L t5.

27.

1

Page 365: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE IÏI, CHAPITRE I. 555

23

elles convergent toutes à la fois Ce n'est pas par

cHes mêmes qu'ellessont liées les unes avec les autres;

mais c'estpar

leur commune résultante. Prises e~

elles-mêmes, dansl'expression

abstraite de leur cau-

salité, les causes ne sontque

despoints de vue

géné-

raux, des lieux, d'où toute science doit successivement

considérer sonsu~et~.

C'est dans leurrapport

actuel

avec leur produit qu'elles se déterminent. C'est dans

ce rapport seul que consistent et la réalité propre de

chacune d'elles, et leur commune unité; c'est dans ce

rapport seul que chaque science peut les saisir, les

coordonner ensemble, et en tirer des démonstrations.

Ainsi les causes ne sont des causesque

dans leur

rapportimmédiat avec une chose, un être dont elles

déterminent l'existence, etqu'elles

font être cequ'il

Mt. Que sera-ce donc que les causes premières, sinon

3fet. tir, p. 43, L 3 M<& ft~ y<~p ëm<7Tt~t)î ~f& ~f etn ft)) à<-

MnK o&mî ï~ apj~ yMfp~Mf;Cf~ Alex.

Aphrod.ad h. t. IV, p. 61,

) t8 (M~<tp («!MM' TM!' ~MtC*&' ~eyo~f&w ~«m! ë<TT~

~e&)pt?<ra<

)M&,<BM xal ~f <M~ ft~f ~eyo~f~f ~!<T<f x<[! yap Tai~arpotrof

fm erat JMO' &

Pty<. !î, Ht ÂMfTa ~e Ta fMf e~)!ftefa~TM eis TeTrapo:: ~xTe<

Mtoxt to~~ctMptM~TOM.

Plusieurs manuscrits donnentTporou: au

Heu de t<hMM. On lit aussi Tp~ousdans la Métaphystque (V, p. 68,

t5) c& le n* chapitredu V* livre n'est que ta reproduction presque

littérale du )H* chapitredu H* livre de la Physique. Quelques lignes

plus bas, en se réMxmtnt {Af~. V, p. 69, L ti; Phys. II, p. toi3,

~9 IlBeUt.), Anatote dit Tp<~o<

Taw e~TtNf. Tp<!co< est l'expression

propre po'f te't iëa ~f<~<~a'< Xsy~ftefa. Cependant,dans le

passage

précité, «<jtM< BMM semble demander plutôtTo~ou~.

Page 366: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

55~ PARTIE 11:.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

les quatre causes par lesquelles tout être est ce quest avant tout, c'est-a-dirc un être? La science <

premiers principes est donc la science des causes ()<

l'être en tant qu'être~. Chacune des autres sciences sf

renferme dans une classe d'êtres définie, dont pj)f.

s'attache à démontrer, d'une manière plus ou nioiu~

rigoureuse, les propriétés essentielles. Aucune ne s;

croit en droit de rechercher ce qu'est, dans son etr.;

même, l'être particulier dont elle fait son Ooft~

L'être en tant qu'être ne se laisse circonscrire da)h

aucune classe; les causes n'en sont pas diverses et

particulières, mais universelles et uniformes il h'

peut être l'objet que d'une science universelle.

La science des premiers principes, la phitosoptii'

première peut donc être définie, «la science univo

selle de l'être en tant qu'être~. M

Mais il ne faut pas comprendre dans l'être ce q'ii

n'est que par accident. L'accident, en généra! c~

qui arrive aux choses indépendamment de tcm es

Met. IV, p. 6t, t. 5 Éwe} Je r<i< tpx"~ xaiaxpoT~TM

~ToCftef, ~Xof ~!<re<~ T<fo$ ajrat <!M[yM:<of e7t"]M <a9' MTft' ll0

JM~ <}(<?fTOC ~TOf ~f TM ~p<&TM t~T&tt Âtttrr~of.

tbid. VI, p. tt), t~ n&MU aSraH & T< )M~ ~~fo:Tf cM

yp<nt~t«MM -atBp!T0~f0«

<Np<tyt**Te~Oft<t<~ a~X* M~ <Mp!~fM~ fXM'

0~ ai, 0~ We T~ ~<tT!~ Ot!6~ MyOf <M«K?OT<M.Xf p. 2 t Q.L l,

tbtd. IV, p. 6t, t(M~ep~t y~ Mf <jMtMf eM~o~r x!~

TOS AMTOf ~f. –– A~~M' << tM~ Tct ~T<[(t<& J&«~t~a< <

Sar tM accidents essentiels, auxquels tout ce quiva suivre

s'applique pas, voyez plus bas.

Page 367: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE Hï, CHAPITRE 355

23.

~'ncc, et par suite, ce qui ne leur arrive ni toujours

le plus souvent. C'est un accessoire qui leur vient

()')))) concours fortuit de circonstances extérieures.

L'accident n'appartient de soi-même à rien; aucune

chose ne'!e tient d'elle-même, mais de ses relations

extraordinaires avec quelque chose d'étranger. Or la

cause d'un être est ce qui le fait être ce qu'il est en

)ui même; l'accident ne dérive donc pas des causes

de l'être auquel il arrive. Il n'a pas de cause qui lui

~oi< propre et de principe déterminé; il est donc

impossible qu'il soit l'objet d'une science. Par cela

seul que toute science se fonde sur les causes, il

n'est pas de science qui se p)Popose d'autreobjet

que ce qui arrive toujours ou du moins le plus sou-

vent; il n'en est pas qui ne néglige et ne doive négli-

ger les accidents de son sujet~. L'accident, qui se

multiplie avec les rapports extérieurs des choses, est

indéterminé, indéfini; la science qui chercherait à en

épuiser la connaissance ne trouverait pas de terme

et nepourrait pas

être~. L'accident n'apas

de limite,

de forme ni d'essence; aucune définition ne lui con-

vient, qu'une déânîtion négative~. Ce n'est pas vé-

?.< Vt.n;xt,vt!t.

fbid. V!, p. ns4, 7 Â~e<pa yop &rtK' (se. ~<yao~S~et). V,

P '~0, t. 25 0<M~ <<~Mf~MC~t~Of

oJO~f T<W <Tt<~?e6!t<OTO:, t~)LCt

MM~ M5M <MpMMM'.Xt. p. ~:8, :7.

Top. î, Et~i!~ ~T!f }t!f ~i' Tû~T&)!< SCT:, ~HTe '<f

!e f&o~ y<fM, ~Kfp~e< Ty cp<<yjMM, T.

Page 368: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

556 PARTIE II!.–DE LA MÉTAPHYSIQUE 1

ritablement de l'être, mais plutôt du non-être, qui!faut abandonner à la frivolité des sophistes'.

L'être n'est pas non plus le vrai. Iln'y a de vo it<

que dans une proposition qui unit ou sépare, en af-

firmant ou en les niant l'un de l'autre, deux termes

unis ou séparés dans la réalité; il n'y a de fausseté qnr

dans une proposition qui unit ce qui est séparé ouqui

sépare ce qui est uni. Dire vrai, ce n'est pas dire ce qui

est, ni dire faux, dire ce qui n'est pas. Dire vrai. c'est

dire que ce qui est est, que ce qui n'est pas n'est pas;

dire faux, c'est dire que ce qui est n'est pas 2, et réci-

proquement. Ce n'est donc pas l'être par lui-même qui

est le vrai, ni le non~tre qui est le faux. Le vrai et le

faux ne sont pas dans les choses, mais dans la s\x

thèse ou combinaison de l'entendement~. L'accident

est un résultat passager du hasard; la vérité une rela-

tion dépendante d'un état de la pensée~.

L'être véritable, objet de la métaphysique, cstcc

qui existe en soi. Ce qui existe en soi est en dehors

des combinaisons de l'entendement~. Ce n'est donc

JMet.Vt.p. ta~.t t5;Xt.p. 227, L t7.

Ut;d.VÏ,m;Xt.vm;ÏX.x.

ïbtd. VI, p. 197, t. 13 <Myatp

e<n'< to ~e5&~ Te x~ ~o d~M

TO& ~p~f«Mtf,o!<W T~ ~f ay~f ~~$, T~ xaxdv eJM~

< ~f ~Mfo~. Xi, p. aaS, 94 Ëf <n<ti~ot~ TC< jMM~î.

Ibid. Vt, p. 197, a 3 To yalp ah<of ToS ~f oop«nof,T<M

~Mtf0&[< T< ~Oo<. XI, p. 2:8, i. 95 K<~ <M~06 ~f Titt!?!

tbid. VI, p. ta?,i. tg To y o~TMe dv, ~<peM tM~ xu~M,

(~ f~t <M<~t6e6o<t~ «M TÔ <M ~t;6~ ~tt <tper~Mr. <M~ <~orep*

Page 369: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE I. 557

pas dans le rapport exprimé par la proposition que

nous devons chercher l'être en soi, mais dans les

termes simples, par la combinaison desquels l'enten-

dement la constituer Ces termes simples forment des

espèces;les espèces forment des genres, qui ne sont

à leur tour que les espèces de genres plus élevés. Mais

analyse n'arrive pas jusqu'à un genre suprême, qui

embrasse dans son étendue toutes les classes de l'être.

)i y a dix genres2 entre lesquels se partagent, en dé-

thntive, tous les attributs que l'entendement peut af~

firmer (xecTw~pt!)d'un sujet; en un mot, dix ca~o-

nc~ qui ne se résolvent pas les unes dans les autres,

qui ne se ramènent pas à un genre plus élevé, et qui

expriment tout ce que peut être l'être en soi\ Ce sont

tctre proprement dit, la quantité, la qualité, la rela-

tion, le lieu, le temps, la situation, la possession, l'ac-

tion, la passion~. De ces dix catégories, il y en a neuf

M~CtjMf y~ttOS TOB &T<~ M! OUX ~§M A~tMKKf oB<Mf TtMt ~!<Hf TOU

W~. XI, p. 338~ t. 3 5 A~ ~'ep~ ~f*A S~a)f ~f 0<! !~MMT<M <!<

<

~Ep!? T&~&' an 'Mt!~ptorJf.TA MMMt tMf~t&nt a«tnr~o~f ~eyo~teMt. Co< iv. Cf. Met. VI

)' 'ï?, :o.

S~~MM )tatwyop~[f,T~f xctTttyoptMf, xaTt!yop~<M.

!'&'of pour MDtyop&t..Me<XïV, p. 296, n-t?; XI, p. at8,

t t6-93. V, p. §y, L 95 r~'e< 3* (se. &Tth' ëf) ~f To ajro <~<!fMt T~<

*tyop<M. X,<p. teg, t. t6-9<. De An. t, ï. Catey. vin sub fin.; x

'nit.~tMf.pMt.t.tau!.

?{. V, p. t :t~, t. 6 0<M~ yapT<tt?M[<ÏMtMM<M OUT*CM <ÏXXt?X<tOUT'

&'

Cttby. TfM' <[<ttA ~~eft&tf Offt~OK~ ?Leyo~f&'f ~M~TOf <fTOt

Page 370: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

358 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

qui n'ont d'existence réelle que dans un sujet dtiïcrem

d'elles mêmes. Une seule existe par elle-même, cc~

quenous avons nommée la

première,et c'est ceitp-t.,

qui sert de sujet à toutes les autres. La catégorie df

l'Être renferme donc les substances, dont toutes b

qualités, quantités, relations, etc., ne sontque les

accidents*. C'est l'être en soi par excellence.

Avec l'être s'identifie l'un. Tout ce qui est un, est,

et tout ce qui est, est un. Il n'y a entre ces deux

termes, comme entre la concavité et la convexité

d'une courbe, qu'une différence logique, qui n'en cm

pcche pas l'identité réelle~. L'un a donc comme t'ctrc

OtMatf 0~(M~e< ~M~ôf ~MtOf ~00: T< ~TOU <!OTS )) xefs~ r

e~e<f ~ote!f ~ao~etf. Top. I, tx Ë<TT< v<wraTOfapt~f

~t Ce

pendant,dans un passage ~es secondes Analytiques, où ArtsMc affirme

que Ic nombre des catégories doit être fini, il n'eucompte que huit

Anal. po~f. xxu Ta ~ft; Taif xaT!fyop«5« -se~pafTat' yap z;6M

t) ~o<ro~ t?pM T<, A 'cotoCf, tKK~ott, t?o<?, 'sf~Te. Il negtigc<i6nL

ici la situation et la possession. Dans laMétaphysique,

il semble rctMfi

cher encore le temps (XI, p. :36, t. 20; p. ':38, i. to).H varie 'm

l'ordre des catésories, qu'il ne paraît pas s'occuper de détermino r

goureusement.L'être ot?<T~ est toujours en tête; mais en général

la qualité qui vient immédiatementapr~,

et nof pas, commp <t<")

le traité des Catégories,la

quantité. On en verra plus bas la raison

(Mc<9[ ne peutêtre toujours bien rendu ni par fMfoec ni par «<~f«'i

Quand je t'ai traduit parêtre dans le sens propre où on dit wt ffrf j]

écrit avec une majuscule (Etre).

Ca~. V. Me< VM, p nS, t. t3 Ta <ÏXAa XejsTtu oy!'

TOC Ot?t&M COTOt T<t ~OTOT~TM ?!)"!<, T« Je tKX~Tttra~, Ta ~e C'

Te <?X).o si TotoCfof. L. ao TfSf ~ef yap t~&tt- xan;) opttf~T!''cc

6~ y&)p«Ttof,a~Tt) Je (sc. oJ~of) ~Cft!.

~< !V. p. 62, t. f) To ëf )M< To of T«dTOf KM ~Wft.r' n~.

Page 371: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE IÏI, CHAPITRE L 359

'.cssenres,ses catégories irréductibles, qui ne sont

autres que celles de l'être; et, comme les catégories

de l'être, celles de l'unité ont leur fondement et leur

substance dans l'Être qui est par soi-même; c'est l'u-

nité substantielle des Etres qui fait l'unité des quan-

tités, des qualités, de l'espace et du temp~

Ce n'est donc pas dans un genre supérieur que

s unissent les catégories, ni dans une commune par-

ticipation à un seul et même principe ou à une seule

et même idée; elles s'unissent, comme les quatre

causes, dans une relation commune avec un seul et

même terme, et c'est cette relation qui en fait les ob-

jets d'une seule et même science2. L'objet propre de

cette science est donc la première catégorie, à la-

quelle toutes les autres sont comme suspendues~.

Ce n'est que dans leur rapport avec le premier genre

?')t~e!f <M~o«. <B~* o~y <M ef< Âoy&) ~~otiftEfo:. L. i<) OtMef Fre-

pM M-BMpA

T~

Jf<-<.p. 65, t. t?, :t. VH, p. t6t, L g; X, p. 196, t. 2< p. x~.

).<

!Md. IV, p. 6t, t. n To ~f ~yerett [tÉf coX~~M~ a~ot mpo~

? M< (Jap T«)ot ~eMf.–

n<~<&)$ (t~f, a~X' <~tr<]tf <Mos ~<tf <tp~t!f

fMf y<tp, ~tt Ot!<T&H, ~)T<t X~eTtM, T<it OTt ~a6t! OUOMS, TO! OT<

~f eM <M?<~ac, ~Copat! cMpnceM t) <r<MOTt)TM tt ~so<!tT<xa t; yE~ftt-

:<M o!c~M, TMf ~eo~ T~f o<?<~ef Xeyoft~fa!f To<!T&)t' T~o~ «Ko~f-

~t oJj~fM' oùya~ fto~of, x. T. X. Voy. plus haut, p. 353, note t.

–tMd.p. 63, L at <M y<~p e<-BfoXX<t~$, eTepM (se. em~T~t):),

e~~g jt<t6' ~f (tt}te ~po< ~f o! Xoyot af<npepo!/Tft<. Sur la disttnc-

'fan de «tC' et trpM ~f, toyM encore V)!, p. t34, i 20

tHd. p. 8s, t !!s~TftyM< JèXUp~

TOMTFpMTO!< )? e~i~TM~ t!<

Mi t<[ e~')t~pït~TM, XtM &' <5X~OfTOH.

Page 372: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

360 PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE. 1

de l'être, que les genres subordonnés peuvent deve.

nir l'objet de la métaphysique.

Mais il y a des relations d'une nature toute diffé.

rente qui établissent entre les diverses catégories une

sorte de parenté; ce sont les oppositions de l'être.

Le non-être s'oppose à l'être, comme sa négation:

ce n'est donc pas, non plus que l'être, une chose

simple, et autant il y a de genres de l'être, autant il

faut que le non-être ait de genres 1. Cependant l'oppo~

sition de l'être et du non-être, duïérente, en réalité,

dans chacune des catégories, est la même dans toutes

par sa formel Dans cette forme, le second terme

n'exprime pas autre chose que l'absence du premier.

Le rapport de l'être et du non-être consiste donc dans

une pure contradiction; dernière forme à laquelle

toute opposition doit se ramener 5. Mais l'être est

aussi Fan, et à 1*H~ s'oppose la multitude. Ici l'oppo-

sition ne pose plus l'être d'un côté et le non-être de

l'autre; elle ne s'étend pas hors de l'être; il n'y a que

ce qui est qui puisse être plusieurs~. La multitude

n'est point la négation pure et simple de l'unité:

elle en est le contraire, non pas le contradictoire.

JMet. MV, p. 9<)4, L s3 noXXf~M yap ïA ft~ <p, ~)Mt&) «f"

of. P. a~S,t. 5 To ~ef )MT<t Tt~ <fK4<re«

~a~<Tcït Mtn)~

p&Mt XeyeMH.

'Ib;d.!V,p.65.t1.

Ibid. p. 63, t. n X, p. aot, 8; Ca< x.

îMd. tV. p. 63, t. 5 T~ J' ~< wT~e<Tat ~~s< &~s

Ty et'< ~M~0p<t epO~Mn <M~TO ~f Ty t!!tO~<[Mt. Cf. X, p. t99; 7î

Page 373: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE I. 561

Etic ne l'exclut pas d'une manière absolue; elle la ren-

ierme en quelque façon. En effet l'MKest l'indivisible,

la multitude est le divisible; or le divisible se résout

parla division en des indivisibles. La multitude s'op-

posedonc à l'unité, comme des unités à l'unité. C'est

une opposition fondée sur un rapport, le rapport de

la mesure à la chose mesurée~. L'unité, en toutes

choses, est la mesure qui sert à estimer par compa-

raison les grandeurs. La mesure diSëre selon ce qu'on

mesure; pour les quantités c'est une quantité, pour les

qualités une qualité. En un mot la mesure est du genre

des choses qu'elle mesure, et la multitude diHere,

comme l'unité, selon les différentes catégories~. Mais

ce rapport du mesurable à la mesure, qui fait l'opposi-

tion des deux termes, n'en est pas moins partout le

tpême. A l'opposition de l'NR et de la multitude se ra-

mène celle du même et de r<m<re.(Deux choses iden-

tiques ne font qu'un; deux choses qui sont autres for-

ment une pluralité. Mais si l'opposition de l'unité et

de la multitude impliqueune relation, celle du même

et de l'autre supposeune comparaison expresse et une

réciprocité de rapport. Elle n'est pas moins univer-

Met. X, p. tQ7, 97; p. 2o4, L 2t <MraMy<~p ~yo~ &' <MM

<M~ ~)MpM< ettM &' <M[!&Mt, A XeMMf «~ ~eMM~ xai -r~ ~te~-

!f<fMM[ Wp~tT~

ft~TpOf,)M~ T~

fterpT)-

Ibid.p. t<)3, 1. 17 Tô e~<u. (M~cra ty {~Mf ewat

*P'hett &«&tTOC ~<&tOM tM~ XttpK&TaTftTOM<fO<TOU.P. 'gS, t. tO Âe< Je

~~o'~ to ft~tpey. P. t<)6, s t A~eTfM âè ~a~ ïo «a< To

'97.8.

Page 374: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

562 PARTIE IM.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

selle,en ce qu'il n'est pas d'être auquel elle ne

s .m

plique 1;mais elle est plus définie. Au même et a

l'autre se ramènent les contrariétés du semblable et du

dissemblable, de l'égal et de l'inégal, qui ne sont plus

des oppositions universelles, mais qui ont unrapport

essentiel l'une à la qualité, l'autre à la quantité 2.

Sous le terme négatif de l'opposition du même et de

l'autre, se placent la différence et la contrar~ La diffé-

rence ne suppose plus seulement deux choses, dont

l'une n'est pas l'autre, mais une troisième chose par

laquelle elles diSèrent le genre ou l'espèce, ou tout au

moins Faccident~. Enfin la contrariété est la dii!e

rence de deux espèces qui forment les extrêmes d'un

genre; c'est la seule différence définie et la forme In

plus parfaite de l'opposition

De toutes ces oppositions, il n'en est pas une qui

appartienne àtel ou tel genre de l'être exclusivement.

elles s'étendent toutes à tout ce qui est; ce sont tes

affections propres, les accidents essentiels de l'être

en tant qu'être,et de l'unité en tant qu'unité~.

Les

Met. IV, p. 62, 1. 23; p. 63, t. 14; X, p. 199, t. a H.t' cp~

<iitKW M<M 4 <!M~.–A<o od X~erott ~tt T~f fti~ ~TMf (ro ~e ft)) T!tjK

~e)er<M), eM ~e TfSf 'safran' ~t~Mf.

Ibid. tV, loce. laudd. X, p. 198,1.8

sqq.; p sot, t. <?

thid. X, p. '99. L '3 tt~ ~ap ~repofrewTo <ST< af

~e ~tt~ocof T<f<~ TtM &<ïpopot),~'o-r' af~Xtt T<n!r<! n eîfat ~M~oxm

ToSto ïo ajro y~<"x eMo~.

th!d. p. Mo, 3 sqq; ÎV, p 63, t. 17

!btd. t\ p. 6& 8 Toi? EfM ~f X<MTOtt OPTOtT<if'

«MW e~t' ~9)?.

Page 375: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE IH, CHAPITRE I. 565

deux membres contraires de chaque opposition dif-

fcrcnt donc nécessairement dans chacune descatégo-

ries, comme l'être lui-même dans chacun de ses

"cures. Mais de même aussi que c'est partout l'être,

partoutc'est la même opposition les termes sont di-

vers, mais le rapport identique'. L'unité, par exemple,

est à la multitude, dans la catégorie delà quantité, ce

que l'unité est à la multitude dans les catégories de

ta qualité, de l'espace ou du temps. Les oppositions

établissent donc èntre les dix genres de l'être des éga-

tttes de rapport, des proportions, des analogies trois

termes synonymes Les catégories, avec toutes les

espèces dans lesquelles chacune d'elles se ramifie,

forment autour de lEtre comme des rayons qui vont

sécartant de plus en plus, mais entre lesquels les op-

positions mesurent les angles et soumettent les in-

ten allés à la loi d'une proportionnalité constante

Mais il faut aux proportions une mesure commune

dans un premier rapport auquel elles se ramènent

toutes; cette mesure, c'est encore dans lacatégorie

de l'Être qu'elle se trouve. C'est le rapport des deux

termes dans l'Etre qui détermine la valeur réelle de

chaque opposition, et sert de fondement aux analo-

~<?t.X, p. sot, t. a4 sqq

tbtd. XtV, p. 3o6, 1. 28 Ëf etMCTt) y<ip TO:. ~fTO!tMTM~epM

~n ïo«ft~o~of. X, p. 97, L 2 r~e< (se. e<rr<t) ro aJro o~x

tM«TM~'op&M, taT' ta'o&o~Mf ~e 6<M ~e'

Mx~.o ErpM

«~o. ~)<' 7'art.

<HM). I, t Ta ~t' )'ep ~OM~tïo «otfOf «T' ~MA~tS! T~ xaTa ~e-

Ta MT' eMo<. Cf. Thcophr. ;Mtt. p. 3~. t tf)

Page 376: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

564 PARTIE IIL–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

gies des contraires. C'est ce rapport enfin qui fait reu

trer dans le domaine de la métaphysique toutes les

oppositions de l'être en tant qu'être, avec les caté-

gories qu'elles unissent

La dialectique se propose aussi pour objet l'être

en tant qu'être et ses oppositions. Mais, comme la

sophistique, elle prend et l'être et ses contraires dans

leur idée abstraite 2. Elle ne tient pas compte de la

dinérence fondamentale des catégories, et elle ne

connaît pas l'unité substantielle de l'Etre elle s'arrête

à une généralité vaine, à l'idée indéterminée de l'être

en soi. Au contraire, la métaphysique part de la dis

tinction des genres 3. L'être, et par suite le non-

être, et tous les contraires ne sont rien pour elle

que dans la diversité réelle des catégories, et c'est

dans la réalité d'un sujet subsistant par soi-même

qu'elle trouve le principe supérieur qui soumet la

jMi't. TV, p. 63, l. 22. Êxe! 'seh'M ~tp~s T~ -cp~rof afc~pe-

T<M, oiof ~<M ëf Myera< -M~ T~-spcSTOf &M<!MM ~ftT~of x<t<~ef

TajToi? ~Mt!ér~poM <Mt!T&'f ~fa~r&t)~ ~ew &rre AeXJttefOf ~ooa~M

yeMM ~MtOTOf O~Ta)~ a~O~OV~Of -Cp~T~

~fOMTOf &' ~<M{<TT~JMtTttyop~;

~r<B< <~< ~Mpo ~yer<M. P. 65, i. t4 Ap~Ta

x<[! ~titCot. T<tt?~ot jM& ~<r!~ftt! e<'re xoC' MyeMt edse (t)t,

<Bp <<MM~e< T<i!XttO&. AX~' ~t~t ef x<~~o~~ct~M~ ~~yera< T~ & ~pef

To ~p~To~ TJE~a Xe~<h!<Ter<t<jMt! Ta: ~f<t~a ~~o~.

ÏHd. ÏV, p. 64, t. n-25; Il, p, A', L aa. Voyet plushaut.

p. 3n.tbid. XtV, p. 2<)A, t. 12 npMrof f< e< te <BoXX<t~&.

p. 33, 25 ÔAMe Te T~ <Mf ~f~w ~tTe<t orot~eM &eA<!fT<

~a~Mt ~eyo~t&'&w, a~MwfeMpEM'.

Cf. XH, p. 9~5, t. t6.

Page 377: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE I. 365

diversité à l'unité. Elle ne descend pas, sans doute,

aux espècesdes catégories inférieures, ni aux appli-

cations que les oppositions y reçoivent; mais elle ne

s'en tient pas non plus aux formes logiques qui ne

sont en elles-mêmes que des rapports; elle les ra-

mène à un plus solide principe, elle les asseoit sur

le ferme fondement de la réalité. Sans les catégories,

les oppositions ne sont que des abstractions logiques

dépourvues de sens; sans les oppositions, les catégo-

ries n'ont plus entre elles de rapports logiques, et

la science est impossible; sans l'être enfin, catégo-

ries et oppositions n'ont ni sens ni réalité, et il n'y

a ni science ni existence.

Sur le double Ibndement des catégories de l'être

et de ses oppositions s'élève l'édince de la science.

Toute démonstration suppose des principes qu'elle

ne démontre pas; autrement on remonterait à l'in-

fini de démonstration en démonstration, et la science

serait impossible~ Mais toute démonstration consiste

dans une suite de propositibns dont chacune a sa

preuve dans celles qui la précèdent; et prouver une

proposition, c'est prouver que le prédicat doit être

aBirmé du sujet'i Le principe d'une démonstration

est donc une proposition qui ne peut être prouvée

et qui n'a pas besoin de l'être, c'est à dire où le rap-

port du prédicat au sujet est évident de soi-même

~tat.pMt. I, <t, nt, x; II, xv.

Page 378: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

566 PARTIE IH.–DE LA MÉTAPHYSIQUE

Or les propositions premières qui commencent t«

démonstrations ne s'étendent pas inditïéremmcnt et

de la même manière a toutes choses; elles dincunt

comme les genres, et se rangent avec les êtres dans

des catégories distinctes.

En effet, qu'est-ce que l'entendement affirme d'oh

sujet sans chercher et sans pouvoir assigner aucune

raison de son amrmation? C'est ce que le sujet nos

sèdc en lui-même, et qu'il tient de son essence; c'est.

par conséquent, ce qui ne peut pas cesser de lui an

partenir sans qu'il cesse d'être, ce qui lui est necci.

saire; et de là vient la nécessité de la démonstration

Mais ce qu'une chose possède par eHe-même, en volu

de son essence propre, ne ,peut pas être à une autre

autrement ce serait un accident qui pourrait, scion

les circonstances, se trouver ou ne pas se trouver en

elles. Les attributs essentiels sont donc essentielle-

ment propres à leur sujet, et par conséquent au~i

les propositions qui les lui rapportent 2. Les pt'm-

cipes de la science diCerent donc selon les sujets.

Or le sujet d'une première proposition est le genre

auquel se ramènent tous les sujets plus particuliers

des propositions subordonnées. C'est donc selon les

genres que diuerent les principes des démonstra

~M<. p<Mt. t, Vt E< oSf ë<rr<f <MMJe«[ï<~ eTKcr~~ e$ <u'~ x~'oi,

a~fBf'Mt «&' <!t!?Tt[

<Sc<~OfTa CM'eytMtM Tels<M<~M<nf. <&

C'Tt &t TMOMTMf T<MM' ~f eA? 0 <Ï)ro~e<ttT<XOf <MX~ay:CHO:.

ntid.

TU'tÃ1' &v elf/ Ó Œ7toJelIllTlxoS atlÀÀor,ap.Ós.

1

Page 379: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE IÏÏ, CHAPITRE I. 567

tions, et chaque science, à laquelle chacun de ces

principesdonne naissance, est la science d'un seul

et unique genre t

Mais un genre n'est-il pas souvent une espèce d'un

('cn)'e plusélevé? Les attributs essentiels d'une chose

sont de deux sortes les uns, qui composent sa défini

tion les autres, dans la définition desquels elle est

enveloppée. Tout genre se spécifie par des différences

contraires, dont l'une ou l'autre s'affirme nécessaire-

ment de ses différentes espèces toute quantité est

continue ou discrète, tout nombre pair ou impair.

Toute chose qui est un genre et qui en même temps

est une espèce renferme donc d'une part les attri-

buts qui la constituent espèce, c'est-à-dire son genre

avec sa différence spécifique, et de l'autre les attri-

buts qu'elle constitue comme genre, savoir les dif-

terenccs entre lesquelles se partageront ses propres

espaces. Ces derniers lui sont propres et lui appar-

tiennent à elle seule. Les dinérences ne peuvent être

définies que par ie genre, le pair et l'impair par le

nombre, le discret et le continu par la quantité 2. Cha-

cune des différences s'affirme donc du genre, et le

JMef. IV, p. 62, t. 5 Â~MtfTos Je y~o:~ j«M <~<j6t!OM j~a efo: Ktt<

EtMDf~);.Anal. p<Mt.t, Mn ËTep<Myop coX~Mf TfSye~t af ap~at,M! C~

~ttp~TTOWfftt.

~'M~. pMf. t, tv KaC* aéra: J', ~a )!)rap~s<ëf T~ Tt eortf oiov

~'y~t yjM(~t~, )Mt) yp~t~ cr<yftt!' yapouc~t auT&n' ex To~Ta; eor~,

~M TfS Aoyy, T~ A~yot~t T~ ~tTTtf, ~fu~p~ef.K<M <~<ro« TcSt;

et~<r<tp-

iMfTM; t[jTo<f <t~~ TM My&) et~!r<tp~o«cr', T~ Ti Arn JttXoC~Tt. 0?o~

Page 380: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

368 PARTIE II!.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

genre, à son tour, de la somme de ses différences

dans la réalité de ses espèces Le genre, d'un côte

et ses différences essentielles, de l'autre, forment deux

termes de même extension, deux membres d'une

équation, qu'on peut convertir l'un dans l'autre 2. Les

premières différences du sujet d'une science, n'étant

autre chose que ses affections propres 3, donnent ne

cessairement naissance à des principes qui lui sont

propres au même titre. Au contraire, si la dénnitio))

dans sa totalité est exclusivement propre au défini,

le genre qui fait la base de cette dénnition le sur

passe en extension, et, par conséquent, ne lui est pas

propre. Or le genre est de son essence~. Voilà donc

un attribut essentiel qui n'est pas propre à son sujet.

Et, si le genre est de l'essence de la chose définie,

To e<!M ~n~6< ypz~~xal ro

-Brept~ep~' «~ To~eptTTof ~na'

<!p~~<Mf!1M ~pfSrof

x<t! o~fSerof. IMd. Tt, xxn.

Anal. post. I, iv Tadpa XeyJ~tefa e~ T<5f a~& ~r«yr~T<iw <~

eM~r~ o<~ef< <S< eM~xf!p~e<fTOM

xaT~yopouft~oMj à'MM~M<~t,&'

<n!r<! T~ ~<~T<Mt! ~§ <tf~x<tî. OJy~p ~J~eraf (ttt mr~ye<f <!x).&, e

Ta opTMetfteMt' o!of ypot~t~ To e<!M T~ <M{t«!Xof, )M~<~<0~

Tt ee-

p<Tt~fTO ~TtOf.

!Nd. vi, Jum Ât~«TTp~ofT<: &rTMj, <&X*o~' ewepTe&'ofM.

Top. I, T MM!' d' ~<TT~ (t)~ ~~oT~Éf T~ T~f e!)'M, ~Of&)

ocve*)Mt! t~'tMmtyopetTM. Cf ix.

~md. po<t. t, vu Ëtte< y <!wc~)t)!~ MK~e< «Bp! &M[<rrcc yc'M

Afft ]Mt6' a6r~ ~tf~et, <Mt< &KMrr<M', ~affep~f~T<

wtp{ T<if ffC' aM'

&MMy~TfM'a! ~M<yntfMM)te! aftoJe~BM, )M} &[ TMf TOtojTMf eM. X"

(Mx ~t&!T!f dM~o« y~fOM (teraëchTa ~e!&a. tx

~fep~~T'

(FM? <nt~M&M 0~'t ~M" < *M' ~fM~TWWp~Sf, ~KM~

f<w ~'X?&te"'<

Page 381: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE Ml, CHAPITRE I. 369

24

elle doit avoir aussi au nombre de ses principes les

principesdu genre. Or ces principes sont communs,

comme le genre lui-même, à toutes les espèces. Voilà

donc des principes qui ne sont pas propres au sujet

de la science. C'est que le sujet n'est plus ici pris en

lui-même, mais dans son genre; et c'est dans ce

genre qu'ilfaut chercher et son essence et ses prin-

cipes'.C'est donc toujours au genre que les prin

cipes appartiennenten propre; ils ne se transportent

pasd'un genreà un genre différent, ils descendent

seulement du genreà ses espèces. La musique se

emontre par l'arithmétique, la mécanique et l'op-

tique par la géométrie; mais on ne peut pas démon-

trer les sciences arithmétiques les unes par les autres,

ni les unes par les autres les sciences géométriques.

On ne peut pas démontrer les sciences arithmé-

tiques parla géométrie,

ni par l'arithmétique les

sciences géométriques;on ne peut pas démontrer la

géométrie en général par l'arithmétique, ni l'arithmé-

tique par la géométrie. D'un genre à un autre genre,.

iln'y a pas de communication, sinon dans leur rap-

port avec un genre plus élevé qui les enveloppe tous

deux Mais nous avons vu que l'analyse ne peut

~M<.pMt. VtU.

tb!d. m & <M~ <My<f)f re ajro e?MH y~f&î ft~XXc< t;

<t!M«6tt }tatt<6a~Mw.–OtM* <&~t ~n~r~ (se. &yT< ~§M) ïo~pM,

&A' &M[ o~Mt <~e< <tp~ d~tt~cf <&TT' e~MM .~TepofMto

;&<fTepot~

MMtTd j~m~ ~p~ yeMfterp&tf,r~ <~fM)Mx<i <fpot <tp<~t;t<x~. Cf

't.

Page 382: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

570 PARTIE HÏ.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

pas tout réduire à un seul et même genre, et qu'elle sa;

rête en définitive à un certain nombre decatégories

qui ne souffrent plus de réduction. Les catégories n'ont

pas de genre; elles ne sont donc pas susceptibles de

définition. Par conséquent aucune n'a d'autres attri-

buts essentiels que les différences fondamentales qui

constituent ses affections propres. Chaque genre de

l'être a donc ses principes qui lui appartiennent a

lui seul. Chacun de ces principes est une propo

sition, une thèse qui est la source d'une science m

dépendante.

Cependant il y a des principes qui sont communs a

des sciences diSêrentes~. Ce sont des principes com-

muns à l'arithmétique et à la géométrie que, si l'on

retranche de deux choses égalesun même nombre

de parties égales,les deux restes seront encore égaux:

et que deux choses égales à une troisième sont égales

entre elles. Mais ce ne sont, ni dans l'une ni dans

l'autre de ces deux sciences, des principesdirects

de démonstration. Ni l'une ni l'autre ne les prend

en eux-mêmes et dans leur acception généralel'a-

rithmétique les considère dans leur applicationam

nombres, la géométrie dans leur applicationaux eten

1 At~. post.X.

ïbid. n <Mx &W a<ro~M &MK~<w chA<B~ <DA' &t T~"

~<M'- <tM~ TO<!MM'<MO~t} ~OUO< TO X<W<!f. X ËeT< J' ~f Xf~

M& <t~eMT«M& ~te~fMUt ft~ ~M ht~M~t e*«m)~`:

«M)~.

Page 383: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE ÏM, CHAPITRE I. 37]

24.

dues; chacune les approprie son objet 1. L'essence

de ces principesne consiste donc pas dans ia nature

des termes, mais dans le rapport qui les unit. Les

termes sont variables; le rapport est constant. C'est

ou Iciles termes ne sont pas des réalités démues ce

sont ces opposés, ces contraires qui établissent l'ana-

)o"iedes genres l'égal et l'inégal, le semblable et

le dissemblable, le même et l'autre; les propositions

qui en résultent n'expriment donc aussi que des ana-

logies,dont l'unité toute formelle suppose, bien loin

de l'exclure, une diversité réelle dans les choses aux-

quelles elle s'applique~. Les principescommuns ré-

pondent aux oppositions, comme les principes propres

répondent aux genres et de même quil y a des op-

positions premières auxquelles toutes les autres se

ramènent, et qui rapprochent tous les genres de

l'être, de même il y a des principes communs qui

s'étendent à la fois à toutes les sphères que les prin-

cipes propres déterminent. Les principes communs

en générai s'appeueat des <M;Mmcs; les principes uni-

/tn<tXMt.

x Ko<f o!b~ T~ ~M <H[0 f<T&W~f ap~t;, ~t< ftM Tft

~Mï. t)M[f<~ &Mt<TT<w Tf<!M)f, ~<rof èv Ty ~fet- TaJï~ ya~p cot~t,

~f fn) «tïo~ ~f ~i~, < e!r! fteye9<3f (tofot)- T~ ap<9~T<x&!

<tpt0~. Cf. H. ?<. IV, p. 66, t. 7Ë~ T0<~our0f ~fBoTtM,

o<TOf0[JM& !)M[f<!f' TOCtO &rTtf, ~Of e!r~e< TO ~«0~. Xt, p. 2 18,

!Ï ô{MtNt)(M[T<<tOSyp~T<M

T<tM «XfOM t~S)t.

~M<. p0<t. t, X K<Mf~ tM~ <M"O~Otf,eM}

~pt{<T'(tOf ye 0<TO~

~aT~~t!' y~N.

Page 384: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

572 PARTIE HI.–DE LA MÉTAPHYSIQUE

versels peuvent s'appeler les axiomes de }'êt)e en

tant qu'être

Les principes propres sont généraux lesprincipe

communs sont seuls universels. Puisqu'il n'y a pas de

genre qui s'étende à tout, l'universalité ne peut con

sister que dans la relation, l'analogie 2. Les principes

communs ne peuvent donc être en eux-mêmes

comme les oppositions universelles, que l'objet de

la dialectique~. Toute science porte sur un sujet

qui a ses propriétés des rapports sans termes défi.

nis, des formes qui ne renferment rien et qui peu-

vent s'appliquerà tout ne sont pas l'objet propre

d'une science Ce ne sont pas les principes Seconds

de la connaissance des choses dans leur essence in-

time ce sont des notions indéterminées quine

peuvent rien faire connaître que d'une manière

superficielleet extérieure, par une induction incer-

taine, par une vague opinion 5. En un mot, ce sont

A&f~M. JM<t. ÏV, p. 66, t. 5 ÂiKKn yctp ~pxe<Toit a~'

eM~' et! yA'N ~f! X"< ~4 <~M'

Anal. pMt. t. xvnt. Met. t. p. 33, t t8.

&?&.eL Xt Ô (t~f oSf MT~ T~ CpayfMt ~S&~f

Tct )MMf~ A~t

T<«~.

Rhtt. t, nr È)M~T)t(Mtf ~oxetft&wf T<t~f ~pay~Mh~f, < f

fef X<!y<M'.

&M~.eL Xt TeE~ft y<~ oM~f tTrof <Mw a<!Tc<, ~f ~oft&r'

~«t. – É~Ttf TM!r<M' ~ep) f!)KhT«f «~pa~ ~S~e<f. Vo~'

plus haut, p aSg aqq.

Page 385: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE tll, CHAPITRE I. 373

cases vides, ou des lieux dont la théorie forme la

foptqueet c'est sur la Topique que se fondent les

eux sciences discursives, ou plutôt les deux arts de

opinionet de la vraisemblance, la Dialectique et la

Mtorique~

Mais l'universalité des axiomes comme des opposi-

ions repose sur l'universalité de l'être. L'universalité

e t'être, à son tour, repose sur le rapport commun

e toutes les catégories avec les substances dans les-

elles elles existent. C'est parce qu'il ya de l'être

ans toutes les catégories, qu'aucune n'échappe aux

viornes or aucune n'a d'être que dans la réalité

un Être en soi. Ainsi, c'est de leur rapport avec

Etre en soi que les axiomes tirent leur nécessité,

ni en fait les lois de toute démonstration. Si, dans

eursapplications, ils appartiennent aux diverses

menéesdes divers genres de l'être, si, dans leurs fbr-

nutes abstraites, ils ne peuvent être l'objet que des

jwculations vaines du dialecticien, dans leur essence

M<t. t, n A~yM yftp&aXe)tTMte<!< Te <M~

p)!Topoto)!< o~X~oyttT~toXt

Mp! &t <w~< T<htOM MyojMf* o~ot eMf eï xo<f~ ceph.~oX-

~Aa~epJ~fM' df~H~ o!of ToCfMtXXof ad %TTOf T<0t.–Ko~etMt ~f

WM<oe<~ee!

e<t~)' y~c< ~t~poMt' ~ep! oj~fyttp )!]t<xe<fte)'of ~<ym'-

(M:. T<t~M), ~Oy tXf <~ ~~TtOf ~«~~)tT<H T~~pd~eM, Xt~e<

'M)M< <<ML~ ~tMT~~m~ T!f< jM~THttX XOt! ~t)TOp«!!S'<îf yap eft~t!

fX" o<:)t~t, ~M&ejMOn) 0~~ ~tfTOpMM~<a~' ~6~ &TT<M ~e< T<M

f~M – A<y«) e0)i) ft&' T~ MN* &MK~TO<'yévos <fpOT<t<ye<t.

!V, p. 66. i. 8 XpMMeM (tef tM~M, ~Tf ToC ~fto< MT~ of,

"w Je to y~o<

Page 386: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

574 PARTIE HI.–DE LA MÉTAPHYSIQUE

intérieure d'où dérivent et les applications partie

Hères et la généralité logique, ils relèvent, comn~

les oppositions universelles, de la philosophie prp

mière

Si les principes communs se ramènent à un m;

mier principe, ce ne peut être que la loi de la

première opposition, de la contradiction de 'être

et du non-être cet axiome que la même chose oc

peut pas, dans le même temps et selon le ment;

rapport, être et ne pas être~. Ce n'est pas là une pro

position susceptible de démonstration car il est im

possible d'en trouver une qui soit plus générale mais

ce n'est pas non plus une hypothèse ou un postubt

d'une valeur conditionnelle. C'est la condition de tout-

pensée, le principe sans lequel il n'y a rien de con

cevable, qui est nécessaire, qui ne peut pas ne pa'

être et qu'on ne peut pas même ignorer3.La consc

quence immédiate de ce premier principe est que les

contraires ne peuvent pas appartenir, en même temps

Afet. IV, p. 66, t0 &fT' être! ~of <~< <~T<t uno~tcf.

(To6M y&t<)t<!ïo& To !to<t0f), ToS

~ep<ro ~f $ ~f )'f&)p~o"*o!

TO~Tf~ ~~T!f .&<&)p&t.

Ibid.p. 6y, t. a i Ta

y<tp<tjT~ <~Mt <iirftp~e<f

Te K'!i f*t! M'f~

a~ftTOf T~ ftJTM <M< tMCTotT~ aM.

tHd. 3 Be&MoT~ ep~ <M<Mw, ~ep< <~ A~eu~f*'

T<W ~fMptfMO'~TttfTe

yftp <M«ty)t<Mbf eÏMM tl)t< TOM~TOf (~Ep< ~fu'

yfMp<!<w<nf, «aT<MT<M ~e~TM) xat! at~ttoCerof ~f yap <!f9yt'!Mt' !X-'

TOf 6t<oTf &'MefT<t TMf ~T&K', TOtrM oj~ ë<OCe<Kt. ~n<tt. p0!t !i0;

Arït J* M!to9e<y« o~' a~nf~ af~ Kt! ~f0t< ~t' a<T~ tt<t< Jo~eft' !?

Page 387: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE 1 575

selon le même rapport, à une même chose. Car toute

contrariété implique une privation, et toute priva-

tion une contradiction Enfin, le principe de contra-

diction a sa réciproque qui n'est pas moins nécessaire,

et qui donne la loi universelle de la vérité et de l'erreur.

S Hestimpossible qu'une même chose soit et ne soit pas

en même temps, il est également impossible qu'une

chose ne soit pas et quelle soit; s'il est impossible que

les deux propositions contradictoires soient vraies en

même temps d'une même chose, il est également impos-

sible du* elles soient toutes deux fausses. Point d'afïir-

mation, mais aussi point de négation qui ne soit ni vrain

mfausse. D'ou il suit qu'entre deux propositions contra-

dictoires, il n'y a pas de milieu. Les deux parties op-

posées de toute contradiction se partagent toute l'éten-

due du possible, tout le domaine de l'erreur et de la

vérité~. La contradiction est donc la règle à laquelle

ta démonstration se mesure toute proposition qui

a pour conséquence une proposition contradictoire,

est par là même convaincue de fausseté.

Les axiomes ne sont pas la source des démonstra

t'ons mais ils en sont la règle et la condition. Puis-

')t il n'y a pas de genredont toutes les classes d'êtres

J~<tV.p.SS.t.

tbtd. i. :t AM~a fMJf <w~e (Mra~< a<)T<~<!<K&~stxSe~eraH e<Mf<oM

&tty)Mf < ~M'fM <hf<~MM MÛ' ~f<~ OTMUf. P. 85 L t6

<'M'tp& <!fT<~aeM eMf &s eM" ?e <~t!! aXttCeK eh'M' ouJe ~t)

~Kc&r«.–Af~xtf yap t)~ a~t~re~t .&~Mpof f~'at ~op<ox aA!t6M

.,s 1IJ'"(IS.-1'«(' iiis dptiq4aews &ŒTepov el'eat P.OpIOIl 4,'Knoéç.

Page 388: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

576 PARTIE IH–DE LA MÉTAPHYSIQUE. 1

ne soient que des espèces plus ou moinséloignées, i)

n'y a pas de principe dont on puisse faire tout sortir

par voie de déduction, pas de proposition dont toutes

les propositions possibles soient des conséquences

Mais il y a des lois auxquelles tous les genres, tousies

principes, toutes les propositions sont soumises~. Ce

sont ces lois qui établissent des rapports nécessaires

entre toutes les sciences, et les assujettissent à des

formules universelles. La proposition aCSrme ou nie,

la science démontre une chose d'une autre, un pré

dicat ou attribut de son sujet et c'est à une première

proposition qui affirme du sujet ou du genre son pré

mier attribut, queremontent les démonstrations

mais au-dessus de la variété des sujets et des attribub

s'élève l'axiome immuable au-dessus des principes

contingents,sur lesquels sont fondées les diSerente'

sciences, les principes nécessaires quiles enchaî-

nent les uns aux autres et qui les enveloppenttous.

avec toutes leurs conséquences, d'un uniforme réseau

&M!&. el. xt (Mre y<!p Ânw &M~r<t ep MM y~e<~ o~re et f"

oHf Te MfA Tttf aJï~ e?f<Mep~ck.

énal. post. I, axxtt A7~' oûdé sânr xo:vo-rv âp~;wvoTdvs' eia~é r~rrs

~tmtt.pMt. ï, xxxn A~' oJJ~ T<iif xotMw <i!p~<!woMpT' e!f<H ï'

&' ~KM'Mt ~e<eT<U' X~'W )t0<f~ oïof T~ <Mf ~MHM <tHcCM"

T4 yap y~tt TfM' ~aw ~repe, :t<d T~ ft~f T<'« <Mco&, T~ dé TOM TN'

~)M{p~t< ftJfMf, {<eN' &' Je~tM~roM Aa TfSf xotfMf.

Ibid. V! Ap~ ~<tT<f. T~ ~pfSTOO TOC ~fOMt <Sp!J~~TfH

tMd. H Âf<~ar<w <tpX~ c<'MK~cr"~< a~<n" f~f ~M <)"

&~ ~<§!M, ft! at-f~ot ~e<f Tof (Mt6~J{te~ T.- e~yx!!

tM' ~HoCt (MtOtt~ottefo~ i~fwftat.

Page 389: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE ÏH, CHAPITRE 1. 577

(('analogies. Toute science suppose donc trois élé-

ments distincts ce dont elle démontre, ce qu'elle

démontre, ce par quoi elle démontre; le sujet, l'attri-

but, l'axiome 1. De ces éléments, le dernier ne lui ap-

partient pas en propre, et ne relève, à vrai dire, que

de la métaphysique. Toute science pose le rapport

d'un sujet à un attribut dans une thèse dont elle est

seule juge. La métaphysique coordonne toutes les

thèses à des axiomes supérieurs.

Mais, de plus, aucune science peut-elle s'assurer par

pHe-même de la réalité de sa thèse, ou de son principe

propre ? Ce principe donne le rapport d'un sujet avec

un attribut qui fait partie de son essence il donne

la nature du sujet. Mais ce sujet existe-t-il ? C'est une

question préalable à laquelle ni la thèse ni aucune de

ses conséquences ne sauraient fournir de réponse~.

La thèse n'est donc qu'une <~tRt<:on, si l'on n'affirme

pas la réalité du sujet et si on l'auirme, ce n'est qu'une

~po~A~M~. La question de l'existence réelle n'est donc

~M~. CMt. H Ë)tMM<MM'oB<H dé <?&M< ~no~MH tXXt~XaM «tTat Ta

"Mt~. HowA J~ My« oTs~MSt~TtM

<5< ~t TOt!T~f <MToJe«H'UMM, a~X' OU

Mp! &' ~«M'<!<w<Hf MM* <SJe<)[M!ou<nf. xxxtt A< y<!p ~PX' ~"<~t e~

M'Te fMt)~ep!

AI t* "S" uiv xo< ai J~ ~rept ~tfu, o!o<'<!pt9-

fMf, ~~eOof. vnï T~ y< ~!<re< Tp~tT<mTf! ~n, ~ep!

ô' Te Je~ftxn !ta<

4 ~M«n <M~ & Afet. nt, p. 45, t. 9 Afayot ~ap TtfMf e~(H

"M nEp! ï! <M~ ït~tw D~ f!t<!Je<&f.

JMe<. VI. p. Ot, t. 94 (MJ* Ci ~T'f &TT' TO y~O.; ~ep<à

~P*yfMtTt<!eyM< M!6~f MyOMH.

Anal. pott. !t Q&tMK < {tef 0)[OTepOfOM"T&'f ~Op~ Tt)t "!ro-

Page 390: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

578 PARTIE IM.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

du ressort d'aucune science particulière c'est unp) o

bléme universel qu'il n'appartient de résoudre, et

même de poser, qu'à la science universelle de l'être

en tant qu'être. La science de l'être est la science de

l'Être en soi, et c'est dans la réalité de l'Être en soi

que consiste toute réalité. La philosophie première nedonne donc pas seulement a toutes les sciences l'unité

logique des principes communs elle les réunit toutes

dans l'unité substantielle de l'existence. L'unité lo-

gique est une unité relative, qui n'est quun résultat

et un signe de l'unité absolue des substances.

La métaphysique n'est donc pas une science gène

raie dont toutes les sciences particulières ne contien-

nent que des conséquences. Elle est universelle, mais

parce qu'elle tient le premier rang L'être n'est pas le

genre suprême, ni la source de tout être, mais un

universel qui repose sur l'Être en soi. Les catégories

sont ses genres, les oppositions ses dinérences~:

l'Être en soi est le fondement commun et des c~e-

gories et desoppositions.

C'est un genre qui forme

t'objet propre d'une science déterminée et qui a ses

parties, mais auquel tous les genres se rapportent~.

et qui étend à tous ses formes et ses formules. L'Etre

~<f)W6W< ~ft&tfMMM, <!<!<'X~yM T~ e!if~ Tt, ~t~MM' A'M TOfTCf,

~pM'tt~f.JMet. VI, p. n3, 2t &~ )M<MX<M<o<ftM< ~T<

wp<5r~.

!b!d. Xt, p. 9t~, L 7 T~ ~MtfTMUMtW &M~t~<M~

TS< ~p~TM

Aa~OS~<MM~MWTM~M<S 'M~O<{~etM ToS ~!fTOt.

tbM. tV. p. 65, t. t9 E~t) ~<TT<Te ~f T~ <«t9<!X<w K<Mf~'

Page 391: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE 111, CHAPITRE 579

en soi est comme ia tige qui produit tous les ra-

meaux divers de l'être et du savoir; et c'est dans

[Identité de la tige que toutes les variétés des ra-

meaux trouvent un principe commun et des lois

nécessaires de ressemblance et de proportionnalité.

Ainsi se concilient les deux éléments qui avaient été

confondus par la dialectique l'unité formelle que ré-

clame la science, et l'unité réelle qu'il faut à l'exis-

tence l'unité formelle, l'universalité, dans les analo

gies de l'être l'unité réelle, dans son Individualité.

CHAPITRE Il.

Puissance et acte. Mouvement. Naturecorps

et âme; puissances

successives de la vie. Humanité, fin de la nature. Fin de l'huma-

nitépratique, spéculation.

-Science démonstration; induction;

déRn!t!on; intuition.

Le premier, l'unique objet de la science de l'être,

est l'Être proprement dit, la substance dont toutes les

catégories ne sont que les accidents. L'être propre-

ment dit n'est pas seulement le sujet dans lequel elles

existent etqui

n'existequ'en

lui-même cest lesujet

<MtM«f < ~pMTOf, <&nMp~M< eux ~<rr<f, <!HM T~ ~f <rpf! et', T'i'

~e~f.

Page 392: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

580 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

dont elles s'affirment toutes, et qui seul ne s'anhmc

de rien. Il y a des choses qui ne peuvent jouer dans

ia proposition que le rôle d'attributs ily en a

d'autres qui peuvent servir également, dans des pro

positions duÏérentes, d'attributs et de sujets; ily cil

a d'autres enfin qui ne peuvent servir que de sujets à

l'affirmation ou à la négation. Dans ia première classe

se rangent les attributs universels qui constituent ics

analogies des genres différents; dans la seconde, les

genres et les espèces; dans la troisième, les individus 1.

L'universel n'a rien de la substance, ni par conséquent

de l'Etre c'est un rapport, une forme dépourvue de

réalité. Le genre et même l'espèce, attribut et sujet,

est une substance secondaire qui suppose la réaHtt

L'individu est la substance primaire, qui ne suppose

rien, et par conséquent la seule vraie substance e.

L'être ne consiste donc ni dans les catégories géné-

raies de l'être, ni dans aucun desgenres qu'elles

t'en

ferment, ni dans aucune de leurs espèces; c'est l'être

particulier qui n'existe qu'en soi, d'une existence in-

dépendante, l'individu, objet de l'expérience,ou de

l'intuition

/i)Mt. pr. Mm.

Ca~. v Ae~epoH o<!<r&H~y<M'T<M ~f e!< e~MM' a! ~rpt5rMM

o&M ~eyJt<efa< MHm~ouM.

Met. Vtt, p. t55, t. :7 npf5r!t (t~ yftp<M!<~[ Mtot ~MKrr~ t M"

t!~<tp~e< ~MLy TO xaOoX<W XOt~.––ËT< oj~&t MyeM< TO X~

~0<t«ft~oe, TO ? )MOJX<W <Mt6' ~ttOtt6<{t~fOM T<~< MyM<U <

ïMd. p. t56, t. t5 <MO~ c)t(t<ffe< T<w ~ott~ «TttyopouftS'M

Page 393: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE Ut.CHAPrnŒH. 381

Ua)st expériencenous monhc les Individus dans

x)) changementcontinue!. C'est ta nn

premier prin-

cipe dont il serait absurde de chercher la démonstra-

tion. H faut savoir faire le discernement de ce nui est

t vident par soi-même, et de cequi

a besoin depreuves,

ij ) m<savoirdistinguer

le meilleur dupire,

etl'expé-

est meilleureque

le raisonnement.Que sert à

t.hCttgle né de discourir sur les couleurs? La couleur

))\t pourlui

qu'un nom, dans ce nom il nepense

rit'n. C'est une faiblesse de l'entendement que de cher-

chu des raisons ou le sens est seul juge Les indivi-

dus changent donc; ils sont, mais aussi ils deviennent:

ilspassent toujours

d'un état à un état dînèrent, et

(emplissent le temps de leurs variations. Dans cette

succession de modIScatIons et dans cettecomplication

d'éléments, qu'est-ce donc qui fait l'être? Quel est le

'ej:T<ftt<M<Me. Le T<Me T<exprime l'ohjet immédiat de Fin

luition, et par suite l'essence, !'Etrc individuelpar opposition à la

qualité qui peutêtre

l'objet d'une conception géncratc. Ibid. p. t56.

M))oj<~<(t Te tM~ï~ ~o:of opposé à oj<r~ Te x<d r~ ro~e. V, p. t«6.

ËtMKtTOf & M W<!Je T<. P. 100, t. 7 T~ Mroxe~fOf ~<[

(ttHf~MJMtt' ~OM Myet<M, xat T<<Je T<~<Mp<(TT~f

f~. M, t T~ ~e~t~MM ïA~Mp~

<!«[ T<5f f!fSf, ot! jHfa-

'~OM<fpMte<f ~f! T~ A' a~y~pt~M~. ÔT< ~~er<[t ïouto ~f~e<t),

'~X ~t~of ewX~oy&MMïe y<!p T« ~efer~î <&f T«p~~ ~ep~ yp&'

f~Mf, ~are &~)nt To!< TOM~roM ~Bp! Te?f ofO(M!T&)f e!fcu T~f XJ~of,

M<n.~0~. Vtn, ut T~ ft~ oSf tfpe~f, «t< T<M:ïou ~)Tew

~f, e~tM a<e<ht<Kf, e~p~MT~t T/e ~<Tt< JMwo~K. – Z~reM' ~o-

)ct&'~TMf <~et«f Myou ~eB~af, «MKSf ~fe<f T~

6~T<of

X~F~'t ~fer~ iM~ Ta ~<cr~, xcdap~" f"' °PX~"

CC~<.tV.p.8t,). 99.

Page 394: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

382 PARTIE III.–DE LAMÉTAPHYSIQUE

moment qui le détermine et le trait qui le car~

térise?

Tout changement suppose, entre les états qui s~

succèdent, une opposition. H n'y a donc pas df

changement du non-être au non-être, qui ne lui est

pas opposé, mais du non-être à l'être, de l'être au

non-être, et de l'être à l'être*. Dans les deux prémières espèces de changement, l'un des termes n'est

que l'absence de l'autre; ce ne sont pas des chan-

gements d'état et de manière d'être, mais le comrnen-

cement et la fin de l'être, la naissance et la mort. b

troisième espèce de changement est la seule où les

deux termes soient réels; l'opposition n'y peut plus

être de contradiction, mais de contrariété c'est là le

vrai changement, le changement d'état ou mouve

ment 2.

Mais les contraires appartiennent à des genresdont

ils sont les différences extrêmes. Si donc le mouve-

ment consiste dans le passagedu contraire au con

traire ou à quelqu'un des intermédiaires qui séparent

les contraires l'un de l'autre, le mouvement n'est pas

une chose qui soit par elle-même d'une manière

abstraite et indépendante, non plus que l'être et que

Met. XI. p. 235, L *4-a6.

tbift. p. a36, 1. t a É~ ~&nt )~Mt<n< f<eT<t6o~ w, ft~&~

Tpe« <t! e~tft~M, TM~Mw J* <~ «tï~ yA'e<np )t<~ ~OopÂfoJ xtt'xK';

ttM<M J' eM)' C:! MT* tt~~Mf, )Myx<t T~f eC ~tOXM~MOU e~ ~<

ftHfOf ft~Mf e&a< ft~f. Td J~ ~«~(«Mt ~s~ft (teto~

Page 395: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE Ml, CHAPITRE IL 385

i onite il n'y a pas de changement absolu et hors des

choses comme l'entend la philosophie platonicienne;

i1n'ya que des changements dans tel ou tel genre, et

puisque l'être est le sujet qui change, les genres du

changement sont les genres mêmes de l'être~. La

troisième espèce de changement, le mouvement sup-

pose donc trois éléments l'être qui est en mouve-

ment, ou le mobile, le temps pendant lequel le

mouvement a lieu, et la catégorie où il a lieu

Cependant toutes les catégories ne sont pas sujettes

au mouvement. n n'y a pas de mouvement dans celle

de l'Être, mais seulement de la naissance et de la

mort; iln'y en a pas dans la relation, dans l'action

et la passion. H ne peut y avoir de mouvement que

dans les catégories soumises à la contrariété, et ces

catégories sont au nombre de trois la qualité, la

quantité, l'espace

Le mouvement est triple; iln'y a pas de mouve-

ment plus général auquel les trois mouvements

puissent être ramenés. Rs s'unissent dans l'Être qui

Jfet.p. 22~, t~

(Mx e<ff< Je ~!)OM <MpotT<~'cp<~MTa' ~ew-

?MAe<y<îp ae! MtA T~ToC ~prot xaT~op~i!.

1' VMt, TH! Tp&t y<!p ~T<~ ïo Te x<fo<fof, o!of~Sp~Bo~

't ~<M, jMt} ~re, <bf ~pJfoe,<M!<

Tp~TOf<A ef M. Qt'ot n'a

pas de sens

'a Onpeut Ufe ~eJeof, d'après

le passage suivant, !bid. V, tv

"y<t~ e&f~ Tf Te )[<tt0)!f<ef0f~ eJbf MpMtrof ~<!cofj «~ ef T<f<

'~MO )HM!<!&H.

iHi~.Xt, p. s3@, t. 3 S A~yit!! TpCft e!f<!MXtf!f?e<~ ~MOM, sJ.70M,

~,<.T.P&Ytî, tt.

Page 396: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

584 PARTIE HL–DELA MÉTAPHYSÏQLE j 1

est le mobile, et dans le temps où il se meut. Us se

séparent dans la triplicité du troisième élément, quiest la catégorie; ils n'ont rien de commun qui lesunisse d'une manière immédiate les uns avec les

autres Toutefois, dans cette triplicité même, il a

quelque chose de général qui en fait l'unité c'est le

rapport <des deux termes contraire? entrelesquels

chaque mouvement s'accomplit; l'identité de rapport"

donne une proportion qui soumet les trois genres ;')

l'unité d'une mesure commune. Comme les opposi-

tions de rêtre et du non-être, de l'unité et de la

multitude, le mouvement est une universalité d'ana

logie 2.

En passant d'un état à un état contraire, l'être de.

vient ce qu'il n était pas. Ce qu'il n'était pas. il pouvait

l'être, et il l'est présentement; de la puissance il a passe

à l'acte. Le mouvement est donc la réalisation du possible~. Mais, avant de recevoir la forme d'une statue.

l'airain n'existait-il pas? L'enfant n'était-il pas avant de

devenir homme? L'airain existait, mais il n'était pas

la statue; l'enfant n'était pas homme. Le mouyemon!

n'est donc pas la réalisation du mobile d'une manière

Met. XI, p 929, i8 Meraf&~ety~p

fM «T~ Tôt ToS <~TM M

Tt)y0p~!t.K<MMf TO~tNf OuS~f ~<!T<f Ot!J* {t~[ «tT~OjM;'

p. 119,t. 6 (M~

y~TOtCM <!faX<!eTa< o~r* e~ ~a o~T' e~

Met. ÎX, p. t8z, i. 5; XI, p. 2:9, t. ao.s tbid. XI, p. 229, t. 26 AM)p)!ou xaN* &ftarop y~fo~

Te? M'

~M~te< ToC d' et~eXe~e~t, T~f ToC~)~te< T<MoCT<t<tArr~ efep~"

Iéy« xismeris,.

d' ¡vreÀex"eú, 'v TOÎiau. f fOlOÜT<ÎlI taTllI

1 1

~~y~ )t~<Hf.

Page 397: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE CHAPITRE Il. 585

25

absolue, mais la réalisation de sa puissance. Enfin la

réalisation ne commence qu'avec l'acte, au moment

ou ia virtualité entre en action. Le mouvement peutdonc être dénni, dans ses trois différentes catégories

l'acte du possible en tant que possible C'est une

définition universelle, fondée sur le rapport universel

de la puissance'etde l'acte. Quelle que soit la diffé-

rence réelle des termes, leur relation ne change pas.

Qualités, quantités, espace, c'est toujours la puissance

et l'acte, et toujours le mouvement; de la différence

même ressort ia ressemblance, et de l'hétérogénéité

t analogie qui la domine.

Les contraires entre lesquels se passe le mouve-

ment constituent les deux membres d'une opposition

H est donc impossible qu'ils existent à la fois en un

mêmesujet. Ils sont, dans les limites du genre qui

les renferme, la négation l'un de l'autre. Or il est de

i'essence de tout ce qui peut être de pouvoir aussi

n'être pas. Ce qui peut devenir l'un des contraires

peutdonc aussi devenir l'autre ils tombent tous les

3&t. XI, p. s3o, L i B«ft&~fe< <f<fe!o6<M <~af ~fre~~M

<r~ )Mt}o~M~<p<!rep<w

<M~' <f<rrepoy.–<M~ )! ToC ~et~Ko? ~fre~~e«t,

~<t~ ft~~ Am~. (M y~p teJïA ~aXx~ e!f<M xat &ft~t€< T< –

Etr~ <K!ta~~ ~Wtp0<

XP~<~TOUt~f «M

OpftTOP, )} TOU ~Mf~TOU

? A~ttt~A~MM~eM x&~o~ ~artf.

tHd. IX, p. 187, 1. 29 n&M A!);f~t<< ~Mt ~< afT<~a<re~t&yT<

Te ttMA~M AMMttAf tMt} erMtt <[<! ft~ tÏ)MM. P. 189,

t. 6ÔM y~p XttTS

M ~)~)a< MytMM, T<t<!Mh'~or< ~M~rop Tf!Mfïh. Vu, p. tSg, a6

'M' <M~t&M;tp~Mf

T<fA Ta <tt!fo eHo<' T~< yap <Trep~eaM oj<y&[ oj-

Page 398: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

586 PARTIE tH.~DË LA MÉTAPHYStQm:

Jeux sous la même définition et sous la même ))!j,.

sance. Par cela même qu'ils s'excluentréciprc(n),

ment dans l'acte de l'existence. ils se cotit~nfhi

ensemble dans ia virtualité d'un seul et même pr~

voir' Les contraires supposent donc comnx )< h

condition un troisième terme, qui les unisse en s~

unité. Il les enveloppe à la fois de sa puissance: ;)

l'enveloppent tour à tour de leur réalité. Ils lui s<') <

de forme, il leur sert de matière

Ainsi la matière n'est pas une nature à part, a\~

ses qualités et ses habitudes spécifiques. Tous

êtres animés ont pour matière le corps. Mais le corp

n'est pas la matière d'une manière absolue les quoi

tés qui caractérisent les corps simples, la chah'ur

le froid, sont déjà de la forme. Le corps le plus <t

mentaire a donc déjà sa matière, d'où se dévelop;)' t

tour à tour le froid et la chaleur. La matière est Ii'

terme relatif qui suppose le corrélatif de la (bm~

point de matière qui ne soit la matière d'une cho~

tesujet

d'uneopposition

déterminée~. Autre ac!

e~t fOTMtetft~Mf,o~p ~eM MWTow-~e~f yotp a~o~~ ~XoSTMï

<TM. XI, p. 2t~, t. t&; IX, p. ty' L 4 Ao~Of ~tT~ it ~OT!ip)!r.

~<!yo<ô eJrof A)~o?ïA ~pSy~Mt<M<D~f cr~ptXMp.

Afe<.tV, p. 189, L t: To ~f m ~Mta&M TeM!)rr&t42

~e<, T<H' ~at~~ ~Mt <M<!t~tTOf.Ka~ ï~ ~epys&tt ~M ~AifaTO!

<t<i'T~ ~MMt~tu o~Mf o~Jrepo~ <M?J~repof.

UMd. XH, p. t~C, 1. 22 ÉOTt~~ptt

TtTp~Mf <Mtp~

Ttt ~MfT'!

~*)t.P. :4t, t8.

J f~ <!<<t. et Cofr. H. t Afte!< ~<t(tew ~« eh«~ T<<Mt<'7"f ~è'

Page 399: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

ht\!Œ !U. CHAH!!Œ H. M7ï

2~.

tut)'' puissance;autre tonne, autre matière. Les prin

,ij)cs, identiques dans tous tes genres de t ''tre, sont

ttttn.sdanscttacun; Identiques ail point de ~uede

Lt [ctation et de t'universatite, Us sont divers dans

)j jt'atite. Partout t'anatogie, partout!a dinercnce

).<' premier aspect que présente te monde, est

cchti de i opposition le jour et la nuit, t amour et la

htinc, le ttien etle mal, te filli et t'innui, te plus et

tt moins, le combat eternei deprincipes

ennemisqui

ntrdcut et reprennent tour a tour t'avantage sans

[use et sans raison, ou qui s'annulent nmtuettonent

Lus t'immobilitedc t'équitibre. Mais ne nous arrêtons

)'.)-< t'apparence; les contraires se succèdent. le

in~ndt' change, les choses se meuvent au\~ contraires

il t~mt une matière d'où ils sortent et oil ils rentrent

'n«essivement~. L'opposition des formes nest nue

~~TT&t)) T&nt aMttTaw, a~X<t Tat!tt)f «u ~<Mp«m)« aXX* ae~ ftet' ëf<t~r<

~M )i< ~ferat T<t fMt~oM~Mt <~<.<~e!a. – Ù<TTe trpMTOf ftef To ~«~

T~~t tMo~tTOf cp~, ~e~repopai ~fafTt&xre~, ~~M J' o!ot)

~ep-

~{ )t~~«~pjTttt, Tp~TOf

~ti -aEMp<t<M

È'~Mp)«d Ta TOMUTa. ?<.

~p.4X,t.t5.

.M<!<. XM, p. ~t*. t a6 Ë<!T< T~ <t<'T«t <t<H ai <<M ~X~Ot ~~&)H,

!T:< J' <M<At; <M[0<&<W~y~ T't <CMffat' <tf<tX«~af TWTat tf~PTMf. P. a43

!? n<r<M' ? o~Tf~f (t~f e«e!f oJx ~<rr<, Tt5 af~o~ott J~, <&!irep et

d:o< ~n~X~ *'pe!<, TO eMot ttM CT~p!)<TM «M n <~tt. ÂX~~

~t~ott To~TMf~pof ~ep< &HMTofy~fo< e<!T& ~<rre <tTo<~eMfte~

Mtt Ma&oy&W Tp~Z, <~T&H Xt< <tpX« TeTT~pEt~ÀO J* f~X&t.

't.t0.

M~. l, tttnptBro'' fM" oSf e~~Stf "ï' "px'" T~t'TM ~efot',

~T:pMt <T< ~tt~yx)) )t~ <o T< UtTOMM~M )t<[! e~t'a< Tp~.

Page 400: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

388 PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE

la double limite dont elle peut remplir l'intervai))-

qui mesure rétendue de sa puissance

Tout objet de l'expérience se compose donc, a

chaque instant de sa durée, d'une matière revêtue d'une

forme et dépouillée, pr~e de la forme contraire:

toute réalité veut trois principes la matière, la forme

et la privation~. La forme et la privation, liées l'une

à l'autre comme les deux limites qui déterminent la

puissance, forment un seul système qui a dans la puis

sance son opposée Mais, dans la réalité de i'exis

tence, l'une des deux formes contraires s'anéantit

devant l'autre, et ne subsiste plus que dans la \ir

tualité de leur sujet commun les trois principes st-.

réduisent donc, non plus à la matière et à t'oppos;

tion, mais à la forme et &la matière. Mais toujours, des

deux principes, il y en a un qui est double; l'unité de h

définition enveloppait les deux contraires l'unité de

la matière enveloppe l'un des contraires avec la pub

sance. Le sujetest un et il est deux il est un, dans

son être et sa réalité deux, au point de vue de la

logique et de l'abstraction. La triade se ramène à une

dyade la trinité à un couple le couple se déveioppf

en une trinité

JM<<.X, p. aoo. t. 3.

îbid. IX, p. ~6, 1. *?; XI, p. 999, 9t; p. 938, i. t?; Xi!

p. 943. t. 93.

tbid. XI!, p. 9At, 1. *8 Tp&tvA <~Mt

tpeM<J

<~<u,

~e- &'eMr&*eM, Te Tp<t0f

P~.J~THË~Tt ïA )!««e~(<efof <~MO~

ei~e'

IPl.r', "VII:

9378 Ji Ta WOlteifUtlOP c4uoFf fÙtI 'l', et&el Jè J.

Page 401: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LÏVRE m, CHAPITRE Il. 589

Maintenant la matière n'est-eUepas

la substance

et <.i~ l'être n'estque

la substancequi

apour

accident

tout cequi

n'estpas l'être, la matière n'est-elle

point

tt'trePSans doute, aupoint

de vue<?.T~rNNe

d'une

~cncrauté superficielle 1.Mais à

y regarderde

plus près

etplus

à fbnd, la matièrepour être, en un sens, le

sujetde la forme, n'est pas, à proprement parier, la

substance, ni ia forme l'accident. La matière n'est rien

par ette-même elle n'existepas

d'une existence à elle

indépendamment de sa forme ~.Indéterminée, indén-

nie comme l'accident même, elle s'affirme comme

l'accident de la réalité qui la suppose 5 elle n'est que

la puissance d'où sortent les contraires, et non le ion

~M &rt< (t~f f~f ~<!o Xe~T~of e?fM T<~ ap~~<rr< <5<Tpe!t.

At!o Mt

t'tt~ tp aotC~~ o~T* <tB«tfTe~fSt A!o, &tt To~tepof t%<tp~e<f

TÔ e~ffM

~Toit, <tXX<~Tpe!f. En générâtla

sunpHctté numérique ou réette (~f

~(ty, T~ ~)to]te<~f%') n'empêche pasla

duplicité logique et relative

e!3e<, 3~y, Ty e7f<n). Voyez plus bas.

J~t. VII, p. 13o, 1. 26 NCf (t~f ojy TMir~ efp<!T<M,~or' ~<TT<f

< oj~, ~t< MC* M)toxe<{t~f<M' f!M «O' eJTtt ~Xa. &ef~ ft~ ~fof

eirtttf ogy<tp

tttft~M'. Â~J te yap ToCfo <Mtt~ef, XM ~r< <!Xt! oH<r~t yi-

ttTtt.

tbid.p. 131.1. ao A~t~rof y<~

ï~ ~p«TT~fxof T<Me T'

M~Mt ~<Mf tMOMaM T~ eJo~t. Vit, p. t46, t. :0 To ~«Of oJ-

~'OTt JtsO' <t~~ ?~MtT~W.

~t. tX, p. t84, t. 98 ELott<!pO<B< ~ftS~fet T~ ~«e~t.of

)M~!< )MttA t~ ~w" Mt <«?< <<ft~ y' <M(MOTa.La matière étant

'Lignée par &M?)w, cela, la chose qui en est faite est appelée par

Amtote Att<M~~ le de c<h; &~MM~ d'~ewo, comme X~tfox de M.

<M. ?-<. VU, p. t4t. L 9 Ê6 e~ o~ ~W y~eraf &"a, X~ erM, ~M'

)~WM, e&e e)tMM, <Bt*' &t~MM~ e!bf <t~McJ ~o< ~X~ ~~of.

L~eworépond en ce MM au «Me (voye* plus haut, p. 38o, n. A)

Page 402: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

590 PARTIE Ht–DE LA MÉTAPHYSIQUE

dement sur lequel ils reposent; la substance est le to~

que composent, reunies, la forme et la matière L

matière n'est donc pas l'être; il n'y a d'être que dans

ce qui a pris forme et qui existe en acte. La forme

occupe seule le champ de la réalité, et seuley tombe

sous l'intuition La matière ne se laisse pas con

naître en elle-même~ elle ne se laisse pas voir, mai"

deviner, comme l'inconnue qu'exige la loi de la pro

portion, et par laquelle l'induction complète ses ana

logies~; à l'induction même elle ne se révèle que dans

le mouvementé dans l'action où elle se dérobe, el ox

elle cesse d'être elle-même pour arriver l'être.

Cependant il n'est pas vrai, d'une manière absohx

que la matière ne soit rien. Ce qu'elle n'est pas, d)c )<

peut être elle est en puissance, sinon en acte. Mais

quand une forme s'est réalisée, la forme conhaix

!X, p. t8i, t. 8 Êo~e X~oftef eïtKM o<! roJe <!XX*~t~Mfot' M-

TO )N&~tMf cJ 6!X<W f!XM ~tfOf.

La &Mme ou acte est ie T<Meproprement dit; la matière et mfmf

le concret ne sont T<Meque par

ia forme sous laquelleils

apparaissf~

De An. M, t A~'Oftef y~'M & T' T~ ~M~f T~f oJo&tf, T<niïM

T~ <&<<0~, 0 ttaC* <t<!T~ft~f ojt ~T< ~ST<, ~MpOP ftOp~)'

eHM, xaN' tf <fA; X~yer<M T<Me T<. 1/acte est donc le T<Me d'un K&

XIII, p. 389, t. 6 tt ? ~«~pyeM ~p«f(t&~x<d

«pt~ft~ouTo3e T<M"

TOSM Mf0<.

Met. Vn, t49, 96 ~MMTM tM[9' C~T)~.

SPhys. I, vn 6 ~r<Mte<ft&~ ~<Ht ~KOD~ <Mt~ <oyh~ ?

!X, p. t8<, t. 3 ~of TBf <M~' &t<terat ~Mya~fo

~ou~'

~<ye<~ )t<d <~ ~e?owT~ ~xw ~frew < Te &MR«y<w <wopM'

tbid. u, p. 39. t. 8 T~" <~)" ~f xttKMft~M foe!f <Myttt.Jhid. n. p. 39.1. 8: Tyj" f), ¿" x"'O'Jph~ l'oeil'

dll/lrx".

Page 403: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE HI, CHAPITRE Il. 59t

t)C!'tplus et ne peut plus être. C'est donc ta privation

(luiest le non-être en soi; la matière n'est le non-être,

( om'ne aussi elle n'est l'être, que d'une manière re-

lative et accidentelle' la forme est l'être en soi.

Tous les systèmes antiques étaient partis de ce

principe, que rien ne vient du non-être. Si rien ne

peutvenir de ce qui n'est pas, ni cesser d'être après

avoir été, tout ce qui est a été et continuera d'être

pendant toute l'éternité; la naissance et la mort, le

changement ne sont que des apparences; au fond ili

))\ a que contraires qui se mêlent et se séparent. Mais

ti rien ne vient du non-être, c'est que le non-être n est

pas; rien ne saurait être que l'être lui-même; et te

tnonde est réduit à l'unité stérile de l'être en soi. Bien-

tôt on rejette l'axiome antique, et on réhabilite le non-

ctt'e le non-être devient la matière à laquelle la forme

donne l'être, et la matière est double. Mais ce n'est

pasencore là la triade qui renferme les éléments de

la solution du problème, la triade des vrais principes:

matière de Platon est encore l'assemblage et comme

lemélange de deux contraires équivalents, et ces deux

contraires réuste ne donnent que le non-être absolu.

C'est toujours le non être comme l'être logique ce

sonttoujours les généralités indéterminées de la dia-

PA~<. I, vu *M tt~f oJx (se. ~a~f) e!Mu «<[T~ <n~t@e€)t)to<, r~f

~t~ T~<M~<W

tM~ <t~

ïhM. tt n'M~eA~t erep<~o

Tp<{MîoJTf~ Tttf TpMi~ot, x<me<f0{,

t. X.

Page 404: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

392 PARTIE IIL–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

lectique éléatique et de la sophistique. H y manque la

distinction fondamentale des genres irréductibtes (Je

l'être il y manque égalementla distinction de Fab

solu et du relatif, de l'essence et de l'accident dans

l'être et le non-être. Le non-être n'y est que l'équna

lent du faux, le contradictoire de l'être, la négation

indénnie qui ne se renferme pas dans les objets seo

sibles et les choses périssables,mais qui envahit le

monde des idées et pénètre dans l'éternel. Tout se

mêle et se confond, et la réalité s'évanouit avec la dit

férence. Le mouvement redevient impossible c'est le

détruire que de le résoudre dans des abstractions et

des négations telles que l'inégalité,la diversité, le

non-être~, c'est demander à la logique ce qu'elle ne

saurait donner, et qui ne ressort que de l'expérience

Enfin l'élément matériel est, dans tous ces systèmes.

le chaos d'où la raison ou le hasard tirent tous !e~

êtres indistinctement. Mélange ou substance, collec-

tion ou unité, c'est une universalité sans bornes dont

toute variété doit sortir. Que chaque individu ait sa

matière, chaque espèce sa matière à soi, c'est la ce

qui n'est venu à la penséede personne~. Personne

Voyet plus haut, partie ÏII, livre !I, chap.H.

JM~ XI, p. a3t, 3 A~f &' My<w<nf o: ft~ ~epow

iM~ <~M<!tWMt Mt ft~ << <5f oJMf <My« MM~M. Cf. Plat. &~

t56 a b; Pan)t. i46 a.

itet. 1, p. a5, t. t8 ÂT~M y<~A~ot <<~Mf Te5 ~Me<f

~CN < <M&~<!t.)M~ ~M t& <e~)t~M WX<!w ~fM~

M~w. Xn, p. a4t. t. :3 E~ ~<r" ~tet, <RX' ~fMMoJ t«

Page 405: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE 111, CHAPITRE Il. 395

ua su concilier la dinérence avec l'unité dans l'idée

de l'analogie'. Dans cette période d'enfance.2, la phi-

losophie s'est arrêtée aux dehors et aux apparences;

eHc a pris pour simple ce qui est complexe 3 elle a

tourné autour du tout sans se douter des parties; elle

a cru toucher au fond des choses quand elle n'en

était qu'aux surfaces elle s'est posée les questions

dans des termes généraux où se cachait l'équivoque,

et elle s'est fait à elle-même des réponses à double

entente, vraies en un sens, fausses en un autre, qui

contiennent la vérité et l'erreur. « Rien ne vient du

non-être; cela est vrai et faux à la fois. Rien ne

nent de ce qui n'existe en aucune manière; mais tout

t lent de ce qui n'est qu'en puissance et qui n'est pas

en acte; tout vient donc de l'être en puissance et du

non-être en acte; rien ne vient de ce qui n'est ni en

~MTo~ <ML* ~rep<M' Mpoe.De An. H, n Ka~rep

ot!~ ~wo~fo~

t"CTt~J~TOf tM~M~M T~ <~<

JMtt. XH, p. 945, L t6 T~ ?ttre<f T~M < <! <TT<M~eMT<5f

<'MM!f )Mt}tM~f

<~ «t! ~e<& wJTepof <tJT~~Tepa<, ~)j~<w ~T< o~o~-

~Nt Te ~eyaft~MM' ~T!f âtM~rw, ~MHpeC~tM'o<! T<n?T~f!~X*

~repa,

eMf <M) )M} ~MhtT< )ÛJ! T<![JïA j) Ty <tPcfXoyOf.

!Md.I,p.35.i.99.Met. 1, p. t<), L 23 A&n' <MtM< ~Mty~MtTe~eoûaM.

De ~ttt. lî, v;

~e~ett. <!<corr. n, Vt A*M< T~yetf. Nécessité de la distinction

pour

Mwir ceqm'oa cheKhe, Me VII, p. *63, o OÏbf ~Mpo~oe r~ ~~r:

~e7M< A<t tA <~Mw Myee~M, fM~et&op~e<f

<t'T<vJJe < T<Me. Â~a

~AapOpftM~MM S)tT~* ft~, JMW~ TO? ft~C~ ~e!f <Mt!TOC

~tM' n y~erM.

P& ï, n; i~. I.p. tg, 93 6p<~e<

~<*o~a~.Voyet pius

haut, p. 248, n. t p. a84, n. t

Page 406: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

594 PAI~TŒ IH–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

puissance ni en acte'. Ainsi se résoudrait chacun d~

problèmes autour desquels la sagesse antique sY'taii

consumée en efforts inutiles2; une distinction tranche

!e nœud.

De toutes les philosophies une seule avait entrevu

la distinction de la puissance et de l'acte, et c'était

celle-là même qui niait non-seulement toute transfor

mation, mais encore toute forme spécinque, et qui

réduisait la nature aux atomes similaires d'une ma

tière homogène. A force de simplifier les éléments

la différence devient extrême entre les principes ça

chés des phénomènes et les phénomènes perceptible

aux sens; ce n'est rien moins que la distance qui sépare

de la réalité la simple possibilité,«Tout était don

pour nous en puissance avant que d'être en acte

Mais jusque-là la distinction ne se rapporte qu'à l'op

position de l'entendement et de la sensation: elle xc

touche que la connaissance et ne s'étend pas au\

choses.

La distinction de ces deux termes, de la puissan'r

et de l'acte, ne peut sortir que de la considération du

mouvement où ils semblent se confondre. Comment

l'acte tout seul donnerait-il la puissance, et comment

JMet. tV, p. 77,1. 3 Tp<~ f~f t<M ope<B< My<wK, TpJ'M

T<Mt <!yfeoB<M. TAy<tp

~x T~erM & ef~x~

y~Mto&J T< &t wS fttt ATof, ~<TT<J' < De~<n.

et cotr. t. t't

'M<'t.tV,p.77,6;XIV,p.3o-t.t7.

tHd. XH, p. <4t, t. 7 ~ftJxptTOt ~t<Hf, ~f <fM' <Mf!'

M~t«, ~epye~ty < Voyez plus haut, p. 97'.

Page 407: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LiVR!: !H, CHAPITRE !î. 5<)5

!.) puissance, qui est sans forme, se taisserait-eHc

apercevoiren elle-même? Hors de l'être. la pensée

lie peut trouver que la privation de t'être, le non-être,

onp absolue négation formant avec l'être une con-

tradiction absolue. Mais le mouvement est d'expé-

rience, et le mouvement est le non-être dans l'être,

le non-être passant à l'acte. Ce n'est plus le rapport

logique de l'exclusion réciproque des deux termes;

n'est un intermédiaire réel où ils sont liés ensemble

<omme les deux moments d'une même existence, et

.'ù l'un devient l'autre. Le mouvement n'est ni l'être

su le non-être, ni l'acte ni la puissance, ou plutôt il

<st l'un et l'autre à la fois; il est le point indivisible

"n coïncident les opposés, et où une expérience

'ttcntive peut en surprendre le rapport intime'.

La puissance en elle-même est indéterminée; elle

s) ce qui peut être et qu. est pas; elle n'a point de

juantité, de qualité, ni rien de ce qui détermine l'être;

!te ne peut être comprise dans aucune catégo-

'ie~, mais elle se détermine dans le mouvement; le

mouvement est le passage de l'indétermination de la

matière à la détermination de la forme; la forme,

At<'t. XI, p. ~St, t. 90 ~cre ~e~rcMu T~ ~e~S~e~faH x~

ct~p-

?e<M «J &~pyeMW Tt)f e~pttft~Mtf,Metf ft~f ~aXemjf, à~e~o~M~

~MH.

Ibid. VII, p. t3t, t A~y<M fi <~<tf fa9' auT~f (t)!T6 T~ ~re

~oo~ ~te ~OAo ft<!<Mf Myer<t< ois <Sp<or<!MT~ ~rt

y~p Tf xaS* oj

"tTttyop~MM TO<!TWf &t<MTO~ T~ e~fSM ~repOfxai T&if

XMTtyOjMaw

~"Mnt.

Page 408: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

596 PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE. 1

ou l'acte, est la fin; le mouvement est le passage de

l'indénni, de l'innnià sa fin; ainsi la matièrerépond

à l'innni~. L'infini en soi, comme un absolu en face

des principes de la limitation et de ia fin, est «ne

abstraction et une fiction2. L'inum n'est que ia puis

sance~: l'opposition de la fin et de l'infmin'a de sens

et de réalité que dans le mouvement même où l'infi-

nité expire.

Limiter un infini, c'est faire venir à l'acte, en lui

donnant une forme, l'indétermination d'une puis

sance mais limiter, c'est mesurer, unir; l'acte qui, en

déterminant la puissance, en fait l'être, en fait donc

aussi l'unité. Ainsi s'explique le principe de l'identité

de l'unité avec l'être c'est que l'être est l'acte, et l'acte

l'unité~. Ce n'est pas l'association de l'infini en soi

avec l'unité en soi qui donne des êtres et des unités

rée~es; ce n'est pas la participation du premier de

ces éléments au second, non plus que leur mélange.

Un tout n'est un tout que par Faction commune de

toutes ses parties5. Le lien de l'infini et de l'unité est

Phys. III, vn ~t <!X<;ï~ ~«pof<th«m ~T<.

JM<*t. X!,p.:39,t:: !M< &er<M «tO* aMTO eT~u dhretpof,

e~

jM! <~MCft~f!M< (t~ye~M,

Sf «cNot ïA)<ire<

!b!d. !V, p. ~3, t. aTa y<~ ~MM~<e< <M~ fut ~TeXe~?

T<1 Ibid. IY, p. ,3, 1. 2: Tà ¡de 31, àv xarl p..q ~vseaexefy~sô

<Mp«tT<{f&rn. jHyt. IH, Tt A~trerM oBf A<ff!fte< s&M T~

<<<re<pof.

Met. V!n. p. '74, i. 8 K<~ w e!M< eJM~ & ~o~w <&rMj:

tMt ~f ~t' &0 <M~odx ~Mf ~repOf T< «htOX T0<? &' eÏMtt eJOeft TOUT~rMl iJl '1'1' &0 xaJ OÙ" tan" h.pÓJ/ T' J'QOJl 'l'oii eT.œ OÙ, T<WTMVr

e~< <wB ~f T< <~m.

!Md. t. t3 sqq.; p. t?o. t. 9; Mt. p. s58, t. t:.

Page 409: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE H. 597

j'acte, quiunit la puissance. Tout être où'il y a de

t'muni, toute réalité composée d'une (orme', et d'une

matière n'est une que comme mobile, et de l'unité de

son mouvement 1.

Mais rien n'est susceptibled'unité et de mesure

que la quanliMjc'est à la quantité qu'appartient l'op-

positionde finfini et de la fin, de l'imperfection et de

la perfectionLa matière n'est donc point la quantité

en soi, qui, de même que l'innni ou l'unité en soi, est une

pure abstraction, mais la quantitén'est que dans la ma-

tière etia puissance. Au contraire, la forme est ce qui

fait le caractère des choses et qui les qualifie. Entre les

deux premières catégories qui viennent après l'être,

entre la quantité et la qualité,il y a un rapport qui ne

se manifeste que dans l'opposition universelle de la ma-

tière et de la forme de la puissance et de l'acte La

qualité est ie caractère ou la dioerence propre qui dé-

termine l'être*. L'être de toute quantité est donc aussi

dans son rapport avec l'unité spécifique; ce rapport

JH<t. X, p. tga, L t3 (ÊfïTO <~<W )Mt~~Of

T<fa ftOp~f XCHS~-

&'< T~ t~M' Tt~ X<M!<Mf eÏMM. VIII, p. ~4, ~8 A~T<Of <!t!<~ <~0

e~f M ~< tH~<M[f ~Mf~M eff ~pye<a~.

Pt~t. t. t K<M~ ~Mof T~ f~f T~e<o~ 'ro 3' aïe~.

Atei. XI, p. 9:3, 1. 8 & otîo~t xarA ï~ <ro~f, ToCro T~

~p«rft&~< ~eeMf it<Mrof T~t oop~o-rou. P~. t, n 6ydp

ToS

"e~peu Myo< ï~! «~)! ~p<M~)!r<Hf~X* oux oJ~ 0~~ Ty ~o~.

M'<nt, p. 5o, t. 8; X, p. t~S, 5 K<~ ïo <?o<ropopposé à )K[T<t

~tSet.CEFeKt.V.t.

jMtt. V, p. tOS, t0 npf~Tt! ft~f yt~ ~Ot~T);~ ); TTff oJoM~ &«~0p«.

Page 410: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

598 PARTIE HI.–DE LA MÉTAPHYSiQLE.

est la mesure la mesure ne peut être réalisée q~.dans le mouvement.

Cependant la perfection de l'être et de l'unité n'es!

pas dans le mouvement; mais elle n'est pas non ntihdans l'ordre ou la figure immobile qui en est le r<

sultat. Le résultat du mouvement est l'établissen)p))t

d'une disposition qui remplit toutes les conditions de

la forme, l'acquisition d'une habitude, d'une pleine ft

entière possession 2. Déjà l'acquisition de l'habitude.

l'entrée en possession n'est plus un mouvementé du

degré qui précède à ce dernier degré, iln'y a pas

de milieu à traverser c'est un passage immédiat d'ce qu'on n'avait pas encore à ce qu'on commence

d'avoir, un simple changement, non d'un contraires a

un autre, mais du non-être à l'être, du oui au non

La disposition, ou l'habitude, est une relation; dans la

catégorie de la relation, iln'y a pas de mouvement

Tout rapport est une limite; toute limite est indivi

Met. X, p. tQ- t. 27 sqq.

A~e~e, ~c. Met. V, p. tt3, 1. 3-6.

·JP~<. VH, !H TfSf

yapd!XX&w(MfXtora ~f sis ~oÀ<!6o< M M'-

<T~{MKr<xa! ~a!t ptop<p<[!$ <<[} ef T<M<~e<r< <a~ Ttm TotTMf X~s?

xai <to6oX<t& ttXÂO&MMf ~K~etf ëf0<!JeT~pO« dé ~Tt. –– (MJ* t

MM< <K!T&' ~XÂO~W~ ~OTff.

Ibid. De An. n. v.

ftyt. VII, tu É*e< cCf T~ ~pot T~ o~re <H!M! eortf <6~o<~ot''

o~re mMf &rT<f <&~o&M<~ ou~~ y~fe<Hf, ~afep~f ~rt <)<?' <M?'=

o'M' ai ~M' ~e~f fhmëo~a! xe} Âth~eM <ïX~o«&re« etc/f. C~ Met. t

p. 99*,L t6

Page 411: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE iii. CttAPHUE Il. 3~9

.jbit et l'Indivisible ne se meut pas'. Le mouvement

~)t < omplit, le mobile se meut entre les termes Immo

hitt's de la matière et de la lorme~. Mais i'habitudf

)!< metne n'est pas encore la dernière forme de l'être;

n x'cst que le plus haut degré de la puissance; ce

)!'<"<(encore que repos, inertie, sonnncit Au delà de

ia possession il y a l'usage; au deta de l'habitude

!.t(tion. Mais de l'habitude à l'action, non-seulement

il n'y a plus de mouvement; il n'y a pas même de

changement ce n'est plus un état succ/'dant à un

(t.ttdHIerent; ce n'est plus destruction, mais accom-

plissement et salut; c'est le même s'ajoutant au même,

ft remplissant son être de sa propre action

Le mouvement est un acte imparfàit, qui na pas

sa fin en soi-même, et qui tend à sa fin le mouvement i

finit au repos Mais le repos lui-même n'est pas la

tm; la fin est la perfection qui se suffit a eUe-memc;

)c repos n'est que la privation du mouvement par un

Mf(. Ht. p. 58, i. 98; Xi, p. 2.6. i. 3. Cf. P/ Vf, iv.Mc(.VH, p. t42, L 6 sqq.; XH, p. a~)J.2t: OJ y~fSTat o~

M))o~TeT~ eMot, ~~yM T<~~o~aTa.

De An. Il, v.

P&~t. VII, m n~f ans ~pn<Te<Mîxai Tit~ eMpye<M oùx ~jTt

M'MM.

De An. n, v T~ ft~f ~Cop~ T<t t~ ToC efOfTtOM' T~ <ïe<wn)j!M&

"i/.AOf Top ~Uf<tf«< OfTOf <~ TOU ~fïeÂe~e~<!fTO~ xai O~O/OU' e<

'~0 ~)rM<MM <to~ M< ~fTeX~e«[~.

~t. tX, p.'t8:, i. 95 T<5f~p~eiMf

~f ~~r' ~pa~, o~e~a T~

""f, fOMt~ «ept

T~ T~of. P. t83, t. 6 ~et <<<'coTe w~eo~cH.

TÎMyftp )jMt<M< ereMt.

Page 412: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

~00 PARTIE !–DE LA MÉTAPHYSIQUE~C-1

mouvement contraire, et qu'une négation'. La fin

t dernière est l'action toujours semblable à eHe-mnnp.

qui ne donne jamais rien qu'elle-même, et qui ne

connaît le changement ni le repos telle est la vie, la

vue, la pensée~. Le corps de l'animal s'engendre et

se développe par un mouvement; mais ni le moovp

ment n'est le but et la fin de son être, ni même la

figure, immobile et inerte. La fin et la vraie forme est

la fonction, l'usage dont l'œuvre n'est que l'instru

ment, et auquel elle attend dans le repos qu'on la fasse

servir3. La fm et la vraie forme du corps est l'action

uniforme de la vie. A marcher, à apprendre, à h;'d)'.

on avance toujours,et il n'y a pas deux mon: nts

semblables. Mais vivre, regarder, penser, sont des

~ctes complets, qui, à chaque instant, sont ce quik

étaient; toujours la même action, sans repos et ans

changement, comme dans un présent perpétu

Telle est la forme suprême de l'activité dont le '='on

vement n'est que la préparation.

Le lieu du mouvement, dest le lieu d'une manière

absolue, l'espace; l'étendue est la première scène ou

se produit l'opposition de la puissance et de l'acte ft

ifet. XI, p. 986. 1. 'o;p. 957, t. 97.Ibid. ÏX, p. t83, t A~' &te~ &WK~t~e< ïo T~of

1

~pS&<*o!<M' ~M M~

ppeM?:Mt!fée?- x. T.

DeP<M<v;JM<t.VÏÏ,p. i5t. t. t3;F<~t.t,n;D<G~

<M~t, X

&Kt. !X, p. t83, 3 K<t) Me? «~xe, -B~~ <H?~t~oM'

(tefMNttttef, x.

Page 413: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

UVRH IH, CHAPtTRR Il. ~Oi

2 G

j.t ji~tt'c sensible sous laquelle se mamicstent les lois

jtni~'rselles du changement'.

Toutes les parties de l'étendue occupent un Heu.

Le-' parties dont les extrémités sont dans un même lieu,

se ochent; elles sont contigues~. Les parties con-

tinu sontde plus continues, quand les extrémités par

csq.tdies elles se touchent se confondent en une seule,

qui st la limite communedesdeux parties contiguës.Ia

!)t~ lapremière etiecommencement delà seconde~.

Or toute étendue, en tant qu'étendue, est continue.

L ndue ne peut donc être composée que d'étendues

'ar les parties de l'étendueétaient inétendues, elles ne

'!itï- seraient pas de leurs extrémités; elles se confon-

'irai nt donc tout entières les unes avec les autres dans

L'ms limites communes, et ne formeraient pas une

'tendue. Donc, enfin, toute étendue peut toujours être

)).n t )géeen des étendues plus petites, et ccHes-cien de

))tuspetites encore, sans que la division ait jamais de

terme. La continuité suppose la divisibilité à l'Innni~.

Tout cequi

va Miivre, sur !& quantitécontinue considérée dans

espace, s'applique égatementaux catégories

de laqualité

et de la

~Mntttc. Dans les trois catégoriesdu mouvement, la matière

peut

<rc < onsidérée sous la forme d'une étendue, ~eyeOof. Jjfet. Xt, p. 934,

) !<i !Mt~<n< MT~ T~ t~ycOo~ oJ )MfeiM< eXXotoSTiM a~ercK.

~<'t. XI, p. ~38, 99 Â~eoNtM ~f T~ ~ptt <~M[. P. 239,

t t6~<!(teMtt Af ~< ~f ~)tT!tT<H.

)Md.p. t3Q, 1. 9 A~yM O~MY~f ~TCtf

T!tUTO y~<tT<[< xal TO

Mnepou ~p<t< oIs AtTO~DM xd ew~ofTat. P~. VI, tSufe~ ~f

M'&t~f[M &' &tT<!(tM'tt &' <~Mt.

P~t. Vt, t !!& awfe~ &OMpero~eM ee!

&a<pM<Ltt Â~arof

Page 414: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

<t02 PARTIE HI.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

Ainsi l'infini est en puissance dans toute étendue

mais cela ne veut pas dire qu'un jour pourra venir o~

il se trouve réalisé; loin de là cela veut dire qu'ijle sera jamais, et ne pourra jamais l'être'. On ne

pourraitobtenir une infinité de

parties qu'après avoir

fini l'infinie divisibilité; or finir l'infini, c'est une

contradiction. C'est donc une contradictionqu'uof

totalité infinie; l'énumération des parties ne finn-ait

jamais, jamais on ne ferait la somme, jamais onn'arri

verait au tout". La divisibilité à linfini ne auppost

donc pas la possibilité de la synthèse d'une infinité (ic

parties;au contraire, elle l'exclut, car il ne

peut<

avoir de quantitéInfinie.

L'infini ne peut donc jamais être en acte 3 il n'c~t

jamais, il devient'.

L'infinité ne consiste que dans la possibilité

passer perpétuellementd'une quantité à une quanti~

<~ <frJ(MM' e~'a~ T< owe~t' ft~'eOof ~<rttf ~<[f <n<fe~<. V)t AfK'

T<Mft~f yap e& ~e<pe T~ o~fe~t.

JMet. tX, p. t8a, ao T~ J'<~te<p<w oJ~ o~TM J«fc!(tei e<rT" M

~epye~t ~o<ef0f ~pt<TToy,oXX<t yf~<re<. T~i yA: ft~ <!troXi!mf n'r

jM~pe~i'a~oJ~~MM T~ e~fa< JuM~et T<[t!r)t)' T))f ~f~eyeMtt, T~ Je ~M-

~ee~M o<

tbid. lî, p. 39, L 7 A«!wep ojx~pt0~<re<

ïAt ïo~ o r~f ~'jn')

&e&f5f. Tô J*d~e<poi'

<MtT<tT!)f ~p<t<f0e<n~oJx ~r«' ~f

~e<€pM.t='

J<eSeMe<f.XI, p. 233, L 2 (Mr* f~M~f<~

M~Mptor~t~~)M~ ~e'

FtM. ïït, Vil OJ~Mp«!T~f

0<tB<0(<~t

o3t0t T~f A~OTO~M.

Met. XI, p. 93 a, t. s 4 ÂXX' ~MWf ~te~e~e~elfm J~'

p<M~ <Mo'M' y~eMw <&'fty~.

P~. nt. vtt <M~ ~M <nte<p&t~<EM ~t.eT<M.

1

Page 415: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE 1H. CHAPITRE H. &05

a6.

JitR-rente', dans la possibilitéd'un

progrès indéfini.

Ce progrès ne consiste pas dans une addition; c'est

une négation perpétuellece n'est pas une composi-

tion, mais une décomposition;c'est un progrès en ar-

itoe, une régression indénnie. En un mot, le progrès

a l'infini ne consiste pas à avancer de plus en plus en

dehors des limites d'une quantité donnée, mais à s'én-

foncer de plus en plusdans l'intervalle défini de deux

{imites. L'innni n'est point, comme on se l'est imaginé,

ce qui enveloppe toute chose, car ce n'est pas une

forme; c'est ce qui est enveloppé dans tout, la ma-

tière quela forme circonscrit 2. La forme est la li-

mite on trouve l'infini en descendant de la forme à

la matière par une abstraction successive 3, qui tend,

"ans y toucher jamais, au terme d'une possibilité iné-

puisable.Toutefois, à mesure qu'on avance dans la division

et que les partiesdeviennent plus petites, il y

a plus

(le parties; à mesure qu'elles se partagent, elles s'a-

joutentretendue décroît, le nombre augmente. La

quantité continue et la quantité discrète forment deux

P~. III, Vt Ô~f ft~' rtlp"~M ~TTf T~ <~p0f T~ <tM <&Xo

"B C~o ~att&~M&M-)M~ T~ Xottt&t<wfte''o" f~" "e' ~e~epMft~fO!' elMu,

'M' ae~ ye AtpofMt) ~<pof.

!bid. TM K<tT<t Xoyof <n<tt&~fe< xoM ïo xMa <fpo<~e<Mf, <&t

MM ~o)teif ~e<po~<t<?Tan t~~re <KtfTO< ~repë~~e~ ftey~Ooue, ~ift T~f

~pt(w e&<c' <ep~x~ y<f"~ < ~"T~, xai ï~~e<pof, wep<-

eSo<.

Â~Mp~M, xe~Mp~Mt. Phys. ÏU, «. v')

Page 416: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

PARTiEin.–DH LA MÉTAPtiYSIQLE.

progressions corrélatives qui marcitent en sens invt

l'une de l'autre 1. La première part du divisible, et tfnf)

au plus petit; la seconde part de l'indivisible, et hh()

au plus grand 2 d'un côté l'analyse, de l'autre 1:) svo

thèse. L'inuni se développe dans l'un et l'autre scosj ,1

la fois, dans le plus et dans le moins, par l'auu'matioh

et par la négation. Mais, des deux progressions. );

seconde n'est qu'une forme de la première, le nomhr

qui la mesure. Ce n'est pas une synthèse réelle, uni.

sant ultérieurement ce que l'analyse a d'abord désun!

c'est une synthèse idéale qui accompagne l'an.ti~-

pas à pas, et qui ne fait que réuéchir dans ladditi'~)

même des unités discrètes, non la soustraction, m'i

la division successive de la quantité continue

Le lieu de toute division est le lieu même oti <_

confondaient par leurs extrémités les parties qu'on(Ii

vise, leur moyen terme, leur commune limite'

moyen terme est un, en tant qu'il réunit; douhtc. <i

P& ÎH, Tt Tu K<ET~<?p<~e<nf

TO aMTO 'CMf eOT< <MH T& n~

At~pe~ff ~f Tap T~ 'efe'necct<y~<!4't!!tT<4~pocCe~tf ~fer<M afTecr~'

<~M<e'X y~p ~MMpo~tefOfMpSTaHeM<ftrc<po<Ta~ït) ~potrnC~ei'&t' J'

ye?TM~p0f t~titpKt~fOf.

tbid. vtt EJXJycM ~s K~ ïo ~f ft~ TM f!pt0}t~5 e7<M[<ixl To ~f

TOf ~paf T~~e&a, a~e!~afrof ~rep&&~e<f ~tj~OM.

1tbid. tt 4'M'ep~

~r' oj~e d«fo!fte( ~f etn «tTs~po~eotf,

~y

AnMp e~p~T~'t <h~ecTp*f~f&'s T~ Afup~ffet.–At«peTOf M T)tt

Mpemf x<~Ti)~~t~e<~Tp! ~poaûemf.

Dans la ligne, le point; dans la surface, la ligne; dans le c<'rj)

la surface. PAy~. IV, xt K<ï!y<ip it <rnyft~ xai o~f~e< -~M<To tjm

x~ surface. ~est yalpXI: taév dpx~, 1t cmrfU}seaevasi.

.fIIS Ta flii::é';

1

!<*}&ep~!et' &TT<y<~pToSf~' ''px~ M~e«n{.

Page 417: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

UVHE I! CHAPITRE H. 405

).))t< oui! sépare, connue la matière entre les deux

(ontt aires, il est un en soi, double dans son rapport

nc< les deux parties dont il ibrmc l'intermédiaire'.

M.tis, un et double, il n'est qu'une limite, non pas un

chc part; il n'était pas avant que la division l'eut

t)).t!tifcsté il n'est plus dès que les parties se sont

séparées l'une de l'autre il n'est que dans l'acte même

()c la division. Le progrès de la division a l'innni n'est

quela détermination successive d'une inimité de

moyens termes entre deux extrémités de l'étendue.

0) tous les moyens termes sont les limites de quan

titps homogènes et semblables, et toute limite est in

divisible. H n'y a donc entre tous les moyens termes

possibles, d'autre dinércnce que la position; c'est

connue une même chose qu'on peut considérer dans

une infinité de lieux Ainsi le moyen terme n'est pas

seulement un dans sa duplicité essentielle; il est un

etidentique par toute l'étendue, et c'est son unité qui

en tait la continuité. Dans le progrès de la division, la

quantité devienttoujours

dinerente, et toujours plus

petite; mais la division est partout la même. C'est

~yt. IV, Xt ToStO ft~f IMTS <!f, TO <tJïO e<TTt' TM &) 3<:

'~o. Û afore to ftJro est la même chose <)HCapfOftMou u!K'Ke<(Mf&)

a et T~ My~ <j!M~o,ou eHet <o, la tucrne cttose que eT?pof T&'

~m. Voyez plus haut, p. 389, n. t. Cf. ~< Xtt. p. 257, t 7 E~

<N Ta! ~T~ <n)(t6~!txe« <&<< «t<'pX?

elvai "°" "<'

} e~faM oj TonSto.

P&~t. IV, ï)ii <M) ap aMT~ Jff f"r ~T!.f f' TH f"i~fi ~<

~Tfjtf yttp<OtXtt. ~t ~<, «UTt tm~O

Page 418: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

406 PARTIE III.-DE LA MÉTAPHÏSIQUE.

toujoursle même acte, quoique toujours ailleurs l,

Ainsi toutes les limites déterminées par !a division

dans une quantité continue sont comme des positions

différentes d'un seul et même mobile 2. La limite ne

se meut pas; elle appartient à la fois à deux parties

simultanées elle en est le lien indivisible, et ne peut

passer de l'une à l'autre Ce n'est donc pas une même

chose d'un bout à l'autre de l'étendue donnée, mais

une même relation pour une chose quelconque; et

cette chose ne peut être qu'un mobile parcourant !'e-

tendue Si donc c'est la continuité de l'étendue qui

est la cause de la continuité du mouvement, c'est la

continuité du mouvement qui mesure et qui fait con-

naître celle de l'étendue s. Le mouvement est divisible

en une inCnité de parties, parce que l'étendue est in

dénniment divisible 6; mais ce qui divise l'étendue

P~y<. tV, X)H ÉOT< T<) eJïO X<MX<tT~ TO <tt!ro J<a/pe<T«xai

éf&MMt' T~ d' <I'M' cJ TeMT<i.

ttbtd H Ô<<0&M Tt O~yf~ TO

~ep0{tef0ttxai TOCTOJ)? TM x:·

Xo& )MJ jC~oO' eTf!M, ~repof.

!?< AM~' <~<tf f~f <~T&' ~a~6~< T«, !M<JH<ri~pf&ftefot

T); f"

a~y~m ~TMÛa<, e!&~T<f ~x" TeXe~ï~ ~Tn .rït~tf. TM 3:'

(t~t <tT<y(t~ j~jM)<MT<t<-~ore ~pe(te<f Tu{t?t(<feT<M.

tbid. Ûtto&te T~ <fr<y~ T~~tp~ftefof, S T~p x~mmf o~M

{ef<M.

tbid. M y~ tt~ye0oe sïf<u o~ft~t, <t~ ~Mt~t &rn <r!

~t. De An. tn. t M~eOM ~at< (M. <~oa<!tf<<(te&)t).

6 Met. XI, p. :34, i. 24 TA dhtHpof oJ TaMTo~ ttey~e<"<

)M~t!<fM XP<<~ t~* ~Mt, &XA TQ eorepo)' Atytra< xaTt? r

~pttTtpef<Jof t<tMt "< 'o ft~eCof.

Page 419: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE II. 407

comme ce qui l'unit, c'est le mouvement. La limite

fit le terme où ie mouvement s'achève, la fin où le

mobile a son acte; et c'est l'action du mobile qui, par

la division, détermine des limites, points, lignes ou

surfaces', dans l'uniformité de l'étendue.

Mais il y a de l'ordre dans l'étendue toutes les

parties y ont un rang, et forment une suite; l'une est

devant, l'autre après. Le mobile ne parvient donc

dune extrémité à une autre qu'après avoir traversé

le milieu dans le mouvement comme dans l'éten

due il y a de l'antériorité et de la postériorité~; mais

l'ordre dans le mouvement n'est pas de position

comme dans l'étendue, il est de succession c'est

une succession de positions. La mesure de la suc-

cession est le temps. Cependant le temps n'est pas

le mouvement. Le mouvement, en effet, diSere se-

lon les catégories; le temps est partout le même.

Danschaque catégorie il y a plusieurs mouvements

à la fois; il n'ya qu'un seul et même temps. Le

mouvement est plus ou moins rapide; le temps

marche d'un pas égal'. Le temps est la mesure uni-

M<*<.U[, p. 5~ ~atfercM raura: cat'ra ~<a<pe<re<tdtrra to6

~fitTOt, TA f~f tAffrot, ïA e~ ~cf9o$, ro ~e eM f!'xof. XI, P. 215,

1.2 7: Te~M) J~ f)t<d ~M<p<<Wf ~f ~<0aM<Mf. a< <ra~MtT&m. a<

~f<d ypOt~MM'.

Pt~t. IV, )H T~ J)) <M<<TepOfxai

ù<TTepOfEf Miry ~pNT~f

~TT'f-~M~~jt ~MM T~ ~~Mt. É~t< J* ~)' Te ~e~ ~t ~<Mr<To

WpcMpo~

«<<ttrepM', <!M~!t<t «a< &' <ttf<tce< e!fa< To

~poTepo)'xai

~<Trepo~atra{-

Page 420: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

M8 PARTIE IH–DE LA MÉTAPHYSIQUE jforme de tous les genres et de tous les degrés (tu

mouvement. Dans l'ordre de la succession, letemps

est le nombre du mouvement selon l'antériorité et la

postériorité Mais si le temps est la mesure de tous

les mouvements, comme le nombre est la mesure de

la pluralité des animaux aussi bien que de celle des

plantes, il n'est pas pour cela indépendant du mou

vement. Il n'y a pas de nombre en soi, subsistant par

soi-même, hors de tout ce qu'il nombre; il n'y a point

de temps hors des seules choses que nombre le temps.

c'est-à-dire hors de tout mobile. L'avant et l'aprcs se

comptent dans le temps, mais n'ont de réalité que

dans le mouvement~. Le temps n'est pas autre chose

que le mouvement lui-même, en tant qu'il forme un

nombre par la succession de ses époques; ce n'est pas

un nombre nombrant, mais un nombre nombre Le

temps n'est donc pas une quantité discrète; c'est un

nombre concret, continu comme la quantité qui)

mesure. Le temps suit le mouvement, comme le mou

)~0f T<Mf &t<?. Â~Xft (t~f Mt! ~f T~ Xp<~e<TT~TO

~K~TepOfxai !«M

p<w, &ATo a«~OMOe!f <!e! a~T~py .~repcf <:n!T&w.

tF~. tV, xn.

tbtd. H ËCTM' ~pofM aptCftOf <[<ft{oeM< xare T~<rpoMpoy

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~tt <m<e ~f ~Mt~t ~ort' T~ f~fTOt elMU <tJr~ ~repo! )tM oj )t<t")<r''

.– tL~trepef y<tp xai <<trepof ~<rr< T~ x<ft!~e<' T~ J* e~yat ~repey)'

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<!p<9(te<!ttefo<.

Page 421: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE IL 409

\ement l'étendue la continuité de l'étendue est le

fondement de la continuité du mouvement; la con-

tinuité du mouvement est le fondement de celle du

temps'. Enfin le temps est un nombre qui ne reste

jamais le même, mais qui est toujours autre qu'il

n'ctait;comme l'infini, il n'est pas, il devient touj ours2.

L'unité du temps est le présent, l'instant indivisible

du présent. Le présent est le terme moyen entre le

passéet l'avenir, entre ce qui n'est plus et ce qui n'est

pas encore. Le présent change donc sans cesse, et

pourtant c'est toujours le présent, la limite constante

d'un passé et d'un avenir toujours nouveau3. En effet,

le mobile répond & la limite qu'il détermine dans l'é-

tendue comme le mouvement répond a l'étendue elle-

même le présent répondau mobile comme le temps au

mouvement. Or le mobile est le même pendant toute

la durée du mouvement, dans toute l'étendue qu'il par-

court il changede position

sans changer d'être. Le

présent change donc aussi avec la position La limite

Phys. IV, xu ÂJ<o)~<M<OeTy<!pr~ {jtey~e< ~f!;<K~ -n? xw~t o

Xpe«M T~ iM~ <M<tAM! owe~!«~

&<Mperc[e!f<H. JMet. XI, p. z3~, a~.

M~t. tH, VM Â~' OU~MptOT~

ôaptOfMt

ojTOÎ ~S &~OTO~M,

~fM )t <!)te<~o[<<t y~er<M, <Stntep

o~pOtw

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Te~~pOfOM.

tbid. IV, u T~ TOf xpJfof (terps?, ~poTepofxai !?;rre-

p<~ To dt M!' ~T< <Sf ïo aJrA, ~or< J' <&<< To auïo- y<yec

&~ M~ ~M~, ~po~'ToCro aurp T~ e~cu- $ < ~ore eor<

M tM~ T~ a~T<{.

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o~poMt s~?

-7:; – Te t~f, &<t M )MfeieC<[t To ~ep<!(tef<'f, «Et eTepof.

Page 422: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

&i0 PARTIE Ml.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

de l'étendue est autre partout; la limite dutemps ton

jours autre. La limite de l'étendue demeure et ne passe

point, ia limite du temps passe sans cesse. Mais, ni

dans l'un ni dans l'autre il n'y a d'être. Les limites sont

des divisions, des abstr actions sans réalité, déter

minées parle mouvement~. Le mouvement lui même

n'est pointla réalité, objet de l'expérience la réalité

est le mobile2. C'est le mobile qui demeure et(pi

passe à la fois identique dans sa substance“ changea)))

dans ses rapports. C'est le mobile qui est l'être, sou:

la double forme de l'immutabilité de l'étendue, et d<-

la mutabilité continuelle du temps.

Enfin, la réalité, l'être du mobile lui-même n'est

que dans l'acte qui détermine et qui achève le mou

vement, l'action qui divise, qui crée le moyen terni'

dans l'infini de la continuité~, et qui réalise la puis-

sance au point de concours indivisible de l'espace et

du temps.

Le sujet du mouvement, ou le mobile est le corps

La sunace n'est que la limite du corps, la lignede la

surface, le pointde la ligne. Ce sont les divisions succes

JKet. Ht, p. 59. t. 9 (TM tnw) ~epoo<~ A~eT e~<M, ot!x

w e~M. ûfM<Mf &iXof <tT< ~e< )Mt< <ep< T~ <rr<y~xtM yptftf"

)Mt< ~M~r y<~<M~ X~y<M" thKtfM y<)p ~fto~t ~para t) A"

p&!«< eMf- Cf. XI, p. :t6, 1. 3.

Phyt. IV, H TJ~s y< f ïApepofte~of' ~t~<nf, o~.

tb!<I. VIII, ïnt T<ft eJOe~M T<i5f ~'T~< ~3"Atp<.w

otteef <n;!<H<

d<~te< f~f &yr< ft«w, ~ep) e~ < << ~f &~ Ta~n'.

~R!TTah' «~«' '<p&tT«<M<'e«<)'M.

Page 423: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE ÏU, CHAPITRE IL 4t!

$ives de l'étendue suivant ses différentes dimensions;

ces divisions n'ont d'existence, et par conséquent de

mouvement que dans la chose même qu'elles divisent;

elles sont d'une manière accidentelle et relative elles

ne se meuvent aussi que par accident. Ainsi, aucune

étendue n'est mobile par elle-même que l'étendue à

trois dimensions*. Les trois dimension? contiennent

toutes les dimensions possibles. Il semble qu'en toute

chose, comme l'avaient vu les Pythagoriciens, le

nombre trois épuise toutes les conditions de la per-

fection, et que trois soit tout2. Le mobile n'est donc

passeulement une quantité continue, infiniment di-

visible c'est une quantité continue infiniment divi-

sible en tous sens.

Mais ie mobile ne peut pas de lui-même entrer en

acte, et se mettre en mouvement. La mobilité est une

puissance passiveil faut une puissance active pour

donner à la puissance passive l'impulsion, et la porter

l'acte. Toute puissance suppose une puissance cor-

P& VI, x. De C<)'L t, U; !X Ktf!)<TM at-Sf G!«nMM <K~MO<

wf &rrw. Le CMpsseul est par

lui-même dans l'espace, qui est la ti

mite ducorps enveloppant

Les surfaces, lignes et pointsne sont dans

i espace que paraccident. Pt~. IV, iv, v

De C<B<. t, 1: ~MfM J~ ï~ ~<~ &<t<per~i' &~To

Tp<a trayTa

t:t~ M!ip!t <M~r~' JM<<M«p y~ ~<t~< <" n~S~<!pe<o<, ïo

<M M <M~M w& Tpt~f ~p«nw<. –TA <n?fM[ ~Mf ei~ TMf ~eye~M'

Tt~tMtf ~M~O~ y~O ~MOTMTO& Tp«T~'

TOUTO e<7T~tfaf.Tpt~tt ~f

~-Mperof, A~per~~<TT'- Cf ?-<. V, p. 97, t?; Xtîr. p. 269,

) <<

Page 424: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

412 PARTIE III.-DE LA MÉTAPHYSIQUE.

relative, à laquelle elle s'oppose,de laquelle cUp

reçoit, ou à laquelle elle donne le mouvement. Toute

puissanceest le principe d'un changement, soit en

quelque chose, soit de la part de quelque chose autre

que son propre sujet1. Il n'y a pour tout acte qu'une

puissance, qui est le principedu changement, mais

résidant à la fois en deux sujets, dont l'un produit !p

changement et l'autre le souure 2.

Or, pour que le principe moteur mette le mobile

en mouvement. il ne suffit pas qu'il possède le pou

voir de le faire; il faut qu'il le fasse en effet; il faut

qu'il agisse, qu'il soit en acte; il faut que son acte soit

la forme même qu'il doit faire prendre a la matioe

la forme commune de la puissance passive et de

puissance active. C'est donc dans le mobile qu'est le

mouvement, et dans le moteur l'action 3. Le mouvc

ment est le changement graduel par lequel le mobile

prend la forme du principe qui le meut. La fin du

mouvement est la coïncidence des deux termes en un

seul et même acte, leur limite commune. L'action est

Ak(. V, p. io4, t0 :6 ~f oSf <~M<ap~ ~eT~oX~ x<Mc~

~enM ~Mt~tK ~r~ $ <~epof, < ~pou ~Tepof. IX, p.

}. s6 ËP fSO~ ~MLO,–– U~' <~XOM $ <~Xo.

tbtd. IX, p. 176,L 6 Ê<rn (~f <&: ~e ~Jfa~Mt rou <fo<~ "j.

wa<tye<f (~ef<tTOf yap~OT< xai TN ~e<f ftjr~ ~<{f<t~y Tou 'cc[0etf,

TW ~M~ ~r' <M!roC)&yT< Mf <ÏXX~. 6 rdv yatp ef Ty ~foio~ofït.

ïbid. Xt, p. 93 t, 22 Ôït ~0-r!f X~tt<T«; Cf Ty X<f!!T~,

Afre~yeM y~'~<TT<To«T<!« <!)[~ Tcu <«ft)T«foC, <m )) ToC«f~T' il

~pye«<~< <<! ~Tt~.

Page 425: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

HVRE H!, CHAPH~E IL 413

i( )t)oyen terme, un et doubte A la <ois, de la puissance

j):)ssivcet de la puissance active

La matière, ou le principe passif, est dans le monde

comme la femelle qui renferme le germe; la forme

est comme le mâle quila féconde. C'estdans lesein de la

JoncHe que se passe le mouvement et se transforme

le ~erme la puissance passive et la puissance active,

)( tnate et la femelle, s'unissent dans une action com-

xtunc et dans un commun produit 2.

Tout ce qui est l'ouvrage d'une puissance extérieure,

tout ouvrage d'art ne peut se mouvoir que sous l'im-

pulsion immédiate d'une puissance extérieure. Une

fabte xe se meut pas, en tant qu'elle est une table, si

rien ne vient du dehors lui imprimer le mouvementé

1 ont ouvrage d'art n'est donc que le sujet passif de

toute espèce de changements qu'une causeétrangère

peut lui faire subir; ce n'est pas un être tendant à une

fm; sa fin n'est que dans les desseins de celui qui t'a

fait; sa forme n'est qu'un accident~. Mais tout ouvrage

d'art est formé d'un corps que l'art n'a pas fait. Or il

't'y a pas de corps qui ne se porte sans que rien le

J~et.Xt, t. s 8 Ôfto&Mft~a a~fw ef~oyeM, cS<jTrepTo ajro <~M-9T');M~f tfp~ A!o <M~J)!o OTpO~

X<tt <ÏfM'TM tMt TO XXTitfTM, <!X~<~T«lJ711f1.11dto~pBs

J60 xa1 J60~rpôs t;v, xœl dvav-teg xxi Ta x,iaavses, a'a7~d T,J

A"U0<!y ~t.

J~tM. ttï, m OtM' -BfO~M~ Tt) ~9[Ot{<TE<TO <tMTOXUp<&)î,

&A' !S9T~e< T<tCMt, < ]~M!<nf TOy~

TO~E ef TN~ X<![<TO TOC~E

MMMt~e~pyeMwe7<'tt<repopT~M~.

P~yt. 1. H; De Cm. an. t. xof.

3P~t. M. t.

?<. Xtî, p. 24z. t, 6.9~ VtH. p..<'9. )

Page 426: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

<ti4 PARTIE ÏÏI.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

pousse, pourvu seulement que rien ne l'arrête, vers

un point de l'univers plutôt que vers tout autre. Tout

corps se dirige vers le centre ou vers la circonfcrcnce

du monde, vers l'une ou l'autre extrémité de l'un quel-

conque des rayons de la sphère. Or les extrémités

d'une même droite constituent dans l'espace des con-

traires. Tout corps possède, au moins dans la catego

rie de l'espace, une tendance primitive à l'un des

deux termes de la contrariété 2. Cependant on ne peut

pas dire que le corps, grave ou léger, se porte de

lui-même au lieu qui lui convient; ce n'est pas un

pouvoir qu'il possède, puisqu'il ne peut jamais en sus-

pendre l'exercice, et s'arrêter dans son mouvement:

c'est une disposition constante, une habitude innce~ 5.

Ce qui le meut, ce n'est pas lui ce n'est pas son es-

sence propre. La pesanteur du corps n'est pas sa nature

mêrnc~; la nature qui le meut, qui le fait léger ou

grave, est la puissance active qui l'a fait ce qu'il est.

Le corps n'a que des puissances passives; l'action, qui

constitue l'être, ne lui appartient pas~.

Excepté Féther, voy.le chap. suivant.

DeC<BLî,tx;P~m,n.

P~<. VÏM, nr.Le corps

a seulement en lui le mouvement. Met. IX, p '88

t. M K< <M ?'<~p'Mt< év <WT<Mt~e< T~t' <t<f!!<Hf.

P~. Il, t T<w?o y~p ~!cM f<~f o<!x &rnf, etM' ~st ~<nf,

xat xara p!!<Kf ~ertf.

6 ïbid. VHI, tv Kt~eNî «px~"< ~°'~

<BAe Tei? <M<<r~e<f.–Û y<yToC ye~f~afToe M~ ~M~ewfTOt «o?~

0M~,Mf~ TOC T<!t~HoJ~OfTtt ):<~ jtMMo<T<t M<K:t~Ot.

Page 427: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE Hi. CHAPITRE Il. 415

Mais il ya des choses qui se meuvent elles-mêmes.

t. est un fait qui n'admet pas de preuves, non plus que

la rcalité du mouvement, un fait d'expérience II y a

donc des choses qui ont en elles et le principe passif

et le principeactif du mouvement. Or la nature d'une

chose est la fin où elle atteint sa forme essentielle, et

la forme réside dans le principe qui pousse le mo-

!)i)e à sa fin. La nature est donc l'essence ou la forme

essentielle (substantielle) de tous les êtres qui se

meuvent eux-mêmes. La nature est donc la cause du

mouvement dans le sujet même où eUe réside~. Ce

<)est pas une force étrangère au corps qu'elle met en

mouvement. et qui le pousse du dehors c'est une

[tuissance inséparable, quoique distincte, du mobile.

Toute puissance est un principe de changement d'un

terme à un autre terme; mais ici les deux termes

~ont le même être la nature est le principe du mou-

sèment et du repos dans le même en tant que même.

La nature n'est donc pas comme l'art une activité

~dépendante qui s'exerce indiHéremment sur toute

espèce de matière. Toute nature est liée à une ma-

Pty<. VHI, Vt ôp~fe" ~<tMp<B<~fT" TOteCTOt, ~~7 euM

M"T!![.n, 1 &tT<f ~Me ~e<jM[0&M <~<X!tfMt<, ye~Otbf.

Jtfet. V, p. 92, L sty6

<Bpe5t)t ~)!<n< ~up~M ~eyo~e~ e<TT!f

MMa T&)~ ~oyK<w <~p~" )t<f<{<re&)~~f a<!roM auM. VIII, p. t(}g,

L'9 T~ y~p ~M~ tt<~f &' T« ~e~tt ï&n' toM

~OapToM oj~f.

M. P. 225, L 99 P~<. Il, t O&W ~MWt <ïpX"<'°' xai fKT~C

TeS«f)go&t< )M~~pe~te! &' &K{p~e< <fp<t

<«tC' ~To «< fo) ttara

TMtMtMfO:.

Page 428: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

416 PARTIE Ht–DE LA MÉTAPHYSIQUE

tière', non par un lien extérieur etmécanique, m:)b

par le mouvement même et la vertu intérieurenui

transforme le possible dans l'acte de sa forme. Toute

nature suppose une matière à elle, dont elle est i'es

sence propre; sa matière n'a d'être que par elle, et à

son tour elle n'est possible que par sa matière. Ce-

pendant l'acte ne peut pas être la suite nécessaire de

la puissance, la réalité de la possibilité. Le possible

embrasse toute l'étendue d'une opposition de contra

riété, et, de toutes les formes comprises entre les den\

extrêmes, n'en détermine aucune. La matière est donc

la condition, non pas la cause efficiente de l'acte; ce

n'est pas ce qui le fait être, mais seulement ce sans

quoi il ne peut pas être 2. La nécessité n'est pas dans

la fin, mais seulement dans le moyen; la néccssit<

n'est donc que de relation et de négation c'est h\

pothèse impliquée dans la thèse de la réalité

C'est~onc à la puissance active de déterminer d'c)!c

même le mouvement et la forme la nature comme

l'art, se porte, sans y être contrainte, à sa fin' Mais

la nature est une activité concrète, une forme en uoc

P~t. H, t Èf ~mxet~t~) &-nf ~<i<Kf oe~.

!Md. K (M« ~"eu ftèf T&w afay<M[&iw ~<!fMW t~ ~<n~ oj ~M~M

&A T<tBrc[. Met. V, p. §3, ÂftyxaMO)' {j~f ~er<[< o? <ih'M oJ" M

~e~era<, x. T.

F~. H, H Ë~ ~o0~e<M< 0~ ïA ~MtyjM«M~ <B~' ej~ f~ T~O!

y<tp T~ <~ Ta tftytMMOf, T~ 0? &'6<M[ ~f Ty ~<<y~. De Part. ~M ï, i

Ôr< o~ o!of te <tfM Ta~ntt e~a<. ToCro ~or~~ar~ep

~o~<TM!

Pkya. Il, V)n; ne ~n. tït, xn; Polit. T, vnT.

Page 429: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE 111. CîtAHTHE 11. ~!7

"7

maucrc'. aa itn nest pas, comme celle de tart, une

ronception,une idée, un type arbitraire qui n'est que

dans la pensée 2, et que la volonté réalise. La nature

n'a pasde choix à faire; sa forme, c'est elle-même,

dans sa réalité concrète. Des deux formes contraires

dont chaque puissance est susceptible, il y en a une

ouiest l'essence, dont l'autre est la privation c'est

celle-là qui est la forme de la nature, sa perfection,

son bien Sans choix et sans délibération, elle y as-

pire, elley

mardi d'un mouvement continua

La puissance, dont l'étendue dépasse toujours la

«''alite, échappe sans cesse par quelque côté à l'action

régulière de la nature. Elle tombe sous l'empire de

principes étrangers, et de la l'accident. Le hasard vient

de la même source que la nécessité. Avec la matière se

glisse dans le monde le désordre et le mal La na-

ture a beau faire; à chaque instant, elle manque le but

('t trompe les légitimes prévisionsde la science Mais

toujours elle vise au bien, et fait tout pour le mieux

J~. VU, p. 15~ 99 oJo~ yep&!T< ïo eHot To ef<w.

tbM. p. t~o, L '9

tbid. Vnî, p. t'79. tg ToS fef xaS' ~tf <M~M~ ro eMo~~t?,

~e XM~<tT~Mt<Hf

xai~6opAf Tt)'' ttapA ~!<Ht'.

P~M. H vtu <M~e<y<!p, o<Taa)to r~M Er E<tt<To<îap~î <TOfe~&

«f~~teM t~<)[M&« e~ T~ ï~oî.

Met. VI, p. 125, t. 23 ~ore ~<TT<M ~n atTM et~E~~e~tt w~pa

M '&t ~MtM-oM ToS <n<(t6e&!t:Jroe.

IMd.XI.p. 9:9, 8.

P~yt. VïtI, TH To j3e~of <te< t!eo~t(t&<f0f<ef ëf T~ ~M< u)[-

*PX~t ~MTOf. De Gen. et corr. H, x Ëf ~!<nf <t6tToi?jSeXïM.

Page 430: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

418 PARTIE H!.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

Ce qu'elle perd d'un côté, elle ie reprend d'un autre

ce qui surabonde, elle l'emploie à suppléer ce qui

manque. Elle rétablît l'équilibre, répare le désordre.

guéritla maladie. Toujours elle travaille la masse

inerte du corps, la façonne et la transforme. Partout

elle met et elle conserve la proportion et la beauté~ 2.

Ce mouvement régulier, cette activité infatigahtc

qui ne fait rien en vain et qui, sans le savoir et sans

l'avoir voulu, pousse incessamment la matière, indo.

cile et rebelle, au développement parfait de ses puis-

sances, ce n'est pas autre chose que la vie. Nul corps

n'est un par soi-même qui ne vive. Sans la vie, qui

fait le solide dans l'espace, plus rien que des limites

comme dans les théories pythagoricienne et platoni-

cienne, rien quedes grandeurs mathématiques, abs-

traites, isolées et sans lien, rien qu'une division et

qu'unedissolution indéfinie E~ outre, nul corps

ne

vos Jp~M~ ~ef ï~f ~<nf. De Vita et JMbrte, tT Ti~ ~u<Hf op~

~ef ~f ~&W &t TMf ~M'OtMM' <M<oC<Mtf TO )M~X«~TOf. De ~tt. MC ')

6 ~OM M~ we? (t~n)f, <&X' TMf ~e~o~twe T~ o<!<T~e~

&Mt<TTOfy~'Ot ?<&0« T~ d!p<OTO)~.

De Gea an. ttt, t û ëM!Oef <~<Mpe<~ ~t!'H<, wpo<TT~))<r't

raBSot.

P&M. VIII, t 6 y4 ~T't <'&" ~< M~e<M. Tf[&<

~&Ht ~M.De Gen. an. ÏV, H ïMfTa yo~

ïA )'<tM!;teM<M~ T~M"

~t~ Â<!yy T<~ ~t< JMet. XM!. p. s65, t. t6 ToC «~ou ~~«n!

e!~ t<< <Mt<(teTp~tJM~ tA t&p<<fft~'of.

3<et. XItt, p. s6*, t 7ÊT< ~M ~<!re ~<TT<M T<t tjKtOttfMt!

(t~ y~p<'t~a~i' f~pe< ~ux~ a !ÏM~ e~"y"

e:

? <n~, «eM~ft, )M~ ~«[X~erat. Êxe<fo<t cfè AcuperoMx~ ~e<ro?f oS"'

Page 431: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

UVRE Hï, CHAPITRE H ~tl9

27.

..c change soi-même qui ne vive Le principe inté-

rieur du changement, la nature, c'est le principe de

la chaleur et de la vie, l'âme. Le corps, que la na-

turc anime, est l'instrument de l'âme Les parties

(iittcrentes du corps sont des organes divers, qui ne

sont rien que pour leurs fonctions. La main que l'âme

ne peut plus faire servir à ses fins, n'est une main

que de nom, comme si elle était de pierre ou de

bois le moyen n'est fait et n'existe que pour sa fin.

Mais toute nature a sa matière propre, dont elle n'est

pas séparable i'âme ne commande donc pas au corps

comme le maître à l'esclave, comme une puissance

indépendante qui peut se séparer de l'instrument

qu'elle emploie elle n'y est pas comme dans une de-

meure qu'elle puisse abandonner. Ce n'est pas une

substance voyageantde corps en corps, comme les

pythagoriciens se la représentent 5. Ce n'est pas une

substance, en général, un sujet, mais une forme la

terme d'un seul et unique corps dont elle fait la vie

tttfOf TOS e~-S! iM~ g~~S~t –To !K~M! T~ÂStO!) xai ~Xof ~aUot)

~<M' y~MTM.

P~t. VM! tT ZMTMOf yotpT<WM xai TMf Eff~ti~Mf MtW.

De Part. an. t. v; De An. !v.

?<. Vtî. p. '48. 1. t?; De Gfn. <M. x; H, t; Mf~or tV, xn;

M<. H.

Pofft.t. Il.Ne At. 1, Ht.

tbid. Aeyof w Af e6! M) eHot, aXX' o:?x ~t xai ~o ùxo~~e-

t (My<~

~OT< Tf?f )M~' <M<e<~fOM TO ~iBfMt, ;M~Of <&: M~e-

M'fM~O)' !M< <

Page 432: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

420 PARTIE m–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

propre et l'individualité. Elle n'est pas le corps, )n:)is

sans le corps elle ne peut pas être. Elle estqudquc

chose du corps; et ce quelque chose n'est ni lafigure,

ni le mouvement, ni un accidentquelconque, mais

la forme même de la vie, l'activité spécifique qui (~

termine l'essence et tous ses accidents L'âme n'est

pas non plus l'harmonie des parties du corps, ni la

résultante de ses mouvements divers elle est ce qui

y produit l'accord et l'harmonie, la cause qui y dcto

mine, y ~iriga, y règle le mouvement. Ce n'est pas

une unité de mélange et de composition, un nombre

mais une unité simple, l'unité de la forme c) de

l'acte Ce n'est donc pas une puissance dont le corps

serait la réalisation, mais la réalité dernière do!)

corps Le corps doué d'abord du mouvement natu

rel, puis organisé,et toutes ses parties disposées pou)

len fonctions vitales, il ne lui manque pour vnn

Dc~tt. I, n KotX<B<~oXot~h'oMMf o~ ~ef~Te <Ïfe« o~(M:T<M<!t~

fn!re o~M! T< ~< <~5<t<tM~f y~coJx ~ort, <rf5~MtTos T<. K~ Aot T'i:

<y<4fM[T<~A~e< ~f <re&(MtT<To<o)!ïM, <tt< oJ~ ~nree o< ~peMp

C~ <~<?(M!~ft(p;t0~0f OtjT~f, Ot!8~f ~KKf&ep~TCtPTM ~f T/M t<~ CM'

M~Mp o< ~MM~ou ToC Tf~ot~rof Je~eo~m Ta T«~<!f. (MïM ~e ~M

TCH<t~ <M[T~]~<!yo~' ~tM~CTOM~ctp ~t~e~~EM dv TM Juf~et ttmp/'i!!

)Md o&te~t ~~«xe y<M<~<M. Met. VIII, p. 168, i. t8 A~ !M

~"X~) y~P O!!e&[ <at<~pye<a c<~MT<!t T<fot. De An. n, t To T~ Ú

fM xai ~<!y0t. ~UM)tOC T<MO«~.

îbtd. M; Il, t Toydp

~f x~ e~M trXeo~M ~e)~~

T~ M<p&« 4 à~e~~efe~<~r<. Cf. Met. VIII, p. t~4, t5 sqq.

De An. H, n (M ïo <T<Bftf:e<rT<« ~TeX~eM <tAA' <tet'! ?'-

(MtOt T'<~t.

Page 433: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE 11. Ml

(jn'oneseule chose, l'acte même de la vie, et cet acte

c'est t'ame. L'âme est donc l'acte d'un corps nature!,

(tf'auise, qui a la vie en puissance

Ainsi rame, cause du mouvement, ne se meut pas,

tbns aucune catégorie. Rien ne se meut qui ne soit

<),u)~l'espace, et rien n'est dans l'espace qui ne soit

t tendu et indéfiniment divisible. Or rame est une

forme active qui n'a pas d'étendue. Elle n'est pas en

rppos davantage !e repos, privation du mouvement,

suppose la mobilité. Elle est la limite immobile d'où

partent et où reviennent les mouvements

Mais i'âmc en elle même, dans son immobilité inal-

k-rable, est-elle la forme dernière de l'être qu'elle

.tnitne? Il l'a, il la possède;mais posséder, ce n'est

j'as user. Jusque-là l'âme n'est qu'une habitude, une

disposition; la vie n'est encore que sommeil, et la

<eiHe est un degré de plus. L'âme n'est donc en elle

mnuc que !a première forme, le premier acte de l'or-

~nisme. La forme dernière, la fin suprême, est

) action même de l'âme, l'action indivisible, supé

rieure au mouvement et au repos 3.

~e Au. H, t ÂtMtyMubf <<p* T~f ~f <!<!<rMf 6M'<H<&î eMo< 0~-

MMof p«!n)toB~M~t<e< C~f ~ot~o~' J' oum'a efTeXe~a:-TOtourott

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'bid.ut,tv;P~<. VIH.Vt.~e ~n. Il, t Êf yc~p T~ ~ew Tx" '~X~"

xai ~p~op-

MwaM~oyo~ y tt f~f ~p~op<n< TM ;&M)pe:f o ~nfoî Ty

y'f <!M~tp~eff.–

Ato ~<rrft' efTe~~eM n ~p~TH :r~M<tT<'<

~~<fo{! !~tt~y<tttto< ~ft"

Page 434: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

&22 PARTIE HL–DE LAMÉTAPHYSIQUE j

Mais la nature ne peut se dégager que par deo-c;

des liens de la matière et de ia nécessité. Elle tend a

sa fin et ne la perd jamais de vue; mais elle ne peut

pas s'y élever du premier coup. Ce n'est que par )<))(

progression ascendante de formes qu'elle atteint la

terme la plus haute. Une échelle d'existences se dcvc

loppe qui remplit, sans laisser de vide, toute la catc

gorie de la substance ou de l'Être. C'est comme une

même puissance qui, d'organisation en organisation

d'âme en âme, monte d'un mouvement continu jus

qu'au point culminant de l'activité pure, c'est !(tn

sortant par degrés de la stupeur et du sommeil

Le plus bas degré de la nature est la simpiicih

absolue des corps élémentaires. Au-dessus de l'ctc-

ment vient le mixte. La mixtion n'est pas une juxta

position mécanique, mai;} une combinaison. un<

transformation. Le produit est dînèrent de ses prin

cipes il a sa nature, son essence, sa forme propre=.

et il est indéfiniment divisible en parties similaires.

La mixtionsuppose

la diHérence des principescous

titutifs, et l'homogénéité des parties intégrantes~.

MM<. An. VÏH. (Mra) Ta'" <ht'«x<Bf e~ r~ ~Ba ftew~

Mï<t fMXp~ ~OM. <Serre ïtif owe~e~?mfMfe<f r~

{teCopiOfaJïM

To ~of <MT~p<w~~f. De Part. an. IV, v.

JM<t. VII, p. t63, i. 20 T~ t<f~ <nMeTop o<fr<M ~re 6

va T& <*& <0~A <5f <TMpJî. L. 37 K~ <Ktp~ OU ~Of ~p

y~ ïA .~ep~Mfx« t~~po~

aX~a xai ~ep<!fn

De Ce! f( Cen-. t, x <ï'~f ?, e~ep ~e'{tt~6<M *<, To M~

OtMt<0(tep~< E~MH.

1

Page 435: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

HVRE tti, CHAPITRE Il. 423

dessus de la nuxtton vient 1 organisation l'organisa-

tion est une synthèse hétérogcne de dinërents mixtes

homogènes l'unité de cette synthèse est ia vie La

première forme de la vie est ia végétation. La végé-

tation est la croissance spontanée, la croissance est

le résultat de la nutrition. La nutrition est l'intus-

susccption, par laquelle l'être reçoit dans son corps

uoc substance étrangère, se l'assimile par l'action de

sa chaleur vitale, et la convertit en sa propre subs-

tance en rejetant le superflu 2. La forme fondamentale

de l'organisme est donc celle d'un canal qui reçoit la

oourriture par l'extrémité supérieure, la digère au

centre, et par l'extrémité inférieure rejette le rester

C'est la forme d'une longueur avec ses deux limites

<t son intervalle entre deux, la première dimension

de l'espace". La première fonction de l'organisme

est le mouvement dans la catégorie de la quantité,

qui répond a la matière, la première puissance du

principe vital, de l'âme, est la puissance végéta-

tive c'est l'âme nutritive, Pet-l'être qui n'a pas d'autre

âme est la plante 5. La végétation n'est pas, comme

la mixtion, indéHnie elle suit un ordre, elle a un

De Part. <m. M.

De An. H, tv; Mut. <M. ). n; De Part. ait. Il, n'

Hnf. an. î, Il.

De ~ttt. inc. tV É<e< J* e~nf <H &aoT<HTM Tof ap<<~ox auop~-

(MCm <~Mte ïc) ~&t. To <h'<H XM )«!t&' ~optox wanTa ~e< T<f

{'iO'M.

De~M. !t. <t, De Plant. L

Page 436: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

PARTIE Ht–DE LA METAPHYSIQUE

terme elle s'arrête a une grandeur comme à une fi-

gure déterminées, et c'est par 1A que l'âme se rcvc)e.

Le feu brûle et s'accroît tant qu'on lui apporte des

aliments l'âme assujettit le corps à une mesure

L'infini est la matière, la nature cherche la forme et

fuit l'infini~. Mais la forme, la fin, c'est l'action, et

l'action ne veut pas être finie; en possession du pré-

sent, elle aspire à en faire l'éternité. Or la matiez

renferme un germe nécessaire de destruction !;t

plante est née, il faut qu'elle meure. Ce n'est dont

pas elle-même qu'elle peut éterniser mais du moins

el~.se perpétuera dans un autre elle-même. La )M

ture fait tout pour le mieux. Où l'identité est impos-

sible, elle supplée par la ressemblance; où s'interrompt

la continuité de la vie, elle établit la propagation; elle

remplit, sans relâche, de la perpétuité de ses périodes.

les vides que la mort ferait dans le temps. Le but

de la nutrition est donc la génération. C'est la l'action

linale ou la plante, parvenue au développement de

tous sesorganes, trouve

sa perfection et son bien 5,

De An. tt, tw il t~f yap TaC wpo: <t~<tM CM <~e<pof,&K f

TO )MtMTTOf, T&!f <pu<Tef <n<f<OTC~t~MtW <MfT&)C ~OTt~Mp0<

<M<

ftey~Cott ~e x~ oH!6'(o~e<M- raCTa ~e ~u~t~, e~ <"? -arupot, xai A~~

ttaX~Of <~)t<-

De Gen. an. î, t H ~u<r« ~e<!ye< To <ïxe<po< To ~f yapf!

~o~ ore~M, ~e pw~M <te< ?t)~ TeXoy.

De An. n, !T 4~<HXf&T<tTOf ) <tpT<B!' ~py&)f TOM ~<T<f. TO ~OitS!.

creeotoîs~ <H~o, ?So~ {M!' ?e5of, ~«TOf ~e ~ïo~, :~<: TOM ae< xa: M-

&e~oM <tM~y<<t<T<~ 9 J~f!tfT<u. Ëtrei oSf xoffMfetf <f<tTe< ïou dei M'

Page 437: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE IL 425

La génération supposeun principe passif qui con-

tienne le germe du nouvel être, et un principe actif

oui imprime au germe le mouvement et la vie. Il faut

un principefemelle et un principe mâle qui s'unissent

< un acte commun 1. Mais les deux sexes sont déjà

):<c!cs dans la plante. Toute sa vie, tout son être est

(i.tns la reproduction les deux principes générateurs

semblent se confondre sur sa tige dans un perpétuel

nnbrassement~. En général, dans la vie végétative,

individualité est encore faible; l'hétérogénéité est

peu prononcée, et par conséquent aussi l'unité Si OH

divise une plante, chacune des parties prend une vie

propre et se développe en une plante nouvelle. Toute

ptante est en quelque sorte un agrégat de plantes,

"nies dans une vie commune. C'est un seul et même

être, et aussi une seule et même âme, mais qui peut

tlevenir plusieurs par la division du corps. La na-

iut'c n'y a pu atteindre, avec la continuité de la figure,

que l'unité d'action; la pluralité y subsiste dans la

puissance, et tout près de passer à l'acte~.

i<a 3~t'ou t~ owe~e~, &<t ro ~Jef ëf<!e~M~T&~ ~OapT<Bf T<n!ïo xai

<!pt9~ &a~e'f. ~!MTM fteT~ew &[<t<rt0f xa~a)fe? Touït), To ~f

"M~Op To d' ~TTOf xai J«!t(te<'6< ojx <![!?TO ~X' OMf ajïo, aptS~ fMf

~f, e~Je< J* ëf. OEcott. ï, !H 6 <~u<M afa~npo~Tatt!~ T~ ~ep<t!J&)

M< e!p<M' ~!re! «T* optS~tofo:! Jt!f<tM<, < ?'& xaTa to sSo:. De

<M. I[, i; De Gett. et Corr. tt, x.

Gen. an. t, XXH.

tbMi. xxm Éf To& ~MTo& ttefM~ftefOtt luT~i xt ~fa~e~ eiai, xai

Txe~!Bp<OTM Ta .M~ tOt?

~pEfC~.

Mf ,h<. !t. )t Ô-jit~ ~tp em Tf-'t-~T~f t'~M Aafpo~eft ~xt'tter<t

Page 438: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

<t26 PARTIE IH.–DE LA MÉTAPHYSIQUE

Le second degré de la vie est le sentiment. Ce qui

fait l'animal, et qui l'élève au-dessus de rêtre anime.

c'est l'âme sensitive. La plante est presque homogène;

formée principalement de l'élément terrestre dont ctic

se nourrit et où plongent toutes les bouches de ses

racines, elle passe sa vie dans l'unubrmité du som

meil le corps de l'animal est un composé de tous

les éléments du monde, dans des proportions définies

qui ne peuvent changer beaucoup sans qu'il meure.

Il ne lui suffit plus de la puissance aveugle de la nu

trition et de la génération il lui faut un principe qui

lui serve de mesure entre les influences qui s'exercent

sur lui de tous côtés, qui l'avertisse, par des affections

de plaisir et de peine, de ce que les choses du dehors

peuvent lui causer de bien ou de mal, et qui lui en

seigne à reconnaître ce qu'il doit chercher et ce quitil

doit fuir. A cette organisation compliquée,il faut b

sensation 2. La végétation consiste dans un accroisse

ment spontané; la sensation dans une altération. L'a-

nimal ne se meut donc pas seulement, comme tout

être animé, dans la catégorie de la quantité, mais

aussi dans celle de la qualité

CBfTft <M< ~Mp~OftBtMt <Mt*cB~t~tW, <&t O&T)!: T~t du TOt!ïOM

M~e~e~t tt~f («& ~or~) ~Tf5, ~ufo~t ~e<ofN~' x. T. ?'

Respir.x~tt.

De Gen. an. Ut, M; De Re~xr. Xtn; De /in. n; De Ju". (!

&< t; De Atc. an. tt; De .Sonuto, t.

De An. H!, t. Ktt, xm

Ibld. U. y.

Page 439: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III. CHAPITRE Il. M7

Tout mouvement suppose un moteur et un mobile,

une puissance active et une puissance passive. Le

mouvement est dans le mobile, l'acte est la limite

commune des deux puissances opposées. La sensa-

tion se passe donc dans le sujet qui l'éprouve; mais

elle n'appartient pas moins à l'objet extérieur qui la

cause; elle est leur Ibrme, leur acte, leur réalite

commune 1. L'acte de la couleur est la vue, l'acte du

son est Fouie La couleur n'est en acte qu'a l'instant

même où elle est vue, le son au moment précis où

on l'entend. La sensation est le moyen terme qui

met en rapport l'être qui sent avec la chose sentie, la

limite commune qui les sépare et qui les unit à la

fois dans la réalité indivisible d'une seule et même

action~. Enfm toute puissance s'étend à deux con-

mires, entre lesquels s'opère le mouvement; le mou-

cernent suppose entre le moteur et le mobile une

contrariété qui décroît jusqu'à ce que le second aitt

pris la forme du premier. La sensation suppose donc t

Me An. Hi, H Û y"?TOC ~0<T<XOU xai XtfttT'toS e~p~EM

ëf T&)

~MYMtt ~yy~MMH. ~a~ep y<tp )) ~to/tts~ xt~ )t <KtC!)w eo Ta! <tM-

c~o~< eOA' o<?)t T4; 'arotoCtTt, o<?T<f xai t} ïou <Ms6ttToC ef~pye<a tt<M »

Ot&ttT<<toB &' t~ «~~Mty.

tHd. Ëwe! ? <<&[ f~f ~<TT"' e~pye«t n ToC <M<~)ïoS )Mt< ToS ai-

e~TtJMM?, ïo Je e&M< ~tepof, ~fa~xtt <~M[ ~~peoC<tt xai <K~eo~a< T)tf

M~M~ey<tft~!tf <&M))f t~o~of, xai ~«(tOf an «" ~eCer'f xa< Ta o~X'

~to~.

tHd t ~e r<Ki aM~ToO Jt'~eMftt r<'< 'm'~ti~M't M ''t!ïM f-'e"

~~< !t<t< ~tMt' TO <:&M OtjTCK OU T<tjTOt'.

Page 440: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

M8 PARTIE II!.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

comme la nutrition entre l'agent et le patient une

opposition que le mouvement fait disparaître par de-

grés. La sensation consiste dans la détermination du

rapport entre le plus et le moins, dans la mesure de

l'excès et du détaut~. Mais si la différence est trop

grande entre la forme de l'agent et celle du patient, le

rapport n'est plus possible, l'équilibre ne peut s'étabin

et la violence du mouvement détruit le sentiment~.

t.a sensation est le milieu entre deux extrêmes, com-

mensurables l'un avec l'autre c'est le moyen terme.

et par conséquent la mesure de l'opposition des qua-

lités sensibles~.

Le premier de tous les sens est celui qui fait con-

naître les différences essentielles des éléments mêmes

dont l'être qui sent est composé la gravité et la lé-

eèreté, la dureté et la mollesse, le froid et la chaleur.

Ces différences sont les oppositions du corps en tant

que corps;le sens qui en donne la mesure est le

toucher. Le toucher juge donc de tous les corps,et

De An. H, tT ÂtMCoCt ~fTOt TOC O~tO~OM<5ttÔ TOC ~tO~OU.––~ fM~

yapt!ftE<TOf (tC. ~<TT<f irpoP~), TO ~fafT~Of Tq5 ~MWT~ tp~ew, ,i

aè ~e~e~t~, TD ~ftOtor T~! ofto~.

tbid. H, xt A<o Tou o{<o~ .~ep~B < ~~poC~ ~ft~poSxai fM

XajtoB oJx ft&tteSit, <!XM T<Bc tS)rep6oMf, f~ TiK ouo~titreM~ o!<

<ron!TO< T<f0f o~f ï~~ ~f TOM o~oû~TOM ~ctt~<t5ereMf.

tb!d. XH Âf yap ~MpoT~p«ToC <~cC!fTt!p<ou x~mt, M~"

« ~<!yo~'ToSfo J* Jtf < a/<!rO)tM<.

!btd. Xt &M toSto <p~e<ta aio~T! To

yap ~op xp.T!~ct' ?'

)-Etft< yc'p cpo: etatep~fauTSf .&NTepot~ TfBf ~pMf.

Page 441: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE IH. CHAPITRE Il. ~29

ii est répandu par tout le corps de l'animât. Sans le

toucher, ranima! n'est plus l'excès d'une qualité

tangible,en détruisant le rapport nécessaire à la sen-

sation, entraîne la destruction de l'organisation tout

entière, et anéantit la vie avec le sentiment~. L'ani-

ma! constitué, la nutrition est son premier besoin.

Après le toucher viendra donc le sens de la nourri-

turc, le goût, qui, en déterminant les saveurs, dis-

cerne l'aliment des substances inutiles ou nuisibles à

la végétation, et enseigneà l'animal ce qu'il doit

prendre et ce qu'il doit repousser. Le goût est encore

romme une sorte de toucher. Il ne juge qu'au con-

tact. Placé à l'entrée du canal qui constitue l'essence

de l'organisation végétale, ses jugements portent en-

core sur le nécessaire, sur ce qui entretient la vie, et

dont le vice, comme l'absence, la détruit~.

Jusque-là, l'animal n'est pas fort élevé au-dessus

de la plante. S'il n'a plus la partie supérieure, la bouche,

plongée dans la terre, par sa partie inférieure il y est

encore attaché. C'est encore un mélange des deux

sexes, et une individualité imparfaite qu'une division

mécanique partageen une multitude d'Individualités

distinctes. Tel est l'animal plante, le zoophytc~. Ce-

pendant l'âme sensitive déploie une activité dé)à su-

'De~t.tu.xtn.

tbid. xn T~f yeBmf oMy«tt o~f eî~ w~ &a ïo rou a~oS xai

~TttM~ (tM~OM' eWM. A§T<M ft~ oSf M'zyMMM T~ De 5eM.

Mut. <M. Vtn, t; Oc Gen. ~n. t. t.

Page 442: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

&30 PARTIE HL–DE LA MÉTAPHYSIQUE

périeureaux puissances aveugles de ta

vegétahon.

elle connaît le plaisir et la peine; elle a donc des

aversions et des désirs il s'élève donc en elle des

images confuses des objets extérieurs elle n'a pas la

volonté, l'imagination volontaire, mais elle a l'ima

ginationsensible et passive

1 Mais bientôt l'animal se détache de la terre; il se

meut dans l'espace.Dès lors, il faut qu'il prévoie de

loin les périls qu'il pourrait rencontrer; il faut qui)

sente de loin. Il a besoin de nouveaux sens, qui

n'exigent plus, comme le toucher et le goût, le coo

tact immédiat de l'objet et de l'organe. La condition

de toute sensation est l'impression, qui suppose

toucher; mais maintenant il faut des sens qui ne re-

çoivent l'impression que d'un milieu, mis en mouvc

ment par l'objetces sens sont l'odorat, l'ouïe, la vue~

Mais si l'odorat est encore étroitement lié au goût,si

sa principale fonction est encore le discernement des

aliments, les sens de l'ouie et de la vue ne sont plus

uniquementrelatifs aux besoins de la vie ce n'cst

plus seulement à l'être qu'ils servent, mais aussi au

bien-être; au-dessus de la matière et de la nécessite

commence à paraîtrele bien et le beau Le son et

De Gen. An. I, xt AM<~)T"t~ ~<[fTa<~a.

De Sens. t; De An. Ht, xu.

De An. tM, xn A~ <~M (se. aM~re~)ToC Te e3 &exa. x'"

De P<tft. <M. M, vu <M)t <!M:yt[)tt, (O~ot T<M?eS ad «t~<Bf ~Msr

Pot. Vtt, nt A yf~p ~Ta&! wept T&w aMty~NW oj~ef~ f~

Page 443: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

1LIVRE Ht, CHAPITRE H. ~51

la lumière, répandus par la rénexion dans toute la

nature', la lumière surtout, maniiestcnt à l'animal

une Innnité de différences sur lesquelles s'exerce in-

cessamment l'activité de son imagination et de ses

(icsirs~. Le toucher, répandu par tout le corps, n'a

pasde lieu défini; le goût siége à la partie supérieure

de l'organisme végétal. Les trois autres sens, de plus

fn plus indépendants des fonctions de la végétation,

s'échelonnent, dans des organes distincts, à des dis-

tances de plus en plus grandes de l'organe du goût

todorat d'abord, puis l'ouie, puis la vue. Tous re-

gardent dans le même sens, qui n'est plus celui de

l'organe général de la nutrition. L'animal n'a plus seu-

lement le haut et le bas, mais aussi l'avant et l'ar-

riére une partie antérieure, où siègent les sens, une

partie postérieure, qui leur est opposée. La figure

n'est plus déterminée dans le sens seulement de la

tongucur, mais dans celui de la largeur; à la première

dimension de fespace vient s'ajouter la seconde

Mais dès que l'animal se meut lui-même dans l'es-

!M&f!!Ht.t, n Ëorf y~p ~repe ~r~pawTa ~f efT~orepa, T<t af~-

MMepe.

DeAn. H, vn!.

?<. I, p. 3, t. 7, De Sens. t.

De An. !nc. tV Ô<M j~fOf <tXXot xai ?<M* EtOf, TOM T0<0«-

tett<~)~p~e~

T<} TS ~HtpcoCefxai To ~moCef. Afoû~<T<f yap ~s< ~fTz

mM'e~er<M <MtT~ taM!~f To Te ~rpoo~ef

x<~ ïo ~~<tCef. Ë~' M

"f}«? < <t<oCt)<n< <~M[e, x<H ~ef ~6' ~<t<rroM, ~Hrpoo~Ef Ta6T'

Tjt <M~)te~teM[ T<M!ïOM, ~«~ef. De Part «H. !).

Page 444: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

432 PARTIE Ht–DE LA MÉTAPHYSIQUE

pace, il faut que le corps se partage comme en dp))\

parties, dont l'une ébranle et entraine l'autre. Dans )p

reptile, cette distinction est à peine sensible; ct~sf

prononce bientôt, et l'organisme manifeste daosFcs

pace une opposition nouvelle. Les membres se dc\c

loppent par paires parallèles, le long de l'axe de l'ani

mal. Perpendiculaires à la fois et &la longueur et a )<

largeur, ils déterminent dans le système du corps li

troisième dimension, qui épuise toutes les mesures

possibles de l'étendue. Rien n'est mobile dans Fcs

pace, quele solide divisible selon trois dit ce bons

perpendiculairesentre elles; rien ne se meut soi-mcmc

dans l'espace, qui ne représente dans sa figure la soli-

dité, qui fait le corps, et les trois dimensions de !'e-

tendue'. Enfin c'est le mouvement qui est le prin-

cipe, la raison déterminante et le signe de la troisième

dimension de l'étendue. De même dans le corps de

l'animai, point de caractère extérieur qui puisse servir

à discerner la droite de la gauche; les deux cotes

sont symétriques;nulle dinércnce de figure et de po-

sition. La seule différence est donc dans la fonction:

elle est dans l'initiative du mouvement, qui appar

tient à la droite. La droite n'est en elle-même, et ctk

n'est pourl'animal que la partie par laquelle il corn

De An. met. t; De ~n. Me. [V u<Mt T<5~ ~&t)f fJ~fOt'x'~

OMX «MfMfe!, f3M A!MtTtU WMeMCtM T~f tMtt~ TOirOM <n!ïA &' a~TÏ fC

Ta6~)f, TO~OM &!&p«TT<M Op~TOM ~e~6ei<T<,

TO «pKrMjMfXM K

~e&J)'. De Part. <M. III, Ut.

Page 445: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

1LIVRE Ht, CHAPITRE Il. ~55

~8

mencc à se mouvoir lui-même; sa gauche, la partie

quiobéit et qui suit'.

Mais, tant quela vie n'a pas de centre, t'individua-

[itc est incomplète. Un peu au-dessus du zoophyte,

les sexes ne sont déjà plus confondus; l'animal a déjà

une fin plus haute que de perpétuer sa race le mâle,

et la femelle se séparent, pour suivre chacun par

)oi-mcme une destinée particulière, et ils ne se rcu-

nisscnt plus qu'àdes

époques renéesou tt'amour les

rapproche. Mais les parties peuvent encore, des qu'on

icsccarte, manifester une vie propre; citaque afticu-

latiun est en quelque sorte la limite d'une organisation

ctd'une vie particuilère' Le nombre des parties

symétriquesest comme indënni; le tout ne forme pas

une unité substantielle, absolument indi\tsib!c, mais

seulement une unitc de concours et d'action. Ccpen

<!ant i'organisationse <ompHque. et, pour s'en assi-

'niteriesctemcnts, l'animal a besoin d'un degré supc-

t)e Pat<. an. tH, UtËp~<M

"t" xai ~t! ~e<re< ~Ct'pfar~etx/f ~XTtTspof

'M*' ~Ce~ttef T~P n ToS <TM(t!tT<X T);t Kaït TOro)' jtgT]f&'M/.)!~ fp~!t ~!<TE<,

~m ~tey~e&Ofe<!MtM'T<t< <tfT<XEt).te<)OfXOttTOt~' TJE~UXf!a«o~o«S~;t',

'p'~TepOf.

.~ft. V!t, P. '6t, ). a MK~«rr'! tf T'< T'' T! e~~Nf uso~a-

&'<ii«p(0:

Xi! Ta TtJW 'Ef"P~ ?"~ Ct~M y~MO~M, «fTX Jfft< EfTëXe-

~if xoj &t«tHte<, TM ~X''< ~s'" '"ftfceaM axo T<f«: et) T«!! x~THM.

~fm ~&[ &<Hpo<!{te)'<t cML ~&)î ~ufTf<e<TT~fT'~Tj<, oT]:o

<Mowey~< 0!!t~e<. De RMMr. XTK To~raw ~M ~uo~et coX~tt:

ap-

X'f ~oM<nf, ot! ft~TOt ye ~epye~. Afo xai T<i5f efTo~Mf &M&')!<po<

fS" ~&M, !M~ TM' A'f <)!<T<tf~ ~<.tT<!t<ï XMf S< at). ÏV, )t. De

an. IV, V.r t)

Page 446: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

454 PARTIE IH.–DE LA MÉTAPHYSIQUE1

rieur de chaleur vitale'. Un cœur se forme, ()u,

achève la transformation de la nourriture en s:n~

et qui lui imprime un mouvement perpétuel. H a

un milieu déterminé, et vivant dans l'animal comme

d'une vie propre 2,un centre, un moyen terme de

puissanceet de matière aussi bien que d'action aussi

tôt le corps se centralise ce n'est plus comme une

agrégation d'animaux, mais un tout indivisible3. Le

nombre des organes de la locomotion ne dépasse p)m

deux paires, dissemblables entre elles, et mobii~

selon des diagonalesdont le centre répond au centre

de l'organisme4.Les mouvements, les sensations, les

imaginations,les désirs se diversifient et s'ordonnent

sous l'empire d'une activité supérieure. L'hétérogf

néité augmente,et en même temps la simplicité.

La

vie, en se concentrant, est devenue plus intense, taf

tion plus libre et plus puissante, l'unité plusintime

et plus indissoluble.

Le système organique, double dans toutes ses pa'

De BftptT.MH.

De Part. an. III, tv tt Mp~t. <~<w ~<Mf T< <~Mtef ef f<K

~CMM..

th'd.v.

De ~'t. me. t A~«w T<w J«Mp<M!(teM'~n «aM)fep Af eif T'ow!

wee « <foM~ i!f C~f e~xetfte~of, o~TNt ~'Ktorof ajT~ <n<f~oT!)"e

Jw. et <en. U Êo~MMK yetpT~ TOMwMt ïSf ~t~Mf <o~Xo& ~5oM w~

OW)M!<K~.Ttt < AtMrMt <Mfe~T!!)t<<M[ TOCT* 0<!

tK~etTMf ?<5<M' rb S'

~<MTir ~<Mf eaMw tf~ertM fM~MtMt f~ftf.

De An. Me. t Te t~f ef<M(M( TerrttpM,Tft <hM<fMttAe<o<Tt.–T'

Terp~o~<MfaiTtn "<M~ &<4terpof.

Page 447: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

1HVRK H!. CHAHTRE &55

2 8.

tus, convergevers te cœur. Le système de la sensi-

hijité a également un centre. Les cinq classes des

objetssensibles forment comme autant de genres dif

fcrcnts qui ont des rapports communs. Ainsi le poli

l'st pourle tact ce que ie blanc est pour la vue '.I!

t a donc un sens général qui compare ces genres,

quien juge la différence et la similitude, en mesure

les proportionset en détermine l'analogie. Chaque

sens est la limite commune d'une ou de plusieurs

oppositions, le -moyen terme qui mesure des espèces

contraires le sens général est la limite où se rencon-

trent les sens particuliers et le terme moyen qui les

mesure tous2. Les objets du sens général sont donc, en

quelque sorte, des universalités qui dominent tous les

genres de la sensation et les soumettent à des formes

communes; ce sont le mouvement et le repos, l'é-

tendue, le temps, la figure, le nombre et l'unité, mais

avant tout le mouvement. Le mouvement donne l'é

tendue et le temps, ou la quantité continue la né-

Jfe!. XIV, p. 306, i. 38 Ëe ~M~ort) ~apToC ofrot

~MT~yop~~<rr<

M*M~oy<M', <&< e~M &* ~xe<, «MTCM <sMre< To o~MtXof, ~ewî ef a<M-

%M5ï~~ep<TT~,

&'Xf<~

Xeu~. Xï!, p. ~45. Lu: À~Xa J~

&~M' «<TM )Mt! orot~e&t, ~hnrep ~X~Ot),TfSf ft~ ~f TauT~ ~fe<, ~pN-

ftttMtt, t~~CM', M!Ma'f, ~<M<!r<tTO~, ~))f Ty ~f~Xo~Of.

De ~K. tn, Vtt T~ <M &~<tTO)' ~f, <MH ft~Ot ~ECOTttt TO J' 6M'<t<

~M«' &T< y~p &' T< 0<~&) xai <MfOpOÎ' )f~ T<tUT<![~K Tp fM-

~ef <[<t) T~ ~<C~ ~f <tpo< ~e< ~«~epof,'Mt e<te:Mt ~rpM <~X)tXa.

!t. n e3~ a&it~eTe~To

<fp<f0feor< '«f ~M ~Mt.pprc" -Y

~vx"' <~x y~p xp'<" <~t(M~

Page 448: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

436 PARTIE HL–DE LA MÉTAPHYSIQUE

gation,ou la division de la quantité continue, (Jo)n~

la quantité discrète, ou le nombre 1; quant a Funitr

elle est dans l'acte même de la division.

Le sens général s'élève ainsi, par une abstraction

successive, du mouvement aux formes immobiks

qui sont les objets des mathématiques, et de la ro

lité de la nature à des conceptions 2. A sa plus haut.

puissance, c'est l'entendement 3. Le sens générai n~

connaît rien que dans les sensations particulières (tes

différents sens; l'entendement ne se représente rio!)

que dans le champ de l'imagination avec les f~h

ditions de l'espace et du temps, sous la forme d<{f!

minée d'une grandeur nnie~. Mais, pour avoir (hob

De An. Il, t (M~e TS))~ <off<5f MOt~r* EH'a« ouo~T~ t :t ~~t.

OtOK~Tt! a!?<t}<TE< OUoC<!fO(teOct XttT': <TMf<6eP)!)tOÎ o!of X<f])*<'< <TTM:/i

<ry~(M[TO< ~e~'e0of< <i!p<8~ouefos'

raSTa <tp tra'fTa )f<f!i<re< otojOa~M;

o!bf ~ye~oî x<f!f<re<' <!)~re xai To o~n~f (i~eOo: yapT< To <f

<!peMoSf T<S ttt! x<fe«~a<' uaptO~o: T~ aTro~f!<re< rou <Mt)E~~

To!t M<o<f. – T&'f Jè xooxBf ~oftef a«~)!<T'f ~t «o<f!<f. m.

n)id. nt. vn.

Part. an. !V, & T~i< ~MfOM!' x<H T)tf ttott~~ M<T3!;mp. ~<

Ut, tx TM Texc<nx~,

~M«o~ ~p~of e<TT< xai ««rOtfereM~. t'f

Mtt. tt, XTtU A)!f*fMt )fptT<)(t{. Kotf~ <~<r6!!<T«, ~tc!t)0t!!t, ~0~9'CTf~

Xoy«!T<)t~f,sont des termes équivalents.

De ~t. tH, Vtt T~ ~tafoonx~ ~X? ~efTf~fMtïa OMX

<MtT<t~ye<A<o oj~trore ooe? <~Mu CafT~tr~TOt ~M~. Ytn 0:~

te ;&ewp~ et~yx)? <!{« ~<t!'ïa<r(Mi T<&ea)peif'

Ttt~~p <pafTf[<T~[TC[ c'~

<UC~{MtT~ ~OT<, tA)tf ~MU 6'X))t. Viï TA ft~f oSf ef~ T« fO!!Tit~!

To!e ~ctt~aKTfMMM fo~. Dans ce dernierpassage,

To nooTtxoF doit t~

pris pour~MtfOM.

De Mem. ) Noerf eJf ~<yT<f ~fM ~oufTatr~aTo~. Su~Sx~e*s'' w

Page 449: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

1LiVME tti, CM APiTRK Il. /t57

i,~ choses sensimes sontype

et sa reaute même, iob-

H) de l'entendement n'en est pas moins unobjet in-

Kifi~'Mc, et la pensée dépasse les limites étroites df

) sensation Avec le sentiment du temps, avec la

(!is)mction du présent, du passe et de Favenir, se dé-

t<)nppent!a mémoire et l'opinion~. L'âme ne se con-

(it)i~ plus par un instinct absolument aveugle; elle

<')t(n'voit sa nn, et cherche les moyens, elle com-

'omcc à connaître i'art et la prudence

Cependant, pour quele sens générai s'éteve, dans

j< «fondement même, a sa forme la plus haute, il

!~)~ un dernier développement qui porte à un plus

hau) degré la mobuité de rorganismc et achève de

le ~~umcttrc à rempire de l'âme. Tant que la partie

~tuieurc du corps est trop grêle et trop faible, et

jj'i it taut quatre membres pour ie supporter, la face,

") siègent les sens, est voisine de la terre, et la chair

j'csc sur rame L'oiseau même ne se meut qu'avec

'w< stûos ~f t&! cce~ cirep T&' J!a~ pe~so" exst TE yefpouSef

~pM~tefft T~ T<L<'COfTO~ MOt~EfO~e!f<tf T« Tp<) &'fua, upK~~ yp~O-

~t'&'p«?~t'0f «[TaTO ~ro~Of' xai 0 fONf &'<T!]!!<T<M~,Mt) ftt; 'Brt«TOf t'O)?,

'~TM <Mu~~MtïMf~rooof, ooM~' ot!~ t! ~ocof. Âf J' ~t!<nî )}T&!f~ro-

<'< tMptoTOf Je, T~OerM (tEf coc~ff&p«r~~fof,

t'oef tfo~of ~<!f0f.

~C An. tH, TU! Êf TOK e~e<Tt TOM tMO~TO~ Ta fOt)Te e<TT<f.

~e JMfm. t.

Mît. an. t, f.

f~ Part. an. IV, x Tôy~ ~apoî JM<r<h't;T<'f ~ote< T))f &af0taf

~M TWf Ke<f))f a~oCttOtH. ~<~ 13~e«!f0f y<fOft~fOUTo6

jS~pOM:0[< TOU OM-

i"Tt~tH«~ tM~Xtt ~~X6ff Ta <M~tOtT<t COO!: T))" )~f' f") ~«f!)[~ft)<

M ~tpo~ 'f'~y. D'après Can'pcr (Kod Mf'«/< t«'~fM de Ont-

Page 450: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

~58 PARTIE m–DELA MÉTAPHYSIQUE.

peine sans le secours de ses ailes, et il incline tou-

jours plus ou moins vers le sol. Mais, dès que tes

membres s'étendent et se fortifient, le corps se reicvc,

l'animal se tient et marche debout. Aussitôt !'intc!}i

gence est libre du poids de la matière; la mémoire

prend plus de force, la volonté se fait jour, et avec

la volonté la raison. Dès qu'on voit poindre le pou-

voir de délibérer et de choisir, ce n'est plus l'âme

sensitive, mais l'âme raisonnable; ce n'est plus l'ani

mal, c'est l'homme La première puissance d'oùctait

partie la nature était l'indétermination absolue de la

matière, qui, de deux formes contraires, peut prendre

indifféremment l'une ou l'autre; la dernière puissance

à laquelle elle arrive, la plus haute, est la puissance

active qui délibère entre deux partis opposés, et (luise décide elle-même pour celui qu'elle préfère.

Les puissances intermédiaires, qui n'ont pask

`

raison, n'ont pas le choix. De deux contraires, cUc"

n'en peuvent qu'un seul, dont elles poursuiventsan'

<e<!<n~MM MMt-Me~e Oro~-Ottta~

Amsterd. t-~So), presqueMh

ta diNXMnee que ta dissection découvreentre t'bomme et t'orang-o"

tang consiste dans lesparties appropriées

à la marche. Hcrder, ?

Mf&t p&tb!.<îe rtut. trad. de M. E. Quinet, 1, t66.

De Part. an. !V, x 6p0o« y~~T< (M!tW T&W <!c5<M',&<ï TO trr

~M~ ftJtoC xai T~" OM<T&'fe~M .at). ËpyOf ToC-~StOtthou TO~M

Mt:~p0fe!f. n, x. Htt:. an. t, BotAMTt~f xai fM!"Of, 0~ <*<?

<M, ~or: T&' M<M' L'homme seul a la mémoire et t'imagimatiou

tMtaires. ~<tM)M~, ~UT"~ ~oy~tXtt. tb:d.; De Ment. n;

ïB.x.

Page 451: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE 111. CHAPITRE il. 439

rciachc la réalisation. La puissance intelligente s'en

sert comme de moyens qu'elle applique à ses fins 1.

Les penchants aveugles, les instincts irrésistibles sont

instruments; la fatalité du monde naturel est

(OtMtnc l'organe de la pensée et de la volonté.

1 eûtes les formes inférieures ne sont que des de-

~cs par lesquels la nature s'est élevée à cette forme

txcellente de l'humanité. L'homme les résume toutes,

( il en représente la suite entière dans la succession

de ses âges. Dans le sein qui l'a conçu, il vit comme

la plante, d'une vie toute végétative muet, aveugle,

insensible, la tête penchée vers la terre Une fois

venu à la lumière, il respire, il sent, il se meut; mais

pendant la première enfance, ses membres inférieurs,

trop faibles encore, ne peuvent le porter. Comme

tous les animaux, c'est un nain, accablé sous le far-

deau de son propre corps M ne s'élève guère au-

dessus des fonctions animales de la sensibilité Li-

~é àl'imagination,

il a la mémoire volontaire faible

<'peu de prévoyance; l'appétit le gouverne. Mais la

Met IX, p. < t. t A( ~tëf (se. ~ufafMM) ftera Xo~oM ~Mow TMp

!Mtft&M) ai ftjMt!, <!t! y ~Xoy<M j~t ~f<!< Ao Ttt MM XjyOf JuMtTO!

"M<<&'ew~o~o« ~e)M(ïo?t wo<e? <aMt!'t~a.

De Gem. <m. n, m.

De Part an. ÏV, X Ht~ta yop~mt T<i[ ?&)e fatfM~t) T~XXa

wapo:

'M'~pMttOf- fM~SJst

~ttp~oT<p w To ~f dffM ft~ya, To Je

~epofTo

S~ot iMt<~jreSeCof («xpo~. – N<tf!t ) apew< Ta <f<t<~«![cafra.

Htt<. an. VHi, t&«t~e< cJj~, M e~Hf, t~ T<?f

&"p~f ~«~!f< JMtA TOf ~pMOfToSTOf.

Page 452: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

4M PARTIE III–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

jeunesse le relève; ses membres inférieurs se devc

loppent et se proportionnent au corps suivant dc~

rapports définis il a l'agilité et la beauté réunies: sa

tête intelligente domine l'horizon. Sans avoir rie))

perdu des facultés de son enfance, végétant encon

comme la plante, sensible comme l'animal, il <~

~devenuhomme, il est libre et il pense.

L'humanité est donc la fin de la nature; la nature

ne fait rien en vain, et c'est pour l'homme qu'elle a

tout fait2. Mais l'humanité est le résumé de tous }cs

règnes et de toutes les époques de la nature; l'huma

nité a donc aussi son commencement, sa fin, ses du-

grés de perfection, et ce n'est que dans sa fin qu'est

la perfection et la dernière fin de la nature. La ne)

fection est le bien; le bien suprême de la nature est

donc le bien de l'homme.

Le bien de toute chose est sa fin. Toute chose est

comprise dans un genre, dans une catégorie de l'être.

et c'est dans les limites de son genre qu'elle arrive à

sa fin. Le bien dechaque

chose n'est doncpas quelquf

chose de supérieur à toutes les catégories de l'être, c)

A quoi elles participent toutes, comme l'idée plato-

nique du bien. Ce n'est pas non plus une généraitte

commune à toutes les catégories, une analogie.0

D< P<trt. an. !V, X T<}M ~€f o3f jfSpamOt~ TO?TO (SC.TO af!t

ZtpO: TO X<tT&)OV~ETpOf.M'

t,!n Et oBt' <MoM {t)!Cef fiMTe

at~.M ~s'€?j~M ~Mm'!

<fa~<ttt<ep TcSf afSpMMM'&E~6t' a~Tt ~«OTt ~e!!0<t)<(e<'<H T)t« ~UOtf.

Page 453: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE Il. 441

n'est ni le bien en soi, ni l'universalité abstraite du

bien C'est pour toute chose la fin de son mouve-

tncnt~. La fin diffère, selon les genres, comme le

ntouvement même. L'universel du bien n'est donc

quele résultat abstrait de la proportion, de l'analogie

des fins dans les catégories du mouv ement 3. Mais

l'analogie a un principe, une mesure commune cette

mesure, elle est dans la catégorie de l'Etre Or, dans

la catégorie de l'être, l'âme est la fin du corps, l'ac-

tion la fin de l'âme. Le premier de tous les biens est

donc l'exercice de l'activité naturelle de l'âme

tfa~m. jUbr. I, tîïoïepof cBf ~ep Tiis M&M roS ayaOou <~ M oJ.

i/ To xomof ~f <~aK<7«' <Sxxp~O!' eyttCJ~ érepot' yap Tn: <3eas TouTo

!~Mef <4f eïftM. 6 fte!' ~~p <~E<t ~&)p«rrofxai a~To )t<t0* ŒMTO' To ~s

~t'co du ~x<ï<F<t' ~xap~M, jf. T. X. E~t. Me. t. n; E</t. Eud. I, vtn.

~ur les xo<fa, voyez ptc- haut, p. 3~t, n. t. t

t J/et. t, p. g, t. 25 To oJ Ffexe xai TayaCof (reAo~ ~ap yeM<7e<M

tt< XtPthjM): CM~t T«ST' ~T<). p. i3, L À~<]:f, «f <<!t9&f

<:y TMTO «< &<it T)tP an!t«S ~t«T<f, T~Xo~ e<TT<!<, K9:< of'T~ aiTMf, ~'T<

Maf(t!< &<et«t «M ~f~fET~f XOMÉ<TT< [x6[t] T~A'Jt, TO Je TeXo~ XZ< TO ou

a'Mt-coa~e~ T!o~ &*?< ïe~ot, ~pa!~e*<

TM<Ta< fteTa x<t)~<rea!s.

~.p. 212, 1. t2;XIH,p. 365. L to.

Dans les trois Morales, Aristote compte autant de genres du tun)

tue degenres

de lêtre. Rft. A'tc. I, n Ta)a</o)' «Tc~M Xe~eTa< Ty

t'T<. E<A. Eud. t, vttt no~t~~ yap X~erxt xott «r~M~ Te o~T< dya-

'Mf. J~MK. Jfcr- t, t T<ty<tCoî' ëf ~a[<rxM raM xtT~yop~M ~<rr<. Mais

~spassages décisifs sont ceux dc la Métaphysique

cités dans la not<;

j'rtcedentc. JI ne peut yavoir de bien dans les catégories

où iln aa

j~s de mouvement que par accident et retati'oncnt (:r. EtA. Et«f. i,

"n. sub fin.

Ë<A. ~<c. t. n, init. Comparez plusttaut. )' 3<'3

tbid. v<. Eft. E' t, yn. v

Page 454: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

~i2 PARTIE Hi–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

Le bien, dans la nature, n'est donc pas unobjet,

une chose, mais un acte. L'art, en général, a sa

fin, son bien dans l'oeuvrequ'il produit, subsistante

parelle-même en dehors et au delà de

l'opération

créatrice. Le but de la nature n'est pas de produire

de faire, mais seulement d'agir; tout ce qu'elle pro

duit, elle ne le produit qu'en vue d'une action finale.

d'un usage dénnitif, d'une pratique dernière. Ce sont

des instruments qu'elle se prépare uniquement pour

enjouer, comme un musicien fait de sa

lyre'.Le

hién dans la nature est donc une action 2.

Or la nature de laplante

est une choseimparfaite.

la matièrey

abonde et nuit à l'action; la vien'y

est

qu'un sommeil continuel. Supérieure à la végétatioo

la vie scn~tive n'estcependant

encorequ'une

vie In

complète c'est une activité nécessairement sujette.! il

l'impulsiondes choses du dehors. La libre, la véritahtt

M~H. Mor. xxxv Tmf ftëf yop ~ro<t)T<«Mf e<yr< To <M(Mm

~0~0<f <~0 TeXot. –– Ë~! TMf~pattTMM'

4x &TTt)~<~e T~<

0~trap' ajT~f ï~f ~pî~ff

o!of litepet To ~Oap~etfoùx ~ortf

Xot otMef, <tXX*aJTO Touïo T~o:<! ~pye<a xoH -sparte.

De Pcd <

t, V To ~f ~pyotfOf ~<[f Ffex~ Tou, To o~ ~fexot <pS~"<

<~e xai To n~t Tt!< ~<~ ~exef. Eth. Nie. < àta~opj

T« ~e~fertM TMf TeMf' T~y<<p

e~f efepye<at' J~~ -sapaT~M

~py<!tT< jM<t. VHt, p. tS?, 18 Ôaw (t!) &rT'f ~o sr ~<"

Otpe t~f à'~pyeMtf,ef auTOM u~p~e* e~pye<a.

P. tS'y, Lao

M ;&eMp«t~f ï~ ~MpoCfM, xa< < ~<M~ ef T~ '«X9' ~'°

fiOf&t.

H(A. ÂM. t Hf T< T<5f ~MUfMf atta~Tft' ~M t&"<; ToSt' M f'"

TO~p<tKTOf 9~<(9o~. JMf~ft. ~Ot. t; Elle. Kt«f. t, \'tU.

Page 455: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LJVRË iiï, CHAPITRE Jt. ~~5

action, ie bien, par conséquent, ne commence pour

)':anc qu'au moment où elle acquiert la volonté et la

raison, et où, maîtresse d'elle -même, elle se porte e

elle-même et de son propre choix à sa fin. Ainsi,

dans la vie végétative et la vie sensitive, il n'y a de

bien, comme iln'y a de perfection, que d'une manière

relative. Ce sont les degrés par lesquels la nature s'é-

!cvc au bien absolu de l'activité pure qu'elle atteint

dans l'humanité.

Maintenant, il ny a pas de plaisir sans action, et,

des que la sensibilité est éveillée, pas d'action sans

plaisir Le plaisir n'est pas l'acte même, ni une qua-

lité intrinsèque de l'acte, mais c'est un surcroit qui

n'y manque jamais; c'est une perfection dernière qui

''y ajoute comme à la jeunesse sa neur Or chaque

action a son plaisir propre; l'effet du plaisir est d'aug

tnenter l'intensité de l'action à laquelle il est lié, d'y

fixer l'activité de l'âme, et de la détourner de touic

autre action 3. Entre l'action et le plaisir, il y a une

'dation intime et une proportion constante. Le vrai

plaisir ne se trouve donc pas, non plus quele vrai

bien, dans la vie végétative ou animale. La volupté

des sens n'est que !e remède de la douleur; elle ne

m. Wtc. X, v.

tbid. IV Te~e«M~e T)!f ef~ystow t )i~oM!, ou~ M ~M ëfuttap-

;t<m, <!M~' fM ëwfytyfoftefof T< T~Xo~, of<w To!< T<ffta<o« &'pa.

tbid. v BMKtu~t y<ip T''f ~pyeMf o~e~ )jJoft{.–~T< ~e ftaX-

~w TMT' ~s~e!:? T0!< ~M a~' ~pt't' ))~<'t"'< ept?:o~fe! T< e~ep-

e!MM. ·

Page 456: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

M PARTIE 111.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

vient qu'à la suite du besoin elle est liée à la p:<s

sion au lieu de Satisfaire l'âme, elle la trouble, cL

en la détournant de l'exercice de ses plus hautes fa-

cultes, elle la prive de ses plus grandes jouissances~.

D'ailleurs, la volupté ne peut durer au delà d'un cer-

tain temps ni dépasser certaines limites, sans se con-

vertir encore en douleur. Le plaisir le plus pur, et en

même temps le plus durable, est dans la libre a~'uu

qui distingue l'homme de la bête. Ce n'est plus le

('ontraire d'une douleur, sujet à se changeren son con-

traire~; c'est un plaisir parfait, qui achève l'activité

de l'âme, qui en rend plus vive encore et plus pêne

trante la pointe délicate et qui l'aiguise sans l'user

Ainsi se confond avec le souverain bien la souveraine

félicité

Enfin, dans les choses de l'art, le bien est l'oeuvre,

en dehors de l'opération et de la manière d'être de

l'artiste; l'œuvre est bonne ou mauvaise parelle-

même~ quoi qu'il ait voulu faire. An contraire, fac-

MA.?«-. Vn, xv iarpe~tt, oT<ef~soC~.

tbid. xu.

tbid. xm Âfeu M~: xai ~<6!<fJ<M e«~w ~of~ MOf at Tou e~'

pMp~f~pye<!M,Tt;f ~<!<y6&)îoux ~eoti<n!<. xn.

Ibid. X, V M&~of yàp~MM~M xp~oxM

xai ë~j'itSouMfo< (~

~ot~tf EfepyoBfTe<.

E~fMMa. Eth. Me. !t. v Te Je eB xai Ta eB ~wf

jcf uToXoi~t&tfouM T~ eJ~ftOfew. vm Su~e< T~ M~'"<"

?!;f x<H TJ eB -spaTTeffMf eJ~cM- er~o!' ) ap eu~a TM e<p);

x« e~~p~a. E<A.EttJ. n, 1.

Page 457: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE m, CHAPITRE H. 4~5

tien est inséparable de l'agent; elle ne renferme donc

pasle bien en elle-même et hors de lui, comme un

rtlet extérieur à sa cause. Le plaisir n'est pas non plus

attaché à la forme abstraite de l'acte, mais à la réalité

intérieure de l'action. Pour la perfection de la vie pra-

tiqueet pour la perfection

du plaisir, il faut donc la

parfaiteconformité de l'habitude ou de la disposition

de l'agentavec son acte. Pour cela, il faut que l'a-

<'ent connaisse l'acte, il faut qu'il le préfère et le choi-

sisse il faut qu'il ie choisisse pour lui-même, comme

une fin, non comme un moyen 1. Ce choix m~'mc et

cette volonté libre, c'est en quoi consiste l'action.

L art se porte au dehors; la pratique se passe au de-

dans, et elle est tout entière dans l'intention et la ré-

solution. Le bien ou la félicité ne se trouve donc que

dans -le choix intelligent et libre du bien pour le

bien.

Le plaisir est la forme sous laquelle le bien pro

voque dans toute âme le désir, et par où il la déter-

mine à Faction. Tous les êtres susceptibles de plaisir ou

<)cpeine fuient ce qui leur déplaît et cherchent ce qui

leur plaît. Chacun suit son plaisir particulier, et tous,

sans le savoir, se trouvent suivre le même plaisir;

Eth. Nic. H, ttt Ta {tef yap~o T'Sf Te~t'Mf ~tfo~eft ïo ~et

~f tMTO&'apxe?

oSf TauT<t tM~ ~O~Ta yevéa0ai.Tx ~E XtT< TM

apETM

)"c~eff[ eux ~f auT~ <!r&~ ~X9' (K~pof&M ~c[rreT<H, <M<t

XM 0lifpeTTmf 'EKM ~Mf ~pa!TT~, ~p~TOf ~Ef Mf efJ&X, ~tf6(T'

~poa<pot!{tsf0f xcJ cpfMtpo~ftefOt< otuït.

Page 458: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

~6 PARTIE Ht–DE LA MÉTAPHYSIQUE

dans tous il y a quelque chose de divin qui, dedc~(

en degré, poursuit, sous l'apparence, la réatitc de ):t

telicité et du bien'. Le dernier degré dans ce mou

vement ascendant de la sensibilité est de trouver son

plaisir dans le plaisir du bien, d'aimer ce qui est ai

mable, de haïr ce qui est haïssable en soi 2. Mais, sous

l'enveloppe même du souverain plaisir, discerner

le bien et le saisir en lui même, c'est ce qui n'ap

partient qu'àla raison. Le mobile qui se porte à 1 ac-

tion sous l'impulsion immédiate du désir est cette

partie ou plutôt cette puissance de l'âme, qui est

sujette aux émotions de la joie et de la douleur, aux

passions de la haine et de l'amour; c'est une puis

sance aveugle par elle-même et dépourvue de raison

Mais elle est susceptible, dans l'homme, de se < on

former à la raison et d'en subir la direction supe

Et&. WtC. VII, XtV OJ~' ~o)~f &ej«)u<r< ntf auï~t) ~ifefïM' ~~oMt

tt6fT<M <MfTM' ~<M xai Jtt&KOUMf, 0<?~ ~f o!ofT<M 0~' ~f ~f

<tM~at Tttf CUT~ nefTtt yc~p ~<T€< ~St T< .9-S<Of.

ÏMd. X, v.

sMa~m. Mor. t, v Ë<TTt J' )! 4"'X"' ~eftef, eis Juo

(t~ &)!f

t~Mt, Te Xeyof ~ooxai d!Xoyo~, x. T. Po~t. VU, xm T~ ~x~

opc5<MfA!o

fcpfjT~ Te aÂoyof xai To Aoyof e~of, xai TM e~eM T~'

TOt!T&)f J60 TÔf <tp<%t0fTO ~ef e<TT<f

<pe~,TO f0m. Cf. Met

XM, p. 244, L t?.De An. ÏU, tX ÂTOXO!' TOCïO (SC.

TOOpSKTfXM;

JtfMTMf. Êf Te Tp ?LO~OT<![~ yc~p t! ~0<})H!<TM~feï<M «tt ep Ty OAO~ N

e!t<0b(*~ )M< o 3Loyot. La (SouÀ~M est rope&fde r~oyof ft~Te~of

A<!

y<w. ~~K.Jtfor. t, xxxv Te ~e j3o<Aet<T«o~ -c~ept Ta <u<)T<~ xai M f

f~oee. &r)'e ro ~po<BpeT<KOf ~op<o~ T%? ~< xaïa To" ~oyofM''

<Mo~t!T~f e<TT<. De An. tH, vu Kai ot!~ erepofïo

opexT~of

T<!<0f. O~re <!XX~&)y, O~TS TOC MO~))T<XOU.

Page 459: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H!. CHAP!TRE ~~7

nem'e*. La raison ne meut point, et ses près

(-notionsn'ébranleraient jamais les puissances de

:))nc~. Mais la raison manifeste !c bien. Immobile,

le !)ien meut le désir par l'irrésistible attrait de sa

teauté; le désir se meut, et en même temps il meut

homme. Le désir est l'intermédiaire ou le moyen

terme nécessaire entre la raison et la partie passive

de l'âme, ou la sensibilité pure 3; c'est la raison qui

impose au désir la forme supérieure de la volonté

Le bien et la félicité n'appartiennent donc a l'homme

même qu'à l'âge ou la sensibilité est devenue entende-

ment, à l'âge de la volonté de la raison, au moment

E<A. WtC. ï, XHt To emSuftt!T«Of X<M Ô~MS OpEKTMO!) ftET~'

BM (se. ~oyoo), MTnso<w eor'f adrou -cfet8<tp~<xoy.

De An. Ht, n (M~ To Xoyto-rtxofx<~ o «tXoti~oî yoSî ë<TTtf «

NM~.––ËT< XCM6MTa[TTOt~O< TOU fOS xai X~OU<nt~ T%: ~KtfO~M ~Eti~ef~

tf n &fS)t6<~ oJ Jt«'e?Tft<.

Ibid. x KCf o ~f fou: ot! ~feT<M x«'&!f aveu op~e& 6 y<ip

~))<rK ~Be&t.–– AtA&! «fS? TO OpeXTOf,

aX~A ToSt* ~<TT<f TO

~!tMo, TO ~fHfJ(tefOf <ty<!t6~f. To?TO yap«fE? xai OU XtfOUftefOf,

!Mt)C)!t<a< ~PT<M~Hf<M.––Ë<TT<TO ~f a«~t!TO!' TO ~ifpftXTOf dya-

Mf' ïo Mfopf xai x<fot!(tef0f,TO

opexTtxof,ïo xwou~efof e<rï<

M~f. De An. mot. V, vm, x Eth. <Y(c. VI, n TpMëoT<f ef Tt)

Tax~Mt ~pa~e~t

x<t! <t~t)0e<a<, af~<TK, foM, ope&

Voy. ci-dessus, p. 446, n. 3, sur la différence du désir et de la vo-

lonté. CE~ De An. Ht, xt. La~po~pe<T«

surtout appartientà la fois à

Mpe&t et à ta ~afOM. De An. mot. V) ~fpo<upe<T<~xowof Aa~at

op~~eM.

Polit. VII, xtv. La ~Xt)<T« est attribuée à l'enfant. Mais la~ou-

~"K, au sens propre,n'est que

la feMett~ des scholastiques (f<'Hp<f<M

deMMem), qui tend à une fin sans en examiner la possibitité, les

movens; la votnnté (coto), qui caractérise te j3o~T«6f, est lai?po<!t<-

Page 460: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

4M PARTIE IIL–DE LA MÉTAPHYSIQUE

de la perfection et de la maturité de la vie F.jj

outre, ce n'est pas assez que de vouloir une fois n

que la raison commande. La vie humaine n'est i~s

d'un jour, et une hirondelle ne fait pas leprintemps

M faut une activité soutenue de l'âme, remplissant ta

vie entière et ne laissant aucune place au mal. H faut

la perfection de la vie dans le sens de l'étendue conxnf

dans le sens de l'intensité et de l'énergie, dans le sois

de la quantité comme dans celui de la forme et <if h

qualité. Le souverain bien doit être défini l'artivit.

de l'âme raisonnable dans une vie parfaite

Pour toute action, il faut une puissance prop!

pour tout bien, une puissance déjà détermine' <!

disposéeau bien, une vertu Le mouvement est t!)b

le mobile la vertu nécessaire au mouvement de i .'m'

vers le bien réside donc dans la partie mobile et p-

sivc de l'âme, sujette aux impressions du plaisirde

la peine,et aux mouvements contraires des passion

Ainsi, la première condition de la pratique du Li<

ce sont lesdispositions

naturelles au bien Mf'is i

pe<T<f,choix d'une fin praticable, en mpnM temps que <h) nw" j ~a~~

la rend possible. Eth. ~Vtc.11I, tv, v.

tMt. Nie. [. x; Eth. RttJ. n. vtn.

Efh.~M-. !.V!.

Ëf Te~e<y. E(A. A'<c. x; Jfo~n.~or. ï, n; E<A. EH<f. Il.

Eth. ~VtC. I, X Ëxa~TOf ~6 eS XttTa T))!) 0«e<f tpeT)!f<MOTS/~

!bid. ir, tt ïlec! ~Jot'M 3 <tpxft< Mxo!: e<yr<f )) ~9<x); apET)!

3&r. t, v Ë" f~o/M aitCMet ~eyopefatt.

t<<Mn.3for. t, ~Mt EM)'

tpeTa! )t'!< M<re< ~f e~<rT<xs e~~i'

Page 461: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

1LIVRE Ml, CHAPITRE II. M9

~9

vertu naturelle, ignoranteet mobile, peut se laisser

(~.tt'er par des voluptés trompeuses; clle peut se lais-

ser détourner du bien par l'apparence du bien. Pour

la maintenir dans le droit chemin, il faut d'une dis-

position,d'une tendance, faire une habitude inva-

riable de l'âme. Or il n'y a qu'un moyen d'acquérir

l'habitude, c'est la coutume; et la coutume est la

répétition de l'action.

L'âme se plaît dans l'action et ne demande qu'à agir.

Cependant la matière, changeante et périssable, ré-

siste, et ne lui permet pas de persévérer toujours et

sans interruption dans le même acte. L'animal est

pendant la veille dans un état de travail et d'effort

continuels 1. A l'effort succède peu à peu la fatigue

le plaisir décroît et l'activité se relâche telle est la

cause du sommeil. Mais l'âme tend incessamment à

rentrer dans l'action ce n'est pas elle qui s'est lassée

plus elle agit, plus elle désire agir, et agir dans le

même sens et de la même manière. Ce qu'elle a fait

une fois, elle se plaît & le refaire; elle surmonte, en

revenant & la charge, la résistance de la matière 3, et

'M, oMf ~p~ TOM& &f~<rrp A-eu )~ou 'srpo<;T~ at~peïb! xottT<i<

MM.– A<~<M~<n<f?pye?T~ Xoy<u<M~oux &rT<faMu Tou Xo~ou t} ~u-

<M)) t!pEtt{.EtA. ?< Vf, XHt K<!t! y~p

'Srf[!<T< KOtt.e-ttp<0t<

<M ~<T<K<~Çm~ uipestf.Eth. Nic. Vf, xttt fiai yaip

aaseî xai~npiots

«i Qvasxas

M~oUMf ~eM.

E<A.ATc.VII, XV ÂE~y<~ 'SOfM TO~NOf.

Ibid. X, tv n;Bt oBf <x!3e!t ows~<M ~er<H; x~fM, nafTayap

:i~Sp~eM <Hfotre<' <MM~<B<~fep~f. Pol. Vtn, n Ô yap ~oo&if

~iM<Ti}t<M'<t)rctu<MMî.Cf. De 5omno, t.

Eth. JVtc.Vtî, xv.

Page 462: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

~50 PARTIE m.–D!; LA MÉTAPHYSÏQUE

retrouve dans la coutume le plaisir même de la non

1 veauté La répétition de l'acte, à défaut de la conti

nuitc, en fait à l'activité comme une forme dont ch<

ne se sépare plus et comme une seconde nature La

coutume produit l'habitude, l'habitude le dcsir, et !<

désir l'action. C'est un cercle dans lequel l'âme tonn~

d'elle-même sans s'arrêter. Pour transformer en oof

habitude constante une simple faculté ou une vertu

naturelle, il sumt donc de la faire entrer en acte; J'art;

engendre peu a peu une habitude conforme. C'est f'u

pratiquant qu'on apprend, en jouant de la lyre qu'on

devient joueur de lyre; c'est en répétant des actes de

tempérance qu'on devient tempérant Le corps oui

n'agit ni ne sent est incapable d'habitudes acquises:

on a beau lancer la pierre cent fois de suite vers )(

ciel, elle retourne, dès qu'on l'abandonne, a sou !i<~

naturel, dans la direction du centre de la terre Seuk

l'âme ajoute à la nature, et se donne à elle-même )<~

formes supérieures de la science, de l'art et de la vertu

Mais de toutes les habitudes acquises, la plus forte

Hth. Afc. X, tV EfM 3e Tepxetx<uf:: ~T<t'

&'CTep'?f~e «~ ~.t?

~«t TaSïa. Hh~t. 1, X).

De Afem. t). ÙOTrec ~ttp ~!<T<t ij~t) To ~Oo<'–To Je ~ro~A~xK

<T<P~9C<S7. Btt<. 1, Xt.

J~t. !X, p. t8o, 1. 22 Tùs ~Ef (SC. ~Uf~tt) <tfm~X!: ~pMtM

y))<rzfTaf ~ye«' c<TiM ~Se< xeH M~M. E<&. A<c. !t, t Tàs eper*!

ëzpo~f ~fMy<i<MfTM ~p~Tepof, <iS<jtrepxot ë~ T'5~ <î~~&)~ TE~f'

yo~ ~jMCoytM ~0!e~ T!t!?T9[ ~rotOt?!)T6< ~t~afOfMf.––É<t TMf &MMt'

exep~et'iBf 9M e~eM y<fofT<n.

3~n. ~or. Vt: K~. A<c. tt, ).

Page 463: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE Ht. CHAPITRE II. Ml

~9-

et la plus durable est celle-là même en laquelle s'est

transformée, par l'exercice, l'inclination constante et

essentielle de toute âme vers le bien et la félicité. On

oublie la science, on oublie mcmc l'art qu'on n'exerce

jtius;la vertu ne connaît pas l'oubli'. La vertu par

excellence est la vertu pratique; les habitudes par

e\ccllence sont les habitudes vertueuses, ce sont les

MM'n/'<!proprement dites, objet principal de l'éduca-

tion et la théorie de la vertu est la .Mbra~

La vertu ne reçoit donc sa perfection que de la

foutumc et ce n'est que dans la perfection de la

vertu que se trouvent remplies toutes les conditions

(h vrai bien. tl ne suffit pas pour le bien de le con-

naître et de le vouloir, pas même de le vouloir comme

))icn et pour lui-même. Il faut une volonté qui ne soit

paslégère et mobile comme la passion, mais qui pro-

cède d'une disposition ferme et inébranlable Le bien,

ou la félicité, peut donc être défini l'action de t'âme

accomplie par vertu, conformément à la raison

Maintenant, tout bien est la fin, c'est-à-dire la per-

E~tc. t.xt.

tb:d.X,X;Mt<.VIt[.tsq<t.

E<t. ?< ït. t M ~0«~ (sr. apST);) e~ ~ou'; Mpt~ferM' oOe~ <a<

!t~O}M[ &~y))xe~ ~MXp~f -BHtpe~tfOfCtro TOM ~ÛOM<. R~t. Eud. tt, !t.

tbid. <MT' <~M: ~<!<ye< <K?Te<TQtpK ~!<nf e~y<t'ofT<t< ai aperat, aX~<i

f~xotn (t~ ~t& J~a<~<u <t<?t~, Te~e<o~~f0<î ~e~ot Tou ~8om.

[Md. tt[ Ta TptTOf, XOMEotf jSeëMM: X9M<ET<MHt't(T!k)! ~<Mt'

~TTt).

E<A. Me. t. T, xm; ~n.Mor. t. n SA. R~.

Page 464: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

M2 PARTIE IH.–DE LÀ MÉTAPHYSIQUE.

fection de son genre'. Or la chose parfaite est cf)~

qui n'a rien de plus ni rien de moins que ce qu< i!t

doit avoir, où il n'y a rien a ajouter ni rien à rctran

cher2; la perfection est un milieu entre un plus p!

un moins. Le mai est donc dans un excès et un dciant.

comme en deux extrêmes entre lesquels le bienoccone

le milieu

Le bien est la fin, c'est-à-dire l'extrémité de son

genre,et cependant

c'est un milieu. Mais le milieu

est la limite commune des deux extrémités qui! sf

pare. C'est le point en deçà duquel est resté le dciaut

et que l'excès a outre-passé c'est donc la fin co ) f";

doit aller et où l'on doit revenir, à partir du prcmio

et du second des extrêmes; c'est leur commune cx)«

mité. Les deux extrêmes en tout genre, en toute ça

tégorie, sont les contraires qui déterminent l'étendue

de l'opposition l'excès et le défaut sont donc contraires

l'un à l'autre c'est la première contrariété de la ca!e

goriede quantité. Mais, de cela même, il suit que ton

extrémité commune leur est contraire à tous deux

L'excès est le contraire du défaut; le bien est le con

traire du mal, c'est à dire tout ensemble de l'excès et

du dé&ut\ Le bien est donc une extrémité en tant

E<A. A'tc. If, n t~e« ~s MO'~pM

?<: ~K!0); ~oftefE

)M)t<M.

Met. V. x.

S Et&.Mc. H.Tsqq.

Htid. Ttn

Page 465: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE m, CHAPITRE !L M3

(jucbien et par sa perfection; c'est un milieu dans le

Jnnb!e rapport qui constitue son être

Le milieu est un excès relativement au délaut, un

(jetant relativement à l'excès. C'est donc, comme tout

milieu, une moyenne en rapport inverse avec les

jjcm extrêmes. L'excès et le défaut forment avec le

ttic't une proportion continue dont il est le moyen

terme. C'est ce point indivisible de la pertection entre

tteux innnis que tout art cherche à atteindre; c'est

)u;'si où vise la nature, plus exacte qu'aucun art, et

pr conséquent la vertu

Mais le bien n'est pas seulement un milieu; c'est le

Mot ce n'est donc pas seulement un milieu entre le

p)ns et le moins, mais un milieu entre plus et moins

qui! ne faut, entre le trop et le trop peu. La con-

venance est ce qui mesure l'excès et le défaut. Les

extrêmes sont ici relatifs au milieu. La relation des

extrêmes avec le bien n'est donc pas une simple dine-

rencc de quantité, mais un rapport; la proportion

Hest pas une proportion arithmétique mais une pro-

portion géométrique; le bien, ou la limite commune

qui en fait la continuité, n'est pas une moyenne dif~

tcrcntieUe, mais une moyenne proportionnelle.

~<t. A'<c. H, Tt Kattat (te~ Tt~ oj<r~f xai Tof Xo~of T&f T~ ~f c!f<M

~t'fM, fte<MTttf &f A epert!'x~ To

~pt<yTOfxai To

eS, mxpjTt!

)Md. v E! -!?<!<n! ~:n<TTt!f*t! o~M) To ~pyofe3 ~~tT~et, ~po~

to

"iTef j3~trou<Mt, 0< ay<[0o} TC~f~tM, <? ~e~c.'JtSf, CfpM T<<UT« )3~

~)JM~py<t~OfM<,H~<M'.ET~ t!c!<nt< T@~ ŒKpi&O~epa ~C[<CMeM'Wf

MKf, ~o~rep ]«t< ToC fte<M:< ~c e~ <TTo~«<fT<Kj'.

Page 466: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

&5& PARTIE III.-DE LA MÉTAPHYSIQUE

En eilet, dans l'art comme dans la pratique, le bien

se mesure sur la fin; la fin est l'acte que l'agent doit

se proposer selon les circonstances, lestemps, ic;

lieux, les personnes, les choses. Le bien n'est donc

pas comme un point immobile à distance égale <)e

deux limites nxëes à l'avance dans l'étendue et dans

la matière; c'est un milieu selon la forme et la mesure

variable de l'acte. Ce n'est pas le milieu de la chose.

mais le milieu relativement à nous 1.

Mais, dans la pratique, l'acte ne se sépare pas.

comme dans l'art, de la manière d'être de l'agent. La

vertu est donc aussi un milieu, un milieu entre dcu\

vices contraires le courage, entre la lâcheté et la té-

mérité, la libéralité, entre la prodigalité et l'avarice.

La vertu est une habitude invariable de modératMn

ou de mesure à l'égard des passions

Mais quest-ce qui détermine le milieu du bien et

de la vertu? Ce ne sont pas les extrêmes de l'excès

et du défaut, qui ne sont pas des termes définis et

déterminants par eux-mêmes, et qui, au contraire.

ne se définissent que par leur relation avec le moyen

terme. Ce n'est pas non plus la vertu, qui est une

disposition, et qui attend d'ailleurs sa détermination et

?&. Nic. H, Y A~N <~e tôt! ftsp TBpfty~MtTO~ ~ecor, To !cof a~

f! ex~Tepou TM' d~pNf, <~Epe<rr<f ëp xa< T~Jro 'sfX<r<' ~po: ~M

==

e ft~Te -sfXeofft~ef ~Te e~e~et T~S <Mofros.

Ibid. MEcoTm T<~~pa

etTT<f!t apeTt), oTc~e[<rT<x!; ye otict T~-

~&ro«. C~ V) sqq. ~fa~n.or. f, ttn M<TT<~ apEïn T~f <!?a0&'o M'

{tMOTn~. MA. t* tf! Vtt MecOTttTM ~aCtfTfXX:.

Page 467: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE 111, CHAPITRE H. /i55

sa forme. Ce ne peut être que la raison. Une habitude

invariable de mesure, à l'égard des passions, volon-

taire, et déterminée par la droite raison, telle est la

seule définition complète de la vertu

La vertu ne réside donc pas dans la raison même.

La vertu n'est pas la science, et on ne peut la ré-

soudre, comme l'a voulu faire la dialectique socra-

tique; dans l'idée nue de la vertu Savoir ce que c'est

que la justice n'est pas la même chose que d'être juste;

savoir n'est pas pratiquer. Ce n'est pas tout (nie de

définir ce que c'est que la vertu; il faut voir d'ou elle

sengendre et de quelle manière. Ce n'est pas tout que

d'avoir la définition et que d'en discourir c'est de

t œuvre qu'il s'agita Ainsi, il n'est pas vrai que la vertu

soit tout entière un objet d'enseignement, et qu'on

puisse l'apprendre uniquement par ouï-dire et par

tradition l'apprentissage de la vertu est l'action la

coutume en est la cause efïiciente Il n'est pas vrai

que la vertu ne soit que connaissance, le vice qu'igno

Kf/t. A'tC. tï Vt Ë~tS ~jM!MpeT(Xt) ~eOMT~Tt <:ù(7XTtt ~pM~ ~&,

VjK!~t~ ~0~~ JMK &~ <tf o <~oM~oî <<ye<e.

J/f!y<t. Mot. t, ) OJx Op~fM <!e 0! aXMKp3[T!): EM<7Ti;~M ~!M<Sf

TMap~TM. XXt <M<Mt!<)f e~PM T)!f apST! ~«y< /.</t. 7:(~. ) V. 0.

f~. \tC.VÏ, Xt)t.

M&. Htt~. I, T Ë~Te< T< ~<rT<f o!peTM, a/LA* ~J TMM ~<~eTKt K<t< ex

to'M! Oi? ft~f aX~~ e etept apeTOto~ T~ EtJefs; T<{.tfMTX!or T< €<rr<t',

&i To tt'MOxetf sx M'&'r s<7T< <tJ e<~E)~< jS~e'/T< :< ~TTu'

"p<9!, e/A* e?t"Mit'~ceK't.

f~t. Y«. tt. n. m.

Page 468: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

456 PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.1

rance, et que nul ne pèche sciemment et volont:u

rement la vertu est dans l'accord, le vice dans if;

désaccord de la volonté avec la science'. Enfin la

science s'oublie, la vertu ne s'oublie pas. La vertu

appartient, comme le vice son contraire, non à la

pensée, mais à cette partie de l'âme qui est suscep-

tible d'action et de passion, de volontés et de désirs,

de plaisirs et de peines, à la sensibilité aveugle et dé-

pourvue par elle-même de raison. Supprimerla pas-

sion et le mouvement, c'est supprimeren même temps

la moralité~. La pratique, comme en général la vie et

la nature, ne s'explique point par les abstractions de

l'entendement; c'est le monde de l'expérience et de

la réalité. L'idée, la forme logique n'est que le dehors,

l'enveloppe superficielle de l'action.

Mais, toute distincte quelle est de la raison, la vertu

ne reçoit que de la raison sa forme et sa perfection.

Seulement la forme est dans la matière, comme l'âme

dans le corps, et ne s'en sépare pas. Pour s'élever au

bien. il faut à l'homme trois degrésla nature, la

coutume ou l'éducation, et la raison Aux penchants

naturels, il faut, pour les tourner en mœurs et leur

imprimer le caractère inenaçable de la moralité, l'ha

m. ATc. III, vu; vn. m; J~" ?" t,t\.

JM<Mn.Jfor. t 2~ft~fe< oSf aJt&i ~«mijMtî ~t<WT< TM ap~M

<tt)Xfpe~TO ~yof ftepOt T! ~M~S. TouTO

-M -tMtSf, M'aupEt xai ~M

x-M ~60~. VoyM p!us haut, p. 278.

Potft. xn Aja9o< xai <J!MU<~MO< y~Oftott ~<a TptBWT!S

eè VU, da-ri, Ions,

,'e Xal

II)ifl.

,1I01111U J.a Tp.Tf

1

T<:<n~e TtTT' ~T', ~T~) ~c~, Ao~ !h") xttt.

Page 469: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE II. ~57

hitude que donne l'exercice~; a la moralité, il faut

ia direction supérieure de l'Intelligence c'est a l'esprit

de régler le développement et l'éducation du cœur 2.

La sphère de la moralité est ce qui peut être et ne

pas être, ou la contingence, et, dans la contingence,

'.euicment la sphère particulière de la pratique, c'est-

à-dire des actes que l'âme peut A son gré accomplir

ou ne pas accomplir. Dans l'alternative, la sensibilité

se détermine par ses aversions et ses désirs; mais,

pour la moralité, il faut le choix, pour le choix la dé-

tibération. Or la délibération, qui parcourt i'inter-

va!le des contraires, discourant successivement sur le

pire et le meilleur, c'est la raison discursive, l'enten-

dement~. Au désir et à l'aversion répondent, dans

l'entendement, l'amrmation et la négation La déli-

bération se clôt par la décision dans un sens ou dans

l'autre, c'est-à-dire par le choix, qui fait la volonté.

Au-dessus de la vertu morale s'élève donc la vertu

de l'entendement Les vertus morales sont des ou-

.~<Mtt<n< TfMf ~~Mf, T)t< tMMTH~. Po~t. H iH <

Po~. ttt, t AfttfOMtoppost;

A ït;! ~u~~ t;SM. L ~0<~ a beaucoup

ra~)~M~~savec !c J&~j~ot.

~f ~Ft. tt!, Kt H ~SoU~EUTfXM ef T&H ~y«TT<X«M* ~«TMOf~ap

Tp6t~e< ToJs~TO~e, ).0)<<TjiM)H ~t! e<TTtf~p~Of.

?/[. AtC. \), )): To

j3oM~e<!eo~<M xo~ ~<~e<-?x ~xuT«! Raison pratique,fou~

~paKT<-

'M, plus exactement AsfUM-Erpa~ttit~ (ibiJ. x), e<[unatcnt de ~o~-

~n«M', Xoy«ynx~f, (Sou~exT~tof. Cf. JMfMn.Afor. t, xxxv.

E~. ?<. Vt, u.

Apet<!MA<tt"?))T<x<t<.Et/f. A'<c. H, 1; VF, t.

Page 470: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

&58 PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

vriers bien dressés et obéissants, bons pour 1 œuvre

et 1 exécution; mais au-dessus, il faut l'intelligence

régulatrice, qui prescrit et gouverne, la vertu archi

tectonique de la sagesse pratique, la prudence 1. La

prudence suppose, avec l'habileté qui juge les moyens.

la perspicacité qui démêle la un Ainsi, de mêmc que

le corps est l'organe de l'âme, la vertu naturelle est

l'organe de la vertu morale, la vertu morale l'organe

ou l'instrument de l'Intelligence 3.

Mais l'atchitectonique n'est pas encore la vraie et

propre fonction de la prudence. L'architectonique est

la science de la systématisationet de la législation

Or la législationne peut pas suffire à la pratiqu

Toute loi est générale,tout acte particulier. Toute

prescription générale,toute formule abstraite n'est

que le cadre vide, quoique plus ou moins étroit.

d'une multitude infinie d'actions différentes dans une

munité de circonstances possibless. La vraie prudence

est donc celle qui descend au détail et pénètredans

~<Mn.Mor. 1, xxxv Ai

yap apeïtM ~<MM' -E'paxT««Me«rf. H

~C&t)<T<~ fSK~Ep ap~tT~KTMfTti; tïjT&if ~<W. Mt. Nic. Vi, VU'.

Ë9r<T<tKT<Xt{ ~<TT<.

&e<fOTt)î, o)!~<TM. Eile. <V<c. YI. \t, xm. Ma~n.~er. t, xxxv.

EtA. ~VtC. VH, X!V H <tpETAToi POM ~py<tf0f.

E~. A<c.Vt.vm.

tbtd. Il, tiï Ëf ~p TOM ~ept TM ~pa~EM Myot< oi ftSf X!t(/o/

tfep!UTepo< M<T<f' o! ~e SM ftspou~ ~ttO~MTe~of ~ep< y<~pTa xa6' Mx~r'

Tp~eM. t t~'t.'t i, A.

t-i ~'t.Y'

ntus h.'ut, p''36.

Page 471: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE II. ~i59

la réalité. Ce n'est donc pas une science, et elle ne

s'enseigne pas, sinon dans une généralité superficielle

et vaine. On ne l'a pas en un jour; c'est le produit

tardif de l'expérience personnelle, le fruit le plus

mûr de la vie, qu'il n'est pas donné à la jeunesse de

cueillir. Ce n'est pas une science, mais plutôt un

sens, un sens général comme celui qui nous enseigne

qu'il faut au moins trois droites pour déterminer une

étendue, mais qui, comme tous les sens, ne s'exerce

proprement que sur le particulier, dans l'intuition

directe, immédiate, in&Ulible, d'une limite indivi-

sible'.

Mais si c'est la droite raison dans l'exercice actuel

de la prudence qui nous enseigne le bien, quelleest

donc la mesure de la rectitude de la raison et de l'in-

faillibilité de la prudence? C'est la raison elle-même.

Quand la partie irraisonnable de l'âme a été soumise

par la vertu, quand la passion n'empêche plus l'en-

tendement d'entrer en acte selon sa nature, il entre

en acte, et c'est cela qui est le bien et la droite rai-

son Le désir et l'imagination sont sujets à l'erreur;

Btt. ?< Vt, <x T&w xatOexoKTMt <ppof)?<Hî,A ~tferat ~f~pt~Mt

~MMtp&K' f&M ~uretpos ot!x ~r<j x. T. X.–ÔT< ~poftt~<M!f

~«m{tt!t ~M'ep<wToS yap ~<r~Tou cjT<f.To ~ap ~pctKTof

T<M<K<-

TOO. AfT~te<TM ~f T~ f~' 0 (tSf y<tpfOM TMf ~pNO

eSf ojx ~<rT< Xo-

yM' ~e TOS e0~t<W &' OMX &TT<f ~«TTt!~ <!ML' <ï~<rS!!<T«, O~ Tmf

'~M~ <tMt.' e~! aMCa~(te9a[ ot< To ef To<$ ~«OttftetnxoM &r~Tof, Tpfy &)-

fef' <!rn!ceT<H yf~ x~f. (~ xn.

~<Mn. A7')f. !t, X Ë'TTtf < X'ïTK T~' "p~f An~ot' ~paTM! uT~t'

Page 472: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

460 PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

toute raison une fois libre est droite et certaine La

raison n'a pas sa règle hors d'elle, dans une loi qu'elle

n'a pas faite et qui lui est imposée c'est elle qui est

la règle et la loi. Le sage voit le vrai en toute chose,

il est la mesure du vrai et du bien 2.

Enfin, qu'est-ce qui décide du moment même

où les passions ne font plus obstacle à la raison~

qu'est-ce qui juge de sa liberté? C'est encore la raison,

dans la conscience immédiate de sa propre action v.

L'intuition est à elle-même son juge et sa mesure.

Cependant la fin de la vertu ne se trouve poim

dans l'individualité. L'homme ne se suffit pas à lui-

même seul, de tous les animaux, il a la parole, il est

fait pour la société

Pour la perfection en général, il est nécessaire que

le bien qu'on veut ne soit pas seulement un bien pour

celui qui le veut, mais un bien en soi, et qu'on trouve

dans le bien absolu son bien particulier 5. Pour la per-

TO ti~O~Of (t~pOS T!t: f") XM~Ut; TO ~oytXOf eMp~Stf T~" <tM<M

évépyetav.Tête yop t7 ~pa~

~<TT<xarc~ T~op<?o~ ~oyof.

1 De An. Ht, xn NoM ftÉf oBf -Ef& op9<!s e'rm'' ~ps&txai &xf-

TttTM Xi! Op9~X0[! 0<!x Op0<{.

Nic. M!, Vt A«t~OE< ~SitTTOf 0 <r!rOM~<ïtOe T~! TaXtt~ èv M:

<TTOMOpef, <SoTtepX<tf&)f X<x!

~TOOfauTjBf <S~. Il, Tt ~f 0

~puMp<!<

Jp~e<e. ÏX, tv Ëome yap. ~Tpo« ex~or~ aper~xai o o-tM~cHO~

ze?pa!t.

31<!am. JUbr. M, x Et~ap (t~ ~s<~ ~apo:

<MUT&i. TtSf ye TOfOiiM"

<[~!)<T<f, OUX ~?T<, K. T.

?«?. î.f.

M<'<. VH. p. tSa, 3 K<MTouTo ~p~f ~<M!f ~Mpèv Tmt

Page 473: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE m. CHAPITRE 11. 461

fection de la vertu, il est nécessaire qu'on veuille le

bien, non pour soi, mais pour le bien même. Il faut

(fue la volonté soit, comme son objet, universelle

et indépendante des intérêts de l'individu. Le vrai

bien de chacun doit donc être aussi un bien pour

d'autres, et la volonté de chacun s'étendre à d'autres

qu'àlui-même. Or la forme sous laquelle le bien se

manifeste à la sensibilité et l'attire a lui est le plaisir.

Le caractère sensible du vrai bien est donc l'univer-

salité du plaisir qui y est attaché; l'épreuve de la

vertu, en même temps que du bonheur, est le plaisir

trouvé dans le bien et dans le plaisir d'un autre 1. La

vertu parfaite et la félicité veulent un désir persévé-

rant de la félicité d'autrui.

H y a dans l'âme de l'homme, avec l'inclination

instinctive au bien, une bienveillance générale pour

tout ce qui est comme lui susceptible de plaisir et de

peine; mais, pour la persévérance du désir, il faut plus

que le penchant, il faut la disposition invariable, qui

naît de la coutume. On aime de plus en plus, à me-

sure qu'on procure le bien de ce qu'on aime~. Pour

!a perfection de la vertu et du bonheur, il faut donc

que la bienveillance naturelle se change, par une suite

~p~~Mt tA <M<tf<K« &t T<Bf &M!or~) <ty<t0&!fTd ~AM a:0a ~x~r&) a~aOa.

Mt. ?0. V, H ÂM~ e<~M&M (dv T<i[<t!LMî C~aM, KM WTO& ~a0<!t

tM<, a~peM~M T<i <MSTo& (!eg. <ï)rX<M ?) a~M.

m. m. v. m.

ïb!d. Vnf, M; tX. Ht.

Page 474: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

462 PARTIE m–DE LA MÉTAPHYSIQUE.1

d'actes de bienveillance, en une volonté constante du

bien d'un autre que nous, c'est à dire en amitié

Mais nul ne peut vouloir d'une volonté constante

le bien d'un autre, si cet autre n'est susceptible des

mêmes biens que lui, et par conséquent ne lui est ou

du moins ne lui devient semblable et égal. L'amitié

suppose la ressemblance et l'égalité de l'aimant et de

l'aimé~. Celui que j'aime, je l'aime comme moi-

même il faut donc que ce soit aussi un autre moi-

même Mais l'égalité dans l'amitié suppose un échange

constant de bienveillance autrement l'avantage serait

toujours du côté de celui qui aime et qui donne c'est

de son côté qu'est l'action et l'énergie de l'âme, de son

côté qu'estle plaisir L'amitié exige donc la récipro

cité d'aSection. En outre, il faut que la bienveillance

mutuelle se manifeste p~r des actions. Si l'ami est pour

l'ami un autre lui-même, il faut que l'ami connaisse,

comme il se connaît, ce que son ami est pourlui.

Avec la réciprocité d'aHection, l'amitié exigedonc

entre les amis la réciprocité absolue et comme l'iden

tité de conscience Enfin iln'y

a d'amitié parfaiteet

invariable que celle qui a pour cause et pourfin la

jEtft. Nie. Vnï. U; ÏX, V E~OMt. ap~ St~K, X. T.

Ibid. VIII, vn, Tin. Polit. Ht, Xt Ô Te <p<Xos~tro! x~ o'~ofo~.

Ibid. IX, ïx ËTepo~ yap cjTM, o <p<~M ~r/.

tMd. VIII, tx; tX, \n; ~n.Mbr. H, xt. xn; E</t. EM< Vn

vm.

E<&. Nie. VMÎ, :t&e~p!!t

eJfOEM' oX~~o~ ~Xe~~s

yaM ft~ ~afSafofT~. !X, t.

tIpaetlvoeiv àÀÀtSÀO¡S ;c/Ù

¡3.O:fÀed.JcII1d"1

Page 475: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE II. 465

vertu, la perfection et la forme invariable de l'âme.

Ainsi l'homme ne peut pas se sufire à lui-même

il est de sa nature de mettre sa vie en commun avec

ses semblables, et de poursuivre dans la société la

réalisation de l'idéal de la parfaite amitié. La première

forme de la société est la famille. La famille n'est pas

le résultat de la seule nécessité. L'union des sexes,

qui en est le fondement, n'y est, dans sa forme né-

cessaire, que d'un moment; tout le reste de la vie,

c'est une communauté de bienveillance mutuelle2;

cette communauté, l'amour l'a commencée, déter-

miné, en général, par ie plaisir des yeux, par lai-

trait de la formel l'amour la continue. L'enfant en

est le lien, l'enfant, le bien commun du père et

de la mère, et comme le terme moyen où ils se

touchent~. Cependant, dans la société domestique,

la nécessité, la matière a sa part que l'amour ne fait

pas disparaître. La nature a fait inégaux les membres

de la famille ia femme et l'homme, i'enfant et les

Ett. ?< IX, t.

ïbtd. VÏH, XtV ÂMtyMMOTepOfoMe ~MASCM,K<!ttTeXt<OTO«'!][~0<-

MTepef ~cSoM. T<?& ftef oBf <~XXots e!t< To<r&CTor xo~fu~a sortf 0; J'

MpN~Ot OU {MfOf Tttî TeXfO~rOft'M X*P~ CUfOfXOM~, tt~Ct Mt TNX CM

TOt'~Ct)' eJM~ yap &~p!!T<MTitépya, x. T. OEcOH.I, iït OJ ~Ot;0f

Ta!?eM'<M, <~XA roC eB e!«fu <n!fep~a e~~XoM 10 MXu xai 70<ïppe)'

e~.

Ett. Nie. tX, v (Ap~t))ïou

ep~f <M T~ o~e&'s ~o~- j~p

~pMtoC~ T~ oJSe~ ~pz.

Et/t. Nie. VHt, MV SufJe<~o~Tft T~fa ~oxe~e~fM. T<i

yoip

T~~tt~ ~w.t ~ÂM ~<9?M' ~TtiM~V~t TO KOti~ï~.

Page 476: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

M& PARTIE IH.–DE LA MÉTAPHYSIQUE. 1

parents, surtout l'esclave et le maître. C'est une mo-

narchie ou le chef de la maison a seul tout le pou

voir 1; ce n'est pas la forme la plus parfaite de la

réciprocité. La première figurede l'amitié parfaite est

l'affection mutuelle des enfants, qui sont la fin de h

famille, l'amitié fraternelle. Les frères sont à peu près

de même âge, semblables, en général,de nature et

de mœurs, de penchants et d'éducation. Mais ils ne

sont pas libres, et le principe de leur union dans la

famille est encore de la nécessité 2.

La vraie forme de la société est la société d'hommes

égaux et libres, ou l'état~. L'état est la forme des ta

milles, comme la famille celle des individus. L'indivi

dualité et la vie domestique sont les puissances succes-

sives dont il est la fonction et le dernier acte. L'état est

donc la fin, la perfection, le bien, au dernier rang dans

le temps, au premier dans l'ordre de l'essence et de

l'être~. Ce n'est pas le résultat d'une combinaison

artificielle, c'est la nature même et la forme essen

tielle de l'humanité. L'nomme est un animal né et

organisé pour la vie politique il l'aime et l'embrasse

PoMt. t, HI, !x; N&. ?< VÎH, xn.

Et&. Me. VIH, XH, xm, xiv.

JPo!tt. IV, K Bo~ertM y' -etoXM !<KtW s!fa< xai o(Mf'!t)fcj'

(MXttTHt.

IHd. I, t n&M ~XM ~<!o& ~<f, e~repxo~ <M

-srpBTMxo"

<WM- ï~oe ye~ e~T)! e~fMf' tt ~M<TMT~Xot ë~f. – K<~ ~porepe:'

t~ ~u<re< ~oX<t o~* << &M!oro< 4f«!.)f ~or'. Voyez piusha"

page :55.

Page 477: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE II. 465

30

pour elle-même, sans que l'intérêt l'y pousse'. L'état

est la totalité où toutes les formes inférieures de la

vie humaine viennent prendre place comme des par-

ties, le corps dont elles sont les membres. Le prin-

cipe qui en fait la continuité est l'amitié. L'unité de

l'état suppose la bienveillance mutuelle et active,

la communauté de pensées, de volontés, d'actions

entre les parties vivantes qui en composent l'or-

ganisme~. Toutes ont une même fin, qui est la fin

de leur tout. Le bien de chacune est le bien de

lensemble, et l'Intérêt général l'intérêt des particu-

liers.

Dans la société, la vertu ne se renferme pas dans

Individualité; sa fm n'est plus seulement la perfec-

tion de chacun, mais la perfection du tout dont chacun

est une partie; toutes les vertus se résument dans la

disposition universelle à tous les actes qui peuvent

procurer la perfection de la société. Cette disposition

est la justice universelle. La justice, en ce sens, est

donc toute vertu (car toute vertu sert au maintien de

la société), mais toute vertu dans son rapport à

autrui 3. Or la société se compose d'individus, le tout

de parties. Dans la justice. universelle doit donc être

Polit. t, tÂ~CpM~ot ~<!oe< <foX<T<~p S&iof.

E<&. ?< VIII, t ËOMM t~ TM tfoXe~ <jw~e<f ~a. IX, x

!)HT~ ~~<t ~a&'er<M o~fOM.

B(t. Nic. V, m ËOT< p~ ytfpK <t'?T~, TO ~fOU oJ TO <!K:TO, a~

fef <p~ ~)r~Mf, &)M«M<!ftt, TOt<Me ~K a~M:apertf. ÔA!}

~'eT~ &tr<f.

Page 478: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

466 PARTIE HL–DE LA MÉTAPHYSIQUE '1

contenue une disposition particulière & établir et

conserver entre les individus l'égalité que l'amitié

exige, et qui est le fondement de l'association c'est

la justice privée ou particulière. La justice univer-

selle consiste dans la volonté constante du main-

tien de l'ordre social en général la jnstice parti

culière dans la volonté constante du maintien de l'é-

galité sociale 2. Le bien est une égalité, puisque c'est

un milieu par rapport à un plus et à un moins; la

vertu, une disposition volontaire à constituer uneéga-

lité la justice, une disposition à constituer l'égatitp

entre égaux.

Ainsi, où est l'amitié, là aussi est la justice; où es)

la justice, là est l'amitié~. Ce sont deux faces ditïf

rentes, mais inséparables, d'une seule et même vo-

lonté, cornue le plaisir et le bien, l'objet du désir ou

de l'amour et l'objet de la raison. L'amitié veut le

bien d'autre pour autrui; la justice le bien d'autrui

pour le bien même La justice est donc la forme

morale, ou la vertu de l'amitié. C'est la vertu qui

rend à chacun ce qui lui appartient, son droit 5.

Comme i'amitié, la justice suppose deux indivi

Ëyfopt~t. PoKt. t, tsqq. Ma~K..Mor. ï, xxxtn.

Voyez cMesscus

p. 468. PoHt. VII, !X NJ)MM' )M[<T<!§e6f< <MXtT«ttJ~.

tcr<!t~. ÏMd.

JMa~tt. Mor. H, xt ÉT< y <MM ~6e!ef &' ofs ~or< ~«t«w,

iro<!TOK tMt! ~<MM' e~tu. Eth. ~tc. VHI, xm.

E<&. j!Hc. V, iu AXMïpto~ <<t6ot' ~<<]t<?~a< &tt<i!<o<~ftt.

m<f. l, txÂps~

&' ~f Toi auTtBf &MMrro< ~o«~.

Page 479: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE II. 467

1)

3o.

dus diNérents. Mais, dans l'indivisibilité de Famé se

distinguent deux parties la sensibilité et la raison;

l'une faite pour obéir, l'autre pour commander. Il y

a donc un amour légitime de soi et un droit envers

soi-même; mais un droit et un amour entre deux

parties inégaies, et par conséquent imparlaits '.Dans

la famille, les individualités sont distinctes et sépa-

rées entre l'époux et l'épouse, le père et l'enfant, le

maître et l'esclave, le droit se développe sur trois

échelles diSerentes. Mais il n'y a pas de vrai droit,

comme il n'y a pas de véritable amitié, où il y a un

maître 2. Le droit proprement dit n'est possible

qu'entre égaux et. entre égaux libres, c'est-à-dire dans

tétât. Dans l'état, l'ordre social n'est autre chose que

iégallté sociale; cest le bien de tous, objet de la

volonté générale,et le droit s'écrit dans la loi~. La

!oi ne connaît plus les mouvements que ia sensibilité

excite dans l'âme de l'homme c'est Ihomme moins

la bête, l'intelligence sans la passion Toujours la

même, égale pour tous en son universalité indiffé-

rente, elle sert de moyen terme et de mesure com-

mune entre les passions et les intérêts opposés elle

EtA. ?< V, XV; Pottt. t. U; Mft~n. jMor t, XKX!V.

m. ~c. v. x.

Pottt. tU xi &yotp T<~M fOfMt.

i Polit. Ut, M Ô ft~f oSf T~f fJ~of jtsAe<!&w <!p~e<f ~oxe?)te~e<!e<f

~Eff T<~ MM'j. o~CpCMMf xe~euaw, ~rpo<TT~t!<T<

xa} ;&w}~)-

m'a'ope~MM MM?< o MM*~

Page 480: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

468 PARTIE IM.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.1

est le milieu dans l'état La justice prend donc la

forme définie de la loi 2.

Cependant la loi n'est pas la règle suprême du justeet de l'injuste. Elle n'est que le décret de

l'opinion cenérale l'opinion peut faillir; la raison seule ne se

trompe point. Au-dessus du droit positif, il v a donc

un droit naturel, qui est celui de la raison. La loi,

fût-elle juste, n'est que la formepolitique, non la

mesure du droit. Mais la règle de la raison est la

raison elle-même dans sa libre action. Le vrai droit,

c'est donc le jugement de l'homme juste. C'est la

justice elle-même qui détermine, dans la sphère de la

vie civile, l'égalité et le milieu du bien

La justice universelle a pour objet le bien universel

de l'état. Elle est donc le principe universel de toutes

les lois. Mais la législation par laquelle elle se repro-

duit elle-même et se perpétue dans l'état est celle

de l'éducation publique La justice universelle est

la vertu dans son rapport avec la société l'éducation

publique est le principe de la vertu civile, la forme

PcKt. III, Xt T~ J~MttOf ÇttTOWTM, T~ ~cof ~To<KT<f oyap

t

(Mt T~ ~<Wf.

E<&. A~tc. V,.t, ti. H! Ô t~fu~o:, ~<Moe. Voyez c! dessus.

p.466, n. i.s

Polit. f,t:6~ Ax<NO<7<!<ttt <M~<T<X<y<]!p ~)t -CfO~tTOt~ KM

f&w&te T<~ ~or~' t} J~t; ToS Axa~ou xp~tH?.E<&. ATc. V, V Ta Je ~ott!T<xa T~t ~tt< aperce

~cr< Tf5f t~of~

~<T<tMfO~MO~tTtM xep~ ~<M~af T~t~ ~tpof T~ X0tf<!tt.

Page 481: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE IM, CHAPITRE II. &69

morale de l'état et par conséquent la cause efficiente

de la justice universelle.

La justice particulière a pour objet le bien dans les

relations particulières d'individualités étrangères les

unes aux autres. Elle ne concerne donc pas le bien

absolu de la vertu, qui ne se trouve que dans l'acti-

vité individuelle, forme suprême de l'âme ou de la

totalité de l'état; eu~ n'a rapport qu'aux biens exté-

rieurs, tels que les richesses, les honneurs, la santé,

la vie même, et dont la possession ou la privation

font la prospéritéou l'adversité, en d'autres termes

aux biens de la fortune qui forment la matière ê& la

vie sociale, et qui servent de moyens ou d'instru-

ments pour l'acquisition du bien absolu 2.

La fin que se proposela justice particulière est

donc en général l'établissement ou le maintien de l'é-

galité des biens extérieurs entre les différents membres

de l'état. Ici les personnes sont distinctes et hors les

unes des autres comme les choses. Plus de moyenJ

terme unissant deux extrêmes dans l'unité d'une

personne, mais au moins quatretermes indépendants

etséparés. L'égalité

ne peut donc plus être cherchée

dans un moyen; il ne s'agit plusde proportion con-

tinue, mais de proportiondiscrète. Comme égalité,

!a justice particulière tient le milieu entre deux choses

P<YH!,t.

Et&. Nie. V, tt nep~ ra <t~a<M &<yr':<, <~ cMi'M, tt~<i ~Mp< ~M

~Tt~M )M[!<he;~0t. tV

HS~ T~t))f t} ~pti~aTa;il 6-&'Tt!pMf,

X. T. )..

Page 482: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

470 PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE. 1

comme justice, elle tient le milieu à l'égard de deux

individus. Le milieu de la justice particulière n'est

donc plus, comme celui de la vertu en général, une

simple moyenne,mais une proportion, et une pro-

portion discrète

Or les biens extérieurs se divisent en deux classes,

selon qu'ils appartiennent aux particuliers ou à l'état,

qu'ilssont privés ou qu'ils sont publics. Les biens

privés sont le sujet des transactions entre les parti-

culiers. Les transactions sont volontaires ou ibrcées

celles-ci sont les crimes, comme le vol ou le meurtre;

ceNt~-la les contrats, comme la vente ou l'achat, le

louage, le prêt2. Mais, de quelque nature que soit la

transaction, la justice consiste essentiellement à éga-

ler les choses entre les parties, ajoutant où ily

a dé-

faut, retranchant où ily

a excès, compensant la perte

par ie gain.La justice de compensation ou de correc-

tion (justice coMnmtatu'e), consiste dans une égalité

de différence, dans une proportion arithmétique

Les biens publics sont l'objet d'une répartition

E<t. ~tc. V, V! ÂM~ttf to~uf ïo ~MHno ~:e<rof Te xou !<rof

Xft}tMO<

ï! <M~ T«T<' X<d ~~f ~<Mt~ TtfftW TaCfa < ~<ft! ~e<0!' X~

~KtTtof' ~e Mf ~<TT<,~oïf $ ~<MO~ Tto~f. Ëtmf ~paTe &'M'ff.

M~tXoyef. VU M&TOf TÔ ~OMMOf TO J~<MOf, ~oXo~Of.

Ibtd. V Tf5f y<~ tïM'o~Xay~Taw ïA ~f exo~Ma! e<yr<. Ta ~e <~<

ata, x. s. a.

tbtd. Vtî To &OB~NT«of,6 y~feT<M év roM <Mfa~~yfMt<y'

x!"

&MU<r~o<e TO& axoM~OM. e<fr~ ~f ?<yo~ T<, o~Xot xat T))f ap'Ofttï"

(sc. aM~Oy~f).––

ne<p<tT<M T~ ?T)ft~t M~e<f, <~<!t<p<BfTOU X~p~OU~.–

Ôere To ft~f ~'i[fopC<MT«to«~<Mof ~f ef'w, ïo ~cof

xo! ~p~~

Page 483: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE 111, CHAPITRE II. ~71

entre les particuliers. C'est une totalité indivise qu'il

s'agit de distribuer. La règle dupartage ne peut être

cherchée dans les difïérences de quantité des choses

elle ne peut l'être que dans la qualité des personnes.

L'objet de la justice est donc ici de faire des parts qui

soient entre elles comme sont entre eux les membres

de l'état. Il nes'agit plus d'une balance à établir

entre des choses, mais d'uneéquation de relations

entre des choses et des personnes; il nes'agit plus de

(iiOerences, mais de rapports. La justice distributive

est une proportion géométrique

Dans l'hypothèse de l'égalité absoluequ'exigerait

1 absolue perfection de l'état, toutes les parts devraient

êtreégales. Mais c'est là un idéal dont la réalisation

n'est pas possible dans la nature, dans le monde de

l'espace et dutemps. Tous les membres de l'état

tussent-ils entre eux d'uneégalité parfaite, tous ne

peuvent pas en mêmetemps exercer au même lieu

les mêmes fonctions et supporter les mêmes charges 2.Le mérite diffère nécessairement, et par conséquentle droit. La justice consiste à établir l'égalité dans l'i-

négalité par l'inégalité même 5. Mais la règle de la

R<M. A<c. V, v Tt)< ~e XftïA~epM AxaM~ft~ xai ToC sa?' aj-n);'

c'M<0« ~t* e<TT<f eHo:~ TO du axis AitfO~OtM Ttfttt~ ~pt~MTSW ü

~f dML<M) <MM[{tMfo-M

TO& X<MMt)fOU<T<T~S ~ro~.tT~M. Vt T~~ap

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KfXo&K T~p TOMUT~f afatXo~Mf ~e<M~T<MX!;t'«t ftaOttftC[T<~0/.

~oC<. Il, t, dans lacritiquo

df la Ke)'ub)if)t)<'<)r Ptaton.

HMd.n!.y.V! i.

Page 484: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

472 PARTIE II!.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

distribution des biens de la fortune ne doit pas être

cherchée dans les différences que la fortune a établies

entre les hommes. La fin des biens extérieurs est le

bien absolu, qui est le bien de l'âme c'est sur les

proportions du bien absolu que doivent être établies

celles des biens extérieurs. La mesure de l'homme

n'est pas la richesse, la naissance, ni la vertu ducorps,

mais la vertu de l'âme. C'est donc dans la vertu de

l'âme que consiste le mérite et qu'est la règle de ia

justice 2. La"démocratie pureest une chose injuste,

et de même l'oligarchie celle- ci c'est l'Inégalité entre

égaux, celle-lâ l'égalité entre inégauxLa

justice ne

se trouve que dans la proportion, la justice distrihu

tive de l'état dans la proportion géométriqueentre les

biens extérieurs et le mérite, et par conséquent dans

la prépondérance de la vertu

Maintenant la mesure la plus favorable à la vertu.

dans la possession comme dans l'usage des biens cxte

rieurs, est la médiocrité. La vertu est un milieu entre

les extrémités des passions. Or aux fortunes extrêmes

répondent les passions extrêmes. Entre la condition

de l'esclave et celle du tyran, l'équilibrede l'âme est

plus stable, la droite voie plus facile à tenir. Dans ta

société, le pauvre envie le riche; le riche se défie du

pc~.vn,

Ibid. tU, ~n.

Ibtd.V.t;VI, t.

tb:d. m, v; VI, vt.

Page 485: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE Il. 475

pauvre,tout en le méprisant. Le pauvre et le rich

se haïssent et veulent le mal l'un de l'autre L'amiti

et la justice, double fondement de l'état, supposée

l'égalité; l'égalité exige la médiocrité générale de

ibrtunes et la prédominance de la classemoyenne

Le meilleur des états, et le plus stable, sera don

celui où la classemoyenne fera le plus grand nombt

et aura le plus de pouvoir. Telle est la république

t'état par excellence ('s-o~TMet) moyen terme entï

les extrémités passionnées del'oligarchie et de i

démagogie~, l'idéal de l'égalité, de l'amitié et de ]

justice.

Enfin, dans l'idéal de l'égalité politique, le droit e;

!e même pour tous, et le pouvoir suit le droit. Chacu

n'est pas seulement l'objet, mais le dispensateu

de la justice, et l'exerce à son tour envers tous

Polit. IV, <x.Ibift. Bo</Xer<M J~ 'croXt~ ~CMf e!fa< o~o/&w ~T< (M~«rr

!«STO J~~S' ft<&<OTO[TOM ~<TO«.

La véritable <f<Te<ot est la \<*r!tabtcaptoroxpetT~

ougouvern

ment des meilleurs. Ce qu'on appeHc vutga!rcment~foX<reM est m

espace de démocratie; ceQHon appelle vutgairetncnt <tp«rro<potT/<

""ecsp&cc doti~archic; Po~tf. IV, vnî.

Cependantla dpmocrattc e

la forme la plus voisine de la vraie co~~Te<a eOe-MMMc. NA. Ni

xn

?<:?. !V, ttt n~tffCe ~€ TOMTOXM TG ~S<T<'f ë~ttfMTM )<!tp~X

Mpop &' «MM T&' <t]tpMf. V, vn 0 vuv )Ltf9<ïfe< ï<ï~tMpe~eS!)~

~o~Te&t<, («&yof.–Ô~ap~fxai ~j~xpaT~tf. ~e<m!<tM«~ Ti

jSMaDK Tf~BMf.

tbid.t;tn.M.

Page 486: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

&7& PARTIE lit.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

Tel est l'idéal de l'homme le citoyen, au milieu

de la cité unie par l'amitié et la justice universelle,

déployant aux différents degrés de la viepolitique les

puissances successives de la justice particulière. Dans

la famille, lapropriété est commune dans l'état etic

est divisée. Le premier résultat de la constitution

élémentaire de la société civile, de la division des

propriétés dans l'unité de lieu, est l'échange 1 l'éga

lité del'échange est la première fin de la justice par-

ticulière. Mais, dès que l'échange s'étend à une mutti

tude de hiens différents, il s'établit une mesure com

mune, non pas entre les valeurs d'usage, mais entre

les valeurs d'échange de toutes les choses échan

geables, et qui donne à l'échange la forme supérieure

et plus savante de la vente et de l'achat. Cette me-

sure, ou ce moyen terme, est un corps facilement

mobile, d'une nature, puis d'une grandeur, puisd'une

figure déSnie, que la loi marque d'une empreinte et

auquel eue donne une valeur arbitraire 3. Pour la

mesure du crime et de la peine, la loi ne suffit plus.

PcM.I.m.

tbid. La vente crée la richesse relative des valeurs d'ccha'~t.

lbid & 3~ «Mn!X<)H) tM<)}T<X)) ~ptt~T&W,OU <!MM'TO~ <& &ft~)!fS'

Taw pterat&A~-

Ibid. AtMo<e~Mtt ~oxe? To f<M[, x~ e! fo~M~ ~MfTatK[<r<, ~t!<r:'

o< Eth. Nie. ÏV, tt! A'o <M~T<!t <n<~6X!!T~ Js? g~<M &' e'rr"

tS~y~' TO M(MOr(t' ~X~uOe' xai y~feTOtJ ~Mt'< ~TOf' ~fTO! ? <'p

tteree!.– tMfMt <n«'~e<.

-– A<a Touto To~fo~Mt ~e< fof<t<TMaoï' f'~

~!<re<, f~A fo(<~) e~. – n<~fM ~o~f~fterpot.

Page 487: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE II 475

Toute loi est générale, toute action particulière; les

généralités n'atteignent pas le détail infini de la réa-

lité elles restent en dehors, comme de vaines formes

et des formules vides Faudra-t-il donc, ou plier

l'action à la forme rigide de la loi, ou fausser la loi

elle-même pour l'ajuster au fait? Entre ces deux ex-

trémités du droit strict et de la fiction, intervient

le juge, qui applique à la mesure des actions hu-

maines la règle flexible de l'équité 3. C'est donc le

juge lui-même qui est la règle, et comme le droit

vivant

Mais toute transaction, soit libre soit forcée, a

pour objet les besoins de la vie et la vie elle-même,

la matière et la nécessité Or toute nécessité est un

mal en elle-même, et la satisfaction d'un besoin n'est

Voyez plus haut, p. A5o.E<t. Nic. IV, vm Ô f~f fOfto~ xaOoXou

e&, 'cep~ &~Mf Je oJ~ o!op Teoc0&

ehteïf tMtCoXou.

Âxp~oJ&MMw.tbid.

IHd. ToBy~p

JuM~ou<Mp~wf <xop<aToe

jMt~ô )M[fMf e<rr<~ ~<~ep

xa~ T~< Aeaëh~ oMto&~H~ o ~toMM~o~ x< Tô ~ne<XM eaafop-~Mt fJ~Mw <a~e~re< T~ xa~oXoM.

3fa~n. JMor. H, i. ?<)?. H, v.

Comp.les belles réBeHons de Vico, De Mttrt <ent/)orM ~htJtonMt ra-

tione(trad. de M. Michetet, t. i4o-5).

Eth. Nic. V, Vtt Ô yftp &)MMT~e ~o~erotteïf<H oiov J~<MOf ~~u-

X< )MJ ~tfToBK A~MM~~ ft~TOf. ~<MOf ~tMMt ~MOf,de

J~a!. Ibid.

5Polit. Ht, v 6 <M!X« cJx ~OT< XOffNf~ ïJ~OU xai TOU <M<xe!f

<~M a~oùc ad tteraJJ~eeM ~,<<i T<tCT« wctyKMOf ~~p-

Xe' e~cep&Ma< iM!X«, oj atM' <!)t<t~o!'T<Mf

Tc~Mc a~ra~rM~

~<!X<<, t&X' ToC eS ~f <to<MtW&t xai To?t otx/ou~ To?~ y~M<r< ~M~~

Te~e&M j~pM' M~<tJT<~<t<wt.

La matière est nécessaire et non suŒ-

sante. VII, M Tels <M'<tyM&M orp<~e«.xu Ta <Mp< T<M &<Mt&n

~p<t-

Page 488: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

476 PARTIE HL–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

qu'un bien relatif. La compensation entre la perte et

le gain ne fait que redresser le tort, la justice de com-

pensation ou de correction n'est, comme le plaisir du

corps, que le remède d'un mai ce n'est donc qu'une

vertu relative. Dans la répartition de la richesse, de

l'honneur et du pouvoir, il ne s'agit plus de la néces-

sité et de ce qu'ilfaut pour vivre; il ne s'agit plus de

l'être, mais du bien-être et du bien faire, du bien

et du beau, fins de la liberté. La distribution des

biens de la communauté est un bien par elle-même.

un bien positif, et la justice distributive une vertu

absolue 2.

Mais, dans la distribution comme dans la compen-

sation, on se conforme à la loi. L'équité n'intervient

que pour suppléer à l'insuffisance nécessaire de toute

formule générale et de tout droit écrit. Au-dessus du

magistratcomme du juge s'élève donc le souverain

qui fait la loi et qui règlela constitution même de

l'état; au-dessus du pouvoir judiciaireet du pouvoir

des magistrats, la puissancedélibérante ou législative

€e« ai ~x<!f«M TtftMp~Mxot! xoXaceM M*

apcr~ ef<Kf, <jtO!Mt<

M~ TO iMtX&Mt!f~«~Mt ~OUMf.

1 Tô ~tf, To eS ~)f. Polit. t, n, tn, v.

Vit, xu Ae~M e§ Mx<~e<rea~ TaM~xaM!,Tn asX& w ~.M

Ai d' (se. <tpeT<M)eK< Tas T<~M xa~ T<~

eutfopM~,<ï?rX<MSe< x~

XtoroM ~pa~e'To ftef yip ~repof

tf~oC T<fo~ <fpe<r« e<yr<f, ai To<a':f~'

~pe~e<~ToufatfT~of' x<![T<M'<tet<a<yap (ï~aO~t'

e«j< xai yefftjoeK. t~t

Surl'opposition d'M'a~MfM' et xAo~ voyez plus haut, p. 43t, n. 2

To~ptof.

PoKt. ÎV, Xt ËOT< T<5f TptcSfTO<:T~ ëf f~f T< TO ~0«Xe«OftE!'0"

Page 489: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE ÏH, CHAPITRE II. &77

'1 1Le souverain n'est pas un homme, c'est la cité entière

assemblée.

La vertu du citoyen, en général, n'est pas la même

(juela vertu de l'homme de bien. Celle-là consiste à

savoir tour à tour commander et obéir, celle-ci est

une vertu toute de domination et d'empire, la pru-

dence. Or l'obéissance est un état d'Infériorité elle

ne suppose pasla prudence, ou la science, mais seu-

lement l'opinion vraie, soumise à la direction de la

science 1; elle n'est bonne en elle-même que d'une

manière relative, comme apprentissagedu comman-

dement. La vertu de l'homme de bien est donc supé-

rieure à la vertu civile en général. Mais, dans ses fonc-

tions de magistrat,le citoyen ordonne et dispose; il

commande, et sa vertu propreest la vertu maîtresse

etarchitectonique, la prudence, et la prudence dans

son rapportavec l'universalité de la cité. Dans le ma-

gistrat se confondent en une forme supérieure la vertu

civile ou politique,et la vertu privée~.

Emm, c'est dans la libre action de la puissance dé-

xsepl siuv xoivaûv, ôeiGrepovJè TO ~ep3 TŒs âp~«s~ splrov dé -rI rô ôr_

cep! Ce sont les trois ~s T~ appelés, Œ~oK' Tp~'ro~ <~ les ro &-~of. Ce sont ïes trois pouvoirs appelés,en générât, chez !cs mo-

dernes, législatif,exécutif et judiciaire.

Polit. ïït, tn Ap~o~fOf y' <"?x ~r"'aper~ epott))<r<~ <tXM

A~t ~0~. Platon n'exige égalementdes guerriers, qui forment le

corps de la cité, que Fop~ ~~t formée parla toi et t'éducation, et

réserve aux magistrats r~mor~. Bfp. Il, 570 c, 3~ b; Polit.

3ot a. Cf. P&~J. 82 a.

PoHt.nt.n.tn.

i -=

Page 490: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

478 PARTIE 11!.–DE LA MÉTAPHYStQUE.

libérante, dans la décision du souverain, qu'est le

point culminant de la prudence humaine; laperspi-

cacité politique, fixant, dans l'indétermination de la

société civile, la limite certaine, le milieu indivisible

du droit 1.

Cependant l'exercice de la prudence n'est pas le

dernierdegré de la vie et de l'activité. Au-dessus de la

prudence, il y a encore la sagesse.

La sphère de lapratique est dans la

contingence,

par conséquent dans les oppositions dont le raison-

nement et la délibération parcourent l'étendue. La

Rn que détermine la perspicacité de l'entendement

n'est qu'un moyen terme variable dans un monde de

mouvement, entre les agitations de la passion. Mais le

sage est celui qui sait d'une science certaine et inva-

riable ce qui ne peut pas ne pas être et nepeut pas

varier 2. Or ce qui ne peut pas ne pas être, cequi

est

nécessaire par soi-même, et non pas seulement,

comme la matière, d'une nécessité relative et con-

ditionnelle, c'est l'êtresimple, identique

à soi-même,

de toute éternité. Mais, pour saisir le simple et Un

variable, il faut une vuesimple et invariable; par

conséquent un acte perpétuel de pensée, exemptde

toute condition matérielle, supérieur à l'opposition et

au changementc'est-Ià

qu'est la sagesse. Lasagesse

est

Polit. IV, m T~ jSoxXeuo~e~of, ~ep ~or} erofe~e~s <M~wM

~pyof. Voyez plus haut, p. 458.

Rt. Wtc. Vt, ttt, vtH; X, vu. JMa~n. Mor. î, xxMV. Cf. Met. t. 1.

Page 491: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE IM, CHAPITRE Il. 479

donc la perfection absolue de l'activité de l'âme. La

vertu tend à une fin qu'elle n'a pas en elle-même la

sagesseseule a en elle sa fin et sa satisfaction. La vie

morale et politique est une lutte perpétuelle contre la

passion;la vertu e~t un combat. Au contraire, la con-

templation invariable du nécessaire et de l'éternel n'est

possible quedans la paix. Or la paix est le prix de la

victoire, c'est-à-dire la fin du combat, et elle est à elle

seule sa propre fin. La lélicité est dans la paix. La vie

politique est une vie militante 1 dont on ne se repose

que dans le calme de la vie spéculative la vie spécu-

lative n'est pas pour cela le repos et le sommeil, c'est

t'activité souveraine dans la liberté du loisir La pru-

dence, ia vertu directrice de toutes les vertus, n'est

que l'intendant quise charge, dans la famille, des

choses de la matière et de la nécessité, pour procurer

au maître ~e loisir de se livrer à la libre recherche du

Et&. Me. X, vu Aoxe? te t? eJ~a~MWM ef Ttjf s~o~ e!f<M' <M~o-

~ts9a yf~p&<t o~oXe~tef~

x<~ -BMXe~ot!(M:f ~ot etp~t~ o~ ~ef. Tt.w

[tSf oBy 'SpMtTOKSf apeT<BfTOM 'BfoXtTOfOf~ TOK ~O~e~tXOM << ef-

tpyetM. – TfM' (f~ xare T~apeTat: ~p«~e&

ai -so~tT«a! XM 'aro~efM-

«d, x. T. X. De là, le corpsde la cité est la classe

guerrière, dans

Aristote(PeK~.ÏV,

ïn T~ 'co~efMxof,To o9rX<T<xof), comme dans Pla-

ton(Rep. n).

La vie guerrière répondà r~owjo~ ou ~e~eT)} que t'e

ducation dirige (Cf. Plat. PA<M~. 8a a),et qui

forme le .~J~os à la

viepotttîqmc.

Sur lerapport

du ~<!f<os à Feducation, voyez plus haut,

P 45?. Aussi, dans Aristote comme dans Platon, honneur, T~);, est

le mobile ordinaire de la viepolitique;

le ;~f«M est @<~oT<~oî. Ef&.

Y<c. u!.

m. Wtc. X. vnt.

Page 492: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

480 PARTIE tH–DE LA MÉTAPHYSIQUE. 1

bien et du beau 1. Enfin, la vie politique suppose des

relations entre des individus étrangers les uns aux

autres; la vie spéculative de la sagesse est une vie so-

litaire, à la perfection de laquelle l'innuence de !a

société peut concourir, mais qui n'en dépend pas par

elle-même et dans son essence. L'objet de la spécu~

tion, l'être nécessaire et simple, c'est Dieu~; Dm!

n'est point séparé par la matière et par l'espace de ):~

chose qui le pense. Entre la chose qui pense et la

chose pensée, il n'y a pas ici de milieu elles se tou-

chent. L'acte de la spéculation est un acte immanent.

quine sort pas de lui-même et de son indivisible

unité 3.

La sagesse n'appartient donc pas à l'entendement

La prudence ne se sépare pas de la vertu; l'entende-

ment ne se sépare pas de la sensibilité elle est

matière, il en est la forme. La spéculationveut une

raison intuitive indépendante de la matière et des

oppositionsde la raison discursive et de la vie mo-

rale~. Mais le caractère distinctif et spécifiquede

l'homme est le libre arbitre, ou la puissancede déli-

bérer et de choisir, qui ne se sépare pasde l'entcn-

JMfMt:.JMbr. t, xxxn.

E<&. EtMf. VII, xv T))t) ToC .e-soS {MXto-ra .~e<Mp~. ~ayn.3for.

xxxv fi ~f y<!p <ro<~t ~'ep~ To <tt'J<of xai .9-e?of.

JEfA. ~tc. X, Vtî Ô <M~, M~ xae' ewTOf ~tKtrat ;&e&-6M

Voyez iechapitre

suivant.

Eth. Nic. VI, Vtt. De /tK. H!, tx sqq. Nou: .~e~poTtxo: par o)'["

sition à fcBf ~paxïtxo~,ou fo<?< ~o~o~efo~, ou ~fOM.

Page 493: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE 111, CHAPITRE II. 481

3t

dément 1. La spéculation veut donc une raison supé-

rieure à l'humanité, une raison divine comme son

objet même, et la félicité absolue de la vie spécula-

tive ne semble pas faite pour nous 2. Mais la raison

divine brille, au moins par éclairs, dans l'humanité

Or la vraie nature, l'essence, et par conséquent la

fin de toute chose, est ce qu'elle a de meilleur et de

plus excellent; la perfection du mortel n'est pas de se

renfermer dans la sphère des choses mortelles, mais

de s'élever de toute sa puissance à l'immortalité. La

vraie vie de l'homme, n'en dût-il jouir qu'un jour,

qu'un seul instant, est la vie divine. La fin de la na-

ture est l'action parfaite de la pensée pure dans l'unité

absolue de la spéculation

Ainsi se reproduisent dans l'histoire des dévelop-

pements de l'âme aux trois degrés de la vie animale,

de la vie humaine ou civile, et de la vie divine les

E<t. ?<?. VI, il H Ope~TtXO~ fOM'Erp<M~p6<T<~ <!pe~K &!MW;-

ÏM)}. IM TOM<!ftt ŒPy~t <~0pN!M$.

tbid. X, Ttt Et .5'e!of o fOM~rpM

To~aMp&wo!

<M<o Ka:T~

MMM) ~Ot ~e<0t ~ifOOSTOf

iïfOp~tfOf ~Of.

iMd.A~.Xtt.p. a49,L 2.

E<t. JV[C. X, TM XpA ~)t oJ XNTZ TOM~MpMfM~TOM <tf9pc5)T<~<ï

~pof6<p, ~Op&ttrop J«T<][, cJ~e .5'fttTŒ TOf ~f!tTof, aXX' e<p' o<TOf e~e-

~N <t<raCef<[T~e<y. Ao~6<6 < ~f «ï< &ta!(rTOf e~fM ToCro, e~epTo xt!-

pMf x<~ <~te<fo«' ïo~ap

o<xe!bf eK<MrT&)T~ ~<!<Te<xpc[T«TTOfxai t~«rrot<

K~' ex<tarT~). Ka[! TM<M'Cp65~ J)) o xera Tof voûv ~3/0$, e~ep ftaÀ<arT<][

T'~to odMpawos*

ToSto~px

xai eJ~at~oMcratTOf.

J?~. iVte. f, mToe~ y<tp

e~<r<fMX«rrc[ oi ~poe~ofTM (se. ~S<o<),

''M pCf e&M!~fo~ (se. o asoXetUTMXû:),xai o <!f~<T<xo<, xai

ïp~TO~o

Page 494: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

~82 PARTIE Ht–DE LA MÉTAPHYSIQUE. 1

trois périodes principales de l'histoire et dudéveiop

pement de la vie en général; d'abord l'unité, l'indi-

vidualité confuse, la matière et la sensibilité ensuite

les oppositions et les abstractions de l'entendement;

enfin l'individualité et l'unité supérieure de la raison

dans la forme Immatérielle de l'activité pure'.

Telle est la marche de la nature, de l'imperfection

de la matière à la perfection de la forme, de la puis

sance à l'acte, du néant à l'être. Du sein de l'Infini.

par une suite de transformations insensibles, elle sa

vance vers sa fin sedégageant peu à peu du chaos,

sortant par degrés du sommeil, elle n'est tout en-

tière elle-même qu'au terme de son mouvement, a

ce moment suprême de l'activité de la raison. Ainsi

c'est par sa finque la nature

s'explique, qu'elle se fait

connaître pour ce quelle est tout le reste n'est que

moyen, dont la fin est la mesure. La fin est donc lu

principe même par lequel on juge tout ce qui précède

dans le temps. La nature s'élève graduellement de la

plus indéterminée de ses conditions à sa fin dernière

la pensée, pour expliquer la nature, revient de ).'

fin aux conditions; son point dedépart est le point

où la nature s'arrête sonpoint d'arrivée, le point

d'où la nature est partie et d'où l'art devra repartir

.~eMpttT«e<.Polit. t, t Ô Je ft~ ~M'e~efo: x<MM~e!f, ~Jef <~f<M"-

A'<a!M{Mte«M',

eJCef~po< <MXe~' <&Tr' -9-!t~ot) A .&eM.

\oyet ptus haut, p 34~-346

Page 495: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE I!ï, CHAPITRE II. 485

3..

son tour. La spéculation et le mouvement repré-

sentent une analyse et une synthèse marchant en sens

contraire l'une de l'autre. L'ordre du temps est Fin

verse de l'ordre logique, et la fin de la nature est le

principede la pensée

Ainsi la Science et la Nature forment deuxsystèmes

distincts, semblables, mais opposés. Des deux côtés,

mêmes rapports, mais en deux sens contraires; la

proportionou l'analogie, qui suppose l'identité de

rapports, n'empêche pas la différence, même la con-

trariété, dans la disposition respective des termes.

La condition générale de l'existence et de la pensée

est l'unité, et l'unité vient de la forme. Mais. dans la

nature, la forme est liée à la matière comme l'acte à

sa puissance; elle est donc dans le mouvement, et

l'unité réside dans la continuité que le mouvement

suppose, qu'il mesure et qu'il produit en mêmetemps.

Ainsi l'unité naturelle ou réelle consiste dans l'indivi

sibilité du mouvement; c'est l'unité de temps de

JHe<. IX, p. t86, t. t'y Àwctf <:?'ap~t~ ~ft~e< Tft ~<yfoftefo~ <M<

T&M.ÂpT~ y~p

o? &e)Mt' ToC T~oM J' éfeiMt yefe<K~. P/ty<. VÏM,

'H OXtM ~t~cerM T~ y<f<~ef0f aïe~M xai ë~'ap~ttf <of. Jjfef. VII,

p. tAo, i. t0 Te!f Je yef~<ye&w xaM )«ft{'TeMf fte~ f0tt<r<î x<~e!rat

«<ro~w, ~te~ <!ito T~e tp~<

xai ïou e!~o«s ~<it!<T< ~o rou Tc-

~T<~<w ~<yeM< ~o~<r<s. C~ Eth. Eud. !I, xt. RA. A~e. IM, v:

~feTtu T~ ~oveTow du T~ apcA~et~tpfSTOf

eH'« ef Tn efeors<.

JMet. V, p. ~5, i. 5 T<?f ~e xa0' ot~M ë~ ~eyo~f&)f Ta ~et< ~eye-

!N ïy ewe~~ ~MU. <Txpe~~ Je ~~yetat, <'M~ftt<r« t<~a, ~/f): J' oC

<MM~peTOf,<MM~peTM< tt<tï<t ~pjfof. Cf~ X, p. ig:, t.

9 sqq.; X!tl,

P 98:, 1. 5 ÂJts~peTOf. To ~f )fetT<i ~oyof, ïo Je xara~po~o~.

Page 496: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

4~i PARTIE MI–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

quantité, de matière; l'unité de nombre, qui fait t'in

dividualité réelle 1. La pensée, au contraire, neporte

que sur la forme, indépendamment de la matière la

forme seule répond à l'idée. La condition de la pensée

est donc une unité formelle, qui n'implique pas tu

nité matérielle de l'individualité 2. C'est une unité de

qualité, non de quantité~. La sensation n'est aussi

qu'une forme, mais elle est la forme commune de

deux puissances corrélatives, la limite où elles se

rencontrent dans l'instant et dans le point qu'elle

détermine. L'objet de la sensation est donc unequa-

lité, mais une qualité présente dans l'espace et le

temps, et dans la réalité matérielle d'un individu.

L'objetde la science est la forme en elle -même

et hors de la puissance, la qualité abstraite, indé-

pendante du temps, du lieu, de l'individualité, et

par conséquent générale Toutes les sensations de

même forme peuvent donc être rassemblées sous

une même idée ce sont comme des parties dont la

j<<?t.X, p. tQ2, t. 9~.

ïb!d. I. 21 Tôt <S~ ~f o~yo~ e?t TOMuTa J'eSf fo~Mf tt'r

TOMMm J~ ~fa&c~peTOt' ~ta~peros J~ rot?

a~M~eTou €<~e< Mt~y.

ÂptO~tM ftef oBf ïo JtftO' &fa<TTOf<M«t/peTO~ ei'~e< T~ Tp yt'&)trr<5 xxi Ti'

~mOT~fttf.

Ibid. tH, p. 5o, t. 8Â~Mperof

~«f 0 ~taTa To ~o<ro~ t) x~T!

fe eï3o:. X, p. t<)4,t. 11 To a~oCp TM ~o<~ T&! ~00~

De An. H, v; m, vm. Anal. post. I. xxxt E~y<tp xai ~<rrH' )'

oStt<K< ToC TOtoCJe, ft~ T<tC3~ T!ff<~ aXX' aM~aoecSctt ye af~xtM'!

TO~e T< X<~ 'BTOC<MHfSf' TO ~6 X<t6oXo« Xf[< ë~ 0?<T<P aJt!~<!TOf at'~fS'

eûfu' otiyftp T<He, oJ~ t~f.

Page 497: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE IL ~85

généralitéfait un tout, comme des unités qu'elle em-

brasse dans son unité 1. La sensation est indivisible de

) indivisibilité absolue de l'atome lagénéralité, de

l'indivisibilité relative d'une totalité (x<z8'~o~). Les

sensations sont les éléments, la matière la notion est

la forme que la matière reçoit de la pensée. La sen-

sation et la science se répondent donc comme la na-

ture et lapensée, comme la quantité et la qualité,

comme la puissance et l'acte.

Mais si les formes individuelles sont contenues

comme des parties dans la forme générale de l'Intelli-

gible, la généralité intelligible est contenue à son tour

dans la forme réelle de l'Individualité. Si l'individu est

dans l'espèce et l'espèce dans le genre, le genre est aussi

dans l'espèce et l'espèce dans l'Individu seulement

ce n'est pas de la même manière, mais d'une manière

toute dluérente et dans le sens contraire. Au point de

vue de la science, les particularités recueillies par la

sensation sont les matériaux dont la généralitédonne

la forme; mais, au point de vue de la réalité, la forme,

dépouillée des conditions de l'existence, abstraite de

l'espace et du temps, est une possibilité qui ne sub-

siste pas par elle-même et qui n'a d'être quedans des

individualités dénnies. Toute forme qu'elle est, c'est

Phys. t, t Uc~Xe )M ~ECfX~&H'M <M f~p!)TO X<tÛoXo«. jMc<. I,

~ttMt!. ~Mt. n, sub Cn.

.Met. V, p. 116, 1. 22 A<o To et~ ToC e~om Mt ft~poî ~~erat,

T!M To M~o~ ToS efom ~a'M.

Page 498: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

M6. PART !E ÏIL–DELA MÉTAPHYSIQUE.

une matière, une matière logique, susceptible d'une

multitude de déterminations qui la réalisent 1. Sa vraie

forme est l'acte, objet de l'intuition. Ainsi la généra

lité est une forme vide, une totalité abstraite ou

peuvent se rassembler une infinité de formes parti-

culières l'individualité est la forme réelle, le tout

actuel et fini où les généralités arrivent, en nombre

dénni, à l'existence actuelle. La généralité est donc

une matière qui enveloppe dans sa puissance une mut

titude de particularités différentes et que celles-ci enve-

loppent dans leur acte elle s'étend à toutes, elle est

comprise dans chacune. Par conséquent, plus une

notion est simple, plus elle a d'étendue car moins

la possibilité est déterminée, plus elie est vaste et

large. Autant la généralité augmente, autant la réalite

diminue; l'étendue est en raison inverse de ia pro-

fondeur ou solidité; l'extension est en raison inverse

de la compréhension

Dans l'ordre des existences, la plus simple est ta

plus générale. La méthode de la nature consiste,

.Met. XIII, p. 289, L i 6 ~ëf «Sf .Mf<t~ M ToC Mt6&M~

o&Kt JMt) eepMTo:ToS )M<MXou x<d

<Mp~rof~<rf~. Anal. post. H, xu

txoxe<o~Map

TotoCtof e!Mt< To efo~ '!}<rreJwap~etf xaTOt ~fctfttf M'

~eMf&)f.

3fe<. ïït, p. 5o.

J'at cru pouvoirme servir des mots

compréhensionet extension.

quoiqu'onne trouve pas

dans Aristote de substantifs qui y répondent

exactement. Mais il emptoieles verbes uMp~ew, ~f«)Mp~e<p, pour

étre

compris, et les verbes ~fept~Mw, ~pexTe~etfet ~rettrs~ew, pour

sur-

paMerft extension.

Page 499: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE in, CHAPITRE II. M7

comme on l'a vu, dans une spécification progressive

qui enveloppe successivement les puissances infé-

rieures, sans les anéantir, sous une forme plus haute,

dans une activité plus déterminée. Chaque degré sup-

posetous les degrés qui le précèdent 1. A mesure

on'on s'élève dans l'échelle, les fonctions s'accumulent

dans un cercle de plus en plus étroit, la matière se

pressedans des formes de plus en plus circonscrites.

L'intensité de la vie va croissant, l'étendue desespèces

diminuant sans cesse. Les branches de l'anglese rap-

prochent continuellement jusqu'à ce sommet indivi-

''ibic de l'individualité absolue et de l'activité pure.

Mais le développement de 'r. nature s'accomplit

dans le temps l'union de la matière sensible et de la

forme se fait par le mouvement. La pensée, en elle-

même, est étrangèreau temps et au mouvement La

totalité, résultat de la matière et de la terme, tui est

donc donnée d'avance dans la réalité. Elle n'y ajoute

rien, elle n'ymet que ce qui y est, et que seulement

on ne savait pas y être; elle n'attribue à la chose que

ce que !a chose possède déjà, l'attribut ou prédicat,

préalablement détaché du su)cteU( le lui rapporte

et l'en amrme comme le contenu du contenant Les

t)e~tM- tt, m Âe<y<tp

e~ T&' e~~ uxap~efTo

~p~tepo~.

tbKt t, m H fo~~M &<XEf )fpe~<TEfT<t'< XMeT:«TT!Kre< ft-ïX)~ t)

Wttaef. Tôt' <H?TOf ~6 TpMT<~<ta< 0 <TttA~«Tf< P/t)~. VH, tU T<

~<[p Mpe~c-Mxctt OT~fM T~« J<afo<af ew«yTa<~a< xa< ~pofetf AEyo~et'.

M. ~tc. Vt, ïn. Problem. XXX, ~tv.

L'attribut étaMt désigne paret le sujet pnr C,

Aristote dit

Page 500: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

488 PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

termes ne sont plus ici une forme et sa matière, de

l'une desquelles à l'autre il faut un passage; ce sont

lesujet tout entier et l'attribut. Entre le sujet et l'at-

tribut, iln'y

a qu'un rapport immobile 1 dont l'énonce

est ce qu'on appelle la proposition 2. La nature est

toute dans le changement, la pensée dans le repos.

Mais si la pensée ne peut pas saisir tout d'abord le

rapport de l'attribut et du sujet, si entre ces extrêmes

il reste pour elle un intervalle vide, qui ne lui per-

mette pas de les unir? De même que, dans la nature,

il faut, pour se mouvoir d'une extrémité à une autre,

l'intermédiaire d'une quantité continue, de même dans

ia science il faut, entre les termes qu'on ne peut

mettre immédiatement en rapport, un intermédiaire

propre à faire disparaître la solution de continuité. Or,

si dans la science le rapprochement des extrêmes ne

se fait pas par un mouvement, mais par un rapport.

l'intermédiaire ne peut être qu'un troisième terme,

qui joueentre les termes extrêmes le rôle d'une

toujoursA est <MC, et non

pas Cest A, comme on dit

vutgairctnou.

La manière dAristote a plus égard aux idées ou universaux qui

s enveloppentles uns les autres; celle du vulgaire aux individus au<-

quelstidée s'étend. Aristote

parleselon la

conMr~tfMMMou tnfrf-

sion, et le vulgaire selon Fc~~MMK.t Leibnitz, Nouv. Ess. sur

l'entend. hum.p. 32~.

Ao~oî. H u y a pasde mouvement dans la

catégoriede reintit )'

\o~ plus haut, p. 383.

npeMKKf.Je ne considérerat ici

quete cas le ptus simple,

ceiu~

dot propositions et syllogismes aturmatifs, ou calégoriques.

Page 501: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE Hï, CHAPITRE IL 489

moyenne proportionnelle. En outre le rapport du

sujetà l'attribut est comme tout rapport géométrique,

un rapport de contenance. Pour joindre l'attribut au

sujet,il faut donc un terme moyen contenant celui-ci

et contenu dans celui-là. La nature se meut entre ses

extrêmes d'un mouvement continu la science établit

entre ses extrêmes, à l'aide d'un moyen terme, une

sorte de proportion continue. A est en B, B est en C;

d'oà la conclusion A est en C

Telle est la formule essentielle de la démonstra-

tion, c'est-à-dire de la science trois termes, dont le

premier compris dans le second et le second dans le

troisième; le troisième enveloppédans l'étendue du

premier, et le second dans celle du premier. Deux

extrêmes dans le rapport inverse de la compréhension

et de l'extension au milieu, la limite ou mesure

commune, dans son rapportinverse avec les deux

extrêmes. Entre ces trois limites, deux intervalles; ce

sont les propositionsou prémisses.

Entre le terme le

/)Mtï.Bf. I, IV K<<5 ~e f~arof flèv (se. opof)

KM <tJw ef ~XXM

xxi t~O ~f T<WT~ ~tf, M~ Ttt :9-e<TE< yt'fSTM ~Of a'KpOt <!e, TO

<M<! ïs ef <S~ of, M~f y <i~Ao ~<nw. Le moyentcnnc ne se trouve

au milieu qH'cn énonçant les propositionsà la mao~rc d' \risto~c (A

".t en B, B est en C, A est en C), ou, si on les o)on< c la manière

tutgaire,en mettant ia mineure avant la majeure (C est B, B est A,

<: estA), comme Locke a propose

de le faire, Ess. sur l'entend. hum.

:m,. –Je ne considérerai encore quele cas le

p!us simpic des

~Hogismcs de la première ugure,à taquet

tes .t:itrc$ n~<ucs se ra

"tenent.

Page 502: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

MO PARTIE !H–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

plus étendu ou legrand

extrême et le moyen teinx

la plus grande proposition ou mo~cnrc; entre lemoycx

terme et le petit extrême, la nHK<SMre.La figure (s~tïjMct)

achevée, il ne reste plus qu'à supprimer le moyen <t

réunir les extrêmes en une c<Mtc!(MMR la synthèse des

termes, lesyllogisme

est accomplie

Ainsi la synthèse des termes, fin de la démonstm

tion, est aussi la synthèsedes deux propositions an

técédentes. Les prémisses sont les parties dont la

conclusion est la totalité, la matière dont elle est );t

forme 2. Mais, dans la nature, la matière n'est que Iii

condition de la forme; la forme ou la fin est l'hypothèse qui détermine le besoin de la condition le rc

sultat est contingent, la matière nécessaire et d'un'

nécessité hypothétique~. Dans la science, c'est tout

le contraire la nécessité est dans le résultat. Les

prémissesne sont pas nécessaires à la conclusion. i

elle pourrait être tirée de prémisses toutes dinercntcs

la conclusion sort nécessairement des prémissesLa

matière est ici l'hypothèseou supposition qui entra nu

Anal Dr. 1, xxv 2<~&t~'e< eXotTra) e!f<M Ta Aeto~t~aTtT'<!

&MM'.A! tMOTt~TeM

7<y<HTOM Aa~T~~Mt~y. Cf. tV

JMet.V,p.89,

Voyez ptus haut, p. 4*6.

Phys. !t, tx Ë<tr< J~ ïo aMyx<M«fTe Toîe (Mt~tf~ xai

)MtMt ~0*~ yt~fO~~Mt, TpJ~OPTtfOt ~OpmxXtt~&M- ~f

Je TO& y'~

!f0« &e~ To«, KM~i! e< To TeXo< ~<yrM e<TT<, M< To~wp«c~'

&fT<H e<TT<f e!<&T)rep

exe? ftt) ~t~ot ToCcu~Mpeio~MtT~, ''fX'

e~tt &mt<, x. T.

Page 503: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE Hï, CHAPITRE II. 491

ia positionde la forme 1. La science est en sens con-

traire de la nature celle-ci est, en général, le règne

de la contingence et de la cause finale; celle-là, le

règnede la nécessité.

Mais souvent la nécessité de la matière sensible

s étend jusqu'à la forme. La nature n'est pas toujours

maîtresse des conditions, et elles lui font la loi. Tant

qu'ellene s'est pas suffisamment assujetti et appro-

prié la matière, celle-ci, restée en dehors de sa

libr e action, la détourne par force de sa fm ainsi

s'introduit dans le monde l'accident, produit de la né-

cessité 2. La liberté de la nature n'est donc, en gé-

néral, que relative et conditionnelle. Pour la liberté

absolue, il faut que le mouvement ait été libre dès le

principede même, dans la science, la nécessité ab-

solue suppose des principesnécessaires. La conclu-

sion, qui est la fin, est toujours nécessaire d'une né-

cessité hypothétiqueet conditionnelle, relative à la

nécessité des prémisses; mais la perfection de la

science, la démonstration veut dans la conclusion

une nécessité sans limites et sans restriction il faut

donc à la démonstration des prémisses nécessaires

Les propositions nécessaires sont celles ou l'attribut

est de l'essence du sujet; enfin les attributs essentiels

d'un sujet sont ceux qui sont propres au genre dont il

JMet. V, p. 89, t. t Ai ~)[oC~<reMpour

ai tfpoT~sM.

t Voyez plus haut, p. 4'7

/<<M~.pMt. t, n.

Page 504: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

492 PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

fait partie Pour la nécessité absolue de la conclu-

sion, pour la démonstration, il faut donc que les trois

termes soient d'un même genre 2. Quelque nombre

demoyens qu'exige la preuve d'une conclusion, de

quelque nombre de syllogismes que la démonstration

se compose, il faut que tous lesmoyens soient du

mêmegenre que les extrêmes, et que la démonstra-

tion entière forme un tout homogène.

Maintenant le principe de l'union réelle de la ma-

tière et de la forme est la cause; le principe de la

synthèse logique du sujet et de l'attribut est le moyen

terme lemoyen terme répond donc à la cause. Par

exemple, l'intervention de la terre entre le soleil et

t la lune est la cause de l'éclipsé de lune c'est donc

aussi le moyen terme auquel lesyllogisme en appellera

pour démontrer l'éclipsé; or tout problème revient a

chercher la raison de la liaison de deux termes en

une proposition, où l'un est le sujet, et l'autre l'attri-

but de l'être ou d'une manière d'être. Tout problème

revient donc à la recherche d'une cause ou d'un moyen

terme 3 c'est la même chose à deux points de vue

t diSerents.Pour la nécessité de la synthèse des termes

Voyez plus haut, p. 36G.

Anal. pMt. I, Vtt A<* <M?JOCKMt

<!e? XCtt TO fte<y0f TMTB~TM,

XM M

~spSrof TM{~o~ <S]r<!p~e<f.É)t y<ip Toi?atjTouy~oM af~x)! Ta ax~

xai Ta ~<M SK'<M. tx Âfzyxtt ïo {teo'of efTp cn~nj! tn~yefe~ 6MMt(.

3 Ibid. tf, )[ 2~ëo~e< apat èv <miM<M? T<Ms ~T:{<Te<T< ~!)Te<r e~ ET~'

ftStMP tt T< e<fTt T~ (J[~<W TO ptëf ~00 O~TtOy, TO ft~<70f.

Page 505: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE m, CHAPITRE II. M5

dans la conclusion, il faut donc à la science unmoyen

terme qui en soit la cause dans la nature. Ici se ren-

contrent et se touchent les systèmes opposés de la réa-

lité et de la pensée.

Ainsi quatre sortes de causes, et de causes essen-

tielles quatresortes de moyens, et de moyens essen-

tiels, qui servent à soumettre les choses à la règle

des notions. Par exemple, dans la sphère de tous les

mouvements nécessaires o~ violents, le moyen terme

est la cause motrice qui agit par impulsion. Dans la

sphère des mouvements et des actions libres, c'est

l'attrait de la cause finale. Ici, les termes qu'il s'agit

de joindre sont, d'une part, un acte possible (C), et

de l'autre, ce qu'il convient de faire (A) le bien sert

d'intermédiaire ( B). De la règle générale qu'il faut faire

le bien, et du rapportde l'acte avec le bien, l'âme

déduit la convenance de l'acte 1. Dans lamajeure est

l'idéal du bien, dans la mineure le possible dans la

conclusion l'action, comme le meilleur des possibles,

et aussitôt la volonté exécute la décision de l'entende-

ment 2. Chez l'animal, c'est l'appétit qui tient lieu de

lamajeure

la sensation, ou en général l'intuition, de

la mineure; l'action elle-même, de la conclusion. «Il

1 De An. mot. xï.

tbid. vu ÔT< f<ef o3p ~fpa~tsTo o~TepMfM, ~otfepof-

«< <~e

CMOTi&TeM<M-6?<M)tT«M[! A!o e~Mf ~<f<WTMJtft Te MU <~ a9o<! X<~ ~«it

MuA~!)[T<w. De JHem. IL Eth. Me. VII, v.

Page 506: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

4M PARTIE lïï.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

« faut boire, a dit l'appétit « voici la boisson, » dit le

sens, et aussitôt l'animal boit

Ainsi de même que, dans la morale, le bien, qui

en soi est un extrême, se trouve dans le milieu entre

les passions, de même la cause, extrémité, commen-

cement ou fin dans la nature, est le termemoyen dans

la science. Mais de même aussi que ce qui fixe entre

les excès des passions le milieu du bien, c'est l'excei-

lence de la raison en sa libre activité, de même c'est

l'activité de la pensée qui détermine et qui réalise la

cause dans la science, sous la forme du moyen terme

Si le moyenterme est en lui-même le principe de la

synthèsedes termes extrêmes, c'est l'action de la pen-

sée qui est le principe formel du moyen terme; mais

la pensée ne peut le prendre que dans l'intervalle des

extrêmes et dans le genre auquel ils appartiennent. La °

sagacité à découvrir les causes n'est donc autre chose

quela perspicacité dans la détermination d'une limite. A

ou mesure commune, entre deux termes homogènes

Ainsi, quelle que soit l'étendue d'une démonstration

la science ne sort pas des termes dont elle se propose

de trouver le rapport. Elle ne prend pas un attribut de

De An. nMt<. vu CoTEOf fMM, t? eM~a ~ë~e<' ToJt ~e -soT&f, )'

a~t?<M~ enref )! )! ~zfT<![<r<a[ o MM' ~<~ ~<fe<. De ~t. ÎH, Xt.

Je n'at trouvé aucune indication (brmeHe de cerapprochement

,2 je n'ai trouvé aucune indication formelle de cerapprochement.

mais il me paraîtsu!!)samment autorisé.

j4n< t, xxxn.

Page 507: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE ÏH, CHAPITRE II. <t95

l'attribut, ni un sujet dusujet, mais un intermédiaire,

attribut du sujet et sujet de l'attribut, sujet essentiel

de celui-ci, attribut essentiel de celui-là; en un mot,

eue commence par diviser le milieu renfermé dans

les limites de la conclusion, puis elle le resserre sur

tui-même, et le condense jusqu'à ce que les extrêmes

se confondent et ne fassent plus qu'un Si l'on

donne au géomètre une figure dans l'espace, ou

que,cherchant une figure, il se la propose à lui-

même, c'est en menant des lignes ou des surfaces par

quelqu'un des points ou quelqu'une des lignes de cette

figure qu'il en développe les propriétés toute science

fait de même. En effet, toute pensée est dans l'acte

la pensée ne pense rien que ce qu'elle fait venir à l'acte.

On ne sait qu'en faisant savoir c'est faire; orl'objet

de la science est donné à la science, soit dans le pos-

sible, soit dans le réel. On ne connaît donc rien qu'en

amenant à l'acte, par la division, ce qui n'est qu'en

puissance dans la totalité de l'objet et eny réalisant le

moyen terme

La méthode syllogistiqueest donc une synthèse

/in<tLpost. t, XXtU (M~MTS

e~T~pN <?pOT!)t<T<~oj~'

j~py~o A<(~[-

&tMT<M TOUA ~P M? ~eHtfMMU, 9~X' CS< TO jMS'Of CUXfO?TM &M a~M-

OSTOt~MfTM )Mt!

~fef. IX, p. i8g, 94 E~p«TxeT'uJs xa< Ta <?Myp~no[TCt e~ep-

j-eï?c. ~lcxs~ov`vses ~·â,p evpfuxovetv.~>o~se y?.xvepàv

ôs~ ss dvvoi~ce~ ùvra~e<9:. AtMpoSfTM yep euc«rxo!«7<f. ~<Tre ~fepof oT< Tx J!<t)ft~g< ofTatFÍ~. Âllllpoiiv'res "),àp e{¡pÍaxou(j"v.!lO'Te ?IXvepQv

(jTI TΠJlivi,(Le' 6VTIX

e~pyeMf ~!)[yo~ef<][ eJc~~eTOM.AtT<o!' oT< t'oM~ t? et~p~eM.

~<TT* eMpyeMf~ t! ~MfftM' XOtt ~ta TOMTO<!ro<0'<fTe~ !tM<TKO!<Mtt. C!

M. Wc. in, v.

Page 508: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

~96 PARTIE III.-DE LA MÉTAPHYSIQUE.1

nécessaire, fondée sur une division antérieure de l'in-

tervalle de ses termes. La méthode de division, au

contraire, pour démontrer l'attribut de sonsujet,

remonte à la division du genre de l'attribut; tandis

que le moyen terme doit être contenu dans l'étendue

dugrand extrême, elle prend pour moyen terme

l'universel, et pour grand extrême, les diuérences ou

les espèces dISérentes dont l'étendue totale est é~aic

à l'étendue de l'universel. D'où il suitqu'elle n'est pas

plus en droit de conclure après qu'avant la division,

quelle est celle des différencesqui appartient au su-

jet, et qu'elle ne conclut qu'en supposant ce qui est

en question. Soit B (mortel) à démontrer de D

(homme) et partons de la division tout A (anima!)

est B (mortel) ou ~Immortel).De cette majeure dis

jonctive, et de la mineure tout D est A, il suit seule-

ment la proposition disjonctivc tout D est B ou C.

Dans cette alternative, pour obtenir laproposition

affirmative simple B est D, il faut la demander et la

prendre pour accordée. L'homme étant un animal, est

mortel ou HMmor~L Maintenant est-il mortel? ce peut

être une opinion ce n'est pas une conclusion. Au

lieu de prouver, la méthode de division interroge:

c'est une perpétuelle pétition de principe. Telle est ia

méthode illusoire, l'impuissant syllogisme de la dia-

lectique platonicienne 1.

Anal.~Mt. t, xxxt ËOT<

y «p tt A~pecM <&nrep aoOef~ <T!

(T~t- ftef ye:p~s? ~eï~M <MTe!TM.

Page 509: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE tH, CHAPITRE II. ~97

'~no~MMt.t.t1.

3 2

La méthode de démonstration tire toute sa force

du moyenterme. C'est le

moyen terme qui fait la mi-

norité de la synthèse des extrêmes.

La synthèse de la démonstration suppose donc l'a-

nalyse, qui donne lemoyen

terme dans son rapport

inverse avec les deux extrêmes. La sciencepropre-

ment dite suppose la connaissance antérieure des pré-

misses 1. Maintenant des deux prémisses, la majeure.

est l'expression du rapportdu

moyenterme avec le

petit extrême, c'est-à-dire avec le sujet de la conclu-

sion la mineure est le rapport du moyen terme avec

le grand extrême, l'attribut de la conclusion or rien

de plus simple que de trouver la mineure. Enposses-

sion de la conclusion, et par conséquent du sujet, il

nous suffit de l'expérience pour connaître dans ce sujet

un attribut de plus, au contraire, la majeure est le~

rapport de deux attributs; ce n'est pas une proposition

propre au sujet,et que l'expérience en puisse tirer

immédiatement, mais un principe pourtout le

genre

dans lequel le moyen terme renferme le petit extrême.

C'est donc la majeure qui est le principe général de la

démonstration; c'est la majeure qu'il s'agit de trouver

pour en tirer la science, en faisant ressortir les con-

clusions qu'elle enveloppe dans l'étendue de sa puis

sance.

Pour obtenir la majeure sans la conclure de dé-

Page 510: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

498 PARTIE Ht.–DE LA MÉTAPHYS!QLR.

monstration'; antécédentes, il faut donc une méthode

nouvelle, qui n'est ni la démonstration ni l'expérience

immédiate l'tKjHC<tOft est cette méthode. L'induction

consiste à tirer lamajeure

de la comparaison de la

mineure et de la conclusion; elle consiste à couctutf.

de ceque

le grand terme (A) et le moyen (B) sont

enfermés dans la compréhension du petit (C), que )f

grand est compris dans le moyen (A en S, B en C

donc A en S~). Mais il est évident que cette consc

quence illégitime en elle-même, ne peut être !c::i

time qu'àune seule condition savoir, que le petit M

trêmc (C) soit équivalent au moyen terme (B), r!

qu'on puisse les substituer lun à l'autre; or, pour ct~

blir cette équation,il n'y a qu'une voie c'est (t<

prendre pour petit extrême tous les casparticuti' r~

contenus dans l'extension du moyen terme'. Dans !cs

sciences naturelles rénumération complète est im

possible et serait superflue on se contente du p)"s

grand nombre, et on néglige les exceptions et )a(ci

dent~; mais la conditionrigoureuse

de la légttin)it<M

logique de l'induction n'en est pas moins la substitu

tion, au moyen terme, de la somme totale des indivi

dualités qui composent son extension. Cette condition

réalisée, le petit terme et lemoyen peuvent

se cou

vertir l'un dans l'autre~. La mineure tourne sur cH<*

~M~.pr. Il, xv.

1

Pf Part. <M. H!, n Cr M<<. VI, n; XI, \tn.

Anal.yr. H, xy E< o3f afTtorp~Cst To r T~* B, xai pi ~epT~

Page 511: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE ÏM, CHAPITRE II. 499

<)3a.

mcmc; les deux autres propositions, sans tourner su

elles-mêmes, tournent autour de la mineure, afin d

présenterà ses deux faces les mêmes (aces

qu'aupa

ravant la conclusion se trouve en tête, la majeure

!a fin, à la place de la conclusion (au lieu de A en B

H en C, A. en C, on a A en C, C en B, A enB). Ain!

l'induction est un syllogisme sans moyen terme, où 1

petit extrême tient lieu du moyen terme, et où 1

conclusion devient la majeure et la majeure la con

ciusion

La démonstration et l'induction s'opposent donc

comme la méthode qui descend des principes aux cor

séquences et la méthode qui s'élève des conséquence

aux principes 2 en outre, si toute démonstration sut

pose une majeure,et s'il est impossible que la preuv

remonte & l'immi, toute démonstration dérive d'un

majeure indémontrable. Toutes les majeures intermi

diaires peuvent donc être trouvées indifféremment pa

l'induction ou la déduction; mais la première majeur

en cnaque genrene peut être trouvée logiquement qu

M ~cef, o~fh~ ro A T~! B <!Mp~e<f. ~ef ~e !~e<f To F ro e~ a~o!

M))) Taw )Mt<~)«MT<w <n~te~MM)f' 1i ~ap e~~c~tt ~M 'sr'M~TN! J<)(

p0<t. H, Vtt tHf O~TMt &a TO ~[)~ef ~~X<fî.

tMd. ÊWftyMy)) ftef oBf ecr< <tt< o e6 e!f<t~~ tts <tv~o~«r~ot

& ToS~rspau .&<~repo~ ~po~ T~ fteerM <r«XX~«rao<?<M. Ëor< 6 roM

ros<nAXoy«y~to< Djfe ~pMïtts

)MK attecoM ~p&TC[<re&K~ Tpo?ro!t T<

~M[e<T« ë~Ct~My)! TM <n<XAOy«T(J[~'0 ftSf fp

~M TOU ftSTOU M<!xp

Tp~ ~ttPUCW Act TOUTp~OM

TO <tt.p0t' TM fJ[e<T&

Ett. Atc H.

Page 512: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

500 PARTIE III.-DE LA MÉTAPHYSIQUE,1

par l'induction De son côté, l'induction suppose pom

fondement, en dernière analyse,une conclusion de

mentaire qui ne puisse pas être la conséquence d'one

induction antécédente cette conclusion ne peut être

trouvée logiquement que par démonstration. La de

monstration et l'induction sont donc les deux mé-

thodes opposées qui vont, l'une des premiers prin

cipes aux dernières conséquences, l'autre des dernict es

conséquences aux premiers principes. Le point de de-

part de la premièreest le genre, et le terme

auquel

elle arrive, à travers toute la suite des espèces, l'Indf-

vidu l'Individu est le point de départ de la seconde.

et le genre son point d'arrivée. L'une va du gcnc'r~!

au particulier, l'autre du particulier au général

La science ne tourne pas pour cela dans un ccrcte,

la démonstration est la première dans l'ordre logique.

l'Induction dans l'ordre du temps. La démonstration

est la forme essentielle de la science; l'induction, qui

doit s'y ramener, la forme accidentelle sous laquelle

il nous faut saisir d'abord les éléments. Celle-là est

plus claire en elle-même; celle-ci plus claire pour

nous Ce qu'il y a de plus évident en soi, l'évidence

~n~KMt. î, xvm. Eth. A~c. VI, m.

ÏOD. 1, XM ÊtKtyft~ ~e <Mo T<5~ x<[<~MKTK[ e~f rat xaCoXoM

o~M. ~tMtt. ptMt. 1, XTUt.

3~iad. post. t, Ht !MxX~) J' ~'T< aJt!f<tTOy atM~KMiS~M SS~Mî

Xof, ehtep~x

-~por~MWJe? T)t!~ a~o~e<~w e~a< xai

yfMpt~MTepMO'a~

faïof y<!p~or' ï* a'~f TMf atjTMf ~~Mf ~ifpJïejMt

xa~~oreptt elval, et f<"

Tef~repef rpo~o~'

o!of Ta (<~f wpoe ~fMM' T<t <ttrM$, ~xep rpo~

Page 513: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H!, CHAPITRE IL 501

mcmc, c'est l'intelligible; ce qu'il y a de plus évi-

dent pour nous, ce sont les choses sensibles'. La

purelumière est trop vive pour nos yeux; comme des

oiseaux de nuit, nous voyons mieux daus l'ombre 2.

Plongés dans le monde des sens, il nous faut apprendre

par degré& à discerner les choses de l'entendement sous

ics formes de l'espace et du teîtps, et dans la réalité du

mouvement~. Ainsi se reproduit, dans la sphère même

de la science, l'opposition universelle de l'ordre de l'es

sence et de l'ordre de la génération des choses, de la

logique et de l'histoire, de la raison et de l'expérience,

de l'idéalité et de la réalité.

Toute science a pour premier principe, dans l'ordre

de sa déduction logique, l'Idée d'un genre pris dans toute

son étendue; dans l'ordre de sa génération, l'expérience

spéciale des individus enveloppés dans l'étendue de ce

genre, et qui l'enveloppent à son tour dans leur com-

préhension. Toute science repose sur une sensation

particulièreun sens de moins, un

genrede moins

''EMt~My~ oro<e?yff5p<ft0f. ~tua!. pr. M, xxm. <M<re< ~ef oSf~porepo~

«M yMMM~MMOOî0 ~Mt TOC ~<MU <TU~Xo~«TfM~' t)~!f ~E

efZjB~eOTepOî0

~H Ttt< ~MtyMyti~.

'.Mft. VM, p. t33, 1. 6 T~ étMMrroK~f~jMfMt

)t<H ~M?T9t ~O~cExtt

'!p~fM eor! yf~pt~M,)t<t!

fMXpofo~Ef ~e<

ro? <}fTo:. ~<ta/o~t. I, ti

Aey<M J~~o~ ~fM~ ftef tfpoTepa

x<t! ~f~~MTepitT~

ey~«Tepof T~:

*6tf<retM' aiAeM ~e <fp<!repc[tte!

yf&xx~MTepatT«t ~oppMrepof.

E~ït ~e

eoppMT<tM) Ta «<~oXtw ~<yT<t, e~uMTM<!e Ta xaOMCt<yra- Ka< «f-

""e<T<M T<![Cr' c!XXt(Xo~. ftc Jn. H. 't. ~("y ). t.

'~f.H.p.36.).

Voyet plus !taut. p

Page 514: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

502 PARTIE ÏH.–DE LA MÉTAPHYSIQUE,1

par suite une science de moins'. Cependant, en de

hors des genres, il faut encore à toute science l'uni

versel; au delà des principes propres les principes con)

muns, qui assujettissentà des lois communes toutes

les démonstrations. Or l'universalité n'est pas, comme

legenre,

une possibilité impliquée dans la réalité de

certains individus ce t'est pas une condition propre

à certaines formes spécinques comme une puissance

l'est à son acte c'est un rapport, une proportion entre

tous les genres et toutes les possibilités. L'universp)

est donc nécessaire à la science en général, Indcpcn

damment de toute hypothèse et de toute restriction,

et d'une nécessité universellepar conséquent les

principes communs ne sont point des majeures de

démonstrations, ni, par conséquent encore, des con-

clusious d'Inductions correspondantes. lis ne se rcn

ferment pas dans les limites d'ungenre dénni et dans

une sphère dénnie de la sensibilité. Ce n'est donc pas

l'expérience qui nous les donne, comme elle nous

donne les principes propres Nécessaires à toute peu

sée, supérieurs à toute expérience, ce sont des pos-

sessions naturelles, non des acquisitions; ce sunt des

habitudes primitives de l'intelligence.

Les principes universels seraient-ils donc en nous

~!M<. pa~. I, xvm.

Voyez plus haut, p. 3~6.

/<<Mtt. pr. f, xxx Tas ftef <!p~<K T<~ ~fep~ ~M:<Trof ~Mretp'M

eMpaJoCftn.C~ Hist. an. t, v. E~t. A<c. Vt, x<t. Voy. plus haut, p 3~"

Page 515: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

Li\M: !H, C!PrfK! !t. 505

(te tout temps, comme une science toute taite:' Kous

n'en avons pourtant nul!c conscience avant de les avoir

appliquésdans quelque cas particulier or les prin-

ripes sont par eux-mêmes plus intelligibles queles

conséquences, ~e serait-il pas étrange que la plus haute

t! la plus puissante des sciences demeurât cachée

ttans l'âme sans qu'cHc s'en aperçut 1~Les principes

nttivcrsels ne résident donc pas en nous avant toute

< \péricn<'c, sous la forme définie de conceptions

.tctuellcs~, et dans l'acte de la pensée. C'est à l'e\

)nriencc qu'il appartient encore de les faire arriver

.') l'acte seulement il n'est plus besoin ici de l'énu-

tnération préalable de la totalité ou même du plus

i~rand nombre des cas particuliers auxquels le principe

s'applique. Dès la première expériencedu

rapportde

()cux termes universels, dans un genre quelconque,

l'induction peut étendre le même rapport a tous les

genres possibles avec une infaillible certitude. Dès

lapremière expérience. elle peut établir comme né

cessaire la proportionou analogie qui lait l'essence

<!e tout principe universel". Les axiomes ne sont pas

.Mf<.t. p. 34, 1. t2 Â~tt ~t)f M XM TU~~Ot orMft~TO~ o3<TO[,

~tMMMWf ~MM X<f~Of[fOMef ~yOfTE~ T~f XCatf'JTi!TMt' EMOTttfMMF. Inft~.

~M<. Il, Xtx: Ef (Mf ~t) ~«ftSfaJtoti; (se. TM e$ef~) otT~x~t'. X~mt~t

? 'y <M[p<~ecT~p<t< ~ofTOts yf~fT~t~ 'f~e<t'~ ~'f~'e'r.

Anal. «Ott. <<'c. laud. C~e ~t) et'u~ap~uMt- -p«yfte«]f<ai e~e<

"M* <Mt*~XXMt' ~6<M' y~O~T<< t'Mpfftiit.T~pMt'.tA~ axo <!t<~tt<reMS.

thut. ttfMf Ta~pefTat enotj~n jf~pt~f M'x~Mt'- K':f:~

~e Mt' afctXc~Mf.

Page 516: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

504 PARTIE III–DE LA MÉTAPHYSIQUE,j

dans l'âme seulement en puissance comme toutes les

propositions contingentes qu'elle pourra concevoir un

jour: ce sont en elle des dispositions prochaines, des

habitudes toutes prêtes à l'acte aussi, lorsqu'elle an

pliqueces principes, il ne lui semble point qu'elle ap-

prenne, mais qu'elle reconnaisse sa science lui sembie

réminiscence. On ne sait pourtant pas, avant l'expé-

rience, l'individualité ou la réalitéque l'expérience

seule peut découvrir on ne sait pas que telle figure

donnée a pour somme de ses angles deux angles droits

avant de savoir que c'est un triangle, et il est (aux

quela science, d'une manière absolue, ne soit que

réminiscence Mais ce que l'âme possède d'avance.

sans en avoir encore iait usage, sans savoir même

quelle le possède, c'est le principe qui enveloppe dans

son universalité toutes les particularités possibles.La science de l'universel n'est pas en nous toute

faite par avance, et elle ne s'engendre pas non plus

de l'expérience pai un mouvement successif: c'est une

puissance prochaine que rien ne sépare de l'acte qu'un

obstacle à l'extérieur, et qui, comme toute habitude,

entre en acte dès que l'obstacle est levé. L'âme, sous

lepoids

de la chair au commencement de la vie, est

Ceci estdirigé

contre la théorie de Piaton. ~M<d.~r. H, xxt

ô~tOKM Je <MM0 ~f T~ M&Wff Xo~Ot, &T< ftO<h)OM <M'a~t!<TM. OJ&tfM~

~ep cuft&t<fe< ~rpoetf~TTCK~MTo ttOtO~jKKfrw, <!XX* <MM:To e~ay&n N ~f

6aM<f T~f TfSf Mît f~poe e~HOTt~ttf, <Sdtep aMt~fMp~t~MM.ËfM

e<!M< <<~tef, o!ef ~T< ~oop9aM,

e~f etJfS~e~ oT<Tp~wyof.

Cf. f, ) M"

JMbr.H. Vt

Page 517: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE I!ï. CHAPITRE II. 505

comme ensevelie dans ie sommeil elle n'a qu'à s'é-

veiller. Comme un homme qui sort de l'ivresse, ou

qui de la maladie revient a la santé, il ne s'agit pas

pour elle de devenir autre qu'elle n'était, mais de re-

devenir elle-même. Pour entrer en possession des

principes de la pensée, elle ne subit pas de change-

ment et d'altération. Ce n'est pas là du mouvement,

mais le repos qui succède aux agitations de la nature

et des sens La pensée a été comme mise en déroute

elle se retbrme par degrés. Une perception sensible

s arrête dans la mémoire, puis une autre toute sem-

blable, puis une autre, et les individualités dispersées,

les espèces, les genres retrouvent peu à peu leurs

rangs dans l'universalité primitive. C'est l'ordre qui se

rétablit, le rapport sous lequel les termes reviennent

se placer deux-mêmes. Toute science, en euet, ainsi

que toute vertu, toute habitude en général, est une

disposition, un ordre, un rapport étranger au mou-

vement~.

P& VH, tn Û Je~PX*~ ~< ein<yn~Mt< yeM<TK ~f

'~x &my ojj* <ïM~M<n: e~axep~raf ex ToC ~e<Me<f xa6s«~ew 0

f«<Ten.' CM T~ ~MtfT~ot ftCMOTt! T< oJ <~a~e~ smcmfftOMc yeyofexaM ~ra!-

~f' XO~TOt a~MH~ t!f Tt; etHOT~fM! ~M;0~a!< ~pOTepOf'OUT&)OU~' ~'T<![~

"fX~ ~f~M"? ~f %f' Ty ~ApX!t6/CTCtcO<M T~f ~~f

6~ Ttf$ ~U<T<-

*«Ttïpa~~ ~poM~f

Tf y<fer<Mx<[< ~«rr~of. A<o xa< T« ~cft~M, x. T.

De ~ttt. n, v Eft <MTo yttpe~om: xc:< eis efreX~etaf.

~tMtt.p0<(. H, XtX O~Of ~f fMÇ~ Tp0!nt~ ytfO~S, ëf0~ CTtïfTO~,

fKpM ~<ynt, eM*erepo~,

~M~ ~< Tt)f ap~f n~Oe~, x. T. Cf. 3f<'<. t,

tnn.

Page 518: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

506 PARTIE IÎL–DE LA MÉTAPHYSiQtJE. 1

Ainsi, tandis que le champ où s'opère le mouvc

ment, c'est-à-dire le passage de la puissance l'acte,

est une quantité continue, dans laquelle la division

peut déterminer une inimité de limites, le champ de

la science separtage

en un nombre fini d'intervalles

indivisibles. Les intervalles de la science, ou les pro-

positions ne sont pas des quantités, mais des formes

où la quantité n'est pour rien; ce sont des rapports.

qui ne renferment pas de matière et qui ne présentent

pas de contenu à traverser, mais dont la pensée as-

semble les termes sans mouvement et sans succession

Dans la nature tout est continu, et plein de l'Innnh

dans la science tout est discret et vide'. La réaiite.

dans toutes les catégories, est comme une étendu.:

l'idée, comme un nombre linnni est donc impos

sible dans la science comme il l'est dans le nombre.

Si, entre les deux termes d'une proposition, on pou

vait insérer une innnité demoyens termes, la pensée

devrait les compter tous; l'énumératioB ne finirait

donc point; d'un extrême on n'arriverait jamaisà

l'autre; il n'y aurait pas de démonstration et pasde

science2. La totalité de la science n'est donc pas seu-

lement comprise, comme celle de la nature, entre

De ~K. t. Ht TawMt (se.roc

fOtipMTOt)rm e~e~ ëf, <t~.

T~ e6<

Met. tt, p. 39, t. 5 (M~p <~<M<w etr< T!!$ ypaft~~ x~M TM

~«Hp~fTeM ~f OU~ ~TftTOft- f<Mt<KM J* OMt ~T< OT~afTT ~tO~ep«'~

ap<C(tt!<re<ToK To~t o Tt~ ~etpof ~<s§t<.Sf.

Page 519: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE II. 507

un commencement et une fin la divisibilité en est

finie, le nombre des intermédiaires limité, et elle se

résout tout entière en un nombre déterminé, ou du

moins déterminable, de rapports immédiats, d'inter-

valles indivisibles, de propositions indémontrables,

qui constituent les principes de la démonstration~.

Mais l'intervalle a des extrémités; la proposition,

le rapport, a des limites ou termes. Qu'est-ce que

chacun des termes que la proposition affirme ou nie

l'un de l'autre? C'est ce qu'il faut savoir, avant que

d'amrmer ou de nier. Avant la science, avant ses

principes mêmes, qui sont les propositions indémon-

trables doit venir la détermination des termes 2, dont

ces propositionsénoncent le rapport. Le commence-

ment de la science est la <~fH<M~.

La proposition n'est que l'affirmation ou la négation

d'un fait, et tout fait est une relation, savoir qu'une

chose est ou n'est pas comprise dans une autre. La

démonstration est la preuve du fait. Mais la déuni-

tion est la détermination de la chose en elle-même

de sa nature, de son être. Elle ne dit pas <~nun terme

est en un autre elle dit ce qu'estun terme donné.

~tmd.MMt. t, MX, xx, XXH OttTS ~OfTOt <MM<!e<KT<!['Ot~T* S~ <~]re<-

jMw <Mof Te &[~e< To yape?M[< o!roTM'o!'o:w ou~ef aX~o eortf To

e!f<M M~f Aa!o'nMM <~t6<rof <M<o&MpeTof,<!MKx~MfT<!t &<Mj9eToL

ùco~, epwftcs.Anot. mxt. n, ttt Ai

tp~<MT<Bf aM~e~e~f, op«rfto<. f, nt.

A&t. VII, p. t5o, L Ô Xo~O~c TOU ~pK~OtTO~.

Page 520: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

508 PARTIE III.-DE LA MÉTAPHYSIQUE.

L'objet de la démonstration est donc fexistence de l'at-

tribut dans le sujet; l'objet de la définition, l'essence 1.

Toute étendue se résout dans les intervalles et les li-

mites, toute science dans les deux formes correspon-

dantes de la démonstration et de la définition~.

Les deux termes de toute proposition sont le petit

et le grand extrême, lesujet et l'attribut tels sont

donc les deux objets de la défmition. Tout attribut

est un accident qui n'a pas d'être par lui-même, qui

est sans essence, et ne peut se définir que dans son

rapport avec unsujet. Or le rapport de l'attribut au

sujet peut être de deux sortes divisible ou indivi-

sible, médiat ou Immédiat en d'autres termes, il

peut être l'objet d'une conclusion ou d'un principe.

La définition d'un attribut médiat est donc la conclu-

sion d'unsyllogisme~.

Mais tout rapport médiat a sa cause hors de lui.

Non-seulement l'attribut médiat ne peut pas être en

lui-même, mais il ne peut pas être par lui-même dans

le sujet où il est. C'est donc de la cause de son rap-

port avec le sujet que dépend son essence et que sa

~ttM~. post. H, !H Ô ftEf o3f op«~to$ ï< do-ri ~~o?' )) ~e <txoJe<?<

~T< !{ ~crt To~e xftra ToS~e, <? oJx ~ortf. \'tt A<' <t~o~e<~eN! ~~Efxr&r. fi èn, TÓ~e x~mÈ "(r;¡~e, n Qllx ¿nw. \'11 à.' Œ1r()Jel~er:,s ~It(lelldl"

ay~MOf e?fiu ~ewuo&M MMf <)T< e<TT<)', e~ ~t) ou<n<!t e~. ~tfW. Vff,

p. *53, 1. aS.

JMef. t, p. 34, t. 8 n&M fta9!!<r< <t A' a~o~6<&Ns M ~t'op«w'

De An. t, 111: Aoyos ~e 'sfM 0 Mpt<r~o~ atro~ef~.

~tn«~. /t0ït. n, x.

!bid.

Page 521: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE II. 509

définition doit être tirée. Or la cause est le moyen

terme qui produit, dans la conclusion, lasynthèse

des extrêmes. La définition de rattribut médiat ne

doit donc pas consister seulement dans la conclusion

elle doit renfermer le moyen terme. La conclusion, à

elle seule, n'énonce qu'un rapport qui n'est pas néces-

saire et évident par lui-même. Rien ne prouve que ce

soit la définition d'une chose, et non pas simplement

l'explication de la signification arbitraire d'un nom.

Par exemple, définir la quadrature, comme on le fait

vulgairement,la formation d'un carré équivalant à

une figure donnée, c'est n'énoncer qu'une définition

nominale; la définition réelle est la définition par la

cause la formation d un carré équivalant à une fi-

gure donnée, parune moyenne proportionnelle. La

moyenne proportionnelle est la cause de la quadrature,

et le moyenterme par lequel on en prouve la possi-

bilité~. Enfin c'est le moyen terme qui est la raison et

la défmition même du grand extrême, et c'est pour

cela précisément que toute science repose sur la défi-

nition c'est que la science est dans le moyen terme~.

La définition de l'attribut médiat est donc de deux

espèces la première est une conclusion; la seconde

~fet. VÎ!I, p. i7)t, t. 28 ÂXX* (Mf~M, At- ft't fET<XT)~ OtTMS M

A<~0î.

Anal. post. H, XtV ËOT< TO ~<TOf ~O~OS T&S ~p~TOM eiKp<.u- ~tt

C&Mt <M ~M<m({«H &'e~M~U ~fOOT!M.

J/ct. tff, p L '4 O~

MT< ïo Terpoty«f~e<oTt ~a~t e6pe<m.

Page 522: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

510 PARTIE Ht–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

unsyllogisme complet, avec ses trois termes. La pré

mière est imparfaite et purement nominale la se-

conde est la définition réelle, essentielle et parfaite.

Cependant l'essence, quelle qu'elle soit, ne peut

pas être démontrée, et la définition n'est nullement,

comme l'a cru la philosophie platonicienne, une es

pèce de la démonstration 2. En -effet on ne peut de

montrer l'essence sans la supposer, et sans prendre

pour principe la conclusion même qu'on s'était pro-

posé de prouver. Le défini est lesujet, la définition

rattribut. Or, en premier lieu. la définition doit ctt'c

renfermée dans tout le défini, par conséquent la con-

clusion doit être affirmative et universelle3; en outre

la définition est l'essence même du défini par cou

séquent elle lui est propre, et elley est contenue

tout entière; l'aHribut doit être pris, comme le sujet,

universellement.!Le sujet et l'attribut sont donc ici

de même étendue, et convertibles l'un avec l'autre.

J'ai suivi avec Zabarella(M ~l<ta<. ;M~t. Il, x) contre la

plupartdes

commentateurs, et principalement des Grecs, l'opinion d'AvcrroM,

quine fait

pointde la définition nominale une

espèce particuHnf

distincte de la définitionpar

conclusion. Lci~nitx( ~YoMt.

&

p. a53) La déMnition réelle fait voir lapossibilité

du déCni, et la

aemtna~ene le fait point. Cf. Kant, Logique, rédigée parJaesche,

S eu.

Anal. nott. Il, Vt!, TtH. Anal. pr. t, xxx ne<<?e<fe~e~tpou~

&-

ufToe ~faroS ~ëp!o~c~ e~3e<$t~ ~e<T&M «ï< ToS T~ eoT~.

Ibid. tn TA T~ e<TT<f atraf xaCo~ou xalKaT!tyoptx<!f.

Par coMC

mtentt'essencc ne

peutêtre

exprimée que par un syHogismcde ta

première figure.

Page 523: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

HVRE m. CHAPITRE Il. 5H

Mais, si les extrêmes sont égaux, l'intermédiaire ou

moyenterme est

égal aux extrêmes. Le moyen terme

de la démonstration ne pourrait donc être que la dé-

)i)ution même qu'il devrait servir àprouver, et la

conclusion serait d'avance dans la mineure Donc

toute démonstration d'une dennition, sous quelque

forme qu'on la présente, r enferme une pétition de

principece n'est qu'une vaine équation du même

avec le même. Serait-ce de la division que sortirait

la démonstration de l'essence? La méthode de divi-

sion, en général, ne conclut que par une pétition de

principe elle met en ordre, elle développe, mais elle

ne démontre rien2. Mais, en outre, ies attributs qui

entrent dans la déHnition de l'essence ne peuvent être

que des attributs essentiels du défini, et la totalité de

!a définition doit comprendre la totalité des attributs

essentiels. Or rien n'empêche que la division ne saute,

dans sa marche, des attributs essentiels, universels et

nécessaires, et qu'aucontraire elle ne s'arrête à des

attributs accidentels; en sorte que, fut-ce même une

démonstration, la conclusion pourrait bien être toute

autre chose quefessence cherchée. Mais supposons

que la division n'omette ni n'ajoute rien, où sera la

preuve qu'il n'y a rien d'omis et rien d'ajouté"? La di-

vision eut elle donné la démonstration exacte de l'es-

/M<~r. t, tv, vnt.

1 Voyez plus haut, p ~f)H.

~<Kt!. /MM~. H,

Page 524: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

512 PARTIE III–DE LA MÉTAPHYSIQUE1

sence, elle ne porte pas sa preuve avec elle. E)t

général,si la démonstration peut établir ce qui fait

l'essence, elle ne peut pas établir que c'est l'essence

même. Elle ne peut pas prouverl'essence en tant qu'cs-

sence. La démonstration de l'essence ne peut être

qu'un syllogisme dialectique et logique qui enveloppe

le sujet sans y pénétrer'. La démonstration, en géné-

rai, ne donne qu'une existence. Si l'être, au sens uni.

versel d'existence, était cequ'il semble qu'il soit au pré

mier abord et au point de vue superficiel de la diaicc

tique, à savoir un genre auquel participent tous les êtres.

et si, en outre, l'essence des choses était le genre, prou-

ver l'existence ce serait prouver l'essence. Ma~s l'être

est une universalité indéfinie, qui ne détermine pasle

genre des choses, pas même le premier genre ou la

catégorie dans laquelle elles doivent être comprises~

Le genre fût-il donc l'essence, aucune détermination

de l'existence ne constitue l'essence même. L'essence

d'une chose n'est pas tout ce qu'elle est, mais seule-

ment ce qu'elle ne peut pas ne pas être; l'existence

qu'onen affirme, ou que l'on en démontre, n'est que

l'enveloppe commune du nécessaire et de l'accident,

l'idée vague de laquelle il reste toujours à dégager

l'essence.

Ainsi l'essence de l'attribut médiat, qui a sa cause

yinat.pMt. Il, vtn ÂXX' ~<rr< Xoy<x<~ <ruX~oy«f~otToi? T<

Voyezplus haut, p. 247. n. 2.

!bid. ~n A<' thro~e~eM: ~tSf afc[yx<Mof eï~at ~e~t~oCoH otco' <

Page 525: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE HI, CHAPITRE II. 513

33

hors de soi, ne peut être trouvée que par la démons-

tration, et pourtant aucune essence ne se démontre'.

Pour tirer de la démonstration l'essence de l'attribut,

i! faut pouvoir lui faire subir un changement de

(brme~, et la convertir en une dénnition expresse.

Le syllogisme,avec ses trois propositions distinctes,

et en même temps liées les unes aux autres, est

comme la ligne que parcourt l'entendement d'une

extrémité à une autre; avec son moyen terme, un

et double à la fois, elle répond en quelque sorte à

la quantitécontinue. La définition contient les mêmes

termes, mais sans intervalle qui les sépare~, sans co-

pule qui en marque la distance' Ce n'est plus une

chaîne de propositions,ni même, comme la pro-

position, un rapport de deux termes, mais la forme

d'un terme indivise Ainsi la démonstration est

comme la matière de la dénnition, forme achevée

de la science. Entre la démonstration et la défini-

tion se reproduit,dans le sein de la science elle-

même, l'opposition généralede la matière et de la

eoïff, e~ (t)) o<?<y~ ehf. To ~s e!f<M oùx oJ<r<a ou~eM' o<! yap y~fos r~ <

Voyez plus haut, p. 3n, 35~

~K<d.p<Mt. H, VU! (Mr* d!feu atro~e~ so-r< yMSfM

ïo T~ e<TT<f

&TT<f <~T<oy d!XXo~ oJï' &T<f atro~e<&$ <tUTOU.

Ibid. x O~f a)rJ~e<§< ToS ë<yr~ T~ 3-~e< &e<~p&w T~s ~o~-

Ea~.

tb!d. tMt a~e<~ <T<wex~,<M~ op«r~

DeLttMpr.

V T~ <~M'E~y<M e/ptfoCa<.

VII, xn.

Page 526: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

514 PARTIE !–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

forme, de la quantité et de la qualité, de la réaiitt

et de l'idée.

Mais le rapport de l'attribut au sujet est-il immé-

diat, est-ce une proposition indémontrable et non

une conclusion, en un mot est-ce un principe qui n'ait

sa cause qu'en soi, l'essence de l'attribut ne ressort

plus d'une démonstration iln'y

a plus demoyen

terme; ce n'est ni une conclusion ni un syllogisme

transformé, mais un premier principe. Ainsi la dcf!ni

tion parfaite de tout ce qui est par soi-même ne doit

renfermer, comme la définition imparfaite de cequi

est en un autre que soi, que les deux termes d'une

proposition. Seulement l'une est une conclusion Inde

montrée, et qui a besoin de démonstration; l'autre.

une proposition évidente par elle-même, la position

ou thèse Indémontrable de l'essence~. La dénnihot)

immédiate et la dénnition nominale sont de mcmo

forme ce sont les deux extrêmes semblables parla

forme, opposés par le fond, entre lesquels se placeia

dénnition médiate par la cause, comme du principe

la conclusion se développela démonstration.

Cependantsi l'attribut immédiat est déjà par

lui-

même dans son sujet,il n'est pas encore en lui-même

Son être est toujours d'être en un autre que soi2. L'at-

~!tMt!. pMt. U, ix ËofTt «Bp~ep~f

T< e~n<M', T<Bf o~'

~nf.' ÔMe Jtj~of ~n )M~ raw ~or< Mf f<~c <~<e<M <Kt<<)!p~

e~f,

T. X 6 TMf a~<Wf ~p«T~< ~<H< ~OT~ TOM T~ ~<TTW MMMM~eMTOf.

Fonnute sco!astique ~iccKtenfMesse est inesse.

Page 527: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE m. CHAPITRE IL 515

33.

tribut, quel qu'il soit, primaire ou secondaire, médiat

ou immédiat, n'a pas en lui d'essence', et ne peut être

en lui-même l'objet de la définition. C'est dans la na-

turc dusujet qu'est

la raison dernière de l'essence

des attributs. Seul, le sujet (le petit extrême) est à la

fois par soi et en soi-même c'est donc le sujet seul

qui est l'essence~ et qui est l'objet véritable de la dé-

finition immédiate.

L'essence ne se trouve donc que dans la seule ca-

tégoriede l'Être. Car toutes les autres catégories sont t

des accidents dont l'être est la substance; toutes,

elles n'ont d'être qued'une manière secondaire et rc

lative. L'être est donc le premier objet de la dénni

tion il en est, au sens propre et d'une manière

absolue, le seul et unique objet~.

Néanmoins, et tout être qu'il est, lesujet de la pro-

position peut être un terme composé, assemblage

d'une substance et d'un accident. Or, que ce soit un

accident médiat ou immédiat, premier ou secondaire~,

la combinaison d'une substance avec un accident n'est

Voyez plus haut, p. 298.

Co< v.

iMet. VM, p. t34, t 2 ~<nrep yatp Mtt ro ~<TT<f uM~e< ~OKHt*

s~7J1'o$x ôFCOf~ds, ac'~71â sÿyèr ~rpwsms

soFs érro~érors, oûsrv xai sô sio~ e{<o~M, <!XX<[ T~ ft~ <Tp<!5T&)t TOM< eMft~faM,

o~T&) ~t r~ T<i>J.'ad" ôruJr.ts, d>.M Tfj plv cp'Tf.dS

Tois J' é1ro(£éllf.dS, OdTf.d XIIi TO Ti

~T<f MM~ f~f T~ oJo~t <MM TOM dEXXoM. –– Ktft TO T~ ~t< e}i~<t<

~~a~t ~pt~t~eMM <t!fX~ TT? OM~ ~Ta Ka~ TO& ~OM.––ô

~pf~rax )Mt! <hfX(5< op<x~ Ta T~ e~!)t/ e<TT<f. P. 136, t. ) MJ

"< T)t< C&M ~OTM' Op«TtM~.

Page 528: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

516 PARTIE IM.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

qu'une essence relative; et l'essence absolue àlaquetip

1elle se rapporte, c'est la substance même qu'elle rco

ferme. Pour définir un terme composé; il faut en

remettre la substance dans la définition; il faut donc

la nommer deux fois, une fois dans la définition, une

fois dans le défini. Par exemple « le nombreimpair

est un nombre, etc. Mais l'essence ainsi constituée

n'est encore qu'une essence relative. Pour en donner

la définition, il fauty reprendre de nouveau la su!)

stancequelle contient, et la remettre en tête de la

définition précédente; puis après cette fois une autre

puis une autre encore, sans pouvoir jamais s'arrêter

L'essence, que poursuitla définition, recule pas a

pas, et se dérobe dans l'infini 1.

Or l'accident, médiat ou immédiat, n'a d'essence

que dans une substance. La combinaison de la sub-

stance et de l'accident est donc le fondement où se

ramène nécessairement et sur lequel doit être assise

la définition de l'accident. Ainsi,en

général, et pour

résumer tout ce qui précède, l'essence n'appartient

pas à ce qui n'existe qu'en composition. Tout ce qui

est en un autre que soi, n'a d'essence qu'en son rap-

port avec cet autre, et, par suite, ne peut être défini

qu'en se répétant soi-même dans ce rapport2.Le

JMet. VH, p. i35, 99 E~ !~te<p<~e~<-

p<~ y<tp p<~ <HfMt

~Xe ~f~ar<M.

lb!d. p. t36,ï.2 Ef y<~p <Mt! T<Sf f~MftM[Tt)yoptNf (se.

~oT'f o

~OM~te~) <tM~~ ex~Mo<~<yeeM eTfM, oïcn ToC tM<oC x<t< ~rep<TToC ()eg

Page 529: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE IL 517

signe et le caractère distinctifs de l'essence, c'est la

définition ou ne se répète pas le défini car c'est le

signe de ce qui n'estqu'en soi'. Tout ce qui n'est

que

relatif n'a pas son essence en soi, n'est point, par

conséquent, la même chose que son essence, et, par

conséquent encore, n'est point susceptible de défi

nition~.

L'objet de la définition ne peut être que la sub-

stance, considérée en elle-même~. Mais, dans la sub-

stance même, la définition ne s'attache qu'à l'essence.

Or la matière ne fait pas partie de l'essence; indéter-

minée, indéfinie, elle échappe nécessairement a la

définition. La définition ne comprend donc pas la to-

talité qui est le sujet de la forme, mais la forme toute

seule~. La réalité concrète est encore un composé qui

n'est pas identique à son essence même, et qui n'a

aussi d'essence que dans son rapport à la forme 5. La

déCnition ne porte donc sur les choses concrètes que

d'une manière secondaire; elle ne les définit que dans

eoemp?)* ojy~p

~e«<tpt<~t<w (add. To -erep'TT~f)~ cJJé T~ -M~u <h'e«

~&w. T~ &t-BrpocC~efM ?~o(Mp ef ois o~ft&M'fet ~« ro «jTo Xsye<f

Anrep~f T<M!ro<t. E~ Touïo oXt)OM, ou~e <rw<!u<o~eMtW barrât, oïb~

<yO~B -ceptTToS.

Met. VII, p. )39, i. tQ Ëf $ dpaë~<TT<[< ~o~M aJro, X~of

*'?ro, eSro: o Rdyos ToS T~ eTfM e)tt!<rr~). Cf. p t33, 1. 4.

!Md. p. t36,t. t6, sqq.; p. <38, 1. 20

tb;d.p. t33,t. 2t.

tbi<t. p. t53, 1. tgtb!d. p. tSs, 37; p. t53, t 2

Page 530: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

518 PARTIE II!.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.1

ieur forme essentielle. La définition ne pénètre pas

dans l'intégrité de l'existence réelle; elle l'embrasse

seulement dans la circonscription de la forme. Or la

forme considérée en elle-même, indépendamment de

la matière variable dans laquelle elle se réalise, c'est

la forme en général, ou l'espèce. La définition n'a donc

pas pour objet les individus, mais les espèces de la

substance 1.

Mais l'espèce elle-même ne suppose-t-elle pas en

généralune matière, comme sa condition? Par

exemple, l'Idée de l'animal n'implique -1 elle pas

avec celle de l'âme, qui est ici la forme, celle du

corps, quiest la matière? La matière entre donc

dans l'essence et dans la définition de l'espèce; mais

la matière n'est plus prise ici qu'en général, c'est-à

dire dans un sens idéal et formel. La matière de

la réalité concrète, ou de l'individu, ce sont les par-

ties matérielles dans lesquelles il se résout en ces-

sant d'être, qui étaient avant lui, et qui subsistent

aprèslui2. La matière de l'espèce est la matière dans

son rapport immédiat et nécessaire avec la forme,

c'est celle qui commence d'être et qui cesse d'être

avec elle. Ainsi, dans une syllabe, ce ne sont p:~

~Meh VU, p. t5o, t. t ToS y<ïp ~MtCoXou M< Tou eJ~oM oop<o~

P. 133, a O~s &TTM ~Mt o<!8eff Te!w y~oM e<JfSt')!~p%o~

T< Af e!f<t<, <tXX~ TOt!TOM (M~of. Anal. posi. t, Xtv To T< e<TT' T~'

KaOJXott e< n, xtt A<e! €<rT< w~ <~o< x<tM~oM.

tbH p '~7.! 9 sf;<{.

Page 531: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE !I1, CHAPITRE II. 519

les lettres dans leur matérialité, comme prononcées

dans l'air, ou écrites sur une tablette, mais les lettres

dans un certain ordre; dans l'animal, ce n'est pas le

corps en tant que corps, mais le corps organisé et

capable de vie. L'animal, en périssant, ne se résout

pas en parties organisées l'organisation cesse d'être

avec la vie; la main d'un mort n'a d'une main que

le nom'. La matière n'est donc pas ici une partie

intégrante de la chose concrète, mais une partie

constituante de son idée abstraite 2. Ce n'est plus une

matière sensible comme les parties du corps en

elles-mêmes mais seulement la condition générale

durapport

de la forme avec le monde sensible. Dans

le premier sens, la matière est la condition actuelle

de l'individu dans le champde l'expérience actuelle;

dans le second sens, elle est la condition de l'espèce

et, par suite, des individus, dans le champ de l'ex-

périence possible~La matière qui entre dans la

compositionde la déËuition n'est donc pas la somme

des parties qui forment la réalité matérielle par leur

assemblage dans l'espaceou ie temps, et qui

la me-

ifet. VH, p. t5t, i. t Atoût~of y<~ ff ro ?<5of x<Mdveu tHf~SM

~Mt ~T<f Op&KM&M'J'~ <'J~' ~fSU TfSf

(<ep<3f ~fTM' 'SMM. (M y<tp

sepTOM ToC a~Opt~rou ft~MM < ~e!p, <t~' A<M!~f)t ro~pyof

<MOT6-

<g<FM ~~<M o&M. P. ï46, 37. Cf. p. ~8, t. t?.

tbH. p. t46, t4; p. t48, sq<}.;p ~9, ~8.

tb:d.p. t46,t 3o.

J'emprunte au langage de Kaut tctpresston d c~cn~tcc pos-

!.6k.

Page 532: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

520 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE. 1

surent selon la quantitéC'est l'habitude totale des par-

ties dans l'espace ou le temps en général, selon la qua.

lité essentielle, immédiatement nécessaire à la forme.

Toutefois, Fhabitude même de la matière, pour

être la condition de l'essence, n'est pas l'essence;

l'essence est la forme dans l'animal, l'âme; dans

l'homme, la raison. Ainsi, si la chose concrète et

individuelle, avec sa matière particulière, n'est pas

identique avec son essence, laquelle n'est que dans

l'espèce, l'espèce, avec sa matière spécifique,n'a pas

non plus son essence en elle-même et dans sa totalité

complexe, mais bien dans sa forme spécifique~. Eue

ne fait pasun avec elle elle se rapporte

à elle comme

à son principe et à sa mesure 3.

<Cependant, indépendamment de tout rapport avec

le monde sensible, la forme qui fait l'objetde la

définition est à elle seule un tout, composé de par-

ties. En effet, l'essence d'une chose se compose de

tout ce qui s'en affirme universellement et sans quoi

elle ne peut être conçue, c'est-à-dire de ses attributs

nécessaires~. Ces attributs sont donc les parties,la

jMet. VII, p. t&6, i. :) noXX<!t~<M~yer<MTOft~po$' &'eMjMf

Tp<!<M<TÔ

(terpOMfJKtMt ~00~.

tbid. p. t52, K).3 Ibid. p. i68, 1. t8 Et'n < <~ ëw'

oft~oT~poM To ?<Bof, of~

<~ ~M X< ~eyJf~faXX' <&s ~po: &. Sur l'opposition de ~fpM

~f

et 'M8' voyez plus haut, p. 359, n. 2 p. 358, m. z, ra ~pos

eppeséà T~ & My~ ~Xo~efa.

Anal. p<Mf.n,xut.

Page 533: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE m, CHAPITRE Il. 521

matière de la définition. Mais cette matière intelli-

giblen'est plus la matière sensible c'en est tout le

contraire. Dans la réalité concrète, comme dans la

forme, les parties peuvent être sans le tout, et le tout

ne peut pas être sans les parties. Mais là, fêtre dont

il s'agit est l'existence réelle dans le temps ici, c'est

l'essence abstraite, l'être dans l'ordre logique. La

totalité concrète ne peut pas exister sans ses parties,

ses parties peuvent subsister sans elle la totalité de

l'espèce ou de l'idée ne peut pas être conçue sans ses

parties formelles, ses parties formelles peuvent être

conçues sans elle. Au contraire, les parties de la tota-

lité concrète ne peuvent être conçues que dans l'idée

du tout 2. Les éléments de la forme sont donc anté-

rieurs dans l'ordre logique à la totalité, et la totalité

aux éléments de la réalité La matière de la chose et

la matière de l'idée s'opposent entre elles comme la

matière et la forme en général, et dans le rapport

inverse de l'ordre du temps et de l'ordre logique.

Les parties de la matière dans la réalité concrète

sont des quantités qui composent par leur addition la

quantité plus grande du tout. Les parties de la forme,

JMet. Vit, p. t~9,t.9 t~n Je t} ftef <!Ha6nTt{ 6<rr<f, <? Je fo~Tt}.

P.t74.LïHd. p. t46, 1. 4 sqq p. t4?, ai sqq.tbid.

p. t48, L 4 ëo6' <;<K[f~p~

<5! xat e<s &&atpe'~M

M < Forepot'Aro: Je Ms ToB Xoyoo <M[<?!?! outr/M T~ «tTa rof Xoyof,

OpOMMt.–– L. t 5 ToC ~iëf o3f (TOfJ~OU CpOTEpOt

TaUT' AyTt!) ~<yr<

4' 0~.

Page 534: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

522 PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

au contraire, sont plus générales, et par conséquent

plus étendues que leur tout ce n'est pas par addition

ou par juxtaposition successive qu'elles s'unissent en

lui, mais par un enveloppement graduel, à partir de

la généralité la plus large, et par une condensation

progressive La, le tout est d'extension; ici, il est de

compréhension. Là, il se divise; ici, il se décom-

pose 2. Chaque degré de l'échelle des espèces, dans

chaque catégorie, comprend donc tous les attributs

essentiels de tous les degrés supérieurs, dansl'exten

sion desquels il est à son tour renfermé. Chaque classe

n'est autre chose qu'une division déterminée par une

différence du genre placé immédiatement au-dessus

d'elle. D'où il suit queladénnition d'une espèce quel-

conque se compose dugenre le plus prochain de

l'espèce et de l'une des différences opposées de ce

genre3. Legenre est donc la matière de l'essence; !a

différence est la forme qui le détermine. Le genre est

la puissance; la différence est l'acte danslequel

la

puissance vient se réalisera Ainsi se répondent c!

Voye:ptus haut, p. 48 7.ÂM&MS1MH.

Voyez3fe<. V, p. n<),

a. Legenre est, CR un seu~

une parité de l'espèce, et l'espèce en un autre sens une part!e'):'

genre (voyez plus haut, p. ~85). L'espèce se trouve par la <Hf<«c'!

de l'étendue du genre, le genre parla ~com~<M~Kw de la

compréhco

sion de l'espèce, qui est la définition.Afef. VU. p..54 5.

1

tbtd. VIII, p. t~4,3 Âe< Tou Ao~ou ïo t~tt, To <

et~p)~

e<rr<t', oiov o XM~~ <Wf"' e~<re~o~. P. t6y, 1. 3t Ko<~e~ap

o f~n

Page 535: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE I!t, CHAPITRE IL 523

s'opposent dans la nature d'une part, et de l'autre

dans la science, la matière et le genre; amsi s'avan-

cent comme de deux extrémités contraires les puis-

sances correspondantes de la réalité et de la pensée

vers la limite commune de la forme.

L'essence n'est donc pas le genre, comme Platon

l'avait cru. Le genre, commun à plusieurs espèces,

n'est qu'une possibilité indéfinie dont elles sont les

réalisations différentes; l'essence d'une chose n'est pas

cequ'elle

a de commun avec d'autres, mais ce qui

fait son être et sa nature propre, et qui, par consé-

quent, la distingue de toute autre chose. L'essence

est donc la dernière différence'. Mais ia dernière

différence en elle-même est plus étendue que l'espèce

qu'elle détermine. Par exemple, dans cette défini-

tion le nombre trois est un nombre impair premier

dans les deux sens (c'est-à-dire qui n'est ni un produit

ni une somme de nombres ) la différence n'est pas

propre au nombre t~'ois, car elle appartient aussi au

itombre deux, qui n'est ni un produit ni une somme

de nombres; mais il n'y a que le nombre trois qui

soit à la fois impair et premier dans l'un et l'autre

sens C'est la limitation réciproquedu genre par la

~'t Tcw~Mt~opwp Aoyoî TOM e~oM x<M Tt;-? efep~e«M e~t'M, o < ex T<Bf

efMMp~JyKM' t!}< <&~ ~a~Xof. Cf. X, p. 209, 1.2..

.M<<. Vttï, p. t54, t. ~7 'totfEpOfOTf t Te~Tt!'< '!<t?0f9 )! Oti<T~

~f<~M{~M[TO< &tTM <K[<0 OOt~Oî.

<M< /!M<.n, xm.

Page 536: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

52& PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

différence et de la différence par legenre qui donne

l'étendue exacte de l'espèce. Le propre du défini n'est

donc ni le genre ni la dernière différence toute seule,

mais leur totalité L'essence ou la différence, en tant

que différence, n'est ni la matière ni la forme abstraite;

c'est la forme dans sa matière 2.

Ainsi l'espèce, intermédiaire entre les individus

qu'elle contient dans son étendue, et legenre où elle

est contenue, l'espèce est l'unique sujet de la défini-

tion. Le premier genre, qui est l'une des catégories,

est indéfinissable; car iln'y a pas d'étendue dans la-

quelle on puisse le renfermer. L'individu est indéfi-

nissable car, au dedans de la dernière espèce, il

n'y a plus de différence spécifique pour distinguerles

uns des autres les individus qu'elle contient Le pre-

mier genre est trop large, l'individutrop étroit pour

la définition. Entre ces deux extrêmes de l'affirmation

et de la négation universelles, entre ce maximum et

ce minimum de Finnniment grand et de l'infiniment

petit vient se placer le moyen terme fini dans les

deux sens, l'unité complexe de lagénéralité et de la

différence. La définition n'est donc, ni au sens de la

forme, ni au sens de la matière, ni comme l'uni

~naLpost. H, <t Ï&of ï~ ~t& ToSro

y<)!peerït ro e~MM exe<f&).

De Part. on. I, Ut Ë<M< &t<pojM To e~o~ ef Ty ~Atf.

tbid.p. t59, 20. Les individus nedtN~reut (essentiellement

qu'<tp<0(M<non e~Je<, et

par conséquent n'ontpas

de différences (es

scnticHes) eonce~abies niexprimables.

Page 537: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE Ht, CHAPITRE IL 525

versel, ni comme l'atome, une unité absolument in-

divisible c'est uncompose; ce n'est pas pourtant

comme le composé de la réalité, auquel répondent

dans l'ordre logique l'espèce et la définition, ce n'est

pasune grandeur continue et indéfiniment divisible;

mais un tout d'un nombre défini de parties indivi-

sibies, auquel on ne peut en ajouter ni en retrancher

aucune sans qu'il devienne autre qu'il n'était. En ;un

mot, c'est une sorte de nombre 1. Dans l'ordre de la

science, où pourtant il n'y a point de quantité réelle,

la définition répond à la quantité discrète comme la

démonstration à la quantité continue.

Mais d'où vient que ce composé de la définition

forme une unité qui ne se dissout pas dans les élé-

ments dont elle fait un nombre ? C'est que c'est la

forme logique d'une chose une, laquelle est l'essence.

Or d'où vient l'unité de l'essence elle ne vient pas d'un

mélange de ses éléments ni d'une participation des uns

aux autres, comme l'unité extérieure d'uncorps

du

contact de ses parties elle vient de ce que ses élé

ments sont entre eux dans le rapport de la matière

et de la forme, c'est-à-dire de la puissance et de l'acte,

et qu'ils s'unissent dans lacté Dans le monde de la

De Part. an. VHt, p. t6g, t. 3o Ù Te y<tp opt~to: aptC~M r~

(&a<per<Te

y<~jMt! e~

t~M~perot'oJ

yap <~e<po<et

MTO<) <M[<ôao<0.

TOtoCtoe, x. T. X. Cf. De An. t, m.

DeJnte~r. v. Met. VIII, p. i~S.IMet. loc. taud. t. t8 E< ~T<f, '<r!rep Myo~e~ To (<~ <~ r~

Page 538: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

526 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

u_ 7 --1- r 1-

le mouvement, et la cause de l'unité n'est autre chostie mouvement, et ia cause de funitê n'est autre chos~~

que ia cause motrice'. Dans le monde de la science.

la puissance est tout idéale, la cause formelle de

l'unité se trouve dans la conception de l'unité de la

forme spécifique 2 comme du principe déterminai

de l'union de la puissanceavec l'acte. Ainsi revient

l'idée de la cause dans la définition des espèces de I:!

substance comme dans celle des accidents. Dans le

monde de la réalité, il faut pour tout changement

artificiel, ou en d'autres termes, accidentel et violent,

une cause extérieure qui impose la forme à la ma

tière; pour tous les changements naturels, la cause

est le principe interne de la forme substantielle des

choses, la nature, l'âme qui les fait vivre 3. De même,

dans la définition de l'accident qui a sa cause hors de

lui, l'idée de la cause s'exprime au dehors, sous la

forme d'un moyenterme étranger aux termes ex-

trêmes de l'accident et du sujet; dans la définition de

la substance, qui a sa cause en elle-même, elle s'enve-

loppe, sans se laisser voir, sous la conception impli-

t<oc~,<KM Ta f<~ J«M~t ïo

e~ep~e~t,oJx~r<

MMp~t ~o~e<e:' a;'

e!Mt< TO ~)tTOt!ftefOf. Cf.p. 1~0, t. t4.

Met. VIII, p. '7 4, t. 28 A/T<of oJOEf df~o ~rXt~ T< <&$ xtf!;

<MW &: &f~:e&'s eM~pystef.

De /itt. !n, Vt To ~S ~OtOW TOtffO 0 OOW<&t<MTO!

Ibid. VIII, p. t69, t7 T~f yàp ~<!<n~(M~~ T« ~e~ T&'f

TOÏf ~9ttpTOMoj<r&:f.

Page 539: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H!, CHAPITRE IL 527

cite de l'unité substantielle du genre et de la didc

rence'.

Mais, maintenant, l'essence des ctres naturels ou

animés, qui remplissent toute lacatégorie de l'Être,

n'est pasun principe général comme une idée plato-

nicienne. Toute généralité est une puissance, plus ou

moins voisine de l'acte, mais qui n'est pas en acte. Or

l'essence d'une chose est le principe interne de son

action; c'est elle même, dans l'exercice de son acti-

vité propre. L'essence réelle n'est donc autre chose

que l'individualité Donc les dénnitions ne peuvent

l'atteindre, et elle leur échappe sous les formes spé-

cifiques où il semblait qu'elles allaient la saisir. Sans

doute l'essence est la forme, mais non dans la géné-

ralité abstraite qui constitue l'espèce c'est la for me

dans la détermination parfaite, c'est-à-dire dans l'u

nité de l'action individuelle. Toute notion est géné-

raie, ainsi quetout rapport

toute notion est divi-

sible~. Aucune ne peut pénétrer jusqu'à l'indivisibilité

et la singularité de l'Être. En déterminant la forme

spécinque, la dénnition ne détermine donc qu'une

forme extérieure de l'essence; elle ne détermine

qu'un indénni, une possibilité qui embrasse dans sa

JMet.Vm,p. t69,t. a sqq.

De Gen. an. H, t 6 y~poJ<r~ T&w ~fTMf ëf T<jfxaS' ëxaerro!

.Met. VH, p. t48, t. 29Ô ~OS

€<TT< TOU XO~O~OU. P. t6o,

t. 23 KeM~ <~Mû My< V, p. ()6,

i. t Ka6' OtUTOf ~fM ~J~Ot ~Mt-

perJ~.

Page 540: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

528 PARTIE IH.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

sphère l'existence, mais qui ne la constitue pas. L'es-

sence et l'existence se confondent dans l'absolue indi-

visibilité de l'acte, et l'acte n'est pas l'objet des idées

et de la science c'est l'objet de l'expérience et de

l'immédiate intuition 1.

La sphère de la science pure est celle des mathé-

matiques. Lesobjets des

mathématiques sont les

formesgénérales de la quantité, indépendamment de

tout sujet réel ce sont desespèces sans individus,

des idées sans autre matière qu'une matière intelli

gible~, des essences idéales que la définition constitue

tout entière, et dont la démonstrationdévelopper c~

prtort, par une suite depropositions catégoriques et

universelles, les propriétés nécessaires~. A mesure

qu'elles s'éloignent de la réalité, et que leur objet se

simplifie, les sciences mathématiques elles-mêmes

deviennent plus exactes et plus démonstratives. La

mécanique est soumise à la condition générale du

mouvement le plus simple et le plus défini, le mou-

vement dans l'espace elle a ses raisons dernières

dans la géométrie. La géométrie, la science de la

quantité continue, est encore soumise à la condition

de l'étendue elle a ses raisons dernières dans l'arith

Met. V, p. t ~Q i. 5 T'OUÏE J' ovx &nwOpM~tÔ: <tX~ ~ETOt f0)j-

<?&? <HoÛ!!<reM< yf~p~ottrou. ÂweXCofMM d' lxeyTe~e~e/<M

oJ ~t-

Àov ~orepof 'BfOTe e«Hf eux e«r<f, aXX' ae< ~~yo~TM xai yMM~<~T<"

T~)M!S<!X<W ~Oy~). Cf. p. t5Q, 1. t6.

Ibid. p. ~49, Lu.3

~Mft.post. t, XH.

Page 541: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE ttl, CHAPITRE II. 529

34

métique générale. L'arithmétique, science absolument

abstraite et simple de la quantité discrète, a seule

en elle-même sa raison et la raison de toutes les

sciences de la quantité c'est la science exacte entre

toutes'. Mais cette échelle des sciences mathéma-

tiques, qu'on peut prendre encore debeaucoup plus

bas que la mécanique, ce n'est autre chose, de la

science la plus composée à la plus simple, que la suite

des degrés de l'abstraction~, la marche de l'entende-

ment en sens contraire de la nature, de l'individua-

lité sensible à la généralité idéale, de la réalité à la

simple et vide possibilité. Le mathématicien, en gé-

néral, ne spécule que sur le possible 3; l'existence

réelle est pour lui une hypothèse~, et de là même

viennent la rigueur et l'infaillibilité de ses démons-

trations.

D'un autre côté, si la cliose sensible est un être;

c'est un être imparfait qui renferme du non être de

même, la sensation ne donne de l'être qu'une connais-

sance extérieure et imparfaite. Partout avec la matière

se trouve la possibilité indéfinie, source de l'accident

et de l'erreur. Mais le progrès de la nature consiste

dans le progrès de la détermination de la puissance

JMet. t, p. 7, i.5. Anal. ~KMf. ï, xxvn. Voyez plus haut, p. 258.

Voyez plus haut, p. 25g et p. ~36.

Md. XU, P. 251, 1. 15: AI à' JX?M (SC.«I dUlOTePMMaOn(MT#Xai)~fft. XH, p. a5t. L t5: Ai <&~<M (SC.ft< e::«TTi)~<M pMt<~(MTOM<)

<Kp< o~e~MM oue~. Xtït, p. 265, i. 8 K<M ~ep!~fT&w

&a~'ofM[<,

M< ~PMt ~T~' ~<TTOfyap

TO ~X, TO jMt< ~Te~e~SM TO < uX<X&.

Ibid. XIII, p. 26~. j. 23; XtV, p. 295, t. a. Anal. post. I, n.

Page 542: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

530 PARTIE III.-DE LA MÉTAPHYSIQUE. 1

et à mesure que l'action augmente et sedéveloppe, à

mesure se fortifie l'individualité. La fin est la forme

achevée de l'activité pure dansTindividualité absolue.

Or, pour atteindre à cette hauteur la réalité immaté-

rielle de l'être en soi, pour saisir en elle-même la forme

indivisible de l'acte, la sensation ne suffit plus il faut

une action une et indivisible de la connaissance pure,

il faut l'immédiate et soudaine intuition de la raison.

Mais l'acte sans matière, ce n'est autre chose que !s

raison en acte, la pensée'. Ainsi, que la pensée soit

la même ou qu'elle soit diSérente, dans la chose pen-

sée et la chose pensante 2, la fm dernière où se ren

contrent et se touchent la nature et la science est

l'expérience5 ou intuition immédiate de la pensée par

la pensée.

Aux deux bouts de la science, au commencement

Bt& la fin, l'intuition; à une extrémité, l'intuition sen-

sible, à une autre l'intuition intellectuelle4. La science,

proprementdite ne roule

quesur le tout, complexe

Voyezplua haut, p. ~78.

Voyez te chapitre suivant.

~Mtt. ~r. I, xx ÉfMtetp~t, pour!a connaissance des

principes.

E<&. Nie. VU, tx 6y~p fOM Ttw

~p&w,Jw odx &rn X<~o~ x. T.

XU 6 foB< TMf ~e~MM' ~<r'a~t~Jrep~*

tM~y<b TNf

<irjM&TMp &)&)<'~a<

tM' &~T6M' M'S< &TT< )M~ Ot! XJyOt. tV A<?T)! J' (se. )} Ct~t~M)

Mff. Le rappnMhement qu'Anatote étabUt entre i'acte de raperception simple de la pensée et celui de la vue autorise t emp!oi du mot

M<at<Mttdont je me suis souvent servi. E<A.~V<c.t, vn 6: y~p ef

Wf~fMtTt~f«,

Page 543: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE tiï. CHAPITRE IL 55i

et divisible, qui a sacause

hors de lui, et elle ne fait

quel'embrasser dans ie tout d'une notion, également

divisible et complexe. La nature est tout entière dans

des combinaisons individuelles de matière et de

forme sensibles la science dans des combinaisons

générales de la matière et de la forme idéales, ou des

conceptions de l'entendement; la nature tout entière

est dans les choses relatives, la science dans les rap-

ports. La nature est le monde des oppositions, dont

le mouvement fait parcourir les intervalles à la puis-

sance, dans les diSérentes catégories; la science est

le monde de la contrariété et de la contradiction des

idées, parmi lesquelles s'exerce l'activité de la raison

discursive. Enfin, dans la sphère de la raison discur-

sive comme dans celle du mouvement, et aussi de la

pratique, l'action ne détermine que desmoyens

termes dans l'indétermination dupossible ce sont

des milieux entre les extrémités que fixel'expérience.

La démonstration, forme nécessaire de la connaissance

discursive, a ses principes dans des propositions im-

médiates, supérieuresà la science; les propositions

immédiates ont leurs principesdans les dénnitions de

leurs limites les limites extrêmes échappent à la défi-

nition elle-même, et ne lui laissent que lesmoyens

termes. A l'intuition seule appartient l'individualité de

l'existence réelle, et à l'intuition intellectuelle, l'indi-

vidualité absolue de l'Être en soi, sur laquelle repose

labsolue universalité des principesde l'être.

Page 544: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

552 PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

CHAPITRE III.

Premier moteur du monde. Dieu, principede la nature et de la

science.

Le monde est ie système des différentes catégories

coordonnées, comme à leur substance, à la catégorie

fondamentale de l'Etre. Le monde est tout entier dans

la catégorie de l'Etre avec ses accidents. Lacatégom

de l'Etre est une totalité de parties différentes; mais

cette totalité n'est pas une collection d'éléments Inde

pendants les uns des autres, sans autre lien entre eu\

qu'une participation commune à un même principe

c'est une suite d'éléments subordonnés les uns aux

autres. Comme ie système des nombres et celui des

figures,le système des êtres forme une série don)

chaque terme contient tous les termesqui le précc

dent'. Ce n'est donc pas une agrégation uniforme de

parties équivalentes,une somme d'un nombre indéfini

d'unités de même ordre, mais une série de termes de

valeurs inégales, et de plus, en proportions continues

c'est une progression. Or, dans toute progression, dans

D~ An. II, m Ae! y<~p A* TM ~e~m ~p~et A<M~t€< r~ ~p~re~of,

Te ran' e~tMtraw )M< TM' ~<f.

Page 545: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE III. 555

toute série croissante ou décroissante suivant un ordre

déterminé d'antériorité et de postériorité, il n'y a

point,à proprement parler, de genre qui s'étende à

tous les termes comme à des espèces~. Car ies espèces

d'un même genre ne sont pas des termes subordonnés

les uns aux autres et contenus les uns dans les autres,

mais des unités2 coordonnées sous une unité supé-

rieure. La catégorie de l'Etre, ce premier genre, n'est

donc pas proprement un genre. Comme l'universalité

de l'Etre prisau sens le plus large, c'est un tout com-

posé de parties hétérogènes liées par desanalogies.

Seulement l'universalité de l'Etre, ou le monde en gé-

néral, est un tout de parties discrètes relatives au

genre de l'Etre, et liées entre ellesuniquement par

des proportions discrètes; le genre de l'Etre, ou le

monde réel des substances, est un tout de parties

subordonnées, et enchaînées par une suite de propor-

tions continues.

Cependant toute relation peut être ramenée, d'une

manièregénérale, a

la relation de l'espèce et du genre.

Comme la communauté de genre unit entre elles les

De An. H, Ht (Khre ~pexe? o~ta -EMpa

roTptymcJf

e<rr< <K~ Ta

~e@tt, <~e &'MNiC<[ ~«~ <Mp<! Tas e~p~fM.– A<o yeXomf ~retif Toy

«WMt My<W <M~T<M!MWJMt} ~T~MtWj

0~ef<~ e0?< T&W<~T<iW~<M

Myet. itfet. M, p. 50, i. ï2 Ëf c~ Ta~rpoTepof

xai<?ttTepJf e<rr<f,

ovx eHf Te T~ ToBMtW e?ff[~ ai~fotpa

TaCïa' fitore oJ~e To~TNf &v

y~o<. JEt&. ~te. t. tv; ?&. Eud. t, vm.

De ~t. Il, n! Âir<!(<of eH<x. Met. !tt, p. 50, t. tg Ë!~ TCM

M~MM <)~« ~T< TO f<ef ~MTepOfTO '?<rT€pOf.

Page 546: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

534 PARTIE H!.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

espèces, de même la communauté de relation à une

seule et même chose unit tout ce qui s'y rapporter

Le genre est un principe intérieur et substantiel, le

rapport un principe extérieur d'unité; l'identité du

genre est entre les espèces un lien direct, l'identité

de rapport un lien indirect et oblique~; à lasynonymie

immédiate des espèces répond, dans les choses rela

tives, une synonymie médiate etimparfaite3. Tout

lsystème d'analogies constitue donc aussi un genre

d'analogie, et par là devient l'objet d'une science

unique4. Unsystème d'analogies ou proportions dis.

Met. IV, p.6t,t. ~8 Ot! 'yap ~f0fT&w JM(0' ~f ~eyo~fMf em

<!D~t!< &TT<.9-eMM<T<t< fMCtS, ftXM Xttt TMf ~p0< ~OW X~O~fMf ~<!<T<

xc~ y<M TpJxof Tt~a: ~~er<ï< xa6' & XI p. a 18,ï6 To Te ~f Œ~a)'

M~* Ff T< Mtt xo<f0f ~~erM ~roX~<i[~&): XeyofMfOf. SurFopposttMn

de

)Mt6' ~f et ~fpos & voyez plus haut, p. 35g.

Onemploie un

casoblique

ou un adjectif pour exprimerle

~<M

car le cpos êv est T~ T«'o~, ainsi les choses de la «M~ecMc ou n)f

dicales; tandis queles xa0* ëf reçoivent au nominatif le nom sub-

stantifdu genre;r&otnme est un animal.

Les~pôe

ëf ne sont ni absolument ewMM~ oudésignant une

même nature, ni simplement MfM5f«fM[, n'ayant de communque

li-

nom, mais <roXX<[~~ ~ey~ftSM!, comme les (TUf~MjMt~ etdésignant

un

rapportà une même nature. JMet. III, p. 63, 1. at Ou

yapel ~o~a

Y& (se. Àe~Meerat), ~pct! ( se. eM<m~m< d!Ka«T<! ~ar<ytwp~e~

<B~X' e~ ~e <M6* ëf fn~re ~pM 6f oi XJyo< afa:~poM<H. VIII, p. 13i.

i. tgT~

&tTOt«~ (M.~OT' ~SMn) T~5 <fp0t

TO aJïO ft~P <M~ ~f, M T&

<t~ &. OJ ft&T<M oJ~* 0{JMO~~Nt- oj<!e/<tp &!tTptXO~ <r<!5jM[

~T

~eyo~JMMc~eCo~ ~~er<M

odre ot*&'M!ftM~ e~ït M~' & t~M ~po< ~f.

Met. IV, p. 62, 5 Àtt<WTO: y~fox~ )M~ af<~<TM ftte ~poî xo:'

~MCTtf~. On verra plusbas le

genre de t'être divisé en trois gcnr~

proportionnelsles uns aux autres.

Page 547: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE m, CHAPITRE ML 535

crètes, ne forme un genre que dans ie rapport exté-

rieur de ia coordination de ses parties; un système

d'analogies continues forme un genre dans le rapport

plus intime de ses termes, enveloppés les uns dans les

autres, suivant un ordre essentiel. L'analogie des caté-

gories, unies dans leur rapport, à l'Etre, mais qui ne

tiennent pas ~es unes aux autres, offre une ressem-

blance imparfaite de l'unité du genre; l'analogie des

différents ordres de la catégorie de l'Etre en offre la

ressemblance la plus exacte.

Dans le premier système, dans le système d'analo-

gies de parties indépendantes et relatives seulement à

une même chose, le genre entier a sa mesure dans

''ette chose, à laquelle toutes les espèces se rapportent.

C'est comme un premier terme dans lequella science

des autres termes a son principe nécessaire; ainsi la

catégorie de l'Être est la première des catégories, et

c'est par elle et en elle que l'on connaît les autres',

Dans le système des analogies continues, par exemple

dans la catégorie de l'Être, l'ordre de tous les termes

est immédiatement dénni le premier est celui qu'au

cun autre ne contient et qui contient en lui seul tous

les autres. Dans l'un et l'autre système,mais surtout

dans le second, il y a un premier terme qui donne la

mesure et l'unité, et la science de ce terme est la

science du tout

.M<-t.IV, p. 6s, t. 2. Vcyezp!us haut, p. 3~.

?'<. Vt. p. ta3. i. ai. Voyet ptus haut, p. ~78.

Page 548: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

556 PARTIE III.-DE LA MÉTAPHYSIQUE.

Ainsi, comme les mathématiques, laphilosophie

n'est pas proprement la science d'ungenre, mais d'une

totalité, analogue au genre, de termes différents et

analogues. L'objet de laphilosophie n'est pas une idée,

mais un double système d'analogies, l'un de subordi-

nation, l'autre de coordination, dont le premier, la

catégorie de l'Être, est la mesure du second, et dont

le premier lui-même a sa mesure dans le premier de

ses termes 1.

Or, en touteprogression, les termes successifs se

contiennent les uns les autres, dans un ordre déter-

miné, et chacun est la forme de tous les termes qui

le précèdent. Mais dans les deux séries des nombres

et des figures, qui font l'objet desmathématiques,

tous les termes sont des formes étrangères au mouve

ment. Dans la série des êtres dont nous avons suivi le

développement, chaque terme est le résultat du pas-

sage successif d'une puissance par toutes les formes

des termes imerieurs, et la série entière représente

les différentes époques d'un seul et même mouvement,

les différents degrés du progrès de la nature, de l'Im

perfection à la perfection. La forme générale de la réa-

Met. !V, p. 63, 2 ÉCT<yap

c p<~o<ro<~os eSo~rep a ftaStt~TMo~

Ae} o:t6<'o$')t<M

yop a~T!! ~e< ~pt!,XM

cpe~T~T<$ x<[<

~euT&Mtëortf

~M<m!fM! )Mu <ïX~a< e~e~t? ~f TOM fMtOtffMKMf. L. 26. Aiex.Aphrod.

"<

JMe<. in, n T<tSMt y<~ e<TT<.a e~e~, ~fep< .~ea)pM[ ïou S<Xofra

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~?p< TO~Tf~' e<TT<

T<?<!rpf?T"f

H 0!<0«.

Page 549: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE Hï, CHAPITRE 111. 557

lité est ia marche du temps, en sens inverse de la

science, et l'ordre suivant lequel les choses viennent

à l'être, en sens inverse de l'ordre de l'être.Chaque

terme de la série des êtres n'est donc pas seulement

la forme mais la fin de tous les termes inférieurs. Tout

ce qui est en mouvement tend à une fin; toute série où

Fidée de la fin ou du bien n'a aucun rôle à jouer, est

une série d'abstractions et de formes sans réalité La

progression qui compose lacatégorie de l'Être, est

donc une suite continue de causes finales. Or la série

des causes fmales ne peut pas fuir à l'infini, et le mou-

vement ascendant de la nature s'aller perdre dans

le vide~. Il faut une fin dernière, un bien suprême où

la nature trouve sa forme suprême, etauquel se

termine le mouvement~.

Mais ce n'est pas assez pour le mouvement de la

cause finale, qui se confond avec la forme. Pour ame-

ner la puissance à l'acte et le mouvement à sa fin, il

faut une cause motrice, et c'est là la cause première

que la philosophie a toujours cherchée vainement,

dont tout le monde a rêvé sans que personne l'aitjamais

bien connue~. La fin dernière ne se trouve qu'au som-

met de la série des êtres car tous les êtresjusqu'à elle

Met. HI, p. 43, 1. t0 sqq. Voyez plus haut, p. 3to.

3Eth. Nic. I, 1: Mn c«VT(t a~' ~€'sepov aipovpe8a· ~°pde~ai )'àp oèiscv y'Ett. Me. I, Mt tM~fMt A* ërepoc tMpou~eCa' <fpoe«n yap o&'TMy'

e~ <~r6MM~ ~t' e~MH xe~f KM ~MtMt~ THf <~e§f.

~e<.U'.p. 38, a t.

De'GeM. etcorr. H, )'t Ae~e -c~ote<Mt<M< Tt)r r~MTt~ ~f a~at'-

Tesofe<pMTTo<«T<, X~ye< ou~e~.

Page 550: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

558 PARTIE Ml–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

sont des formes imparfaites et des fins relatives. Mais

danschaque terme se retrouvent les termes subor-

donnés dans tous par conséquent se retrouve le

dernier terme, c'est-à-dire le point où commence le

développement de la puissance. A chacun desdegrés

de son mouvement, la nature est contrainte de repartir

du premier degré; à chaque degré, il faut que le mou-

vement remonte à la cause première du mouvement.

Si c'est l'action de la chaleur solaire qui détermine

dans la mixtion la combinaison de éléments, c'est en-

core la chaleur solaire qui donnera à l'organisation

même de l'homme lapremière impulsion car la

mixtion est le commencement de l'organisation. Par

la constitution nécessaire de toute progression, la fin

dernière n'est donc que la fin du dernier terme, et

l'universalité de la fin ne repose que sur les relations

de tous les termes de la série au terme le plus élcvc:

la première cause du mouvement est à la fois la caust

premièrede la série entière, et la cause de chacun de

ses membres. Elle est de toute manière et en tout sens

la cause universelle.

Ainsi, c'est dans le mouvement que nous avons vu

se manifester l'opposition universelle de la puissance

et de l'acte. C'est en partant du mouvement que nous

nous élevons à l'idée de la fin, où la puissance se réalise

dans l'acte de la forme. C'est encore du mouvement

~'t~ t!. o At~p&)tro< )<tp a~pM~of ~et'f~~a< <~<o~. Met. XX,

p.2A~ t.

Page 551: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE Ml, CHAPITRE III. 559

qu'il nous faut remonter au principe universel de

toute chose. Le mouvement est le milieu de l'expé-

rience, le centre d'où nous nous orientons dans le

monde des phénomènes, et lemoyen terme néces-

saire de la démonstration des causes.

La série des causes du mouvement ne peut pas être

innnie; elle a un commencement et une fin. Le com-

mencement est le moteur et la fin le mobile. Quel que

soit donc le nombre des termes dont la série entière

se compose, elle se réduit, sous le point de vue de

l'enchaînement des causes, à trois termes le moteur,

le mobile, et ce qui est moteur et mobile tout en-

semble, qui est mû par une chose et qui à son tour

en meut une autre. Des trois termes, ily en a un

qui réunit en lui les conditions des deux autres, et

qui est à chacun d'eux ce que l'autre est à lui ce

sont donc deux extrêmes avec unmoyen terme entre

deux, et en proportioncontinue. Le mobile, le mo-

teur mobile et le moteur~, telle est, dans sa ibr

mulegénérale,

la proportion dont il s'agit de déter

miner le terme le plus élève, qui est la cause des

deux autres.

Tout ce qui est en mouvement est mû par quelque

chose. Or ce quimeut imprime

le mouvement, ou

par quelque chose d'autre que soi-même, ou par soi-

même~. Supposons d'abord le premier d<' ces deux

~.vm, v.

IMd. A,y<!pOM &' «MM TO ~<f0ff, ~~t <?T~"t- ~f6< JHfOUf,

Page 552: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

5M PARTIE III.-DE LA MÉTAPHYSIQUE.

cas, et soient ces trois termes le mobile, le moteur

et l'intermédiaire différent du moteur, par lequel il

meut son mobile. L'intermédiaire est un moteur,

puisqu'il met le mobile en mouvement; mais c'est

aussi un mobile puisqu'il ne faitque transmettre le

mouvement que le moteur lui imprime. Des deux

moteurs, l'un ne meut que le dernier des trois termes,

l'autre meut le dernier et le second l'intermédiaire

estindépendant du dernier terme; le premier est indé-

pendant et du dernier et de l'intermédiaire. L'intermé-

diaire n'est donc que lemoyen terme entre le dernier

mobile et le premier moteur, cause première du mou-

vement. Or, entre un mobilequelconque et le pré-

mier moteur, il ne peut pas yavoir une série infinie

de moyens par lesquels le premier moteur imprime

le mouvement car la série des causes ne peut être

infinie. Donc, en remontant la chaîne des intermé-

diaires, il faut arriver à un premier terme qui ne soit

mû par aucun autre. Le premier moteur ne peut être

mû par rien qui soit autre que lui. La formule gêné

raie des trois termes du moteur, du moteur mobile et

du mobile prend donc cette première forme le mo-

bile qui est mû par un autre que lui, le moteur mobile

qui meut un autre et qui est mû par un autreque lui;

Jc moteur, qui u'est pas mû par un autre que lui*. Le

A* <[~To.–Tp/at ap ttf~xtf e~t'N' ïo Te «<fOt~eMt< «<t< ro ~<fo<~ Mfi

TO ~) tHMt.

) )!)

Page 553: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE IH, CHAPITRE HI. 541

premiercaractère du premier moteur est d'être im-

mobile, du moins à l'égard de tout autre que lui.

Si donc le premier moteur était en mouvement, il

ne serait mû que par lui-même. Et en effet, la cause

première est plutôt cellequi tient d'elle-même sa cau-

salité que celle qui la tient d'autre chose que d'elle-

même. Mais rien de cequi se meut soi-même ne se

meut soi-même tout entier dans le même temps et de

la même manière. En effet, le mouvement est donné

et reçu dans un même instant indivisible, et c'est le

même mouvement qui est donné et qui est reçu. Si

donc la même chose se mouvait elle-même tout en-

tière, la même chose donnerait et recevrait, ferait et

souffrirait en même temps la même chose. Ce seraient

les contraires, et par conséquent les contradictoires

réunis à la fois en un même sujet'. En général, la

chose qui est mue est un mobile, c'est-à-dire une

chose en puissance, tandis que le moteur est une

chose en acte. Donc, tout ce qui se meut soi-même

doit être partagé en un mobile et un moteur. En outre,

les deux partiesne peuvent être indifféremment le

mobile et le moteur l'une de l'autre ce serait un

cercle, et la chaîne des causes ne peut pas faire le

cercle~. Dans ce qui se meut soi même, il faut donc

distinguer deux parties dont l'une est par elle-même

P~. VIII, v AeyN ~'T< ~ï<M M.9-epfMtt'of

xa< onJïo3-epfM~-

"eeCtM, «. T. X.

Voyezplus haut, p. 348.

Page 554: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

542 PARTIE iIL–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

le mobile de l'autre. Mais le mouvement, qui est ie

passage successif de la puissance du mobile à l'acte du

moteur, le mouvement n'est que dans le mobile, et le

moteur, en tant que moteur, est essentiellement im-

mobile. Le premier moteur n'est donc pas seulement

immobile, comme on l'a vu tout à l'heure, par rap-

port à tout autreque lui il est immobile par lui-

même. Voilà le second pas que fait la démonstration

vers le premier moteur. A la progression précédente

se substitue, par l'analyse de ce qui se meut soi-même,

une seconde progression, pins élevée d'undegré,

dont le premier terme répond au second terme d<

celle-là, et dont les deux autres termes sont le déve-

loppement de son dernier terme le moteur qui est

mûpar un autre que lui-même (soit qu'il meuve lui

même ou qu'il ne meuve pas autrechose); le moteur

mobile par lui-même, et immobile à l'égard de tout

autre; enfin, le moteur immobile et pour tout aut e

que lui et pour lui même m

Ainsi, tout ce qui ne se meut pas soi-même est

mis en mouvement par ce qui se meut soi'même, et

ce qui se meut soi-même par leprincipe immobile de

son mouvement. Mais le moteur immobile par lui-

même, immobile par essence, peut encore être mo-

bile d'une manière accidentelle et relative. Ainsi, if

corps inanimé, qui ne se meut pas soi-même, est mis

P~.VHt.v.

Page 555: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE ÏH. CHAPITRE 111. 545

en mouvement par l'être animé, et l'être animé par

son âme. Mais l'âme, tout immobile qu'elle est par

elle-même, se meut du mouvement de ce qu'elle

anime; si le corps change de lieu, elle change de lieu,

s'il souffre, elle souffre avec lui 1. Or rien n'est à la

fois immobile en soi et mobile par accident que ce

qui est la forme d'une matière, l'acte d'une puissance.

La matière est ce qui peut être et ne pas être égale-

ment, et ce qui peut être et ne pas être ne peut

être toujours. L'action d'un moteur tel que l'âme ne

peut donc pas être perpétuelle; elle exige l'effort, et

par suite le repos; elle est interrompue par destemps

de sommeil, et, quand l'organisation se dissout, elle

s'éteint 2.

Cependant le mouvement est éternel Il n'a pas

commencé et ne finira point; il a toujours été et il

sera toujours; c'est comme une vie universelle de la

nature, qui se connaît ni le repos ni la mort\

En effet, ie mouvement suppose d'une part le mo-

bile et de l'autre le temps. Or les deux réciproques

sont vraies le mobile et le temps supposent le mou-

P~<. VIII, vt.

tbM.

Sar hneceMité de ce lemme pourdémontrer un

premier moteur

ah~tament immobile etséparé

de !a matière, voyezJac. Zabarella,

De Me~MM e&nM me&MM, dans le De r<~M fM~«)-aH&as i'. X&Xf,

cet. aSt tqq.

Pt~. VtH, t K~ TCSM oNfhMtTOf )M< <~MM<yMt'U!M!pXS' OU.

Mf, eÏM*C~ T'<oB~*T<"<~)!~e<ovfeora'M <Mow.

Page 556: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

5M PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

vement. C'est de la nécessité du mouvement pour

le mobile, et du temps pour le mouvement, que se

tire la démonstration de l'éternité du mouvement.

D'abord, supposons que le mobile, ou, si l'on veut,

le monde, ait eu un commencement. Ily aurait donc

eu un moment où le mobile aurait commencé d'être.

Commencer d'être, c'est changer, en passant du non-

être à l'être. Or tout changement implique deux états,

l'un on était le sujet du changement, et l'autre où il

arrive. Dans lepremier,

iln'y

a pas encore de chan

gement dans le second, il n'y en a plus. Le change-

ment du non-être à l'être implique donc un chan-

gement antérieur; car autrement il n'y aurait aucun

changement; et ce changement antérieur ne peut

être un changement du non-être à l'être, mais un

mouvement continu qui remplisse l'intervalle entre

les deux états 1. Avant le premier changement, il ya

donc un mouvement antérieur, et par conséquentun

mobile qui se meut dans un temps. Donc le mouvc-

ment est éternel et le mobile aussi. Supposons main

tenant le mobile éternel, et que le mouvement seul ait

eu un commencement. Avant d'être en mouvement,

Phys. VtH, et VI, v. Les limites ou formes, comme lepoint,

la

ligne,ou iâme, qui sont indivisibles, et

par conséquentne sont pas

mobiles, sinonpar accident, commencent et cessent d'être sans géné-

ration aicorruption, et dans un instant indivisible, mais à la suite de

la génération ou corruption, dans le temps, de leurs sujets qui sont

les mobiles. Met. VII, p. t~, t. t8; p. i43, t. 3; VIII, p. ~7:, t. 7;

Xtf, p. a4t, L 2t.

Page 557: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE ÏH, CHAPITRE III. 545

35

le mobile aurait donc été en repos. Mais le repos

n'est rien de positif; c'est la privation du mouvement, j

et la privation du mouvement suppose un mouve-

ment antérieur. Donc l'éternité du mobile implique

l'éternité du mouvementé En second lieu, le temps

est éternel; car tout instant, tout présent est la fin

d'un temps passé et le commencement d'un temps à ¡

venir; d'où il suit qu'il n'y a pas de premier temps, 1et que le temps n'a pas de commencement. Or le ¡

temps n'est pas une chose subsistant en elle-même 1

c'est le mouvement considéré dans le nombre, selon1

l'ordre de l'antériorité et de la postériorité; il a sa

forme dans la pensée qui Ïe compte, sa matière dans

le mouvement 2. Donc si le temps est éternel, 1§

mouvement est éternelaussi. osons que le .Ë~~s~

ait commencé, et non le J~QtBS~~t' et par consé-

quent qu'avant toute espèce de mouvement il se soit

écoulé un temps infini. Comment déterminer dans

l'infinité d'un temps vide un moment où le mouve-

ment commence plutôt qu'à tout autre moment? De

l'infini qui précèdeà l'infini qui doit suivre, il n'y a

point df* rapport;nul rapport entre deux infinis, et

par conséquent nulle raison qui en définisse lemoyen

terme ou la commune limite. Pourtant la nature met

P~. vm.t.

tbtd. ÏV, H? Et Jè ft~~sf d&~o Œre~MtE~ cpt~e< il ~a: ~M-

j~t foBt, <!A!p<trof e!Mt<~cofof ~f~!)< f"! ot!<n~ < ToEvo 4 ~oïe

~~TW0 ~p<!f0f.

Page 558: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

5M PARTIE HL–DE LA MÉTAPHYSIQUE.1

partout le rapport et la proportion; rien ne change

sans raison'. Ni le temps n'a commencé, comme l'a

dit Platon, ni, comme l'ont cru Anaxagorp et Empe

docle, le mouvement dans le temps; ce sont des imn

ginations également vaines

Le mouvement est éternel. Or, pour un mouv?

ment éternel, il ne suffit pas d'une cause qui np

meuve pas toujours; car l'effet est ~multané avec la

cause. Maintenant suffit-il d'une totalité successive

de causes passagères~ une série successive ne peut

pas être la cause d'un mouvement éternel dans sa

totalité indivisible. Chacune des parties de la série

des causes serait-elle la cause d'une partie du mou-

vement éternel dans l'ordre de la succession? Pour

répondre, parties par parties, à la succession infinie

des phénomènes pendant l'éternité, il faut une suc-

cession infinie de causes. Or ces causes elles-mêmes,

qu'est-ce qui les fait. commencer et cesser d'être? S'il

n'y a pas d'autres causes, ou la série des causes est

elle-même une suite de phénomènes indépendants

les uns des autres, et alors elle ne suffit pas, ou elle

P~)~. VIII, t Â~Xe ~t;t< oj~f ye aTŒKTff T<By ~<Te< xa< xera

<Kf' t! y~P P<!<TM tMT~Ot TMKM Ta~eMS. ToO~retOOt) ~M)&:

TO~EtOOf

oJ-

~&'a[ Myof ~e<' ?<t&< ~e ~.r<MT<![X<~o:. To <~efpo!' ~ptifof ~Me~e!

e!r<![ )t<ft)6ijn'~ oore, To~Tox ~e ~~e~aï' e!f<]M&a~op<tf

oT< !W ~a~o''iITa xcv,,6ffvtÚ 'f11OT£, TOOTOII Jè p.rrJep.lŒv elvcuA,a<popàv

ÓT' vùv P.œÃ/,Oll

'f11pMe:l'ov, rL7/A' aÕ Twa Ta.;CV lxew, oùx /:r, ~úuer.cJs lp'J'ov.Cet ar-

'epJrepo~ ft~y aB T.f<[ T<t~<~ ~e< o~x ~T< pt!<yea)î ~pyoy.Cet a'-

gumentest tifé du beMtn d'une raison

~)t~<tn<e.Sur !a même ques

tion, comp.Leibnitz (ed. Dutens), !ï, pars p. t56.

tbid.

Page 559: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE !H, CHAPITRE IH. 547

35,

est une progression de causesdépendantes les unes

des autres, et alors elle ne peut pas être infinie 1.

Léternité du mouvement suppose donc l'éternité

d'un premiermoteur. Or tout moteur éternel est im-

matériel, et par conséquent absolumentétranger au

mouvement. La démonstration fait donc encore ici

un nouveau pas. Au-dessus de la progression à la-

quelle elle s'était arrêtée tout à l'heure, s'élève une

troisième progression dont le premier ternie répond

au second terme de celle-là, et dont les deux derniers

termes sont le développement de son troisième terme

le moteur quise meut soi-même, comme l'être animé;

le moteur quimeut sans être mû par soi-même, et

enfin le moteur absolument Immobile, qui n'est sus-

ceptible de mouvement ni par lui-même ni par ac-

cident~. La démonstration va en trois pas du der-

nier sujet du mouvement au premier moteur. Les

trois progressions, qui marquent ces trois pas en soi

tant successivement les unes des autres, sont le triple

développementde ia progression a

trois termes qui

tes contient dans l'universalité de sa formule, et

dont chacune d'elles reproduit, àdes degrés de plus

en plus élevés, les trois éléments nécessaires le Mo

bile, ie Moteur mobile et le Moteur. De l'extrémité

inférieure de la catégoriede l'être, du mobile qui

ne meut rien. la démonstration s'élève par une sé-

Phys. Vttt.vt

Ibid.

Page 560: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

548 PARTIE III.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

rie demoyens termes moteurs et mobiles à la Ibis,

et au-dessus de l'âme elle-même, jusqu'au moteur

qui ne fait que mouvoir etqui ne peut être lui-

même en mouvement. Le premier moteur n'est point

une âme du monde; c'est unprincipe supérieur au

monde, sépare de la matière~, étranger auchange

ment et au temps, et qui enveloppe les choses, sans

se reposer sur elles, de son éternelle action.

Maintenant F éternité suppose la continuité. Éter

nel comme letemps, le mouvement est continu

comme lui. Or la continuité implique l'unité. En ef-

fet, supposons que le mouvement éternel consiste

dans une succession de mouvements différents, sans

aucun intervalle qui les sépare dans le temps. La

succession se compose de mouvements et de mou-

vements qui unissent, ? toute fin, comme tout com-

mencement de mouvement, suppose, comme sa cause

immédiate, ainsi qu'on l'a vu tout à l'heure, un mou-

vement antérieur. A la continuité de la succession

des mouvements, il faudrait donc une cause dans une

succession de mouvements, et à celle-ci une cause dans

une autre succession, et ainsi à l'infini, ce qui n'est

pas possible; car si une suite infinie de phénomènes

est possible, une suite infinie de causes ne l'est

point. L'éternité des mouvements, en général, sup-

pose donc, non seulement un éternel moteur qui iïn

1 Met. XI, p. 2t4, t. t3X<t)p«tTûf

xa6* auro <te< ~n~eM T&w <M<

?&'~rap~<M'.

Page 561: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE III. 549

primesans cesse le mouvement, mais un mouvement

continu, dans le mobile comme dans le temps, et qui,

comme le premier moteur, enveloppe aussi tous les

mouvements possibles de son éternité Aux trois

termes généraux du mobile, du moteur mobile et du

moteur/répondent donc, dans la réalité, trois genres

d'êtres différents qui composent lacatégorie entière

de lEtre trois genres dont le premier et le second

réunis constituent la totalité des choses sujettesau

mouvement, c'est-a dire la nature, et le second et le

troisième réunis la totalité des choses éternelles. Le

second terme est donc un intermédiaire qui sépare

et qui rapprocheles extrêmes, qui joue envers cha-

cun d'eux le rôle de l'autre, et qui par conséquent

les enchaîne l'un à l'autre dans une proportion con-

tinue i'êtce mobile et péri~sable, 1" h'l ettinue l'être mobile et périssable, l'être et

impérissable, l'être impérissable et immobile

Mais le mobile éternel, le premier mobile qui subit

l'action de l'éternel moteur, se meut-il tout à la fois

selon toutes les catégories du mouvement, dans la

qualité, la quantitéet l'espace ? ou de ces trois genres

du mouvement n'en est-il que deux, n'en est-il qu'un

qui soit la cause des deux autres, et qui puisse rem-

plir sans interruption toute l'éternité ?a

P~.vm.Tt.vn.

~&t. Xtî, p.aAo, i. 7 OJoMf <!eTpsM, ft;a fte~ <[«rOt)T!t, t;

(Mf <Mtot, ~pr~ <&~ ~e <M«f!tTO~. P. 2~5, 1. 28Tpe«

oMtM, A!o <t~f a< ~ecoMM, fMe ~e t) ~tfttT Le pénssabie diS~re en

genre derimpénssaMe. X, p. sto. t 20

Page 562: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

550 PARTIE IÏI.–DE LA METAPHYStQUE.

La première forme de la puissance, et la condition

de ses formes ultérieures, est, comme on l'a vu'.

l'étendue, avec ses trou dimensions, c'est-à-dire la

quantité dans l'espace.L'intuition de la quantité dans

l'espace est la condition de l'Imagination, condition

elle-même de l'entendement~ le mouvement dans

l'espace est la condition de tous les mouvements pos-

sibles. Le mouvement selon la quantité, ou l'accrois-

sèment, qui constitue l'essence de la vie végétative.

suppose la nutrition, et par conséquent le changement

de qualité ou l'altération de la substance nutritive. Ot

l'altération suppose à son tour le rapprochementdans

l'espace de deux substances revêtues de qualités con-

traires. Tout mouvement de quantité ou de qualité

suppose un changement de distance, c'est-à-dire un

mouvement dans l'espace. Les qualités élémentaires

elles-mêmes, qui font la base de toutes les qualités

des corps, et qui, par conséquent, sont la première

condition de toute transformation, la chaleur et le

froid, se ramènent, comme à leurs causes prochaines.

à ia condensation et à la raréfaction, la condensation

et la raréfaction à des changementsde distances. De

là, tant de philosophies qui ont fait consister la na-

ture entière dans la figure, la situation et le mouve

ment Le mouvement dans l'espace est donc la con-

Voyez plus haut, p. 4oo.

Voyez ptus haut, p. 436.

P~M.V~H.~n.

Page 563: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE lii, CHAPITRE 1M. 551

dition du mouvement en général; en outre, la mobilité

dans l'espac~Tp°t < forme générale sous laquelle la ma-

tière arrive à l'existence réelle et qui distingue le corps

de létendue abstraite la première puissance de la na-

ture est donc la puissance passive du mouvement dans

l'espace.' La puissance active de ce mouvement, au

contraire est la dernière dans le développement pro-

gressif de l'organisation et par suite la première dans

l'ordre de l'essence. La laculté de se changer de lieu

soi-même n'appartient, en général, qu'aux animaux

les plus complets doués des sens les plus nobles, et

le signe de la perfection des puissances mêmes de l'âme

dans l'humanité est la force, la proportion et la beauté

des organes de la préhension et de la locomotion

C'est par le déploiement de son activité dans l'espace

que se produit la volonté et que se manifeste l'empire

de l'âme sur le corps. La nature commence dans l'es

pace par la passion, et l'action la ramène à l'espace. Le

monde mécanique est le fond sur lequel se développe

ie monde organique,et en même temps la forme qui

en détermine et qui en mesure la perfection. En re-

montant au delà du commencement même de l'orga-

nisation ou de la mixtion jusqu'à la cause de l'être,

Phys. VHt, TH TeXeuT<MOf ~e <~opK~Mo~

<~<~e<To<s ye~-

<Te<. A<~ T<t ~ce~ ~XfM <MHf!!Ti!t TMf ?MfT<Mf &' ~f~Etaf TOUOp~<M'OU,

<Mff

Tf[ ~!<T<t :Ht< -SO~iit ys~ T&W ~Nf, TO~ ~eTeAS.O!~tEf<M? MSap~M. ~CT'

Et fMXXoy umMye< ~op<tTOM ~~of <ïTSfX)~o<T< Tt!)' ~<r<f, Ka< x~t!-

CXt a~Tt) ~pMMtTiS!' <M« <tP €i)t X~T' oJ<T<!)tf.

Voyez plus haut, p 43~

Page 564: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

552 PARTIE ÏÏI.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

c'est le mouvement dans l'espace qui se trouve à la fois

au premier rang dans l'ordre du temps, et au premier

rang dans l'ordre de l'essence et de la causalité. La

génération suppose l'approche desprincipes généra-

teurs. Or ri~n ne peut changer ni de qualité ni de

quantité qui ne soit d'abord venu à l'être, c'est-à-dire

qui n'ait été engendré. Si donc le mouvement dans

l'espace est antérieur à la génération elle-même, au

changement de l'être au non-être, il est le commen-

cement et la cause de toute espèce de mouvement

enfin de tous les changements, le mouvement dans

l'espace est le seul qui ne porte pas sur l'être, mais

seulement sur les rapports extérieurs des corps les uns

avec les autres; c'est le seul, par conséquent, qui

puisse être éternel en un seul et même être

Reste maintenant la seconde condition du meuve

ment de l'éternel mobile, la continuité. Le change-

ment du non-être à l'être et de l'être au non-être, la

génération et la corruption, est un changementde

contradictoire à contradictoire; les mouvements de

qualité et de quantité sont des changements de con-

traire à contraire. Or aucun changement d'opposé à

opposé ne peut être éternel et continu. En effet le

changement ou le mouvement ne peut être éternel de

P~.vm.vn.IHd. ÛXf~TO! TM 0<M e~tCTCtM< TO «<f0<!ftef0f TMf Xtft~e&W M'

Tt5~BM~fM.

K<T'! fM!'t;t' ~<tpoJ~sf ~er<[~MX~e< MS e7fa~

Page 565: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE III. 555

l'un des opposés à l'autre, sans quoi iln'y aurait pas

de mouvement. L'éternité du mouvement entre des

termes opposés n'est doncpossible que par la pro-

gression et la régression perpétuelle d'un terme à

l'autre. Mais un même mobile ne p,eut pas se mou-

voir dans le même instant de deux ï~ouvements op-v

posés, et les mouvements opposés, sont ceux qui

tendent à des opposés suivant des directions oppo-

sées donc, entre chaque mouvement de progression

et de régression, ily

a un repos, etL:

mouvement

d'opposé à opposé ne peut pas être éternellement

continu En général, la continuitésuppose

Finnnie

divisibilité sans division actuelle, ~ne infinité de

moyens termes en puissance et aucun en acte. Dès

que lemoyen

terme vient à l'acte, il est double, fin

d'une quantité et commencement d'une autre; ce qu'il

unissait est séparé,et la continuité internompue Le

mouvement ne peut donc, sans s'interrompre,déter-

miner un commencement et une fin; or le terme au-

quel ie mobile arrive, et d'ou il repart en sens con-

traire, est le moyen terme défini de la progression et

de la régression, le commencement de l'une et la nn

Â~M~M. Phys. Vin, vm. Œ J~<. il,p.38,12.

P/ty~. VHÎ, vm 0<rr' e~ ~u«<tTOf <ÏfM fteT~a~etf Ta: <M'T«etft~M~

(SC. MMftMM) OMf ~Taft <Tt<fe~< it ~eM~X~,<<t ftET!t~Ù <![JTN<' ~TTa'

~p<!fo~.

ÏHd. Ëf T~ <TUf6ye<~e<TTt ~ef ajretpa: t~f'Tt, <& ojx efTe/.e-

~eM, aXXtt ~fj~te<- ~t; ~M!? sfre~e~e~,ot? WM!}<Tet <rufe~, aXXa

cTt!<re<.

Page 566: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

554 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

de l'autre donc le mouvement s'y arrête, et entre

la progression et la régression du mobile, il s'écoule

nécessairement un temps vide de son mouvementé

Ainsi dans le syllogisme, dans la science, lemoyen

terme, étant pris en deux sens, est un point d'arrêt et

derepos pour la pensée 2.

Dans l'espace, il y a trois sortes de mouvements

deux mouvements simples, dont l'un est rectiligne et

l'autre circulaire, et le mouvement mixte, qui est

composé des mouvements simples5. Les extrémités

de la ligne droite sont les contraires dans l'espace; car

l'opposition des deux extrémités de la ligne droite est

le type même de la contrariété~. Le mouvement rec-

tiligne ne peut donc pas être éternellement continu,

ni par conséquent le mouvement mixte. Mais dans le

mouvement circulaire il n'y a pas d'opposition. De

l'extrémité d'un diamètre le mobile passe à l'autre

extrémité, et de celle-ci il va ensuite à celle-là mais

il n'y revient pas par le même arc; ce n'est pas une

progression suivie d'une régression, mais une pro-

1Phys. VUt, vm T~i Atp~ T~S e~' oj. Te~et~ )?«

<tpj~ xe~poMf

T~5 eM, <n;fte~ <M A!o' &o or~Mtt af~x~.

Voyez plus haut, p. i8o. Phys. VUI, vnt Afe~xt! or~MM ~o: T«

~o ~r<KeM~ <&TMpef )Mt< fo~etef. En eHet, te

moyenest ~f TM

eptOft~ ~<!o T~ Xo~~ (voyez ptus haut, p. 388, n.4), un réeHement.

oifrr9~,âvo zr~. ~yc,~ (voyez pius haut, p. 388 n.

~.),un réeilemen~,

doublelogiquement,

etpar

lapensée qui

divise.P~ tV, x!t) 0"

y<[p en!~ <te! xai fJcc <TTfy~t) T~ fo~<Te<' AcucoXfTWf yap d~X)!.

~<- < 1 n.

.Met. X, n.

Page 567: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LI~RE m, CHAPITRE HL 555

gressionnon interrompue qui peut être perpétuée

ainsi à l'Innni. En enet, dans toute l'étendue de la

circonférence, il n'y a pas un point déterminé; toutes

les limites n'y sont qu'en puissance. Le moyen terme,

c'est le centre, commencement et fin et tout à la fois

milieu dè l'étendue entière 1. Or le centre est néces-

sairement en dehors de la circonférence et à distance

égale de tous les points. Le mobile ne doit jamais l'at-

teindre et y trouver le repos. Le mouvement éternel

et continu, cause de tout mouvement, ne peut donc

être que le mouvement circulaire dans l'espace2.

Maintenant tout corps est un mobile, et il n'y a

rien de mobile qui ne soit un corps ou qui n'appar-

tienne à un corpsen outre, il n'y a rien dans la na-

ture qui n'ait une tendance naturelle. Si donc le mou-

vement dans l'espaceest la première forme de la

nature, tout corps a un mouvement naturel dans l'es-

pace. Aux mouvements simples et primitifs doivent ré-

pondre des corps simples aumouvement rectiligne,

qui se décompose en deux mouvements contraires,

répondent les éléments contraires, qui se meuvent

naturellement selon les directions opposées de la

gravité et de la légèreté. Le mouvement simple en

c~cle n'a pas de contraire c'est le mouvement na-

'urel d'un élément simple qui n'a pas de contraire

P&y<. VtH. t~ Kaî3~ «PX" ~e<TM' To~ f~e6oM xaj reAo-,

e<~w.

tbid.

Page 568: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

556 PARTIE IH–DE LA METAPHYSIQUE.

non plus cet élément est l'éther~. Les éléments

graves et légers sont en lutte perpétuelle, l'éther,

exempt .de toute opposition, est tout entier à l'oeuvre

simple de son perpétuel mouvement c'est l'élé-

ment actif et rapide qui ne se repose jamais (c~6))p

de ae< -3-e&~). En outre à lafigure du mouvement cir-

culaire répond la figure du mobile. Les éléments con-

traires, toujours soumis à des influences opposées,

et se combinant sans cesse entre eux, ne peuvent pas

avoir de figures définies. La détermination invariable

des figures ne permettrait pas lacontiguïté parfaite;

ily aurait du vide, ce

qui n'est pas possible, et il n'y

aurait pas de mixtes Mais il n'en est pas de même

de l'éther de son mouvement suit sa forme. La figure

n'est que le moyen dont le mouvement naturel est la

fin, et rien dans la nature n'est que pour la fin et

par la fin. Le cercle est la pius simple des figures

planes, puisqu'elle est formée d'une seule ligne qui

se suffit à elle-même pour enfermer l'espace; la sphère,

formée d'une seule surface, est le plus simple des so-

Hdes l'éther prend de soi-même la figure d'une sphère.

Tous les corps qu'il entraînera dans son mouvement

prendront sous une action semblable une figure sem-

blable~, et feront autant de sphères. Le mouvement de

De Cmt. n.tbid. I, !u. ~&(Mr. t, tu.

=' De Ça- tV. vm.

!btd. H, ïv Ë<Mt<rro!' e<TT<p mf~pyo~ e<TT<f, évexa. Toù spyw.

~M ToSTo ~e< To 6~xt!xXto!' <y&!fM[~~u<re< xt~efM~ xMfX~) ~e/.

Page 569: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

UVRE 111, GHAPtTRE !!ï. 557

l'éther, cause de tout mouvement dans le monde, em-

brasse le monde au centre de sa sphère se rassemblent

donc et se disposent dans l'ordre de leurgravité et de

leur légèreté spécifique les autres éléments. Le mou-

vement circulaire veut un centre immobile; or le mou-

vement dé l'éther contient le monde le centre de son

mouvement est donc le centre même de sa figure, et

le monde est une sphère qui accomplit autour de son

centre immobile un mouvement éternel de révo-

lution

Dans le mouvement circulaire, les vitesses des dif-

férentes parties du mobile varient comme les dis-

tances de ces parties au centre. Les plus éloignées,

parcourant dans le même temps plus d'étendue, se

meuvent plus rapidement. Toutes les parties de la

sphère du monde ne sont donc pas animées d'une vi-

tesse égale. En outre, l'éther, dans toute son éten-

due, et les quatre éléments contraires ne forment pas

une masse continue, indivisible dans son mouve-

ment. La différence des vitesses dans le mouvement

général de l'éther ou du ciel, ylaisse les couches

inférieures de plus en plus indépendantes du mou-

vement delà couche la plus éloignée du centre; elles

retardent les unes sur les autres, et prennentdes mou-

vements propres dans des sens différents du mou-

vement universel~. La sphère la plus vaste et la plus

DeCœt.M,!V.nM<t.Mt,XM.Xu.~n.

Page 570: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

558 PARTIE HI–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

rapide porte des astres qui ne se meuvent que de son

mouvement ce sont les étoiles fixes. Au-dessous

viennent les sphères des étoiles errantes, ou planètes

La dernière planète est la lune. Au-dessous de la lune

et en général du ciel, vient le monde des éléments

contraires, incapables de se mouvoir d'eux-mêmes

qu'en ligne droite, mais plus ou moins dociles à l'im

pulsiondes sphères célestes d'abord le i'eu, ou piu-

tôt l'élément inflammable, qu'entraîne encore d'un

mouvement assez rapide la pression de la sphère qui

le touche; au-dessous, l'air qu'elle ne fait plus qu'a-

giterau-dessous de l'air, et à la surface de la terre.

l'eau, où l'impulsion de la sphère de la lune ne pro

duit que les oscillations lentes du flux et du renux

enfin la terre est soustraite par la cohésion de ses

parties non moins que par sa petitesse, à l'innuencf

mécanique du mouvement céleste. La terre est im-

mobile, suspendue dans l'espace par la seule pesan-

teur, qui précipite les graves vers le milieu du monder

Mais la terre elle-même subit l'action immédiate de

l'eau, l'eau celle de l'air, et l'air celle de l'élément in

flammable. Enfm, dans les phénomènes de la mixtion,

les deux éléments intérieurs jouent en général, à l'é-

gard des deux autres, le rôle du principe moteur~.

Ainsi chaque sphère du monde est la cause du

JMeteor. H, t.

Dt C<ff. H, xm, xiv.

A~teor. IV, v.

Page 571: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE Ht, CHAPITRE ÏH. 559

changement dans la sphère qu'elle enveloppe; l'ordre

de l'essence et de la causalité répond à l'ordre des

lieux et des temps, la forme à la figurer Depuis la

sphère rapide des étoiles fixes jusqu'à la terre, c'est

une progression décroissante de mouvement et d'ac-

tivité. Mais, entre le monde céleste et le monde sub-

lunaire, l'unité n'est que d'analogie, desimple pro-

portion la différence est de matière, ou de genre;

car le genre répond à la matière2. Au contraire, cha-

cun des deux mondes est formé d'une seule et même

matière. Dans le monde céleste, il n'y a que l'éther,

et dans le monde sublunaire, les quatre éléments

sortent les uns des autres et se résolvent les uns dans

les autres c'est donc une seule matière sous des

formes variables, et dans une transmutation perpé-

tuelle dans le monde sublunaire, l'unité est donc

dugenre

la différence des sphères successives est

une différence de formes, ou d'espèces. Dans le

monde céleste, exempt de toute opposition, l'unité

de genre est aussi une unité d'espèce et iln'y a

De C<B<. IV, m Âe< y~pro

af&wepof ~pMro u~ wro <~ eMos

<MM <!Xtt" o~MM ~ve< ~pMfj~tt~o!. De (jcm. et corr. HI, Vt: MoM'f

y<~ ~oT< x<t! p:xX«rTa ToS e!~oM To :Mp Âa To Tire~uxeoatt ~epeo<?<M ~po~

TOf<&!<W. 6 (.Mp~

)Mt< TO e!3os <Mr<M'T&t!)Eî' Toi;OpOtî..M<?<e0r.

tV.t.

JMet.V, p. g6,t. 3 To ~f0f ëf TO ii~OXe~efO!' T<MÎ

&<ï00pMS.

&~ep <OH! ~ot. Sur lerapport

du genreet de la matière, voyM j)!us

haut. p. 486.

JMet. V, p. Q~,1. 22 Ta ~f '«tï'

ap<~o)/e<yr<f ë«, T<i Jè MT' e<-

Page 572: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

560 PARTIE HL–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

de différences entre les sphères successives que dans

les degrés de per fection.

Or le résultat immédiat de l'opposition des espèces,

dans un monde de mouvement, est la génération et

la corruption. Le contraire détruit le contraire et ia

destruction de l'un est la naissance de l'autre~. Mais

l'action des contraires l'un sur l'autre exige, outre la

matière, une cause de mouvement. La cause immé

diate de la générationest la chaleur; celle de la cor-

ruption, le froid ou la privation de la chaleur La

cause efficiente de la chaleur elle-même, est dans le

frottement que les astres excercent sur les sphères su-

périeures du monde sublunaire 3. Les astres n'ont

pas de chaleur par eux-mêmes la sphère de i'éther

est en elle-même étrangère à toute opposition; la

cause produit un contraire, sans descendre elle-

même dans la contrariété, sans sortir de l'identité et

de l'unitbrmité de son mouvement.

Cependantles alternatives de la

générationet de la

corruption veulent des alternatives dans ia chaleur et

le froid, qui en sont les causes Immédiates les effets

opposés veulent des causes opposées~ L'opposition

Jo~, Te Jè xarct yef<M, Ta )MT'afa~oyKff. Cf. TbcopLr. Met. ed. Bran-

dis, p. 3i7, tg. De Part. an. I, v Tà jMf yap ~ou<y< Ta xo<Mf xatï'

aMtXey~M', Ta xetTa y~fot. Te Jè xar' eMoî.

tMd. XtV, p. 3o2, t6 ~'CotpTMOf yàpToC e~a~ou Ta erafT/of

De Cfe!. II, tu Kai T~s orep~MMî 'efpcTepof n «[Ta~aerM' X~&

3' o!of ïo.~ec~tof

Toi~u~poC.

j~eor. r, III. De c<B!. n, vn.

Page 573: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE III. 561

36

se trouve dans la variation des distances de l'astre

qui produit la chaleur à la région où il la fait péné-

trer, et pour cette variation, il suffit d'uneobliquité

dans son mouvement propre à l'égard du mouvement

généraldu ciel Tandis que le mouvement général

emporter soleil, suivant la ligne circulaire del'équa-

teur, d'orient en occident, il remonte peu à peu d'oc-

cident en orient suivant une ligne circulaire, l'éclip-

tique, dont le plan coupe le plan de l'équateur, en pas-

sant par le même centre, qui est celui de la terre. Sans

s'éloignerni s'approcher du centre, il s'approche et

s'éloignesuccessivement de chacun des points de la

surface, et de là l'inégalité de la chaleur et la variété

des saisons. La révolution de la sphère céleste, selon

l'équateur, perpendiculairementà l'axe du monde,

c'est le jour, qui règle sur la terre, pour les êtres

placés haut dans l'échelle de l'organisation, les alter-

natives du sommeil et de la veille. La révolution

propredu soleil suivant l'écliptique, par les signes du

zodiaque, c'est l'année, qui règleles alternatives gé-

nérales de la naissance et de la mort. Ennn la terre

elle-même a ses âges;seulement elle n'est pas comme

les êtres éphémères qu'elle porte, jeune ou vieille

tout entière. Elle vieillit d'un côté, en perdant sa

De 6em. et con\ H, tx A<o o~ -sfp~T)? ~op~ <tMz s<w efe<TE~

«M~OoptM, <D~' <MtT~TOf Xo~f X~~Of- ef TCtUT)!~p XM TO

<TUfe~

~feart <M~ Ta x<fe!o&M &!<t xM~<yeM. ?'< XH, p. 2~5, i. i ô ~<oî

«! ~o~of X~t~M. ««'OM'TOt.

36

Page 574: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

56.2 PARTIE Ml.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

chaleur, pour rajeunir d'un autre~. Où elle était fer-

tile, elle devient aride; où il n'y avait point d'eaux,

les eaux affluent et forment des déluges puis les eaux

se retirent, les régions desséchées reverdissent. La

cause de ces changements, c'est sans doute le soleil

entraîné lentement par une troisième sphère éthérée

suivant la largeur du zodiaque; l'éciiptique s'incline

peuà peu, et en se déplaçant, déplace les climats.

La révolution del'écliptique est la période d'une

grande année, qui mesure les époques du monde

sublunaire

Ainsi, dans le monde où nous sommes, au milieu

du combat perpétuel des contraires, la nature ne

peut arriver, ni dansl'espace, ni dans le temps, à la

continuité du monde céleste elle arrive à l'unubr

mité et à la régularité duchangement discret~ Elle

ne peut obtenir laperpétuité de l'existence dans fin-

dividu elle l'obtient dansl'espèce. Le sujet change,

la forme dure en se propageant d'individu en indi-

Meteor. t, xiv Tj~ yt! TOth-o y~er<M tM-rA~epoe, ~,t' xai

~ep~M~tW.

C'est le troisième mouvement attribué au soleilpar Eudoxe. Met.

Xt!, p. 252, i. t T~ J~Tp~ntp xotT~ TOf XeXo§M~fop èv T~ ~X<Mre<

?&' ~<!<3<mf. Je n'aipas trouvé dans Aristote de

passage exprèsoù il

rapporteles

âgesde la terre à ce mouvement, comme à une grande

année. Mais j'ai cru que c'était sapensée. Selon une onmion univer-

seliement répandue dansl'antiquité, on avait vu autrefois le soleil se

lever à l'occident.

T~s~.P~. VIII, vr.

Page 575: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE ML 565

36.

vidu; l'être périssable ~e reproduit dans un autre lui-

même 1. Les parties vivantes du monde sublunaire se

propagent ainsi dans le sens de la progression perpé-

tuelle du temps, et suivant la ligne droite. Les élé-

ments font le cercle dans les alternatives de leurs

transformations réciproques~. Enfin le changement

des zones de la terre est une lente révolution. L'o-

bliquité de la marche des planètes suffit dc~c pour

déterminer dans le monde des contraires les vicissi-

tudes de la générationet de la corruption la con-

tinuité du mouvement général du ciel en ramenant

les planètes dans des temps égaux aux mêmes points

de la sphèredu monde, fait de ces vicissitudes les

périodes régulières de l'année et de la grande année.

Les mouvements obliquesfont que tout est toujours

autre; le mouvement diurne quiles domine fait que

tout est toujoursle même, et donne au changement

la forme de l'éternité~. Le monde céleste en général est

le monde de la continuité éternelle du mouvement;

Voyez plus haut, p. j~t 4

JHet. Il, p. S?, L 2~ sqq.

!Md. XH, p. 2&7, t. t5 El ro a~To <te< <Mp«~M, ~?T< &< ~e-

M<f <&<MM!T&~~epyoCf.El Je ~Met y~M<r<$

Rat ~opz ewM, ~.o Js?

.MMH del~fepyoCf

<~<!f: t'M ~.M~. ÂP~Kt! <ÏpKMj< ftEf X<t6* aMro Ef.

epyew (lemouvement propre, annuel

<M~ ~s xtT' <ï~o' ~rot

tMS'&MOf

MTtt T~ CjMTOf (ï~ ~p<BTo~ {emouvement diurne de

tout le ciel). Àvdyxn Ji XilTd -rOiiTO' -woDUP Y&PixsÎvO Œ Te OIT'Ot'

tout te det). Âf~t! xaïa

wCTo' ~z~~ y<ïp sxetfo ttJrp Te <~T<of

tout !e ciel). ~vaiyx» ~~î xas.n:ov"so· Zraû.~v yâ~éxeFvo azs~i sE at'ssav

<~< (i. c. !c mouvement diurne, exeH'o, est ta cause et du

mouvement oblique, e~T~, en tant que périodique,et de la

généra-

tion etcorruption perpétueHe, xftxe<f~). Ouxo~ ~e?LT<o~ ïo

~p<BTo~.

Page 576: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

564 PARTIE II!.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

le monde sublunaire, celui de l'éternelle périodicité.

Le monde céleste lui-même ne peut atteindre A

l'égalité et l'uniformité absolue. C'est un mobile, et

des conditions mêmes du mouvement continu suit,

dans les différentes parties du mobile, l'inégalité des

vitesses. Mais en même temps que décroît la rapidité

des astres dans le mouvement général du monde, en

même temps se multiplient et deviennent plus rapides

les mouvements propres. La sphère des étoiles nxes

n'a qu'un seul mouvement, qui emporte une multi-

tude d'astres avec une vélocité extrême~. Les sphères

inférieures ne portent chacune qu'un astre mais cet

astre à lui seul a plusieurs mouvements diuérents.

Ainsi s'établit entre toutes les parties de la masse ho-

mogène de l'éther une sorte de compensation ce que

ia nature perd d'un côté elle le regagne jusqu'à un

certain point d'un autre côté 2. La multitude lui sert

à contre-balancer la grandeur, la variété à suppléer

la force. Ce n'est pas assez de mettre partout l'ordre

et la proportion partout elle répand des relations

inverses et une réciprocité harmonieuse qui main-

tiennent entre les proportions mêmes un juste équi-

libre, et les rapprochent de l'unité

Kt~ yetp <t&M~ &[e<M ToC W eeca~TMt, Tow J' ~M~f <'repo«' T<M?o*

e« ~~tt ~t~M &M'~n.

De C<~ H. Ht. XH, THt.

Voy. plus baut, p. 4*8.

De Cfet. 11, jUt T<tt!t~ Tg eMt aM<Kt~e< ~M<, <M~~rote? T<fa Ta

Page 577: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE in. CHAPITRE Ht. 565

Le monde dans son ensemble, sous l'action du

premier moteur, est un toutaccompli auquel il ne

manque rien, et qui renferme toute chose sous la

forme de la continuité dans l'espace et dans le temps'.

L'espace, ou le lieu, ne consiste ni dans la matière,

ni dans ia forme, ni dans l'intervalle des surfaces des

corps les intervalles, la forme, la matière sontinsë

parables du corps; l'espace, au contraire, en est

essentiellement séparable. L'espace est la surface

dans laquelle des corps de nature quelconque peu-

vent se succéder c'est comme un vase immobile

pour toute espèce de mobile. Or une limite, telle que

la surface, ne peut pas subsister par elle-même, mais

seulement en un corps. L'espace est donc la limite

du corps enveloppant2. Le vide n'est donc autre chose

qu'une abstraction sans réalité, et, par conséquent, le

monde n'est pas un corps ou un système de corps

suspendu dans le vide innni. Dans l'mnni d'un es-

pace vide comme dans l'innni d'un temps vide, il n'y

a rien qu'une en~èrB indétermination; nul ordre, nul

rapport et nul point discernable où fixer la place du

monde Le monde n'est donc pas dans l'espace, mais

&f, T~ ft~f (M~~OMUM~a <nM~oC<M araire, T~ <~ ~< <nftfMrt< <mXX<tt

~r.

!b:d. t, vtn, n. Sur rid6e du T~aof, cf. t, et JMff. V, !m. S.

Myt. IV, t), tw Û Toxof f~eïot' af<eTM~ttT<w. ToS ~fept~of

TOft~pM <~MtTOf Op~TOf.

!hid. vm Ûa~ep ~ap TaC~tt~tfo: M!3etMtt eot< JM~opa, ouïM~ Ka<

TCU A'T<M.

Page 578: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

568 PARTIE H!.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

l'espace dans le monde. D'un autre côté, le monde ne

peut être infini. En effet, le mouvement d'un mobile

infini, exigerait, avec une vitesse quelconque et pour

une partie quelconque, une durée infinie. La figure

même, fût-elle immobile, suppose la limitation~. Et

enfin, nulle quantité actuelle en général ne peut être

infinie. Le monde est une sphère finie qui n'est pas

dans l'espace, et dont la grandeur détermine les

bornes de l'espace. Maintenant, dans la sphère, le

commencement ne se distingue pas de la un~ c'est

comme la figure même de l'infini. Mais cette infinité

ne consiste que dans l'infini de la possibilité du mou

vement la ligne circulaire, la plus définie, la plus

parfaite des lignes, est la ligne selon laquelle le mou-

vement est possible dans le temps à l'infini. Ainsi le

monde est un tout qui embrasse dans son étendue

tout espace, dans son mouvement toute durée. Ni le

fini de son étendue, ni l'infini de son mouvement ne

dérogent à sa perfection. Sa perfection c'est qu'il est

tout et qu'il mesure tout, dansM~ïj~l par sa forme,

dans le possible par sa durée.

Cependant le monde lui-même n'a rien de réel que

dans son mouvement. Ce n'est pas encore la fin de

toute réalité c'est une limite limitée elle-même, une

forme qui a sa forme. La forme et la limite du monde

est le principe qui siège en quelque sorte sur sa sphère la

Oe Ctt!. VH. CmBp. plus haut, p. 546, n. a.

Pt~. Vtn, M Tt!<; <Mp<~epoM <MpMïft.

Page 579: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE IM, CHAPITRE 11!. 567

plus rapide', et l'enveloppe de son activité. Le monde

est unequantité

le ciel même, et lasphère

du ciel la

plus haute et la plus rapide, n'a que l'unité que sup-

pose et produit le mouvement, c'est-à-dire la conti-

nuité, avec l'infini qu'elle renferme. Le premier mo-

teur seul est sans étendue, sans quantité, sans parties

Le mouvement du monde pendant l'infinité du temps

supposerait dans une grandeur une puissance infinie;

or une puissance infinie ne peut appartenirà une

grandeur finie, et une grandeurinfinie est impos-

sible*. Mais le fini et l'Innni n'appartiennent qu'à la

quantité, et la quantité à la matière~ le premier mo-

teur n'est donc ni nni~u infini: c'est une limite indi-

visible et une unité simple. Le monde, dans son

PA~. VtH, X T~tOTCt XtfeffM Ttt ~y~TCtMt TOU«fOMMOî' TOMtUTtt

ïow ~Xo:< Jt~Me. Éxe?~ïo «tfouf. De C<B~. I. tx Et~~ef ïo

<s~)[Mf tM~ ~M! fM!XMT< <KAe!fo~p~ot', 65 To ;&-efof -Braf !3p5<T~f~ ~«-

t*e~. On peutdonc admettre l'expression

de Sextus Empiricus, P~rrt

t~po~p. Uî, a. 9t8: ApMTOT~e ec~ftarof e~tref Tof S~eof e!MM )MM

~MMT<w

M:p«t~S. Adv. Math. X, s. 33. Cela ne veut pasdire que

Dieu soit étende ni mobile; cela feut dire le contraire.

P~. Vm, ï. Met. Xtl. p. a5o, t &<~T<M ~T< ft~M

e~Mt ~Mf M~et<M MN~f ~f e~af, ~M <tftep~<M: ~«~perof

<:<TT<.

Loce. laudd. Il ne faut pas conclure non plusde cet argument

(eeuMne par exempleS. Thomas, in Met. !oc !aud.) que

dans la pen-

seed'Anttote lepremier

moteur doive avo~ une puissance infinie,

mais au contraire qu'illui faudrait de la puissance

s'it avait de l'éten-

dué. et dans ce cas sentement. La puissance n'appartient qu'àce qui

e~Mte eMnme !'Ame en une matière, ~~of, et par conséquenten nsc

étendue.

Voyez plus haut, p 397.

Page 580: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

568 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

ensemble, n'est qu'une unité de proportion le monde

sublunaire une unité générique que se partagent des

oppositions le monde céleste, une unité d'espèce

le premier moteur est l'unité de l'individualité ab

solue. Enun, dans le monde céleste lui-même, toute

oppositionn'a pas disparu, ni par conséquent toute

contingence la matière y subsiste avec la possibilité

qu'elle implique si la sphère céleste ne peut pas ne

pas être, et même ne pas se mouvoir, car son être

est dans son mouvement, elle pourrait du moins

se mouvoir dans un autre sens et avec une vitesse

différente. Mais le premier moteur est indépendant

de la matière, supérieur à toute contingence; en lui

rien ne peut être que ce qui est c'est le seul être

nécessaire, non pas comme la matière à l'égard de la

forme, d'une eécessité conditionnelle et relative, mais

d'une nécessité simple et absolue'.

Or maintenant, comment le premier moteur peut-

il donner le mouvement? L'impulsion suppose l'ac-

tion du moteur et la réaction du mobile en un point

de contact, quileur sert de limite commune L'action

et la réaction impliquentla passion réciproque du mo-

teur et du mobile sous l'action l'un de l'autre, et la

passion est un mouvement; or le premier moteur

est absolument immobile. Bien plus, non-seulement

3&.<XU. p. :48, t. t8-39.

i%M. t! n Eft<&t~« ToSre J&~e< reS iMtttWMw <Sare d!jM

)t<!<~e~e<.

Page 581: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE UL CHAPITRE IH. 569

l'action qui donne l'impulsion implique la réaction.

mais l'action et la réaction sont égaies or l'égalité<

de l'action et de ia réaction donne l'équHibre. le repos,

et non pas le mouvement. Pour déterminer le mou

vement, il faut un excès, une prédominance; toute

impulsion suppose plus de mouvement dans ie mo-

teur que dans le mobile2. Le moteur immobile ne

meut donc pas par une impulsion il meut ie monde

sans se mouvoir, et par conséquent sans puissance

motrice. Toute la puissance doit être dans le mobile;

l'acte seul dans ie premier moteur.

Le premier moteur ne peut mouvoir ie monde que

comme ie bien ou le beau meut l'àme, comme l'objet

du désir meut ce qui le désire La cause d'une af-

tection de plaisir ou de douleur nous touche sans que

nous ia touchions ie premiermoteur touche le monde

et n'en est pas touché Le mouvement du monde n'est

donc pas ie résultat fatal d une impulsion mécanique.

De Cet. <M. tV, Ut Ô~M TO <MfOCf, t~M TOMWpMTOH, ohTMHfei-

<«< M<wtt&ttow <~<f T~ <Mc?)' ~Tat9e!T<t/ ~Mf, «J <M'T<8~ëer'M T~

&w. De ~f!. mat. Ht y~pT~ «CoSp <Mef, oSïM TO <S9o<e~of <e!irt<,

Mtt ~e&M Mt~ &t'~f. De là la nécesstté d'un point d'appui.

De ~tt. Btet. ïu Ai ft~f &M< (se. «c~MM) c~e!: t* eR~t~mp,

JtpttMeMM !MttA t~ ~epO~f.

~et. X!t, p. a48, Ko'e!' ~e' To opexïof<Mt<70 fo)!To!' «*

"er<~ jtM'e~ttM. De At. mot. M. Tttf. De An. ÏH, x.

De G<9t. el ee!V. t. d T' a~ftTOtt ette~e if

~~<«M wS «MtreS!, t~teftw oJ~f ~e" y<~ ~oïs ?~f X~eS~tt

<hT«~t< <tft~, <PA* ait <R!w! &t~ow. P~. V!M. vAirtMr~ yap

<&-

~'Ptt<f A~Mt, ft<XP'Comme ci-d~sus. dans le

passage cité,

Page 582: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

570 PARTIE IÏI.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

Le premier moteur est le bien où il aspire. La série des-

cendante des causes motrices se renverse ici enquelque

sorte, et se convertit encore en une série ascendante

de causes finales, Ce n'est pas ia cause qui est faite

pour son effet, mais i'eSet pour sa cause, et au fond

la vraie cause est ia nn. Le mouvement circulaire du

ciel est la cause motrice de la génération dans le monde

sublunaire; mais c'est que la génération est l'effort de

la nature pour atteindre à la continuité du mouvement

et de la vie céleste A son tour, le mouvement con-

tinu de la révolution du ciel n'est que la tendance

du monde & réaliser en lui-même l'unité et la sim-

plicité absolue de son principe. Rien n'a de réalité

que par sa fin et dans la tendance à sa fin. La réalité

du corps est dans son mouvement naturel; la réalité

du mouvement lui-même n'est pas dans sa forme

abstraite et extérieure, qui n'est qu'un changement

de relations, elle est tout entière dans le désira

L'acte éternel qui fait la vie du monde est le désir

éternel du bien.

Le principe du désir est la sensation, l'imagination

ou la pensée, qui en manifestent l'objet comme le

p. 568, o. 3; ~MïoC wp<&To«,A

rejccfatMM JttorenMer moteur. Cf.

Vater. tTx<Sct<tteeb~nB ~MtMetM, p. 3t.

Voyez pius haut, p. 4~4, n. 3, et p. 56a.

De ~N. Ht, x KfM~Mt ~pï~

<tM'o<~Kfof ep~yerM, <«[! <tA~cM

~pe~< &M<y ~epyM.DtM les Mciennes éduions OB Ht o~ey<~

ftMwt<tjMt

de <Mfo<~tMMtf, et <t <<p<ë<<~t~t~M au lieu de ~t!<f«

<~<~f, ce qui donne un <em tout différent.

Page 583: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE m, CHAPITRE Ill. 571

bien auquel il faut tendre Or le premier moteur est

nécessairement séparé de toute matière, supérieur

aux conditions de l'espace et du temps. Ce n'est donc

pas un objet de sensation ni d'imagination; c'est un

objet de pensée, une chose intelligible. Le désir du

monde n'est donc pas le mouvement de l'aveugle ap-

pétit, mais bien le libre élan de la volonté intelli-

gente 2.

Mais n'avons-nous pas vu quele bien dont la pensée

détermine la volonté à l'action, que l'objet de l'enten-

dement et de la raison pratique, est une fin qu'on se

représente hors de soi, en face de soi-même, comme

fun des deux termes contingentsd'une opposition,

comme une possibilité, un idéal que l'on peut a son

gré réaliser ou ne pas réaliser~? Le bien auquel le

monde aspire et qui le détermine à se mouvoir ne

serait-il donc aussi qu'un intelligible sans substance P

De ~s. tH, HE, X. Le* princ'pesdéterminants du mouvement

peuventêtre réduits à deux, t'~e~f

et le fo5~, quisont chez Aristote

les deux divisions les plus générâtesde t'âmc, ibid. x; De ~tt. Mot.

tt; Met. X! p. 9~, 1.17; p !'A8, t. 4; Polit. Vm, Tm. Voyeï ptus

haut, p. 4~6, m. 3.

JMtt.XU.p. :48.t.5.

Voyez plus haut, p. 45~.De An. III, x Aet ~f yaip «<f6?To

JpM~-<BM wet' ~W <~<t6of TO ~OtfO~efOf <!yi!t9of Ct! ~ftf

<M~-wp<MT~" <~< ~p<UtTOf

J' ecr~ <ty<!t6of To ~Je~oftefot'

)M! ~U<w ~C* Sur le bien pratique,comme idée, possibilité, voyet

pto< haut, p. 493.

Sur cette aaetdon,consulter tes profondes

dissertations de Cf

Mtpmi, QtMMt. pe~Mt. tï, tt, vt

Page 584: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

572 PARTIE HL–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

Serait-ce une pure conception, une idée abstraite et

générale qu'il s'efforcerait sans cesse d'accomplir en

lui-même par son éternel mouvement? En un mot,

est-ce du côté du monde qu'est la réalité avec l'action,

et du côté de la cause de son mouvement l'idéalité

pure? L'un est-il par soi-même le sujet de la pensée,

et l'autre n'en est-il que l'objet, sans être par lui-

même un sujet et une substance ?

L'objet dont la pensée produit dans l'être le pre-

mier désir et le premier mouvement ne peut pas être

une pure idée qu'il se pose à lui-même comme un

objet externe et comme un type &réaliser. La délibé

ration ne peut pas commencer par la délibération, la

rénexion par la réScxion la première pensée, on n'a

pas pu penser à la penser, car on irait ainsi à l'in6ni

sans trouver de commencement Le premier objet

de la pensée ne peut donc pas être une idée qu'on s'op-

poseà soi-même comme une pure idée et qu'on op-

pose àune idée contraire c'est un être qui agit pat

son être même sur l'intelligence qui le contemple.

H n*y aurait rien au monde, si avant tout n'était l'être

comme principe de tout 2; ainsi, dans l'ordre même

des intelligibles, qui est en général l'opposé de l'ordre

Et&. Ett<t. VHÎ, XM <M yap~e<J~<MTe ~M~MM~tefM, )M~ ~oSt

~ËMAe~ettM, <M~' &TM' <Sp~ T«* 0<H' &~)t<M MM~KMOptfrepW fM!<Kt~

)te~ voSre <~AtNeo~. Otït ~pet roC ~o~<M< foSt t!px*~ < *cC j3of

J~~MM~M pC~

A&t. XIt, p. a45, t. 3o Al Te yap e<!<t~M ~M?MMM~ ~TMf, x«tf

~amtt ~jMw!, WHWTO!~~<t.

Page 585: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE t!ï, CHAPITRE ïïï. 575

des intelligences et des êtres, c'est l'être qui est le

premier terme'. Le réel est le commencement de

l'idéal. Dans le monde sensible, que remplit le mou-

vement spontané de la vie, la fin où la nature tend

sans relâche, ne réside pas en un type général, un

exemplaireabstrait de la forme la forme est dans

l'être et dans l'individualité concrète, du sein de la-

quelle elle se développe. C'est dans la région moyenne

de la raison et de la volonté discursive, dans la ré-

gion de l'art et de la pratique, que l'être s'oppose sa

fin comme quelque chose d'autre que lui même,

comme une forme abstraite qu'il délibère de réaliser

en lui, et qui, dépourvue d'être, ne produit par elle-

même dans l'être aucun changement réel.'Au point

culminant de la nature, la fin qui détermine le mou-

vement, en ébranlant la pensée, est comme dans l'en-

tendement une chose intelligible,et comme dans la

nature un être Ce n'est plusni une forme concrète

et sensible, si un intelligible conçu par abstrac-

tion c'est un intelligibleréel dans l'acte même de la

pensée qui le contemple. Dans la nature il n'y a que

désir aveugle et pointde volonté. Dans le monde de

l'entendement, dans la vie humaine, la volonté est

distincte du désir, et souvent en luttc avec lui. Au

point culminant de ia nature, l'objet du désir est un

JM~t. XH, p. :48, 9 N<w~ ~p" <~<r-rc<~ xx9' atu~f w<

Mt~t 0)Mt <p<~Ttt.

Page 586: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

574 PARTIE Ht.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

objet intelligible, etie désir s'identifie avec la volonté~.

Mais si l'objet du désir du monde est un intelli-

giblesans matière, ce n'est ni une simple possibilité

comme la fin que l'entendement se propose, ni comme

la fin que la nature poursuit sans le savoir, un être

concret, enveloppant sous la forme de son acte une

puissance que développe le mouvement: c'est un

être qui est tout en acte, dans une réalité entière et

une simplicité parfaite. Le principe du monde n'est

donc pas, comme l'avait représenté la philosophie

platonicienne, une idée suprême, un universel. Ce

n'est pas l'idée du bien, car l'idée du bien est une gé-

néralité vagueet indéûnie; c'est le bien suprême,

parce que c'est la fin suprême du mouvement qui agit

dans la pensée, et qui par la pensée attire à soi le désir

de l'étemel mobile Ce n'est pas l'idée de l'unité,

l'an en soi, l'aa absolu; car l'unité ne consiste que

dans le rapport Idéal de la mesure a tout ce qu'elle

mesure, et dans 1 indivisibilitélogique

au contraire

la simplicité est dans la manière d'être. Le premier

pnncipe n'est pas l'un, mais le simple par excellence,

et le simple parce que tout son être est dans la sim-

plicité et l'indivisibilité réelle de sa propre et essen-

iieue action*.

JHtt XH, p. 248, L 4 T~ epexTooxai ïo t'otrTo~ XtfM OM «fos-

}t«W!' Tt~MW sa opMraire <M!ir~.

!Md.p. a57, L Rt. ~tc. t. n'. Eth. Eud. ï, vttt.Ma~n.

Mor. t, t

JMft. Xît. p. ~48, i. t0 K<~ Ta~t (se. ~< e~e&ff op~tt!) ~M

Page 587: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE III, CHAPITRE III. 575

Ce n'est pas tout, si le premier objet de la pensée

est un intelligible sans matière, comment poùrra-t-

il agir sur l'intelligence, non comme une fin idéale et

un objet abstrait de raisonnement, mais par son être

et dans l'essence intime de la chose qui le pense, à

moins que lui-même il ne soit cette chose ? L'enten-

dement se propose pour objet et pour nnquelque

chose qui est autre que lui ou qu'il croit autre la

volonté se distinguede ce qu'elle veut. Mais, dans la

nature, la fin qui agit sur l'être et qui l'attire à elle,

fait tout son être, et ne se distingue pas du désir

qu'elle excite. La réalité de la nature est dans son

mouvement. la réalité du mouvement dans la ten-

dance, ou ie désir, la réalité du désir dans la fin

qui ie détermine. La fin, ou le bien suprême dont

la pensée émeut le désir du monde, ne se distingue

pas non plus de l'intelligence qui le pense. Non-

seulement ce n'est pas une pure idée dont l'âme du

mondepoursuive

incessamment la réalisation; non-

seulement c'est un être et un être toujours agissant,

mais hors de lui il n'y a dans le monde qu'une

puissance passivedocile à son action 1; c'est lui qui

M~ x<tt'MayeMw.

IÉa~< Te &* «~ T~ <~ow o<! Tô <[<!ro- To ft~f yap

<f ft~Tpef <ntfM~f«, <t*~oBf« ~& ~ottajr~. Sur les Idées

plato-

nioemmes du bien et de l'un, voyez plus haut, p. 3o9-3t t.

Le ciel n'estpas mû, à proprement parler, par

une âme; car nulle

âme ne peutmouvoir éternettement. De Co~. n. t Â~a ~f o~e

e~yew <h~Mt!<~<n~ ~MMf <~<of, x. T Il ne faut doncpas

prendre à langaenr

cet autre passage,ibid. n 6 e~pa~ ~t~°"

Page 588: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

576 PARTIE ML–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

se pense dans le monde, et qui de sa pensée !ui

donne l'être, le mouyement et la vie

Ainsi, si la cause première du mouvement ne

donne le mouvement au monde que par le désir

qu'elle lui inspire,si cette cause motrice est une

cause finale, ce n'est pourtant pas, comme la fin que

se propose la raison pratique, une Sn éloignée, sé-

parée par quelque milieu de ce qui aspire à elle, et

qui ne puisse être atteinte que par une suite de

moyens.Le propre de la cause motrice, c'est qu'elle

est en même temps que son effet et que le mobile

où elle le produit;car cette cause, c'est celle

qui

agit par impulsion et au contact, et le contact sup-

pose la simultanéité Or le monde et sa cause finale

se touchent aussi en quelque manière. Si la cause du

mouvement du monde n'est pas touchée de lui, du

moins le touche-t-elle par elle-même, et sans qu'aucun

intermédiaire l'en sépare. Elle n'est pas pour lui un

objet lointain de désir, mais un objet aimé dont la

contemplation immédiate remplit tout son être on

)Mt~<~e< )<M'<hMM< <~p~ L'éther, comme les autres éléments (voyez

plus haut, p. ~t4),ne se meut

pas par lui-même, n'apas d'âme ni

de nature. Les autres étcments sont mis en mouvement par le prin-

c!pe quiles engendre graves ou !égers; t'ether, par

lepremier mo-

teur. Comp. ZabareUa, De ~a<are co'H, dans le De Reb. natur. t!.

XXXt, 970-990.De CaeL ï, H T~ e!f<~ re ?!)p.

pj~. vm, v.

Voyet ci-deMus, p. 568.

AM. XII p. iA8, )8 K<fe?~ <M ~p<&f*eMf.

Page 589: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H!. CHAPITRE III. 577

37

plutôt,si c'est cet objet même qui se pense dans la

nature, et de sa pensée éveille en eiie le désir, n'est-

ce pas lui, n'est-ce pas le bien suprême qui s'aime

comme il se pense, et qui, ainsi qu'un père se com-

templant dans son fils, embrasse le mondeauquel

il donne l'être, dans un acte éternel d'amour ~? Ainsi

se retrouve dans l'idée de la cause fmale du monde,

l'idée de la cause motrice elles s'identifient l'une avec

l'autre dans l'idée de la forme ou essence. De même

l'âme est tout à la fois la cause motrice, la cause nnale

et la. forme essentielle de son corps Les trois prin-

cipes, distincts et opposés dans le monde de l'art et

de la pratiquene sont, dans la nature et dans la réa-

lité absolue supérieureà la nature, que des points

de vue et des rapportsdifférents d'un seul et même

principe.

À favorite le premier principe est Fintelligence et

l'intelligibletout à la fois et il semble qu'il enferme

dans l'unité de son être une dualité nécessaire et une

invincible opposition.Le sens s oppose à l'objet sen-

sible, et l'entendement à l'idée. Mais la chose qui

sent et la chose sentie sont des réalités concrètes qui

se touchent, sans se confondre, sur la limite com-

mune de la sensation. La sensation n'est ni le sujet

ni l'objet tout entier, mais le moyen terme où se réa-

lisent en un seul et même acte, sans s'y épuiser ja-

m. Eud. vn. <x.

Oe An. n, n

Page 590: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

578 PARTIE tH.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

mais, leurs puissances contraires c'est la forme corn

mune de deux matières diËërentes car la sensation

ne porte que sur des formes, mais sur des formes

concrètes~. Dans le monde de l'entendement, de la

pratiqueet de l'art, l'objet de la pensée est une forme

immatérielle; mais ie sujet.qui la pense est une puis-

sance qui s'oppose elle-même à l'objet actuel de sa

pensée, comme à une forme et à une limite où elle

n'est pas contenue tout entière. Dans le monde de

l'intelligence pure, il n'en est pas de même; l'inteili

gence est comme l'intelligible, sans matière distincte

de la forme, sans puissance cachée sous l'action;

pure action et pure forme. Ici, entre le sujet et l'objet

de la connaissance il n'y a plus de milieu et plus de

moyen terme. L'intelligence ne reçoit pas l'intelligible

en elle comme le sens reçoit la forme de l'objet sen-

sible, ou comme l'entendement reçoit la notion Fin-

telligible lui-même est toute l'intelligence, et l'intel.

iigence à son tour tout l'intelligible. A cette hauteur

t'intelligence et l'intelligible, l'objet et le sujet,la

pensée et~'être ne font qu'un

La condition de la pensée en général est l'unité,

Veye<pt<Mhaut, p. ~a~.

De At. Ut. ~Ht OJ y<~ e MCo< T~fi~j~, fOM To e!3M.

i&t. Xt!, p. a4§, t. to Tttdto~ foB< )M~ <wtT< T~ye~

~e)tT<xof

taC <w< <Mt! <~ oth~tt foS<.ËMpyeF

~e ~M~~ H n'y a pas dans in

tdMgHMe tpécahthe, feBt, e6< dtH~reated'~pyeM; e~est le sens

de ceue defatèrephraM

Sur ~6< et ~pyeta ouxp!!ct<, woyet plus

haut, p. 3~§. Le 'w~ m*Mt donc pas proprement un ~tftTM~, comme

Page 591: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE Ht, CHAPITRE H! 579

37.

et par suite l'unité de l'objet de la pensée. Mais,

comme on fa fait voir, l'unité des notions qui sont les

objets de l'entendement est l'unité logique de formes

divisibles qui peuvent être contenues les unes dans

les autres. Leurs rapports de contenance s'expriment

dans l'amrmation et la négation; la conformité de

l'affirmation et de la négation avec les rapports de

contenance des idées, les unes à l'égard des autres,

fait la vérité et l'erreur. La science tout entière con-

siste dans la combinaison et la division des idées de

l'entendement', sur le modèle des objets. Le simple au

contraire est un d'une indivisible unité; ce n'est donc

plus un objet d'affirmation et de négation, ce n'est

plus un objet de raisonnement ni même de proposi-

tion. Ce ne sont plus là des termes entre lesquels la

raison discursive cherche un terme moyen, ni même

entre lesquelsil reste un intervalle que comble le

jugement. C'est un seul et unique terme, une limite

simple, quine peut être saisie que par une expérience

immédiate, et une intuition simple, tl n'y a donc plus

ici de place pourla vérité et pour l'erreur;

la vérité.

c'est de voir et de toucher, l'erreur de ne pas voir et

le MMet t'entendement ou f<wt ~M'a~-VoyM ci-dessus, page 5-yy,

note 3.

Jt&t. VI, p. tX~,t8 6 0~)A<M~ ~OTt X<~ ~M!tpeCt< ec jMWO~t

A't.' -L. L. --k-wun.M L. fi' "11. .In. yr ,,&IÓI.<B~' eëft M& ~fM!< L. e

S~Mtf. ~:S~6< X!, p. :s8,

ai Éy ~Mt~~ T~ &<w< De ~n. Ht, vt Ëf <)& ïo ~eS~M

j~ ï~ <~)tMe, eMt<~ w "B" "<M!Mw. vm S«ft~o)~ y<<js~~t

MMtfM~~ AW~ ~ew~M.

3~.

Page 592: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

580 PART!Ë HL–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

de ne pas toucher 1 et c'est pourquoi la raison est

infaillible, comme le sens dans le jugement de son

objet propre 2. Mais, dans la pensée pure, l'objet et le

sujet qui le touche sont également indivisibles ce

sont donc comme deux points qui ne peuvent se

toucher sans se confondre, et sans s'identifier inté-

gralement La science implique la différence des no-

tions, par conséquent celle des pensées, et par con-

séquent encore, entre les notions en eMcs-mêmes et

les pensées, une opposition qui ne permet qu'une

identité de rapportset une unité de proportion et

d'analogie~. La sensation établit entre la chose sentante

et la t;hose sentie une proportion continue, dont elle

est le moyen terme. Mais, dans l'intuition immédiate

de l'intelligence pure, toute diuérence, et toute oppo-

sition, toute,, relation disparaît dans une indivisible

unité. Ainsi répond toujours à la nature la continuité,

à la science la distinction, avec la proportion discrète

à rinteHigenceet à l'être absolu, l'absolue unité.

D< An. Ht, Tt. Jtj~i !X, p. !t)0, 9*~ Hep< ?M tMpSeïa. To

~t~ a~ew)M~ ~<MM« <&tt< T<! J* «ypoefp {ttt ~yy~tf. Sur !e

rap-

portde t'acte du fOM avec le contact et la vue, voy. encore

P& VH,

tn; E<&.~Vtc.Vt, xn.

De At. tH, Mt NM?î f<ef oSf ~MopCof.

Met tX, p. )gt, i. y.

Voyez plus haut, p. 46o.

jMct. XH, p. 9~9, 8 BfottT~ yop ~~feTat ~<y) o~&w x~ fo<3t.

L'entendement n'est pas nFeott~ae. mais MmAhMe à son ot~et; De

~<t. M, tt ~eitïMtop ToB e~o«~ «~ ~«fftftet TOfMiM~ <3M reSTo.

Voyet plus bu.

Voye* plus haut, p. 488 et 5o()

Page 593: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE in. CHAPITRE îïï. 581

Mais Funité absolue du premier principe est l'unité

de l'action deFinteMigence. Toute vie est dans Fac-

tion, et, dans le plus haut degré de l'action, le degré

le plus é!evé de la vie. Le premier principe est donc

un être vivant. En outre le plaisir est inséparable de

Faction, et Faction du plaisir; dans l'action la plus

pure, se trouve nécessairement la plus pure félicité

Le premier principe est donc un être vivant, éternel

et parfait dans une félicité parfaite. Cet être, c'est ce

qu'on appelle DtEc~. Dieu n'est pas une idée inactive,

une essence ensevelie dans le repos et comme dans

un sommeil éternel; Dieu est une intelligence vi-

vante, heureuse du bonheur simple et invariable de

sa propre action, et qui en remplit incessamment

toute Féternité\

La vie divine n'est donc pas la vie pratique, œuvre

de la vertu et de la prudence. La vie pratique est

une vie d'effort et de combat, qui a sa fin hors d'elle-

JMct.XU, p. 9~9, i. sqq. Voyezplus haut, p. 443.

Met. toc. taud. L t? <<~te:' ~e ro:' .&eof e<t'Kt ~M&f G<~Gpd!p«rro!

Ôore !M <M~<t~p <n<~e~tttM< ~o~ ~xa~st

TM &e& ToCTt)ap

o .9-Mf.

C~ XtV, p. :9t, a3.s Ibid. XH, p. :54, t. ~S Efïs Tp ~8ef foe)~ T< ~f eot ro ce~fof,

<BA* ~e< Amepe~ MiSe~ Cf. RA. Afc. X, t t)t. A'a~n. JtJor. tt,

xxv. Le passagecité de la

M~taphvsiqMCsemble itnitcju~ue dans les

ternes, un pasMgede Platon, ~M)A. sub fin. Aïais il

s'agit moitts ici

d'uupMMge

détacM quede l'esprit et de la tendance de la ptd!oso

ph!e pjta~nictNtme.De même plus haut, p. 3ot)

N~. FVte. Vtt. xtv Ô .~ee< a~e! (t~f oMw x<~pe< tt~oMJf. xv; X,

vHt. Met. xn.p. 249. t

Page 594: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

582 PARTIE Mï.–DE LA METAPHYSIQUE.

même, et n'y arrive que par une suite de moyens

difficiles et de combinaisons laborieuses~. La vie di-

vine est la sagesse, supérieureà la vertu2, dans le

libre exercice de la spéculation. Gomme l'entende-

ment est occupé à la critique du vrai, ainsi la raison

pratique est occupée tout entière au discernement du

bien entre une infinité d'actions diSérentes, & travers

une diversité infinie d'oppositions et de contradic-

tions. Dans le milieu de la vie sensible où elle se

trouve engagée, et dont elle cherche la meilleure

forme elle ne peut se passer entièrement de biens

extérieurs dépendant du hasard elle a besoin aussi

de l'amitié, de la justice, de la société~. La raison

spéculativeseule se suffit à elle-même seule elle a

en soi son bien, sa perfection, sa félicité dans l'uni-

formité de la eontemplation 5. Dieu n'a pas besoin de

biens extérieurs, il n'a pas même besoin d'amis,

parce que ia pensée n'a besoin d'aucune chose qui lui

spit étrangère parce qu'elle est à elle seule son tout

Voyexplus haut, p. A?9

a& i<er. H. v Ô y«p ~~s ~T&w ïijft <~e"Bt&. A'tc. V! t

Voyez phM haut, p. 460-478.

DB Gf! H. TH ËMM y~p ft~ <~M<fT<)t~OfTt &MpJ~

~M wpt~MM. T~! t&e ~pK~m ~e~< 0~ ~ef~ptt~M~' y'4

<~ eJ ~eM. & <M ~pSgft ~<rnf <M A!<nw, ~Htf e? &'e)Mt

)Mt T<~w t~~M. Rt. R~. VM, xn ft& y<!p eB x<

pef, &M~t~ «Mt <~MS W& ~M.

Et~ Nie. X, wt.

JM~~ J&f. n. M. R&. E~. VH. xn.

Page 595: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H!, CHAPITRE IH. 585

sa nn, son bien. On Fa déjà vu' la vie animale est celle

de la sensation la vie humaine, la vie pratique et

sociale, est celle de l'entendement et de la voient

délibérative; la vie divine est celle de l'inteitigence,

dans l'activité immanente de sa spéculation solitaire.

Enfin la pensée où s'identinent l'intelligence et l'In-

telligible, la pensée spéculative, ne peut pas avoir

sort principe ailleurs qu'en elle-même elle n'est pas

la manifestation d'une substance pensante, et le pro-

duit d'une puissance de penser différente de la pen-

sée. En effet, l'essence et la dignitéde

l'intelligence

n'est pas dans le pouvoir, mais dans l'acte de pen-

ser~. Tout bien, toute perfection, comme aussi toute

telicité, est dans l'action c'est pour cela qu'il est

meilleur et plus doux d'aimer que d'être aimé, meil-

leur d'être le sujet que l'objet de la pensée, meilleur,

en un mot, d'exercer que de subir l'action~. Or si

c'était & l'objet de l'intelligence qu'il appartînt d'être

toujours en acte et non à l'intelligence, si du moins,

paisqu'ici l'intelligenceet l'intelligible ne font qu'un,

si le premier principe avait comme intelligible l'acte,

et comme intelligence la puissancede la pensée, ce

Voyezplus haut, p. 48t.

!?<. XM, p. a54, t. :8 A<A yctp w Meff fo T<jMef <n!rMM~~M.

Ctp. ~49,!tt.

i&~)). M*r. Il, xt ÉM ~Ttof yt~p~ew yM~e<t&tt. Comp.

phm haut. p. 463. De ~t. fil, v Ae~ yetp T~t&repof<te<oEf~ ToT

<M&~OMM<. T4«M', comme dans le passagede la

Métaphys:qMe. cité

<x~'<MM, m. t.

Page 596: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

58& PARTIE H!.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

serait au contraire du côté de l'intelligible que se trou-

verait la perfection et la majesté divine 1. Dans l'intel-

ligence la continuité de l'action exigerait un effort

répété la penséedivine se trouverait soumise à la

condition laborieuse de la sensibilité et de l'enten-

dement 2. L'essence divine ne doit donc pas être

cherchée dans la virtualité d'une substance pensante,

mais dans l'action; elle n'est pas l'intelligence (faSc),

à proprement parler,mais la pensée toute seule

(fott~c). Mais si, de son côté, l'intelligible est tout en

acte, l'acte ou l'action ne donne plus Ici, comme

dans l'entendement, la supériorité à l'intelligence sur

l'intelligible l'intelligence et l'intelligible s'identi-

fient dans une seule et unique et indivisible action.

De plus, si c'est dans l'action même de la pensée

qu'est toute l'intelligence et tout l'intelligible, non-

seulement l'intelligence est son objet à elle-même,

mais elle ne peut avoir d'autre objet. Toute autre

chose que l'Intelligence participerait nécessairement

des régionsinférieures de la contingence et de la

possibilité, et l'intelligence ne pourrait l'atteindre

sans descendre de la hauteur de son activité pure.

Elle ne pourrait changer d'objet sans changer elle-

mêïne, ni changer, puisquelle est le bien absolu,

JM~t- XH, p. 955, 10 K<~ y<4prA foetf fM~M ~p&t

)M~ ~pMMt fteg. ~~BOW?) fOOWM-t.

!bM. t. 7 E~ <~tK~< &tT<f <BM &:f< «!Xoy<M' ~Mfof <!M"

To affe~t a<?r~ n~ yot~Mw. Voyt plus haut. p. ~9.

Page 597: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE !H. CHAPITRE HL 585

sans passer du meilleur au pire'. Mieux vaut ne

point voir ce qu'on ne verrait qu'au préjudice de sa

dignité et de sa perfection2. L'intelligence ne peut

donc pas plus être au-dessus qu'au-dessous de son

objet elle est à elle-même son objet unique. Et en

effet, si l'identité de l'intelligence et de linteUigible

est dans l'unité simple d'un seul et même acte, com-

ment l'intelligence absolue pourrait-elle penser autre

chose que l'acte qui fait à la fois tout l'être de son

objet et tout son être à elle même? Iln'y a donc

rien dans l'intelligence spéculative ou absolue, que

l'action de la pensée qui se pense elle même ''ans

changement comme sans repos, et la pensée véri-

table est la pensée de la pensée

Tel est le principe souverain, triple dans son rap-

port avec le monde, tripledans son essence, et

pourtant absolument un et simple, auquel toute la

nature est comme suspendue La série entière des

êtres forme une double chaîne qui vient de lui et qui

retourne à lui, qui en descend et qui y remonte.

ÏVun coté, c'est le système du monde dans l'ordre

Jt&-<XH, p. ~55, sqqtbttt. H ÛOTS e~ ~e«XTOf TOCtO (x«< ~<tp <ip~f

&'MKpefTTW

~P?f),Oj)t TO

<<pMW M t"J!!<Kt. Mt. ~'M<L !t, ~t) B~T<Of (se.

~eo<) ~ers ~Ao T< foe?f aJTM ~a~'a~TOf.

M~. Xn. p. a55, t. t3 Aw~ <~Mt fMt, e~ep~<rr< ïo xp~oro~

)M~ &MM' <wa<M6 f<M!<TMM~tt<ftf.

tbid.p. t48, 1. tg

Ë< TOM~t <<pe "PX~~ ~p~ o~foe )t<t<

4 ~MM. Me C<f< t. )X É~fp~T-M

Page 598: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

586 PARTIE ÏH.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

de la succession de ses parties élémentaires, depuis

ie ciel jusqu'à la terre; de l'autre, ie système des

puissances successives de la nature, depuis ia forme

imparfaite de l'existence élémentaire jusqu'à la forme

accomplie de l'humanité~. Des deux côtés le principe

est le même; les deux extrémités opposées de la chaîne

se joignent et se touchent à cette limite commune de

la pensée divine.

Le dernier et le plus haut degré du développe

ment de la nature est l'âme humaine, et dans l'âme

humaine la raison. Mais la raison humaine est encore

une puissance, et la puissance veut un principe qui

la détermine à l'action. Toute puissance embrasse

une oppositionde deux formes possibles, contraires

l'une à l'autre; des deux formes contraires, il y en a

une qui est l'essence, et la réalité une qui est la

privation. Tous les possibles se partagent ainsi en

deux séries, l'unepositive,

l'autre négative; la série

de l'être, et celle du non-être, la série du bien et

telle du mal; la série de la détermination et de la

perfection.et celle de l'indétermination, de l'imper-

action et du désordre2. La première c'est la nature

même, la fin où tend le mouvement naturel~, et le

Veyet plua haut, p. 438 sqq.

JMet. IV, p.65,i. t, T<Sw &WT&M' ~M: <n<erMj{~ ~r~Mt.Cf.

p. t6. i. 3t. Xt, p. a3t. 8 T~ ê~<MowaTe<x<M «px<M

<& ~MptUMM~e&<M &!pfOT<M.

sVoyez ptus haut, p. 4*7

Page 599: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE H!, CHAPITRE I! 5871

principe de la pensée~. Toute idée, comme tout sens,

s'étend de même à deux formes contraires, égale-ment possibles Pour déterminer la sensation ou la

connaissance, il faut donc une cause active qui mani-

feste dans le possible la forme essentielle de l'être.

L'œil est fait pour voir ie blanc et le noir; pour qu'il

voie, il faut la lumière qui lui manifeste la couleur

positive et réelle, la couleur blanche, dont le noir

n'est que la privation3. Pour la vue de l'entendement,

il faut aussi une lumière qui lui révèle son objet

propre, et qui le tire de l'ombre*. Et cette lumière

que serait-ce? sinon l'intelligence souveraine qui fait

l'être et l'essence de tout intelligible, l'intelligence

divine éclairant d'un rayon la nuit de fintelligence

humaine? L'entendement est une puissance passive

qui peut prendre toutes les formes, recevoir toutes

les idées; comme la matière première, c'est ce qui

peut tout devenir; c'est la puissance universelle dans

le monde des Idées, comme la matière première dans

le monde de la réalité. L'intelligence absolue est l'ac-

VoyMphx haut, p. A8a.

JMet.Et. n

Be Ht, Tt; ï. v

!bid. v :~&f ~M w, e~M' M ~&' Tpenof yc!pT<Mt )M~ To ~<Bc ~KMeÏ

<A &w<tfM' A~e j~~pMtt <Mpye~ ~M&fMtM. Sur les différentes ma-

tt~ee &Htt em < eheK~té à ez~!qner la jbnetion du t~St wen~~t~, on

pMt eeaNMter tMM !e traité de ForttHMtM Licetus. Se m~ttee&t

<~ett~, )~h!*u, '6*7,!n-f.

L'eitpttcadon que je donne me paraît !a

teaie cenienae & i'e<~itde la daetf!ne d Ariatete Voyet !e H* vol.88UIe œotOrme" ¡'eapritde la dockine d'Ari,tote. Voyœ le lie

yol..

Page 600: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

588 PARTIE HÏ.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

tivité créatrice qui fait venir A l'acte toute forme

possible, et qui produit toute pensée En général,

on l'a dé}à vu~, la pensée discursive, la science ne

peut pas être son principe et son commencement à

elle-même; dans l'âme comme dans le monde des

corps, il faut une cause première qui imprime le

premier mouvement; et cette c~'jse première, su-

périeure à la science, que serait-ce, sinon Dieu

même? P

ïl en est de la raison pratique comme de l'enten-

dement car ce sont deux formes d'une même puis-

sance. La distinction du bien et du mal suppose la

lumière primitive, la volonté du bien suppose l'im-

pulsion primitive de la sagesse divine. La vertu n'est

que l'instrument de la pensée absolue. Dieu est le

premier moteur de la volonté et de l'entendement

comme il est celui de l'univers~.

Mais Dieu ne se mêle pas pour cela au monde,

dans les régions de rame, non plus que dans celles

De An. iH, V ËOTfC ftCf TOtOMTOefOue Te -CmfMt ytfM~M, 0 T<M

«M~at wo{e!p. n ne faut pas entendrepar

!àque t'entendement est )a

matière de tout, sinon Kpr)fM<'Hht<tBf, ou M!en<<ofta~t(<r, selon letangage

scolastique. L'objet et lesujet ne sont

identiques quedans ta forme.

sVeypï cwteaMM, p. 5~9.

EM. EtKf. Vit, xtv: T~ Je ~To~ef<w ToCf' &rn, TM Tn~ '"<

«tM m~A T~ 'X?* A~ &ysp~f T~ ~a- ~eo~j ~fa:- ~s~-

.MM?y<~<Wt <H~M ï~ <{f ~fuf J~ei'of. Aoyw <

<!p~o<! ~Jyo~

<R~ Mxpe~nrey.

T~ oBpxpefïTof

x<M ~«rrri~~ e~M, ~~« .~e< ¡

fty~p t~tT~

T0$ tMM~py<MWt~.

Page 601: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE m, CHAPITRE îiï 5891

de l'espace et des corps, Dieu demeure tout en lui-

même, et la pensée de la pensée ne sort pas de la pen-

sée. Dans la sphère de la contingence et de l'opposi-

tion, la privation se connaît dans l'essence, le noir dans

le blanc, le mal dans le bien. Mais l'idée de la priva-

tion n'est qu'en puissance dans l'idée de l'essence; la

connaissance des oppositions n'appartient qu'à la

puissance de l'entendement~. Ce n'est pas l'être ab-

solu qui s'abaisse à la considération du non être c'est

l'entendement qui dans l'être discerne ia possibilité

du non-être~. Le premier principe est la mesure de

tout; et la pensée du premier principe, la mesure de

toute pensée. Mais ce n'est pas lui pour cela qui rap-

porte toute chose à sa mesure c'est l'entendement

qui applique à toute chose ia mesure du premier

principe. Ce n'est pas Dieu, qui voit en lui les

De Jn. Ht, t< OMw tiftBt To x<txof jMi)p~e< ro {t~X<tf; ÏM

àtMT~ y<&: <MM yM~c~e*~ef Ju~a~et e!~cf< To

t'œp~of )M< &OMtt

~f <H?T~.

Cependant Anetote remarque que, (!aM'i la doctrined'Em~doc)t*.

I)ieu, ne pouvant connaître le mal, se trouve être le ntoitMintciiigcnt

dcsétrcs.De~tt.t,v:S«~6z/f€t~' Ë~MJoxAef~e Ka!«tSpot<~<rr<tTot< e!yM

T~ .9<J<~ («!M~ y<M! Ta"' <TTOtye~f0!? yfMp/M, T« fe«t0~, t<t Je

a~~rw o~Mt. MaM précisémentcela n'est vrai qu'au point de vue de

!'enteadement, pour lequel ja perfection est (le connaître les deux

termes de toute opposition,non au point

de la raisonspéculative,

ammtd Aristote pense queses devanciers sont restes

etrangcfs, et ou

mtr coBséaMemt H ne se place pas quandil fait la critique de leurs

opinions. La solution au pointde vue de tentendentent, ccst

que

l'on connaît le négatif parle positif.

Page 602: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

590 PARTIE 11!.–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

idées; le lieu des idées est l'entendement~, et c'est

l'entendement qui les voit en lui-même par leur rap-

port à Dieu, d'où elles tirent toute leur réalité. Enfin

l'entendement, lié à l'âme comme l'âme au corps,

comme la forme à la matière, se multiplie avec les

individus et périt avec eux la pure intelligence n'a

rien de commun avec la matière. Sans se multiplier

et sans se diviser, elle laisse retomber les âmes avec

les corps dans le néant d'où ils sortirent ensemble;

seule, elle subsiste toujours la même, immortelle, in-

altérable, dans son invariable activité~.

Ainsi le monde a son bien et sa fin en lui et hors

de lui tout ensemble, et surtout hors de lui. Le bien

d'une armée est dans son ordre, mais surtout dans son

D<ïM, tv.

Dans le M* clfapitredu MF livre du Traité de l'Ame, le Noies en

généralest représenté

commeséparé

ouséparable du corps (de même,

jM<t. XH, p. 942, 1. 29);de là

l'opinion de ceuxqui ont attribué à

Aristote ita croyance & t immortalité de t'âme humaine. La distinction

entre le fOM ÇÛap~et

i'otproen'est établie q~'au v*

chapitre;

c'est dans ce chapitre qu'ilfaut chercher la vraie pensée d'Arutote.

En génémi,il faut distinguer attentivement le sens large et le sens

stnctdefoS~, voyez plus haut, p. 4~6, n. 4. Sur le rapport de taJtefOM

à ra&~tKf~ woyMibid. n. 3. De

quelques passages de la Mora!<*

(Rt. ~te. H, etc.), on pourrait être tenté de conclure qu'Aristote

t cru A t'immortatité de iapersonnalité humaine. Mais ces

passages

doivent être pris dans un sens ejco~rt~ae etpopulaire, comme ceux

eu il est questiondu culte des dieux. Car la mémoire

appartient

à i'Mne seasMMe, quiest essentieHement pérMsaMe; De An. Ht, v;

De JMeo. ï. Le désir de t'immortalité est le désir d'une choseimpos~

sible. Ett. ~M- HÏ, IV: B<~ttM< &~ wBf a~<w<h<M', oï<M<a9aMt~&t<.

Page 603: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LtVRE !ïï, CHAPtTRK !tL 5tU

chef; car c'est l'ordre qui est par le chef et non le chef

par l'ordre L'univers forme donc un système continu

de progressions ascendantes ordonnées à un seul et

même terme. Ce n'est pas un assemblage de principes

indépendants et détachés, comme un poème mal fait

touttbrmé d'épisodes~, c'est un enchamementde puis-

sances successives subordonnées ies unes aux autres,

selon les degrés de leur dévcioppement, et coordon-

nées entre e!tes par une série d'analogies, selon leurs

rapports communs avec un même principe~. Le prin-

cipe n'est plus une puissance;ii est ie

premier et le

plus haut terme de toutes les séries, et cependant il

est en dehors, au delà, ou plutôt au-dessus de toute

série et de tout ordre, indépendant et séparé. La pro-

gression des êtres commence à la puissance où toute

opposition est enveloppée; elle se termine à l'action,

supérieure à toute opposition !e mouvement remplit

FmtCFvaUe. Du sein de l'indétermination et de l'innnité

du possible, ia nature s'élève par degrés vers la finqui

l'attire, et à mesure qu'eUe approche, à mesure do-

mine en elle Fêtre sur le non être, le bien et le beau

sur le mal; le côté négatif de la double série des con.

traires descend de plus en plusdans l'ombre, l'autre

'J~.XM.p.956.t.t$qq.tbid. p. s58, )? Voyez plus haut, p. 339.

îMd.p. ~56, 6 u<t)~M y<~p

~M~r'Mrat <MM !&X' o~ ~ta&

s~~K~ ëcM ft~ ~~t ~'T~fM ~pe< ~Mtp"" ~Mf, e~A'

<NK A~« e~M' e& y<T~ ~MH<p<0~f<H a~ tm '<)MMKf Me!

ttX~f! <~Mt< ~T~ &' <[Mt~f~ <t)Mt~ e~ rô <~<'f

~"T--

1

AM ofnH m", ¡., IUNfIIGIII,r lnlml ,l, TO ÓÀOJ1.

Page 604: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

592 PARTIE HÏ–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

brille de plus en plus de la lumière divine de l'être et

du bien absolu. La puissance, qui enveloppe les con-

traires, est la condition et non la cause du mouve-

ment à mesure que la nature s'aSranchit de la néces-

sité de la matière, à mesure qu'elle est plus libre, à

mesure aussi elle laisse moins au hasard car sa li-

berté c'est d'être tout entière à sa nn. Toute sa liberté

est avec tout son être dans le désir qui l'attire au bien.

Le mal n'est donc pas comme le bien un principe, et

le monde n'est pas partagé entre deux principes en-

nemis. Le mal a sa source dans la puissance, et il ne

se manifeste que dans le développement del'opposi-

tion qu'elle renferme c'est .la privation du bien, et

par suite le bien même en puissance 2. Ce n'est pas

un être, et il n'y a point de mal subsistant en soi-même

hors des êtres 5; c'est, comme l'infini, ce qui n'est pas

et qui vient à l'être; c'est l'imperfection, le défaut,

l'impuissance qui résulte de la puissance même, et

dont elle aspire à se dégager. L'opposition du bien et

du mal, l'opposition en général, ne dépasse donc

point le monde de la contingence et du change-

ment. Le bien absolu n'a pas de contraire; c'est la

fin dernière de toute chose, et par conséquent le

i~XM.p.956, to.

!Md. XtV, p. 3o:, I. tQ T~ xeot~ &!T<«at!ro fo ~f<{fte<<~aCJf.C<:

P~:&.

JM~LtX, p. t8<),

t. 20 (M)t &<T< TG tMUt~<Mtp~

T<t~pe!y)MtMt.

tt~tpO)' y«p 0<aM TO tKMMf T~ ~~«tM.

Page 605: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE m, CHAPITRE Ht. 595

38

premier être or !e premier n'a point de contraire

Le mal n'est pas par iui-mcme. et ce n'est pas Dieu

non plus qui est la cause du mai. Dieu est. le bien ab-

so!u, sans degrés et sans différences; chaque être en

reçoit, selon son pouvoir, le bien avec la vie Dieu

est la raison unique de tout ce qu'il y a de bien en

tout être; car le bien d'une chose est sa nn, et il n'y

a de bien que par la fin. La raison de l'inégalité des

êtres dans leur participation au bien est la nécessité

invincible et la fataiité de la matière, et la matière

c'est le possible qui enveloppe l'impuissance et l'im-

perfection.

Tout ne peut donc pa& atteindre à la nn suprême;

du moins tout y aspire et y marche sans cesse. Sans

cesse le mal est vaincu par le bien, et le monde, tel

qu'H est, est le meiHeur des mondes possibles Mais

de même quece n'est pas Dieu qui pense tout ce qui

est autre que sa pensée même, de même ce n'est pas

luiqui

ordonnepour

lui-même tout cequi

est autre

que lui. Ce n'est pas la raison spéculative qui dispose;

c'est la raison pratique, ia pensée artiste et architec-

tonique qui prépare tout pour ciie*. Dieu ne descend

point à gouverner les choses; c'est à ia nature qu'ap-

JMet. tX. p. 95~, ty<M yap

~T'" ~'awr'of TcS cpw~) ot~f.

B<fC<B!)n:;n.xn.

Pt~. VHt, vn.

E&. IM. VM. M OJ y<~~TM!TM«5t <<pX~

~«Ht ~pA~ett~ttMMret. Œ ~s~H. Mbr. xx~tv

~t!

Page 606: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

59& PARTIE !–DE LA MÉTAPHYSIQUE.

partient l'architectonique du monde; c'est elle qui

dispose en vue du bien suprême dont eile est attirée,

qui fait sortir partout le meilleur du possible 1, et qui

répand partout, comme une providence vigilante, la

proportion, l'harmonie et la beauté.

Cependant, nous l'avons déjà dit, ce n'est pas non

plus sur des idées que la nature se régie elle ne se

règle point, comme i'art et comme ia raison pratique,

sur le type préconçu d'une perfection abstraite; c'est

le propre de i'humanité que la rénexion et le calcul de

la volonté et de l'entendement. La nature tend donc

de toutes parts au bien sans le voir au-dessus d'elle

comme un lointain idéal, mais sous l'immédiate in-

fluence d'un désir aveugle. Ainsi le bien se trouve

sa cause efficiente, sa cause motrice non moins que

sa nn mais çe bien, c'est la pensée, et la pensée de

la pensée. Tout s'ordonne donc de soi-même dans

l'élan spontané de ia nature comme dans le calcul

·Voyez phM haut, p. 4*7, n. 7.

Anatote, en qaetquea endroits, attribue l'action ordonnatrice et

pMtMentieMe à Dieu comme à la nature. Ainsi, De C<f<.1, t? û

.&<A<<Mt< ~<n<a~f fMh~f~MoSM. D< Ge<t.et con*. X~Mt~pM~e ro

~w û<~ T. Mai:c'est p!u4&t ~e&f qui

doit être subatitné àôâor 8 a~sdss x. s. 71. Maia ~estp!uiôt $ssior qwi doit étre sul~titué à

~<at, comme dans !epaaMge suivant qui repond exactement au

pré-

cèdent, et dont!*t!f<Mt~p<Mfappe!te

lec~xen~)tp<tM~e

de celui-ci. Œcen.

t, tH Il ~~<~« ttwMt~wpef M~tt) t~ <fep«MM T~ <M e!M<. Èw<< <Ktt'

<tp<Sp~ <~ ~Mt<a, ~M <MfT~ T&eHet. O~rw y~e ~poMttofJ~~Titt~jro

~ë ~<~<'w. Au f~te, il faut s'attacher, ici comme a!e!S's, à h liai

tem geaéntte des Mee*, plus qn'a la terminologie de pasMges particu-

MeM, dont !'intttprétat!on est plus contestable.

Page 607: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

LIVRE Ut, CHAPITRE 595

abstrait d'une rénexion prévoyante La nature est

comme pénétrée de la pensée substantielle qui lui

donne la vie, et qui l'agite sans cesse d'un inquiet-et

insatiable désir; elle fait tout, sans le savoir, pour

une seule et même fin qui est la raison même. L'uni-

vers, la science, la vertu, le monde du corps et de

l'âme, tout n'est que l'instrument, l'organe fait pour

servir à la pensée divine, et au delà de l'univers se

pense la pensée dans l'éternité de son action uni

forme et de sa Miche suprême.

F~e Ctft. Il, <x &Txep TM jMXXof ~ceo~at cpofocM)~ TH< ~t/'jc~'t.

~PUTOM)!PRKM)KK.

S~ 1"

Page 608: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson
Page 609: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

TABLE

RHS CHAPtfJtHS m PBt:M!ËR VOLUME.

PREMIÈRE PARTÎE. – i~RcDucTioK.

JREL'HtSTOtRË ET DE L'AUTUENTtOTË DE LA JHETAPMYS:QfK

D'ARtSTOTE.

UVRE DE t. MtSTO!REDE !.A MÉTAt'MIStOUEDARtSTOTË

P'CMAP.1. De Httstoife des ouvrages d'Aristote en généra!.

jusqu'au temps d'ApeUMon de Téos et d'AndtX)

Meus de Hhodes. 3

*CMAf. M. Des travaux d'ApetUcon et d Androtucus sur les

ouvrages d'Anstoh! t8

~CHAP.tH.jDeïhMtoire de ta Mctapitystquc dAnstote. 3 1

«~LÎVRE H DELAtiTMEKTtCHTr~M t.A MKTAP!HS!QUK

n ARtSTOT!!

CHAf.1. Du rapport de !a Métaphysique avec d'autres ou

tragct d'Anstotc coustderës comme perdus.1

"CMAp/U. Du rapport de !a Métaphy~tque d'Anstotc avec

Page 610: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

598 TABLE DES CHAPITRES.

r'-<s<t.

les traités sur la Phitosophie, sur le Bien sur lesPiéges.

Idées, etc.

S t.~Du traité sur la Philosophie. 53

S n~LDes traites aur le Bien, sur les Idées, etc.. 6g

CaAp. M. De ranthenticité et de t'ordre de la Métaphy-

sique et de ses parties.

DEUXIÈME PARTIE.

ANALYSE DE LA M~TAPBTSÏQUR.

ÏIt~ Ta!f ~Me~Sf M~e~HM~ ( V*!ivre). t 1

UVRB.t(A). ~7

~tH (B). !3o

-tV(r). t38

"Vt(E). ~7VH (Z). ~9

-Vm (H ). ~6

~!X (e). ï6o

-'X(t ). t63

~X! (K). t68

-XH!(M). tyo

-XSV(N;'8&

XC(A). tQtXU(A).It"iI.IiII:). 192,

TROISIÈME PARTIE.

DR LA MÉTAPHYSIQUB D'ARtSTOTE.

MVBE i M <tAM; M LA M~APntMQUE. BAtS L'ZtSeMBi K

M LA PBtMMOPBM B A)HSPM<!

CHA~! De hKMvMMon de)! OMWBgee dAristo~ par tap~

'peft t la ~nne Livres exotèriques et aoroMM-

{ttqaet3'<'5

1

.ie~

Page 611: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

TABLE DES CHAPITRES. 599

CnAB. Il. Division des ouvrages d'Aristote relativement àPages.

!amatière.p!assincationdes sciences

philosophiques. 2~4

LIVRE Il. HtSTOtRE DE LA MÉTAPHYSIQUE 0 APRES

ARISTOTE.

CaAP. t. Ioniens. Pythagoriciens, Étéates, Sophistes, So-

crate. 267

Ct!Ap. H. P!aton; dialectique; illéorie des Idées; théorie

des nombres. Résumé de l'histoire de laMétaphy-

sique avant Aristote. ~o

UVRE IM. SYSTEME MÉTAPHYSIQUE D'ABtSTOTE.

CHAP. ï-Objet de la

Métaphysique:les

premiers priu

cipes, t'être en tantqu'être. Catégories. Oppositions

ou analogies. Principes propres et principes com-

muns. 3~yCHAP. U./Puissance et actd Mouvement. Nature: corps

et âme puissances successives de la vie. Humanité;

fin de la natMt~. Fin de 1 humanité pratique, spé

culation.Science démonstration induction dé-

&n!ti<Mt; inSStion.3y()

CHAP. ML Premier moteur du monde. Dieu, principe de

!a nature et de la science. 53Ê~

Page 612: Essai sur la métaphysique d'Aristote I  / par Félix Ravaisson

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