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Eléments de radioprotection médicale M.Lemort 2017 www.radcoursorg.be/RPROT Dimension du problème croissance des procédures de radiodiagnostic au cours du siècle dernier (selon Dowsett et al, 1998) RX/1000 popu

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Eléments de radioprotection médicale

M.Lemort

2017

www.radcoursorg.be/RPROT

Dimension du problème

croissance des procédures de radiodiagnostic au cours du siècle dernier (selon Dowsett et al, 1998)

RX/1000 population

Exposition moyenne par habitant et par an de la population belge: 5,1 mSv par an (source: AFCN 2015)

Proportion des différentes sources de l’irradiation de la population générale

3

Temps équivalent d’irradiation du background (TERB) pour quelques examens RX

Procédure RX mSv (mrem) TERBRX dentaire endo <0.06 6 <=1 semaine

RX thorax 0.08 8 10 joursRx col. dorsale 1.5 150 6 mois

RX col. lombaire 3.0 300 1 an

OED 4.5 450 1.5 ansLavement baryté 6.0 600 2 ans

Justification d’un cours de radioprotection médicale

il n’est pas possible d’affirmer qu’aux doses (faibles) utilisées en imagerie dentaire il y ait réellement un risque

il n’est pas possible non plus d’affirmer qu’il n’y en a pas

Justification d’un cours de radioprotection médicale

la radiologie est un outil important du diagnostic dentaire; son utilisation est donc courante

les techniques évoluent et permettent des réductions de dose grâce à l’intervention de nouvelles technologies

mais l’évolution technologique met aussi à disposition des techniques extra-buccales en elles-mêmes plus irradiantes que les simples RX dentaires ou le panoramique

les choix à faire sont donc de plus en plus nombreux

Principe ALARA

Il n’y a pas d’irradiation insignifiante. Fondement statistique de l’effet.

Cela entraîne donc l’obligation de précaution maximale: maintenir l’irradiation aussi faible que possible tout en restant utile: as low as it is reasonably achievable - ALARA

Question d’équilibre

L’utilisation des rayonnements ionisants en diagnostic médical impose un choix raisonné qui prend en compte l’équilibre entre risques et bénéfices potentiels de la procédure: le bénéfice potentiel doit clairement excéder les risques. C’est le principe de justification.

Code de bonne conduiteL'essentiel de la radioprotection médicale réside dans un code de bonne conduite fondé sur le principe de justification et les règles de bonne pratique. Celui-ci peut se résumer comme suit:

1. les rayonnements ionisants à usage diagnostic ne doivent être utilisés que lorsqu'il n'y a pas d'autre moyen pour obtenir le renseignement souhaité

2. il faut maintenir la dose (tant pour le patient que pour le personnel)aussi basse que possible (principe ALARA )

3. il faut prendre les meilleures mesures de protection possibles, tant au niveau du patient que de l'opérateur et éviter l'irradiation d'organes autres que ceux qui doivent être explorés

Moyens de protection: patient

Restreindre l’irradiation aux zones utiles et protéger les organes radiosensibles

Moyens de protection: personnel

Distance par rapport à la source

Distance augmen

tée

Moindre intensité (moindre quantité

de radiation)

2xd

3xd

4xd

¼ intensité

1/8

intensité

1/16 intensité

Radioprotection: législationLa radioprotection fait l'objet d'une législation destinée à protéger le public, le malade et le travailleur des irradiations excessives. Un certain nombre d'organismes internationaux (particulièrement l'ICRP ou International Radiological Protection Board) ont fait des recommandations qui ensuite ont été intégrées dans les législations nationales. Actuellement on met en place des recommandations européennes. Néanmoins ce sont les règlementations nationales, qui peuvent être plus sévères, qui ont la préséance

Radioprotection: législation

Fixer des doses maximales à ne pas dépasser suppose qu'on puisse mesurer efficacement la dose et évaluer son effet biologique

C’est la raison d’être de la DOSIMETRIE

Radioprotection: législationRepères principaux de la législation belge:

AR 20/07/2001 règlement général sur la protection contre les radiations ionisantes (RGPRI)

AR 12/12/2008 fixant les critères d'acceptabilité pour les appareils à rayons X destinés à être utilisés à des fins de diagnostic en médecine dentaire (remplaçant les critères européens RP91 qui constituaient auparavant la norme)

traduction en documents et consignes par les publications de l’AFCN

Plan du coursBref rappel sur la nature des rayons X

Interactions avec la matière: absorption, diffusion, rayonnement secondaire

Effets sur les tissus biologiques: éléments de radiobiologie

Notion de dose, dosimétrie des examens bucco-maxillo-faciaux

Législation et protection

Irradiation de la femme enceinte

Visite virtuelle, exercices et révision (simulation test)

Questions en suspens..

étude rétrospective portant sur des données d’une époque où les films low-dose (E-F) n’étaient pas utilisés et où on utilisait peu la collimation rectangulaire

Les auteurs incriminent la médiation d’un effet sur la fonction thyroïdienne

sujet à caution car problèmes méthodologiques d’une telle étude rétrospective

Questions en suspens..

2013....

Il n’y a pas d’irradiation anodine....

Rayons X: nature et production

• Les rayons X sont produits par l’impact d’électrons émis par le filament du tube radiogène au moment où le faisceau d’électrons heurte la cible, constituée d’un métal ou d’un alliage de métaux particuliers (ex: le tungstène). Deux mécanismes sont à l’origine de cette production: le rayonnement de fluorescence (0 à 20%) et le rayonnement de freinage (bremsstrahlung) (80 à 100%).

Tube radiogène

Anode fixe

Tube radiogène

From: Statkiewicz et al, Radiation protection 5th ed, Mosby-Elsevier

Anode tournante

Tube à anode tournante

Tubes radiogènes

Une des caractéristiques des tubes producteurs de rayons X est leur très mauvais rendement. Ainsi près de ...99% de l’énergie est transformée en chaleur dans ces tubes, et seulement 1% en rayons X. Les tubes devant supporter des charges importantes sont à anode tournante, pour éviter la dégradation trop rapide de la cible par les faisceaux d’électrons

Gaine du tube

Le tube radiogène est entouré d’une gaine (« housing ») qui contient des blindages destinés à contenir le rayonnement hors-collimation (« leakage »), ainsi qu’un circuit de ventilation ou de circulation d’huile ou d’eau destiné au refroidissement du tube

Structure de l’atome et couches électroniques

Rayonnement caractéristique ou de fluorescence

Couche M

Couche L

Couche K

RXRayonnement de fluorescence (rayonnement caractéristique)

BremsstrahlungL’essentiel de la production de rayons X dans un tube provient du rayonnement de freinage (« bremsstrahlung »). Celui-ci est en rapport avec la brutale décélération de l’électron qui dépasse le noyau et subit dès lors une attraction liée à la charge positive du noyau; l’énergie cinétique perdue est convertie en photon X

RX

Rayonnement de fluorescence

• Si on regarde le spectre d’un faisceau de rayons X, le rayonnement de fluorescence qui se fait à une ou plusieurs énergies bien précises (donc c o r r e s p o n d a n t à d e s fréquences particulières) se manifestera par des raies bien reconnaissables, alors que le rayonnement de freinage se manifestera par un spectre continu.

Rayonnements électromagnétiques

Les rayonnements électromagnétiques sont caractérisés par leur énergie (ils n’ont ni masse ni charge), et définis par leur longueur d’onde λ, leur fréquence ν et leur vitesse c. Toutes les ondes EM se déplacent dans le vide à la vitesse de la lumière (3x1010 cm/sec), mais dans la matière la vitesse dépend de l’énergie. Dans le cas de rayonnement à haute énergie comme les RX, on peut considérer que la vitesse est proche de celle de la lumière.

L’énergie est inversement proportionnelle à la longueur d’onde et directement proportionnelle à la fréquence.

Place des rayons X dans l’ensemble des ondes électromagnétiques

Interactions avec la matière: notion d’énergie du rayonnement

les photons X qui quittent le tube après avoir traversé sa paroi de verre constituent le RAYONNEMENT PRIMAIRE

tous ces photons n’ont pas la même énergie; il s’agit d’un spectre de faisceau; toutefois aucun photon dans le faisceau ne peut avoir une énergie supérieure aux électrons qui bombardent la cible

Cette énergie maximale est liée à la différence de potentiel appliquée aux bornes du tube

Interactions avec la matière: notion d’énergie du rayonnement

si on applique une différence de potentiel de 1 V aux bornes du tube, l’électron déplacé par cette différence de potentiel aura une énergie de 1 eV

pour la radiologie diagnostique, les tensions appliquées s’expriment en milliers de volts (kV). Mais le voltage fluctue en cours d’émission; on parlera donc en kVp (peak). Une tension de 100 kVp signifie qu’aucun électron émis n’aura une énergie supérieure à 100 000 eV (ou 100 keV)

dans une installation habituelle on peut considérer que le photon «moyen» aura une énergie d’environ un tiers de l’énergie maximale

Interactions avec la matière: notion d’énergie du rayonnement

le type d’interaction avec la matière traversée sera fortement déterminé par l’énergie des photons incidents

l’atténuation du faisceau (liée à la probabilité d’interaction) à une énergie donnée sera également différente en fonction de la nature du tissu traversé

From: Statkiewicz et al, Radiation protection 5th ed, Mosby-Elsevier

Le faisceau de RXComme les rayons à faible énergie (sous 25 KeV, et pour l’os 50 KeV) sont inutiles pour l’imagerie diagnostique, ce qui n’a pas été éliminé par le simple passage à travers le verre du tube le sera par un filtre aluminium.

Les rayons X produits dans le tube vont dans toutes les directions. Une partie sera contenue par la gaine du tube; ceux qui sortent par la fenêtre d’émission devront être collimatés pour n’atteindre que la zone à étudier. Ceci réduira la dose au patient et augmentera la qualité de l’image.

Mécanismes des interactions avec la

matière

Interactions avec la matière

• L’atténuation des rayons X pendant sa traversée de la matière justifie à la fois leur caractère utile (génération d’une image contrastée) et leur caractère dangereux (effets biologiques indésirables). Les deux mécanismes significatifs à l’énergie des rayons X diagnostiques sont l’absorption photoélectrique et la diffusion (effet Compton). Dans le cas de l’absorption la totalité de l’énergie d’un photon X est transférée à l’atome rencontré (avec éjection d’un électron et production d’un rayonnement caractéristique), et de la diffusion Compton seulement une partie de l’énergie est perdue par le photon X incident (qui change de direction et perd de l’énergie, tandis qu’un électron est également éjecté de l’atome).

Diffusion Compton

From: Statkiewicz et al, Radiation protection 5th ed, Mosby-Elsevier

Directions du diffusé

Grille antidiffusante

Grille antidiffusante: effet sur la qualité d’image

Sans grille Avec grille

Absorption photoélectrique

Le phénomène est proche de ce qui se produit lors de l’émission du rayonnement de fluorescence par bombardement d’électrons, mais il s’agit cette fois de l’effet d’un photon incident.Il y aura à la fois expulsion d’un e- et émission de photons de fluorescence (ou alternativement éjection d’un électron Auger)Aux énergies employées en radiographie, c’est le mécanisme principal d’atténuation.

From: Statkiewicz et al, Radiation protection 5th ed, Mosby-Elsevier

Interactions avec la matière

• Trois autres mécanismes d’interaction existent:

• la diffusion cohérente ou diffusion Rayleigh, sans effet significatif sauf à des énergies beaucoup plus faibles

• la production de paires et la photodésintégration nucléaire, qui surviennent à des énergies très élevées non utilisées en diagnostic

Diffusion Rayleigh (coherent scattering)

énergies faibles

trajet du photon diffusé différent de moins de 20° du photon initial

pas d’impact sur l’image

From: Statkiewicz et al, Radiation protection 5th ed, Mosby-Elsevier

Production de paires

ne survient que pour photons > 1,012 Mev

le photon interagit fortement avec le noyau et disparaît, production d’un électron et d’un positron

From: Statkiewicz et al, Radiation protection 5th ed, Mosby-Elsevier

Photodésintégration

ne survient que pour des énergies > 10 MeV (thérapie)

absorption de toute l’énergie du photon incident

le noyau devient radio-actif

From: Statkiewicz et al, Radiation protection 5th ed, Mosby-Elsevier

Rayonnement secondaireOn appelle rayonnement secondaire le rayonnement produit dans la matière traversée, et qui n’a pas la même géométrie que le faisceau primaire; il est constitué des photoélectrons, des électrons Compton, des rayonnements caractéristique et diffusé (Compton) produits. Ce rayonnement secondaire est important de par ses effets sur les tissus biologiques voisins, ses répercussions sur la radioprotection, et enfin ses effets sur la qualité d’image.

Rayonnement secondaire

• L’existence de rayonnement diffusé, dans des directions autres que le faisceau incident, explique qu’on ne peut se déplacer dans une salle de radio sans protection (tablier de plomb) pendant un examen, et ce même si on ne se trouve pas sur le trajet du faisceau primaire. En effet du rayonnement diffusé est produit par les tissus du patient. Ceci explique aussi que des organes du patient situés assez loin de la partie du corps visée par le faisceau peuvent également recevoir une dose non négligeable.

Rayonnement secondaire

Documentation: service de contrôle physique ULB

Importance de la collimation et de la taille du foyer

Le récepteur sensible: film radiographique

la nature du film est très importante pour la radioprotection: nécessité d’utiliser des films à émulsion low-dose (E, ou mieux F)

dans l’avenir et pour les clichés extra-oraux: intérêt de la digitalisation

CollimationFrom: Statkiewicz et al, Radiation protection 5th ed, Mosby-Elsevier

Imagerie numérique: la radiographie sans film

Exemple d’une surface d’acquisition numérique à l’iodure de Césium, avec acquisition dans des diodes Si couplées à un TFT From Mahesh, Radiographics 2004

Copyright ©Radiological Society of North America, 2007

Korner, M. et al. Radiographics 2007;27:675-686

Figure 8. Graph illustrates the dynamic range of screen-film combinations and digital detectors

Imagerie en Médecine Nucléaire

L'imagerie par rayons X fait appel à une source EXTERNE de rayonnements ionisants, le tube radiogène. Elle a un objectif essentiellement morphologique (description de l'anatomie normale ou perturbée par une lésion).

Les techniques utilisées en médecine nucléaire on globalement un objectif plus fonctionnel: il s 'agit de détecter des organes ou des zones au sein d'un organe dont le fonctionnement métabolique présente des anomalies

Imagerie en Médecine Nucléaire

Par exemple détecter une zone osseuse où l'incorporation des produits servant à la fabrication de la substance minérale osseuse est plus importante (parce qu'il y a une fracture avec formation de cal, ou une maladie de Paget, ou une tumeur ....).

Ces techniques font appel à l'injection dans l'organisme (généralement par voie intraveineuse) d'isotopes radioactifs émettant (le plus souvent) des rayons γ. La source de rayonnements ionisants est donc ici INTERNE. Seul le détecteur sera extérieur au patient; il fera partie d'une caméra à scintillation

Caméra à scintillation

Caméra à scintillation

Techniques isotopiques courantes

L'agent isotopique générateur de rayons γ le plus

courant est le 99Tc (Technétium). Celui‑ci est fixé à différents composés selon l'organe et/ou la fonction étudiés. On choisit des composés qui soit vont être accumulés plus ou moins bien dans un organe déterminé, ou qui vont être accumulés dans un certain type de lésions.

Médecine nucléaire

Techniques isotopiques courantes

Le scan isotopique osseux est utilisé dans des circonstances aussi diverses que la recherche de foyers de fractures méconnus chez un enfant suspect de subir des sévices ou la recherche de métastases osseuses chez un patient porteur d'un cancer.

Il fait appel à des produits comme le diphosphonate marqué au 99Tc, qui sera sélectivement incorporé dans les régions où il y a production de substance osseuse par les ostéoblastes (cellules qui forment l'os). La scintigraphie osseuse permet l'exploration aisée du squelette entier, la caméra enregistrant les images sur toutes les régions du squelette.

SCINTIGRAPHIE OSSEUSE

Scintigraphie osseuse

PAGET Métas

Techniques isotopiques courantes

Les examens radiologiques traditionnels ne peuvent prétendre à une étude exhaustif du squelette sans la réalisation de très nombreux clichés. La scintigraphie osseuse est donc une bonne méthode de DEPISTAGE.

Techniques isotopiques courantes

Le scan isotopique thyroïdien est réalisé lui à l'aide d'un isotope radioactif de l'Iode (123I), ou éventuellement par l’injection de 99TC-m, moins spécifique mais moins coûteux (le 131I s’utilise pour le traitement, le contrôle de sa fixation se disant par scintigaphie). Il permettra notamment de différencier des nodules thyroïdiens métaboliquement hyperactifs (« nodules chauds > ), d'autres nodules inactifs (« nodules froids > ), qui doivent être ponctionnés et/ou surveillés de plus près.

Scintigraphie thyroïdienne

Techniques isotopiques courantes

Si des produits de contraste radiographiques iodés sont donnés dans les jours qui précèdent cet examen isotopique, ils le perturberont en saturant la thyroïde en iode. Il faut donc réaliser d'abord les études isotopiques thyroïdiennes avant de procéder à un examen d'imagerie nécessitant l'administration d'un produit de contraste iodé. C'est un point auquel il faut être vigilant lors de la planification des examens pour un patient.

Techniques isotopiques

Citons encore les études isotopiques réalisés à l'aide de traceurs vasculaires (comme l' HMPAO) destinés à étudier l'importance ou le caractère fonctionnel d'une vascularisation régionale (examens couplés à des études tomographiques: SPECT scan), les études aux globules blancs marqués pour la recherche de foyers infectieux, etc ....

Techniques isotopiques spécialesGanglion sentinelle

de: Garrel et al., Montpellier

de: IGR, Paris

Médecine nucléaire:irradiation

L'irradiation du patient causée par l'injection des traceurs radioactifs diagnostiques demeure généralement minime. En dehors de la manipulation de produits directement contaminés (sang prélevé peu après l'injection ou urine), l'irradiation des proches ou du personnel peut être considérée comme très faible par rapport aux doses admissibles.

PET SCANTomographie par émission de positrons

PET SCAN

PET SCAN

PET SCAN

PET corps entier avec métastase tibiale de mélanome (flêches)

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