e vendredi 13 juin 2008 la gauche astronomie un œil...

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www.lemonde.fr 64 e Année - N˚19713 - 1,30 ¤ - France métropolitaine --- Vendredi 13 juin 2008 Fondateur : Hubert Beuve-Méry - Directeur : Eric Fottorino Algérie 80 DA, Allemagne 1,90 ¤, Antilles-Guyane 1,90 ¤, Autriche 2,00 ¤, Belgique 1,40 ¤, Cameroun 1 400 F CFA, Canada 3,95 $, Côte d’Ivoire 1 400 F CFA, Croatie 18,50 Kn, Danemark 20 KRD, Espagne 2,00 ¤, Finlande 2,50 ¤, Gabon 1 400 F CFA, Grande-Bretagne 1,40 £, Grèce 2,00 ¤, Hongrie 650 HUF, Irlande 2,00 ¤, Italie 2,00 ¤, Luxembourg 1,40 ¤, Maroc 10 DH, Norvège 24 KRN, Pays-Bas 2,00 ¤, Portugal cont. 2,00 ¤, Réunion 1,90 ¤, Sénégal 1 400 F CFA, Slovénie 2,20 ¤, Suède 25 KRS, Suisse 2,90 FS, Tunisie 1,9 DT, USA 3,95 $, Afrique CFA autres 1 400 F CFA, La frontière entre la Chine et la Corée du Nord. AFP Scruter le cosmos sous son aspect le plus violent, telle sera la tâche du satel- lite international Glast, ici en cours d’intégration sous la coiffe de la fusée Delta-II, qui l’a envoyé en orbite mercredi 11 juin. Financé par les Etats-Unis, la France, l’Al- lemagne, l’Italie, la Suède et le Japon, Glast observera l’Univers dans la tranche des rayons gamma. Ceux-ci permettent d’analyser des phénomènes extrême- ment énergétiques et souvent mal compris par les astronomes : trous noirs géants au centre de galaxies lointaines et capables d’accélérer la matière environ- nante à une vitesse proche de celle de la lumière, explosions d’étoiles supermassi- ves, fusion de trous noirs ou d’étoiles à neutrons… Glast pourrait aussi apporter des indices dans le mystérieux dossier de la matière noire. Lire page 7 Q uelques poignées d’auda- cieux osent passer clandesti- nement la frontière entre la Corée du Nord et la Chine. Surtout des femmes, à la recherche d’une vie meilleure. Les gardes-frontiè- res soudoyés, le fleuve Tumen tra- versé à gué, elles marchent long- temps pour rejoindre les villages de la communauté sino-coréenne en territoire chinois. C’est là que nos reporters les ont rencontrées. Certaines se marient avec des hommes plus âgés en quête d’épouse. D’autres se retrouvent sur le marché de la nuit. L’argent qu’elles y gagnent est envoyé à leur famille restée en Corée du Nord. a Lire Reportage page 16 L a Russie est devenue un eldorado pour les constructeurs automobiles. La manne des matières premières, notamment énergétiques, a permis au pays d’afficher une croissance de 7,8 % en 2007. Une classe moyenne, avide de consommer, émerge. Le potentiel est énorme. Le taux d’équipement n’est enco- re que de 210 véhicules pour 1 000 habi- tants, contre 600 pour l’Europe occiden- tale. D’ici à 2012, la Russie deviendra le premier marché automobile européen, devant l’Allemagne. De telles perspecti- ves attisent les convoitises. La plupart des constructeurs occidentaux, japonais et coréens multiplient les investissements. Dernier en date, le français PSA Peugeot Citroën, qui a posé, mardi 10 juin à Kalou- ga, la première pierre de son usine en par- tenariat avec Mitsubishi. a Lire page 11 Astronomie Un œil sur l’Univers violent Avec les Nord-Coréennes qui osent franchir la frontière chinoise C omment éviter d’entrer dans une période de stagflation durable qui verrait l’économie marquée par la coexistence d’un couple maudit : inflation et faible croissance ? La question est posée par les conjoncturistes après la publica- tion, mercredi 11 juin, d’un mauvais chif- fre d’inflation : 3,3 % de hausse des prix à la consommation – en rythme annuel –, au moment où la France s’attend à un ralentissement de sa croissance en 2008 et, plus encore, en 2009. Certitude : une décision de la Banque centrale européen- ne de relever ses taux porterait un coup supplémentaire à l’activité. Peut-on comp- ter sur les effets de la loi de modernisation de l’économie, et notamment la libéralisa- tion de la distribution, pour peser sur les prix ? Le Monde a posé la question à l’éco- nomiste Philippe Askenazy. a Lire page 10 Russie : le boom de l’industrie automobile A u grand dam du ministre français Xavier Bertrand, une nouvelle polé- mique sur le temps de travail risque d’enflammer les débats au sein du Parle- ment européen, venant compliquer la pré- sidence française de l’Union européenne au second semestre de cette année. Objet de la contestation : le compromis adopté par conseil des ministres de l’emploi de l’UE, dans la nuit du lundi au mardi 10 juin, à Luxembourg. Il s’agissait de clo- re le vieux conflit qui empêchait jusqu’ici la révision de la directive sur le temps de travail dans l’Union – la norme de la semaine de 48 heures, à laquelle nombre d’employeurs souhaitent pouvoir déroger plus facilement. Le compromis autorise un allonge- ment négocié du temps de travail hebdo- madaire. Il a suscité une fronde de la Confédération européenne des syndicats, relayée au Parlement par une bonne par- tie du groupe des socialistes européens, dont les élus du PS français, et les forma- tions de gauche. « Les changements qui interviendront au niveau européen ne diminueront pas les garanties pour les Français », a déclaré au Monde le ministre du travail, M. Ber- trand. La principale critique au compromis adopté par les gouvernements européens – malgré les fortes réticences de plu- sieurs d’entre eux – est le maintien de la possibilité, exigé par la Grande-Breta- gne, de garder une dérogation aux 48 heures. « Avec cet accord, nous enca- drons bien mieux l’“opt out” [la possibilité de dérogation] qu’auparavant, et nous l’avons plafonné à 60 ou 65 heures, au lieu de 78 heures actuellement », se défend le ministre français, qui a eu un rôle décisif dans l’adoption du compromis en rom- pant le front qui unissait jusque-là la France aux cinq autres pays, dont l’Espa- gne et la Belgique, qui s’y opposaient. M. Bertrand a assuré les syndicats français que la possibilité, inscrite dans le nouveau projet de directive, de considé- rer les temps de garde (ceux des hospita- liers, par exemple) comme des temps de repos ne sera pas transposée en France. Cette disposition fait partie des conces- sions que la Confédération européenne des syndicats jugent inacceptable. La concession aux Britanniques sur le temps de travail est le prix cédé pour obte- nir des améliorations à la directive exis- tante sur le statut des travailleurs intéri- maires. Ils sont quelque 8 millions dans l’Union qui devraient ainsi pouvoir dispo- ser de droits équivalant à ceux des sala- riés permanents. Devant la délégation pour l’Union européenne de l’Assemblée nationale, M. Bertrand avait assuré, le 4 juin, qu’il s’agissait non pas de diminuer les acquis en France, mais de rapprocher des plus progressistes les pays européens ayant des législations sociales moins exigean- tes. Lire page 8 PAGE TROIS Le snus ou l’Europe ! La révolte anti-européenne gagne l’archipel finlandais des îles Aland, dans la mer Baltique. Son parlement s’apprête à dire « non » au traité de Lisbonne. Les 26 000 Alandais craignent que l’UE n’interdise la spécialité locale, le snus, un tabac à sucer qui serait dangereux pour la santé. A nos lecteurs « Le Monde des livres » Le supplément hebdomadaire du Monde consacré aux livres sera exceptionnellement publié avec notre édition datée samedi 14 juin. Il sera notamment consacré à la sociologie de la vie quotidienne et à la littérature libertine du XVIII e siècle. Portrait Tzipi Livni Si le chef du gouvernement israélien, Ehoud Olmert, est contraint de démissionner, sa ministre des affaires étrangères, Tzipi Livni, est convaincue qu’elle lui succédera. Page 15 Patrimoine Jardins : la mue d’un festival Le Festival international des jardins de Chaumont-sur- Loire (Loir-et-Cher) s’ouvre aux autres arts. Page 19 La France redoute une hausse des taux de la BCE UK price £ 1,40 JIM GROSSMANN/NASA La gauche européenne dit non à la semaine de 65 heures Directive Les socialistes de l’Union craignent l’autorisation d’allongement du temps de travail Henry Bauchau A CTES SUD www.actes-sud.fr Le boulevard périphérique roman LIVRE INTER 2008

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Page 1: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

www.lemonde.fr

64e Année - N˚19713 - 1,30 ¤ - France métropolitaine --- Vendredi 13 juin 2008 Fondateur : Hubert Beuve-Méry - Directeur : Eric Fottorino

Algérie 80 DA, Allemagne 1,90 ¤, Antilles-Guyane 1,90 ¤, Autriche 2,00 ¤, Belgique 1,40 ¤, Cameroun 1 400 F CFA, Canada 3,95 $, Côte d’Ivoire 1 400 F CFA, Croatie 18,50 Kn, Danemark 20 KRD, Espagne 2,00 ¤, Finlande 2,50 ¤, Gabon 1 400 F CFA, Grande-Bretagne 1,40 £, Grèce 2,00 ¤, Hongrie 650 HUF, Irlande 2,00 ¤, Italie 2,00 ¤, Luxembourg 1,40 ¤, Maroc 10 DH, Norvège 24 KRN, Pays-Bas 2,00 ¤,Portugal cont. 2,00 ¤, Réunion 1,90 ¤, Sénégal 1 400 F CFA, Slovénie 2,20 ¤, Suède 25 KRS, Suisse 2,90 FS, Tunisie 1,9 DT, USA 3,95 $, Afrique CFA autres 1 400 F CFA,

La frontière entre la Chine et la Corée du Nord. AFP

Scruter le cosmos sous son aspect le plus violent, telle sera la tâche du satel-lite international Glast, ici en cours d’intégration sous la coiffe de la fusée Delta-II,qui l’a envoyé en orbite mercredi 11 juin. Financé par les Etats-Unis, la France, l’Al-lemagne, l’Italie, la Suède et le Japon, Glast observera l’Univers dans la tranchedes rayons gamma. Ceux-ci permettent d’analyser des phénomènes extrême-ment énergétiques et souvent mal compris par les astronomes : trous noirsgéants au centre de galaxies lointaines et capables d’accélérer la matière environ-nante à une vitesse proche de celle de la lumière, explosions d’étoiles supermassi-ves, fusion de trous noirs ou d’étoiles à neutrons… Glast pourrait aussi apporterdes indices dans le mystérieux dossier de la matière noire. Lire page 7

Q uelques poignées d’auda-cieux osent passer clandesti-nement la frontière entre la

Corée du Nord et la Chine. Surtoutdes femmes, à la recherche d’unevie meilleure. Les gardes-frontiè-res soudoyés, le fleuve Tumen tra-versé à gué, elles marchent long-temps pour rejoindre les villagesde la communauté sino-coréenne

en territoire chinois. C’est là quenos reporters les ont rencontrées.

Certaines se marient avec deshommes plus âgés en quêted’épouse. D’autres se retrouventsur le marché de la nuit. L’argentqu’elles y gagnent est envoyé àleur famille restée en Corée duNord. a

Lire Reportage page 16

L a Russie est devenue un eldoradopour les constructeurs automobiles.La manne des matières premières,

notamment énergétiques, a permis aupays d’afficher une croissance de 7,8 %en 2007. Une classe moyenne, avide deconsommer, émerge. Le potentiel esténorme. Le taux d’équipement n’est enco-re que de 210 véhicules pour 1 000 habi-tants, contre 600 pour l’Europe occiden-tale. D’ici à 2012, la Russie deviendra lepremier marché automobile européen,devant l’Allemagne. De telles perspecti-ves attisent les convoitises. La plupart desconstructeurs occidentaux, japonais etcoréens multiplient les investissements.Dernier en date, le français PSA PeugeotCitroën, qui a posé, mardi 10 juin à Kalou-ga, la première pierre de son usine en par-tenariat avec Mitsubishi. a

Lire page 11

Astronomie Un œil sur l’Univers violent

Avec les Nord-Coréennes quiosent franchir la frontière chinoise

C omment éviter d’entrer dans unepériode de stagflation durable quiverrait l’économie marquée par la

coexistence d’un couple maudit : inflationet faible croissance ? La question est poséepar les conjoncturistes après la publica-tion, mercredi 11 juin, d’un mauvais chif-fre d’inflation : 3,3 % de hausse des prix àla consommation – en rythme annuel –,au moment où la France s’attend à unralentissement de sa croissance en 2008et, plus encore, en 2009. Certitude : unedécision de la Banque centrale européen-ne de relever ses taux porterait un coupsupplémentaire à l’activité. Peut-on comp-ter sur les effets de la loi de modernisationde l’économie, et notamment la libéralisa-tion de la distribution, pour peser sur lesprix ? Le Monde a posé la question à l’éco-nomiste Philippe Askenazy. a

Lire page 10

Russie : le boomde l’industrieautomobile

A u grand dam du ministre françaisXavier Bertrand, une nouvelle polé-mique sur le temps de travail risque

d’enflammer les débats au sein du Parle-ment européen, venant compliquer la pré-sidence française de l’Union européenneau second semestre de cette année. Objetde la contestation : le compromis adoptépar conseil des ministres de l’emploi del’UE, dans la nuit du lundi au mardi10 juin, à Luxembourg. Il s’agissait de clo-re le vieux conflit qui empêchait jusqu’icila révision de la directive sur le temps detravail dans l’Union – la norme de lasemaine de 48 heures, à laquelle nombred’employeurs souhaitent pouvoir dérogerplus facilement.

Le compromis autorise un allonge-ment négocié du temps de travail hebdo-madaire. Il a suscité une fronde de laConfédération européenne des syndicats,relayée au Parlement par une bonne par-tie du groupe des socialistes européens,dont les élus du PS français, et les forma-tions de gauche.

« Les changements qui interviendrontau niveau européen ne diminueront pas lesgaranties pour les Français », a déclaré auMonde le ministre du travail, M. Ber-trand.

La principale critique au compromisadopté par les gouvernements européens– malgré les fortes réticences de plu-sieurs d’entre eux – est le maintien de lapossibilité, exigé par la Grande-Breta-

gne, de garder une dérogation aux48 heures. « Avec cet accord, nous enca-drons bien mieux l’“opt out” [la possibilitéde dérogation] qu’auparavant, et nousl’avons plafonné à 60 ou 65 heures, au lieude 78 heures actuellement », se défend leministre français, qui a eu un rôle décisifdans l’adoption du compromis en rom-pant le front qui unissait jusque-là laFrance aux cinq autres pays, dont l’Espa-gne et la Belgique, qui s’y opposaient.

M. Bertrand a assuré les syndicatsfrançais que la possibilité, inscrite dansle nouveau projet de directive, de considé-rer les temps de garde (ceux des hospita-liers, par exemple) comme des temps derepos ne sera pas transposée en France.Cette disposition fait partie des conces-sions que la Confédération européennedes syndicats jugent inacceptable.

La concession aux Britanniques sur letemps de travail est le prix cédé pour obte-nir des améliorations à la directive exis-tante sur le statut des travailleurs intéri-maires. Ils sont quelque 8 millions dansl’Union qui devraient ainsi pouvoir dispo-ser de droits équivalant à ceux des sala-riés permanents.

Devant la délégation pour l’Unioneuropéenne de l’Assemblée nationale,M. Bertrand avait assuré, le 4 juin, qu’ils’agissait non pas de diminuer les acquisen France, mais de rapprocher des plusprogressistes les pays européens ayantdes législations sociales moins exigean-tes.

Lire page 8

PAGE TROIS

Le snus ou l’Europe !La révolte anti-européenne gagne l’archipel finlandaisdes îles Aland, dans la mer Baltique. Son parlements’apprête à dire « non » au traité de Lisbonne. Les26 000 Alandais craignent que l’UE n’interdise laspécialité locale, le snus, un tabac à sucer qui seraitdangereux pour la santé.

A nos lecteurs« Le Monde des livres »Le supplément hebdomadaire du Monde consacré auxlivres sera exceptionnellement publié avec notre éditiondatée samedi 14 juin. Il sera notamment consacré à lasociologie de la vie quotidienne et à la littératurelibertine du XVIIIe siècle.

PortraitTzipi LivniSi le chef du gouvernement israélien, Ehoud Olmert, estcontraint de démissionner, sa ministre des affairesétrangères, Tzipi Livni, est convaincue qu’elle luisuccédera. Page 15

PatrimoineJardins : la mue d’un festivalLe Festival international des jardins de Chaumont-sur-Loire (Loir-et-Cher) s’ouvre aux autres arts. Page 19

La Franceredoute unehausse destaux de la BCE

UK

pric

1,40

JIM GROSSMANN/NASA

La gaucheeuropéenne ditnon à la semainede 65 heuresDirective Les socialistes de l’Union craignentl’autorisation d’allongement du temps de travail

Henry Bauchau

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LIVRE INTER2008

Page 2: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

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L’Union européenne (UE) reste la réfé-rence, si ce n’est le miroir, des initiati-ves latino-américaines en matière d’in-tégration régionale. La dernière endate, l’Union des nations sud-américai-

nes (Unasur), née à Brasilia le 23 mai, n’échappepas à la règle. Le traité signé par les douze paysd’Amérique du Sud ne laisse aucun doute à cesujet. Le préambule du texte attribue à la nouvel-le organisation, dotée de la personnalité juridi-que internationale, le but de « construire une iden-tité et une citoyenneté sud-américaines » et de« développer un espace régional intégré sur lesplans politique, économique, social, culturel, envi-ronnemental, énergétique et des infrastructures ».

Il s’agit de contribuer ainsi à l’émergence d’un« monde multipolaire », « libre d’armes nucléai-res et de destruction massive », et de « régler lesproblèmes qui affectent la région, tels que la pauvre-té, l’exclusion et les inégalités sociales ». L’Unasurentend assimiler les acquis du Mercosur –l’union douanière sud-américaine fondée parl’Argentine, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay –et de la Communauté andine des nations (CAN),qui regroupe la Bolivie, la Colombie, l’Equateuret le Pérou. La nouvelle organisation a l’ambi-tion « d’aller au-delà de la convergence du Merco-sur et de la CAN » et, à terme, de les absorber.

Le Mercosur avait déjà dépassé son ambitioninitiale : la promotion des échanges, un objectifatteint en dépit des dérogations et entorses aulibre-échange encore persistantes. Comme l’UE,ses pays membres ont harmonisé leurs passe-ports, qui portent désormais le nom du Merco-sur au-dessus de celui de la nation émettrice.

A l’image des fonds structurels de l’UE, le Mer-cosur s’est doté d’un fonds pour compenser les« asymétries » entre les économies, c’est-à-direles immenses inégalités entre le Brésil et ses par-tenaires, notamment l’Uruguay et le Paraguay.Ce souci est repris par l’Unasur. Selon le traité,l’Union vise un développement équitable, « sur-montant les asymétries par la complémentarité deséconomies des pays d’Amérique du Sud ».

Moins proches que le Mercosur, les paysandins ont mis sur pied une institution de créditperformante, la Corporation andine de dévelop-pement (CAF), qui regroupe d’autres pays de larégion. Le Mercosur et la CAN sont en pourpar-lers avec l’UE en vue d’un accord d’association.

Alors que l’intégration européenne a commen-cé par le charbon et l’acier, l’Unasur cherche às’appuyer sur l’intégration énergétique. L’Initia-tive pour l’intégration de l’infrastructure régio-nale sud-américaine (Iirsa) a identifié plus de500 projets dans le domaine des transports, del’énergie et des communications, d’une valeur de68 milliards de dollars, susceptibles de rappro-cher les pays. La Banque du Sud, lancée fin 2007,vient compléter le dispositif financier existantdans la région. Loin de limiter ses compétences,l’Unasur devrait aborder les migrations, la

recherche et la diversité culturelle, la répressiondes trafics de drogue, d’armes ou d’êtreshumains, le terrorisme et le crime organisé.

Les décisions seront prises par consensus, parle conseil des chefs d’Etat, réuni au minimumune fois par an, ou le conseil des ministres desrelations extérieures, réuni au moins tous les sixmois. Outre une présidence tournante d’un an,l’Unasur a décidé de se doter d’un secrétariatgénéral, basé à Quito (Equateur), et à terme d’unParlement, qui siégera à Cochabamba (Bolivie).

Le mérite, mais aussi les limites d’Unasur,revient à la diplomatie brésilienne, la seule enAmérique latine, avec la diplomatie mexicaine, àtémoigner de continuité, de professionnalismeet de vigueur. L’instabilité de l’Argentine d’après-guerre a lourdement handicapé sa diplomatie.La désinvolture du président Nestor Kirchner,puis de son épouse Cristina Kirchner, a renduinaudible l’Argentine sur la scène internationa-le. Le Venezuela a longtemps assuré la perma-nence de la démocratie dans la région, alors quesévissaient les dictatures en Amérique du Sud etles conflits armés en Amérique centrale, mais leprésident Hugo Chavez a cassé l’outil diplomati-que avec ses provocations dominicales à la télévi-sion et l’allégeance imposée à ses fonctionnaires.

Minée par des conflitsLa démarche de Brasilia serait plus méritoire

si son ministère des relations extérieures n’avaitpas plaqué son propre organigramme sur l’inté-gration régionale, en séparant l’Amérique duSud de l’Amérique centrale, du Mexique et desCaraïbes. D’abord parce que le Brésil et le Mexi-que, acteurs globaux, gagnent à être ensemble etnon en concurrence. Ensuite parce que l’Améri-que centrale est en avance sur le Mercosur et laCAN en termes d’intégration des infrastructureset de convergence. Enfin parce que la Missiondes Nations unies pour la stabilisation en Haïti(Minustah) reste le meilleur exemple ce que peu-vent faire ensemble les pays latino-américains.

La négociation du traité d’Unasur a été labo-rieuse. Aurait-elle été plus compliquée si elleavait inclus le Mexique et l’Amérique centrale ?On peut en douter, car les négociations de l’UEavec les Mexicains et avec les Centre-Américainsn’ont pas connu les problèmes qui bloquent lesdiscussions avec le Mercosur ou la CAN. Les diffi-cultés d’Unasur ont pour origine les tendancescentrifuges en Amérique du Sud. La signaturedu traité était prévue à Carthagène (Colombie),fin mars, mais les tensions entre Bogota, Caracaset Quito ont imposé l’ajournement et le change-ment de cadre. Le secrétaire général désigné,l’ancien président équatorien Rodrigo Borja, arenoncé avant même d’avoir pris ses fonctions.

L’Unasur est minée par des conflits, commecelui qui divise les pays andins, ou celui qui oppo-se l’Argentine à l’Uruguay, à cause de la construc-tion d’une usine de cellulose sur le fleuve fronta-lier. A Brasilia, avant le sommet, le présidentLuiz Inacio Lula da Silva a dû réunir ses homolo-gues du Venezuela, de l’Equateur et de la Bolivie,pour les prier de mettre une sourdine à leurs criti-ques. L’intégration régionale n’est pas une affai-re d’idéologie mais d’avancées en termes d’in-frastructures, de croissance, de coopération et debien-être pour le plus grand nombre. L’UE s’estconstruite sur la base d’un accord entre gaucheet droite européennes. Le consensus supposedes concessions. L’intégration latino-américai-ne ne se fera pas si les négociateurs continuent àcamper sur un souverainisme sourcilleux. a

Courriel : [email protected]

Bracelets par Pessin

Mortel Sénat

Treize laboratoires d’idées européensse sont réunis, sous l’égide de deuxd’entre eux, Notre Europe et la Fonda-tion pour l’innovation politique, afinde proposer aux Vingt-Sept un projet

de « refondation » de l’Union européenne (UE).Vaste ambition, qui prend acte des difficultés del’Europe face aux transformations du monde,sous le regard de citoyens dubitatifs ou hostiles.L’euroscepticisme, en effet, gagne du terrain,interpellant les dirigeants de l’Union.

Le rejet de l’Europe revêt aujourd’hui des for-mes diverses, qui ne se limitent pas aux protesta-tions souverainistes contre le dessaisissementdes Etats membres, mais témoignent, en dépitdes efforts de communication de l’Union, d’uneméfiance croissante à l’égard des politiqueseuropéennes. Le fossé se creuse, comme le souli-gne une chercheuse danoise, Catharina Soren-sen, « entre les idéaux des citoyens et leur percep-tion de l’UE ».

Le sociologue Emmanuel Todd, qui était l’invi-té, samedi 7 juin à Paris, des Rendez-vouscitoyens du Sénat, consacrés à l’Europe, d’Héro-dote à Erasmus, a estimé que celle-ci se caractéri-se désormais par « une sorte de négativité générali-sée ». En mettant l’accent sur le contrôle de l’im-migration, en encourageant le développement del’islamophobie ou en insistant sur ses racines

chrétiennes alors même que les églises se vident,l’Europe, a-t-il dit, ne donne plus d’elle-mêmequ’une « définition négative ».

Il est donc temps d’offrir aux peuples des pers-pectives nouvelles. Il appartient en particulieraux futures présidences de l’Union, comme l’écri-vent Gaëtane Ricard-Nihoul et Elvire Fabry, enpréfaçant le travail collectif des treize « thinktanks », de « convaincre les citoyens européens, par-fois désorientés, de la pertinence, de l’urgence et de lacohérence d’un projet européen d’ensemble qui puis-se être porté à l’échelle internationale ».

Pour Emmanuel Todd, volontiers provocateur,ce projet ne peut être que le rétablissement du pro-tectionnisme aux frontières de l’Europe. Les labo-ratoires d’idées européens, attachés au libre-échange, se contentent d’inviter les Etats mem-bres à « faire valoir un intérêt commun qu’ils puis-sent présenter au reste du monde » et à affirmer lasolidarité européenne d’une façon qui permette àl’Europe de « rester ouverte à la mondialisation »tout en contribuant à sa « régulation ». Comme le

note Emmanuel Todd, le débat progresse.« Il est également fondamental, rappellent les

deux signataires, de ne pas aggraver la distance per-sistante entre un projet porté par des élites et despopulations qui ont parfois du mal à suivre le ryth-me. » Un colloque du Centre d’études de la viepolitique (Cevopol), dont les actes ont été publiés,en 2007, par les Editions de l’Université de Bruxel-les, a mis en évidence ces « résistances à l’Euro-pe », qui conduisent, selon Ramona Coman et Jus-tine Lacroix, éditrices de l’ouvrage, à une « éro-sion » du « consensus permissif » dont a long-temps bénéficié la construction européenne.

Ce qui rend ces résistances difficiles à surmon-ter, c’est qu’elles sont contradictoires d’un pays àl’autre. Ancrées dans la défense de modèles natio-naux, elles expriment une opposition multipleau « modèle européen » qui se met en placedepuis un demi-siècle. La contestation vise tan-tôt la philosophie économique de l’Union euro-péenne, jugée trop libérale par les uns et tropinterventionniste par les autres, tantôt son modede gouvernance politique, tantôt ses initiativessur les questions de société comme la luttecontre les discriminations ou la gestion de l’im-migration. La recherche du compromis semblede plus en plus aléatoire. a

Courriel : [email protected]

Pour vaincre l’euroscepticisme

L’Amérique du Sud sur les traces de l’UE

Le Sénat obéit au mêmes lois mystérieu-ses que la Grande Pyramide. La légen-de veut que tout archéologue tropcurieux de percer les secrets du tom-beau du pharaon Khéops ait été victi-

me d’un mal étrange et fatal. La réalité témoigneque tout réformateur – même prudent – de laseconde Chambre du Parlement français s’exposeà de douloureuses avanies. Le général de Gaulleen fit la cruelle expérience en 1969. Et Lionel Jos-pin, qui le qualifia en 1998 d’« anomalie » pourla démocratie, ne s’en porta guère mieux.

Le premier ministre socialiste avait pourtantcent fois raison. Le Palais du Luxembourg est, eneffet, chargé par la Constitution d’assurer « lareprésentation des collectivités locales ». Or queconstate-t-on ? Même quand la gauche dirige,comme aujourd’hui, la quasi-totalité des régionset une nette majorité des départements et des vil-les, le Sénat penche invariablement à droite : cet-te dernière détient actuellement plus de 200 des331 sièges sénatoriaux ! Immuable, la chambreforte des conservateurs est protégée par sonmode de scrutin, qui surreprésente de façon stu-péfiante les milliers de villages et de petits bourgsau détriment de la France urbaine. Et qui inter-dit, ou quasiment, toute alternance.

Le « comité Balladur », chargé de réfléchir à lamodernisation des institutions, avait entrouvertla porte en recommandant de mieux tenir comptede la démographie locale. La droite sénatoriale aécarté cette menace sans ménagement le 12 juin.Elle propose tout bonnement de verrouiller leprincipe même de son mode de scrutin en l’inscri-vant dans la Constitution. Comment qualifier cet-te initiative autrement que comme un abus deposition dominante ?

Ce ne serait pas trop grave si le Sénat n’étaitqu’une paisible maison de retraite pour politi-ciens en fin de carrière. Ou s’il se contentait depondérer par sa supposée « sagesse » les emballe-ments éventuels de l’Assemblée nationale. Celadevient franchement malsain dès lors que ladeuxième Chambre est en position d’entraver jus-qu’à l’obstruction l’action de tout gouvernementde gauche – ce dont il ne s’est jamais privé. Et debloquer, de fait, toute révision constitutionnellequi n’aurait pas son aval. Cette situation est, àl’évidence, choquante pour la démocratie. a

Chronique

AnalysePaulo A. ParanaguaService International

Europe Thomas Ferenczi

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01232 Vendredi 13 juin 2008

Page 3: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

MARIEHAMN

ENVOYÉ SPÉCIAL

Les petites îles Aland, au milieude la mer Baltique, vont-ellesbloquer le traité de Lisbonne ?La rumeur court le nord de l’Eu-rope. L’archipel finlandais, doté

d’une large autonomie, serait prêt, dit-on, à ne pas ratifier le traité. Et pourquoidonc ? Pour faire entendre sa voix àBruxelles et conserver son snus, un tabacà sucer interdit dans l’Union européen-ne. Le snus reste autorisé dans la Suèdevoisine et se vend en quantité sur les fer-ries battant pavillon « alandais ».

« Le traité de Lisbonne est un peu l’ota-ge dans cette affaire, mais c’est la dernièrechance pour nous de peser sur la Finlandeafin de faire respecter nos intérêts », lanceHarry Jansson, ancien rédacteur en chefd’un quotidien local devenu député d’unparti indépendantiste qui a lancé unepétition pour faire changer Bruxelles surla question du snus. A Helsinki, onbalaye d’autorité cette éventualité.« Légalement, Aland ne peut pas stopper letraité de Lisbonne, affirme Peggy Heikki-nen, conseillère du ministre finlandaisdes affaires européennes. Le comité consti-tutionnel du Parlement a clairement décla-ré que la Finlande peut ratifier le traité deLisbonne, quelle que soit la positiond’Aland. Mais bien sûr, le jour où celui-cientrera en vigueur, Aland, qui a sa proprelégislation dans certains secteurs, seradans une situation légale incertaine si ellene l’a pas ratifié. »

Aland, 6 500 îles, 26 000 habitants, unparlement régional, un gouvernementdoté d’une large autonomie qui a la mainsur l’éducation, la police, la santé etautres. Les insulaires sont dotés d’uneidentité à toute épreuve qui veut que lefinnois n’y soit même pas langue officiel-le. Sur les îles Aland, on parle suédois.Son bien-être est ancré dans une tradi-tion tout aussi forte, celle des paysans-marins qui pour survivre sur ces îles revê-ches maniaient la rame et la bêche.

Certains ont commencé à construiredes bateaux de plus en plus gros au pointde devenir d’authentiques armateurs. Cesont eux qui ont donné naissance à descompagnies comme Viking Line ou Ecke-rö Linjen qui représentent aujourd’huiun tiers de l’économie de ces îles, et dontles imposants ferries transportent depuisdes décennies des centaines de milliersde passagers. Ces traversées bien arro-sées et bon marché sont très populairescar les navires alandais bénéficient, àl’instar des îles Aland, d’une dérogationqui les laisse à l’écart de la zone fiscale del’UE et leur permet de pratiquer les ven-tes hors taxes.

« Le snus est une source de revenusimportante pour les armateurs, raconteBoris Ekman, vice-PDG de Viking Line.Viking Line a un chiffre d’affaires de440 millions d’euros dont le snus représen-te 6 ou 7 millions, la moitié étant du bénéfi-ce net. Quand notre bénéfice total est de30 millions d’euros, le snus en constitueune part de 10 %, ce qui est beaucoup. »

De nombreux retraités font le voyagedans la journée uniquement pour profi-ter de ces prix. « Je viens faire le pleinavant le week-end », raconte Lennart Hol-mgren, un Stockholmois, à bord du ferryd’Eckerö Linjen. Il fait le trajet une foispar mois. Un bus l’a emmené de Stock-holm à 8 heures jusqu’au port de Grissle-hamn d’où le ferry a mis deux heurespour rejoindre Eckerö, sur les îles Aland.Après un cours débarquement à terre, leferry a fait demi-tour vers Grisslehamnoù un autre bus l’a ramené àStockholm.

« Avec ma carte de retraité, levoyage aller-retour bus et ferrym’a coûté 60 couronnes(6,5 euros) », précise LennartHolmgren. Tout à fait renta-ble, quand on a le temps, carl’alcool fort et le snus sont moi-tié moins chers qu’en Suède.

Mais dans la boutique hors taxe duferry, plusieurs Suédois jurent en décou-vrant les vitrines réfrigérées de snus :« Armoire de snus fermée. La vente de snusn’est autorisée que dans les eaux territoria-les suédoises. » Une autre affichette préci-se que la vente ne se fait que durant le

voyage en direction de la Suède.Réflexion d’un Alandais : « Est-ce que lesfonctionnaires de Bruxelles n’ont vraimentrien de plus important à s’occuper que devenir mettre le nez dans nos traditions ? »

Un Suédois, qui tente de convaincreson interlocuteur du crime que représen-terait une interdiction totale du snus, lan-ce : « C’est comme si on interdisait le vin enFrance. Ce serait la révolution, non ? Etbien pareil en Suède. » L’explication estbancale car les Suédois, par tempéra-

ment, ne vont pas brûler despneus devant les préfectures etle snus ne fait pas vivre autantde gens que le vin. Mais les Sué-dois aiment cette patte brunâ-tre dont ils se tapissent les gen-cives. Ils sont aussi nombreuxà « snuser » qu’à fumer. Beau-coup de « snuseurs » ne sontpas dupes des explications

angéliques du fabricant suédois SwedishMatch qui tente depuis des années deconvaincre la Commission européennedes bienfaits du snus par rapport à la ciga-rette. Le cœur est soumis à un effort per-manent, les plus assidus ont un trou dansla gencive.

Or la Commission européenne a finipar réagir car la Finlande ne respectaitpas la directive tabac qui interdit le snus.Le ton est passé à la menace et en janvier,les autorités de l’archipel ont fini parplier.

« Nous avons dû accepter que la ventede snus soit interdite sur nos bateaux »,concède Viveka Eriksson, premier minis-tre du gouvernement autonomed’Aland. Certains armateurs, commeViking Line, avaient déjà des bateauxbattant pavillon suédois et peuvent donccontinuer à vendre leur snus. D’autresont aussitôt réagi. « Auparavant, il étaitécrit que la vente de snus était autoriséesur nos bateaux dans les eaux suédoises.Désormais, cela n’existe plus dans les tex-tes, raconte Björn Blomqvist, PDG d’Ec-kerö Linjen dont les ferries battentpavillon alando-finlandais. Maintenant,nous devons deviner. On continue à ven-dre, mais seulement en direction de la Suè-de, afin de ne pas contribuer à répandre cedangereux tabac dans l’UE. Mais on neconsidère pas cette situation comme sûre.Donc nous sommes en train de passer souspavillon suédois. »

Conséquence pour la fragile écono-

mie alandaise : plusieurs communesvont perdre des revenus fiscaux nonnégligeables puisque des centaines demarins peuvent être désormais amenésà payer leurs impôts en Suède. Un dilem-me pour ces petites îles.

« Ce que nous voulons, explique Vive-ka Eriksson, c’est que la Finlande nouslaisse une place de député européen, quenous puissions nous défendre nous-mêmes auprès de la Cour européenne dejustice et que nous puissions aussi nousfaire entendre auprès du Conseil européendes ministres. » Autant de demandesécartées par la Finlande. « Quitter l’UEpourrait être une alternative si ces ques-tions d’influence ne trouvent pas de répon-se », prévient Harry Jansson, le députéindépendantiste.

Rebelles, les îles Aland ? Au Musée dela marine de Mariehamn, on se targuede posséder l’un des deux seuls authenti-ques drapeaux de pirate au monde.Celui-ci a été acheté voici longtemps parun marin alandais dans un souk d’Afri-que du Nord. « Mais il n’y a jamais eu depirates ici, assure la conservatrice. Enrevanche des contrebandiers, ça, oui ! » a

Olivier Truc

Les îles finlandaises autonomes d’Aland commercialisent un tabac à sucer interdit par l’UE maisautorisé en Suède. Pour convaincre Bruxelles, elles menacent de rejeter le traité de Lisbonne

Les Alandais défendent leur « snus »

LONDRES, STOCKHOLM

CORRESPONDANTS« Not quite European » (pas vrai-ment européennes) : ce slogan alongtemps permis à Jersey, Guer-nesey et à l’île de Man d’attirer lesavoirs des contribuables aisés, sur-tout britanniques et irlandais, ama-teurs d’avantages fiscaux.

Saint-Hélier, St Peter Port etDouglas, respectivement capitalesde Jersey, Guernesey et Man, ontpu longtemps ignorer Bruxelles.Possessions de la Couronne britan-nique, ces îles de la Manche dotéesd’une large autonomie ne font paspartie de l’Union européenne(UE) : a priori, les directives neleur sont pas applicables.

Assurée pendant les dix-huitannées de gouvernement conser-vateur Thatcher-Major, la tranquil-lité de ces paradis fiscaux a été bou-leversée à partir de 1997 par l’arri-vée au pouvoir d’un Labour déter-miné à combattre l’évasion organi-sée de l’impôt. L’exécutif bruxel-lois s’en est pris à son tour au sta-tut fiscal des îles, dénonçant la pré-

sence de sociétés non résidentesexonérées d’impôt alors que lesentreprises résidentes étaienttaxées à 20 %. Résultat, en 2008,les trois juridictions doivent pro-mulguer le plan « zéro taxe » pourtoutes les firmes. Les banquessont taxées à 10 %. Les îles ont aus-si dû accepter la directive surl’épargne entrée en vigueur le1er juillet 2005 : les Européensdétenteurs de comptes doiventdéclarer les intérêts reçus au fiscde leur pays ou d’accepter une rete-nue à la source de 20 %.

« Jersey veut être un bon voisinen termes de coopération », assureGeoff Cook, directeur général deJersey Finance, porte-parole dusecteur financier. L’UE est le pre-mier partenaire commercial de cesconfettis, dont la population totales’élève à 165 000 âmes. Les autoch-tones ont pris conscience qu’unrapprochement avec Bruxelles per-met de mieux résister aux volontéshégémoniques du principalconcurrent, la City de Londres.

Les deux territoires autonomes

du Danemark, les îles Féroé et leGroenland, échappent eux aussiaux règles de l’UE. Les Féroé n’enont jamais fait partie, tandis que leGroenland a quitté la CEE en 1985à l’issue d’un référendum. Peuenclins à partager leurs ressourcesalors qu’ils dépendent presqueentièrement des ressources de lamer, ils contestent le système euro-péen des quotas. L’archipel desFéroé a adopté à la place un systè-me de quotas de jours de pêche.

Certains Féroïens se verraientbien adhérer à l’UE, s’ils étaientsûrs d’avoir une dérogation pourla pêche, « comme les îles Aland ontune dérogation pour rester à l’écartde l’espace fiscal européen », ditEdmund Joensen, député des Par-lements féroïen et danois.

Le Groenland a, lui, un statutdifférent puisqu’il appartient augroupe des pays et territoiresd’outre-mer, comme Saint-Pierre-et-Miquelon ou la Polynésie fran-çaise, qui ont une relation particu-lière avec l’UE. a

Marc Roche et Olivier Truc

Page trois Europe

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« Interdirele snus en Suède,c’est comme si oninterdisait le vinen France »

Un consommateur

Ces îles qui échappent à l’UE

Des voyageurs à bord d’un ferry ont attendu d’être dans les eaux suédoises pour acheter du « snus », tabac à sucer typique. MARKUS MARCETIC/MOMENT/VU POUR « LE MONDE »

0123Vendredi 13 juin 2008 3

Page 4: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

AFGHANISTAN CONFÉRENCE DE PARIS

La faiblesse de la justice illustrele caractère embryonnaire de l’Etat afghanVISAGE méconnu d’un Etat afghan enen chantier, son système judiciaire nefigure pas au premier rang des sujets dediscussions de la conférence de Paris, jeu-di 12 juin. Les dysfonctionnements de lajustice dans la société afghane donnent,aujourd’hui, la mesure du caractèreembryonnaire d’une administration àpeine naissante et une idée du chemin àparcourir.

Selon Najibullah Djanbaz, chargé de laformation à Kaboul des magistrats,« seul un tiers d’entre eux sont réellementen mesure d’assurer leur mission ». L’Eco-le de la magistrature forme, en un an,près de deux cents nouveaux juges. Maisl’institution est jeune. Difficile de fourniraux jeunes juges de quoi leur permettrede remplacer les magistrats formés à lavieille école, proches de la retraite et habi-tués à rendre une justice souvent peuconforme aux règles du droit. « Nous vou-lons étendre la scolarité à deux ans, maisnous sommes encore confrontés à des problè-mes de locaux », détaille M. Djanbaz, quisiège également au sein de hautes instan-ces judiciaires du pays.

A ce jour, nombre des quelque1 480 magistrats afghans sont souventissus des madrassas, ces écoles religieu-ses qui leur dispensent une formationjuridique sommaire mais les gratifientd’un statut religieux qui les rend quasi-ment intouchables. Le gouvernement nepeut les contraindre à quitter leur postesans risquer de s’opposer à la population.

Mieux formés, les magistrats passés parla faculté de droit islamique font quant àeux souvent passer la religion et les coutu-mes locales avant l’Etat. Lorsque lesmagistrats ne sont pas tout simplementfavorables aux thèses des talibans qui ontjuré la perte du pouvoir central.

Aux problèmes de recrutement s’ajou-tent des difficultés d’organisation. Fautede locaux, « certains juges rendent la jus-tice dans des containers », illustre Najibul-lah Djanbaz. Payés environ 30 euros parmois, les magistrats nommés en provin-ce sont souvent logés et nourris par lecommandant de leur district, perdant ain-si toute indépendance. Sans compter leurvulnérabilité à la corruption.

Enfin, les magistrats doivent faire faceà une grande insécurité. Ces derniersmois, dans le sud de la province pachtou-ne du Paktika, une région reculée où lestalibans bénéficient d’un large soutien dela population, deux juges ont été tués, àpeine arrivés sur place, parce qu’ils repré-sentaient le gouvernement.

« L’aide internationale devrait donc aus-si être dédiée à l’effort consacré à l’adminis-tration, elle-même, et non pas seulementaux actions à court terme, les plus visi-bles », estime Ranjana Mukerjee, char-gée par la Banque mondiale de travaillersur la construction d’un Etat afghan etauteur, début 2008, d’un rapport sur lespriorités de la réforme de l’administra-tion publique. a

Jacques Follorou

VIENNE

ENVOYÉE SPÉCIALE

La tournée de George Bush en Europea donné lieu a un regain de confron-tation verbale entre les présidents

américain et iranien, mercredi 11 juin, aumoment où les Etats-Unis poussent lesEuropéens à renforcer l’attirail des sanc-tions contre Téhéran, en dehors même ducadre du Conseil de sécurité de l’ONU.« Toute option reste ouverte », a ditM. Bush, en allusion à un scénario d’em-ploi de la force contre des installations ira-niennes,« mais ma préférence va à une solu-tion diplomatique » a-t-il souligné.

Le « meilleur choix à faire » pour l’Iran,a commenté le président américain lorsd’une conférence de presse en Allemagne,serait d’accepter l’offre de coopération

que doit remettre, samedi, à Téhéran lechef de la diplomatie européenne, JavierSolana, au nom des six pays qui traitent ledossier nucléaire iranien (Etats-Unis,Royaume-Uni, France, Allemagne, Russieet Chine).

Le président iranien, Mahmoud Ahma-dinejad, a, de son côté, averti que l’Irann’échangerait pas sa « dignité » contredes avantages qui lui seraient proposés. Ils’est aussi attaché à réduire le problèmequi oppose son pays au Conseil de sécuritéde l’ONU depuis 2006 à la confrontationavec les Etats-Unis, voire avec le seul Geor-ge Bush. Ce qui suggère, ainsi que desdiplomates occidentaux en sont convain-cus,que l’Iran joue la montre jusqu’à l’arri-vée d’une nouvelle administration améri-caine, et n’envisage guère d’enclencherun règlement négocié de la crise avant cet-te échéance. Le Conseil de sécurité exigede l’Iran qu’il suspende ses activités d’enri-chissement d’uranium. « Ton ère est révo-lue », a dit le président iranien en parlantde M. Bush, le qualifiant d’« homme malé-fique » qui est « entré en Afghanistan, enIrak, et a annoncé que l’Iran serait sa troisiè-me cible ». « Par la grâce de Dieu, tu n’en-dommageras pas un centimètre de la terresacrée d’Iran », a-t-il ajouté.

Le dossier nucléaire iranien est entrédans une nouvelle phase de tensions, avecun retour des spéculations sur la possibili-té d’une action militaire que pourrait déci-der Israël. Dans ce climat, les Européens– et la France a l’intention de faire valoircette ligne lors de sa présidence de

l’Union européenne, qui commence le1er juillet – semblent s’acheminer versl’adoption de nouvelles mesures contrai-gnantes contre l’Iran.

Durcissement généralLe secteur financier iranien, notam-

ment les banques Melli et Saderat, men-tionnées dans la dernière résolution desanctions de l’ONU votée en mars, seraitciblé. Les appels de l’ONU à exercer de la« vigilance » sur les activités de ces institu-tions seraient transformées, au niveaueuropéen, en interdiction ferme de tran-sactions.

Si certains pays comme l’Autricheseront difficiles à convaincre pour durcirles sanctions, un changement notables’est produit depuis le retour au pouvoir à

Rome de Silvio Berlusconi car l’Italie, par-tenaire économique important de l’Iran,est désormais d’accord pour aller del’avant, disent des diplomates.

Un facteur important pèse désormaisdans le débat entre responsables euro-péens et contribue à un durcissementgénéral envers l’Iran. Il s’agit du dernierrapport de l’Agence internationale del’énergie atomique (AIEA), qui constatait,le 26 mai, que Téhéran n’avait pas apportéles clarifications nécessaires sur ce qui estsoupçonné d’être le volet militaire de sonprogramme nucléaire. Ce rapport se pen-che sur les études iraniennes portant surla mise au point d’une tête de missile pou-vant accueillir une charge nucléaire, surdes essais d’explosifs de haute intensité, etsur un projet de possible site de test

nucléaire – autant d’éléments que l’AIEAa décrit comme « sourcede sérieuse préoccu-pation ». La chancelière allemande, Ange-la Merkel, a commenté, mercredi, qu’il fal-lait « réagir » à ce rapport « avec des sanc-tions accrues si nécessaire ».

Les grandes puissances poursuiventleur double approche de la carotte et dubâton pour tenter de convaincre l’Iran desuspendre l’enrichissement d’uranium.L’offre que doit présenter l’émissaireeuro-péen, Javier Solana, aux responsables ira-niens est une amélioration de cellequ’avaient déjà présentée les « Six » enjuin 2006, expliquent des diplomates.

Outre des propositions de coopérationdans le nucléaire civil et au plan commer-cial, elle porte sur des consultations régio-nales au Moyen-Orient sur les questionsde sécurité. Elle inclut aussi une « choré-graphie » particulière pour la suspensionde l’enrichissement, selon des sourcesdiplomatiques. La mise au point de cettenouvelle offre avait été demandée par laRussie et la Chine, à l’approche du vote dela résolution 1803 à l’ONU.

L’Iran, de son côté, a fait parvenir unecontre-offre à ses interlocuteurs, mettanten exergue son poids régional au Moyen-Orient, tout en revenant sur une idée de« consortiums » internationaux pouvantaccompagner la poursuite de son pro-gramme d’enrichissement d’uranium. Letexte iranien, daté du 13 mai, fait cepen-dant l’impasse sur la question centrale dela suspension de l’enrichissement. a

Natalie Nougayrède

Après l’étape de Meseberg en Allema-gne, le président américain, GeorgeBush, retrouve, jeudi 12 juin, à Rome son« ami » Silvio Berlusconi pour des entre-tiens qui devraient être dominés par leprogramme nucléaire iranien et l’Afgha-nistan, où Washington souhaite un plusgrand engagement des Italiens.Cette visite devrait aussi permettre unerelance des relations entre les deuxpays, plutôt fraîches à l’époque du gou-vernement de gauche de Romano Prodi,alors que M. Bush et M. Berlusconi onttoujours affiché d’excellents rapports.Rome « peut compter sur les amis améri-

cains » et s’attend à ce que M. Bushappuie clairement la demande de l’Italied’intégrer le groupe de pays « 5 + 1 » (lescinq membres du Conseil de sécuritéplus l’Allemagne) qui sont chargés denégocier avec l’Iran sur le nucléaire, adéclaré, mercredi, le chef de la diploma-tie italienne, Franco Frattini.Comme il l’avait déjà fait il y a un an lorsde sa précédente visite en Italie, le prési-dent américain rencontrera, vendredi, lepape Benoît XVI avant de s’envoler pourune visite de deux jours à Paris.Il sera dimanche à Londres et lundi à Bel-fast. – (AFP.)

NÉPAL « DIEU-ROI » DÉCHU, GYANENDRA A QUITTÉ DÉFINITIVEMENT SON PALAIS

Le « dieu-roi » déchu du Népal, Gyanendra, et son épou-se, la reine Komal, quittent, mercredi 11 juin, leur palais royal deKatmandou, sous les cris de « Longue vie à la République » scan-dés par plus de 500 personnes. Vénéré comme l’incarnation deVishnu, le monarque se plie ainsi à la décision – prise le 28 maipar l’Assemblée constituante dominée par les maoïstes – d’abo-lir l’unique royaume hindouiste du monde et de transformer leNépal en une république, après 239 années de dynastie Shah.

Dans une adresse rarissime à la nation, Gyanendra, assis entredeux tigres et une tête de rhinocéros empaillés, a assuré « res-pecter le verdict du peuple ». L’ancien roi a « rendu au gouverne-ment du Népal » sa couronne en diamants, rubis et émeraudeset le sceptre des Shah, mais « ne quittera pas le pays », a-t-ilexpliqué. Il devrait s’installer dans une ancienne résidence roya-le proche de Katmandou. Son gigantesque palais de Narayanhi-ti, au cœur de la capitale, sera transformé en musée. – (AFP.)

International

CHRONOLOGIE

3 mars 2008. Le Conseil de sécurité del’ONU vote, pour la troisième fois, dessanctions contre l’Iran. Les Etats sontappelés à contrôler les compagniesaériennes et maritimes iraniennes pou-vant servir au transport de biens liésaux secteurs nucléaire et balistique.26 mai. Rapport de l’Agence internatio-nale de l’énergie atomique (AIEA) surles « possibles dimensions militaires »du nucléaire iranien.14 et 15 juin. Visite prévue en Irandu chef de la diplomatie européenne,Javier Solana, pour transmettreune nouvelle offre de coopération.

ISLAMABAD

CORRESPONDANTE

Les très vives réactions du Pakistan à lamort, mardi 10 juin, de onze de ses sol-dats, tués par un missile américain tiréd’Afghanistan, laissent planer un doutesur l’avenir de la coopération entre lesdeux pays dans la « lutte contre le terroris-me ». Dans un communiqué sans précé-dent dans sa formulation, l’armée pakista-naise a « condamné cet acte totalement déli-béré et lâche [des forces de la coalitiondéployées en Afghanistan] qui heurte lesfondements de la coopération et les sacrificesconsentis par les soldats pakistanais dansleur soutien à la guerre antiterroriste ».

Le communiqué affirme encore :« Nous [l’armée] nous réservons le droit deprotéger nos citoyens et nos soldats contretoute agression. » Interrompant son dis-

cours devant le Parlement sur la présenta-tion du budget, le premier ministre pakis-tanais, Youssouf Raza Gilani, a « sévère-ment condamné (cette) agression » et pro-mis de « préserver la souveraineté et ladignité du Pakistan ». L’ambassadrice desEtats-Unis, Ann Patterson, convoquée auministère des affaires étrangères, a reçuune « ferme protestation contre un acte tota-lement inacceptable ».

L’armée pakistanaise et les forces de lacoalition à Kaboul ont donné des versionscontradictoires de ce qui s’est passé danscette région frontalière inaccessible à lapresse et disputée entre Kaboul et Islama-bad. Selon le général Athar Abbas, porte-parole de l’armée pakistanaise, tout a com-mencé quand des soldats afghans ont ten-té d’édifier un poste de contrôle sur unehauteur. Repoussés après discussions par

les forces frontalières pakistanaises, lesAfghans regagnaient leur pays « quand ilsont été attaqués par des insurgés dans leurpropre pays » et ont fait appel à un soutienaérien. Un missile a alors détruit postefrontièrepakistanais. Les forcesde la coali-tion expliquent, pour leur part, avoir étéattaquées par des insurgés « à 200 mètresà l’intérieur du territoire afghan ». En étatde « légitime défense », l’avitation n’auraittué que des « éléments anti-afghans ».

L’incident survient alors que les rela-tions entre l’armée pakistanaise, les forcesde la coalition et l’armée afghane sont auplus bas. Islamabad a annulé dernière-ment des réunions de coordination et, augrand dam de Washington, s’est retirée deplusieursendroits des zones tribales, aban-données aux extrémistes islamistes. a

Françoise Chipaux

CHINE-TAÏWANPékin et Taïpeh reprennentles discussions directes,interrompues depuis 1995PÉKIN. Les négociateurs de Taïwan et dela Chine ont engagé, jeudi 12 juin àPékin, le premier dialogue direct entreles deux parties depuis 1995. Les discus-sions portent sur la mise en place de volsréguliers entre le continent et l’île et lapossibilité pour les touristes du conti-nent de se rendre à Taïwan.Le négociateur taïwanais, Chiang Pin-kun, président de la Fondation deséchanges entre les deux rives (SEF), arencontré son homologue chinois de l’As-sociation pour les relations entre lesdeux rives (ARATS), Chen Yunlin.L’émissaire taïwanais doit égalementêtre reçu, vendredi, par le présidentchinois, Hu Jintao. Selon l’agence offi-cielle Chine nouvelle, Chen Yunlin aaccepté l’invitation de son homologuetaïwanais à se rendre dans l’île dans lecourant de l’année. – (AFP.)

BANGLADESHL’ancien premier ministreHasina Wajed a quitté le paysDACCA. L’ex-premier ministre du Ban-gladesh Hasina Wajed, détenue depuisprès d’un an pour corruption et libéréemercredi, a quitté le pays, jeudi 12 juin,pour se rendre aux Etats-Unis, via Lon-dres, afin de recevoir un traitementmédical. Mme Hasina, qui a dirigé cepays d’Asie du Sud entre 1996 et 2001,est la présidente de la Ligue Awami(opposition).La libération de Mme Hasina avait étéannoncée, lundi, par le gouvernementintérimaire, et interprétée comme unemesure d’apaisement à l’égard de l’oppo-sition avant des élections législativesprévues en décembre.D’après la presse, la rivale de Mme Hasi-na et également ex-premier ministre (de2001 à 2006), Khaleda Zia, détenuedepuis septembre pour des faits de cor-ruption, devrait elle aussi être remise enliberté pour recevoir des soins. – (AFP.)

A Rome, M. Bush va s’entretenir avec M. Berlusconi et le pape

Diplomatie Javier Solana se rend à Téhéran avec de nouvelles propositions

Nucléaire : pression occidentale renforcée sur l’Iran

PRAKASH MATHEMA/AFP

PAKISTAN ONZE SOLDATS PAKISTANAIS TUÉS PAR UN MISSILE TIRÉ D’AFGHANISTAN

Une bavure américaine assombrit les relations avec Islamabad

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FRANCE-KAZAKHSTAN

Paris renforceson partenariaténergétiqueavec le Kazakhstan Un an après sa nomination

à la tête du gouvernement,Salam Fayyad estime qu’il fautagir en dépit des contraintesisraéliennes pour entretenirl’espoir et la confiance

MOSCOU

CORRESPONDANTEEn visite à Paris mardi 10 et mercredi11 juin, le président kazakh NoursoultanNazarbaev a signé un traité de partenariatstratégique renforçant la coopération éco-nomique entre les deux pays, notammentdans le domaine de l’énergie nucléaire, dupétrole et du gaz.

Le Kazakhstan est la plus vaste des répu-bliques d’Asie centrale (cinq fois la Francepour 15 millions d’habitants). Son sous-sol regorge d’hydrocarbures et de mine-rais. Les relations commerciales avecParis sont faibles (1,7 % des parts de mar-ché). La France se situe au huitième rangdes fournisseurs de cette ex-républiquesoviétique, loin derrière la Russie, laChine ou l’Allemagne. Courtisé par Mos-cou, le Kazakhstan a été le premier paysvisité par le président russe, Dmitri Med-vedev, après sa prise de fonctions. LaChine y est de plus en plus représentée.

Le groupe métallurgique françaisAubert et Duval a signé avec UKTMP,fournisseur kazakh de titane, un accordévalué à 850 millions d’euros. Ces accords« annoncent de véritables partenariatsindustriels, et pas seulement des contratscommerciaux » souligne l’Elysée.

Le pays est dirigé depuis vingt ans parNoursoultan Nazarbaev, 67 ans, unancien cadre du Parti communiste del’époque soviétique qui s’est maintenu aupouvoir par des référendums et des élec-tions considérés comme non démocrati-ques par l’Organisation pour la sécurité etla coopération en Europe (OSCE). Pour-tant, le Kazakhstan a obtenu la présidencede l’OSCE en 2010. Renouvelé il y a un an,le Parlement ne compte plus aucun repré-sentant de l’opposition. a

Marie Jégo

Le premier ministre palestinien souhaite « édifierun Etat en dépit de l’occupation » israélienne

International

RAMALLAH (Cisjordanie)

ENVOYÉS SPÉCIAUX

Ancien haut fonctionnaire du Fondsmonétaire international (FMI), néen 1952 en Cisjordanie, ministre

des finances de l’Autorité palestinienne àpartir de 2002, Salam Fayyad occupe lesfonctions de premier ministre depuis lecoup de force du Hamas à Gaza enjuin 2007. Indépendant, il avait conduitsa propre liste, « Troisième voie », auxélections législatives de janvier 2006. Cet-te liste n’avait recueilli que deux sièges.Vous avez envoyé une lettre aux mem-bres de l’Union européenne critiquantl’attitude d’Israël dans les négociationsde paix en cours et demandant à cetitre de suspendre le projet de renforce-ment des relations entre l’Etat juif etles Vingt-Sept. Pourquoi ?

Ce qui me guide, c’est la préservationde nos intérêts et de faire en sorte que leprocessus de paix se poursuive. Je nedemande pas à la communauté interna-tionale de prendre position pour oucontre Israël, mais plutôt de prendre posi-tion en faveur du processus de paix. Je neparle pas de boycottage. Notre approcheest constructive. Elle est en accord avec laposition de principe adoptée par leConseil européen le 28 janvier 2008 lors-qu’il a été déclaré que la colonisationdans les territoires occupés, y compris àJérusalem-Est, est illégale au regard dudroit international. C’est cela qui est enjeu. Il faut mettre un terme à l’occupa-tion. Il faut créer un Etat viable, continu

et indépendant. Conformément à la décla-ration de George Bush en juin 2002.Peu après que votre lettre à l’Unioneuropéenne eut été rendue publique,Israël a gelé pendant une semaine letransfert du produit des taxes sur lesimportations palestiniennes qu’il collec-te en votre nom. S’agissait-il d’une puni-tion ?

Cet argent, c’est celui des contribua-bles palestiniens. Il nous appartient. Auxtermes du protocole de Paris, Israël esttenu de collecter ces sommes et de nousles reverser. Qu’une lettre pareille consti-tue la cause d’un retard ou d’une suspen-sion de ce versement est quelque choseque je trouve incompréhensible. Uneautre chose : le président MahmoudAbbas nous soutient intégralement danscette affaire. Mon gouvernement estd’abord son gouvernement.Pensez-vous qu’Israël va stopper lesconstructions dans les colonies ?

Si vous regardez les statistiques avantet après Annapolis, plutôt qu’un gel de lacolonisation, il y a eu une accélération.Nous ne pouvons l’accepter comme unefatalité. Nous tentons de faire en sorteque ça ne le devienne pas. C’estcrucial pour la viabilité du pro-cessus de paix.Dans ces conditions, pensez-vous qu’un accord de paixpuisse être trouvé avant la finde l’année, comme le deman-de Georges Bush ?

Si vous me demandez si celaest possible, je réponds oui.Car tous les problèmes quisont sur la table ont déjà été discutés parle passé, et les contours d’une solutiondurable sont connus et font l’objet d’unconsensus international. Donc, oui, c’estpossible. Mais est-ce probable ? Je ne lecrois pas, étant donné ce qui se passeavec la « feuille de route ».

Pensez-vous qu’il y a un manque devolonté politique de la part d’Israëlconcernant le processus de paix ?

Ce qui compte, ce sont les actes. Je neveux pas perdre de temps à spéculer surles intentions. Ce n’est pas mon tempéra-ment. J’ai des objectifs et la communauté

internationale les a acceptéslors de la conférence de Parisau mois de décembre. Chacuna des obligations pour faireassurer le succès de ce proces-sus. Mais les progrès doiventêtre symétriques.Vous ne perdez pas espoir ?

Pas du tout. Nous essayonstoujours de façon non violenteet civilisée de faire en sorte que

ce qui peut apparaître comme un faitaccompli ne soit plus un fait accompli. Jeme suis engagé pour cela.Croyez-vous qu’il soit possible deconstruire une économie dans un paysoccupé ?

Oui, on peut le faire. Mais peut-on

construire quelque chose de durable ?C’est une autre question. Cependant,cela ne veut pas dire que l’on ne doit pasessayer de renforcer nos capacités, dansle domaine économique comme sécuritai-re, pour tenter d’édifier un Etat en dépitde l’occupation et des restrictions de tou-te nature. Car cela nous place dans unemeilleure position pour mettre un termeà l’occupation.

Bien sûr, nous pourrions le faire plusrapidement, plus efficacement, s’il n’yavait pas de contraintes. Mais il est impor-tant d’agir de façon positive sur le ter-rain. Ne serait-ce que pour ranimer l’es-poir et la confiance en nous-mêmes.

Laissez-moi vous rappeler qu’Israëln’a pas été créé le 15 mai 1948. Cette datecorrespond juste à la proclamation del’Etat. Ses institutions, elles, avaient étébâties bien avant.Jusqu’à quand allez-vous continuerà fournir des efforts qui ne sont pasrécompensés par des progrès dansles négociations ?

Que pouvons-nous faire afin que leschoses progressent ? J’ai deux options.La première est de m’asseoir et de meplaindre sans fin. La seconde, de prendrele risque de construire quelque chosedans l’adversité.Y a-t-il une limite de tempspour vous ?

Pour vous dire la vérité, il m’est diffici-le de penser en termes de temps. Je n’aipas de contrôle sur le temps. Je ne saispas quand nous allons pouvoir réglertout cela. Pour le moment, nous devonsnous assurer que la possibilité d’obtenirune solution soit préservée. Nous devonsconserver un filet de sécurité. C’est pourcela que les négociations doivent se pour-suivre. Il n’y a pas de plan B. a

Propos recueillis parBenjamin Barthe

et Michel Bôle-Richard

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Le premier ministre palestinien,Salam Fayyad, en juin 2007. AWAD AWAD/AFP

« La communautéinternationaledoit prendreposition en faveurdu processusde paix »

Salam Fayyad

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CUBA

La Havane remeten cause le dogmede l’égalitarismesalarial

NEW YORK

CORRESPONDANT

Selon John McCain, le futur candidatrépublicain à l’élection présidentiellede novembre, son adversaire démo-

crate, Barack Obama, augmenterait lesimpôts de « tous les Américains » s’il étaitélu. Ce dernier juge pour sa part « injus-te » de comparer la politique fiscale préco-nisée par M. McCain à celle menée parGeorge Bush : les propositions du séna-teur de l’Arizona sont pires, selon lui.

Entre les deux prétendants, le fer estengagé sur le terrain économique.M. McCain propose de pérenniser les bais-ses d’impôts générales accordées sousM. Bush, d’augmenter encore celles desplus fortunés, de réduire l’impositiond’une partie des classes moyennes de2 000 dollars par an, enfin d’abaisser de35 % à 25 % celle des entreprises. Il finan-cerait le manque à gagner fiscal par uneréduction du « gaspillage » public.

Plan de relance fédéralM. Obama, lui, veut un nouveau plan

de relance fédéral de 50 milliards de dol-lars (après les 150 milliards dégagés enmai par M. Bush). Il rétablira l’impositiondes revenus supérieurs à 250 000 dollarspar an à son précédent niveau (de 36,5 %à 39 %) et taxera plus lourdement les plus-values boursières (de 15 % à 28 %). Ainsipourra-t-il allouer aux salariés 1 000 dol-lars de réduction fiscale par foyer en

moyenne, réduire l’impôt des plus faibles(les retraités pauvres ne seront plus impo-sés) et financer l’éducation et l’assurance-santé des nécessiteux. Il souhaite aussidiminuer le déficit budgétaire.

Pourtant, crise et nécessité de convain-cre les « indépendants » obligent, les deuxcandidats font des concessions au regardde leur « philosophie économique ».M. McCain, adversaire des dépenses publi-ques, a admis, mardi 10 juin, que l’Etatdevait plus aider les propriétaires endettéset souhaité une augmentation des alloca-tions chômage. M. Obama envisage de« différer » certaines de ses propositions.

Mercredi, le Livre beige, rapport sur laconjoncture de la Réserve fédérale (Fed,banque centrale américaine), a rappelé lestermes du débat : entre la hausse des prixde l’énergie et de l’agroalimentaire et unmarché de l’emploi alarmant, la consom-mation est « coincée ». Le risque de réces-sion n’est pas enrayé. Dette, constructionau ralenti, crédit resserré, recul des inves-tissements, pouvoir d’achat en berne, lesenjeuxsont multiples.Pourtant, laconfron-tation politique se concentre presque uni-quement sur la fiscalité. « Aucun des deuxcandidats n’aborde la question de fond, ditDonald Grimes, professeur d’économie à

l’université du Michigan à Ann Arbour. En1980, le taux d’épargne des Américains attei-gnait 10 %. Il est tombé à 0,5 %. La faiblessedu dollar s’ajoute à une dette énorme. Maispersonne ne peut se faire élire en disant :“Vous devrez apprendre à vivre heureux enconsommant moins et différemment”. »

En attendant, mauvaise nouvelle pourM. Obama, l’une des trois personnes char-géesde lui trouver uncolistier a démission-né mercredi. Jim Johnson, ex-PDG de Fan-nyMae,premier préteur immobilieraméri-cain, estaccusé d’avoir obtenu un empruntà des conditions très avantageuses. a

Sylvain Cypel

Le candidat républicain veutrenforcer les baisses d’impôtsaccordées sous M. Bush.Son adversaire démocratesouhaite taxer plus lourdementles plus-values boursières

À LA HAVANE, une réforme de la politi-que salariale remet en cause un dogme durégime castriste, l’égalitarisme. Dans sonédition du mercredi 11 juin, le quotidienofficiel Granma évoque une réglementa-tion du ministère du travail datée du2 févrierqui aligne lessalaires desentrepri-ses d’Etat (90 % de l’économie) sur ceuxdéjà en vigueur dans les entreprises depointe, contrôlées par l’armée.

Désormais, plusieurs modes de paie-ment pourront coexister dans une entre-prise. « Le travailleur gagnera en fonctionde sa productivité », explique Granma, quicite le vice-ministre du travail, CarlosMateu Pereira. « La tendance était quetout le monde touche le même salaire, dit-il.Cet égalitarisme n’est pas convenable. »« Il y a parfois beaucoup de paternalis-me », ajoute-t-il. « La quantité et la quali-té » du travail seront donc prises en comp-te dans le calcul de la rémunération.

D’après le vice-président José RamonMachado Ventura, les Cubains « nedevraient pas avoir peur des hauts salai-res », à condition que cela « se traduisepar des résultats concrets » en termes deproduction et de services. Alors que lesalaire moyen est de 408 pesos nonconvertibles (12 euros), la fin du plafondsalarial en vigueur pourrait modifier l’at-titude des médecins, des enseignants etd’autres professionnels, qui ont abandon-né l’exercice de leur métier pour une acti-vité informelle plus rémunératrice : fairele taxi, louer une chambre, etc.

A La Havane, 19 % des personnes enâge de travailler n’ont pas d’emploi,selon des sources officielles. Cependant,une moitié des Cubains a accès à des devi-ses ou aux pesos convertibles, provenantdes touristes, des entreprises étrangèresprésentes sur l’île ou des fonds envoyéspar des proches résidant à l’étranger.

La réforme salariale devra s’appliquerpartout avant la fin du mois d’août. a

Paulo A. Paranagua

BUENOS AIRES

CORRESPONDANTE

L’espoir suscité par l’électiond’une femme à la présidence del’Argentine semble être retombé.Six mois après son investiture, lapéroniste Cristina Kirchner estconfrontée à plusieurs secteurs dela société et à un climat social ten-du, qui ont écorné sa popularité.En succédant à son mari, NestorKirchner, elle avait promis unnouveau style de gestion, unmeilleur fonctionnement des ins-titutions, « un temps de dialogue,où il faut écouter plus que parler ».

Aujourd’hui, Mme Kirchner esten conflit avec les agriculteurs, quiont lancé depuis trois mois unefronde rurale sans précédent, avecl’Eglise catholique, qui lui repro-che de masquer les chiffres de lapauvreté, et avec une grande partiedes médias, qui la qualifientd’« arrogante ». Comme sonmari, elle ne donne pas de confé-rence de presse et n’accorde pasd’interview. Sa popularité est tom-bée à 26 % d’opinions favorables,d’après des sondages.

Des analystes évoquent un pou-

voir « de double commande » avecNestor Kirchner. Président duParti péroniste, ce dernier mobili-se les militants pour défendre legouvernement, cherchant à ravi-ver le souvenir du couple légen-daire Juan Peron et Evita. Les Kir-chner gouvernent avec deux outrois fidèles. Il n’y a jamais de réu-nion du conseil des ministres.

Appels au dialogueSur un ton inusuel, Cristina Kir-

chner a demandé pardon, lundi9 juin : « au cas où quelqu’un seserait senti offensé par une de mesparoles ou un de mes gestes ».Depuis le début du conflit avec lecampo (la « campagne »), elleaccuse les agriculteurs de fomen-ter un coup d’Etat. Ceux-ci protes-tent contre une hausse des impôtssur les exportations de soja, laprincipale richesse du pays.

Le 8 juin, ils avaient suspenduleur troisième grève, espérant ungeste du gouvernement. Le lende-main, Mme Kirchner a assuré queles taxes sur les exportationsétaient destinées « à une meilleureredistribution de la richesse ». Pour

la première fois, elle a promis quel’argent irait à la constructiond’hôpitaux, de logements sociauxet de routes. Les quatre associa-tions rurales se sont félicité qu’il yait des investissements contre lapauvreté, tout en soulignant queles fonds ne proviennent que dumonde agricole, sans toucher dessecteurs prospères comme les ban-ques, le pétrole ou les mines.

Malgré les appels au dialoguede l’Episcopat, de l’opposition etdes hommes d’affaires, le conflitrural semble loin d’être résolu.Dans la foulée, les camionneursont annoncé, mardi, une grève illi-mitée avec des blocages routiers.

Alors que le prix des denrées ali-mentaires s’envole, l’Argentine estl’un des principaux producteurs decéréales. Troisième exportateurmondial de graines de soja, c’estaussi le deuxième pour le maïs et lecinquième pour le blé. De l’aveumême de Mme Kirchner, le pays a lacapacité de nourrir 500 millions depersonnes. La fronde rurale risquetoutefois de faire sentir ses effetssur les exportations argentines. a

Christine Legrand

International

Aux Etats-Unis, le débat électoral entre M. McCainet M. Obama se focalise sur la fiscalité

ARGENTINE CRISE SOCIALE ET POLITIQUE

La fronde rurale compromet la popularitéde la présidente argentine Cristina Kirchner

EX-YOUGOSLAVIEArrestation en Serbied’un ancien conseillerde Radovan KaradzicLA HAYE. La cavale de StojanZupljanin, qui fut l’un desconseillers de l’ancien chef politi-que des Serbes de Bosnie, Rado-van Karadzic, a pris fin mercredi11 juin. Accusé par le Tribunalpénal international pour l’ex-You-goslavie (TPIY) de crimes contrel’humanité et de crimes de guerrecommis en Bosnie-Herzégovineen 1992, Stojan Zupljanin a étéarrêté près de Belgrade par lapolice et les services de renseigne-ments serbes. – (Corresp.)

ÉTATS-UNISPremière exécution au Texasdepuis la fin du moratoireWASHINGTON. Un homme de37 ans, Karl Chamberlain,condamné à mort pour le viol etle meurtre d’une jeune femme, aété exécuté, mercredi 11 juin, à laprison de Huntsville, au Texas.Il s’agit de la première exécutionau Texas depuis que la Coursuprême a mis fin à un moratoirede fait de sept mois en se pronon-çant sur la constitutionnalité del’injection mortelle.Une douzaine d’autres exécu-tions sont prévues dans cet Etatavant la fin de l’été. – (AFP.)

CANADAExcuses du premier ministrecanadien aux autochtonesOTTAWA. Le premier ministrecanadien, Stephen Harper, a pré-senté, mercredi 11 juin devant leParlement, des excuses officiellesaux populations indiennes pourles discriminations et les mau-vais traitements du passé, notam-ment la scolarisation forcée desti-née à couper les enfants de leursracines. Quelque 150 000 élèvesont été envoyés, de 1870 à 1970,dans des pensionnats où étaitmenée une politique d’assimila-tion afin de « tuer l’Indien dansl’enfant ». – (AFP, Reuters.)

Moment de détente pour John McCain avant son intervention devant des patrons, le 10 juin, à Washington. CHARLES DHARAPAK/AP

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Page 7: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

Lancé mercredi 11 juin,ce télescope spatialdétectera les rayonsgamma, indices dephénomènes cosmiquestrès énergétiques

LES APICULTEURS de l’Est de laFrance sont en alerte. Depuis ledébut du mois de mai, ils obser-vent d’importants dépeuple-ments de leurs ruchers, le sud del’Alsace étant le plus touché. « Lesouvrières partent butiner mais nereviennent pas et le rucher finit pardépérir », constate Daniel Limon,président du Syndicat des apicul-teurs professionnels d’Alsace, Lor-raine et Champagne.

« La situation est préoccupante,certaines colonies ont totalementdisparu, même dans les montagnesexemptes d’agriculture donc de pes-ticides », constate Raymond Bor-neck, président du Syndicat apico-le du Jura. Pour lui, le responsa-ble est Nosema ceranae, un cham-pignon pathogène détecté pour lapremière fois dans cette partie dela France en 2005.

Les syndicats nationaux, enrevanche, désignent d’autres cou-pables : les pesticides. « L’apicul-ture allemande est en crise. Le longde la vallée du Rhin, 90 % du chep-tel est menacé˘par les phytosanitai-res agricoles. Huit d’entre eux, dontle Poncho, viennent d’être interditsd’urgence par le gouvernement fédé-ral. Ces produits ne s’arrêtent pas àla frontière ! », affirme Henri Clé-ment, président de l’Union natio-nale des apiculteurs français.Yves Vedrenne, président du Syn-dicat national des apiculteurs,explique pour sa part qu’« il y acertainement plusieurs phénomè-nes conjugués dans l’Est de la Fran-ce, mais les soupçons pèsent forte-ment sur les semis de maïs enrobésde Cruiser, un insecticide ».

Il y a une quinzaine de jours,des échantillons ont été prélevéspour analyses dans des ruchersayant subi des pertes. « Les pre-miers résultats montrent des quan-tités de spores de Nosema ceranaetrès élevées, de nature à entraîner lamort des abeilles », confirmeMarie-Pierre Chauzat de l’Agen-ce française de sécurité sanitaire

et alimentaire (Afssa). Mais lascientifique reste prudente : « Ilest difficile d’attribuer la dispari-tion des ouvrières à la seule nosemo-se. Le symptôme peut être égale-ment dû au varroa, un acarien pré-sent dans toutes les coloniesd’abeilles. » Il n’y a donc peut-êtrepas une mais plusieurs causesdont la synergie mène au dépeu-plement massif et rapide des colo-nies d’abeilles.

« Depuis des années, les instan-ces nationales sont focalisées sur lespesticides et ignorent les problèmessanitaires causés par les parasito-ses. C’est grave ! », s’insurge Ray-mond Borneck, dont la colère nefait que souligner à quel point lemilieu apicole est divisé.

Manque de formationCe qui freine une organisation

plus professionnelle de la filière.Les apiculteurs manquent de for-mation, peu de vétérinaires sontspécialisés, les agents des groupe-ments sanitaires des abeilles sontdes bénévoles… « Nous ne dispo-sons même pas d’un institut techni-que pour nous donner des directivesclaires de lutte contre les mala-dies », déplore Daniel Limon. Lacréation d’un tel institut, interfaceentre le monde académique et lesprofessionnels de l’apiculture, faitcependant partie d’une proposi-tion de résolution du député Jac-ques Remiller (UMP, Isère), dépo-sée en octobre 2007.

En attendant, dans l’Est, l’heu-re est à l’inquiétude et à l’urgence.Le comité technique apicole d’Al-sace a fait une demande de subven-tion auprès de la région, afin d’éta-blir une cartographie sanitaire desexploitations professionnelles tou-chées. Une épidémie de nosemoseen pleine saison de butinage seraitune catastrophe économiqued’autant que le Fumidil B, le seulantibiotique efficace, n’est pasautorisé à la vente en France. a

Olivier Rescanière

Environnement & Sciences

S i tout le rayonnement électro-magnétique de l’Univers serésumait sur un piano, les

ondes radio seraient les basses, lalumière visible les trois notesd’Au clair de la lune jouées aumilieu du clavier et les rayonsgamma la partie la plus aiguë…pilonnée par un marteau-piqueur. Cette fraction du spectretémoigne en effet des phénomè-nes les plus violents du cosmos,qui mettent en jeu des quantitésd’énergie proches de l’inimagina-ble. C’est elle que va observer letélescope spatial Glast (Gamma-ray large area space telescope),lancé mercredi 11 juin par unefusée américaine Delta-II, depuisla base de Cap Canaveral (Flori-de). Glast est un projet internatio-nal rassemblant les Etats-Unis, laFrance – à travers cinq équipes –,l’Allemagne, l’Italie, le Japon et laSuède, pour un budget total de690 millions de dollars.

Les rayons gamma sont éner-vants pour les astronomes. Telle-ment énergétiques qu’ils transper-cent l’espace comme une balle defusil une motte de beurre. Maisdès qu’ils rencontrent la denseatmosphère de notre Terre, ilsinteragissent avec ses moléculeset ne parviennent pas au sol.Seuls les rayons de très hauteénergie peuvent y être détectés demanière indirecte, via les casca-

des de particules qu’ils engen-drent. Pour étudier cette lumièrecapricieuse, mieux vaut doncmonter au-dessus de l’at-mosphère. Comme le résumeBenoît Lott, directeur de recher-ches au Centre d’études nucléai-res de Bordeaux-Gradignan etcoordonnateur d’un des groupesqui analyseront les résultats deGlast, « l’astronomie gamma estune science jeune, née avec l’avène-ment de l’ère spatiale ».

Glast, qui évoluera à 560 kmd’altitude, constitue donc le der-nier venu d’une lignée d’instru-ments, dont les plus marquantsont été l’européen COS-B(1975-1982) et l’américain Comp-ton Gamma-Ray Observatory(CGRO, 1991-2000). L’améliora-tion que proposera Glast par rap-port à CGRO est énorme, souli-gne Benoît Lott : « La sensibilitéde l’instrument sera meilleure,d’un facteur 25. Son champ devision sera aussi plus large puisqueGlast couvrira 20 % du ciel à toutmoment et verra tout le ciel en deuxorbites, soit trois heures, ce qui estimportant car l’Univers, en gam-ma, est extrêmement variable. »

Saut technologiquePour réaliser ce saut qualitatif,

il a fallu changer de technologie,explique Berrie Giebels, du labo-ratoire Leprince-Ringuet :« L’instrument Egret qui équipaitCGRO fonctionnait avec une cham-bre à étincelle. C’est une techniqueassez encombrante, qui limite lechamp de vue, utilise du gaz et doncimplique des fuites. LAT, l’instru-ment principal de Glast, marcheavec des cristaux de silicium. »

Du saut technologique découle-

ra un saut scientifique. CGRO adétecté 271 événements gamma.Glast, au cours de ses cinq ans demission, devrait en collecter dixfois plus. Il nous transporteradans les environnements les plusextrêmes du cosmos, où de lamatière est accélérée à une vitesseproche de celle de la lumière :dans le maëlstrom de matièretombant vers des trous noirsimmenses, contenant la masse demillions voire de milliards deSoleils ; dans la fusion de trousnoirs ou d’étoiles à neutrons ;dans des hypernovae – explo-sions d’étoiles géantes –, etc.

Les chercheurs espèrent aussique Glast pourra les aider à résou-dre certaines énigmes, comme cel-le de la matière noire qui demeu-re invisible alors qu’on sait lapeser. Les particules mystérieu-ses qui la composent pourraientse trahir sous l’« œil » de LAT :en se rencontrant, elles s’annihile-raient mutuellement et créeraientdes rayons gamma. Encore de laviolence… a

Pierre Barthélémy

Le satellite Glast scruterala violence de l’Univers

APICULTURE ALERTE SANITAIRE

Les ruches de l’Est de la Francese dépeuplent de façon inquiétante

L’Univers vuen lumière visible

Voie lactée

L’Univers en rayons gammatel que le représenteraGlast après un and’observations So

urce

: N

ASA

Voie lactée

Suivant qu'on l'observe en lumière visible ou dans la partie du spectre électro-magnétique correspondant aux rayons gamma, l'Universne présente pas le même visage. Dans le visible, notre représentation du ciel est très largement

dominée par la Voie lactée. En gamma, la barre centrale de notre galaxie est certes présente mais l'image est parsemée de points chauds, qui indiquent la présence de super-trous noirs au centre d'autres galaxies.

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Page 8: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

UE AVANT LE VOTE IRLANDAIS

Les Lords ouvrentla voie à la ratificationpar Londresdu traité de LisbonneLONDRES

CORRESPONDANTEn rejetant, lors d’un vote très attendu,un dernier appel pour un référendum surle traité européen de Lisbonne, la Cham-bre des lords britannique a libéré le che-min, mercredi 11 juin, pour sa ratificationdéfinitive par la Grande-Bretagne. Cevote est un signal aux Irlandais, invités àapprouver le texte, jeudi 12 juin, lors d’unréférendum resté incertain jusqu’aubout.Au Royaume-Uni, le projet de loi de ratifi-cation doit désormais revenir pour un der-nier imprimatur aux Communes, qui l’adéjà approuvé. Il sera ensuite promulguépar la reine Elizabeth II, qui devra écrireau bas du traité la fameuse formule, « lareine le veut », suivie de sa signature. Sonassentiment, purement formel, est atten-du pour la fin du mois ou au début dejuillet, juste après le début de la présiden-ce française de l’Union européenne.

Un amendement voué à l’échecLes pairs eurosceptiques ne se faisaient

pas d’illusion. En raison de l’arithméti-que parlementaire en faveur de la ratifica-tion, l’amendement réclamant l’organisa-tion d’un référendum déposé par lesconservateurs n’avait aucune chanced’aboutir. La coalition pro-européenneregroupant les travaillistes, les libéraux-démocrates (centristes), les conserva-teurs de la vieille garde pro-Lisbonne etdes indépendants l’a facilement emportépar 280 voix contre 218. « Le traité de Lis-bonne est totalement différent de la Consti-tution. L’argument démocratique en faveurd’un référendum est très faible », a souli-gné le pair travailliste, Lord Anderson.Les députés de la Chambre des commu-nes avaient approuvé le document le11 mars après le rejet d’une motion simi-laire de la droite par 346 voix contre 206.

L’autre obstacle, le recours en justicedéposé par Stuart Wheeler, un donateurdu Parti conservateur exigeant un référen-dum, a été mis en touche par la HauteCour de Londres. Aux yeux de cet hommed’affaires excentrique ayant fait fortunedans les paris sportifs, Gordon Brown n’apas respecté l’engagement de son prédé-cesseur, Tony Blair, d’organiser uneconsultation sur la Constitution. « Lerefus de tenir un référendum n’est pas seule-ment immoral, mais illégal », a déclaréson avocat. Reste qu’Outre-Manche, oùles référendums sont rarement utilisés,l’Acte unique européen et le traité deMaastricht ont été adoptés par voie parle-mentaire.

Que va-t-il se passer avec la signatureroyale si l’Irlande, le seul pays européen àêtre tenu par sa Constitution d’avoir unréférendum, dit non ? « Un rejet irlandaisaugmenterait la pression sur GordonBrown pour qu’il abandonne le processusde ratification royale. Il devrait résister à cesrequêtes jusqu’au conseil européen du19 juin », estime Hugo Brady, un cher-cheur du Center for European Reform, uncentre d’études européen basé à Londres.

Le vote de la Chambre haute sur le trai-té de Lisbonne a été éclipsé en Grand-Bre-tagne par la victoire obtenue de justessele même jour par le premier ministre,Gordon Brown, aux Communes, sur sonprojet de loi sur l’extension de détentionpréventive de 28 à 42 jours dans les affai-res de terrorisme. Une quarantaine dedéputés travaillistes ont voté contre ce tex-te, qui a suscité des tensions au sein duparti majoritaire. Le vote a été acquis par315 voix contre 306, alors que le gouverne-ment dispose théoriquement d’une majo-rité de 65 voix. a

Marc Roche

MADRID

CORRESPONDANTEAu troisième jour de la grève d’une partiedes camionneurs espagnols, qui deman-dent une réduction temporaire desimpôts sur les carburants et la fixation detarifs minimaux pour le transport de mar-chandises, le gouvernement de José LuisRodriguez Zapatero a opté pour la métho-de forte, mercredi 11 juin.

Quelque 25 000 policiers et gardescivils ont été mobilisés pour disperser despiquets de routiers qui bloquaient la circu-lation des poids lourds et pour escorter descamions non grévistes. L’impasse danslaquelle se trouvent les négociations, lesperturbations causées par des grévistesminoritaires (les deux organisations à l’ori-gine de la grève représentent 20 % de laprofession) et les reproches de l’opposi-tion l’ont convaincu de hausser le ton.

Fermées aux routiers depuis lundi, lesvoies de passage vers la France de La Jon-quera (Catalogne) et d’Irun (Pays basque)ont été dégagées par la police. Une soixan-taine de conducteurs ont été interpellés.Mardi, un camionneur qui participait à unpiquetdegrèveavait été tué ententant d’ar-rêter un véhicule qui forçait le passage.Dans la nuit de mardi à mercredi, un rou-tier a été gravement brûlé dans l’incendievolontaire de son camion. Mercredi, desdizaines de blessés ont été répertoriés aucours d’affrontements entre les forces del’ordre et des camionneurs, des pêcheurs(en Galice et à Séville) et des agriculteurs(Almeria), qui demandent eux aussi desaides.

Le ministre de l’intérieur, Alfredo PérezRubalcaba, a suggéré aux transporteursnon grévistes de solliciter la protection dela police. Les forces de l’ordre ont escortédes camions qui allaient livrer des vivresau marché de gros de Barcelone, du carbu-rant dans les stations-service ou des médi-caments en Catalogne. Certaines pompesà essence étaient à court de carburant dèsmardi, surtout en Catalogne. Dans lesgrandes surfaces, les produits frais com-mencent à se faire rares. Les producteurs-exportateursde fruits et légumes ont quali-fié de « dramatique » leur situation.

Le ministre de l’intérieur a aussi offert àl’industrieautomobile d’assurer sonappro-visionnement. Paralysée par le manque depièces détachées, la construction automo-bile,premiersecteurde l’industrie enEspa-gne (elle produit 13 000 véhicules parjour) est touchée de plein fouet. Des usinesVolkswagen, Renault, Nissan, Citroën,Seat et Mercedes-Benz ont dû arrêter tota-lement ou partiellement leur production.

Premier mouvement socialLe gouvernement a conclu un accord

avec les entreprises non grévistes. Mais lesorganisations à l’origine du mouvementont affirmé qu’elles ne signeraient rientant que le gouvernement n’accepterait

pas la fixation d’un prix plancher pour letransport des marchandises, ce qu’il serefuse à faire. Confronté à son premiermouvement social depuis son arrivée aupouvoir, en avril 2004, M. Zapatero aannoncé une réunion des partenairessociaux le 18 juin.

Au Portugal, le gouvernement sembleavoir trouvé un accord avec les organisa-tions de transporteurs, qui étaient aussi engrève. Mercredi, les avions n’étaient plusravitaillés en carburant à l’aéroport de Lis-bonne.

AuRoyaume-Uni, les transporteurs rou-tiers de Shell ont déposé un préavis de grè-ve de quatre jours à partir de vendredi13 juin. Les chauffeurs routiers d’autres

compagnies pétrolières ou les indépen-dants pourraient se joindre à ce mouve-ment de protestation contre la hausse dugazole. Les camionneurs menacent de blo-quer l’accès des raffineries et des dépôtsafin de perturber l’approvisionnement desstations-service.

L’appel lancé par Gordon Brown auxautomobilistes, leur demandant de paspaniquer, a eu l’effet inverse, comme enattestent les queuesdevant les stations-ser-vicesdu nord de l’Angleterre. Les protesta-taires exigent par ailleurs l’annulationd’une hausse des taxes sur les carburantsprévue en octobre. a

Cécile Chambraudavec Marc Roche (à Londres)

Les 27 ministres de l’emploiont maintenu et étendula dérogation à la règledes 48 heures. Le Parlementeuropéen devrait se saisirde cette affaire

EN PLEIN CONFLIT sur les 35 heures,l’accord européen sur le temps de travailconclu par le ministre du travail fran-çais, Xavier Bertrand, tombe plutôt mal.Le texte, qui maintient la possibilité dedéroger à la durée légale hebdomadairedes 48 heures fixée dans l’Union euro-péenne, inquiète les syndicats français.

Ces derniers, qu’ils appellent ou non àla journée d’action sur le temps de travailet les retraites du 17 juin préparée par laCGT et la CFDT, dénoncent « un jour som-bre pour le droit social européen », commeFO, « un grand bond en arrière de l’Europesociale », pour la CFTC, ou « une véritablerégression sociale », pour la CGT.

Conscient du télescopage des deux dos-siers – la directive européenne et le projetde loi sur la représentativité et le temps detravail qui sera présenté au conseil desministres le 18 juin –, M. Bertrand s’est

voulu rassurant. « Les changements quiinterviendront au niveau européen ne dimi-nueront pas les garanties pour les Fran-çais », a-t-il dit au Monde. La possibilité,inscrite dans la directive, de considérerles temps de garde comme des temps derepos ne sera pas transposée en France, aassuré M. Bertrand, « notamment pourpréserver la situation des hospitaliers ».

« Volte-face »« Avec cet accord, nous encadrons bien

mieux l’“opt out” [la possibilité dedérogation] qu’auparavant, et nousl’avons plafonné à 60 ou 65 heures au lieude 78 heures actuellement », a-t-il faitvaloir. Le ministre du travail, qui a assou-pli la position de la France, abandonnantle camp de ceux qui étaient pour la sup-pression de l’“opt out”, se défend de toutrecul. « En cas d’échec de la discussion, le

commissaire européen nous avait indiquéqu’il retirerait la directive et nous aurionseu une situation de no man’s land », plai-de-t-il.

Ces assurances n’ont pas calmé les syn-dicats. « La volte-face de la position françai-se, qui jusqu’ici s’appuyait sur “la crédibili-té du modèle social européen et la protectionde la santé des travailleurs”, est-elle le signed’une présidence française aux optionsanglo-saxonnes au détriment du modèlesocial français ? », s’interroge ainsi laCFTC. Pour la CGT, qui prépare la jour-née d’action du 17 juin, « les déclarationsd’autosatisfaction du ministre du travailfrançais, Xavier Bertrand, éclairent l’enjeudu projet de loi de déréglementation dutemps de travail (…), qui anticipe déjà surla mise en œuvre de “l’opt out” dans le droitfrançais ». a

Rémi Barroux

Des policiers espagnols à Iznalloz, près de Grenade, où des routiers en grève bloquaient la route, mercredi 11 juin. JOSE LUIS ROCA/AFP

Europe

Les socialistes européens se mobilisent contrela possibilité de l’allongement du temps de travail

La Grèce, la Finlande etl’Estonie approuvent le traité

Avec le vote de la Grèce jeudi 12 juin, de laFinlande et de l’Estonie mercredi, 18 des27 Etats membres ont autorisé la ratifica-tion du traité de Lisbonne, approuvé par lesdirigeants des 27 Etats membres le 19 octo-bre 2007. Outre l’Irlande, huit Etats doi-vent encore se prononcer. Aucune surprisen’est attendue au Royaume-Uni, en Italie,aux Pays-Bas, en Belgique, ni même dansles trois pays qui n’ont pas commencé leprocessus de ratification (Espagne, Suède,Chypre). La situation demeure incertaineen République tchèque : la Cour constitu-tionnelle doit juger si le traité de Lisbonnerespecte la Constitution tchèque.

CARBURANTS ET CONFLITS CIRCULATION BLOQUÉE EN ESPAGNE ET PRÉAVIS DE GRÈVE AU ROYAUME-UNI

M. Zapatero mobilise 25 000 policiers pour disperser les routiers en grève

BRUXELLESBUREAU EUROPÉEN

Une partie des socialistes européensont entrepris de livrer bataille à uncompromis sur la directive « temps

de travail », adopté mardi 10 juin au petitmatin par les vingt-sept ministres de l’em-ploi. Ils contestent le maintien, dans cetexte, d’une dérogation à la règle des48 heures hebdomadaires – la normeeuropéenne –, à la demande du Royaume-Uni.

Sauf convention collective allantau-delà, le temps de travail sera plafonnédans l’Union européenne à 60, ou 65 heu-res hebdomadaires – contre une limitethéorique de 78 heures à ce jour.

Les opposants au compromis enten-dent combattre les principales modalitésdu texte lors de son examen par le Parle-ment européen. D’après l’eurodéputéespagnol Alejandro Cercas, le rapporteursocialiste sur le projet de directive, « laposition commune adoptée par le conseilrend la conciliation avec le Parlement euro-péen extrêmement difficile ». A quelquesmois des élections européennes, enjuin 2009, les socialistes européens pour-raient se montrer d’autant plus fermesqu’ils tiennent, avec ce texte dénoncé parl’ensemble des syndicats, un dossier trèsemblématique pour se démarquer desconservateurs du PPE. Martin Schulz, lechef du groupe socialiste, a reproché àplusieurs reprises à José Manuel Barroso,le président de la Commission, d’avoirfait « l’autruche » en matière sociale pen-dant son mandat.

Un vote en plénière n’est pas attenduavant le mois de décembre, et pourraitmême avoir lieu sous présidence tchèque,en janvier 2009. « Il faudra voir quelle estl’ambiance : le processus pourrait prendre

du temps si les fronts sont très opposés dansle contexte de la campagne électorale pourles européennes », dit un diplomate.

La Confédération européenne des syn-dicats (CES), qui salue par ailleurs lesavancées faites dans le domaine du tra-vail intérimaire, a promis de mobiliser leseurodéputés sensibles à sa cause, lorsquel’examen du texte en seconde lecture com-mencera, après l’été. « Le texte va affaiblirconsidérablement la situation des salariés,surtout dans les pays qui ne disposent pasde conventions collectives solides commedans les nouveaux Etats membres », craintCatelene Passchier, une des responsablesde la CES, à Bruxelles.

Position du Labour britanniqueUn rejet du texte en bloc au Parlement

est cependant peu probable, car une telledécision doit être votée à la majorité abso-lue des eurodéputés. Lors de la premièrelecture, au printemps 2005, le Parlements’était prononcé, après des débats hou-leux, contre la dérogation aux 48 heuresdemandée par le Royaume-Uni, et pour la

prise en compte de l’ensemble des heuresde garde dans le temps de travail. Le grou-pe socialiste pourrait être partagé entreles élus qui, comme en France, ou en Espa-gne, annoncent une opposition frontale,et ceux dont les gouvernements ontapprouvé le compromis survenu mardientre les Etats membres. « L’enjeu sera devoir dans quelle mesure les eurodéputésseront en ligne avec les positions de leur capi-tale d’origine, à quelques mois des électionseuropéennes », dit un expert des joutes par-lementaires. Seul cinq pays se sont abste-nus lors du côté du conseil – l’Espagne, laBelgique, la Hongrie, Chypre, la Grèce –en dénonçant une « régression » sociale.

La position du Labour britanniquesera importante. Il y a trois ans, les tra-vaillistes britanniques avaient voté contrele maintien de la dérogation sur les48 heures défendu par Tony Blair. L’atti-tude des sociaux-démocrates allemandsest elle aussi incertaine : c’est un desleurs, le ministre du travail, Olaf Scholz,qui négocie pour le gouvernement alle-mand. Faute de majorité pour bloquer letexte, M. Schulz devrait plaider pour une« opposition constructive » afin d’amen-der le projet de directive sur les points lesplus controversés, la dérogation, ou lafaçon de prendre en compte le temps degarde. a

Philippe Ricard

L’accord européen inquiète les syndicats français

RÉFÉRENCES

Le compromis négocié par les Vingt-Sept confirme le plafond de 48 heu-res de travail hebdomadaires.Il maintient aussi la dérogation défen-due par les pays libéraux, qui permet àun salarié de travailler au-delà de ce pla-fond.Les ministres du travail ont décidé de fai-re la distinction entre temps de gardeinactif et actif, seul ce dernier devantêtre pris en compte dans le temps de tra-vail. La Cour de justice européenne aadmis à plusieurs reprises que lestemps de garde devaient être considé-rés comme du temps de travail.

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Page 9: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

Les sénateurs du PS, du PCF et desVerts ont claqué la porte de la com-mission des lois du Sénat, mercredi

11 juin, où était examiné le projet de réfor-me des institutions. La majorité sénatoria-le venait d’adopter un amendement durapporteur, Jean-Jacques Hyest (UMP,Seine-et-Marne), inscrivant dans laConstitution un mode d’élection des séna-teurs reposant sur un corps électoral« essentiellement composé de membres desassemblées délibérantes et des collectivitésterritoriales », limitant par conséquent àl’avance une éventuelle réforme de ce col-lège électoral. « C’est une parodie de démo-cratie. On nous prend pour des idiots »,s’est exclamé Bernard Frimat (PS, Nord)

à la sortie de la commission. Le groupesocialiste du Sénat a condamné, dans uncommuniqué, une disposition « qui ren-drait l’alternance impossible au Sénat ».

Vraie colère ou simple prétexte, à l’ap-proche d’un débat qui devrait s’avérerdéterminant pour la suite du parcours duprojet de révision constitutionnelle ? LePS a fait de la réforme des modes de scru-tin, et notamment du scrutin sénatorial,une des conditions de son approbation duprojet de loi. Le gouvernement s’est cepen-dant refusé, jusqu’à présent, à touteconcession sur ce point. Les propositionsde loi du PS portant sur le mode d’électiondes sénateurs ont été successivement écar-tées à l’Assemblée nationale et au Sénat.

La droite sénatoriale a cependant franchiun cran supplémentaire en souhaitant ins-crire dans la Constitution une sorte de« verrou » dont elle n’ignorait pas que lagauche y verrait une « provocation ». Ellefragilise ainsi l’éventualité – ténue – d’uncompromis entre l’UMP et le PS sur le pro-jet qui doit être soumis à l’approbation duCongrès et recueillir une majorité destrois cinquièmes pour être définitivementadopté.

« Jeu d’équilibre subtil »« Le gouvernement et la majorité navi-

guent à vue sur ce texte. Manifestement, il ya un problème de cohérence », a estimé lepremier secrétaire du PS, François Hollan-

de, ajoutant que « si le texte ressort duSénat en recul même par rapport à la pre-mière lecture à l’Assemblée, cela ne présagepas d’un consensus ».

Le secrétaire d’Etat chargé des rela-tions avec le Parlement, Roger Karoutchi,veut toutefois continuer à espérer que desarrangements sont possibles. Ce qui sup-pose de ramener la majorité sénatoriale àde meilleures intentions. « On va devoirs’expliquer », reconnaît laconiquementl’ancien sénateur des Hauts-de-Seine.

M. Hyest, de son côté, ne se montre guè-re réceptif. « On veut bien changer le Sénat,mais pas le sacrifier. Et pour quel bénéfice ?Pour que les socialistes, de toute façon, rejet-tent la révision ? Si on commence à leur dire

amen, après ils demanderont autre chose »,assure le président de la commission deslois du Sénat, convaincu qu’« ils avaientprévu leur coup ». Partisan de la « ferme-té », il entend « ne rien lâcher sur les princi-pes » : « On verra bien qui a raison. » Aquelques mois du prochain renouvelle-ment sénatorial, les sénateurs de l’UMPsont d’autant plus vigilants qu’ils saventque leur majorité en sortira encore amoin-drie.

« Pour eux, cela passe avant tout »,regrette le président du groupe UMP del’Assemblée, Jean-François Copé, qui voitsa tâche d’autant plus compliquée que lessénateurs ont également rejeté, en com-mission, l’article tel qu’il avait été voté àl’Assemblée rendant obligatoire un réfé-rendum pour l’adhésion de la Turquie àl’Union européenne. Une dispositioncontraignante qui avait été introduite,avec la bénédiction de Nicolas Sarkozy, àla demande des opposants les plus déter-minés à l’entrée de la Turquie dans l’UE.Leur chef de file, Richard Mallié (UMP),ne décolère pas contre ses collègues duSénat. « Si c’est comme ça, je ne voterai pasla réforme constitutionnelle, et je ne seraipas le seul », assure le député des Bouches-du-Rhône. Le président de l’Assembléenationale, Bernard Accoyer, a pour sa partexprimé le souhait que les députés « sui-vent » désormais le Sénat sur ce point.

« Il va nous falloir construire un jeud’équilibre subtil entre toutes les contrain-tes », admet M. Copé, qui souhaite conti-nuer à préserver les chances d’un consen-sus avec l’opposition et d’un compromisdans la majorité. L’intervention du Sénata toutefois passablement compliqué ladonne. « Ce n’est pas gagné, consentM. Copé, mais ce n’est pas figé. » a

Patrick Roger

ENQUÊTE LE SRPJ DE VERSAILLES SAISI

Du matériel électronique découvertdans la voiture de Bernard ThibaultUNE PLAINTE a été déposée au commis-sariat de Draveil (Essonne) par BernardThibault, secrétaire général de la CGT,mercredi 11 juin à 15 heures, après que leresponsable syndical a découvert, tôtdans la matinée de mercredi, sa porte degarage ouverte et du matériel électroni-que dans sa voiture.

L’enquête préliminaire a été confiée parle parquet d’Evry à la police judiciaire deVersailles. « Eu égard à la personnalité deM. Thibault, il était normal que le procureurd’Evry saisisse le SRPJ de Versailles »,a-t-on indiqué au commissariat de Dra-veil.

Ce sont donc des membres de la policejudiciaire d’Evry et de Versailles qui ontinterrogé à Draveil, mercredi jusque tarddans la soirée, M. Thibault, son épouse,sonchauffeuret un responsablede sa sécu-rité. Ils se sont aussi rendus au domicile duresponsable syndical pour un relevé d’em-preintes. Le matériel retrouvé sur le plan-cher de la voiture, qui était fermée, selon

les proches de M. Thibault, et dans la por-tière arrière près d’une enceinte, a étéconfié à la police : bout de fil électrique,tournevis, carte électronique, du petitmatériel qui aurait été abandonné par leou les visiteurs. Ce pourrait être du maté-riel de surveillance, selon une source pro-che de l’enquête.

La police locale a pris des mesures pourrenforcer la surveillance autour du domici-le de M. Thibault. En octobre 2007, unchat égorgé, peint en rouge, avait étéretrouvé accroché à l’entrée de sa demeu-re. Il y a trois ans, c’était une tête decochon. Ce nouvel incident intervientalors que la CGT prépare la mobilisationdu 17 juin contre la réforme du temps detravail et les retraites. Le syndicat, qui ditne pas vouloir se laisser distraire de cetobjectif, attend de la police que toute lalumièresoit faite sur« la violation du domi-cile, la nature du matériel retrouvé et lesauteurs ». a

Rémi Barroux

France

SUSCITER LE DÉBAT, remotiver les mili-tants, l’UMP, à l’unisson de Nicolas Sarko-zy, s’est lancé dans une opération « recon-quête. » La cible est identique : les classesmoyennes et populaires. Celles que le par-ti considère comme ayant formé lebataillon des abstentionnistes des derniè-res élections municipales, ces électeursdéçus mais qui toutefois ne se sont pas –encore ? – tourné vers la gauche.

« Il faut faire revivre le P, de l’UMP, le Pde populaire », plaide Frédéric Lefèbvre,député des Hauts-de-Seine et bouillon-nant porte parole du parti. Affaiblie parla fuite de ses cerveaux qui ont, commeEmmanuelle Mignon, suivi le chef del’Etat vers l’Elysée ou rejoint les cabinetsministériels, contrariée par les luttes depouvoir interne, l’UMP a connu une sor-te de « baby blues » après l’entrée de sonprésident à l’Elysée. Du statut de force depropositions, elle est passée – disent lesplus critiques – à une machine tout justebonne à produire des couacs.

« Il nous a fallu passer d’un parti deconquête à un parti de gouvernement »,analyse Dominique Paillé, autre porteparole et conseiller du président de laRépublique. De la machine à produire età séduire à la machine à gérer. « Les lende-mains de l’élection présidentielles n’ont pasété faciles, renchérit M. Lefèbvre. Nousavons du trouver de nouvelles marques etune organisation adaptée. Les adhérents

avaient rejoint l’UMP pour soutenir Nico-las Sarkozy, il nous a fallu trouver une orga-nisation qui maintienne le lien avec lui. ».C’est ainsi qu’au lendemain des électionsmunicipales le chef de l’Etat a placé deuxsentinelles, Xavier Bertrand et NathalieKoscusko-Morizet, aux côtés du secrétai-re général Patrick Devedjian.

« Il contrôle tout »Pour tenter de « reprendre la main » sur

le débat alors que le PS et encalminé dansla préparation de son congrès, l’UMP adécidéderenouer avec les conventions thé-matiques qui avaient nourri la campagneprésidentielle. Confiées à l’époque àEmmanuelle Mignon, dix-huit conven-tions « pour la France d’après » avaientexploré entre mars 2005 et octobre 2006tous les thèmes de la société française. Cesdébatsouverts àdespersonnalitésextérieu-res et à des experts avaient servi de socle auprogramme du candidat.

C’est sur ce modèle que le parti organisejeudi 12 juin, à la Mutualité sa conventionsur le social avec au programme des tablesrondes axées notamment sur la « relancede l’ascenseur social ». Préparée par PierreMehaignerie, Marc-Philippe Daubresse etPhilippe Juvin, elle doit accueillir quelquespersonnalitésdu mondesyndical et de l’en-treprise, notamment Guillaume Pepy, leprésidentde la SNCF« On a été très critiquéau moment du paquet fiscal. Il faut montrer

que l’UMP est le défenseur de la justice socia-le, que nous ne sommes pas là pour faire descadeaux aux riches, plaide Philippe Cochet,député du Rhône et délégué général à laréforme. Il faut que le parti redevienne unemachine à idées, avant d’être une machineélectorale. L’UMP doit être devant le gouver-nement, quitte à déranger ». M. Devedjianen a récemment fait la démonstration enplaidant pour la suppression pure et sim-ple des 35 heures, là où M. Bertrand secontentait de plaider pour des assouplisse-ments dans l’entreprise. Et mercredi11 juin, le secrétaire général de l’UMP n’apas hésité à prendre ses distances avec leRevenu de solidarité active, défendu parMartin Hirsch, en mettant en garde contrele risque de « créer une grande populationassistée ».

Cette convention qui veut redonner tou-te sa place au débat arrive à point nommépour faire taire les critiques exprimées cesderniers jours par les clubs et partis asso-ciés sur le « monolithisme de l’UMP » ou« sa RPRisation ». François Fillon devraity faire une courte apparition. Pour la pho-to ? Car l’UMP est et reste une machine auservice exclusif du chef de l’Etat. M. Sarko-zy se fait communiquer quotidiennementl’évolution du nombre de militants, avaliseles initiatives, surveille l’évolution des fédé-rations : « Il contrôle tout », lâchent encœur les porte-parole de l’UMP. a

Sophie Landrin

L’AMENDEMENT à la réforme des insti-tutions accepté mercredi 11 juin par lacommission des lois du Sénat s’inscritdans la jurisprudence du Conseil constitu-tionnel. Saisi par la droite sénatoriale surle projet de loi réformant le mode de scru-tin des sénateurs présenté par le gouverne-ment de Lionel Jospin, le Conseil, alorsprésidé par Yves Guéna, en avait censuréune disposition essentielle. Elle prévoyaitque les conseils municipaux éliraientleurs délégués à raison d’un par tranchede 300 habitants. Dans l’esprit du gouver-nement Jospin et de sa majorité, il s’agis-sait de corriger un système – qualifiéd’« anomalie » – qui pérennise la surre-présentation des petites communes rura-les au détriment des villes et des agglomé-rations urbaines.

Le Conseil avait alors estimé que « leSénat doit, dans la mesure où il assure lareprésentation des collectivités territoriales,être élu par un corps électoral qui est lui-même l’émanation de ces collectivités » etque, « par suite, ce corps électoral doit êtreessentiellement composé de membres desassemblées délibérantes des collectivités terri-toriales ». C’est précisément cette notionque la droite sénatoriale entend inscriredans la Constitution.

« Verrouillage supplémentaire »Pour Didier Maus, président émérite

de l’Association française de droit consti-tutionnel, si cette disposition était adop-tée, « ce serait incontestablement un ver-rouillage supplémentaire ». Et d’expli-quer : « Le projet de loi constitutionnellepouvait ouvrir la voie à un rééquilibrage ducorps électoral : il prévoit que le Sénat assu-re la représentation des collectivités territo-riales en tenant compte de leur population.

Mais le verrou introduit limite singulière-ment la portée de cette disposition. Il rend leSénat quasiment intouchable. »

Qu’advient-il, alors, en cas de désac-cord entre les deux chambres ? « Le Sénata un pouvoir de blocage absolument anor-mal, estime M. Maus. Ce qui pouvait se jus-tifier en 1958, quand le président de la Répu-blique n’était pas élu au suffrage universel,n’a plus de raison d’être aujourd’hui. Sipour être adoptée une loi doit être approuvéedans les mêmes termes par les deux assem-blées, il n’est pas normal qu’une chambreélue au suffrage indirect dispose d’un pou-voir de veto de fait. Il devrait dès lors y avoirun moyen de trancher, et ce pouvoir n’appar-tient qu’au peuple. Mais pour cela il fau-drait pouvoir réviser la Constitution et, pourréviser la Constitution, il faut l’accord dessénateurs. Leur droit de blocage, on le voit,est totalement disproportionné. »

La situation est-elle, dès lors, insolu-ble ? M. Maus regrette que, d’une certainemanière, l’occasion d’élargir le possiblerecours à l’article 11 de la Constitutionpour la convocation d’un référendum aitété manquée en 1995, lorsque fut soumispar Jacques Chirac et son ministre de lajustice de l’époque, Jacques Toubon, unprojet de révision constitutionnelle qui seheurta, lui aussi, à la résistance des séna-teurs. « Ce qui prouve, ajoute M. Maus,que la majorité sénatoriale, quand il s’agitde défendre ses intérêts, n’est pas aux ordresdu gouvernement. » Charles de Gaulle lui-même en avait fait les frais lorsqu’il s’avi-sa, en 1969, de limiter les pouvoirs duSénat : il essuya un échec qui signa sondépart. Son président actuel, ChristianPoncelet, aime à le répéter : « Toucher auSénat, c’est mortel. »a

P. Rr

CALENDRIER

Le gouvernement avait annoncé latenue d’un Congrès le lundi 7 juillet àVersailles pour l’adoption du projet deloi constitutionnelle. Cette hypothèseapparaît d’ores et déjà improbable.Sénat. L’examen en séance commence-ra mardi 17 juin. La discussion est pré-vue jusqu’au lundi 23 juin.Navette. Le texte reviendra ensuite endeuxième lecture à l’Assemblée nationa-le, où la discussion ne pourra commen-cer, au mieux, que le 1er juillet, puisretournera au Sénat.Congrès. Si les deux chambres parvien-nent à se mettre d’accord, le texte pour-ra alors être soumis au Congrès. Le gou-vernement envisage désormais la datedu 21 juillet. Pour être adopté, le projetde loi devra recueillir les trois cinquiè-mes des suffrages exprimés.

DÉBAT LE PARTI MAJORITAIRE ORGANISE UNE CONVENTION SOCIALE À LA MUTUALITÉ

L’UMP, cornaquée par Nicolas Sarkozy,cherche à redevenir une grande formation populaire

Pour Didier Maus, le pouvoirde blocage du Sénat est anormal

DÉPENSESLuc Chatel justifie la haussedu budget de l’Elysée en 2007Le porte-parole du gouvernement, LucChatel, a justifié, mercredi 11 juin, la pro-gression de 8,4 % des dépenses de l’Ely-sée en 2007 par l’activité plus importantede Nicolas Sarkozy. « Il y a 8 % d’aug-

mentation des dépenses, mais pour 300 %d’activité en plus », a indiqué. « Les dépla-cements en province ont été multipliés partrois, les déplacements à l’étranger pardeux (…). » « Les frais de bouche, de récep-tion sont en diminution, a-t-il précisé,citant entre autres : «-43 % sur le vin,-8 % sur les traiteurs ». – (Reuters)

Constitution Les amendements des sénateurs compliquent la recherche de la majorité requise au Congrès

Réforme des institutions : le Sénat pose ses verrous

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Page 10: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

ÉDUCATION

Le financementdes universités pourraits’appuyer sur descritères de performanceUN RAPPORT sénatorial, publié mercre-di 11 juin, prône un système de finance-ment des universités sur des critères deperformance. Six sénateurs ont été char-géspar la ministrede l’enseignement supé-rieur, Valérie Pécresse, de proposer uneréforme du système dit « de San Remo »(système analytique de répartition desmoyens).

Utilisé depuis 1994, ce modèle permet àl’Etat de répartir les emplois et de fixer lemontantde la dotation annuelle qu’il verseaux universités, en tenant compte notam-ment du nombre d’étudiants inscrits et dela superficie des bâtiments. Critiqué pourson caractère illisible et opaque, le systèmeSanRemo estaccusé de pousser les univer-sités à remplir leurs amphis au détrimentde la qualité.

Baptisé « Sympa » (système de réparti-tiondesmoyens à laperformance età l’acti-vité), le système envisagé au Sénat prôneune corrélation entre financement et per-formance. 10 % des crédits de formationseraient évalués au titre de la performance,contre 3 % actuellement. Pour la recher-che, déjà financée à hauteur de 20 % sur labase d’objectifs, cette part pourrait être de30 % dès 2009, et à terme atteindre 50 %.

« Système concurrentiel »Pour évaluer l’efficacité d’une universi-

té, les sénateurs suggèrent d’utiliser descritères comme le taux d’insertion profes-sionnelle à six mois et à trois ans, tout enprenant en compte la poursuite d’études.Le niveau de salaire ou le statut de cadrepeuvent aussi constituer, selon les séna-teurs, des indicateurs pertinents.

Le groupe de travail propose aussi delier le financement au nombre d’étudiantsprésents aux examens et non pas au nom-bre d’étudiants inscrits, comme le prévoitle système San Remo. Le taux d’occupa-tion des locaux, mais aussi des critères degestionadministrative, financière et deres-sources humaines pourraient égalemententrer en ligne de compte. Pour pondérerles critères de performance, les parlemen-taires suggèrent de croiser les résultatsd’insertion avec des indicateurs sur l’origi-ne socio-économique ou le niveau scolairedes étudiants.

« En 2009, aucune université ne devraitêtre perdante, assure le sénateur (non ins-crit) de l’Aube Philippe Adnot. Les univer-sités considérées comme “déficitaires”devraient bénéficier d’une première tranchede rattrapage, les universités “excédentaires”conserveraient leurs moyens. A partir de2010, le montant des dotations tiendrait à lafois compte de la situation initiale par rap-port au rééquilibrage, de l’évolution de l’acti-vité et des progrès qualitatifs. » Ces proposi-tions pourraient toutefois raviver lesdébats sur la « rentabilité » de certainesfilières. « Il pourra y avoir des redéploie-ments de certaines disciplines sur un nombrelimité de sites », convient Jean-LéonceDupont (Union centriste-UDF, Calvados).

Le syndicat d’étudiants UNEF a réagiaux propositions du Sénat en dénonçant,mercredi, « la mise en place d’un systèmeconcurrentiel pénalisant les universités quiont le plus besoin d’être aidées ». La missiond’évaluation et de contrôle de l’Assem-blée nationale, qui travaille égalementsur ce sujet, doit présenter ses conclu-sions fin juin. a

Catherine Rollot

Les prix français sont-ils, comme le sou-tient le gouvernement, supérieurs àceux pratiqués dans le reste de l’Unioneuropéenne ?

En exhibant les prix de quelques pro-duits alimentaires, le secrétaire d’Etat à laconsommation, Luc Chatel, triche unpeu : d’abord parce qu’il existe dans cha-que pays, pour un produit donné, des dif-férentiels de prix très importants d’unmagasin à un autre au sein d’une mêmeenseigne. Ensuite, les habitudes deconsommation différant d’un pays àl’autre, la comparaison de paniers nonsimilaires est délicate. Les estimations enparité de pouvoir d’achat suggèrent que laFrance aurait des niveaux de prix prochesde la moyenne de l’Union à 15. Elle étaitmieux placée il y a 12 ans, avant les loisGalland et Raffarin.

Mais entre 1996 et 2008, les prix rela-tifs alimentaires ont évolué plus rapide-ment dans notre pays, de l’ordre de 4 % à5 %, ce qui représente une ponctionannuelle d’environ 5 milliards d’euros surles consommateurs. En même temps, lesprofits des distributeurs ont augmentéplus vite en France que chez nos voisins. Il

y a donc des marges pour faire baisser lesprix, mais pas de 30 %, et cela dépend desproduits.Depuis 1996, les prix alimentaires évo-luent plus rapidement en France qu’enAllemagne. Pourquoi ?

Les lois Galland et Raffarin ont conju-gué leurs effets. La première a empêchéune concurrence par les prix et la secondeune concurrence par l’offre. La loi Raffa-rin est à l’origine, dans un premier temps,d’une politique malthusienne de créationde nouvelles grandes surfaces et, dans unsecond temps, d’extension de surfacesexistantes. Elle a renforcé des positionsdominantes déjà existantes. C’est lecontraire de la concurrence.Mais la loi Chatel de janvier 2008 achangé la donne…

Oui, depuis sa promulgation, les distri-buteurs peuvent restituer les « margesarrière » aux consommateurs. Il suffit,pour déclencher une baisse des prix, qu’ilsle veuillent. Et pour cela, il faut introduireune concurrence entre opérateurs auniveau local. L’étude récente de l’UFC-Que choisir n’a fait que rendre public unconstat bien connu : dans au moins un

tiers des zones de chalandise, il y a peu oupas de concurrence. L’exemple de Parisest frappant : un seul groupe y détient70 % des grandes surfaces alimentaires.L’association de consommateurs proposede permettre à une autorité de concurren-ce de casser ces monopoles locaux etd’obliger à des ventes de magasin entreconcurrents. Cette option radicale présen-te l’avantage de régler immédiatement leproblème sans attendre une constructionfrénétique de nouveaux commerces. Ellepourrait permettre des baisses de prixsignificatives.Que peut-on attendre du projet de loide modernisation de l’économie (LME)en cours d’examen au Parlement ?

Tel qu’il est actuellement, ce texte estplutôt a minima et favorable aux distribu-teurs. Il va permettre à la grande distribu-tion de répondre aux demandes de clients,qui se tournent vers le hard discount. Lesconsommateurs trouveront des prix bas,non pas à travers une concurrence plus for-te, mais à travers une offre ciblée dédiéeau segment croissant des consommateursà faible pouvoir d’achat.

En revanche, les prix dans les magasins

classiques ne devraient guère bouger. Ensomme, la loi LME devrait offrir une peti-te baisse des prix aux consommateurs enaméliorant l’offre commerciale, sans dété-riorer les profits des distributeurs.

Ce sont plutôt les industriels, en particu-liers les PME, qui devraient être les per-dants de la négociabilité des prix permisepar le projet de loi. Le risque est que les dis-tributeurs fassent tellement pression surleurs fournisseurs pour regagner des mar-ges que seuls les plus gros résisteront.Une fois que les petits fournisseurs serontmorts, on se trouvera dans un affronte-ment entre puissants industriels et gran-de distribution. Et là, on peut obtenir desprix d’équilibre au-dessus de ce qu’ils sontaujourd’hui. C’est un risque d’évictiondont la grande distribution est consciente.

Nul ne sait évaluer l’effet final sur lesprix du projet de loi de modernisation del’économie.De plus, les amendements pro-posés, s’ils sont adoptés, risquent de limi-ter l’effet de la loi. Accroître les pouvoirsdu maire revient à freiner l’implantationdes nouveaux points de vente. a

Propos recueillis parC. Gu.

Les conjoncturistes redoutentune éventuelle hausse des tauxpar la BCE. Excepté le smic quiaugmentera encore en juillet,les salaires n’accélèrent pas.Le pouvoir d’achat est menacé

FAITS DIVERSUn corps de femme, sans tête nijambes, retrouvé dans une valiseprès de NantesUn corps de femme, décapité et sans jam-bes, a été retrouvé, mardi 10 juin, dansune valise plongée dans la Sèvre nantai-se, à Vertou, commune limitrophe deNantes. « Il s’agit du corps d’une femmede peau blanche, âgée de 50 à 60 ans, mesu-rant entre 1, 55 mètre et 1,60 mètre etpesant 80 kg », a indiqué le procureur dela République de Nantes, Xavier Ronsin,précisant que « la mort est récente ». Mer-credi soir, l’identité de la victime demeu-rait officiellement inconnue, tout comme« la cause première du décès ». – (Corresp.)

JUSTICEPrison ferme pour le lancer morteld’un bloc de bitumeGuillaume P., plombier de 19 ans, a étécondamné par la cour d’assises desmineurs de Loire-Atlantique, mercredi11 juin, à cinq ans de réclusion criminel-

le, dont deux assortis de sursis, pouravoir lancé un bloc de bitume de 5 kgdepuis un pont, le 15 avril 2006, à Pont-Château (Loire-Atlantique). Ce geste,qu’il avait qualifié de « jeu », a tué Fabri-ce Ferrand, 13 ans, passager d’une voitu-re roulant en contrebas. Son ami,Mathieu L., lycéen de 20 ans poursuivipour ne pas avoir empêché le drame, aété condamné à trois ans de prison dontun avec sursis. « J’aurais préféré une pei-ne d’intérêt général élevée plutôt que de laprison ferme », a déclaré MartineFerrand, mère de la victime. – (Corresp.)

DÉFENSECrash d’un Mirage 2000de la force nucléaire non arméUn Mirage 2000 N affecté à la force dedissuasion nucléaire, s’est écrasé, mer-credi 11 juin, à Laurenan (Côtes-d’Ar-mor). Ses deux membres d’équipage, quise sont éjectés, sont sains et saufs. Com-me tous les avions de la composanteaérienne de la dissuasion nucléaire en

vol d’entraînement, ce Mirage, originai-re de la base aérienne 116 de Luxeuil(Haute-Saône), n’était pas armé. Le pré-cédent crash, le 12 février, était aussicelui d’un Mirage 2000 N de la base deLuxeuil. – (AFP.)

ACCIDENTTrois vacanciers allemands se noientdans un affluent du VerdonTrois vacanciers allemands, deux jeunesfemmes et leur guide, qui faisaient mer-credi 11 juin en fin d’après-midi du canyo-ning ont trouvé la mort dans un affluentdu Verdon. Ils ont été emportés par unevague de crue consécutive aux orages.Depuis quelques jours, le sous-préfet deCastellane (Alpes-de-Haute-Provence)avait pris un arrêté pour interdire les acti-vités nautiques et d’eau vive dans les gor-ges du Verdon où le débit est de 75mètres cube à la seconde. La pratique dessports d’eau vive était cependant autori-sée dans l’affluent où l’accident a eu lieu.– (AFP.)

Même s’il était généralement atten-du, le mauvais chiffre de l’infla-tion française en mai relance les

interrogations sur la politique à venir de laBanque centrale européenne (BCE). Uneéventuelle hausse des taux d’intérêt enjuillet ne pourrait qu’accentuer le ralentis-sement attendu de la croissance françaiseen 2008 et, surtout, en 2009. Ce ne seraitpas « forcément une bonne nouvelle » dansle contexte actuel, a déclaré, jeudi 12 juinsurRTL, la ministre de l’économie, Christi-ne Lagarde.

Le renchérissement du pétrole et celuides produits alimentaires, particulière-ment marqué pour les produits frais, sontà l’origine de la plus forte hausse annuelle(+3,3 %) des prix à la consommationqu’ait annoncée l’Insee depuis le mois dejuillet 1991. L’inflation française, harmoni-sée au niveau européen (IPCH), poussée àla hausse par les franchises médicales, etplussensible, pour des raisons de pondéra-tion différente, à l’évolution des prix del’énergie et des produits alimentaires, « amême atteint son plus haut historiquedepuis le début de la série à 3,7 % », souli-gne Mathieu Kaiser (BNP Paribas). L’éco-nomiste note que le choc pétrolier tend àse diffuser aux prix des transports. « Etantdonné la poursuite des tensions et l’incertitu-de régnant sur les marchés des matières pre-mières, il est désormais difficile d’affirmerque le pic d’inflation est passé », ajoute-t-il.

Pour la plupart des conjoncturistes, lesFrançais vont devoir vivre avec une infla-tion d’au moins 3 % jusqu’en septembreet un pouvoir d’achat qui, en l’absenced’accélération des salaires, s’amenuise.Seul le smic est épargné. Mécaniquementindexé sur l’inflation, il augmentera de

0,9 % au 1er juillet après +2,3 % en mai.Combinée aux deux chocs de l’euro fort

et du pétrole cher, qui, selon l’Insee, ontréduit la croissance de 0,4 point par anentre 2002 et 2007, cette perspective n’estévidemment pas une bonne nouvelle pourl’économie française. Pour MathildeLemoine, directrice des études économi-ques de HSBC France, « la vraie mauvaisesurprise, c’est la faiblesse, au premier trimes-tre, de la consommation des ménages, qui estpourtant le principal moteur de la croissancefrançaise. Or le moral des Français, en ber-ne, est totalement corrélé à l’inflation ». Letout peut nourrir une spirale négative :plus d’inflation, plus de déprime, moinsde consommation et moins de croissance.Autrement dit, la stagflation. Avec un barilde pétrole à 150 dollars et un relèvement,par la BCE, des taux d’intérêt de 50 points

de base, la progression du produit inté-rieur brut (PIB) français tomberait à0,83 % en 2009, selon un scénario noir –mais pas invraisemblable – de la banque.

« Bouffés de tous les côtés »« Les consommateurs sont bouffés de

tous les côtés, note de manière imagée ledirecteur des études de Natixis, PatrickArtus. Leurs crédits à la consommation sefont plus chers et plus rares. Leurs emploissont menacés car les entreprises sont tentéesd’accélérer les délocalisations. Et les salairesréels sont en croissance négative dans toutela zone euro. Quant à l’Etat, il n’a plus d’ar-gent et fabrique du déficit. Le partage de lacharge est clairement défavorable aux Etatset aux ménages. »

L’éventuelle hausse des taux de la BCEdégraderait fortement la situation des ban-

ques, des marchés financiers et accentue-rait l’hétérogénéité des économies euro-péennes, note M. Artus. Et pourrait mêmeêtre« catastrophique » en l’absence de coo-pérationentre la FED et la BCE. Pour l’éco-nomistede Natixis, qui a fréquemment cri-tiqué le président de la BCE, Jean-ClaudeTrichet, la Banque centrale européenne setrouve dans une position extrêmement dif-ficile : « Elle peut être tentée d’augmenterles taux pour lutter contre une forme d’infla-tion sur laquelle elle ne peut rien, au risquede ralentir l’activité. Mais elle peut difficile-ment ne rien faire, car, depuis peu, l’infla-tion anticipée, sur laquelle elle se cale, aug-mente et atteint des niveaux (2,5 %) qui peu-vent faire craindre des tensions inflationnis-tes durables ». En somme, entre la peste etle choléra, que peut-elle choisir ? a

Claire Guélaud

APRÈS la bonne nouvelle du chômage,ce sont les créations d’emploi, au nombrede 70 700 dans le secteur concurrentielpour le 1er trimestre, qui se montrent plusnombreuses qu’attendues. Selon les chif-fres publiés, jeudi 12 juin, par l’Insee et leministère de l’économie, la progressionest de 0,4 % par rapport au dernier tri-mestre et de 1,6 % sur un an. La révisionà la hausse est forte puisque l’estimationprovisoire était de + 0,2 %, avec moinsde 40 000 nouveaux emplois prévus.

Cette progression de l’emploi est égale-ment constatée par l’Unedic, qui perçoitles cotisations chômage des employeursdu secteur concurrentiel. Pour l’assuran-ce-chômage, la hausse est de 0,3 % avec55 900 nouveaux emplois. « Une bonne

surprise », pour le responsable des statis-tiques de l’assurance-chômage.

Malgré ce nouveau chiffre record –18 184 200 salariés français dans le sec-teur concurrentiel à la fin mars –, la décé-lération des créations d’emploi est réel-le : 78 000 nouveaux emplois avaient étéenregistrés au dernier trimestre 2007 etprès de 75 000 au troisième trimestre.

L’industrie perd de plus en plus d’em-plois, -12 100 postes (-7 100 au 4e trimes-tre 2007). La construction en a créé12 000, même si, précise l’Unedic, la pro-gression dans ce secteur est moindrequ’auparavant. Le secteur tertiaire et lesservices restent les premiers créateursd’emploi en France.a

R. Bx.

La forte hausse des prix en mai alimenteles craintes d’une stagflation en France

ENTRETIEN AVEC PHILIPPE ASKENAZY, DIRECTEUR DE RECHERCHE AU CNRS

« La loi de modernisation économique devrait offrir une petite baisse des prix »

France

SOCIAL UNE PROGRESSION PLUS IMPORTANTE QUE PRÉVUE

70 700 emplois ont été créés dansle secteur privé au premier trimestre

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Economie & Entreprises

Au moment où la flambée desprix des carburants touchede plein fouet la plupart des

marchés automobiles et que lesconstructeurs américains voientleurs ventes de 4 × 4 s’effondrermois après mois, le marché auto-mobile russe, lui, est en pleine for-me. Ce secteur profite à plein de lacroissance économique de la Rus-sie : 7,8 % en 2007 après 6,7 % en2006.

Ce boom économique est engrande partie entretenu par lesrevenus tirés des matières premiè-res, notamment énergétiques. Lenombre de milliardaires en dol-lars aurait quasiment doublé en2007, passant de 60 à 110. Les mil-lionnaires augmentent plus quen’importe où ailleurs. Mais cetterichesse croissante commence àse diffuser dans la société russe.L’émergence d’une classe moyen-ne tire la consommation, à com-mencer par l’automobile.

En 2007, les immatriculationssur le marché russe ont largementdépassé celle du marché français(2,450 millions contre un peu plusde 2 millions pour la France). Et lepotentiel est énorme. En effet, letaux d’équipement n’est que de210 véhicules pour 1 000 habi-tants, contre 600 en Europe occi-dentale et 800 aux Etats-Unis. Lemarché devrait dépasser 4 mil-lions de voitures en 2012. A cettedate ou même avant, la Russiepourrait devenir le premier mar-ché européen devant l’Allemagne.

Cette forte hausse profite essen-tiellement aux marques étrangè-res : leurs ventes ont augmenté de62 % en 2007. La Russie est déjàle premier marché européen desJaponais Toyota, Lexus, Mitsu-bishi, Subaru ou du coréen Kia.En revanche, la croissance du mar-ché ne profite pas aux construc-teurs locaux. Du fait d’une qualitémédiocre et d’une mauvaise ima-ge de marque, leurs ventes plon-gent. De 800 000 en 2007, ellesdevraient tomber à 350 000 en2015.

Multiples investissementsLa classe moyenne préfère se

porter sur les modèles occiden-taux comme la Peugeot 308, laCitroën C4 ou encore la RenaultMegane. Les plus riches, eux, s’af-fichent dans de luxueux 4 × 4 oudes véhicules encore plus haut degamme. « Nous avons vendu plusde 8 000 voitures Infiniti (groupeNissan) dès la première année. C’estbien au-delà de toutes nos espéran-ces », confie Carlos Ghosn, lepatron de Renault-Nissan. Mais leboom est tel que même la voiture àbas coût de Renault, la Logan,connaît un vrai succès. Depuis2005, le constructeur français en aécoulé 150 000.

Pas étonnant donc que tout lemonde veuille une part de ce nou-vel eldorado. Après GeneralMotors et Ford sur place depuislongtemps, d’autres construc-teurs ont investi récemment.

Volkswagen n’a pas lésiné endépensant plus de 1 milliardd’euros dans une usine pour pro-duire 150 000 voitures par an.Toyota a commencé sa produc-tion fin 2007 et Nissan doit ouvriren 2009 une usine à Saint-Péters-bourg. Quant à Renault, grâce aurachat au printemps de 25 % durusse Avtovaz, propriétaire de lamarque Lada, le pays va deveniren 2009 son premier marché.

PSA Peugeot Citroën tente derattraper son retard. La Russieconstitue sa troisième zone dedéveloppement prioritaire aprèsle Brésil et la Chine. Le construc-teur français a posé, mardi 10 juinà Kalouga, la première pierre deson usine en partenariat avec Mit-subishi. L’investissement totalatteint 470 millions d’euros dont70 % pour PSA. L’usine emploiera3 000 personnes et doit entrer enproduction en 2011 avec une capa-cité initiale de 160 000 véhicules.

Mais elle pourrait être portée à300 000 unités.

Comme Volvo ou encore Volks-wagen, PSA a été largement soute-nu par Anatoly Artamonov, le gou-verneur de la région de Kaluga.« Il y a quelques années, nous noussommes fixés pour objectif de fairede cette région une des régions les

plus attractives pour les investisse-ments et le premier pôle automobiledu pays. Nous avons réussi », se féli-cite M. Artamonov.

Premier pôle automobile de laRussie, Kaluga devrait accueillirde nombreux fournisseurs. L’équi-pementier Faurecia est dans laphase finale de sélection d’un site

pour fournir PSA et Volkswagen.Pour faire face à ce développe-ment, la région a augmenté deplus de 72 % les logements. Et laconstruction d’un centre de forma-tion automobile est en cours pourrépondre à la forte demande enmain-d’œuvre. a

Nathalie Brafman

Industrie PSA Peugeot Citroën et Mitsubishi ont posé la première pierre de leur usine à Kalouga

La Russie, eldorado desconstructeurs automobiles

S’IMPLANTER à Moscou, pourune entreprise étrangère, n’est pasune sinécure. Depuis 2000, plu-sieurs entreprises, comme Dano-ne, L’Oréal, Schlumberger, TotalouBouygues, font l’objet de redres-sements fiscaux et bataillentdevant les tribunaux, parfois avecsuccès, comme Bouygues. « Lesrèglements sont souvent utiliséspour contrarier un projet qui n’apas, pour des raisons très variées, lafaveur des dirigeants, qui font par-fois un usage discrétionnaire dudroit », déplore un entrepreneurfrançais.

Des délais plus longsInstallé en Russie depuis 2001,

où il a ouvert vingt et un magasinset racheté la chaîne Ramstore,Auchan rencontre pour la premiè-re fois des difficultés. Son magasinsitué à Sokolniki dans Moscou,achevé depuis décembre 2007,attend toujours son ouverture. Vla-dimir Yakunin, président des che-mins de fer russe, s’oppose à laconstruction des voies d’accès aumagasin sur un terrain commun.« Dès que nous avons compris quec’était un terrain mixte, nous avonsengagé une négociation, indiqueJean Mailly, président d’AuchanRussie. Elle n’a pas été facile carnous n’avions pas compris tous lesrouages administratifs. »

Paradoxalement, malgré la bon-ne image revendiquée par Auchanen Russie, M. Mailly affirme qued’autres problèmes pourraient sur-venir dans le futur. « Les procédu-res sont fouillées, précises et longues,c’est d’autant plus vrai quand ons’installe à Moscou », reconnaît-il.Jusqu’à présent, il fallait environ

deux ans pour ouvrir un magasin.« Ce délai risque de s’allonger carles Russes deviennent de plus en plusexigeants », conclut-il.

Dans le domaine de la construc-tion, après la crise financière de1998, la compétition est devenueâpre, avec des entreprises souventmoins disantes, venues d’Ukraine,de Slovénie, de Turquie ou desex-républiques soviétiques orien-tales, Ouzbékistan, Tadjikistan, etmême de Chine.

« Nous n’avons rien signé à Mos-cou depuis quelques années, recon-naît un porte-parole du groupeBouygues, mais nous engrangeonsde beaux contrats ailleurs, notam-ment à Ekaterinbourg » : dans lacapitale de l’Oural, le groupe vaconstruire l’Iset Tower, une tourrésidentielle de luxe (136 millionsd’euros) et un hôtel Hyatt (75 mil-lions d’euros), livré à l’automne2008.

Ces projets sont conduits parValode et Pistre, seule agence d’ar-chitecture française à disposerd’une licence russe : « Nous ren-controns plus de succès en provinceque dans la capitale », reconnaîtJean Pistre, qui travaille beaucoupavec un conglomérat minier,métallurgique et, désormais,immobilier de l’Oural, UGMK.

Pour faire face aux difficultésadministratives grandissantesdans le pays, PSA, lui, s’est adjointle soutient de la région de Kalou-ga. « Elle a fait un effort pour que leterrain nous soit accessible. C’est ellequi s’est chargée d’effectuer lesdémarches », reconnaît Didier Ale-ton, responsable du projet. a

N. Bnet Isabelle Rey-Lefebvre

ÉNERGIELes discussions entre BP etses alliés russes sont rompuesLes discussions entre le britanni-que BP et ses associés russessur l’avenir de leur coentrepriseTNK-BP ont été rompues, affir-mait mercredi 11 juin l’agenceReuters. Les Russes réclamentune réduction de 60 % des effec-

tifs étrangers de TNK-BP, unereprésentation à parité de cha-cun des deux camps dans l’en-semble des conseils d’administra-tion des filiales de TNK-BP, etdes prérogatives élargies de man-dataire pour l’avocat de GermanKhan, un important actionnairerusse, membre de la directionde TNK-BP. – (Reuters.)

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2007 2009 2011 2013 2015

Une croissance continue

Source : PSA Peugeot Citroën

PRÉVISION DU MARCHÉ AUTOMOBILE EN RUSSIE

RÉPARTITION RÉGIONALE DES VENTES D’AUTOMOBILES, en milliers de véhicules

en millions de véhicules2007 2010 prévisions

Moscou

Saint-Pétersbourg

Oural

Russie du Sud

Russie plaine centrale

Sibérie centrale

Sibérie orientale

9501 023

250

2,4

4,1

275462

175297

600924

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125165

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L’implantation des étrangersse révèle parfois compliquée

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DÉVELOPPEMENT

Le « Club de Paris »annule 413 millionsde dollars de la dettede cinq pays pauvres

Légitime sanction contre des salariésirresponsables ? Représailles visantà écarter des gêneurs ? Le licencie-

ment de deux stewards par la compagnieirlandaise CityJet, une filiale d’Air Fran-ce, crée des remous.

Le 14 mai, lors d’un vol Dublin-Paris,un chef de cabine glisse quelques « bla-gues » en annonçant les consignes desécurité : « Veuillez garder votre ceinturede sécurité Gucci attachée », « des gilets desauvetage Chanel sont situés sous votre siè-ge », etc. L’épisode est rapporté à la direc-tion de CityJet par un passager, cadrechez Air France. Après enquête, la compa-gnie irlandaise découvre que le plaisantinn’était pas en service mais en « positio-ning » : il portait son uniforme et pou-vait, en cas de nécessité, être sollicité,mais il ne figurait pas sur le planning duvol ; les démonstrations de sécuritéauraient dû être assurées par le « chef decabine en titre », affirme Me StéphaneBloch, l’avocat de CityJet.

D’après la compagnie, l’auteur des facé-ties aurait ajouté : « Les parents voya-geant avec des enfants doivent mettre leurmasque à oxygène avant d’en appliquer unà leurs enfants, en commençant par celuiqu’ils préfèrent. » L’intéressé, qui désiregarder l’anonymat, dément.

Jugeant ces comportements très gra-

ves, CityJet congédie, à la fin mai, le bla-gueur et le chef de cabine « en titre », cou-pable d’avoir laissé faire. Deux hôtessesécopent d’un avertissement.

Cette décision est liée « au fait que nousavons assigné CityJet devant les prud’hom-mes », estime l’un des stewards. Soumisau code du travail irlandais, une vingtai-ne de salariés établis en France deman-dent à bénéficier de la loi française. Ceproblème de droit est, par ailleurs, aucœur d’une enquête préliminaire ouvertepar le parquet de Créteil ; les deux chefsde cabine remerciés ont été entendusdans le cadre de ces investigations. SelonBernard Thouvenot, vice-procureur au tri-bunal de grande instance de Créteil, lesauditions se déroulent dans un « mauvaisclimat » car les salariés donnent le senti-ment de « ne pas s’exprimer librement ».« Ils ont peur de perdre leur emploi et de nepas en retrouver dans d’autres compa-gnies », commente Me Nathalie Micault,l’avocate des navigants.

Me Bloch assure qu’il n’y a pas de lienentre les deux procédures en cours et leslicenciements des stewards. Même s’ilsn’avaient pas saisi la justice, explique-t-il,ces salariés « auraient été sanctionnés dela même manière » car ils ont « détournéles règles de sécurité ». a

Bertrand Bissuel

LES DIX-NEUF principaux pays créan-ciers du monde, réunis dans le « Club deParis », ont annulé, en 2007, 413 mil-lions de dollars (268 millions d’euros)des dettes publiques de l’Afghanistan, dela République centrafricaine, de la Gam-bie, du Sierra Leone et de Sao Tomé etPrincipe, dans le cadre de la procédured’allégement de la dette des pays pauvrestrès endettés.

Le premier rapport d’activité du Club,publié le 11 juin, fait aussi état du rembour-sement anticipé de 7,3 milliards de dollarsdes dettes de l’ex-Yougoslavie, du Pérou,du Gabon et de la Jordanie.

A l’occasion de la présentation de ce rap-port, Xavier Musca, président du Club etdirecteur du Trésor français, a exprimé« les préoccupations » des Etats membresau sujet des « fonds vautours » qui achè-tent les dettes décotées de certains payspauvres et qui demandent ensuite aux tri-bunaux d’obliger ceux-ci à leur rembour-ser la totalité de la dette. M. Musca a ainsicité la société américaine Donegal, qui aracheté, à vil prix, la dette contractée parla Zambie pour l’achat de matériels agri-coles roumains et qui a réalisé un profitde 400 % en obtenant son rembourse-ment par un tribunal londonien.

Contrecarrer les fonds vautoursCes « fonds vautours » ont déjà empo-

ché 1 milliard de dollars sur les 2 mil-liards qu’ils réclament en justice, notam-ment au Congo et au Liberia. « C’est par-faitement légal puisqu’une créance est untitre de propriété, a commenté le présidentdu Club, mais ces demandes sont immora-les, car ces fonds s’approprient, en fait, lesannulations de dettes publiques consentiesaux pays pauvres par le Club, donc au détri-ment de nos contribuables. »

Le Club a mis en place, avec les autresacteurs multilatéraux (G7, Banque mon-diale, Fonds monétaire international, Ban-que africaine de développement), une stra-tégie pour contrecarrer l’action de ces pré-dateurs. Il demande notamment aux payscréanciers de ne pas vendre leurs créancesà ces fonds, afin que ces dettes impayéespuissent être rachetées par la Banquemondiale et qu’elles puissent par la suiteêtre annulées. Une aide juridique est parailleurs apportée aux pays « attaqués »par les « fonds vautours ».

D’autre part, le Club s’efforce d’asso-cier à ses travaux les pays émergents deve-nus d’importants prêteurs (Abu Dhabi,Brésil, Israël, Koweït, Corée du Sud, Tur-quie, Chine). En effet, il souhaite les per-suader qu’il serait dommageable de réen-detter excessivement les pays dont ladette vient d’être annulée et qu’ilconvient de discipliner l’attribution deprêts, par ailleurs bienvenus. a

Alain Faujas

La transaction, d’un montantcompris entre 2,2 et 3 milliardsd’euros, illustre la volontédes groupes pharmaceutiquesnippons de se diversifieret de s’internationaliser

Deux stewards licenciés pour des« blagues » considérées comme graves

Le japonais Daiichi Sankyo prend le contrôledu fabricant indien de génériques Ranbaxy

Economie & Entreprises

TRANSPORT UN INVESTISSEMENT DE 300 MILLIONS D’EUROS, CRÉATEUR DE PLUS DE 2 000 EMPLOIS

A Leipzig, DHL a ouvert son troisième hub mondialLEIPZIG (Allemagne)ENVOYÉE SPÉCIALE

C’est un aéroport dans l’aéroport : un han-gar où peuvent entrer deux Airbus A380 etun immense centre de stockage et de tri sedressentsur un espacede quelque200 hec-tares. A proximité, sur une piste toute neu-ve,près de soixanteavions atterrissentcha-que soir. Ils déchargent, puis repartent, ducœur de la nuit au petit matin, lestés d’unenouvelle cargaison de colis.

A l’aéroport de Leipzig-Halle, en Saxe(Est), le leader mondial de la livraisonexpress DHL vient de mettre en service sonnouveau hub européen. Filiale du groupeallemand Deutsche PostWorld Net, DHL ainauguréofficiellementà la findumoisder-nier cette plate-forme aérienne pour lescolis à forte valeur ajoutée et les paquetsexpress. Soit deux ans et demi après avoirlancé leprojet, à l’automne2005.Unegran-de partie des activités implantées à l’aéro-portde Bruxelles-Zavantem ont étédéloca-lisées à Leipzig, choisie notamment audétriment de Vatry en France.

« Nous avions un besoin urgent de nousagrandir.A Leipzig, à la différencedeBruxel-les, nous avons l’autorisation de faire volerles avions la nuit, soit un fonctionnement dusite vingt-quatre heures sur vingt-quatre,explique Claus Korfmacher, porte-parolede DHL. En outre, nous nous trouvons iciaux portes de l’Europe de l’Est et nous avons

à disposition un personnel motivé et quali-fié. » L’investissement, évalué à 300 mil-lions d’euros, a été subventionné à hauteurde 70 millions d’euros par les pouvoirspublics. En échange, l’entreprise s’estengagée à créer 3 500 emplois d’ici à 2012.Déjà 2 000 personnes ont été embau-chées, dont 90 % sont originaires de cetterégion d’ex-RDA durement touchée par lechômage.

Avec Leipzig, le spécialiste du courrierexpress entend renforcer son maillageentre l’Europe, l’Amérique du Nord etl’Asie. La nouvelle plate-forme compte dèsson démarrage parmi les trois principauxhubs de DHL, aux côtés de Wilmingtonaux Etats-Unis (Ohio) et Hongkong.

100 000 paquets en une heureL’entreprise s’enorgueillit de ce site

logistique, selon elle « le plus moderne enEurope, voire dans le monde ». Dans la hallede stockage, véritable centre nerveux duhub, un dédale de tapis roulants acheminesur quatre étages les colis et les paquetsarrivés de toute l’Europe par trains,camions et avions. Une fois réceptionnés,ils sont triés selon leur taille et leur conte-nu, remballés si besoin, puis répartis enfonction de leur destination.

En journée, les installations fonction-nent au ralenti ; la nuit, l’activité est inten-se dans ce bâtiment de 48 000 mètres car-

rés. « De l’atterrissage au décollage, lesmarchandises restent rarement plus dedeux heures sur place, décrit une responsa-ble technique, Condula Pabsch. Jusqu’à100 000 paquets et documents peuvent êtreexpédiés en une heure grâce à un processuspresque entièrement automatisé. »

1 500 tonnes de marchandises sontenvoyées chaque jour ouvrable vers unecinquantaine de destinations à travers lemonde. DHL vise 2 000 tonnes par jourd’ici à 2012, soit 600 000 tonnes par an.

« La plate-formeaériennede Leipzig-Hal-le est un centre logistique d’envergure mon-diale », grâce auquel le groupe assoit sa« position dominante dans le secteur de lalivraison express », s’est réjoui FrankAppel, président de la maison mère Deuts-che Post, lors de l’inauguration du site.DHL justifie son investissement par la for-te croissance des échanges et la divisionmondiale du travail. Comme ses concur-rents UPS et FedEx, la division express dugroupe profite à plein de la mondialisa-tion, malgré des pertes enregistrées parson activité aux Etats-Unis. En 2007, lenombre de ses envois a dépassé 900 mil-lions, vers 120 000 destinations.

M. Appela annoncé leprochaindévelop-pement du nouveau hub. Le terrain offri-rait assez d’espace pour construire deuxautres centres de stockage. a

Marie de Vergès

GRANGE CASTLE (Irlande)ENVOYÉ SPÉCIAL

Le laboratoire américain Wyeth a investi1,8 milliard d’euros en Irlande, à GrangeCastle, dans le comté sud de Dublin, pourproduire un kilogramme de matière acti-ve d’Enbrel par jour. L’Enbrel est un médi-cament biologique – il est tiré des cellulesovariennes de hamster chinois – qui atransformé la vie de milliers de personnesatteintes de polyarthrite rhumatoïde, unemaladie douloureuse et invalidante. Maisil est très coûteux (entre 10 000 et20 000 euros par an et par malade).

La production de Grange Castle est suf-fisante pour répondre à la demande del’Europe et des Etats-Unis. Mais le labora-toire est aujourd’hui au carrefour de plu-sieurs contraintes : le nombre de maladesva croître avec le vieillissement de la popu-lation, des patients nouvellement solva-bles arrivent des pays riches d’Asie(Chine, Inde…) et les systèmes d’assuran-ce-maladie vont imposer progressive-ment des réductions de prix.

Comment doubler la production –deux kilos d’Enbrel par jour – sans inves-tir à nouveau 1,8 milliard d’euros ? Parune augmentation des cadences ? L’usinetourne déjà sept jours sur sept sans uneminute d’arrêt.

Réduire les temps de fabrication outrouver des fournisseurs moins chers ?« Tirer les prix vers le bas engendre deredoutables problèmes de qualité », expli-que Jean-Pierre Reynier, professeur à la

faculté de pharmacie de Marseille. Lesmédicaments biologiques ont un niveaude susceptibilité tel que toute modifica-tion – le bouchon, la forme de l’ampouleou de la seringue, sans parler de l’exci-pient qui accompagne la molécule – faitsurgir le risque d’une « dégradation de lamolécule ». Il est arrivé que, des fabri-cants de bouchon n’ayant pas signalé àun laboratoire une modification mineurede leur produit, celui-ci a commencé de

commercialiser un médicament moinsefficace pour les patients.

En biotechnologie, la réduction descoûts passe donc par des investissementsen recherche. En galénique (mise en for-me du médicament) tout d’abord. L’enro-bage de la molécule dans un excipientamélioré peut démultiplier l’effet de lasubstance active.

Il est possible aussi de réduire les per-tes, qui peuvent atteindre 10 % de la pro-

duction, à chaque étape de la purificationdu médicament. Une meilleure sélectionpeut aussi accroître la densité des cellulesdans les cuves… Autant de pistes qui sontdes secrets techniques passant par desdépôts de brevets. Quant à l’efficacité, elledevra, après toute modification, être prou-vée à l’aide de nouveaux essais cliniques.Les agences sanitaires sont fermes sur lasécurité des produits. a

Y. M.

La pharmacie nippone multiplie lesacquisitions hors du territoire natio-nal. Le laboratoire japonais Daiichi

Sankyo a annoncé, mercredi 11 juin, qu’illançait une offre d’achat amicale sur lepremier groupe pharmaceutique indien,le fabricant de génériques Ranbaxy. L’opé-ration aura lieu en deux temps.

Tout d’abord, la famille Singh, fondatri-ce de Rabaxy, cède les 34,8 % du capitalqu’elle détient avec un bonus de 31,4 %par rapport au dernier cours de Bourse.Ensuite, Daiichi lancera une offre publi-que d’achat (OPA) sur le reste du capital.Le coût total de la transaction se situeraitentre 3,4 et 4,6 milliards de dollars (entre2,2 et 3 milliards d’euros).

Ranbaxy est le premier fabricant de

médicaments indien, largement spéciali-sé dans les génériques. Pour le japonaisdont les produits les plus connus sont leBenicar (antihypertenseur) et le Prasu-grel (antithrombotique), l’acquisitionreprésente tout à la fois une diversifica-tion importante dans les génériques, maisaussi une réelle internationalisation. Ran-baxy, comme tous les fabricants de généri-ques, commercialise des médi-caments aux Etats- Unis et enEurope.

Le PDG de Ranbaxy, Malvin-der Singh, le petit-fils du fonda-teur de l’entreprise BhaiMohan Singh, sera maintenudans ses fonctions. « C’est unpas très important vers le pro-chain niveau de croissance », adit M. Singh à la presse à NewDelhi.

Alors que les groupes indiens sont fiersde leurs récents achats en Occident –notamment l’achatde Jaguaret LandRoverpar Tata –, M. Singh a défendu une ventequi« va nous permettrede grossir, plusvite, etd’être meilleur ». Il espère « transformer »

son groupe – l’un des dix premiers fabri-cants mondiaux de génériques – en « unlaboratoire pharmaceutique international derecherche ».

Plusde80 %duchiffred’affairesdeRan-baxy provient des produits génériques.Mais comme tous les fabricants de« copie », ce sont les profits réalisés sur lesmédicaments innovants et brevetés qui les

font rêver. Beaucoup de fabri-cants de génériques investissentdonc leurs profits dans unerecherche classique capable dedonnerlieuàunproduitexclusif.

Ce rachat est un épisode deplus dans la politique agressivede diversification menée depuis2008 par les laboratoires japo-nais. Après le rachat de l’entre-prise de biotechnologie améri-

caine Millenium par le japonais Takedapour plus de 8 milliards de dollars, etaprès la prise de contrôle de MGI Pharmapar Eisai pour 3,9 milliards, l’opérationDaiichi Sankyo est la troisième de grandeampleur pour le marché nippon.

Daiichi se positionne désormais à la

neuvième place mondiale sur un marchédugénérique estiméaujourd’hui à 120 mil-liards de dollars. La stratégie suivie par lelaboratoire japonais est à peu près lamêmeque celle du suisse Novartis : répon-dre aux besoins du marché national japo-nais en médicaments génériques, réduireles risques en explorant les différentesfacettesdumarchédumédicament et pren-dre pied sur des marchés émergents(Chine, sous continent indien) où il estaujourd’hui absent.

En outre, compte tenu du fait que leslaboratoires nippons sont de taille trèsmodeste par rapport à leurs homologuesoccidentaux, la course à la grandeur réduitle risque d’être eux-mêmes avalés. Un dan-ger d’autant plus grand qu’ils rencontrentles mêmes problèmes que les autres : unedifficulté certaine à assurer la relève demédicaments qui vont prochainementtomber dans le domaine public. Un labora-toire comme Sanofi-Aventis ne fait ainsipas mystère de son intention d’acquérirune structure conséquente sur le marchéjaponais. a

Yves Mamou

BIOTECHNOLOGIES L’USINE DE GRANGE CASTLE, QUI PRODUIT LE MÉDICAMENT ENBREL, A DÉJÀ COÛTÉ 1,8 MILLIARD D’EUROS

Le laboratoire américain Wyeth cherche à doubler sa production en Irlande

A l’usine Wyeth de Grange Castle, dans le comté sud de Dublin, les employés travaillent 24 heures sur 24, sept jours sur sept, pourproduire un kilo par jour de matière active d’un médicament efficace pour soulager les malades atteints de polyarthrite rhumatoïde. DR

Le PDGde Ranbaxya défenduune vente qui « vanous permettrede grossir, plusvite, et d’êtremeilleur »

12 0123Vendredi 13 juin 2008

Page 13: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

La commission préconisede poursuivre le « virageéditorial » pris par FranceTélévisions, en faisantdes chaînes du service public« ni élitistes ni confidentielles »

Jean-François Copé, président (UMP)de la commission chargée de réfléchirà l’avenir de la télévision publique

sans publicité, a présenté, mercredi11 juin, les grandes lignes du rapportfinal qui doit être remis au président dela République le 25 juin.

Après avoir déjà acté à l’unanimité l’in-dexation de la redevance audiovisuellesur l’inflation et l’élargissement de l’as-siette aux autres moyens de réception(Internet, téléphonie mobile), la commis-sion va, cette semaine, se décider sur unetaxation des chaînes privées et des four-nisseurs d’accès Internet pour compen-ser le manque à gagner des recettespublicitaires de France Télévisions.

Concernant le « modèle culturel et decréation », la commission préconise depoursuivre le « virage éditorial » engagépar Patrick de Carolis, PDG de FranceTélévisions, en faisant des chaînes du ser-vice public des télévisions « ni élitistes niconfidentielles ». Pour cela, la commis-sion insiste sur la transformation de

France Télévisions en un « média glo-bal », composé de six unités de program-mes (fiction, cinéma, arts-musique-litté-rature-civilisations, documentaire, diver-tissements, jeunesse). Elle souhaite une« nouvelle identité » des chaînes : Fran-ce 2 (fédératrice), France 4 (innova-tion), France 5 (savoir et décryptage),RFO (cultures et diversités). A ces chaî-nes s’ajouteraient plusieurs chaînes thé-matiques numériques (information, san-té, sciences, spectacle vivant…).

Sept régions au lieu de treizeMais c’est France 3 qui subirait la

plus grosse révolution avec un renforce-ment de son « identité régionale » autourde sept régions au lieu de treize actuelle-ment. « C’est un renversement complet deson mode de fonctionnement », a soulignéM. Copé. « Au lieu d’une chaîne nationaleet de décrochages régionaux, nous propo-sons un réseau de chaînes régionales et undécrochage national », a-t-il poursuivi,en demandant que cette réorganisationse fasse toutefois « par étapes ». « Le pro-gramme de ses sept chaînes régionales com-prendrait la retransmission d’événementslocaux et une plus grande place serait don-née aux rendez-vous d’information deproximité », a-t-il précisé.

Parallèlement, le décrochage nationaldevrait participer à la valorisation desrégions et des patrimoines locaux par la

fabrication de programmes nationauxen région et par des structures de produc-tion déconcentrées. L’informationdevrait être aussi bouleversée avec « larecherche des synergies » entre les rédac-tions afin de développer un portail d’in-formation unique et des bulletins d’infor-mation sur France 4 et France 5, adaptésà l’identité de ces chaînes.

Concernant la gouvernance, la com-mission recommande le regroupementde toutes les sociétés de France Télévi-sions en une société unique avec unconseil d’administration de douze mem-bres où ne seraient pas présents les parle-mentaires. Outre deux salariés, huit per-sonnalités qualifiées de l’entreprise y sié-geraient et les représentants de l’Etatauraientun droit de veto, sauf pour la dési-gnation du PDG. Ce dernier, jusqu’icinommé par le Conseil supérieur del’audiovisuel (CSA) serait élu par leconseil d’administration sur présentationde trois noms sélectionnés par le CSA.

Selon le schéma avancé par la commis-sion, le PDG nommerait deux directeursgénéraux, un pour les contenus, un autrepour les moyens. Enfin, le contrat d’ob-jectifs et de moyens (COM) – actuelle-ment de trois ans – sera allongé àcinq ans, la durée du mandat d’un prési-dent, « pour gagner en cohérence et en effi-cacité ». a

Daniel Psenny

Jean-François Copé, le 11 juin : pour le député, France Télévisions doit devenir un « média global ». MARC CHAUMEIL/FÉDÉPHOTO POUR « LE MONDE »

La commission Copé prône uneprofonde réorganisation de France 3

BERLIN

CORRESPONDANCEBlottie dans les collines boisées du nord dela Bavière, la petite ville d’Ostheim von derRhön offre au visiteur l’apparence d’unejolie bourgade endormie. C’est pourtant làqu’a débuté l’histoire de Bionade, uneentreprise qui enregistre depuis trois ansdes taux de croissance fulgurants. La cléde son succès : une limonade 100 % natu-relle devenue culte en Allemagne.

En 2005, Bionade a vendu 20 millionsde bouteilles, 70 millions en 2006 et200 millions en 2007. Jour après jour, unballet incessant de camions s’approvision-ne à la brasserie Peter où sont produits,quotidiennement, un million de sodas.« L’ambiance qui règne ici est un peu celled’une ville de chercheurs d’or. Tout change ets’agrandit à toute vitesse », raconte PeterKowalsky, gérant de cette PME familiale.

Pour répondre à unedemande exponen-tielle, le site doit sans cesse être repensé.En deux ans, trois nouvelles chaînes d’em-bouteillage et 12 km de tuyauterie ont étéconstruits. Les bureaux ont déménagédans le centre-ville. Quatre réservoirsneufs sont prêts à être mis en route. « Avecune progression de nos ventes de 300 %, cha-que année depuis trois ans, nous devons enpermanence recalculer nos investissements,explique Stephan Kowalsky, frère de Peteret responsable du développement techni-que de Bionade. C’est très excitant et enmême temps, c’est un véritable défi de devoirmener de front la production et les travauxd’aménagement permanents. »

Lesmembres de l’entrepriseaiment rap-peler l’histoire loufoque de cette limonadeau secret de fabrication jalousement gar-dé. Dans les années 1980, touchée de pleinfouet par le déclin de la consommation debière, la brasserie Peter est au bord de lafaillite. Le maître brasseur Dieter Leopold,beau-père de Peter et Stephan Kowalsky,se lance le défi de créer une nouvelle bois-son.Fermentée, mais sansalcool etentière-

ment biologique. Huit années durant, ilmet au point sa recette et la peaufine. En1995, la marque est déposée et la premièreBionade mise en bouteille.

« Les débuts ont été très difficiles : contrai-rement à ce que nous pensions, personne nevoulait de notre invention », se souvientPeter Kowalsky.

Au début des années 2000, c’est ledéclic. Sous l’impulsion d’un publicitaire,Wolfgang Blum, la stratégie et le designsont repensés. Distribué à Hambourg et àBerlin, le soda commence à capter uneclientèle urbaine et branchée. Peu à peuses quatre parfums (sureau, gingembre-orange, litchi et plantes) séduisent lesconsommateurs, à l’heure de la vague bio.

ConvoitisesAujourd’hui, la Bionade est partout :

dans les bars, les cantines scolaires, les res-taurants d’entreprise. En août 2007, l’en-treprise a passé un contrat de distributionavec McDonald’s. Après Fanta et Sprite,elle est la troisième limonade la plusconsommée par les Allemands. « Mêmebio, cette boisson n’est pas destinée à être chic.Nous voulons en faire un produit de masse »,affirme M. Blum, aujourd’hui associé etdirecteur marketing de Bionade.

Rançon de sa gloire, la PME suscite lesconvoitises. Depuis deux ans, Coca-Colamultiplie les offres de rachat. Sa dernièretentative date de mi-avril. Mais, aux diresde ses propriétaires, Bionade n’est pas àvendre. L’Allemagne est devenue un mar-ché trop petit pour la boisson gazeuse, par-tie fin 2006 à la conquête de l’internatio-nal. Elle est aujourd’hui distribuée dansvingt pays, dont la France depuis mi-2007.Et, depuis le mois d’avril, les Etats-Unis.« L’heure est historique : Bionade est la pre-mière marque allemande de soda à être ven-due sur le marché américain, se réjouitM. Blum. Et elle a les moyens de faire jeuégal avec Fanta, Sprite ou Seven up. » a

Marie de Vergès

LE CONSEIL d’administration d’Icade,mercredi 11 juin, n’a pas permis de voirplus clairement l’avenir du pôle de loge-mentsde cette filiale d’immobilier cotée enBourse de laCaisse des dépôts et consigna-tions (CDC).

Malgré des démentis, la presse (le sited’information sur Internet Médiapart, le6 juin, puis La Tribune, le 10 juin) s’étaitfait l’écho d’un projet de cession de l’inté-gralité du pôle de logements d’Icade(40 000 logements). Ce projet allait trèsau-delà de la vente de 14 500 logementsannoncée en début d’année.

Les administrateurs d’Icade escomp-taient donc des clarifications de la part desdirigeants d’Icade et de sa maison mère, laCDC. Ils n’en ont pas obtenu. Mais ils ontacquis laconviction,de sourcesconcordan-tes, au terme d’un conseil heurté, que des« discussions poussées » ont bel et bien eulieu sur une cession massive de logements,sans qu’ils en aient été avertis ou saisis. Cequi, selon ces sources, constitue une entor-se aux règles de gouvernance.

Questions sur le logement socialEn fait, ainsi que l’ont affirmé Icade et la

CDC, il n’existe aucun mandat de venteofficiel du pôle de logements d’Icade, pasplus qu’il n’y a d’offre formelle de la partd’un acheteur. Tout s’est passé de manièrediscrète et officieuse, dans le cadre du pro-cessus de vente du bloc de 14 500 loge-ments, piloté notamment par un banquierde BNP Paribas, Charles Sayag, une stardes fusions et des acquisitions dans l’im-mobilier. Un consortium de sociétés HLM,dont l’immobilière 3F, a fait part de sonintérêt pour l’ensemble du pôle immobi-

lier d’Icade, et notamment les 30 000 loge-ments non sociaux au plan juridique, maisqui jouent ce rôle de fait, et auxquels lesmaires sont attachés. Ce patrimoine estvalorisé autour de 3,5 milliards d’euros.

A travers cette vente, c’est la question del’avenir de la société qui est posée, et doncde la politique de la CDC en matière delogement social, l’une des grandes politi-ques publiques du moment. Débarrasséede sa vocation résidentielle et sociale, Ica-de deviendrait une foncière classique, etpeut-être plus rentable, à la tête d’un patri-moine de bureaux et de commerces.

« Ce n’est pas forcément une mauvaiseidée de remettre les logements d’Icade dans lepatrimoine social. Mais il faut faire les cho-ses dans les règles et, surtout, avec une visionstratégique claire », estime un proche dudossier. La cession du pôle de logementsd’Icade, qui exerce par ailleurs une activitéd’administration de biens et de promo-tion, rendrait délicat le maintien du statutde SIIC, avantageux sur le plan fiscal.

Dans ce contexte flou, Serge Grzybow-sky, le président d’Icade, réitère qu’« Icadepoursuit sa politique de cession de logementstelle qu’annoncé », soit la vente de14 500 logements à différents bailleurssociaux, etde2 500 logements à leursoccu-pants, entre 2008 et 2012.

M. Grzybowsky ajoute cependant que« l’avenir du logementdans Icadeestun sujetdonton peutdébattre et, s’il y a des évolutions,elles serontdiscutéesdevant le comitédestraté-gie et le conseil d’administration. Je suis, il estvrai, approché chaque jour par des entrepri-ses sociales de l’habitat maisnotredésengage-ment n’est pas à l’ordre du jour ». a

Anne Michel et Isabelle Rey-Lefebvre

Economie & Médias

ALIMENTATION 200 MILLIONS DE BOUTEILLES VENDUES EN 2007

Le fabuleux succès de Bionade, sodaallemand à la conquête du monde

SELON les différentes pistes retenuespar la commission Copé sur la suppres-sion progressive ou totale de la publicitésur les chaînes publiques, l’agence AegisMédia Expert a fait des estimations dumanque à gagner pour France Télévi-sions calculé sur la base des investisse-ments en 2007.

D’après les estimations de l’agence, labaisse de recettes serait de 280 millionsd’euros net par an jusqu’en 2011 (date dela suppression totale de la publicité) et de110 millions d’euros net pour 2009,année au cours de laquelle la publicitéserait supprimée après 20 heures. Pen-dant la phase transitoire (2009-2011),« les investisseurs pourraient reporter inté-gralement cet investissement sur les chaînesprivées nationales et [celles] de la télévisionnumérique terrestre (TNT) », soulignel’agence. Dans l’hypothèse où le « parrai-nage publicitaire » serait conservé pourl’outre-mer, les décrochages régionauxde France 3 et les sites Internet de France

Télévisions, le coût annuel pour le groupepublic serait ramené de 800 à 650 mil-lions d’euros net (incluant, outre la pertede recettes, le remplacement de trois heu-res de publicité par jour par des program-mes).

Une manne pour les régiesLes grands groupes privés (TF1, M6

et Canal+) pourraient se partager envi-ron 10 points de parts de marché publici-taire supplémentaires. Les autres régiesbénéficieraient elles aussi de cette nou-velle manne avec 14 millions d’eurosbrut pour Lagardère Publicité, 8 mil-lions brut pour TMC Régie, 6 millionspour MTV Publicité, 3 millions pourNRJ Régie et NextRadio, 900 000 eurospour Bolloré et Manchette.

« La suppression de la publicité sur leschaînes publiques n’est pas une bonne cho-se pour les annonceurs », affirme ValérieNégrier, directrice du pôle expert TVchez Aegis. « Il y aura des vases communi-

cants avec [leurs rivales] privées mais plu-sieurs annonceurs seront obligés de se pri-ver de cibles spécifiques aux chaînes de ser-vice public comme les enfants et les seniorsqui représentent respectivement 6 % et15 % des recettes publicitaires de FranceTélévisions », poursuit-elle.

La seconde coupure publicitaire quipourrait être octroyée aux réseaux privésrapporterait 300 millions d’euros, etmême 435 millions d’euros si la régle-mentation sur les interruptions publici-taires était assouplie de 6 à 9 minutespar heure. Selon Aegis Média Expert, lasuppression de la publicité sur les chaî-nes publiques ne bénéficiera pas à lapresse écrite et à Internet. Seule la pres-se magazine pourrait récupérer une par-tie des annonceurs qui, pour certainescibles, n’investissaient que sur FranceTélévisions. En 2007, cette publicité trèsciblée avait rapporté 68 millions d’eurosau groupe public. a

D. P.

IMMOBILIER UNE CESSION ENVISAGÉE

L’avenir incertain du pôle logementsd’Icade, filiale de la Caisse des dépôts

France Télévisions devra trouver 650 à 800 millions d’euros

AGROALIMENTAIREInBev lance une OPA hostilesur son rival Anheuser-BuschLe brasseur belgo-brésilien InBev, l’undes trois géants mondiaux de la bière, aproposé mercredi à son rival américainAnheuser-Busch, le producteur de laBudweiser, de le racheter pour 46,3 mil-liards de dollars (30 milliards d’euros),afin de créer le premier brasseur mon-dial. La nouvelle entité aurait un chiffred’affaires de 36 milliards de dollars et

laisserait loin derrière elle SABMiller,fort de 21 milliards de dollars de chiffred’affaires. Le nouveau groupe issu d’unefusion entre InBev et Anheuser-Buschserait aussi le leader de la bière enChine, un marché-clé convoité par tousles brasseurs mondiaux.InBev propose 65 dollars par action ennuméraire, soit une prime de 35 % parrapport au cours de Bourse moyen obser-vé avant la récente spéculation déclen-chée par les rumeurs de rachat.

JEUXLe gouvernement compte ouvrirle capital de la Française des JeuxLe gouvernement a confirmé, mercredi10 juin, qu’il réfléchissait à l’actionnariatde la Française des Jeux. « La Françaisedes Jeux devra adapter sa stratégie, sonorganisation et sa gouvernance. L’Etat vaengager dans ce contexte une réflexion surl’évolution de l’actionnariat du groupe », adéclaré Eric Woerth, le ministre du bud-get au cours du conseil des ministres.

FINANCESophie Boegner, administrateurde la SLPS (Wendel), a été révoquéeSophie Boegner, l’administrateur de laSociété lorraine de participations sidérur-giques (SLPS) qui avait porté plaintecontre la direction de Wendel, a été révo-quée mercredi 11 juin par l’assembléegénérale des actionnaires, à 82,2 %, selonun porte-parole. La question de la succes-sion d’Ernest-Antoine Seillière à la prési-dence a été renvoyée à l’automne.

L’Assemblée libéralisela distribution du Livret AL’Assemblée nationale a répondu mer-credi 11 juin aux injonctions de Bruxel-les en votant la généralisation de la dis-tribution du Livret A à tous les établisse-ments de crédit.Auparavant, ce champion de l’épargnepopulaire était entre les mains de troisétablissements (Banque postale, Caissesd’épargne et Crédit mutuel pour leLivret bleu).

0123Vendredi 13 juin 2008 13

Page 14: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

VALEURS DU CAC40LES BOURSES DANS LE MONDE 12/6, 9h56

Pays Indice Dernier % var. Maxi Mini PER cours 2008 2008

ACCOR ............................◗ 46,25 46,48 -0,49 -15,45 56,30 42,45 3,15 T FR0000120404AIR FRANCE-KLM .............◗ 15,96 15,91 0,31 -33,64 24,61 15,20 0,48 T FR0000031122AIR LIQUIDE ......................◗ 84,60 84,15 0,53 -8,57 95,64 74,67 2,25 T FR0000120073ALCATEL-LUCENT .............◗ 4,19 4,26 -1,76 -15,35 5,15 3,24 0,16 T FR0000130007ALSTOM.............................◗ 154,50 151,53 1,96 5,10 168,24 113,15 0,80 T FR0010220475ARCELORMITTAL ..............◗ 61,99 62,08 -0,14 16,54 67,79 35,35 0,21 A LU0323134006AXA ....................................◗ 20,59 20,56 0,15 -24,83 27,60 19,18 1,20 T FR0000120628BNP PARIBAS ....................◗ 60,02 59,65 0,62 -19,13 75,41 52,12 3,35 T FR0000131104BOUYGUES........................◗ 44,93 44,73 0,45 -21,18 57,25 39,44 1,50 T FR0000120503CAP GEMINI ......................◗ 40,64 40,75 -0,27 -5,49 45,14 31,12 1,00 T FR0000125338CARREFOUR ......................◗ 43,39 43,38 0,02 -18,58 53,75 43,27 1,08 T FR0000120172CREDIT AGRICOLE ............◗ 13,62 13,58 0,29 -36,04 21,58 13,45 1,20 T FR0000045072DANONE............................◗ 52,66 52,72 -0,11 -14,23 64,00 50,10 1,10 T FR0000120644DEXIA.................................◗ 13,07 13,10 -0,23 -24,06 18,86 12,90 0,68 T BE0003796134EADS ..................................◗ 13,78 13,60 1,32 -36,88 22,20 12,83 0,10 T NL0000235190EDF .....................................◗ 67,65 68,88 -1,79 -16,97 83,90 53,87 0,70 S FR0010242511ESSILOR INTL.....................◗ 40,04 39,94 0,25 -8,27 44,39 35,00 0,62 T FR0000121667FRANCE TELECOM ............◗ 18,14 18,02 0,64 -26,34 26,14 17,68 1,30 T FR0000133308GAZ DE FRANCE................◗ 43,39 43,15 0,56 8,47 44,77 33,35 1,26 T FR0010208488LAFARGE............................◗ 110,43 108,79 1,51 -11,30 125,45 102,65 4,00 T FR0000120537LAGARDERE ......................◗ 42,16 42,06 0,24 -17,80 54,68 42,00 1,30 T FR0000130213L'OREAL .............................◗ 74,48 73,74 1,00 -23,98 99,26 72,47 1,38 T FR0000120321LVMH MOET HEN. ............◗ 70,72 70,47 0,35 -14,47 83,93 61,95 1,25 S FR0000121014MICHELIN ..........................◗ 47,57 47,78 -0,44 -39,40 79,90 47,12 1,60 T FR0000121261PERNOD RICARD ..............◗ 70,44 70,03 0,59 -10,89 79,97 61,65 1,26 S FR0000120693PEUGEOT ...........................◗ 35,57 36,11 -1,50 -31,40 53,68 35,54 1,50 T FR0000121501PPR .....................................◗ 77,45 78,37 -1,17 -29,59 112,76 77,10 3,45 T FR0000121485RENAULT ...........................◗ 58,00 58,04 -0,07 -40,21 99,16 57,65 3,80 T FR0000131906SAINT-GOBAIN .................◗ 46,00 45,73 0,59 -28,67 65,26 45,41 1,70 T FR0000125007SANOFI-AVENTIS .............◗ 42,98 42,88 0,23 -31,76 66,90 42,41 2,07 T FR0000120578SCHNEIDER ELECTRIC.......◗ 76,50 76,69 -0,25 -17,46 94,29 69,01 3,30 T FR0000121972SOCIETE GENERALE ..........◗ 57,99 57,46 0,92 -37,37 93,52 57,11 0,90 T FR0000130809STMICROELECTRONICS ...◗ 7,48 7,60 -1,58 -23,67 9,89 6,21 0,05 A NL0000226223SUEZ...................................◗ 46,28 46,12 0,35 -0,62 49,35 37,70 1,36 T FR0000120529TOTAL ................................◗ 54,00 53,40 1,12 -4,98 59,50 45,45 1,07 S FR0000120271UNIBAIL-RODAMCO ........◗ 156,06 156,13 -0,04 4,10 175,50 136,51 1,70 A FR0000124711VALLOUREC.......................◗ 205,25 200,60 2,32 10,86 212,60 120,02 4,00 S FR0000120354VEOLIA ENVIRON. ............◗ 40,60 40,40 0,50 -34,99 64,00 40,22 1,21 T FR0000124141VINCI..................................◗ 42,76 42,31 1,06 -15,58 51,15 39,60 1,05 S FR0000125486VIVENDI.............................◗ 25,56 25,64 -0,29 -18,55 31,60 23,05 1,30 T FR0000127771

Jeudi 12 juin 9h45Valeur Dernier Cours % var. % var. Plus Plus Divid. Code cours préc. /préc. 31/12 haut bas net ISIN

FRANCE CAC 40 4681,96 12/6 0,45 5665,94 2/1 4416,71 17/3 10,90

CAC Mid100 6955,54 12/6 0,16 7736,69 2/1 5759,58 22/1

CAC Small 90 6641,49 11/6 -0,95 8124,81 2/1 6034,08 22/1

SBF 250 3309,82 11/6 -1,99 3953,69 2/1 3136,96 17/3 11,50

ALLEMAGNE DAX Index 6671,66 12/6 0,32 8100,64 2/1 6167,82 17/3 11,30

ROYAUME UNI FTSE 100 index 5725,90 12/6 0,05 6534,70 4/1 5338,70 22/1 10,50

SUISSE Swiss market 7143,03 12/6 -0,34 8421,00 3/1 6769,80 17/3 15,90

ETATS-UNIS Dow Jones ind. 12083,77 11/6 -1,68 13279,54 2/1 11634,82 22/1 12,90

Nasdaq composite 2394,01 11/6 -2,24 2661,50 2/1 2155,42 17/3 20,50

JAPON Nikkei 225 13888,60 12/6 -2,08 15156,66 4/1 11691,00 17/3 15,70

(Publicité)

Cours en euros.◗ : valeur pouvant bénéficier du service de règlement différé (SRD). # : valeur faisant l'objet d'un contrat d'anima-tion. Plus haut et plus bas : depuis le 1/1/2008. n/d : valeur non disponible. A : acompte, S : solde, T : totalité.

SÉLECTION publiée sous laresponsabilité de l'émetteur

Dernier cours connu le 12/6 à 9h

Valeur Cours date

en euro valeur

Fonds communs de placementsEc.BENEF.RESP(EX EC1,2,3FUTUR) 49,99 10/6ECUREUIL ACTIONS EUROP. C 18,28 10/6ECUREUIL CAPIPREMIERE C 2624,37 10/6ECUREUIL CAPITAL C 53,21 10/6ECUREUIL DYNAMIQUE + D 39,12 10/6ECUREUIL ENERGIE D 44,10 10/6ECUREUIL EURIBOR 1210,28 10/6ECUREUIL EXPANSION C 17775,03 10/6ECUREUIL INVESTISSEMENT D 54,55 9/6ECUREUIL MONEPREMIERE C 2331,01 10/6ECUREUIL SECURIPREMIERE C 2507,11 10/6ECUREUIL SENSIPREMIERE C 3116,71 10/6ECUREUIL TRESORERIE C 64,90 11/6ECUREUIL TRIMESTRIEL D 248,20 10/6

Multi-promoteursCM EUROPE ACTIONS 26,90 11/6Fonds communs de placementsCM-CIC EURO ACT C 23,95 10/6CM SELECTION PEA 8,88 10/6CM OBLIG CT C 190,26 11/6

CM-CIC MID EUROPE 21,33 10/6CM-CIC TEMPERE 163,23 10/6CM-CIC DYN.EUROPE 36,85 10/6CM-CIC FRANCE 38,33 10/6CM MONDE ACTIONS 247,58 10/6CM-CIC EQUILIBRE 70,44 10/6

GMO ACTIONS 102,79 10/6LBPAM ACTIONS AMERIQUE C 22,04 10/6LBPAM ACTIONS DEVELDURABLE C 129,89 10/6LBPAM ACTIONS DEVELDURABLE D 119,45 10/6LBPAM ACTIONS DEVELDURABLE S 85,98 10/6LBPAM ACTIONS EURO R 30,17 10/6LBPAM ACTIONS FRANCE C 102,00 10/6LBPAM ACTIONS FRANCE D 91,95 10/6LBPAM ACTIONS INDICE FRANCE 39,64 10/6LBPAM ACTIONS INDICE EURO 93,91 10/6LBPAM ACTIONS MIDCAP C 120,01 10/6LBPAM ACTIONS MIDCAP D 111,13 10/6LBPAM ACTIONS MONDE C 200,66 10/6LBPAM ACTIONS MONDE D 168,53 10/6LBPAM ACTIONS PACIFIQUE C 17,35 10/6LBPAM MONETAIRE 1 C 124,28 11/6LBPAM MONETAIRE1D 109,59 11/6LBPAM OBLI LONG TERME 1 D 122,59 10/6LBPAM OBLI MOYEN TERME C 223,08 10/6LBPAM OBLI REVENUS 725,64 10/6LBPAM PROFIL 100 C 74,16 10/6LBPAM PROFIL 100 D 68,00 10/6LBPAM PROFIL 100 S 89,29 10/6LBPAM PROFIL 15 C 218,49 10/6LBPAM PROFIL 15 D 200,17 10/6LBPAM PROFIL 50 C 222,75 10/6LBPAM PROFIL 50 D 204,62 10/6LBPAM PROFIL 80 C 235,22 10/6LBPAM PROFIL 80 D 216,73 10/6LBPAM PROFIL 80 PEA C 89,09 10/6LBPAM PROFIL 80 PEA D 81,59 10/6LBPAM PROFIL 80 PEA S 91,57 10/6

LBPAM TRESORERIE 2 C 3093,97 11/6LBPAM TRESORERIE 2 D 2267,76 11/6VIVACCIO ACTIONS 103,23 10/6Fonds communs de placementsLBPAM ACTIONS TELECOM 48,68 10/6LBPAM ACTIONS EUROPE C 69,52 10/6LBPAM ACTIONS FINANCE 76,05 10/6LBPAM ACTIONS SANTE 85,97 10/6LBPAM OBLI EUROPE D 101,02 10/6

FCP Multi-gestionF&C ASIA PACIFIC DYNAMIC A 13,10 10/6F&C ASIA PACIFIC DYNAMIC I 13,17 10/6F&C ASIA PACIFIC DYNAMIC X 13,25 10/6F&C DIVERS.GR. A HDG USD 196,98 10/6F&C DIVERS.GR. X GBP 99,36 10/6F&C EMERGING MKTS. BD A USD 12,78 10/6F&C EMERGING MKTS BD C HDG 106,06 10/6F&C ENHALPHAUKEQ I GBP 100,77 10/6F&C ENHALPHAUKEQ X GBP 101,13 10/6F&C EUR INFLATION LINK BD A 9,93 10/6F&C EUR INFLATION LINK BD I 9,69 10/6F&C EUROPEAN CORPORATE BD A 16,41 10/6F&C EURO HIGH YLD BD A 13,08 10/6F&C EUROP SM CAP A 14,24 10/6F&C EUROPEAN EQTY A 15,51 10/6F&C GL .EMG. MKT. A USD 26,93 10/6F&C GL CLIMATE OPP A 49,28 10/6F&C GL CLIMATE OPP. A USD 76,24 10/6F&C GL CONV BD AH 12,54 10/6F&G GLOBAL CONVERTIBLE BD A 11,79 10/6F&C GLB CONVERTIBLE OPP EUROIH 12,67 10/6F&C GL REAL ESTATE A 13,03 10/6F&C GTAA ALPHA FUND A 92,95 10/6F&C GTAA ALPHA FUND I 93,54 10/6F&C GTAA ALPHA FUND I GBP 99,38 10/6F&C JAPAN.EQTY A 21,64 10/6F&C NORTH AMER EQ. A 18,82 10/6F&C PACIFIC EQTY A 40,75 10/6F&C STEWARDSHIP INT A 8,90 10/6

F&C STEWARDSHIP INT I 9,27 10/6F&C US SMALL COMP A USD 81,18 11/6F&C US SMALL COMP C USD 8,86 11/6

Fonds communs de placementsCM-CIC DYN.INTERN. 27,44 10/6CIC OBLI C.T. D 130,37 11/6CIC OBLIGATIONS D 24,29 11/6CM-CIC MID FRANCE 34,66 10/6CM-CIC USA 6,55 10/6CM- CIC JAPON 4,27 9/6CIC PROFILE EQUILI 19,68 10/6CM-CIC TEMPERE 163,23 10/6CIC PLAN BOURSE 12,96 10/6............................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

Ecofrictions Les « gents »préfèrent l’Asie à la City

COURS DE L'EURO

TAUX D'INTÉRÊT LE 12/6Taux Taux Taux Tauxj.le j. 3 mois 10 ans 30 ans

france 4,04 4,96 4,74 4,98

royaume-uni 5,09 5,95 5,30 4,96

italie 4,04 4,96 5,12 5,37

allemagne 4,04 4,96 4,54 4,87

japon 0,58 0,92 1,80 2,54

états-unis 2,10 2,79 4,09 4,83

suisse 2,10 2,88 3,38 3,53

Les anciennes possessionsde la Couronne défient leurex-colonisateur sur son ter-rain : la finance. A en croire

une presse britannique alarmiste,les places boursières des écono-mies émergentes, en particulierDubaï, Mumbai et Singapour,débauchent à tour de bras des pro-fessionnels londoniens.

Les « gents » se verraient offrirdes salaires mirobolants, jusqu’àquatre fois leurs rémunérationslondoniennes, des avantages fis-caux et en nature colossaux, ainsiqu’un cadrede vie agréable. S’ajou-tent l’absence de contraintes régle-mentaires, des relations privilé-giées avec un marché intérieur enplein boom, l’utilisation de l’an-glais et l’esprit d’aventure.

« Les places émergentes disposentde toute l’infrastructure nécessaire,notamment des télécommunicationset des liaisons aériennes nécessaires àl’exercice du métier de banquier. Et,quand les individus décampent, lesbanques suivent », souligne Ralf Sil-va, analyste auprès du Tower-Group, à propos du récent trans-fert par Goldman Sachs et MerrillLynch d’équipes entières de la City« à l’est de Suez ».

Peter Hahn, de la Cass BusinessSchool, partage ce diagnostic :« Alors que Londres souffre de la cri-se du crédit, ces places peuvent tirer

profit du boom des transactions. Parailleurs, en ces périodes de vachesmaigres, le coût exorbitant des loyerset du train professionnel ainsi quel’aggravation de la pression fiscalesur les expatriés pénalisent la City. »

Enfin, le quartier financierconnaît une montée de la délin-quance etdes comportements anti-sociaux, étant considéré avechostilité comme un repaire de nan-tis par nombre des sujets de SaMajesté. L’utilisation de la cocaïneet l’ivresse d’une minorité de jeu-nes banquiers stressés défrayent lachronique de la presse populaire.

Alors…« Mumbai, Dubaï, Shan-ghaï… Goodbye », comme l’a joli-ment énoncé un journal britanni-que adepte des bouts rimés ? « Cet-te nouvelle concurrence concerne tou-tes les places financières occidenta-les. Il s’agit d’un défi à long terme » :sans sous-estimer cette menace,

Tony Halmos, directeur de la com-munication de la Corporation ofLondon, le lobby de la haute finan-ce, reste confiant. Il y a l’avantagedes fuseaux horaires : Londrescommence après la fermeture deTokyo et avant l’ouverture de NewYork, ce qui permet de jouer. Ledroit qualifié de jurisprudentiel etle système judiciaire anglais rassu-rent. Et, à l’instar de Wall Street, sarivale historique, la City disposed’un formidable réseau de bureauxd’avocats, de cabinets d’audit etd’entreprises de relations publi-ques aux méthodes rodées.

Enfin, à l’ombre de la Banqued’Angleterre, la règle du jeu finan-cier ne change pas selon les vicissi-tudes politiques, comme c’est tropsouvent le cas dans le Golfe oudans le sous-continent indien.

Dans sa campagne de promo-tion, Dubai souligne que les Pors-che coûtent deux fois moins cherdans l’émirat que dans la City.« C’est bien la preuve que ceux quipartent sont des flambeurs cupides,le genre d’adepte du clinquant dontonn’a pas besoin », souligne unres-ponsable d’une banque étrangère.« Tellement “non-U” [non upperclass, mal vu] Dubaï », aurait mur-muré la romancière snob NancyMitford… a

Marc Roche(Londres, correspondant)

PER - Price Earning Ratio (ou cours/bénéfice) : cours de Bourse divisé par le bénéfice par action estimé pourl'exercice courant. PER : FactSet JCF Estimates ; données : la Cote Bleue.n/d : valeur non disponible.

Achat Vente

dollar us ................................1,5435...........1,5437

yen .......................................165,9000 ......165,9300

couronne tchèque .............24,3430.........24,3630

couronne danoise ...............7,4581...........7,4591

livre sterling.........................0,7900...........0,7901

forint hongrois...............246,9900 ......247,9900

zloty polonais ......................3,3780...........3,3880

couronne suédoise ..............9,3631...........9,3648

couronne slovaque ..........30,2610.........30,3610

franc suisse ...........................1,6077...........1,6079

couronne norvég. ...............8,0241...........8,0281

rouble ...................................36,5820.........36,6820

livre turque...........................1,9373...........1,9473

dollar australien ................1,6441...........1,6451

dollar canadien ...................1,5779...........1,5789

yuan chinois .......................10,6605.........10,6705

won sud-coréen ............1592,4000 ....1593,4000

dollar néo-zéland...............2,0423...........2,0523

rand sud-africain .............12,3639.........12,3739

TAUX

OR

JEUDI 12 JUIN 9h56 Cours % var.

LIGHT SWEET CRUDE ................................. ................

ChineL’indice des prix à la consom-mation en Chine a augmentéde 7,7 % en mai en glissementannuel, en recul par rapport àavril (+ 8,5 %), a annoncé leBureau national des statistiques,jeudi 12 juin. Sur les cinq pre-miers mois de l’année, l’indice aprogressé de 8,1 %.

Les investissements directsétrangers (IDE) en Chine ontprogressé de 37,94 % en mai,en glissement annuel, atteignant7,761 milliards de dollars (5 mil-liards d’euros), a annoncé leministère chinois du commerce,jeudi 12 juin. Sur les cinq pre-miers mois de l’année, ils ont tota-lisé 42,778 milliards de dollars,en hausse de 54,97 %.

Etats-UnisL’activité économique est res-tée « généralement faible »depuis fin avril aux Etats-Unis,a indiqué la Réserve fédéraleaméricaine (Fed) dans son Livrebeige publié mercredi 11 juin.« Les dépenses de consommationont ralenti depuis le dernier rap-port, les revenus étant rognés parla hausse des prix de l’énergie etdes denrées alimentaires », expli-que la Fed dans son rapport.

IndeLa banque centrale indienne aannoncé un relèvement d’unquart de point de son taux direc-teur à court terme, à 8 %, mercre-di 11 juin. Cette décision est prisealors que l’inflation s’est établiedébut juin à 8,24 % sur un an.

Londres voit partirde jeunes banquiers,mais garde des atouts :ses horaires, son droit,sa stabilité

JEUDI 12 JUIN 9h56 Cours % var.

ONCE D'OR EN DOLLAR.................874,25.......-1,16

PÉTROLE

SICAV ET FCP

TABLEAU DE BORD

BEN BERNANKE est à la fois pro-fesseur d’université et banquiercentral. Le discours qu’il a pro-noncé, lundi 9 juin, reflète sesdeux points de vue. Celui de l’an-cien doyen du département d’éco-nomie de l’université de Prince-ton est bien plus alarmant quecelui du président de la Réservefédérale américaine (Fed).

Les marchés ne se sont intéres-sés qu’aux propos du patron de laFed. M. Bernanke a minimisé lerisque « de ralentissement économi-que substantiel », n’a expriméaucune inquiétude relative à la sta-bilité financière et a affirmé que laFed allait « fortement résister » àtoute révision en hausse des pers-pectives d’inflation à long terme.Ce qui a été considéré comme unesuccession de mots-clés annon-çant une future hausse des taux.Celle-ci est dorénavant anticipéepour août.

Pourtant la partie universitaireétait plus révélatrice. Elle a mon-tré que M. Bernanke est profondé-ment troublé par la mécaniqueinflationniste.

Le premier sujet était le prix desmatières premières. Il est exclu dela statistique préférée de la Fedsur l’inflation sous-jacente. MaisM. Bernanke a admis que cettepolitique a conduit à des « sous-évaluations » de l’inflation. Il a

aussi exprimé son incompréhen-sion des causes de la flambée descours de matières premières aussivariées. Il s’est alors tourné vers larelation entre prix et salaires. Lesdonnées restent assez floues, maisil semble que les employeurs nerespectent pas les modèles écono-miques, qui incitent à ne pas ali-gner les hausses de salaire sur l’in-flation. Au motif qu’une économieaffaiblie devrait empêcher lessalaires d’augmenter et de suivreles prix.

La conclusion de M. Bernankeportait sur les prévisions d’infla-tion. Pour lui, personne ne saitcomment elles sont réalisées,pourquoi elles changent ni com-ment elles pèsent immédiatementsur les salaires et les prix. Les pro-fesseurs aiment les débats ani-més. Aussi, que M. Bernankereconnaisse son ignorance ne doitpas être interprété comme un crid’impuissance. Mais avec la per-sistance d’une inflation mondiale,qui surprend la plupart des écono-mistes, le modèle conventionnelpourrait connaître quelques chan-gements de fond.

Peut-être M. Bernanke devrait-il penser un peu plus à la monnaieet au crédit. La théorie monétaris-te pourrait finalement connaîtreun renouveau. a

Edward Hadas

Economie & Finances

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Le professeur, la Réservefédérale et l’inflation

LA DÉMISSION du gouverne-ment sud-coréen comme l’agita-tion sociale en Malaisie provien-nent de la flambée du prix desmatières premières. Ces fluctua-tions rendent les autorités, mêmecompétentes, impuissantes.

En Corée du Sud, la crise a étéofficiellement provoquée par ladécision de Séoul, en avril, de leverl’interdiction d’importations debœufs en provenance des Etats-Unis,dans l’espoir (sans doute futi-le) que cela persuaderait leCongrès américain de ratifier l’ac-cord de libre-échange entre lesEtats-Unis et la Corée. L’augmen-tation simultanée des prix de l’ali-mentation et de ceux de l’énergie adéclenché des vagues de protesta-tions, des menaces de grèves et afait descendre la cote de populari-té du pouvoir local à moins de25 % – ce qui est inhabituel pourun gouvernement et un présidentélus à de larges majorités quel-ques mois plus tôt.

En Malaisie, le prix du baril à130 dollars fait que les subven-tions entraînent un coût budgétai-re intolérable, représentant 9 %

du produit intérieur brut. La haus-sede 41 % du gazole s’est accompa-gnée de menaces de protestationsde masse, affaiblissant davantagela fragile et récente administrationd’Abdulllah Ahmed Badawi.

Dans les deux cas, le bouleverse-ment du prix des matières premiè-res a fait basculer des opinions quis’étaient récemment exprimées,mettant fin à la lune de miel quetout gouvernement nouvellementélu est en droit d’espérer.

Les violentes fluctuations desprix font souffrir les consomma-teurs. Ce tourment peut vite pren-dre la forme d’un scandale politi-que, les dirigeants se voyant alorsreprocher faiblesse et incompéten-ce. De tels « tsunamis » sur lesprix effacent donc l’avantagequ’ont les gouvernements écono-miquement capables sur ceux quisont ineptes, et accroît la probabili-té que des régimes économique-ment extrémistes ou populistesémergent du chaos. a

Martin Hutchinson

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La crise efface la compétencedes gouvernements

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Page 15: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

1958Naissance à Tel-Aviv(Israël).

1980-1984Agent du Mossad, l’une desagences de renseignementisraéliennes.

1999Elue députéeà la Knesset.

2001Ministrede la coopération régionale.

Mars 2006Devient ministre desaffaires étrangères.

2007Demande, en mai,la démission du premierministre, Ehoud Olmert.

Le pays l’aimeparce qu’il ne saitque peu de chose d’elle

La ministredes affaires étrangèresisraélienneest convaincueque le chefdu gouvernement,Ehoud Olmert,va démissionner.Persuadée queson heure est venue,elle veut lui succéderet se préparepour cette bataille

DécryptagesPortrait

Tzipi Livni est dans lesstarting-blocks. Tousles sondages la placenten tête. Elle est convain-cue qu’Ehoud Olmert, lepremier ministre – misen cause par la justicepour une affaire de

financement illégal de ses campagnesélectorales –, ne pourra plus tenir long-temps dans la position inconfortabledans laquelle il se trouve. Tzipi Livni estpersuadée que son heure est venue. Laministre israélienne des affaires étrangè-res a donc demandé que des primairesaient lieu au sein du parti Kadima (Enavant) pour désigner un successeur à l’ac-tuel chef du gouvernement. Elle se prépa-re à cette bataille d’appareil en recensantses appuis.

La lutte ne sera pas facile contre sonprincipal adversaire, l’ancien chef d’état-major de l’armée, Shaul Mofaz, ministredes transports. Ehoud Olmert, non plus,n’est pas disposé à lui faire de cadeau. Aucontraire. Il va tout tenter pour faireéchouer cette concurrente qui, contraire-ment à lui, ne contrôle pas les rouages duparti. C’est là son principal handicap.

En revanche, cette avocate de profes-sion dispose d’un atout capital, outrecelui de sa popularité : son intégrité.Jamais impliquée dans un scandale dequelque nature qu’il soit, la « Mme Pro-pre » de la politique israélienne fait figu-re de renouveau après la succession d’af-faires qui ont terni l’image de bon nom-bre de dirigeants politiques du pays cesdernières années.

Sans espoir de lui trouver la moindrecasserole, ses adversaires et concurrentss’efforcent de mettre en avant son côténovice en politique ainsi qu’un parcourssans beaucoup de relief. Mais comme ledit Daniel Bensimon, journaliste à Haa-retz, « son avantage est qu’ici en Israël onadore le changement, et sa faiblesse est quele parti a peur d’elle. C’est un peu commeSégolène Royal avant la présidentielle : plé-biscitée à l’extérieur et contestée à l’inté-rieur ».

Bientôt âgée de 50 ans, Tzipi Livni est,

il est vrai, entrée tard en politique. Fidèledu Likoud (droite nationaliste), elle a étéélue pour la première fois à la Knesset(Parlement) en mai 1999. Issue d’unefamille de combattants de l’Irgoun, orga-nisation ultranationaliste juive qui a eurecours à des opérations terroristescontre les Anglais et les Palestiniensavant la création de l’Etat d’Israël en1948, Tzipi Livni a été élevée dans la tradi-tion conservatrice, le goût du secret et lavolonté indéfectible du combat dans les-quels ses parents Sara et Eitan se sontillustrés. Aujourd’hui encore, elleconnaît par cœur les chants de conquêteet de sacrifice qui ont bercé son enfance.

Rendant hommage à sa mère, décédéeen octobre 2007, elle a salué « cette guerriè-re qui a entraîné tout le monde dans sonsillage ». Dans sa jeunesse, elle en fut aus-si une. Pendant au moins quatre ans, audébut des années 1980, elle a été un agentdu Mossad – officiellement en tant qu’ex-pert juridique – et aurait participé à la tra-que de dirigeants de l’Organisation delibération de la Palestine (OLP), notam-ment en Europe. Bien évidemment, peu afiltré de ces années de lutte clandestine.

Revenue à une vie plus paisible, elleachève des études de droit à peine com-mencées, puis devient avocate, spécialistedu droit commercial. C’est tout naturelle-ment qu’elle s’est orientée vers la politiquepour continuer le combat entrepris par les

siens et par cette famille politique issue del’Irgoun qu’est devenu le Likoud. Même sielle n’est pas du même bord politique queGolda Meir, elle voue une profonde admi-ration à la seule femme israélienne qui futministre des affaires étrangères pour deve-nir ensuite premier ministre. Une trajec-toire qu’elle espère bien suivre. Son par-cours politique a été rapide grâce à la pro-tection que lui a offerte Ariel Sharon. Ellea suivi sans sourciller ses inflexions politi-ques en faveur du désengagement de labande de Gaza et de la scission du Likoudavec la création de Kadima.

Tzipi Livni sait ce qu’elle veut, et elle estprête à faire ce qu’il faut pour y parvenir.On raconte qu’en février 2003, afin d’obte-nir le portefeuille convoité, elle n’a pashésité à devancer l’heure du rendez-vous

du candidat précédent pour lui souffler leministère qu’il allait se voir attribuer.Après plusieurs expériences au sein dugouvernement Sharon, elle obtient enfin,en mars 2006, le poste ambitionné deministre des affaires étrangères, considé-ré comme le tremplin naturel à la direc-tion du gouvernement.

Ce n’est pas parce qu’elle est particuliè-rement pressée qu’elle veut accéder à laplus haute marche mais parce qu’elle pen-se qu’il faut faire avancer les choses dansune certaine direction. Celle de la créationd’un Etat palestinien, dont elle est convain-cue que c’est une nécessité afin de préser-ver le caractère juif de l’Etat d’Israël. Elleest donc parfaitement à sa place à la têtede l’équipe qui mène les négociations avecles Palestiniens. Sa complicité avec Condo-leezza Rice, secrétaire d’Etat américaine,lui a permis d’asseoir son autorité et deparfaire son apprentissage des arcanesinternationaux.

Tout le monde avait mis sur le comptede son inexpérience sa demande de démis-sion d’Ehoud Olmert, en mai 2007, aprèsla publication du rapport préliminairedévastateur de la commission Winogradsur la guerre du Liban de l’été 2006. Elleavait été accusée de manque de couragepour ne pas avoir abandonné ses fonc-tions après ce qui lui avait valu le surnom« Tzipi the Knife ».

Certains lui reprochent d’être toujours

profondément ancrée à droite lorsqu’elleaffirme que les Palestiniens d’Israëln’auront plus qu’à se taire si l’Etat palesti-nien est créé ou que « les Palestiniens nepourront célébrer leur indépendance quelorsqu’ilsauront supprimé de leur vocabulai-re le terme Nakba [catastrophe] », utilisépour évoquer la saisie de leurs terres etl’éviction de leurs villages. Gideon Levy,du quotidien Haaretz, n’a pas manqué dela clouer au pilori, mais estime néanmoinsqu’elle est « préférable » à tous les succes-seurs potentiels d’Ehoud Olmert.

En vérité, Tzipi Livni reste un grandpoint d’interrogation. « Le pays l’aime par-ce qu’il ne sait que peu de choses d’elle », iro-nise Herb Keinon, du Jerusalem Post. Dis-crète, secrète, refusant toujours de parlerd’elle et de ses projets, cette quinquagénai-re reste à découvrir. Plutôt froide, sérieu-se, préférant les choses simples aux mon-danités, elle préserve jalousement sa vieprivée.

Mariée et mère de deux enfants, elle estconsidérée comme féministe, mais estimeque la promotion doit reposer sur les méri-tes et non sur le genre. Au ministère desaffaires étrangères, elle est considéréecomme une bonne professionnelle, unpeu trop distante, qui, pour se positionnerdans le rôle de premier ministre, va devoirsortir de sa carapace. a

Michel Bôle-RichardPhoto Ammar Awad/Reuters

PARCOURS

Herb Keinondu « JerusalemPost »

Tzipi Livni Laprétendante

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Page 16: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

Henry Chang, Lucien SimonYangi, Chine, Envoyés spéciaux

Menue maisrobuste, avecses cheveuxcourts et sonvisage halé parle travail deschamps, c’estun petit boutde femme bra-

ve et décidée. Agenouillée sur l’ondol (solde papier huilé chauffé par-dessous)d’une modeste maison de style coréen, elleporte dans ses bras son enfant endormi.De la République populaire démocratiquede Corée (RPDC) à ce hameau chinoissitué à une trentaine de kilomètres dufleuve Tumen, qui marque la frontièreentre les deux pays, elle a fait un courtvoyage, une tragique odyssée qui reflètecelle de milliers de Coréennes fuyant leurpays.

Originaire de la ville minière d’Onsong,nonloinde la frontière, elle travaillait à l’ex-traction du charbon. Le nord de la provinced’Hamgyong, jouxtant la Chine, est larégionlapluspauvredelaRPDC : la« Sibé-rie coréenne », dit-on, en raison de son cli-mat,maisaussiparcequec’est traditionnel-lement une région de bannissement. Sonpère, membre du Parti des travailleurs, fut« purgé » lorsqu’elle était encore enfant, etla famille quitta Pyongyang, où vivent lesprivilégiés. Devenu mineur, le père mourutpendant la grande famine de la secondemoitié des années 1990, qui fit un millionde morts (5 % de la population).

« J’ai pensé que moi non plus je ne survi-vrais pas et j’ai décidé de partir. Je n’étaisjamais sortie de ma commune. La rumeurdisait qu’en Chine on vivait mieux. Quandon ne sait rien, on supporte tout, mais, si unelumière apparaît dans la nuit, on va verselle,dit-elle. C’est la faim et l’absence de pers-pective plus que la répression politique quipoussent à partir. »

Elle avait 19 ans. Elle soudoya un garde-frontière et passa le fleuve. « L’eau arrivaitjusqu’au cou. Je portais un paquet de vête-ments secs sur la tête. » Sur l’autre rive, ellefut appréhendée par la police chinoise.Renvoyée en RPDC, questionnée, semon-cée, battue. Un mois plus tard, elle recom-mençait. Découverte, elle fut à nouveaurapatriée. « Cette fois, lors de l’interrogatoi-

re, j’ai hurlé que j’avais soudoyé des gardes-frontières. J’ai fait un tel vacarme que, crai-gnant que mes cris parviennent à leurs supé-rieurs, les policiers m’ont jetée dehors. »

La troisième tentative faillit aussi tour-ner mal. « Du côté chinois, je suis tombéesur un barrage de police. Dans la Jeep, j’aipu faire glisser les menottes, trop grandespour mes poignets, et j’ai sauté en marche.Puis j’ai couru, couru et j’ai pu les semer »,raconte-t-elle, enjouée comme un enfantqui a joué un bon tour. Parcourant à pied30 km à travers la montagne, elle est par-venue jusqu’à ce hameau habité par desSino-Coréens.

L’importante communauté d’originecoréenne de Yanbian, la région autonomejouxtant la RPDC, est implantée là depuistrois générations. Elle se chiffre à prèsd’un million d’habitants, ce qui permetaux migrants de se fondre dans la masse.La majorité vient faire un peu d’argent etrepart. D’autres essaient de s’exfiltrer aufil d’un long périple de 5 000 km jusqu’auYunnan pour passer au Laos, puis enThaïlande, où ils demandent asile enCorée du Sud.

Cette jeune femme (26 ans) est arrivéelà il y a quatre ans. Après quelques mois,elle a commencé à vivre avec un paysanqui a le double de son âge et dont elle a eusonenfant. Elle sourit quand on lui deman-de si elle est heureuse. « Mais j’ai peur. »Au cours de son récit, son regard ne s’estvoilé qu’une fois lorsqu’elle raconta com-ment elle avait reconnu sa tante sur unephoto présentée aux habitants du villagepar des policiers qui cherchaient à identi-fier une femme assassinée et dévaliséedont le corps venait d’être découvert. Pas-sée en Chine, elle avait été victime de pas-seurs brigands.

Depuis le début de l’année, les 1 300 kmde la frontière sino-nord-coréenne sontscellés. Caméras, clôtures de grillage surplusieurs centaines de mètres aux endroitsconnus pour être des lieux de passage, ren-forcement des patrouilles de policiers et desoldats sur la route longeant le fleuve etdoublementdesamendesen casd’assistan-ce à un migrant, sont dissuasifs. Il en va demême sur la rive nord-coréenne, où il fautpasser plusieurs contrôles avant de parve-nir au fleuve et où les punitions infligées à

ceux qui sont pris ont été alourdies.Plus de 200 000 à la fin des années

1990, lors de la grande famine, lesmigrants nord-coréens en Chine ne sontplus que 30 000 selon les organisationshumanitaires locales. « Désormais, le nom-bre des passages est infime », dit le prêtred’un village aux maisons basses couvertesde chaume, non loin de la Tumen, dontl’église est surmontée d’une croix dispro-portionnée par rapport au modeste bâti-ment : un point de repère pour lesmigrants. La communauté sino-coréenneest en majorité chrétienne et les églisessont un maillon des réseaux qui leur vien-nent en aide.

La question des transfuges nord-coréens a longtemps été secondaire pourla Chine. Elle estime que ceux-ci ne sontpas des réfugiés, mais des « migrants éco-nomiques » en situation illégale, qu’ellerapatrie conformément à l’accord fronta-lier avec la RPDC. Pourtant, à la veille desJeux olympiques, Pékin veut éviter un nou-veau foyer de critiques internationales denon-respect des droits de l’homme. « Lesautorités chinoises ont deux objectifs, pour-suit le prêtre, bloquer les arrivées et fairepreuve d’une plus grande flexibilité à l’égardde ceux qui sont déjà en Chine. » C’est le cas

pour les enfants nés de liaisons entre desCoréennes et des Chinois.

« Lorsque les mères ont été rapatriées deforce, les enfants illégitimes [la femme étanten situation illégale, il n’y a pas eu demariage] sont souvent abandonnés par lespères », commente le directeur d’une peti-te école de la région, qui compte septorphelins parmi une quarantaine d’élèves.« Non déclarés, ces enfants n’ont pas droit àl’éducation gratuite. Mais, depuis le débutde l’année, les autorités acceptent de leur don-ner des certificats. Indirectement, c’est unegarantie pour la mère. Celle-ci reste cepen-dant en situation irrégulière, toujours à lamerci d’une déportation », poursuit-il.Selon les organisationshumanitaires inter-nationales, ces enfantsapatrides abandon-nés seraient plusieurs milliers.

Autre assouplissement : « Depuis quel-ques mois, les déportations ont pratique-ment cessé », dit le prêtre. Une tolérance,confirmée par plusieurs sources, mais quin’est peut-être que temporaire.

Ces dernières années, les femmes sonttrois fois plus nombreuses que les hommesà être entrées clandestinement en Chine.« Elles encourent en général des punitionsmoins sévères », assure le prêtre. Pas tou-jours : parmi les 15 personnes exécutéesen mars dans la région d’Onsong, il y avait13 femmes. Ceux ou celles qui avaient l’in-tention de fuir au sud sont passibles delourdes peines : camp, exécution publique.

Les Coréennes passées en Chine sontparfois mariées : elles tentent de gagnerun peu d’argent pour nourrir leur familleet retournent en RPDC. D’autres essaient

de refaire leur vie. Toutes risquent d’êtrevictimes des « marchands de femmes » :violentées, vendues comme épouses à despaysans âgés ou handicapés, ou contrain-tes de se prostituer. « Vulnérables commetoutes les femmes en détresse, elles sont desproies d’autant plus faciles qu’elles sont ensituation illégale », dit-il.

Dans les quartiers coréens des villesfrontalières, « on peut vivre sans parler unmot de chinois », dit un homme d’affairessino-coréen de Shenyang. C’est le cas dansle quartier de Xinda, ruisselant de lumièresetd’enseignesderestaurantset dekaraoke-bars, de cette capitale de la province deLiaoning. Des migrantes coréennes tra-vaillent clandestinement comme serveu-ses, plongeuses, domestiques. D’autres se« défendent » sur le marché de la nuit.

Dansce bar luxueux,cette jeune Coréen-ne au visage avenant et en robe froufrou-tante ultracourte pourrait être une hôtessecomme une autre. Dans un lieu plus dis-cret, elle raconte son histoire : « J’ai26 ans dont huit passés dans l’armée popu-laire. J’ai fini sous-lieutenant, dit-elle. Puisj’ai été envoyée en usine. Je n’avais aucunechance de m’en sortir dans la patrie et j’aidécidé de partir. Une amie passée en Chinem’aenvoyé de l’argent et j’ai soudoyé des gar-des-frontières. J’ai trouvé ce travail grâce àmon amie. Je ne m’étais jamais maquillée dema vie et des hommes je ne connaissais queles soldats. Avec l’argent gagné en trois mois,j’ai fait venir ma mère. »

Les passeurs fournissent à des contactsde l’autre côté de la frontière des télépho-nes mobiles chinois. Ils leur indiquent lapersonne à contacter – « même à l’autrebout du pays ». Un rendez-vous téléphoni-que est fixé. « C’est ainsi que ma mère estpassée en échange de 3 000 yuans[280 euros] », raconte-t-elle.

Les communications téléphoniquesclandestines sont aussi un moyen d’entre-voirce quisepasseenRPDC: les témoigna-ges indiquent que la pénurie alimentaire,sans atteindre les proportions de la faminede la seconde partie des années 1990, adéjà des conséquences dramatiques dansles régions pauvres : « En raison de la fer-meture de la frontière, mes compatriotes sontcomme des poissons dans un bocal qui se videde son eau, dit l’ex-soldate devenue hôtes-se.Lasurveillance de la frontière estplus sévè-re. Mais quand on a faim… »

Elle ne sort qu’à la tombée du jour. She-nyang est l’avant-poste de la présencenord-coréenne en Chine après Dandong,sur l’estuaire du fleuve Yalu qui, à l’ouest,marque la frontière avec la RPDC. Maisc’est aussi un nid d’espions : donc une vil-le dangereuse pour les illégaux. a

Reportage

Lesfugitives

Des Nord-Coréennesfranchissent chaqueannée la frontièrechinoise avec l’aidede passeurs.Elles rentrent parfoisavec un peu d’argent,essaient de passeren Corée du Sud,ou se retrouvent surle marché de la nuit

La communautésino-coréennede Yanji, à lafrontière chinoise,est en majoritéchrétienneet les églisessont un maillondes réseauxqui viennenten aideaux réfugiés.PHOTO PETER PARKS/AFP

150 km

Yangi

Onsong

C O R É E D U N O R D

CORÉEDU SUD

CHINE

LIAONINGHAMGYONG

JILIN

RUSSIE

Shenyang

Dandong

Pyongyang

Séoul

Ya lu

Tu

m e n

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Page 17: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

Bipolaires par Brito

Europe : carpettes s’abstenir !Sauf à accentuer son déficit démocratique, l’Union doit choisir ses responsables en toute clartéDe Gaulle,

en mille anecdotes

Ainsi, l’Assemblée nationale aadopté le 3 juin le projet de loiconstitutionnelle qui comporte,en son article 31, la créationd’un défenseur des droits des

citoyens. Il se substituera d’abord aumédiateur de la République, dont l’exposédes motifs du projet regrettait qu’il nepuisse pas être saisi directement ; une sim-ple loi aurait pu combler cette lacune.Mais il s’agit aussi, toujours selon l’exposédes motifs, de supprimer « des autoritésdont la multiplicité affaiblit l’efficacité ».Parmi elles, c’est la Commission nationalede déontologie de la sécurité (CNDS), quiest nommément visée.

Créée par la loi du 6 juin 2000, cetteautorité administrative indépendante estchargée de « veiller au respect de la déonto-logie par les personnes exerçant des activitésde sécurité sur le territoire de la Républi-que ». Toute personne s’estimant victimed’un tel manquement doit s’adresser à unparlementaire dont c’est le rôle éminentde vérifier si l’intervention de la CNDS est« méritée ». Ce système fonctionne et n’ap-pelle pas de saisines directes qui, par leurnombre, risqueraient de nuire à l’efficaci-té du contrôle.

Si tout service de sécurité, public com-me privé, peut être concerné, la quasi-tota-lité des saisines vise la sécurité publiquedans la police et l’administration péniten-

tiaire, qui ont dans leurs missions la possi-bilité de porter atteinte à des droits del’homme fondamentaux (arrestation,détention…). L’objet n’est pas de régler,comme le ferait un médiateur, un litigeentre un particulier et un de ces services.C’està la justice judiciaire ou administrati-ve de statuer. La loi donne pour mission àla CNDS de formuler « tout avis ou recom-mandation visant à remédier aux manque-ments constatés ou en prévenir le renouvelle-ment ».

La CNDS procède à des auditions (lespersonnes convoquées sont tenues dedéférer) ainsi qu’àdes vérifications surpla-ce même exceptionnellement sans préa-vis ; les autorités publiques doivent luifournir des informations et pièces etmême saisir leur corps de contrôle à sademande. Après délibération, outre lesavis et recommandations, la CNDS peutporter à la connaissance de l’autorité titu-

laire du pouvoir disciplinaire ainsi que duprocureur de la République les faits qui luiont été soumis.

Tant ces pouvoirs que la place des servi-ces contrôlés, parmi les institutionsdotées de droits exceptionnels, imposentune commission composée de personnali-tés compétentes et incontestables (quatreparlementaires, des représentants destrois hautes juridictions françaises, desmembres de la société civile, universitai-res, médecin, ancien bâtonnier, anciencommissaire de police…). Les décisionsprises le sont à l’unanimité. La ministre dela justice a précisé lors des débats qu’aprèsla suppression de la CNDS, le défenseur,reprenant les missions de la commission,« pourrait être assisté d’un collège ». Pour-quoi, dès lors, supprimer ce qui existe ?

Le président de la CNDS est nommépar le président de la République, qui atoujours choisi un ancien haut magistrat.La richesse de la composition prévue parla loi ainsi que l’existence de la CNDS,reconnues par les institutions européen-nes compétentes en la matière, ne sau-raient être contestées. Il ne faudrait pasque ce qui apparaît, notamment par soninscription dans la Constitution, commeune avancée dans la défense des droits descitoyens, se traduise par une remise enquestion des garanties qui leur sont déjàacquises. a

En 1959, le second maître demarine Guy-Marcel Hennequinentre au service du général deGaulle comme valet de cham-

bre. Il raconte : « Je viens de faire coulerson bain quand, de retour dans sa cham-bre, j’entends soudain parler dans la sallede bains ! Je n’ai pourtant fait entrer per-sonne (…) Je frappe donc à la porte, l’entre-bâille, et qu’est-ce que je vois ? Il est seul,debout, en peignoir, devant son miroir etrépète le texte d’un discours comme leferait un comédien. Tout y est, les gestes,les mimiques, les intonations. »

Ils ne sont pas nombreux à avoir vu,comme Guy-Marcel Hennequin, Char-les de Gaulle en peignoir. Ni à avoir pul’observer à son bureau, chez lui ou àtable. Les témoins de cette époque sefont même rares. C’est l’intérêt de cetouvrage de leur donner une fois encore,sinon une dernière fois, la parole.

Michel Tauriac connaît bien le sujet.Il a déjà publié un livre d’entretiens avecPhilippe de Gaulle, devenu un best-sel-ler, De Gaulle, mon père (deux tomes,Plon, 2002 et 2004). Ce nouvel ouvrageest dans la même veine et vise le mêmepublic : les passionnés de l’homme inti-me. Il a pour titre explicite Vivre avec deGaulle et pour sous-titre : « Les dernierstémoins racontent l’homme ».

Les 95 personnalités mises à contribu-tion par Michel Tauriac ont, pour certai-nes, déjà parlé ou publié leurs Mémoi-res : Jacques Chirac, Jean-Louis Cré-mieux-Brilhac, Jean Foyer, Valéry Gis-card d’Estaing, Jean-Marcel Jeanneney,Pierre Lefranc, Jean Mauriac, LucienNeuwirth, Edgard Pisani, pour ne citerque les plus notoires.

D’autres témoignent pour la premiè-re fois, comme Alice Garrigoux, unearchiviste à laquelle de Gaulle confia lesoin, en 1945, de mettre en ordre les300 cartons de documents qu’il avaitrapportés de Londres et d’Alger.

Ce gros livre, qui aurait pu être pluscourt, rassemble leurs témoignages en33 chapitres dont l’intitulé illustre cha-cun un trait de caractère de l’homme du18-Juin : « Séducteur », « Impassible »,« Perfectionniste »… Et aussi : « Colé-reux », « Impatient »…

La dévotion de Michel Tauriac pourson sujet est telle qu’il manque parfoisde recul. Pour évoquer l’exceptionnellemémoire de De Gaulle, il prétend que« l’on n’a jamais surpris le Généraldevant un micro, un papier à la main,excepté à Londres, le 18 juin 1940 ».Alors que l’une des photos les plusconnues de celui-ci le montre tenant desfeuilles dactylographiées le 16 juin 1946à Bayeux (Calvados), le jour où il pro-nonce son fameux discours sur l’avenirdes institutions.

Michel Tauriac profite aussi de celivre pour corriger certains jugements àl’emporte-pièce qu’il avait laissé Philip-pe de Gaulle formuler dans De Gaulle,mon père, quand il n’avait pas abondédans son sens. Il revient sur l’échec del’attaque franco-britannique de Dakar(1940), une opération destinée à ouvrirles portes de l’Afrique occidentale à laFrance libre. Très affecté par cet échec,de Gaulle, qui était de l’expédition, a-t-ilsongé à ce moment-là au suicide ? DansDe Gaulle, mon père, Michel Tauriacparle de « rumeur ». Aujourd’hui, il pri-vilégie le témoignage d’un proche duGénéral, Philippe Dechartre, auquell’homme du 18-Juin aurait dit : « Ehbien, figurez-vous que moi aussi [àDakar] j’ai pensé au suicide. »

D’inflexions historiographiques enanecdotes, ce livre se lit avec plaisir.Hauteur, causticité : par sa personnalitéet sa place dans l’Histoire, le Général estune source perpétuelle d’étonnement.Parmi les curiosités de l’ouvrage, on relè-vera cet aparté du grand homme, que sastature et ses fonctions plaçaient trèsau-dessus des contingences quotidien-nes : « Depuis 1940, ce qui m’ennuie,c’est que je ne connais pas les prix prati-qués en France. Je n’ai aucune idée de lavaleur des choses. » a

Bertrand Le Gendre

Dans leurs discours, les diri-geants européens appellenttoujours à une Union euro-péenne plus démocratique,plus transparente, plus effi-cace. Après les référendumsnégatifs de 2005, c’était

juré, croix de bois, croix de fer, nos autori-tés avaient compris les attentes du peuple.Et Nicolas Sarkozy d’affirmer à Stras-bourg en octobre 2007 : « L’Europe doitavoir plus de débats, plus de démocratie et aufond plus de politique. »

La présidence française de l’Union, quicommence le 1er juillet, va offrir une magni-fique occasion de voir comment les pro-messes se traduisent en actes. C’est eneffet le Conseil européen, composé desvingt-sept chefs d’Etat et de gouverne-ment de l’UE, qui doit bientôt doter celle-ci d’un président stable et d’un haut repré-sentant, chargé de l’action externe, auxpouvoirs renforcés. En 2009, le mandat del’actuel président de la Commission arrive

également à échéance. Trois nominations,troispostesstratégiques.Désigner nosdiri-geants après un débat public constitue,pour l’Union, un enjeu de légitimité maisaussi de crédibilité internationale. Pourpeser plus dans les affaires du monde, lesEuropéens devraient choisir les meilleursd’entre eux, les plus indépendants, les pluscombatifs. Et non se mettre d’accord surles moins gênants, d’autant plus appréciésqu’ils ne fâchent personne.

Au nom de la démocratie et de l’efficaci-té, la présidence française de l’Union pour-rait poser sept exigences nouvelles.

1. Respecter le calendrier démocrati-que. Aux termes du traité de Lisbonne, leprochain président de la Commission sera

issu de la majorité du Parlement européenélu en juin 2009. Il est particulièrementchoquant que certains envisagent deconclure « un marché » dès 2008. Si lesgouvernants veulent décourager lescitoyens européens d’aller voter, qu’ilscontinuent ainsi ! La démocratie imposed’attendre juin 2009, quitte à prévoir dessolutions transitoires pour les premiersmois de l’année.

2. Faire la lumière sur la sélection. Lapratique des petits arrangements entreamis, dans le huis-clos du Conseil euro-péen, doit cesser. Il serait inouï que l’orga-ne suprême de l’Union s’affranchisse desrèglesde transparenceque les traités impo-sentaux autres institutions communautai-res. Cette période d’une année laisse letemps d’organiser une phase de dépôt descandidatures puis un débat public, sousdes formes à définir, impliquant notam-ment le Parlement européen et les Parle-ments nationaux. La campagne pour lesélections européennes serait le moment,

pour chaque parti européen, d’indiquerquel est son programme et quels sont sescandidats. Ceux-ci seraient appelés à visi-ter les Etats membres, à exposer leursvues, à se faire connaître.

3. Définir des postes avant de choisirdes individus. Des noms (Tony Blair, Jean-Claude Juncker, Jose Manuel Barroso) cir-culent déjà mais, au fond, pour quoi faire ?Le profil le plus probable pour le « prési-dent » du conseil est celui d’une chairper-son à l’anglo-saxonne, c’est-à-dire l’anima-teur d’une équipe, un facilitateur de com-promis ou bien d’un président autoritémorale à l’italienne ou à l’allemande. Maispour les Français, l’image présidentielleest autre. Il faudrait en parler ouvertementsinon les frustrations seront grandes.

4. Répartir les tâches entre ces différen-tes autorités. Les risques de rivalité sontconsidérables. Si un accord n’est pas trou-vé pour éviter les empiétements, notam-ment dans les fonctions de représentationextérieure de l’UE, la cacophonie, la tradi-tiondes délégations européennespléthori-ques se perpétueront, au détriment de l’in-térêt européen.

5. Juger les candidats sur pièces et nonsur titre. La qualité d’ancien membre duConseil européen – qui tend à devenir unecondition incontournable –assureune cer-taine expérience. Elle ne garantit pas lesaptitudes requises pour occuper une fonc-tion supranationale. En outre, elle réduit levivier. Si elle avait été imposée jadis, Jac-

ques Delors ne serait jamais devenu prési-dent de la Commission. Il faut au contraireélargir le cercle afin de mobiliser destalents plus divers. Enfin, une évaluationplus systématique des candidats est néces-saire : des instituts de recherche indépen-dants, répartis dans différents Etats mem-bres pourraient dresser un bilan de l’ac-tion de chacun des candidats, dans sesfonctions nationales ou dans ses fonctionseuropéennes antérieures.

6. Poser des exigences de fond. Nul nepeut prétendre diriger l’UE s’il vient d’unpays qui s’est abstenu de reconnaître laCharte des droits fondamentaux. En effet,aunom de quelles valeurs irait-il par exem-ple conclure de nouvelles adhésions ? Lesdirigeants européens ne peuvent pas nonplus être issus des Etats qui se sont affran-chis des accords de Schengen et de l’euro.Il serait incompréhensible pour des Euro-péensconsentantde telspartages desouve-raineté d’être dirigés par ceux qui s’y sontdérobés.

7. Accorder au moins l’un de ces postesà une femme. Les plus hautes autoritéseuropéennes ne sauraient ignorer les exi-gences de parité imposées aux collectivitéslocales, aux Parlements nationaux et auxentreprises, ni décrédibiliser des décen-nies d’efforts de l’UE en faveur de la non-discrimination. Enfin, face aux intégristesde toutes confessions, la défense de la mixi-téconstitue l’une despriorités de nos socié-tés, tout comme l’intégration des person-nes issues de l’immigration. La conditionnon écrite tendant à privilégier les anciensmembres du Conseil renforce au contrairetous les conservatismes.

L’Union européenne se trouve à unmoment-clé de son histoire. L’enjeu de cesnominations est immense. La présidencefrançaise peut aider l’UE à éviter septpéchés capitaux contre l’esprit européen.Il serait tout à son honneur de proposerune véritable « rupture » démocratiqueafin d’éviter que le Conseil européen nesorte les noms des heureux élus comme unmagicien fait apparaître des lapins, sansexpliquerd’où ilsviennent, nioù ilsont l’in-tention d’aller. a

Débats

Roger BeauvoisPrésident de la CNDS

Pierre TrucheAncien président de la CNDS

La qualité d’ancien membredu Conseil européen assureune certaine expérience.Elle ne garantit pasles aptitudes requisespour occuper une fonctionsupranationale

Vivre avec de GaulleMichel TauriacPlon, 610 p., 24 ¤

La déontologie menacée par la ConstitutionLa Commission de déontologie de la sécurité pourrait passer à la trappe

Sylvie GoulardPrésidentedu Mouvement européen France

Lelivredujour

0123Vendredi 13 juin 2008 17

Page 18: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

ClaudeDityvonIl photographiaitla réalité sociale avecun regard plus poétiqueque documentaire P

rofesseur émérite à lafaculté des sciences juridi-ques de Tunis, ministre del’éducation de 1989 à1994, ancien président dela Ligue tunisienne desdroits de l’homme

(LTDH), une cause dont il resta toute savie un fidèle militant, Mohamed Charfiest mort d’un cancer, vendredi 6 juin, àTunis. Il était âgé de 71 ans.

Elégant, rigoureux, séduisant, cethomme de conviction, passionné de poli-tique, était né à Sfax le 11 octobre 1936.Rien ne destinait le jeune garçon, issud’une famille de lettrés religieux, plutôtconservateurs, à devenir ce modernisteflamboyant, ouvertement laïque et fémi-niste, qui sera, dès la fin des années 1980,la bête noire des islamistes. Le surnomde « Jules Ferry tunisien » qui lui est don-né au moment où il entreprend sa réfor-me de l’éducation, en 1989, l’a longtempspoursuivi. Sans qu’il s’en offusque.

Rien ne destinait non plus ce fort enthème à participer, après des études àParis, à la création du mouvement d’ex-trême gauche Perspectives. Au début desannées 1960, le tiers-monde est en ébulli-tion. La Tunisie n’est pas à l’écart dutumulte. Républicain et « patriote », com-me il se définit lui-même, MohamedCharfi a toujours eu « le cœur à gauche ».La dérive autoritaire du régime du prési-dent Habib Bourguiba le révolte. Mais,au Maghreb, la contestation se payecher : par la prison et la torture.

En 1968, la plupart des militants dePerspectives sont arrêtés et embastillés.Mohamed Charfi passe un an en prison.Il commence cependant à s’éloigner despositions, trop radicales à ses yeux, de sescamarades, attirés par le maoïsme.

A sa sortie de prison, il reprend le che-min de l’université et devient professeurde droit. Sans lâcher le militantisme. Ilest l’un des premiers à s’engager dans lalutte pour le respect des droits de l’hom-me. A la fois homme d’action et de

réflexion, il est à lui seul un condensé dela Tunisie moderne… et de ses paradoxes.Pour preuve : en 1989, alors qu’il est pré-sident de la LTDH, le chef de l’Etat, ZineEl Abidine Ben Ali, au pouvoir depuisdeux ans, lui offre le ministère de l’éduca-tion. Ayant accepté cette dernière charge,il se retire de la première. Ministre, il meten chantier une réforme qui établit unenette séparation entre l’enseignementreligieux et l’instruction civique et qui,surtout, ouvre écoles et lycées à la penséecontemporaine et au regard critique.

Démocrate sans partiCette réforme, exceptionnelle au regard

du monde arabe, assoit durablement laréputation de Mohamed Charfi, au-delàdu paysage maghrébin. Quelques annéesplus tard, l’auteur d’Islam et liberté, lemalentendu historique (Albin Michel,1999) sera appelé à siéger au sein de laCommission de haut niveau [high level

committee]des Nations unies pour le dialo-gue des civilisations. Ce n’est pas le lustredes titres qui l’attire. En 1994, sans tapageni amertume, il avait démissionné de sonposte de ministre, marquant ainsi sondésaccordavec le durcissement du régime.

Démocrate sans parti, ce penseur-mili-tant suit de près l’actualité politique inter-nationale – qu’il évoque dans ses chroni-ques sur les ondes de la radio marocaineMedi 1. Si beaucoup, en Tunisie, ont vuen lui l’un des meilleurs candidats pourdiriger l’opposition progressiste, Moha-med Charfi n’a pas eu le temps ou l’occa-sion de suivre cette voie jusqu’au bout.En 2002, il lance un Manifeste de la Répu-blique, en réaction à la réforme constitu-tionnelle qui prolonge la durée des man-dats présidentiels. Ce sera sa dernièregrande initiative politique. Marié à unebrillante physicienne, père de trois filles,Mohamed Charfi laisse aussi orphelinetoute une génération de démocrates. a

Catherine Simon

Claude Dityvon, photographe,fondateur de l’agence Viva, estmort le 3 juin, à l’âge de 71 ans,des suites d’un cancer. Il occu-pait une place à part dans la

photographie française. Ses influences lit-téraires et cinématographiques, sonregard porté sur la réalité sociale, plus poé-tique que journalistique, en ont fait unauteur difficilement classable, en margedes courants et des modes, un peu oubliépar la presse et les commandes publiques.

Célèbre pour ses photographies deMai 1968, il n’a jamais collé à l’actuali-té, au contraire d’un Gilles Caron, pré-férant des images décalées, étonnan-tes. Comme celle où un homme estassis sur une chaise, impassible, aubeau milieu des fumigènes et des CRS.Dans ses images en noir et blanc,Claude Dityvon fait se côtoyer unerecherche formelle poussée et des flousféeriques. « Je suis un hybride d’HenriCartier-Bresson et de Robert Frank »,déclarait-il d’ailleurs au Monde en1994, héritant du Français sa maîtrisede la géométrie, et du Suisse son goûtde la subjectivité.

Dès ses débuts, Claude Dityvon sepassionne pour son époque : les lieuxen marge, les groupes sociaux commeles mineurs et les pêcheurs, le mondedu travail, les bidonvilles. Mais il choi-sit de la montrer avec un regard pluspoétique que documentaire. Très vite,en 1970, il gagne le prix Niépce. L’agen-ce Viva, dont il est l’un des fondateursen 1972, témoigne de cette envie deraconter la société avec un regardd’auteur. Pour partager l’aventure decette agence alternative et militante, ontrouve à ses côtés François Hers, HervéGloaguen, Martine Franck, RichardKalvar, Guy Le Querrec.

Marqués par les idéaux de Mai 1968,les membres de Viva sont fermementancrés à gauche, refusent tout spectacu-laire, préfèrent le noir et blanc à la cou-leur, sont intransigeants sur l’éthiqueet la déontologie. Ils ont une réputationdifficile, la presse les boude. Toujoursau bord de la faillite, opposés sur lesstratégies à adopter, ils finissent par seséparer, minés par leurs contradic-tions. Le Querrec, Franck et Kalvarrejoignent l’agence Magnum, tandisque Dityvon tente de prolonger l’expé-rience Viva, seul, en la rachetant en1982. C’est un échec.

Déchiré, contradictoire, tout commeson œuvre, Claude Dityvon était unécorché vif, « profondément marqué parl’enfance », qui utilisait la photogra-phie pour parler du monde, mais ausside lui et de ses proches. Ses référencespremières sont moins à chercher dansla photographie que dans la littérature,le jazz et avant tout le cinéma, dont ilétait un consommateur boulimique : àParis, après son service militaire, ilvoyait plus d’un film par jour. Il étaitmarqué par le cinéma muet (FriedrichMurnau), sensible aussi à la lumièrepropre aux films de Jean Vigo . « L’Ata-lante, de Vigo, a été un déclic terrible »,disait-il. Les années 1980 vont lui don-ner l’occasion de céder à sa passion : ilcollabore aux Cahiers du cinéma et tra-vaille sur les plateaux de tournage deClaude Chabrol, Maurice Pialat, AndréTéchiné ou Jacques Demy. Dans lesannées 2000, il partira ensuite sur lestraces d’Arthur Rimbaud à Djibouti etphotographiera la vie des habitants deZanzibar.

La ville natale de Claude Dityvon,La Rochelle, programme jusqu’à la finde l’été plusieurs expositions en hom-mage au photographe. a

Claire Guillot

J ’ai connu Jacques-Francis Rolland,appelé familièrement « JFR » par sesamis, au lycée parisien Rollin, devenu

Jacques-Decour après la seconde guerremondiale. Il était né le 26 juillet 1922 àAlbertville, en Savoie. Son père était l’écri-vain Louis Francis. Il avait le visage carré,le menton légèrement en galoche. Il étaitdéjà gouailleur. Je le trouvais gamin.

Quand nous nous sommes retrouvéssous l’Occupation, audébut de1942,à Tou-louse, le gamin était devenu un jeune bol-chevik, qui me poussait à entrer au Particommuniste clandestin. J’étais alors deve-nu marxiste,mais il medisait d’un ton doc-te : « Il ne suffit pas de lire Marx, il fautaimer la classe ouvrière. » Nous avons mili-téensemble à Lyon chez les étudiants com-munistesau seindes Forces uniesde la jeu-nesse patriotique. Nous méditions d’écrireensemble un livre sur « la lutte des classes

en France ». Le soir, dans notre chambred’étudiants, nous déclamions des passa-ges d’Une saison en enfer.

Nous avons été recrutés ensemble auMouvement de résistance des prisonnierset déportés, qui allait fusionner en 1943avec celui de François Mitterrand. J’y suisresté ; lui s’en est détaché pour rejoindre leréseau Mithridate, que dirigeait l’écrivainRogerVailland. Denotre jeunesse résistan-te il a tiré un récit romancé, La Chute deBarcelone (Gallimard, 1952), qui mérite-rait d’être réédité tant il restitue bien cetteexpérience de notre génération. RogerVailland en fit son héros Rodrigue dansson roman Drôle de jeu.

A la Libération, il devient grand repor-ter à Ce soir, et part comme correspon-dant de guerre auprès des troupes améri-caines. Il se trouve au moment chaud surle pont de Remagen, puis son petit grou-pe de journalistes est encerclé par des SSau monument des nations de Leipzig. Unphotographe est tué près de lui, mais ilest miraculeusement sauvé par des charsaméricains. La guerre terminée, il conti-nue sa vie aventureuse en partant pour leMoyen-Orient et l’Inde. Après son retourà Paris, il collabore à l’hebdomadaireAction. Il se plaît à fréquenter des grou-pes divers et parfois ennemis, comme leclan Duras, le clan Sartre, le clan Marti-net de L’Observateur, et évidemment les

héros de notre génération résistanteaujourd’hui complètement ignorés : Pier-re Hervé, Marcel Degliame, Pierre Cour-tade. L’enterrement de ce dernier, triste-ment avili au service du Parti, a inspiréson roman Un dimanche inoubliable prèsdes casernes (Grasset, 1984)

En 1950, il se sédentarise, passe l’agré-gation, devient professeur d’histoire,s’installe à Silly-Tillard, dans l’Oise, avecsa femme Flavienne, parmi une petitecolonie d’intellectuels qui compte Jac-ques Havet et Robert Scipion. Il s’est arra-ché au Parti communiste en 1956. Il anotamment publié Le Grand Pan est mort(1965), Le Tango chinois (1970) (Galli-mard), et, en 1989, une biographie deBoris Savinkov, L’Homme qui défia Léni-ne (Grasset et Fasquelle).

Il travaillait à ses Mémoires, les avaitpresque achevées quand une hospitalisa-tion qu’on avait crue provisoire lui a faitsubirdeuxopérationssuccessives. Jegarde-rai le souvenir de son visage souriant d’il ya deux semaines, quand je lui disais :« Allons, faut que tu sortes d’ici, tu as taconclusion à terminer. » Il approuvait de latête, l’air content. « Il faut qu’on reprennenos petits verres quotidiens de rouge avec sau-cisson et rillettes. » Il approuvait encore. Ilest mort le 4 juin, à l’hôpital de Beauvais. a

Edgar MorinSociologue

Il avait publié une trentaine d’al-bums, signé 650 chansons, et on lesurnommait le « Frank Sinatrades Roms ». Le chanteur tziganeSaban Bajramovic est mort des sui-

tes d’un infarctus, dimanche 8 juin, àl’hôpital de Nis, en Serbie, la ville où ilétait né le 16 avril 1936. Il était âgé de72 ans.

Emir Kusturica avait à plusieurs repri-ses utilisé ses talents. Le cinéaste avaitutilisé une de ses compositions, Meseci-na (Djeli Mara), arrangée par Goran Bre-govic, pour la bande originale d’Under-ground, ou encore Bubamara sur celle deChat noir, chat blanc.

Saban Bajramovic entretiendra dureste une relation de complicité avecGoran Bregovic, musicien fétiche du réa-lisateur serbe, qui l’intègre dans son pro-jet musical Tales and Songs From Wed-dings and Funerals. Il a également jouéet chanté dans le film L’Ange gardien, deGoran Paskaljevic, qui dénonçait la tris-te condition des Tziganes yougoslavesen 1988.

Saban Bajramovic avait passé troisans dans un des camps de travail crééspar le maréchal Tito, à Goli Otok, île-gou-lag sur la côte Dalmate, que l’on retrou-ve dans Papa est en voyage d’affairesd’Emir Kusturica.

De cette expérience très dure, vécuepour des motifs romantiques – amou-reux à 19 ans, il avait déserté les rangs del’armée –, Saban avait gardé des cicatri-ces au visage, mais aussi des traces posi-tives : en prison, cet enfant des rues a lu,appris la vie et la philosophie. Au camp,il avait créé un orchestre, interprétantdu Louis Amstrong, du Frank Sinatra,des chansons romantiques mexicainesou espagnoles, en bref, phagocytant,dans la plus pure tradition rom, tout cequi passait à portée de ses oreilles.

Saban Bajramovic n’avait pas dedomicile connu, et affichait une ignoran-ce volontaire des « papiers qu’on lui faitsigner », ce qui permettra aux copieurset aux voleurs de se servir librementdans le répertoire de ce chanteur excep-tionnel. Il ne donnait presque jamais deconcerts, jugeant les sommes proposéesdérisoires. Dans un mariage, il étaitpayé à la chanson, très cher.

Il avait enregistré son premier disqueen 1964, puis fondé son orchestre, CrnaMamba. Rare en France, ce maître admi-ré par tous les Tziganes des Balkans etau-delà avait chanté à Paris lors du festi-val Voyage en Tziganie en mai 2006.

En 2007, avant d’entrer dans unepériode de graves ennuis de santé, ilavait enregistré un titre sur l’albumQueens and Kings de la Fanfare Ciorca-lia, hommage à quelques « reines etrois » de la musique et du chant tziganesdes Balkans. a

Véronique Mortaigne

Jacques-Francis RollandEcrivain et journaliste, il avait tiré plusieurs récits de sa jeunesse résistanteet de son engagement au Parti communiste, jusqu’en 1956

1937 Naissance à La Rochelle1972 Fonde Viva, agencede photographes marquéspar les idéaux de Mai 19683 juin 2008 Mort

VijayTendulkarAuteur indien prolifique et célèbre dedizaines de pièces de théâtre, scénariste,journaliste, essayiste, Vijay Tendulkarest mort le 19 mai à Pune, à l’âge de80 ans.Né le 6 janvier 1928 à Kolhapur, il fut sai-si très tôt par le démon de l’écriture : ilaurait produit son premier récit à 6 anset à 11 ans sa première pièce. La dénon-ciation des injustices sociales, la descrip-tion de la violence sous toutes ses formesfournissent la trame de beaucoup de sesécrits. Accusé d’avoir un goût morbidepour la violence et l’obscénité, Vijay Ten-dulkar fut plus d’une fois en butte à l’hos-tilité publique.

SabanBajramovicCe chanteur tziganeétait surnommé« le Frank Sinatrades Roms »

16 avril 1936 Naissance à Nis (Serbie)1964 Enregistre son premier disque etfonde son groupe, Crna Mamba8 juin 2008 Mort à Nis (Serbie)

Mohamed CharfiIl fut l’artisan principal d’une réforme de l’enseignement tunisien. Ce défenseurdes droits de l’homme siégea aussi à l’ONU pour le dialogue des civilisations

Disparitions

11 octobre 1936 Naissance à Sfax(Tunisie)1989-1994 Ministre de l’éducation2002 Lance un Manisfestede la République6 juin 2008 Mort à Tunis

26 juillet 1922 Naissanceà Albertville (Savoie)1942 S’engage dans la Résistance1956 Quitte le Parti communiste1984 Grand Prix du roman de l’Acadé-mie française avec « Un dimanche inou-bliable près des casernes »4 juin 2008 Mort à Beauvais

En 1999, à Paris. ADINE SAGALYN

18 0123Vendredi 13 juin 2008

Page 19: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

C ’est un condensé d’humour,d’imaginaire et de déliresloufoques. Pork and Beans,

le dernier clip de Weezer – le grou-pe américain de rock vitaminépour teenagers –, est une curiosi-té, qui ouvre grande la porte de lacommunauté Internet. La vidéomet en lumière un concept mécon-nu, celui du « mème » – sans fau-te d’orthographe. Sur la Toile, leterme renvoie à des personnages,photographies, dessins et vidéosrécurrentes, qui jouent le rôle delangage ou de codes. Weezer aplus spécialement invité les« mèmes » en chair et en os, ceuxqu’on peut découvrir sur le sited’hébergement de vidéos YouTu-be. On les voit tous ensemble, ani-maux et humains mélangés, pren-dre la guitare, sauter en compa-gnie des membres du groupe, separodier eux-mêmes, ce qui créeun joli effet de fourre-tout éclecti-que, de folklore bigarré et de ren-contres improbables.Ils sont presque tous là : Fritz etStephen, les savants fous du bon-bon à la menthe Mentos mélangéau Coca, qui donne des explosionsspectaculaires. Gary Brolsma, lepetit gros qui fit se fendre la poireà des milliers de cliqueurs avec unplay-back de la chanson DragosteaDin Tei, du groupe moldaveO-Zone. Et même le DramaticGopher, ce rongeur inutile à l’œiltorve.

C’est Matthew Cullen, cofonda-teur du studio Motion Theory etréalisateur entre autres des clipsAnimal, du groupe américainREM, et Girl, du chanteur de popBeck, qui les a conviés. Un tou-che-à-tout à l’imagination débor-dante, que le magazine américainRolling Stone a récemment placédans sa « hot list » des créateursde films les plus en vue.A l’origine, les mèmes désignentdes « éléments d’une culture pou-vant être transmis par des moyensnon génétiques, en particulier parl’imitation ». Le terme a été crééen 1976 par Richard Dworkins,dans son livre Le Gène égoïste.Dworkins était persuadé que lescultures évoluaient comme lesêtres vivants, par variations etsélection naturelle.Ces figures forment la sève d’unenouvelle pop culture, branchée surl’intime et le do it yourself, et dontle Web accélère les mutationsgénétiques. La vidéo de Weezer adéjà été vue plus de cinq millionsde fois, signe de l’engouementd’une communauté pour ces icô-nes qui la distinguent et partici-pent de sa formation. Mais parado-xalement, Weezer tue ainsi dansl’œuf ce qui reste de l’antique espè-ce, et qui constitue encore le pro-duit principal du groupe califor-nien : son disque, attendu pour le16 juin. a

Aude Lorriaux

Culture&vousActualités

PARIS, 1960-1972

FIGURATIONNARRATIVE

Après deux années detransition, le Festivalinternational des jar-dins de Chaumont-sur-Loire (Loir-et-Cher)

commence une double mutation :administrative et culturelle. Cechangement est bien sûr motivépar la mort brutale, en 2005, deson créateur, Jean-Paul Pigeat, quiavait imposé une marque très per-sonnelle sur une manifestationdont il assumait l’entière responsa-bilité depuis sa création en 1992.

Mais surtout parce que larégion Centre est devenue proprié-taireduchâteauetduparcde Chau-mont-sur-Loire, grâce à une tran-saction avec l’Etat. Ce dernier avaitconcédé à l’association qui géraitle Festival un morceau du parc.Celui-ci retrouve donc son unité endevenant un Centre d’arts et denature, Festival international desjardins.« Tout en gardant ses fonda-mentaux », précise François Barré,le président du nouvel Etablisse-ment public de coopération cultu-relle (EPCC).

Le but de la région Centre est demaintenir l’événement central quidraine plus de 150 000 visiteurspar an : la création annuelle d’unevingtaine de jardins éphémères,confiés après concours à autant decréateurs, sur unthèmedonné. Cet-te année : « Des jardins en parta-ge », sous la direction du paysagis-te Louis Benech. Une vingtaine deparcelles déclinent cette idée un

peu floue, avec des approchesdiverses et pas toujours convain-cantes : superpositions de trames,éloge du compost, évocation ducimetière, partage de l’eau…

L’une des réalisations les plusréussies est celle de l’Ecole d’horti-culture d’Angers, avec ses murs depierres volcaniques qui racontentcomment la fragmentation de laTerre a débouché sur la biodiversi-té. Deux paysagistes detalent, Michel Corajoudet Alexandre Chemetoff,qui boudaient Chau-mont depuis l’origine,se sont investis cetteannée, hors concours,dans deux gestes mini-malistes que les visi-teurs auront peut-êtredu mal à détecter, l’un face au parchistorique dessiné en 1884, parAchille Duchêne, l’autre face à laLoire.

Mais n’est-ce pas l’idée mêmed’un thème fédérateur pour l’en-semble du Festival des jardins, quis’essouffle ? Peut-être faut-il trou-ver un autre biais pour que cettemanifestation où l’on « venaitpiquer des idées », selon Jean-Paul Pigeat, « reste majeure » touten s’intégrant au sein du nouvelensemble : le Centre d’arts et denature, un titre non moins fourre-tout. Pour François Barré, il s’agitde faire une percée en direction desarts plastiques, du cinéma, de lamusique et de l’architecture.

Ce n’est pas la place qui man-que, le château de Chaumont,Renaissance, avec son curieuxdécor intérieur XIXe siècle, et sesnombreux bâtiments annexes (fer-me, écuries), largement sous-employés, pourraient être mieuxutilisés. Le parc d’Achille Duchêne– en très mauvais état – devrait luiaussi servir d’écrin. « Nous avonsdès cette année lancé une commande

publiqueàunartiste, Ian-nis Kounellis. Installée le1er juillet dans la galeriedu château, elle serarenouvelée tous les troisans », précise M. Barré.

Bricolé à toute vitessepar la nouvelle directri-ce de Chaumont, Chan-tal Colleu-Dumond, le

programme accumule au cours del’été quantité de manifestationsdiverses. A commencer par la pho-tographie, qui fait une apparitionremarquée sur ces bords de Loire.Une mini-exposition Gursky, lephotographe américain, rare etcher, accrochée dans deux salonsdu château – trois grands paysa-ges lacustres.

On verra aussi, dans la ferme duchâteau, une exposition sur les jar-dins ouvriers et familiaux photo-graphiés par les représentants del’école humaniste, de Doisneau àBoubat, mais aussi par des anony-mes. Le 15 juin, un concert de l’En-semble Microkosmos aura lieudans les écuries du château.

C’est à partir du 1 er juillet queles animations se déplacerontdans le parc historique, avec unfestival de cinéma Jardins d’ima-ges, ainsi que Les Lucioles d’ErikSamakh (installations) et deMichel Séméniako (photogra-phies). François Barré aimeraitmême développer ici un Centrede ressources photographiquessur le patrimoine et le paysage.

« Il s’agit d’une nouvelle naissan-ce pour Chaumont », expliqueChantal Colleu-Dumond, qui dis-pose d’un budget de fonctionne-ment de 4,3 millions d’euros, dontles trois quarts sont issus des res-sources propres du Festival.

La difficulté va être de fairemonter en puissance les autresarts sans banaliser celui des jar-dins, réduits à une sorte de faire-valoir, tout en renouvelant pro-fondément l’idée même du Festi-val originel. L’entreprise est diffi-cile. a

Emmanuel de Roux

Centre d’arts et de nature, Festivalinternational des jardins, Chaumont-sur-Loire (Loir-et-Cher). Tél. :02-54-20-99-22. Tous les jours de9 h 30 à la tombée de la nuit. Jusqu’au19 octobre.

Patrimoine Le rendez-vous annuel des jardins s’ouvre aux autres arts

La mutation du Festival de Chaumont

CinémaDeuxième séance pour lefilm d’horreur « Martyrs »Après avoir rencontré PascalLaugier le réalisateur du filmd’horreur Martyrs, la ministrede la culture, Christine Albanel,a demandé mercredi 11 juin « unnouvel examen » de ce film à lacommission de classification desœuvres cinématographiques. Le29 mai, celle-ci avait rendu unpremier avis préconisant soninterdiction aux mineurs (Le

Monde du 11 juin), suscitant devives réactions dans les milieuxdu cinéma.Le réalisateur a été reçu, lundi9 juin, au ministère de la culture« pour présenter ses arguments etnotamment la démarche artisti-que à l’origine de ses choix », aindiqué le ministère dans uncommuniqué. La sortie du filmétait prévue au départ le 18 juinmais son distributeur, WildBunch, a préféré la différer. –(AFP.)

Ici&ailleurs

Les stars du Web chezles rockers de Weezer

La difficultéva être de fairemonteren puissanceles autres artssans banalisercelui des jardins

Vue aérienne du château et du parc de Chaumont-sur-Loire. MARC HELLER

TokyoCorrespondant

A près de 70 ans, le créateurjaponais Issey Miyake mon-tre à son pays qu’il continue

à s’émerveiller de l’inventivitéhumaine. Mondialement connupour son invention, Pleats Please –vêtements plissés, légers et infrois-sables –, il ne s’est jamais considé-ré comme un « couturier » maiscomme un « designer ». Ses collec-tions furent toujours d’étonnantsspectacles plus que de simples« présentations de mode ».

L’exposition « L’homme duXXIe siècle » qu’il a conçue au21_21 Design Sight de Tokyo estune consécration de cette appro-che. Elle dure jusqu’au 6 juillet.D’une seule envolée d’acier telleune pièce de tissu jetée dans le jar-din du complexe Midtown, aucœur du quartier de Roppongi,21_21 Design Sight a été dessiné

par le grand architecte japonaisTadaoAndo. Ce n’est pasun muséeavec collections et archives, maisun « forum » : un lieu dans lequelse rassemblent des talents d’hori-zons divers pour travailler sur unthème arrêté par les trois direc-teurs, Issey Miyake et les designersTaku Sato et Naoto Fukasawa. Lesartistes sont moins choisis en fonc-tion de ce qu’ils ont déjà réalisé quede ce qu’ils sont en train d’élaborer.

L’exposition est construiteautour de l’idée de la fragilité desêtres et des choses, de l’érosion dutemps, de la rareté des ressourceset de la destruction de l’environne-ment, mais aussi de la renaissance.Presque tous les matériaux utiliséspour les œuvres présentées ont étérecyclés.

La figure mythique du dragon,symbole à la fois de destruction etderenaissance, est le thèmedel’ins-tallation réalisée par Issey Miyakeavec son équipe. En apesanteur,

ondulant à travers une salle plon-gée dans la pénombre, le dragonconstitué d’une myriade de mor-ceaux de papier beige est inspiré,selon Issey Miyake, par le Serpentà huit têteset huit queues (Yamata-no-Orochi)de lamythologie nippo-ne. Au sol, huit formes humaines,également en papier – référenceau Sacre du printemps, d’Igor Stra-vinsky –, qui dansent en dépit de lamonstrueuse présence au-dessusde leurs têtes, symbolisent l’éner-gie positive.

Des visions plus technologi-ques, des sièges en Pleats Pleaseconçus par le cabinet de designNendo, la forme humaine de DuiSeid faite à partir de branches dumûrier qui sert à fabriquer lepapier japonais (washi) ou le cerf-volant en emballages de café engrains, de Yazou Hokama venud’Okinawa, donnent du futur desimages plus colorées et festives. a

Philippe Pons

Issey Miyake esquisse au Japonson « Homme du XXIe siècle »Le designer a conçu une exposition dans son institution de Tokyo

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Du 22 mai au 4 juillet 2008

BRAME LORENCEAUPARIS

68, bd Malesherbes - 75008 ParisTel. : 33145221689 - Internet : www.gbl.fr

gouaches

Les hommes pantins d’un magiciende la scène nommé Philippe GentyLa pièce « Boliloc », un enchantement au Théâtre du Rond-Point

Culture

THÉÂTRE NATIONAL DE LA COLLINE 15, RUE MALTE-BRUN 72020 PARIS 01 44 62 52 52 WWW.COLLINE.FR

texte

EDWARD BONDmise en scène

ALAIN FRANÇON

CHAISEdu 14 au 27 juin 2008

nouvelle distribution

LÉNA BRÉBAN,PIERRE-FÉLIX GRAVIÈRE,

DOMINIQUE VALADIÉ,ABBÈS ZAHMANI

12 REPRÉSENTATIONS EXCEPTIONNELLES

Théâtre

U n magicien enchante leThéâtre du Rond-Point, àParis, depuis le 27 mai. Un

magicien de théâtre, à la fois maî-tre de marionnettes, chorégra-phe, inventeur d’images rêveuseset poétiques qui, depuis trenteans, font le tour du monde. A70 ans, Philippe Genty signe,avec sa vieille complice, MaryUnderwood, un de ses plus beauxspectacles : Boliloc, soliloque bur-lesque pour une jeune femme lan-cée dans un vertigineux voyageintérieur. Une fantaisie où sedéploie avec une maîtrise tran-quille toute la liberté des arts de lascène, qui met le public du Rond-Point, tous âges confondus, dansun état de bonheur avancé.

Qu’a-t-elle en réserve dans sesboîtes bleues empilées en toussens, la jeune femme avec qui toutcommence ? Ses monstres intéri-eurs, peut-être, djinns-dibbouks àtête humaine, au corps élastique,disparaissant-réapparaissant àleur gré. Comment faire pourvivre avec ? Comment les extrairedu refuge interne où ils se sonttapis ? A quel savant – fou, évi-demment – se vouer pour effec-tuer l’opération, mener l’explora-tion jusqu’aux « souvenirs inter-dits » cachés dans les replis del’âme ?

Tout est matière à métamor-phoses, dans l’espace scéniquedécoupé par les superbes lumiè-res de Baptiste Bussy. A l’issued’une drolissime scène d’opéra-tion sur laquelle veille un étrangerobot-transfuseur, l’espace inté-rieur, corps et âme, de l’héroïne,devient comme par enchante-

ment cosmos habité de lunes à laMéliès : c’est proprement magi-que.

Ce sont les lois de l’inconscientqui gouvernent ce théâtre impré-gné de surréalisme et lui dictentses images somptueuses, fertiles :vaste cocon-chrysalide transluci-de enfantant d’un monstre rougecomme le diable, doté, telle unepieuvre, de multiples membres.Voyage à la 2001 : l’Odyssée de l’es-pace dans un paysage fœtal demembranes diaphanes, avecchambres secrètes et corridorsdérobés.

Le corps dans tous ses étatsQu’est-ce qui est vrai, qu’est-ce

quiest faux dans cette fantasmago-rie où tout se recompose sans ces-se ? Qui est la marionnette, quil’être vivant ? Les techniques demanipulation de Philippe Gentysontsi savantes, sa science de l’illu-sion si fine, que le trouble s’installeen permanence : homme-pantin,homme-machine, homme-robot…Intérieur-extérieur, jeu entre l’infi-niment petit et l’infiniment grand,entre les Lilliputiens et les géants,changements d’échelle, mécani-

que des fluides et des corps…Il est vraiment dans tous ses

états, le corps vu par Philippe Gen-ty. Et ses trois comédiens-dan-seurs-acrobates, Alice Osborne,Scott Koehler et surtout l’extraor-dinaire Christian Hecq, souplecomme du caoutchouc, explorent,avec un plaisir de jeu communica-tif, toutes les déclinaisons de l’ac-teur-marionnette.

Dommage, juste, que la toutefin du spectacle s’achemine versquelque chose de plus mièvre, mal-gré, là encore, la beauté de cetteimage de prairie duveteuse où seperdent de petits êtres de bois et dechiffon.Perdus dans le grand mon-de comme à l’intérieur d’eux-mêmes. a

Fabienne Darge

« Boliloc », par Philippe Genty et MaryUnderwood. Avec Christian Hecq, ScottKoehler et Alice Osborne. Théâtre duRond-Point, 2 bis, av. Franklin-D.-Roose-velt, Paris-8e. Mo Franklin-D.-Roosevelt.Du mardi au samedi à 20 h 30, diman-che à 15 heures, jusqu’au 6 juillet. De14 ¤ à 33 ¤. Durée : 1 h 30.Tél. :01-44-95-98-21. www.theatredurond-point.fr

« Storm/o », de Giulana Lo Porto, quinze minutes magiques entre danse et poésie, théâtre et musique. LUCIANO ROMANO

Musique

U n ciel de printemps légère-ment nostalgique, un grou-pe de jeunes filles blacks

dansant aux accents d’une fanfa-re à la Kusturica : rien, sur le par-vis de la basilique Saint-Denis,pour annoncer la terrible leçon devie que va nous administrer laGrande Messe des morts de Berlioz(1803-1869) sous la baguette deSir Colin Davis. Berliozien de lapremière heure (c’est en écoutantBerlioz qu’il décida enfant qu’ilserait chef d’orchestre), le chef bri-tannique s’est fait prophète ducompositeur, au disque commedans les salles de concert.

Ce soir, il est le berliozien del’heure dernière et c’est en messiequ’ildirige le Requiem dont le com-positeur écrivait à son ami Hum-bert Ferrand le 11 janvier 1867 :« Si j’étais menacé de voir brûlermonœuvre entière, c’estpour la Mes-

se des morts que je demanderaisgrâce ».

Terminé trente ans plus tôt, leRequiem fut d’abord exécuté le5 décembre 1837 à la mémoire dumaréchal Edouard Mortier, avantde célébrer la prise de Constanti-ne, où le général Charles Denys,comte de Damrémont, avait trou-vé la mort. Alfred de Vigny, quil’entendit en l’église Saint-Louisdes Invalides, parlera d’une musi-que « belle et bizarre, sauvage,convulsive et douloureuse ».

Mais aussi démiurgique et frap-pée de gigantisme : les cinq centsmusiciens voulus par Berlioz (encela héritier des grandes célébra-tions révolutionnaires et des fastesimpériaux) furent réduits à 450avant de se stabiliser autour de400 exécutants.

Une musique dont les effetscathartiques avaientété soigneuse-ment pensés par le compositeur,qui avait disposé aux quatre

angles de l’édifice une quadripho-nie de petits orchestres de cuivres,de manière à frapper davantage aumoment du fameux « Dies Irae »annonçant la fin du monde et leJugement dernier.

C’est ainsi que Colin Davis adéchaîné les peurs et les pleurs, lessuppliques et les prières. Le ténorbelge Marc Laho (un joli timbre)remplaçait le jeune Sébastien Guè-ze, dans l’angélique « Sanctus ».Une seule voix pour les Chœurs del’Académie Sainte-Cécile de Romeet ceux de Radio France, tandisque l’Orchestre national de Francetémoignait de sa complicité avec lechef d’orchestre britannique. a

Marie-Aude Roux

Festival de Saint-Denis. « Requiem » deBerlioz. Sir Colin Davis (dir.). BasiliqueSaint-Denis, 1, rue de la Légion-d’Honneur,Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). Le 11 juin.Concert redonné le 13 juin à 20 h 30. Tél. :01-48-13-06-07. De 26 ¤ à 65 ¤.

Sir Colin Davis, prophète de BerliozA Saint-Denis, le chef d’orchestre britannique dirige le « Requiem »

Théâtre

NaplesEnvoyée spéciale

Après cinq mois de crisedes ordures qui ont vuNaples baigner dansune mer de déchetsménagers, il n’y a prati-

quement plus de sacs poubellesdans les rues de la ville, du moinspas plus qu’en temps normal. Lescamions bennes sillonnent la villeen permanence, histoire sans dou-te de rassurer les passants.

Cela rassure aussi Renato Qua-glia, qui après avoir été pendantneuf ans responsable des arts dela scène de la Biennale de Venise,a été nommé pour trois ans direc-teur artistique du Napoli TeatroFestival Italia dont la première édi-tion a débuté le 6 juin (jusqu’au29 juin). « Monter le festival dansces conditions a été très difficile dit-il, d’autant plus qu’ici tout est com-pliqué. »

Après cela, même les trombesd’eau qui se sont déversées sur laville le premier soir, obligeant àannuler la représentation desTroyennes, par la Compagnia Tea-trale Europea de la ville deNaples, prévue en plein air, et à lareporter au lendemain dans unthéâtre couvert, n’ont pas réussi àle décourager.

Il faut dire que le problème duramassage des ordures ménagè-res, en plus de risquer de faire fuirles spectateurs, était d’autant pluspréoccupant que le festival a misla protection de l’environnementau premier plan, allant jusqu’à fai-re poser des installations photo-voltaïques sur les toits de la ville etde celle, proche, de Caserte pour

assurer sa consommation électri-que. Le ridicule n’était pas loin…

« Naples est la plus théâtrale desvilles italiennes ! », s’exclameM. Quaglia. C’est là qu’est né auXVIIe siècle, Pulcinella (littérale-ment, « bec de poulet »), Polichi-nelle, comme le rappellent toutesles boutiques de souvenirs et aveclui, la comedia dell’arte.

Mais ce n’est pas uniquementpar tradition que la ville a été dési-gnée sur concours parmi vingtautres pour devenir le siège de cenouveau festival international de

théâtre, c’est aussi parce qu’il yexiste près de cent cinquante sal-les (consacrées toutefois au théâ-tre de boulevard, « de télévision »)et parce que c’est « une ville d’artis-tes », ajoute M. Quaglia.

Mélanger langues et culturesLes raisons politiques sont diffi-

ciles à cerner : la décision a été pri-se sous le gouvernement de Roma-no Prodi mais son lancement sefait avec Silvio Berlusconi, et per-sonne ne tient à commenter. Biensûr, on espère des retombées éco-

nomiques, mais il s’agit aussi desortir la ville de son isolement et,comme le dit le directeur artisti-que, « de cesser de se regarder lespieds ».

M. Quaglia fait une distinctionentre la pauvreté, « quand on n’ar-rive pas à boucler ses fins de mois »,et la paupérisation, « quand onn’arrive pas à boucler ses fins demois et qu’on n’a pas d’espoir quecela s’arrange ». Pour lui, la pau-vreté et la criminalité ont conduitles Napolitains à la « dépres-sion ». Il est urgent de les en sortir

et le festival, espère-t-il, peutjouer un rôle positif. « C’est uneville où se côtoient depuis toujoursune noblesse très riche et le peuple.Mais la bourgeoisie naissante, c’estla Camorra », la mafia napolitai-ne.

Les prix des spectacles sontdonc très abordables. Avec unbudget assez raisonnable : cinqmillions d’euros pour trois semai-nes de spectacles. Un million estconsacré à la partie technique, unautre à la communication et lestrois millions restant à la partie

artistique. L’Etat a investi deuxmillions, la région de Campanie,trois millions. Et la ville ? « Nien-te, rien. »

La programmation, qui a évitéles grands noms « que l’on voitpartout », a misé sur l’originalitécomme les quinze minutes bellis-simas de Storm/o, de Giuliana LoPorto, les créations comme Ano-ther Sleepy Dusty Delta Day, de JanFabre, que l’on verra à Avignon,en juillet ou Lo Vommaro a duello,du maestro Roberto De Simone,et également des commandes(L’Inseguitore, de Tiziano Scarpa,Alberi adagiati sulla luce, du poètelibanais Adonis ou encore Chie-Chan e Io, de l’écrivaine japonaiseBanana Yoshimoto, adapté parGiorgio Amitrano.)

Mélanges des langues et descultures pour Les Troyennes, enquatre langues (français, italien,portugais et espagnol), qui mani-feste la naissance d’une troupeeuropéenne, mais aussi Médée, deMax Rouquette, dans la mise enscène de Jean-Louis Martinelli(que l’on avait pu voir en 2003aux Amandiers, à Nanterre) avecune troupe du Burkina Fasso (enfrançais et en bambara) et Peined’amour perdue, de Shakespeare(du 20 au 22 juin), dans la mise enscène d’Emmanuel Demarcy-Mota, le nouveau directeur duThéâtre de la Ville, à Paris, en fran-çais et en portugais. En tout, deuxcents représentations répartiessur trente lieux, neuf langues etquelque deux cents artistes. a

Martine Silber

Festival de théâtre de Naples. ViaDepretis, 130. Tél. : +39-081- 413-904.De 5 ¤ à 15 ¤.www. napoliteatrofestival. it

A Naples, le théâtre après les orduresUn nouveau festival international anime une ville en dépression, envahie par les déchets

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Leschoixdu«Monde»

Culture

SélectionDVDCarolyn Carlsonfédère l’Europede la danse àla Cartoucherie Musique

Nordeste do BrasilBOBIGNY. La MC 93 de Bobignyconsacre un week-end à la musiquedu Nordeste brésilien et en particu-lier la scène très active de Recife,capitale du Pernambouc. A la pro-grammation, Rémy Kolpa Kopoulde Radio Nova. De quoi découvriren scène des artistes comme SpokFrevo Orquestra, Silverio Pessoa,Orquestra do Fuba et DJ Dolores.MC 93, 1, boulevard Lénine, Bobi-gny. Tél. : 01-41-60-72-72. Les 13 et14 juin, à 19 h 30. De 9 ¤ à 15 ¤.

ThéâtreLettre à mon jugePARIS. La pièce Lettre à mon jugeadaptée du roman de Simenon paret avec Robert Benoit au Théâtredu Lucernaire, originellement pré-vue jusqu’au 7 juin, a été prolongéejusqu’au samedi 30 août.Théâtre du Lucernaire, 53, rueNotre-Dame-des-Champs, Paris-6e.Mo Notre-Dame-des-Champs. Tél. :01-45-44-57-34. Du mardi au same-di, à 21 heures. De 10 ¤ à 30 ¤.

En 1942, Heydrich, repré-sentant du Reich à Pra-gue et surnommé « leBourreau », est assassi-né. L’événement donne

à Fritz Lang (1890-1976) l’idée defaire un film sur la résistance tchè-que. Il concocte un scénario avecBertolt Brecht qu’il a décidé d’aiderà survivre aux Etats-Unis. Ainsinaît Les bourreaux meurent aussi(1943), dont Bernard Eisenschitzrelate longuement l’élaborationdans le bonus du film, réédité danssa version intégrale de 2 h 15. Lesdémêlés de Brecht avec le scénaris-te John Wexley qui s’adjugea lapaternité du scénario. Les désac-cords entre Brecht et Lang, maisaussi leur détermination communeà raconter cette histoire d’une villeliguée contre la Gestapo, jouantune comédie pour sauver le tueurdumonstrenazidesgriffesrépressi-ves et la vie des otages.

L’idée des deux créateurs alle-mands était d’exalter la force dupeuple contre les tyrans. Détermi-né à servir la cause antinazie, FritzLang signe aussi Chasse à l’homme,

récit de la cavale d’un Anglais tra-qué par les SS et décidé à tuer Hit-ler. Comme Lubitsch dans To Be OrNotToBe, ouChaplindansLeDicta-teur, il use des faux-semblants duthéâtre dans Les bourreaux meurentaussi, tragédie épique qui osemener plusieurs intrigues deconcert (l’enquête policière pourretrouver l’assassin, la manièredont ce dernier file entre les doigtsdesoccupants, lesaffrespsychologi-ques de Masha, la jeune femme quilui vient en aide, le destin de Czakal’opportuniste).

Il s’avère que c’est en jouant lacomédiequeles Tchèquesvontgru-ger les nazis, dépeints ici commedes guignols cabotins, pantinsexpressionnistes. Chacun use d’unmasqueet accumule les faux témoi-

gnages : l’assassin se fait passerpour un architecte amoureux,Mashamime une liaison sentimen-tale, son père – pris en otage –cachequ’il écoute la radiodes résis-tants, Czaka joue double jeu,mi-résistant mi-collabo. La luttecontre le nazisme passe par le spec-tacle, la manipulation, les subterfu-ges. Les Tchèques bernent les Alle-mands sur leur propre terrain :celuidelamiseenscène.Cetteglori-fication du mensonge est ce qui futreproché à Lang par le bureau decensure,qui jugea le filmimmoral !

On retrouve ce thème de la dissi-mulation dans l’autre film sorti parles éditions Carlotta : La Rue rouge(1945). Il s’agitde l’adaptationd’unroman déjà transposé à l’écran parJeanRenoirdans LaChienne.L’his-

toire d’un peintre amateur subju-gué par une femme qui le manipu-le, s’adjuge la paternité de ses toi-les, et qu’il tue, condamné à vie parses remords. Là encore, mais cettefois pour montrer un homme victi-medesespulsions(sexuelleetartis-tique), Fritz Lang orchestre uncycle d’aveuglements et de traves-tissementsde lavérité.Tout lemon-de ment, jusqu’à prendre ses pro-pres désirs pour la réalité. Le vraipasse pour le faux, seuls les men-songes sont écoutés. Otage de sesfantasmes, le héros succombe à unjeu de dupes. a

Jean-Luc Douin

Les bourreaux meurent aussi, 1 cof-fret, 2 DVD, Carlotta. La Rue rouge,1 DVD, Carlotta.

La glorification du mensonge parFritz Lang, cinéaste des apparences« Les Bourreaux meurent aussi » et « La Rue rouge », deux films qui érigent le faux en vérité

Agnès VardaJacquot de NantesMalade, Jacques Demy peignaitet écrivait, quand Agnès Varda semit à faire un film évoquantl’enfance de son compagnon àNantes, sur sa demande. Cettelettre d’amour retrace l’éclosiond’une vocation. Agnès Varda yrelève de front trois défis : filmerles jeunes années de Demy ennoir et blanc, dans le ton desfilms français des années1930-1940 ; montrer le décalageentre les scènes qu’il avait vécueset ce qu’il en avait fait aucinéma ; et montrer Demy auplus près, et son souci d’être« avec le temps ». Demy mouruten 1990, dix jours après la fin dutournage. Le DVD estaccompagné d’un livret et defilms souvenirs, témoignages,récit du tournage, ainsi que duSabotier du Val de Loire, deDemy, et d’une interview de troishommes de cinéma quibricolèrent eux aussi de lapellicule lorsqu’ils étaientgamins (Patrice Leconte, MelvilPoupaud et Jean-Noël Félix). a

J.-L. D.1 DVD Ciné Tamaris.

Danielle ArbidDans les champsde batailleUn homme perduLes films de Danielle Arbidportent en eux la trace de sonhistoire, celle d’une jeune femmequi a grandi au Liban pendant laguerre civile. Ses deux premiersfilms sont deux portraitsd’individus dans la tourmente.Sur fond de violence hors champet de sensualité, le premier, Dansles champs de bataille, retrace lequotidien d’une pré-adolescenteque la guerre fait passer trop viteà l’âge adulte. Un homme perduinvente la rencontre entre unpersonnage inspiré duphotographe Antoine D’Agata etun ancien combattant de laguerre du Liban désireuxd’effacer son passé. Ponctué descènes de sexe, ce road movie enterres proche-orientales se perddans les chemins de l’oubli pourque ses personnages puissentenvisager le présent en hommeslibres. Préfacés par le critiquePhilippe Azoury, les films sontaccompagnés d’entretiens avecDanielle Arbid et de soncourt-métrage, Nous. a

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LE GRAND S UCCÈS

DE L AROUSSERÉÉDITÉ !

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Clovisaux

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L�HISTOIRE DE FRANCE EN BANDES DESSINÉES

Danse

C ’est une première ! Depuis le4 juin, les cinq théâtres deLa Cartoucherie, à Paris, se

mobilisent pour la danse contem-poraine à travers la troisième édi-tion du festival June Events initiéen 2004 et dirigé par la chorégra-phe Carolyn Carlson. Entre leThéâtre de l’Aquarium, celui duSoleil et de la Tempête, vingt-cinqchorégraphes européens compo-sent un menu différent chaquesoir – entre petites formes façonapéro chorégraphique et plats derésistance plus consistants – jus-qu’au 20 juin.

Cette façon de se serrer les cou-des fait plaisir dans le contexte defrilosité affective et économiqueactuelle. Que des metteurs en scè-ne comme Ariane Mnouchkine ouJulie Brochen, qui a par ailleursparticipé à une soirée d’improvisa-tion avec Carolyn Carlson le 7 juin,se fédèrent autour de jeunes choré-graphes n’est pas une mince affai-re. Il a fallu toute la conviction deCarolyn Carlson, qui a planté sonAtelier de Paris (centre de forma-tion pour danseurs profession-nels) à la Cartoucherie depuis1999, pour que l’opération prennecette ampleur.

Au Théâtre du Chaudron, lechorégraphe finlandais Juha Mar-salo dansait Parfum, le 7 juin, avecsa complice Sara Orselli. Sur desmusiques indiennes et chinoises,ce duo entre une créature à tête enpapier gaufré et une jeune femmeaccro à son vaporisateur de par-fum ouvrait des pistes esthétiquessubtiles sans affirmer tout à faitson propos. Traiter de la légèreté,de l’apesanteur, de la diffusion dumouvement, pourquoi pas, àcondition de ne pas s’évanouirdans l’espace.

Fable insolitePlutôt porté sur des pièces mas-

sives et musclées qui roulent ausol et crient leur malaise, JuhaMarsalo tentait de révéler sa facecachée à travers la mise en scèned’un fantasme asiatique. Largeéventail qui chasse le parfum, ber-ceuses aigrelettes, jeu de pliage etdépliage de papier, les ingré-dients d’une petite fable insolitesont là, mais la recette manque detonus.

Juha Marsalo, en résidence àl’Atelier de Paris depuis 2004, faitpartie de cette jeune garde finlan-daise que Carolyn Carlson, Cali-fornienne et d’origine finlandaise,soutient depuis la création de lamanifestation. Dans le cadre del’opération « 100 % Finlande »,qui programme des artistes, desi-gners, circassiens, auteurs de BDdans toute la France, elle accueillehuit jeunes chorégraphes finlan-dais pendant trois jours. « J’ai misen scène mes meilleurs spectacles,les plus fous, les plus étranges, lors-que j’étais directrice du City Thea-tre d’Helsinki (1991-1992), glisseCarolyn Carlson, par ailleurs à latête du Centre chorégraphique deRoubaix - Nord - Pas-de-Calaisdepuis 2004. J’aime l’absurdité deshabitants de ce pays, dont je me senstrès proche. »

Du 13 au 15 juin, le Tout-Helsin-ki de la danse contemporaine seraà La Cartoucherie. Entre des filmsde danse, des dégustations de spé-cialités, du shopping tradition etdesign, on pourra se glisser dansles volutes de Susanna Leinonen,recevoir un uppercut de la jeuneet nerveuse Eeva Muilu ou savou-rer tout simplement l’élégancephysique de Tommi Kitti. Unebonne introduction à la singulari-té finlandaise entre lâcher-toutsans parapet et retenue vissée. a

Rosita Boisseau

June Events. Danse à La Cartoucherie,route du Champ-de-Manœuvre,Paris-12e. Jusqu’au 20 juin.Du 13 au 15 juin, programme finlandais.Tél. : 01-41-74-17-07. De 10 ¤ à 20 ¤.

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Alain Lompech

I l fait chaud, enfin, parfois ! Etles roses vont pouvoir s’épa-nouir davantage sans craindre

de pourrir en boutons. Certainesvariétés anciennes bien doublessont sensibles à la pluie, qui fait secoller les uns aux autres les pétalesextérieurs. Si l’on s’y prend àtemps, on peut réussir à contrariercette évolution, mais bien souvent,à peine épanouie, la rose perd alorsses pétales, qui s’éparpillent au sol.

Ce que l’on peut en revancheréellement prévenir, c’est la chutedes grandes vivaces qui tiennentmal et s’effondrent vite fait quandil fait orage, voire quand il pleut.Et toujours en pleine floraison.Les delphiniums sont particulière-ment fragiles, et comme ils sonthauts, voire très hauts, quand ilspoussent bien, ils doivent êtretuteurés tôt. Et de façon discrète,ce qui n’est pas du tout évident.En fait, il faut jouer avec le tempset ne se résoudre à les attacher àde fins piquets que le plus tard pos-sible, de façon que le jardin ne soitpas hérissé de tiges disgracieuses.Quel dommage que les variétésnaines soient si étranges, diffor-mes, sans élégance.

L’aconit, qui ressemble tant audelphinium (dans sa variété nai-ne), est, ce que beaucoup de jardi-niers ignorent, l’un des poisonsles plus redoutables – le plus toxi-que de notre flore. L’Aconit napel,que l’on appelle aussi casque deJupiter, est bleu très foncé, violetou rose. C’est une splendeur, quirésiste à tout et vit très longtemps.Son feuillage est vert vif, quand

celui du delphinium est vert glau-que. Ses tiges sont dressées et soli-des et ses fleurs réparties le longde cette tige. Il en existe d’autresdans la nature, comme l’aconit tue-loup, aux fleurs jaunes.

On trouve cette plante dans leslieux humides mais aérés, jusquehaut en altitude, mais aussi en plai-ne, en Normandie. L’aconit estsouvent planté dans les vieux jar-dins et est très fréquemment ven-du dans les jardineries. Il fleuritl’été. Mais attention, deux gram-mes de racines suffisent à envoyerun homme au cimetière.

Ce n’est pas la seule plante quisoit toxique au point d’être mortel-le : l’if, le laurier-rose, le daphnédit bois-joli, le bonnet-d’évêque,les narcisses le sont aussi. Mieuxvaut, en fait, se dire, si l’on n’estpas un herboriste confirmé, queles plantes ornementales sont fai-tes pour être mangées des yeux,mais ni mâchonnées ni utiliséespour faire des tisanes.

Le jardin ne manque pas dedangers : la rallonge électrique dela tondeuse qui baigne dans l’eau,le râteau au sol… dont l’effet n’estdrôle que dans les films muets, latondeuse bidouillée pour tournersans que la poignée soit mainte-nue, les cailloux dans l’herbe, etc.

Il faut donc faire attention,mais il y a une chose dont il fautabsolument se prémunir, c’est letétanos, maladie très dangereuse,et même mortelle. Aussi il fautimpérativement se faire vaccinerou faire effectuer son rappel. Lamoindre blessure, la moindreépine de rosier peut être la ported’entrée du tétanos… a

Il se passe toujours quelquechose au rayon du petit élec-troménager. Une année, cesont les machines à caféexpresso qui se hissent au

rang de stars, envahissant les cui-sines et les écrans de télévision.Une autre, ce sont les machines àpain qui explosent. Régulière-ment, les aspirateurs, tour à touravec ou sans sac, « compacts »,« silencieux » ou même « intelli-gents » créent l’événement.

Aujourd’hui, ce sont les yaour-tières qui font leur grand retour, etles appareils à confiture qui réap-paraissent. Les machines à fabri-quer de la bière font une entrée ful-gurante (avec plus de 70 000 piè-

ces vendues en un an). Les robots-café – ces machines qui moulentles grains, avec bruit et odeurgarantis, pour un café de « pro »,pourraient détrôner les machinesà café expresso. Pour demain, lesespoirs des industriels se portentvers les appareils pour la beauté etl’hygiène mais aussi vers le petitéquipement médical (comme lestensiomètres).

Bref, le secteur du petit électro-ménager n’en finit pas de faireparler de lui. Les Français, quiaiment de plus en plus passer dutemps chez eux et fabriquer eux-mêmes leur pain, soupe et autrejus de fruit, équipent leur cuisine.Ils possèdent en moyenne

14 appareils par foyer. En un an(d’avril 2007 à avril 2008),2,150 milliards d’euros ont étédépensés pour le petit électromé-nager. Soit une progression deplus 9 % du chiffre d’affaires.

Le secteur se divise en quatregrands secteurs : entretien dessols et du linge, beauté et hygiè-ne, préparation culinaire et cuis-son, préparation des boissons.Cela représente une multitude deproduits, qui vont du pèse-person-ne au robot ménager, en passantpar la brosse à dents électrique, legrille-pain, le sèche-cheveux, etc.

Cette diversité est une chanceque les fabricants savent saisir, àcondition de se mettre à l’écoute

des attentes du consommateur.Clé de voûte du dynamisme de cesecteur depuis plusieurs années,l’innovation s’attache à satisfaireau plus près cette demande.« Aujourd’hui, elle porte principale-ment sur le confort d’utilisation, pré-cise Vincent Bougeard, directeurmarketing de DeLonghi etKenwood. Face à la surenchère desproduits technologiques qui envahis-sent la maison et le quotidien (ordi-nateur, téléphones portables, lec-teurs DVD…), le consommateurattend du petit électroménager desproduits solides et simples. » Larecherche porte sur la technologiemais aussi sur le design. « Le clientsouhaite une ergonomie simplifiée,

afin qu’au premier coup d’œil il puis-se comprendre son appareil. »

Depuis que la cuisine est deve-nue une pièce que l’on ne cacheplus, les appareils qui s’y trouventdoivent être beaux et correspondreauxnouvelles tendancesde la déco-ration. Ces dernières années, lemarché est porté pardeux désirs forts duconsommateur : celuid’avoirchez luidesappa-reils comparables àceux des professionnels,mais aussi des machi-nes qui permettent demanger plus frais etplussain. Autrefoismar-ché de niche, les « kit-chen machines » (ces robots à bolouvert utilisés pour la pâtisserie, etqui, avec un accessoire, peuventhacher la viande) enregistrent uneprogression de 46 % en un an.

Quant à la friteuse sans huile deSeb, en dépit de son prix élevé(200 euros), les ventes ont explosé(plus 28 % en un an), au point dereprésenterplus dutiers du marchéglobal de la friteuse en France. Lamême année, les mixeurs ont pro-

gresséde 12 %.

Lepetit élec-troménager est un mar-

ché qui fonctionne essentielle-ment sur le bouche-à-oreille, car,explique André Dot, directeur mar-keting du groupe Seb France, « cesont, pour beaucoup, des appareilsqu’on utilise avec et pour les autres.Le café, les frites, le pain se consom-ment en famille et entre amis ». Etd’ajouter : « Du même coup, dans

certains cas, ils finissentpar devenir un attributdu statut social. Celas’est vérifié avec lesmachines à café expresso,et se voit aujourd’huiavec les machines à biè-re. »

Beau, solide, efficaceet pratique : le petitélectroménager doit

être à la hauteur de ces attentes.« On observe dans ce secteur le phé-nomène de l’effet sablier qui seretrouve ailleurs, notamment dansl’habillement, souligne VincentBougeard. C’est-à-dire un fortdéveloppement dans le haut de gam-me et dans les premiers prix. Entreles deux, point de salut. On recher-che soit le top, soit le meilleur rap-port qualité/ prix. » a

Véronique Cauhapé

Lundi Mardi Mercredi Jeudi VendrediRoues libres Santé&forme A table A la maison En voyage&vous

Jardins & jardinières

Attention, danger !

Dans certains cas,les engins finissentpar devenirun attributdu statut social.Cela s’est vérifiéavec les machinesà café expresso

Les grandes starsdu petit électroménagerMachines à café, à bière, à confiture, sèche-cheveux, yaourtières :le marché français a progressé de 9 % en un an

MixeurKenwoodKMX55. DR

22 0123Vendredi 13 juin 2008

Page 23: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

CE WEEK-END

+

4,95en plus

du Monde 2

Requiempar Leonard Bernstein

F allait-il ajouter l’Inde àl’édition 2008 du Guidede la conduite dans les

régions du monde (autoesca-pe.com) ? Qui connaît le sous-continent sait que la peur au ven-tre vous tient sur ces routes prin-cipales trop étroites pour quedeux véhicules se croisent. Il saitque, face à face, l’un des deuxconducteurs lâchera prise avantl’impact en se jetant sur le bas-côté dans un coup de volant.Bien sûr, l’image de Ganesh, ledieu protecteur, accrochée aurétroviseur, comme le sourireamusé du chauffeur, rassurent.Si ce guide précise que « la

conduite en Inde s’apparente à unjeu vidéo dans lequel tout peutarriver », il aurait mieux valudéconseiller formellement d’yprendre le volant. Parmi les82 pays répertoriés, on apprendque le taux d’accidents est élevéen Afrique du Sud, par manqued’expérience des conducteurs, etqu’un rapatriement sanitaire estfortement recommandé ! Que laroute de La Paz aux Yungas, enBolivie, considérée comme « laplus dangereuse du monde », est« entourée d’un décor mer-veilleux », et ainsi de suite.

Avis de danger aux casse-coude tout poil. a Fl. E.

Aujourd’hui

Globe-trotteurs au volant :appel à la prudence

Le BHV distribue l’œuvred’Erro aux ParisiensLa fresque d’Erro, de 30 mètres de large sur 6 mètres de haut, quiparade depuis fin mai sur la façade du BHV, va être découpée encarrés de 45 × 45 cm… puis distribuée aux Parisiens le mercredi18 juin, de 16 heures à 20 heures. Chaque morceau de la fresque,inspirée des bandes dessinées et du pop art, sera accompagnéd’une reproduction de l’œuvre, numérotée et signée par l’artisteislandais, de quoi créer une émeute dans la petite rue de la Verre-rie, où aura lieu l’événement. Alors qu’il participe à l’exposition duGrand Palais « La Figuration narrative » (jusqu’au 13 juillet), Gud-mundur Gudmundsson, dit Erro, 76 ans, n’a pas hésité à réaliserune œuvre exclusive pour l’enseigne de bricolage : « Dès mon arri-vée à Paris, en 1958, c’est là que j’achetais tout mon matériel pour lapeinture », a confié l’artiste, ravi. a V. L. PHOTO : DR

E voquer SOS-Amitié, c’estréveiller immanquablementle souvenir d’une scène ou

d’une réplique du film Le Père Noëlest une ordure. La réalité est loind’être aussi joyeuse, même si lesbénévoles qui donnent de leurtemps et de leur énergie à cetteassociation d’écoute et de préven-tion du suicide sont loin d’êtredépourvus d’humour et de recul.Mieux vaut, d’ailleurs, être doté deces deux qualités pour faire faceaux situations douloureuses, quisont plutôt en augmentation.

En 2007, SOS-Amitié a reçu724 000 appels téléphoniques(soit 2 000 par jour) contre600 000 en 2000. Soit, une haussede 20 % en sept ans.

Résultat : l’association créée en1960, reconnue d’utilité publiqueen 1967, serait presque en passe delancer son propre SOS. « Aujour-d’hui, pour être présents 24 heuressur 24 et 7 jours sur 7 sur nos cin-quante centres d’écoute en France, ilfaudrait avoir 2 050 écoutants. Ornous n’en avons que 1 800 envi-ron », explique Rémi Rousseau,administrateur fédéral de SOS-Amitié France.

L’association peine aujourd’huià recruter des volontaires. « Lesécoutants ont du mal à s’engagerautant qu’on le souhaiterait, conti-nue M. Rousseau, à savoir une dis-ponibilité de 20 heures par mois,incluant une nuit entière. » Enoutre, la bonne volonté ne suffitpas. Il faut aussi passer toutes lesétapes auxquelles SOS-Amitié sou-met chacun des postulants : entre-tien avec un psychiatre, 30 à60 heures (étalées sur douzesemaines environ) de découvertede l’association et d’informationsur les différents troubles men-taux, puis formation en situationauprès d’un écoutant confirmé.

A l’issue de ce parcours, c’est àpeine une personne sur dix quisera retenue. La sélection est rude,mais indispensable, car les souf-frances qui s’expriment sont lour-des, notamment celles liées auxproblèmes matériels comme lelogement, le chômageou laprécari-té (en hausse de 33 % par rapport à2002).

Premier motif depuis toujours,le sentiment de solitude augmenteaussi, et représente aujourd’hui

23 % des interventions. Il y a aussila forte progression des appels enprovenance de personnes atteintesde maladies mentales (plus 50 %par rapport à 2002). Faire face àdes cas de dépression grave, deschizophrénie, de paranoïa poseproblème à certains écoutants quiestiment « ne pas être faits pourça ». Difficile en effet de s’improvi-ser sur ces pathologies qui exigentune prise en charge et un suivi quela société n’assure pas.

« Les écoutants sont de plus enplus souvent confrontés à des expé-riences traumatisantes et à desdétresses spectaculaires, souligneRémi Rousseau. Il faut être capablede maintenir un équilibre entreempathie et distance par rapportaux personnes qui appellent, maisaussi d’accepter la partde frustration inhérente àcette forme d’aide, donton ne voit jamais lesretombées. »

Car l’un des fonde-ments de SOS-Amitié,c’est le respect de l’ano-nymat. Pour celui quiappelle, cela permet unetotale liberté d’expression. Pourl’écoutant, c’est une garantie deprotection mentale et physique.

Lors de sa création, le premierobjectif que s’était fixé l’associa-tionétait l’aide auxpersonnessuici-daires. En France, plus que dansn’importe quel autre pays d’Euro-pe, lenombredes suicidesaugmen-te (10 713 en 2005, selon l’Inserm).Pourtant, le nombre d’appels pro-venant de ceux qui sont en situa-tion de désespoir (2 %) et de « sui-cidants » – c’est-à-dire ayant déjàengagé un processus suicidairecomme la prise de médicaments(0,2 %) – reste stable.

Les écoutants de SOS-Amitiésont essentiellement des femmes,âgées en moyenne de 60 ans. Unprofil lié, en grande partie, à la dis-ponibilité exigée et à l’expériencede la vie nécessaire pour ce rôle.« Nous aimerions avoir plus d’hom-mes, car leur écoute est extrêmementintéressante et apporte autre cho-se », remarque M. Rousseau. Cer-tains bénévoles restent des annéesà SOS-Amitié (vingt ans parfois)mais ce n’est pas ce qui est souhai-té à l’association. « Deux annéesseraient une bonne moyenne », esti-me M. Rousseau.

Les appels proviennent prati-quement autant d’hommes (47 %)quede femmes(53 %).Uneconver-sation dure en moyenne 15 à20 minutes, mais cela peut aussi

aller jusqu’à une heure.Depuis 2006, l’asso-

ciation a une adressesur Internet. En 2007,elle y a enregistré2 443 appels (contre2 379 l’année précéden-te). Les femmes sontplus nombreuses à s’yexprimer (70 %) que les

hommes. Et les personnes qui écri-vent sur le site sont plus jeunes(45 % ont entre 25 et 39 ans, 30 %de 40 à 60 ans, 13 % de 20 à 24 anset7 %ont moins de20 ans)que cel-les qui appellent au téléphone.

Sur Internet, le suicide est évo-qué dans 16 % des messages,contre 2 % au téléphone. Lesautres situations se retrouventdans les mêmes proportions surles deux moyens de communica-tion. a

Véronique Cauhapé

SOS-Amitié : Tél. : 01-40-09-15-22www.sos-amitie.com/

Face à la hausse des appels,SOS-Amitié manque de bénévolesEn 2007, l’association, créée en 1960, a répondu à 2 000 appels téléphoniques par jour

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SantéNouveau délaipour les patients en ALDLes patients reconnus en affec-tion longue durée (ALD) avant le15 novembre 2005, et qui devai-ent faire un bilan médical avantle 1er juillet 2008 pour continuer àbénéficier d’une prise en charge à100 %, ont jusqu’au 31 décembre2009. Ce report, annoncé le9 juin, est dû au retard pris parl’établissement de nouveaux pro-tocoles de soins, qui risquait deprovoquer « des ruptures de droitsinacceptables dans la prise en char-ge des patients concernés ». En2006, près de 8 millions de sala-riés étaient en ALD couvrant tren-te maladies (diabète, cancer, sida,etc.). En 2004, la loi a condition-né à l’établissement d’un nou-veau « protocole de soins » la priseen charge de 100 % des dépensesde santé dont bénéficient lespatients. Protocole qui doit êtreétabli par le médecin traitant dupatient et le médecin conseil del’assurance-maladie.

L’un desfondementsde l’identitéde SOS-Amitié,c’est l’anonymatrespectéde part et d’autre

&vous0123Vendredi 13 juin 2008 23

Page 24: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

Football

Châtel-Saint-Denis (Suisse)Envoyé spécial

Les critiques qui ont suivila copie rendue par lesBleus lors de leur pre-mier match de l’Eurocontre les Roumains

(0-0), les supputations sur leschances de la France de sortirvivante du « groupe de la mort »,les effets de manche à quarante-huit heures d’un match crucialface aux Pays-Bas, vendredi13 juin, à Berne, Raymond Dome-nech laisse cela à d’autres.

Le sélectionneur français n’en acure ou feint de ne pas s’y intéres-

ser. La partition n’est pas nouvellemais, avouons-le, l’entraîneur amé-liore de jour en jour ses qualitésd’interprète. Mercredi, sous le cha-piteau de Châtel-Saint-Denis, lepetit village où s’entraînent lesFrançais, le chef d’orchestre desBleus a livré l’un de ses meilleursconcerts.

Le sélectionneur excelle dans leregistre du contournement. Unjournaliste l’interroge sur seschoix tactiques face à la Rouma-nie : Raymond Domenech se pré-sente en « entraîneur de base »indiquant à ses joueurs des« consignes stupides ». Le techni-cien dirigera pourtant le 13 juinau soir sa 53e rencontre à la tête del’équipe de France A, autant

qu’Aimé Jacquet (sélectionneurentre 1994 et 1998) et RogerLemerre (entre 1998 et 2002). Unautre envoyé spécial le sonde surla composition du onze qui affron-tera les Pays-Bas, vainqueurs parKO des champions du monde ita-liens (3-0) le 9 juin : il annoncequatre postes pouvant donnerlieu à un changement de titulaireet s’empresse de glisser, « tu peuxme croire… si tu en as envie » !

Raymond Domenech joue avecla presse et souvent se joue d’elle.« Quand je discute avec Aimé Jac-quet et qu’il me dit quelque chose,cela me touche. C’est probablementjuste, cela vient d’un technicien dehaut niveau, expliquait-il au Mon-de mi-avril. Quand un journaliste

écrit quelque chose, j’ai envie de luidire “corrige ta formule” ! Sur lefond, il ne sera jamais crédible, ilmaîtrise la forme, mais pas le fonddu foot. » Et l’entraîneur des Bleusde poursuivre : « J’ai une forme decohérence, je ne suis pas influençablepar l’extérieur. A l’intérieur du grou-pe en revanche, je suis à l’écoute. »

Pour quoi faire ?Sous la tente géante des confé-

rences de presse, le long de laquel-le s’agglutinent les voitures desmédias de l’Europe entière, le dis-cours reste le même. Séduire lepublic par un football plus offensif,plus débridé, pour quoi faire ?« L’objectif n’est pas de séduire oude réussir d’entrée un match excep-

tionnel puis de se ramasser ensuite.C’est de jouer de mieux en mieux etd’avancer. » Même si, à progresserà si petits pas, les Bleus risquent derater leur rendez-vous avec l’Euro.« Je crois à la stabilité, à la force del’équipe, à la solidité de sa défense »,martèle Raymond Domenech.

FaceauxPays-Bas,Thierry Hen-ry, en attaque, devrait faire sonretour, remis de sa contracture à lacuisse. Patrick Vieira, le capitaineaux 105 sélections, a lui aussiretrouvé l’entraînement. Sur le casdes deux hommes, RaymondDomenech, fidèle à sa ligne deconduite, ne s’arrête pas vraiment.

La veille, William Gallas avaitévoqué le sujet. « Avec Thierry,Nico[Anelka] ou Karim [Benzema], on

a des attaquants très rapides, quivont nous permettre de jouer encontre-attaque, au cas où les Hollan-dais sedécouvrentunpeu », espérait-il. La philosophie du sélectionneurest bien intégrée.

« La sélection batave est impres-sionnante, elle est capable de jouervite, à une touche de balle, en mouve-ment », prévient Raymond Dome-nech, qui n’hésite jamais à enfon-cer une porte ouverte. Dire unechose, la relativiser, entretenir ledoute. La parole est aux exégètes.« Avoir des certitudes lorsqu’on faitpartie d’un groupe comme celui-ci,avec l’Italie et les Pays-Bas, c’est êtrefou. Je ne le suis pas ! », ironise lesélectionneur. a

Simon Roger

Onlâcherien

Le piège des espacesDidier Deschamps

C ’est un tout autre match quiattend l’équipe de France,vendredi 13 juin, à Berne.

D’abord parce qu’il aura lieu ensoirée : les Bleus connaîtront ain-si le résultat de la rencontre com-mençant à 18 heures (Italie-Rou-manie), ce qui n’est pas négligea-ble lors d’une phase de poulescomme celle-ci. Ensuite parcequ’un adversaire totalement diffé-rent du précédent se présentedevant eux : l’équipe des Pays-Bas est une formation qui va del’avant, qui joue vite, qui crée dudanger mais aussi… des espaces –ces fameux « espaces » qui onttant manqué aux Français contrela Roumanie. Mais là est précisé-ment le piège dans lequel ilsdevront ne pas tomber. Vouloircompenser ce qu’on a raté lors dupremier match, chercher à trans-poser ce qu’on aurait dû fairecontre les Roumains serait uneerreur. Les Bleus auront plus d’es-pace, certes ; ils devraient pouvoirmieux s’exprimer offensivementface à ce type d’équipe, oui. Maisils devront d’abord être très soli-des défensivement. Et ne pas selancer à l’attaque en criant : « Enavant toute ! »L’enjeu de ce match sera, avanttoute chose, de répondre à la vites-se et à la vivacité des joueurs offen-sifs néerlandais – notammentSneijder et Van der Vaart, deuxjoueurs qui se déplacent beau-coup sur le terrain. Pour avoir ali-gné trois défenseurs très lents,l’Italie a payé le prix fort (3-0) faceà cette équipe lors de la premièrejournée du groupe C. Le problèmede la vitesse, dans le football, c’est

que tu peux difficilement lacontrer à partir du moment où tonvis-à-vis est lancé dans l’espace :s’il est plus rapide que toi, tu nepeux plus le rattraper. La seulesolution, pour un défenseur, c’estalors d’anticiper sur les déplace-ments de l’attaquant adverse ousur les trajectoires du ballon.Contrarier des joueurs hyper-rapi-des est possible avec de l’expérien-ce et de l’intelligence. Sur ce plan-là, l’équipe de France est plutôtbien fournie.Elle le sera encore plus si PatrickVieira fait son retour sur le terrainà l’occasion de ce match. Sonimpact physique ne sera pas detrop, par ailleurs, face aux milieuxde terrain néerlandais. Mais pour-ra-t-il tenir sa place ? Sera-t-ilcapable de jouer une heure seule-ment ? L’incertitude est grande.Thierry Henry, en revanche, serabien là, lui. Sa capacité à créer dela profondeur sur le front de l’atta-que a fait défaut contre la Rouma-nie. Sa présence devrait égale-ment avoir un impact sur cetterencontre.Reste la question du système dejeu à adopter. J’ai envie de dire…peu importe. Ce qui compte, c’estéviter de donner la sensation d’unjeu stéréotypé. Et avoir des jam-bes, bien sûr. Tu peux mettre enplace tous les systèmes du monde,si les jambes ne suivent pas, tonanimation ne fonctionnerajamais. Les Bleus ont manqué dejus lors de leur premier match. Ilsen auront besoin vendredi. Vu cequi les attend… a

Didier Deschamps était le capitaine del’équipe de France championne dumonde en 1998 et d’Europe en 2000.

Euro 2008&Sport

Domenech, fidèle à ses idéesAvant le match face aux Pays-Bas, vendredi, le sélectionneur des Bleus, volontiers opaque, vante la stabilité

Groupe DL’Espagnol David Villase fissure l’indexL’attaquant espagnol David Villa,auteur d’un triplé contre la Russiemardi 10 juin, en match comptantpour le groupe D de l’Euro 2008(4-1), souffre d’une fissure à l’in-dex droit, a annoncé mercredi l’at-tachée de presse de la Fédérationespagnole, Paloma Antoranz.« Il souffre d’une petite fissure quine l’empêchera pas de disputer leprochain match » contre la Suède,a déclaré Mme Antoranz. Villa s’estblessé lors de la célébration deson premier but face aux Russes,en se coinçant l’index dans lemaillot de son coéquipier Fernan-do Torres.

OrganisationPas d’incidents gravesen AutricheLes autorités autrichiennes,qui ont fait état de 249 interpella-tions dans le pays depuis ledébut de l’Euro 2008, samedi7 juin, se sont déclarées « trèssatisfaites du déroulement des évé-nements », lors d’un premierbilan, mercredi 11 juin, ne signa-lant pas d’incidents graves. Lesrares incidents, comme à Klagen-furt (sud du pays), samedi etdimanche, entre supporteurs alle-mands et polonais, ont été rapide-ment maîtrisés. Au total, 21 per-sonnes ont été officiellementblessées, dont quatre policiers,depuis le 7 juin.

24 0123Vendredi 13 juin 2008

Page 25: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

BâleEnvoyé spécial

Bras dessus, bras des-sous, ils s’apprêtent àfaire la fête dans le cen-tre de Bâle, envahi parune marée de maillots

et tee-shirt rouges. L’un a entouréses épaules d’un drapeau turc,l’autre a fait de même avec celui dela Suisse. Ils rient, chantent, se lan-cent des blagues. L’un hurle « Tur-kiye ! », l’autre « Hop Schwiiz ! »Cette image résume bien l’at-mosphère chaleureuse qui régnaità Bâle mercredi 11 juin, à l’occa-sion d’une journée que beaucoupredoutaient.

Trois ans après les graves inci-dents survenus après un matchTurquie-Suisse disputé à Istanbul,au cours duquel des joueurs helvè-tes avaient été pourchassés et cer-tains frappés, joueurs, dirigeantset supporteurs des deux camps sesont, cette fois, parfaitementtenus. Malgré la fin cruelle de larencontre, mercredi, pour la Suis-se, l’un des deux pays organisa-teurs de l’Euro, avec l’Autriche.

En cette orageuse soirée bâloi-

se, la Nati dirigée par Köbi Kuhn adéjà dit adieu à « son » Euro. Enseulement deux matches, son des-tin a été scellé. Après sa défaitelors du match d’ouverture face auxTchèques, il fallait face aux Turcs,eux aussi battus lors de leur entréedans la compétition, se reprendre.Portée par un public moins calmeque d’habitude, la Nati n’a pasréussi son pari. Pour lapremière fois depuisl’élimination prématu-rée de la Belgique lorsde l’Euro 2000, unenation hôte est priée dequitter la compétitionaussi tôt.

Sur la pelouse duParc Saint-Jacques,détrempée par un vio-lent orage en première période, lesfans suisses y ont pourtant cru.Leurs favoris, qui alignaient troisjoueurs d’origine turque au coupd’envoi (Hakan Yakin, GökhanInler et Eren Derdiyok), menaientà la mi-temps grâce à un but d’Ha-kan Yakin. Dans ce genre de condi-tions météorologiques, la pluiediluvienne favorise l’équipe lamoins technique, la moins apte à

garder le ballon. Il était donc logi-que que la Suisse mène face à desjoueurs turcs plus doués techni-quement, mais aussi plus gênéspar le terrain.

Il a suffi que la pluie cessepour que la logique reprenne sesdroits. En inscrivant deux butsen seconde période, dont l’undans les arrêts de jeu, les joueurs

de Fatih Terim ontpoussé la Nati dehors.« C’est une très, trèsgrosse déception, maisla Suisse s’en remet-tra », a déclaré KöbiKuhn, en poste depuissept longues années etqui va céder sa place desélectionneur au célè-bre technicien alle-

mand Ottmar Hitzfeld.LesTurcs, eux, nesont pas enco-

re sûrs de pouvoir continuer long-temps leur route et donc de profi-ter du luxe de La Réserve, l’établis-sement somptueux qui leur sert derésidence à Bellevue, au bord dulac Léman. Pour en jouir encoreun peu, il va leur falloir battre lesTchèques, dimanche, à Genève.

Le sélectionneur Fatih Terim,

surnommé « l’empereur », a déjàemmené son pays vers sa premiè-re phase finale (Euro 1996) et per-mis au football turc de remporterson premier titre européen (Cou-pe de l’UEFA 2000 pour Galatasa-ray). Ambitieux, l’expérimentétechnicien n’a pas l’intention dequitter rapidement la Suisse oùses joueurs évoluent presque àdomicile. Voir la Turquie conti-nuer son chemin permettrait à lafête populaire de continuer dansles rues suisses. Le Portugal, autreéquipe suivie par de nombreuxsupporteurs, est déjà qualifié. a

Alain Constant

Le Portugal s’est qualifié pour lesquarts de finale de l’Euro, mercre-di 11 juin, grâce à sa victoire (3-1)face à la République tchèque, àGenève, et à celle de la Turquiecontre la Suisse (2-1). Le capitaineNuno Gomes et ses équipiers sontassurés de terminer en tête dugroupe A et donc de rencontrer ledeuxième du groupe B, qui com-prend l’Allemagne, la Croatie, laPologne et l’Autriche. La sélectionportugaise s’est imposée face auxTchèques grâce à des buts de

Deco (8e minute), Cristiano Ronal-do (63e) et Ricardo Quaresma(90e + 1), contre une réalisation deLibor Sionko (17e).Dans la soirée, mercredi, le clubanglais de Chelsea a par ailleursannoncé que le sélectionneur duPortugal, Luiz Felipe Scolari,deviendrait son manager généralle 1er juillet. Le Brésilien avait pour-tant nié avoir des contacts avecChelsea, qui n’a plus d’entraîneurdepuis le limogeage de l’IsraélienAvram Grant.

&Sport

La forme de Tiger Woodsà l’épreuve de l’US OpenLe numéro un mondial revient après une opération au genou

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Golf

A vant chaque grand rendez-vous majeur, depuis queTiger Woods écrase de sa

suprématie le golf mondial, laquestion la plus fréquemment for-mulée est de savoir qui finiradeuxième derrière lui. Avant la108e édition de l’US Open, qui alieu du 12 au 15 juin sur le par-cours sud de Torrey Pines, à SanDiego (Californie), l’interroga-tion peut être transposée : qui fini-ra premier devant Woods ? Surles rotules, comme il l’était lorsdu Masters d’Augusta, en avril, leno 1 mondial avait en effet terminédeuxième. Opéré du genou gau-che dès le surlendemain de cetterelative contre-performance, « leTigre » n’est pas revenu à la com-pétition depuis lors.

Prudent, Woods n’a joué queneuf trous lors de sa première par-tie d’entraînement, lundi 9 juin.Si l’Américain s’aligne, c’est qu’ilestime probablement être revenuau meilleur de sa condition. Maisun doute subsiste quant à sa capa-cité de l’emporter.

L’US Open pourrait donc unenouvelle fois réserver une surpri-se en consacrant un vainqueurinattendu, d’autant que ce tour-noi majeur est celui qui réussit lemoins au Tigre, qui ne l’a gagnéqu’à deux reprises, en 2000 et2002, alors qu’il a remporté trois

Open britanniques, quatre Mas-ters et quatre USPGA.

Depuis la victoire de JimFuryk, en 2003, aucun Américainn’a plus remporté ce titre dont letrophée a fait le tour de la planète,par l’hémisphère Sud, serré dansles bras du Sud-Africain RetiefGoosen, vainqueur en 2004, puisdu Néo-Zélandais Michael Camp-bell en 2005, de l’Australien GeoffOgilvy en 2006 et de l’ArgentinAngel Cabrera en 2007. Ces troisderniers ont remporté d’ailleurs àcette occasion leur premier tour-noi majeur. « Voir autant dejoueurs non américains remporterdes tournois est le reflet du dévelop-pement du golf partout dans le mon-de et cela est très positif », seréjouit Angel Cabrera, qui se ver-rait bien l’emporter une deuxiè-me fois.

Beaucoup plus rapide« Le parcours de Torrey Pines, je

ne le connais pas vraiment, admetl’Argentin. J’y ai juste joué deuxfois en 2003. » Cela se passait lorsdu Buick Invitational, épreuve ducircuit américain qui a lieu tousles ans sur les deux parcours deTorrey Pines, où il n’avait pas pas-sé le cut. A en croire l’homme deCordoba, connaître un parcoursne représente pas forcément uneaide pour remporter le tournoiqui s’y joue. La preuve, celui quiest surnommé « el Pato » (le

canard) n’avait jamais mis lespieds sur celui d’Oakmont (Penn-sylvanie), théâtre de la dernièreédition de l’US Open.

La relation d’extrême familiari-té que Tiger Woods et Phil Mickel-son entretiennent avec TorreyPines – le premier a remporté leBuick Invitational à six reprises,et le second, qui est par ailleursdomicilié à deux pas du parcours,trois fois – ne leur serait doncd’aucune utilité. Surnommé« Docteur Open » pour ses inter-ventions méphistophéliques surles parcours destinés à accueillirl’US Open, l’architecte Rees Jonesne saurait démentir. « Le par-cours tel qu’il est aujourd’hui n’arien à voir à ce qu’il est en janvierlors du Buick Invitational, préci-se-t-il. Il est beaucoup plus ferme etbeaucoup plus rapide. Les joueursdevront taper des coups vraimenttrès bons pour arrêter leurs ballessur les greens. »

L’Espagnol Sergio Garcia,dont le palmarès est encore vier-ge de tout tournoi majeur maisqui a remporté au mois de mai lePlayers Championship, considérécomme le 5e majeur, ou le quadra-génaire rugissant Thomas Levet,seul représentant français, ontdonc toutes les chances de créerla surprise. Tout comme les 154autres concurrents qui devaientprendre le départ jeudi 12 juin. a

Jean-Louis Aragon

« C’est unetrès, très grossedéception,mais la Suisses’en remettra »

Köbi Kuhn, entraîneurde l’équipe helvétique

Le Portugal en quarts, Luiz Felipe Scolari à Chelsea

FootballEuro 2008

Groupe A Mercredi 11 juin, GenèveRépublique tchèque - Portugal 1-3Mercredi 11 juin, BâleSuisse - Turquie 1-2

Groupe B Jeudi 12 juin, Klagenfurt, 18 h, M6Croatie - AllemagneJeudi 12 juin, Vienne, 20 h 45, M6Autriche - Pologne

Groupe CVendredi 13 juin, Zurich, 18 h, TF1Italie - RoumanieVendredi 13 juin, Berne, 20 h 45, TF1Pays-Bas - France

Groupe DSamedi 14 juin, Innsbruck,18 h, M6Suède - Espagne Samedi 14 juin, Salzbourg, 20 h 45, TF1Grèce - Russie

Les matches

1 I Portugal ...........................................6 points2 I Turquie ............................................. 3 points2 I République tchèque ......................... 3 points4 I Suisse ...............................................0 point

1 IAllemagne......................................... 3 points2 I Croatie ............................................. 3 points3 I Autriche ...........................................0 point4 I Pologne ............................................0 point

1 IPays-Bas ........................................... 3 points2 IFrance ................................................1 point2 IRoumanie...........................................1 point4 IItalie..................................................0 point

1 I Espagne ........................................... 3 points2 I Suède............................................... 3 points3 I Grèce ...............................................0 point4 I Russie ..............................................0 point

Classement

Le match entre la Suisse (en rouge) et la Turquie sous le déluge bâlois, le 11 juin. PASCAL LAUENER/REUTERS

CyclismeTom Boonen exclu duprochain Tour de FranceAprès le contrôle positif de TomBoonen à la cocaïne, faute d’unedécision de la part de son équipeQuick Step, les organisateurs dela Grande Boucle ont exclu mer-credi 11 juin le coureur belge duprochain Tour de France, qui par-tira de Brest, le 5 juillet.

AutomobileMarion Bartoli incertainepour WimbledonLa Française Marion Bartoli(10e mondiale), a été battue mer-credi 11 juin au 2e tour du tournoide Birmingham par la TchèquePetra Cetkovska. Elle pourrait nepas participer à Wimbledon, dontelle a été finaliste en 2007, en rai-son d’une tendinite à un poignet.

RugbyParra blessé au Mondialdes moins de 20 ansLe capitaine de l’équipe de Francedes moins de 20 ans, Morgan Par-ra, blessé à la main droite, est for-fait pour le reste du Mondial desmoins de 20 ans de rugby disputéau Pays de Galles. La France joue-ra sa place en demi-finale, samedi14 juin, contre le Pays de Galles.

La Suisse, pays hôtede l’Euro, est déjà éliminéeLa « Nati » a été défaite par la Turquie (2-1), sous une pluie diluvienne

0123Vendredi 13 juin 2008 25

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LOTO Nº 47

Résultats des tirages effectués mercredi 11 juin.Premier tirage : 6, 7, 9, 35, 45, 46 ; complémentaire : 1. Rapports pour6 numéros : 741 916,00 ¤ ; 5 numéros et complémentaire : 5 984,10 ¤ ;5 numéros : 1 227,10 ¤ ;4numérosetcomplémentaire :45,40 ¤ ; 4numé-ros : 22,70 ¤ ; 3 numéros et complémentaire : 4,00 ¤ ; 3 numéros : 2,00¤.Second tirage : 22, 25, 26, 35, 45, 47 ; complémentaire : 31. Rapportspour 6 numéros : 1 597 586,00 ¤ ; 5 numéros et complémentaire :8 626,80 ¤ ; 5 numéros : 1 238,20 ¤ ; 4 numéros et complémentaire :52,80 ¤ ; 4 numéros : 26,40 ¤ ; 3 numéros et complémentaire : 5,20 ¤ ;3 numéros : 2,60 ¤. Joker : 5 579 883

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En France

Météorologue en direct au 0899 700 703

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Région

Nord-Ouest

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Jours suivants

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AlgerAmmanBangkokBeyrouthBrasiliaBuenos AiresDakarDjakartaDubaiHongkongJérusalemKinshasaLe CaireMexicoMontréalNairobiNew DelhiNew YorkPékinPretoriaRabatSéoulSingapourSydneyTéhéranTokyoTunisWashington

CayenneFort-de-Fr.NouméaPapeetePte-à-PitreSt-Denis >35°-10 à -5°< -10°

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très nuageuxbeau tempséclairciesaverses éparseséclairciescouvertéclairciescouvertorageuxorageuxcouvertcouvertéclairciesensoleillétrès nuageuxbeau tempsbeau tempsaverses éparsestrès nuageuxéclaircieséclaircieséclairciesbeau tempspluvieuxaverses éparsesbeau tempséclairciesensoleilléorageuxaverses éparsesensoleilléaverses modéréestrès nuageuxtrès nuageuxtrès nuageuxforte pluie

ensoleillébeau tempsaverses modéréesbeau tempsensoleillébeau tempsensoleillééclairciesbeau tempsforte pluiebeau tempsbeau tempsbeau tempsorageuxéclaircieséclairciesaverses éparsesbeau tempsorageuxbeau tempsbeau tempsbeau tempsaverses éparsestrès nuageuxbeau tempsensoleilléensoleillébeau temps

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SamediDimanche Lundi Mardi

Vendredi 13 juin 2008 13.06.200813.06.2008

13.06.2008

15 km/h

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15 km/h

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Températuresà l’aube et l’après-midi

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EN EUROPE DANS LE MONDE

OUTREMER

Dans le monde Des pluies et des orages arroseront copieusement le Midwest, aux Etats-Unis

Los Angeles

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AntananarivoLa Paz

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Châlons-en-Champagne

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Dijon

Grenoble

LilleFrais mais lumineux

La journée débutera fraîchement avec quelques brumes et nuages bas par endroits, notamment dans les vallées. Quelques gouttes tomberont près de la frontière allemande ou encore en Haute-Savoie et du côté de la Normandie. La couverture nuageuse sera plus importante sur le piémont pyrénéen où quelques pluies se produiront. Les conditions évolueront peu l'après-midi : l'ambiance s'annonce lumineuse malgré des nuages assez nombreux, et quelques ondées se produiront entre la Normandie et le Limousin. C'est au sud de la Garonne que nuages et averses seront les plus nombreux.

ST-ANTOINE

COEFF. DE MARÉE: 48

Cumul pluviométrique le

En Europe

LEVER: COUCHER:PARIS

COUCHER:PARIS

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Le 12h TU

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8 6Realise par Koalog (http://sudoku.koalog.com)

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DifficileCompletez toute lagrille avec des chiffresallant de 1 a 9.Chaque chiffre ne doitetre utilise qu’uneseule fois par ligne,par colonne et parcarre de neuf cases.

SUDOKU Nº 806 Solution du no 805

Unjeupourchaque jourLundi daté mardi Affaire de logiqueMardi daté mercredi ScrabbleMercredi daté jeudi BridgeVendredi daté Samedi L’art en questionSamedi daté dimanche-lundi Echecs

LeLotoLes résultats sontpubliés dans cette pagedans nos éditions datéesdimanche-lundi, mardiet vendredi

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ttcE48MOTS CROISÉS Nº 08 - 137

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Solution du n° 08 - 136HorizontalementI. Hauts de-forme. - II. Usnée.Pubien. - III. Miséreuse. UV. -IV. On. Sincérité. - V. Ria. Nie.Eger. - VI. Iéna. Ver. - VII.Snober. Akène. - VIII. Dotes. Iu.- IX. Elira. Pipier. - X.Syndicaliste.

Verticalement1. Humoristes. - 2. Asinien. Ly. -

3. Uns. Anodin. - 4. Tees. Abord.- 5. Serin. Etai. - 6. Enivré. - 7.Epucée. Spa. - 8. Fuse. Râ. Il. - 9.Obère. Képi. - 10. Ri. Igné. Is. -11. Meute. Niet. - 12. Envergeure.

II.. Fait travailler les neurones.IIII.. Domination absolue. Venuede Russie avec plein d’histoiresà raconter. IIIIII.. Allumés avecintentions. Bon pour accord. IIVV..Fait l’alliance. Article. Les plusgrandes sont les plus fermées.VV.. Prise d’air. A prendre avecmodération. VVII.. La premièren’est pas toujours bonne. Versgrec. Trouvé dans l’erreur. VVIIII..Protections rapprochées.Mesures prises sur le terrain.VVIIIIII.. Reste à l’écart. Protecteurdes espèces. IIXX.. Voyelles. Lepetit est souvent serré. XX.. Pasfacile à toucher.

11.. Peut reprendre du service. 22..Etoiles de mers. 33.. Grand desforêts américaines. Mise en rap-port. 44.. Alouette africaine. Droità l’entrée du cimetière. 55.. Poursuivre ses affaires quotidiennes.66.. Bien arrivée. Sorties dunéant. Facilite le tirage. 77..Personnel. Appelée quand ça vamal. 88.. Préposition. Révolté. 99..Belle mais tristement monoto-ne. Propos puéril. 1100.. Similaire.Suiveur imbécile. 1111.. Sans voile.Page d’histoire. Propos de laFrance d’en haut. 1122.. Travailledans les fonds.

Philippe Dupuis

HORIZONTALEMENT VERTICALEMENT

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 1 1 12

26 0123Vendredi 13 juin 2008

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20.35Football.Pays-Bas - FranceEuro 2008 (1re phase, gr. C).20.45 Coup d’envoi en directde Berne (Suisse).22.45Euro 2008 : le mag.23.12C’est quoi l’amour ?Prématurité, naissancesmultiples, adoption :quels parents sont-ils ?Présenté par Carole Rousseau.0.50Watcast. Magazine. Une1.10Le Droit de savoir.Magazine (70 min) d.

20.45Bones.Le Fossoyeur. L’EpouvantailLa Sorcière sans tête 2 Série(saison 2, 9, 11 et 10/22) 0.Avec Emily Deschanel, DavidBoreanaz (2006) d.Un criminel enlève Brennanet Hodgins qu’il enterre vivants...23.15Sex and the City.Deux poids, deux mesures.La Soirée de ma vie. Série(S5, 4 et 5/8). Avec SarahJessica Parker (2002) 0 d.0.20100 % Euro. Magazine.1.30Club. Magazine (85 min).

20.50Thalassa.Les Martyrs du golfe d’AdenPrésenté par Georges Pernoud.Sommaire : Les Martyrs du golfed’Aden 0 ; Christmas Island ;La Grand-Mère des Bunaken...22.55Météo, Soir 3.23.25Parfum de femme a a

Film Dino Risi. Avec VittorioGassman, Agostina Belli,Alessandro Momo (It., 1974).1.05Toute la musiquequ’ils aiment...Bach l’intemporel Magazinemusical (65 min).

20.50Femmes de loi.Une femme parfaite.La Robe et la Justice 0 Série.Avec Natacha Amal, NoémieElbaz, Charles Lelaure d.Enquête sur le meurtred’un chauffeur de limousine.22.50La Méthode Cauet.Présenté par Cauet. Invités :Elsa Pataky, Passi, YannDelaigue, Vincent Clerc, DavidGuetta, Kelly, ChristopheDominici, les Vamps, MickeyMahut, Idriss Diop.1.05Les Coulissesde l’économie (40 min).

21.00Boulevard du Palais.La Guerre des nerfsTéléfilm. Jacques Malaterre.Avec Anne Richard, PhilippeAmbrosini, Jean-FrançoisBalmer (France, 1999) 0 d.Nadia, la juge d’instruction, en-quête sur la mort d’un hommeatrocement mutilé.22.45Esprits libres.Magazine présentépar Guillaume Durand.0.50Journal, Météo.1.10Pour vos yeux.Magazine (30 min) d.

20.30Football.Autriche - PologneEuro 2008 (1re phase, groupe B).20.45 Coup d’envoi en directde Vienne (Autriche) d.22.40Genesis :l’origine du crime.Les Sept Sacrements [1 et 2/2]Série (S1, 8 et 9/9). Avec PepMunné, Quim Gutiérrez, SoniaAlmarcha (Esp., 2006) 2 d.Mateo et son équipe traquentun tueur en série qui se pré-tend redresseur de torts.0.30100 % Euro.Magazine (70 min).

20.50American HauntingFilm Courtney Solomon. AvecDonald Sutherland, SissySpacek (EU, 2005) 2 d.22.20Doom Doom.Série (saison 1, 3/3) 2.22.55Jeepers Creepers 2 a a

Film Victor Salva. Avec Jona-than Breck, Ray Wise, EricNenninger (EU, 2003) 2 d.Le monstre est de retouret s’attaque cette foisà un car scolaire.0.35Métal brutal.Court métrage (15 min) 0 d.

20.55Louis la Brocante.Louis et le violon noirSérie. Michel Favart. AvecVictor Lanoux, Louis-Do deLencquesaing (Fr., 2003) d.22.40 et 23.30Ce soir (ou jamais !).Magazine présentépar Frédéric Taddeï d.23.00 et 2.30Soir 3.Entretien exclusifde George W. Bush.0.45New York Police Blues.La Loi du silence Série(saison 9, 16/23). AvecCharlotte Ross (50 min) d.

21.00Le Lion noir.Téléfilm. Wolfgang Murnberger.Avec Hosh Kane, Sule Rimi,Robert Bertrand (Autr., 2007) d.22.30Strip-o-scope.Documentaire. PhilippeTruffault et Jean-MarcBarbieux (2004) d.22.55Tracks. Magazine d.23.50Le Vampireet le Sang des vierges a

Film Harald Reinl. Avec LexBarker, Christopher Lee, KarinDor, Carl Lange (Allemagne,1967, v.o., 80 min) d.

20.50A vous de juger.Invité : François FillonMagazine présenté par ArletteChabot. Invité : FrançoisHollande.23.30D’art d’art.La Danse à deux,de Jean-Baptiste Huet d.23.35Infrarouge.Chroniques de la violenceordinaire Le Business deschéquiers volés. Documentaire.Christophe Nick, PierreBourgeois, David Carr-Brownet Patricia Bodet. [1/2](France, 2004, 120 min) d.

20.50Cold Case.Voleur d’enfance. Electron libreSérie (saison 4, 19/24). AvecKathryn Morris, Danny Pino,John Finn (2007) 0 d.Un père de famille, devenutueur en série, fait pressionsur l’équipe de Rush.22.15Meadowlands.Soupçons 2 Série (S1, 3/8).Avec David Morrissey (2007) d.23.05Jeudi investigation.Scandales sur ordonnance.0.00Mensomadaire.Magazine (30 min) 0.

21.00Le Dernier Témoin.Le Prix de la vérité. A la santéde nos défunts Série (saison 5,2 et 3/8). Avec Ulrich Mühe,Gesine Cukrowski (2003).22.25Les Swenkas.Documentaire. Jeppe Ronde(Danemark, 2004) d.23.40Paris-Berlin, le débat.A qui profitent les droitsde l’homme ? Magazine.0.40Ouvre les yeux a

Film Alejandro Amenabar.Avec Eduardo Noriega, Pené-lope Cruz (1997, 130 min) 0.

Dominique Dhombres

J ack Johnson (1878-1946) aété le premier Noir championdu monde de boxe poidslourds. Sa victoire, le 4 juillet

1910 devant 25 000 spectateursréunis à Reno, dans le Nevada,fut un traumatisme pour l’Améri-que blanche et ségrégationnisted’alors. Le public, majoritaire-ment blanc, criait « Tuez lenègre ! ». Au bout de quinze repri-ses, son adversaire, l’ancien cham-pion du monde James Jeffries,que les propagandistes de lasuprématie blanche avaient faitsortir de sa retraite, devaits’avouer vaincu.Aussitôt, dans plusieurs grandesvilles telles que New York etChicago, des groupes racistes atta-quaient des Noirs pris au hasard.Il y eut des dizaines de morts. Leremarquable documentaire améri-cain de Ken Burns, UnforgivableBlackness : the Rise and Fall ofJack Johnson (Une négritudeimpardonnable : l’ascension et lachute de Jack Johnson), raconte cedestin hors du commun. Le filmétait diffusé pour la première foismercredi 11 juin sur Arte. C’est unextraordinaire livre d’images surl’Amérique raciste de la premièremoitié du XXe siècle.Pour ceux qui n’ont pas vu cettemerveille, une fois encore, maiscela ne durera pas éternellement,votre serviteur résume. Jack John-son était né en 1878 à Galveston,au Texas. Ses parents avaient étéesclaves. Ils étaient désormaislibres mais extrêmement pauvres.

Pour le jeune Jack, la seule façond’échapper à la condition miséra-ble qui lui était promise était laboxe. A cette époque, les Noirspouvaient affronter des adversai-res blancs dans toutes les catégo-ries, sauf celle des poids lourds.Johnson brise ce tabou en 1908 etdevient champion du monde.Mais cette victoire est contestéepar les tenants de la suprématieblanche, qui poussent l’ancienchampion James Jeffries, quiavait pris sa retraite et quarantekilos, à remonter sur le ring. Etc’est le combat de Reno, en 1910.Les actualités filmées montrant lavictoire incontestable de Johnsonsont interdites dans certainsEtats américains. L’idée que lenouveau champion du mondesoit noir était insupportable àbeaucoup.Johnson aggrave son cas en épou-sant une femme blanche, ce quiétait alors interdit par la loi.Condamné à un an de prison, ils’enfuit à l’étranger et arrive àParis. Le 27 juin 1914, il se bat, auVél’d’Hiv’, contre un adversaireblanc venu de Pittsburgh, qu’ilécrase. Mais la première guerremondiale éclate quelques joursplus tard, et Johnson doit quitterl’Europe. Il perd son titre en 1915à La Havane face à Jess Willard etpréfère rentrer aux Etats-Unispurger sa peine. Il aimait les fem-mes, blanches de préférence, aumoins autant que la boxe. Il a tou-jours été vêtu comme un prince.Il est mort en 1946 dans un acci-dent de la route. Il ne s’est jamaispréoccupé de politique. a

Vu&commenté

Le fabuleux destind’un prince de la boxe

FRANCE 5

20.40Passeurs d’espoir.Brésil [1/6] Documentaire. Pierre Barneriaset Laurent Ramanonjiarisoa (France, 2004) d.22.10C dans l’air.Magazine présenté par Yves Calvi.23.20On n’est pas que des parents.Magazine. Invité : Christian Helson d.0.05Allô, docteurs ! (30 min).

TMC

19.45 Le Mur infernal.Jeu.20.45Les Cordier, juge et flic.Série. Un garçon mystérieux d.22.25L.A. Dragnet.Le Vice dans la peau 2 A qui profite le crime ?La Gloire à tout prix 0 Six ans de silence 0

Série (S2, 6/10 ; S1, 7, 6 et 11/12). Avec EvanDexter Parke, Ed O’Neill, Eva Longoria, RobinBartlett, Michael Massee (EU, 170 min).

NT 1

20.45Changement de cap.Téléfilm. Patrick Malakian. Avec Mimie Mathy,Claude Gensac, Denis Braccini (Fr., 1998).22.20Catch Attack.Raw. Smack Down Magazine.0.05Au-delà du réel, l’aventure continue.Anniversaire de mariage. Ordre et obéissanceSérie (S2, 7 et 6/22). Avec Matt Frewer, JayneHeitmeyer, Michelle Johnson (100 min).

LCP-AN/PUBLIC SÉNAT

20.00Le Temps de penser.20.30Entre les lignes.21.00Ça vous regarde.22.00Paroles du monde. Best of.22.45Conversation d’avenirs. Le vin.23.00Un monde de bulles (30 min).

FRANCE 4

20.45Taratata.Invités : MC Solaar, Constance Amiot, Son ofDave, Moriarty, David Salsedo, Minor Majority.22.15Un gars, une fille.Série (quinze épisodes).0.00Dirt.Le Mentor Série (saison 1, 11/13) . Avec LukasHaas, Courteney Cox, Ian Hart, Tara Summers,Josh Stewart (Etats-Unis, 45 min) 2.

DIRECT 8

20.40Blandine l’insoumise.La Farine du diable Série. Avec Ann Gisel Glass,Emmanuel Quatra, Jacques Frantz (Fr., 2003) d.22.20Les Perles du Net.23.45La Pub et le Beau Temps.Magazine présenté par François Kermoal etMark Tungate.0.15Morandini ! (60 min).

W 9

20.45Nouvelle star.La Finale Divertissement présenté par VirginieEfira.23.05Le Mag de l’Euro.Magazine présenté par François Pécheuxet Sidonie Bonnec. Au sommaire : Pays-Bas -France et Italie - Roumanie.23.50La Plage des secrets.Episode 16 (60 min) 2.

I TELE

20.15Ça chauffe.20.45Journal de l’économie.21.15Journal de l’international.21.34N’ayons pas peur des mots.22.00Info soir.0.15A juste titre. Magazine (15 min).

Jeudi 12 juin

TF1 France 2 France 3 Canal + Arte M 6

TF1 France 2 France 3 Canal + Arte M 6

E N K I O S QU E C H AQU E J E U D I, 3€

“Moi, l’Europe”Sarkozyet la présidence française de l’UE

JEUDI 12 JUIN

2 000 ans d’Histoire13.30 France Inter Emissionconsacrée au navigateur EricTabarly, à l’occasion du dixièmeanniversaire de sa disparition enmer d’Irlande, dans la nuit du 12au 13 juin 1998. Invité de PatriceGélinet, l’écrivain Yann Quéfelec.

Opéra20.00 France Musique AndréChénier, opéra d’Umberto Gior-dano, donné, le 7 mars, à l’Opéranational de Lorraine, par lesChœurs de l’Opéra nationalde Lorraine et l’Orchestre sym-phonique et lyrique de Nancy,dir. Paolo Olmi. Avec CarloScibelli (André Chénier), MartinaSerafin (Madeleine de Coigny),Piero Guarnera (Charles Gérard),Michèle Lagrange (La comtessede Coigny)…

Vendredi 13 juin

Arte salue la Franceà la tête de l’Union européenneTélévision La chaîne multiplie les reportages dans les coulissesde Bruxelles à l’occasion de la présidence française de l’UE

Les codes du CSA 0 Déconseillé aux moins de 10 ans 2 Déconseillé aux moins de 12 ans 6 Déconseillé aux moins de 16 ans 8 Déconseillé aux moins de 18 ans.Les cotes des films a On peut voir a a A ne pas manquer a a a Chef-d’œuvre ou classique. Sous-titrage spécial pour les sourds et malentendants d.

VENDREDI 13 JUIN

Science publique14.00 France Culture Sujet del’émission scientifique présentéepar Michel Alberganti, journa-liste au Monde : « A qui profitele réchauffement climatique ? »

Concert franco-allemand20.00 France Musique Concertdonné, en direct de la Salle Pleyelà Paris, par l’Orchestre philhar-monique de Radio France, dir.Myung-whun Chung, NemanjaRadulovic, violon. Au program-me : Sibelius (Concerto pourviolon et orchestre en ré mineur)et Brahms (Symphonie n˚ 4).

Le Goût des autres21.00 Radio Classique FrançoisLafon nous propose de comparerdes enregistrements des Préludes,de Chopin.

Télévision« C dans l’air » passel’été sur France 5 avecThierry GuerrierA partir du 30 juin, Thierry Guer-rier, qui anime « C à dire ? ! » surFrance 5 du lundi au vendredi,prendra le relais d’Yves Calvi à laprésentation du magazine« C dans l’air ». L’émission resteà l’antenne tout l’été, du lundi auvendredi à 17 h 45, avec des repor-tages inédits liés à l’actualité.

Canal+ retenue pourla haute définitionLa chaîne cryptée Canal+ a obte-nu, mardi 10 juin, le canal pourune diffusion en haute définition(HD) qu’elle avait sollicitéauprès du Conseil supérieur del’audiovisuel (CSA). Canal+ étaitl’unique candidat à ce canal réser-vé à une télévision payante.Selon le CSA, la chaîne s’est enga-gée à diffuser «l’essentiel de sesprogrammes» en haute définition«entre 14 heures et minuit», àcompter de 2012. Le CSA avaitdéjà attribué deux canaux en HDaux chaînes privées TF1 et M6.Par ailleurs, deux chaînes publi-ques, France 2 et Arte,avaient préempté des canauxpour une diffusion en HD.Selon le CSA, l’offre de haute défi-nition comprendra donc «dès cet-te année» cinq chaînes sur la télé-vision numérique terrestre(TNT): TF1 HD, M6 HD, F2 HD,Arte HD et Canal+ HD.

La sélection radio

Al’occasion de la prési-dence française del’Union européenne(UE), qui commence le1er juillet, la chaîne fran-

co-allemande Arte propose uneprogrammation spéciale, en plusde ses journaux habituels (19 h 45et 20 heures) et de ses reportagesqui privilégient déjà l’actualité del’UE, vers une vision européennedes informations internationales.

Comment les Britanniquesvoient-ils Nicolas Sarkozy ? Qu’at-tendent les Allemands de cetteprésidence française ? Pourquoiles Polonais préfèrent-ilsM. Sarkozy à Jacques Chirac ? Un« Zoom Europa » spécial sur lescoulisses de la présidence françai-se, vendredi 13 juin à 19 heures,tente de répondre à ces questions.Le magazine de Bruno Duvic etAstrid Emerit, présentateur etrédactrice en chef, diffuse unesérie de courts reportages àBruxelles.

Récemment, une douzaine d’at-tachés de presse de ministres fran-

çais ont passé une journée àBruxelles, suivant les pas d’unecentaine de fonctionnaires fran-çais venus se former ces derniersmois. Leur formation sembleconsister d’abord à verrouiller lacommunication : dire sans tropdire semble être la règle.

Des progrès à fairePendant ce temps, à Paris, au

siège de la présidence françaisede l’UE, des fonctionnaires detous les ministères se réunissentpour préparer les cent cinquanteévénements qui doivent marquerce semestre européen.

Qui dit présidence dit cadeauaux hôtes étrangers : le designerPhilippe Starck a créé un cartablerempli de petits objets.

Après les déclarations de Nico-las Sarkozy, le 10 février – « LaFrance est de retour en Europe » –,quatre journalistes européens réa-gissent. A écouter le BritanniqueDavid Rennie, de The Economist,l’entente cordiale a encore desprogrès à faire : « Ce n’est pas

clair si Sarkozy est un libéral quidit des choses stupides pour se faireélire et rester populaire auprès desFrançais ou s’il croit vraiment à cesabsurdités. » Le journaliste alle-mand Wolfgang Proissl, du Finan-cial Times Deutschland, est pluspositif sur la présidence françaiseet sur le rôle de la France en Euro-pe.

Tout au long du week-end des28 et 29 juin, la chaîne franco-alle-mande déploiera ses regards surl’Europe de la culture ou celle despetits métiers et de la cuisine, ycompris dans les nouveaux paysde l’UE. En particulier, neuf por-traits d’artistes, de vingt-six minu-tes, s’attardent sur les œuvres etles visions contemporaines desplasticiens Ben, Annette Messa-ger, du peintre Jonathan Meese oude la styliste Agatha Ruiz de la Pra-da. a Catherine Bédarida

« Zoom Europa », vendredi 13 juinà 19 heures sur Arte. Week-end spé-cial Europe les 28 et 29 juin à partirde 9 h 45.

Ecrans0123Vendredi 13 juin 2008 27

Page 28: e Vendredi 13 juin 2008 La gauche Astronomie Un œil …medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20080612/1057106_lemonde... · 2008-06-12 · «Le Monde des livres» Le supplément hebdomadaire

IL Y A 50 ANS DANS « LE MONDE »

Vieux journaux

Le monde de la chauve-sourisest sans grand rapport aveccelui du mille-pattes, qui n’arien à voir avec celui de l’aigle

SOMMAIRE

UNE COLLECTION de journauxd’autrefois – d’il y a dix ans, qua-rante et même cent cinquante ans– sera dispersée, le 19 juin, au pro-fit des œuvres sociales des ven-deurs de journaux. Cette collec-tion est exposée à partir d’aujour-d’hui dans le hall de notre confrè-re France-Soir, rue Réaumur.

Rien ne saurait mieux définirl’actualité, le mot, la chose, sesgrandeurs et ses faiblesses, quece petit musée provisoire dupapier imprimé. Si l’on y peut sui-vre le progrès des techniques depresse, on y découvre par lamême occasion tout ce qu’ontd’éphémère certains événementsqui nous occupent, nous passion-nent pendant vingt-quatre heu-res, avant de tomber dans l’oubli.

L’ancêtre est peut-être cenuméro de La Gazette universellede 1774. L’actualité ne chômaitpas en ce temps-là, mais elle ne

sortait guère du conseil du roi. Iln’en va pas de même pour ce Jour-nal de Paris du 13 janvier 1792,qui publie en pleine « une » lecompte rendu des débats de l’As-semblée.

Vieux journaux : ce sont enco-re ces numéros du Grelot, du Jour-nal des voyages, du Journal amu-sant, illustré par Henriot, etc.

A moins de trente ans de dis-tance, certains quotidiens desdeux guerres ont l’air de se faireécho. Ainsi, le numéro du PetitParisien du 12 novembre 1918 etcelui de Libé-Soir du 8 mai 1945,chantant victoire sur toute la lar-geur de sa page tricolore. Enthou-siasmes défunts, querellesoubliées. Nulle part mieux qu’enprésence de ces témoins on n’ap-précie le cri désabusé du poète :« Ah ! que la vie est quotidien-ne ! » a

(13 juin 1958)

Robert Solé

Euro, mange ta soupe !

Billet

L’animal en généralou en particulier

LE SPORT n’est pas sans effet sur l’état civil chinois. En 2001,année où Pékin l’a emporté sur les capitales concurrentes pourorganiser les Jeux de cet été, 553 nouveau-nés ont été prénommés« Olympique ». Au total, ce sont plus de 4 000 enfants qui ont étéappelés ainsi dans l’ancien empire du Milieu. Bizarrement,92,50 % des heureux bénéficiaires de ce joli prénom sont des gar-çons. Sans doute le mot chinois a-t-il une consonance résolumentmasculine, contrairement à nos vieilles Olympe et Olympie.

Il fut un temps où la France était encore plus grande que laChine : dans la seconde moitié du XIXe siècle, Paris a décroché àcinq reprises l’Exposition universelle. Combien de bébés avaient-ils été prénommés « Expo » à ces occasions ? Difficile de lesavoir. On ne connaît même pas le nombre de petits « Euro » nésen 2000 après la victoire des Bleus au championnat d’Europe defootball. Combien de filles ? Combien de garçons ? Tout laisse àpenser qu’il n’y en aura pas beaucoup cette année, à moins d’unaccouchement exceptionnel – aux forceps ou par césarienne – ven-dredi, à Berne, contre les Pays-Bas. a

Les vacances s’annoncent, lesabandons aussi. Comme cha-que année, des milliers defois, un chien, un chat vontêtre laissés au coin d’un bois,au bord d’une route. Chacunconnaît la scène : la brave

bête ne se doute pas, et puis la voituredémarre. L’errance insensée commence, lavie affolée, la mort au bout.

C’était un compagnon, une présence.Quand c’est une charge, un ennui, un pro-blème, on s’en débarrasse. On les entenddire : « Pourquoi se faire du souci, c’est unebête, non ? Et puis, laisser une bête dans lanature, ce n’est pas un crime. » Il existe pour-tant une Déclaration universelle des droitsde l’animal, proclamée à Paris en 1978, quiprécise en son article 5 : « 1. L’animal quel’homme tient sous sa dépendance a droit à

un entretien et à des soins attentifs. 2. Il nedoit en aucun cas être abandonné ou mis àmort de manière injustifiée. » Evidemment,elle n’a rien de contraignant.

Pourtant, le cas des lâcheurs de chiensest presque trop simple. Car tout le mon-de connaît la sensibilité canine, chacuncomprend qu’une relation s’était établieavec ses maîtres, et que le monde s’effon-dre, d’un coup, pour un toutou à l’aban-don. En revanche, rien de plus complexeà saisir que les relations des hommes auxautres espèces vivantes. Là, des tas d’obs-tacles guettent. A commencer par lafaçon de parler.

Quand on parle de « l’animal », quedésigne-t-on exactement ? Quel animal ?La mouche, ou la baleine ? La vache, ou lever de terre ? La limace, ou le colibri ?L’escargot, ou le requin ? Ce singulier

« animal » que représente le terme « ani-mal » au singulier, cet animal « en géné-ral », dépourvu d’espèces, voilà quidevient vite source de confusion et demalentendus. Car nombre d’ambiguïtésse dessinent dès qu’on parle, sans autreprécision, de « l’animal ».

Par exemple, dans la Déclaration déjàévoquée, un des droits de « l’animal »s’énonce ainsi : « L’animal mort doit êtretraité avec décence » (article 3,3). L’inten-tion générale est claire : respect de lavie, donc respect du cadavre. Pas ques-tion de traiter un organisme comme uneordure. Il arrive, dans cette logique, queles enfants enterrent dans le jardin lepoisson rouge décédé. Qu’il n’aille pas àla poubelle ! Bonne règle, donc, en appa-rence.

Mais doit-on l’appliquer aussi aux four-mis, aux mites, aux cafards, aux acariens– et si oui, comment ? Que faire si « l’ani-mal mort » est une larve, un scorpion ouun ténia ? Si c’est un cadavre plus noblequi « doit être traité avec décence », que fai-re de la boîte de sardines, où les corpssont rangés tête-bêche, sans tête, dansl’huile ? Avec le corned-beef, qui réduitun grand mammifère à une bouillie qui lerend méconnaissable ? Et, dans la vitrine,cette tête de veau avec du persil dans lesnaseaux, est-ce décent ?

Pour sortir de ces dilemmes, il n’y aque deux attitudes. La première est derefuser toute distinction entre les espèceset de respecter tout vivant, quel qu’il soit,de manière absolue. On s’interdira alorstotalement de tuer un moucheron, tout

autant que d’occire une vache ou d’assas-siner un homme. C’est cohérent, maiscontraignant. Ainsi vivent les jaïns, quisont quatre millions en Inde aujourd’hui.

Les adeptes de cette religion, fondéepar Mahavira, un contemporain duBouddha, ne mangent que des plantes –mais aucune racine, car leur arrachagesaccage vers et insectes. La nuit, ils n’allu-ment ni lampes ni bougies, car la flammeattire et tue papillons et autres. Ils ne boi-vent que de l’eau filtrée, pour des raisonsqu’on devine. C’est encore pour lesmêmes motifs que les plus pieux des jaïnsbalaient en permanence le sol devant euxen marchant, tout en portant sur le visageun masque de coton, car en respirant…

Si l’on ne devient pas jaïn, l’autre atti-tude ne peut être que de distinguer leplus clairement possible entre les espè-ces. Cessons de confondre le cheval etl’alouette. Le chat, l’anchois et la tiquen’ont ni les mêmes comportements ni lesmêmes rapports à leur environnement.Nous n’avons donc pas nécessairementenvers eux les mêmes devoirs. Et peut-

être n’ont-ils pas tous les mêmes droits.Une fois admises quelques grandes géné-ralités – préservation de la biodiversité,interdiction des mauvais traitements… –,il semble nécessaire de différencier« les » animaux et d’abandonner, au lieude son chien, cette fiction qui devient rapi-dement trompeuse : « l’animal ».

Car le monde de la chauve-souris estsans grand rapport avec celui du mille-pat-tes, qui n’a rien à voir avec celui de l’aigle,qui lui-même n’entretient avec la loutre, lecochon et la puce que des rapports hypo-thétiques. Le résultat est clair : il faut cer-tes réfléchir aux droits des animaux, encommençant par ceux qui sont communsà toutes les espèces. Mais il faut aussi prê-ter attention aux spécificités, élaborer desdroits distincts par famille d’espèces, enfonction de leurs traits spécifiques. Celaéviterait bien des débats confus.

La principale confusion provient d’unefausse symétrie. Droits de l’homme, dit-on, donc droits de l’animal. Il y a là unparallélisme illusoire. Parce que l’hommene forme, effectivement, qu’une seule espè-ce. C’est vrai biologiquement : toutes lesethnies humaines sont interfécondes.C’est vrai culturellement : tous les peuplesont la même capacité de symbolisation. Al’opposé, l’animal n’est pas un. Il est diviséen espèces dissemblables, qui n’ont ni lamême organisation biologique, ni lesmêmes activités, ni les mêmes besoins.Bref, l’animal en général n’existe pas.Seuls existent des animaux. Et il incombeà l’homme de s’interroger sur les droits etles devoirs selon les espèces. a

Carte blancheRoger-Pol Droit

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