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IPCF – Conférence Stagiaires – Septembre 2011 - Droit des sociétés en pratique © S. Mercier, 2011 1 Droit des sociétés en pratique – AG - responsabilité des dirigeants- plan financier - procédure d’alarme – faillite – concordat – liquidation STÉPHANE MERCIER Comptable-fiscaliste agréé IPCF Ingénieur commercial Solvay, ULB Maître en Gestion fiscale, Solvay, ULB Professeur à l’EPHEC Conférence « Stagiaires IPCF » du 17 septembre 2011 Woluwé-Saint-Lambert

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IPCF – Conférence Stagiaires – Septembre 2011 - Droit des sociétés en pratique

© S. Mercier, 2011 1

Droit des sociétés en pratique – AG - responsabilité des dirigeants- plan financier - procédure d’alarme – faillite – concordat – liquidation

STÉPHANE MERCIER

Comptable-fiscaliste agréé IPCF

Ingénieur commercial Solvay, ULB Maître en Gestion fiscale, Solvay, ULB

Professeur à l’EPHEC

Conférence « Stagiaires IPCF » du 17 septembre 2011 Woluwé-Saint-Lambert

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CHAPITRE 1 LE PLAN FINANCIER Préalablement à la constitution d’une société, il convient que les fondateurs s’assurent de sa viabilité avant de commencer ses activités. Il serait trop facile d’arguer de la responsabilité limitée de la société pour ainsi s’attribuer, au détriment des créanciers en cas de faillite, un salaire mirobolant, d’effectuer des investissements en les finançant à crédit tout en sachant que les prêts ne seront jamais remboursés, etc. L’obligation d’établir un plan financier s’impose à toutes les sociétés à responsabilité limitée (essentiellement les SPRL, SCRL et SA), au moment de leur constitution, mais elle n’est pas prévue dans le cas des sociétés dans lesquelles la responsabilité est illimitée (SNC, SCS, SCRI), mais elle reste souhaitable pour éviter tout dérapage incontrôlé. Afin de protéger leur propre responsabilité, les fondateurs ont l’obligation d’établir un plan financier dans lequel ils justifient que le capital libéré de la société est suffisant pour assurer l’activité de la société. Si le plan financier oublie des paramètres essentiels, p.ex. les loyers, la responsabilité des fondateurs pourrait s’en trouver engagée. Il leur est possible – c’est une obligation dans le cas d’une SPRL-S - de se faire assister par un expert (un professionnel de la comptabilité ou une organisation agréée à cette fin par le Roi). Le notaire ne participe pas à la rédaction du plan financier, mais il doit émettre des réserves lorsque le plan lui paraît trop succinct ou peu réaliste. Sauf pour la SPRL-S, aucun modèle de plan financier n’a été prévu dans les textes légaux ou réglementaires en vigueur. Pour la SPRL-S, l’on s’en réfèrera à l’A.R. du 27 mai 2010 (M.B. 31 mai 2010), dont le Rapport au Roi stipule que « Les caractéristiques essentielles du plan financier déterminées dans le présent arrêté ne constituent que des exigences minimales. Les fondateurs ont évidemment la possibilité de rédiger un plan financier plus détaillé. Les tableaux de financement intègrent également une alternative, permettant d'établir le tableau à partir du cash flow. » Le plan financier de la SPRL S doit comporter au moins quatre parties (cf. art. 219bis à 219septies, A.R. du 30 janvier 2001): 1) une description de la société qui va être créée; 2) un bilan projeté; 3) un compte de résultats projeté; 4) un tableau de financement projeté. L’avis 2010/6 C.N.C. (19 mai 2010) fournit quant à lui un exemple d’application chiffré. Les articles 215, 391 et 440 CS renseignent une obligation légale pour les fondateurs de sociétés à responsabilité limitée d’établir un plan financier préalablement à sa constitution. Les fondateurs sont responsables « des engagements de la société dans une proportion fixée par le juge, en cas de faillite, prononcée dans les trois ans de la constitution, si le capital social était, lors de la constitution, manifestement insuffisant pour assurer l'exercice normal de l'activité projetée pendant une période de deux ans au moins. Le plan financier doit être signé par tous les fondateurs1, qui en portent par conséquent la responsabilité en premier lieu. Ils sont en effet les auteurs du plan financier. 1 Pour mémoire, l’art. 450 al. 2CS permet dans les sociétés anonymes de désigner une catégorie d’actionnaires comme n’étant que de simple souscripteurs (et, partant, de ne pas supporter la responsabilité des fondateurs)

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Le Code des sociétés stipule uniquement que les fondateurs remettent un plan financier au notaire instrumentant, qui doit le conserver (le plan financier n’est pas publié). Ce document n'est pas publié en même temps que l'acte constitutif, mais est conservé par le notaire. Dans les cas prévus par la loi, il est transmis, à la demande du juge-commissaire ou du Procureur du Roi, au Tribunal. Nonobstant toute stipulation contraire, les fondateurs sont tenus solidairement envers les intéressés des engagements de la société dans une proportion fixée par le juge, en cas de faillite, prononcée dans les trois ans de la constitution si le capital social ou, dans le cas prévu à l'article 211bis CS (SPRL-S), les fonds propres et les moyens subordonnés étaient, lors de la constitution, manifestement insuffisants pour assurer l'exercice normal de l'activité projetée pendant une période de deux ans au moins. Le législateur n’a pas prévu de sanction spécifique pour cause d’absence de plan financier. L’absence de plan financier peut toutefois constituer une circonstance aggravante au cas où la responsabilité des fondateurs est retenue en cas de faillite dans les 3 ans après la constitution de la société. Le cas échéant, le plan financier doit en effet permettre au juge d’examiner si, au vu des circonstances concrètes, le capital au cours des deux premières années de constitution était suffisant pour l’exercice normal des activités de l’entreprise. Une note technique a été établie conjointement par l’IPCF et l’IEC en matière de plan financier. Celle-ci énonce (p. 17) que « La tâche de l’expert-comptable ou du comptable(-fiscaliste) agréé consiste à fournir les informations nécessaires concernant l’élaboration du plan financier. Il peut éventuellement établir un projet de plan financier, mais celui-ci mentionnera clairement les obligations et la non-responsabilité du professionnel. Le professionnel ne peut en aucun cas signer lui-même le plan financier. L’expert-comptable ou le comptable(-fiscaliste) agréé peut uniquement agir sur base de l’information qui lui a été communiquée par les fondateurs. Il n’est pas apte à examiner de manière approfondie les informations communiquées, et ne peut encourir aucune responsabilité pour les dégâts qui pourraient être causés par des informations fausses ou incomplètes. »

LLAA SSOOCCIIEETTEE PPRRIIVVEEEE AA RREESSPPOONNSSAABBIILLIITTEE LLIIMMIITTEEEE «« SSTTAARRTTEERR »» OOUU SSPPRRLL--SS La loi du 12 janvier 2010 a introduit dans le Code des Sociétés la notion de la SPRL « starter » qui, en théorie, peut se suffire d’un capital théorique de seulement 1 €. Par conséquent, aucune attestation n’est nécessaire pour justifier la libération du capital ; la procédure d’alarme prévue aux art. 332 et 333 C. Soc. ne s’applique pas davantage. Les conditions pour constituer une SPRL-S sont les suivantes : - La société peut uniquement être constituée par une ou plusieurs personnes physiques ; si les parts

sont transférées à une personne physique, suite à un décès ou entre vifs, les dispositions usuelles limitant la cession des parts s’appliquent au cessionnaire;

- les parts d'un associé ne peuvent pas être cédées ultérieurement à une personne morale, à peine de nullité de l'opération ; des personnes morales ne peuvent être admises que par la voie d'une augmentation de capital qui porte le capital social au moins à hauteur de 18.550 €

- De plus, aucun associé ne peut détenir des titres dans une autre société à responsabilité limitée qui représentent 5 % ou plus du total des droits de vote de cette autre société,

- La société doit ajouter à toute mention de sa forme juridique le mot « starter ». L'abréviation de la forme juridique est dite « SPRL-S ».

- La procédure d’alarme ne s‘applique pas aux SPRL « starter » ;

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- La société ne peut occuper l'équivalent de cinq travailleurs à temps plein ; sinon elle perd son statut de « starter » et devra régulariser sa situation c.à.d. se conformer aux dispositions applicables à une SPRL ordinaire;

- En tout état de cause, la SPRL-S devra devenir une SPRL ordinaire au plus tard dans les 5 ans de sa constitution ; elle perd alors son statut de « starter », ce qui sera aussi le cas si la société renonce à son statut, dès que la société occupe l'équivalent de cinq travailleurs temps plein, ou encore si elle est dissoute. Il sera dans ce cas nécessaire procéder à une augmentation de son capital, et libérer le minimum légal « classique ». Toutes les dispositions du Code des sociétés s'appliquent à la société privée à responsabilité limitée sont applicables, sauf dérogation expresse.

Mesures préventives : la création d’une société avec un capital demande de responsabiliser ses promoteurs et de protéger les intérêts des tiers. Il faut donc relativiser l’obligation de capital réduit comme avantage de la SPRL-S. Ainsi : - Tout fondateur d'une SPRL-S est réputé caution solidaire des obligations de toute autre SPRL-

qu'il constituerait par la suite comme fondateur. Ceci ne s’applique pas dans la mesure où la société perd ou renonce à son caractère «starter » ou dès la publication de sa dissolution.

- Tout fondateur d'une SPRL-S qui détient 5% ou plus du total des droits de vote dans une autre SPRL est tenu solidairement envers les intéressés.

- La SPRL-S doit établir un plan financier, établi en collaboration avec un professionnel de la comptabilité (v. A.R. du 27 mai 2010 et avis 2010/06 C.N.C. ) ;

- Après expiration d'un délai de trois ans après la constitution, les associés sont tenus solidairement envers les intéressés de la différence éventuelle entre le capital minimum requis par le paragraphe premier et le montant du capital souscrit. Aussi longtemps que la société a le statut de « starter », l’on ne peut pas procéder à une réduction de capital.

- L'assemblée générale doit mettre en réserve 25% au moins du bénéfice net. Cette obligation de prélèvement existe jusqu'à ce que le fonds de réserve ait atteint le montant de la différence 18.550 €, et le montant du capital souscrit.

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CHAPITRE 2 COMMUNICATION D’ACTIONNARIAT Dans le cadre de la lutte contre le blanchiment d’argent, la loi du 18 janvier 2010 limite encore davantage l’anonymat en ajoutant un nouvel article 515bis dans le Code des sociétés : « Toute personne physique ou morale qui acquiert des titres représentatifs ou non du capital, conférant le droit de vote dans les sociétés anonymes autres que celles visées aux articles 514 et 515 et qui ont émis des actions au porteur ou dématérialisées, doit déclarer à cette société, au plus tard le cinquième jour ouvrable suivant le jour de l'acquisition, le nombre de titres qu'elle possède lorsque les droits de vote afférents à ces titres atteignent une quotité de 25 % ou plus du total des droits de vote existant au moment de la réalisation de l'opération donnant lieu à déclaration. Elle doit faire la même déclaration, dans le même délai, en cas de cession de titres lorsque, à la suite de cette cession, les droits de vote tombent en deçà du seuil précité de 25 %. » Trois types de sanctions sont susceptibles de frapper un actionnaire qui a omis de procéder à la notification prévue à l’article 515bis CS :

1. Le président du tribunal de commerce peut suspendre pour une durée maximale d'un an l’exercice de tout ou d’une partie des droits liés aux titres pour lesquels la notification n’a pas été effectuée. Lorsque des droits de vote ont été exercés alors qu'ils ont été suspendus par le président du tribunal et que, sans ces droits de vote illégalement exercés, les quorums de présence ou de majorité requis pour les décisions de l'assemblée générale n'auraient pas été réunis, ces décisions sont nulles (art. 516 CS).

2. Le conseil d’administration peut reporter une assemblée générale qui a été convoquée jusqu’à trois semaines après la date programmée lorsqu’il reçoit, dans les vingt jours qui précèdent l’assemblée générale, une déclaration de participation ou s'il a connaissance qu'une telle déclaration n’a pas été effectuée alors qu’elle aurait dû l'être (art. 534 CS).

3. Les actionnaires ne peuvent pas prendre part au vote à l'assemblée générale pour un nombre de voix supérieur à celui pour lequel ils ont effectués la déclaration de participation vingt jours au moins avant la date de l'assemblée générale (art. 545 CS)(cette sanction est automatique contrairement aux deux premières).

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CHAPITRE 3 GOUVERNEMENT D’ENTREPRISE

1. Principes et définitions du « corporate governance » – ou « gouvernement d’entreprise » Le « corporate governance » provient d’un courant d’opinion qui s’est initialement développé dans les pays anglo-saxons (Etats-Unis d’Amérique et Royaume-Uni) en réaction à une série de scandales financiers: – aux Etats-Unis, l’affaire fut en particulier les ‘Savings & Loans’; – au Royaume-Uni, les affaires ‘Maxwell’, ‘Poly Peck’ et ‘BCCI’ ainsi que notamment des abus

de rémunération et leur reporting insuffisant (Comité Cadbury en 1992, suivi du Rapport Greenbury).

Le concept a été utilisé en Belgique lorsque les affaires qui ont ébranlé les secteurs bancaires et d’assurance ont démontré que les contrôles du droit belge n’étaient pas encore au point. La crise financière de 2008 a encore davantage montré la nécessité de ce gouvernement d’entreprise. C’est ainsi que deux lois, l’une datée du 17 décembre 2008, et l’autre datée du 6 avril 2010, ont précisé diverses obligations à charge des sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé. Seuls des principes généraux du « corporate governance » pourront être donnés dès lors que chaque société est un cas particulier et qu’elle méritera un gouvernement d’entreprise (ou gouvernance d’entreprise) sur mesure et adapté à ses besoins propres. L’A.R. du 6 juin 2010 désigne le “Code Daems” de 2009 comme Code de gouvernement d'entreprise à respecter par les sociétés cotées Il n’y a pas de définition stricte (et encore moins de définition légale) du « corporate governance » ou du « gouvernement d’entreprise ». Parmi les auteurs de référence, Jean Scalais (mars 1998) définit le corporate governance comme: « Les règles de contrôle de la gestion des entreprises destinées à garantir le meilleur équilibre entre les intérêts de ses différentes composantes: conseil d’administration, comités spécifiques actionnaires ou share-holders, stakeholders ». Une autre définition est donnée par la Fédération des entreprises suisses : « L’ensemble des principes qui, tout en maintenant la capacité de décision et l’efficacité, visent à instaurer au plus haut niveau de l’entreprise, dans l’intérêt des actionnaires, la transparence et un rapport équilibré entre les tâches de direction et de contrôle. » Il s’agit donc de règles particulièrement importantes pour les grandes sociétés. En effet, un contrôle du management est nécessaire, surtout lorsque les actionnaires n’exercent plus de réel contrôle sur ses dirigeants, ce qui peut être le cas dans de très grandes sociétés. 2. Commentaires Pour établir le « corporate governance », il importe qu’une tierce partie intervienne: outre l’actionnariat et l’organe de gestion, il est nécessaire de nommer des personnes habilitées à contrôler le management. Sans cela, les sociétés (surtout celles dont le contrôle est dispersé) seraient finalement dirigées par le conseil d’administration plutôt que par le management. 2.1. Introduction Sans contrôle, les risques de conflit entre actionnaires et dirigeants sont réels puisque les intérêts des uns et des autres peuvent diverger. Pour les premiers, l’augmentation de la richesse de la société prime; pour les seconds, l’ambition de « grandir », fût-ce au détriment de la rentabilité, peut prendre le pas.

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Le système de contrôle des dirigeants est mis en cause lorsqu’il apparaît que des défaillances ne sont pas sanctionnées. Les moyens de contrôle sont multiples. Du point de vue externe, on regardera comment évolue le cours de l’action de la société (si elle est cotée). Du point de vue interne, on peut rémunérer les administrateurs en fonction des résultats réalisés par l’entreprise. Un contrôle externe des actionnaires peut être exercé par la nomination des dirigeants et par les sanctions qui sont prévues à leur égard en cas de faute. Un contrôle interne devient possible dans la mesure où se produit une concentration de l’actionnariat. Des actionnaires de référence deviennent ainsi partenaires de la direction. Le rôle du contrôleur légal se borne à l’approbation des comptes annuels (respect de la loi et des statuts et image fidèle), il est donc beaucoup plus restreint que celui dont dispose le comité d’audit qui détectera les fraudes et irrégularités. 2.2. Recommandations La Bourse de Bruxelles et la Commission bancaire, financière et des assurances avaient déjà émis des recommandations en matière de « corporate governance », destinées aux sociétés belges cotées en bourse. Depuis l’A.R. du 6 juin 2010, le Code Daems, qui était déjà accepté dans la pratique, devient le document de référence. Ces recommandations n’ont pas pour objectif d’établir des règles contraignantes d’organisation pour ces sociétés. Le principe de base est « comply or explain » - « satisfaire les recommandations, ou à défaut expliquer pourquoi ». L’objectif des recommandations formulées est double: – d’une part, fournir aux sociétés cotées un cadre de référence en vue -d’alimenter leur réflexion

en matière de « corporate governance »; et – d’autre part, faciliter la lecture, par les investisseurs internationaux, de la situation des

entreprises belges cotées. La Commission Belge du Corporate Governance recommande donc d’établir une répartition précise des attributions de la direction de la société (c’est-à-dire celles du conseil d’administration) afin d’assurer un bon équilibre des pouvoirs. Les principes du « gouvernement d’entreprise » sont les suivants: – la présence d’administrateurs indépendants dans le conseil d’administration; – l’obligation pour le conseil d’administration d’agir en fonction de l’intérêt social; – la création de comités spécialisés auprès du conseil d’administration (direction, audit,

rémunération, nomination); – la publication d’informations permettant de rendre plus transparente la gestion de la société. Selon M. De Middeleer, les objectifs du « corporate governance » sont les suivants: « tous les acteurs et organes sociaux assument activement leurs responsabilités dans l’intérêt exclusif de la société concernée, dans un équilibre de pouvoir et de contre-pouvoir favorable sur le moyen et long terme ». Suivant la Commission bancaire, financière et des assurances, le « corporate governance » est un code de bonne conduite élaboré sur les principes suivants:

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– la transparence, dans les limites découlant des conditions de la concurrence, précise-t-on toutefois, à la base de la confiance entre la société et toutes les personnes concernées par son activité;

– l’intégrité de telle sorte que l’ensemble des rapports financiers et informations diffusées par la société soit un reflet honnête et complet de la situation de celle-ci;

– la responsabilité dans le reporting (ou « reportage ») et la conduite des affaires. La Fédération des Entreprises Belges (F.E.B.) avait publié en septembre 2001 une brochure contenant à ce sujet les recommandations suivantes: – adopter des normes de bonne gestion qui privilégient les valeurs de -transparence, de

performance et d’objectivité; – souligner la nécessité d’un fonctionnement effectif des trois organes essentiels de toute société:

l’assemblée générale, le conseil d’administration et le comité de direction (ou administrateur délégué);

– rémunérer chaque fonction (président du conseil d’administration, administrateur-délégué, directeur général) d’une manière spécifique;

– veiller à ce que chaque fonction soit occupée par une personne différente; – en fonction de la taille de l’entreprise, engager un ou plusieurs administrateurs indépendants, qui

peuvent avoir la qualité d’expert dans un premier temps. En résumé, on retrouve invariablement derrière le concept du « corporate governance » des notions telles que: équilibre des pouvoirs, mécanismes -définis de reporting et de contrôle, transparence, etc. – soit tout ce que l’on pourrait qualifier de principes de bonne gestion. A l’opposé, nous pourrions donner des exemples de dysfonctionnements dans les circuits décisionnels en les regroupant autour de deux grands thèmes : – l’absence de transparence ou de procédures dans le fonctionnement des organes (assemblée

générale, organes de contrôle, conseil d’administration, comités spécifiques, etc.): . composition de l’assemblée générale et du conseil d’administration; . nomination, évaluation ou rémunération éventuelle des administrateurs; . définition de la fonction, mode de nomination, d’évaluation ou de rémunération des

dirigeants; . confusion des rôles entre la politique générale (conseil d’administration) et la gestion

journalière (direction); . conseil d’administration pléthorique, avec constitution d’organes intermédiaires peu

transparents ou redondants (bureau, comité exécutif, comité de gestion, comité permanent, comité restreint);

. administrateurs plutôt passifs, peu responsabilisés, peu disponibles, peu compétents, ‘obligés’ politiquement ou autrement, piégés dans des conflits d’intérêts (mandats croisés, etc.);

. clientélisme sous toutes ses formes (politique ou autre), dans le jeu des nominations, promotions; régimes de faveurs, etc.;

. confusion au niveau des administrateurs exécutifs et non exécutifs; . inexistence de comités spécifiques; – la faiblesse de la qualité des informations sur l’entreprise en général et du reporting en

particulier (tableaux de bord de gestion, rapports annuels, politique générale, etc.): . reporting insuffisant ou sélectif de la part d’une direction trop puissante face à un conseil

d’administration trop peu impliqué ou responsabilisé; . dispositifs encore faibles de contrôle de gestion; . comités spécifiques inactifs ; . tableaux de bord de gestion incomplets ou non diffusés;

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. rapports et comptes annuels peu compréhensibles ou non publiés; . stratégie, budgets non communiqués. Le Code Daems de « corporate governance »(2009) définit neuf grands principes :

1. La société adopte une structure claire de gouvernance d’entreprise; 2. La société se dote d’un conseil d’administration effectif et efficace qui prend des décisions dans l’intérêt social; 3. Tous les administrateurs font preuve d’intégrité et d’engagement; 4. La société instaure une procédure rigoureuse et transparente pour la nomination et l’évaluation du CA et de ses membres; 5. Le conseil d’administration constitue des comités spécialisés; 6. La société définit une structure claire de management exécutif; 7. La société rémunère les administrateurs et les managers exécutifs de manière équitable et responsable; 8. La société engage avec les actionnaires existants et potentiels un dialogue basé sur la compréhension mutuelle des objectifs et des attentes; 9. La société assure une publication adéquate de sa gouvernance d’entreprise.

2.3. Mise en place du « corporate governance » au sein d’une société Une déclaration de gouvernement d’entreprise est insérée dans le rapport de gestion et renseigne essentiellement :

- Le code de gouvernement d’entreprise appliqué ; - La justification des éventuelles dérogations à certaines parties de ce code (« comply or

explain »). Le gouvernement d’entreprise concerne les organes suivants de la société: – le conseil d’administration; – les comités spécifiques du conseil d’administration; – les actionnaires (« shareholders »); – les tiers (« stakeholders »). 2.3.1. Le conseil d’administration Le conseil d’administration, nommé par l’assemblée générale, exerce la haute direction au sein de la société. Le conseil d’administration définit les objectifs stratégiques, les moyens généraux pour y parvenir et les personnes à qui la gestion des affaires doit être confiée. La Commission Belge du Corporate Governance recommande d’établir une répartition précise des attributions de la direction de la société afin d’assurer un bon équilibre des pouvoirs. Au cas où le président du conseil d’administration serait également l’ad-ministrateur-délégué, il est essentiel que des personnalités fortes et indépendantes siègent au sein du conseil. Voici les recommandations de « corporate governance » en ce qui concerne le fonctionnement du conseil d’administration. Contrôle complet et effectif Le conseil d’administration définit la stratégie (politique générale) et le contrôle de la société: – il définit les missions et les valeurs de l’entreprise; – il établit et évalue régulièrement la stratégie (alliances, nouveaux produits ou services, etc.);

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– il désigne la direction, à savoir le directeur général (niveau [n]) et les directeurs départementaux (niveau [n-1]);

– il approuve les moyens à mettre en œuvre (budget annuel, cadre d’effectif, plan d’investissement, etc.);

– il contrôle la réalisation du budget et surveille les outils de gestion (tableaux de bords, ajustements budgétaires, procédures de contrôle interne ou externe, etc.);

– il contrôle, soutient et évalue la direction; – il fait rapport à l’assemblée générale. Bon équilibre des pouvoirs Tous les administrateurs sont tenus d’exercer leur mandat d’administrateur de façon indépendante et dans l’intérêt de la société. Toute opération ou relation entre la société et un actionnaire dominant devrait avoir lieu sur la base dudit ‘at arms length’ et sur des fondements commerciaux habituels. Ceci entraîne les constatations suivantes: – le conseil d’administration agit ‘en collège’ sans prépondérance d’un type d’administrateur sur

l’autre; la responsabilité est collégiale et solidaire; – il y a équilibre entre le nombre d’administrateurs exécutifs et non exé-cutifs; – il y a dissociation de fonction entre le président du conseil d’administration et l’administrateur-

délégué ou directeur général; – des tâches particulières sont confiées à des administrateurs non exécutifs dans les comités

spéciaux (direction, audit, nomination, rémunérations); – le nombre d’administrateurs ne devrait pas dépasser le chiffre de 12. Procédures clairement définies Elles doivent être établies en ce qui concerne: – le reporting interne: des comités spécifiques au conseil d’administration, de la direction au

conseil d’administration, du conseil d’administration à l’assemblée générale; – le reporting externe (relations avec le personnel, les syndicats, les pouvoirs publics, etc.); – toute autre communication écrite: publications, communication de rapports établis par le

secrétaire; – toute communication verbale (un porte-parole doit être désigné); – le recours à des experts extérieurs (conseils, audits, consultants, etc.). Il est recommandé que l’information soit lisible et compréhensible, mettant les chiffres en perspective, et qu’elle donne une image fidèle des comptes annuels et de la situation financière de la société. Il faut en outre que cette information soit susceptible de permettre aux tiers de se faire un jugement adapté sur ses objectifs et sur ses orientations -stratégiques. Le conseil d’administration devrait comprendre une majorité d’administrateurs non exécutifs, ayant une autorité telle que leurs opinions aient un poids significatif dans les décisions prises par le conseil. On définit la notion d’administrateurs non exécutifs, exécutifs et indépendants. Les administrateurs exécutifs Sont ceux qui sont liés aux actionnaires dominants, c’est-à-dire les actionnaires détenant une influence décisive ou notable sur la société.

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Les administrateurs non exécutifs Les administrateurs non exécutifs doivent pouvoir exprimer un jugement indépendant sur la société ; ils sont définis dans une recommandation CE du 15 février 2005 :

o «administrateur exécutif»: tout membre de l'organe d'administration d'une société chargé de la gestion quotidienne de cette société;

o «administrateur non exécutif»: tout membre de l'organe d'administration d'une société autre qu'un administrateur exécutif.

o L’art. 526quater C.S. stipule quant à lui que « Est notamment présumé membre exécutif du conseil d’administration tout administrateur qui est membre du comité de direction visé aux articles 524bis et 524ter et tout administrateur qui s’est vu déléguer la gestion journalière au sens de l’article 525 C.S. »

Les administrateurs non exécutifs doivent apporter un jugement indépendant sur les questions relatives à la stratégie, aux résultats et aux moyens mis en œuvre, en ce compris les nominations-clés et les codes de conduite. La rémunération des administrateurs non exécutifs doit correspondre au temps qu’ils consacrent à la société. Elle ne devrait pas être liée au résultat, mais pourrait être liée à l’évolution de la valeur de la société. A cet effet, la rémunération pourrait être versée sous forme d’actions de l’entreprise. Il est toutefois recommandé que la rémunération des administrateurs non exécutifs ne prenne pas la forme d’options sur actions de la société, ni d’une participation dans le plan de pension de la société. Les recommandations en ce qui concerne les administrateurs non exécutifs sont: – privilégier leurs jugements indépendants, sens collégial, et souci de l’intérêt général; – ils sont désignés suivant une procédure définie, par exemple sur proposition d’un comité de

nomination; – la durée de leur mandat doit être limitée (par exemple 6 ans conformément au Code des

sociétés) et ne pas être automatiquement renouvelable; – il faut susciter leur participation active aux différents comités spéciaux; – une procédure d’évaluation de l’activité de l’administrateur doit être établie, et sa performance

doit être liée à des critères de rémunération, établis par un comité de rémunérations, en tenant compte du temps presté, et en compensation par rapport à l’activité d’origine;

– il est recommandé de mentionner dans le rapport annuel, de manière distincte, le montant global de la rémunération des administrateurs non exécutifs et d’en scinder la partie fixe et la partie variable. En outre, en cas d’une rémunération variable, les principes servant de base au calcul de celle-ci devraient également être mentionnés.

Les administrateurs non exécutifs devraient être sélectionnés en définissant une procédure formelle. Cette dernière relève de la compétence de l’ensemble du conseil d’administration. Parmi les administrateurs non exécutifs, certains administrateurs devraient être indépendants de la direction et des actionnaires dominants et n’avoir aucune relation d’affaires ou autre qui pourrait affecter l’indépendance de leur jugement en dehors de leur rémunération et de leur participation dans le capital de la société. Les administrateurs indépendants Ce sont des personnes physiques qui sont considérées comme administrateurs non exécutifs et non liée aux diverses composantes de l’assemblée générale.

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Plus généralement, ils ne peuvent jamais avoir faire partie de la direction ou l’avoir quittée depuis trois ans au moins et n’entretenir aucune relation -d’affaires avec la société ou des relations d’affaires relativement peu importantes. Les administrateurs indépendants sont en principe nommés par le comité de gouvernement d’entreprise (parfois aussi appelé pour ces raisons « comité de nomination »). Ils doivent satisfaire aux critères suivants: - Etre reconnus pour leurs compétences spécifiques, leur expérience, discernement et leur profil personnel; - Etre indépendants de l'actionnariat et des groupes composant l'assemblée générale; - Etre indépendants à l'égard de la direction ; - Ne pas avoir de liens de parenté avec un administrateur exécutif pouvant influencer son jugement indépendant; - Ne pas faire partie de la direction, ni du conseil d'administration d'un des actionnaires dominants; ils ne sont pas non davantage élus sur proposition des actionnaires dominants et n’ont aucune relation d'affaires, financière ou autre avec eux qui soit de nature à influencer leur pouvoir de jugement; - Ne pas fournir ni des biens ni des services qui soient de nature à influencer son jugement; ceci vaut également pour les membres de la société dont le conseiller ou le consultant ferait partie; - N’entretenir aucune relation avec la société - Etre libres de toute relation d’affaire, pas de lien de parenté (art. 526ter C.Soc.) Le nombre d’administrateurs indépendants devrait être suffisant pour qu’ils puissent disposer d’une influence significative sur le processus de décision. 2.3.2. Comités spécifiques A. Le comité de direction – organisation d’une délégation légale de pouvoirs (art. 524bis C.S.) Les sociétés anonymes de grande taille sont gérées par un conseil d’administration tandis que la gestion journalière peut être exercée par une ou plusieurs personnes déléguées à cette fin. En pratique, le conseil d’administration plénier ne se réunit que de manière plus espacée et assure une sorte de contrôle de la gestion. Celui-ci se réserve désormais la définition de la stratégie de la société et les décisions très importantes ou qui sont spécialement de son ressort, tout en assurant également la surveillance de la gestion de la société. Les prescriptions légales semblent donc dépassées par la nécessité d’un fonctionnement efficace de la SA. Le conseil d'administration d'une SA peut déléguer des compétences considérables au comité de direction. Celui-ci peut réunir aussi bien des personnes physiques que des personnes morales (dans ce cas ce dernier doit nommer parmi ses administrateurs, gérants, associés (actifs) ou salariés un représentant permanent. Dans les sociétés de petite taille, un administrateur exerce la gestion journalière; celle-ci est décrite à l’art. 525 C.S. La Cour de cassation a défini la gestion journalière comme ‘Les actes ou opérations de gestion journalière des affaires, qui sont commandés par les besoins de la vie quotidienne de la société et ceux qui tant en raison de leur peu d’importance que la nécessité d’une prompte solution ne justifient pas l’intervention du conseil d’administration lui-même.’ (Cass., 17 septembre 1968, Pas., 1969, I, 61).

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Dans la pratique, cette définition est trop restrictive et encore moins utilisable pour ces sociétés de plus grande taille où l’on cherche une gestion souple et efficace. Ce sont alors un ou plusieurs administrateurs, agissant soit seuls, soit conjointement, qui interviendront dans le processus de gestion journalière. Cette situation de fait présente plusieurs inconvénients: – la personne chargée de la gestion journalière ne peut que représenter la société tandis que le fait

de décider relève du conseil d’administration; dans la pratique, les comités en fonctionnement sont investis de manière contractuelle ou statutaire, de pouvoirs englobant une partie de la gestion de la société;

– le pouvoir de représentation doit être général pour pouvoir être opposé aux tiers (cf. art. 9, § 3 de la 1ère directive 68/151/CEE du Conseil en matière de droit des sociétés); rappelons enfin que d’éventuelles restrictions à leurs pouvoirs ne sont pas opposables aux tiers, même si elles ont été publiées.

Loi du 2 août 2002 Il est dorénavant facultatif d’instituer un comité de direction par un règlement statutaire – ou non – autorisant le conseil d’administration à lui -déléguer une part de ses pouvoirs; les comités déjà existants devront être confirmés par une modification statutaire en ce sens. Cette disposition est logiquement réservée aux SA. La société règle les conditions de désignation et de révocation des membres du comité de direction, la durée de leur mandat, le niveau de leur rémunération et le mode de fonctionnement du comité. Attention: la délégation de pouvoirs ne peut porter ni sur la détermination de la politique générale, ni sur les actes qui seraient réservés au conseil -d’administration par d’autres dispositions du Code des sociétés. De plus, le conseil d’administration est chargé du contrôle du comité et ce dernier lui dresse un rapport. Du point de vue de la responsabilité, chaque organe – conseil d’administration ou comité de direction – est responsable de ses actes. B. Le comité d’audit Suivant les recommandations de « corporate governance », il est recommandé d’instaurer un comité d’audit. La loi du 17 décembre 2008 impose l’existence d’un comité d’audit dans les sociétés cotées et dans les entreprises financières, conformément à la Directive 2006/43/CE du Parlement européen et du conseil du 17 mai 2006. Dans les sociétés cotées et dans établissements de crédit répondant à au moins deux des trois critères suivants (établis sur base consolidée): - nombre moyen de salariés inférieur à 250 personnes sur l’ensemble de l’exercice concerné, - total du bilan inférieur ou égal à 43.000.000 €, - chiffre d’affaires net annuel inférieur ou égal à 50.000.000 €. Les comités d’audit se sont développés aux Etats-Unis à partir de 1940 et surtout au cours des années 1970, puis au Canada et en Angleterre. Le comité d’audit se caractérise par une totale indépendance par rapport à l’organe exécutif. Le comité d’audit est chargé d’examiner et d’évaluer les résultats et l’étendue de l’audit et des autres prestations assurées par les commissaires; il est enfin chargé de revoir les principes comptables retenus par la société, et les systèmes de contrôle interne.

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Ce comité est notamment chargé des missions suivantes : a) suivi du processus d’élaboration de l’information financière; b) suivi de l’efficacité des systèmes de contrôle interne et de gestion des risques; c) suivi de l’audit interne et de ses activités; d) suivi du contrôle légal des comptes annuels et des comptes consolidés, en ce compris le suivi des questions et recommandations formulées par le commissaire; e) examen et suivi de l’indépendance du commissaire.

Le comité d’audit fait régulièrement rapport à l’organe d’administration sur l’exercice de ses missions. Les sociétés cotées sont obligées de constituer un comité d’audit, Le comité d’audit est uniquement composé de membres non exécutifs du conseil d’administration.

f) au moins un des membres du comité d’audit est indépendant et doit être compétent en matière de comptabilité et d’audit.

Règle du « one to one » : le commissaire ne peut prester des services autres que les missions qui lui sont confiées par la loi, dans la mesure où le total des honoraires relatifs à ces prestations serait supérieur à la rémunération perçue pour l’exercice du mandat de commissaire, sauf délibération favorable du comité d’audit. Règle du mandat de 3 ans : Cass., 5 juin 2008 : concerne 3 exercices comptables et non 3 années civiles. C. Le comité de nomination (ou de gouvernement d’entreprise) Le Comité de gouvernement d’entreprise (de nomination) est un Comité créé par le Conseil d’administration, en son sein, en vue d’accomplir notamment les tâches suivantes :

- établir des procédures de nomination des administrateurs; - rendre un avis au Conseil d’administration sur l’indépendance des candidats en qualité

d’administrateur indépendant et sur les membres du Comité de Direction ; - tenir le Conseil d’administration informé de toutes les décisions qu’il prend.

Il s’agit d’un autre comité spécifique émanant directement du conseil -d’administration. Il est composé majoritairement d’administrateurs non exécutifs et si possible un nombre significatif d’administrateurs indépendants. Il doit être présidé par le président du conseil ou par un administrateur non exécutif. Le comité de nomination fixe les principes régissant la sélection des candidats à élire ou à réélire au conseil d’administration et prépare la sélection selon ces critères. Le comité de gouvernement d’entreprise est chargé d’évaluer l’efficacité des pratiques adoptées dans ce domaine, et de recommander des candidats en vue de l’élection de nouveaux administrateurs. Chaque année, le comité de gouvernement d’entreprise présente des recommandations au conseil d’administration en ce qui touche le déroulement des réunions du conseil, notamment leur date et leur périodicité, les sujets à l’ordre du jour et les renseignements à fournir aux administrateurs. La Commission belge du « corporate governance » définit son rôle comme suit: – il est chargé de suivre l’évolution de l’organigramme en général; – il veille à l’établissement de descriptifs et de profils des principales -fonctions dirigeantes de

niveaux [n] et [n-1];

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– il établit des procédures relatives au recrutement, à la désignation, à -l’évaluation des principales fonctions dirigeantes de niveaux [n] et [n-1];

– il établit les procédures relatives aux critères de désignation, d’évaluation et de renouvellement des mandats d’administrateurs;

– il fait rapport régulièrement au conseil d’administration. Cette responsabilité d’élaboration et de suivi des organigrammes, des descriptifs de fonction, d’établissement de procédures concernant les nominations est une des fonctions essentielles d’un conseil d’administration. La délégation de ce travail à un comité de nomination garantit cependant plus d’objectivité et de rationalité, et évite notamment les dérives de cooptation, de népotisme ou de clientélisme. Elle garantit également la pérennité de la société sans tomber dans l’immuabilité des mandats d’administrateurs ou des principaux dirigeants. D. Le comité de rémunération Dans les sociétés dont les actions sont admises à la négociation sur un marché réglementé, ce comité est devenu obligatoire de par la loi du 6 avril 2010. Ce comité doit être établi au sein du conseil d’administration et doit être exclusivement composé d’administrateurs non exécutifs. Il est composé d’une majorité d’administrateurs indépendants au sens de l’article 526ter C.Soc. et est compétent en matière de politique de rémunération. Sans préjudice des missions légales du conseil d’administration, le comité de rémunération est au moins chargé des missions suivantes: a) Le comité de rémunération formule des propositions au conseil d’administration sur la politique de rémunération des administrateurs, et le cas échéant des membres du comité de direction et des délégués à la gestion journalière et, s’il y a lieu, sur les propositions qui en découlent et qui doivent être soumises par le conseil d’administration aux actionnaires; b) Le comité de rémunération formule des propositions au conseil d’administration sur la rémunération individuelle des administrateurs, et le cas échéant des membres du comité de direction et des délégués à la gestion journalière, y compris la rémunération variable et les formules d’intéressement à long terme, liées ou non à des actions, octroyées sous forme d’options sur actions ou autres instruments financiers, et les indemnités de départ anticipé, et, s’il y a lieu, sur les propositions qui en découlent et qui doivent être soumises par le conseil d’administration aux actionnaires; c) Le comité de rémunération prépare le rapport de rémunération qui est joint par le conseil d’administration à la déclaration visée à l’article 96, § 2 C.Soc. Le rapport de rémunération doit dorénavant être approuvé par l’assemblée générale des actionnaires (art. 554 C.Soc.). La rémunération doit être en rapport évident avec le succès de l’entreprise sur la durée et la contribution personnelle; il faut éviter qu’elle ne crée de fausses incitations. Le comité de rémunération est plus spécifiquement chargé d’établir les -critères de rémunérations: – de l’équipe dirigeante (niveaux [n] et [n-1]); – des administrateurs; – des experts extérieurs chargés de mission ponctuelle ou permanente par le conseil

d’administration. Outre la déclaration de gouvernement d’entreprise et la publication d’un rapport sur les rémunérations, la loi limite les « parachutes dorés » (art. 554 C.Soc.) :

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- L'assemblée générale de la société se prononce également sur le rapport de rémunération par vote séparé (un point distinct à l’ordre du jour est nécessaire);

- Si une indemnité de départ dépasse 12 mois – ou 18 mois sur avis motivé du comité de rémunération – l’approbation préalable de la première assemblée générale « qui suit » est nécessaire ;

- Communication au conseil d’entreprise 30 jours au moins avant la publication de la convocation pour avis (publication).

Sanction en cas de non respect de ce qui précède: la disposition deviendrait nulle de plein droit. Le Code Daems demandait déjà une mention dans le rapport de gestion lorsque ces 12 ou 18 mois étaient dépassés, ceci s’applique obligatoirement depuis l’A.R. du 6 juin 2010. Si la législation sociale impose une indemnité plus élevée, les dispositions du Code des sociétés limitant l’indemnité à 12 ou 18 mois ne sont plus applicables. En outre, en cas d’une rémunération variable, les principes servant de base au calcul de celle-ci devraient également être mentionnés. Un nouvel art. 520bis C.Soc. prévoit également les critères de l’attribution d’une rémunération variable; le paiement de celle-ci n’est autorisé que si les objectifs ont été atteints. Un étalement dans le temps est obligatoire quant aux critères de performance permettant de déterminer la rémunération variable attribuée au management exécutif – art. 520ter C. Soc.): si la rémunération variable dépasse le quart de la rémunération annuelle

- max. 50% peuvent être calculés sur base de critères de l’exercice comptable en cours ; - min. 25% peuvent être calculés sur base de critères mesurables sur 2 ans au moins ; - min. 25% peuvent être calculés sur base de critères mesurables sur 3 ans au moins, sauf dispositions statutaires contraires ou approbation expresse par l'assemblée générale

2.3.3. Les actionnaires (« shareholders ») Pourvoyeurs de capitaux, c’est aux actionnaires que revient le dernier mot. Leurs pouvoirs s’exercent en pratique de la manière suivante: – nomination ou révocation par l’assemblée générale des membres du -conseil d’administration;

décision de (non) renouvellement de ceux-ci; – nomination et révocation du ou des commissaires; – affectation du résultat (distribution de dividendes, tantièmes ou jetons de présence; mise en

réserves); – droit de poser des questions à l’assemblée générale; – plus généralement, approbation des comptes annuels et décharge à -l’organe de gestion; – modifications des statuts, i.e. augmentation ou diminution de capital et décisions entraînant une

fusion, scission, transformation ou la liquidation de la société. 2.3.4. Les tiers (« stakeholders ») On qualifie de « stakeholders » les personnes ou les groupes concernés par l’activité de l’entreprise. Il s’agit principalement des membres du personnel de la société, des syndicats et des pouvoirs publics. Le pouvoir des travailleurs s’exerce notamment au sein du conseil d’entreprise. L’influence des pouvoirs publics résulte d’aides publiques et de la définition de taxes diverses.

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2.4. Conclusion Il en résulte que le concept et la dénomination de « corporate governance » réhabilitent les principes de bonne gestion, à savoir: – la délimitation des responsabilités, entre conseil d’administration et direction, d’une part, et au

sein de la direction, d’autre part; – l’exercice collégial des responsabilités au sein d’un conseil d’administration; – la délégation de certaines tâches à des comités spécifiques (direction, audit, nomination,

rémunération) qui ne donnent que des avis consultatifs et font rapport au conseil d’administration;

– l’équilibre et la complémentarité des forces et compétences au sein d’un conseil d’administration entre administrateurs exécutifs, non exécutifs et indépendants;

– le nombre des administrateurs indépendants devrait être prépondérant; – les exigences de transparence et de qualité dans le reporting et la communication tant interne

qu’externe; – une meilleure définition de l’organigramme et des descriptifs de fonction (et communication de

celui-ci); – une définition précise des procédures de recrutement, de nomination, de promotion, de

rémunération des principales fonctions dirigeantes. Le « corporate governance » constitue donc non seulement un code de bonne conduite, mais aussi – et surtout – un état d’esprit poussant à plus d’indépendance de pensée, de compétence, d’éthique et d’intégrité.

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CHAPITRE 4 LES ORGANES SOCIAUX En vertu de l’art. 61 du Code des sociétés (CS), « Les sociétés agissent par leurs organes dont les pouvoirs sont déterminés par le présent code, l'objet social et les clauses statutaires. Les membres de ces organes ne contractent aucune responsabilité personnelle relative aux engagements de la société ». Les membres de ces organes ne contractent aucune obligation personnelle relativement aux engagements de la société. Cet article confirme la « théorie de l'organe ». Une société est dotée d'une personnalité morale purement juridique et elle ne peut poser elle-même aucun acte matériel ou juridique. C'est la raison pour laquelle elle est tributaire de ses organes pour poser des actes. La société est ainsi réputée avoir agi elle-même si un de ses organes pose un acte dans les limites de son pouvoir de représentation2. La représentation externe concerne quant à elle le pouvoir d'engager la société à l'égard des tiers sur la base de décisions internes3.

La sprl et la société anonyme sont liées par les actes accomplis par le conseil d'administration et par les administrateurs, même si ces actes excèdent l'objet social. Le système de la représentation organique, qui avait été imposé par la première directive sur les sociétés et transposé en droit belge par la loi du 6 mars 1973 modifiant la législation relative aux sociétés commerciales, instaurait une distinction légale entre pouvoir de représentation et pouvoir de gestion. « Eu égard à la distinction légale entre administration interne et représentation externe, un acte juridique posé par un organe de représentation dans les limites de son pouvoir de représentation est directement attribué à la société, peu importe l'existence d'une décision valable de l'organe de gestion interne compétent »4.

La seule possibilité dont la société dispose pour contester l'acte consiste à prouver que le tiers savait ou aurait dû savoir que l'acte de l'administration dépassait l'objet 5. En outre, la doctrine considère qu'il doit y avoir « mauvaise foi »6. La mauvaise foi ne peut pas être déduite de la simple publication des statuts7. Cette restriction des pouvoirs du conseil d'administration n'est pas opposable aux tiers, même si elle est publiée (système de la « prokura »)8. La répartition des compétences entre les divers organes de la société est donc une matière purement interne. L’assemblée générale est l’organe souverain des sociétés dotées de la personnalité juridique. Chaque année, elle est amenée à prendre des décisions importantes : approbation des comptes annuels (et affectation du résultat), nomination/révocation des mandataires, décharge et, parfois, modification des statuts ou même de l’objet social. Note : l’assemblée ordinaire ne peut rien faire en dehors de l'objet social. En effet, si l’on a créé une société, c'est dans un but bien déterminé, et ce dernier constitue un des points sur lesquels le contrat de société s'est noué.

2 B. Tilleman, Droit et entreprise, L'administrateur de sociétés: statut, fonctionnement interne et représentation, La Charte, 2005, p. 637. 3 B. Tilleman, o.c., p. 636, no 1023. 4 B. Tilleman, o.c., p. 637, no 1025 5 Cf articles 258 et 526 du Code des sociétés 6 B.Tilleman, o.c., p. 652 et suiv. 7 B. Tilleman, o.c., p. 702. 8 Art. 522, § 1er, alinéa 2, Code des sociétés. Dans le même sens: Cass. 12 novembre 1987, Arr. Cass., 1987-88, 324, Pas. 1988, I, 304, TRV 1998, 107, note L. Liefsoens, et RCJB 1989, 385, note A. Benoit-Moury

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Dans certains cas, il s’agit de décisions extrêmes : changement de la forme sociétaire, fusion/scission, dissolution, etc. L'organe de gestion doit quant à lui convoquer chaque année une assemblée générale ordinaire. Plus généralement, la loi prévoit qu’il peut accomplir tous les actes nécessaires ou utiles à l'accomplissement de l'objet social de la société, sauf ceux qui sont réservés à l'assemblée générale. Rien n’empêche les statuts de restreindre davantage les pouvoirs du conseil d’administration ; ces restrictions ne sont cependant pas opposables aux tiers. Dans les sociétés de grande dimension, le rôle de l’assemblée générale semble limité à l’approbation des projets élaborés par le conseil d’administration. C’est la raison pour laquelle un « comité de direction » est amené à intervenir. L’on pensera également à la mise en jeu de la responsabilité des dirigeants de sociétés commerciales. Dans des sociétés de moindre dimension, les associés non gérants pourront exercer une influence significative dans l’exercice du droit de vote et l’assemblée deviendra le lieu de confrontation entre l’organe de gestion et l’assemblée générale. Enfin, le contrôle de la société est confié soit aux commissaires, soit, lorsque aucun commissaire n’a été désigné, chaque associé agissant individuellement peut exercer les prérogatives dévolues par la loi au commissaire. A l’heure actuelle, on pourrait comparer l’assemblée générale au parlement tandis que l’organe de gestion correspondrait au gouvernement. Le contrôle relève quant à lui de la compétence de la Cour des comptes. Les sociétés peuvent donc être représentées par trois types d’organes :

- organes de gestion : conseil d'administration (S.A.) ou gérant (S.P.R.L.), délégué à la gestion journalière (S.A. : administrateur-délégué) ;

- organes de contrôle: commissaire ou collège des commissaires ; - organes de délibération des associés (assemblées générales), et, lorsque la société a émis

des obligations, un organe de délibération des obligataires (assemblée générale des obligataires).

Les sociétés obéissent à des règles de fonctionnement. Ces règles s'intègrent dans une structure qui peut être relativement simple comme dans des sociétés de personnes (supra) mais qui peut aussi atteindre un certain degré de complexité et de perfectionnement comme dans les sociétés anonymes et les sociétés mixtes (cf. coopératives). La loi définit les attributions des organes sociaux les uns par rapport aux autres et les statuts ne pourraient modifier cette répartition. Il résulte de ce principe que chaque organe doit demeurer dans la sphère de ses attributions légales, ne peut empiéter sur les compétences des autres organes. La loi définit les pouvoirs des organes sociaux, au double point de vue (qui ne doit jamais être confondu) de la gestion (relations internes) et de la représentation (relations externes). Dans les S.A. et les S.P.R.L., les pouvoirs légalement définis ne peuvent ni être étendus ni être restreints vis-à-vis des tiers, par les statuts.

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1. Types d'assemblées générales Une distinction pourrait être opérée entre trois types d'assemblées générales, à savoir l'assemblée générale ordinaire, l'assemblée générale extraordinaire et l'assemblée générale spéciale. L'assemblée générale ordinaire doit se tenir au moins une fois par an. Sa compétence principale est l'approbation des comptes annuels. Les dispositions relatives au rapport de gestion et à l'assemblée annuelle ne s'appliquent pas nécessairement à la S.C.R.I. Rien n'empêche toutefois d'organiser une assemblée annuelle dans cette forme de société. En effet, lorsque les actionnaires veulent accorder la décharge aux administrateurs ou qu'ils souhaitent approuver les comptes annuels, ils ne peuvent le faire qu'en assemblée générale. L'assemblée annuelle se tient aux date et lieu tels que fixés dans les statuts. Assemblée générale extraordinaire 1. Une assemblée générale non tenue à la date prévue par les statuts devient d’office une

assemblée générale extraordinaire non pas en raison de son ordre du jour, lequel reste identique, mais compte tenu du fait qu’elle ne s’est pas réunie conformément aux statuts ; elle n’a d’extraordinaire que le nom.

2. Une assemblée générale qui se tient à la demande d’actionnaires/associés possédant au moins 1/5 de l’ensemble des parts sociales ou à la demande du commissaire, est d’office une assemblée générale extraordinaire.

3. Une assemblée où un vote à une majorité qualifiée doit intervenir se tient extraordinairement. L'assemblée générale extraordinaire est convoquée pour se prononcer sur une proposition de modification des statuts. Cette assemblée générale extraordinaire se réunit selon les règles fixées par les statuts. Des conditions moins sévères que les conditions légales ne seraient toutefois pas valables. L'assemblée générale spéciale ne peut être classée dans aucune des deux autres catégories. Cette assemblée est convoquée pour une raison spéciale ou elle concerne une catégorie particulière des titres émis par la société. Le code des sociétés fait également référence à l’éventualité d’une offre publique d’acquisition (art. 556 CS). De même, une assemblée spéciale sera convoquée par le commissaire (lorsque l'actif net a diminué au point de ne plus représenter la moitié ou un quart du capital souscrit) ou à la demande des actionnaires (ou associés) qui représentent au moins un cinquième du capital. Tous les actionnaires/associés ont le droit d'assister aux assemblées générales en personne ou par mandataire. Le vote par correspondance est permis lorsque les statuts l'autorisent .Lorsque la société ne compte qu'un seul associé (S.P.R.L. u), ce dernier exerce les pouvoirs dévolus à l'assemblée générale. Il ne peut les déléguer. Seule l’assemblée générale peut conférer à l’égard de tiers des droits affectant le patrimoine de la société ou donnant naissance à une dette ou à un engagement à sa charge, lorsque l’exercice de ces droits dépend d’une offre publique d’acquisition.

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2. Compétences de l'assemblée générale Depuis la loi du 6 mars 1973, l'assemblée générale n'est plus compétente que pour les tâches que lui ont attribuées de manière résiduelle. Citons par exemple l’art. 257 CS qui stipule que : « Chaque gérant peut accomplir tous les actes nécessaires ou utiles à l'accomplissement de l'objet social de la société, sauf ceux que le présent code réserve à l'assemblée générale. Les statuts peuvent apporter des restrictions aux pouvoirs des gérants. Ces restrictions ne sont pas opposables aux tiers, même si elles sont publiées. » Lorsque qu’une S.P.R.L. ne compte qu'un seul associé, il exerce les pouvoirs dévolus à l'assemblée générale. Il ne peut les déléguer. Il est possible d'introduire dans les statuts des clauses qui limiteraient les compétences de l’organe de gestion au profit de l'assemblée générale, mais ces clauses statutaires ont uniquement un effet interne et elles ne sont pas opposables aux tiers. L’assemblée pourra exercer l’action sociale contre les gérants qui n’ont pas respecté les limitations statutaires de leurs pouvoirs. L'assemblée générale peut donc exercer toutes les compétences qui lui sont attribuées par le Code des sociétés ou par les statuts.

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2.1. Compétences prévues dans la loi L'assemblée générale ne peut s'écarter de ces dispositions légales, ni au profit d'un autre organe de la société ni au profit de tiers. La loi indique quelles sont les compétences minimales de l'assemblée générale. Ces compétences réservées par le code des sociétés à l'assemblée générale sont les suivantes : 1) La nomination et la révocation des administrateurs et des gérants, ainsi que du commissaire.

L'assemblée générale peut révoquer à tout moment les administrateurs ou un gérant non statutaire. Un gérant statutaire peut uniquement être révoqué par une décision unanime des associés ou pour des motifs graves (décision à prendre à la majorité requise pour une modification des statuts). En revanche, un commissaire ne peut être révoqué que pour un motif légal. L'assemblée générale fixe également les rémunérations des personnes nommées par ses soins. La révocation d'un gérant statutaire suppose : - S.C.A. : son accord9; - S.P.R.L. : des motifs graves10.

2) L'octroi de la décharge aux administrateurs, gérants et commissaires; l'octroi ou non d'une rémunération aux personnes précitées.

3) Examen des comptes annuels, du rapport de gestion et du rapport du commissaire. Elle décide de l'approbation des comptes annuels et de l'affectation du résultat.

4) L'introduction d'une action en justice au nom de la société. 5) La modification des statuts de la société. 6) La prolongation de la durée de la société, si la société a été constituée pour une durée

déterminée. La décision de dissoudre une société et de clôturer sa liquidation ; La décision de recourir à la technique du capital autorisé et à l’émission d’actions en-dessous du

pair comptable ; 9) La décision de transformer la forme de la société. L'assemblée générale décide selon les

règles qui s'appliquent en cas de modification des statuts. 10) La décision du rachat des actions, parts ou certificats propres. 11) L'approbation préalable de l'acquisition par la société d'un élément d'actif appartenant à un

fondateur, administrateur ou gérant, actionnaire ou associé, dans les deux ans suivant la constitution de la société.

12) La décision d'émettre des obligations convertibles ou des obligations assorties d'un droit de souscription préférentielle.

13) La décision de fusion, scission, d'apport d'universalité ou de branche d'activité. 14) La décision de transformer la forme juridique de la société ou de modifier son objet social.

9 Art. 658 CS : « L'associé gérant est nécessairement indiqué dans l'acte constitutif. Il est responsable comme fondateur de la société. La gérance de la société appartient à des associés désignés par les statuts. » Art. 659 CS : « Sauf disposition contraire des statuts, l'assemblée générale ne fait et ne ratifie les actes qui intéressent la société à l'égard des tiers ou qui modifient les statuts, que d'accord avec les gérants. » 10 Art. 256 CS : « Les gérants sont nommés par les associés pour un temps limité ou sans durée déterminée. Sauf stipulation contraire des statuts, ou accord unanime des associés, les gérants, associés ou non, nommés par les associés dans l'acte de société sans limitation de durée sont réputés nommés pour la durée de la société; leurs pouvoirs ne sont révocables en tout ou en partie que pour motifs graves. »

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2.2. Compétences additionnelles Les statuts peuvent élargir les compétences déjà attribuées légalement par la loi. L'émission d'un emprunt obligataire ordinaire est généralement une tâche réservée au conseil d'administration ou au gérant, sauf disposition contraire dans les statuts. Dans une société coopérative s'applique le principe de la liberté statutaire en ce qui concerne la compétence de l'assemblée générale, sauf les décisions particulières prévues par le code des sociétés. La loi stipule toutefois que, si rien n'a été prévu en la matière, l'assemblée générale est compétente pour décider sur l'adhésion ou l'exclusion d'associés, la reprise de sommes versées et l'affectation du résultat. Pour les S.A. et S.P.R.L., la loi prescrit en outre expressément que l'approbation des comptes annuels, ainsi que la décharge aux administrateurs et commissaires relèvent des compétences de l'assemblée générale. Dans une société en commandite par actions, il a été prévu que, sauf disposition contraire des statuts, l'assemblée générale ne fait et ne ratifie les actes qui intéressent la société à l'égard des tiers ou qui modifient les statuts, que d'accord avec les gérants. Elle représente les associés commanditaires vis-à-vis des gérants. Sauf stipulation contraire, la société prend fin par la mort du gérant.

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3. Compétences et fonctionnement de l’organe de gestion La loi donne au conseil d'administration le pouvoir d'accomplir tous les actes nécessaires ou utiles à la réalisation de l'objet social, à l'exception de ceux que la loi réserve à l'assemblée générale : c’est le pouvoir de gestion. Il représente en outre la société pour tous les actes et en justice ou pour tout acte officiel, à l’égard des tiers (p.ex. un achat immobilier). L'article 522, §2 CS permet cependant de prévoir dans les statuts qu'un ou plusieurs administrateurs pourront exercer ce pouvoir de représentation, soit seul, soit conjointement. Si cette délégation est publiée aux Annexes au Moniteur belge, elle est opposable aux tiers. 3.1. Compétences et fonctionnement des membres de l’organe de gestion L’organe de gestion exerce un rôle capital dans la gestion de la société. C’est lui qui est l’organe dirigeant de la société et qui dispose du droit de l’engager. L’organe de gestion est le gouvernement de la société. C'est lui qui dirige effectivement la société. Les membres de cet organe ne contractent aucune obligation personnelle relativement aux engagements de la société dès lors que, en sa qualité de mandataire, il agit pour compte et au nom de son mandant. Les engagements que le conseil d'administration prend, profitent ou préjudicient son mandant qui est la société, mais, sauf certaines fautes, ils ne peuvent avoir d'influence sur ledit conseil. Au plan des obligations et de l'étendue des pouvoirs qui leur sont confiés, les administrateurs sont des mandataires. La désignation d'un administrateur ne peut donc pas être unilatérale puisqu’il s'agit en effet d'un mandat, c.à.d. un contrat bilatéral, et il faut dès lors que l'administrateur accepte sa fonction, que ce soit d'une manière formelle ou tacite. Les administrateurs forment un collège, ils n'ont pas de pouvoir à titre individuel, sauf s'il reçoivent une délégation particulière du conseil. La taille de certaines sociétés ne permet pas toujours aux administrateurs de la gérer entièrement par eux-mêmes; dans ce cas, le conseil peut déléguer certains pouvoirs (jamais la totalité) tout en restant responsable de l'usage qui est fait de cette délégation ; les administrateurs peuvent également se partage les tâches. Ces délégations ou partages de tâche ne sont en principe pas opposables aux tiers. Dans les S.A. et les S.P.R.L., les pouvoirs légalement définis ne peuvent être étendus ni restreints vis-à-vis des tiers, par les statuts. Pour les S.C.R.L., on se réfèrera aux règles applicables à la société anonyme si les statuts sont muets. Note : les administrateurs/gérants doivent exercer eux-mêmes les fonctions que la loi attribue à l'organe de gestion. Il en résulte que les délégations générales de pouvoirs sont interdites. 3.1.1. Election La nomination des administrateurs ou gérants relève de la compétence exclusive de l'assemblée générale (ordinaire ou extraordinaire). L’Assemblée générale, exprimant la volonté de la société, choisit en principe les administrateurs à la majorité simple des voix ; ceux-ci ne doivent pas nécessairement avoir la qualité d’actionnaire ou associé. Il peut s’agir de personnes physiques ou morales, diplômées ou non. La proposition de nomination doit figurer à l’ordre du jour de la convocation.

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Cette règle connaît quelques exceptions : - les administrateurs ou gérants peuvent être désignés par les statuts ; - pour les sociétés de droit public, il existe une exception : l’administrateur qui représente le

Gouvernement est désigné d’office par celui-ci. Sa nomination ne doit donc pas être soumise au vote de l’assemblée générale ;

- il peut arriver qu'au cours d'une année sociale, un administrateur ou gérant soit mis dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions par suite d’un événement de force majeure. Si les statuts ne s'y opposent pas, les autres administrateurs désigneront un (ou des) remplaçant(s) provisoires (« cooptés »). La prochaine A.G. procèdera ensuite à l'élection définitive.

- la loi prévoit des causes d’incapacité ou des incompatibilités professionnelles (p.ex., les règles de déontologie d’un expert-comptable lui interdisent d’être en même temps l’administrateur d’une société commerciale) ;

- certaines interdictions peuvent être prononcées11 : des personnes condamnées pour des infractions de type financier (fausse monnaie, faux et usage de faux en écritures, vol, extorsion, abus de confiance, escroquerie, recel, corruption privée,…) peuvent se voir interdire d’être administrateur. Cette interdiction n’est pas automatique : elle doit être prononcée par un juge et ne peut être inférieure à trois ans ni supérieure à dix ans.

Le fait que la loi ne stipule aucun nombre maximum n'empêche aucunement les statuts de fixer le nombre d'administrateurs.

Sauf pour la S.A., les statuts règlent librement la durée du mandat des administrateurs ou gérants. 3.1.2. Cooptation Lorsque, pour quelque raison que ce soit, un ou plusieurs administrateurs viennent à cesser leurs fonctions avant l’expiration normale de leur mandat (décès, démission, retrait de mandat, etc.), les administrateurs « résiduels » peuvent désigner des administrateurs provisoires (il n’y a cependant aucune obligation). Si un administrateur provisoire est désigné, celui-ci poursuit le mandat de l’administrateur qu’il remplace jusqu’à son terme.

Il existe cependant un cas d’urgence pour lequel la cooptation s’impose : c’est celui qui survient lorsque le nombre d’administrateurs prévu par les statuts est réduit de plus de la moitié (en effet, pour délibérer valablement, la moitié des administrateurs doit être présente).

Si un candidat n’est pas nommé provisoirement par le conseil d’administration soit à défaut de réunir une majorité de votes soit par absence de délibération (par exemple lorsque la moitié au moins des administrateurs est atteinte et qu’il n’est dès lors pas obligatoirement nécessaire de désigner un administrateur provisoire), la candidature proposée doit alors être inscrite à l’ordre du jour de la plus prochaine assemblée générale.

L’installation par le conseil d’administration est toujours provisoire. Lors de sa plus prochaine réunion, l’assemblée générale pourvoit à l’élection définitive des administrateurs désignés provisoirement par le conseil d’administration. Si la nomination provisoire n’était pas ratifiée par la plus prochaine assemblée générale, le remplaçant désigné perdrait automatiquement sa qualité d’administrateur.

11 Guide pratique du conseil d’administration et de l'assemblée générale/ Watillon Sophie, André-Dumont/ André-Pierre, Renard Jean-Pierre, Liège, Editions de la Chambre du Commerce et de l'Industrie, 2000, pp. 27 et 28

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3.1.3. Révocation Il est loisible à l’assemblée générale - et à elle seule - de révoquer les administrateurs de leur mandat, en tout temps sans motif ni préavis. Le Code des sociétés prévoit que les administrateurs/gérants sont à tout moment révocables : c’est ce que l’on appelle la révocation ad nutum12. L'assemblée générale ne doit donner aucun motif de sa décision. Cette règle est d'ordre public. La société ne doit lui payer aucune indemnité, sauf si les circonstances de la révocation sont infamantes ou sauf si l'administrateur est sous contrat d'emploi. La proposition de révocation doit figurer à l'ordre du jour de l'assemblée générale pour que les actionnaires qui veulent participer à la délibération puissent décider d'assister à l'assemblée. Note : la jurisprudence admet pourtant que la révocation puisse avoir lieu en cours d'assemblée, si l'on découvre sur place une faute grave, inconnue au moment de la rédaction de l'ordre du jour. Parallèlement, un administrateur a le droit de démissionner lorsqu'il l'entend. Sa démission ne doit pas nécessairement être acceptée pour être définitive. Sa notification suffit. Il faut cependant que le départ d'un administrateur ne mette pas la société en difficulté. Enfin, le mandat d’un administrateur/gérant s’achève par l’expiration du terme ou par la mort de celui-ci. 3.1.4. Rémunération La loi permet de rémunérer les administrateurs ou de ne pas le faire : les statuts règlent en général ce problème. Ils préciseront si l’assemblée générale peut rémunérer le mandat des administrateurs et leur allouer des émoluments fixes et/ou variables ainsi que des jetons de présence.

A défaut, l'assemblée générale pourra déterminer si les administrateurs ont droit à une rémunération, et de quelle manière celle-ci sera octroyée.

Exemples : - les tantièmes (pourcentage du bénéfice partagé entre les administrateurs.) - des rémunérations fixes (émoluments) - des jetons de présence13 (pour inciter les administrateurs à ne pas s'absenter des réunions)

Les émoluments octroyés doivent bien entendu rester raisonnables et tenir compte de la situation financière de la société et de l’intérêt général.

Note : que le mandat soit gratuit ou onéreux, l'administrateur a droit au remboursement des frais qu'il a exposés pour le compte de la société, pour autant que ces dépenses lui aient été utiles14.

12 « Ad nutum » est une expression latine ou dérivée du latin qui caractérise le fait que celui qui a confié un mandat à une autre personne , est en droit retirer les pouvoirs qu'il lui a confiés sans avoir à justifier des motifs de ce retrait , ni observer un préavis, même s'il a été convenu à durée indéterminée et sans que, sauf application des règles de l'abus de droit, il puisse être contraint de lui verser un dédommagement. 13 Rémunération accordée aux directeurs généraux et administrateurs, qui est en principe calculée en fonction de l’assiduité aux réunions auxquelles ils assistent 14 Watillon Sophie, André-Dumont André-Pierre, Renard Jean-Pierre, op. cit. p. 38.

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3.1.5. Publicité Les nominations, démissions, révocations des administrateurs ainsi que la déclaration relative à leur décès devront être publiées aux Annexes au Moniteur belge. L’extrait mentionnera si l'administrateur nommé peut engager la société seul ou collégialement. En cas de négligence de cette formalité la sanction sera l'inopposabilité aux tiers. 3.1.6. Particularités applicables à la S.A. : nombre et durée La loi prévoit que le conseil d'administration de la S.A. doit comprendre au moins trois membres (il n'y a pas de maximum).

Le nombre d'administrateurs peut toutefois être exceptionnellement limité à deux lorsque la société ne comprend que deux actionnaires.

Si le nombre d'administrateurs passe sous ce minimum, les autres administrateurs doivent convoquer le plus tôt possible une nouvelle assemblée générale pour le remplacer. La loi ne permet pas de désigner un administrateur pour plus de six ans ; les statuts peuvent prévoir une durée moindre. Si les statuts ne prévoient rien, on considère que la durée du mandat est de 6 ans. Les administrateurs sont rééligibles à l’expiration de leur mandat. Note : certains exercices sociaux sont parfois supérieurs à un an (en particulier le premier exercice social) ; la durée maximale d’un mandat est de six ans calendrier ; ce mandat peut cependant être renouvelé par l’assemblée générale. En règle générale, les administrateurs choisissent un président qui reçoit le plus souvent les missions suivantes : - présider l'assemblée générale des actionnaires - convoquer le conseil d'administration lorsque l'intérêt de la société l'exige - signer les procès-verbaux des décisions du conseil Généralement, le Président a une voix prépondérante en cas de parité des voix au cours d'une délibération du conseil (exception : lorsque seuls deux administrateurs ont été nommés).

Le conseil d'administration doit réunir la majorité des administrateurs pour pouvoir délibérer valablement.

Il peut se réunir périodiquement (aux dates prévues à l'avance) ou sur convocation.

Il doit en tous les cas de réunir dès que l'un des administrateurs le propose.

Si un administrateur ne peut pas être personnellement présent au moment de la réunion, il peut se faire représenter par procuration (attention, ce mandataire doit lui aussi être administrateur de la société), pour la réunion en question.

Les décisions du conseil d'administration sont en principe prises à la majorité des voix, sauf disposition plus restrictive des statuts.

Si les statuts le prévoient, exceptionnellement dans les cas urgents et justifiés par l'intérêt social, les décisions peuvent être prises par écrit.

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3.1.7. Sociétés privées à responsabilité limitée

Les règles applicables en matière de S.A. se retrouvent au niveau des S.P.R.L., sauf quelques particularités : - quant à l’appellation des gérants (et non plus « administrateurs »), - quant au nombre de gérants : un seul suffit, - quant à la procédure des conflits d’intérêts cf. art. 259 à 261 C. Soc. Sauf stipulation contraire des statuts, ou accord unanime des associés, les gérants, associés ou non, nommés par les associés dans l'acte de société sans limitation de durée sont réputés nommés pour la durée de la société; leurs pouvoirs ne sont révocables en tout ou en partie que pour motifs graves.

3.1.8. Sociétés coopératives

Comme souvent en matière de sociétés coopératives, il est laissé la plus grande liberté aux fondateurs dans l’élaboration des statuts. Ceux-ci peuvent en effet prévoir de confier l'administration de la coopérative à un gérant ou à un ou plusieurs administrateurs.

En cas de silence sur la question dans les statuts, la société est gérée par un administrateur désigné par l'assemblée générale.

Les pouvoirs du gérant ou des administrateurs sont en principe déterminés par les statuts. Si ceux-ci sont muets, on se réfèrera à ce qui a été dit pour la S.A.

3.1.9. Responsabilités de l’organe de gestion

Les administrateurs sont responsables à l'égard de la société de tous les actes qu'ils accomplissent en exécution du leur mandat et de toutes les fautes qu'ils peuvent commettre.

Note : la société devra cependant assumer toutes les conséquences de ces fautes puisqu'ils agissent comme organes de celle-ci.

1°) Responsabilité civile (art. 1382 C. Civ.) La responsabilité civile suppose l’existence d’un dommage, une faute et un lien de causalité entre la faute et le dommage. La responsabilité civile (quasi-délictuelle15) est la conséquence , soit de l'inexécution d'un contrat , soit d'un acte volontaire ou non , entraînant pour une personne qui est fautive ou qui est légalement présumée fautive, l'obligation de réparer le dommage subi par une ou plusieurs autres . La réparation se fait par le paiement de dommages-intérêts.

15 Les quasi-délits sont des engagements qui résultent du dommage qu'une personne a provoqué sans droit mais involontairement au détriment d'autrui et qui l'oblige à en réparer les conséquences

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2°) Responsabilité pour inexécution du mandat Le droit commun est ici d'application : les administrateurs ont un mandat à exécuter. Ils doivent répondre de leurs fautes envers leur mandant, lequel est engagé par les actes que les mandataires ont réalisés en son nom, dans la limite de leurs pouvoirs :

• à l'égard de la société, il y a donc responsabilité contractuelle; • à l'égard des tiers, responsabilité extra-contractuelle si le délégué a dépassé les limites de

son mandat. En tant que mandataire, le conseil d'administration et donc les administrateurs, sont responsables de l'exécution du mandat qu'ils ont reçu et des fautes commises dans leur gestion. (art.62) 16. Ils doivent donc agir en bons gestionnaires, c'est-à-dire :

• comme des gens actifs et compétents • mais ils ne sont pas responsables d'une erreur de jugement, d'appréciation ou d'opinion les

menant à une décision préjudiciable pour la société. 3°) Responsabilité en cas d’infractions à la loi ou aux statuts L’organe de gestion est tenu pour responsable en cas d’infraction à la loi (le code des sociétés) ou aux statuts. Cette responsabilité est solidaire. Il s'agit d’une responsabilité civile, ou quasi délictuelle. La société est liée par les actes accomplis par les gérants, même si ces actes excèdent l'objet social, à moins qu'elle ne prouve que le tiers savait que l'acte dépassait l'objet social ou qu'il ne pouvait l'ignorer, compte tenu des circonstances, sans que la seule publication des statuts suffise à constituer cette preuve. Les administrateurs/gérants peuvent cependant en être déchargés : - s'ils n'ont pas participé à l'infraction ; - s'ils n'ont commis aucune faute ; - s'ils ont dénoncé les infractions à la première assemblée générale la plus prochaine après qu'ils

en auront eu connaissance. 4°) Responsabilité en cas de conflit d’intérêts Le membre d'un collège de gestion qui a, directement ou indirectement, un intérêt opposé de nature patrimoniale à une décision ou à une opération soumise à l’organe de gestion, est tenu de le communiquer aux autres administrateurs/gérants avant la délibération au collège de gestion. Sa déclaration, ainsi que les raisons justifiant l'intérêt opposé qui existe dans le chef du gérant concerné, doivent figurer dans le procès-verbal du collège de gestion qui devra prendre la décision. De plus, il doit, lorsque la société a nommé un ou plusieurs commissaires, les en informer. Il faudra établir des rapports de gestion et de contrôle ; dans les S.A., l’administrateur en cause ne peut participer aux délibérations du conseil d’administration. Les membres de l’organe de gestion sont personnellement et solidairement responsables du préjudice subi par la société ou les tiers si la décision ou l'opération leur a procuré ou a procuré à l'un d'eux un avantage financier abusif au détriment de la société.

16 Comm. Louvain, 9 janvier 1990, T.R.V., p.459

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La société peut agir en nullité des décisions prises ou des opérations accomplies en violation des règles prévues au présent article, si l'autre partie à ces décisions ou opérations avait ou devait avoir connaissance de cette violation. 5°) Responsabilité en cas de faute grave et caractérisée : Le loi ne prévoit l’application de cette responsabilité que pour autant que la faute grave et caractérisée ait contribué à la faillite de la société. Cette responsabilité ne peut donc être invoquée qu'en cas de faillite et d'insuffisance d'actif. Elle vise non seulement les administrateurs en fonction, mais aussi tout ancien administrateur, ainsi que toute personne qui a effectivement détenu le pouvoir de gérer la société. Il s'agit d'une responsabilité facultative. Le juge apprécie au cas par cas s'il y a lieu de mettre l'excédent du passif à charge des administrateurs ou seulement de certains d'entre eux et, dans l'affirmative, s'il y a lieu de les condamner à combler tout ou partie du passif, avec ou sans solidarité. Note : ces cas de responsabilité – hormis les conflits d’intérêt – sont applicables mutatis mutandis aux délégués à la gestion journalière, d’une part, et aux commissaires, d’autre part. Ils dépendent cependant du montant des chiffres du bilan et du compte de résultats. 6°) Responsabilité pénale Le Code des sociétés prévoit des peines – amendes et/ou emprisonnement – dans certaines éventualités, p. ex. lorsque les membres de l’organe de gestion ont négligé de convoquer l'assemblée générale des associés ou des obligataires dans les trois semaines de la réquisition qui leur en aura été faite. L’existence d’inventaire ou de comptes annuels frauduleux est passible de peines de prison (cf. « lettre d’affirmation » faite au commissaire). 7°) Responsabilité fiscale Responsabilité civile solidaire des dirigeants de société en matière de TVA ou de précompte professionnel Lorsqu’une société manque à ses obligations de payer la TVA ou le précompte professionnel, les dirigeants de cette société sont tenus solidairement au paiement de ces dettes (cf. nouvel art. 442quater C.I.R.). Il suffit qu’une faute de gestion soit commise par ces dirigeants (de droit ou de fait); il y a présomption réfragable de faute en cas de non paiement répété de dettes de TVA ou de précompte professionnel.

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3.1.10. Mise en œuvre de la responsabilité Il existe diverses actions : 1°) L’action civile L'actionnaire à titre individuel peut agir en réparation du préjudice personnel qu'il peut avoir subi à la suite d'un acte illicite commis par les administrateurs. Exemples : - Un actionnaire a acheté des titres « L & H » en faisant confiance aux comptes annuels qui se

sont avérés faux par la suite ; - Annulation d’une décision prise en méconnaissance de la procédure des conflits d’intérêts. 2°) Les tiers Certaines fautes peuvent causer aux tiers (p.ex. un fournisseur) un préjudice dont ils peuvent exiger réparation en vertu de l'article 1382 du Code civil. La responsabilité civile à l'égard des tiers peut être personnelle en cas de faute simple, ou solidaire en cas d'infraction à la loi ou aux statuts. 3°) L'action sociale L'assemblée générale peut exercer une action en responsabilité et charger un mandataire de son exécution. Lorsque la décharge leur est accordée, elle libère des administrateur/gérants de toute responsabilité envers la société, à raison des fautes - fautes de gestion, violation de la loi ou des statuts - commises pendant l'exercice. La décharge est, en revanche, sans effet sur les actions en responsabilité qui appartiennent aux tiers ou aux actionnaires individuellement. En l’absence de décharge, il est évident que l’action sociale pourra toujours être intentée par l’assemblée générale des actionnaires/associés. 4°) L’action minoritaire Cette action est intentée pour compte de la société et non pas (seulement) pour celui de ceux qui l'intentent. Les minoritaires doivent ensemble posséder au moins 1% du capital. Ils doivent désigner un mandataire commun chargé de conduire le procès en leur nom pour compte de la société. Celui-ci continuera à poursuivre même si les mandants se désistent.

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3.2. La gestion journalière La gestion journalière se définit comme l’accomplissement des « actes d'exploitation dans le cadre des décisions prises par le conseil d’administration ou des directives arrêtées par lui, et dont l'ensemble constitue en quelque sorte la vie quotidienne de la société ».17 La jurisprudence la détermine comme suit : "actes ou opérations qui ne dépassent pas les besoins de la vie quotidienne de la société ou les besoins qui revêtent une moins grande importance ou qui requièrent une solution rapide, de sorte qu'ils ne justifient pas l'intervention de l'organe d'administration".18 Cette notion est subjective, les besoins, les enjeux et les intérêts de chaque société étant différents. La gestion de la société est une tâche collective du conseil d'administration. Il y a cependant des décisions à prendre à chaque instant, et il est impossible de réunir continuellement le conseil. C'est pourquoi, la loi autorise le conseil d'administration à déléguer la gestion journalière de la société à une ou plusieurs personnes, administrateurs ou non, actionnaires ou non. La gestion journalière n'est, quant à son contenu, pas définie par le Code des sociétés. La jurisprudence établit une conception relativement étroite des actes qui rentrent dans le cadre de cette gestion. Ces derniers sont groupés en deux catégories : - Les actes qui sont commandés par les besoins de la vie quotidienne de la société (ces besoins

varient d'une société à l'autre, suivant le type d'activité qu'elle exerce). - Les actes qui, tant en raison de leur peu d'importance que de la nécessité d'une prompte

solution, ne justifient pas l'intervention du conseil d'administration : les actes conservatoires, la réception et le dépouillement du courrier, etc.

Les statuts décident ou à défaut, c'est le conseil d'administration ou l’assemblée générale qui nomme le délégué à la gestion journalière. Ce dernier reçoit parfois le titre d’administrateur-délégué. Le choix de l’administrateur-délégué est libre; quiconque, associé ou non, peut être choisi, à moins que les statuts ne limitent le choix. La société est toujours liée par les actes de gestion accomplis soit par le conseil d'administration, soit par les délégués à la gestion journalière, même si ces actes excèdent l'objet social.

17 Van Rijn J., Heenen J., Principes de droit commercial, Bruylant, 1954, T.1, p. 411. Lire pour une analyse plus profonde X., Commentaire systématique du Code des sociétés. Editions Kluwer, Brussel, 31 mars 2001, en particulier DE WOLF, P., STEVENS, G. (Art. 521-526 C. soc.) 18 Collectif, Lexique Sociétés Commerciales, Ed. 2002/1, Bruxelles, Kluwer, 2002, p. 251.

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3.3. Le contrôle L’assemblée générale ordinaire, en adoptant chaque année le bilan, exerce moins un contrôle sur les comptes qu'elle ne marque sa confiance aux administrateurs/gérants. Par conséquent, la loi a confié à un autre organe le contrôle de la situation financière de la société et du respect des statuts ainsi que du droit des sociétés. Cet autre organe est composé d'un ou de plusieurs commissaires. Ces derniers sont nommés pour un terme de 3 ans, irréductible. Si la désignation du ou des commissaires est obligatoire pour les grandes sociétés, elle reste en principe facultative dans les cas suivants : 1° aux sociétés en nom collectif, aux sociétés en commandite simple et aux sociétés coopératives à responsabilité illimitée dont tous les associés à responsabilité illimitée sont des personnes physiques; 2° aux petites sociétés au sens de l'article 15, non cotées, étant entendu que, pour l'application du présent chapitre, chaque société sera considérée individuellement, sauf les sociétés qui font partie d'un groupe qui est tenu d'établir et de publier des comptes annuels consolidés; 3° aux groupements d'intérêt économique dont aucun membre n'est lui-même soumis au contrôle par un commissaire; 4° aux sociétés agricoles. Les petites sociétés sont les sociétés dotées de la personnalité juridique qui, pour l’avant dernier exercice et pour le dernier exercice clôturé, ne dépassent pas plus d'une des limites suivantes : - nombre de travailleurs occupés, en moyenne annuelle : 50; - chiffre d'affaires annuel, hors taxe sur la valeur ajoutée : 7.300.000,00 €; - total du bilan : 3.650.000,00 €; sauf si le nombre de travailleurs occupés, en moyenne annuelle, dépasse 100. Dans les cas où il n'est pas nommé de commissaire, chaque associé a malgré toute stipulation contraire des statuts, individuellement les pouvoirs d'investigation et de contrôle des commissaires. Note : les critères fournis ci-dessus, pour ce qui est de la nomination du commissaire, restent en principe établis sur base non consolidée.

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3.3.1. Election Les commissaires sont nommés par l’assemblée générale parmi les membres de l'Institut des réviseurs d'entreprises, dans un contrat de mandat. Leur nombre est fixé par l’assemblée générale, et ils sont nommés pour 3 ans19 (renouvelables). Sous peine de dommages-intérêts, ils ne peuvent être révoqués en cours de mandat que pour juste motif, par l'assemblée générale. Afin de préserver son indépendance, le commissaire ne peut exercer aucune autre fonction dans la société qu'il contrôle ; sa rémunération est fixée au moment de sa nomination. 3.3.2. Exercice du pouvoir Les commissaires ont un droit illimité de surveillance. Ils peuvent soit conjointement soit individuellement (cf. art. 137 C. Soc.): A tout moment, prendre connaissance sans déplacement :

* des livres, * de la correspondance, * des procès-verbaux, * et généralement de tous les documents et écritures de la société, - Requérir des administrateurs, des agents et des préposés de la société, toutes les explications

ou informations qui lui paraissent nécessaires, - Procéder à toutes vérifications qui leur paraissent nécessaires, - Requérir les administrateurs d'être mis en possession d'informations relatives aux entreprises

liées à la société, - Les requérir de demander à des tiers la confirmation du montant de leurs créances, dettes et

autres relations avec la société contrôlée. Il leur est remis chaque semestre au moins par l'organe de gestion un état comptable établi selon le schéma du bilan et du compte de résultats. A l'issue de leur contrôle, ils rédigeront un rapport (de contrôle) destiné à l'assemblée générale.

19 Ce délai des trois ans est impératif : une grande société qui redeviendrait « petite » doit conserver son commissaire jusqu’à la fin de son mandat !

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3.4. Les comptes annuels Une fois par an, les administrateurs des grandes sociétés doivent rendre compte à l'Assemblée générale en lui remettant un rapport de gestion qui sera commenté par ses auteurs lors de l’assemblée générale ordinaire (art. 92 C. Soc.) La loi fixe donc les règles que nous avons exposées précédemment, mais pour le reste, les fondateurs (lors de la création de la S.A.) ou les actionnaires (lors des modifications de statuts) peuvent restreindre les pouvoirs de l’organe de gestion par les statuts. La loi ne donne donc que des règles minimales. Chaque année, le rapport de gestion, de même que les comptes annuels sont transmis, examinés et approuvés par une assemblée générale ordinaire. 1°) Chaque exercice social Les administrateurs dressent un inventaire et établissent les comptes annuels : bilan, compte de résultats et annexe. Ils établissent également un rapport de gestion (s’il s’agit d’une grande société). Les comptes annuels sont transmis au commissaire Les membres de l’organe de gestion sont tenus de convoquer l’assemblée générale. 2°) 15 jours20 avant l’assemblée générale Les actionnaires/associés peuvent prendre connaissance : - des comptes annuels; - (des titres composant le portefeuille); - de la liste des actionnaires qui n’ont pas entièrement libéré leurs actions; - du rapport de gestion et du rapport des commissaires. 3°) Au cours de l’assemblée générale Les actionnaires entendent les rapports de gestion et de contrôle, discutent et adoptent le bilan. Les administrateurs/gérants doivent être convoqués ; ils répondent en principe aux questions qui leur sont posées au moment de l’assemblée générale. Ils donneront ensuite décharge aux administrateurs et commissaires. Ils décident de l’affectation du résultat. 4°) Dans les 30 jours de leur approbation par l’assemblée générale Les administrateurs doivent déposer les comptes annuels à la Centrale des Bilans de la Banque Nationale de Belgique.

20 Note : pour les S.A. dont les actions sont admises aux négociations sur un marché visé à l’art. 4 CS, des règles particulières sont d’application.

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3 Ordre du jour de l'assemblée générale 1. Intérêt de l'ordre du jour L'ordre du jour est établi par celui qui convoque l'assemblée générale, c.-à-d. le plus souvent l’organe de gestion. Cet ordre du jour doit être repris sur la convocation à l'assemblée générale. Il est important que l'ordre du jour indique clairement et précisément les points sur lesquels l'assemblée générale devra délibérer et prendre une décision : - C'est sur base de cet ordre du jour que l'actionnaire ou l'associé décidera d'assister ou non à

l'assemblée générale ; - Le même ordre du jour est aussi intéressant pour l’organe de gestion, parce qu'il sait, dès lors,

sur quels points les actionnaires ou associés sont susceptibles de lui poser des questions. Pour les sociétés dont les actionnaires peuvent voter par correspondance, il est également important que l'ordre du jour soit établi de telle sorte que les actionnaires, soient, sans participer à l'assemblée, suffisamment informés des problèmes à examiner pour pouvoir exprimer leur vote.

L'assemblée peut en principe délibérer sur tous les points prévus à l'ordre du jour. Aucune décision valable ne peut être prise sur un problème ne figurant pas à l'ordre du jour, sauf si tous les actionnaires sont présents et sont d'accord de délibérer et de prendre une décision sur le problème en question. Dans ce cas, aucune réclamation ne peut être exprimée à l'encontre des décisions prises, sauf si la loi impose une procédure particulière préalable.

Exemple : Lorsque l'assemblée générale d'une S.A., d'une S.P.R.L. ou d'une S.C.R.L. doit délibérer sur la révocation d'un commissaire, l'article 136 CS stipule que l'inscription à l'ordre du jour doit être notifiée immédiatement à l'intéressé. Il peut dès lors faire connaître par écrit à la société ses observations. Celles-ci sont aussi annoncées dans l'ordre du jour. Lorsque la société a émis des obligations, l'assemblée ne peut pas davantage ignorer l'ordre du jour. Les porteurs d'obligations ou les titulaires de droit de souscription ont, en effet, le droit d'assister à l'assemblée générale, bien qu'ils ne disposent que d'une voix consultative. Ils doivent dès lors être informés préalablement des points qui seront abordés à l'assemblée. L'ordre du jour de sociétés ayant fait ou faisant appel public à l'épargne doit également comporter, outre les sujets à traiter, les propositions de décision. Cette réglementation s'inscrit dans le cadre d'une transparence accrue. L'actionnaire est en droit, non seulement de savoir ce qui figure dans l'ordre du jour, mais aussi de savoir comment on se propose de résoudre la question, pour pouvoir ainsi juger, à la lumière de ces informations, s'il doit ou non participer à l'assemblée générale. Lorsque l'assemblée générale est convoquée dans le cadre des articles 268, 382 et 533 CS à la demande des associés ou des actionnaires représentant ensemble le cinquième ou plus du capital social, ces associés ou actionnaires ont le droit de faire ajouter certains points à l'ordre du jour. Notes : une convocation pourra être jugée irrégulière (v. infra) :

• lorsque l’assemblée est convoquée directement par un des associés ; • lorsque le délai de convocation n’a pas été respecté ; • lorsque même un seul associé n’a pas été convoqué (s’il n’a pas pu être présent à l’assemblée).

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2. Etablissement de l'ordre du jour L'organe de gestion de l'entreprise doit élaborer l'ordre du jour de l'assemblée générale et le porter à la connaissance des actionnaires/associés suivant les formalités de la convocation. L'ordre du jour est établi par l'organe compétent pour convoquer l'assemblée générale. Normalement, l'assemblée est convoquée par l’organe de gestion (éventuellement sur demande des actionnaires/associés ou même des obligataires). En cas de liquidation, ce sont les liquidateurs qui sont investis de cette mission (art. 189 CS). Les articles 268, 382 et 532 CS (art. 136 pour la S.P.R.L.) spécifient également que les commissaires, s'il y en a, peuvent convoquer l'assemblée générale. Cette situation est néanmoins rare. Dans ce cas, l'ordre du jour est établi par les commissaires. Les statuts peuvent déterminer librement par qui les associés sont convoqués. Ces derniers établissent les convocations à l'assemblée générale et ils en fixent également l'ordre du jour. L'assemblée générale peut également se convoquer elle-même. Elle peut ainsi décider lors d'une assemblée qu'une deuxième assemblée sera tenue à une autre date; il va sans dire que cette assemblée doit avoir un objet, c'est-à-dire un ordre du jour qui est établi par l'assemblée générale elle-même. Les actionnaires représentant le cinquième du capital social peuvent exiger qu'une assemblée générale soit tenue. Il est évident que ce droit a une signification réelle dans la mesure où ces actionnaires peuvent établir l'ordre du jour de cette assemblée. L’organe de gestion ou les commissaires doivent mettre à l'ordre du jour les points avancés par les actionnaires en question, sans les modifier. Ils peuvent également ajouter d’autres points à l'ordre du jour de cette assemblée. Note : Le conseil d’entreprise doit recevoir des informations sur les comptes annuels avant la tenue de l’assemblée générale (art. 16 A.R. 27/11/1973). – cf. art. 151 sq. CS. Loi du 20 décembre 2010 Contenu de la convocation L’article 533bis, § 1er CS renseigne le contenu minimal de toute convocation à une assemblée générale d’une société anonyme dont les actions sont admises aux négociations sur un marché visé à l’article 4 du Code des sociétés c.à.d. un marché réglementé). L’obligation de mentionner dans l’ordre du jour les propositions de décision est maintenue, mais la société a dorénavant l’obligation de publier celles-ci sur son site internet. Cette obligation de disposer d’un site internet n’est pas neuve pour les sociétés anonymes cotées puisqu’elle leur est déjà imposée, en tant qu’émetteurs de titres, en vertu de l’arrêté royal du 14 novembre 2007 relatif aux obligations des émetteurs d’instruments financiers admis à la négociation sur un marché réglementé. Les informations ainsi mises à disposition sur le site internet doivent y rester accessibles pendant une période de cinq années à compter de la date de l’assemblée générale à laquelle elles se rapportent. Outre l’ordre du jour, la convocation devra contenir, notamment, une description claire et précise des formalités à accomplir par les actionnaires pour être admis à l’assemblée générale (la convocation doit indiquer la date d’enregistrement, la manière dont les actionnaires doivent se

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faire enregistrer et que seules les personnes qui sont actionnaires à cette date auront le droit de participer l’assemblée générale) et pour y exercer leur droit de vote, ainsi que des informations concernant: - les droits des actionnaires d’inscrire des sujets nouveaux à l’ordre du jour et de déposer des propositions de décision concernant des sujets à traiter inscrits ou à inscrire à l’ordre du jour; - la procédure à suivre pour voter par procuration, notamment le formulaire qui peut être utilisé pour le vote par procuration et les modalités selon lesquelles la société est prête à accepter les notifications, par voie électronique, de désignation d’un mandataire; et - le cas échéant, les procédures permettant de participer à distance à l’assemblée générale et de voter par correspondance ou par voie électronique (art. 533bis, § 1er, 3° nouveau). Note : la définition de ce contenu minimal ne porte pas préjudice au respect d’autres dispositions du Code des sociétés qui prescriraient des mentions particulières dans l’ordre du jour ou la convocation. L’on songe par exemple à l’article 533, § 1er, alinéa 4, deuxième phrase du Code des sociétés en vertu duquel les sociétés cotées, c’est-à-dire, celles dont les titres sont cotés au sens de l’article 4, doivent indiquer dans leur ordre du jour la proposition du comité d’audit relative (au renouvellement de la) à la nomination du commissaire ou du réviseur d’entreprises chargé du contrôle des comptes consolidés. Aux termes de l’article 6 de la Directive, les actionnaires des sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé se voient reconnaître le droit, d’une part, d’inscrire des sujets nouveaux à l’ordre du jour de l’assemblée générale et, d’autre part, de déposer des propositions de décision concernant des points inscrits ou à inscrire à l’ordre du jour d’une assemblée générale. En droit belge, le droit d’inscrire des sujets à traiter à l’ordre du jour d’une assemblée générale est subordonné au droit de convoquer une telle assemblée en cas de détention de 20 % du capital (art. 532 C.soc.). La Directive reconnaît les droits précités aux actionnaires de sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé indépendamment du droit de convoquer une assemblée. C’est ce que consacre le nouvel article 533ter du Code des sociétés. Ces droits sont ouverts quel que soit l’objet de l’assemblée générale considérée: ordinaire, spéciale, extraordinaire. La Directive n’assortit l’exercice de ces droits à aucune condition. On peut cependant rappeler qu’en ce qui concerne l’établissement de l’ordre du jour par des actionnaires qui représentent vingt pour cent du capital et qui exercent leur droit de convoquer une assemblée générale en application de l’article 532 du Code des sociétés, la jurisprudence et la doctrine admettent que le conseil d’administration, saisi d’un tel ordre du jour, ne peut modifier cet ordre du jour, quant au fond ou à la forme, que dans des cas exceptionnels, par exemple, si l’ordre du jour proposé contient des propositions manifestement illicites ou contraires à l’intérêt social ou de nature à causer un préjudice à la société ou à certaines personnes (F. HELLEMANS, Algemene vergadering: een onderzoek naar de grondslagen van haar bestaansreden en de geldigheid van haar besluiten, Jan Ronse Instituut (éd.), Kalmthout, Biblo, 2001, p. 399, n° 367) ou si l’ordre du jour proposé mentionne des points qui ne sont pas de la compétence de l’assemblée générale (K. GEENS et M. WYCKAERT, “Discretie of transparantie in het vennootschapsbelang”, in Liber Amicorum Pr. Dr. Eddy Wymeersch, Intersentia, Anvers-Oxford, 2008, p. 527, note de bas de page 11). Tout comme les actionnaires se voient ainsi reconnaître le droit de formuler des propositions de décisions alternatives sur les points inscrits à l’ordre du jour par le conseil d’administration, le conseil d’administration pourra lui-même formuler ses propres propositions de décision sur les points inscrits par les actionnaires.

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L’exercice des droits précités des actionnaires est subordonné à la détention de trois pour cent du capital social de la société. L’article 533ter, § 1er, al. 2 CS définit la manière dont les actionnaires établissent la possession de cette fraction de capital. L’examen des sujets à traiter et des propositions de décision portés à l’ordre du jour, à la demande d’actionnaires, est cependant subordonné à la condition que ceux qui ont exercé ces droits soient encore actionnaires à la date d’enregistrement à hauteur de trois pour cent du capital. Les demandes formulées en application de l’article 533ter CS doivent être formulées par écrit ; elles doivent parvenir à la société au plus tard le vingt-deuxième jour qui précède la date de l’assemblée générale. Il s’agit d’un délai unique conformément à la Directive, c’est-à-dire, un délai d’application pour toute société dont les actions sont admises aux négociations sur un marché visé à l’article 4 du Code des sociétés, et pour toute AG quel que soit son objet. L’objectif poursuivi par la Directive est en effet que l’actionnaire d’une telle société, quel que soit son lieu de résidence, ait l’assurance que, pour chaque assemblée, le délai dans lequel il peut exercer le droit d’inscrire des sujets nouveaux à l’ordre du jour ou de déposer des propositions de décision, soit invariablement le même. Les actionnaires disposeront ainsi de sept jours francs, dans l’hypothèse d’une publication de la convocation le trentième jour qui précède l’assemblée, pour évaluer, sur base des informations mises à leur disposition, s’ils entendent soumettre des sujets à traiter nouveaux ou formuler des propositions de décision.

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3. Ordre du jour d’une assemblée générale annuelle ordinaire L’ordre du jour de l’assemblée générale ordinaire doit mentionner les rapports spéciaux prévus par le code des sociétés, les rapports annuels de gestion et de contrôle (s’il y a lieu), l’approbation des comptes annuels, l’affectation du résultat et la décharge aux administrateurs, gérants et commissaires. Quinze jours21 avant l'assemblée générale, les associés peuvent prendre connaissance, au siège social, des pièces suivantes : 1° les comptes annuels; 2° le cas échéant, les comptes consolidés; 3° la liste des fonds publics, des actions, obligations et autres titres de sociétés qui composent le portefeuille; 4° le rapport de gestion et le rapport des commissaires (& rapports spéciaux éventuels). 3.0. Opérations ou décisions spéciales (conflit d’intérêts) – v. aussi art. 523 et 524 CS Le code des sociétés prévoit que l’organe de gestion doit établir un rapport sur les circonstances dans lesquelles certaines opérations ou décisions en cause ont été effectuées, sur les conditions auxquelles elles ont été conclues et sur les conséquences patrimoniales qui en ont résulté pour la société (conflits d’intérêt). En outre, le commissaire doit établir un rapport de contrôle par lequel il déclare que les informations contenues dans le rapport du conseil d'entreprise sont fidèles et suffisantes pour éclairer l'assemblée générale. Si de telles décisions ou opérations ont eu lieu à une assemblée générale, le rapport du conseil d'administration constitue le tout premier point à l'ordre du jour. 3.1. Le rapport de gestion et le rapport de contrôle du commissaire L'assemblée entend les rapports. Elle ne doit pas les approuver. Les sociétés qui répondent aux critères de l'article 15 CS sont dispensées de l'obligation de dresser un rapport de gestion annuel. Les administrateurs ou gérants répondent aux questions qui leur sont posées par les associés au sujet de leur rapport ou des points portés à l'ordre du jour, dans la mesure où la communication de données ou de faits n'est pas de nature à porter gravement préjudice à la société, aux associés ou au personnel de la société. Les commissaires répondent aux questions qui leur sont posées par les associés au sujet de leur rapport. Ils ont le droit de prendre la parole à l'assemblée générale en relation avec l'accomplissement de leur fonction (cf. art. 540 CS). 3.2. Approbation des comptes annuels Les comptes annuels (bilan, compte de résultats, annexe et bilan social) doivent être approuvés et sont publiés après affectation du résultat (cf. art. 26, §1er A.R. 30 janvier 2001). L'approbation des comptes annuels implique automatiquement l'approbation de l'affectation du résultat, ainsi que la rémunération des membres de l’organe de gestion pour l’exercice écoulé.

21 Note : pour les S.A. dont les actions sont admis aux négociations sur un marché coté, ce délai est porté à 30 jours

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3.3. Décharge aux administrateurs, gérants et commissaires Le rapport de gestion est soumis à l'assemblée générale et sert de base à la décharge donnée aux administrateurs ou au(x) gérant(s). Après l'approbation des comptes annuels, l'assemblée générale se prononce par un vote spécial sur la décharge des gérants et des commissaires22. Cette décharge n'est valable que si les comptes annuels ne contiennent ni omission, ni indication fausse dissimulant la situation réelle de la société et, quant aux actes faits en dehors des statuts ou en contravention du présent code, que s'ils ont été spécialement indiqués dans la convocation. 3.4. Nomination, renouvellement et révocation du mandat des administrateurs, gérants et

des commissaires S.A. La loi prescrit que les administrateurs sont nommés pour un mandat de (maximum) six ans. Les statuts peuvent toujours raccourcir la durée de ce mandat. Les commissaires (s’il y en a) sont nommés quant à eux pour un terme de trois ans, renouvelable. Ce délai est incompressible. Il conviendra donc de pourvoir à temps à leur remplacement, voire de les révoquer (en particulier le commissaire si la société est devenue «petite » au sens du code des sociétés). Dans les S.A., les administrateurs cooptés (art. 519 CS) achèvent le mandat de celui qu’ils remplacent. S.P.R.L. & S.C.R.L. Les gérants peuvent être nommés sans limitation de durée ou pour une durée déterminée. Dans ce dernier cas, il y a lieu, à l'échéance du mandat, de pourvoir au prolongement de leur mandat ou à leur remplacement lors de l'assemblée générale. Les statuts peuvent limiter dans le temps la durée du mandat des gérants ou administrateurs. L'assemblée générale doit, dans ce dernier cas, pourvoir à temps à leur remplacement. Les commissaires (s’il y en a) sont nommés pour un terme de trois ans, renouvelable. Si la société n'a pas de commissaire, mais qu'il ressort des derniers comptes annuels (qui ont été soumis à l'assemblée générale) que les critères de taille ont été atteints (critères définis à l’art. 15 CS), la nomination d'un ou de plusieurs commissaires doit figurer à l'ordre du jour. Dans les petites sociétés où aucun commissaire ne doit être nommé, la nomination éventuelle d'un commissaire doit être mise à l'ordre du jour, si un ou plusieurs actionnaires l'ont demandé. A défaut d'une telle nomination, chaque associé a, nonobstant toute stipulation contraire des statuts, individuellement les pouvoirs d'investigation et de contrôle des commissaires. Dans les S.C.R.L., l’art. 385 CS indique que ces pouvoirs peuvent être délégués à un ou plusieurs associés (ils ne peuvent exercer aucun autre mandat). En vertu de l’art. 76 CS, les actes et indications dont la publicité est prescrite ne sont opposables aux tiers qu'à partir du jour de leur publication par extraits ou par mention aux Annexes au Moniteur belge, sauf si la société prouve que ces tiers en avaient antérieurement connaissance. 22 En l’absence de cette décharge, l’assemblée générale pourrait décider d’intenter l’action sociale ; il en est de même si le rapport de gestion n’est pas inscrit à l’ordre du jour.

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Les tiers peuvent néanmoins se prévaloir des actes dont la publicité n'a pas été effectuée, sauf pour les opérations intervenues avant le seizième jour qui suit celui de la publication. Ces actes ne sont pas opposables aux tiers qui prouvent qu'ils ont été dans l'impossibilité d'en avoir connaissance. En cas de discordance entre le texte déposé et celui qui est publié aux Annexes au Moniteur belge, ce dernier n'est pas opposable aux tiers. Ceux-ci peuvent néanmoins s'en prévaloir, à moins que la société ne prouve que ces derniers ont eu connaissance du texte déposé. 3.5. Rémunération des administrateurs ou gérants Dans certains cas, les modalités de rémunération sont fixées dans les statuts. La plupart des statuts prévoient toutefois que la rémunération des administrateurs sera fixée par l'assemblée générale. Il faudra également déterminer les modalités de rémunération des commissaires, s’il y en a23. 3.6. Divers Une rubrique «Divers» est trop générale pour que l’ordre du jour reste valable. Il faut considérer que cette rubrique est réservée aux communications moins importantes qui doivent être faites à l'assemblée générale. Les mesures qui peuvent avoir un certain impact sur le fonctionnement de la société ne peuvent donc pas être reprises sous cette rubrique.

23 Pour certaines sociétés, un comité d’audit a été institué

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4. Ordre du jour d’une assemblée générale extraordinaire ou d’une assemblée spéciale L'ordre du jour d'une assemblée générale de ce type est encore plus important que celui de l'assemblée générale ordinaire. Les assemblées générales de ce type ne sont convoquées que dans des circonstances exceptionnelles : perte d'une grande partie du capital, quasi-apports, proposition de modification des statuts, transformation de la forme juridique de la société, etc. Il n'est pas nécessaire que tous ces points soient décrits en détail dans l'ordre du jour. Il suffit de mentionner, en abrégé, les points (les thèmes) sur lesquels l'assemblée doit statuer. Diverses situations demandent que des rapports spéciaux doivent être établis par l’organe de gestion ainsi que par un expert externe, un reviseur d’entreprises, ou le commissaire s’il y en a un) doivent être annoncés dans l'ordre du jour. Ces rapports doivent être établis dans les cas suivants : - l'émission d'actions sous le pair comptable; - les augmentations de capital avec apports autres qu'en numéraires (apports en nature); - les augmentations de capital avec limitation ou suppression du droit de souscription

préférentielle; - la proposition de l’organe de gestion de poursuivre l'activité de la société lorsque le capital

souscrit est entamé par des pertes; - la transformation de la forme juridique d’une société ; - la modification de l'objet social; - la dissolution d’une société commerciale.

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5. Publicité de l'ordre du jour L'ordre du jour est repris dans les lettres de convocation aux assemblées générales. Lorsque l'ordre du jour est établi par le conseil d'administration d'une S.A., le rapport de la réunion au cours de laquelle l'ordre du jour a été établi doit figurer dans le procès-verbal des réunions du conseil. Les S.A. dont les actions sont cotées sur un marché réglementé sont tenues d’y inscrire les propositions de décision (v. supra).

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4 Rapports soumis à l'assemblée générale Conformément à l’art . 26, § 1er A.R. 30/01/2001, le bilan est établi après répartition, c'est-à-dire compte tenu des décisions d'affectation du solde du compte de résultats de l'exercice et du résultat reporté. Lorsqu'à défaut de décision prise par l'organe compétent, cette affectation n'est pas définitive, le bilan est établi sous condition suspensive de cette décision. Le résultat à affecter est obtenu par addition du résultat de l’exercice, du résultat reporté de l’exercice précédent, déduction faite des transferts aux réserves immunisées et augmenté des prélèvements sur lesdites réserves. L'affectation du résultat fait partie intégrante du compte de résultats. Elle doit faire apparaître comment elle influence le patrimoine de l'entreprise. L'assemblée générale annuelle, par l'approbation des comptes annuels, confirme l'affectation du résultat et elle prononce (par un vote spécial) la décharge aux administrateurs, gérants et commissaires. 1. Assemblée générale ordinaire Le code des sociétés impose à l'organe de gestion d'une S.A., S.C.A., S.P.R.L., ou S.C.R.L. une série d'obligations en vue de la communication d'informations élémentaires aux actionnaires en guise de préparation de l'assemblée générale. L’organe de gestion est tout d'abord tenue de préparer les comptes annuels. Si un commissaire a été nommé, les comptes annuels, ainsi que le rapport de gestion, doivent lui être transmis un mois avant l'assemblée générale (cf. art. 143 CS : il s’agit du moment où ce rapport doit être mis à leur disposition). Le rapport du commissaire doit pouvoir être consulté au siège de la société quinze jours avant l’assemblée générale ; le commissaire ne dispose donc finalement que de un mois pour établir son rapport de contrôle. Les comptes annuels, y compris les rapports de gestion et de contrôle, doivent être à la disposition des actionnaires au siège de la société quinze jours avant l'assemblée générale. Toute personne s'adressant au siège de la société peut prendre connaissance du rapport de gestion et en obtenir gratuitement, même par correspondance, copie intégrale. Cette obligation n'est pas applicable aux petites sociétés Lorsque l'organe de gestion omet d'établir les comptes annuels, chaque actionnaire peut demander en référé qu’il y soit condamné. Les comptes annuels doivent être soumis (par l’organe de gestion) à l'approbation de l'assemblée générale dans les six mois de la clôture de l'exercice. Si les comptes annuels n'ont pas été soumis à l'assemblée générale dans ce délai, le dommage subi par les tiers est, sauf preuve contraire, présumé résulter de cette omission. Les comptes annuels ainsi approuvés sont déposés par les administrateurs ou gérants à la Banque nationale de Belgique. Ce dépôt a lieu dans les trente jours de leur approbation. Si les comptes annuels n'ont pas été déposés, le dommage subi par les tiers est, sauf preuve contraire, présumé résulter de cette omission. Si la société compte un conseil d'entreprise, la réunion du conseil d'entreprise doit avoir lieu avant l'assemblée annuelle. Le rapport de la réunion du conseil d'entreprise doit être communiqué à l'assemblée annuelle des actionnaires.

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Les comptes consolidés ainsi que le rapport sur les comptes consolidés sont mis à la disposition des associés de la société consolidante dans les mêmes conditions et dans les mêmes délais que les comptes annuels. Ces documents sont communiqués à l'assemblée générale et sont publiés dans les mêmes délais que les comptes annuels. Il peut être dérogé à l'alinéa 1er au cas où les comptes consolidés ne sont pas arrêtés à la même date que les comptes annuels afin de tenir compte de la date de clôture des comptes des sociétés les plus nombreuses ou les plus importantes comprises dans la consolidation. Dans ce cas, les comptes consolidés ainsi que les rapports consolidés doivent être tenus à la disposition des associés et publiés au plus tard sept mois après la date de clôture. 2. Autres assemblées générales En cas de convocation d’une assemblée générale autre que celle qui doit approuver les comptes annuels, l’organe de gestion doit parfois élaborer certains rapports spéciaux. Un rapport de contrôle est en général également établi par un expert externe. Ces rapports sont annoncés dans l’ordre du jour de l’assemblée générale. Ils sont parfois mis à la disposition des actionnaires/associés qui en font la demande. 3. Le rapport de gestion Le code des sociétés impose à l'organe de gestion de rédiger un rapport annuel dans lequel il rend compte de sa gestion. Le rapport de gestion comprend des commentaires complémentaires sur la marche des affaires et la situation de la société. Le rapport de gestion complète les comptes annuels : - pour le passé, par le commentaire des (derniers) comptes annuels; - pour le présent, par le compte rendu des événements importants survenus après la clôture de

l'exercice; - pour l'avenir, par des informations relatives aux perspectives de la société (pour autant que

ces informations ne risquent pas de nuire à la société). Le rapport de gestion est soumis à l'assemblée générale et sert de base à la décharge donnée aux administrateurs ou au(x) gérant(s). Nous allons analyser de façon plus approfondie : 1) Les sociétés qui doivent établir un rapport de gestion. 2) La procédure. 3) Le rapport de gestion et le droit comptable. 4) La responsabilité des administrateurs. 5) Les sanctions.

3.1. Quelles sociétés doivent établir un rapport de gestion? Le code des sociétés prévoit que l'organe de direction des sociétés suivantes doit établir un rapport de gestion : - la société anonyme (S.A.); - la société en commandite par actions (S.C.A.); - la société privée à responsabilité limitée (S.P.R.L.) éventuellement unipersonnelle; - la société coopérative à responsabilité limitée (S.C.R.L.).

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Aucun rapport de gestion ne doit être établi par : 1° les petites sociétés non cotées – c.à.d. les petites sociétés sont les sociétés dotées de la personnalité juridique qui, pour l’avant-dernier et pour le dernier exercice clôturé, ne dépassent pas plus d'une des critères suivants :

- nombre de travailleurs occupés, en moyenne annuelle : 50; - chiffre d'affaires annuel, hors taxe sur la valeur ajoutée : 7.300.000,00 €; - total du bilan : 3.650.000,00 €,

… sauf si le nombre de travailleurs occupés, en moyenne annuelle, dépasse 100. 2° les sociétés en nom collectif, aux sociétés en commandite simple et aux sociétés coopératives à responsabilité illimitée dont tous les associés à responsabilité illimitée sont des personnes physiques (il suffit donc d’avoir au moins un associé personne morale); (…) Les petites sociétés peuvent toujours établir un rapport de gestion. Les «grandes» sociétés doivent publier le rapport de gestion en même temps que leurs comptes annuels. Les petites sociétés doivent cependant reprendre la justification visée à l'article 96, 6° (justification de l’application des règles comptables de continuité), dans l'annexe aux comptes annuels. De même, certaines mentions relatives aux conflits d’intérêts éventuels doivent y figurer (v. infra). 3.2. Procédure L’organe de gestion doit présenter au moins un mois avant le délai endéans lequel ce rapport doit être mis à la disposition de l'assemblée générale le rapport de gestion au commissaire qui rédige le rapport de contrôle. Les porteurs d'actions nominatives reçoivent en principe le rapport de gestion en même temps que les comptes annuels et la convocation à l'assemblée générale. Les détenteurs d'actions au porteur peuvent prendre connaissance du rapport de gestion au siège de la société, quinze jours avant l'assemblée générale. Ils ont le droit d'obtenir gratuitement dans les mêmes délais un exemplaire du rapport de gestion. Au moment de l'assemblée générale annuelle, les administrateurs ou le(s) gérant(s) répondent aux questions qui leur sont posées par les actionnaires au sujet de leur rapport. Le rapport de gestion forme la base de la décharge à donner aux administrateurs ou au(x) gérant(s). Le rapport de gestion n'est par contre pas soumis à l'approbation de l'assemblée générale. 3.3. Rapport de gestion et droit comptable L'obligation d'établir un rapport de gestion est imposée par le code des sociétés, et non par la réglementation comptable. Bien que toutes les informations relatives aux comptes annuels aient désormais été intégrées dans le code des sociétés (et son A.R. d’exécution), le droit comptable garde toute son importance dès lors que les données chiffrées reprises dans le rapport de gestion sont basées sur les données des comptes annuels. 3.4. Responsabilité pénale des administrateurs (cf. art. 126 et 128 CS) Les administrateurs peuvent être rendus solidairement responsables : - au cas où ils n'établiraient pas le rapport de gestion; - au cas où certaines données essentielles manqueraient dans le rapport de gestion; - au cas où ils ne remettraient pas (dans les temps) le rapport de gestion au commissaire; - au cas où ils empêcheraient les actionnaires/associés de consulter le rapport de gestion.

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Les gérants et administrateurs ainsi que les personnes chargées de la gestion d'un établissement en Belgique qui contreviennent à l'une des obligations des articles 81 à 85, 95, 96, 98 et 100 seront punis d'une amende de cinquante à dix mille euros. Si la violation de ces dispositions a lieu dans un but frauduleux, ils peuvent en outre être punis d'un emprisonnement d'un mois à un an ou de ces deux peines cumulées. 3.5. Contenu du rapport de gestion En vertu de l’art. 96 CS, le rapport annuel comporte : 1° au moins un exposé fidèle sur l'évolution des affaires, les résultats et la situation de la société, ainsi qu'une description des principaux risques et incertitudes auxquels elle est confrontée. Cet exposé consiste en une analyse équilibrée et complète de l'évolution des affaires, des résultats et de la situation de la société, en rapport avec le volume et la complexité de ces affaires. Dans la mesure nécessaire à la compréhension de l'évolution des affaires, des résultats ou de la situation de la société, l'analyse comporte des indicateurs clés de performance de nature tant financière que, le cas échéant, non financière ayant trait à l'activité spécifique de la société, notamment des informations relatives aux questions d'environnement et de personnel. En donnant son analyse, le rapport de gestion contient, le cas échéant, des renvois aux montants indiqués dans les comptes annuels et des explications supplémentaires y afférentes ; 2° des données sur les événements importants survenus après la clôture de l'exercice; 3° des indications sur les circonstances susceptibles d'avoir une influence notable sur le développement de la société, pour autant qu'elles ne sont pas de nature à porter gravement préjudice à la société; 4° des indications relatives aux activités en matière de recherche et de développement; 5° des indications relatives à l'existence de succursales de la société; 6° au cas où le bilan fait apparaître une perte reportée ou le compte de résultats fait apparaître pendant deux exercices successifs une perte de l'exercice, une justification de l'application des règles comptables de continuité; 7° toutes les informations qui doivent y être insérées en vertu du présent code. 8° en ce qui concerne l'utilisation des instruments financiers par la société et lorsque cela est pertinent pour l'évaluation de son actif, de son passif, de sa situation financière et de ses pertes ou profits : - les objectifs et la politique de la société en matière de gestion des risques financiers, y compris sa politique concernant la couverture de chaque catégorie principale des transactions prévues pour lesquelles il est fait usage de la comptabilité de couverture, et - l'exposition de la société au risque de prix, au risque de crédit, au risque de liquidité et au risque de trésorerie. Le Code des sociétés détermine les données à inclure obligatoirement dans le rapport de gestion. En pratique cependant, ce rapport sera étoffé et comprendra plus d'informations que celles que la loi impose. Il faut garder à l'esprit que la loi sur les sociétés ne détermine que le contenu minimum du rapport de gestion. Dans de nombreux cas, l'entreprise a intérêt à reprendre un maximum de données dans ce rapport (p. ex. sociétés cotées en bourse, sociétés qui ont l'intention d'émettre des effets publics ou qui l'auraient déjà fait, etc.). Un rapport de gestion sur les comptes consolidés est joint aux comptes consolidés par les administrateurs ou gérants.

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Ce rapport comporte : 1° au moins un exposé fidèle sur l'évolution des affaires, les résultats et la situation de l'ensemble des entreprises comprises dans la consolidation, ainsi qu'une description des principaux risques et incertitudes auxquels elles sont confrontées. Cet exposé consiste en une analyse équilibrée et complète de l'évolution des affaires, des résultats et de la situation de l'ensemble des entreprises comprises dans la consolidation, en rapport avec le volume et la complexité de ces affaires. Dans la mesure nécessaire à la compréhension de l'évolution des affaires, des résultats ou de la situation des entreprises, l'analyse comporte des indicateurs clés de performance de nature tant financière que, le cas échéant, non financière ayant trait à l'activité spécifique des entreprises, notamment des informations relatives aux questions d'environnement et de personnel. En donnant son analyse, le rapport de gestion contient, le cas échéant, des renvois aux montants indiqués dans les comptes consolidés et des explications supplémentaires y afférentes. 2° des données sur les événements importants survenus après la clôture de l'exercice; 3° pour autant qu'elles ne soient pas de nature à porter gravement préjudice à une société comprise dans la consolidation, des indications sur les circonstances susceptibles d'avoir une influence notable sur le développement de l'ensemble consolidé; 4° des indications relatives aux activités en matière de recherche et de développement. 5° en ce qui concerne l'utilisation des instruments financiers par la société et lorsque cela est pertinent pour l'évaluation de son actif, de son passif, de sa situation financière et de ses pertes ou profits :

- les objectifs et la politique de la société en matière de gestion des risques financiers, y compris sa politique concernant la couverture de chaque catégorie principale des transactions prévues pour lesquelles il est fait usage de la comptabilité de couverture, et

- l'exposition de la société au risque de prix, au risque de crédit, au risque de liquidité et au risque de trésorerie.

6° le cas échéant, la justification de l'indépendance et de la compétence en matière de comptabilité et d'audit d'au moins un membre du comité d'audit. Le rapport de gestion sur les comptes consolidés peut être combiné avec le rapport de gestion joint aux comptes annuels ordinaires pour constituer un rapport unique, pour autant que les indications prescrites soient données de manière distincte pour la société consolidante et pour l'ensemble consolidé. Il peut être pertinent, dans l'élaboration de ce rapport unique, de mettre l'accent sur les aspects revêtant de l'importance pour l'ensemble des entreprises comprises dans la consolidation. 3.5.1. Informations relatives aux comptes annuels La loi impose à l'organe de gestion d’établir un rapport comprenant des commentaires sur les comptes annuels afin de donner une image fidèle de la marche des affaires et de la situation de la société. En général, ces commentaires comprennent : a) une description plus détaillée des rubriques principales de l'actif et du passif des comptes

annuels; b) une description détaillée des résultats et de l'affectation et des prélèvements; c) une justification des principales modifications des rubriques par rapport aux exercices

précédents; d) une justification des modifications des règles d'évaluation; e) des informations complémentaires relatives aux filiales : nature et développement de leurs

activités, données concernant leur situation financière; f) des informations concernant les sociétés avec lesquelles la société a un lien de participation; g) une analyse financière ou des tableaux annexés tels que :

- comparaison du chiffre d'affaires et des résultats avec les exercices précédents; - calcul et représentation schématisée de la valeur ajoutée;

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- état des ressources et emplois; - ratios financiers et leur évolution; - bénéfice par action, etc.

Les commentaires sur les comptes annuels comprennent la plupart du temps des informations complémentaires sur l'évolution dans le secteur, à l'intérieur de l'entreprise, dans certains services, etc. A côté de l'information relative aux comptes annuels, le rapport de gestion peut également contenir des informations qui commentent la politique industrielle, commerciale et du personnel que la société a menée au cours du dernier exercice. 3.5.2. Evénements importants survenus après la clôture de l'exercice Le code des sociétés prévoit que le rapport de gestion doit comprendre également des informations sur les événements importants survenus après la clôture de l'exercice et dont l'origine ne se situe pas dans l'exercice écoulé. Il s'agit d'événements pouvant exercer une influence notable, tant positive que négative, sur la situation financière et les résultats de la société. (cf. également art. 33 A.R. 30/01/2001). Ces informations sont importantes pour les lecteurs des comptes annuels parce qu’elles permettent de se faire une idée exacte de la situation réelle de l'entreprise. Ces événements doivent être mentionnés dans le rapport de gestion, quel que soit leur traitement éventuel dans les comptes annuels. En plus d'une description de la nature de ces événements, il est indiqué d'ajouter une évaluation de leurs conséquences financières positives ou négatives. Exemples : - augmentation ou diminution sensible du chiffre d'affaires; - litiges en cours; - condamnation judiciaire au paiement d'une amende ou de dommages et intérêts; - disparition d'un client important ou d'une part de marché importante; - faillite d'un fournisseur ou d'un client; - acquisition ou vente d'une filiale.

Il est possible d'inclure dans le rapport de gestion les événements postérieurs à la clôture de l'exercice du fait que l'assemblée générale à laquelle les comptes annuels et le rapport de gestion sont présentés se déroule plusieurs mois après la clôture de l'exercice. Il s'agit ici d'événements réels et non pas de prévisions comme au point suivant. 3.5.3. Développement de la société Le Code des sociétés stipule explicitement que le rapport de gestion doit contenir des données relatives aux circonstances susceptibles d'exercer une influence notable sur le développement de la société. Il s'agit des éléments négatifs et positifs pouvant influencer de façon importante la situation financière et les résultats futurs de l'entreprise.

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Exemples : - projets d'investissement; - perspectives de commandes; - prévisions relatives au chiffre d'affaires; - évolution du secteur, prévisions conjoncturelles, concurrence, tendances nouvelles, etc.; - augmentation de capital prévue susceptible de modifier les rapports de force existants; - évolution politique des marchés; - suivi du plan de restructuration (éventuellement en application de la procédure d'alarme

lorsque le capital social est entamé par des pertes). Ces renseignements ne doivent être fournis que pour autant qu'ils ne soient pas de nature à porter gravement préjudice à la société. 3.5.4. Recherche et développement Le code des sociétés impose à l'organe de gestion de la société l'obligation de mentionner dans son rapport de gestion des données concernant les activités dans le domaine de la recherche et du développement. L’avis nº 138/4 C.N.C. (Bulletin nº 26, mars 1991), indique quelles sont les informations à fournir dans le rapport de gestion dans le cadre de la recherche et du développement. Ni les travaux préparatoires de la loi du 5 décembre 1984, qui a introduit cette disposition, ni la 4éme directive CEE dont elle s'inspire directement, ne contiennent en effet de précisions à ce sujet. La Commission des Normes comptables fournit quelques éléments de réponse : 1°) En ce qui concerne la notion de recherche et développement Sur le plan international, les activités de « recherche » et de « développement » sont définies comme suit24 :

• Recherche : travail original, conduit systématiquement, avec l'espoir d'acquérir une compréhension et des connaissances scientifiques ou techniques nouvelles.

• Développement : mise en œuvre de plans ou d'études pour la production de matériaux, d'appareils, de produits, de procédés, de systèmes ou de services nouveaux ou fortement améliorés, en application de découvertes réalisées ou de connaissances acquises, avant le commencement d'une production commercialisable.

2°) Quelle est l'information à donner en matière de recherche et de développement? Celle-ci se situe dans le cadre de la reddition de compte par les dirigeants de leur gestion. On en déduit qu'elle porte sur les activités en matière de recherche et de développement exercées au cours de l'exercice écoulé. La loi n'exige dès lors pas que des informations soient données sur des plans de recherches futures. L'information en matière de recherche et de développement s'inscrit dans le cadre du rapport de gestion et non dans le cadre des comptes annuels. On en déduit qu'au vœu du législateur l'information n'est pas exclusivement chiffrée et ne se résume dès lors pas à l'indication du montant des charges en matière de recherche et de développement exposées durant l'exercice.

24 Norme Comptable Internationale n° 9, La comptabilisation des activités de recherche et de développement, I.A.S.C., 1978; Statement of Financial Accounting Standards n° 2, Accounting for Research and Development Costs, F.A.S.B., 1974; Clarification des expressions comptables figurant dans les principes directeurs de l'O.C.D.E. (mai 1983).

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Le législateur a visé manifestement une information de nature qualitative portant sur l'objet et la nature des recherches en cause. En revanche, s'inscrivant dans le cadre d'une reddition de compte, il paraît évident que le législateur a eu en vue une information qui ne serait pas exclusivement qualitative, mais qu'elle comporte des indications quant aux coûts engagés. Les informations visés dans le rapport de gestion ne constituent dès lors par un commentaire des montants repris au bilan, sous les immobilisations incorporelles au titre de frais de recherche et de développement et mentionnés de façon distincte à l'annexe. Sous ces rubriques figurent en effet les seuls coûts en matière de recherche et de développement qui ont été portés à l'actif. Si la société n'a exercé aucune activité dans ce domaine, rien ne doit être mentionné dans le rapport de gestion. 3.5.5. Succursales Le rapport de gestion doit aussi contenir des informations concernant l'existence de succursales de la société. 3.5.6. Perspectives de continuité Au cas où le bilan fait apparaître une perte reportée ou le compte de résultats fait apparaître pendant deux exercices successifs une perte de l'exercice, une justification de l'application des règles comptables de continuité (cf. art. 96, 6° CS). Les commissaires qui constatent, au cours de leurs contrôles, des faits graves et concordants susceptibles de compromettre la continuité de l'entreprise, en informent l'organe de gestion par écrit et de manière circonstanciée. Dans ce cas, l'organe de gestion doit délibérer sur les mesures qui devraient être prises pour assurer la continuité de l'entreprise pendant un délai raisonnable. Les commissaires peuvent renoncer à l'information visée au premier alinéa, lorsqu'ils constatent que l'organe de gestion a déjà délibéré sur les mesures qui devraient être prises. Si dans un délai d'un mois à dater de la communication de l'information visée au premier alinéa, les commissaires n'ont pas été informés de la délibération de l'organe de gestion sur les mesures prises ou envisagées pour assurer la continuité de l'entreprise , ou s’ils estiment que ces mesures ne sont pas susceptibles d’assurer la continuité de l’entreprise pendant un délai raisonnable, ils peuvent communiquer leurs constatations au président du tribunal de commerce. Dans ce cas, l'article 458 du Code pénal (ndlr : secret professionnel) n'est pas applicable (cf. art. 138 CS). Au cas où il n'est pas nommé de commissaire, lorsque des faits graves et concordants sont susceptibles de compromettre la continuité de l'entreprise, l'organe de gestion est également tenu de délibérer sur les mesures qui devraient être prises pour assurer la continuité de l'entreprise pendant un délai raisonnable. 3.5.7. Augmentations de capital sous le pair comptable ou émissions d'obligations

convertibles ou de droits de souscription Lorsqu'une augmentation du capital, une émission d'obligations convertibles ou une émission de droits de souscription sont décidées par le conseil d'administration au cours de l'exercice social, le rapport de gestion comporte un exposé à leur sujet.

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Il comporte également, le cas échéant, un commentaire approprié portant sur les conditions et les conséquences effectives des augmentations de capital ou des émissions d'obligations convertibles ou de droits de souscription à l'occasion desquelles le conseil d'administration a limité ou supprimé le droit de préférence des actionnaires. Le code des sociétés prévoit aussi que le rapport de gestion doit contenir des informations relatives aux augmentations de capital sous le pair comptable ou aux émissions d'obligations convertibles ou de droits de souscription, décidées au cours de l'exercice dans le cadre du capital autorisé. Le cas échéant, le rapport de gestion comprendra un commentaire approprié portant sur les conditions et conséquences effectives d'une augmentation de capital sous le pair comptable ou dérogeant au droit de préférence. Note : ces dispositions ne sont pas applicables aux petites sociétés. 3.5.8. Acquisition des actions ou parts/certificats propres Le rapport de gestion de la société qui a acquis ses propres actions parts ou certificats, par elle-même ou par une personne agissant en son nom propre mais pour le compte de la société est complété au moins par les indications suivantes : 1° la raison des acquisitions; 2° le nombre et la valeur nominale ou, à défaut de valeur nominale, le pair comptable des parts

acquises ou cédées et des parts auxquelles se rapportent les certificats acquis ou cédés pendant l'exercice, ainsi que la fraction du capital souscrit qu'elles représentent;

3° la contre-valeur des parts ou des certificats acquis ou cédés; 4° le nombre et la valeur nominale de l'ensemble des parts acquises et détenues en portefeuille, et

des parts auxquelles se rapportent les certificats acquis et détenus en portefeuille, ainsi que la fraction du capital souscrit qu'elles représentent. Lorsque la société n'est pas tenue de rédiger un rapport de gestion, les indications visées à l'alinéa 1er, doivent être mentionnées dans l'annexe aux comptes annuels.

3.5.9. Activités complémentaires du commissaire Le rapport de gestion inclut également une justification des activités exceptionnelles ou des missions particulières qui ont été confiées au commissaire, tant au niveau de leur objet que des rémunérations y afférentes. La même justification est à fournir pour les activités et la rémunération d'une personne avec laquelle le commissaire a conclu un contrat de travail ou avec laquelle il se trouve, sous l'angle professionnel, dans des liens de collaboration. Note : rémunérations – cf. art. 134, §2 CS. 3.5.10. Conflits d'intérêts Le rapport de gestion doit comprendre l'intégralité du procès-verbal du conseil d'administration ou du collège des gérants, relatif à une décision prise en matière d'intérêts opposés. Les données suivantes doivent au moins y être reprises : - nature de la décision ou de l'opération au niveau de laquelle l'intérêt opposé s'est manifesté; - motifs pour lesquels la décision a été prise malgré les intérêts opposés; - conséquences patrimoniales de la décision pour la société.

Un dilemme se pose ici : comment les actionnaires d'une P.M.E., n'étant plus obligée d'établir un rapport de gestion, seront-ils prévenus du fait qu'au cours de l'exercice un conflit d'intérêts est survenu entre un ou plusieurs administrateurs ou gérants et la société ?

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Par analogie avec la procédure applicable à l'acquisition d'actions propres, les mentions obligatoires pourraient figurer dans l'annexe aux comptes annuels. Comme les comptes annuels doivent être publiés dans leur intégralité, les tiers seraient mis au courant des conflits d'intérêts internes de la société, alors que ce n'était pas le cas jusqu'à présent. En effet, si les petites sociétés étaient tenues de rédiger un rapport de gestion, la publication de celui-ci n'était pas requise. Dès lors, il serait peut-être préférable de dresser quand même un rapport de gestion. La loi ne l'impose plus mais elle ne l'interdit pas. Cette procédure présente l'avantage d'informer correctement les actionnaires tandis que les tiers restent de toute façon tenus à l'écart d'un tel conflit. 3.5.11. Informations relatives aux instruments financiers Le rapport de gestion doit complété par des informations sur l'utilisation des instruments financiers par la société et lorsque cela est pertinent pour l'évaluation de son actif, de son passif, de sa situation financière et de ses pertes ou profits : - les objectifs et la politique de la société en matière de gestion des risques financiers, y

compris sa politique concernant la couverture de chaque catégorie principale des transactions prévues pour lesquelles il est fait usage de la comptabilité de couverture, et

- l'exposition de la société au risque de prix, au risque de crédit, au risque de liquidité et au risque de trésorerie.

3.5.12. Informations facultatives Le rapport de gestion peut être complété par une série d'informations facultatives telles que :

- tableau de financement et cash-flow; - activités industrielles; - entreprises liées; - participations; - politique du personnel; - affectation des résultats; - communication de l'approbation des comptes annuels et décharge des

administrateurs/gérants et du commissaire; - nominations et démissions des administrateurs/gérants ; - chaque année, les liquidateurs soumettent à l'approbation de l'assemblée générale de la

société les comptes annuels avec l'indication des causes qui ont empêché la liquidation d'être terminée (…).

3.6. Publicité du rapport de gestion Le code des sociétés prévoit l'obligation pour les S.A., S.C.A., S.P.R.L. et S.C.R.L. de déposer auprès de la Banque nationale de Belgique (B.N.B.), en même temps que les comptes annuels et le rapport du commissaire, le rapport de gestion du conseil d'administration ou du (des) gérant(s). La Banque nationale de Belgique impose une série de conditions de forme au dépôt du rapport de gestion, soit que le dépôt est fait sur papier, soit qu’il est réalisé sur disquette.

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4 Convocation de l'assemblée générale La convocation à l'assemblée générale suppose le respect de certaines conditions de forme et de fond. L'assemblée générale peut parfois délibérer valablement sans l’accomplissement de ces formalités. Le mode de convocation diffère en fonction de la forme juridique de la société et selon qu'il s'agit d'actions au porteur, nominatives ou dématérialisées. Des règles particulières sont prévues pour les sociétés anonymes dont les actions sont admises sur un marché réglementé au sens de l’art. 4 CS. La directive 2007/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 juillet 2007 concernant l’exercice de certains droits des actionnaires de sociétés cotées a été transposé dans la loi du 20 décembre 2010 (M.B., 18 avril 2011). La directive a pour objet de favoriser et faciliter l’exercice du droit de vote des actionnaires de sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé quel que soit le lieu de résidence de l’actionnaire: l’actionnaire ne résidant pas dans le même État membre que celui dont relève la société, doit pouvoir exercer son droit de vote aussi aisément qu’un résident de l’État membre en question. La Directive prévoit un certain nombre de mesures relatives à la convocation des assemblées générales, que ce soit les modes et délai de convocation, les informations à mettre à disposition des actionnaires, le droit d’inscrire des sujets nouveaux à l’ordre du jour de l’assemblée générale ou de déposer des propositions de décision, ainsi qu’à la participation à l’assemblée générale par les formalités d’admission à l’assemblée générale et la participation à distance à l’assemblée. 1. Qui procède à la convocation ? L'assemblée générale doit en principe être convoquée par l'organe de gestion ou par le liquidateur. Le commissaire peut également convoquer l’assemblée générale, et ce d’autant plus qu’il a l'obligation d'éclairer l'assemblée générale de toute faute commise par l'organe de gestion dans le cadre de l'exécution de son mandat. Tant le conseil d'administration, ou les gérants, le liquidateur que le commissaire sont tenus de convoquer l'assemblée générale lorsque les actionnaires qui représentent le cinquième du capital le demandent. Il en sera de même s'il émane une telle demande de convocation par des obligataires représentant le cinquième du montant des titres en circulation. Les commissaires peuvent, s'il rien n’a été prévu par les statuts, désigner, dans le cas de décès, d'incapacité légale ou d'empêchement de l’organe de gestion, un administrateur, associé ou non, qui fera les actes urgents et de simple administration, jusqu'à la réunion de l'assemblée générale. L'administrateur, dans la quinzaine de sa nomination, convoquera l'assemblée générale suivant le mode déterminé par les statuts. Lorsque le conseil d'administration, les gérants, le liquidateur ou le commissaire refusent de convoquer l'assemblée générale, les actionnaires/associés peuvent s'adresser au tribunal pour obtenir un jugement en référé visant à obliger l'organe de gestion à convoquer l'assemblée générale. Les statuts ne peuvent ni limiter ni interdire le droit d'initiative de ces organes ou personnes. Par contre, ce droit d'initiative peut être élargi. Par exemple, les statuts peuvent prévoir que des actionnaires/associés disposant de moins d'un cinquième du capital, un actionnaire isolé ou encore un administrateur puisse demander de convoquer l’assemblée générale.

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La convocation effective doit cependant toujours être accomplie par l'organe de gestion ou le commissaire. Il est clair que dans une société privée à responsabilité limitée unipersonnelle, cette formalité de convocation doit, en principe, être suivie, même si elle n'a aucune raison d'être. Sauf disposition statutaire contraire, la convocation à l'assemblée générale d’une société coopérative se fait au moins quinze jours avant l'assemblée générale par lettre recommandée, signée par les administrateurs (art. 383 CS). Les statuts peuvent déterminer librement qui peut convoquer les associés en assemblée générale. Les administrateurs sont explicitement désignés pour établir les comptes annuels et rédiger un rapport de gestion. Par référence aux règles de fonctionnement des sociétés anonymes, ils ont donc la compétence de convoquer l'assemblée annuelle. Le commissaire ne dispose pas d'un droit légal de convocation de l'assemblée générale, sauf si les statuts lui attribuent cette compétence (art. 382 CS). 2. La forme de la convocation Une distinction est faite selon qu'il s'agit d'actions au porteur, dématérialisées ou nominatives. L'assemblée annuelle ne peut être convoquée sans formalités que dans des cas exceptionnels. 2.1. Actions au porteur (v. cependant la remarque sur l’existence limitée de celles-ci) ou dématérialisées Seules les S.A. et S.C.A. peuvent avoir tout ou partie de leur capital représentées par des actions au porteur ou dématérialisées. Les convocations pour toute assemblée générale contiennent l'ordre du jour et sont faites par des annonces insérées (v. art.533 CS) : a) quinze jours au moins avant l'assemblée, dans le Moniteur belge; b) quinze jours au moins avant l'assemblée, dans un organe de presse de diffusion nationale. Exception importante : les assemblées générales annuelles qui se tiennent dans la commune aux lieu, jour et heure indiqués dans l’acte constitutif et dont l’ordre du jour se limite à l’examen des comptes annuels, le rapport de gestion et, le cas échéant, le rapport des commissaires ainsi que le vote sur la décharge des administrateurs et, le cas échéant, des commissaires. Pour ces assemblées générales annuelles ordinaires, une seule annonce suffit : la publication dans le Moniteur belge. Note : certaines règles particulières (délai de 30 jours) sont prévues pour les sociétés dont les actions sont admises à la négociation sur un marché réglementé au sens de l’art. 4 CS. L'ordre du jour doit contenir l'indication des sujets à traiter ainsi que, pour les sociétés ayant fait ou faisant publiquement appel à l'épargne, les propositions de décision. Une copie des documents qui doivent être mis à la disposition des actionnaires nominatifs, des administrateurs et des commissaires leur est adressée en même temps que la convocation. Une copie de ces documents est également transmise sans délai aux personnes qui, au plus tard sept jours avant l'assemblée générale, ont rempli les formalités requises par les statuts pour être admises à l'assemblée. Les personnes qui ont rempli ces formalités après ce délai reçoivent une copie de ces documents à l'assemblée générale. Tout actionnaire, obligataire, titulaire d'un droit de souscription ou titulaire d'un certificat émis avec la collaboration de la société a le droit d'obtenir gratuitement, sur la production de son titre, quinze jours avant l'assemblée générale, une copie de ces documents au siège de la société.

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Note : - La loi prescrit les conditions minimales. Les statuts peuvent, par conséquent, prévoir des

conditions plus sévères. 2.2. Actions nominatives Sont concernés ici les actionnaires des S.A. qui ont choisi la forme nominative, les associés de S.P.R.L. et les associés de sociétés coopératives. Si toutes les actions sont nominatives (ce qui s’impose dans le cas d’une S.P.RL. ou d’une S.C.R.L.), l'invitation peut être envoyée à chaque actionnaire (ou associé) au moyen d'une lettre missive recommandée. Cet envoi doit s'effectuer au plus tard quinze jours avant l'assemblée générale. Il ne s'agit pas ici de quinze jours ouvrables, la convocation peut donc être envoyée au moins le quinzième jour avant l'assemblée, le jour de l'assemblée proprement dite n'entrant pas en considération. Note : lorsqu’un associé a individuellement, expressément et par écrit, dérogé au formalisme de la lettre recommandée, il est permis de recourir un autre mode de communication (par xemple : par téléfax, par courrier électronique recommandé ou par e-mail, ou encore mettre les documents sur le site internet de la société et avertir les associés de cette publication par e-mail). Ces moyens de communication peuvent également être utilisés pour l’envoi des documents qui doivent légalement être mis à disposition des associés. Si l'assemblée générale se tient, par exemple, le 25 mai, l'invitation peut être envoyée le 5 mai ou plus tôt. Les statuts d'une S.C. ou d'une S.C.R.I. peuvent déterminer librement la forme et le délai de l'envoi des convocations. Si les statuts ne prévoient rien en la matière, on se réfèrera aux règles applicables aux S.A. (cf. art. 382 CS). 2.3. Mixité des titres Si des actions au porteur et des actions nominatives ont été émises, les deux formes de convocations doivent être utilisées. La lettre qui est envoyée aux actionnaires nominatifs ne doit pas nécessairement se faire par lettre recommandée à la poste. Des lettres missives seront adressées, quinze jours avant l'assemblée, aux actionnaires, porteurs d'obligations ou titulaires d'un droit de souscription en nom, aux titulaires de certificats nominatifs émis avec la collaboration de la société, aux administrateurs et aux commissaires, mais sans qu'il doive être justifié de l'accomplissement de cette formalité. Quand l'ensemble des actions, obligations, droits de souscription ou certificats émis avec la collaboration de la société est nominatif, les convocations peuvent être faites uniquement par lettres recommandées. Note : lorsqu’un associé a individuellement, par écrit, dérogé au formalisme de la lettre recommandée, il est permis de recourir un autre mode de communication. 2.4. Assemblée générale des obligataires L’organe de gestion ou les commissaires ou les liquidateurs peuvent convoquer les porteurs d'obligations en assemblée générale.

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Ils doivent convoquer cette assemblée sur la demande d'obligataires représentant le cinquième du montant des titres en circulation. 2.4.1. Obligations au porteur Les convocations à l'assemblée générale contiennent l'ordre du jour et sont faites par annonce insérée quinze jours avant l'assemblée, dans le Moniteur belge, et dans un organe de presse de diffusion nationale (cf. art. 570 CS). Quand toutes les obligations sont nominatives, les convocations peuvent être faites uniquement par lettre recommandée (ou par le biais d’un autre mode de communication, pour autant que les intéressés aient marqué leur accord en ce sens). L'ordre du jour contient l'indication des sujets à traiter ainsi que les propositions de décisions qui seront soumises à l'assemblée. Les convocations à l’assemblée générale des obligataires dans une SPRL doivent être faites huit jours avant par lettre recommandée à la poste. La possibilité a également été introduite pour les destinataires d’accepter individuellement, expressément et par écrit d’être informé moyennant une autre méthode de communication (art. 294 C. Soc.). 2.4.2. Obligations nominatives Les convocations à l'assemblée générale contiennent l'ordre du jour et sont faites huit jours avant l'assemblée par lettres missives, recommandées à la poste. L'ordre du jour contient l'indication des sujets à traiter ainsi que les propositions de décisions. 2.5. Titres dématérialisés Dans une S.A. ou S.C.A. des effets dématérialisés peuvent être délivrés. Faute de règles particulières à cette catégorie d'effets, les règles générales pour la convocation des actionnaires s'appliquent. Concrètement, il faut appliquer les règles de la convocation des détenteurs d'actions au porteur. 2.6. Certificats de titres (S.A., S.C.A., et S.P.R.L.) Des certificats se rapportant à (et représentant) des actions, parts bénéficiaires, obligations convertibles ou droits de souscription peuvent être émis, en collaboration ou non avec la société, par une personne morale qui conserve ou acquiert la propriété des titres auxquels se rapportent les certificats. Ces certificats peuvent revêtir la forme au porteur, la forme nominative ou la forme dématérialisée. Toutefois, les certificats se rapportant à des titres nominatifs ne peuvent revêtir la forme au porteur (dans le cas d’une S.P.R.L., les certificats seront donc toujours nominatifs). L'émetteur de certificats exerce tous les droits attachés aux titres auxquels ils se rapportent, en ce compris le droit de vote. Les produits ou revenus attachés aux certificats sont en principe toutefois rétrocédés aux titulaires (porteurs) de ceux-ci.

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2.7. Convocation sans formalités Une assemblée générale peut également se tenir sans convocation formelle, à savoir lorsque tous les actionnaires (ou associés) sont présents ou représentés et représentent la totalité du capital et qu'ils renoncent au respect des formalités de convocation. Ils doivent déclarer vouloir délibérer et décider sur les points de l'ordre du jour qui sont proposés. Cette déclaration doit être reprise dans le procès-verbal. Ceci est confirmé par la loi du 2 août 2002. Il est clair qu'une telle manière de procéder n'est possible que dans une société comptant un nombre restreint d'actionnaires (ou associés) qui sont en contact relativement étroit. D'un point de vue pratique, cette manière de procéder est impossible lorsque des obligations ont été émises, étant donné que les porteurs de celles-ci ont également le droit d'assister à l'assemblée générale avec voix consultative, à moins que tous ne soient également présents ou représentés et renoncent aux formalités de convocation. Si des procurations sont présentées, il convient aussi de vérifier si celles-ci sont formulées de manière suffisamment large pour permettre le déroulement de la procédure susvisée. Tant une assemblée annuelle qu'une assemblée appelée à modifier les statuts peuvent être convoquées sans formalités. Le Code des sociétés, dispose que : « Les associés peuvent, à l'unanimité, prendre par écrit toutes les décisions qui relèvent du pouvoir de l'assemblée générale, à l'exception de celles qui doivent être passées par un acte authentique. » Selon l'Institut des reviseurs d'entreprises, les dispositions du Code des sociétés en matière de décision par écrit ne dispensent cependant :

ni de convoquer l'assemblée générale (y compris donc le commissaire), puisqu'aucune dérogation à l'article 268, § 1er, n'est prévue (sauf renonciation unanime aux formalités de convocation, y compris par le commissaire) ;

ni de délibérer des décisions à prendre (cf. article 63 CS), sauf dispositions statutaires contraires ou renonciation unanime des associés. 3. Contenu de la convocation Le texte de la convocation doit avoir le contenu suivant : - la dénomination de la société; - les mots «société privée à responsabilité limitée», «société anonyme» ou «société en

commandite par actions», « société coopérative à responsabilité limitée; - le siège social; - les mots «registre des personnes morales» ou l'abréviation «R.P.M.» accompagnés de

l'indication du siège du tribunal de commerce dans le ressort duquel la société a son siège social et suivis du numéro d'immatriculation;

- les jour, heure et lieu de l'assemblée; - l'ordre du jour; celui-ci est important parce qu'il limite la compétence de l'assemblée générale :

seuls les points qui y sont mentionnés peuvent faire l'objet de délibérations valables par l'assemblée. l'ordre du jour pour la convocation à l'assemblée générale d'une société ayant fait ou faisant appel public à l'épargne doit comporter les sujets à traiter ainsi que les propositions de décision;

- les formalités à accomplir pour avoir accès à l'assemblée générale (celles-ci sont en principe indiquées dans les statuts). Une formalité à remplir est, par exemple, le dépôt des titres au siège ou auprès d'une institution financière. Souvent, on se contente de faire référence à l'article des statuts applicable;

- pour les sociétés ayant des titres dématérialisés et les sociétés ayant fait ou faisant publiquement appel à l'épargne, des règles légales sont prévues en ce qui concerne les formalités à accomplir pour avoir accès à l'assemblée générale.

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La loi ne prévoit rien concernant le contenu de l'invitation à l'assemblée générale d'une S.C.R.L. ou d'une S.C.R.I., sauf qu'elle doit comporter : - le nom de la société; - les mots «société coopérative» ou l'abréviation «S.C.R.L.» ou les mots «société coopérative

à responsabilité illimitée et solidaire» ou l'abréviation «S.C.R.I.». L'indication des jour, heure et lieu de l'assemblée est naturellement indispensable. Pour le reste, il faut veiller à ce que l'invitation soit suffisamment claire et comprenne les points de l'ordre du jour sur lesquels il convient de prendre une décision. Contenu de la convocation : S.A. dont les actions sont admises à la négociation sur un marché réglementé L’article 533bis, § 1er CS renseigne le contenu minimal de toute convocation à une assemblée générale d’une société anonyme dont les actions sont admises aux négociations sur un marché visé à l’article 4 du Code des sociétés c.à.d. un marché réglementé). L’obligation de mentionner dans l’ordre du jour les propositions de décision est maintenue, mais la société a dorénavant l’obligation de publier celles-ci sur son site internet. Cette obligation de disposer d’un site internet n’est pas neuve pour les sociétés anonymes cotées puisqu’elle leur est déjà imposée, en tant qu’émetteurs de titres, en vertu de l’arrêté royal du 14 novembre 2007 relatif aux obligations des émetteurs d’instruments financiers admis à la négociation sur un marché réglementé. Les informations ainsi mises à disposition sur le site internet doivent y rester accessibles pendant une période de cinq années à compter de la date de l’assemblée générale à laquelle elles se rapportent. Outre l’ordre du jour, la convocation devra contenir, notamment, une description claire et précise des formalités à accomplir par les actionnaires pour être admis à l’assemblée générale (la convocation doit indiquer la date d’enregistrement, la manière dont les actionnaires doivent se faire enregistrer et que seules les personnes qui sont actionnaires à cette date auront le droit de participer l’assemblée générale) et pour y exercer leur droit de vote, ainsi que des informations concernant: - les droits des actionnaires d’inscrire des sujets nouveaux à l’ordre du jour et de déposer des propositions de décision concernant des sujets à traiter inscrits ou à inscrire à l’ordre du jour; - la procédure à suivre pour voter par procuration, notamment le formulaire qui peut être utilisé pour le vote par procuration et les modalités selon lesquelles la société est prête à accepter les notifications, par voie électronique, de désignation d’un mandataire; et - le cas échéant, les procédures permettant de participer à distance à l’assemblée générale et de voter par correspondance ou par voie électronique (art. 533bis, § 1er, 3° nouveau). Note : la définition de ce contenu minimal ne porte pas préjudice au respect d’autres dispositions du Code des sociétés qui prescriraient des mentions particulières dans l’ordre du jour ou la convocation. L’on songe par exemple à l’article 533, § 1er, alinéa 4, deuxième phrase du Code des sociétés en vertu duquel les sociétés cotées, c’est-à-dire, celles dont les titres sont cotés au sens de l’article 4, doivent indiquer dans leur ordre du jour la proposition du comité d’audit relative (au renouvellement de la) à la nomination du commissaire ou du réviseur d’entreprises chargé du contrôle des comptes consolidés.

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4. Informations complémentaires Quinze jours25 avant l'assemblée générale, les actionnaires ou associés, les porteurs d'obligations et les titulaires d'un droit de souscription et de certificats émis avec la collaboration de la société peuvent prendre connaissance, au siège social, des pièces suivantes : 1° les comptes annuels; 2° le cas échéant, les comptes consolidés; 3° la liste des actionnaires qui n'ont pas libéré leurs actions, avec l'indication du nombre de leurs

actions et celle de leur domicile; 4° la liste des fonds publics, des actions, obligations et autres titres de société qui composent le

portefeuille; 5° le rapport de gestion et le rapport des commissaires.

En même temps que la convocation à l'assemblée générale, il est adressé aux actionnaires nominatifs ou aux associés, gérants et commissaires une copie des comptes annuels et des rapports de gestion et de contrôle. Exception : les sociétés coopératives. Une copie de ces documents est transmise gratuitement aux autres personnes convoquées qui en font la demande. Dans les S.P.R.L., ces documents sont transmis sans délai. Dans les sociétés coopératives, ce délai est d’au moins quinze jours ; il est de sept jours avant l'assemblée générale dans une S.A. Cependant, tout actionnaire, obligataire, titulaire d'un droit de souscription ou titulaire d'un certificat émis avec la collaboration de la société a le droit d'obtenir gratuitement, sur la production de son titre, quinze jours avant l'assemblée générale, une copie de ces documents au siège de la société. Une assemblée générale extraordinaire est généralement convoquée pour décider d'une modification des statuts. Les mesures sur lesquelles l'assemblée générale extraordinaire doit décider doivent être mentionnées expressément dans la convocation, de préférence de manière quelque peu détaillée. Pour certaines modifications des statuts, le conseil d'administration, les gérants et/ou le commissaire ou, à défaut de commissaire, un reviseur d'entreprises, doivent établir un rapport. Dans ce cas, la convocation doit indiquer que ces rapports ont été envoyés à trois catégories d'actionnaires : 1) aux détenteurs d'actions ou parts nominatives, en même temps que la convocation; 2) à ceux qui ont rempli les formalités requises par les statuts pour être admis à l'assemblée

générale (7 jours – S.A.); 3) à tout actionnaire/obligataire qui le demande, sur la production de son titre. Cette copie doit

être fournie au moins quinze jours avant l'assemblée. 5. Date limite d'une convocation valable Les gérants ou administrateurs sont tenus de convoquer l'assemblée annuelle dans les six mois de la clôture de l'exercice comptable. Une assemblée générale demandée par un cinquième du capital doit être convoquée dans les trois semaines de la réquisition ainsi introduite.

25 Exception faite des S.A. dont les actions sont admises à la négociation sur un marché réglementé (30 jours)

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5 Admission à l'assemblée générale Les statuts prescrivent les formalités requises pour être admis à l'assemblée générale. La formalité la plus fréquente pour être admis à l'assemblée générale est la clause de dépôt : l'obligation de déposer les actions au porteur, quelque temps avant l'assemblée, auprès d'une institution financière ou au siège social de la société, et l'obligation pour les propriétaires d'actions nominatives de communiquer à la société s'ils assisteront à l'assemblée générale. L’admission aux assemblées générales des sociétés anonymes dont les actions sont admises aux négociations sur un marché visé à l’article 4 CS est ainsi subordonnée à l’enregistrement à une date qui précède l’assemblée générale, appelée date d’enregistrement, des actions détenues par l’actionnaire. Cette procédure d’enregistrement n’est pas inconnue pour les sociétés anonymes cotées belges puisque depuis la loi dite de « Corporate Governance » du 2 août 2002, les statuts des sociétés cotées pouvaient déjà prévoir une telle procédure d’enregistrement. De facultatif, ce système devient, par l’effet de la Directive, obligatoire. Le système proposé distingue deux moments dans la procédure d’admission à l’assemblée générale: la date d’enregistrement, soit la date à laquelle les droits d’un actionnaire de participer à l’assemblée générale et d’y exercer le droit de vote sont déterminés et ce, en fonction des actions dont il est détenteur à cette date, et la date ultime à laquelle l’actionnaire doit avoir manifesté son intention de participer à l’assemblée générale. La date d’enregistrement est fixée au quatorzième jour qui précède l’assemblée générale à 24 heures (heure belge). Est visée la position de l’actionnaire qui est liquidée dans les comptes de l’intermédiaire (« settlement date »), à l’exclusion des ordres d’achat ou de vente d’actions qui ne seraient pas encore liquidés à cette date. Les actionnaires seront admis à participer à l’assemblée générale à la condition que leurs actions soient inscrites à leur nom, à la date d’enregistrement sur le registre des actions nominatives ou dans les comptes d’un teneur de compte agréé ou d’un organisme de liquidation. Il s’agit d’un délai unique conformément à la Directive, c’est-à-dire, un même délai d’application pour toute société. Une attestation doit être délivrée à l’actionnaire par le teneur de comptes agréé ou par l’organisme de liquidation certifiant le nombre d’actions dématérialisées inscrites au nom de l’actionnaire dans ses comptes à la date d’enregistrement, ou par l’intermédiaire financier certifiant le nombre d’actions au porteur produites à la date d’enregistrement, pour lequel l’actionnaire a déclaré vouloir participer à l’assemblée générale. En ce qui concerne les actions nominatives, la société elle-même constatera, dans le registre des actions nominatives, le nombre d’actions détenues à la date d’enregistrement par les actionnaires qui lui auront indiqué leur intention de participer à l’assemblée générale. La seule démarche qui incombe à l’actionnaire est de faire part de son intention de participer à l’assemblée générale au plus tard le sixième jour qui précède celle-ci. Le conseil d’administration consigne dans un registre les coordonnées de chaque actionnaire qui a manifesté son intention de participer à l’assemblée générale.

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Synthèse : Publication convocation A.G. (au plus tard) 30e jour Mise à disposition sur site Inscription points nouveaux et propositions décision (au plus tard) 22e jour Accusé de réception des demandes d'inscription des points nouveaux 20e jour Deuxième convocation (A.G. de carence) 17e jour Publication ordre du jour révisé (au plus tard) 15e jour Date d'enregistrement (à 24 heures) 14e jour Intention de participer à l'A.G., vote par procuration et par correspondance, questions écrites (au plus tard) 6e jour Vote électronique (vote à distance) 1e jour Assemblée générale Publication résultats vote (au plus tard) 15 jours Les jours sont des jours calendrier.

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1. Personnes admises à l'assemblée générale Tous les actionnaires/associés ayant droit de vote peuvent voter eux-mêmes ou par procuration. 1.1. Les actionnaires/associés Les statuts déterminent les formalités à accomplir pour être admis à l'assemblée générale. Le droit de participer à l'assemblée générale. Quiconque est détenteur d'une ou de plusieurs actions (ou parts) a le droit d'assister à l'assemblée générale. Les porteurs d'actions sans droit de vote ont également accès à l'assemblée générale. Ils ne peuvent toutefois pas participer au vote, sauf dans les cas où la loi prévoit que les actions sans droit de vote ont malgré tout droit au vote. Le porteur d'une part bénéficiaire ne peut participer à l'assemblée générale que si cette participation a été prévue statutairement. Dans ce cas, il existe certaines limitations quant au pouvoir de vote qui leur est attribué. Si les actions ont été vendues au moment de l'assemblée générale, il convient de consulter le registre des actions. Seule la personne inscrite sur le registre (actions nominatives) ou le possesseur de l’action (actions au porteur) a accès à l'assemblée générale. Les statuts d'une S.C. ou d'une S.C.R.I. peuvent prévoir une autre réglementation en cas de cession de parts. Si l'on a hérité d'actions nominatives, seuls les héritiers qui sont en mesure de prouver leur qualité d'héritier (p. ex. au moyen d'un acte notarié) sont admis. Si un associé d'une S.C. ou d'une S.C.R.I. décède, ses héritiers n'ont pas le droit de participer à l'assemblée générale en cette qualité. S'ils sont cités nommément dans les statuts ou s'ils appartiennent à une catégorie statutaire à laquelle les actions peuvent être transmises et qu'ils reçoivent en outre l'autorisation de l'organe compétent pour décider de l'adhésion, ils peuvent devenir associés dans la société coopérative et exercer tous les droits liés aux actions. Si les actions sont la propriété d'une autre société, un représentant de cette société participera à l'assemblée générale (il s'agira généralement des administrateurs ou gérants). 1.1.1. Actions en indivision La loi prévoit expressément que, si une action appartient à plusieurs propriétaires, la société a le droit de suspendre les droits (droit de vote, droit de dividende) liés à l'action. Cette suspension se prolonge jusqu'à ce qu'une personne soit désignée comme propriétaire de l'action. Les copropriétaires peuvent également se faire représenter par un mandataire unique, choisi parmi eux ou en dehors d’eux. 1.1.2. Usufruit d'actions Qui peut agir dans ce cas : l'usufruitier ou le nu-propriétaire ? Plusieurs positions sont avancées dans la jurisprudence. Comme dans le cas d'actions en indivision, la société peut suspendre les droits liés à cette action jusqu'à ce qu'une personne soit désignée comme propriétaire de l'action. Les statuts peuvent également prévoir que le droit de vote soit exercé par l’usufruitier pour les assemblées dites ordinaires et par le nu-propriétaire pour les assemblées dites extraordinaires. Certains jugements considèrent que le droit de vote appartient au nu-propriétaire, sauf lorsqu’il porte sur l’affectation du résultat (il est alors dévolu au nu-propriétaire).

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En tout état de cause, nous pensons que le nu-propriétaire doit être convoqué à toutes les assemblées et il peut prendre aux délibérations. 1.1.3. Mise en gage d'actions Lorsque les actions sont données en gage, le débiteur demeure en droit d'assister à l'assemblée générale et d'y voter. Le créancier (le détenteur du gage) ne peut participer à l'assemblée, mais il doit néanmoins faire le nécessaire pour fournir au débiteur une preuve d'accès (p. ex. en se conformant à la formalité de dépôt). 1.1.4. Saisie sur actions Si une saisie sur actions a été pratiquée, le débiteur peut néanmoins prendre part à l'assemblée générale. Ceci résulte du fait qu’il garde la qualité d’associé. 1.1.5. Actions/parts non entièrement libérées L'exercice du droit de vote afférent aux parts sur lesquelles les versements n'ont pas été opérés est suspendu aussi longtemps que ces versements, régulièrement appelés et exigibles, n'auront pas été effectués.

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1.2. La représentation par un mandataire et le vote par correspondance Il a été expressément prévu dans la loi que les actionnaires peuvent se faire représenter à l'assemblée générale et voter par procuration. En conséquence, un actionnaire/associé peut envoyer un mandataire à l'assemblée générale, doté d'une procuration écrite valable. Les statuts ne peuvent exclure le droit de vote par procuration. La notion de procuration est désormais définie dans l’article 547, al. 2 CS. Il est également confirmé, ainsi que l’exige la Directive, que le mandataire bénéficie des mêmes droits que ceux dont bénéficie l’actionnaire ainsi représenté et, en particulier, du droit de prendre la parole, de poser des questions lors de l’assemblée générale et d’y exercer le droit de vote. En ce qui concerne la durée du mandat, l’article 547, al. 3 CS précise que la procuration peut être donnée pour une ou plusieurs assemblées déterminées ou pour les assemblées tenues pendant une période déterminée Note : dans les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé, l’actionnaire ne peut désigner, pour une assemblée générale donnée, qu’un seul mandataire, celui-ci pouvant toutefois se substituer un tiers conformément aux règles de droit civil en matière de substitution de mandat. Deux exceptions sont également prévues… La désignation d’un mandataire doit faire l’objet d’un écrit. Il en va de même de la notification de la désignation à la société. Les actionnaires peuvent également procéder à cette désignation et à sa notification par voie électronique. La procuration doit parvenir à la société au plus tard le sixième jour calendrier qui précède la date de l’assemblée. Sont seules prises en compte les procurations introduites par des actionnaires qui satisfont aux formalités d’admission à l’assemblée visées à l’article 536, § 2, c’est-à-dire dont les actions ont été enregistrées à la date d’enregistrement. Conflit d’intérêts En cas de conflit d’intérêts potentiel entre l’actionnaire d’une société dont les actions sont admises à la négociation sur un marché réglementé et le mandataire qu’il a désigné, deux règles doivent être respectées : - d’une part, le mandataire doit divulguer les faits précis qui sont pertinents pour permettre à

l’actionnaire d’évaluer le risque que le mandataire puisse poursuivre un intérêt autre que celui de l’actionnaire.

- d’autre part, en cas de conflit d’intérêts potentiels, le mandataire ne peut valablement exercer le droit de vote pour compte de l’actionnaire que s’il dispose d’instructions de vote spécifiques pour chaque sujet inscrit à l’ordre du jour. En d’autres termes, dans cette situation, le mandat ne peut pas être donné en termes généraux, c’est-à-dire, sans instructions de vote précises. Conformément à la Directive, l’article 547bis, § 4 CS énonce, de manière exemplative, des situations constitutives de conflits d’intérêts potentiels entre un mandataire et l’actionnaire qui le désigne.

Vote par correspondance ou par voie électronique Pour les sociétés non cotées, il y a lieu de se référer aux statuts. Selon la Directive, les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé, doivent pouvoir offrir à leurs actionnaires la possibilité de voter par correspondance avec un support papier avant l’assemblée générale (art. 12 Directive). En outre, ces sociétés doivent se voir autorisées à offrir également à leurs actionnaires la possibilité de voter par voie électronique avant l’assemblée (art. 8, § 1er , c), de la Directive).

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Le vote par correspondance avant l’assemblée est admis dans les sociétés anonymes par l’article 550 CS qui comporte en la matière un encadrement souple. Le recours au vote à distance ne dispense pas l’actionnaire du respect des formalités d’admission à l’assemblée générale prévues par l’article 536 CS. En ce qui concerne le délai dans lequel l’actionnaire, qui entend avoir recours à ce mode d’exercice du droit de vote, doit exprimer son vote à distance, il convient de distinguer le vote par correspondance et le vote sous forme électronique. Le vote sous forme électronique doit pouvoir être exercé jusqu’au jour qui précède l’assemblée. Dans la mesure où la société propose à ses actionnaires ce mode d’exercice du droit de vote, elle doit être en mesure de mettre à leur disposition une technologie offrant cette possibilité. En ce qui concerne le vote par correspondance, ce délai sera fixé par ou en vertu des statuts sauf dans les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé où les formulaires de vote par correspondance doivent parvenir à la société au plus tard le sixième jour qui précède la date de l’assemblée générale. Dans les autres sociétés, dans l’hypothèse où un actionnaire, qui aurait exprimé un vote à distance, viendrait à céder ses actions avant la date de l’assemblée générale, le vote à distance qu’il aurait ainsi exprimé est considéré comme nul. Le vote par correspondance peut aussi être organisé dans les SPRL (cf. art. 280 C.soc.), tandis que la faculté d’offrir aux associés la possibilité de voter à distance sous forme électronique leur est également ouverte (cf. art. 270bis, § 5 CS). Par contre, vu la règle d’unanimité instaurée par l’article 382, alinéa 3 CS, aux termes duquel les associés d’une société coopérative, peuvent, à l’unanimité, prendre par écrit toutes les décisions qui relèvent du pouvoir de l’assemblée générale, le vote à distance n’est pas organisé dans cette forme de société. Les statuts d’une société coopérative peuvent interdire la représentation par procuration ou par correspondance. En vertu du principe de la liberté statutaire, les statuts peuvent régir la représentation et le droit de vote par procuration et, par exemple, prescrire qu'un actionnaire ou un associé ne peut se faire représenter que par un autre actionnaire ou associé. 2. Administrateurs, gérants et commissaires Tant le conseil d'administration, ou les gérants, que le commissaire sont tenus d'assister en personne à l'assemblée générale et y sont convoqués. Les actionnaires ou associés ont en effet le droit de leur poser des questions. Les gérants répondent aux questions qui leur sont posées par les associés au sujet de leur rapport ou des points portés à l'ordre du jour, dans la mesure où la communication de données ou de faits n'est pas de nature à porter préjudice aux intérêts commerciaux de la société ou aux engagements de confidentialité souscrits par la société ou ses gérants. Les commissaires répondent aux questions qui leur sont posées par les associés au sujet de leur rapport. Ils ont le droit de prendre la parole à l'assemblée générale en relation avec l'accomplissement de leur fonction. Les administrateurs et les commissaires ont accès à l'assemblée générale d'une S.C. et d'une S.C.R.I., même s'ils ne sont pas associés. Dans ce cas, ils ne disposent pas d'un droit de vote (cf. art. 412 CS). Note : les liquidateurs sont soumis à des obligations similaires.

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3. Porteurs d'obligations, titulaires d'un droit de souscription ou de certificats Les porteurs d'obligations, titulaires d'un droit de souscription ou de certificats émis avec la collaboration de la société peuvent assister aux assemblées générales, mais avec voix consultative seulement. Les porteurs d'obligations d'une S.C. et d'une S.C.R.I. ne disposent pas d'un droit légal d'assister à l'assemblée générale. Les statuts peuvent les y autoriser. 4. Tiers Les tiers peuvent être tant des avocats que les conseillers de certains actionnaires ou de l'organe d'administration. Ils ne peuvent assister à l'assemblée générale que si l'assemblée elle-même les y autorise par une décision à la majorité. En effet, l'assemblée générale n'a pas un caractère public. Si la société n'a pas désigné de commissaire, l'actionnaire peut toutefois se faire assister par un expert-comptable, et dispose de pouvoirs individuels d'investigation et de contrôle. En principe, les personnes autres que celles déjà nommées, n'ont pas accès à l'assemblée générale d'une S.C. ou d'une S.C.R.I. Néanmoins, lorsque la société coopérative n'a pas nommé de commissaire, les experts-comptables des associés doivent, dans ce cas, aussi être admis à l'assemblée générale. L'assemblée générale peut admettre des tiers (p. ex. des avocats), lorsqu'une demande a été faite à cet effet. L'assemblée générale proprement dite se prononce sur cette demande, sauf si la présence de ces tiers a été réglée dans les statuts.

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6 Délibérations et prise de décision Pour pouvoir prendre valablement des décisions, l'assemblée générale doit prendre en considération une série de prescriptions légales et statutaires. Ces prescriptions varient selon la nature de la société et en fonction des décisions prises par l'assemblée générale. 1. Délibération Les statuts déterminent la manière dont l'assemblée générale délibère. En l'absence de dispositions statutaires, les nominations sont faites et les décisions prises selon les règles ordinaires des assemblées délibérantes (voir le Règlement de la Chambre des représentants). Participation à distance (nouveau) Dans la mesure où ce mode de participation aux assemblées générales est susceptible de favoriser une plus grande participation des actionnaires aux assemblées générales, il a paru adéquat d’ouvrir cette possibilité à toutes les formes de sociétés indépendamment de l’éventuelle cotation de leurs actions. Dans les SA et les SPRL, le dispositif peut en outre être étendu aux assemblées générales d’obligataires. Seule une disposition statutaire peut autoriser les actionnaires/associés à participer à l’assemblée générale grâce à un moyen de communication électronique mis à disposition par la société. Cela suppose une décision favorable de l’assemblée générale qui déterminera en outre les modalités suivant lesquelles la qualité d’actionnaire/associé et l’identité de la personne désireuse de participer à l’assemblée sont contrôlées, les conditions visant à garantir la sécurité de la communication électronique. Le Code des sociétés laisse une grande liberté statutaire pour organiser ce mode de participation à l’assemblée, afin qu’elles puissent retenir les solutions les plus adaptées à leur situation et tenir compte des évolutions technologiques en la matière. Le Roi est cependant autorisé à préciser la nature et les conditions d’application des moyens de communication électronique visés par la présente disposition si cela s’avérait nécessaire. Note : l’organisation d’une participation à distance par voie électronique à l’assemblée n’est qu’une faculté ouverte aux sociétés. La société est libre du choix des technologies auxquelles elle entend recourir, elle doit toutefois être en mesure de contrôler, grâce au moyen de communication électronique utilisé, la qualité et l’identité de l’actionnaire/associé mais aussi de garantir la sécurité de la communication électronique dans un souci de faciliter le bon déroulement et la préparation des assemblées. Exemples :

- Page web sécurisée, - Formulaire électronique, - Signature électronique, - Recours obligatoire à l’utilisation de certains logiciels, - etc.

Ce mode de participation ne vient pas se substituer à l’obligation de tenir une réunion physique des actionnaires/associés en un lieu désigné par les statuts. La tenue d’une réunion physique reste obligatoire mais la société peut organiser, au profit de ses actionnaires/associés, un mode de participation à distance. Les membres du bureau de l’assemblée, les administrateurs et les commissaires doivent être physiquement présents au lieu de l’assemblée.

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Les statuts doivent définir les modalités suivant lesquelles le bureau de l’assemblée assure ses tâches dans le cas particulier des actionnaires qui participent à distance: régularité de la convocation, contrôle de la qualité d’actionnaire et de l’identité de la personne désireuse de participer à distance à l’assemblée, tenue de la liste (électronique) des présences, etc. La participation à distance à une assemblée générale est assimilée à la participation à la réunion physique. Les actionnaires/associés qui participent à distance à l’assemblée générale sont réputés présent à l’endroit où se tient l’assemblée générale pour le respect des conditions de présence et de majorité. Note : il n’est pas requis que ces moyens de communication électronique permettent à l’actionnaire/associé de participer aux délibérations et d’exercer son droit de poser des questions – rien n’empêche cependant les statuts de prévoir cette possibilité. 2. Qui dispose du droit de vote? Chaque titulaire d'une action (assortie d'un droit de vote) doit pouvoir voter à l'assemblée générale. Les statuts ne peuvent porter atteinte à ce droit, par exemple en rendant le droit de vote tributaire d'un nombre minimum d'actions de capital. Ce droit de vote peut toutefois être suspendu si l'actionnaire n'a pas procédé à la libération de son action légitimement demandée par le conseil d'administration. Le droit de vote lié aux actions de capital qu'une société détient d'elle-même en portefeuille (c.à.d. des actions propres) est suspendu. Le titulaire d'une part bénéficiaire ne disposera d'un droit de vote que si celui-ci est prévu par les statuts. Toutefois, lorsque l'assemblée générale prend une décision sur les différents types d'actions et les droits y afférents, le titulaire d'une action sans droit de vote ou d’une part bénéficiaire a toujours un droit de vote, nonobstant toute disposition contraire des statuts.

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3. Quorum et majorité 3.1. Types de décisions de l'assemblée générale Les décisions que peut prendre l'assemblée générale peuvent être subdivisées en quatre catégories. Les conditions pour prendre valablement des mesures diffèrent selon la catégorie. En principe, la compétence de l’assemblée est résiduaire, en ce sens qu’elle connaît de tout ce qui ne touche pas à l’administration ou au contrôle de la société (ou plus précisément de tout ce qui n’a pas été confié au conseil d’administration). 3.1.1. Décisions ordinaires Il s’agit de décisions qui requièrent une majorité simple (50% + 1 voix) ; la plupart du temps, ces décisions sont prises au moment de l’assemblée générale annuelle. L’acte constitutif d’une société doit mentionner les lieu, jour et heure de l'assemblée générale ordinaire des associés ainsi que les conditions d'admission et d'exercice du droit de vote. Il doit en effet être tenu, chaque année, au moins une assemblée générale dans la commune, aux jour et heure indiqués par les statuts ; c’est ce qu’on appelle l’assemblée générale annuelle. Les décisions à adopter ont trait aux sujets suivants :

- approbation des comptes annuels; - affectation du résultat; - nomination /renouvellement du mandat d'un administrateur ou d'un gérant, d’un

commissaire; - décharge aux administrateurs, gérants et commissaire(s) ; - autorisation d'achat d'un bien relevant de la procédure des quasi-apports; - exercice de l’action sociale contre l’organe de gestion ou de contrôle; - continuation des activités.

Celle-ci discute des points suivants :

- L’approbation des comptes annuels Chaque année, en vue de l’assemblée générale ordinaire, les administrateurs dressent un inventaire et établissent les comptes annuels dont la forme et le contenu sont déterminés par le Roi. Les comptes annuels comprennent le bilan, le compte de résultats ainsi que l’annexe et forment un tout. L'organe de gestion a le droit de proroger, séance tenante, la décision relative à l'approbation des comptes annuels à trois semaines. Cette prorogation n'annule pas les autres décisions prises, sauf si l'assemblée générale en décide autrement. La seconde assemblée a le droit d'arrêter définitivement les comptes annuels. Note : le délai dans lequel la société anonyme dont les actions sont admises aux négociations sur un marché visé à l’article 4 du Code des sociétés, peut, dans les conditions de l’article 534 du Code des sociétés, reporter son assemblée générale, doit être prolongé afin de tenir compte du délai de convocation de trente jours minimum prévu par l’article 533, § 2 CS. Le délai de trois semaines est porté à cinq semaines afin de tenir compte des délais de publication de la convocation. Ces comptes annuels ne sont qu'un projet. Ils sont soumis par l'assemblée générale pour analyse. Dans le cadre de celle-ci, l'assemblée générale a le droit d'apporter des modifications et demander ainsi à l’organe de gestion de « revoir sa copie » pour ensuite approuver une nouvelle version proposée de comptes annuels.

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Si l'assemblée générale rejette le bilan, l'organe d'administration devra établir un nouveau bilan, en tenant compte des observations de l'assemblée. Ce bilan devra dès lors être soumis à une nouvelle assemblée générale.

- La lecture du rapport de gestion des administrateurs et du rapport du commissaire ou des coopérateurs chargés du contrôle.26

L'assemblée générale prend connaissance de ces rapports. Les rapports ne doivent pas être approuvés. Dans les « petites sociétés » qui n'établissent pas de rapport de gestion, l'organe de gestion devra se justifier oralement en cette matière.

- La décharge aux administrateurs, gérants et commissaire(s) La décharge a pour effet de libérer les administrateurs, le commissaire ou les associés chargés du contrôle de la société de leur responsabilité contractuelle vis-à-vis de la société en ce qui concerne leur gestion relative à l’exercice clôturé. Elle est votée, chaque année, par l’assemblée générale ordinaire des sociétaires à l’occasion de l’approbation des comptes. L'octroi de la décharge doit s'effectuer par vote distinct. La décharge peut être refusée. Il doit y avoir des fondements à ce refus et ceux-ci donnent lieu généralement à l'introduction d'une action de la société contre les administrateurs, les gérants et/ou le commissaire. En cas de refus d'accorder la décharge, les administrateurs peuvent se faire accorder la décharge par le tribunal ou attendre la prescription quinquennale. La décharge n’est valable que si : - le bilan ne contient ni omission, ni fausse indication de nature à dissimuler la situation réelle

de la société ; - l’assemblée générale s’est prononcée par un vote spécial sur la décharge des administrateurs et

des commissaires. La seule approbation des comptes annuels n’entraîne donc pas automatiquement la décharge ; celle-ci doit faire l’objet d’une délibération séparée.

- La nomination d'administrateurs ou de gérants et des commissaires cf. supra.

- La rémunération des administrateurs ou gérants Trois hypothèses peuvent se présenter : 1) les statuts déterminent que les administrateurs ne sont pas rémunérés; 2) les statuts fixent le montant de la rémunération : l'assemblée générale ne peut attribuer

aucune autre rémunération; 3) les statuts ne déterminent rien ou prévoient que la rémunération est fixée par l'assemblée

générale.

26 Code des sociétés, articles 15, 141, 165 et 166.

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Lorsque des décisions interviennent en cours d’exercice social, ces décisions sont prises par une assemblée générale ordinaire réunie extraordinairement. Exemple : Dans le cadre de la procédure d’alarme, une assemblée générale est réunie et décide de continuer les activités de la société.

Seule l’assemblée générale des actionnaires/associés, organe souverain de la société, dispose du pouvoir d’affecter le résultat. Pour les sociétés coopératives, sauf disposition statutaire contraire, l'assemblée générale décide de l'affectation des « bénéfices et des pertes » (art. 384 CS). Le bilan doit être établi après affectation, c.à.d. après que l’assemblée générale ait statué sur les propositions de l’organe de gestion. Ces dernières sont évidemment conditionnelles. L'assemblée générale en décidera puisqu’elle reste l’organe souverain de la société. L’organe de gestion propose et explique la répartition du bénéfice à l'assemblée générale. Comme le(s) membres(s) de l’organe de gestion sont en principe nommés à la majorité simple par l’assemblée générale, il est fréquent que la proposition d’affectation des résultats obtienne l'approbation de cette même assemblée générale. Dans certains cas exceptionnels, l'assemblée générale n'approuvera les comptes annuels qu'à condition que l'affectation du résultat soit modifiée. L'affectation du résultat modifiée doit être comptabilisée et elle engendrera de nouveaux comptes annuels. Ceux-ci sont (ou deviennent) définitivement approuvés et seront publiés. Lors de l'affectation du résultat, des moyens peuvent être prélevés sur le capital, les primes d'émission et les réserves. Ceci sera principalement le cas lorsque le bénéfice à affecter n'est pas suffisamment important pour procéder à des distributions satisfaisantes aux actionnaires (éventuellement aux administrateurs ou gérants) ou lorsque l'on se trouve face à une perte à affecter et que l'on veut tout de même mener une politique de distribution ou que l'on veut la couvrir par les réserves. Si l'on recourt à cette éventualité (p.ex. une réduction de capital) dans une S.A., une S.P.R.L. ou une S.C.R.L., il faut respecter les dispositions applicables en cas de modification des statuts (conditions de quorum et de majorité).

Depuis le 1er

avril 2007, le dépôt des comptes annuels et consolidés ne peut plus être effectué que par voie électronique, au contraire de la solution adoptée pour les autres actes des sociétés. L'assemblée générale décide s'il y a lieu d'exercer l'action sociale contre les administrateurs, gérants ou les commissaires. Elle peut charger un ou plusieurs mandataires de l'exécution de cette décision. Sauf dispositions plus rigoureuses des statuts, si, par suite de perte, l'actif net est réduit à un montant inférieur à la moitié (S.C.R.L. : de la part fixe du) du capital social, l'assemblée générale doit être réunie dans un délai n'excédant pas deux mois à dater du moment où la perte a été constatée ou aurait dû l'être en vertu des obligations légales ou statutaires, en vue de délibérer et de statuer, le cas échéant, dans les formes prescrites pour la modification des statuts, de la dissolution éventuelle de la société et éventuellement d'autres mesures annoncées dans l'ordre du jour. L'organe de gestion justifie ses propositions dans un rapport spécial tenu à la disposition des associés au siège de la société quinze jours avant l'assemblée générale. Si l'organe de gestion propose la poursuite des activités, il expose dans son rapport les mesures qu'il compte adopter en vue de redresser la situation financière de la société. Ce rapport est annoncé dans l'ordre du jour. Une copie de ce rapport est transmise conformément à l'article 269 CS.

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Dans les sociétés coopératives, un exemplaire de ce rapport est simplement mis à la disposition des associés conformément à l'article 381 CS. Une copie en est également transmise sans délai aux personnes qui ont accompli les formalités prescrites par les statuts pour être admises à l'assemblée. Ce rapport est annoncé dans l'ordre du jour. Une copie peut en être obtenue conformément à l'article 535 CS. Un exemplaire est également transmis sans délai aux personnes qui ont accompli les formalités requises par les statuts pour être admises à l'assemblée. Les mêmes règles sont observées si, par suite de perte, l'actif net est réduit à un montant inférieur au quart du capital social mais, en ce cas, la dissolution aura lieu si elle est approuvée par le quart des voix émises à l'assemblée. Lorsque l'assemblée générale n'a pas été convoquée conformément au présent article, le dommage subi par les tiers est, sauf preuve contraire, présumé résulter de cette absence de convocation. L'absence du rapport prévu par cet article entraîne la nullité de la décision de l'assemblée générale.

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3.1.2. Modifications ordinaires des statuts L'assemblée générale a, sauf disposition contraire, le droit d'apporter des modifications aux statuts. L'assemblée générale ne peut valablement délibérer et statuer sur les modifications aux statuts que si l'objet des modifications proposées a été spécialement indiqué dans la convocation, et si ceux qui assistent à la réunion représentent la moitié au moins du capital social. Si cette dernière condition n'est pas remplie, une nouvelle convocation sera nécessaire et la deuxième assemblée délibérera valablement, quelle que soit la portion du capital représentée par les associés présents. Aucune modification n'est admise que si elle réunit les trois quarts des voix au moins. Notes : - Il n'est pas tenu compte des parts qui sont suspendues pour la détermination des conditions de

présence et de majorité à observer dans l'assemblée générale ; - Art. 276 CS (SPRL)

Hormis les cas où un droit de vote leur est reconnu, il n'est pas tenu compte des parts privilégiées sans droit de vote pour la détermination des conditions de présence et de majorité à observer dans les assemblées générales. Il n'est pas tenu compte des parts qui sont suspendues pour la détermination des conditions de présence et de majorité à observer dans l'assemblée générale.

- Art. 543 CS (SA) Pour la détermination des conditions de présence et de majorité à observer dans les assemblées générales, il n'est pas tenu compte : 1° des actions privilégiées sans droit de vote, hormis le cas où un droit de vote leur est reconnu; 2° des actions qui sont suspendues.

Les statuts peuvent limiter le nombre de voix dont chaque associé dispose dans les assemblées, à condition que cette limitation s'impose à tout associé quelles que soient les parts pour lesquelles il prend part au vote. Lorsque les actions sont de valeur égale, chacune donne droit à une voix. Lorsqu'elles sont de valeur inégale ou que leur valeur n'est pas mentionnée, chacune d'elles confère de plein droit un nombre de voix proportionnel à la partie du capital qu'elle représente, en comptant pour une voix l'action représentant la quotité la plus faible; il n'est pas tenu compte des fractions de voix, excepté dans les cas prévus à l'article 560. L'exercice du droit de vote afférent aux actions sur lesquelles les versements n'ont pas été opérés est suspendu aussi longtemps que ces versements, régulièrement appelés et exigibles, n'auront pas été effectués. Les statuts déterminent si, et dans quelle mesure, un droit de vote est accordé aux titulaires de parts bénéficiaires. Ceux-ci ne pourront, en aucun cas, donner droit à plus d'une voix par titre, se voir attribuer dans l'ensemble un nombre de voix supérieur à la moitié de celui attribué à l'ensemble des actions, ni être comptés dans le vote pour un nombre de voix supérieur aux deux tiers du nombre des voix émises par les actions. Si les votes, soumis à la limitation sont émis en sens différents, les réductions s'opèrent proportionnellement; il n'est pas tenu compte des fractions de voix. Pour la détermination des conditions de présence et de majorité à observer dans les assemblées générales, il n'est pas tenu compte des actions privilégiées sans droit de vote, hormis le cas où un droit de vote leur est reconnu (cf. supra). Nul ne peut prendre part au vote à l'assemblée générale d'une société pour un nombre de voix supérieur à celui afférent aux titres dont il a déclaré la possession, conformément aux articles 514

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ou 515, alinéa 1er (ndlr : publicité des participations importantes), vingt jours au moins avant la date de l'assemblée générale. L'article 2 de la loi du 2 mars 1989 relative à la publicité des participations importantes dans les sociétés cotées en bourse et réglementant les offres publiques d'acquisition est applicable au présent alinéa. Ce prescrit ne s'applique pas : 1° aux titres auxquels est attaché un pouvoir de vote inférieur à 5 % du total des droits de vote existant à la date de l'assemblée générale; 2° aux titres auxquels est attaché un pouvoir de vote se situant entre deux des seuils successifs de cinq points visés à l'article 1er, § 1er, de la loi du 2 mars 1989 relative à la publicité des participations importantes dans les sociétés cotées en bourse et réglementant les offres publiques d'acquisition; 3° aux titres souscrits par exercice d'un droit de préférence, aux effets acquis par succession ou par suite de fusion, de scission ou de liquidation, ni aux effets acquis en exécution d'une offre publique d'acquisition effectuée en conformité avec les dispositions prévues par ou en vertu du chapitre II de la loi du 2 mars 1989 relative à la publicité des participations importantes dans les sociétés cotées en bourse et réglementant les offres publiques d'acquisition. Note : Lorsque des droits de vote suspendus ont été exercés et que, sans ces droits de vote illégalement exercés, les quorums de présence ou de majorité requis pour les décisions d'assemblée générale n'auraient pas été réunis, ces décisions sont nulles. Si les statuts d'une S.C.R.L. ou d'une S.C.R.I. ne prévoient rien concernant une modification des statuts ou prévoient la possibilité sans préciser la majorité requise, il convient d'admettre qu'une décision de ce type requiert l'accord de tous les associés (seulement pour certains cas). Sauf dispositions contraires des statuts, les résolutions sont prises en suivant les règles applicables aux sociétés anonymes. D'autres clauses sont toutefois possibles, et ce concernant tous les types de décision. On peut ainsi prévoir une majorité simple (la moitié + 1 voix) ou une majorité absolue. Ces modifications, dans la mesure où elles modifient les statuts, doivent être constatée par acte authentique. Exemples :

- augmentation de capital; - procédure du capital autorisé ; - émission d'obligations convertibles ou de droits de souscription; - réduction de capital; - rachat d’actions propres et reventes de celles-ci (sauf exceptions) ; - modification de la durée de la société, de la date de clôture d’un exercice; - transfert du siège social (si ce transfert est effectué vers l’étranger, certains auteurs estiment

que l’unanimité des actionnaires est requise) ; - dissolution de la société ; - durée de la société.

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3.1.3. Modification des statuts relative aux droits ou aux types d'actions S'il existe plusieurs catégories de parts, l'assemblée générale peut, malgré toutes dispositions contraires des statuts, modifier leurs droits respectifs ou décider le remplacement des parts d'une catégorie par celles d'une autre. L'objet et la justification détaillée des modifications proposées sont exposés par l'organe de gestion dans un rapport annoncé dans l'ordre du jour. Une copie de ce rapport est transmise en même temps que la convocation. L'absence du rapport entraîne la nullité de la décision de l'assemblée générale. Dans l'hypothèse visée au présent article, les limitations résultant des articles 277 et 543 ne sont pas applicables et l'assemblée générale doit réunir dans chaque catégorie les conditions de présence et de majorité requises pour une modification des statuts. Il n'est pas tenu compte des parts qui sont suspendues pour la détermination des conditions de présence et de majorité à observer dans l'assemblée générale. Pour les S.C. et les S.C.R.I., sauf dispositions contraires des statuts, les résolutions sont prises en suivant les règles applicables aux sociétés anonymes (art. 382 CS). Nonobstant toute stipulation contraire, la modification des statuts qui vise à transformer une société coopérative à responsabilité limitée en une société coopérative à responsabilité illimitée requiert l'accord unanime des associés. Nonobstant toute stipulation contraire, la modification des statuts qui vise à transformer une société coopérative à responsabilité illimitée en une société coopérative à responsabilité limitée est décidée par l'assemblée générale, dans les conditions requises pour la modification des statuts. La modification est décidée après l'établissement d'un état résumant la situation active et passive de la société, arrêté à une date ne remontant pas à plus de trois mois et indiquant quel est le montant de l'actif net. Un réviseur d'entreprise ou un expert-comptable externe désigné par les associés fait rapport sur cet état et indique notamment s'il traduit d'une manière complète, fidèle et correcte la situation de la société. Note : les parts bénéficiaires disposent du droit de vote nonobstant toute disposition contraire des statuts.

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3.2. Assemblée générale spéciale Seule l'assemblée générale peut conférer à des tiers des droits affectant le patrimoine de la société ou donnant naissance à une dette ou à un engagement à sa charge, lorsque l'exercice de ces droits dépend du lancement d'une offre publique d'acquisition sur les actions de la société ou d'un changement de contrôle exercé sur elle. A peine de nullité, la décision fait l'objet d'un dépôt au greffe préalable à la réception par la société de la communication visée à l'article 557, conformément à l'article 75. Dès la réception par une société de la communication faite par la Commission bancaire et financière et des Assurances (C.B.F.A.) selon laquelle elle a été saisie d'un avis d'offre publique d'acquisition la visant et jusqu'à la clôture de l'offre, seule l'assemblée générale peut prendre des décisions ou procéder à des opérations qui auraient pour effet de modifier de manière significative la composition de l'actif ou du passif de la société, ou assumer des engagements sans contrepartie effective. Ces décisions ou opérations ne peuvent être prises ou exécutées sous condition de la réussite ou de l'échec de l'offre publique d'acquisition. Le conseil d'administration a toutefois la faculté de mener à terme les opérations suffisamment engagées avant la réception de la communication de la Commission bancaire et financière, ainsi que d'acquérir des actions ou des parts bénéficiaires conformément à l'article 620, § 1er, alinéa 3. Les décisions visées par cet article sont immédiatement portées à la connaissance de l'offrant et de la Commission bancaire et financière par le conseil d'administration. Elles sont également rendues publiques. L'assemblée générale a, sauf disposition contraire, le droit d'apporter des modifications aux statuts (en cas d’interdiction, l’art. 781, §5 impose la règle de l’unanimité). L'assemblée générale ne peut valablement délibérer et statuer sur les modifications aux statuts que si l'objet des modifications proposées a été spécialement indiqué dans la convocation, et si ceux qui assistent à la réunion représentent la moitié au moins du capital social. Si cette dernière condition n'est pas remplie, une nouvelle convocation sera nécessaire et la deuxième assemblée délibérera valablement, quelle que soit la portion du capital représentée par les actionnaires présents. Aucune modification n'est admise que si elle réunit les trois quarts des voix.

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CHAPITRE 5 LA LIQUIDATION DES SOCIETES COMMERCIALES Une société prend fin à la dissolution, c’est alors que l’on doit procéder à la liquidation et au partage de l’actif net entre les ayant droits. La Cour de cassation définit la liquidation comme « l’ensemble des opérations qui, à la suite de la dissolution d'une société commerciale, tendent au paiement des créanciers à l'aide de l'actif social et à la répartition du reliquat éventuel entre les associés » (Cass., 8 mai 1930, Pas., 1930, I, 202). La liquidation peut aussi être définie de la manière suivante: «La liquidation est l'ensemble des opérations qui, suite à l'annulation ou la dissolution d'une société qui a pris la forme juridique d'une société commerciale, visent à réaliser l'actif de la société dissoute, rembourser les dettes et affecter l'éventuel solde de liquidation entre les associés ou les actionnaires à des fins décrites par la loi ou les statuts» (DE BIE, E., Liquidation des sociétés après la loi du 13 avril 1995, 1996, p. 25). Bien qu’une liquidation puisse déboucher sur une faillite, sur une fusion de sociétés, etc., nous avons choisi de ne parler que du thème de la liquidation dans les notes qui suivent. Ce sujet n’est, à notre avis, pas un thème courant dans les séminaires de formation actuels en Belgique, d’où son intérêt. De plus, la loi sur les faillites a également modifié certaines dispositions en matière de droit commercial. Il nous paraît donc utile de faire le point. Nous vous proposons de faire une synthèse sur l’état de la législation actuelle et future en matière de liquidation de sociétés commerciales. Il n’y a pas si longtemps, la durée de vie d’une société commerciale était limitée à 30 ans. La liquidation de cette société devenait inéluctable. Rien n’obligeait les actionnaires à attendre ce terme, et de procéder à une modification adéquate des statuts de la société. Le problème se pose moins parce qu’aujourd’hui que les sociétés sont généralement constituées pour une durée de vie illimitée, la législation ayant depuis été modifiée en ce sens. La liquidation des sociétés commerciales est régie par les articles 181 à 195 du code des sociétés (CS); elle implique la dissolution de la société, et, à terme, la disparition de la personnalité juridique de celle-ci. Les causes de dissolution peuvent procéder de trois motifs : - une dissolution volontaire, - une dissolution judiciaire, - une dissolution de plein droit.

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La liquidation d’une société commerciale s'articule en trois étapes : 1°) Décision de dissolution de la société (en principe suite à une assemblée générale extraordinaire, v. infra); elle s'accompagne de la désignation de un ou plusieurs liquidateurs; la société conserve la personnalité juridique tout au cours de sa liquidation; toutes les pièces émanant de la société doivent dès lors mentionner que celle-ci est en liquidation; 2°) Le ou les liquidateurs sont chargés de réaliser l'actif et de rembourser le passif; ils ne peuvent plus exécuter d'opération commerciale « normale » (sauf pendant un temps limité; certaines opérations sont subordonnées à une autorisation préalable de l'Assemblée Générale); les liquidateurs soumettront chaque année à l'Assemblée Générale les comptes de la liquidation; ceux-ci doivent ensuite être déposés à la Centrale des bilans/B.N.B. par les S.A., S.P.R.L. et S.C. (cf. article 193 CS); 3°) La liquidation est terminée lorsque les actifs ont été revendus et lorsque les créanciers ont été satisfaits; il reste alors généralement un bilan « tire-lire » avec, à l'actif, des espèces et, au passif, les capitaux propres. Les liquidateurs convoquent alors une dernière Assemblée Générale (extraordinaire), déposent un rapport sur l'emploi des valeurs sociales au siège de la société et présentent les liquidateurs les comptes de la liquidation. Le ou les commissaires devront établir un rapport sur la liquidation. L’assemblée générale entendra leur rapport; il sera alors statué sur la décharge des liquidateurs. La clôture de la liquidation qui s'ensuit devra être publiée. La dissolution d'une société n'entraîne pas sa disparition, mais bien uniquement sa mise en liquidation. Quand une société est dissoute, elle survit pour les besoins de sa liquidation.

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1. Dissolution de plein droit La dissolution de plein droit est régie par les articles 39 à 44 CS, intégrés dans le livre II du Code des sociétés (Dispositions communes à toutes les sociétés). Ces articles sont une copie des anciens articles 1865 à 1870 du Code civil (abrogés par l’entrée en vigueur du Code des sociétés). Pour les sociétés à responsabilité limitée, certaines de ces dispositions ne s’appliquent pas dès lors que d’autres dispositions spécifiques ont été prévues (articles 343, 386, 645, 660 du Code des Sociétés). TITRE III. - Des différentes manières dont finit la société Art. 39 La société finit : 1° par l'expiration du temps pour lequel elle a été contractée; 2° par l'extinction de la chose, ou la consommation de la négociation; 3° par la mort naturelle de quelqu'un des associés; 4° par l'interdiction ou la déconfiture de l'un d'eux; 5° par la volonté qu'un seul ou plusieurs expriment de n'être plus en société. Art. 40 La prorogation d'une société à temps limité ne peut être prouvée que par un écrit revêtu des mêmes formes que le contrat de société. Art. 41 Lorsque l'un des associés a promis de mettre en commun la propriété d'une chose, la perte survenue avant que la mise en soit effectuée, opère la dissolution de la société par rapport à tous les associés. La société est également dissoute dans tous les cas par la perte de la chose, lorsque la jouissance seule a été mise en commun, et que la propriété en est restée dans la main de l'associé. Mais la société n'est pas rompue par la perte de la chose dont la propriété a déjà été apportée à la société. Art. 42 S'il a été stipulé qu'en cas de mort de l'un des associés, la société continuerait avec son héritier, ou seulement entre les associés survivants, ces dispositions seront suivies : au second cas, l'héritier du décédé n'a droit qu'au partage de la société, eu égard à la situation de cette société lors du décès, et ne participe aux droits ultérieurs qu'autant qu'ils sont une suite nécessaire de ce qui s'est fait avant la mort de l'associé auquel il succède. Art. 43 La dissolution de la société par la volonté de l'une des parties ne s'applique qu'aux sociétés dont la durée est illimitée, et s'opère par une renonciation notifiée à tous les associés, pourvu que cette renonciation soit de bonne foi, et non faite à contre-temps. Art. 44 La renonciation n'est pas de bonne foi lorsque l'associé renonce pour s'approprier à lui seul le profit que les associés s'étaient proposé de retirer en commun. Elle est faite à contre-temps lorsque les choses ne sont plus entières, et qu'il importe à la société que sa dissolution soit différée. Ces causes de liquidation découlent : 1.1. des statuts ou de l’épuisement de l’objet social de la société (p.ex. épuisement des ressources d'une mine dont l'exploitation correspondait précisément à l'objet social). 1.2. de la réunion de toutes les parts en une seule main pour les SNC, SCS (moins de trois associés pour les SC).

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La réunion de toutes les parts sociales en une seule main n'entraîne pas automatiquement la dissolution d’autres formes de société (cf. articles 646 -S.A., 657 -S.C.A. et 213 CS. - S.P.R.L.). L'actionnaire ou associé dispose d'un an pour soit dissoudre la société (cette décision sera constatée par un acte authentique), soit pour trouver (au moins)un nouvel associé. 1.3. de dissolution de sociétés dont la durée est limitée, lors de l’expiration du terme Les articles 645, 343 et 355 CS prescrivent que les sociétés anonymes, les sociétés privées à responsabilité limitée et les sociétés coopératives soient en principe constituées pour une durée illimitée; si une durée avait néanmoins été inscrite dans les statuts et que la date-limite a été dépassée, la société est dissoute de plein droit. L'on constate occasionnellement qu'une société était en fait déjà dissoute à un moment donné - par exemple parce que sa durée d'existence était arrivée à échéance - et que les gérants ou administrateurs n'en étaient pas conscients et qu'ils ont donc continué à contracter dans le cadre de l'objet social. A propos de la prorogation tardive de la durée de la société, la jurisprudence et la doctrine belges ont dû émettre un avis sur la «réactivation» de la société dissoute (pour ce point, nous nous sommes basés sur un article de TILQUIN, T., «De heropening van de staat van vereffening» T.V.R., 1993, 443-453). Si aucune assemblée générale n’a prorogé la durée avant la survenance de son terme statutaire, la société est en état de liquidation de plein droit. Il faut rappeler aussi que l’art. 1134 C.Civ. prévoit que « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. (…) ». Une prorogation a posteriori, avec effet rétroactif, est donc impossible. La constitution d’une autre société est obligatoire, l’ancienne société devant être liquidée pour lui faire apport de son actif net. Pour régulariser une telle situation, il faut accomplir les démarches suivantes : - acter que la (première) société était dissoute de plein droit; - nommer un ou plusieurs liquidateurs; - leur octroyer les pouvoirs les plus larges possibles; et - faire en sorte que les liquidateurs ratifient toutes ces transactions. Une alternative serait d’opérer une fusion ou scission dès lors qu’aucune répartition de l’actif n’aurait été effectuée (cf. article 681 CS 27) 1.4. de la mort du gérant d’une SCA sauf si les statuts prévoient d’autres stipulations Dans le cas d’une SPRL avec un associé unique, le décès de ce dernier n’entraîne pas la dissolution de plein droit s’il existe des héritiers. A défaut de tout successible, la succession sera acquise à l’Etat et la société sera dissoute de plein droit (cf. article 344 CS). Pour les SA, SPRL et SCRL, les art. 343, 386 et 645 CS précisent que les art. 39, 5° ne sont pas applicable. En cas de dissolution de plein droit, l’article 181 CS n’est logiquement pas applicable puisque celui-ci traite des cas de dissolution volontaire.

27 « La fusion ou la scission peut également avoir lieu lorsqu'une ou plusieurs des sociétés dont le patrimoine sera transféré sont en liquidation ou en faillite pourvu qu'elles n'aient pas encore commencé la répartition de leurs actifs entre leurs associés. Dans ce cas, toutes les missions qui, en vertu du présent titre, incombent à l'organe de gestion de la société en liquidation ou en faillite sont remplies par les liquidateurs ou par les curateurs. »

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2. Dissolution volontaire d’une société commerciale Les actionnaires ou associés se mettent d'accord pour une dissolution anticipative de la société. Les décisions se prennent aux conditions nécessaires à une modification des statuts. Une assemblée générale extraordinaire doit donc se réunir, dûment convoquée dans les délais et formes prescrits par le Code des sociétés. Cette mise en liquidation sera parfois dictée par des motifs fiscaux, p.ex. le taux de 10% du précompte mobilier sur la distribution des réserves ou la récupération (annulation) des montants inscrits au débit du compte courant des associés (pour éviter l’imputation d’un avantage en nature au titre d’intérêts fictifs28). La règle générale veut que les actionnaires ou associés en soient avertis au préalable au travers de l'ordre du jour qui mentionne clairement qu'une éventuelle dissolution est au programme et les associés présents doivent représenter au moins la moitié du capital social (art. 286, 38229 et 558 CS). Si cette dernière condition n'est pas remplie, une nouvelle convocation sera nécessaire et la nouvelle assemblée délibérera et décidera valablement, quelle que soit la portion du capital représentée par les associés présents ou valablement représentés. Une modification n'est admise que si elle réunit les trois quarts des voix30. Une société commerciale n’est donc volontairement dissoute (mise en liquidation) que par suite d’une assemblée générale extraordinaire ayant pris une décision en ce sens. Conformément à l’art 66 dernier al. CS, toute modification conventionnelle à l'acte constitutif doit, à peine de nullité, être faite en la forme requise pour cet acte. En l’occurrence, pour les sociétés dont la responsabilité est limitée, un acte authentique sera nécessaire. Art. 181 § 1er. La proposition de dissolution d'une société coopérative à responsabilité limitée, d'une société en commandite par actions, d'une société privée à responsabilité limitée , d'une société européenne, d'une société coopérative européenne ou d'une société anonyme fait l'objet d'un rapport justificatif établi par l'organe de gestion et annoncé dans l'ordre du jour de l'assemblée générale appelée à statuer. à ce rapport est joint un état résumant la situation active et passive de la société, arrêté à une date ne remontant pas à plus de trois mois. Sauf dérogation motivée, cet état est établi conformément aux règles d'évaluation fixées en exécution de l'article 92 pour les cas où la société renonce à poursuivre ses activités ou lorsque la perspective de continuité de ses activités ne peut être maintenue. Le commissaire ou, à défaut, un réviseur d'entreprises ou un expert-comptable externe désigné par l'organe de gestion fait rapport sur cet état et indique, notamment, s'il reflète complètement, fidèlement et correctement la situation de la société. § 2. Une copie des rapports et de l'état résumant la situation active et passive, visés au § 1er, est adressée aux associés conformément aux articles 269, 381 et 535, suivant le cas, s'il s'agit d'une société privée à responsabilité, d'une société coopérative, d'une société anonyme ou d'une société en commandite par actions. § 3. La décision de l'assemblée générale prise en l'absence des rapports prévus par le présent article est frappée de nullité. § 4. Avant de dresser l'acte authentique de la décision de dissolution de la société, le notaire doit vérifier et attester l'existence et la légalité externe des actes et formalités incombant, en vertu du § 1er, à la société auprès de laquelle il instrumente.

28 v. Tactiques et Stratégies, 1ère année, n°1, 27 janvier 1998, p.6, Ed. Indicator 29 Sauf disposition contraire des statuts (S.C.) 30 Les cas supposant l’existence de pertes ayant entamé l’actif net seront examinés plus loin. Une exception à cette règle est applicable en cas de dissolution judiciaire.

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L'acte reproduit les conclusions du rapport établi conformément au § 1er par le commissaire ou par le réviseur d'entreprises ou par l'expert-comptable externe. Les actionnaires ou associés présents doivent être identifiés soit par une inscription nominative dans le registre des actions (ou parts), soit par une inscription sur une liste des présences. En ce qui concerne les sociétés en commandite par actions, sauf disposition contraire des statuts, la dissolution n'est ni réalisée ni ratifiée que d’accord des gérants (art. 657 CS); dans ce cas, l'acte de dissolution n'est donc pas adopté si ces gérants ne sont pas présents ou s’ils s'abstiennent lors du vote. Les sociétés en nom collectif et les sociétés en commandite simple ne peuvent être en principe être dissoutes anticipativement qu'à l'unanimité des voix (RONSE, J., Algemeen deel van het vennootschapsrecht, n° 509). Une décision de dissolution prise à la majorité des voix peut être prévue dans les statuts sous réserve d’un contrôle judiciaire (Cass., 11 mars 1966, R. C.J. B., 1967, 209). Selon B. Van Bruystegem, ce contrôle judiciaire n'est toutefois nécessaire que lorsqu'une des parties peut rompre unilatéralement une convention pour motif grave. Une clause qui permet la dissolution par une décision prise à la majorité n'entre pas dans ce cadre, de sorte qu'il peut être admis qu'une telle clause est valable conformément au droit commun (VAN BRUYSTEGEM, B., «Enkele aspecten van de vennootschap onder firma» in Miskende vennootschapsvormen, Kluwer éditions juridiques, 1990, 29-30). Un acte authentique n'est pas davantage requis dans ce cas, un acte sous seing privé suffit. Sauf dispositions plus rigoureuses des statuts, si, par suite de perte, l'actif net est réduit à un montant inférieur à la moitié du capital social, l'assemblée générale doit être réunie dans un délai n'excédant pas deux mois à dater du moment où la perte a été constatée ou aurait dû l'être en vertu des obligations légales ou statutaires, en vue de délibérer et de statuer, le cas échéant, dans les formes prescrites pour la modification des statuts, de la dissolution éventuelle de la société et éventuellement d'autres mesures annoncées dans l'ordre du jour. L'organe de gestion justifie ses propositions dans un rapport spécial tenu à la disposition des actionnaires ou associés au siège de la société quinze jours avant l'assemblée générale. Si l'organe de gestion propose la poursuite des activités, il expose dans son rapport les mesures qu'il compte adopter en vue de redresser la situation financière de la société. Ce rapport est annoncé dans l'ordre du jour. Les mêmes règles sont observées si, par suite de perte, l'actif net est réduit à un montant inférieur au quart du capital social mais, en ce cas, la dissolution aura lieu si elle est approuvée par le quart des voix émises à l'assemblée. Les conditions de quorum de présence doivent toutefois avoir été respectées. Lorsque l'assemblée générale n'a pas été convoquée conformément au présent article, le dommage subi par les tiers est, sauf preuve contraire, présumé résulter de cette absence de convocation. L'absence du rapport de gestion prévu ci-dessus entraîne la nullité de la décision de l'assemblée générale. A noter qu’il n’a pas été prévu dans le Code des sociétés que ce rapport ou cet état résumé soient approuvés par l’assemblée générale. Des problèmes peuvent se poser pour les sociétés qui doivent être dissoutes par un acte authentique (principalement S.A., S.C.A., S.P.R.L. et S.C.R.L.). L'assemblée n'est pas toujours tenue devant notaire dès le début. Tel peut être le cas, à titre d'exemple, quand on applique l'article 633 CS. Si la dissolution de la société est décidée à ce moment, se pose alors sérieusement la question de savoir si l'acte sous seing privé suffit. Il convient de répondre à cette question par la

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négative. La modification envisagée des statuts par acte sous seing privé est en effet nulle pour cause de vice de forme. Cependant, cela n'implique nullement que l'acte doive être «repassé» devant notaire. Il suffit qu'après l'établissement de l'acte sous seing privé, l’on invite un notaire à régulariser la modification des statuts. Les modifications des statuts doivent, à peine de nullité, être faites en la forme requise pour l'acte constitutif de la société (cf. art. 66 CS). Le vice de forme peut être rectifié ultérieurement par l'établissement d'un nouvel acte valable. Une fois régularisé, l'acte de dissolution, qui avait antérieurement la forme d'un acte sous seing privé, ne peut plus être déclaré nul (cf. WEYTS, L., «Tijdige verlenging van de vennootschapsduur», T Not., 1980, n° 11, n° 4, 327.

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3. Dissolution judiciaire : suite à une décision du tribunal de commerce compétent Plusieurs motifs de dissolution judiciaire ont été prévus par la loi : l’insuffisance d’actif net, le non rachat d’actions ou parts, l’existence de justes motifs, le non dépôt des comptes annuels ou d’autres cas « subsidiaires ». Dans tous ces cas, le tribunal nommera lui-même le liquidateur Les articles 634 (S.A.), 657 (S.C.A.), 332 (S.P.R.L.) et 431 (S.C.R.L.) CS stipulent que tout intéressé (c.à.d. un créancier, un actionnaire ou associé) peut demander au tribunal la dissolution d'une société lorsque l'actif net est tombé à moins de 61.500 EUR (S.A. et S.C.A.), ou 6.200 EUR (S.P.R.L. et S.C.R.L.). La dissolution peut être prononcée en cas de refus de trouver un acquéreur pour les parts d’associés sortants d’une S.P.R.L. (cf. dernier al. de l’article 251 CS) : « Si le rachat n'a pas été effectué dans le délai de trois mois prévu ci-dessus, le cédant pourra exiger la dissolution de la société; mais il devra exercer ce droit dans les quarante jours qui suivront l'expiration du délai de trois mois. » (v. aussi art. 252 CS). La dissolution peut également être décidée par le Tribunal en cas de mésentente entre les associés : c'est la dissolution pour justes motifs (cf. articles 645, 657, 343, et 37031 CS). Le juge appréciera l'intérêt des actionnaires, mais aussi celui de la société : clients, fournisseurs, créanciers, personnel, ainsi que l’intérêt général. La loi du 13 avril 1995 avait, quant à elle, introduit une procédure judiciaire de dissolution des sociétés qui ne déposeraient pas leurs comptes annuels auprès de la Banque Nationale de Belgique (cf. art. 182 CS.). Certaines dispositions particulières du code des sociétés prévoient enfin la liquidation d’une société commerciale lorsqu’une société à finalité sociale ne reprend pas dans ses statuts les mentions légalement requises ou, lorsque, dans sa pratique effective, elle contrevient à ces dispositions statutaires. Dans ce cas, tout associé, tout tiers intéressé ou le ministère public, peut demander la dissolution de la société (cf. art. 667 CS). 3.1. Actif net minimum insuffisant La dissolution judiciaire la plus évidente est bien entendu le recours aux articles 634/657 (S.A. et S.C.A.), 333 (S.P.R.L.) et 432 (S.C.R.L.) CS. Ces dispositions stipulent que tout intéressé peut demander la dissolution de la société si l'actif net est réduit à un montant inférieur à 61.500,00 EUR (S.A. et S.C.A.) ou à 6.200,00 EUR (S.P.R.L. ou S.C.R.L.32). Notons que, à chaque fois, le texte de loi stipule que le juge peut octroyer un délai à la société pour régulariser sa situation. 3.2. Justes motifs La dissolution peut également avoir lieu pour de justes motifs33. L’art. 1871 C.Civ. a été transposé vers l’article 45 du Code des sociétés :

31 L’exclusion d’un associé d’une S.C. est en principe décidée par l’assemblée générale, sauf si les statuts en disposent autrement 32 Assez curieusement les sociétés coopératives à finalité sociale doivent libérer € 2.500,00 mais il n’en a pas été tenu compte à ce niveau. 33 v. J. VERHOEYE et S.MERCIER, Dissolution et liquidation des sociétés, novembre 1995, Ed.

Ced-Samsom

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Art. 45 La dissolution des sociétés à terme ne peut être demandée par l'un des associés avant le terme convenu, qu'autant qu'il y en a de justes motifs, comme lorsqu'un autre associé manque à ses engagements, ou qu'une infirmité habituelle le rend inhabile aux affaires de la société, ou autres cas semblables, dont la légitimité et la gravité sont laissées à l'arbitrage des juges. 1° Sociétés anonymes, sociétés en commandite par actions, sociétés privées à responsabilité limitée et sociétés coopératives. Pour les sociétés anonymes et, mutatis mutandis, les sociétés en commandite par actions, la dissolution pour justes motifs est visée à l'article 645, alinéa 2 CS. En ce qui concerne les S.P.R.L., il s'agit de l'article 343, alinéa 3 des CS ; pour les sociétés coopératives, on retrouve l’art. 370 CS – la règle de base de la liberté statutaire étant que ce sont les statuts qui déterminent les règles de fonctionnement de la société (art. 355 CS). Seuls les associés, à l'exclusion des tiers, peuvent invoquer cette disposition légale. En fait, ces dispositions sont, au niveau du contenu, une application de l'article 45 CS. En vertu de cet article, il faut considérer comme juste motif le cas où un autre associé manque à ses engagements, ou lorsqu'une infirmité habituelle le rend inhabile aux affaires de la société, ou autres cas semblables, dont la légitimité et la gravité sont laissées à l'arbitrage du juge. Cependant, contrairement à l'article 44 CS, pour les sociétés anonymes, les sociétés en commandite par actions, les sociétés privées à responsabilité limitée et les sociétés coopératives (sous les deux formes), le juste motif est valable, qu'il s'agisse ou non d'une société à durée déterminée (VAN BRUYSTEGEM, B., De Vennootschappenwet 84, 99-100; voir également T.P.R. 1994, 1159, n° 277). Notons que ces mêmes articles excluent expressément la dissolution volontaire prévue par l'article 43 CS (ce dernier n’est pas applicable aux sociétés constituées pour une durée illimitée). Note: dans les sociétés coopératives il est possible d'exclure un associé pour justes motifs (cf. art. 370 CS) mais dans ce cas l'exclusion est en principe prononcée par l'assemblée générale ; l’art. 386 CS envisage quant à lui la dissolution judiciaire de la société coopérative à durée limitée ou illimitée peut être demandée en justice pour de justes motifs. En dehors de ce cas, la dissolution de la société ne peut résulter que d'une décision prise par l'assemblée générale dans les formes prescrites pour la modification des statuts.. 2° Sociétés en nom collectif et sociétés en commandite simple Bien qu'à première vue, l'article 45 CS (justes motifs) soit uniquement applicable aux sociétés à durée déterminée (« à terme »), la doctrine a rendu cette disposition également applicable aux sociétés qui ont été constituées pour une durée indéterminée (VAN BRUYSTEGEM, B., o.c., 100). Si l'article 45 CS vise les sociétés à durée déterminée, c'est que le législateur n'a voulu mentionner que le cas le plus fréquent. L'intention n'aurait été d'aucune façon de priver les associés de sociétés constituées pour une durée indéterminée du droit de dissolution. Ces derniers ont de toute façon déjà le droit de dissoudre la société par renonciation unilatérale en vertu de l'article 43 CS mais pour éviter les contestations sur la validité de la renonciation (qui, en vertu de l'art. 43 CS doit être de bonne foi et non faite à contre-temps), les associés peuvent choisir de demander la dissolution de la société pour de justes motifs (TILLEMAN, B., «De gerechtelijke ontbinding: een laatste redmiddel», T.R.V., 1992, 492-493). Cette doctrine nous permet de dire que l'article 45 CS s'applique tant à une société en nom collectif qu'à une société en commandite simple, qu'elle ait ou non été constituée pour une durée déterminée.

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3° L'article 45 CS permet, en effet, qu'un associé demande la dissolution de la société s'il existe de « justes motifs » à cet effet. L'article donne ensuite, de manière non limitative, deux exemples de ce que l'on peut qualifier de « juste motif »: - un associé manque à ses engagements (non-exécution d'une obligation); - une infirmité habituelle rend un associé inhabile aux affaires de la société D'autres motifs entrent également en considération. La loi parle de « cas semblables, dont la légitimité et la gravité sont laissées à l'arbitrage des juges ». L'énumération des justes motifs de l'article 45 CS, considérée comme exemplative d'une base de dissolution, ne contient d'ailleurs même pas le motif de dissolution invoqué le plus souvent en pratique, à savoir un différend grave et persistant entre les associés. En général, un juste motif est toute circonstance qui trouve son origine dans le contrat de société ou dans le fonctionnement de la société par lequel la réalisation de l'objet social est irrémédiablement empêché, de sorte que l'on ne peut plus attendre raisonnablement des associés qu'ils continuent la société (TILLEMAN, B., « La dissolution judiciaire: un ultime remède », T.R.V., 1992, p. 495, n° 7). La dissolution judiciaire anticipée doit épargner aux associés des pertes inévitables. Il est évident que la dissolution judiciaire est la mesure la plus radicale. Le juge doit donc faire preuve de la plus grande circonscription. A cet effet, il fera une balance entre les intérêts de l'associé ou des associés demandeurs et ceux des autres associés, de la société et même de l'intérêt général: naturellement, les intérêts des créanciers, des travailleurs, etc. jouent également un rôle important. La pratique du droit indique que le juge tentera de toute manière de sauver la société et, par exemple, désignera un administrateur provisoire dans l'attente d'une solution. Ainsi, il n'acceptera que rarement la dissolution anticipée d'une entreprise prospère. D’autres dispositions de régimes d’exclusion ou de sorties d’associés ont été prévues dans le Code des sociétés. 1°) Non-exécution d'une obligation par un ou plusieurs associés Un premier juste motif est une non-exécution grave d'un engagement pris par un ou plusieurs associés à l'égard de la société, de sorte que les intérêts de la société sont gravement et irrémédiablement préjudiciés. Ce motif est expressément prévu par l'article 45 CS. Il doit s'agir d'un engagement essentiel. De plus, le juge devra prendre en considération l'ampleur des dommages et leur impact sur la société. Il peut s'agir, entre autres: - de la non exécution d'un engagement réel et essentiel à l'égard de la société, comme par

exemple la non exécution d'un engagement d'apport qui est nécessaire au fonctionnement et à la continuité de la société;

- les actes d'un associé qui portent préjudice à la société jusqu'à en hypothéquer l'avenir, par exemple :

- la communication de données à un concurrent; - le commencement d'une activité concurrente; - la diffusion inutile de rumeurs négatives, fondées ou non, sur la société; méconnaissance de la

législation sur les sociétés et la comptabilité et par ex.: le non-respect répété de la procédure en matière d'opposition d'intérêts dans le chef d'administrateurs et de gérants;

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- le non établissement ou l'absence de dépôt des comptes annuels; la non-tenue de l'assemblée générale annuelle;

- l’absence de tenue d’une comptabilité régulière. La non exécution de ses engagements dans le chef d'un actionnaire ou d'un associé n'est pas le seul juste motif. La non exécution de leurs engagements en qualité d'administrateur et de gérant peuvent également tomber sous l'application de l'article 45 CS. - La mauvaise gestion de l'unique gérant statutaire d'une S.P.R.L.; - le refus illégitime et permanent du conseil d'administration ou du gérant de convoquer

l'assemblée générale; - une rémunération attribuée en violation des statuts. Il ressort toutefois de la jurisprudence que les fautes commises par des administrateurs ou des gérants ne peuvent être prises en considération que si l'intéressé s'est également rendu coupable de manquements à ses engagements en qualité d'associé. On va souvent encore plus loin: les faits suivants peuvent entrer en considération comme justes motifs, surtout lorsqu'il apparaît que la réputation et même la survie de la société peut être compromise: - une lourde condamnation pénale; - une infraction aux règles déontologiques par un associé d'une société professionnelle (par

exemple, une société de médecins). Le demandeur ne devra en tout cas pas attendre trop longtemps avant d'introduire sa demande en dissolution. Le fait qu'il ne réagisse pas à temps peut constituer un indice que la non exécution des obligations concernées n'a pas causé de dommages graves et irrémédiables à la société et qu'elle ne compromet pas sa continuité. La non exécution d'obligations ne peut pas non plus être imputable, pour l'essentiel, à l'associé qui demande la dissolution. Penser autrement permettrait à un associé de susciter lui-même des motifs de dissolution. Si la dissolution est déclarée sur la base d'une non exécution d'obligations de l'un des associés, l'associé fautif peut être, en outre, condamné à des dommages-intérêts pour les dommages qui ont résulté de la non exécution de ses engagements et/ou à la dissolution anticipée de la société. Si la dissolution est rendue nécessaire par des fautes respectives des associés, les dommages que chacun d'entre eux a subis, peuvent être sanctionnés par des dommages-intérêts mutuels. Dans ce cas, la dissolution est déclarée à charge des deux parties. 2°) Empêchement d'un associé L'empêchement d'un associé est également expressément prévu par l'art. 45 CS. Cet empêchement peut résulter de la vieillesse, de la maladie, de l'incapacité, de la détention préventive, de l'absence... Naturellement, ce motif de dissolution sera surtout important pour les sociétés de droit commun (S.N.C.). L'empêchement d'un associé ou d'un actionnaire ne sera que rarement valable comme juste motif de dissolution d'une S.A., d'une S.P.R.L. ou d'une S.C.R.L.

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3°) Différend grave et persistant Un différend grave et persistant entre les actionnaires ou les associés peut constituer un motif de demande de dissolution judiciaire. A cet égard, il faut que le litige paralyse le fonctionnement normal de la société et rende impossible toute collaboration, empêchant ainsi la réalisation de l'objet social (v. entre autres, Comm. Hasselt, 8 avril 1991, T.R.V., 1991, p. 315.) Comme nous l'avons dit précédemment, l’on ne retrouve pas expressément ce motif de dissolution dans l'article 45 CS. Avant d'accepter un différend comme juste motif, le juge voudra s'assurer de plusieurs choses. Tout d'abord, le différend doit être persistant. Le juge ne pourra pas prononcer la dissolution s'il constate que le différend est survenu récemment ou s'il peut supposer qu'il est de nature passagère. De plus, le différend doit être grave. De simples divergences d'opinions ou des différends sur des points secondaires ne constitueront pas un motif de dissolution d'une société. Un différend grave survient souvent dans les cas suivants: - caractère infructueux d'une tentative de conciliation; - introduction de demandes ou démarches judiciaires contre la société et les coassociés; - absence de toute communication entre les actionnaires (surtout lorsque celle-ci ne s'effectue

plus que par huissier de justice, avocat et devant le juge); - intervention indépendante et arbitraire de certains actionnaires, surtout lorsque celle-ci ne sert

pas l'intérêt social; - divergence d'opinion insurmontable sur des points essentiels (par exemple, les statuts, le

fonctionnement de la société, la politique d'investissement ... - différend pour des motifs purement personnels et familiaux (par exemple, difficultés

familiales, divorce...). Dans son appréciation, le juge tiendra également compte de nombreux autres facteurs: - le nombre d'associés et la manière dont les associés collaboraient auparavant; - la structure de l'actionnariat; - la nature de l'activité de la société; - la forme de la société, - les dispositions statutaires. L’existence d’un différend grave entre les deux seuls associés actifs d'une S.P.R.L. qui détiennent chacun 50% des actions, conduira plus rapidement à la dissolution que le différend grave entre les actionnaires d'une S.A. qui ne possèdent qu'une petite part des actions et où, éventuellement, après exclusion ou démission d'un des associés, la société peut continuer ses activités. En ce qui concerne la forme de la société, on fait, en effet, théoriquement une distinction entre les sociétés de capitaux (la S.A.) et les sociétés de personnes (la S.P.R.L. et la S.C.R.L.). Le caractère privé et personnel de la S.P.R.L. et de la S.C.R.L. conduira plus rapidement le juge à décider une dissolution. Ces formes de sociétés s'appuient généralement sur des relations et une collaboration personnelles. Ce n'est, en principe, pas le cas pour la S.A. Toutefois, la pratique montre que de nombreuses S.A. sont également des sociétés privées.

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Ainsi, la convention entre actionnaires et des limitations en matière de cession des actions veillent à ce que l'actionnariat reste privé. Dans ces S.A. également, la collaboration entre les actionnaires existants est souvent d'une importance essentielle. On peut se demander si le demandeur peut aussi reporter sa demande. À notre avis, on doit accepter qu'un associé patiente, avant d'intenter son action, dans l'espoir de dissiper le différend: l'action en dissolution judiciaire est en effet l'ultime recours! Cependant, on doit éviter de laisser un différend traîner trop longtemps. Le juge pourrait en déduire que le différend a effectivement un impact sur la vie de la société, mais qu'il n'est pas de nature à favoriser le processus décisionnel au sein de la société. 4°) Abus de majorité ou abus de minorité Dans d'autres cas, les actionnaires méconnaissent continuellement l'intérêt social, soit pour servir leurs propres intérêts, soit simplement pour nuire à la société et à l'associé majoritaire. Nous distinguons: - l'abus de majorité, avec méconnaissance des droits des actionnaires minoritaires; - l'abus de minorité, par exemple le blocage de certaines décisions nécessaires, l'introduction de

demandes en justice inutiles et coûteuses, etc. 5°) Autres situations L'impossibilité de poursuivre la réalisation de l'objet social, qu'il s'agisse d'une impossibilité juridique (par exemple, perte d'un permis d'exportation) ou d'une impossibilité économique (manque permanent de fonds de roulement) constitue un motif de dissolution judiciaire. La dissolution judiciaire à également déjà été accordée en raison du caractère fortement déficitaire de la société. Dans ce cas, la dissolution anticipée devait protéger les associés de pertes encore plus lourdes. Le fondement de la dissolution judiciaire se trouve dans les exigences de la bonne foi qui régit les relations au sein de la société. Il serait contraire à ce principe de vouloir maintenir une collaboration devenue inutile ou nuisible en raison de l'absence de l'affectio societatis. C'est également l'idée dont doit s'inspirer le juge dans son appréciation. Nous insistons sur le fait que, pour obtenir la dissolution judiciaire, le demandeur devra apporter la preuve que le fonctionnement de la société et la réalisation de son objet sont irrémédiablement empêchés. Il est évident que le juge qui reçoit une demande de dissolution doit réaliser une balance des intérêts des parties. Aucune convention ne peut déroger au pouvoir du tribunal de déclarer la dissolution de la société avant le terme convenu, pour des raisons dont le tribunal apprécie souverainement la légitimité et la gravité (Cass., 9 mars 1903, D., 1904, I, 89). Il s'ensuit que le droit des associés de demander la dissolution anticipée de la société pour de justes motifs ne peut d'aucune façon être limité avant la naissance du litige. Une clause statutaire qui voudrait instaurer une telle réglementation est tout simplement nulle (VAN BRUYSTEGEM, B., o.c., 30).

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Dans le même ordre d'idées, l'arbitrage (art. 1676 et seq. C.J.) ne peut être décidé qu'après la naissance du litige (VAN BRUYSTEGEM, B., o.c. 30; voir toutefois aussi T.P.R., 1993, 1161, n° 279). Une clause statutaire qui imposerait impérativement une telle procédure est également nulle. Les justes motifs qui peuvent justifier la dissolution anticipée de la société n'impliquent pas nécessairement que l'associé-défendeur ait commis une faute. Une telle demande peut être autorisée lorsque la poursuite de l'entreprise est devenue impossible en raison de la maladie d'un des associés ou du désaccord qui règne entre les associés, imputable, par exemple, à une différence de caractère ou à des divergences d'opinion sur la politique de l'entreprise. La demande doit toutefois être rejetée lorsque le désaccord est la conséquence du comportement fautif du demandeur qui en a créé les causes ou lorsque, malgré le désaccord, la possibilité d'une exploitation florissante est maintenue et que la dispute porte uniquement sur des faits secondaires (Bruxelles, 22 mars 1947, Jur. Comm. Br., 1948, 224). Voici quelques exemples de justes motifs issus de la jurisprudence: - un désaccord profond et persistant entre les associés d'une S.P.R.L. qui rend toute

collaboration impossible et menace la réalisation de l'objet social, est un juste motif de dissolution de la société en application de l'article 45 CS (Trib. comm. Hasselt, 8 avril 1991, T.R.V., 1991, 315), est à considérer comme juste motif de dissolution anticipée d'une S.P.R.L.,

- un malentendu grave et continu entre les associés qui se font des reproches, de sorte que la bonne entente, sans laquelle il n'existe plus d'affectio societatis, et la poursuite normale de la société basée sur la collaboration et la confiance mutuelles, sont rendues impossibles (Trib. comm. Bruxelles, 10 novembre 1965, R. W, 1965-66, 1773).

L'arrêt suivant va dans un autre sens. Une S.P.R.L. a été dissoute parce qu'à l'assemblée générale, l'actionnaire principal a abusé de sa position. La cour a estimé que le fonctionnement de la société n'était absolument pas devenu impossible par ce comportement (Anvers, 15 décembre 1987, T.R.V., 1988, 453). Généralement, la jurisprudence émet à juste titre des réserves à l'égard de la demande de dissolution judiciaire. Surtout lorsqu'une entreprise est encore prospère, la dissolution sera une mesure trop radicale et d'autres mesures plus adaptées pourront également offrir la solution souhaitée (T.P.R., 1993, 1159, n° 277). Dans le cas suivant, le tribunal n'a pas accédé à la demande de dissolution judiciaire : le fait que les comptes annuels n'aient pas été soumis pour approbation à l'assemblée générale peut impliquer la responsabilité des gérants mais ne peut entraîner la dissolution de la S.P.R.L. sur la base de l'article 45 CS. En. effet, les faits cités n'empêchent pas la réalisation de son objet social (Trib. Tongres, 16 novembre 1989, T.R.V., 1990, 263; voir également T.P.R., 1993, 1160, n° 277). La loi du 13 avril 1995 apporte cependant d'importantes modifications (voir point 1.2.4.) Souvent, dans l'attente d'une décision sur le fond de la dissolution judiciaire, un administrateur provisoire est désigné par le juge des référés, uniquement pour assurer la poursuite de l'entreprise (T.P.R., 1993, 1160, n° 277).

Dans un arrêt relatif à la procédure d’exclusion (19 février 2009), la Cour de Cassation constate que l'article 642 C. Soc. « a pour objet de résoudre les situations conflictuelles qui mettent en péril les intérêts fondamentaux ou la continuité de l'entreprise ou, plus généralement, de résoudre les situations de mésentente grave entre les associés. Elle n'implique pas que le demandeur démontre l'existence d'une faute dans le chef des actionnaires contre lesquels il dirige son action. ». Par conséquent, le président du tribunal n'a pas à allouer au demandeur en retrait forcé qui obtient gain de cause une indemnité de procédure pour couvrir ses frais d'avocat;

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Un second arrêt (16 mars 2009), rédigé en langue néerlandaise et rendu en matière de SPRL (article 340 C. Soc.), va dans le même sens: les justes motifs doivent être d'une nature telle qu'il ne peut raisonnablement être souhaité que l'associé qui demande la reprise demeure associé, ce qui n'implique pas nécessairement l'existence d'un comportement fautif ou illicite imputable à l'associé cité en reprise de parts.

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3.3. Non dépôt persistant des comptes annuels La loi du 13 avril 1995 avait introduit une disposition (cf. art. 182 CS) visant à prononcer la mise en liquidation des sociétés dormantes, c.à.d. celles qui ne déposeraient pas leurs comptes annuels auprès de la Banque Nationale de Belgique pendant trois exercices comptables consécutifs. Pour mémoire, l’organe de gestion est tenu d'effectuer ce dépôt dans les trente jours qui suivent l'approbation des comptes par l'assemblée générale et celle-ci doit avoir été convoquée dans les six mois qui suivent la clôture de l'exercice comptable. La liquidation judiciaire d'une société peut être prononcée à la demande de tout intéressé, ou à la demande du ministère public, à partir du 7e mois qui suit la clôture du 3e exercice comptable (consécutif) pour lequel le dépôt des comptes annuels n'a pas été effectué. Le tribunal peut soit prononcer la clôture immédiate de la liquidation, soit déterminer le mode de liquidation et désigner un ou plusieurs liquidateurs. Lorsque la liquidation est terminée, le liquidateur fait rapport au tribunal et, le cas échéant, lui soumet une situation des valeurs sociales et de leur emploi. Le tribunal prononce la clôture de la liquidation. Par « personne intéressée », il faut entendre le peut être un actionnaire ou associé, un créancier, la Banque Nationale de Belgique. Notes: - Cette disposition ne s’applique qu’aux sociétés qui sont légalement tenues de déposer leurs

comptes annuels conformément aux articles 97 et suivants du Code des Sociétés ; - Cette procédure de liquidation peut être évitée en cas de régularisation de la situation avant

que le juge n’ait statué sur le fond ; - La mise en liquidation d'une société et la clôture judiciaire de celle-ci peuvent parfois être

prononcées simultanément. Dans ce cas, les administrateurs ou gérants sont considérés comme liquidateurs;

- Dans les autres cas de dissolution judiciaire, le caractère judiciaire de celle-ci se limite à la mise en liquidation de la société, la clôture de celle-ci restant du ressort de l'assemblée générale.

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4. Nomination d’un ou plusieurs liquidateurs Lorsqu’une société est dissoute pour quelque raison que ce soit, elle doit, en principe, être liquidée conformément aux articles 183 et suivants du Code des sociétés. La mise en liquidation d’une société implique que la gestion et la représentation de la société soient confiées à des liquidateurs qui sont, en principe, désignés par l’assemblée générale ou, plus rarement, par le tribunal de commerce. Il n'existe aucune compétence spécifique pour exercer un mandat de liquidateur (alors que la fonction de curateur doit obligatoirement être assurée par un avocat, ainsi qu’en atteste l’art. 27 de la loi du 8 août 1997 sur les faillites). Une société peut être désignée comme liquidateur mais, depuis le 1er janvier 1998, la mention d’une personne physique est obligatoire (cf. art. 184, alinéa 2 CS). La nomination du liquidateur doit être confirmée ou homologuée par le tribunal de commerce depuis l’entrée en vigueur de la loi du 2 juin 2006. Nous recensons quatre restrictions au principe de libre nomination du ou des liquidateurs : o l’existence d’incompatibilités légales comme par exemple pour les notaires, ou le(s)

commissaire(s) en fonction; o la fixation de critères de désignation restrictifs dans les statuts, o une seule et même personne ne peut être simultanément engagée dans les liens d'un contrat de

travail et comme liquidateur unique d'une société mise en liquidation, o les critères d’honorabilité fixés par la loi du 2 juin 2006. Il faut également rappeler que le liquidateur agit comme mandataire de la société et ne représente nullement les divers créanciers même s’il est tenu de veiller à leurs intérêts et à l’égalité entre eux. Le liquidateur agit au nom et pour compte de l’entreprise en tant qu’organe de la société (Cass., 12 novembre 1903, Pas., 1904,I, 47 et VAN RYN, Principes, I, 111, n°1062). Puisque la société conserve sa personnalité juridique, le liquidateur n'a pas qualité de commerçant; il n'exerce que les droits de la société et représente la société vis-à-vis des tiers. 4.1. Nomination du ou des liquidateurs Trois possibilités peuvent se présenter : - soit tout est réglé (en principe) dans les statuts de la société, - soit les statuts ne prévoient rien, l'assemblée générale décide à la majorité simple de la

nomination des liquidateurs (cf. art. 184, § 1er CS). - soit le tribunal peut également procéder à la nomination d'un liquidateur, - soit aucune disposition spécifique n'est reprise à ce sujet. Dans ce cas, le Code des sociétés.

indiquent dans certains cas qui est considéré comme liquidateur à l'égard des tiers si aucun liquidateur n'est nommé.

Généralement, les statuts attribuent souvent la fonction de liquidateurs aux anciens gérants ou administrateurs. S’il y a plusieurs liquidateurs, ceux forment un collège et délibèrent et décident selon les dispositions prévues dans les statuts et, à défaut, selon les règles normales de l'assemblée délibérante (cf. art. 63 CS). Dans une société en nom collectif ou une société en commandite simple, la décision de mise en liquidation et la désignation du liquidateur requièrent des majorités spéciales. A défaut d’une telle majorité, il est statué par les tribunaux (cf. article 184, §1er, alinéa 8 CS).

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Si aucun liquidateur n'est nommé, les administrateurs ou gérants sont considérés comme liquidateurs vis-à-vis des tiers (cette présomption légale n'est valable qu'à l'égard de tiers). Il en va de même en cas de clôture immédiate de la liquidation conformément à l'article 182 CS. Dans ce cas, l'article 185 CS ne confère pas aux administrateurs ou gérants le pouvoir d'intenter des actions pour la société dissoute; ils peuvent uniquement la représenter à l'égard des tiers en tant que défenderesse (Cass., 5 janvier 1911, Pas., 1911, 1, 68, concl. TERLINDEN). Le tribunal peut également nommer un liquidateur dans les cas suivants: - à l'occasion d'une dissolution judiciaire; - lorsqu'une majorité ne peut être atteinte à l'assemblée générale34 ou lorsque le candidat

nommé ne « satisfait » pas; - lorsque l'application des clauses statutaires est estimée inopportune. Dans les sociétés en nom collectif et dans les sociétés en commandite simple, les décisions ne sont valablement prises que par l'assentiment de la moitié des associés possédant les trois quarts de l'avoir social ; à défaut de cette majorité, il est statué par les tribunaux. Dans les autres sociétés dotées de la personnalité juridique, le liquidateur peut être nommé à la majorité absolue des voix, même s’il est désigné dans l’acte de dissolution proprement dit35. Si le liquidateur a été nommé dans les statuts, il ne peut être révoqué par l'assemblée générale que dans les conditions requises pour une modification des statuts. Si le liquidateur a été nommé par l'assemblée générale, cette dernière pourra le révoquer à la majorité simple. Si le tribunal a désigné le liquidateur, son mandat ne peut être révoqué que par celui-ci (p. ex. pour cause de défaut de prestation du liquidateur). La révocation du mandat du liquidateur doit également être publiée. Si le liquidateur peut être révoqué, il peut aussi démissionner. Si le liquidateur démissionne de plein gré, il doit tenir compte du fait que son remplacement doit pouvoir être prévu à temps. Si sa démission préjudicie à la société, le liquidateur doit en effet dédommager la société, à moins qu'il ne se trouve dans l'impossibilité de continuer son mandat sans en éprouver lui-même un préjudice considérable (art. 2007 C. Civ.). Si la durée du mandat n’a pas été fixée, on considère que le liquidateur a été nommé pour toute la durée de la liquidation (RESTEAU, S.A., III, 611, n°1813). Si le liquidateur désigné vient à décéder, l'assemblée générale doit désigner un nouveau liquidateur au plus vite. 4.2. Contrôle judiciaire de la liquidation Le document Ch. 51/1906/1 (cf. la loi du 2 juin 2006) évoquait notamment que « les droits qui sont reconnus aux créanciers dans le cadre d’une procédure de liquidation d’une société sont pratiquement inexistants. Ainsi, non seulement les créanciers n’ont aucune information sur la façon dont se déroule la liquidation mais ils ne disposent également pas des informations nécessaires leur permettant de connaître les actes qui ont été posés par le liquidateur durant la procédure de liquidation. Il est également instauré, indistinctement, pour chaque liquidation la constitution d’un dossier de liquidation auprès du greffe du tribunal de commerce. »

34 Le tribunal peut nommer un liquidateur lorsque la majorité ne peut être atteinte à l'assemblée générale en raison du désaccord entre les associés (Cass., 2 février 1973, Rev. Prat. Soc., 1973, 137). 35 Voir en ce sens Ph. JEHASSE, Manuel de la liquidation, Bruxelles, éditions Kluwer, 2004, 176 ; E.DE BIE et J. DE LEENHEER, Vereffening van vennootschappen na de wet van 13 april 1995, Brugge, die Keure, 1995, 70, in Rutger Van Boven, Accountancy & Tax, 2006/3.

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En effet, le seul contrôle exercé sur la liquidation était jusqu’ici celui de l’assemblée générale. Les créanciers ne recevaient aucune information sur la façon dont se déroule la liquidation (contrairement à la procédure de la faillite, il n’y a pas de déclaration de créance), ni sur les actes qui ont été posés pendant la liquidation. Le législateur a donc estimé qu’il convenait d’être plus attentif au sort réservé aux créanciers, ce qui a eu pour effet de confier une mission de contrôle au tribunal de commerce dans le cas d’une liquidation. Pour ce faire, les dispositions applicables en matière de faillite ont quelque peu été recopiées. Art. 184, § 1er CS : (…) Ne peuvent être désignés comme liquidateurs, ni les personnes qui ont été condamnées pour infraction aux articles 489 à 490bis du code pénal ou pour vol, faux, concussion, escroquerie ou abus de confiance, ainsi que tout dépositaire, tuteur, administrateur ou comptable, qui n'a pas rendu et soldé son compte en temps utile. Cette exclusion ne peut intervenir que pour autant qu'elle advienne endéans un délai de dix ans, prenant cours à dater d'une décision définitive de condamnation ou de l'absence de reddition et solde de compte en temps utile. Ne peuvent non plus être nommée comme liquidateur, sauf homologation par le tribunal compétent, les personnes qui ont été déclarées en faillite sans avoir obtenu la réhabilitation et celles qui ont encouru une peine d'emprisonnement, même avec sursis, pour l'une des infractions mentionnées à l'article 1er de l'arrêté royal n° 22 du 24 octobre 1934 relatif à l'interdiction judiciaire faite à certains condamnés et faillis d'exercer certaines fonctions, professions ou activités, pour une infraction à la loi du 17 juillet 1975 relative à la comptabilité des entreprises ou à ses arrêtés d'exécution, ou pour une infraction à la législation fiscale. En cas de refus d'homologation ou de confirmation, le tribunal compétent désigne lui-même le liquidateur, éventuellement sur proposition de l'assemblée générale. L’art. 184, §1er al. 2 CS prévoit donc que les liquidateurs n'entrent en fonction qu'après confirmation, par le tribunal de commerce, de leur nomination résultant de la décision prise par l'assemblée générale. Le tribunal compétent est celui de l'arrondissement où la société a son siège le jour de la décision de dissolution. Si le siège de la société a été déplacé dans les six mois précédant la décision de dissolution, le tribunal compétent est celui de l'arrondissement où la société avait son siège avant que celui-ci ne soit déplacé. Pour saisir le tribunal, une requête unilatérale, signée par l'organe compétent de la société – le liquidateur - ou par un avocat, doit être déposée en son greffe. L’initiative revient également au procureur du Roi et à tout tiers intéressé (par requête contradictoire). Un état comptable actif et passif doit être joint à la requête. Puisque l’organe de gestion de la société en passe d’être dissoute a dû établir un état résumant la situation active et passive de la société pour accompagner sa proposition de dissolution, cet état de fraîche date peut servir de situation comptable accompagnant la requête de confirmation ou d’homologation adressée au tribunal de commerce36. Le tribunal statue au plus tard dans les vingt-quatre heures du dépôt de la requête. Le tribunal n'accorde confirmation de la nomination qu'après avoir vérifié que les liquidateurs offrent toutes les garanties de probité. Le tribunal statue également sur les actes que le liquidateur a éventuellement accomplis entre sa nomination par l'assemblée générale et la confirmation de 36 Voir en ce sens Chr. FISCHER, « Les effets du nouveau régime de liquidation sur la comptabilité des sociétés dissoutes », C.F.P. N°8, p. 272, 2006, Ed. Kluwer

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cette nomination. Il peut confirmer ces actes de manière rétroactive, ou les annuler s'ils constituent une violation manifeste des droits de tiers. L'acte de nomination du ou des liquidateurs, pour être déposé et publié valablement, doit être accompagné d'une copie de la décision positive de confirmation ou d'homologation rendue par le tribunal de commerce. L’article 184, §1er , alinéa 10 du Code des sociétés prévoit que si le liquidateur est une personne morale, la personne physique qui représente le liquidateur doit être désignée dans l’acte de nomination. Bien que cela ne soit pas mentionné expressément, il convient de considérer que la personne physique représentant une personne morale sera aussi soumise à la procédure de confirmation ou d’homologation, compte tenu du ratio legis de la loi. Le tribunal qui refuse la confirmation ou l’homologation désigne alors lui-même le liquidateur, éventuellement sur proposition de l’assemblée générale. Dans les travaux parlementaires, il a été souligné que « le tribunal ne doit procéder qu’à des vérifications formelles. Le tribunal n’est pas habilité à statuer si telle personne nommée en qualité de liquidateur par l assemblée générale est un bon choix. » (Doc. Ch. 51/1906/005, p.102). En outre, « le liquidateur ne doit fournir aucune preuve de sa probité. Si le principe général est qu’à défaut de dispositions statutaires contraires, le mode de liquidation est déterminé par l’assemblée générale, cette dernière doit également vérifier si le liquidateur répond aux conditions requises » (Doc. Chambre 51 2005-2006, 1906/005, p. 88). Par conséquent, la probité peut être mise en doute par le fait de l’exclusion ou par la nécessité d’une homologation (Doc. Chambre 51 2005-2006, 1906/005, p. 87). Lors du jugement de probité du liquidateur, le tribunal de commerce peut, en outre, utiliser toutes informations dont il dispose, comme par exemple les informations sur des infractions au Code des sociétés. Ainsi, un gérant ou administrateur qui n’aurait pas déposé les comptes annuels de la société en cause durant plusieurs années pourrait être refusé en tant que liquidateur. A titre complémentaire, le tribunal pourra demander un extrait du casier judiciaire ou effectuer les vérifications nécessaires concernant des personnes déclarées en faillite (Doc. Ch. 51/1906/005, p. 102).

Par contre, le tribunal ne peut pas demander de désigner un autre liquidateur pour la seule raison que la liquidation serait déficitaire. Le défaut de qualité à exercer un recours ne pouvant être tiré de l’autorité de la chose jugée de la décision entreprise, fut-elle exécutoire par provision, la société est elle-même recevable à l’exercer lorsque le litige a pour objet la contestation même de la dissolution, ou, depuis la loi du 2 juin 2006, l’homologation de la désignation du liquidateur. Est irrecevable la requête en homologation de sa propre désignation comme liquidateur que l’associée unique a erronément déposée alors que la dissolution n’avait pas encore été formalisée selon la procédure prévue par l’article 181 du Code des Sociétés. Conséquence d’une requête introduite prématurément, les frais et honoraires du liquidateur désigné par le tribunal sont à charge de la requérante qui a commis l’erreur et non de l’Etat. Source : Liège, 24 mai 2007 (tiré de JuriSquare, Ed. La charte) Note : contrairement à ce qui est prévu pour la procédure de confirmation, le juge n’a pas la possibilité de se prononcer sur la validité des actes que le liquidateur aurait éventuellement posés entre le moment de sa nomination et celui de son homologation.

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Cette impossibilité est résulte de l’utilisation du terme « homologuer » qui signifie qu’un acte est approuvé par une mesure qui lui donne une force exécutoire, et que tous les actes antérieurement posés par la personne concernée ne sont pas valables. La 3e phrase de l’art.184, §1er

, alinéa 2 CS dispose que si le siège de la société a été déplacé dans les six mois précédant la décision de dissolution, le tribunal compétent est celui de l'arrondissement où la société avait son siège avant que celui-ci ne soit déplacé. Le constat qui en résulte est que deux tribunaux sont compétents37 : - l’homologation ou la confirmation doit être demandée au tribunal de l’arrondissement où la

société avait son siège avant le déplacement, - tandis que l’acte de nomination, ainsi que la confirmation ou l’homologation, les états

intermédiaires et le plan de répartition doivent être déposés au greffe du tribunal de l’arrondissement où la société a son siège après le déplacement.

Réforme de la procédure de liquidation des sociétés

Sur proposition de M. Stefaan De Clerck, ministre de la Justice, le Conseil des ministres a approuvé un avant-projet de loi qui modifie le Code des sociétés dans le but de réformer la procédure de liquidation des sociétés, modifiée par la loi du 2 juin 2006.

Les modifications portent notamment sur la procédure à suivre afin d'introduire la demande de confirmation ou d'homologation du liquidateur par requête unilatérale : - cette requête doit obligatoirement être introduite devant le président du tribunal de commerce ; - elle doit être signée par le liquidateur ou le mandataire de la société ; - le tribunal de commerce doit statuer dans les 5 jours. L'avant-projet est transmis pour avis au Conseil d'Etat. 4.3. Dossier (art. 195bis CS) Pour chaque liquidation, le Code des sociétés prévoit désormais la constitution d’un dossier de liquidation auprès du greffe du tribunal de commerce. Tout intéressé (en particulier un créancier) peut prendre gratuitement connaissance du dossier. Ce dossier reprend notamment les procès-verbaux de l’assemblée générale, les rapports de l’organe de gestion et de contrôle déposés en même temps que la requête, ainsi qu’un état détaillé de la situation de liquidation. Le dossier de liquidation ne peut constituer qu’une partie (un sous-dossier) du dossier général de la société. 4.4. Devoir d’information Conformément aux dispositions de l’article 189bis CS, les liquidateurs doivent transmettre aux cours des sixième et douzième mois de la première année de liquidation, puis tous les ans, un état détaillé de la situation de la liquidation contenant l’indication des recettes, des dépenses, des répartitions et de ce qu’il reste à liquider, sous peine d’amendes. L’article 189bis du Code des sociétés dispose que le liquidateur doit rendre compte de sa mission en transmettant un état détaillé de la situation de la liquidation au greffe.

37 Cf. Circulaire du 14 novembre 2006 adressée au SPF Justice à Monsieur Visart de Bocarmé

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Selon les travaux préparatoires (Doc. Chambre, 51 2005-2006, 1906/005, p.61), l’article 189bis CS est comparable à l article 34 de la loi sur les faillites. La loi définit le contenu du rapport en des termes généraux, à savoir les recettes, les dépenses, les répartitions, ainsi que ce qu’il reste à liquider. L’état détaillé est intégré au dossier de liquidation visé à l’article 195bis mais ne doit pas être publié dans les Annexes au Moniteur belge. En outre, avant la clôture, les liquidateurs devront préalablement soumettre le plan de répartition de l'actif au tribunal de commerce pour accord. Ce dernier terme « pour accord » est inexact puisque l'intervention du tribunal se limite à un contrôle de légalité. Selon les travaux préparatoires, il convient de procéder par requête (Doc. Ch. 51/1906/005, p.90). La loi ne fixe aucun délai pour l’introduction de cet état de répartition, mais sans jugement exprès à propos de ce plan de répartition, la liquidation ne pourra pas être clôturée. Ce plan de répartition ne doit pas être publié dans les Annexes au Moniteur belge De plus, la loi ne définit pas les conséquences d'un refus ou de l’absence de cet accord. La nature du jugement rendu sur le dépôt de l'état de répartition n'est pas précisée par la loi. Il faudra considérer que le plan invalidé est nul et empêche quelconques répartitions par le liquidateur. Si le liquidateur ne dépose pas le plan de répartition ou s'il ne soumet pas le plan de répartition, le procureur du Roi ou tout intéressé peut demander son remplacement au tribunal. Pour assurer le respect des droits de la défense, la loi prévoit que le liquidateur sera entendu ; par ailleurs, le non dépôt des états de liquidation est désormais pénalement sanctionné (art. 196, al. 1, 5° nouveau CS). Note : il faut également ne pas oublier les sanctions civiles de droit commun (responsabilités). 4.5. Commissaire ou expert-comptable externe Les fonctions de gérant, d'administrateur sont résiliées de plein droit. Par contre, la mission du commissaire n’est en rien arrêtée. Les administrateurs ou gérants des S.A., S.C.A, S.P.R.L. et S.C.R.L. sont tenus d’établir un rapport justifiant la proposition de dissolution. L’organe de gestion est également tenu d’établir un état résumant la situation active et passive de la société» ainsi qu’un rapport de gestion (v. également Commission des normes comptables, Avis C.N.C., n° 110/7, Bull. C.N.C., 1989, n° 24, septembre 1989). Le rapport de contrôle sera établi par le commissaire de l’entreprise, au cas où il a été procédé à sa nomination; dans le cas contraire, il sera fait appel à un reviseur d’entreprise de l’I.R.E. ou à un expert-comptable inscrit sur le tableau des experts externe de l’I.E.C. Le professionnel indiquera notamment si l’état précité reflète complètement, fidèlement et correctement la situation de la société (art. 181 CS). Depuis le 1er janvier 1998, une copie de tous les rapports établis dans le cadre de missions spéciales par un expert-comptable externe (notamment en cas de liquidation) doivent être transmis à la Commission des mandats spéciaux. Notes : - Ni l’état résumé ni les rapports de gestion et de contrôle ne doivent être soumis au vote : ils

doivent seulement être « communiqués » aux actionnaires ou associés ;

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- La situation active et passive doit comprendre au moins un bilan ou une situation intermédiaire comparable ainsi qu’une annexe explicative qui pourra comprendre entre autres un résumé des droits et engagements. La situation active et passive doit découler sans addition ni omission de la balance des comptes ;

- Aucun rapport ne doit être établi pour les sociétés dont la responsabilité des associés n’est pas limitée à concurrence de leur apport : société en nom collectif, société en commandite simple et société coopérative à responsabilité illimitée.

La situation comptable doit comprendre au moins un bilan ou une situation intermédiaire comparable ainsi qu’une annexe explicative qui pourra comprendre entre autres un résumé des droits et engagements; la situation active et passive doit découler sans addition ni omission de la balance des comptes. La mission du professionnel consiste à faire rapport sur celle-ci et à vérifier, notamment, si elle reflète complètement, fidèlement et correctement la situation de la société38. Ni les rapports de gestion ou de contrôle, ni leurs conclusions ne doivent être déposés au greffe du tribunal de commerce. Les conclusions de ces rapports doivent être reprises dans l’acte authentique constatant la dissolution. Un extrait de cet acte doit être déposé au greffe et publié dans les Annexes au Moniteur belge. Le délai de trois mois pour l’établissement de la situation active et passive n’est pas modifié lorsque l’absence de quorum a empêché l’assemblée de délibérer valablement. Les commissaires ne peuvent accepter aucun mandat dans la société qui les a nommés (cf. art. 133 al. 2 CS). Le Rapport 2008 de l’Institut des Réviseurs d’entreprises (page 83) compare : - l’application de l’art. 190 CS qui prévoit l’intervention du tribunal avant la clôture de la

liquidation, - le contrôle prévu par l’art. 194 CS pour en conclure que le commissaire ne doit pas établir de rapport lorsque le plan de répartition est communiqué au tribunal de commerce. 4.6. Pouvoirs du liquidateur Les compétences ordinaires du ou des liquidateurs comprennent (cf. article 186 CS) : - intenter et soutenir toutes actions pour la société; il est admis que l'action en responsabilité au

nom de la société contre l'organe d'administration ou le commissaire fait partie des compétences ordinaires du liquidateur. Il ne doit pas demander l'autorisation de l'assemblée générale à cet effet;

- recevoir tous paiements; - donner mainlevée avec ou sans quittance; - réaliser toutes les valeurs mobilières; - endosser tous effets de commerce; - transiger ou compromettre sur toutes contestations; - aliéner les immeubles de la société par adjudication publique, s'ils jugent la vente ; nécessaire

pour payer les dettes. On peut dire en général que les liquidateurs peuvent prendre toutes les mesures conservatoires qui s'avèrent nécessaires. 38 Cf. Normes relatives au contrôle à opérer lors de la proposition de dissolution d’une société dont la responsabilité

est limitée, Conseil Supérieur du Révisorat et de l’Expertise comptable, 7 novembre 1997

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Pour les actes dits spéciaux, l'autorisation de l'assemblée générale est légalement requise. L'autorisation n'est qu'une condition préalable qui doit être remplie pour que le liquidateur puisse exercer les pouvoirs que lui attribue la loi. Celle-ci est octroyée à la majorité qualifiée (lors de la première assemblée générale) dans une S.A., une S.P.R.L., une S.C.A. et par la moitié des voix des associés possédant au moins les trois quarts de l'avoir social dans une S.N.C. et S.C.S. Il s'agit de: - poursuivre l'industrie ou le commerce de la société; comme nous l'avons déjà dit, il s'agit ici

d'une poursuite provisoire en vue d'une liquidation optimale. La distinction entre ce qui est visé ici et un simple règlement des affaires pendantes est parfois difficile à faire; une poursuite de l’activité n’est justifiée que si les profits escomptés sont supérieurs aux frais (RESTEAU, S.A., IV, 87, n°1923; VAN RYN, Principes, II, 175, n°1091);

- emprunter pour payer les dettes sociales; - créer des effets de commerce; - hypothéquer les biens de la société, - les donner en gage; - aliéner ses immeubles de gré à gré; - faire apport de l'avoir social dans d'autres sociétés; l'acte d'apport est déterminant pour savoir

s'il s'agit d'une opération de liquidation ou d'une fusion par absorption. Lorsqu'il s'agit d'un apport d'actif et de passif sans limitation, c'est une fusion, c.à.d. une succession à titre universel. Lorsqu'il s'agit d'un apport de l'actif par lequel la société absorbante s'engage à apurer le passif à concurrence de l'actif, c'est une succession à titre particulier, pour laquelle toutes les conditions légales en matière de cession de créances, de cession de sûretés et autres restent applicables. Cela implique notamment que la cession des créances doit être signifiée, qu'une transcription doit être faite dans le registre des hypothèques, etc.

Il est toutefois une disposition contraignante à laquelle il ne peut être dérogé: les liquidateurs peuvent exiger des associés le paiement des montants non appelés qui sont nécessaires au paiement des dettes et des frais de liquidation (cf. article 188 CS). Les liquidateurs disposent ainsi d’un pouvoir d’appréciation appréciation discrétionnaire. Il va sans dire que les associés ne peuvent demander aucune compensation entre la somme que le liquidateur leur demande et leur part éventuelle dans le patrimoine net de la société. Ce serait en effet contraire à l'article 1291 du C. Civ. qui stipule que la compensation n'a lieu qu'entre deux dettes liquides et exigibles. Les pouvoirs du liquidateur précités, qui découlent de la loi, sont purement supplétifs. L'assemblée générale peut par exemple régler la réalisation de l'actif tout à fait autrement dans les statuts ou dans l'acte de nomination des liquidateurs. Dans ce cas, une publication spéciale de ces pouvoirs dans l'acte de nomination est requise (cf. art. 67 et 73 CS). La publication des pouvoirs du liquidateur en rend les limites opposables aux tiers. En l'absence de publication, les tiers sauront que les liquidateurs n'ont d'autres pouvoirs que ceux qui sont inscrits dans la loi ; les pouvoirs des liquidateurs peuvent être étendus par les statuts et par l'assemblée générale au-delà des pouvoirs visés aux articles 186 à 188 CS. Le liquidateur de plein droit ne dispose pas des mêmes pouvoirs que le liquidateur qui aurait été nommé comme tel, même par le tribunal. Dans ce cas, il ne peut représenter la société que passivement (VAN RYN, Principes, II, 116, n°1070).

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Le liquidateur a le pouvoir de mettre fin à tout litige et à toute contestation dans lesquels la société est impliquée au moyen d'une transaction quels que soient leur nature, objet ou valeur (RESTEAU, C., Sociétés anonymes, 3 1, n° 1876, DE BIE. E., Liquidation des sociétés après la loi du 13 avril 1995, p. 110). En ce qui concerne les dettes à payer, le liquidateur doit rechercher les créanciers sur base de la comptabilité. En cas de doute quant à l’exactitude de la comptabilité, le liquidateur a tout intérêt à essayer de joindre les créanciers par voie de presse. Si des créances sont contestées par le liquidateur, il est préférable qu'il consigne les sommes nécessaires au paiement du créancier. Pour ce qui est du paiement de celles-ci, les créanciers privilégiés doivent être payés avant les autres. Ces créanciers peuvent en outre procéder à des actes d'exécution sur le patrimoine de la société dissoute pour récupérer leur créance. Le droit d'être payé par préférence n'existe que pour les titulaires d'une sûreté réelle (p. ex. les créanciers hypothécaires) et pour les titulaires d'un privilège spécial (p. ex. le vendeur d'équipements d'exploitation impayé). Il ne s'applique donc pas aux créanciers qui n'ont qu'un privilège général, tels que l'O.N.S.S. ou les travailleurs de la société. Pour le surplus, les créanciers bénéficiant d'un privilège général entrent en concours avec les créanciers similaires et ils subissent les conséquences de l'égalité de traitement entre créanciers requise, nonobstant leur droit à être payés, après la réalisation de l'actif, avant les créanciers chirographaires. Après les créanciers privilégiés, c'est au tour des créanciers chirographaires (ordinaires) d'être payés. En vertu de l'article 190 CS, le liquidateur qui souhaite payer les dettes sociales aux créanciers chirographaires, doit le faire au marc le franc, c.-à-d. proportionnellement aux créances et sans distinction entre les dettes exigibles et les dettes non exigibles, sous déduction d'un escompte pour celles-ci. Les liquidateurs peuvent cependant payer d'abord les créances exigibles, si l'actif dépasse notablement le passif ou si les créances non échues ne sont pas suffisamment garanties. Il existe toutefois une exception à la règle de cette égalité de traitement pour les dettes de la masse, c.à.d. celles qui ont été contractées par les liquidateurs, après la mise en liquidation de la société. Ces dettes doivent être payées intégralement avant les dettes dans la masse (antérieures) entre lesquelles il existe un concours et qui doivent être payées au marc le franc (l’euro). Le partage entre les associés du solde de l'actif après paiement des dettes ne pose généralement pas de problème. Ce qui est divisible est partagé et distribué. Ce qui n'est pas divisible est transféré en indivision aux actionnaires. Le liquidateur n'est pas compétent pour attribuer aux actionnaires ou associés individuellement les actifs qui n'ont pas été réalisés en espèces ou en valeurs. Il doit les remettre en indivision aux actionnaires ou associés conjointement. Ces derniers procèdent eux-mêmes au partage conformément aux dispositions du Code civil (RESTEAU, C., Sociétés anonymes, IV, 112-113, n 1946; MASIUS, Bel. Jud., 1983, 1521, n° 1.). Ce cas se présente toutefois rarement. Les biens immeubles seront d'abord vendus et le produit de la vente sera partagé entre les actionnaires.

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L'article 190 CS prévoit la possibilité d'un rachat d'actions ou parts par le liquidateur afin de faciliter la liquidation du solde de liquidation. A cet égard, le liquidateur doit de toute façon respecter l'égalité entre les actionnaires. Si les statuts ne prévoient rien pour ce qui est de la répartition du solde de la liquidation, la répartition s’effectuera en proportion de l’apport respectif de chacun (cf. art. 30, al. 1er C.S.). Le solde doit être réparti en fonction de la libération des apports et non pas en fonction de leur valeur nominale ou pair comptable comme ce serait le cas en cas de perte (DE BIE, la loi des sociétés après la loi du 13 avril 1995, p. 166). Les liquidateurs sont invités dans les six mois suivant la clôture de la liquidation de faire savoir s'il y a des sommes ou des valeurs à consigner.

S'il n'y a rien à consigner le liquidateur envoie une déclaration négative à la Caisse des Dépôts et Consignations

Si des sommes ou des valeurs doivent être consignées le liquidateur donne à la Caisse des Dépôts et Consignations une liste détaillée avec toutes les sommes ou valeurs de coupons ou de titres qui peuvent encore être offerts pour un éventuel paiement ou échange.

Le liquidateur doit : - verser les sommes en numéraire (euros) sur le compte de chèques postaux 679-2004099-79 de

la Caisse des Dépôts et Consignations avec la mention « compte 10 » ; - verser les sommes en devises sur le compte 001-5837654-76 de la Caisse des Dépôts et

Consignations chez BNP Parisbas Fortis avec la mention « compte 37 » ; - remettre les titres pour compte de la Caisse des Dépôts et Consignations à la Banque Nationale

de Belgique (BNB) - qui intervient comme Caissier de l'Etat - ou à une des ses agences. Le détenteur de titres ou coupons émis par une société liquidée peut s'adresser à une institution financière ou directement à la Caisse des Dépôts et Consignations pour demander la contrevaleur de ses titres ou coupons.

Les sommes sont transférées sur le compte qu'il indique. Le délai de prescription est de 30 ans débutant à compter de la date du dernier dépôt effectué par le liquidateur dans un dossier déterminé. Conflit d’intérêts Art. 191 C. Soc. Dans les sociétés anonymes et les sociétés privées à responsabilité limitée, le membre du collège des liquidateurs qui a, directement ou indirectement, un intérêt opposé de nature patrimoniale à une décision ou à une opération soumise au collège, est tenu de se conformer à l'article (ou 259 et 261) CS, applicable par analogie. Ceci suppose que ce membre informe ses collègues de son intérêt opposé, d’une part, et qu’il n’assiste pas aux délibérations et ne prenne pas part au vote s’il s’agit d’une S.A. faisant ou ayant fait appel publiquement à l’épargne, d’autre part. Au cas où un seul liquidateur est nommé et qu'il se trouve dans cette opposition d'intérêts, il en réfère aux associés et la décision ne pourra être prise ou l'opération ne pourra être effectuée pour le compte de la société que par un mandataire ad hoc. Si le liquidateur est l'associé unique d'une société privée à responsabilité limitée, l'article 259 CS, est applicable par analogie. Ceci suppose que ce membre informe ses collègues de son intérêt opposé, d’une part, et qu’il n’assiste pas aux délibérations et ne prenne pas part au vote s’il s’agit d’une S.A. faisant ou ayant fait appel publiquement à l’épargne, d’autre part.

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4.7. Responsabilités du liquidateur Les créanciers pourraient mettre en cause la responsabilité du liquidateur lorsque leurs créances n'ont pas été payées et que la clôture de la liquidation est intervenue, pour autant qu'ils puissent démontrer une faute dans le chef du liquidateur ce qui, généralement, ne pose aucun problème. En effet, en vertu de l'article 192 CS., le liquidateur est responsable tant envers les tiers qu'envers les associés de l'indemnisation du dommage qui est causé par sa faute. Il convient de signaler que, si tant est que ce soit possible, la responsabilité des liquidateurs est encore plus réelle que celle des administrateurs/gérants ou des commissaires. La décharge donnée aux liquidateurs par l'assemblée générale ne met pas fin à la responsabilité de ceux-ci envers les tiers. Quand il y a plusieurs liquidateurs, aucune solidarité n'est prévue même lorsque la faute consiste en une violation de la loi ou des statuts; ceux-ci sont tenus individuellement responsables de leurs fautes. Conformément aux règles du droit commun, la responsabilité est « in solidum » lorsqu'un fait dommageable unique leur est imputable à tous (DERMINE, L., Le mécanisme de la liquidation, IV.3.1-16). Le liquidateur peut toutefois appeler les actionnaires ou associé en garantie si, certes, il n'a pas consigné de sommes mais qu'il a partagé les sommes restantes entre les actionnaires sous réserve de dettes fiscales éventuelles. Tant la citation que la dénonciation de la saisie-arrêt sont valablement signifiées au dernier siège connu de la société qui, même dissoute d'office, continue à exister en tant que personne morale jusqu'à la liquidation, conformément à l'article 181 CS. Une action oblique sur la base de l'article 1166 C. Civ. accorde au demandeur les mêmes droits qu'au créancier originaire, en l'espèce la seconde défenderesse. Le dépôt des bilans au greffe du tribunal de commerce implique l'accord de l'assemblée générale des associés, qui, d'ailleurs, peuvent s'opposer aux bilans déposés sans approbation préalable par l'assemblée générale. (Bull. Contr. n° 683 - Mai 1989, Banque de données LEADERS) Les actions en responsabilité contre les liquidateurs pour les fautes commises dans l'exercice de leur mandat se prescrivent par cinq ans à dater de la faute. Si la faute a été cachée intentionnellement, le délai commence à courir à partir de sa découverte. Les actionnaires, dont la responsabilité est limitée à leur apport, ne sont pas tenus au paiement des dettes impayées de la société liquidée, pas même à concurrence de ce qu'ils ont reçu de la société liquidée (RESTEAU, C., Sociétés Anonymes, IV, 135, n 1968; VAN RYN, J., Principes, II 140, n° 119). Les biens qui réapparaissent après la clôture de la liquidation sont des biens vacants relevant du domaine public. En effet, du fait de la clôture de sa liquidation, la société a disparu. La clôture de la liquidation implique une renonciation au droit sur les biens ou droits que la société aurait encore pu faire valoir. Cela suppose que la décision de procéder à la clôture de la liquidation est prise en connaissance de cause. A défaut, la responsabilité du liquidateur pourrait être invoquée. Celui-ci ne peut donc invoquer la décharge qui lui a été accordée étant donné que l'acte de décharge peut porter uniquement sur les données sur lesquelles les actionnaires ont pu se prononcer en connaissance de cause. Le cas échéant, l'annulation de la décision de procéder à la clôture de la liquidation peut également être demandée bien qu'il soit requis à cet effet que cette décision soit entachée d'un

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dol. Quoi qu'il en soit, se pose également la question de savoir comment l'annulation pourrait être obtenue étant donné que la société à assigner a cessé d'exister. Une solution pragmatique consisterait à attribuer tout l'actif non connu à un associé lors de la clôture de la société, étant entendu que, après perception de cet actif, l'associé doit rendre des comptes aux autres actionnaires. Le liquidateur pourrait alors intervenir en tant qu'observateur pour le compte des autres actionnaires. Les liquidateurs qui omettent de convoquer l'assemblée générale dans les trois semaines qui suivent la demande qui leur en a été faite, sont passibles d'une amende de cinquante à dix mille euros. 4.8. Liquidation déficitaire ou faillite ? Tout d'abord, la jurisprudence de la Cour de cassation adhère au principe de l'égalité des créanciers. Les créanciers entrent de plein droit en concours du fait et dès le moment de la liquidation de la société (Cass., 31 janvier 1964, Rev. Prat. Soc., 1964, 102, Cass., 19 janvier 1984, Pas., 1984, I, 546 et Cass., 7 avril 1986, Pas., I, 1951; v. aussi P. GERARD, La règle de l’égalité entre créanciers d’une société commerciale en liquidation, C.J.B., 1977 (634), 640-641, n°7). Ce principe est particulièrement important et entraîne les conséquences suivantes (cf. pour un commentaire circonstancié, WUILLAUME, M., Vademecum du liquidateur de sociétés et d'associations, Bruxelles, 1983, 112) : - les droits des créanciers sur les créances antérieures à la liquidation sont fixés

irrévocablement; - en principe, il ne peut pas y avoir de compensation entre des dettes antérieures et des dettes

postérieures au concours (Cass., 23 novembre 1939, Pas., 1939, I, 486); - les intérêts des dettes cessent de courir (Cass., 24 mars 1977, Rev. Prat. Soc., 1977, n°5933,

108); - les créanciers non privilégiés peuvent s'opposer à ce que l'un d'eux soit payé dans une

proportion plus importante que les autres.

4.9. Dispense de cotisation/ Modification auprès de la Banque-Carrefour des entreprises Les sociétés en liquidation sont dispensées de payer la cotisation de € 347,50 – ou € 822,50 - à charge des sociétés, pour autant que l'acte déterminant le mode de liquidation ait été publié aux Annexes au Moniteur belge. Une note de l'INASTI précise ce qu'il faut entendre par « état de liquidation »39. Seules les sociétés en liquidation, en faillite ou en concordat (redressement judiciaire) peuvent être exemptées de la cotisation sociale des sociétés. Les sociétés sans activité mais qui ne sont pas dissoutes n'entrent pas dans cette catégorie (Q. et R. Parl., Sénat, n° 42, 2 février 1993 à Q. n°218 GOOVAERTS), sauf bien sûr les cas de liquidation judiciaire. Une modification de l’inscription dans la Banque-carrefour des entreprises est quant à elle nécessaire, faisant suite à la mise en liquidation de la société. Tous les documents émis par la société devront faire état que la société est « en liquidation ».

39 v. Nouvelles brèves, Comptabilité et Fiscalité pratiques, n°98/1

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Art. 183 § 1er. Les sociétés sont, après leur dissolution, réputées exister pour leur liquidation. Toutes les pièces émanant d'une société dissoute mentionnent qu'elle est en liquidation. § 2. Toute modification de la dénomination d'une société en liquidation est interdite. § 3. Une procédure de transfert du siège d'une société en liquidation ne peut être mise à exécution qu'après homologation par le tribunal de commerce dans le ressort duquel se trouve le siège de la société. L'homologation est sollicitée par voie de requête à la diligence du liquidateur. Le tribunal statue toutes affaires cessantes. Le ministère public est entendu. Le tribunal accorde l'homologation s'il estime que le transfert du siège est utile pour procéder à la liquidation. Un acte portant transfert d'une société en liquidation ne peut être valablement déposé conformément à l'article 74 que si le tribunal de commerce y joint une copie de la décision d'homologation. 4.9. L'assemblée générale En vertu de l’art. 181 CS, l’assemblée générale prononçant la mise en liquidation doit faire préalablement l’objet d’un rapport de gestion et d’un rapport de contrôle, annoncés dans l’ordre du jour; si aucune proposition de mise en liquidation ne figurait à l’ordre du jour, la procédure visée à l’art. 181 CS ne peut pas être appliquée. Elle doit être constatée par un acte authentique. Le notaire doit constater l’existence des deux rapports précités dans l'acte qu'il dresse. Le rôle de l'assemblée générale est maintenu, mais sa mission est modifiée: - L'assemblée générale reste l'organe suprême de la société, les liquidateurs lui sont

hiérarchiquement subordonnés (art.531 CS) ; - Par ailleurs, l’assemblée n’est pas tenue – en cours de liquidation – de procéder à

l’approbation des comptes annuels ; - L'assemblée générale doit en principe être convoquée une seule fois par an par les liquidateurs

pour leur permettre de lui exposer leur rapport sur le déroulement de la liquidation et pour lui soumettre les comptes annuels (cf. art. 193 CS). Ceux-ci doivent d’ailleurs être publiés à la Banque nationale de Belgique ;

- Le liquidateur doit convoquer l’assemblée générale pour obtenir l'autorisation nécessaire à un certain acte juridique pour lequel une autorisation de l'assemblée générale est requise légalement ou statutairement (cf. art. 187 CS), si celle-ci n'a pas encore été obtenue ;

- Après la liquidation, l’assemblée doit être réunie pour procéder à la clôture de celle-ci (cf. art. 194 CS, v. ci-dessous).

- L'assemblée générale ne peut plus procéder à une modification générale des statuts à partir de la dissolution. Seules les dispositions des statuts concernant l'organisation de la liquidation peuvent faire l'objet d'une modification.

Dans les sociétés de personnes que sont les S.N.C. et les S.C.S., on renonce à la règle de l'unanimité afin d'accélérer la prise de décision: les décisions sont prises par la moitié des associés possédant les trois quarts du capital (cf. art. 184 CS). A défaut de cette majorité, le juge tranchera. Dans les autres sociétés, il convient de travailler à la majorité simple des voix, à moins que des conditions plus restrictives soient inscrites dans les statuts de la société.

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Note : ces dispositions ne permettent pas que les décisions soient prises légalement sans que tous les associés n'aient eu l'occasion de participer à l'assemblée afin de pouvoir défendre leurs intérêts personnels, notamment par des communications à leurs coassociés, qui pourraient éventuellement influencer les décisions de la majorité. Lorsqu'un associé a été illégalement empêché de participer à l'assemblée, les décisions prises par celle-ci sont nulles dans la mesure où il est démontré que les intérêts de cet associé ont été préjudiciés par ces décisions, nonobstant le fait qu'elles aient été prises à la majorité requise (Cass., 4 avril, 1975, MW, 1974-75, 2461, concl. DUMON, F.; il s'agit en fait d'une application de l'art. 196 CS). Le vote sur le mode de liquidation n'implique pas automatiquement la confirmation d'un acte de dissolution irrégulier. En effet, les associés qui ont voté pour la liquidation étaient en l'espèce convaincus à tort que l'acte de dissolution avait été pris en tenant compte du quorum de présence et de majorité requis (Gand, 26 juillet 1989, Rev. Prat. Soc., 1989, n° 1098, 79; voir TILLEMAN, B., De geldigheid van besluiten van de algemene vergadering, 1994, n° 93, 84-85).

Seule une assemblée générale doit être tenue à la clôture d'une liquidation. Après la liquidation et au moins un mois avant l'assemblée générale ou la réunion des associés, les liquidateurs déposent un rapport sur l'emploi des valeurs sociales au siège de la société et soumettent les comptes et pièces à l'appui. Ces rapports sont contrôlés par le commissaire. A défaut d'un tel commissaire, les associés disposent d'un droit individuel d'investigation, pour lequel ils peuvent se faire assister d'un expert-comptable ou d'un réviseur d'entreprises. Le commissaire communique ses constatations et l'on procède à l'octroi de la décharge aux liquidateurs. L'assemblée statue également sur la clôture de la liquidation à la majorité ordinaire (cf. art. 194 CS). Lors de la dernière assemblée générale, il est également indiqué l'endroit où les livres et documents de la société devront être déposés et conservés pendant 5 ans, en vertu de l'article 195 CS. En réalité, les documents ne doivent pas être conservés 5 ans, mais 7 ans, à dater du premier janvier de l'année qui suit la clôture, selon la législation comptable plus récente (art. 6 al. 4 de la loi du 17 juillet 1975). En l'absence d'indications sur l'endroit où les documents de la société sont déposés, le liquidateur est tenu de les garder. La clôture de la liquidation ne doit se faire par acte authentique que s'il reste des biens immeubles qui doivent encore être transférés aux actionnaires. L'avis signalant que les comptes de la liquidation ont été approuvés et que la liquidation est clôturée doit être publié en même tant que l'indication de l'endroit où les documents de la société sont déposés par le liquidateur et, le cas échéant, avec mention des sommes consignées pour les créanciers non payés (art. 195 CS). Les comptes annuels, le rapport (éventuel) du commissaire et le procès-verbal de l'assemblée générale qui décide de la clôture de la liquidation, ne doivent par contre pas être publiés. Le fait que la clôture de la liquidation ne soit pas publiée n'entraîne pas son inopposabilité à l'égard de tiers. La publication a uniquement pour but de permettre au délai de prescription de cinq ans pour les liquidateurs de commencer. Dans l'année qui suit la clôture de la liquidation, le liquidateur doit également procéder à la radiation de l'inscription de la société auprès de la Banque-Carrefour des entreprises. Cette radiation coûte € 77 (au travers d’un guichet d’entreprises); par ailleurs, la dissolution (mise en liquidation) demandait déjà une modification de l’inscription auprès de la Banque-Carrefour des entreprises

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En ce qui concerne la consignation de sommes et de valeurs, l'article 45 de la loi du 24 juillet 1921 relative à la dépossession involontaire des titres au porteur fixe que les sommes et valeurs qui reviennent aux actionnaires, mais qui n'ont pu leur être transmises dans les six mois après la clôture de la liquidation, doivent être déposées à la Caisse des dépôts et consignations. Dès que la décision de clôturer la liquidation a été prise, ces sommes disparaissent du patrimoine social et intègrent le patrimoine des ayants droit. Après la clôture de la liquidation, la société n'a plus qu'une personnalité juridique passive et elle n'a plus de siège social. Par conséquent cette société n'est plus attaquable en tant que personne juridique passive qu'en la personne et au domicile de son liquidateur. Une société commerciale continue d'exister après sa dissolution jusqu'à clôture de la liquidation et conserve en conséquence son siège social. L'avertissement-extrait de rôle concernant des impôts établis dans le chef de la société ne peut donc plus être envoyé au siège social (Gand, 13 décembre 1988, F.J. F., 1989, n 25 1). La correspondance (notamment celle de l'Administration fiscale) doit être adressée au dernier siège social mentionné au Moniteur belge quand bien même cette publication serait postérieure à la date de dissolution. (Cass., 20 septembre 1990, Banque de données LEADERS) A partir de la clôture de la liquidation, la société ne peut même plus agir en justice, elle ne peut plus intenter d'action ou interjeter appel contre une décision concernant une action intentée avant la clôture de la liquidation. Le mandat de liquidateur prend fin à la clôture de liquidation. Il perd donc son pouvoir de représentation de la société, à l'exception de son pouvoir de représentation dans la responsabilité passive de la société comme signalé ci-dessus. Aussi, le liquidateur doit-il veiller à ce que la liquidation ne soit pas clôturée avant qu'il ait été définitivement mis fin à toutes les procédures dans lesquelles la société est partie ni avant que les délais d'appel ou de cassation ne soient expirés. S'il agit autrement, sa responsabilité personnelle peut être mise en cause. Dès que le délai de cinq ans, à dater de la publication de la clôture de la liquidation, est échu, l'action du créancier est prescrite. Le fisc ne peut donc plus établir un nouvel impôt à charge de la société liquidée. Si l'actionnaire ou associé unique déclare dans l'acte de clôture de la liquidation, qu'il assurera personnellement le paiement des dettes à concurrence de ce qu'il a reçu de la société en liquidation, il est le successeur particulier et non le successeur universel de la société en liquidation étant donné son engagement, consigné dans l'acte de clôture de la liquidation, qui vaut convention à l'égard des tiers. 4.10. Comptes annuels Les comptes couvrant la période précédant la dissolution, qui ont été établis par l'organe d'administration, ainsi que le rapport de gestion et le rapport du commissaire, doivent être soumis à l'assemblée générale, qui doit se prononcer sur leur approbation, la décharge et l'éventuelle affectation du bénéfice.

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Le Code des sociétés prévoit également que chaque année, les liquidateurs doivent convoquer une assemblée générale à un moment qu'ils déterminent afin de lui faire rapport sur l'état de la liquidation, tout en indiquant les causes qui ont empêché celle-ci d'être terminée. S'il s'agit d'une société anonyme, d'une société européenne, d'une société coopérative européenne, d'une société coopérative, d'une société en commandite par actions ou d'une société privée à responsabilité limitée, ils doivent établir des comptes annuels conformément à l'article 92 CS, les soumettre à l'assemblée générale et, dans les trente jours de la date de l'assemblée et au plus tard sept mois après la date de clôture de l'exercice, les déposer à la Banque nationale de Belgique, accompagnés des autres documents prévus par le présent article; les articles 101 et 102 CS sont applicables à ce dépôt. Après la liquidation et au moins un mois avant l'assemblée générale ou la réunion des associés, les liquidateurs déposent un rapport sur l'emploi des valeurs sociales au siège de la société et soumettent les comptes et pièces à l'appui. Ces rapports sont contrôlés par le commissaire. A défaut d'un tel commissaire, les associés disposent d'un droit individuel d'investigation, pour lequel ils peuvent se faire assister d'un expert-comptable ou d'un réviseur d'entreprises. L'assemblée entend le cas échéant le rapport du commissaire et statue sur la décharge des liquidateurs. Les liquidateurs sont responsables tant envers les tiers qu'envers les associés, de l'exécution de leur mandat et des fautes commises dans leur gestion (cf. art. 192 CS). De même, la responsabilité ordinaire de droit commun est également applicable au liquidateur. La responsabilité du liquidateur se prescrit par cinq ans à dater de la faute. En cas de dissimulation frauduleuse de la faute, le délai commence à courir à partir de sa découverte. Pourquoi cette procédure ? La société est, après sa dissolution, réputée exister pour sa liquidation. Cette liquidation est l'ensemble des opérations qui, par suite de la dissolution de la société, visent à payer les créanciers de la société avec l'actif de la société et l'éventuel solde de liquidation à partager entre les actionnaires. Le patrimoine social et le patrimoine des actionnaires restent donc scindés après la dissolution (ou la déclaration de nullité) pendant la période de liquidation. La liquidation n'a pas pour but de prévenir une faillite imminente de la société. Les dispositions de la loi du 8 août 1997 ont d’ailleurs introduit des précisions quant à la possibilité de déclarer la faillite d’une société en liquidation. La société dissoute, à l'instar de la société déclarée nulle (cf. art. 175 CS), se trouve dans une situation de liquidation, ce qui veut dire que la société revêt pour ainsi dire une autre forme et que son objet d'exploitation est modifié par l'objet de liquidation comme décrit précédemment. En revanche, l'assemblée générale continue d'exister. La tâche de l'assemblée générale est toutefois modifiée unilatéralement. L'assemblée générale reste l'organe suprême de la société et les liquidateurs lui sont hiérarchiquement subordonnés. Cela ressort notamment du fait qu'en vertu de la loi, les liquidateurs doivent obtenir l'assentiment de l'assemblée générale pour certains actes. Si l'acte de dissolution mentionne que tout l'actif (et le passif) est transféré à l'associé unique, la jurisprudence admet que la liquidation est ainsi clôturée. Il en va de même lorsque l'actif et le passif d'une société sont transférés à une société nouvellement constituée et que les actions ou

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parts émises à cet effet sont partagées. Dans ce cas, l'acte de dissolution et l'acte de clôture de la liquidation peuvent coïncider.

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CHAPITRE 6 LA CONTINUITE DES ENTREPRISES ET LA FAILLITE

Il a fallu attendre 1997 pour que le législateur réforme enfin les lois sur le concordat judiciaire (le 17 juillet 1997) et la faillite (le 8 août 1997). Cette réglementation, qui datait du 19è siècle (de 1873 !), ne correspondait plus du tout à la réalité économique et de plus, elle ne permettait pas « d'empêcher de couler » certaines entreprises en difficultés. Deux lois sont ainsi apparues :

- la première, datée du 17 juillet 1997, a trait au concordat judiciaire, - la seconde, datée du 8 août 1997, traite de la faillite.

Compte tenu de la conjoncture économique, on constatera que les concordats ou faillites prennent, malheureusement, de plus en plus d'importance. Ces deux lois concernent uniquement les commerçants ; a contrario, une société civile (p.ex. un cabinet d’expertise comptable) ou une A.S.B.L. pourra être déclarée en déconfiture. Un concordat judiciaire apparaît souvent comme l’antichambre de la faillite. Il vise en tous cas à éviter les conséquence qu’une telle faillite pourrait avoir. 1. DROIT COMPTABLE ET DISPOSITIONS COMPTABLES DU CODE DES SOCIETES Le Code des sociétés intègre plusieurs dispositions qui font référence au principe comptable de continuité : Art. 96 CS Le rapport annuel [de gestion] visé à l'article 95 comporte : (…) 6° au cas où le bilan fait apparaître une perte reportée ou le compte de résultats fait apparaître pendant deux exercices successifs une perte de l'exercice, une justification de l'application des règles comptables de continuité;(…) Art. 94 CS (…)Les petites sociétés doivent cependant reprendre la justification visée à l'article 96, 6°, dans l'annexe aux comptes annuels. Art. 138 CS Les commissaires qui constatent, au cours de leurs contrôles, des faits graves et concordants susceptibles de compromettre la continuité de l'entreprise, en informent l'organe de gestion par écrit et de manière circonstanciée. Dans ce cas, l'organe de gestion doit délibérer sur les mesures qui devraient être prises pour assurer la continuité de l'entreprise pendant un délai raisonnable. Les commissaires peuvent renoncer à l'information visée au premier alinéa, lorsqu'ils constatent que l'organe de gestion a déjà délibéré sur les mesures qui devraient être prises. Si dans un délai d'un mois à dater de la communication de l'information visée au premier alinéa, ou s’ils estiment que ces mesures ne sont pas susceptibles d’assurer la continuité de l’entreprise pendant un délai raisonnable, les commissaires n'ont pas été informés de la délibération de l'organe de gestion sur les mesures prises ou envisagées pour assurer la continuité de l'entreprise pendant un délai raisonnable, ils peuvent communiquer leurs constatations au président du tribunal de commerce. Dans ce cas, l'article 458 du Code pénal n'est pas applicable.

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Au cas où il n'est pas nommé de commissaire, lorsque des faits graves et concordants sont susceptibles de compromettre la continuité de l'entreprise, l'organe de gestion est également tenu de délibérer sur les mesures qui devraient être prises pour assurer la continuité de l'entreprise pendant un délai raisonnable. Art.. 332-332, 431 & 633 CS Art. 332 CS (S.P.R.L.) Sauf dispositions plus rigoureuses des statuts, si, par suite de perte, l'actif net est réduit à un montant inférieur à la moitié du capital social, l'assemblée générale doit être réunie dans un délai n'excédant pas deux mois à dater du moment où la perte a été constatée ou aurait dû l'être en vertu des obligations légales ou statutaires, en vue de délibérer et de statuer, le cas échéant, dans les formes prescrites pour la modification des statuts, de la dissolution éventuelle de la société et éventuellement d'autres mesures annoncées dans l'ordre du jour. L'organe de gestion justifie ses propositions dans un rapport spécial tenu à la disposition des associés au siège de la société quinze jours avant l'assemblée générale. Si l'organe de gestion propose la poursuite des activités, il expose dans son rapport les mesures qu'il compte adopter en vue de redresser la situation financière de la société. Ce rapport est annoncé dans l'ordre du jour. Une copie de ce rapport est transmise conformément à l'article 269. Les mêmes règles sont observées si, par suite de perte, l'actif net est réduit à un montant inférieur au quart du capital social mais, en ce cas, la dissolution aura lieu si elle est approuvée par le quart des voix émises à l'assemblée. Lorsque l'assemblée générale n'a pas été convoquée conformément au présent article, le dommage subi par les tiers est, sauf preuve contraire, présumé résulter de cette absence de convocation. L'absence du rapport prévu par cet article entraîne la nullité de la décision de l'assemblée générale. Art. 333 CS (S.P.R.L.) Lorsque l'actif net est réduit à un montant inférieur à 6.200,00 EUR40, tout intéressé peut demander au tribunal la dissolution de la société. Le tribunal peut, le cas échéant, accorder à la société un délai en vue de régulariser sa situation. L’Arrêté Royal du 30 janvier 2001 prévoit quant à lui, que : Art. 28. § 1er. Chaque société détermine les règles qui, dans le respect des dispositions du présent chapitre, mais compte tenu de ses caractéristiques propres, président aux évaluations dans l'inventaire prévu à l'article 9, § 1er, de la loi du 17 juillet 1975 relative à la comptabilité des entreprises et, notamment, aux constitutions et ajustements d'amortissements, de réductions de valeur et de provisions pour risques et charges ainsi qu'aux réévaluations. Ces règles sont arrêtées par l'organe d'administration de la société et actées dans le livre prévu à l'article 9, § 1er, de la loi du 17 juillet 1975 relative à la comptabilité des entreprises. Elles sont résumées dans l'annexe; ce résumé doit, conformément à l'article 24, alinéa 1er, être suffisamment précis pour permettre d'apprécier les méthodes d'évaluation adoptées. Sans préjudice du § 2, ces règles sont établies et les évaluations sont opérées dans une perspective de continuité des activités de la société. § 2. Les dispositions du présent titre sont applicables aux sociétés en liquidation. Dans les cas où, en exécution ou non d'une décision de mise en liquidation, la société renonce à poursuivre ses activités ou lorsque la perspective de continuité de ses activités, visée au § 1er, alinéa 3, ne peut être maintenue, les règles d'évaluation sont adaptées en conséquence et, notamment :

40 6.200 EUR également pour les SCRL et 61.500 EUR pour les S.A. et S.C.A.

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a) les frais d'établissement doivent être complètement amortis; b) les immobilisations et les actifs circulants font, le cas échéant, l'objet d'amortissements ou de réduction de valeur additionnels pour en ramener la valeur comptable à la valeur probable de réalisation; c) des provisions sont formées pour faire face aux charges inhérentes à la cessation des activités, notamment au coût des indemnités à verser au personnel. L'alinéa 2 est également applicable en cas de fermeture d'une branche d'activité ou d'un établissement de la société, en ce qui concerne les actifs, les passifs et les engagements relatifs à cette branche d'activité ou à cet établissement.

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22.. LLAA LLOOII DDUU 3311 JJAANNVVIIEERR 22000099 RREELLAATTIIVVEE ÀÀ LLAA CCOONNTTIINNUUIITTÉÉ DDEESS EENNTTRREEPPRRIISSEESS La loi du 31 janvier 2009 relative à la continuité des entreprises fait suite au fait que la loi du 17 juillet 1997 sur le concordat ne permettait d’intervenir que quand il était pratiquement trop tard pour éviter une faillite. Certaines dispositions de l’ancienne loi ont cependant été maintenues. Il a aussi fallu tenir compte du fait que le droit des procédures collectives subit, dans la plupart des États européens, une évolution rapide, tant sous l’influence des instruments juridiques internationaux, tels le règlement européen 1346/2000/CE relatif aux procédures l’insolvabilité ou les directives européennes en matière financière. Le code judiciaire a également été réaménagé compte tenu de ce qui précède. L’entrée en vigueur de la loi a été fixée au 1er avril 2009; les procédures de concordat judiciaire en cours au moment de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi restent cependant régies par la loi du 17 juillet 1997. 2.1. DEFINITIONS Aucune définition légale ne figurait dans la loi du 17 juillet 1997 ; tout au plus avions nous proposé une telle définition : le concordat judiciaire est une procédure collective organisée pour permettre le sauvetage des entreprises en proie à des difficultés passagères, mais fondamentalement saines, en leur procurant un répit (un « sursis ») pour concevoir et appliquer, à l’abri du harcèlement (recours, saisie, etc.) de leurs créanciers, un plan de redressement de leurs affaires. La loi du 31 janvier 2009 ne définit pas davantage ce concept (la procédure n’est d’ailleurs plus nécessairement collective) ; elle fournit cependant plusieurs définitions utiles : o « créances sursitaires » : les créances nées avant le jugement d'ouverture de la procédure de

réorganisation judiciaire ou nées du dépôt de la requête ou des décisions prises dans le cadre de la procédure;

o « créances sursitaires extraordinaires » : les créances sursitaires garanties par un privilège spécial ou une hypothèque et les créances des créanciers-propriétaires; « créances sursitaires ordinaires » : les créances sursitaires autres que les créances sursitaires extraordinaires;

o « créancier-propriétaire » : la personne dans le chef de laquelle sont réunies simultanément les qualités de titulaire d'une créance sursitaire et de propriétaire d'un bien meuble corporel qui n'est pas en sa possession et qui fait office de garantie;

o « créancier sursitaire ordinaire » : la personne qui est titulaire d'une créance sursitaire ordinaire;

o « créancier sursitaire extraordinaire » : la personne qui est titulaire d'une créance sursitaire extraordinaire;

o « plan de réorganisation » : le plan établi par le débiteur au cours du sursis ; o « siège social » : le siège statutaire visé à l'article 3.1 du règlement (CE) n° 1346/2000 du

Conseil du 29 mai 2000 relatif aux procédures d'insolvabilité; o « sursis » : un moratoire accordé par le tribunal au débiteur en vue de préserver la continuité

de l’entreprise.

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2.2. COMMENTAIRES

2.2.1. Champ d’application La loi relative à la continuité des entreprises (LCE) est applicable aux débiteurs suivants : - les commerçants visés à l'article 1er du Code de commerce, - la société agricole visée à l'article 2, § 3, CS, - les sociétés civiles à forme commerciale visées à l'article 3, § 4 CS (ce qui est une nouveauté

puisqu’antérieurement la loi du 17 juillet 1997 s’appliquait aux seuls commerçants, alors que l’art. 3, §4 CS dispose que les sociétés civiles n’ont précisément pas la qualité de commerçant ; une exception a été prévue pour les sociétés qui ont la qualité de titulaire d’une profession libérale).

Toutes les décisions du tribunal prévues dans la loi relative à la continuité des entreprises (LCE) sont exécutoires par provision. Sauf dispositions contraires, les décisions du tribunal sont susceptibles de recours selon les modalités et dans les délais prévus par le Code judiciaire. Lorsqu’il est stipulé que des décisions soient publiées par extrait au Moniteur belge, les délais commencent à courir du jour de la publication. 2.2.2. Dépistage des entreprises en difficulté : la collecte des données et les enquêtes commerciales 2.2.2.1. Généralités – la collecte des données Les renseignements et données utiles concernant les débiteurs qui sont en difficultés financières telles que la continuité de leur entreprise peut être mise en péril, y compris ceux qui sont obtenus en application des dispositions du présent titre, sont tenus à jour au greffe du tribunal de l'arrondissement dans lequel le débiteur a son établissement principal ou son siège social. Le procureur du Roi et le débiteur concerné peuvent à tout moment prendre connaissance sans déplacement des données ainsi recueillies. Ce dernier a le droit d'obtenir, par requête adressée au tribunal, la rectification des données qui le concernent. Conformément à des modalités qui seraient fixées par A.R., le tribunal peut également communiquer les données recueillies aux organismes publics ou privés désignés ou agréés par l'autorité compétente pour assister les entreprises en difficulté. 2.2.2.2. Comptes annuels S'il ressort de l'examen de la situation du débiteur que ce dernier est en état de faillite ou qu'il réunit les conditions d'application de l'article 182 CS, la chambre d'enquête commerciale peut communiquer le dossier au procureur du Roi. 2.2.2.3. Les protêts sur lettres de change et billets à ordre Dans les dix premiers jours de chaque mois, le dépositaire central envoie au président du tribunal du domicile, ou, s'il s'agit d'un commerçant, de l'établissement principal, ou, s'il s'agit d'une personne morale, du siège social du débiteur d'une lettre de change ou d'un billet à ordre un tableau des protêts des lettres de change acceptées et des billets à ordre, enregistrés le mois précédent et dont le dépositaire central n'a pas encore constaté le paiement ou été avisé de celui-ci.

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Ce tableau contient les mentions visées à l'article 3, 1° à 7°, de la loi du 3 juin 1997 sur les protêts. Ces tableaux restent déposés aux greffes respectifs desdits tribunaux où chacun peut en prendre connaissance. 2.2.2.4. Les jugements de condamnation Les jugements de condamnation par défaut et les jugements contradictoires prononcés contre des commerçants qui n'ont pas contesté le principal réclamé, doivent être transmis au greffe du tribunal du ressort de leur établissement principal ou de leur siège social. Il en va de même des jugements qui déclarent résolu un bail commercial à charge du locataire, qui refusent un renouvellement sollicité par celui-ci ou qui mettent fin à la gestion d'un fonds de commerce. 2.2.2.5. Retards de paiement auprès de certaines administrations Dans le mois de l'expiration de chaque trimestre, l'Office national de sécurité sociale transmet une liste des commerçants qui n'ont plus versé les cotisations de sécurité sociale dues depuis deux trimestres au greffe du tribunal de commerce dans le ressort duquel ils ont leur domicile ou leur siège social. La liste indique, outre le nom du commerçant, la somme due. Dans le mois de l'expiration de chaque trimestre, l'administration des Finances transmet une liste des commerçants qui n'ont plus verse la T.V.A. ou le précompte professionnel dus depuis deux trimestres au greffe du tribunal de commerce dans le ressort duquel ils ont leur domicile ou leur siège social. La liste indique, outre le nom du commerçant, la somme due. 2.2.2.6. Autres indices Citons, sans prétendre à l’exhaustivité : - décisions administratives de suspension ou de retrait de l'agrément d'un entrepreneur, ou

d'exclusion d'un entrepreneur des marchés publics. - assignations à comparaître devant le tribunal en récupération de créance. - exploits de saisie. - comptes annuels et rapports de commissaires; retard dans le dépôt ou absence de dépôt des

comptes annuels auprès de la BNB ; - révocation d'administrateurs, gérants ou liquidateurs de sociétés. - prorogation de l'assemblée générale.

Certains indices proviennent de communications spontanées de tiers (i.e. : plaintes de créanciers) ou de tiers qui engageraient, le cas échéant, leur responsabilité en se taisant (i.e. : le commissaire qui constate que la société est dans une situation menaçant sa continuité - cf. art. 138 CS) lorsque l'organe de gestion ne réagit pas à ses commentaires). D'autres indices enfin proviendront des investigations personnelles du tribunal et des initiatives qu'il aura prises : convocation et audition du commerçant, etc. Le tribunal a le droit de recueillir, par toutes voies légales, tous renseignements nécessaires pour découvrir à temps les entreprises en difficulté et remplir utilement sa mission préventive.

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2.2.3. Les chambres d'enquête commerciale Il est prévu que chaque tribunal de commerce institue une ou plusieurs chambres d’enquête commerciale et chaque arrondissement judiciaire compte un ou plusieurs substituts du Procureur du Roi spécialisés en matière commerciale. Les chambres d'enquête commerciale suivent la situation des débiteurs en difficulté en vue de favoriser la continuité de leur entreprise ou de leurs activités et d'assurer la protection des droits des créanciers. Cette activité ressemble donc assez bien à celle qui avait déjà été déployée, jusqu’à présent, par les chambres d’enquête commerciale. L'examen d’une entreprise est confié soit à un juge (exception faite de son président), soit à un juge consulaire. Lorsque le juge estime que la continuité de l'entreprise d'un débiteur est menacée, il peut appeler et entendre le débiteur afin d'obtenir toute information relative à l'état de ses affaires et au sujet des mesures de réorganisation éventuelles. La convocation est adressée, à la diligence du greffier, au domicile du débiteur ou à son siège social. L'enquête a lieu à huis clos. Le débiteur comparaît en personne, éventuellement assisté des personnes de son choix. En outre, il est loisible au juge de rassembler d'office toutes les données nécessaires à son enquête. Il peut entendre toute personne dont il estime l'audition nécessaire, même hors de la présence du débiteur (ce qui est une nouveauté : On se souviendra que c’est une telle audition, hors de la présence du débiteur, qui a abouti à la condamnation de l’État belge dans la célèbre affaire Anca (Cass.,19 décembre 1991, A.C. 1991-92, n° 215), et ordonner la production de tous documents utiles. Le débiteur peut produire tous autres documents de son choix. Le juge peut également descendre d'office sur les lieux de l'établissement principal ou du siège social, si le débiteur omet par deux fois de comparaître. Le procureur du Roi et le débiteur peuvent à tout moment obtenir communication des données recueillies durant l'enquête ainsi que du rapport visé ci-dessus. Dans les dix premiers jours de chaque mois, une liste des examens entamés est communiquée au procureur du Roi, à la diligence du greffier (à des fins de coordination, notamment lorsqu’une entreprise est active dans plusieurs arrondissements judiciaires. Conformément aux modalités fixées par le Roi, le tribunal peut échanger les données recueillies avec les organismes publics ou privés désignés ou agréés par l'autorité compétente pour assister les entreprises en difficulté. Lorsque le juge a terminé l'examen de la situation du débiteur, il rédige un rapport contenant les opérations accomplies lors de cet examen, ainsi que ses conclusions. Ce rapport est joint aux données recueillies. S'il ressort de l'examen de la situation du débiteur que ce dernier est en état de faillite ou qu'il réunit les conditions d'application de l'article 182 CS (non dépôt persistant des comptes annuels), la chambre d'enquête commerciale peut communiquer le dossier au procureur du Roi.

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Note : les membres de la chambre d'enquête commerciale qui ont procédé à l'examen de la situation du débiteur ne siègent pas dans le cadre d'une procédure de faillite, de réorganisation judiciaire ou de liquidation judiciaire qui concernerait ce débiteur. 2.2.4. Autre nouveauté de la LCE : le médiateur d’entreprise Une solution née des demandes des praticiens de l’insolvabilité (et utilisée de plus en plus souvent dans la pratique, surtout en cas d’impayés au niveau international) de type conventionnel, consiste à faire appel à un médiateur d’entreprise. Le droit a fait, dans la plupart des États, la découverte des «médiateurs». La notion de «médiateur d’entreprise» s’inspire du médiateur du droit commun, en ce que le médiateur est censé agir comme une personne qui rapproche les points de vue, en laissant dans une large mesure aux personnes concernées le soin de formuler elles-mêmes une première solution au problème. Le médiateur d’entreprise a, certes, un rôle plus actif dès le départ que celui joué par le médiateur de droit commun, mais restera attentif au fait que son rôle n’est pas celui d’un administrateur provisoire. Il pourra agir comme intermédiaire entre les créanciers et le débiteur et pourra amener le débiteur à réfléchir à sa stratégie d’entreprise. Beaucoup de petites entreprises en difficulté éprouvent quelque difficulté à trouver un bon intermédiaire qui puisse à la fois amener les dirigeants à réfléchir aux problèmes posés par une situation de crise et à trouver le bon moyen pour contacter ceux qui ont le destin de l’entreprise en mains. Une personne neutre et compétente qui, à l’instar du médiateur judiciaire, fait découvrir aux créanciers importants ainsi qu’aux débiteurs les solutions possibles, peut s’avérer être d’un précieux secours. Sur la demande du débiteur, le président du tribunal peut désigner un médiateur d'entreprise, en vue de faciliter la réorganisation de l'entreprise. Si le débiteur fait l'objet d'une enquête commerciale et a été convoqué par le juge, la demande est adressée à la chambre d'enquête commerciale. La demande de désignation d'un médiateur n'est soumise à aucune règle de forme et peut être formulée oralement. Le président du tribunal ou la chambre d'enquête commerciale qui accède à la demande du débiteur, fixe par ordonnance donnée en chambre du conseil l'étendue et la durée de la mission de médiation dans les limites de la demande du débiteur. La mission du médiateur d'entreprise prend fin lorsque le débiteur ou le médiateur le décident. La partie la plus diligente informe le président du tribunal que la mission a pris fin. 2.2.5. Nomination d’un mandataire de justice Lorsque des manquements graves et caractérisés du débiteur ou de ses organes menacent la continuité de l'entreprise en difficulté et que la mesure sollicitée est de nature à préserver cette continuité, le président du tribunal, saisi par tout intéressé selon les formes du référé, peut désigner à cet effet un ou plusieurs mandataires de justice (cf. art. 14 LCE). L'ordonnance qui désigne le mandataire de justice justifie et détermine de manière précise l'étendue et la durée de la mission de celui-ci.

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En cas de faute grave et caractérisée ou de mauvaise foi manifeste du débiteur ou d'un de ses organes, le tribunal peut, à la demande de tout intéressé ou du ministère public et dans le jugement qui ouvre la procédure de réorganisation judiciaire (v. infra) ou dans un jugement ultérieur, le débiteur entendu et le juge délégué entendu dans son rapport, leur substituer pour la durée du sursis un administrateur provisoire chargé d'administrer l'entreprise de la personne physique ou de la personne morale (cf. art. 28 §1er LCE). 2.2.6. L'accord amiable Le sauvetage d’une entreprise en difficulté s’effectue souvent en toute discrétion, par le biais d’accords conclus en dehors de toute procédure (qui pourrait donner une mauvaise image de l’entreprise et qui, par ailleurs, est inévitablement accompagné de certaines rigidités). Le débiteur peut toujours conclure un accord avec ses créanciers, axé sur le redressement de la situation du débiteur et sur le réaménagement de son passif. La différenciation du traitement des créanciers fait partie intégrante de la vie des entreprises, particulièrement en temps de crise41. L’accord amiable est de nature contractuelle et donc a pour double caractéristique que les parties en conviennent librement et que cet accord n’oblige pas les tiers Pour des insolvabilités transnationales importantes, un concordat amiable reste souvent la seule solution. Cela s’applique bien évidemment à des accords amiables en Belgique. Avant même que ne soit entamée une procédure de réorganisation judiciaire, un débiteur peut donc proposer à tous ses créanciers ou à deux ou plusieurs d'entre eux un accord amiable en vue de l'assainissement de sa situation financière ou de la réorganisation de son entreprise. Les parties conviennent librement de la teneur de cet accord, qui n'oblige pas les tiers. Cet accord ne peut en principe être remis en cause en cas de faillite, si celui-ci énonce qu'il est conclu en vue d’assainir la situation de l’entreprise et est déposé au greffe du tribunal et y conservé dans un registre. Permettre les accords amiables n’a de sens que si, en parallèle, les paiements effectués sans fraude au cours des six mois précédant la faillite subséquente à l’échec de l’accord amiable sont opposables à la masse des créanciers. Les tiers ne peuvent ni prendre connaissance de l'accord ni être informés de son dépôt sauf l'assentiment exprès du débiteur.

41 Cf. Doc. Ch. 52/0160/001, p. 5

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2.3. La procédure de réorganisation judiciaire (PRJ) Le titre 4 de la LCE vise les procédures judiciaires et non plus conventionnelles. La procédure de réorganisation judiciaire vise à préserver, sous le contrôle du juge, la continuité de tout ou partie d’une entreprise en difficulté, ou de ses activités. Elle permet d'accorder un sursis au débiteur en vue : - soit de permettre la conclusion d'un accord amiable; - soit d'obtenir l'accord des créanciers sur un plan de réorganisation; - soit de permettre le transfert sous autorité de justice, à un ou plusieurs tiers, de tout ou partie

de l'entreprise ou de ses activités.

Le débiteur peut donc soit demander un moratoire, soit demander l’octroi d’un sursis, pour obtenir, sous le contrôle du juge, un étalement de sa dette ou une réduction des montants dus soit que son entreprise soit transférée à un tiers. La première procédure, réalisée sous supervision judiciaire, est la négociation d’un concordat amiable sous le couvert d’un sursis. Les quelques mois de répit peuvent faciliter les démarches du débiteur. La seconde procédure est celle de la réorganisation judiciaire par accord collectif. Elle est fort proche de l’ancienne procédure du concordat judiciaire. La procédure est divisée en deux périodes: celle du sursis, visant la période pendant laquelle le débiteur cherche une solution à ses difficultés et élabore un plan de réorganisation, et celle de l’exécution du plan. La troisième procédure organise le transfert de l’entreprise sous supervision judiciaire. On part de l’idée selon laquelle la sauvegarde de l’entreprise, ou au moins de certaines activités de cette dernière, est l’objectif à atteindre. Comme en matière de faillite, et plus récemment en matière de liquidation, un dossier de la réorganisation judiciaire est tenu au greffe ; il contient tous les éléments relatifs à cette procédure et au fond de l'affaire. Aucune publicité n’accompagne le dépôt de la requête, afin de permettre au requérant de mettre en place le dispositif du sursis, sans subir les conséquences négatives d’un tel dépôt. 2.3.1. Ouverture de la procédure Le débiteur qui sollicite l'ouverture d'une procédure de réorganisation judiciaire adresse une requête au tribunal compétent. Il doit joindre un total de dix documents à sa requête: 1° un exposé des événements sur lesquels est fondée sa demande et dont il ressort qu'à son estime, la continuité de son entreprise est menacée à bref délai ou à terme; 2° l'indication de l'objectif ou des objectifs pour lesquels il sollicite l'ouverture de la procédure de réorganisation; 3° la mention de l'adresse judiciaire électronique à laquelle il peut être contacté; 4° les deux derniers comptes annuels ou, si le débiteur est une personne physique, les deux dernières déclarations à l'impôt des personnes physiques; 5° une situation comptable de son actif et de son passif et un compte de résultats ne datant pas de plus de trois mois. Les petites sociétés visées à l'article 15 CS doivent communiquer leur compte

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de résultats selon le schéma complet (au lieu de l’usuel « schéma abrégé »); 6° une prévision d'encaissements pour la durée demandée du sursis au moins; 7° une liste complète des créanciers sursitaires reconnus ou se prétendant tels, avec mention de leur nom, de leur adresse et du montant de leur créance et avec mention spécifique de la qualité de créancier sursitaire extraordinaire. 8° s'il est en mesure de les formuler, les mesures et propositions qu'il envisage pour rétablir la rentabilité et la solvabilité de son entreprise, pour mettre en oeuvre un éventuel plan social et pour satisfaire les créanciers; 9° l'indication que le débiteur a satisfait aux obligations légales et conventionnelles d'information et de consultation des travailleurs ou de leurs représentants; 10° toutes autres pièces que le débiteur juge utiles pour étayer la demande. Note : s'il n'est pas à même de joindre à sa requête les documents visés ci-dessus aux numéros 5° à 9°, le débiteur les dépose au dossier de la réorganisation judiciaire dans les 14 jours du dépôt de sa requête. La requête est signée par le débiteur ou par son avocat. Elle est déposée au greffe du tribunal, avec les pièces utiles. Le greffier en délivre un accusé de réception. Dans tous les cas, le président du tribunal désigne dès le dépôt de la requête, un juge délégué qui est, soit un juge au tribunal, le président excepté, soit un juge consulaire, pour faire rapport à la chambre du tribunal saisie de l'affaire sur la recevabilité et le fondement de la demande et sur tout élément utile à son appréciation. Le juge délégué entend le débiteur et toute autre personne dont il estime l'audition utile à son enquête. Il peut demander auprès du débiteur toute information requise pour apprécier sa situation. Le juge délégué veille au respect de la présente loi et informe le tribunal de l'évolution de la situation du débiteur. Il prête particulièrement attention aux formalités prévues aux articles 17 (dépôt de la requête), 26, § 2 (il faut aviser les créanciers individuellement), 44 et 46, § 6 LCE (élaboration du plan de réorganisation et liste des créanciers). Au greffe est tenu un dossier de la réorganisation judiciaire où figurent tous les éléments relatifs à cette procédure et au fond de l'affaire. Tout créancier et, sur autorisation du juge délégué, toute personne pouvant justifier d'un intérêt légitime peut prendre gratuitement connaissance du dossier et en obtenir copie moyennant paiement des droits de greffe, si une copie sur support matériel est délivrée. Le dépôt d'un titre par le créancier au dossier de la réorganisation judiciaire interrompt la prescription de la créance. Il vaut également mise en demeure. Le juge délégué peut toutefois décider que le dossier sera accessible en tout ou en partie à distance, par voie électronique, selon les modalités et aux conditions qu'il détermine. 2.3.2. Conditions d'ouverture de la procédure de réorganisation judiciaire La procédure de réorganisation judiciaire est ouverte dès que la continuité de l'entreprise est menacée, à bref délai ou à terme, et pour autant qu’une requête en ce sens ait été déposée. Lorsque le débiteur est une personne morale, la continuité de son entreprise est en tout cas présumée être menacée si les pertes ont réduit l'actif net à moins de la moitié du capital social.

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Pour éviter les abus, il a été prévu que il est précisé que le débiteur qui a demandé et obtenu un sursis ne peut plus le demander dans les trois ans qui suivent, si ce n’est pour demander le transfert de tout ou partie de l’entreprise ou de ses activités. L'état de faillite du débiteur ne fait pas obstacle en soi à l'ouverture ou à la poursuite de la procédure de réorganisation judiciaire. 2.3.3. Effets de la requête Tant que le tribunal n'a pas statué sur la requête en réorganisation judiciaire, que l'action ait été introduite ou la voie d'exécution entamée avant ou après le dépôt de la requête :

- le débiteur ne peut être déclaré en faillite et, dans le cas d'une société, celle-ci ne peut non plus être dissoute judiciairement;

- aucune réalisation de biens meubles ou immeubles du débiteur ne peut intervenir à la suite de l'exercice d'une voie d'exécution.

2.3.4. Jugement sur la requête de procédure de réorganisation judiciaire Le tribunal procède à l'examen de la requête en réorganisation judiciaire dans les dix jours42 de son dépôt au greffe. Le délai laissé au tribunal pour statuer est bref. Il ne peut être long, étant donné le caractère encore secret des effets de la requête. S’il se confirme que la continuité de l’entreprise est menacée, le tribunal déclare ouverte la procédure de réorganisation judiciaire ; il fixe également la durée du sursis (maximum 6 mois, v. infra cependant). Lorsque la procédure de réorganisation judiciaire a pour objectif d'obtenir l'accord des créanciers sur un plan de réorganisation, le tribunal désigne, dans le jugement par lequel il déclare ouverte cette procédure, ou dans un jugement ultérieur, les lieu, jour et heure où, sauf prorogation du sursis, aura lieu l'audience à laquelle il sera procédé au vote sur ce plan et statué sur l'homologation. Lorsque le débiteur en fait la demande et, lorsqu'une telle désignation est utile pour atteindre les fins de la procédure de réorganisation judiciaire, le tribunal peut par la même décision ou à tout autre moment de la procédure, désigner un mandataire de justice pour assister le débiteur dans sa réorganisation judiciaire, auquel cas le tribunal fixe la mission sur la base de la demande du débiteur. Une même demande peut être faite par un tiers qui y a un intérêt. La demande est introduite par une requête contradictoire notifiée par les soins du greffier au débiteur. La requête précise la mission proposée par le requérant et prévoit que le requérant paie les frais et honoraires du mandataire de justice. Le débiteur doit aviser chacun des créanciers de ces données dans les 14 jours du prononcé du jugement43.

42 Le délai laissé au tribunal pour statuer est bref. Il ne peut être long, étant donné le caractère encore secret des effets de la requête (cf. Doc. Ch. 52/0160/001, p. 18). 43 Dans la mesure où la LCE ne prévoit pas de procédure de déclaration de créance, il est prévu que tout créancier peut, en vue d’interrompre la prescription de sa créance, déposer le titre de celle-ci dans le dossier de la procédure (cf. art. 20 al. 2 LCE).

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Le jugement qui déclare ouverte une procédure de réorganisation judiciaire doit être publié par extrait au Moniteur belge. Note : si le tribunal rejette la demande, le débiteur se retrouve comme avant le dépôt de la requête et le droit commun reprend ses droits. Si la demande est rejetée, il n’y a pas de raison de publier ce rejet au Moniteur belge. Par contre, le rejet doit être notifié au requérant, afin que les délais de recours puissent commencer à courir à son égard. 2.3.5. Durée de la procédure La durée du sursis ne peut pas être supérieure à 6 mois; à défaut, le tribunal rejette la demande. Sur requête du débiteur et sur le rapport du juge délégué, le tribunal peut proroger le sursis octroyé, sans que la durée du sursis ainsi prorogé n’excède 12 mois à compter du jugement (initial) accordant le sursis. Dans des circonstances exceptionnelles et si les intérêts des créanciers le permettent, ce délai peut cependant être prorogé de maximum 6 mois. Exemple de circonstances exceptionnelles pouvant entrer en ligne de compte : la dimension de l'entreprise, la complexité de l'affaire ou l'importance de l'emploi qui peut être sauvegardé. Les décisions rendues quant au prolongement du sursis ne sont susceptibles ni d'opposition ou d'appel. 2.3.6. Administrateur provisoire En cas de faute grave et caractérisée ou de mauvaise foi manifeste du débiteur ou d'un de ses organes, le tribunal peut, à la demande de tout intéressé ou du ministère public et dans le jugement qui ouvre la procédure de réorganisation judiciaire ou dans un jugement ultérieur, le débiteur entendu et le juge délégué entendu dans son rapport, leur substituer pour la durée du sursis un administrateur provisoire chargé d'administrer l'entreprise de la personne physique ou de la personne morale. Le tribunal, après avoir entendu le débiteur, le juge délégué, et l'administrateur provisoire, peut toujours ultérieurement retirer cette décision ou modifier les pouvoirs de l'administrateur provisoire. Ces décisions sont publiées par extrait au Moniteur belge. Elles ne sont pas susceptibles d'opposition (un appel reste cependant possible). 2.3.7. Effets de la décision de réorganisation La procédure de réorganisation ne connaît pas de «masse» au sens du droit de la faillite; le débiteur reste en possession des biens; les contrats sont poursuivis tels qu’ils avaient été conclus, avec leurs modalités d’exécution et leurs délais d’exécution. Aucune voie d'exécution des créances sursitaires ne peut être poursuivie ou exercée sur les biens meubles ou immeubles du débiteur au cours du sursis. Pendant la même période, le débiteur qui a la qualité de commerçant ne peut pas être déclaré en faillite et, dans le cas d'une société, celle-ci ne peut pas être dissoute judiciairement.

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Aucune saisie ne peut être pratiquée du chef des créances sursitaires au cours du sursis. Les saisies déjà pratiquées antérieurement conservent leur caractère conservatoire, mais le tribunal peut, selon les circonstances et dans la mesure où cette mainlevée n'impose pas un préjudice significatif au créancier, en accorder mainlevée après avoir entendu le juge délégué en son rapport, ainsi que le créancier et le débiteur. Le sursis n'affecte pas le sort des créances spécifiquement gagées au profit de tiers. La procédure de réorganisation ne connaît pas de «masse» au sens du droit de la faillite; le débiteur reste en possession des biens; les contrats sont poursuivis tels qu’ils avaient été conclus, avec leurs modalités d’exécution et leurs délais d’exécution. Le sursis ne fait pas obstacle au paiement volontaire de créances sursitaires par le débiteur. Nonobstant toutes stipulations contractuelles contraires, la demande ou l'ouverture de la procédure de réorganisation judiciaire ne met pas fin aux contrats en cours ni aux modalités de leur exécution. La procédure de réorganisation ne connaît donc pas de «masse» au sens du droit de la faillite; le débiteur reste en possession des biens; les contrats sont poursuivis tels qu’ils avaient été conclus, avec leurs modalités d’exécution et leurs délais d’exécution. Le débiteur peut cependant, même en l'absence de disposition contractuelle en ce sens, décider de ne plus exécuter un contrat en cours pendant la durée du sursis (sauf exception : les contrats de travail), en notifiant cette décision à ses cocontractants dans les 14 jours, à la condition que cette non-exécution soit nécessaire pour pouvoir proposer un plan de réorganisation aux créanciers ou rendre le transfert sous autorité judiciaire possible. Lorsque le débiteur décide de ne plus exécuter un contrat en cours, les dommages auxquels son contractant peut prétendre sont une créance sursitaire. Les clauses pénales, en ce compris les clauses de majoration du taux d'intérêt, visant à couvrir de façon forfaitaire les dommages potentiels subis par suite du non-respect de l'engagement principal, restent sans effet au cours de la période de sursis et jusqu'à l'exécution intégrale du plan de réorganisation en ce qui concerne les créanciers repris dans le plan. Le créancier peut cependant inclure dans sa créance sursitaire le dommage réel subi par suite du non-respect de l'engagement principal, ce qui entraîne par le fait même la renonciation définitive à l'application de la clause pénale, même après l'exécution intégrale du plan de réorganisation. 2.3.8. Modification de l'objectif de la procédure A tout moment pendant le sursis, le débiteur peut demander au tribunal : 1° s'il a sollicité la procédure de réorganisation judiciaire en vue d'obtenir un accord amiable et que celui-ci ne paraît pas réalisable, que la procédure soit poursuivie pour proposer un plan de réorganisation judiciaire ou pour consentir à un transfert, sous autorité de justice, de tout ou partie de l'entreprise ou de ses activités, auquel cas la procédure est poursuivie à cette fin; 2° s'il a sollicité la procédure de réorganisation judiciaire pour proposer un plan de réorganisation judiciaire et que celui-ci ne paraît pas réalisable, qu'il consente au principe d'un transfert, sous autorité de justice, de tout ou partie de l'entreprise ou de ses activités, auquel cas la procédure est poursuivie pour assurer ce transfert. Le jugement qui accède à cette demande est publié par extrait au Moniteur belge. 2.3.9. Fin anticipée et clôture de la procédure Deux acteurs peuvent provoquer la fin anticipée de la procédure :

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- Le débiteur

Celui-ci peut, à tout stade de la procédure, renoncer en tout ou en partie à sa demande en réorganisation judiciaire, à charge d'exécuter intégralement ses obligations aux conditions et selon les modalités convenues avec les créanciers que concerne la renonciation, si elle est partielle, ou avec tous ses créanciers, si elle est complète.

- Le tribunal Lorsque le débiteur n'est manifestement plus en mesure d'assurer la continuité de tout ou partie de son entreprise ou de ses activités au regard de l'objectif de la procédure, le tribunal peut, à compter du trentième jour du dépôt de la requête et jusqu'au dépôt du plan de réorganisation au dossier de la procédure, ordonner la fin anticipée de la procédure de réorganisation judiciaire par un jugement qui la clôture. Si le débiteur n'a pas déposé les pièces utiles dans les 14 jours du dépôt de sa requête, le tribunal peut statuer d'office sur la fin de la procédure de réorganisation judiciaire Le jugement est publié par extrait au Moniteur belge. Dès le prononcé du jugement qui ordonne la fin anticipée de la procédure en réorganisation judiciaire ou qui la clôture, le sursis prend fin et les créanciers retrouvent l'exercice intégral de leurs droits et actions.

2.4. Application de l’une des trois procédures de réorganisation judiciaire 2.4.1. La réorganisation judiciaire par accord amiable Lorsque la procédure de réorganisation judiciaire tend à la conclusion d'un accord amiable avec tous ses créanciers ou avec deux ou plusieurs d'entre eux, le débiteur poursuit cet objectif sous la surveillance du juge délégué et, le cas échéant, avec l'aide du mandataire de justice désigné par le tribunal (cf. ci-dessus). Sur requête contradictoire du débiteur, le tribunal peut octroyer des délais modérés visés à l'article 1244 du Code civil. En cas d'accord, le tribunal, statuant sur requête du débiteur et sur le rapport du juge délégué, constate cet accord et clôture la procédure. Le jugement est publié par extrait au Moniteur belge. Les parties à l'accord restent tenues par les dispositions de leur accord, aussi longtemps qu'il n'y est pas mis fin conformément au droit commun des contrats. 2.4.2. La réorganisation judiciaire par accord collectif Lorsque la procédure de réorganisation judiciaire a pour objectif d'obtenir l'accord des créanciers sur un plan de réorganisation, le débiteur dépose un plan au greffe au moins 14 jours avant l'audience fixée dans le jugement octroyant le sursis. Le débiteur doit communiquer à chacun de ses créanciers sursitaires, dans les 14 jours du prononcé du jugement qui déclare ouverte cette procédure, le montant de la créance pour lequel ce créancier est inscrit dans ses livres, accompagné, dans la mesure du possible, de la mention du

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bien grevé par une sûreté réelle ou un privilège particulier garantissant cette créance ou du bien dont le créancier est propriétaire. Durant le sursis, le débiteur élabore un plan composé d'une partie descriptive et d'une partie prescriptive. Il joint ce plan au dossier de la réorganisation judiciaire. Le cas échéant, le mandataire de justice désigné par le tribunal assiste le débiteur dans l'élaboration du plan. La partie descriptive du plan décrit l'état de l'entreprise, les difficultés qu'elle rencontre et les moyens à mettre en œuvre pour y remédier. Elle comporte un rapport établi par le débiteur sur les contestations de créances, de nature à éclairer les intéressés sur leur ampleur et leur fondement. Elle précise la manière dont le débiteur envisage de rétablir la rentabilité de l'entreprise. La partie prescriptive du plan contient les mesures à prendre pour désintéresser les créanciers sursitaires renseignés sur la liste déposée auprès du tribunal. Le plan de réorganisation décrit les droits de toutes les personnes qui sont titulaires : - de créances sursitaires; - de créances à naître du fait du vote ou de l'homologation du plan de réorganisation, et ce, quelle que soit leur qualité, la sûreté réelle ou personnelle qui les garantit, le privilège spécial ou général dont la créance est assortie, ou le fait que le titulaire ait la qualité de créancier-propriétaire ou une autre qualité. Le plan indique les délais de paiement et les abattements de créances sursitaires en capital et intérêts proposés. Il peut prévoir la conversion de créances en actions et le règlement différencié de certaines catégories de créances, notamment en fonction de leur ampleur ou de leur nature. Le plan peut également prévoir une mesure de renonciation aux intérêts ou de rééchelonnement du paiement de ces intérêts, ainsi que l'imputation prioritaire des sommes réalisées sur le montant principal de la créance. Il s’impose dès que le plan est homologué. L’homologation ne peut être refusée qu’en cas d’inobservation des formalités requises par la loi ou pour violation de l’ordre public. Note : tant le fisc que l’O.N.S.S. relèvent des créanciers sursitaires ordinaires dès lors qu’ils ne disposent pas de privilège spécial, mais bien général (cf. art. 422 et 423 CIR 92, cf. art. 86 et 87 CTVA) Sans préjudice du paiement des intérêts qui leur sont conventionnellement ou légalement dus sur leurs créances, le plan peut prévoir le sursis de l'exercice des droits existants des créanciers sursitaires extraordinaires pour une durée n'excédant pas 24 mois à dater du dépôt de la requête, étant cependant entendu que des intérêts doivent encore être payés. Les créances sursitaires extraordinaires peuvent donc être reportées, mais non réduites. Dans les mêmes conditions, le plan peut prévoir une prorogation extraordinaire de ce sursis pour une durée ne dépassant pas 12 mois. Dans ce cas, le plan prévoit qu'à l'échéance du premier délai de sursis, le débiteur soumettra au tribunal, son créancier entendu, la preuve que la situation financière et les recettes prévisibles de l'entreprise la mettront, selon les prévisions raisonnables, à même, à l'expiration de cette période supplémentaire, de rembourser intégralement les créanciers sursitaires extraordinaires concernés, et qu'à défaut d'apporter cette preuve, le débiteur entendra ordonner la fin de ce sursis.

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Le délai d'exécution du plan ne peut dépasser 5 ans à compter de son homologation. Le plan est déposé au greffe pour que les créanciers sursitaires puissent le consulter. Le débiteur informe les représentants des travailleurs du contenu de ce plan. Le tribunal dispose d’un délai de 14 jours à compter de celui de l'audience pour homologuer le plan de réorganisation. Le plan de réorganisation est tenu pour approuvé par les créanciers lorsque le scrutin recueille le vote favorable de la majorité de ceux-ci, représentant par leurs créances non contestées ou provisoirement admises, conformément à l'article 46, § 3, la moitié de toutes les sommes dues en principal. Notes : - Les créanciers ayant voté « contre » sont liés dès lors que ces majorités seraient acquises, - Les créanciers qui n'ont pas participé au vote et les créances qu'ils détiennent ne sont pas pris

en compte pour le calcul des majorités.

L'homologation du plan de réorganisation le rend contraignant pour tous les créanciers sursitaires. Notes : - tout créancier peut, par citation du débiteur, demander la révocation du plan de réorganisation

lorsqu'il n'est pas ponctuellement exécuté, ou lorsqu'il démontre qu'il ne pourra pas en être autrement et qu'il en subira un préjudice ;

- Les créances sursitaires qui n'ont pas été portées dans la liste déposée, et qui n'ont pas donné lieu à contestation, sont payées après l'exécution intégrale du plan conformément aux modalités prévues pour les créances de même nature. Si le créancier n'a pas été informé dûment au cours du sursis, il sera payé selon les modalités et dans la mesure prévue par le plan homologué pour des créances similaires.

2.5.3. Réorganisation judiciaire par transfert sous autorité de justice Le transfert sous autorité de justice de tout ou partie de l'entreprise ou de ses activités peut être ordonné par le tribunal en vue d'assurer leur maintien lorsque le débiteur y consent dans sa requête en réorganisation judiciaire ou ultérieurement au cours de la procédure. - volontairement

Si le débiteur consent au transfert sous autorité de justice au cours de la procédure, les représentants du personnel au sein du conseil d'entreprise ou, à défaut, du comité pour la prévention et la protection au travail, ou, à défaut, la délégation syndicale, ou, à défaut, une délégation du personnel, seront entendus.

- de manière forcée Le même transfert peut être ordonné sur citation du procureur du Roi, d'un créancier ou de toute personne ayant intérêt à acquérir tout ou partie de l'entreprise : 1° lorsque le débiteur est en état de faillite sans avoir demandé l'ouverture d'une procédure de réorganisation judiciaire; 2° lorsque le tribunal rejette la demande d'ouverture de la procédure, en ordonne la fin anticipée ou révoque le plan de réorganisation parce qu’il n’est pas correctement exécuté; 3° lorsque les créanciers n'approuvent pas le plan de réorganisation; 4° lorsque le tribunal refuse l'homologation du plan de réorganisation.

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La demande de transfert peut être faite dans la citation tendant à mettre fin de manière anticipée à la procédure de réorganisation ou à révoquer le plan de réorganisation, ou dans un exploit distinct dirigé contre le débiteur. Le jugement qui ordonne le transfert désigne un mandataire de justice chargé d'organiser et de réaliser le transfert au nom et pour compte du débiteur. Il détermine l'objet du transfert ou le laisse à l'appréciation du mandataire de justice. Le tribunal peut, par le même jugement, ordonner un (autre) sursis complémentaire, n'excédant pas 6 mois à compter de sa décision. Le jugement est publié par extrait au Moniteur belge par les soins du mandataire de justice désigné. Par ailleurs, les droits et obligations qui résultent pour le cédant des contrats de travail existant au moment du transfert de l'entreprise sont, du fait de ce transfert, en principe transférés au cessionnaire. Le cessionnaire et le cédant ou le mandataire de justice et toutes les organisations représentées au sein de la délégation syndicale peuvent convenir, dans le cadre d'une procédure de négociation collective, de modifier les conditions de travail pour préserver l'emploi en assurant en tout ou en partie la survie de l'entreprise ou de ses activités. Le cessionnaire et les travailleurs peuvent en outre convenir de modifier le contrat de travail individuel, pour autant que ces modifications soient liées principalement à des raisons techniques, économiques ou organisationnelles et pour autant que ces modifications n'imposent pas d'obligations plus lourdes au cessionnaire que celles qui découlent des négociations collectives. Le choix des travailleurs qu'il souhaite reprendre appartient au cessionnaire. Ce choix doit être dicté par des raisons techniques, économiques et organisationnelles et s'effectuer sans différenciation interdite, en particulier sur la base de l'activité exercée en tant que représentant du personnel dans l'entreprise ou la partie d'entreprise transférée. Le cessionnaire, le cédant ou le mandataire de justice peut demander, par requête au tribunal du travail du siège social, ou de l'établissement principal du débiteur, l'homologation du transfert projeté dans la mesure où la convention de transfert concerne les droits établis au présent article. Par le transfert projeté, on entend dans le présent article, outre le transfert même, la liste des travailleurs à reprendre ou repris, le sort des contrats de travail, les conditions de travail fixées et les dettes. Le tribunal du travail statue en urgence, après avoir entendu les représentants des travailleurs et le requérant. Le mandataire désigné organise et réalise le transfert ordonné par le tribunal par la vente ou la cession des actifs mobiliers ou immobiliers nécessaires ou utiles au maintien de tout ou partie de l'activité économique de l'entreprise. Il sollicite des offres en veillant prioritairement au maintien de tout ou partie de l'activité de l'entreprise tout en ayant égard aux droits des créanciers. En cas de pluralité d'offres comparables, la priorité est accordée par le tribunal à celle qui garantit la permanence de l'emploi par un accord social négocié. Il communique ses projets au juge délégué et, par requête contradictoire, notifiée au débiteur deux jours au moins avant l'audience, il demande au tribunal l'autorisation de procéder à l'exécution de la vente proposée. Sur le rapport du juge délégué, le tribunal accorde l'autorisation sollicitée, si la vente projetée satisfait aux conditions fixées.

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Lorsque le mandataire de justice désigné estime que toutes les activités susceptibles d'être transférées l'ont été, et en tout cas avant la fin du sursis, il sollicite du tribunal par requête la clôture de la procédure de réorganisation judiciaire, ou, s'il se justifie qu'elle soit poursuivie pour d'autres objectifs, la décharge de sa mission. Lorsque le débiteur est une personne morale, le tribunal peut, dans le jugement qui fait droit à cette demande, ordonner la convocation de l'assemblée générale avec la dissolution à l'ordre du jour. Le tribunal statue sur le rapport du juge délégué, le débiteur entendu. La décision de clôture de la procédure de réorganisation judiciaire décharge le cessionnaire de toutes les obligations autres que celles mentionnées dans l'acte de transfert. La personne physique dont l'entreprise a été transférée dans sa totalité peut être déchargée par le tribunal des dettes existantes au moment du jugement ordonnant ce transfert, si cette personne est malheureuse et de bonne foi. Elle peut, à cet effet, déposer une requête contradictoire au tribunal, 3 mois au plus tard après ce jugement. La requête est notifiée par le greffier au mandataire de justice. Le jugement ordonnant la décharge du débiteur est publié par les soins du greffier au Moniteur belge. S'il est déchargé, le débiteur ne peut plus être poursuivi par ses créanciers. La décharge ne profite pas aux codébiteurs ni aux sûretés personnelles, sans préjudice de l'application des articles 2043bis à 2043octies du Code civil.

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3. LA FAILLITE Lorsqu'il est clair qu'un redressement durable est hors d'atteinte, la faillite est une procédure de liquidation des biens du débiteur en vue du règlement de ses créanciers. La faillite conduit au paiement des dettes dans la mesure des possibilités du débiteur ou de ses actifs, en mettant les créanciers sur un pied d'égalité, sous réserve des privilèges et des sûretés opposables à la masse faillie. En vertu de l’art. 2 L. 08/08/1997, « Tout commerçant qui a cessé ses paiements de manière persistante et dont le crédit se trouve ébranlé est en état de faillite » Pour être déclaré en faillite, la loi du 8 août 1997. impose donc que 3 conditions soient simultanément réunies : - Etre commerçant ou une société de commerce ; - Etre en état de cessation de paiements - Avoir son crédit ébranlé de manière persistante

Celui qui n'exerce plus le commerce peut être déclaré en faillite, si la cessation de ses paiements remonte à une époque où il était encore commerçant. La faillite d'une personne physique peut être déclarée jusqu'à six mois après son décès, lorsqu'elle est décédée après avoir cessé ses paiements de manière persistante et que son crédit a été ébranlé. La faillite d'une personne morale dissoute peut être déclarée jusqu'à six mois après la clôture de la liquidation. La cessation des paiements peut exister alors même que l'actif serait supérieur au passif (c’est un problème de liquidité : le commerçant débiteur n’arrive pas à payer les échéances d’intérêts et/ou les dettes échues). Le débiteur a perdu la confiance de : - ses créanciers qui ne veulent plus lui accorder de délais de paiements - ses fournisseurs qui n'acceptent plus de lui livrer autrement que comptant - de ses banquiers qui ne lui consentent plus de nouvelles avances

Sauf en cas de privilège (v. infra), un créancier ne recouvrera que rarement sa créance en cas de faillite. Tout comme dans le cas du concordat, il faudra en outre accorder une attention toute particulière à la déclaration de créances. 3.0. Principales causes de faillite Suivant une étude réalisée auprès de 450 curateurs, qui ont traité environ 4000 faillites en 2001, les causes de faillite sont multiples. La majorité des faillites sont occasionnée par un capital insuffisant et une mauvaise gestion d’entreprise. - les incidents de paiement :

Les retards de règlements dans les transactions commerciales, peuvent provoquer des défaillances en cascade. - la mauvaise gestion :

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D’après les curateurs, la plupart des entrepreneurs commencent leur activité avec une bonne connaissance du produit et de la profession mais pas assez d’expérience en matière d’organisation. Malheureusement, les curateurs constatent souvent une incompétence des entrepreneurs en matière d’administration, de comptabilité et de budget. Les entrepreneurs dirigent leur société avec l’obsession du chiffre d’affaires, en perdant totalement de vue leur rentabilité qui est importante pour la vie de leur société. - capital insuffisant : Souvent les entrepreneurs empruntent un capital suffisant pour créer leur société, mais oublient de tenir compte des coûts d’exploitation pour lancer la société. Ils ont tendance aussi à oublier qu’il faut avoir un stock de départ et payer les frais de personnel. - situation économique : La situation économique est la troisième cause de faillite. La concurrence avec les pays où les coûts salariaux sont réduits joue un rôle essentiel. Les entreprises du secteur alimentaire évoquent également les crises successives (dioxine, vache folle, etc.). - fraude : Les entreprises souffrent des pratiques malhonnêtes des clients, des fournisseurs et parfois des collaborateurs. 3.1. Jugement déclaratif de faillite La faillite est déclarée par jugement du tribunal de commerce saisi soit sur l'aveu du commerçant, soit sur citation d'un ou plusieurs créanciers, du ministère public, d'un administrateur provisoire. Le jugement de citation détermine : - la date de cessation de paiement; - un ou plusieurs juge-commissaire; - le curateur. a) Sur aveu Le commerçant doit déclarer son état dans le mois de la cessation de paiement au greffe du tribunal de commerce du domicile ou du principal établissement de la société. De plus, il doit y déposer sa comptabilité (d'où l'expression: « dépôt de bilan »). Le non respect de cette obligation est sanctionnée par la loi. Note : l'obligation de faire cet aveu est suspendue à compter du dépôt d'une requête en réorganisation judiciaire et aussi longtemps que dure le sursis accordé en vertu de la loi du 31 janvier 2009 relative à la continuité des entreprises. L'article 8 de la loi du 8 août 1997 sur les faillites autorise le président du tribunal de commerce, lorsqu'il existe des indices précis, graves et concordants que les conditions de la faillite sont réunies, à dessaisir le commerçant de la gestion de son patrimoine, en tout ou en partie et à désigner un administrateur provisoire. Suivant le nouvel art. 8 de la loi sur les faillites (tel que modifié par la loi du 31 janvier relative à la continuité des entreprises), lorsqu'il existe des indices graves, précis et concordants que les

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conditions de la faillite sont réunies, et qu'il y a urgence, le président du tribunal de commerce peut dessaisir en tout ou en partie le commerçant ou la société de commerce de la gestion de tout ou partie de ses biens. Le président statue soit sur requête unilatérale de tout intéressé, soit d'office. Son ordonnance de dessaisissement ne conserve d'effet que si, dans les huit jours de son prononcé, une assignation en faillite est introduite, soit par la partie demanderesse, soit par l'administrateur provisoire lorsque le président a statué d'office. Les frais de l'administration provisoire sont fixés par le président du tribunal. Ils sont à charge du demandeur et, en cas de désignation d'office, du débiteur. b) Par un créancier Un créancier impayé (p.ex. l’O.N.S.S.) peut demander au tribunal de commerce de prononcer la faillite de son débiteur. Le débiteur sera convoqué en même temps que le créancier demandeur à l'audience du tribunal. c) Par le ministère public (Chambres de dépistage) Dans chaque tribunal de commerce, une ou plusieurs chambres d' enquêtes commerciales (de dépistage) existent. Le greffe du tribunal de commerce établit la liste des entreprises en difficultés grâce à des indices « clignotants » tels que les protêts, l'O.N.S.S., la T.V.A., le précompte professionnel (non paiement pendant deux trimestres consécutifs), les jugements de condamnation par défaut, la perte de l'agréation d'entrepreneur, etc. Cette liste est transmise chaque mois au Parquet. Tant en cas d'aveu qu'en cas de demande en faillite, le tribunal de commerce peut suspendre sa décision pour un délai de quinze jours pendant lequel le commerçant ou le ministère public peut introduire une demande en concordat. Dans son jugement déclaratif de faillite, le tribunal de commerce nomme, parmi ses membres, le président excepté, un juge-commissaire. Le tribunal de commerce désigne un ou plusieurs curateurs (qui sont nécessairement des avocats), selon l'importance de la faillite. Les honoraires des curateurs sont fixés en fonction de l'importance et de la complexité de leur mission. Le jugement déclaratif de la faillite et celui qui a fixé ultérieurement la cessation de paiement, sont, par les soins des curateurs et dans les cinq jours de leur date, publiés par extraits au Moniteur belge et dans au moins un journal de diffusion nationale. Les curateurs entrent en fonctions immédiatement après le jugement déclaratif et ils gèrent la faillite en bon père de famille, sous la surveillance du juge-commissaire Dès leur entrée en fonctions, les curateurs décident sans délai s'ils poursuivent l'exécution des contrats conclus avant la date du jugement déclaratif de la faillite et auxquels ce jugement ne met pas fin. Le curateur est le principal agent de la faillite ; à lui seul revient la mission de gérer la faillite. Les curateurs sont choisis parmi les avocats inscrits sur une liste établie par l’assemblée générale du tribunal de commerce. Cependant, en fonction de l’importance de la faillite, d’autres personnes non inscrites sur la liste du tribunal peuvent être désignées pour leurs compétences particulières (art. 27 L.F. )

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Le curateur a trois fonctions : o il est un mandataire de justice

Dans l’exercice de leurs fonctions de mandataire de justice, les avocats restent soumis à toutes les obligations déontologiques de leur profession ; cependant, le courrier adressé par le curateur à un autre avocat, et inversement, n’est pas couvert par la confidentialité.

o il remplace le failli dans l’administration des ses biens, o il représente l’ensemble des créanciers.

Le juge-commissaire est chargé particulièrement d’accélérer et de surveiller les opérations, la gestion et la liquidation de la faillite ( art. 35 L.F. ) Le procureur du Roi peut assister à toutes les opérations de la faillite, consulter à tout moment le dossier de la faillite, prendre connaissance des livres du failli, vérifier sa situation et se faire comminuquer par les curateurs tous les renseignements qu’il juge utiles. ( art.36 L.F). Les curateurs remettent au juge-commissaire, au cours des sixième et douzième mois de la première année de liquidation de la faillite, un état détaillé de la situation de la faillite. Cet état, qui comporte notamment l'indication des recettes, des dépenses, des répartitions, ainsi que de ce qu'il reste à liquider, est déposé au dossier de la faillite. L'état des contestations des créances est également précisé. A partir de la deuxième année de la liquidation, l'état détaillé ne doit plus être remis au juge-commissaire et déposé au dossier de la faillite que tous les ans.

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3.2. Effets de la faillite Tout comme la liquidation, la faillite implique à terme la disparition de la personnalité morale d’une société. La faillite vise à vendre les actifs, rembourser (le plus possible) des dettes et le solde (presque jamais) sera remboursé aux actionnaires. La faillite entraîne trois conséquences fondamentales : - le dessaisissement, en vertu duquel d’une part, le failli se voit retirer la gestion de ses biens au

profit d’un ou plusieurs curateurs, nommés spécialement à cette fin (nécessairement des avocats),

- les droits d’exécution des créanciers sont suspendus, - la formation d’une masse, la masse faillie, qui, sous l’angle de l’actif, comprend l’ensemble

des biens et droits du failli (la masse active ), et du point de vue du passif regroupe les créanciers appelés à se partager l’actif net du failli (la masse passive ).

Le failli, à compter du jour du jugement déclaratif de la faillite, est dessaisi de plein droit de l'administration de tous ses biens, même de ceux qui peuvent lui échoir tant qu'il est en état de faillite. Tous paiements, opérations et actes faits par le failli, et tous paiements faits au failli depuis ce jour sont inopposables à la masse. Les lettres et messages adressés au failli sont remis aux curateurs qui les ouvrent; si le failli est présent, il assiste à leur ouverture. Les lettres et messages qui ne concernent pas exclusivement l'activité commerciale du failli sont transmis ou communiqués par le curateur à l'adresse indiquée par le failli. Tous les actes accomplis par le débiteur sont inopposables à la masse, lorsqu'ils ont été faits après la date de cessation de ses paiements. Le jugement déclaratif de la faillite rend exigibles, à l'égard du failli, les dettes non échues. A partir du même jugement, toute action mobilière ou immobilière, toute voie d'exécution sur les meubles ou immeubles, ne peut être suivie, intentée ou exercée que contre les curateurs. Pour participer à une répartition ou pour exercer personnellement un droit de préférence quelconque, les créanciers sont tenus de déposer au greffe du tribunal de commerce une déclaration de créance. Dès que la procédure est déclenchée, l’ensemble des créanciers se regroupe au sein de la masse qui prend en charge les intérêts communs ; la masse est représentée par le curateur qui agit pour les nom et compte de la masse. On distingue : - les dettes dans la masse : celles qui existaient au jour du jugement déclaratif de faillite, - les dettes de la masse : celles qui sont nées ensuite, et qui ont en principe été contractées par

le curateur. La constitution de la masse ne concerne que les créanciers dont le droit préexiste à l’ouverture de la procédure et qui sont appelés « créanciers dans la masse » par opposition à ceux dont le droit est né ensuite du jugement déclaratif de faillite qui sont appelés « créanciers de la masse ».

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Les créanciers de la masse, qui contractent après l’ouverture de la faillite avec le curateur, sont privilégiés par rapport aux autres créanciers et désintéressés par priorité A partir du jugement de faillite, les créanciers perdent leur droit d’agir individuellement contre le débiteur, ils sont ainsi tous placés sur un plan d’égalité. En contrepartie de cette suspension des poursuites, les créanciers dans la masse exercent une sorte de saisie collective sur le patrimoine du débiteur ; la masse est considérée comme un tiers qui peut demander que tous les actes pouvant lui nuire et donc, qui portent atteinte aux droits des créanciers, lui soient inopposables. Le produit de la vente [des biens du débiteur] est distribué entre [les créanciers] par contribution Lorsque les biens du débiteur sont insuffisants pour satisfaire tous les créanciers chirographaires (ordinaires), et uniquement en cas de concours, le produit de la réalisation doit être réparti au marc le franc (l’euro) entre tous les créanciers, c’est-à-dire en proportion de leur créance. Note : une dérogation est possible par les parties en modifiant la répartition comme elles l’entendent Sanction : lorsqu’une telle convention porte atteinte aux droits d’un des créanciers, il y a inopposabilité des effets au créancier, mais pas la nullité absolue ou relative. Toutes voies d'exécution, pour parvenir au paiement des créances privilégiées sur les meubles dépendant de la faillite, seront suspendues jusqu'à la clôture du procès-verbal de vérification des créances. La notion du « concours » implique la suspension du cours des intérêts et des mesures d'exécution forcée, l'interdiction de la compensation entre créances et dettes, l'extinction du droit d'action en résolution dans le chef du vendeur de biens mobiliers, ainsi que la distinction entre les dettes « de » la masse (qui échappent au « concours ») et les dettes « dans » la masse. Lorsque toutes les créances sont définitivement admises ou rejetées par un jugement exécutoire, même frappé d'un recours, les curateurs procèdent à la liquidation de la faillite. Ils procèderont aux remboursement des dettes en respectant l’ordre suivant : - les dettes de la masse, - les créanciers privilégiés spéciaux (p.ex. créanciers hypothécaires), - les créanciers privilégiés généraux (p.ex. l’O.N.S.S., le bailleur, etc.), - les créanciers chirographaires (ordinaires) ; - les associés/actionnaires.

Période suspecte Les entreprises tentent de reculer au maximum l’échéance de la faillite. A un certain moment, l’on se rend compte que « les carottes sont cuites » et le législateur a voulu combattre les abus. Un curateur peut dénoncer toutes les transactions sui sont survenues dans les 6 mois qui précèdent le jugement déclaratif de faillite. Exemple. : Le failli vend sa voiture à un ami pour € 1.000 alors qu’elle vaut € 15.000 ; le curateur peut annuler cette vente. Note : cela pourrait être comparé avec l’action paulienne. Lorsque la liquidation de la faillite est terminée, le failli et les créanciers sont convoqués par les curateurs, sur ordonnance du juge-commissaire, rendue au vu des comptes des curateurs. Le compte simplifié des curateurs reprenant le montant de l'actif, les frais et honoraires des curateurs, les dettes de la masse et la répartition aux différentes catégories de créanciers, est joint à cette convocation.

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Dans cette assemblée, le compte est débattu et arrêté. Les créanciers donnent leur avis sur l'excusabilité du failli. - Ne peuvent être déclarés excusables les faillis dont les administrateurs ont été condamnés

pour infraction à l'article 489ter du Code pénal, pour vol, faux, concussion, escroquerie ou abus de confiance, ni les dépositaires, tuteurs, administrateurs ou autres comptables, qui n'ont pas rendu et soldé leur compte en temps utile.

o Si le failli est déclaré excusable, il ne peut plus être poursuivi par ses créanciers ; o Si le failli n'est pas déclaré excusable, les créanciers recouvrent le droit d'exercer

individuellement leur action sur ses bien. - Une personne morale ne peut jamais être déclarée excusable.

L’excusabilité annule les dettes du failli et décharge toute personne physique s’étant rendue caution de ses obligations. Cette décharge n’est pas valable pour les cautions professionnelles, ni pour celles qui ont été donnée par des personnes morales qu’elles soient privées ou publiques. Par conséquent, le conjoint du failli qui s’était personnellement obligé à la dette de son époux est libéré de cette obligation sur le simple fait de l’excusabilité. Si , a quelque époque que ce soit, il est reconnu que l'actif ne suffit pas pour couvrir les frais présumés d'administration et de liquidation de la faillite, le tribunal peut, à la requête des curateurs, le failli dûment appelé par pli judiciaire contenant le texte du présent article, prononcer la clôture des opérations de la faillite. Dans ce cas, les créanciers rentrent dans l'exercice de leurs actions individuelles contre la personne et les biens du failli, sauf si le tribunal a déclaré le failli excusable.

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4. Excusabilité Le Moniteur du 28 juillet 2005 publie la loi du 20 juillet 2005 qui modifie la loi du 8 août 1997 sur les faillites, et spécialement les articles 80 à 82 de celle-ci. Cette loi est entrée en vigueur dans les dix jours qui suivent sa publication. Cette loi, rendue indispensable par un récent arrêt de la Cour d’arbitrage, est très importante pour les personnes qui se sont portées cautions d’une personne physique déclarée en faillite. Pour la Cour d’arbitrage, la distinction entre l’excusabilité, entre le failli - pour l’excusabilité duquel le tribunal peut examiner la manière dont il a exercé son commerce - et la caution à titre gratuit, dont la décharge était automatique, quelle que soit sa situation de fortune, imposait aux créanciers un sacrifice disproportionné. La loi contient en outre des dispositions transitoires qui imposent des délais de réaction très brefs aux créanciers et aux cautions, à dater de son entrée en vigueur. Le législateur a récemment modifié les règles concernant les personnes qui se sont portées caution à titre gratuit, c.à.d. celles qui, sans contrepartie, ont accepté de garantir la dette d'autrui, tel un parent ou un ami. Pour la caution

- La loi du 20 juillet 2005 a choisi de paralyser les voies d’exécution ; elle introduit un article 24bis, rédigé comme suit : «à compter du même jugement, sont suspendues jusqu'à la clôture de la faillite les voies d'exécution à charge de la personne physique qui, à titre gratuit, s'est constituée sûreté personnelle du failli».

- Alors qu'auparavant, la sûreté personnelle était automatiquement déchargée lorsque le failli était déclaré excusable la caution doit demander la décharge au juge. En vertu des articles 72bis et 72ter nouveaux, pour bénéficier éventuellement de la décharge, les personnes physiques qui, à titre gratuit, se sont constituées sûreté personnelle du failli devront avoir déposé au greffe une « déclaration attestant que leur obligation est disproportionnée à leurs revenus et à leur patrimoine ». Cette déclaration doit être accompagnée de la dernière déclaration fiscale, d’un relevé de la situation patrimoniale globale et de « toute autre pièce de nature à établir avec précision l'état des ressources et des charges.

- Tant le failli que la caution pourront en outre demander que le tribunal statue sur l'excusabilité ou la décharge des cautions six mois après la date du jugement déclaratif de faillite.

Pour les créanciers

- Les créanciers se voient également imposer de nouvelles obligations. En cas de non respect, le risque est de perdre d'office le droit de se retourner contre la caution. Par conséquent, les créanciers qui jouissent d'une sûreté personnelle doivent désormais le préciser dans leur déclaration de créance. A défaut, ils peuvent encore s'exécuter endéans les six mois qui suivent la date du jugement déclaratif de faillite, sauf si celle-ci est clôturée plus tôt. S'ils ne respectent pas cette obligation dans les délais, la caution sera automatiquement déchargée.