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Le 17 octobre 2012
Droit boursier
Réforme des obligations de déclarations de franchissement de seuils et de déclarations d’intentions
RESUME
Le régime des déclarations de franchissement de seuils et des déclarations d’intentions, réformé par
la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 dans l’objectif de contrecarrer les stratégies de prise de contrôle
sans offre publique et d’améliorer l’information des marchés financiers, est complété par des
dispositions du règlement général de l’AMF, entrées en vigueur le 1er octobre 2012.
Pour les déclarations de franchissement de seuils, le régime nouveau assimile désormais aux actions
et droits de vote possédés les actions déjà émises ou les droits de vote sur lesquels porte tout accord
ou instrument financier réglé exclusivement en espèces et ayant pour le déclarant un effet
économique similaire à la détention d’actions. Leur comptabilisation ne se pratique pas « en
nominal » mais en appliquant la méthode du « delta », qui devra être précisée dans la déclaration de
franchissement de seuils. La compensation avec toute position courte détenue par le déclarant en
vertu d’un autre accord ou instrument financier réglé en espèces est interdite. Jusqu’alors, ces
produits dérivés réglés exclusivement en numéraire (type cash-settled equity swap) ne faisaient
l’objet que d’une information séparée lorsqu’une déclaration de franchissement de seuil était requise
pour d’autres raisons, mais n’étaient pas pris en compte dans le calcul du seuil.
Toutefois, cette assimilation ne s’applique pas au calcul du seuil déclenchant une OPA obligatoire,
pourtant aligné par ailleurs sur les modalités de calcul des franchissements de seuils. Mais elle
s’applique pour le calcul des seuils entraînant une obligation de déclaration d’opérations en période
de pré-offre et d’offre.
S’agissant des déclarations d’intentions, elles doivent désormais révéler également les intentions de
l’investisseur quant au dénouement des accords et instruments relatifs à des actions déjà émises ou
des droits de vote que le déclarant est en droit d’acquérir à sa seule initiative ou de ceux qui sont
réglés en espèces et ont, pour le déclarant, un effet économique similaire à la détention d’actions.
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Le nouveau régime est entré en vigueur le 1er octobre 2012. Il s’applique aux produits dérivés en
place dès cette date ou conclus postérieurement. Il est donc susceptible d’entraîner des
franchissements de seuils passifs en hausse pour les détenteurs de positions longues constituées
antérieurement à cette date.
CONTEXTE
Bien qu’elles trouvent leur origine dans les préconisations du Rapport de l’AMF, remis en 2008 par le
groupe de travail présidé par l’ancien Secrétaire Général de Saint Gobain, on relie généralement ces
nouvelles dispositions aux affaires Wendel/Saint-Gobain et LVMH/Hermès International. Dans
ces dossiers largement médiatisés, des instruments financiers corrélés aux actions, tels que des
contrats financiers d’échange sur actions avec dénouement en espèces (« cash settled equity
swaps ») ou des contrats financiers avec paiement d’un différentiel (« contracts for difference »), qui
confèrent une position économique dite « longue » sur les actions, ont été utilisés pour prendre des
participations au capital de sociétés cotées sans que ces montées potentielles au capital ne soient
révélées au marché lors de la mise en place de ces produits dérivés. Dans l’un des cas, les actions
sous-jacentes ont été acquises sur le marché lorsque le prestataire de service d’investissement avec
qui le contrat avait été passé s’est défait de sa couverture. Dans l’autre, par un avenant au contrat de
produit dérivé, une livraison physique des actions sous-jacentes a été substituée lors du dénouement
initialement prévu en numéraire.
Le dossier Wendel/Saint Gobain a donné lieu à une sanction administrative de l’AMF, confirmée par
la cour d’appel de Paris.
Des prises de participation structurées à l’aide de produits dérivés conférant une exposition
économique se sont multipliées dans de nombreux pays, que ce soit aux Etats-Unis (affaire CSX
Corp.), en Allemagne (aff. Continental), en Italie (aff. Fiat) ou encore en Suisse (aff. Laxey). Celles-ci
ont amené certains tribunaux, législateurs et régulateurs à imposer davantage de transparence. La
France est ainsi en phase d’aligner sa réglementation sur celle en vigueur en Allemagne, au Portugal
ou au Royaume-Uni et d’anticiper la révision de la directive « transparence » (2004/109/CE).
DECLARATIONS DE FRANCHISSEMENT DE SEUILS
Insuffisances du régime actuel
Le mode de calcul des seuils avait, en dernier lieu, été modifié par l’ordonnance n° 2009-105 du 30
janvier 2009, créant de nouveaux cas d’assimilation aux instruments financiers ou droits de vote
détenus, telles les actions déjà émises ou les droits de vote non détenus par le déclarant mais qu’il
était en mesure d’acquérir, immédiatement ou à terme et à sa seule initiative, en vertu d’un accord ou
d’un instrument financier.
Un certain nombre d’instruments financiers devaient également, depuis cette ordonnance du 30
janvier 2009, faire l’objet d’une information séparée lorsqu’une déclaration de franchissement de
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seuils était requise par ailleurs, mais sans être pris en compte au numérateur dans le calcul du seuil.
Il s’agissait :
des titres donnant accès au capital à émettre et les droits de vote qui y sont attachés, tels que les bons de souscription d’actions ou les obligations convertibles en actions ;
des actions déjà émises ou les droits de vote pouvant être acquis par le déclarant en vertu d’un accord ou d’un instrument financier non assimilé, c'est-à-dire ceux dont le dénouement physique ne dépend pas de la seule initiative du déclarant (par exemple parce qu’une condition de seuil de cours ne s’est pas réalisée - options « à barrières non encore activées ») ;
de la catégorie qui constitue l’objet de la réforme, à savoir des actions déjà émises ou les droits de vote sur lesquels porte tout accord ou instrument financier réglé exclusivement en espèces et ayant pour le déclarant un effet économique similaire à la détention desdites actions. Ces éléments n’étant pas pris en compte dans le calcul du seuil, un investisseur pouvait avoir une exposition économique supérieure au seuil déclaratif légal minimum (5 %) d’une société cotée sans avoir à en informer le marché, sauf cas particuliers (notamment s’il franchissait un seuil déclaratif au titre d’une détention physique ou détention « en dur »).
Assimilation aux actions des expositions économiques
Le nouveau régime assimile aux actions et droits de vote détenus les actions déjà émises ou les
droits de vote sur lesquels porte tout accord ou instrument financier réglé exclusivement en espèces
et ayant pour leur titulaire un effet économique similaire à la détention d’actions. Ceux-ci seront donc
désormais inclus au numérateur pour le calcul des franchissements de seuils.
Selon le règlement général de l’AMF, caractérisent des accords ou instruments financiers à
dénouement exclusivement monétaire et ayant pour leur titulaire un effet économique similaire à la
possession d’actions :
les accords ou instruments financiers référencés, indexés ou relatifs aux actions d’un émetteur ; et
qui procurent une position longue sur celles-ci à la personne tenue à l’obligation de déclaration.
Il en va ainsi notamment des contrats financiers avec paiement d’un différentiel, des contrats
d’échange relatifs à des actions ou de tout instrument financier exposé à un panier ou à un indice
d’actions de plusieurs émetteurs sauf s’ils sont suffisamment diversifiés. Dans son rapport annuel
pour 2009, l’AMF avait pris pour position que les actions d’un panier ou d’un indice, sur lequel est
indexé un instrument financier à dénouement en espèces, peuvent ne pas être assimilées dès lors
qu’elles représentent moins de 20 % de la valeur dudit panier ou indice.
Le règlement général de l’AMF précise qu’aucune compensation avec une position courte détenue
par le déclarant en vertu d’un accord ou instrument financier réglé en espèces ne peut avoir lieu.
Le nombre d’actions et de droits de vote à prendre en compte par le déclarant est calculé en
multipliant le nombre maximal d’actions et de droits de vote sur lequel porte l’accord ou l’instrument
financier par le delta de l’accord ou de l’instrument financier. En effet, plutôt qu’une comptabilisation
en notionnel, c’est une comptabilisation en delta qui a été retenue : le déclarant ne doit assimiler les
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actions et droits de vote sous-jacents qu’à hauteur du nombre notionnel d’actions objet du contrat,
multiplié par le delta de l’instrument financier à dénouement en espèces, ce qui revient à ne déclarer
au maximum que le nombre d’actions et de droits de vote auquel il pourrait avoir accès si sa
contrepartie lui cédait les actions détenues en couverture de l’instrument financier.
L’instruction n° 2010-08 du 9 novembre 2010 relative à la déclaration des positions courtes nettes à
l’AMF définit ainsi le delta : « Le delta (…) correspond à la sensibilité de la valeur théorique de
l’instrument considéré par rapport aux variations du cours sous-jacent, cette valeur théorique étant
calculée, en cas de besoin, sur la base d’une volatilité implicite cohérente avec les informations
disponibles. Le delta est calculé au cours de clôture de l’actions sous-jacente. » L’AMF préconise
d’utiliser un delta « issu d’une source fiable, communément reconnue comme telle par les
professionnels de la place et d’être en mesure de fournir, sur demande, les hypothèses de calcul du
delta utilisé (en particulier la volatilité) ».
Actualisation de la déclaration de franchissement de seuils
Une nouvelle déclaration de franchissement de seuils sera due en cas d’entrée en possession (seul
ou de concert) d’actions ou de droits de vote sous-jacents à un instrument assimilé visé au 4° ou 4°
bis de l’article L. 233-9 C. com. – à savoir, un instrument ou accord, soit permettant d’acquérir à sa
seule initiative des actions déjà émises ou des droits de vote, soit à dénouement exclusivement
monétaire et ayant pour son titulaire un effet économique similaire à la possession d’actions – faisant
franchir l’un des seuils légaux. Ce n’est donc qu’en cas d’accès aux actions et droits de vote – lors de
l’attribution d’actions au titre d’un accord ou instrument financier le prévoyant ou lors de l’acquisition
des actions détenues en couverture par la contrepartie d’un CFD ou assimilé – qu’une nouvelle
déclaration pourra être requise, ainsi que, le cas échéant, une nouvelle déclaration d’intention.
Contenu de la déclaration de franchissement de seuils
La déclaration comporte en particulier une description de chaque type d’accord ou d’instrument
financier réglé en espèces, précisant notamment :
la date d’échéance ou d’expiration de l’instrument ou de l’accord ;
la dénomination de l’émetteur de l’action concerné ;
les principales caractéristiques de l’instrument ou de l’accord, notamment le nombre maximal d’actions sur lesquelles il est indexé ou référencé, sans compensation avec le nombre d’actions sur lesquelles la personne tenue à l’obligation de déclaration détient une position courte en vertu de tout accord ou instrument financier réglé en espèces ;
le delta de l’instrument ou de l’accord, utilisé pour déterminer le nombre d’actions et de droits de vote assimilés par le déclarant.
Contenu de l’information séparée
L’information séparée – due en complément à une déclaration de franchissement de seuils – est
maintenue quant aux :
titres donnant accès à des actions non encore émises ;
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actions déjà émises mais dont la détention à terme ne dépend pas de la seule initiative du déclarant ;
actions déjà émises ou droits de vote sur lesquels porte tout accord ou instrument financier réglé exclusivement en espèces mais n’ayant pas pour leur titulaire un effet économique similaire à la détention d’actions et à ce titre non inclus au numérateur.
OPA obligatoire
On rappellera que doit déposer un projet d’offre publique toute personne physique ou morale,
agissant seule ou de concert, qui vient à posséder directement ou indirectement plus des trois-
dixièmes du capital ou des droits de vote, ou qui détient, directement ou indirectement, un nombre
compris entre trois-dixièmes et la moitié du capital ou des droits de vote et qui, en moins de douze
mois consécutifs, augmente sa détention en capital ou en droits de vote d’au moins un cinquantième
du capital ou des droits de vote de la société.
La réforme du calcul du numérateur aux fins des déclarations de franchissement de seuils ne
s’applique pas au calcul du seuil d’OPA obligatoire : il n’est donc pas tenu compte pour caractériser le
franchissement de ce seuil, des actions déjà émises ou des droits de vote sur lesquels porte tout
accord ou instrument financier réglé exclusivement en espèces et ayant pour leur détenteur un effet
économique similaire à la détention d’actions, ceci sauf cas particuliers – par exemple s’il existe une
action de concert entre les parties à l’accord ou à l’instrument concerné.
Le régime déclaratif en période d’offre et de pré-offre, notamment l’obligation de déclarer
quotidiennement ses opérations à l’AMF et ses intentions à l’égard de l’offre en cours lorsque la
détention est accrue, respectivement, de 1 % et 2 %, est toutefois calqué sur les règles d’assimilation
prévues à l’article L. 233-9 C. com., ce qui inclut notamment les produits dérivés à dénouement
monétaire et ayant un effet économique similaire à la possession des titres visés.
Les nouvelles règles précisent que l’exemption de déclaration dont bénéficient les prestataires de
services d’investissement qui détiennent « en dur », dans leurs activités de trading, moins de 5 % du
capital et des droits de vote d’un émetteur, ne s’applique pas au régime des déclarations en périodes
d’offre et de pré-offre.
DECLARATION D’INTENTIONS
Contenu actuel
Lors du franchissement des seuils de 10, 15, 20 ou 25 % du capital ou des droits de vote, l’acquéreur
doit aussi déclarer ses intentions pour les six mois à venir.
Cette déclaration devait jusqu’alors préciser :
si l’acquéreur agit seul ou de concert ;
s’il envisage d’arrêter ses achats ou de les poursuivre et d’acquérir ou non le contrôle de la société ;
s’il envisage de demander sa nomination ou celle d’une ou plusieurs personnes comme administrateur, membre du directoire ou du conseil de surveillance ;
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tout accord de cession temporaire ayant pour objet les actions ou les droits de vote de l’émetteur ;
les modes de financement de l’acquisition ;
la stratégie envisagée vis-à-vis de l’émetteur et les opérations pour la mettre en œuvre.
Contenu élargi
Le règlement général, tout comme la loi nouvelle, impose d’y préciser également les intentions de
l’acquéreur quant au dénouement des accords et instruments
permettant au déclarant d’acquérir à sa seule initiative des actions déjà émises ou des droits de vote ; ou
qui sont réglés en espèces et qui ont pour le déclarant un effet économique similaire à la détention d’actions.
Ainsi, le déclarant précisera s’il envisage ou non d’exercer les options qu’il détient ou de se porter
acquéreur des actions détenues en couverture par la contrepartie de l’instrument dénouable en
espèces, ou si des modifications sont envisagées pour convertir un contrat financier à dénouement en
espèces en dénouement physique.
ENTREE EN VIGUEUR
Le nouveau régime de déclarations de franchissement de seuils et des déclarations d’intentions est
entré en vigueur le 1er octobre 2012. Il s’applique aux produits dérivés en place dès cette date ou
conclus postérieurement.
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