-
Les rformes successives inities depuis
laprs-guerre visant instaurer une
plus grande galit des chances ont
permis une lvation gnrale des
niveaux de formation et une diminution
consquente de la non qualification sur
les quarante dernires annes. Cependant, la
grande difficult scolaire persiste et devient
un phnomne trs concentr socialement
qui samplifie au fur et mesure que lon
descend dans lchelle sociale atteignant son
maximum dans les familles dinactifs 2 (Caille, 2000). Elle
est identifie ds le dbut de la scolarit primaire et sag-
grave tout au long du parcours scolaire pour aboutir la
non matrise du socle commun de connaissances au
terme de la scolarit obligatoire 16 ans.
Si, jusqu la crise conomique des annes
soixante-dix, le plein emploi et une conomie
moins exigeante en termes de qualification
permettaient dabsorber les non-diplms
sans trop de difficult, il nen est plus rien
depuis les transformations de lconomie de
march qui leur laissent peu de chances din-
sertion. Considrs comme trs peu
employables , ces jeunes se trouvent en
marge du march du travail et assigns diff-
rentes formes demplois prcaires et non
1 Cette tude, ralise linitiative de la Dlgation inter-ministrielle la ville (DIV), constitue un tat des lieux et une
synthse des recherches portant sur les jeunes rencontrant des
difficults en matire dducation et dinsertion socio-
professionnelle de la fin de la scolarit obligatoire la majorit
civile en France. Elle est consultable en ligne sur les sites du
colloque, de la DIV, et de VEI :
http://colloque16-18.cndp.fr/
http://www.ville.gouv.fr/infos/div/
http://www.cndp.fr/vei/
2 Les enqutes Budget des familles de l'INSEE dsignentcomme inactive une personne de moins de 60 ans ni tudiante
ni retraite. Environ 200 000 mnages pauvres entrent dans cette
Leffet stigmatisant que reprsente lchec scolairesest considrablement renforc depuis la monte de lapleine scolarisation. Cest en fin de troisime que lapoursuite dun parcours qualifiant se diffrencie selonune chelle des comptences acquises qui relgue leslves les plus en chec dans les filires les moinsvalorises. Une fraction dentre eux abandonne alorsle systme scolaire soit en cours de collge, pour lesplus gs, soit avant datteindre un niveau qualifianten filire professionnelle courte. Mais il existegalement dautres parcours scolaires heurts ouparallles qui concernent un public htrogneparticulirement fragilis par leur environnementfamilial ou le handicap et qui est mis lcart de lascolarisation complte de leur classe dge 1.
chec scolaire :
Quelles solutions entre 16 et 18 ans? tat des lieux
1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8 diversit v i l l e c o l e i n t g r a t i o n 15
Br ig i t te Larguze Cather ine Mathey-Pier re
Avec la co l laborat ion de Miche l Destefan is (CEE) ,Madele ine Mai l lebou is (CNAM-CDFT) ,
Cami l le Tap in-Reboul , avocate ,Danie l le Trancar t (un ivers i t de Rouen/GRIS- CEE)
DIV154 complet 23/09/08 18:00 Page 15
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qualifis ou au non-emploi sur un temps long.
La discrimination que subissent les jeunes non
diplms est devenue dautant plus impor-
tante que lchec scolaire ne concerne plus
maintenant quune minorit 3. Ainsi, laug-
mentation du niveau de qualification et, en
corollaire, la rduction de lchec scolaire tend
renforcer le caractre de stigmate social de
la non-certification scolaire et en amplifier
les effets dautant plus quand elle est associe
dautres facteurs non scolaires tels que le
handicap, lorigine trangre, sociale ou
ethnique, le lieu de rsidence. Ce processus
conduit enfermer un groupe socialement
constitu dans une trajectoire dviante la
norme, plutt qu le considrer comme un
groupe faible niveau de comptences
pouvant tre compens par des actions inten-
sives de formation lui permettant un accs
non discrimin au march du travail.
Depuis les trente dernires annes, un ensem-
ble de mesures palliatives scolaires et post-
scolaires ont t mises en uvre par lduca-
tion nationale et par des politiques publiques
externes celle-ci afin de contrer les effets
dun chec scolaire dj sanctionn ou pour
le rattraper. Cette externalisation des cons-
quences de lchec scolaire dplace donc les
mesures de rattrapage et de formation hors
du systme scolaire qui la produit. Prenant
en charge laxe formation-emploi, les inter-
ventions publiques tentent de rduire les dficits de
formation entrans par lchec scolaire et leurs effets sur
linsertion professionnelle tout en tablissant des liens
concrets avec la vie active. Les rponses apportes se
diversifient entre laide sociale, la formation profession-
nelle, la remise niveau des comptences et lapprentis-
sage du savoir-tre requis pour accder lemploi. Mais
ces formations destines aux jeunes faible comptence
scolaire, dont la trajectoire en formation initiale se carac-
trise par une inadquation avec les normes de linstitu-
tion scolaire, induisent aussi des critres qui conduisent
les carter de certains dispositifs en slectionnant plutt
les lves les moins en chec lcole. Cette mise lcart
continue augmente les risques dune ghettosation des
offres de formation destines aux jeunes les plus en chec,
avec un impact ngatif sur la reconnaissance sociale de
ces dispositifs.Tant au regard des cots levs des mesu-
res de remdiation post-scolaires que de leur efficacit
en termes dinsertion professionnelle, lessentiel des
efforts pour rsoudre les consquences de lchec scolaire
apparat devoir se concentrer avant la sortie du systme
scolaire et ce, ds le dbut de la scolarisation, en accord
avec lobjectif de ne plus laisser un jeune sortir de lcole
non diplm.
UN CHEC SCOLAIRE PRCOCE ET UN FORTMARQUAGE SOCIALLes sortants sans qualification et les sortants sans diplme Les jeunes sortants sans qualification sont des lves
qui ont interrompu leur formation initiale, pour la
premire fois et pour un an au moins, aprs
des enseignements des niveaux de formation
VI et V bis. Cest la dernire classe frquente
qui prvaut pour tablir le niveau de sortie
(aprs une classe du premier cycle de lensei-
gnement secondaire, une classe correspon-
dante de lducation spciale, avant lanne
terminale dun CAP, dun BEP ou en dea).
Toutefois, selon la nomenclature des mtiers
de 1969, sont cependant considrs comme
qualifis tous les jeunes sortant de classe
terminale de CAP ou de BEP, de seconde, de
premire ou de terminale tout en ayant
chou lexamen ainsi quau brevet.
La part des lves sortant de manire prcoce
catgorie. Il s'agit d'une population relativement ge : un homme
sur deux a entre 50 et 60 ans. Lorsque la personne de rfrence est
un homme, il s'agit plutt de chmeurs dcourags percevant le
RMI ou des handicaps dont un sur trois peroit un pension
d'invalidit ou l'allocation aux adultes handicaps. Quand c'est une
femme, elle se dclare gnralement au foyer . Dans six cas sur
dix, ces femmes ont des enfants charge. Ce sont souvent des
femmes qui viennent de se sparer de leur conjoint et qui sont
ges de 40 60 ans. Elles se retrouvent quasiment prives de
ressources, mis part les prestations familiales et une ventuelle
pension alimentaire et sont dans une situation aussi difficile que
les chmeurs pauvres : revenus et consommation faibles, absence
de patrimoine et d'aides de la famille.
3 Ils reprsentaient environ 40% des jeunes ayant arrt leurstudes en 1963, 30% en 1970, 15% en 1980, 8% en 1990, 6% en 2007.
16 v i l l e c o l e i n t g r a t i o n diversit 1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8
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du systme ducatif diminue 4 fortement entre
1975 et 2005 en passant de 25% 6%. Cette
baisse est lie successivement la dmocra-
tisation de laccs au secondaire (1967), la
cration dun BEP accessible en fin de premier
cycle puis au dveloppement du second cycle
court. partir de 1975, laccs croissant aux
CAP et BEP entrane un recul des sorties sans
qualification. En 1989, la loi dorientation sur
lducation affirme le droit une qualification
minimale et les dures de prparation des
diplmes professionnels se diversifient. Le
palier dorientation en fin de cinquime est
supprim en 1992 puis lallongement de la
scolarisation sacclre (en 1995, 57 % des
jeunes poursuivent leur formation jusqu
lge de vingt ans et 62 jeunes sur 100 sont
bacheliers, toutes sections confondues).
La loi dorientation sur lducation de juillet
1989 affirmait la ncessit de conduire 100%
des jeunes une qualification (le CAP ou le
BEP constituant le premier niveau de qualifi-
cation): Tout lve qui, lissue de la scola-
rit obligatoire, na pas atteint un niveau de
formation reconnu doit pouvoir poursuivre
des tudes afin datteindre un tel niveau. Ltat
prvoira les moyens ncessaires dans lexer-
cice de ses comptences, la prolongation de
la scolarit qui en dcoulera . Mais malgr
llvation gnrale des niveaux dtude, le
seuil de 6% semble difficile rsorber depuis
la dernire dcennie. Il savre troitement
corrl des difficults scolaires rencontres
ds le dbut de lcole primaire avec une surre-
prsentation des milieux socio-conomiques
les plus dfavoriss.
En juin 2005, il est recens 42 000 jeunes
(mtropolitains) sortant sans qualification.
Selon une tude de la DEPP (Lger, 2008), la
lgre baisse enregistre au cours des dix
dernires annes sexplique par la rduction
des abandons dtudes au collge et en dbut
de CAP et BEP, avec comme principal facteur
explicatif la rduction des redoublements en
dbut de scolarit qui entrane mcaniquement un allon-
gement du niveau dtudes, en particulier au-del des
classes confrant un statut de qualification.
Les jeunes non diplms
Depuis le Sommet de Lisbonne (2000), lUnion europenne
considre quun diplme de second cycle de lenseigne-
ment secondaire est le bagage scolaire minimal.
Dsormais, la France se rfre explicitement et distincte-
ment, dune part, aux jeunes non diplms (sans CAP,
BEP ni baccalaurat) et, dautre part, aux jeunes non
qualifis. Les dernires donnes diffuses par la DEPP
dans Ltat de lcole (2007) sur le niveau dtude des
sortants du systme ducatif sont actuellement prsen-
tes en fonction de la Classification internationale des
types de lducation (CITE) selon laquelle un lve est
rput qualifi sil a achev avec succs le cycle de
formation, russite atteste par un certificat ou un
diplme.
Selon cette dfinition, 17% des lves nont pas de diplme
du second cycle du secondaire (soit 133 000 jeunes en
moyenne par classe dge, en 2005). Parmi eux:
9% ont tudi jusquen dernire anne de prparation
dun diplme de second cycle mais ont chou aux
examens (dont 5% en classe terminale prparant un
baccalaurat ou un quivalent et 4% en dernire anne de
CAP ou BEP). Ils ont, en moyenne, plus de 19 ans. Cette
population est plus masculine, puisque ce sont 19 % des
jeunes hommes (contre 14 % de femmes) qui chouent
en passant un examen (CAP, BEP, baccalaurat).
8% ont arrt avant la classe terminale de prparation
dun diplme de 2me cycle dont 2% en seconde ou 1re
gnrales ou technologiques du cycle long et 6 % en
premire anne de CAP ou de BEP du cycle court, du
premier cycle du secondaire (collge) ou moins. Ils ont
moins de 18 ans en moyenne lorsquils sortent du systme
ducatif.
133000 lves non diplms (dont 7% titulaires du DNB)
69 000 lves ont tudi jusquen dernire anne de prpa-
ration dun diplme de second cycle mais ont chou aux
examens. Parmi eux:
35000: classe terminale prparant un baccalaurat
ou un quivalent (Niveau IV),
34000: dernire anne de CAP ou BEP (V).
64000 lves ont arrt avant la classe termi-
nale de prparation dun diplme du second
cycle. 4 40% en 1963, 30% en 1970, 15% en 1980, 8% en 1990, 7% en1999, 6% en 2005
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Parmi eux:
12000: en 2nde ou 1re gnrales ou techno-
logiques (Niveau V),
52 000 : en 1re anne de CAP ou de BEP,
premier cycle du secondaire ou moins
(Niveaux VI-Vbis).
(Source : Estimations DEPP partir des enqutes
Emploi de lINSEE, 2005.)
Le mode de recensement des sorties
sans qualification
Pourtant, un rapport des Inspections de ldu-
cation nationale (2005) consacr aux sorties
sans qualification indique les difficults dun
dnombrement exact des sorties sans quali-
fication. Le fait tout dabord quil coexiste
plusieurs approches des sorties fondes sur
des conventions de langage htrogne parti-
cipe au flou contradictoire des chiffres et des
indicateurs. Il existe une vritable difficult
reprer et recenser ces sorties et ce phno-
mne sobserve tout dabord au niveau de
ltablissement dappartenance o le motif
de sortie est souvent imprcis; ceci pouvant
se rapporter au fait qu ce niveau, les sorties
ne concernant que peu dlves, ce problme
est considr comme marginal. Cest au fur et
mesure que leur nombre sagrge diff-
rents niveaux (dpartemental, acadmique)
quil devient significatif et proccupant.
Les sorties concernent aussi dautres syst-
mes de formation qui ne sont pas toujours pris
en compte (enseignement priv hors contrat,
enseignement agricole, lyces maritimes et
aquacoles, coles du secteur sanitaire et
social...). Dautre part, certaines acadmies
nayant pas mis en place un dispositif dob-
servation et de dnombrement des sorties, les
rectorats sappuient donc sur les informations
donnes par les enqutes nationales (indicateurs de la
DEPP, donnes fournies par le Creq), mais les rsultats
ne concordent pas toujours avec les chiffres des services
statistiques rectoraux qui effectuent un suivi quantitatif.
Celui-ci leur permet dvaluer le nombre dlves sans
affectation et de reprer les dcalages quand les deman-
des dpassent les capacits daccueil en filire profes-
sionnelle. Mais il nexiste pas de suivi de cohortes permet-
tant de mesurer lefficacit des solutions trouves.
Pour les chefs dtablissement qui sont tenus rglemen-
tairement de suivre pendant un an les lves aprs leur
sortie, ce suivi est souvent difficile et nest pas exhaustif
(par exemple, quand un lve change dacadmie ou sins-
crit dans un tablissement priv). Ainsi, lorientation
immdiate est connue, les bulletins scolaires trimestriels
de ltablissement daccueil doivent tre communiqus,
mais comme au-del dune anne, la remonte dinfor-
mations nest plus assure, le devenir scolaire de llve
abandon ou poursuite dune formation qualifiante
nest pas renseign.
Le rapport de lInspection observe que, dune manire
gnrale, il ny a pas ou peu de protocoles acadmiques
de reprage des sorties sans qualification, ni beaucoup de
dispositifs acadmiques organiss pour observer (et encore
moins, analyser) les flux entre lducation nationale, lagri-
culture, notamment les MFR, les chambres consulaires,
les formations des conseils rgionaux et le secteur priv.
Il y a tout simplement confusion entre sorties dtablis-
sements publics du ministre de lducation nationale et
sorties de formation initiale. Les informations rassem-
bles, en outre, par certaines acadmies concernent, en
fait, seulement les sorties en cours danne.
La rsolution de lparpillement des donnes 5 rside, pour
lInspection, dans la mise en place dun partenariat, la
coordination dinitiatives multiples (notamment au niveau
rgional depuis la dcentralisation) et la cration dune
base commune de donnes au niveau national.
Les sources statistiques nationales et leur marge dincertitude
Au niveau des statistiques nationales, la mise
en place depuis 1973, du Bilan Formation-
Emploi pilot par la DEPP et qui regroupe le
Creq, la DARES, lINSEE a permis une entente
sur les sources et les mthodes relatives aux
sorties du systme ducatif et lentre des
jeunes dans lemploi.
Mais Poulet-Coulibando (2000) souligne gale-
ment combien lvaluation des sortants du
5 L'intgralit des sorties sans qualification ne pouvant treapprhende actuellement que par la consultation d'une
multitude de bases de donnes : bases lves de l'enseignement
public et de l'enseignement priv sous contrat, tableaux
statistiques de la MGI, tats de stagiaires jeunes du rseau
formation continue, listes de prsence des actions finances par les
conseils rgionaux, donnes statistiques des OREF, bases
Parcours du rseau d'accueil des missions locales et des PAIO,
bases de l'ANPE...
18 v i l l e c o l e i n t g r a t i o n diversit 1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8
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systme ducatif est devenu difficile notam-
ment par la plus grande complexit des
parcours scolaires avec lallongement de la
formation initiale, les passages dun tablisse-
ment lautre, la dscolarisation progressive
marque dinterruptions temporaires.Ainsi:
Plusieurs sources dincertitudes sont difficile-
ment rductibles. Celles-ci tiennent au mode
de collecte, la prcision des rponses, sinon
la linarit des parcours. De plus, tout chan-
gement du mode de collecte de linformation
doit tre rigoureusement sans effet pour quun
reliquat entre deux recensements conscutifs
soit reprsentatif. En outre: Les prcdents
scolaires (de lensemble des inscrits) comme
limplantation gographique de leur prcdent
tablissement lorsquil sagit dapproximations
rgionales doivent tre exactement rensei-
gns ou convenablement rectifis, au risque
de confondre une sortie avec une poursuite
dtude. Enfin les parcours doivent tre rigou-
reusement ascendants, dfaut de quoi un
jeune pass de seconde indiffrencie en
seconde professionnelle (BEP) pourrait figurer
parmi les abandons de BEP et ce titre parmi
les sortants sans qualification.
Les estimations actuelles sur les niveaux de
sortie de formation initiale proviennent des
enqutes Emploi de lINSEE qui calculent les
quantits globales de sortants et lvolution
des inscriptions dentrants dans les tablisse-
ments secondaires. Mais ces rsultats doivent
tre perus comme des approximations: vrais
dans lensemble mais peu srs petite chelle.
Cest la faon dont ils concordent avec les
rsultats fournis par des enqutes indpen-
dantes qui emporte, en dfinitive, la convic-
tion.Ainsi, les rsultats correspondent ceux
des panels dlves qui suivent plusieurs
annes de suite les mmes lves. Les donnes
rtrospectives tires des enqutes Emploi
confirment dans les grandes lignes les volu-
tions. Elles permettent de reprer des sortants
plusieurs annes aprs la fin de leurs tudes.
Ces donnes rtrospectives permettent de
confirmer mais pas daffirmer (Poulet-
Coulibando, 2000).
Une anne de CP cruciale
La grande difficult scolaire qui pse fortement sur les
risques de dcrochage et entrave laccs une formation
qualifiante se constitue ds le dpart de la scolarit
primaire pour la majorit des lves en chec au terme de
la scolarit obligatoire.
Le niveau lentre au CP reste trs dpendant de lenvi-
ronnement familial et les trois annes passes lcole
maternelle ne suffisent pas rduire consquemment
les ingalits sociales prexistantes. Les rsultats de diff-
rentes tudes divergent pourtant sur le gain rsultant de
la pr-scolarisation deux ou trois ans. Le rapport Moisan-
Simon (1997) estime que la scolarisation ds deux ans
constitue en ZEP un dterminant important de meilleure
russite scolaire. Lenqute de Jantheau et Murat (1998)
va dans le mme sens en prcisant quelle apporte un
bnfice rel aux enfants des quartiers populaires, tandis
que Grard Chauveau (2000) en prcise les objectifs pda-
gogiques qui doivent dpasser la seule socialisation.
Ltude de Jean-Paul Caille (2000) nuance ses effets sur la
scolarisation ultrieure: elle ne rduit pas les ingalits
sociales mais augmente les chances daccder au CE2
sans redoubler. Nanmoins, toutes ces tudes saccordent
sur le fait que cette scolarisation prcoce bnficie aux
lves trangers ou issus de limmigration.
Un rapport rcent du Haut Conseil de lducation (2007)
synthtise les diffrents rsultats dun corpus de recher-
ches et danalyses statistiques pour dcrire laggravation
des difficults identifies ds le dbut de la scolarit (en
particulier, les consquences dune matrise insuffisante
de la lecture lors de la scolarit secondaire). Ainsi : Les
lves qui sont en difficult ds leur entre au CP le sont
toujours, dans leur quasi-totalit, par la suite. Lcole
lmentaire ne permet pas, en gnral, de rduire les diffi-
cults repres au dbut de la scolarit obligatoire. (...). En
sixime, au moment o la multiplication des professeurs
ne favorise pas laccompagnement individualis des
lves, labsence de consolidation des acquis des lves
les plus fragiles aggrave leurs lacunes initiales. Par la suite,
durant la scolarit secondaire, les lacunes initiales ne sont
pas davantage combles. Ces scolarits chaotiques condui-
ront de nombreux checs au collge et des orienta-
tions non dsires ou des sorties sans qualification ni
diplme.
Les difficults en lecture
la demande de lObservatoire national de la lecture
(Baktavatsal, Pons, 1999 ), la DEPP a men une tude sur
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la difficult en lecture. Une preuve spcifique
a t ajoute lvaluation nationale en
sixime auprs de 2 600 lves dont les rsul-
tats font apparatre une situation particuli-
rement proccupante pour 4,3% dentre eux
(avec une trs forte surreprsentation de
garons), tandis que 7,8% sont handicaps par
une extrme lenteur dans lidentification des
mots.
Les enqutes internationales PIRLS et PISA
Lenqute internationale PIRLS ralise en 2006
qui vise mesurer les performances en lecture
des lves en fin de CM1 situe la France en
de de la moyenne europenne avec des
performances qui restent statistiquement
stables par rapport lenqute 2001. Il est
observ que les lves franais se trouvent
surreprsents dans le groupe le plus faible
(36% contre 25% au niveau europen) et sous-
reprsents dans le groupe de plus haut
niveau (17% contre 25%). Comme en 2001, les
lves franais russissent mieux lorsquil
sagit de rpondre des QCM et quand le mode
de rponse requis nimplique pas le recours
lcrit construit: plus la rponse doit tre labo-
re et demande un dveloppement crit, plus
les lves ont tendance sabstenir (Colmant,
Dos Santos, 2008).
Lautre enqute internationale, PISA (Pro-
gramme international pour le suivi des acquis
des lves), a t initie par lOCDE partir de
2000. Chaque cycle denqute porte tous les
trois ans sur les comptences des lves de 15
16 ans dans trois grands domaines (compr-
hension de lcrit, mathmatiques et scien-
ces) et se focalise sur lun de ces domaines. En
2000, lessentiel de lvaluation portait sur la
comprhension de lcrit. Si la France se situe
dans la moyenne des pays participants, lana-
lyse des rsultats distingue diffrents niveaux
qui font apparatre un groupe dlves en
grande difficult: 4,2% dentre eux prouvent
de srieuses difficults mettre en uvre les
connaissances et les comptences les plus lmentaires
et 11% sont uniquement capables deffectuer des tches
de lecture parmi les moins complexes. Les rsultats les
plus faibles correspondent aux lves qui sont encore au
collge 15 ans (ils ont donc redoubl une classe, soit en
primaire, soit au collge) ou en seconde professionnelle
(Bourny, et al, 2001). Les rsultats de lenqute 2003 en
comprhension de lcrit montrent une augmentation
des lves les moins performants (6,3%) reprsents prin-
cipalement par les lves encore en quatrime ou en troi-
sime 15 ans (Bourny, et al, 2004).
Les valuations JAPD
Lvaluation en lecture dans le cadre de la Journe dap-
pel de prparation la dfense (JAPD) concerne chaque
anne prs de 800 000 jeunes hommes et femmes de
17 ans ou plus, de nationalit franaise. Les preuves se
droulent en deux temps afin de dpartager dabord les
jeunes en difficult de lecture et les lecteurs efficaces
puis dajuster les tests correspondant chaque niveau.
En 2006, si 78,7% de ces jeunes sont considrs comme des
lecteurs efficaces, le reste de cette population est valu
pour 9,6% comme lecteurs mdiocres et 11,7% en diffi-
cult de lecture, dont 4,8% en grave difficult. Parmi
ces derniers, certains sont sans doute non lecteurs. Ces
jeunes en difficult de lecture sont en enseignement
professionnel court, en collge ou en SEGPA, ou ont quitt
la formation initiale ces niveaux. Les garons sont plus
souvent en grande difficult que les filles (14,8 % de
garons contre 8,5 % de filles). Leur pourcentage varie
sensiblement dune rgion lautre et concerne plus parti-
culirement la Picardie, la Bourgogne et le Nord-Pas-de-
Calais (La Haye et al., 2007).
Les rsultats de lenqute 6 Information et Vie quoti-
dienne mene la fin 2004 par lINSEE sont assez proches
de ceux observs lors des JAPD. Sur le champ des person-
nes scolarises en France, ges de 18 25 ans, cette
enqute recense 5% de personnes en difficult grave ou
assez forte et 7% en difficult partielle face lcrit mais
aussi en comprhension orale et en calcul, les plus en
difficult peuvent tre considrs comme en situation
dillettrisme (Murat, 2005).
Lorientation en fin de troisime
Les diffrences de russite selon lorigine
sociale ont un impact sensible au moment du
palier dorientation qui marque la fin du
collge. Si 78% des enfants douvriers du panel
6 Un ensemble d'exercices fonds sur des supports de la viequotidienne a t propos plus de 10 000 personnes de 18 65
ans, rsidant en France mtropolitaine.
20 v i l l e c o l e i n t g r a t i o n diversit 1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8
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1995 (contre 71% du panel 1989) atteignent la
troisime gnrale, seulement 42% dentre eux
parviennent au second cycle gnral et tech-
nologique des lyces (contre 91% des enfants
de cadres et denseignants). Les volutions
observes ne vont donc pas dans le sens dune
diminution de lingalit des chances : un
enfant de cadre a 14 fois plus de chances dat-
teindre la seconde gnrale et technologique
quun enfant douvrier dans le panel 1995,
alors que ce rapport ntait que de 11 parmi
les lves du panel 1989 (Coudrin, 2006).
Le dispositif du panel 1995 comprenait gale-
ment une enqute spcifique Jeunes 2002
(Caille, 2005) sur le vcu de lorientation,
conduite sept ans aprs lentre en sixime,
auprs de 12 879 jeunes. lissue de cette
classe, les lves de lenseignement secon-
daire peuvent choisir entre la voie gnrale, la
voie professionnelle ou lapprentissage (ou,
sils ont atteint lge de fin de scolarit obli-
gatoire, interrompre dfinitivement leurs
tudes). Un second palier dorientation
correspond la seconde gnrale et techno-
logique o se dterminent la srie du bacca-
laurat ou une rorientation en enseignement
professionnel. 40% des jeunes ayant rpondu
au moment de lenqute taient lycens gn-
raux, 26% en enseignement professionnel, 7%
taient en apprentissage et 8% avaient quitt
le systme ducatif.
Le niveau scolaire constitue la principale
contrainte qui pse sur les vux exprims par
llve et implique alors un renoncement aux
souhaits exprims. Dans ce cas, lorientation
est plus vcue comme une contrainte que vrai-
ment dsire et concerne plus dun jeune sur
deux ayant rejoint lenseignement profes-
sionnel en fin de collge. Du fait des dispari-
ts sociales de russite scolaire, la proportion
dorientations contraintes par les rsultats
scolaires varie fortement avec le milieu social
dorigine: proche ou suprieure 50% parmi
les enfants douvriers non qualifis, dem-
ploys de service et dinactifs, elle natteint
que 28% parmi les enfants denseignants et
de cadres.
Une autre contrainte concerne loffre scolaire, le jeune ne
disposant pas toujours prs de chez lui, surtout en zone
rurale, dun tablissement proposant la formation recher-
che. Un tiers des enfants douvriers non qualifis disent
avoir t confronts cette difficult (contre 14 % des
enfants de cadres et denseignants). Le sentiment din-
justice est galement plus fortement ressenti par les
enfants demploys de service (27%) et ceux dinactifs
(25 %). Linsatisfaction concerne plus spcialement les
jeunes dont le niveau scolaire insuffisant na pu permet-
tre une orientation en filire gnrale (45% des apprentis
et 52% des jeunes scolariss dans lenseignement profes-
sionnel), elle culmine parmi les sortants dont prs des
deux tiers ont vu leur orientation contrainte par un faible
niveau (Caille, 2005).
En 2008, le Haut Conseil de lducation, qui tablit chaque
anne un bilan thmatique des rsultats obtenus par le
systme ducatif, a port son attention sur lorientation
scolaire. Posant la question dune orientation scolaire qui
entrine une mcanique dexclusion, il relve que lorien-
tation en fin de troisime conforte une rpartition hirar-
chise des lves dtermine ds lcole lmentaire.
Diffrentes sources de donnes sur le grand chec scolaireen fin de collge et les caractristiques des lves concerns Un ensemble de travaux statistiques relevant des services
de plusieurs ministres contribuent tablir une valua-
tion quantitative, mais aussi mettre en relation carac-
tristiques sociales et difficults dapprentissage, tandis
que dautres travaux apportent un clairage sur linser-
tion professionnelle et sociale des jeunes en abandon
prcoce du systme scolaire.
La sortie du systme scolaire 16 ans qui se traduit par
labsence dune formation qualifiante est troitement corr-
le, dune part, un milieu social marqu par la pauvret
et,dautre part, des difficults dapprentissage reprables
ds le dbut de la scolarit. Lvaluation des acquis des
lves tout au long du parcours scolaire fait apparatre des
carts importants des performances, lesquels sont croiss
avec les PCS des parents par le ministre de lducation
nationale. Au cours de la dernire dcennie, de nombreu-
ses tudes ont mis en vidence un noyau dur du grand
chec scolaire avec une surreprsentation des milieux
sociaux les plus prcariss.
Les 16-18 ans partir de trois enqutes Gnration
du Creq
Un corpus de donnes est fourni par le dispositif den-
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qutes longitudinales sur les premires annes
de vie active mis en place depuis le dbut des
annes 1990 par le Creq. Les enqutes
Gnration recueillent, sur la base de panels,
les donnes lies linsertion des jeunes tous
les niveaux de formation et simultanment
partir de leur sortie du systme ducatif.
Chaque enqute Gnration (1992, 1998,
2001) a donn lieu une exploitation spci-
fique portant sur linsertion des jeunes sans
qualification et permettent de dcrire des situa-
tions trs diverses telles que les priodes de
chmage, lutilisation par les jeunes des
missions locales ou des dispositifs de formation
hors emploi, aidant ainsi mieux cerner les
difficults dinsertion professionnelle des
jeunes sortant sans qualification du systme
scolaire.
Dans le cadre de la prsente synthse, une
extraction indite de donnes partir des trois
enqutes Gnration (1992,1998,2001), rali-
se par Danielle Trancart 7, a t spcialement
conduite dans le but dapporter un cadrage
prcis des caractristiques des 16-18 ans.
Lextraction des 16-18 ans permet tout dabord
une valuation quantitative des jeunes sortants
appartenant cette tranche dge ainsi que son
volution. Ils reprsentent 21% de la
Gnration 92, 15% de la Gnration 98 et
17% de la Gnration 2001. Tandis que len-
semble des non qualifis de chacune des trois
Gnrations varie de 15% en 1991 (dont 80%
de moins de 18 ans, soit 134 000 jeunes) 8%
en 1998 (dont 75% ont moins de 18 ans, soit
111000 jeunes),cette proportion augmente lg-
rement en 2001 o ils reprsentent 10% de la
Gnration, soit 129 000 jeunes.
Milieu dfavoris et chmage des parents
Sur lensemble des sortants de 16-18 ans, entre
1992 et 2001, la proportion de jeunes ayant
leurs deux parents au chmage double en 1998
et reste suprieure de 4 points en 2001 relati-
vement 1992. Par ailleurs, en 1992, ils sont
presque deux fois plus nombreux que lensemble de leur
gnration avoir leurs deux parents au chmage lors-
quils sont de niveaux V sans diplme, V bis et VI, lop-
pos des sortants titulaires dun CAP. Ce pourcentage
augmente de 1992 2001, passant de 15% 19%.
72% de ces jeunes appartiennent un milieu dfavoris
(parents ouvriers ou employs), ce qui reprsente un cart
de 16 points par rapport lensemble des sortants tous
niveaux de ces trois Gnration.
Htrognit des niveaux de sortie et des filires
Lge des sortants 16, 17 et 18 ans implique logiquement
quils relvent du niveau V (diplms ou non) et des
niveaux V bis et VI.Tandis que la proportion des jeunes de
niveau V reste stable avec 6% de diplms et 5% de non
diplms, celle des niveaux V bis et VI baisse de 4 points
entre 1992 et 1998 et se stabilise 6% en 2001.
Pour la Gnration 2001:
Au niveau V, les diplms sont ceux qui ont le CAP (37%
des sortants) et les non-diplms sont majoritairement
les lves qui ont abandonn au cours de la deuxime
anne de BEP ou qui ont chou lexamen (44 % des
sortants).
Au niveau V bis et VI, 11% des lves sont sortis entre la
cinquime et la troisime ou avant lobtention du CAP et
4% sont des lves de SEGPA.
Pour 5% des lves, les sorties se rpartissent entre la
filire gnrale et technologique et la filire profession-
nelle (en seconde, premire et terminale).
Un retard scolaire important et persistant en dpit des
rformes du systme ducatif
La proportion de jeunes de 16-18 ans ayant redoubl deux
fois avant la sixime tait trs importante en 1992 aux
niveaux V bis et VI (20%) et elle le reste en 1998 et 2001
bien quelle soit en diminution (14% puis 10%). Leffet de
la politique de non-redoublement serait donc limit pour
les jeunes de ce niveau qui restent deux fois plus nomb-
reux redoubler que lensemble de leurs Gnrations.
Ce sont ces jeunes qui sortent sans doute avant la troi-
sime et pour certains ds la cinquime sils ont redou-
bl deux fois au cours de leur scolarit.
Les diffrences entre garons et filles
Sur les trois Gnration, les garons sont
plus nombreux sortir entre 16 et 18 ans (66%
contre 34% des filles).Sils sortent plus souvent
diplms dun CAP, cest parce que la propor-
7 D. Trancart, C. Mathey-Pierre, Les sortants du systme ducatifentre 16 et 18 ans d'aprs les enqutes Gnration du Cereq,
note en ligne sur le site de la revue.
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tion des filles est nettement suprieure tous
les autres niveaux de sortie, en particulier dans
les niveaux prcdant le baccalaurat gnral
ou professionnel ; mais aussi, bien que les
carts soient moindres, entre les classes de
cinquime et de troisime et pour la filire
SEGPA.
Ainsi, parmi les sortants de chaque
Gnration, les filles sont moins nombreu-
ses, ce qui est particulirement net, ds 1992,
au niveau V des non-diplms. En 2001, leur
proportion correspond un peu plus dun tiers
des sortants pour les deux autres niveaux de
sortie (37%).
La proportion de jeunes parents
La poursuite du suivi des enqutes
Gnration permet dobserver que les jeunes
de niveau V diplms sont moins rapidement
parents que les non qualifis et les non-dipl-
ms. On sait par ailleurs que ceci concerne
presque toujours les filles (2 3% de garons).
Des caractristiques diffrentes pour les
diplms de niveau V
Les jeunes de niveau V diplms se distin-
guent des deux autres niveaux et en particu-
lier du niveau VI : ils sont moins souvent en
retard de deux ans, moins souvent parents,
moins souvent dorigine trangre et leurs
deux parents sont moins souvent au chmage,
Autour de 70 % dentre eux sont de milieu
dfavoris, mais un cart de 5 points les spare
des autres jeunes de niveaux V bis et VI.
Dautres exploitations de lenqute
Gnration 92 avaient dj apport un clai-
rage sur les jeunes sortis de lcole sans
diplme (de 16 22 ans) qui, en 1992, taient
plus de 146 000 avoir quitt le systme
scolaire sans tre titulaire dun diplme (soit
27,5% de cette gnration). Leur ge correspon-
dant gnralement aux niveaux de sortie, les
plus jeunes (16 ans) se rpartissaient entre le:
Niveau VI: 4,2% (premier cycle du second degr: classe
de 6me, 5e ou 4e. Ou formation prprofessionelle en un
an, CEP, CPPN, CPA),
Niveau V bis: 8,2% (3me gnrale, 4e ou 3e technolo-
gique, classe de second cycle court avant lanne termi-
nale),
Niveau V : 9,7 % (anne terminale des cycles courts
professionnels (CAP, BEP) et second cycle long avant la
classe terminale (seconde et premire gnrale et tech-
nologique).
Paralllement aux donnes sur linsertion professionnelle,
cette enqute fournissait galement des lments sur les
caractristiques des jeunes interrogs en 1997, soit cinq
ans aprs leur sortie du systme scolaire. Leur profil socio-
dmographique dsignait un groupe plus masculin, plus
populaire et plus souvent issu de limmigration ou dune
famille nombreuse qui comportait galement des diff-
rences entre filles et garons et selon la dernire classe
frquente.
Les diffrences entre garons et filles se situaient surtout en
termes de dcohabitation du domicile parental,plus impor-
tante chez les filles et souvent lie une installation en
couple. Parmi elles, les jeunes mres les plus en retrait du
march de lemploi taient les plus exposes aux risques
dexclusion quand elles cherchaient retourner sur le
march du travail aprs une maternit, mais sans plus de
qualification scolaire que cinq ans auparavant (Bordigoni,
2001).
De la mme faon, une exploitation de lenqute
Gnration 98 ralise au printemps 2001 comportait
galement un volet sur les 59000 jeunes sans qualifi-
cation de niveau VI ou V bis, sortis du systme ducatif
en 1998 (51% sortaient dune premire anne densei-
gnement professionnel, 38 % de collge, 11 % dune
SEGPA). Au regard de leurs caractristiques scolaires,
familiales et sociales, ces jeunes sans qualification cons-
tituaient un groupe part (Gasquet, 2003). Plus que
les autres jeunes de faible niveau de qualification, ils
cumulaient les handicaps en tant le plus souvent en
retard lentre en sixime (14% avaient au moins deux
ans de retard en sixime), en tant aussi plus
frquemment issus dune famille touche
par le chmage ou avec un seul des deux
parents ayant un emploi et dont le pre tait
plus souvent n hors de la Communaut
europenne
8 Depuis 1972, le service charg des statistiques au ministre del'ducation nationale a labor des chantillons reprsentatifs
d'lves des tablissements publics et privs. Des enqutes
complmentaires par questionnaire auprs des familles
permettent de prciser l'environnement familial et social.
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Le Panel 89 et les jeunes sortants non
qualifis
Les panels dlves rendent compte du chemi-
nement de cohortes relles dlve 8. Une
extraction du panel 1989 a concern 2064
lves (soit 9% du panel) en abandon de scola-
rit au cours des sept annes suivant lentre
en sixime (Segpa comprises) dont la scola-
rit en primaire et maternelle a galement t
prise en compte. Sur cette base, ltude mene
par Jean-Paul Caille (2000) a permis danaly-
ser le risque de sortie sans qualification dans
la double perspective des diffrences de cursus
scolaire et des disparits de situation familiale
ou sociale. Le panel 1995 a galement donn
lieu une tude sur les abandons de scolarit
partir du devenir des lves neuf ans aprs
leur entre en sixime. Les rsultats prsents
ici sont issus de ltude de Jean-Paul Caille
(2000).
Les caractristiques de ces jeunes sortants
indiquent un milieu familial en profond dca-
lage avec lcole et un phnomne trs
concentr socialement atteignant une
ampleur maximale dans les familles dinac-
tifs. Au total, plus des deux tiers (68%) des
lves sortis sans qualification sont des
enfants douvriers, de personnels de service
ou dinactifs. ces caractristiques sociales
se cumulent dautres facteurs pesant forte-
ment sur les risques de sortie prcoce du
systme scolaire, comme le fait dappartenir
une famille nombreuse, ce risque slevant au
fur et mesure que le rang dans la fratrie sac-
crot. Ainsi le cadet dune fratrie de cinq
enfants ou plus a quatre fois plus de risques
dinterrompre sa scolarit avant lobtention
dune formation qualifiante que dans une
famille de deux enfants.
Les diffrences de configuration familiale
(monoparentalit, famille recompose) ont galement un
impact ngatif.Ainsi, prs dun quart des sortants vivent
avec un seul de leurs parents (17%), le plus souvent la
mre. Les familles recomposes lissue dun divorce sont
aussi proportionnellement plus nombreuses (13%). Une
autre caractristique qui pse fortement concerne le
niveau de diplme le plus lev dtenu par les parents
avec un phnomne de concentration trs marqu: prs
dun sortant non qualifi sur trois appartient une famille
dont les parents ne dtiennent aucun diplme et 84%
appartiennent des foyers o le pre et la mre ne dtien-
nent pas de diplme plus lev que le CAP ou le brevet
des collges. Le risque dabandon dcrot au fur et
mesure que le niveau de diplme de la mre slve. La
structure parentale est, aprs le diplme maternel, la
caractristique familiale qui pse le plus sur le risque de
sortie sans qualification.
Les lves de nationalit trangre prsentent un risque
dinterruption de scolarit plus fort que leurs camarades
franais. Ils sont presque deux fois plus nombreux que
ces derniers quitter le systme ducatif sans qualifica-
tion (15% contre 9%). Mais degr de difficult compara-
ble en franais et en mathmatiques, lingalit de risque
sestompe totalement : arrivs au collge avec un gros
dficit dacquisition en franais et en mathmatiques, les
franais et les trangers 9 ont une probabilit de sortie
sans qualification comparable.
Le petit nombre dlves de lchantillon qui vit sans ses
parents (il sagit le plus souvent de jeunes relevant de la
DDASS) sont dans une situation encore plus fragile: ils quit-
tent le systme scolaire sans qualification trois fois plus
souvent que les collgiens qui vivent avec leurs pre et mre.
Les sortants sans qualification constituent une popula-
tion majoritairement masculine. Prs de 60% dentre eux
sont des garons. Mais cette ingalit de risque de sortie
sans qualification sexplique surtout par des diffrences
de retard scolaire et de niveau dacquisition lcole
lmentaire. Ds que lon observe des lves compara-
bles sur ces deux aspects et qui partagent la mme situa-
tion familiale et sociale, les diffrences deviennent tnues.
Ce risque est troitement li au droulement
de la scolarit lmentaire o les filles rus-
sissent sensiblement mieux que les garons.
Parcours scolaires
Le risque de sortie sans qualification apparat
trs dpendant de la manire dont sest drou-
le la scolarit en primaire. Les difficults dap-
9 C'est parmi les lves qui appartiennent aux nationalits lesplus exposes des difficults d'insertion professionnelle que le
risque de sortie sans qualification est suprieur celui des lves
franais. En 1995, le taux de chmage tait de 7,9 % parmi les
immigrs d'origine portugaise et atteignait 29,3 % parmi les
immigrs d'origine algrienne et 33,2% parmi ceux d'origine
marocaine (les immigrs en France (Contours et caractres,
INSEE,1997).
24 v i l l e c o l e i n t g r a t i o n diversit 1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8
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prentissage des lves non qualifis appa-
raissent presque toujours comme la poursuite
de difficults survenues dans les premiers
cycles : 39% ont redoubl le CP et 71% dentre
eux commencent le collge aprs un ou
plusieurs redoublements en primaire avec des
niveaux trs faibles en mathmatiques et en
franais (prs des deux tiers de ces lves se
situaient parmi les 25% dlves les plus faibles
dans ces deux disciplines lors de lvaluation
nationale de 6e).
En grande difficult lentre au collge, les
redoublements sont massifs et concentrs sur
la 6e et la 5e. En moyenne, les abandons en
cours de scolarit se produisent au terme de
cinq annes dans lenseignement secondaire.
Les sorties prcoces (aprs deux ou trois
annes de collge) sont plus rares (11%) et sont
plus frquentes parmi les lves les plus gs
au commencement du collge. Seulement 12%
arrtent leurs tudes en fin de troisime gn-
rale et tout juste un peu plus dun sortant sans
qualification sur quatre russit atteindre
cette classe. Mais si apparemment la dure de
scolarit correspond au premier cycle de len-
seignement secondaire, la plupart neffectue
pas entirement leur scolarit en filire gn-
rale 10 du collge.
Ces difficults ds le dbut du collge les diff-
rencient fortement des lves sortis aux niveaux V et IV
et des lves en poursuite dtudes sept ans aprs leur
entre au collge alors que moins dun tiers des lves
non qualifis est parvenu en 3me gnrale, ce niveau a
t atteint par plus de la moiti des lves sortis au niveau
V ou VI et plus de 90% de ceux en poursuite dtudes aprs
la 3e.
Lorientation dans une classe spcialise o sont pris en
charge les lves en difficult accrot les risques de sortie
sans qualification alors quune orientation prcoce dans
lenseignement professionnel semble avoir un effet
protecteur pour les lves qui nont pas atteint la 3me
gnrale. Le risque dabandon prmatur ne concerne
plus quun lve sur quatre en cas dorientation en 4me
technologique ou de prparation dun CAP en apprentis-
sage ou en lyce professionnel.
Les lves de SEGPA
Le passage par la SEGPA saccompagne dune aggravation
sensible du risque darrt dtude avant lobtention dune
formation qualifiante. Une fois sur deux, ces lves sortis
sans qualification quittent le systme ducatif lissue
de leur dernire anne de scolarit en SEGPA. Ils arrtent
leur scolarit soit par dmotivation, soit parce quils nont
pu bnficier de lopportunit daccs lapprentissage
ou en lyce professionnel qui permet lacquisition dun
diplme. Ce taux lev dabandon la sortie de la SEGPA
semble surtout sexpliquer par un fort dficit en offre de
formations en apprentissage ou en lyce professionnel
doubl dun effet de marquage dfavorable.
Quand ils peuvent poursuivre leur formation
en lyce professionnel ou en apprentissage,
les lves de SEGPA ont un degr de russite
plus faible que les autres lves, mais ces
checs ne sont pas massifs.
Les enqutes Emploi de lINSEE et les sortants
des annes quatre-vingt-dix
Sur la base dune source diffrente de donnes
(neuf enqutes Emploi INSEE, 1991- 1999),
ltude mene par Pascale Poulet-Coulibando
(2000) apporte des prcisions complmentai-
res concernant les caractristiques sociales
des jeunes sortants non qualifis et analyse
leur porte. Cette tude confirme la dimen-
sion discriminante de labsence de diplme
des parents (mme dun certificat dtudes
primaires), dune fratrie nombreuse et lim-
10 Comme ces lves du panel 89 n'ont pu bnficier de lasuppression du palier d'orientation de fin de 5e (elle n'a t effective
qu' la rentre scolaire 1992), pour une majorit d'entre eux, la
scolarit en filire gnrale s'est arrte en fin de 5me. Ils ont alors
t orients vers la filire technologique ou, pour les plus en
difficult, dans des classes qui existaient depuis le dbut des
annes 80 (CPA, CPPN), ou dans des structures pdagogiques plus
rcentes : 4e amnage, 3e d'insertion. Les abandons d'tude avant
l'obtention d'une formation qualifiante concernent prs de la
moiti des lves orients en CPA ou CPPN et prs d'un tiers des
lves de 4me amnage ou de 3e d'insertion.
11 Les informations sur les ressources sont trs limites dans lesenqutes mobilises. La plupart des allocations sociales de
solidarit ne sont pas voques par le questionnaire. Seules le sont
les indemnits verses par les Assedic, dans un contexte o les
ambiguts entre chmage et inactivit masculine compliquent la
dlimitation. Pour les mmes raisons, la part des bnficiaires du
RMI est sous-value. Sur un chantillon de 254 jeunes dont un
parent dclare en tre bnficiaire, plus du tiers sont des non-
qualifis. Ces RMIstes reprsentent prs de la moiti des chefs de
mnage qui dclarent tre chmeurs et n'avoir jamais travaill.
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pact du non-emploi ou de la profession des
parents. Le contexte monoparental, les bas
salaires 11 et le logement social sont significa-
tivement plus frquents parmi les non-quali-
fis que parmi les sortants de niveau CAP. Le
chmage des proches et le working poor
distinguent les sortants sans qualification des
sortants de niveau CAP (qui ont peu prs le
mme milieu dorigine).
Lauteure observe que les consquences de cet
ensemble de facteurs persistent malgr une
rduction importante de limpact du milieu
social sur le niveau de sortie. Llvation des
niveaux de diplme a t plus forte pour ces
jeunes que pour lensemble des milieux sociaux,
mais une fraction dentre eux reste dans une
position critique.
La situation des parents par rapport lem-
ploi (chmage, inactivit) apparat dtermi-
nante sur le risque de sortie sans qualifica-
tion. Parmi les pres des sortants, les
hommes inactifs sont presque autant repr-
sents que les chmeurs. Dans un contexte
de chmage massif, une part importante des
inactifs sont danciens chmeurs. Plus dun
pre de non-qualifi sur cinq (23%) est
chmeur ou inactif (contre 13% des pres des
sortants de niveau V et moins de 8% aux
niveaux suprieurs). La part des mres inac-
tives ou chmeuses distingue autant les non-
qualifis que le pourcentage des pres sans
emploi (58% des mres de non-qualifis
contre 43% des mres de niveau CAP). Ce qui
distingue les mres des non-qualifis est
moins leur groupe socioprofessionnel que le
fait quelles ne sidentifient aucune profes-
sion. Plus dune mre de non qualifi sur cinq
est donc trs loigne du monde du travail
(contre un sur huit pour les sortants de
niveau CAP). Elles nont jamais travaill lex-
trieur de leur domicile et sont inactives
au moment de lenqute. Les mres qui
dclarent une profession sont en gnral
employes ou ouvrires.
Lemploi dun des parents (ou le fait quil bnficie dune
retraite), quil sagisse du pre ou de la mre, rduit consi-
drablement les risques dabandon prcoce. 25% des
sortants non-qualifis vit dans un foyer sans emploi ni
retraite. Les familles sans emploi sont aussi plus souvent
monoparentales que biparentales. Les risques de sortie
sont massifs dans les groupes professionnels les plus
exposs au chmage: les emplois les moins qualifis de
lindustrie, de lartisanat et des services directs aux parti-
culiers (o linactivit et le chmage touchent principa-
lement des femmes seules 12).
Plus dun non-qualifi sur deux partage son foyer avec au
moins deux autres enfants. Ils sont le plus souvent issus
de familles trs nombreuses (16% dentre eux appartien-
nent des familles comptant au moins 5 enfants
prsents). Rsider en quartier dhabitat social augmente
le risque dabandon prcoce, quelles que soient les carac-
tristiques de la famille (plus de un non-qualifi sur trois
vit en logement social).
Lorigine trangre nest pas en soi un facteur aggravant
Relativement leur proportion sur lensemble des trois
Gnration (10%), les jeunes dorigine trangre sont
plus nombreux sortir entre 16 et 18 ans (15%) au niveau
V non diplm et surtout aux niveaux V bis et VI o un
jeune sur cinq est dorigine trangre en 1992, cette
proportion augmentant en 1998 et 2001 (23%). Plus dun
jeune sur quatre n hors de France sort sans qualifica-
tion et prsente donc de srieuses difficults dintgra-
tion sociale et professionnelle. Limmigration nest pas
en soi un facteur augmentant les risques dchec. Ce
sont les conditions sociales associes (chmage plus
frquent des parents, milieu professionnel, faible niveau
dinstruction de la mre, fratrie importante, logement
social) qui sont responsables des frquences leves de
sortie sans qualification, non le fait que les jeunes aient
immigr. Les parents des migrants sont avant tout des
employs et des ouvriers peu qualifis, prouvant de sv-
res difficults demploi. Les mres immigrantes repr-
sentent plus de la moiti des femmes qui nont jamais
travaill. Elles possdent trs rarement un diplme.
Cependant la part des non-qualifis est plutt infrieure
ce que permet de prsager leur environnement social.
Exclusion du milieu scolaire des jeunes accidents de la vieIl existe plusieurs catgories de jeunes qui
suivent un circuit parallle au cursus scolaire
12 Plus d'un non-qualifi sur quatre appartient une famillemonoparentale, une fois pris en compte le rle aggravant du
chmage.
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classique. Peu denqutes disponibles permet-
tent de vraiment cerner leurs trajectoires
scolaires ni dvaluer leur pourcentage (et si
celui-ci est pris en compte) parmi les lves
dcrocheurs et les sorties sans qualification.
Certains ont t orients trs tt dans lensei-
gnement spcialis, dautres dans lenseigne-
ment intgr. Pour les jeunes pris en charge
par lAide sociale lenfance (ASE) ou la
Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), les
donnes sont encore plus rares et parcellai-
res, mais elles indiquent toutes des parcours
scolaires en majorit chaotiques et des milieux
sociaux trs dfavoriss.
la diffrence des lves considrs comme
atteints dun handicap socioculturel, o il
est observ un vritable processus de margi-
nalisation du dedans vers le dehors de lcole
ordinaire pour les enfants handicaps, la
question de la dscolarisation se pose en
termes de non-scolarisation, de possibilits
une scolarit (ordinaire), du dehors vers le
dedans (Sicot, 2005).
Le discours sur lintgration du handicap est
devenu omniprsent et a constitu un des
thmes de la dernire campagne prsiden-
tielle. Depuis 1975, plusieurs lois et circulaires
se sont succd en faveur des personnes
handicapes, notamment sur le droit la
scolarisation en milieu ordinaire. La loi du 11
fvrier 2005 institue lgalit des droits et des
chances, la participation et la citoyennet des
personnes handicapes: le droit dinscrire
lcole tout enfant qui prsente un handicap
constitue lune des volutions fondamentales
de cette loi ; la scolarisation en milieu ordi-
naire est pose comme principe; sont concer-
ns les jeunes de 6 16 ans, mais la forma-
tion peut commencer avant lge obligatoire
si la famille en fait la demande.
Lvaluation du nombre denfants et dado-
lescents en situation de handicap non scola-
riss est dlicate car les informations sont
partielles. Pour les enfants handicaps vivant au domi-
cile de leurs parents, il nexiste pas de source adminis-
trative permettant den apprcier le nombre. Seule len-
qute Handicaps-Incapacit-Dpendance (HID) de lINSEE
de 1998 ou lenqute de la DREES sur les trajectoires des
enfants passs en CDES en 2004-2005 permettent desti-
mer cette population. En 1998, de lordre de 5% des enfants
handicaps vivant domicile, gs de 6 16 ans, taient
non scolariss. On retrouve le mme ordre de grandeur
partir de lenqute DRESS (Vanovermeir, 2006.c) sur les
enfants passs en CDES en 2004-2005 (environ 4%). Il y
aurait donc environ 5 000 enfants handicaps de 6 16 ans
vivant domicile et non scolariss.
Au total, en regroupant domicile et tablissement, 20 000
enfants handicaps soumis lobligation scolaire seraient
non scolariss (soit moins de 10% dentre eux), les trois
quarts tant cependant placs en tablissements et bn-
ficiant du soutien dun ducateur, les autres vivant avec
leurs parents et tant pour lessentiel en attente dune
solution (Espagnol, Prouchandy, 2007)
Les jeunes handicaps scolariss
Sur 235 000 enfants et adolescents en situation de handi-
cap en 2005-2006, les structures de lducation nationale
en ont accueilli 151 500. Les deux tiers des enfants et
adolescents handicaps sont des garons, mais cette
surreprsentation est conforme celle de la rpartition
du handicap selon le sexe. Entre 1999 et 2005, le nombre
des enfants ou adolescents handicaps en scolarisation
individuelle (dans une classe ordinaire ou dadaptation)
a doubl et slve 104 000 lves en 2005-2006. Pour
rpondre leurs besoins particuliers, un projet person-
nalis de scolarisation organise la scolarit de llve,
assortie des mesures daccompagnement dcides par la
Commission des droits et de lautonomie (CDA).
Lvaluation des besoins, laquelle tout jeune handicap
a droit en application de la loi, est ralise par une quipe
pluridisciplinaire dvaluation place auprs de la
Commission 13 des droits et de lautonomie des personnes
handicapes (CDAPH), laquelle doit apprcier la nature et
lampleur du handicap afin de dcider de lorientation la
plus pertinente. Deux publics trs diffrencis
y sont reus. Un tiers sont des enfants ayant
essentiellement des troubles scolaires (en
majorit de milieux dfavoriss) et deux tiers
reprsentent tous les handicaps (moteurs,
13 Mise en place en 2006 au sein de la Maison dpartementaledes personnes handicapes (MDPH), cette commission reprend les
missions auparavant dvolues la Cotorep et la Commission
dpartementale de l'ducation spciale (CDES).
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sensoriels, mentaux profonds) pour lesquels
il napparat pas de diffrence de milieu social
avec la population gnrale.
Lenseignement adapt et spcialis dans le
cadre de lducation nationale concerne le
premier et le second degr. En 2006, 111 100
lves en situation de handicap sont scolari-
ss dans le premier degr dont 9% dans len-
seignement priv. Leffectif des lves handi-
caps scolariss dans le premier degr a
progress de 6300 lves (+6%). La majorit
des lves accueillis souffrent de troubles des
fonctions cognitives ou de troubles psychiques
(70 000 lves). Leur scolarisation peut tre
individuelle dans des classes ordinaires ou
dans des classes adaptes des lves prsen-
tant des difficults scolaires ou sociales. Leur
proportion est en hausse (69% en 2007 contre
52% en 1999). Elle peut tre collective quand
llve est scolaris dans les classes dint-
gration scolaire (CLIS) qui accueillent des
lves prsentant un handicap mental, audi-
tif, visuel ou moteur.
Diffrents critres dterminent une orienta-
tion en classe dintgration scolaire (CLIS) o
39700 lves 14 ont t scolariss en 2006-2007.
Il sagit dlves en grande difficult scolaire
dans les premires annes dcole ou dont le
comportement gne le bon fonctionnement
de la classe (ou cumulent les deux profils).
Les CLIS, au nombre de 3900 en 2005, permet-
tent daccueillir un petit groupe dlves (12
au maximum) par un enseignant spcialis et
bnficient galement de priodes dintgra-
tion dans une classe ordinaire de lcole. 70%
des lves de CLIS ont entre 9 et 11 ans. lge
de six ans, les deux tiers des lves de CLIS
prsentent un retard de niveau scolaire dau
moins un an et 30% ont au moins deux ans de
retard. 10 ans, la quasi-totalit des enfants
a au moins deux ans de retard. 88% des lves
de CLIS prsentent un handicap mental ou
psychique (Espagnol, Prouchandy, 2007).
Cette orientation fait suite une valuation du rseau
daide (RASED) et une dcision de la Commission de
circonscription prscolaire et lmentaire (CCPE). Celle-
ci est rgulirement conduite orienter dans cette filire,
les enfants problmes qui sont majoritairement issus
de milieux dfavoriss et qui sadaptent difficilement au
fonctionnement de lcole. Leur viction des classes ordi-
naires ne permet pas pour autant de traiter ces probl-
mes qui relvent souvent de leur environnement socio-
conomique.
Trs peu dinformations sont disponibles concernant le
fonctionnement des CLIS, hormis deux Notes de la DEPP
(Lacerda, 2000 et 2003). Prs des deux tiers des lves
taient dans le cycle des apprentissages fondamentaux
(Grande section de maternelle, CP et CE1) avec une surre-
prsentation des garons (60%), et la trs forte proportion
dlves entre 9 et 11 ans (70%) indique un retard scolaire
important. Dautre part, les lves de nationalit tran-
gre sont deux fois plus nombreux quen classe ordinaire
et la proportion dlves issus de limmigration nest pas
indique, ni les catgories sociales.
Aprs leur scolarisation en CLIS, les lves sont en prin-
cipe accueillis, selon leur ge et les places disponibles,
dans des structures denseignement spcifique comme
les Units pdagogiques dintgration (UPI), les SEGPA et
les EREA. Mais la continuit de la prise en charge nest
pas toujours assure faute de places en UPI ou en insti-
tut mdico-ducatif, et seule une minorit dentre eux
(suite au dpart de la CLIS 11, 12 ou 13 ans) intgre les
UPI, SEGPA ou IME. Les orientations concernant les autres
ne sont pas renseignes.
Les effectifs en UPI reprsentent 9 400 lves en 2006 (soit
21% des lves handicaps). Les UPI ont t cres en 1995
dans certains collges en complment dautres formes
daccueil, afin de permettre des regroupements pdago-
giques dadolescents de 11 16 ans prsentant un handi-
cap mental (la part des garons est denviron 60%). En
2007, il existe 1040 UPI (contre 900 en 2006), ce qui reste
insuffisant pour couvrir le second degr. la rentre 2006,
seuls 9400. lves y ont t accueillis, dont 92% dans les
collges. Leur scolarisation en milieu ordinaire diminue
avec lge: la proportion denfants scolariss en tablis-
sement scolaire est de 80% 6-7 ans et de 30% 19-20
ans (Espagnol, Prouchandy, 2007).
Le secteur spcialis hors ducation nationale
Diagnostiqus comme prsentant un trou-
ble de la conduite et du comportement (TCC)
14 Les lves de CLIS reprsentent 1 % des lves del'enseignement lmentaire public et priv (91 % d'entre eux
frquentant une cole publique).
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malgr des capacits intellectuelles norma-
les, des lves peuvent galement tre orient
en secteur spcialis hors ducation natio-
nale, le plus souvent en Institut 15 thrapeu-
tique, ducatif et pdagogique (ITEP),
dnomm Institut de rducation (IR) avant
2005. Ils peuvent tre galement accueilli par
des structures qui ne leur sont pas destines
: tablissements sociaux (foyers de lenfance,
maison denfants caractre social) ou en
tablissement dducation spciale pour
enfants dficients mentaux. La prise en charge
suppose dtre reconnu comme handicap
par la CDAPH.
Les ITEP ne constituent pas le seul mode de
prise en charge envisageable pour les enfants
et les adolescents prsentant ces troubles :
ceux-ci peuvent galement tres suivis par des
Services dEducation Spcialise et des soins
domicile (SESSAD) spcialiss ou non dans
laccueil de jeunes prsentant ces difficults.
Ceux-ci offrent une prise en charge ambula-
toire, en suivant le jeune sur son lieu de vie
habituel (domicile, cole) et non au sein dun
tablissement. Les SESSAD se spcialisent
dans laccueil des enfants prsentant une dfi-
cience particulire : on compte 166 SESSAD-
ITEP qui prennent en charge les enfants souf-
frant de trouble du comportement. Mais leur
capacit daccueil est limite 2800 places
(Vanovermeir, 2006).
En forte croissance depuis les annes 1980 (la totalit de
la demande manant de lducation nationale), il existe
actuellement 342 ITEP 16, rpartis de manire disparate
sur le territoire et accueillant plus de 15 600 jeunes de 3
20 ans (dont 81% de garons). Ces tablissements sont
grs 85% par une association, une congrgation ou une
fondation.
Un rapport de lIGAS (Gagneux, Soutoux, 1999) relve le
caractre extrmement complexe et divers de la notion
de trouble de comportement qui vhicule, derrire des
strotypes dsuets (de type enfants caractriels), une
reconnaissance quasi-officielle dun handicap de nature
trs vague pour une population mal dfinie. Ce rapport
recense une srie de dysfonctionnements tant au niveau
de la dcision de placement, du suivi des enfants que du
pilotage des ITEP, et qui stendent aussi toute la chane
des interventions sociales auprs des familles en diffi-
cult, depuis le dpistage jusqu la sortie de lenfant du
circuit institutionnel. Repr prcocement ds lcole
maternelle lenfant porteur des signes prcurseurs dune
difficult grave dintgration, dapprentissage et de
comportement nest pris rellement en charge que de
faon alatoire et sporadique. Indiffrence, rticence ou
refus des parents, difficult technique organiser un
travail social efficace auprs des familles, encombrement
des services de pdopsychiatrie sont autant dobstacles
un traitement prcoce et efficace de lenfant. Celui-ci
poursuit alors un parcours scolaire lmentaire en situa-
tion dchec ou de rejet, jusquau moment o
la situation devient trop perturbante pour
linstitution scolaire.
Trois tudes locales repres par Marine Zecca
(2001) apportent des prcisions complmen-
taires sur ces diffrents constats faits par
lIGAS:
En Bretagne 17, un peu plus dun enfant sur
deux (54%) ne bnficie daucune prise en
charge spcifique coordonne (accompagne-
ment de la famille ou de lentourage habituel
par un CMPP ou SESSAD ou enseignement
adapt) avant dtre orient.
En Aquitaine 18, une tude transversale et
exhaustive ralise en 1997 (soit 39 tablisse-
ments et 2035 jeunes) observe que lors de
leur premire admission, le pourcentage
15 Le secteur spcifique de ces tablissements est rgi parl'annexe XXIV du dcret n89-798 du 27 octobre 1989 relative aux
conditions techniques d'autorisation des services et tablissements
prenant en charge des enfants et adolescents atteints de
dficiences intellectuelles ou inadapts. Les ITEP relvent de la
mme annexe que les tablissements d'ducation spciale en
faveur des enfants et des adolescents dficients intellectuels qui
rassemblent les instituts mdico-ducatifs et les instituts mdico-
professionnels. Leur financement est assur par un prix de journe
fix par le prfet (DDASS), pris en charge par l'Assurance maladie,
faisant l'objet d'une convention de tiers payant (Zecca, 2001).
16 En 1998, ces tablissements employaient 11 300 personnes enquivalent temps plein avec un cot de 3,5 milliards de francs pour
l'assurance maladie (Zecca, 2001).
17 tude PRAC, Assurance maladie en Bretagne, mars 1997. 18 Analyse de l'adquation du placement des enfants eninstituts de rducation. Rgion Aquitaine anne 1997, Service
mdical de l'Assurance maladie Aquitaine (avec intgration des
donnes 2000).
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nayant bnfici daucune prise en charge
adapte (entres directes) reprsentait 34,2%,
variant selon lge dadmission. 28,3% des
enfants orients taient considrs inad-
quat pour les structures choisies. 73% des
enfants taient scolariss au sein de linstitu-
tion. 90% taient considrs comme inadapts
en milieu scolaire ordinaire. 64% pris en charge
ayant un retard suprieur ou gal deux ans.
Retard qui saccrot au cours du sjour insti-
tutionnel, atteignant de trois cinq ans 17
ans. Sur 434 sorties, 56% des enfants taient
maintenus dans le secteur du handicap.
En Gironde (dpartement le mieux dot au
plan national), il tait enregistr une attente
de placement de 10% de loffre de places. 16,3%
des enfants ne prsentaient quun trouble
lger du comportement, alors que 10,1% ne
prsentaient aucun trouble. Quant la sortie,
labsence de suivi tait la rgle.
Seule, la DRESS (Vanovermeir, 2006) fournit un
aperu partiel de leur trajectoire scolaire et de
leur situation la sortie de linstitution. Plus de
96% des jeunes placs en ITEP sont scolari-
ss: 84% dentre eux ont acquis la lecture avec
ou sans difficult (52% savent lire sans diffi-
cult et 32% lisent avec difficult). Les jeunes
ne matrisant pas la lecture (13%) sont moins
frquemment scolariss que les autres. Mais
77,6% des enfants et des jeunes placs demeu-
rent scolariss temps plein en ITEP 18 contre
20,2% en tablissement priv ou public de lducation
nationale. Un faible pourcentage ne bnficie daucune
forme de scolarisation, soit 3,9%.
En fin de scolarit obligatoire, aucune source disponible
ne permet de connatre le niveau scolaire atteint. En 2001,
aprs leur sortie (pour les 16 ans et plus), seulement 14%
rejoignent un tablissement de lducation nationale (le
plus souvent dans des filires spciales ou dvalorises et
sans prise en charge mdico-sociale), 7% un IME, IMPRO
ou IMP et 2% dautres tablissements ou services ddu-
cation spciale, 4% restent en ITEP. Pour ceux qui intg-
rent le march du travail : 12% sont dclars en emploi,
27% sont en recherche demploi en milieu ordinaire, 16%
en formation ou en stage et 1% en CAT.
Une extraction de lenqute INSEE Handicaps, incapa-
cits, dpendance (Barral, Razaki, 2002) a permis dta-
blir un profil social des familles partir de la CSP du pre
(sur la base dun chantillon reprsentatif de la popula-
tion accueillie en ITEP) o est observe une nette surre-
prsentation des milieux dfavoriss : 42,3% des jeunes
sont issus du milieu ouvrier. Pour 30%, la CSP du pre 20
nest pas connue, mais des informations complmentai-
res permettent de savoir que 47,5% sont chmeurs.
Pour Franois Sicot 21 (2005) la notion du handicap socio-
culturel a t remplace par la catgorie diagnostique
de troubles du caractre et du comportement qui four-
nit la lgitimit mdicale lorientation des lves en
difficult ou difficiles. Il distingue deux populations den-
fants pour qui lintgration scolaire se pose en termes trs
diffrents. Dune part, un ensemble de situations et dac-
tions relativement semblables pour des enfants aux
handicaps avrs, ensemble caractris par
la non-scolarisation et les stratgies parenta-
les visant obtenir une scolarit adapte ou
en scolarit en milieu ordinaire; dautre part,
un ensemble constitu dlves issus de
milieux dfavoriss qui connaissent une
orientation hors de lcole ordinaire ou vers
ladaptation et intgration scolaire (AIS), voire
dans certaines conditions, des processus de
dscolarisation.
tant donn la surreprsentation de la prca-
rit sociale et conomique au sein de cette
population exclue de lcole en raison de
difficults scolaires considres comme irr-
ductibles la seule approche pdagogique
ou de comportements perturbateurs jugs
19 Le Haut Comit de Sant publique (1999) observe ainsi qu'enITEP les rythmes de prise en charge ducative et pdagogique
sont trs diffrents et rendent difficile pour les tablissements,
l'accomplissement d'une de leurs missions essentielles qui sert la
rintgration des enfants dans un milieu scolaire ordinaire .
20 L'Observatoire national de l'action sociale dcentralise(ODAS, 1998) observe ainsi que: la prcarit n'est pas nomme
comme facteur explicite de danger pour les enfants, et les
travailleurs sociaux, comme dans une raction datant d'une
poque o ils taient critiqus pour le cadre normatif qu'ils
imposaient aux populations dfavorises, en arrivent ne plus
recueillir dans les signalements les donnes relatives l'activit
professionnelle des parents .
21 Franois Sicot a observ pendant 18 mois le fonctionnementdu dispositif cens assurer l'intgration scolaire de ces lves (dans
le cadre de l'appel d'offre sur les processus de dscolarisation, voir
La dscolarisation en Haute-Garonne. Rapport l'cole et dispositifs de
scolarisation, 2002).
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pathologiques, le registre dactions permet-
tant ces parents le maintien de leur enfant
en milieu scolaire ordinaire est encore plus
restreint du fait de la complexit du proces-
sus excluant. La dscolarisation peut alors tre
interprte comme une forme de rsistance
passive des parents qui ont donn un accord
purement formel.
Oprant un parallle avec la dlinquance des
mineurs o, sur la dernire dcennie, les
mesures de rpression ont t durcies, Marine
Zecca (2001) observe une augmentation des
ITEP, ainsi quune progression rapide de la
population carcrale des mineurs. Dans le
mme temps, une conversion du processus
de pauprisation, de dsaffiliation, voire dex-
clusion dans les banlieues sensibles (et plus
silencieusement dans une partie du monde
rural) en matire de violence et dordre public
a accentu le phnomne. Aussi interroger la
notion du trouble de la conduite et du
comportement seulement en termes tech-
niques et scientifiques peut tre un leurre,
car la question est minemment politique,
idologique, conomique et polmique. Elle
est galement trs pragmatique par ses cons-
quences sur les trajectoires des enfants et des
jeunes. Le cadre curatif des ITEP est gale-
ment peu enqut. Alors que se multiplient
les travaux sur les risques inhrents aux prises
abusives des amphtaminiques, dont la
Ritaline au premier plan, il nexiste pas dtu-
des concernant cette question. Ce nest quau
dtour des entretiens mens que lauteure a pu
mesurer lampleur du phnomne.
Les structures mdico-ducatives
Hormis une rcente enqute de la DRESS
(Espagnol, Prouchandy, 2007) dont sont extrai-
tes les diffrentes informations chiffres
prsentes ici, il nexiste pas dinformation
disponible sur lorigine sociale, la scolarisa-
tion et linsertion sociale et professionnelle
des jeunes accueillis dans ces diffrentes
structures mdico-ducatives. Seul un rapport
de lIGAS et de lIGEN (Naves, Gossot, 1999)
signale, sans dvelopper, des inadquations
dans les placements en tablissements mdico-sociaux,
labsence ou lextrme faiblesse de la scolarit sans que
le handicap des jeunes accueillis puisse le justifier et lab-
sence des acquis ncessaires pour suivre une formation
professionnelle.
En 2006, il tait dnombr 2 100 tablissements mdico-
ducatifs (EME) offrant prs de 108 000 places et recevant
des enfants et adolescents de 0 20 ans (sauf prolonga-
tion pour finir un cursus pdagogique ou au titre de
lamendement Creton). Ils accueillent les enfants souf-
frant principalement dune dficience psychique ou
mentale (72%), de handicap moteur (6%) ou de polyhan-
dicap (8%). La majorit sont des garons (65% en 2005-
2006). Seuls 70 100 enfants et adolescents taient scola-
riss toute lanne, les autres enfants tant pour la plupart
scolariss temporairement au sein de lEME ou scolariss
hors tablissement. Prs de 56% des enfants et adoles-
cents scolariss toute lanne dans les EME ont entre 11
et 16 ans.
ct dautres structures comme les Instituts mdico-
ducatifs (67000 enfants), les Instituts dducation motrice
(6 800 enfants), les Instituts dducation sensorielle (10600
enfants), le secteur sanitaire sous tutelle principale du
ministre de la Sant et des Solidarits accueille gale-
ment prs de 15300 jeunes handicaps dont seulement
6200 ont suivi une scolarit toute lanne scolaire 2005-
2006.
Aussi, Claire Brisset, ancienne dfenseure des enfants,
dclarait : Jai visit des institutions sous le chapeau
sant publique. Jai demand voir o tait la structure
ducative au sein de ces tablissements. On ma ouvert la
porte dune classe bien range, qui servait uniquement
deux fois deux heures par semaine. Lon considre encore
que lducation des enfants souffrant de pathologie est
un appendice dans leur prise en charge. Les enfants en
souffrent normment. (Brisset, 2006).
La maternit prcoce des adolescentes
Un autre motif de sortie du systme scolaire concerne les
jeunes mres mineures. Hormis une enqute de lINED
(Kafe, Brouard, 2000), il existe peu de donnes pidmio-
logiques ni denqutes nationales rcentes (qualitatives ou
quantitatives) sur la maternit des adolescentes, et les
donnes sur leurs caractristiques sociales et leurs trajec-
toires ultrieures sont encore plus rares et toujours par-
ses et parcellaires.
Lenqute concernant La sant des adolescents (DREES,
2004) indique quen 2001, 4845 jeunes filles mineures ont
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eu un enfant ; soit 4,3 sur 1000 jeunes filles
ges de 15 17 ans, ce qui reprsente un taux
un peu plus lev que pendant la priode 1995-
1999 (aux environs de 3,6 naissances pour
1000). Ce chiffre a fortement dcru puisque
cette proportion tait de 28 pour 1000 en 1980.
Comparativement, le nombre dinterruptions
de grossesse effectues pour les mineures en
2001 est de 10 153, soit un taux de 9,1 pour 1
000 qui a augment ces dernires annes (7,5
pour 1 000 en 1995).
Des donnes complmentaires sont fournies
par les enqutes statistiques se rapportant aux
bnficiaires de lAllocation de parent isol
(API) partir dune extraction par tranche
dge (moins de 20 ans) ou par ge (de moins
de 15 ans 18 ans).Allocation diffrentielle et
dune dure temporaire (de 1 an 3 ans selon
les situations), lAPI est attribue aux parents
isols qui disposent dun faible (ou daucun)
revenu et peut tre verse des adolescentes
de moins de 18 ans rsidant chez leurs parents
(vivre avec ses parents ne constituent pas un
obstacle pour la percevoir) ou en foyer mater-
nel.
partir du fichier CNAF, des analyses statis-
tiques concernant lensemble des bnficiai-
res de lAPI apportent quelques lments sur
la tranche dge moins de 20 ans (Algava,
Avenel, 2001). Ces jeunes mres mineures
apparaissent peu scolarises : sur les 14 000
bnficiaires ges de 15 19 ans, 30% seule-
ment sont encore scolarises (alors que le taux
atteint 80% pour lensemble de cette classe
dge). Les facteurs explicatifs mobiliss sont
que la maternit prcoce concerne souvent
des jeunes filles en difficult scolaire et le fait
dlever seule un enfant constitue un obsta-
cle la poursuite des tudes. Elles peroivent
galement le montant le plus lev de lAPI,
ce qui suppose quelles avaient, avant le verse-
ment de lAPI, un niveau de ressources person-
nelles globalement plus faible que lensemble
des allocataires. Globalement plus dmunies,
elles sont galement plus frquemment
hberges par leurs ascendants.
la fin de lAPI, et ce, sur la base de lensem-
ble des allocataires, prs de la moiti dentre elles bascu-
lent au RMI (PLA, 2006). Le fait dtre parent et de ne bn-
ficier daucune ressource permet en effet de percevoir le
RMI avant lge de 25 ans. Pour les autres, et surtout
concernant les plus jeunes, les contrats en alternance,
lapprentissage et les contrats de qualification sont le plus
souvent mentionns (56,9% ne possdent aucun diplme).
Lorsquelles ont un emploi, le temps partiel contraint est
majoritaire (Belleville-Pla, 2004). La prvalence de ces
trajectoires est confirme par une tude base sur des
donnes longitudinales provenant dun panel dalloca-
taires de Meurthe-et-Moselle (Chaupain-Guillot, Guillot,
2003). Le devenir sur 24 mois, suite la perception de lAPI,
de jeunes filles mineures (entre 15 et 18 ans) indique une
majorit de parcours marqus par linactivit ou le
chmage puisque seulement 11,4% dentre elles ont
travaill, au total, pendant plus de douze mois, tandis que
plus de la moiti (52%) percevaient le RMI et que 21,2%
dentre elles ont connu un nouvel pisode dAPI. Les carac-
tristiques individuelles disponibles ne renseignent ni sur
le niveau de formation, ni sur le diplme au moment de
la demande dAPI.
Ce sont des tudes cibles sur des effectifs plus restreints
qui permettent de mieux cerner certaines caractristiques
sociales de ces trs jeunes mres. Ainsi une enqute
mene auprs des professionnels de PMI concernant une
population de 130 jeunes filles mineures (de 13 18 ans)
ayant accouch en 2004 (Conseil gnral du Val-de-Marne,
2007) tmoigne que ces grossesses prcoces intervien-
nent plus frquemment dans un contexte familial
perturb, sur fond de plus ou moins grande prcarit et
de peu dinvestissement scolaire. 56% dentre elles bn-
ficiaient dj dun suivi antrieur la grossesse par les
services sociaux ou lAide sociale lenfance. Seules 36%
ont continu leur scolarit jusqu la fin de la grossesse,
25% lont interrompu au premier trimestre de la gros-
sesse, 39% taient dj dscolarises et 13% navaient
jamais t scolarises. Labsence de scolarisation est certai-
nement relier en partie lorigine trangre pour 62%
de ces jeunes filles (38% dAfrique et 9% du Maghreb).
Dans 60% des cas, le jeune pre tait prsent au moment
de laccouchement et apparaissait investi dans un projet
de couple.
Une seconde enqute mene dans un service de gynco-
logie-obsttrique en Seine-Saint-Denis (UZAN, 1998)
apporte des donnes complmentaires en tablissant une
typologie des adolescentes accueillies lors dune gros-
32 v i l l e c o l e i n t g r a t i o n diversit 1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8
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sesse prcoce (chantillon de 102 adolescen-
tes de 12 18 ans).Trois profils ont t tablis:
celui de la trs jeune femme marie ou
vivant en couple,
la grossesse accidentelle dune jeune adoles-
cente scolarise vivant chez ses parents,
la grossesse de ladolescente en grande diffi-
cult, en chec scolaire et professionnel, en
rupture avec la famille.
Dans le premier cas de figure, il sagit de jeunes
femmes trangres pour qui le mariage
prcoce est culturel, le dsir denfant est
comparable