Échec scolaire: quelles solutions entre 16 et 18 … solutions entre 16 et 18 ans? État des lieux...

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L es réformes successives initiées depuis l’après-guerre visant à instaurer une plus grande égalité des chances ont permis une élévation générale des niveaux de formation et une diminution conséquente de la non qualification sur les quarante dernières années. Cependant, la grande difficulté scolaire persiste et devient un phénomène très concentré socialement qui s’amplifie au fur et à mesure que l’on descend dans l’échelle sociale atteignant son maximum dans les familles d’inactifs 2 (Caille, 2000). Elle est identifiée dès le début de la scolarité primaire et s’ag- grave tout au long du parcours scolaire pour aboutir à la non maîtrise du socle commun de connaissances au terme de la scolarité obligatoire à 16 ans. Si, jusqu’à la crise économique des années soixante-dix, le plein emploi et une économie moins exigeante en termes de qualification permettaient d’absorber les non-diplômés sans trop de difficulté, il n’en est plus rien depuis les transformations de l’économie de marché qui leur laissent peu de chances d’in- sertion. Considérés comme très peu « employables », ces jeunes se trouvent en marge du marché du travail et assignés à diffé- rentes formes d’emplois précaires et non 1 Cette étude, réalisée à l’initiative de la Délégation inter- ministérielle à la ville (DIV), constitue un état des lieux et une synthèse des recherches portant sur les jeunes rencontrant des difficultés en matière d’éducation et d’insertion socio- professionnelle de la fin de la scolarité obligatoire à la majorité civile en France. Elle est consultable en ligne sur les sites du colloque, de la DIV, et de VEI: http://colloque16-18.cndp .fr/ http://www .ville .gouv .fr/infos/di v/ http://www .cndp .fr/v ei/ 2 Les enquêtes « Budget des familles » de l'INSEE désignent comme « inactive » une personne de moins de 60 ans ni étudiante ni retraitée. Environ 200 000 ménages pauvres entrent dans cette L’effet stigmatisant que représente l’échec scolaire s’est considérablement renforcé depuis la montée de la pleine scolarisation. C’est en fin de troisième que la poursuite d’un parcours qualifiant se différencie selon une échelle des compétences acquises qui relègue les élèves les plus en échec dans les filières les moins valorisées. Une fraction d’entre eux abandonne alors le système scolaire soit en cours de collège, pour les plus âgés, soit avant d’atteindre un niveau qualifiant en filière professionnelle courte. Mais il existe également d’autres parcours scolaires heurtés ou parallèles qui concernent un public hétérogène particulièrement fragilisé par leur environnement familial ou le handicap et qui est mis à l’écart de la scolarisation complète de leur classe d’âge 1 . Échec scolaire : Quelles solutions entre 16 et 18 ans? État des lieux 154-SEPTEMBRE 2008 diversité ville école intégration 15 Brigitte Larguèze Catherine Mathey-Pierre Avec la collaboration de Michel Destefanis (CEE), Madeleine Maillebouis (CNAM-CDFT), Camille Tapin-Reboul, avocate, Danielle Trancart (université de Rouen/GRIS- CEE)

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  • Les rformes successives inities depuis

    laprs-guerre visant instaurer une

    plus grande galit des chances ont

    permis une lvation gnrale des

    niveaux de formation et une diminution

    consquente de la non qualification sur

    les quarante dernires annes. Cependant, la

    grande difficult scolaire persiste et devient

    un phnomne trs concentr socialement

    qui samplifie au fur et mesure que lon

    descend dans lchelle sociale atteignant son

    maximum dans les familles dinactifs 2 (Caille, 2000). Elle

    est identifie ds le dbut de la scolarit primaire et sag-

    grave tout au long du parcours scolaire pour aboutir la

    non matrise du socle commun de connaissances au

    terme de la scolarit obligatoire 16 ans.

    Si, jusqu la crise conomique des annes

    soixante-dix, le plein emploi et une conomie

    moins exigeante en termes de qualification

    permettaient dabsorber les non-diplms

    sans trop de difficult, il nen est plus rien

    depuis les transformations de lconomie de

    march qui leur laissent peu de chances din-

    sertion. Considrs comme trs peu

    employables , ces jeunes se trouvent en

    marge du march du travail et assigns diff-

    rentes formes demplois prcaires et non

    1 Cette tude, ralise linitiative de la Dlgation inter-ministrielle la ville (DIV), constitue un tat des lieux et une

    synthse des recherches portant sur les jeunes rencontrant des

    difficults en matire dducation et dinsertion socio-

    professionnelle de la fin de la scolarit obligatoire la majorit

    civile en France. Elle est consultable en ligne sur les sites du

    colloque, de la DIV, et de VEI :

    http://colloque16-18.cndp.fr/

    http://www.ville.gouv.fr/infos/div/

    http://www.cndp.fr/vei/

    2 Les enqutes Budget des familles de l'INSEE dsignentcomme inactive une personne de moins de 60 ans ni tudiante

    ni retraite. Environ 200 000 mnages pauvres entrent dans cette

    Leffet stigmatisant que reprsente lchec scolairesest considrablement renforc depuis la monte de lapleine scolarisation. Cest en fin de troisime que lapoursuite dun parcours qualifiant se diffrencie selonune chelle des comptences acquises qui relgue leslves les plus en chec dans les filires les moinsvalorises. Une fraction dentre eux abandonne alorsle systme scolaire soit en cours de collge, pour lesplus gs, soit avant datteindre un niveau qualifianten filire professionnelle courte. Mais il existegalement dautres parcours scolaires heurts ouparallles qui concernent un public htrogneparticulirement fragilis par leur environnementfamilial ou le handicap et qui est mis lcart de lascolarisation complte de leur classe dge 1.

    chec scolaire :

    Quelles solutions entre 16 et 18 ans? tat des lieux

    1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8 diversit v i l l e c o l e i n t g r a t i o n 15

    Br ig i t te Larguze Cather ine Mathey-Pier re

    Avec la co l laborat ion de Miche l Destefan is (CEE) ,Madele ine Mai l lebou is (CNAM-CDFT) ,

    Cami l le Tap in-Reboul , avocate ,Danie l le Trancar t (un ivers i t de Rouen/GRIS- CEE)

    DIV154 complet 23/09/08 18:00 Page 15

  • qualifis ou au non-emploi sur un temps long.

    La discrimination que subissent les jeunes non

    diplms est devenue dautant plus impor-

    tante que lchec scolaire ne concerne plus

    maintenant quune minorit 3. Ainsi, laug-

    mentation du niveau de qualification et, en

    corollaire, la rduction de lchec scolaire tend

    renforcer le caractre de stigmate social de

    la non-certification scolaire et en amplifier

    les effets dautant plus quand elle est associe

    dautres facteurs non scolaires tels que le

    handicap, lorigine trangre, sociale ou

    ethnique, le lieu de rsidence. Ce processus

    conduit enfermer un groupe socialement

    constitu dans une trajectoire dviante la

    norme, plutt qu le considrer comme un

    groupe faible niveau de comptences

    pouvant tre compens par des actions inten-

    sives de formation lui permettant un accs

    non discrimin au march du travail.

    Depuis les trente dernires annes, un ensem-

    ble de mesures palliatives scolaires et post-

    scolaires ont t mises en uvre par lduca-

    tion nationale et par des politiques publiques

    externes celle-ci afin de contrer les effets

    dun chec scolaire dj sanctionn ou pour

    le rattraper. Cette externalisation des cons-

    quences de lchec scolaire dplace donc les

    mesures de rattrapage et de formation hors

    du systme scolaire qui la produit. Prenant

    en charge laxe formation-emploi, les inter-

    ventions publiques tentent de rduire les dficits de

    formation entrans par lchec scolaire et leurs effets sur

    linsertion professionnelle tout en tablissant des liens

    concrets avec la vie active. Les rponses apportes se

    diversifient entre laide sociale, la formation profession-

    nelle, la remise niveau des comptences et lapprentis-

    sage du savoir-tre requis pour accder lemploi. Mais

    ces formations destines aux jeunes faible comptence

    scolaire, dont la trajectoire en formation initiale se carac-

    trise par une inadquation avec les normes de linstitu-

    tion scolaire, induisent aussi des critres qui conduisent

    les carter de certains dispositifs en slectionnant plutt

    les lves les moins en chec lcole. Cette mise lcart

    continue augmente les risques dune ghettosation des

    offres de formation destines aux jeunes les plus en chec,

    avec un impact ngatif sur la reconnaissance sociale de

    ces dispositifs.Tant au regard des cots levs des mesu-

    res de remdiation post-scolaires que de leur efficacit

    en termes dinsertion professionnelle, lessentiel des

    efforts pour rsoudre les consquences de lchec scolaire

    apparat devoir se concentrer avant la sortie du systme

    scolaire et ce, ds le dbut de la scolarisation, en accord

    avec lobjectif de ne plus laisser un jeune sortir de lcole

    non diplm.

    UN CHEC SCOLAIRE PRCOCE ET UN FORTMARQUAGE SOCIALLes sortants sans qualification et les sortants sans diplme Les jeunes sortants sans qualification sont des lves

    qui ont interrompu leur formation initiale, pour la

    premire fois et pour un an au moins, aprs

    des enseignements des niveaux de formation

    VI et V bis. Cest la dernire classe frquente

    qui prvaut pour tablir le niveau de sortie

    (aprs une classe du premier cycle de lensei-

    gnement secondaire, une classe correspon-

    dante de lducation spciale, avant lanne

    terminale dun CAP, dun BEP ou en dea).

    Toutefois, selon la nomenclature des mtiers

    de 1969, sont cependant considrs comme

    qualifis tous les jeunes sortant de classe

    terminale de CAP ou de BEP, de seconde, de

    premire ou de terminale tout en ayant

    chou lexamen ainsi quau brevet.

    La part des lves sortant de manire prcoce

    catgorie. Il s'agit d'une population relativement ge : un homme

    sur deux a entre 50 et 60 ans. Lorsque la personne de rfrence est

    un homme, il s'agit plutt de chmeurs dcourags percevant le

    RMI ou des handicaps dont un sur trois peroit un pension

    d'invalidit ou l'allocation aux adultes handicaps. Quand c'est une

    femme, elle se dclare gnralement au foyer . Dans six cas sur

    dix, ces femmes ont des enfants charge. Ce sont souvent des

    femmes qui viennent de se sparer de leur conjoint et qui sont

    ges de 40 60 ans. Elles se retrouvent quasiment prives de

    ressources, mis part les prestations familiales et une ventuelle

    pension alimentaire et sont dans une situation aussi difficile que

    les chmeurs pauvres : revenus et consommation faibles, absence

    de patrimoine et d'aides de la famille.

    3 Ils reprsentaient environ 40% des jeunes ayant arrt leurstudes en 1963, 30% en 1970, 15% en 1980, 8% en 1990, 6% en 2007.

    16 v i l l e c o l e i n t g r a t i o n diversit 1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8

    DIV154 complet 23/09/08 18:00 Page 16

  • du systme ducatif diminue 4 fortement entre

    1975 et 2005 en passant de 25% 6%. Cette

    baisse est lie successivement la dmocra-

    tisation de laccs au secondaire (1967), la

    cration dun BEP accessible en fin de premier

    cycle puis au dveloppement du second cycle

    court. partir de 1975, laccs croissant aux

    CAP et BEP entrane un recul des sorties sans

    qualification. En 1989, la loi dorientation sur

    lducation affirme le droit une qualification

    minimale et les dures de prparation des

    diplmes professionnels se diversifient. Le

    palier dorientation en fin de cinquime est

    supprim en 1992 puis lallongement de la

    scolarisation sacclre (en 1995, 57 % des

    jeunes poursuivent leur formation jusqu

    lge de vingt ans et 62 jeunes sur 100 sont

    bacheliers, toutes sections confondues).

    La loi dorientation sur lducation de juillet

    1989 affirmait la ncessit de conduire 100%

    des jeunes une qualification (le CAP ou le

    BEP constituant le premier niveau de qualifi-

    cation): Tout lve qui, lissue de la scola-

    rit obligatoire, na pas atteint un niveau de

    formation reconnu doit pouvoir poursuivre

    des tudes afin datteindre un tel niveau. Ltat

    prvoira les moyens ncessaires dans lexer-

    cice de ses comptences, la prolongation de

    la scolarit qui en dcoulera . Mais malgr

    llvation gnrale des niveaux dtude, le

    seuil de 6% semble difficile rsorber depuis

    la dernire dcennie. Il savre troitement

    corrl des difficults scolaires rencontres

    ds le dbut de lcole primaire avec une surre-

    prsentation des milieux socio-conomiques

    les plus dfavoriss.

    En juin 2005, il est recens 42 000 jeunes

    (mtropolitains) sortant sans qualification.

    Selon une tude de la DEPP (Lger, 2008), la

    lgre baisse enregistre au cours des dix

    dernires annes sexplique par la rduction

    des abandons dtudes au collge et en dbut

    de CAP et BEP, avec comme principal facteur

    explicatif la rduction des redoublements en

    dbut de scolarit qui entrane mcaniquement un allon-

    gement du niveau dtudes, en particulier au-del des

    classes confrant un statut de qualification.

    Les jeunes non diplms

    Depuis le Sommet de Lisbonne (2000), lUnion europenne

    considre quun diplme de second cycle de lenseigne-

    ment secondaire est le bagage scolaire minimal.

    Dsormais, la France se rfre explicitement et distincte-

    ment, dune part, aux jeunes non diplms (sans CAP,

    BEP ni baccalaurat) et, dautre part, aux jeunes non

    qualifis. Les dernires donnes diffuses par la DEPP

    dans Ltat de lcole (2007) sur le niveau dtude des

    sortants du systme ducatif sont actuellement prsen-

    tes en fonction de la Classification internationale des

    types de lducation (CITE) selon laquelle un lve est

    rput qualifi sil a achev avec succs le cycle de

    formation, russite atteste par un certificat ou un

    diplme.

    Selon cette dfinition, 17% des lves nont pas de diplme

    du second cycle du secondaire (soit 133 000 jeunes en

    moyenne par classe dge, en 2005). Parmi eux:

    9% ont tudi jusquen dernire anne de prparation

    dun diplme de second cycle mais ont chou aux

    examens (dont 5% en classe terminale prparant un

    baccalaurat ou un quivalent et 4% en dernire anne de

    CAP ou BEP). Ils ont, en moyenne, plus de 19 ans. Cette

    population est plus masculine, puisque ce sont 19 % des

    jeunes hommes (contre 14 % de femmes) qui chouent

    en passant un examen (CAP, BEP, baccalaurat).

    8% ont arrt avant la classe terminale de prparation

    dun diplme de 2me cycle dont 2% en seconde ou 1re

    gnrales ou technologiques du cycle long et 6 % en

    premire anne de CAP ou de BEP du cycle court, du

    premier cycle du secondaire (collge) ou moins. Ils ont

    moins de 18 ans en moyenne lorsquils sortent du systme

    ducatif.

    133000 lves non diplms (dont 7% titulaires du DNB)

    69 000 lves ont tudi jusquen dernire anne de prpa-

    ration dun diplme de second cycle mais ont chou aux

    examens. Parmi eux:

    35000: classe terminale prparant un baccalaurat

    ou un quivalent (Niveau IV),

    34000: dernire anne de CAP ou BEP (V).

    64000 lves ont arrt avant la classe termi-

    nale de prparation dun diplme du second

    cycle. 4 40% en 1963, 30% en 1970, 15% en 1980, 8% en 1990, 7% en1999, 6% en 2005

    1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8 diversit v i l l e c o l e i n t g r a t i o n 17

    DIV154 complet 23/09/08 18:00 Page 17

  • Parmi eux:

    12000: en 2nde ou 1re gnrales ou techno-

    logiques (Niveau V),

    52 000 : en 1re anne de CAP ou de BEP,

    premier cycle du secondaire ou moins

    (Niveaux VI-Vbis).

    (Source : Estimations DEPP partir des enqutes

    Emploi de lINSEE, 2005.)

    Le mode de recensement des sorties

    sans qualification

    Pourtant, un rapport des Inspections de ldu-

    cation nationale (2005) consacr aux sorties

    sans qualification indique les difficults dun

    dnombrement exact des sorties sans quali-

    fication. Le fait tout dabord quil coexiste

    plusieurs approches des sorties fondes sur

    des conventions de langage htrogne parti-

    cipe au flou contradictoire des chiffres et des

    indicateurs. Il existe une vritable difficult

    reprer et recenser ces sorties et ce phno-

    mne sobserve tout dabord au niveau de

    ltablissement dappartenance o le motif

    de sortie est souvent imprcis; ceci pouvant

    se rapporter au fait qu ce niveau, les sorties

    ne concernant que peu dlves, ce problme

    est considr comme marginal. Cest au fur et

    mesure que leur nombre sagrge diff-

    rents niveaux (dpartemental, acadmique)

    quil devient significatif et proccupant.

    Les sorties concernent aussi dautres syst-

    mes de formation qui ne sont pas toujours pris

    en compte (enseignement priv hors contrat,

    enseignement agricole, lyces maritimes et

    aquacoles, coles du secteur sanitaire et

    social...). Dautre part, certaines acadmies

    nayant pas mis en place un dispositif dob-

    servation et de dnombrement des sorties, les

    rectorats sappuient donc sur les informations

    donnes par les enqutes nationales (indicateurs de la

    DEPP, donnes fournies par le Creq), mais les rsultats

    ne concordent pas toujours avec les chiffres des services

    statistiques rectoraux qui effectuent un suivi quantitatif.

    Celui-ci leur permet dvaluer le nombre dlves sans

    affectation et de reprer les dcalages quand les deman-

    des dpassent les capacits daccueil en filire profes-

    sionnelle. Mais il nexiste pas de suivi de cohortes permet-

    tant de mesurer lefficacit des solutions trouves.

    Pour les chefs dtablissement qui sont tenus rglemen-

    tairement de suivre pendant un an les lves aprs leur

    sortie, ce suivi est souvent difficile et nest pas exhaustif

    (par exemple, quand un lve change dacadmie ou sins-

    crit dans un tablissement priv). Ainsi, lorientation

    immdiate est connue, les bulletins scolaires trimestriels

    de ltablissement daccueil doivent tre communiqus,

    mais comme au-del dune anne, la remonte dinfor-

    mations nest plus assure, le devenir scolaire de llve

    abandon ou poursuite dune formation qualifiante

    nest pas renseign.

    Le rapport de lInspection observe que, dune manire

    gnrale, il ny a pas ou peu de protocoles acadmiques

    de reprage des sorties sans qualification, ni beaucoup de

    dispositifs acadmiques organiss pour observer (et encore

    moins, analyser) les flux entre lducation nationale, lagri-

    culture, notamment les MFR, les chambres consulaires,

    les formations des conseils rgionaux et le secteur priv.

    Il y a tout simplement confusion entre sorties dtablis-

    sements publics du ministre de lducation nationale et

    sorties de formation initiale. Les informations rassem-

    bles, en outre, par certaines acadmies concernent, en

    fait, seulement les sorties en cours danne.

    La rsolution de lparpillement des donnes 5 rside, pour

    lInspection, dans la mise en place dun partenariat, la

    coordination dinitiatives multiples (notamment au niveau

    rgional depuis la dcentralisation) et la cration dune

    base commune de donnes au niveau national.

    Les sources statistiques nationales et leur marge dincertitude

    Au niveau des statistiques nationales, la mise

    en place depuis 1973, du Bilan Formation-

    Emploi pilot par la DEPP et qui regroupe le

    Creq, la DARES, lINSEE a permis une entente

    sur les sources et les mthodes relatives aux

    sorties du systme ducatif et lentre des

    jeunes dans lemploi.

    Mais Poulet-Coulibando (2000) souligne gale-

    ment combien lvaluation des sortants du

    5 L'intgralit des sorties sans qualification ne pouvant treapprhende actuellement que par la consultation d'une

    multitude de bases de donnes : bases lves de l'enseignement

    public et de l'enseignement priv sous contrat, tableaux

    statistiques de la MGI, tats de stagiaires jeunes du rseau

    formation continue, listes de prsence des actions finances par les

    conseils rgionaux, donnes statistiques des OREF, bases

    Parcours du rseau d'accueil des missions locales et des PAIO,

    bases de l'ANPE...

    18 v i l l e c o l e i n t g r a t i o n diversit 1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8

    DIV154 complet 23/09/08 18:00 Page 18

  • systme ducatif est devenu difficile notam-

    ment par la plus grande complexit des

    parcours scolaires avec lallongement de la

    formation initiale, les passages dun tablisse-

    ment lautre, la dscolarisation progressive

    marque dinterruptions temporaires.Ainsi:

    Plusieurs sources dincertitudes sont difficile-

    ment rductibles. Celles-ci tiennent au mode

    de collecte, la prcision des rponses, sinon

    la linarit des parcours. De plus, tout chan-

    gement du mode de collecte de linformation

    doit tre rigoureusement sans effet pour quun

    reliquat entre deux recensements conscutifs

    soit reprsentatif. En outre: Les prcdents

    scolaires (de lensemble des inscrits) comme

    limplantation gographique de leur prcdent

    tablissement lorsquil sagit dapproximations

    rgionales doivent tre exactement rensei-

    gns ou convenablement rectifis, au risque

    de confondre une sortie avec une poursuite

    dtude. Enfin les parcours doivent tre rigou-

    reusement ascendants, dfaut de quoi un

    jeune pass de seconde indiffrencie en

    seconde professionnelle (BEP) pourrait figurer

    parmi les abandons de BEP et ce titre parmi

    les sortants sans qualification.

    Les estimations actuelles sur les niveaux de

    sortie de formation initiale proviennent des

    enqutes Emploi de lINSEE qui calculent les

    quantits globales de sortants et lvolution

    des inscriptions dentrants dans les tablisse-

    ments secondaires. Mais ces rsultats doivent

    tre perus comme des approximations: vrais

    dans lensemble mais peu srs petite chelle.

    Cest la faon dont ils concordent avec les

    rsultats fournis par des enqutes indpen-

    dantes qui emporte, en dfinitive, la convic-

    tion.Ainsi, les rsultats correspondent ceux

    des panels dlves qui suivent plusieurs

    annes de suite les mmes lves. Les donnes

    rtrospectives tires des enqutes Emploi

    confirment dans les grandes lignes les volu-

    tions. Elles permettent de reprer des sortants

    plusieurs annes aprs la fin de leurs tudes.

    Ces donnes rtrospectives permettent de

    confirmer mais pas daffirmer (Poulet-

    Coulibando, 2000).

    Une anne de CP cruciale

    La grande difficult scolaire qui pse fortement sur les

    risques de dcrochage et entrave laccs une formation

    qualifiante se constitue ds le dpart de la scolarit

    primaire pour la majorit des lves en chec au terme de

    la scolarit obligatoire.

    Le niveau lentre au CP reste trs dpendant de lenvi-

    ronnement familial et les trois annes passes lcole

    maternelle ne suffisent pas rduire consquemment

    les ingalits sociales prexistantes. Les rsultats de diff-

    rentes tudes divergent pourtant sur le gain rsultant de

    la pr-scolarisation deux ou trois ans. Le rapport Moisan-

    Simon (1997) estime que la scolarisation ds deux ans

    constitue en ZEP un dterminant important de meilleure

    russite scolaire. Lenqute de Jantheau et Murat (1998)

    va dans le mme sens en prcisant quelle apporte un

    bnfice rel aux enfants des quartiers populaires, tandis

    que Grard Chauveau (2000) en prcise les objectifs pda-

    gogiques qui doivent dpasser la seule socialisation.

    Ltude de Jean-Paul Caille (2000) nuance ses effets sur la

    scolarisation ultrieure: elle ne rduit pas les ingalits

    sociales mais augmente les chances daccder au CE2

    sans redoubler. Nanmoins, toutes ces tudes saccordent

    sur le fait que cette scolarisation prcoce bnficie aux

    lves trangers ou issus de limmigration.

    Un rapport rcent du Haut Conseil de lducation (2007)

    synthtise les diffrents rsultats dun corpus de recher-

    ches et danalyses statistiques pour dcrire laggravation

    des difficults identifies ds le dbut de la scolarit (en

    particulier, les consquences dune matrise insuffisante

    de la lecture lors de la scolarit secondaire). Ainsi : Les

    lves qui sont en difficult ds leur entre au CP le sont

    toujours, dans leur quasi-totalit, par la suite. Lcole

    lmentaire ne permet pas, en gnral, de rduire les diffi-

    cults repres au dbut de la scolarit obligatoire. (...). En

    sixime, au moment o la multiplication des professeurs

    ne favorise pas laccompagnement individualis des

    lves, labsence de consolidation des acquis des lves

    les plus fragiles aggrave leurs lacunes initiales. Par la suite,

    durant la scolarit secondaire, les lacunes initiales ne sont

    pas davantage combles. Ces scolarits chaotiques condui-

    ront de nombreux checs au collge et des orienta-

    tions non dsires ou des sorties sans qualification ni

    diplme.

    Les difficults en lecture

    la demande de lObservatoire national de la lecture

    (Baktavatsal, Pons, 1999 ), la DEPP a men une tude sur

    1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8 diversit v i l l e c o l e i n t g r a t i o n 19

    DIV154 complet 23/09/08 18:00 Page 19

  • la difficult en lecture. Une preuve spcifique

    a t ajoute lvaluation nationale en

    sixime auprs de 2 600 lves dont les rsul-

    tats font apparatre une situation particuli-

    rement proccupante pour 4,3% dentre eux

    (avec une trs forte surreprsentation de

    garons), tandis que 7,8% sont handicaps par

    une extrme lenteur dans lidentification des

    mots.

    Les enqutes internationales PIRLS et PISA

    Lenqute internationale PIRLS ralise en 2006

    qui vise mesurer les performances en lecture

    des lves en fin de CM1 situe la France en

    de de la moyenne europenne avec des

    performances qui restent statistiquement

    stables par rapport lenqute 2001. Il est

    observ que les lves franais se trouvent

    surreprsents dans le groupe le plus faible

    (36% contre 25% au niveau europen) et sous-

    reprsents dans le groupe de plus haut

    niveau (17% contre 25%). Comme en 2001, les

    lves franais russissent mieux lorsquil

    sagit de rpondre des QCM et quand le mode

    de rponse requis nimplique pas le recours

    lcrit construit: plus la rponse doit tre labo-

    re et demande un dveloppement crit, plus

    les lves ont tendance sabstenir (Colmant,

    Dos Santos, 2008).

    Lautre enqute internationale, PISA (Pro-

    gramme international pour le suivi des acquis

    des lves), a t initie par lOCDE partir de

    2000. Chaque cycle denqute porte tous les

    trois ans sur les comptences des lves de 15

    16 ans dans trois grands domaines (compr-

    hension de lcrit, mathmatiques et scien-

    ces) et se focalise sur lun de ces domaines. En

    2000, lessentiel de lvaluation portait sur la

    comprhension de lcrit. Si la France se situe

    dans la moyenne des pays participants, lana-

    lyse des rsultats distingue diffrents niveaux

    qui font apparatre un groupe dlves en

    grande difficult: 4,2% dentre eux prouvent

    de srieuses difficults mettre en uvre les

    connaissances et les comptences les plus lmentaires

    et 11% sont uniquement capables deffectuer des tches

    de lecture parmi les moins complexes. Les rsultats les

    plus faibles correspondent aux lves qui sont encore au

    collge 15 ans (ils ont donc redoubl une classe, soit en

    primaire, soit au collge) ou en seconde professionnelle

    (Bourny, et al, 2001). Les rsultats de lenqute 2003 en

    comprhension de lcrit montrent une augmentation

    des lves les moins performants (6,3%) reprsents prin-

    cipalement par les lves encore en quatrime ou en troi-

    sime 15 ans (Bourny, et al, 2004).

    Les valuations JAPD

    Lvaluation en lecture dans le cadre de la Journe dap-

    pel de prparation la dfense (JAPD) concerne chaque

    anne prs de 800 000 jeunes hommes et femmes de

    17 ans ou plus, de nationalit franaise. Les preuves se

    droulent en deux temps afin de dpartager dabord les

    jeunes en difficult de lecture et les lecteurs efficaces

    puis dajuster les tests correspondant chaque niveau.

    En 2006, si 78,7% de ces jeunes sont considrs comme des

    lecteurs efficaces, le reste de cette population est valu

    pour 9,6% comme lecteurs mdiocres et 11,7% en diffi-

    cult de lecture, dont 4,8% en grave difficult. Parmi

    ces derniers, certains sont sans doute non lecteurs. Ces

    jeunes en difficult de lecture sont en enseignement

    professionnel court, en collge ou en SEGPA, ou ont quitt

    la formation initiale ces niveaux. Les garons sont plus

    souvent en grande difficult que les filles (14,8 % de

    garons contre 8,5 % de filles). Leur pourcentage varie

    sensiblement dune rgion lautre et concerne plus parti-

    culirement la Picardie, la Bourgogne et le Nord-Pas-de-

    Calais (La Haye et al., 2007).

    Les rsultats de lenqute 6 Information et Vie quoti-

    dienne mene la fin 2004 par lINSEE sont assez proches

    de ceux observs lors des JAPD. Sur le champ des person-

    nes scolarises en France, ges de 18 25 ans, cette

    enqute recense 5% de personnes en difficult grave ou

    assez forte et 7% en difficult partielle face lcrit mais

    aussi en comprhension orale et en calcul, les plus en

    difficult peuvent tre considrs comme en situation

    dillettrisme (Murat, 2005).

    Lorientation en fin de troisime

    Les diffrences de russite selon lorigine

    sociale ont un impact sensible au moment du

    palier dorientation qui marque la fin du

    collge. Si 78% des enfants douvriers du panel

    6 Un ensemble d'exercices fonds sur des supports de la viequotidienne a t propos plus de 10 000 personnes de 18 65

    ans, rsidant en France mtropolitaine.

    20 v i l l e c o l e i n t g r a t i o n diversit 1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8

    DIV154 complet 23/09/08 18:00 Page 20

  • 1995 (contre 71% du panel 1989) atteignent la

    troisime gnrale, seulement 42% dentre eux

    parviennent au second cycle gnral et tech-

    nologique des lyces (contre 91% des enfants

    de cadres et denseignants). Les volutions

    observes ne vont donc pas dans le sens dune

    diminution de lingalit des chances : un

    enfant de cadre a 14 fois plus de chances dat-

    teindre la seconde gnrale et technologique

    quun enfant douvrier dans le panel 1995,

    alors que ce rapport ntait que de 11 parmi

    les lves du panel 1989 (Coudrin, 2006).

    Le dispositif du panel 1995 comprenait gale-

    ment une enqute spcifique Jeunes 2002

    (Caille, 2005) sur le vcu de lorientation,

    conduite sept ans aprs lentre en sixime,

    auprs de 12 879 jeunes. lissue de cette

    classe, les lves de lenseignement secon-

    daire peuvent choisir entre la voie gnrale, la

    voie professionnelle ou lapprentissage (ou,

    sils ont atteint lge de fin de scolarit obli-

    gatoire, interrompre dfinitivement leurs

    tudes). Un second palier dorientation

    correspond la seconde gnrale et techno-

    logique o se dterminent la srie du bacca-

    laurat ou une rorientation en enseignement

    professionnel. 40% des jeunes ayant rpondu

    au moment de lenqute taient lycens gn-

    raux, 26% en enseignement professionnel, 7%

    taient en apprentissage et 8% avaient quitt

    le systme ducatif.

    Le niveau scolaire constitue la principale

    contrainte qui pse sur les vux exprims par

    llve et implique alors un renoncement aux

    souhaits exprims. Dans ce cas, lorientation

    est plus vcue comme une contrainte que vrai-

    ment dsire et concerne plus dun jeune sur

    deux ayant rejoint lenseignement profes-

    sionnel en fin de collge. Du fait des dispari-

    ts sociales de russite scolaire, la proportion

    dorientations contraintes par les rsultats

    scolaires varie fortement avec le milieu social

    dorigine: proche ou suprieure 50% parmi

    les enfants douvriers non qualifis, dem-

    ploys de service et dinactifs, elle natteint

    que 28% parmi les enfants denseignants et

    de cadres.

    Une autre contrainte concerne loffre scolaire, le jeune ne

    disposant pas toujours prs de chez lui, surtout en zone

    rurale, dun tablissement proposant la formation recher-

    che. Un tiers des enfants douvriers non qualifis disent

    avoir t confronts cette difficult (contre 14 % des

    enfants de cadres et denseignants). Le sentiment din-

    justice est galement plus fortement ressenti par les

    enfants demploys de service (27%) et ceux dinactifs

    (25 %). Linsatisfaction concerne plus spcialement les

    jeunes dont le niveau scolaire insuffisant na pu permet-

    tre une orientation en filire gnrale (45% des apprentis

    et 52% des jeunes scolariss dans lenseignement profes-

    sionnel), elle culmine parmi les sortants dont prs des

    deux tiers ont vu leur orientation contrainte par un faible

    niveau (Caille, 2005).

    En 2008, le Haut Conseil de lducation, qui tablit chaque

    anne un bilan thmatique des rsultats obtenus par le

    systme ducatif, a port son attention sur lorientation

    scolaire. Posant la question dune orientation scolaire qui

    entrine une mcanique dexclusion, il relve que lorien-

    tation en fin de troisime conforte une rpartition hirar-

    chise des lves dtermine ds lcole lmentaire.

    Diffrentes sources de donnes sur le grand chec scolaireen fin de collge et les caractristiques des lves concerns Un ensemble de travaux statistiques relevant des services

    de plusieurs ministres contribuent tablir une valua-

    tion quantitative, mais aussi mettre en relation carac-

    tristiques sociales et difficults dapprentissage, tandis

    que dautres travaux apportent un clairage sur linser-

    tion professionnelle et sociale des jeunes en abandon

    prcoce du systme scolaire.

    La sortie du systme scolaire 16 ans qui se traduit par

    labsence dune formation qualifiante est troitement corr-

    le, dune part, un milieu social marqu par la pauvret

    et,dautre part, des difficults dapprentissage reprables

    ds le dbut de la scolarit. Lvaluation des acquis des

    lves tout au long du parcours scolaire fait apparatre des

    carts importants des performances, lesquels sont croiss

    avec les PCS des parents par le ministre de lducation

    nationale. Au cours de la dernire dcennie, de nombreu-

    ses tudes ont mis en vidence un noyau dur du grand

    chec scolaire avec une surreprsentation des milieux

    sociaux les plus prcariss.

    Les 16-18 ans partir de trois enqutes Gnration

    du Creq

    Un corpus de donnes est fourni par le dispositif den-

    1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8 diversit v i l l e c o l e i n t g r a t i o n 21

    DIV154 complet 23/09/08 18:00 Page 21

  • qutes longitudinales sur les premires annes

    de vie active mis en place depuis le dbut des

    annes 1990 par le Creq. Les enqutes

    Gnration recueillent, sur la base de panels,

    les donnes lies linsertion des jeunes tous

    les niveaux de formation et simultanment

    partir de leur sortie du systme ducatif.

    Chaque enqute Gnration (1992, 1998,

    2001) a donn lieu une exploitation spci-

    fique portant sur linsertion des jeunes sans

    qualification et permettent de dcrire des situa-

    tions trs diverses telles que les priodes de

    chmage, lutilisation par les jeunes des

    missions locales ou des dispositifs de formation

    hors emploi, aidant ainsi mieux cerner les

    difficults dinsertion professionnelle des

    jeunes sortant sans qualification du systme

    scolaire.

    Dans le cadre de la prsente synthse, une

    extraction indite de donnes partir des trois

    enqutes Gnration (1992,1998,2001), rali-

    se par Danielle Trancart 7, a t spcialement

    conduite dans le but dapporter un cadrage

    prcis des caractristiques des 16-18 ans.

    Lextraction des 16-18 ans permet tout dabord

    une valuation quantitative des jeunes sortants

    appartenant cette tranche dge ainsi que son

    volution. Ils reprsentent 21% de la

    Gnration 92, 15% de la Gnration 98 et

    17% de la Gnration 2001. Tandis que len-

    semble des non qualifis de chacune des trois

    Gnrations varie de 15% en 1991 (dont 80%

    de moins de 18 ans, soit 134 000 jeunes) 8%

    en 1998 (dont 75% ont moins de 18 ans, soit

    111000 jeunes),cette proportion augmente lg-

    rement en 2001 o ils reprsentent 10% de la

    Gnration, soit 129 000 jeunes.

    Milieu dfavoris et chmage des parents

    Sur lensemble des sortants de 16-18 ans, entre

    1992 et 2001, la proportion de jeunes ayant

    leurs deux parents au chmage double en 1998

    et reste suprieure de 4 points en 2001 relati-

    vement 1992. Par ailleurs, en 1992, ils sont

    presque deux fois plus nombreux que lensemble de leur

    gnration avoir leurs deux parents au chmage lors-

    quils sont de niveaux V sans diplme, V bis et VI, lop-

    pos des sortants titulaires dun CAP. Ce pourcentage

    augmente de 1992 2001, passant de 15% 19%.

    72% de ces jeunes appartiennent un milieu dfavoris

    (parents ouvriers ou employs), ce qui reprsente un cart

    de 16 points par rapport lensemble des sortants tous

    niveaux de ces trois Gnration.

    Htrognit des niveaux de sortie et des filires

    Lge des sortants 16, 17 et 18 ans implique logiquement

    quils relvent du niveau V (diplms ou non) et des

    niveaux V bis et VI.Tandis que la proportion des jeunes de

    niveau V reste stable avec 6% de diplms et 5% de non

    diplms, celle des niveaux V bis et VI baisse de 4 points

    entre 1992 et 1998 et se stabilise 6% en 2001.

    Pour la Gnration 2001:

    Au niveau V, les diplms sont ceux qui ont le CAP (37%

    des sortants) et les non-diplms sont majoritairement

    les lves qui ont abandonn au cours de la deuxime

    anne de BEP ou qui ont chou lexamen (44 % des

    sortants).

    Au niveau V bis et VI, 11% des lves sont sortis entre la

    cinquime et la troisime ou avant lobtention du CAP et

    4% sont des lves de SEGPA.

    Pour 5% des lves, les sorties se rpartissent entre la

    filire gnrale et technologique et la filire profession-

    nelle (en seconde, premire et terminale).

    Un retard scolaire important et persistant en dpit des

    rformes du systme ducatif

    La proportion de jeunes de 16-18 ans ayant redoubl deux

    fois avant la sixime tait trs importante en 1992 aux

    niveaux V bis et VI (20%) et elle le reste en 1998 et 2001

    bien quelle soit en diminution (14% puis 10%). Leffet de

    la politique de non-redoublement serait donc limit pour

    les jeunes de ce niveau qui restent deux fois plus nomb-

    reux redoubler que lensemble de leurs Gnrations.

    Ce sont ces jeunes qui sortent sans doute avant la troi-

    sime et pour certains ds la cinquime sils ont redou-

    bl deux fois au cours de leur scolarit.

    Les diffrences entre garons et filles

    Sur les trois Gnration, les garons sont

    plus nombreux sortir entre 16 et 18 ans (66%

    contre 34% des filles).Sils sortent plus souvent

    diplms dun CAP, cest parce que la propor-

    7 D. Trancart, C. Mathey-Pierre, Les sortants du systme ducatifentre 16 et 18 ans d'aprs les enqutes Gnration du Cereq,

    note en ligne sur le site de la revue.

    22 v i l l e c o l e i n t g r a t i o n diversit 1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8

    DIV154 complet 23/09/08 18:00 Page 22

  • tion des filles est nettement suprieure tous

    les autres niveaux de sortie, en particulier dans

    les niveaux prcdant le baccalaurat gnral

    ou professionnel ; mais aussi, bien que les

    carts soient moindres, entre les classes de

    cinquime et de troisime et pour la filire

    SEGPA.

    Ainsi, parmi les sortants de chaque

    Gnration, les filles sont moins nombreu-

    ses, ce qui est particulirement net, ds 1992,

    au niveau V des non-diplms. En 2001, leur

    proportion correspond un peu plus dun tiers

    des sortants pour les deux autres niveaux de

    sortie (37%).

    La proportion de jeunes parents

    La poursuite du suivi des enqutes

    Gnration permet dobserver que les jeunes

    de niveau V diplms sont moins rapidement

    parents que les non qualifis et les non-dipl-

    ms. On sait par ailleurs que ceci concerne

    presque toujours les filles (2 3% de garons).

    Des caractristiques diffrentes pour les

    diplms de niveau V

    Les jeunes de niveau V diplms se distin-

    guent des deux autres niveaux et en particu-

    lier du niveau VI : ils sont moins souvent en

    retard de deux ans, moins souvent parents,

    moins souvent dorigine trangre et leurs

    deux parents sont moins souvent au chmage,

    Autour de 70 % dentre eux sont de milieu

    dfavoris, mais un cart de 5 points les spare

    des autres jeunes de niveaux V bis et VI.

    Dautres exploitations de lenqute

    Gnration 92 avaient dj apport un clai-

    rage sur les jeunes sortis de lcole sans

    diplme (de 16 22 ans) qui, en 1992, taient

    plus de 146 000 avoir quitt le systme

    scolaire sans tre titulaire dun diplme (soit

    27,5% de cette gnration). Leur ge correspon-

    dant gnralement aux niveaux de sortie, les

    plus jeunes (16 ans) se rpartissaient entre le:

    Niveau VI: 4,2% (premier cycle du second degr: classe

    de 6me, 5e ou 4e. Ou formation prprofessionelle en un

    an, CEP, CPPN, CPA),

    Niveau V bis: 8,2% (3me gnrale, 4e ou 3e technolo-

    gique, classe de second cycle court avant lanne termi-

    nale),

    Niveau V : 9,7 % (anne terminale des cycles courts

    professionnels (CAP, BEP) et second cycle long avant la

    classe terminale (seconde et premire gnrale et tech-

    nologique).

    Paralllement aux donnes sur linsertion professionnelle,

    cette enqute fournissait galement des lments sur les

    caractristiques des jeunes interrogs en 1997, soit cinq

    ans aprs leur sortie du systme scolaire. Leur profil socio-

    dmographique dsignait un groupe plus masculin, plus

    populaire et plus souvent issu de limmigration ou dune

    famille nombreuse qui comportait galement des diff-

    rences entre filles et garons et selon la dernire classe

    frquente.

    Les diffrences entre garons et filles se situaient surtout en

    termes de dcohabitation du domicile parental,plus impor-

    tante chez les filles et souvent lie une installation en

    couple. Parmi elles, les jeunes mres les plus en retrait du

    march de lemploi taient les plus exposes aux risques

    dexclusion quand elles cherchaient retourner sur le

    march du travail aprs une maternit, mais sans plus de

    qualification scolaire que cinq ans auparavant (Bordigoni,

    2001).

    De la mme faon, une exploitation de lenqute

    Gnration 98 ralise au printemps 2001 comportait

    galement un volet sur les 59000 jeunes sans qualifi-

    cation de niveau VI ou V bis, sortis du systme ducatif

    en 1998 (51% sortaient dune premire anne densei-

    gnement professionnel, 38 % de collge, 11 % dune

    SEGPA). Au regard de leurs caractristiques scolaires,

    familiales et sociales, ces jeunes sans qualification cons-

    tituaient un groupe part (Gasquet, 2003). Plus que

    les autres jeunes de faible niveau de qualification, ils

    cumulaient les handicaps en tant le plus souvent en

    retard lentre en sixime (14% avaient au moins deux

    ans de retard en sixime), en tant aussi plus

    frquemment issus dune famille touche

    par le chmage ou avec un seul des deux

    parents ayant un emploi et dont le pre tait

    plus souvent n hors de la Communaut

    europenne

    8 Depuis 1972, le service charg des statistiques au ministre del'ducation nationale a labor des chantillons reprsentatifs

    d'lves des tablissements publics et privs. Des enqutes

    complmentaires par questionnaire auprs des familles

    permettent de prciser l'environnement familial et social.

    1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8 diversit v i l l e c o l e i n t g r a t i o n 23

    DIV154 complet 23/09/08 18:00 Page 23

  • Le Panel 89 et les jeunes sortants non

    qualifis

    Les panels dlves rendent compte du chemi-

    nement de cohortes relles dlve 8. Une

    extraction du panel 1989 a concern 2064

    lves (soit 9% du panel) en abandon de scola-

    rit au cours des sept annes suivant lentre

    en sixime (Segpa comprises) dont la scola-

    rit en primaire et maternelle a galement t

    prise en compte. Sur cette base, ltude mene

    par Jean-Paul Caille (2000) a permis danaly-

    ser le risque de sortie sans qualification dans

    la double perspective des diffrences de cursus

    scolaire et des disparits de situation familiale

    ou sociale. Le panel 1995 a galement donn

    lieu une tude sur les abandons de scolarit

    partir du devenir des lves neuf ans aprs

    leur entre en sixime. Les rsultats prsents

    ici sont issus de ltude de Jean-Paul Caille

    (2000).

    Les caractristiques de ces jeunes sortants

    indiquent un milieu familial en profond dca-

    lage avec lcole et un phnomne trs

    concentr socialement atteignant une

    ampleur maximale dans les familles dinac-

    tifs. Au total, plus des deux tiers (68%) des

    lves sortis sans qualification sont des

    enfants douvriers, de personnels de service

    ou dinactifs. ces caractristiques sociales

    se cumulent dautres facteurs pesant forte-

    ment sur les risques de sortie prcoce du

    systme scolaire, comme le fait dappartenir

    une famille nombreuse, ce risque slevant au

    fur et mesure que le rang dans la fratrie sac-

    crot. Ainsi le cadet dune fratrie de cinq

    enfants ou plus a quatre fois plus de risques

    dinterrompre sa scolarit avant lobtention

    dune formation qualifiante que dans une

    famille de deux enfants.

    Les diffrences de configuration familiale

    (monoparentalit, famille recompose) ont galement un

    impact ngatif.Ainsi, prs dun quart des sortants vivent

    avec un seul de leurs parents (17%), le plus souvent la

    mre. Les familles recomposes lissue dun divorce sont

    aussi proportionnellement plus nombreuses (13%). Une

    autre caractristique qui pse fortement concerne le

    niveau de diplme le plus lev dtenu par les parents

    avec un phnomne de concentration trs marqu: prs

    dun sortant non qualifi sur trois appartient une famille

    dont les parents ne dtiennent aucun diplme et 84%

    appartiennent des foyers o le pre et la mre ne dtien-

    nent pas de diplme plus lev que le CAP ou le brevet

    des collges. Le risque dabandon dcrot au fur et

    mesure que le niveau de diplme de la mre slve. La

    structure parentale est, aprs le diplme maternel, la

    caractristique familiale qui pse le plus sur le risque de

    sortie sans qualification.

    Les lves de nationalit trangre prsentent un risque

    dinterruption de scolarit plus fort que leurs camarades

    franais. Ils sont presque deux fois plus nombreux que

    ces derniers quitter le systme ducatif sans qualifica-

    tion (15% contre 9%). Mais degr de difficult compara-

    ble en franais et en mathmatiques, lingalit de risque

    sestompe totalement : arrivs au collge avec un gros

    dficit dacquisition en franais et en mathmatiques, les

    franais et les trangers 9 ont une probabilit de sortie

    sans qualification comparable.

    Le petit nombre dlves de lchantillon qui vit sans ses

    parents (il sagit le plus souvent de jeunes relevant de la

    DDASS) sont dans une situation encore plus fragile: ils quit-

    tent le systme scolaire sans qualification trois fois plus

    souvent que les collgiens qui vivent avec leurs pre et mre.

    Les sortants sans qualification constituent une popula-

    tion majoritairement masculine. Prs de 60% dentre eux

    sont des garons. Mais cette ingalit de risque de sortie

    sans qualification sexplique surtout par des diffrences

    de retard scolaire et de niveau dacquisition lcole

    lmentaire. Ds que lon observe des lves compara-

    bles sur ces deux aspects et qui partagent la mme situa-

    tion familiale et sociale, les diffrences deviennent tnues.

    Ce risque est troitement li au droulement

    de la scolarit lmentaire o les filles rus-

    sissent sensiblement mieux que les garons.

    Parcours scolaires

    Le risque de sortie sans qualification apparat

    trs dpendant de la manire dont sest drou-

    le la scolarit en primaire. Les difficults dap-

    9 C'est parmi les lves qui appartiennent aux nationalits lesplus exposes des difficults d'insertion professionnelle que le

    risque de sortie sans qualification est suprieur celui des lves

    franais. En 1995, le taux de chmage tait de 7,9 % parmi les

    immigrs d'origine portugaise et atteignait 29,3 % parmi les

    immigrs d'origine algrienne et 33,2% parmi ceux d'origine

    marocaine (les immigrs en France (Contours et caractres,

    INSEE,1997).

    24 v i l l e c o l e i n t g r a t i o n diversit 1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8

    DIV154 complet 23/09/08 18:00 Page 24

  • prentissage des lves non qualifis appa-

    raissent presque toujours comme la poursuite

    de difficults survenues dans les premiers

    cycles : 39% ont redoubl le CP et 71% dentre

    eux commencent le collge aprs un ou

    plusieurs redoublements en primaire avec des

    niveaux trs faibles en mathmatiques et en

    franais (prs des deux tiers de ces lves se

    situaient parmi les 25% dlves les plus faibles

    dans ces deux disciplines lors de lvaluation

    nationale de 6e).

    En grande difficult lentre au collge, les

    redoublements sont massifs et concentrs sur

    la 6e et la 5e. En moyenne, les abandons en

    cours de scolarit se produisent au terme de

    cinq annes dans lenseignement secondaire.

    Les sorties prcoces (aprs deux ou trois

    annes de collge) sont plus rares (11%) et sont

    plus frquentes parmi les lves les plus gs

    au commencement du collge. Seulement 12%

    arrtent leurs tudes en fin de troisime gn-

    rale et tout juste un peu plus dun sortant sans

    qualification sur quatre russit atteindre

    cette classe. Mais si apparemment la dure de

    scolarit correspond au premier cycle de len-

    seignement secondaire, la plupart neffectue

    pas entirement leur scolarit en filire gn-

    rale 10 du collge.

    Ces difficults ds le dbut du collge les diff-

    rencient fortement des lves sortis aux niveaux V et IV

    et des lves en poursuite dtudes sept ans aprs leur

    entre au collge alors que moins dun tiers des lves

    non qualifis est parvenu en 3me gnrale, ce niveau a

    t atteint par plus de la moiti des lves sortis au niveau

    V ou VI et plus de 90% de ceux en poursuite dtudes aprs

    la 3e.

    Lorientation dans une classe spcialise o sont pris en

    charge les lves en difficult accrot les risques de sortie

    sans qualification alors quune orientation prcoce dans

    lenseignement professionnel semble avoir un effet

    protecteur pour les lves qui nont pas atteint la 3me

    gnrale. Le risque dabandon prmatur ne concerne

    plus quun lve sur quatre en cas dorientation en 4me

    technologique ou de prparation dun CAP en apprentis-

    sage ou en lyce professionnel.

    Les lves de SEGPA

    Le passage par la SEGPA saccompagne dune aggravation

    sensible du risque darrt dtude avant lobtention dune

    formation qualifiante. Une fois sur deux, ces lves sortis

    sans qualification quittent le systme ducatif lissue

    de leur dernire anne de scolarit en SEGPA. Ils arrtent

    leur scolarit soit par dmotivation, soit parce quils nont

    pu bnficier de lopportunit daccs lapprentissage

    ou en lyce professionnel qui permet lacquisition dun

    diplme. Ce taux lev dabandon la sortie de la SEGPA

    semble surtout sexpliquer par un fort dficit en offre de

    formations en apprentissage ou en lyce professionnel

    doubl dun effet de marquage dfavorable.

    Quand ils peuvent poursuivre leur formation

    en lyce professionnel ou en apprentissage,

    les lves de SEGPA ont un degr de russite

    plus faible que les autres lves, mais ces

    checs ne sont pas massifs.

    Les enqutes Emploi de lINSEE et les sortants

    des annes quatre-vingt-dix

    Sur la base dune source diffrente de donnes

    (neuf enqutes Emploi INSEE, 1991- 1999),

    ltude mene par Pascale Poulet-Coulibando

    (2000) apporte des prcisions complmentai-

    res concernant les caractristiques sociales

    des jeunes sortants non qualifis et analyse

    leur porte. Cette tude confirme la dimen-

    sion discriminante de labsence de diplme

    des parents (mme dun certificat dtudes

    primaires), dune fratrie nombreuse et lim-

    10 Comme ces lves du panel 89 n'ont pu bnficier de lasuppression du palier d'orientation de fin de 5e (elle n'a t effective

    qu' la rentre scolaire 1992), pour une majorit d'entre eux, la

    scolarit en filire gnrale s'est arrte en fin de 5me. Ils ont alors

    t orients vers la filire technologique ou, pour les plus en

    difficult, dans des classes qui existaient depuis le dbut des

    annes 80 (CPA, CPPN), ou dans des structures pdagogiques plus

    rcentes : 4e amnage, 3e d'insertion. Les abandons d'tude avant

    l'obtention d'une formation qualifiante concernent prs de la

    moiti des lves orients en CPA ou CPPN et prs d'un tiers des

    lves de 4me amnage ou de 3e d'insertion.

    11 Les informations sur les ressources sont trs limites dans lesenqutes mobilises. La plupart des allocations sociales de

    solidarit ne sont pas voques par le questionnaire. Seules le sont

    les indemnits verses par les Assedic, dans un contexte o les

    ambiguts entre chmage et inactivit masculine compliquent la

    dlimitation. Pour les mmes raisons, la part des bnficiaires du

    RMI est sous-value. Sur un chantillon de 254 jeunes dont un

    parent dclare en tre bnficiaire, plus du tiers sont des non-

    qualifis. Ces RMIstes reprsentent prs de la moiti des chefs de

    mnage qui dclarent tre chmeurs et n'avoir jamais travaill.

    1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8 diversit v i l l e c o l e i n t g r a t i o n 25

    DIV154 complet 23/09/08 18:00 Page 25

  • pact du non-emploi ou de la profession des

    parents. Le contexte monoparental, les bas

    salaires 11 et le logement social sont significa-

    tivement plus frquents parmi les non-quali-

    fis que parmi les sortants de niveau CAP. Le

    chmage des proches et le working poor

    distinguent les sortants sans qualification des

    sortants de niveau CAP (qui ont peu prs le

    mme milieu dorigine).

    Lauteure observe que les consquences de cet

    ensemble de facteurs persistent malgr une

    rduction importante de limpact du milieu

    social sur le niveau de sortie. Llvation des

    niveaux de diplme a t plus forte pour ces

    jeunes que pour lensemble des milieux sociaux,

    mais une fraction dentre eux reste dans une

    position critique.

    La situation des parents par rapport lem-

    ploi (chmage, inactivit) apparat dtermi-

    nante sur le risque de sortie sans qualifica-

    tion. Parmi les pres des sortants, les

    hommes inactifs sont presque autant repr-

    sents que les chmeurs. Dans un contexte

    de chmage massif, une part importante des

    inactifs sont danciens chmeurs. Plus dun

    pre de non-qualifi sur cinq (23%) est

    chmeur ou inactif (contre 13% des pres des

    sortants de niveau V et moins de 8% aux

    niveaux suprieurs). La part des mres inac-

    tives ou chmeuses distingue autant les non-

    qualifis que le pourcentage des pres sans

    emploi (58% des mres de non-qualifis

    contre 43% des mres de niveau CAP). Ce qui

    distingue les mres des non-qualifis est

    moins leur groupe socioprofessionnel que le

    fait quelles ne sidentifient aucune profes-

    sion. Plus dune mre de non qualifi sur cinq

    est donc trs loigne du monde du travail

    (contre un sur huit pour les sortants de

    niveau CAP). Elles nont jamais travaill lex-

    trieur de leur domicile et sont inactives

    au moment de lenqute. Les mres qui

    dclarent une profession sont en gnral

    employes ou ouvrires.

    Lemploi dun des parents (ou le fait quil bnficie dune

    retraite), quil sagisse du pre ou de la mre, rduit consi-

    drablement les risques dabandon prcoce. 25% des

    sortants non-qualifis vit dans un foyer sans emploi ni

    retraite. Les familles sans emploi sont aussi plus souvent

    monoparentales que biparentales. Les risques de sortie

    sont massifs dans les groupes professionnels les plus

    exposs au chmage: les emplois les moins qualifis de

    lindustrie, de lartisanat et des services directs aux parti-

    culiers (o linactivit et le chmage touchent principa-

    lement des femmes seules 12).

    Plus dun non-qualifi sur deux partage son foyer avec au

    moins deux autres enfants. Ils sont le plus souvent issus

    de familles trs nombreuses (16% dentre eux appartien-

    nent des familles comptant au moins 5 enfants

    prsents). Rsider en quartier dhabitat social augmente

    le risque dabandon prcoce, quelles que soient les carac-

    tristiques de la famille (plus de un non-qualifi sur trois

    vit en logement social).

    Lorigine trangre nest pas en soi un facteur aggravant

    Relativement leur proportion sur lensemble des trois

    Gnration (10%), les jeunes dorigine trangre sont

    plus nombreux sortir entre 16 et 18 ans (15%) au niveau

    V non diplm et surtout aux niveaux V bis et VI o un

    jeune sur cinq est dorigine trangre en 1992, cette

    proportion augmentant en 1998 et 2001 (23%). Plus dun

    jeune sur quatre n hors de France sort sans qualifica-

    tion et prsente donc de srieuses difficults dintgra-

    tion sociale et professionnelle. Limmigration nest pas

    en soi un facteur augmentant les risques dchec. Ce

    sont les conditions sociales associes (chmage plus

    frquent des parents, milieu professionnel, faible niveau

    dinstruction de la mre, fratrie importante, logement

    social) qui sont responsables des frquences leves de

    sortie sans qualification, non le fait que les jeunes aient

    immigr. Les parents des migrants sont avant tout des

    employs et des ouvriers peu qualifis, prouvant de sv-

    res difficults demploi. Les mres immigrantes repr-

    sentent plus de la moiti des femmes qui nont jamais

    travaill. Elles possdent trs rarement un diplme.

    Cependant la part des non-qualifis est plutt infrieure

    ce que permet de prsager leur environnement social.

    Exclusion du milieu scolaire des jeunes accidents de la vieIl existe plusieurs catgories de jeunes qui

    suivent un circuit parallle au cursus scolaire

    12 Plus d'un non-qualifi sur quatre appartient une famillemonoparentale, une fois pris en compte le rle aggravant du

    chmage.

    26 v i l l e c o l e i n t g r a t i o n diversit 1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8

    DIV154 complet 23/09/08 18:00 Page 26

  • classique. Peu denqutes disponibles permet-

    tent de vraiment cerner leurs trajectoires

    scolaires ni dvaluer leur pourcentage (et si

    celui-ci est pris en compte) parmi les lves

    dcrocheurs et les sorties sans qualification.

    Certains ont t orients trs tt dans lensei-

    gnement spcialis, dautres dans lenseigne-

    ment intgr. Pour les jeunes pris en charge

    par lAide sociale lenfance (ASE) ou la

    Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), les

    donnes sont encore plus rares et parcellai-

    res, mais elles indiquent toutes des parcours

    scolaires en majorit chaotiques et des milieux

    sociaux trs dfavoriss.

    la diffrence des lves considrs comme

    atteints dun handicap socioculturel, o il

    est observ un vritable processus de margi-

    nalisation du dedans vers le dehors de lcole

    ordinaire pour les enfants handicaps, la

    question de la dscolarisation se pose en

    termes de non-scolarisation, de possibilits

    une scolarit (ordinaire), du dehors vers le

    dedans (Sicot, 2005).

    Le discours sur lintgration du handicap est

    devenu omniprsent et a constitu un des

    thmes de la dernire campagne prsiden-

    tielle. Depuis 1975, plusieurs lois et circulaires

    se sont succd en faveur des personnes

    handicapes, notamment sur le droit la

    scolarisation en milieu ordinaire. La loi du 11

    fvrier 2005 institue lgalit des droits et des

    chances, la participation et la citoyennet des

    personnes handicapes: le droit dinscrire

    lcole tout enfant qui prsente un handicap

    constitue lune des volutions fondamentales

    de cette loi ; la scolarisation en milieu ordi-

    naire est pose comme principe; sont concer-

    ns les jeunes de 6 16 ans, mais la forma-

    tion peut commencer avant lge obligatoire

    si la famille en fait la demande.

    Lvaluation du nombre denfants et dado-

    lescents en situation de handicap non scola-

    riss est dlicate car les informations sont

    partielles. Pour les enfants handicaps vivant au domi-

    cile de leurs parents, il nexiste pas de source adminis-

    trative permettant den apprcier le nombre. Seule len-

    qute Handicaps-Incapacit-Dpendance (HID) de lINSEE

    de 1998 ou lenqute de la DREES sur les trajectoires des

    enfants passs en CDES en 2004-2005 permettent desti-

    mer cette population. En 1998, de lordre de 5% des enfants

    handicaps vivant domicile, gs de 6 16 ans, taient

    non scolariss. On retrouve le mme ordre de grandeur

    partir de lenqute DRESS (Vanovermeir, 2006.c) sur les

    enfants passs en CDES en 2004-2005 (environ 4%). Il y

    aurait donc environ 5 000 enfants handicaps de 6 16 ans

    vivant domicile et non scolariss.

    Au total, en regroupant domicile et tablissement, 20 000

    enfants handicaps soumis lobligation scolaire seraient

    non scolariss (soit moins de 10% dentre eux), les trois

    quarts tant cependant placs en tablissements et bn-

    ficiant du soutien dun ducateur, les autres vivant avec

    leurs parents et tant pour lessentiel en attente dune

    solution (Espagnol, Prouchandy, 2007)

    Les jeunes handicaps scolariss

    Sur 235 000 enfants et adolescents en situation de handi-

    cap en 2005-2006, les structures de lducation nationale

    en ont accueilli 151 500. Les deux tiers des enfants et

    adolescents handicaps sont des garons, mais cette

    surreprsentation est conforme celle de la rpartition

    du handicap selon le sexe. Entre 1999 et 2005, le nombre

    des enfants ou adolescents handicaps en scolarisation

    individuelle (dans une classe ordinaire ou dadaptation)

    a doubl et slve 104 000 lves en 2005-2006. Pour

    rpondre leurs besoins particuliers, un projet person-

    nalis de scolarisation organise la scolarit de llve,

    assortie des mesures daccompagnement dcides par la

    Commission des droits et de lautonomie (CDA).

    Lvaluation des besoins, laquelle tout jeune handicap

    a droit en application de la loi, est ralise par une quipe

    pluridisciplinaire dvaluation place auprs de la

    Commission 13 des droits et de lautonomie des personnes

    handicapes (CDAPH), laquelle doit apprcier la nature et

    lampleur du handicap afin de dcider de lorientation la

    plus pertinente. Deux publics trs diffrencis

    y sont reus. Un tiers sont des enfants ayant

    essentiellement des troubles scolaires (en

    majorit de milieux dfavoriss) et deux tiers

    reprsentent tous les handicaps (moteurs,

    13 Mise en place en 2006 au sein de la Maison dpartementaledes personnes handicapes (MDPH), cette commission reprend les

    missions auparavant dvolues la Cotorep et la Commission

    dpartementale de l'ducation spciale (CDES).

    1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8 diversit v i l l e c o l e i n t g r a t i o n 27

    DIV154 complet 23/09/08 18:00 Page 27

  • sensoriels, mentaux profonds) pour lesquels

    il napparat pas de diffrence de milieu social

    avec la population gnrale.

    Lenseignement adapt et spcialis dans le

    cadre de lducation nationale concerne le

    premier et le second degr. En 2006, 111 100

    lves en situation de handicap sont scolari-

    ss dans le premier degr dont 9% dans len-

    seignement priv. Leffectif des lves handi-

    caps scolariss dans le premier degr a

    progress de 6300 lves (+6%). La majorit

    des lves accueillis souffrent de troubles des

    fonctions cognitives ou de troubles psychiques

    (70 000 lves). Leur scolarisation peut tre

    individuelle dans des classes ordinaires ou

    dans des classes adaptes des lves prsen-

    tant des difficults scolaires ou sociales. Leur

    proportion est en hausse (69% en 2007 contre

    52% en 1999). Elle peut tre collective quand

    llve est scolaris dans les classes dint-

    gration scolaire (CLIS) qui accueillent des

    lves prsentant un handicap mental, audi-

    tif, visuel ou moteur.

    Diffrents critres dterminent une orienta-

    tion en classe dintgration scolaire (CLIS) o

    39700 lves 14 ont t scolariss en 2006-2007.

    Il sagit dlves en grande difficult scolaire

    dans les premires annes dcole ou dont le

    comportement gne le bon fonctionnement

    de la classe (ou cumulent les deux profils).

    Les CLIS, au nombre de 3900 en 2005, permet-

    tent daccueillir un petit groupe dlves (12

    au maximum) par un enseignant spcialis et

    bnficient galement de priodes dintgra-

    tion dans une classe ordinaire de lcole. 70%

    des lves de CLIS ont entre 9 et 11 ans. lge

    de six ans, les deux tiers des lves de CLIS

    prsentent un retard de niveau scolaire dau

    moins un an et 30% ont au moins deux ans de

    retard. 10 ans, la quasi-totalit des enfants

    a au moins deux ans de retard. 88% des lves

    de CLIS prsentent un handicap mental ou

    psychique (Espagnol, Prouchandy, 2007).

    Cette orientation fait suite une valuation du rseau

    daide (RASED) et une dcision de la Commission de

    circonscription prscolaire et lmentaire (CCPE). Celle-

    ci est rgulirement conduite orienter dans cette filire,

    les enfants problmes qui sont majoritairement issus

    de milieux dfavoriss et qui sadaptent difficilement au

    fonctionnement de lcole. Leur viction des classes ordi-

    naires ne permet pas pour autant de traiter ces probl-

    mes qui relvent souvent de leur environnement socio-

    conomique.

    Trs peu dinformations sont disponibles concernant le

    fonctionnement des CLIS, hormis deux Notes de la DEPP

    (Lacerda, 2000 et 2003). Prs des deux tiers des lves

    taient dans le cycle des apprentissages fondamentaux

    (Grande section de maternelle, CP et CE1) avec une surre-

    prsentation des garons (60%), et la trs forte proportion

    dlves entre 9 et 11 ans (70%) indique un retard scolaire

    important. Dautre part, les lves de nationalit tran-

    gre sont deux fois plus nombreux quen classe ordinaire

    et la proportion dlves issus de limmigration nest pas

    indique, ni les catgories sociales.

    Aprs leur scolarisation en CLIS, les lves sont en prin-

    cipe accueillis, selon leur ge et les places disponibles,

    dans des structures denseignement spcifique comme

    les Units pdagogiques dintgration (UPI), les SEGPA et

    les EREA. Mais la continuit de la prise en charge nest

    pas toujours assure faute de places en UPI ou en insti-

    tut mdico-ducatif, et seule une minorit dentre eux

    (suite au dpart de la CLIS 11, 12 ou 13 ans) intgre les

    UPI, SEGPA ou IME. Les orientations concernant les autres

    ne sont pas renseignes.

    Les effectifs en UPI reprsentent 9 400 lves en 2006 (soit

    21% des lves handicaps). Les UPI ont t cres en 1995

    dans certains collges en complment dautres formes

    daccueil, afin de permettre des regroupements pdago-

    giques dadolescents de 11 16 ans prsentant un handi-

    cap mental (la part des garons est denviron 60%). En

    2007, il existe 1040 UPI (contre 900 en 2006), ce qui reste

    insuffisant pour couvrir le second degr. la rentre 2006,

    seuls 9400. lves y ont t accueillis, dont 92% dans les

    collges. Leur scolarisation en milieu ordinaire diminue

    avec lge: la proportion denfants scolariss en tablis-

    sement scolaire est de 80% 6-7 ans et de 30% 19-20

    ans (Espagnol, Prouchandy, 2007).

    Le secteur spcialis hors ducation nationale

    Diagnostiqus comme prsentant un trou-

    ble de la conduite et du comportement (TCC)

    14 Les lves de CLIS reprsentent 1 % des lves del'enseignement lmentaire public et priv (91 % d'entre eux

    frquentant une cole publique).

    28 v i l l e c o l e i n t g r a t i o n diversit 1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8

    DIV154 complet 23/09/08 18:00 Page 28

  • malgr des capacits intellectuelles norma-

    les, des lves peuvent galement tre orient

    en secteur spcialis hors ducation natio-

    nale, le plus souvent en Institut 15 thrapeu-

    tique, ducatif et pdagogique (ITEP),

    dnomm Institut de rducation (IR) avant

    2005. Ils peuvent tre galement accueilli par

    des structures qui ne leur sont pas destines

    : tablissements sociaux (foyers de lenfance,

    maison denfants caractre social) ou en

    tablissement dducation spciale pour

    enfants dficients mentaux. La prise en charge

    suppose dtre reconnu comme handicap

    par la CDAPH.

    Les ITEP ne constituent pas le seul mode de

    prise en charge envisageable pour les enfants

    et les adolescents prsentant ces troubles :

    ceux-ci peuvent galement tres suivis par des

    Services dEducation Spcialise et des soins

    domicile (SESSAD) spcialiss ou non dans

    laccueil de jeunes prsentant ces difficults.

    Ceux-ci offrent une prise en charge ambula-

    toire, en suivant le jeune sur son lieu de vie

    habituel (domicile, cole) et non au sein dun

    tablissement. Les SESSAD se spcialisent

    dans laccueil des enfants prsentant une dfi-

    cience particulire : on compte 166 SESSAD-

    ITEP qui prennent en charge les enfants souf-

    frant de trouble du comportement. Mais leur

    capacit daccueil est limite 2800 places

    (Vanovermeir, 2006).

    En forte croissance depuis les annes 1980 (la totalit de

    la demande manant de lducation nationale), il existe

    actuellement 342 ITEP 16, rpartis de manire disparate

    sur le territoire et accueillant plus de 15 600 jeunes de 3

    20 ans (dont 81% de garons). Ces tablissements sont

    grs 85% par une association, une congrgation ou une

    fondation.

    Un rapport de lIGAS (Gagneux, Soutoux, 1999) relve le

    caractre extrmement complexe et divers de la notion

    de trouble de comportement qui vhicule, derrire des

    strotypes dsuets (de type enfants caractriels), une

    reconnaissance quasi-officielle dun handicap de nature

    trs vague pour une population mal dfinie. Ce rapport

    recense une srie de dysfonctionnements tant au niveau

    de la dcision de placement, du suivi des enfants que du

    pilotage des ITEP, et qui stendent aussi toute la chane

    des interventions sociales auprs des familles en diffi-

    cult, depuis le dpistage jusqu la sortie de lenfant du

    circuit institutionnel. Repr prcocement ds lcole

    maternelle lenfant porteur des signes prcurseurs dune

    difficult grave dintgration, dapprentissage et de

    comportement nest pris rellement en charge que de

    faon alatoire et sporadique. Indiffrence, rticence ou

    refus des parents, difficult technique organiser un

    travail social efficace auprs des familles, encombrement

    des services de pdopsychiatrie sont autant dobstacles

    un traitement prcoce et efficace de lenfant. Celui-ci

    poursuit alors un parcours scolaire lmentaire en situa-

    tion dchec ou de rejet, jusquau moment o

    la situation devient trop perturbante pour

    linstitution scolaire.

    Trois tudes locales repres par Marine Zecca

    (2001) apportent des prcisions complmen-

    taires sur ces diffrents constats faits par

    lIGAS:

    En Bretagne 17, un peu plus dun enfant sur

    deux (54%) ne bnficie daucune prise en

    charge spcifique coordonne (accompagne-

    ment de la famille ou de lentourage habituel

    par un CMPP ou SESSAD ou enseignement

    adapt) avant dtre orient.

    En Aquitaine 18, une tude transversale et

    exhaustive ralise en 1997 (soit 39 tablisse-

    ments et 2035 jeunes) observe que lors de

    leur premire admission, le pourcentage

    15 Le secteur spcifique de ces tablissements est rgi parl'annexe XXIV du dcret n89-798 du 27 octobre 1989 relative aux

    conditions techniques d'autorisation des services et tablissements

    prenant en charge des enfants et adolescents atteints de

    dficiences intellectuelles ou inadapts. Les ITEP relvent de la

    mme annexe que les tablissements d'ducation spciale en

    faveur des enfants et des adolescents dficients intellectuels qui

    rassemblent les instituts mdico-ducatifs et les instituts mdico-

    professionnels. Leur financement est assur par un prix de journe

    fix par le prfet (DDASS), pris en charge par l'Assurance maladie,

    faisant l'objet d'une convention de tiers payant (Zecca, 2001).

    16 En 1998, ces tablissements employaient 11 300 personnes enquivalent temps plein avec un cot de 3,5 milliards de francs pour

    l'assurance maladie (Zecca, 2001).

    17 tude PRAC, Assurance maladie en Bretagne, mars 1997. 18 Analyse de l'adquation du placement des enfants eninstituts de rducation. Rgion Aquitaine anne 1997, Service

    mdical de l'Assurance maladie Aquitaine (avec intgration des

    donnes 2000).

    1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8 diversit v i l l e c o l e i n t g r a t i o n 29

    DIV154 complet 23/09/08 18:00 Page 29

  • nayant bnfici daucune prise en charge

    adapte (entres directes) reprsentait 34,2%,

    variant selon lge dadmission. 28,3% des

    enfants orients taient considrs inad-

    quat pour les structures choisies. 73% des

    enfants taient scolariss au sein de linstitu-

    tion. 90% taient considrs comme inadapts

    en milieu scolaire ordinaire. 64% pris en charge

    ayant un retard suprieur ou gal deux ans.

    Retard qui saccrot au cours du sjour insti-

    tutionnel, atteignant de trois cinq ans 17

    ans. Sur 434 sorties, 56% des enfants taient

    maintenus dans le secteur du handicap.

    En Gironde (dpartement le mieux dot au

    plan national), il tait enregistr une attente

    de placement de 10% de loffre de places. 16,3%

    des enfants ne prsentaient quun trouble

    lger du comportement, alors que 10,1% ne

    prsentaient aucun trouble. Quant la sortie,

    labsence de suivi tait la rgle.

    Seule, la DRESS (Vanovermeir, 2006) fournit un

    aperu partiel de leur trajectoire scolaire et de

    leur situation la sortie de linstitution. Plus de

    96% des jeunes placs en ITEP sont scolari-

    ss: 84% dentre eux ont acquis la lecture avec

    ou sans difficult (52% savent lire sans diffi-

    cult et 32% lisent avec difficult). Les jeunes

    ne matrisant pas la lecture (13%) sont moins

    frquemment scolariss que les autres. Mais

    77,6% des enfants et des jeunes placs demeu-

    rent scolariss temps plein en ITEP 18 contre

    20,2% en tablissement priv ou public de lducation

    nationale. Un faible pourcentage ne bnficie daucune

    forme de scolarisation, soit 3,9%.

    En fin de scolarit obligatoire, aucune source disponible

    ne permet de connatre le niveau scolaire atteint. En 2001,

    aprs leur sortie (pour les 16 ans et plus), seulement 14%

    rejoignent un tablissement de lducation nationale (le

    plus souvent dans des filires spciales ou dvalorises et

    sans prise en charge mdico-sociale), 7% un IME, IMPRO

    ou IMP et 2% dautres tablissements ou services ddu-

    cation spciale, 4% restent en ITEP. Pour ceux qui intg-

    rent le march du travail : 12% sont dclars en emploi,

    27% sont en recherche demploi en milieu ordinaire, 16%

    en formation ou en stage et 1% en CAT.

    Une extraction de lenqute INSEE Handicaps, incapa-

    cits, dpendance (Barral, Razaki, 2002) a permis dta-

    blir un profil social des familles partir de la CSP du pre

    (sur la base dun chantillon reprsentatif de la popula-

    tion accueillie en ITEP) o est observe une nette surre-

    prsentation des milieux dfavoriss : 42,3% des jeunes

    sont issus du milieu ouvrier. Pour 30%, la CSP du pre 20

    nest pas connue, mais des informations complmentai-

    res permettent de savoir que 47,5% sont chmeurs.

    Pour Franois Sicot 21 (2005) la notion du handicap socio-

    culturel a t remplace par la catgorie diagnostique

    de troubles du caractre et du comportement qui four-

    nit la lgitimit mdicale lorientation des lves en

    difficult ou difficiles. Il distingue deux populations den-

    fants pour qui lintgration scolaire se pose en termes trs

    diffrents. Dune part, un ensemble de situations et dac-

    tions relativement semblables pour des enfants aux

    handicaps avrs, ensemble caractris par

    la non-scolarisation et les stratgies parenta-

    les visant obtenir une scolarit adapte ou

    en scolarit en milieu ordinaire; dautre part,

    un ensemble constitu dlves issus de

    milieux dfavoriss qui connaissent une

    orientation hors de lcole ordinaire ou vers

    ladaptation et intgration scolaire (AIS), voire

    dans certaines conditions, des processus de

    dscolarisation.

    tant donn la surreprsentation de la prca-

    rit sociale et conomique au sein de cette

    population exclue de lcole en raison de

    difficults scolaires considres comme irr-

    ductibles la seule approche pdagogique

    ou de comportements perturbateurs jugs

    19 Le Haut Comit de Sant publique (1999) observe ainsi qu'enITEP les rythmes de prise en charge ducative et pdagogique

    sont trs diffrents et rendent difficile pour les tablissements,

    l'accomplissement d'une de leurs missions essentielles qui sert la

    rintgration des enfants dans un milieu scolaire ordinaire .

    20 L'Observatoire national de l'action sociale dcentralise(ODAS, 1998) observe ainsi que: la prcarit n'est pas nomme

    comme facteur explicite de danger pour les enfants, et les

    travailleurs sociaux, comme dans une raction datant d'une

    poque o ils taient critiqus pour le cadre normatif qu'ils

    imposaient aux populations dfavorises, en arrivent ne plus

    recueillir dans les signalements les donnes relatives l'activit

    professionnelle des parents .

    21 Franois Sicot a observ pendant 18 mois le fonctionnementdu dispositif cens assurer l'intgration scolaire de ces lves (dans

    le cadre de l'appel d'offre sur les processus de dscolarisation, voir

    La dscolarisation en Haute-Garonne. Rapport l'cole et dispositifs de

    scolarisation, 2002).

    30 v i l l e c o l e i n t g r a t i o n diversit 1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8

    DIV154 complet 23/09/08 18:00 Page 30

  • pathologiques, le registre dactions permet-

    tant ces parents le maintien de leur enfant

    en milieu scolaire ordinaire est encore plus

    restreint du fait de la complexit du proces-

    sus excluant. La dscolarisation peut alors tre

    interprte comme une forme de rsistance

    passive des parents qui ont donn un accord

    purement formel.

    Oprant un parallle avec la dlinquance des

    mineurs o, sur la dernire dcennie, les

    mesures de rpression ont t durcies, Marine

    Zecca (2001) observe une augmentation des

    ITEP, ainsi quune progression rapide de la

    population carcrale des mineurs. Dans le

    mme temps, une conversion du processus

    de pauprisation, de dsaffiliation, voire dex-

    clusion dans les banlieues sensibles (et plus

    silencieusement dans une partie du monde

    rural) en matire de violence et dordre public

    a accentu le phnomne. Aussi interroger la

    notion du trouble de la conduite et du

    comportement seulement en termes tech-

    niques et scientifiques peut tre un leurre,

    car la question est minemment politique,

    idologique, conomique et polmique. Elle

    est galement trs pragmatique par ses cons-

    quences sur les trajectoires des enfants et des

    jeunes. Le cadre curatif des ITEP est gale-

    ment peu enqut. Alors que se multiplient

    les travaux sur les risques inhrents aux prises

    abusives des amphtaminiques, dont la

    Ritaline au premier plan, il nexiste pas dtu-

    des concernant cette question. Ce nest quau

    dtour des entretiens mens que lauteure a pu

    mesurer lampleur du phnomne.

    Les structures mdico-ducatives

    Hormis une rcente enqute de la DRESS

    (Espagnol, Prouchandy, 2007) dont sont extrai-

    tes les diffrentes informations chiffres

    prsentes ici, il nexiste pas dinformation

    disponible sur lorigine sociale, la scolarisa-

    tion et linsertion sociale et professionnelle

    des jeunes accueillis dans ces diffrentes

    structures mdico-ducatives. Seul un rapport

    de lIGAS et de lIGEN (Naves, Gossot, 1999)

    signale, sans dvelopper, des inadquations

    dans les placements en tablissements mdico-sociaux,

    labsence ou lextrme faiblesse de la scolarit sans que

    le handicap des jeunes accueillis puisse le justifier et lab-

    sence des acquis ncessaires pour suivre une formation

    professionnelle.

    En 2006, il tait dnombr 2 100 tablissements mdico-

    ducatifs (EME) offrant prs de 108 000 places et recevant

    des enfants et adolescents de 0 20 ans (sauf prolonga-

    tion pour finir un cursus pdagogique ou au titre de

    lamendement Creton). Ils accueillent les enfants souf-

    frant principalement dune dficience psychique ou

    mentale (72%), de handicap moteur (6%) ou de polyhan-

    dicap (8%). La majorit sont des garons (65% en 2005-

    2006). Seuls 70 100 enfants et adolescents taient scola-

    riss toute lanne, les autres enfants tant pour la plupart

    scolariss temporairement au sein de lEME ou scolariss

    hors tablissement. Prs de 56% des enfants et adoles-

    cents scolariss toute lanne dans les EME ont entre 11

    et 16 ans.

    ct dautres structures comme les Instituts mdico-

    ducatifs (67000 enfants), les Instituts dducation motrice

    (6 800 enfants), les Instituts dducation sensorielle (10600

    enfants), le secteur sanitaire sous tutelle principale du

    ministre de la Sant et des Solidarits accueille gale-

    ment prs de 15300 jeunes handicaps dont seulement

    6200 ont suivi une scolarit toute lanne scolaire 2005-

    2006.

    Aussi, Claire Brisset, ancienne dfenseure des enfants,

    dclarait : Jai visit des institutions sous le chapeau

    sant publique. Jai demand voir o tait la structure

    ducative au sein de ces tablissements. On ma ouvert la

    porte dune classe bien range, qui servait uniquement

    deux fois deux heures par semaine. Lon considre encore

    que lducation des enfants souffrant de pathologie est

    un appendice dans leur prise en charge. Les enfants en

    souffrent normment. (Brisset, 2006).

    La maternit prcoce des adolescentes

    Un autre motif de sortie du systme scolaire concerne les

    jeunes mres mineures. Hormis une enqute de lINED

    (Kafe, Brouard, 2000), il existe peu de donnes pidmio-

    logiques ni denqutes nationales rcentes (qualitatives ou

    quantitatives) sur la maternit des adolescentes, et les

    donnes sur leurs caractristiques sociales et leurs trajec-

    toires ultrieures sont encore plus rares et toujours par-

    ses et parcellaires.

    Lenqute concernant La sant des adolescents (DREES,

    2004) indique quen 2001, 4845 jeunes filles mineures ont

    1 5 4 - S E P T E M B R E 2 0 0 8 diversit v i l l e c o l e i n t g r a t i o n 31

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  • eu un enfant ; soit 4,3 sur 1000 jeunes filles

    ges de 15 17 ans, ce qui reprsente un taux

    un peu plus lev que pendant la priode 1995-

    1999 (aux environs de 3,6 naissances pour

    1000). Ce chiffre a fortement dcru puisque

    cette proportion tait de 28 pour 1000 en 1980.

    Comparativement, le nombre dinterruptions

    de grossesse effectues pour les mineures en

    2001 est de 10 153, soit un taux de 9,1 pour 1

    000 qui a augment ces dernires annes (7,5

    pour 1 000 en 1995).

    Des donnes complmentaires sont fournies

    par les enqutes statistiques se rapportant aux

    bnficiaires de lAllocation de parent isol

    (API) partir dune extraction par tranche

    dge (moins de 20 ans) ou par ge (de moins

    de 15 ans 18 ans).Allocation diffrentielle et

    dune dure temporaire (de 1 an 3 ans selon

    les situations), lAPI est attribue aux parents

    isols qui disposent dun faible (ou daucun)

    revenu et peut tre verse des adolescentes

    de moins de 18 ans rsidant chez leurs parents

    (vivre avec ses parents ne constituent pas un

    obstacle pour la percevoir) ou en foyer mater-

    nel.

    partir du fichier CNAF, des analyses statis-

    tiques concernant lensemble des bnficiai-

    res de lAPI apportent quelques lments sur

    la tranche dge moins de 20 ans (Algava,

    Avenel, 2001). Ces jeunes mres mineures

    apparaissent peu scolarises : sur les 14 000

    bnficiaires ges de 15 19 ans, 30% seule-

    ment sont encore scolarises (alors que le taux

    atteint 80% pour lensemble de cette classe

    dge). Les facteurs explicatifs mobiliss sont

    que la maternit prcoce concerne souvent

    des jeunes filles en difficult scolaire et le fait

    dlever seule un enfant constitue un obsta-

    cle la poursuite des tudes. Elles peroivent

    galement le montant le plus lev de lAPI,

    ce qui suppose quelles avaient, avant le verse-

    ment de lAPI, un niveau de ressources person-

    nelles globalement plus faible que lensemble

    des allocataires. Globalement plus dmunies,

    elles sont galement plus frquemment

    hberges par leurs ascendants.

    la fin de lAPI, et ce, sur la base de lensem-

    ble des allocataires, prs de la moiti dentre elles bascu-

    lent au RMI (PLA, 2006). Le fait dtre parent et de ne bn-

    ficier daucune ressource permet en effet de percevoir le

    RMI avant lge de 25 ans. Pour les autres, et surtout

    concernant les plus jeunes, les contrats en alternance,

    lapprentissage et les contrats de qualification sont le plus

    souvent mentionns (56,9% ne possdent aucun diplme).

    Lorsquelles ont un emploi, le temps partiel contraint est

    majoritaire (Belleville-Pla, 2004). La prvalence de ces

    trajectoires est confirme par une tude base sur des

    donnes longitudinales provenant dun panel dalloca-

    taires de Meurthe-et-Moselle (Chaupain-Guillot, Guillot,

    2003). Le devenir sur 24 mois, suite la perception de lAPI,

    de jeunes filles mineures (entre 15 et 18 ans) indique une

    majorit de parcours marqus par linactivit ou le

    chmage puisque seulement 11,4% dentre elles ont

    travaill, au total, pendant plus de douze mois, tandis que

    plus de la moiti (52%) percevaient le RMI et que 21,2%

    dentre elles ont connu un nouvel pisode dAPI. Les carac-

    tristiques individuelles disponibles ne renseignent ni sur

    le niveau de formation, ni sur le diplme au moment de

    la demande dAPI.

    Ce sont des tudes cibles sur des effectifs plus restreints

    qui permettent de mieux cerner certaines caractristiques

    sociales de ces trs jeunes mres. Ainsi une enqute

    mene auprs des professionnels de PMI concernant une

    population de 130 jeunes filles mineures (de 13 18 ans)

    ayant accouch en 2004 (Conseil gnral du Val-de-Marne,

    2007) tmoigne que ces grossesses prcoces intervien-

    nent plus frquemment dans un contexte familial

    perturb, sur fond de plus ou moins grande prcarit et

    de peu dinvestissement scolaire. 56% dentre elles bn-

    ficiaient dj dun suivi antrieur la grossesse par les

    services sociaux ou lAide sociale lenfance. Seules 36%

    ont continu leur scolarit jusqu la fin de la grossesse,

    25% lont interrompu au premier trimestre de la gros-

    sesse, 39% taient dj dscolarises et 13% navaient

    jamais t scolarises. Labsence de scolarisation est certai-

    nement relier en partie lorigine trangre pour 62%

    de ces jeunes filles (38% dAfrique et 9% du Maghreb).

    Dans 60% des cas, le jeune pre tait prsent au moment

    de laccouchement et apparaissait investi dans un projet

    de couple.

    Une seconde enqute mene dans un service de gynco-

    logie-obsttrique en Seine-Saint-Denis (UZAN, 1998)

    apporte des donnes complmentaires en tablissant une

    typologie des adolescentes accueillies lors dune gros-

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  • sesse prcoce (chantillon de 102 adolescen-

    tes de 12 18 ans).Trois profils ont t tablis:

    celui de la trs jeune femme marie ou

    vivant en couple,

    la grossesse accidentelle dune jeune adoles-

    cente scolarise vivant chez ses parents,

    la grossesse de ladolescente en grande diffi-

    cult, en chec scolaire et professionnel, en

    rupture avec la famille.

    Dans le premier cas de figure, il sagit de jeunes

    femmes trangres pour qui le mariage

    prcoce est culturel, le dsir denfant est

    comparable