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Page 1: Cancer « Se sentir exister autrement que parla maladie » grâce à l’art martial sensoriel

MERCREDI 12 SEPTEMBRE 2012 30Région

À Altkirch et Mulhouse,le comité du Haut-Rhinde la Ligue contrele cancer propose desateliers d’art martialsensoriel. Basée sur laperception de son corpset de ses mouvements,cette disciplineest devenue, pourles malades qui lapratiquent, une sourcede bien-être, à la foisphysique et psychique.

« Tout doucement, on va basculersur la jambe droite et lever en mêmetemps le bras… Ayez bien consciencede vos gestes, pour arriver à unmouvement fluide. » Dans la sallede sport de l’espace Ligue à Mul-house (lire ci-dessous), Anne-Claude, Françoise, Étiennerépètent trois fois le même en-chaînement, guidés par la voix àla fois apaisante et stimulante deDominique Mathis. Un vendredisur deux, ce kinésithérapeute, pé-dagogue en art martial sensoriel,anime un atelier destiné aux per-sonnes qui ont été ou sont attein-tes d’un cancer.

Issu des réflexions d’un kiné etostéopathe français, Danis Bois,prolongées par une autre kiné,Martine De Nardi (lire ci-contre),l’art martial sensoriel (AMS) don-ne la possibilité aux malades d’al-ler au-delà de l’épuisementprovoqué par le cancer et ses trai-tements, pour se remettre enmouvement et « se sentir existerautrement que par la maladie et uncorps en souffrance », explique Do-minique Mathis.

Chaque séance dure trois heures.Cela peut paraître long, c’est par-fois difficile à supporter en coursde traitement, disent certains par-ticipants. Mais de la durée dé-pend aussi la qualité de l’atelier :« On prend le temps, insiste l’ani-

mateur. La première chose est de seposer, de se détendre pour pouvoirtravailler dans le relâchement. »

« On sait qu’on n’estpas foutu, qu’onpeut encore fairedes choses »

« Il y a un mot qui me vient, c’est ladouceur, celle qu’on n’a pas quandon est bousculé par le traitement,témoigne Anne-Claude. Là, on sepose, on se fait un cadeau à soi-mê-me. » L’AMS prend chaque per-sonne là où elle en est – aumoment de l’annonce du cancer,

après une opération, une chimio ou une radiothérapie. « Parfois,certaines personnes peuvent à peinetenir debout, relève DominiqueMathis. À la fin de l’atelier, leurfatigue est toujours là, mais diluée.Ils n’ont pas le même regard, pas lamême couleur de peau… »

Les mouvements appris pendantl’atelier peuvent être répétés parchacun chez soi et aider à soula-ger la douleur. « On peut arriver àprendre moins de médicaments »,affirme Françoise. Pour elle qui abeaucoup souffert de devoir arrê-ter sa pratique sportive, l’AMS aété « un nouvel apprentissage devie ». « C’est un long chemin, mais

on sait qu’on n’est pas foutu, qu’onpeut encore faire des choses. » Ap-prendre à réécouter son corps,redécouvrir des moyens physi-ques entamés par le cancer et desthérapies parfois « corrosives »…Pour Étienne, l’AMS a été unmoyen de « sortir de l’engrenage unpeu aliénant » de la maladie et deretrouver un dynamisme – deve-nu communicatif.

« Moi, ça m’a demandé un groseffort, psychologique et physique, departiciper à l’atelier, confie Isabelle.Au début, j’avais du mal à arriver à9 h… Mais j’ai été bien récompensée.L’AMS m’a aidée à dormir correcte-ment et à me sentir moins fatiguée

pendant la journée. » En commen-çant par des mouvements trèssimples et très lents, l’art martialsensoriel va progressivementvers des situations à deux ou plu-

sieurs, inspirées des techniquesde l’aïkido. « On n’est pas dansl’attaque ou l’esquive, précise Do-minique Mathis, mais dans unerelation d’égalité, pour apprendre àse canaliser et avoir une meilleureperception de soi – et de l’autre. »

« J’ai trouvé ici ce queje n’avais pas du faitde l’absence de familleproche autour de moi »

Au fil des séances, les partici-pants acquièrent une aisance ges-tuelle, retrouvent une confianceet une combativité mises à malpar la maladie. « On ressort tou-jours dans un état physique et psy-chologique bien meilleur qu’àl’entrée », confirme Marie-Noëlle,tandis qu’Anne-Claude parle deressourcement. Pour elle commepour la plupart des participants,l’apport de l’atelier est aussi large-ment relationnel : « J’ai trouvé icice que je n’avais pas du fait del’absence de famille proche autour demoi. »

Au cours des trois heures d’ate-lier, la pause a toute son impor-tance : moment de repos, maisaussi de convivialité, de parole,d’échange. « C’est d’une très gran-de richesse », souligne Marie-Noëlle, qui se pose la question du« sevrage » : « Ce n’est pas faciled’arrêter, on se sent tellement porté…Mais il faut bien sûr laisser la placeà ceux qui en ont encore plus besoinque nous. »

Julie Tassetti

Cancer « Se sentir exister autrement que par la maladie » grâce à l’art martial sensoriel

L’atelier d’art martial sensoriel, animé par Dominique Mathis (habillé en noir), permet aux personnes, pendant ou après leur traitement, de« sortir de l’engrenage un peu aliénant » de la maladie, témoigne Étienne. Photo Denis Sollier

Marcher, trottiner,courir… La deuxièmeédition des Fouléesde la Ligue contrele cancer du Haut-Rhinaura lieu dimanche16 septembre à Colmar.

Ce rendez-vous de la convivialitéet de la solidarité entend faire lapromotion des activités physi-ques dans le cadre de la préven-tion du cancer. Familles, copains,collègues de travail, membres declubs de sports… ont rendez-vousdimanche 16 septembre, à partirde 8 h 30, au parc des expositionsde Colmar d’où partiront deuxcircuits vers la forêt et les vignesenvironnantes.

Les bénéficespour la LigueLe premier, de 6 km, est destinéaux randonneurs. Départ entre9 h et 9 h 30. Le second, de 9 km,avec un départ unique à 10 h, estréservé aux coureurs. À noterqu’il ne s’agit pas d’une compéti-tion. C’est le plaisir de « bouger »qui est recherché, tout en partici-pant à une grande fête en faveurde la Ligue contre le cancer.

Tous les bénéfices de la manifes-

tation seront reversés à la Liguedu Haut-Rhin. Les droits d’ins-cription sont de 10 € pour unadulte et 1 € pour les plus jeunesde moins de 15 ans.

Les groupes les plus nombreux,les mieux déguisés, les familles etentreprises les mieux représen-tées… seront récompensés à11 h 15.

Des surprises sont prévues auprogramme et notamment unéchauffement musical des cou-reurs qui devrait être un momentinoubliable.

L’année dernière, près de 900 per-sonnes avaient participé à cettemanifestation soutenue par L’Al-sace. Les organisateurs entendentbien battre le record de participa-

tion à l’occasion de cette deuxiè-me édition.

P. B.

FS’INSCRIRE On peut téléchargerson bulletin d’inscription surwww.fdl68.com et le renvoyeravant le 13 septembre à la Liguecontre le cancer du Haut-Rhin,10 rue du Triangle à Colmar 68000Colmar. On peut aussi appelerla Ligue au 03.89.41.18.94.

Les Foulées, c’est bon pourla santé !

L’an dernier, malgré le temps maussade, près de 900 personnes avaient participé aux premières Fouléesde la Ligue, en marchant ou en courant. Archives Dominique Gutekunst

FUne discipline qui a 20 ansL’art martial sensoriel (AMS) a été fondé en 1992 par MartineDe Nardi. Infirmière et kinésithérapeute, ceinture noired’aïkido, elle a associé la gymnastique sensorielle (créée par lekiné et ostéopathe Danis Bois) et des techniques issues del’aïkido. « C’est une activité physique non compétitive, résumeMartine De Nardi. Les objectifs sont de bouger sans se fairemal, d’apprendre à gérer les conflits, à communiquer sansviolence avec soi-même et les autres, à déployer sa capacité derésilience… » (www.artmartialsensoriel.org)

cès quand ils le souhaitent,pendant ou après leur traite-ment, à des soins socio-esthéti-q u e s , d e s c o n s e i l s e ndiététique, des ateliers artisti-ques, des activités physiquesadaptées… Outre l’AMS (artmartial sensoriel, lire ci-des-sus), la salle de sport aménagéedans les locaux accueille desséances de sophrologie et unatelier « de la voix parlée à lavoix chantée » animé par Élisa-beth Baudry. Tout est gratuit,une fois qu’on s’est acquitté del’adhésion annuelle de 8 €.

Mulhouse, Altkirchet bientôt ColmarÀ Altkirch, les ateliers AMS etvoix existent depuis jan-vier 2011 et les malades peu-vent aussi participer à unatelier d’arts plastiques et créa-tifs animé par Anne Zimmer-mann, sous l’égide du CracAlsace (Centre rhénan d’artcontemporain).

L’ouverture, fin 2013, de la Mai-son des patients et de la Ligue,permettra de proposer ces ate-liers également à Colmar.

FSE RENSEIGNER L’espace Ligue,18 rue Poincaré à Mulhouse,tél. 03.89.53.70.20 ;[email protected] ateliers de la Ligue à Altkirch,Christine Ackermann,tél. 03.89.08.30.02 ;[email protected]é du Haut-Rhin de la Ligue,10 rue du Triangle à Colmar,tél. 03.89.41.18.94 ;[email protected]

L’espace Ligue, ouvert depuisprès d’un an à Mulhouse, a étéconçu comme un lieu d’accueilet de vie hors des murs de l’hô-pital pour les malades et leursproches, mais aussi comme unespace d’information pour legrand public. Une équipe deprofessionnels et de bénévolesest là pour apporter des répon-ses aux questions sur le cancer.

Une psychologue et une assis-tante sociale tiennent des per-manences chaque semaine :malades et familles peuvent lesrencontrer sur simple rendez-vous. « Et pour les familles ou lesmalades qui ont besoin de parler,il y a toujours des bénévoles àl’écoute », souligne Sylvie Ochs,l’animatrice de l’espace Ligue.

Les malades ont également ac-

Anne Zimmermann (icilors d’une performanceà Mulhouse), anime desateliers à Altkirch.

Archives Dom. Poirier

Des structures de proximité pour un meilleur accompagnement

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