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DOSSIER
LA PART DU NUMERIQUE
DANS
LA CREATION CONTEMPORAINE
EXPOSITION COLLECTIVE
L’ART RENOUVELLE LE LYCEE,
LE COLLEGE, LA VILLE ET L’UNIVERSITE
2018
PASSAGE DE L’ART
12>22/06
TABLE DES MATIERES
Présentation p.1
La feuille de salle avec les cartels p.5
Les œuvres et leur part de numérique par les artistes p.6
Dominique Bosq p.6
Hélène Bellenger p.7
Annabel S.Chatterjee p.8
France Gobbo p.9
Philippe Formet p.10
Sophie Geider p.11
Véronique Loh p.12
Milena Walter p.13
Manon Aguesseau p.14
Matthieu Montchamp p.15
Primavera Gomes Caldas p.16
Gilles Benistri p.17
Sarah Cardona p.18
Chloé Desmoineaux p.19
Manuel Ruiz Vida p.20
Marc Chostakoff p.21
1
D’après la thématique de cette vingt-deuxième édition de l’Art
Renouvelle le Lycée, le Collège, la Ville et l’Université (ARL),
l’exposition collective questionne la part du numérique dans l’art
contemporain. Cette présentation collective trouve un sens en se
donnant à voir dans un établissement élu par le Conseil
départemental au programme du 100% numérique, comme en atteste la
plaque visible à l’entrée.
Cette exposition n’a pas pour vocation d’être une illustration
exhaustive de ce qu’est l’art numérique.
La genèse de l’art numérique fait débat et son émergence
oscillerait entre les années 1960 et 1980, période durant laquelle
l’usage de l’ordinateur commença à être détourné à des fins
esthétiques. L’apparition de l’art numérique serait concomitante et
liée au développement de l’art vidéo et précéderait l’émergence du
Net Art dans les années 1990. L’art par ordinateur a apporté une
dimension interactive nouvelle et a mobilisé d’autres disciplines
tels que les arts de la scène ou la littérature.
Les réponses des artistes présentés ici à cette question du
numérique dans l’art contemporain convergent vers l’affirmation
d’une mixité des média numériques et d’autres plus classiques tels
que l’impression papier, la gravure, la peinture, ou le dessin dans
les procédés de création contemporaine. Des média classiques plans,
à l’installation, jusqu’à la vidéo et au Net Art, l’exposition
offre un aperçu des mutations de l’œuvre. Au sein des créations des
seize artistes, l’empreinte du numérique et des technologies, dont
l’usage est aujourd’hui banalisé, peut apparaître évidente autant
que ténue. Certaines œuvres témoignent d’une recherche de
renouvellement des genres du portrait, du paysage, du documentaire,
de la gravure ou du jeu vidéo en puisant l’inspiration nécessaire
dans les média numériques et leur incessant progrès technologique.
Dominique Moulon parle d’une hybridation des œuvres où les
nouvelles technologies tel qu’ internet sont des média utilisés au
même titre que ceux non digitaux, non codés, dits « classiques ».
Il affirme que la part du numérique commence quand l’artiste fait
une simple recherche sur internet préalablement à la production
effective de son œuvre.
« (…) l’arrivée d’Internet — ou plus précisément du Web
participatif — a amené la société dans son ensemble à se saisir du
numérique. La grande mutation qu’a apportée le Web 2.0, c’est que
le numérique est passé d’outil à culture. Cette culture nous
influence toutes et tous et c’est ainsi qu’ont émergé des œuvres
hybrides, dont on ne sait pas très bien si elles appartiennent à un
art numérique ou contemporain. »1
1 CLEMENT THIBAULT, Clément Thibault (en ligne) « De l’évolution des arts numériques et de
la porosité dans le monde de l’art », mis en ligne le 16 octobre 2016, consulté le 20 mai
2018, http://clementthibault.xyzblog/2016/10/21/dominique-moulon-de-lvolution-des-arts-
numriques-et-de-la-porosit-dans-le-monde-de-lart
2
La notion de culture du web et du numérique avancée par Dominique
Moulon résume la prégnance de ces outils dans nos modes de vie. Les
artistes, autant que tout un chacun, baignent irrémédiablement dans
le numérique. La démocratisation des ordinateurs et de la connexion
internet, la praticité des appareils numériques et le
perfectionnement infini des vues qu’ils offrent ont favorisé leur
utilisation jusque dans les pratiques artistiques.
La tendance étant à l’immixtion de la technologie dans la création
et réciproquement, les contours de l’art contemporain et de l’art
numérique demeurent flous.
Cette exposition rend compte de cette difficile catégorisation des
œuvres usant de différents médias entre art numérique et art
contemporain. Elle n’a pas vocation à définir ni à essentialiser,
mais à montrer comment la pensée créative s’échafaude en réseau, à
l’image de notre temps.
Les œuvres présentées démontrent que l’utilisation du numérique
n’entraîne pas forcément une œuvre technologiquement sophistiquée
et demandant d’être décodée. Que les artistes fondent leurs œuvres
sur le terrain du virtuel ou du tangible, il est question de
l’identité, de son usurpation, de l’anonymat, du paysage modifié,
d’architecture, de l’effacement de la figure humaine, de nature
artificielle, ou de discrimination. Autant de sujets qui pourront
faire écho à nos expériences individuelles. Le numérique sera t-il
l’art contemporain du futur ? L’art doit-il intégrer les progrès
techniques qui lui sont contemporains pour délivrer son message ou
rendre ses représentations plus intelligibles auprès du public ?
Qu’apporterait un art positiviste ?
Aujourd’hui l’influence du numérique dans l’art contemporain est
palpable et il est possible que l’art de demain reflète les
prochaines avancées technologiques. Dès les années 1960, Marshall
MacLuhan percevait en l’artiste sa capacité d’intégrer de manière
avant-gardiste et distanciée les nouvelles technologies à sa
pratique. Il attribuait à l’artiste cette force d’adaptation et de
résilience qu’il opposait à la réaction réfractaire des citoyens
ordinaires face aux innovations. L’auteur considérait les nouvelles
technologies comme étant des extensions de l’être humain et de son
activité, créant des nouveaux milieux déstabilisant les facultés et
valeurs jusqu’alors acquises.
«(…)J'aimerais savoir ce qui se produirait si l'on se mettait tout
à coup à tenir l'art pour ce qu'il est réellement, c'est-à-
dire une indication précise sur la façon dont il faut remanier ses
facultés pour se préparer au prochain coup de leurs prolongements.
(…) Quoi qu'il en soit, l'art expérimental renseigne les hommes
avec précision sur les prochains assauts que livreront à leurs
esprits leurs propres technologies ou calmants de
l'inflammation. Ces parties de nous-mêmes que nous projetons hors
de nous sous forme d'inventions sont en effet des tentatives de
compensation ou de neutralisation des inflammations ou des
pressions collectives. Mais le calmant finit généralement par se
3
révéler comme un plus grand mal que l'inflammation initiale, un
peu comme une narcomanie.
Et c'est ici que l'artiste peut nous enseigner à « suivre le coup » et à l'amortir au lieu de l'encaisser droit au menton. Je ne puis
que répéter que l'histoire de l'humanité est une longue suite de
« directs au menton »2.
«(…) A mesure que la prolifération de nos technologies créait tout
une série de nouveau milieu , les hommes se sont rendu compte que
les arts sont des contre-milieu ou des antidotes qui nous donnent
les mo ens de percevoir le milieu lui-m me. 3
La question « Quand y –a –t-il art ? » résonne dans les salles
d’exposition depuis les ready-made de Duchamp et l’usage d’objets
prosaïques pour faire œuvre. De la même façon, l’usage de la
technologie dans l’art contemporain suscitera t-il la même
interrogation ? Le regardeur doit également s’adapter aux nouvelles
inspirations trouvées par les artistes pour en comprendre les
apports. Ces nouvelles modalités de création ne cessent
d’interroger la beauté à l’œuvre, son artisticité et le geste de
l’artiste à l’ère du numérique.
Les questions suscitées par le numérique débordent du seul champ
artistique du fait qu’il embrasse différentes sphères. Happés par
la culture du numérique, nous manifestons une attitude d’inertie.
Remonter à la surface de ce bain de « coutume » numérique dans
lequel nous sommes immergés pourrait nous permettre de prendre du
recul sur notre temps qui est accaparé par des obligations
tangibles et saturé de stimulations virtuelles. Cette exposition
est l’occasion d’une pause critique et d’une déambulation autour du
potentiel créatif du numérique au sein de voies artistiques aussi
diverses que celles empruntées par les artistes de l’ARL, ainsi
qu’une une voie de réflexion quant à la manière dont il façonne
notre quotidien et notre rapport aux images.
Cette exposition attire l’attention sur la conscience de notre
regard et ses postures vis-à-vis des images. Regardons nous de la
même manière une vidéo sur une télé, un écran de tablette, une
photo numérique photoshopée, une installation ou un tableau ?
Il est largement répandu que les images diffusées par des appareils
électroniques sont d’avantages interactives de telle façon qu’elles
sembleraient s’adresser de manière plus percutante et stimulante à
leurs destinataires. S’il est vrai que les images interactives
supposent un programme informatique et une interface logicielle et
visuelle, selon Jean-Louis Boissier4, ce serait un leurre de croire
que ces images insèrent leurs destinataires dans leurs scenarii et
seraient subordonnées à leurs attentes. Ces images sont ordonnées
2 Marshall Mc Luhan, Pour comprendre les médias, éditions Seuil, Paris, 1968, page 120-124
3 Marshall Mc Luhan, Pour comprendre les médias, éditions Seuil, Paris, 1968, page 12
4 Jean-Louis Boissier, « L’interactif en mots », COLLECTIF, Images interactives Art
contemporain, recherche et création numérique, Liège, éditions La lettre volée, 2016, p.28
4
selon un dispositif découlant d’une programmation de codes, donc
délimitées et calculées, répondant à des directives.
Si les dispositifs numériques créent une relation et aboutissent à
des images performatives, restant à expérimenter et en perpétuelle
actualisation, les images numériques ne rendraient pas notre
posture plus active.
Comme l’explique Jean-Paul Fourmentraux5, la notion ambivalente de
« dispositif » comme ensemble de procédures visant à contrôler ou à
surveiller telle que l’avait définie Michel Foucault tend à prendre
différents sens au sein des pratiques numériques du Net Art. Le
dispositif se dote d’une dimension participative du public où il
met en œuvre des situations d’énonciation où les différents rôles
d’auteurs et d’acteurs de l’œuvre empiètent les uns sur les autres
et où une logique de contrainte et d’aléatoire se mêlent de façon
complexe. Cependant, ses modalités restent différentes du
dispositif vidéo télévisuel et celui cinématographique.
Jean-François Lyotard6 pensait qu’il ne fallait pas concevoir la
réception des images numériques et de celles non numériques d’après
l’opposition binaire actif/passif, mais sous l’angle de la
passibilité, signifiant notre capacité à recevoir. C’est grâce à la
capacité universelle et commune à tous les êtres humains à recevoir
des images qu’il nous est possible d’éprouver du plaisir ou du
déplaisir, sentiments constituant notre expérience esthétique et
fondant notre jugement esthétique. Une image numérique est par
essence interactive car elle est un ensemble d’interactions et de
relations de codes et de langages. Elle est une relation car elle
permet de relater et relier des contenus7. Jean-Louis Boissier écrit
que le numérique aurait transformé une esthétique de la
consultation. Alors qu’une œuvre non numérique serait achevée et
reposerait sur la monstration, une œuvre fondée sur des outils
numériques se donnerait à voir par le biais de la démonstration car
elle est fondée sur une logique interne de codes articulés par un
programme. Quelle réception pour les œuvres qui procèdent de cette
porosité des médiums traditionnels et numériques ?
Voilà l’expérience que nous vous proposons de vivre au cours de
cette exposition.
Lisa Leandri
Passage de l’Art
5 Jean-Paul Fourmentraux, « Le concept de dispositif à l’épreuve des images interactives.
Mutations théoriques et usages d’une notion frontière. » COLLECTIF, Images interactives
Art contemporain, recherche et création numérique, Liège, éditions La lettre volée,
2016,p.200-206 6 Jean-Louis Boissier, « L’interactif en mots », COLLECTIF, Images interactives Art
contemporain, recherche et création numérique, Liège, éditions La lettre volée, 2016, p.28 7 Jean-Louis Boissier, « L’interactif en mots », COLLECTIF, Images interactives Art
contemporain, recherche et création numérique, Liège, éditions La lettre volée, 2016, p.23
2
4
3
Entrée
1. Hélène Bellenger, Sans titre (mariées le Bon coin), 2017-2018, tirages photo, 42 x 10 x 15 cm 2. Annabel S.Chatterjee, La Chute, 2018, pointe sèche imprimé sur papier Rosaspina, 270 x 240 cm 3. France Gobbo, 3-XIV, 2018, peinture numérique, tirage sur papier canson et dibond, 100 x 66cm4. Sophie Geider, Ecailles, 2017, peinture sur toile, 52 x 52 cm5. Philippe Formet, Ypoxam, 2017, image numérique, tirage sur dibond, 60 x 40 cm6. Véronique Loh, Un coeur en hiver, 2017, série « Avant que l’eau des banquises… », tirage photo, 60 x 75 cm7. Milena Walter, Renouvellement concret d’une civilisation ancienne, 2018, impression sur carton plume, 42 x 59.4 cm8. Manon Aguesseau, Sans titre, 2017, impression numérique sur papier mat, 49 x 32 cm
5
1
6
78101112
13
15
9. Matthieu Montchamp, Google Earth Hannibal (Alpes), 2017,aquarelle, 21x 29.7cm10.Primavera Gomes Caldas, Intrication, série de vidéos, conférences et archives en cours de production, 201811. Gilles Benistri, Network Profile, 2018, crayon sur papier, 148 x 168 cm12. Sarah Cardona, Fraude 419, vidéo , durée 15 minutes13. Chloé Desmoineaux, Lipstrike, 2016, vidéo sur youtube du dispositif Lipstrike14. Manuel Ruiz Vida, Fragment-Marseille,2017, tirage photographique, 50 x 70 cm15. Marc Chostakoff, Lac de Serre-Ponçon #1 , 2014, tirage numérique, 50 X 70 cm16. Dominique Bosq, L’île verte, 2018, installation, dimensions variables
14 16
9
Dominique Bosq
L’île verte, 2018, installation avec Bouquets de Fleurs
sauvages, Bout de Jardin côté Fontaine et Bout de jardin côté
Lavoir
« L’île est riche de symboles et d’imaginaires. Vue comme
lointaine, inconnue, inaccessible, elle est un rêve, un
paradis ailleurs, protégé, isolé, sauvage. L’île est aussi un
lieu qui reste secret, un refuge. Elle peut être idéalisée et
ressentie comme une fuite de la civilisation, un retour aux
origines, une quête de solitude. L’île est aussi un
microcosme, un écrin de beauté où se retrouvent entre autres
les artistes et autres amoureux d’espaces inédits, des
Robinson avides de curiosité et de liberté. La mer est presque
toujours à portée de vue.
Elle est constituée d’un nombre important de plantes et
végétaux, olivier, ficus, pittosporum, plantes grasses et
autres espèces regroupées en forme d’îlot. Associé à cette
végétation naturelle se trouvent des sculptures appelées
« Bouquets de Fleurs Sauvages ». »
Hélène Bellenger
Sans titre (mariées Le Bon Coin), 2017-2018, 42 tirages
photographiques,42 x 10 x 15 cm
« Sans titre est une série d’images glanées sur internet; les
jeunes mariées représentées souhaitent vendre leur robe sur le
site Le Bon Coin. À des fins d’anonymat, les mariées ont
masqué, gribouillé, découpé leurs visages, créant parfois des
compositions faisant écho à des productions iconiques
d’histoire de l’art (photocollage par exemple).
Ce projet de collection et de réemploi photographique, pose
ainsi un regard humoristique et satirique sur cette
iconographie de l’amour standardisée que représente la
photographie de mariage.
Mon oeuvre propose de repenser notre relation à notre culture
visuelle. »
Annabel S.Chatterjee
La Chute,2018, pointe sèche imprimé sur papier Rosaspina,270 x
240 cm
« Le travail de la plasticienne Annabel S.Chatterjee
s’articule autour d’une réflexion plastique sur la
représentation des complexités du paysage naturel & urbain, à
travers la pratique du dessin et de la gravure. Elle se
plait à superposer et confronter plusieurs couches d'images,
créant une épaisseur de lignes, de matières et de volumes pour
évoquer des paysages tumultueux dont les masses en mouvement
sont toujours proches d’un point de basculement.
Pour le Passage de l'Art, elle a établi un procédé qui
consiste à traduire manuellement par le dessin un effet créée
numériquement par le biais d'un logiciel de retouche d'image.
Elle traduit ainsi les possibilités de l'outil numérique par
le dessin et la gravure, procédé ancien et manuel.
Pour l'exposition de l'ARL, elle nous présente une
installation intitulée La chute composée d'une gravure grand
format qui semble figurer une monumentale chute de roches, un
écroulement de quelques mètres de haut proche d'un
anéantissement; Probablement à l’image des turbulences
mentales ou environnementales dont nous sommes malgré nous
témoins ou encore victimes, tel le suggère la métaphore de la
chute.
Le dessin de la "Chute" elle-même est une reproduction
dessinée d'un effet de déformation d'une photographie
numérique par un logiciel de retouche d'image. »
France Gobbo
3-XIV,2018,peinture numérique, contrecollage sur dibond,
100 x 66 cm
« 3-XIV s'inscrit dans une série (XIV) proposant une mise en
dialogue esthétique entre le médium pictural et le médium
photographique à l'ère du numérique. A partir d'anciennes
diapositives, cette série développe une réflexion sur la
question de l'appropriation de l'espace de l'image. Celles-ci
deviennent le point de départ d'une dynamique d'appropriation
de l'espace photographique. Pour cela l'image est scannée,
transférée, vectorisée et picturalisée à l'aide du logiciel
Illustrator afin de faire naître un nouvel espace. Le travail
de transformation picturale engendre une nouvelle étape dans
le rapport distanciation/appropriation de l'image, tout en
donnant corps à l'espace irréel du numérique. Les éléments du
paysage urbain viennent se mêler aux éléments du paysage
naturel afin de rendre visible l'unicité d'une apparente
opposition. »
Philippe Formet
Ypoxam, tirage d’image numérique, 2018, 60 x 40 cm
« Xypoxam est d’abord la recherche de l’harmonie d’une forme ainsi
que la création du mouvement s’y référent grâce à un logiciel de
modélisation 3D. Cet équilibre obtenu, les différents volumes sont
recouverts de textures élaborées sous des logiciels de création
graphique.
Alors le travail cérébral prend le dessus et modifie tous les
paramètres jusqu’à l’apparition d’une esthétique émotionnelle.
Le code binaire qui sert à l’élaboration des logiciels n’est plus
l’outil numérique mais devient une matière que je forme, que je
modèle, que je fais évoluer et qui me permet de transmettre mon
intériorité sans y apporter de références concrètes.
Xypoxam est une œuvre de l’esprit, transcription de mon ressenti
et de mes sentiments. »
Milena Walter
Renouvellement concret d’une civilisation ancienne, 2018, impression d’images numériques, 42 x 59.4 cm
« Milena Walter s'est intéressée au lieu du collège et son
architecture. Construit autour des années soixante-dix,
l'immeuble possède des caractéristiques presque futuristes avec
des formes simples en béton et un coloris de différentes
nuances de turquoise.
L'artiste a retravaillé des photos du lieu à l'aide d'outils
numériques et les a combiné en imaginant l'immeuble dans d'un
espace-temps alternatif.
Dans la cour du collège se trouve une formation de pierres, un
peu cachée entre arbustes, peut-être une commande publique
d'une œuvre d'art datant de la construction de l'immeuble -
personne ne semble connaître l'origine. Les morceaux de pierres
deviennent des reliques d'un autre temps, rappelant des
excavations d'une civilisation ancienne.
Les symboles, inspirés en partie de l'écriture maya, dont le
déchiffrement a fait des avancés majeurs ces dernières années,
s'ajoutent au projet, qui invite à spéculer sur une
civilisation fictionnelle à partir d'un endroit physique. »
Sophie Geider
Ecailles,2017, peinture sur toile,52 x 52 cm
« Le thème de L'ARL 2018 étant "L'art et le numérique", c'est
sous l'angle de la résonance entre la photographie et la
peinture que j'ai choisi cette année de développer ce travail.
En effet, mon style s'inspire d'éléments picturaux que
je découvre sans cesse dans la nature lors de mes
pérégrinations, laissant apparaître également dans l'atelier
les hasards dus aux matières, aux différentes couches
superposées, aux motifs qui se répètent, à ce qui se plisse,
se superpose, se répond.
Ces différents éléments sont essentiellement puisés dans
l'inspiration que me procurent les nombreuses photographies
que je ramène. Je chemine ainsi dans mes tableaux comme dans
un voyage. Mon univers est habité de femmes qui vibrent dans
leur posture lascive ou dans leurs mouvements, faisant
apparaître des fragments de tissus et des fonds en relief. La
peinture que je recherche est féminine, douce, apaisante. Mon
propos est de travailler autour des corps et de leurs
courbures, leurs contours, par la voie de ce qui peut les
habiller, les mettre en valeur, ou encore de ce qui peut être
de l'ordre de la suggestion. Chaque tableau puise sa source
dans divers éléments photographiques. Ici la fleur de
l’anthurium, dont se drape la jupe. »
Véronique Loh
Un cœur en hiver, série « Avant que l’eau des
banquises… »,2017,photographie numérique,60 x 75 cm
« La série Avant que l'eau des banquises...dont est extraite
Un cœur en hiver présentée ici est née d'un court séjour à
Venise où je me suis rendue sans conviction, des images en
tête de foule asphyxiante, de gondoles, d'amoureux, et de pont
des soupirs.
Mais submergée par une émotion inattendue, j'ai déambulé dans
l'îles-ville au passé fastueux promise à la destruction depuis
sa naissance et j'ai déposé mes pas dans ceux de ses fantômes
tant Venise semble immuable. En arpentant les Calli, Guardi,
Turner, Sophie Calle, Tintoretto, Thomas Mann, Philippe
Claudel et bien d'autres se sont invités dans mon viseur.
Je photographiais Venise en peinture.
Autodidacte exploratrice, je pratique une photographie
numérique inspirée par le dessin et la peinture. J'ai donc
retravaillé chaque photo en post-production numérique à l'aide
d'un logiciel de traitement d'image pour matérialiser texture,
couleur et matière. »
Milena Walter
Renouvellement concret d’une civilisation ancienne, 2018, impression d’images numériques, 42 x 59.4 cm
« Milena Walter s'est intéressée au lieu du collège et son
architecture. Construit autour des années soixante-dix,
l'immeuble possède des caractéristiques presque futuristes avec
des formes simples en béton et un coloris de différentes
nuances de turquoise.
L'artiste a retravaillé des photos du lieu à l'aide d'outils
numériques et les a combiné en imaginant l'immeuble dans d'un
espace-temps alternatif.
Dans la cour du collège se trouve une formation de pierres, un
peu cachée entre arbustes, peut-être une commande publique
d'une œuvre d'art datant de la construction de l'immeuble -
personne ne semble connaître l'origine. Les morceaux de pierres
deviennent des reliques d'un autre temps, rappelant des
excavations d'une civilisation ancienne.
Les symboles, inspirés en partie de l'écriture maya, dont le
déchiffrement a fait des avancés majeurs ces dernières années,
s'ajoutent au projet, qui invite à spéculer sur une
civilisation fictionnelle à partir d'un endroit physique. »
Manon Aguesseau
Sans titre,2017,impression numérique sur papier mat, 49 x 32 cm
«Ce portrait de peinture est une image sélectionnée parmi une
série réalisée en 2017.
J’utilise la photographie pour questionner par allers retours la
peinture, et explorer la question du portrait, de la scénographie
ou du décor de théâtre.
Pour cette série d’images, j’ai travaillé avec des peintures
pliées, mises en volume que j’ai par la suite photographiées.
Il s’agit d’une recherche de forme, de couleur, de matière et
également de rapport à l’échelle.
Je développe un questionnement entre la photographie et la
peinture, autour de la pratique associée de ces deux médiums;
En photographie mon travail dialogue avec la peinture, il s’agit
d’une boucle, je me nourris de peinture pour la photographie, et,
de la même manière pour la peinture.»
Matthieu Montchamp Google Earth Hannibal (Alpes) ,2017, aquarelle sur papier, 41,8 x 29,8 cm
«Je me suis mis à errer devant l'écran de l'ordinateur en regardant les images des Alpes produites par Google Earth. La photographie satellite dont Google exploite les images est l'ultime avatar de la photographie aérienne. Elle plonge ses racines dans une généalogie guerrière : on sait bien que les premières photos aériennes n'ont pas été faites pour admirer la beauté des paysages, mais pour planifier, organiser des bombardements. C'est ce que montre le film d’Harun Farocki Bilder der Welt und Einschrift des Krieges (Images du Monde et Inscription de la Guerre). Mais Google Earth produit aussi une image du monde inédite qui combine une construction topographique en trois dimensions et une recomposition de milliers de photographies, de fragments de paysages, de saisons, d'heures du jour. Il y a du découpage, du collage, des couches, quelque chose de très pictural. Je m'en saisis comme motif, je m'installe devant comme un peintre du début du XXème siècle avec son chevalet de campagne, mais moi je rentre dans l'atelier.» Extrait d'entretien mené par l'Artothèque Antonin Artaud, in Hannibal disparu , Cahier de l'Artothèque n° 68, mars 2018
Primavera Gomes Caldas
Intrication, Série de vidéos, conférences et archives en cours
de production, 2018.
« Intrication est un projet de contre-fiction futuriste visant
à réfléchir notre présent politique par le biais d'une
projection fictionnelle sur le devenir de notre société
occidentale.
Nous sommes en 2050 et la découverte, 70 ans plus tôt de
l'intrication humaine a complètement transformé les sociétés.
Il est à présent possible d'échanger des données d'un corps à
un autre via un transfert neuronal et surtout, de transférer
une partie de ce que l'on appelait par le passé conscience,
plus connue aujourd'hui sous le nom d'information génétique et
cognitive patente, vers un autre corps et une autre dimension.
Le dessein de ce projet est de construire un espace remettant
en cause nos acquis. Qu'est-ce que l'être humain aujourd'hui?
Qu'est-ce que l'individualité ? Qu'est-ce que l'authenticité?
Mais aussi la question du statut des individus par rapport à
leur fonction dans la société (détenteur de pouvoir, diffuseur
de savoir, employé, étudiant etc) en mettant en jeu les
notions de véracité et de simulacre.
Quels sont les discours qui font autorité? Quel sont les
rapports de force contenus dans ces images ?
Il pose également la question de ce qu'est l'information, la
donnée qui se transfert, se vend ou s'échange, en questionnant
son mode de transmission, son statut, sa sémantique, et celui
ou ceux qui la porte et la diffuse.
À mon sens le numérique se définit comme image de la modernité
dans ce qu'il a cherché à quantifier l'existant et à
rationaliser le réel. La donnée était née et avec elle, tout
un vocabulaire de la maîtrise et de la vérité. Le
numérique est paradoxalement aussi l'incarnation de courants
de pensées rhizomatiques et holistiques issus de longues
lignées de philosophies de l'horizontalité. Plus qu'une
simplification des procédés analogiques (dite upgrade
technologique) c'est le paradoxe du contemporain déchiré par
ses espoirs et ses peurs. »
Gilles Benistri
Network Profile, 2018, crayon sur papier, 148 x 168 cm
«Network Profile est un projet qui est né avec les réseaux
sociaux. L’image du portrait photographique sélectionné dudit
« ami » est devenu un motif de dessin à dépasser pour
déconstruire l’image d’apparence séduisante proposée sur le
net.Il en ressort une série diversifiée de 48 portraits extirpés de leur contexte, juxtaposés pour susciter à nouveau
l’attention du regardeur sur Nous, les Hommes/Femmes.
La lecture visuelle aléatoire vient renforcer l’intensité du
propos.»
Sarah Cardona
Fraude 419, vidéo, durée 15 minutes
« On appelle Fraude 419, les arnaques par mail qui abusent de
la crédulité et souvent de la solitude des victimes pour leur
soutirer de l'argent. La dénomination 419 provient du numéro
de l'article du code nigérian sanctionnant ce type de fraudes.
Cette vidéo se compose autour de témoignages de victimes, à
travers le monde. Tous ces témoignages ont été récupérés sur
Youtube, puis montés les uns à la suite des autres.
A ce montage, sont ajoutés des sous-titres, qui, si à première
vue peuvent donner l'impression d'être les traductions des
témoignages, sont en fait, un récit autour des mails que j'ai
échangés avec des arnaqueurs.
J'interroge à la fois la notion de documentaire par la forme
de ma pièce (à quel point peut-on croire un artiste lorsqu'il
utilise cette forme ?), mais aussi la question d'auteur ;
lorsque l'artiste construit autour de vidéos récupérées, est-
il vraiment auteur ?
Ici, le numérique trouve sa place à la fois dans la source
mais également dans le sujet même de la pièce. »
Chloé Desmoineaux
Lipstrike, 2016,vidéo youtube de la performance Lipstrike
« Créée en résonance avec la polémique du GamerGate* abordant
le sexisme dans les jeux vidéos, Lipstrike est une performance
live streamée sur la plateforme TWITCH, durant laquelle une
performeuse utilise un rouge à lèvres connecté à l’ordinateur
pour jouer à Counter-Strike. Lorsque le rouge à lèvres entre
en contact avec la peau, un coup de feu est déclenché dans le
jeu.
La partie est streamée sur le site TWITCH. Le projet s’est
prolongé sous la forme d’une édition papier regroupant tous
les commentaires sexistes ou agressifs récoltés. »
*Le Gamergate est la polémique portant sur les accusations de
sexisme et misogynie de la communauté des joueurs par certaines
personnalités féministes. Cette polémique a été provoquée par le
harcèlement de Zoe Quinn, développeuse web et par son ex-copain qui
l’accusait d’une relation adultère avec un journaliste.
Manuel Ruiz Vida
Fragment-Marseille,2017, photographie numérique,50 x 70 cm
« L’écrivain Michel Makarius écrit dans son ouvrage Ruines :
la mémoire fonctionne un peu comme les ruines avec ses
multiples strates…On peut aujourd’hui qualifier de ruines (les
décombres, ruines de guerre, démolitions, friches, chantiers)
entraînant des changements importants…Cités industrielles
désertées : la ruine est un motif de notre époque, son décor,
la forme dans laquelle elle se pense et se rêve. Loin de la
colonne antique dont les romantiques ont pu faire leur modèle,
la ruine contemporaine c’est le récit et le miroir d’un
présent qui contemple, non sans frissons, son propre espace
déserté, rendu à la vie des choses.
La ville sinistrée, abandonnée ou détruite aimante nos
images : rocades explosées, immeubles à l’abandon…Nos ruines
actuelles n’ont pas d’âge, elles nous situent dans un futur
indéterminé, comme infini.»
Fragments -Marseille fait partie d’une série de photographies
numériques commencée en 2017 à Marseille où de nombreux
chantiers sont en cours. Certaines images trouvent un écho
dans ma recherche picturale. De par sa composition l’image
apparaît comme un tableau photographique.
Cela tient parfois du collage ou du photo montage, certaines
parois murales semblent avoir été arrachées, découpées comme
du papier. L’aspect graphique et coloré accentue cette idée.
Le fond situé dans l’axe vertical de l’image où l’on perçoit
les étages d’un logement semble venir au second plan et se
confondre avec celui-ci. Je m’intéresse à cet instant, durant
le processus du travail de démolition où les édifices ont été
partiellement détruits, où ne subsistent que certaines parties
préservées. Michel Makarius écrit «[Il est vrai que d’une
certaine façon les chantiers ont à voir, certes différemment,
presque à l’inverse des ruines, avec le temps. Il ne s’agit
pas ici du passé mais du futur. Et avec le chantier on a une
ouverture vers l’avenir, la construction d’une autre
histoire. ]»
Marc Chostakoff
Lac de Serre Ponçon ⌗1, 2014, tirage numérique, 50 x 70 cm
« À l’encontre de toute classification de son travail à un
unique médium, Marc Chostakoff se définit comme un « plasticien
de l’image ». Sans doute est-ce parce que transpirent de sa
recherche photographique des réminiscences des techniques de
gravure – qu’il explore depuis sa sortie de l’École des Beaux
Arts de la ville de Marseille, en 1985 jusqu’à aujourd’hui, et
dont il conserve le besoin de sonder la surface de l’image
photographique. Sans doute est-ce surtout parce que l’image est
véritablement modelée au sens étymologique du terme "plastique"
par des altérations numériques.(…) »
Extrait du texte de Charline Bourcier, «L’altération numérique
dans les images de paysage de Marc Chostakoff»