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Rapport intermédiaire pour l’INSEE – ESSnet ESeG Rédigé par Cédric Hugrée, Etienne Penissat, Alexis Spire Pertinence et portée du clivage entre public et privé en Europe Pertinence et portée du clivage entre public et privé en Europe......................................................... 1 1) Public/privé : un clivage absent de la réflexion sur ESeC........................................................... 2 2) Une différence qui perdure à l’échelle nationale.......3 A) L’Allemagne...............................................4 1) Histoire et configuration du secteur public..............4 2) Les évolutions statistiques..............................4 3) Les études disponibles...................................5 B) La Grande Bretagne........................................5 1) Définition et périmètre de l’emploi public en Grande- Bretagne......................................................... 5 2) Le clivage public/privé et la question de la middle class 6 3) Des différences de caractéristiques des salariés du public et du privé à leurs pratiques distinctives.......................9 C) Les pays scandinaves.....................................10 1) Définition et périmètre de l’emploi public dans les pays scandinaves..................................................... 10 2) Les débats sur la public sector class...................11 3) Une variable secondaire dans les travaux récents........15 3) Le halo du secteur public européen....................15 A) Le rapprochement des conditions de travail entre public et privé 16 B) Les cercles concentriques du secteur public..............16 C) Approcher le secteur public depuis les Labor Force Survey 2010 et 2011......................................................16 1) Une première approximation statistique du secteur public européen depuis la NACE (PUB 3).................................16 2) Deux définitions supplémentaires du secteur public à partir d’ISCO 08 (niveau 2) et de la NACE (PUB 2, PUB 1)........21 1

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Rapport intermédiaire pour l’INSEE – ESSnet ESeG

Rédigé par Cédric Hugrée, Etienne Penissat, Alexis Spire

Pertinence et portée du clivage entre public et privé en Europe

Pertinence et portée du clivage entre public et privé en Europe...........................1

1) Public/privé : un clivage absent de la réflexion sur ESeC....................................2

2) Une différence qui perdure à l’échelle nationale...................................................3A) L’Allemagne............................................................................................................................... 4

1) Histoire et configuration du secteur public...................................................................................42) Les évolutions statistiques....................................................................................................................43) Les études disponibles............................................................................................................................5

B) La Grande Bretagne................................................................................................................51) Définition et périmètre de l’emploi public en Grande-Bretagne..........................................52) Le clivage public/privé et la question de la middle class........................................................63) Des différences de caractéristiques des salariés du public et du privé à leurs

pratiques distinctives................................................................................................................................................... 9C) Les pays scandinaves........................................................................................................... 10

1) Définition et périmètre de l’emploi public dans les pays scandinaves...........................102) Les débats sur la public sector class..............................................................................................113) Une variable secondaire dans les travaux récents...................................................................15

3) Le halo du secteur public européen.........................................................................15A) Le rapprochement des conditions de travail entre public et privé.....................16B) Les cercles concentriques du secteur public...............................................................16C) Approcher le secteur public depuis les Labor Force Survey 2010 et 2011.......16

1) Une première approximation statistique du secteur public européen depuis la NACE (PUB 3)................................................................................................................................................................ 16

2) Deux définitions supplémentaires du secteur public à partir d’ISCO 08 (niveau 2) et de la NACE (PUB 2, PUB 1).......................................................................................................................................21

3) Les trois définitions du secteur public européen à l’épreuve du sexe et du diplôme.............................................................................................................................................................................................. 23

Conclusion temporaire...................................................................................................... 27

Bibliographie......................................................................................................................... 28Sur l’ensemble des pays européens.....................................................................................................28Sur l’Allemagne............................................................................................................................................29Sur la Grande-Bretagne.............................................................................................................................29Sur la Scandinavie........................................................................................................................................30

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Cette contribution part d’un constat et d’une interrogation. Pour l’instant, les projets de nomenclature harmonisée à l’échelle européenne ne comportent aucune distinction entre travailleurs du secteur public et travailleurs du privé. Pourtant, il nous a semblé que cette « grande différence » (Singly et Thélot 1988) a une pertinence et qu’il était possible de le montrer, en s’appuyant à la fois sur la littérature existante et sur les sources statistiques disponibles.

1) Public/privé : un clivage absent de la réflexion sur ESeCDurant les années 1970, l’essentiel du débat sociologique au niveau européen se situait entre des chercheurs décrivant le monde social en termes de strates (principalement structurées par une échelle des prestiges) et ceux analysant la société selon une division en classes sociales (où l’appartenance au secteur public est une dimension parmi d’autres). A partir des années 1980, le débat s’est déplacé, opposant désormais d’un côté ceux qui considèrent que strates et classes sociales n’ont plus de pertinence eu égard aux nouvelles formes d’inégalités et ceux qui continuent à plaider pour des études statistiques fondées sur une lecture en termes de classes sociales. Pour les premiers, l’enjeu est de découpler le travail du statut social, en défendant l’idée que l’identité professionnelle n’est plus le principal marqueur social mais une composante parmi d’autres. Pour les seconds, la position dans le système économique de production demeure un principe structurant des inégalités et pour en rendre compte, la plupart s’appuient sur les préconisations du sociologue John H. Goldthorpe qui propose un schéma de classe censé être valable pour tous les pays développés.Face aux attaques de ceux qui dénient aux classes sociales tout pouvoir explicatif, la nomenclature EGP (pour Erikson, Goldthorpe et Portocarero) pouvait apparaître à certains comme la réponse la plus adaptée car elle rend possibles des comparaisons statistiques entre pays européens. Elle permet de comparer dans le temps et dans l’espace les différents régimes de mobilité sociale des principaux pays industrialisés. C’est tout le sens du projet Comparative Analysis of Social Mobility in Industrial Nations (Casmin) (Erikson, Goldthorpe and Portocarero 1979; Erikson and Goldthorpe 1992). Principalement conçue en référence aux structures sociales britanniques et suédoises (Penissat et Rowell, 2012), la nomenclature EGP n’intègre pas le clivage public/privé comme variable de description et de délimitation des groupes sociaux voire des sous-groupes qui les composent. Ce clivage est absent de la nouvelle nomenclature britannique officielle refondée à partir d’EGP mais aussi et surtout du projet ESeC élaboré par ces sociologues de la mobilité sociale (Rose and al., 2001 ; Rose and Harrison, 2006). Dans le cadre du consortium ESeC, cette question a été soulevée par les travaux français et plus généralement lorsqu’il a fallu décrire les structures sociales des pays du Sud de l’Europe (Rose et Harrison, 2010). Mais, son intégration dans les variables constitutives du prototype ESeC ne fait pas consensus parmi les experts appelés à se prononcer. Elle n’a donc pas été retenue même s’il est admis que les chercheurs auront intérêt à croiser ESeC avec le secteur d’emploi (public/privé). Trois principaux arguments sont avancés pour justifier ce choix. Premièrement, les sociologues utilisant EGP considèrent qu’il existe de trop fortes différences entre États quant à la définition et au périmètre de ce que l’on peut entendre par « secteur public » (Rose and al., 2001, p. 81). Prendre en compte cette variable serait donc trop contraignant et trop coûteux. Deuxièmement, la distinction public/privé n’entre pas (ou trop peu) dans le schéma de classe conçu par Goldthorpe et Erikson. En effet, le concept de « relation d’emploi » (employment relationship) distingue les professions en lien avec leur position sur le marché du travail (employeur/salariés) et dans l’entreprise (des managers aux emplois les moins qualifiés, les routines occupations). De plus, ce concept se veut unidimensionnel, contrairement à la nomenclature française des PCS qui articule plusieurs logiques et dont second niveau distingue les salariés en fonction de leur appartenance au privé et au public. La théorie sociologique sous-jacente à ESeC exclut de

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prendre en compte le cadre juridique qui peut participer à la définition des emplois ou le type de travail qu’ils impliquent (distinction entre mission de service public et mission marchande). Pourtant, l’un des critères pour mesurer la relation d’emploi (le continuum entre « service relationship » et « labour contract ») est celui des perspectives de carrière et pour en rendre compte, le clivage public/privé s’avère déterminant. On peut en effet faire l’hypothèse que l’appartenance au secteur public favorise une plus grande sécurité de l’emploi. Si elle a parfois été évoquée (Rose et Harrison, 2010), cette question a été rapidement abandonnée au motif qu’ESeC ne saurait être une nomenclature tenant compte des types de contrats de travail. La nature des contrats de travail (précaires ou pas, relevant du public ou du privé, etc.) doit demeurer une variable indépendante, au même titre que les niveaux de revenus et d’éducation. Troisièmement, cette distinction, même en lien avec la sécurité de l’emploi, serait d’autant moins pertinente que, dans un contexte de remise en cause du Welfare State (privatisation, sous-traitance de certaines missions publiques, new public management), les conditions d’emploi et de travail du secteur public se rapprochent de celles du secteur privé. En dépit de des divers arguments, la pertinence de ce clivage dans le futur prototype ESeG mérite d’être analysée de façon plus approfondie. C’est d’ailleurs ce qu’invitaient à réaliser le rapport de Bernard Grais en 1999, puisqu’il observait qu’au moins trois pays (France, Allemagne, Espagne) l’utilisait dans leur nomenclature nationale, et le rapport de David Rose en 2001. Le rapprochement des conditions d’emploi et de travail devrait être documenté et mis à l’épreuve de la comparaison entre pays européens. De plus, bien que le Welfare State a subi de nombreuses transformations et des tentatives pour rapprocher son mode de fonctionnement du privé, il n’est pas sûr que des formes d’inégalités ou de différenciations entre secteur privé et secteur public ne se soient pas accrues puisque le secteur privé à lui aussi connu de nombreuses mutations. S’il est établi que les conditions de travail entre secteur public et privé tendent à se rapprocher, on peut faire l’hypothèse que des différences demeurent, voire s’accroissent : les salariés du public entretiennent un rapport à l’Etat, à leur mission et à l’avenir qui demeure spécifique. On pourrait notamment se demander dans quelle mesure ce clivage détermine aussi des différences de pratiques politiques, culturelles, de consommation, etc.

2) Une différence qui perdure à l’échelle nationaleParmi les travaux sociologiques, la question du clivage public/privé s’est posée différemment en fonction des contextes nationaux. Elle est plus présente dans les pays où le poids de la fonction publique était et demeure très important (les pays scandinaves) et/ ou son statut est constitutive de différences très prononcées (Allemagne). L’étude qui suit interroge le clivage public/privé en Allemagne, Grande-Bretagne et dans les pays Scandinaves. Cette approche a un triple intérêt. D’abord, elle porte sur des pays qui ont un poids important au sein de l’UE et qui sont très impliqués dans le débat sur les projets de nomenclature socio-économique européenne. Ensuite, ce sont des pays qui, tout en étant marqués par des histoires différentes quant à la construction de l’Etat et à la définition de son périmètre, ont un secteur public qui joue un rôle important et concerne une part non négligeable de leur salariat. Or, lors des débats sur ESeC, ses promoteurs ont insisté sur le fait que la prégnance du clivage public/privé était surtout le fait des pays du Sud, la France en tête. Il est cependant intéressant de regarder comment ce clivage est pris en charge par la statistique publique et par les études sociologiques dans ces pays dont on dit a priori qu’il y joue un rôle moins structurant. Enfin, dans ces pays, la réflexion sur les inégalités sociales ou sur les transformations des classes sociales est restée très dynamique, même dans les années 1980-1990, et s’est déployée sur la scène internationale dans des projets de comparaison entre pays européens ou pays occidentaux. Ainsi, dans ces pays, la nomenclature EGP, proche d’ESeC, s’est imposée depuis longtemps comme une référence pour les sociologues mais aussi pour la statistique publique. Il est donc pertinent d’y observer comment se structure l’objectivation statistique et le débat sociologique sur ce clivage public/privé.

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A) L’Allemagne

1) Histoire et configuration du secteur publicL’organisation de la fonction publique en Allemagne remonte à la fin du 18ème siècle, lorsque l’Etat fédéral s’est constitué sur la base de trois piliers : l’administration fédérale (Bund), celle du Land (Bundesländer) et le niveau local (Gemeinden / Gemeindeverbände). Après la Seconde Guerre mondiale, la loi fondamentale adoptée en 1949 reprend les principes de l’administration prussienne.Les fonctionnaires ont un statut (Berufsbeamtentum) qui prend sa source dans l’histoire de la Prusse et comporte certaines obligations liées au caractère souverain de leur mission (Derlien 2003). Ils bénéficient de la garantie de l’emploi, ne peuvent pas faire grève et sont supposés faire leur carrière au service de la puissance publique. Ils sont recrutés par concours, rémunérés selon leur grade et leur statut est garanti à vie. On les trouve principalement dans les postes de l’administration, au niveau fédéral et régional : ils sont souvent policiers, soldats, juges ou agents des impôts. En Allemagne, les fonctionnaires ont dans l’ensemble un haut niveau de formation et de qualification : en 2003, 24 % d’entre eux se classent dans le HöhererDienst, équivalent à A + composé à un tiers de femmes ; plus de 50 % sont dans le GehobenerDienst, équivalent à A et composé pour moitié de femmes ; moins de 25 % appartiennent au MittlererDienst, équivalent de la catégorie B ; l’Einfacher Dienst (catégorie C) représente moins de 1 % des effectifs (Fons et Meyer 2005).Les salariés du public sont des employés et des ouvriers qui travaillent habituellement dans le secteur social, la santé publique et au niveau des gouvernements locaux, c’est-à-dire des communes et des regroupements de communes (Gemeinden / Gemeindeverbände). Ils ne font pas automatiquement toute leur carrière sur le même emploi et peuvent être licenciés. Leur salaire peut être négocié (sur la base des conventions collectives) et dépend non pas de leur grade mais de l’emploi qu’ils occupent. Les employés appartiennent pour la plupart au MittlererDienst (57,5 %), pour un quart à la catégorie des GehobenerDienst et 15 % à celle des HohererDienst. Les ouvriers sont tous ceux qui exercent des activités manuelles et relèvent des conventions collectives des ouvriers du privé.La dichotomie entre fonctionnaires et salariés du public est donc relative car certains fonctionnaires peuvent avoir des contrats de travail limités et certains salariés du public peuvent exercer le même emploi pendant longtemps et avoir une progression de salaire comparable à celle des fonctionnaires. La décision de savoir si une personne nouvellement recrutée doit l’être en tant que fonctionnaire ou en tant que salarié du public est même assez arbitraire : des employés exerçant exactement le même métier peuvent avoir des statuts différents, le meilleur exemple étant celui des enseignants (Keller 57).

2) Les évolutions statistiquesLe nombre de salariés travaillant pour les pouvoirs publics a constamment progressé à l’Est et à l’Ouest jusqu’à la chute du Mur de Berlin. En RFA, le nombre de fonctionnaires passe de 800 000 en 1950 à plus de 2 millions en 1993 ; en RDA, il avait atteint environ 2,2 millions mais comptait une bonne part de services de maintien de l’ordre (police, agents de renseignement) et toutes les administrations locales et régionales avaient été supprimées dans les années 1950. Le secteur public a donc dû être totalement réorganisé après l’unification du pays. L’emploi public a alors connu un repli conséquent dans l’Allemagne réunifiée : les effectifs passent de 6,4 millions en 1991 à 4,2 millions en 2003 (1 600 000 fonctionnaires d’administrations1 et juges, 184 000 soldats, 1 842 000 employés et 571 000 ouvriers). Cette diminution, principalement due à la privatisation d’entreprises publiques comme la Poste, est

1 En Allemagne, les enseignants sont majoritairement fonctionnaires et plus rarement employés (Angestellte) mais aucune statistique officielle ne donne la répartition selon le statut d’emploi.

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plus marquée dans les Länder de l’Est. Parallèlement à la diminution des effectifs, on constate une augmentation des emplois à temps partiel : ils représentent aujourd’hui plus d’un quart des effectifs de la fonction publique allemande et concernent majoritairement des employés et ouvriers travaillant dans les Länder.La statistique publique repose sur le concept très ancien de statut d’occupation (Stellung im Beruf) qui répartit la société entre ouvriers (Arbeitern), employés (Angestellten) et fonctionnaires (Beamten). Cette distinction élémentaire a une justification institutionnelle dans le système de sécurité sociale allemand. La partition entre ouvriers, employés et fonctionnaires ne répond pas seulement à des différences dans le contenu ou le type de métier mais renvoie aussi à des droits différents : la retraite des fonctionnaires est de la responsabilité directe de l’Etat tandis qu’il existe une caisse fédérale d’assurance pour les employés (Bundesversicherungsanstalt fûr Angestellte) et différentes agences d’assurance des Länder (Landsversicherungsanstallten) pour les ouvriers.Cette représentation de la société allemande selon le statut d’emploi a été beaucoup critiquée par les sociologues allemands, à la fois en raison de son obsolescence et de l’impossibilité d’en tirer des enseignements pour des comparaisons avec d’autres pays. A l’instar de Walter Müller, beaucoup considèrent que l’utilisation de la nomenclature de Goldthorpe est le seul moyen de rendre compte des différences de caractéristiques socio-économiques des individus (Müller 1997).

3) Les études disponiblesLes travaux traitant du clivage entre secteur public et privé insistent sur quelques différences importantes, celles relatives à la place des femmes, au temps partiel et au niveau de salaire. Les femmes occupant des emplois dans le secteur public sont concentrées dans les secteurs de l’éducation, de la santé publique et les services postaux. Le temps partiel s’est diffusé des emplois salariés à ceux de fonctionnaires : il est passé de 6 % dans les années 1960 à 20 % au milieu des années 1990 (avec des taux plus importants chez les salariés que chez les fonctionnaires), ce qui doit être comparé avec les 16 % du secteur privé (Keller 1999 : 61).En termes de rémunérations, il reste des différences importantes. A diplômes équivalents, les femmes sont mieux payées dans le secteur public tandis que pour les hommes, c’est le secteur privé qui est plus rémunérateur (Melly 2005).

B) La Grande Bretagne

1) Définition et périmètre de l’emploi public en Grande-Bretagne

Il n’existe pas contrairement à la France de statut de la fonction publique unifié en Grande-Bretagne. Il faut distinguer le Civil service composé des civils servants qui travaillent pour le gouvernement central et un cercle plus vaste d’agents employés, plus ou moins directement, par des administrations locales ou des agences d’exécution pour réaliser des missions de service public. Les premiers travaillent directement dans des administrations centrales et sont considérés comme des « serviteurs de la couronne » qui peuvent être démis de leur fonction sur décision politique. L’organisation du recrutement et de l’avancement qui prévaut correspond à un système d’emploi et non de carrière. Cependant, les conditions d’emploi de ces civils servants sont les plus proches de celles des fonctionnaires français puisque leur carrière est relativement protégée par le législateur qui leur a octroyés des droits spécifiques. Ils représentent environ 10 % de l’emploi public (Public sector employment) soit approximativement 500 000 agents. Ce noyau dur exclut une grande partie des agents exerçant des missions d’intérêt général comme les magistrats, les policiers, une grande partie des professionnels de santé ou de l’éducation. Ceux-ci sont eux employés par des agences d’exécution sous tutelles des administrations centrales et

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surtout par les collectivités locales (local government service). Ils sont recrutés sur des contrats de droit privé et soumis à la législation générale du travail au même titre que les salariés du privé. A noter, enfin, qu’il existe des public corporations – équivalent des entreprises publiques françaises – mais que ceux-ci ont en grande partie disparu avec les privatisations des années 1980. Il faut en effet insister sur le fait que le fonctionnement et le périmètre du secteur public ont été nettement remodelés dans les années 1980-1990. Ces réformes ont consisté soit à privatiser des entreprises ou des missions publiques (les télécommunications, la gestion des ports, l’aérospatiale, etc.) soit à imposer des modèles d’organisation proches du secteur privé avec le développement des PPP (Public-Private Partnership) et des agences exécutives. À la fin des années 1990, il existait ainsi environ 140 agences employant environ 75 % des civils servants. Enfin, un vaste programme de décentralisation a conduit à ce que l’emploi public soit de plus en plus souvent pris en charge par les collectivités plutôt que par l’État central (Winchester et Bach, 1999).L’absence d’un statut unifié de la fonction publique rend difficile la mesure de l’emploi public. Les écarts sont importants entre séries statistiques qui relèvent de sources administratives ou d’enquêtes (principalement la LFS). À définition équivalente, ces écarts sont de l’ordre de 670 000 salariés (ONS, 2005). L’ONS préfère utiliser les sources administratives pour mesurer le niveau de l’emploi public mais il utilise la LFS pour comparer les caractéristiques des salariés du public et du privé. Au total, on peut cependant estimer qu’entre les années 1980 et 1990, l’emploi public est passé de 7 millions de salariés (soit 30 % de l’emploi salarié) à un peu plus de 5 millions (22%) (Roberts, 2001). Cette chute de l’emploi public a été particulièrement importante dans les public corporations qui ont été privatisés (500 000 emplois passés du public au privé). Pour les années 2000, si la part de l’emploi public dans l’emploi total s’est stabilisé autour de 21%, en revanche, les effectifs sont passés d’un peu plus de 5 millions au milieu des années 1990 a 5,8 millions en 2005. Ceci s’explique notamment par l’augmentation importante des effectifs du National Health Service (NHS) à la fin des années 1990.Le processus de réforme de la fonction publique britannique a donc conduit à une réduction de son périmètre et à un rapprochement des conditions d’emploi des salariés du public et du privé. Cependant, il faut nuancer ce constat. D’une part, la sécurité de l’emploi demeure plus forte dans ce secteur public et ses salariés bénéficient d’un meilleur système d’indemnisation maladie et de pensions (Bach et Winchester, 1999). Ceci s’explique entre autre par le fait que la décentralisation des missions publiques et la multiplication des agences relativement autonomes n’ont remis en cause qu’à la marge le modèle de négociation des conventions collectives au niveau national et professionnel par les syndicats. Ceux-ci, bien que leur pouvoir de mobilisation ait décliné, sont parvenus à résister à la décentralisation des négociations. D’autre part, si la part de l’emploi public stricto sensu a diminué des années 1980 aux années 1990, ceci masque un accroissement des emplois relatifs aux fonctions d’intérêt public. Baccache et Audier ont ainsi montré que si que la part de l’emploi public passait de plus de 25 % à environ 20 % sur cette période, la part des emplois relatifs aux missions d’intérêt public elle n’avait cessé de croître de 24 % à plus de 30 % au début des années 2000. En effet, les missions éducatives, sociales et de santé se sont largement déployées pendant cette période. C’est le poids de ces univers professionnels et de leurs effets sur les différenciations internes au salariat moyen et supérieur qui se retrouve au cœur des débats sociologiques dans les années 1990 et 2000 (Roberts, 2001 ; Crompton, 2008).

2) Le clivage public/privé et la question de la middle class

Contrairement à la France, le débat entre sociologues sur l’existence et le contour des classes sociales n’a pas disparu en Grande-Bretagne dans les années 1980 et 1990 sous le poids des réformes du Welfare State et de la diffusion de la doxa néo-libérale. Au contraire, la discussion

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est restée dynamique et vive notamment en ce qui concerne les nomenclatures socioprofessionnelles. En revanche, la problématique du clivage public/privé y est secondaire. Il n’est d’ailleurs intégré dans aucune des nomenclatures socioprofessionnelles utilisées par les sociologues et/ ou les statisticiens de l’ONS jusque dans les années 1990. Actuellement, la nomenclature officielle refondée au début des années 2000 à partir du schéma de classe de Goldthorpe, ne distingue pas non plus les catégories sociales en fonction de ce critère, même au niveau le plus fin en 46 postes. De ce fait, il est impossible d’obtenir une décomposition des grands groupes socioprofessionnels selon l’appartenance de leurs membres au public ou au privé. Au mieux, les études sociologiques sur la participation politique, les pratiques culturelles ou de consommation utilisent donc la variable public sector, le plus souvent comme variable de contrôle.Pour autant, la question du clivage public/privé n’est pas absente des débats puisqu’elle s’insère dans la problématique plus vaste des transformations et de l’unification ou non de la middle class2. En effet, si la sociologie britannique s’intéresse principalement après 1945 et jusque dans les années 1970 à la formation et aux transformations de la classe ouvrière, dans les années 1980 et 1990 ce sont les middle class qui sont au cœur des polémiques. Dans les années 1970, lorsqu’il met au point son schéma de classe, Goldthope construit une classe supérieure nommée service class qui regroupe les managers, les professionals et les grands patrons (Goldthorpe et al., 1979, Erikson et Goldthorpe, 1992, voir aussi Bidou, 2000). Ce concept de service class, repris à Karl Renner et à Rahl Dahrendorf, correspond à une classe regroupant ceux qui exercent l’autorité déléguée par les dirigeants patronaux et politiques. Cette service class a considérablement grossit avec le développement du capitalisme et de l’État depuis les années 1930, passant de 5 % de la population active à presque 25%. Elle a la particularité pour Goldthorpe d’être une classe ouverte aux promotions sociales – les membres des classes intermédiaires et populaires qui accèdent à des postes de cadres – mais aussi fermée puisque ses membres s’y maintiennent de père en fils. Assurant la reproduction sociale de ses membres, cette service class est aussi représentée comme conservatrice politiquement puisqu’elle aurait intérêt à maintenir l’ordre social et politique établi. A l’opposé, des sociologues comme Lash et Urry tout en observant eux aussi le développement de cette service class considèrent qu’elle participe au basculement d’une société dominée par le capitalisme industriel et par le matérialisme à une autre où l’accumulation d’informations est au cœur du développement du capitalisme et où les valeurs post-matérialistes triomphent. Ils insistent notamment sur le rôle de cette service class dans le développement des nouveaux mouvements sociaux (écologiques, féministes, etc.) (Bidou, 2000). Ils parlent alors de new middle class.La question de l’unité de la service class s’est donc au cours de cette période installée dans le débat sur les classes sociales. L’une des problématiques centrales de ce débat est celle de la différenciation ou non des fractions de cette middle class appartenant au secteur public et privé. Dans une version radicale de ce point de vue, certains sociologues analysent les années 1980 et la période Thatcher comme un tournant où le clivage public/privé prend le pas sur le clivage entre classes sociales (Edgell et Duke, 1991). Avec l’arrivée des conservateurs, le secteur public se trouve menacé par la croissance du secteur privé et par les politiques de privatisation. Le rapport aux services publics se constituerait en conflit central de la société britannique. Par exemple, les managers du secteur public ont des intérêts divergents avec ceux du secteur privé qui mettent la main sur les missions que les premiers assuraient jusque là. Ces sociologues opposent plus largement les salariés et/ ou les usagers du public à ceux du privé. Ce clivage se déploierait spécifiquement dans l’espace politique puisqu’ils notent que les premiers se confrontent par la mobilisation et par le vote aux conservateurs, tandis que les seconds forment

2 L’expression « middle class » ne correspond pas à celle de « classes moyennes » en France mais englobe les classes dominantes et la fraction supérieure des professions intermédiaires françaises. Sur ce point, lire Bidou, 2000.

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le soutien aux réformes de Thatcher (p. 65). Comme le note Roberts (2001), the « public services’ white-collar employees have been at the forefront of campaign to defend the National Health Service and state education ». Dans ce cadre, « a new political cleavage can be envisaged between working-class users together with public-sector managers and professionals on the one side, and the private-sector middle class on the other ».Les sociologues qui autonomisent le clivage public/privé sont cependant minoritaires. Plus nombreux sont les travaux qui insèrent ce clivage dans un effort pour différencier les managers et les professionals que Goldthorpe a regroupé et unifié sous le concept de service class. Ce sont notamment les sociologues de Manchester autour de Mike Savage qui portent ce questionnement. En s’inspirant de la sociologie de Bourdieu, notamment du concept de capital culturel, et de celle de Wright, notamment du concept de capital organisationnel, ces sociologues distinguent trois logiques d’exploitation et de domination fondées sur la propriété économique, la culture et l’exercice de l’autorité dans une organisation (property, culture, bureaucracy) (Savage et al., 1992 ; Butler et Savage, 1995). Les années 1980-1990 seraient marquées par un déclin de la bureaucratie, qui se matérialise par la diminution du marché intérieur des firmes, au profit d’un poids toujours plus importants des compétences et donc du capital culturel. Dans ce cadre, la réduction du secteur public réduit les pouvoirs des bureaucrates mais pas celui des professionals, dont les sociologues notent qu’ils connaissent des augmentations de revenu plus importants que les autres groupes professionnels. Le déclin des effectifs ouvriers du public est compensé par le développement des secteurs sociaux, éducatifs et de santé. Les processus de réforme des administrations ne doivent pas masquer un accroissement récurrent des dépenses publiques. Et si l’État n’est plus toujours en position d’employeur direct, il continue d’intervenir comme donneur d’ordre. De ce fait, la transformation du secteur public ne modifierait qu’assez peu la market situation et work situation des salariés du public. C’est notamment le cas des professionals dont l’autonomie et le pouvoir continuent d’être fondés sur l’intervention de l’État (certification et diplôme, régulation de ces secteurs, dépenses sociales, etc.) (Savage et al., 1992, p. 72-76). Se distinguant de l’approche de Goldthorpe qui envisage les classes sociales essentiellement à partir des positions sociales dans l’entreprise, ces sociologues, en s’inspirant de Bourdieu, explorent la formation et la cohésion des classes sociales en observant les styles de vie (lifestyles), les pratiques culturelles et les identités mobilisées par leur membres (Devine et al., 2005). Ils observent notamment les pratiques de consommation et de loisirs en s’appuyant sur les enquêtes forgées par les entreprises de marketing et sur les enquêtes électorales. Ils identifient alors trois fractions ou trois groupes au sein de la middle class. Un groupe dont les pratiques culturelles et de loisirs sont ascétiques et qui correspondent plutôt au public sector professionals (les professeurs, les médecins, les employés du welfare state), un groupe qualifié de « post-moderne » composé des private sector professionals et un groupe « indifférencié », autrement dit dont l’engagement culturel est plus faible et moins distinctif, regroupant plutôt les managers du privé et du public (Savage, 1992, p. 108-110). Ce découpage, bien qu’il ne corresponde pas entièrement à un clivage public/privé, est donc informé par la question de l’appartenance au public sector. Ces sociologues insistent sur le fait que les salariés du public se distinguent des salariés du privé par un niveau de capital culturel supérieur. Ceci implique alors un rapport différencié à l’État qui s’incarne dans l’orientation politique des membres de la middle class. À partir des enquêtes électorales, ils montrent que les professionals votent relativement plus pour le Labour, tandis que les managers votent relativement plus pour les conservateurs (p. 194-197). Ce clivage recoupe alors celui entre public et privé : dans le secteur privé, les managers et les professionals votent plus souvent pour les conservateurs, tandis que dans le public, le vote pour la gauche est très élevé. Cette différenciation politique implique deux rapports différents à l’État : les professionals, souvent payés ou dépendant financièrement de l’État, ont un intérêt à défendre le maintien d’un certain niveau d’intervention de celui-ci

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dans la société, tandis que les managers, souvent employés dans le privé y sont moins enclins car ils bénéficient de l’externalisation et de la privatisation des missions publiques. De plus, cette différenciation n’est pas seulement à mettre en lien avec les intérêts directs de ces fractions de classe : la proximité d’une grande partie des professionals au secteur public est déterminée par le fait que ses membres s’appuient principalement sur leur capital culturel, capital fortement dépendant de l’État qui par le biais du système scolaire assure sa reproduction et sa valorisation. Ils concluent alors que « the rise of this new group might be evidence for a new division within the middle classes, between a public sector, professional, increasingly female, middle class on the one hand, opposed to an entrepreneurial, private sector, propertied middle class on the other ». (p. 218). On retrouve là l’idée d’un clivage, également débattu en France, entre classes moyennes du public et classes moyennes du privé (Groux, 2005).L’importance du clivage public/privé dans la structuration des groupes sociaux doit toutefois être nuancée. Ces sociologues montrent aussi que les inégalités entre la middle class et la working class se maintiennent voire se renforcent sur la période, les différenciations internes à la middle class n’étant que secondaires et ne se déclinant pas sur toutes les dimensions de la vie sociale – par exemple en matière de mobilité sociale ou d’accouplement, ces différenciations sont peu opérantes. Dans ce cadre, la distinction public/privé ne traverse pas de la même manière toutes les classes sociales. De plus, l’absence de nomenclatures socioprofessionnelles déclinant le clivage public/privé pour tous les groupes sociaux, ne permet pas une analyse systématisée de ce clivage. La notion de « secteur public » est donc variable selon les enquêtes et ne s’articule pas avec celui des positions socio-économiques. Enfin, il faut noter que ce débat très vif dans les années 1990, semble prendre moins d’importance dans les années 2000.

3) Des différences de caractéristiques des salariés du public et du privé à leurs pratiques distinctives

Les publications de l’ONS concernant le clivage public/privé sont peu importantes. Elles se contentent en général de dresser une évolution de l’emploi public selon ses différentes composantes (central government, local authorities, public corporations). Toutefois, il faut pointer le fait que l’appareil statistique a été amélioré dans les années 2000. Un effort d’harmonisation des définitions et la systématisation des comparaisons entre la LFS et les sources administratives ont été entrepris. Ceci s’est notamment traduit par la publication de données comparant les caractéristiques sociodémographiques et les conditions d’emploi des salariés du privé et du public (ONS, 2005). On y observe que le salariat du public est très féminisé (65 % de femmes en 2004) par rapport au privé (40 % de femmes). De ce fait, le temps partiel y est plus développé, 30 % des emplois contre 25 % dans le privé. De même, la part des agents du public âgés (plus de 50 ans) est plus importante que dans le privé. Ceci va de pair avec une sécurité de l’emploi, mesurée par l’ancienneté chez le même employeur, plus élevée dans le public que dans le privé, même si elle y diminue. En 2004, les salariés qui sont dans leur emploi depuis 10 ans et plus représentent 40 % des salariés du public contre 28 % de ceux du privé. Pour compléter cette cartographie, plusieurs études montrent que les ressources accompagnant l’emploi sont plus favorables dans le secteur public : l’accès à la formation y est plus élevé que dans le privé (Gallie, 2007), de même que celui à une couverture santé ou un meilleure niveau de pension (Bach et Winchester, 1999 Meyer et Bridgen, 2008). Plusieurs études ont aussi pointé le resserrement des écarts de salaire avec le privé et le fait que les femmes y sont mieux payés que dans le privé, de même que les salariés peu qualifiés (Lucifora et Meurs, 2004).Ces différences de profils sociodémographiques et de conditions d’emploi peuvent se traduire par des pratiques politiques, sociales et culturelles différentes. Si la carte de ces pratiques doit être dressée, on peut en donner quelques exemples. Tout d’abord, l’engagement collectif des salariés du public est nettement plus élevé que celui des salariés du privé. Bien que le taux de

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syndicalisation ou le nombre de conflits sociaux ait diminué dans le public et dans le privé, leur niveau est beaucoup plus important dans le public. En 2004, le taux de syndicalisation est de presque 60 % dans le public contre 16 % dans le privé. Les plus gros syndicats appartiennent au secteur public, ce qui n’était pas le cas dans les années 1970. Sur le plan de l’orientation politique, plusieurs enquêtes montrent que le clivage gauche/droite est corrélé avec la distinction public/privé (Dorling et al., 2001 ; Knutsen, 2005), même si elle moins significative que dans les pays nordiques. Sur le versant des relations familiales, certaines études montrent que le fait de travailler dans le public sector, parce que cela implique des horaires de travail moins flexibles et une pression hiérarchique moins importante, favorise une meilleure conciliation travail et vie de famille. Les salariés du public seraient ainsi moins exposés aux conflits familiaux (Gallie, 2007). Enfin, concernant les pratiques culturelles, les travaux les plus récents parce qu’ils mobilisent la nomenclature officielle britannique n’intègre pas ce clivage dans les exploitations des enquêtes statistiques. Ils montrent qu’au relatif désinvestissement culturel des classes populaires s’oppose un engagement très prononcé de la middle class britannique. Au sein de celle-ci, les publics servants et les enseignants se montrent plus « omnivores » que les managers du privé et plus proches de la culture légitime (Savage et al., 2009, p. 181).Ces différences mais aussi la structuration du débat autour de l’unité de la middle class et du clivage public/privé se retrouvent pour les pays scandinaves.

C) Les pays scandinaves

1) Définition et périmètre de l’emploi public dans les pays scandinavesLes pays scandinaves se caractérisent encore aujourd’hui par l’existence de l’un des secteurs publics les plus importants en Europe. Que l’on mobilise les sources de la statistique publique de chaque État ou celle de l’OCDE, le Danemark, la Finlande, la Norvège et la Suède se distinguent en effet des autres pays européens par la proportion qu’occupe l’ensemble des emplois du secteur public dans l’emploi total (entre 25 % et 30 %, OCDE, 2012). Cet indicateur les place de fait en tête des pays les plus « administrés » d’Europe, juste avant la France (environ 22 %). Alestalo, Bisley et Furåker (1991a) rappellent que cette place unique de l’emploi public trouve son origine dans les années 1970 et 1980, où « la croissance de l’emploi total en Scandinavie est par dessus tout due au secteur public » (Ibid., p. 42). Croisant, au début des années 1990, les données du Danish Personnel Statistics of public sector (Danemark), du Population Censuses (Finlande), des Labour Force Surveys (Norvège et Suède) et des données publiées par l’OCDE, les auteurs soulignent les nombreux enjeux statistiques d’une comparaison des secteurs et des emplois publics liés aux l’État sociaux nationaux. Ils notent que la définition du secteur public dans les enquêtes de l’OCDE s’appuie sur le System of National Accounts qui exclue la plupart des entreprises publiques et ne tranche pas la question des institutions privées subventionnées par l’État (Ibid., p. 38), à l’image des médecins privés suédois depuis 1972. Les sources statistiques nationales se font quant à elle l’écho des histoires salariales nationales et de l’organisation territoriale des services publics qui limitent les possibilités de comparaison de pays aux structures sociales et économiques pourtant relativement proches. Ainsi le Danish Personnel Statistics of public sector couvre à la fois les fonctionnaires statutaires (régis par la loi plus que par les accords collectifs et dépourvus du droit de grève), les salariés sous contrats, et les salariés « subventionnés » (tilskudsområde) appartenant à des organisations ou entreprises subventionnées par les pouvoirs publics. La Norvegian Labour Force Surveys dispose quant à elle d’une question subjective dans laquelle les enquêtés se classent eux-mêmes comme « salariés du public » ou « salariés du privé ». La Swedish Labour Force Surveys, enfin, n’intègre qu’une partie salariés des entreprises détenues par les pouvoirs publics (environ 5 % de la population active).

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Ces constructions statistiques différentes n’interdisent cependant pas de faire se confronter leurs résultats. Ceux-ci révèlent « qu’à l’exception de la Norvège, la croissance de l’emploi public [dans les pays scandinaves] a été plus importante que celle de l’emploi total » (Ibid., p. 43) dans les années 1970 et dans une moindre mesure dans les années 1980. Les différences entre les pays Scandinaves existent (la Suède détenant par exemple, au terme de cette période, la part la plus importante de salariés du secteur public), mais ces données indiquent que dans tous ces pays, les emplois se sont le plus développés dans les activités liés à la politique sociale des États : éducation, santé, services sociaux (Ibid., 55). Enfin, la « féminisation marquée » des marchés du travail de ces différents États au cours de la période 1970-1985 est elle-même étroitement liée au fort développement des emplois publics. Ainsi, en 1985, près d’une femme sur deux qui travaille au Danemark, en Norvège ou en Suède, est salariée du secteur public ; elles n’étaient qu’une sur trois, 15 ans auparavant (Ibid., p. 51).

2) Les débats sur la public sector classCette grande transformation morphologique concomitante des marchés du travail et de la stratification sociale des pays Scandinaves est allée progressivement de pair avec l’irruption de l’objet « secteur public » dans la sociologie scandinave des classes et des groupes sociaux de l’époque. Tout au long de la décennie 1980 et au début des années 1990, plusieurs auteurs débattent du statut sociologique des salariés du secteur public et de leur rôle dans la structure de classe des sociétés scandinaves. Alestalo, Bisley et Furåker (1991b) soulignent ainsi, au début des années 1990, que dans l’écrasante majorité des approches théoriques de la structure de classe des sociétés capitalistes, les salariés du public ne sont pas rendus visibles. Dans les travaux des néo-marxistes [Poulantzas, Wright], la distinction public-privé ne revêt pas beaucoup de signification (Alestalo et al., 1991b., p. 96), seule l’étude de Theborn sur la structure de classe suédoise (1981, non traduite) recense les différences entre ces deux secteurs, sans connaître de suites. Les auteurs font un constat identique pour les travaux d’inspiration « néo-weberienne » [Golthorpe, Parkin] qui n’accordent pas plus d’attention à cette distinction. Ils écrivent ainsi que Golthorpe « voit la service class, qui correspond aux cadres du management, administratif ou technique, comme une classe en expansion sans aucune distinction entre les salariés du public et ceux du privé »3 (Alestalo et al., 1991b., p. 97). Pour Alestalo et al., la raison pour laquelle les recherches néo-Weberienne de l’époque sur la structure de classe n’accordent pas à la distinction public-privé de caractère important tient au fait que ces salariés ont des espérances de vie proches et que les différences entre les ouvriers, la classe moyenne et la classe supérieure sont, de ce point de vue, bien plus importantes (Ibid., p. 98). Dans l’inventaire rapide qu’ils livrent des travaux liés à la théorie du capital culturel (Bourdieu, Gouldner), Alestalo et al. retiennent que les travaux de Bourdieu considèrent la différenciation entre les salariés du public et ceux du privé comme importante mais peu enquêtée (Alestalo et al., 1991b., p. 99)4. L’intérêt de l’analyse bibliographique d’Alestalo, Bisley et Furåker est de revenir en détail sur les recherches scandinaves étudiant la distinction sociologique entre le secteur public et secteur privé en matière de stratification sociale. La critique de Arhne et Leiulfsrud (1978, non traduite) de l’approche de Poulantzas débouche par exemple sur une analyse séparée des salariés du secteur public et privé en appliquant une catégorisation des classes sociales similaire dans les deux secteurs. Ils concluent ainsi que le secteur public et l’État sont partis prenantes d’un conflit de classes qu’il faut penser autant à l’intérieur de l’État qu’à l’extérieur (Alestalo et al., 1991b., p. 101). Mais, parmi les recherches scandinaves, ce sont les travaux sur le Danemark de Hoff (1985 ; Hoff, Jørgen 1989), d’inspiration néo-marxiste, qui défendent l’idée « que les salariés

3 Les citations sont traduites par nous.4 Ce point tient sans doute à l’état de la traduction de ces travaux en anglais au moment où les auteurs

écrivent puisque The State Nobility n’a été traduite et édité qu’en 1996.

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du public constituent un groupe spécial, qui pose un problème spécial à l’analyse des classes sociales et mérite de ce fait un analyse spéciale » (Hoff cité par Alestalo et al., 1991b., p. 101). Sans les considérer comme une classe sociale selon la terminologie marxiste, Hoff réfute l’idée que le secteur public s’organise à l’identique du secteur privé et défend l’idée d’un groupe social en partie autonome des salariés du privé. L’étude de Lafferty (1988, non traduite) analyse les réponses données par les membres de la « public sector class » à la question de la « conscience de classe » selon la définition de Mann (1973). Pour Lafferty (cité par Alestalo et al. 1991, p. 102), les « white collar public employees » n’ont pas d’identité de classe propre sans doute parce qu’il leur est difficile de s’opposer à la classe ouvrière et à la bourgeoisie en faisant leur les principes de l’opposition de classe, selon la définition qu’en donne l’orthodoxie marxiste. Participant à la naissance d’un débat sur la « public sector class », Knutsen (1986, non traduit ; Hoel et Knutsen, 1989), défend la thèse qu’en Norvège, en Suède et au Danemark, la classe moyenne du secteur public forme une classe sociale spécifique, qu’il nomme la « nouvelle classe » (Knutsen cité par Alestalo et al., 1991b., p. 101-102). Discutant notamment l’approche de Goldthorpe, il montre que les « white collar public employees » sont, à bien des égards, plus radicaux que les salariés occupant des positions identiques dans le privé. À cette époque (données de la première moitié des années 1980), la classe sociale d’appartenance a le plus grand impact sur la préférence politique partisane aussi bien en Suède, en Norvège qu’au Danemark. Mais, Hoel et Knutsen note qu’au Danemark et en Norvège, le secteur d’emploi a un effet important et qu’elle est la variable la plus discriminante dans la déclaration de valeurs « post-matérialistes », « non économiques » (1989, p. 198). Cette progressive actualité de la distinction public/privé dans les débats de la sociologie scandinave sur les classes sociales s’applique souvent à un cas national. Alestalo, Bisley et Furåker soulignent cependant l’intérêt de mettre à l’épreuve la distinction public/privé en comparant l’ensemble des pays scandinaves. Mobilisant des sources nationales construites différemment les auteurs comparent les effets de cette distinction sur les salaires (dispersion intra/inter secteur), sur les conditions de travail (avoir de l’influence sur l’organisation de son travail), le niveau d’éducation, la syndicalisation et le vote à gauche (1965-1985). À la lumière de ces indicateurs, les auteurs concluent que les salariés du public ne constituent pas une classe en soi au sein des pays Scandinaves mais, qu’au sein des salariés du public, il y a des différences marquées qui tendent à valider l’hypothèse d’une similitude avec les salariés du privé et ce pour l’ensemble des pays Scandinaves (Alestalo, et al., 1991b, p. 115).La décennie 1990 et 2000 n’accorde pas, dans les sources étudiées, une place similaire à cette question. Les réflexions théoriques et empiriques sur la structure sociale dans les pays scandinaves se font peu à peu dans une perspective de comparaison internationale (avec les Etats-Unis, avec l’Allemagne de l’ouest par exemple) depuis les nomenclatures EGP (tel que Erikson, Jonsson, 1998) ou le modèle modifié de Wright (à l’image de Hong Li, Singlemann, 1998). L’application de ces grilles d’analyse standardisées aux structures sociales scandinaves (ici essentiellement Suédoise), tient pour une part à l’organisation des statistiques publiques au sein de ces États. Hoff souligne ainsi que, dans le cas du Danemark, « les statistiques publiques ont été compilées, depuis 1970, sur la base d’une conception économique de la main-d’œuvre ce qui rend les données douteuses et inintéressantes d’un point de vue sociologique. Au Danemark, nous n’avons ainsi pas de données officielles de la structure des statuts/d’activité/de classe depuis 1970 » (1989, p. 26). Mais, la place historique des questions liées à la structure sociale au sein de l’espace académique influence également la production des outils et critères d’appréciation des groupes sociaux. La Suède s’illustre ici par une position singulière. Ce pays figure en effet régulièrement dans la liste des pays étudiés pour comparer, à l’échelle internationale, la mobilité sociale et les transformations des marchés de l’emploi au moyen de nomenclatures internationales standardisées. Dans ces publications, la question du secteur d’emploi est parfois soulevée mais

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le plus souvent éludée et les données quantitatives mentionnant le secteur d’emploi sont rares. Quelques recherches quantitatives attestent cependant que la réflexion sur le « private/publique gap » n’est pas complètement désuète. Gornick et Jacobs (1998) étudient, à partir des données du Labour Income Study, le lien entre les femmes et le secteur d’emploi dans 7 pays industrialisés, dont la Suède. La question des rapports entre l’emploi des femmes et l’État social occupe, à l’époque, une place de choix dans les débats féministes. Leurs conclusions viennent notamment discuter les résultats de Kolberg (1991) qui voyait dans l’emploi public des pays socio-démocrates Nordiques un bien pour l’emploi des femmes. Gornick et Jacobs montrent que ces pays proposent aux femmes, via l’État social, des emplois plus qualifiés (« professionnal, managerial, and technicals jobs », 1998, p. 707) que le secteur privé. Ils notent à cet égard que « l’avantage salarial des femmes à être employées dans le secteur public est particulièrement modeste en Suède » (Ibid., p. 707).

Encadré 1Les nomenclatures socio-économiques en Suède

La Suède utilise aujourd’hui la nomenclature ISCO-08 pour l’analyse de son marché du travail (Statistics Sweden 2012). L’abandon de l’usage de la classification socio-économique nationale suédoise la plus récente « The Swedish Standard Classification of Occupations 1996 (SSYK96) » tient probablement au fait que cette classification était une adaptation de la nomenclature ISCO-88(COM). La table de conversion entre ISCO-88(COM) et SSYK 96 ne concerne que quelques Minor Groups (Tableau 1) et Unit Groups. La liste des groupes professionnels concernés par une transformation de leur position au sein de la nomenclature NYSS 96 révèle ainsi que l’enjeu de l’adaptation nationale suédoise d’ISCO-88(COM) n’est pas liée, au milieu des années 1990, à la volonté de repérer et distinguer, au sein d’une nomenclature socio-économique, les professions appartenant au secteur public ou au secteur privé5. C’est en fait la suite logique de l’approche suédoise puisque la Swedish Socio-economic Classification (SEI) utilisée jusqu’au milieu des années 1990 dans plusieurs recherches académiques (détaillées ci-après) n’intègre pas la distinction public/privé. Svallfors justifie par exemple l’usage de la SEI dans l’analyse attitudes à l’égard de l’État social parce qu’elle « est, de façon frappante, similaire au schéma de classe développé par Goldthorpe et ses collaborateurs (1987) et utilisée depuis dans une multitude d’analyses sur la structure de classe et la mobilité sociale (Erikson & Goldthorpe, 1992) ». Il voit dans EGP un outil « d’une grande fiabilité en matière de structure du travail et des relations d’emploi (Evans, 1992) et supérieure ou au moins égale aux autres classifications pour structurer les phénomènes idéologiques tels que le vote ou les attitudes (Marshall et al. 1988 ; Baxter et et al., 1991) » (Svallfors, 1995, p. 64-65).

Tableau 1Minor Groups concernés par une conversion entre ISCO-88(COM) et SSYK 96

ISCO-88(COM) SSYK 96

2. Professionals/24. Others Professionals

241. Business Professionals241. Business Professionals + 248. Administrative professionals of special-interest organisations

244. Social science and related professionnals

244. Social science and related professionnals+ 249 Psychologists, social work and related professionals

3. Technicians and associate professionals/32. Life science and health associate professionals

321. Life science technicians and related associate professionals

321. Life science technicians and related associate professionals + 324. Life science technicians

5 Il faut ici souligner que l’emploi public (historiquement statutaire) se trouve à cette période profondément transformé, puisqu’à partir de 1985, les différentes agences gouvernementales obtiennent le pouvoir de fixer les salaires et de recruter (Guillemot, Melnik, 2010, p. 9).

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4. Clerks/41. Office clerks 414.  Library, mail and

related clerks414.  Library, mail and related clerks + 415. Mail carriers and sorting clerks

9. Elementary occupations/91. Sales and services elementary occupations

913  Domestic and related helpers, cleaners and launderers

913.  Domestic and related helpers, cleaners and launderers+ 912.  Shoe cleaning and other street services elementary occupations- 9123. Window cleaners

914.  Building caretakers, window and related cleaners

919. Other sales and services elementary occupations+ 7137. Building caretakers+ 9123 Window cleaners

Svallfors montre ainsi que les salariés du secteur public et les retraités « supportent plus significativement l’État social que les personnes travaillant dans le privé ou les actifs », mais que la différence entre les salariés du privé et du public est devenue plus petite sur les six années observées (1995, p. 68). Pour l’auteur, l’ensemble des données collectées indique qu’il n’y a aucun signe équivoque que la division entre les salariés du secteur privé et ceux du secteur public se creuse (Ibid., p. 69).En 2001, Knutsen rouvre la question des clivages politiques dans les pays scandinaves par une étude longitudinale du vote selon la classe sociale, le secteur d’emploi et le genre entre 1970-1995. Sa justification de recourir au secteur d’emploi comme variable explicative du vote dans les différents pays scandinaves se fonde sur l’hypothèse de Lafferty d’une public sector class (1988), produite notamment par des conditions de socialisation spécifiques qui favorisent des liens de sympathie entre les salariés du secteur public et leurs clients (Lafferty 1988 cité par Svallfors, 1995, p. 55). Pour Knutsen, le clivage entre les salariés du secteur privé et ceux du secteur public s’explique par des intérêts économiques divergents, des environnements culturels (éducation) et des expériences professionnelles différentes (2001, p. 313). Il souligne ainsi que de nombreux salariés du secteur public sont confrontés à des problèmes sociaux dans leur travail ; situation qui participe à la diffusion d’une véritable idéologie de service public (Kristensen, 1980 cité par Knutsen Ibid.). Les valeurs de cette idéologie trouvent également leur origine dans les parcours scolaires des salariés de la classe moyenne du secteur public qui sont majoritairement formés au sein des départements d’éducation et de sciences sociales. Ces arguments attestent pour l’auteur que le secteur d’emploi peut constituer un clivage politique important dans les pays Scandinaves ; hypothèse semble t-il déjà mise à l’épreuve par Iversen et Wren (1998). Au terme des comparaisons des résultats des enquêtes entre 1970 et 1995, au Danemark, en Suède et en Norvège, l’auteur confirme que l’impact des classes sociales sur le vote baisse tandis que celui du genre et du secteur d’emploi augmente dans l’ensemble de ces pays : « Le secteur d’emploi est devenu un important clivage structurel dans tous les pays Scandinaves. […] Il y a des différences entre les pays, notamment sur le moment où le secteur d’emploi devient important, […] Le secteur est graduellement devenu un clivage politique plus important dans les trois pays observés » Puis, il conclu : « Les différences comparées indiquent qu’une large proportion des écarts de genre dans le vote est expliquée par le secteur d’emploi au Danemark. Ainsi, l’hypothèse selon laquelle les écarts dus au genre dans le vote, sont liés à la croissance du secteur public et à l’explosion des services de l’État social dans les pays

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scandinaves. Il ne faut cependant pas oublier que l’écart de genre dans le vote demeure significatif lorsqu’est contrôlé le secteur d’emploi dans les trois pays » (Knutsen, 2001, p. 345). L’intérêt de ces résultats est certain ; sa limite demeure de tester indépendamment la variable du secteur d’emploi et le schéma des classes sociales d’Erikson et Goldthorpe que l’auteur mobilise dans la première partie du texte (p. 324-329). Il est ainsi impossible de savoir si l’enracinement plus à droite et au centre de l’ensemble de la new middle class (équivalent de la Service class chez Goldthorpe) dans les trois pays observés indique que les membres de la public new middle class sont eux-mêmes plus à droite que les public Lower-Level and Non-manual Employees et les rares Public workers, ou bien qu’ils le sont dans des mesures identiques aux différentes composantes du salariat scandinave travaillant dans le secteur privé.

3) Une variable secondaire dans les travaux récents Plusieurs travaux récents sur la structure sociale des pays scandinaves continuent à mobiliser le secteur d’emploi dans leurs investigations quantitatives. Il faut ici reconnaître que ces travaux et les débats dans lesquels ils s’insèrent ont peu de choses en commun avec les débats sur la public service class et la place des public employees dans la structure sociale des années 1980 : dans les articles consultés, la question du secteur d’emploi est réduite à celle de son effet sur le fait social observé. Elle passe ainsi du statut d’objet de recherche à celui de variable secondaire d’explication, mobilisée sporadiquement.L’étude de Masterkaasa (2004) sur la structure sociale des élites norvégienne indique des différences importantes entre les élites du secteur privé (business sector) et celles du public (central or local government). Celles-ci renvoient aux types de diplômés (majoritairement en économie et droit dans le public) mais plus encore au fait que l’effet d’origine sociale semble beaucoup plus indirect dans les élites du secteur public alors que l’effet du diplôme prédomine (ce qui rapproche le secteur public des grandes firmes). De même, l’effet du genre est significatif dans les deux secteurs mais semble plus fort dans le secteur privé (Ibid., p. 230-231). L’étude des liens entre l’origine sociale et la mobilité professionnelle descendante en Suède réalisée par Bihagen (2007) combine le schéma de EGP avec le secteur d’emploi, à l’image de la variable « public working class » testée (mais non significative) dans une modélisation des chances de connaître une mobilité professionnelle descendante (Ibid., p. 426). L’appartenance au secteur public suédois influe positivement sur les carrières descendantes et donne aux répondants des chances plus petites de mobilité professionnelle descendante ; ce que l’auteur rapproche des forts taux d’études supérieur chez les salariés du public (Ibid., p. 425). Un usage similaire de la variable du secteur d’emploi est faite par Dieckhoff (2011) dans sa comparaison des effets du chômage dans la qualité de l’emploi ultérieur pour le Danemark, l’Autriche, l’Espagne et le Royaume-Uni. S’appuyant sur les données du European Community Household Panel (Eurostat, 1994-2001), l’auteur mobilise ISCO 88 et de façon séparée l’appartenance au secteur public (public sector worker) et conclue que ces derniers « sans surprise, et dans tous les pays, connaissent des chances moindre de connaître le chômage » (p. 240-241).

3) Le halo du secteur public européenLes frontières du terme de fonction publique sont à la fois très floues et très variables d’un pays à l’autre. Selon si l’on retient le statut du contrat, la qualité publique ou privée de l’employeur ou la façon dont se déclarent les salariés, on peut faire varier considérablement les contours de l’ensemble à mesurer. Pour réduire ces ambigüités taxinomiques amplifiées lorsqu’on les applique à des réalités nationales différentes, on a choisi de retenir le terme de secteur public, entendu comme l’ensemble des emplois remplissant des fonctions d’intérêts public dans l’administration (au sens large des fonctions régaliennes), l’éducation et la santé (Audier, Bacache-Beauvalet 2007).

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A) Le rapprochement des conditions de travail entre public et privé

Les profonds changements qui sont intervenus dans les relations d’emploi du secteur privé dans les années 1970 et 1980, ont commencé à se diffuser ensuite dans le secteur public, par le biais d’une phraséologie vantant les « best practices » du privé, à savoir l’efficacité et l’amélioration de la relation au client.

B) Les cercles concentriques du secteur publicOn peut appréhender le secteur public en Europe comme un halo en distinguant un noyau dur et des périphéries. Le cœur du secteur public est constitué par l’ ensemble des « statuts typiques » (fonctionnaires mais aussi salariés de droit privé) recrutés par le biais d’un contrat de droit public ou privé et dont la situation professionnelle est garantie statutairement ou conventionnellement. La périphérie concerne les agents de la fonction publique relevant de situations de travail moins stables ; ce sont des personnes qui sont associées à l’exécution de missions de service public par le biais d’emplois subventionnés (CES, CEC, CEJ en France, ABM ou encore BSI en Allemagne...) ou qui sont embauchés par l’entremise d’entreprises intérimaires comme complément de main-d’œuvre pour des activités produites par le service public national.

C) Approcher le secteur public depuis les Labor Force Survey 2010 et 2011

Les enquêtes Forces de travail (Labor Force Survey) constituent une source privilégiée pour appréhender les contours de la population active en Europe, notamment grâce aux « core variables » qui sont une batterie de questions identiques posées dans tous les pays européens. Or l’appartenance au secteur public ne figure pas parmi les « core variables » des enquêtes LFS, alors même que cette distinction constitue un clivage important de la population active salariée. Pour en prendre la mesure, on a donc procédé par approximations statistiques : on a choisi d’approcher les actifs occupés dans le secteur public en utilisant en première approximation les secteurs d’activités définis dans la Nomenclature des activités de la communauté européenne (NACE).

1) Une première approximation statistique du secteur public européen depuis la NACE (PUB 3)Pour cerner l’appartenance au secteur public, nous avons construit une première variable, appelée ici « PUB 3 », définie par la déclaration d’une activité salariée dans le secteur de l’éducation, de la santé et du travail social, ou au sein de l’administration publique et de la défense. Cette première définition du secteur public, volontairement large, prolonge directement « l’indicateur de fonction d’intérêt public »6 construit par Audier et Bacache-Beauvallet depuis la base Labour de l’OCDE (Audier, Bacache-Beauvallet 2007, p. 331). L’intérêt de cette approximation du secteur public par les secteurs d’activités est de contourner les problèmes de comparabilité des secteurs publics à l’échelle européenne, étant donné que les statuts d’emplois ou les définitions de la qualité publique ou privée de l’employeur peuvent varier d’un pays à l’autre. En outre, les déclarations d’appartenance au secteur public peuvent aussi être subjectives, certains salariés surestimant la relation de leur emploi avec la fonction publique (Ibid., p. 328).

6 Il s’agit du rapport entre le nombre d’emplois relevant de l’administration (et les fonctions régaliennes de l’État telles que la défense et la sécurité publique), de l’éducation, de la santé/travail social et le nombre total d’emplois.

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Si l’on retient les critères de définition de la variable PUB3, plus d’un quart des salariés européens (29 %) travaillent dans le secteur public (voir tableau 1). Parmi eux, la moitié (12% des salariés européens) travaillent dans l’administration publique ou au sein des fonction régaliennes de l’État (défense, sécurité) et l’autre moitié se partage entre des salariés travaillant dans l’éducation (8,5%) ou la santé et la travail social (8,6%). Sans surprise, c’est au sein du groupe « Armed Forces » que l’on trouve la plus grande proportion de salariés appartenant au secteur public (98 %). Le groupe des « Professionals » compte plus de la moitié de ses membres dans le secteur public (56 %) et celui des « Technicians and associate professionnals » en compte un tiers (37 %). Le groupe des « Service and sales workers » est le quatrième à compter la plus grande proportion de salariés du secteur public (22 %). Cette première définition du secteur public repère plutôt des positions intermédiaires et supérieures qui ne se confondent pas d’une part avec les « managers » et d’autre part avec les salariés d’exécution des Major groups 6, 7 et 8.

Tableau 1Le secteur public en Europe observé depuis les nomenclatures ISCO 1 et NACE (en %)

Education

Human health and social work activities

Public administration and defence; compulsory social security

Total Public sector(PUB 3)

MG 0 Armed Forces 97,02% 0,51% 0,14% 97,66%MG 1 Managers 7,43% 5,50% 5,52% 18,45%MG 2 Professionals 8,44% 31,46% 16,26% 56,16%MG 3 Technicians and associate professionals 13,41% 3,66% 19,94% 37,01%MG 4 Clerical support workers 12,19% 3,76% 6,27% 22,21%MG 5 Service and sails workers 7,69% 5,57% 18,21% 31,46%MG 6 Skilled agriculture, forestry and fishery

workers 8,73% 1,44% 2,69% 12,86%

MG 7 Craft and related trade workers 1,61% 0,48% 0,89% 2,99%MG 8 Plant and machine operators and

assemblers 1,75% 0,26% 1,52% 3,53%

MG 9 Elementary occupations 5,65% 5,41% 8,40% 19,46%NR 7,32% 13,47% 8,32% 29,10%Mean 8,52% 8,60% 11,43% 28,56%Source : Labor Force Survey, 2011Champ : Ensemble des salariés européens, effectifs pondérés. (Pour information, Effectifs enquêtés = 185638, NR = 1634)Lecture : En 2011, 51 % des salariés européens classés dans la catégorie des « Professionals » travaillent dans le secteur public défini

depuis les trois secteurs de l’éducation (27 %), la santé ou le travail social (17 %) ou l’administration publique et la défense (7 %)

Ce premier repérage permet de construire une variable de secteur d’emploi (PUB  0) qui « dichotomise » chaque Major group d’Isco 08 selon son appartenance au secteur public ou au secteur privé. Ainsi, l’ensemble des salariés d’un Major group d’Isco 08 qui appartient soit au secteur de l’éducation, soit à celui de la santé et du travail social, soit à celui de l’administration publique/défense constitue le secteur public d’un Major group. Malgré le caractère relativement rudimentaire de ce premier découpage, on constate qu’il rend visibles plusieurs clivages sociaux au sein des salariés européens (Tableau 2). La proportion de femmes est nettement supérieure chez les salariés européens du secteur public (46,5 % contre 34,4 % en moyenne) tout comme la proportion de diplômés du supérieur (29,4 % contre 25,2 % en moyenne). Fait notable, dans tous les Major groups numériquement significatifs pour le secteur public, la part de femmes et de diplômés du supérieur est systématiquement supérieure à celle des Majors groups du secteur privé.

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On découvre alors par cette rapide dichotomisation public/privé que la proportion de femmes est la plus importante au sein des Clericals support worker du public sector (78,5 %) et que c’est au sein des Professionnals du public sector que l’on trouve la plus grande proportion de salariés ayant un niveau d’études supérieures (85,5 %). Ces derniers salariés représentent 1/10 du salariat européen ; ils constituent ainsi un groupe important en nombre et relativement distinct des Professionals du Private sector et de l’ensemble des salariés à la lumière de ces deux indicateurs sociaux.La figure 2 permet une visualisation synthétique de ce qui sépare les Major groups du secteur public de ceux du privé lorsqu’on les regarde à la lumière de la proportion de femmes et de celle de personnes ayant un niveau d’études supérieures. Les Major groups du public (en gris) les plus importants en nombre se caractérisent en premier lieu par une position plus haute que ceux du privé sur l’axe des ordonnés du fait de leur plus grande proportion de femmes. Les Majors group du public se situent également toujours plus sur la droite du graphique (axe des abscisses) que leurs homologues respectifs du privé ce qui renvoie ici à la plus grande proportion de diplômés du supérieur à l’intérieur de chaque Major group du public (à l’exception des salariés des Elementary occupations). On constate ici que ce sont les Professionals, les Technicians et associate professionals et les services and sale workers qui constituent les Majors group les plus importants du secteur public puisqu’ils regroupent à eux trois 21,5 % des salariés européens. Sous l’angle de la composition sexuée, ce sont les Professionals, les Technicians et associate professionals et les managers qui s’opposent le plus avec une différence respective de 34 points entre les Professionals du secteur public et ceux du privé, de 34 points entre les Technicians et associate professionals et ceux du privé et une différence 23 points entre les Managers du public et ceux du privé. Sous l’angle de la composition scolaire, ce sont les Managers (+ 19 points), les professionals (+ 8 points) et les Clerical support workers (+ 5 points) qui présentent le plus de différence de proportion de salariés ayant un niveau d’études supérieures.En d’autres termes, cette première approximation du secteur public en Europe éclaire plus spécifiquement les particularités sexuées et scolaires des groupes sociaux du haut et du milieu du salariat européen.

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Tableau 2Part des diplômés du supérieur diplôme et part des femmes (ISCO 08, niveau 1, en %)

Major Groups adapted from ISCO 08 High education % Women %

Major groups part in the whole part of wage earner (Ranking)

0a. Armed forces occupations private sector (ns) 28,5% 7,7% 0,0%0b. Armed forces occupations public sector 27,0% 8,1% 0,7%1a. Managers private sector 57,2% 31,4% 4,1%1b. Managers public sector 76,2% 54,8% 0,9%2a. Professionals private sector 77,1% 34,4% 7,9% (7)2b. Professionals public sector 85,5% 68,7% 10,1% (4)3a. Technicians and associate professionals private sector 36,4% 38,2% 10,3% (3)3b. Technicians and associate professionals public sector 40,5% 72,1% 6,1% (9)4a. Clerical support workers private sector 20,6% 65,4% 8,9% (5)4b. Clerical support workers public sector 25,1% 78,5% 2,5%5a. Service and sales workers private sector 11,1% 65,3% 11,7% (1)5b. Service and sales workers public sector 14,7% 70,1% 5,4% (10)6a. Skilled agricultural, forestry and fishery workers private sector 7,3% 21,1% 0,7%6b. Skilled agricultural, forestry and fishery workers public sector

(ns) 8,0% 14,3% 0,1%

7a. Craft and related trades workers private sector 4,4% 11,5% 11,5% (2)7b. Craft and related trades workers public sector 9,1% 9,6% 0,4%8a. Plant and machine operators, and assemblers private sector 4,1% 17,7% 7,8% (8)8b. Plant and machine operators, and assemblers public sector 4,2% 14,8% 0,3%9a. Elementary occupations private sector 5,1% 51,1% 8,2% (6)9b. Elementary occupations public sector 3,9% 74,1% 2,0%NR 20,5% 41,4% 0,3%Maxima 85,48 78,52 11,74Minima 3,91 7,71 0,02N 179248Source : Labor Force Survey, 2011Champ : Ensemble des salariés européensLecture : En 2011, 85,5% des salariés européens classés dans la catégorie des Professionals ont un niveau d’études supérieures et

68 ,7 % sont des femmes. Ce groupe de professions regroupe à cette date 10,1 % des salariés européens.

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Figure 1

Part des diplômés du supérieur et part des femmes selon le secteur d’emploi au sein des Majors Groups de la nomenclature ISCO 08, (niveau 1, en %)

Source : Labor Force Survey, 2011Champ : Ensemble des salariés européensLecture : En 2011, 85,5% des salariés européens classés dans la catégorie des Professionals public sector (PUB 3) ont un niveau

d’études supérieures et 68 ,7 % sont des femmes. Ce groupe de professions regroupe à cette date 10,1 % des salariés européens.Remarque : certains Major Groups figurant sur le tableau ont été supprimé du graphique pour plus de lisibilité. Les Major group

grisés correspondent au secteur public.

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2) Deux définitions supplémentaires du secteur public à partir d’ISCO 08 (niveau 2) et de la NACE (PUB 2, PUB 1)Dans un second temps, on s’est efforcé d’affiner cette première approximation statistique du secteur public au sein du salariat européen en conservant le principe d’une construction du secteur public à partir de fonctions d’intérêt public. Nous nous sommes donc appuyés sur les deux nomenclatures mobilisées plus haut (NACE et ISCO 08) en ayant recours au niveau 2 d’ISCO afin de repérer plus précisément les Minor groups qui, à l’intérieur des Major groups, regroupaient les plus grandes proportions de salariés travaillant soit dans le secteur de l’administration publique et la défense, soit dans l’éducation, soit dans la santé et le travail social.Tandis que dans la définition du secteur public par PUB 3, les salariés du secteur public d’un Major group représentent la totalité des salariés de ce Major group qui travaillent dans ces trois secteurs, dans la définition adoptée pour construire PUB1 et PUB2, on restreint l’approximation des salariés du secteur public aux Minor groups surlignés en bleu gris, en bleu et en bleu foncé (voir tableau 3).On peut ainsi produire deux définitions plus restrictives afin de mieux comparer les intérêts et limites de l’approche statistique par fonctions d’intérêt publique. La définition la plus restrictive du secteur public (PUB 1) rassemble les Minor groups où au moins 80 % des salariés travaillent dans le secteur de l’éducation, de la santé et du travail social et de l’administration publique et de la défense. Dans le tableau 3, il s’agit des Minor groups surlignés en bleu foncé. La définition intermédiaire du secteur public (PUB 2), rassemble les salariés des Minor groups où au moins 25 % d’entre eux travaillent dans le secteur de l’éducation, de la santé et du travail social et de l’administration publique et de la défense. Dans le tableau 3, il s’agit des Minor groups surlignés en bleu. Au total, les salariés du public représentent 14% de l’ensemble des salariés européens avec PUB1 et 24% avec PUB2.

Tableau 3

Le secteur public en Europe observé depuis les nomenclatures ISCO 2 et NACE (en %)

Public sector Total Public sector

Total Private sector

Total (*)Admini

stration Education Santé

Armed forces

000 54 9 0 63 22 85010. Commissioned

armed forces officers97 1 0 98 2 100

020. Non-commissioned armed forces

officers

961

097 3 100

030. Armed forces occupations, other ranks

98 0 0 98 2 100

Managers

110. Chief executives, senior officials and legislators

25 2 5 33 67 100120. Administrative

and commercial managers6 2 4 12 88 100

130. Production and specialised services managers

5 12 0 27 73 100140. Hospitality, retail

and other services managers2 2 2 6 94 100

Professionals

200 2 22 3 28 72 100210. Science and

engineering professionals8 3 2 13 87 100

220. Health professionals

4 2 84 89 11 100230. Teaching

professionals2 90 5 97 3 100

240.Business and administration professionals

20 4 4 28 72 100

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250. Information and communications technology

professionals

63 2 11 89 100

260.Legal, social and cultural professionals

18 7 18 43 57 100

Technicians and associate professionals

310. Science and engineering associate

professionals

62 2 9 91 100

320. Health associate professionals

2 1 81 83 17 100330. Business and

administration associate professionals

233 5 31 69 100

340. Legal, social, cultural and related associate

professionals

1415 30 59 41 100

350. Information and communications technicians

7 4 3 14 86 100

Clerical support workers

410. General and keyboard clerks

17 6 8 30 70 100420. Customer

services clerks8 2 8 17 83 100

430. Numerical and material recording clerks

6 2 3 11 89 100440. Other clerical

support workers19 6 7 33 67 100

Service and Sales workers

510. Personal service workers

2 6 7 15 85 100520. Sales workers 0 0 0 1 99 100530. Personal care workers

4 17 69 89 11 100540. Protective

services workers56 1 1 58 42 100

Skilled agricultural, forestry and fishery workers

600 0 0 0 0 106 106610. Market-oriented

skilled agricultural workers9 2 3 14 86 100

620. Market-oriented skilled forestry, fishery and

hunting workers

70 0 8 92 100

630. Subsistence farmers, fishers, hunters and

gatherers

00 0 0 115 115

Craft and related trades workers

710. Building and related trades workers, excluding electricians

21 1 4 96 100

720. Metal, machinery and related trades workers

1 0 1 2 98 100730. Handicraft and

printing workers1 1 1 3 97 100

740. Electrical and electronic trades workers

2 1 1 5 95 100750. Food processing,

wood working, garment and other craft and related trades

workers

00 1 2 98 100

Plant ant machine operators

810. Stationary plant and machine operators

0 0 1 2 98 100820. Assemblers 0 0 1 1 99 100830. Drivers and

mobile plant operators3 0 2 5 95 100

Elementary occupations

910. Cleaners and helpers

7 8 14 29 71 100920. Agricultural,

forestry and fishery labourers 4 0 1 5 95 100930. Labourers in

mining, construction, manufacturing and transport

3 0 3 6 94 100

940. Food preparation assistants 2 11 15 28 72 100

950. Street and related sales and service

workers2 0 1 3 97 100

960. Refuse workers 11 11 5 27 73 100

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and other elementary workersNo answer No answer 7 13 8 29 71 100

Moyenne 14 6 9 29 71 100Source : Labor Force Survey, 2011Champ : Ensemble des salariés européensLecture : En 2011, 11 % des salariés européens classés dans la catégorie des « Health professionals » travaillent dans le secteur privé

et 89 % travaillent dans le secteur public (éducation, 2 % ; santé ou le travail social, 84 %, ou l’administration publique et la défense, 4 %)Note : les totaux légèrement supérieurs à 100 % tiennent aux arrondis à l’unité supérieure.

3) Les trois définitions du secteur public européen à l’épreuve du sexe et du diplômeLes trois approximations statistiques du secteur public européen (PUB 3, PUB 2, PUB 1) peuvent maintenant être mise à l’épreuve d’autres variables. La part de femmes et d’individus disposant d’un niveau d’études supérieures à l’intérieur d’un secteur d’un pays européen donné a ainsi été testée avec ces trois définitions. L’enjeu est ici d’identifier les variations concomitantes de la position moyenne de secteur public de chaque pays européen sur chacune de ces deux échelles (sexe et diplôme) afin de mieux appréhender les effets de sélection sexuée et scolaire à l’échelle nationale produit par les variations de périmètre. La Figure 1 propose une projection des taux d’individus disposant d’un niveau d’études supérieur (x) et des taux de femmes (y) au sein des deux secteurs d’emploi de chaque pays européen approché depuis PUB 3, variable la plus englobante dans notre approche. On constate que ces deux indicateurs partagent très distinctement les secteurs publics des secteurs privés de l’ensemble des pays européens dès lors que ceux-ci sont approchés depuis les secteurs de l’administration publique, l’éducation et la santé (PUB 3). Avec cette définition, on peut distinguer quatre groupes de pays à l’intérieur du secteur public européen. Au Sud-Est de la moyenne du secteur public, les pays disposant de la plus forte proportion d’individus ayant un niveau d’études supérieures et d’une proportion relativement faible de femmes (Grèce, Chypre, Espagne). Au Nord-Est, les pays disposant d’une forte proportion de femmes et d’individus ayant un niveau d’études supérieures (Grande-Bretagne, pays Scandinaves, pays baltes, etc.). Au Sud-Ouest de la moyenne du secteur public, les pays qui disposent de la plus faible proportion de femmes et d’individus passés par des études supérieures (Italie, Roumanie, Luxembourg, Malte, etc.). Au Nord-Ouest, les pays qui cumulent une plus faible proportion d’individus passés par des études supérieures et une forte proportion de femme au sein du secteur public (France, Allemagne, Pays-Bas, Portugal, Slovaquie, République Tchèques, etc.). Ces groupes de pays sont relativement stables avec PUB1 et PUB2. Avec la définition PUB1, on note toutefois quelques glissements d’une zone à l’autre, à l’image du Luxembourg et des pays scandinaves, mais la structure reste identique.La proportion de femmes est ainsi nettement supérieure dans l’ensemble des secteurs publics des pays européens (67 % versus 40 %) tout comme celle d’individus disposant d’un niveau d’études supérieures (50 % versus 24 %). Plus la définition du secteur public est restrictive et plus l’écart-type est élevé. C’est un indice de l’augmentation de la distance entre les secteurs privés et les secteurs publics européens à partir du sexe et du niveau d’études supérieures. En revanche, l’écart-type pour chaque secteur est plus faible avec les trois définitions. En comparant avec l’écart-type global, il semble donc que la dispersion intersectorielle est plus forte que celle intra-sectorielle, au regard de ces deux variables.Le coefficient de détermination (R2 = 0,67) indique que les deux tiers de la variation de la proportion de femmes selon les secteurs d’emploi des pays membres de l’UE peuvent être expliqués par la variation de la proportion d’individus disposant d’un niveau d’études supérieures. Ce coefficient reste stable avec PUB 2 mais augmente avec PUB 1 (R2 = 0,70). Cela indique que la définition la plus restrictive du secteur public à l’échelle européenne rend

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davantage visible les deux logiques de segmentation des différents marchés du travail européens selon le sexe et le diplôme.

Figure 2

Part moyenne des diplômés du supérieur et des femmes dans chaque secteur d’emploi par pays (PUB 3)

Source : Labor Force Survey, 2011Champ : Ensemble des salariés européens (EU 27)Lecture : En 2011, 40 % des salariés français classés dans le secteur public (selon la variable PUB 3) ont un niveau d’études

supérieures et 68 % sont des femmes. Respectivement, ce n’est le cas que de 30 % et 41 % des salariés du secteur privé Français. Remarque : L’indication « Séries 1 » renvoie en fait aux parts d’individus disposant d’un niveau d’études supérieures et de femmes

dans les secteurs privés de chacun des 27 pays européens [à compléter]Note: L’équation de la droite de régression linéaire est indiquée en haut du graphique. Voici quelques indications complémentaires

pour sa lectureHigh

education (%)Women

(%)Mean Public Sector (PUB 3) 0,50 0,67Mean Private Sector 0,24 0,40Maxima 0,66 0,78Minima 0,11 0,31Standard deviation 0,159 0,145Standard deviation Public sector (PUB 3) 0,097 0,067Standard deviation Private sector 0,082 0,032R2 0,6731

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Figure 3

Part moyenne des diplômés du supérieur et des femmes dans chaque secteur d’emploi par pays (PUB 2)

Source : Labor Force Survey, 2011Champ : Ensemble des salariés européens (EU 27)Lecture : En 2011, 41 % des salariés français classés dans le secteur public (selon la variable PUB 2) ont un niveau d’études

supérieures et 73 % sont des femmes. Respectivement, ce n’est le cas que de 31 % et 41 % des salariés du secteur privé Français. Remarque : L’indication « Séries 1 » renvoie en fait aux parts d’individus disposant d’un niveau d’études supérieures et de femmes

dans les secteurs privés de chacun des 27 pays européens [à compléter]Note: L’équation de la droite de régression linéaire est indiquée en haut du graphique. Voici quelques indications complémentaires

pour sa lectureHigh

education (%)Women

(%)Mean Public Sector (PUB 2) 0,52 0,71Mean Private Sector 0,25 0,41Maxima 0,71 0,80Minima 0,12 0,31Standard deviation 0,163 0,162Standard deviation Public sector (PUB 2) 0,099 0,064Standard deviation Private sector 0,081 0,034R2 0,67486

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Figure 4

Part moyenne des diplômés du supérieur et des femmes dans chaque secteur d’emploi par pays (PUB 1)

Source : Labor Force Survey, 2011Champ : Ensemble des salariés européens (EU 27)Lecture : En 2011, 41 % des salariés français classés dans le secteur public (selon la variable PUB 2) ont un niveau d’études

supérieures et 73 % sont des femmes. Respectivement, ce n’est le cas que de 31 % et 41 % des salariés du secteur privé Français. Remarque : L’indication « Séries 1 » renvoie en fait aux parts d’individus disposant d’un niveau d’études supérieures et de femmes

dans les secteurs privés de chacun des 27 pays européens [à compléter]Note: L’équation de la droite de régression linéaire est indiquée en haut du graphique. Voici quelques indications complémentaires

pour sa lectureHigh

education (%)Women

(%)Mean Public Sector 0,62 0,76Mean Private Sector 0,27 0,43Maxima 0,87 0,87Minima 0,12 0,33Standard deviation 0,202 0,172Standard deviation Public sector 0,112 0,070Standard deviation Private sector 0,081 0,031R2 0,70119

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Conclusion temporaire

La revue de littérature indique que si le clivage public/privé est difficilement pris en compte dans les études comparatives à l’échelle européenne, en revanche il demeure une dimension importante, bien que secondaire, à l’échelle nationale, au moins pour les pays étudiés (Allemagne, Grande-Bretagne, pays Scandinaves). Ainsi, l’articulation entre l’appartenance au secteur public et la position de classe a fait et fait encore l’objet de débats entre spécialistes des inégalités sociales dans ces pays. Les réformes de l’Etat des années 1980-1990 ont d’ailleurs renforcé le questionnement sur ce clivage puisqu’elles ont accentué les différenciations entre salariés du privé et du public, notamment au sein des classes supérieures (middle classes). De ce fait, l’étude bibliographique invite à ne pas évacuer trop rapidement la prise en compte de ce clivage dans une nomenclature socio-économique européenne mais plutôt à le mettre l’épreuve des enquêtes européennes. Bien qu’il n’existe pas directement de question harmonisée sur le secteur public dans les LFS, nous proposons une première approche de cette variable, en croisant ISCO-08 et les secteurs de l’administration, de l’éducation et de la santé de la NACE. Ceci permet ensuite de découper les différents groupes d’ISCO-08 selon ce clivage. La part des salariés travaillant dans le secteur public, selon notre définition la plus extensive, est conséquente puisqu’elle regroupe presque 30 % des salariés européens. Avec des définitions moins englobantes, les ordres de grandeurs restent importants (24 % et 14 %). Enfin, la comparaison de la part de femmes et d’individus ayant un niveau d’études supérieures selon l’appartenance au secteur public ou privé montre que ces deux secteurs se différencient nettement de ce point de vue. Ainsi, le salariat public est bien plus féminisé et plus diplômé dans tous les pays européens. Ce résultat invite à poursuivre d’une part, l’objectivation et la description de ce clivage, d’autre part, à vérifier s’il est prédictif de certaines pratiques sociales et culturelles.

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