dissertation manicouagan
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Début de dissertation sur le thème de l'ÉloignementTRANSCRIPT
Au Québec, depuis la Nouvelle-France jusqu’à aujourd’hui, de nombreuses familles sont
passées par une période de séparation : le mari, afin de subvenir aux besoins de sa
maisonnée, était souvent amené à travailler aux chantiers, dans l’arrière-pays. Ainsi, de
nombreux hommes allèrent bucher en forêt durant l’hiver et aider à la construction de
projets majeurs comme le barrage de la Manicouagan. L’éloignement a marqué l’imaginaire
québécois au point que de nombreux chansonniers écrivirent des mélodies dépeignant des
couples séparé par le devoir. Parmi ces artistes, il y a Gilles Vigneault, qui chanta Ah que
l’hiver(1997), précédé de Georges Dor, auteur de La Manic(1966). Dans ces deux pièces, le
thème de l’éloignement, est prédominant. Cela dit, bien qu’il soit abordé de manière
similaire sur quelques points, il reste que les deux auteurs l’ont abordé d’une manière
différente.
Dans les deux chansons, le thème de l’éloignement est traité de manière différente sur le
plan des occupations des personnages, de l’époque dans laquelle ils se trouvent et du statut
social de la femme. Tout d’abord, les deux personnages ne s’occupent pas de la même
manière. En effet, dans le texte de Gilles Vigneault, alors que la femme est assise à regarder
par la fenêtre, elle dit que « La femme est seule à s’ennuyer » (Ligne 8) et dans les paroles de
Georges Dor, le narrateur dit plutôt que « Nous autres on fait les fanfarons. » (Ligne 32)
Alors que dans Ah que l’hiver (1967), la femme narratrice est complètement perdue et ne
sait quoi faire de ses journées, dans La Manic (1966), l’homme travaille et s’amuse avec ses
compagnons. Ainsi, le champ lexical utilisé par Vigneault se rapporte plus à l’ennui tandis
que celui de Dor indique une situation plus joviale.
Aussi, l’époque des deux chansons n’est pas la même. En effet, alors que la narratrice des
paroles de Ah que l’hiver est en train de regarder le temps passer, elle déclare que puisque
« L’homme [est] à bucher et charroyer » (Ligne 23), « Il faut rester à la maison » (Ligne 20)
pendant que le narrateur de la chanson de Georges Dor indique qu’il se trouve « À la
Manicouagan » (Lignes 57). Ainsi, le fait que, dans le texte de Vigneault, l’homme soit parti
bucher dans un chantier alors que la femme reste à la maison laisse à penser qu’il s’agit
d’un couple de cultivateurs. Tout cela laisse à penser que les évènements ont lieu dans une
époque plus proche de la colonisation. En revanche, Georges Dor a créé un homme qui est
parti à la Manicouagan, ce qui sous-entend qu’il est en train de participer à l’édification d’un
grand barrage hydroélectrique portant le nom du Premier Ministre Daniel- Johnson dans
les années 1960.
Ensuite, le statut social des femmes est très différent. Effectivement, dans son message à
son mari, la femme de Ah que l’hiver soutient à ce dernier « [Qu’elle tient] la maison [qu’elle
fait] pas la folle » (Ligne 38). À l’inverse, dans sa lettre à sa femme, le personnage de
Georges Dor demande à sa douce :
« Te tournes-tu vers la Côte nord
Pour voir un peu, pour voir encore
Ma main qui te fait signe d’attendre » (Ligne 15-17)
Dans la chanson de Gilles Vigneault, la femme ne peut rien faire sans son mari et c’est elle
qui l’attend sagement, puisqu’à l’époque, les femmes avaient un rôle très défini et il n’était
pas très bien vu de sortir des sentiers battus. Cela dit, dans La Manic, c’est l’homme qui, loin
de chez lui, s’inquiète un peu pour cette femme qu’il aime tant et qui lui écrit si peu… Dans
les années 1960, les femmes ont une bien plus grande liberté et rien ne garanti au pauvre
homme que sa bienaimée sera toujours là à son retour.
En résumé, les deux œuvres divergent sur plusieurs plans dont les occupations des
personnages principaux, de l’époque dans lequel se déroulent les récits et du statut social
de la femme.
D’un autre côté, les deux chansons présentent des éléments similaires. En effet, les deux
narrateurs s’ennuient de leur douce moitié. Par exemple, dans le texte de Vigneault, la
femme écrit dans sa missive que :
« […] la maison quand y’a pas d’homme
C’est comme un poêle éteint tout le temps » (Lignes 51-52)
Et dans le texte de Dor, le narrateur ouvre sa lettre en disant :
« Si tu savais comme on s’ennuie » » (Ligne 1)
Ainsi, dans la chansons de Vigneault, la comparaison que fait la femme entre la maison vide
et un poêle étaient amplifie le froid mordant et inhospitalier de l’hiver : sans son mari, elle
est désabusée et ne sait que faire de ses journées.
Dans le même ordre d’idées, dans ces deux musiques, les narrateurs pensent que leur
partenaire éloignée s’ennuie moins. C’est ce que reflète les paroles de Vigneault lorsque la
femme affirme que :
« L’homme est parti pour travailler
La femme est seule seule seule » (Ligne 5-6)
Il en va de même pour la chanson de Dor quand l’homme reproche à sa femme :
« Tu m’écrirais bien plus souvent » (Ligne 3)
Dans la pièce Ah que l’hiver, il y a une répétition du mot « seule » pour mettre l’accent sur
l’isolement que vit la femme tandis que son homme est au chantier, occupé et entouré.
Pareillement pour le personnage de Georges Dor qui blâme un peu sa femme parce qu’elle
ne lui envoie pas beaucoup de lettres alors que lui s’ennuie à mourir loin d’elle.
De plus, les deux chansons sont en fait des lettres d’amour.
Effectivement, quand la femme seule de Ah que l’hiver termine sa lettre à son mari, elle
signe :
« Je t’embrasse encore avant de signer
Ta talle d’amour ta rose ta Jeanne » (Ligne 56-57)
Et dans La Manic, l’homme implore à sa femme de lui envoyer une missive :
« Écris cent fois les mots « Je t’aime »
Ce sera le plus beau des poèmes » (Ligne 48-49)
Dans la pièce de Vigneault, la narratrice se compare à une talle, une pousse formée d’un
bourgeon à la base d’un arbre, ce qui laisse supposer un fort lien fusionnel entre ses deux
amoureux. Le reste du vocabulaire du paragraphe se rapportant au champ lexical de
l’amour ne fait que confirmer cette idée. Dans la même optique, le texte de Dor montre un
mari éploré attendant désespérément une preuve d’amour de sa douce. ???
En somme, ces deux pièces ont en commun que les deux narrateurs s’ennuient de leur
partenaire et pensent s’ennuyer plus que leur compagnon qui se trouve loin d’eux. De plus,
les deux chansons sont en fait des lettres d’amour.