cynisme « instrumental » dans l'organisation : définition, mesure et conséquences

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CYNISME « INSTRUMENTAL » DANS L'ORGANISATION : DÉFINITION, MESURE ET CONSÉQUENCES Carolina SERRANO ARCHIMI ANDESE | Vie & sciences de l'entreprise 2011/1 - N° 187 pages 12 à 38 ISSN 0336-142X Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-vie-et-sciences-de-l-entreprise-2011-1-page-12.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- SERRANO ARCHIMI Carolina, « Cynisme « instrumental » dans l'organisation : définition, mesure et conséquences », Vie & sciences de l'entreprise, 2011/1 N° 187, p. 12-38. DOI : 10.3917/vse.187.0012 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour ANDESE. © ANDESE. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 129.10.52.112 - 06/04/2014 23h01. © ANDESE Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 129.10.52.112 - 06/04/2014 23h01. © ANDESE

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CYNISME « INSTRUMENTAL » DANS L'ORGANISATION :DÉFINITION, MESURE ET CONSÉQUENCES Carolina SERRANO ARCHIMI ANDESE | Vie & sciences de l'entreprise 2011/1 - N° 187pages 12 à 38

ISSN 0336-142X

Article disponible en ligne à l'adresse:

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-vie-et-sciences-de-l-entreprise-2011-1-page-12.htm

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------SERRANO ARCHIMI Carolina, « Cynisme « instrumental » dans l'organisation : définition, mesure et conséquences »,

Vie & sciences de l'entreprise, 2011/1 N° 187, p. 12-38. DOI : 10.3917/vse.187.0012

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CYNISME « INSTRUMENTAL » DANS L’ORGANISATION : DEFINITION, MESURE ET CONSEQUENCES

Par Carolina SERRANO ARCHIMI Maître de Conférences

IAE Aix-en-Provence, Université d’Aix-Marseille, CERGAM Nominée du Prix de Thèse ANDESE 2010.

Thèse soutenue sous la Direction du Professeur Maurice Thévenet, ESSEC & CNAM

Résumé : Cet article se propose d’analyser la notion de « cynisme » au travail et d’en déterminer le sens qui lui est attribué. En effet, le terme « cynisme » est souvent utilisé pour décrire une réalité organisationnelle douteuse, mais son sens reste flou. Les résultats qui sont présentés portent à la fois sur la définition du cynisme, sur l’identification et la mesure des dimensions de ce construit, ainsi que sur ses conséquences au travail. Une étude quantitative auprès d’un échantillon de managers français à fait suite à une étude qualitative exploratoire. Ces études ont montré que les managers se placent dans le cadre de l’échange social, adaptant ainsi leur niveau de contribution au travail à la perception du comportement de leurs dirigeants.

Mots clés : Cynisme « instrumental », manager, dirigeant, comportements de retrait EVLN (exit, voice, loyalty, neglect), échange social

Abstract: The purpose of this article is to analyze the concept of « cynicism » at work. This term is indeed extensively used to describe an organizational reality suffering from a lack of integrity. Its meaning, however, remains fuzzy. This article is articulated around two separate parts. The first one is a qualitative part to explore the concept of cynicism and to help build the research model. In the second part the model will be tested quantitatively. The study clarifies the definition of cynicism, the identification of its dimensions, and its consequences at work as well. It shows the social exchange mechanism by which the managers adapt their level of contribution at work, according to the perception they have of their top managers’ behaviours.

Keywords : « instrumental » cynicism, manager, top manager, withdrawal behaviours, EVLN (exit, voice, loyalty, neglect), social exchange

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INTRODUCTION Il ne se passe pas un jour sans que l’on entende ou que l’on ne lise dans la presse le mot « cynisme ». A en croire les médias, cela deviendrait monnaie courante dans le monde économique. De plus, de nombreuses publications des années 1980, 1990 et 2000 décrivent le cynisme comme un phénomène croissant dans nos sociétés (Kanter et Mirvis, 1989 ; Cappella, 2002 ; Dupin, 2006). Pourtant, ne faut-il pas s’arrêter un instant pour se demander ce que l’on stigmatise par ce terme. Que recouvre le terme « cynisme » ? Et quelles en sont les conséquences pour la conduite des organisations ? L’objectif de cette recherche consiste à étudier le concept de cynisme dans l’organisation et, plus précisément, le cynisme perçu par les managers français, population cible de notre recherche. Le terme « cynisme » semble recouvrir plusieurs acceptions en langue française. Une étude empirique, composée d’une partie exploratoire et d’une partie quantitative, se centre sur le cynisme tel que les managers se le représentent dans leur organisation. L’objectif est d’expliquer théoriquement et de tester empiriquement le construit de cynisme ainsi que ses conséquences sur les réactions au travail des managers français.

1. CYNISME AU TRAVAIL : ETUDE QUALITATIVE Le terme ‘cynisme’, dans son utilisation courante en langue française, se caractérise par sa polysémie. Ainsi nous avons conduit une étude qualitative dont le but est de questionner le terrain sur sa représentation du cynisme. L’étude qualitative vise à répondre à notre première question de recherche : « Quelle conception les managers ont-ils du cynisme au travail ? »

1.1. EXPLORATION AUPRES DES MANAGERS : LA TABLE RONDE Nous utilisons la technique de la table ronde semi-directive dans un but exploratoire approfondi. Notre objectif est double : premièrement, appréhender la compréhension du cynisme au travail par les membres de la table ronde / focus group et deuxièmement, déterminer si la perception du cynisme a un effet sur leur comportement au travail. Le groupe se compose de 12 managers et vise à répondre à la question « que vous évoque le cynisme au travail ? ». Le corpus issu de la transcription des échanges du groupe a donné lieu à une analyse de contenu thématique. 1.1.1. Population ciblée : les managers français La population ciblée est le manager intermédiaire. Cette appellation n’a pas de définition légale (Boyer, 2006), mais correspond à un ensemble de salariés qui, d’une part, assurent des fonctions d’encadrement à n’importe quel niveau de la structure managériale, et, d’autre part, ne décident pas des orientations stratégiques de l’organisation (Dietrich, 2009). Les managers forment une population clé dans l’entreprise, car ils animent au quotidien et à tout niveau l’action collective (Thévenet, 2009).

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Nous restreignons notre analyse aux managers français, car ils semblent présenter des spécificités liées à la culture nationale : « en effet, la France est le pays développé où les relations de travail sont les plus mauvaises, à la fois du point de vue des dirigeants d’entreprises et du point de vue des employés » (Philippon, 2007 : 20). Plus critiques, plus inciviques, les salariés français sont ceux qui exigent le plus de reconnaissance de la part de leurs supérieurs hiérarchiques (Algan et Cahuc, 2007). Ceci nous pousse à choisir un échantillon de managers français pour l’étude. 1.1.2. Caractéristiques de l’échantillon Le groupe est composé de 12 managers français qui répondent à des critères d’homogénéité intragroupe afin que les données recueillies reflètent le plus possible l’opinion « générale » que les managers ont sur le cynisme dans l’entreprise. Les 12 managers sont de nationalité française et comptent 5 femmes. Leur expérience professionnelle est d’au moins 4 ans et leur ancienneté dans leur entreprise actuelle se situe entre 2 et 8 ans. Ils viennent d’entreprises françaises de petite, moyenne et grande taille, ainsi que de secteurs d’activité variés. Cet échantillon de convenance est issu d’une promotion d’Executive MBA à temps partiel, composé de cadres intermédiaires et supérieurs en activité au moment de la table ronde et volontaires pour participer à un exercice à but de recherche. Lorsque nous avons lancé la démarche, nous n’avons pas détaillé le sujet de notre recherche afin d’éviter tout biais d’auto-sélection des membres et tout biais de rationalisation a posteriori issu d’une réflexion préalable artificielle. Le travail a été conduit avec un guide d’animation suivant une approche semi-directive. Compte tenu de la polysémie du terme ‘cynisme’, nous avons cherché à faire surgir des positions contrastées pour permettre l’émergence d’argumentations qui les soutiennent à l’intérieur des questions qui composent notre guide d’animation. 1.1.3. Analyse de contenu : codage des données Nous avons enregistré et retranscrit la totalité de la table ronde qui a duré 1h 45. L’analyse de contenu du corpus s’appuie sur une méthode originale de codage à trois niveaux, proposée par Pratt et al. (2006) et Corley et Gioia (2004). La démarche se divise en trois étapes : (1) une préanalyse, composée d’une lecture flottante et d’une décontextualisation du corpus, (2) l’exploitation du corpus, composée d’une double catégorisation : une catégorisation provisoire de premier ordre, illustrée par des verbatim, puis une catégorisation de second ordre, et (3) l’agrégation des catégories de second ordre puis la recontextualisation des résultats. Les codes de premier ordre correspondent à des catégories provisoires issues d’une première lecture flottante du corpus ; la création de codes de second ordre consiste à intégrer des codes de premier ordre dans des codes plus abstraits, d’un niveau supérieur ; les codes de second ordre sont ensuite agrégés en des

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dimensions théoriques, des métacatégories, qui permettent de décrire et de théoriser le phénomène étudié. Nous présentons ci-après les résultats de l’analyse de contenu :

Graphique 1 :

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Nous présentons l’agrégation des catégories de premier ordre, puis de second ordre :

Graphique 2 :

1.1.4. Recontextualisation des données et description du phénomène : émergence du cynisme « instrumental » L’analyse des codes de second ordre nous a permis de déterminer deux catégories théoriques qui rendent compte du phénomène exploré : (1) Le cynisme que nous qualifions d’« instrumental », et (2) les comportements de retrait du manager EVLN (exit, voice, loyalty, neglect) en réponse à la perception du cynisme « instrumental ». 1.1.4.1. Cynisme = instrumental = chez les dirigeants Pour les managers, le cynisme concerne les dirigeants. Le cynisme est, pour les répondants, une affaire des dirigeants, quelle que soit le taille de l’organisation du répondant. Selon la taille de l’entreprise, le dirigeant est également le supérieur hiérarchique du répondant, mais la variable qui détermine l’attribution de cynisme

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est davantage le pouvoir et la possibilité d’abus grâce à ce pouvoir, que la relation hiérarchique immédiate. 1.1.4.2. Notion de pouvoir et de tromperie Les managers relient le cynisme à des positions de pouvoir. Pour eux, le cynisme est synonyme d’abus, et ils associent l’abus ou la possibilité d’abus à des positions de pouvoir. Cette notion d’abus comme indicateur de cynisme est vaste et complexe. Elle semble se définir par un certain nombre de caractéristiques, comme la duplicité, l’arrogance ou l’absence d’intégrité. Le cynique est l’homme de pouvoir qui sert ses propres intérêts aux dépens des autres. En effet, dans l’esprit des managers, le cynisme est représenté comme un comportement douteux et par la volonté de manipulation des autres pour servir ses propres intérêts. Ce cynisme, que nous qualifions de « cynisme instrumental », définira les hommes de pouvoir qui instrumentalisent les autres, sur lesquels ils ont du pouvoir, utilisant une rhétorique trompeuse et calculée, pour servir leurs propres intérêts. Cette connotation du cynisme semble se consolider à l’aune des différents scandales, très médiatisés, pointant les abus financiers de certains dirigeants pour leur bénéfice propre et au détriment des autres. Ces scandales mettent par ailleurs en exergue l’insouciance de ces dirigeants à l’égard de la performance et de la pérennité de l’entreprise dont ils ont la charge, et génèrent, ainsi, des conditions d’incertitude chez les managers. Dupin, s’appuyant sur les réflexions menées à ce sujet par le philosophe allemand Peter Sloterdijk (1987), définit le cynisme des hommes de pouvoir comme celui de ceux qui « témoignent d’une ironisation radicale de la morale et de la convention sociale, comme si, pour ainsi dire, les lois n’étaient là que pour les imbéciles » (Dupin, 2006 : 56). A ce stade, deux conclusions s’imposent : (1) le référent du cynisme, aux yeux des managers, ce sont les dirigeants de l’entreprise, et, (2) les caractéristiques du cynisme soulignent le cynisme « instrumental ». ► Signification du cynisme instrumental perçu (C.I.P.) Le cynisme semble correspondre à une forme d’immoralité, qui se caractérise par la duplicité, l’arrogance et l’absence d’intégrité. Il apparaît que les répondants présentent le cynisme comme un signe de dévalorisation par l’organisation de leur contribution individuelle au travail, dévalorisation qui participe au développement de leur désenchantement amer ou de leurs comportements de retrait, comme dans « le cas d’Airbus », où le contraste entre les résultats de l’entreprise et le golden parachute de Noël Forgeard d’une part, et le montant de l’intéressement des salariés d’autre part, semblent choquants au répondant : « l’intéressement était de 3 ou 30 euros par salarié (…) …soit cette prime a été décidée par quelqu’un de stupide et déconnecté de la réalité dans son bureau (…) soit par quelqu’un de véritablement cynique. » L’analyse de contenu a fait ressortir trois aspects constitutifs du cynisme instrumental, que nous qualifions de « duplicité », « arrogance » et « absence d’intégrité ».

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► Duplicité perçue « Pour moi, le cynisme dans les entreprises, c’est pousser les gens à faire certaines actions, accomplir certaines tâches en ne leur donnant pas forcément les vrais objectifs et la vraie définition des choses. » Cet extrait induit la notion de mensonge instrumentalisé pour le bénéfice direct de la personne faisant preuve de cynisme. Le verbatim montre qu’il y a falsification, comme un faux-monnayeur remet une pièce pour vraie alors que, sachant qu’elle est fausse, il y trouve un avantage personnel. Fausse monnaie aussi que celle des dirigeants qui prétendent régler un problème avec une solution qui ferait payer le prix à des gens qui n’y sont pour rien : « La première variable, c’est ça : on doit réduire le nombre de salariés. (…) Quand je vois avec EADS et Power 8 (…) … problème de retard de livraison des biens ? On va supprimer 10 000 postes. (…) Je ne vois pas l’adéquation de la réponse au problème ». Ou encore cette direction qui annonce un système d’incitation financière lié au résultat tout en disant ne pas avoir les budgets pour des augmentations : «…les primes dépendent des subventions qu’on aura touchées et des choses qu’on a faites, mais en réalité, les choses qu’on a faites n’ont aucune importance au niveau financier, c’est uniquement les subventions (…) sachant que le directeur est payé trois fois le salaire d’un conseiller ». Outre les avantages directs retirés de ce comportement, il pourrait servir des objectifs d’entreprise : « on pense qu’il a été missionné pour ça, pour refonder une équipe, parce que moi, je sais que derrière il a repris des personnes beaucoup plus jeunes – junior – que nous ». ► Arrogance perçue Une dimension mêlant arrogance (attitude qui se manifeste par des manières hautaines), suffisance (sentiment d'une très haute valeur de soi-même, de supériorité à l'égard d'autrui) et égocentrisme (tendance à ne considérer que son point de vue et ses intérêts propres) est décrite comme un indicateur de cynisme des dirigeants : « il n’encourageait jamais, toutes les propositions qu’on lui faisait n’étaient pas forcément remerciées ou écoutées. C’était lui finalement qui s’appropriait les propositions de manière détournée, il contournait les problèmes et il était très cassant. Donc il créait une ambiance malsaine et on pourrait l’associer à du cynisme aigu de sa personne pour avoir le pouvoir constamment et donc le comité de direction ne voyait rien de ce qui se passait ». Dans ce sens, un répondant nous dit : « Il était cynique, il avait un côté malsain, c’était heu, (silence court), c’était limite harcèlement, c’était faire passer sa volonté à tout prix, c’était l’égo démesuré, c’est-à-dire de ne pas arriver du tout à prendre du recul dans les situations heu, pour écouter les gens ». Un répondant associe l’absence d’écoute des dirigeants et le tort que cela peut porter à l’entreprise : « Ils s’y prennent souvent de travers [pour mettre en place la nouvelle politique de la relation client] et ne nous écoutent jamais, pourtant ce n’est

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pas faute d’avoir essayé de faire passer le message. Ce n’est pas compliqué, il suffit de créer un comité de pilotage qui intègrerait des clients fidèles et qui guiderait et évaluerait notre action ». Un autre répondant met l’accent sur la distance voulue par les dirigeants avec son encadrement intermédiaire : « Ils font tout pour nous mettre à l’écart et nous faire croire qu’ils maîtrisent la situation. Bonjour le courage ! » ► Absence d’intégrité perçue Définie comme le degré d’adhésion à un ensemble de pratiques considérées comme acceptables (Mayer et al. 1995), les répondants associent systématiquement le cynisme à l’absence d’intégrité. A l’inverse, les répondants qui considèrent que leurs dirigeants sont intègres, ne les considèrent pas comme cyniques : « C’est scandaleux les magouilles qui existent, le pire est quand on cherche à vous raconter que tout est fait pour le bien de la boîte, alors que vous savez qu’ils valident le référencement d’un nouveau fournisseur qu’on a trouvé uniquement s’ils touchent de l’argent de leur part ». Ce répondant, manager dans une PME, se révolte de devoir accepter les termes de négociations qui lui paraissent peu intègres. Les répondants insistent sur les jeux de pouvoir auxquels les dirigeants « vendent leur âme ». Un répondant précise : « Pour moi le cynisme c’est… pas être honnête (…) et se préoccuper uniquement de ses intérêts, de son pouvoir ». Quand on lui demande d’illustrer ce qu’il veut dire, il explique : « Quand on a vécu la réorganisation [il y a 2 ans], ils nous ont dit qu’on ne s’inquiète pas, qu’il y aurait une réunion des chefs de service pour réfléchir ensemble. Cette réunion n’a jamais eu lieu, les membres du comité de direction sont toujours là, alors qu’ils ont viré la moitié des chefs de service. » Cette analyse exploratoire nous permet de définir le « cynisme instrumental perçu » comme une attitude propre aux dirigeants, caractérisée par de la duplicité, de l’arrogance et une absence d’intégrité. 1.1.4.3. Comportements de retrait des managers L’étude exploratoire a permis d’identifier chez les managers des comportements qui résulteraient d’une exposition soutenue au cynisme instrumental qu’ils perçoivent chez leurs dirigeants : départ de l’entreprise, protestation, silence, désillusion, désinvestissement. Certains membres du groupe présentent des signes de ressentiment ; leur déclaratif est amer et accusateur. D’autres membres du groupe ont un déclaratif qui met en avant leur indifférence, une indifférence affective qui ressemble à celui qui boude parce qu’on ne s’occupe pas de lui. Les perceptions que les membres du groupe se sont imaginées de leurs dirigeants, qu’elles soient positives ou négatives, et leurs tentatives d’explication des attitudes qu’ils attribuent aux dirigeants sont très présentes dans le groupe. De plus, ils décrivent un processus de cause à effet entre cette croyance et leurs comportements au travail. Plus ils

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perçoivent négativement leurs dirigeants, plus ils se réclament de comportements de retrait : « je fais mon travail, mais a minima, sans motivation et je ne me sens pas aligné avec les valeurs de l’organisation ». Un répondant souligne les difficultés à trouver le bon ton sur des choses qui méritent pourtant d’être signalées : « Vous percevez un décalage entre ce que [le dirigeant] dit et ce qu’il fait, et la bêtise qu’il est en train de pousser l’entreprise à faire; si vous ne le dites pas, l’entreprise ne peut pas apprendre, et si vous le dites de façon trop crue, l’autre se braque ». La perception d’absence comportementale (Simons, 2002), si elle compromet l’avenir de l’entreprise, peut réveiller les sentiments d’attachement à l’entreprise de l’individu, qui, pourtant, perçoit que s’en ouvrir à sa hiérarchie peut comporter un risque pour lui. Le silence devient ainsi une porte de sortie. Cette collaboratrice – qui a quitté l’entreprise – est affectée : « je suis peinée de savoir que l’entreprise fonctionne tant bien que mal avec cette pression là (…) parce que j’ai conscience que ce n’est pas uniquement le service commercial qui était sous ce format là ». Ces extraits montrent que ces perceptions ont une influence sur le comportement du manager. Ici, le répondant a quitté l’entreprise après s’être épuisé pour tenter de changer les choses. De plus, lorsque l’intégrité, aux yeux des répondants, fait défaut, elle est une des sources de leur déclaratif véhément, presque colérique, comme un « mal fatal » contre lequel il est inefficace de se battre : « Ils n’en ont rien « à foutre » de l’entreprise, ils ne pensent qu’à préserver leur territoire, qu’à se faire mousser ; à la limite je m’en fiche de ça s’ils tenaient à l’entreprise et à son avenir ; s’ils faisaient leur boulot, quoi ». 1.1.5. Mécanisme sous-jacent d’échange social Le manager n’aborde pas la relation d’emploi qui le lie à ses dirigeants de façon neutre. Même si la relation entre managers et dirigeants n’est pas toujours directe et interpersonnelle, les managers se font une représentation de cette relation et de sa qualité. L’utilisation de termes comme « humanité » ou, plutôt, « manque d’humanité », témoigne du fait que l’image qu’ils se font de leurs dirigeants est marquée et ne les laisse pas indifférents. Cette appréciation a ensuite une influence sur leur niveau de contribution au travail. L’étude exploratoire a mis en exergue l’échange social qui semble lier les managers à leurs dirigeants, indépendamment de la distance hiérarchique qui les sépare. Les managers évaluent la qualité perçue de cet échange et répondent par des comportements qui leur permettent de rétablir un équilibre équitable de l’échange social (Cropanzano et Mitchell, 2005, Settoon et al. 2006). Dans cette perspective, le cynisme instrumental des dirigeants est vécu comme un manque d’égard envers les managers qui, en contrepartie, peut les pousser à « se retirer » des efforts réalisés pour soutenir la performance organisationnelle. Les comportements de retrait des managers peuvent signifier une dégradation de l’échange social entre les managers et les dirigeants et une volonté de distanciation à l’organisation.

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Nous allons présenter ci-après l’étude quantitative, qui a comme but de tester empiriquement le construit de C.I.P., ainsi que ses conséquences sur les comportements au travail des managers français.

2. « CYNISME INSTRUMENTAL PERÇU » (C.I.P.) : ETUDE QUANTITATIVE

2.1. RETRAIT DES MANAGERS COMME CONSEQUENCE DU C.I.P : LES

REPONSES EVLN (EXIT, VOICE, LOYALTY, NEGLECT) Les réponses de retrait au travail sont vraisemblablement multiformes et multicauses. Si l’on trouve dans la littérature des facteurs explicatifs des réponses de retrait des managers (baisse de la satisfaction au travail, mécontentement au travail, perception de rupture du contrat psychologique), la perception de cynisme instrumental chez les dirigeants peut devenir un facteur supplémentaire à la montée du retrait (Dupuy, 2005), à ce mécontentement grandissant qui s’empare des managers, allant jusqu’à une augmentation significative d’intention de départ de l’entreprise (Lane et McGurk, 2009) : « nous assistons à un mouvement de balancier : après le surinvestissement [des années 1970 et 1980], c’est le temps du recul, voire celui du désinvestissement » (Légeron, 2003 : 23). Nous avons recours au modèle EVLN1 (exit, voice, loyalty, neglect) pour conceptualiser les conséquences du cynisme instrumental perçu sur le comportement au travail des managers, d’autant plus que les variables décrites par ce modèle se rapprochent des effets qui ont émergé dans l’étude qualitative. Nous gardons, tout au long de notre recherche, les termes anglo-saxons, car une traduction au français nous éloigne du concept, connu dans le monde académique gestionnaire sous les sigles EVLN. Pour analyser ces réactions, nous avons recours aux travaux de Albert Hirschman (1970, 1986) distinguant Exit, Voice et Loyalty (EVL), puis aux développements ultérieurs de la typologie de réactions spécifiques du salarié, Exit, Voice, Loyalty et Neglect (EVLN). En sciences de gestion, et plus particulièrement en gestion des ressources humaines, le modèle de Hirschman est utilisé comme cadre explicatif et prédictif d’une variété de réactions de la part des salariés soumis à des conditions d’adversité au travail (Farrell, 1983, Hagedoorn et al 1999, Rusbult et Zembrodt, 1983, Rusbult et al. 1982, 1986, 1988, Turnley et Feldman, 1999, Withey et Cooper, 1989, Naus et al. 2007). Les salariés qui se sentent frustrés et désenchantés au travail vont, d’un côté, chercher des opportunités d’accomplissement de soi à l’extérieur du contexte de travail, et, d’un autre côté, réagir de différentes façons, soit exit, voice, loyalty ou neglect, face à des situations vécues comme des obstacles au travail (Naus et al. 2007). Le cynisme

1 Compte tenu de la difficulté à traduire les termes EVLN, qui présentent des traductions hétérogènes (défection ou intention de départ pour exit ; expression de l’insatisfaction, protestation ou critique pour voice ; loyauté, lassitude, passivité, patience, fidélité, apathie ou résignation pour loyalty ; négligence ou revanche pour neglect), nous gardons les termes en langue anglaise, que nous signalons systématiquement en italique.

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instrumental perçu deviendrait ainsi un nouvel antécédent à des réponses de retrait au travail. Les analyses traditionnelles proposent des réactions extrêmes : soit le départ, soit la loyauté (le non départ). Hirschman (1970), quant à lui, ajoute une autre voie, voice (ou protestation), qui permet à l’individu d’exprimer son insatisfaction au travail. Loyalty, chez Hirschman, reste vague, et est plutôt décrit comme une attitude qui dissuade le salarié de partir et le pousse à protester (Kolarska et Aldrich, 1980 ; Withey et Cooper, 1989, 1992 ; Leck et Saunders, 1992). Rusbult et Zembrodt (1983) et Farrell (1983) identifient par la suite neglect comme un quatrième comportement en réponse à l’insatisfaction. 2.1.1. Exit La définition d’origine de exit, qui peut être traduit par défection ou intention de départ, se présente sans ambiguïté : « certains clients cessent d’acheter les produits de l’entreprise ou bien quelques salariés quittent l’organisation : il s’agit là de l’option de défection » (Hirschman, 1970 :4) ; la défection c’est se dégager d’une relation établie avec une personne ou une organisation » (Hirschman, 1986 : 58). Pour l’auteur, la fonction d’exit est d’envoyer un signal de mécontentement à l’égard de la performance de l’entreprise. Rusbult, Farrell, Rogers et Mainous (1988) ont élargi la conceptualisation de cette option. Exit n’est plus uniquement le fait de quitter son travail ou son organisation volontairement, mais inclut également la recherche d’un autre emploi et l’intention de quitter l’organisation. Sous cet aspect, exit devient plus une propension psychologique à quitter (intention de quitter) qui peut varier en intensité avec le temps (Naus et al. 2007). La possibilité de quitter son emploi n’étant pas toujours une option viable pour le salarié, que ce soit en raison de barrières, au départ réelles, ou perçues (Withey et Cooper, 1989), quitter l’organisation sous un angle psychologique est un état que le salarié peut en revanche contrôler. 2.1.2. Voice Hirschman définissait voice comme « toute tentative de changer une situation contestable, non seulement en protestant auprès du management ou des autorités supérieures, mais aussi par le biais de pétitions intégrant la mobilisation de l’opinion publique » (1970 : 3). Cette réaction est privilégiée si le client a par ailleurs plusieurs options et si les barrières à la sortie sont faibles. Dans ce cas le client se soucie peu de la façon dont il exprime ses plaintes (Naus et al. 2007). En revanche, quand le modèle est appliqué pour expliquer la relation d’emploi, la protestation prend un sens très différent et plus sensible. S’inspirant de la littérature sur la gestion de conflits (Saunders et al. 1992), Hagedoorn et al. (1999) élargissent le concept de voice, considéré comme une tentative de changement de la situation présentant divers degrés de volonté constructive de la part de l’individu. L’utilisation de voice peut poursuivre, soit un objectif de résolution de la situation (constructive voice), soit une recherche de conflit. Cette deuxième forme de voice est qualifiée d’agressive voice ou protestation agressive (Hagedoorn et al. 1999), et elle est aussi qualifiée de

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réaction de retrait. Elle ne cherche pas à concilier les intérêts des deux parties, i.e. l’individu et l’organisation, mais à imposer unilatéralement les intérêts de celui qui agresse. 2.1.3. Loyalty Loyauté, résignation, passivité, patience, lassitude, fidélité, apathie. De nombreuses traductions de ce concept ont été réalisées depuis la conceptualisation de Hirschman de « cet attachement particulier à l’organisation que l’on connaît comme loyauté » (1970 : 77), qui reste flou. Le salarié loyal est un « membre qui se soucie et qui aura tout tenté avant de se résoudre à se retirer et à se résigner à ne plus agir » (1970 : 83). Cette option constitue une barrière psychologique à la défection, et, par là même, une propension à la protestation. C’est cette conception de loyauté résignée qui prévaut dans la littérature en management (Naus et al. 2007). Cette résignation passive est considérée comme une réaction de retrait du manager qui, dans son rôle, doit maintenir un comportement actif. 2.1.4. Neglect Prenant comme contexte les relations de couple, neglect a été identifiée comme une réponse distincte des trois autres, caractérisée par le comportement du partenaire qui laisse passivement la relation s’atrophier (Rusbult et al. 1982). Dans le contexte organisationnel, la négligence est décrite comme un comportement de mollesse et d’indifférence comme le retard, l’absentéisme, le nombre d’erreurs ou l’utilisation de temps de travail pour des affaires personnelles. Il s’agit d’un comportement qui cherche délibérément à nuire à l’organisation (Farrell, 1983, Rusbult et al. 1988, Hagedöorn et al. 1999). Cette conceptualisation de la négligence est restée prévalente dans la littérature en management (Naus et al. 2007).

2.2. MODELE DE RECHERCHE Le modèle de recherche s’intéresse à l’effet de la perception du cynisme instrumental des dirigeants sur des réponses de retrait au travail des managers, conceptualisées par le modèle conceptuel EVLN (exit, voice, loyalty et neglect). Il répond à deux objectifs : (1) approfondir le statut du construit « cynisme instrumental des dirigeants perçu » : est-il déterminé par les trois dimensions « duplicité », « arrogance » et « absence d’intégrité » ? (2) déterminer le(s) comportement(s) de retrait des managers qui est(sont) significativement influencé(s) par la perception que ces derniers ont du cynisme instrumental de leurs dirigeants. A la vue de l’ensemble de ces éléments, l’hypothèse de l’étude présente le « cynisme instrumental perçu » (C.I.P.) comme un déterminant des comportements de retrait EVLN des managers. L’étude quantitative est soumise à deux étapes successives : (1) élaborer les instruments de mesure : il s’agit, d’une part, de créer une mesure du « cynisme

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instrumental perçu » et, d’autre part, d’adapter les mesures ELVN issues de la littérature ; (2) tester les hypothèses et valider le modèle de recherche.

2.3. ELABORATION DE L’ECHELLE DE MESURE DU « CYNISME INSTRUMENTAL PERÇU » (C.I.P.)

En raison des insuffisances conceptuelles existantes dans la littérature, nous sommes amenés à réaliser nos propres outils de mesure du construit central de notre recherche : le « cynisme instrumental perçu » (C.I.P.). Cette démarche, effectuée à partir de l’analyse des données recueillies par un questionnaire réalisé par nos soins, se soumettra, conformément au paradigme de Churchill (1979), à une étude exploratoire d’abord, puis à une étude confirmatoire ensuite. Afin d’élaborer une échelle de mesure fiable et valide, nous nous sommes appuyés sur les résultats de l’analyse de contenu de l’étude qualitative exploratoire. Nous avons ainsi construit la structure des dimensions du cynisme instrumental perçu. Cette structure se compose a priori de trois dimensions : 1) duplicité perçue, 2) arrogance perçue, et 3) absence d’intégrité perçue. Nous avons conçu les énoncés en nous appuyant sur le verbatim issu de la table ronde. 25 énoncés représentant ces trois dimensions ont été créés à partir de la phase exploratoire. Les énoncés ont été soumis à deux experts reconnus pour leurs connaissances en données statistiques dans la recherche en gestion, puis à sept managers en entreprise. Suite au pré-test nous avons supprimé 3 énoncés. Ainsi, 22 énoncés ont été sélectionnés pour la phase de collecte des données : 7 énoncés pour la facette ‘duplicité’, 8 énoncés pour la facette ‘arrogance’, et 7 énoncés pour la facette ‘absence d’intégrité’. Le questionnaire a été réalisé sur l’outil d’enquête par internet « Surveymonkey ». Nous avons envoyé plus de 3000 courriers électroniques personnalisés, avec une présentation de la démarche de recherche et le lien web d’accès au questionnaire. La cible est composée de managers encadrants français, issus de la base du réseau des diplômés de l’IAE d’Aix-en-Provence. Un total de 907 questionnaires a été collecté. Après élimination des valeurs manquantes, aberrantes et de répondants non représentatifs, nous gardons une base utile de 658 répondants. 2.3.1. Caractéristiques de l’échantillon L’échantillon est constitué de managers français en activité. Il compte 35 % de femmes. Plus de 63 % des individus ont une expérience professionnelle supérieure à 10 ans. Ils occupent des fonctions diverses dans l’entreprise. Ils viennent d’entreprises françaises de petite, moyenne et grande taille, ainsi que de secteurs d’activité variés.

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Tableau 1 : Statistiques descriptives et intercorrélations des 8 variables

du modèle de recherche

2.3.2. Dimensionnalité et purification de l'échelle C.I.P. Le processus de purification de la mesure du C.I.P. a suivi les recommandations de Churchill (1979) et de Gerbing et Anderson (1988). La base de données de 658 répondants est scindée en deux par un tirage aléatoire : une première base de 220 répondants est utilisée pour l’analyse factorielle exploratoire et une seconde base de 438 répondants sera utilisée pour l’analyse factorielle confirmatoire. Les données sont factorisables selon la mesure KMO (0,955). Le test de Bartlett rejette l’hypothèse nulle d’absence de corrélation entre les 22 énoncés (X2 = 3394,67 ; dl = 231 ; p<0,001). Selon le critère de Kaiser, il faut retenir les dimensions qui expliquent plus de 100/22 = 4,5 4% de variance. Ceci nous amène à conserver 2 dimensions (respectivement 53,7 % et 7,1 %), dont la première est nettement dominante. Selon le critère du coude, qui se produit au niveau du 2ème axe, il faut retenir 1 dimension. Selon le critère du Scree, on retient 2 dimensions. Selon le test MAP de Velicer, on retient 2 dimensions : le minimum de la somme des corrélations résiduelles élevées au carré (0,0145) est atteint pour 2 facteurs. Les résultats des divers tests sont ambigus. D’un point de vue théorique, on s’attendait à trois dimensions, or les tests indiquent soit une, soit deux dimensions. Pour les analyses factorielles exploratoires, on examinera donc une solution avec deux dimensions et une solution avec trois dimensions afin de les comparer. On examinera aussi la possibilité d’un modèle de second ordre dans lequel le C.I.P. comporterait trois facettes de premier ordre. Pour tester la solution bidimensionnelle, une rotation s’impose car la solution sans rotation n’est pas lisible. On effectue une rotation orthogonale Varimax suivie d’une

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rotation oblique Promax. On purifie l’échelle par éliminations itératives des énoncés complexes chargeant sur les deux axes, ainsi que des énoncés dont la qualité de représentation est inférieure à 0,45. On obtient une solution avec 18 énoncés. Elle explique 61,6 % de la variance. La corrélation entre les deux axes est de 0,71. Les deux axes présentent des α de Cronbach de 0,919 et 0,916. La solution tridimensionnelle résulte en une solution avec 17 énoncés après épuration d’un dernier énoncé non pertinent. Les corrélations entre les 3 axes sont de 0,68, 0,61 et 0,59. Les trois dimensions identifiées expliquent 64,7 % de la variance. Les coefficients α de Cronbach varient entre 0,815 (absence d’intégrité) et 0,915 (duplicité). Le modèle bidimensionnel suggéré par les tests de dimensionnalité présente une faible qualité d’ajustement (χ2 = 408,20, ddl = 134, χ2 /ddl = 3,046, AGFI = 0,867, RMSEA = 0,068, TLI = 0,930, CFI = 0,938). L’analyse des résidus standardisés nous amène à éliminer un énoncé qui a un résidu standardisé supérieur à 3. Après suppression, le modèle bidimensionnel présente un meilleur ajustement (χ2 = 339,70, ddl = 118, χ2 /ddl = 2,878, AGFI = 0,883, RMSEA = 0,066, TLI = 0,940, CFI = 0,948). Cependant, c’est la solution tridimensionnelle à 17 énoncés qui présente le meilleur ajustement aux données (χ2 = 266,60 ddl = 116, χ2 /ddl = 2,298, AGFI = 0,909, RMSEA = 0,054, TLI = 0,957, CFI = 0,963). C’est cette solution qui est retenue. Au vu des énoncés, nous nommons les trois dimensions « duplicité », « refus d’écoute » (au lieu d’arrogance) et « absence d’intégrité ».

Tableau 2 : Qualités psychométriques et indices d’ajustement des échelles C.I.P.

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Bien que les coefficients de symétrie et d’aplatissement soient tous compris entre -1 et 1 pour les 17 énoncés, le test de Mardia (Mardia's Multivariate Normality Test) est de 70,77. Ceci signale la présence de répondants très éloignés du centre de gravité dans le cadre de l’hypothèse de multi normalité (Bollen, 1989). On décide de supprimer les 15 répondants présentant les distances de Mahalanobis les plus élevées. Après suppression, le test de Mardia descend à 35,20, présentant une amélioration de la condition de multi normalité. Les énoncés présentant plus de variance résiduelle que de variance expliquée par le concept latent sont épurés par analyses itératives sur les 423 répondants, ce qui conduit à une diminution de X² ainsi qu’à une amélioration de tous les autres indices d’ajustement. Le modèle retenu contient 14 énoncés et présente les indices suivants : χ2 = 130,19 ddl = 74, χ2 /ddl = 1,759, AGFI = 0,940, RMSEA = 0,042, TLI = 0,980, CFI = 0,984. 2.3.3. Validité discriminante des dimensions du C.I.P. Les corrélations entre les trois facettes du construit « cynisme instrumental perçu » sont comprises entre 0,77 et 0,81. Compte tenu de ces valeurs élevées, l’existence d’un modèle de second ordre est examinée, modèle qui remplace les corrélations entre les trois facettes par leurs relations avec le concept global C.I.P. Les deux modèles sont équivalents, et présentent les mêmes indices de qualité. Les corrélations entre le C.I.P. et arrogance (0,87) ainsi qu’entre le C.I.P. et absence d’intégrité (0,88) sont quasiment égales. Cela nous amène à examiner une version contrainte de l’échelle de cynisme instrumental perçu, dans laquelle on contraint à l’égalité les coefficients de régression entre C.I.P. et arrogance d’une part, et C.I.P. et absence d’intégrité, d’autre part. Le degré de liberté supplémentaire permet l’identification des relations entre le concept de second ordre et ses trois facettes. Pour examiner la question de la validité discriminante des 3 facettes du C.I.P. on calcule la cohérence interne des facettes au moyen du Rhô de Jöreskog et du pourcentage moyen de variance extraite par le concept (Rhô VC). Selon la règle proposée par Fornell et Larcker (1981), la variance extraite par chaque concept doit être supérieure à la variance partagée entre les concepts.

Tableau 3 : Cohérence interne des facettes du C.I.P.

Variance partagée (corrélations)

Concepts Rhô de Jôreskog

Variance extraite Duplicité Refus d’écoute

Duplicité 0,906 58,1 % Refus d’écoute 0,854 59,5 % 63,5 % (0,797) Absence d’intégrité 0,819 60,2 % 65,4 % (0,809) 59,4 % (0,771)

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La validité discriminante au sens de la règle de Fornell et Larcker n’est pas vérifiée. En effet, la variance extraite par le concept de duplicité (58,1 %) est plus petite que toutes les variances partagées entre les trois facettes. Cependant, le test de Bagozzi et Yi (1989) vérifie la validité discriminante du modèle. Ce test consiste à contraindre les corrélations entre les trois facettes à l’unité. Si cette contrainte détériore de manière significative la qualité de l’ajustement par rapport au modèle non contraint, alors il existe une validité discriminante puisqu’il n’est pas possible de prétendre que les facettes corrèlent parfaitement entre elles. Le delta χ2 montre que le modèle contraint (χ2 = 426,14 ddl = 80, χ2 /ddl = 5,327, AGFI = 0,805, RMSEA = 0,101, TLI = 0,885, CFI = 0,899) est significativement moins bon que le modèle non contraint (χ2 = 130,19 ddl = 74, χ2 /ddl = 1,759, AGFI = 0,940, RMSEA = 0,042, TLI = 0,980, CFI = 0,984). Il existe donc un degré significatif de validité discriminante entre les trois facettes du C.I.P. En conclusion, les analyses de l’échelle C.I.P. plaident pour un concept d’ordre deux, composé de trois facettes proches, mais cependant différentes, baptisées « duplicité », « refus d’écoute » et « absence d’intégrité ». Cette structuration de l’échelle présente le meilleur ajustement aux données et correspond le mieux aux résultats de notre étude qualitative.

2.4. TEST DES ECHELLES DE MESURE EVLN Pour mesurer exit, voice, loyalty, neglect, nous avons utilisé les échelles de Hagedöorn et al. (1999) Les auteurs se sont inspirés des travaux de Farrell (1983) et Rusbult et al. (1988). Exit est défini, à la fois comme le départ effectif du poste de travail ou de l’organisation, et comme la recherche d’un autre emploi et l’intention de quitter l’organisation. La forme de voice la plus proche d’un comportement de retrait est issue de la littérature sur la gestion de conflits (Saunders et al. 1992) et est définie comme la volonté d’imposer unilatéralement les intérêts de celui qui agresse. Loyalty est défini comme l’attente passive, mais optimiste d’une amélioration de la situation dans l’organisation. Enfin, neglect est décrit comme un comportement laxiste et irrespectueux, caractérisé par des absences et retards chroniques, l’utilisation du temps de travail pour des affaires personnelles et l’augmentation d’erreurs dans le travail. Pour mesurer les qualités psychométriques de ces échelles, nous gardons la même base de données, i.e. 220 répondants pour l’analyse exploratoire et 423 répondants pour l’analyse confirmatoire.

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Tableau 4 : Qualités psychométriques et indices d’ajustement des échelles EVLN

Exit Voice Loyalty Neglect

Source des échelles Travaux de Hagedöorn, Yperen, Vliert et Buunk (1999) Nb énoncés de l’échelle d’origine 5 7 5 5

Nb dimensions (critère de Kaiser) 1 1 1 1

Analyse factorielle exploratoire (N=220)

Kaiser-Meyer-Olkin Measure of Sampling Adequacy 0,884 0,773 0,746 0,722

Bartlett’s Test of Sphericity

Approx. Chi2 1072,10 350,37 252,02 287,02 Dl 10 21 10 10 Sig. ,000 ,000 ,000 ,000

Alpha de Cronbach (nb énoncés) 0,949 (5) 0,742 (4) 0,758 (4) 0,755 (4)

Analyse factorielle confirmatoire (N=423)

Rhô de Jöreskog (nb énoncés) 0,932 (4) 0,722 (3) 0,784 (3) 0,742 (3)

Variance extraite 77,5 % 46,4 % 54,7 % 48,9 % Indices d’ajustement du modèle

Chi2 (dl) 3,532 (2) 5,739 (1) 1,681 (1) 5,522 (1)

Chi2 corrigé 1,766 5,739 1,681 5,522

AGFI 0,979 0,946 0,984 0,948

RMSEA 0,043 0,106 0,040 0,104

TLI 0,997 0,943 0,994 0,954

CFI 0,999 0,981 0,998 0,985

Matrice de corrélations (** p<0,01 ; * p<0,05)

Exit 1

Voice 0,222** 1

Loyalty -0,100* -0,124** 1

Neglect 0,381** 0,235** -0,050 1

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Les 4 échelles exit, voice, loyalty, neglect sont unidimensionnelles et les énoncés retenus après l’analyse confirmatoire corrèlent fortement avec chaque dimension. L’échelle exit présente des qualités psychométriques excellentes. Les échelles voice, loyalty et neglect sont moins bonnes, leur ρ est inférieur à 0,7 et le % de variance expliquée est inférieur à 50 % pour voice et neglect.

2.5. TEST DU MODELE STRUCTUREL Etant donné que le modèle présente quatre variables latentes à expliquer qui doivent être examinées simultanément, nous utilisons la méthode d’équations structurelles (Pedhazur et Pedhazur Schmelkin, 1991). Avant d’examiner les relations structurelles entre les variables du modèle, la qualité d’ajustement du modèle est vérifiée. Les indices sont très satisfaisants : χ2 = 642,74 ddl = 317, χ2 /ddl = 2,028, AGFI = 0,921, RMSEA = 0,042, TLI = 0,960, CFI = 0,964. Pour tester le modèle structurel, le même échantillon que celui utilisé lors de l’analyse confirmatoire a été utilisé.

Graphique 3 : Relations structurelles du modèle de recherche

Le cynisme instrumental perçu (C.I.P.) présente une structure de second ordre, qui se caractérise, d’une part, par sa multidimensionnalité interne : duplicité, refus d’écoute et absence d’intégrité, puis, d’autre part, par son unidimensionnalité externe : sa seule cible est composée des dirigeants de l’organisation.

Duplicitéperçue

Refus d’écoute perçu

Absence d’intégrité

perçue

Exit

Voice

Loyalty

Neglect

Cynisme instrumental

perçu

Indices d’ajustement:X2 = 642,74 ddl = 317 X2/ddl = 2,028 AGFI=0,921 RMSEA=0,042 TLI=0,960 CFI=0,964

0,18**

0,54**

-0,19**

0,40**

Var=15,7%

Var=3,5%

Var=3,3%

Var=28,9%

** p<0,001

0,93**

0,88**

0,87**

Relation > 0,50

Relation < 0, 20Relation ]0,20;0,50[

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L’influence du C.I.P. est significative sur les quatre variables EVLN. Le C.I.P. influence fortement exit (r=0,54 ; p<0,001), puis neglect (r=-0,40 ; p<0,001). A l’inverse, son influence sur voice et loyalty est beaucoup plus faible (r=0,19 et r=-0,19 ; p<0,001 respectivement). Le C.I.P. n’est bien sûr pas le seul facteur qui influence les comportements de retrait EVLN des managers (R2 = 0,289 ; 0,033 ; 0,035 ; 0,157 respectivement). Ces résultats valident notre hypothèse. Le C.I.P. a bien un effet sur les comportements de retrait EVLN des managers. De plus, ils permettent de confirmer la validité nomologique du C.I.P. Ce type de validité fait référence à la mesure dans laquelle des prédictions issues d'une structure de relations théoriques sont confirmées. La validité nomologique est satisfaisante lorsque les paramètres statistiques correspondant aux relations théoriques entre construits sont forts (C.I.P.=>exit = 0,54 ; C.I.P.=>voice = 0,18, C.I.P.=>loyalty = -0,19 ; C.I.P.=>neglect = 0,40) et statistiquement significatifs (p<0,001 pour les 4 relations), et les coefficients de détermination suffisamment élevés (R2 = 0,289 ; 0,033 ; 0,035 ; 0,157 respectivement).

3. DISCUSSION : LE C.I.P. EST UNE REALITE ORGANISATIONNELLE

Ces résultats montrent que le cynisme instrumental perçu (C.I.P.) correspond à une réalité organisationnelle et peut avoir un effet négatif sur les comportements des managers, population clé de l’organisation.

3.1. PREMIERE FACETTE DU C.I.P. : DUPLICITE PERÇUE La perception qu’ont les managers de la duplicité de leurs dirigeants les fait se sentir manipulés. Les managers demandent que les dirigeants fassent preuve de sincérité et qu’ils alignent leurs actions au discours organisationnel. En effet, il est attendu des dirigeants qu’ils soient « l’exemple » à suivre. La duplicité est perçue par les managers comme l’absence d’exemplarité. Les managers souhaitent que les dirigeants assurent leur légitimité de représentants de l’organisation à laquelle ils appartiennent. S’ils sont conscients que tout ne peut pas être dit, ils attendent que les raisons d’une absence de transparence soient au service de l’intérêt général, et pas de l’intérêt personnel des dirigeants.

3.2. DEUXIEME FACETTE DU C.I.P. : REFUS D’ECOUTE PERÇU Une barrière qui paraît infranchissable semble se dresser entre les dirigeants et les managers. Le fait de ne pas se sentir entendus par les dirigeants engendre chez les managers un sentiment de désarroi qui peut les pousser à se désinvestir du travail. La compétence d’écoute des dirigeants est d’autant plus indispensable qu’ils ont moins d’éléments que d’autres collaborateurs pour percevoir les déficiences organisationnelles (Mezias et al. 2001). Ainsi, si les dirigeants ont tendance à faire

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bien plus confiance à leur expérience personnelle qu’à l’information provenant de leurs équipes (Mezias et Starbuck, 2003), ils ont tout intérêt à apprendre à écouter leurs équipes qui, elles, perçoivent les déficiences internes avec plus de clairvoyance, afin de mieux mettre en cohérence le fonctionnement organisationnel de leur entreprise. De plus, les entreprises, notamment les grandes entreprises, privilégient souvent des dirigeants centrés sur les aspects techniques, car elles sous-estiment les aspects humains (Pitcher et Smith, 2001) ; elles nient les émotions, ignorent les comportements et valorisent uniquement les capacités cognitives et les compétences (Pitcher, 1999). Ce type de dirigeants a souvent une conception instrumentale de l’organisation, ce qui contribue à augmenter la distance entre dirigeants et managers (Pitcher et Smith, 2001).

3.3. TROISIEME FACETTE DU C.I.P. : ABSENCE D’INTEGRITE PERÇUE Les managers sont particulièrement sensibles à cette dimension du C.I.P. L’étude qualitative avait mis en avant le lien systématique qui est fait par les managers entre le cynisme instrumental perçu et l’absence d’intégrité perçue. Rappelons, qu’en effet, « tout ce qui concerne [l’entreprise] a un parfum de scandale au point même que le ton général des commentaires était à l’émoi lors de l’annonce de bons résultats des sociétés du CAC40, par ce que le soupçon de la répartition injuste s’imposait comme première réaction » (Thévenet, 2005). Cette perception existe, qu’elle corresponde à des faits objectifs ou pas. La prendre en considération apparaît comme essentiel à toute démarche de direction. De plus, la presse (et les médias en général) joue vraisemblablement un rôle dans l’interprétation des actions des dirigeants. Dans la mesure où la presse d’information contribue à façonner les expressions utilisées socialement sur les sujets qu’elle aborde (Cappella, 2002), elle peut avoir une influence sur une perception accrue d’absence d’intégrité chez les dirigeants.

3.4. CONSEQUENCES DU C.I.P. SUR LE RETRAIT DES MANAGERS La relation la plus forte relie le C.I.P. à exit (r=0,54, p<0,001). Ce résultat suggère que dans les entreprises, les managers qui perçoivent leurs dirigeants comme cyniques « quittent » l’organisation. Mais ce « départ » peut se manifester, à la fois, comme un départ effectif ou bien, compte tenu du coût de départ élevé, comme un départ… tout en restant. Ceci peut être un antécédent de comportements de désinvestissement dans leur travail, compte tenu de la distance affective que l’intention de départ peut établir entre le manager et son organisation. Neglect est également fortement expliqué par le C.I.P. Le manager semble évaluer la qualité de l’échange social et « rendre la monnaie » à travers le choix de comportements négligents. Visiblement, quand il perçoit que ses dirigeants sont cyniques, il évalue une détérioration de la qualité d’échange social, puis rééquilibre cet échange par des réponses qui incluent des retards systématiques et un investissement, voire un effort minimum, au travail.

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L’influence du C.I.P. sur la baisse de loyalty, forme de passivité bienveillante (mais passive quand même), et sur l’augmentation de voice et neglect, suggère que les managers perdent l’espoir que les choses puissent changer et s’améliorer (même sans leur contribution). Le mécanisme des jeux de pouvoir, vécu par les managers comme un système qui s’auto nourrit sans pouvoir se modifier, peut empêcher les managers de croire à un changement d’intention des dirigeants.

4. PRECONISATIONS MANAGERIALES

4.1. COMPRENDRE LES ATTENTES DES MANAGERS A L’EGARD DES DIRIGEANTS

En premier lieu, les dirigeants doivent bien comprendre que leurs comportements importent aux managers. Ceux-ci ne sont pas neutres à leur égard, et les observent et les jugent. L’influence de la perception du cynisme des dirigeants sur les réactions des managers nous renseigne sur la conception que ceux-ci se font de leurs dirigeants : les résultats soulignent de façon particulièrement nette l’attente des managers à l’égard de leurs dirigeants : (1) absence de signes de duplicité (une revendication de sincérité) ; (2) absence d’attitudes de refus d’écoute (une revendication d’écoute du discours des managers sur la conduite de l’entreprise) ; (3) absence de signes d’une intégrité défaillante (une revendication de sens de l’intérêt général). Ces comportements semblent devenir la condition de la perception d’un échange social perçu comme équitable par les managers. Sincérité, écoute, sens de l’intérêt général : les managers conçoivent leur relation aux dirigeants comme celle de partenaires dans des relations d’échange social et, ainsi, attendent que les dirigeants soient à leur service, comme eux sont à leur service. Une affaire de réciprocité.

4.2. DEVELOPPER UNE COMMUNICATION DE QUALITE En second lieu, la perception par les managers de l’attitude des dirigeants n’est pas forcément totalement factuelle. Ces derniers « se font un film » dont ils écrivent peut-être une partie du scénario. Du fait de l’éloignement et du degré de différenciation structurelle et sociale entre les dirigeants et les salariés, les perceptions de ces derniers sur les dirigeants sont soumises à une information imparfaite (Paine, 1994). Ceci n’empêche pas que les managers s’appuient sur leurs perceptions, même imprécises, pour juger les comportements de leurs dirigeants. De plus, le fait qu’ils soient brillants, mais arrogants et peu sensibles aux aspects humains dans la conduite de l’organisation, peut leur donner une image de « dirigeants inhumains », et contribuer à interpréter, d’une part, certains de leurs actes comme peu intègres, et, d’autre part, leurs discours comme manipulateurs. Konovsky (2000) explique qu’il est rare que les managers possèdent l’information permettant de juger si l’autorité est digne de légitimité. Malgré un manque

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d’information, les managers (et, de façon générale, les salariés) feront appel à une heuristique qui se rapproche le plus de leur propre vécu ou des représentations collectives pour interpréter l’information qu’ils ont. Ils interprètent les situations à travers des cognitions préexistantes créées, soit par des contextes d’expérience, soit par les histoires véhiculées par la presse. Ce phénomène permet de donner du sens aux situations qui paraissent importantes et pour lesquelles ils sont sous-informés (Mezias et al. 2001). Aux dirigeants de comprendre que ces éventuelles déformations auront des conséquences importantes. Il leur appartient donc de veiller à leur communication dans l’entreprise et à sa sincérité, ainsi qu’au degré d’information fourni aux managers. Compte tenu de l’exigence d’exemplarité qu’ils ont, il est important de veiller à éviter toute manipulation de l’information, qui ne saurait que contribuer à une image encore plus cynique des dirigeants. Le besoin d’une communication managériale de qualité a émergé comme un besoin fondamental dans la gestion de la qualité de l’échange social managers-dirigeants.

4.3. METTRE EN PLACE DES CAPTEURS DE COMPORTEMENTS DE RETRAIT En troisième lieu, mettre en place des capteurs et déchiffrer les comportements de retrait des managers devient une compétence à développer. Exit est le comportement le plus influencé par le C.I.P. Des mesures pour l’identifier s’avèrent nécessaires. Compte tenu du coût de départ pour le manager, il est fort possible qu’il « reste tout en étant parti dans son esprit ». Connaître le degré d’intention de départ et contrecarrer le C.I.P. est fondamental pour garder des managers investis et présents. Le C.I.P. influence fortement voice. Un bras de fer entre les dirigeants et leurs managers n’est constructif ni pour eux ni pour l’organisation. Les dirigeants doivent créer une véritable équipe avec leurs N-1, tout en évitant le piège de l’équipe trop homogène. Veiller à capter des états de passivité (même bienveillante) des managers est crucial pour éviter qu’ils cessent d’être une force de proposition et qu’ils ne jouent pas leur rôle de managers. Identifier les signes de négligence chez les managers s’avère d’autant plus indispensable qu’ils peuvent être directement nuisibles pour l’organisation. Les résultats de l’étude permettent de supputer que c’est le mécanisme de l’échange social que les managers induisent à l’égard de leurs dirigeants qui sous-tend l’appréciation qu’ils se font de leurs dirigeants et l’effet que cette appréciation peut avoir sur leurs comportements au travail. Ainsi, chercher à comprendre leurs comportements de retrait peut permettre, d’une part, d’identifier que les dirigeants sont perçus comme cyniques et, d’autre part, de créer les conditions pour inverser ces comportements et développer l’envie de s’engager vers des comportements pro-sociaux au travail.

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5. LIMITES ET VOIES DE RECHERCHE FUTURES Tout d’abord, sur un plan conceptuel, le rôle du supérieur hiérarchique immédiat du manager doit être examiné. En effet, la perception de soutien de son hiérarchique direct peut modérer l’influence du C.I.P. des dirigeants sur les comportements des managers. Des études ont montré que la qualité d’échange social entre le manager et son supérieur hiérarchique immédiat peut influencer l’intention de départ du manager (Graen et al. 1982). On peut supposer que le soutien du hiérarchique immédiat perçu peut jouer en faveur d’une réduction des comportements de retrait des managers (Cole et al. 2006, Wayne et al. 1997), même s’ils perçoivent leurs dirigeants comme cyniques. Ensuite, il semble indispensable d’élargir l’unité d’analyse au dirigeant lui-même, afin de recueillir sa perception du cynisme au travail. Des recherches futures devraient questionner les dirigeants de toute taille d’entreprise sur leur représentation du cynisme, qui pourrait peut-être faire référence au cynisme des salariés, voire au cynisme des dirigeants d’autres entreprises. Enfin, sur le plan méthodologique, il est nécessaire d’améliorer les échelles des variables voice, loyalty et neglect. Alors même que la variable exit présente d’excellents résultats statistiques, voice et neglect présentent quelques faiblesses. La variance expliquée du concept est inférieure à 50 % et ils présentent un ρ de fiabilité < 0.75. En outre, les indices d’ajustement des modèles sont moyennement satisfaisants. Les résultats de loyalty sont meilleurs que ceux de voice et neglect, mais ne sont pas entièrement satisfaisants. Au-delà des modèles de mesure, loyalty et voice sont très faiblement expliquées par le modèle structurel (3,3 % et 3,5 % respectivement). Des recherches futures nécessiteraient d’approfondir l’adaptation au contexte français de ces variables.

CONCLUSION Notre recherche visait à comprendre la connotation que la langue française attribue au terme « cynisme » au travail. Pour ce faire, nous avons étudié le cynisme au travail tel qu’il est perçu par les managers français à travers une étude qualitative exploratoire. Pour les managers français, le cynisme est l’affaire des dirigeants, et il s’agit d’une attitude mêlant duplicité, refus d’écoute et absence d’intégrité. La duplicité renvoie à un discours volontairement et consciemment hypocrite, en vue de tromper les salariés. Le refus d’écoute renvoie à la perception d’une incapacité des dirigeants à se remettre en question et à s’intéresser aux autres. L’absence d’intégrité illustre la propension à l’opportunisme et le seul intérêt pour le pouvoir de la part des dirigeants. Ces trois aspects ressortent comme des traits caractéristiques des dirigeants perçus comme cyniques. Nous avons ainsi conceptualisé ce cynisme en tant que « cynisme instrumental perçu » (C.I.P.). L’étude quantitative, quant à elle, montre que le C.I.P. que les managers perçoivent chez leurs dirigeants induit des comportements de retrait EVLN (exit, voice, loyalty, neglect) au travail, particulièrement exit et neglect. Le C.I.P. est donc bien une réalité dans l’organisation et peut être compris comme un indicateur d’une

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appréciation négative des dirigeants qui génère des comportements de retrait chez les managers.

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