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Cure de jouvence pour pachydermes à la Fonderie Vincent. Günther Zahorka a racheté à Georges Vincent, un ancien ingénieur de l’ESFF, la fonderie de fonte de Brignais (69). C’était en 1998, cela fait plus 16 ans. Ingénieur des Mines de Paris, aujourd’hui âgé de 62 ans, il est de la promotion 1976 de cette grande école. Etonnamment, M. Zahorka s’oriente dès le début de sa carrière vers l’industrie alors que ses collègues choisissent plutôt la banque et l’informatique. La production chez Péchiney le conduit à des responsabilités de production à Tarascon, Flessin et Riou avant de rejoindre le Centre de recherche de Voreppe en Isère il travaillera avec des personnalités telles MM Gard, Figuère et Portalier. Luc Bellon, Gunther Zahorka, une apprentie compagnon du devoir, Daniel Bihan. En 1982, il découvre les affres d’une nationalisation, qui voit arriver aux affaires des politiques, Jean Gandois, Martine Aubry qui se mêleront d’industrie et de l’avenir de Péchiney. L’aventure industrielle de Günther se poursuit à Laigle dans l’Orne dans le matriçage-laiton appelé aussi forgeage ou frappe à froid. Il rejoint ensuite à Lyon le groupe autrichien Amag. Ce groupe, à l’époque est associé à Thomas Di Serio qui dirige la fonderie de Saint Jean c’était en 1991-92. Ensuite directeur de l’usine de la Mine d’or de Salsigne, il devient spécialiste des traitements du précieux minerai. Il rejoint après la fonderie Jurine devenue LFI Loire Fonte Industrie. La fonderie Vincent qu’il a donc rachetée en 1998 est surtout une fonderie de fontes spéciales mais aussi d’aciers moulés. Pour les besoins des clients elle est même capable de fondre du bronze ou du laiton comme pour le bastingage du Mont Saint Michel. Auparavant le moulage-main était la règle et l’on bossait ici par terre avec des clients comme JC Decaux (30% du CA) qui à l’époque utilisait plutôt la fonte. Le panel des clients était complété par les verriers basés dans les vallées de la Bresle ou du Giers pour cette spécialité pointue : le moule de verrerie en fonte. Ces moules aux métallurgies spécifiques devront supporter les cadences infernales. D’autres clients dits « pièces de rechanges » complètent ce panel.

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Cure de jouvence pour pachydermes à la Fonderie Vincent.

Günther Zahorka a racheté à Georges Vincent, un ancien ingénieur de l’ESFF, la fonderie de fonte de Brignais (69).

C’était en 1998, cela fait plus 16 ans. Ingénieur des Mines de Paris, aujourd’hui âgé de 62 ans, il est de la promotion 1976 de cette grande école. Etonnamment, M. Zahorka s’oriente dès le début de sa carrière vers l’industrie alors que ses collègues choisissent plutôt la banque et l’informatique. La production chez Péchiney le conduit à des responsabilités de production à Tarascon, Flessin et Riou avant de rejoindre le Centre de recherche de Voreppe en Isère où il travaillera avec des personnalités telles MM Gard, Figuère et Portalier.

Luc Bellon, Gunther Zahorka, une apprentie compagnon du devoir, Daniel Bihan.

En 1982, il découvre les affres d’une nationalisation, qui voit arriver aux affaires des politiques, Jean Gandois, Martine Aubry qui se mêleront d’industrie et de l’avenir de Péchiney.

L’aventure industrielle de Günther se poursuit à Laigle dans l’Orne dans le matriçage-laiton appelé aussi forgeage ou frappe à froid. Il rejoint ensuite à Lyon le groupe autrichien Amag. Ce groupe, à l’époque est associé à Thomas Di Serio qui dirige la fonderie de Saint Jean c’était en 1991-92. Ensuite directeur de l’usine de la Mine d’or de Salsigne, il devient spécialiste des traitements du précieux minerai. Il rejoint après la fonderie Jurine devenue LFI Loire Fonte Industrie. La fonderie Vincent qu’il a donc rachetée en 1998 est surtout une fonderie de fontes spéciales mais aussi d’aciers moulés. Pour les besoins des clients elle est même capable de fondre du bronze ou du laiton comme pour le bastingage du Mont Saint Michel.

Auparavant le moulage-main était la règle et l’on bossait ici par terre avec des clients comme JC Decaux (30% du CA) qui à l’époque utilisait plutôt la fonte. Le panel des clients était complété par les verriers basés dans les vallées de la Bresle ou du Giers pour cette spécialité pointue : le moule de verrerie en fonte. Ces moules aux métallurgies spécifiques devront supporter les cadences infernales. D’autres clients dits « pièces de rechanges » complètent ce panel.

La fonderie Axiane dans la Drôme (7 collaborateurs) devenue fonderie de Saint Uze « s’est fondue » dans la fonderie Vincent de Brignais (35 salariés) au milieu des années 2000.

Aujourd’hui, un chantier de moulage automatisé italien de 35 moules/heure aux dimensions 460 x 600 assure même les petites séries. Il est alimenté par deux fours à induction de 800 Kg de métal liquide disponible toutes les heures.

Un responsable fusion et un BTS fonderie assurent la qualité métallurgique des quelque 1000 tonnes annuelles de fontes spéciales, blanches, GS, ni Hard, ni Resist et autres.

Les moulages 2/3 main, 1/3 machine, grâce à ce nouveau chantier mécanisé, sont maintenant inversés. Etonnamment, seulement 10 % des fabrications sont exportées souvent vers l’Allemagne moins compétitive parait-il en fonderie. C’est un chiffre d’affaires ambitionné de 4 millions d’euros qui n’aura pas été atteint ces dernières années de crise.

Cependant, deux commandes (pièces ci-dessus & ci-dessous) pour l’émir du Qatar sont en passe d’être totalement livrées, de quoi scotcher le visiteur Piwi.

Outre cette nouvelle notoriété, il n’est pas inutile de rappeler d’autres anciennes fabrications médiatisées

comme l’horloge de Tassin, les 3 tonnes de la vierge de Fourvière, son socle de 4 tonnes, sans oublier la statue du Général de Boigne cet aventurier savoyard qui fit fortune aux Indes où il entraîna et commanda une force de près de cent mille hommes avant son retour à Chambéry. On lui doit cette fontaine aux 4 pachydermes.

La restauration du monument de Chambéry dit des « quatre sans Q » (ce qui manque en effet à leur anatomie) sera terminée courant mai ou juin prochain. Il s’agit de quatre éléphants d’Asie à ne pas confondre avec ceux d’Afrique, question oreilles puissantes et donc contre-dépouilles.

L’enjeu technologique est de taille quand on veut réparer à moindre coût les terribles effets de la corrosion sur ces quatre extraordinaires éléphants en fonte et aussi sur l’ensemble des pièces d’un monument : une fontaine emblématique chère à l’identité de la ville …qu’il convient de sauvegarder.

Les éléphants ainsi alignés en plusieurs parties sont venus ici pour une authentique cure de jouvence dont ils repartiront guéris.

C’est en 1838 que la célèbre fonderie Haut-Marnaise du Val d’Osne avait moulé, coulé et assemblé ces chefs d’œuvres déjà réparés en 1985 et qui aujourd’hui défient les équipes d’une PME fière de ses compétences et de ses savoir-faire. Les renforcements en fibre de verre et résine de l’époque auront permis d’attendre ces jours meilleurs enfin venus. Les affres de la corrosion liée aux divers assemblages sont légions sur chacun de ces ouvrages d’art. Il avait été envisagé de mouler deux nouveaux éléphants et d’en restaurer les deux autres. Mais ce sont trois nouveaux éléphants qui seront moulés, un seul pouvant être réhabilité et sauvé.

La restauration, un travail minutieux

Démonter les trompes,

et les deux pattes,

si les quatre trompes sont presque intactes, quelques pattes apparaissent encore en bon état, trois ensembles corps-tête sur quatre sont bien

abîmés.

décaper, enlever la corrosion, la peinture, les coques et les résines, réparer, couler des « rustines en fonte » sur des modèles en plâtre, ajuster par meulage, assurer les fixations visées, soudure, métallisation à chaud, masticage, peinture au pistolet de zinc fondu, thermo-laquage et choupage « autant d’opérations qui ne sont pas de minces affaires à faire ». Enfin remonter, assembler l’ensemble des éléments, brider, boulonner, assurer les joints d’assemblage avec mastic et couche de peinture de finition anticorrosion.

Transmettre le patrimoine aux générations

futures. Un des quatre éléphants a été scanné grâce à un bras de numérisation, afin de conserver en mémoire sa morphologie exacte. Son empreinte 3D est gardée sur un ordinateur. "Cela pourra servir à reproduire des maquettes ou des modèles réduits".

Le savoir-faire, la maîtrise de l’entreprise, de ses professionnels qui connaissent aussi les techniques ancestrales adaptées à la conservation du patrimoine, vont permettre de les transmettre aux générations futures.

Ce monument, c’est aussi un superbe bas relief cassé en deux,

et des trophées,

authentiques œuvres d’art d’une époque révolue qui nous renvoie à la qualité des savoir-faire de 1838 à côté desquels le quidam passe sans en mesurer l’importance. Les Fondeurs de 2015 apprécieront au moins l’ouvrage si ce n’est la valeur artistique d’une autre époque.

« Le modus operandi se fait comme en 1838. » selon Luc Bellon, chef de projet ici avec Daniel Bihan.

La surchauffe économique de 2008 suivie des années de crise avait vu le chiffre d’affaires de la fonderie Vincent divisé par deux. En 2011 l’entreprise passait par la case règlement judiciaire dont elle est maintenant sortie après 12 mois d’observation. 2015 vient de commencer sous les meilleurs auspices avec ces commandes augures d’une véritable reconnaissance et d’une notoriété confortée au moment où son patron M. Zahorka envisage sa retraite. Patrick Wibault dit piwi en visite le9 janvier 2015