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Études Économiques Groupe http://etudes-economiques.credit-agricole.com Trimestriel n°142 4 e trimestre 2013 Croire en une sortie par le haut Le marché va jouer de plusieurs thématiques au cours des prochains mois ; et il faut essayer de comprendre quelle synthèse il en fera. Du côté de la croissance, une inflexion haussière apparaît dans chacune des quatre plus importantes régions de l’économie mondiale (les États-Unis, la zone euro, la Chine et le Japon) ; mais, la visibilité reste faible sur les rythmes de croissance à attendre à l’horizon des prochains trimestres. Le premier élément fait espérer l’enclenchement d’un cercle vertueux, chaque région tirant les autres. Ce processus cumulatif serait in fine favorable à davantage de croissance et réduit les incertitudes liées au manque de visibilité. Le resserrement monétaire n’a pas commencé. Le Japon reste en phase d’expansion, les États-Unis hésitent à ralentir leurs achats de titres, la zone euro maintient un biais baissier et la Chine ne remontera pas ses taux directeurs avant l’année prochaine. Le paysage politique reste compliqué ; qu’il s’agisse de politique intérieure, avec une vie politique à même de se bloquer facilement aux États-Unis et la difficulté à lire les initiatives en Europe (de la faiblesse des gouvernements italien, espagnol et français aux interrogations sur la relance du processus d’intégration de la zone euro), ou d’affaires internationales (la Syrie et ce que cela dit sur les rapports de force entre grandes et super puissances). Le double risque aux États-Unis d’un quasi-arrêt du gouvernement et d’un défaut souverain durant la première moitié d’octobre illustre assez bien cette première difficulté. Le nouvel épisode de blocage du gouvernement italien de coalition en est une autre preuve. A contrario, sans doute est-il sage de ne pas surinterpréter la tentative d’ouvrir un dialogue diplomatique entre l’Iran et les États-Unis. Ne s’agit-il pas davantage d’un transfert du « cœur » des tensions internationales du Moyen-Orient vers l’Asie, que d’une réduction à proprement parler ? Le « meilleur des mondes » combinant réglage monétaire plus accommodant que prévu, ou au moins sur plus longtemps que prévu, et amélioration sur le front de la croissance est intrinsèquement instable. La sortie se fait, soit par le haut (avec une corrélation positive entre prix des actions et taux longs, les deux étant orientés à la hausse), soit par le bas (et une corrélation plus difficile à anticiper). Nous faisons le pari de la sortie par le haut, après un quatrième trimestre sans réelle tendance de marché. Attention à court terme aux blocages pouvant provenir de Washington ; ils mettraient à mal le retour de l’appétit pour le risque. Et pourquoi ne pas croire en une initiative (largement allemande) d’accélération de l’intégration d e la zone euro ? Cela créerait une préférence en faveur des actifs risqués européens. Sommaire Des efforts, encore des efforts ! ................................................................. 2 BCE : découplage....................................................................................... 4 Taux d’intérêt américains : la hausse va reprendre .................................. 5 Taux d’intérêt en zone euro : ce n’est pas une défaite, mais une hausse continue des taux .......................................................... 6 Taux de change : suivre le courant ............................................................ 7 Énergie : au-delà de la Syrie, les perturbations de l’offre OPEP .............. 8 Or : la hausse des prix ne devrait pas durer ............................................. 9 États-Unis : le renforcement des fondamentaux soutient la croissance ............................................................................................. 10 Japon : les Jeux olympiques de 2020 renforcent la confiance ............... 12 UEM : la malédiction du suiveur .............................................................. 13 France : vous avez dit reprise ? ............................................................... 14 Allemagne : attention à la marche ........................................................... 15 Italie : rien n’est acquis ............................................................................. 16 Espagne : un pays excédentaire.............................................................. 17 Portugal : la récession a pris fin, pour le moment ................................... 18 Royaume-Uni : la reprise se généralise .................................................. 19 Australie : tourner la page ........................................................................ 20 Nouvelle-Zélande : croissance forte et inflation faible, le scénario idéal ?..................................................................................... 20 Canada : dans l’attente de la reprise de la demande américaine .......... 21 Marchés émergents : ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain ! .......... 22 Brésil : une bonne surprise, mais cela durera-t-il ? ................................. 23 Russie : en pleine récession .................................................................... 24 Inde : par ici la descente ! ........................................................................ 25 Chine : rebond temporaire ....................................................................... 26 Europe centrale : reprise graduelle.......................................................... 27 Turquie : de la crédibilité à la liquidité... .................................................. 27 Corée du Sud : la reprise à nouveau sur les rails ................................... 28 Mexique : des réformes, pas de résultats ................................................ 28 Maroc : l’activité sectorielle marque le pas .............................................. 29 Égypte : légère détente financière ........................................................... 29 Taux d’intérêt ............................................................................................ 30 Taux de change ........................................................................................ 32 Scénario économique du Groupe Crédit Agricole S.A. ........................... 33 Matières premières ................................................................................... 35 Comptes publics ....................................................................................... 35 Zoom vidéo : Ne pas crier « reprise » trop vite

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Études Économiques Groupe http://etudes-economiques.credit-agricole.com

Trimestriel – n°142 – 4e trimestre 2013

Croire en une sortie par le haut

Le marché va jouer de plusieurs thématiques au cours des prochains mois ; et il faut essayer de comprendre quelle synthèse il en fera. Du côté de la croissance, une inflexion haussière apparaît dans chacune des quatre plus importantes régions de l’économie mondiale (les États-Unis, la zone euro, la Chine et le Japon) ; mais, la visibilité reste faible sur les rythmes de croissance à attendre à l’horizon des prochains trimestres. Le premier élément fait espérer l’enclenchement d’un cercle vertueux, chaque région tirant les autres. Ce processus cumulatif serait in fine favorable à davantage de croissance et réduit les incertitudes liées au manque de visibilité.

Le resserrement monétaire n’a pas commencé. Le Japon reste en phase d’expansion, les États-Unis hésitent à ralentir leurs achats de titres, la zone euro maintient un biais baissier et la Chine ne remontera pas ses taux directeurs avant l’année prochaine.

Le paysage politique reste compliqué ; qu’il s’agisse de politique intérieure, avec une vie politique à même de se bloquer facilement aux États-Unis et la difficulté à lire les initiatives en Europe (de la faiblesse des gouvernements italien, espagnol et français aux interrogations sur la relance du processus d’intégration de la zone euro), ou d’affaires internationales (la Syrie et ce que cela dit sur les rapports de force entre grandes et super puissances). Le double risque aux États-Unis d’un quasi-arrêt du gouvernement et d’un défaut souverain durant la première moitié d’octobre illustre assez bien cette première difficulté. Le nouvel épisode de blocage du gouvernement italien de coalition en est une autre preuve. A contrario, sans doute est-il sage de ne pas surinterpréter la tentative d’ouvrir un dialogue diplomatique entre l’Iran et les États-Unis. Ne s’agit-il pas davantage d’un transfert du « cœur » des tensions internationales du Moyen-Orient vers l’Asie, que d’une réduction à proprement parler ?

Le « meilleur des mondes » combinant réglage monétaire plus accommodant que prévu, ou au moins sur plus longtemps que prévu, et amélioration sur le front de la croissance est intrinsèquement instable. La sortie se fait, soit par le haut (avec une corrélation positive entre prix des actions et taux longs, les deux étant orientés à la hausse), soit par le bas (et une corrélation plus difficile à anticiper). Nous faisons le pari de la sortie par le haut, après un quatrième trimestre sans réelle tendance de marché. Attention à court terme aux blocages pouvant provenir de Washington ; ils mettraient à mal le retour de l’appétit pour le risque. Et pourquoi ne pas croire en une initiative (largement allemande) d’accélération de l’intégration de la zone euro ? Cela créerait une préférence en faveur des actifs risqués européens.

Sommaire

Des efforts, encore des efforts ! ................................................................. 2 BCE : découplage....................................................................................... 4 Taux d’intérêt américains : la hausse va reprendre .................................. 5 Taux d’intérêt en zone euro : ce n’est pas une défaite, mais une hausse continue des taux .......................................................... 6 Taux de change : suivre le courant ............................................................ 7 Énergie : au-delà de la Syrie, les perturbations de l’offre OPEP .............. 8 Or : la hausse des prix ne devrait pas durer ............................................. 9 États-Unis : le renforcement des fondamentaux soutient la croissance ............................................................................................. 10 Japon : les Jeux olympiques de 2020 renforcent la confiance ............... 12 UEM : la malédiction du suiveur .............................................................. 13 France : vous avez dit reprise ? ............................................................... 14 Allemagne : attention à la marche ........................................................... 15 Italie : rien n’est acquis ............................................................................. 16 Espagne : un pays excédentaire.............................................................. 17 Portugal : la récession a pris fin, pour le moment ................................... 18 Royaume-Uni : la reprise se généralise .................................................. 19 Australie : tourner la page ........................................................................ 20

Nouvelle-Zélande : croissance forte et inflation faible, le scénario idéal ?..................................................................................... 20 Canada : dans l’attente de la reprise de la demande américaine .......... 21 Marchés émergents : ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain ! .......... 22 Brésil : une bonne surprise, mais cela durera-t-il ? ................................. 23 Russie : en pleine récession .................................................................... 24 Inde : par ici la descente ! ........................................................................ 25 Chine : rebond temporaire ....................................................................... 26 Europe centrale : reprise graduelle .......................................................... 27 Turquie : de la crédibilité à la liquidité... .................................................. 27 Corée du Sud : la reprise à nouveau sur les rails ................................... 28 Mexique : des réformes, pas de résultats................................................ 28 Maroc : l’activité sectorielle marque le pas .............................................. 29 Égypte : légère détente financière ........................................................... 29 Taux d’intérêt ............................................................................................ 30 Taux de change ........................................................................................ 32 Scénario économique du Groupe Crédit Agricole S.A. ........................... 33 Matières premières ................................................................................... 35 Comptes publics ....................................................................................... 35

Zoom vidéo : Ne pas crier « reprise » trop vite

Spécial

N°142 – 4e trimestre 2013 2

Des efforts, encore des efforts !

Les indicateurs conjoncturels « verdissent » ; cela vaut pour les États-Unis, l’Europe et la Chine. Cependant, le sentiment de fragilité demeure ; la confiance est à consolider et les erreurs sont à éviter. La reprise va se construire « pas à pas » et le chemin menant à plus de visibilité reste escarpé.

Les marchés veulent croire que l’économie mondiale est en train de s’améliorer. Aux États-Unis, au-delà des soubresauts conjoncturels qui font, qu’après un deuxième trimestre finalement meilleur qu’attendu, le chiffre du troisième trimestre risque de décevoir un peu, la tendance serait à une accélération de la croissance sur la seconde partie de l’année et encore en 2014. En Europe, les chiffres du PIB du deuxième trimestre sont apparus comme une « divine surprise » et les indicateurs conjoncturels les plus récents laissent à penser que le tempo de l’activité en zone euro se maintiendrait en territoire positif sur la seconde partie de l’année. En Chine aussi, les derniers chiffres et enquêtes rassurent. Le gouvernement arriverait à maintenir la croissance au-delà de la barre des 7% l’an.

Bien sûr, on ne sort pas d’une longue période de crise structurelle, qui affecte en profondeur les équilibres bilancielles de moult agents économiques dans de nombreux pays, sans un guidage de politique économique. De fait, que ce soit en termes de communication et/ou de réglage, celui-ci a joué son rôle ; qu’il s’agisse d’un moindre resserrement des politiques budgétaires ou de l’élargissement des outils de politique monétaire (de l’assouplissement quantitatif – le quantitative easing – au guidage des anticipations de taux directeurs – le forward guidance). Les marchés ont réagi dans l’ensemble favorablement à ces évolutions et on peut penser que l’optimisme qui en a résulté s’est diffusé en partie à l’économie réelle. Il faut, toutefois, noter que celles-ci peuvent avoir certains effets induits malheureux. La récente correction baissière sur les marchés émergents trouve en partie son origine dans les annonces de changement de pied de la politique monétaire américaine.

Et puis, une fois encore, l’économie et les marchés ne sont pas isolés des interrogations géopolitiques. Les tensions au Moyen-Orient peuvent créer des craintes légitimes, avec le prix du pétrole comme courroie de transmission aux activités réelles et financières. On n’en est pas là aujourd’hui, avec l’espoir d’une sortie diplomatique à la crise syrienne. Néanmoins, toute hausse un tant soit peu ample et durable des « cours du brut » serait à même de mettre à mal les idées de reprise économique et de retour du risque sur les marchés.

Avant de conclure que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes, étudions plus en détail ces différents points et commençons par la dynamique de croissance en cours dans chacune des trois grandes régions du monde. Aux États-Unis, le tempo de la croissance est très certainement en territoire positif. De plus, un réglage budgétaire devenant moins restrictif justifie les anticipations d’une accélération à venir rapidement. Enfin, la consolidation du bilan des ménages et des banques donne du crédit à l’idée que cette phase de « reprise » est durable. Le « maillon faible » dans cette démonstration est sans doute la perspective d’une accélération de la croissance, ou pour mieux dire l’ampleur de celle-ci. Il y a au moins deux raisons à cela. La première est toute d’expérience. La plupart des prévisionnistes, y compris la Banque centrale, ont au cours des dernières années été trop optimistes sur les performances à venir de l’économie américaine. Pour quelles raisons ? Avant tout, par une insuffisante prise en compte de l’impact du phénomène de désendettement en cours. Mais, il est largement derrière, au moins dans le secteur privé, et donc cela devrait moins jouer à l’avenir. Une seconde raison doit toutefois être gardée à l’esprit. L’effort d’investissement des entreprises n’est vraisemblablement à l’aune, ni des reprises précédentes, ni de la différence entre rentabilité et coût du capital. Pourquoi cela est-ce durable ? À côté du comportement prudent (trop ?) des banques et de réglementations plus sévères dans beaucoup de secteurs, un manque de visibilité sur « de quoi demain sera fait » est sans doute une partie importante de l’explication. Il faut ainsi garder à l’esprit que Washington peut toujours réserver des surprises. Même si le climat est sans doute moins à la guerre ouverte entre Démocrates et Républicains, s’entendre sur le budget 2014 (l’année fiscale commence au 1

er octobre) et sur le relèvement du plafond de la dette n’est en rien

garanti. Attention aux soubresauts en termes de confiance qui peuvent en résulter.

Disons-le clairement, la « reprise » européenne est encore moins convaincante, ce qui ne veut pas dire qu’elle n’est ni réelle, ni un tant soit peu durable. Le message est plutôt celui d’une fragilité et donc d’un risque de réversibilité. Pourquoi cela ? Interrogeons-nous sur la genèse de l’amélioration conjoncturelle en cours ; on va trouver un réglage monétaire toujours accommodant, des conditions de marché en amélioration, un resserrement budgétaire en voie de relâchement et sans doute aussi une certaine forme de dynamique cyclique qui fait, qu’après une longue période de repli de l’activité (six trimestres), une correction n’est pas inattendue, sauf à s’inscrire dans une spirale dépressive.

Banques centrales, ratio bilan/PIB : la BCE se démarque

États-Unis : lente reprise de l'investissement des entreprises

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Croissance PIB Etats-Unis

Dépenses investisst entreprises (éch. dr.)Source : Bloomberg, Credit Agricole CIB

Spécial

N°142 – 4e trimestre 2013 3

Ces développements sont positifs, assurément. Peuvent-ils être perçus comme suffisants pour rassurer sur le caractère pérenne de l’inflexion en cours ? La réponse serait positive si, dans les pays périphériques, mais aussi en France, des réformes de fond étaient suffisamment engagées pour assurer d’une amélioration visible et durable de la compétitivité (coût et qualité) et de l’efficacité des secteurs productifs et des infrastructures en tout genre. La zone euro n’en est pas encore là. Sans doute doit-on accepter le diagnostic d’un simple « souffle de croissance » à l’horizon des prochains trimestres. L’évolution des coûts unitaires, la montée en gamme des productions (et donc en combinant les deux éléments le profil des profits par unité produite), sans oublier la poursuite du désendettement, tant dans le secteur privé que dans le public, seront autant de marques à repérer sur la route d’une sortie plus complète de la crise.

Les investisseurs paraissent « acheter » l’arbitrage en Chine entre moindre croissance et davantage de réformes de structure. La perspective d’une progression annuelle du PIB autour de 7%, et non plus à deux chiffres, serait le prix à payer pour changer le modèle économique et mettre la demande intérieure privée au cœur de la dynamique de croissance. Ils reconnaissent aussi l’efficacité d’un réglage conjoncturel de type stop and go, un peu similaire à celui pratiqué en Occident des années 50 aux années 70. Ce double « quitus » appelle toutefois quelques remarques. Tout d’abord, passer du « grand angle » au « téléobjectif » pour regarder l’économie chinoise modifie la perspective. Si les provinces côtières ont atteint un niveau de développement les « qualifiant » pour un changement de modèle économique, celles de l’intérieur, où vit à-peu-près 60% de la population, relèvent encore d’un schéma de développement faisant la part belle aux investissements d’infrastructures sous la houlette de l’État. Au final, ce changement de modèle, intégré à l’analyse des marchés, ne peut, au moins dans un long premier temps, n’être que partiel. Ensuite, que vont devenir les politiques de stop and go ? Dans le passé, l’inflation et une plus grande ouverture au reste du monde les ont mises à mal en Occident. Peut-on penser qu’une plus grande libéralisation du fonctionnement de l’économie chinoise, même si le phénomène doit être progressif, amoindrira leur efficacité ? La Chine est embarquée dans un changement de modèle économique. La route sera longue et sinueuse. Les investisseurs doivent se préparer à des moments de doute.

Venons-en à la politique économique. Il faut admettre que les initiatives prises, au-delà d’un accueil favorable tant par les marchés que par les opinions publiques, ont ouvert la porte vers une terra incognita dont les économistes essaient de dresser la carte. Pour ce qui est de la politique monétaire, la fragile amélioration économique aujourd’hui en marche a donc incité les banquiers centraux à « changer leur fusil d’épaule » : du quantitative easing au forward guidance. Cela crée-t-il plus de visibilité pour les acteurs économiques ? En fait, cela dépend probablement de la façon dont les anticipations des marchés sont « guidées ». Soit la Banque centrale se contente de dire qu’elle ne relèvera pas son taux directeur avant « un certain temps » ; et cela peut être lu, toutes choses égales par ailleurs, comme la marque d’un certain pessimisme sur les évolutions à venir de la croissance et de l’inflation. La première serait toujours trop faible et la seconde, encore en-deçà de l’objectif affiché. Dans ce cas, la participation des initiatives monétaires à davantage d’optimisme s’en trouve limitée. Soit, la Banque centrale conditionne le maintien de son taux directeur à un niveau bas et stable à l’atteinte de certains objectifs ; et cela devrait être lu comme une évolution ou une précision de sa fonction de réaction. Les questions vont alors tourner autour du bien fondé et de la permanence des changements apportés. Ainsi, tenter de quantifier la baisse attendue du taux de chômage aux États-Unis est-il raisonnable ?

Pour ce qui est de la politique budgétaire, le débat sur le bon réglage entre rééquilibrage des comptes publics et soutien à l’activité n’est pas clos. Comme cela a déjà été discuté ici

1, l’horizon temporel retenu et le jeu d’acteurs

(entreprises, ménages ou institutions financières ; épargnants ou emprunteurs) sont deux clés essentielles pour comprendre la préférence donnée soit à l’orthodoxie budgétaire, soit à la croissance. Un récent papier du FMI

2 éclaire la

complexité du débat. Peut-être ne faudrait-il pas grand-chose pour que celle-ci se mette à rimer avec réversibilité.

Les tensions au Moyen-Orient viennent rappeler qu’un monde sans leadership incontestable (les États-Unis ne remplissent plus pleinement ce rôle) et sans gouvernance efficace est davantage sujet aux crises ; simplement parce que les problèmes n’arrivent pas bien à être gérés et réglés à des niveaux de plus faibles tensions. C’est un risque pour une économie mondiale au tempo mal assuré.

Hervé GOULLETQUER

[email protected]

Indice PMI et PIB de la zone euro : timide reprise

Chine : le poids de la consommation privée progresse timidement

1 Cf. Perspectives Macro de mars 2013

2 Working Paper 13/182: Assessing the Impact and Phasing of Multi-year Fiscal Adjustment: A General framework

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Source : Bloomberg, Credit Agricole CIB

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PIBInvestissement (éch. dr.)Conso. finale (éch. dr.)

Source : Bloomberg, Credit Agricole CIB

Politique monétaire

N°142 – 4e trimestre 2013 4

BCE : découplage

Normalisation de la politique monétaire de la Fed et des taux longs, rotation de la croissance et des comportements des investisseurs en termes de marchés et de zones géographiques, risques (géo)politiques… La BCE évolue dans un environnement dont elle ne maîtrise pas tous les paramètres. Dans le meilleur des cas, elle peut favoriser un « découplage » partiel des taux d’intérêt des deux côtés de l’Atlantique, en espérant que la reprise se confirme sur le Vieux Continent.

Depuis plusieurs mois, la BCE s'efforce d'adopter un ton aussi accommodant que possible pour une Banque centrale jugée conservatrice, confrontée à une reprise économique certes fragile, mais qui semble s’élargir progressivement à la plupart des pays de la zone euro. Si la BCE suivait une fonction de réaction standard qui prévalait avant la crise, elle se laisserait la liberté d'ajuster le réglage monétaire en conséquence. Au minimum, elle adopterait probablement un ton plus neutre – les rapports mensuels de la Bundesbank et les discours de son président donnent un aperçu de la position des membres les plus hawkish du Conseil des Gouverneurs.

Au contraire, la BCE a maintenu un biais baissier et s'est engagée depuis juillet dernier à maintenir ses taux directeurs à leur niveau actuel, voire plus bas, « pendant une période de temps prolongée ». Cette forme allégée de guidage des anticipations est certes critiquable (et critiquée), mais elle marque néanmoins une nouvelle étape dans la stratégie de communication de la BCE. Cette dernière est en pleine mutation et de nouveaux ajustements sont probables, y compris à travers la publication de minutes des réunions de politique monétaire.

À court terme, l'objectif de la BCE est clairement assumé : répondre aux pressions haussières sur les taux en découplant au maximum leur évolution des deux côtés de l'Atlantique. Dans l'absolu, il semble difficile pour une Banque centrale de garder le contrôle de la partie longue de la courbe des taux. Un coup de pouce de la Fed serait le bienvenu, mais la BCE pourrait être forcée d'intervenir à nouveau. Dans ce cas, sa préférence irait, selon nous, vers des outils de gestion de la liquidité, dans le but de limiter toute remontée des taux courts jugée excessive. Une nouvelle opération de refinancement à très long terme (v-LTRO), sans être la panacée, pourrait permettre à la BCE de renforcer la crédibilité de sa forward guidance, en allongeant de facto la maturité des LTROs à trois ans, surtout si elle est offerte à taux fixe (non indexé sur le taux directeur). Idéalement, l'opération pourrait être l'occasion pour la BCE d'accroître son soutien au marché des prêts titrisés aux PME (SME ABS), en les acceptant comme collatéraux avec des décotes réduites.

Si une gestion fine de la liquidité ne suffit pas, la BCE pourrait envisager d'autres options. Une baisse des taux reste possible au moindre signe de faiblesse de la reprise. Une forme plus radicale de forward guidance conditionnant toute hausse des taux directeurs à des seuils quantitatifs semble peu probable – son efficacité dans le cas britannique est plus que discutable. La BCE pourrait lui préférer une forme de « retour aux fondamentaux » à travers son approche à deux piliers. Le pilier monétaire, en particulier, peut fournir des arguments en faveur d'un maintien de la politique de taux (quasi) zéro pendant une période de temps plus longue que ce que les marchés anticipent. La BCE peut également choisir de révéler implicitement son estimation de l'écart de production (la variable déterminante au sein de sa fonction de réaction), en insistant davantage sur les risques baissiers pesant sur la dynamique des agrégats monétaires et de crédit, et donc sur la stabilité des prix à moyen terme. Le biais baissier de la BCE permettrait ainsi d’atteindre un deuxième objectif, celui d’assurer un maintien de conditions monétaires ultra-accommodantes avant le lancement de la prochaine revue des bilans et stress tests bancaires, début 2014. Ce prochain grand test pour la zone euro sera, à nouveau, affaire d'équilibre et de crédibilité. La BCE est attendue au tournant.

Frederik DUCROZET [email protected]

Remboursements cumulés de LTROs

La forward guidance de la BCE est-elle crédible ?

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Source : BCE, Bloomberg, Crédit Agricole CIB

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"forward guidance"

Taux Refi

Source : Bloomberg, CA CIB

Politique monétaire

N°142 – 4e trimestre 2013 5

Taux d’intérêt américains : la hausse va reprendre

L’économie devrait s’améliorer et la Fed va entamer son tapering (réduction des achats d’actifs), mais le virage à près de 180 degrés auquel la Fed a procédé sur le guidage des anticipations va réduire sa capacité à manipuler le marché à l’avenir. Aux niveaux actuels, nous pensons que le secteur du deux ans est très vulnérable à une remontée des taux.

Pendant de nombreuses années, la Réserve fédérale a implicitement encouragé la mise en place d’opérations de

portage, mais après trois années de manipulation de la courbe, la partie longue a craqué sous la pression générée

notamment par la nette baisse du taux de chômage. La Fed a fait de son mieux pour séparer tapering (baisse des

achats d’actifs) et tightening (hausse des taux directeurs). Le marché a compris la différence, mais il a également

compris que la Fed ne commencerait pas à réduire ses achats d’actifs, tant que l’économie ne serait pas suffisamment

solide pour supporter ce changement et que si l’économie était assez solide pour supporter un tapering, une hausse des

taux ne pouvait être très loin. Le tapering était un signal.

La partie courte de la courte s’est pratiquement alignée sur les prévisions de taux officielles de la Fed (cf. graphique). La partie longue de la courbe étant basée sur le niveau et la pente des taux courts, le taux à dix ans reflète presque parfaitement les vues de la Fed (sous l’hypothèse d’absence d’ajustement de la prime de terme (term premium en anglais).

Il nous semble un peu étrange que les taux courts soient aussi proches des prévisions de la Fed : après tout, le marché devrait incorporer une prime de terme pour prendre en compte le risque et devrait donc afficher des anticipations de taux supérieures au niveau auquel on peut raisonnablement attendre le taux des Fed funds à l’avenir.

Nous pensons que la remontée de la volatilité des marchés va conduire à une ré-augmentation des primes de terme. Lors du FOMC de septembre, la Fed a semblé revenir en arrière sur la « feuille de route » concernant le tapering, feuille de route qu’elle avait pourtant communiquée récemment, en juin. Un tel virage à 180 degrés va limiter sa capacité à guider les anticipations du marché à l’avenir. Le retour du PIB et du taux de chômage vers des niveaux plus normaux, phénomène lent mais inévitable, conduira à un surcroît de volatilité. Le seuil de la Fed pour le taux de chômage (6,5%) est très proche du taux de chômage actuel (7,3%). Il est vrai que la santé du marché du travail ne peut se résumer à un seul indicateur, mais la forte proximité du seuil diminue l’efficacité du « guidage des anticipations » (forward guidance). Or, sans un guidage efficace des anticipations, le marché va devenir (et est déjà) nerveux.

Nous avons récemment relevé notre prévision à fin 2013 pour le taux dix ans de 2,85% à 2,95%, mais l’idée générale est que la remontée des taux sur la partie longue de la courbe va marquer une pause. Nous pensons que le secteur le plus exposé à une remontée des taux est la partie courte de la courbe, sur laquelle nous attendons un rattrapage avec ce qui s’est passé pour les maturités supérieures à cinq ans. Nous pensons que le taux des emprunts du Trésor à deux ans se positionnera autour de 0,8% vers la fin de l’année, une hausse très marquée par rapport au niveau actuel (0,38%) qui provoquera un aplatissement du segment deux ans dix ans.

Les contrats futures sur Libor USD trois mois montrent que les marchés s’attendent aujourd’hui, une fois le processus de hausse entamée, à une remontée des taux directeurs de 12 points de base par réunion du FOMC et à une quasi-stabilisation une fois qu’ils auront atteint 3%. On peut comparer cette situation à celle qui prévalait avant la série de hausses des taux en 2004, tout en gardant en tête qu’au travers du guidage des anticipations la Fed a déjà prévenu le marché qu’il fallait s’attendre à des hausses de taux à « un rythme probablement mesuré » et que le point de départ des Fed funds était à l’époque de 1% et non de 0% à 0,25%. En 2004, le marché anticipait une remontée de 22 points de base par FOMC au cours des deux premières années du cycle de hausse. La première hausse des taux étant encore éloignée, les contrats futures incorporent probablement une probabilité importante de maintien des taux à leur niveau actuel. Cependant, la situation va évoluer à l’approche de la première hausse des taux : la série des taux anticipés se pentifiera et le taux deux ans suivra l’évolution des anticipations, ce qui devrait selon nous l’amener à remonter très fortement.

David KEEBLE

[email protected]

Prévisions de la Fed et niveaux anticipés par le marché

Trois épisodes de hausse du taux dix ans

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Nbre de jours écoulés depuis le point bas

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Source : Bloomberg

Politique monétaire

N°142 – 4e trimestre 2013 6

Taux d’intérêt en zone euro : ce n’est pas une défaite, mais une hausse continue des taux

La position accommodante de la Fed ne devrait pas inverser la remontée de la prime de terme des taux du G7. La reprise économique et la diminution du risque d’éclatement de la zone euro suggèrent une pentification de la courbe de taux euro, la BCE étant elle-même très accommodante. En dépit des difficultés politiques, les réformes engagées et l’aide extérieure suggèrent une poursuite de la baisse des spreads périphériques.

Les taux de swap contre Euribor à cinq et dix ans, qui étaient inférieurs à 0,80% et 1,70% fin mars, ont récemment atteint 1,50% et 2,35% respectivement. Sur le dix ans, cette hausse représente 63% de la hausse sans lendemain observée entre fin 2010 et début 2011, période durant laquelle l’indice PMI manufacturier était nettement au-dessus de ses niveaux actuels et la croissance plus élevée de 2% environ. Sur cette base, nos anticipations de hausse des taux pour le reste de l’année 2013 étaient assez modérées, même avant la prise de position étonnamment accommodante du FOMC, mi-septembre.

Il semble à présent improbable que la Fed entame son tapering (baisse des achats d’actifs) avant décembre et ce revirement a des conséquences pour les taux euro. D’après certains modèles que nous utilisons pour expliquer l’évolution des taux euro, nous estimons qu’entre 50% et 90% de la hausse des taux euro peut être attribuée à la hausse des taux dollar, auxquels les taux de la zone euro restent durablement et fortement corrélés. La hausse des taux américains, quant à elle, s’explique par les craintes liées au tapering de la Fed et par la remontée de la prime de terme. La dernière réunion du FOMC conduit-elle à une disparition ou à une réduction de ce facteur ? Comme nous l’écrivons dans la section sur les taux américains, nous ne le pensons pas : ce facteur ne diminuera pas suffisamment pour inverser la montée de la perception du risque sur les taux.

D’autres déterminants empiriques importants des taux euro suggèrent que la hausse des taux de marché à laquelle nous venons d’assister est soutenable et peut se poursuivre. Les mesures de la perception du risque d’éclatement de la zone euro, telles que les spreads périphériques et les soldes nets absolus de Target 2, montrent que la prime de risque qui a poussé les taux du « centre » vers leurs points bas historiques continue de diminuer. De plus, les indicateurs économiques avancés continuent (bien que très graduellement) de s’améliorer. Face à cela, la BCE devrait conserver une position très accommodante par le biais de taux directeurs inchangés, voire plus bas, d’une poursuite des mesures de soutien à la liquidité et d’actions visant à influencer le marché, telles que le guidage des anticipations (forward guidance). Au total, ceci devrait modérer la remontée des taux de marché, laquelle accélérera néanmoins en 2014 avec la consolidation de la croissance.

Concernant la pente de la courbe de taux, les mouvements récents suggèrent que la logique selon laquelle la hausse des taux est synonyme de pentification est toujours bien en place. Le graphique ci-dessous montre la relation empirique qui existe entre la pente deux ans dix ans et le taux à cinq ans. Il semble que nous soyons actuellement dans une sous-régime particulier, dans lequel la relation de pentification est exacerbée. Sur cette base, nous continuons à penser que les taux entre sept et dix ans sont les plus menacés par la tendance actuelle du marché. En conséquence, cela implique que le positionnement optimal dans le cadre d’un portefeuille est une réduction des maturités et le maintien des rendements espérés en augmentant l’exposition au crédit souverain.

La deuxième partie de l’affirmation ci-dessus appelle une explication. Vers la fin de l’été, la tendance au resserrement des spreads périphériques a ralenti et la divergence entre les spreads des pays périphériques a légèrement progressé. Ceci reflète la baisse des achats de produits « à risque » pendant l’été, mais également une certaine insatisfaction vis-à-vis du rythme d’amélioration budgétaire et, plus encore, le risque politique dans certains pays périphériques (en Italie et au Portugal en particulier). Face à ces facteurs négatifs, les signes de rééquilibrage de l’économie et même de reprise de la croissance se multiplient dans les pays périphériques. Au total, il nous semble que la situation est favorable, grâce aux importantes mesures de soutien (le MES et la capacité de la BCE à lancer le programme OMT), une conclusion qui s’imposera plus clairement lorsque la campagne électorale sera complètement derrière en Allemagne.

Luca JELLINEK [email protected]

Lien entre taux et pente (2006-2013)

Convergence haussière du climat économique

des pays du centre et de la périphérie

-0,75

-0,25

0,25

0,75

1,25

1,75

0,5 1,5 2,5 3,5 4,5 5,5

5 ans (%)

Pente 2 ans 10 ans (%)

Niveau actuel

Source : Bloomberg, Crédit Agricole CIB

60

70

80

90

100

110

120

janv.-06 juil.-07 janv.-09 juil.-10 janv.-12 juil.-13

Centre

Périphérie

Source : CE, Crédit Agricole CIB

Politique monétaire

N°142 – 4e trimestre 2013 7

Taux de change : suivre le courant

Les investisseurs vont se montrer de plus en plus sélectifs dans les mois qui viennent et le dollar devrait sortir gagnant, malgré des risques à court terme.

Le thème qui a dominé le marché des changes au cours des derniers mois a été l’impact, direct et indirect, du tapering

(ralentissement des achats d’actifs) attendu de la Fed. Avec l’amélioration de l’activité économique aux États-Unis, le début

du tapering devient effectif, ce qui provoque une remontée des taux obligataires américains et, au final, une appréciation du

dollar, en particulier contre de nombreuses devises émergentes. La plupart des devises majeures, notamment les devises des

pays producteurs de matières premières, ont reculé face au dollar, à l’exception notable de l’euro qui s’est montré assez

résilient. De plus, l’absence d’amélioration durable de l’appétit pour le risque depuis le début de l’année a conduit à une baisse

de la demande pour les devises risquées ou à taux d’intérêt élevés. Ceci a contribué à l’appréciation du dollar, d’autant plus que

la remontée des taux américains a, par ailleurs, pesé sur l’intérêt relatif des devises à taux élevés.

La volatilité des devises a généralement suivi les variations de l’appétit pour le risque et notre indicateur composite de volatilité

implicite sur les devises majeures a augmenté depuis le début de l’année. La plupart des devises majeures se sont

cependant assez bien comportées : la volatilité la plus élevée a été observée parmi les devises émergentes et, plus

particulièrement, sur les devises de pays affichant des besoins de financement externe. En effet, des indicateurs tels que le

ratio déficit courant comparé au PIB, la dette extérieure à court terme, la couverture des importations par les réserves de

change, etc. fournissent et continueront à fournir de précieuses indications sur la vulnérabilité des devises pour les semaines et

les mois à venir.

La relation qui existait entre les différentiels de taux, l’appétit pour le risque et l’évolution des devises a disparu, mais nous

pensons que cette situation est temporaire et que cette relation va se rétablir. Face à la plupart des devises, le dollar va

bénéficier dans les mois qui viennent à la fois de la reprise cyclique (la croissance sera légèrement plus élevée) et des

perspectives de hausse des taux d’intérêt. Cela ne se fera toutefois pas sans heurts. Dans l’immédiat, la sous-performance

des obligations et des actions américaines, face aux actifs européens notamment, coïncide avec (et a peut-être même été

provoquée par) des ventes d’actions et d’obligations américaines par des investisseurs étrangers. Les grands détenteurs de

réserves, et parmi eux les Banques centrales asiatiques, ont vendu des titres du Trésor américain. Ce facteur freine le dollar

face à l’euro.

À terme, le tapering soutiendra le dollar, d’autant plus que les bilans des Banques centrales connaîtront des

trajectoires divergentes. Ceci s’appliquera tout particulièrement à l’USD/JPY : alors que la Fed réduira, puis mettra fin à

l’expansion de son bilan, la BoJ fera gonfler le sien pour atteindre son objectif d’inflation de 2%. De plus, l’écart entre les taux

obligataires américains et leurs homologues japonais s’accroîtra, ce qui obligera les investisseurs japonais à investir à l’étranger

et notamment aux États-Unis, accentuant la hausse de l’USD/JPY. En conséquence, nous sommes fortement baissiers sur

le yen, en termes de prévisions ajustées du portage. Sur les douze prochains mois, le franc suisse, l’euro et la livre sterling

ne feront pas beaucoup mieux. Le yen et le franc suisse retrouveront en partie leur rôle de devise de financement dans les mois

qui viennent, avec la remontée de l’appétit pour le risque.

Quant aux autres devises, nous pensons que les investisseurs vont se montrer de plus en plus sélectifs. Plusieurs

devises émergentes vont rester assez vulnérables dans les mois qui viennent, les fragilités extérieures continuant d’exercer une

certaine influence. Le ralentissement de la croissance dans certains pays émergents contribuera à la faiblesse de leur devise. À

cet égard, les devises des BRIC, le rand sud-africain et la livre turque sont susceptibles de baisser davantage vers la fin

de l’année. À l’inverse, les devises des pays producteurs de matières premières devraient se reprendre dans les mois qui

viennent : nous sommes nettement plus optimistes que le consensus pour certaines devises comme le dollar canadien, le dollar

australien et le dollar néo-zélandais. De manière générale, les devises « à risque » devraient finir par profiter d’une certaine

amélioration de l’appétit pour le risque (à condition que leur sensibilité au risque augmente). Le tapering de la Fed et la

remontée des taux obligataires américains suggèrent, néanmoins, que les capitaux vont continuer à quitter de nombreux pays

émergents. Ces sorties se feront à un rythme plus faible qu’au cours des derniers mois, mais limiteront le potentiel de hausse

des devises émergentes.

Mitul KOTECHA [email protected]

Prévisions ajustées du portage sur douze mois – devises majeures

Performance des devises depuis le début de l’année 2013

-13

-11

-9

-7

-5

-3

-1

1

3

5

7

9

JPY CHF EUR GBP AUD

%

Source : Bloomberg,Crédit agricole CIB

c/ USD -16

-14

-12

-10

-8

-6

-4

-2

0

2

4

JPY AUD CAD GBP CHF NZD EUR

%

Source : Bloomberg,Crédit agricole CIB

c/ USD

Énergie - Métaux

N°142 – 4e trimestre 2013 8

Énergie : au-delà de la Syrie, les perturbations de l’offre OPEP

Les prix du Brent ont progressé cet été, soutenus par l’éventualité d’une intervention occidentale en Syrie et de nouvelles perturbations sur l’offre en Irak, en Libye et au Nigéria. La prime de risque liée à la Syrie a déjà diminué, mais les arrêts de production continueront de constituer un risque dans les mois qui viennent. À moyen terme, l’offre devrait cependant être amplement suffisante, en raison de la progression régulière de la production hors OPEP. Nous avons révisé nos prévisions 2014 sur les cours du Brent en hausse de 5 USD/b et tablons à présent sur un baril de Brent à 105 USD fin 2014.

L’offre de pétrole brut a été fortement perturbée cet été, avec un niveau de perturbation exceptionnellement élevé dans les pays de l’OPEP. Ces arrêts de production ont joué un rôle majeur dans la montée des prix du pétrole, un rôle probablement plus important que les développements récents en Syrie.

En Libye, des sites d’exportation et des gisements pétroliers cruciaux ont été témoins de conflits sociaux et d’affrontements, qui ont provoqué des pertes de production de plus en plus importantes au cours de l’été (jusqu’à 900 kb/j). Les causes de ces problèmes sont multiples : conflits sur les salaires, recrutement du management et tensions régionales liées à la faiblesse du gouvernement central. Ce dernier problème est structurel et même si des solutions peuvent être trouvées rapidement sur la question des salaires, la Libye reste un producteur moins fiable qu’on pouvait le supposer il y a six mois. En Irak, les perturbations affectant la production pétrolière (environ 250 kb/j en août) semblent également de plus en plus structurelles, avec une série d’attaques visant les oléoducs, des différends sur les paiements entre le gouvernement central et la région autonome du Kurdistan et des infrastructures insuffisantes pour le stockage et les pipelines. Il n’y a pas si longtemps, on attendait une hausse de la production irakienne, de 3 Mb/j début 2013 à 4 Mb/j début 2015 : cette perspective semble plus éloignée à présent.

Les sanctions visant les exportations pétrolières de l’Iran ont retiré environ 1 Mb/j des marchés, mais elles ont également conduit à une baisse de la capacité de production effective (détérioration des gisements iraniens, manque d’investissements étrangers). La capacité de production totale de l’Iran, qui était proche de 4 Mb/j avant les sanctions, n’est probablement plus que de 3,4 Mb/j, avec une production effective de 2,8 Mb/j : le potentiel de hausse de la production a clairement diminué, même en supposant une détente durable entre le nouveau gouvernement iranien et les pays occidentaux.

Dans ce contexte, et compte tenu des tensions croissantes autour de l’éventuelle intervention occidentale en Syrie évoquée fin août et début septembre, la montée des prix du pétrole vers un intervalle 110-118 USD/b était un ajustement logique. Et maintenant ? Nous pensons que la montée des cours au-dessus de 115 USD/b était liée à la menace d’une intervention militaire en Syrie. Cette menace semble à présent s’éloigner et les prix du pétrole devraient retomber dans un intervalle 105-110 USD/b, en dépit d’une production qui risque d’être irrégulière en septembre et en octobre (de nouvelles perturbations sont probables), en supposant toutefois que le climat des affaires du côté de la demande reste correct.

Malgré tout, les perturbations de l’offre dans les pays de l’OPEP restent plus importantes qu’on ne pouvait l’envisager il y a quelque temps et leur nature semble à présent plus structurelle qu’accidentelle. L’Irak, la Libye et le Nigéria, des producteurs importants, sont confrontés à des problèmes de stabilité internes importants qui affectent à la fois la production pétrolière (ce qui affecte la situation à très court terme) et l’investissement pétrolier (ce qui affecte les perspectives à plus long terme). C’est pourquoi, malgré la montée de la production hors OPEP, qui reste spectaculaire, principalement aux États-Unis, l’équilibre entre l'offre et la demande se resserre, ou plus précisément, la menace d’une offre excédentaire s’éloigne. En conséquence, nous avons révisé nos prévisions 2014 sur les cours du Brent en hausse de 5 USD/b et tablons à présent sur un baril de Brent à 105 USD fin 2014.

Nous restons cependant baissiers sur les prix du pétrole à moyen terme, compte tenu de la dynamique de l’offre hors OPEP. Le département américain de l’Énergie prévoit, par exemple, une hausse de la production hors OPEP de 1,5 Mb/j l’année prochaine (entre le troisième trimestre 2013 et le troisième trimestre 2014), un niveau en ligne avec la hausse de 1,3 Mb/j observée ces quatre dernières années, mais supérieur à la hausse attendue de la consommation, qui est d’environ 1 Mb/j. En conséquence, à moins d’une nouvelle forte baisse de la production OPEP (déjà faible actuellement), l’offre devrait facilement satisfaire la demande, ce qui conduira à une baisse des cours.

Jean-François PERRIN [email protected]

Production réelle et prévue hors OPEP

Prix du Brent, historique et prévisions

50

52

54

56

58

60

62

04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14

Production totale hors OPEP

Offre, Mb/j

Source : Dpt américain de l’Énergie, CA CIB

90

100

110

120

130

11 12 13 14 15Premier contrat Brent Courbe des futuresConsensus Bloomberg Prév. CA CIB

Source : Bloomberg, Crédit Agricole CIB

Énergie - Métaux

N°142 – 4e trimestre 2013 9

Or : la hausse des prix ne devrait pas durer

La récente hausse des prix de l’or reflète l’absence de dynamique haussière du dollar, la demande saisonnière et la hausse de l’aversion au risque. Nous tablons sur une reprise de la tendance baissière vers la fin de l’année avec l’appréciation du dollar, l’amélioration de l’appétit pour le risque et la poursuite de la hausse des taux obligataires américains. Nous avons révisé notre objectif à 1 200 USD l’once fin 2013.

Les prix de l’or ont fortement baissé au premier semestre, mais ont progressé au troisième trimestre 2013. La hausse du dollar et la montée des taux obligataires américains ont fortement pesé sur les cours de l’or pendant la première moitié de l’année, mais l’incapacité du dollar à s’apprécier davantage ces dernières semaines a créé une marge de progression pour l’or. La demande saisonnière et la montée de l’aversion au risque ont également contribué à soutenir les prix de l’or récemment, tandis que les investisseurs spéculatifs et les fonds indiciels augmentaient leurs positions. Par ailleurs, la demande d’or en provenance d’Inde et de Chine semble s’être quelque peu stabilisée. Alors que les cours de l’or pourraient rester bien orientés à court terme, nous prévoyons une reprise de la tendance baissière vers la fin de l’année avec l’appréciation du dollar, l’amélioration de l’appétit pour le risque et la poursuite de la hausse des taux obligataires américains. En combinant ces facteurs, notre modèle quantitatif continue de souligner les risques baissiers sur les prix de l’or dans les mois qui viennent. Nous avons révisé notre objectif de fin d’année à 1 200 dollars l’once.

La demande physique d’or a repris au cours du dernier trimestre, enregistrant un rebond en Inde et en Chine en glissement annuel, bien que la demande chinoise ait diminué par rapport au premier trimestre 2013. La demande indienne a été particulièrement importante au deuxième trimestre 2013, avec une progression de 36% a/a, en partie en raison du souhait des consommateurs/investisseurs indiens d’échapper aux pressions baissières sur la roupie indienne et à une inflation domestique relativement élevée, en investissant sur un actif considéré comme plus sûr. Le gouvernement indien a pourtant fait tout son possible pour réduire les importations d’or, afin de limiter le creusement du déficit courant. Le niveau élevé de la demande d’or indienne sera difficile à maintenir, compte tenu de ces mesures et du ralentissement de la croissance indienne. De même, le ralentissement de la croissance chinoise à 7,2% en 2014 sur lequel nous tablons, suggère que la demande d’or en provenance de Chine ne progressera pas fortement.

Les cours de l’or resteront fortement corrélés à l’évolution du dollar et des taux obligataires américains. Avec le renforcement de la croissance américaine et le démarrage du tapering (baisse des achats d’actifs) de la Fed, les taux américains vont continuer à progresser et le dollar continuera à s’apprécier contre de nombreuses devises. Nous attendons une poursuite de la hausse du dollar et des taux américains dans les prochains mois (taux des emprunts du Trésor à dix ans attendus à 3,75% et indice dollar attendu à 88,7 fin 2014), une combinaison qui aura un impact négatif sur les prix de l’or. Bien que le renforcement de la croissance économique mondiale puisse alimenter les risques de pressions inflationnistes, nous n’anticipons pas de réelle menace inflationniste dans les mois qui viennent. Le niveau relativement élevé du chômage et des capacités de production excédentaires au niveau mondial suggèrent que l’inflation n’est pas une menace sérieuse à l’heure actuelle. Une reprise de la demande d’or liée à la recherche d’une protection contre le risque inflationniste est donc fortement improbable.

Fait encourageant pour les cours de l’or, la demande spéculative des fonds indiciels et les positions spéculatives (communiquées par la CFTC) sont reparties à la hausse. Ceci constitue un revirement partiel du retrait massif de la demande spéculative observé plus tôt dans l’année. Il n’est pas étonnant d’observer des achats à bon compte, après la baisse des cours de 28% observée au premier semestre 2013. Les cours de l’or se sont toutefois fortement redressés depuis les points bas atteints fin juin (environ 1 180 USD l’once) et la demande supplémentaire des investisseurs spéculatifs devrait être plus limitée. En effet, les prises de positions spéculatives sur l’or ont déjà progressé bien au-delà de leur moyenne sur trois mois. Par ailleurs, la stabilisation de la demande de fonds indiciels sur l’or ne semble pas particulièrement convaincante. Une poursuite de la demande spéculative à court terme n’est pas exclue, mais elle ne serait pas durable, l’or commençant à nouveau à perdre de son attrait.

Mitul KOTECHA

[email protected]

Hausse du dollar, baisse de l’or

Reprise de la demande d’or

68

73

78

83

881 000

1 200

1 400

1 600

1 800

janv.-11 oct.-11 juil.-12 avr.-13 janv.-14 oct.-14

USD/once

Or au comptant Indice dollar (éch. dr. inv.)

prév.

Source : Crédit agricole CIB, Bloomberg

-10

10

30

50

%, a/a

Croissance de la demandede conso. d’or (moy. glissante s/ 1 an)

Chine IndeSource : CA CIB, Bloomberg

Amérique

N°142 – 4e trimestre 2013 10

États-Unis : le renforcement des fondamentaux soutient la croissance

Après une croissance modérée au troisième trimestre, le PIB devrait accélérer au quatrième trimestre, progressant de 2,1% sur un an. Le marché du travail continue de s’améliorer, les freins à la consommation ont diminué, la reprise du secteur de l’immobilier résidentiel se poursuit et le freinage budgétaire devrait peser moins fortement sur la croissance. L’inflation devrait rester inférieure à son objectif et la politique monétaire exceptionnellement accommodante.

Les perspectives de renforcement de la croissance aux États-Unis s’appuient sur des bases solides. Les restrictions budgétaires pèsent moins fortement sur les ménages et l’amélioration du patrimoine net des ménages continuera de soutenir la consommation. De fait, il semble qu’une grande partie du durcissement budgétaire du début d’année, qui avait pris la forme d’une hausse des impôts, a été compensée par la hausse du patrimoine des ménages, liée à la hausse des prix de l’immobilier et des marchés actions. Le patrimoine net des ménages est désormais supérieur à son niveau d’avant la « grande récession ». De plus, le désendettement observé ces dernières années et le faible niveau des taux d’intérêt ont ramené le service de la dette moyenne des ménages à des niveaux qui n’avaient plus été observés depuis le début des années 80 et les banques commencent à assouplir graduellement les conditions des emprunts hypothécaires et des crédits automobiles pour les clients ayant de bons historiques de crédit.

Les ventes de voitures continuent de progresser et ont dépassé le cap des 16 millions d’unités (en rythme annualisé) au mois d’août, une performance qui s’explique par des taux de financement attractifs, mais aussi parce que le vieillissement des véhicules en circulation (dont l’âge moyen est de onze ans) génère une demande latente importante. Les ventes ont également été soutenues par la reprise de l’immobilier résidentiel, qui a poussé les entreprises du bâtiment à acheter de nouveaux véhicules utilitaires.

Le secteur de l’immobilier résidentiel reste sur une pente ascendante. Les mises en chantier sont proches de 900 000 unités en rythme annuel, contre 741 000 unités un an plus tôt. Les ventes dans le neuf et dans l’ancien ont progressé de 16% en un an. Le prix des logements a progressé de 8% à 12% a/a, selon la mesure retenue, et les saisies immobilières ont continué de reculer. La remontée récente des taux hypothécaires a provoqué un repli assez net des refinancements.

Le taux d’un prêt hypothécaire classique à taux fixe sur trente ans a augmenté de près de 100 pdb depuis le printemps. Nous pensons que cela ralentira la reprise de l’immobilier, mais ne la remettra pas en cause. Les logements restent en effet très abordables, malgré cette hausse. Le revenu médian des ménages représente actuellement environ 160% du montant nécessaire pour obtenir un prêt permettant l’acquisition d’une maison individuelle de prix médian, avec un apport personnel de 20%. Ce chiffre a fortement baissé depuis le début de l’année, mais reste nettement au-dessus des niveaux observés au cours de la décennie passée.

Si l’on excepte les immeubles collectifs, les dépenses des entreprises en bâtiments et autres structures devraient rester faibles, les taux de vacance, bien qu’en baisse, restant élevés. L’investissement des entreprises en équipements et logiciels devrait continuer de progresser à un rythme modeste. Les livraisons et les nouvelles commandes de biens d’équipement hors défense et aéronautique (un bon indicateur des intentions d’investissement) ont atteint un palier, ce qui suggère des taux de croissance de quelques points seulement à court terme. À l’étranger, la croissance s’améliore, mais reste faible : nous ne nous attendons pas à ce que les exportations contribuent fortement à la croissance dans l’année qui vient, ce qui devrait conduire à un déficit courant d’environ 2,8% du PIB en 2014.

Le marché du travail continue de s’améliorer progressivement. Au cours de l’année écoulée, l’économie américaine a créé 184 000 emplois non agricoles par mois en moyenne et le taux de chômage a baissé à 7,7% en août, contre 8,4% un an plus tôt. Nous tablons sur une progression graduelle des embauches l’année prochaine, les entreprises constatant la solidité de la croissance de la demande agrégée. L’amélioration du marché du travail devrait toutefois amener certaines personnes à revenir sur le marché du travail, ce qui se traduira par une population active plus importante et un déclin moins rapide du taux de chômage. Le sous-emploi des ressources sur le marché du travail reste important, ce qui a contribué à une progression modérée des salaires. Ceci a contribué au maintien du ratio profits/PIB à un niveau record, mais a limité la progression du revenu des ménages.

États-Unis : la situation financière des ménages s’améliore

États-Unis : la reprise de l’immobilier résidentiel se poursuit

9,75

10,50

11,25

12,00

12,75

13,50

14,25

10 000

20 000

30 000

40 000

50 000

60 000

70 000

1985 1991 1997 2003 2009

ncvsMds USD

Patrimoine net ménages etassociations sans but lucratifService de la dette/revenusdisponibles des ménages (éch. dr.)

Source : Federal Reserve Board

75

100

125

150

175

200

225

400

800

1 200

1 600

2 000

2 400

1985 1989 1993 1997 2001 2005 2009 2013

rythme annuel,

cvs, ‘000

Mises en chantier

Indice NAR d’accessibilité à la propriété (tx fixes & variables), éch. dr.

Source : CensusBureau, NAR

Amérique

N°142 – 4e trimestre 2013 11

Le freinage budgétaire devrait peser moins fortement sur la croissance à l’avenir. Le CBO (Congressional Budget Office) a estimé que le resserrement budgétaire opéré en début d’année (via une remontée des charges sociales et les baisses automatiques des dépenses (sequester) ont probablement coûté 1,5 point de croissance en 2013. La visibilité sur la situation budgétaire qui prévaudra pour l’année fiscale 2014 (qui commence le 1

er octobre 2013) est faible. Nous

avons décrit plusieurs scénarii possibles dans notre note Budget battles begin in earnest (« la bataille budgétaire commence pour de bon »). Toutefois, parmi les différents scénarii que nous avons envisagés, nous pensons qu’une décision de court terme sera prise pour permettre de continuer à financer les dépenses discrétionnaires au niveau actuel, mais que l’incapacité à trouver un accord plus général pourrait conduire à une poursuite du sequester pour l’année fiscale 2014. Le freinage budgétaire qui en résulterait serait légèrement inférieur à la moitié de celui de l’année fiscale 2013. Nous tablons également sur un relèvement du plafond de la dette, au prix d’une bonne dose d’agitation politicienne dans le courant de l’automne.

L’inflation devrait rester sous l’objectif de 2% de la Fed cette année et l’année prochaine. La mesure de l’inflation privilégiée par la Fed est actuellement à 1,2% a/a. Nous avons évoqué plus haut l’impact du chômage sur la modération salariale, mais la recherche économique suggère que les anticipations d’inflation jouent également un rôle important dans la formation des prix. Si l’objectif de 2% de la Fed est crédible, l’inflation aura tendance à graviter autour de ce niveau dans la durée. Les anticipations d’inflation sont bien ancrées si l’on en juge par les enquêtes ou par des mesures de marché telles que l’inflation anticipée pour cinq ans dans cinq ans par les emprunts indexés du Trésor (TIPs).

La politique monétaire devrait rester fortement accommodante jusque dans le courant de l’année 2015. Notre scénario de baisse assez lente du taux de chômage et d’inflation inférieure à son objectif nous amène à penser que la Fed ne relèvera probablement pas les taux avant le deuxième semestre 2015, une prévision confortée par l’affirmation du FOMC selon laquelle « une politique monétaire fortement accommodante restera appropriée longtemps après que les achats d’actifs auront cessé et que la croissance se sera renforcée ».

Nous pensons que la Fed cherche à empêcher une forte remontée des taux longs en coupant court aux anticipations de marché d’un relèvement prochain de ses taux directeurs. Le FOMC table a priori sur un arrêt de ses achats d’actifs vers la mi-2014, mais cela dépendra bien sûr de l’évolution des données : le FOMC a indiqué qu’il n’y avait pas de plan préétabli concernant le programme d’achats d’actifs. L’affaiblissement récent des données économiques, les craintes de ralentissement de l’activité – de l’immobilier résidentiel par exemple – lié à des marchés financiers moins favorables et les inquiétudes sur les perspectives budgétaires de court terme ont amené le FOMC à considérer qu’il avait besoin, avant d’ajuster le rythme de ses achats, de davantage de signes montrant que le renforcement de l’économie sera soutenu.

L’inflation étant inférieure à l’objectif, il nous semble que la Fed conservera une politique fortement

accommodante plus longtemps qu’elle ne l’aurait fait dans un cycle de reprise normal, afin d’obtenir davantage

de résultats sur le front de l’emploi. Les membres de la Fed ont répété que « tapering is not tightening » (le

ralentissement des achats d’actifs n’est pas un relèvement des taux) et qu’ils n’anticipaient pas de relèvement des taux,

tant que le taux de chômage sera supérieur à 6,5%, que « l’inflation anticipée à un ou deux ans ne dépassera pas

l’objectif de 2% (objectif à long terme du comité) de plus de 0,5% » et que « les anticipations d’inflation à long terme

restent bien ancrées ». De plus, dans les remarques faites à l’occasion du FOMC de septembre, Ben Bernanke a

indiqué que « nous devons être très réticents à relever les taux si l’inflation reste durablement sous l’objectif et c’est l’une

des raisons qui me poussent à penser que nous pouvons faire preuve de beaucoup de patience avant de relever le taux

des Fed funds, puisque nous n’avons pas encore observé de pressions inflationnistes ».

La fonction de réaction de la Fed est devenue plus accommodante et cela transparaît clairement au travers de ses dernières prévisions économiques. Pour 2016, le FOMC prévoit une croissance de 2,5% à 3,3% (supérieure au potentiel) et une inflation vers l’objectif de 2%. La prévision médiane des membres de la Fed sur le taux des Fed funds est néanmoins de 2% en fin d’année, contre environ 4% pour le niveau d’équilibre du taux des Fed funds à long terme ; ce qui suggère un rythme de normalisation très graduel. En conséquence, le durcissement initial de la politique interviendra plus tard que cela n’aurait normalement été le cas en phase de reprise (et donc plus tard que ne l’indiquent la règle de Taylor ou ses variantes) et la montée des taux courts devrait être plus progressive.

Mike CAREY [email protected]

États-Unis : des anticipations d’inflation bien ancrées

0,0

0,5

1,0

1,5

2,0

2,5

3,0

1,8

2,0

2,2

2,4

2,6

2008 2009 2010 2011 2012 2013

%%, a/a

Prév. médiane des économistes : tx inflationmoy. attendu dans les 5 prochaines annéesNiveau inflation ds 5 ans attenduimplicitement par les marchés (éch. dr.)

Source : FRBPhiladelphia, Federal reserveBoard

Etats-Unis (a) 2012 2013 2014

T1 T2 T3 T4

PIB 2,8 1,7 2,7 1,1 2,9 1,8 2,7

Consommation privée 2,5 2,1 2,7 2,3 2,2 2,1 2,9

Investiss., équip. & logiciels 7,6 3,2 4,1 1,6 2,9 3,0 6,8

Investissement résidentiel 12,9 13,3 17,8 12,5 13,9 6,5 16,5

Variation des stocks (b) 0,2 -0,1 0,0 42,2 63,0 51,0 40,0

Exportations nettes (b) 0,1 0,1 -0,1 -0,3 0,0 0,4 0,1

Taux d'épargne 5,6 4,0 3,3 2,3

Taux de chômage 8,1 7,5 7,0 7,7 7,5 7,3 7,3

Inflation (t/t, %) 2,1 1,8 1,9 1,7 1,4 1,6 1,6

Balance courante (% PIB) -2,7 -2,8 -2,8 -2,6 -2,8 -3,0 -3,0

(a) données annualisées (b) contribution à la croissance du PIB (en %)

2013

Asie

N°142 – 4e trimestre 2013 12

Japon : les Jeux olympiques de 2020 renforcent la confiance

Alors que les fondamentaux économiques sont robustes, le Premier ministre, Shinzo Abe, devrait bientôt faire un choix définitif sur le relèvement du taux de TVA, prévu en avril prochain. Les « initiatives de croissance » du gouvernement semblent avancer plus rapidement (c’est le cas de la baisse de l’impôt sur les sociétés, par exemple) et l’obtention de l’organisation des Jeux olympiques de 2020 devrait soutenir un peu plus la confiance.

La reprise économique se poursuit au Japon : après une croissance de 4,1% en rythme annualisé au premier trimestre, le PIB a progressé de 3,8% (chiffre révisé) en rythme annualisé au deuxième trimestre, un niveau nettement supérieur à la croissance potentielle (1%). Nous pensons que le relèvement de la TVA de 5% à 8% en avril prochain est une affaire entendue, même si le Premier ministre, Shinzo Abe, ne prendra sa décision définitive qu’à la publication par la Banque du Japon de l’enquête Tankan, attendue le 1

er octobre. Le gouvernement prévoit également de relever à

nouveau le taux de TVA, à 10%, en octobre 2015. La croissance, actuellement très élevée, devrait ralentir quelque peu, mais rester solide ; d’autant plus que l’approche du relèvement de la TVA en avril prochain va provoquer des dépenses par anticipation qui soutiendront notamment l’investissement résidentiel, la consommation de biens durables et l’investissement des entreprises. Bien sûr, les inquiétudes sur l’évolution de l’économie après la hausse de la TVA n’ont pas disparu. Nous pensons, toutefois, que la combinaison d’un stimulus budgétaire supplémentaire et d’une politique monétaire plus accommodante soutiendra l’économie au cours de l’année fiscale 2014 (octobre 2013-septembre 2014). De fait, le Premier ministre a déjà commencé à préparer des mesures budgétaires destinées à mitiger les effets négatifs que le relèvement de la TVA pourrait avoir, principalement sur les ménages. Les dépenses supplémentaires du gouvernement seront probablement comprises entre 4 000 et 5 000 milliards de yens, presque 1% du PIB, sous forme notamment d’allocations versées aux ménages modestes ou aux acheteurs de logements neufs. En conséquence, nous maintenons notre prévision de croissance à 2%, pour 2013 comme pour 2014.

L’inflation est clairement orientée à la hausse : l’inflation sous-jacente a atteint 0,7% a/a en juillet, son niveau le plus élevé depuis près de cinq ans, en nette accélération par rapport à juin (0,4%) et mai (0,0%). L’objectif de la BoJ d’une inflation à 2% n’en reste pas moins très difficile à atteindre dans un avenir proche et suppose que la BoJ maintienne une politique ultra-accommodante jusqu’à nouvel ordre. Les taux des emprunts d’État japonais (JGB) sont restés étonnamment stables au regard des nombreux facteurs susceptibles de les faire augmenter (fondamentaux économiques solides, hausse de l’inflation domestique et montée des taux obligataires américains) : le taux à dix ans japonais est tombé à 0,714% vers la fin du mois d’août, son niveau le plus bas en quatre mois. La principale explication réside dans la meilleure efficacité de la gestion du marché des emprunts d’État par la BoJ, avec notamment 1) l’impact cumulé des achats de JGB à long-terme, 2) la flexibilité des opérations de marché et 3) une communication améliorée. Cela n’est toutefois pas le seul facteur : « le retour sur le marché des JGB des fonds du secteur privé, qui dispose de réserves excédentaires » joue également un rôle important, selon nous.

Les initiatives de croissance du gouvernement, la « troisième flèche » de l’Abenomics (politique économique du Premier ministre), progressent. Les médias ont indiqué que Shinzo Abe avait demandé aux ministres concernés de commencer à étudier la question d’une baisse de l’impôt sur les sociétés, la hausse de la TVA étant quasiment acquise. L’annonce gouvernementale du 5 juin sur sa « stratégie de croissance » a déçu des marchés financiers, parce qu’elle n’abordait ni la question très attendue de la baisse de l’impôt sur les sociétés, ni celle de l’amélioration de la flexibilité du marché du travail. Nous pensons qu’il ne s’agit là que d’une question de calendrier et que ces sujets reviendront sur la table cet automne. Il est clair que de très nombreux dossiers économiques doivent encore être abordés (consolidation budgétaire, problèmes démographiques, réforme du système de sécurité sociale, revitalisation des économies régionales, réformes de la politique énergétique) : il serait prématuré d’être très optimiste à propos de l’Abenomics à ce stade. Le contexte politique est toutefois très favorable et devrait soutenir les réformes à venir. Après sa victoire écrasante lors des élections législatives en décembre dernier, le Parti libéral démocrate (PLD) a remporté une nouvelle victoire spectaculaire lors des élections sénatoriales de juillet. La coalition menée par le PLD détient désormais la majorité dans les deux chambres du Parlement et aucune élection nationale n’est prévue dans les trois années à venir : ceci donne au Premier ministre l’opportunité de mener à bien des réformes structurelles essentielles. De plus, la préparation des Jeux olympiques de 2020 à Tokyo devrait constituer un facteur de soutien supplémentaire à la confiance et à la croissance et constitue, selon nous, la quatrième flèche de l’Abenomics.

Kazuhiko OGATA Yoshiro SATO [email protected] [email protected]

Japon : croissance du PIB

-15

-10

-5

0

5

10

05 06 07 08 09 10 11 12 13

Crois. réelle (t/t, cvs, rythme annuel)

Croissance nominale (a/a)

Croissance réelle (a/a)

%

Source : Cabinet Office, CA CIB

Japon (a) 2012 2013 2014

T1 T2 T3 T4

PIB 1,9 2,0 2,0 1,0 0,9 0,6 0,8

Consommation privée 2,4 1,8 0,7 0,8 0,7 0,2 0,3

Investissement 0,0 -0,8 4,8 0,0 1,3 1,2 2,0

Variation des stocks (b) 0,0 0,2 0,1 0,0 -0,2 0,0 0,0

Exportations nettes (b) -0,7 0,2 0,3 0,4 0,2 0,0 0,1

Production industrielle 0,6 -0,4 5,7 0,6 1,5 1,7 0,8

Taux de chômage 4,4 4,0 3,7 4,2 4,0 3,9 3,8

Inflation (Core CPI, a/a, %) -0,1 0,3 2,4 -0,3 0,0 0,8 0,8

Dette publique (% PIB) 215 224 230 - - - -

(a) données annualisées (b) contribution à la croissance du PIB (en %)

2013

Europe

N°142 – 4e trimestre 2013 13

UEM : la malédiction du suiveur

Le décalage cyclique et les asymétries de performance entre pays leader, les États-Unis, et pays suiveur, la zone euro, condamnent le second à subir la politique monétaire du premier. Si le réalignement des taux d’intérêt entre les deux côtés de l’Atlantique a déjà commencé, la pleine convergence du cycle des profits et des prix des actifs paraît, en revanche, moins sûre. Dans cette reprise qui se dessine pour la fin 2013 (-0,3% en 2013) plane donc sur la zone euro le risque de conditions monétaires trop restrictives, dans un contexte d’ajustements de bilan de tous les agents encore en cours. L’ensemble laisse entrevoir une reprise cyclique très molle (+1% en 2014).

Après avoir cumulé un retard de croissance de 8% par rapport aux États-Unis depuis 2011, et alors que le cycle américain rentre dans une phase mature, la zone euro montre les premiers signes de reprise. Un tel décalage suggérerait une forte divergence entre les taux d’intérêt et une dépréciation de l’euro. Au contraire, nous observons une contagion dans la remontée des taux et aucun affaiblissement de la monnaie commune. Si la justification de telles évolutions est la réduction anticipée du décalage cyclique des deux côtés de l’Atlantique, cette réduction sera néanmoins limitée. Le réalignement potentiel du cycle des profits et des prix des actifs paraît partiel. Les timides signes de reprise du printemps se sont diffusés au cours de l’été, mais le décalage entre données d’enquête et données d’activité persiste et s’accentue. Le plus récent indicateur d’enquête, l’indice PMI de septembre, demeure pour le troisième mois consécutif dans un territoire signalant une expansion de l’activité. Mais le repli de la production industrielle en juillet (-1,5% t/t), laisse un acquis de croissance négatif au troisième trimestre 2013 (-1,3%), difficilement rattrapable par un regain même vigoureux de l’activité en août et septembre.

Le raffermissement de l’activité dans la zone euro a, certes, permis une quasi-stabilisation du taux de marge au premier trimestre 2013, mais celui-ci reste à son creux, après une baisse quasi-ininterrompue depuis le début 2012. Et si, fin 2012 l’épargne financière des entreprises est redevenue positive pour la première fois depuis deux ans, c’est que l’investissement ne cesse de se contracter. L’accumulation de richesse financière a donc pu accélérer et la richesse financière nette aussi. L’endettement bancaire continue de se contracter avec des banques peu enclines à prêter dans un environnement où le risque entreprise augmente, tandis que la demande reste asphyxiée par une activité atone. L’endettement obligataire accessible aux grandes entreprises a, néanmoins, fait remonter le taux d’endettement total à 102,8 points de PIB. Le niveau toujours élevé du le taux d’endettement bancaire, à 170,8% de la valeur ajoutée produite, empêche de parier sur la fin imminente du processus d’ajustement bilanciel. Le réalignement du cycle des profits, de l’investissement et des prix des actifs sur le cycle américain justifiant le réajustement des taux d’intérêt, paraît difficilement matérialisable dans l’immédiat.

Le recul de l’emploi et des salaires, ainsi que la ponction fiscale ont provoqué un repli du revenu disponible des ménages de la zone que le tout récent rebond en début d’année 2013 est loin de combler. Le taux d’épargne a sursauté au premier trimestre 2013, sans pour autant s’éloigner de son creux. L’investissement résidentiel a continué son ajustement à la baisse. Le patrimoine des ménages a profité certes de la meilleure valorisation boursière, mais ceci n’a pas compensé la perte de valeur côté patrimoine immobilier. Malgré la poursuite du désendettement, la richesse nette des ménages s’est encore réduite. Des ménages plus pauvres et plus prudents dans leurs investissements, autant physique que financier, n’ont pas pour préoccupation immédiate de reconstituer leur patrimoine. L’investissement résidentiel n’a pas terminé son ajustement, avec donc peu d’espoir de réactiver des effets de richesse positifs pour soutenir la reprise comme aux États-Unis. Le redémarrage des créations d’emplois sera retardé par l’important stock de chômage partiel et par la faiblesse des heures travaillées, qui justifieront d’abord une remontée de la durée du travail, avant que les premières baisses du nombre de chômeurs puissent se matérialiser à la fin de notre horizon prévisionnel.

Même si la récente décision de la Fed de retarder la normalisation de sa politique monétaire a permis à la BCE de gagner un peu de temps, la reprise fragile de la zone euro reste sous l’épée de Damoclès d’une contagion de la remontée des taux, sans que les fondamentaux de l’économie européenne aient pu s’améliorer, au point de justifier des conditions monétaires plus restrictives. L’effort d’ajustement des bilans publics se poursuit avec les marges de manœuvre prévues par le Pacte de stabilité en cas de faiblesse cyclique. Mais, cet effort est à peine suffisant pour stabiliser le ratio dette/PIB en 2014 et n’enlève pas le risque d’une nouvelle remontée des primes de risque sur le souverain de la périphérie, qui pourrait se greffer sur des taux « core » élevés, en cas de stratégie de sortie mal négociée par la Fed.

Paola MONPERRUS-VERONI [email protected]

UEM 2012 2013 2014

T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4

PIB -0,6 -0,3 1,0 -0,1 -0,2 -0,1 -0,6 -0,2 0,3 0,1 0,2 0,3 0,3 0,3 0,4

Consommation privée -1,4 -0,6 0,6 -0,2 -0,5 -0,2 -0,6 -0,2 0,1 -0,1 0,0 0,2 0,2 0,3 0,3

Investissement -3,7 -3,5 1,4 -1,4 -1,7 -0,9 -1,4 -2,2 0,1 0,0 0,1 0,4 0,5 0,5 0,6

Variation des stocks (a) -0,5 0,1 0,1 0,0 -0,1 -0,1 -0,1 0,4 -0,1 0,1 0,1 0,0 0,0 0,0 0,0

Exportations nettes (a) 1,6 0,6 0,4 0,3 0,6 0,3 0,1 0,0 0,2 0,1 0,1 0,0 0,1 0,1 0,1

Taux de chômage 11,4 12,3 12,5 10,9 11,3 11,5 11,8 12,0 12,1 12,4 12,5 12,5 12,5 12,5 12,4

Inflation (a/a, %) 2,5 1,5 1,4 2,7 2,5 2,5 2,3 1,9 1,4 1,4 1,4 1,2 1,4 1,5 1,5

(a) contribution à la croissance du PIB (en %)

2012 2013 2014

Europe

N°142 – 4e trimestre 2013 14

France : vous avez dit reprise ?

Avec le rebond de son activité au deuxième trimestre 2013 (+0,5% t/t, après -0,1% t/t au premier trimestre 2013), la France est sortie de récession. Malgré cette surprise positive, il est encore trop tôt pour parler de reprise durable. Nos prévisions restent prudentes pour le second semestre 2013 et tablent sur un redressement très graduel en 2014 (+0,8% en moyenne annuelle, après +0,1% en 2013).

L’accélération observée de la croissance française au deuxième trimestre (+0,5% t/t, après -0,1% t/t au premier trimestre) change-t-elle les grandes lignes de notre scénario ? Non ! Cette surprise positive relève essentiellement de facteurs temporaires (dépenses énergétiques notamment), sans remise en cause de la tendance profonde de l’activité économique. Il est encore trop tôt pour parler de reprise durable.

Nous tablons depuis plusieurs mois sur une quasi-stabilisation de l’activité en 2013, avec des prévisions comprises entre -0,1% et +0,1% en moyenne annuelle. Le signe est certes différent, mais l’histoire est identique. Contrairement à ses voisins européens (-1,9% pour l’Italie ; -1,3% pour l’Espagne et les Pays-Bas), la France échappe à une récession profonde. Malgré une conjoncture européenne dégradée, un taux de chômage en hausse depuis début 2011 (à 10,5% en métropole au deuxième trimestre 2013) et un ajustement budgétaire conséquent (38 milliards d’euros, soit 1,9 point de PIB en 2013), l’activité s’est montrée résistante, s’appuyant sur des « béquilles structurelles » solides. Le dynamisme des prestations sociales, la poursuite de la hausse du salaire par tête et le repli du taux d’épargne ont soutenu la consommation des ménages. L’absence de violent resserrement des conditions de crédit a évité une correction plus sévère encore de l’investissement. Enfin, le dosage et le ciblage des mesures d’ajustement budgétaire ont limité l’effet négatif induit sur la croissance.

Les grandes lignes du bilan économique de 2013 étant déjà bien dessinées, les regards se tournent désormais vers 2014. Un consensus s’est formé sur une croissance molle de l’activité (+0,8% en moyenne annuelle dans notre scénario). L’économie bénéficiera de l’effet positif du cycle, avec une amélioration des exportations dans un environnement européen un peu plus porteur, et un redressement progressif de l’investissement des sociétés non financières (besoins de modernisation de l’appareil productif notamment). Les entreprises profiteront de la mise en œuvre du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (4% de la masse salariale – salaires de 1 à 2,5 SMIC – en 2014, 6% en 2015) et de diverses mesures de soutien (notamment la refonte de la fiscalité des plus-values mobilières).

Néanmoins, la capacité de rebond de l’activité est restreinte, d’une part, par des freins structurels et, d’autre part, par l’assainissement des finances publiques. Dans les phases de reprise, les limites du modèle français sont mises à nu. Les béquilles sur lesquelles l’économie s’appuie en période de basse conjoncture deviennent des freins encombrants en phase de redémarrage. Prenons l’exemple du salaire par tête : il n’a pas reculé (+1,6% prévu en 2013 et en 2014, après +2,1% en 2012), participant à la fois à la correcte tenue de la consommation privée (et donc à l’absence de récession en 2013) et au tassement de la profitabilité des entreprises françaises (et donc au déficit de compétitivité et à l’absence de rebond marqué de l’activité en 2014). Par ailleurs, l’ajustement budgétaire va se poursuivre, avec un effort structurel de 18 milliards d’euros en 2014 (soit 0,9 point de PIB). Cet effort est concentré sur les dépenses publiques (a priori 15 milliards d’euros), l’impact d’une hausse des prélèvements étant plus négatif à moyen terme sur l’activité et la croissance potentielle.

Le seul élément vraiment nouveau de cet exercice est l’apparition d’un risque haussier. Bien sûr, les aléas baissiers sont toujours majoritaires : un risque pèse sur la reprise de l’emploi dans un contexte de rattrapage des gains de productivité ; des questions demeurent sur le redémarrage de l’investissement dans un environnement fiscal qui reste instable ; un doute subsiste sur l’évolution de la consommation, avec un taux de chômage très élevé favorable à l’épargne de précaution. Néanmoins, pour la première fois depuis plusieurs trimestres, quelques facteurs sont susceptibles de dynamiser notre activité : nos voisins européens pourraient connaître une reprise plus robuste, avec un effet positif sur nos exportations ; compte tenu de la longue période traversée de sous-investissement, les besoins de modernisation de l’appareil productif pourraient être plus importants qu’anticipé, incitant les chefs d’entreprise à investir davantage ; le mouvement de reconstitution des stocks pourrait également surprendre à la hausse.

Axelle LACAN [email protected]

France 2012 2013 2014

T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4

PIB 0,0 0,1 0,8 0,0 -0,3 0,2 -0,2 -0,1 0,5 0,0 0,1 0,2 0,2 0,3 0,3

Consommation privée -0,4 0,1 0,5 0,2 -0,5 0,1 0,1 -0,1 0,4 -0,2 0,0 0,2 0,2 0,3 0,3

Investissement -1,2 -2,4 0,3 -1,4 -0,3 -0,6 -0,8 -1,0 -0,4 -0,3 -0,1 0,2 0,2 0,3 0,4

Variation des stocks (a) -0,8 0,1 0,4 0,1 -0,1 0,0 -0,3 0,2 0,2 0,1 0,1 0,1 0,1 0,1 0,1

Exportations nettes (a) 1,0 0,1 -0,1 -0,1 0,0 0,1 0,2 -0,2 0,0 0,1 0,0 0,0 -0,1 0,0 -0,1

Production industrielle (manuf.) -3,4 -1,3 0,8 -1,4 -1,8 1,4 -2,6 -0,3 1,3 -0,6 0,1 0,2 0,3 0,3 0,3

Taux d'épargne 15,6 15,3 15,1 15,5 16,1 15,8 15,0 15,9 15,6 15,1 14,5 15,2 15,3 15,2 14,9

Taux de chômage (métropole) 9,8 10,6 10,8 9,5 9,8 9,9 10,1 10,4 10,5 10,7 10,8 10,9 10,9 10,8 10,6

Inflation (CPI, a/a, %) 2,0 1,1 1,6 2,3 2,0 2,0 1,5 1,1 0,8 1,1 1,3 1,4 1,6 1,7 1,7

(a) contribution à la croissance du PIB (en %)

2012 2013 2014

Europe

N°142 – 4e trimestre 2013 15

Allemagne : attention à la marche

L’autonomisation de sa croissance permet à l’Allemagne d’afficher dès 2014 un rythme de croissance supérieur au potentiel et de combler l’essoufflement de la contribution des exportations nettes, grâce à l’enclenchement d’un cycle d’investissement qui reste toutefois peu dynamique. Les facteurs temporaires qui ont soutenu la croissance n’étant pas extrapolables, la reprise au deuxième semestre 2013 se fera sur des rythmes plus lents.

La croissance au deuxième trimestre a été meilleure qu’anticipé (+0,7%, après 0%), redevable principalement de la forte contribution de la demande intérieure (0,7%). Les exportations nettes ont soutenu la croissance avec une contribution de 0,2 point compensant ainsi le déstockage. La consommation privée a continué de croître à un rythme soutenu et l’investissement s’est relevé, pour la première fois depuis le troisième trimestre 2011, dans ses deux composantes productives (+0,9%) et surtout construction (+2,6%). Le rebond compense à la fois la chute de la construction au premier trimestre 2013, due à des facteurs climatiques (comptant pour 0,25 point de la croissance du PIB au deuxième trimestre), et le ralentissement des exportations depuis l’automne 2012. La probabilité d’une récession a nettement reculé et la reprise est soutenue par une croissance dynamique des revenus, un marché du travail résistant et des conditions de profitabilité et de financement favorables.

Les indicateurs anticipateurs du cycle allemand sont bien orientés, compatibles avec un rythme « normal » de reprise, et donc sans l’effet d’élastique observé durant la période 2010-2011, après il est vrai une récession historique. L’indice PMI s’est légèrement replié en septembre, mais reste en territoire d’expansion de l’activité. En revanche, l’indice Ifo maintient sa remontée qui dure désormais depuis cinq mois. Mais la production industrielle de juillet, en repli marqué (-2,3% t/t), laisse un acquis de croissance négatif de 1,3% au troisième trimestre 2013. Les carnets de commandes se sont également dégarnis en juillet (-2,7% t/t), montrant ainsi des incohérences avec l’évolution des indicateurs d’enquête.

Ces données ne remettent pas en question une reprise technique tirée par la reconstitution des stocks, mais jettent des doutes sur l’ampleur du rôle d’’accélérateur de l’investissement, notamment au regard des commandes intérieures de biens d’investissement, qui ont fléchi en juillet (-1,1% t/t) après leur rebond de juin.

La politique budgétaire ne pèsera pas sur la croissance à l'horizon de la prévision, avec une orientation neutre. L'Allemagne continuera, en revanche, de pâtir de la restriction menée chez ses partenaires commerciaux. Le résultat des élections allemandes ne modifiera sans doute que marginalement la réflexion sur le nouveau cadre institutionnel de la zone euro. Les incertitudes sur les perspectives d’une intégration plus poussée de la zone euro ne vont probablement pas se lever sur notre horizon de prévisions, continuant ainsi à peser sur les décisions des investisseurs. Aussi, les ajustements de bilan en cours dans les entreprises européennes brideront la reprise du cycle des biens d’investissement, principal secteur de spécialisation de l’industrie allemande. De plus, les exportations vers les économies émergentes, qui ont tant soutenu la croissance en 2011 et 2012 devront composer, à la fois, avec un ralentissement de ces dernières et la dépréciation de leurs devises.

Avec une contribution des échanges extérieurs moindre qu’observé sur le passé récent, notre prévision table sur une croissance de +0,6% en 2013, après un troisième trimestre en deçà des performances du printemps. La reprise deviendrait progressivement plus autonome en 2014, à un rythme de +1,6%, qui ne permettrait pas de combler entièrement l’écart de production négatif cumulé avec la crise.

Paola MONPERRUS-VERONI [email protected]

Allemagne : contributions à la croissance

-1,5

-1,0

-0,5

0,0

0,5

1,0

1,5

2,0 % Demande intérieureSolde extérieurStocksPIB

Source : Eurostat, Crédit Agricole S.A.

Allemagne 2012 2013 2014

T1 T2 T3 T4

PIB 0,9 0,6 1,6 0,0 0,7 0,4 0,4

Consommation privée 0,7 1,0 1,6 0,2 0,5 0,4 0,3

Investissement -1,3 -1,0 4,1 -2,1 1,9 0,9 0,8

Variation des stocks (a) -0,6 0,2 0,0 0,4 -0,2 0,0 0,0

Exportations nettes (a) 1,1 -0,2 0,0 -0,2 0,2 0,0 0,0

Taux de chômage 5,5 5,5 5,4 5,4 5,4 5,6 5,5

Inflation (a/a, %) 2,1 1,7 1,7 1,8 1,5 1,8 1,7

Solde public (% PIB) 0,2 -0,1 0,0 - - - -

(a) contribution à la croissance du PIB (en %)

2013

Europe

N°142 – 4e trimestre 2013 16

Italie : rien n’est acquis

La diffusion de l’amélioration des indicateurs est cohérente avec la stabilisation de l’activité, mais la reprise n’est pas une route tracée d’avance et plusieurs facteurs peuvent encore la faire dérailler. Étant l’ampleur et la durée de la récession, le potentiel de rebond est réel, mais les destructions d’emplois et de capital physique hypothèquent la croissance future. Le chemin emprunté par l’Italie se situe sur une ligne de crête, avec une action politique d’autant plus essentielle pour faire basculer le pays du bon côté de la reprise.

Un meilleur chiffre de croissance au deuxième trimestre, soit un ralentissement de la récession, (-0,3%t/t, après -0,6% au premier trimestre), a confirmé la stabilisation de l’activité au printemps. Tous les indicateurs qualitatifs d’enquête reflètent l’amélioration de la situation et signalent une inversion de tendance, que l’indicateur avancé de l’OCDE anticipe au quatrième trimestre 2013. L’indice PMI d’août est pour le deuxième mois consécutif en zone d’expansion, une première depuis deux ans. La confiance des entrepreneurs signalée par l’ISTAT est à son plus haut depuis novembre 2011 dans tous les secteurs, à l’exception de la construction. La confiance des consommateurs a aussi fortement remonté et les opinions sur la situation financière des ménages italiens n’ont pas été si peu négatives depuis août 2012. Mais la nouvelle chute de la production industrielle en juillet (-1,1%, t/t) est là pour rappeler que l’inversion du cycle est loin d’être acquise, avec un acquis de croissance de -0,7% au troisième trimestre.

Par ailleurs, l’affaiblissement de la récession au deuxième trimestre est surtout le résultat d’une contribution positive des échanges avec une reprise des exportations vers l’Union européenne ayant plus que compensé le ralentissement des autres zones. Certes, la performance conforte l’idée d’une reprise tirée par l’extérieur avec des exportations, qui ont su depuis 2011 évoluer en ligne avec celles de la moyenne de la zone euro et qui ont permis de maintenir les parts de marché, notamment par rapport aux exportations allemandes. Mais cet élément de traction ne suffira pas tout seul à tirer la croissance. Les entreprises exportatrices réalisent encore 65% de leur chiffre d’affaires sur le marché intérieur et les signes de redressement de ce dernier sont faibles. La consommation des ménages est en retrait depuis deux ans et demi. L’investissement productif a profité du rebond de la composante en transport, mais l’accumulation de capital en machines et équipements continue de se replier depuis 2011, bien qu’à un rythme ralenti. L’investissement en construction continue également de corriger à la baisse.

Le rythme de contraction du pouvoir d’achat du revenu disponible a nettement décéléré au premier trimestre, permettant à la fois une moindre baisse de la consommation et une hausse du taux d’épargne. L’évolution de la masse salariale demeure, néanmoins, peu favorable et ne garantit pas la poursuite de ces tendances. Les salaires arrivent à peine à maintenir leur pouvoir d’achat. Les immatriculations de voitures ont, certes, quitté, leur creux de janvier 2013, mais le sentiment des producteurs de biens de consommation sur les commandes et les perspectives de production restent moroses. Si la baisse attendue du coût de l’énergie soulagera le pouvoir d’achat des ménages, les incertitudes sur le financement de la suppression de la hausse d’un point de TVA (dès octobre) et celle de l’impôt foncier ne permettent pas de tabler sur une pression fiscale beaucoup plus allégée. Sur le front de l’investissement logement, on assiste à une graduelle convergence entre le nombre de permis de construire et de logements terminés, qui signalerait l’absorption progressive du nombre de logements invendus, justifiant un ralentissement progressif de l’ajustement dans le secteur.

Les entreprises manufacturières anticipent une nette amélioration de leur chiffre d’affaires à l’exportation, le taux d’utilisation des capacités se redresse et le taux de marge remonte, mais les obstacles d’ordre financier sont ressentis de façon plus aiguë. Avec le déblocage de 11,3 milliards d’euros (sur les 27 budgétés) d’arriérés de paiement des APU, la trésorerie des entreprises s’est améliorée au cours des derniers mois, mais elle est jugée encore insuffisante par un quart des entreprises dans le secteur manufacturier et par la moitié d’entre elles dans la construction. L’action du gouvernement a permis de limiter, par des mesures contra-cycliques, le rationnement de l’offre de crédit, mais les marges de manœuvre pour aller plus loin sont limitées. De plus, l’incertitude politique affaiblit les initiatives législatives, empêche la pleine remontée de la confiance et contribue à la défiance des investisseurs étrangers.

Notre prévision table sur une stabilisation du PIB en fin d’année, suivie d’une reprise technique modeste tirée par le cycle des stocks et par l’activation lente et partielle du mécanisme d’accélérateur de l’investissement, avec au total une croissance de +0,5% en 2014, après -1,9% en 2013.

Paola MONPERRUS-VERONI

[email protected]

Italie : ralentissement de la récession au T2

-4

-2

0

2

2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013

Commerce extérieur

Variation des stocks

Demande intérieure

PIB

Source : Istat, Crédit Agricole S.A.

contribution à la croissance, t/t,%Italie 2012 2013 2014

T1 T2 T3 T4

PIB -2,4 -1,9 0,5 -0,6 -0,3 -0,2 -0,1

Consommation privée -4,3 -2,6 -0,2 -0,5 -0,4 -0,3 -0,3

Investissement -8,0 -5,5 1,1 -2,9 -0,3 -0,4 -0,1

Variation des stocks (a) -0,6 -0,2 0,0 0,4 -0,4 0,1 0,1

Exportations nettes (a) 2,8 0,8 0,5 -0,3 0,4 0,1 0,1

Taux de chômage 10,7 12,1 12,4 11,9 12,1 12,1 12,3

Inflation (a/a, %) 3,3 1,4 1,3 2,1 1,3 1,1 1,2

Solde public (% PIB) -3,0 -3,3 -2,6 - - - -

(a) contribution à la croissance du PIB (en %)

2013

Europe

N°142 – 4e trimestre 2013 17

Espagne : un pays excédentaire

Après deux années de réformes structurelles douloureuses, l’Espagne a regagné assez de compétitivité pour espérer être tracté par l’extérieur à un rythme suffisant, afin de s’extraire de récession. Le chemin qui reste à parcourir sera long et difficile, mais l’Espagne semble être sur la voie de la reprise.

À -0,2% t/t, le recul de l’économie espagnole a été très limité au deuxième trimestre 2013. La consommation privée est restée inchangée et les dépenses publiques ont augmenté pour la première fois depuis début 2011. La reprise de l’investissement en biens d’équipements se poursuit (+2,9% t/t, après +0,8% t/t au premier trimestre), ce qui tranche avec la construction, dont la contraction se poursuit (-4,5% t/t, après -3,7% t/t au premier trimestre). Le principal moteur de la croissance reste la demande extérieure, avec une progression des exportations de biens (+12,7% a/a au deuxième trimestre), mais également de services (+2,0% a/a). L’excédent courant a mécaniquement augmenté à 2,57 milliards d’euros en juin (contre un déficit de 981 millions € sur la même période en 2012).

La production industrielle a moins reculé en juillet (-1,4% a/a, après -2,2% en juin). Les enquêtes sur le climat des affaires suggèrent que l’économie devrait retrouver une croissance modérée au troisième trimestre. En août, l’indice PMI est passé au-dessus du niveau clé des 50 points dans le secteur manufacturier et dans les services, pour la première fois depuis l’été 2011. Du côté de la demande, la baisse des ventes dans le commerce de détail a ralenti. Mais les consommateurs resteront prudents, au regard du maintien de conditions difficiles sur le marché du travail et de conditions de financement dégradées.

Le taux de chômage s’est stabilisé à un niveau très élevé (26,3%) en juillet. Les effets de la récente réforme des conventions collectives commencent à se faire sentir (les hausses de salaire négociées ont été de 0,7% en moyenne en juin, contre 1,2% en 2012). Le coût total du travail baisse progressivement (-0,9% a/a au deuxième trimestre). Le taux de chômage, qui a jusqu’ici été la seule variable d’ajustement du marché du travail, devrait continuer de progresser en 2013, mais à un rythme plus modéré (nous attendons une hausse à 27,4%).

Sur le plan budgétaire, l’ajustement semble suffisant pour atteindre l’objectif de déficit de 6,5% du PIB en 2013. Le ratio de dette publique devrait rester inférieur à la moyenne de la zone euro en 2013 (à 91,2% du PIB, contre 94,5%). Le programme de réduction budgétaire pour 2014 devrait reposer principalement sur les dépenses, avec la réforme des collectivités locales et la baisse du coût du travail dans le secteur public.

L’ajustement semble s’accélérer dans le secteur de l’immobilier résidentiel, ce qui est fondamentalement une bonne chose pour le processus de rééquilibrage. Les prix des logements ont baissé de 35% depuis leurs points hauts en 2007, mais ils restent néanmoins surévalués et devraient continuer à reculer en 2014, compte tenu de la faiblesse persistante de la demande domestique. Le transfert de 50 milliards d’euros d’actifs et de prêts toxiques à la nouvelle structure de défaisance (SAREB) a également renforcé la solvabilité des banques. Les conditions de financement commencent doucement à s’améliorer, mais des risques subsistent. Le ratio de CDL reste élevé et devrait augmenter avec la nouvelle règlementation relative aux prêts restructurés (de 11,9% en juillet à environ 16%, selon les calculs du FMI).

Malgré les facteurs de risque encore importants qui continuent de peser sur le secteur bancaire, l’économie est sur la voie d’une reprise, bien que modeste, de la croissance. Nous attendons une contraction du PIB de 1,3% pour l’ensemble de l’année 2013 et une légère reprise, tirée par les exportations, à +0,6% en 2014.

Bénédicte KUKLA [email protected]

Espagne : évolution du commerce extérieur

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10

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03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13

a/a, %

Exportations

Importations

Source : Eurostat

Espagne 2012 2013 2014

T1 T2 T3 T4

PIB -1,6 -1,3 0,6 -0,4 -0,1 0,1 0,1

Consommation privée -2,8 -2,7 0,3 -0,5 -0,1 -0,2 0,0

Investissement -7,0 -6,7 -3,2 -1,5 -2,1 -1,0 -0,8

Variations des stocks (a) 0,1 0,1 0,1 0,1 -0,1 0,1 0,0

Exportations nettes (a) 2,4 1,8 1,3 0,1 0,2 0,5 0,4

Exportations 2,1 5,3 7,2 -3,8 6,0 1,3 1,4

Importations -5,7 -0,6 3,9 -4,5 5,9 -0,2 0,3

Taux de chômage 21,7 25,1 26,9 26,4 26,4 27,5 27,5

Inflation (a/a, %) 2,4 1,7 1,1 2,8 1,8 1,4 0,9

Solde public (% PIB) -10,6 -6,9 -5,9 - - - -

(a) contribution à la croissance du PIB (en %)

2013

Europe

N°142 – 4e trimestre 2013 18

Portugal : la récession a pris fin, pour le moment

L’économie portugaise a rebondi au deuxième trimestre tirée par les exportations. Ce résultat est très encourageant, mais ne garantit pas une reprise à part entière. La demande domestique reste vulnérable aux nouvelles mesures de durcissement budgétaire qui devraient être mises en œuvre d’ici la fin de l’année.

L'économie portugaise devrait se contracter de 1,8% sur l’ensemble de l’année 2013, un résultat nettement meilleur qu’anticipé en début d’année. La récession a pris fin au deuxième trimestre, avec un rebond surprise de la croissance (1,1% t/t), grâce notamment à un fort mouvement de restockage. La progression des exportations a également été impressionnante, à 5,2% t/t (après +2,6% t/t au premier trimestre). Elle s’explique par une très forte progression de la composante « énergie » liée à la hausse des capacités de raffinage implantées dans le pays. De plus, la part des exportations hors UE continue à progresser, alors que les exportations vers l’Espagne se sont également renforcées récemment. Sur le plan des exportations de service, l’activité touristique a affiché des résultats positifs, tant en termes de revenus (+6,9% de janvier à juin, par rapport à la même période de 2012) que de nuitées (+5,4%). Bien qu’un léger ralentissement des exportations soit attendu en 2014, celles-ci resteront le pilier de la croissance.

La situation de la demande domestique est, en effet, nettement moins favorable. Compte tenu de la surcharge de dette (100% du PIB pour les ménages, 187% pour les entreprises et 123% pour le secteur public), les perspectives de reprise de la consommation et de l’investissement restent assez lointaines. Bien que le coût du travail baisse, les entreprises ont toujours besoin d’emprunter pour couvrir leurs besoins de financement. À l’inverse, les ménages continuent d’épargner davantage : le taux d’épargne est en hausse à 11% des revenus disponibles. La légère reprise de la confiance des ménages (+9,2 points depuis le quatrième trimestre 2012) et le ralentissement de l’inflation (à 0,7% a/a en juillet) ont conduit à une contraction moins importante de la consommation au premier semestre 2013. L’impact de certaines mesures d’austérité devrait, néanmoins, se faire ressentir en fin d’année.

Le taux de chômage a, par ailleurs, reculé d’un point, à 16,5%, depuis mars 2013, une baisse inattendue. Ce recul peut s’expliquer par un phénomène d’émigration de travailleurs portugais qui cherchent à fuir le chômage, mais également par des facteurs saisonniers liés à la hausse des contrats temporaires dans le secteur agricole. Les enquêtes indiquent que le taux d’utilisation des capacités de production reste à des niveaux historiquement bas, ce qui en retour explique le ralentissement de l’inflation, avec une hausse de seulement 0,2% a/a en août. Le ralentissement des prix à la consommation est lié à des effets de base (contrecoup de la hausse des impôts indirects en 2012), ainsi qu’à la baisse du prix des matières premières. Le coût unitaire du travail ayant commencé à reculer, en particulier dans le secteur public, les prix à la production se sont également inscrits sur une tendance baissière.

Nous restons prudents sur nos anticipations de croissance à court et moyen terme, compte tenu des obstacles politiques et financiers qui s’annoncent. Dans les mois qui viennent, le gouvernement portugais devra négocier un nouveau plan de financement avec la probable mise en place d’une ligne de crédit préventive du MES. Les négociations avec la Troïka s’annoncent, néanmoins, compliquées concernant les conditionnalités attachées à cette nouvelle aide financière. Il n’est pas certain que le Portugal qui aimerait marquer une pause dans l’ajustement budgétaire, étant donné les tensions politiques et sociales, obtienne gain de cause.

Bénédicte KUKLA

[email protected]

Portugal : contribution à l'inflation annuelle

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%

Alimentation ServicesEnergie Prod. manuf.Inflation tot. Source : INE, Crédit Agricole

Portugal 2012 2013 2014

T1 T2 T3 T4

PIB -3,2 -1,8 0,4 -0,4 1,1 -0,1 0,0

Consommation privée -5,4 -2,8 -1,1 -0,7 0,4 -0,7 -0,6

Investissement -14,3 -9,0 -0,1 -2,7 -0,1 -0,7 -0,3

Variation des stocks (a) 0,1 0,2 0,3 -1,0 0,5 0,0 0,0

Exportations nettes (a) 3,7 1,7 1,4 1,6 0,3 0,5 0,4

Exportations 3,2 6,7 5,6 2,6 5,2 1,4 1,2

Importations -6,6 2,1 2,2 -1,8 4,5 0,2 0,2

Taux de chômage 15,9 17,5 18,5 17,6 17,0 17,6 17,8

Inflation (a/a, %) 2,8 0,6 -0,2 0,4 0,8 0,7 0,6

Solde public (% PIB) -6,4 -5,7 -4,9 - - - -

(a) contribution à la croissance du PIB (en %)

2013

Europe

N°142 – 4e trimestre 2013 19

Royaume-Uni : la reprise se généralise

Nous avons révisé à la hausse nos prévisions de croissance, à 1,0% t/t pour le troisième trimestre et de 0,7% à 1,4% pour l’année en cours, en réponse à la forte montée de la confiance des entreprises et des ménages. Bien que les flux de crédit soient restés très faibles, des signes suggèrent que le plan de financement pour le crédit (FLS) produit des résultats et que la demande de crédit des entreprises redémarre enfin. Le taux de chômage joue désormais un rôle clé dans l’évolution de la politique monétaire. Si la reprise cyclique s’accompagne d’un redressement de la productivité et si le taux de participation augmente, comme nous le pensons, le taux de chômage ne baissera probablement pas rapidement vers le seuil des 7%.

L’économie britannique a progressé de 1,0% au premier semestre 2013, mettant un terme à vingt-quatre mois de relative stagnation. La croissance du deuxième trimestre (0,7% t/t) a été bien équilibrée, toutes les principales composantes de dépenses affichant de fortes progressions (à l’exception des institutions à but non lucratif au service des ménages). La reprise actuelle semble donc basée sur des fondations plus solides. Le secteur industriel et le secteur des services ont progressé de 0,6% t/t chacun et la construction a crû de 1,4% t/t. Il y a peu de données disponibles pour le trimestre en cours, mais la production industrielle s’est bien maintenue en juillet, avec un acquis de 0,9% pour le troisième trimestre, et les ventes au détail ont progressé de 1,5%, sur les deux premiers mois du trimestre. De fait, la confiance des ménages, probablement soutenue par la reprise du marché du travail, du prix des logements et des actions, a retrouvé des niveaux d’avant crise. Le ralentissement anticipé de l’inflation devrait permettre un léger redressement du pouvoir d’achat. Néanmoins, la faiblesse persistante de la progression des salaires et le niveau déjà très faible du taux d’épargne suggèrent que la consommation des ménages ne progressera qu’à un rythme modéré.

Les indices PMI, qui ont été régulièrement supérieurs aux attentes depuis le début de l’année, suggèrent une croissance d’environ 1,2% t/t au troisième trimestre. L’indice PMI du secteur des services a ainsi atteint 60,5 en août, son niveau le plus élevé depuis décembre 2006. Toutefois, les indices PMI pourraient exagérer la croissance réelle et les résultats des autres enquêtes ne sont pas aussi élevés. Nous avons donc révisé notre prévision de croissance préliminaire pour le troisième trimestre à la hausse, à 1,0% t/t. Un tel rythme de reprise n’est clairement pas soutenable à moyen terme et nous attendons un net ralentissement au quatrième trimestre, puis un rythme de croissance modéré par la suite.

L’amélioration du climat des affaires trouve son origine dans la reprise substantielle des nouvelles commandes : celles-ci ont progressé à leur rythme le plus rapide depuis août 1994, dans le secteur manufacturier, et depuis mai 1997, dans le secteur des services. La composante « commandes » de l’enquête CBI a également enregistré une très forte hausse (atteignant son niveau le plus élevé depuis août 2011). Les entreprises étant de plus en plus confiantes sur les perspectives de demande, nous pensons que la reprise de l’investissement pourrait accélérer dans les mois qui viennent. Cette opinion est confortée par des enquêtes indiquant que les intentions d’investissement s’améliorent, que les entreprises sont confrontées à des problèmes de capacité de production et que leur profitabilité augmente. De plus, les derniers indicateurs de crédit sont raisonnablement encourageants. Les flux nets de crédit dans le cadre du plan de financement pour le crédit (Funding for Lending Scheme) sont enfin devenus positifs au deuxième trimestre (+1,6 milliard £). La disponibilité du crédit s’est élargie aux PME, un phénomène qui a coïncidé avec la décision annoncée en avril par la BoE d’orienter le FLS vers les PME. La demande de crédit a progressé pour toutes les tailles d’entreprises au deuxième trimestre, selon la dernière enquête de la BoE sur les conditions de crédit.

Dans un contexte de remontée des taux d’intérêt, la BoE a déclaré, en août, qu’elle n’envisagerait pas de hausse du taux directeur et qu’elle resterait prête à relancer son programme d’achats d’actifs, tant que le taux de chômage est supérieur à 7%. Elle a, en outre, défini des règles de sortie de cette politique de forward guidance portant sur les prévisions d’inflation CPI, les anticipations d’inflation à moyen terme et la stabilité financière. La BoE prévoit que le seuil sur le taux de chômage sera atteint au troisième trimestre 2016, ce qui signifie clairement qu’elle n’envisage pas de durcissement monétaire avant cette date. Bien que l’écart entre le niveau actuel du taux de chômage (7,7%) et le seuil adopté semble petit, une période de temps prolongée pourrait, en effet, être nécessaire pour le combler : la reprise cyclique s’accompagnera probablement d’une amélioration de la productivité et le taux de participation pourrait augmenter, en raison de l’évolution de la population active. Nous ne prévoyons donc pas de hausse des taux avant 2016.

Slavena NAZAROVA

[email protected]

Royaume-Uni : marché du travail

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Emploi Chômage (éch. dr.)

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Source: ONS, Crédit Agricole CIB

Royaume-Uni 2012 2013 2014

T1 T2 T3 T4

PIB 0,2 1,4 2,0 0,3 0,7 1,0 0,0

Consommation privée 1,2 1,5 1,7 0,3 0,4 0,5 0,2

Consommation publique 2,8 1,8 1,0 0,1 0,9 0,5 0,0

Investissement 0,5 -2,9 3,5 0,2 1,7 1,5 0,6

Variation des stocks (a) -0,3 -0,2 0,3 -0,8 -0,2 0,5 -0,2

Exportations nettes (a) -0,6 0,7 0,0 0,6 0,3 0,0 0,0

Balance publique (% du PIB) -6,3 -5,3 -6,1 - - - -

Taux de chômage (BIT) 8,0 7,7 7,4 7,8 7,7 7,7 7,7

Inflation (HICP, a/a, %) 2,8 2,5 2,3 2,8 2,7 2,6 2,0

(a) contribution à la croissance du PIB (en %)

2013

Océanie

N°142 – 4e trimestre 2013 20

Australie : tourner la page

La reprise de l’activité en Chine va bénéficier à l’Australie. L’économie australienne a connu quelques mois décevants avec des ventes au détail faibles, un marché du travail moins dynamique et une croissance légèrement inférieure aux attentes au deuxième trimestre. Les perspectives à court terme semblent toutefois plus encourageants, grâce à la reprise de l’activité en Chine et au regain d’optimisme lié à la victoire électorale de Tony Abbott, perçu comme plus favorable aux entreprises.

Le gouvernement de Tony Abbott devra, toutefois, composer avec un Sénat difficile à manœuvrer, où de nombreux candidats de petits partis ont obtenu des sièges. Sur le plan budgétaire, la coalition ne devrait pas renouer beaucoup plus vite avec l’excédent que les travaillistes ne le prévoyaient (2016-2017), ce qui apaisera les craintes d’un resserrement trop important par la coalition dans une période économiquement difficile.

Comme attendu, la Banque centrale (RBA) a baissé son taux directeur de 25 pdb à 2,50% (son plus bas niveau historique) en août. Son discours n’a pas été aussi accommodant qu’espéré lors de la réunion de septembre, mais la détermination de la Banque centrale à freiner l’appréciation du dollar australien par le biais de sa communication ou de mesures monétaires est apparue de plus en plus clairement depuis quelques mois. En conséquence, nous avons repoussé au troisième trimestre 2014 notre prévision de première hausse de taux, un changement cohérent avec la révision à la baisse de nos prévisions d’inflation. Il est toujours envisageable qu’un nouvel assouplissement monétaire intervienne avant le démarrage du cycle de hausses, mais la probabilité d’une baisse des taux paraît faible : les décisions de la RBA restent très sensibles aux données économiques, et la croissance devrait repartir dans les trimestres à venir. L’amélioration des fondamentaux et la stabilité politique devraient soutenir le dollar australien dans les mois qui viennent. Nous tablons sur un dollar australien à 0,93 fin 2013 et à 0,96 fin 2014.

Nouvelle-Zélande : croissance forte et inflation faible, le scénario idéal ?

Une gestion prudente de la politique monétaire va être nécessaire. La situation a évolué favorablement en Nouvelle-Zélande au cours des derniers mois, les ventes au détail ont augmenté de façon significative (+1,7% t/t en termes réels au deuxième trimestre) et les indices de confiance ont enregistré de fortes progressions récemment. Le taux de chômage a légèrement augmenté à 6,4%, mais il devrait baisser progressivement dans les mois qui viennent, grâce à la reconstruction de la région de Canterbury et au secteur de la construction en général.

L’inflation est, par ailleurs, restée faible. Les pressions à la hausse sur les prix des biens (importés ou non) ont été limitées, grâce à une inflation importée faible et à la progression contenue des salaires. Nous attendons une poursuite de l’amélioration de la croissance dans les mois à venir, tirée par la consommation (elle-même soutenue par l’effet richesse) et l’investissement. À moyen terme, l’inflation suivra la croissance à la hausse, mais à un rythme graduel, en raison de la persistance de capacités de production excédentaires. La combinaison d’une croissance forte et d’une inflation faible est de bon augure pour la Nouvelle-Zélande à moyen terme.

En revanche, le niveau élevé du prix des logements reste un problème et une gestion prudente de la politique monétaire par la Banque centrale (RBNZ) sera nécessaire dans les prochains mois. Le Gouverneur G. Wheeler a admis la nécessité de durcir rapidement la politique monétaire. Cependant, l’inflation restant globalement modérée et la RBNZ craignant que l’appréciation du dollar néo-zélandais ne pèse sur la croissance, celle-ci s’est abstenue de relever son taux directeur (OCR) et a préféré introduire des restrictions sur les prêts immobiliers : les banques ne pourront accepter de financer des emprunts ayant un apport personnel de moins de 20% dans la limite de 10% du volume total des nouveaux prêts émis. Cette mesure macro-prudentielle devrait permettre de gagner du temps, mais une hausse de l’ORC sera probablement nécessaire à moyen terme. Nous prévoyons une première hausse de taux vers la fin du premier trimestre 2014. Cette perspective de resserrement monétaire devrait soutenir le dollar néo-zélandais : nous tablons sur un dollar néo-zélandais à 0,80 fin 2013 et à 0,82 fin 2014.

Anthony LAM [email protected]

Australie : principaux partenaires commerciaux

Nouvelle-Zélande : prix des logements

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% exports tot. sur 12m glissants

Source : Bloomberg, Crédit Agricole CIB

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mars-00 mars-04 mars-08 mars-12

% revenus dispo.

Dette des ménages

Indice REINZ des prixdes logements (éch. dr.)

Source : RBNZ, Bloomberg, Crédit Agricole CIB

Amérique

N°142 – 4e trimestre 2013 21

Canada : dans l’attente de la reprise de la demande américaine

Nous tablons sur un renforcement de la croissance, de 1,6% en 2013 à 2,3% en 2014. La croissance sera légèrement supérieure à son potentiel l’année prochaine, ce qui devrait provoquer un resserrement de l’output gap. L’inflation devrait rester inférieure à 2%. La Banque centrale (BdC) devrait conserver son biais légèrement restrictif, mais ne relèvera ses taux, au plus tôt, que fin 2014.

La croissance a ralenti à 1,7% en rythme annuel au deuxième trimestre, contre 2,2% au premier trimestre. Ce ralentissement s’explique en partie par les inondations dans l’Alberta et par une grève dans le secteur de la construction au Québec, mais il a des origines plus larges. La consommation a continué de jouer son rôle au deuxième trimestre, affichant une progression de 0,9% (rythme non annualisé), sa plus forte progression en plus de deux ans. Cette hausse s’explique en partie par la forte progression des ventes de voitures (+4,7%).

À plus long terme, la dette des ménages canadiens, qui reste élevée, et la remontée des taux d’intérêt devraient fortement peser sur les dépenses de consommation. Alors que le ratio dette des ménages/PIB avait baissé au cours des deux trimestres précédents, il a de nouveau progressé au deuxième trimestre, à plus de 163% des revenus disponibles.

L’immobilier résidentiel a été plus vigoureux qu’attendu au deuxième trimestre. L’investissement des entreprises en structures résidentielles a notamment progressé de 1,3%, après trois trimestres de baisse. Les ventes de logements ont été soutenues en fin d’été : les ventes ont progressé de 2,8% m/m et de 11,1% a/a dans l’ancien en août. La forte progression de la mesure en glissement annuel est liée à des effets de base positifs et s’explique également, nous semble-t-il, par le fait que des acquéreurs disposant d’un crédit ont hâté leur décision d’achat pour échapper à la remontée des taux.

Nous n’avons pas encore observé la grande « rotation » – anticipée par la BdC – « de la demande canadienne vers les exportations et l’investissement » au détriment de la consommation et de l’immobilier résidentiel. Les exportations ont ralenti au deuxième trimestre (+0,2%, contre +1,3% au premier trimestre). Les importations, tirées par l’équipement électronique, l’équipement électrique et les véhicules motorisés, ont progressé de 0,4%. L’investissement des entreprises en structures non résidentielles, en machines et équipements, pénalisé par la baisse de l’investissement non résidentiel, liée en partie à la grève de la construction au Québec en fin de trimestre, a reculé de 0,6% au deuxième trimestre. L’investissement en machines et équipements a, toutefois, également reculé (-0,6%), en raison des incertitudes sur les perspectives de demande agrégée. Nous pensons que la rotation des sources de croissance s’améliorera avec le temps, avec l’amélioration de la demande agrégée mondiale.

Les différentes mesures d’inflation restent assez modérées. Sur un an, l’indice des prix (CPI) a progressé de 1,3% et l’indice sous-jacent utilisé par la BdC de 1,4%. Bien que nous tablions sur une remontée de l’inflation sous-jacente vers l’objectif de 2% de la BdC, cette convergence devrait être lente, repoussant toute nécessité pour la BdC de relever ses taux directeurs à fin 2014, au plus tôt. Le durcissement de la BdC surviendra avant celui de la Fed, en raison d’un output gap plus faible au Canada qu’aux États-Unis. La déclaration la plus récente de la BdC soulignait l’incertitude croissante pesant sur les perspectives des États-Unis, pays destinataire de la plus grande partie des exportations canadiennes, ce qui pourrait conduire à une hausse de taux intervenant plus tard que nous ne le prévoyons actuellement. Mais le renforcement de la croissance américaine en 2014 s’accompagnera d’une accélération de la croissance canadienne.

Les finances publiques canadiennes continuent de s’améliorer et le déficit budgétaire devrait tomber à 1,0% du PIB en 2014.

Mike CAREY [email protected]

Canada : dette des ménages

Canada : inflation

80

90

100

110

120

130

140

150

160

170

90 93 96 99 02 05 08 11

% revenu disponible

Source : Statistics Canada

-1

0

1

2

3

4

0,8

1,3

1,8

2,3

2,8

mai-08 mai-09 mai-10 mai-11 mai-12

a/a, cvs

a/a, cvs2002=100

Inflation s/s-jacente hors impôts ind. (éch. dr.)

Inflation Source : Statistics Canada, BdC

Pays émergents

N°142 – 4e trimestre 2013 22

Marchés émergents : ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain !

Les pressions financières sur les pays émergents apparues en mai ont été aggravées par une reprise décevante. La croissance émergente pourrait, toutefois, se renforcer dans les prochains mois avec la reprise des exportations. Les difficultés n’ont pas entièrement disparu, mais nous attendons une légère accélération de la croissance des pays émergents en 2014, malgré un léger ralentissement en Chine.

Si l’on fait abstraction des moments de répit, les pays émergents ont connu une période difficile – qui s’est notamment traduite

par une dépréciation de leurs devises – depuis le début de la normalisation des taux américains, il y a quatre ou cinq mois. Les

pressions pesant sur les pays émergents pourraient persister dans une certaine mesure, les États-Unis étant engagés dans une

longue période de normalisation. Ceci dit, nous pensons qu’il ne faut pas « jeter le bébé avec l’eau du bain ». Premièrement, la

remontée des taux américains pourrait se poursuivre, mais à un rythme nettement inférieur à celui qui a prévalu entre mai et

août. Deuxièmement, la croissance des pays émergents, après avoir été inférieure aux anticipations, pourrait surprendre à la

hausse. Le niveau décevant de la croissance émergente a accentué la baisse des marchés émergents. La lenteur de la reprise

a alimenté les doutes sur la « success story » émergente et fait craindre que la croissance émergente ne s’appuie pas sur des

bases solides.

La situation pourrait toutefois changer sur le front de la croissance. Tout d’abord, la croissance n’a pas été si mauvaise

qu’il y paraît au deuxième trimestre. En effet, notre indice de PIB pour douze pays émergents majeurs (hors Chine) montre une

croissance plutôt limitée (2,5% a/a) au deuxième trimestre, mais la version séquentielle de cet indice fait apparaître une forte

accélération, avec une croissance de 3,7% t/t en rythme annuel (cvs), son niveau le plus élevé depuis le premier trimestre

2011. En termes de demande domestique, la consommation privée a continué de représenter la contribution la plus élevée à la

croissance des pays émergents (hors Chine), tandis que l’investissement a été beaucoup plus faible. Il faut cependant garder à

l’esprit qu’après quatre trimestres de contribution insignifiante à la croissance, l’investissement repartirait probablement à la

hausse en cas d’amélioration des perspectives de demande.

De ce point de vue, l’amélioration du contexte mondial pourrait alimenter certains espoirs. Comme le montre le graphique

de droite, la corrélation relativement importante entre les exportations émergentes et la moyenne des indices PMI manufactu-

riers aux États-Unis et en zone euro suggère une accélération possible des exportations émergentes, dans les mois qui vien-

nent. La croissance émergente pourrait même être plus élevée que nous le prévoyons, compte tenu de la reprise simultanée en

Europe aux États-Unis et dans certains pays émergents dont la Chine. Cette accélération synchronisée pourrait déboucher sur

une dynamique positive auto-entretenue et conduire à des niveaux de croissance plus élevés dans les trimestres à venir.

Cela dit, au-delà des bonnes surprises éventuelles sur la croissance, certaines difficultés perdurent et devraient continuer de

brider la croissance des pays émergents jusqu’en 2014. Nous en voyons quatre. Premièrement, la normalisation des taux

américains devrait se poursuivre. Nos stratégistes taux tablent sur un taux américain à dix ans à 3,4% en juin 2014 et à 3,75%

en décembre 2014. Les pressions pesant sur les devises des pays émergents affichant un déficit courant pourraient

réapparaître, poussant les taux à la hausse et freinant la croissance économique. Certains grands pays émergents, tels que le

Brésil, l’Indonésie et la Turquie, ont déjà été contraints de durcir leur politique monétaire. Deuxièmement, les développements

au Proche-Orient pourraient conduire à un rebond des prix du pétrole, ce qui ajouterait aux pressions sur les importateurs de

pétrole (Inde et Turquie, par exemple).

Troisièmement, contrairement à la moyenne du monde émergent, certains pays affichent actuellement une croissance très

faible (c’est le cas de la Russie et du Mexique) et leur reprise dépend en partie de l’évolution de la demande mondiale. Enfin,

de nombreux pays émergents ont besoin de moderniser leur modèle de développement, afin d’améliorer leur croissance

potentielle et d’être en mesure de réduire leur dépendance à la demande extérieure. Le problème réside dans le fait que,

hormis au Mexique et en Chine dans une certaine mesure, la volonté de lancer des réformes semble faire défaut, en raison

notamment de la faible marge de manœuvre politique dont certains grands pays émergents disposent à l’approche des

élections (Inde en avril ou mai 2014, Brésil en octobre 2014). En conclusion, nous attendons une légère accélération de la

croissance des pays émergents, de 4,7% en 2013 à 4,9% en 2014, malgré un léger ralentissement en Chine (de 7,7% en

2013 à 7,2% en 2014).

Sébastien BARBE [email protected]

Croissance du PIB de douze émergents*

* Brésil, Rép. tchèque, Hong Kong, Hongrie, Corée, Mexique,

Philippines, Roumanie, Singapour, Afrique du Sud, Taïwan, Turquie

Exportations émergentes et indices PMI des pays développés

-10%

-5%

0%

5%

10%

04 05 06 07 08 09 10 11 12 13

t/t a/aSource : Crédit Agricole CIB

32

36

40

44

48

52

56

60

64

-45%

-25%

-5%

15%

35%

98 00 02 04 06 08 10 12

moy. mobile sur 3m

a/a, moy. mobile sur 3m

Exports des pays émergentsMoy. indices PMI des USA et de la ZE (éch. dr.)

Source : Crédit Agricole CIB

Pays émergents

N°142 – 4e trimestre 2013 23

Brésil : une bonne surprise, mais cela durera-t-il ?

La croissance a été plus élevée que prévu au deuxième trimestre, mais nous pensons que ce rythme n’est pas soutenable. La Banque centrale (BCB) a renforcé ses interventions sur le marché des changes. Cette nouvelle approche a été efficace à court terme, mais nous pensons que le real brésilien reprendra bientôt le chemin de la baisse.

La croissance brésilienne a été plus forte que prévu au deuxième trimestre 2013. Elle a été de 1,5% t/t, son niveau le plus élevé depuis le premier trimestre 2010, alors que le consensus tablait sur 1,1%. L’investissement a continué à tirer la croissance (+3,6%), un point positif, puisque le Brésil doit augmenter son taux d’investissement, afin d’améliorer sa croissance potentielle. La consommation a également progressé, mais à un rythme plus modéré (+0,3%).

De nombreux signes suggèrent cependant une contraction du PIB au troisième trimestre. La production industrielle, par exemple, a baissé de 2% en juillet, effaçant la progression du mois précédent et confirmant la forte volatilité récente. Des indicateurs avancés suggèrent que la production industrielle s’est à nouveau contractée en août. Du côté de la demande, la consommation ne devrait pas accélérer : le poids de la dette continue à peser sur le budget des ménages et le marché du travail semble aller en s’affaiblissant. Si cela est confirmé, la progression actuelle de l’investissement pourrait difficilement se maintenir. Pour l’instant, nous avons relevé nos anticipations de croissance pour 2013 (de 2,2% à 2,4%), mais abaissé nos anticipations pour 2014 (de 2,5% à 1,8%), en raison de la dégradation des perspectives macro-économiques.

L’inflation a, par ailleurs, recommencé à augmenter. L’inflation (IPCA) a progressé de 0,24% en août, contre 0,03% le mois précédent, mais ces chiffres d'inflation dissimulent la poursuite du contrôle des prix réglementés par l’État et le niveau plus élevé de l’inflation sous-jacente. Nous anticipons une accélération de l’inflation (IPCA) à 0,4% en septembre et à 0,6% en octobre. Dans les mois suivants, il est probable que la récente baisse de la devise continuera à peser sur les prix domestiques et nous tablons sur une inflation proche de la borne haute de l’objectif d’inflation en 2013 (6,2%) et 2014 (6,5%). Pour faire face à cette situation, la BCB continuera probablement à relever ses taux. Nous tablons sur des hausses de taux supplémentaires du taux directeur (Selic), de 50 pdb en octobre, puis de 25 pdb en décembre, portant le Selic à 9,75% en fin d’année. Ces hausses ne seront probablement pas suffisantes pour amener l’inflation à converger vers l’objectif, mais nous pensons que la BCB évitera de relever ses taux en 2014, année des élections présidentielles.

Après la forte baisse du real brésilien lors de la dernière vague de dépréciation des devises émergentes, la BCB a décidé de renforcer ses interventions en s’engageant dans un programme d’interventions pour un montant de 60 Mds USD, sous forme de swaps et de lignes de crédit d’ici la fin de l’année. Cette annonce a provoqué une appréciation du real brésilien dans les semaines qui ont suivi, nous pensons cependant que cette hausse ne durera pas. Le déficit du compte courant augmente, malgré la croissance décevante observée ces dernières années, et a atteint 3,4% du PIB d’après les données les plus récentes. La confiance est plutôt basse actuellement, les économistes locaux et internationaux considérant que le potentiel de croissance est limité, entre 2% et 2,5%. Les anticipations d’inflation ne sont pas ancrées : le marché considère que les politiques macro-économiques actuelles créent des distorsions et ne sont pas suffisamment centrées sur la stabilité des prix. Tous ces facteurs, combinés à un environnement extérieur de moins en moins favorable pour le Brésil, devraient ramener très rapidement le real brésilien sur une trajectoire baissière. Nous tablons sur un USD/BRL à 2,35 fin 2013 et à 2,5 fin 2014.

Des réformes sérieuses sont nécessaires pour que le Brésil connaisse une croissance plus forte que celle de ces dernières années, qui a été décevante. Le pays a notamment besoin de réformer la fiscalité et le marché du travail, d’ouvrir l’économie au commerce extérieur et de redéfinir le rôle de l’État dans l’économie. L’impopularité à court terme de telles mesures devrait cependant pousser le gouvernement à les repousser après les élections de 2014.

Vladimir VALE [email protected]

Brésil : l’inflation pose toujours problème

Brésil : le déficit courant se creuse, pour l’instant

0%

2%

4%

6%

8%

10%

janv.-07 juil.-08 janv.-10 juil.-11 janv.-13

Inflation IPCAPrix fixés par le marchéprix contrôlés

% a/a

Source : IBGE, Crédit Agricole Brésil

1,5

2,0

2,5

3,0

3,5

janv.-12 mai-12 sept.-12 janv.-13 mai-13

Déficit courant IDE

% PIB sur 12m

Source : BCB

Pays émergents

N°142 – 4e trimestre 2013 24

Russie : en pleine récession

L’économie s’est contractée deux trimestres consécutifs, en raison notamment d’une évolution décevante de l’investissement. L’inflation devrait se modérer dans les mois qui viennent et la Banque centrale (BCR) devra faire preuve de davantage d’audace pour soutenir la reprise. Nous tablons sur une baisse de 50 pdb des taux directeurs avant la fin de l’année.

La Russie est le seul pays émergent majeur à être tombé en récession en 2013, avec une croissance séquentielle (t/t) négative aux premier et deuxième trimestres. En glissement annuel, la croissance n’a progressé que de 1,2% a/a au deuxième trimestre. La croissance a constamment ralenti depuis fin 2011, époque à laquelle elle dépassait les 5%. Le détail de la croissance du deuxième trimestre n’est pas encore disponible, mais les données mensuelles suggèrent que la décomposition de la croissance selon ses différentes contributions n’a pas beaucoup évolué par rapport au premier trimestre :

La contribution de l’investissement a complètement disparu : elle est passée d’environ 3% fin 2011-début 2012 à presque 0% ces derniers trimestres.

La contribution du commerce extérieur est restée légèrement négative, le surplus du compte courant continuant à décliner.

La consommation privée reste le seul moteur de la croissance. Elle a ralenti au cours des derniers trimestres, mais continue d’apporter une contribution importante à la croissance (à hauteur de 3% environ, contre 4% fin 2011-début 2012).

Et maintenant ? Sans un soutien plus efficace de la politique économique, la demande domestique pourrait ne pas se redresser d’elle-même. L’investissement, qui était un des grands espoirs pour l’année 2013, est devenu la principale déception. La mise en place de projets d’investissement financés par l’État a été retardée. Les initiatives publiques n’ont donc pas suscité une dynamique d’investissement de nature à provoquer un redémarrage de l’investissement privé aidé par la baisse des taux à long terme. Nous pensons qu’une partie de ces projets finira par se concrétiser, ce qui contribuera à une croissance plus forte au second semestre qu’au premier. La hausse des taux à long terme depuis le début de l’année ne facilitera, toutefois, pas la reprise de l’investissement.

La consommation privée, soutenue jusqu’à présent par le marché du travail (à 5,3% en juillet, le taux de chômage se maintient proche de son plus bas historique), reste relativement robuste. Il pourrait, cependant, devenir de plus en plus difficile pour la consommation privée d’être la seule à contribuer à la croissance. Le marché du travail pourrait envoyer des signaux plus mitigés dans les mois qui viennent et l’emploi a déjà commencé à reculer récemment. De plus, le ralentissement économique récent devrait provoquer une hausse du taux de chômage.

Compte tenu de ces incertitudes, la BCR pourrait commencer à faire preuve de davantage d’audace pour soutenir l’économie dans les mois qui viennent. Début septembre, elle a annoncé des changements significatifs dans la manière de mener sa politique monétaire visant à la simplifier et à évoluer vers un couloir de taux (actuellement 5,5%, +/-1%). Elle n’a cependant pas encore opté pour un assouplissement monétaire à proprement parler.

L’inflation, qui reste au-dessus de l’objectif de la BCR, a été une des principales raisons empêchant une baisse des taux directeurs. Nous pensons, toutefois, qu‘elle passera sous la barre des 6% dans les mois qui viennent et que la Banque centrale baissera ses taux directeurs : nous attendons une baisse de 50 pdb avant la fin de l’année.

Sébastien BARBE [email protected]

Russie : ralentissement significatif

Russie : inflation

-30%

-20%

-10%

0%

10%

20%

30%

03 05 07 09 11 13

a/a

Prod. manuf.

Investissement (réel)

Source : Crédit Agricole CIB

0%

5%

10%

15%

20%

03 05 07 09 11 13

a/a

Indice des prix

Source : Crédit Agricole CIB

Pays émergents

N°142 – 4e trimestre 2013 25

Inde : par ici la descente !

L’activité économique n’en finit pas de s’étioler, encore au deuxième trimestre. De plus, la chute des marchés indiens durant l’été, en particulier de la roupie, fragilisés par la dégradation des fondamentaux macro-économiques et une politique économique peu convaincante, douchent à présent les espoirs de reprise à court terme. La descente risque au contraire de se poursuivre. Reste à savoir jusqu’où ?

La croissance a continué de ralentir au deuxième trimestre (et premier de l’année fiscale indienne). Elle s’est établie à 4,4% a/a. C’est un plus bas depuis les trois premiers mois de 2009. La performance est d’autant moins satisfaisante, qu’elle repose en large partie sur la consommation publique (qui s’est nettement accélérée). Au contraire, la consommation privée a marqué le pas, et l’investissement s’est contracté.

Un point bas ? C’est ce qui était plus ou moins anticipé il y a trois mois. Le redressement de l’économie indienne au trimestre suivant paraissait alors mal engagé, mais susceptible de se dessiner ensuite, aidé par un effet de base favorable et la baisse des taux d’intérêt de 75 pdb au cours de la première moitié de 2013. C’est aussi ce que les précipitations durant la mousson d’été, plutôt favorables aux récoltes, et les signes d’embellie aux États-Unis et dans la zone euro, les deux principaux marchés d’exportation de l’Inde, pourraient laisser escompter.

(Sauf que) le déficit courant s’est creusé de façon assez nette ces deux dernières années et devrait rester lourd au cours des prochains mois ; il est attendu à 3,9% du PIB sur l’ensemble de l’année fiscale 2013/2014. (Sauf que) les finances publiques sont malades et le gouvernement oscille entre mesures pour réduire le déficit budgétaire, les subventions et les aides alimentaires (pour soutenir les plus pauvres et surtout son électorat) ; l’objectif de déficit budgétaire à 4,8% du PIB pour l’année fiscale en cours a, d’ailleurs, été réalisé à presque 63% sur les seuls quatre premiers mois de l’exercice et paraît d’autant plus difficile à atteindre que le Parlement a adopté début septembre un programme visant à fournir des céréales à un prix très nettement inférieur à celui du marché à plus de 800 millions de personnes. (Sauf que) la relance des réformes annoncée en septembre 2012 n’y a pas changé grand-chose. Peu de mesures concrètes depuis ou suffisamment convaincantes, et le scrutin législatif de mai 2014 laisse craindre que la politique économique de Dehli continue de décevoir d’ici là et après ; à l’instar de la loi sur l’acquisition de terres adoptée fin août qui protège mieux les paysans, mais risque, en revanche, d’allonger la durée du processus d’achat, d’alourdir le coût du foncier et in fine d’entraver, plutôt que de faciliter tout projet d’investissement industriel.

Le cocktail est dangereux, notamment au contact d’un changement d’anticipations sur les places financières mondiales, comme c’est actuellement le cas avec le raffermissement de l’économie américaine et le resserrement consécutivement attendu de la politique monétaire de la Fed. Les marchés indiens ont chuté cet été, la roupie en particulier, qui a été l’une des devises émergentes les plus chahutées.

Ces turbulences financières ne sont guère propices à la reprise de l’activité économique. Elles pèsent sur la confiance des ménages et des entreprises et elles ne favorisent pas la détente plus avant la politique monétaire (au contraire, la dépréciation de la roupie génère de l’inflation importée et la Banque centrale a relevé son taux d’intérêt directeur de 25 pdb en septembre, prenant les observateurs par surprise). Elles exposent, en outre, les agents économiques endettés en devises (principalement les entreprises) à un double risque de change et de liquidité (et ceux-là de rencontrer éventuellement des difficultés pour honorer leurs engagements vis-à-vis de l’extérieur). Bref, le recul de la croissance risque de se poursuivre au cours des prochains mois.

Jusqu’où ? Il est encore compliqué de le dire. Les marchés indiens ne sont pas stabilisés ; même s’ils se sont quelque peu raffermis ces derniers jours. Le Crédit Agricole anticipe actuellement une croissance de 4,2% pour l’année fiscale 2013/2014, mais le risque qu’elle ralentisse plus nettement est réel.

Sylvain LACLIAS [email protected]

Inde : production industrielle

Inde : solde courant et investissements directs étrangers

-20

-10

0

10

20

30

40

-10

-5

0

5

10

15

20

sept.-08 sept.-09 sept.-10 sept.-11 sept.-12 sept.-13

cumul 12m, a/a,

%

vol, a/a, %

production industrielleventes motos (éch. dr.)ventes autos (éch. dr.)Source : CSO

0

1

2

3

4

5-5

-4

-3

-2

-1

0

T3 07 T3 08 T3 09 T3 10 T3 11 T3 12

% PIB% PIB

Solde courant IDESource : RBI, MCI

Pays émergents

N°142 – 4e trimestre 2013 26

Chine : rebond temporaire

L’objectif de croissance de 2013 sera atteint. Tous les signes suggèrent une ré-accélération de la croissance au second semestre. L’endettement menace la croissance de long terme. À long terme, l’économie doit ralentir pour éviter une dangereuse bulle de crédit.

Tous les signes suggèrent une ré-accélération de la croissance. La production industrielle accélère et les fortes révisions à la hausse des données m/m du premier semestre indiquent que les performances a/a devraient être meilleures que prévu pour le reste de l’année 2013. Les exportations, soutenues par la légère baisse du taux de change effectif réel du yuan, accélèrent. Le climat des affaires s’améliore dans le secteur manufacturier et dans les services, suggérant une poursuite du renforcement de l’activité. Le crédit domestique a rebondi après un ralentissement temporaire provoqué par le manque de liquidité en juin et la liquidité du marché interbancaire s’est améliorée. Les mesures de relance mises en œuvre depuis juillet ont donc suffisamment soutenu l’économie. Nous prévoyons une hausse de la croissance à 7,7% a/a au troisième trimestre et à 7,9% a/a au quatrième trimestre et nous maintenons notre prévision de croissance à 7,7% pour l’ensemble de l’année, légèrement au-dessus de l’objectif de 7,5%.

Cette réussite a cependant un coût élevé. La dette totale de la Chine (ménages, entreprises et gouvernement) a bondi de 40 000 Mds de yuans (5 400 Mds USD ou 149% du PIB) il y a cinq ans à 107 000 Mds CNY (17 100 Mds USD ou 205% du PIB) l’année dernière. Pour la seule année 2012, la dette a augmenté de 16 000 Mds CNY (2 700 Mds USD ou 14% du PIB). Nous estimons que la dette a atteint 118 000 Mds CNY (19 300 Mds USD ou 216% du PIB) en août 2013. Nous trouvons ce niveau inquiétant en lui-même, mais ce qui est peut-être plus alarmant encore, c’est le fait que la dette ait progressé de 12 000 Mds CNY (2 200 Mds USD ou 11% du PIB) en seulement huit mois – un rythme encore plus rapide qu’en 2012. Si le rythme actuel se maintient, la dette totale de la Chine dépassera 300% du PIB d’ici 2018, ce qui pourrait facilement conduire à une crise.

Le modèle de croissance, basé sur la dette, doit évoluer. Abaisser la dépendance au crédit sera difficile, compte tenu de la hausse de l’intensité de crédit de la croissance : la quantité de financement nécessaire pour atteindre le même niveau de croissance augmente. Ainsi, en 2012, chaque point de pourcentage de PIB de financement ne générait que 0,25 point de croissance, contre 0,35 en 2011 et 0,65 cinq ans plus tôt. Cela signifie que l’économie ralentira, même si le crédit continue de progresser au rythme actuel et qu’elle ralentira fortement si le taux d’endettement se stabilise.

Cela signifie que la Chine doit accepter un rythme d’expansion plus modéré, faute de quoi le pays pourrait connaître une crise de la dette dans les quelques années qui viennent, à moins de transformer son modèle de croissance pour que celle-ci soit tirée par la consommation des ménages, elle-même financée par les revenus et l’épargne. Une telle transformation prendra du temps et d’ici là nous nous attendons à ce que le gouvernement abaisse progressivement son objectif de croissance, à 7,0% en 2014 et, peut-être, à 6,5% en 2015. Ceci devrait être accepté par la société chinoise, les créations d’emplois dépassant largement l’objectif de 9 millions par an jugé nécessaire pour maintenir le taux de chômage bas et stable (12,7 M d’emplois ont ainsi été créés en 2012).

La crise de liquidité du mois de juin, que la Banque centrale a laissée survenir pour montrer aux banques qu’il est dangereux de trop faire gonfler son bilan, indique que Pékin est résolu à limiter le crédit. Les dirigeants actuels auraient probablement accepté un ralentissement plus important de la croissance cette année, s’ils n’étaient pas engagés par l’objectif fixé par le gouvernement précédent. L’économie pourra, toutefois, ralentir vers un rythme plus soutenable à partir de l’année prochaine. Nous avons révisé notre objectif de croissance de 7,8% à 7,2% pour 2014 et tablons sur des chiffres encore plus bas dans les années suivantes.

Dariusz KOWALCZYK [email protected]

Chine : quantité de crédit et évolution de la croissance

Chine : dette

* Estimation : données officielles x 15 ** Dont lettres de change, « trust loans » (emprunts repackagés et

vendus aux investisseurs particuliers) et « entrusted loans »

(emprunts sans échéance)

0,0

0,2

0,4

0,6

0,8

0

10

20

30

40

50

02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12

% PIB%

Crois. réelle/Financt social (éch. dr.)

Financement social/PIB nominal

Croissance réelle

Source : CEIC, CA CIB

114%

18%

38%

15%

36%

0%

50%

100%

150%

200%

07 08 09 10 11 12

% PIB

entreprises** Institutions fin.

Ménages Gouvernement

Collectivités locales*

206%

Source : CEIC, CA CIB.

Pays émergents

N°142 – 4e trimestre 2013 27

Europe centrale : reprise graduelle

Les perspectives macro-économiques des quatre principaux pays d’Europe centrale (CE4) sont assez favorables ; la demande extérieure, le rebond progressif de la consommation et les politiques monétaires accommodantes soutenant la croissance.

Le ralentissement a pris fin au deuxième trimestre dans les pays du CE4 (République tchèque exceptée). L’activité économique augmentera progressivement dans les trimestres à venir. En 2013, nous attendons une croissance de 1,1% en Pologne, de 0,5% en Hongrie, de 2,0% en Roumanie et une contraction de 1,0% en République tchèque.

Le rebond des exportations, lié à la reprise économique en zone euro, restera la principale source de croissance des pays du CE4. Les balances commerciales des pays du CE4 profiteront également de la réorientation géographique régulière des exportations – la dépendance vis-à-vis de la demande de la zone euro diminue, tandis que le commerce international (à l’importation, comme à l’exportation) au sein du CE4 et avec la Russie ou l’Ukraine gagne de l’importance.

La consommation va progresser grâce à la hausse modérée des salaires et à des conditions de crédit favorables. La demande domestique restera faible, toutefois, en raison de la faiblesse de l’investissement. De plus, l’attitude des Banques centrales devrait constituer un facteur de soutien supplémentaire aux économies. Les taux sont à des niveaux historiquement bas en Pologne ; on attend de nouvelles baisses de taux en Hongrie ; la baisse des pressions inflationnistes ouvre la possibilité d’un assouplissement monétaire en Roumanie et les taux seront maintenus à un niveau extrêmement bas en République tchèque, où des interventions sur le marché des changes destinées à affaiblir la couronne tchèque semblent moins probables.

Jakub BOROWSKI

[email protected]

Turquie : de la crédibilité à la liquidité...

Ce n’est pas seulement le volume des besoins de financement à court terme qui fragilise la monnaie et les marchés turcs, c’est aussi la crédibilité monétaire et surtout le doute sur les évolutions politiques. Tout cela heurte les anticipations de moyen terme.

La Turquie est en première ligne des pays dépendants des liquidités internationales (une dette à court terme de 111 Mds USD, contre 54,9 Mds en 2008, et un déficit courant de 55 Mds). Mais le capital-confiance était fort. Or, c’est la variable qui bascule depuis trois mois.

Crise de crédibilité politique, puisque les manifestations se poursuivent, et que les Kurdes ont appelé les leurs (15 millions de personnes) à s’y joindre. Clairement, Erdogan n’a plus la main (on rentre en année électorale), mais l’alternance est à construire.

Crise de crédibilité monétaire, car les interventions de la Banque centrale n’ont pas restauré la confiance, d’autant que les outils de politique monétaire sont trop complexes. De plus, cette stratégie d’intervention transforme le risque de change en risque de liquidité, d’autant que les réserves, affichées à cinq mois d’importation et 93 Mds USD, sont potentiellement plus faibles que cela – 35 Mds appartiennent aux banques. Sur cette base, les ratios de liquidité sont alertants.

Au final, cette situation ne correspond plus au statut d’investment grade (Moody’s et Fitch ont aussi un problème de crédibilité !). Heureusement, le risque ne se concentre pas sur le souverain et le secteur bancaire semble solide (un bon niveau de capitalisation et peu de créances douteuses), ce qui limite le risque systémique. Mais attention à la liquidité du secteur privé… De plus, la Turquie risque de payer le prix de cette crise sur sa croissance à moyen terme.

Tania SOLLOGOUB

[email protected]

CE4 : le ralentissement prend fin

Turquie : prime de risque et cours de la livre

-10

-5

0

5

10

2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012

PologneRép. tchèqueHongrieRoumanie

% a/a

Source : WDI, Crédit Agricole Bank Polska

1,3

1,4

1,5

1,6

1,7

1,8

1,9

2,00

100

200

300

400

500

août-10 mai-11 févr.-12 nov.-12 août-13

Indice EMBI Europe Emerg.Indice EMBI TurquieCours TRY/USD (éch. dr., inv.)

Source : Morgan Stanley, Reuters, Crédit Agricole SA

pts

Pays émergents

N°142 – 4e trimestre 2013 28

Corée du Sud : la reprise à nouveau sur les rails

La reprise, soutenue tant de l’intérieur que de l’extérieur, est à nouveau sur les rails.

La croissance économique, tirée par un rebond de l’investissement et le maintien des contributions significatives de la consommation et du commerce extérieur, a accéléré, de 1,5% a/a au premier trimestre à 2,3% a/a au deuxième trimestre. Les données récentes sur le commerce extérieur sont également encourageantes : la croissance des exportations se renforce grâce à la demande des marchés majeurs, tels que la Chine, l’ANASE et l’Amérique du Nord. Par ailleurs, le marché du travail reste tendu, avec un taux de chômage en baisse à 3,1% en août. Nous tablons sur une poursuite de l’amélioration graduelle de la croissance.

Le won a surperformé les devises de la région au cours des trois derniers mois, période pendant laquelle la plupart des devises de l’Asie du Sud-est se sont dépréciées. L’excédent commercial de la Corée constitue un soutien fondamental pour le won. La Banque centrale (BoK) a maintenu son principal taux directeur inchangé lors de sa réunion de septembre. Elle s’est montrée optimiste sur l’économie domestique et a déclaré que les perspectives d’exportations étaient favorables, compte tenu de la reprise aux États-Unis, et qu’elle mettrait ses perspectives à jour en octobre. Cela confirme que le cycle d’assouplissement est terminé et que le prochain mouvement de taux sera une hausse, qui pourrait intervenir au troisième trimestre 2014.

Le marché obligataire coréen a connu une sortie nette de capitaux de 2 000 Mds KRW en août, la première depuis janvier, sur fond de remboursements importants. Cette sortie de capitaux a, néanmoins, été en grande partie compensée par une entrée de capitaux de 1 500 Mds KRW vers le marché des actions en septembre. Nous attendons une remontée des flux obligataires, compte tenu de la demande de diversification des réserves du secteur public et de la demande du secteur privé, les marchés considérant que le marché obligataire coréen bascule actuellement du statut de marché émergent à celui de marché développé.

Frances CHEUNG [email protected]

Mexique : des réformes, pas de résultats

Un rebond de l'activité est attendu au cours des prochains mois, après un premier semestre décevant. La performance globale sur l'année restera cependant nettement en-deçà des attentes. Les réformes en cours devraient toutefois renforcer la confiance, et laissent espérer un rebond en 2014.

Avec un PIB en recul de 0,74% t/t au deuxième trimestre, après +0,03% au premier (chiffre révisé à la baisse : la première estimation était de 0,45%), la croissance mexicaine a été très décevante au premier semestre. La production manufacturière a décroché par rapport à celle des États-Unis, à laquelle elle est normalement très corrélée : +0,2% a/a au deuxième trimestre, contre +1,9% dans le pays voisin. La principale raison de l'atonie de l'économie mexicaine semble être la contraction des dépenses publiques : sur les sept premiers mois de l'année, celles-ci sont en recul de 3,2% en volume, par rapport à la même période de 2012 (avec entre autres un impact sévère sur un secteur du BTP déjà en difficulté). Mais ce repl i est lui-même étonnant : problèmes de prise en main de l'administration par le gouvernement ? Prudence fiscale dans la perspective d'une réforme fiscale à venir et à impact encore incertain ? Tout indique que le second semestre sera meilleur, avec une demande nord-américaine bien orientée (mais fragile), et une reprise de la dépense publique. Mais on n'échappera plus à une année médiocre, avec une croissance inférieure à 2%.

Pourtant, le gouvernement d'Enrique Peña Nieto persiste dans la mise en œuvre de réformes structurelles qui devraient relever le potentiel de croissance du Mexique. La première (et peut-être la plus importante à terme) a été celle du secteur éducatif : malgré une vive résistance de certains membres du syndicat des enseignants, le vote des lois d'application continue à progresser. Les projets de réformes énergétique et fiscale présentés ces dernières semaines sont également sans précédent. Le premier prévoit notamment un renforcement de l'autonomie financière de Pemex (dont un régime fiscal qui se rapprocherait du droit commun) et, pour attirer des investissements privés dans le secteur et relancer la production, la possibilité pour Pemex de partage des profits avec ses éventuels partenaires privés : il n'était sans doute pas politiquement possible d'aller au-delà, jusqu'à l'ouverture de la possibilité de concessions. Le projet de réforme fiscale est centré sur l'élargissement de la base fiscale ; il est toutefois un peu décevant, car peu ambitieux en matière de renforcement des capacités d'intervention de l'État.

Jean-Louis MARTIN [email protected]

Corée du Sud : rebond de la demande extérieure

Mexique : PIB et production manufacturière

-40

-20

0

20

40

60

08 09 10 11 12 13

a/a, %

Exportations

Production indus.

Source : Bloomberg, Crédit Agricole CIB

0

2

4

6

8

T1 11 T3 11 T1 12 T3 12 T1 13 T3 13

Mexique : PIBMexique : prod. manuf.Etats-Unis : PIBEtats-Unis : prod. manuf.

a/a, %

Source : INEGI, US Bureau of Census

Pays émergents

N°142 – 4e trimestre 2013 29

Maroc : l’activité sectorielle marque le pas

L’activité marque le pas au premier semestre 2013. Les exportations se contractent et le secteur du BTP est la première victime du ralentissement de la consommation. La révision à la hausse des prévisions de croissance européenne et l’augmentation des investissements européens laissent, toutefois, entrevoir un rebond de croissance en 2014.

Les données relatives aux performances économiques du Maroc au premier semestre 2013 déçoivent et illustrent l’impact de la récession en zone euro en 2012 et 2013. Les exportations se sont contractées de 1,7% sur le premier semestre a/a et la baisse de la consommation intérieure se fait ressentir à travers la forte chute de l’activité du BTP (-26,5% a/a). L’activité économique plus faible s’accompagne d’un risque de dérive budgétaire important, malgré l’entrée en vigueur de premières mesures visant à maîtriser les subventions à l’énergie. Le déficit budgétaire était en juin plus de 20% (a/a) supérieur à ce qu’il était en 2012. Le ralentissement de la croissance non agricole, la consommation intérieure fragilisée (elle progresse de 3% en juin, contre 3,8% un an plus tôt, malgré l’exceptionnelle saison agricole qui la soutient) et la hausse importante du déficit budgétaire et de la dette, fragilisent la note souveraine accordée par les agences de notation (investment grade). Un nouveau choc de croissance en Europe pourrait rendre inévitable des réformes fiscales douloureuses.

Fort heureusement, les prévisions de croissance en Europe en 2014 sont favorables, ce qui soutiendrait la croissance marocaine. Par ailleurs, les investissements productifs restent en progression depuis le début de l’année (+28% a/a sur le premier semestre 2013), témoignant de l’intérêt des entreprises européennes, particulièrement françaises, et augurant d’une réelle capacité de rebond avec un retour de croissance en Europe en 2014.

Égypte : légère détente financière

L’aide apportée par le Golfe et les nouvelles promesses de prêts ont fait réagir les indicateurs financiers. La Bourse du Caire est en hausse, les spreads sur CDS se détendent et la valeur de la livre a été renforcée. La poursuite de ce mouvement de détente pourrait désormais dépendre de l’efficacité de la dépense publique, alors que le gouvernement se préparerait à la mise en œuvre d’un plan de relance.

L’aide versée par les pays du Golfe – 5 milliards à ce jour – a permis à la Banque centrale de mettre aux enchères 1,3 milliard USD début septembre. Cet approvisionnement exceptionnel en USD est le bienvenu, alors que la Banque centrale le limitait à 120 millions USD/semaine depuis le début de l’année. De nouveaux dépôts auprès de la Banque centrale sont attendus à court terme. Grâce à ce soutien, la visibilité sur la stabilité de la monnaie égyptienne est rallongée de quelques mois, ce que saluent les marchés : le spread sur CDS souverain dix ans a baissé de 70 pdb depuis le 30 juin et la Bourse a gagné 10%. Cette éclaircie n’occulte pas les difficultés économiques et budgétaires du pays : dans un contexte politique fragile, le gouvernement ne réduit pas son déficit budgétaire et ne prévoit pas d’augmenter les taxes et impôts dans l’immédiat. Dans ce contexte, l’aide du FMI ne sera pas possible à court terme et l’Égypte restera dépendante de l’aide bilatérale, pour financer ses importations de pétrole notamment.

La nouvelle stratégie économique égyptienne au cours des prochains mois semble « jouer la croissance ». En maintenant fermement la livre sous la barre des 7 EGP/1 USD et en préparant un plan de relance équivalent à 1,5% du PIB, le pays épuisera relativement vite l’aide apportée par le Golfe, mais espère revigorer ainsi l’investissement privé, intérieur et étranger. Cette stratégie est rendue risquée par les troubles politiques, mais il convient de remarquer que seule la croissance économique a permis au pays de réduire sa dette depuis vingt ans, jamais la baisse des dépenses.

Riadh EL-HAFDHI [email protected]

Maroc : indices d’activité sectoriels

Égypte : une légère détente des taux égyptiens

-40% -20% 0% 20% 40%

Eq. électro. & électriques

Immobilier

BTP

Pharma.

Equip. industriels

Assurances

Telecom

Pétrole et gaz

Mines

Banques

Distributeurs

Agroalimentaire

Transports

Source : Ministère de l'économie, Maroc, CA S.A.

6,1

6,3

6,5

6,7

6,9

7,1

5

7

9

11

13

15

janv.-13 mars-13 mai-13 juil.-13 sept.-13

Taux bons du Trésor 90 jours

USD/EGP (éch. dr.)

Source : Banque centrale, Egypte

Prévisions

N°142 – 4e trimestre 2013 30

Taux d’intérêt

1-oct. déc.-13 mars-14 juin-14 sept.-14 déc.-14

Etats-Unis

Fed funds 0,25 0-0.25 0-0.25 0-0.25 0-0.25 0-0.25

3 mois 0,25 0,30 0,50 0,50 0,50 0,60

Taux 2 ans 0,33 0,80 1,20 1,50 1,65 1,85

Taux 10 ans 2,65 2,95 3,15 3,40 3,55 3,75

Japon

Call 0,07 0-0.10 0-0.10 0-0.10 0-0.10 0-0.10

3 mois 0,15 0,16 0,16 0,16 0,16 0,16

Taux 2 ans 0,11 0,10 0,10 0,10 0,10 0,10

Taux 10 ans 0,67 0,80 0,90 0,90 1,00 1,00

Zone euro

Repo 0,50 0,50 0,50 0,50 0,50 0,50

3 mois 0,16 0,25 0,25 0,30 0,35 0,40

Taux 2 ans (All.) 0,17 0,35 0,45 0,70 1,00 1,25

Taux 10 ans (All.) 1,80 2,10 2,30 2,55 2,70 2,80

Royaume-Uni

Taux de base 0,50 0,50 0,50 0,50 0,50 0,50

3 mois 0,52 0,55 0,55 0,55 0,60 0,60

Taux 2 ans 0,45 0,65 0,75 0,90 1,05 1,15

Taux 10 ans 2,74 2,95 3,05 3,20 3,30 3,35

Suède

Repo 1,00 1,00 1,00 1,00 1,00 1,00

Norvège

Deposit 1,50 1,50 1,50 1,50 1,50 1,50

Canada

Overnight Target 1,00 1,00 1,00 1,00 1,25 1,50

Australie

Cash Target 2,50 2,50 2,50 2,50 2,75 3,00

Nouvelle-Zélande

Official Cash Rate 2,50 2,50 2,75 3,00 3,00 3,25

Spread 10a c/ USD

Japon -198 -215 -225 -250 -255 -275

Zone euro -85 -85 -85 -85 -85 -95

Royaume-Uni 8 0 -10 -20 -25 -40

Spread 10a c/ EUR

Italie 276 230 210 190 170 150

Espagne 244 245 225 200 175 150

Royaume-Uni 94 85 75 65 60 55

Suède 69 -210 -230 -255 -270 -280

Norvège 102 -210 -230 -255 -270 -280

Suisse -78 -210 -230 -255 -270 -280

Prévisions

N°142 – 4e trimestre 2013 31

01-oct déc-13 mars-14 juin-14 sept-14 déc-14

Asie

Chine 1Y lending rate 6,00 6,00 6,25 6,25 6,50 6,50

Hong Kong Taux de base 0,50 0,50 0,50 0,50 0,50 0,50

Inde Taux Repo 7,50 7,25 7,25 7,25 7,25 7,25

Indonésie BI rate 7,25 7,25 7,25 7,00 6,50 6,00

Corée Call rate 2,50 2,50 2,50 2,50 2,75 3,00

Malaisie OPR 3,00 3,00 3,25 3,25 3,25 3,25

Philippines Taux Repo 3,50 3,50 3,75 3,75 3,75 3,75

Singapour 6M SOR 0,30 0,70 0,86 0,91 1,22 1,33

Taiwan Redisc 1,88 1,88 2,00 2,13 2,25 2,25

Thaïlande Repo 2,50 2,50 2,75 2,75 3,00 3,25

Vietnam Refinancing rate 7,00 7,00 7,00 7,00 7,00 7,00

Amérique latine

Argentine Deposit 3 mois 17,02 16,00 16,00 16,00 16,00 16,00

Brésil Overnight/Selic 9,00 9,75 9,75 9,75 9,75 9,75

Mexique Taux Overnight 3,75 3,75 3,75 3,75 4,00 4,25

Europe émergente

Rép. tchèque Repo 14 j. 0,05 0,05 0,05 0,25 0,25 0,25

Hongrie Repo 2 sem. 3,60 3,50 3,50 3,75 4,00 4,25

Pologne Repo 7 j. 2,50 2,50 2,75 3,25 3,50 3,75

Roumanie Repo 2 sem. 4,25 4,00 4,00 4,25 4,50 4,75

Russie Refinancing rate 4,50 4,00 4,00 4,00 4,25 4,25

Repo O/N 5,50 5,00 5,00 5,00 5,00 5,00

Turquie Repo 1 sem. 4,50 4,50 5,00 5,75 5,75 5,75

o/n borrow ing rate 3,50 3,50 3,50 3,50 3,50 3,50

o/n lending rate 7,75 7,75 8,50 9,00 9,00 9,00

Afrique & Moyen-Orient

Afrique du Sud Repo 5,00 5,00 5,00 5,00 5,00 5,25

EAU Repo 1,00 1,00 1,00 1,00 1,00 1,00

Arabie saoudite Repo 2,00 2,00 2,00 2,00 2,00 2,00

Prévisions

N°142 – 4e trimestre 2013 32

Taux de change

Taux de change USD 1-oct. déc.-13 mars-14 juin-14 sept.-14 déc.-14

Pays industrialisés

Euro EUR/USD 1,36 1,32 1,30 1,28 1,27 1,25

Japon USD/JPY 98 107 109 111 114 115

Royaume-Uni GBP/USD 1,62 1,57 1,57 1,54 1,55 1,54

Suisse USD/CHF 0,90 0,93 0,95 0,98 0,98 1,00

Canada USD/CAD 1,03 1,02 1,00 0,99 0,98 0,98

Australie AUD/USD 0,94 0,96 0,97 0,96 0,95 0,95

Nouvelle-Zélande NZD/USD 0,83 0,85 0,87 0,86 0,85 0,85

Asie

Chine USD/CNY 6,12 6,10 6,08 6,05 6,03 6,00

Hong Kong USD/HKD 7,75 7,77 7,77 7,77 7,76 7,76

Inde USD/INR 62,26 68,00 71,00 73,00 74,00 75,00

Indonésie USD/IDR 11 335 11 500 11 800 11 700 11 650 11 600

Malaisie USD/MYR 3,23 3,25 3,26 3,27 3,28 3,30

Philippines USD/PHP 43,30 43,00 42,70 42,40 42,20 42,00

Singapour USD/SGD 1,25 1,26 1,25 1,25 1,24 1,24

Corée du Sud USD/KRW 1 074 1 080 1 070 1 060 1 050 1 040

Taiwan USD/TWD 29,56 29,70 29,50 29,30 29,10 28,90

Thaïlande USD/THB 31,14 31,80 31,70 31,60 31,40 31,20

Vietnam USD/VND 21 115 21 500 21 500 21 500 21 900 21 900

Amérique latine

Argentine USD/ARS 5,79 5,70 5,80 5,90 6,00 6,10

Brésil USD/BRL 2,35 2,35 2,37 2,40 2,45 2,50

Mexique USD/MXN 13,07 13,00 12,90 12,80 12,70 12,60

Afrique & Moyen-Orient

Afrique du Sud USD/ZAR 9,98 10,35 10,60 10,75 10,80 10,80

TRY/ZAR 4,96 4,95 5,00 5,02 4,95 4,91

Europe - émergents

Pologne USD/PLN 3,11 3,20 3,18 3,16 3,19 3,20

Russie USD/RUB 32,27 32,52 33,04 33,30 32,99 32,81

Basket/RUB 37,45 37,20 37,50 37,50 37,00 36,50

Turquie USD/TRY 2,01 2,09 2,12 2,14 2,18 2,20

Parités croisées contre euro

Pays industrialisés

Japon EUR/JPY 133 141 142 142 145 144

Royaume-Uni EUR/GBP 0,84 0,84 0,83 0,83 0,82 0,81

Suisse EUR/CHF 1,22 1,23 1,24 1,25 1,25 1,25

Suède EUR/SEK 8,64 8,60 8,55 8,53 8,51 8,49

Norvège EUR/NOK 8,15 7,90 7,80 7,70 7,60 7,50

Europe centrale

République tchèque EUR/CZK 25,69 25,80 25,80 25,50 25,00 24,50

Hongrie EUR/HUF 297 295 295 290 287 286

Pologne EUR/PLN 4,22 4,22 4,13 4,05 4,05 4,00

Roumanie EUR/RON 4,45 4,40 4,40 4,35 4,35 4,35

Prévisions

N°142 – 4e trimestre 2013 33

Scénario économique du Groupe Crédit Agricole S.A.

2012 2013 2014 2012 2013 2014 2012 2013 2014

Etats-Unis 2,8 1,7 2,7 2,1 1,6 1,9 -2,7 -2,8 -2,8

Japon 1,9 2,0 2,0 -0,1 0,3 2,4 1,0 1,4 1,9

Zone euro -0,6 -0,3 1,0 2,5 1,5 1,4 1,3 2,3 2,3

Allemagne 0,9 0,6 1,6 2,1 1,7 1,7 6,9 6,2 5,8

France 0,0 0,1 0,8 2,2 1,2 1,6 -2,2 -2,0 -1,9

Italie -2,4 -1,9 0,5 3,3 1,4 1,3 -0,7 0,1 0,7

Espagne -1,6 -1,3 0,6 2,4 1,7 1,1 1,7 2,9 2,9

Portugal -3,2 -1,8 0,4 2,8 0,6 -0,2 -1,5 -0,1 -0,1

Autres pays développés

Royaume-Uni 0,2 1,4 2,0 2,8 2,5 2,3 -3,8 -2,9 -2,8

Norvège 3,1 2,5 2,7 0,7 1,5 2,0 14,2 13,5 13,0

Suède 0,8 1,5 2,5 0,9 1,0 1,8 7,0 6,5 6,3

Suisse 1,0 1,3 1,5 -0,7 0,0 1,2 13,5 12,0 11,0

Canada 1,7 1,6 2,3 1,5 1,1 1,8 -3,4 -3,0 -2,6

Australie 3,6 2,6 3,0 1,8 2,2 2,7 -3,7 -2,5 -2,5

Nouvelle-Zélande 2,3 2,9 3,0 1,1 0,9 1,5 -5,0 -5,3 -5,6

Asie 6,1 6,0 5,9 3,8 3,4 4,2 1,2 1,2 0,9

Chine 7,8 7,7 7,2 2,6 2,6 3,4 2,3 2,4 1,9

Hong Kong 1,4 3,5 3,8 4,7 4,6 4,5 3,3 4,5 4,9

Inde 5,0 4,2 5,0 7,3 5,3 6,6 -4,8 -3,9 -4,9

Indonésie 6,2 5,2 5,2 4,3 7,5 7,6 -2,8 -4,5 -3,8

Corée 2,0 2,8 3,9 2,2 1,7 3,0 2,3 2,6 2,7

Malaisie 5,6 4,8 5,2 1,7 1,6 1,7 6,1 4,8 4,0

Philippines 6,8 7,0 5,7 3,1 3,3 3,7 3,5 2,7 2,4

Singapour 1,3 2,3 4,4 4,6 4,0 4,3 19,0 16,0 19,5

Taiwan 1,3 3,0 2,7 1,9 1,5 1,7 10,7 9,0 9,5

Thaïlande 6,4 4,6 4,0 3,0 3,3 3,0 0,7 2,0 1,6

Vietnam 5,0 5,5 5,7 9,3 6,7 7,9 0,0 -0,1 -0,7

Amérique latine 2,4 2,8 2,8 5,6 6,3 6,5 -1,7 -2,1 -1,9

Argentine 3,5 4,0 3,0 12,0 14,0 14,0 -1,1 -0,8 -1,0

Brésil 1,0 2,4 1,8 5,2 6,2 6,5 -2,5 -3,2 -2,8

Mexique 3,9 3,0 4,1 3,8 3,4 3,5 -0,9 -1,0 -1,0

Europe - émergents 2,5 2,0 2,9 5,6 4,7 4,8 -0,1 -0,5 -1,1

République tchèque -1,2 -1,0 1,6 3,3 1,6 1,3 -2,5 -1,9 -2,4

Hongrie -1,7 0,5 1,4 5,7 2,1 3,1 1,6 2,3 2,5

Pologne 1,9 1,1 2,3 3,7 1,0 1,6 -3,5 -2,2 -2,4

Russie 3,9 2,0 3,0 5,4 5,5 6,0 4,2 3,0 2,0

Roumanie 0,7 2,0 2,2 3,3 4,6 3,3 -3,9 -2,7 -3,5

Turquie 2,2 3,8 4,1 8,9 7,3 6,4 -6,2 -6,9 -7,0

Afrique & Moyen-Orient 3,6 3,3 3,8 4,7 5,0 4,6 7,9 6,1 5,5

Algérie 2,7 3,5 3,7 8,9 4,0 4,0 8,9 6,0 3,5

Egypte 2,0 2,5 3,0 7,5 8,5 7,5 -3,2 -3,3 -1,5

Koweït 7,0 4,5 5,0 2,8 3,1 3,5 37,6 46,0 39,0

Liban 1,8 1,5 2,5 3,1 10,0 3,0 -12,0 -15,0 -12,0

Maroc 2,7 3,0 3,5 1,2 3,0 3,0 -10,2 -8,0 -6,0

Qatar 6,0 5,5 5,5 3,0 4,0 4,0 25,0 22,0 20,0

Arabie saoudite 5,1 4,5 4,5 2,9 4,0 3,5 23,0 16,5 15,0

Afrique du Sud 2,4 1,8 3,0 5,7 5,5 5,3 -6,2 -5,9 -5,3

Emirats arabes unis 4,4 4,0 4,5 0,7 1,5 2,5 17,0 12,5 9,8

Tunisie 3,6 3,1 3,5 6,5 5,5 4,5 -7,5 -9,5 -9,0

Total 3,0 2,8 3,3 3,1 2,7 3,1 0,1 0,2 0,1

Pays industrialisés 1,4 1,1 2,0 1,9 1,4 1,8 -0,8 -0,4 -0,3

Pays émergents 4,8 4,7 4,9 4,4 4,2 4,7 1,2 1,0 0,6

Notes :

(1) Royaume-Uni : HICP ; Inde : prix de gros ; Chine, index prix de détail ; Brésil : IPCA ; Afrique du Sud : CPI-X

(2) Inde : f in de l'année fiscale en mars.

PIB (a/a, %) Inflation (a/a, %)Balance courante

(en % du PIB)

Prévisions

N°142 – 4e trimestre 2013 34

Croissance PIB, % T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4

Etats-Unis (annuel) 3,7 1,2 2,8 0,1 1,1 2,5 1,8 2,7 2,6 2,9 3,1 2,8

Japon 1,2 -0,3 -0,9 0,3 1,0 0,9 0,6 0,8 1,3 -1,2 0,8 0,4

Eurozone -0,1 -0,3 -0,1 -0,5 -0,2 0,3 0,1 0,2 0,3 0,3 0,3 0,4

Allemagne 0,7 -0,1 0,2 -0,5 0,0 0,7 0,4 0,4 0,3 0,4 0,4 0,4

France 0,0 -0,3 0,2 -0,2 -0,1 0,5 0,0 0,1 0,2 0,2 0,3 0,3

Italie -1,0 -0,6 -0,3 -0,9 -0,6 -0,3 -0,2 -0,1 0,3 0,3 0,3 0,3

Espagne -0,4 -0,5 -0,4 -0,8 -0,4 -0,1 0,1 0,1 0,1 0,2 0,2 0,2

Royaume-Uni 0,0 -0,5 0,7 -0,2 0,3 0,7 1,0 0,0 0,5 0,5 0,5 0,5

Prix à la consommation, a/a % T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4

Etats-Unis 2,8 1,9 1,7 1,9 1,7 1,4 1,6 1,6 1,7 2,0 1,9 1,9

Japon 0,1 0,0 -0,2 -0,1 -0,3 0,0 0,8 0,8 0,8 2,9 2,9 2,8

Eurozone 2,7 2,5 2,5 2,3 1,9 1,4 1,4 1,4 1,2 1,4 1,5 1,5

Allemagne 2,4 2,1 2,1 2,0 1,8 1,5 1,8 1,7 1,5 1,8 1,8 1,8

France 2,6 2,3 2,3 1,7 1,2 0,9 1,3 1,5 1,5 1,6 1,7 1,6

Italie 3,6 3,6 3,4 2,6 2,1 1,3 1,1 1,2 1,0 1,0 1,5 1,5

Espagne 1,9 1,9 2,8 3,2 2,8 1,8 1,4 0,9 0,8 1,2 1,2 1,1

Royaume-Uni 3,5 2,7 2,4 2,7 2,8 2,7 2,6 2,1 2,0 2,3 2,6 2,3

Taux de chômage, % T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4

Etats-Unis 8,2 8,2 8,0 7,8 7,7 7,5 7,3 7,3 7,2 7,1 6,9 6,8

Japon 4,5 4,4 4,3 4,2 4,2 4,0 3,9 3,8 3,7 3,7 3,6 3,6

Eurozone 10,9 11,3 11,5 11,8 12,0 12,1 12,4 12,5 12,5 12,5 12,5 12,4

Allemagne 5,5 5,5 5,4 5,4 5,4 5,4 5,6 5,5 5,4 5,4 5,4 5,3

France 10,0 10,2 10,3 10,6 10,8 10,9 11,0 11,1 11,3 11,3 11,2 11,0

Italie 9,9 10,6 10,8 11,3 11,9 12,1 12,1 12,3 12,4 12,4 12,4 12,2

Espagne 26,4 26,4 27,5 27,5 27,5 27,5 27,6 27,7 27,5 27,3 27,1 26,9

Royaume-Uni 8,3 8,1 8,1 7,8 7,8 7,8 7,7 7,7 7,6 7,4 7,3 7,3

2012 2013 2014

2012 2013 2014

2012 2013 2014

Prévisions

N°142 – 4e trimestre 2013 35

Matières premières

Comptes publics

Achevé de rédiger le 1er

octobre 2013

Directeur de la publication : Isabelle JOB-BAZILLE Rédacteur en chef : Hervé GOULLETQUER

Réalisation & Secrétariat de rédaction : Fabienne PESTY

Contact : [email protected]

Crédit Agricole S.A. — Études Économiques Groupe 12, place des États-Unis — 92127 Montrouge Cedex

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Métaux précieux T4 Année T1 T2 T3 T4 Année

Or USD/oz 1 334 1 200 1 315 1 120 1 090 1 060 1 050 1 094

201401-oct

2013

2013

01-oct T4 T1 T2 T3 T4

Brent $/BBL 108 108 107 106 105 105

Prix fin de trimestre

2014

2012 2013 2014 2012 2013 2014

Etats-Unis -6,8 -3,9 -3,3 70,1 72,5 73,7

Japon -9,8 -9,2 -7,6 214,5 224,0 229,5

Zone euro -3,7 -3,1 -2,5 92,0 94,5 94,4

Allemagne 0,2 -0,1 0,0 81,9 80,3 77,6

France -4,8 -4,1 -3,6 90,2 93,4 95,1

Italie -3,0 -3,3 -2,6 127,0 131,2 131,2

Espagne -10,6 -6,9 -5,9 84,2 91,2 96,0

Pays-Bas -4,1 -4,2 -3,6 71,4 74,5 73,3

Belgique -3,9 -2,8 -2,4 99,6 100,7 100,4

Grèce -10,0 -4,1 -3,2 156,9 176,0 174,0

Irlande -7,6 -7,5 -4,5 117,6 122,5 121,0

Portugal -6,4 -5,7 -4,9 123,6 123,1 124,9

Royaume-Uni -6,3 -5,3 -6,1 90,0 92,4 94,0

Solde budgétaire Dette publique