conservation de la biodiversitÉ et dÉveloppement …
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République Algérienne Démocratique et Populaire Ministère de L’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique
Université Larbi Ben M’hidi Oum El Bouaghi Faculté des Sciences Exactes et des Sciences de la Nature et de la Vie
Département des Sciences de la Nature et de la Vie
Support pédagogique de cours
Matière:
CONSERVATION DE LA BIODIVERSITÉ ET DÉVELOPPEMENT
DURABLE
LICENCE : ÉCOLOGIE ET ENVIRONNEMENT
Dr Farah ADJEL LALOUANI
Année Universitaire 2019/2020
2
SOMMAIRE
1- 1- LES PRINCIPALES CAUSES D’EXTINCTION DES ESPÈCES 2- 4
Introduction 4
1.1- 1.1-Définitions 1.2- 4
1.2- Les mécanismes des extinctions 5
1.3- Les causes anthropiques des extinctions actuelles 6
1.4- Des réactions en chaîne 7
1.5- Evaluation du risque d’extinction des espèces menacées 7
2- FRAGMENTATION DES HABITATS 9
Introduction 9
2.1- Mécanisme affectant la biodiversité 10
2.2- Espèces sensibles à la fragmentation 11
2.3- Processus affectant les espèces 11
2.3.1- Les processus exogènes 11
2.3.2- Les processus endogènes 12
2.3.3- Interaction entre processus exogènes et endogènes, et prédisposition à l’extinction 12
2.4- Impact de la fragmentation sur les populations 12
2.5- Conséquences génétiques de la fragmentation des habitats 13
2.6- L’effet de lisière et ses conséquences 13
2.6.1- Modifications des conditions climatiques 13
2.6.2- Modifications biologiques 13
3. CONSEQUENCES DES INVASIONS DES ESPECÈS SUR LA BIODIVERSITÉ 15
Introduction et définitions 15
3.1- Types d'invasions biologiques 15
3.1.1- Les invasions biologiques volontaires 15
3.1.2- Les invasions biologiques involontaires 15
3.2- Processus d’invasion des espèces exotiques 16
3.3- Les différents stades d’une invasion biologique. 17
3.4- Exemples d’introduction d’espèces 17
4. CONSÉQUENCES DE LA SUR EXPLOITATION DES ESPÈCES SUR LA BIODIVERSITÉ 18
4.1- Types d'exploitations des espèces 18
4.2- Conséquences de la surexploitation des espèces sur la biodiversité 19
4.2.1- Réduction de la taille de la population 19
4.2.2- Changement dans la structure de la population (âge/sexe/taille) 19
3
4.2.3- Changement dans la distribution spatiale 19
4.2.4- Destruction d’espèces non-cibles 19
5. LA POLLUTION 20
5.1- Les pollutions organiques 20
5.1.1- Rejet des eaux usées 20
5.1.2- Hydrocarbures 20
5.1.3- Impacts écologiques 20
5.2- Les pollutions chimiques 21
5.2.1- Les détergents 21
5.2.2- Les pesticides 21
5.2.3- Les métaux lourds 22
6- DÉVELOPPEMENT DURABLE 23
6.1- Notion de développement durable 23
6. 1.1- Les composantes du développement durable 24
6.1.2- Les principes du développement durable 25
6.1.3- Instruments pour la réalisation des objectifs de durabilité 26
6.2- Conservation de la biodiversité 26
6.2.1- Conservation in situ 26
6.2.2- Conservation ex situ 27
6.3- Définition et caractères généraux des principaux types de zones protégées du monde 27
6.4- Lutte contre l’érosion de la biodiversité et la désertification 31
7. GESTION DES RESSOURCES GÉNÉTIQUES DES POPULATIONS SAUVAGES ET
DOMESTIQUÉES
34
7.1- Ressources génétiques 34
7.2- Gestion et diversité des ressources génétiques 35
8. ASPECTS SOCIO-ÉCONOMIQUES DE LA CONSERVATION ET DE LA GESTION DES
RESSOURCES BIOLOGIQUES
38
ANNEXE I : Catégories de l’UICN pour les listes rouges (UICN, 2001) 40
ANNEXE II : DÉCLARATION DE RIO SUR L’ENVIRONNEMENT ET LE DÉVELOPPEMENT 41
4
CONSERVATION DE LA BIODIVERSITÉ ET DÉVELOPPEMENT DURABLE
À ce jour, les scientifiques ont décrit et nommé officiellement environ 1,8 million d’espèces d’organismes. Certains
biologistes croient qu’il existe actuellement environ 10 millions d’espèces de plus ; d’autres encore estiment ce nombre
à 100 millions. Les plus grandes concentrations d’espèces se situent dans les tropiques. Malheureusement, on déboise
les forêts tropicales humides à une vitesse alarmante pour faire place à la population humaine en pleine croissance et
la faire vivre.
Dans toute la biosphère, les activités humaines modifient les structures trophiques, le flux d’énergie, les cycles
biogéochimiques et les perturbations naturelles. Or, comme les autres espèces, nous dépendons des processus qui se
déroulent dans les écosystèmes. Nous avons modifié près de 50 % des terres émergées de la planète et nous utilisons
plus de la moitié de l’eau douce de surface accessible. Dans les océans, les stocks des principales ressources halieutiques
sont en train de s’épuiser à cause de la surpêche. Selon certaines estimations, nous infligeons plus de dommages à la
biosphère et entraînons plus d’espèces vers la disparition que ne l’a fait l’énorme astéroïde responsable, semble-t-il, des
extinctions de masse vers la fin de la période du Crétacé, il y a 65,5 millions.
La biologie est la science de la vie. Par conséquent, il est tout à fait approprié d’aborder une discipline qui vise à
préserver la vie. La biologie de la conservation intègre l’écologie, la physiologie, la biologie moléculaire, la génétique et
la biologie de l’évolution afin de préserver la diversité biologique à tous les niveaux.
De plus, les mesures prises pour maintenir les processus des écosystèmes et freiner la perte de biodiversité
établissent un lien entre les sciences de la vie et les sciences sociales, économiques et humaines.
1- LES PRINCIPALES CAUSES D’EXTINCTION DES ESPÈCES
Introduction
Les cinq cents dernières années ont été marquées par un taux d’extinction des espèces dont certains estiment qu’il
est sans précédent au cours de l’histoire du Globe. Lawton et May (1995) prétendent que ce taux est aujourd’hui de 100
à 1 000 fois plus élevé qu’au cours de toute l’histoire de la planète. Plusieurs des espèces menacées d’extinction le sont
en raison de la perte de leur habitat d’origine, des changements climatiques et des activités humaines. Les estimations
les plus alarmantes du nombre d’espèces qui pourraient disparaître au cours du siècle en cours vont jusqu’à prédire une
disparition de plus de 50% des espèces actuelles. Cette crise a conduit à mettre la conservation de la biodiversité sur la
liste des priorités des rencontres nationales et internationales et des politiques de l’environnement.
1.1- Définitions
L’extinction des espèces est un processus naturel qui survient au travers d’une combinaison de caractéristiques de
la population et de facteurs environnementaux conduisant à la disparition des espèces vivantes au cours des périodes
géologiques.
Ce sont de grandes tailles corporelles chez les animaux, des domaines géographiques restreints ou petits, une
spécificité de l’habitat, un manque de variabilité génétique ou une incapacité à passer à une source alimentaire de
remplacement.
L’extinction de masse (mass extinction) : les phénomènes d’extinction font partie des processus naturels qui ont
marqué l’évolution de la biosphère. Depuis les origines de la vie dans l’écosphère, bien que l’évolution ait été marquée
par un foisonnement de la biodiversité, elle ne s’est pas effectuée selon un processus continu. En effet, les espèces
vivantes finissent par disparaître après avoir existé pendant quelques millions d’années, à l’exception de quelques
fossiles vivants.
Toutefois la différenciation de nouveaux taxa n’est pas un processus constant. On a mis en évidence au plan
paléoécologique des phases de foisonnement évolutif qui ont alterné avec des périodes d’extinction. Depuis la période
d’accroissement de la biodiversité de la fin du Protérozoïque, à l’Édiacarien, voici 650 millions d’années, on a pu
dénombrer un nombre total de 17 périodes d’extinction dont certaines furent marquées par un holocauste d’espèces
5
vivantes. Parmi elles prirent lieu cinq épisodes d’extinction de masse, qui survinrent à la fin de l’Ordovicien (–438 millions
d’années), du Dévonien (–370 millions d’années), du Permien (–250 millions d’années), à la jonction Trias-Jurassique
(–215 millions d’années) et à la fin du Mésozoïque (jonction Tertiaire-Crétacé) voici 65 millions d’années (fig. 1).
La dernière période d’extinction, l’actuelle, commencée au cours du Quaternaire, au Pleistocène, avec les grandes
glaciations, s’est considérablement accélérée depuis la fin du Würm, voici 11 000 ans. Elle a conduit à la disparition de
la majorité de la grande faune de Mammifères terrestres, à l’exception de celle d’Afrique, qui paraît maintenant à son
tour bien engagée du seul fait de l’homme (fig.2).
Quelle que soit l’ampleur de ces extinctions, elles se sont néanmoins effectuées à un rythme d’une lenteur dérisoire
par rapport à celle qui caractérise l’action de l’homme moderne dont on a pu dire sans aucune exagération qu’elle
représente la 6e période d’extinction de masse depuis les débuts même des temps géologiques.
1.2- Les mécanismes des extinctions : dans tout écosystème, certaines espèces sont des plus banales, d’autres rares et
donc, a priori plus vulnérables à un risque d’extinction que celles dont les populations sont abondantes. La valeur du
Figure 1 : Les cinq épisodes d’extinctions majeurs
O = Ordovicien, D = Dévonien, P = Permien,
T = Trias, K-T = jonction Crétacé-Tertiaire
6
potentiel biotique d’une espèce constitue le critère majeur de son aptitude à la survie, car elle mesure sa capacité de
reproduction. Une population a d’autant plus de chance de se perpétuer que sa fécondité intrinsèque est plus grande.
À cela s’ajoute un autre paramètre de nature génétique, lui négatif, la consanguinité, qui rend aléatoire la survie de
petites populations. Elle se manifeste en général par une diminution de fécondité, voire par une stérilité des individus
et par un accroissement de la fréquence des tares congénitales, en particulier des déficiences physiologiques, dont
résulte une augmentation immédiate et importante de la mortalité des individus qui en sont atteints. En outre,
l’accroissement de la vulnérabilité au moindre accident écologique de telles populations isolées, de plus souvent peu
nombreuses, constitue un autre facteur qui compromet leurs possibilités de survie.
Selon les caractéristiques intrinsèques de chaque espèce, il est possible de définir un effectif théorique minimal
nécessaire pour assurer la pérennité de leurs populations, dont est issu le concept de population minimale viable (=
PMV). Toutes choses égales par ailleurs, la probabilité qu’a une population de perdurer est d’autant plus forte que son
effectif et son potentiel biotique sont plus importants.
La PMV pour les Vertébrés homéotherme a par exemple été calculée à partir de considérations purement génétiques,
liées au déclin résultant de la consanguinité. Elle fluctue de 50 à 500 individus selon l’espèce pour que la probabilité de
survie de la population concernée soit supérieure au siècle. Par ailleurs, on considère en première approximation que la
population survivante d’un Vertébré homéotherme doit être d’un millier d’individus pour que l’espèce présente 95 %
de chance de ne pas disparaître au cours d’un millénaire.
La spirale d’extinction : les conséquences de la petite taille des populations sur l’évolution
Une petite population est sujette à la consanguinité et à la dérive génétique. Celles-ci l’entraînent dans une spirale
d’extinction au cours de laquelle sa taille se réduit progressivement, jusqu’à ce qu’il n’existe plus aucun individu (fig.3).
Figure 3 : Le processus menant à une spirale d’extinction
1.3- Les causes anthropiques des extinctions actuelles : l’action de l’Homme sur les espèces vivantes s’exerce selon
plusieurs modalités directes et indirectes au plan de l’écologie des populations.
▪ La fragmentation des habitats représente l’une des caractéristiques majeures de son action sur les écosystèmes
naturels. Elle conduit à diminuer la taille des subpopulations par suite de la diminution des surfaces de milieu favorable
à l’espèce considérée et par suite de l’éloignement croissant des habitats qu’elle colonise. D’une part, cela réduit leurs
possibilités d’émigration, ce qui a pour conséquence d’empêcher la colonisation d’autres milieux favorables. De l’autre,
cette fragmentation rend aléatoire la survie des subpopulations dont les effectifs sont réduits en proportion directe de
la diminution de surface des biotopes résiduels qui en résulte. Ce déclin des effectifs affaiblit génétiquement les
subpopulations à cause de la consanguinité. Par ailleurs, l’accroissement de la longueur des lisières par rapport à la
surface d’habitat résiduel dû à cette fragmentation conduit à favoriser l’installation d’espèces concurrentes ou de
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prédateurs qui n’auraient pu faire intrusion dans les habitats non fragmentés. Le cumul de ces divers obstacles à la survie
des petites subpopulations consécutif à cette fragmentation rend problématique la pérennité d’une métapopulation
prise dans son ensemble.
▪ L’augmentation de mortalité dans un grand nombre d’espèces constituant les communautés terrestres et marines.
Cette dernière résulte de prélèvements excessifs des populations végétales et animales sauvages par la collecte et (ou)
l’exploitation forestière pour les premières et de la chasse et de la pêche excessives pour les secondes. Le déclin de ces
espèces sera inéluctable à partir du moment où le taux de mortalité excède à cause des prélèvements celui de fertilité
des populations exploitées. L’Homme augmente aussi la vulnérabilité d’un grand nombre d’espèces et menace ces
dernières en compromettant la « santé » des divers écosystèmes auxquels elles sont inféodées.
▪ La pollution des divers milieux constitue l’une de ces causes indirectes majeures de mortalité dans les populations
contaminées. Par ailleurs, dans certains cas, la pollution environnementale due à l’Homme provoque une baisse de
fécondité donc une réduction de la natalité chez certaines espèces exposées. Cela s’est par exemple observé chez de
nombreuses populations d’Oiseaux, en particulier de Rapaces, exposées à la pollution de l’environnement par divers
pesticides.
▪ Les introductions d’espèces constituent une autre cause majeure d’extinction due à l’action de l’Homme. En effet, les
espèces introduites sont souvent de puissants compétiteurs des espèces autochtones d’écologie analogue. Cela fut par
exemple le cas de l’introduction du lapin en Australie dont la fécondité intrinsèque est supérieure à celle des espèces
de marsupiaux dont la niche écologique est voisine, les bandicoots (ou Billys), appartenant à la famille des Peramelidae.
Le lapin y a de la sorte relégué ces espèces concurrentes dans quelques zones reculées correspondant aux habitats les
plus marginaux de leur domaine vital, première étape de l’extinction de plusieurs de ces marsupiaux, comme Perameles
eremiana, ou le bandicoot cochon (Chaeropus caudatus), ayant même disparu. Il en a été de même pour l’introduction
du chien Dingo, importé par les aborigènes australiens, qui contribua à l’extinction du loup marsupial, le Thylacine. Ce
dernier, qui occupait une niche écologique identique à celle du Dingo, avait l’infériorité dans la compétition
interspécifique avec ce Mammifère supérieur.
1.4- Des réactions en chaîne
La raréfaction ou la disparition d'une espèce a des répercussions sur les autres espèces de la chaîne alimentaire et,
à plus long terme, sur l'ensemble des écosystèmes. En effet, tous les maillons des chaînes alimentaires sont liés les uns
aux autres. Toucher à un maillon, c'est toucher à un ou plusieurs autres, de façon directe ou indirecte.
Par exemple, au début du XXe siècle aux États-Unis, le loup, trop chassé, disparaît totalement du parc naturel de
Yellowstone (USA). En l'absence de ce prédateur, les élans (de grands cerfs), leurs principales proies, se sont multipliés
sans contrainte. Or, les élans se nourrissent de pousses d'arbres. Devenus trop nombreux, ils ont alors provoqué la
disparition de certaines espèces d'arbres, en les empêchant de pousser. Fautes de suffisamment d'arbres à ronger, les
castors se sont raréfiés, puis ont disparu du parc dans les années 1950. Sans les castors, certaines plantes aquatiques
qui poussaient sur les plans d'eau derrière leurs barrages ont disparu à leur tour. Or, ces plantes servaient de nourriture
aux ours sortant d'hibernation... La disparition d'une espèce peut ainsi entraîner la raréfaction ou la disparition d'espèces
avec laquelle elle n'a aucun lien direct.
Mais depuis la réintroduction des loups dans le parc de Yellowstone en 1995, la situation de cet écosystème est en
train de se rétablir.
1.5- Evaluation du risque d’extinction des espèces menacées : l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de
la Nature) a entrepris de publier depuis la fin des années 1960 des « Livres rouges » des espèces végétales et animales
menacées afin que toutes les parties prenantes concernant la conservation de la biodiversité puissent disposer
d’informations précises permettant d’orienter leurs actions prioritaires.
Ces livres classent les espèces en danger selon une échelle des risques établie en fonction du degré d’importance de
la menace d’extinction à laquelle elles sont exposées.
Cette estimation est basée sur des critères bien définis, comme la taille de la population, la disparition de son habitat
naturel et le nombre d’individus qui ont atteint la maturité (Annexe I).
8
La rareté en soi ne doit pas signifier qu’une espèce est menacée d’extinction. L’IUCN reconnaît quatre catégories de
risque d’extinction (Tab. 1, fig. 4).
Tableau 1 : Classification de l’IUCN du risque d’extinction
Catégorie de risque Description
1
2
3
4
Espèces rares : petites populations, habituellement à l’intérieur de limites géographiques restreintes ou
d’habitats localisés ou ayant des individus largement dispersés ; exposés au risque de devenir rares, mais
pas au risque de l’extinction.
Espèces vulnérables : menacées ou actuellement en diminution de nombre.
Espèces en danger : très faible chiffre de population ; en danger considérable d’extinction.
Espèces disparues : non trouvées dans leur territoire d’habitats d’autrefois ni dans d’autres susceptibles
d’être des habitats.
Figure 4 : Catégories et Critères de l’UICN pour la Liste Rouge. Version 3.1.
9
2- FRAGMENTATION DES HABITATS
Introduction
Elle constitue la principale cause d’extinction des espèces dans le monde. La fragmentation se manifeste lorsqu’un
écosystème de large étendue est transformé en de nombreux fragments, de taille réduite, isolés spatialement.
La perte et la fragmentation des habitats sont généralement deux phénomènes corrélés, qui peuvent intervenir en
même temps, augmentant de ce fait les effets délétères sur le milieu naturel.
Evolution de la surface couverte par des forêts de chênes au Wisconsin entre 1831 et 1950
Ces phénomènes sont liés à un grand nombre d’activités humaines : l’urbanisation et l’agriculture qui entraînent une
perte d’habitat importante mais aussi une dégradation à cause de la pollution qu’elles engendrent ou encore la
construction d’infrastructures qui induit une fragmentation des habitats (exemple des routes qui traversent les forêts, les
routes sont une barrière pour de nombreuses espèces). Mais à cela il faut rajouter la pêche, l’aquaculture, la sylviculture,
les aménagements touristiques et industriels, les extractions de matériaux (comme les carrières),… la liste des activités
occasionnant un impact est très longue.
La fragmentation est un phénomène hautement variable, ou interviennent :
• des phénomènes de perte de surface biologiquement utile,
• des phénomènes d’effet de bord et de lisière,
• des phénomènes d’isolement des populations locales.
10
2.1- Mécanisme affectant la biodiversité
La fragmentation des milieux naturels affecte la biodiversité selon 4 mécanismes :
- L’effet « mécanique » est la destruction de l’habitat par l’homme, qui se manifeste par exemple par la déforestation.
Un des effets les plus rapides et les plus évidents de la fragmentation est l’élimination des espèces présentes seulement
dans les parties du paysage détruites. Il peut engendrer également une perte immédiate des espèces endémiques à la
zone fragmentée. Ceci peut être expliqué par la disparition d’un certain nombre d’éléments, suite à la fragmentation, qui
était nécessaire à la survie de ces espèces.
- Une perturbation des processus de dispersion. Les espèces qui exigent une mosaïque d’habitats (présence de plusieurs
habitats différents) pour leur développement peuvent être menées vers l’extinction si une barrière physique sépare un
habitat des autres. De plus ces espèces peuvent être mises en danger quand la fragmentation provoque la séparation
d’une grande population en plusieurs petites populations qui ne sont plus reliées entre elles et dont les effectifs ne sont
plus assez importants pour avoir une population viable. Ces populations ne pourront pas survivre sur le long terme du fait
de leur faible effectif, et du fait de l’uniformité génétique que cela va induire qui les rendra plus sensible aux conditions
extérieures.
- Une diversité d’habitats réduite avec des populations restreintes. La diversité des habitats contribue à la diversité des
espèces. Dans certains cas, les espèces exigent la présence d’une diversité d’habitats pour vivre : un habitat lié à la
nidification, un autre à l’alimentation, un à la reproduction… Une réduction des potentialités d’habitats entraînera donc
la disparition de ces espèces.
Un autre facteur devant être considéré est la taille des animaux. Une espèce de grande taille nécessitant souvent un
espace plus important pour sa survie, qu’une espèce de petite taille. La fragmentation des milieux occasionnant la création
de plusieurs fragments de petite taille, le milieu deviendra donc défavorable aux espèces ayant besoin de grands espaces.
- Un effet de lisière : on augmente la part représentée par la lisière dans l’écosystème en cas de fragmentation. Des
conditions écologiques spécifiques sont présentes dans l’écosystème de lisière par rapport à la zone centrale :
l’ensoleillement, le régime des vents ou encore le régime de température vont varier. Ces conditions différentes entre la
lisière et la zone cœur induisent la présence d’une faune et d’une flore différentes. L’habitat initial sera par conséquent
dénaturé du fait de l’augmentation de l’effet de lisière, qui va altérer la diversité locale et la dynamique des populations.
Un nouveau cortège d’espèces sera donc présent sur cet espace au détriment de celui de l’espace cœur. Si ce dernier
abrite des espèces endémiques, la réduction de la surface de l’habitat peut mettre en danger ces populations, et
provoquer leur extinction
11
2.2- Espèces sensibles à la fragmentation
Les espèces les plus sensibles sont les premières qui seront affectées par la fragmentation. Une perte d’habitat va donc
provoquer une diminution de la diversité spécifique et un changement de la composition des communautés.
Ces espèces sensibles à la fragmentation sont :
- Les espèces naturellement rares qui ont une faible densité de population ou une distribution géographique limitée.
- Les espèces qui ont une faible fécondité ou un cycle de vie court.
- Les espèces ayant besoin d’une grande superficie d’habitat pour assurer une viabilité de la population sur le long terme.
- Les espèces ayant de faible capacité de dispersion, et qui ne pourront donc pas rejoindre un habitat non fragmenté.
- Les espèces ne pouvant vivre que dans les espaces cœurs (et donc pas dans les zones de lisières) ou les espèces qui
seront vulnérables aux prédateurs présents dans les zones de lisières.
- Les espèces vulnérables à l’exploitation humaine.
La fragmentation des habitats par la création de routes peut également favoriser l’exploitation des espèces, et donc
leur extinction, en rendant accessibles à l’homme des zones jusqu’à présent inaccessibles.
2.3- Processus affectant les espèces
Afin de mieux comprendre l’impact négatif de la fragmentation sur les espèces, les processus qui les menacent peuvent
être classés en deux catégories : les processus exogènes (indépendants de la biologie de l’espèce) et les processus
endogènes (dépendants de la biologie de l’espèce).
2.3.1- Les processus exogènes
La perte d’habitats peut être considérée comme la principale menace affectant la biodiversité dans le monde. Elle est
principalement causée par la modification des paysages pour l’agriculture ainsi que par l’urbanisation. La dégradation de
l’habitat correspond à une dégradation progressive de la qualité de ce dernier. Dans un tel habitat, une espèce peut
décliner, être présente dans une densité plus faible ou être en mesure de se reproduire (ou pas).
Les effets de la dégradation des habitats peuvent être difficiles à détecter car certains peuvent mettre du temps avant
de se manifester ou encore parce que certaines espèces qui ont un cycle de vie assez lent peuvent être encore présent
dans la zone même si elles sont incapables de se reproduire.
La division de l’habitat en de multiples patches d’habitats peut conduire à une diminution de la taille de population,
notamment si les ressources dans les patches sont plus limitées que dans la zone avant fragmentation. Mais aussi parce
que la division en patches augmente l’isolement, qui va nuire au déplacement quotidien des espèces (par exemple entre
le site de reproduction et le site d’alimentation). Ce phénomène peut également avoir un impact négatif sur la dispersion
12
des jeunes. Enfin l’isolement des habitats peut nuire à des mouvements de plus grande envergure comme les
mouvements migratoires saisonniers ou les mouvements liés au phénomène de réponse aux changements climatiques.
2.3.2- Les processus endogènes
Le déclin des espèces dans les paysages modifiés est souvent également lié à des modifications de la biologie et du
comportement de ces espèces mais aussi à une modification des interactions inter spécifiques. Ces changements sont
souvent déclenchés par des processus exogènes. La modification du paysage peut conduire à une modification des modes
de reproduction et des systèmes sociaux. Par exemple, les oiseaux peuvent avoir des saisons de reproduction plus courtes,
des pontes moins importantes (par conséquent moins de jeunes produits).
Elle peut également conduire à la modification des relations de concurrence entre les espèces, de prédation de
parasitisme ou de mutualisme. Ainsi une prédation ou une concurrence accrue d’une espèce avec une autre espèce peut
conduire à la raréfaction ou à la disparition de cette dernière. Ce type de comportement a été relevé de nombreuses fois
chez les oiseaux. L’augmentation de la pression de prédation et de concurrence interspécifique peut être particulièrement
inquiétante lorsque des espèces introduites sont impliquées.
Ainsi les perturbations des interactions entre espèces sont particulièrement graves lorsque des espèces qui jouent un
rôle clé dans le fonctionnement des écosystèmes sont affectées.
2.3.3- Interaction entre processus exogènes et endogènes, et prédisposition à l’extinction
Une espèce en déclin en raison des modifications du paysage est souvent affectée par les deux processus. Les menaces
exogènes conduisent souvent à la baisse initiale des effectifs d’une espèce. Les populations plus petites sont ainsi plus
sensibles aux menaces endogènes.
De nombreux éléments peuvent expliquer une certaine prédisposition de certaines espèces à être plus sensible à
l’extinction. Ainsi on considère souvent les espèces ayant un habitat ou une niche écologique spécialisée, la taille du
domaine vital, la mobilité, la densité de la population, la taille des individus et le régime alimentaire spécialisé. L’influence
de la taille des individus peut être expliquée par une différence dans le besoin d’espace, la mobilité ou encore le régime
alimentaire. Les espèces ayant une faible spécialisation en termes d’habitats seront plus aptes à se maintenir dans des
habitats modifiés. Le même constat peut être fait pour les espèces pouvant supporter une tolérance aux dérangements
plus importante. Les espèces n’ayant pas un régime alimentaire spécialisé pourront également se maintenir plus
aisément: en effet, si la proie principale des espèces spécialisées diminue ou disparait, ces dernières risquent de
disparaitre à leur tour.
2.4- Impact de la fragmentation sur les populations
Le rôle de l’isolement sur les processus d’extinction des populations est un phénomène bien connu. La fragmentation
ne conduit pas seulement à la réduction et à l’isolement des populations, ces dernières sont aussi grandement exposées
aux changements écologiques associés à l’accroissement des lisières.
Le phénomène de fragmentation interrompt souvent les nombreuses interactions biologiques d'une communauté,
comme les relations prédateur-proie ou parasite-hôte.
Trois types de réactions des populations à la fragmentation peuvent être distingués, selon les aptitudes à la dispersion
des espèces et le degré de fragmentation des habitats :
- Populations isolées : la capacité de dispersion de l'espèce est nettement inférieure aux distances qui séparent les
diverses populations.
- Populations en taches : bien que spatialement fragmentées, les populations sont fonctionnellement reliées ; la capacité
de dispersion des espèces est supérieure aux distances existant entre les diverses populations locales.
- Métapopulation : ce concept a été introduit par Levins en 1969 qui parle de population de populations. Blondel (1986)
en donne la définition suivante : 'Une métapopulation est un ensemble de sous- populations interconnectées d'un même
13
voisinage dont certaines sont en déclin, voire s'éteignent localement et temporairement tandis que d'autres sont
démographiquement excédentaires et réalimentent les premières.
2.5- Conséquences génétiques de la fragmentation des habitats
Les populations isolées par la fragmentation sont généralement plus pauvres sur le plan génétique que les autres. Ceci
s’explique notamment par la sélection naturelle qui peut augmenter le taux d’autogamie des populations. Cette
autofécondation, si elle a lieu sur plusieurs générations, provoquent une dépression de consanguinité et une
augmentation du taux d’homozygotie. Les populations cernées par des routes accueillent moins de migrants d’autres
populations, ce qui réduit le flux de gènes et accroît le danger de consanguinité. Les petites populations ont une
probabilité plus grande de s’éteindre, et les surfaces isolées se repeuplent rarement après l’extinction.
Les espèces isolées sont ainsi dotées d’une plus faible variabilité génétique, et peuvent donc avoir un potentiel évolutif
limité en cas de conditions environnementales changeantes et hétérogènes. Ceci peut conduire à une augmentation du
risque d’extinction locale des espèces concernées.
2.6- L’effet de lisière et ses conséquences
La lisière correspond à la zone de transition entre deux ou plusieurs biocénoses. Généralement, l’un de ces milieux est
une forêt et l’autre peut être par exemple une prairie, une clairière… La lisière présente des conditions climatique et
écologique particulière. Elle est pour cette raison soumise à une dynamique écopaysagère propre. On parle d'effet-lisière
(ou effet-bordure) pour décrire les impacts négatifs des lisières artificielles créées dans les milieux naturels, par exemple
par la fragmentation.
2.6.1- Modifications des conditions climatiques
Les changements d'occupation du sol provoqués par la fragmentation conduisent à modifier la balance radiative,
particulièrement l'albédo (coefficient de réflexion) qui peut passer de 20% pour les forêts sclérophylles et matorrals à
25% au niveau des pelouses. Les effets de la structure de la végétation sur l'impact du vent sont bien connus. Une canopée
intacte réduit significativement la vitesse du vent près du sol.
La fragmentation du paysage entraîne une modification du régime hydrique local par l'altération de nombreux
composants du cycle hydrologique. Les phénomènes érosifs connaissent donc une rapide extension suivant la position
topographique de l'îlot. Les isolats situés sur terrain plat ou en haut de pente seront peu affectés par les changements
dans les flux hydriques et les éventuels transports de nutriments, pesticides ou herbicides, alors que les fragments
forestiers de bas de pente seront susceptibles de connaître d'importants atterrissements, avec augmentation de la charge
en composés azotés.
Enfin, les changements structuro-architecturaux de la végétation conduisent à une modification des taux:
d'évapotranspiration et d'interception des précipitations mais aussi à des modalités différentes d'acheminement de l'eau
dans le sol.
2.6.2- Modifications biologiques
Les conditions écologiques différentes (degré d'insolation plus élevé en particulier) entre lisière et intérieur de l'îlot
conduisent à une modification de la composition spécifique. L'augmentation des radiations solaires entraîne
classiquement une prolifération de végétaux hydrophiles le long des marges de l'isolat, avec le plus souvent augmentation
de la richesse spécifique, ainsi qu'une élévation de la biomasse végétale en lisière. Les lisières des forêts isolées sont plus
susceptibles d'être envahies par des espèces allochtones. Les changements du régime des vents conduisent souvent à
l'augmentation du taux de mortalité des arbres, d'où la création de chablis qui permettent là aussi le développement, au
moins temporaire, d'une végétation héliophile. La nécromasse ligneuse en lisière des isolats tend également à augmenter.
14
15
3. CONSEQUENCES DES INVASIONS DES ESPECÈS SUR LA BIODIVERSITÉ
Introduction et définitions
Deuxième cause de la crise de la biodiversité après la perte d'habitats, l'introduction d'espèces, volontaire ou
involontaire a probablement contribué pour 40 % aux disparitions d'espèces enregistrées depuis 1750. Parfois appelées
espèces exotiques, les espèces introduites sont les espèces que les Humains déplacent de leur aire de distribution normale
jusque dans de nouvelles aires géographiques. Elle s’est particulièrement accrue avec le développement des transports
et des échanges internationaux.
Des rats aux coccinelles asiatiques, en passant par la crevette impériale « déménagée » de la Mer rouge vers la
Méditerranée suite au percement du canal de Suez, ce sont des exemples d’introductions volontaires ou involontaires
d’espèces dans de nouvelles aires géographiques. D’abord vues comme un atout – c’est le cas des plantes exotiques
appréciées pour leurs qualités esthétiques ou alimentaires –, ces introductions ont progressivement été perçues comme
des menaces pour leurs milieux de destination, du fait des profonds bouleversements qu’elles peuvent y causer.
Son effet délétère sur la biodiversité est présent lorsqu’une espèce parvient à se naturaliser (une espèce sur dix), et
d’autant plus lorsqu’elle devient envahissante. Le danger de l’introduction d’une espèce allochtone réside dans sa
capacité à se naturaliser. Ces espèces peuvent alors devenir envahissantes et provoquer de multiples nuisances sur les
écosystèmes. L’impact des espèces introduites sur les espèces natives a lieu principalement par prédation directe, par la
compétition pour les ressources et l’espace, par modification de l’habitat et par une action directement génétique. Elles
provoquent souvent :
- Une modification de la dynamique des populations
- Une modification de la structure des communautés
- Une modification de la composition des écosystèmes et leurs fonctionnements
- Une accélération de l'extinction des espèces indigènes
3.1- Types d'invasions biologiques
On peut distinguer deux cas pour l’introduction d’espèces exotiques par l’homme :
3.1.1- Les invasions biologiques volontaires : elle résulte notamment de l’importation par l’homme d’espèces animales
domestiques sur l’ensemble des continents pour l’accompagner ou pour tenter de réparer une erreur passée, en rajoutant
un nouveau problème. C’est le cas par exemple de l’introduction par l’homme d’une espèce prédatrice pour enrayer
l’expansion d’une espèce proie introduite par le passé, et dont le succès occasionne des dégâts sur le milieu naturel. Cette
nouvelle introduction ajoute de ce fait une nouvelle espèce exotique au « compteur » qui peut également réussir et
occasionner à son tour un impact fort. Nous pouvons citer par exemple l’introduction du chat par l’homme pour limiter
les populations de rats ayant colonisé la quasi-totalité des terres grâce aux activités humaines (transports maritimes). Les
deux espèces auront un impact sur le milieu naturel, du fait de la non-adaptation des espèces indigènes à ces prédateurs.
Ce phénomène est d’autant plus important sur les espaces insulaires.
3.1.2- Les invasions biologiques involontaires : elle résulte des activités humaines qui ont provoqué de manière non
volontaire l’introduction d’espèces dans de nouvelles aires géographiques. Nous avons cité l’exemple du rat qui était
présent dans les soutes des bateaux de commerce et a profité des routes commerciales pour coloniser la majorité des
continents. Mais ce phénomène se présente aussi lors de la construction d’édifices : suite à la construction du Canal de
Suez, il y a eu un échange unidirectionnel d’espèces marines entre la Mer rouge et la Méditerranée. Cet échange a été
favorisé par le réchauffement de la méditerranée et a permis la présence de plus de 300 espèces de Mer rouge (qualifiées
d’espèces Lesseptiennes) en Méditerranée. Ces espèces vont rentrer en compétition avec les espèces méditerranéennes
pour les ressources et l’espace, pouvant de ce fait causer la raréfaction des espèces indigènes.
Parmi les espèces exotiques, il est nécessaire de distinguer celles qui deviennent envahissantes. Leurs impacts sur la
faune, la flore et le milieu sont par conséquents bien plus importants qu’une autre espèce exotique. Ces espèces
envahissantes ont une caractéristique commune : elles possèdent une forte plasticité écologique qui leur permet de
s’adapter facilement à tout type de conditions de milieux, ce qui n’est pas le cas des espèces indigènes qui sont, elles,
16
adaptées uniquement à la zone biogéographique dont elles dépendent. Ceci expliquant leur plus grande sensibilité en cas
de changements des conditions de milieux, quel qu’en soit l’origine.
3.2- Processus d’invasion des espèces exotiques
Avant de devenir une espèce exotique, l'espèce doit être transportée, avoir la capacité de s’adapter aux nouvelles
conditions environnementales et la capacité de puiser les ressources qui lui sont nécessaires. Plusieurs processus entrent
en jeu pour qu’une espèce exotique devienne envahissante :
- La nécessité pour l’espèce d’être transportée d’une zone appartenant à son aire de répartition vers une nouvelle zone
en dehors de son aire (qu’elle n’aurait pu atteindre par des voies naturelles à causes de barrière géologiques,
hydrographiques…). Le transport des espèces exotiques est souvent dû aux activités humaines comme les transports
internationaux (avions, bateaux…). L’espèce doit avoir une certaine capacité à disséminer ses propagules afin qu’ils
puissent être captés et transférer par l’homme (dans le cas d’introductions involontaires).
- La capacité des espèces à s’adapter aux nouvelles conditions environnementales (différentes de celles rencontrées
dans son aire de répartition) rencontrées sur le nouveau site. Une espèce ne possédant pas une plasticité écologique
suffisante ne pourra survivre à de nouvelles conditions de milieu.
- La capacité de l’espèce à puiser les ressources nécessaires à son développement, à se défendre contre les ennemis
naturels ou inversement à créer des relations mutualistes avec d’autres espèces.
Ces trois processus constituent les étapes nécessaires à une espèce exotique pour s’implanter. Toutefois pour qu’une
espèce exotique devienne envahissante, celle-ci doit s’étendre et établir de nouvelles populations sur de nouveaux sites.
Cette propagation de l’espèce dépend de la facilité de cette dernière à s’installer dans le nouveau milieu, à la connectivité
présente entre les différents patchs du paysage ou encore dépend du mode de dispersion utilisé par l’espèce. De plus,
une espèce exotique aura plus de facilité à s’installer dans des milieux déjà perturbés et fragilisés (par les activités
humaines notamment) que dans des milieux sains.
La réussite d’une espèce exotique envahissante (et donc inversement l’ampleur des dégâts occasionnés) dépend de la
superficie qu’elle a réussi à occuper. Les facteurs de propagation de l’espèce sont donc des éléments capitaux à prendre
en compte dans l’évolution des invasions biologiques.
Figure 1 : Étapes d’une invasion biologique
17
3.3- Les différents stades d’une invasion biologique.
Classiquement on définit différentes étapes pour étudier le déroulement d’une invasion biologique : l’introduction
d’une population exotique dans son nouvel écosystème, l’établissement de celle-ci suivi de sa prolifération (ou expansion)
qui peut aboutir à de sévères conséquences écologiques, économiques et sociales. Ces différentes étapes peuvent être
représentées comme dans le schéma suivant (Fig. 1).
3.4- Exemples d’introduction d’espèces
Dans certains cas, l'introduction est voulue. Ainsi, on a introduit intentionnellement le Renard roux européen (Vulpes
vulpes) en Australie, à la fin des années 1800, en raison de l'intérêt que l'on avait à chasser cet animal. Les Renards roux
ont contribué à la disparition de quelques mammifères indigènes de taille moyenne qu'ils ont pris comme proies.
L'introduction désastreuse, en 1960, de la Perche du Nil (Laces niloticus) dans le lac Victoria constitue un autre exemple
d'introduction volontaire d'espèce.
Dans d'autres cas, les Humains ont transplanté des espèces sans le savoir. Ainsi, on a introduit accidentellement dans
l'île de Guam le Serpent brun arboricole (Boiga irregularis), « passager clandestin » de cargos militaires après la II Guerre
mondiale. Depuis, 12 espèces d'Oiseaux et 6 espèces de Lézards servant de proies à cet animal ont disparu de Guam.
Les Humains ont également introduit beaucoup d'espèces avec les meilleures intentions du monde. Ainsi, le ministère
de l'Agriculture des États-Unis a encouragé l'importation d'une plante japonaise appelée Kudzu (Pueraria lobata) dans le
sud du pays, dans les années 1930. Le but était de lutter contre l'érosion, la plante ayant envahi de grandes étendues du
paysage du Sud. En 1890 à New York, un groupe de citoyens qui souhaitaient introduire dans Central Park tous les
végétaux et les animaux que mentionnent les pièces de Shakespeare y libéra l’étourneau sansonnet (Sturnus vulgaris).
Celui-ci se répandit rapidement dans toute l’Amérique du Nord, où sa population dépasse maintenant 100 millions
d’individus, chassant une multitude d’espèces d’oiseaux chanteurs indigènes.
18
4. CONSÉQUENCES DE LA SUR EXPLOITATION DES ESPÈCES SUR LA BIODIVERSITÈ
Au cours des siècles l’homme a augmenté de manière croissante son emprise sur le milieu naturel en exploitant de
plus en plus les espèces. C’est la troisième cause d’extinctions des espèces sur terre, bien que ce soit de manière générale
celle qui vient en premier à l’esprit du public.
L’exploitation des forêts, ainsi que la chasse et la pêche intensives, menacent certaines espèces de disparition. La
surexploitation d’une espèce survient quand elle est exploitée pour la nourriture, les matières premières ou la médecine
au-delà de sa capacité à se régénérer elle-même. C’est la principale menace pour la biodiversité marine, le thon rouge,
par exemple, est proche de l’extinction en Méditerranée. Dans d’autres cas, c’est le trafic d’animaux exotiques
(perroquets, poissons, tortues…) ou de produits d’origine animale ou végétale (ivoire, cornes de rhinocéros, corail…) qui
réduit le nombre d’individus d’une espèce.
4.1- Types d'exploitations des espèces
Les espèces les plus sensibles sont celles à faible taux de reproduction : grands arbres, grands mammifères (baleines,
rhinocéros...), espèces endémiques des îles... Il existe différents types de surexploitation :
La consommation par la chasse, la pêche ou la cueillette, la commercialisation, les collections… Voici deux cas
extrêmes:
- l'exploitation indirecte. Quand l'exploitation d'une espèce a un effet indirect sur l'exploitation d'une autre. C'est le
cas des prises non ciblées mais tout de même affectées par la pêche commerciale. Ainsi, 200 000 tortues caouannes et
50 000 tortues luths sont accidentellement tuées tous les ans par la pêche à la palangre (lignes d'hameçons de plusieurs
km) et rejetées mortes en mer (Fig.1).
- l'exploitation commerciale intensive. Exploiter le plus grand nombre d'individus le plus rapidement possible, pour
avoir d'importants revenus, sans tenir compte du renouvellement de la population, qui peut alors disparaître. C'est le
cas des grands prédateurs des mers, comme la morue au Canada ou le thon rouge en Méditerranée.
19
Figures 1 : Des tortues marines régulièrement prises au piège dans les filets maillants
4.2- Conséquences de la surexploitation des espèces sur la biodiversité
4.2.1- Réduction de la taille de la population
L’exploitation des espèces par l’homme est une cause de mortalité additionnelle (en sus de la mortalité naturelle). Si
les individus d’une espèce sont capturés plus rapidement qu’ils ne peuvent se reproduire le taux de croissance de la
population va décliner. La baisse des effectifs d’une population entraine indirectement la chute des effectifs d’autres
espèces liées (marines ou mammifères), et avoir un impact à l’échelle de l’écosystème.
4.2.2- Changement dans la structure de la population (âge/sexe/taille)
L’exploitation des espèces par l’homme se fait sur certaines catégories d’individus. Elle touche des espèces de grande
taille avec un faible taux de reproduction (comme les éléphants, baleines, rhinocéros…) qui sont des proies convoitées
du fait de leur déplacement lent qui facilite leur capture. Si les individus capturés sont les plus productifs, la perte
d’individus de la population peut avoir un effet démesuré sur le taux de croissance de la population.
4.2.3- Changement dans la distribution spatiale
L’exploitation de certaines espèces peut les conduire à se déplacer en dehors de leur habitat optimal vers un habitat
de moindre qualité. Cette altération de la distribution spatiale des individus peut entrainer une baisse du taux de survie
et/ou du succès de reproduction de l’espèce ; et ainsi réduire la viabilité de la population.
4.2.4- Destruction d’espèces non-cibles
Les filets de chalutage ne sont pas discriminants et ramassent tout ce qui se présente amenant un taux de prise
accidentelle d’espèces non cibles élevé. Par exemple, près de 95% des prises se révèlent être accidentelles, comprenant
une large gamme d'espèces menacées ou déjà victime de surpêche.
Certaines prises accidentelles sont conservées pour le marché, mais le plus souvent rejetées mortes car elles ne
correspondent pas à la bonne espèce: Trop petites, de moindre qualité ou ne font pas partie des quotas de pêche. Ces
prises accidentelles contribuent à la baisse de la biodiversité aquatique des mammifères marins, des tortues marines,
des oiseaux marins, d'autres espèces de poissons (les requins sont capturés à la place des thons et des espadons).
20
5. LA POLLUTION
Les pollutions physiques et chimiques sont la quatrième cause d’extinction des espèces. La dégradation des habitats
occasionnée par la pollution constitue également un phénomène important d’érosion de la biodiversité, il se manifeste
par la pollution des eaux, des sols et de l’atmosphère, qui vont modifier le fonctionnement des écosystèmes et par
conséquent entraîner le déclin de la faune et de la flore présente.
Le déclin résulte de plusieurs mécanismes : mort par intoxication, modification du fonctionnement des chaînes
alimentaires, altération de la reproduction...
Les principaux phénomènes affectant la biodiversité sont :
5.1- Les pollutions organiques
Les pollutions organiques se caractérisent par un appauvrissement marqué du milieu récepteur en oxygène, une
augmentation de la turbidité, la présence fréquente de composés ammoniacaux ou phénoliques toxiques, de gaz
carbonique, issus de la fermentation anaérobie.
5.1.1- Rejet des eaux usées
Les eaux usées que nous rejetons ne sont pas épurées en totalité, et transportent ainsi des germes pathogènes
comme les coliformes, les streptocoques, les staphylocoques, les salmonelles et les virus, mais aussi du sable, des
hydrocarbures, des produits chimiques et des métaux lourds.
Cette charge polluante peut détériorer considérablement l’état des cours d’eau récepteurs. Les apports d’azote et
de phosphore, contribuent à l’eutrophisation des cours d’eau soit leur enrichissement et leur vieillissement prématuré.
Les polluants chimiques tels que les hydrocarbures, les pesticides, les produits pharmaceutiques, les produits nettoyants
domestiques ou les résidus domestiques dangereux peuvent affecter la faune et la flore aquatiques qui y sont exposées.
Parmi ces produits, plusieurs peuvent être accumulés par les organismes (bioaccumulation) et le long de la chaîne
alimentaire (bioamplification).
Par ailleurs, la pollution bactériologique (tels les coliformes fécaux), détériore la qualité de l’eau des rives. Elle limite
les usages, notamment la baignade et diverses activités aquatiques.
5.1.2- Hydrocarbures
Dans le cadre de pollution due à des déversements importants à cause des activités anthropiques, la quantité est
telle que cela entraîne de graves conséquences environnementales sur les écosystèmes. Tous les groupes taxonomiques
sont susceptibles d'être affectés (algues, bactéries, invertébrés, poissons, oiseaux, mammifères).
Lors d’une pollution aux hydrocarbures, telle qu’une marée noire, un des impacts les plus visibles est celui de
l’engluement de la macrofaune (oiseaux, mammifères marins). Mais outre cet impact purement physique, le contact
des animaux avec les hydrocarbures peut entrainer des effets toxicologiques.
Cette toxicité peut être aiguë, entraînant la mort rapide de l’organisme exposé par contact ou ingestion, ou en
causant une perturbation grave des fonctions de base. La toxicité différée intervient lorsque la capacité de survie de
l’organisme est diminuée. C’est-à-dire lorsqu’il y a une réduction de sa résistance au stress ou à une agression biologique
(maladies, parasites, prédateurs).
5.1.3- Impacts écologiques
Outre les impacts directs sur une espèce, la pollution peut occasionner divers impacts indirects sur toute une
communauté ou un écosystème :
Un affaiblissement des organismes consommant des espèces polluées.
La perturbation de certaines interactions entre espèces, à la suite de l’élimination ou de l’affaiblissement d’espèces.
Un milieu naturel est composé d’une multitude d’espèces vivant en interactions, soit par des relations de type
prédateurs – proies (les plus courantes), soit par des relations comme le parasitisme, la symbiose ou d’organismes hôtes.
La disparition ou l’affaiblissement d’une espèce est susceptible d’affecter indirectement de nombreuses autres espèces
en cascade.
21
La prolifération massive d'organismes favorisés par la pollution et qui s’emparent de la nourriture habituellement
consommée par les espèces présentes dans le milieu.
La modification de l’habitat à la suite des opérations de nettoyage, comme l’altération ou la disparition du substrat.
5.2- Les pollutions chimiques
La pollution chimique est engendrée par des rejets de produits chimiques à la fois d’origine industrielle et
domestique. Elles peuvent résulter notamment de l'utilisation de pesticides, de détergents ou encore de métaux lourds.
5.2.1- Les détergents
Un détergent est un composé chimique, généralement issu du pétrole, doté de propriétés tensioactives, ce qui le
rend capable d'enlever les salissures. Les plus nocifs sont les détergents anioniques qu’on retrouve dans certaines
lessives.
Canal recouvert de lentilles d'eau
Les phosphates constituent un des ingrédients les plus utilisés et les plus abondants dans les détergents domestiques
et industriels. Les phosphates sont des nutriments essentiels comme le montre leur utilisation dans les engrais. La
principale préoccupation relative à l’utilisation des phosphates dans les détergents est qu’elle peut conduire à un excès
de nutriments dans l’environnement aquatique ce qui, à son tour, peut provoquer des problèmes d’eutrophisation. Les
inconvénients principaux de l'eutrophisation sont la diminution de la biodiversité et de la qualité de l'eau en tant que
ressource. On constate notamment : l’augmentation du volume d'algue, l'augmentation de la biomasse du zooplancton
gélatineux, la dégradation des qualités organoleptiques de l'eau, l'envasement plus rapide, et apparition de vase putride,
sombre et malodorante, le développement de phytoplancton toxique, le développement de pathogènes par diminution
de la pénétration des UV qui ont un pouvoir désinfectant, la diminution de l'indice biotique et enfin une perte de
biodiversité dans les milieux aquatiques.
5.2.2- Les pesticides
Le terme "pesticides" est une appellation générique couvrant toutes les substances ou produits qui éliminent les
organismes considérés comme nuisibles, qu'ils soient utilisés dans le secteur agricole ou dans d'autres applications.
Ils sont destinés à tuer les herbes (herbicides), les insectes (insecticides), à lutter contre les maladies (fongicides), ou à
se débarrasser de divers animaux jugés nuisibles (souricides, …). Les pesticides se retrouvent partout : dans nos aliments,
dans l’eau des rivières et dans l’eau souterraine, dans l’air, dans les sols, dans la biomasse vivante et morte, dans le sang
et le lait maternel... Ils représentent par conséquent un danger pour l’homme mais aussi pour l’environnement.
22
Pic d'algues ou eutrophisation extrême en chine
Les pesticides sont susceptibles d’affecter tous les compartiments de l’écosystème (sol, eau, air) et d’affecter un
grand panel d’espèces : les oiseaux (canards, pigeons, buses variable, perdrix), les mammifères (sanglier, chevreuil,
renard, lapin, blaireau, loutre), les insectes (abeilles…). Les populations les plus directement exposées sont la faune
(macro- et micro-faune) et les micro-organismes de l'écosystème touché par les pesticides.
Les substances incriminées sont principalement les rodenticides anticoagulants (bromadiolone, chlorophacinone,
crimidine, coumaphène, difénacoum, etc.) et dans une moindre mesure les inhibiteurs des cholinestérases (insecticides
organophosphorés et carbamates : furathiocarbe, mévinphos, carbofuran, aldicarbe, etc.) et d'autres molécules
(chloralose, imidaclopride, etc.).
5.2.3- Les métaux lourds
Les métaux lourds sont présents dans tous les compartiments de l'environnement, mais en général en quantités très
faibles, on dit qu’ils sont présents « en traces ». On assimile souvent métaux lourds à métaux toxiques, mais ce n’est pas
toujours le cas : des éléments comme le cuivre, le zinc, le cobalt sont des métaux lourds indispensables au métabolisme
de certains organismes. La toxicité des métaux lourds a conduit les pouvoirs publics à réglementer les émissions en fixant
des teneurs limites. Cette réglementation n'est cependant d'aucun secours pour déterminer sans ambiguïté une liste de
métaux à surveiller car la liste varie selon les milieux considérés : émissions atmosphériques, rejets dans l'eau, règles sur
l'épandage des boues ou la mise en décharge... Les métaux lourds les plus toxiques sont le mercure, le plomb, le
cadmium, le titane et le chrome.
Le mercure est un métal très réactif au milieu dans lequel il se trouve (température, composition chimique...). Il peut se
lier dans l'organisme aux molécules constituant la cellule vivante (acides nucléiques, protéines...) modifiant leur
structure ou inhibant leurs activités biologiques.
Le cadmium est très peu répandu dans la nature et est habituellement associé au zinc, ses impacts sont variables :
troubles osseux (par action sur le métabolisme du calcium), troubles de la reproduction, perturbations respiratoires par
action sur les branchies, changement de la composition sanguine, accumulation dans le système rénal…
Le plomb provient essentiellement de l’atmosphère : fumées d’échappement, fonderies, incinérations… Le plomb
entraîne des effets divers tels que l’altération au niveau cellulaire (altération des membranes), le blocage de la
reproduction, des troubles de l’appareil respiratoire (altération des branchies et des cellules sanguines), des
modifications du métabolisme des glucides, des effets sur le système nerveux (saturnisme) et une modification du
développement embryonnaire.
23
6- DÉVELOPPEMENT DURABLE
6.1- Notion de développement durable
L’expression sustainable development, traduite de l’anglais par « développement durable », apparaît pour la première
fois en 1980 dans la Stratégie mondiale de la conservation, une publication de l’UICN.
Le développement durable est le paradigme politique qui propose de poursuivre le développement des activités
humaines sur la planète, sans porter préjudice aux besoins des générations futures. Ce paradigme repose sur un certain
nombre de postulats qui s’articulent autour de l’idée que le développement durable et la satisfaction des besoins de la
société englobent la stabilité sociale, écologique et économique, les trois dimensions de toute analyse de durabilité.
L’expression « développement durable » qualifie, pour chaque acteur concerné, un développement respectant
simultanément efficacité économique, équité sociale et respect de l’environnement. On évoque ainsi les trois piliers
du développement durable, schématisé par trois sphères qui s’entrecroisent, avec à l’intersection des trois, la partie
relevant du développement durable (idéal à atteindre). Les dimensions culturelles et patrimoniales sont intégrées
dans le pilier social (fig. 1). D’autres schémas présentent quatre sphères entrecroisées, mettant ainsi en relief la
dimension culturelle (Fig. 2).
Le développement durable et ses principes s’appliquent à toutes les activités et tous les secteurs. On parle ainsi de
santé durable, de ville durable, de gestion durable des forêts, de modes de production et de consommation durables, etc.
Figure 1 : Schéma du développement durable, à
la confluence de trois préoccupations, dites
« les trois piliers du développement durable »
Depuis la conférence de Rio (1992), le développement durable est reconnu comme un objectif par la communauté
internationale (fig. 3). Un écosystème doit être ou non capable de soutenir tel ou tel usage. Il n’appartient pas à l’homme,
même si celui-ci peut évidemment le détruire.
Plusieurs principes sont sous-jacents au développement durable :
- le principe de participation,
- le principe de précaution,
Figure 2 : Schéma du développement durable avec la
dimension culturelle
24
- l’évaluation environnementale,
- le principe pollueur-payeur.
Ils se fondent sur un équilibre entre les domaines économique, social et environnemental. L’utilisation de la terre et
de l’eau doit soutenir une production indéfinie sans détérioration environnementale, idéalement sans perte de la
biodiversité locale. Il vise à un développement équilibré et répondant à deux types d’éthique :
- une éthique anthropocentrée qui reconnaît une valeur inhérente à la nature qui doit être transmise aux générations
futures ;
- une éthique écocentrée reconnaissant une valeur intrinsèque à la nature, tout en considérant que l’Homme y a sa place.
Figure 3 : Objectifs du développement durable (ONU)
6. 1.1- Les composantes du développement durable
Tendre vers un développement durable, c’est reconnaître que le développement est pluridimensionnel et s’efforcer de
mettre en synergie ses différentes composantes.
Le progrès social
La finalité est le développement humain : réduction de la pauvreté et des inégalités, partage équitable des revenus et
des services, égalité entre hommes et femmes, accès de tous aux droits, à l’éducation, à la santé, sécurité et inclusion
sociales.
L’équilibre écologique
L’objectif de développement humain doit être « soutenable » par la biosphère : préservation des ressources naturelles,
des écosystèmes locaux et globaux, lutte contre le dérèglement climatique, réduction de l’empreinte écologique.
La diversité culturelle
La culture, dans sa diversité, est une richesse : préservation des libertés et des droits culturels, des identités, des savoirs,
des langues, respect de modes et de rythmes de développement diversifiés.
L’efficacité économique
L’économie est un instrument au service du développement humain : modes de production, de consommation et de
commercialisation viables, intégration des coûts environnementaux et sociaux, création de richesses répondant aux
besoins.
25
La démocratie est en même temps un objectif et un moyen du DD
Accès de tous à l’ensemble des droits humains : droits civils et politiques ; droits économiques, sociaux et culturels;
droits environnementaux.
Mise en œuvre de la participation de tous les acteurs à la définition, à la mise en œuvre et à l’évaluation des politiques.
6.1.2- Les principes du développement durable
Le développement durable vise à traduire dans des politiques et des pratiques un ensemble de 27 principes, énoncés
à la Conférence de Rio en 1992 (Annexe II). Parmi ces principes :
La responsabilité
Elle s’exerce aux niveaux individuel et collectif. Au niveau international “étant donné la diversité des rôles joués dans
la dégradation de l’environnement mondial, les Etats ont des responsabilités communes mais différenciées. Les pays
développés admettent la responsabilité qui leur incombe dans l’effort international en faveur du développement
durable" (Principe 7).
Exemple : les pays riches, principaux responsables du changement climatique global, s’engagent à des quotas de
réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre. La responsabilité induit d’autres applications comme le principe de
pollueur-payeur, celui de réparation des dommages causés.
L’équité ou la solidarité
Dans le temps : entre les générations présentes et futures. Ainsi, les choix du présent doivent être effectués en tenant
compte des besoins des générations à venir, de leur droit à vivre dans un environnement sain.
Dans l’espace : entre le Nord et le Sud, l’Est et l’Ouest, entre régions pauvres et régions riches, entre milieu urbain et
rural… (principe 3)
Exemple : l’engagement des 0,7 % du PIB (Produit Intérieur Brut) pour l’Aide Publique au Développement (APD) aux pays
du Sud.
Droit à l’information et principe de participation
Ce principe vise à mettre en œuvre des processus d’information transparente et pluraliste, de consultation, de débat
public, de gestion des conflits, en intégrant tous les acteurs concernés à tous les niveaux de décision, du local à
l’international (principe 10).
Exemples : les conférences de citoyens, le budget participatif, les dispositifs prévus dans les Accords de Cotonou, la
Convention d’Aarhus de 1998 (accès à l’information, à la participation et à la justice environnementale).
La précaution
En cas de risque de dommages graves ou irréversibles, l’absence de certitude scientifique ne doit pas servir de prétexte
pour remettre à plus tard l’adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l’environnement. La
précaution diffère de la “prévention”, qui analyse par exemple le rapport entre coût de dépollution et bénéfices en
termes d’emplois créés. En matière de précaution, face aux risques, on agit pour rendre les choix réversibles, sans
évaluer les coûts (principe 15).
Exemple : le Protocole de Carthagène sur la Biosécurité (2000) autorise le refus d’importation de produits OVGM pour
des raisons sanitaires ou environnementales.
La subsidiarité
La prise de décision et la responsabilité doivent revenir à l’échelon administratif ou politique le plus bas en mesure
d’agir efficacement. Les règles internationales devraient être adaptées aux contextes locaux et sous-régionaux.
Exemple : une action de coopération internationale doit s’intégrer aux politiques décidées et mises en œuvre localement
et non s’y substituer.
26
6.1.3- Instruments pour la réalisation des objectifs de durabilité
Pour réaliser les objectifs de durabilité, un certain nombre d’instruments ont été définis. Ces derniers sont
progressivement intégrés dans les politiques de la nature, des eaux, du territoire, de l’agriculture et de la forêt,
notamment pour promouvoir les mesures en faveur de la biodiversité. Ces instruments se répartissent dans les catégories
suivantes:
• Information et instruction: un changement de valeurs et de comportement est nécessaire à terme, par exemple en
matière de gestion des déchets.
• Accords volontaires: pris par des entreprises privées, pour atteindre volontairement les objectifs de la durabilité, par
exemple en termes d’impacts sur l’environnement des activités économiques.
• Incitations économiques: ce sont des instruments de nature variable, par exemple les incitations négatives par taxes
écologiques, les incitations positives par des subventions ou avantages fiscaux, ou encore les droits de propriété
négociables comme les droits d’émission de CO2.
• Instruments régulateurs: les prescriptions et interdictions édictées par les états (lois, règlements) restent nécessaires,
notamment lorsque la santé des personnes ou d’écosystèmes est directement menacée.
• Projets et propositions des états: ce sont les prestations liées aux grandes infrastructures publiques (trafic, eaux,
déchets, etc.) qui peuvent être directement traitées conformément aux objectifs du développement durable.
Des formes mixtes de ces différents instruments existent notamment sous la forme de conventions globales, contrats
étatiques, accords volontaires combinés avec des incitations économiques, etc.
6.2- Conservation de la biodiversité
La Convention sur la diversité biologique (CDB) est un traité international adopté lors du Sommet de la Terre à Rio de
Janeiro en 1992, avec trois buts principaux : (a) la conservation de la diversité biologique (ou biodiversité), (b) l'utilisation
durable de ses éléments, et (c) le partage juste et équitable des avantages découlant de l'exploitation des ressources
génétiques.
6.2.1- Conservation in situ
La conservation in situ est une technique de conservation de la faune et de la flore sauvages qui intervient sur le terrain
dans le milieu naturel. Ce processus concerne les espèces animales ou végétales en voie d'extinction dans leur milieu
naturel. Il a pour objectif soit la protection de l’habitat des espèces, soit la réduction des menaces affectant l’espèce sur
l’habitat.
L'avantage de la conservation in situ par rapport à la conservation ex situ est qu'elle maintient la restauration des
populations dans le milieu même où se sont développés leurs caractères distinctifs et dans lequel elles peuvent continuer
d'évoluer avec leurs prédateurs et leurs parasites.
Cette stratégie est la seule qui permet un succès à long terme, notamment pour la sauvegarde des communautés
végétales et le maintien de leur diversité. Son importance est soulignée dans les conventions et législations
internationales; elle constitue l’une des bases des conceptions du développement durable.
Protéger les milieux naturels ne suffit pas toujours à garantir le maintien des espèces menacées. De nombreuses
espèces continuent à disparaître même au sein des espaces protégés. De plus, la conservation des espèces sauvages dans
leur milieu naturel nécessite des actions plus spécifiques qu’une simple protection de l’espèce et de son habitat. Ces
actions sont notamment des mesures de terrains, des suivis de l’espèce, des études biologiques et éthologiques…
27
6.2.2- Conservation ex situ
La conservation ex situ est une technique de conservation de la faune et de la flore sauvages qui intervient hors du
milieu naturel. Ce processus de protection d'une espèce menacée de plante ou d’animal permet d’enlever une partie de
la population de l'habitat menacé et de la placer dans un nouvel environnement, qui peut être une aire sauvage ou sous
les soins de l'homme.
La conservation ex situ ne se substitue pas à la protection in situ; elle la complète dans les cas les plus problématiques.
L’objectif est le renforcement des stations naturelles affaiblies, voire la réintroduction en nature si l’espèce a disparu,
mais pas la culture à long terme. L’objectif de ces programmes d’élevage est de constituer des populations viables de 250
à 500 individus par espèce en conservant, sur 150 ans, plus de 90% de la diversité génétique des individus fondateurs de
la population.
Différents organismes sont impliqués dans la conservation des espèces ex situ :
1. Les parcs zoologiques et les parcs animaliers spécifiques aux espèces animales terrestres, 2. Les aquariums publics, 3. Les conservatoires botaniques nationaux, les jardins botaniques, les arboretums pour les espèces végétales,
6.3- Définition et caractères généraux des principaux types de zones protégées du monde
La règlementation internationale élaborée par l’UICN pour les Nations unies a défini plusieurs catégories d’aires
protégées. Il en existe aujourd’hui six types dont le statut de protection va en décroissant de la catégorie I à VI.
I- Réserves naturelles strictes : protègent des écosystèmes remarquables d’importance nationale ou internationale, dont
la vocation majeure est la recherche scientifique. Elle protège des habitats fragiles et des espèces, parfois même des
biocénoses entières, menacées d’extinction. Les perturbations artificielles, l’accès du public, a fortiori le tourisme, y sont
interdits, afin de s’assurer que les processus écologiques fondamentaux puissent s’y perpétuer. En France par exemple,
la réserve naturelle de Camargue correspond à cette catégorie (Fig. 4).
II- Parcs nationaux : Il s’agit de territoires relativement étendus constitués par un ou plusieurs types d’écosystèmes
contigus peu ou pas transformés par les activités humaines, qui présentent un intérêt scientifique, éducatif, et récréatif
exceptionnels et des paysages de grande valeur esthétique.
Toute exploitation ou occupation constituant une entrave à la conservation doit être interdite ou entièrement éliminée.
L’agriculture, la chasse, les aménagements tels les barrages et toute autre construction de quelque nature que ce soit
doivent être strictement proscrits pour qu’un parc national puisse bénéficier du label international. En revanche, le
tourisme dans les parcs nationaux est autorisé voire encouragé à des fins récréatives, éducatives et culturelles, sous la
stricte réserve qu’il ne mette pas en péril la conservation des écosystèmes concernés.
Figure 4 : Réserve naturelle de Camargue (France)
28
Figure 5 : Les parcs nationaux en Algérie
Figure 6 : Parc national d’EL Kala Figure 7 : Parc national de Belezma (Batna)
III- Monuments naturels : leur statut est analogue à celui des parcs nationaux, mais il s’agit d’entités de plus faible surface,
parfois seulement quelques hectares, où s’ajoute souvent une valeur historique à leur importance écologique.
29
Figure 8 : Le monument naturel de Devils tower (Wyoming, Etats Unis)
(Remarquable par son dyke volcanique qui est un des plus remarquables au monde . Il héberge aussi une des
dernières grandes colonies de chiens de prairies (Cynomys ludovicianus) autrefois très commun dans les
steppes nord-américaines et qui est classée parmi les espèces menacées
IV- Réserves de nature gérées (= aires de gestion des habitats et de la biodiversité)
Figure 10 : Réserve naturelle de Néouvielle, crée en 1936 par la SNPN (Société Nationale de Protection de la
Nature) protège des forêts de conifères d’altitude et plusieurs lacs glaciaires dans les Pyrénées occidentales
Figure 9 : Chien des prairies
30
Elles impliquent une intervention active et permanente dans leur gestion. Elles étaient autrefois dénommées réserves
particulières car, à la différence des réserves de catégories I, ou la protection des écosystèmes est absolue, une certaine
exploitation d’un type donné de ressource biologique y est tolérée, le reste étant strictement protégé. Ainsi, par exemple,
elles peuvent constituer une réserve de faune mais le couvert végétal (pâturage ou boisement) y sera exploité. A l’opposé,
ces réserves peuvent protéger une forêt, mais la chasse y sera permise.
V- Paysages terrestres ou marins protégés comme par exemple les parcs naturels régionaux français ou des « national
parks » britanniques. Sa vocation est assez large du fait de la grande diversité des paysages semi-naturels et plus
généralement anthropisés que représente ce type d’aires protégées dans le monde. La vocation touristique de ces zones
est prépondérante. Leur protection implique, outre de sévères restrictions en matière immobilière, une planification
rigoureuse de l’espace pour assurer la conservation des paysages et le maintien des formes traditionnelles d’exploitation
agro-sylvo-pastorales qui les ont façonnés de longue date. Parmi leurs autres objectifs figurent la préservation du type
architectural local et celle des modes de vie souvent « traditionnels » .
VI- Réserves de ressources naturelles gérées : Elle concerne des zones souvent étendues, d’accès généralement difficile,
dans lesquelles la flore et la faune sont exploitées à des fins d’autosubsistance et(ou) commerciales. Ce type d’aire est
des plus importants pour le tiers-monde ou les territoires concernés sont exposés à une surexploitation de leurs
ressources naturelles par des populations humaines en expansion. Il impose donc de prévenir leur éventuelle défriche
illégale et d’établir des règles d’exploitation qui assurent la pérennité des ressources végétales et/ou animales exploitées.
A ces catégories doivent être ajoutés les deux types d’aires protégées établies par l’UNESCO : les réserves de biosphère
et les sites du patrimoine mondial. Les réserves de biosphère représentent une catégorie d’aires protégées, d’importance
particulière pour la protection de la nature. Elles furent créées à partir de 1974 dans le cadre du programme MAB de
l’Unesco (Man and the Biosphere Programme) afin de conserver au moins une aire représentative de chaque écosystème
majeur existant dans le monde(fig.11).
Leur objet principal, la recherche scientifique, s’ajoute aux objectifs classiques de conservation d’écosystèmes témoins
afin de suivre leur évolution dans le temps. Ce sont en particulier des aires de choix spécialement favorables à la
surveillance permanente de l’environnement.
Figure 11 : Nombre de réserves de biosphère, par pays et continents
Enfin les sites du patrimoine mondial de l’UNESCO, créés par une convention spécifique (World Heritage Convention),
comportent divers monuments et zones naturelles de valeur esthétique et culturelle universelle qui font partie du
patrimoine de l’humanité.
Ces sites concernent aussi la conservation des écosystèmes dans la mesure ou en sus de leurs richesses culturelles,
architecturales ou non, ils renferment des habitats naturels et des espèces d’importance exceptionnelle pour la
31
conservation. A titre d’exemple, le parc national de Kakadu, en Australie, qui renferme plusieurs milliers de peintures
aborigènes est inscrit au patrimoine mondial.
Figure 12 : Parc national de Kakadu (Australie)
6.4- Lutte contre l’érosion de la biodiversité et la désertification
E.O. Wilson (2002) a formulé des recommandations concernant la stratégie à suivre à l’avenir pour assurer la
conservation d’un maximum d’espèces et de milieux. Ces recommandations constituent en quelque sorte les objectifs à
atteindre pour la conservation de la diversité biologique. Elles sont résumées ci-dessous sous la forme de 12 types
d’actions, qui nécessitent de nombreuses compétences professionnelles, mais dont les sciences biologiques constituent
une des bases conceptuelles premières:
1. Assurer immédiatement la protection des “hotspots” planétaires de la biodiversité.
2. Protéger de manière intégrale les 5 derniers grands massifs forestiers (1. Amazonie, 2. Afrique centrale, 3. Nouvelle
Guinée, 4. Alaska-Canada et 5. Russie-Scandinavie).
3. Supprimer immédiatement l’exploitation des écosystèmes forestiers encore intacts.
4. Mettre partout la priorité sur les lacs et rivières (systèmes aquatiques).
5. Définir avec précision les “hotspots” de la biodiversité marine.
32
6. Achever le relevé de la biodiversité planétaire, afin d’optimiser les efforts de conservation.
7. Faire usage des technologies de SIG pour assurer une couverture exhaustive des écosystèmes à protéger par une
stratégie globale.
8. Rendre les efforts de conservation rentables économiquement.
9. Intégrer la biodiversité comme un paramètre-clef de l’économie mondiale.
10. Initier des efforts de restauration écologique afin d’augmenter la surface des zones consacrées à la conservation de la
diversité biologique.
11. Augmenter la capacité des zoos et jardins botaniques à assurer la reproduction d’espèces menacées d’extinction.
12. Soutenir toute forme d’effort de limitation de la croissance de la population mondiale.
Selon l'article 1 de la Convention des Nations Unies sur la Lutte contre la Désertification (CNULD, Paris, 1994), la
désertification désigne "la dégradation des terres dans les zones arides, semi-arides et sub-humides sèches par suite de
divers facteurs, parmi lesquels les variations climatiques et les activités humaines".
L'avènement de phénomènes périodiques et aléatoires extrêmes de sécheresse et de pluies intenses sont des facteurs
déterminants de dégradation des écosystèmes : érosion des sols, variabilité de la production de biomasse, perte de
biodiversité. En se conjuguant, ces phénomènes créent les conditions d’un appauvrissement du milieu et des populations
qui y vivent : famines, migrations, …
De plus, la dégradation de la qualité de ces milieux affecte non seulement leur biodiversité et les conditions sociales et
économiques des populations mais aussi les espaces périphériques qui doivent en subir les conséquences en termes
environnemental (ensablement des bassins versants), social (exode rural) et économique. Enfin, la capacité de fixation de
carbone de ces écosystèmes et leur capacité de rétention d’eau s’en trouve affectées.
Ainsi, la désertification est à la croisée d’enjeux multiples tant locaux que globaux :
• Au niveau local, la désertification affecte directement les perspectives de développement des populations locales
en réduisant la productivité des systèmes de production et le renouvellement des ressources naturelles qui en sont la
base (eau, sol, bois énergie, faune et flore)
• Au niveau global, la désertification menace la diversité biologique et accélère les émissions de gaz à effet de serre. A
ce titre, la lutte contre la désertification doit être considérée comme un bien public mondial et complémentaire des
actions mises en œuvre dans le cadre des autres conventions internationales (Convention sur la diversité biologique,
Convention sur les changements climatiques, Gestion des eaux internationales).
Les techniques de régénération visent à restaurer la capacité productive des sols. Elles associent des techniques de
lutte contre le ruissellement et des actions de restauration de la fertilité minérale et organique des sols. Les techniques
de lutte contre le ruissellement n'ont pas seulement pour objet de réduire l'érosion hydrique, elles favorisent aussi le
stockage de l'eau.
La restauration des parcours et des pâturages dégradés relève de la même logique de correction. La plantation
d'arbustes fourragers constitue la principale forme de restauration. Le reboisement, en bosquet ou de manière
disséminée, la protection des rejets naturels favorise la régénération de la végétation.
Les résultats de ces opérations ont été limités. Très vite, il est apparu plus intéressant d'investir dans la prévention des
risques de désertification. Les mêmes techniques sont utilisées mais la lutte contre la désertification concerne alors
l'ensemble des zones arides susceptibles d'être affectées, en particulier les zones d'immigration où se pratique la défriche
de fronts pionniers pour l'agriculture ou l'élevage dans les zones sub-humides.
33
Par ailleurs, pour avoir un réel impact, les techniques de lutte contre la désertification doivent s'intégrer aux systèmes
de production, permettant une amélioration de la gestion globale des ressources de l’exploitation, qui doit se traduire
aussi par une augmentation de la production.
L'hypothèse principale est qu'il est possible d'augmenter la productivité des systèmes :
• en valorisant au mieux les ressources disponibles localement (optimiser leur utilisation) en particulier eau,
sol/nutriments et biodiversité, pour produire davantage de biomasse ;
• en gérant mieux la biomasse, en recherchant les synergies agriculture - élevage, production - transformation, ce qui
revient à garantir une alimentation plus satisfaisante à un troupeau plus important qui produit du fumier en quantité pour
restituer des éléments minéraux et organiques aux sols et aux cultures.
De manière concrète, la valorisation de la diversité biotique et abiotique des milieux passe d'abord par la constitution
de stocks pour augmenter la capacité de résistance à la sécheresse : stocks d'eau grâce à des investissements en
hydraulique (alimentation humaine, abreuvement des bétails, périmètres irrigués,…) ; stocks de grains (banques de
semences et greniers) ; stocks de fourrage (réserve sur pied, foin, ensilage…) ; stocks forestiers. Ces stocks devraient avoir
pour effet d'augmenter la production de biomasse sur l’ensemble des espaces en utilisant la biodiversité.
La valorisation des ressources passe également par l’élargissement de la gamme d’espèces végétales disponibles,
endogènes ou exotiques, pour exploiter la diversité des situations de production potentielle de biomasse (allées, haies,
clôtures, jachères, bosquets, berges de rivière) à toutes fins possibles (production de bois d’œuvre ou de feu, de piquets,
de fruits, de fourrages, de plantes alimentaires et médicinales, etc).
Une meilleure compréhension des processus écologiques semble nécessaire pour transformer les agro-écosystèmes.
34
7. GESTION DES RESSOURCES GÉNÉTIQUES DES POPULATIONS SAUVAGES ET DOMESTIQUÉES
7.1- Ressources génétiques
Depuis des millénaires, les espèces vivantes n’ont cessé de se disperser dans des milieux très variés, bien au-delà de
leurs centres d'origine. Ces espèces ont ainsi dû évoluer et s’adapter progressivement à des environnements très variés.
Ceci a conduit à la formation et à l'expression d'une importante diversité génétique au sein des espèces. Cette diversité
se matérialise au travers d’une grande variété de formes et de caractères transmis par voie héréditaire. Elle a
grandement évolué au cours du temps du fait des pressions de sélection naturelle, mais aussi de l’action exercée par les
communautés humaines tout au long de leur histoire dans les différentes régions du monde.
Une part importante de la diversité génétique est indispensable à l’homme qui y a recours pour l’agriculture, l’industrie
et la médecine ; il s’agit en fait de véritables ressources dans lesquelles il puise pour répondre à ses besoins présents et
futurs, aujourd’hui difficilement prévisibles. Du fait de leur nature héréditaire, ces ressources sont qualifiées de
«ressources génétiques ». Concrètement, elles recouvrent :
- les populations sauvages, les populations traditionnelles ou primaires, les races standardisées, les lignées ou les
souches sélectionnées, pour les animaux ;
- les variétés anciennes ou modernes, les populations locales, les formes sauvages apparentées, pour les végétaux ;
- les souches, les isolats, les populations et les communautés, pour les micro-organismes.
Leur préservation se fait en conditions naturelles, en milieu traditionnel d’élevage ou de culture ou en conditions
artificielles, selon ces catégories de ressources et l’objectif de conservation.
Les forêts qui sont gérées pour les bois d’œuvre sont souvent récoltées pour être maintenue, par exemple des arbres
qui sont abattus sont replantés avec de jeunes arbres. La sylviculture de maintien, même si elle ne détruit pas
l’écosystème de la forêt et assure que les ressources en bois d’œuvre sont maintenues, altère fortement la forêt et
presque toujours réduit la biodiversité et la valeur de conservation. Les forêts gérées sont habituellement plus du même
âge et ont une diversité d’espèces d’arbres plus basse que les forêts naturelles. Elles tendent aussi à avoir une flore de
terre pauvrement développée.
La biodiversité des plantes en général peut être traitée comme une ressource biologique à cause de ses valeurs
commerciales actuelles ou potentielles. Couramment, entre 25% et 50%des médicaments sont basés sur la production
des plantes.
La biodiversité des espèces de plantes de récoltes et de leurs relatifs est précieuse à cause des opportunités
potentielles comme l’offre la diversité génétique aux plantes reproductrices. Aussi bien en maximisant le rendement,
les reproducteurs peuvent exploiter cette variation pour créer des variétés qui améliorent la résistance aux nuisibles,
augmentent l’utilisation de l’eau ou l’efficacité des nutriments ou d’autres caractéristiques favorables. Cependant, la
diversité des espèces de récoltes a décliné dramatiquement avec le début des techniques modernes d’agriculture
(tableau 1). Le manque de diversité génétique dans une récolte fait aussi que la récolte est vulnérable aux pathogènes
ou aux dommages des nuisibles. Aux Etats-Unis, une variété de patates douces compte pour 69% de la production, tandis
que deux variétés de pois comptent pour 96% du rendement total. Une étude récente conclut que l’agriculture
américaine était « génétiquement uniforme d’une manière impressionnante et aussi vulnérable de façon
impressionnante.
Pour les animaux domestiques, actuellement la planète compte 2,3 milliards de boeufs et de cochons d’élevage, et 17
milliards de poulets. La sélection naturelle et par l’homme a donné des milliers de races génétiquement différentes
d’animaux d’élevage, adaptées à une grande variété de milieux naturels. Comme pour l’agriculture, l’intensification de
35
l’élevage a entraîné au cours des dernières décennies une homogénéisation des productions et une diminution du
nombre de races animales exploitées.
Tableau 1. Exemples sélectionnés du déclin de la diversité des récoltes
Pays Récoltes Nombre de variétés perdues
EU
Europe
Philippines
Pommes
Pois
Mais
Brocoli
Animaux domestiques
Blé
Riz
6121 (86%)
546 (95%)
296 (96%)
34 (100%)
Depuis 1900, 50% de toutes variétés se sont
éteintes.
345 (90%)
Avant 1970, 3500 variétés poussaient, maintenant
5 dominent (> 90% de perte)
D’après la FAO, environ 20% des races animales sont menacées d’extinction, et une race disparaît chaque mois. Sur
plus de 7 600 races d’animaux d’élevage figurant dans la base mondiale de données de la FAO, 190 ont disparu au cours
des 15 dernières années et 1500 autres sont en péril. Or, le maintien de cette diversité permettrait peut-être de
sélectionner, selon les circonstances, des animaux capables de résister à diverses maladies, de s’adapter aux
changements climatiques ou de répondre aux demandes des consommateurs.
7.2- Gestion et diversité des ressources génétiques
Le but général de la gestion des ressources génétiques est d’assurer la conservation, la disponibilité et, si possible, la
diversification du matériel biologique dans lequel les utilisateurs seront susceptibles de trouver de nouvelles
combinaisons génétiques pour répondre aux nécessités de la production et aux attentes de la société. Deux modes de
gestion coexistent: la gestion ex situ et la gestion in situ.
La gestion ex situ tire parti de l’existence des collections de référence et des infrastructures de recherche, d’évaluation
et d’exploitations existantes. Les spécimens ramenés des prospections ou issus des laboratoires d’amélioration y sont
rassemblés et maintenus en conditions de conservation, à l’abri de pressions de sélection aléatoires. Le processus
d’enrichissement génétique est entièrement contrôlé par les hommes et met en œuvre diverses techniques:
• Les cultures de tissus in vitro: la méthode consiste à conserver des parties minuscules de plantes dans des éprouvettes
et à faire pousser de petits plants dans des tubes contenant un milieu nutritif. Elle convient au clonage intensif d’une
espèce et à son stockage dans des conditions de croissance ralentie. Malgré ses limites c’est la seule méthode possible
de conservation ex situ pour les plantes qui ne forment pas de graines ou qui se propagent par rhizome ou bulbe. Elle
est associée parfois à la cryoconservation qui consiste à maintenir des cultures de tissus à très faible température, par
exemple dans l’azote liquide (– 196°C).
• Les banques de graines, de pollens, de spores. La plupart des espèces végétales donnent des graines qui sont la partie
de la plante la plus facile à conserver. Pour certaines espèces, dont la majorité des céréales, les graines peuvent être
séchées et maintenues à faible température (environ – 20°C) sans perdre leur viabilité. Certaines graines peuvent ainsi
survivre pendant une centaine d’années.
La gestion in situ, s’efforce quant à elle de maintenir la diversité génétique dans des sites où elle a été trouvée lors de
prospections, ou introduite à partir de laboratoires. Elle y subit les contraintes complexes de l’environnement naturel
(écosystèmes, agrosystèmes) et continue à évoluer. Plusieurs techniques sont utilisées:
• Les banques de gènes au champ: les espèces végétales qui ne donnent pas facilement de graines, ou dont les graines
ne supportent pas la congélation, sont habituellement conservées sous forme de plantes sur pied. De nombreuses
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espèces cultivées qui sont importantes pour les pays tropicaux se reproduisent par voie végétative (patate douce,
manioc, igname) et sont aussi conservées dans des jardins botaniques, des arboretums, ou des stations de recherche.
C’est également sous cette forme que l’on conserve le matériel génétique de diverses espèces telles l’hévéa, le cocotier,
le manioc, ainsi que le bananier et le caféier.
• La conservation «à la ferme»: l’objectif est de préserver les nombreuses variétés locales de plantes cultivées ou
d’animaux domestiques qui ont été patiemment sélectionnées par les agriculteurs sur des critères d’adaptation aux
conditions locales ou d’usages spécifiques. Dans de nombreux pays les agriculteurs pratiquent à la ferme la conservation
de la diversité génétique en entretenant des races traditionnelles.
• La conservation in situ des ressources génétiques des plantes sauvages apparentées aux plantes cultivées. Elle
nécessite une approche spécifique car la plupart des aires protégées ont été établies pour entretenir un paysage
renommé, ou pour sauver un mammifère ou un oiseau rare, mais rarement pour conserver une plante sauvage. En
outre, beaucoup de ces variétés sauvages ne sont présentes que dans des zones assez limitées. Il en résulte que les
zones naturelles protégées déjà existantes ne sont pas toutes aptes à la constitution de réserves génétiques de plantes
sauvages apparentées et que des réserves spécialisées sont souvent nécessaires. Il semble logique d’accorder la priorité
aux espèces qui ne peuvent être conservées facilement ex situ telles l’hévéa en Amazonie, le cacao et l’arachide en
Amérique latine, le caféier en Afrique, etc.
Les deux modes de gestion sont clairement complémentaires pour optimiser l’enrichissement des ressources
concernées. Les collections ainsi rassemblées ne présentent pas un échantillonnage équilibré de la diversité génétique
végétale globale, puisque 60% des accessions proviennent de moins de 1% des espèces vivantes. De plus l’exploration
des réserves potentielles est loin d’être assurée: les botanistes estiment que nous ne consommons que 3 000 espèces
alors que 20 000 seraient comestibles!
La gestion des ressources génétiques animales se présente différemment. Seule une quarantaine d’espèces est
concernée et beaucoup ne font pas l’objet de collections formellement organisées. Collections, banques de sperme et
élevages contrôlés sont cependant indispensables pour entretenir la diversité des races domestiques. Les saumons ou
les abeilles sont traités selon les mêmes démarches que les plantes. Un immense effort de cryoconservation est réalisé
par les banques de sperme dans le cadre de programmes d’inséminations artificielles. Le maintien des races locales à
faible effectif demande pour les ovins, les caprins, les volailles, etc., des plans d’élevage adaptés et des troupeaux
spécialisés. La charge financière en est partagée entre les institutions publiques, les associations de professionnels et de
nombreux amateurs.
Les collections de champignons et de micro-organismes ont un double rôle: servir à la fois de référence en
systématique et de source de matériel pour les utilisateurs. La Fédération mondiale des collections de cultures a recensé
quelque 800 000 souches entretenues par près de 500 collections. Celles-ci font autorité en matière de nomenclature.
Champignons et levures représentent 44%, les bactéries 43%, les virus 2%, les 11% restants comportent des algues, des
protozoaires, des protistes, des plasmides. Comme les autres collections, elles ne présentent qu’une image biaisée de
la diversité biologique parce que probablement plus des deux tiers des micro-organismes que les microbiologistes savent
observer ne sont pas cultivables en conditions artificielles de laboratoire. Par conséquent ils n’entrent pas dans les
collections vivantes (on les trouve cependant dans les banques d’ADN et de séquences).
Les bactéries représentent un gisement très important de ressources génétiques, encore peu exploré. Leur nombre a
été estimé dans la biosphère entre 4 et 6 x 1030, soit une biomasse équivalente à celle des végétaux. L’utilisation des
ressources génétiques microbiennes présente une importance réelle ou potentielle dans des domaines aussi variés que
l’industrie pharmaceutique et la santé humaine ou animale, la de l’environnement, l’agroalimentaire, les
biotechnologies (épuration, biodégradation, etc.).
On sait que dans le monde bactérien, les transferts de matériel génétique entre individus sont fréquents. Les
ressources génétiques microbiennes (les unités fonctionnelles de l’hérédité) sont donc de plus en plus considérées
comme des ressources déconnectées des organismes dans lesquelles elles s’expriment. Ainsi, le matériel génétique est
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le plus souvent conservé hors de l’organisme porteur, dans des banques de plasmides, ou de souches transformées, (E.
coli le plus souvent).
En conclusion, les collections de ressources génétiques sont peut-être loin de leurs objectifs théoriques. Elles sont
coûteuses et difficiles à entretenir. Leur simple maintien est menacé en cas de crise économique. En dépit de tous ces
défauts, elles ont apporté la preuve de leur intérêt scientifique économique et social. Une véritable lutte est engagée
entre les États, les communautés, les entreprises (nationales et multinationales) et les individus pour s’assurer la
propriété de ces ressources génétiques actuelles et futures. Les enjeux ont dépassé le niveau de la biologie. Ils sont si
forts que la mise en œuvre de la Convention sur la diversité biologique passe surtout par des négociations sur les statuts,
les droits et les redevances. Les régulations mondiales futures du commerce et de la propriété intellectuelle porteront
sans aucun doute sur les ressources génétiques.
38
8. ASPECTS SOCIO-ÉCONOMIQUES DE LA CONSERVATION ET DE LA GESTION DES
RESSOURCES BIOLOGIQUES
La diversité biologique joue un rôle important dans notre économie du fait de ses nombreuses utilisations dans l’agroalimentaire, l’industrie, la pharmacologie, les loisirs, sans oublier toutes les activités traditionnelles de cueillette, de chasse et de pêche. Mais paradoxalement, alors que la biodiversité constitue une des plus grandes richesses de la planète, nous revendiquons le plus souvent un accès gratuit aux ressources biologiques. Or, ce qui n’a pas de prix est sans valeur, selon les économistes. Certains ont alors suggéré que la protection de la diversité biologique ne deviendra crédible que lorsqu’il sera possible de démontrer les avantages économiques des décisions publiques ou privées en matière de conservation. C’est la raison pour laquelle on a vu se développer depuis deux décennies une économie de la biodiversité.
On peut également mettre en avant les nombreux services rendus par les écosystèmes, comme l’a fait le programme international «Évaluation des écosystèmes pour le Millénaire» commandité par les Nations Unies. Ces services correspondent à un ensemble de fonctions remplies par les écosystèmes et qui se révèlent utiles aux sociétés ou au bon fonctionnement de la biosphère.
Notions de biens et services fournis par les écosystèmes
La Nature a longtemps été perçue comme une source inépuisable de ressources gratuites, qu’elles soient ou non de nature biologique. Pour les économistes, les biens sont les produits que nous achetons ou vendons, et dont la valeur monétaire est fonction d’un marché. Le bois, les poissons ou les champignons appartiennent à cette catégorie. Mais la société dépend aussi des services rendus par les écosystèmes (tableau 1), services qui sont plus difficiles à apprécier en termes monétaires.
TABLEAU 1 : TYPOLOGIE DES BIENS ET SERVICES AINSI QUE DES FONCTIONS REMPLIES PAR LES ÉCOSYSTÈMES (D’APRÈS CONSTANZA et al., 1997).
Biens et services Fonctions Exemples
Régulation des gaz Régulation de la composition chimique de l’atmosphère
Équilibre CO2/O2
Régulation du climat Régulation de la température globale, des précipitations et autres phénomènes climatiques
Régulation des gaz à effet de serre
Régulation des perturbations Réponses des écosystèmes aux fluctuations de l’environnement
Contrôle des inondations, résistance à la sécheresse, protection contre les tempêtes
Régulation du cycle de l’eau Régulation des débits Approvisionnement en eau pour l’agriculture (irrigation) ou l’industrie
Approvisionnement en eau Stockage et rétention de l’eau Approvisionnement en eau par les bassins versants, les réservoirs, les aquifères
Contrôle de l’érosion Rétention des sols dans les écosystèmes
Prévention de l’érosion par le vent, le ruissellement, etc. Stockage des sédiments dans les lacs
Formation des sols Processus de formation des sols Altération des roches et accumulation de matériel organique
Cycle des nutriments Stockage, recyclage, transformation et acquisition de nutriments
Fixation de l’azote, du phosphore ou d’autres éléments nutritifs
Traitement des déchets Récupération des nutriments mobiles, dégradation des composés en excès
Contrôle des pollutions, traitement des déchets, désintoxication
Pollinisation Mouvements des gamètes floraux Fourniture de pollinisateurs pour la reproduction des plantes
Contrôle biologique Régulation des populations à travers les chaînes trophiques
Contrôle des proies par des prédateurs clés, contrôle des herbivores par les carnivores
Refuge Habitat pour des populations résidentes ou de passage
Nurseries, habitats pour espèces migratrices, etc.
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Production de nourriture Proportion de la production primaire brute qui est utilisable pour la nourriture
Production de poissons, de gibier, de fruits, de graines etc.
Matériaux La proportion de la production utilisable sous forme de matériaux
Production de bois de grume, de fuel, de fourrage
Ressources génétiques Source de matériel biologique et de substances naturelles
Médecine, gènes de résistance pour l’agroalimentaire, espèces ornementales, etc.
Loisir Fournir des opportunités pour des activités de loisirs
Écotourisme, pêche sportive, et autres activités de plein air
Culture Fournir des opportunités pour des usages non commerciaux
Valeurs esthétique, artistique, éducative, spirituelle ou scientifiques des écosystèmes
L’«Évaluation des écosystèmes pour le Millénaire» a beaucoup travaillé, dans une démarche fortement
anthropocentrée, sur la notion de services que procurent les écosystèmes vis-à-vis de certains éléments constitutifs du
bien être de l’homme (figure 1). Il peut s’agir de services de prélèvements (essentiellement les biens fournis par les
écosystèmes), de services de régulation (du cycle de l’eau ou du climat par exemple), et de services culturels qui se
réfèrent aux bénéfices immatériels issus des écosystèmes. Ces services affectent directement les populations à travers
leurs impacts sur les éléments constitutifs du bien être humain tels que la sécurité, la santé, les relations sociales et
culturelles, etc.
Figure 1 : Les services fournis par les écosystèmes et leurs liens avec le bien-être de l’homme. (D’après Évaluation des Écosystèmes pour le Millénaire.)
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ANNEXE I
Tableau - Catégories de l’UICN pour les listes rouges (UICN, 2001). L’Union Internationale pour la
Conservation de la Nature (UICN) a retenu les huit catégories qui suivent pour définir le statut des
espèces figurant sur les listes rouges. A titre d’exemple, la clef de détermination pour la catégorie CR est citée in extenso.
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ANNEXE II
Nations Unies
Assemblée générale A/CONF.151/26 (volume I) 12 août 1992
DÉCLARATION DE RIO SUR L’ENVIRONNEMENT ET LE DÉVELOPPEMENT
La Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement,
Réunie à Rio de Janeiro du 3 au 14 juin 1992,
Réaffirmant la Déclaration de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement adoptée à Stockholm le 16 juin 1972 et cherchant à en assurer le prolongement,
Dans le but d’établir un partenariat mondial sur une base nouvelle et équitable en créant des niveaux de coopération nouveaux entre les États, les secteurs-clés de la société et les peuples,
Œuvrant en vue d’accords internationaux qui respectent les intérêts de tous et protègent l’intégrité du système mondial de l’environnement et du développement,
Reconnaissant que la Terre, foyer de l’humanité, constitue un tout marqué par l’interdépendance,
Proclame ce qui suit :
PRINCIPE 1 Les êtres humains sont au centre des préoccupations relatives au développement durable. Ils ont droit à une vie saine et productive en harmonie avec la nature. PRINCIPE 2 Conformément à la Charte des Nations Unies et aux principes du droit international, les États ont le droit souverain d’exploiter leurs propres ressources selon leur politique d’environnement et de développement, et ils ont le devoir de faire en sorte que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommages à l’environnement dans d’autres États ou dans des zones ne relevant d’aucune juridiction nationale. PRINCIPE 3 Le droit au développement doit être réalisé de façon à satisfaire équitablement les besoins relatifs au développement et à l’environnement des générations présentes et futures. PRINCIPE 4 Pour parvenir à un développement durable, la protection de l’environnement doit faire partie intégrante du processus de développement et ne peut être considérée isolément. PRINCIPE 5 Tous les États et tous les peuples doivent coopérer à la tâche essentielle de l’élimination de la pauvreté, qui constitue une condition indispensable du développement durable, afin de réduire les différences de niveaux de vie et de mieux répondre aux besoins de la majorité des peuples du monde. PRINCIPE 6 La situation et les besoins particuliers des pays en développement, en particulier des pays les moins avancés et des pays les plus vulnérables sur le plan de l’environnement, doivent se voir accorder une priorité spéciale. Les actions internationales entreprises en matière d’environnement et de développement devraient également prendre en considération les intérêts et les besoins de tous les pays. PRINCIPE 7 Les États doivent coopérer dans un esprit de partenariat mondial en vue de conserver, de protéger et de rétablir la santé et l’intégrité de l’écosystème terrestre. Étant donné la diversité des rôles joués dans la dégradation de l’environnement mondial, les États ont des responsabilités communes, mais différenciées. Les pays développés admettent la responsabilité qui leur incombe dans l’effort international en faveur du développement durable, compte tenu des pressions que leurs sociétés exercent sur l’environnement mondial et des techniques et des ressources financières dont ils disposent. PRINCIPE 8 Afin de parvenir à un développement durable et à une meilleure qualité de vie pour tous les peuples, les États devraient réduire et éliminer les modes de production et de consommation non viables et promouvoir des politiques démographiques appropriées.
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PRINCIPE 9 Les États devraient coopérer ou intensifier le renforcement des capacités endogènes en matière de développement durable en améliorant la compréhension scientifique par des échanges de connaissances scientifiques et techniques et en facilitant la mise au point, l’adaptation, la diffusion et le transfert de techniques, y compris de techniques nouvelles et novatrices. PRINCIPE 10 La meilleure façon de traiter les questions d’environnement est d’assurer la participation de tous les citoyens concernés, au niveau qui convient. Au niveau national, chaque individu doit avoir dûment accès aux informations relatives à l’environnement que détiennent les autorités publiques, y compris aux informations relatives aux substances et activ ités dangereuses dans leurs collectivités, et avoir la possibilité de participer aux processus de prise de décision. Les États doivent faciliter et encourager la sensibilisation et la participation du public en mettant les informations à la disposition de celui-ci. Un accès effectif à des actions judiciaires et administratives, notamment des réparations et des recours, doit être assuré. PRINCIPE 11 Les États doivent promulguer des mesures législatives efficaces en matière d’environnement. Les normes écologiques et les objectifs et priorités pour la gestion de l’environnement devraient être adaptés à la situation en matière d’environnement et de développement à laquelle ils s’appliquent. Les normes appliquées par certains pays peuvent ne pas convenir à d’autres pays, en particulier à des pays en développement et leur imposer un coût économique et social injustifié. PRINCIPE 12 Les États devraient coopérer pour promouvoir un système économique international ouvert et favorable, propre à engendrer une croissance économique et un développement durable dans tous les pays, qui permettrait de mieux lutter contre les problèmes de dégradation de l’environnement. Les mesures de politique commerciale motivées par des considérations relatives à l’environnement ne devraient pas constituer un moyen de discrimination arbitraire ou injustifiable ni une restriction déguisée aux échanges internationaux. Toute action unilatérale visant à résoudre les grands problèmes écologiques au-delà de la juridiction du pays importateur devrait être évitée. Les mesures de lutte contre les problèmes écologiques transfrontières ou mondiaux devraient, autant que possible, être fondées sur un consensus international. PRINCIPE 13 Les États doivent élaborer une législation nationale concernant la responsabilité de la pollution et d’autres dommages à l’environnement et l’indemnisation de leurs victimes. Ils doivent aussi coopérer diligemment et plus résolument pour développer davantage le droit international concernant la responsabilité et l’indemnisation en cas d’effets néfastes de dommages causés à l’environnement dans des zones situées au-delà des limites de leur juridiction par des activités menées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle. PRINCIPE 14 Les États devraient concerter efficacement leurs efforts pour décourager ou prévenir les déplacements et les transferts dans d’autres États de toutes activités et substances qui provoquent une grave détérioration de l’environnement ou dont on a constaté qu’elles étaient nocives pour la santé de l’Homme. PRINCIPE 15 Pour protéger l’environnement, des mesures de précaution doivent être largement appliquées par les États selon leurs capacités. En cas de risque de dommages graves ou irréversibles, l’absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l’adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l’environnement. PRINCIPE 16 Les autorités nationales devraient s’efforcer de promouvoir l’internalisation des coûts de protection de l’environnement et l’utilisation d’instruments économiques, en vertu du principe selon lequel c’est le pollueur qui doit, en principe, assumer le coût de la pollution, dans le souci de l’intérêt public et sans fausser le jeu du commerce international et de l’investissement. PRINCIPE 17 Une étude d’impact sur l’environnement, en tant qu’instrument national, doit être entreprise dans le cas des activités envisagées qui risquent d’avoir des effets nocifs importants sur l’environnement et dépendent de la décision d’une autorité nationale compétente. PRINCIPE 18 Les États doivent notifier immédiatement aux autres États toute catastrophe naturelle ou toute autre situation d’urgence qui risque d’avoir des effets néfastes soudains sur l’environnement de ces derniers. La Communauté internationale doit faire tout son possible pour aider les États sinistrés. PRINCIPE 19 Les États doivent prévenir suffisamment à l’avance les États susceptibles d’être affectés et leur communiquer toutes informations pertinentes sur les activités qui peuvent avoir des effets transfrontières sérieusement nocifs sur l’environnement et mener des consultations avec ces États rapidement et de bonne foi.
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PRINCIPE 20 Les femmes ont un rôle vital dans la gestion de l’environnement et le développement. Leur pleine participation est, donc, essentielle à la réalisation d’un développement durable. PRINCIPE 21 Il faut mobiliser la créativité, les idéaux et le courage des jeunes du monde entier afin de forger un partenariat mondial, de manière à assurer un développement durable et à garantir à chacun un avenir meilleur. PRINCIPE 22 Les populations et communautés autochtones et les autres collectivités locales ont un rôle vital à jouer dans la gestion de l’environnement et le développement du fait de leurs connaissances du milieu et de leurs pratiques traditionnelles. Les États devraient reconnaître leur identité, leur culture et leurs intérêts, leur accorder tout l’appui nécessaire et leur permettre de participer efficacement à la réalisation d’un développement durable. PRINCIPE 23 L’environnement et les ressources naturelles des peuples soumis à oppression, domination et occupation doivent être protégés. PRINCIPE 24 La guerre exerce une action intrinsèquement destructrice sur le développement durable. Les États doivent, donc, respecter le droit international relatif à la protection de l’environnement en temps de conflit armé et participer à son développement, selon que de besoin. PRINCIPE 25 La paix, le développement et la protection de l’environnement sont interdépendants et indissociables. PRINCIPE 26 Les États doivent résoudre pacifiquement tous leurs différends en matière d’environnement, en employant des moyens appropriés conformément à la Charte des Nations Unies. PRINCIPE 27 Les États et les peuples doivent coopérer de bonne foi et dans un esprit de solidarité à l’application des principes consacrés dans la présente Déclaration et au développement du droit international dans le domaine du développement durable.