concilier démocratie et efficacité économique : l’exemple mutualiste - résumé

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Economy & Finance


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Page 1: Concilier démocratie et efficacité économique : l’exemple mutualiste - Résumé

RésuméModèle économique original, sans but lucratif et sans actionnaire, le mutualisme fonctionne depuis deux siècles autour d’un mode de gouvernance fondé sur le principe « un homme – une voix » et constitue aujourd’hui une voie complémentaire aux sociétés anonymes. Au-delà de l’attachement à un corpus de valeurs

commun structuré par le sociétariat et porté par une vision de long terme, le mutualisme se caractérise par une très grande diversité des statuts juridiques et des secteurs d’activité qu’il recouvre (santé, assurance banque, grande distribution, production agricole…). Ce rapport s’est particulièrement attaché aux secteurs de la banque et de l’assurance afin d’en analyser les indiscutables réussites et de formuler un certain nombre de propositions afin d’en pérenniser l’efficacité.

1. Un modèle ancré dans l’histoire et fort d’une très grande diversité

Le mouvement mutualiste plonge ses racines dans l’histoire sociale du XIXe siècle. Face à la misère induite par la Révolution industrielle et pour pallier l’incurie des pouvoirs publics, les citoyens s’associent pour créer les premiers organismes de solidarité. Dans le domaine bancaire, les banques mutualistes (coopératives aujourd’hui) ont commencé à se structurer au XIXe siècle. Toutes, à l’origine, partagent la même vocation : financer l’activité de catégories professionnelles qui n’ont pas accès au crédit – les agriculteurs pour le Crédit Agricole ou le Crédit Mutuel, les artisans et les petits commerçants pour la Banque Populaire. On dénombre aujourd’hui en France, sur les marchés de la banque et de l’assurance, trois grandes familles :

• les banques coopératives, encadrées par la loi de 1947, qui se caractérisent par deux éléments communs : un échelon local qui prend la forme d’une coopérative et une structure nationale dite en « pyramide inversée », les banques régionales étant actionnaires d’une structure commune qui est également organe central ;

• les mutuelles d’assurance qui se distinguent entre les « mutuelles 45 », principalement actives dans le domaine de l’assurance complémentaire santé, d’une part ; et les sociétés d’assurance mutuelle, ou SAM qui sont pour leur part régies par le code des assurances. À l’origine spécialisées en assurance de biens et de responsabilité, elles ont également désormais une activité significative en assurance de personnes ;

• enfin, les institutions de prévoyance qui présentent des spécificités distinctes des autres acteurs mutualistes. Créées et gérées par les partenaires sociaux d’une entreprise, d’une branche ou de plusieurs branches, elles ont pour but de protéger l’intérêt de leurs participants ou de leurs adhérents. Elles ne proposent en conséquence que des contrats d’assurance de personnes à caractère collectif.

2. Un modèle majoritaire dans les services financiers et dont la performance est soutenue

Le modèle économique du mutualisme domine largement les marchés de la banque de détail (67 % des encours de dépôts et 71 % des crédits aux particuliers sont le fait des banques coopératives) ainsi que celui de l’assurance des biens et des personnes. Forts de leur ancrage territorial profond et de leur tradition de proximité – les banques coopératives représentent 60 % des 36 200 agences bancaires – les établissements mutualistes ont également un rôle social affirmé notamment en zones rurales et sensibles. C’est également vrai des assureurs mutualistes qui déploient un certain nombre d’initiatives à l’échelle territoriale (structuration de réseaux de soins, prise en compte de risques professionnels spécifiques) qui peinent néanmoins à être perçues comme une spécificité du modèle, faute de recensement et de quantification systématique.

C’est également un modèle dont la performance économique est démontrée notamment en banque de détail (en 2012, les établissements mutualistes ont généré plus de 2/3 de la rentabilité d’exploitation des établissements en France).

3. Un modèle qui doit s’adapter à un environnement en mutation

Les services financiers connaissent aujourd’hui de profondes mutations. Le modèle relationnel tout d’abord, évolue sous l’effet des attentes nouvelles des ménages. Internet fait de l’accès aux services 24h/24 un critère essentiel de choix au détriment de la proximité géographique, point fort traditionnel des mutuelles. De même, le critère du prix peut jouer à l’encontre de la relation de long-terme.

Par ailleurs, les vagues réglementaires qui se sont succédé depuis 2007 ont impacté durablement l’environnement bancaire et assurantiel et n’ont pas nécessairement tenu compte des spécificités de la gouvernance des mutuelles, notamment du rôle particulier des élus. Par ailleurs, les normes prudentielles internationales mettent désormais l’accent sur la diversification des risques ce qui peut être contradictoire avec le profil de certaines mutuelles d’assurance, centré sur la protection d’un risque ou sur un territoire.

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INSTITUT MONTAIGNE

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En réponse à ces évolutions, les acteurs mutualistes ont largement participé à des mouvements de consolidation et de rapprochements afin d’optimiser les coûts et diversifier les risques. S’ils souhaitent poursuivre leur croissance, les établissements sont confrontés au défi de l’internationalisation et se heurtent à l’absence de statut européen de mutuelle.

4. Quelques pistes d’action pour maintenir et conforter la robustesse et la performance du modèle

Mieux expliciter et communiquer sur les spécificités du modèle mutualiste

Il s’agit de faire connaître les valeurs fondamentales du mutualisme ainsi que les caractéristiques de son modèle économique (équité, approche de long terme, non-distribution des profits) et de mettre en exergue les externalités positives du mutualisme tant auprès des clients/adhérents que des pouvoirs publics. Afin d’attirer les futurs collaborateurs, cette communication doit être déployée en amont, au travers de cursus spécifiques (grandes écoles et universités). Enfin, il est plus que jamais clef de faire connaître les spécificités du mutualisme auprès du régulateur européen, davantage familier du modèle des SA, et accroître ainsi la lisibilité de ce type de gouvernance afin que ses spécificités soient mieux prises en compte.

Enrichir le lien avec les clients/sociétaires/adhérents

Tout en restant attachés au caractère universel de l’offre mutualiste, les modes de relations et l’offre produit doivent aujourd’hui s’adapter afin de tirer avantage des nouvelles technologies et répondre aux attentes spécifiques de certaines clientèles (notamment les jeunes et la clientèle entreprise). Les acteurs mutualistes peuvent pour ce faire s’appuyer sur leurs sociétaires qui sont des relais essentiels pour faire remonter attentes et besoins dans une logique de co-création.

Se doter des outils financiers et juridiques afin de permettre le renforcement des fonds propres, une plus grande agilité dans l’organisation et le développement international

Compte tenu de leur modèle économique spécifique, un certain nombre d’outils doivent être mis en place afin d’assurer aux acteurs mutualistes un développement pérenne :

• accentuer l’effort de pédagogie auprès des sociétaires afin de faire de l’endettement une possibilité de refinancement normale ;

• encourager le regroupement de mutuelles autour de pôles d’adossement ou favoriser la mutualisation de moyens entre petites entités ;

• doter le statut de SGAM de la possibilité de créer des paliers de sous-consolidation ;

• améliorer et harmoniser les modalités de contrôle, de reporting et de gouvernance des petites mutuelles afin de rendre plus lisible le modèle au niveau européen.

Renforcer la gouvernance au travers de la mise en œuvre de bonnes pratiques

Afin que les Conseils des groupes mutualistes puissent exercer de façon efficace et sereine leurs missions, les acteurs mutualistes ont mis en place différentes bonnes pratiques, qui gagneraient à être déployées à l’ensemble du secteur qu’il s’agisse de parcours de formation pour les administrateurs élus ; de la détection de jeunes talents ; du renouvellement régulier du conseil (par des limites d’âge ou par des règles de non cumul dans le temps des mandats) ; de l’organisation des processus de décision permettant aux élus une réelle appropriation des dossiers et la collecte d’informations complémentaires le cas échéant. L’usage des nouveaux moyens technologiques peut également constituer un moyen important pour améliorer la participation des membres aux Assemblées générales et donner à cette instance tout son rôle dans les débats et la prise de décision.