comité de suivi de l’appel à la paix et à la réconciliation ... oupes ont été éguliè ement...
TRANSCRIPT
CONFERENCE-DEBAT La crise centrafricaine : défis et enjeux
Agir en solidarité pour la paix durable en Centrafrique
À l’occasion de la journée célébrant la cohabitation pacifique au Tchad, le 25 janvier 2014, le
CSAPR a organisé une conférence-débat sur la crise centrafricaine. Ne pouvant rester indiffé-
rent, le réseau continue de se mobiliser pour un retour à la paix et la stabilité.
Cette conférence fut l’occasion de faire
une analyse politico-sécuritaire des évène-
ments en Centrafrique, de partager sur les
initiatives existantes en faveur de la paix et
d’envisager des propositions de sorties de
crise. Le CSAPR a eu l’honneur d’accueillir
des panélistes de haut niveau, acteurs
politiques et sociaux de différentes ten-
dances :
- Dr Beyom Malo Adrien, Ministre conseil-
ler à la Présidence de la République, Se-
crétaire général du parti au pouvoir, le
MPS (Mouvement Patriotique du Salut).
- Dr Gali Gatta Ngothe, Député, Secrétaire Général du parti d’opposition UFD/PR (Union des
Forces Démocratiques/Parti républicain), membre de la CPDC (Coordination des Partis pour
la Défense de la Constitution).
- Mr Mahamat Djigadjimbaye, coordinateur de la CASCIDHO (Coordination des associations
de la société civile et de défense des droits de l’Homme).
- Mr Pyrrhus Boguel, Président de la gouvernance associative de l’APLFT (Association pour la
Promotion des Libertés Fondamentales au Tchad, association membre du CSAPR).
Les échanges ont essentiellement porté sur la cause de la crise en Centrafrique et en particu-
lier sur l’intervention militaire tchadienne. Depuis le début du conflit, des éléments de nos
troupes ont été régulièrement accusées d’entretenir les violences en RCA aux côtés de la Sélé-
ka. Le haut commissariat aux droits de l’homme a même indiqué en janvier 2014 avoir eu
connaissance de « multiples témoignages de collusion » entre troupes tchadiennes et Séléka.
De nombreux observateurs s’interrogent sur l’implication des autorités de notre pays dans le
conflit et sur son potentiel soutien au mouvement rebelle.
Selon le Secrétaire général du MPS, l’intervention chez le voisin centrafricain était inévitable :
la protection des tchadiens en RCA et le risque de propagation du conflit nécessitaient son
engagement. Ne pas intervenir aurait été perçu comme une fuite de responsabilité. Avec le
sommet extraordinaire de la CEEAC présidé par le Tchad qui a poussé au retrait du Président
de la transition Michel Djotodia, la communauté des Etats d’Afrique Centrale a permis l’ouver-
ture d’une nouvelle perspective pour la résolution du conflit, avec l’instauration de la nouvelle
transition démocratique. Mr Adrien Beyom a appelé à être « solidaire pour les actions en fa-
veur de la paix », car « sans le Tchad, la zone aurait pu être totalement déstabilisée ». L’inter-
vention du coordinateur de la CASCIDHO allait dans le même sens : « Nous avons une respon-
sabilité très importante en RCA. Le Tchad a l’obligation a l’obligation d’envoyer l’armée pour
asseoir la paix et veiller à la protection des Tchadiens ».
Pour le député de l’opposition au contraire, le Tchad devait se retirer dès que possible du
théâtre des opérations. Par les mots « J’accuse le pouvoir actuel », il a ouvertement désigné
l’exécutif comme étant le responsable de la situation qui se déroule en RCA. Depuis des géné-
rations, le Tchad ferait et déferait le pouvoir centrafricain: « Nous nous sommes transformés
en parrains de chefs d’Etats en RCA, qui doivent tous faire un passage obligé par N’Djamena
avant Bangui » a –t-il déclaré. Dr Gali Gatta Ngothe affirme que le mouvement Séléka est bien
La lettre du CSAPR vous permet de rester informés
des activités du réseau.
+235 66 29 48 65 +235 60 88 85 53
www.initiative-paix-tchad.org
LES BREVES
Le 4 février, le coordonateur du CSAPR a ren-
contré un Conseiller de l’ambassadeur de la
RCA au Tchad pour échanger sur le conflit et
sur les actions menées par le CSAPR pour la
paix durable au Tchad et dans la sous-région.
Suite à la sortie le 12 février de son 3ème
communiqué de presse pour la restauration
de la paix en RCA, le CSAPR a organisé le 17
février une rencontre d’échanges d’informa-
tions sur le conflit centrafricain avec quel-
ques membres de la société civile et le député
Gali (UFD/PR). L’APLFT, TNV, l’AFDCPT, l’ACAT,
et l’APAD étaient présents.
Du 17 au 26 février, le CSAPR a été convié
par l’ONG ACORD à la mission d’évaluation
de ses actions menées dans le Guera auprès
des structurations paysannes. Chargé d’éva-
luer l’impact politique du projet, le CSAPR a pu
constater une réelle élévation du niveau de
conscience citoyenne des acteurs locaux, et de
leur potentiel de propositions et d’influence
dans leur milieu. Le CSAPR va lui aussi mener
de plus en plus d’actions en milieu rural, où il
existe une dynamique citoyenne en pleine
émergence.
Conférence-débat sur la crise centrafricaine…….p1
Appui à la communauté peule réfugiée…….………p2
Evaluation des activité de dialogue acteurs politi-
ques - société civile…………………………………….…….p3
Voyage d’échanges Moundou-Goz Béida………....p4
Dialogue de femmes, dialogue de cultures…..…..p4
Programme Paix………………………………………..……..p5
La réaction des membres…………………….…………...p6
La lettre du CSAPR Comité de Suivi de l’Appel à la Paix et à la Réconciliation
Avril 2014
Pour plus d’informations,
contactez-nous !
Coordination Nationale BP 4559 -Bureau Inades formation
Ardep Djoumal—N’Djamena
2
« soutenu par Deby, qui lui aurait fournit des armes ». Selon
lui, des éléments de l’Etat-major de la Séléka auraient été en
visite à N’Djamena quelques jours avant les premières offensi-
ves sur Bangui. L’ingérence politique du Tchad serait justifiée
par la préservation d’intérêts stratégiques, notamment pétro-
liers et diamantifères. Il a par la suite insisté sur les conséquen-
ces néfastes de l’interventionnisme militaire tchadien, qui peut
entraver l’intégration de la sous-région en instaurant un climat
de méfiance entre les Etats de la zone.
Tous les intervenants ont exprimé leur inquiétude quant à la
future relation entre tchadiens et centrafricains, et notamment
sur l’importance du travail de réconciliation à accomplir. Le
CSAPR partage cette appréhension. Un fort sentiment anti-
tchadien s’est confirmé jour après jour depuis le début du
conflit. Aujourd’hui, Ils sont encore nombreux à être pourchas-
sés en Centrafrique par les anti-Balakas. L’amalgame tchadiens
= musulmans = Séléka est très prégnant. Le CSAPR appelle au
respect et à la tolérance. Les acteurs de la vie publique tcha-
dienne et centrafricaine doivent lutter contre ces stigmatisa-
tions basées sur l’ignorance. Et face à l’enlisement de la situa-
tion en RCA et à la difficulté des forces françaises et africaines à
rétablir le calme, le CSAPR appelle de nouveau au déploiement
de la mission onusienne le plus rapidement possible, d’autant
plus que le Tchad se retire à présent du théâtre des opérations.
En effet, le jeudi 3 avril, le chef de la diplomatie tchadienne,
Mr Moussa Faki Mahamat, a annoncé le retrait du contingent
tchadien de la MISCA, suite aux accusations répétées dont il a
fait l’objet. Avec environ 850 hommes, le Tchad aura fournit
l’un des plus importants contingents de la MISCA, forte de 6000
militaires. Ce coup de théâtre survient plus précisément après
la mort d’au moins 24 habitants de Bangui le 29 mars. Le haut
commissariat aux droits de l’homme les a accusé « d’avoir tiré
sans discrimination dans la foule », alors que les soldats se-
raient tombés dans une embuscade des anti-Balakas.
Les déclarations de Human Rights Watch du 5 février, après
celles du Commissariat aux droits de l’Homme de janvier,
avaient déjà particulièrement choqué : elles témoignaient de la
participation des troupes à de nombreux faits de violences et
affirmaient qu’elles avaient facilité le mouvement des chefs
rebelles. Il s’agit de très graves accusations portées contre l’ar-
mée tchadienne. Il importe aujourd’hui de faire la lumière de
manière objective et rationnelle sur ces évènements et plus
largement sur toutes les violations des droits de l’Homme com-
mises en Centrafrique. Le CSAPR avait déjà auparavant appelé à
l’ouverture d’une enquête internationale rigoureuse.
Le CSAPR s’engage dans le plaidoyer en faveur des réfugiés peuls centrafricains au Tchad
Le CSAPR mène un plaidoyer actif pour la protection de cette communauté marginalisée, gravement victime du conflit en
Centrafrique. Environ 40 000 peuls seraient aujourd’hui réfugiés au Tchad.
Depuis le début du conflit, le CSAPR a régulièrement échangé avec la société civile centrafricaine. C’est donc tout naturellement
que l’association pour l’intégration et le développement social des peuls Bororo de Centrafrique (AIPSPC) s’est tournée vers
nous pour l’appuyer dans ses actions au Tchad, où la plupart des membres s’y sont réfugiés. Le CSAPR a d’abord soutenu la dif-
fusion mi-février de son mémorandum : Les peuls bororo centrafricains réfugiés au Cameroun et au Tchad : des communautés
en danger. Suite à cela, le CSAPR a conduit la délégation auprès du Haut Commissariat aux Réfugiés et d’OXFAM pour qu’ils
puissent soumettre leurs revendications :
La représentante du HCR au Tchad, Mme Aminata Gueye, a affirmé que son organisation entendait favoriser la cohabitation
pacifique et lutter contre l’apatridie à travers plusieurs actions :
- la mise en place d’un projet pour la coexistence et l’éducation à la paix ciblant les réfugiés et autochtones pour minimiser les
risques de conflits, notamment religieux. Ce projet cherche aussi à contrer la stigmatisation subie par certaines minorités, y
compris les peuls, dans la communauté des réfugiés ainsi que chez les hôtes.
- le HCR est en pourparlers pour la dotation de documents d’état civil, dans le but de lutter contre l’apatridie.
- le HCR mène un plaidoyer auprès de l’Etat tchadien pour qu’il octroie des sites où les populations réfugiées pourraient s’instal-
ler avec leur bétail. Une étude de la cartographie des zones d’hébergement serait en cours.
En attendant, les peuls poursuivent leurs actions ; le CSAPR à leurs côtés. Fin mars, une délégation s’est rendue pendant 10
jours sur la zone des trois frontières Tchad-RCA-Cameroun. Sa mission : identifier les zones de rassemblement des réfugiés
peuls et leurs besoins d’urgence. Elle fut composée du CSAPR, de l’AIPSPC, de la coopération nationale des éleveurs du Tchad
(CONARET), et de l’association des jeunes nomades pour le développement rural et de l’élevage (AJNDRET). Un comité de
pilotage Tchad-Cameroun a été mis en place. Dans le futur proche, il s’agira de mettre en place une plateforme sous régionale
des organisations peules pour la défense des intérêts des peuples autochtones minoritaires.
Avec le soutien de :
trouver des sites qui préservent leur mode de vie d’éleveurs et favoriser la transhumance de leurs bêtes ;
favoriser l’enregistrement acceptable de cette population en tant que réfugiée ;
intervenir pour l’obtention des documents d’état civil pour éviter l’apatridie ;
participer à la lutte contre la discrimination que subit cette population.
3
L’évaluation était nécessaire pour analyser les forces et les
faiblesses du processus et projeter les futures actions à mener.
Le CSAPR a sollicité pour l’évènement l’appui d’un expert inter-
national ayant une bonne connaissance des partis politiques et
de la société civile au Tchad, et la maitrise de la négociation
politique et de la médiation : Dr Christian Pout, chercheur à
l’Institut des Relations Internationales du Cameroun (IRIC).
L’évaluation a permis de constater que le processus de dialo-
gue fut largement apprécié par les acteurs, tant sur le plan de
la diversité des activités proposées que sur l’état d’esprit géné-
ral. Les relations entre familles d’acteurs se sont nettement
améliorées. Au début du projet, février 2012, elles dialoguaient
difficilement suite aux crises politiques successives qui ont se-
couées le pays. Finalement, grâce à nos activités, elles sont
parvenues à échanger. Cependant, s’il y a eu « déblocage », la
méfiance est toujours de mise. Le dialogue doit être renforcé
avec l’ensemble de la classe politique tchadienne. Mais les der-
nières rencontres entre société civile et acteurs politiques sont
encourageantes : nous constatons une évolution favorable avec
l’entretien récent passé avec Mr Beyom Adrien Malo (MPS), sa
participation à la conférence-débat sur la crise centrafricaine
en tant que panéliste (p1), et notre récente rencontre avec Mr
Saleh Kebzabo, chef de file de l’opposition.
Pourquoi ce processus de dialogue ? Le renforcement du dialo-
gue entre les acteurs nationaux se présente encore comme une
nécessité dans le contexte national et sous régional actuel. La
crispation politique autour du cadre national de dialogue politi-
que (auquel la société civile est partie prenante), le retard dans
l’organisation du futur processus électoral, l’annonce l’année
dernière par le Gouvernement d’une tentative de déstabilisa-
tion des institutions sont autant d’éléments qui le justifient
déjà à suffisance. Le terrible conflit en RCA nous le démontre
aussi : il est nécessaire de conserver un lien entre les leaders de
la vie publique pour éviter, en cas de crise politique aigüe, les
instrumentalisations, les stigmatisations, les replis identitaires,
et a fortiori, la prise des armes. Les élites doivent savoir se par-
ler pour réagir rapidement, se mobiliser collectivement pour
éviter la résurgence des conflits. Tous doivent œuvrer à la cons-
truction d’une société citoyenne homogène et non à son déchi-
rement. Dans cette optique, il faut notamment stopper ces
clichés de compétition entre acteurs politiques et société civile
pour œuvrer au décloisonnement des dynamiques et faciliter la
résolution des crises potentielles.
Tous les participants à l’évaluation ont d’ailleurs affirmé qu’ils
existaient toujours de graves facteurs de déstabilisation du
pays et qu’il fallait ouvrir le débat entre acteurs politiques et
société civile sur ces questions : mauvaise gouvernance, cor-
ruption, décentralisation, justice instrumentalisée, confiscation
économique, inégalités intercommunautaires, ethnicisme des
forces de défense et de sécurité, etc...Les débats doivent inté-
grer de nouveaux acteurs et être répercutés à la base. Avec ces
éléments, le CSAPR s’engage en confiance sur un nouveau plan
triennal d’activités de dialogue multi-acteurs, toujours dans
l’optique de construction d’une société citoyenne et en paix.
Activités de dialogue acteurs politiques - société civile pour la consolidation de la paix au Tchad
Évaluation à mi-parcours
Selon les parties prenantes au processus de dialogue…
- le projet aura permis d’apporter le respect entre chaque famille
d’acteurs.
- on passe d’une logique de confrontation au dialogue.
- le CSAPR offre de véritables espaces de débats ouverts à tous, où
chacun peut s’exprimer librement.
- les débats du CSAPR permettent l’élaboration de propositions qui
trouvent un écho dans les médias et donc auprès des autorités.
- les femmes doivent participer davantage.
- il faut multiplier les actions en province où les échanges sont très
francs et où les autorités publiques sont ouvertes au dialogue.
- les autorités publiques doivent davantage être intégrés au processus
de dialogue
- les efforts de médiatisation des activités du CSAPR doivent être ac-
crues au niveau de la base, en vue de favoriser la construction d’une
opinion publique nationale et la construction d’une société citoyenne.
- de nouvelles activités de renforcement des capacités doivent être
organisées, notamment en matière de recherche et d’analyse. Les
acteurs ont des difficultés pour accéder à l’information et déplorent le
manque de base factuelle à leur disposition pour, par exemple, mon-
ter un plaidoyer et asseoir leurs revendications.
Le processus de dialogue « 2ème génération » est attendu !
Nos activités de dialogue organisées depuis 2012
à N’Djamena et en province :
forum d’échanges entre acteurs politiques et société civile ;
mission d’échange d’expériences sur les mécanismes de consolida-
tion de la paix au Burundi ;
caravane de consolidation de la paix dans 12 villes du pays ;
formation en communication politique à l’IRIC ;
cafés politiques (espaces de débats politiques)
fora régionaux de consolidation de la paix
Renforcement des capacités des cadres de dialogue pour la pré-
vention et la gestion des conflits
Les 15 et 16 janvier 2014, le CSAPR a organisé une évaluation des activités de dialogue entre acteurs politiques et société civi-
le. Depuis février 2012, le CSAPR mène en effet un projet soutenu par le Département Fédéral des Affaires Étrangères suisse,
qui vise la pérennisation du dialogue entre acteurs politiques et leaders de la société civile. Le résultat fut largement positif et
le CSAPR s’engage à présent sur la voie d’un nouveau plan triennal d’activités.
4
En cas de crise au niveau local, ces cadres
peuvent contribuer à faire la différence.
En devenant des réseaux de confiance
entre acteurs, ils sont des mécanismes
d’alerte et d’intervention rapide pour la
résolution des conflits. L’exemple du co-
mité de médiation de Bangassou en RCA
est révélateur : après de très forte ten-
sions entre chrétiens et musulmans en
octobre 2013, les représentants des deux
communautés avaient mis sur place un
comité de médiation au sein duquel sié-
geaient musulmans et chrétiens ensem-
ble. Il sillonnait les quartiers et avait réus-
si à cantonner la violence.
A Moundou, le cadre de dialogue est
constitué des représentants de l’adminis-
tration, des organisations de la société
civile, des chefs traditionnels et religieux,
des forces de l’ordre. A Goz Beida, l’asso-
ciation pour la réconciliation et la cohabi-
tation pacifique en faveur de la paix dans
la région du Sila rassemble les représen-
tants des différentes communautés de la
région. Le caractère multi-acteurs consti-
tue véritablement une force puisque cela
permet une meilleure coordination, la
désignation de l’acteur le plus à même de
résoudre le conflit, qui va tirer sa légitimi-
té des autres acteurs du cadre.
Ces voyages auront permis de rendre
compte de l’importance des dynamiques
de dialogue existantes au sein des cadres.
Par exemple, les deux structures entre-
tiennent aujourd’hui de bonnes relations
avec l’administration, ce qui facilite indé-
niablement le déroulement des missions
de gestion des conflits. A Moundou, elle
est même intégrée au cadre. Ce rapport
pourrait être élargi à Goz Beida : en de-
hors de la délivrance des ordres de mis-
sion et de la sécurisation du terrain, ils
envisagent aussi une collaboration sur la
prévention des conflits (renforcement de
la communication ; identification en
amont des crises potentielles…).
Cette mission aura permis d’amorcer le
dialogue entre les différents acteurs de la
paix au Tchad, et d’envisager dans le fu-
tur la vulgarisation de leurs pratiques
dans d’autres localités du pays par les
acteurs eux-mêmes. En effet, ils ont pu
échanger sur les solutions que chacun a
mis en œuvre pour la résolution de cer-
tains conflits. Ils se sont rendus compte
que certaines solutions pouvaient être
dupliquées dans leur localité respective.
Les « tournées de paix » organisées par
les acteurs de Goz Beida furent fortement
appréciés des Moundoulais, tout comme
la matérialisation physique des couloirs
de transhumance par exemple.
Les acteurs ont émis le souhait de par-
courir le Tchad afin d’encourager la créa-
tion d’autres cadres de dialogue. L’enri-
chissement mutuel est clairement mani-
feste et l’engouement des acteurs lors
des voyages encourage le CSAPR à persé-
vérer dans l’appui aux initiatives locales
de paix.
Une grande rencontre des leaders féminins a eu lieu à Moundou du 16 au 20 décembre 2013, dans le cadre du projet « consolidation du dialogue interculturel par la construction des espaces de médiation sociale entre musulmans et chrétiens».
Ce forum a regroupé 60 femmes leaders venant de toutes les régions du Tchad, aussi bien du monde rural que urbain. Ces fem-mes sont catholiques, protestantes ou musulmanes. Dans l’optique de l’amélioration du vivre-ensemble, elles ont discuté de leur appréhension des rapports sociaux de genre en milieu musulman et en milieu chrétien. Les débats ont permis d’envisager des pistes d’actions pour faire avancer la cause des femmes dans leurs zones respectives, en tenant compte des différences socio-culturelles existantes. Elles ont notamment préconisé l’adoption du code de la famille qui permettrait l’évolution de leur statut.
Voyage d’échange d’expériences des cadres de dialogue de Moundou et Goz Beida
Dialogue de femmes, dialogue de cultures
« Les coutumes et les religions ne constituent pas un frein
au dialogue, c’est la peur de l’autre. Nous avons un passé
figé en nous ; l’histoire du Tchad nous a marqué […] Nous
devons avoir un code de la famille pour que la femme ait
un statut. Elle est considérée comme un objet et n’a pas
droit à l’héritage. Cela me fait mal. Il faut qu’il y ait des
femmes fortes au niveau du pouvoir pour nous soutenir. »
« Je vis à Goré. Je suis venue au forum avec une femme
musulmane. J’avais peur que son mari refuse qu’elle ne
parte. Mais il a finalement accepté. Par contre, une chré-
tienne qui était aussi invitée au forum a refusé de partir
car j’étais accompagné de la femme musulmane ! »
« Les discussions sur le thème de l’excision m’ont touché.
C’est une pratique néfaste pour la société et surtout pour
la fille tchadienne. Il faut que mes sœurs le comprennent.
Je refuse que ma fille soit excisée un jour. Je suis prête à
me battre contre cela. »
Porté par la Commission diocésaine Justice et Paix, ce projet de
construction d’espaces de médiation entre chrétiens et musul-
mans fut monté en collaboration avec le CSAPR, le Conseil supé-
rieur des affaires islamiques, l’Entente des Eglises et missions
évangéliques au Tchad, le Réseau pour la promotion de la paix et
de la citoyenneté au Tchad, l’Agence pour la coopération et la
recherche au développement. Déjà en 2010, puis en 2012, nous
nous étions engagés ensemble dans un processus interculturel
d’échanges pour le renforcement de la cohabitation interreligieu-
se. Le projet avait permis de construire une analyse commune
chrétiens-musulmans sur les enjeux du vivre-ensemble au Tchad.
les éléments suivants avait été mis en exergue : le peu de forma-
tion des leaders religieux, l’interprétation des Ecritures pour servir
des objectifs politiques, le double langage entre valeurs promues
et valeurs vécues (mariage mixte, partage des repas, participation
citoyenne…), etc. Le CSAPR affirme la nécessité de poursuivre le
travail de changement de perception sociale en élargissant les
lieux d’interconnaissance entre chrétiens et musulmans.
Les cadres de dialogue sont des structures de gestion des conflits au niveau local. Le CSAPR soutient leurs actions pour la paix.
Après une session de renforcement des capacités sur les mécanismes de prévention et de gestion des conflits fin 2013, le
CSAPR a organisé un voyage d’échange d’expériences : le cadre de dialogue de Moundou s’est rendu à Goz Beida (est du
Tchad) du 10 au 19 novembre 2013 et celui de Goz Beida s’est rendu à Moundou (sud du Tchad) du 22 au 29 décembre 2013.
Les voyages d’échanges ont été très appréciés
par les gouverneurs des régions du Sila et du
Logone Occidental, qui ont suivi au quotidien
le déroulement des missions. Le gouverneur
du Logone Occidental a déclaré que « ces
voyages sont les vraies activités de la société
civile qui vont permettre aux tchadiens de se
réconcilier ».
5
Le CSAPR s’engage dans le Programme Paix ! Initié par ACORD et
le CCFD-terre solidaire, il s’agit d’un Programme multi-acteurs, qui
vise l’amélioration du vivre-ensemble dans la sous-région (Tchad,
RCA, Soudan, Sud Soudan).
Il fut présenté à N’Djamena le 7 mars dernier par Mr Seid Sultane, directeur pays ACORD Tchad, Mr Bruno Angsthelm, chargé
de mission Afrique au CCFD-terre solidaire, avec la participation de Mr Abderamane Ali Gossoumian, coordonnateur du CSAPR.
Le Programme Paix favorise les processus de structuration de la société civile et des démarches pluri-acteurs, des dynamiques
transfrontalières et des actions sous-régionales. Nous l’appelons « Programme Paix » mais il s’agit bien plus en réalité d’une
vision et d’un engagement partagé entre les acteurs du monde de la solidarité et de la coopération. Il ne s’agit pas en effet d’un
programme au sens classique du terme avec un cadre opératoire et un financement global comme cela est la norme habituelle
de travail. Il s’agit plutôt d’un ensemble d’actions, de projets, d’études, de rencontres, et de programmes classiques, initié et
approprié par les sociétés civiles sous-régionales. Elles apporteront progressivement des réponses aux 3 causes profondes de
conflits retenues comme axes d’intervention à long terme : la compétition sur les ressources naturelles, les tensions identitaires
au sein des sociétés, la mauvaise gouvernance politique.
Partenaires du Programme Paix :
Au Tchad : ACORD Tchad, CSAPR, APAD/
REPPACT (réseau pour la promotion de la paix et de
la citoyenneté au Tchad), GRAMP-TC (Groupe de
recherches alternatives et de monitoring du projet
Pétrole Tchad Cameroun)
En RCA : ACORD RCA, OCDH (Observatoire centra-
fricain des droits de l’Homme)
Au Sud Soudan : ACORD SUD Soudan
Les 3 causes profondes de conflits ont pu être
identifiées suite à un travail de recherche méti-
culeux lancé par ACORD et le CCFD-terre
solidaire dans l’ensemble des 4 pays concer-
nés. Il était nécessaire, avant même d’envisa-
ger une stratégie sous-régionale partagée,
d’identifier les dynamiques communes des
conflits et les actions menées par les sociétés
civiles locales. L’ensemble de ces réflexions,
qui ont donc ouvert la voie au Programme Paix,
sont compilées dans l’étude « Des sociétés
prises au piège, conflits et enjeux régionaux ».
Programme Paix : un portail pour agir auprès des instances de décisions interétatiques
Le 21 février dernier, un forum des organisations de la société civile s’est
tenu à Maseru, au Lesotho. Le forum avait pour objet d’émettre des recom-
mandations au Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine pour amé-
liorer leur accès à cette instance et faciliter leur interaction (révision de la
formule de Livingstone de 2008). Il a rassemblé des ONG œuvrant dans le
domaine de la paix et de la sécurité et qui sont présentes sur les théâtres
des conflits actuels : en RCA, au Soudan et Sud Soudan, en Somalie, ou en-
core au Mali. ACORD était présente, ainsi que le partenaire centrafricain
du Programme Paix, l’OCDH. Ce forum fut une excellente opportunité pour
nos partenaires du Programme Paix d’échanger avec d’autres ONG de haut
niveau engagées dans la sous-région, mais aussi avec les représentants du
Conseil de paix et de sécurité. Lors de la session du Conseil du 22 février,
l’OCDH, représenté par Mr Gervais Lakosso, a été invité à présenter ses
recommandations d’actions pour la résolution du conflit en RCA.
L’OCDH présente ses recommandations au Conseil de paix
et de sécurité de l’Union africaine pour la résolution du conflit
centrafricain
6
QUI SOMMES-NOUS ?
Le CSAPR participe à la consolidation de la paix au Tchad. Il est né en 2002 suite au rassem-blement de plus de 150 acteurs de la vie publique tchadienne qui se sont mobilisés pour débattre de la résurgence des conflits au Tchad, de l’échec des différentes rencontres de réconciliation natio-nale et du recul de la démocratie pluraliste. Il regroupe aujourd’hui plus de 70 organisations sur toute l’étendue du territoire tchadien (organisations de développement, de mouve-ments de jeunes et de femmes, d’ONG de Droits de l’Homme, de syndicats…). Le CSAPR est présent en région à travers 18 points focaux qui jouent un rôle de relais, d'animation de débats et de mobilisation au niveau local.
Œuvrant dans le champ politique, le CSAPR promeut la construction d’une société ci-toyenne. Le CSAPR défend la libre expression politique en offrant des espaces de débats aux acteurs de la vie publique, et favorise l’émergence d’une opinion publique nationale. Toujours en rassemblant des acteurs de tendan-ces et d’horizons divers, Le Comité organise des fora, des cafés politiques, des conférences sur des sujets d’intérêt général en lien avec la conso-lidation de la paix et la réconciliation des tcha-diens.
Par la production d’études thématiques et par son plaidoyer, le CSAPR enrichit les débats. Car il est depuis l’origine une force de propo-sitions citoyennes. Il mène des actions de plai-doyer au niveau national, régional et internatio-nal. A travers ses mémos et ses analyses sur la situation politico-sécuritaire, le CSAPR n’hésite pas à contester les stratégies du gouvernement et/ou des partis politiques. Le CSAPR a par exemple fortement critiqué en 2007 le processus de sortie de crise basée sur le seul processus électoral et a défendu ses propres propositions de transition politique après les évènements de février 2008. En 2011, suite aux élections, le Comité a notamment mené une étude sur le fonc-tionnement des partis politiques tchadiens sur lequel les partis ont pu échanger lors d’un forum.
Le CSAPR a pour objectif : - l’organisation d’élections transparentes, avec une administration dépolitisée. - La réforme des services de défense et de sécurité, accompagné d’un processus de dé-sarmement-démobilisation-réinsertion effica-ce pour assurer la stabilité des institutions démo-cratiques et affermir l’Etat de droit. - Le développement de mécanismes favori-sant la réconciliation populaire, telle que la création d’espaces de dialogue multi-acteurs.
NOS PARTENAIRES
Mobilisons-nous pour une paix durable au Tchad !
La réaction des membres du CSAPR
Dr Younous Mahadjir, vice-président de l’UST (Union des Syndicats du Tchad)
« la Constitution a déjà été modifiée en 2005 et il y a des
rumeurs d’une nouvelle modification pour l’institution d’u-
ne vice-présidence. Dans notre lutte, nous avons toujours
combattu cette pratique de coup d’état constitutionnel qui
tue l’espoir dans ce pays. La Constitution est la loi fonda-
mentale qui définit les critères de gestion d’un pays, et no-
tamment la possibilité de l’alternance. Cette dernière est
porteuse d’espoir et d’amélioration de la situation sociale.
La pratique actuelle du blocage de l’alternance ne peut apporter la paix. La paix qu’on
nous miroite aujourd’hui n’est pas réelle mais une paix imposée par les armes. On
veut la paix des cœurs. Le respect de la loi, l’égalité de tous devant la loi sont des prin-
cipes républicains qui sont fondamentaux pour la conduite normale d’un pays.
Les dirigeants doivent comprendre que le Tchad est éternel et que ceux qui sèment les
choses néfastes le récolteront un jour. Ce qui manque à ce pays, c’est un dirigeant
honnête, patriote, qui accorde des responsabilités suivant les talents et mérites des
tchadiens. Les intellectuels ne manquent pas. Beaucoup se sont prostitués pour des
intérêts mesquins relevant d’une bassesse regrettable, mais il y en a aussi qui sont
restés fidèles aux nobles convictions et que l’on peut responsabiliser.
Si la gestion du pays se révèle être un échec à tous les niveaux, il faut que le Président
tire les leçons de cet échec et quitte le pouvoir. Il doit partir en organisant des élec-
tions sans se présenter lui-même. S’il le fait, ce sera un acte salutaire et hautement
nationaliste. S’il refuse, un jour la population le fera. Le fait que la population se taise
n’est aucunement une acceptation de ce qui se passe. Elle réagira un jour à un élé-
ment vibrateur qui la mettra en activité. Il sera trop tard pour l’arrêter. Le mieux serait
d’anticiper, car, qu’on ne se méprenne point, il n’y a pas de peuple peureux et il ne
faut jamais chercher à l’humilier.
A l’UST, nous serrons toujours prêt à dénoncer les dérapages orchestrés par le pouvoir
en place et notamment les fraudes électorales. La peur nous a quitté il y a longtemps.
La peur est l’élément le plus dangereux qui est en l’être humain mais le jour où elle
quitte l’homme, il est libéré de tous les maux. »
Nos membres partagent dans cette rubrique leurs analyses de la situation socio-
politique et sécuritaire actuelle.
Mr Issaka Dounia Haroun, président du COPES (Comité d’Organisation pour la Paix
dans les Etablissements Scolaires)
« Depuis un bon bout de temps, on constate que l’insécurité a
considérablement augmenté. Les cas d’assassinats sont de
plus en plus nombreux, et souvent pour de simples vols. La
question que l’on se pose est de savoir si les forces de l’ordre
font leur travail. On constate que les malfrats, une fois arrê-
tés, sont libérés par la suite. Rien n’est fait pour décourager
les criminels. La cherté de vie n’arrange rien. En plus de la
flambée des prix des denrées de première nécessité, il y a
aussi le prix des loyers qui augmentent exagérément et de manière anarchique au bon
gré des bailleurs. Très clairement, cette situation est aussi à l’origine du phénomène
de l’insécurité. Nous constatons que les gouvernants ne travaillent pas vraiment pour
le pays. Beaucoup de responsables n’ont aucun souci pour l’intérêt général. Ils n’ont
pas d’autres objectifs que celui de leurs intérêts particuliers égoïstes. Vous remarque-
rez par exemple qu’en cas de nominations à un poste ministériel, le bénéficiaire mobi-
lise ses parents pour des remerciements officiels pour la confiance placé en leur fils. Il
faut que cela cesse et les jeunes doivent être impliqués pour relever les défis en vue
d’un changement des paradigmes. Pour que le Tchad puisse se développer, tout le
monde doit se mettre au travail. »