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Classification des comportements antisociaux au travail Établissement d’une nouvelle classification des Comportements Antisociaux Au Travail Phanie Rioux, Secor-Paris Marie-Élène Roberge, The Ohio State University Luc Brunet et André Savoie, Université de Montréal François Courcy, Université de Sherbrooke Résumé Les comportements antisociaux au travail (CAAT) tels que le harcèlement, le vol, le vandalisme, sont des conduites de plus en plus fréquentes dans nos organisations en plus d’être des manifestations comportementales d’intérêt pour les chercheurs scientifiques. Par une analyse systématique du contenu de cinq classifications portant sur des termes associés aux CAAT, cet article propose une classification intégrée des actes antisociaux. L’analyse est effectuée à partir de quatre critères incontournables dans l’évaluation d’une classification à savoir : l’exclusivité,l’objectivité,l’homogénéité et l’exhaustivité (Bardin, 1998; Carney, 1972; Holsti, 1969; Miles et Huberman, 1984; Mucchielli, 1991; Pourtois, 1988). L’établissement de cette nouvelle classification permet de positionner un CAAT en regard de : 1) l’agresseur (criminel, client, employé ou ami), 2) la modalité d’interaction entre l’agres- seur et la cible (directe / indirecte et connue / inconnue), 3) l’approche pour atteindre la cible (physique / verbal), 4) la cible de l’agression (indi- vidu / organisation) et 5) l’objet de l’agression (physique / psychologique ou production / propriété). Enfin, les limites et l’application de cette classi- fication sont discutées. Le harcèlement psychologique, le harcèlement sexuel, le vol de temps ou encore le vandalisme sont des exemples de comportements indésirables au travail qui jouissent, depuis la dernière décennie, d’une grande couverture médiatique (Baril, 2000; Dufour, 2000; Noël, 2000; Roux, 2000) et d’un intérêt accru de la part des chercheurs québécois (voir Aurousseau et Landry, 1996;

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Classification des comportementsantisociaux au travail

Établissement d’une nouvelle classification desComportements Antisociaux Au Travail

Phanie Rioux, Secor-ParisMarie-Élène Roberge, The Ohio State University

Luc Brunet et André Savoie, Université de MontréalFrançois Courcy, Université de Sherbrooke

Résumé

Les comportements antisociaux au travail (CAAT) tels que le harcèlement, levol, le vandalisme, sont des conduites de plus en plus fréquentes dans nosorganisations en plus d’être des manifestations comportementales d’intérêtpour les chercheurs scientifiques. Par une analyse systématique du contenude cinq classifications portant sur des termes associés aux CAAT, cet articlepropose une classification intégrée des actes antisociaux. L’analyse esteffectuée à partir de quatre critères incontournables dans l’évaluation d’uneclassification à savoir : l’exclusivité,l’objectivité,l’homogénéité etl’exhaustivité (Bardin, 1998; Carney, 1972; Holsti, 1969; Miles et Huberman,1984; Mucchielli, 1991; Pourtois, 1988). L’établissement de cette nouvelleclassification permet de positionner un CAAT en regard de : 1) l’agresseur(criminel, client, employé ou ami), 2) la modalité d’interaction entre l’agres-seur et la cible (directe / indirecte et connue / inconnue), 3) l’approchepour atteindre la cible (physique / verbal), 4) la cible de l’agression (indi-vidu / organisation) et 5) l’objet de l’agression (physique / psychologiqueou production / propriété). Enfin, les limites et l’application de cette classi-fication sont discutées.

Le harcèlement psychologique, le harcèlement sexuel, le vol de temps ouencore le vandalisme sont des exemples de comportements indésirables autravail qui jouissent, depuis la dernière décennie, d’une grande couverturemédiatique (Baril, 2000; Dufour, 2000; Noël, 2000; Roux, 2000) et d’un intérêtaccru de la part des chercheurs québécois (voir Aurousseau et Landry, 1996;

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Damant, Dompierre et Jauvin, 1997; Leblanc, Simard, Le Brock et Rioux, 2002).)et internationaux (voir Bennett et Robinson, 2003; Fox, et Spector, 2005 ;Giacalone et Greenberg, 1997). Bien que nos connaissances de ces actessoient en progression, nombre de questions demeurent encore sans réponse.

Une première confusion, relevée par plusieurs chercheurs (Andersson et Pear-son,1999; Bennett et Robinson, 2003; Clark et Hollinger, 1983; Fox et Spector,2005; Robinson et Bennett, 1995), provient de la terminologie employée dans ladocumentation pour qualifier ces actes indésirables. En fait, étant donné que lestravaux de recherche proviennent de disciplines différentes (ex. : sociologie,psychologie du travail, psychologie sociale, criminologie, comportementorganisationnel, gestion, etc.), en plus d’avoir des préoccupations distinctes(ex. : préoccupation financière vs de santé/sécurité), peu de liens entre cestermes ont été établis jusqu’à ce jour. Cette ambiguïté s’accroît par l’utilisationd’appellations différentes pour signifier une même réalité (ex. : le harcèlementmoral et le harcèlement psychologique). Il y a, en effet, une multitude de termesayant été utilisée dans la documentation (Courcy, Savoie et Brunet, 2004) pourréférer aux comportements indésirables en milieu de travail tels que la violenceou l’agression psychologique, physique, sexuelle, financière, institutionelleou organisationnelle, le harcèlement moral ou psychologique, le mauvais trai-tement, l’abus émotionnel, l’incivilité, la tyrannie, la déviance, le comportementcontreproductif ou antisocial, etc. Cette multiplicité de termes rend doncdifficile de circonscrire précisément ce qui a été étudié jusqu’à présent et ildevient ardu d’identifier les apports spécifiques de chaque appellation.

Andersson et Pearson (1999) ont tenté de schématiser (figure 1 à la pagesuivante) différents termes utilisés en regard du manque de civisme (ex. : com-portement antisocial, déviance, violence et agression). Leur analyse s’appuiesur des définitions retrouvées dans la documentation et indique que leconcept des comportements antisociaux incorpore l’ensemble des autresphénomènes liés aux conduites nuisibles au travail. Ainsi, il est possible depenser que les comportements antisociaux au travail (CAAT) constituent unphénomène d’étude en soi et qu’une classification de ceux-ci permettrait d’ob-tenir un portrait exhaustif des comportements de ce genre en milieu de travail.

Un deuxième élément de confusion concerne l’identité de l’auteur des actesantisociaux (Bennett et Robinson, 2003; Callender Knefel et Bryant, 2004;LeBlanc et Barling, 2005). Ce n’est pas tant la diversité des auteurs de cesactes qui cause problème, mais plutôt l’absence de précision quant à leuridentité (Bachman, 1996; Whitley, Jacobson et Gawrys, 1996; Howard, 1996;

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Leather, Cox et Farnsworth, 1990; McCann, 1996; Simonowitz, 1996). Il devientdonc difficile de comparer les études entre elles, puisque les résultats reflètentdes réalités différentes (ex. : une étude portant sur les agressions des clientsenvers les employés d’une organisation vs une étude portant uniquement surles agressions entre employés). Par conséquent, lors de l’élaboration d’uneéventuelle classification, il devient essentiel de préciser l’identité de l’auteurdes CAAT.

Au plan psychométrique, plusieurs chercheurs tentent d’élaborer des instru-ments afin de mesurer la fréquence d’apparition des comportements antiso-ciaux, mais rares sont ceux qui se réfèrent à une conceptualisation valide de cesmanifestations (Baron et Neuman, 1996; Baron, Neuman et Geddes, 1999;Marcus, Schuler, Quell et Hümpfner, 2002; Fox, Spector et Miles, 1999). En fait,la mesure peut être soit contaminée (des éléments étrangers au concept sontinclus) ou déficiente ( des éléments essentiels au concept sont absents) et nefait pas état d’une vérification de la validité de construit. La création d’uneclassification permettrait de fournir une conceptualisation de base servant à lacréation et à la validation d’instruments de mesure. Il faut souligner qu’il existeplusieurs classifications dans la documentation (Baron et Neuman, 1996; Clarket Hollinger, 1983; Damant, Dompierre et Jauvin, 1997; Gruys et Sackett, 2003),mais celles-ci rendent compte de phénomènes spécifiques (ex. : agression,déviance) et non de l’éventail complet des CAAT. La création d’une classificationdes CAAT permettrait de vérifier les qualités psychométriques d’une éventuellemesure et assurerait une couverture exhaustive de ces manifestations.

Figure 1 : Manque de civisme et autres formes de mauvais traitements dans lesorganisations (Andersson et Pearson, 1999)

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Le but de la présente étude consiste donc à effectuer une analyse systématiquedu contenu des classifications relevées dans la documentation portant sur destermes associés aux CAAT afin de déterminer leur apport respectif à l’élaborationd’une classification des CAAT. Pour ce faire, certains critères d’évaluation ontété identifiés et sont présentés dans la section « méthodologie » du présentarticle. L’analyse de contenu est donc faite à partir de ces critères, alors qu’enconclusion, il est question des perspectives de recherche suite à la présenta-tion de cette classification intégrée des CAAT. Mais avant d’aborder ce sujet,il convient de définir ce qu’on entend par comportement antisocial.

Définition

Pour être considéré comme antisocial, le comportement, émis par un individuquelconque, doit dévier des normes formelles et/ou informelles de l’organisa-tion. Ce critère est présent dans différentes définitions de phénomènes liés auxCAAT (Andersson et Pearson, 1999; Bennett et Robinson, 2003; Clark etHollinger, 1983; Robinson et Bennett, 1995; Sackett, 2002). Ainsi, selon lesnormes en vigueur, un même comportement peut être acceptable dans uneorganisation et ne pas l’être dans une autre. Malheureusement, les différencesorganisationnelles et interculturelles modifiant ces normes n’ont pas encoreété investiguées. Il serait donc intéressant de développer la recherche en cesens. Toutefois, cet aspect de la définition ne vient en rien discréditer laconstruction d’une classification des CAAT; les normes formelles et/ou infor-melles font varier le contenu et non la forme de la classification. Ainsi, seuls lesactes classés peuvent changer (ex. : vol de temps) et non les aspects consti-tuant la classification (ex. : les catégories).

Un comportement peut être antisocial qu’il atteigne ou non sa cible. Ceciimplique que la conséquence de l’acte n’est pas un aspect primordial de ladéfinition; ce qui est central, c’est l’émission du comportement. Ainsi, si lecomportement est émis et qu’il n’atteint pas la cible visée, il est quand mêmeconsidéré comme antisocial.

Dans la même perspective, la présente recherche exclut toute notion d’inten-tionnalité (Buss, 1961; Giacalone et Greenberg, 1997), d’actes volontaires(Robinson et Bennett, 1995) ou de causes pouvant expliquer ces conduites,puisqu’elle tente de faire la lumière sur les CAAT, peu importe leurs antécé-dents. En plus de la difficulté d’opérationnaliser l’intentionnalité et le conceptd’acte volontaire, deux termes synonymes selon le dictionnaire Le Petit

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Robert, on peut aisément concevoir la possibilité qu’un tort soit causé sansqu’il y ait intentionnalité du geste .

Enfin, plusieurs auteurs ont identifié deux cibles visées par l’émission decomportements associés au concept des CAAT : les conduites visant l’organi-sation et celles touchant l’individu (Baron et Neuman, 1996; Giacalone etGreenberg, 1997; Greenberg et Scott’s, 1996; Gruys et Sackett, 2003; O’Lealy-Kelly, Griffin et Glew, 1996; Robinson et Bennett, 1995; Mitchell et coll., 1996).

À partir de ces éléments, nous proposons cette définition du comportementantisocial au travail : comportement qui dévie des normes formelles et/ou infor-melles du milieu et qui peut atteindre l’individu ou l’organisation (GRCA1).Cette définition constitue un cadre de référence à l’analyse de contenu quisuit, mais avant, précisons les critères d’évaluation des différentes classifica-tions recensées.

Méthode

L’analyse systématique du contenu de chacune des classifications recenséess’effectue à partir de quatre critères incontournables dans l’évaluation d’uneclassification: l’exclusivité, l’objectivité, l’homogénéité et l’exhaustivité (Bardin,1998; Carney, 1972; Holsti, 1969; Miles et Huberman, 1984; Mucchielli, 1991;Pourtois, 1988).

Pour satisfaire au critère d’exclusivité, les composantes d’une classification(exemple : axe22 , catégorie23 , continuum24 ) doivent différencier les CAATselon des caractéristiques comportementales distinctes. En fait, ce premiercritère permet de s’assurer que chaque comportement ne peut être placé dansplus d’une catégorie à la fois (Bardin, 1998; Carney, 1972; Holsti, 1969;Mucchielli, 1991).

Pour sa part, l’objectivité est respectée lorsque l’interprétation de chacune descomposantes est similaire d’une personne à l’autre; par exemple, lorsque

22 « Ligne droite sur laquelle a été choisi un sens particulier » (Petit Larousse illustré, 1988)23 Les catégories sont des classes qui rassemblent un groupe d’éléments en raison des

caractères communs qu’ils partagent (Bardin, 1998).24 Un continuum implique une densité dans une suite numérique dénombrable (Herman,

1986). Selon le Petit Robert, un continuum correspond à un « objet ou phénomèneprogressif dont on ne peut considérer une partie que par abstraction ».

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plusieurs individus codent de la même manière les éléments à classifier à partird’une même grille catégorielle (Bardin, 1998; Holsti, 1969; Mucchielli, 1991;Pourtois, 1988). Les distorsions causées par la subjectivité des codeurs sontdonc réduites si le choix et la définition des catégories sont clairs. Ce critèrevérifie donc la précision et l’ambiguïté des définitions (Holsti, 1969; Miles etHuberman, 1984; Mucchielli, 1991; Pourtois, 1988) afin de permettre un accordinter-juges respectable des éléments d’une classification.

Le troisième critère d’évaluation réfère à l’homogénéité, c’est-à-dire à la pré-sence d’un principe uniforme de classification gouvernant l’organisation de laclassification. En fait, des niveaux d’analyse différents doivent être séparés enautant d’analyses successives (Bardin, 1998; Carney, 1972; Holsti, 1969). Enprocédant ainsi, l’uniformité du classement est assurée.

Enfin, l’exhaustivité implique que toutes les données recueillies empiriquementou répertoriées théoriquement peuvent être classées à l’intérieur d’une descatégories de la classification (Carney, 1972; Holsti, 1969; Mucchielli, 1991). Cedernier critère permet de vérifier l’étendue des comportements couverts par laclassification.

Analyse de contenu

Avant d’appliquer ces quatre critères d’évaluation aux différentes classifica-tions recensées, il est important de préciser ce qu’est une classification. Selonle dictionnaire usuel de psychologie (1983), une classification est une « opéra-tion méthodologique consistant à regrouper mentalement dans un certain nombred’ensembles, (…) des données (faits, objets, êtres) présentant un ou plusieurscaractères communs. (Une) classification prend la dénomination de typologiedans les sciences de l’homme, ou de taxinomie25 dans les sciences de lanature » (p. 129-130). Plus précisément, une typologie réfère à l’ensemble descritères permettant de différencier divers types d’une classification (exemples :introvertie, extravertie), alors qu’une taxinomie consiste en l’étude des lois quidoivent présider au classement systématique des animaux et végétaux(Larousse, 1988; Manuila, Manuila, Nicole et Lambert, 1981). Bien que lestermes typologie et taxinomie ne soient pas toujours employés correctementdans la documentation en psychologie et que certains auteurs n’ont pasnécessairement l’intention d’établir des classifications, il n’en demeure pas

25 « L’Académie des Sciences de Paris déconseille l’orthographe taxonomie, qui gardecependant la préférence de la plupart des biologistes. » p. 910 (Dictionnaire français demédecine et de biologie, 1981)

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moins que les travaux recensés dans cet article peuvent apporter des contribu-tions pertinentes à l’élaboration d’une nouvelle classification des CAAT. Ainsi,cinq « classifications » sont analysées et le tableau I présente les différentsauteurs, leurs sujets d’étude et les composantes de leur classification.

Tableau I : Les classifications recensées

Auteurs Sujet d’étude Composantes des classifications

Aurousseau et Violence organisationnelle - violence ponctuelle (forte et visible)Landry (1996) (hiérarchique) - violence soutenue (forte et insidieuse)

- violence ponctuelle (faible et insidieuse)- violence soutenue (faible et insidieuse)

Buss (1961) Agression - aspect physiques / verbales- aspect direct / indirect- aspect actif / passif

Damant, Violence au travail - forme de violence physiqueDompierre et - forme de violence psychologiqueJauvin (1997) - forme de violence sexuelle

- forme de violence financière

Hollinger et Déviance - type de déviance de propriétéClark (1982-1983) - type de déviance de production

Robinson et Déviance au travail - dimension mineure / sérieuseBennett (1995) - dimension interpersonnelle / organisationnelle

- catégorie déviance de propriété- catégorie déviance de production- catégorie agression personnelle- catégorie déviance politique

Les formes d’agression

Buss (1961) est un des pionniers dans l’étude de l’agression. Selon lui, l’agres-sion est une réponse qui envoie un stimulus nocif à un autre organisme. Baronet Neuman (1996; 1997) ainsi que Folger et Baron (1996) se sont inspirés destravaux de Buss pour effectuer leurs études sur l’agression au travail. Ilsdéfinissent l’agression au travail comme un effort intentionnel de la part d’unindividu pour causer un tort à une personne avec qui il travaille ou a travailléou encore pour causer un tort à une organisation pour laquelle il travaille ou adéjà travaillé.

Buss prétend que la réponse agressive prend différentes formes selon la partiedu corps utilisée par l’auteur de l’agression (physique / verbal) et la relationinterpersonnelle (interaction) entre l’auteur et la victime (directe / indirecte etactive / passive). Ainsi, l’agression dite physique regroupe des comportementsd’attaque utilisant les parties du corps ou un objet, tandis que l’agression

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qualifiée de verbale réfère à des actions où le langage verbal ou non verbal estemployé. L’agression directe, quant à elle, désigne une interaction sans inter-médiaire, c’est-à-dire que l’agression se manifeste en la présence de la victime,alors que l’agression indirecte consiste en une agression posée en l’absenceou à l’insu de la victime ou encore visant un objet lui appartenant. Finalement,l’agression est qualifiée d’active lorsqu’elle découle de l’émission d’un com-portement et elle est dite passive lorsqu’elle se traduit par l’omission d’uncomportement attendu (Buss, 1961). L’interaction de ces trois aspects (ex. :physique, direct et actif) détermine huit catégories d’actes agressifs (voir letableau II présentée par Folger et Baron (1996) et Neuman et Baron (1997).

Tableau II : Exemples des huit types d’agressions en milieu de travail suivant lacatégorisation de Buss (1961 dans Neuman et Baron, 1997)

Dimension Dimension Dimension Direct/Indirect

Physique/ Actif/

Verbal Passif Direct Indirect

Physique Actif Homicide VolAssaut SabotageAgression sexuelle VandalismeVoyeurisme Gaspillage des ressourcesGestes obscènes Camouflage des ressourcesInterférence Élimination des ressources

Passif Ralentissement de travail Arriver en retard aux réunionsVolontaire Retarder le travailRefus de fournir des ressources Retarder les autresQuitter les lieux de travail Ne rien faire pour permettreNuire à la lecture des objectifs L’atteinte des objectifs de travail

Verbal Actif Menaces RumeursHurlements DéblatérerHarcèlement sexuel Opinions mensongèresInsultes et sarcasmes Parler contre les meilleurs employésÉvaluation de rendement Transmettre de l’information erronée

Passif Ne pas retourner les appels Ne pas transmettre l’informationNe pas parler des objectifs à atteindre Ne pas nier les fausses rumeursSe plaindre Ne pas essayer d’atteindre les objectifsRefuser les ordres Ne pas avertir des dangers

Au niveau de l’analyse des composantes de cette classification , l’aspectdirect / indirect, qui qualifie l’interaction entre l’auteur et la victime, permet declassifier les comportements d’agression de façon exclusive et objective. Eneffet, leurs définitions sont suffisamment claires pour permettre un accordinter-juges et un classement dans l’un ou l’autre des deux éléments de cetaspect. Pour l’aspect physique / verbal ainsi que celui de l’actif / passif,l’exclusivité et l’objectivité sont mises en doute. En effet, dans le cas de

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l’aspect physique / verbal, il est possible que, pour un même comportement,l’auteur de l’agression utilise la force et le verbal. Dans un viol, par exemple,l’agresseur utilise sa force physique pour contrôler sa victime et il peut égalementparler à sa victime pour la menacer et la neutraliser; il devient donc impossiblede classer le comportement comme étant uniquement physique ou verbal. Pource qui est de l’aspect actif / passif, il ne répond pas aux critères d’objectivitépuisque les comportements sont classés en fonction de l’interprétation de leurformulation. Prenons l’exemple du comportement « ignorer quelqu’un », cedernier peut être classé « actif » s’il est interprété comme étant l’action d’ignoreret « passif » s’il est interprété comme étant le fait de ne pas porter attention àun individu.

Enfin, les critères d’homogénéité et d’exhaustivité sont satisfaisants pour lestrois aspects. Malgré les lacunes de deux des aspects, le principe de classifica-tion est uniforme. De plus, la classification semble pouvoir classer un vasteéventail d’agressions portées contre un individu ou une organisation.

Suite à l’analyse de cette classification, on constate que seul l’aspect direct /indirect répond aux quatre critères de l’analyse de contenu et peut donc êtreconsidéré lors de l’élaboration d’une nouvelle classification des CAAT.L’aspect physique / verbal pourrait également être intéressant, mais unique-ment en tant qu’axe et non en tant que catégories distinctes et exclusives.Enfin, l’aspect actif / passif est à rejeter, puisqu’il semble que malgré uneclarification des définitions, il ne serait pas possible de satisfaire le critèred’objectivité.

Les types de déviance

Clark et Hollinger (1983) sont les précurseurs des études portant sur ladéviance des employés envers leur organisation. Ils définissent la déviancecomme étant « des actes d’employés qui s’en prennent à la propriété de l’orga-nisation ou qui violent les standards de production » (p. 9). En étudiant ladéviance dans différentes organisations (hôpital, manufacture et entreprise devente au détail) par l’administration de questionnaires, ils ont pu distinguerdeux catégories de comportements déviants : la déviance de propriété et ladéviance de production.

La déviance de propriété réfère à des comportements d’appropriation oud’endommagement des biens tangibles appartenant à l’organisation. Quant àla déviance de production, elle consiste en des actions formellement proscritespar des normes délimitant le minimum de qualité et de quantité de productionqui doit être accompli.

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Les déviances de propriété et de production sont deux catégories homogèneset exhaustives qui permettent de classifier de façon objective les actes visantl’organisation, c’est d’ailleurs ce qu’a démontré les indices d’accord inter-juges de la recherche de Robinson et Bennett (1995). Par ailleurs, les deuxdéviances ne semblent pas exclusives l’une de l’autre puisque certains actespeuvent atteindre tant la production que la propriété de l’organisation. À titred’exemple, prenons un employé qui propage un virus dans tout le réseauinformatique d’une entreprise; ce faisant, le matériel est touché et la produc-tion peut même être arrêtée. Par conséquent, ces déviances organisationnellessont pertinentes et devraient être intégrées dans une nouvelle classificationdes CAAT, mais sous l’aspect d’un axe au lieu de catégories distinctes.

La typologie des comportements déviants au travail

Robinson et Bennett (1995) ont élaboré une typologie des comportementsdéviants au travail. Cette typologie (voir figure 2 à la page suivante) rendcompte des comportements déviants posés volontairement par les employés,c’est-à-dire : «tous ceux violant significativement les normes organisationnel-les et menaçant le bien-être de l’organisation , de ses membres ou des deux »(p. 556). Ces auteures élargissent donc le concept de déviance apporté parClark et Hollinger en incorporant les membres de l’organisation comme ciblespotentielles des actes déviants.

La construction de la typologie s’est effectuée en trois étapes. Tout d’abord,40 travailleurs ont été rencontrés individuellement. Chacun d’eux devaitdécrire deux incidents de déviance émis par quelqu’un au travail. Ensuite, 180participants ont répondu à un questionnaire basé sur les comportementsdéviants répertoriés à l’étape 1. Ils devaient juger de la similitude et de ladifférence des cibles de chaque comportement sur une échelle de Likert enneuf points. Le positionnement spatial des comportements à partir ce cetteéchelle a permis d’identifier l’existence de deux dimensions. Lors de la troi-sième étape, 10 juges devaient évaluer les comportements déviants à partir desix critères bipolaires: l’intentionnalité / la non intentionnalité, la sévérité / lanon sévérité, les dommages à la compagnie / l’absence de dommage à la com-pagnie, les dommages infligés aux individus / l’absence de dommage infligé auxindividus, le caractère éthique / non éthique et finalement, l’aspect direct / indirect.Ce faisant, il a été possible de nommer deux dimensions (mineur / sérieux etinterpersonnelle / organisationnelle) et le croisement de celles-ci a fait émergerquatre catégories: la déviance de propriété, la déviance de production, l’agres-sion personnelle et la déviance politique.

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Les deux dimensions, qui peuvent être considérées comme des axes, n’ont pasde définitions précises, ce qui n’est pas le cas des catégories. Les définitionsde la déviance de propriété et de production qu’énoncent Robinson et Bennett(1995) réfèrent à celles établies par Clark et Hollinger (1983). Quant àl’agression personnelle et la déviance politique, Robinson et Bennett ont étéles premières à en établir une définition. Ainsi, l’agression personnelle englobedes conduites agressives ou hostiles dirigées contre des individus, alors quela déviance politique correspond à des actes d’interaction sociale qui désa-vantagent personnellement ou politiquement des individus.

Selon les critères de l’analyse de contenu, l’exclusivité ne s’applique pas auniveau des dimensions interpersonnelle / organisationnelle et mineure / sé-rieuse puisqu’elles forment deux axes allant graduellement d’un pôle à l’autre.Par ailleurs, la qualification des deux axes porte sur des critères qui sont parfois

Figure 2 : Typologie des comportements déviants au travail (Robinson et Bennett, 1995).

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ambigus ou subjectifs (exemples : la sévérité, l’intentionnalité), ce qui éliminela possibilité de positionner les comportements de façon objective. Au niveaudes catégories, tel qu’exposé précédemment lors de la présentation des typesde déviance de Clark et Hollinger (1983), les déviances de propriété et deproduction ont des lacunes au niveau du critère d’exclusivité. Le même pro-blème s’applique aux catégories de l’agression personnelle et de la déviancepolitique puisque l’agression personnelle qualifie la façon dont l’acte est fait,soit de façon agressive ou hostile, et cet acte doit se faire à l’intérieur d’uneinteraction sociale. Or, c’est précisément l’interaction qui permet de définir lacatégorie de la déviance politique et en ce sens, un même acte peut donc êtreclassé dans l’une ou l’autre de ces deux catégories. En fait, les éléments dedésavantage personnel ou politique de la définition de la déviance politique nepermettent pas de distinguer l’agression personnelle de la déviance politique,puisque cet aspect de la définition donne une indication sur les conséquencesde l’acte. À titre d’exemple, rien n’empêche qu’un abus verbal (acte classédans l’agression personnelle) puisse occasionner des désavantages person-nels ou politiques à la victime. Pour toutes ces raisons, ces deux catégoriessont ni exclusives ni objectives.

Par ailleurs, le critère d’homogénéité de la typologie est respecté étant donnéqu’il y a plusieurs niveaux d’analyse appliqués successivement aux comporte-ments à classifier. Finalement, en ce qui concerne l’exhaustivité du classement,l’établissement des axes « interpersonnelle / organisationnelle » et « mineure /sérieuse » semble permettre de classifier l’ensemble des comportements dé-viants répertoriés. Le problème d’exhaustivité vient plutôt de l’attribution descatégories au croisement des axes, puisque selon la représentation, il est im-possible de classer un comportement représentant une déviance de produc-tion sérieuse, une déviance de propriété mineure, une déviance politique sé-rieuse ou une agression personnelle mineure.

En somme, pour que l’axe « mineur / sérieux » correspondant à la gravité del’acte, soit inclus dans une nouvelle classification des CAAT, ce dernierdevrait être définie par des critères objectifs. Or, jusqu’à ce jour, aucune étuden’a établi les constituants à prendre en compte pour se prononcer sur la gravitédes actes (ex. : fréquence, durée, conséquences des actes). Étant donné l’avan-cement de la recherche à ce sujet, la notion de gravité ne peut être incorporéedans une nouvelle classification des CAAT. Par contre, sans que les ciblesindividu et organisation soient présentées sur un axe, elles ont été identifiéespar plusieurs chercheurs. L’établissement d’une définition claire de ces deuxpôles permettrait de répondre au critère d’objectivité, ce qui rendrait possibled’inclure l’axe dans une classification des CAAT. Tel que mentionné précé-demment, les déviances de propriété et de production répondent de façonsatisfaisante aux critères de l’analyse de contenu, mais en tant qu’axe et non en

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tant que deux catégories distinctes. Enfin, pour ce qui est de l’agressionpersonnelle et de la déviance politique, leurs définitions et leurs contenus nepermettent pas de les incorporer dans une nouvelle classification des CAAT.À la limite, l’agression personnelle pourrait être liée à l’aspect physique /verbal de Buss (1961) et la déviance politique ouvre la voie à l’identification deconséquences possibles de l’acte sur la victime.

Les types de violence organisationnelle

Aurousseau et Landry (1996) ont élaboré des types de violence psychologi-que et verbale, aussi nommés «  violence organisationnelle », exercés par dessuperviseurs envers des subordonnés (figure 3). Leurs résultats proviennentd’une recherche exploratoire basée sur 17 témoignages de victimes provenantde professionnels de la FPPSCQ26 . Ces auteurs définissent la violence organi-sationnelle comme étant : « des comportements qui outrepassent le pouvoirformel ou légitime d’une ou d’un supérieur(e), qui sont perçus comme tels parles subalternes et atteignent ces derniers de telle manière qu’ils ne peuventplus travailler au meilleur de leur capacité ou profiter pleinement de la vie »(p.4). Bien que l objectif de l’étude était de documenter les manifestations, lesimpacts et les déterminants organisationnels de la violence vécue par lesprofessionnels et non d’élaborer une classification des types de violence, lesdifférents types de violence méritent d’être analysés compte tenu de leurscaractéristiques.

26 Fédération des professionnels et professionnelles salarié(e)s et des cadres du Québec.

Figure 3 : Les axes Occurrence et Intensité et visibilité servant à établir lestypes de violence (Aurousseau et Landry, 1996)

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Les auteures ont identifié des types de violence hiérarchique de nature psy-chologique et verbale en fonction de deux axes: l’occurrence et l’intensité-visibilité. L’axe d’occurrence inclut «le nombre d’incidents rapportés et ladurée de la situation de violence déterminée par l’enchaînement, le maillagedes incidents» (p. 34). Sur cet axe, la violence dite ponctuelle regroupe desincidents survenant rarement; celle que l’on nomme « soutenue » réfère à unemultiplication d’actes violents ou à la reconnaissance d’un lien entre ceux-ci.Quant à l’axe intensité-visibilité, les auteures définissent les deux composan-tes de l’axe de manière indépendante même si elles constituent un seul et mêmeaxe. L’intensité (faible / forte) représente donc la gravité intrinsèque du com-portement violent déterminée par le contexte dans lequel il se produit et lesimpacts subis par la victime. L’intensité de la violence est faible lorsque lagravité intrinsèque du comportement est moindre, alors qu’elle est forte lors-que la gravité est évidente. Pour ce qui est de la visibilité (insidieuse / visible),elle correspond à la facilité avec laquelle la violence peut être perçue et inter-prétée, tant par la victime que par des observateurs. Une violence insidieuseréfère à des comportements masqués par divers facteurs, laissant ainsi planerun doute sur le caractère violent du comportement. La violence dite « visible »est associée à des actions dont le caractère violent est indéniable.

Selon notre analyse, l’axe d’occurrence permettrait de classifier les actes enfonction de critères exclusifs et objectifs tels la fréquence des comportementset leur durée, mais la définition des qualificatifs de l’axe (violence ponctuelle etsoutenue) n’est pas objective. En effet, aucun critère objectif ne permet dedéterminer la fréquence et la durée associées à des incidents qualifiés de ponc-tuels par exemple.

Pour ce qui est de l’axe « intensité-visibilité », les auteures ne définissent pasles concepts « conséquences » et « contexte » qui déterminent le niveau d’in-tensité. De plus, la définition de la visibilité de la violence est établie à partir decritères subjectifs, comme la facilité avec laquelle la violence peut être perçueet interprétée. Par conséquent, ce deuxième axe ne respecte pas le critèred’objectivité de l’analyse de contenu et, par le fait même, nous empêche de seprononcer sur le critère d’exclusivité.

En ce qui a trait au critère d’homogénéité, il n’est pas satisfait. En effet, lesdeux axes ne possèdent pas un même principe de regroupement; l’axe del’occurrence représente un seul et même concept, alors que l’axe « inten-sité-visibilité » combine deux composantes. Au niveau de l’exhaustivité,l’association de la visibilité et de l’intensité à un même axe ne permet pas dedistinguer les comportements qui pourraient être à la fois émis de façon forte etinsidieuse (exemple : menacer subtilement une personne de congédiement encomparant sa performance à celle d’un employé congédié) ou encore, faible etvisible (exemple: la persécution au travail).

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Suite à cette analyse, la contribution des types de violence organisationnelle àl’élaboration d’une nouvelle classification des CAAT est limitée, mais les con-cepts présentés sont intéressants et pourraient être retravaillés afin d’êtreincorporés dans la classification. L’axe de l’occurrence semble représenter lafréquence du comportement; cet aspect peut très bien être pris en compte parl’échelle de réponse d’un questionnaire et s’appliquer à chaque comportementde manière indépendante. Ainsi, ce ne serait pas un critère qui permettrait declasser des comportements. L’aspect « intensité » de l’axe « intensité / visibi-lité » semble s’associer au concept de gravité. Tel que mentionné dans laprésentation de la typologie des comportements déviants au travail de Robin-son et Bennett (1995), les études n’ont pas encore établi les constituants de lagravité des actes, ce qui limite l’incorporation de cet aspect dans une nouvelleclassification des CAAT. Finalement, bien que l’aspect visibilité du même axene respecte pas les critères de l’analyse de contenu, il est possible de faire unparallèle entre la visibilité et l’aspect direct / indirect de Buss (1961), qui luirespecte les critères. Ainsi, par leur étude, Aurousseau et Landry viennentappuyer l’importance d’incorporer cet aspect dans une nouvelle classificationdes CAAT.

Les formes de violence en milieu de travail

Damant, Dompierre et Jauvin (1997) ont étudié la violence au travail qu’ellesdéfinissent comme suit : « [ Il y a violence] lorsqu’un individu ou un grouped’individus, en posant une action, en menaçant ou en tentant de [le] faire,porte atteinte à l’intégrité ou à la sécurité physique ou psychologique d’unepersonne [...] » (p.16). Dans le cadre de leur recherche, elles ont utilisé troismoyens pour recueillir leurs données : un focus group mené auprès de 12personnes qui devaient révéler si elles avaient été témoins ou victimes d’actesviolents au travail, une enquête par questionnaire auto-administré auprès de200 personnes et l’analyse des procès-verbaux de groupes de formation d’unevingtaine de personnes. Le but de l’étude portait sur l’incidence du phéno-mène de la violence, ses manifestations, ses causes, ses conséquences etl’élaboration de recommandations pour prévenir la violence. Cette étude a étémenée auprès des membres de six fédérations de la CSN27. Bien que le but del’étude n’était pas d’établir une classification, la méthodologie employée apermis d’identifier quatre formes de violence au travail : la violence physique,psychologique, sexuelle et financière.

La violence physique regroupe des actions qui utilisent la force avec l’inten-tion d’atteindre physiquement la victime soit de façon directe (à mains nues) ouindirecte (avec un objet). Quant à la violence psychologique, elle correspond

27 CSN : La Confédération des syndicats nationaux

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à des conduites spécifiques, intentionnelles et répétitives, qui s’expriment àtravers différents canaux de communication (verbal, gestuel et postural) defaçon active ou passive, directe ou indirecte, dans le but d’atteindre une per-sonne et de la blesser émotionnellement. Pour sa part, la violence sexuelleréfère à des actions se manifestant par des paroles, des actes ou des gestes àconnotation sexuelle non désirés par la victime et qui portent atteinte à sadignité ou à son intégrité physique ou psychologique. Finalement, la violencefinancière regroupe des actes posés dans le but de nuire ou d’empêcher unavancement, une promotion ou de mettre en cause une situation à incidencemonétaire pour la personne.

Les quatre formes de violence de Damant, Dompierre et Jauvin (1997) classentles comportements en fonction de la nature des actes posés. Toutefois, il y aambiguïté par le fait qu’un même comportement peut avoir plusieurs natures,ce qui nuit au critère d’exclusivité de l’analyse de contenu. Non seulement unacte peut se retrouver à l’intérieur de deux formes de violence distinctes (voirl’exemple du viol dans les formes d’agression de Buss), mais certains gestes deviolence sexuelle incorporent à la fois les aspects de la violence physique et deviolence psychologique. En effet, la définition de la violence sexuelle inclutl’utilisation de paroles, d’actes ou de gestes, des éléments qui font partie de ladéfinition de la violence physique ou psychologique. Par conséquent, on nepeut pas conclure à l’exclusivité des quatre formes de violence. Il faut toute-fois noter que les violences, physique et psychologique, s’apparentent à l’aspectphysique / verbal de Buss (1961), ce qui vient renforcer l’importance du médiumemployé par l’auteur pour atteindre sa cible dans l’élaboration d’une nouvelleclassification des CAAT.

D’autre part, au niveau des définitions de chacune des formes de violence, lefait de référer aux objectifs visés par l’agresseur (ex. : dignité, empêcher unepromotion) pour faire du tort à sa victime ne permet pas de considérer cesformes de violence comme étant objectives. En effet, il semble impossible pourquiconque de se prononcer objectivement quant à l’intention de l’agresseur.Par ailleurs, il pourrait être possible de déterminer ce que l’acte a atteint sanstenir compte de l’intention.

Enfin, il y a également un problème en lien avec le critère d’homogénéitépuisque les définitions ne contiennent pas les mêmes aspects permettant de fairele classement. À titre d’exemple, dans les définitions de la violence physique,psychologique et sexuelle, il est question des moyens entrepris par l’agresseurpour atteindre la victime (ex. : paroles, gestes) et au niveau de la violencefinancière, il n’y a aucune spécification à ce sujet. Malgré le manque d’exclu-sivité, d’objectivité et d’homogénéité, le critère d’exhaustivité semble respecté

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puisque les formes de violence permettent de classifier l’ensemble des com-portements violents dirigés envers les individus.

Suite à l’analyse de contenu des formes de violence en milieu de travail, nousconsidérons que telles qu’elles sont présentées, elles ne peuvent pas êtreincluses dans une nouvelle classification des CAAT. Par ailleurs, les défini-tions apportent un aspect nouveau et intéressant à la documentation, soit cequi est atteint par l’acte. Pour conserver plus d’objectivité, il faut toutefoiséliminer la notion d’intention attribuée à l’auteur des actes et se concentreruniquement sur la qualification de la résultante du comportement (ex. : la vic-time a été atteint au niveau physique ou psychologique) et non sur l’énuméra-tion des conséquences subies par la victime qui peuvent être multiples et secumuler (ex. : perte d’emploi, de dignité).

Élaboration d’une nouvelle classification

Cette section présente l’élaboration d’une nouvelle classification des CAATsuite à l’intégration des composantes étudiées dans l’analyse du contenu descinq classifications exposées précédemment. Cette classification est consti-tuée de cinq niveaux d’analyse correspondant à des catégories et à des axes.

Les catégories

Le premier niveau d’analyse correspond à l’identification de l’agresseur, soitcelui qui émet le comportement antisocial. Les différents chercheurs n’en fontpas mention dans l’établissement de leur classification, mais Peek-Asa, Runyanet Zwerling (2001) proposent quatre principales catégories d’agresseurs: (1) lecriminel extérieur à l’organisation (exemple: un voleur de banque), (2) le clientd’une organisation (exemple: les patients d’un hôpital), (3) l’employé (exem-ple : un employé qui atteint un autre employé), et (4) un individu ayant unerelation personnelle avec la victime (exemple : un conjoint). Au niveau de laterminologie, bien que plusieurs auteurs s’entendent pour qualifier les catégo-ries 1, 2 et 4 comme étant de la violence occupationnelle (Baron et Neuman,1998; O’Leary-Kelly, Griffin et Glew, 1996), le modèle de Andersson et Pearson(1999) stipule que le comportement antisocial englobe la violence. Ainsi, il yaurait quatre catégories d’agresseurs pouvant commettre un acte antisocial autravail (LeBlanc et Barling, 2005).

Le deuxième niveau d’analyse correspond à la qualification de l’interactionentre l’auteur de l’acte et la cible visée; les catégories associées à ce niveaud’analyse proviennent de la conceptualisation de l’agression élaborée par

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Buss (1961) et ressemble au concept de visibilité de Aurousseau et Landry(1996). La catégorie « directe » regroupe donc des comportements se manifes-tant en présence de la victime, alors que la catégorie « indirect » englobe lescomportements se manifestant en l’absence ou à l’insu de la victime ou visantun objet lui appartenant. Ces deux catégories décrivent bien l’interactionlorsque la cible visée est une personne, mais si la cible est une organisation, lesdéfinitions ne sont pas adaptées. Ainsi, l’interaction auteur-cible organisa-tionnelle comprend deux autres catégories distinctes : l’interaction est soitconnue, c’est-à-dire que le comportement se manifeste en présence de témoins,ou soit inconnue, lorsque le comportement se manifeste en l’absence detémoins. Le tableau III présente ces deux catégories.

Criminel(le) extérieur Client(e) de Employé(e) de Ami(e) d’un employé(e)de l’organisation l’organisation l’organisation de l’organisation

Directe Indirecte Directe Indirecte Directe Indirecte Directe Indirecte

Connue Inconnue Connue Inconnue Connue Inconnue Connue Inconnue

Tableau III : Représentation des catégories de la classification des CAAT

Les axes

Il est également possible de se prononcer quant aux moyens employés parl’auteur des actes pour atteindre la cible; dans ces cas, il est question dumédium utilisé. L’identification de ce niveau d’analyse s’inspire d’une part,des formes d’agression de Buss (1961) (physique / verbale) et, d’autre part,des formes de violence en milieu de travail de Damant, Dompierre et Jauvin(1997) (violence physique et psychologique). Suite à l’analyse du contenu deces classifications, l’établissement d’un axe plutôt que de catégories distinc-tes s’impose. Le pôle symbolique signifie l’utilisation de signes (mots, posturecorporelle) pour atteindre sa cible alors que le pôle matériel réfère à l’utilisationdu corps ou d’objets matériels. Ainsi, l’auteur d’un CAAT pourrait doncutiliser soit sa force physique, soit le langage ou même les deux médiums pouratteindre sa cible.

En ce qui a trait au quatrième niveau d’analyse, il correspond à un axe repré-sentant la cible visée : un individu et/ou une organisation. Cet axe provientprincipalement de l’analyse de la typologie de Robinson et Bennett (1995)(dimension interpersonnelle / organisationnelle), mais également de l’identifi-cation de ces deux cibles par plusieurs auteurs (Baron et Neuman, 1996;Giacalone et Greenberg, 1997; Greenberg et Scott’s, 1996; O’Lealy-Kelly, Griffin

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et Glew, 1996; Mitchell et coll., 1996). Le pôle de la cible « individu » réfère àl’ensemble des comportements nuisibles pouvant être dirigés envers un membrede l’organisation ou de sa propriété, tandis que le pôle de la cible « organisa-tion » correspond à l’ensemble des comportements nuisibles dirigés enversl’organisation elle-même ou une entité la représentant. Étant donné que lacible visée est représentée par un axe et non par des catégories distinctes, il estpossible qu’un même comportement atteigne les deux cibles. D’autre part, enfonction de ces deux cibles, la conceptualisation des CAAT tient compte d’axesdistincts se rapportant à un cinquième et dernier niveau d’analyse : ce qui estatteint par l’acte ou encore, les impacts du comportement antisocial sur la cible.

Plus le comportement se positionne près du pôle « organisation » de l’axereprésentant la cible visée, plus les impacts portent uniquement sur l’organisa-tion. Ces impacts, provenant de l’analyse du contenu des classifications deClark et Hollinger (1983) ainsi que de Robinson et Bennett (1995), sontreprésentés sur un axe ayant deux pôles : la production et la propriété. Lesdéfinitions de ces deux pôles réfèrent exactement à celles élaborées par Clark etHollinger mentionnées précédemment dans le présent article.

Si, par contre, le comportement antisocial se positionne davantage au niveaudu pôle individu de l’axe représentant la cible visée, alors les impacts portentsur cet individu et non sur l’organisation. Bien que les auteurs n’aient pasvraiment identifié ce qui est atteint chez une victime, les travaux de Robinson etBennett (1995) et ceux de Damant, Dompierre et Jauvin (1997) proposent unevoie possible. Ainsi, selon la présente analyse, les impacts sur l’individutouchent le physique et/ou le psychologique de la personne. Le pôle physi-que de ce dernier axe représente des comportements pouvant atteindre le corpsphysique ou la propriété d’un individu, alors que le pôle psychologique com-prend des comportements pouvant atteindre les cognitions et/ou les émotionsd’une personne.

Étant donné qu’un comportement peut atteindre un individu et une organisa-tion, un comportement se positionnant au centre de cet axe peut donc engendrerdes impacts au niveau de l’individu et de l’organisation. C’est pourquoi lesdeux axes représentant les impacts sur la cible se superposent.

La figure 4 (à la page suivante) expose la juxtaposition des axes représentantles trois derniers niveaux d’analyse. Cette représentation cubique permet depositionner les comportements en fonction de leur position sur un axe parrapport aux autres. Ainsi, prenons l’exemple d’un comportement, soit celui depropager un virus dans le réseau informatique d’une organisation. Le médiumutilisé est physique et la cible visée est davantage l’organisation que l’individu;

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Figure 4 : Représentation des axes de la classification des comportements antisociaux

ainsi, les impacts se situent principalement par rapport à l’organisation. Parcontre, le virus informatique attaque la propriété de l’organisation (les ordina-teurs) mais il peut également paralyser toute la production puisque personnene peut se servir de son ordinateur pour travailler. Pour cette raison, le posi-tionnement de cet acte se situe au centre de ce dernier axe. Le X de la figure 4positionne l’acte dont il est question ici.

Puisque la classification des CAAT est élaborée à la suite d’une analyse decontenu de différentes classifications portant sur des phénomènes liés auxCAAT, la classification semble satisfaire les quatre critères d’analyse. En effet,les catégories et les axes sont objectifs, homogènes et permettent de déterminerun répertoire exhaustif des comportements antisociaux pouvant se manifesterau travail. Les catégories sont également exclusives, critère qui ne s’appliquepas au niveau des axes. Enfin, non seulement cette nouvelle classificationtient compte des meilleures composantes des différents auteurs ayant travaillésur le sujet des CAAT, mais l’étude empirique de Leblanc, Simard, Le Brock etRioux (2002) a permis de vérifier en partie la validité de construit des ses troisaxes à partir d’un échantillon de 166 personnes.

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Perspectives de recherche à venir

Cette étude visait à effectuer une analyse de contenu systématique de cinqclassifications recensées dans la documentation afin de déterminer l’apportrespectif de chaque conceptualisation quant à l’élaboration d’une nouvelleclassification des comportements antisociaux au travail. Son élaboration apermis de répondre à des questions de base et de les assembler en un systèmecohérent. Il est désormais possible de se positionner quant à : l’auteur duCAAT (niveau 1 de l’analyse : catégories criminel, client, employé et ami),l’interaction entre l’auteur du CAAT et la cible (niveau 2 de l’analyse : catégo-ries  directe / indirecte et catégories  connue / inconnue ), le moyen pris pouratteindre la cible (niveau 3 de l’analyse : axe matériel / symbolique), la cible del’acte (niveau 4 de l’analyse : axe individu / organisation) et l’atteinte (niveau 5de l’analyse : axe physique / psychologique et axe production / propriété).

Non seulement l’analyse du contenu des classifications présentées a permisd’apporter des nuances à plusieurs concepts, mais elle a également permisd’identifier deux aspects importants : l’identification de l’auteur des CAAT etles impacts subis par les individus visés par ces derniers. L’établissement de lanouvelle classification permettra également d’établir une base solide pour laconception d’instruments de mesure fidèles, valides et exhaustifs des CAAT.

Suite à l’élaboration de cette classification, il reste à poursuivre les études(Leblanc, Simard, Le Brock, et Rioux, 2002) de la validité de sa structure ainsique la pertinence et la clarté des différentes définitions la constituant. Par lasuite, il sera possible de construire un questionnaire basé sur la classificationpour arriver à mesurer et déterminer la prévalence du phénomène des CAAT.Éventuellement, cette mesure pourrait permettre d’établir des liens avec desvariables organisationnelles dites prévisionnelles telles la culture, la percep-tion de la justice sociale ou la structure organisationnelle et ainsi, orienter lesinterventions. Enfin, il pourrait également être intéressant de vérifier l’applica-tion de cette classification à d’autres milieux que celui du monde du travail.

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