Échanges · 2019. 6. 17. · revue de philosophie, littÉrature et sciences humaines Échanges...

23
ISSN : 2310-3329 REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES REVUE SEMESTRIELLE VOLUME 3 N o 011 décembre 2018 LOMÉ-TOGO

Upload: others

Post on 17-Sep-2020

2 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

ISSN : 2310-3329

REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES

ÉCHANGES

VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES

REVUE SEMESTRIELLE VOLUME 3 No 011 décembre 2018

LOMÉ-TOGO

Page 2: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES

ÉCHANGES

VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES

Volume 3, N° 011 décembre 2018

Laboratoire d’Analyse des Mutations Politico-juridiques,

Économiques et Sociales (LAMPES)

Faculté des Sciences de l’Homme et de la Société

Université de Lomé

01 BP 1515 Lomé

ISSN 2310-3329

Page 3: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

ADMINISTRATION ET RÉDACTION DE LA REVUE

Revue de Philosophie, Lettres et Sciences humaines de la Faculté des Sciences de l’Homme et de la

Société, Université de Lomé (Togo) Revue créée en 2013

Directeur de publication : Pr Octave Nicoué BROOHM

Coordinateur de Rédaction : Pr Robert DUSSEY

Secrétariat de rédaction :

Coordinateur du secrétariat de rédaction : Bilina Iba BALLONG, Maître de

conférences

Coordinateur Adjoint du secrétariat de rédaction : Kokou GBEMOU, Maître

de conférences

Membre du secrétariat de rédaction : Roger FOLIKOUE, Bilakani TONYEME,

Charles-Grégoire Dotsè ALOSSE, Bantchin NAPAKOU, Yawo AMEWU, Koffi

AGNIDE, Komlan AZIALE

COMITÉ SCIENTIFIQUE

Pr Koutchoukalo TCHASSIM

Pr Serge GLITHO

Pr Komla NUBUKPO

Pr François D. GBIKPI

Pr Laurence FAVIER

Pr Doh Ludovic FIÉ

COMITÉ DE LECTURE

Pr Yaovi AKAKPO (Université de Lomé)

Pr TCHAMIE Thiou (Université de Lomé)

Pr Komi KOSSI-TITRIKOU (Université de Lomé)

Pr Essè AMOUZOU (Université de Lomé)

Pr Cyrille KONE (Université de Ouagadougou 1)

Pr Pierre NAKOULIMA (Université de Ouagadougou 1)

Pr Mahamadé SAVADOGO (Université de Ouagadougou 1)

Pr Augustin DIBI (Université de Cocody, Abidjan)

Pr Kazaro TASSOU (Université de Lomé)

Pr Adovi GOEH-AKUE (Université de Lomé)

Pr Koffi AKIBODE (Université de Lomé)

Pr Yao DJIWONOU (Université de Lomé)

Pr Laurence FAVIER (Université Lille 3)

Pr Doh Ludovic FIÉ (Université de Bouaké)

Pr Widad MUSTAFA EL HADI (Université Lille 3)

Pr Atafeï PEWESSI (Université de Lomé)

5

Page 4: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

Revue Échanges – Administration, Rédaction, Comités scientifique et de lecture

Pr Issiaka KONÉ (Université de Bouaké) Pr Essoham ASSIMA-KPATCHA (Université de Lomé)

Pr Robert DUSSEY (Université de Lomé)

Pr Tamasse DANIOUE (Université de Lomé)

Pr Essodina K. PERE-KEWEZIMA (Université de Lomé)

Pr Komlan E. ESSIZEWA (Université de Lomé)

Pr Thiémélé L. Ramsès (Université de Cocody, Abidjan)

Pr Jean-Gobert TANOH (Université de Bouaké)

Pr Rubin POHOR (Université de Bouaké)

Pr Henri BAH (Université de Bouaké)

Pr Antoine KOUAKOU (Université de Bouaké) Pr Tchégnon ABOTCHI (Université de Lomé)

Pr Wonou OLADOKOUN (Université de Lomé)

Pr Aklesso ADJI (Université de Lomé)

Pr Dossou GBENOUGA (Université de Lomé)

Pr Kokou ALONOU (Université de Lomé)

Pr Nicoué BROOHM (Université de Lomé)

Pr Edinam KOLA (Université de Lomé)

Lalle Richard LARE, Maître de Conférences (Université de Lomé)

Lare KANTCHOA, Maître de conférences (Université de Kara)

Komlan KOUZAN, Maître de conférences (Université de Kara)

Padabô KADOUZA, Maître de conférences (Université de Kara)

Donissongui SORO, Maître de conférnces (Université de Bouaké) Souleymane SANGARÉ Maître de conférnces (Université de Bouaké) N’goran François KOUASSI, Maître de recherche (Université de Bouaké) Brou Émile KOFFI, Maître de conférences (Université de Bouaké) Afiwa Pépvi KPAKPO, Maître de conférences (Université de Lomé)

Mike MOUKALA NDOUMOU, Maître de conférences (Université Omar Bongo,

Libreville)

Komi KOUVON, Maître de conférences (Université de Lomé)

Gbati NAPO, Maître de conférences (Université de Lomé)

Komlan AVOUGLA, Maîtrede conférences (Université de Lomé)

Folligan HETCHELI, Maître de conférences (Université de Lomé)

Koffi Messan Litinmé MOLLEY, Maître de conférences (Université de Lomé)

Mawusse Kpakpo AKUE-ADOTEVI, Maître de conférences (Université de Lomé)

Secrétaire : Rahima BOUKARI

6

Page 5: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

Revue Échanges – Administration, Rédaction, Comités scientifique et de lecture

Éditeur : Laboratoire d’Analyse des Mutations Politico-juridiques, Économiques

et Sociales (LAMPES), Université de Lomé.

Mail : [email protected]

Site : www.lampes-ul.org

Contact

- Adresse : Revue Échanges, Faculté des Sciences de l’Homme et de la Société,

Université de Lomé, 01 BP : 20459, Lomé-Cité, Togo.

- Tel : 90063972 ; 90844484 ; 90142268 (Uniquement pour les renseignements)

- Mail : [email protected]

7

Page 6: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

SOMMAIRE

SOMMAIRE ...................................................................................................................................... 15

SCIENCES HUMAINES ................................................................................................................ 543

CONCEPTIONS ET GESTION DES ORDURES À ASSÔKÔ (SUD-EST DE LA CÔTE

D’IVOIRE), XVIIE-XVIIIE SIÈCLES, ADJÉ SÉVERIN ANGOUA (UNIVERSITÉ FÉLIX HOUPHOUËT-

BOIGNY D’ABIDJAN – RCI) ............................................................................................................ 545

SAVOIRS LOCAUX ET SUIVI PRENATAL DANS LA ZONE SANITAIRE ALLADA-TOFFO-

ZE (SUD BENIN), ROGER AYÉLODJOU ATCHOUTA, AZIZOU CHABI IMOROU, (UNIVERSITÉ

D’ABOMEY-CALAVI – BÉNIN), YVETTE ONIBON DOUBOGAN (UNIVERSITÉ DE PARAKOU –

BÉNIN), ALBERT TINGBE-AZALOU (UNIVERSITÉ D’ABOMEY-CALAVI – BÉNIN) ........................ 557

LA CONTRIBUTION DE MADELEINE PERE DANS LA COLLECTE DES ARCHIVES

COLONIALES DU CERCLE DE GAOUA DE 1902-1957 (HAUTE-VOLTA), BOUBIÉ BAZIE

(UNIVERSITÉ PROFESSEUR JOSEPH KI-ZERBO DE OUAGADOUGOU – BF) ........................................ 580

LES ESPACES MARÉCAGEUX, ENTRE DYNAMIQUE DE L’HABITAT ET PRATIQUE DU

MARAICHAGE INTRA-URBAIN À DALOA (CENTRE-OUEST DE LA CÔTE D’IVOIRE),

GBITRY ABEL BOLOU, EGUE ALPHONSE CHARLES TROTSKY MEL (UNIVERSITÉ JEAN LOROUGNON

GUÉDÉ DE DALOA – RCI), KOUASSI INNOCENT KANGA (UNIVERSITÉ ALASSANE OUATTARA DE

BOUAKÉ – RCI) ............................................................................................................................. 596

LES DYNAMIQUES EXPLICATIVES DU RADICALISME ET DE L’EXTRÉMISME

VIOLENTS EN AFRIQUE, THÉLESPHORE TOLITON DIKPO (UNIVERSITÉ D’ABOMEY CALAVI –

BÉNIN ............................................................................................................................................ 615

BALAFON ET RELIGION AU BURKINA FASO. DU RAPPORT DE L’INSTRUMENT AUX

PRATIQUES RELIGIEUSES DE LA SOCIÉTÉ GOIN DANS LES COMMUNES DE BANFORA

ET DE NIANGOLOKO, TIONYÉLÉ FAYAMA, VALÉRIE CLAUDINE OUEDRAOGO/ROUAMBA,

AIMÉ DÉSIRÉ HEMA (UNIVERSITÉ PR JOSEPH KI-ZERBO DE OUAGADOUGOU – BF) ...................... 635

GESTION PARTICIPATIVE DE LA FORÊT CLASSÉE DE WOUTO À AVETONOU AU SUD-

TOGO : RÉUSSITE OU ÉCHEC ?, KOKOU MAWULIKPLIMI GBEMOU (UNIVERSITÉ DE LOMÉ –

TOGO) ........................................................................................................................................... 651

ASCENSION POLITIQUE DES ÉLITES DU BÉNIN PRÉ-DÉMOCRATIQUE : HISTORICITÉ

ET ITINÉRAIRES SOCIOLOGIQUES, PATRICK HINNOU (UNIVERSITÉ D´ABOMEY-CALAVI -

BÉNIN) .......................................................................................................................................... 664

DÉTERMINANTS SOCIO-DÉMOGRAPHIQUES DE LA VULNÉRABILITÉ DES

POPULATIONS DES ZONES À RISQUES HYDROMÉTÉOROLOGIQUES DE KORHOGO AU

NORD DE LA CÔTE D’IVOIRE, ARSÈNE KADJO, FERDINAND ADJA VANGA, SÉGBÉ GUY

ROMARIC BALLE, SERGES FIDÈLE ASSOUMAN (UNIVERSITÉ PELEFORO GON COULIBALY DE

KORHOGO – RCI) .......................................................................................................................... 682

ANALYSE DE L’EFFET DES DÉPENSES DE SCOLARISATION SUR LA RÉUSSITE

SCOLAIRE DANS LES MÉNAGES AGRICOLES RURAUX DES COMMUNES DE NIKKI ET

DE N’DALI, ABDUL-RAZAK KOTCHONI, ESTHER OGOUNIYI ADIMI, JACOB A. YABI

(UNIVERSITÉ DE PARAKOU – BÉNIN) .............................................................................................. 701

ACTIVITÉS MINIÈRES, CONFLITS ET DÉVELOPPEMENT SOCIOÉCONOMIQUE EN

MILIEU RURAL IVOIRIEN : ÉTUDE DES CAS DE TONGON DANS LA SOUS-

15

yan
Texte surligné
Page 7: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

PRÉFECTURE DE N’BENGUÉ, ITY À ZOUAN HOUNIEN ET AGBAHOU À DIVO, AMANI

AUGUSTIN KOUADIO (UNIVERSITÉ FÉLIX HOUPHOUËT-BOIGNY D’ABIDJAN – RCI) .................... 715

LES MOTOTAXIS DANS LES STRATÉGIES D’INSERTION SOCIOPROFESSIONNELLE

DES JEUNES EN CÔTE D’IVOIRE, ROBERT G. LOBA, VINCENT D. DIBI, NABINDOU KONE

(UNIVERSITÉ ALASSANE OUATTARA DE BOUAKÉ – RCI) ............................................................... 731

DIFFICULTÉS D’APPRENTISSAGES DU FRANÇAIS DES ÉLÈVES DU CM2 DES

INSPECTIONS DE L’ENSEIGNEMENT PRÉSCOLAIRE ET PRIMAIRE DE LOMÉ, KOSSI

LODONOU (UNIVERSITÉ DE LOMÉ - TOGO) ................................................................................. 745

QUAND L’ÉMOTION INFLUENCE LE PROCESSUS DE COMPRÉHENSION, FAUSTIN

MOUNGUENGUI (UNIVERSITÉ OMAR BONGO DE LIBREVILLE – GABON) ................................. 764

EFFET DU STATUT VISUEL ET DES PROCÉDURES TACTILES SUR LA

RECONNAISSANCE D’OBJETS CHEZ LES SUJETS DÉFICIENTS VISUELS ET VOYANTS,

LOUIS ANGE ONKEREKAKOULA (UNIVERSITÉ OMAR BONGO DE LIBREVILLE – GABON) .......... 779

APPORT DE L’UNIVERSITÉ PELEFORO GON COULIBALY DE KORHOGO DANS LE

DÉVELOPPEMENT URBAIN, ANOUMAN YAO THIBAULT OUSSOU, TCHAN ANDRÉ DOHO BI,

GRAH FELIX BECHI (UNIVERSITÉ ALASSANE OUATTARA DE BOUAKÉ – RCI), .............................. 791

EXCLUSION FINANCIÈRE ET STRATÉGIES DE RÉSILIENCE DES FEMMES DE

L’ASSOCIATION VILLAGEOISE D’ÉPARGNE ET DE CRÉDIT, WEBEHESSON, DE

SOAKPE-DOUEDY (CÔTE D’IVOIRE), RUBIN POHOR (UNIVERSITÉ ALASSANE OUATTARA DE

BOUAKÉ – RCI) ............................................................................................................................. 807

RATIONALITÉS SOCIALES ET ENJEUX DE LA NON-OBSERVANCE THÉRAPEUTIQUE

CHEZ LES DIABÉTIQUES DU CENTRE ANTIDIABÉTIQUE D’ABIDJAN (CADA) EN CÔTE

D’IVOIRE, KANDO AMÉDÉE SOUMAHORO (UNIVERSITÉ FÉLIX HOUPHOUËT-BOIGNY D’ABIDJAN

– RCI) ........................................................................................................................................... 827

LA PROBLÉMATIQUE DE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE DANS UN CONTEXTE

D’INSÉCURITÉ ET DE RÉTRÉCISSEMENT DU LAC TCHAD, JIM NAREM BOUYO KWIN,

AMANE TATOLOUM (UNIVERSITÉ DE N’DJAMENA –TCHAD) ...................................................... 845

LE PROGRAMME D’URGENCE ET LES MUTATIONS SOCIOÉCONOMIQUES AU NORD

DE LA CÔTE D’IVOIRE (1974-1980), BEN SOUALIOUO MEITE, BAKARY TRAORE, GNOPOH

JULIEN PREGNON (UNIVERSITÉ FÉLIX HOUPHOUËT-BOIGNY D’ABIDJAN – RCI) ......................... 867

ANALYSE DES PARADOXES DE L’IMPLICATION DES ÉLUS LOCAUX DANS LA

GOUVERNANCE DE L’ÉCOLE AU MALI (CAS DANS LES COMMUNES DE

OUATAGOUNA, MARKALA, SAN ET COMMUNE V DU DISTRICT DE BAMAKO), IDRISSA

SOÏBA TRAORE (UNIVERSITÉ DES LETTRES ET DES SCIENCES HUMAINES DE BAMAKO – MALI) .... 886

ZONES DE PRÉVALENCE ENDÉMIQUE ET MÉTHODES DE CORRECTION DE LA

FLUOROSE DENTAIRE DANS LES COMMUNES DE DASSA-ZOUME ET DE GLAZOUE,

JEAN BOSCO KPATINDÉ VODOUNOU, ODETTE KOGBÉ DASSI (UNIVERSITÉ DE PARAKOU – BÉNIN)

...................................................................................................................................................... 904

16

Page 8: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

BALAFON ET RELIGION AU BURKINA FASO. DU RAPPORT DE

L’INSTRUMENT AUX PRATIQUES RELIGIEUSES DE LA SOCIÉTÉ

GOIN DANS LES COMMUNES DE BANFORA ET DE NIANGOLOKO,

Tionyélé FAYAMA, Valérie Claudine OUEDRAOGO/ROUAMBA, Aimé Désiré

HEMA (Université Pr Joseph Ki-zerbo de Ouagadougou – BF)

[email protected], [email protected], [email protected]

Résumé

De la sacralisation à l’usage commun quotidien, le balafon a subi des

mutations liées aux processus de transformation et d’évolution de la société Goin

dans toutes ses composantes. Élément de culture banni par les uns et accepté par

les autres. Il s’agit pour nous de montrer les raisons réelles qui ont été à l’origine

de cette universalisation du balafon dans une partie du Burkina Faso en général, et

dans l’aire Goin en particulier. Cet instrument de musique parait avoir un caractère

fédérateur avéré, ce qui a favorisé sa présence dans la quasi-totalité des activités

traditionnelles chez les Ciraamba. C’est ainsi que l’acceptation du balafon a été

progressivement rendue possible au sein de certaines religions pratiquées dans la

zone d’étude. Cet article tente de comprendre, à travers une approche

sociohistorique, les représentations sociales que les confessions religieuses ont du

balafon dans les communes de Banfora et de Niangoloko. La méthode qualitative a

donc été choisie et les données ont été collectées à travers des entretiens semi-

directifs auprès des acteurs des différentes confessions religieuses.

Mots clés : balafon, perception, symbolique, religion, société Goin, prosélytisme

religieux, changement social

BALAFON AND RELIGION IN BURKINA FASO. RELATIONSHIP

BETWEEN THE INSTRUMENT AND RELIGIOUS PRACTICES IN GOIN

SOCIETY IN BANFORA AND NIANGOLOKO’S MUNICIPALITIES

Abstract

From sacralization to common use, balafon faced change under Goin

socciety’s progress. This cultural tool is liked as well as rebuked by people. Our

concern is to point out the reasons that universalize balafon in a area of Burkina

Faso in general and in Goin’s location in particular. This instrument seems to be

revered and federative. That expansion inked Goin’s traditional activities. Thereby,

balafon’s allowance becomes evident among its religions. This article tries to

understand, through a socio-historical approach, the social representations that

religious confessions have of the balafon in the district of Banfora and Niangoloko.

The qualitative method was therefore chosen and the data were collected through

semi-directive interviews with actors of the different religious confessions.

635

Page 9: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

Tionyélé FAYAMA, Valérie Claudine OUEDRAOGO/ROUAMBA, Aimé Désiré HEMA / Balafon

et religion au Burkina Faso. Du rapport de l’instrument aux pratiques religieuses de la société Goin

dans les communes de Banfora et de Niangoloko / Revue Échanges, vol. 3, n° 11, décembre 2018

Keywords: Balafon, perception, religion, religious proselytism, symbolic, religion,

Goin’s society, social change

Introduction

Le balafon, instrument de musique traditionnelle au Burkina Faso, est

connu de l’Ouest du pays et est présent dans presque toutes les cérémonies des

Goin. Il est de toute évidence que la société Goin, à l’instar d’autres sociétés sont

soumises à une dynamique sociale. Le balafon a été l’un des instruments de

musique de l’Afrique noire qui a le plus résisté à la modernisation et demeure

toujours dans les cultures des Burkinabés. À partir d’une étude anthropologique,

nous tentons dans cet article de comprendre comment l’instrument qui au départ

était sacré chez les Ciraamba est aujourd’hui admis dans certaines cultures

(Fayama, 2011, p. 71), comment certaines confessions religieuses perçoivent-elles

cet instrument ? Et comment a-t-il pu être adopté par certaines religions dans leurs

pratiques ?

Le modèle théorique de référence retenu pour notre étude est celui de

l’interactionnisme d’Erving Goffman. La théorie interactionniste, se définit comme

étant l’influence réciproque que les partenaires exercent sur leurs actions

respectives lorsqu’ils sont en présence physique les uns les autres.

L’interactionnisme comprend au moins deux groupes sociaux en

interaction, destinée à analyser les structures de chacun dans la société. Pour E.

Goffman « une interaction entre deux personnes n’est jamais seulement une

interaction, c’est-à-dire une simple séquence d’actions/réactions limitées dans le

temps et dans l’espace ; c’est toujours aussi un « certain type d’ordre social » (E.

Goffman, 1988, p. 96).

De ce modèle théorique interactionniste de Goffman, nous convoquons

pour éviter toute incomplétude, cette définition du cadre théorique de référence, par

P. N’DA représente le champ

théorique ou épistémologique dans lequel le problème, placé, prend sens, envergure,

allure et orientation. Il s’agit pour le chercheur, d’inscrire son problème dans un

cadre de référence en montrant qu’il connaît clairement les tenants et aboutissants

des théories et concepts engagés dans la formulation du problème en question (P.

N’DA, 2006, p. 62).

Pour ce faire, nous allons montrer l’encrage du concept opératoire choisi

dans la théorie interactionniste, afin d’apporter un éclairage à notre étude.

Eu égard au but poursuivi par notre méthode d’approche, nous avons choisi

le changement social comme concept opératoire pour analyser les résultats de notre

étude relative à l’apport du balafon dans la religion en général et dans le pays Goin,

en particulier. La pertinence du concept de changement social réside dans le fait

que nous étudions un processus de conversion et de cohabitation (socialisation). Il

636

Page 10: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

Tionyélé FAYAMA, Valérie Claudine OUEDRAOGO/ROUAMBA, Aimé Désiré HEMA / Balafon

et religion au Burkina Faso. Du rapport de l’instrument aux pratiques religieuses de la société Goin

dans les communes de Banfora et de Niangoloko / Revue Échanges, vol. 3, n° 11, décembre 2018

s’agit de traiter de l’impact d’un instrument de musique sur les croyances

religieuses nouvelles dans l’espace Goin et de mettre en exergue son devenir dans

une société en pleine mutation. Au plan sociologique, cela se rapporte de façon

essentielle à la dynamique sociale. Le concept opératoire qui sied donc à notre

étude reste clairement celui du changement social.

À cet effet, ce concept qui prend corps, conduit à une « modification

nécessitée par des causes intrinsèques et extrinsèques à un groupe, bouleversant

dans les proportions différentes, son fonctionnement, sa structure, ses éléments de

cohésion, ainsi que les relations interpersonnelles et ses rapports avec les autres

groupes » (E. Minarik, 1971, p. 27-28). Il induit des transformations dont la mise

en pratique de nouveaux rapports humains et l’acquisition de nouvelles capacités

(M. Crozier et E. Friedberg, 1977, p 152).

Par rapport à l’interactionnisme et du sujet sur le balafon et la religion, le

changement est aussi social, c’est-à-dire, peut recouvrir certaines caractéristiques

selon G. Rocher (1968, p. 324-326). En effet, il doit d’abord être un phénomène

collectif, ce qui veut dire un fait ou une action ou une implication qui concerne une

communauté, une organisation ou une collectivité et touche les conditions ou les

modes de vie. Il doit aussi être un changement de la structure, car on doit constater

une modification de l’organisation sociale dans sa totalité ou dans certaines de ses

parties.

Enfin, le changement de la structure doit être identifiable dans le temps et

être permanent. En d’autres termes, pour G. Rocher le changement social est alors

toute transformation observable dans le temps, qui affecte, d’une manière qui ne soit

pas provisoire ou éphémère, la structure ou le fonctionnement de l’organisation

sociale d’une collectivité donnée et qui en modifie le cours de son histoire (G.

Rocher, 1969, p. 326).

Les transformations durables et profondes des domaines de la société dont

le changement social, est la résultante de facteurs interdépendants, relayés par des

acteurs. Et, comme le définit G. Rocher (1969, p.328), un facteur est « un élément

d’une situation donnée, qui du seul fait de son existence ou par l’action qu’il

exerce, entraîne ou produit du changement. »

Les agents de changements, eux, sont « les personnes, les groupes, les

associations qui introduisent le changement, qui l’appuient, le favorisent ou s’y

opposent. » (G. Rocher, 1969, p. 329). Les agents sont donc des acteurs qui

agissent selon les objectifs poursuivis, de valeurs et des idéologies et dont l’action

influence le cours de l’histoire d’une société. Ces derniers peuvent avoir une

attitude positive, en soutenant le changement ou une attitude négative, en y

opposant une résistance.

Dans cette optique, actions, objectifs et stratégies sont des notions motrices

qui permettent d’interpréter les représentations des différents acteurs (les Goin et

637

Page 11: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

Tionyélé FAYAMA, Valérie Claudine OUEDRAOGO/ROUAMBA, Aimé Désiré HEMA / Balafon

et religion au Burkina Faso. Du rapport de l’instrument aux pratiques religieuses de la société Goin

dans les communes de Banfora et de Niangoloko / Revue Échanges, vol. 3, n° 11, décembre 2018

les prédicateurs religieux) dans l’aire cerma du balafon dans les confessions

religieuses et d’en analyser les nouvelles formes de contrôle social.

Dans la démarche du modèle théorique d’analyse, E. Goffman (1988) fait

appréhender le rôle de la structure et le sujet dans les sciences humaines. Il met en

évidence le rôle moteur de la relation à l’œuvre dans l’interaction, aussi bien dans

le processus de socialisation que de subjectivation. Sa sociologie adopte pour thèse

générale l’effectivité, au cœur de l’interaction, d’un sens commun qui est en même

temps un sens pratique. Ce sens commun manifeste la présence du social au sein

même de la psychologie individuelle sous forme d’une certaine compétence. Cela

signifie un dépassement de l’opposition entre individu et société.

Ainsi, le sujet et la structure, loin d’être des entités antagonistes, sont

intrinsèquement liés au cœur de l’unité qu’est la relation. Ce ne sont ni les

structures qui déterminent les acteurs, ni les acteurs qui engendrent les structures,

mais une relation cognitive qui constitue le moteur d’un processus de

subjectivation et de socialisation. L’ordre de l’interaction apparaît comme un ordre

structurel où les structures n’existent que pour autant qu’elles sont mises en œuvre

à chaque instant par les acteurs, mais les acteurs ne peuvent eux-mêmes les mettre

en œuvre que sur la base d’un sens commun guidant leur conduite. L’objet de

l’analyse sociologique de E. Goffman est constitué par la relation, donnée

première, qui ne résulte pas de la synthèse de deux unités préexistantes, mais qui

engendre au contraire les unités mises en relation (E. Goffman, 1988, p.107). Cette

relation peut donc être qualifiée d’unité analytique.

Nous nous référons à cette théorie interactionniste d’Erving Goffman

(1988) comme modèle théorique d’analyse, pour appréhender l’impact du balafon

dans le processus de rapprochement et d’intégration des croyances religieuses

étrangères au sein des groupes sociaux Goin. En ce sens que ce xylophone, loin

d’être un instrument de musique traditionnelle et ordinaire, est un sujet social qui a

un pouvoir d’attraction et de liaison à l’occasion d’une activité quelconque chez les

Ciraamba. Par le truchement de ces opportunités de rassemblement, le balafon a

permis d’atteindre certains objectifs. Les communautés Goin et les confessions

religieuses en tant que structures distinctes trouvent là un tremplin pour nouer des

liens entre les différents acteurs qui les constituent à travers l’usage du balafon. Le

caractère fédérateur et symbolique que les Goin accordent à cet instrument a été

vite perçu par certaines religions. Dès lors, une relation consciente qui constitue le

moteur du processus de socialisation se développe et crée ainsi l’interaction entre

les Ciraamba et les dépositaires des religions à travers le balafon. A cet effet, un

nouvel ordre, qui est structurel, voit le jour et sur lequel se fonde un but commun

qui guide les attitudes et comportements des acteurs.

Dans ces conditions, il convient de se demander quels ont été les facteurs

incubateurs dans la relation balafon-religions chez les Goin ? Cette préoccupation

centrale de l’étude est sous-tendue par les interrogations suivantes :

638

Page 12: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

Tionyélé FAYAMA, Valérie Claudine OUEDRAOGO/ROUAMBA, Aimé Désiré HEMA / Balafon

et religion au Burkina Faso. Du rapport de l’instrument aux pratiques religieuses de la société Goin

dans les communes de Banfora et de Niangoloko / Revue Échanges, vol. 3, n° 11, décembre 2018

- Comment l’approche s’est-elle opérée entre les Goin et les religions

étrangères à travers le balafon ?

- Quelles ont été les attentes des différentes parties ?

- Quels ont été les actions entreprises pour améliorer les rapports entre les

Goin et les confessions étrangères par le truchement du xylophone ?

En appliquant cette théorie à notre étude, l’objet de l’analyse sociologique

de E. Goffman (1988) repose, de façon essentielle, sur la relation qui engendre la

dynamique sociale entre deux entités (communautés Goin et les religions) mises en

relation par le biais du balafon. L’étude a ainsi permis de comprendre et

d’expliquer dans une dimension globale les représentations sociales que les

chrétiens et des musulmans ont du balafon dans la société Goin. Elle a également

permis de mieux cerner le processus de rapprochement et d’acceptation entre

l’instrument de musique et les croyances étrangères. Pour répondre aux

préoccupations ci-dessus posées, une méthodologie adaptée s’est avérée

indispensable.

1. Méthodologie

Dans l’objectif d’appréhender les représentations sociales du balafon par

les confessions religieuses dans les communes de Banfora et de Niangoloko, nous

sommes parti de l’hypothèse que dans un sens, l’adoption du balafon par certaines

confessions religieuses s’explique par sa valeur réunificatrice et que dans un autre

sens, son refus par d’autres confessions religieuses est lié à son caractère sacré.

Pour atteindre cet objectif, nous avons adopté une démarche

sociohistorique auprès des « balafonistes » (joueurs et fabricants), des responsables

coutumiers et religieux, des gardiens de la tradition et des mélomanes. Il nous a

ainsi été possible à partir de guides d’entretien semi directif d’avoir une diversité

d’opinions sur les représentations sociales que les confessions religieuses ont eu

sur le balafon et surtout par l’observation directe. La revue documentaire a

également été mise à profit pour un croisement avec l’existant.

La zone d’étude concernée est l’aire cerma. Les Goin sont localisés dans

les Départements de Banfora, Niangoloko et Soubakaniendougou dans la Province

de la Comoé. Pour des raisons pratiques, l’observation a été circonscrite dans les

Communes de Banfora et de Niangoloko. Le choix de ces deux Départements se

justifie par leur proximité ethnolinguistique. En effet, les parlers de Niangoloko et

de Banfora ne différent que très peu et tendent à se confondre si bien qu’on peut les

considérer comme un même dialecte.

639

Page 13: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

Tionyélé FAYAMA, Valérie Claudine OUEDRAOGO/ROUAMBA, Aimé Désiré HEMA / Balafon

et religion au Burkina Faso. Du rapport de l’instrument aux pratiques religieuses de la société Goin

dans les communes de Banfora et de Niangoloko / Revue Échanges, vol. 3, n° 11, décembre 2018

Carte : Situation géographique de la Zone d’étude

Source : Tionyélé FAYAMA et Alkassoum MAIGA, 2017

2. Résultats et discussion

Les résultats de l’étude traduisent la trajectoire sociohistorique du Balafon

dans la région Ouest du Burkina Faso chez les Goin. L’instrument bien qu’il ait été

au début rejeté par les chrétiens, fait partie de nos jours, de leur vécu quotidien. Il a

dans l’histoire résisté au vent de la modernisation et fonctionne de nos jours au-

delà de son terrain d’antan. Il reste que certains musulmans « fanatiques religieux

et extrémistes, ceux qui n’ont toujours pas compris la religion », comme l’a

qualifié, le muezzin de la mosquée du secteur 8, qui ont toujours des perceptions

négatives sur l’instrument.

2.1. De l’introduction du balafon dans la religion chrétienne

L’existence du pays Goin, selon L. Soma (1994) et Y. Soma (1983), est

indissociable du balafon. Cette assertion est aussi reprise par M. Dacher (2003) qui

montre que le xylophone cerma joue une importante fonction socioculturelle à telle

enseigne qu'il est utilisé en diverses occasions tant de réjouissance que de tristesse ;

et cela, malgré sa sacralité d’autrefois avérée.

Pour T. Héma (1985), à la mise en place du peuplement cerma, les Goin

étaient essentiellement des animistes qui, avaient beaucoup résisté aux autres

religions qu’ils taxaient de « satanique ». O. Sirima (1996) de montrer que les

croyances ancestrales et les rites de toutes sortes étaient accompagnés par le

balafon dont les pouvoirs magico-religieux à même de permettre au cerma de

rentrer en communion avec ses ancêtres en les implorant pour la concrétisation de

souhaits divers. Ce qui prouve que le balafon a toujours ponctué la spiritualité du

Goin, de façon particulière.

Le balafon reste tributaire des mutations successives qu’a connues la

société Goin. Avant la pénétration des religions étrangères, l’instrument de

musique a longtemps joué son rôle premier, celui socioculturel. Aujourd’hui, avec

640

Page 14: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

Tionyélé FAYAMA, Valérie Claudine OUEDRAOGO/ROUAMBA, Aimé Désiré HEMA / Balafon

et religion au Burkina Faso. Du rapport de l’instrument aux pratiques religieuses de la société Goin

dans les communes de Banfora et de Niangoloko / Revue Échanges, vol. 3, n° 11, décembre 2018

le brassage des peuples, le xylophone a progressivement évolué au même titre que

ses différentes représentations. Il semble désormais de plus en plus toléré par les

autres communautés. C’est aussi avec la modernisation que cet instrument de

musique traditionnelle a continué de rythmer la vie des Ciraamba. Etant présent

dans presque toutes leurs activités, l’instrument a heurté le domaine religieux

nouveau. Il a été par conséquent adopté par la religion catholique lors de la

conquête des peuples burkinabè pour leur conversion. Mais comment s’est passée

cette interaction entre ce xylophone cerma et les missionnaires ?

En effet, les pères missionnaires d’Europe, pour conquérir les peuples

burkinabè avaient élaboré un plan d’attaque avec une stratégie bien définie qui

consistait à procéder par deux étapes. La première étape a été tout d’abord de

conquérir les chefs de villages. Et dans la seconde étape, ces derniers à leur tour,

pourront faciliter la conquête du reste de la population. Cette stratégie est bien

définie par A. E. C. Sandwidé (2000, p. 171) en ces termes : « Arrivés dans une

localité, une salutation était adressée au chef de village qui convoquait le chef de

famille, ensuite les Pères procédaient à un exposé où était mentionné le but de leur

présence dans le milieu »

Cette stratégie de conquête des âmes, qui consistait à gagner d’abord

l’esprit des chefs, s’est révélée inefficace parce que la notion de chef restait

méconnue dans certaines sociétés. Le constat s’est vite opéré chez les Ciraamba et

les Bobo et bien d’autres formations sociales de l’Ouest. Ainsi soutient-il que :

Chez les Bobo et les Goin de Niangoloko par exemple, il n’existe pas de chef en tant

que tel. Cette organisation sociopolitique faussait la stratégie initiale de conquête des

Pères blancs. Au regard donc de ces difficultés, ils frayèrent des moyens pour

toucher directement les populations locales. Les voies et moyens ont été le contact et

l’amitié. (A. E. C. Sandwidé 2000, p. 171).

Par conséquent, les visites se multipliaient en famille, au champ, dans les

quartiers et les villages. Mais la communication était un deuxième handicap. C’est

là que dans la région de Banfora, Ousmane fils aîné du chef de canton de

Bounouma, servit d’interprète auprès des pères missionnaires d’Europe.

Également, à Niangoloko, Hasônsi et Milon, tous deux anciens élèves de l’école

régionale de Banfora, apprirent aux pères missionnaires d’Europe la langue Goin

afin de leur permettre de s’adresser directement aux populations autochtones. Les

pères missionnaires d’Europe rendirent des visites régulières à Niangoloko et

donnèrent des soins aux malades. Mais comment faire pour regrouper ces Goin qui

voyaient en ces Blancs, « des génies ». C’est là que le balafon est intervenu dans

beaucoup de villages de l’Ouest. A. E. C. Sandwidé donne l’exemple de

Niangoloko et Konadougou. Il affirme qu’« à Konadougou, non seulement les

pères missionnaires d’Europe s’occupaient des soins aux malades, mais encore

faisaient jouer le balafon instrument local de musique qui leur attirait les jeunes

641

Page 15: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

Tionyélé FAYAMA, Valérie Claudine OUEDRAOGO/ROUAMBA, Aimé Désiré HEMA / Balafon

et religion au Burkina Faso. Du rapport de l’instrument aux pratiques religieuses de la société Goin

dans les communes de Banfora et de Niangoloko / Revue Échanges, vol. 3, n° 11, décembre 2018

filles lors des fêtes chrétiennes de Noël et de Pâques » (A. E. C. Sandwidé, 2000, p.

175).

Il ajoute qu’à Niangoloko, « c’est le Père Pierre DUMAS, arrivé en 1942

qui lança le premier essai de grammaire Goin. Cela permit à plusieurs jeunes de

lire en Goin ». (Idem, p.176). De là, découle une autre fonction du balafon qui se

traduit en stratégie d’approche. Vu sous cet angle, le balafon est donc par

excellence un instrument d’attraction. Le balafon, défini comme tel, assure une

fonction socioreligieuse qui pourrait être qualifiée de prosélytisme religieux.

Au cours de l’étude, il nous a été donné de constater avec les Ciraamba que

le balafon était formellement interdit dans les églises et les temples. Alors qu’A. E.

C Sandwidé évoque le rôle que le balafon a joué dans les années 1880-1942

(Ibidem, p. 176). Bien avant les indépendances, cet instrument a servi aux

catholiques pour recruter leurs fidèles. Et en même temps, on leur fait savoir juste

après leur installation que c’est un instrument satanique. Le balafon a été de

manière circonstancielle, un moyen de propagande de l’idéologie religieuse dans

les villages cerma. Après la conquête, l’usage de l’instrument fut interdit aux

fidèles croyants sous prétexte qu’il est « satanique ». Mais qu’en est-il aujourd’hui

quand on sait que le contexte religieux a évolué ?

2.2. Balafon et christianisme

Le balafon, instrument de musique traditionnelle des peuples de l’Ouest et

plus particulièrement des Goin est présent dans les lieux de culte des catholiques et

des chrétiens évangéliques (protestants). Fort contesté au début des années

d’évangélisation, il participe à toutes les cérémonies aujourd’hui. La question

fondamentale qui fait place à la réflexion, est de savoir comment cette mutation

s’est opérée dans la société cerma et quelle a été de façon progressive la conception

des religieux de cet instrument ?

2.2.1. De la conception catholique

E. Durkheim définit : « Une religion est un système solidaire de croyances

et de pratiques relatives à des choses sacrées, c’est-à-dire séparées, interdites ;

croyances et pratiques qui unissent en une même communauté morale, appelée

Eglise, tous ceux qui y adhèrent » (E. Durkheim, 2003, p. 65). Cela signifie que la

religion et la société sont presque des synonymes et que la religion émerge comme

lien fondamental. Cette perception a fortement inspiré les pères missionnaires

d’Europe dans leur approche en pays Ciraamba. C’est ainsi que ce xylophone Goin

a été intégré comme moyen approprié de rapprochement des communautés

Ciraamba.Il a aussi été adroitement utilisé comme un subterfuge d’acculturation du

Goin.

À l’étape actuelle de la vie, le balafon est employé par les catholiques pour

célébrer la messe dans les églises. Le balafon sert donc à rassembler les fidèles et à

leur transmettre un message. L’instrument joue ainsi le rôle intermédiaire entre les

642

Page 16: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

Tionyélé FAYAMA, Valérie Claudine OUEDRAOGO/ROUAMBA, Aimé Désiré HEMA / Balafon

et religion au Burkina Faso. Du rapport de l’instrument aux pratiques religieuses de la société Goin

dans les communes de Banfora et de Niangoloko / Revue Échanges, vol. 3, n° 11, décembre 2018

fidèles et Dieu à travers l’enseignement de la bible. Ce sont les paroles bibliques

qui sont dites par le balafon dans des airs cerma. Au-delà de ces évènements

heureux, un recours est fait au balafon lors des funérailles (y compris

l’enterrement) des catholiques. Dans la Province de la Comoé et précisément dans

l’aire Goin (Banfora, Niangoloko et Soubakaniendougou), le balafon est utilisé lors

des enterrements catholiques même si tous les catholiques de la région ne sont pas

des Ciraamba. Les chants sont catholiques mais l’air du balafon est textuellement

Cerma. Les fidèles catholiques intègrent le balafon dans leur vie socioreligieuse.

Avant, on avait tout fait, les missionnaires-là ont refusé que le balafon ne se joue pas

à l’église, parce que c’est satanique mais ils n’avaient pas compris. Aujourd’hui par

exemple, le jour que le prêtre n’entend pas le son du balafon à la messe, il m’appelle

et me demande pourquoi ? [Le balafoniste de la cathédrale de Banfora].

Le balafon catholique est accompagné à l’église avec les mêmes

instruments qui accompagnent celui des Goin lors des funérailles à savoir le

djoloŋgu et le djolbiloŋu et pendant les mariages, les barra.

C’est de là que les catholiques ont été conquis par le balafon et possèdent

de nos jours des cassettes de balafon coproduites avec les chrétiens évangéliques

communément appelés ‘’Protestants’’. Ils ont essayé d’adapter les paroles de la

bible à la pratique traditionnelle. Cette action de l’église au départ, c’est-à-dire le

refus du balafon auparavant a fait perdre aux Ciraamba des ‘’génies’’ (se référant à

l’excellence, au surdoué) de la musique et de la danse à l’image de J. S. (un

balafoniste de renommée à Niangoloko, converti au christianisme et qui a

abandonné le balafon). Il faut dire que l’introduction du balafon n’a pas été chose

facile parce que le xylophone Cerma qui est consacré pour les rites est toujours

soumis à des sacrifices. Mais les missionnaires (Prêtres blancs) l’ont étudié et ont

trouvé en lui un caractère profane. Il faut le reproduire et sans faire de sacrifice

dessus. Nous nous sommes intéressé à l’introduction de cet instrument dans les

pratiques de l’Église et certains fidèles nous ont donné des éclairages.

L’église au Burkina Faso a plus de cent ans et le balafon a été introduit dès les

premières années d’évangélisation. Mais comme nous avons été évangélisés par les

Européens, ceux-ci ne connaissaient pas le balafon et donc il fallait du temps pour

qu’ils puissent comprendre. Ils ont vite pensé que le balafon était réservé aux

fétiches, ce qui avait fait naître une réticence. Mais au fil du temps, ils ont

commencé à comprendre. Et le balafon est rentré dans la vie d’Église véritablement

quand ils ont commencé à ‘’ordonner’’ les africains, les autochtones, alors donc, on

a introduit le balafon parce qu’il fait partie de notre culture. Cependant, il n’y a pas

eu de réticence quant aux fidèles. Bien au contraire, l’introduction du balafon à

l’église a été bien accueillie et acceptée par les villages. Pour les convaincre, il a

fallu les faire comprendre que lorsqu’on part payé l’instrument, il est du moins sans

tache. Vous remarquerez que lorsque vous allez à un mariage ou à des funérailles,

on observe que les grosses gourdes sont tachées de sang et de plumes ; cela veut dire

qu’ils ont fait des sacrifices dessus. Ce balafon, on ne peut pas l’utiliser dans

643

Page 17: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

Tionyélé FAYAMA, Valérie Claudine OUEDRAOGO/ROUAMBA, Aimé Désiré HEMA / Balafon

et religion au Burkina Faso. Du rapport de l’instrument aux pratiques religieuses de la société Goin

dans les communes de Banfora et de Niangoloko / Revue Échanges, vol. 3, n° 11, décembre 2018

l’Église, ni dans le reste de nos activités. C’est ainsi que les missionnaires furent

convaincus. [Curé de l’Église de la cathédrale de Banfora]

Selon la liturgie et la doctrine catholiques, tout autre instrument de

musique est fortement interdit hormis ceux-là qui ont été inventoriés de façon

exhaustive dans la Bible. Nonobstant, ce refus du Balafon au départ, l’instrument

est apparu progressivement comme une solution d’intégration et de changement

social. Ainsi, la relation née entre Goin et catholicisme a créé cette dynamique

sociale qui explique aisément la tolérance constatée.

Par ailleurs, cet Abbé n’a pas manqué de mentionner que le balafon, une

fois que les catholiques l’achètent (puisqu’ils ne sont pas des fabricants), est

soumis à un acte divin. Il s’agit d’une bénédiction parce que cet instrument sert à

louer le Christ. Pour lui, l’acquisition de l’instrument est une grâce divine. Par

contre chez les protestants, cet acte divin n’existe pas. « Lorsque nous partons

payer notre balafon, il n’y a rien de satanique, rien de souiller dessus, on rend grâce

à Dieu. Dès que le balafon arrive à l’Eglise, il est prêt à être joué, il n’y a pas de

rite, ni d’invocation à faire ». [Pasteur du centre d’évangélisation de Banfora].

2.2.2. De la conception des chrétiens évangéliques ou protestants.

D’après Mauss : « Il n’y a pas, en fait, une chose, une essence, appelée

Religion ; il n’y a que des phénomènes religieux et qui ont une existence historique

définie, dans des groupes d’hommes et dans des temps déterminés » (M. Mauss,

1968, p. 93-94). De ce fait, les protestants ont eu cette représentation de cet

instrument de musique cerma, tout comme l’ont fait les catholiques, en l’adoptant

au sein de leurs lieux de culte, puisqu’ils sont arrivés, dans l’espace Goin, loin

après les catholiques.

Les ‘’protestants’’ utilisent le balafon presqu’au même titre et aux mêmes

occasions que les catholiques. La différence réside dans les funérailles ou

l’enterrement. Les ‘’protestants’’ pensent que le décès est un fait social qui ne

relève pas du domaine de la réjouissance et par conséquent, il n’y a pas de raison à

ce qu’on y joue cet instrument de gaieté.

Quand quelqu’un décède chez nous, les chrétiens évangéliques, comme c’est un

sujet de tristesse, on peut chanter sans instrument parce que ce n’est pas la joie. Par

contre lorsque c’est un mariage, là c’est un sujet de joie, gloire à Dieu ! Là, le

balafon, on le fait monter à tout son volume. C’est également la même chose les

jours de baptêmes, les présentations des enfants au seigneur et les rencontres des

fidèles ; à toutes ces occasions, le balafon est au rendez-vous. [Pasteur du centre

d’évangélisation de Banfora].

Nous notons par ailleurs aussi que l’introduction n’a également pas été

facile (comme les pensées négatives des missionnaires blancs sur le balafon

cerma). Mais le balafon est un instrument de louanges pour les ‘’Protestants’’.

644

Page 18: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

Tionyélé FAYAMA, Valérie Claudine OUEDRAOGO/ROUAMBA, Aimé Désiré HEMA / Balafon

et religion au Burkina Faso. Du rapport de l’instrument aux pratiques religieuses de la société Goin

dans les communes de Banfora et de Niangoloko / Revue Échanges, vol. 3, n° 11, décembre 2018

Le ‘’rituel’’ catholique de bénédiction qui consiste à asperger de l’eau

bénite sur le balafon n’existe pas chez les « protestants ». Pour les catholiques,

cette action sur le balafon consiste à rendre grâce à Dieu, de bénir ce qu’il leur a

donné contrairement aux « protestants » qui pensent que cet acte de purification ne

s’explique pas parce que c’est lui Dieu qui leur a donné l’instrument et leur a

ordonné de l’utiliser pour le louer. Mais que dire des deux actions sur le balafon :

verser du sang et des plumes plus incantations et verser de l’eau bénite plus paroles

de bénédiction ?

Dans le fond, ces deux actions s’opposent-elles ? Chacune de ces pratiques

s’attache à quelque chose mais peut être de nature différente. Une analyse

anthropologique du phénomène ou de ces attitudes nous amène à établir un

parallélisme entre les deux pratiques religieuses. Dans la bible, il n’y a pas de

passage qui parle du balafon mais de la flûte, de la corde et des tambours (J. Grou

2010, p. 15-21). Ces instruments, en réalité, étaient cités en fonction de la culture

juive. Et, donc le balafon est une adaptation par rapport à la culture africaine.

Ce n’est pas dit dans la bible d’utiliser le balafon, mais je suis africain, burkinabè, je

vais louer Dieu avec mes instruments de musique traditionnelle parce que c’est avec

ça que le message passe bien. Et comme dirait quelqu’un ‘’si Dieu veut me parler, il

va le faire en Cerma parce que je suis Cérièg-ngo, s’il veut parler également à un

Karaboro, il va lui parler en Karaboro. [Curé de l’Eglise de la cathédrale de

Banfora].

Au pasteur de confirmer que « c’est un instrument de louange car la parole

de Dieu dit dans le psaume 150, louez Dieu avec tous les instruments ». [Pasteur du

centre d’évangélisation de Banfora]

Figure 5 : le Pasteur S. C. esquisse des notes de balafon

Source : Enquête-terrain, cliché Tionyélé FAYAMA, 2016

645

Page 19: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

Tionyélé FAYAMA, Valérie Claudine OUEDRAOGO/ROUAMBA, Aimé Désiré HEMA / Balafon

et religion au Burkina Faso. Du rapport de l’instrument aux pratiques religieuses de la société Goin

dans les communes de Banfora et de Niangoloko / Revue Échanges, vol. 3, n° 11, décembre 2018

Quant au caractère sacré du balafon, les « protestants » pensent que le

balafon est l’œuvre de Dieu. C’est Dieu qui l’a créé et l’a caché, l’homme l’a

découvert par la force du même Dieu et ce dernier (l’homme) en fait sa gloire. Pour

eux, le balafon n’est pas sacré mais ce sont les hommes qui l’ont rendu ‘’sacré’’.

Avant que l’instrument ne soit corrompu jusqu’à ce que d’autres l’adorent, il était

destiné à louer Dieu. Il est devenu maintenant une question de fétiches, il est sacré.

Ce n’est pas n’importe qui, qui joue à ce balafon, parce que le propriétaire a fait des

sacrifices par rapport à ça. [Pasteur du centre d’évangélisation de Banfora].

Parallèlement à ces deux confessions de la chrétienté, quelle position

adopte l’Islam vis-à-vis de l’instrument.

2.3. Balafon et Islam : de la conception islamique d’un instrument de musique

traditionnelle

Contrairement au christianisme (catholicisme et protestantisme), l’Islam

n’admet pas le balafon dans ses activités. Cela est lié aux principes du Saint Coran

selon les fidèles. Mais quelles sont les raisons d’un tel refus dans un pays si laïc et

avec une richesse très diversifiée de cultures comme le Burkina Faso ? Quelles sont

les représentations que les musulmans ont de cet instrument de musique ? Ce sont

autant de préoccupations qui ont guidé cette partie de la réflexion ? Les raisons

avancées par les populations musulmanes contre l’usage du balafon sont multiples

et ont été recueillies à travers les entretiens sur le terrain.

Lorsque vous rassemblez les hommes et les femmes à ces occasions comme le

balafon, il y avait peut-être des gens qui avaient manigancé des choses contre

d’autres personnes et cela peut être l’occasion de se rendre des comptes et l’Islam

devient responsable. Il peut aussi s’agir d’un homme qui a rendez-vous avec la

femme d’autrui ou même peut faire la cour à cette dernière lors d’une organisation

musulmane où il y a le balafon et ces deux peuvent aller ensemble, qui est

responsable ? C’est bien les musulmans. C’est pourquoi le Coran dit de ne jamais se

mélanger ; les hommes d’un côté, les femmes de l’autre et les enfants à part. Chez

les Ciraamba on danse tous ensemble. Ça peut aussi être le dolo parce que lorsqu’il

ya le balafon, le dolo est aussitôt abondant. Les gens boivent jusqu’à en perdre

connaissance et ‘’tombent’’ sur les femmes des gens ou ce sont les bagarres de

partout, on sort les couteaux partout. Le coran est contre tout ça, donc pas de balafon

chez nous les musulmans même si je suis Cérièg-ngo. [Imam de la mosquée du

secteur 8 de Banfora].

Ensuite, les musulmans reprochent aux Ciraamba leur consommation

excessive de la bière locale le ‘’dolo’’, qui est pour eux un élément souillé parce

qu’il ne provoque que du ‘’Chetan’’ (pour qualifier un mauvais acte c'est-à-dire

relatif à Satan).

Du reste, ils ne nient pas l’importance du balafon chez les Ciraamba. Pour

cela, il confie :

646

Page 20: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

Tionyélé FAYAMA, Valérie Claudine OUEDRAOGO/ROUAMBA, Aimé Désiré HEMA / Balafon

et religion au Burkina Faso. Du rapport de l’instrument aux pratiques religieuses de la société Goin

dans les communes de Banfora et de Niangoloko / Revue Échanges, vol. 3, n° 11, décembre 2018

Le balafon est d’une importance grande chez nous. C’est un instrument de joie. Mais

comme on fait des fétiches sur le balafon, alors l’Islam pose une barrière parce que

c’est deux mondes différents et comme je le dis, le balafon est important… ah, mais

sache que Dieu, c’est Dieu et nul ne peut aller contre sa volonté. Donc si tu dis que

tu ne voles pas, quelqu’un d’autre vole et vient te confier ce qu’il a volé, tu prends et

tu gardes, si les policiers viennent à découvrir ça chez toi lors de leurs enquêtes, est

ce que tu es vite épargné ? Non absolument pas ! Tu es aussi fautif et coupable. Une

fois que tu décides de rentrer dans l’Islam, tu évites tout ce qui est contraire parce

que si un jour les féticheurs viennent te voir, ah, Imam faut tuer la poule là pour

nous, qu’est-ce que tu fais ? Les problèmes sont venus entre les frères ! Voilà

pourquoi chacun se réserve même de côtoyer l’autre. [Imam de la mosquée du

secteur 8 de Banfora].

Le balafon n’est pas nommément interdit par le coran qui rappelle

d’ailleurs les louanges de David des Psaumes qui furent accompagnés

d’instruments (sourate Saba 34, verset 10). Ce verset rappelle les Psaumes qui sont

de David où les instruments sont permis. Mais cette conception coranique des

instruments n’est-elle pas comparable à celle biblique qui justifie l’utilisation du

balafon chez les Chrétiens ?

Il faut noter que malgré ce regard des musulmans sur le balafon, ce sont les

Hommes qui font le Coran et ce sont encore eux qui appliquent ses prescriptions ;

comme ces Hommes sont des Ciraamba, il a fallu explorer plus profondément cette

connaissance coranique. Mais un radicalisme à ce niveau n’est pas admis. Les

musulmans toujours selon les règles et prescriptions du Coran permettent que

certaines organisations fassent appel au balafon mais ils ne doivent pas être les

instigateurs.

Lorsque tu veux épouser la fille d’un croyant qui fait cette pratique, tout ce qu’il te

demande, tu es dans l’obligation morale et spirituelle de lui donner parce que l’Islam

recommande cela, sinon tu offenses la personne qui te donne sa fille en mariage.

Donc si ce dernier demande à ce qu’on joue le balafon, tu ne t’opposes pas mais le

balafon ne doit pas sonner dans toi ta cour, on peut le jouer chez la fille puisque ce

sont les parents qui ont demandé. Ils demandent des poules, des cauris etc., tu leur

donnes mais dès que tu as ta femme, tu lui fais marcher sur la voie de l’Islam. Et

quand je parle de balafon c’est le Cergbonga (balafon sacré des Goin) qui est banni

chez nous mais si c’est le djogbonga (le balafon profane de réjouissance des Goin),

on permet cela mais c’est dans ce cas bien précis. Il y a aussi des cas où l’homme

(musulman) demande le balafon, c’est le ‘’djogbonga’’ qui ne relève pas du Goin,

ou du sacré. On ne tue rien dessus. On peut le jouer pour avoir du monde à son

mariage mais pas de dolo, pas de poules, pas de fétiches ». Et ajoute-t-il :« ce qui

n’est même pas possible c’est le mariage entre musulman et « féticheur »,

« animiste » parce qu’ils ne sont pas des croyants. Ce qui est permis c’est le mariage

entre musulmans et chrétiens et le djogbonga est accepté en fonction de la religion

de l’un ou de l’autre ». ». [Imam de la grande mosquée de Banfora].

647

Page 21: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

Tionyélé FAYAMA, Valérie Claudine OUEDRAOGO/ROUAMBA, Aimé Désiré HEMA / Balafon

et religion au Burkina Faso. Du rapport de l’instrument aux pratiques religieuses de la société Goin

dans les communes de Banfora et de Niangoloko / Revue Échanges, vol. 3, n° 11, décembre 2018

Photo 1 : Prise de vue du Balafon sacré à l’autel de Dionouna

Source : Enquête-terrain cliché Fayama Tionyélé

Photo 2 : Fayama esquisse des notes du Balafon profane à Niangoloko

Source : Enquête-terrain cliché Zani DjakaliaTraoré

Par-delà toutes ces réalités, les musulmans disent avoir eux aussi leurs

instruments de musique comme le tambour à aisselle et le djembé. Ils estiment que

ces deux instruments se jouent lors des fêtes mais ils ne louent pas Dieu en Islam

avec un instrument de musique.

Somme toute, M. Lecordier-Ferlay (2012) estime qu’il existe des forces qui

résistent au changement social. En effet, ces forces ont pour but de maintenir un

statut quo. Elle indique que Visagie et Botha (1998) ont retenu quatre (04) raisons

qui déterminent la résistance au changement social dans un système social.

D’abord, il s’agit des normes qui maintiennent une harmonie entre les membres

d’un système social en vertu de laquelle ces normes leur sont imposées et dont la

transgression est perçue comme une déviance. Ces normes étant partagées par les

membres d’une communauté sont difficilement modifiables ou supprimables sans

un consensus social. Ensuite, les changements sociaux sont généralement proscrits

au nom d’une cohésion culturelle qui est le substrat de la configuration de base des

648

Page 22: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

Tionyélé FAYAMA, Valérie Claudine OUEDRAOGO/ROUAMBA, Aimé Désiré HEMA / Balafon

et religion au Burkina Faso. Du rapport de l’instrument aux pratiques religieuses de la société Goin

dans les communes de Banfora et de Niangoloko / Revue Échanges, vol. 3, n° 11, décembre 2018

systèmes sociaux dont le changement d’une partie implique le changement du

système social dans son ensemble. En plus, Le sujet intouchable c’est-à-dire

certains pans de la réalité sociale subissent des modifications plus rapides que

d’autres. Ces derniers résistent mieux aux changements dans la mesure où ces

derniers relèvent de l’ordre du divin, du saint, du pieu. Enfin, la résistance aux

étrangers est la stratégie développée par les structures sociales imperméables aux

changements sociaux de s’en prémunir dans la mesure où le changement social est

perçu comme l’œuvre des acteurs en dehors du système dont le contact fragiliserait

le système.

De fait, ces analyses semblent traduire l’essence-même des représentations

évolutives que les Goin ont manifestées lors de l’invasion des religions étrangères

dans leur environnement.

Conclusion

Le balafon, dès les débuts d’évangélisation des Goin, a servi de stratégie

pour atteindre les populations. Le balafon était joué à cette époque et organisé pour

les attirer afin de pouvoir les évangéliser. A la suite de la conquête des âmes par les

missionnaires, le balafon fut interdit à tout catholique et protestant. Il est désormais

hors d’usage de ces derniers parce que c’est un instrument sur lequel se font des

sacrifices, toute chose qui s’oppose aux prescriptions chrétiennes. Cette situation

va connaître des changements et le balafon sera intégré dans les lieux de culte

lorsque les pères missionnaires d’Europe ont commencé à ordonner les prêtres

noirs. De nos jours, l’instrument s’est imposé pendant les célébrations des messes

chez les Chrétiens. Il est aussi présent dans toutes les circonstances et activités des

Chrétiens. Mais si l’instrument intègre quasiment la vie socioreligieuse des

catholiques, pour les protestants, les funérailles ou les cas de décès ne sont pas

accompagnés par le balafon à partir du moment où ce ne sont pas des occasions

festives. Cependant, le balafon utilisé dans ces lieux de culte a un caractère

profane. Pour les musulmans, les principes islamiques sont fermes sur l’utilisation

de ce xylophone. C’est un instrument satanique et n’est autorisé dans aucun cas.

Mais des dérogations sont accordées et conformément aux prescriptions

islamiques. Ce qui fait que le balafon profane est, parfois, joué lors de certaines

cérémonies de mariage musulman. L’instrument a, par ailleurs, servi de moyen de

prosélytisme religieux et continue toujours de recruter ou de regrouper les fidèles

chrétiens.

Références bibliographiques

CROZIER Michel et FRIEDBERG Erhard, 1977, L’acteur et le système : les

contraintes de l’action collective, Paris, Seuil.

DACHER Michel, 2003, Une épopée Goin : les Paysans Noirs à Banfora

Aujourd’hui ! in Savant et Politique (1897-1976), Une réflexion anthropologique,

Paris, KARTHALA, p. 28-53.

649

Page 23: ÉCHANGES · 2019. 6. 17. · REVUE DE PHILOSOPHIE, LITTÉRATURE ET SCIENCES HUMAINES ÉCHANGES VOLUME 3 : SCIENCES HUMAINES Volume 3, N° 011 décembre 2018 Laboratoire d’Analyse

Tionyélé FAYAMA, Valérie Claudine OUEDRAOGO/ROUAMBA, Aimé Désiré HEMA / Balafon

et religion au Burkina Faso. Du rapport de l’instrument aux pratiques religieuses de la société Goin

dans les communes de Banfora et de Niangoloko / Revue Échanges, vol. 3, n° 11, décembre 2018

DURKHEIM Emile, 2003, Les formes élémentaires de la vie religieuse, Paris, PUF

5e édtion.

GOFFMAN Erving, 1969, Strategic Interaction, Philadelphia, University of

Pennsylvania Press.

FAYAMA Tionyélé, 2011, Analyse des fonctions socioculturelles du balafon chez

les Goin dans la province de la Comoé, Mémoire de Maitrise, Université de

Ouagadougou, département de Sociologie.

GROU Jean, 2010, « La Terre Sainte », n°583, pp.15-21.

HEMA Thomas, 1985, Le chant de funérailles chez les Ciraamba du Burkina

Faso, Une approche de la conception de Dieu, Abidjan, ICAO (Institut Catholique

de l’Afrique de l’Ouest) faculté de Théologie, 1ère

année de Licence.

JAVEAU Claude, 1997, Leçons de sociologie, Armand Colin, Paris.

LECORDIER-FERLAY Marianne, 2012, Les freins sociaux à la diffusion des

innovations, thèse de doctorat, Université de Grenoble, science de gestion, 327p

MAUSS Marcel, 1968, « L’analyse des faits religieux, in les fonctions sociales du

sacré, Esquisse d’une théorie de la magie », in Sociologie et Anthropologie, Paris,

Minuit, p. 55 -115.

MINARIK Etienne, 1971, Les 50 mots-clés de la psycho-sociologie, Toulouse,

Privat.

N’DA Paul, 2006, Méthodologie de la recherche : de la problématique à la

discussion des résultats, Abidjan, Educi.

ROCHER Guy, 1968, Introduction à la sociologie générale, Le changement social,

Paris, HMH, 2ème

édition

ROCHER Guy, 1969, « Introduction à la sociologie générale », Tome 3 – le

changement social, 3ème

édition, Hurtubise HMH, LTEE, p. 313-562.

SANDWIDE Abbé Épiphane Claude, 2000, « La conquête des peuples burkinabè

pour leur conversion », in Histoire de l’Église au Burkina Faso, Traditio,

Perceptio et Re-expressio : 1899-1979, Diocèse de Bobo-Dioulasso, Évêché de

bobo, p.169-216.

SIRIMA Owamaké, 1996, La mise en place du peuplement Cerma (Goin) dans la

province de la Comoé : GBA-FO (Banfora), Université de Ouagadougou,

département d’Histoire et d’archéologie, année académique.

SOMA Léon, 1994, Contact de langues et de cultures : l’influence du Jula sur le

Cerma, Mémoire de Maitrise, Univ. de Ouagadougou, département de linguistique.

SOMA Yarmon, 1983, « les instruments de musiques du pays Cerma (ou Goin) au

Sud-ouest du Burkina Faso », in Anthropos, Revue Internationale d’ethnologie et

de linguistique, éditions St-Paul, CH-1700 Fribourg, Suisse, 83-1988-4/6.

650