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 Conseil d'État, 6 avril 2007, n° 284736, Commune d’Aix-en-Provenc e , publié au Recueil Lebon E-rjcp n° 15  Thème : -Principe de libre organisation de services publics, et de mise en concurrence lorsque le service est confié à des tiers. - Condit io ns pour qu'un se rv ic e pu bl ic co nf ié à un opér at eur n’en tr e pa s da ns le ch amp concurrentiel, selon la nature de l’activité, les conditions particulières de son exercice et la nature de l'opérateur prestataire. - Application de l'exception de mise en concurrence «in house», à un service public culturel confié à une association. Résumé : Lorsque des collectivités publiques sont responsables d'un service public, elles peuvent, dès lors que la nature de ce service n'y fait pas par elle-même obstacle, décider de confier sa gestion à un tiers. A cette fin, sauf si un texte en dispose autrement, les collectivités publiques doivent en principe conclure avec un opérateur, un contrat de délégation de service public ou, si la rémunération de leur cocontractant n'est pas substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service, un marché public de service : - quel que soit le statut juridique de l’opérateur, - et alors même qu'elles l'aurai ent créé ou auraient contribué à sa création, - ou encore qu'elles en seraient membres, associés ou actionnaires. Les collectivités publiques peuvent toutefois ne pas passer un tel contrat lorsque le tiers auquel elles s'adressent ne saurait être regardé comme un opérateur sur un marché concurrentiel eu égard : - à la nature de l'activité en cause, - aux conditions particulières dans lesquelles il l'exerce, - le tiers auquel les collectivités publiques s’adressent. Lorsque les collectivités publiques sont responsables d'un service public, elles peuvent aussi décider d'en assurer directement la gestion et à cette fin, le gérer : - en simple régie, - ou encore, s'il s'agit de collectivités territoriales, dans le cadre d'une régie à laquelle elles ont conféré une autonomie financière et, le cas échéant, une personnalité juridique propre. Les collectivités publiques doivent aussi être regardées comme gérant directement le service public si : - el le s cr ée nt à ce tt e fi n un or ga ni sme do nt l' ob je t statutai re exclusif es t, so us réserve d' un e diversific ation purement accessoire, de gérer ce service, - et si elles exercent sur cet organisme un contrôle comparable à celui qu'ell es exercent sur leurs propres services leur donnant notamment les moyens de s'assurer du strict respect de son objet statutaire. Cet organisme doit alors être regardé comme n'étant pas un opérateur auquel les collectivités publiques ne pourraient faire appel qu'en concluant un contrat de délégation de service public ou un marché public de service. Un tel organisme peut notamment être mis en place lorsque plusieurs collectivités publiques décident de créer et de gérer ensemble un service public. Lorsqu’une personne privée exerce une activit é, elle ne peut, en tout état de cause, être regardée comme  bénéficiant de la part d'une personne publique de la dévolution d'une mission de service public si : - elle a pris l'initiative de cette activité, - elle l’exerce sous sa responsabilité, - et sans qu'une personne publique en détermine le contenu. Cette activité peut cependant se voir reconnaître un caractère de service public, alors même qu'elle n'a fait l'objet d'aucun contrat de délégation de service public procédant à sa dévolution, si :

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Conseil d'État, 6 avril 2007, n° 284736, Commune d’Aix-en-Provence, publié au Recueil LebonE-rjcp n° 15

► Thème :-Principe de libre organisation de services publics, et de mise en concurrence lorsque le service estconfié à des tiers.- Conditions pour qu'un service public confié à un opérateur n’entre pas dans le champconcurrentiel, selon la nature de l’activité, les conditions particulières de son exercice et la naturede l'opérateur prestataire.- Application de l'exception de mise en concurrence «in house», à un service public culturel confiéà une association.

► Résumé :Lorsque des collectivités publiques sont responsables d'un service public, elles peuvent, dès lors que lanature de ce service n'y fait pas par elle-même obstacle, décider de confier sa gestion à un tiers.

A cette fin, sauf si un texte en dispose autrement, les collectivités publiques doivent en principe conclureavec un opérateur, un contrat de délégation de service public ou, si la rémunération de leur cocontractant

n'est pas substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service, un marché public de service :- quel que soit le statut juridique de l’opérateur,- et alors même qu'elles l'auraient créé ou auraient contribué à sa création,- ou encore qu'elles en seraient membres, associés ou actionnaires.

Les collectivités publiques peuvent toutefois ne pas passer un tel contrat lorsque le tiers auquel elless'adressent ne saurait être regardé comme un opérateur sur un marché concurrentiel eu égard :- à la nature de l'activité en cause,- aux conditions particulières dans lesquelles il l'exerce,- le tiers auquel les collectivités publiques s’adressent.

Lorsque les collectivités publiques sont responsables d'un service public, elles peuvent aussi décider d'enassurer directement la gestion et à cette fin, le gérer :- en simple régie,- ou encore, s'il s'agit de collectivités territoriales, dans le cadre d'une régie à laquelle elles ont conféréune autonomie financière et, le cas échéant, une personnalité juridique propre.

Les collectivités publiques doivent aussi être regardées comme gérant directement le service public si :- elles créent à cette fin un organisme dont l'objet statutaire exclusif est, sous réserve d'unediversification purement accessoire, de gérer ce service,- et si elles exercent sur cet organisme un contrôle comparable à celui qu'elles exercent sur leurs propresservices leur donnant notamment les moyens de s'assurer du strict respect de son objet statutaire.

Cet organisme doit alors être regardé comme n'étant pas un opérateur auquel les collectivités publiquesne pourraient faire appel qu'en concluant un contrat de délégation de service public ou un marché publicde service. Un tel organisme peut notamment être mis en place lorsque plusieurs collectivités publiquesdécident de créer et de gérer ensemble un service public.

Lorsqu’une personne privée exerce une activité, elle ne peut, en tout état de cause, être regardée comme bénéficiant de la part d'une personne publique de la dévolution d'une mission de service public si :- elle a pris l'initiative de cette activité,- elle l’exerce sous sa responsabilité,- et sans qu'une personne publique en détermine le contenu.

Cette activité peut cependant se voir reconnaître un caractère de service public, alors même qu'elle n'afait l'objet d'aucun contrat de délégation de service public procédant à sa dévolution, si :

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- une personne publique, en raison de l'intérêt général qui s'y attache et de l'importance qu'elle revêt àses yeux, exerce un droit de regard sur son organisation,- et, le cas échéant, lui accorde des financements, dès lors qu'aucune règle ni aucun principe n'y fontobstacle.

Dans l’affaire, la Cour administrative d'appel a entaché son arrêt d'une erreur de droit en jugeant qu'uneassociation ne pouvait gérer un service public et bénéficier à ce titre d'une subvention qu'à la conditiond'être titulaire d'un contrat de délégation de service public passé soit en application des dispositions desarticles 38 et suivants de la loi du 29 janvier 1993 soit en application des articles L. 1411-1 et suivantsdu code général des collectivités territoriales, sans rechercher si, pour l'une des raisons analysées ci-dessus, la passation d'un tel contrat pouvait ou devait être exclue.

L’Etat, une région, un département et une commune ont créé une association pour le cinquantenaire dufestival international d'art lyrique d'Aix-en-Provence, devenue l'association pour le festival internationald'art lyrique et l'académie européenne de musique d'Aix-en-Provence.

Ils ont ainsi décidé, sans méconnaître aucun principe, de faire du festival international d'Aix-en-Provence un service public culturel, car :

- cette association a pour objet statutaire exclusif la programmation et l'organisation du festival,- elle se compose de trois représentants de l'État, de quatre représentants des collectivités territoriales etde cinq personnalités qualifiées, dont une est nommée par le maire de la commune membre et trois par le ministre chargé de la culture , ainsi que, le cas échéant, de membres actifs ou bienfaiteurs ou encored'entreprises, dont la demande d'adhésion doit être agréée par le bureau et qui ne disposent pas de voixdélibérative au sein de l'association,- son conseil d'administration est composé de quinze membres, dont onze sont désignés par lescollectivités publiques,- les subventions versées par ces collectivités publiques représentent environ la moitié des ressources del'association,- l’association bénéficie en outre, de la part de la commune membre, de différentes aides, comme la mise

à disposition de locaux dans lesquels se déroule le festival et des garanties d'emprunt.

Ce service public présente un caractère administratif, compte tenu :- de son objet,- de ses modalités d'organisation,-et de ses modalités de financement.

Cette association à laquelle les quatre collectivités publiques ont confié la gestion du service public, nesaurait être regardée, comme un opérateur auquel il ne pourrait être fait appel que dans le cadre d'uncontrat de délégation de service public ou d'un marché public de service compte tenu :- de son objet statutaire,

- et du contrôle qu'exercent sur elle ces collectivités.

Le moyen tiré de ce que la commune aurait dû passer avec l'association une convention de délégation deservice public doit être, en tout état de cause, écarté et les requérants ne peuvent, dès lors, utilementinvoquer les dispositions de l'article L. 1411-2 du code général des collectivités territoriales.

La commune membre pouvait accorder des subventions au service public culturel du festivalinternational d'Aix-en-Provence et les dispositions de l'article L. 2224-2 du code général descollectivités territoriales, qui limitent la possibilité pour une commune de prendre en charge dans son

 budget des dépenses d'un service public à caractère industriel et commercial, ne peuvent être utilementinvoquées

La commune, membre de l’association, n'a pas davantage méconnu les dispositions des articles L. 1511-

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1 et suivants du même code dès lors que- celles-ci ont pour objet de réglementer les conditions dans lesquelles les collectivités territoriales

 peuvent apporter des aides à des entreprises,- et que l'association, dont l'activité exclusive est de gérer, à la demande des collectivités publiques quil'ont créée et sous leur contrôle, le service public du festival international d'Aix-en-Provence, ne sauraitêtre regardée comme une entreprise au sens de ces dispositions.http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnDocument?

 base=JADE&nod=JGXAX2007X04X000000284736

► Commentaire

 Nul doute que cet arrêt va réformer en profondeur les modalités de dévolution des services publics par les collectivités.

Après avoir affirmé le principe de libre organisation des services publics et de leur mise en concurrencelorsqu’ils sont confiés à un tiers, le juge va poser les jalons de l'exonération possible de ces règlesnotamment lorsque le service public est confié au secteur associatif, à l'occasion de la dévolution d’unservice public culturel.

Ces exonérations de mise en concurrence du prestataire sont de deux types :- soit en raison de la nature de l’activité, de ses conditions particulières d'exercice et de la nature del'opérateur prestataire, dont nous tâcherons d'en définir le périmètre qui correspond en fait au desservices listés par l’article 30 du Code des marchés publics,- soit en application de l'exception de mise en concurrence «in house», découlant du droitcommunautaire.

Cet arrêt porte en germe :- l’exonération des services sanitaires, sociaux, culturels et sportifs amateurs confiés dans un cadre nonlucratif,

- la modification de la politique de coopération entre collectivités publiques, pouvant faire tomber endésuétude ses différentes formes institutionnelles de droit public qui ne bénéficient pas d'une fiscalité propre, au profit d'une organisation associative de droit privé.

Première partie : La liberté d'organiser les services publics, et le principe de mise en concurrencelorsque le service est confié à des tiers.

Le Conseil d'État affirme la liberté des collectivités publiques à gérer leurs services en régie simple (par leur propre service) ou pour les collectivités territoriales dans le cas d'une régie à autonomie financièreavec le cas échéant une personnalité juridique propre. Le Conseil d'État confirme également la

 possibilité de confier la gestion d'un service public à un tiers dès lors que la nature de ce service n'y fait pas par elle-même obstacle.

Ces deux principes de liberté d'organisation de service public et de mise en concurrence du prestataireauquel ce service public serait confié, sont tout à fait conformes au droit communautaire et au droitnational.

A. La liberté d'organisation de service public.

Cette liberté d'organisation est inscrite dans le marbre de la constitution à son article 72 qui reconnaît àcôté du pouvoir souverain de l'État, un principe de libre administration des collectivités territoriales,

dont les conditions d'exercice restent néanmoins encadrées par la loi.« Dans les conditions prévues par la loi, ces collectivités s'administrent librement par des conseils élus

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et disposent d'un pouvoir réglementaire pour l'exercice de leurs compétences.»

Seuls les établissements publics restent régis par les principes de spécialité et d'exclusivité : ils ne peuvent exercer que les compétences qui leur ont été confiées par l'État ou les collectivités territoriales,à l'occasion de l'adoption des statuts de ces établissements.

Le pouvoir souverain des États est également reconnu par le droit européen. Ainsi, le livre blanc sur lesservices d'intérêt général, communication COM (2004) 374, dispose que : «4.2. (…)  En principe, les

 États membres bénéficient d'une grande latitude pour fixer les modalités de l'organisation des servicesd'intérêt général. En l'absence d'harmonisation communautaire, les pouvoirs publics concernés dans les

 États membres sont, en principe, libres de décider de fournir eux-mêmes un service d'intérêt général oude le confier à une autre entité (publique ou privée). Néanmoins, les fournisseurs de services d'intérêt économique général, y compris les fournisseurs de services internes, sont des entreprises et sont dèslors soumis aux règles de concurrence prévues par le traité».

Ainsi, tout service public peut faire objet d'une délégation, même un service public administratif, àl'exception de l'exercice de droits régaliens, comme l'exercice du pouvoir de police (CAA Lyon, 7 mai2003, n° 01LY02009 Communauté de communes Vallons du Lyonnais).

B. Le principe de mise en concurrence lorsque le service est confié à des tiers.

Le Conseil d'État reconnaît que la conclusion d'un contrat avec un opérateur relève de la délégation deservice public ou d'un marché public de service, sauf si un texte en dispose autrement, ce qui neconstitue pas une surprise.

Ce principe, dont nous examinerons les ressorts dans les autres parties de ce commentaire, s'applique :- Premièrement, quel que soit le statut juridique du prestataire. Ainsi, la nature juridique que constitueune association ou une collectivité publique ne permet pas en elle-même de les exempter des règles

 publiques de leur mise en concurrence.

- Deuxièmement, même si les collectivités publiques auraient créé le prestataire, ou auraient contribué àsa création. C'est ainsi le cas des sociétés d'économie mixte et de certaines associations.- Troisièmement, même si ces prestataires dont les collectivités publiques en seraient l’associé oul’actionnaire, agissent sur leur demande.

Cependant, ce principe peut être écarté en raison de textes contraires. Tel est cas de l'article 3 du codedes marchés publics, qui exonère de son application certains types de relations contractuelles. Certainesexemptions mentionnées à cet article, au demeurant contestables selon le droit européen, ne seraient pasexonérées complètement de mise en concurrence en application des principes du Traité CE, tels lesservices financiers.

D'autres exemptions prévues à cet article, permettent d'échapper clairement à toute mise en concurrence,tel :- le monopole légal de service accordant un droit exclusif, compatible avec le droit communautaire (2°),- les relations contractuelles conclues «entre un pouvoir adjudicateur et un cocontractant sur lequel il exerce un contrôle comparable à celui qu’il exerce sur ses propres services et qui réalise l’essentiel de

 ses activités pour lui à condition que, même si ce cocontractant n’est pas un pouvoir adjudicateur, il applique, pour répondre à ses besoins propres, les règles de passation des marchés prévues par le

 présent code ou par l’ordonnance nº 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics»(3°).

Dans la présente affaire, le juge administratif va appliquer dans les faits cet article 3-3° du Code desmarchés publics de 2004 et de 2006, sur un litige antérieur à ces textes. Rappelons que cette codificationn'est que la résultante de l'évolution de la jurisprudence, dite exception «in house», dont le texte d’appui

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d'origine est ancien : l’article 6 de l'ancienne directive 92/50/CEE du 18 juin 1992 portant coordinationdes procédures de passation des marchés publics de services.Cet article 6 n’est qu’une interprétation jurisprudentielle des droits exclusifs, tels qu’ils ont été codifiés àl’article 3-2° du Code des marchés publics de 2004 et 2006 susmentionné. Ces droits exclusifs figurentégalement dans la nouvelle directive unifiée des marchés publics 2004/18/CE.

Une codification nationale logique aurait dû intégrer ce dispositif du 3-3° au sein du 3-2° du Code. Lamême logique de rédaction a inspiré l'ordonnance de 2005-649 du 6 juin 2005 : dispositif spécifique àson article 23.

Cette exception ne s'applique qu'aux seules prestations de services, et non aux fournitures (CJCE, 18novembre 1999, aff. C-107/98, Teckal ), ni aux travaux (CJCE, 18 janvier 2007, Affaire C-220/05,  Jean

 Auroux e.a. contre Commune de Roanne). Elle a été étendue par la jurisprudence communautaire à laconcession de services, délégation de service public au sens de notre droit national (CJCE, 13 octobre2005, aff. C-458/03, Parking Brixen).

Dans la présente affaire, le Conseil d'État applique également cette exception jurisprudentielle «inhouse», sans distinction des différents modes de gestion du service public : lorsque les conditions

d'exception sont remplies le service est considéré comme étant assumé en régie. La notion de tiers prestataire disparaît, comme étant l'émanation même de l'administration.

La directive des entités adjudicatrices 2004/17/CE et ses transpositions nationales comportent unmécanisme approchant, mais avec une application plus mathématique (voir développement en deuxième

 partie).

Par ailleurs, le Conseil d'État va prendre en compte la nature de l’activité et de ses conditions particulières d'exercice et la nature de l'opérateur prestataire qui ouvre un nouveau champ de dérogationau principe de mise en concurrence.

Mais comme on le verra, cet autre champ de dérogation s'inscrit également dans des textes européens, enl'absence de transposition nationale.

Deuxième partie - les conditions pour qu'un service public confié à un opérateur n’entre pas dansle champ concurrentiel, selon la nature de l’activité, les conditions particulières de son exercice etla nature de l'opérateur prestataire : vers l’exonération de concurrence de la gestion associativedes services publics de sanitaires, sociaux, culturel et sportifs amateurs

Dans le présent arrêt du 6 avril 2007, le Conseil d’État pose le principe que les collectivités publiques puissent décider de confier la gestion d'un service public à un opérateur, sans appliquer les règles deconcurrence des marchés publics ou des délégations de service public, lorsque cet opérateur «ne

 sauraient être regardé comme un opérateur sur un marché concurrentiel» eu égard :- «à la nature de l'activité en cause»,- «aux conditions particulières» dans lesquelles l'opérateur l’exerce,- «le tiers» auquel les collectivités publiques s’adressent.On trouve ici trois conditions cumulatives qui apparaissent dans l’avis du Conseil d’État, ass. Générale,n° 369315 du 23 octobre 2003,  Fondation Jean Moulin (rapport du Conseil d’État 2003 pages 209 à215), qui exclurait les prestations sociales des fonctionnaires, des règles de la concurrence.

Déjà, le Conseil d'État, dans son arrêt ATMMP et autres, (n° 264712, 265248, 265281, 265343, 23février 2005, publié au Recueil Lebon), n’envisageait pas la mise en concurrence automatique des

services régis par l’article 30 du Code des marchés publics : «Considérant que, si certains marchés publics de service ayant pour objet des prestations ne figurant pas à l'article 29 du même code, peuvent être passés sans publicité préalable et même, éventuellement, sans mise en concurrence, en raison de

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leur objet ou de situations répondant à des motifs d'intérêt général  , il ne saurait en résulter que tousces marchés puissent être conclus sans respecter les principes rappelés par l'article 1er du code»

Le Conseil d’État dans le présent arrêt du 6 avril 2007 balise le nouveau dispositif de l’article 30 Codedes marchés de 2006, qui recouvre ce type de prestations susceptibles d’être menées par desassociations, (cf. nomenclature d’activités CPV) :« Article 30

 I. - Les marchés et les accords-cadres ayant pour objet des prestations de services qui ne sont pasmentionnées à l’article 29 peuvent être passés, quel que soit leur montant, selon une procédure adaptée,dans les conditions prévues par l’article 28.

 Article 28(…) les marchés (…) peuvent être passés selon une procédure adaptée, dont les modalités sont librement fixées par le pouvoir adjudicateur en fonction de la nature et des caractéristiques du besoin à

 satisfaire, du nombre ou de la localisation des opérateurs économiques susceptibles d’y répondre ainsique des circonstances de l’achat. (…) Le pouvoir adjudicateur peut décider que le marché sera passé

 sans publicité ni mise en concurrence préalables si les circonstances le justifient (…) »

En fait, cet arrêt va implicitement fait revivre partiellement des dispositions de l'article 30 du code des

marchés publics de 2001 en tant qu'elle ne soumettait leur passation aux seules obligations relatives à ladéfinition des prestations par références à des normes ainsi qu'à l'envoi d'un avis d'attribution pour lesmarchés qui ont pour objet :« 2° Des services sociaux et sanitaires ;3° Des services récréatifs, culturels et sportifs ;4° Des services d'éducation ainsi que des services de qualification et insertion professionnelles, »mais uniquement appliqué aux contrats passés avec des opérateurs à but non lucratif.

A. La nature des activités susceptibles d’être placées hors champ du marché de la concurrence.

1. Une définition nécessairement communautaire et une mise en oeuvre nationale.

Bien que le Conseil d'État ne vise pas le droit européen, la frontière entre le secteur concurrentiel et nonconcurrentiel entre pleinement dans l'application des règles du droit primaire européen (le Traité descommunautés européennes) et du droit dérivé (les directives d’application ou les décisions de laCommission des communautés européennes).

La directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative auxservices dans le marché intérieur (JOUE du 27 décembre 2006 L 376/36), soumet les services d'intérêtgénéral économique (fournis en échange d'une contrepartie économique) au principe de la libertéd'établissement des prestataires et de la libre circulation des services, saufs exceptions listées par cetexte.

Ces principes impliquent pour les pouvoirs adjudicateurs et entités adjudicatrices, la mise en oeuvred’une concurrence entre les opérateurs économiques dans le respect du droit européen :- directive 2004/17/CE pour les contrats passés par les entités adjudicatrices et directive 2004/18/CE

  pour les pouvoirs adjudicateurs, telles que transposées par le Code des marchés publics et par l'ordonnance de 2005- 649 du 6 juin 2005,- application pour les autres types de contrats ou de désignations, du «régime d'autorisation» prévue par la directive 2006/123/CE «services dans le marché intérieur», dont la concession, notamment lesdélégations de service public telles qu'elles existent dans notre droit national par la loi «Sapin» n° 93-122 du 29 janvier 1993.

Par contre, «les services d'intérêt général non économiques», fournis en l'absence d'échangeséconomiques, ne sont pas soumis aux principes de libre établissement et de libre circulation, selon

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l'article 2-1-2 a) de la directive «service dans le marché intérieur». Les États n'ont donc aucuneobligation à les soumettre à concurrence, sauf éventuelle directive européenne sectorielle. Le Code desmarchés publics à son art. 1er -I contient la même logique : il ne s’applique qu’aux «contrats conclus àtitre onéreux».

Cependant, on recherchera vainement une définition précise dans les communications de la Commissiondes communautés européennes, de cette notion de «non économique», notamment en annexe 1définition terminologique du livre blanc sur les services intérêt général (COM/2004/0374 final).

La Commission des communautés européennes dans sa communication du 26 avril 2006 «Mettre enœuvre le programme communautaire de Lisbonne - Les services sociaux d'intérêt général dans l'Unioneuropéenne», peut fournir des indices des principes posé par le présent arrêt du Conseil d'État. Bien que

 plaçant ce secteur d’activités dans la sphère concurrentielle (voir 4. dessous), le Parlement européen feraensuite son office pour contrecarrer cette position de la Commission que certains qualifieraientd’ultralibérales lors de l’adoption de la directive 2006/123/CE «services dans le marché intérieur»

Cette directive 2006/123/CE «services dans le marché intérieur», va lister les services exclus de ces principes de mise en concurrence. Précisons que si cette directive «ne concerne (…) ni la conclusion de

contrats par les autorités compétentes pour la fourniture d'un service donné qui relève de règlesrelatives aux marchés publics, étant donné que la présente directive ne traite pas des règles relativesaux marchés publics » (considérant 57), le droit européen de la commande publique ne coordonne pasles procédures de passation des marchés relevant de l’équivalent de l’article 30 du Code des marchés

 publics (annexe II B de la directive 2004/18/CE), sauf l’exigence de spécifications techniques et d’unavis d’information du marché passé. Ce vide de procédure coordonnée de passation laisse donc unchamp d’application à la directive 2006/123/CE, qui s’appliquera par défaut.

2. Les services exemptés de mise en concurrence selon la directive 2006/123/CE du 12 décembre2006 : les services de soin et les activités sportives non lucratives amateurs.

La directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative auxservices dans le marché intérieur (JOUE du 27 décembre 2006) L 376/36, qui vise que les servicesfournis en échange d'une contrepartie économique, exclut notamment de la liberté d'établissement des

 prestataires et de la libre circulation des services, notamment à son article 2 - Champ d'application -2 2.La présente directive ne s'applique pas aux activités suivantes :« f) les services de soins de santé, qu'ils soient ou non assurés dans le cadre d'établissements de soins et indépendamment de la manière dont ils sont organisés et financés au niveau national ou de leur nature

 publique ou privée ; g) les services audiovisuels, y compris les services cinématographiques, quel que soit leur mode de production, de distribution et de transmission, et la radiodiffusion sonore ; j) les services sociaux relatifs au logement social, à l'aide à l'enfance et à l'aide aux familles et aux

 personnes se trouvant de manière permanente ou temporaire dans une situation de besoin qui sont assurés par l'Etat, par des prestataires mandatés par l'État ou par des associations caritativesreconnues comme telles par l'État»

Elle exclut également les activités sportives amateurs de son application par son article 2 -2 : «Lesactivités sportives non lucratives pratiquées à titre amateur revêtent une importance socialeconsidérable. Elles poursuivent souvent des objectifs entièrement sociaux ou de loisir. Elles neconstituent donc pas des activités économiques au sens du droit communautaire et ne devraient pasrelever du champ d'application de la présente directive.»

3. Le cas des services de tourisme et de loisirs soumis à concurrence selon la directive 2006/123/CEdu 12 décembre 2006.

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La même directive 2006/123/CE «services dans le marché intérieur» inclut le tourisme et loisir dans lechamp concurrentiel de la consommation (considérant 33)(…)Les services aux consommateurs sont également compris, notamment ceux dans le domaine dutourisme, y compris les guides touristiques, les services de loisir, les centres sportifs et les parcsd'attraction (…).

Il est à remarquer que la directive vise la notion de «consommateurs». Mais, le tourisme et le loisir  peuvent répondre également à un besoin social, le cadre juridique est celui détaillé dessous.

4. Les services publics sociaux : le parlement européen a réussi à remettre en cause la position dela Commission européenne qui les soumettait à la concurrence.

La communication de la Commission des communautés européennes du 26 avril 2006 – COM (2006)177 final (JOUE du 29 juin 2006 C 151/15) «Mettre en œuvre le programme communautaire de

 Lisbonne - Les services sociaux d'intérêt général dans l'Union européenne», vise :

- «les régimes légaux et les régimes complémentaires de protection sociale, sous leurs diverses formesd'organisation (mutualistes ou professionnelles), couvrant les risques fondamentaux de la vie, tels que

ceux liés à la santé, la vieillesse, les accidents du travail, le chômage, la retraite, le handicap »- «les autres services essentiels prestés directement à la personne. Ces services jouant un rôle de

 prévention et de cohésion sociale, ils apportent une aide personnalisée pour faciliter l'inclusion des personnes dans la société et garantir l'accomplissement de leurs droits fondamentaux» qui sont définiscomme :

- l'aide aux personnes dans la maîtrise des défis immédiats de la vie ou des crises (l'endettement, lechômage, la toxicomanie, la rupture familiale) ;- les activités visant à assurer que les personnes concernées ont les compétences nécessaires à leur insertion complète dans la société (réhabilitation, formation linguistique pour les immigrés) etnotamment sur le marché du travail (formation, réinsertion professionnelle). Ces services complètent

et soutiennent le rôle des familles dans les soins apportés notamment aux plus jeunes et aux plus âgés ;- les activités visant à assurer l'intégration des personnes ayant des besoins à long terme liés à unhandicap ou un problème de santé.- le logement social, qui procure un logement aux personnes défavorisées ou aux groupes sociauxmoins avantagés.

Or, la commission soumet ces services à concurrence : En ce qui concerne la libre prestation de services et la liberté d'établissement, la Cour a établi quedoivent être considérées comme activités économiques au sens du traité, les prestations fourniesnormalement contre rémunération. Le traité n'exige pas, néanmoins, que le service soit payédirectement par ceux qui en bénéficient [13]. Il s'ensuit que la quasi-totalité des services prestés dans

le domaine social peuvent être considérés comme des «activités économiques» au sens des articles 43et 49 du traité CE .[13] Affaire C-352/85, Bond van Adverteerders.(…)- Le choix de la délégation partielle ou complète d'une mission socialeSi les pouvoirs publics décident de confier la mission à un partenaire extérieur ou de coopérer avec le

 secteur privé, le droit communautaire des marchés publics et des concessions peut entrer en jeu.»

Et pourtant, les conditions d’exercice de l’activité et le «tiers» auquel les collectivités s’adressent, telsque définis dans la présente communication, auraient tous milités pour la non mise en concurrence deces activités de service (voir dessous en B-1). On reste d’ailleurs pantois par l’inaction des représentantsdu gouvernement français gouvernementaux au sein de la Commission de l’époque, sur un texte si peucompatible avec la culture française peu propice à la marchandisation de ce secteur d’activité.

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 Néanmoins, la réaction va venir de la part du Parlement européen qui a réussi, par sa résolution du 15novembre 2006 (P6_TA(2006)0490), à infléchir la rédaction du projet de la directive «services dans lemarché intérieur» qui sera finalement adoptée le 12 décembre 2006 (dir. 2006/123/CE). Le Parlement afait introduire un volet sur les services sociaux. Cette source législative européenne et postérieure à lacommunication de la Commission, fait donc échapper clairement les services publics sociaux aux

 principes de libre établissement et de libre circulation :

«(Considérant 27) La présente directive ne devrait pas couvrir les services sociaux dans les domainesdu logement, de l'aide à l'enfance et de l'aide aux familles et aux personnes dans le besoin qui sont assurés par l'État au niveau national, régional ou local, par des prestataires mandatés par l'État ou par des associations caritatives reconnues comme telles par l'État avec pour objectif d'assister les

  personnes qui se trouvent de manière permanente ou temporaire dans une situation de besoin particulière en raison de l'insuffisance de leurs revenus familiaux, ou d'un manque total ou partiel d'indépendance et qui risquent d'être marginalisées. Ces services sont essentiels pour garantir le droit 

 fondamental à la dignité et à l'intégrité humaines et sont une manifestation des principes de cohésion sociale et de solidarité et ne devraient pas être affectés par la présente directive.

(Considérant 28) La présente directive ne porte pas sur le financement des services sociaux, ni le système d'aides qui y est lié. Elle n'affecte pas non plus les critères ou conditions fixés par les Étatsmembres pour assurer que les services sociaux exercent effectivement une fonction au bénéfice del'intérêt public et de la cohésion sociale. En outre, elle ne devrait pas affecter le principe de serviceuniversel tel qu'il est mis en oeuvre dans les services sociaux des États membres.

- Champ d'application -2 2. La présente directive ne s'applique pas aux activités suivantes : j) les services sociaux relatifs au logement social, à l'aide à l'enfance et à l'aide aux familles et aux personnes se trouvant de manière permanente ou temporaire dans une situation de besoin qui sont assurés par l'Etat, par des prestataires mandatés par l'État ou par des associations caritativesreconnues comme telles par l'État»

5. Les services culturels : un encadrement international non concurrentiel transposé en droiteuropéen et national.

Le droit européen a totalement ignoré les services culturels comme une composante possible d'unservice d'intérêt général, économique ou non. La Commission des Communautés européennes n'aannoncé aucune réglementation sectorielle dans ce domaine.

Cependant, le Conseil de l’Union européenne, par sa décision 2006/515/CE du 18 mai 2006 a approuvéla conclusion de la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressionsculturelles, (JOUE du 25 juillet 2006 L 201/15), en suivant la proposition de la Commission du 21

décembre 2005 - COM(2005) 678 final - et l'avis du Parlement européen du 18 mai 2005 - 5067/2006 – COM(2005)0678 – C6-0025/2006 – 2005/0268(CNS).

Cette convention sur la protection et la promotion de la diversité culturelle a été adoptée par laConférence Générale de l'UNESCO le 21 octobre 2005 en sa 33e session. Elle a été également étéapprouvée en droit national par la loi nº 2006-792 du 5 juillet 2006 et par le décret n° 2006-1402 du 17novembre 2006.

Cette convention, tout en organisant une coopération entre les États, affirme leurs droits souverains àmettre en oeuvre leur politique culturelle. Cette mise en oeuvre nationale passe en France également par les compétences des collectivités territoriales.

Article premier - Objectifs

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«Les objectifs de la présente Convention sont :(h) de réaffirmer le droit souverain des États de conserver, d’adopter et de mettre en œuvre les

 politiques et mesures qu’ils jugent appropriées pour la protection et la promotion de la diversité desexpressions culturelles sur leur territoire ;»

Article 2 - Principes directeurs«2. Principe de souveraineté

 Les États ont, conformément à la Charte des Nations Unies et aux principes du droit international, ledroit souverain d’adopter des mesures et des politiques pour protéger et promouvoir la diversité desexpressions culturelles sur leur territoire.»

Dans ses motivations, le rapport parlementaire européen de Madame Christa Prets, présente cetteconvention comme :

«Un nouvel instrument de droit international 

Cette Convention de l'UNESCO a pour objectif la promotion et la protection de la diversité descontenus culturels et des expressions artistiques et vise à favoriser la mise en place et l'adoption de

 politiques culturelles et de mesures appropriées aux fins de la promotion et de la protection de ladiversité des expressions culturelles tout en encourageant un élargissement des échanges culturelsinternationaux.

 La Convention consacre la reconnaissance du droit souverain qu'ont les États et gouvernements de  formuler et mettre en œuvre des politiques culturelles permettant le développement de leurs propres secteurs culturels (…)

 En reconnaissant la nature spécifique des biens et services culturels en tant que porteurs de valeurs et d'identité, la Convention établit que ceux-ci ont une dimension qui va au delà de l'aspect commercial, cequi confère une pleine légitimité aux politiques culturelles nationales et internationales (…).»

Cette convention est conforme à l'application de l'article 151 du Traité CE qui dispose, à son point 4 :«La Communauté tient compte des aspects culturels dans son action au titre d'autres dispositions du

 présent traité, afin notamment de respecter et de promouvoir la diversité de ses cultures.»

Ainsi, la mise en oeuvre des politiques culturelles va au-delà de l’aspect commercial, et constitue par définition une exception à l'application :- des principes européens de libre établissement et de libre circulation des entreprises,- des directives régissant les marchés publics des pouvoirs adjudicateurs (directive 2004/18/CE). Lescontrats passés par les identités adjudicatrices (directive 2004/18/CE), par leur objet même, n’ont pasvocation à s’appliquer, sauf éventuellement dans les activités de philatélie.

Dans l’affaire traitée par le présent arrêt du Conseil d'État, la Cour aurait probablement pu placer l’activité de programmation culturelle hors champ de la concurrence à ce titre, si les faits traités avaientété antérieurs aux adoptions de la Convention UNESCO.

Il ne reste pas moins que cette activité culturelle doit répondre à des conditions d'application qui fontque ce secteur puisse aller «au delà de l'aspect commercial», pour reprendre les termes de la rapporteuredu Parlementaire européen.

B. Les conditions particulières dans lesquelles l'opérateur qui exerce son activité et le tiers auquelles collectivités publiques s’adressent.

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Le principe étant posé sans que le Conseil d’État ne les détaille, nous allons examiner ces deux autresconditions supplémentaires à l’exception de concurrence.

1. Les conditions particulières d'exercice de l'activité.

L'avis du CE précité du 23 octobre 2003, «Fondation Jean Moulin», au titre de l'action sociale desfonctionnaires, tenait compte des conditions d'exercice de l'action sociale des fonctionnaires susceptiblesde faire échapper aux règles de la concurrence : «la qualification d'action sociale ne peut être reconnueà ces prestations que si, par leur contenu, elles présentent des caractéristiques garantissant leur vocation sociale et les distinguant des prestations à caractère purement marchand ; ce qui supposenotamment qu'elles ne se bornent pas à offrir des services disponibles et aisément accessibles, en termesde localisation et de prix, sur le marché et que leurs conditions d'octroi et de tarification les rendent accessibles à l'ensemble des agents, en particulier ceux à revenus modestes (…) les prestations d'action

 sociale en cause, qui constituent un élément de la politique de gestion des ressources humaines de ceministère, ne présentent pas, dans les conditions où elles sont mises en oeuvre, le caractère d'uneactivité économique. Il suit de là qu'en organisant la gestion de ces prestations, le ministère procède àune simple organisation du service et il lui est loisible, soit de gérer lui-même en régie lesdites

 prestations, soit d'en confier la charge par voie de convention à la «Fondation Jean-Moulin», sans être

astreint dans ce dernier cas à la passation d'un marché public de prestation de service .»La communication de la Commission des communautés européennes du 26 avril 2006 – COM (2006)177 final, «Mettre en œuvre le programme communautaire de Lisbonne - Les services sociaux d'intérêt 

 général dans l'Union européenne», explique parmi les raisons qui font que les services sociaux d'intérêtgénéral sont régis par un régime spécifique. Ce régime est désormais reconnu comme exonératoire demise en concurrence du service par la directive «services dans le marché intérieur» 2006/123/CE.

Les faisceaux d’indices sont basés sur un financement qui n’est pas en rapport direct avec le serviceoffert, le recours au bénévolat, l’absence de lucre, la proximité du prestataire, le recours à un tiers

 payant (subvention).

« Il s'est avéré lors de la consultation avec les États membres et les organisations de la société civile,qu'en raison de cette spécificité, dans l'accomplissement de leur mission d'intérêt général, les services

 sociaux présentent de facto souvent une ou plusieurs des caractéristiques d'organisation suivante :Ces critères sont le résultat du recensement mentionné ci-dessus (v. supra sous 6).- un fonctionnement sur la base du principe de solidarité requis notamment par la non sélection desrisques ou l'absence d'équivalence à titre individuel entre cotisations et prestations,- un caractère polyvalent et personnalisé intégrant les réponses aux divers besoins nécessaires pour 

 garantir les droits humains fondamentaux et protéger les personnes les plus vulnérables- la participation de volontaires et de bénévoles, expression d'une capacité citoyenne,- l'absence de but lucratif [9], notamment pour aborder les situations les plus difficiles et s'expliquant 

 souvent par des raisons historiques,[9] Dans l'arrêt Sodemare, la Cour a estimé qu'une condition de non lucrativité pouvait être compatibleavec le principe de liberté d'établissement.- un ancrage marqué dans une tradition culturelle (locale). Ceci trouve notamment son expression dansla proximité entre le fournisseur du service et le bénéficiaire permettant de prendre en compte lesbesoins spécifiques de ce dernier,- une relation asymétrique entre prestataires et bénéficiaires ne pouvant être assimilée à une relation«normale» de type fournisseur-consommateur requérant ainsi la participation d'un tiers payant.

Conformément à l’avis du CE précité du 23 octobre 2003,  Fondation Jean Moulin, les besoins remplis par l’activité ne doivent pas être propres à l’administration, mais s’adresser à des tiers bénéficiaires :« Elle [l'action sociale de l'État en faveur de ses agents] regroupe l'ensemble des prestations destinées àaméliorer directement ou indirectement les conditions d'emploi, de travail et de vie des agents et de

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leurs familles, notamment en les aidant à faire face à diverses situations difficiles et en facilitant leur accès à des services collectifs divers. »

Ces caractéristiques d’exercice de ce type d’activités peuvent être communs à l’ensemble des servicessusceptibles d’être exonérés déjà en raison de leur nature sociale, culturelle, sportive amateurs.

 Néanmoins, parmi les critères de financement, la jurisprudence nationale n'admet la tarification sociale basée sur un principe de solidarité entre les usagers, que pour les services publics à vocation sociale, etnon pour les services publics culturels : «Considérant que le tribunal administratif de Lille pour annuler la délibération du 30 mai 1991 du conseil municipal de Lambersart fixant les tarifs applicables à l'écolede musique de la commune tout en jugeant légales les délibérations du 30 mai 1991 de la même autoritéqui fixaient, selon des principes identiques, les tarifs applicables aux centres de loisirs et aux cantines

 scolaires, s'est fondé sur la circonstance que l'école de musique constituait un service public culturel alors que les cantines scolaires et les centres de loisirs constituaient des services à vocation sociale, et qu'ainsi seuls ces derniers pouvaient faire l'objet d'une tarification variable en fonction des ressourcesdes usagers et du nombre de leurs d'enfants ; qu'ainsi il n'a entaché son jugement d'aucunecontradiction» (CE, 18 Mars 1994, n° 140870, Mme D. et autres c/ Commune de Lambersart , publié auxtables du Recueil Lebon).

2. La qualité du tiers opérateur

Le terme «le tiers», utilisé au singulier dans la partie de phrase «eu égard (…) le tiers auquel elles s'adressent », vise les conditions d’examens du juge sur la qualité du prestataire et non des bénéficiairesdu service, ce dernier examen résultant implicitement des conditions d'exercice de l'activité mentionnée

 plus haut. Le terme «le tiers», est à mettre en relation avec le début du considérant de l'arrêt quimentionne «décider de confier sa gestion à un tiers».

La forme associative ne permet pas à ces entités d'échapper aux règles de la concurrence. En effet, « lanotion d'entreprise comprend toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut 

  juridique de cette entité et de son mode de financement» et s'applique à l'association (CJCE, 12septembre 2000, aff. C-180/98 à C-184/98, Pavlov, e.a.).

Le juge national a suivi le même raisonnement :- en commençant par l’application de la fiscalité des entreprises aux associations assurant des prestationsde services effectuée à titre onéreux (CE, 6 juillet 1990, n° 88224, C.O.D.I.A.C., publié au RecueilLebon),- puis au titre de l’application des règles de la commande publique aux prestations des associationsassurées aux collectivités publiques (CAA de Bordeaux, 19 mars 2002, n° 98BX02208 M.T.c/Communauté urbaine de Bordeaux)

Cependant, la formule associative est susceptible de faire échec à l'application des règles de lacommande publique, lorsqu’elle s’exerce selon les autres conditions énoncées dans cette seconde partie.

Comme le tiers prestataire ne doit pas avoir vocation à entrer dans le secteur marchand, il ne peut êtreune société régie par le droit commercial, y compris une Société d’économie mixte selon la

 jurisprudence de la CJCE initiée depuis l’affaire C-231/03, Coname, grande chambre, 21 juillet 2005. Ilne peut donc s'agir que d'opérateurs qui agissent à but non lucratif.

L'avis du CE précité du 23 octobre 2003, «Fondation Jean Moulin», au titre de l'action sociale desfonctionnaires, tenait déjà compte du but non lucratif de l'organisme auquel a été confié la gestion duservice, pour le faire échapper aux règles de la concurrence : « Il résulte des dispositions de l'article 9 dela loi du 13 juillet 1983 ouvrant à l'État, aux collectivités locales et à leurs établissements publics la

 possibilité de confier à titre exclusif la gestion de tout ou partie des prestations d'action sociale à des

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organismes à but non lucratif, qu'eu égard à leur domaine d'intervention, elles ont nécessairement pour objet au regard du droit interne, de permettre aux collectivités publiques de choisir un ou plusieursorganismes pour gérer de telles prestations sans avoir à respecter les procédures de publicité et de miseen concurrence préalables prévues par le code des marchés publics.»

Dans la même logique, le Tribunal de Dijon (14 novembre 2000, n° 001662/MR,  préfet de la Nièvre) avalidé une délégation de service public pour un contrat de programmation culturelle passé aux risques et

 périls entre une commune et une maison de la culture gérée en SCOP SARL.

C. L'application de ces principes dans la présente affaire.

Le juge a repris indirectement une partie de ces critères pour qualifier ce « service public culturel », lefestival international d'Aix-en-Provence, «à caractère administratif », «compte tenu son objet, de sesmodalités d'organisation et de ses modalités de financement »

Une analyse similaire avait été faite par le Tribunal des Conflits (19 décembre 1988, n° 02541, Ville deCannes, publié au Recueil Lebon) qui avaient reconnu la compétence du juge administratif pour trancher un litige relatif au licenciement d'un agent affecté à l'exploitation d'un palais des festivals et des

congrès :«Considérant qu'en exploitant le Palais des festivals et des congrès après l'avoir construit, la ville deCannes assure une mission de service public ; qu'à la date des faits litigieux elle gérait cet établissement en régie directe avec un nombreux personnel relevant presque en totalité du statut du

 personnel communal ; que les recettes propres du service exclusivement tirées de la location des sallesne représentaient qu'une infime partie des dépenses de fonctionnement ; que, dès lors, même sil'exploitation de cet établissement était de nature à favoriser l'activité touristique et commerciale de laville, elle était conduite en l'espèce dans des conditions exclusives de tout caractère industriel et commercial»

Les dispositions de l'article L. 2224-2 du Code général des collectivités territoriales, qui limitent la

 possibilité pour une Commune de prendre en charge dans son budget des dépenses d'un service public àcaractère industriel et commercial, ne pouvaient donc être utilement invoquées dans cette affaire.

Cependant, ce n'est pas sur la base de la nature des trois critères de la nature de l’activité confiée, de sesconditions particulières d'exercice et de la nature de l'opérateur prestataire, que dans cette affaire, leConseil d'État va placer la gestion de ce service public culturel hors champ de la concurrence. Les

 principes qu'il a posés serviront donc de balises à sa future jurisprudence.

En effet, il va faire l’économie de cette analyse au cas traité, en appliquant une autre voie d’exception demise en concurrence de l’association prestataire : la jurisprudence européenne «in house», lorsque leservice est confié à un démembrement de pouvoirs publics, placé sous leur contrôle.

Troisième partie : le contrat de service confié à l'opérateur n'est pas à mettre en concurrence,lorsqu'il répond à l'exception «in house».

Le Conseil d'État dans la présente affaire, juge que «doivent aussi être regardées comme gérant directement le service public si elles créent à cette fin un organisme dont l'objet statutaire exclusif est,

 sous réserve d'une diversification purement accessoire, de gérer ce service et si elles exercent sur cet organisme un contrôle comparable à celui qu'elles exercent sur leurs propres services leur donnant notamment les moyens de s'assurer du strict respect de son objet statutaire, cet organisme devant eneffet être regardé, alors, comme n'étant pas un opérateur auquel les collectivités publiques ne

 pourraient faire appel qu'en concluant un contrat de délégation de service public ou un marché publicde service ; qu'un tel organisme peut notamment être mis en place lorsque plusieurs collectivités publiques décident de créer et de gérer ensemble un service public ;»

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On y retrouve les ingrédients de la jurisprudence européenne initiée par l'arrêt CJCE «Teckal» du 18novembre 1999, affaire C-107/98, qui donnera naissance à de nombreux autres arrêts de cette Cour (voir ci-dessous). Le Conseil d’État comme en son habitude, marquera son terrain en utilisant un vocabulairesimilaire, mais non totalement identique, à celui utilisé par le juge européen.

A. La création par des collectivités publiques d’un service public dont l'objet statutaire exclusif est, sous réserve d'une diversification purement accessoire, de gérer ce service.

1.  L'origine de la création du service public : une condition nécessaire à l'application del'exception «in house» ou à la qualification «de subvention».

La notion de création du service par les collectivités publiques « si elles créent à cette fin un organisme»,revient à rechercher si les collectivités publiques sont à l'origine du besoin.

- Si l’opérateur privé est à l’origine du besoin et sans détermination du contenu des prestations par les  pouvoirs publics, il n’y a pas de service public confié, donc de relation contractuelle à mettre enconcurrence :

Dans la présente affaire, le Conseil d'État juge que : «lorsqu'une personne privée exerce, sous saresponsabilité et sans qu'une personne publique en détermine le contenu, une activité dont elle a prisl'initiative, elle ne peut, en tout état de cause, être regardée comme bénéficiant de la part d'une

 personne publique de la dévolution d'une mission de service public».

Cet arrêt se situe dans le prolongement de la jurisprudence :- l’arrêt CAA de Marseille, 20 juillet 1999 - nº 98MA01735 - préfet du Var c/ Commune de Toulon :« Le Comité à l’initiative duquel a été décidée la “Fête de la liberté du livre et de la francophonie1997”, était le seul organisateur de cette manifestation ; que, par suite, en organisant cette fête, ledit comité n’a pas agi en qualité de prestataire de service de la commune».- Conseil d'État, 6 juillet 1990, n° 88224, Comité pour le développement industriel et agricole du

Choletais (C.O.D.I.A.C.) :« Le comité pour le développement industriel et agricole du choletais a passé avec la ville de Cholet uneconvention particulière qui lui confiait la réalisation pour le compte de cette dernière d’une étude

 précisément déterminée et qui prévoyait qu’une rémunération spécifique de 510 000 F lui serait versée ;que cette activité constitue une prestation de services effectuée à titre onéreux au sens de l’article 256 du code général des impôts et doit donc être soumise à la taxe sur la valeur ajoutée»

Sur ce point, voir aussi : CAA de Bordeaux, 19 mars 2002, n° 98BX02208, M. T.c/Communautéurbaine de Bordeaux et CAA de Paris, MM   X et y c/Commune de Corbeil-Essonnes, 27 avril 2004, n°00PA00879.

La circulaire du 7 janvier 2004 portant manuel d’application du code des marchés publics - Point 2.4.1,va dans le même sens :« Le marché public se différencie de la subvention qui constitue une contribution financière de la

 personne publique à une opération justifiée par l’intérêt général, mais qui est initiée et menée par untiers. Il s’agira d’une subvention si l’initiative du projet vient de l’organisme bénéficiaire et si aucunecontrepartie directe n’est attendue par la personne publique du versement de la contribution financière.

 Dans le cas contraire, il s’agira d’un marché public. La notion d’initiative implique non seulement l’impulsion du projet mais aussi sa conception et sa définition.»

Il en est de même par la circulaire DGEFP no 2002-30 du 4 mai 2002 concernant la distinction entre lacommande publique et le subventionnement en matière d’insertion et de qualification professionnelles :«En revanche, si un organisme dépose une demande de subvention auprès de l’administrationconcernée, pour un projet qu’il prend l’initiative de mener, et que ce projet présente un intérêt direct 

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 pour l’administration, cette dernière peut décider de le subventionner.»

Si une ou plusieurs collectivités publiques sont à l’origine du besoin ou déterminent le contenu des prestations, alors la dévolution d’un service public qui ressort de la sphère contractuelle est à mettre enconcurrence sauf :- en raison de la nature du service, de ses conditions particulières d’exercice et du tiers (traité en

 première partie)- en raison que le tiers n’en est pas réellement un, mais constitue un démembrement des collectivités

 publiques placé sous leur contrôle (cas de la présente deuxième partie)

2. Deuxième condition nécessaire à l'application de l'exception «in house» : un objet statutaireexclusif de gestion du service public, sous réserve d'une diversification purement accessoire.

Dans le présent arrêt du Conseil d'État du 6 avril 2007, comme l'objet de l'association était, selon sadénomination même, «le festival international d'art lyrique et l'académie européenne de musique d'Aix-en-Provence», l'association avait bien pour compétence d'assurer ce seul service public culturel, sans quene se pose la problématique d'une diversification de ses activités, même marginale.

a) Un objet statutaire exclusif de gestion du service public

Le présent arrêt du Conseil d'État du 6 avril 2007, applique strictement les conditions posées par le jugeeuropéen dans sa décision CJCE, 13 octobre 2005, affaire C-458/03,  Parking Brixen. Le juge européenavait refusé de reconnaître à une autorité publique, un niveau de contrôle analogue sur ses propresservices et donc une exception de mis en concurrence, lorsque cette autorité publique laisse un large

 pouvoir au conseil d'administration de la société prestataire, notamment lorsque l'objet social de cettedernière permet d'intervenir dans de nombreux domaines d'intervention.

On remarquera que le Conseil d'État dans la présente affaire du 6 avril 2007, fait de l'objet social un cas

distinct du contrôle «compte tenu de son objet statutaire et  du contrôle qu'exercent sur elle cescollectivités», alors que le juge européen fait de l'objet social un élément d'appréciation du contrôle.

Ce souci de distinction du juge national n'a pas de réelle portée pratique, car dans les deux casl'ensemble des conditions doit être rempli.

Le présent arrêt du Conseil d'État du 6 avril 2007, se situe également dans la lignée de l’arrêt CAA deBordeaux, 19 mars 2002, n° 98BX02208, M. T.c/Communauté urbaine de Bordeaux, en fait, précurseur de la position européenne définie par la suite. Une Communauté urbaine n’exerce pas un contrôleanalogue sur une agence urbaine associative qui en est pourtant l’émanation, lorsque l’Agence estsusceptible de prester pour des tiers : «l'agence peut, en vertu de l'article 4 de ses statuts procéder 

également à des études ... pour des collectivités publiques, des établissements publics, ou même des particuliers, tant en France qu'à l'étranger ... ; qu'elle constitue ainsi une entité distincte de lacommunauté urbaine».

b)  Une tolérance de diversification purement accessoire du prestataire ne remettant pas en cause

l'exception «in house» de mise en concurrence

Le juge national s'écarte là aussi de la sémantique strictement européenne sur la forme, mais pas sur lefond. Le juge européen conditionne l'exception de mise en concurrence à «la condition que l’entité

 prestataire réalise l’essentiel de son activité avec l’autorité qui la détient», comme dans l'arrêt CJCE, 6avril 206, aff. 410/04, ANAV , alors que le juge national tolère la «diversification accessoire». L’arrêt dela CJCE précise les composantes de ce critère comme suit :

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- Pour les activités qui relèvent des entités adjudicatrices, 80 % au minimum du chiffre d'affaires del'entité liée doivent être réalisés pour le compte du pouvoir public (deuxième partie du Code des marchés

 publics de 2006, ou décret n° 2005-1308 du 20 octobre 2005 relatif aux marchés passés par les entitésadjudicatrices mentionnées à l'article 4 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés

 passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics - J.O.22/10).

- Ce ratio n'est pas applicable aux activités des pouvoirs adjudicateurs, en dehors de leurs éventuellesactivités d'entités adjudicatrices (première partie du Code des marchés publics de 2006, ou décret nº2005-1742 du 30 décembre 2005 fixant les règles applicables aux marchés passés par les pouvoirsadjudicateurs mentionnés à l'article 3 de l'ordonnance nº 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés

 passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics - J.O.31/12).

La Cour de justice des Communautés européennes donne des indications au juge national pour vérifier la condition que l’entité prestataire réalise l’essentiel de son activité avec l’autorité, pouvoir adjudicateur, qui la détient :

- lorsque l'entreprise est contrôlée par un ou par plusieurs pouvoirs adjudicateurs, ce critère s'apprécie

sur l'ensemble des activités rendues à ces pouvoirs adjudicateurs ;- il ne doit pas conduire à ce que l'entreprise reste active sur le marché concurrentiel en entrant enconcurrence avec d’autres entreprises. L’activité de cette entreprise doit être principalement consacréeà ce ou ces pouvoirs adjudicateurs, toute autre activité ne revêtant qu’un caractère marginal ;- il convient de tenir compte de toutes les activités que cette entreprise réalise sur la base d’uneattribution faite par le pouvoir adjudicateur, et ce, indépendamment de savoir qui rémunère cetteactivité, qu’il s’agisse du pouvoir adjudicateur lui-même ou de l’usager des prestations fournies, leterritoire où l’activité est exercée étant sans pertinence.

B. Un contrôle de collectivités publiques sur cet organisme, comparable à celui qu'elles exercent

sur leurs propres services, leur donnant notamment les moyens de s'assurer du strict respect deson objet statutaire.

Le présent arrêt du Conseil d'État du 6 avril 2007 a vérifié que cette condition était remplie. En effet,l’association tant :- par les modalités de sa composition statutaire de l’association dirigée par les collectivités publiques,- que par son financement, avec des subventions majoritairement assurées par ces personnes auxquelless’ajoutent des aides indirectes de la commune membre, telles la mise à disposition de locaux et desgaranties d’emprunts.

Il n’évoque aucun éventuel argument de non-comparabilité, comme l’absence de comptabilité publique,

ou le fait que les agents de l’association ne seront pas soumis au statut de la fonction publique.

1. Le contrôle sur le prestataire peut être assuré par plusieurs collectivités publiques, pourl'application de l'exception de concurrence «in house».

En utilisant «des collectivités publiques» le juge national accepte l'exception «in house» lorsque plusieurs collectivités publiques créent un service public et le contrôlent. Cette cogestion publique a étéreconnue par la jurisprudence européenne :«69. […] Elle [la CJCE] a donc envisagé la possibilité que l’exception [in house] prévue s’appliquenon seulement au cas où une seule collectivité détient une telle personne juridique, mais également aucas où plusieurs le font .» (CJCE , 11 mai 2006, affaire C-340/04 , Carbotermo et Consorzio Alisei).

Le Conseil d'État a donc fait application de cette possible intervention de plusieurs collectivités

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  publiques, dans cette association qui  «  se compose de trois représentants de l'Etat, de quatrereprésentants des collectivités territoriales et de cinq personnalités qualifiées, dont une est nommée par le maire d'Aix-en-Provence et trois par le ministre chargé de la culture […]».

On notera par ailleurs, qu'en dehors d’éventuels cadres législatifs particuliers, la détention majoritaire par une seule collectivité publique des pouvoirs de décision sur une association qu’elle financeentraînerait quasiment automatiquement une qualification de gestion de fait des deniers publics.

2. Un contrôle de collectivités publiques comparable à celui qu'elles exercent sur leurs propresservices

Toujours par souci d'émancipation sur le terrain formel, le Conseil d’État utilise la notion de «contrôlecomparable», alors que la jurisprudence européenne utilise celles de «contrôle analogue».

La CJCE refuse en principe de considérer qu’un contrôle analogue puisse s’exercer sur une entité quicomporte un actionnariat privé (21 juillet 2005 Coname, C-231/03 - 13 octobre 2005, C-458/03 ParkingBrixen - 10 novembre 2005, C-29/04, Commission contre République d'Autriche - 6 avril 2006, affaireC-410/04, ANAV) «un capital social ouvert à des actionnaires privés».

Une association ne dispose pas de capital. Cependant, une association peut agir dans le domaineconcurrentiel. Les activités concernées seront alors analysées par le droit fiscal au même titre que lesactivités menées par les sociétés commerciales. Dans ce cas, une analyse similaire à de la capitalisation

 peut être appliquée au titre de l'apport de cotisations, donc des éventuels droits de contrôle qui peuvents'y attacher, au regard des contreparties espérées par les cotisants à cette association.

Cependant, la CJCE considère qu'une partie de la détention du capital par d'autres entités que les pouvoirs publics, ne constitue pas un obstacle incontournable à l'application de l’exception «in house» :

«37  La circonstance que le pouvoir adjudicateur détient, seul ou ensemble avec d’autres pouvoirs publics, la totalité du capital d’une société adjudicataire tend à indiquer,   sans être décisive , que ce

 pouvoir adjudicateur exerce sur cette société un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services, au sens du point 50 de l’arrêt Teckal, précité.» (CJCE, 6 avril 206, aff. 410/04, ANAV ).

C’était le cas d’espèce : le Conseil d'administration de l'association est composé de 15 membres, dont 11sont désignés par les collectivités publiques.

Une personne qualifiée était membre es-qualité. Trois membres potentiels pouvaient être des«bienfaiteurs» ou des «entreprises». Mais, ces bienfaiteurs et entreprises devaient être agréés par le

 bureau de l’association, lui-même émanant de représentants directs des collectivités publics (7 membres)et de personnalités qualifiées (5 membres dont 4 désignées par ces collectivités). La participation des

 bienfaiteurs et des entreprises paraissait donc relever de la participation citoyenne, ou du mécénat

reconnu notamment par le droit fiscal comme n’étant pas de nature lucrative, sauf détournement de sonobjet.

Dans l’arrêt CJCE, 6 avril 206, aff. 410/04, ANAV , le juge précise que le prestataire doit être soumis «àun contrôle permettant au pouvoir adjudicateur d’influencer les décisions (…) Il doit s’agir d’une

  possibilité d’influence déterminante tant sur les objectifs stratégiques que sur les décisionsimportantes». L'avocat général M. Geelhoed dans l’affaire cite comme exemple : «le pouvoir de délivrer des instructions, le pouvoir de tutelle et de nomination». L’appréciation par le juge s’effectue donc nonseulement «in abstracto» selon l’objet social, mais aussi «in concreto» selon l’exercice effectif de cecontrôle.

Dans le cas présent traité par le Conseil d'État, on remarquera que le respect «in concreto» de ce contrôles'exerce nécessairement par les financements des membres de l'association, collectivités publiques, tant

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en espèce qu’en nature. En effet, bien que le Conseil d'État n'en fasse pas une réflexion publiée, cefinancement est nécessairement lié à des décisions émises par les assemblées délibérantes descollectivités locales. Ces organes viennent ainsi s'ingérer directement dans la gestion de l'association, endehors même d’une éventuelle indépendance d'action de leurs représentants au sein du conseild'administration de l'association. De plus, l'article 10 de la loi nº 2000-321 du 12 avril 2000 ( JO du 13avril), soumet les subventions qui atteignent 23.000 € à la signature d’une convention. Faute de cefinancement, le service public ne pourrait être mené à bien

C. Vers un démantèlement de la coopération non fiscalisée entre collectivités publiques au profitdes formules associatives ?

Cet arrêt remet en cause l’utilité des syndicats mixtes et autres formes de coopération intercommunale.

 Nul doute que les dirigeants des collectivités publiques vont apprécier l'espace de liberté que va leur conférer ce nouvel espace de liberté reconnue de la formule associative, qui leur permet de s'affranchir des règles de la comptabilité publique et du statut de la fonction publique.

Certes, les cotisations des membres à leurs syndicats sont régies par la règle des dépenses obligatoires,

mais la jurisprudence administrative a déjà considéré qu'un engagement de subvention pouvait valoir obligation de l'honorer par la collectivité publique qui l’a voté :«Considérant qu'une décision attributive de subvention, dès lors qu'elle est prise sous condition, ne créede droit au profit de son bénéficiaire que dès lors que celui-ci est, au moment où il demande leversement de la subvention allouée, en mesure de justifier que la condition posée se trouve remplie ;que si tel est le cas, la décision ayant ainsi créé un droit, le refus de versement est de nature à constituer 

  pour la collectivité publique, une faute susceptible d'engager sa responsabilité à l'égard dubénéficiaire» (CAA de Marseille, 28 juin 2004, nº 00MA00317, Société cinéma g. Lamic SARL).

De même, en relation directe avec l'objet de la présente affaire, on peut douter de l’utilité de la créationd'un établissement public de coopération culturelle, telle instituée par la loi n° 2002-6 du 4 janvier 2002,

intégrée au Code général des collectivités territoriales.

En outre, la formule associative sera susceptible d'apporter une structure juridique beaucoup plus claire pour les différentes formes d'ententes entre collectivités territoriales prévues par ce même Code.

Enfin, elle permettra également de s'affranchir à la longueur des procédures de création des groupementsd'intérêt public.

***

Conseil d'ÉtatStatuant au contentieuxN° 284736Publié au Recueil LebonSection du ContentieuxM. Edouard Crépey, Rapporteur, M. Séners, Commissaire du gouvernement,M. Stirn, PrésidentSCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET ; SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ ; SCPGASCHIGNARDLecture du 6 avril 2007

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 septembre 2005 et 5 janvier 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour  la COMMUNE D'AIX-EN-PROVENCE (Bouches-du-Rhône), représentée par son maire ; la COMMUNE D'AIX-EN-PROVENCE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 4 juillet 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a, à lademande de M. et Mme Jean-Louis A, annulé les jugements du 29 juin 2000 du tribunal administratif deMarseille rejetant leurs demandes tendant à l'annulation pour excès de pouvoir des délibérations des 12février et 26 mars 1998 du conseil municipal d'Aix-en-Provence décidant d'allouer à l'association pour lefestival international d'art lyrique et l'académie européenne de musique d'Aix-en-Provence deuxsubventions d'un montant respectif de six et deux millions de francs ;2°) de mettre à la charge de M. et Mme A une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'articleL. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;Vu le code général des collectivités territoriales ;Vu la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de lavie économique et des procédures publiques ;

Vu le code de justice administrative ;Après avoir entendu en séance publique :- le rapport de M. Edouard Crépey, Maître des Requêtes,- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la COMMUNE D'AIX-EN-PROVENCE, de la SCP Gaschignard, avocat de M. et Mme A et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani,Thiriez, avocat de l'association pour le festival international d'art lyrique et l'académie européenne demusique d'Aix-en-Provence,- les conclusions de M. François Séners, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par des délibérations en

date des 12 février et 26 mars 1998, le conseil municipal d'Aix-en-Provence a accordé à l'association pour le festival international d'art lyrique et l'académie européenne de musique d'Aix-en-Provence dessubventions d'un montant respectif de six et deux millions de francs ; que la COMMUNE D'AIX-EN-PROVENCE se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 4 juillet 2005 par lequel, saisie par M. et Mme A,la cour administrative d'appel de Marseille, infirmant les jugements du tribunal administratif deMarseille du 29 juin 2000, a annulé pour excès de pouvoir les délibérations litigieuses ;

Sur l'intervention en demande :

Considérant que l'association pour le festival international d'art lyrique et l'académie européenne demusique d'Aix-en-Provence justifie d'un intérêt à l'annulation de l'arrêt attaqué ; qu'ainsi, son

intervention est recevable ;

Sur le bien-fondé de l'arrêt attaqué :

Considérant qu'après avoir relevé que l'association pour le festival international d'art lyrique etl'académie européenne de musique d'Aix-en-Provence s'était vu confier une mission de service public, lacour, pour annuler les délibérations litigieuses, a jugé qu'une association ne pouvait exercer une tellemission et bénéficier à ce titre d'une subvention que si elle était liée à une personne publique par uncontrat de délégation de service public conclu soit en application des dispositions des articles 38 etsuivants de la loi du 29 janvier 1993 soit en application des articles L. 1411-1 et suivants du codegénéral des collectivités territoriales ;

Considérant que, lorsque des collectivités publiques sont responsables d'un service public, elles peuvent,

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dès lors que la nature de ce service n'y fait pas par elle-même obstacle, décider de confier sa gestion à untiers ; qu'à cette fin, sauf si un texte en dispose autrement, elles doivent en principe conclure avec unopérateur, quel que soit son statut juridique et alors même qu'elles l'auraient créé ou auraient contribué àsa création ou encore qu'elles en seraient membres, associés ou actionnaires, un contrat de délégation deservice public ou, si la rémunération de leur cocontractant n'est pas substantiellement liée aux résultatsde l'exploitation du service, un marché public de service ; qu'elles peuvent toutefois ne pas passer un telcontrat lorsque, eu égard à la nature de l'activité en cause et aux conditions particulières dans lesquellesil l'exerce, le tiers auquel elles s'adressent ne saurait être regardé comme un opérateur sur un marchéconcurrentiel ;

Considérant que, lorsqu'elles sont responsables d'un service public, des collectivités publiques peuventaussi décider d'en assurer directement la gestion ; qu'elles peuvent, à cette fin, le gérer en simple régie,ou encore, s'il s'agit de collectivités territoriales, dans le cadre d'une régie à laquelle elles ont conféré uneautonomie financière et, le cas échéant, une personnalité juridique propre ; qu'elles doivent aussi êtreregardées comme gérant directement le service public si elles créent à cette fin un organisme dont l'objetstatutaire exclusif est, sous réserve d'une diversification purement accessoire, de gérer ce service et sielles exercent sur cet organisme un contrôle comparable à celui qu'elles exercent sur leurs propresservices leur donnant notamment les moyens de s'assurer du strict respect de son objet statutaire, cet

organisme devant en effet être regardé, alors, comme n'étant pas un opérateur auquel les collectivités publiques ne pourraient faire appel qu'en concluant un contrat de délégation de service public ou unmarché public de service ; qu'un tel organisme peut notamment être mis en place lorsque plusieurscollectivités publiques décident de créer et de gérer ensemble un service public ;

Considérant en outre que, lorsqu'une personne privée exerce, sous sa responsabilité et sans qu'une personne publique en détermine le contenu, une activité dont elle a pris l'initiative, elle ne peut, en toutétat de cause, être regardée comme bénéficiant de la part d'une personne publique de la dévolution d'unemission de service public ; que son activité peut cependant se voir reconnaître un caractère de service

 public, alors même qu'elle n'a fait l'objet d'aucun contrat de délégation de service public procédant à sadévolution, si une personne publique, en raison de l'intérêt général qui s'y attache et de l'importance

qu'elle revêt à ses yeux, exerce un droit de regard sur son organisation et, le cas échéant, lui accorde, dèslors qu'aucune règle ni aucun principe n'y font obstacle, des financements ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'en jugeant qu'une association ne pouvait gérer unservice public et bénéficier à ce titre d'une subvention qu'à la condition d'être titulaire d'un contrat dedélégation de service public passé soit en application des dispositions des articles 38 et suivants de la loidu 29 janvier 1993 soit en application des articles L. 1411-1 et suivants du code général des collectivitésterritoriales, sans rechercher si, pour l'une des raisons analysées ci-dessus, la passation d'un tel contrat

 pouvait ou devait être exclue, la cour administrative d'appel de Marseille a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; que la COMMUNE D'AIX-EN-PROVENCE est fondée pour ce motif, et sans qu'il soit besoind'examiner les autres moyens de sa requête, à en demander l'annulation ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application des dispositions del'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Considérant d'une part que, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme A, le tribunal administratif deMarseille a suffisamment répondu aux moyens tirés de l'absence de convention de délégation de service

 public et de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 1411-2 du code général des collectivitésterritoriales ;

Considérant d'autre part qu'il ressort des pièces du dossier que l'Etat, la région Provence-Alpes-Côted'Azur, le département des Bouches-du-Rhône et la commune d'Aix-en-Provence ont créé en 1996 uneassociation pour le cinquantenaire du festival international d'art lyrique d'Aix-en-Provence, devenue en1997 l'association pour le festival international d'art lyrique et l'académie européenne de musique d'Aix-

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en-Provence ; que cette association a pour objet statutaire exclusif la programmation et l'organisation dufestival international d'art lyrique et de l'académie européenne de musique ; qu'elle se compose de troisreprésentants de l'Etat, de quatre représentants des collectivités territoriales et de cinq personnalitésqualifiées, dont une est nommée par le maire d'Aix-en-Provence et trois par le ministre chargé de laculture, ainsi que, le cas échéant, de membres actifs ou bienfaiteurs ou encore d'entreprises, dont lademande d'adhésion doit être agréée par le bureau et qui ne disposent pas de voix délibérative au sein del'association ; que son conseil d'administration est composé de quinze membres, dont onze sont désignés

 par les collectivités publiques ; que les subventions versées par les collectivités publiques mentionnéesci-dessus représentent environ la moitié des ressources de l'association ; que celle-ci bénéficie en outre,de la part de la commune d'Aix-en-Provence, de différentes aides, comme la mise à disposition delocaux dans lesquels se déroule le festival et des garanties d'emprunt ;

Considérant que l'Etat, la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, le département des Bouches-du-Rhône etla commune d'Aix-en-Provence ont ainsi décidé, sans méconnaître aucun principe, de faire du festivalinternational d'Aix-en-Provence un service public culturel ; que, compte tenu de son objet, de sesmodalités d'organisation et de ses modalités de financement, ce service public présente un caractèreadministratif ; que l'association à laquelle les quatre collectivités publiques ont confié sa gestion nesaurait être regardée, compte tenu de son objet statutaire et du contrôle qu'exercent sur elle ces

collectivités, comme un opérateur auquel il ne pourrait être fait appel que dans le cadre d'un contrat dedélégation de service public ou d'un marché public de service ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que lacommune d'Aix-en-Provence aurait dû passer avec l'association une convention de délégation de service

 public doit être, en tout état de cause, écarté ; que M. et Mme A ne peuvent, dès lors, utilement invoquer les dispositions de l'article L. 1411-2 du code général des collectivités territoriales ;

Considérant que la commune d'Aix-en-Provence pouvait accorder des subventions au service publicculturel du festival international d'Aix-en-Provence ; que, contrairement à ce que soutiennent M. et MmeA, les dispositions de l'article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales, qui limitent la

 possibilité pour une commune de prendre en charge dans son budget des dépenses d'un service public àcaractère industriel et commercial, ne peuvent être utilement invoquées ; que la commune d'Aix-en-

Provence n'a pas davantage méconnu les dispositions des articles L. 1511-1 et suivants du même codedès lors que celles-ci ont pour objet de réglementer les conditions dans lesquelles les collectivitésterritoriales peuvent apporter des aides à des entreprises et que l'association, dont l'activité exclusive estde gérer, à la demande des collectivités publiques qui l'ont créée et sous leur contrôle, le service publicdu festival international d'Aix-en-Provence, ne saurait être regardée comme une entreprise au sens deces dispositions ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à se plaindre de ceque, par ses jugements du 29 juin 2000, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leurs demandestendant à l'annulation des délibérations des 12 février et 26 mars 1998 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justiceadministrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la COMMUNE D'AIX-EN-PROVENCE, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. et Mme Ademandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstancesde l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. et Mme A une somme de 4 000 euros au titre desconclusions que la COMMUNE D'AIX-EN-PROVENCE présente sur le même fondement ;

DECIDE :

Article 1er : L'intervention de l'association pour le festival international d'art lyrique et l'académieeuropéenne de musique d'Aix-en-Provence est admise.

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Article 2 : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille en date du 4 juillet 2005 est annulé.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. et Mme A sous les requêtes n° 00MA02343 et n°00MA02344 devant la cour administrative d'appel de Marseille sont rejetées.

Article 4 : M. et Mme A verseront à la COMMUNE D'AIX-EN-PROVENCE une somme de 4 000euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE D'AIX-EN-PROVENCE, à M. et MmeJean-Louis A, à l'association pour le festival international d'art lyrique et l'académie européenne demusique d'Aix-en-Provence, au ministre de la culture et de la communication et au ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.