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CAHIER STATISTIQUE LA SÉCURITÉ SOCIALE - 2016 Numéro 4 - Décembre 2016 Mireille Zanardelli Décision d’absence ou de présence au travail suite à la survenance d'une maladie Analyse du présentéisme au Luxembourg CONTENU 1. Introduction 2. Présentation de l'enquête réalisée pour mesurer le présentéisme 3. Mesurer et comprendre le choix des salariés suite à la survenance d'une maladie 4. Conclusion : Quels enseignements et quelles perspectives en termes de politiques publiques ?

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CAHIER STATISTIQUE

LA SÉCURITÉ SOCIALE - 2016

Numéro 4 - Décembre 2016

Mireille Zanardelli

Décision d’absence ou de présence au

travail suite à la survenance d'une maladie

Analyse du présentéisme au Luxembourg

CONTENU

1. Introduction

2. Présentation de l'enquête réalisée pour mesurer le présentéisme

3. Mesurer et comprendre le choix des salariés suite à la survenance

d'une maladie

4. Conclusion : Quels enseignements et quelles perspectives en termes

de politiques publiques ?

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Auteur : Mireille ZANARDELLI

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RESUME

Cette étude porte sur le présentéisme au travail, phénomène qui désigne le comportement des

salariés qui se rendent à leur travail alors qu’ils sont malades.

Le présentéisme au travail a commencé à être étudié au début des années 2000, au moment où le

phénomène est devenu préoccupant, compte tenu de son ampleur et de ses conséquences

attendues. En effet, le présentéisme est souvent considéré comme un réservoir d’absences futures

puisqu’il peut conduire les individus à une forme d’épuisement qui les contraint, à un moment

donné, à s’absenter, souvent pour une période plus longue que celle qui aurait été nécessaire à leur

convalescence s’ils s’étaient absentés au “bon moment“. Ainsi, les conséquences du présentéisme

sont reconnues comme étant négatives, à la fois pour la productivité de l'entreprise, pour la santé

des individus et aussi pour les dépenses publiques de santé.

Se basant sur une enquête réalisée en 2013 auprès de salariés du secteur privé travaillant au

Luxembourg, cette étude a pour objectif, d’une part de mesurer le phénomène au Luxembourg, et

d’autre part, d’identifier les éléments qui conduisent un individu temporairement affecté par une

maladie à décider de s’absenter et/ou de se présenter à son travail malgré son état de

santé dégradé. Plus précisément, notre objectif est d’étudier les déterminants qui conduisent un

salarié malade à choisir entre les trois possibilités suivantes : une absence totale (le salarié

s'absente pendant toute la durée de l’épisode de maladie), une présence totale (il travaille pendant

toute la durée de l’épisode de maladie), une présence partielle (il combine absence et présence au

sein d'un même épisode de maladie).

Les principaux résultats sont les suivants :

- Parmi les salariés ayant été malades au moins une fois au cours d'une année, plus de 80% se

rendent à leur travail alors qu'ils sont malades.

- Parmi l’ensemble des épisodes de maladies renseignés par les individus enquêtés, 26%

donnent lieu à une absence totale (l’individu s’absente pendant toute la durée de l’épisode de

maladie) ; 49% donnent lieu à une présence totale (l’individu travaille pendant toute la durée

de l’épisode de maladie) ; enfin, dans 25% des épisodes de maladies, on observe une

combinaison entre absence et présence au sein même de l’épisode de maladie.

- La durée des épisodes de maladie est un élément déterminant du choix des salariés. En effet,

plus l’épisode de maladie est long, plus le recours à une combinaison entre absence et

présence est fréquent.

- Les maladies ayant un caractère chronique ne sont pas les seules à être associées au

présentéisme. Ce dernier concerne toutes les maladies, certes dans des proportions

relativement différentes.

- Le présentéisme au travail ne concerne pas que les maladies faiblement incapacitantes. En

effet, même si le présentéisme total est plus fréquent dans le cas de maladies ne générant

qu'une faible incapacité, on l’observe également pour des maladies plus incapacitantes, au

cours desquelles il est fréquent d’observer une combinaison entre absence et présence.

- La décision du salarié malade entre absence totale, présence totale et présence partielle est la

conséquence d’un arbitrage entre, d’une part, les risques que l’individu prend sur sa santé

future s’il choisit le présentéisme et ainsi renonce à tout ou partie du temps nécessaire à sa

convalescence et, d’autre part, les risques qu’il prend sur son emploi et/ou l’évolution de sa

carrière s’il décide de s’absenter tout ou partie de l’épisode de maladie.

L’étude montre également dans quelle mesure le présentéisme ainsi que les conséquences qu’on

lui attribue nécessitent de repenser les politiques de lutte contre les absences au travail, de sorte à

mettre la préservation de l’état de santé des salariés au centre de la réflexion politique.

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SOMMAIRE

1 Introduction / Analyser le présentéisme au travail pour identifier de nouvelles politiques

destinées à réduire le taux d'absence : une démarche apparemment paradoxale ? ............. 7

2 Appréhender le présentéisme : nécessité de mener une enquête ad hoc ........................ 13

3 Mesurer le présentéisme et comprendre le choix des salariés suite a la survenance

d'une maladie ................................................................................................................................... 16

3.1 Plus de 85% des salariés ayant été malades sont concernés par le présentéisme, total

ou partiel, au cours d’une année ......................................................................................... 16

3.2 Présentéisme partiel ou total : un comportement observé dans 3 épisodes de

maladie sur 4 .......................................................................................................................... 17

3.3 Le choix entre absence totale, présence partielle et présence totale très lié à la durée

de l'épisode de maladie ........................................................................................................ 18

3.4 Une pratique du présentéisme variable selon les pathologies mais ne se limitant pas

aux seules maladies chroniques ......................................................................................... 20

3.5 Un présentéisme ne se limitant pas aux seules maladies faiblement incapacitantes 22

3.6 Le choix entre absence totale, présence totale ou combinaison absence-présence au

sein d’un épisode de maladie : un arbitrage entre risques sur la santé et risques sur

l'emploi .................................................................................................................................... 23

4 CONCLUSION : Quels enseignements et quelles perspectives en termes de politiques

publiques ? ........................................................................................................................................ 25

Annexe............................................................................................................................................... 29

Bibliographie .................................................................................................................................... 30

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Introduction

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1 INTRODUCTION / ANALYSER LE PRESENTEISME AU

TRAVAIL POUR IDENTIFIER DE NOUVELLES POLITIQUES

DESTINEES A REDUIRE LE TAUX D'ABSENCE1 : UNE

DEMARCHE APPAREMMENT PARADOXALE ?

La question des absences au travail inscrite à l'agenda politique depuis 2009

Depuis l'introduction du statut unique au Luxembourg en 2009, la question des absences au travail

est devenue une priorité politique. En effet, en alignant le régime des ouvriers sur celui des

employés, le statut unique a eu pour conséquence de modifier considérablement la prise en charge

du coût des absences. Désormais, ce sont les entreprises qui indemnisent tous les salariés absents

pendant les 77 premiers jours de l'absence, alors qu'avant 2009, la continuation de la rémunération

n'était appliquée que pour les employés. Bien que la continuation de la rémunération ait été

accompagnée d'une diminution importante des cotisations sociales pour les ouvriers, le

gouvernement était conscient des conséquences financières que pouvait avoir l'instauration du

statut unique sur les entreprises employant beaucoup d'ouvriers et affichant un fort taux

d'absence. Pour tenter d'atténuer ces effets éventuels, plusieurs mesures ont été mises en œuvre.

La première concerne l'instauration d'un principe de mutualisation du risque "absence au travail"

(les entreprises versent une cotisation annuelle à la mutualité des employeurs - établie sur la base

de leur taux d'absence - et reçoivent en contrepartie le remboursement de 80% des indemnités

journalières qu'elles versent à leurs salariés absents). La deuxième mesure, quant à elle, relève d'un

dispositif transitoire, opérationnel de 2009 à 2014, dédié spécifiquement aux entreprises

employant des ouvriers2 et devant leur permettre de s'adapter progressivement aux nouvelles

règles de prise en charge du coût des absences. Enfin, la troisième mesure concerne la volonté

clairement affichée du gouvernement, depuis 2009, de faire de la maîtrise des absences au travail

une priorité politique.

S'il est vrai que l'inscription à l'agenda politique de la question des absences au travail était

initialement une réponse aux conséquences possibles du statut unique, on peut aujourd'hui la

resituer dans un cadre beaucoup plus global et la mettre en perspective par rapport à l'ensemble

des tenants et aboutissants liés à la problématique des absences au travail. En effet, cette dernière

ne se limite pas à la seule question de la prise en charge du coût direct et immédiat des absences.

Elle relève au contraire d'un phénomène complexe qui contribue à une pluralité d'objectifs

économiques et sociaux et qui nécessite de fédérer une pluralité d'acteurs.

Un phénomène lié à une multiplicité d'objectifs et impliquant une multiplicité d'acteurs

Du point de vue des objectifs, les absences au travail ont certes des conséquences directes sur le

coût du travail et la productivité des entreprises. C'est d'ailleurs pour cette raison que la réduction

des absences est devenue un enjeu important au niveau international. En effet, elle est considérée

comme l'un des moyens pour baisser le coût du travail, devenu une question majeure dans le

contexte de la mondialisation. Cependant, les absences au travail ont également d'autres

conséquences :

1 Dans ce document, nous utiliserons les termes "absence" pour désigner l'ensemble des absences, "absence abusive" pour

désigner le comportement du salarié qui s'absente sans raison médicale et « absences pour maladie » pour désigner le

comportement du salarié qui s'absente pour raisons médicales. 2 Le taux pour les prestations en espèces est fixé pour tous à 0,5%, dont 0,25% à charge des employeurs et 0,25% des

salariés. Les ouvriers ont payé une surprime de 2,1% jusqu’en 2011, de 1% en 2012 et de 0,5% en 2013.

(http://www.mss.public.lu/actualites/2008/12/art_comm_press_statut_unique1/index.html#P2)

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Introduction

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- Les premières se posent en termes de santé publique, qu'il s'agisse des dépenses de santé de

court et de moyen terme mais également du niveau de santé général de la population active :

si l'on considère l'absence comme une période de repos nécessaire pour recouvrer son état de

santé suite à la survenance d'une maladie, des absences trop courtes ou inexistantes peuvent,

d'une part, détériorer l'état de santé des salariés et, d'autre part, conduire à plus ou moins long

terme à des dépenses de santé plus élevées que celles qui auraient dû être réalisées si

l'individu avait pris le temps de la guérison.

- La question des absences au travail est également en lien direct avec les conditions de travail :

réfléchir aux absences c'est réfléchir au bien-être des salariés, et par ricochet, c'est

probablement réduire les absences, donc le coût du travail ; c'est probablement également

préserver l'état de santé des salariés et donc mieux maîtriser les dépenses futures de santé.

Ainsi, le phénomène des absences au travail, en étant au carrefour de nombreuses préoccupations

actuelles, est un phénomène multidimensionnel qui rayonne vers de nombreux enjeux socio-

économiques, qui en retour, agissent sur les absences au travail.

Du point de vue des acteurs, même s'il est évident qu'in fine c'est le salarié qui agit et prend la

décision d'absence, cette dernière est influencée, d'une part, par le contexte institutionnel, décidé

par les pouvoirs publics et auquel l'individu est soumis (taux de compensation du salaire en cas

d'absence, existence d'un délai de carence, durée d'absence avant de devoir fournir un certificat,

etc.) et, d'autre part, par la politique managériale mise en place par l'entreprise (politique

sanctionnant l'absence, existence de primes d'assiduité, conditions de travail, etc.). Ainsi, la maîtrise

des absences au travail nécessite l'adhésion et la participation de tous, salariés, entreprises,

pouvoirs publics ainsi que celles des médecins, que ce soit en termes de prise de conscience des

enjeux ou de recherche collective de comportements vertueux. Dans les pays où la réflexion est la

plus avancée sur les politiques à mettre en place pour réduire les absences, cette adhésion est mise

en avant ; elle est nécessaire pour proposer des mesures responsabilisant l'ensemble des acteurs

et, de ce fait, éviter que les débats ne stigmatisent qu'un seul des acteurs (les salariés en les

accusant d'absences abusives, les entreprises en invoquant le seul effet des mauvaises conditions

de travail, les pouvoirs publics en reprochant aux règles de fonctionnement de l'assurance maladie

d'être trop permissives ou les médecins en les accusant de complaisance à l'égard des absentéistes

abusifs).

Le schéma ci-dessous restitue cette pluralité d'objectifs et d'acteurs.

Conditions de travail et bien-être au travail

Productivité

Coût du travail

Santé publique

Absences au

travail

Entreprises

Pouvoirs

publics

Salariés

Médecins

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Introduction

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Dépasser l’analyse des seules absences abusives en étudiant les comportements d’absence en cas

de survenance d’une maladie : comprendre le phénomène de présentéisme au travail

Pour identifier les leviers à activer pour réduire ou contenir efficacement le phénomène, il est

fondamental de mieux comprendre les comportements d'absence au travail. Or le moins que l'on

puisse dire, c'est que ces comportements ne sont jamais discutés dans toute leur diversité.

Traditionnellement, les débats, qu'ils soient politiques ou scientifiques, proposent une approche

très réduite du phénomène, qui distingue, d'une part, les absences abusives, pour lesquelles le

salarié simule une maladie et, d'autre part, les absences liées à la survenance d'une maladie, pour

lesquelles l'absence s'impose au salarié puisqu'il est malade, ce qui implicitement signifie qu'on ne

peut pas agir sur elles, puisqu'elles sont synonymes d'absences involontaires. En conséquence, la

plupart des travaux, notamment économiques, se concentrent sur l’analyse des absences abusives

et négligent celle des absences pour maladie dont il semble entendu que la nature involontaire

limite l’action en termes de politiques publiques ou managériales.

Or les décisions d'absence au travail, en cas de maladie, nous semblent relever de processus de

décision bien plus complexes, nécessitant de prendre en compte deux éléments souvent ignorés.

Le premier est le niveau d'incapacité auquel le salarié est soumis suite à la survenance d'un épisode

de maladie. En effet, la maladie n'est pas toujours totalement incapacitante. Il existe de

nombreuses maladies qui ne le sont que partiellement, de sorte que le lien entre maladie et

absence ne doit pas toujours être considéré comme automatique.

Le second élément à prendre en compte pour mieux comprendre les comportements des salariés

est la durée d'absence au sein de l'épisode de maladie, qui à notre connaissance n’a jamais été

analysée.

Dans le cas d'une maladie partiellement incapacitante, le salarié peut prendre trois décisions

différentes :

- Il peut décider de s'absenter pendant toute la durée de l'épisode de maladie (définie comme la

période pendant laquelle la productivité du salarié est réduite) ; il s'agit alors d'une absence

totale.

- Il peut décider de s'absenter pendant une partie de la maladie ; dans ce cas, le salarié combine

au sein d'un même épisode de maladie absence et présence au travail ; il s'agit alors d'une

absence partielle ou d'une présence partielle.

- Il peut également décider de ne pas s'absenter du tout ; malgré son état de santé

temporairement dégradé, le salarié se rend à son travail pendant toute la durée de l'épisode de

maladie ; il s'agit alors d'une présence totale.

Dans le cas d'une maladie totalement incapacitante, la présence totale ne peut pas être une option

pour le salarié. Il peut en revanche décider d'une présence partielle ou d'une absence totale, dans

le cas où sa maladie évolue et ne demeure pas totalement incapacitante pendant toute la durée de

l'épisode de maladie.

Le tableau suivant permet de restituer toute la diversité des comportements d'absence et de

présence au travail, en tenant compte à la fois des absences abusives et des absences pour

maladie.

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Introduction

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Pas malades

Malades

Maladies

partiellement

incapacitantes

Maladies

totalement

incapacitantes

Absence Absence abusive Absence pour

maladie

Absence pour

maladie Absence totale

Présence Présence

"normale"

Absence pour

maladie +

Présentéisme

Absence pour

maladie +

Présentéisme

Présence

partielle

Présentéisme

Présence totale

Ainsi, la décision d'absence peut être prise dans deux cas de figure différents :

- le premier se caractérise par l'absence de maladie ; si le salarié décide de s'absenter, il s'agit

d'une absence abusive ;

- le second se caractérise par la survenance d'une maladie ; si le salarié s'absente, il s'agit d'une

absence pour maladie ; s'il décide de travailler, il s'agit de présentéisme, qui désigne le

comportement du salarié qui se rend à son travail alors qu’il est malade. Le présentéisme peut

être total ou partiel selon que le salarié ne s'interrompt pas du tout (ce qui n'est compatible

qu'avec une maladie partiellement incapacitante) ou selon qu'il combine absence et présence au

sein du même épisode de maladie.

Ces deux cas de figurent renvoient aux deux questions suivantes :

- Quel est le processus de décision qui conduit un individu à s'absenter de son travail en dehors

de tout problème de santé ? Autrement dit, quels sont les déterminants des absences abusives ?

- Quel est le processus de décision qui conduit un individu temporairement affecté par une

maladie à décider de s’absenter ou à décider, au contraire, de se présenter à son travail malgré

son état de santé ? Le cas échéant, quelle est la durée, au sein de l'épisode de maladie, pendant

laquelle il va décider de travailler ? Autrement dit, quels sont les déterminants du présentéisme

au travail ?

Or si l'on tient compte du fait que les absences abusives ne représentent environ que 13% de

l'ensemble des absences3, il est clair que c'est à la deuxième question qu'il faut tenter de répondre

pour comprendre la part la plus importante des comportements des salariés. Cette statistique est

en effet une invitation à développer des analyses sur le phénomène du présentéisme de manière à

comprendre les raisons qui expliquent la durée d'absence ou de présence que va choisir un

individu temporairement affecté par une maladie. En effet, chercher à comprendre les durées

d'absence nous semble pouvoir ouvrir la voie vers de nouveaux leviers dont l'objectif ne serait pas

forcément de réduire le nombre d'absences mais plutôt d'en ajuster la durée pour optimiser à la

fois les effets sur la santé des individus, sur la productivité des entreprises et sur les dépenses

publiques de santé.

3 http://www.annuaire-secu.com/html/news355.html#6 Nous utilisons des chiffres français dans la mesure où il n’existe pas

au Luxembourg de données équivalentes. A priori, nous ne voyons aucun élément qui nous conduirait à penser que le

comportement abusif des salariés soit très différent au Luxembourg et en France.

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Introduction

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Le présentéisme au travail : un phénomène récent en plein essor dont les tenants et aboutissants

doivent être intégrés aux réflexions en termes de politiques publiques

Le présentéisme au travail est un phénomène qui a commencé à être étudié au début des années

2000, à un moment où le phénomène est devenu préoccupant, compte tenu de son ampleur4.

Paradoxalement, ce sont les politiques de lutte contre les absences abusives qui expliquent, au

moins en partie, la hausse du présentéisme. En effet, alors que les politiques managériales et

salariales développées par les entreprises au cours des dernières décennies étaient destinées à

l’origine à lutter contre les absences abusives (c'est-à-dire non justifiées médicalement), elles ont

également conduit certains individus réellement malades à renoncer à une ou plusieurs absences,

conscients qu’ils étaient des risques auxquels ils s’exposaient en étant absents trop souvent. Ces

politiques, supposées lutter contre la perte de productivité due à l’absence des salariés, lui ont

substitué in fine une perte de productivité due à leur présence, puisque la présence au travail n’est

pas synonyme de performance. La dégradation récente de la sécurité de l'emploi, liée à la crise

économique, a sans aucun doute intensifié le présentéisme au travail, puisque certains salariés ont

été amenés, par crainte de perdre leur emploi, à décider de travailler malgré des niveaux de

maladie pour lesquels ils se seraient absentés avant la dégradation de leurs conditions de travail.

Le phénomène de présentéisme semble avoir pris une telle ampleur que certains affirment qu'il y a

désormais plus de gens malades dans les entreprises qu’à la maison5. Or si l’on considère le

présentéisme d’aujourd’hui comme un réservoir d’absences futures, l’ampleur du phénomène a

effectivement de quoi inquiéter. En effet, si les conditions de travail venaient, en se détériorant

encore davantage, à aggraver l’insécurité qui pèse sur l’emploi, les individus qui, en période moins

défavorable, auraient choisi le présentéisme pourraient à l’avenir ne plus avoir la capacité de le

faire, simplement parce qu’ils auraient atteint des limites les contraignant à l’absence ; le taux

d’absence pourrait en conséquence augmenter de manière importante.

D'ailleurs, l'évolution récente des taux d'absence au travail, par exemple en Belgique ou au

Luxembourg, a été interprétée comme la conséquence d'une intensification du présentéisme

(Securex (2013) pour la Belgique et Mazoyer (2013) pour le Luxembourg). Si on prend le cas du

Luxembourg, l’évolution du taux d’absence6 au cours des dernières années est la suivante : entre

2009 et 2013, ce dernier est passé, dans le secteur privé, de 3,3% à 3,7%. Sans autre analyse de ce

taux global, on pourrait conclure que la dégradation des conditions de travail, dans le contexte de

la crise économique, a conduit à une augmentation des absences au travail. Pourtant, si l’on

décompose cette évolution en distinguant les absences selon leur durée, on observe alors que la

hausse ne concerne que le taux d’absence de longue durée7 (ce dernier est passé de 1,2% à 1,6%),

alors que le taux d’absence de courte durée stagne à 2,1%. L’hypothèse qui a été formulée pour

expliquer cette évolution reflète ce qui a été dit au paragraphe précédent (Mazoyer, 2013) : le fait

que le taux de courte durée n’augmente pas pourrait être lié au comportement des individus qui,

dans le contexte de crise économique, ont renoncé à certaines absences de courte durée, les

conduisant à une forme d’épuisement qui les a contraints à s’absenter, certes plus tard, mais

surtout plus longtemps. En d’autres termes, les absences pour maladie de courte durée qui

auraient été observées en période économiquement favorable sont reportées et remplacées par

des absences pour maladie de plus longue durée. En résumé, la dégradation récente des conditions

de travail semble avoir conduit, d’une part, à une augmentation du présentéisme de courte durée

et, d’autre part, à une augmentation des absences de longue durée.

4 Plusieurs études ont évalué le coût du présentéisme (Goetzel et al, 2004, Stewart et al. (2003), cités dans Hemp, 2004) et

toutes conduisent à la même conclusion : pour les entreprises, le coût du présentéisme est supérieur au coût des absences

au travail. 5 Eric Gosselin, cité dans un document publié par la Commission de la santé et de la sécurité au travail, Canada (2013)

(www.csst.qc.ca/accueil/prévention/reportages). 6 Rapport entre le nombre total de jours d’absence et le nombre total de jours travaillés. Source : IGSS (Luxembourg). 7 C'est-à-dire ayant une durée de plus de 21 jours.

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Introduction

12

En conséquence, il ne nous semble plus envisageable de réfléchir aux moyens de contenir les

absences au travail sans tenir compte de leur corolaire, le présentéisme. Cette démarche implique

de dépasser la seule prise en compte des coûts directs de court terme en intégrant à la réflexion les

coûts indirects de moyen ou long terme sur les dépenses de santé ainsi que les conséquences sur

la santé des salariés.

Cependant, il n'est pas aisé de pouvoir analyser les décisions de présentéisme prises par les

salariés suite à la survenance d'un épisode de maladie. En effet, dans la mesure où les données

administratives de la Caisse nationale de santé (CNS) ne portent que sur les absences déclarées par

le salarié et l'employeur, elles ne permettent pas i) d'identifier les cas de maladie où l'individu a

choisi une présence totale, ii) de distinguer les cas de présence partielle et d'absence totale

puisqu'aucune information n'existe sur la durée de l'épisode de maladie. Il a donc été nécessaire de

mener une enquête ad hoc, proposant un protocole centré sur la survenance de la maladie et

permettant d'appréhender la décision prise par l'individu suite à cette maladie.

Dans la deuxième partie de ce document, nous présenterons l'enquête qui a été réalisée ainsi que

le protocole de questions qui a été mis en œuvre pour appréhender les comportements des

individus suite à la survenance d'une maladie. Dans une troisième partie, nous exposerons les

principaux résultats auxquels nous sommes parvenus. Enfin, en conclusion, nous tenterons de

mettre en évidence les pistes auxquelles ces résultats nous invitent à réfléchir en termes de

politiques publiques destinées à réduire ou à contenir les absences au travail et à protéger la santé

des travailleurs.

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Appréhender et mesurer le présentéisme : nécessité de mener une enquête ad hoc

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2 APPREHENDER ET MESURER LE PRESENTEISME :

NECESSITE DE MENER UNE ENQUETE AD HOC

L'enquête que nous avons réalisée auprès de salariés travaillant au Luxembourg est inédite dans le

sens où à notre connaissance, aucune des enquêtes portant sur les décisions d'absence ou de

présence au travail ne tente d'appréhender le comportement des individus dans le cadre d'un

épisode de maladie.

Le processus de décision que nous souhaitons identifier et analyser est le suivant :

Pour être certains de collecter à la fois des cas d'absence totale, de présence partielle et de

présence totale, nous avons imaginé un protocole d'enquête en deux temps.

Pour appréhender les cas où il y a absence totale du lieu de travail ou combinaison absence-

présence, les questions posées sont les suivantes :

Concernant la dernière fois où vous avez été absent parce que vous étiez malade ou blessé(e)…

A0. Quelle a été la durée de votre absence (en jours) ?

A1. Avant de vous absenter, étiez-vous déjà malade depuis un certain temps ?

A1bis. Si oui, pendant combien de jours ?

A2. Quand vous avez repris le travail, étiez-vous complètement rétabli ?

A2bis. Si non, combien de jours auriez-vous dû rester encore à la maison avant d’être entièrement rétabli ?

La combinaison de ces questions permet d’identifier un certain nombre de cas :

- une absence totale : il s'agit des cas où A1 = non ET A2= oui,

- une combinaison absence - présence : il s'agit des cas où A1 = non ET A2 = non,

- une combinaison présence - absence : il s’agit des cas où A1 = oui ET A2 = oui

- une combinaison présence - absence - présence : il s’agit des cas où A1 = oui et A2 = non

Pour appréhender les cas où l‘on observe une présence totale, la question est la suivante :

Concernant la dernière fois où vous étiez malade et où vous êtes allé(e) travailler pendant toute la durée de votre

maladie, pendant combien de jours votre maladie/blessure a-t-elle réduit votre efficacité au travail ?

Survenance d’une

maladie

caractérisée par un

nombre de jours

tm de

convalescence

nécessaires pour

recouvrer l’état de

santé initial

Trois

choix

possibles

Absence totale

Temps de présence au travail

tp = 0

Combinaison entre absence

et présence

Temps de présence au travail

tp compris entre 0 et tm

Présence totale

Temps de présence au travail

tp = tm

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Appréhender et mesurer le présentéisme : nécessité de mener une enquête ad hoc

14

La notion même de présentéisme, qui, rappelons-le, désigne le fait de venir travailler alors que le

salarié est malade, implique un fort niveau de subjectivité concernant la détermination du seuil de

maladie à partir duquel on estime être malade. Il n'existe aucun critère objectif permettant

d'uniformiser les réponses des salariés, ce qui d'ailleurs ne serait pas souhaitable. En effet, ce seuil

dépend de paramètres qui sont propres à chaque individu, et il n'existe aucune raison valable qui

justifierait qu'on tente de neutraliser cette dimension individuelle, malgré les problèmes

d'interprétation qui peuvent en découler.

Le tableau 1 présente, pour chaque cas envisagé, le mode de calcul de la durée de l’épisode de

maladie (tm) et de la durée de présence (tp).

Tableau 1. Mode de calcul de la durée de la maladie tm et de la durée de présence tp selon les différents cas

Type de

décision Protocole de questions

Calculs de

tm et tp

Absence sur

toute la

période tm

A0. Quelle a été la durée de votre absence ? (x jours)

A1. Avant de vous absenter, étiez-vous déjà malade depuis un certain temps ?

NON

A1bis. Si oui, pendant combien de jours (0 jour)

A2. Quand vous avez repris le travail, étiez-vous complètement rétabli ? OUI

A2bis. Si non, combien de jours auriez-vous dû rester encore à la maison pour

être entièrement rétabli ? (0 jour)

tp = 0

tm = x

Présence au

début de la

période de

maladie puis

absence

A0. Quelle a été la durée de votre absence ? (x jours)

A1. Avant de vous absenter, étiez-vous déjà malade depuis un certain temps ?

OUI

A1bis. Si oui, pendant combien de jours (y jours)

A2. Quand vous avez repris le travail, étiez-vous complètement rétabli ? OUI

A2bis. Si non, combien de jours auriez-vous dû rester encore à la maison pour

être entièrement rétabli ? (0 jour)

tp = y

tm = x + y

Absence au

début de la

période puis

présence

A0. Quelle a été la durée de votre absence ? (x jours)

A1. Avant de vous absenter, étiez-vous déjà malade depuis un certain temps ?

NON

A1bis. Si oui, pendant combien de jours (0 jour)

A2. Quand vous avez repris le travail, étiez-vous complètement rétabli ? NON

A2bis. Si non, combien de jours auriez-vous dû rester encore à la maison pour

être entièrement rétabli ? (z jours)

tp = z

tm = x + z

Présence puis

absence puis

présence

A0. Quelle a été la durée de votre absence ? (x jours)

A1. Avant de vous absenter, étiez-vous déjà malade depuis un certain temps ?

OUI

A1bis. Si oui, pendant combien de jours (y jours)

A2. Quand vous avez repris le travail, étiez-vous complètement rétabli ? NON

A2bis. Si non, combien de jours auriez-vous dû rester encore à la maison pour

être entièrement rétabli ? (z jours)

tp = y + z

tm = x + y + z

Présence sur

toute la

période tm

P1. Pendant combien de jours votre maladie/blessure a-t-elle réduit votre

efficacité au travail ? (s jours) tm = tp = s

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Appréhender et mesurer le présentéisme : nécessité de mener une enquête ad hoc

15

La période de référence retenue est de 12 mois. Le choix de cette durée se justifie, d’une part, par

le fait qu’elle couvre toutes les saisons et, d’autre part, par le fait qu’elle n’est pas trop longue par

rapport aux problèmes possibles de mémoire.

Le questionnaire a été soumis entre mars 2013 à juin 2013 par Internet à un échantillon de 80 000

salariés travaillant dans les entreprises privées implantées au Luxembourg. L’échantillon a été

constitué à partir du fichier administratif fourni par l’Inspection Générale de la Sécurité Sociale

(IGSS) et comprenant toutes les personnes actives au Luxembourg et affiliées au système de

sécurité sociale luxembourgeois. Nous avons obtenu 17 461 réponses exploitables.

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Mesurer le présentéisme et comprendre le choix des salariés suite a la survenance d'une maladie

16

3 MESURER LE PRESENTEISME ET COMPRENDRE LE CHOIX

DES SALARIES SUITE A LA SURVENANCE D'UNE MALADIE

Le présentéisme semble être un comportement très largement diffusé au sein des salariés

travaillant au Luxembourg.

3.1 PLUS DE 85% DES SALARIES AYANT ETE MALADES SONT

CONCERNES PAR LE PRESENTEISME, TOTAL OU PARTIEL, AU

COURS D’UNE ANNEE

Au total, 62% des salariés ont fait au moins une fois du présentéisme, total ou partiel, au cours des

12 mois précédant l’enquête. Parmi eux, 55% ont déclaré avoir fait du présentéisme total et 29% du

présentéisme partiel (22% ont fait au cours de l'année à la fois du présentéisme total et du

présentéisme partiel) (tableau 2).

Tableau 2. Fréquence du présentéisme total et partiel

L’individu a fait du présentéisme partiel au cours

des 12 mois précédant l’enquête Total

oui non

L’individu a fait du présentéisme

total au cours des 12 mois

précédant l’enquête

oui 3 795

(22%)

5 679

(33%)

9 474

(55%)

non 1 273

(7%)

6 714

(38%)

7 987

(39%)

Total 5 068

(29%)

12 393

(71%) 17 461

Source : enquête « conditions de travail et qualité de vie au travail », 2013, IGSS-LISER

Si l'on recalcule cette statistique en ne tenant pas compte de ceux qui n'ont pas été malades au

cours de la période étudiée (et qui par définition sont non concernés par le phénomène), la part

des salariés ayant fait du présentéisme total ou partiel passe de 62% à 85%. Autrement dit, plus de

8 salariés sur 10 ayant été malades au moins une fois au cours d'une année se rendent à leur

travail alors qu'ils sont malades. Rappelons que 28% des salariés enquêtés (soit 4 818 salariés)

déclarent de pas avoir été malades au cours de la période de référence.

Si l’on distingue les salariés selon le nombre de maladies subies, des différences importantes

apparaissent. Parmi les salariés ayant subi une seule maladie, 75% ont fait du présentéisme (total

ou partiel), tandis que c’est le cas de 90% des salariés ayant été malades deux fois. Si l’on s’en tient

à la fréquence du présentéisme total uniquement, ces chiffres s’établissent à 63% et 84%.

Ces derniers résultats laissent supposer que la pratique du présentéisme s’intensifie avec le

nombre d’épisodes de maladies subis.

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Mesurer le présentéisme et comprendre le choix des salariés suite a la survenance d'une maladie

17

3.2 PRESENTEISME PARTIEL OU TOTAL : UN COMPORTEMENT

OBSERVE DANS 3 EPISODES DE MALADIE SUR 4

Parmi l’ensemble des épisodes de maladies renseignés par les individus, 26% donnent lieu à une

absence totale (l’individu s’absente pendant toute la durée de l’épisode de maladie) ; 49% donnent

lieu à une présence totale (l’individu travaille pendant toute la durée de l’épisode de maladie) ;

enfin, dans 25% des épisodes de maladies, on observe une combinaison entre absence et présence

au sein même de l’épisode (tableau 3).

Les combinaisons entre absence et présence se répartissent ainsi : dans 13% des épisodes de

maladie, l’individu enchaîne une période de présence puis une période d’absence (combinaison

PA) ; dans 6%, on observe la séquence inverse : d’abord une période d’absence puis une période de

présence (combinaison AP) ; dans 6% des épisodes de maladie, l’individu déclare une période

d’absence encadrée par deux périodes de présence (combinaison PAP).

Tableau 3. Structure des épisodes de maladie selon absence totale, présence totale et combinaison

absence-présence

Comportement au cours de l’épisode de maladie

Part dans l’ensemble

des épisodes de

maladie

Présence totale 49%

Présence partielle

présence-absence 13%

25%

absence-présence 6%

présence-absence-

présence

6%

Absence totale 26%

Total 100%

Source : enquête « conditions de travail et qualité de vie au travail », 2013, IGSS-LISER

Ainsi, le présentéisme partiel semble être un comportement relativement fréquent, observé dans

un épisode de maladie sur quatre. Toutefois, cette fréquence doit être relativisée par le nombre de

jours de présence au sein de l’épisode de maladie. En effet, s’il était avéré que l’individu qui

combine absence et présence ne travaille que très peu de jours au prorata de la durée de sa

maladie, alors la présence partielle serait très proche de l’absence totale. A contrario, si la durée de

présence était très proche de la durée de la maladie, la présence partielle serait assimilable à une

présence totale. Dans un cas comme dans l’autre, la présence partielle ne pourrait pas être

considérée comme une véritable alternative à l’absence totale et à la présence totale et son analyse

perdrait alors son intérêt.

Pour apporter des réponses à cette question, nous avons calculé le ratio entre la durée de présence

(tp) et la durée de l’épisode de maladie (tm) (tableau 4). Dans les cas d’absence totale, le ratio est par

définition nul tandis que, dans les cas de présence totale, il est égal à 1 puisque l’individu travaille

toute la durée de la maladie. Dans 1% des épisodes de maladie, tp/tm est inférieur ou égal à 25%,

indiquant que le choix de l’individu est proche de l’absence totale ; dans 5% des cas, il est supérieur

à 75%, indiquant cette fois que le choix est assez proche de la présence totale. En revanche, dans

19% des épisodes de maladie (ce qui correspond à près de 4/5e des épisodes de maladie où on

observe une combinaison entre absence et présence), la durée de présence représente entre 25%

et 75% de la durée de l’épisode de maladie. La combinaison entre présence et absence au sein du

même épisode de maladie n’est donc ni une « quasi » absence totale ni une « quasi » présence

totale.

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Mesurer le présentéisme et comprendre le choix des salariés suite a la survenance d'une maladie

18

Tableau 4. Répartition des maladies selon la durée de présence dans l’épisode de maladie

Temps de présence (tp) /

Durée de l’épisode de maladie (tm)

Nombre

d’épisodes de

maladies

% de

maladies

Nombre

total de

jours

d’absence

Nombre

total de

jours de

présence

Somme des

durées des

épisodes de

maladie

tp/tm = 0 (absence totale) 5 225 épisodes 26% 29 675 0 29 675 j.

tp/tm entre ]0 %; 25%] 270 épisodes 1% 2 611 595 3 206 j.

tp/tm entre ]25 %; 50%] 2 046 épisodes 10% 16 821 13 520 30 341 j.

tp/tm entre ]50 %; 75%] 1 765 épisodes 9% 12 543 22 829 35 372 j.

tp/tm entre ]75 %; 100%[ 986 épisodes 5% 2 925 17 053 19 978 j.

tp/tm = 100% (présence totale) 9 725 épisodes 49% 0 52 615 52 615 j.

Total 20 017 épisodes* 100% 64 575 106 612 171 187 j.

Source : enquête « conditions de travail et qualité de vie au travail », 2013, IGSS-LISER

Note : le nombre de maladies est supérieur au nombre d’individus malades (qui s’établit à 12 643, soit 17 461 – 4 818).

Cela tient au fait que certains salariés enquêtés ont fourni des informations pour deux maladies, et non pas une seule.

3.3 LE CHOIX ENTRE ABSENCE TOTALE, PRESENCE PARTIELLE ET

PRESENCE TOTALE LIE A LA DUREE DE L'EPISODE DE MALADIE

La durée des épisodes de maladie semble être un élément déterminant du choix des salariés. En

effet, plus l’épisode de maladie est long, plus la proportion d’absences totales et de présences

totales baisse. Parmi les épisodes de maladie de 2-3 jours8, seuls 7% correspondent à des

présences partielles, alors que c’est le cas de 23% des épisodes de maladie de 4-5 jours et de 60%

de ceux ayant une durée de plus de 15 jours. La présence totale semble être beaucoup plus

fréquemment adoptée pour les maladies courtes, probablement parce que, dans le cas de maladies

longues, ne pas s’absenter du tout est trop préjudiciable à la santé future du salarié. De la même

manière, l’absence totale est plus souvent associée à une maladie courte, sans doute parce qu’une

absence trop longue réduit les chances futures de promotion ou d’augmentation salariale

(graphique 1).

8 Ici, nous n'avons pas tenu compte des épisodes de maladie d’un jour puisqu’il est impossible de combiner absence et

présence si l’épisode ne dure pas au moins deux jours. Les épisodes de maladie sont plutôt concentrés sur des durées

courtes : 1-3 jours pour 41%, 4-5 jours pour 20%, 6-10 jours pour 17%, 11-15 jours pour 6% et 16 jours et plus pour 16%.

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Mesurer le présentéisme et comprendre le choix des salariés suite a la survenance d'une maladie

19

Graphique 1. Absence totale, présence totale et combinaison absence-présence selon la durée de la

maladie

Source : enquête « conditions de travail et qualité de vie au travail », 2013, IGSS-LISER

Parmi les différentes combinaisons d’absence et de présence, la plus fréquemment utilisée

correspond à la combinaison présence-absence, quelle que soit la durée de l'épisode de maladie.

Peut-être peut-on expliquer ce résultat en suggérant que les individus enclins au présentéisme

attendent, avant de s’absenter, que la maladie ait atteint un certain niveau de gravité. La

combinaison présence-absence-présence est, quant à elle, rarement utilisée au cours des épisodes

de maladie courts. En revanche, elle représente 29% des épisodes de 11-15 jours et 37% de ceux

qui se prolongent au-delà de 15 jours (graphique 2).

Graphique 2. Choix entre présence-absence, présence-absence-présence et présence-absence selon la

durée de l’épisode de maladie (parmi les combinaisons entre absence et présence)

Source : enquête « conditions de travail et qualité de vie au travail », 2013, IGSS-LISER

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

90%

100%

2-3 jours 4-5 jours 6-10 jours 10-15 jours 16 jours et plus

Présence totale Combinaison absence-présence Absence totale

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

90%

100%

1-3 jours 4-5 jours 6-10 jours 11-15 jours 16 jours et plus

AP PAP PA

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Mesurer le présentéisme et comprendre le choix des salariés suite a la survenance d'une maladie

20

En résumé, la relation entre la durée des épisodes de maladie et la décision du salarié met en

évidence les comportements individuels suivants :

- Le présentéisme n’est une alternative à l’absence pour maladie que dans le cas d’épisodes de

maladie courts, pour lesquels il semble que les individus arbitrent soit pour une absence totale,

soit pour une présence totale, sans envisager une combinaison entre les deux.

- A contrario, quand les maladies sont plus longues, le présentéisme semble devenir un

complément et non plus une alternative à l’absence. Ainsi, en cas de survenance d'un épisode de

maladie long, l’individu décide de consacrer une partie de sa convalescence au travail.

En effet, en cas de maladie longue, l'individu ne peut :

- ni s'absenter pendant toute la durée de l'épisode de maladie, compte tenu des risques que ce

choix lui fait prendre pour son revenu futur (du fait par exemple de risques accrus de perte

d'emploi ou de moindres chances d'accéder à des promotions)

- ni travailler pendant toute la durée de l'épisode de maladie, compte tenu cette fois des risques

trop grands pour son état de santé future s'il ne prend pas le temps de la convalescence.

3.4 UNE PRATIQUE DU PRESENTEISME VARIABLE SELON LES

PATHOLOGIES MAIS NE SE LIMITANT PAS AUX SEULES MALADIES

CHRONIQUES

Les études portant sur le présentéisme indiquent que le comportement de présentéisme est

souvent associé aux maladies chroniques puisque les individus qui en sont victimes ne peuvent

probablement pas s’absenter à chaque manifestation de leur affection chronique. Pourtant, il

semble que le présentéisme, bien que plus fréquemment observé dans des pathologies pouvant

avoir une dimension chronique, n'en soit pas l'exclusivité. En effet, quatre groupes de maladies se

distinguent en fonction de la fréquence (graphique 3) :

- le 1er, constitué des convalescences après actes chirurgicaux, se caractérise par la plus forte

proportion d’absence totale (46%) et la plus faible de présence totale (18%) ; il n'en demeure pas

moins que dans 36% des cas, les individus reprennent le travail en étant pas tout à fait rétablis.

- le 2e groupe se compose des maladies inflammatoires des os et articulations, des troubles

musculo-squelettiques (TMS), des maladies de la sphère ORL, des maladies infectieuses (telles

que rhume, otite, sinusite, etc.) et des maux de tête. Il se caractérise par un présentéisme total

très fréquent (entre 50% et 65%) ;

- le 3e groupe, qui inclut les maladies liées au stress ou aux dépressions, est caractérisé par un

présentéisme partiel plus fréquent et un présentéisme total moins fréquent que ceux du

groupe 2 ;

- le 4e groupe correspond à une répartition beaucoup plus homogène entre les différents

comportements. Les parts d’absences totales, de combinaisons absence-présence et de

présences totales sont beaucoup plus proches les unes des autres que dans les groupes

1, 2 et 3. Cette caractéristique s’explique, selon nous, par le fait que les maladies de ce groupe

sont très hétérogènes, nécessitant parfois une absence totale et permettant d’autres fois une

présence, partielle ou totale.

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Mesurer le présentéisme et comprendre le choix des salariés suite a la survenance d'une maladie

21

Graphique 3. Répartition entre absence totale, présence totale et combinaison absence-présence selon la

pathologie

Source : enquête « conditions de travail et qualité de vie au travail », 2013, IGSS-LISER

Ainsi, contrairement aux résultats présentés dans les études empiriques sur le présentéisme, les

maladies ayant un caractère chronique ne sont pas les seules à être associées au présentéisme. En

effet, si on regroupe toutes les maladies saisonnières (gastro-entérites-grippes et maladies

infectieuses), on observe qu’elles représentent 56% des maladies donnant lieu à du présentéisme

total (tableau 5). Ce résultat s'explique en partie par un effet de la durée de la maladie, puisque les

maladies saisonnières sont généralement de courte durée.

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

absence totale combinaison absence-présence présence totale

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Mesurer le présentéisme et comprendre le choix des salariés suite a la survenance d'une maladie

22

Tableau 5. Répartition des pathologies selon le type de comportement

A PA PAP AP P Total

Convalescences actes chirurgicaux 490 172 105 113 196 1076

Troubles musculo-squelettiques (TMS) 415 238 223 203 1197 2276

Gastro-entérites/grippes 1339 644 165 186 1480 3814

Maladies infectieuses 1327 956 275 200 3528 6286

Maux de tête 197 55 29 33 589 903

Stress, déprime 93 61 78 61 208 501

Dépressions, troubles psychologiques 48 27 47 41 87 250

Traumatismes blessures 298 40 38 131 278 785

Maladies inflammatoires os et

articulations 69 73 78 51 263 534

Maladies ORL 226 130 33 26 482 897

Problèmes de santé liés à une

grossesse 90 32 15 15 71 223

Autres 633 227 112 154 610 1736

Total 5225 2655 1198 1214 8989 19281

Source : enquête « conditions de travail et qualité de vie au travail », 2013, IGSS-LISER

Signification des intitulés des colonnes : A = absence totale ; PA = présence-absence ; PAP = présence-absence-présence ;

PA = absence-présence ; P = présence totale

Note : le nombre d’épisodes de maladie dans ce tableau est plus faible que celui du tableau 4, ce qui s’explique par le fait

que certains enquêtés n’ont pas renseigné la pathologie.

3.5 UN PRESENTEISME NE SE LIMITANT PAS AUX SEULES MALADIES

FAIBLEMENT INCAPACITANTES

On pourrait remettre en cause l’intérêt que nous portons à l'analyse du présentéisme au travail en

supposant que les salariés qui choisissent de travailler en étant malades ne sont atteints que de

maladies, certes avérées, mais qui ne sont finalement que peu invalidantes. Si tel était le cas, le

présentéisme ne serait ni plus ni moins qu’un comportement normal puisque les capacités des

individus qui le pratiquent ne seraient que très peu affectées par la maladie. Or, même si le

présentéisme total est plus fréquent dans le cas de maladies ne générant qu'une faible incapacité,

plus de 35% des maladies les plus incapacitantes font l'objet d'une décision de présence totale

(graphique 4)9. A mesure que le niveau d'incapacité augmente, on observe une substitution entre

présence totale et présence partielle : quand la pénibilité générée par la maladie augmente, la part

des présences totales diminue d’environ 40 points, tandis que la part des présences partielles

augmente de plus de 30 points.

9 Le niveau d'incapacité que génère la maladie a été mesuré par la somme des incapacités associées à chaque tâche, réalisée

dans le cadre de l'emploi, pondérée par l'importance de la tâche dans le travail. Comme les tâches prises en compte sont au

nombre de huit, que leur fréquence dans l’emploi est mesurée sur une échelle allant de 0 à 10 et que le niveau d’incapacité

généré par la maladie est également mesuré sur une échelle en dix positions, la pénibilité du travail générée par la maladie

varie potentiellement de 0 à 800.

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Mesurer le présentéisme et comprendre le choix des salariés suite a la survenance d'une maladie

23

Graphique 4. Répartition selon la décision d‘absence totale, de présence partielle et de présence totale

selon le niveau de pénibilité générée par la maladie

Source : enquête « conditions de travail et qualité de vie au travail », 2013, IGSS-LISER

3.6 LE CHOIX ENTRE ABSENCE TOTALE, PRESENCE TOTALE OU

COMBINAISON ABSENCE-PRESENCE AU SEIN D’UN EPISODE DE

MALADIE : UN ARBITRAGE ENTRE RISQUES SUR LA SANTE ET

RISQUES SUR L'EMPLOI

Au-delà des relations bivariées qui viennent d'être mises en évidence entre la décision des salariés

et les caractéristiques de la maladie, nous avons cherché à comprendre le processus qui est à

l'œuvre quand un individu, subissant un choc de santé qui détériore momentanément son état de

santé, doit décider : soit de s'absenter pendant toute la durée de l'épisode de maladie (absence

totale) ; soit de s'absenter pendant une partie de la maladie (présence partielle) ; soit de ne pas

s'absenter du tout (présence totale).

Pour répondre à cette question, nous avons réalisé des analyses économétriques permettant de

raisonner toutes choses égales par ailleurs. L’objectif de ces analyses était de valider une approche

théorique selon laquelle le processus de décision qui conduit un individu à choisir entre les trois

options possibles est basé sur un arbitrage entre, d’une part un risque de détérioration de la santé

future si le salarié choisit la présence et, d’autre part, un risque de baisse du revenu futur s’il choisit

l’absence puisque cette dernière réduit les chances de promotion ou augmente le risque de

licenciement. Les résultats obtenus valident ce processus de décision (les résultats sont présentés

en annexe) :

- Le fait d’avoir un risque élevé de perdre son travail par rapport à un risque faible augmente

fortement la probabilité de choisir une présence totale par rapport à une absence totale alors

que cela n’affecte pas la probabilité de choisir une présence partielle par rapport à une absence

totale. Cet effet peut s’interpréter ainsi : pour un salarié qui fait face à un risque élevé de perdre

son travail et qui soupçonne son entreprise d’utiliser les absences comme un critère de sélection

pour licencier, il peut être préférable de ne pas s’absenter du tout et de choisir une présence

totale, dans la mesure où le moindre jour d’absence peut envoyer un signal négatif à

l’employeur ; si tel est le cas, le salarié considérera que la présence partielle est un choix tout

aussi pénalisant que l’absence totale, puisqu’elles sont toutes deux synonymes d’absence.

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

]20-50] ]50-100] ]100-150] ]150-200] ]200-250] ]250-300] ]300-350] ]350-400] ]400-450] ]500-760]

Absence totale Combinaison absence-présence Présence totale

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Mesurer le présentéisme et comprendre le choix des salariés suite a la survenance d'une maladie

24

- Plus l’état de santé du salarié est dégradé, plus les chances de faire du présentéisme, partiel et

total, diminuent par rapport au fait de choisir une absence totale ; autrement dit, quand l’état de

santé se détériore, les individus passent de la présence totale à la présence partielle, puis de la

présence partielle à l’absence totale.

C’est cet arbitrage qui permet de comprendre pourquoi la présence partielle est la solution la plus

souvent adoptée par les salariés en cas de maladie longue. En effet, quand la durée de l’épisode de

maladie augmente, l’individu renonce à la fois à une absence totale, compte tenu des risques que

ce choix lui fait prendre pour son revenu futur, mais également à une présence totale, compte tenu

cette fois des conséquences trop grandes sur la santé future de l’individu.

Le modèle que nous avons réalisé fournit de nombreuses prédictions sur l’effet des différentes

caractéristiques des salariés, qu’il s’agisse de leurs caractéristiques personnelles ou de celles de

leur emploi. Deux éléments nous semblent intéressants à signaler ici, parce qu’ils permettent de

mieux comprendre l’arbitrage entre risques pour l’emploi et risques pour la santé.

- Pour un état de santé global identique, le fait de devoir faire face, au cours d’une période

donnée, à un nombre élevé de problèmes de santé ayant un caractère chronique, augmente les

chances de faire du présentéisme, partiel ou total. En effet, les individus ne peuvent sans doute

pas s’absenter à chaque manifestation de leur maladie chronique, risquant le cas échéant de

mettre en danger leur revenu futur.

- Plus le salarié a été absent dans les mois qui précèdent l’épisode de maladie, plus sa probabilité

de faire du présentéisme augmente. Plus précisément, chaque jour supplémentaire d’absence

antérieur augmente sensiblement la probabilité de choisir une présence totale par rapport à la

probabilité de choisir une absence totale. Ainsi, cette variable, qui possède un pouvoir explicatif

très fort et qui reflète le poids des décisions passées sur le choix de l’individu, agit faiblement sur

les chances de choisir une présence partielle et fortement sur celles de choisir une présence

totale. Ce résultat s’explique selon nous par la même hypothèse que celle évoquée

précédemment : un individu s’étant déjà beaucoup absenté devra, pour ne pas se mettre en

danger par rapport à son emploi, ne plus s’absenter du tout, s’il craint que son comportement

d’absence puisse le pénaliser en termes de promotion ou d’évolution salariale.

Page 25: CAHIER STATISTIQUE - gouvernement · Numéro 4 - Décembre 2016 Mireille Zanardelli Décision d’absence ou de présence au travail suite à la survenance d'une maladie Analyse du

CONCLUSION : Quels enseignements et quelles perspectives en termes de politiques publiques ?

25

4 CONCLUSION : QUELS ENSEIGNEMENTS ET QUELLES

PERSPECTIVES EN TERMES DE POLITIQUES PUBLIQUES ?

Nécessité de prendre en compte les conséquences du présentéisme dans les politiques de

lutte contre les absences au travail

Les analyses que nous avons proposées mettent en évidence l'importance du phénomène de

présentéisme. Il constitue un comportement, d'une part, fréquent et, d'autre part, qui touche

toutes les maladies. L'enquête que nous avons menée met également en évidence que le

présentéisme concerne toutes les catégories de salariés. En effet, ce comportement est tout autant

observé chez des salariés pour qui le présentéisme est une réponse à leur engagement et aux

responsabilités qu'ils occupent, que chez des salariés moins qualifiés qui s'abstiennent, malgré un

état de santé dégradé, de s'absenter de crainte d'être pénalisés, notamment dans le contexte de la

crise économique qui a renforcé le chômage et le stress au travail.

Or les conséquences du présentéisme sont en général reconnues comme étant négatives, à la fois

pour la productivité de l'entreprise, pour la santé des individus et aussi pour les dépenses

publiques de santé. En termes de productivité des entreprises, le présentéisme, peut dans certains

cas, être souhaité à court terme par les entreprises, notamment si le salarié décide de travailler

pendant tout l'épisode de maladie. En effet, dans ce cas, l'entreprise ne doit pas gérer le

remplacement du salarié absent, si son remplacement est nécessaire. Dans d'autres cas, en

revanche, le présentéisme n'est pas souhaité par l'entreprise à court terme, puisque l'entreprise

doit gérer la baisse de productivité du salarié malade, ce qui peut être un problème réel dans

certaines professions, pouvant d'ailleurs conduire l'entreprise à préférer une absence du salarié

(c'est le cas par exemple des emplois qui s'exercent sur une chaîne de production, qui nécessitent

une main-d'œuvre peu qualifiée et qui en conséquence peuvent être pourvus facilement par un

autre salarié, puisqu'ils ne nécessitent pas de compétences spécifiques). En outre, à court terme, le

présentéisme peut également ne pas être souhaité par l'entreprise s'il concerne des maladies

contagieuses pouvant se diffuser aux autres salariés.

Si à court terme et du point de vue de la productivité des entreprises, le bilan du présentéisme en

termes d'avantages et d'inconvénients peut sembler mitiger, ce n'est plus le cas dès que l'on

envisage les conséquences à moyen ou long terme. Plusieurs études médicales mettent en

évidence le lien entre présentéisme d'aujourd'hui et absences de demain. Un salarié ne prenant

pas le temps de la convalescence s'expose à des risques de rechutes plus importants, qui cette fois

ont une probabilité plus forte de contraindre l'individu à s'absenter, et qui plus est, pendant une

durée plus longue. Ainsi, en termes de santé des individus, de dépenses de santé ainsi qu'en

termes de productivité des entreprises, le présentéisme, s'il devient dangereux pour la santé, est un

comportement qu'il faut combattre tout autant que les absences abusives.

Or les mesures qui incitent à un présentéisme délétère sont les mêmes que celles qui tentent de

réduire les absences abusives. Ces mesures correspondent à des politiques ayant pour objectif

d'augmenter le coût de l'absence (délai de carence, sanction financière en cas d'absences, prime à

l'assiduité, etc.). Toutes ces mesures contraignent les salariés réellement malades à ne pas

s'absenter ou à s'absenter moins longtemps que le nécessiterait leur état de santé, soit parce qu'ils

ne peuvent supporter la baisse de revenus qu'ils subiraient, soit parce qu'ils craignent que leurs

absences puissent mettre en péril leurs chances de promotion ou de maintien dans l'emploi.

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CONCLUSION : Quels enseignements et quelles perspectives en termes de politiques publiques ?

26

Ajoutons que ceux qui redoutent le plus les conséquences financières de leurs absences sont

souvent ceux qui ont les revenus les plus faibles, donc les conditions de travail les plus

défavorables, et ainsi les risques de survenance de maladie les plus forts. En conséquence, pour ces

groupes de salariés, il existe un risque de spirale du présentéisme qui peut conduire in fine à des

risques forts de retrait précoce du marché du travail (invalidité ou reclassement).

Compte tenu de ce qui vient d'être dit, il est fondamental selon nous de ne plus réfléchir aux

mesures destinées à lutter contre les absences au travail sans prendre en compte leurs

conséquences sur les risques d'augmentation du comportement de présentéisme. De façon très

concrète, cela signifie qu'il faut, pour lutter contre les absences abusives, activer d'autres leviers

que ceux basés sur une augmentation du coût de l'absence, qui, comme nous venons de le voir,

atteignent également les salariés réellement malades, et d'une façon qui pourrait être très

préoccupante puisque c'est leur santé future et leur capacité à se maintenir sur le marché du travail

qui sont en danger.

En dehors des politiques basées sur une augmentation du coût de l'absence, les moyens

traditionnellement mis en avant pour dissuader les absences abusives sont les suivants :

- La possibilité de réaliser des contrôles médicaux à l'initiative de l'employeur. Ces derniers ne

peuvent être efficaces qu'à la condition que l'entreprise possède des moyens rapides, efficaces

et justes pour sanctionner le salarié absent abusivement.

- La mise en œuvre de procédures automatisées au sein des caisses de maladie destinées à

repérer des comportements abusifs. Cette démarche, qui est à l'étude au Luxembourg,

nécessite toujours une très grande prudence de manière à tenir compte du risque d'amalgame

entre un absentéiste abusif et un salarié souvent absent parce qu'il est atteint par exemple

d'une maladie chronique.

- Une partie de la littérature sur la lutte contre les absences abusives signale que c'est au niveau

de l'entreprise qu'il faut agir, notamment parce que la proximité de cette dernière avec ses

salariés permet une meilleure information sur leur état de santé et donc limite les risques d'une

mauvaise interprétation du comportement d'absence.

- En outre, certaines réflexions peuvent être menées sur le rôle des médecins. Elles sont toutefois

très difficiles à faire aboutir puisque mesurer le comportement éventuellement complaisant de

certains médecins est très périlleux : il faut toujours tenir compte du type de populations qui

constitue la patientèle d'un médecin (si ce dernier est installé dans un quartier populaire,

constitué majoritairement d'ouvriers, il n'est pas étonnant qu'il soit amené à délivrer

proportionnellement plus d'arrêt-maladie que dans un quartier davantage habité par des

employés).

Réfléchir à la durée d'absence au sein de l'épisode de maladie de manière à optimiser à la

fois la productivité des entreprises et la santé des salariés

Les mesures de politiques publiques destinées à réduire les absences au travail visent toujours une

réduction du phénomène sans qu'il ne soit jamais précisé si l'objectif est de réduire le nombre

d'absences ou leur durée. Or ces deux objectifs ne concernent sans doute pas les mêmes causes

d'absence. Réduire le nombre d'absences est un objectif plus adapté à la lutte contre les

comportements abusifs, tandis que réduire la durée des absences est plus adapté dès lors que l'on

s'interroge sur les absences consécutives à la survenance d'une maladie.

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CONCLUSION : Quels enseignements et quelles perspectives en termes de politiques publiques ?

27

En outre, nos résultats ont mis en évidence qu'en cas de maladies longues, les salariés avaient

souvent recours à des absences partielles de façon à la fois à préserver leur capital-santé et à

limiter les risques sur leur revenu futur.

Dans ce contexte, il nous semble intéressant d'orienter notre réflexion vers des mesures qui aillent

dans le sens d'une meilleure adéquation entre durée de l'absence, santé de l'individu et

productivité de l'entreprise, d'autant plus que le poids financier des absences longues est très élevé

dans le coût total des absences au travail.

De telles mesures, déjà adoptées par plusieurs pays tels que la Suède, le Danemark, la GB et la

Norvège, portent sur la question de la réintégration des salariés absents en cas de maladie de

longue durée et préconisent l'application des "graded absences" (absences graduées ou partielles).

Elles constituent une mesure d'activation destinée à favoriser un retour précoce au travail

permettant à la fois de réduire les coûts des absences mais également de garantir un

rétablissement plus rapide des salariés malades et une meilleure santé à moyen terme.

En Norvège, qui est le pays qui est allé le plus loin en la matière, le système des absences graduées

prend la forme d'une loi votée en 2004, qui prévoit que l'absence graduée est la solution par défaut

pour les absences de plus de 8 semaines. Ainsi, le médecin, qui est au centre du dispositif, et qui

souhaite pour son patient une absence totale doit le justifier (les justifications les plus fréquentes

sont que les aménagements nécessaires pour le poste de travail sont trop difficiles à mettre en

place ou que l'absence va bientôt se terminer). L'absence totale doit donc selon la loi être utilisée

dans des cas exceptionnels10. Le système norvégien prévoit normalement une réduction du temps

de travail mais il peut également s'agir d'une réduction de la tâche sur le même temps de travail.

Il faut noter que la loi de 2004 est le résultat d'un consensus selon lequel les partenaires sociaux et

le gouvernement étaient d'accord sur le fait que les mesures à mettre en œuvre pour réduire le

taux d'absence en Norvège ne devaient être supportées ni intégralement par les salariés ni

intégralement par les entreprises. Dans ce contexte, les absences graduées sont apparues comme

une solution prometteuse, compte tenu des effets attendus d'une telle mesure :

- inciter les absents abusifs à reprendre le travail et ainsi réduire l'aléa moral du côté du salarié

(dû au fait que le taux de compensation en Norvège est de 100%) ;

- contraindre les employeurs à faire des efforts pour faciliter l'adaptation du poste et ainsi réduire

l'aléa moral du côté de l'employeur (dû au fait que ce dernier ne paie que les 16 premiers jours

d'absence, ce qui ne les incite pas à réduire les absences de longue durée) ;

- accélérer le rétablissement des individus et améliorer la santé future des individus en ne les

laissant pas éloignés trop longtemps du travail, l’hypothèse sous-jacente étant que, dans le cas

de maladies longues, le retour précoce au travail, s’il est en déquation avec l’état de santé de

l’individu, contribue à son rétablissement en l‘accélérant.

Une évaluation scientifique a mis en évidence des résultats positifs pour la Norvège11 : une

réduction globale de 20% du taux d'absence, une augmentation de 25% à 40% des absences de 8

semaines et plus faisant l'objet d'une absence graduée, un meilleur état de santé à moyen terme

des salariés ayant bénéficié d'une absence graduée par rapport à ceux qui n'en ont pas bénéficié12.

10 Notons que la loi ne prévoit pas de sanction à l'encontre des médecins qui ne respectent pas ce principe. 11 Markussen, S., Mykletun, A., & Røed, K. (2012). The case for presenteeism - Evidence from Norway's sickness insurance

program. Journal of Public Economics, 96(11), 959-972. 12 Cette conclusion est fondée sur le fait que le nombre de jours à charge de la sécurité sociale pendant les 24 mois qui

suivent la fin de l'épisode de maladie baisse de 90 jours en moyenne / le pourcentage de personnes actives au cours de la

seconde année suivant le début de l'absence est supérieur de 16% parmi ceux qui ont eu une absence graduée par rapport à

ceux qui n'en ont pas eue. Certaines études montrent que les effets sont positifs pour toutes les maladies physiques. En

revanche, aucun effet n'est observé pour les absences liées à des troubles mentaux (mental disorders). Cette absence d'effet

s'explique par le fait que les collaborateurs sont moins enclins à travailler avec une personne atteinte de troubles mentaux

et que les personnes concernées sont également moins enclines à vouloir s'exposer à leurs collaborateurs dans ce type de

pathologies.

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CONCLUSION : Quels enseignements et quelles perspectives en termes de politiques publiques ?

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Ainsi, les absences graduées sont efficaces en termes de santé publique mais également du point

de vue des économies à réaliser. Si on appliquait ce système au Luxembourg en simulant les

mêmes performances que celles observées en Norvège, une économie de 31 millions d’euros par

an pourrait être réalisée13.

Au Luxembourg, il existe deux systèmes qui sous-tendent la même philosophie que celle des

absences graduées. Le premier est celui du mi-temps thérapeutique, qui permet à un salarié en

longue maladie de travailler à mi-temps en attendant son rétablissement. A l’heure actuelle, c’est le

salarié qui demande à bénéficier d’un mi-temps thérapeutique. En outre, le recours à ce dispositif

reste très limité. Pour que ce système puisse servir de support à la mise en place d'un système

d'absences graduées tel qu'observé en Norvège, il faudrait, d’une part, diffuser cette pratique et,

d’autre part, mettre en place une coordination rapide et efficace entre le salarié malade, le médecin

et l'entreprise, ce qui nécessite sans doute d’adapter certaines procédures appliquées au

Luxembourg en cas de maladies longues. Le second système qui s’approche de la notion

d’absences graduées est celui du reclassement professionnel, qui depuis la réforme entrée en

vigueur en janvier 2016, favorise davantage le reclassement interne, notamment par l’adaptation

des horaires de travail. En outre, le nouveau système prévoit de procéder à des évaluations

périodiques du salarié reclassé, la situation de ce dernier pouvant dorénavant être modifiée en

fonction de l’évolution de son état de santé par le médecin du travail. Cependant, ce changement

législatif, par définition, ne concerne que les salariés reclassés, alors que le système des absences

graduées devrait pouvoir s’appliquer à toutes les maladies longues, sans se limiter à celle qui

conduisent à une procédure de reclassement. Dans ce contexte, il est nécessaire d’analyser

l’ensemble des procédures en vigueur dans la chaîne de décisions qui se met en place en cas

d’absences de longue durée. Une telle analyse est en cours à l’IGSS.

Toutes les conclusions et perspectives qui sont présentées dans ce document ont en commun de

s'inscrire dans une philosophie nouvelle de la question des absences au travail. Elles tentent toutes

de promouvoir une approche intégrée, prenant en compte l'ensemble des tenants et des

aboutissants liés au phénomène, ces derniers ne se limitant pas à la seule question de la

productivité des entreprises, fédérant l'ensemble des acteurs autour de pratiques vertueuses qui

partagent les responsabilités et incitent chaque acteur à parcourir une partie du chemin, et enfin,

mettant en garde sur les risques de renforcer les absences si on contraint les salariés à renoncer à

des absences qui auraient pourtant été nécessaires à leur rétablissement.

Dans la mesure où le taux d'absence au Luxembourg n'est pas très élevé (Mazoyer, 2016),

comparativement à d'autres pays, il serait envisageable de prendre le temps de la discussion et de

la négociation pour adopter des mesures en ligne avec cette philosophie nouvelle.

13 Ce chiffre a été obtenu en simulant l'impact financier d'une mise en œuvre du concept d'absences graduées au

Luxembourg. Pour cela, nous avons appliqué les résultats observés en Norvège : dans 40% des absences de plus de 8

semaines, une absence graduée a été appliquée ; pour ces absences, la durée moyenne d'absence au travail a été réduite de

moitié par rapport aux absences de plus de 8 semaines n'ayant pas fait l'objet d'une absence graduée. Au Luxembourg, on

observe, en 2014, 14 709 épisodes de maladie de plus de 8 semaines, ayant eu une durée moyenne de 128 jours et ayant

donné lieu au versement de 204 millions d’euros aux salariés concernés (Mutualité et CNS confondues). Au Luxembourg, on

observe en outre en 2014 qu'environ 10% des absences de longue durée ont donné lieu à un mi-temps thérapeutique, ce qui

correspond à 30 points de pourcentages de moins par rapport à la Norvège. Ainsi, nous avons calculé le gain qui serait

effectué si on considère que dans 30% des absences de plus de 8 semaines, la durée de l'absence était réduite de moitié, ce

qui revient au calcul suivant : 204 x (50% x 30%) = 31. L'économie serait donc de 31 millions par rapport au 204 millions

dépensés actuellement pour les absences de plus de 8 semaines.

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Annexe

29

ANNEXE

Résultats du modèle multinomial

Variables introduites dans le modèle multinomial1

Effet attendu sur le temps de

présence tp des variables

introduites dans le modèle

multinomial

Rapport de chances [p/(1-p)]

entre la probabilité de choisir une présence

partielle et la probabilité de choisir une absence totale

Rapport de chances [p/(1-p)]

entre la probabilité de choisir une présence

totale et la probabilité de choisir une absence totale

durée_épisode_maladie ↘ 1,22*** ↗ 1,00 →

perte_productivité_maladie ↘ 0,84 → 0,17***

pénibilité_maladie ↘ 1,00 → 0,43***

fréquence_problèmes_santé 1,07*** ↗ 1,12***↗

nombre_maladies ↘ 0,96*** 0,78***

risque_perte_emploi ↗ 0,97 → 1,28***↗

réinsertion_très_difficile_si perte emploi ↗ 1,17 → 1,18 →

réinsertion_assez_difficile_si perte emploi ↗ 0,97 → 1,11 →

nb_jours_absence_antérieurs ↗ 1,07*** ↗ 1,41*** ↗

Source : enquête « conditions de travail et qualité de vie au travail », 2013, IGSS-LISER

*** p < 1% ; ** p < 5% ; * p < 10%

Note : ne sont reportés dans ce tableau que les variables dont les effets ont été discutés dans ce document.

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