cahier 1 – outils de protection...
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Violaine Colonna d’Istria, Paola Consonni, Adrien Larcade, Pierre Mercier, Halima Rhaoui, Amandine Vidal.
Atelier d’Urbanisme Cap Haïtien - Université Paris-Sorbonne Paris IV - 2010Sous la direction de François Dumail
Cahier 1 – Outils de protection patrimoniale
Expériences françaises et internationales
Janvier 2010
2Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Sommaire
Introduction : la notion de patrimoine Une notion relative aux sens et symboles qui lui sont attachés
Le patrimoine urbain : préserver sans freiner le développement
Le centre ancien du Cap-Haïtien : un héritage composite
Synthèse - La difficile définition de la notion de patrimoine
La protection du patrimoine : outils français
Le patrimoine monumental :
fondement de l’action des Architectes des Bâtiments de France
Les secteurs sauvegardés :
un outil de protection du patrimoine à l’initiative étatique
exemple du quartier du Marais (Paris)
ZPPAUP : outil de protection du patrimoine à l’initiative communale
ZPPAUP : l’exemple des pentes de la Croix-Rousse (Lyon)
Synthèse - Les outils règlementaires
Pistes de réflexion pour Cap Haïtien - Une applicabilité limitée
Le patrimoine et la planification spatiale Le PLU : une acception libre du patrimoine à protéger
Le PADD, un projet de développement urbain :
exemple de Baie-Mahault, Guadeloupe
Les OPAH : l’approche contractuelle de la valorisation du patrimoine
L’OPAH, un dispostif de renaissance du patrimoine urbain :
exemple de Fort-de-France, Martinique
La Protection Ville de Paris :
retour sur la protection du patrimoine historique parisien
p. 4p. 4
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p. 12
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La Protection Ville de Paris :
une expérience originale et inédite
un exemple représentatif, le 13ème arrondissement
Synthèse - Les outils de planification
Pistes de réflexion pour Cap Haïtien - Des mécanismes à retenir
Le patrimoine universel : l’UNESCO Modalités du classement au patrimoine mondial
Le classement dans les Caraïbes
Relations avec la République Haïtienne
Synthèse - Un objectif intéressant mais ambitieux
Exemples de protections patrimoniales urbainesLa Havane :
la vieille ville et son système de fortifications (Cuba)
Belém, capitale culturelle de l’Etat du Para (Brésil)
Phnom Penh :
une démarche locale de protection et valorisation (Cambodge)
Cidade Velha,
lieu de mémoire du commerce triangulaire (Cap Vert)
Pistes de réflexion pour Cap Haïtien
Mise en valeur du patrimoine par le développement local
Mise en valeur du patrimoine par l’évènementiel
Synthèse - La diversité des méthodes, entre inspiration et
renouvellement
Bibliographie
p. 26
p. 28
p. 30
p. 31
p. 34p. 35
p. 38
p. 39
p. 41
p. 43
p. 44
p. 47
p. 49
p. 51
p. 55
p. 57
p. 59
p. 60
p. 61
3Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
4Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Introduction : la notion de patrimoineUne notion relative au sens et symboles qui lui sont attachés
I. Construction de la notion de patrimoine
Le patrimoine désigne en premier lieu ce qui
est hérité du père. Il constitue en ce sens un bien
transmis de générations en générations, et qui est
alimenté par la continuité de la lignée.
A partir du moment où la notion de patrimoine
s’universalise, le patrimoine devient un bien com-
mun, une ressource étatique dont la définition peut
être floue.
En effet, déterminer la nature patrimoniale
d’un bien suppose de considérer que ce bien parti-
cipe à la création d’une identité commune, renforce
l’appartenance à un groupe, permet une reconnais-
sance au sein même de ce groupe. La question des
critères de patrimonialisation d’un bien est donc
fondamentale.
II. Quels critères pour le patrimoine ?
Le caractère patrimonial d’un bien peut repo-
ser sur différents critères.
Le premier critère est historique. L’état de
conservation du bien est très important. Le patri-
moine doit permettre d’accéder à un état antérieur
malgré les modifications subies au fil des siècles.
Le second critère est esthétique. Un bien serait
donc conservé en vertu de sa beauté, de sa capacité
à manifester un génie humain technique ou artisti-
que.
Enfin, le dernier critère se manifeste par l’ap-
préciation collective, par un attachement social à un
bien spécifique. Ainsi, n’importe quel groupement
humain peut proposer un bien à une inscription au
patrimoine. La valeur du bien est identitaire.
Dans tous les cas, le patrimoine a pour ambi-
tion d’éclairer le présent par le passé, mais aussi
d’ouvrir l’avenir, de recréer le lien entre passé et
avenir et d’assumer une inscription identitaire, col-
lective ou individuelle, dans une continuité. A ce ti-
tre, il convient de rappeler la signification originelle
du terme «monument», qui désigne tout ce qui rap-
pelle un souvenir.
III. Le patrimoine et ses modifications
La préservation du patrimoine ne peut négliger
le facteur temps, qui nuit à la pérennisation d’un
bien. Le patrimoine bâti est en effet galvaudé par
nature, qu’il soit réinvesti ou réutilisé ou qu’il soit
laissé à l’abandon.
Il a donc fallu déterminer à quel point les modi-
fications reçues par un bien pouvaient être considé-
rées comme respectueuses de ce bien. C’est l’objet
de la Charte de Venise. Au delà, ces considérations
constituent également un manuel de mise en valeur
et de préservation du bien dans la mesure où ces
définitions permettent également de comprendre à
partir de quel type de rénovation le bien est modifié
trop considérablement pour être estimé intact.
Les méthodes et limites varient à ce sujet en
fonction des pays. Cependant, la Charte de Venise
fixe un cadre commun, quoique suffisamment li-
bre.
Ainsi, ce texte définit la restauration comme
une technique de préservation qui doit rester ex-
ceptionnelle. Lorsqu’elle a lieu, celle-ci doit être jus-
tifiée par le recours à une documentation solide sur
le bâtiment concerné.
Par ailleurs, la rénovation ou la restauration
ne doit pas nécessairement revenir à un état anté-
rieur du bien. En effet, si un bien a été modifié dans
le temps et présente la superposition de styles et
d’époques différentes, toutes ces époques doivent
être préservées. La question de l’authenticité du
bien prédomine sur celle de son unité architectu-
rale.
Un autre élément doit être noté : les altéra-
tions de volume et de couleur d’un ensemble pro-
tégé sont proscrites.
5Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
I. Définition
Un peuple a toujours besoin de s’en remettre à
son passé pour se construire une identité qui puisse
évoluer avec le temps.
Le patrimoine peut être :
matériel (produits des arts, artisanat, patri-•
moine bâti, formes urbaines)
immatériel (traditions orales et mode d’ex-•
pression, arts éphémères, pratiques socia-
les, rituelles et religieuses, savoir-faire et
connaissances traditionnelles)
II. Le patrimoine urbain
A l’échelle de la ville, le patrimoine désigne :
les monuments prestigieux•
les espaces publics•
les formes et tracés urbains•
les vestiges archéologiques locaux•
l’architecture vernaculaire•
les activités artisanales et industrielles•
Mais aussi des usages et des pratiques sociales
les parcours urbains (autochtones et touris-•
tiques)
les lieux auxquels est attachée une significa-•
tion particulière (rituelle, sociale, religieuse)
les témoignages de l’histoire (artistiques et •
monumentaux ou plus discrets, témoignages
de la mémoire locale)
L’enjeu du patrimoine urbain se situe à l’arti-
culation du culturel (lié aux politiques de l’Etat), de
l’économique (foncier, pratiques liées au sol) et du
social (besoins des habitants).
III. Ce qui menace les centres anciens
La croissance urbaine, la déterioration des bâti-
ments conséquente, ainsi que la construction spon-
tanée et l’appauvrissement de la population sont les
premiers risques touchant au patrimoine urbain.
En ce qui concerne Haiti, il faut considérer les
risques naturels, qui constituent une menace cou-
rante.
IV. Objectifs de la mise en valeur du patrimoine
retisser l’histoire collective (institutions, in-•
dividus et groupes, histoire locale et histoire
nationale)
mettre en réseau le patrimoine colonial de •
Cap Haitien, le patrimoine culturel, paysa-
ger...
appuyer la démarche sur les infrastructures •
existantes et les atouts du territoire.
articuler démarche sociale, patrimoniale et •
environnementale et développement éco-
nomique
Si la mise en valeur du patrimoine peut avoir un
objectif économique, la portée de cette valorisation
est tout autant symbolique : historique, culturel,
scientifique, artistique, identitaire ou encore envi-
ronnemental, le patrimoine est une notion polysé-
mique qui ne cesse d’être redéfinie.
Introduction : la notion de patrimoineLe patrimoine urbain : préserver sans freiner le développement
6Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Introduction : la notion de patrimoineLe centre ancien du Cap Haïtien : un héritage composite
I. Le plan de la ville
Si les bâtiments ont subi de nombreuses des-
tructions et appropriations successives, le plan en
damier, constamment conservé, est celui imposé à
l’origine par les colons.
On peut se demander les raisons de ce choix.
Y a-t-il un attachement à la morphologie d’origine
de la ville, ou une simple reconnaissance de l’effica-
cité du plan hippodamien ? Une autre manière de
comprendre ce choix peut être plus pragmatique :
reconstruire sur les fondations existantes est plus
simple que de recréer des tracés.
II. Le patrimoine bâti
Le patrimoine bâti, par ailleurs, est enrichi des
multiples échanges internationaux. L’architecture
vernaculaire d’Haïti a en effet progressivement
disparu au profit de constructions aux inspirations
multiples (espagnoles, françaises et américaines).
Par ailleurs, dans un pays où les destructions
sont régulièrement dues à des phénomènes natu-
rels, l’attachement au bâti est relatif. On sait depuis
plusieurs siècles construire en utilisant des structu-
Parole due
Pour édifier un nouveau mondetous les désespoirs sont permiss’ils peuvent enraciner
pour commencersemer une Caraïbelabyrinthe d’étoiles tombéesinitiées à la mort avant d’avoir vécu
y défricher la libertésur les désespoirs antérieursténue tenace comme un parfumfraîche frêle comme la roséeabolie par le prochain matin
et pour moissonoser glaner son héritagefagot d’échardes et de rayonsenflammé d’un espoir nouveau
Daniel Maximin, L’invention des désirades
res légères, qui supportent ces destructions et peu-
vent être réutilisées (ainsi en allait-il des toitures de
palmes). Ce qui n’est plus le cas aujourd’hui avec les
nouveaux matériaux tels que le béton armé.
Si l’attachement au patrimoine bâti semble a
priori discutable en Haïti, et s’il faudra chercher à
comprendre la portée de cet attachement pour la
population haïtienne, le potentiel de mise en valeur
d’un patrimoine qui n’est pas seulement haïtien
mais bien universel ne peut être questionné consi-
dérant la richesse qu’il constitue pour un pays dans
une situation économique et sociale critique.
III. Les pratiques culturelles
Un trait culturel fondamental est l’appropria-
tion des lieux et de l’espace par ses habitants suc-
cessifs. Les phénomènes de constructions sponta-
nées, qui altèrent notamment le centre ancien, sont
des pratiques courantes.
Le patrimoine bâti semble essentiellement être
envisagé d’un point de vue fonctionnel. L’attache-
ment aux racines et à un héritage culturel porte, en
définitive, plus sur le patrimoine immatériel que sur
le patrimoine matériel.
Ce propos est cependant à nuancer. Les pou-
voirs publics travaillent depuis le début du XXe siè-
cle à préserver également patrimoine matériel et
patrimoine immatériel.
7Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Ce qui fait patrimoine
La définition de ce qui fait patrimoine aux yeux des résidents haïtiens est déli-•
cate. Il convient de s’attacher à mesurer les réactions d’appropriation et de rejet
d’un patrimoine composite, à la fois héritage remanié des premiers haïtiens in-
dépendants et legs des colons.
Il faudra également trouver des moyens de conserver le caractère vivant du •
patrimoine du centre ancien.
Au delà de la simple gestion du patrimoine, une tentative de préservation de •
celui-ci revient à rechercher la création d’une identité collective qui s’attacherait
aux biens matériels. Les dynamiques socio-culturelles actuelles en Haïti, plutôt
liées au patrimoine immatériel et à sa recréation, devront être analysées en ce
sens.
Un patrimoine malmené
Les risques naturels doivent être pris en compte, tant pour les modifications •
qu’ils ont déjà fait subir au patrimoine bâti que dans celles qui pourraient advenir.
Risques d’inondation, de tremblements de terre ou encore de tempêtes diverses
doivent être pris en compte dans la préservation du centre ancien.
Les risques et inventions humaines doivent également être analysés rigou-•
reusement. La capacité des haïtiens à apporter des modifications successives au
patrimoine bâti est une spécificité indéniable qui ne facilite pas la mise en place
d’une politique de préservation et qui interdit radicalement toute manière figée
d’envisager ce patrimoine.
Synthèse - La difficile définition de la notion de patrimoine
8Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
9Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
La protection du patrimoine : outils français
Les méthodes de mise en valeur du patrimoine diffèrent se-
lon les pays et dépendent de leur manière de le concevoir. La
France donne un échantillon de pratiques particulièrement re-
marquables en matière de protection, de préservation, de répé-
rage et d’actions en faveur du patrimoine.
La plupart des outils proposés sont cependant des outils
réglementaires. Malgré les difficultés de mise en application de
la réglementation en Haïti, il nous a semblé pertinent de voir à
quel usage était attribué chaque outil, de relever leur spécificité
afin de tirer les leçons d’outils qui ont fait leur preuve et de les
confronter à leur applicabilité supposée à la préservation du pa-
trimoine du centre historique de Cap-Haïtien.
La partie qui suit présente donc un manuel de quelques
outils de préservation du patrimoine tels qu’on les rencontre en
France.
10Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
La protection du patrimoine : outils françaisLe patrimoine monumental : fondement de l’action des Architectes des Bâtiments de France
I. Les monuments historiques
En France, la loi du 13 décembre 1913 fixe le
principe de patrimoine monumental et développe
les notions de classement et d’inscription des mo-
numents historiques.
Cette loi succède à une législation qui s’esquis-
se dès les années 1840 avec la notion des ‘‘biens
nationaux’’, héritage de la Révolution Française (les
biens religieux ou issus de la noblesse).
Les immeubles ou parties d’immeubles, les ob-
jets mobiliers ou les vestiges archéologiques dont la
conservation présente, du point de vue de l’histoire
ou de l’art, un intérêt public sont suceptibles d’être
protégés selon deux procédures distinctes :
Le classement, qui s’applique au patrimoine
monumental le plus intéressant et prestigieux de-
mandant des mesures de protection importantes.
L’inscription sur l’inventaire supplémentaire
des monuments historiques qui concerne les mo-
numents qui ne justifient pas un classement immé-
diat mais présentant un intérêt.
Le classement et l’inscription des monuments
historiques sont des outils opérationnels de protec-
tion d’un patrimoine bâti.
III. Les travaux du patrimoine protégé
Dès lors que la protection est obtenue, clas-
sement ou inscription, toute intervention sur l’im-
meuble ou une partie de l’immeuble ne peut être
réalisée sans l’accord préalable du Ministère de la
Culture.
C’est l’architecte en chef des monuments his-
toriques qui est chargé des travaux de restauration
alors que l’architecte des Bâtiments de France (ABF)
est chargé de la surveillance des monuments histo-
riques.
Parce que la réglementation est très contrai-
gnante, le propriétaire doit faire appel à des spé-
cialistes agrées mais l’Etat finance une partie des
travaux. La participation peut atteindre 50% si l’im-
meuble est classé ou 40% si l’immeuble est inscrit
(dans les faits, rarement plus de 15% atteints).
L’environnement du monument est également
protégé puisqu’a été instauré un périmètre de 500
mètres autour des monuments dans lequel toute
modification doit faire l’objet d’une autorisation
des ABF.
II. La procédure de classement et d’inscription
La demande de protection au titre des monu-
ments historiques peut se faire à l’initiative des pro-
priétaires, affectataires, collectivités, associations
et représentants de l’Etat.
Le service de conservation régionale des monu-
ments historiques ou le service régional de l’archéo-
logie instruit la demande qui est ensuite soumise à
l’avis de la Commission régionale du patrimoine et
des sites. Le préfet de région décide alors de l’ins-
cription ou propose au Ministère de la Culture le
classement.
Dans ce second cas, le dossier est transmis à
la Commission supérieure des monuments histori-
ques pour examen du dossier et propose alors le
classement ou estime l’inscription suffisante. Le Mi-
nistère peut engager une procédure de classement
d’office en cas de refus du propriétaire. De même,
si un immeuble est menacé de disparition ou d’alté-
ration, le Ministère peut prendre une décision d’ins-
tance de classement, dont les effets sont valables
pendant un an et dès réception de la notification.
11Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
La protection du patrimoine : outils françaisLes secteurs sauvegardés : un outil de protection du patrimoine à l’initiative étatique
I. Définition
Les secteurs sauvegardés ont été créés par la
loi Malraux du 4 août 1962 pour la sauvegarde des
centres urbains historiques et plus largement des
ensembles urbains d’intérêt patrimonial.
Selon la loi, la création d’un secteur sauvegardé
est une mesure de protection sur un «secteur pré-
sentant un caractère historique, esthétique ou de
nature à justifier la conservation, la restauration et
la mise en valeur de tout ou partie d’un ensemble
d’immeubles».
Les secteurs sauvegardés tentaient de répon-
dre lors de leur création à la politique de rénovation
urbaine des centre villes anciens où les reconstruc-
tions n’étaient plus en rapport avec la ville tradition-
nelle.
II. Objectifs
Un secteur sauvegardé a pour objectif la
conservation du cadre urbain et de l’architecture
ancienne tout en permettant une évolution harmo-
nieuse en rapport avec les fonctions urbaines de la
ville actuelle.
Par des règles et prescriptions spéciales, cette
démarche permet la prise en compte du patrimoine
dans chaque opération d’urbanisme, dans le but
de ne pas porter atteinte à ses qualités historiques,
morphologiques et architecturales.
III. Elaboration
La mise en œuvre d’un secteur sauvegardé est
de la compétence de l’Etat, en charge des ministres
de la Culture et de l’Equipement. Le conseil munici-
pal est associé en émettant un avis sur la création
et délimitation.
Une commission de secteur sauvegardé ras-
semblant représentants de l’Etat, de la commune,
des chambres de commerces et d’industrie et des
métiers ainsi que des experts est constituée par le
préfet dans le but de suivre l’élaboration du plan de
sauvegarde et mise en valeur (PSMV) qui est le plan
d’urbanisme du secteur sauvegardé.
Au terme de cette étude, le plan est soumis à
enquête publique et les résultats de cette enquête
sont examinés par la commission qui peut formuler
des propositions de modification. Le projet d’élabo-
ration est ensuite soumis au conseil municipal, puis
à la commission nationale des secteurs sauvegardés
et ensuite au Conseil d’Etat.
Enfin, le plan est approuvé par décret du Pre-
mier ministre ce qui clôt la procédure et le met en
œuvre définitivement. Il est applicable dès qu’il est
rendu public.
IV. Application
L’ABF veille à l’application du règlement du
secteur sauvegardé en émettant un avis conforme,
dans un délai d’un mois à réception du dossier, qui
concerne toutes les autorisations d’urbanisme.
En cas de travaux non assujettis à ces autori-
sations, l’ABF délivre des autorisations particulières.
Lorsque l’ABF émet un avis défavorable, l’autorité
compétente doit prendre une décision de refus.
Les PSMV qui remplacent les documents d’ur-
banisme précédents peuvent notamment imposer
ou interdire des démolitions, fixer des normes de
réseaux, de terrain, de stationnement, de densité
de construction.
Le règlement détaillé permet de spécifier cha-
que règle à l’immeuble. Des subventions peuvent
être accordées pour des travaux portant sur la res-
tauration, la réhabilitation d’immeubles existants
ou la mise en valeur des espaces publics ou privés.
12Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
La protection du patrimoine : outils françaisLes secteurs sauvegardés : exemple du quartier du Marais (Paris)
I. Création
En 1964, afin de préserver ce quartier et favori-
ser sa restauration immobilière, l’Etat créait le sec-
teur sauvegardé du Marais à cheval sur les 3e et 4e
arrondissements de Paris et sur une superficie de
126 hectares.
Par conséquent, le secteur est régi par un
PSMV et non par le Plan Local d’Urbanisme (PLU) de
Paris. Cependant, le PSMV est compatible avec les
grandes orientations du PLU. Le PSMV actuel, conçu
dans les années 60-70, privilégie la conservation du
patrimoine sur la mise en valeur du quartier.
II. Révision
Le PSMV du Marais est en cours de révision afin
de prendre en compte les orientations de la politi-
que urbaine, sociale et durable de la ville mention-
nées dans le Projet d’Aménagement et de Dévelop-
pement Durable (PADD) du PLU de Paris.
Cette révision permettra également de pro-
mouvoir une politique patrimoniale plus complète
avec une prise en compte plus développée de l’ar-
chitecture des XIXe et XXe, le PSMV actuel étant
concentré sur la période historique antérieure à
1800.
Ainsi, une réévaluation du secteur tenant
compte de la valeur patrimoniale et de la valeur de
témoignage historique de ces bâtiments plus ré-
cents sera mis en oeuvre dans le nouveau PSMV.
La révision permettra en outre d’affiner les
prescriptions sur les bâtis anciens pour une bonne
conservation et mise en valeur. Enfin, l’espace pu-
blic et les activités liées à l’animation et la vie du
quartier seront mieux intégrés, protégés et valori-
sés par les nouvelles règles.
La procédure de révision durera 3 ans et com-
prendra une phase d’étude réalisée par un atelier
d’architecte urbaniste, une concertation de chacun
des arrondissements tout au long de l’élaboration
et une enquête publique réalisée à partir du nou-
veau projet.
Enfin, le conseil de Paris se prononcera sur le
projet dont l‘approbation sera réalisée par arrêté
préfectoral.
13, rue Saint-Antoine dans le 4e arrondissementSource : Google Image
Périmetre du PSMV - Source : Mairie de Paris
13Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
La protection du patrimoine : outils françaisZPPAUP : un outil de protection du patrimoine à l’initiative communale
I. Définition
Elles sont créées le 7 janvier 1983 par la loi de
décentralisation relative à la répartition des compé-
tences entre l’Etat et les collectivités locales et font
suite à la volonté des élus locaux de gérer leur pa-
trimoine.
Par conséquent, la constitution d’une ZPPAUP
donne un rôle actif aux communes dans la gestion
et la mise en valeur de leur patrimoine. Une ZPPAUP
permet de mener conjointement entre la commune
et l’Etat une démarche de protection et d’évolution
harmonieuse de certains quartiers.
II. Objectif
Elles ont pour objectif d’assurer la protection du
patrimoine paysager et urbain et de mettre en va-
leur des quartiers et sites protégés pour des motifs
d’ordre esthétique ou historique en substituant aux
périmètres des 500 mètres un périmètre adapté.
La procédure de ZPPAUP s’applique à tout type
de lieux (centre ancien, quartier de reconstruction,
espace ruraux) pourvu qu’il soit doté d’une identité
patrimoniale.
La ZPPAUP s’applique aux abords des monu-
ments historiques mais peut englober des protec-
tions souples telles les cônes de visibilité, les axes
de vues ou les ensembles de façades. Elle peut éga-
lement se concevoir en l’absence de monument his-
torique.
III. Elaboration
La décision d’engager l’étude d’une ZPPAUP re-
vient au maire et à son conseil municipal. Le pré-
fet de région prend l’arrêté auquel fait suite l’étude
d’élaboration de la ZPPAUP par un chargé d’étude
au sein d’un groupe de travail composé du maire et
de ses services assistés par l’ABF et le service dépar-
temental de l’architecture et du patrimoine.
Au terme de la procédure, la ZPPAUP est créée
et délimitée après une enquête publique, par un
arrêté du préfet de région avec l’accord de la com-
mune et après avis de la Commission régionale du
patrimoine et des sites.
IV. Application
Le document de ZPPAUP, en tant que servitude
d’utilité publique, est annexé au plan local d’urba-
nisme qui est modifié en conséquence.
Les ZPPAUP sont composées d’un rapport de
présentation (motifs de la création et mesures pré-
vues), d’un document graphique délimitant la zone
et d’un règlement définissanr les interdictions, pres-
criptions et recommandations.
L’ABF a pour mission de vérifier que les deman-
des d’autorisation de travaux soient conformes aux
dispositions de la ZPPAUP.
Les travaux de construction, de démolition, de
déboisement, de transformation ou de modification
de l’aspect des immeubles compris dans le périmè-
tre de la zone de protection sont notamment sou-
mis à autorisation spéciale.
14Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
La protection du patrimoine : outils françaisZPPAUP : l’exemple des pentes de la Croix-Rousse (Lyon)
I. Création et objectifs
La ZPPAUP des pentes de la Croix-Rousse à été
créée le 25 juillet 1994 par arrêté préfectoral à l’is-
sus d’une procédure lancée 3 ans auparavant.
Le périmètre se justifie par l’unité du site,
l’identité du bâti, l’histoire et la densité de sa popu-
lation. Les objectifs de la ZPPAUP sont la protection
et la mise en valeur du quartier.
Les évolutions urbaines du quartier ont conduit
à élaborer de nouvelles dispositions qui enrichissent
les objectifs initiaux dans une vision de complémen-
tarité et de dynamique urbaine.
Ces nouvelles dispositions sont également
confortées par l’inscription du site historique de
Lyon au patrimoine mondial de l’humanité par
l’UNESCO en décembre 1998.
II. Les prescriptions
Les prescriptions établies en neuf articles s’ar-
ticulent autour de cinq thèmes : L’archéologie (qua-
tre zones sensibles), la protection et la mise en
valeur des immeubles existants, la reconstruction
du tissu urbain (les nouvelles constructions), les
prescriptions particulières pour le paysage urbain
(silhouette du quartier, échappées visuelles), les es-
paces extérieurs (cœur d’îlot, puits, fontaine sculp-
ture, végétation).
Par exemple, les prescriptions concernent les
matériaux utilisés, la visibilité d’installations techni-
ques ou les caissons des fermetures métalliques.
Carte des servitudes dans le périmètre de la ZPPAUPSource : Mairie de lyon
Pentes de la Croix-Rousse côté SaôneSource : Google Image
15Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Le classement ou l’inscription sur la liste des monuments historiques
Concerne un immeuble ou une partie d’immeuble avec un intérêt historique, • artistique ou architectural.
Une protection plus ou moins stricte selon que le monument est classé ou • inscrit, elle intervient lorsqu’un propriétaire souhaite effectuer des travaux sur son bien (autorisation de l’ABF pour un monument classé ou simple déclaration
pour un monument inscrit).
Protection dans un périmètre de 500 mètres autour des monuments•
Une règle fermée sur elle-même qui ne s’intègre pas dans les documents d’ur-• banisme
Des subventions pour la réalisation de travaux conformes aux règles définies • par l’administration, même si elles sont restées modestes
Les secteurs sauvegardés et le PSMVElargissement de la notion de patrimoine aux sites urbains, à des quartiers •
entiers
Esprit de la loi : moderniser les quartiers historiques, comprenant souvent des •
poches d’îlots insalubres, tout en les préservant de la rénovation «bull-dozer»
Création de «secteurs sauvegardés» délimités par l’Etat pour contrôler cette • modernisation
Elaboration de règlements d’urbanisme particuliers et financements apportés • par l’Etat
Synthèse - Les outils réglementaires
La ZPPAUP
Outil à l’initiative et sous la responsabilité des communes (contrairement aux •
monuments historiques et secteurs sauvegardés)
Création d’une zone de protection du patrimoine architectural, paysager, •
urbain : toute modification est soumise à autorisation spéciale
Offre également des avantages fiscaux qui peuvent inciter les particuliers à •
investir dans les quartiers anciens dégradés
S’impose au PLU•
16Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Pistes de réflexion pour Cap HaïtienUne applicabilité limitée
I. Des outils de protection du patrimoine «à la française»
Des outils adaptés à une vision française du
patrimoine
La perception française du patrimoine bâti
est installée depuis plusieurs siècles dans les men-
talités. Elle s’est construite progressivement et a
conduit à la constitution d’outils spécifiques.
Une transposition qui semble possible grâce à
la proximité administrative
L’administration haïtienne, en grande partie
inspirée de l’administration française, dispose d’or-
ganismes comparables, dans leur fonction, du point
de vue de la valorisation du patrimoine.
Cette valorisation constitue un enjeu prioritai-
re des politiques publiques. En effet, le patrimoine
culturel et historique du Cap Haïtien constitue l’une
des richesses du pays, et est vu comme un moyen
de développement local.
II. Que retenir de ces outils pour Cap Haïtien ?
Ces outils offrent de manière générale un cadre
méthodologique intéressant. Mais chaque outil pos-
sède ses spécificités, et ce sont les caractéristiques
de la ZPPAUP qui semblent les plus appropriées aux
besoins du Cap Haïtien en matière de protection du
patrimoine de son centre historique.
Des apports méthodologiques
Ces outils apportent une méthodologie et une
grande rigueur pour localiser précisément les lieux
concernés par la sauvegarde et pour les distinguer
sur des documents cartographiques.
Des échelles de protection différentes
Ils présentent diverses manières d’aborder l’es-
pace urbain. En effet, la préservation des bâtiments
ne concerne pas toujours un monument isolé. La
notion de cône de visibilité semble devoir être rete-
nue du point de vue de la cohérence du champs de
vision que celui-ci suppose.
Une démarche venant de la commune mais
avec le soutien de l’Etat
La ZPPAUP, contrairement au classement et à
l’inscription sur la liste des monuments historiques
et aux secteurs sauvegardés, émane des décideurs
politiques locaux. Les décisions sont donc entre les
mains de la commune.
L’association des services nationaux à l’élabo-
ration du document constitue un atout important
pour les communes qui pourront ainsi profiter
d’une connaissance complémentaire, mais éga-
lement d’une expérience et d’un appui logistique
performant.
Un outil de protection et de mise en valeur du
patrimoine assez souple
La ZPPAUP est un outil souple parce qu’elle peut
intégrer les monuments historiques à l’intérieur de
son périmètre en annulant la règle des 500 mètres.
On pourrait alors envisager de protéger certains
éléments comme le marché ou la cathédrale sous la
forme «monument historique» pour lesquels la ré-
glementation serait plus stricte, et le reste du cen-
tre historique en ZPPAUP.
Le recensement et la mise en place d’une pro-
tection dans le cadre d’une ZPPAUP peut également
constituer le premier pas vers la démarche patri-
17Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
moine mondial de l’UNESCO.
Par ailleurs, elle met aussi l’accent sur la mise
en valeur patrimoine, ce qui peut offrir une pers-
pective intéressante pour le centre ancien du Cap
Haïtien afin de le restaurer et de le valoriser dans
une perspective de développement touristique.
III. Les limites à l’applicabilité de ces outils au Cap Haïtien
Des difficultés administratives et financières
Ces dispositifs nécessitent une bonne coordi-
nation entre les différentes institutions et les ac-
teurs, ainsi que des moyens financiers et humains.
En effet, ils exigent une organisation institu-
tionnelle solide pour l’instruction des dossiers, la
surveillance des monuments et la délivrance d’auto-
risations.
La difficulté réside aussi dans l’absence de
moyens financiers et techniques ou dans leur exis-
tence limitée. Les aides internationales semblent
donc devoir être convoquées. Un espoir réside dans
la diaspora haïtienne, qui possède généralement
un bon niveau de vie ainsi qui continue de venir en
aide activement au pays d’origine.
Le rôle de l’ISPAN à renforcer
Le centre historique du Cap Haïtien étant classé
au patrimoine histotique national, l’ISPAN est l’orga-
nisme garant, avec la commune, de sa sauvegarde
et de son développement.
De ce fait, les nouvelles constructions dans le
centre ville sont règlementées, suivies et contrôlées
par le service municipal d’urbanisme et l’ISPAN. En
pratique lors d’un dépôt d’un permis de construire
concernant le centre ville, le service d’urbanisme
transmet à l’ISPAN le dossier pour avis.
Mais en réalité les demandes de permis de
construire ne sont pas toujours déposées et les
constructions sont réalisées dans l’illégalité, bien
que les cas soient moins fréquents dans le centre
historique que dans le reste de la ville.
La question de la propriété
Le pendant de la question du suivi des construc-
tions est celle du recensement de propriétés bâties
qui ne représente actuellement qu’environ 10%
de la totalité du patrimoine de la ville. Le centre-
ville semble toutefois être privilégié par rapport à
d’autres zones de la ville.
Dans ce contexte, comment adapter ces
outils?
18Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
19Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Le patrimoine et la planification spatiale
Si les ZPPAUP et les secteurs préservés sont largement une extension
des modes de protections hérités des monuments historiques dans la
mesure où ce sont des secteurs privilégiés d’un point de vue architectu-
ral, urbain ou paysager ; la protection patrimoniale par les documents
d’urbanisme a connu une forme de généralisation.
Avec le Plan Local d’Urbanisme (PLU) mais aussi avec d’autres dis-
positifs, le législateur a rendu possible une politique patrimoniale à l’ac-
ception très libre, permettant une multitude d’actions différenciées en
fonction des environnements urbains et des ambitions des municipali-
tés. Parallèlement, se sont mises en place des politiques publiques d’in-
terventions de plus en plus centrées sur la ville ordinaire, illustrant que
l’ouverture de la valorisation du milieu urbain à d’autres catégories que
celles de l’exceptionnel ou du monumental.
Dans la perspective de notre travail au Cap-Haïtien, cette approche
est très intéressante puisqu’elle montre comment travailler à échelle gé-
néralisée.
20Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Le patrimoine et la planification spatialeLe PLU : une acception libre du patrimoine à protéger
I. Définition : un document de synthèse
Le PLU est le principal document de planifi-
cation urbaine depuis la loi du 13 décembre 2000
Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU). En tant
que document ultime de l’aménagement commu-
nal, il reprend en principe , et est compatible avec,
l’ensemble des préconisations présentes dans les
documents qui lui sont supérieurs ou annexes à l’ex-
ception des PSVM.
L’articulation de ces différents documents avec
le PLU est complexe. Il n’est pas tenu de respecter
toutes les dispositions des ZPPAUP par exemple. De
plus, l’existence d’un patrimoine architectural in-
ventorié n’a pas de conséquence réglementaire sur
le PLU. Dans la pratique, s’il n’y a pas d’obligation
légale, la compatibilité est souhaitable et souvent
recherchée.
II. Objectif : identifier un patrimoine élargi
Le droit de l’urbanisme ménage au PLU des
compétences larges en matière de protection et de
valorisation du patrimoine en particulier pour «les
entités autonomes non réductibles à leurs compo-
santes architecturales». Le patrimoine doit être
identifié et retranscrit dans le rapport de présenta-
tion, le règlement et le zonage qui lui est joint et,
enfin, dans le Projet d’Aménagement et de Déve-
loppement Durable (PADD).
La législation impose au PLU des enjeux de dé-
veloppement et de valorisation qui peuvent paraître
incompatibles avec la stricte protection résultant de
la plupart des documents.
III. Elaboration
L’élaboration d’un PLU se fait à «l’initiative et
sous la responsbilité de la commune» d’après l’arti-
cle L 123-6 du code de l’urbanisme. Les autorités et
les services de l’Etat sont appelés à intervenir mais
les décisions de prescription et d’approbation leur
échappent.
En revanche, dans un souci de bonne compa-
tibilité des différents documents, il est prévu qu’à
l’initiative du maire ou à la demande du préfet, les
services de l’Etat soient associés à l’élaboration du
projet.
Enfin, l’élaboration suppose une concertation
avec la population ainsi que de nombreuses consul-
tations.
IV. Application
Le PLU dispose d’un éventail très varié de dis-
positifs à même de définir une politique de valori-
sation du patrimoine. Leur grande variété permet à
chaque collectivité de définir une politique propre
à ses ambitions et à son environnement urbain. Il
convient de souligner le caractère contraignant de
ces moyens.
Exemples de dispositifs possibles
-Faire du paysage une priorité du PADD-Identifier des éléments urbains de tous ordres méritant d’être protégés et définir des prescrip-tions à cette fin.-Préciser le tracé et les caractéristiques des voies de circulation à conserver, à modifier ou à créer.-Fixer une superficie minimale des terrains constructibles lorsque cette règle est justifiée pour préserver l’urbanisation traditionnelle ou l’intérêt paysager de la zone considérée.-Déterminer des règles concernant l’aspect ex-térieur des constructions, leurs dimensions et l’aménagement de leurs abords, afin de contri-buer à la qualité architecturale et à l’insertion harmonieuse des constructions dans leur envi-ronnement.-Modifier le périmètre des abords de monuments historiques.
21Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Le patrimoine et la planification spatialeLe PADD, un projet de développement urbain : exemple de Baie-Mahault, Guadeloupe
La ville de Baie-Mahault est, à la Guadeloupe,
le pendant, sur la Basse-Terre, de Pointe-à-Pitre
dont elle n’est séparée que par la rivière Salée et
avec laquelle elle forme une même agglomération.
La ville connaît un territoire en partie semblable à
celui du Cap Haïtien, notamment par sa situation
tropicale et les importantes mangroves présentes
sur la commune.
I. Création et objectifs
En 2007, la ville a entamé une procédure d’éla-
boration de PLU et a choisi de redoubler d’efforts en
matière de concertation. Ainsi, elle a mis en ligne un
site d’échanges et de présentation du projet de PLU
comprenant notamment le PADD.
Celui-ci met l’accent sur l’identité communale
qui doit être renforcée pour répondre à la dilution
de l’urbanisation dans l’agglomération mais aussi
au problème de cohérence spatiale posé par les
rivières, mangroves et différentes zones non urba-
nisables. Selon le site municipal, «l’archipel urbain
Baie-Mahault doit être mieux structuré et fédéré.
Cela ne pourra se faire, notamment, qu’en prenant
en compte l’identité spécifique de la commune et en
favorisant la mise en réseaux des quartiers et des
sections».
L’orientation retenue tend à valoriser «l’extra-
ordinaire patrimoine naturel situé aux portes mê-
mes de la cité» que sont les mangroves et rivières.
Loin d’être perçu comme une contrainte, cet aspect
naturel du territoire est valorisé par le document
comme une source de développement, touristique
ou patrimonial.
II. Les prescriptions
Le PADD propose donc des projets de valorisa-
tion du littoral dans ce qu’il a de plus spécifique à
Baie-Mahault : l’entre-deux-mers. Il se propose de
renforcer les usages existants, considérés comme
des éléments de l’identité communale. Par ailleurs,
une politique de mise en valeur des espaces na-
turels est esquissée en parallèle à la construction
d’infrastructures -permettant des activités et donc
une valorisation économique- liées à ce patrimoine.
Ainsi, il est question de liaisons douces, de travail
sur les espaces agricoles ou les activités compati-
bles au milieu naturel...
Ce document est sans aucun doute un bon
exemple d’une synthèse des enjeux de développe-
ment et de protection qui peuvent se rencontrer
dans une ville antillaise. La carte de la page suivante
illustre la possibilité de définir de grandes orienta-
tions compatibles et formulées de manière généra-
le. Toute la difficulté tient ensuite à ne pas s’en tenir
à une déclaration d’intentions.
On pourra regretter que l’entrée privilégiée à
ce document soit le patrimoine naturel et non ur-
bain mais il montre malgré tout la compatibilité de
ce patrimoine et d’un développement ainsi que les
moyens d’une valorisation généralisée de l’environ-
nement urbain.
22Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
23Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Le patrimoine et la planification spatialeLes OPAH : l’approche contractuelle de la valorisation du patrimoine
I. Définition : un outil d’intervention
Les Opérations Programmées d’Amélioration
de l’Habitat (OPAH) sont un type de procédure créé
en 1977. Il s’agit d’un outil d’intervention publique
dans des secteurs subissant de grandes difficultés
liées à l’habitat privé.
Les OPAH se déclinent en plusieurs catégories
pour traiter des enjeux particuliers : logements in-
salubres, problèmes de santé publique, économies
d’énergie dans les logements, territoires ruraux en
dévitalisation, copropriétés en grande difficulté...
Les OPAH ont été redéfinies par la circulaire du
8 novembre 2002 et concernent «des quartiers ou
zones présentant un bâti dégradé, voire indigne, en
milieu rural, péri-urbain, ou urbain, dans tous types
de bourgs, de villes ou d’agglomérations, et, souvent
confrontés à des phénomènes de vacance de loge-
ments, de dévalorisation de l’immobilier, d’insuffi-
sance, quantitative et qualitative, de logements, et,
enfin, d’insuffisance des équipements publics et ou
de déclin des commerces ».
Il s’agit donc moins de valoriser un patrimoine
que le bâti existant en général. L’opération repose sur
un contrat entre les collectivités et l’Agence Nationa-
le de l’Habitat (ANAH) qui s’engagent à apporter des
financements dans un calendrier pré-défini.
II. Objectif : améliorer les conditions de vie
L’approche de ce partenariat est d’abord socia-
le. L’objectif en est l’amélioration des conditions de
vie de l’ensemble des citoyens en incitant les inves-
tisseurs, propriétaires et co-propriétaires à investir
dans l’amélioration ou la réfection de logements
existants dans un périmètre donné.
Pour cela, l’OPAH s’efforce de «remédier à ces
situations à travers une dynamique de réhabilita-
tion et de production d’une offre de logements et
de services, répondant aux besoins des populations
résidentes, tout en préservant la mixité sociale du
quartier, en cohérence avec les objectifs du Pro-
gramme local de l’habitat (PLH), s’il existe, et du
Plan local d’urbanisme».
III. Application
Partout où une OPAH est mise en place un fi-
nancement majoré est apporté aux propriétaires
(occupants ou bailleurs) qui entreprennent des tra-
vaux d’amélioration de leur logement. Les taux de
subventions accordés varient pour chaque opéra-
tion programmée en fonction des enjeux thémati-
ques et des partenaires co-financeurs.
Phases de l’élaboration
-En premier lieu, une phase de diagnostic recen-se les dysfonctionnements du quartier ou des im-meubles du périmètre choisi : problèmes urbains, fonciers, sociaux, état du bâti, conditions de vie des habitants etc... Il s’agit de définir un périmè-tre tout autant que des objectifs détaillés.-Ensuite, une étude pré-opérationnelle préconise les solutions possibles et définit les objectifs qua-litatifs et quantitatifs.-Enfin, l’OPAH proprement dite, est instaurée pour une durée déterminée, généralement comprise entre trois à cinq ans, pendant laquelle des aides financières sont accordées par l’État (ANAH), le Conseil Régional, le Conseil général, les EPCI (se-lon les cas) et la Ville. Cette mission est confiée à un opérateur externe qui est en charge de la mise en œuvre et du bon déroulement de l’opération.
24Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Le patrimoine et la planification spatialeL’OPAH, un dispostif de renaissance du patrimoine urbain : exemple de Fort-de-France, Martinique
Exemples de bâtiments rénovés
La ville de Fort-de-France en Martinique connaît
elle aussi de fortes similitudes avec Cap haïtien. Son
environnement topographique et climatique est
proche, de même que sa position en bord de baie.
La ville a connu une forte croissance qui a induit une
dégradation de l’habitat urbain et des difficultés so-
ciales importantes.
I. Création et objectifs
En 2000, la ville s’inscrit dans le processus des
Grands Plans de Villes, lançant ainsi une dynamique
de renouvellement urbain mêlant valorisation de
l’habitat et tentative d’action sociale. Prolongeant
cette démarche, une OPAH de renouvellement ur-
bain (OPAH-RU) est lancée en 2006 et arrivera à
échéance en 2011.
L’opération se divise en deux volets, l’un d’amé-
lioration de l’habitat, l’autre de rénovation urbaine.
Il s’agit, sur une période de cinq ans, d’intervenir
massivement sur le bâti ordinaire afin d’en amélio-
rer la qualité, l’état apparent ou le confort. La pro-
cédure est étalée dans le temps et dans l’espace
afin de ne pas avoir d’effet sur les populations rési-
dentes et de ne pas en modifier la sociologie.
Si la ville connaît un patrimoine architectu-
ral important, l’OPAH se concentre, elle, sur des
opérations de petite ampleur sur de l’habitat sans
valeur particulière : campagne de ravalement des
façades du centre-ville, engagement d’un dispositif
d’état d’abandon manifeste (visant à lutter contre
la vacance et la dégradation d’une partie du parc)
et procédures de péril imminent et de chantiers de
démolition.
Un dispositif de déclaration d’intention d’alié-
nation a été créé afin d’identifier les immeubles
susceptibles de bénéficier d’une intervention à la
faveur d’un changement d’occupant.
II. Les travaux financésLes travaux encadrés par l’OPAH sont de deux
types ; l’un, concerne les réhabilitations aux restau-
rations de bâtiments ; l’autre, passe par la préemp-
tion de parcelles en vue de la construction de
commerces, équipements ou logements. Ce type
d’intervention a nécessité le recours à des déclara-
tions d’utilité publique.
Les réalisations (état des lieux en 2009)
Volet Améliration de l’habitat :68 propriétaires qui représentent :- 306 000 € de travaux- 238 000 € de subventions359 logements dont :- 71 en attente de début de travaux- 63 en cours de travaux- 45 en fin de travaux
Volet Rénovation urbaine :- 117 parcelles faisant l’objet de négociations d’une SHON de 40 000 m² pour la production de commerces, services et plus de 400 logements- 11 millions d’euros générant une aide pour fa-ciliter l’opération de rénovation urbaine dont 5 millions pris en charge par l’ANRU- 3 DUP mises en place
25Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Le patrimoine et la planification spatialeLa Protection Ville de Paris : retour sur la protection du patrimoine historique parisien
Paris a toujours entretenu une relation particu-
lière avec son patrimoine, par la concentration de
monuments exceptionnels en son sein mais aussi
par les mutations urbaines importantes qu’a subies
la ville. C’est dans ce contexte de destruction d’un
patrimoine urbain peu reconnu que les PVP ont été
mises en place.
La prise de conscience de la nécessité de pro-
téger le patrimoine face à une modernisation peu
soucieuse de sa conservation remonte à 1897 avec
la création de la Commission du vieux Paris (CVP),
composée de conseillers municipaux, de représen-
tants de l’administration et d’experts issus du mon-
de de l’histoire de l’art et de l’architecture. Sa mis-
sion est de «rechercher les vestiges du vieux Paris,
de constater leur état actuel, de veiller, dans la me-
sure du possible, à leur conservation, de suivre, au
jour le jour, les fouilles qui pourront être entreprises
et les transformations jugées indispensables et d’en
conserver les preuves authentiques» (Fierro, 1996).
La pression urbaine rend difficile l’expression
d’un souci de préservation du patrimoine par la
CVP. La volonté de renouvellement urbain et l’idéo-
logie fonctionnaliste laissent de côté la pensée pa-
trimoniale. La CVP se contente alors de «limiter les
dégâts» et de sauver quelques immeubles ou en-
sembles architecturaux.
Le début des années 1970 voit apparaître un
nouveau regard sur la question patrimoniale. L’ur-
banisme «à visage humain» émerge avec l’Atelier
parisien d’urbanisme qui dénonce la politique de
rénovation à grande échelle. La politique d’aména-
gement de Paris prend un tournant à partir du POS
de 1977 puis avec les POS de quartier au début des
années 1990.
Avant 2001, les possibilités de protéger un bâ-
timent étaient restreintes au classement ou à l’ins-
cription à l’inventaire des monuments historiques
(Etat) et à certaines mesures réglementaires inscri-
tes au POS de quartier (Paris). Ce type de protection
est essentiellement concentré dans les quartiers
centraux de Paris et ne couvre pas les époques ré-
centes (XIXe et XXe siècle).
La destruction, la dénaturation et le façadisme
d’édifices fragiles étaient donc possibles et aucune
mesure ne permettait de les protéger. Les nouveaux
outils de protection élargissent ainsi le champ d’ac-
tion patrimoniale.
Carte des monuments nationaux à ParisSource : Mairie de Paris
26Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
La «Protection Ville de Paris» a été intégrée au
nouveau PLU de 2001. Il s’agit d’une servitude d’ur-
banisme s’appliquant au patrimoine urbain bâti et
paysager.
I. Un système de protection à plusieurs niveaux
Les Bâtiments Protégés (BP) et les Eléments
Particuliers Protégés (EPP)
Les PVP protègent des immeubles, des équipe-
ments, des maisons, villas (BP) mais aussi des devan-
tures, des porches, des escaliers, des halls d’entrée
et des éléments de décors (EPP). Cette première
catégorie couvre la protection du patrimoine histo-
rique et architectural remarquable. Ces protections
ont pour principal effet d’interdire la démolition
et de subordonner la délivrance des autorisations
d’urbanisme à la mise en valeur du patrimoine (an-
nexe VI du règlement du PLU).
Les Traitements Morphologiques Paysagers
(TMP)
Les TMP protègent paysages et atmosphères.
Les mesures concernent et réglementent : «volu-
métrie existante à conserver, filet de hauteur, em-
prise constructible maximale, espace libre à végéta-
liser, espace libre à protéger, espace à libérer». Les
mesures s’appliquant aux TMP sont une adaptation
des mesures applicables au cadre bâti.
Le signalement
Le signalement de quelques 4300 bâtiments in-
citera à prendre en compte l’attachement que leur
portent les habitants du quartier. Cette catégorie a
un rôle préventif.
II. Une protection élargie
Les PVP ont été élaborés dans un souci de com-
plémentarité avec les mesures existantes instituées par
l’Etat. Les PVP apportent une diversité patrimoniale en-
richissant les mesures de protections actuelles.
Diversité des styles et des époques
Les PVP présentent un élargissement temporel
aux XIXe et XXe siècles notamment, peu protégés
par l’Etat puisque la protection au titre des monu-
ments historiques concerne essentiellement des en-
sembles monumentaux des XVIIe et XVIIIe siècles.
Diversité des formes et des fonctions urbaines
Les PVP prennent en compte le patrimoine ur-
bain non monumental et notamment des éléments
du bâti «commun». De plus, le patrimoine industriel
par exemple introduit une diversité fonctionnelle.
Nombre de parcelles à Paris : 74 986 Nombre de protections État : 1 912 Nombre de mesures de PVP : 8 959 - BP et EPP : 4 648 - Signalements : 4 311
Au terme du processus, 12% à 15% du territoire parisien sera protégé contre 2,5% actuellement.Exemple de PVP - Institut de Géographie, Paris V.
Source : Photographie personnelle
Le patrimoine et la planification spatialeLa Protection Ville de Paris : une expérience originale et inédite
27Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Diversité géographique
Les PVP ont permis une protection des arron-
dissement périphériques (du 12e au 20e) jusqu’alors
très peu pris en compte puisque le nombre de par-
celles protégées par l’Etat dans chacun de ces ar-
rondissements est inférieur à 1%.
Diversité des critères d’évaluation
Les biens sont évalués en fonction de caractéris-
tiques architecturales et esthétiques mais aussi plus
largement en tant qu’entité urbaine et paysagère
cohérente rendant une atmosphère intéressante.
De plus, les éléments fragiles (risques d’altération
ou de destruction) sont pris en compte.
III. Une association avec l’ensemble de la population
La sensibilisation croissante de la population
à l’égard de la protection du patrimoine a ouvert
les politiques patrimoniales à une participation ci-
toyenne. La mise en place de nouvelles modalités
de choix permet aux PVP de sortir d’un système
d’expertise institutionnalisé, constitué de corps et
fonctions dédiés au sein de l’administration.
Le dispositif mis en place ici va au-delà de l’obliga-
tion légale de concertation en mobilisant de nouvelles
structures. Il permet à chacun de proposer des adresses
de bâtiments à préserver dans le cadre des conseils de
quartiers notamment (121 mobilisés pour l’occasion).
Déroulement du processus :
- phase de présentation du diagnostic avec une
carte de «potentiel patrimonial» (outil dynamique
et opérationnel de protection du patrimoine) per-
mettant d’identifier les sites possédant potentielle-
ment des éléments patrimoniaux.
- formulation de propositions par les habitants:
organisation de marches collectives afin de noter
les bâtiments qui semblent les plus remarquables,
possibilité de formulations supplémentaires par des
associations locales.
- présentation de la liste en réunion publique :
Cette phase de concertation a amené 8000
propositions venant d’habitants, d’associations,
d’élus complétées par des architectes-urbanistes,
historiens d’art venant la CVP, de la Direction de
l’urbanisme et de l’Atelier parisien d’urbanisme.
Ces propositions ont ensuite été examinées par une
commission ad hoc (spécialistes placés sous la direc-
tion de François Loyer) aboutissant à l’inscription de
plus de 4500 d’entre elles sur la liste des PVP.
Il est intéressant de noter les différences de ju-
gement de valeur entre experts et habitants. Les re-
gistres sont différents et mettent en avant des élé-
ments contradictoires. La commission décisionnelle
finale est composée d’experts issus de l’administra-
tion. Il y a donc une inversion totale de la logique
mais sachant que les 2/3 des propositions viennent
des conseils de quartiers, une diversité plus grande
des différentes formes de patrimoine. Néanmoins,
la catégorie «signalement» a permis la prise en
compte d’un certain nombre de bâtiments sans leur
accorder de valeur juridique.
Les différents registres retenus
- historique : protection au titre de l’histoire de l’art et de l’architecture, c’est-à-dire le bâtiment en tant que révélateur d’une pensée, d’un art (différent du beau)
- pittoresque : souci de préservation de ce qui semble «pittoresque» dans le paysage urbain : bâtiment considéré en tant qu’il incarne une am-biance ou une atmosphère, logique de préven-tion contre un éventuel renouveau urbain
- mémoriel : lieu de mémoire, souci de préser-vation mémorielle : défendre un bâtiment parce qu’il a été habité par un personnage célèbre, théâtre d’un événement historique particulier.
- urbain : protection d’un bâtiment au titre de son insertion dans un ensemble architectural considéré comme important dans la préservation du tissu urbain (Apur).
28Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Le patrimoine et la planification spatialeProtection Ville de Paris : un exemple représentatif, le 13ème arrondissement
Le 13ème arrondissement est assez représen-
tatif des orientations en matière de protections
voulues par la Ville de Paris.
En effet, cet arrondissement «périphérique» a
été urbanisé à partir de la fin du XIXème siècle. La
plupart des bâtiments protégés sont donc récents
(1850-1950).
Néanmoins, on observe une réelle diversité de
formes et de fonctions. Entre un hôtel particulier
de la fin du XIXème siècle très bien conservé et une
ancienne gare ferroviaire à l’abandon, ces PVP tra-
duisent une volonté d’élargissement manifeste de
classement autant temporel que thématique.
Cette variété du patrimoine reconnu traduit
bien l’évolution de la notion de patrimoine de ces
trente dernières années.
Immmeuble de bureaux, année 1970Source : Photographie personnelle
Ancienne gare sur le petite ceintureSource : Photographie personnelle
Décors de façade : cinéma Escurial, 1911Source : Photographie personnelle
Maison de style néo Louis XV, 1901Source : Photographie personnelle
29Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Maison du XVème siècleSource : Photographie personnelle
Immeuble de faubourgSource : Photographie personnelle
Hôtel particulier XIXème siècleSource : Photographie personnelle
Immeuble de logement, 1969Source : Photographie personnelle
On dénombre peu d’éléments particuliers pro-
tégés. L’exemple du cinéma est pourtant le plus si-
gnificatif car la plupart de ces éléments se rappor-
tent à des salles de spectacles.
Les bâtiments les plus récents comptent peu de
classement et cherchent surtout à faire reconnaître
les grand architectes comme Joseph Belmont (pro-
che de Jean Prouvé) pour l’immeuble de logement
de 1969.
L’apport des PVP
Concernant les différents niveaux de protection, elles permettent une prise en compte assez large du patrimoine tout en protégeant plus particuliè-rement les éléments les plus remarquables. De plus, l’idée de prendre en compte différentes notions de patrimoine (historique, pittoresque, mémoriel, urbain) est intéressante notamment en terme de perception par les populations de ce qui est ou non patrimoine. Il paraît essentiel de comprendre ce que les haï-tiens eux-mêmes considèrent comme culturelle-ment important dans leur patrimoine.
Tous ces éléments convergent vers un élargis-
sement voire une généralisation patrimoniale à vi-
sée plus protectrice que révélatrice.
30Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Le Plan Local d’Urbanisme
Document de planification urbaine instauré par la loi du 13 décembre 2000 •
Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU)
Elaboré à l’initiative et sous la responsabilité des communes•
Il est composé de quatre documents : •
- le rapport de présentation, qui établit un diagnostic de la ville ;
- le Projet d’aménagement et de développement durable (PADD), document
politique exprimant le projet de la collectivité locale en matière de développe-
ment économique et social, d’environnement et d’urbanisme pour les 10 années
à venir ;
- les orientations particulières d’aménagement, qui offrent à la fois une vi-
sion de développement susceptible d’évoluer et des règles ;
- le document graphique du règlement, qui traduit sous forme de cartes les
règlements pour chaque zone.
Il donne de larges compétences aux communes en matière de protection et de •
valorisation du patrimoine et impose la définition d’enjeux de développement
Il instaure une concertation obligatoire avec la population•
Les Protections Ville de Paris (PVP) Interprêtation large de la loi SRU qui a permis à la ville de Paris d’intégrer un •
volet patrimonial à son PLU en 2001
Les PVP protègent de la démolition et soumettent à la délivrance d’autorisa-• tion pour toute modification :
- les Bâtiments Protégés (BP) : des immeubles, des équipements, des mai-
sons et villas ;
Synthèse - La protection du patrimoine dans les outils de planification
- et les Eleménts Particuliers Protégés (EPP) : des devantures, des porches,
des escaliers, des halls d’entrée et des éléments de décors
Les PVP créent aussi des «• Traitements Morphologiques Paysagers» pour pro-téger les paysages et atmosphères, avec des règles sur la volumétrie, les espaces à végétaliser, etc...
Le • Signalement de quelques 4300 bâtiments joue un rôle préventif
Les Opérations programmées de l’amélioration de l’habitat (OPAH)
O• util d’intervention public pour des secteurs d’habitat privé dégradés
Objectif moins de valorisation du patrimoine que de réhabilitation du bâti •
existant en général et d’amélioration des conditions de vie de l’ensemble des
citoyens en incitant les investisseurs, propriétaires et co-propriétaires à inves-
tir dans l’amélioration ou la réfection de logements existants dans un périmètre
donné
L’opération repose sur un contrat entre les collectivités et l’Agence Nationale •
de l’Habitat (ANAH) qui s’engagent à apporter des financements dans un calen-
drier pré-défini.
31Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Pistes de réflexion pour Cap HaïtienDes mécanismes à retenir
I. OPAH et PLU : deux outils très différents mais complémentaires
Ces outils, tout en étant juridiquement indépen-
dants, sont les deux volets d’une même conception
généralisée des enjeux du patrimoine urbain.
D’une part, le PLU définit une politique globale
de valorisation, mettant l’accent sur les éléments
identitaires forts sans recourir à une méthodologie
complexe d’évaluation du patrimoine ; il est donc
destiné à la «ville ordinaire». D’autre part, les OPAH
sont un volet d’action sur cette même «ville ordinai-
re» et une source de financement.
II. Une approche et une méthodologie nouvelles
La nécessaire participation des citoyens
La participation citoyenne est un processus qui
se met de plus en plus en place en France. En ce
qui concerne Cap Haïtien, celle-ci semble être prio-
ritaire. Investir la population permettrait en effet de
renforcer auprès de celle-ci la teneur patrimoniale
et identitaire des éléments préservés.
Par ailleurs, la participation citoyenne peut être
envisagée en Haïti sous l’angle de la formation. Ré-
novation, techniques constructives... sont en effet
des éléments qui font actuellement défaut pour la
mise en place d’une politique efficace de mise en
valeur du patrimoine.
L’élargissement de la notion de patrimoine
L’introduction de bâtiments récents dans des
mesures de préservation du patrimoine laisse es-
pérer la possibilité d’assouplir au besoin la notion
même de patrimoine selon des critères psychologi-
ques et sociétaux. Cette voie semble parfaitement
porteuse pour la ville du Cap Haïtien.
La mise en valeur de la notion d’ambiance et
de paysage fait écho à la réalité culturelle du pa-
trimoine bâti capois. Cette composante est en effet
une de celle qui est la plus importante du point de
vue du centre ancien, celle qui demeure malgré les
modifications subies par le tissu bâti et qui est ali-
mentée par la culture immatérielle.
La question des registres est fondamentale
dans la perspective de l’inventaire patimonial du
centre ancien du Cap Haïtien. Là encore, créer des
registres et des catégories propres à la ville semble
une solution adéquate.
La question développement durable
Un premier enjeu consiste dans le relogement
des populations ou dans la maîtrise du logement
conjointe à des actions de rénovation et de préser-
vation du patrimoine. Aux vues du contexte actuel
en Haïti, il semble évident que la préservation du
patrimoine ne doit pas nuire aux populations rési-
dentes.
Par ailleurs, introduire des mécanismes dura-
ble de préservation du patrimoine pourrait avoir un
effet double : préserver le patrimoine tout en par-
venant à instaurer une pérennité de celui-ci autant
que de sa valeur identitaire dans le temps.
II. Applicabilité avec le patrimoine du Cap Haïtien
L’intérêt du PLU : la définition d’une politique
de développement soucieuse du patrimoine
La mise en place d’un document similaire au
PADD pourrait permettre de définir des objectifs
généraux sans tomber dans l’écueil des règlements
irréalistes dans le contexte d’une administration fai-
ble.
L’exemple de Baie-Mahault illustre aussi que la
présence de mangroves peut être source de richesse
32Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
et peut faire l’objet d’une valorisation volontaire à
même de réconcilier les habitants avec certains as-
pects de leur territoire.
Ceci reste néanmoins difficilement applicable au
Cap Haïtien où c’est, avant-tout, la pression démo-
graphique qui détermine les zones urbanisables.
OPAH pour une réhabilitation du bâti dégradé
Enfin, les OPAH sont un outil d’intervention qui
mériterait de connaître une déclinaison au Cap Haï-
tien. Ils permettent de répondre à des problémati-
ques sociales et à la dégradation de l’environnement
urbain tout en tenant compte de la faible capacité
budgétaire des habitants.
Par ailleurs, le déploiement dans le temps de
l’action permet d’étaler les dépenses et donc de pré-
server les finances des collectivités. On pourrait sans
doute imaginer un dispositif similaire qui ferait ap-
pel à des financements de l’aide internationale. Cela
augmenterait la capacité financière de l’institution.
L’action induirait sans doute un changement
dans la durée du parc immobilier avec en particulier
un travail sur l’aspect des constructions et de la salu-
brité. Il faudrait cependant trouver une solution au
problème de la propriété : comment inciter un pro-
priétaire à investir si on ne sait pas à qui s’adresser ?
De même, si l’on prétend agir sur la ville en général,
comment agir sur l’auto-construit des bidonvilles ?
33Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
34Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Le patrimoine universel : L’UNESCO
En dehors des outils locaux ou nationaux, il existe des outils
internationaux en faveur de la protection du patirmoine.
Un concept est alors fondamental : celui de patrimoine
universel ou de patrimoine de l’humanité. Au delà de la simple
représentation symbolique locale, les biens protégés à ce titre
revêtent une signification commune pour les habitants de tous
horizons.
Le cas du Cap Haïtien est intéressant dans cette optique. En
tant qu’ancienne ville coloniale, le centre ancien du Cap présente
en effet un patrimoine vivant dont la préservation a pour enjeu
celle d’une histoire mondiale.
Les organismes internationaux possèdent ainsi, en plus de
collaborations inter-étatiques, des outils propres dont le fonc-
tionnement dépasse un cadre purement réglementaire.
De la même manière que précédemment, l’étude du fonc-
tionnement de ces outils et la constitution d’un référentiel
d’exemples transposables semblaient être donc la meilleure ma-
nière de percevoir la portée de la préservation du patrimoine à
l’échelle internationale.
35Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Le patrimoine universel : l’UNESCOModalités du classement au patrimoine mondial
I. Les classements de l’UNESCO
L’UNESCO offre la possibilité de préserver le pa-
trimoine mondial par différentes procédures :
- l’inscription sur la liste
- le classement au patrimoine mondial
- l’inscription sur la liste du patrimoine mondial en péril
L’inscription sur la liste est une procédure plus
légère que le classement et une étape qui précède
celui-ci (aucun classement ne peut être demandé
pour un objet ne figurant pas sur la liste d’inscrip-
tion).
II.Actions annexes au classement
La stratégie de l’UNESCO, concernant la culture
et le patrimoine mondial, est justement de les utili-
ser pour répondre aux besoins des Etats parties et
favoriser la cohésion sociale. Dans cette optique, le
classement UNESCO est utilisé afin de contribuer à
la restauration de la paix ou à sa préservation.
Des actions de formations professionnelles
sont généralement mises en oeuvre, dans les pays
les plus défavorisés, afin de promouvoir et de ren-
dre possible par la population concernée, la préser-
vation du patrimoine mondial.
III. Les modalités du classement
Afin d’être classé au patrimoine mondial de
l’UNESCO, un bien doit justifier d’une valeur univer-
selle. Il existe 10 critères dont l’UNESCO se sert afin
de déterminer cette valeur universelle (représenter
un chef-d’oeuvre du génie humain....).
En fonction de ces critères, le classement se
fonde non seulement sur l’état du bien mais aussi
soit sur son authenticité soit sur son intégrité.
En plus de ces critères principaux du classe-
ment, l’Etat partie dont émane la demande de clas-
sement doit fournir un dossier complet afin de faire
connaître le bien, son état, et l’avancement de sa
mise en valeur.
Ainsi, ce dossier comporte plusieurs études au
nombre desquelles figurent :
- la présentation des programmes législatifs
concernant la protection du bien ainsi que l’expli-
cation de leur fonctionnement et de leur efficacité.
L’investissement des autorités locales est requis.
- le niveau d’investissement financier étatique
ou local, ainsi que les plans de gestion du bien (tou-
ristiques ou patrimoniaux)
- l’étude des infrastructures touristiques exis-
tantes, de leur capacité d’accueil mais aussi de l’im-
pact d’un apport touristique sur le bien
- l’état des lieux des pressions dues au dévelop-
pement potentiellement nuisibles à son intégrité.
- l’analyse de l’état de la propriété du bien
- l’étude détaillée des catastrophes naturelles
passées et susceptibles de se reproduire.
IV. Les fonds du patrimoine mondial
Le fond du patrimoine mondial est un fond
destiné à l’investissement pour la préservation du
patrimoine mondial. Celui-ci s’élève à 4 millions de
dollars américains par an, et est alimenté par les
Etats membres ainsi que par des dons privés. Dans
son attribution, la priorité est donnée aux sites les
plus menacés.
Il existe par ailleurs une procédure entre un Etat
membre et l’UNESCO qui consiste à créer un fond
en dépôt. Celui-ci est généralement utilisé dans un
objectif clairement défini.
Ainsi, la convention entre la France et l’UNESCO
est un outil de coopération technique et financière
dont le but est d’assister les pays qui n’ont pas de
36Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
L’emblème du patrimoine mondial est apposé aux biens
classés ou peut être utilisé par les Etats membres. Il a pour utilité de
signaler le lien avec la notion de valeur universelle du bien. Son but
est également de favoriser les investissements extérieurs en faveur du
bien, par la valorisation commerciale de celui-ci.
1. représenter un chef-d’oeuvre du génie créateur humain ;
2. témoigner d’un échange d’influences considérable pendant une période donnée ou dans une aire culturelle déterminée, sur le développement
de l’architecture ou de la technologie, des arts monumentaux, de la planification des villes ou de la création de paysages ;
3. apporter un témoignage unique ou du moins exceptionnel sur une tradition culturelle ou une civilisation vivante ou disparue ;
4. offrir un exemple éminent d’un type de construction ou d’ensemble architectural ou technologique ou de paysage illustrant une période ou des
périodes significative(s) de l’histoire humaine ;
5. être un exemple éminent d’établissement humain traditionnel, de l’utilisation traditionnelle du territoire ou de la mer, qui soit représentatif
d’une culture (ou de cultures), ou de l’interaction humaine avec l’environnement, spécialement quand celui-ci est devenu vulnérable sous l’im-
pact d’une mutation irréversible ;
6. être directement ou matériellement associé à des événements ou des traditions vivantes, des idées, des croyances ou des oeuvres artistiques
et littéraires ayant une signification universelle exceptionnelle (le Comité considère que ce critère doit de préférence être utilisé conjointement
avec d’autres critères) ;
7. représenter des phénomènes naturels remarquables ou des aires d’une beauté naturelle et d’une importance esthétique exceptionnelles ;
8. être des exemples éminemment représentatifs des grands stades de l’histoire de la terre, y compris le témoignage de la vie, de processus
géologiques en cours dans le développement des formes terrestres ou d’éléments géomorphiques ou physiographiques ayant une grande
signification ;
9. être des exemples éminemment représentatifs de processus écologiques et biologiques en cours dans l’évolution et le développement des
écosystèmes et communautés de plantes et d’animaux terrestres, aquatiques, côtiers et marins ;
10. contenir les habitats naturels les plus représentatifs et les plus importants pour la conservation in situ de la diversité biologique, y compris ceux
où survivent des espèces menacées ayant une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de la science ou de la conservation.
Les partenaires scientifiquesICOMOS : Conseil International des Monuments et des SitesICCROM : Centre international d’études pour la conservation et la restauration des biens cultu-relsIUCN : Union mondiale pour la Nature
Ces organismes oeuvrent pour la protection du patrimoine mondial, veillent à l’application de la Charte de Venise, et ont une mission de conseil autant que d’expertise technique auprès de l’UNESCO
List
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cla
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NES
CO
politique patrimoniale à recenser les biens sur leur
territoire et à les préserver. Ce faisant, cet outil sert
également à la formation professionnelle des po-
pulations locales. Cet outil est soutenu notamment
par l’AFD.
Le lien historique entre Haïti et la France peut
lui faire prétendre à une action plus directe en sa
faveur.
V. Un travail en faveur du tourisme durable
Le programme de tourisme du Patrimoine
Mondial favorise le développement durable du tou-
risme sur les sites du patrimoine mondial. Les ac-
tions entreprises visent à la préservation des sites
ainsi qu’au développement durable et au dialogue
entre les cultures.
Des coopérations sont mises en œuvre avec
les organisations conseils que sont IUCN, ICOMOS
et ICCROM, des Agences des Nations Unies telles
que le PNUD, l’OMT et le PNUE ainsi qu’avec l’in-
dustrie touristique pour renforcer les effets positifs
du tourisme et en réduire les impacts négatifs. Ce
programme a pour ambition d’utiliser le tourisme
comme un moyen de préserver la valeur des sites et
de réduire les menaces sur cette valeur..
Cette action s’appuie sur la montée en puissan-
ce du tourisme culturel et sur les ouvertures que les
augmentations récentes de la population touristi-
que attirée par ces domaines rendent possibles.
37Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Le patrimoine universel : l’UNESCOLe classement dans les Caraïbes
I. Etudes en Caraïbes : le projet «la route des esclaves»
Depuis 1999, l’UNESCO a lancé un projet, dans
la catégorie «mémoire du monde», destiné à retra-
cer et à conserver les archives de la traite des es-
claves.
Les îles caribéennes intéressent l’UNESCO à ce
titre, pour les archives qu’elles comprennent. De
nombreux monuments ont pu être classés dans le
cadre de ce projet. Les Caraïbes ont en effet été
identifiées comme zone «oubliée» sur laquelle doit
s’exercer, selon l’UNESCO, un devoir de mémoire.
Haïti se distingue dans cette perspective, par
son acquisition de l’indépendance. La République
participe au projet par le biais du comité national
haitien de la route de l’esclave.
II. Le problème de la formation
Le programme CCBP, programme de renforce-
ment des capacités dans les Caraïbes, a pour objet
d’assister ce secteur dans la mise en place d’un ré-
seau de personnes qualifiées pour la restauration et
la mise en valeur du patrimoine.
Un organe régional, basé à la Havane, a pour
mission d’assurer l’efficacité de ce programme. Haïti
en a bénéficié, par le biais d’ateliers professionnels,
dans le cadre de la restauration de la citadelle La
Ferrière.
III. Potentiel du Cap Haïtien
La ville du Cap Haïtien possède une valeur uni-
verselle indéniable. Cependant, la rédaction d’un
dossier de proposition d’inscription, ainsi que les
démarches préalables, notamment l’inscription sur
la liste indicative du patrimoine mondial nécessite
des moyens financiers et humains difficiles à mettre
en oeuvre.
IV. Notes sur le classement des centres historiques
Les centres historiques peuvent être classés au
patrimoine mondial à plusieurs titres. Dans la ca-
tégorie «cité historique vivante», il convient, pour
obtenir le classement, que celui-ci s’impose par la
qualité architecturale du site. Aucun classement ne
peut être attribué pour des raisons symboliques,
historiques ou abstraites.
Le centre doit également témoigner de la civili-
sation qui y réside dans sa forme, son organisation
spatiale, ses matériaux ou dans les fonctions de ses
bâtiments.
L’UNESCO distingue plusieurs cas de figure :
- le classement d’une ville typique d’une épo-
que ou d’une culture et conservée en état de quasi-
intégrité
- celui des centres anciens des villes dites à ca-
ractère évolutif
- celui des «centres historiques» qui doivent
être strictement délimités par rapport aux autres
époques d’évolution de la ville
- celui de secteurs ou de quartiers à préserver
qui constituent «des échantillons cohérents d’une
ville historique». Là encore, le secteur doit être clai-
rement délimité.
38Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Puerto Plata
AzuaJacmel
Patrimoine culturel
Patrimoine naturel
Bien proposé à l'inscritpion
Légende
Le classement UNESCO en Haïti
Les subventions de l’UNESCO ont servi à la restau-ration des bâtiments (citadelle La Ferrière) ainsi qu’à la formation des haïtiens par des ateliers de travail visant à la restauration du monument.
V. Un centre inscrit : la ville coloniale de Saint-Domingue
La République dominicaine a proposé en 1990
l’inscription sur la liste du patrimoine mondial du
centre ancien de Saint Domingue au regard des cri-
tères 2, 4 et 6. Cette inscription n’a pas donné suite
au classement.
En effet, pour justifier le classement des 41 bâ-
timents proposés, l’UNESCO, par le biais de l’ICO-
MOS, a demandé une évaluation des projets en
cours, des principes de la planification urbaine ont
été demandés et sont restés sans suite.
Cependant, depuis son inscription, la ville a bé-
néficié de financements, d’études, d’outils de ges-
tion des risques et d’une assistance en faveur du
tourisme culturel.
Les différents patrimoines caribéens - Source : Réalisation personnelle
39Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Le patrimoine universel : l’UNESCORelations avec la République Haïtienne
Conventions UNESCO ratifiées par la République Haïtienne
- Accord pour l’importation d’objets de caractère éducatif, scientifique ou culturel, avec annexes A, B, C, D et E et Protocole annexé. (14/05/1954) - Convention universelle sur le droit d’auteur avec Déclaration annexe relative à l’article XVII et Ré-solution concernant l’article XI. (01/09/1954) - Protocole annexe 1 à la Convention universelle pour la protection du droit d’auteur concernant la protection des oeuvres des personnes apatri-des et des réfugiés. (01/09/1954) - Protocole annexe 2 à la Convention universel-le pour la protection du droit d’auteur concer-nant l’application de la Convention aux oeuvres de certaines organisations internationales. (01/09/1954) - Protocole annexe 3 à la Convention universelle pour la protection du droit d’auteur relatif à la ratification, acceptation ou adhésion condition-nelle. (01/09/1954) - Convention concernant la protection du patrimoi-ne mondial, culturel et naturel. (18/01/1980) - Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel. (17/09/2009) - Convention internationale contre le dopage dans le sport. (17/09/2009)
I. La préservation du patrimoine en Haïti
En ce qui concerne la préservation du patri-
moine mobilier, les premiers textes sont la loi du 23
avril 1940 suivie du Décret-Loi du 31 octobre 1941.
Ces textes sont difficiles d’application, notam-
ment en raison des difficultés spécifiques à la Répu-
blique haïtienne concernant le suivi et la régularisa-
tion de la propriété foncière.
De plus, les textes réglementaires sont par na-
ture d’un impact limité en Haïti.
La création de l’ISPAN, par décret du 29 mars
1970 avait pour ambition de mettre en oeuvre une
politique patrimoniale maîtrisée.
II. Une succession d’inventaires
L’ISPAN publie en 1989 une «Liste provisoire
des monuments historiques de la république d’Haï-
ti» qui compte 240 références et en mars 1992 un
«Manuel de l’inventaire des biens immobiliers à
haute valeur culturelle».
Ces premiers inventaires ont été complétés par
diverses missions, notamment dans le cadre du ré-
cent projet «Route 2004».
III. Les partenaires et soutiens techniques
Le Bureau national de l’ethnologie, les Archi-
ves nationales, la Bibliothèque nationale, le musée
d’Art, le musée du Panthéon national de Haïti et
l’Université sont les partenaires nationaux de l’IS-
PAN les plus importants en matière de recensement
et de protection du patrimoine.
L’ambassade de France en Haïti assiste éga-
lement l’ISPAN dans sa mission. En 2009, Port-au-
Prince, Jacmel ainsi que Cap Haïtien ont fait l’objet
d’une attention particulière.
Un des projets phares consiste à créer un ré-
seau de «Centres d’interprétation de l’architecture
et du patrimoine».
40Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
XXème siècle
CAP
HAITIEN
HAITI
UNESCO
1948 :Création de la fondation du Jazz septentrional.(orchestre Septentrional)
1963 :Création de l'orchestre Tropicana (dit Tropic).
2000:Ouverture du premier musée de numismatique à Cap Haitien
1982Le parc national historique - la citadelle La Ferrière, le palais Sans-Souci et le fort des Ramiers; sont classés au patrimoine mondial.
La Citadelle La Ferrière se distingue en tant que premier fort bâti par des esclaves ayant conquis leur liberté.
2004La République Haïtienne, par le biais de son directeur du patrimoine (H. Gaspard) inscrit sur la liste indicative du patrimoine mondial le centre historique de Jacmel
Ces dernières années voient une tentative de la part de la municipalité pour remettre à l'honneur le
1945Création par Philomé Obin d"un atelier de
peinture, "l'école du Cap".
1930 : concept de négritude
1995 Cap Haitien est classée comme patrimpoine national
1980 : concept de créolité
1915 - 1934 Occupation américaine 1957-1986 DUVALIER
41Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Synthèse - Un objectif intéressant mais ambitieux
Des procédures exigentes
Les classements de l’UNESCO sont caractérisés par la longueur et la com-•
plexité des dossiers à fournir et des justifications d’une action conjointe entre
l’UNESCO et l’Etat partie concerné - les moyens humains et financiers de leur
mise en oeuvre pourraient être difficiles à mobiliser.
Une demande d’aide à la constitution de ces dossiers peut cependant être •
déposée auprès de l’UNESCO.
Le contexte politique et institutionnel du Cap Haïtien autant que d’Haïti, •
les instabilités réccurentes et le faible impact des actions prévues ainsi que le
manque de moyens financiers pour leur mise en oeuvre peuvent rendre plus
difficiles la constution du dossier.
Cependant, des demandes de classement UNESCO sont en cours, d’autres ont •
déjà pris effet. Ces éléments simples permettent d’espérer un classement pour
le centre ancien du Cap Haïtien. Toutefois, ce classement ne pourra se faire sans
une politique adaptée et volontariste.
Un cadre qui semble des plus adaptés...
Considérant la nature du patrimoine bâti du centre ancien du Cap Haïtien, •
il semble logique de penser au classement au patrimoine mondial. En effet, ce
patrimoine bâti appartient originellement à l’époque coloniale et permet d’en
restituer ou d’en conserver la mémoire.
Le caractère adapté de ce cadre ne doit cependant pas faire négliger les nom-•
breuses difficultés inhérentes à la République Haïtienne en matière de préserva-
tion du patrimoine. La question à laquelle il faudra répondre est celle du dépas-
sement des difficultés.
... Mais qui comporte ses limites
Si l’action de l’UNESCO peut être perçue comme une action combinée efficace •
(puisqu’elle associe études, réhabilitations et formation des populations) il est
clair que le budget annuel de l’UNESCO est insuffisant au regard de l’étendue de
son domaine d’action.
Toute aide provenant de l’UNESCO seul ne saurait être, par conséquent, •
qu’une aide limitée.
42Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
43Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Exemples de protections patrimoniales urbaines
Les centres anciens préservés au titre de leur valeur de pa-
trimoine universel sont nombreux. Le choix des exemples pré-
sentés ci-dessous a par conséquent été délicat.
Cependant, nous avons procédé en tâchant de trouver des
exemples comparables, tant du point de vue de la nature de l’ar-
chitecture et de ses modifications, des contextes historiques que
du point de vue des situations géographiques.
L’étude de ces exemples offrent pleinement la vision des dif-
ficultés concernant la mise en place de politiques de préserva-
tion patrimoniale. Si ces difficultés sont généralement typiques
d’un lieu particulier, elles font préssentir les difficultés suscepti-
bles d’être rencontrées au Cap Haïtien.
Toutefois, ces exemples enrichissent également l’analyse
de quelques bonnes pratiques. Les réussites ou échecs déclinés
ci-après sont donc riches d’enseignements pour le cas qui nous
occupe.
44Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
La Havane : la vieille ville et son système de fortifications (Cuba)Une urbanisation coloniale similaire au Cap Haïtien
Répartition fonctionnelle dans les immeublesdu centre ancien
Source : Réalisation personnelle
Une architecture victime du blocus
L’architecture de la vieille ville a été préservée des ravages du modernismes mais les immeubles aux couleurs délavés sont dans un état de déla-brement avancé. Les anciens palais, héritage de la colonisation espagnole, sont occupés par des activités de pro-ductions (textile, confection) au rez-de-chaussée et habités dans les étages supérieurs par des fa-milles pauvres n’ayant pas les moyens d’entrete-nir les lieux.Cette situation reflète la réalité économique ac-tuelle de l’île causée en partie par le blocus amé-ricain mis en place le 7 février 1962.
La Havane est située dans la partie la plus sep-
tentrionale de l’arc antillais sur l’île de Cuba. Elle
occupe une péninsule s’ouvrant sur le détroit de
Floride et sur l’Océan Atlantique. La vieille ville de la
Havane et son système de fortifications sont inscrits
au patrimoine mondial depuis 1982.
I. Un environnement urbain similaire au Cap Haïtien
La ville a été fondée par les Espagnols en 1519
puis les boucaniers se sont installés au XVIème siècle
après avoir pillé et brûlé la ville. La proximité entre
Haïti et Cuba permet de mettre en avant des évo-
lutions historiques similaires avec notamment un
développement économique important au XVIIème
siècle. A cette époque, La Havane est un centre de
construction navale important.
La vieille ville de la Havane a été mieux conser-
vée dans le temps que celle du Cap Haïtien et l’ar-
chitecture y est plus variée. On y trouve des mo-
numents baroques et néoclassiques ainsi que des
maisons avec arcades, balcons et cours intérieures.
Le bâti relève de modes architecturaux succes-
sifs : palais seigneuriaux de style hispano-maures-
que, bâtiment baroque avancé, rococo, néoclassi-
que du XIXème siècle, villas tropicales style Art déco,
Art nouveau... Néanmoins, concernant les maisons
d’habitation, on trouve un ensemble homogène
d’architecture coloniale alors que les bâtiments mo-
numentaux sont plutôt baroques ou néoclassiques.
Le plan de la ville en damier est organisé autour
de quatre places. La trame de rues étroites et rec-
tilignes semble similaire à ce qui existe au Cap Haï-
tien.
Ces éléments architecturaux montrent l’intérêt
de la vieille ville par rapport au patrimoine urbain
non monumental. Le classement de la ville au patri-
moine de l’UNESCO inclut le centre ancien ainsi que
les fortifications du XVIIème siècle.
Aujourd’hui, La Havane est la capitale de Cuba,
c’est une ville très peuplée (environ 2 millions d’habi-
tants), coeur économique et culturel du pays. Le cen-
tre ancien compte 60 000 habitants. Les immeubles
sont partagés entre un manque d’entretien et une
revalorisation touristique.
45Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
II. Le classement au patrimoine mondial de l’UNESCO en 1982
Le centre ancien a été reconnu monument
national en 1978 puis patrimoine culturel de l’Hu-
manité en 1982. La Havane a donc été inscrite au
patrimoine mondial de l’UNESCO sur la base des
critères 4 et 5 : ensemble cohérent et homogène de
constructions illustrant la période de colonisation
espagnole ainsi que les modes architecturaux suc-
cessifs, aujourd’hui en train de disparaître et dont la
consolidation est devenu nécessaire pour préserver
ses attraits culturels traditionnels.
II. Le projet de réhabilitation du centre historique
Un projet global de réhabilitation a été mis en
place par la municipalité. Un décret-loi, entré en vi-
gueur en 1993, transforme le centre historique en
«zone prioritaire de conservation», le but étant de
favoriser la réhabilitation par une autorité institu-
tionnelle unique.
Ce projet est régi par le Bureau de l’historien
de la ville (Eusebio Leal Spengler) et comprend un
espace de 2,14 km², 3 744 édifices dont 553 sont
considérés comme des monuments d’une grande
valeur patrimoniale. Il s’inscrit dans une logique
globale de planification stratégique sur l’ensemble
du territoire. Il ne s’agit donc pas d’une simple ré-
habilitation mais aussi du développement d’un pro-
gramme socioculturel qui donnerait un véritable
dynamisme aux activités humaines.
L’institution s’appuit pour cela sur un fonds im-
mobilier propre ainsi que sur la possibilité de perce-
voir des impôts. Un volume important de ce fonds
est consacré aux projets qui génèrent de la richesse
rapidement, qui mettent l’accent sur le volet cultu-
rel et social profitables aux secteurs les plus vulné-
rables de la population résidante. Le principe est
d’engager d’importants travaux tout en préservant
l’habitat populaire et la vie culturelle en faisant de
cette réhabilitation un moteur économique et so-
cial. Le programme de restauration ne s’étend pas
seulement aux monuments et aux bâtiments les
plus importants mais concerne aussi les boutiques
et les petites maisons d’habitation.
Le foncier et le patrimoine bâti du centre an-
cien à dominante privée sont en mauvais état. La
réhabilitation a donc consisté à trouver des répon-
ses créatives pour résoudre les problèmes d’insa-
lubrité (réseaux obsolètes…). Néanmoins, la dyna-
mique de rénovation architecturale a entraîné un
La Havane : la vieille ville et son système de fortifications (Cuba)La réhabilitation et la valorisation touristique
Vue aérienneSource : Google Image
Centre ancienSource : Google Image
46Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
changement de destination des immeubles, pour la
plupart transformés en musées ou monuments. Le
problème majeur est donc le relogement des popu-
lations. et le maintien des activités sur place.
III. Les conséquences en matière d’évolution touristique
Le cas de la Havane est paradoxal. Les réhabi-
litations du centre ancien ont permis d’engendrer
une mutation de celui-ci et une ouverture au tou-
risme mais la majorité des immeubles du quartier
sont aujourd’hui encore dans un état de délabre-
ment. Les églises et couvents ont pu être rénovés
grâce à des subventions internationales notamment
venues de l’UNESCO alors qu’ils étaient auparavent
habités.
L’évolution touristique de ce quartier est en
cours. La muséifaction est quelque peu limitée par
la construction de nouveaux logements pour les
personnes nées dans le centre ancien, ce qui per-
met de limiter les départs. Le maintien d’une partie
de la population en place permet aussi de conser-
ver les activités et les emplois productifs sur place.
Néanmoins, le développement touristique amène
de nouvelles activités réduisant les activités locales
et modifiant ainsi la vie culturelle de La Havane.
Le centre ancien de La Havane perd donc des
habitants et des activités, mais de manière plus li-
mité qu’ailleurs.
Evolutions urbaines comparéesSource : réalisation personnelle
47Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
I. Ville stratégique et militaire (XVIème - XVIIIème siècle)
La ville de Belém est créée en 1616 par les co-
lons portugais comme point d’entrée stratégique de
l’Amazonie orientale à l’embouchure du fleuve Ama-
zone. Elle présente donc des similitudes avec Cap
Haïtien, qui fut fondée en 1670 par des colons espa-
gnols pour des raisons stratégiques également.
La première vocation de Belém est donc mili-
taire et la ville s’organise autour du fort de défense
donnant naissance au quartier de Cidade Velha. Ce-
lui-ci s’étend ensuite avec la montée des échanges
maritimes vers Campina, un quartier plus commer-
cial aux abords du port.
La ville s’agrandit en 1627 grâce à l’exploitation
et à la commercialisation des ressources locales. Le
paysage urbain se transforme et les églises font fi-
gures de nouveaux repères dans le tracé urbain ir-
régulier.
II. Ville portuaire et commerciale (XVIIIème - fin XIXème siècle)
Au XVIIIe siècle, Belèm s’affirme comme une
ville portuaire d’influence majeure. Comme au Cap
Haïtien, l’économie de la ville est essentiellement
basée sur le commerce maritime. Rapidement, les
deux villes vont développer d’importants échanges
commerciaux avec la métropole et se structurer
autour du port.
Cette période marque une nouvelle étape dans
l’aménagement de la ville qui voit se multiplier les
magnifiques demeures coloniales, propriétés néo-
classiques et autres édifices baroques.
A la fin du XIXème siècle, Belém est devenue
une ville commerciale incontournable dont l’écono-
mie est basée sur le caoutchouc. La ville s’agrandit,
se modernise et se dote d’un prestigieux patrimoine
architectural.
De 1897 à 1911, le Sénateur Antônio José de
Lemos, le «Baron Haussmann» de Belém, aména-
ge la ville de façon spectaculaire. Il réalise le plan
d’alignement des rues des zones hautes, l’aménage-
ment de places publiques mais aussi la création du
Bosque Municipal, parc arboré, ainsi que de nom-
breuses maisons baroques.
Là encore, les similitudes avec Cap Haïtien sont
remarquables du point de vue de la période d’essor
architectural ainsi que de la constitution d’un patri-
moine bâti colonial prestigieux jusqu’au XIXe siècle.
III. Capitale administrative
La ville connaît une période de déclin à partir
de 1910 lorsque le Brésil perd le monopole de l’ex-
ploitation du caoutchouc. La renaissance de Belém
n’aura lieu qu’un demi-siècle plus tard grâce à sa
promotion au rang de capitale administrative. Les
institutions publiques et organismes fédéraux s’y
installent et elle bénéficie d’une opération de dé-
senclavement autoroutier.
Belém, capitale culturelle de l’Etat du Para (Brésil)Les étapes de la constitution de la ville de Belèm
Situation de BelèmSource : Réalisation personnelle
48Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Face à l’arrivée massive de nouveaux habitants,
la ville change d’aspect. Le centre-ville se densifie,
on construit en hauteur et un habitat précaire se
développe sur les zones inondables. Peu à peu, l’an-
cien tissu urbain du centre-ville est délaissé pour la
proche périphérie. Le centre perd progressivement
de son importance au profit, entre autres, de l’en-
trée de ville où sont construits des immeubles ad-
ministratifs aux fades façades vitrées.
La politique patrimoniale introduite par les
pouvoirs publics à partir des années 1980 a contri-
bué à hisser Belèm au rang de capitale culturelle de
l’Etat du Para.
I. Deux exemples d’actions engagées par les pouvoirs publics
Au niveau régional, le gouvernement de l’Etat
du Pará a pris en charge la restauration du comple-
xe industriel du port de Belém. En partie désaffecté
depuis le début du XXème siècle, ce complexe por-
tuaire n’avait pas s’adapter aux progrès techniques.
La réhabilitation du site a été conçue pour une
meilleure gestion. Les anciens hangars sont divisés
en sections : le boulevard des arts, salle d’exposition
permanente sur l’histoire de la ville ; le boulevard
de la Gastronomie, composé de restaurants régio-
naux et internationaux ; le boulevard des Foires et
des Expositions consacré aux événements culturels
ponctuels ; et enfin un terminal d’embarquement
des voyageurs.
Au niveau municipal, plusieurs chantiers sont
mis en œuvre pour réhabiliter toutes les formes de
patrimoine culturel. La restauration du marché Ver-
o-Peso, dont l’intérêt patrimonial est aussi bien ar-
chitectural avec sa structure de métal et de pierre,
qu’immatériel puisqu’il s’agit d’un musée vivant des
pratiques culturelles, a été décidé en partenariat
avec la société civile (associations locales, coopé-
rative et syndicat). Le marché a été organisé par
fonctions : l’aménagement des abords du marché
couvert a permis l’accueil d’un marché d’artisanat
local, la restauration ambulante a été regroupée le
long du fleuve, etc... Cette expérience est une vraie
réussite puisque le marché est devenu aujourd’hui
un lieu de promenade qui attire les touristes.
II. Une politique patrimoniale participative
La municipalité de Belèm a engagé une politi-
que de gestion participative de la ville depuis 1997 :
le budget participatif. Il s’agit d’un mode de gouver-
nance municipal né dans les années 1980 au Brésil
dont Porto Alegre est l’exemple le plus connu.
La gestion publique de la ville dépend des rubri-
ques du budget participatif élaboré lors de réunions
auxquelles est conviée la population. Cette répar-
tition s’effectue selon quatre principes de base : la
réorientation des ressources publiques en direction
des plus pauvres ; la création de nouvelles relations
entre municipalités et citoyens ; la reconstruction
du lien social et de l’intérêt général ; et l’invention
d’une nouvelle culture démocratique. Ce mode de
gestion a permis la (ré)appropriation du patrimoine
de la ville par les habitants.
Belém, capitale culturelle de l’Etat du Para (Brésil)Le renouveau de Belèm grâce à une politique patrimoniale forte
Le marché de Ver-o-Peso du PortSource : Google image
49Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Phnom Penh : une démarche locale de protection et valorisation (Cambodge)Urbanisation et construction du patrimoine
I. Le développement urbain et la construction du patrimoine de Phnom Penh
Phnom Penh a été fondée vers 1370 sur un site
original, dans l’axe des quatre bras que forment le
Mékong, le Tonlé Sap et le Bassac. Cette bourgade
portuaire et marchande est constituée de paillotes
et de maisons en bois implantées le long du fleuve.
La ville moderne émerge en 1890 sous le pro-
tectorat français (1863-1953). L’administration fran-
çaise découpe la ville en trois quartiers et introduit
des espaces publics importants. entre 1920 et 1939,
la ville connaît de grands travaux d’extension et
d’embellissement. Tous les édifices en maçonnerie
sont réalisés pendant cette période. A la fin du pro-
tectorat la population atteint 360 000 habitants.
A l’indépendance, la ville devient capitale de
l’Etat et une politique de grands travaux est menée
par le Prince Norodom Sihanouk sur l’ensemble du
territoire et notamment à Phnom Penh pour doter
la ville des structures nécessaires à son nouveau sta-
tut de capitale. La population atteint 1 million d’ha-
bitants en 1970 mais les événements politiques qui
aboutissent à la prise de pouvoir des Khmers rouges
viennent interrompre ce processus.
Entre 1979 et 1990, on assiste à une recons-
truction et une réorganisation de la ville. Cette res-
tructuration confirme la vocation traditionnelle des
quartiers centraux. La population se concentre dans
l’ancien centre administratif alors que le quartier
marchand reprend ses activités. Le patrimoine ar-
chitectural est en partie détruit par le comblement
des jardins sur rue ou la construction d’immeubles
de bureaux, notamment dans le quartier du Palais
Royal.
Constitué de monuments importants - Palais
Royal - ainsi que par un tissu urbain de villas, pago-
des, et un tissu ordinaire de compartiments et de
petites maisons, le patrimoine architectural, paysa-
ger et urbain est cohérent, homogène et à échelle
humaine.
II. La coopération internationale : un moyen pour préserver et mettre en valeur le patrimoine
La ville est entrée dans un processus de trans-
formation rapide et spectaculaire ces dernières an-
nées. Le territoire urbain ne cesse de s’étendre ; le
développement des périphéries et la rénovation du
centre ancien sont intimement liés. La ville travaille
donc depuis les années 1990 avec la Ville de Paris
et l’APUR pour se doter des outils nécessaires à une
politique de développement urbain et de protec-
tion du patrimoine.
Après la réalisation d’une première étude en
1996, le bureau des Affaires Urbaines de la muni-
cipalité a engagé une évaluation du patrimoine en
2005 afin de mesurer les évolutions du patrimoine
architectural.
Entre 2000 et 2003, près du quart des parcel-
les ont fait l’objet d’un permis de construire dans le
quartier historique. On assiste donc à une mutation
rapide du patrimoine par la construction de com-
Compartiments :
Immeuble composé d’une série de balcons et d’habitations dont l’accès se fait par une porte la-térale. Le nom de compartiment est dû à la forme de ces habitations en «couloir» de 3 à 4 mètres de large sur des dizaines de mètres de longueur (jusqu’à 50 mètres). Les compartiments sont mitoyens et alignés le long de la rue. Les étages successifs ont été ajoutés, les logements divisés et les cours intérieures comblées par la construc-tion d’extension.
50Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
conservation du patrimoine mais aussi de requalifi-
cation et de développement économique et social
du centre-ville. Ce projet a été financé par l’Agence
Française de Développement et mis en oeuvre par
la municipalité de Phnom Penh.
partiments qui renouvellent le tissu en détruisant le
bâti ancien. Cette densification est dû à la pression
foncière de plus en plus importante dans les quar-
tiers centraux et entraine une disparition progres-
sive des ouvertures et de la végétation.
A partir de ce constat, des propositions régle-
mentaires et des outils financiers ont été soumis
mais n’ont pas abouti pour l’instant.
Toutefois, quelques opérations ponctuelles
et opérationnelles de mise en valeur patrimoniale
ont été réalisées. L’Etat cambodgien a financé des
projets de modernisation de l’espace public comme
la création d’espaces vert, le bitumage des voies,
l’aménagement des trottoirs, l’éclairage public...
D’autres projets, financés par l’aide internationa-
le et le secteur privé dans quelques rares cas ont
consisté en l’aménagement des voiries, la mise en
place de mobilier urbain, l’assainissement ou en-
core la réhabilitation du marché central.
Le marché central Psar Thmey, inauguré en
1937, regroupe plus de 3 000 commerçants sur plus
de 20 000 m2. Les travaux ont permis d’améliorer
les conditions d’hygiène et l’état des infrastructures
(canalisations, point d’eau, bennes à ordures, ven-
tilation) mais aussi de réorganiser la gestion pour
assurer la pérennité et le bon fonctionnement des
installations rénovées.
Sa rénovation a été réalisée dans une logique de Un exemple de réhabilitation : le marché Psar Thmey
Source : APUR
51Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
I. Une ville fondée pour le commerce
Cidade Velha, appelée Ribeira Grande à sa créa-
tion, a été fondée par le navigateur génois Antonio
do Noli vers 1460. C’est la première ville européen-
ne sous le tropique du Cancer. Les colons portugais
s’installent sur ce territoire vierge et y créent un
port d’escale et de dépôt en raison de sa proximité
avec les côtes africaines.
La ville est implantée à l’embouchure d’une val-
lée profonde et escarpée, et entourée par la mer, ce
qui a limité la croissance de la ville sur une surface
d’environ 50 hectares. Ces contraintes géographi-
ques prennent au Cap Haïtien une forme similaire
Cidade Velha, lieu de mémoire du commerce triangulaire (Cap Vert)Histoire de la ville jusqu’à son inscription sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO
à l’embouchure de la rivière du Haut Cap et au pied
d’un morne. Néanmoins, dans le cas du Cap Haïtien,
cette situation n’a pas empêché la croissance urbai-
ne de la ville.
La ville prend une réelle importance comme
point de passage de tous les esclaves à partir de
1494 (Traité de Tordesillas). En effet, le Portugal a
le monopole du trafic d’esclaves venus de Guinée
et la ville est constituée essentiellement de vastes
entrepôts accueillant les esclaves qui sont bapti-
sés et latinisés avant d’être vendus et envoyés vers
l’Amérique.
Cidade Velha s’est enrichie grâce à ces échan-
ges maritimes durant la traite négrière. De plus, elle
a été une base d’expérimentation de l’agriculture de
plantations des colons européens. La culture de la
canne à sucre, du coton, du maïs et de l’igname ont
permis un développement économique de l’île. Le
Cap Vert a été à l’origine de la traite négrière dès
1460, alors que ce développement intervient deux
siècles plus tard en Haïti vers 1670.
II. Développement : architecture religieuse et défensive
La «latinisation» des esclaves montre l’impor-
tance du rôle de l’Eglise et par voie de conséquen-
ce, la présence de monuments religieux au sein de
la ville de Cidade Velha.
L’architecture religieuse apparaît très tôt et la
ville accueille la première cathédrale d’Afrique qui
domine par sa taille et son emplacement, et reflète
la puissance de l’organisation religieuse.
De plus, pour protéger les richesses de la ville
convoitées par les autres puissances européennes
et les pirates, la ville se dote de nombreux forts sur
les sites stratégiques. Le plus impressionnant est la
forteresse royale Sao Felipe achevée en 1593.
La forteresse São Felipe, dominant la ville et la merSource : Sébastien Moriset, CRATerre-ENSAG, 2007
Baie de Cidade Velha depuis le sommet de la falaiseSource : Sébastien Moriset, CRATerre-ENSAG, 2007
52Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
IV. Une incription du patrimoine immatériel
Les critères invoqués pour l’inscription de Cida-
de Velha sont au nombre de trois. Les critères II et III
ont trait au patrimoine culturel architectural.
Le critère IV a également été retenu et corres-
pond au patrimoine immatériel. Ce lieu a été à l’ori-
gine de la traite négrière et a vu l’émergence pour
la première fois, d’une nouvelle forme d’expression
artistique et culturelle, de croyances, ainsi qu’une
pharmacopée et un art culinaire que l’on retrouvera
ensuite dans tous les pays liés à l’esclavagisme.
Cidade Velha est à l’origine de la création d’une
nouvelle langue, le créole, qui a permis les échan-
ges entre les maîtres et les esclaves de provenances
différentes.
C’est ce processus de conceptualisation du
créole sur la base du portugais et des langues afri-
caines qui sera repris plus tard dans les Caraïbes,
espace à dominance francophone, anglophone et
hispanophone, par des esclaves venus de Cidade
Velha. La langue conserve ainsi proverbes, contes,
légendes, chants, poèmes, prières et incantations
qui retracent non seulement le vécu et l’histoire,
mais relient aussi ces peuples. Un des exemples les
plus frappants est la percussion traditionnelle afri-
caine et son évolution dans l’espace atlantique dont
le début est le Batuque (batuku) du Cap-Vert.
III. Le déclin de Cidade Velha au XVIIe siècle
A partir du XVIIe siècle, les autres puissances
européennes contestent l’hégémonie ibérique sur
le commerce triangulaire. L’escale du Cap Vert n’est
plus avantageuse. Avec le déclin du commerce, la
ruine et l’insécurité (liée à la piraterie notamment),
la population abandonne peu à peu la ville et s’ins-
talle à l’intérieur de l’île. Le port de Praia se substi-
tue à Cidade Velha et à partir du milieu du XVIIIème
siècle, elle devient la capitale du pays.
Cidade Velha est aujourd’hui un petit bourg
d’environ 200 maisons à 12 km à l’ouest de Praia et
a obtenu son inscription en juillet 2009 sur la liste
du patrimoine mondial de l’UNESCO.
Patrimoine immatériel : Le Batuque, chant traditionnelSource : Sébastien Moriset, CRATerre-ENSAG, 2007
Vue du village et du port depuis la forteresse São FelipeSource : Sébastien Moriset, CRATerre-ENSAG, 2007
53Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
1km
N
Phnom Penh La Havane
Cap Haïtien Belem
54Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Synthèse
La Havane (Cuba)
Une évolution historique similaire au Cap Haïtien •
Une explosion urbaine récente (2 millions d’habitants aujourd’hui)•
Une réhabilitation des constructions à vocation touristique qui jouxtent des immeubles délabrés•
Un relogement inévitable d’une grande partie de la population hors du centre•
Belèm (Brésil)
Une situation portuaire avantageuse•
Un essor architectural à la fin du XIXème siècle, comme au Cap Haïtien •
Des actions régionales de restauration du port favorisant l’activité économique de celui-ci•
Une action municipale basée sur la démocratie participative•
Phnom Penh (Cambodge)
Un patrimoine urbain moderne né sous le protectorat français au XIXème siècle•
L’extension de l’urbanisation met en péril le patrimoine urbain du centre qui se densifie•
Un travail de coopération internationale avec la ville de Paris•
Citade Velha (Cap Vert)
Un patrimoine religieux et défensif•
Une ville tournée vers la vente d’esclaves pour le commerce triangulaire•
Une inscription du patrimoine liée aux expressions artistiques des esclaves ainsi qu’à la naissance •
de la langue créole.
55Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Pistes de réflexion pour Cap Haïtien
I. Les outils de gestion et de planification du patrimoine
Les exemples étudiés ici mettent en avant la
nécessité d’une autorité unique de gestion com-
pétente institutionnelle pour délimiter les zones
d’actions. De même, l’élaboration d’un projet global
prenant en compte tous les facteurs et toutes les
conséquences de la patrimonialisation est néces-
saire pour piloter ensuite les différentes mesures
prises.
La désignation d’une autorité unique
Dans l’exemple de La Havane, la désignation
d’une autorité unique compétente et institution-
nelle a permis de délimiter les zones d’actions et de
piloter les différents projets de réhabilitation du pa-
trimoine avec un souci de cohérence des actions.
De même, la présence de cette autorité de ré-
gulation peut permettre d’échapper à une muséifi-
cation de la ville qui pourrait finir par éloigner les
populations initiales du quartier.
Un pouvoir politique fort et volontaire
Le renouveau patrimonial de Belèm a été enga-
gé par un pouvoir politique fort et volontaire. Mais
la mairie du Cap Haïtien a-t-elle les moyens humains
et financiers pour un tel engagement ?
Une planification à long terme
L’exemple de Phnom Penh et de son schéma di-
recteur à l’horizon 2020 montre l’importance d’une
vision à long terme des possibilités en matière de
développement patrimonial. Ce document vient en
complément des textes réglementaires en vigueur
depuis 1996 et s’appuit sur un relevé patrimonial
avec suivi de son évolution.
La méthode du budget participatif
La méthode employée par la ville de Belèm
pour définir sa politique patrimoniale est particuliè-
rement intéressante. Plus que la mise en place d’un
budget participatif, c’est la participation des habi-
tants à la définition et à la mise en valeur de leur
patrimoine qui doit être recherchée.
Une collaboration multi-partite
Phnom Penh, par exemple, a réussi à tirer par-
tie des coopérations internationales en collaborant
de manière très étroite avec les techniciens fran-
çais, italiens, japonais...
Dans cette logique de coordination, la ville a
tiré profit des différentes aides internationales ; le
projet Asia-Urbs (financé par l’Union européenne)
a permis la rehabilitation de la rue 128, le projet Lu-
ceepp (soutenu par l’UNESCO) a rénové une partie
des impasses du centre ancien, .
Bien que le système de protection ne soit
pas complètement développé et efficace cette dé-
marche de coopération et d’échange montre que la
ville peut protéger une partie de son patrimoine par
l’investissement public et par la coopération inter-
nationale.
II. Intérêts des exemples de rénovation d’un lieu : le port, le marché
L’exemple de la rénovation du marché à Be-
lèm et à Phnom Penh est intéressante puisqu’elle
apporte des pistes de réflexion concernant un lieu
emblématique présent au Cap Haïtien puisque le
centre ancien comprend plusieurs marchés ayant
une grande importance dans la vie locale. De même
la transformation du port en un nouveau centre de
vie à Belèm rejoint l’analyse puisque le port du Cap
Haïtien est aujourd’hui inutilisable car ensablé.
Ces exemples nous conduisent à nous question-
ner sur l’utilisation de ces deux équipements. L’amé-
lioration des conditions d’hygiène et la réorganisa-
56Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
tion spatiale du marché de Phnom Penh a permis
une amélioration des conditions de ventes des pro-
duits. L’exemple du Cap Haïtien montre aujourd’hui
que l’ensemble des rues autour du marché sont en-
combrée et que la plupart des vendeurs ne trouvent
pas de place à l’intérieur même du marché.
L’activité du port international du Cap Haïtien
est au ralenti depuis quelques temps. En effet, le
port connaît des problèmes d’ensablement du fait
de la disparition de la barrière naturelle de corail.
De plus, le wharf public du Cap Haïtien représente
seulement 10% des échanges du pays avec l’exté-
rieur en 2004-2005 (étude de l’Autorité portuaire
nationale).
L’exemple de Belèm montre que l’on peut
adapter les infrastructures et les réduire au besoin
du trafic pour créer de nouveaux espaces culturels
attractifs. D’un autre point de vue, un projet a été
imaginé pour que le port du Cap Haïtien puisse de-
Rue encombrée autour du marché du Cap HaïtienSource : Google Image
venir une escale pour les touristes. Les deux projets
pouvant être combinés.
III. L’inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO
Le cas cubain semble apporter des éclaircisse-
ments sur la manière d’envisager une inscription
au patrimoine mondial de l’UNESCO. En effet après
analyse de la candidature de La Havane, la présence
d’une dynamique de projets de rénovation porté par
la ville et un zoning pré-établi ont motivé la décision
bien plus que la satisfaction d’un des dix critères.
De plus, l’importance d’une volonté politique forte
est primordiale pour porter un projet d’inscription
au patrimoine mondial de l’UNESCO.
L’exemple du Cap Vert et de l’inscription au pa-
trimoine immatériel des fondements d’une culture
esclave liée aux expressions artistiques ainsi qu’à la
langue créole s’inscrit dans une réalité présente au
Cap Haïtien. De nombreux éléments de la culture
créole haïtienne, même s’ils ne peuvent être inscrit
au patrimoine mondial de l’UNESCO, méritent d’être
pris en compte dans une mise en valeur patrimonia-
le du centre historique du Cap Haïtien à travers un
programme de développement socio-culturel com-
me à La Havane par exemple. Un tel programme
s’inscrit dans la préservation de l’habitat populaire
permettant ainsi à la vie culturelle locale de conti-
nuer à exister.
57Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
III. Initiative locale et collaboration internationale
Le Programme de Revitalisation et de Promo-
tion de l’Entente et de la Paix - financé par le USAID
et l’OIM - est une initiative qui prend en compte
l’inclusion sociale et l’interaction avec les autorités
locales.
Le PREPEP a récemment mis en oeuvre deux
projets à Blue Hills ; une des sections communales
les plus isolées et les plus négligées de la zone du
Cap Haïtien.
Les membres de l’Organisation Populaire pour
le Développement de Blue Hills (OPDB) ont fait
entendre leurs sentiments d’abandon sur la radio
et la télévision locale. Afin de rebâtir la confiance
et la stabilité de la communauté de Blue Hills, les
autorités locales et la population ont sollicité l’aide
de PREPEP pour répondre aux besoins prioritaires
identifiés.
Ainsi, des projets de réhabilitation de l’école,
du pont Vaillant, d’un équipement sportif, de deux
tronçons de route ; de mise en place d’un système
de drainage et d’éclairage public.
Le patrimoine joue un rôle d’importance dans la
construction territoriale car il est objet de légitimi-
sation du territoire ; en effet le patrimoine renvoie
parfois à un contexte économique et social fragile.
De fait, la valorisation par le tourisme peut conduire
à un (re)démarrage socio-économique et à de nou-
velles configurations spatiales pour le territoire.
Les centres historiques des pays en développe-
ment sont l’objet de fortes tensions sociales – cen-
tralités contradictoires et inorganisées – impliquant
anarchie des fonctions et des usages, fragmenta-
tion du tissu urbain, précarisation du bâti et du pa-
trimoine et donc dégradation de la qualité de vie en
milieu urbain.
L’absence de planification urbaine et le désin-
térêt des pouvoirs publics pour les réglementations
consacrées par les lois haïtiennes en matière d’ur-
banisme (Lois de 1936, 1963 et 1982), et par rap-
port à l’aménagement de l’espace urbain, ont eu
comme conséquence une détérioration du cadre
bâti en général, la dégradation de l’environnement
urbain, et la précarisation d’anciens beaux quartiers
et du centre historique.
I. Le concept de développement local
Le développement local apparaît comme un
modèle alternatif du schéma de développement
économique traditionnel - qui vient d’en haut. Le
développement local est le fait de la mobilisation
d’acteurs qui acceptent de s’associer au service d’un
territoire.
La notion d’appartenance à une communauté
est un élément primordial à la construction d’un
projet de développement local ; la motivation des
jeunes est un point à prendre en compte car s’ils
ne sont pas intéressés par l’objet du projet (le tou-
risme) cela peut expliquer une partie de l’échec.
II. Le patrimoine et le développement local
Le patrimoine est un outil de développement
local, urbain ou rural.
La valorisation du patrimoine, voire sa mar-
chandisation, est un levier essentiel pour l’aména-
gement et le développement des territoires.
Mise en valeur du patrimoine par le développement local
58Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
nomique, au travers du tourisme, qui est mise en
exergue.
La richesse du patrimoine de Makatea (Poly-
nésie Française) pose sans difficulté les bases d’un
développement touristique de l’île.
Mais la population s’est prononcée contre ce
type de développement car s’est posée la question
de l’acculturation, de la perte d’identité, de la dé-
térioration du patrimoine, si on fait de Makatea la
vitrine de l’exceptionnel pour des touristes privilé-
giés.
Ces projets ont permis de créer une centaine
d’emplois à court terme pour leur mise en oeuvre et
d’une vingtaine d’emplois à long terme notamment
du fait de l’implantation d’entreprises nouvelles -
résultat direct des travaux d’éclairage, de voirie et
d’assainissement.
Ces projets ont également renforcé la capacité
de l’association locale. OPDB a créé un comité pour
encourager le développement professionnel. L’ac-
tion des programmes PREPEP a permis la formation
d’habitants pour l’exécution des projets, nombreux
d’entre eux étaient des ouvriers non-qualifiés et
sont devenus maçons, charpentiers, ferronniers,
notamment parce que tous ces projets sont menés
en partenariat avec des entreprises locales.
IV. Le patrimoine et le tourisme
C’est à partir de la seconde moitié du XXème
siècle que le patrimoine commence à jouer un rôle
dans les aménagements compte tenu de l’essor du
tourisme de masse. Des Etats et des organismes in-
ternationaux ont alors pris en compte l’intérêt tou-
ristique dans la valorisation des monuments histori-
ques et du patrimoine.
La protection et la mise en valeur du patri-
moine s’inscrit dans le cadre de développement
économique et touristique ; c’est la relation entre
d’une part, la valeur historique et culturelle du bâti
et d’autre part, le développement de l’activité éco-
59Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Mise en valeur du patrimoine par l’évènementielL’exemple du Togo : une promotion touristique du patrimoine immatériel
I. Le choix de l’évènementiel
La création de manifestations de nature évè-
nementielle, qui peuvent être de différentes sortes
(festivals, spectacles divers, happenings, rencon-
tres...) a plusieurs objectifs, notamment :
- mettre en valeur le patrimoine immatériel
d’un lieu en assurant sa représentation et
sa diffusion
- permettre un rayonnement des pratiques
culturelles locales
Au Togo, le choix de l’évènementiel a été fait
pour sa souplesse. En effet, les festivals, même s’ils
mobilisent de nombreuses structures (notamment
des associations nationales ou locales) sont relati-
vement simples à mettre en place, et peu coûteux.
II. Associations de partenaires divers
Les festivals togolais sont soutenus notamment
par l’UNESCO.
Il est particulièrement intéressant de noter que
les festivals togolais ne bénéficient que de peu de
soutiens financiers. Les initiatives de ces manifesta-
tions, même si elles reçoivent un appui administra-
tif, relèvent de la population locale, d’associations,
ou encore d’ONG.
Le soutien politique est à la fois financier et ad-
ministratif. Des subventions sont accordées à cer-
tains festivals, ainsi qu’une importante aide logisti-
que. Ces aides ne sont intervenues qu’après la mise
en place des festivals et leur premier succès.
III. Une forme de marketing urbain
La promotion et la diffusion des pratiques
évènementielles de mise en valeur du patrimoine
culturel sont des élèments essentiels du bon dérou-
lement de ces évènements.
Le Togo a fait le choix de plusieurs modes de
diffusion : l’association avec d’autres pays a un im-
pact dans le caractère international de ces festivals.
Par ailleurs la promotion est assurée par l’intermé-
diaire d’internet.
EXEMPLES DE FESTIVALS TOGOLAISDe nombreux festivals ont été récemment
créés, afin de promouvoir la culture locale et de
favoriser un tourisme périodique.
Ainsi, le festival des divinités noires a, de-
puis 2006, pour ambition de faire tomber les
nombreux préjugés existants autour du Vaudou.
Ce festival ne touche pas uniquement le Togo, il
rassemble différents pays pour lesquels la repré-
sentation de la religion Vaudou est importante
notamment le Bénin et le Ghana.
Ce festival est porté par l’ACOFIN (associa-
tion pour la sauvegarde du patrimoine culturel
africain), il a été crée à l’initiative d’étudiants bé-
ninois, togolais, antillais et français.
Parmi les autres festivals mis en place ré-
cemment au Togo, on peut citer :- le festival du théâtre de la Fraternité- les rencontres et résidences internationales d’arts visuels- le festival international des danses africaines- les rencontres du cinéma et de la télévision de Lomé
La ville du Cap-Haïtien possède un réel po-
tentiel du point de vue d’un tourisme fondé sur
des pratiques évènementielles.
Ces dernières années voient notamment
une tentative pour remettre à l’honneur le car-
naval du Cap Haitien. Le carnaval est tradition-
nellement en Haïti l’occasion de mettre en ques-
tion et d’abandonner les distinctions sociales. Ce
sont des évènements animés, au cours desquels
la danse, la musique et les chants sont omnipré-
sents.
La richesse des pratiques culturelles, l’impor-
tance du théâtre en Haïti et de la musique offrent
également un potentiel sur lequel s’appuyer.
60Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Des outils spécifiques à chaque objectif
En fonction de chaque ville et de leurs enjeux propre, les outils utilisés et les •
politiques de préservation du patrimoine s’adaptent
La question fondamentale qui devra occuper la préparation de l’inventaire du •
patrimoine du centre ancien du Cap-Haïtien sera donc celle de la procédure la
plus adaptée aux enjeux propres de la ville.
Une fois encore, les exemples et contre-exemples montrent la nécessité de •
prendre en compte les besoins et volontés des populations concernées dans la
mise en oeuvre d’une protection patrimoniale.
Enfin, il faut noter la propension à l’aide internationale, qui caractérise presque •
invariablement les mesure de protection du patrimoine mises en oeuvre dans les
pays en voie de développement.
L’art de la combinaison
Une donnée réccurente des politiques de valorisation du patrimoine consiste •
en une combinaison d’actions rapprochées dans le temps.
Ces combinaisons permettent de travailler à plusieurs types de protection, de •
la plus fine (réhabilitation d’un bâtiment) à la plus large (protection d’un secteur
entier)...
Une combinaison envisageable pour la ville de Cap-Haîtien serait à réfléchir : •
celle d’une mise en rapport du patrimoine matériel et du patrimoine immatériel
du point de vue d’une mise en valeur réciproque.
Synthèse - La diversité des méthodes, entre inspiration et renouvellement
61Atelier Cap Haitien - Université Paris IV Sorbonne - Institut d’urbanisme et d’aménagement - 2009-2010 - François Dumail - Cahier 1 Outils de protection du patrimoine
Introduction : la notion de patrimoine Charte Internationale sur la Conservation et la Restauration des Monu-•
ments et des Sites, Venise, 1964.
Architecture, patrimoine et création, une démarche d’éducation• , un outil du CAUE du Nord
La protection du patrimoine : outils françaisEtude du Plan de Sauvegarde et de Mise en Valeur du Marais, Apur, Février •
2004
http://www.lyon.fr•
http://www.culture.gouv.fr•
http://fr.wikipedia.org •
Le patrimoine et la planification spatiale
PLU mairie du 13e arrondissement•
dossier de presse, Transmettre et inventer aujourd’hui le patrimoine de •
demain: les protections patrimoniales dans le futur PLU de Paris, Sandrine
Mazetier, jeudi 20 janvier 2005.
Poupeau François-Mathieu, Faire du patrimoine bâti un objet de concerta-•
tion. L’expérience des Protections Ville de Paris, Revue française de sociologie
2009/01, Volume 50, p. 123-150, Paris.
Le patrimoine universel : l’UNESCOhttp://portal.unesco.org/fr•
Exemples de protections patrimoniales urbaines http://www.togo-tourisme.com/•
Agnès Serre, Belém do Para et ses quartiers : contrastes et témoignages • d’un espace dit urbain (Brésil), Autrepart (15), 2000, p. 93-115.
Institudo de Investigaçao e do Patrimonio Culturais, Cidade Velha - Centre • historique de Ribeira Grande - Cap-Vert, Proposition d’inscription sur la Liste du patrimoine mondial, Janvier 2008.
Bibliographie