c-2 les enjeux par famille - accueil - les services de l
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Parmi les espaces nonurbanisés du département,
les paysages forestiers sontcertainement les plus stablesdepuis la grande pĂ©riodedâarrachage des bois enChampagne Berrichonne. Lesbois et forĂȘts qui ont Ă©tĂ©maintenus sont gĂ©nĂ©ralementbien gĂ©rĂ©s par une sylvicultureactive ; des actions en faveurde la filiĂšre bois, ainsi que laprĂ©sence dâunitĂ©s de sciage etde traitement, confortent ces
massifs. Le dynamisme de cetteĂ©conomie sylvicole peutcependant comporter des"risques paysagers" : le critĂšreproductif et le souci de trouverune rentabilitĂ© rapideconduisent Ă modifier lacomposition des peuplements auprofit des essences Ă rĂ©volutioncourte. La question de lapĂ©riphĂ©rie des forĂȘts se posefrĂ©quemment : lâĂ©tat deslisiĂšres, lâimpact du bĂąti debordure, lâĂ©volution de lâusage
des sols en frange de la forĂȘtpeuvent correspondre Ă derĂ©els enjeux paysagers. Enfin,lâusage de la forĂȘt en ce dĂ©butde siĂšcle qui voit se poursuivreun mouvement detransformation radicale durapport de lâhomme Ă sonterritoire reprĂ©sente dans leCher, comme en beaucoup depays ruraux, une problĂ©matiquenouvelle et des enjeuxconflictuels qui mĂ©riteraientune large rĂ©flexion.
Les familles de paysages sedécomposent en deux sous-
ensembles : les paysages à unedominante et les paysagesmixtes. Dans le premier cas, leprésent chapitre expose
globalement les enjeux qui ontĂ©tĂ© relevĂ©s dans le cadre de ladescription de chaque unitĂ©(chapitre 2), analyse des pistespossibles dâactions de mise envaleur et rappelle leur
localisation gĂ©nĂ©rale. Dans lecas des paysages mixtes, lesenjeux sont pour lâessentielceux des phases paysagĂšres quiles composent et lâĂ©volution deleur rĂ©partition rĂ©ciproque.
Une relative stabilité
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LâĂ©volution des lisiĂšres, flou et banalisation
La lisiĂšre est la partie la plusvisible de la forĂȘt, le
moment de son dialogue aveclâenvironnement, elle est unpoint fort de son identitĂ©, aussiest-elle essentielle pour lâimagede ses paysages. On peutobserver une tendance gĂ©nĂ©raleĂ la simplification : leur dessin,leur dĂ©coupage, lâimbricationentre lâespace ouvert etlâespace fermĂ© tend Ă sâeffacerprogressivement. Ceci est
particuliĂšrement vrai sur lessituations de pieds de versantsoĂč de petites parcellespĂąturĂ©es se voientrĂ©guliĂšrement reboisĂ©es,transformant un jeu complexedâombres et de lumiĂšres en unemasse compacte et univoque. Lerecul de la prairie et ladiminution du cheptel au prĂ©supprime les lisiĂšres biennettes, rĂ©guliĂšrement broutĂ©espar la dent des bovins ; la
pĂ©riphĂ©rie du bois sâĂ©paissit etperd sa nettetĂ© tandis quelâenvahit la ronce (unitĂ©s 1-1 et1-2 notamment). Le mĂȘmephĂ©nomĂšne sâobserve pour leslisiĂšres internes des clairiĂšresdans lesquelles lâeffet decontraste tend Ă sâattĂ©nuer(unitĂ© 1-7). La diversitĂ©floristique dâune lisiĂšre estenfin garante de sa qualitĂ©paysagĂšre : elle est Ă la foistĂ©moignage des conditions
C-2 LES ENJEUX PAR FAMILLE
GĂNĂRALITĂS
2-1 PAYSAGES FORESTIERS
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Ă©cologiques (les sureaux,cornouillers, saules, trembles etfrĂȘnes Ă©voquent lâhumiditĂ©, lesĂ©rables champĂȘtres les solscalcaires et secsâŠ) et porteusedâun enchaĂźnement dâambiancesqui racontent les saisons : la
succession des floraisons, ladiversitĂ© des nuances defeuillages juvĂ©niles, les chatonset les teintes changeantes delâautomne, les couleurs fortesdes baies et les teintes desĂ©corces lorsque vient lâhiver ne
cessent de moduler le paysage.La tendance Ă la monoculturerĂ©sineuse sur les franges decertains massifs altĂšreprofondĂ©ment cette richesse enbanalisant lâaspect des margesboisĂ©es.
HomogĂ©nĂ©iser la forĂȘt ou prĂ©server sa diversitĂ©âŠ
La forĂȘt comme rĂ©vĂ©lateur du construit
La forĂȘt du Cher esttraditionnellement le
domaine du chĂȘne et la partiesud du dĂ©partement est le payspar excellence des grands boisde feuillus sur riche sous-bois,plantĂ©s dâessences nobles etcomposant de belles futaiesrĂ©guliĂšres. Le chĂątaignier, lehĂȘtre, le frĂȘne relaient le chĂȘnesuivant les conditions de sol etde climat pour crĂ©er un paysagede la diversitĂ© aux multiplesambiances. La forĂȘt solognotefait exception avec ses pinssylvestres, ses bouleaux et salande qui se mĂ©langent auxchĂȘnes, crĂ©ant un paysagesingulier au sous-bois clair. Cesont des forĂȘts de lumiĂšres etdâombres, chatoyantes etsouvent enrichies de belleszones humides quâentoure uncortĂšge floristique trĂšs riche ;les allĂ©es forestiĂšres qui les
traversent montrent des jeuxde profondeurs et detransparences oĂč il semble quejamais ne se rĂ©pĂšte la mĂȘmescĂšne.
Les enjeux liés au construitconcernent essentiellement
la pĂ©riphĂ©rie des massifs ;lâeffet de fond de tableausombre que produit la masseforestiĂšre rendparticuliĂšrement visibles lesĂ©difices : des teintes tropclaires ou artificielles crĂ©ent unrĂ©el conflit paysager (unitĂ©s 1-1,1-5, 1-6 et 1-7). Cela concerne
les habitations Ă proximitĂ© desbourgs de lisiĂšre et lesbĂątiments dâĂ©levage dans leszones herbagĂšres. Des Ă©tudesspĂ©cifiques de dĂ©finition decouleurs et de matiĂšres seraientnĂ©cessaires pour offrir auxĂ©difices nouveaux une lĂ©gitimitĂ©minimale.Le rapport au construitsâexprime Ă©galement par les
façons de clore les fonds privés.Les grandes propriétéssolognotes, en particulier,comportent quelques exemplesde gestion des limites ou detraitement des entréesgrandiloquentes et fortdisparates qui prennent uneimportance souvent excessive.
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2-2 PAYSAGES DE BOCAGE
PĂ©renniser la trame des haies
MaĂźtriser lâĂ©volution
La trame des haies, principalecomposante du bocage est en
recul constant. Dans denombreux cas, la qualitĂ©paysagĂšre se fonde aujourdâhuisur lâaspect insolite desilhouettes qui sont des figuresreliquaires : lignes dâarbres,sujets remarquables isolĂ©s aumilieu dâune parcelle, haiesouvertes qui offrent destransparences et uneprofondeur nouvelle au paysage.IsolĂ©es et fines, elles sont par lĂ mĂȘme fragiles. Les haiessupposent un entretien qui biensouvent nâest plus assurĂ© : ellessâĂ©paississent ou sâĂ©claircissent,sont frĂ©quemment remplacĂ©espar des clĂŽtures ou arrachĂ©eslorsque sâagrandit la mailleparcellaire. Les diffĂ©rentstypes de haies sont concernĂ©s
par les processus de rĂ©gression ;les haies composĂ©es Ă©voluentvers une basse strateenvahissante qui nâest plustaillĂ©e, ponctuĂ©e de vieux arbresqui nâont pas de remplaçantslorsquâils disparaissent. Lesarbres Ă©mondĂ©s dĂ©pĂ©rissentaprĂšs quelques annĂ©es sansentretien (le cas des saulestĂȘtards dans les zones humidesest exemplaire), les bouchuresdeviennent intermittentes ou au
contraire " montent " fautedâentretien rĂ©gulier, les lisiĂšressâĂ©paississent quand la densitĂ©de bovins Ă lâhectare devienttrop faible pour en assurer le"nettoyage". Pour maintenir lescaractĂšres identitaires de cespaysages, il conviendrait demener deux types dâactions : larĂ©gĂ©nĂ©ration de la trameexistante et sa reconstitution lĂ oĂč elle tend Ă disparaĂźtre.
Les paysages de bocage ontconsidérablement régressé
en surface. Les unitĂ©s classĂ©essous cette rubriquereprĂ©sentent les figures qui ontconservĂ© jusquâĂ notre Ă©poqueleurs caractĂšres originaux,câest-Ă -dire un rythme rĂ©gulierdâenclos, une trame de haiessignificative, un rapport intimeentre le bĂąti dispersĂ© et lerĂ©seau des haies et uneĂ©conomie fondĂ©e sur lâherbe. LessingularitĂ©s se fondent sur lamorphologie et la compositiondes haies (opacitĂ© outransparence, couleurs ettextures), la prĂ©sence ou non durelief (vues courtes ou paysagesen tableau), lâexistencedâĂ©lĂ©ments singuliers (arbresremarquables, figuresconstruites) et la dimension du
parcellaire. Certains de cescaractĂšres sont Ă peu prĂšsstables et donc pĂ©rennes(figures bĂąties, taille duparcellaire, composition deshaies) mais nombreux sont ceuxqui Ă©voluent : la densitĂ© durĂ©seau de haies, la prĂ©sencedâarbres remarquables, lâĂ©tat"dissimulĂ©" du construit etc. Laprise en compte de lâĂ©volutiondes pratiques agricoles etnotamment du recul gĂ©nĂ©ral dessuperficies toujours en herbe73
montre que ces paysages vontavoir tendance Ă Ă©voluer versdes figures mixtes etintĂ©greront Ă terme les famillesde "plaines et bocage" ou de"plaines et bois", dans lesquellesles figures bocagĂšres nâexistentplus quâĂ lâĂ©tat de trace. Laquestion qui se pose est
clairement celle de lâavenir desbocages dans le Cher et soncorollaire : Ă quelle Ă©conomie cespaysages correspondront-ils auvingt-et-uniĂšme siĂšcle ? Il y a lĂ un rĂ©el enjeu, qui est celui de ladiversitĂ© paysagĂšre dudĂ©partement. Ce nâest passeulement un enjeu esthĂ©tiqueou une nostalgique rĂ©fĂ©rence :un territoire qui perd sesspĂ©cificitĂ©s est un territoire quinie ses identitĂ©s et par lĂ mĂȘmecelles de ceux qui y vivent. Câestune question culturelle forte quine pourra ĂȘtre Ă©vitĂ©e. Lesprincipaux enjeux sont lapĂ©rennisation de la trame deshaies, le maintien de lâactivitĂ©herbagĂšre, la gestion duconstruit et la mise en Ćuvredâune rĂ©flexion sur une "nouvelleĂ©conomie du bocage ".
Formes de régression des figures végétales
73 DonnĂ©es statistiques du Recensement GĂ©nĂ©ral de lâAgriculture
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Evolution des usages et paysage forestier
La forĂȘt fut longtemps unmilieu hostile, que lâhomme ne
frĂ©quentait quâavec parcimonieou dans une Ă©conomie trĂšsparticuliĂšre. La plus grandepartie des massifs fut, jusquâauxgrandes pĂ©riodes dedĂ©frichement ou de conversionen forĂȘts de production, unmilieu impĂ©nĂ©trable Ă lâhomme,un espace sans usage. Ilnâexistait pas alors Ă proprement parler de paysageforestier car cette notionsuppose une interaction entrelâhomme et son milieu. Lepaysage nait de cetteinteraction et du regard que lacollectivitĂ© porte sur elle. Ănotre Ă©poque les usages de laforĂȘt se sont multipliĂ©s : lesyliviculteur, le chasseur, lemycologue ou le promeneur sontdevenus des usagers de lâespaceboisĂ© qui participent de deuxfaçons Ă lâĂ©laboration desfigures paysagĂšres. Dâune partparce que ces usages supposentdes amĂ©nagements (les rĂ©seauxdâallĂ©es dâexploitation, lesroutes dâaccĂšs, les sentiers derandonnĂ©e, les aires de repos ou
de pique-nique) et, dâautre partĂ cause de la posture duâregardeurâ au sens de ladĂ©finition de Marcel Duchamp,qui postulait quâune Ćuvre dâartnâest achevĂ©e que par le regardet la rĂ©appropriation duspectateur. On peut tout Ă faitĂ©tendre cette notion au paysage.Il devient alors clair que sansusage, le paysage âse dĂ©faitâ.
On peut également constaterune extension des phénomÚnesde fermeture des milieuxforestiers, soit quand la gestionest moins réguliÚre et que lemilieu devient impénétrable, soitquand le massif est enclos pourse réserver à un usage unique(en général, la chasse privée).Un exemple simple illustre biencette régression paysagÚre : uneparcelle ouverte, traitée enfutaie montre le long des routesle spectacle des hautes colonnesde ses troncs, les jeux delumiÚres dans ses frondaisons etla richesse de son sous-bois ; aucontraire, une parcelle encloseest le plus souvent ceinturée parune lisiÚre épaissie qui constitue
un mur de verdureinfranchissable et cache le cĆurforestier. La vision desprofondeurs de l'espace boisĂ©et la comprĂ©hension de sadiversitĂ© ont fait place Ă uneuniformitĂ© opaque. Le paysagerĂ©gresse jusqu'Ă disparaĂźtre. Iln'y a plus d'usage possible, laforĂȘt, isolĂ©e de l'espace publicpar une clĂŽture doublĂ©e d'unelisiĂšre Ă©paissie, ne constitueplus un paysage mais plutĂŽt unmonde clos, isolĂ© de soncontexte. Ainsi peut-onaffirmer que la spĂ©cialisationexcessive des usages se traduitbien par un enjeu paysager, quise double de surcroĂźt dâun enjeutouristique et Ă©conomique car laforĂȘt demeure lâun des attraitsessentiels du dĂ©partement.
Le dĂ©veloppement desenrĂ©sinements affecte parfoisfortement cette diversitĂ© eninstallant de vastes parcelles demonoculture dâĂ©picĂ©as ou dedouglas, gĂ©nĂ©ralementdĂ©pourvues de sous-bois quigĂ©nĂšrent un paysage boisĂ©monotone. LisiĂšres et borduresdes allĂ©es semblent alorsdâunivoques murs de verdurederriĂšre lesquels lâobscuritĂ© etla pauvretĂ© du sous-boisnâinspirent aucun dĂ©sir aupromeneur. Ces bois sonttraitĂ©s en futaies trĂšs densesqui donnent un couvert opaque.Lâabsence de lumiĂšre etlâappauvrissement des sols dus Ă
la mauvaise dĂ©composition desaiguilles crĂ©ent un milieu quasistĂ©rile : rĂ©gression paysagĂšreet Ă©cologique sâinstallentrapidement. La description desunitĂ©s a montrĂ© que cetteĂ©volution, lorsquâelle concernedes massifs que le relief rendvisibles (unitĂ©s 1-2 et 1-5) oudes bordures de voies trĂšsfrĂ©quentĂ©es (Sologne), produitune altĂ©ration globale dupaysage sur laquelle il convientde sâinterroger. Le maintiendâune diversitĂ© de peuplement,dâune mixitĂ© entre rĂ©sineux etfeuillus, mĂȘme dans les terrainsqui semblent plus propices auxpremiers, est indispensable. Il
conviendrait de dĂ©finir unepalette dâessences par unitĂ© (oupar groupes dâunitĂ©scorrespondant aux mĂȘmesconditions de milieu) qui tint Ă lafois compte des impĂ©ratifsculturaux et Ă©conomiques etdâune exigence de maintien de ladiversitĂ© paysagĂšre.
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La régression des figuresbocagÚres est
essentiellement liĂ©e Ă un reculgĂ©nĂ©ralisĂ© des prairies pĂąturĂ©eset des prairies de fauche.Lâagrandissement de la mailleparcellaire et la progression dulabour remettent en cause larĂ©partition des enclos et lerythme qui caractĂ©rise cesformes de paysage. Ă terme, lamise en culture se traduira parla disparition totale des haiesqui mobilisent du terrain etportent ombre sur les cultures.Le maintien des caractĂšresoriginaux de certaines partiestrĂšs Ă©voluĂ©es du bocage passeimpĂ©rativement par un soutiende lâactivitĂ© herbagĂšre. UnerĂ©flexion gĂ©nĂ©rale, Ă lâĂ©chelle dudĂ©partement, sur lâavenir des
productions agricoles etnotamment les filiĂšres animalesserait la seule garantie de voirperdurer certains paysagesfragilisĂ©s. Si le cĆur duBoischaut, le bocagedâembouche, la vallĂ©e deGermigny ou le Pays Fortsemblent assurĂ©s dâune relativepĂ©rennitĂ©, nombreux sont lessites qui sont en ce dĂ©but desiĂšcle Ă la croisĂ©e des chemins.La promotion dâun label dequalitĂ© (bĆufs, moutons etchĂšvres du Berry parexempleâŠ), Ă partir dâunecampagne de sensibilisation,dâaides spĂ©cifiques (fondseuropĂ©ens, mesures agri-environnementales, lagĂ©nĂ©ralisation des contratsterritoriaux dâexploitation) et
lâorganisation de filiĂšrescommerciales spĂ©cifiques,permettrait sans aucun doute demaintenir un relatif Ă©quilibreentre herbe et labour, conditionde la survie des paysages debocage. Câest Ă©galement pour ledĂ©partement un enjeuĂ©conomique Ă deux titres : lagĂ©nĂ©ralisation dâun modĂšleunique de production setraduirait inĂ©luctablement parune saturation des marchĂ©s quipĂątirait en premier lieu auxterroirs les moins adaptĂ©s Ă laculture et, par ailleurs, la qualitĂ©paysagĂšre âqui se fonde sur ladiversitĂ©- a Ă©galement unevaleur Ă©conomique, qui est celledu potentiel touristique et delâattractivitĂ© des sites.
Maintenir un Ă©quilibre entre lâherbe et le labour
Fermeture, ouverture et effet de flou
Les mutations se traduisentpar deux mouvements
apparemment contradictoires
dâouverture et de fermetureexcessives des sites et par unegĂ©nĂ©ralisation de " lâeffet de
flou " dans les parties les plusévolutives des bocages.
Un paradoxe qui nâest quâapparent
La régression des surfaces enherbe provoque un double
mouvement assez gĂ©nĂ©ral surlâensemble des figuresbocagĂšres : les terresdĂ©sertĂ©es par les animaux selivrent Ă lâemblavement lorsquele parcellaire est vaste et lesconditions agrologiquesfavorables ; le paysage sâouvre,sâinvente de nouvellesprofondeurs et une Ă©chellebeaucoup plus ample. Ă lâinverse,si le parcellaire est exigu ou les
sols peu fertiles, câest la frichepuis le boisement spontanĂ© ou lereboisement qui tendent Ă occuper le terrain, le paysage seferme, se coupe du monde etdevient impĂ©nĂ©trable. Tout sepasse comme si Ă terme nedevaient exister que deux typesde paysages, la plaine ouverte oule bois inextricable. Ce tropismevers un "paysage binaire" rendbien plus prĂ©cieuses les figuresbocagĂšres qui savent encorenous dire que câest dans la
complexitĂ© et la diversitĂ© que selit la beautĂ© de la relation entreune communautĂ© humaine etlâespace qui lâaccueille.
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Le flou comme icĂŽne de la mutation paysagĂšre
Un paysage de bocage biengéré et pleinement utilisé
montre des contours nets : leshaies sont rĂ©guliĂšrementtaillĂ©es, lâherbe est tondue parla dent des animaux, les lisiĂšresportent une marque rectilignequi correspond Ă la partierĂ©guliĂšrement broutĂ©e sous les
frondaisons, le construitsâinscrit clairement dans latrame plantĂ©e. Les premierssignes dâun dĂ©sĂ©quilibre entre ladensitĂ© de lâĂ©levage et lasurface disponible semanifestent par une attĂ©nuationde la nettetĂ© des contours. Leshaies sâĂ©paississent faute
dâentretien, les lisiĂšressâempĂątent lorsque les animauxne sont plus aussi nombreux surla parcelle, les pelouses segarnissent de ligneux et deronces, le rapport entre le bĂątiet le paysage perd sa clartĂ©, enun mot, le paysage devient flou.
Les deux termes de lâalternative : fermeture ououverture ?
Effet de flou et perte de sens du paysage
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Câest le premier terme lisibledâune mutation qui se poursuivrajusquâĂ la fermeture complĂštedu site. On peut extrapolercette notion de flou Ă lâĂ©volutiondes silhouettes villageoises :lorsquâun bourg sâentoure de
pavillons et de lotissements,câest une forme de nettetĂ© de lasilhouette qui rĂ©gresse. Cetteapparition du flou est un signedâalerte ; le territoire est entrain de changer parce quâilnâexiste plus de cohĂ©rence entre
sa forme et son usage. Laquestion du devenir est alorsposĂ©e : faut-il prĂ©server cemotif ou bien imaginer âetencadrer- la venue dâun nouveaupaysage ?
Le rapport au construit est unenjeu essentiel pour les
paysages de bocage. Ils sontissus de figures bocagĂšres quifurent mises en place entre leseiziĂšme et le dix-huitiĂšmesiĂšcle. Le construit sây estinstallĂ©, comme lâa montrĂ©lâanalyse des unitĂ©s, dans unelogique gĂ©nĂ©rale de dispersionen petits noyaux nichĂ©s dans latrame des haies. LedĂ©membrement de cette tramemet Ă nu des constructions quisemblent souvent " flotter "dans le paysage, et rĂ©vĂšle defaçon beaucoup plus claire lesbourgs et chefs-lieux quimontrent dĂ©sormais leurssilhouettes, jadis beaucoup plusdiscrĂštes. Le bĂąti, quâil soit Ă usage dâhabitation ou
dâexploitation, devient de plusen plus visible Ă mesure quesâouvre le bocage, ce qui supposeque son aspect et ses modalitĂ©sdâorganisation fassent lâobjet desoins particuliers. Plus unterritoire bocager est ouvert,plus grande devra ĂȘtre lavigilance. Cette vigilance devras'appliquer Ă deux domainesdiffĂ©rents : la planification delâurbanisme et l'attention Ă porter Ă lâaspect desconstructions. Pour ce quiconcerne la planification, larĂ©alisation dâĂ©tudes paysagĂšreset urbanistiques menĂ©es Ă lâĂ©chelle de lâunitĂ© de paysagepermettrait de fixer des rĂšglesde dĂ©veloppement cohĂ©rent quitiennent compte du site et delâaspect des silhouettes de
bourgs. Le construit dans lesĂ©carts (bĂątiments agricoles etrĂ©novation ou construction delogements neufs) devrait fairelâobjet dâun accompagnementqualitatif, dans le cadre desprocĂ©dures dâinstruction despermis de construire, qui sefonderait sur lescaractĂ©ristiques du bĂąti dechaque unitĂ©74 et sur un certainnombre de rĂšgles (implantation,adaptation au terrain, palettesde couleur, de matĂ©riaux et devĂ©gĂ©taux). Ces Ă©lĂ©mentspourraient ĂȘtre mis Ă dispositiondes concepteurs afin d'enrichirles volets paysagers des permisde construire pour en faire devĂ©ritables outils de projet etnon de simples actesadministratifs .
GĂ©rer le construit
Quelle Ă©conomie pour le bocage ?
Il semble Ă©vident que lesoutien de lâĂ©levage extensif,
pour indispensable quâil soit, nerĂ©soudra pas le problĂšme desmutations en cours et de leursconsĂ©quences. Le mouvementdâextension du labour, lafermeture de certains milieuxet le recul du linĂ©aire de haiesse poursuivra avec son cortĂšgede consĂ©quences : perte decomplexitĂ©, attĂ©nuation descaractĂšres originaux,homogĂ©nĂ©isation du territoirerural, banalisation des figurespaysagĂšres. Les portions de
bocages qui ne sont plus gĂ©rĂ©esse ferment et la question de larĂ©intĂ©gration de milieuxsauvages dans lâespace ruralrisque Ă terme de se poser. Ilconvient de rĂ©flĂ©chir Ă denouveaux modĂšles Ă©conomiquespour les bocages de demain. Lesparties les plus emblĂ©matiquesreprĂ©sentent un potentiel de"ruralitĂ© rĂ©crĂ©ative" nonnĂ©gligeable. Le tourisme vert,les conversions de fermes enrĂ©sidences secondaires ou enlieux de loisirs collectifs, la miseen place dâitinĂ©raires de
dĂ©couverte sont desalternatives qui peuventjustifier un entretien et desrestaurations partielles par lescollectivitĂ©s des motifs dubocage. Enfin il existe desproductions susceptiblesdâoccuper les parcellaires exiguset les formes bocagĂšres commeles cultures de petits fruits, lescultures Ă gibier et les formesbiologiques de lâagriculture, quipĂ©rennisent lâusage extensif dela terre, consubstantiel dusystĂšme bocager. Lacohabitation entre formes
74 voir en particulier les plaquettes âRestaurer en Pays Fort et en Sancerroisâ et âLâarchitecture rurale de la Marche et du Boischautâ (C.A.U.E. du Cher)
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bocagĂšres et cultures spĂ©cialesest possible, comme le montrelâexemple de la rĂ©gion deChĂąteaumeillant qui a suincorporer son vignoble dans unetrame de bocage. Lareconstitution de trames plantĂ©esdoit aussi poser la question de leurfinalitĂ©. Les haies linĂ©aires fines,qui produisaient du bois dechauffage ou du fourrage, nâontplus Ă jouer ce rĂŽle. Il faut sansdoute leur prĂ©fĂ©rer des bandesboisĂ©es composĂ©es dâessencesnobles adaptĂ©es aux conditions demilieu (chĂȘne, merisier, noyer,alisier, etc.) susceptibles defournir du bois dâĆuvre.
2-3 PAYSAGES DE VALLĂE
Des sites en devenir
Les paysages de vallĂ©es se distinguent par un effet de contraste avec leur entour, câest de la gĂ©ographiequâelles tiennent leur typicitĂ©, qui est par lĂ mĂȘme assurĂ©e dâune grande stabilitĂ©. Leur double fonction
ancienne dâaxes de communication et de systĂšme dâinstallation linĂ©aire du construit sont Ă©galement inscritspour longtemps dans le territoire. Cependant, lâapparition de nouvelles formes dâorganisation autour desgrandes infrastructures routiĂšres et les mutations radicales du dĂ©veloppement de lâurbanisation les priventdu rĂŽle prĂ©pondĂ©rant qui fut le leur pendant les siĂšcles passĂ©s. Si le rapport Ă lâextĂ©rieur des paysages devallĂ©e est relativement stable, leur structure interne subit de profondes modifications qui en font des sitesen devenir, Ă la recherche dâun nouvel Ă©quilibre.
Gestion des fonds de valléeet fermeture du milieu
La fermeture des berges
Les mutations rĂ©centes de lâoccupation des fonds devallĂ©es ont des consĂ©quences lourdes sur le
paysage : le recul gĂ©nĂ©ralisĂ© des pĂąturages dans leszones humides laisse la place Ă des peupleraies ou Ă des boisements spontanĂ©s qui ont pour effet defermer les sites et de rĂ©duire considĂ©rablement lavisibilitĂ© des cours dâeau. Les vallĂ©es se montrentessentiellement par leurs galeries boisĂ©es et cesmilieux perdent une grande partie de leur diversitĂ©.Les accĂšs aux riviĂšres se rarĂ©fient et lâentretien desberges est de moins en moins assurĂ©.
LES ENJEUX PAYSAGERS DU DĂPARTEMENT page 562
La pratique des riviĂšres par lespĂȘcheurs ou les promeneursdevient de plus en plus malaisĂ©e.Il conviendrait de conduire unedouble rĂ©flexion visant Ă dĂ©senclaver les cours dâeau et Ă
rĂ©tablir un rapport Ă©quilibrĂ©entre les pleins et les vides :soit imaginer une gestioncollective des accĂšs et desberges par les communes, lessociĂ©tĂ©s de pĂȘche ou les
associations naturalistes, soitexaminer les possibilités deréimplanter des parcourspùturés, en concertation entreles collectivités locales et laprofession agricole.
Les nombreux creusements desabliĂšres, en particulier dans
les vallĂ©es du Cher et de lâYĂšvre,transformĂ©es aprĂšs exploitationen bases de loisirs ou en plansdâeau de pĂȘche gĂ©nĂšre unĂ©vident problĂšme de seuil : leursystĂ©matisation est un facteurde banalisation du paysage. LeSchĂ©ma DĂ©partemental descarriĂšres a Ă©tĂ© approuvĂ© le 7mars 2000, il a comme objectif
de mettre un terme Ă cesextensions. NĂ©anmoins, laquestion de lâusage de ces plansdâeau en fin dâexploitationdemeure posĂ©e car lamultiplication des bases deloisirs ne peut ĂȘtre dans tous lescas une rĂ©ponse pertinente. UneĂ©tude gĂ©nĂ©rale dâaffectation deces sites devrait ĂȘtre menĂ©e,qui poserait la question demaniĂšre transversale dans une
logique dâamĂ©nagement duterritoire et de dĂ©veloppementdurable, et dĂ©boucherait sur derĂ©els projets de paysageprenant en compte le rapport ausite de ces plans dâeau, qui tropsouvent apparaissent comme desanecdotes paysagĂšres malmaĂźtrisĂ©es.
SabliĂšres et plans dâeau
Pratiques culturales et protection des biotopes
Risques et fragilités
Les vallées les plus amples, quiont constitué une vaste
plaine alluviale (val de Loire) ouqui sâinstallent dans une vastedĂ©pression sans rupture francheavec le terroir environnant(basse vallĂ©e de lâArnon,certaines partie du val dâAuron,lâessentiel de lâĂ©ventail deBourges) voient le lit mineur dufleuve ou de la riviĂšre misdirectement en relation avecdes secteurs livrĂ©s Ă la grandeculture. Câest le cas pour laLoire, dont le lit majeur sâestrĂ©cemment converti au labour etpour les autres riviĂšresmentionnĂ©es dans les zones deChampagne Berrichonne quâellesbaignent. Les pratiques
culturales intensives setraduisent par lâutilisationmassive dâintrants, dont on a pumesurer les effets sur lebiotope de la Loire : progressiondes herbus, rĂ©gression desbancs de sable, modification dela composition des verdiaux auprofit des espĂšces neutrophiles,apparition de phĂ©nomĂšnes dedominances qui dĂ©sĂ©quilibrentles cortĂšges floristiques7 5.Cette altĂ©ration est cependantattĂ©nuĂ©e en Loire par la relativeĂ©paisseur de la ripisylve quiĂ©vite tout contact direct entreles champs cultivĂ©s et le coursdâeau ; en revanche, dans le casde la basse vallĂ©e de lâArnon oude la vallĂ©e de lâAuron, la
confrontation est parfoisbeaucoup plus directe, mettantparfois les rampes detraitement en contact directavec la riviĂšre. Il seraitsouhaitable dâexaminer lapossibilitĂ© de neutraliser unebande de terrain autour descours dâeau les plus sensibles quiserait traitĂ©e en prairie (defauche ou pĂąturĂ©e) et recoupĂ©ede bandes boisĂ©es afin deralentir la course des eaux deruissellement chargĂ©es depolluants vers les riviĂšres.
75 voir unité 3-6, page 213
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Le débordement du construitsur les versants est un
phĂ©nomĂšne rĂ©cent qui a Ă©tĂ©observĂ© dans plusieurs cas(vallĂ©e du Cher, vallĂ©e delâYĂšvre, vallĂ©e de lâAuron dans larĂ©gion de Dun, versants delâAubois au droit des bourgs) ;lâactivitĂ© industrielle sâestdepuis longtemps installĂ©e dansces sites (vallĂ©e du Cher). LesvallĂ©es connaissent donc desmutations en terme dedĂ©veloppement qui nĂ©cessitent
un accompagnement spĂ©cifique.La vallĂ©e prĂ©sente lâavantagedâĂȘtre un axe fĂ©dĂ©rateur, unerĂ©elle entitĂ© paysagĂšre quipermet de valider desstratĂ©gies intercommunales derĂ©flexion et dâaction. DesĂ©tudes conduites Ă lâĂ©chelle dechaque vallĂ©e permettraient dedisposer dâun volet paysager desdiffĂ©rents documentsdâurbanisme opĂ©rationnel descommunes riveraines ainsi quedâun cadre de lecture du paysage
pour alimenter les procĂ©duresdâinstruction des permis deconstruire. On pourrait ainsifixer un certain nombre derĂšgles simples : respecter leslignes de forces du site, Ă©viterles implantations en tĂȘte deversant, Ă©tablir des lignesplantĂ©es qui Ă©vitent les effetsde mitage, inventer dessystĂšmes de continuitĂ© avec lesnoyaux existants, proscrire lesĂ©difices volumineux sur lespentes, etcâŠ
Vallées et urbanisation
Si lâoccupation agricoletraditionnelle tend Ă
reculer, les paysages de vallĂ©ene sont pas sans avenir. Nousavons vu que leur situationprivilĂ©giĂ©e dans la gĂ©ographiedĂ©partementale en faisait desinstruments de dĂ©couverte etde comprĂ©hension du territoire :la vallĂ©e de lâArnon raconte lagĂ©ographie physique, la vallĂ©e duCher parle de lâhistoire et de lagĂ©ographie humaine, la vallĂ©e delâAuron fait Ă©vĂ©nement dans la
plaine de Champagne⊠à samaniĂšre, chacune de ces unitĂ©sde paysage tient son rĂŽle decharniĂšre et de rĂ©vĂ©lateur despaysages quâelle traverse. Il y alĂ un vĂ©ritable enjeu et unechance Ă saisir : ce sont sansdoute les vallĂ©es qui seraient lesmeilleurs supports possibles descircuits de dĂ©couvertepermettant de revitaliser leszones bocagĂšres en dĂ©shĂ©rence.Les tronçons de vallĂ©e, quitraversent les paysages souvent
ressentis comme monotones desplaines de culture, doiventprofiter de leur statut de"contrepoint vert" pouraccueillir des usages centrĂ©s surlâidĂ©e de nature. Dans undĂ©partement qui sâorientenettement vers les diversesformes du tourisme vert, lespaysages de vallĂ©e offrent Ă lafois un outil de connaissance etun support inĂ©galable.
Un rÎle à jouer dans les paysages départementaux
Une sensibilitĂ© liĂ©e Ă lâextrĂȘme visibilitĂ©
Les plaines livrées à la grandeculture sont globalement
stables puisquâelles ontpratiquement atteint le stadeultime de leur Ă©volutionpaysagĂšre. Elles sont dâabordlues comme une marqueterieample de parcelles aux textureset aux couleurs changeantesavec les saisons oĂč la vue semblese perdre en dâinaccessibleslointains. Ces paysages secaractĂ©risent par leur extrĂȘmevisibilitĂ© : tout objet (bĂątiment,bosquet, arbre isolĂ©, pylĂŽne ouchĂąteau dâeauâŠ), prend ici une
importance singuliĂšre. Nousavons vu que les nuances quicaractĂ©risent et individualisentles diffĂ©rents paysages deplaine se fondent sur de subtilesdiffĂ©rences de relief, sur laprofondeur des horizons ou lerapport aux limites. CâestĂ©galement la prĂ©sence defigures vĂ©gĂ©tales ou construitesqui donne une mesure Ă lâimmensitĂ© et une personnalitĂ© Ă chaque unitĂ© : lâune secaractĂ©rise par la prĂ©sence denoyers de plein vent, une autrepar la qualitĂ© du bĂąti de ses
fermes ou de ses villages, unetroisiĂšme parce quâelle comportedes reliques de figuresbocagĂšres qui composent undessin singulier sur lâĂ©tenduedes terres labourĂ©es. Ce sontdonc des paysages qui sontautant dĂ©terminĂ©s par un rĂ©seaudâobjets que par leur structurespatiale proprement dite.Lâaspect de ces objets, leurpĂ©rennitĂ© ou leur fragilitĂ©figureront les principaux enjeuxdes plaines.
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2-4 PAYSAGES DE PLAINE
Toutes les unités de cetensemble comportent des
figures vĂ©gĂ©tales plus ou moinsĂ©vanescentes, qui vont du bois Ă
lâarbre isolĂ© en passant par deshaies reliques, de petitsalignements dâarbres, desbandes boisĂ©es et des vergers
aux abords des villages et desfermes.
Le fragile enjeu des figures végétales
Lâimportance dâun arbre solitaireâŠ
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Il existe un paradoxe entre lerĂŽle paysager de ces figures etleur fragilitĂ©. Dans la plupartdes cas, elles ne correspondentplus Ă un usage dans le territoirequâelles habitent et sont doncdâune Ă©vidente fragilitĂ©, etcependant elles le qualifientdâune indicible maniĂšre. Latendance naturelle dâĂ©volutionest une disparition progressivede lâensemble de ces scĂšnesreliquaires, câest-Ă -dire unebanalisation de ces paysages qui
Ă terme finiront par tous seressembler. Les champagnes, quisont dĂ©jĂ perçues par beaucoupcomme des " non-paysages " yperdront les seuls Ă©lĂ©mentssusceptibles de leur apporterdiversitĂ© et lisibilitĂ©. Il estimportant de prendre desmesures de sauvegarde de cesstrates arborĂ©es, voire de lesrenforcer. Un relevĂ© prĂ©cis etune inscription au titre desespaces boisĂ©s classĂ©s dans lesdocuments dâurbanisme seraient
ici indispensable. Cependanttoutes ces figures nâont pas lamĂȘme importance, un inventaireraisonnĂ©, conduit dans le cadredâune Ă©tude paysagĂšre desplaines permettrait unenĂ©cessaire hiĂ©rarchisation. Ilserait possible dâenvisager, dansdes secteurs oĂč cela estcompatible avec les contraintesdâexploitation, de reconstituertout ou partie de cette trameverte.
LisibilitĂ© et arbres dâalignement
Sâil semble difficile dâimaginerque lâon puisse envisager de
reconstituer ou mĂȘme depĂ©renniser un systĂšme de haiesau beau milieu des champs decĂ©rĂ©ales, il est possibledâenvisager une intervention en
limite du domaine public, câest-Ă -dire le long des routes. Laphotographie ci-dessous montrelâimportance que prend un simplealignement de noyers le longdâune allĂ©e ; pourquoi ne pasrestaurer une partie des grands
alignements qui existĂšrentjusquâau milieu du siĂšcle dernieret permettaient, enhiĂ©rarchisant le rĂ©seau viaire,de comprendre le territoire etde sây repĂ©rer.
Une allée plantée de noyers : un événement dans la plaine
Il existe des moyens techniquespour rĂ©pondre Ă un besoin desĂ©curitĂ© tout en reconstituantun paysage lisible et cohĂ©rent.Les croquis ci-dessous montrentdes dispositions susceptibles derendre compatibles lesimpĂ©ratifs de sĂ©curisation de laroute et la plantation dâarbresdâalignement. Ces croquis ont
Ă©tĂ© Ă©tablis en tenant comptedes normes actuelles desĂ©curitĂ©, Ă©dictĂ©es par laDirection des Routes auMinistĂšre de l'Equipement.On peut Ă©galement imaginerdâaccompagner certains axesroutiers par des haies en plein,composĂ©es dâune basse stratedense et dâune strate arborĂ©e,
qui ne constitueraient pas unobstacle frontal pour unvéhicule en sortie de route.
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Planter⊠malgrĂ© toutâŠ
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La ferme en son Ă©crin
Le construit, une histoire de silhouettes, une question de qualité
Le principe de la visibilitéporteuse de sensibilité
paysagĂšre sâapplique, bienentendu, aux objets construits.Les fermes anciennes ou lesvillages Ă©taient entourĂ©s dâunsocle plantĂ© qui les ancrait dans
le paysage en accompagnant leurrapport avec le sol. LâĂ©chelle desbĂątiments, les textures et lescouleurs, filles de matĂ©riauxtirĂ©s du sous-sol, installaient undialogue dâune grande cohĂ©renceentre les Ă©difices et le site. Les
modalitĂ©s de groupement desmaisons dâhabitation et lesbĂątiments dâexploitationparachevaient une idĂ©edâharmonie et dâĂ©quilibre.
Les figures dâurbanisationnouvelle qui se dĂ©veloppent surtoute la partie des paysages deplaine jouxtant lâagglomĂ©rationde Bourges (unitĂ©s 4-1 et 4-5)et sur les pĂ©riphĂ©ries desbourgs qui Ă©maillent les routesprincipales sont perçues Ă grande distance, et la façondont se lit leurs silhouettes estun enjeu important. Il estindispensable dâintroduire iciune dimension de projet globalqui pourrait prendre sa placedans les volets paysagers desdocuments dâurbanisme (schĂ©made cohĂ©rence territorial de
Bourges, plans locauxdâurbanisme, etcâŠ). Une Ă©tudegĂ©nĂ©rale sur le thĂšme " habiterles paysages de plaine ", quifixerait quelques principessimples (prĂ©voir des modes degroupements cohĂ©rents aveclâexistant, composer lessilhouettes en harmonie avec leslignes de force du paysage,exprimer clairement les limitesĂ partir de structures plantĂ©es,Ă©laborer des palettes decouleurs, de matĂ©riaux et devĂ©gĂ©taux adaptĂ©s au milieu enĂ©vitant les conifĂšres et autresessences exotiques etcâŠ), serait
sans doute la rĂ©ponse la mieuxadaptĂ©e. Concernant le construitse pose Ă©galement la questiondes bĂątiments agricoles, souventde grand volume (silos et autresbĂątiments de stockage), pourlesquels des principes devolumĂ©trie et de colorationdevraient ĂȘtre dĂ©finis. Enfin, lespaysages de plaine sontsoulignĂ©s par le passage desdeux couloirs de lignes EDF quipourraient susciter une politiquede plantations compensatoiresdes abords de certaines routes(voir unitĂ©s 4-1 et 4-5).
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2-5 PAYSAGES DE RELIEF
Les paysages de relief ont pardéfinition une structure
gĂ©nĂ©rale stable car leurprincipal dĂ©terminant est lagĂ©omorphologie, dont lâĂ©volutionse rĂ©fĂšre Ă une Ă©chelle detemps qui dĂ©passe largementcelle de lâhomme. Cependantlâune des caractĂ©ristiquesprincipales de ces sites est laprĂ©sence constante de paysagesen tableau : les versantsmontrent lâoccupation du solcomme un dessin projetĂ© surune paroi. La richesse ou la
pauvretĂ© du tableau conditionnela force ou la faiblesse delâenchaĂźnement des motifs quepropose le paysage. Une figuredâĂ©volution rĂ©gressive se voittrĂšs clairement, sans doutebeaucoup plus que dans unbocage Ă plat dans lequel lesprofondeurs des vues sontfaibles et nâoffrent pas devision dâensemble. Les paysagesde relief proposent aussi unegrande diversitĂ© de postures duregard : on change trĂšsrapidement dâambiance selon
que lâon se dĂ©place sur unecrĂȘte, un versant ou un fond devallon. DiversitĂ© et complexitĂ©caractĂ©risent ces sites quiproposent en particulier unpassage constant entre deszones fermĂ©es et ouvertes biendiffĂ©renciĂ©es. Enfin, ladisposition en tableau met biensouvent en Ă©vidence leconstruit. Les enjeux paysagersse fondent sur cette sensibilitĂ©particuliĂšre.
PrĂ©server lâintĂ©gritĂ© des tableaux et la diversitĂ©
Lâimpact de la dĂ©prise agricole sur un paysage en tableau : dĂ©but d'enfrichement
La simplification des tableaux paysagers
Les paysages de reliefcomportent deux phases : la
premiĂšre est forestiĂšre etrenvoie aux enjeux de ces typesde paysage ; la stabilitĂ© globalenâest pas remise en cause, unetendance Ă la monoculturerĂ©sineuse peut apparaĂźtrecomme un appauvrissement danscertains secteurs ponctuels desMonts de la Marche ou du cĆurdu Pays Fort. La seconde phase,agricole, est gĂ©nĂ©ralement detradition herbagĂšre etbocagĂšre, elle subit de pleinfouet les consĂ©quences delâĂ©volution rĂ©gressive de cespratiques dans le dĂ©partement.La mise en Ă©vidence par ladisposition en tableau rendbeaucoup plus sensiblequâailleurs cette Ă©volution : lacomplexitĂ© des scĂšnes et enparticulier le dĂ©coupage deslisiĂšres qui semble dĂ©rouler Ă lâinfini la transition entre lessĂ©quences forestiĂšre etbocagĂšre se dĂ©lite peu Ă peu. La
perte de complexitĂ© du paysagedevient extrĂȘmement visibledans les paysages de relief. Lespaysages en tableau sont depuissants rĂ©vĂ©lateurs desprocessus dâĂ©volution. Lepremier signe de la dĂ©prise
agricole sur une parcelle enherbage est lâapparition desronces, qui sur un versantmarquĂ© se distinguentimmĂ©diatement et laissent uneimpression dâabandon.
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De la mĂȘme façon, la progressiondu labour et lâarrachage deshaies, la rĂ©gression des lisiĂšreset la conquĂȘte des bois par lesfutaies rĂ©sineuses, ensimplifiant les tableaux,altĂšrent les qualitĂ©s despaysages de relief. Il existe unesensibilitĂ© particuliĂšre desversants les plus en vue, qui setraduit Ă©galement par le rĂŽleque jouent les objets construits,mis en Ă©vidence par les reliefs.Les pentes les plus exposĂ©es
(versant de la cuesta du PaysFort, de la cĂŽte de Saint Amand,flancs de la Motte dâHumbligny,etc.) doivent faire lâobjet dâunsuivi rigoureux de leur Ă©volution.Ce sont des sites prioritaires quimĂ©ritent des mesures deprotection et dâaccompagnement(aides au maintien dâune activitĂ©agricole diversifiĂ©e, chartequalitative des bĂątimentsagricoles, maĂźtrise dudĂ©veloppement du construit)dâautant plus indispensables que
ce sont le plus souvent des sitesreconnus et porteurs delâattractivitĂ© de la rĂ©gion quâilsoccupent. Les potentialitĂ©stouristiques et naturelles dudĂ©partement sont fortementdĂ©terminĂ©es par des sites quiappartiennent Ă cet ensemble (lePays Fort, les gorges de lâArnon,les Monts de la Marche enparticulier).
Le risque de fermeture des fonds de vallons et dépressions
Il existe une deuxiĂšmemaniĂšre de connaĂźtre et
dâapprĂ©cier les paysages derelief, qui est celle de la relationintime : lorsque lâon pĂ©nĂštredans le cĆur de ces paysages,les fonds de vallons, gorges etdĂ©pressions offrent des scĂšnesdĂ©licates de petites poches deprairies, de clairiĂšres ou deruisseaux entourĂ©s de fraĂźchesprairies piquetĂ©es de vieux
saules et recelant parfois devĂ©ritables joyauxarchitecturaux. La rĂ©gressiongĂ©nĂ©rale du pĂąturage quioccupait la plupart de ces sitesles conduit Ă se fermer parboisement spontanĂ© ou parreplantation. Câest toute unedimension du paysage qui peu Ă peu sâefface et une Ă©chelle delecture qui disparaĂźt.Ă lâinstar de ce qui a Ă©tĂ© proposĂ©
pour les paysages de vallĂ©e, ilconviendrait de procĂ©der Ă unĂ©tat des lieux qui permettraitde recenser les scĂšnes encoreintactes et les moyens dâĂ©viterquâelles ne sâaltĂšrent (parcourspĂąturĂ©s, entretien des bords deriviĂšre, rĂ©flexion sur lesmodalitĂ©s dâune gestionspĂ©cifique, etc.).
La fermeture des fonds et la perte de compréhension du paysage
LES ENJEUX PAYSAGERS DU DĂPARTEMENT page 570
Les paysages viticoles et legrand verger de la région de
Saint Martin d'Auxignyconstituent un ensemble depaysages qui peuvent Ă termedevenir des victimes de leurpropre rĂ©ussite, bien Ă©loignĂ©s encela des secteurs de bocage quirisquent de disparaĂźtre. Ce qui aĂ©tĂ© observĂ© en premier lieu surle vignoble du Sancerrois mĂ©riteune rĂ©flexion gĂ©nĂ©rale. Le soucide rentabilitĂ© conduit lesexploitants de ces culturesspĂ©ciales devenues hautementtechnologiques Ă utiliser despratiques oublieuses du tempsqui patiemment façonne lespaysages. Nous sommes entrĂ©sdans une Ăšre oĂč les alĂ©as sont demoins en moins tolĂ©rĂ©s. Lespratiques culturales intensiveset lâabandon des techniques desauvegarde des sols,incompatibles, semble-tâil avecla mĂ©canisation, conduisent Ă mettre en pĂ©ril la qualitĂ© decertains sols Ă long terme tout
en simplifiant Ă lâexcĂšs lesfigures paysagĂšres. De la mĂȘmefaçon, le fait que les critĂšresdâaspect priment sur ceux dugoĂ»t a conduit Ă privilĂ©gier lesvariĂ©tĂ©s amĂ©ricaines en bassestiges, au dĂ©triment de ladiversitĂ© variĂ©tale ancienne. CephĂ©nomĂšne a entraĂźnĂ© le grandverger vers la quasimonoculture, qui prĂ©sente unrisque dâappauvrissement dumilieu Ă plus ou moins brĂšveĂ©chĂ©ance et unehomogĂ©nĂ©isation banalisante dupaysage.Enfin sur les terroirs les plusprestigieux, la "rançon dusuccĂšs" se lit dans les figuresbĂąties souvent quelque peuostentatoires et dont lavolumĂ©trie nĂ©cessitĂ©e par lesnormes techniques contreditbien souvent lâharmonie du sitedâaccueil.Une remise en question decertains de ces signes duprogrĂšs et de la modernitĂ© sera
certainement indispensable pourmaintenir un Ă©quilibre entre labeautĂ© des sites et la qualitĂ©des produits, car lâĂ©conomie dela rĂ©gion sâappuie sur ces deuxfondements complĂ©mentaires.
2-6 PAYSAGES DE VIGNES ET VERGERS
2-7 PAYSAGES URBANISĂS
Ecrire les limites dâagglomĂ©ration
La clarté du rapport entre lesvilles et le paysage rural doit
se fonder sur une redéfinitiondes limites ; à partir des imagesà terme que définiront lesdocuments de planification, ilfaudrait définir une typologieurbaine des quartierspériphériques qui évite leseffets de mitage
(dĂ©veloppements de Vierzon etde Saint Amand sur le coteauoriental) et mettre en place unsystĂšme de limites Ă©crites :fronts urbains clairs et formespaysagĂšres dâaccompagnement,(en particulier dans le cas deBourges et de ses extensionsfutures vers le sud).
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Les zones comprises entre lesgrandes infrastructures
routiĂšres et les limites actuellesdâagglomĂ©ration sont desterritoires dâenjeux. Prochesdes Ă©changeurs de lâautoroute A71, elle reprĂ©sentent des zonespotentielles de dĂ©veloppementmĂȘme si, dans le cas de celui deSaint Amand il nây a pas Ă ce jourde mutation visible. Ilconviendrait de mettre en placesur ces secteurs (en particulierlâespace compris entre le sud deBourges et la rocade de
contournement) une stratĂ©gievolontaire qui organise ledĂ©veloppement et maintiennedes espaces paysagers detransition entre les zones bĂątieset les rocades. Cette question sepose pour Vierzon au nord (A 71)et Ă lâouest (A 20), sur desterrains qui se trouventenclavĂ©s entre ville et route. Icise posera Ă terme la question dela fin de la ville : doit-elle ou nontransgresser ces nouveauxremparts que lui a offertlâĂ©poque contemporaine?
Lâimage de lâagglomĂ©ration sefondera sur sa façon dâĂ©tablir unrapport paysager avec ces axes.Dans les deux cas (Bourges etVierzon), les enjeux nĂ©cessitentune rĂ©flexion du type plan depaysage sur la thĂ©matique "faut-il ici finir la ville"? Dans le cas delâagglomĂ©ration de Saint Amand,la mise en place dâune procĂ©duredâencadrement dudĂ©veloppement de la zone delâĂ©changeur et de la partieoccidentale dâOrval sâimpose.
Maintenir les coupures vertes
Accompagner les approches externes
GĂ©rer les interstices
Le paysage interne desagglomérations se fonde
souvent sur un subtil Ă©quilibreentre zones bĂąties et zonesvertes : câest tout le principe dela forme radiale de Bourges , durapport entre Vierzon et sariviĂšre et de lâimportance desversants et collines boisĂ©es danslâagglomĂ©ration SaintAmandoise. Ces coupures vertessont Ă protĂ©ger et Ă valoriser et
ce type de disposition doitprĂ©valoir dans la dĂ©finition desfuturs quartiers endĂ©veloppement. Un plan decomposition paysagĂšre desfutures extensions, nourri parune analyse des trames vertesexistantes serait lâinstrumentde cette indispensableprĂ©caution. On peut remarquer Ă ce propos que la procĂ©dure desSchĂ©mas de CohĂ©rence
Territoriale, qui permet laconstitution de coupures vertesest une réelle occasion demettre en place ces paysagesd'équilibre entre urbanisationet trame végétale.
La façon dont les villes sontperçues et comprises depuis
lâextĂ©rieur est fondatrice deleur identitĂ©. Nous avons vu queBourges exprimait largement sasilhouette sur son entour. Lesvues trĂšs dĂ©gagĂ©es la mettentdirectement en contact aveclâimmensitĂ© de la plaine dâunemaniĂšre parfois ambiguĂ«. Lamise en place de plantations
dâalignement, qui fut Ă©voquĂ©edans le chapitre des plaines,permettrait de recrĂ©er unehiĂ©rarchie des rapports entre lacapitale et son arriĂšre-pays,pour retrouver les fondementsdu territoire : les routes royalesque fait apparaĂźtre la carte deC a s s i n i7 6 Ă©taient toutesplantĂ©es dâun double alignementdâarbres.
76 voir chapitre 1, carte page 30
LES ENJEUX PAYSAGERS DU DĂPARTEMENT page 572
2-8 PAYSAGES DE BOCAGES BOISĂS
2-9 PAYSAGES DE FORETS HUMIDES
Ces trois unitĂ©s composentdâune part un ensemble
particulier des paysagesforestiers solognots, qui ne sâen
distinguent que par la prĂ©sencedes milieux humides et lecortĂšge vĂ©gĂ©tal qui sây rattacheet dâautre part par un milieu
tout Ă fait exceptionnel enBerry, les marais de Contres.
Ce sont soit des paysages danslesquels des figures de
bocages sâintercalent avec desbois dont la taille estcomparable Ă celle des parcellesen herbe, comme le sud duBoischaut (unitĂ© 8-1), soit desfigures bocagĂšres installĂ©esautour de masses boisĂ©es plusimportantes (unitĂ©s 8-2 et 8-3).Dans les trois cas, la phaseboisĂ©e est relativement stableet prĂ©sente les caractĂ©ristiqueset les enjeux des paysagesforestiers. La phase bocagĂšreproprement dite est assez
stable dans lâunitĂ© 8-1 grĂące Ă lataille gĂ©nĂ©reuse des parcelles etau dynamisme de lâĂ©levage desbĂȘtes Ă viande en embouchedans le Boischaut ; en revanchedans les deux autres unitĂ©s, leparcellaire est de taille plusrĂ©duite et les signes dâabandonde gestion sont nombreux,surtout dans lâunitĂ© 8-2 quiappartient aux terroirs pointĂ©ssur la carte des dĂ©prises de lapage 497. La marqueterie debois et dâherbages nâest pasfavorable Ă une conversion versle labour, câest donc le processus
de rĂ©gression par fermeture dubocage qui sâexprime ici. Cesdeux unitĂ©s subissent uneĂ©volution vers le boisement sansrĂ©elle gestion. Lâutilisation Ă desfins cynĂ©gĂ©tiques est possibleen ce qui concerne les margessolognotes et une mise Ă lâĂ©tudede nouvelles modalitĂ©s degestion et dâentretien sâimposedans le cas de " lâancien bocage "de ChĂąteauneuf, qui pourraitbĂ©nĂ©ficier du potentieltouristique liĂ© Ă la vallĂ©e du Cheret Ă la petite citĂ© couronnĂ©e parson chĂąteau.
Aux marges de la Sologne
Le principal enjeu des deuxunitĂ©s qui composent cetensemble se fonde sur unecertaine tendance Ă lafermeture, voire mĂȘme Ă lâenfermement : les clairiĂšres dubassin de la Sauldre rĂ©gressentet la station de Nançay sembleavoir bien du mal Ă gĂ©rer sarelation avec le monde
extĂ©rieur. Dans les deux cas, ilsâagit de paysages attractifs quisemblent ne pas oser utiliserleur potentiel⊠faut-il y voir uneffet de lâambiance solognotequi tend Ă privatiser le paysage?Il semble que Nançay ait unebelle carte touristique Ă jouer.Une mise en valeur des pratiquesde promenade, de randonnĂ©e, de
pĂȘche et de contemplation dâunmilieu naturel extrĂȘmementriche devrait pouvoir ĂȘtreenvisagĂ©e sur lâensemble de laSologne y compris sur lesparties de la rĂ©gion situĂ©es dansles dĂ©partements voisins. LesunitĂ©s 9-1 et 9-2 pourraientĂȘtre des supports de cetterestructuration qui devrait
Les forĂȘts humides solognotessont des milieux moins
favorables aux essencessylvicoles que les stationssĂšches, et apparaissent plutĂŽtcomme des marges favorisĂ©espar une grande richessebiologique. La flore y estdiversifiĂ©e et ce sont de trĂšsriches refuges pour la faune ettout particuliĂšrement pour lesoiseaux. Les milieux humides et lâavifaune
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2-10 PAYSAGES DE PLAINES BOISĂES
La troisiÚme unité de cetensemble, les marais de
Contres, est un milieuexceptionnel et fragile, qui
constitue l'un des rarespaysages du département pourlesquels il conviendrait deproposer une protection totale.
Ces paysages sont composéscomme des mosaïques
binaires, qui combinent lestermes ultimes de lâĂ©volution despaysages ruraux dudĂ©partement, la plaine cultivĂ©eet le bois. Ils sont donc faits dedeux phases dont nous avons vuquâelles Ă©taient les figures lesplus stables que lâon puisserencontrer dans le Cher. Ce sontdonc des paysages dont lagĂ©omĂ©trie varie peu mais quinĂ©anmoins subissent pourcertains dâentre eux de trĂšsfortes Ă©volutions. Une seule deces unitĂ©s, la campagne de Dun(unitĂ© 10-1) connaĂźt desmodifications radicales de larĂ©partition entre plaine et bois :la premiĂšre progresseconsidĂ©rablement au dĂ©trimentdes seconds. Dans les six autrescas, la rĂ©partition entre lespleins et les vides ne se modifiepas ou trĂšs peu, il sâagit de taillisde production ou de bois dechasse qui ont toutes chances deperdurer grĂące Ă leurs
dimensions ou du fait desconditions pĂ©dologiques, mais laphysionomie gĂ©nĂ©rale du paysageĂ©volue fortement pour deuxraisons essentielles. La premiĂšrede ces raisons est la grandeouverture visuelle de ces unitĂ©spaysagĂšres, qui donne uneimportance particuliĂšre au bĂąti.La campagne de Dun (unitĂ© 10-1),lâinterfluve Cher-Arnon (unitĂ©10-2), et surtout le piĂ©mont duPays Fort (unitĂ© 10-4) en raisonde la mise en Ă©vidence par lerelief, sont fortement affectĂ©spar de nouvelles constructionstrĂšs visibles. Il y a lieu, commedans les paysages de plaineouverte soumis Ă cette pression,de conduire des Ă©tudes visant Ă encadrer les volets paysagersdes documents dâurbanisme etdes permis de construire endĂ©finissant de maniĂšre prĂ©ciseles modalitĂ©s de groupement etdâimplantation, les effets desilhouette et les palettes dematĂ©riaux ou de vĂ©gĂ©tauxdâaccompagnement. La seconde
figure dâĂ©volution est ladĂ©gradation des figuresvĂ©gĂ©tales ; il sâagit de tracesbocagĂšres dans le cas de laplaine ponctuĂ©e (unitĂ© 10-3) etde la plaine de Dun (unitĂ© 10-1)et dâun processus dâaltĂ©rationdes lisiĂšres, souvent dĂ» auxexcĂšs des enrĂ©sinements (unitĂ©10-2). Une protection desreliques bocagĂšres dans lesdocuments dâurbanisme sembleici sâimposer. Enfin il fautsouligner que malgrĂ© la stabilitĂ©relative du " rapport plein vide ",deux des unitĂ©s de cetensemble, la mosaĂŻque de Graçayet la plaine dâentre Cher etArnon (unitĂ©s 10-4 et 10-7), fontpartie des rĂ©gions en dĂ©prise etmontrent les seuls exemples dâunrecul des figures de plaine auprofit de boisements spontanĂ©snon gĂ©rĂ©s, qui sont nĂ©s delâenfrichement. La question de lagestion de ces terroirs vacommencer Ă se poser avecacuitĂ©.
Le sanctuaire des marais
susciter une large concertationentre tous les acteurs de cespaysages. Pourquoi ne pasimaginer la mise en place dâunitinĂ©raire de dĂ©couverte du
milieu naturel, dĂ©clinĂ© enparcours, qui permettrait deconnaĂźtre et de contemplerlâavifaune ? Nây aurait-il pas lĂ unheureux contrepoint Ă©cologique
Ă lâobservatoire, mĂȘlant ainsi lesdeux termes dâun regard globalsur la nature ?
Un milieu fragile à protéger
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Les deux paysages paradoxauxet insolites qui réunissent les
contraires et sâinstallent pourlâun comme un Ă©vĂ©nement (lesbuttes dans la plaine, unitĂ© 12-2)et pour lâautre comme le gardiendu sanctuaire sancerrois (unitĂ©12-1), ont des personnalitĂ©ssuffisamment fortes pourĂ©voluer sans disparaĂźtre. Ils ne
sont pas stables dans le dĂ©tail(le narthex nâa pas fini desâouvrir et de se simplifier et lesbuttes sont soumises Ă lapression de dĂ©veloppement duconstruit) mais le sontassurĂ©ment dans ce qui fondeleurs caractĂšres originaux. Ilconvient cependant, comptetenu de la grande visibilitĂ© que
leur confĂšrent le relief et unetotale ouverture, de prendredes mesures de contrĂŽle vis-Ă -vis de la qualitĂ© desconstructions qui les habitent etde prĂ©voir un accompagnementplantĂ© adaptĂ©, composĂ© Ă partirdâessences indigĂšnes, quipermette de reconstituer dessilhouettes cohĂ©rentes.
2-12 PAYSAGES DE CONTRASTE PLAINE RELIEF
2-11 PAYSAGES DE PLAINES ET BOCAGES MĂLĂS
Ces trois unités sont lesfigures presque finales de
lâĂ©volution rĂ©gressive desbocages, le dernier stade avantque ne sâinstalle dĂ©finitivementlâopenfield. Elles sontconstituĂ©es par des lambeauxbocagers perdus dans la plaine.Si lâon souhaite que ces unitĂ©sconservent un minimum detypicitĂ©, il est indispensable deprendre des mesuresconservatoires en deux temps :protection des figuresrelictuelles et Ă©laboration dâunestratĂ©gie de renouvellement.Celle-ci devra sâappuyer sur uneĂ©tude paysagĂšre qui dĂ©finira latrame Ă mettre en place, sadensitĂ©, le type dâessences Ă
utiliser et la localisation desinterventions. Une dĂ©marche dutype plan de paysage, quiinclurait Ă©galement unerĂ©flexion sur le construit et ledĂ©veloppement, semble adaptĂ©eĂ cette problĂ©matique dans lecas des unitĂ©s 11-1 et 11-2 etaux schĂ©mas qui figurent enannexe de l'atlas. On peutimaginer deux systĂšmescomplĂ©mentaires : une trame quiparle du passĂ© et sâappuie sur lesreliques existantes et une tramequi sâinstalle sur les bords dechemins, dans lâesprit de ce qui aĂ©tĂ© proposĂ© pour certainspaysages de plaine. Ainsi aurait-on trouvĂ© lĂ un moyendâexprimer la substance de ces
paysages singuliers, qui vont aubout dâune Ă©volution vers laplaine mais nâen continuent pasmoins par quelques signes tĂ©nus,Ă parler de leur histoire passĂ©e.Pour ce qui concerne lâest duPays Fort, lâanalyse de lâunitĂ© 11-3 a montrĂ© quâil Ă©tait questiondâun choix radical : faut-ilaccepter et accompagner lamutation vers une image deplaine qui regarde vers la Loireet le Sancerrois ou faut-ilprĂ©server, sauvegarder,remplacer ce qui peut lâĂȘtre ?