association pou lra santÉ publique du quÉbec · de la prévention en regard de la santé mentale...

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ASSOCIATION POUR LA SANTÉ PUBLIQUE DU QUÉBEC WA 400 C714 1989

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Page 1: ASSOCIATION POU LRA SANTÉ PUBLIQUE DU QUÉBEC · de la prévention en regard de la santé mentale au travail. MARIE-CLAIRE CARP ENTIER-ROY, sociologu 7e 9 Le collectif de métier:

ASSOCIATION POUR LA

SANTÉ

PUBLIQUE DU

QUÉBEC

WA 4 0 0 C 7 1 4 1 9 8 9

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SANTÉCOM

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ASSOCIATION POUR LA SANTÉ PUBLIQUE DU. QUÉBEC

COMPTE-RENDU DU COLLOQUE

tenu les 9 et 10 novembre 1989

L'HEURE JUSTE EN SANTE-SECURITE DU TRAVAIL £SST)

INTENSIFIER L'ACTION!

INSTITUT NATIONAL DE SANTÉ PUBLIQUE DU QUÉBEC CENTRE DE DOCUMENTATION.

MONTRÉAL

3958 rue Dandurand, Montréal, Québec H1X 1P7 w (514) 593-9939 Télécopieur : (514) 725-2796 _ ..

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ASSOCIATION POUR LA SANTÉ PUBLIQUE DU QUÉBEC

TABLE DES MATIERES

. Page

Remerciements Programme du colloque Un point de vue global sur le régime québécois en matière .de santé et sécurité du travail. JEANNE-D'ARC VAILLANT, avocate .... . 2 Réaliser une approche communautaire en santé-j-sécurité du travail dans un contexte légal et institutionnel. MICHEL PERREAULT, Ph.D. Université de Montréal 67 La psychopathologie du travail: une autre approche de la prévention en regard de la santé mentale au travail. MARIE-CLAIRE CARP ENTIER-ROY, sociologue 79 Le collectif de métier: les règles et les savoir-faire de prudence. JEAN-PIERRE BRUN, IRSST 93 Le retrait préventif de la travailleuse enceinte... au coeur des débats actuels. MICHELINE BAIL, CLSC Centre-Ville 109 La prévention au travail... ça commence à l'école. SOLANGE PR0N0V0ST, Centrale de l'Enseignement du Québec 119 L'université et la formation des travailleurs en santé et sécurité au travail. LUC DESNOYERS, département des sciences biologiques, UQAM 131 Prendre le risque de participer: un secteur, le forage au diamant. DENISE PLAM0ND0N, CSST... . 139 La prévention, ça rapporte! MICHEL PERUSSE, Université Laval 157 Adapter notre milieu de travail à nous et non nous adapter au milieu de travail. NICOLE BERNECHE, Union des ouvriers et ouvrières du vêtement pour dames .* 167 Le médecin responsable: vision d'une grande entreprise. MICHEL GUILLEMETTE, m.d., Produits forestiers Canadien Pacifique 171

3958 rue Dandurand. Montréal, Québec H1X 1P7 tr (514) 593-9939 Télécopieur : (514) 725-2796 . .

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TABLE DES MATIERES (suite)

Page

Le défi des années '90: l'intégration stratégique de la SST à l'ensemble de la société québécoise. FLORIAN OUELLET, Université de Montréal...: 179 Compte-rendu-synthèse des derniers colloques en SST:

- YVES GINGRAS, Groupe Nursing Beauce-Amiante, Etchemins 191

- CELINE LAMONTAGNE, Confédération des Syndicats Nationaux.. 197

- PIERRE PHENIX, Association des médecins du travail 209

Prévention, paritarisme' et efficacité en gestion de la santé-sécurité au travail. MARCEL SIMARD, Université de Montréal . 217 L'environnement au-delà des zones de travail, expériences vécues. GILLES MARTIN, Syndicat canadien de la Fonction publique 237 L'accord du libre-échange et son impact sur la santé et la sécurité du travail au Québec: la prévention, un enjeu commercial? JEAN-LOUIS BERTRAND, ASSTSAS ; 249 Perspectives et orientations:

- GHISLAIN DUF0UR, Conseil du Patronat du Québec....... 261. - CLEMENT G0DB0UT, Fédération des Travailleurs du Québec... 271 - Echanges avec l'assistance 275

Synthèse des ateliers: • - LUCIE DAGENAIS .. 277

Perspectives et orientations: - . MARC DIONNE,

ministère de. la Santé et des Services sociaux...-. 291 - YVES SEGUIN,

Ministre du Travail ' 297 Echanges avec l'assistance 301

Synthèse partielle des conférences. 303

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ASSOCIATION POUR LA SANTÉ PUBLIQUE DU QUÉBEC

Remerciements généraux

.L'Association pour la Santé Publique du Québec tien à remercier les conférencières et conférenciers eux-mêmes puisque c'est là qualité de leur présentation qui a finalement assuré le succès de ces journées de réflexion.

Nous voudrions aussi remercier ceux qui ont contribué à organiser ce colloque en participant au comité de travail mis sur pied à cette fin, soient madame Lise Langevin et messieurs Robert Bouchard, Jean.Goyette, Florlan Ouellet, Richard Paquin, Mario Tardif.et Denis St-Amand.

Sincères remerciements également, à la Direction générale de la préven tion et des services communautaires du Ministère de la Santé et des Services sociaux pour son support financier pour défrayer une partie des coûts d'organisation du colloque.

Remerciements spécifiques

L'Association pour la Santé Publique du Québec.tient à remercier le Centre de recherche et de statistiques sur le marché du travail du Ministère du Travail pour la subvention permettant de publier les actes de ce colloque.

3958 rue Dandurand, Montréal, Québec H1X 1P7 « (514) 593-9939 Télécopieur : (514) 725-2796

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Q U O I ?

1989 : 10ème anniversaire de l'adoption par le

gouvernement du Québec de la loi sur la Santé et la

Sécurité du travail.

L'ASPQ invite les intervenant-e-s

en ce domaine à se rassembler afin de favoriser,

au-delà des divergences institutionnelles,

de nouvelles alliances et de .profitables collaborations.

L'heure est à l'action!

Quels sont, après 10 années de mise en application, les acquis de cette expérience que plusieurs pays nous envient? Quelles leçons en tirer et quelles perspec-tives s'ouvrent dans ce champ d'interven-tion?

L'HEURE EST À L'AVANCEMENT!

[ O M M E N Ï ?

t f * U * t ? * H *

• Conférence "diagnostic", • discussion en atelier, • échange avec des conférenciers de mar-

que, • allocutions de représentants des secteurs

patronal et syndical, du ministère du Tra-vail et du ministère de la Santé et des Services sociaux. Dans chaque atelier, un animateur veillera

à s'assureisque chaque participant-e puisse faire valoir ses aspirations et ses projets et permettra, à partirdes analyses présentées, de porter un regard plus ouvert sur différentes expériences "vécues" afin de dégager des perspectives d'action.

La synthèse des débats en ateliers sera assurée par une personne attitrée et remise en plénière. À partir de ce matériel, i'ASPQ va retourner aux participant-e-s la synthèse des débats de même que les propositions et recommandations qu'elle adressera aux autorités concernées.

L'HEURE EST AUX PRISES DE DÉCISION.

Association pour la Santé Publique du Québec

6865 Saint- Denis, Montréal. H2S 2S3

COLLOQUE

L'heure juste en Santé-Sécurité du Travail (SST)

Intensifier l'action!

t ! H 4 t ! i t * t f * U *

Date : 9 et 10 novembre 1989

Lieu: Hôtel Loews Le Concorde 1225 Place Montcalm, Québec, G1R 4W6

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J E U D I matin, 9 novembre 1989

8 DO Accueil 9:00 Ouverture du colloque

Jean-Pierre Bélanger, président ASPQ 9:15 "Un point de vue global sur le régime québécois en

matière de santé et sécurité du travail*. Jeanne-tf Are Vaillant ex-présidente de la Commission cTAppel en matière de santé et sécurité du travail.

10:15 Pause-santé 1030

JEUDI après-midi, 9 novembre 1989 ; VENDREDI, 10 novembre 1989

A t e ! i e r s

D-1 Micro et macro analyse du système actuel, gestion et organisation du travail. Diane Berthelette, Université de Montréal (GRIS).

E Réaliser une approche communautaire dans un con-texte légal et institutionnel. , Michel Perreauft, chargé de cours en SST, éducation permanente, Université de Montréal.

G La psychopathologie du travail:

Marie-Claire Carpentler-Roy, Coflecfif de recherche en psychopathologie du travail. Jean-Pierre Brun, IRSST.

H-1 Le retrait préventif... au coeur des débats actuels. Mchedne Bail, CLSC Centre-Vine.

L La prévention au travail... ça commence à récote. Solange Pronovost, vice-présidente à la CEO.

N Les conséquences de ta division sexuelle du travail sur la santé des travailleuses. Karen Messing, UQAM-GRABIT.

0 Formation des travailleurs. Luc Desnoyers, Sciences biologiques, Université de Montréal.

13:30 Ate';e's

A-1 Les forces du marché comme incitatif à la prévention: scienoe et fiction. Brian Jenner,A.Q.T.A.

A-2 Prendre le risque de participer: un secteur, le forage au diamant Denise Plamondon, C.S.S.T.

B La prévention... ça rapporte. Michel Pérusse, Université Laval. Nicole Bemèche, Union des ouvriers et ouvrières du vêtement pour dames.

F Le médecin responsable: vision d'une grosse entreprise. Michel Girfllemette, Produits forestiers Canadien pacifique.

G La psychopathologie du travail : le rapport travail et santé mentale. Marie-Claire Carpentler-Roy, Collectif de recherche en psychopathologie du travail. Jean-Pierre Brun, IRSST.

H-2 La CSST et le retrait préventif (diaporama). Bernard Chabot, CSST.

K Le défi des armées '90: l'intégration stratégique de la santé et de la sécurité du travail. Florlan Ouellet, Université de Montréal.

N Les conséquences de la division sexuelle du travail sur la santé des travailleuses. Karen Messing, UQAM-GRABIT.

12:00 Dîner libre

1530 Pause-santé 16:00 Compte-rendu-synthèse des derniers colloques en SST:

YvesGIngras. Groupe Nursing Beauce-Amiante-Etchemins Céline Lamontagne. Confédération des Syndicats Nationaux Pierre Phénix. Association des médecins du travail.

1730 Clôture de la première journée

830 Accueil 9:00

A-1 Les forces du marché comme incitatif à la prévention: science et fiction. Brian Jenner, A.Q.TA

B La prévention... ça rapporte. Mchet Pérusse, Université Laval. Nicole Bemèche, Union des ouvriers et ouvrières du vêtement pour dames.

C Se concerter... une voie vers la rentabilisation des ressources. ' Marcel Pépin, Université de Montréal.

D-2 Prévention, paritarisme et efficacité en gestion de la santé, sécurité du travail. Marcel Slmard, Université de Montréal (GRASP-SST).

I L'environnement, au-delà des zones de travail. Qussal Samak, CSN. Gilles Martin, S.C.F.P.

K Le défi des années *90: Tintégration stratégique de la santé et de la sécurité du trav&il. Florlan Ouellet, Université de Montréal.

L La prévention au travail... ça commence à l'école. Solange Pronovost vice-présidente à la CEO.

M Libre-échange et santé-sécurité du travail: en cfconscrire clairement les impacts, (conférencier à confirmer)

1030 Pausè-santé 11 DO Perspectives et orientations: (plénière)

-te point de vue patronal :Ghlslaln Dufour. - te point de vue syndical : Louis Laberge. échanges avec rassistance.

1230 Dînef libre 14:00 Synthèse des ateliers : Lucie Dagenafs. 14:45 Perspectives et orientations: (plénière)

• Ministère de la Santé et des Service sociaux - Ministère du Travail : M. le ministre Yves Séguin, échanges avec l'assistance.

16:15 Clôture du colloque.

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"Un point de vue global sur le régime.québécois en matière de santé et sécurité du travail"

Conférence prononcée lors du Colloque organisé par l'Association pour -la santé publique du Québec

• •

"L'heure juste en santé et sécurité du travail • (SST): intensifier l'action"

les 9 et 10 novembre 1989

POUR LA PRESSE Reproduc£ion_c3e_la_conclusion_seulement

Jeanne d'Arc Vaillant Avocate

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"Un point de vue global sur le régiie québécois en matière de santé et sécurité du travail"

Conférence prononcée lors du Colloque organisé par 1 'Association pour la santé publique du Québec

"L'heure juste en santé et sécurité du travail (SST) : intensifier l'action"

les 9 et 10 novembre 1989

Jeanne d'Arc Vaillant Avocate

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Table des matières

Première partie : De 1885 à la réforme * 4

I. Historique ... . ... 4

II. Les grandes lignes de la réforme 9

2.1 Quelles sont donc les grandes lignes de cette réforme? 11

Deuxième partie : Dix ans après la réforme .... 16

I. La responsabilité première des parties 16

1.1 Les objectifs ..... 16

1.2 Les règles du jeu 19

1.3 Les mécanismes de concertation 23

II. Organisation et dispensation des services aux

travailleurs et aux employeurs 29

2.1 La CSST , 29

2.2 Les services 33

2.2.1 L'indemnisation * , 33

2.2.2 Les services de prévention 34

.A. Information, formation 34 B. Recherche 35 ' C. Santé au travail 37 D. Inspection 46

Troisième partie : La Commission d'appel en matière de lésions professionnelles 48

Notes 55

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2

Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs,

C'est avec plaisir que j'ai accepté l'invitation de participer à

titre de conférencière à votre Colloque: "L'heure juste en santé-sécu-

rité du travail (SST): intensifier l'action".

Je vous livre aujourd'hui une réflexion qui résulte de près de

quinze ans de travail à différents niveaux dans les secteurs de la

santé, des services sociaux, de la santé au travail, et au sein d'un

tribunal administratif siégeant en appel des décisions de la Commission

de la santé et de la sécurité du travail (CSST).

Mon propos est sans prétention, il résulte de mon expérience. Je

veux tout simplement partager avec vous mon point de vue sur le régime

québécois en. matière de santé et sécurité du travail.

La question est posée: "Quels sont, après dix années de mise en

application, les acquis de cette réforme que plusieurs pays nous

envient? Quelles leçons .en tirer et quelles perspectives s'ouvrent dans

ce champ d'intervention?".

D'entrée de jeu, permettez-moi de placer cette conférence sous le

signe de cette affirmation contenue dans le message inaugural, pronon-

cée par un grand premier ministre du Québec, M. René Lévesque, le 8

mars 1977: "2 'économie qui préténdrait encore faire passer l'homme

après les machines serait vouée à l'échec".

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Je vous présenterai donc, au cours de cet exposé, un point de vue

global sur le régime québécois en matière de santé et sécurité du

travail.

Je ne peux pas le faire adéquatement sans rappeler l'expérience du

passé. Nous esquisserons d'abord, un bref historique pour ensuite

brosser les grandes lignes de la réforme. Ce retour aux sources cons-

titue un précieux instrument de connaissance et de réflexion, qui nous

permettra de mieux comprendre les enjeux actuels du système de santé et

de sécurité du travail. Et par la suite, nous nous interrogerons donc

sur les acquis de la réforme dix ans après, quelles leçons devons-nous

en tirer, quel diagnostic devons-nous poser, quelles perspectives

s'ouvrent devant nous? Nous le ferons en deux temps, savoir en premier

lieu en traitant.des objectifs, des règles du jeu, des mécanismes de

concertation comme responsabilité première des parties, et dans un

deuxième temps, nous examinerons l'organisation et la dispensation des

services qui doivent être mis à la disposition" des .parties en vertu de

la' loi. Nous traiterons également, de façon succincte, de la Loi sur

les accidents du travail et les maladies professionnelles adoptée en

1985 et dé la Commission drappel en matière de lésions professionnelles

que nous présenterons brièvement en troisième partie.

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Première partie

De 1885 à la réforme

I. Historique Au cours de ce premier point, nous allons remonter dans le temps.

Cette démarche nous apparait nécessaire afin de nous permettre de mieux

contextér la période actuelle. De plus, rappelons ce mot de Borges:

"Nous sommes faits en grande partie de mémoire. Cette mémoire est

faite en grande partie d'oubli".

Remontons l'horloge du temps, non pas de dix ans, mais d'un

siècle. Ainsi, nous nous retrouvons au cours de la seconde moitié du

XIXe siècle, alors que l'industrialisation s'amorce peu a peu au

Québec. Cette industrialisation se fonde sur une utilisation intensive

de la main-d'oeuvre: des problèmes de santé et de sécurité au travail

apparaissent, tels l'usure prématurée, alcoolisme, etc. causés par de

très longues'heures de travail (treize heures par jour, six jours par

semaine) et par l'emploi de façon abusive d'un nombre considérable de

femmes et d'enfants.

C'est, en 1885 que la première loi visant directement la santé et

la sécurité des travailleurs est adoptée. Il s'agit de L'Acte pour

protéger la vie et la santé des personnes employées dans les manufac-

tures [(1885), 48 Vict. c. 32].

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L'article 3 de cette loi édicté ce qui suit:

Il n'est pas permis de tenir une manufacture de manière que la vie de qui que ce soit qui y est employé soit en danger, ou de façon que la santé de ceux qui y sont employés soit probablement en danger d'être permanemment compromise.

Cette loi s'appliquait à tous les établissements industriels sauf aux

petites entreprises familiales. En vertu de cette loi, des inspecteurs

pouvaient être nommés avec des pouvoirs d'enquête, d'inspection et avec

également le pouvoir de rendre des ordonnances dans certains cas.

Cette loi, qui aura peu d'effets au début, a eu le grand mérite de

dénoncer.une situation intolérable et d'y apporter un certain nombre de

solutions.

Alain Pontaut commente ainsi ce qu'on appelait à l'époque "L'Acte

des manufactures":

Pour tolérante qu'elle futr cette première législa-tion de contrôle heurte de front la conception du libéralisme économique selon laquelle c'est le patronat et non l'État qui doit fixer les règles du monde du travail. (—J'1'*

( . . . ) ce "libéralisme" nocturne qui. considère comme inhérents au travail la maladie, 1 'accident, la mort .du travailleur. ( — ) i 2 )

En 1892, L'Acte à l'effet d'amender la loi des mines est adopté.

En 1894, deux lois des plus importantes pour l'époque en santé et

sécurité des travailleurs sont adoptées. Il s'agit de la Loi relative

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6

aux édifices publics et dé la Loi relative aux établissements indus-

triels. De nouveaux règlements sont promulgués. Une unité spéciale

d '.inspection est créée pour assurer l'application des Règlements

concernant l'inspection des chaudières à vapeur/ soupapes de sûreté,

manomètres, etc. Ajoutons que la Loi relative aux établissements

industriels édicté que les établissements industriels "(**.) doivent

être construits et tenus de manière à assurer la sécurité du personnel

", elle prévoit également la nomination d'inspecteurs et de médecins

hygiénistes pour veiller à son application.

Par ailleurs, dès cette époque, l'intervention de l'État s'est

imposée: les-principaux textes législatifs en témoignent, ceux de 1885,

1892, 1894 précités. Les interventions .de l'État ont résulté de

l'apparition de problèmes sérieux de santé et de sécurité du travail.

Ces problèmes furent mis en relief par la Commission royale sur les

relations du travail avec le capital au Canada qui a été mise sur pied

en.1886, par le premier ministre MacDonald.

Pour la suite, il faudra attendre la révolution tranquille pour

que la santé et la sécurité du travail refassent véritablement surface.

La première moitié du XXe siècle peu fertile en nouvelles législations

en santé-sécurité du travail, le sera toutefois en matière d'indemnisa-

tion des victimes d'accidents du travail, comme nous le verrons ci-

après.

C'est en Allemagne, de 1883 à 1889, que prend naissance le premier

système d'assurances sociales obligatoires en.matière d'accidents de

travail. Le 6 juillet 1884 est adoptée la loi sur l'assurance-acci-

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7

dents. Avec cette loi, les notions de responsabilité de l'employeur

s'il y a eu faute de sa part disparaît, pour être remplacée par celle

du risque professionnel.

Ainsi, la victime n'a plus à faire la preuve de la fauté, mais en

contrepartie, la réparation se fera sur des bases forfaitaires.

L'employeur doit s'assurer, obligatoirement et la gestion du système

d'assurances sociales s'effectue par une organisation administrative

propre de caractère public, avec participation des représentants des

assurés et des employeurs. C'est à l'époque, une première mondiale.

De plus, ajoutons que "l'uii des mérites de 1'assurance-accidents alle-

mande est d'avoir, dès le début, associé la réparation et la préven-

tion". <3>

Revenons maintenant au Québec, en matière d'indemnisation, ce

n'est qu'en 1909 qu'est adoptée la Loi concernant les responsabilités

des accidents dont les ouvriers sont victimes dans leur travail et la

réparation des dommages qui en résultent. Cette loi reposait sur la

théorie du risque professionnel.

En 1923, le gouvernement abroge la loi de 1909 et en adopte deux

nouvelles, savoir: La loi concernant les accidents du travail (S.Q.

1928, c. 79) et la Loi concernant la Commission des accidents du

travail (S.Q. 1928, c. 80). Cette nouvelle législation n'instituant

pas un régime de responsabilité collective des employeurs, elle était

insatisfaisante pour le mouvement des travailleurs.

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C'est en 1931 que la Loi des accidents de travail est adoptée et

rend par ses dispositions les employeurs collectivement responsables

des accidents. Cette législation visait à garantir une indemnisation

sûre et rapide des victimes d'accidents du travail et de maladies

industrielles. Elle donne à la Commission des accidents du travail un

nouveau mandat de gérer un fonds d'indemnisation auquel devraient

contribuer les employeurs. Elle introduit les notions de prévention

des accidents et de réadaptation des accidentés.

Cette réforme de 1931 constitue le premier jalon du système actuel

de santé et de sécurité du travail par la création d'un régime univer-

sel d'assurances. Le mécanisme de cette législation repose sur deux

principes:

(1) Celui dit. du "no fault" qui abandonne la relation entre l'accident et "la faute mais qui maintient pour l'employeur une responsabilité économique à l'égard du travailleur accidenté qui, lui, renonce en contrepartie à son droit de poursuite.

(2) 'Celui qui vise à faire assumer le coût de la réparation par 1'ensemble des producteurs économiques (employeurs) par le biais d'un régime d'assurances obligatoire et universel, administré par un organisme public: la Commis-

. sion des accidents du travail.

Une nouvelle perception de l'accident de travail s'établissait,

fondée sur l'interdépendance de ce dernier avec la production écono-

mique et sur la co-responsabilité collective de tous les employeurs à

l'égard de l'ensemble des dangers et aléas de la production.

Page 19: ASSOCIATION POU LRA SANTÉ PUBLIQUE DU QUÉBEC · de la prévention en regard de la santé mentale au travail. MARIE-CLAIRE CARP ENTIER-ROY, sociologu 7e 9 Le collectif de métier:

9

Au chapitre de l'inspection, en 1938, un Service d'inspection des

camps forestiers est mis sur pied; à son apogée en 1955, il compte 27

inspecteurs. En 1939, .un Service d'inspection des mines est institué

pour voir à l'application des Règlements concernant la salubrité et la

sécurité du travail dans les mines et les carrières..

Ce n'est qu'au début des années soixante-dix qu'un renouveau se

fait sentir en santé et sécurité du travail par la multiplicité des

lois<4), nouvelles ou refondues, et de règlements.

Dans les années '70, dans la foulée des études<s>, à la suite de

nombreuses tragédies'6> survenues dans les usines, les mines, les

chantiers de construction, à la suite des revendications du mouvement

syndical: une réforme s'impose. Elle se traduit par le dépôt en 1978

d'un Livre blanc*7> qui propose une réforme globale dans le domaine de

la santé et de la sécurité au travail.

*

II. Les grandes lignes de la réforme Il convient, à ce moment-ci, de laisser la parole au Livre blanc.

Il sera, intéressant un peu plus loin de vérifier si la problématique

élaborée dans le Livre blanc a été modifiée ou non et dans quel sens.

Nous citons des extraits du Livre blanc qui posent le diagnostic dans

le domaine de la santé et de la sécurité du travail, en 1978:

(...) Inadéquation entre les moyens investis et les besoins réels des milieux de. travail (...) {B)

(...) N'est-il pas révélateur de constater qu'à quarante ans d 'intervalle, deux commissions d'enquête (Montpetit et Beaudry) ont jeté un même cri d'alarme au sujet de la négligence entretenue à l'égard de la. santé au travail? (...) <9>

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10

(...) Nous avons vu que le domaine de la santé et de la sécurité au travail est actuellement régi par sept lois et vingt règlements, dont l'application est• confiée à six administrations .distinctes (...) <10)

(...) Le régime actueJ favorise très peu la parti-cipation des employeurs et des travailleurs (...) ( , 1 >

(...) Il faut également déplorer l'absence de cueillette sys t ém'a ti que d ' informa tion (.-..) Il n'existe pas non plus de tableau d'ensemble des facteurs de risqué auxquels sont exposés les tra-vailleurs du Québec (...) il2)

( ; L'insuffisance des services de santé à la disposition du. milieu de travail est un autre problème aigu (...) Tous les travailleurs ne béné-ficient pas de services de même qualité (...) <13ï

(...) Alors que le régime d'indemnisation dispose de budgets et d'effectifs considérables, centra-lisés au sein d'un même organisme, la prévention voit ses minces effectifs dispersés entre plusieurs organismes. Il va là un déséquilibre qu'il est urgent de redresser (...) <14>

Une réforme globale s'impose. Comme société, nous avions besoin,

à l'époque, d'un nouveau contrat social qui assurerait la part de

chacun et interpellerait tous les acteurs du monde du travail à relever

le défi d'une démocratisation de la prévention.

A la suite du Livre blanc, le gouvernement déposait devant

l'Assemblée nationale du Québec, le 20 juin 1979, le Projet de loi sur

la santé et la sécurité du travail (projet de loi 17) qui fut adopté le

21 décembre 1979. Ce projet de loi, tout comme "le projet de loi

42"<19> en 1985, a fait l'objet de longs débats difficiles et houleux.

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2.1 Quelles sont donc les grandes lignés de cette réforme? Cette réforme repose d'abord et avant tout sur la "participation

active et volontaire du milieu de travail".<•»*> Elle introduit dans le

milieu de travail des principes démocratiques en reconnaissant la

valeur et la dignité de la personne sur les lieux mêmes de travail, là

où les citoyens et les citoyennes passent une grande partie de leur

vie. Il s'agit ici du respect de droits fondamentaux inscrits dans la

Charte des droits et libertés de la personne.<17 >

Ainsi, les objectifs visés par la réforme sont édictés à l'article

2 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail et nous citons:

La présente loi a pour objet l'élimination à la source même des dangers pour la santé, la sécurité et 1 'intégrité physique des travailleurs. Elle établit des mécanismes. de participation des travailleurs et de leurs associations, ainsi que dés employeurs et de leurs associations à la réali-sation de cet objet.

Toute cette législation se fonde sur deux grands principes, savoir:

La prévention des dangers relatifs à la santé, à la sécurité et à l'intégrité physique des travailleurs;

La prise en charge par les parties intéres-sées, travailleurs et employeurs, de l'élimi-nation à la source des dangers.

Ce cadre juridique constitue un changement fondamental, comme nous

l'avons vu précédemment, par rapport à la législation antérieure qui ne

s'attaquait que de façon partielle aux causes des accidents de travail

( 1 )

( 2 )

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et des maladiés professionnelles. De plus, les droit6 de gérance sont

désormais limités en ce domaine par la reconnaissance du principe de la

parité.

Afin de permettre une prise en charge de la santé et de la sécu-

rité au travail, par le milieu de travail lui-même, la nouvelle légis-

lation définit clairement les droits et obligations des travailleurs,

employeurs, propriétaires et fournisseurs. La législation antérieure

était quasi muette relativement aux droits dès travailleurs.

Le nouveau régime repose donc sur la participation des travail-

leurs et des employeurs. Les mécanismes de participation des travail-

leurs et des employeurs sont définis: création- d'un comité paritaire de

santé et de sécurité au sein de certaines catégories d'établissements

de plus de vingt (20) travailleurs, déterminés par règlements, avec

pouvoirs décisionnels*18> sur certains éléments, et la mise sur pied

d'associations sectorielles paritaires (A.S.P.). Les instruments

prévus pour faire en sorte que le monde du travail assume lui-même la

responsabilité première des mesures de santé et de sécurité qui lui

sont nécessaires, sont le programme de prévention, lequel doit

comprendre entre autres les programmes de formation et d'information,

et le programme de santé spécifique, et la nomination d'un représentant

à la prévention, pour certaines catégories d'établissements. Ces

mécanismes de prévention qui ne s'appliquent qu'aux secteurs réglemen-

tés, constituent la responsabilité première des parties.

Par ailleurs, pour pallier à la fragmentation des responsabilités,

et pour assurer la dispensation dès services aux travailleurs et aux

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employeurs dans l'esprit- de là réforme dont "l'objectif ultime, le seul

gui convienne, c'est l'élimination des causes d'accident et de

maladie"*1 9 >, le gouvernement a opté pour une restructuration au niveau

central de l'ensemble des responsabilités administratives. Il a donc

créé la Commission de la santé et de la sécurité au travail: "oi> seront

représentés les travailleurs et les employeurs et qui assumera toutes

les responsabilités de prévention et d'indemnisation".*20>

L'orientation est clairement définie:

L'actuelle Commission des accidents du travail sera transformée en une Commission de la santé et de la sécurité au travail. Il ne s'agit pas là d'un simple changement de,nom, mais de la volonté ferme du gouvernement d'accorder à la prévention des accidents du travail et des maladies profession-nelles une importance beaucoup plus grande que celle qu'elle possède dans le cadre actuel de la Commission des accidents du travail et d'assurer la participation des travailleurs èt des employeurs à la définition et à la gestion des politiques de santé et de sécurité au travail.<21 >

Les services qui doivent être mis à la disposition des travail-

leurs et des employeurs se regroupent sous trois chefs: la prévention,

l'inspection et l'indemnisation.

Nous pouvons immédiatement préciser qu'en matière d'indemnisation

et de réadaptation des victimes d'accidents de,travail et de maladies

professionnelles, le gouvernement du Québec en 1978 n'était pas prêt à

formuler des propositions précises. Il faudra attendre en 1985, pour

que le troisième jalon du système de santé et de sécurité au travail

soit posé par l'adoption de la Loi sur les accidents du travail et les

maladies professionnelles (L.R.Q., c. S-2.1).

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Rappelons que les services de prévention comportent trois volets:

l'information, la formation, la recherche et les services de santé.

La CSST a des responsabilités relativement à l'information et la

formation; entre autres, elle doit collaborer avec les associations

sectorielles paritaires, les comités'de santé et de sécurité ... Au

niveau de la recherche, le mandat, depuis 1980, est principalement

assumé par l'Institut de recherche en santé et en sécurité du travail

(IRSST). Dans le champ de la santé au travail, la CSST a, en vertu de-

la loi, comme partenaire pour assurer les services nécessaires à la

mise en application des programmes de santé au travail, le réseau

public de santé et de services sociaux.

En conclusion à cette première partie, nous constatons que ...

cent ans dix ans ... aujourd'hui, quel contraste y a-t-il entre un

progrès scientifique, technologique qui est à s'approprier l'espace et

la lente évolution des mentalités qui ne semblent faites que d'oubli

et d'éternels recommencements? ...

Cette réforme qui est une victoire du sens commun collectif sur

l'ignorance et les préjugés croit fondamentalement en la nature humaine

en faisant reposer tout l'édifice sur une démocratisation de la préven-

tion. "Ceux gui ne peuvent se rappeler le passé, a dit un sage, sont

condamnés à le répéter

Au-delà du libellé de la nouvelle législation qui reflète le

consensus social de l'époque, le sens profond et novateur de la réforme

est d'introduire un idéal démocratique dans le milieu de travail. Le

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travailleur dans son milieu de travail a le droit d'être respecté dans

sa santé, sa sécurité et son intégrité physique. Si c'est utopique,

alors notre démocratie l'est et la Charte des droits et libertés de la

personne également. Ce sont là des valeurs fondamentales, auxquelles

nous nous devons dé souscrire.

L'accident ne doit plus être perçu comme inhérent-au travail ni

comme une fatalité que doit assumer le travailleur s'il veut gagner sa

vie mais comme un aléa de la production que nous devons tenter d'élimi-

ner. Le patronat a une responsabilité économique à l'égard du travail-

leur accidenté. Le patronat s'assure contre les risques de.lésions

professionnelles par le biais d'un régime d'assurances obligatoire et

universel dont le principe remonte à 1884. Les travailleurs, en

contrepartie renoncent à leur droit de poursuite. L'État, fixe les

règles du jeu. Le régime nous semble juste et équitable. En bout de

piste, ce sont les consommateurs qui en défraient les coûts — D'où

l'intérêt pour les travailleurs, les employeurs, et la société toute

entière d'oeuvrer "à 1 'élimination à la source même des dangers pour la

santé, la .sécurité et l'intégrité physique des travailleurs

Nous avons pu au cours de cette première partie cerner la problé-

matique, définir les priorités d'action lors de la réforme, en

comprendre le dynamisme propre et surtout revenir au grand principe qui

soutient tout l'édifice soit l'élimination à la source des dangers pour

la santé, la sécurité et l'intégrité physique des travailleurs. Nous

sommes prêts à procéder à la deuxième partie de notre exposé, et à

examiner la situation qui prévaut dix ans plus tard.

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Deuxième partie t

Dix ans après la réforme

Nous procéderons à notre analyse en abordant dans un premier

point, les objectifs, les règles du jeu et les mécanismes de concerta-

tion, lesquels constituent la responsabilité première des milieux de

travail. Par la suite, nous examinerons l'organisation et la dispensa-

tion dès services qui doivent être mis à la disposition des travail-

leurs et des employeurs en vertu de la loi.

I. La responsabilité première des parties

1.1 Les objectifs Abordons, en premier lieu, les objectifs visés par la réforme.

Qu'en est-il de ces objectifs? Sont-ils à revoir?(22) Sont-ils uto-

piques, comme, le prétendent certains? Comme nous l'avons vu précédem-

ment, les objectifs sont définis à l'article deux de la loi et nous

citons:

La présente loi a pour objet 1'élimination à la . source même des dangers pour la santé, la sécurité et 1 'intégrité physique des travailleurs.

Elle établit les .mécanismes de participation des travailleurs et de leurs associations, ainsi que des employeurs et de leurs associations à la réali-sation de cet objet'.

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Nous pouvons d'ores et déjà affirmer qu'avant 1979, le champ de la

santé et de la sécurité du travail était à toutes fins utiles assimilé,

à l'indemnisation des accidents du travail. L'adoption de la Loi sur

la santé et la sécurité du travail (L.R.Q.,, c. S-2.1) en 1979, dont

nous soulignons actuellement le 10e anniversaire, . constitue le point

culminant, le moment magique qu'il nous faut marquer d'une pierre

blanche. La réforme s'inscrivait, comme nous l'avons.déjà vu, dans la

logique du régime de 1931, résultat "d'un pacte social" intervenu entre

les employeurs et les travailleurs. La Loi sur la santé et la sécurité

du travail demeure donc notre acquis majeur. Elle s'attaque aux causes

et démocratise la prévention.

Le Québec, par l'adoption de cette loi cadre, s'est donné une

politique globale de la santé et de la sécurité du trayail, novatrice

et inscrite dès 1979, dans la dynamique d'un monde du travail en marche

vers le XXIe siècle. Cette législation par ses objectifs constitue le

contrat social qui définit la part de chacun.

Le consensus social existe, il n'est pas questionné dans le grand

débat public comme en a fait • foi la dernière campagne électorale*23>

durant laquelle aucun des partis politiques n'a remis en cause ni les

objectifs ni le cadre juridique en santé et sécurité du travail.

Ce consensus social s'inscrit dans un processus évolutif qui doit

faciliter le changement des mentalités et permettre le regroupement de

toutes les forces vives du travail (travailleurs, syndicats,

employeurs, associations patronales, dirigeants politiques). A cause

de l'importance du travail dans l'organisation d'une société, ce monde

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du XXI* siècle commande aux partenaires actuels du système de pour-

suivre cette démarche de conciliation,_de concertation, de coopération,

de prise en charge. Un monde du travail de demain dynamique et compé-

titif reposera sur la compréhension mutuelle, le partenariat, le

respect les uns des autres ou il ne sera pas. Il suffit, comme le dit

Radio-Canada, "de prendre des nouvelles de notre nonde" pour s'en

rendre compte.' Nous sommes tous interreliés, les domaines de l'acti-

vité humaine se compénètrent: travail, environnement, développement

économique, progrès technologique, dynamiques sociales, santé, etc.(24)

Non seulement il ne faut pas rebrousser chemin, mais au nom de

l'avenir, il est impérieux d'actualiser cette réforme qui, comme nous

le verrons ci-après, est dans certains domaines à peine amorcée.

Les agents économiques doivent regarder assez haut et assez loin,

pour s'apercevoir qu'au-delà dé la garantie des droits il y a la garan-

tie des intérêts. Ils .doivent réfléchir, sur les rapports nouveaux des

personnes avec le travail, renouveler leur discours et orienter leur

action vers demain.-

Demain est là, il exige des transformations dans plusieurs cas de

l'univers du travail, une philosophie de direction qui comprend l'enri-

chissement du travail et l'humanisation du lieu du travail, une plus

grande autonomie des employés, un partenariat qui fait déjà le succès

d'entreprises québécoises bien connues.

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Je dirais en conclusion sur ce point avec Charles Péguy: "L'heure

qui sonne est sonnée. Le jour qui passe est passé. Demain seul reste

et les après-demain—

1.2 Les règles du jeu Poursuivons notre analyse des éléments du système en examinant

cette fois les droits et obligations des parties, ce que nous avons

qualifié de règles du jeu.

Désormais, et c'est là un droit fondamental: le travailleur a

droit à des conditions de travail qui respectent sa santé, sa sécurité

et son. intégrité physique.<23> En conséquence, la loi confère au

travailleur des droits spécifiques. Il -s'agit du droit de refus, du

droit au retrait préventif pour "le travailleur exposé à un contaminant,

du droit au retrait préventif pour la travailleuse enceinte ou qui

allaite. Par ailleurs, à l'ensemble des droits reconnus aux travail-

leurs se greffent des obligations*26> concomitantes à ces'droits.

L'article 10 de la loi confère aux travailleurs deux droits fonda-

mentaux: celui de connaître les risques reliés à son travail et de

bénéficier de services de santé préventifs et curatifs adéquats.

Ce droit du travailleur "de connaître les risques reliés à son

travail" constitue un autre acquis important de la réforme de même que

celui de bénéficier de services de santé adéquats.

Le travailleur a droit à des services de formation, d'information

et de conseil en matière de santé et de sécurité du travail en général.

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et en ce qui a trait à ses tâches et à son milieu de travail particu-

lier.

L'employeur doit informer adéquatement le travailleur sur les

risques reliés à son travail (article 51).

Rappelons également les articles 123 et 124 de la loi<27> qui

confère au médecin responsable une responsabilité importante d'informa-

tion du travailleur-relativement aux risques pour sa santé auxquels il

s'expose dans l'exécution de son travail.

: C'est pour mieux garantir au travailleur le.droit à une informa-

tion objective que cette responsabilité a été confiée également au

médecin responsable, ressource extérieure aux parties et à la CSST dont

l'intérêt est celui de la santé publique. Il est impérieux que les

professionnels de la santé continuent d'assumer cette lourde responsa-

bilité.

Sur ce point, il nous apparaît intéressant de citer ici un extrait

d'une allocution prononcée par M. Fernand Daoust<28), le 12 juin 1988.

(...) Nous sommes en mesure d'affirmer aujourd'hui, pour en avoir vécu l'expérience dans les dix premiers secteurs (...) prioritaires, et auxqùels s'étendent les services de santé au travail, que le fait de confier cette mission d'informer à un médecin du travail qui n'est pas sur la liste de paye de l'employeur (...) mais qui est plutôt au service des partenaires dans une perspective de prévention primaire d'élimination du danger à la source, a constitué une révolution dans l'exercice du droit de savoir (...) [notre soulignement].

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21*

Pour sa part, l'employeur a.droit en vertu de, l'article 50 À des

services de formation, d'information et de conseil en matière de santé

et de sécurité du travail. Ces services lui sont offerts par la CSST,

par les associations sectorielles paritaires et par les associations

patronales. Mais il n'en demeure pas moins qu'il est le premier

responsable de voir à ce que les normes de sécurité soient observées.

Ce sont les articles SI à 57 de la loi qui précisent les obliga-

tions générales de l'employeur. L'article clé est l'article 51 qui i

stipule que "1 'employeur doit prendre les mesures nécessaires pour

protéger la santé et assurer la sécurité et l'intégrité physique du

travailleur". Les quinze paragraphes de cet article énoncent quinze

mesures devant être prises par l'employeur pour protéger la santé du

travailleur et assurer sa sécurité et son intégrité physique.<29>

Un autre droit est conféré: celui de poursuivre quand le travail-

leur croit qu'il a fait l'objet de sanctions^à'cause de l'exercice d'un

droit, ou d'une fonction qui lui résulte de la loi ou des règlements

(article 227).

Ces droits ont été exercés. Soulignons qu'en 1985, par l'adoption

de la Loi sur les accidents du travail et les-maladies professionnelles

(L.R.Q., c. A-3.001), le régimè de santé et de sécurité au travail a

été bonifié. Cette loi a modifié de façon importante la Loi sur la

santé et la sécurité du travail (L.R.Q., c. S-2.1) en . créant un méca-

nisme de révision paritaire de certaines d é c i s i o n s * ^ o ) rendues en vertu

de cette dernière loi et en conférant un droit d'appel des décisions du

bureau de révision paritaire devant la Commission d'appel en matière de

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lésions professionnelles également créée en 1985, en vertu de la Loi

sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.131'

La Commission d'appel avait reçu au 31 mars 1988* 3 2environ 500

déclarations d'appel en santé et sécurité au travail.

En terminant sur ce point, il nous faut souligner une recherche

très intéressante subventionnée par l'IRSST, effectuée par Marc Renaud

et Gilles Trudeau, intitulée Le droit de refus comme instrument de

prévention: un premier bilan.(33)

Cette, étude couvre la période de septembre 1985 à juin 1988, et

révèle que le droit de refus s'avère un moyen de prévention très effi-

cace: des corrections ont été imposées dans plus de 60% des cas et

l'utilisation de ce droit a facilité le règlement des conflits de

travail. Selon l'étude, le droit de refus n'a pas été utilisé univer-

sellement. Sept entreprises ont exercé le tiers des droits de refus.

Les travailleurs syndiqués représentent 98% des utilisateurs de ce

droit.

Nous pouvons constater, après dix ans, que les parties sont à

vivre le cadre juridique, que dans l'ensemble, les dispositions rela-

tives aux droits et obligations des parties semblent adéquates.

Le bilan est positif.

Somme toute, il faut laisser ici le temps faire son oeuvre et

permettre aux parties de vivre la loi pleinement, car "(...) seule une

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participation active et volontaire du milieu de travail lui-même va

permettre de faire face aux problèmes sérieusement".<3«>

1.3 Les mécanismes de concertation Le nouveau régime repose donc sur la participation des travail-

leurs et des employeurs. Les mécanismes de participation des travail-

leurs et des employeurs sont définis: création d'un comité paritaire de

santé et de sécurité au sein de certaines catégories d'établissement de <

plus de vingt (20) travailleurs. Ce comité*38> possède des pouvoirs

décisionnels en ce qui concerne les programmes de formation et

d'information, les moyens et équipements de protection individuels, le

choix du médecin responsable des services de santé de l'établissement

et le programme de santé élaboré par le médecin.<36) Il possède égale-

ment un pouvoir de recommandation pour certains aspects du programme de

prévention. La philosophie sous-jacente au cadre législatif est très

claire, c'est de faire en sorte que le monde du travail assume lui-même

la responsabilité première des mesures de santé et de sécurité qui lui

sont nécessaires. Le nouveau système étant bâti sous le signe de la

coopération, le comité paritaire de santé et de sécurité en est un des

principaux instruments. Les associations sectorielles paritaires en

sont un autre exemple. Elles ont pour objectif de fournir aux

employeurs et aux travailleurs des services de formation, d'informa-

tion, de recherche et de conseil. Elles peuvent également collaborer

avec la CSST et les chefs des départements de santé communautaire, à la

préparation et à la réalisation d'études sur la santé des travailleurs

et sur les risques auxquels ils sont exposés.

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Il faut rappeler ici, que le gouvernement À cause de l'ampleur de

la réforme et du changement de mentalités qu'elle implique a opté pour

une mise en place progressive des mécanismes de la loi. Ainsi, cette

partie relative aux mécanismes de participation ne s'applique que dans

jes secteurs réglementés.

Où en sommes-nous, dix ans plus tard, au niveau de la mise en

oeuvre des mécanismes de prévention: Comité de santé et de sécurité du

travail, programme de prévention, programme de santé spécifique, repré-

sentant à la prévention.

Au niveau de.la réglementation devant permettre la mise en oeuvre

des mécanismes de prévention, voici l'état de situation:

Règlement sur les comités' de santé et de sécurité du travail, octobre 1983, couvrant les groupes I et II.<37>

Règlement sur le représentant à la prévention dans un établissement, septembre 1984, couvrant les groupes I et II.(36\

Règlement sur le programme de prévention, Décret 1282-82, du 26 mai 1982, modifié en 1983, et en 1985, couvrant les groupes I, II et III.(-39)

Règlement sur les services de santé au travail adopté en 1982, modifié en 1983 et en 1985, couvrant les groupes I, II et III.<40>

Règlement sur les associations sectorielles paritaires de santé et de sécurité du travail adopté en 1982, modifié en 1983, 1984 et 1985, déterminant douze secteurs d'activités aux fins de créer des associa-tions sectorielles.*41>

Nous pouvons constater que la mise en oeuvre par voie réglemen-

taire des mécanismes de prévention se fait en 1982, 1983, 1984 et 1985;

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que les groupes IV, V et VI ne sont pas couverts par aucun règlement,

ce qui représente près de 1,700,000 travailleurs, soit 74% des travail-

leurs et que depuis 1985, aucun groupe n'a été ajouté.

Après ce bref tour d'horizon qui révèle que seuls les groupes I et

II sont couverts par l'ensemble des mécanismes de prévention, que doit-

on penser?

Comme le dit si bien M. Fernand Daoust(<2) en parlant de la

réforme: "Il s'agit en vérité, d'un vaste projet de société puisque la

presque totalité de notre main-d'oeuvre et de nos chefs d'entreprises

est interpellée par ce défi".

Doit-on remettre, en cause le paritarisme? D'après les études

effectuées*43*, et le constat que nous pouvons en faire, il appert que

la société québécoise a atteint un point de non-retour dans ce domaine.

D'autant plus qu'une étude sur "L'efficacité en gestion de la sécurité

du travail: principaux résultats d'une recherche dans l'industrie

manufacturière"*44 > conclut :

( ) C'est que si l'on se piace au plan des choix stratégiques fondamentaux à faire pour atteindre l'efficacité en sécurité du travail et réduire le taux de fréquence des accidents, il semble bien que 1 'enseignement à tirer de l'expérience des entre-prises plus efficaces dans ce domaine consiste à mettre la priorité sur les stratégies de prévention plutôt que sur les stratégies d'administration des dossiers d'accidents (...) [notre soulignement]

(...) il semble donc y avoir au moins deux grandes stratégies gagnantes pour réduire la fréquence des accidents du travail. Vans les entreprises de plus petite taille, la stratégie gagnante semble s'appuyer sur la décentralisation de la prise en

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charge, le développement de forts appuis au comité de santé-sécurité et le développement d'une concep-tion intégrée de là sécurité du travail partagée par le responsable SST et les contremaîtres. Dans les entreprises de plus grande taille, la décentra-lisation de la prise en charge et le développement d'une conception intégrée de la sécurité demeurent importants, mais ce qui devient primordial, c'est le développement d'activités de prévention orien-tées à la fois vers 1 'expression et la régulation des risques et facteurs d'accidents.<4B>

Du côté des associations sectorielles paritaires, des remises en

question se font également par la CSST.

En 1986, la CSST a procédé à l'évaluation du fonctionnement et des

effets des ASP. Une étude évaluative*46> a été menée.

Un grand malaise subsiste ... Laissons la parole au Rapport sur

les trois questions suivantes: .

"Le système-paritaire fonctionne-t-il?"

"Les ASP ont-elles des retombées positives?"

"Les ASP ont-elles de l'avenir?"

Les auteurs du Rapport concluent à la viabilité du paritarisme et

l'expliquent par de nombreux facteurs dont le fait qu* "une tradition de

parité existait dans la majorité des secteurs, et cela, depuis de

longues annéesque "la santé-sécurité est devenue, autant pour les

syndicats que pour les employeurs (les premiers pour des raisons d'évo-

lution des motivations des membres, les seconds pour des raisons de

coûts et d'ouverture à la qualité de vie) une préoccupation majeure."

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Les auteurs notent "que ce succès n'est pas survenu sans conces-

sion".*47 >

Le rapport décrit les tensions et les difficultés majeures que

vivent les ASP. Ces dernières craignent que la CSST manoeuvre de façon

à les éliminer.<48) Leur financement dépend de la CSST, elles ont peu

ou pas de services de soutien de la CSST.

Sur l'autre question, Les ASP ont-elles des retombées positives?

Oui, dit le RapportMS> (...) on peut penser que les ASP engendrent des

changements positifs dans 1'état de la santé-sécurité dans leurs

secteurs. Demandons-nous également, les ASP ont-elles de l'avenir? La

réponse est également oui pour un grand nombre de raisons.*30>

En 1987, treize associations sectorielles paritaires étaient en

place. Elles recevaient des subventions de l'ordre de 9,858,062 $,

d'après le Rapport annuel de la CSST (1987). s

De cette partie qui traite du paritarisme et des mécanismes de

prévention comme responsabilité première du monde du travail, il se

dégage des acquis importants: la viabilité du paritarisme, le bien-

fondé des mécanismes de prévention et leur bon fonctionnement.

La période de dix ans, en aura été une d'expérimentation au niveau

des groupes I et II; l'expérience est concluante ... On rie peut

mesurer de façon mathématique à court terme, une réforme qui vise la

transformation d'attitudes et de comportements bien ancrés dans la

partie de la population oeuvrant dans les milieux de travail.

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Comme il s'agit de valeurs, de transformations profondes, le

changement ne se fait pas sans heurts ... Ainsi, les principaux méca-

nismes de prévention font l'objet de remises en question, ils sont

joués les uns contre les autres dans la stratégie budgétaire, la régle-

mentation stagne ... Une question importante se pose à ce moment-ci:

il importe de définir la place Que 1 'on veut réserver et l'importance qu'on veut accorder au sein de l'univers de la santé-sécurité au travail, au concept de prévention lui-même et aux diverses structures par lesquelles ce concept trouvera une expression concrète.

Les acteurs du système doivent y répondre puisque nous sommes en

démocratie, nous devons tous y'répondre..

Dans un environnement comme le nôtre de fin du XXe siècle où les

• problèmes d*environnement se posent avec acuité, où les catastrophes

écologiques se multiplient, où la prévention s'impose partout comme la

seule solution Poser la question, c'est y répondre. Tout comme la

démocratie, la.prévention paritaire constitue le moins mauvais des

systèmes Ainsi,< 31>

( ) Face à la dégradation de la situation et aux récriminations sans remède, la prévention paritaire àpparait dès lors non seulement -comme une solution mais, personne n'en ayant trouvé d'autres, comme la seuie solution.

La loi portant cette réforme est incitative non contraignante, formative et informative, adulte et pour des adultes.

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II. Organisation et dispensation des services aux travailleurs et aux employeurs

Nous abordons maintenant la dernière partie de notre exposé qui

traite de l'organisation et de la dispensation des services aux parties

telle que prévue par la loi.

2.1 La CSST Un organisme central de gestion du système santé et sécurité du

travail a été mis sur pied: la CSST. La Commission assume à la fois

toutes les responsabilités en matière de prévention et d'indemnisation.

Elle est gérée par un conseil d'administration paritaire. Qu'en est-il

dix ans après?' La nouvelle Commission a-t-elle réussi à gérer le chan-

gement? Quel est le poids de l'indemnisation? Quelle devrait être la

dynamique interne de la Commission et son interface avec le milieu?

La Commission a pour fonctions d'élaborer, de proposer et de

mettre en oeuvre des politiques relatives à la santé et à la sécurité

des travailleurs de façon à assurer une meilleure qualité des milieux

de travail.<52) Ses.mandats sont définis dans les lois qu'elle admi-

nistre. La .Commission relève du Ministre du travail. La CSST s'est

substituée à la Commission des accidents du travail du Québec, le 13

mars 1980. Le conseil d'administration de la Commission est formé de

la présidente, qui est aussi directrice générale, et de 14 autres

membres, tous nommés par le gouvernement et représentant en nombre égal

les travailleurs et les employeurs québécois. De plus, il faut noter

que le Ministre de la santé et des services sociaux et le Ministre du

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travail, nomment chacun un observateur auprès du conseil d'administra-

tion de la Commission.

La Commission est une organisation de grande taille; au 31

décembre 1987<33>_, lé nombré de postes autorisés était de 2574, et à

cette même date, la Commission comptait 2359 employés permanents, 461

employés occasionnels. La Commission comporte 15.directions régionales

dont l'effectif était en 1987, de 1442 postes. Cette déconcentration a

été entreprise par l'organisme au début des années 80; et la régiona-

lisation des services a constitué alors une des priorités de la Commis-

sion. Cette régionalisation a eu un impact important,' très positif

dans la gestion du système SST, en permettant un rapprochement des

différents intervenants (ASP, DSC, CLSC, etc.) au niveau régional.

Quel est le poids au sein de la Commission de ces deux mandats

interreliés que sont la prévention et la réparation?

Il faut souligner qu'au début des années 80, la Commission devait

implanter la réforme de .1979, qui, comme nous l'avons vue, est majeure

et ce, à partir de la structure de l'ancienne CAT. Le poids certain de

la culture organisationnelle de la CAT, décriée par le Rapport Riverin

a sûrement freiné la gestion du changement et maintenu le .poids très

lourd de la fonction réparation au sein du nouvel organisme. Ajoutons

également, qu'en 1985, la Commission devait gérer une autre réforme

d'importance en matière d'accidents de travail et de maladies profes-

sionnelles instituée par l'adoption de la Loi sur les accidents de

travail et maladies professionnelles entrée en vigueur le 19 août 1985.

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Examinons le poids des deux mandats h partir des états financiers

(Source: Rapport du Vérificateur général, à la page 153):

Indemnisation, réadaptation et retrait préventif Prévention [prestations versées]

1984 721* 59 1985 748 59 1986 895 61 1987 936 65

* en millions de dollars.

Il faut également noter que bon an, mal an, la CSST reçoit plus ou

moins 300,000 déclarations de lésions professionnelles.

La CSST, en vertu de sa loi constitutive, gère un système public,

universel et intégré de prévention-réparation des lésions profession-

nelles. Tous lés employeurs doivent adhérer au système et contribuer à

son financement au moyen de cotisations individuelles, calculées selon

les principes de l'assurance. Les fonctions réparation et financement

sont intrinsèquement liées; en effet.pour qu'il y ait réparation suite

à un accident, il faut que la Commission ait à sa disposition suffisam-

ment de ressources financières pour pouvoir défrayer le coût des soins

médicaux et des prestations.<34> Au tandem réparation-financement. (Loi

sur les accidents de travail et des maladies professionnelles) s'ajoute

celui de la prévention-inspection (Loi sur la santé et la sécurité du

travail).

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Les deux tandems sont interdépendants; l'action de la prévention-

inspection doit avoir comme impact de réduire l'ampleur de la répara-

tion-financement en termes de fréquence et de gravité des lésions

professionnelles. C'est d'ailleurs ce que tend à démontrer les études

effectuées*39> par Marcel Simard dont nous avons déjà parlé..

Il importe donc que la gestion de la Commission intègre cette

dimension et que les deux tandems soient gérés en interaction. Il

existe actuellement une grande insatisfaction*36> face à la gestion par

la CSST de la fonction prévention-inspection compte tenu également du

cadre législatif dans lequel elle doit évoluer.

En effet, sur l'implantation de la loi et la mise en place des

mécanismes de prévention, le Rapport du Vérificateur général est expli-

cite. Après avoir dénoncé la situation*37> qui prévaut à la CSST au

niveau de la prévention, il recommande 1'évidence; "la Commission

devrait mettre en place les mécanismes de prévention prévus par la

1 o i < 3 B > Il faut souligner toutefois comme le f ait le Vérificateur

général que "Je gouvernement n'a pas encore ratifié la proposition de

la Commission d'avril 1985 à l'égard des autres mécanismes du groupe

JJJ».<39) .

Le rôle de la Commission, c'est en fait par l'application des

politiques prévues par la loi, de permettre la prise en charge par les

travailleurs et les employeurs de l'amélioration de leur environnement

de travail et sa transformation. C'est également "de mettre à la

disposition de ces derniers les outils et les moyens leur permettant de

trouver eux-mêmes les solutions" (...) "stimuler la prise en charge"

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(...) "Les fonctions à créer sont essentiellement des services de

soutien à l'action du milieu" (...)<60>

En terminant, nous vous soumettons cette réflexion: "L'État est au

service des citoyens, mais toute organisation a son dynamisme propre et

développe ses intérêts, gui ne sont pas toujours ceux des personnes ou

des groupes qu'elle a pour mandat de servir (.. ^

2.2 Les services Si nous procédons maintenant à l'examen des services qui, en vertu

de la législation, doivent être mis à la disposition des travailleurs

et des employeurs, nous pouvons les regrouper sous trois chefs: la

prévention, l'inspection et l'indemnisation.

2.2.1 L'INDEMNISATION

<

Nous pouvons immédiatement préciser qu'en matière d'indemnisation

et de réadaptation des victimes d'accidents de travail et de maladies

professionnelles, le gouvernement du Québec en 1978 n'était pas prêt à

formuler des propositions précises. Il faudra attendre en 1985, pour

que le troisième jalon du système de santé et de sécurité au travail

soit posé par l'adoption de la Loi sur les accidents du travail et les

maladies professionnelles (L.R.Q., c. S-2.1).

Cette réforme a instauré un nouveau régime de réparation des

lésions professionnelles, notamment par l'introduction d'une nouvelle

base d'indemnisation qui repose sur le principe du remplacement du

revenu, assorti d'un montant forfaitaire pour la perte d'intégrité

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physique: par l'affirmation d'un droit de retour au travail, d'un droit

A la réadaptation physique, sociale ou professionnelle, laquelle cons-

titue l'une des pierres d'assise de ce nouveau régime. A ces change-

ments, s'ajoute la nouvelle procédure d'évaluation médicale dont la

conséquence est de retirer à la CSST la tâche, difficile et contestée de

décider des questions d'ordre médical.

Force nous est de constater que la réparation occupe presque.tout

l'espace en santé-sécurité du travail. Ainsi, la Commission a ouvert

263,889(62> nouveaux dossiers relativement aux accidents du travail,

maladies professionnelles ou décès déclarés en cours d'année; à ce

chiffre s'ajoutent 27,611 cas de rechute ou d'aggravation. Sur le plan

budgétaire, les programmes de réparation en termes de prestations

versées se chiffrent à 898 millions.*63>

2.2.2 LES SERVICES DE PRÉVENTION

Nous aborderons maintenant les services de prévention qui

comportent trois volets: l'information, la formation; la recherche et

les services de santé.

A. Information, formatiop

Les services d'information et de formation constituent une des

pierres d'angle du régimè. En effet, pour, qu'une prise en charge par

les parties puissent s'effectuer relativement à l'amélioration de leurs

conditions de santé et de sécurité au travail, et à leur implication

dans l'élimination à la source des dangers; il est essentiel que les

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travailleurs et les employeurs possèdent un minimum de connaissances et

de savoir-faire.

En ce qui a trait à la CSST, elle doit "accorder son aide finan-

cière à une association vouée à la formation ou à l'information de ses

membres en matière dé santé et de sécurité du travail (...)" (article

167, 15e.). Elle doit "accorder son concours technique aux comités de

santé et de sécurité et son aide technique et financière aux associa-

tions sectorielles" (article 167, 2e). Elle a également un rôle d'ani-

mation du milieu en élaborant et en mettant en oeuvre "(...) un

programme d'aide à l'implantation et au fonctionnement des mécanismes

de participation des employeurs et des travailleurs dans le domaine de

la santé et de la sécurité du travail." (article 167, 3e).

D' après le Rapport annuel de. 1987, la subvention pour les

programmes de formation et d'information est de 14,600,000$.

B. Recherche

Si nous tournons maintenant notre attention du côté de la

recherche, ce mandat sera, confié, en vertu de l'article 169 de la loi,

à l'Institut de recherches en santé et en sécurité du travail (IRSST)

créé en novembre 1980. L'IRSST est subventiônné annuellement par la

CSST (article 167, 6e).

Nous pouvons résumer le rôle de l'IRSST aux axes suivants: identi-

fication des risques et des problèmes de santé et de sécurité au

travail, leur diminution et. leur élimination.

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L'IRSST a pu réaliser.des activités qui correspondent aux besoins

des milieux de travail, il suffit de parcourir les deux volumes de son

Répertoire des recherches pour s'en convaincre. Les priorités de

recherche et les orientations stratégiques sont soumis aux partenaires

patronaux et syndicaux. Une concertation s'est établie entre

l'Institut et la CSST "dans l'établissement des priorités de recherche

et dans la coordination des dossiers prioritairesUne approche que

semble privilégier de plus en plus l'IRSST est la concertation dans la

recherche.

L'Institut offre également aux intervenants du système santé-

sécurité du travail (CSST, DSC, CLSC, ASP) les services de laboratoire

et l'expertise nécessaire à leur action.

L'identification . des risques par secteur et professions à

risque*64> effectuée par l'Institut constitue un. outil précieux de

connaissances pour les milieux de travail.

Les projets de recherche couvrent les champs suivants: risques

reliés au bruit, maladies pulmonaires, cancers d'origine, profession-

nelle, maux de dos, contaminants .chimiques et physiques, problèmes de

sécurité dans les secteurs. La subvention que reçoit l'IRSST de la

CSST est de 13,215,000$.<63>

Aujourd'hui, nous pouvons affirmer que l'Institut est devenu un

instrument' de prévention indispensable et constitue un acquis important

de la réforme. .

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C. Santé t u travail

Nous complétons cette revue des services de prévention en abordant

maintenant le plat de résistance: les services de santé au travail.

Plusieurs, rapports au cours des 50 dernières années ont dénoncé la

situation qui prévaut en santé au travail au Québec. Citons entré

autres, la Commission Montpetit (1930), le Rapport Beaudry (1975), le

Rapport de la F.T.Q. intitulé Le contrôle des travailleurs sur leur

santé (1975), le Livre blanc (1978).

La situation s'est-elle améliorée dix ans après l'adoption de la

Loi sur la santé et la sécurité du travail? Quelle en est la probléma-

tique? Quelles perspectives s'ouvrent dans ce champ d'intervention?

En santé au travail, le choix qui a été fait par le législateur

suite à la réforme, c'est la mise en place de. nombreux mécanismes qui

font appel au réseau public de santé et de services sociaux. C'est un

choix judicieux qui devrait permettre des changements dans la pratique

de la médecine du travail, et favoriser une approche de prévention en

santé au travail. La santé au travail fait partie de la santé

publique; elle n'est pas un objet de négociation, c'est une question

d'ordre public. A juste titre, le législateurs voulu éviter la créa-

tion d'un réseau parallèle de services de santé et de services sociaux

en milieu de travail.

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Cette volonté de l'État ressort de la législation. Ainsi, au

Chapitre VIII intitulé "La santé au travail*', se retrouvent les règles

qui doivent s'appliquer et que la CSST, dans l'esprit et dans la lettre

de la loi, doit respecter.

Rappelons l'article 10 de la loi: "Le travailleur a notamment le

droit conformémént •à la présente loi et aux règlements: (...) de béné-

ficier de services de santé préventifs et curatifs en fonction des

risques auxquels il peut être exposé (...)"

Ainsi, la responsabilité de dispenser ces services incombe au CH-

DSC et aux CLSC en relation avec la CSST.

Posons-nous la question suivante: Quelle était ' la situation, au

moment de la réforme, en santé au travail et quelle est-elle mainte-

nant?

Ainsi en 1981, 1982: les CH-DSC avait un mandat de la CSST de voir

à la promotion et à la prévention de la santé des travailleurs. On

transférait du secteur privé au réseau public 1'essentiel ,de l'organi-

sation de la médecine du. travail dans les èntreprises. Les déboursés

effectués au Québec en 1977 pour la surveillance de la santé au travail

se chiffrent à 28,675,000$.(66> Au niveau de l'effectif qui oeuvre à

l'époque, en médecine du travail dans l'industrie, nous pouvons résumer

de la façon suivante, d'après les données du Livre blanc*67>:

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100 omnipraticiens à temps plein 36 médecins spécialistes

600 infirmières

736 personnes à temps plein

Qu'en est-il, dix ans après?

Au niveau budgétaire, les sommes allouées pour les services de

santé au travail et autres totalisent 36,811,000$<68> , ce qui repré-

sente un peu plus de 2% du budget global de la CSST. Au niveau du

personnel affecté aux services de santé au travail, la situation est la

suivante:

En première ligne 627,1 postes dont 70 sont non comblés à •cause du moratoire

CH-DSC 203,5 postes

830,6 postes dont 760 personnes effectives

Dix ans plus tard ... un gain de 24 postes en santé au travail!

(

Une constatation faite dans le Livre blanc*69 » demeure encore

d'actualité et mérite réflexion —

L'examen du système (...) nous montre également que la "santé au travail" a continuellement tiré de l'arrière par rapport à la "sécurité du travail". N'est-il pas révélateur de constater qu'à quarante ans d'intervalle, deux Commissions d'enquête (Montpetit et Beaudry) ont jeté un même cri d'alarme au sujet de la négligence entretenue à l'égard de la santé au travail? (...)

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Il est important pour bien saisir les enjeux de comprendre la

problématique. Nous ne pouvons pas procéder A une analyse de la santé

au travail au Québec et de la réforme de 1979 sans référer ici, briève-

ment à une autre grande réformé: celle de la santé et des services

sociaux au début des années i970. Cette réforme s'inspire largement du

concept de santé communautaire. L'approche proposée en 1979 en santé

au travail s'inspire également d'une philosophie de santé communau-

taire. <70>

Alors qu'en 1971 la Loi sur la santé et les services sociaux,

rédigée à partir du rapport Castonguay-Nepveu, prône une approche

globale de la santé qui fait consensus dans le réseau public, la situa-

tion est toute autre en 1979, dans les milieux de travail quant à une

définition.de .la santé au travail.

En effet, il n'y a pais de consensus sur ce qu'on entend par la

santé au travail; la Loi sur la santé et la sécurité du travail est

muette sur la définition même de la santé au travail. Le Livre blanc

réfère quant à lui à la définition de l'Organisation mondiale de la

santé.*71> Un problème majeur de valeurs se pose. Les parties n'ont

pas la même définition de la santé au travail, elles n'ont pas les

mêmes préoccupations eu égard à la santé au travail et à l'importance

qu'on doit y accorder. Comme le souligne Michel Vézina*72) dans un

article intitulé Travail et prévention.

Une excellente analyse*.73 > , que je vous invite à lire, a été

effectuée par Deena White et Marc Renaud sur la dynamique interne du

réseau public en santé au travail et vis-à-vis de la CSST.

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La lecture qui est faite de cette période explique les tensions

qui ont existé, et qui existent à un degré moindre aujourd'hui, entre

les ÇLSC et les DSC, les DSC et l'AHQ, l'AHQ et la FCLSCQ et 1'AHQ et

le MAS d'une part, et d'autre part, entre le réseau public de santé et

des services sociaux et la CSST.

Une autre remarque est relative à la perte de leadership en santé

au travail du ministère de la Santé et des Services sociaux. Au cours

des années 1970 jusqu'en 1976, le Ministère a assumé un grand leader-

ship en santé au travail notamment à l'occasion des travaux*74* de la

Commission Riverin. »

Par la suite, le MAS s'est peu à peu retiré du dossier. White et

Renaud décrivent ainsi la situation: "The Public Health Network: from

leadership to subordination".179^

Le Rapport Rochon*76> note:

Au fil du temps, le Ministère s'est peu à peu désintéressé de sa mission en matière de protection de la santé publique, notamment en santé environne-mentale depuis la création du ministère de 1'Envi-ronnement, et en santé et sécurité des travailleurs depuis la mise sur pied de la CSST.

Ce faisant, les professionnels intéressés par cette problématique ont développé leur propre expertise en dehors du cadre ministériel et ils se sont donnés des mécanismes de concertation qui trouvent un appui dans les associations, d'établissements.

Un autre facteur majeur qu'il nous faut souligner porte sur les

différences importantes qui existent entre la CSST et le réseau public

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au niveau de.la culture administrative, des valeurs véhiculées, de la

structure organisationnelle, (système centralisé versus système décen-

tralisé) , des' exigences et des comportements administratifs.

La santé au travail portée par deux grandes réformes se retrouve

écartelée et coincée entre "deux machinesdeux systèmes.

Qu'en est-il maintenant des services?

Les objectifs visés en santé au travail qui s'inspirent de ceux de

la santé communautaire ne peuvent pas être réalisés uniquement par les

seuls intervenants en milieu de travail. Ce sont des objectifs de

santé publique qui doivent également être ceux de l'État.

Ainsi, les services de santé ne doivent pas se limiter à la seule

approche clinique individuelle mais pour être en mesure de contribuer à

l'élimination à la source des problèmes de santé, ces services doivent

être conçus selon une approche.de santé publique. Des bilans épidémio-

logiques doivent être faits. La législation attribue des tâches très

précises au chef du département de santé communautaire. Ses fonctions

sont définies à l'article 127 de la loi. Son rôle est majeur dans la

mise en oeuvre des services de santé au travail. Il a également une

responsabilité en matière de retrait préventif d'un travailleur exposé

à un contaminant (article 33) et en matière de retrait préventif de la

travailleuse enceinte ou qui allaite (articles 40 et 46).

Au niveau local, pour chaque usine, entreprisé ou regroupement

d'entreprises, un service de santé au travail doit exister. C'est le

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médecin responsable des services de santé qui a la responsabilité

d'élaborer le programme de santé spécifique*77> (article 112).-

C'est l'article 113 de la loi qui prévoit les éléments que doit

contenir le programme de santé spécifique.

Sur le plan régional, une coordination des divers intervenants

(associations sectorielles paritaires, associations syndicales, patro-

nales, CSST bureau régional-inspection, CRSSS, CH-DSC, CLSC) doit se

faire afin d'optimiser l'utilisation des ressources et d'assurer la

mise en commun des connaissances.

Au niveau central, la CSST doit établir ses priorités d'interven-

tion en matière de santé au travail. Elle doit . en quelque sorte se

donner une politique en santé au travail qui fixe des objectifs qu'elle

peut être en mesure d'évaluer efficacement subséquemment (article 167,

1 1 e ) .

Quant au Ministre de la Santé et des . Services sociaux, il a le

mandat de coordonner la réalisation des programmes de santé et de

s'assurer de la qualité du personnel employé, de l'équipement et des

locaux utilisés aux fins des services de santé au travail, (article 167,

16e).

s

Les services dispensés le sont adéquatement; ils sont insuffisants

et pour cause ... comme en font foi les multiples études*78> qui ont

été effectuées en santé au travail. Les études font état de l'enchevê-

trement administratif dont nous avons parlé précédemment sur lequel

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nous reviendrons en conclusion avec des pistes de solutions. Un mora-

toire a été décrété par la CSST en 1987 sur le développement des

services de santé au travail dans le groupe III, et un gel des postes a

été décidé pour les groupes I et II.

Quel en est le bilan?

Voici les principaux éléments des divers bilans*79> déposés

1° Accessibilité pour les travailleurs et établisse-ments des groupes I et II à des services préven-tifs de santé au travail (6,970 établissements ont été couverts).

2° Développement d'un réseau d'expertise en santé au travail à travers la province, environ huit cent intervenants et intervenantes sont formés et assurent des services de qualité auprès des milieux de travail.

3° Adaptation des intervenants du réseau public à la culture organisationnelle des milieux, de travail; ainsi, d'après le sondage- effectué par le DSC du Sacré-coeur :

"Suite à des mises en doute sur l'efficacité des services de santé au travail, ce sondage avait pour but d'évaluer certaines compo-santes reliées à ces services notamment, la satisfaction des employeurs face à l'équipe des services de santé, leur perception quant à l'impact des interventions et leur opinion face à une éventuelle privatisation.

Les résultats ont démontré que les employeurs des régions desservies par les DSC du Sacré-Coeur et de la Cité de la santé sont très satisfaits de l'équipe des services de santé et qu'ils croient que les interventions contribuent à améliorer la santé des travailleurs. Pius de 50% d'entre eux ont identifié l'équipe des services de-santé comme étant la plus apte à offrir les services médicaux. Depuis le début des

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interventions, les employeurs ont noté des changements positifs concernant le comporte-ment des travailleurs. De plus, malgré le vas te courant de la privatisation des services de santé, leur opinion face à l'organisation de ces services demeure partagée et la privatisation n'apparaît pas comme vraiment privilégiée.

4° Transformation de l'environnement de travail dans près de 35% des établissements, la plus grande part de ces changements ont été orientées vers l'élimination à la source (3,178 transformations, essentiellement par 1'installation de moyens collectifs de contrôle ou modifications au niveau des machines, 1'autre partie des changements (1,526 cas) porte sur.1'acquisition de l'utilisa-tion nouvelle de moyens de protection indivi-duelle.

5° Développement de programmes de formation dans les •universités; développement d'unités d'enseignement, de la santé au travail dans quelques CH-DSC (Sacré-Coeur, CHUL, Maisonneuve-Rosemont, etc.).

6° Mise sur pied d'un système régional et provincial de surveillance de -l'état de santé des travail-leurs et des facteurs de risque (S.M.E.S.S.T.).

y

Les travailleurs, qui sont également les bénéficiaires des

services de santé semblent en être satisfaits, ainsi que le souligne

Fernand Daoust.<80>

Ces services de santé qui, comme on le voit, ont bien servi à faire le diagnostic de nos problèmes ne rejoignant dans le moment qu'environ 15% de 1 'effectif global assujetti à la loi, sont compris dans les secteurs dits "prioritaires". Il appar-tient au Gouvernement du Québec d'enclencher l'appareil de la réglementation pour qu'ils soient étendus à tous, et à toutes le plus rapidement possible.

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D. Inspection

46

Nous procédons maintenant à une analyse de la fonction inspection.

Cette fonction est liée dans l'histoire des accidents de travail à une

prévention axée sur la surveillance. L'inspection a toujours joué un

rôle de chien de garde, dès les débuts, pour assurer le respect des

lois et des règlements. Il faut bien distinguer entre l'inspection qui

est un moyen dissuasif et les services de prévention décrits précé-

demment. Il nous faut établir une ligne de démarcation entre les deux.

Ils ont une dynamique qui leur est propre et des fonctions fort diffé-

rentes. Le rôle de l'inspection est essentiellement d'assurer le

respect des normes et des règlements. C'est une fonction qui requiert

dans son exercice beaucoup d'indépendance. Les inspecteurs détiennent

en vertu de la loi des pouvoirs d'enquête très étendus, y compris le

pouvoir de rendre diverses ordonnances ou avis de corrections.

Ainsi, dans le volume "Droit de la santé et de la sécurité-du

travail", au chapitre portant sur l'inspection, nous pouvons lire:

Les mécanismes d'inspection institués au Chapitré X de la Loi sur la santé et la sécurité du travail constituent. un moyen, de contrôle efficace, permet-tant de s'assurer que les parties se prennent en charge dans le but d'atteindre l'objectif de la loi, qui est 'l'élimination à la source même des dangers pour la santé, la sécurité et l'intégrité physique des travailleurs '. En effet, ce sont les inspecteurs qui sont les principaux intervenants dans le domaine de 1'application de la loi et de ses règlements (...) D'autre part, rappelons que le Chapitre III de la loi accorde un rôle particu-lier à 1'inspecteur, en matière de droit de refus, et que le Chapitre XI relatif aux chantiers de construction traite de son côté des conditions spécifiques au mandat de l'inspecteur dans ce domaine.( 81 > '

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En cette matière, la loi a des dents; l'ensemble des dispositions de la

loi à ce chapitre vise à assurer un contrôle efficace, et un respect de

la loi et des règlements. Les inspecteurs doivent donc avoir toute la

latitude voulue pour assumer adéquatement les responsabilités qui leur

sont dévolues par la loi et ils doivent être en nombre suffisant —

Nous venons de faire un tour d'horizon de l'organisation des

services et de leur dispensation aux parties. Il en ressort que "les

préoccupations et les efforts consentis à 1'indemnisation des victimes

d'accidents du travail dépassent largement ceux que l'on a consacrés à

leur prévention".<B2> Le diagnostic de 1979 demeure inchangé. En

santé au travail, les problèmes se posent encore avec plus d'acuité,

nous pouvons reprendre le diagnostic de 1979: "L'insuffisance des

services de santé à la disposition du milieu de travail est un autre

problème aigu f...,J"<83). De plus, le moratoire de 1987 a créé un

climat de démobilisation du personnel des équipes de base des CH-DSC et

des services de santé offerts par les CLSC. La situation est déplo-

rable et doit être corrigée.

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Troisième partie

La Commission d'appel en matière de lésions professionnelles

La Commission d'appel en matière de" lésions professionnelles*64>

est un tribunal administratif d'appel constitué par la Loi sur les

a'ccidënts du travail et les maladies professionnelles pour entendre et,

décidèr, en dernière instance, toute question qui peut être contestée,

en appel en vertu dé cette loi et en vertu de la Loi sur la santé et la

sécurité du travail. Antérieurement, la Commission des affaires

sociales. Division des accidents du travail, entendait en appel les

questions relatives au droit et quantum de l'indemnisation des victimes

d'accidents du travail et de maladies professionnelles ainsi que les

questions relatives au retrait préventif, dans la mesuré où celui-ci

était considéré comme un accident du travail.

La. Commission d'appel est un tribunal administratif spécifique au

secteur santé-sécurité du travail. Il constitue un mécanisme de rétro-

action du système, de "feedback loop". En ce sens, la Commission

d'appel est un tribunal administratif sectoriel, systémique et spéci-

fique. La Commission d'appel constitue la dernière étape du processus

administratif santé-sécurité du travail et par ses décisions devrait

être à l'origine de la révision.des politiques de la CSST.

C'est ce pourquoi la Commission d'appel, dès

fixée des objectifs d'accessibilité, de célérité,

cohérence.

les débuts, s'est

d'efficacité et de

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La Loi sur les accidents du travail et les maladies profession-

nelles a élargi le droit d'appel à toute décision d'un bureau de révi-

sion paritaire constitué en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité

du travail. Ces bureaux de révision paritaires ont juridiction pour

réviser les décisions relatives à la prévention et à l'inspection et

pour réviser également les décisions rendues par la CSST en vertu de la

Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

Par ailleurs, une question d'ordre médical sur laquelle la CSST

est liée ne peut faire l'objet d'une révision par un bureau de révision

paritaire. Dans un tel cas, c'est la procédure d.'arbitrage médical par

un arbitre médical indépendant qui tient lieu de révision, la CSST

étant liée par l'avis de l'arbitre.

La Commission d'appel peut donc" être saisie de toute décision

rendue par un bureau de révision paritaire, ainsi que de toute décision

d'ordre médical sur laquelle la CSST est liée par l'avis d'un arbitre

médical.

Le système SST génère en contestation plus de 18,000 ,dossiers par

année qui se répartissent entre les différentes instances: plus de

10,000 demandes dans les bureaux de révision paritaires*83 », plus de

4,000 dossiers acheminés à l'arbitrage médical et 4,500 devant la

Commission d'appel.*86>

Le volume n'est pas encore stabilisé, et continue d'augmenter à un

rythme inquiétant pour les différentes instances dont la Commission

d'appel.*87> Un fait est à souligner ici: de tous les systèmes SST au

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Canada, ce sont ceux du Québec et de l'Ontario qui présentent le plus

de similitudes notamment quant à leur tribunal d'appel. Or, il appert

que la Commission d'appel doive traiter deux fois plus de dossiers en

appel que le tribunal ontarien.(80>

Cette situation a des conséquences: elle implique des délais dans

le traitement des demandés; un examen du processus devrait se faire

notamment en ce qui concerne l'arbitrage médical.<89>

Les instances qui assument la fonction d'adjudication devraient

être-en mesure de procéder rapidement; il est impensable qu'un travail-

leur ou un employeur attende" plusieurs années avant d'obtenir une

décision finale dans son dossier. De plus, pour le comportement de

l'ensemble du régime, à cause de son caractère systémique, tout retard

dans le traitement des dossiers en appel a un impact sur l'ensemble des

parties et tend à accroître les tensions.

• • •

En conclusion, je voudrais simplement que nous nous situions dans

le temps et dans l'espace. Regardez autour de vous! Le Nouvel

Observateur, titre en août 1989: "Ces fous qui veulènt sauver la

terre", la revue Science et Vie, août 1989, écrit: "La rie sur terre

menacée? Les savants parlent". René Dumont, conférence à l'UQAM,

dénonce la situation qui prévaut en matière d'environnement: "Nous

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devons changer nos habitudes de consommation, de production ... Tout

se joue d'ici dix ans! Et, on ne peut passer sous silence, la catas-

trophe de St-Basile-le-Grand et les BPC. L'émission Le Point nous

parle des pluies acides, de l'égout à ciel ouvert qu'est le St-Laurent, ;

des nappes d'eau souterraines polluées, des forêts québécoises qui sont

malades, des déchets toxiques, etc... Une vérité toute simple émerge

de ce chaos: notre société pour survivre va devoir s'adonner à la

prévention.

Prévention pour préserver les éléments essentiels à la vie: sol,

•eau, air, mer, forêts, etc. Nous sentirons à un moment donné la néces-

sité de nous doter d'une Charte des droits collectifs pour préserver

tout simplement la vie avec comme objectif premier: la prévention.

Dans,ce contexte, en santé et sécurité du travail du Québec, le

virage prévention a été amorcé en 1979. Les objectifs visés par la

réforme sont de plus en plus d'actualité et forts à propos. Dix ans s

après le bilan est positif. Je dirais que nous nous sommes donnés

dix ans pour expérimenter les différents mécanismes de participation,

pour vivre dans les.secteurs réglementés: le paritarisme. L'expérience

est concluante. Les études effectuées, dont nous avons parlé précédem-

ment, le démontrent. Les sondages*90> effectués auprès des employeurs

en attestent également. Les acquis sont nombreux: les parties ont fait

l'apprentissage du paritarisme, les mécanismes tels le Comité de santé

et de sécurité du travail s'est avéré un instrument de prévention utile

et intéressant, les associations sectorielles paritaires également. Le

paritarisme est là pour, y rester, parce que c'est tout simplement la

seule voie qui peut permettre une prise en charge adéquate par les

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milieux de travail de leurs problèmes en santé et en sécurité du

travail. L'intervention des services de santé du réseau public a

permis également de faire, avec les milieux de travail, l'apprentissage

mutuel d'une démarche préventive en santé au travail. L'expérience est

également concluante comme en font foi les diverses études et sondages.

Au niveau de la recherche, l'IRSST est devenu un instrument de

prévention indispensable.

Par ailleurs, des problèmes multiples se posent au niveau de la

prévention dans le système. Des tensions, des heurts, des incompréhen-

sions, des luttes de pouvoir, des conflits de valeurs, des remises en

question, etc Des clarifications s'imposent.

Une question se pose<®l> si l'on veut assurer la continuité —

Quelle place veut-on réserver et quelle importance veut-on accorder au sein de 1'univers de la santé-sécurité du travail, au concept de prévention lui-même et aux diverses structures par lesquelles ce concept trouvera une expression concrète?

La question est posée. Elle est posée d'abord aux parties,

travailleurs et employeurs, qui doivent assumer la responsabilité

première des mesures de santé et de sécurité qui leur sont nécessaires.

Elle s'adresse également à tous ceux qui sont impliqués dans les méca-

nismes de prévention et qui ont des responsabilités qui leur sont

imposées par la loi (CSS, ASP, CH-DSC, CLSC, CSST). Elle concerne la

CSST dans son orientation et sa gestion de la fonction prévention-

inspection. C'est ce pourquoi, je pense que des états généraux de la

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prévention devraient se tenir pour permettre À tous les intervenants de

comprendre la problématique, de partager des connaissances, d'effectuer

des mises en commun, de clarifier des niveaux d'intervention, et de

déterminer la place que l'on veut accorder à la .prévention dans

l'univers SST.

Le tout devrait se dérouler sous le signe du respect mutuel et axé

sur les objectifs définis dans la loi. Une telle approche postulé

l'intérêt commun qu'ont les employeurs et les travailleurs à éviter les

accidents de travail et les maladies professionnelles en visant à

éliminer à la source les dangers susceptibles d'y conduire. C'est un

fait que le maintien de la force de travail en ce qui concerne la santé

et la capacité des travailleurs et travailleuses coûtera d'autant moins

cher qu'on aura diminué les risques d'accidents et de maladies.

Par ailleurs, relativement à court terme, des solutions devront

être apportées en santé au travail parce que la situation actuelle est

très critique. Le Ministre de la Santé et des Services sociaux, comme

mandataire officiel de l'État en matière de protection de la santé

publique*92> pour l'ensemble de la population, devrait intervenir en

santé au travail auprès de la CSST; afin de débloquer le dossier et de

clarifier les règles du jeu.

Somme toute, pour l'univers santé-sécurité au travail, dix ans

plus tard, la phase expérimentale .devrait être terminée et le gouverne-

ment devrait désormais procéder à la mise en place progressive de

l'ensemble des mécanismes de prévention en réglementant tous les

secteurs (III, IV, V, VI).

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Dans une société de;, droit comme la nôtre, il est anormal de

laisser en plan, inopérant parce que non réglementé, un ensemble de

dispositions prévues dans la loi. Un grand principe de droit soutient

. tout le système, c'est l'égalité de tous et.de toutes devant la loi et

le droit pour tous et pour toutes aux services prévus par la législa-

tion.

Une dernière réflexion ...

Le travail, est le premier facteur structurant de la vie et de la santé. Sans nier l'intérêt préventif des modifications de comportement, il est vàin de s'attaquer à des comportements ou des habitudes sans remonter à l'environnement qui les conditionne largement. La promotion de la santé de ses membres peut être considérée comme l'objectif fondamental d'une société démocratique. La prévention, instru-ment majeur de cette- promotion, est donc l'indica-. teur le plus significatif de la capacité de cette société de prendre en main son destin. <93>

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Notes (1) PONTAUT, A., Santé et sécurité: un bilan du régime québécois de

santé et de sécurité du travail (1885-1985), Éditions du Boréal Express, Montréal,. 1985, à la page 16.

(2) Op. cit., à la page 22.

(3) TRIBY, Raymond, L'assurance obligatoire contre les accidents du travail en Alsace et dans le Département de la Moselle, Nais-sance et évolution 1884-1985, In: Histoire des accidents du travail, L.H.D.S. N° 19, 2€o« semestre 1985; Presses de l'Uni-versité de Nantes, 1987, à la page 29.

(4) Au début des années '70, les Règlements concernant la salubrité et la sécurité au travail dans les mines et les Règlements concernant les établissements industriels et commerciaux sont refondus. En mai 1974, le Code de sécurité pour les travaux de construction est adopté. En 1975, La loi sur l'indemnisation des victimes d'amiantose ou de silicose dans les . mines et les carrières est adoptée; toujours en 1975, les chefs de départe-ments de santé communautaire sont nommés médecins hygiénistes au sens de l'article 21 de la Loi des établissements industriels et commerciaux.

(5) Dé nombreuses études sont également effectuées: en 1974, le ministère du Travail et de la Main-d'oeuvre forme un Comité d'hygiène et de sécurité au travail; il commande aussi une étude sur les fonctions d'inspection dans les domaines de la sécurité et de l'hygiène. La Commission des accidents du travail, la même année, crée un Groupe de travail sur les objectifs et les structures de la CAT du Québec présidé par Alphonse Riverin qui publie en juillet 1975 son rapport. En 1975, un mémoire très étoffé de la Fédération des travailleurs du Québec dénonce la situation et demande une réforme. En-1976, le rapport final du Comité d'étude sur la salubrité dans 1'industrie de l'amiante présidé par le juge Beaudry est déposé.

(6) Êchangeur Turcot, Lac Cassé, Monsanto, le Pont Laviolette, le Mont Vright.

(7) Livre blanc - Santé et sécurité au travail - Politique québé-coise de la santé et de la sécurité des travailleurs. Éditeur officiel du Québec, 1978.

08) Op. cit., à la page 63.

09) Op. cit., à la page 63.

(10) Op. cit., à la page 187. .

(11) Op. cit., à la page 187. -

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(12) Op. cit., à la page 188.

(13) Op. cit., À la page 188.

(14) Op. cit., à la page 188.

(15) Le projet de loi 42 sera adopté sous la dénomination de Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., A-3.001) dont 1 * entrée" en vigueur pour la grande majo-rité des dispositions sera le 19 août 1985.

(16) Supra note 7, à la page VI.

(17) La Charte des droits et liberté de la personne (L.R.Q., c. C-12), à l'article 46, "Toute personne qui travaille a droit conformément à la loi, à des conditions de travail justes et raisonnables et qui respectent sa santé, sa sécurité et son .intégrité physique

(18) Article 78, aux paragraphes 1° à 4° de la Loi sur la santé et la sécurité du travail.

(19) Supra note 7, à la page VII.

(20) Supra.note 7, à la-page 223.

(21) Supra note 7, à la page 223.

(22) Conseil du Patronat du Québec, Mémoire présenté au Ministre du Travail, de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du Revenu, "Propositions pour une révision en profondeur du régime québé-cois de santé et de sécurité du travail. Octobre 1986, 29 pages.

(23) Le Conseil du Patronat du Québec a essayé de faire en sorte qu'un débat public s'engage sur ces questions durant la dernière campagne électorale mais .sans succès.

(24) Revue Science et Vie. La vie sur terre menacée? Les savants parlent. Les 7 plaies de la planète Terre, publié par Excelsior Publications S.A., Paris, Numéro 863, Août 1989, aux pages 19 à 45.

(25) Article 9 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (L.R.Q., c. S-2.1).

(26) ' Article 49 de1la Loi sur la santé et la sécurité du travail (L.R.Q., c. S-2.1).

(27) Loi sur la santé et la sécurité du travail (L.R.Q., c. S-2.1):

a.123 Tout en respectant le caractère confidentiel du dossier médical et des procédés industriels, le médecin responsable doit signaler à la Commission, à l'employeur, aux travailleurs, à l'association accréditée, au comité de santé et de sécurité et au

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chef du département de santé communautaire toute déficience dans les conditions de santé, de sécu-rité ou de salubrité susceptible de nécessiter une • mesure de prévention. Il doit leur transmettre, sur demande, un rapport de ses activités, [notre soulignement]

a.124 Le médecin responsable informe le travailleur de toute situation l'exposant à un danger pour sa santé, sa sécurité ou son intégrité physique ainsi que toute altération à sa santé.

(28) DAOUST, Fernand (Secrétaire général de la Fédération des travailleurs et des travailleuses du Québec), La motivation des travailleurs et travailleuses passe par le respect de leurs droits de participation. Allocution présentée au Salon Préven-tion Plus, 12 juin 1988, à la page 8.

(29) L'employeur a l'obligation de s'assurer que l'organisation du travail, l'aménagement des lieux de travail, l'équipement," etc. respectent la santé et la sécurité du travailleur à -son emploi. Il devra également fournir le matériel et les équipements individuels ou collectifs nécessaires. L'employeur a l'obliga-tion de s'assurer de l'existence d'un programmé de prévention spécifique à son établissement. En vertu de l'article 58 de la loi; l'employeur a la responsabilité de la mise en application de ce programme en tenant compte des responsabilités du comité de santé et de sécurité, s'il y en a un. De cette obligation découle celle d'informer les travailleurs des dangers qui peuvent résulter des tâchés attribuées.

(30) La juridiction des bureaux de révision porte sur les éléments suivants: droit de refus, retrait préventif d'un travailleur exposé à un contaminant, retrait préventif de la travailleuse enceinte ou qui allaite, inspection et plainte d'un travailleur faisant l'objet de sanctions disciplinaires à cause de l'exer-cice d'un droit.

(31) La Commission d'appel en matière de lésions professionnelles a été instituée en 1985 par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., c. A-3.001), Chapitre XII.

(32) Commission d'appel en matière de lésions professionnelles. Rapport annuel pour l'exercice financier 1987-1988, à la page 21:

• Retrait préventif 239, soit 2,5% du volume total

• Urgences (droit de refus, inspection, etc.) 176, soit 1,8% du volume total

• Mesures disciplinaires (en vertu des deux 187, soit 2,0% du volume total lois)

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(33)- Institut de recherche en santé et en sécurité du travail (IRSST), Marc Renaud, Gilles Trudeau, Le droit de refus comme instrument de prévention: un premier bilan "(RS-85-23), Texte: 572 pages, Résumé: 20 pages. Répertoire des recherches. Volume 2, S-46, Avril 1989.

Publications et communications scientifiques: Renaud, M-,. Saint-Jacques, C., "The Right to Refuse in Quebec: Five years. Evolution of a New Mode of Expressing Risk", International Journal of Health Services, Vol. 18, N° 3, 1988, p. 401 à 417.

Trudeau, G., "Le refus d'exécuter un travail dangereux: aux confins .du droit et des sciences sociales". Sociologie et Société, Vol. XVIII,. N° 2, Octobre 1986, p. 87 à 97.

(34) Supra note 7, à la page VI.

(35) Les fonctions du Comité de santé et de sécurité sont très éten-dues, c'est l'article.78 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail qui en précise les fonctions.

(36) L'article 79 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail prévoit pour les fonctions décrites aux paragraphes 1° à 4° de l'article 78, . et pour elles seules, la possibilité de.soumettre un litige à la CSST, en cas de désaccord. Ces fonctions sont (article 78):

(...) 1° de choisir conformément à l'article 118 le ' médecin responsable des services de santé dans 1 'établissement;

2° d'approuver le programme de santé élaboré par le médecin responsable en vertu de 1'article 112;

3° d'établir, au sein du programme de prévention, les programmes de formation et d'information en matière de santé et de sécurité du travail;

4° de choisir les moyens et équipements de protec-tion individuels qui, tout en étant conformes aux règlements, sont les mieux adaptés aux besoins des travailleurs de l'établissement (—).

(37) Règlement sur les comités de santé et de sécurité du travail (D. 2025-83 du 83-09-28, G.O. 83-10-12, p. 4209).

(38) Règlement sur le représentant à la prévention dans un établisse-ment (D. 1879-84 du 84-08-16, G.O. 84-08-29, p. 4195).

(39) Règlement sur le programme de prévention (D. 1282-82 du 82-05-26, G.O. du 82-06-23, p. 2373):

Mod. par: D.747-83 du 83-04-13, G.O. du 83-05-04, p. 1927.

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D.361-85 du 85-02-21, G.O. du 85-03-13, p. 1552.

(40) Règlement sur les services de santé au travail (D. 1281-82 du 82-05-26, G.O. 82-06-23, p. 2383):

Mod. par: D.748-83 du 83-04-13, G.O. 83-05-04, p. 1937. D.362-85 du 85-02-21, G.O. 85-03-13, p. 1566.

(41) Règlement sur les associations sectorielles paritaires de santé et de sécurité du travail (R.R.Q., 1981, ch. S-2.1, r.l):

Mod. par: D. 517-82 du 82-03-03, G.O. 82-03-24, p. 1133. D. 47-83 du 83-01-12, G.O. 83-02-09, p. 1033. D. 582-83 du 83-03-23, G.O. 83-04-20, p. 1729. D.1405-83 du 83-06-22, G.O. 83-07-27, p. 3259. D.1406-83 du 83-06-22, G.O. 83-07-27, p. 3261. D.1606-84 du 84-07-04, G.O. 84-07-04, p. 3979. D.2487-84 du 84-11-07, G.O. 84-11,28, p. 5675. D. 287-85 du 85-04-03, G.O. 85-05-01, p. 2301.

(42) Supra note 28, à la page 3.

(43) SIMARD, Marcel, Les facteurs d'efficacité dans l'organisation de la prévention des accidents du travail (RS-85-38), 76 pages, In: IRSST, Répertoire des recherches. Volume 2, S-52.

SIMARD,. Marcel, LÊVESQUE, Christian, BOUTEILLER, Dominique, L'efficacité en gestion de la sécurité du travail: principaux résultats d'une recherche dans 1'industrie manufacturière. Groupe de recherche sur les aspects sociaux de la prévention en santé et en sécurité du travail (Équipe associée de 1'IRSST).

(44) SIMARD, Marcel, LÊVESQUE, Christian, BOUTEILLER, Dominique, L'efficacité en gestion de la sécurité du travail: principaux résultats d'une recherche dans l'industrie manufacturière. Groupe de recherche sur les aspects sociaux dé la prévention en santé et en sécurité du travail (Équipe associée de 1'IRSST), Université de Montréal, Octobre 1988, à la page 67.

(45) Op. cit., à la page 71.

(46) Laboratoire de recherche en écologie humaine et sociale (LAREHS), Évaluation du fonctionnement et des effets de sept associations sectorielles paritaires, préparé pour la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Université du Québec à Montréal, Février 1989.

Dans cette étude, il ne s'agit pas non plus de cerner l'impact des ASP, c 'est-à-dire les transformations profondes et durables que leurs activités ont engendré dans le secteur ( ) L'étude porte sur les effets des ASP "c'est-à-dire des rétombées se manifestant à court terme et affectant des caractéristiques des individus et/ou des entreprises de telle façon que l'état de la santé-sécurité (SST) dans le secteur ait davantage de

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' probabilités d'évoluer positivement" (...)

(47) Op. cit., à la page 445. Une hypothèse avancée dans le rapport mérite réflexion ...

(...) on peut se demander si l'absence de conflits au niveau des conseils d'administration des ASP ne signifie pas que des thèmes cruciaux liés à la santé-sécurité et à la prévention sont laissés pour compté, de façon à préserver le climat d'entente entre les parties. L'exemple le plus probant de cela est l'abandon, par certaines ASP, des programmes visant à promouvoir l'implantation de CSS. Cette décision, contraire à celle de plusieurs autres associations pour lesquelles le CSS constitue une porte d'entrée extrêmement utile dans beaucoup d'établissements, est en fait le résultat de divergences profondes des parties au sujet du statut à conférer aux CSS et, plus particulièrement de leur intégration aux conventions collectives (—)

(48) Op. cit., à la page 489. Il nous apparaît important de citer le rapport sur les liens CSST-ASP:

Au chapitre 10, nous avons eu l'occasion d'examiner en détails l'état pitoyable des relations entre la CSST et les ASP et de décrire le climat de méfiance généralisé qui prévaut à 1 'heure présente entre les deux parties. S'il s'agit de répondre maintenant de façon directe aux questions posées dans 1'étude préparatoire au sujet de l'utilité de l'aide, et du soutien apporté par la Commis-sion aux ASP, on ne peut que conclure que cette question est formulée dans le mauvais sens: il faudrait plutôt se demander jusqu'à quèl point les activités de la CSST nuisent aux ASP, car le problème est bien celui-là: quels sont les impacts négatifs du désinvestissement progressif effectué par la CSST dans le dossier des ASP e t combien de temps ces dernières pourront-elles pour-suivre leurs activités de façon cohérente tout en n'ayant aucune idée précise de leur avenir?

(49) Op. cit., aux pages 497-498.

(50) Op. cit., à la page 499.

(51) Supra note 1, à la page 143.

(52) Article 166 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail.

(53) Le Vérificateur général du Québec, Rapport à l'Assemblée natio-nale. Année financière terminée le 31 mars 1988, à la page 149.

(54) Ainsi, la Commission a connu une majoration importante des coûts en indemnisation de 1985 à 1986 (1985: 748 millions, 1986: 895 millions). Cette hausse subite en 1985, des demandes de presta-tions et par voie de conséquence du déficit a provoqué des

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remises en questions. Ajoutons que les Rapports Fortier, Gobeil et Scowen ont fait des propositions claires de révision du statut de monopole para-étatique de la CSST.

Comité sur la privatisation des sociétés d'État, De la révolu-tion tranquille ... à l'an deux mille, Québec, ministère des. Finances, Ministre délégué à la privatisation, 1986, 68 p. (Pierre Fortier, Ministre délégué).

Groupe de travail sur la révision des fonctions et des organisa-tions gouvernementales. Rapports (Premier rapport: "L'organisa-tion gouvernementale"; Deuxième rapport: "La gestion des programmes gouvernementaux"), Québec, le Gouvernement du Québec, 1986, 47 p. (Paul Gobeil, Président).

Groupe de travail sur la déréglementation. Réglementer moins et mieux: rapport final du Groupe de travail sur la déréglementa-tion (Vol. 1: "Le processus de réglementation, réglementation sociale, la réglementation économique"; Vol. 2: "Inventaire sectoriel de la réglementation économique au Québec"), Québec, Conseil exécutif, 1986, 2 vol. (Reed Scowen, Président).

(55) Supra note 43.

(56) Supra note 48. Le 30 mars 1989, l'AHQ dénonce le recul de la CSST en matière de santé-sécurité du travail:

Le Président de la Conférence de la santé communautaire de l'AHQ, Monsieur Jean-Pierre Montpetit, s'inquiète de voir le dossier de la santé et de la sécurité au travail prendre un recul certain. "Les progrès en matière de prévention en milieu de travail sont présentement mis en péril par 1 'adoption d'une politique de courte vue • accompagnée d'une absence d'orientation claire et précise de la CSST, de déclarer Monsieur Montpetit. Rappelons que huit ans après l'entrée en vigueur de la Loi sur la santé et sécurité au travail, seulement 15% de la main-d 'oeuvre québécoise, soit 315,000 travail-leurs sur 2,000,000, ont accès aux services publics de santé au travail. "Cette situation est due au fait que la CSST limite l'intervention des DSC depuis 1987", précise Monsieur Montpetit.

(57) Supra note 53. Rapport du Vérificateur général, aux pages 165-166:

( ) Dans la réalisation de sa mission de prévention, la Commission n'a pas assuré la mise en place complète des mécanismes de prévention prévus à la Loi sur. la santé et la sécurité du travail, dont le comité de santé et de sécurité, le représentant à la prévention, le programme de prévention et le programme de santé spéci-fique à chaque établissement.

La Commission a approuvé l'ordonnancement des secteurs

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d'activités économiques au Québec en formant six groupes prioritaires pour les fins d'une' application graduelle des principales dispositions de la loi. Ainsi, entre juillet 1982 et avril 1985, la Commission a fait approu-ver par le gouvernement des règlements concernant les mécanismes de prévention des groupes I et II et une partie de ceux du groupe III. Cependant, le gouverne-ment n'a pas encore ratifié là proposition de la Commis-sion d'avril 1985 à l'égard des autres mécanismes du groupe III.

Depuis avril 1985, la Commission n'a pas poursuivi ses démarches pour étendre 1'application de la loi aux autres travailleurs du Québec. En conséquence, au 31 décembre 1987, les travailleurs des groupes IV, V et VI, qui représentent 74* des travailleurs, ne sont pas encore couverts par les mécanismes de prévention prévus à la loi:

Par ailleurs, la Commission n'a pas élaboré et recom-mandé au gouvernement 1 'adoption des règlements néces-saires à la mise en application de certains articles de la loi. Il s'agit d'abord des articles 62 sur l'avis d'accident et 91 sur la formation du représentant à la prévention (...)

(58) Op. cit., à la page 166.

(59) Supra note 57.

(60) Supra note.7, à la page VII.

(61) Rapport de la Commission d'étude sur l'accès du citoyen à l'information gouvernementale et sur la protection des rensei-gnements personnels. Information et liberté. Gouvernement du Québec, 1981, à la page 79.

(62) CSST, Rapport annuel, 1987,. à la page 39.

(63) Op. cit., à la page 24.

(64) IRSST, Secteurs et professions à risque. Les principaux problèmes de santé et de sécurité du travail au Québec, publié par 1'IRSST, Octobre 1987.

(65) Supra note 50, à la page 25.

(66) Supra note 7, à la page 183.

(67) Supra note 7, à la page 153. .

(68) Supra note 62, à la page 25.

(69) Supra note 7, à la page 63.

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(70) Supra note 7, à la page 238.

(71) Supra note 7, à la page 238.

(72) VÊZINA, Michel, Travail et prévention, In: Traité d'anthropo-logie médicale, l'Institution de la santé et de la maladie, sous la direction de Jacques Dufresne, Fernand Dumont, Yves Martin, Presses de l'Université du Québec, Institut québécois de recherche sur la culture. Presses Universitaires de Lyon, 1985, Chapitre 39, aux pages 787-788.

(73) VHITE, Deena, RENAUD, Marc, The Involvement of the Public Health. Network in Occupational Health and Safety: a Strategic Analysis, Document préparé dans le cadre du programme de recherche de la Commission d'enquête sur les services de santé et les services sociaux. Recherche §21, Les Publications du Québec, 1987.

(74) Op. cit., aux pages 55 à 59.

(75) Op. cit., à la page 62.

(76) Rapport de la Commission d'enquête sur les services de santé et les services sociaux (présidée par Jean Rochon), Les Publica-

. tions du Québec, 1988, à la page 504.

(77) Le programme de santé spécifique tel que défini dans le Livre blanc:

(...) se caractérise par un ensemble cohérent et intégré d'activités et de services, en vue d'améliorer l'état de santé d'une population donnée. Un tel programme ne se limite donc pas à une simple dispensation d'examens médicaux aux travailleurs, mais dcfit également comporter des activités d'éducation sanitaire, d'information et d'animation, de même que des analyses des exigences de certains postes de travail.

(78) • Bilan sur les services de santé préventifs financés par la CSST [CSST, Octobre 1987];

• Opération bilan 1987 - Équipes de base (CH/DSC) [AHQ, Février 1988];

• Bilan et perspectives en santé et sécurité du travail [AHQ, Février 1985];

• Opération bilan 1987 - Équipes de programmes (CLSC) [AHQ, Mars 1*988] ;

• Portrait des services privés de santé au travail [CSS.T, Janvier 1988];

• Opération bilan 1987, services de santé reconnus [AHQ, 1988];

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• Rapport de vérification intégrée du programme de santé au travail [Price Vaterhouse, Décembre 1987];

• Sondage en santé et sécurité au travail [DSC - Cité de la santé de Laval - DSC de l'Hôpital du Sacré-Coeur de Montréal, Janvier 1987]v

(79). Opération bilan 1987, Bilan des réalisations des services de santé, réalisé par le Comité provincial en santé au travail (AHQ), la FCLSCQ, et le ministère de la Santé et des Services sociaux. Voir également supra note 78.

(80) Supra note 28, à; la page 9.

(81) BRADET, Denis, CLICHE,. Bernard, RACINE, Martin, THIBAULT, France, Droit de la santé et de la sécurité du travail, La loi et la jurisprudence commentée, Les Éditions Yvon Biais Inc., 1986, à la page 125.

(82) Supra note 7, à la page 188.

(83) Supra note 7, à la page 188.

(84) VAILLANT, Jeanne d'Arc, Allocution prononcée devant le Barreau de Québec, le 18 avril 1986, La Commission d'appel en matière de lésions professionnelles: son mandat, sa juridiction, ses objec-tifs, son fonctionnement et sa procédure, aux pages 8-9.

(85) Supra note 62, à la page 47.

(86) Commission d'appel en matière de lésions professionnelles, Rapport annuel pour l'exercice financier 1987-1988, à la page 20.

(87) Op. cit., aux pages 19 à 22.

(88) Op. cit., aux pages 24-25.

(89) Supra note 95, à la page 29. ,

Dans lé rapport annuel, il est recommandé:

(...) Étant donné que 60% du volume des déclarations de la Commissiàn d'appel provient de contestations de déci-. sions de la CSST, rendues à la suite d'un avis de 1 'arbitre médical, et, surtout, que lors de leur audi-tion en appeJ, il s'agit pour les parties de leur première et unique audition, la Commission d'appel suggère au Ministre de la Justice de faire en sorte que les décisions de la CSST faisant suite à l'avis d'un arbitre médical soient préalablement soumises en révi-sion, avànt de pouvoir être portées en appeJ.

(90) Supra notes 78 et 79.

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(91) Supra note 46, à la page 489.

(92) Supra note 76, aux pages 504-505.

(93) Supra note 1, aux pages 190-191. Extrait d'un rapport français, rédigé à la demande du Ministre de la Santé, par un groupe de travail réunissant, sous la direction du Professeur G. de Bernis, des médecins, des inspecteurs du travail, des universi-taires, des syndicalistes.

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«Réaliser une approche communautaire en santé-sécurité du travail dans un contexte légal et institutionnel»

Conférence prononcée lors du Colloque organisé par l'Association pour la santé publique du Québec

«L'heure juste en santé et sécurité du travail: intensifier 1 'action»

Québec, Hôtel Loews le Concorde

le 9 novembre 1989

Michel PERREAULT

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Introduction

Ne craignez pas, je ne me lancerai pas dans une longue discussion

sur ce que devrait être une approche communautaire. Je me conténterai

d'en illustrer les grandes lignes avec un exemple tiré de mon vécu

récent !

Je viens de réaliser une thèse de doctorat qui s'est greffée à une

véritable approche communautaire en santé-sécurité du travail. Le

Regroupement des professionnels de la danse, à sa création en 1985,

avait établi la.santé-sécurité du travail comme priorité d'action. . Un

comité formé de danseuses chorégraphes a vite établi un question-

naire pour connaître la situation et, devant l'ampleur de la tâche, a

demandé au Ministère des Affaires culturelles de subventionner une

étude. Ce Ministère, s'est dit d'accord avec une telle étude mais ne

voulait la financer que' si elle était faite' par des gens qui ont des

compétences là-dedans - et qui auraient la crédibilité, parce que non

impliqués dans les problèmes. Le Regroupement a contacté le Groupe de

recherche auquel j'étais associé. J'ai entrepris l'étude avec le

Comité du Regroupement comme comité aviseur et j'ai remis les résultats

au Regroupement qui en a fait la .diffusion et a obtenu trois subven-

tions du Ministère des Affaires culturelles pour entreprendre des

activités de prévention; j'agis comme consultant pour leur réalisation.

Le moindre que l'on puisse dire, c'est que ce n'est pas du tout,

mais pas du tout l'approche choisie par la CSST. D'ailleurs, si vous

allez interroger les gens du Regroupement, ils vous diront spontanément

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que la phase la plus difficile dans leur action fut dé convaincre la CSST de financer une partie de l'étude: la danse professionnelle n'entrait pas dans les priorités; il a donc fallu tordre des bras et sortir du jeu de ping-pong entre CSST et IRSST. [Ceci dit, la collabo-ration de l'IRSST a été impeccable, une fois acquise.]

La première partie de mon exposé portera donc sur-: Qu'a fait le

réseau de. santé communautaire face à une approche institutionnelle à

l'opposé d'une approche, communautaire classique?

Nous savons tous qu'au niveau des programmes de santé du travail,

la loi établit clairement qu'il s'agit d'un mandat devant faire l'objet

d'une entente entre la CSST (qui paie) et lê-MSSS. Dès le départ,'la

CSST a décidé de fonctionner selon un modèle de gestion de la préven-

tion: on priorise des groupes «statistiques» selon les incidences que

révèle une description statistique sommaire, on établit des quotas

statistiques de services à rendre, services définis selon la loi, et on

gère par postes de dépenses en fonction de ces quotas.

Il s'agit là d'une logique impeccable ... et, malheureusement,

implacable. J'en sais quelque chose puisque j'ai participé en vain aux

négociations avec la CSST pour que le réseau de la santé et des

services sociaux, puisque l'un des groupes les moins prioritaires selon

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les statistiques, soit déclaré prioritaire -- charité bien ordonnée

commence par soi-même! — alors que j'étais représentant patronal au

premier comité exécutif de. la première association sectorielle,

l'ASSTAS. Il s'agit donc :-d* une logique impeccable mais la réalité ne

fonctionne pas selon une telle logique que je qualifierais d'absolu-

tisme technocratique— car je n'ai rien contre des priorités à la

condition qu'il n'y ait pas que des priorités!

Quelques exemples de réalité:

• Dans la plupart des établissements, aucun programme, de

prévention n'existait, sauf parfois sur papier. Il n'y

avait de registre pratiquement nulle part et vous avez dû

aider les établissements à mettre en place ce système.

• Le retrait préventif de la travailleuse enceinte ou qui

allaite a connu une croissance exponentielle et exigé des

investissements de ressources dans, les DSG bien au-delà des•

quotas prévus," sans qu'il y ait, à ce que je sache, ajuste-

ment des. quotas de ressources. Mais on n'en tient pas

compte dans cette logique; nous sommes encore chanceux dans

un certain sens que la CSST n'ait pas encore appliqué, dix

ans après, les articles concernant le retrait préventif

face aux contaminants pour tous les travailleurs et

travailleuses. Et qui dénonce ce non-respect de la loi???

A l'intérieur d'une telle logique, il est facile d'affirmer que le

réseau public est inefficient et inefficace. On a d'ailleurs confié la

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tâche de le démontrer à une firme comptable — Price Waterhouse — , puisque c'est bien d'une logique comptable dont il s'agit; cette firme cependant a adopté un cadre de gestion comptable autrement plus arti-culé que celui de la CSST!!!

Cette logique a constitué et constitue encore pour le patronat

«dominant» [car nous nous savons qu'il y a plusieurs sortes de patro-

nat] une chance inespérée d'essayer de récupérer les pouvoirs perdus

avec'la loi de 1979: il suffit d'avoir assisté, comme moi, à plusieurs

tournées du Ministre Marois avant le Livre blanc puis à toutes les

sessions de la Commission" parlementaire de l'automne 1979, pour réali-

ser que la perte du médecin d'entreprise constituait pour le patronat

un des enjeux fondamentaux, sinon l'enjeu fondamental: on y a même vu

Augustin Roy plaider,' avec le patronat, que les erreurs passées, recon-

nues comme réelles même si exagérées par les syndicats, ne se reprodui-

raient plus si la loi obligeait le médecin d'entreprise à relevtr

directement, donc personnellement, du président de la compagnie ! Le

patronat a donc commencé à attaquer le réseau public dès 1983-1984 et

l'enjeu est devenu plus crucial encore avec la refonte de la loi.

d.'indemnisation en 1985; cette loi a montré, par l'augmentation effa-

rante des contestations légales, combien il en coûtait au patronat

d'avoir perdu le contrôle de sa médecine d'entreprise [qu'il peut

d'ailleurs s'offrir encore, mais à ses frais] et a aussi démontré une

vision limitée de la notion de prévention d'une partie du patronat. La

loi indiquait clairement que les programmes de santé relevaient du

réseau de la santé publique. Mais on s'est livré à un véritable

chantage sans jamais préciser la logique du «privé» par rapport au

public: les médecins «privés» seraient-ils payés à salaire selon les

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quotas actuels? Il me semble que si c'était le cas,- le bilan comptable

des services -de santé offerts véritablement aux travailleurs serait

rachitique car je connais peu de médecins qui accepteraient de faire

-dans le privé ce que font les médecins de santé publique. Sinon, la

privatisation se ferait-elle au paiement à l'acte? Vous savez comme

moi que lesjcoûts en seraient faramineux [existe-t-il en passant une

étude prospective là-dessus? ... Non, il s'agit bien de chantage]. Le

patronat accepterait-il de payer .la note pour reprendre le contrôle:

difficile à prophétiser, puisque c'est de «prophéties» dont on parle.

Or,, le plus important à ce moment-ci est d'examiner rapidement,

comment le réseau à réagi devant cette menace «réelle» ou «appréhendée»

—: pour utiliser le vocabulaire des mesures de guerre — de la privati-

sation..

Par la panique: bilans par-dessus bilans, pour démontrer en fait l'indémontrable puisqu'il ne peut faire de doute qu'une approche de santé publique dans les conditions réelles — e t non pas logiques -- ne peut atteindre eh deux ans [c'était bien le délai] des indicateurs comptables imposés.

Pire 'que cela:- nous, avons assisté à une absence quasi totale de

solidarité entre dés établissements de santé communautaire qui

devraient pourtant savoir qu'il n'y a pas d'approche communautaire

pouvant avoir le minimum de succès sans solidarité. On a même vu

certains en rajouter : la logique comptable de la CSST en allant inter-

venir dans le groupe III alors que la plupart affirmaient ne pouvoir

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atteindre les objectifs assignés pour les groupes I et II avec les

ressources consenties.

Et dans tout cela, une absence lamentable de leadership politique

du Ministère: c'est politique et ce n'est certainement pas dû aux

fonctionnaires en place car c'est chronique: des exemples ... le Minis-

tère de la Santé du Québec n'a créé une division de l'hygiène indus-

trielle qu'une dizaine d'années au moins après la recommandation de la

Commission Kontpetit de .1931 et, encore, il n'a pratiquement jamais

rendu cette division opérationnelle, malgré les efforts de bien des

fonctionnaires; autre exemple, les pressions énormes qui ont dû être

exercées pour que les chefs de DSC soient nommés médecins hygiénistes

de 1972 .à 1975, alors qu'éclataient grèves et scandales en santé du

travail.

Pourquoi cette inertie politique du MSSS dans ce champ spécifique

que constitue la santé-sécurité du travail: il y aurait "une belle thèse

de doctorat à faire!

Mais n'entrons pas dans les blâmes car cela ne mène à rien:

sachons seulement faire l'analyse minimale pour en tirer des leçons dès

maintenant.

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Il y a' -un cadre- légal: travaillons avec puisqu'il s'agit d'un"

choix de société à un moment précis. Ce cadre légal a créé une insti-

tution, la CSST, dont on ne peut pas et dont on ne devrait pas ne pas

tenir compte. Mais la logique de-l'action n'est pas contenue.dans la

loi et peut être négociable: le Ministère a un statut•reconnu par la

loi et', avec le Ministère, il s'agit bel et bien du réseau.

Mais il est plus que temps d'agir comme réseau avec ce Ministère, sinon pourquoi pas,'du moins théoriquement, privatiser tout cela, car ce qui fait entre autres la spécificité1 de l'approche publique c'est de vouloir- fonctionner en réseau.

Il m'apparait donc qu'il est temps que le réseau amène le Minis-

tère à assumer véritablement son mandat et à le négocier avec l'insti-

tution CSST comme, l'indique d'ailleurs la loi. Cette négociation

devrait, selon moi, viser fondamentalement deux objectifs:

(1) Une évaluation serrée de ce qui se fait dans le réseau comme mise en oeuvra ou processus d'implantation en fonction des tâches réelles à accomplir. Il semble qu'on disposera sous peu de l'instrument pour y parvenir avec le SMEST.

(2) Une évaluation la plus complète possible de l'impact de

tous ces services sur la santé des travailleurs et

travailleuses, car finalement c'est le seul-objectif qui .

devrait compter ultimement: contribuer à ce que cette

santé s'améliore.

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Ces deux modes d'évaluation clairement négociés par entente

devraient surtout permettre de dégager une marge de manoeuvre pour

pouvoir essayer autre chose que la logique implacable mise en place

jusqu'à maintenant: en dehors d'objectifs clairement définis par

rapport" à des groupes prioritaires — 11 idée de priorité n'est pas

entièrement à rejeter :—, objectifs qui commandent des moyens précis en

termes d'investissements prévisibles en ressources humaines et maté-

rielles, il y aurait sûrement moyen de négocier des sphères d'activité

plus conformes à une mission globale de santé publique communautaire

comme l'élargissement de la prise en charge de la santé-sécurité du

travail par des communautés locales ou régionales, des avancées dans

des établissements où le milieu est prêt à se prendre en charge même

s'ils ne font pas partie d'un groupe prioritaire désigné. Il serait

d'ailleurs intéressant de prévoir une évaluation comparative de

l'impact de ces deux approches après un nombre déterminé d'années.

Conclusion,

Est-ce possible à ce moment-ci alors que l'état de démobilisation

des intervenants atteint un point critique? Sommes-nous prêts à foca-

liser nos énergies comme réseau là-dessus? Je me contenterai de faire

valoir deux points d'appui qui nous permettraient de rallier plus

facilement l'ensemble du réseau — DSC et CLSC — pour briser l'isole-

ment que connaissent les équipes en santé du travail à l'intérieur du

réseau, car il y a bien malheureusement isolement.

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(1) Les milieu?: de travail constituent un terrain incontour-

nable pour une approche de santé communautaire - en

. général: on ne.peut se permettre de se retirer de ces

endroits et populations qui font partie, qu'on le

veuille.ou non, de notre mandat général comme établisse-

ments de santé. Il semble que la plupart des CLSC

réalisent maintenant . cela d'après les informations que

j'ai obtenues du congrès récent de la Fédération des

CLSC [je n'ai pas d'informations sur les 32 CH-DSC].

(2)' La-santé environnementale devient enfin — un peu tard

-merci et à .quel prix! — une préoccupation majeure de la

population et du réseau. Or. le lien est évident entre

santé du .travail et santé environnementale et il y a

longtemps que les épidémiologistes savent cela!

Quelques exemples:

B La Balmest à St-Jean • Les BPC à St-Basile;

• Les transports de matières dangereuses.

Ce sont deux déterminants.majeurs qui peuvent contribuer à briser

l'isolement actuel des équipes .de santé du -travail et il - faudrait s'en

servir pour dégager une marge de manoeuvre tout en continuant à agir de

façon claire, concertée, entre nous et avec les autres, à l'intérieur

du.cadre logique actuel.mais conçu et appliqué de façon réaliste.

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L'expérience nous montre, hors de tout doute, que nous ne pouvons

réaliser pleinement ou même minimalement des objectifs de santé commu-

nautaire en catimini, par la porte d'à côté de la CSST. [Si j'ai pu

donner cette impression dans le passé, je m'en excuse.]

Il est temps ..de faire face à nos véritables responsabilités,

quitte à susciter un débat au niveau de toute la société si cela oblige

à réviser la loi.

Si c'était le cas, on verrait qui gagnerait ...

Si ce n'était pas le réseau public, nous aurions au "moins acquis

l'expertise pour être de bons chiens de garde! . Du moins, je l'espère

MiiCÂX Michel PERREAULT, Ph.D.

Chargé de projets en recherche CH-DSC Maisonneuve-Rosemont

et Chargé de cours au Certificat en santé-sécurité du travail

Faculté de l'Éducation Permanente de l'Université de Montréal

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IA PSYCHOPATHOLOGIE DU TRAVAIL: UNE AUTRE APPROCHE DE LA PRÉVENTION EN REGARD

DE LA SANTÉ MENTALE AU TRAVAIL

Quand on parle de santé mentale au travail, les recherches connues au-Québec sont celles faites à partir de la notion de stress. Mais, il existe une autre approche, développée surtout en France et qui, depuis peu a traversé l'Atlantique? il s'agit de la psychopa-thologie du travail dont jé vous parlerai aujourd'hui, dans ce Col-loque sur la santé-sécurité du travail car elle se situe d'enblée dans l'axe de la prévention.

Depuis les dernières décennies, on a mis au jour les princi-paux paramètres socio-culturels, politiques et économiques qui struc-turent la santé, révisant ainsi le «credo déterministe linéaire». On a accepté le principe de pluricausalité en dévoilant les interactions multiples entre l'individu et les différents champs dans lesquels il s'inscrit socialement. Bien sûr, le champ du travail sera un des champs privilégiés d'étude carme lieu possible d'agression à la santé. Le milieu de travail, est en effet reconnu carme étant le lieu ie plus propice aux attaques à la santé, à cause des multiples contraintes qu'il exerce sur l'horme came être biologique et social.

C ' est dans ce questionnement pluriel que va se greffer la psychopathologie du travail qui interroge le rapport travail/santé mentale. Pour situer rapidenent la* psychopathologie du travail, il

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sied, je crois, de faire une rapide conparaison avec les études sur le stress et cela pour deux raisons: 1° afin d'éviter le syncrétisme épistémologique dont on sait les dégâts dans l'histoire de la pensée et 2° pour mieux saisir leur nécessaire carplémentarité.

Si on peut retracer quelqu1 accou in tance entre ces deux appro-ches, ce qui saute aux yeux, c'est leur différence. Dans toutes les études sur le stress et le «burn-out», on retrouve une «constante» et une «daninante». La «constante» est relative à l'étiologie des problèmes de santé mentale, qui est toujours présentée carme étant fonction d'une dimension quelconque de l'organisation du travail. La «dcminante» concerne l'utilisation de certains concepts catme la satisfaction, l'ennui, la fatigue. Cette «constante» et cette «dcmi-nante» semblent être les points d1 ancrage de la ressemblance entre les études sur le stress et celles faites en psychopathologie du travail. Mais il faut tout de suite ajouter que les limites de. cette ressem-blance sont posées par le traitement qui est fait de ces facteurs ou variables.

Au niveau des différences, il y en a quatre principales dont je vous parlerai rapidement. La première concerne l'objet même de la recherche. Les études sur le stress, avec quelques variations, privilégient l'analyse des états de stress à travers leurs mani-festations pathogênes. On se retrouve d'emblée dans la sphère de la maladie, du pathologique; tandis que la psychopathologie du travail

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s'intéresse, pourrait-on dire à la «normalité», c'est-à-dire qu'elle propose l'analyse de là souffrance que doivent subir les travailleurs et des mécanismes qu'ils doivent mettre en place pour né pas être malades. Elle s'intéresse donc à la souffrance au travail et aux dégâts qu'elle peut produire sur l'équilibre psychique. Mais elle s'intéresse également aux sources de plaisir au travail, qui elles, peuvent être structurantes pour l'équilibre psychique.

La 2° différence concerne les référents théoriques auxquels s'alimente la psychopathologie du travail. Ces référents théoriques sont tirés de la psychiatrie, de la psychanalyse et aussi de la sociologie du travail dans la mesure oû cette approche se situe d'emblée dans le champ du politique et du social. Ce qui n'est pas le cas de la majorité des études sur le stress oû ce qui est visé c'est le changeront adaptatif auquel sont conviés * les travailleurs-euses pour faire face au stress et à apprendre à le gérer.

Cela nous conduit à une troisième différence. La psychopa-thologie du travail postule l'existence d'éléments inhérents à l'orga-nisation du travail qui sont virtuellement pathogênes ou structurants pour l'équilibre psychique et ce, indépendairment des traits de person-nalité des travailleurs-euses qui la subissent. Cela ne veut pas dire que sont niés les effets modulateurs de la personnalité, cela veut indiquer seulement que ce qui est visé, c'est l'identification de ce

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qui est potentiellement pathogêne ou structurant pour tous. On ccmprendra alors facilement, que ccmpte tenu de ces différences, les solutions recherchées seront également un lieu de différence. Car si, dans le cas du stress les solutions passent surtout par la prise en charge du stress par les travailieurs-euses pour apprendre à le gérer, les solutions proposées par la psychqpathologie du travail seront orientées vers la transformation des rapports de travail tels que structurés par l'organisation du travail. Il y a, si on veut, une visée éthique implicite à la "psychopathologie du travail dans la mesure où est présente la préoccupation constante de débusquer, s'il y a lieu, derrière les rapports de travail, les facteurs qui fragilisent les travailleurs et de donner à ces derniers les moyens d'agir sur leur environnement de travail.

La dernière différence, et peut-être la plus importante quand on parle de santé-sécurité du travail, concerne si on veut certaines règles épistémologiques et méthodologiques. Cette approche en effet se situe dans ce qu'on appelle «la-théorie du sujet» dans le sens où ce qui est interpellé par cette approche, c'est le sujet qui vit la réalité dû travail? les agents sociaux sont donc au centre de l'ana-lyse. Je m'explique. La psychqpathologie du travail s'intéresse à la subjectivité des travailleurs-euses, à ce qu ' ils vivent sub jec-tivenent, à -leur système de représentations, leur imaginaire, leur symbolique, leurs «affecte»; tout ce qui fait «sens» pour eux et qui peut donc être reçu canne source de plaisir, ou de souffrance.

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Avant d1 entrer dans -le coeur de non exposé, je voudrais rappeler que si on peut sans ambiguïté affirmer la différence de ces deux approches, cela me doit pas nous faire oublier leur nécessaire canplémentarité. Il ne faut donc pas tenter de coloniser l'une par l'autre ou se servir de l'une ou de l'autre carme repoussoir? il faut surtout se rappeler que l'étude de la santé mentale au travail est à ce point complexe, qu'on ne peut se permettre de refuser des approches qui l1éclairent de différentes manières.

Pour les fins de cet exposé, je me limiterai à présenter la psychopathologie du travail dans ce qu'elle a d'éclairant popr le champ de la santé-sécurité du travail, ' donc pour tout ce qui concerne la prévention, les mesures préventives et les attitudes vis-à-vis ces protocoles de prévention.

Il faut d'abord poser clairement que c'est l'organisation du travail qui est questionnée comme source de plaisir et de souffrance au travail. La psychopathologie du travail part du postulat suivant: spontanément, tout travailleur essaie d'aménager l'organisation de son travail, son mode opératoire, dans un ordre et selon une séquence de gestes qui tiennent compte de ses besoins, de ses désirs et de ses capacités. On dira que spontanément, les cxmportements de l'individu au travail sont orientés vers le plaisir. Il est alors facile de saisir que plus une organisation du travail est rigide, plus cet effort d'harmonisation, ce rapport psychique de l'horme au travail

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risque d'être troublé, et alors s'installe la souffrance. À l'in-verse, on comprendra qu'une organisation du travail souple (c'est-à-dire celle qui laisse au travailleur suffisanment de liberté pour qu'il puisse adapter son mode opératoire à ses désirs et à ses be-soins) peut être structurante pour l'équilibre psychique, c'est-à-dire qu'alors est déverrouillé l'accès au plaisir. .

Mais qu'est-ce donc que la souffrance au travail? Et qu'est-ce donc que le plaisir au travail?

La souffrance doit être entendue comme étant un espace compris entre la santé et la maladie. .On a eu tendance, dans l'histoire de la santé, à considérer santé et maladie ccmme s'excluant l'un l'autre et couvrant l'ensemble du fonctionnement psychique. La psychopathologie du travail propose plutôt de considérer la santé ccsnte un but, corme quelque chose qui se remanie constamment, qui se conquiert et se protège dans un processus continu. Cette définition infère l'idée que son atteinte et sa sauvegarde supposent la mise sur pied de mécanismes pour conquérir, garder ou retrouver la santé. On voit poindre, ici, la nécessité d'un espace spécifique oû se négocie la liberté néces-saire au travailleur pour rendre l'organisation du travail la plus congrue possible par rapport à ses désirs. Investiguer sur la souf-france au travail, c'est donc investiguer sur « 1 'infrapathologique ou le prépathologique» ou encore c'est investiguer dans l'axe de préven-tion.

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Le plaisir, peur1 sa part, doit être entendu dans son acception psychanalytique et pour l'expliquer simplement, je dirai qu'il est relié à la charge psychique du travail. Regardons cela de plus près, bans tout travail, le travailleur est soumis à des excitations exo-gènes et endogènes qui génèrent une tension psychique inévitable. Alors le plaisir sera relié à l'existence d'exutoires, de voies de décharge sur les lieux de travail afin que s'exprime cette tension. Si ces exutoires existent, alors s'ouvre la porte qui donne accès au plaisir, sinon le verrou reste poussé et c 'est la souffrance qui s'installe.

Cette souffrance et ce plaisir ne sont certes pas visibles à l'oeil nu; il faut les décoder dans les discours, les pratiques et les ccxnportements collectifs des travailleurs. IJ. faut décrypter, dans ce que la psychopathologie du travail norme «le vécu collectif et sub-jectif», les traces de plaisir ou de souffrance. C'est dire donc, que doivent être créés des espaces de parole où les agents sociaux impli-qués puissent être écoutés, entendus et crus car les sujets qui vivent une situation sont certes les meilleurs témoins de ce vécu et de ses effets pathogènes ou structurants. Ce qui veut dire, entre autre chose, que si on veut faire de la prévention, il faut d'abord ques-tionner et «entendre» les travailleurs impliqués. Et les indicateurs les plus heuristiques sont l'insatisfaction reliée au contenu signifi-catif et ergonomique de la tâche et 11 anxiété face aux risques du travail.

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L'insatisfaction peut être générée par un contenu significatif peu satisfaisant ou par un contenu ergonomique lourd. Dans le premier cas, il s'agit de l'image de soi telle que perçue par le sujet tra-vailleur et là, deux possibilités s'ouvrent: ou bien le contenu de la tâche est perçu carme étant en deçà des capacités ou bien carre étant au-delà. Dans les. deux cas, l'insatisfaction s'installe, générée dans le premier cas, par un sentiment d'inutilité, de dévalorisation, de non-reconnaissance des connaissances et des savoir-faire et, dans le second cas, par un sentiment d'impuissance, d'incapacité et de peur de l'échec. Ces deux situations peuvent aboutir au même résultat: la souffrance psychique.

Quant au contenu ergonomique, il est plus facile de saisir qu1 il peut être source d' insatisfaction. On pense d'emblée aux malaises physiques mais on oublie qu'il peut aussi être source de souffrance psychique si l'adéquation désir-plaisir est rendue impos-sible par des contraintes. On a:qu'à penser au travail" posté et aux différents troubles qui lui sont associés. Il faut se rappeler alors que si le point d'impact semble être le corps, peut-être qu'il s'agit là de fragilisation sanatique oû le corps sert d'expression à la souffrance psychique.

Puis vient l'anxiété reliée à la peur qui elle, est engendrée par les risques, réels, présumés ou imaginés. Cette anxiété est reliée aux risques physiques mais aussi aux risques d'ordre socio-affectif engendrés par l'organisation du travail. Avant de passer à

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l'analyse d'un élément important lié à la prévention dans le dcmaine de la santé mentale, je voudrais rappeler que si le contenu signifi-catif, le contenu ergonomique et l'anxiété peuvent tous les trois agresser la santé mentale, leur importance s'articule dans un rapport hiérarchique. En effet, un contenu significatif important peut contrer, voir gamier, les effets pathogênes engendrés soit par le contenu ergonanique, soit par une anxiété profonde.

Ce constat fait à partir de différentes recherches est très important quand on parle de prévention. On sait bien, en effet, qu'il est impossible de faire disparaître certaines sources d'anxiété ou d'insatisfaction ainsi que certains aspects du contenu ergonanique. Alors, il est intéressant de savoir qu'on peut contrer leurs effets pathogènes en mettant l'accent sur le contenu significatif de la tâche. Dans une recherche faite auprès des infirmières travaillant aux soins intensifs, on a pu constater que la reconnaissance dont elle font l'objet et la plus grande marge de manoeuvre dont elles jouissent associée à une responsabilité et un pouvoir réel, viennent contre-balancer, en partie, l'anxiété très grande générée par la présence constante de la mort.

Devant plusieurs réalités de travail, on peut se demander cannent les travailleurs agressés psychiquement arrivent à protéger leur santé mentale face à cette souffrance. Les recherches de terrain

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faites à ce jour, ont mis en lumière l'existence de mécanismes de défense qu'on appelle, des stratégies collectives de défense qui viennent à la fois statuer sur la présence de souffrance et servir de moyens pour la conjurer.

L'analyse des stratégies collectives de défense est, d'une certaine naniêre, au coeur de la psychopathologie du travail et au coeur, aussi, de l'analyse des mécanismes de prévention à mettre en place.

Elle rappelle la nécessité de comprendre les écarts entre organisation du travail prescrite, mesures préventives prescrites et les pratiques réelles en dépassant la lecture spontanée qui se limite à la lecture des comportements sans interroger le «Qui» agit derrière ces comportements. Elle oblige à questionner les modes d'émergence de ces pratiques défensives et leur signification «in situ» à l'intérieur des collectifs de travail. Ce qui permet de dépasser la vision, encore trop présente, qui fait voir les travailleurs ccnme étant des agents inconscients et irresponsables qui ne respectent pas les consignes préventives. Elles conduit enfin, â l'analyse des fontes de résistance des travailleurs à certaines mesures préventives prescrites dans d'autres tentes que ceux de l'insouciance; cette analyse peut mettre au jour la. démarche de réappropriation, par les travailleurs, de. leur savoir-faire de prudence, signe de la mobilisation et de l'intelligence ouvrière. Et finalement, il faut noter aussi que ces

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stratégies collectives, de défense face au risque peuvent témoigner de la recherche, par les travailleurs, de zones de plaisir nécessaires à leur équilibre psydiique.

Je vous parlerai, en terminant d'une stratégie collective de défense qui émerge d'une investigation faite auprès des infirmières en milieu hospitalier. Cet exemple nous fait voir le sens que peut prendre le comportement des travailleurs pour peu qu'on veuille le décrypter.

Lors des mois d'observation dans les départements oû sont hospitalisés des patients infectieux (sida,, hépatite virale, etc.), j'avais remarqué que le port de masque et de gants> qui est au centre du protocole de prévention n'était pas toujours observé. Convaincue que tout geste a un sens et que les ccmportements des travailleurs, même s'ils peuvent sanbler étranges, ont toujours une finalité, j'ai questionné ce comportement lors des entrevues. Deux éléments impor-tants se dégagent. D'abord, il y a ce qu'on norme un. «déni de per-ception», puis également la mise en place de mécanismes collectifs pour contrer la souffrance en ouvrant la porte sur le plaisir. Regardons cela de plus près. D'abord le «déni de perception». Le port de masque et de gants n'étant pas une protection absolue, il ne lui reste que sa dimension anxiogène, celle qui vient rappeler le danger constant d'infection au contact du malade. Et ce rappel est à

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ce point anxiogène qu'il augmente la souffrance psychique de l'infir-mière, alors on le rejette.. On voit que le refus de protocole de prévention a un . sens beaucoup plus profond que ce que la lecture spontanée pourrait laisser croire.

De plus, devant des sidéens en phase terminale, alors qu'au risque d'infection s'ajoute l'angoisse de la mort, le rejet du masque et des gants prend, en plus, un autre sens. Elles me le disaient en ces termes: «lorsqu'un patient va mourir, on ne peut lui refuser un dernier contact humain» et pour cela, elles laissent tariber gants et masque. Ici, par choix éthique, les infirmières défient les pratiques préventives et se donnent accès au plaisir et à la satisfaction. Elles négocient avec ce qu'il y a d'anxiogène dans leur travail afin d'en diminuer les effets pathogènes. Le sens de ces comportements, au regard de la prévention, on ne peut le saisir sans que soit créé un espace de parole oû. puissent s'exprimer les travailleurs et ce, dans quelque milieu de travail que ce soit, espace oû leur parole devient action sur leur environnement de travail.

Évidemment, il y a d'autres dimensions importantes qui ne peuvent prendre place ici, faute de temps et d'espace carme par exemple, le poids des différenciations sexuelles dans le rapport santé mentale/travail. Des recherches ont déjà oarmencé à mettre au jour l'importance de ces différences dans le rapport au plaisir et à la souffrance au travail; c'est dire que les haïmes et les feumes n'ont pas les mêmes besoins ni les mânes désirs face à une organisation du

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travail. Et si on veut vraiment agir sur la santé mentale au travail, dans le registre de la prévention, c'est toutes ces dimensions qu'il faut questionner. C'est ce que propose la psychopathologie du travail et c'est là à mes yeux ce qui lui confère sa validité heuristique.

En terminant ce trop bref exposé, je vous donne deux réfé-rences qui pourront satisfaire un peu plus votre curiosité quant à cette approche et vous aider dans votre travail en santé-sécurité du travail.

1) C. Dejours, C. Veil, A. Wisner (sous la direction de). Psycho-pathologie du travail. Entreprise moderne d'édition, Paris, 1985.

2) C. Dejours (sous la direction de). Plaisir et souffrance dans le travail, Tone 1 (1987) CNRS, Paris. Tone II (1988) AOCIP, Paris.

IARIE-OAIRE CARPENTIER-ROY [ Sociologue Novembre '89

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ATELIER G RESUME

LE COLLECTIF DE METIER: LES REGLES ET LES SAVOIR-FAIRE DE PRUDENCE

La psychopathologie du travail à clairement identifié les contraintes, et leurs conséquences, qu'exerce l'organisation du travail sur les travailleurs-euses. Mais elle a aussi fait voir que ces mêmes travailleurs-euses ne sont pas des êtres qui ne font que subir, ils transforment aussi l'organisation du travail. Lë collectif de métier joue un rôle déterminant dans ce processus de transformation. C'est dans ce lieu que s'élabore les règles de métier, les savoir-faire de prudence et les stra-tégies de défense. Après avoir définit ce que nous entendons par collectif de métier, nous nçjus servirons d'une recherche en cours sur les monteurs de lignes électriques pour décrire concrètement les concepts que nous venons de proposer.

3 é f ! A s y - P / s * * ^ S A C J A / IRSST

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Col loque: L '.heure, juste en santx et sîcuritj£ du travail

RESUME

TITRE: Le collectif de mîtier:. les rigles et les savoir—-faire de prudence

La psychopathologi'e du travail a clairement identifii les

con traintes, et 1eurs conséquences, qu'exerce 1'organisation du

travai1 sur 1 es t rayai 11 eurs-euses ... • liais elle a aussi fait voir

qu.e c e s m î m e s • travai 1 leurs-euses ne s o n t pas des i t r e s qui n e

font que subir, ils trans-forment aussi l'organisation du travai 1.

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LE COLLECTIF DE METIER: LES REGLES ET LES SAVOIR-FAIRE DE PRUDENCE

Aujourd'hui, oeuvrer dans le domaine de la santé et de la sécurité du travail,

c'est parler d'accidents du travail et de maladies professionnelles, de mesures de

prévention et de programmes de santé. On écrit des lois et des règlements, on

élabore des moyens de prévention, on transforme les postes de travail. Mais à

travers tout cet "arsenal préventif" on oublie souvent qu'en bout de ligne se trouve

un être humain: le travailleur ou la travailleuse. Non pas un être interchangeable,

anonyme, moyen, standardisé, ou une sorte "d'athlète industriel" comme l'aurait

voulu Taylor, mais plutôt un être avec sa propre identité, son histoire, ses émotions,

sa subjectivité. Tous ces éléments collent à la peau de l'être humain, ils le suivent

à chaque instant du jour et de la nuit. Au travail, chacun de nous, sans exception,

agit aussi en fonction de ce que j'appellerai tout simplement sa subjectivité.

Lorsque nous allons au boulot, personne ne laisse son vécu et ses émotions à la

maison, dans la voiture ou dans son casier à l'usine. Cela signifie que le travail est

aussi un lieu où s'expriment la souffrance, l'anxiété, la peur; comme la joie, le

plaisir, la fierté. C'est à tout cela que s'Intéresse la psychopathologie du travail,

c'est-à-dire au rapport psychique au travail.

Comme l'a bien exprimé Marie-Claire Carpentier-Roy, le travail a des effets

pathogènes et structurants sur l'individu. Cela ne veut pas dire que nous sommes

tous malades du travail, mais que plusieurs d'entre nous souffrent, ça ouil

L'expression de cette souffrance ne se limite pas à la petite boîte noire qu'est notre

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cerveau, elle se manifeste aussi très clairement dans le rapport de l'être humain à

l'organisation du travail. Ce rapport est à double sens: le travail a des effets sur

l'individu, mais l'inverse est aussi vrai.

Pour être plus précis, je yeux dire que le-la travailleur-euse est un acteur

social actif, qui en fonction de ses intérêts et de sa subjectivité, a des effets directs

sur la production, la coopération, la sécurité, etc. Il s'agit ici d'un point de vue qui

rééquilibre le rapport entre l'humain et le travail: nous sommes tous convaincus que

le travail a des effets sur l'individu, mais nous sommes moins attentifs au fait que

l'individu a aussi des effets sur le travail.

Le point de jonction de tout cela est l'activité humaine de travail qui s'exprime

dans un contexte organisationnel précis composé de machines et d'outils, mais

aussi de personnes, de groupes, de relations hiérarchiques, de négociations, de

respect, etc. J'insiste sur les mots personnes et groupes, car ils font voir que

l'organisation du travail comporte une dimension collective plus ou moins formelle.

La psychopathologie du travail accorde une importance toute particulière à

cette dimension collective, parce que c'est à travers elle que s'élabore en grande

partie la lutte contre les facteurs pathogènes du travail. Nous nommons cette lutte

les stratégies défensives des travailleurs.

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Avant d'aborder le sujet des stratégies défensives, attardons nous quelques

instants au support de ces stratégies, soit les collectifs de travail.

Tout d'abord, il faut bien comprendre que le collectif dë travail n'est pas une

entité naturelle. Il s'inscrit dans une organisation du travail qui a ses particularités,

ses méthodes de travail, son histoire. Ainsi donc les collectifs n'ont pas tous les

mômes stratégies défensives et les même règles. Néanmoins, ils partagent certains

prérequis pour pouvoir exister.

Damien Cru définit le collectif à partir de trois critères:

1) plusieurs travailleurs;

2) une oeuvre commune avec des objectifs communs et socialement située; ex:

v pompiers qui éteignent un incendie ou équipe de monteurs qui réparent une

panne;

3) une ou plusieurs règles de métier, qui débouchent sur des pratiques sociales

commune et une prise de conscience de son existence;

J'insiste sur la notion de règles, elle contribue à la création du collectif, mais

assure aussi sa continuité et son évolution. Je reviendrai sur ces éléments un peu

plus tard dans ma présentation.

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Pour revenir aux stratégies défensives de métier, je disais que leur fonction

principale est de lutter contre les effets pathogènes de l'organisation du travail;

comme la pëur, l'anxiété, l'angoisse.

Prenons l'exemple de la peur. Dans plusieurs emplois à risque élevé

(ex: construction, mine, nucléaire), les employés adoptent des comportements et

tiennent des propos qui laissent croire qu'ils méconnaissent le risque, sont

irresponsables ou immatures. On les considère comme imprudents ou ayant le goût

du risque.

Pour la psychopathologie du travail, ces comportements forment une logique

cohérente, ils ont un sens. Ces travailleurs sont victimes de la peur. Ils sont les

mieux placés pour, connaître les dangers puisqu'ils les côtoient quotidiennement.

Dans bien des situations, cette peur paralyse, ralentit et est incompatible avec la

poursuite du travail. Comment un pilote de F-18 pourrait voler en pensant

constamment qu'une seule fausse manoeuvre peut entraîner sa mort? Comment un

monteur de ligne pourrait travailler sur du 25 000 volts en pensant qu'à tout instant

il peut s'électrocuter?

Les travailleurs doivent donc lutter psychologiquement contre cette peur. En

la niant oui, mais aussi en la confrontant et en tentant de maîtriser le risque, d'être

plus fort que lui. En fin de compte sans ces comportements de bravoure et de

parade, sans la négation du risque le travail ne pourrait être fait. Ce que les

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préventeurs considèrent comme des actes dangereux ou inconscients jouent, en

réalité, en faveur de la réalisation du travail et contribue à le rendre

psychologiquement tolérable.

La confrontation du danger (i.e. la stratégie défensive) n'est pas la seule

forme de lutte, il en existe une seconde que nous identifions comme les savoir-faire

de prudence.

Ces savoir-faire de prudence sont des tours de main, des modalités de

communication, des règles de coopération, des traditions, etc. Bien souvent, ils

n'apparaissent pas dans les normes, le formel, ils se communiquent dans

l'expérience, le vécu quotidien. Par exemple, dans la construction d'un échafaudage

temporaire, il y a des façons bien particulières qui ne sont pas du tout enseignées

et qui ne sont présentes dans aucun guide de construction.

Il faut retenir de la première partie de mon exposé trois énoncés:

1) les règles de métier participent activement à la construction, au maintien et à l'évolution des collectifs de travail;

2) les stratégies défensives luttent contre les effets pathogènes de l'organisation du travail, comme la peur et l'anxiété. Ce que l'on qualifie comme des comportements dangereux permettent aux travailleurs de lutter psychologiquement contre la peur et permettent la réalisation du travail;

3) les savoir-faire de prudence constituent des .moyens de prévention efficaces, mais qui sont malheureusement rarement reconnus et pris en considération.

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Pour faire suite à cette rapide présentation théorique, je vous suggère de voir

comment se manifestent concrètement les concepts que je viens d'aborder. Mon

point de départ est une étude que je fais avec les monteurs de lignes électriques

sur ce que j'appellerai la souffrance psychique engendrée par les contraintes

organisationnelles.

Les monteurs de lignes électriques soumettent à leur autorité une force

mystérieuse, immatérielle, invisible, silencieuse et à la fois puissante, voir destructive

et mortelle: l'électricité.

Le monteur est fier de son métier.. Il évolue dans un milieu où les

contraintes sont nombreuses: il porte une combinaison ignifugée, souvent trop

chaude l'été et qui limite les mouvements en hiver. Les interventions se font sur

des installations placées à dix mètres du sol, sur un poteau en bois. Pour y

accéder, il peut utiliser un camion-élévateur à nacelle ou monter directement sur le

poteau à l'aide d'éperons installés sur la partie intérieure du talon. Dans ce dernier

cas, il devra gravir le poteau en évitant plusieurs obstacles (corde à linge, cabane

d'oiseaux, écriteau, etc.) qui peuvent provoquer un dérapage ou une chute. A

cause des distancés d'approche à respecter, les outils de travail sont fixés à

l'extrémité d'une perche d'un à trois mètres de longueur. Les perches sont toujours

manipulées avec les bras au-dessus du coeur et la tête penchée vers l'arrière; ces

postures s'accompagnent d'un effort physique important pour contrôler l'effet de bras

de levier provoqué par le poids de l'outil. Quand le travail se fait selon la méthode

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"au gant", le monteur est isolé dans une nacelle, l'espace autour dé lui se compose

de fils électriques, de transformateurs, de sectionneurs sous tension électrique. Il

manipule ces équipements avec ses mains, recouvertes de gants diélectriques en

caoutchouc épais qui limitent les mouvements de préhension. Un faux mouvement,

un mauvais contact, un câble échappé et c'est le court-circuit, l'arc électrique, la

chute, les brûlures et peut-être la mort.

Leurs principales tâches consistent à construire, entretenir et réparer le

matériel et les équipements installés sur le réseau aérien de distribution. Ils

peuvent donc être appelés à construire un réseau pour un nouveau développement

domiciliaire, à changer des câbles défectueux, à installer des transformateurs plus

puissants, etc.

Le collectif de travail

En raison des contraintes de travail (électricité, travail en hauteur, espace

restreint et encombré) les monteurs interviennent toujours en équipe d'un minimum

de deux personnes. Chaque équipe relève d'un chef qui dirige les travaux, mais qui

ne possède aucun pouvoir hiérarchique, puisqu'il est un syndiqué comme ses

compagnons. Toutefois cela ne veut pas dire qu'il n'a pas d'autorité sur le

déroulement du travail; au sein du collectif il est reconnu comme responsable des

travaux et des membres de son équipe. Ces responsabilités lui confèrent donc un

pouvoir de décision, mais ce pouvoir n'est pas absolu, les décisions qu'il prend

peuvent être remises en question si elles vont à l'encontre d'une règle du métier.

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Par exemple, il existe une règle du métier qui veut que le monteur ne

travaille Jamais seul dans un poteau. Au cours de mes observations sur le terrain.

J'ai été témoin d'une tentative du chef d'outrepasser cette règle. En voici l'histoire:

Lors de l'installation de transformateurs dans un poteau, le chef a demandé à un

monteur d'effectuer quelques opérations seul dans un autre poteau. Ce dernier a

refusé et a demandé qu'un autre monteur soit au sol pour le surveiller. Le chef à

accepté le point de vue du monteur et a changé sa décision. En discutant de cet

événement, le monteur m'a dit, et je le cite: "On a l'habitude de travail à deux. Ca

prend pas grand chose pour rester pris dans le 120 volts, et puis quand tu es collé

ça fait pas de bruit, si on ne te surveille pas il n'y a personne pour te voir ou pour

t'entendre, c'est là que ça peut mal aller pour toi".

Jusqu'à présent, ce qu'il ressort de mes premières analyses, c'est que

l'autorité du chef-monteur ne correspond à aucun modèle du chef hiérarchique dans

une entreprise. Le chef-monteur dirige, mais sans pouvoir de sanction, il décide,

mais à la suite de consultation et d'un consensus il fait face et accepte les critiques

du collectif. Il s'agit donc plutôt d'un modèle indigène issu de la capacité

d'autorégulation et d'initiative du collectif des monteurs. Son titre lui est octroyé par

l'entreprise, mais ses fonctions et son pouvoir réel sont sanctionnés par le collectif.

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Les stratégies défensives

Nous avons vu que le travail de monteur de lignes présente plusieurs risques

sérieux. Par moment, j'ai observé que les monteurs n'appliquaient pas toutes lès

mesures de prévention ou avaient mâmë certains comportements que l'on peut

qualifier de dangereux. On peut, bien sûr, les accuser de méconnaître le risque,

d'être imprudent ou d'aimer prendre des risques. Mais comme je l'ai mentionné

dans la première partie de mon exposé, ces comportements, que l'on appelle des

stratégies défensives, ont un sens très clair lorsqu'on les analyse du point de vue

de la psychopathologie du travail. Ils servent à occulter la peur, ils sont un pouvoir

anesthésiant contre la souffrance engendrée par les risques présents dans le milieu

de travail.

Voici un exemple qui nous permettra de mieux comprendre le concept de

stratégie défensive de métier: un monteur m'a raconté les plaisanteries qu'il faisait

aux apprentis monteurs qui sortaient tout droit de l'école. En voici quelques-unes: il

retirait son gant de protection diélectrique et agrippait brusquement le fil sous

tension électrique avec seulement son gant de coton, ou. encore, au cours d'une

intervention dans le poteau, il installait le minimum de protection pour placer

l'apprenti dans une situation de malaise et d'inconfort. Ces anecdotes étaient

rapportées à l'ensemble des monteurs qui écoutaient et riaient de bon coeur.

A première vue on peut considérer cette façon d'agir comme l'expression

d'une irresponsabilité qui traumatise les apprentis. Mais avec un peu de recul tout

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cela prend un autre sens. L'objectif de ces rîtes d'initiation est de mettre à

l'épreuve les réactions face au risque, la confiance en soi, les compétences des

apprentis. En fait, de vérifier s'ils intègrent bien les stratégies défensives du collectif

de métier. Ces éléments sont déterminants pour les monteurs, car il est difficile et

dangereux de travailler avec un collègue à ses côtés qui a peur de l'électricité ou

des hauteurs; dans le travail de monteur l'action d'une personne a un effet sur la

sécurité et la vie des autres. Mettre à jour les comportements des apprentis a donc

deux utilités. La première est de s'assurer que l'on peut leur faire confiance, et la

seconde permet de vérifier si les apprentis intègrent les défenses collectives face à

la peur.

Il me faut aussi préciser que ces rîtes d'initiation ne sont pas marqués d'intolérance.

Le collectif laisse te temps qu'il faut aux apprentis pour s'acclimater. S'ils n'ont pas

de délais de fixés, ils n'ont pas toute l'éternité non plus. Ce qui est important c'est

d'évoluer, les réactions aux rîtes d'initiation en seront donc la preuve.

Les savoir-faire de prudence

Nous venons de voir que les travailleurs élaborent et se communiquent des

procédures pour nier et confronter le risque; la psychopathologie du travail a aussi

pu identifier que les travailleurs confrontés à des situations dangereuses se

communiquent aussi des façons de travailler qui sont sécuritaires, ce que nous

nommons des savoir-faire de prudence. Je terminerai mon exposé sur ce dernier

point.

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Les travailleurs et les travailleuses ont une connaissance profonde et implicite

de leur environnement de travail et des risques présents. La peur qu'ils ressentent

peut aussi être maîtrisé en intervenant sur le danger réel. C'est ainsi qu'ils élaborent

des modes opératoires ou des méthodes de travail qui se révèlent comme des

actes de prudence. On parle ici de traditions, de tour de main, de trucs du métier et

de coopération qui sont le résultat de la mise en commun de l'expérience des

collectifs de travail, et non pas d'une quelconque formation professionnelle, norme

ou méthode formelle proposées par l'entreprise.

Au cours de mon étude, j'ai aussi pu identifier des savoir-faire de prudence.

Je vous ai dit que les monteurs travaillent en équipe d'un minimum de deux

personnes. Chacun a un rôle bien précis, l'homme dans le poteau effectue la

réparation ou l'installation et l'homme au sol est là pour le servir et le surveiller.

Tout le travail est réalisé de manière à ce que le monteur dans le poteau y

demeure le moins longtemps possible, ceci à cause de la présence du courant,

mais aussi à cause des postures inconfortables, de l'effort physique, des conditions

climatiques, etc. L'homme au sol doit donc fournir le matériel au bon moment, ni

trop tôt ni trop tard, il doit aussi se représenter le travail dans une vue d'ensemble

car le monteur dans le poteau n'a qu'une représentation partielle, il ne verra peut-

être pas qu'il est trop près d'un fil derrière lui ou au-dessus de sa tête.

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Voilà ce que la psychopathologie du travail propose d'appeler des savoir-faire

de prudence. Ce sont des traditions, des règles empiriques qui s'organisent autour

de l'expérience ouvrière. Ils ne peuvent être saisis qu'en portant une attention toute

particulière au travail réel.

Conclusion

Comme nous venons de le voir à travers le cas des monteurs de lignes

électriques, les travailleurs et les travailleuses ont un effet direct et concret sur leur

travail. Ce qui est qualifié de comportement dangereux, est plutôt un moyen de

lutter contre la peur que chaque personne, confrontée à une situation dangereuse,

ressent. C'est aussi le résultat d'un compromis entre la sécurité et

l'accomplissement du travail. De plus, l'être humain au travail développe, de lui-

même et avec les autres des actes de prudence qui ne sont consignés dans aucun

manuel de formation et aucunè description de tâche.

Stratégies de défense et savoir-faire de prudence peuvent paraître en

complète contradiction et relever de l'insouscience ou de l'ignorance, mais elles ne

le sont pas. Au contraire, elles manifestent l'intelligence et l'initiative ouvrière.

Malheureusement, bien peu d'agents de prévention, de contremaîtres, de

cadres et de présidents d'entreprise abordent les comportements des travailleurs

sous cet angle. Faute d'être compris, les travailleurs se cachent, il s'installe un

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silence, la coopération est détruite, on se dénonce, le climat se détériore et on se

désinvestit totalement de son travail. Pour sortir de cette impasse, la clef du succès

est de revoir les styles de gestion de la prévention et du plus largement du travail:

Il faut reconnaître les règles du métier et la compétence des

travailleurs;

rendre officiel les savoir-faire de prudence et les modes

opératoires élaborés par les ouvriers.

Pour conclure, je dirais que la prévention telle que pratiquée aujourd'hui doit

sérieusement se questionner sur sa philosophie du travail et de l'être humain, mais

aussi sur ses méthodes et solutions. Enfin, je souhaite que ce colloque en soit

l'occasion et que mes propos aient contribué à trouver l'heure juste en santé et

sécurité du travail.

Jean-Pierre Brun

Octobre 1989

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LE RETRAIT PRÉVENTIF DE LA TRAVAILLEUSE E N C E I N T E . . .

AU COEUR DES DÉBATS ACTUELS.

LE RETRAIT PRÉVENTIF, ENTRÉ EN VIGUEUR EN 1 9 8 1 , EST' UN

DROIT QUI A CONNU UNE HAUSSE CROISSANTE DE DEMANDES AU F I L

DES ANNÉES. À PREMIÈRE VUE, ON PEUT DIRE QUE C'EST UN

DROIT QUI SE PORTE BIEN/ PUISQUE DE 1981 À 1 9 8 8 , LES

DEMANDES SONT PASSÉES DE 1 259 À 16 1 1 3 . CEPENDANT, LE

TAUX DE REFUS A ÉGALEMENT AUGMENTÉ DE FAÇON SIGNIF ICATIVE

ET DE 1984 À 1 9 8 8 , IL EST PASSÉ DE 7% À ENVIRON 21% À 24%.

PAR CONTRE, LA DURÉE DE L'.INDEMNISATION A BAISSÉ

CONSTAMMENT AU COURS DES ANNÉES, ET LES TRAVAILLEUSES ONT

OBTENU LEUR RETRAIT DE PLUS EN PLUS TARD AU COURS DE LEUR

GROSSESSE (3E TRIMESTRE.), CE QUI A EU DES EFFETS ÉVIDENTS

SUR LA.DURÉÈ DE L ' INDEMNISATION.

SI ON REGARDE LE PROFIL DE LA CLIENTÈLE TOUCHÉE, ON

CONSTATE, SELON UNE ÉTUDE DU GRASP/SST DE L 'UNIVERSITÉ DE

MONTRÉAL, QUE LA DEMANDE EST SURTOUT VENUE DES CATÉGORIES

SOCIO-PROFESSIONNELLES QUI EN AVAIENT LE PLUS BESOIN

PUISQU'ELLES TRAVAILLAIENT DANS . DES CONDITIONS

DANGEREUSES, SOUVENT ASSOCIÉES DANS LA LITTÉRATURE

SCIENTIFIQUE À UN EXCÈS DE PRÉMATURITÉ OU D'HYPOTROPHIE Â

LA NAISSANCE (SERVICES MÉDICAUX, SECTEUR MANUFACTURIER,

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COMMERCES/ AUTRES SERVICES). CE SONT SURTOUT LES

TRAVAILLEUSES SYNDIQUÉES QUI ONT ÉTÉ REJOINTES PAR LA

MESURE.

POUR COMPRENDRE DAVANTAGE LE SENS DE CETTE HAUSSE DES

REFUS/ I L FAUT SAVOIR .QUELLES ONT ÉTÉ SOMMAIREMENT LES

MODIFICATIONS IMPORTANTES QU'ON A APPORTÉES DANS

L 'ADMINISTRATION DE CETTE MESURE, ÛN PEUT D'ABORD PARLER

D'UN RESSERREMENT GRADUEL DANS L 'APPLICATION DU RETRAIT

PRÉVENTIF,

EN EFFET/ DE 1981 À 1983, LA CSST SEMBLAIT ACCORDER UN

RETRAIT EN CAS DE DOUTE SUR LES DANGERS D'UN MILIEU DE

TRAVAIL, ON TENAIT ALORS COMPTE DES CONDITIONS MÉDICALES

PERSONNELLES D'UNE TRAVAILLEUSE/ SEULEMENT SI ELLES

ÉTAIENT CAUSÉES PAR LES CONDITIONS DE TRAVAIL.-

EN 1983/. ON ASSISTE À UNE ATTITUDE PLUS RESTRICTIVE À L'ÉGARD DE L 'APPLICATION DE LA LOI ET À UNE PREMIÈRE

TENTATIVE DE NORMALISATION. JUSQUE-LÀ, LE DIAGNOSTIC DU

MÉDECIN TRAITANT PRIME. EN 1 9 8 7 , DES DIRECTIVES INTERNES

DE LA CSST FONT GLISSER CETTE PRIMAUTÉ DE DIAGNOSTIC/ DES

MAINS DU MÉDECIN TRAITANT À CELLES DU MÉDECIN DU D S C / ET

LA CSST ÉVACUE LES CONDITIONS MÉDICALES PERSONNELLES POUR

NE CONSIDÉRER PLUS QUE LES DANGERS DES CONDITIONS DE

TRAVAIL. LE FAMEUX GUIDE . DE NORMES APPARAÎT LA MÊME

ANNÉE,

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C'EST EN 1988 QUE LA CSST, PAR UNE NOUVELLE DIRECTIVE,

LA D - 3 0 - 8 8 , RÉCUPÈRE CETTE FAMEUSE PR IMAUTÉ DE - DIAGNOSTIC

DES MAINS DU MÉDECIN DE DSC POUR LA REMETTRE DANS CELLES

DE SON BUREAU MÉDICAL.

DES INTERVENANTS IMPLIQUÉS QUOTIDIENNEMENT DANS LE

DOSSIER DU. RETRAIT ET TÉMOINS DES EFFETS DE CE

RESSERREMENT ONT COMMENCÉ À SE POSER DE SÉRIEUSES

QUESTIONS SUR L 'AVENIR DE CE DROIT. ILS SE SONT REGROUPÉS

ET ONT MIS SUR PIED UNE COALITION, FORMÉE DE REPRÉSENTANTS

DE CENTRALES SYNDICALES, DE TRAVAILLEURS ET TRAVAILLEUSES

EN SANTÉ AU TRAVAIL DE PLUSIEURS CLSC, DE GROUPES

POPULAIRES ET COMMUNAUTAIRES,. D ' I N D I V I D U S (MÉDECINS,

CHERCHEURS, AVOCATS, E T C . ) , POUR DÉNONCER CE QU'LLS ONT

APPELÉ "L'EFFRITEMENT OU LA QUASI-EXTINCTION" D'UN DROIT

JUGÉ ESSENTIEL POUR LA FEMME AU TRAVAIL.

SUITE AUX PRESSIONS DE LA COALITION POUR LE DROIT AU

RETRAIT PRÉVENTIF DE LA TRAVAILLEUSE ENCEINTE OU QUI

ALLAITE , LA CSST A FINALEMENT ÉMIS DE NOUVELLES DIRECTIVES

EN MAI 1 9 8 9 , QUI SEMBLERAIENT CONSIDÉRER À NOUVEAU LE

DIAGNOSTIC DU MÉDECIN TRAITANT COMME PRIORITAIRE, DU MOINS

EN PRÉSENCE DE CONDITIONS MÉDICALES PERSONNELLES. CES

DIRECTIVES POSAIENT ÉGALEMENT COMME PRINCIPE QUE LA CSST

N ' A L L A I T PLUS CONTESTER DANS LES CAS DE CONVERGENCE ENTRE

LE DIAGNOSTIC DU MÉDECIN TRAITANT ET CELUI DU MÉDECIN DE

DSC. DANS LES CAS DE DIVERGENCE D 'OPINIONS, LA CSST

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SEMBLAIT SE GARDER UN DROIT DE VETO. ÛN EST ENCORE LOIN

DU RESPECT INTÉGRAL DU DIAGNOSTIC DU MÉDECIN. TRAITANT ET

IL Y A ENCORE DU TRAVAIL À FAIRE POUR QUE L 'ESPRIT DES

ARTICLES 40 À 48 DE LA LOI SUR LA SANTÉ ET LA SÉCURITÉ DU

TRAVAIL S 'APPLIQUE, TEL QUE L ' A VOULU LE LÉGISLATEUR.

I L RESTE À VOIR COMMENT LA CSST VA RÉAGIR DANS LES CAS

DE DIVERGENCE D'OPINIONS ET DE QUELLE FAÇON LES MÉDECINS

DE DSC VONT S'ENLIGNER DANS LES MOIS QUI VIENNENT. ON SE

SOUVIENDRA QU'UNE GRILLE . DE NORMES SUR LES RISQUES

ERGONOMIQUES AVAIT ÉTÉ UTILISÉE POUR APPRÉCIER LES

DEMANDES DE RETRAIT PRÉVENTIF/ DANS PLUSIEURS DSC DU

QUÉBEC/ AVEC POUR RÉSULTAT QUE BON NOMBRE DE TRAVAILLEUSES

S'ÉTAIENT VUES REFUSER LÉ- DROIT AU RETRAIT, ON SE

SOUVIENDRA ÉGALEMENT QUE LE COMITÉ AVISEUR SUR LES RISQUES

ERGONOMIQUES DE LA CSST S ' É T A I T PENCHÉ EN OCTOBRE 1988 SUR

LADITE GRILLE ET AVAIT STATUÉ . QUE CE N 'ÉTA IT PAS UN BON

OUTIL POUR APPRÉCIER ET CODIFIER LES DANGERS RELIÉS AUX

CONTRAINTES ERGONOMIQUES, QUE C ' É T A I T MÊME UN OUTIL

DANGEREUX ET QUE, PAR CONSÉQUENT, IL FALLAIT L'ABANDONNER.

QUAND ON REGARDE LE NOMBRE DE DEMANDES DE RETRAIT

PRÉVENTIF, ON EST OBLIGÉ DE CONSTATER QUE PARMI LES DROITS

INDIVIDUELS CRÉÉS PAR LA LOI. SUR LA SANTÉ ET LA SÉCURITÉ

DU TRAVAIL/ C'EST CELUI QUI A ÉTÉ LE PLUS U T I L I S É / DE

SORTE QUE CE DROIT A JOUÉ UN RÔLE STRATÉGIQUE AU COURS DES

ANNÉES/ P U I S Q U ' I L S'EST RÉVÉLÉ ÊTRE UNE SORTE DE SIGNAL

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D'ALARME, UN RÉVÉLATEUR DES PIÈTRES CONDITIONS DE TRAVAIL

QUI SONT FAITES, NON SEULEMENT AUX FEMMES ENCEINTES, MAIS

AUX FEMMES EN GÉNÉRAL. ET ON EST RESTÉ ÉTONNÉ PUISQU'ON-

NE S'ATTENDAIT PAS À CELA.

D'ABORD, ON A CRU QUE LES CONDITIONS DE TRAVAIL DES

FEMMES ÉTAIENT PLUS DOUCES QUE CE QUE NOUS A. RÉVÉLÉ LA

RÉALITÉ ET ON A PENSÉ QUE L ' OBJECT IF DE LA LOI 17 ALLAIT

ÊTRE ATTEINT RAPIDEMENT ET QUE LES MILIEUX DE TRAVAIL

SERAIENT NETTOYÉS DE FAÇON EFFICACE ET DURABLE. ÛR, FORCE

NOUS EST DE CONSTATER QUE BIEN PEU DE CHOSES ONT ÉTÉ

FAITES POUR ÉLIMINER LES DANGERS DES MILIEUX DE; TRAVAIL,

POUR LA BONNE RAISON QUE LES MÉCANISMES PRÉVUS PAR LA LOI

SUR LA SANTÉ ET LA SÉCURITÉ DU TRAVAIL (PROGRAMME DE SANTÉ

ET PROGRAMME DE PRÉVENTION DES SECTEURS PRIORITAIRES)

N'ONT PU REJOINDRE LES FEMMES LOCALISÉES MASSIVEMENT DANS

LE TERTIAIRE (SERVICES) ET DANS LES SECTEURS MOUS DE

L ' INDUSTRIË , CE N'EST QU'À TRÈS LONG TERME QU'ELLES

SERONT REJOINTES PAR CES MESURES, EN ADMETTANT QUE

L'APPROCHE CSST ÉLIMINE VRAIMENT LES DANGERS À LA SOURCE,

CE QUI N'A PAS ENCORE ÉTÉ DÉMONTRÉ, ET À LA CONDITION QUE

LA CSST CONTINUE À DÉVELOPPER SON APPROCHE PAR BLOCS

PRIORITAIRES.

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DE SORTE QUE CE DROIT, DE PALLIATIF Q U ' I L ÉTA IT , EST

DEVENU GÉNÉRALISÉ, ON A REPROCHÉ AUX FEMMES DE

SURUTILISER LE RETRAIT PRÉVENTIF ET DE SE RETIRER

MASSIVEMENT DU TRAVAIL, ALORS QUE L'ÉTUDE DE LA RÉALITÉ

NOUS DÉMONTRE QUE DANS LA MAJORITÉ DES CAS, ELLES N'ONT

PAS EU LE CHOIX.

LÀ RECHERCHE DÉJÀ CITÉE QUE LE GRASP/SST A MENÉE SUR

PLUS DE CINQ ANNÉES, DÉMONTRE QUÉ BIEN PEU D'EMPLOYEURS

ONT OPTÉ POUR LA. RÉAFFECTATION, POUR TOUTES SORTES DE

RAISONS DE GESTION, ÛN A PRÉFÉRÉ QUE LA TRAVAILLEUSE SE

RETIRE DU TRAVAIL, PLUTÔT QUE D' INVESTIR DANS DES

AMÉNAGEMENTS OU DES MODIFICATIONS DE POSTE QUI AURAIENT PU

ÊTRE DURABLES ET ENTRAÎNER DE S MOD IF I CAT IONS À LONG TERME

DES CONDITIONS DE TRAVAIL,

C'EST CELA QUI DEVRAIT ÊTRE VISÉ PAR LES EMPLOYEURS ET

LA CSST ET NON PAS DES RÉAFFECTATIONS BIDON OU UN RENVOI

PUR ET SIMPLE DE LA TRAVAILLEUSE CHEZ ELLE. L 'OBJECTIF DE

CETTE MESURE PRÉVENTIVE NE SERA JAMAIS ATTEINT SI LES

TRAVAILLEUSES SONT RÉAFFECTÉES TEMPORAIREMENT OU RENVOYÉES

CHEZ ELLES SANS QUE LEURS CONDITIONS DE TRAVAIL NE SOIENT

AMÉLIORÉES. EN AGISSANT DE LA SORTE, ON MA I NT IENT ENTIER

LE PROBLÈME DE SANTÉ AU TRAVAIL NON SEULEMENT POUR LA

FEMME ENCEINTE, MAIS ÉGALEMENT POUR TOUTES LES AUTRES

TRAVAILLEUSES. ET CE SONT LES FEMMES EN ÂGE DE PROCRÉER

QUI RISQUENT DE PAYER LA NOTE À LONG TERME; PARCE QUE LES

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EMPLOYEURS POURRAIENT FORT BIEN LES DISCRIMINER À

L'EMBAUCHE POUR ÉVITER D'AVOIR À FAIRE LES FRAIS D'UN

RETRAIT PRÉVENTIF,

I L Y A UN AUTRE ASPECT IMPORTANT QUE LE RETRAIT

PRÉVENTIF MET EN LUMIÈRE ET C'EST LA RESPONSABILITÉ

PATRONALE DES CONDITIONS DE TRAVAIL.

DEPUIS PLUSIEURS ANNÉES LES EMPLOYEURS TENTENT DE

TIRER LEUR ÉPINGLE DU JEU ET .DE REFILER LA FACTURE DU

RETRAIT PRÉVENTIF A L'ENSEMBLE DE LA SOCIÉTÉ, PRÉTEXTANT

QUE LE RETRAIT EST UNE MESURE SOCIALE QUE L'ENSEMBLE DE LA

SOCIÉTÉ DEVRAIT ASSUMER.

RAISONNER A I N S I , C'EST OUBLIER LE "CONTRAT SOCIAL" DE

1 9 3 1 , QUI STIPULAIT QUE LES EMPLOYEURS SE RECONNAISSAIENT

COLLECTIVEMENT RESPONSABLES DE LEURS CONDITIONS DE

TRAVAIL, EN ÉCHANGE D'UN ABANDON PAR LES TRAVAILLEURS DU

DROIT DE LES LES POURSUIVRE.

LES LOIS 17 ET M2 POSENT POUR PRINCIPE LA

RESPONSABILITÉ DE L'EMPLOYEUR, LEQUEL DOIT FOURNIR À LA

TRAVAILLEUSE ENCEINTE DE SAINES CONDITIONS DE TRAVAIL. LE

RETRAIT PRÉVENTIF N'EST DONC PAS UN PRIVILÈGE QU'ON

ACCORDE À LA FEMME ENCEINTE, MAIS LE RÉSULTAT D'UNE

RESPONSABILITÉ DE L'EMPLOYEUR.

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QUELQUES QUESTIONS À SE POSER POUR LES ANNÉES À VENIR

D QUAND ALLONS-NOUS NOUS OCCUPER D'ASSAINIR DE FAÇON

DURABLE LES MILIEUX DE TRAVAIL OCCUPÉS MAJORITAIREMENT PAR

LES FEMMES?

EX.ISTE-T^ELLE CETTE VOLONTÉ D'ASSAINIR LES MILIEUX DE

TRAVAIL PAR L 'ÉL IM INAT ION DU DANGER À LA SOURCE, À LA

CSST, CHEZ LES EMPLOYEURS ET CHEZ NOS GOUVERNEMENTS?

S LA CSST RÉSISTERA-T-ELLE AUX PRESSIONS DU PATRONAT

QUI VOUDRAIT ÉVACUER LE PROBLÈME ET REFILER LA FACTURE

AILLEURS?

RÉSISTERA-T-ELLE~ ÉGALEMENT À LA TENTATION DU

GESTIONNAIRE DE LIMITER L''ACCÈS À CE DROIT POUR EN RÉDUIRE*

LES COÛTS?

I DU CÔTÉ DES MÉDECINS DE DSC, TENTERA-T-ON DE

RELAYER LA CSST EN CRÉANT DES NORMES D'ACCÈS QUI VONT

LIMITER À NOUVEAU.LE NOMBRE DE RETRAITS ACCORDÉS?

LE MÉDECIN DE DSC SERA-T - IL ENCLIN À DÉBORDER DE SON

RÔLE DE CONSEILLER POUR AVOIR PRIORITÉ SUR LE MÉDECIN

TRAITANT? ,

LA CSST ACCORDERA-T-ELLE PRÉPONDÉRANCE À L 'OPIN ION DU

MÉDECIN DE DSC, DANS LES CAS DE DIVERGENCE?

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El EST-CE QUE LA TRAVAILLEUSE ENCEINTE DEVRA RENONCER

À L ' U T I L I S A T I O N DE CE DROIT POUR PROTÉGER SON- DROIT AU

TRAVAIL?

PAR: MICHELINE BAIL

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Centrale de l 'enseignement du Québec

119

Intervention de

Solange Pronovost dans le cadre du Colloque

"L'heure juste ën santé et sécurité du travail" organisé par

l'Association pour la santé publique du Québec 9 et 10 novembre 1989

• Siège social: 1415, rue Jarry Est, bureau 300, Montréal (Québec) H2E 1A7 Téléphone: (514) 374-6660 • Bureau de Québec: 2336, chemin Ste-Foy, C.P. 5800, Sainte-Fby (Qc) G1V 4E5 Téléphone: (418) 658-5711

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La prévention au travail... ça commence à l'école

L ' é c o l e , qui a pour m i s s i o n p r e m i è r e de f o r m e r l e s j e u n e s e t de t r a v a i l l e r â l e u r d é v e l o p p e m e n t i n t é g r a l e t à l e u r é p a n o u i s s e -ment p e r s o n n e l , s e d o i t de l e u r f o u r n i r t o u s l e s o u t i l s d o n t i l s a u r o n t b e s o i n pour ê t r e d e s c i t o y e n n e s e t d e s c i t o y e n s à p a r t e n t i è r e e t pour q u ' i l s p u i s s e n t c o n t r i b u e r à l a bonne marche e t au d é v e l o p p e m e n t de l a s o c i é t é .

Ce f a i s a n t , 11 é c o l e a une t r è s l o u r d e r e s p o n s à b i 1 i t ê en m a t i è r e de f o r m a t i o n de l a m a i n - d 1 o e u v r e . Non s e u l e m e n t d o i t - e l l e l u i p r o c u r e r t o u t e s l e s c o n n a i s s a n c e s p r o f e s s i o n n e l l e s qu i l u i p e r -m e t t r o n t d ' e n t r e r s u r l e marché du t r a v a i l , m a i s e l l e a é g a l e m e n t l ' o b l i g a t i o n de l u i d o n n e r t o u t l ' é q u i p e m e n t n é c e s s a i r e pour que c e t r a v a i l s ' a c c o m p l i s s e d a n s l e r e s p e c t de son i n t é g r i t é e t de sa d i g n i t é .

L o r s q u e nous p r é p a r o n s l e s f u t u r e s t r a v a i l l e u s e s e t l e s f u t u r s t r a v a i l l e u r s , nous ne p o u v o n s f a i r e l ' é c o n o m i e d ' u n e p r é o c c u p a -t i o n de l e u r s a n t é e t de l e u r s é c u r i t é . A c e t i t r e , l ' é c o l e d o i t d ' a b o r d d o n n e r l ' e x e m p l e , e n s u i t e , e l l e d o i t i n f o r m e r l e s j e u n e s d e s r i s q u e s r e l i é s â l e u r s m é t i e r s ou p r o f e s s i o n s e t c e u x qui e x i s t e n t de f a ç o n p l u s g é n é r a l e e t f i n a l e m e n t , e l l e d o i t l e u r a s s u r e r une bonne f o r m a t i o n â l a p r é v e n t i o n .

O u i , on p e u t d i r e que l a p r é v e n t i o n * . . ç a d e v r a i t commencer à l ' é c o l e .

L ' é c o l e , m i l i e u s é c u r i t a i r e ?

A p a r t i r de c e t t e p r é m i s s e , v o y o n s s i l ' é c o l e e s t un m i l i e u s é c u r i t a i r e .

Q u e l q u e s c h i f f r e s nous f o u r n i r o n t un d é b u t de r é p o n s e . S e l o n l e s s t a t i s t i q u e s f o u r n i e s par l a d i r e c t i o n g é n é r a l e d e s r e s s o u r c e s h u m a i n e s du m i n i s t è r e de l ' E d u c a t i o n e n t r e 1982 e t 1 9 8 6 , pour t o u t e s l e s c a t é g o r i e s de p e r s o n n e l d e s c o m m i s s i o n s s c o l a i r e s ( i n c l u a n t l e p e r s o n n e l c a d r e ) , l e nombre de j o u r s d ' a b s e n c e due aux a c c i d e n t s de t r a v a i l a a u g m e n t é de 22% c ' e s t - à - d i r e de 57 607 j o u r n é e s en 1982 â 70 518 en 1 9 8 6 . De son c ô t é , l a CSST nous a p p r e n d dans s e s s t a t i s t i q u e s de 1987 q u ' i l y a eu dans l e s e c -t e u r de l ' e n s e i g n e m e n t :

3 6 0 3 a c c i d e n t s n é c e s s i t a n t une i n t e r r u p t i o n de t r a v a i l a v e c i n d e m n i s a t i o n f i n a n c i è r e ;

23 c a s de m a l a d i e s p r o f e s s i o n n e l l e s

2 5 4 r e t r a i t s p r é v e n t i f s pour l a t r a v a i l l e u s e e n c e i n t e ou qui a ï l a i t e .

Le C o n s e i l s c o l a i r e de l ' I l e de M o n t r é a l , q u a n t à l u i , nous r é v è l e q u ' e n t r e 1984 e t 1 9 8 7 , 2 380 a c c i d e n t s de t r a v a i l o n t eu

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l i e u d a n s l e s h u i t c o m m i s s i o n s s c o l a i r e s ; 1 430 o n t p r o v o q u é d e s a r r ê t s de t r a v a i l t o t a l i s a n t 28 489 j o u r s d ' a b s e n c e .

Mais c è s c h i f f r e s ne m o n t r e n t p a s l e p o r t r a i t r é e l du d o s s i e r . D 'une p a r t , i l s ne r e c e n s e n t que l e s s i t u a t i o n s d é c l a r é e s s o i t p a r c e q u ' e l l e s e n t r a î n e n t un a r r ê t de t r a v a i 1 , . s o i t p a r c e que l a p e r s o n n e a s s o c i e l a l é s i o n à s e s c o n d i t i o n s de t r a v a i l . D ' a u t r e p a r t , nous s a v o n s que p l u s i e u r s a c c i d e n t s ou m a l a d i e s p r o f e s s i o n -n e l l e s s o n t i n d e m n i s é s par nos r é g i m e s d 1 a s s u r a n c e c o l l e c t i v e , é c h a p p a n t a i n s i aux d i f f é r e n t e s s t a t i s t i q u e s .

Du c ô t é de l a c l i e n t è l e é t u d i a n t e , on c o n s t a t e dans nos é c o l e s q u ' u n bon nombre d ' é l è v e s s u b i t c h a q u e a n n é e un a c c i d e n t p l u s ou m o i n s g r a v e . Et c e l a non p l u s n ' e s t pas c o m p t a b i 1 i s é . Des s t a t i s t i q u e s a n a l y s é e s par l a F é d é r a t i o n d e s c o m m i s s i o n s s c o l a i -r e s c a t h o l i q u e s du Québec en 1 9 8 8 , d é m o n t r e n t que c e s o n t s u r t o u t l e s j e u n e s t r a v a i 1 l e u r s qui s o n t v i c t i m e s du p l u s grand nombre d ' a c c i d e n t s du t r a v a i l , a c c i d e n t s t r o p s o u v e n t c a u s é s par de m a u v a i s e s m é t h o d e s de t r a v a i l e t par un manque de p r é v e n t i o n . Et c e s j e u n e s s o n t c e u x qui s o r t e n t de nos é c o l e s .

A l a l u m i è r e de c e s d o n n é e s , l e s e c t e u r de l ' E d u c a t i o n e s t b e a u -coup m o i n s s é c u r i t a i r e q u ' o n s e m b l e v o u l o i r , l e c r o i r e ou l e l a i s s e r c r o i r e .

H a i s i l n ' y a p a s que l e s c h i f f r e s c o n c e r n a n t l a s é c u r i t é qu i p e u v e n t t é m o i g n e r de l ' a s p e c t non s é c u r i t a i r e d e s é c o l e s .

Une é t u d e menée en 1978 dans d e s a t e l i e r s p r o f e s s i o n n e l s , par l e D é p a r t e m e n t de s a n t é c o m m u n a u t a i r e du C e n t r e h o s p i t a 1 i e r r é g i o n a l de L a n a u d i è r e , nous r é v è l e d e s f a i t s qui p o r t e n t à r é f l e x i o n .

On y a p p r e n d que :

1 . 90% d e s p r o f e s s e u r s du s e c t e u r du b o i s , de t r o i s c o m m i s s i o n s s c o l a i r e s r é g i o n a l e s , o n t é t é d é p i s t é s " p o s i t i f s " par l ' a u -d i o l o g i s t e , c ' e s t - à - d i r e a y a n t une b a i s s e d ' a u d i t i o n s i -g n i f i c a t i v e c a u s é e par une e x p o s i t i o n au b r u i t ;

2 . 1 'aud iogramme p a s s é à t o u s l e s é t u d i a n t s en m e n u i s e r i e , m é c a n i q u e e t s o u d u r e d ' u n e é c o l e p o l y v a l e n t e a p e r m i s de d é p i s t e r 90% de c a s " p o s i t i f s " ;

3 . d a n s un a t e l i e r de s o u d u r e où un a p p a r e i l i a r c é l e c t r i q u e a f o n c t i o n n é p e n d a n t un c e r t a i n temps e t dans l e s c o n d i t i o n s n o r m a l e s , l e s r é s u l t a t s de l ' a n a l y s e de l ' a i r d o n n e n t une q u a n t i t é de p o u s s i è r e r e s p i r é e qui d é p a s s e de t r o i s f o i s l a norme max imale p e r m i s e en i n d u s t r i e ;

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4 . une s o u d e u s e a u t o m a t i q u e é m e t t a i t dans l é s v o i e s r e s p i r a t o i -r e s d e s é t u d i a n t s s i x f o i s p l u s d ' o z o n e que l a norme m a x i -m a l e p e r m i s e en i n d u s t r i e .

Oe p l u s , une e n q u ê t e e f f e c t u é e dans 2 é c o l e s de l a M a u r i c i e a p e r m i s de c o n s t a t e r q u ' a u c u n é l è v e d ' u n e c l a s s e de m e n u i s e r i e ne p o u v a i t d é f i n i r l e mot " d é c i b e l " , que s e u l e m e n t 3% d e s f u t u r s s o u d e u r s c o n n a i s s a i e n t l e mot "s i d é r o s e " , q u ' a u c u n s o u d e u r ne p o u v a i t i d e n t i f i e r l e s s o u r c e s d ' o z o n e .

Une d e u x i è m e r e c h e r c h e c o n d u i t e é g a l e m e n t par l e DSC du C e n t r e h o s p i t a l i e r r é g i o n a l de L a n a u d i è r e p o r t a i t s u r l e s e f f e t s de l ' e x p o s i t i o n au b r u i t s u r l ' a c u i t é a u d i t i v e d e s é l è v e s i n s c r i t s en a p p r e n t i s s a g e p r o f e s s i o n n e l c o m p a r a t i v e m e n t aux é l è v e s i n s c r i t s au s e c t e u r g é n é r a l m o i n s e x p o s é s aux b r u i t s .

Les a u t e u r s c o n c l u e n t que m a l g r é l e u r j e u n e â g e ( 1 4 à 20 ans pour une moyenne dé 17 a n s ) , l e s é t u d i a n t s du s e c t e u r p r o f e s s i o n -n e l a c c u s e n t d é j à une l é g è r e d é f i c i e n c e d ' a c u i t é a u d i t i v e r e l i é e à l ' a p p r e n t i s s a g e s c o l a i r e .

On p e u t donc c o n s t a t e r que non s e u l e m e n t 1 ' é c o l e ne p r é p a r e pas a d é q u a t e m e n t l e s f u t u r e s t r a v a i 1 l e u s e s e t l e s f u t u r s t r a v a i 1 -l e u r s m a i s e l l e s ' a t t a q u e d é j à à l e u r s a n t é . Ce qui e s t d ' a u t a n t p l u s p r o b l é m a t i q u e , c ' e s t que l ' é c o l e p l a c e l e s j e u n e s dans d e s s i t u a t i o n s p a r f o i s p i r e s que c e l l e s q u ' i l s r e n c o n t r e r o n t en i n d u s t r i e . On c o n t r i b u e donc a i n s i à d é v e l o p p e r c h e z eux un s e u i l de t o l é r a n c e t r è s é l e v é à l ' é g a r d de d i f f é r e n t s a g r e s s e u r s e t on l e s empêche de f a i r e p r e u v e de s e n s c r i t i q u e e t de v i g i l a n -c e . Une f o i s s u r l e marché du t r a v a i l , c e s j e u n e s ne d i s p o s e r o n t pas d e s normes de r é f é r e n c e n é c e s s a i r e s pour l e u r p e r m e t t r e de d é t e c t e r l e s s i t u a t i o n s d a n g e r e u s e s e t par v o i e de c o n s é q u e n c e , d ' u t i l i s e r t o u s l e s moyens de p r é v e n t i o n e t de p r o t e c t i o n mis â l e u r d i s p o s i t i o n .

0 a a u t r e s é l é m e n t s c o n t r i b u e n t é g a l e m e n t à l ' é v a l u a t i o n de l a s a l u b r i t é e t de l a s é c u r i t é d e s é t a b l i s s e m e n t s s c o l a i r e s .

Nous f a i s o n s r é f é r e n c e i c i aux c o n d i t i o n s d ' e n t r e t i e n e t â l ' é t a t de v é t u s t é d e s é d i f i c e s .

En 1 9 8 8 , à l a demande du p e r s o n n e l e n s e i g n a n t de deux é c o l e s é l é m e n t a i r e s de N e u v i l l e , l a CSST p r o c é d a i t & une i n s p e c t i o n qui r é v é l a i t de m u l t i p l e s s i t u a t i o n s à r i s q u e . A t i t r e d ' e x e m p l e , on n o t e :

- d e s v o i e s de c i r c u l a t i o n ou a u t r e s i n s t a l l a t i o n s com-munes qui ne s o n t p a s e n t r e t e n u e s de f a ç o n a d é q u a t e :

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d e s i s s u e s qui s o n t v e r r o u i l l é e s ; l e s t r o u s s e s de p r e m i e r s s o i n s qui s o n t i n c o m p l è t e s ; l e s e x t i n c t e u r s c h i m i q u e s qui n ' o n t p a s f a i t l ' o b j e t d ' u n e v é r i f i c a t i o n r é g l e m e n t a i r e e t qui p a r f o i s s o n t p l a c é s dans d e s e n d r o i t s d i f f i c i l e s d ' a c c è s ; d e s c o r r i d o r s qui s o n t e n c o m b r é s d o n t l ' u n d ' e u x s e r t de b i b l i o t h è q u e , f a u t e d ' e s p a c e ; e t c .

Quant au v i e i l l i s s e m e n t du p a r c i m m o b i l i e r du r é s e a u s c o l a i r e , l e s c o m m i s s i o n s s c o l a i r e s de l a r é g i o n 04 ( T r o i s - R i v i è r e s , Drum-m o n d v i l l e , V i c t o r i a v i 1 l e , S h a w i n i g a n , e t c . ) o n t s o n n é l ' a l a r m e en novembre d e r n i e r en p r e s s a n t l e m i n i s t è r e de l ' E d u c a t i o n d ' i n j e c -t e r une somme d ' e n v i r o n 50 m i l l i o n s de d o l l a r s pour f i n s d ' e n t r e -t i e n e t de r é p a r a t i o n . On p a r l e i c i de l a r é f e c t i o n d e s t o i t u r e s e t d e s o u v e r t u r e s , de l a r e m i s e en bonne c o n d i t i o n d e s s y s t è m e s de c h a u f f a g e , du r e s p e c t d e s l o i s e t r è g l e m e n t s , de l ' e n t r e t i e n p h y s i q u e , m é c a n i q u e e t é l e c t r i q u e d e s b â t i m e n t s .

Or, n o u s s a v o n s t o u s que l e f a i t de t r a v a i l l e r ou d ' é t u d i e r dans d e s l o c a u x i n a d é q u a t s , mal é c l a i r é s , mal c h a u f f é s , mal v e n t i l é s , où l ' e n t r e t i e n l a i s s e à d é s i r e r , où l e s e s p a c e s de c i r c u l a t i o n s o n t e n c o m b r é s , c o n s t i t u e d e s f a c t e u r s p o u v a n t p o r t e r a t t e i n t e à l a s a n t é , à l a s é c u r i t é e t à l ' i n t é g r i t é p h y s i q u e d e s p e r s o n n e s .

I l y a t o u t l i e u de c r o i r e que l e s deux e x e m p l e s d o n t nous v e n o n s de p a r l e r ne s o n t pas u n i q u e s dans l e Québec e t que d ' a u t r e s é c o -l e s s o u f f r e n t d e s mêmes c a r e n c e s .

Les 6 5 2 m i l l i o n s de d o l l a r s de c o u p u r e s b u d g é t a i r e s q u ' o n t s u b i e s l e s c o m m i s s i o n s s c o l a i r e s d e p u i s l e s 10 d e r n i è r e s a n n é e s o n t c e r t a i n e m e n t c o n t r i b u é à c e t é t a t de d é t é r i o r a t i o n . Et m a l h e u -r e u s e m e n t , r i e n ne nous i n d i q u e une v o l o n t é f e r m e du g o u v e r n e m e n t de r e m é d i e r à l a s i t u a t i o n .

V o i l a donc un e n s e m b l e de f a c t e u r s qui p e u v e n t nous p e r m e t t r e de p o r t e r un j u g e m e n t s u r l ' é c o l e comme m i l i e u s é c u r i t a i r e .

L ' é c o l e e t l a Loi s u r l a s a n t é e t l a s é c u r i t é du t r a v a i l

R e g a r d o n s m a i n t e n a n t , a p r è s 10 a n s d ' e x i s t e n c e de. l a Loi s u r l a s a n t é e t l a s é c u r i t é du t r a v a i l q u e l l e e s t l a s i t u a t i o n de l ' é c o l e eu é g a r d  c e t t e l o i , c e t t e l o i qui c o n t i e n t d e s méca-n i s m e s de p r é v e n t i o n e t qui l e s rend o b i i g a t o i r e s d a n s l e s s e c -t e u r s d ' a c t i v i t é s é c o n o m i q u e s d i t s " p r i o r i t a i r e s " .

Au moment de l ' a d o p t i o n de l a l o i en 1 9 7 9 , un c o m i t é de t r a v a i l a é t é mandaté a f i n d ' é t a b l i r d e s p r i o r i t é s d ' i n t e r v e n t i o n . On a donc r é p a r t i t o u s l e s s e c t e u r s d ' a c t i v i t é s en s i x g r o u p e s . Les

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p r é v i s i o n s de d é p a r t é t a i e n t de r é g l e m e n t e r t o u s l e s g r o u p e au ry thme de un par a n n é e . C e t t e o p é r a t i o n d e v a i t s e t e r m i n e r en 1 9 8 6 . Or, e n c o r e a u j o u r d ' h u i , i l n ' y a que l e p r e m i e r e t . l e s e c o n d g r o u p e qui o n t f a i t 1 1 o b j e t de c e t t e d é m a r c h e , l e t r o i -s i è m e g r o u p e n ' é t a n t que p a r t i e l l e m e n t r é g l e m e n t é . Le s e c t e u r de l ' e n s e i g n e m e n t , quant à l u i , s e r e t r o u v e dans l e g r o u p e VI , c ' e s t - à - d i r e l e d e r n i e r g r o u p e .

L ' e f f e t c o n c r e t de c e p r o c e s s u s f a i t en s o r t e que l a m i s e s u r p i e d de c o m i t é s p a r i t a i r e s de s a n t é - s é c u r i t é , l a n o m i n a t i o n de r e p r é s e n t a n t e s ou r e p r é s e n t a n t s à l a p r é v e n t i o n , 1 1 é t a b l i s s e m e n t de programmes de p r é v e n t i o n e t de programmes de s a n t é , ne s o n t pas o b l i g a t o i r e s dans nos m i l i e u x . Nous sommes donc c o n t r a i n t s de n é g o c i e r t o u s c e s m é c a n i s m e s de p r é v e n t i o n e t de c e f a i t s o u m i s aux v o l o n t é s p a t r o n a l e s qui t r o p s o u v e n t s ' y o b j e c t e n t p r é t e x t a n t l e s c o û t s que c e l a e n g e n d r e r a i t , comme s i l a v i e e t l a s a n t é d e s g e n s n ' é t a i e n t p a s l e s c o n s i d é r a t i o n s l e s p l u s impor-t a n t e s .

C ' e s t à b o u t de b r a s e t par a c h a r n e m e n t que nous r é u s s i s s o n s dans c e r t a i n e s c o m m i s s i o n s s c o l a i r e s e t c é g e p s . Mais l e s d é m a r c h é s s o n t t o u j o u r s t r è s l a b o r i e u s e s .

De p l u s , l e f a i t de ne pas f a i r e p a r t i e d ' u n g r o u p e p r i o r i t a i r e nous p r i v e d e s s e r v i c e s d e s d é p a r t e m e n t s de s a n t é c o m m u n a u t a i r e dans l ' é t a b l i s s e m e n t d e s programmes de s a n t é e t de c e u x d e s i n s p e c t r i c e s ou i n s p e c t e u r s de l a CSST qui • i n t e r v i e n n e n t c h e z nous p r e s q u e e x c l u s i v e m e n t dans l e s c a s oû l e s s a l a r i é e s e t s a l a r i é s e x e r c e n t un d r o i t de r e f u s .

C e t t e s i t u a t i o n . c r é e donc deux c a t é g o r i e s de t r a v a i l l e u s e s e t de t r a v a i 1 l e u r s ; 11 une b é n é f i c i a n t d e s e f f e t s p o s i t i f s d e s méca-n i s m e s de p r é v e n t i o n e t l ' a u t r e en é t a n t e x c l u e . On c r é e a u s s i deux mondes du t r a v a i l ; l ' u n où l a s a n t é e t l a s é c u r i t é s o n t une p r é o c c u p a t i o n c o n s t a n t e d o n t l a r e s p o n s a b i l i t é e s t p a r t a g é e p a r i t a i r e m e n t par l e s e m p l o y e u r s e t l a m a i n - d ' o e u v r e e t 1 ' a u t r e oû l ' i d e n t i f i c a t i o n e t l ' é l i m i n a t i o n d e s d a n g e r s à l a s o u r c e , l a p r é v e n t i o n , l a s a n t é , l a s é c u r i t é e t l ' i n t é g r i t é p h y s i q u e d e s g e n s s o n t l a i s s é e s aux a l é a s d é s d e s i d e r a t a p a t r o n a u x .

On f a i t é g a l e m e n t p e r d u r e r une f a u s s e c o n c e p t i o n de l a s a n t é e t de l a s é c u r i t é . En e f f e t , en d é c l a r a n t " p r i o r i t a i r e s " l e s s e c -t e u r s t e l l e s l a c o n s t r u c t i o n , l e s m i n e s e t f o r ê t s , l ' i n d u s t r i e c h i m i q u e , e t c . , l à où l e s a c c i d e n t s du t r a v a i l s o n t v i s i b l e s e t s o u v e n t s p e c t a c u l a i r e s , on a c c o r d e une p r é d o m i n a n c e aux a s p e c t s s é c u r i t a i r e s en l a i s s a n t p a s s e r p r e s q u e s o u s s i l e n c e l e s d a n g e r s qu i p e u v e n t p o r t e r a t t e i n t e à l a s a n t é , c ' e s t - à - d i r e c e u x qui s o n t l e s p l u s i n s i d i e u x e t c o m b i e n d é v a s t a t e u r s . Dans l e s e c t e u r de 1 ' e n s e i g n e m e n t , l e s p r o b l è m e s r e v ê t e n t p a r t i c u l i è r e m e n t c e

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c a r a c t è r e . On r e t r o u v e l e s r i s q u e s d ' i n f e c t i o n par l ' h é p a t i t e B, l e c y t o m ê g a l o v i r u s e t l e s m a l a d i e s c o n t a g i e u s e s , l e s a f f e c t i o n s r e s p i r a t o i r e s e t a u d i t i v e s , l e s t r o u b l e s v i s u e l s , l e s maux de d o s , 1 ' é p u i s e m e n t p r o f e s s i o n n e l , l e s t r à u m a t i s m e s e t l e s b l e s -s u r e s r e l i é s à l a v i o l e n c e en m i l i e u s c o l a i r e , e t c .

I l n o u s s e m b l e que l ' a b s e n c e de t o u s c e s m é c a n i s m e s de p r é v e n t i o n n ' e s t p a s l à l a m e i l l e u r e f a ç o n de donner l ' e x e m p l e aux j e u n e s n i de l e u r p e r m e t t r e de r e c e v o i r une f o r m a t i o n c o m p l è t e en m a t i è r e de s a n t é e t de s é c u r i t é .

Qui p l u s e s t , c e l a nous a p p a r a î t m o n t r e r l a f a i 11 i t e de l a c o n -c e r t a t i o n s e l o n l ' e s p r i t même de l a l o i qui , v e u t que l ' e n s e m b l e du d o s s i e r s o i t assumé de f a ç o n p a r i t a i r e par l e s e m p l o y e u r s e t l e s t r a v a i l l e u s e s e t t r a v a i l l e u r s . Les d i f f i c u l t é s que nous é p r o u v o n s d e p u i s e n v i r o n c i n q ans à m e t t r e s u r p i e d une a s s o c i a -t i o n s e c t o r i e l l e p a r i t a i r e dans l e s e c t e u r d e l ' e n s e i g n e m e n t , t é m o i g n e n t b i e n de l ' a b s e n c e de v o l o n t é q u a n t à une r é e l l e p r i s e en c h a r g e de la s a n t é e t de l a s é c u r i t é . Dans c e c o n t e x t e , i l nous e s t d i f f i c i l e d ' i m a g i n e r que l e m i n i s t è r e de l ' E d u c a t i o n , l e s f é d é r a t i o n s p a t r o n a l e s e t l e s d i r e c t i o n s d e s c o m m i s s i o n s s c o l a i r e s , d e s c é g e p s e t d e s u n i v e r s i t é s p e u v e n t p r é t e n d r e à un s o u c i de f o r m a t i o n i n t é g r a l e d e s é t u d i a n t e s e t d e s é t u d i a n t s y i n c l u a n t l a s a n t é e t l a s é c u r i t é a l o r s q u ' i l s t a r d e n t t a n t à c o n s i d é r e r c e t a s p e c t i m p o r t a n t de l a v i e de l e u r s p r o p r e s s a l a -r i é e s e t s a l a r i é s .

M a l g r é t o u t . . . c e qu i s e f a i t

Tout c e c i é t a n t d i t , i l s e r a i t f a u x de p r é t e n d r e que r i e n ne bouge en m a t i è r e de s a n t é - s é c u r i t é dans l e s é c o l e s du Q u é b e c .

D e p u i s q u e l q u e s a n n é e s , l e s programmes de f o r m a t i o n du m i n i s t è r e de l ' E d u c a t i o n pour l e s e c o n d a i r e p r o f e s s i o n n e l p r é s e n t e n t d i v e r s c p n t e n u s l i é s à l a s a n t é - s é c u r i t é . Le programme de f o r m a t i o n p e r s o n n e l l e e t s o c i a l e e n s e i g n é au p r e m i e r e t d e u x i è m e c y c l e du p r i m a i r e t r a i t e d e s d a n g e r s de 1 ' e n v i r o n n e m e n t p h y s i q u e e t d e s c o n s é q u e n c e s d e s a c t i o n s d e s j e u n e s s u r l e u r s a n t é . Au n i v e a u s e c o n d a i r e , c e même programme a t t i r e l ' a t t e n t i o n s u r l e s d a n g e r s de l a v i e q u o t i d i e n n e e t s u r l a r e s p o n s a b i l i t é d e s j e u n e s e n v e r s l e u r s a n t é e t c e l l e d e s a u t r e s . D ' a u t r e s programmes du s e c o n -d a i r e g é n é r a l c o n t i e n n e n t d e s é l é m e n t s en s a n t é e t s é c u r i t é qui s o n t i n t é g r é s à d i v e r s a p p r e n t i s s a g e s , notamment en é d u c a t i o n t e c h n o l o g i q u e . Quant aux l a b o r a t o i r e s , un document d ' i n f o r m a t i o n s u r l a s a n t é e t l a s é c u r i t é d a n s l ' e n s e i g n e m e n t d e s s c i e n c e s de l a n a t u r e a é t é d i f f u s é au d é b u t de l ' a n n é e 1 9 8 6 .

T o u t e c e t t e f o r m a t i o n nous s e m b l e f o r t l o u a b l e . C e p e n d a n t , i 1 nous a p p a r a î t q u ' o n y met b e a u c o u p t r o p l ' a c c e n t s u r l a r e s p o n -

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sab i l i s a t i o n i n d i v i d u e l l e d e s é t u d i a n t e s e t é t u d i a n t s par r a p p o r t â une i n f o r m a t i o n e t une f o r m a t i o n p l u s g l o b a l e qui v i s e r a i e n t & f a i r e p r e n d r e c o n s c i e n c e aux j e u n e s que l a s a n t é e t l a s é c u r i t é e s t une r e s p o n s a b i l i t é p a r t a g é e e n t r e l e s e m p l o y e u r s e t l e s e m p l o y é e s e t e m p l o y é s e t que 11 o b j e c t i f p r e m i e r v e r s l e q u e l t o u t e s e t t o u s d o i v e n t t e n d r e en c e t t e m a t i è r e e s t l ' é l i m i n a t i o n d e s d a n g e r s à l a s o u r c e . Nous s o u h a i t e r i o n s é g a l e m e n t que l e s j e u n e s c o n n a i s s e n t l e s d i f f é r e n t e s normes i n d u s t r i e l l e s e t q u ' i l s s o i e n t i n f o r m é s d e s d r o i t s p r é v u s à l a l o i .

De p l u s , l ' i d é a l s e r a i t que t o u s l e s n i v e a u x d ' e n s e i g n e m e n t i n t è g r e n t un minimum d ' i n f o r m a t i o n e t de f o r m a t i o n en s a n t é -s é c u r i t é e t que c e s é l é m e n t s s o i e n t a c c e n t u é s e t d é v e l o p p é s pour d e s m a t i è r e s s p é c i f i q u e s . On d i s p o s e r a i t donc a i n s i d ' u n p r o -gramme c o m p l e t qui p e r m e t t r a i t aux j e u n e s t r a v a i l l e u s e s e t t r a -v a i l l e u r s d1 e n t r e r s u r l e marché du t r a v a i 1 muni s du b a g a g e n é c e s s a i r e de c o n n a i s s a n c e s pour a f f r o n t e r l e s r é a l i t é s du t r a -v a i l .

C e t t e i m p o r t a n t e démarche ne d o i t c e p e n d a n t pas ê t r e e f f e c t u é e en v a s e c l o s . L ' a p p o r t d e s d i f f é r e n t e s c a t é g o r i e s de p e r s o n n e l e t p l u s p a r t i c u l i è r e m e n t c e l u i du p e r s o n n e l e n s e i g n a n t e s t a b s o l u -ment n é c e s s a i r e . Le d o s s i e r de l a s a n t é e t de l a s é c u r i t é , comme nous l ' i n d i q u e l a l o i , d o i t ê t r e p r i s en c h a r g e p a r i t a i r e m e n t e t nous y t e n o n s b e a u c o u p .

C ' e s t dans c e t e s p r i t , i l y a e n v i r o n s i x a n s , que l a C e n t r a l e de l ' e n s e i g n e m e n t du Québec a a c c e p t é de p a r t i c i p e r à une e x p é r i e n c e c o n j o i n t e a v e c l e m i n i s t è r e de l ' E d u c a t i o n , l a F é d é r a t i o n d e s c o m m i s s i o n s s c o l a i r e s c a t h o l i q u e s du Québec , l a F é d é r a t i o n d e s c é g e p s e t l a Commiss ion de l a s a n t é e t de l a s é c u r i t é du t r a v a i l . Ce p r o j e t de s i m u l a t i o n v i s a i t â e x p é r i m e n t e r l ' a p p l i c a t i o n de l a Loi s u r l a s a n t é e t l a s é c u r i t é du t r a v a i l dans d i v e r s m i l i e u x s c o l a i r e s . Le t o u t qui d e v a i t d u r e r un an s ' e s t é c h e l o n n é s u r p r e s q u e q u a t r e a n s .

Q u o i q u e nous p u i s s i o n s en t i r e r d e s é l é m e n t s p o s i t i f s , nous d é p l o r o n s que c e t t e e x p é r i e n c e ne s e s o i t pas d é r o u l é e en c o n f o r -m i t é a v e c l a l o i .

Des c o m i t é s de s a n t é - s é c u r i t é o n t é t é mis s u r p i e d au n i v e a u de l a c o m m i s s i o n s c o l a i r e p l u t ô t que dans l e s é t a b l i s s e m e n t s . Les r e p r é s e n t a n t s à l a p r é v e n t i o n , pour l a p l u p a r t , s e s o n t vu c h a r -g e r de l ' é t a b l i s s e m e n t du programme de p r é v e n t i o n , c e q u i , s e l o n l a l o i , r e l è v e de l a r e s p o n s a b i l i t é d e s e m p l o y e u r s . Ces mêmes r e p r é s e n t a n t s é t a i e n t l e p l u s s o u v e n t s o u m i s aux v o l o n t é s d e s d i r e c t i o n s s c o l a i r e s p l u t ô t que de d é t e n i r l e u r mandat s u i t e à un c o n s e n s u s é t a b l i e n t r e l a p a r t i e p a t r o n a l e e t l a p a r t i e s y n d i -c a l e . Nous a v o n s é g a l e m e n t r e n c o n t r é un p r o b l è m e de t a i l l e en c e

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qui c o n c e r n e . l e temps de l i b é r a t i o n de c e s p e r s o n n e s . A c e c h a p i t r e , l e c ô t é p a t r o n a l n ' a j a m a i s r e s p e c t é l e s t e r m e s p r é v u s a l a l o i c ' e s t - â - d i r e l e nombre d ' h e u r e s â c o n s a c r e r au d o s s i e r s a n t é - s é c u r i t é en f o n c t i o n du nombre de t r a v a i 1 1 e u s e s é t de t r a v a i l l e u r s dans l ' é t a b l i s s e m e n t e t i l a é t é i m p o s s i b l e de f a i r e c o m p t a b i l i s e r l a c l i e n t è l e é t u d i a n t e dans c e c a l c u l , c e que ne p r é v o i t e f f e c t i v e m e n t pas l a l o i .

Or, l o r s q u ' u n r e p r é s e n t a n t ou une r e p r é s e n t a n t e à l a p r é v e n t i o n d o i t f a i r e 11 i n s p e c t i o n c o n c e r n a n t l a s é c u r i t é d e s l i e u x , c e t t e p e r s o n n e d o i t n é c e s s a i r e m e n t t e n i r compte de l a p r é s e n c e d e s é l è v e s en p l u s de c e l l e du p e r s o n n e l . Et s i on v e u t v é r i t a b l e -ment e n r a y e r l e s a c c i d e n t s e t l e s l é s i o n s , i l f a u t f a i r e e n q u ê t e l o r s q u e d e s é v é n e m e n t s i m p l i q u e n t d e s é l è v e s pour p o u v o i r en d é t e r m i n e r l e s c a u s e s e t a p p o r t e r l e s c o r r e c t i f s n é c e s s a i r e s . Tout c e l a a j o u t e â l a t â c h e . V o i l à une f a i l l e i m p o r t a n t e de l a l o i que l e p r o j e t de s i m u l a t i o n nous aura1, p e r m i s de c o n f i r m e r . Mais nous sommes t o u j o u r s l e s s e u l s à nous b a t t r e s u r c e t e r r a i n .

En c e qui r e g a r d e l ' a s p e c t f i n a n c i e r du p r o j e t pour l e q u e l l e m i n i s t è r e de l ' E d u c a t i o n a v a i t o c t r o y é d e s s u b v e n t i o n s p a r t i c u -l i è r e s , aucun b u d g e t n ' a pu ê t r e a d m i n i s t r é p a r i t a i r e m e n t . L o r s q u e l e s r e c o m m a n d a t i o n s du Comi té s a n t é - s é c u r i t é i m p l i q u a i e n t d e s d é p e n s e s , l e s u i v i ne s e f a i s a i t pas ou t a r d a i t indûment â s e r é a l i s e r . Dans b i e n d e s c a s , l e s é q u i p e m e n t s de p r o t e c t i o n i n d i v i d u e l l e é t a i e n t f o u r n i s au p e r s o n n e l m a i s non aux é t u d i a n t e s e t é d u t i a n t s .

s

M a i s , c e qui e s t l e p l u s d é p l o r a b l e , c ' e s t que l e p r o j e t a p r i s f i n d ' u n e p a r t , p a r c e que l e s r e p r é s e n t a n t e s e t r e p r é s e n t a n t s de l a CEQ e x i g e a i e n t d e s c o r r e c t i f s i m p o r t a n t s comme c o n d i t i o n de m a i n t i e n de l e u r p a r t i c i p a t i o n , c e qui a é t é r e f u s é , e t d ' a u t r e p a r t , p a r c e que l e s r e p r é s e n t a n t s p a t r o n a u x c o n s i d é r a i e n t l e u r s o b j e c t i f s a t t e i n t s .

Par l a s u i t e , l e m i n i s t è r e de l ' E d u c a t i o n , l e s c o m m i s s i o n s s c o -l a i r e s c o n c e r n é e s e t l a F é d é r a t i o n d e s c o m m i s s i o n s s c o l a i r e s c a t h o l i q u e s du Québec o n t p r é p a r é un e n s e m b l e de d o c u m e n t s c o n -c e r n a n t l a g e s t i o n de l a s a n t é - s é c u r i t é dans l e r é s e a u s c o l a i r e e t l e s o r i è n t a t i o n s du M i n i s t è r e . En aucun moment, l a p a r t i e s y n d i c a l e n ' a é t é a s s o c i é e à c e t t e d é m a r c h e . E n c o r e l a , c ' e s t un manque de r e s p e c t de l a l o i q u a n t à son a s p e c t p a r i t a i r e .

En c e qu i c o n c e r n e l e t r a v a i 1 que l a C e n t r a l e de 11 e n s e i g n e m e n t du Québec e f f e c t u e a u p r è s de s e s membres , i l y a b i e n s û r l a d é f e n s e d e s p e r s o n n e s v i c t i m e s d1 a c c i d e n t s du t r a v a i 1 ou de l é s i o n s p r o f e s s i o n n e l l e s , m a i s i l y a a u s s i d ' i m p o r t a n t e s démar-c h e s d ' i n f o r m a t i o n e t de f o r m a t i o n qui s o n t f a i t e s . Chaque a n n é e , nous o f f r o n s un programme de s e s s i o n s de f o r m a t i o n t a n t au

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n i v e a u n a t i o n a l que r é g i o n a l ou l o c a l . De p l u s , d i v è r s d o c u m e n t s é c r i t s e t a u d i o - v i s u e l s v i e n n e n t a p p u y e r c e s e f f o r t s de s e n s i b i -l i s a t i o n . En 1 9 8 5 , nous a v o n s d i f f u s é un c a h i e r p é d a g o g i q u e s u r l a s a n t é e t l a s é c u r i t é en mi l i e u s c o l a i r e â l ' i n t e n t i o n de l a c l i e n t è l e é t u d i a n t e qui a é t é l a r g e m e n t u t i l i s é par l e p e r s o n n e l e n s e i g n a n t à 1 ' i n t é r i e u r de l e u r s c o u r s . Nous menons é g a l e m e n t d e s l u t t e s s u r d i f f é r e n t s p r o b l è m e s que r e n c o n t r e n t nos membres dans l e u r m i l i e u de t r a v a i l : l ' é p u i s e m e n t p r o f e s s i o n n e l qui n1 e s t t o u j o u r s pas r e c o n n u comme m a l a d i e p r o f e s s i o n n e l 1 e f l e r e t r a i t p r é v e n t i f de l a t r a v a i l l e u s e e n c e i n t e ou qu i a l l a i t e e t l a q u a l i t é de 1 ' a i r .

C e p e n d a n t , nous sommes c o n s c i e n t s qu ' i 1 f a u d r a i t f a i r e b e a u c o u p p l u s . Mais i l nous e s t t r è s d i f f i c i l e de d é f e n d r e n o t r e p o i n t de vue e t de d é m o n t r e r l a p e r t i n e n c e e t l ' i m p o r t a n c e de nos r e v e n -d i c a t i o n s p u i s q u e d e p u i s 1 9 8 2 , l a C e n t r a l e de l ' e n s e i g n e m e n t du Québec e s t e x c l u e du C o n s e i l d ' a d m i n i s t r a t i o n de l a CSST.

Pour n o u s , l a p r é v e n t i o n . . . ça d e v r a i t commencer â l ' é c o l e . Mais f o r c e nous e s t de c o n s t a t e r que peu d ' i n t e r v e n a n t e s ou d ' i n t e r -v e n a n t s dans l e domaine , de l a s a n t é e t de l a s é c u r i t é s e m b l e n t p a r t a g e r n o t r e o p i n i o n e t v e u l e n t a t t e i n d r e c e t o b j e c t i f .

Ce q u i d e v r a i t ê t r e f a i t

A p r è s 10 ans de m i s e en a p p l i c a t i o n de l a l o i , on ne p e u t pas d i r e que l ' h e u r e j u s t e en s a n t é - s é c u r i t é du t r a v a i l dans l e monde de 1 ' é d u c a t i o n e s t â 1 ' h e u r e a v a n c é e . 11 s e r a i t g r a n d temps d ' a b a n d o n n e r 1 ' h o r l o g e g r a n d - p è r e pour a d o p t e r l e c a d r a n n u m é r i -que par d e s d é m a r c h e s c o n c r è t e s .

Tout d ' a b o r d , i l f a u d r a i t é t a b l i r un v é r i t a b l e p a r i t a r i s m e à t o u s l e s n i v e a u x de l a s t r u c t u r e du s y s t è m e d1 e n s e i g n e m e n t , â p a r t i r du m i n i s t è r e de l ' E d u c a t i o n l u i - m ê m e , en p a s s a n t par l e s f é d é r a -t i o n s p a t r o n a l e s , l ' e n s e m b l e d e s d i r e c t i o n s s c o l a i r e s pour s e r e n d r e j u s q u e dans l e p l u s p e t i t é t a b l i s s e m e n t . C e l a f a i t a p p e l à l a c o n c e r t a t i o n e t à l a v o l o n t é de t r a v a i l l e r e n s e m b l e , t a n t de l a p a r t d e s e m p l o y e u r s que de c e l l e d e s t r a v a i l l e u s e s e t d e s t r a v a i 1 l e u r s .

E n s u i t e , l e s e c t e u r de l ' e n s e i g n e m e n t d e v r a i t ê t r e c l a s s é comme s e c t e u r p r i o r i t a i r e e t t o u s l e s m é c a n i s m e s de p r é v e n t i o n p r é v u s à l a l o i d e v r a i e n t ê t r e r e n d u s o b l i g a t o i r e s . C e p e n d a n t , compte t e n u d e s l e n t e u r s de n o s a p p a r e i l s p o l i t i q u e s , l e s e c t e u r de 1 ' e n s e i g n e m e n t l u i - m ê m e d e v r a i t d ' o r e s e t d é j à c o n s i d é r e r t o u s c e s m é c a n i s m e s o b l i g a t o i r e s e t t r a v a i l l e r à l e u r m i s e s u r p i e d . De p l u s , pour t e n i r compte de l a r é a l i t é qui l u i e s t p r o p r e , i l y a u r a i t l i e u de f a i r e en s o r t e que l e s é t u d i a n t e s e t l e s é t u d i a n t s p u i s s e n t p a r t i c i p e r â c e t t e p r i s e en c h a r g e de l a s a n t é e t de l a

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s é c u r i t é . Par e x e m p l e , d e s j e u n e s p o u r r a i e n t s i é g e r aux c o m i t é s de s a n t é - s é c u r i t é e t c e , à c o m p t e r , du d e u x i è m e c y c l e du s e c o n -d a i r e .

Mais nous ne s a u r i o n s ê t r e c a p a b l e s d 1 i n t é r e s s e r l e s j e u n e s à l a p r é v e n t i o n s ' i l s ne s o n t d1 abord i n f o r m é s . Aucun programme de p r é v e n t i o n , s i é l a b o r é s o i t - i l , ne p o u r r a i t p r o t é g e r un f u t u r s o u d e u r qui s e r a i t p r i v é d' i n f o r m a t i o n s u r son m é t i e r , d e s r i s -q u e s q u ' i 1 c o u r t , d e s m e s u r e s de p r é v e n t i o n d i s p o n i b l e s e t d e s m é c a n i s m e s qui e x i s t e n t pour t r a v a i l l e r à l ' é l i m i n a t i o n d e s d a n g e r s à l a s o u r c e . L1 i n f o r m a t i o n nous a p p a r a î t ê t r e l ' a s p e c t l e p l u s i m p o r t a n t de l a p r é v e n t i o n . A c e l a c e p e n d a n t , i 1 f a u t a j o u t e r une d e s c o m p o s a n t e s e s s e n t i e l l e s , c ' e s t - à - d i r e l a f o r m a -t i o n . Ce n ' e s t pas t o u t de s a v o i r q u ' u n p r o d u i t d a n g e r e u x p e u t ê t r e c o n t a m i n a n t ; , e n c o r e f a u t - i l a p p r e n d r e à l e m a n i p u l e r . C ' e s t p o u r q u o i , nous p r é c o n i s o n s l ' i n s t a u r a t i o n d ' u n programme c o m p l e t d ' i n f o r m a t i o n e t de f o r m a t i o n pour t o u s l e s n i v e a u x d ' e n s e i g n e -ment en t e n a n t compte de l ' â g e e t d e s r é a l i t é s d e s d i v e r s e s c l i e n t è l e s é t u d i a n t e s .

A f i n d ' ê t r e h a b i l i t é à d i s p e n s e r c e s a p p r e n t i s s a g e s , 1 ' e n s e m b l e du p e r s o n n e l d e v r a i t b é n é f i c i e r de programmes de r e c y c l a g e e t de m i s e à j o u r . De p l u s , l e s programmes de f o r m a t i o n d e s t r a v a i 1 -1 e u s e s e t d e s t r a v a i 1 l e u r s de l ' e n s e i g n e m e n t d e v r a i e n t p r é v o i r une f o r m a t i o n t h é o r i q u e e t p r a t i q u e a d é q u a t e en h y g i è n e i n d u s -t r i e l l e .

En c e qui a t r a i t à l ' é l i m i n a t i o n d e s d a n g e r s à l a s o u r c e e t l a q u a l i t é de v i e d e s é l è v e s e t du p e r s o n n e l dans l e s é c o l e s , i l nous a p p a r a î t p r i m o r d i a l que d e s i n v e s t i s s e m e n t s s o i e n t f a i t s pour que l e s j e u n e s e t l e u r s a î n é e s e t a î n é s j o u i s s e n t de c o n d i -t i o n s d ' a p p r e n t i s s a g e e t de t r a v a i 1 qu i r e s p e c t e n t l e u r s a n t é , l e u r s é c u r i t é e t l e u r i n t é g r i t é p h y s i q u e .

D ' a u t r e s m e s u r e s p o u r r a i e n t a u s s i ê t r e m i s e s de l ' a v a n t a f i n d ' a p p o r t e r l e s c o r r e c t i f s n é c e s s a i r e s .

Pour n ' e n c i t e r que q u e l q u e s - u n e s :

i n c l u r e l a c l i e n t è l e é t u d i a n t e pour c o m p t a b i l i s e r l e temps de t r a v a i l d e s r e p r é s e n t a n t e s ou r e p r é s e n t a n t s à l a p r é v e n -t i o n ;

é t a b l i r d e s s t a t i s t i q u e s qui t i e n n e n t c o m p t e de l a r é a l i t é , qu i f a s s e n t é t a t d e s t y p e s d ' a c c i d e n t s du t r a v a i 1 e t de l é s i o n s p r o f e s s i o n n e l l e s e t qui c o m p t a b i l i s e n t é g a l e m e n t l e s é t u d i a n t e s e t l e s é t u d i a n t s ;

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f a i r e d e s r e c h e r c h e s s u r l ' é t a t de s a n t é d e s é l è v e s e t s u r l e u r n i v e a u de c o n n a i s s a n c e en m a t i è r e de s a n t é e t de s é c u -r i t é .

Nous p o u r r i o n s a i n s i a l l o n g e r l a . l i s t e d e s d é m a r c h e s â a c c o m p l i r p e n d a n t p l u s i e u r s h e u r e s . Ce ne s o n t pas l e s i d é e s qu i m a n q u e n t .

Mais c e qui nous p a r a î t l e p l u s i m p o r t a n t , c ' e s t que s e d é g a g e , de l a p a r t de t o u t e s l e s i n t e r v e n a n t e s e t de t o u s l e s i n t e r v e -n a n t s du monde de l ' E d u c a t i o n , , une v é r i t a b l e v o l o n t é de p r e n d r e en c h a r g e l a s a n t é , e t l a s é c u r i t é en m i l i e u s c o l a i r e . C e l a p o u r r a i t nous c o n d u i r e <1 une p l a n i f i c a t i o n c o n c e r t é e d e s i n t e r -v e n t i o n s . e t dans q u e l q u e t e m p s , nous p o u r r i o n s a f f i r m e r a v e c f i e r t é que o u i , l a p r é v e n t i o n du t r a v a i l . . . ç a commence à l ' é c o l e .

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L'Université et la formation des travailleurs en santé et sécurité au travail.

Luc Desnoyers. Département des sciences biologiques.

Université du Québec à Montréal.

La loi sur la santé et la sécurité au travail établit le droit pour le travailleur à des services de formation, d'information et de conseil en matière de santé et de sécurité au travail, particulièrement en relation avec son travail et son milieu de travail ( Art. 10) tout comme elle lui fait obligation de participer à l'identification et à l'élimination des risques (Art. 39).

Des activités de formation peuvent être initiées par plusieurs instances, et les organismes du réseau des affaires sociales, la Commission sur la santé et la sécurité du travail, les associations sectorielles paritaires, les associations patronales y jouent un rôle très variable. Ce sont surtout les syndicats, subventionnés à cet effet par la CSST, qui effectuent le gros de la formation des travailleurs. Dans certaines activités, et plus spécialement dans le cas de formations sur des thèmes plus fouillés ( le bruit en milieu de travail, le travail sur terminal à écran, etc.), les syndicats ont fait appel à des ressources universitaires pour développer des contenus de formation et pour offrir les sessions de formation.

Cette collaboration université-syndicat s'est surtout développée dans le cadre du Protocole UQAM-CSN-FTQ sur la formation syndicale. L'entente-cadre, intervenue entre les parties en 1976, a permis la participation de professeurs, d'étudiants et d'employés dans un nombre considérable d'activités de formation dont nous n'allons pas ici faire le bilan.

Cette collaboration pose cependant un nombre important de questions, sur le rôle des universitaires dans ce cadre, sur la nature, la portée et les limites de leur participation.

La première remarque qu'il m'apparaît important de faire concerne le statut de l'universitaire. Les sessions syndicales sont d'ordinaire données par des formateurs syndicaux, qui sont identifiés à la centrale syndicale, à son discours, à son idéologie. L'universitaire, fut-il syndiqué, n'a pas à endosser les positions politiques du syndicat, son rôle n'est pas dé leur

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donner une caution, un vernis scientifique. Il est là d'abord comme expert, comme spécialiste d'un contenu spécialisé, comme enseignant -ou plutôt comme formateur; la nuance est de taille et nous y reviendrons. Son rôle est de contribuer à l'acquisition critique, par les participants, de connaissances scientifiques qui soient exactes, véridiques, et pertinentes aux problèmes rencontrés par ces participants. Ce rôle le distancie du formateur syndical, mais cette distanciation n'est pas négative. Au contraire, et peut-être paradoxalement, j'ai pu souvent constater qu'elle contribuait à asseoir la crédibilité de l'universitaire auprès de participants qui craignaient, victimes de stéréotypes marquants, qu'on les abreuve d une rhétorique syndicale pure et dure.

Bien sûr, l'universitaire qui accepte de participer à ces activités de formation est rarement un antisyndicaliste notoire; il est sensible aux problèmes vécus par les travailleurs, il est convaincu que la formation peut les outiller pour les aider à régler leurs problèmes de santé et de sécurité. Il aura développé une approche écologique de la santé au travail, c'est-à-dire qu'il croit que l'amélioration de la santé et de la sécurité ne passe pas prioritairement par la sélection du personnel, ni par le recours systématique aux mesures incitatives et encore moins coercitives, ni par le port systématisé de protecteurs personnels. Il est de ceux qui endossent fondamentalement l'objectif que présente l'article 2 de la loi sur la santé et la sécurité du travail, qui vise à régler les problèmes par l'élimination à la source des dangers.

Ceci dit, que vient faire l'universitaire dans cet univers? Il vient contribuer à la formation et à l'information d"étudiants" dont les caractéristiques en font une population fort différente des diplômés de Cégeps. La moyenne d'âge est beaucoup plus élevée, la scolarisation est d'ordinaire beaucoup moins poussée; La tolérance à l'écoute passive, des heures durant, d'un maitre d'école qui prononce son exposé de façon magistrale, cette tolérance est disparue. Souvent, les participants ont perdu -ou n'ont pas acquis- l'habitude de la gymnastique intellectuelle pure, ils ont pris leurs distances par rapport aux constructions théoriques de l'induction et de la déduction. Le milieu et l'activité de travail favorisent la concentration sur l'analyse et la solution de problèmes concrets, immédiats. L'analyse de l'état de santé de la population des travailleurs dont on fait partie, l'analyse des contraintes dans ses conditions de travail, non seulement ne sont pas pratiquées dans ce milieu, mais au contraire sont souvent tacitement mises de côté, entre autres à cause de ce que Christophe Dejours (1) a appelé "l'idéologie defensive de métier ". Il n'est pas facile de reconnaître, surtout là où les conditions sont les plus pénibles, que votre propre gagne-pain vous agresse dans votre corps et dans votre esprit et que

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vous vous soumettez à cette agression. On aura préféré repousser ces considérations hors de la sphère consciente; or la session de formation vient maintenant vous y confronter, et ce face à face ne va pas toujours sans heurt.

L'universitaire vient participer à une formation dont il n'est pas le seul et surtout pas le premier, à définir les objectifs, le cadre et les méthodes. La formation offerte est organisée par un syndicat, pour ses membres, dans une perspective que Michel Blondin (2) a bien définie. L'éducation syndicale est liée à l'action, elle s'inscrit dans un objectif de promotion collective, elle se fonde sur les connaissances concrètes et sur l'expérience des travailleurs sur lesquelles elle bâtit, sur lesquelles elle ajoute sans tomber dans la vulgarisation facile, par des méthodes éducatives dynamiques et actives.

L'universitaire doit d'abord se familiariser avec ce groupe d'étudiants, ne serait-ce que par simple souci d'efficacité. L'universitaire n'a pas toujours une connaissance concrète, réaliste, de ce que sont les vraies conditions de travail; ses connaissances peuvent être livresques, elles peuvent se teinter aussi bien d'angélisme que de catastrophisme. Il ne connait pas toujours le point de vue des travailleurs sur leur travail, sur ses conditions, il ne sait pas nécessairement leur perception de leur état de santé, de la relation travail-santé. Une formation est efficace dans la mesure où, au point de départ, éducateurs et étudiants sont sur la même longueur d'onde. La familiarisation de l'universitaire avej: ses étudiants implique donc un certain apprentissage que personne n'a réussi à systématiser: il se fonde sur l'écoute, sur l'apprivoisement réciproque, progressif, sur l'essai et l'erreur.

Mais il y a plus. Le scientifique a l'habitude surtout de la communication... scientifique. Dans sa salle de cours, ou lorsqu il présente une communication, il gère une transmission de l'information tout à fait particulière et dont il n'a pas toujours pris conscience des caractéristiques -et des limites. L'exposé scientifique est surtout unidirectionnel: il y a transmission de l'information selon un gradient de concentration qui va du plus connaissant au moins, selon un gradient d'autorité aussi, de l'expert à l'apprenti, du maitre à l'élève. L'enseignant prend pour acquises les connaissances prévues dans les cours préalables, que tout le monde doit avoir suivis. Il n'a pas beaucoup à se repositionner par rapport au groupe, et il fait relativement peu de place à l'interaction dans ses méthodes éducatives: manque de temps, peut-être, car il doit "couvrir sa matière ". Les étudiants sont presque sélectionnés sur la base de leur tolérance à l'exposé magistral, qui est la régie.

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Mais voilà, la formation doit permettre à des travailleurs d'analyser leurs conditions de travail, doit les outiller pour qu'ils puissent oeuvrer à les transformer. Les méthodes habituelles de la pédagogie universitaire sont une.garantie d'échec dans ce cadre. L'efficacité éducative passe ici par la transformation de l'enseignant en formateur, en animateur. Cette animation est nécessaire d'abord parce qu'il faut établir où se situe la case départ: tous les groupes diffèrent, et c'est par un questionnement en séance qu'on peut établir les coordonnées de base. L'animation est aussi nécessaire parce qu'il faut systématiquement accrocher le contenu de formation à l'expérience concrète des participants -dont ils sont les seuls à pouvoir nous faire part. Elle est nécessaire pour maintenir l'intérêt, l'attention, face à des participants qui soient ont décroché de l'école trop ennuyante, soit ont perdu toute habitude, toute tolérance, de l'écoute patiente et passive du conférencier, si compétent soit-il. Il faut partir du connu, du vécu, et toujours retourner à ce quotidien. Il y a donc questionnement, il ya donc travail de groupe, il y a donc discussion, échange, interaction et repositionnement constant. Non seulement c'est possible, mais ça marche.

J'en veux pour exemple une session de formation sur le travail à lécran cathodique, que j'ai eu l'occasion de développer avec le Syndicat canadien de la fonction publique, le Syndicat des métallos et le Service d'éducation de la Fédération des Travailleurs du Québec, pour l'offrir dans nombre de syndicats de la FTQ. Cette session est une retombée d'une recherche sur les problèmes de vision au travail, que j'ai menée à l'UQAM et à l'Institut de recherche appliquée sur le travail. Elle a d'abord pris la forme de petits exposés, puis de soirées d'information et finalement d'une session de trois jours (3). Voyons comment se déroule cette session.

Les participants seront une vingtaine, délégués par leur syndicat local, issus de plusieurs milieux de travail différents. On a exigé avant l'inscription qu'une majorité utilisent un terminal à écran dans leur travail. Il y a deux animateurs: un universitaire et un formateur syndical. Dès le début de la session, on invite les participants à un tour de table où ils se présentent et répondent à de brèves questions des animateurs sur leur travail, sur leur perception des problèmes de santé au travail dans leur milieu. Ceci permet aux animateurs de choisir trois ou quatre participants qui ont des tâches différentes à l'écran. On demande alors à chacun de ces élus de décrire en détail leur activité de travail, les contraintes, les problèmes qu'ils y perçoivent et lés changements induits par l'informatisation. Les autres participants sont invités à se joindre au questionnement, qui se prolonge jusqu'à ce que tous aient compris la nature du travail et ses conditions.

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Les animateurs font alors un premier bilan, à partir de ce qui vient d'être dit. Us font ressortir la diversité des tâches sur écran: les contraintes ne sont pas les mêmes dans la saisie de données que dans la consultation de fichiers, que dans le travail interactif; le terme 'opérateur de terminal à écran" masque la diversité des conditions. Ils proposent ensuite des réflexions sur les changements induits par l'informatisation, faisant le parallelle avec le taylorisme et le fordisme. Us proposent finalement un modèle de la situation de travail qui deviendra le fil directeur de la session: le travail à l'écran est un travail visuel, un travail postural, un travail mental. On se propose d'étudier chacun de ces aspects dans une demi-journée.

On traite d'abord des aspects oculo-visuels. Le tout commence par une mise en situation que fait l'universitaire. On parle globalement du mécanisme de la vision. On commente les limites organiques et populationnelles de la fonction visuelle, les limites dictées par l'éclairage et par les propriétés des objets regardés. On conclut en énonçant que le travail visuel prolongé ou intense peut induire de la fatigue visuelle.

On divise alors les participants en groupes de quatre ou cinq. On leur demande de produire une liste des symptômes de fatigue visuelle qu eux ou leurs collègues de travail ressentent au travail. Après dix ou quinze minutes, les groupes sont rassemblés en plénière et chacun fait rapport. La liste de symptômes ainsi produite est d'habitude fort complète. On la compare en séance avec les résultats d'enquêtes scientifiques sur le même sujet, autant pour mettre le groupe en confiance face à sa démarche que pour lui faire prendre conscience des limites qu'elle comporte.

Le formateur fait ensuite un exposé sur la structure, le fonctionnement de l'oeil et l'origine de la fatigue visuelle. Il insiste sur les contraintes imposées par l'éclairage et les propriétés des objets regardés. On retourne alors au travail en atelier. On demande aux participants de faire une liste des problèmes liés à l'éclairage, de même que de ceux qui sont liés i la visibilité sur l'écran, le clavier ou les documents qu'ils utilisent.

IL y a ensuite plénière sur les problèmes d'éclairage. On recueille l'information sur les aspects quantitatifs, dont on discute en traitant des normes d'édairement et de leur application. On considère ensuite les aspects plus qualitatifs de l'aménagement d'un système d'éclairage, de l'utilisation de l'éclairage naturel, de l'éclairage d'appoint.

On recueille ensuite les rapports verbaux sur les problèmes de visibilité. Organisés, systématisés par le formateur, ils permettent de traiter de la prévention des reflets et de l'éblouissement, de l'utilisation des filtres,

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de la taille des caractères, de la distance oeil-tâche et de sa contribution à la charge visuelle, etc. Des problèmes aux solutions, on aura ainsi fait le tour du travail visuel. Et l'on pourra passer à l'étude de l'aspect suivant.

N'entrons pas dans le détail. Mais disons qu'on aura recours aux mêmes méthodes éducatives. Le formateur fera une brève mise en situation. On procédera à du travail en atelier pour identifier des problèmes. Il y aura plénière pour la mise en commun de ces constats, pour leur analyse. Et il y aura des exposés et discussions pour mettre en relation les contraintes et les malaises, pour présenter les avenues de prévention. Et on couvrira ainsi les aspects posturaux et mentaux du travail à l'écran. Après quoi le formateur syndical prendra la relève, la dernière journée, pour traiter des modalités d'action des travailleurs sur leurs problèmes de santé et de sécurité au travail.

Cette session décrite, se pose la question de son évaluation. Il faut bien faire le point sur pareille activité, jauger son efficacité. Mais comment faire? La façon habituelle pour un professeur d'évaluer si ses enseignements fonctionnent, si ses élèves ont appris, consiste à faire passer un examen à ses étudiants. Voilà qui serait parfaitement inapproprié dans ce cas. L'objectif d'une session n'est pas d'augmenter le savoir académique individuel des participants, mais bien de les outiller collectivement pour qu'ils puissent contribuer à l'amélioration de leurs conditions de travail: un examen ne permet pas de vérifier si cet objectif a été atteint. Peut-on alors mesurer les initiatives des participants lors de leur retour dans leur milieu de travail? Ces actions sont soumises à tant de facteurs dans les relations de travail que leur mesure ne reflétera pas très spécifiquement l'effet de l'activité de formation.

Il faut donc se centrer sur la différence entré ce que les participants savaient de leurs conditions de travail avant et après la session. Et cette différence ne se limite pas à des aspects quantitatifs: il peut se produire des changements structurels, quant à la façon dont les travailleurs perçoivent la relation entre le travail et la santé, que j'ai eu l'occasion d'explorer avec des collègues ergonomes français (4). Ces réflexions nous ont amenés à mettre au point des méthodes d'évaluation qui se fondent sur l'étude de ce que disent les participants de leur travail et de leur santé pendant une session, et des éventuelles transformations dans leurs énoncés (S). Nous analysons les transcriptions d'enregistrements produits pendant des sessions; une grille d'analyse nous permet de qualifier les énoncés quant aux sujets traités et quant à l'état des connaissances qu'ils révèlent. Nous espérons que des comparaisons entre différents moments d'une session nous permettront de qualifier les changements que tous les observateurs et les formateurs

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remarquent dans la façon dont les participants traitent de travail et de santé.

La formation des travailleurs est donc un champ dans lequel les universitaires peuvent et doivent, à mon sens, s'investir plus avant. On y a besoin de leur expertise, on a besoin qu'ils participent à ce que l'on a appelé la mission de service à la collectivité des universités. C'est affaire de justice sociale que les travailleurs, bons payeurs de taxes, reçoivent quelque service plus direct de cette institution si lointaine qu'est l'université.

Evidemment la participation des universitaires demande une adaptation à cette nouvelle clientèle, mais c'est à mon sens un défi fort stimulant. Et pour tous ceux qui, ergonomes. sociologues, psychologues, andragogues, s'intéressent à l'apprentissage et à la structure du savoir et du savoir faire des travailleurs, s'ouvre un champ de recherche appliquée et utile dans lequel il m'apparait important de progresser.

Bibliographie

1.- Dejours, Ch... "Travail: usure mentale. Essai de psychopathologie du travail.'* Le Centurion* Paris, 1980.

2.- Blondin. M., "Une formation syndicale faite par les travailleurs eux-mêmes.1' Revue internationale d'action communautaire, 3/43:73-80,1980.

3.- Desnoyers, L.. "Analysing and improving VDU working conditions: workers' education." In B. Knave and P.G. Wide back (eds): "Work with display units 86", Elsevier Science Publishers, 1987, pp 655-664.

4.- Desnoyers. L.. Daniellou. F.. Laville. A.. Teiger. C. Davidson. J.G.. Guy. M.. "Les formations sur travail et santé. Réflexions sur la transformation des savoirs des travailleurs." Laboratoire d'ergonomie. Conservatoire national des arts et métiers, Paris 1986.

5.- Desnoyers. L., St-Onge. G., "Evaluating workers' knowledge and its transformations in occupational health workshops." Second international conference on education and training in occupational health. Helsinki, 1989.

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139

PRENDRE LE RISQUE DE PARTICIPER:

UN SECTEUR/ LE FORAGE AU DIAMANT

DOCUMENT PREPARE PAR:

DENISE PLAMONDON

OCTOBRE 89

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INTRODUCTION

Dans les années 1980, la santé et la sécurité aura fait un pas

de géant dans au moins un secteur, soit celui du forage au diamant.

Coïncidant avec l'entrée en vigueur de la Loi sur la santé et

la sécurité du travail, le développement des actions accréditives

a fait bondir les projets d'exploration minière dans l'ensemble du

Québec et particulièrement dans la région de l'Abitibi-

Témiscamingue et du Nouveau-Québec. En effet, il s'est produit une

telle ruée; vers l'or que l'on serait cru aux années du Klondike.

L'impact d'une telle activité, minière s'est traduit par

1 ' entrée dans le secteur du forage au diamant d ' un très grand

nombre d'entreprises, d1 un nombre encore plus considérable de

travailleurs.

Différents éléments nous incitent à approfondir davantage ce

secteur, soit le type d'équipement utilisé, les risques reliés à

son utilisation, la gestion des entreprises en santé et sécurité,

le genre de formation dispensée aux travailleurs, l'organisation

du travail et les mécanismes de prévention mis en placé.

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L'ensemble des efforts faits par les travailleurs et les

entrepreneurs du forage au diamant pour améliorer leurs conditions

de vie au travail m'a incitée à vous faire connaître davantage ce

secteur. Par ailleurs/ les résultats obtenus auprès des

manufacturiers pour améliorer la foreuse au diamant se doivent

d'être soulignés. Mais surtout/ il faut spécifier jusqu'à quel

point le rôle des comités de santé et de sécurité a été

déterminant.

J'aimerais d'abord vous faire un portrait du secteur de forage

au diamant, vous préciser 1'apport des travaillëurs et . de

l'employeur aux changements profonds èn santé et en sécurité du

travail de leur secteur, leur participation au fonctionnement du

comité de santé et de sécurité, malgré les contraintes reliées à

leurs conditions de travail.

1. Portrait du forage au diamant

Le forage au diamant est l'activité préliminaire à tout

développement minier. Les foreurs au diamant viendront

confirmer les anomalies géologiques qu'auront répérées les

prospecteurs miniers.

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Précurseurs, comme ces derniers, des grandes comme des petites

découvertes minières, leur travail n'en est pas moins

difficile et exigeant.

Présentement en Abitibi-Témiscamingue, l'activité de forage

est considérablement réduite, comme partout ailleurs au

Québec, dû & l'effondrement des marchés boursiers. Nais dans

la période 1980-88, pas moins de (100) entreprises de forage

oeuvraient au Québec De ce nombre, près de 75 %

concentraient leurs activités dans la seule région de

l'Abitibi-Témiscamingue. Une somme de 500 millions environ,

au cours de l'année (87) a été dépensée en travaux de forage.

Ces sommes phénoménales venant du programme d'actions

accréditives à favoriser l'éclosion d'un nombre considérablè

de projets miniers. En voici le détail:

Mines en production

Non de la mine: Compagnies:

First Canadian Resources Aur Bras d'Or Mines Belmoral Dumont Mines Belmoral Orion Malartic Hygrade Dumagami Mines Dumagami Bousquet 2 Minerais Lac Barvue Mines Abcourt

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Telbel Montauban Mobrun Pierre Beauchemin Casa-Berardi Est Casa-Berardi Ouest Francoeur Stratmin

Agnico-Eagle Explorations Musocho Ressources Audrey Cambior Ingo-Golden Knight Inco-Golden Knight Ressources Rouyn Stratmin

Mines en préparation

Nom de la mine:

Silidor . Pascalis Beauchastel Ans il

Compagnies:

Noranda, Cambior Cambior Exploration Augmitto Minnova inc.

Projets d'exploration avancés

Nom du projet Compagnies:

Eastmain McWatters Donalda-Deka Lamaque Duquesne Norlartic Joe Mann Est Mouska Peel Elder

Ressources MSV McAdam Resources Minnova Syngold Tundra Gold Ressources Radisson Ressources Aur Campbell Resources Cambior Ressources Aunore

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Nouvelles découvertes (projets)

NOB du projet: Compagnies

Louvem Grevet Lentille 1100 Lac Knife Golboro Dundee-Pallitzer Lac Pelletier Zone Lac Rouleau

Aur-Louvem VSM-Serem Ressources Audrey Mazarin Orex (K.E.) North American Rere Métal Falconbridge Falconbridge

A un certain moment, on dénombrait au-delà de (400) foreuses

sur le terrain. Plusieurs compagnies régionales ont émergé

extrarégionales a été important. Des foreurs de la Colombie-

grande aventure de recherche de métaux précieux, surtout l'or*

Le nombre des travailleurs est passé à 2 000, répartis ici et

là sur le territoire, convoitant des salaires de plus en plus

élevés, mais s1 exposant à de plus en plus dé risques• La

formation pour ces nouveaux travailleurs étaient inexistantes,

l'organisation de la prévention était précaire.

de ce "boom" Cependant, 1•apport des entreprises

Britannique comme du sud des Etats-Unis se sont joints à cette

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Les conditions de travail dans ces entreprises-champignons

contrastaient heureusement avec celles des entreprises

établies dans le forage depuis longtemps que ce soit dans

1'équipement, dans 1'environnement de travail, dans les

campements, dans la supervision , dans la présence d'un comité

de santé et sécurité. Passons ces éléments point par point.

L'équipement

La foreuse au diamant (diapo) est un ensemble imposant. La

tête de la foreuse, munie d'un train de tiges permet de percer le

sol à des profondeurs allant jusqu'à (300) mètres. Certaines

foreuses peuvent creuser des trous de près de (1000) mètres.

La foreuse est installée sur des rails permettant son

déplacement d'un endroit à un autre. Les sondages se font à partir

d'un patron ou d'un schéma déterminé selon les relevés magnétiques

antérieurs au forage.

La foreuse est actionnée par un moteur d'une puissance de

64 forces (moteur diesel FORD BBS-45) 2500 RPM. Un système de

poulies permet de manipuler les tiges vers le haut et de retirer

les "carottesn de minerai du sol.

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Celles-ci sont placées dans des boîtes conçues à cet effet.

Toutes ces composantes sont rassemblées sous un abri,

communément appelé "cabane de forage" d'environ 3 mètres par

3 mètres. Un petit poêle est installé pour réchauffer le lieu de

travail.

Une pompe est installée à proximité pour alimenter la foreuse

en eau.

Les risques reliés à la forëuse sont nombreux, que ce soit le

bruit, les fractures, les maux de dos, les chutes.

\

L'environnement de travail

Les foreurs au diamant travaillent par équipes de deux. Ils

oeuvrent sur un quart de travail de (8-12) heures.

Isolés dans des endroits hostiles, soit marécages, forêt dense

la plupart, du temps, ils doivent être munis d'un bon système de

communication* Ce n'est pas toujours le cas pour toutes les

entreprises.

Ils doivent se pourvoir d'eau potable et.de nourriture,

dépendant de la distance du campement pour toute la période de

forage qui varie de (5-25) jours selon les lieux de forage.

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Le transport vers le site de forage se fait en avion, en

"muskeg", en quatre roues ou à pied selon le cas.

Les campements

La planification des campements dépend beaucoup de la

philosophie de gestion des conditions de travail pour laquelle

l'entreprise a opté. On passe des campements organisés avec toutes

les. commodités jusqu'à des tentes dépourvues des conditions

hygiéniques élémentaires.

Par ailleurs, la planification des activités influencent le

type de campement choisi. Ainsi au lieu de déplacer les

travailleurs avec là foreuse, certaines compagnies ont opté pour

installer un campement permanent au milieu des opérations. Si la

fréquence des déplacements des campements est trop élevée,

plusieurs conditions minimales ne sont plus respectées, que ce soit

pour l'eau potable, la qualité de la nourriture et du logement.

Le rendement des travailleurs s'en ressent.

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La supervision

Dans un contexte ou le travail s'exécute dans des endroits

éloignés, difficiles d'accès et aussi mobile, la supervision est

problématique.

Certaines compagnies arrivent à superviser quotidiennement

leurs travailleurs, d'autres ne le . font même pas une seule fois

pendant un contrat.

Les fiches de contrôle pour l'entretien préventif existent

dans certaines entreprises. Dans d'autres les bris mécaniques

sont rapportés quand ils se produisent sans aucune autre forme de

prévention.

Pourtant, on retrouve des risques variés dont les conséquences

peuvent être graves et parfois fatales; risques de feux, de

brûlures, de ruptures de câbles, de chutes sur les échafauds,

échappements de gaz, risques d'être enroulé par les tiges de

forage, maux de dos, d'intoxication, de fractures lors du

déplacement de la foreuse, des chariots de tiges et de carottes et

autour de la cabane, enfin risque de surdité dû au bruit élevé de

la foreuse atteignant près de (102) dba.

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PRISE EN CHARGE PAR LES ENTREPRISES DE FORAGE

Depuis la première inspection de lieux de forage, faite par

ailleurs à la suite de circonstances tragiques, plusieurs des

risques énumérés plus haut ont pu être éliminés à la source, on en

voie d'être éliminés.

Des compagnies de forage comme St-Lambert, St-Gelais,

Philippon, Bradley et Frères, N. Morissette, Forage Moderne pour

ne nommer que celles-là ont entrepris avec leurs travailleurs un

changement profond des outils, des méthodes de travail, des

programmes de formation et de supervision. Ces entreprises ont

pris le leadership dans le forage au diamant, d'abord et avant tout

par leurs actions en prévention.

Ainsi, des comités de santé et de sécurité existent dans

toutes ces entreprises. Des réunions ont lieu mensuellement,

malgré la dispersion des représentants des travailleurs sur les

sites de forage.

Par ailleurs, des modifications profondes ont été apportées

d'abord au niveau de l'équipement et de la cabane de forage.

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Les boyaux d'alimentation en huile ont été entourés d'une

membrane, évitant ainsi les éclaboussures d'huile sur le

plancher de la cabane, gui est la cause de nombrèuses chutes

et de fractures; soustrayant les travailleurs à des incendies,

provoquées par le contact de l'huile sur le poêle installé

dans la cabane de forage.

Les moteurs de la foreuse ont été encastrés diminuant le bruit

auquel étaient soumis les travailleurs pendant tout le quart

de travail; différents matériaux ont été mis à l'épreuve, de

même que différents types d'aménagement. A cet égard, des

expertises de la compagnie Boyles de Toronto, en collaboration

avec les compagnies de forage et le bureau régional de la CSST

en Abitibi-Témiscamingue ont permis des changements

technologiques importants à la foreuse. En ce sens, une

communication a été faite au dernier congrès de l'Association

américaine d'hygiène industrielle. Les innovations sont les

suivantes.

(la réduction du bruit de 15 dba sur la foreuse. Celui-ci a

été rendu possible grâce à la conception d'un silencieux, de

type absorbant, ajouté au boyau de la foreuse.)

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3) Des matériaux isolants ont permis également la diminution du

bruit par l'impact sur les parois de la cabane des bruits de

foreuse. Différentes expertises ont été faite avec l'aide des

équipes locales de santé au travail et de la CSST.

4 ) Hais ce gui retient 1'attention, c'est 1'ensemble des

dispositifs de protection sur la foreuse elle-même, mis au

point par la compagnie Bradley et Frères. Cette entreprise

vient de se mériter le prix CSST dans la catégorie PME, pour

sa foreuse améliorée.

Cette entreprise, avec la participation de ses travailleurs

a présenté un ensemble de. modifications à la foreuse au

diamant, à quatre volets, soit:

• un garde protecteur ajustable sur la tête hydraulique y •

. un garde protecteur à la serre-tige hydraulique

. une manette d'ajustement pour le frein du treuil

• un grillage protecteur pour le câble du treuil

Ces innovations contribuent à rendre la foreuse beaucoup plus

sécuritaire, non seulement lors des opérations de forage mais aussi

à l'entretien de cet équipement.

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En effet, le garde protecteur ajustable soustrait le

travailleur au danger d'être happé par la tige en rotation et

d'être enroulé autour d'elle, ce qui occasionne la mort dans la

plupart des cas. Les autres dispositifs de protection mentionnés

préviennent aussi d'être happé ou de subir des fractures aux

membres. Le grillage protecteur, quant à'lui, constitue un écran

entre le travailleur et le câble du treuil, ce dernier étant

susceptible de casser et de frapper de plein fouet le visage du

foreur.

Témoins de nombreux accidents graves et mortels, les

travailleurs de ce secteur apprécient la valeur sans précédent de

ces innovations à la foreuse.

Deux travailleurs de chez Bradley & Frères ont

particulièrement contribué à développer ces mécanismes de

prévention des accidents: Lionel Goulet, contremaître, et Réjean

Bellerose, travailleur et co-président du comité de santé-sécurité

dans l'établissement. Cette paire d'amis n'en est pas à sa

première invention et en mijote déjà d'autres.

D'ailleurs, cette entreprise se fait remarquer par la qualité

des campements qu'elle met à la disposition de ses travailleurs.

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Elle a même* développé un type de logement dans, certains cas

supérieur & ce qu'exigent les normes.

Enfin, le comité de santé-sécurité de Bradley et Frères est

le 1 ieu d ' échanges très fructueux entre les représentants des

travailleurs et de l'employeur, afin d'améliorer constamment les

conditions de travail des foreurs.

5) Une deuxième sortie de secours a été systématiquement

construite dans les nouvelles cabanes.

Au niveau de la philosophie de gestion des entreprises de

forage, il faut mentionner les efforts considérables pour se

doter d'une structure de prévention.

D'abord plusieurs entreprises, dont celles mentionnées plus

haut, ont élaboré un programme de prévention et produisent une

mise à jour annuelle, à la suite des discussions au comité de

santé et de sécurité.

Ces entreprises ont embauché un préventionniste auquel elles

ont donné un pouvoir d'intervention sur 1'ensemble des

opérations.

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Quelques unes de ces entreprises ont produit un montage audio-

visuel d'information à leurs travailleurs sur la prévention

dans l'opération d'une foreuse au diamant.

Enfin des sessions de formàtion ont été intensifiées auprès

des contremaîtres afin de pallier aux nombreuses lacunes de

supervision observées chez les entreprises de forage au

diamant. Deux opérations ciblages de la CSST ont permis de

cerner davantage la hausse des accidents de travail et des

lésions professionnelles dans le secteur du forage au diamant.

Technologiquement, la foreuse constituée est le centre

d'intérêt pour des améliorations futures, notamment pour la

réduction du bruit.

Quant aux risques à la sécurité, certaines innovations, comme

celles apportées par Bradley & Frères, ne sont pas encore

appliquées à toutes les foreuses. Les manufacturiers devront

modifier leur équipement, en tenant compte de ces garde-

protecteurs . En attendant, c'est 1'action concertée des

entreprises et de leurs travailleurs qui permettront aux

anciens d'équipement d'être munis de ces dispositifs de

protection.

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CONCLUSION

Le comité de santé et de sécurité semble constituer une base

solide de prévention dans le secteur du forage au diamant pour

mener à terme le programme de prévention déposé par l'entreprise.

L'association paritaire dans le secteur minier accueille dans

ses rangs des représentants du secteur du forage au diamant. Cette

association peut fournir des services de formation et d'information

tant aux employeurs qu'aux travailleurs.

Mais ce qu'on observe avant tout c'est la volonté des

représentants des deux parties à faire avancer la prévention dans

le secteur. Les efforts faits par plusieurs entreprises sont

remarquables.

Il reste encore beaucoup à faire, comme en fait foi d'une

païrt, les statistiques que nous avons colligées pour les trois

dernières années...

D'autre part, la décroissance économique a amené la

disposition de nombreuses entreprises de forage, à forcer la fusion

d'un certain nombre.

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Enfin, les argents consacrés aux innovations technologiques sont

moins élevés.

Toutefois, la performance d'une entreprise comme Bradley et

Frères laissé voir que la prévention demeure une préoccupation pour

les travailleurs et les employeurs du forage au diamant.

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La prévention, ca rapporte!'

par: Michel Pérusse

Professeur au Département des Relations Industrielles et membre du GIROSST, Université Laval, et associé senior dé la firme Pérusse, Potvin. Fortin et Associés inc

Conférence prononcée au Colloque "L'heure juste en santé et sécurité du travail" de l'Association pour la Santé Publique du Québec, à Québec, les 9 et 10 novembre 19Ô9-

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Introduction On constate de plus en plus qu'un nombre sans cesse croissant

d'entreprises et d'organisations s'impliquent/organisent des activités et font état de leurs réalisations en matière de SST. On serait portés à croire qu'il y a à cela trois raisons principales: 1) le fait que la Loi sur la Santé et la Sécurité du Travail (L.S.S.T.) a maintenant près de 9 ans, et donc que les effets de ses pressions statutaires commencent à se faire sentir, 2) les coûts croissants des indemnisations pour lésions professionnelles; et .}) les pressions grandissantes des organisations représentant les travailleurs.

Bien sûr on ne peut pas nier que ces trois facteurs combinés expliquent une partie non négligeable des résultats positifs qu'on constate en matière de réduction des lésions professionnelles. Mais il y a à mon avis un autre facteur, moins publicisé celui-là, qui fait en sorte que la santé et la sécurité sont de plus en plus considérées comme des valeurs fondamentales dans les organisations. Ces dernières réalisent en effet que, par delà les incitatifs négatifs qui peuvent avoir comme malencontreux effet de rendre un sujet rébarbatif plutôt qu'attrayant, il y a des incitatifs positifs à s'occuper de SST. Ce sont ces incitatifs positifs, qui n'attirent pas, nécessairement l'attention au premier coup d'oeil, que je veux passer en revue aujourd'hui.

La rentabilité de la prévention Le premier, et sans doute le plus important, de ces incitatifs positifs

est. le fait que les bonnes mesures qu'on prend pour prévenir efficacement les lésions professionnelles s'avèrent en bout de ligne financièrement rentables. Une telle affirmation a de quoi surprendre C'est pourquoi je vais m'y arrêter quelques minutes pour i'étayer un peu.

Mais pour bien comprendre ce point, il convient de préciser quelques notions fondamentales à propos des coûts reliés aux accidents. Celui des coûts qui est le plus visible, sans doute à cause de l'avis de cotisation de la Commission de la Santé et de la Sécurité du Travail (C.S.S.T.), est le coût de l'indemnisation et de la réparation des lésions. Bien sûr les sommes concernées sont importantes. Elles représenteront plus d'un milliard de dollars cette année.

Plusieurs entreprises se concentrent sur ces sommes, car elles s'imaginent que ce sont les seuls coûts reliés aux accidents. En conséquence

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elles mettent sur pied des mesures administratives (assignation temporaire, demandes de révision ou d'appel/demande de reclassification ou de partage des coûts, etc.) qui ont pour but de faire diminuer leur cotisation. Ces mesures trouvent leur justification dans le fait qu'elles peuvent endiguer une hémorragie, donc améliorer la santé financière de l'entreprise. Cependant c'est une erreur de se concentrer sur ces seules mesures administratives pour régler le problème.

En effet, en règle générale les résultats de ces mesures ne sont pas récurrents. Ces mesures administratives équivalent à gérer la cotisation, pas à régler le problème, car on composé avec les conséquences plutôt qu'avec les causes. De plus, ces mesures ne traitent qu'un des aspects des coûts, et pas nécessairement le plus important De toute façon, avec la restructuration du mode de financement de la CSST et les tendances qui se dessinent dans la jurisprudence, certaines de ces mesures administratives sont appelées à perdre de leur importance.

Les coûts liés à l'indemnisation et à la réparation constituent ce qui s'appelle les coûts directs. Or il y a un large consensus pour reconnaître que les coûts indirects des accidents sont encore plus importants que les coûts directs. De quoi se composent ces coûts indirects? Il y a à ce sujet deux courants de pensée.

Le premier s'intéresse essentiellement aux coûts indirects des accidents avec blessure. Cette portion des coûts indirects inclut par exemple tout ce siui a trait au temps perdu ou improductif avant que les activités ne reprennent leur cours normal à la suite d'un accident, les coûts des démarches administratives liées au régime d'indemnisation et à l'enquête de l'accident, le bris d'équipement et la perte de matières premières ou de produit fini, les coûts de remplacement de la main d'oeuvre, et ainsi de suite. Un économiste de la CSST, M Jacques Cousin, a créé un formulaire qui permet à une entreprise de comptabiliser ces coûts indirects. Cela donne un ordre de grandeur: le formulaire compte trois pages! Quelques essais de ce formulaire, de même qu'une étude en cours présentement à l'Université de Montréal, tendent à indiquer que les accidents avec blessure entraînent environ un dollar de coûts indirects pour chaque dollar de coût direct.

Le deuxième courant de pensée implique un concept de coûts indirects encore plus large que le premier. En fait c'est le concept d'accident qui est plus large. Ce concept englobe tout événement hors de contrôle et qui se

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traduit, ou qui pourrait se traduire en pertes (humaines ou matérielles) pour l'entreprise. On ajoute ainsi aux coûts indirects toute une série de coûts qui ne sont pas forcément couverts dans la première approche. C'est dans ce contexte que certaines études américaines affirment que les coûts indirects équivalent à environ 3 à 5 fois les coûts directs. Ainsi,-pour une entreprise dont la facture d'indemnisation s'élève à $250,000, les coûts indirects seraient au minimum d'environ $750,000; la véritable facture totale des accidents serait donc de l'ordre du million de dollars.

La plus importante catégorie de coûts ainsi ajoutée est sans doute ce qu'on appelle les pertes matérielles accidentelles. Cette catégorie comporte toutes les pertes de matériaux, d'équipements, d'outils, de pièces, de produits finis et autres objets matériels qui sont- endommagés ou ruinés lors d'accidents, qu'il y ait eu blessure ou pas. Ces pertes matérielles accidentelles sont rarement comptabilisées séparément, même lorsque l'accident a entraîné une blessure. A plus forte raison lorsqu'il s'agit de ce qu'on appelle parfois un incident, i.e. lorsqu'il n'y a pas eu de blessure.

Si les chiffres avancés par l'International Loss Control Institute sont exacts, et ils sont susceptibles de l'être, pour chaque accident avec blessure il y aurait 30 accidents n'entraînant que des pertes matérielles. Des études réalisées au sein de certaines entreprises révèlent des, coûts énormes. Par exemple, l'une d'elles laisse entrevoir que chaque accident avec pertes matérielles coûte en moyenne $500. C'est donc dire que, si une entreprise a vu ô de ses travailleurs blessés dans une année, elle est susceptible d'avoir encouru également des pertes matérielles accidentelles de l'ordre de $120,000.

Dans une autre étude on a réalisé que les pertes matérielles représentaient environ 5 fois le montant des cotisations versées à la CSST. Ainsi, pour une facture CSST de $100,000 il y aurait en parallèle des pertes matérielles d'environ $500,000. Et cela ne comprend pas le coût de la main-d'oeuvre qui effectue les réparations ou les remplacements! Une étude assez rigoureuse a permis d'entrevoir que les seules pertes matérielles accidentelles constitueraient environ 20% du budget total d'entretien et de maintenance.

On ne voit pratiquement jamais une entreprise créer, dans son bilan financier, un poste budgétaire intitulé "coûts des accidents", poste auquel seraient imputées les sommes versées en indemnisation bien sûr, mais aussi

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les montants des pertes matérielles accidentelles et autres portions d'autres postes budgétaires (recrutement, sélection, formation, travail clérical, etc.) attribuables aux accidents. Si une entreprise le faisait, cependant, on estime que ce poste budgétaire représenterait le deuxième plus gros coût de production, précédé seulement par la masse salariale. Leis coûts totaux des accidents pourraient, dans certains cas, représenter l'équivalent de 20% des profits nets avant impots. Certaines entreprises ont également calculé que les profits des ventes des 10 premières semaines de l'année allaient à combler les pertes dûes aux accidents.

Dans une très grande entreprise étrangère où j'interviens depuis maintenant un peu plus de deux ans, je leur mentionnais à l'occasion d'un séminaire que, en utilisant diverses méthodes de calcul basées sur les quelques indicateurs que nous révèle la littérature spécialisée, selon l'estimé le plus conservateur la facture totale de leurs accidents pour l'année 1906 s'élevait au moins à $42 millions de dollars américains. Croyant à une bonne blague de ma part, ils ont commencé à établir un premier bilan comptable. Ils ont calculé les coûts seulement des dommages matériels et seulement des 7 accidents les plus graves. Ils ont arrêté de compter à $3 5 millions; ils n'avaient pas encore chiffré la kyrielle d'autres accidents avec pertes matérielles, ni inclus leur facture d'indemnisation, ni les nombreux autres points qui constituent les autres coûts indirects. Ils ont facilement compris qu'ils gaspillaient annuellement le montant qu'ils n'arrivaient pas à trouver pour construire leur usine de pièces de rechange.

Alarmiste, tout, ça? Pas vraiment C'est parce qu'elles en sont venues à de tels constats que des entreprises de plus en plus nombreuses ont commencé à faire sérieusement de la prévention. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, certaines ont même vu là une planche de salut au plus fort de la récession au début des années '00. Elles sè sont dit que les accidents étaient un "luxe" qu'elles ne pouvaient plus se permettre. Dans un contexte économique difficile, alors que les coûts totaux des accidents représentaient des sommes énormes en pures pertes, elles n'avaient plus le choix. Si; avec des changements majeurs dans l'environnement économique comme le traité de libre-échange avec les Etats-Unis, la loi du "survival of the fittest" s'applique, les mêmes conditions peuvent prévaloir à nouveau.

Je reviens brièvement à un point que je mentionnais tout à l'heure. L'utilisation des recours prévus par la Loi sur les Accidents de Travail et les

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Maladies Professionnelles (L.A.T.M.P.) et les mesures à caractère administratif comme l'assignation temporaire ne sert qu'à juguler les coûts directs, et encore seulement une partie des coûts directs. Les demandes de reclassification à la C.S.S.T. n'ont, jamais eu d'effets bénéfiques sur le budget du département de la maintenance ou sur le pourcentage de matière première qui devient effectivement produit fini.

C'est ici qu'entrent en jeu les mesures préventives. Seule une application rigoureuse et systématique de ces dernières produit des résultats tangibles non seulement en termes de réduction effective des lésions professionnelles, mais aussi par la diminution des coûts de production. Deux exemples suffiront à illustrer mon propos.

Dans une entreprisé du secteur agro-alimentaire, l'acheminement des porcs vers l'abattage présentait de nombreux problèmes de sécurité pour les employés. La solution fut l'installation d'une barrière mobile actionnée par poulie et manivelle. Bien sûr les chutes dans l'enclos, les blessures infligées par les porcs ou liées à l'utilisation des bâtons électriques ont complètement disparu. Mais on a de plus constaté que la cadence d'abattage a augmenté, et que le pourcentage de viande qui rencontre les critères de qualité des clients étrangers est passé de 05 à 95S.

Dans une autre entreprise, qui fabrique des produits en acier, des modifications avaient été réclamées à une table de montage pour la rendre plus sécuritaire. La compagnie n'a pas acquiescé de bon coeur à ces demandes mais les a tout de même réalisées. Elle a constaté que, en plus d'être beaucoup moins dangereuse, la table de montage permet de produire 25* de plus. Alors que l'entreprise pensait devoir investir $325,000 pour l'achat d'une table . additionnelle car l'autre ne suffisait plus, cet investissement n'est plus nécessaire.

Les exemples de ce type abondent. L'installation d'un nouveau dispositif d'alimentation a réduit les blessures aux mains et augmente le nombre horaire de pièces produites. L'installation d'un, couvercle sur un bain de dégraissage a non seulement réduit l'exposition aux vapeurs nocives, du solvant, mais fait également économiser deux barils de solvant par mois. Et ainsi de suite. Au fur et à mesure que de tels exemples s'accumulent, on dresse les constats suivants. Premièrement, les bonnes mesures préventives, généralement initiées d'abord pour corriger des problèmes de sécurité, ont souvent des retombées bénéfiques sur le volume de production.

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Deuxièmement, la liste s'allonge tous les jours: des bonnes mesures préventives qui ont aussi eu des impacts positifs sur la qualité des biens ou services produits. En conséquence, donc, elles sont ties nombreuses les. mesures préventives qui se sont amorties toutes seules, parfois même à court terme.

Je viens de souligner un lien entre prévention des accidents et qualité du produit. Ce lien est trop souvent ignoré, par beaucoup d'entreprises. Il est maintenant à la mode de parler de qualité. Sans doute alléchées par les succès japonais, plusieurs entreprises se lancent dans des programmes de qualité totale. Mais si ces mêmes entreprises ne sont pas prêtes à régler leurs problèmes d'accidents, elles ne sont pas prêtes pour la qualité totale. La Nippon Steel Corporation a fait un relevé des quelque 2 0,000 problèmes réglés par ses groupes d'amélioration de la qualité sur une période de 10 ans. Environ 30 % de ces problèmes ont été abordés d'abord pour des raisons de production, mais il est intéressant de constater que près du quart (22,7$) concernaient d'abord la sécurité. Il semble donc que la qualité totale passe, environ pour un quart., par la sécurité!

C'est un peu tout ça auquel on fait référence quand on parle de la . rentabilité de la prévention. Mais il convient ici d'apporter deux précisions. Premièrement, les propos qui précèdent sous-entendent qu'il est possible d'éliminer tous les accidents. Et effectivement tous les accidents sont ëvitables. Il s'ensuit donc que l'objectif "zéro accident" est atteignable, même si certains peuvent le considérer utopique. Il y a des entreprises, qu'on cite en exemple un peu partout dans le monde, qui y parviennent. Ce qui est utopique, cependant, c'est de penser qu'on peut y arriver à court terme, sans un effort soutenu, sans en faire un objectif corporatif aussi important que les autres.

Deuxièmement, pour atteindre un tel objectif, on doit apprendre à véritablement gérer la sécurité et pas seulement les dossiers de réclamation. Je fais référence à la prévention efficace, aux bonnes mesures préventives, à ces mesures qui font disparaître le problème pour de bon et qui l'empêchent de réapparaître. L'expérience démontre que la protection individuelle est un palliatif, une mesure provisoire qui atténue le problème sans le régler et qui parfois même en introduit un autre.

Il est toujours risqué de donner des "recettes de succès". Mais il semble qu'il y ait quelques conditions essentielles pour parvenir aux

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résultats décrits ci-haut. Un nombre croissant d'études soulignent entre autres l'implication active de la direction, l'intégration de la prévention à la ligne hiérarchique et aux activités courantes de l'entreprise. Lorsque de telles conditions sont remplies, on voit non seulement les lésions professionnelles diminuer, mais l'état de santé général de l'entreprise s'améliorer. Et cela à cause des autres impacts bénéfiques de la prévention.

Les autres retombées positives de la prévention Car lorsqu'on apprend à gérer la sécurité, on est surpris de constater

qu'il y a de nombreux autres "bénéfices marginaux" qu'on ne suspectait même pas. Je n'ai pas la prétention d'en faire un bilan exhaustif, mais j'aimerais passer en revue les quelques-uns qui m'apparaissent les plus significatifs.

Une équipe de chercheurs du National Institue of Occupational Safety ànd Health (N.I.O.S.H.) aux Etats-Unis a réalisé une étude qui constate que ce sont les entreprises avec les meilleurs bilans de sécurité qui ont également la meilleure stabilité de main d'oeuvre. Ces chercheurs croient qu'un nombre élevé d'accidents incite les travailleurs à se trouver un autre emploi, et inversement qu'on n'est pas portés à quitter une entreprise sécuritaire. En d'autres mots, ce sont, les entreprises qui ont la réputation de bien traiter leur personnel, entre autres en le protégeant contre les accidents, qui attirent ou réussissent à retenir une main d'oeuvre compétente. Ce constat est: appelé à prendre de plus en plus d'importance pour deux raisons.

Premièrement, de plus en plus d'entreprises et d'organisations prennent des virages technologiques (robotisation, mécanisation, automatisation, informatisation, etc.) qui ont un double effet: ou bien on réussit à produire davantage avec le même personnel, ou bien on réussit à produire autant sans devoir augmenter les effectifs. Les effectifs qui demeurent deviennent de plus en plus spécialisés, de plus en plus difficiles à remplacer, de plus.en plus précieux pour l'entreprise.

Deuxièmement, la population du Québec vieillit. C'est un phénomène démographique bien connu. Or lai demande de biens et de services ne diminue pas nécessairement. Au contraire, la demande augmente dans certains secteurs. Dans les années qui viennent il y aura de moins en moins de monde pour répondre à la demande. Que ce soit à cause des virages technologiques ou à cause de vieillissement de la population, les entreprises

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pourront de moins en moins se permettre le luxe de voir partir leur main d'oeuvre ou de se priver de ses services à cause des lésions professionnelles. Il s'agit là sans doute d'une forme de rentabilité sociale, mais elle a aussi des incidences économiques très importantes pour les organisations.

Une autre retombée positive qu'on découvre progressivement à la gestion de la prévention vient du phénomène de généralisation. Je m'explique. Depuis quelques années on voit se développer des modèles qui appliquent à la prévention des approches assez classiques tirées du domaine du management. Ces modèles servent de plus en plus lors de la formation des gestionnaires en matière de prévention. Lorsque cette formation est bien faite, ces gestionnaires développent des habiletés de gestion de la prévention (gestion du temps, résolution de problèmes, fixation d'objectifs et de priorités, etc.) qu'on les voit de plus en plus transposer à d'autres aspects de leur gestion courante. En apprenant à gérer la prévention, ils apprennent en même temps à mieux gérer globalement. Suite à certaines sessions de formation de ce type en industrie, j'ai eu l'occasion de voir des contremaîtres et des surintendants se comporter un peu plus comme des gestionnaires et un peu moins comme des exécutants gradés. Le rendement global s'en ressent positivement. J'ai toute une collection d'anecdotes concernant dés gestionnaires qui ont pu résoudre toutes sortes de problèmes non reliés à la sécurité en appliquant des principes, méthodes ou outils qu'ils avaient appris par l'entremise de la gestion de la sécurité.

Quand on y réfléchit bien, cela n'est pas tellement surprenant. En effet, rapproche globale elle-même et. plusieurs des outils qu'on utilise sont en fait des transpositions au domaine de la prévention d'outils de gestion assez connus. Par exemple, ce qu'on appelle le schéma de la démarche préventive, et certaines des méthodes d'analyse des accidents, sont des applications concrètes de la démarche de résolution de problème, un a vu des gestionnaires de la ligne hiérarchique se servir de ce qu'ils avaient appris en analyse d'accident pour résoudre des problèmes de gaspil de matières premières, de volume ou de qualité de production, de bris mécaniques ou d'arrêts de production.

Je pourrais continuer en citant d'autres retombées positives: amélioration de l'image de la compagnie, du climat de travail et du moral des troupes, commercialisation et mise en marché de dispositifs inventés à des fins de sécurité, publicité gratuite lorsque les réalisations de l'entreprise sont

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citées en exemple, et ainsi de suite. C'est, tout un ensemble de petites (et parfois pas si petites!) choses qui finissent par se traduire en bout de ligne en améliorations de la santé financière et globale de l'entreprise. Je suis persuadé que plusieurs des personnes présentes aujourd'hui pourraient apporter leurs propres exemples pour illustrer ce que je viens de raconter, je serais d'ailleurs très heureux que vous me fassiez part de ces faits vécus.

Réussira-t-on jamais à chiffrer précisément toutes ces retombées positives? j'en doute. Mais j'espère en avoir assez dit pour bien appuyer mon argument à l'effet que s'occuper de santé et de sécurité du travail ne devrait pas être perçu comme une contrainte. Il y va de l'intérêt de tout le monde. -

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UIOVD FAT.COICTC

AFL-CIO-CLC

ILGWU QERALD ROY JÉSUS FALCON PttsMent — President Vfce-prtettent - Vice President

CONSEIL CONJOINT QUÉBÉCOIS 167 DE

L'UNION INTERNATIONALE DES OUVRIERS ET OUVRIÈRES DU VÊTEMENT POUR DAMES (FAT-COI-CTC)

QUEBEC JOINT COUNCIL of the'

INTERNATIONAL LADIES* GARMENT WORKERS' UNION (AFL-CIO-CLC)

ADAPTER NOTRE MIlilEU DE' TRAVAIL . A^NOUS^Ï-NON NOUS S 1 ADAPTER 'AU MILIEU DE TRAVAIL

Bonjour/ L:'- ' ' ' Je très heureusè d'être loi aujourd'hui ; potir échanger

avec vous s u * t i e n t . ^ïc^Ôreinent & coeur «La SantÉ-Sêçi^^'au" Travail».1 ' "

Malgré que souvent, on a pu dire/Y on retrouve beaucoup de lésions professionnelles/ dans ,1e secteur du vêtements, et je peux vous dire qu'il ne a1 agit pas uniquement de piqûre,d'aiguille.

Ayant travaillé mçi~même dans un atelier de confection de vêtements pendant. 12 ans comme opératrice de machine a coudre et 4 ans cbnrae, représentante syndicale oû j'ai & défendre constamment, dee travailleuses victimes de lésions professionnelles, jèrconnais bien l'industrie du vêtament et ses problèmes en matière de santé-sécurité au travail.

'w *

- •

Avant d'aller plus loin, 11 m'apparaît important de vous brosser un bref protrait de ce qu'est L'industrie du vêtement.

L'induBtrie est, comprise majoritairement 4e femmes et souvent de races e t f a i ^ ^ <tf fférëntes; sç^ent, de mentali-té différente et de;'iàx#ùeè àiffÔreii^f?^ ae qui; parfois rend la communication cliffioile.

9275 Clark/Suite 200, Montréal, Québec H2N 2K3 ^ 9275 Clark Street, Suite 200, Montreal, Quebec H2N 2K3 Tél. : 381-4692

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Les ateliers dé ; couture,communément appelés, sont souvent dans des vieùx édifices mal congus. On peut ouvrir un atelier & pe^près partout. On peut aussi, facilement déménager;4!'un loaal-ft L'autre.

Tout ceci pour vous expliquer dans, quel contexte le6 travailleuses dù vétWënt. se retrouvent.

Lorsqu'une opératrice arrive dans un atelier, on l'installe â une machine â coudre et on lui explique le travail qu'elle a à faire. Comme o1est de.la production qu'on vend, dans le secteur du vêtement/ on ne perd pas de temps & autre chose*

Généralement rSnumÔrée au rendement, la travailleuse sacrifie sa posture de travail au détriment-de la production Quand on regarde travailler'uneopératrice :sursa machine, on voit dans 75% :des cas, une -travailleuse .assise sur le bout de sa chaise, le dos courbé vers l'avant, souvent de biais.à' la machine, les bra? non-appuyés.

Après 3-10-15-20 années de travail dans cette posture, les travailleuses se retrouvent avec des maux de dos, douleurs au cou, aux épaules, lésions qui souvent demeurent permanentes et les empêchent de reprendre leur travail, et même faire leurs travaux ménagers.

Certains médecins encore aujourd'hui,; tente de faire" croire qué pour une oçSratrice c'est normald'avoirinal au dos, avec l'âge."; , '

75% des lésions dans le secteur du vêtement sont dûs a des maladies professionnelles, naturellement pas toutes reconnues, souvent.pas déclarées•

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Ces lésions sont causée par une mauvaise posture dû à une mauvaise conception du poste de travail»,

A l'U.I.O.V.D., il a d'abord fallu faire du travail de sensibilisation auprès de nos membres, pourx

1) leur démontrer que contrairement See qu'on a pu leur dira r c e n fest pas normal d'avoir mal au dos p o ^ ime opératrice. •

2) qu'elles n1avaient pas fi se sentircoupables parce qu'elles avalent mal aù^dos;| au cou pu aux épaules.

3) Que c'est spri poste de travail qu'il fallait corrigé et non pas elles.

Ce travail de sensibilisation, auprès de nos menibre s'est fait en grande partie avec le service d'éducation à l'U.l.o.V.D. et ensuite avec la formation d'une association paritaire.en.santé-sécurité au travail, dans le secteur de l'habillement, ce qui a permis de commencer à sensibiliser certains employeurs aux-problèmes de ôâHté-sécurité.

Tout ce travail & commencé, ft porter ses fruits.

Dans certains atelierB, les travailleuses ont commencé 5 penser "prévention"1. Des comité santé-sécurité se pont f o r m é s . . .

Dans un atelier de la Beauoe, entre autre, des travailleuses- qui.'commençaient à se plaindre de maux de dos, douleurs aux épaules, & la fin de la journée de travail, ont décidé d'y voir avant que cela ne s'aggrave.

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Elles ont décidé que ce ne serait plus elles qui s'adapteraient au poste de.travail et qu'on devrait adapter leur poste & elles. Les solutions, elles les avaient et n'étaient pas coûteuses. .11 suffisait d'y consacrer seulement: un peu de temps et de les écouter.

1) ajustement de la hauteur de la machine en .. fonction .de leur grandeur;

2) ajustement du pédalier.de façon à.pouvoir avancer leur chaise plus pr&a de leur table.de travail;

3) garde pour les.aiguilles?

4) accoudoir pour les coudes? 5) les paquets de vêtements plus petits.

Suite a ces simples ajustements du poflfce de travail, cela a eu pour effet.de faire disparaître»les douleurs & la fin de la. journée .-de travail...de *ces travailleuses.

Celles-ci sont conscientes que ce n'est pas suffisant et qu'il faut faire davantage.

Le comité santé-sécurité de l'usine a d'ailleurs demandé à 11 association paritaire en santé-sécurité dû secteur, de l'habillement, une étude ergonomique de plusieurs postes dé travail, afin d'améliorer davantage la conception du poste afin d'éliminer le plus possible de lésions professionnelles, ce qui .d'ailleurs est en marche. Suite à leur expérience, lés travailleuses ont compris l'importance de la prévention. -

Le travail est loin d'être terminées l'U.1,0,V.D. On doit continuer•notre;travail -e sensibilisation auprès de nos. membres afin qua oeux-ci prennent;consqiènoë que leur eantô-sôcurité au travail n'a pas de prix et que la prévention ça rapporte.

Merci de votre attention.

Nicole BernÔche - Représentante syndicale

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COLLOQUE: L'HEURE JUSTE EN SANTE-SECURITE AU TPAVAIL L'ASSOCIATION POUR LA SANTE PUBLIQUE DU QUEBEC

* Québec, le 9 novembre 1989

ATELIER: LE MEDECIN RESPONSABLE: VISICN D'UNE GRANDE ENTREPRISE

Michel Guillemette, M.D. Directeur des services médicaux PRODUITS FORESTIERS CANADIEN PACIFIQUE LTEE

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LE MEDECIN RESPONSABLE VIS-A-VIS UNE GROSSE ENTREPRISE

J'ai choisi de parler de ma vision... du médecin responsable, c'est-à-dire d'un regard jeté sous différents angles sur ce pauvre médecin responsable, à partir de l'éclairage fourni par notre Bible à tous, notre livre de chevet, la Loi. La loi, c'est le cadre dans lequel nous placerons tout à l'heure notre image. Le malheur avec les lois, c'est que chacun essaie d'y trouver son compte, chacun essaie de s'y reconnaître, de les considérer à travers le prisme de son expérience, de son...j'allais dire de son vécu, disons, de son analyse personnelle des choses de la vie. Je n'échappe sans doute pas à cette règle, moi non plus. Mon interprétation de la loi, puisque c'est de celà qu'il s'agit, a au moins le mérite, je pense, de coller au concept énoncé par le législateur.

On a dit de cette loi qu'elle est avant-gardiste, et même révolutionnaire. Ceux et celles qui n'ont jairais oeuvré dans le cadre de l'entreprise privée ne peuvent pas s'imaginer à quel point ça l'est. Il est peut-être exagéré de comparer les philosophies "respectives des entreprises publiques et privées à la différence qu'il peut y avoir entre la Terre et la planète Mars: il faut tout de même se rendre conpte qu'à la différence du réseau public, dont la survie est assurée de par son caractère de nécessité, l'entreprise privée, elle, est aléatoire de par sa nature même. Bien que ses préoccupations de survie soient inversement proportionnelles au montant de ses profits, ces préoccupations restent néanmoins toujours présentes, prêtes à se manifester dans les temps difficiles, comme au début de la décennie '80. Nous revivrons sans doute, qoiqu'à un moindre degré, la même situation dans le contexte du libre-échange. Vous* vous demandez sans doute ce que cet exposé sur l'entreprise privée vient faire dans le sujet que nous débattons aujourd'hui. J'y arrive... Il m'apparaît essentiel d'en parler, parce que mon expérience me dit que ces réalités n'en sont pas pour tout le monde. Une entreprise compétitive est une entreprise prospère et viable. Une entreprise qui ne l'est pas agonise et éventuellement meurt. C'est la dure loi du marché. C'est ainsi, par exemple, que le choix d'une norme réglementaire touchant à la concentration d'un contaminant dans le milieu ambiant doit tenir compte des normes en vigueur dans le même

•«Vous» dans le texte réfère aux intervenants en santé au travail du réseau public.

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secteur industriel sur un marché donné. Pour une entreprise québécoise, ce sont les normes en vigueur en Amérique du Nord qui doivent servir de cadre à toute réglementation. Toute déviation excessive à ce principe entraîne une augmentation réelle iirmédiate des coûts de production reliés à une baisse de la compétitivité sur les marchés. Les diminutions éventuelles des coûts de production reliées à une baisse des réclamations pour maladies professionnelles doivent être, dans ce contexte, tout aussi réelles, et non pas simplement théoriques. C'est le principe universel du retour sur l'investissement qui s'applique. Scandale, diront certains? blasphème, diront d'autres. Comment peut-on parler de questions économiques lorsque la santé des travailleurs en dépend? La réponse est dans la loi, à l'article 2, que l'on cite, souvent en'le tronquant de son deuxième alinéa. Je le cite dans son entier: 1er alinéa: «La présente loi a pour objet l'élimination à la source mène

des dangers pour la santé, la sécurité et l'intégrité physique des travailleurs.»

2e alinéa: «Elle établit les mécanismes de participation des travailleurs et de leurs associations, ainsi que des employeurs et de leurs associations à la réalisation de cet objet.»

Réduction à la source, donc, dans le respect de l'équilibre qui s'est établi dans l'entreprise entre les 2 partenaires à la production de biens et de services, les travailleurs et leurs associations, ainsi que les employeurs et leurs associations. C'est le milieu qui se prend en main, et non pas le réseau public qui prend le milieu en main. La nuance est de taille. Je fais partie de ce milieu. Pas vous. Je suis un des 2 principaux partenaires. Pas vous. Les Associations Sectorielles Paritaires font partie de ce milieu. Les sept rtembres patronnaux du C.A. de la CSST, et les sept membres syndicaux du C.A. de la CSST font partie de ce milieu. Pas vous.. Quand on a compris ce principe, on se sent bien. On n'a plus de frustrations, on ne se sent pas rejeté, on a ccnpris que son rôle en est un de support, d'appui aux efforts du milieu à prendre sa santé et sa sécurité en main. On est un outil mis à la disposition des 2 partenaires pour ces fins par le législateur. Ce n'est rien d'autre, mais c'est déjà beaucoup.

1ère dimension donc (je reviens à mon thème original de «vision») : Le milieu de travail, l'entreprise, est souverain dans ses décisions et maître de sa destinée (dans les limites, évidemment, des lois et des règlements* qui la régissent). La réduction à la source, l'objectif *Le processus mâne de réglementation est aussi un processus paritaire.

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ultime de la loi, se fera par la prise en charge de la santé et de la sécurité au travail par les 2 principaux partenaires, ou ne se fera pas.

Cette préoccupation de la prise en charge de la SST par les partenaires se reflète sur un certain nombre d'éléments contenus à la loi. Celle-ci subordonne entre autres le médecin responsable non pas aux politiques du ministère, non pas aux politiques de gestion interne du D.S.C., non pas aux politiques de gestion interne du C.L.S.C., mais au Ccmité de santé et de sécurité. Les grandes orientations elles aussi, sont définies de façon paritaire par le C.A. de la C.S.S.T., formé à parts égales de représentants de 1 'employeur et des travailleurs. J'insiste: à parts égales.

Voyons d'ailleurs ce que dit la loi à ce sujet, à l'article 78. 1) Le Comité de santé-sécurité choisit le médecin responsable Il doit donc y avoir un choix entre plusieurs médecins. La politique actuelle de plusieurs D.S.C. d'investir sur la formation d'un seul médecin m'apparaît aberrante au plan de la logique. D'une part, en effet, il ne faut pas se surprendre de l'impact, disons, mitigé, d'un médecin responsable imposé par le D.S.C. parce qu'il est le seul sur les rangs: au mieux, il sera toléré, au pire, ignoré, à l'extraie: contesté. D'autre part, qu'arrivera-t-il si l'une ou l'autre des parties au C.S.S. (ou les deux parties ensemble, ça c'est déjà vu) ne veut plus avoir affaire au médecin responsable à l'expiration de son mandat, pour différentes raisons? Qu'arrivera-t-il si toutes les entreprises qui ont fait affaire avec ce médecin responsable n'en veulent plus, et qu'il n'y a personne d'autre sur les rangs?

Etait-ce celà la volonté du législateur?.

2) Le Ccmité de santé-sécurité approuve le progranme de santé Les 2 partenaires au C.S.S. ont donc le droit de discuter du programme de santé, d'en rejeter certains éléments, de le remanier, de renvoyer le médecin responsable à ses devoirs. Le milieu est souverain. C'est tellement vrai, que le médecin responsable n'intervient plus lorsqu'il y a désaccord entre les 2 parties. Il se retire du dossier:

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«En cas de désaccord au sein du comité de santé et de sécurité quant aux décisions que celui-ci doit prendre conformèrent aux paragraphes 1° à 4° de l'article 78, les représentants des travailleurs adressent par écrit leurs reccranandaticns aux représentants des employeurs qui sont tenus d'y répondre par écrit en expliquant les points de désaccord. Si le litige persiste, il peut être soumis par l'une ou l'autre des parties à la Carmission dont la décision est exécutoire.» (Art. 79, L.S.S.T.)

Est-il nécessaire d'ajouter à ce moment-ci que ies préjugés ou jugertents de valeur portés à l'encontre de l'une des parties (habituellement contre l'employeur) par les intervenants du réseau public n'ajoutent rien au débat et qu'au contraire, elles le compliquent inutilement? Le milieu est en équilibre, carme je vous l'ai déjà dit. Il obéit a ses propres règles, et n'a pas de compte à vous rendre. 2e dimension: Le médecin responsable répond au C.S.S., et à personne d'autre.

C'est volontairement que j'escamote certaines nuances ici. Bien évidemment, le médecin responsable doit respecter son code de déontologie professionnelle, et doit fournir un rapport d'activités à un certain nombre de personnes ou d'institutions. J'ajouterai aussi que n'importe lequel médecin, s'il est accrédité par le C.M.D.C.H., peut être inscrit sur la liste de médecins à être soumise au C.S.S. . Il n'a pas à être eirployé du D.S.C. ou du C.L.S.C. Il peut opérer un cabinet privé, ou oeuvrer dans le domaine à 11 emploi du même employeur ou d'un autre. La notion d'équipe de santé au travail exclut à priori le médecin responsable. La loi est dure, mais c'est la loi. Son action, par ailleurs, est une action médicale. Les éléments de l'article 113 doivent être interprétés à la lumière d'une approche médicale à la solution, des problèmes qui se posent en milieu de travail. Si on avait voulu, par exemple, qu'il concentre ses efforts sur la réduction des dangers à la source, ce n'est pas à un médecin, mais bien à un ingénieur responsable (qui aurait été choisi lui aussi, par le C.S.S.) qu'on aurait confié la tâche d'élaborer un programme de santé. De même, si l'on avait voulu ramener la santé au travail à la seule dimension des normes relatives à la présence d'un contaminant dans le milieu, c'est à un hygiéniste industriel responsable (choisi, lui aussi)

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qu'on aurait confié cette tâche. Il en va de même de l'infirmière: si on avait voulu confiner le progranme de santé aux dimensions d ' une grille ou d'un algorythme élaborés ailleurs, «en haut lieu», c'est à une infirmière responsable (choisie, inutile de le dire) qu'on aurait confié la problématique du progranme de santé. Je ne retrouve nulle part le non de ces professionnels dans la loi. C'est à un médecin que la loi a confié ce rôle, parce que le législateur a considéré que lui seul était capable d'intégrer ces données et de formuler un jugement, une opinion sur une situation donnée, et que cette opinion n'avait pas à se limiter à un protocole précis, exactement canne dans la pratique médicale de tous les jours. Je n'ai rien personnellement contre les hygiénistes, les ingénieurs ou les infirmières, ou contre la notion d'équipe de santé comme telle? ce que je dis, c'est que ces professionnels jouent un rôle de second plan eu égard au rôle prépondérant joué par le médecin responsable. Rappelez-vous ce que j'ai énoncé tout-à-l'heure: seul le médecin est choisi, et il répond seul de ses activités auprès du C.S.S. Tout passe par lui. Lui seul risque sa tête. Il est donc normal qu'il soit le leader de l'équipe. Vous avez le droit de ne pas être d'accord: si tel est le cas, je vous dis que votre place est ailleurs. 3e dimension: L'équipe de santé au travail n'existe que par et pour le médecin responsable, d'où qu'il provienne.

J'ajouterai une quatrième dimension avant de terminer. C'est celle de la crédibilité. Je serais bien en peine de vous expliquer. ce que c'est. Je peux vous dire ce que ce n'est pas: - Ce n'est pas le titre. Ce n'est pas parce qu'on s'appelle médecin responsable qu'on est crédible auprès des 2 partenaires au C.S.S. Ce n'est mime pas parce qu'on porte le titre de médecin. Ce serait même un handicap dans certains milieux, tant syndicaux que patronaux. - Ce n'est pas en devenant le vassal d'une ou de l'autre partie au C.S.S. qu'on devient crédible. Ce serait plutôt le contraire, même pour la partie à laquelle on veut plaire à tout prix.

Exemple: La dimension compensation: - Relève depuis la réforme de 1985 du médecin traitant. - Soulève en fait la même problématique, à l'inverse, de celle

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qu'on reprochait autrefois, à tort ou à raison, au médecin gestionnaire.

- Remet en question la crédibilité des intervenants auprès des deux parties en cas d'erreur dans un sens ou dans l'autre.

Etre crédible, c'est être efficace. C'est mettre ses culottes de temps en temps face à l'une ou à l'autre partie (pas toujours la même, évidemment). Etre crédible, c'est le nirvana, le bonheur suprême, c'est devenir un véritable partenaire. La consécration, quoi-Bref: on ne naît pas partenaire - on le devient. Le temps passe: j'aurais voulu parler de certaines autres choses, qui reviendront probablement dans la discussion. Entre autres:

- Les pouvoirs du médecin responsable sont des pouvoirs délégués, qu'il ne peut pas lui-même déléguer à un autre médecin (le médecin de famille, par exemple), à moins que ce médecin ne soit lui-même désigné médecin responsable.

- Les 2 partenaires ont tous deux des droits et des obligations. Uh. prograirme de santé, c'est un contrat qui lie les 2 parties. Des sanctions sont, prévues lorsque l'une ou l'autre des parties ne se conforme pas à ses obligations. Le médecin responsable n'a pas le pouvoir de relever une partie de ses obligations, corme par exemple, l'obligation, pour tous les travailleurs visés, de se soumettre à l'examen médical prévu au prograirme de santé, (art. 49, 4°).

- Le médecin responsable n'est pas un inspecteur. Pour ce faire, il faudrait que lui soient délégués par résolution du C.A. ces pouvoirs. Informer n'est par inspecter.

- Attention au chevauchement des juridictions. Ce n'est pas au médecin responsable (qui n'est pas qualifié pour ce faire) qu'on confie le mandat de s'occuper de la sécurité. ' C'est à l'employeur, par le biais de son prograirme de prévention, au C.S.S., au représentant de la prévention que la loi confie ce mandat. L'éparpillement des efforts, ici carme ailleurs, est contre-productif. Voilà, c'est à peu près tout. On m'avait demandé de faire un texte «punché»: j'espère, Monsieur le modérateur, que j'ai livré la marchandise. Merci.

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LÉ DEFI DES ANNEES 9 0 : L' INTEGRATION STRATEGIQUE DE LA SST A L'ENSEMBLE

DE LA SOCIETE QUEBECOISE

PAR

FLORIAN OUELLET

NOVEMBRE 1989

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INTRODUCTION

La réforme de la santé et de la sécuri té du travail (SST) qui a pris la forme d'une loi. en 1979 et qui s ' a c t u a l i s e lentement, e s t en train de réuss ir avec succès l'épreuve du temps. Il s ' a g i t d'une réa l i sa t ion soc ia le majeure.

Après dix ans d ' e f f o r t s ardus et parfois d i f f i c i l e s à v ivre , nous sommes mieux en mesure de comprendre l'ampleur du véri table projet dé soc ié té auquel la loi nous avait conviés à l 'époque.'

Nous sommes capables aujourd'hui de mesurer de façon au moins sensible l ' im-portance du chemin parcouru. Nous avons également une v is ion mieux éc la i rée de ce qui reste à f a i r e et nous réal i sons le besoin de reproblématiser la question en vue d'une véri table relance de la SST.

Nous verrons que l es d é f i s que pose encore aujourd'hui la réforme 1979-85 ne concernent pas que l 'appl icat ion quotidienne des d i spos i t ions de la l o i . La réuss i t e à longue échéance de la réforme pose des d é f i s aux i n s t i t u t i o n s , au système économique, à la soc ié té toute ent ière .

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UN CHANGEMENT DE PARADIGME

La réforme de 1979-85 const i tue bien plus qu'un changement d 'or ientat ion , c ' e s t un changement de paradigme : une maniéré fondamentalement d i f f érente de penser, de voir e t d'agir en matière de rapport sani ta ire et sécur i ta ire de t r a v a i l . En voici l ' i l l u s t r a t i o n :

Algorithme i l l u s t r a n t l e changement de paradigme

Date Objet du régime But Etat Economie

1909-31—> Loi des a c c i d e n t s — > Gestion d e s E t a t pro ^ Assurance du travail conséquences vidence

1979-85—^ Loi de la s a n t é — ^ Gestion préven- "Etat c o n — ^ ??????? et de la sécuri té t i v e des causes certé" du travail

Ue la LAT à la LSST

L'objet premier de l 'ancien régime es t l 'accident du t r a v a i l , un phénomène que Ton considère comme imprévisible et inévitable et que la soc ié té se doit d'assumer de manière â protéger l es victimes et à se protéger e l l e -même.

Le nouveau régime va au-delà du protectionnisme pour s 'ouvrir à la santé et â la sécurité en tant que dimension pos i t i ve , en tant que socialement poss ib le . Le "DU" de l 'express ion "Santé et Sécurité du Travail" s i g n i f i e que l e travai l n 'es t pas seulement le l i eu où se produit la morbidité (décès, maladies, blessures , malaises, e t c . ) ; on aurait parlé de santé et sécurit "AU" t r a v a i l , le "DU" s i g n i f i e que l e travail, f a i t part ie intégrante du phénomène considéré.

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De la gest ion des conséquences à la gest ion préventive des causes

Avec l e nouveau régime, i l ne s u f f i t plus de s'occuper du b ien-être social des vict imes d'une certa ine f a t a l i t é , i l ne s ' a g i t plus pour l e s t r a v a i l -leurs de s'adapter à n'importe quel t r a v a i l , à une organisation considérée immuable. Non, i l s ' a g i t dans l e nouveau paradigme d'aménager et de trans-former l e t r a v a i l , l 'organisat ion du t r a v a i l , l e s procédés de fabr icat ion , l e s systèmes de production, e t c . , en fonct ion des exigences et des capacités des t r a v a i l l e u r s . Il s ' a g i t en d'autres mots d'adapter l e travai l de manière à respecter l e principe d ' i n v i o l a b i l i t é de la personne en emploi.

De l 'Eta t providence â l '"Etat concerté"

Le changement de paradigme concerne l 'Eta t dans sa nature même. L'Etat s u p p l é t i f , ce lui qui prend charge des problèmes non r e n t a b i l i s a b l e s par l ' e n t r e p r i s e privée, cède la place à la concertat ion. L'Etat normatif, ce lu i qui f i x e l e s règ les et l e s l imi te s de la "normalité" s o c i a l e , cède la place au consensus. Avec la loi sur la SST, on a s s i s t e à la nais -sance au Québec d'une forme d'Etat concerté : gest ion t r i p a r t i t e de la CSST, administration conjointe des assoc ia t ions s e c t o r i e l l e s , comité par i ta i re de SST dans l e s en trepr i se s , e t c .

Un vide paradigmatique

Dans notre algorithme, l 'assurance n'a pas son équivalent contemporain. L'assurance, l ' o u t i l macro-économique par exce l lence dè l 'Eta t providence, l ' instrument même de la gest ion des conséquences, s e r a i t - i l également valable pour la gest ion préventive des causes?. On me permettra d'en douter. Nous reviendrons sur ce point .

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Il e s t bien évident qu'un changement de c e t t e envergure ne s ' a c t u a l i s e pas d'un seul coup et nécess i te d 'être réévalué et relancé périodiquement. Il importe pour ce f a i r e de bien marquer l es acquis du nouveau régime.

LES ACQUIS DU REGIME DE SST

Sans prétendre d'aucune façon f a i r e l e bilan du régime, j e voudrais souligner ce qui me semble en être l e s principaux acquis. Les moyens créés par la loi SST ont pris du temps à se mettre en place et la loi ne s'applique intégrale-ment que dans une minorité de secteurs . Il demeure que la CSST, l'IRSST, l e s DSC, l e s CLSC, l e s ASP, l e s c o l l è g e s , l e s un ivers i t é s , l e s assoc iat ions , l e s gest ionnaires , l e s synd ica l i s t e s , l e s corporations profess ionnel les , l e s experts-consei ls , en SST, e t c . ont f a i t un travail remarquable qui se • traduit par des acquis probablement i rrévers ib l e s .

Par l 'éducation, l ' in tervent ion loca le , la mise en place de services de santé, l e conseil aux entreprises , l 'amélioration de la gestion du dossier de la SST, la recherche s c i e n t i f i q u e , l'enseignement, la promotion, la reven-dicat ion, la gest ion , e t c . , la soc ié té québécoise s ' e s t donnée des éléments e s s e n t i e l s d'une culture de la SST. Les trava i l l eurs e t t rava i l l euses ne craignent plus l e r id icu le en revendiquant sur ce terrain; la haute direct ion des entreprises intègre de plus en plus ces nouvelles valeurs à leurs po l i t iques , e t c .

C'est ainsi qu'une multitude d' interventions réussies ont donné l i eu à des investissements dans un nombre considérable d 'entreprises , ont transformé nos conceptions des accidents du t r a v a i l , nos conceptions également du tra-v a i l , des t rava i l l eurs e t des rapports de t r a v a i l . En somme, une nouvelle sagesse e s t en train de naître en réponse au projet de soc i é t é qui nous a é té proposé en 1979.

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Il res te cependant beaucoup à f a i r e en part icu l i er auprès des p e t i t e s et moyennes entreprises , dans l e s secteurs où le personnel de production es t facilement interchangeable, dans l e s organisations dont la survie économi-que n 'es t pas assurée chez l e s t rava i l l eurs dont l'emploi es t précaire, e t c .

LA NOUVELLE PROBLEMATIQUE

Il e s t tout â f a i t normal que durant l e s premières années d'une réforme -d'envergurei on s'attaque à des problématiques loca les et à courte échéance, à des dimensions de nature particulièrement technique et opérationnalisable. Une t e l l e contrainte ne doit cependant pas nous empêcher de voir l e s dimen-sions plus fondamentales, plus larges e t plus profondes de la même r é a l i t é . C'est ce que nous tenterons de mettre en évidence maintenant.

Une r é a l i t é historique .

Les problèmes qui a f f ec tent la santé et la sécurité des personnes en emploi ne datent pas d 'hier . Au contraire , le travail traîne avec lui un héritage te l que la morbidité qui se manifeste par l e f a i t et à l 'occasion du t r a v a i l , possède un caractère historique. Cette morbidité n ' e s t pas simplement l e f a i t des po l i t iques , de la gest ion e t de '.la production contemporaine des entreprises , e l l e découle des modèles économico-politiques e t organisation-nels qui ont marqué l ' h i s t o i r e de la production i n d u s t r i e l l e . Il ne s ' a g i t pas seulement d'une simple question de bonne gest ion locale et micro-économique, i l s ' a g i t d'une question de c i v i l i s a t i o n , une question soc ia l e , po l i t ique et économique.

Or, on en conviendra, on ne s'attaque pas à un héritage historique de c e t t e envergure comme on s'attaque à un problème dont on es t soi-même la cause.

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Des maladies de c i v i l i s a t i o n

En 1989, seule une fract ion de la morbidité historique du travai l f a i t l ' o b j e t d'indemnisation. Combien de maladies chroniques l i é e s au travai l ou au chômage (qui e s t aussi un problème de t r a v a i l ) ne sont pas reconnues? Combien de dépressions, de s t r e s s , de burn out, de troubles cardio-vascula ires , de maladies pulmonaires, de maux de dos, de surdi té , de cancer, de v i e i l l i s s e -ment prématuré, e t c . ne sont jamais comptabil isés dans l e s s t a t i s t i q u e s de la CSST? Ces maladies l i é e s à la c i v i l i s a t i o n i n d u s t r i e l l e , c a p i t a l i s t e e t r e n t a b i l i s t e sont pr is en charge par l e régime public e t portées au compte de la dégradation normale et nature l le de l 'organisme. Il ne s ' a g i t pas i c i non plus d'une problématique loca le qui comporte des so lut ions à courte échéance.

Le travai l comme prix à payer

En 1989, l e travai l n ' e s t généralement pas considéré.comme une a c t i v i t é heureuse, une a c t i v i t é qu'on f a i t dans la . joie en tant que moyen d'at te indre à l'autonomie et à la l i b e r t é dans la production; l e travai l , n ' e s t pas . considéré comme l i eu d'épanouissement et de r é a l i s a t i o n de s o i . Au con-t r a i r e , le. travai l apparaît ê tre une contrainte plus qu'une opportunité, un l i eu où l e v i e i l l i s s e m e n t accéléré es t la norme e t où l'épanouissement par l ' a c t i v i t é industrieuse et productive e s t l ' except ion pour ne pas dire un p r i v i l è g e .

Nous sommes lo in d'une s i tuat ion où l e travai l sera un facteur de santé et de sécur i té et la SST un facteur de développement humain, s o c i a l , p o l i t i q u e , économique, technologique, e t c .

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Des mi l l iards qui ne sont pas gérés

En 1989, selon l e s estimés et l e s théor ie s , l e s coûts d i r e c t s e t ind irec t s occasionnés par l e s l é s i o n s profess ionne l l e s s ' é l è v e r a i e n t annuellement à 4 ,5 ou 6 mi l l iards de d o l l a r s . Ce coût socialement i n u t i l e tend à augmenter d'année en année même si des mesures administratives parviennent à l e f a i r e f luc tuer occasionnellement. Ces coûts contre-product i fs placent une bonne part ie de notre économie e t de nos entreprises en pos i t ion précaire face â la concurrence de pays qui n'ont pas à assumer une t e l l e hypothèque.

Il s ' a g i t bel e t b i e n i c i d'une question d'économie po l i t ique ou de macro-économique de toute première importance en matière de SST.

L'absence d'un i n c i t a t i f macro-économique à la prévention

Le nouveau paradigme, avons-nous vu, ne comporte pas d ' a s s i s e macro-écono-mique qui s era i t l e pendant de l 'assurance dans l e paradigme de la gest ion des conséquences. Toute l'économie du régime achoppe sur c e t t e dramatique absence. La prévention n é c e s s i t e des mi l l iards en investissement pour trans former l e travai l e t l 'organisa t ion de la production. Ces m i l l i a r d s , on ne l e s trouvera pas dans l e s tact iques pour réduire l e taux de c o t i s a t i o n à courte échéance. On ne réussira jamais non plus à forcer l e s entreprises à i n v e s t i r dans la transformation des moyens de production par la menace e t la sanction l éga les et économiques.

La seu le manière de s 'attaquer à des problèmes d'envergure h is tor ique , c ' e s t de se donner des moyens d' intervent ion qui ont une envergure compas rable.

Ces éléments de la nouvelle problématique sont g loba l i sants et nous amènent à proposer une s t r a t é g i e d ' intervent ion qui e s t également g loba l i sante .

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L' INTEGRATION STRATEGIQUE DE LA SST

Une s tratég ie d'envergure soc ia le comporte bien évidemment des dimensions po l i t ique , sociologique, des re lat ions de t r a v a i l , e t c . , en plus d'une dimension économique. Nous l imiterons notre propos à cette , dernière pour restreindre la durée de l 'exposé et parce que ce t t e dimension est l ' ob je t du vide paradigmatique que nous venons d ' i d e n t i f i e r et que de plus, l'économie et la finance sont, dans ce domaine, comme dans tant d'autres, l e nerf de la guerre.

L'investissement en prévention

Les experts conse i l s en SST nous disent que l ' invest issement en prévention es t rentable pour l es entreprises prises individuellement. I l s nous démon-trent avec force et détai l que la solution à une bonne partie des problèmes rencontrés réside dans l ' inves t i s sement . Non seulement i l e s t poss ible de rentabi l i ser l ' inves t i s sement , on nous apprend, que l e s mesures prises pour régler des problèmes d'accidénts et de contaminants du travai l ont des e f f e t s bénéfiques pour d'autres fonctions v i t a l e s des ,entreprises : qual i té des produits ou des serv ices , réduction des coûts énergétiques, augmentation de la productivi té , création des produits de pointe commer-c i a l i s a b l e sur une haute é c h e l l e , amélioration des re la t ions de t r a v a i l , e t c .

Les s tra tég ies de développement industriel

L 'h i s to ire du développement industrie l nous apprend que l 'amélioration historique des conditions de v i e , de santé, de sécurité et de confort a é té et demeure un leitmotiv constant du développëment technologique et indus tr ie l .

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Cela s i g n i f i e qu'un i n c i t a t i f macro-économique à la prévention pourrait cons t i tuer une vér i tab le s t r a t é g i e de développement industr ie l de produits e t de serv ices de pointe à l ' é c h e l l e s e c t o r i e l l e dans cer ta ins cas , à l ' é c h e l l e mondiale dans d'autres cas .

Un d i s p o s i t i f macro-économique

Le d i s p o s i t i f que nous cherchons, ce pendant contemporain de l 'assurance , ex-i s t e déjà d'une certa ine façon. Ce d i s p o s i t i f , c ' e s t l e fonds d ' i n v e s t i s -sement e t de placement. Il en e x i s t e divers modèles qui vont de la Caisse d'économie au Fonds de So l idar i t é de la FTQ. Celui qui nous in téresse i c i , c ' e s t l e fonds consol idé de la CSST, s o i t quelques mi l l iards de do l lars qui sont gérés par la Caisse de dépôt du Québec et dont la seule mission e s t de se r e n t a b i l i s e r financièrement.

Il apparaît incongru que ce fonds actuariel cons t i tué pour garantir la responsabi l i té de la CSST à l 'égard des e f f e t s à longue échéance des l é s i o n s pro fes s ionne l l e s , ne serve pas l ' o b j e c t i f préventif de la l o i . Allons plus l o in . S ' i l devait s 'avérer économiquement rentable et socialement productif d ' i n v e s t i r en prévention, pourquoi ne pas développer ce fonds par des placements indiv iduels comportant des avantages sociaux et f i scaux comparables à ceux que procure l e fonds de So l idar i t é de la FTQ? .

La s o c i é t é québécoise e s t novatrice au chapitre de la gest ion f inanc ière e t e l l e l ' e s t au chapitre de la SST. Nous proposons i c i de combiner ces deux dynamismes, de p o t e n t i a l i s e r leurs atouts r e s p e c t i f s . La s o c i é t é québécoise y gagnerait à avoir un réseau de la SST qui chercherait â trouver des problèmes d'organisation du travai l e t de la production, laque l l e pour-r a i t f a i r e l ' o b j e t d'un financement d'envergure. Cette démarche s e r a i t bien plus u t i l e que c e l l e qui c o n s i s t e à cacher la r é a l i t é e t à relayer aux géné-rat ions futures des problèmes que nous ont l a i s s é s l e s précédentes et ceux que nous créons ceux-mêmes.

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C'est ce genre de d i s p o s i t i f qui f a i t qu'on gère l e s problèmes d'envergure

plutôt que de l e s n ier , que j ' a p p e l l e une intégrat ion s tratégique . On intègre la SST dans l e s s t r a t é g i e s de gest ion des entrepr i se s , on tend à en f a i r e autant au niveau s e c t o r i e l . Je vous suggère de l é f a i r e au niveau de la soc i é t é dans son ensemble.

Il me semble, en conclusion, que l 'absence de s t r a t é g i e macro-économique conditionne les pratiques d ' intervent ion loca le . Il me semble également que l ' ins taurat ion d'un d i s p o s i t i f macro-économique d'envergure, une vér i table a s s i s e économique à la prévention sur une haute é c h e l l e , rendrait moins précaire l e s acquis du. régime, sécur i sera i t l e s gens qui y t r a v a i l -l e n t , s t imulerait l ' u n i v e r s a l i s a t i o n de l ' app l i ca t ion de la l o i .

Est-ce là un déf i intéressant et stimulant pour l e s années 90? Ce déf i ne doit pas cacher ceux du quotidien, ceux du travai l pa t i ent , parfo is i n v i s i b l e mais v i t a l . Ces d é f i s quot idiens , ce sont l e s vôtres et ce sont l e s miens. Cependant, sans une relance au niveau s o c i a l , po l i t ique ou économique, saurons-nous r é s i s t e r encore longtemps? La roue tourne, i l e s t vra i , mais sans une nouvelle motion d'envergure s o c i a l e , notre épaule risque de se meurtrir et la.réforme risque de s ' e s s o u f f l e r , faute de munition.

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COLLOQUE PROVINCIAL DES INFIRMIERS(ÈRES) EN SANTÉ AU TRAVAIL DU RÉSEAU PUBLIC

"Santé au travail entre nous!

Enfin... une réalité 99

Saint-Georges, Beauce

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THÈME ET OBJECTIFS DU COLLOQUE

Ce premier colloque provincial des infirmiers et infirmières en santé au travail

de9 CLSC - DSC se voulait avant tout une occasion privilégiée de se rencontrer

et de faire le point après plua de 5 années d'existence en santé au travai l .

échanger entra nous, partager nos expériences et nos outils de travail étaient

au coeur même de nos rencontras et de nos discussions.

Ces objectifs atteints nous donnent un élan nouveau, un renforcement de nos

convictions en mat ière de prévention de la santé de nos travail leurs. Nous nous

sommes donnés les. moyens d'aller de l'avant et ensemble nous sommes maintenant

en mesure de témoigner de notre richesse et de notre expertise dans le domaine

de la santé au travai l .

"Santé au travail entre nous! Enfin.. . une réalité" restera longtemps gravé dans

nos mémoires car nou9 avons réussi à donner à ce thème tout son sens.

Yves Gingra9 Président du Colloque

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Le 15 ju in 1989

OBJBT: Rapport de la coordonnatrlce. LS. col loque provinc ia l dea Inf i rmleres e t Inf irmiers en ganté au t r a v a i l du réseau oubl i e . 9-10-11-12 mal 1989,

C'es t à part i r d'un rêve que ce col loque s ' e s t é l a b o r é ; . . Le rêve de

réunir ces Inf irmières e t ce s in f i rmiers qui partagent une probléma-

tique commune, e t qui sont r i c h e s d 'expér iences , de c o n n a i s s a n c e s . . .

Le rôve, de permettre l ' a c c è s à c e t t e immense banque de données,

cons t i tuée par l e savoir e t l e vécu de tous l e s c o l l è g u e s des CLSC-

DSC en santé au t r a v a i l . En f a i t , l e rêve, de mieux vous con-

na î t re . . .

Quelques faits:

Au t o t a l 48 conférenciers-animateurs ont par t i c ipé à la r é a l i s a t i o n

des a c t i v i t é s du programme.

206 intervenants-es ont p a r t i c i p é aux journées de mardi e t mercredi,

e t 165 aux journées de jeudi e t vendredi.

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Plus de 90 CLSC e t DSC é t a l e n t représenté s . 10 médias ont couvert

l 'événement. Un programme s o c i a l a permis de f a i r e mei l leure

connaissance, e t a contribué A augmenter la population de la Beauce.

(5 nouve l les Beaucerons-nes) .

Résultats à court termes

- Des présentat ions p e r t i n e n t e s , bien r o d é e s , . d e grand I n t é r ê t .

- Des conférenc iers ( ères ) engagés ( e s ) , dynamiques et' novateurs

( t r i c e s ) .

- Des échanges d ' e x p e r t i s e e t de connaissances .

- Des rencontres mult ip les f a v o r i s é e s par l e s a t e l i e r s e t l e s

a c t i v i t é s s o c i a l e s .

- Des échanges d i r e c t s avec la d i r e c t i o n de l a CSST et du MSSS.

Résultats A moyen et long terme:

- Désir profond de renouveler l ' e x p é r i e n c e .

- Sentiment d'appartenance.

- A c c e s s i b i l i t é à l ' e x p e r t i s e du réseau.

- Motivation.

Nous avons constaté par votre éva luat ion .que le besoin d'échanger

e s t encore grand. Nous avons encore te l lement à découvrir, À

partager, à cons tru ire . Beaucoup de s u j e t s ont é té abordés, i l en

re s t e encore beaucoup d'autres À ven ir . .

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Ce col loque aura é t é pour nous du "Groupe Nursing B'eauce-Araiante-

Etchemlns", un moment p r i v i l é g i é . On s ' e s t o f f e r t l e grand p l a i s i r

de vous recevo ir . Et toute c e t t e énergie que vous avez amenée avec

vous, nous anime encore.

Merci de votre p a r t i c i p a t i o n à ce premier co l loque prov inc ia l des

in f irmières e t in f i rmiers en santé au t r a v a i l du réseau publ ic .

Merci auss i pour l e s appréc iat ions e t commentaires de votre évalua-

t ion e t pour tous l e s messages chaleureux qu'ont reçu nos organismes.

Lyse uo i iy Coordonnatrlce du co l loque

LB/lb

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197

Allocution de Céline Laroontagne

Vice-présidente CSN CSN Conférence de l 'Assoc ia t ion pour l a

santé publique du Québec 9 novembre 1989

Bonjour!

Je remercie d'abord l 'Assoc ia t ion pour la santé publique du

Québec de m'avoir inv i tée à présenter une conclusion de notre

Colloque.

Avant de vous fa ïpe part des grandes l i gnes s tratégiques que nous avons dégagées à la f i n de ce Colloque, i l n ' e s t pas i n u t i l e de rappeler quels é ta i en t l e s o b j e c t i f s de ce Colloque et qui é ta ient l e s part ic ipantes et part ic ipants .

Ce Colloque s ' adres sa i t principalement . à nos membres des secteurs p r i o r i t a i r e s incluant l e groupe I I I , c ' e s t - à - d i r e pour l a CSN, ce sont des membres des fédérat ions de la métal lurgie , du commerce, du papier et de la forê t e t une part ie des serv ices publ ics .

Il e s t vrai qu'un des o b j e c t i f s du Colloque é t a i t de f a i r e l e bi lan de l a l o i sur .la santé et sécur i té après 10 ans d ' ex i s t ence . Dans ce sens, l ' o b j e c t i f de ce Colloque n ' é t a i t pas en soi t rès o r i g i n a l . Par a i l l e u r s , l e bi lan é t a i t un prétexte pour finalement reva lor i ser la prévention auprès de nos syndicats e t de nos membres. Nous savons tous que l e volet de l ' indemnisat ion, l e vo le t juridique a accaparé beaucoup d'énergies des mi l i tantes e t mi l i tant s des syndicats e t de notre organisation au cours dè ces dernières années e t peut-être aux dépens même de la prévention. Le Colloque v i s a i t d'une part à donner une s i g n i f i c a t i o n concrète

CONPFTDFTMTTON DBS SYNDICATS N M t o H M n

lôOl avenue deLortrter Montréal H2K4M5

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à la prévention en se rappelant notre o b j e c t i f qui e s t l ' é l iminat ion des dangers à la source.

Finalement, nous avons souhaité que ce Colloque permette aux syndicats d 'ê tre mieux o u t i l l é s e t mieux équipés pour agir dans leurs milieux de t r a v a i l .

Le b i lan de l a l o i

Nous avons abordé, durant ce Colloque, l ' a s p e c t bi lan de la l o i selon plusieurs f a c e t t e s : enquête-terrain, jurisprudence, notre pratique sur l e s comités de santé - sécur i té e t représentation à la prévention, comparaison de d i f f é r e n t e s l é g i s l a t i o n s . Nous avons également pro f i t é de l 'expérience de plusieurs s p é c i a l i s t e s . Par a i l l e u r s , nous ne prétendons pas avoir r é a l i s é ou même cherché à r é a l i s e r un bilan exhaustif de la l o i .

En 1979, la CSN a jgué sévèrement la l o i 17. Nous avons revendiqué plus ieurs amendements substant i e l s au projet de l o i . Rappelons que l 'avant -proje t de l o i ne. prévoyait pas, comme objec t i f à l a prévention, - l 'é l imination.du danger à la source. Ce faut l e r é s u l t a t de l ' a c t i o n du mouvement syndical s i cet o b j e c t i f a é té intégré.

En 1989, la CSN c r o i t que la l o i de santé et sécur i té a é té plus qu'une réforme administrative. Nous affirmons que c e t t e l o i a ef féct ivement donné des dro i t s nouveaux aux t r a v a i l l e u s e s et t r a v a i l l e u r s :

Droit de refus: ce d r o i t e x i s t a i t dans c e r t a i n e s conventions c o l l e c t i v e s

Retrait préventif de Ta femme enceinte e t qui a l l a i t e

Retrait préventif face aux contaminants Programme de prévention et programme de santé

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Et surtout des dro i t s e t des moyens pour l e s t r a v a i l l e u s e s et t r a v a i l l e u r s de s 'organiser par l e b i a i s des comités de santé et sécur i té et de l a représentation à la prévention.

Nous pouvons aussi aff irmer que l ' e x e r c i c e de ces dro i t s a donné des ré su l ta t s dans la mesuré où l e s syndicats organisés , s tructurés , v e i l l e n t au grain et ont forcé , par leur action syndicale , l ' a p p l i c a t i o n de la l o i .

Je ne peux d ire , hors de tout doute, qu' i l e s t impossible de f a i r e appliquer l a l o i dans l e s milieux de travai l non-syndiqués. J 'a i la convict ion que c ' e s t f o r t d i f f i c i l e .

Rappelons que, selon l ' é tude de Marc Renaud de l 'Un ivers i t é de Montréal, 98% des dro i t s de refus exercés entre 1981 et 1986 l ' o n t é té par des t r a v a i l l e u s e s et t r a v a i l l e u r s syndiqués.

En 1989, comme en 1979, nous maintenons une s ér i e de revendications à la l o i e t souhaitons toujours des amendements qui ira ient dans l e sens d ' inc lure l a reconnaissance syndicale .

A la f i n de ce Colloque de t r o i s (3) jours, c ' e s t autour de quatre (4) grands axes que nous avons élaboré l e s s t r a t é g i e s à venir de la CSN en prévention. Précisons dès l e départ l ' o b j e c t i f même de la l o i qui d o i t , selon nous, inspirer et agir sur tous l e s autres a r t i c l e s de la l o i .

1er axe: Elargir l e s d r o i t s syndicaux

Pour nous, ce la exprime 1 ' idée qu' i l faut reconnaître des dro i t s pour l e syndicat , pour- l ' a s s o c i a t i o n représentat ive des personnes s a l a r i é e s , e t donc des droi t s qui s 'a joutent , s i l 'on veut, aux dro i t s reconnus aux t r a v a i l l e u s e s e t t r a v a i l l e u r s . Nous ins i s tons particulièrement sur l e droit à l ' informat ion, l e droit d'enquête sur l e s condit ions prévalant dans l e milieu de t r a v a i l ,

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l e droit à* des l ibéra t ions défrayées par l'employeur, la reconnaissance des comités de santé et s écur i t é .

Pour obtenir ces d r o i t s , nous avons p r i v i l é g i é deux (2) moyens:

Premièrement, une de nos plus grandes p r i o r i t é s e s t d 'ex iger que l e s quatre (4) mécanismes (comité de santé e t s écur i t é , représentation à la prévention, programme de prévention e t programme de santé) s 'appliquent dans un déla i t r è s bref à tous l e s secteurs et que la l o i s o i t promulguée pour l e secteur construct ion. Il e s t inacceptable qu'après dix (10) ans de l 'adoption de la l o i , ces quatre (4) mécanismes nè s'appliquent qu'à 13% de la mainrd'oeuvre québécoise, d'autant plus que l e s condit ions de sécuri té et de santé dans l e s secteurs non couverts ne sont pas plus r e l u i s a n t e s ' q u ' i l faut , d'autant plus également que ces mécanismes ont f a i t leur preuve là où i l s s 'appl iquent .

C'est un choix dél ibéré de notre part de ne pas p r i v i l é g i e r à ce s t a d e - c i , en terme de revendication, la réouverture de la l o i de santé et sécur i té , mais plutôt de s'acharner à rendre un iverse l l e la l o i a c t u e l l e .

Deuxièmement, nous croyons que l a négociation des conventions c o l l e c t i v e s demeure un instrument p r i v i l é g i é pour l e s t r a v a i l l e u s e s e t t r a v a i l l e u r s syndiqués. Certains dro i t s inclus dans la l o i d'aujourd'hui e x i s t a i e n t avant dans l e s conventions c o l l e c t i v e s . La négociation de c lauses portant sur l a santé e t sécur i té demeurent une p r i o r i t é pour toutes e t tous mais ce la e s t plus important encore pour l e s secteurs touchés par l e s quatre (4) mécanismes ou encore pour amorçer des revendications sur des maladies profess ionne l l e s non i n s c r i t e s dans la l i s t e .

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2e axe: La prévention préventive p lutôt que l a prévention curat ive

Ce thème va sûrement vous apparaître peu orthodoxe. C'est une expression qui a é té formulée par un part ic ipant au Colloque. Nous voulons s i g n i f i e r par là qu' i l ne faut pas attendre l e s accidents de travai l pour f a i r e de la prévention, mais prévenir l e s accidents de travai l plutôt que de corriger l e milieu de travai l une f o i s que l e mal e s t f a i t .

Nous avons premièrement inv i té chacun de nos syndicats , au retour dans leur mil ieu de t r a v a i l , à i d e n t i f i e r une action concrète à mener à court terme, pas nécessairement l e plus grave problème à rég ler , mais un changement qui s e r a i t poss ib le de f a i r e à court terme. Deuxièmement, e t c ' e s t là un dé f i important pour notre organisation à l ' i n t e r n e , i l a é té proposé de bât ir dans chacune des fédérat ions des plans d' intervent ion et d 'act ion par secteur . Nous intervenons beaucoup actuellement dans l e s syndicats locaux, mais i l nous apparaît que s i nous voulons f a i r e un pas de plus co l lect ivement , i l faut développer des act ions s e c t o r i e l l e s , des plans d' intervent ion qui intégreraient à la f o i s la recherche, nouvelle recherche ou recherche ex i s tan te , la formation, l ' a n a l y s e , 1 'information et des revendications t rè s préc i ses .

Voici quelques exemples de plans s e c t o r i e l s . Dans l e secteur boulangerie e t p â t i s s e r i e d'une de nos fédérat ions , on entreprend actuellement un plan de travai l pour él iminer l a poussière de far ine . Dans l e secteur des s c i e r i e s , vous savez sans doute qu' i l y a plusieurs études qui ont é té menées récemment par l'IRSST. Alors comment maintenant comme secteur pouvons-nous u t i l i s e r ces études pour modifier col lect ivement l e s milieux de t rava i l? L'avantage de ces plans d' intervent ion s e c t o r i e l s es t q u ' i l s permettent une action concertée, oui c e r t e s , mais aussi d'apprendre l ' expér ience des uns et des autres . I l s permettent

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également de contourner l e s arguments de l a concurrence qui nous sont souvent s e r v i s par l e s employeurs s i notre intervent ion syndicale touche p lus ieurs employeurs à l a f o i s . Qu'il' me s o i t permis de sou l igner , par a i l l e u r s , que c ' e s t un d é f i important pour notre organisat ion de mener à terme de t e l s plans d ' i n t e r v e n t i o n .

3e axe: Utiliser toute la portée de la loi

La tro i s i ème grande p r i o r i t é découlant de ce Colloque e s t

l ' i n c i t a t i o n auprès de nos syndicats à u t i l i s e r davantage l e s

d r o i t s inc lus dans l a l o i . Par exemple, l e recours sur

l ' indemnisat ion pour maladies p r o f e s s i o n n e l l e s comme un i n c i t a t i f

à l a prévention. Plus ieurs maladies p r o f e s s i o n n e l l e s ne sont pas

reconnues à l 'heure a c t u e l l e e t même parmi c e l l e s qui sont

r e c o n n u e s , on u t i l i s e . p a r f o i s t r è s peu l e s demandes

d' indemnisat ion. Nous croyons que s i on m u l t i p l i e l e s demandes

d' indemnisat ion, ou mieux que l ' o n coordonne ces demandes, c e l a

pourrait avoir comme e f f e t à l a f o i s de f a i r e reconnaître de

nouvel les maladies i n d u s t r i e l l e s e t aussi i n c i t e r ou f o r c e r à là

prévention.

Le dro i t de re fus e s t un recours prévent i f qui demeure toujours important. C'est encore l e 1angage que 1'employeur comprend l e mieux quand l e s t r a v a i l l e u s e s e t t r a v a i l l e u r s arrêtent de t r a v a i l l e r à cause de condi t ions dangereuses.

D'autres recours ou d 'autres aspects de la l o i . Par exemple,

l e r e t r a i t prévent i f f ace aux contaminants qui a é t é t r è s peu

u t i l i s é j u s q u ' i c i , l a dénonciation de condi t ions dangereuses.

Cette dénonciation permet aux syndicats de comprendre e t de

connaître mieux leur mi l ieu de t rava i l e t de monter un d o s s i e r sur

l e s dangers inhérents à leur mi l ieu de t r a v a i l . Ce sont , l e s

revendicat ions que nous avons f a i t connaître aux syndicats dans

l ' u t i l i s a t i o n de l a l o i .

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Face au gouvernement et à la CSST, toujours dans l 'opt ique d ' u t i l i s e r la l o i à son maximum, nous croyons qu'une des p r i o r i t é s de la CSST e t du gouvernement - l e l é g i s l a t e u r - e s t de dépoussiérer l a réglementation a c t u e l l e . Nous avons pr ior i sé particulièrement deux règlements - l e règlement sur la qual i té du milieu de travai l e t l e règlement sur l e s établ issements industr ie l s e t commerciaux. Nous savons que l e règlement sur la quai i té du milieu de travai l contient plusieurs normes dont certa ines sont dépassées, e l l e s ne t iennent pas compte des recherches s c i e n t i f i q u e s a c t u e l l e s . Par exemple, la norme sur la qual i té de l ' a i r - l 'apport d ' a i r f r a i s - e s t beaucoup plus basse que c e l l e suggérée par l'organisme américain "ASCHE".

La Cour a l imi t é 1'.appl ication du règlement sur l e s é tab l i ssements industr iel s e t commerc iaux e t actuel 1ement i 1 ne peut s 'appliquer dans l e s municipal i tés , l e s éco les et l e s établ issements de santé e t serv ices sociaux. Nous croyons encore là qu' i l y a une 1 imitation à 1 ' u n i v e r s a l i t é e t contraire à l ' e s p r i t de la l o i de santé e t s écur i t é .

Amél i o r e r 1 ' i n s p e c t o r a t e s t une autre revendication importante qui s 'adresse plus particulièrement à la CSST, mais également au gouvernement dans la mesure où c ' e s t l e gouvernement qui f inance l e coût des inspecteurs. Nous nous entendons tous, la d irect ion de la CSST, l e patronat - avec un bémol peut-être - e t la part ie syndicale , pour dire qu' i l e s t urgent d'augmenter l e nombre d ' inspecteurs . Mais au-delà du nombre d ' inspecteurs , i l nous apparait important de bien préciser l e rôle des inspecteurs. Nous croyons que l e s inspecteurs mandatés pour tenter de c o n c i l i e r l e s par t i e s ont une approche strictement to lérante face aux employeurs et q u ' i l s devraient à l ' aven ir avoir une approche plus coerc i t ive. De plus , i l e s t également important que 1 es inspecteurs acquièrent une meil leure formation.

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La question de 1 ' inspectorat m'amène à parler des services de santé au t r a v a i l . Vous savez sans doute que Madame Forget avait f a i t l a . proposit ion, il y a quelques mois au conséi l d'administration de la CSST, de réduire l e budget accordé aux serv ices de santé au travai l pour inves t i r ce t argent dans l e s serv ices de l ' i n s p e c t o r a t . Même s i nous sommes d'accord avec une augmentation du.nombre d' inspecteurs comme je viens de la d ire , nous nous sommes battus contre c e t t e proposit ion. Pour nous, l e s inspecteurs et l e s serv ices de santé au travai l ont des rô le s

«

d i f f é r e n t s . Dans la même l igne de pensée, nous nous sommes battus également contre 1 e morato i re e t contre 1 es coupures des ressources aux serv ices de santé au t r a v a i l . Je voudrais souligner à ce t e f f e t l e travai l important f a i t dans ce doss ier par Madame Andrée Bouchard, ma col lègue au consei l d'administration de la CSST. L'expertise des serv ices de santé au travai l e s t nécessaire pour mener à bien l e travai l de prévention et de santé dans l e s milieux de t r a v a i l . Il e s t important de maintenir c e t t e expert i se et de pouvoir compter sur des ressources extér ieures à l a mutuelle d'assurance.

Un autre a s p e c t qui semble majeur c ' e s t l ' a s p e c t mult idisc ipl inaire des serv ices de santé au t r a v a i l . J 'a joutera i s également l 'apport majeur que l e s membres*des équipes de santé au t r a v a i l peuvent f a i r e pour appuyer l e s t r a v a i l l e u s e s e t t r a v a i l l e u r s non syndiqués. Comme je l e d i s a i s tout à l 'heure , je su i s t r è s convaincue que l a l o i a c t u e l l e , malgré l e s dro i t s q u ' e l l e confère, e s t d i f f i c i l e d 'appl icat ion dans l e s milieux non syndiqués. Le recours à des ressources extér ieures , t e l s des s p é c i a l i s t e s en serv ices de santé, e s t une ass i s tance importante pour ces t r a v a i l l e u s e s e t t r a v a i l l e u r s plus démunis.

Avant d'aborder l e quatrième axe de notre Colloque, permettez-moi de vous f a i r e une courte ré f l ex ion sur l e mode de pr ise de déc is ions à la CSST. Cette ré f l ex ion d ' a i l l e u r s e s t

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aussi un commentaire indirect sur la démission de Madame Forget et donc tout à f a i t d ' a c t u a l i t é .

La tendance qui s ' e s t développée ces dernières années e s t de conf ier aux part ies l e s déc i s ions , c ' e s t - à - d i r e , d'attendre que l e s deux part ies fassent concensus avant de procéder, par exemple, à 1'adoption d'un règlement au conseil d'administration de la CSST. C'est un objec t i f louable ce lui de vouloir obtenir l e concensus e t c ' e s t même un dé f i intéressant . Mais i l demeure que, selon moi, la d irect ion de la CSST ainsi que l e l é g i s l a t e u r devraient se rappeler l ' o b j e c t i f principal des l o i s qui sont administrées par Ta Commission. Ces l o i s ex i s t en t dans leur essence même pour protéger l e s droi t s des t r a v a i l l e u s e s et des t r a v a i l l e u r s , protéger leur in tégr i t é physique. Le gouvernement et ses représentants au Conseil d'administration ne peuvent pas toujours res ter neutres car i l y a là des enjeux majeurs pour l e s victimes d'accidents e t pour la santé des t r a v a i l l e u s e s e t t r a v a i l l e u r s . A t i t r e d'exemple, soulignons qu' i l y a à peine quelques semaines que l e consei l d'administration a finalement adopté une réglementation pour se conformer à la convention internationale du BIT sur l 'amiante. Ce règlement t r a î n a i t de comité en comité, de réunion en réunion, depuis plusieurs mois. La permanence a refusé de trancher pour décider du règlement.

Je pense qu' i l e s t donc d ' a c t u a l i t é de f a i r e ce commentaire aujourd'hui à savoir , qu'à notre av i s , la prochaine présidence de la CSST devrait ass imi ler c e t t e or ientat ion a f in d ' ê t re plus e f f i c a c e et de respecter finalement l e s o b j e c t i f s l i é s à l ' e x i s t e n c e de la CSST.

4e axe: La dimension internationale en santé et sécurité

Finalement, l e quatrième axe ou conclusion de notre colloque portai t , sur la dimension internationale en santé et s écur i t é . C'est peut-être une des premières f o i s que T o n aborde la santé et

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sécur i té au travai l dans son aspect internat ional . Nous avons é té s e n s i b i l ï s é s à c e t t e dimension par certa ines présentations de p a n e l i s t e s . Nous avons eu la chance de rencontrer un représentant syndical de l a Confédération Européenne des syndicats , également un camarade des syndicats suédois e t même un représentant des syndicats américains.

1) L'exemple de l'Europe e s t important pour nous dans l e cadre

du l ibre-échange;

2) La l é g i s l a t i o n sur l e s normes demeure su je t t e à des or ientat ions pr ises a i l l e u r s c ' e s t - à - d i r e aux Etats-Unis;

3) Nous nous sommes rendus compte que nous u t i l isons peu l e s o u t i l s ou l e s conventions qui vont votés par l e Bureau international du travai l (BIT). J 'a i part ic ipé l ' an dernier à la première discuss ion du BIT sur l e travai l de nui t . Au Canada, nous n'avons aucune l é g i s l a t i o n , ni fédérale ni provincia le , portant sur l e travai l de nui t . Donc, nous devrons nous inspirer de c e t t e convention pour amener des changements de mental ité sur la question du travai l de nui t . Plusieurs aspects t r a i t é s dans la d iscuss ion au BIT touchent de t rès près la santé des t r a v a i l l e u s e s e t des t r a v a i l l e u r s .

En conclusion, je vous rappel lera is également que nous nous sommes donnés des devoirs à f a i r e , c ' e s t r à - d i r e des ré f l ex ions à poursuivre. Réflexions sur l e s normes, i l faut améliorer l e s normes ac tue l l e s mais jusqu'où - avons-nous besoin de normes? Les normes qui sont é t a b l i e s n ' o n t - e l l e s pas pour o b j e c t i f premier de protéger la santé? Réflexions aussi à poursuivre sur la double mission de la CSST, mission de prévention ou mission de réparation. Je rappelle que lorsque la l o i de santé - sécur i té en 1979 a é té déposée, la CSN avait pris part ie à ce moment pour que ce s o i t deux (2) organismes d i f f é r e n t s qui administrent la prévention et la réparation. Dix ans plus tard, i l nous faut

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rafra îch ir notre ré f l ex ion sur cet aspect à la lumière de l 'expérience des dernières années.

Un l i e n évident e s t à f a i r e également entre environnement et santé - sécur i té au t r a v a i l . Il y a de plus en plus de s e n s i b i l i s a t i o n au niveau de la population du Québec pour améliorer e t protéger notre environnement e t nous croyons que l e s t r a v a i l l e u s è s et t r a v a i l l e u r s sont doublement exposés, à l ' i n t é r i e u r dans l e mil ieu de travai l e t aussi à l'environnement extér ieur .

L'organisation du travai l e s t un sujet f o r t important et sur lequel il nous faut aussi continuer à r é f l é c h i r . Il y a des incidences évidentes entre organisation du travai l e t amélioration du milieu de t r a v a i l .

Pour terminer, quelques commentaires peut-être un peu moins o b j e c t i f s . Nous avons pu constater tout au cours de ce Colloque que, depuis l e s dix dernières années, l e s t r a v a i l l e u s e s e t t r a v a i l l e u r s membres de la CSN avaient acquis .une très grande compétence, une connaissance extraordinaire en santé e t sécur i té au t r a v a i l . I l s ont réussi à f a i r e des changements majeurs dans leur mi l ieu. Cette compétence et c e t t e connaissance ont é té acquises, entre autres, grâce à l'appui de ressources extér ieures t e l l e s que l e s serv ices de santé et l e s ressources du secteur public. Nous pouvons aussi ajouter avec beaucoup de f i e r t é mais aussi avec une très grande modestie que l e s part ic ipantes et part ic ipants ont qu i t t é ce Colloque avec beaucoup d'enthousiasme et t r è s stimulés à poursuivre l e s b a t a i l l e s quotidiennes pour améliorer leur santé et c e l l e de leurs camarades de t r a v a i l .

Je vous remercie.

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l'association des médecins du travail du québec

PRESENTATION DU

DR PIERRE PHENIX

Président de l'Association des médecins

du travail du Québec

au colloque de

l'Association pour la Santé Publique du Québec

le 9 novembre 1989

Thème: Résumé du colloque Catastrophes en milieu de travail:

sommes-nous prêts? ayant eu lieu les 6 et 7 novembre 1989

à Montréal, Québec

2, Complexe Desjardins, tour de l'Est, 30® étage. C.P. 216, Succ. Desjardins, Montréal (Québec) H5B 1G8 Tél. (514) 286-1220

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Pourquoi choisir ce thème des catastrophes en milieu de travail lors d'un colloque de l'AMTQ?

Parce que: 1) la planification et l'intervention en cas de catastrophe en

milieu de travail se situe dans la continuité du rôle du médecin du travail et implique.une démarche intellectuelle semblable à celle avec laquelle nous sommes familiers.

2) la gestion des catastrophes - aussi bien la planification du plan d'urgence que 1'opérationnalisatiori des activités en cas de catastrophe - exige l'implication et la participation des médecins oeuvrant dans l'entreprise et dans le réseau de santé publique, donc les deux composantes principales du membership de l'Association.

3) les organisateurs du colloque ont l'impression qu'il existe des lacunes importantes dans le processus de gestion des catastrophes et qu'ils croient que les médecins du travail, même s'ils ne sont pas en général responsables de l'élaboration du plan d'urgence, peuvent agir comme levier d'influence auprès des gestionnaires privés et publics, et les amener à prioriser la gestion des catastrophes dans leur propre travail.

Ce texte ne constitue pas un résumé de chacune des conférences, dont certaines présentaient un aspect technique, mais plutôt un compte rendu succinct de style télégraphique à partir d'un fil conducteur. 0 Conférencier "vedette": Dr Gaétan Carrier, coordonnateur en

santé environnementale du DSC Maisonneuve-Rosemont. + a ouvert la marche du colloque en traitant de "L'approche

d'évaluation des risques dans l'entreprise" + il a d'emblée précisé trois notions fondamentales dans

l'évaluation des risques soit: Notion de danger: fait référence à la potentialité

d'atteinte à la santé/intégrité physique;

Notion de risque: probabilité d'occurence - risque individuel ou collectif - risque qu'un événement qu'on

craint survienne - risque qu'il y ait dommages à santé/sécurité si événement survient.

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Notion de facteurs de risque: facteurs qui contribuent à augmenter la probabilité d'occurence ex.: - absence de protection individuelle ou

collective - manque de formation du personnel - mauvais entretien préventif de la tuyauterie.

démarche d'estimation des risques: 1) identifier les éléments dangereux dans l'entreprise 2) définir les effets potentiels en cas d'exposition 3) conditions nécessaires pour que l'exposition se

produise? 4) probabilité d'occurence 5) probabilité de subir les effets néfastes si

occurence (tous les éléments doivent être considérés) a abordé la notion de risque acceptable

selon lui, il ne s'agit pas d'une démarche scientifique mais on doit disposer du plus d'informations possibles, avec rigueur et objectivité? s'il manque des informations, il est préférable de surestimer les risques; il s'est inspiré de ses propres expériences dans la catastrophe de St-Basile et aussi lorsqu'il éta it médecin à Hydro-Québec pour illustrer ses propos,

a souligné qu'il faut avoir fait la démarche intellectuelle avant que ne survienne une catastrophe, sinon on risque d'être inefficace; a parlé de la méthodologie d'analyse qu'i1 est en voie d'implanter pour le territoire du DSC Maisonneuve-Rosemont; a souligné la nécessité de collaboration des différents partenaires impliqués, dont les médecins présents dans les entreprises. André Gagnon, du Bureau des mesures d'urgence de la CUM Rôle — voir à l'organisation de plan d'urgence dans lés

entreprises; coordonner le déroulement des opérations lors de situations d'urgence; s'assurer de 1'harmonisation du plan de l'industrie avec ceux des autorités locales;

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Plan d'urgence: Mobiliser des ressources (internes à industrie et externes)

puis coordonner ces ressources pour contrôler le désastre et ses conséquences

De façon humoristique, il a souligné que les conditions essentielles pour qu'un responsable perçoive le danger et donc la pertinence du plan d'urgence sont:

- danger doit être certain; - danger doit être relativement proche; - responsable doit se sentir personnellement menacé, soit dans son intégrité physique, soit dans le risque de perdre sa job s'il ne fait rien-,.

Brigitte Côté, médecin-conseil en santé communautaire du DSC Maisonneuve-Rosemont, est venue traiter du public et des médias en cas de catastrophe. - elle a souligné le rôle important des médias en cas de catastrophe et le fait qu'on doit rendre des informations disponibles, même si ces informations sont incomplètes;

- en abordant par la théorie dé la communication la situation, elle a souligné que l'émetteur du message

doit être crédible,, détenteur d'un pouvoir réel et avoir un comportement non-verbal en accord avec la situation; - elle a souligné la différence de perspective à l'égard du risque entre les professionnels concernés et le public;

- elle a transmis des conseils pratiques de planification d'une communication.

D'autres présentations plus techniques ont été faites par: M. Paul Martel de Transport Canada, sur la structure d'un plan d'urgence, avec un accent particulier sur les communications et la coordination. M. Yvan Thiffault de CIL, avec un vidéo sur l'organisation d'urgence dans cette corporation, de même qu'un exemple de:gestion d'une fuite de SO chez un client de CIL.

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M. GéraId Vigeant, météorologiste à Environnement Canada a sensibilisé 1'auditoire à 1'importance des conditions météorologiques dans la dispersion des contaminants en cas de catastrophes donc de la population affectée. Il a parlé des outils disponibles : modèle de dispersion atmosphérique (utilisé dans la méthodologie du DSC Maisonneuve-Rosemont).

La deuxième journée du colloque était consacrée aux aspects médicaux et juridiques des catastrophes: 0 Dr MacDonald Caza, directeur santé et hygiène de Noranda

Inc. est venu rappeler aux participants 1'importance de l'intégration de l'organisation médicale d'une entreprise au plan d'urgence et ce à divers points de vue:

attribution de responsabilités bien définies et bien comprises; . participation à l'évaluation des dangers; rôle bien décrit dans le plan d'urgence, et connu de l'équipe médicale adéquation des facilités et équipements d'urgence au plan mécanismes de communication : responsable plan d'urgence — é q u i p e médicale —* ressources hospitalières formation adéquate de l'équipe médicale, mais aussi des ressources hospitalières si risques spécifiques nécessitant traitement spécifique ou inhabituel.

+ Il a transmis également un message que le plan doit être tenu à jour car les usines changent continuellement.

0 Dr Jean-Paul Robin, directeur santé et sécurité à la Division CCR du groupe Noranda Inc. a suivi, et a parlé de son expérience concrète dans son entreprise.

+ l'équipe du service de santé: participe à la planification du plan d'urgence exerce un rôle dans - évaluation aptitude secouristes

- choix de l'équipement - formation des membres de l'équipe

agit comme personnel ressource de l'équipe d'urgence.

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Dr Gaétan Carrier est revenu traiter des responsabilités du médecin de santé publique. il a souligné les ententes relativement récentes entre le Ministère de l'Environnement - MSSS qui font en sorte que le réseau dë santé publique exerce un rôle support/conseil auprès de la population, d'autres experts d'autres domaines, et des décideurs, de même qu'un . rôle support pour l'évaluation des risques. Rôle durant une catastrophe: 1) Participe à l'évaluation des risques en cause 2) Cherche à identifier immédiatement si des personnes

auront besoin de soins urgents (Etre préparé à l'avance, avoir le plus d'informations possibles afin de pouvoir prendre rapidement une décision cruciale ex.: évacuation: re: St-Basile)

3) Recommande les mesures requises pour assurer la santé publique, ex: définir les individus les plus à risque, comme les pompiers à St-Basile.

4) Définit avec les autres spécialistes le type de surveillance médicale et ses embûches.

5) Communique aux personnes exposées le risque qu'elles encourent pour leur santé/intégrité physique.

Revient au concept de communication média-public du Dr Brigitte Côté. Rappelle le concept de crédibilité pour la communication et souligne sa propre expérience à Hydro-Québec. Dans ce contexte, il indique que le médecin de santé publique devrait aller chercher l'expertise du médecin de l'entreprise, si celui-ci est détenteur d'une expertise particulière, mais qu'il ne peut utiliser efficacement vu sa crédibilité plus restreinte auprès du public. Il souligne la nécessité de la collaboration de tous en cas de catastrophe. Pour ce qui est de l'aspect plus "clinique" des catastrophes, 1'auditoire a apprécié le visionnement en primeur d'un vidéo, d'une simulation d'un écrasement d'avion

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à l'aéroport de Québec, présenté par le Dr Renaud Leroux, coordonnateur aux mesures d'urgence du CRSSS-région 03. On pouvait mieux mesurer l'importance de la mobilisation et de la coordination des diverses équipes médicales dans les centres hospitaliers et sur le terrain pour le triage.

0 Par la suite, le Dr Michel Loyer, urgentologue, a aussi commenté un vidéo présentant une méthode simple de triage, en cas de multiples victimes de catastrophe.

0 En après-midi, Dr Stéphane Groulx, médecin-conseil en santé du travail au DSC Charles Lemoyne, a traité des protocoles de surveillance médicale.

+ l i a rappelé certaines des actions de santé publique qui peuvent suivre une catastrophe, de façon à minimiser les risques, soit: - moyens de protection - évacuation - confinement - non consommation eau/aliments - restriction de certaines activités - décontamination environnementale.

+ Pour ce qui est de l'aspect surveillance médicale, il a défini les critères qui doivent être respectés, et rappelé qu'elle doit être basée- sur des connaissances fiables.

+ Il a établi des comparaisons entre la surveillance suite à St-Basile et celle faite à St-Jean, vu la contamination au plomb. Dans un cas, on sait comment faire, dans l'autre, il y a des ??? , des difficultés à faire des tests faciles et valides, etc.

0 Suivi d'un exposé de M. Léo Lalonde, conseiller en administration du personnel, jusqu'à récemment au Ministère fédéral des Transports à Dorval. Il est un spécialiste dans le domaine du syndrome post-traumatique, un problème de santé mentale fréquent mais méconnu chez les victimes de catastrophe, les secouristes et parfois même des membres de l'entourage.

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+ l i a indiqué les manifestations cliniques du syndrome de même que la thérapeutique, le tout assorti d'anecdotes sur ses expériences dans le domaine.

0 Le colloque s'est terminé par un exposé de Michel Yergeau', avocat en droit environnemental chez Lavery, O'Brien. Il a d'abord traité de la législation et des règlements en vigueur dans le domaine environnemental, puis a traité de leur application dans certains dossiers où il a été impliqué, dont St-Basile et la Balmet à St-Jean.

Texte préparé par Pierre Phénix, m.d.

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PREVENTION, PARITARISME ET EFFICACITE

EN GESTION DE LA SANTE

SECURITE AU TRAVAIL

par

MARCEL SIMARD, professeur co-'directeur du GRASP/sst

Université de Montréal

Texte de la conférence prononcée au . Colloque de 1 'Association pour la Santé publique du Québec à 1'Hôtel Le Concorde, Québec, 9 - 1 0 novembre 1989.

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Mesdames, Messieurs,

Permettez-moi d'abord de f a i r e quelques précisions

au sujet du t i t r e de ma conférence. Certains

d'entre vous se demandent peut-être pourquoi j ' a i

associé dans mon t i t r e de conférence, prévention et

paritarisme avec la notion d ' e f f i c a c i t é en gestion

de la SST. Eh! bien, i l y a d e u x raisons à cela.

La première raison renvoie• au sens de

l'intervention de l'Etat en SST qui soulève déplus

en plus certaines questions. Quand- le

gouvernement, par la LSST adoptée en 1979, a établi

la prévention et le paritarisme comme bases d'un

nouveau régime en SST, i l l ' a f a i t non seulement

pour des raisons d'éthique sociale, renvoyant

notamment aux droits fondamentaux des travailleurs

et travailleuses, mais i l l ' a f a i t aussi pour des

raisons d 'efficacité. sociale. En f a i t , selon

l'approche gouvernementale de. l'époque', un régime

de prévention et de prise en charge paritaire de

cette prévention était le seul moyen -de s'attaquer

efficacement aux lésions professionnelles et d'en

réduire réellement 1 'incidence et la gravi té.

Aujourd'hui, on s'interroge, de plus en plus dans

certains milieux . sur l ' e f f i c a c i t é prétendue d'un

tel régimè de SST. Bien que les critiques ne

soient pas toujours faites avec nuances, i l reste

que le f a i t que les taux d'incidence et de gravité

des lésions professionnelles aient été à la hausse

depuis 1 'application du régime dans les secteurs

prioritaires,, est évidemment de nature à soulever

diverses questions concernant non seulement

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l'application, mais aussi plus fondamentalement

l ' e f f i c a c i t é du régime. De sorte que pour une

part, le' t i t r e de ma conférence se veut l'écho de

cette interrogation actuelle sur l ' e f f i c a c i t é d'un

système de SST orienté vers la prévention et le

paritarisme• comme modèle de prise en charge de

cette prévention.

Mais par ailleurs, je veux aussi signifier par ce

t i t r e de conférence, mon' intention de fournir des

éléments de réponse à cette interrogation. I l se

trouve en effet que. depuis 3 ans, j ' a i . poursuivi

des . recherches en profondeur sur les modes de

gestion de la SST dans les entreprises, appartenant

à divers s e c t e u r s p r i o r i t a i r e s ou non. Or, l'une

des conclusions très nettes qui se dégage de toute

cette recherche, c'est que les entreprises

gagnantes en terme de capacité à réduire les

lésions professionnelles, principalement les

accidents du t r a v a i l , sont justement les

entreprises qui mettent la p r i o r i t é sur la

prévention et qui structurent la prise en -charge de

cette prévention autour d'un certain concept de

paritarisme.

J'aimerais donc vous présenter brièvement les

résultats de ma recherche qui supportent cette

conclusion et qui suggèrent aussi des pistes de

réflexion pour accroître 1 ' e f f i c a c i t é du régime de

SST au Québec. Mais, auparavant, j'aimerais vous

présenter brièvemet le cadre de cette recherche.

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I ' Brève présentation de. la recherche.

Cette recherche est d'abord basée sur' un constat

et une hypothèse. be constat est celui-là même qui

est à la base du système de mérite et de démérite

de la CSST, à savoir que dans un même sous-secteur

ou unité de classification, on trouve des

entreprises qui ont des taux\ de fréquence et

gravité d ' accidents très supérieurs à la moyenne,

ce qui les place a u démérite, alors que d'autres

entreprises ont des taux inférieurs, ce qui leur

vaùt d'être au mérite. Cherchant à comprendre les

raisons de ces différences, mon équipe a alors

entrepris une étude-pilote dans un sous-secteur de

1 'industrie t e x t i l e , et . nous nous sommes alors

aperçus que ces différences dans les taux

d'accidents n'étaient pas dû d'abord à des

différences d'ordre technologiques, i . e . au niveau

des risques, ou encore à des différences de t a i l l e

d'entreprise, i . e . des différences au niveau des

moyens d'agir. En f a i t , . en comparant des

entreprises de même, t a i l l e et de technologie et

procédés de fabrication assez semblables, on

constatait toujours ' de très substantielles

différences dans les taux d'accidents compensables.

Par exemple, dans les grandes entreprises, la

différence au niveau de la fréquence des accidents

était de 1 à 8, ce qui . veut dire qu'une grande

entreprise avait 8 fois plus d'accidents qu'une

autre grande entreprise de là même unité de

classification. • ,

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C'est ce constat qui m'a amené à 1 'hypothèse

selon laquelle les différences dans les taux

d'accidents étaient probablement dues, au moins en

partie, à la façon de gérer et de prendre en charge

le dossier SST dans les entreprises. En f a i t , en

raisonnant ainsi, je ne faisais qu'appliquer au

domainè de la SST une hupothèse qui est couramment

vérifiée dans ïe domaine dès affaires, où l'on voit

régulièrement des entreprises déclinantes qui

retrouvent le chemin de la rentabilité et de la

prospérité après avoir été rachetées par une

nouvelle équipe dirigeante.

En somme, selon cette hypothèse, il- y a des

approches gagnantes de gestion de la SST qui se

traduisent par des taux plus bas d'accidents du

travail,. et i l y a aussi des approches perdantes,

exactement comme cela existe dans d'autres domaines

de la vie économique. Mais quelles sont ces

approches gagnantes permettant de réduire notamment

les accidents du travail?.

C'est cette question qui a donné lieu, au cours

des deux dernières années, à une vaste reherche

auprès de toute 1 'industrie manufacturière du

Québec. J'ai privilégié 1'industrie manufacturière

parce q u ' i l s'agit d'un secteur très problématique

au niveau des lésions professionnelles. Par

exemple, en 1987, 1 'industrie• manufacturière

employait seulement 22% du total de la main-

d'oeuvre au Québec, mais elle totalisant 40% de

tous les accidents du travail indemnisés par la

CSST. C'est donc un secteur où l'application de

stratégies gagnantes de gestion de la SST, pourrait

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avoir un impact considérable, au bénéfice de toutes

les parties concernées. D'autre part, c'est aussi

un section o ï l je savais que des expériences très

concluantes- au plan de la gestion de la SST étaient

réalisées, ce qui rendait possible la réalisation

de ma recherche.

C'est donc dans ce secteur que nous avons réalisé

la recherche auprès d'un échantillon de 100

entreprises représentatif de toutes les entreprises

manufacturière employant plus de 70 personnes. Le

taux de réponse à notre s o l l i c i t a t i o n a été de

71%, ce qui est . t r è s élevé et garantit des

résultats hautement généralisables.

Nous avons visité chacune de ces 100 entreprises

où : nous avons réalisé des entrevues et recueilli

diverses information par.ques tionnaires auprès d'un

large éventail de personnes concernées par les

questions de SST: membres de la direction des

entreprises, cadres intermédiaires et

contremaî très, responsables et coordonnateurs du

dossier . SST, mèmbrés des comités. de SST,

représentants à la prévention, médecins et

infirmières du travail-, et président du syndicat,

l o r s q u ' i l y en avait un. Au total, 2169 personnes

dans les- 100 entreprises ont participé à la

recherche, ce qui en f a i t non seulement la plus

vaste jamais réalisée au Québec et ailleurs, mais

ce qui garantit des résultats d'une grande validité

parce q u ' i l s réflètent la réalité complexe du vécu

des entreprises en ce domaine.

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J'ai indiqué tantôt que cet échantillon de 100

entreprises était représentatif des entreprises

manufacturières de plus de 70 employés. C'est donc,

dire qu'on y trouve aussi bien des entreprises plus

efficaces et performantes en SST et d'autres qui le

sont moins. En f a i t , p o u r effectuer les analyses

dont je vais vous présenter maintenant les

résultats, nous avons mesurer l ' e f f i c a c i t é d'une

entreprise en comparant ses taux de fréquence

d'accidents du travail compensables en 86 et 87 par

rapport aux taux moyens de son unité de classifica-

tion pour ces deux années. Ainsi, une entreprise

ayant maintenu sur. ces deux années un taux de

fréquence inférieur à celui de son unité de

classification est définie comme plus efficace,

alors qu'un taux supérieur sur l'une ou les .deux

années classe l'entreprise comme moins efficace..

Et c'est en comparant systématiquement ces deux

sous-groupes d'entreprises que nous ayons pu

identifier les caractéristiques des approches qui

distinguent les entreprises plus efficaces par

rapport à celles qui le' son t.' moins.

2- Prévention et efficacité en gestion de la SST.

Or, la première caractéristique distinctive des

entreprises performantes en SST consis te en la

p r i o r i t é qu'elles! mettent sur la prévention. En

d'autres termest ces entreprises cherchent à

contrôler l'accident plutôt que l'accidenté. Pour

vous aider à comprendre le sens de cette formule,

je vais prendre un exemple dans un a u t r e domaine

que celui de la SST. I l s'agit du contrôle de la

qualité des produits. Ces dernières années, le

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concept de qualité totale a été popularisé dans

divers milieux. Cette approche à la gestion de la

qualité est très différente de 1 'approche

traditionnelle. Dans l'approche traditionnelle, on

contrôle la quali té à postériori,, i . e . en

inspectant le produit une fois q u ' i l est fabriqué.

Ceci permet de détecter les produits défectueux au

bénéfice du client et d ' i d e n t i f i e r les opérateurs

dont le travail est insatisfaisant au plan de la

qu'alité. En termes de stratégie de gestion, cette

approche traditionnelle consiste es sentiellement à

exercer un contrôle, sur l'opérateur, i . e . le

travailleur, par une surveillance de la qualité de

sa production. A l'inverse, l'approche de qualité

totale privilégie les contrôles à p r i o r i , ce qui

amène à développer une gestion de tout le processus

de fabrication de manière à corriger les sources ou

les causes d'errèurs et de défauts de qualité qui

ne sont pas attribuables à 1 'opérateur. Une telle

approche n'élimine pas le contrôle de la qualité du

produit f i n a l , mais elle, change la stratégie de

gestion de manière à- cotrôler 1 'opération plutôt

que seulement 1 'opérateur.

Nos résultats montrent q u ' i l en est de même en

SST, puisque les entreprises gagnantes en termes de

réduction durable de la fréquence de leurs

accidents sont celles qui appliquent ce genre de

stratégie de gestion. Celle-ci consiste à mettre

la p r i o r i t é sur le contrôle du processus d'accident

par diverses techniques pour i d e n t i f i e r , réduire et

éliminer les risques, les causes et les facteurs

d'accident. Ceci ne veut pas dire que ces

entreprises gagnantes n 'exercent pas. de contrôles

au niveau des dossiers d'accidentés. En f a i t , -

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elles surveillent dé près le suivi médical de leurs

employés en accident de t r a v a i l , elles recourent à

1 'occasion à des contre-expertises médicales,' elles

contestént également certains dossiers devant les

tribunaux administratifs et elles pratiquent à

1'occasion 1'assignation temporaire. Mais, tout

comme dans le cas de la qualité totale, l.a raison

principale de leur succès à réduire la fréquence de

leurs accidents, n'est pas au' niveau de ces

contrôles administratifs qui s'exercent à

postériori, i . e . après que l'accident soit: survenu

et qui visent l'accidenté plutôt que l'accident. En

f a i t nos analyses montrent que les entreprises les

plus performantes en. SST ont. même tendance à

u t i l i s e r moins que la moyenne, certains de ces

contrôles, notamment la contestation devant la

CSST.

Par contre, le t r a i t d i s t i n c t i f des entreprises

performantes, et donc une des raisons principales

de leur succès à réduire les accidents du t r a v a i l ,

tient au f a i t qu 'elles s 'impliquent très activement

dans le contrôle du processus d'accident. En e f f e t f

nous avons constaté que la stratégie de prévention

des \entreprises performantes en SST est à la fois

plus développée que celles des entreprises moins

performantes, et a u s s i plus équilibrée. Cet aspect

d'équilibre dans l'approche de prévention est très

important pour assurer un contrôle efficace du

processus d'accident. Cet équilibre existe quand

on combine deux types d'activités de prévention.

D'une part, i l faut avoir dès activités pour bien

identifier et connaître les1 risques et les causes

d ' accident, par exemple grâce à des inspection s

régulières et systématiques des lieux de t r a v a i l ,

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d e bonnes enquêtes d 'accident approfondies et des

analyses de sécurité des tâches. D'autre part, une

stratégie équilibrée de prévention implique aussi

des activités pour contrôler 1 es risques et

éliminer les causes d ' a c c i d e n t t e l l e s que par

exemple 1 'entretien préventif de 1'équipement,

1 'action corrective sur la machinerie,

1 ' u t i l i s a t i o n des protecteurs individuels et la

formation aux comportements sécuritaires chez les

contremaî très et lés employés. En somme, le

contrôle efficace du processus d'accident suppose

qu'on n'ait pas peur d ' i d e n t i f i e r et de bien

connaître' les problèmes d'ordre matériel,

technique, organaisationnel. et humain qui sont

sources d'accidents et qu'on développe des moyens

pour corriger ces problèmes. C e t équilibre peut

paraître évident sur papier, mais dans la réalité,

u n e majorité des entreprises que nous avons

étudiées ne l'ont pas encore atteint. En f a i t ,

dans de nombreuses entreprises, nous avons observé

des faiblesses soit au. niveau des moyens de

connaître adéquatement les risques et les causes de

1eurs accidents, soi t au con t r a i r e au hi veau du

suivi des mesures correctives. Et nos analyses

montrent que dans la très grande majorité de^s cas,

les entreprises qui ont un système de prévention

sous-développé et déséquilibré sur l'une ou l'autre

de ces deux composantes, sont moins efficaces à

réduire la fréquence de leurs accidents. A

1'inverse, là grande majorité des entreprises ayant

un système équilibré de prévention ont des taux

d 'accidents plus.bas que la moyenne.

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Cependant, i l ne faudrait pas croire qu'une

gestion efficace de la SST est uniquement une

question de ressources. C'est aussi une question

d 'attitude. Par exemple, nous . avons observé que

dans, les entreprises les plus performantes en SST,

le plus souvent• le coordonnateur SST et les

contremaîtres, qui sont deux maillons très

importants de la chaîne de gestion du dossier,

partagent une conception intégrée 'de la sécurité au

t r a v a i l . Or, une conception intégrée de la

sécurité, c'est précisément une attitude qui

consiste à voir les accidents du travail comme

résultant de divers facteurs techniques,

organisationnel's et humain et qui conçoit la

solution à ces problèmes par des interventions sur

les différentes causes d'accident. Au contraire,

quand i l y a des attitudes simplificatrices vis-à-

vis des accidents du genre "les accidents sont dus

•à la négligence des employés1'entreprise est

moins efficace, parce que ce genre d'attitude

dispose à contrôler 1 ''accidenté et à trouver un

coupable plutôt que de contrôler le. processus

d'accident en identifiant et réglant les différents

problèmes qui sont à son origine.

Voilà donc un ensemble de caractéristiques tirées

encore une fois de l'expérience des entreprises les

plus performantes, et qui montrant que la première

raison expliquant pourquoi ces entreprises sont

plus efficaces que d'autres, consiste dans le f a i t

qu'elles orientent leur stratégie vers la

prévention et le contrôle des accidents plutôt que

vers le contrôle des accidentés. Mais cette plus'

grande efficacité s'explique aussi par une seconde

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raison qui elle renvoie davantage à un certain

concept de paritarisme.

3. Paritarisme et efficacité en gestion de la SST

Le plus souvent, quand on pense au pari tarisme en

SST au niveau de l'établissement, on ne pense qu'au

comité paritaire de SST, lequel peut comprendre un

représentant à* la prévention. On oublié trop

souvent que le paritarisme, c'est aussi et peut-

être . même d'abord la participation ' directe des

travailleurs à la base, conjointement avec les

premiers représentants de 1'employeur, en

l'occurencë les contremaîtres et superviseurs, à la

prise en charge de la prévention.

Et de f a i t , si l'on s'appuie sur l'expérience des

entreprises les plus performantes en SST que nous

avons étudiées, l ' e f f i c a c i t é èn gestion de la SST

est la résultante non seulement de certaines

caractéristiques du comité de SST, mais a u s s i du

f a i t que la préventiàn est intégrée à la ligne.de

production et qu 'en conséquence contremaîtres et

travailleurs à la base participent à sa prise en

charge. En f a i t , nous avons observé t r o i s façons

différentes de structurer la prise en charge de la

prévention., La première est une structuration

plutôt centralisée, selon laquelle c 'est le :

responsable du dossier SST et le comité de.SST qui

réalisent les principales activités de prévention.

La deuxième façon consiste à décentraliser la prise

en charge de la prévention au niveau de la ligne

hiérarchique, en impliquant les contremaîtres dans

la . réalisation de certaines activités de

prévention. Comme on peut le voir au tableau

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suivant, 1 'une et 1 'autre de ces deux approches

sont peu efficaces. Ce qui est beaucoup plus

efficace, c'est une troisième approche qui consiste

à structurer la prise en charge de la prévention au

niveau de la ligne de production, et par conséquent

à impliquer dans des activités de prévention, non

seulement les contremaîtres, mais aussi et surtout

les travailleurs avec eux.

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Proportion des entreprises plus et moins efficaces en gestion de la sécurité du t r a v a i l , selon les stratégies de structuration de la prise en charge de la prévention

Stratégies de structuration de la prévention

Degré d ' e f f i c a c i t é en gestion de la sécurité du travail

Centralisation (intervenants

SST)

Décentralisation hiérarchique

(intervenants

Décentralisation en profondeur

intervenants

(n=25)

SST et contre-maîtres)

(h=29)

SST, contre-maîtres et employés)

(n=36)

.

Faible efficacité (taux r e l a t i f s de fréquence d'accidents supérieurs en 1986 et'1987)

-

73,2%

-

70, 4% •

• .

V 371 09!

Forte efficacité . (taux r e l a t i f s de fréquence d'accidents inférieurs en 1986 et 1987)

26,8%

29, 6%

63,0*

X = 10,34, p = 0,005, Cramer 's V = . 0,34

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Cette .approche est beaucoup plus efficace pour

trois ràisons.

D'abord, elle sensibilise à la prévention non

seulement les gestionnaires mais aussi les

travailleurs qui sont les plûs directement

confrontés aux risques. Ensuite, elle u t i l i s e la

connaissance des risques que les travailleurs ont

développée dans le cadre même de l e u r t r a v a i l , ce

qui est de nature à favoriser des solutions plus

réalis tes et applicables par rapport aux problèmes

de SST. Enfin, elle.favorise un meilleur suivi des

mesures correctives parce que les gestionnaires ont

désormais des comptes à rendre à leurs travailleurs

impliqués en prévention et informés des mesures

correctives recommandées.

Mais encore une f o i s , ceci ne veut pas dire que

le rôle et la place du comité de SST, mécanisme

pari taire plus formel, sont sans effet sur

l ' e f f i c a c i t é de la gestion de la SST. Au

contraire, les comités de SST qui opèrent dans les

entreprises plus efficaces en gestion de la SST et

qui contribuent ainsi à réduire les accidents du

t r a v a i l , ont généralement les trois

caractéristiques suivantes.

Ainsi, une première caractéristique des comités

qui contribue à l ' e f f i c a c i t é , c'est d'être bien

enracinés dans le milieu de t r a v a i l . Par exemple,

on observe dans les entreprises efficaces en santé-

sécurité une très forte tendance à développer une

structure décentralisée -de comi tés avec un .comité

central et des sous-comités dans les départements

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de production. Et cette tendance existe autant

dans les petites et moyennes entreprises que dans

lès grandes. Une telle structuration du comité de

SST permet de désengorger 1e comité centra1 qui

peut ainsi fonctionner autrement que sur la base de

la fameuse " l i s t e d'épicerie", parce que

l'essentiel de ces petits problèmes sont réglés par

les sous-comités de département, ce qui contribue

précisément à intégrer la prévention aux opérations

couran tes, tout en permettant au comité central de

s'occuper de dossiers de plus grande envergure.

Une deuxième caractéris tique des comités qui

contribue également à une plus grande e f f i c a c i t é ,

c 'est d'être fortement appuyés par les autres

composantes du milieu de t r a v a i l . En f a i t , les

résultats montrent. que les comités qui contribuent

le plus à la réduction des taux d'accidents du

travail sont ceux qui obtiennent à la. fois un appui

f o r t de . la direction de .1 'entreprise et du

syndic at, quand i l existe, et la collaboration

active des contremaîtres.

Enfin, la troisième caractéristique des comités

dans les entreprises efficaces en santé-sécurité,

c'est q u ' i l s sont beaucoup plus impliqués dans

l'élaboration des mesures de prévention que les

comités des entreprises peu efficaces en santé-

sécurité. Disons d'abord à c e . sujet que les

entreprises efficaces ont généralement une

stratégie de prévention socio-technique ausens où

la prévention vise à la fois à éliminer-les risques

d 'accidents provenant de 1'équipement . ou de.

I 'environnement de travail et à modifier les

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comportements au travail pour les rendre plus

sécuritaires. Or, on observe à partir des

résultats de la .recherche, que dans les entreprises

efficaces en santé-sécurité, les comités sont très

impliqués sur ces deux volets de la stratégie de

prévention, alors que les cômités des entreprises

peu efficaces sont beaucoup moins impliqués. Ceci

veut dire concrètement, que les comités sont non

seulement impliqués dans 1'étude et la discussion

des mesures correctives visant à éliminer les

dangers à la source, mais q u ' i l s s'occupent a u s s i

activement de la formation-information à donner aux

travailleurs en matière de santé-sécurité du

t r a v a i l .

Les comités ^de SST qui combinent ces trois

caractéristiques peuvent être considérés comme

occupant une place importante, au plan stratégique

et opérationnel dans le système de prévention de

l'entreprise. C'est alors q u ' i l s contribuent de

façon très significative à 1 ' e f f i c a c i t é de la

gestion de là santé-sécurité et à la réduction des

taux d'accidents. Ainsi, les trois

caractéristiques des comités de SST dont je viens

de parler expliquent à elles seules plus de 30% de

la variance dans les taux de fréquence d'accidents

existant entre les deux groupes d'entreprises,

efficaces et inefficaces en santé-sécurité, que

nous avons étudiées dans la recherche.

Malheureusement, une minorité seulement des comités

de SST, qui existent pourtant dans les trois quarts

des entreprises manufacturières, sont actuellement

bien intégrés au système de prévention. En f a i t , ,

une majorité des comités s o n t encore dans une

situation marginale pour diverses raisons, ce qui

réduit d'autant l ' e f f i c a c i t é des efforts de

prévention.

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Les résultats de cette recherche sont donc très

clairs en ce qui concerne 1'importance de la

prévention et du paritarisme comme déterminants de

l ' e f f i c a c i t é en gestion de la SST et de la capacité

des milieux de travail à réduire les lésions

professionnelles. En ce sens, ces résultats

confirment que ces deux grandes orientations de

notre régime de SST sont tout à f a i t valablês et

qu 'on doit chercher dès moyens d'en renforcer

l'application pour en accroître l ' e f f i c a c i t é plutôt

que de les remettre fondamentalement en question.

Dans cette perspective d ' a i l l e u r s , les résultats de

la recherche suggèrent certaines pistes de

réflexion. D'abord, on constate à partir de la

recherche que les entreprises gagnantes au plan de

la réduction des accidents du travail sont celles

qui m e t t e n t vraiment la p r i o r i té sur la prévention.

Or, i l est bien connu que le mode de t a r i f i c a t i o n

et de. financement du régime actuel est peu

i n c i t a t i f , au plan économique, pour amener les

entreprises à mettre la p r i o r i t é sur• la prévention.

Le résultat est que dans une majorité des

entreprises, la prévention e s t encore trop

élémentaire et minimale pour donner de véritables

résultats. I l semblerait cependant que le nouveau

mode de t a r i f i c a t i o n et de financement proposé par

la CSS.T puisse améliorer la situation actuelle sous

ce rapport. . ~

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Deuxièmement, on voit à partir de la recherche que

les entreprises qui ont du succès à réduire leurs

accidents du travail sont celles qui orientent

clairement leur stratégie de prévention vers cet

objectif et qui à cette f i n , développent non

seulement un éventail d'activités correctives, mais

aussi plusieurs activités pour bien identifier et

analyser les problèmes à régler,' i . e . les dangers

et facteurs d'accidents à éliminer et contrôler.

Or, i l y a peut-être certains problèmes en ce sens,

dans notre régime de SST. Par exemple, le

programme de prévention fournit un cadre pour le

développement d'activi tés correctives Jadaptation

aux- normes, entretien préventif, moyens. de

protection individuelle, formation-informat ion,

e t c . . . ) , mais.il y a très peu d'autres dispositions

qui favorisent la structuration d'activités

d'identification et d'analysé des problèmes. Ce

déséquilibre n'est pas de nature à favoriser la

qualité des programmes de prévention. Par

ail leurs, je ne pense pas que le programme de

prévention ait été conçu et administré dans la

perspective d ' ê t r e clairement un plan de réduction

des lésions professionnelles, et notamment des

accidents du t r a v a i l . En partie pour des raisons

administratives, les programmes de prévention ont

été davantage des plans d'adaptation aux normes

réglementaires, alors que les programmes de santé

ont peut-être été da vantage orien tés en fonetion

d'une réduction des lésions professionnelles,

essentiellement les maladies industrielles

cependant. En conséquence, 1 a conception et

1'administration des programmes. de prévention

devrait f a i r e l ' o b j e t d'une réflexion.

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Troisièmement, i l faut redonner à la participation

des travailleurs à la base toute son importance

dans la promotion qui est f a i t e du paritarisme. Au

niveau de l'établissement, le paritarisme ne doit

pas être réduit à la mise sur pied d'un comité de

SST et à la désignation d'un représentant à la

prévention. Cependant, même sur ces aspects plus

institutionnels du paritarisme, i l y a beaucoup à

f a i r e dans une majorité des milieux de travail pour

que ces mécanismes jouent pleinement leur rôle et

contribuent ainsi à accroître 1 ' e f f i c a c i t é des

stratégies de prévention. Tous les intervenants,

et particulièrement les associations sectorielles

et les services de prévention-inspection de la

CSST, doivent intensifier leurs efforts en ce sens,

car notre capacité collective à réduire les lésions

professionnelles passe par une intégration du

paritarisme à la gestion de la SST.

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L'ENVXRONNBlQtr AU-DELA DBS ZONES DE TRAVAIL

EXPERIENCES VECUES

Conférence prononcée au colloque

"L'heure juste en santé et sécurité du travail. Intensifier 11 action"

organisé par l'Association pour la santé publique du Québec les 9 et 10 novembre 1989 à l'Hôtel Loew's le Concorde à Québec

Gilles Martin Conseiller syndical

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Le Syndicat canadien de la fonction publique, SCFP (FTQ) est impliqué activement depuis plusieurs années dans la cause de la défense de l'envi-ronnement. Certaines actions ont été posées conjointement à la Fédéra-tion des travailleurs et travailleuses du Québec FTQ tandis que d'autres ont été faites localement ou provlnclalement par le SCFP. Voici quelques exemples:

En 1984 avait lieu une explosion d'un transformateur de haute tension à l'Institut de recherche énergétique du Québec (IREQ de Hydro-Québec). Des représentants de la presse ont tenté de savoir de la part des repré-sentants d'Environnement Québec et d'Environnement Canada si des Byphénll Polyclorés (BPC) étalent touchés par l'Incendie. La réponse donnée, à ce moment, était qu'il n'y avait pas de BPC dans cet incerxiie. Cependant, le lendemain matin la réponse s'est avérée fausse et à ce moment la pani-que s'est emparée de plusieurs.

Le temps nous a permis de constater que les pompiers qui avalent été en contact avec les suies contaminées n'avalent pas reçu la formation ou l'Information concernant les risques de leur travail, malgré une exigence de la Loi santé et sécurité du travail et de ce fait ils ne réalisaient pas qu'en apportant du linge souillé par les suies à la maison, ils expo-saient leur famille à de graves dangers, notamment parce que les dioxines produites par une combustion à basse température d'huile contaminée par des BPC sont d'une très grande toxicité et peuvent causer la mort si Ingérées accidentellement et ce, même en très petite quantité.

La population était très mal renseignée aussi puisque la seule source accessible (ou presque) sur ces informations était les vidéos et quelques émissions de télévision préparées par Hydro-Québec. Ce matériel offre de 11 information Incomplète et souvent faussement rassurante quant aux dan-gers potentiels. On y mentionne, à titre d'exeraple, qu'aucune étude n'a démontré de relation entre l'exposition au BPC et lé cancer chez l'être humain.

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Pourtant, le Centre canadien d'hygiène et sécurité au travail, dans une brochure sur les BPC, cite le Centre international de recherche sur le cancer:

"Le CIRC a fondé son évaluation sur un certain nombre d'études sur cle? personnes et des animaux de laboratoire, ainsi que sur og expériences à court terme. En combinant les preuves suffi-santes et les éléments insuffisants, les experts du Centre exit finalement conclu que les BPC étaient probablement cancérigènes pour les humains, même si, selon leurs critères, cette conclu-sion s'appuie sur des preuves incertaines.11

durant la rencontre préparatoire des procédures de décontamination du laboratoire de haute tension où s'est produite l'explosion et en présence d ' environ trente personnes représentant Hydro-Québec,- Environnement Canada, Environnement Québec, la CSST, les trois sections locales du SCFP; un cadre de l'entreprise beaucoup moins prestigieux que son diplôme déclarait sans gêne aucune: "Les BPC, vous en avez peur pour rien, j'en boirais un grand verre". . Il est révoltant de constater que tous les moyens semblent bons pour banaliser le danger.

Nous vivons encore trop fréquemment le mythe qu'un titre ronflant: direc-teur de .., vice-président de... où doctorat ou maîtrise implique néces-sairement honêteté et qu'ils disent toute la vérité. Nos expériences nous démontrent souvent le contraire.

J'ai entendu, au cours d'une des présentations durant le présent colloque que l'accident de Saint-Basile-le-Grand, que plusieurs ont appelé Saint-Tchernobile-le-Grand, avait été bien "géré" ou contrôlé, tout au moins au niveau du syndrome post-traumatique. Pour y être personnellement inter-venu, je n'hésite pas à vous dire que, ou les spécialistes n'ont pas dit toute la vérité, ou bien les médias les ont mal cités. J'ai rencontré les cols bleus qui ont agi ccrane pompiers volontaires sur le site de l'incendie. Environ une semaine après l'accident, quelques représentants de la célèbre CSST étaient venus expliquer le rôle que cet organisme "jouait" sur le site. J'ai été renversé de constater que personne, même pas les spécialistes que l'on voyait tous les jours au bulletin de nou-

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velles n'avait informé ces travailleurs des risques auxquels Ils étalent exposés en étant en contact avec des suies.

On leur avait expliqué comment laver un camion contaminé par les suies mais rien du tout sur les dioxines et les furanes qui pouvaient se re-trouver dans les suies. Aucune précaution sur le linge contaminé qu'ils apportaient à leur domicile le soir et que leurs enfants pouvaient tou-cher accidentellement. Pourtant la revue "National Geographic" en mars 1985, dans une édition spéciale sur l'environnement, écrivait en page 344:

"2,3,7,8 TCDD, les dioxines sont les composés chimiques synthétiques organiques les plus toxiques connus à ce jour, même si aucun être humain n'en est mort à date", (traduction libre)

Que faisaient les spécialistes? Ils s'efforçaient surtout à tuer la panique au lieu de fournir les informations essentielles aux premiers concernés, soit les cols bleus, puisqu'ils allaient sur le site contaminé plus de quinze heures par jour.

La population a été à peine informée et dans plusieurs cas pas du tout! A une question que posait un journaliste à savoir si on avait retrouvé des BPC dans le lait maternel des femmes qui allaitaient leur bébé, un "spécialiste" a répondu:

"Nous n'en avons pas trouvé plus que nous nous attendions d'en trouver"

Serait-il donc devenu normal de retrouver des BPC dans le corps de tous les Québécois ou Québécoises? Le laxisme voire même l'incurie des gou-vernements a certainement eu un rôle à jouer dans cette situation. Un journallste a posé la question: "les BPC, est-ce que c'est toxique"? Le "savant" de répondre "N N N Non".. La seconde question qui aurait dû être posée: "pas toxique veut-il dire pas dangereux"? Mais malheureusement cette question ne fut jamais posée.

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Devons-nous en tant que société considérer qu'une augmentation de risque de cancer doit être interprétée comne étant dangereuse? Je crois que oui!

La notion de danger pour plusieurs "savants" est reliée à une preuve scientifique, or cette preuve est longue à produire et se fait presque uniquement à partir de la liste des victimes et de plus pour conclure qu'il y a preuve, ces savants personnages interprètent comme valeur con-fondante toute exposition à'une autre source de danger. Le résultat de toute cette savante démarche est qu'un produit dangereux est considéré (jusqu'à preuve du contraire) comme ne l'étant pas et ce, autant pour l'environnement que pour le milieu de travail.

Le bénéfice du doute est accordé au contaminant ou produit dangeruex plutôt qu'à la personne. On traite le produit dangereux ccttme l'être humain est traité en droit criminel, ce qui est une erreur grossière. Les deux grandes philosophies continuent à être confrontées; les employeurs nous disent "donnez-nous la preuve que c'est dangereux et nous ne vous le ferons pas faire" et nous, les syndicats, continuons à répéter "donnez-nous la preuve que c'est sécuritaire et nous le ferons sans mau-gréer". De tout évidence, l'approché privilégiée par plusieurs "savants" s'apparente étroitement à la philosophie que prônait les employeurs et les gouvernements.

Un autre aspect de la notion de danger qui est aussi faussement rassurant est toute la question des normes. Une autre phrase souvent entendue "les BPC retrouvés étaient en quantité égale ou inférieure à la norme". Ce que veut dire cette norme n'est pas du tout que c'est sécuritaire mais plutôt qu'à cette concentration nous n'aurons pas plus de cancers que ceux qui ont fixé cette noiroe ont accepté qu'il y en ait.

Les normes en santé et sécurité du travail et en environnement sont ba-sées sur la notion de risques acceptables tels que déterminés par nos chers politiciens qui sont souvent beaucoup plus préoccupés par la santé économique que par la santé de la population. Nous savons depuis au

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moins 25 ans que la norme d'exposition au bruit en milieu de travail rendra 1 personne sur 5 sourde à un tel point qu'elle pourra être indem-nisée par. la CSST (selon l ' a n c i e n n e loi des accidents du travail); pour-tant certains pays, couue la Suède, malgré le fait qu'elle soit en bonne santé économique, a des normes de 2 à 3 fois plus exigeâtes que celles que nous avons Ici et que le gouvernement ne fait même pas respecter.

Le règlement sur la qualité du milieu de travail qui détermine des seuils maximaux d'exposition à certains contaminants n'a pas été amélioré depuis sa publication mais les Etats-Unis, qui ne sont pourtant pas un pays progressiste, ont diminué jusqu'à 5 fois les seuils d'exposition à cer-tains produits; les nôtres sont demeurés inchangés et qui plus est, ne sont même pas respectés.

Le 2 septembre 1988, nous donnions avec la FTQ une conférence de presse où nous avons dénoncé Hydro-Québec, preuve à l'appui, quelques dizaines de photos de sites contaminés et plusieurs lettres du ministère de l'Environnement qui accuse Hydro-Québec de violer la loi de la protection de l'environnement en diluant des huiles contaminées et en vendant de l'appareillage contaminé.

Pourquoi cette nouvelle n'a à peu près pas été touchée par les médias? Liberté de presse? Choix du rédacteur en chef? Choix du chef de pupi-tre? Pas une nouvelle importante? Serait-ce parce que Hydro-Québec dépense des millions en publicité et que les médias aiment ces contrats lucratifs? Les médias nous répondront sûrement que ce n'est pas du tout pour cette raison. Ils n'ont, de toute façon, pas beaucoup de comptes à rendre. Le choix de la priorlsatlon des nouvelles leur appartient en entier. La libre entreprise s'occupe du reste... Mais qui s'occupera de la santé des êtres humains?

Voici quelques extraits d'un communiqué de pressé de la FTQ:

"La FTQ accuse le gouvernement et Hydro-Québec de négli-gence criminelle.

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Monsieur Laberge a déclaré que la FTQ considère que le gouvernement doit être tenu responsable de ce désastre parce qu'il a fait preuve d'un laxisme qui mettait quoti-diennement en. danger la vie, la santé et la sécurité de milliers de Québécois et Qubécoises depuis plusieurs an-nficfl •

...Le problème fondamental ne réside pas dans la sévérité des normes mais dans la volonté de les faire respecter. Et si les anciennes normes avalent été rspectées, si les inspections avalent été faites, si les contrevenants avaient été poursuivis, nous ne serions peut-être pas aux prises avec cette catastro-phe. Pour la FTQ, il ne fait aucun doute qu'il y a un lien direct à faire entre ce sinistre et les politiques de déréglementation, de privatisation et de désengagement de l'Etat prônées par le gouvernement Bourassa. Pour le SCFP, ...Hydro Québec procède actuellement à une campagne de relations publiques qui vise à cacher et à camoufler son inaction chronique, ses mensonges et son mépris des lois et des règlements du ministère de l'Envi-ronnement du.Québec (MENVIQ) etc."

La FTQ à son congrès de 1987 a voté une résolution d'urgence sur les 3PC et déchets dargereux. Voici quelques extraits:

Attendu que les BPC sont soupçonnés depuis longtemps comme étant cancérigènes et que leur composition chimique fait en sorte que si déversés dans l'environnement, ils y res-terait pour plusieurs décennies. • Attewîu que les BPC sont véhiculés par l'eau et se retrou-vent dans la chaîne alimentaire et selon Hydro-Québec chaque Québécois a dans son organisme plus de BPC que la réglementât ion le permet; nous serions donc des déchets toxiques ambulants . Attendu que ce changement à la réglementation permettra de venire, pour être brûlés, environ 65 millions de litres d'huile maintenant considérée canne déchet dangereux, le but ultime de cette démarche est de transformer une con-trainte réglementaire qui vise à protéger la santé publi-que en une démarche bassement profitable pour les pol-lueurs. Attendu que le brûlage de ces huiles représente des dan-gers importants pour les humains et l'environnement.

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Attendu que Hydro-Québec fait depuis plusieurs années des campagnes publicitaires visant à rassurer faussement les employés et la population à l'effet que les BPC ne sont pas prouvés came étant dangereux. Il est résolu que la FTQ dénonce publiquement les dangers d'une telle modification à la réglementation sur les dé-chets dangereux ét ses conséquences. Il est résolu que la FTQ fasse part aux gouvernements Bourassa et Mulroney de notre désaccord face à tout chan-gement ou modification à la baisse; cette réglementation, au contraire, devrait être plus exigeante, etc. etc.

Il y a quelques jours le ministère de l'Environnement faisait savoir à la population qu'il n'émettrait pas d'ordonnance à la Cie Bélinet à Saint-Jean et ne fixerait pas non plus de délais pour nettoyer le site conta-miné au plomb. Il y a pourtant eu suffisamment de personnes intoxiquées pour justifier une action à court terme. Pourquoi cette tolérance? Quels intérêts défend le ministère de l'Environnement en se comportant de la sorte? Serait-ce les intérêts de la libre entreprise aux dépens de la santé publique?

Une autre firme de récupération de plomb à Saint-Sylvestre dans le comté de Lotbinière fait l'objet d'une enquête présentement. Pouvons-nous nous attendre à une attitude différente de celle qu'affiche le ministère dans le cas précité?

Le Syndicat canadien de la fonction publique a dénoncé encore une fols le 29 septembre dernier Hydro-Québec qui pollue la seule source d'eau pota-ble aux Iles-de-la-Madeleine et de cacher la vérité aux résidents. Hydro-Québec a refusé pendant des mois de fournir les rapports d'analyse de la contamination des sols au-dessus de la nappe d'eau qui alimente les résidents des Iles. Il a fallu la loi d'accès à l'information pour que l'entreprise remette au syndicat lesdits documents, il y a de cela quel-ques semaines. Nous avons appris récenment qu'il s'agit de deux sources de contamination de 40,000 litres.

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Voici le conmuniqué de presse que nous émettions le 27 septembre dernier

OOMJNIQUE DE PRESSE

Hydro-Québec, principal pollueur aux Iles-de-la-Madeleine

Le Syndicat des employé-è-s de bureau d'Hydro-Québec, section locale 2000, SCFP - FTQ, accuse le P.D.G. d'Hydro-Québec, Mons-ieur Richard Drouln, de cacher la vérité aux résidentes et résidents des Iles-de-la-Madeleine concernant deux sources de pollution et non une... soit la contamination des sols de la Centrale thermique de Cap-aux-Meules et de l'unique source d'eau potable, des Iles. Le Syndicat affirme que la population est en droit de savoir toute la irrité sur la qualité de son environnement. Le 11 juillet dernier, le président provincial du syndicat. Monsieur André Charbonneaux, écrivait à Monsieur Richard Drouln, P.D.G. actuel d1 Hydro-Québec, pour lui demander des explications sur la soi-disant contamination des sols et de l'eau souterraine suite à des informations reçues. Ce n'est que le 8 août 1989, soit un mois plus tard que Monsieur Drouin donne signe de vie et convoque les représen-tants syndicaux pour une rencontre d'information le 23 août 1989. Fort curieusement le 11 août 1989, dans son édition télévisée, Radio-Canada rapportait la possibilité d'une contamination de la nappe phréatique avec des huiles provenant de cette centrale de Cap-aux-Meules. Malheureusement, le communiqué ne parlait pas des quatre cent cinquante barils entreposés depuis plu-sieurs années pêle-mêle sur un site inapproprié de la Centrale thermique. De l'aveu même d'Hydro-Québec, personne ne connais-sait ce que les barils contenaient et ce fut la surprise d'ap-prendre que nombre de barils contenaient des huiles contaminées aux B.P.C.; dans certains cas la concentration dépassait les 14000 p.p.m. alors que la concentration minimale se situe à 50 p.p.m.

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UNE RENCONTRE SANS REPONSE..

Le 23 août 1989, le Syndicat a appris que la nappe d'eau conte-nait, selon les évaluations des experts, près de quarante mille (40 000) litres d'huile dont an ne connaît pas encore la nature ou même si celle-ci serait contaminée par des B.P.C... Devant cette catastrophe écologique, le Syndicat n'a pu obtenir de la Direction la source du déversement, depuis combien de temps les huiles ont atteint la nappe d'eau souterraine, ni même si cette situation persiste toujours. Le Syndicat a in-sisté pour obtenir tous les documents qui sont d'ordre public, concernant les analyses de sols qui ont été effectuées au prin-temps. Ce fut un non catégorique de la part de la Direction d ' Hydro-Québec. Compte tenu qu'Hydro-Québvec a toujours soigné son Image face à la population et se vante même d'être à 11 avant-garde de la protection de l'environnement des Québécoises et Québécois, le Syndicat comprend mal cette attitude qui nous porte à croire que la société d'Etat cache la vérité à la population du Québec.

LA DIRECTION DOIT MAINTENANT Informer de façon régulière la population des Iles-de-la-Madeleine de tous lés travaux qui seront effectués; Rendre publics tous les rapports et expertises effectués et qui se feront à l'avenir; Mettre tout en oeuvre pour qu'en aucun moment, ni la popu-lation ni les syndlqué-e-s de ce secteur soient menacés par cette pollution; Et enfin, entreposer tous es produits toxiques selon ses propres normes et selon celles du ministère de l'Environ-nement (MBWIQ).

Une autre façon de banaliser ou de faire oublier les vrais pollueurs est de responsabiliser l'Individu par toutes sortes de campagnes publicitai-res souvent faites à même les deniers publics en tout ou en partie. Un bel exemple: "touche pas à ma planète" après une petite musique douce. On s'entête à répéter plusieurs fols par jour, à la radio "Eteignez vos lumières quand vous n'en avez pas besoin - le robinet qui fuit - ne je-tez pas vos cannettes de boissons gazeuses, faites-les recycler, etc." sans jamais mentionner les vrais pollueurs qui laissent échapper dans

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l'air, dans l'eau ou dans le sol, à chaque année, des centaines de tonnes de déchets toxiques de toute sorte.

I l ne faut pas oublier qu'une autre étude récente a démontré que 73* des entreprises ne payent pas un sous d'Impôt. Nous savons que les entrepri-ses bénéficient, dès leur Implantation dans une région, de subventions généreuses de toutes sortes et d'autres sommes sont régulièrement "injec-tées" ou investies sans profit par nos gouvernements depuis longtemps dans les entreprises. Est-Il normal que nous encouragions ces.pollueurs et générateurs de maladies à moyen et long terme au nom du simple fait qu'ils fournissent de plus en plus d'emplois précaires et que lorsque les projets cesseront d'être très gros, ils plient bagage et que nous devons assumer les douleurs humaines et financières des maladies qu'ils ont si généreusement distribuées.

Nous avons été très peu exigeants de nos gouvernements, c'est pourquoi le problème prend des allures de catastrophe. Selon plusieurs experts di-gnes de fol, l'avenir de la planète se jouera dans les dix ou quinze pro-chaines armées.

La solution de mettre les industries polluantes à l'amende (surtout des amendes de 5,000$ ou 10,000$ et qui génèrent des profits de plusieurs millions de dollars) n'est sûrement pas la meilleure solution. Ces "no-bles entreprises" auront vite fait de nous refiler ces coûts. Une des solutions pourrait être d'inclure la pollution dans le code criminel et d'emprisonner les très dignes présidents et membres de conseils d'admi-nistration qui, dans le fond, sont ceux qui bénéficient d'une façon di-recte du tort qu'ils causent à l'environnement et à la population en général.

Aujourd'hui le mur de Berlin a été "défoncé", le totalitarisme est en voie de régression et c'est très bien. Il nous reste maintenant à briser le pouvoir presque absolu qu'ont certaines entreprises. La pollution doit cesser d'être payante pour ces pollueurs. Il est odieux que nous devions assumer les coûts humains et financiers des maladies causées

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directement par leurs profits. La libre entreprise doit se faire retirer le droit de causer la maladie et la mort.

Le Syndicat des chauffeurs d'autobus de la Rive-Sud de Montréal, SGFP, section locale 3333, s'est vu Imposer une amende de 100,000 $ pour avoir prétendument recommandé une grève soi-disant illégale et pendant ce temps les pollueurs industriels s'en tirent "pattes blanches" ou avec des amen-des ridicules.

Nous devons, à très court terme, exiger de nos gouvernements qu'ils chan-gent d'attitude envers les compagnies qui jouissent depuis trop longtemps d'un pouvoir quasi-absolu. Un philosophe a écrit un jour: "le pouvoir corrompt et le pouvoir absolu corrompt absolument".

Gilles Martin, Conseiller syndical SCFP Service santé et sécurité du travail et Président du Comité santé et sécurité du travail FTQ

GM/rg siepb 491

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ÉCOLE DES RELATIONS INDUSTRIELLES

UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL

XXe COLLOQUE

NÉGOCIER L'AVENIR

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par

Jean-Louis Bertrand

Directeur général ASSTSAS

NOVEMBRE 1989

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L'Accord du Libre-Échange et son impact sur la santé et la sécurité du travail

au Québec: la prévention, un enjeu commercial?.

Je remercie les organisateurs de ce XXe Colloque de l'École de relations industriel-les de l'Université de Montréal, et particulièrement monsieur le professeur Bernard Brody, de leur invitation à vous entretenir brièvement aujourd'hui de l'impact de l'accord du libre-échange sur les normes et politiques gouvernementales en santé et en sécurité du travail.

Mon intervention abordera par trois angles différents, mais complémentaires, le thème proposé: l'effet "Canada", l'effet "Amérique" et l'effet "International", particulièrement celui d'"Europe '92". L'absence presque complète de l'enjeu santé et sécurité du travail dans les débats précédant et suivant la conclusion de l'Accord m'amène à vous suggérer des scénarios et des pistes de discussions qui n'ont pas subi l'épuration de la contradiction. Nos échanges aujourd'hui devraient, je l'espère, nous permettre de mieux entrevoir les enjeux pour mieux négocier l'avenir comme nous le suggère le thème du colloque.

Je me dois aussi de vous souligner que j'interviens ici à titre personnel et non comme directeur de l'ASSTSAS. Je ne prétends pas, par ailleurs, être un spécia-liste de l'Accord ou du commerce international. Mon expérience én santé et en sécurité du travail au cours des dix dernières années me permet cependant de vous exposer aujourd'hui le point de vue d'un observateur attentif et impliqué.

L'effet "Canada"

Le premier effet du Libre-Échange sur les politiques et nonnes gouvernementales en santé et en sécurité du travail sera de renforcer l'autorité du gouvernement fédéral pour imposer des politiques et normes canadiennes de prévention. En d'autres termes, c'est le début de la fin de l'autonomie provinciale dans ce domaine.

Jusqu'à maintenant, chaque province, et le fédéral pour les employeurs sous sa gouverne, ont et conservent juridiction pour édicter les normes de prévention en santé et en sécurité du travail. Comme vous le savez, le Québec et la Colombie Britanique ont récemment été déboutés en Cour suprême dans les affaires Bell 1 et Alltrans Express Ltd 2 de leur prétention d'imposer à une entreprise fédérale leur loi provinciale de prévention en santé et en sécurité du travail. Par ailleurs, la mise en oeuvre du SIMDUT (Système d'information sur les matières dangereuses utilisées

Bell Canada c. Québec R.C.S. 19103, 88-05-26 Alltrans Express Ltd v The Workers' Compensation Board of British Columbia & al. R.C.S. 17991, 88-05-26

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au travail) a permis pour la première fois, avec le concert des parties patronales et syndicales, d'uniformiser un système d'information en santé et en sécurité du travail dans tout le Canada et ce, à partir d'une politique fédérale à laquelle, "librement", les provinces ont accepté d'adhérer pour faciliter le "libre-échange" intra-canadien. Un bel exemple de confédéralisme coopératif. Cependant, nous devons constater que dans ce dossier, le fédéral obtient un leadership de contenu et manoeuvre les pièces maîtresses du système, soit la classification des produits dangereux et les obligations des fabricants et importateurs.

Cette première canadienne a été suivie rapidement par une seconde percée fédérale appuyée et presque pilotée par le Québec, la réhabilitation de Tamiante comme produit "contrôlable" par l'adhésion du Canada à la convention du BIT 3

portant sur ce produit. Cette signature n'a été rendue possible que par l'engage-ment des provinces à respecter cette convention. Là encore, le leadership consenti au fédéral est indéniable et constitue à ma connaissance une première canadienne.

Nous devons nous attendre dans ce contexte à la mise en place au fédéral de l'équivalent à la loi fédérale américaine sur la santé et la sécurité du travail (Occu-pational Safety and Health Act - 1970) pour gérer les futures orientations pan-canadiennes en santé et en sécurité du travail. La création par une loi fédérale 4

du Centre Canadien d'hygiène et de santé au travail n'était qu'un modeste début dans cette direction.

Vous me direz sans doute que ces dossiers sur le SIMDUT ou sur la convention de l'amiante se sont développés avant l'accord du libre-échange, même si la conclusion de ces dossiers est concomitante à l'accord. Vous avez parfaitement raison. Cependant, ces deux dossiers n'ont réussi à abaisser les frontières juridictionnelles et protectionnistes des provinces que pour un motif principal: faciliter le commerce en "normalisant" les règles du jeu et ce, même si ces règles sont plus contraignan-tes pour les producteurs et les employeurs. Cet intérêt supérieur a aussi permis à ces dossiers de progresser dans un environnement politique favorisant fortement la déréglémentation et le retrait de l'État, y compris en santé et en sécurité du travail.

Convention 162 concernant la sécurité dans l'utilisa-tion de l'amiante. Adoptée par le BIT à sa 72ième session - Genève 24 juin 1986. Ratifiée en 1987 par le CANADA et entrée en vigueur en 1988 - Les Provinces avaient jusqu'à juin 1989 pour adopter les règlements de mise en application.

Canadian Center for Occupational Health and Safety Act - Statut révisé au Canada 1985 c.13

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Cet effet "canada" sera particulièrement alimenté par la mise en oeuvre du chapitre 6 de l'Accord portant sur les obstacles techniques au commerce *. Les mots clés de ce chapitre réapparaissent la portée des expressions:

"mesures normatives, qui inclut les spécifications techniques, les règlements techniques, les normes et les règles des systèmes de certification qui s'appliquent aux produits ainsi qu'aux procédés et aux méthodes de produc-tion,"

et

"Objectif intérieur légitime, qui désigne un objectif visant à protéger la santé, la sécurité, les intérêts essentiels en matière de sécurité, d'environnement ou les intérêts des consommateurs".

Par ce biais, le gouvernement canadien s'engage à "lisser les obstacles inutiles au commerce bilatéral.

Vous avez noté comme moi que ce chapitre ne s'applique pas aux mesures adoptées par les gouvernements des Provinces ou des États bien que chaque partie s'engage à notifier l'autre des initiatives de ces gouvernements. Cependant, le Québec a officiellement donné son accord aux objectifs poursuivis dans les termes suivants:

"Dans ce domaine, le Québec est d'accord en principe avec une harmonisa-tion des normes fédérales dans la mesure où celle-ci n'affecte pas à la baisse la qualité des produits".6

En d'autres termes, le Québec offre sa pleine collaboration sans sembler noter que les termes de l'accord vont au-delà de la qualité des produits et visent les procédés et les méthodes de production.

Donc un premier effet d'importance pour le Québec, la prépondérance de la norme "canadienne" pour le bien du commerce. Plus concrètement, nous devons constater que le Québec, depuis les dix dernières années est plutôt à l'avant-garde "cana-dienne" en santé et en sécurité du travail. La normalisation "canadienne" à cause des consensus qu'elle requiert a de forte chance, sinon de stopper, du moins de ralentir la progression du Québec. Cet effet devrait cependant être compensé par l'effet "Amérique" que nous examinerons maintenant.

Accord de Libre-Échange entre le Canada et les États-Unis - Affaires extérieures Canada - Ottawa - Copie 4-01-88 - 364 pages . page 81 et suivantes. L'Accord de Libre-Échange entre le Canada et les Etats-Unis - Analyse dans une perspective québécoise -Ministère du Commerce extérieur et du développement technologique - Québec 1988, 53 pages, page 16.

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"L'effet Amérique"

Les réformes québécoises et canadiennes en santé et en sécurité durant les années 80 sont les effets des courants américains des années 1970. Ce retard de dix ans a été partiellement comblé. Nous sommes loin cependant des "standards" qui s'appliquent aux entreprises américaines par le biais de OSHA (Occupational Safety and Health Administration) et de EPA (Environmental Protection Agency).

A titre d'exemple, dans le secteur de la santé et des services sociaux où j'oeuvre, l'actuelle proposition de réglementation par OSHA 7 de tout ce qui touche la manipu-lation du sang ou autres matières infectées est beaucoup plus exigente sur le plan de la prévention que les normes volontaires qui sont appliquées au Canada et au Québec.

Ainsi, l'employeur, selon cette proposition, doit:

évaluer toutes les tâches et procédures de travail pour déterminer s'il y a une exposition actuelle ou potentielle à du sang ou à d'autres matières potentielle-ment infectées;

mettre en place un système de contrôle des infections comprenant les mesures universelles de prévention, l'élimination des dangers lorsque faisable, la fourniture gratuite des équipements de protection personnelle, llentretien préventif par nettoyage et désinfection, la gestion des déchets dangereux, la gestion de la lingerie souillée, la surveillance médicale des employés dont la vaccination contre l'hépatite B, etc...

Quelque 18 pages de réglementation comprenant près de 150 prescriptions de prévention.

Je vous souligne qu'aucune réglementation ni proposition de réglementation de ce type n'existe ici. Santé et Bien-être Canada propose l'adoption volontaire des mesures universelles de prévention et la CSST ne s'est pas encore prononcée, même dans le cadre du SIMDUT.

Des exemples de ce type sont nombreux. Ainsi, l'équivalent américain de notre SIMDUT se traduit par le "right to know". Les règles fédéràles américaines se recoupent avec les règles des États et des villes. Notre système, malgré son apparente complexité, est d'une simplicité désarmante en regard des exigences américaines.

"L'effet Amérique" créera une pression pour élever nos "standards" en santé et en sécurité du travail. Sinon, nos normes à la "baisse" pourront être pointées comme dès mesures favorisant indûment notre production ou comme permettant la mise en

7 "Draft copy of OSHA's proposed standard for blood -borne pathogens". Occupational Safety and Health Reporter - 01-18-89 - page 1492 à 1510.

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marché de produits dangereux. Pour ceux qui sont sceptiques, la bataille de l'amiante est un bon exemple. L'amiante doit être bannie du territoire américain selon l'EPA. Vu sous l'angle du Libre-Échange, cette interdiction équivaut à instaurer une barrière non tarifaire au commerce bilatéral a. Mais, au-delà des batailles scientifiques, juridiques et commerciales qui entourent ce produit depuis 20 ans, nous percevons facilement que l'amiante est maintenant un "produit maudit", un "produit qui tue", que les arnéricains n'achèteront plus. Nous devons nous attendre à ce que les normes et les interdits américains touchent un nombre croissant de produits, particulièrement dans le secteur de la construction et des équipements industriels et commerciaux. Pour ne pas être en reste, le Canada et le Québec normaliseront et interdiront. Les premiers produits seront sûrement les substituts à l'amiante...

"L'effet Amérique" crée déjà par ailleurs une forte pression pour améliorer notre productivité. Pour être compétitifs, dans un contexte respectant nos valeurs culturellës et sociales et nos contraintes environnementales (particulièrement le froid) nous n'aurons d'autre choix que d'automatiser notre production, d'améliorer l'excel-lence et la fiabilité de nos produits et d'innover constamment.

Ces trois exigences vont aussi améliorer notre rendement en santé et sécurité du travail. Nos plus grands gains, en SST comme en hygiène publique, nous les devons plutôt à l'engineering qu'à la médecine. Dans les secteurs forestier, minier, manufacturier et bientôt dans la construction, les équipements de production de plus en plus "robotisés" vont enfin nous permettre d'isoler les travailleurs et les travailleu-ses des travaux dangereux qui continuent d'être requis par la production. Par ailleurs, nos produits comme nos équipements ne pourront être vendus que s'ils répondent aux normes de "qualité de vie" européennes et américaines et j'ose espérer que nos gouvernements feront de même pour nous protéger. Enfin l'innovation a sa source dans les cerveaux de "nos" ressources humaines. La protection ët l'épanouissement de cette ressource devient enfin pour l'espèce humaine un "enjeu commercial" important entre les pays fortement et moyennement industrialisés. Le coût de renouvellement et de formation de cette ressource oblige là mise en place d'un meilleur environnement de travail, tant physique que psychi-que.

Ce point de vue est partagé par les syndicats québécois impliqués dans l'exploitation de l'amiante (Métallos -FTQ, CSN et CSD) . Voir "Trois syndicats en appelle de la décision-américaine sur l'interdiction de l'amiante" - Le Devoir - 12 octobre 1969, page 3. "Elle (l'inter-diction) est un déguisement sophistiqué pour protéger les intérêts éconpmiques américains..." Clément Godbout - Directeur québécois des Métallurgistes unis d'Améri-que .

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Plusièurs d'entre vous me souligneront sans doute le caractère trop optimiste de ('"effet Amérique". Ils m'opposeront les 10,000 travailleurs tués chaque .année, le million qui sont blessés et le portrait assez pessimiste que tracent les syndicats américains de la santé et de la sécurité du travail aux Etats-Unis V

Mais nous sommes toujours dans ce domaine au moins cinq ans "en arrière" des Etats-Unis qui eux-mêmes sont "en retard" en regard des pays européens. Si le scénario que je projette se réalise, et je pense qu'il a commencé à se réaliser par le SIMDUT, la prévention fera des gains importants.

9 "La législation en santé et sécurité au travail aux Etats-Unis" par David W. Ortlieb - Directeur service de santé et sécurité - International Chemical Workers Union - Conférence présentée à l'occasion du Colloque CSN sur la prévention en santé et sécurité - Québec 4, 5, 6 octobre 1989. Vcir aussi les inter-rogations très pertinentes de Bailus Walker J r. dans 1'American. Journal of Industrial Medecine - (1989.) 16:321-328 - sur les orientations du système américain de santé et de sécurité du travail. "In the 1990's, the country will er_bark upon a .search for some newer definition of the role of the public and private sector in a common quest for greater economic progress... As this new era begins it is essential first, to determine what physical and mental health costs are imposed on workers by the introduc-tion of new technologies and new labor-management systems and, second, to make a careful assessment of the actual need, the feasibility, and the possible long-term consequences of an integrated on "biopsychosocioeconomic" approach to occupational health policy formulation and implementation". Ralph Nader au mois d'avril dernier a présenté un scénario pessimiste quant à la survie de notre système de santé et d'in-demnisation des accidents du travail dans le contexte du libre-échange. Mais il situe son scénario en référence avec le Japon et la Corée alors qu'il me semble que c'est la "Communauté Euro-péenne du moins pour ce qui est du modèle socio-économique qui demeure la référence même pour les pays asiatiques - Journal Les Affaires - 15 avril 1989, p. C-l - "Le régime québécois sera mis à l'épreuve par le libre échange".

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Ces gains seront dus d'une part à une reconnaissance e! à une application nord-américaines de normes plus élevées, plus strictes et plus contraignantes en santé et sécurité du travail et en environnement et, d'autre part, à la pression de l'opinion publique "en faveur de la sauvegarde et de la protection de l'environnement où la prévention est une dominante"10

Je crois d'autant plus à un scénario optimiste que "l'effet Amérique" sera renforcé par "l'effet International" particulièrement celui d" Europe 92".

L'Effet International

La vision du village global du canadien Mac Luhan tend à se réaliser dans tous les domaines et particulièrement dans celui du commerce. Pour paraphaser la célèbre expression "le médium est le message", nous pouvons a^irmer que "le commerce est la norme" pour la stabilisation de l'ordre international des années 2000. C'est l'Europe qui actuellement impose ces nouvelles règles commerciales par la mise en place en 1992 du Supermarché de la Communauté Européenne, une nouvelle frontière qui rejoint et dépassera bientôt celle de l'empire romain.

Cette ouverture interne des frontières européennes crée entre ces nations des mécanismes nouveaux d'ajustement, y compris un "gouvernement supranational". L'Europe nouvelle, la "Communauté Européenne" édicté des directives minimales de législation et de réglementation que les Etats membres doivent adopter y compris en santé et sécurité du travail Les Etats membres peuvent être plus exigeants et le "gouvernement communautaire" peut en plus suggérer des normes plus sévères à titre de guide, au-delà des directives de base. Evidemment, il revient à chaque Etat d'assurer l'application de ces règles sous peine d'intervention de la cour de justice "communautaire" chargée d'assurer le respect des divers .traités entre ces nations.

L'adhésion fortement probable des pays du nord de l'Europe, particulièrement de la Suède à la Communauté Européenne accentuera la tendance à l'adoption de

Propos de Gérald Larose - Président de la CSN - au Colloque cité (9) - rapporté par le journaliste André Dionne dans Le Soleil - samedi le " octobre 1989 p. A-

Bilan des directives, santé-sécurité de la Communauté Européenne" exposé présenté par Marc Sapir, coordonna-teur en santé et sécurité à la Confédération européenne des syndicats - Colloque cité (5) - Voir aussi -"Rencontre Marco Genoni" - Président d'Oerlikon Aéros-patial" - par Jean-Pierre Nicaise - Le devoir économi-que - Vol. 5" - no. 6 - sept. 1985: "La CÉE est déjà protégé par tout un arsenal de barrières non tarifai-res... règlements de santé et sécurité, d'environnement et ainsi de suite."

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normes élevées en santé et sécurité du. travail. Par exemple, les nouvelles normes européennes concernant la conception des machines et des outils intègrent les aspects santé et sécurité du travail et exigent que tous les dangers reliés à leur utilisation soient couverts, sinon leur vente en est interdite.

Sans doute que ces normes seront perçues dans un premier temps comme des barrières non tarifaires entravant la libre circulation des produits. Mais rapidement, les Etats-Unis, le Canada, le Japon et les autres pays industrialisés adopteront des normes similaires de sorte que dans ce domaine, comme déjà dans le domaine des communications et des transports, ces normes feront l'objet de conventions interna-tionales pour mieux favoriser le libre commerce.

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Conclusion

Dans le domaine de la santé et de la sécurité du travail, l'avenir me semble prometteur. La libéralisation des échanges nous forcera à nous hausser au niveau des standards internationaux "élevé et très élevé" de qualité de production et de qualité de vie.

Monsieur M. James Harrington, le maître à penser dé la qualité à l'américaine affirme avec raison:

"Les entreprises qui seront encore là au milieu des années 90 vont toutes offrir des produits et des services d'excellentes qualités. C'est ce qui leur aura permis de survivre. Celles qui se seront simplement contentées d'une bonne qualité seront disparues" 12.

Appliqués aux nations et aux sociétés qui s'affirment distinctes comme le Québec, il faut "faire très bien du premier coup, à tout coup" 13.

L'absence de prévention coûte près d'un milliard et demi par année au Québec en indemnisation directe plus de trois milliards si nous comptons les frais indirects 14.

En fait, les entreprises versent à la CSST l'équivalent de ce qu'elles paient en impôt au Québec 15. Ce montant double avec les coûts indirects. C'est donc près de 5% de la masse salariale, cotisable qui, annuellement, est consacré à la réparation des lésions. Pour gagner au jeu international du libre échange nous n'avons d'autre choix que de performer, y compris en prévention dans le domaine de la santé et et la sécurité du travail. C'est le meilleur argument pour hausser nos standards d'excellence en prévention. Pour ceux qui. croient qu'il est possible de gagner en diminuant la qualité de vie des travailleurs, le commentaire de la directrice exécutive du Hudson Institute, Marie-Josée Drouin paru dans le Financial Post devrait vous

"Une entrevue exclusive avec M. James Harrington - Le nouveau gourou américain de la qualité" Suzanne Lalonde - Le Devoir économique, vol. 5 no. 7 - octobre 1989. page 54 et 55. idem 13, page 55. Selon une étude inédite de l'équipe du professeur Bernard Brody dont les principales conclusions ont été dévoilées lors d'une conférence à l'IRSST le 12 octobre 1989.

15 Pour un juste équilibre - CSST - Québec 1989. page 3

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convaincre Elle souligne essentiellement que le Canada ne peut plus compter sur ses ressources naturelles comme moteur de son économie. Les ressources humaines dans le nouvel ordre économique mondial constituent plus que jamais le nerf du succès, le facteur détérmlnant.

Les normes de prévention en santé et sécurité du travail n'ont d'autre objet que là protection de cette ressource qui ne se renouvelle qu'en deçà du seuil critique au Québec.

Oui, la prévention est un enjeu commercial puisqu'elle est au coeur même de la production des biens et services. A cause de son impact sur les ressources humaines, sur la qualité de vie et celle de l'environnement, sur le contrôle des coûts et de la qualité de la production, elle est un facteur important de succès commer-cial.

Merci de votre attention.

Skilled workers vital to Canada - Marie-Josée Drouin -The Financial Post - 5 avril 1989. "Canada can no longer rely on its natural resources to be its engine of economic growth. Human resources are quickly becoming one of the most important factors of compara-tive advantage in the fiercly competitive world eco-nomy". Voir aussi "Des Japonais en grève" mémo de Michel Lefèvre - Le Devoir économique Vol. 5 no. 7 -Octobre 1989 . page 5.

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REFERENCES

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Danger Libre-Echange - La Coalition québécoise d'opposition au Ubre:Echange -CEQ, CSN, FTQ, UPA - 1987 - 58 pages

"EC lays foundations of Europe-Wide safety law" - Paul Reeve - Health and Safety at work - Août 1989, pages 18 à 20

"Free trade ;ans social policy - Canadian Council on Social Development - 1988 -Ottawa, 151 pages

L'Accord de Libre-Echange entre le Canada et les Etats-Unis - Analyse dans une perspective Québécoise - Gouvernement du Québec - Ministère du Com-merce extérieur et du développement technologique - 1988 - 53 pages

La politique sociale canadienne et le libre-échange - La coalition québécoise d'opposition au libre-échange - CEQ-CSN-FTQ-UPA - 68 pages.

Le régime québécois de santé et de sécurité du travail dans le contexte Nord-Américain - Commission de la santé et de la sécurité du travail - 1989 - 43 pages

Libre-échange - Bulletin de la coalition québécoise d'opposition au libre-échange - Avez-vous lu l'entente? - Octobre 1987

Libre-échange, changements, flexibilité et ajustements - Claude Rioux - Confé-dération des syndicats nationaux - 20 sept. 1988 - 17 pages - Colloque international sur la flexibilité des marchés du travail au Canada et aux Etats-Unis. Libre-échange et écart de productivité - Au courant - volume 9 no. 3 1989 -Conseil économique du Canada - page 10 et 11.

Pour un Juste équilibre - Projet d'un nouveau mode de tarification - CSST -1989 - 12 pages

Preventing Illness and Injury in the workplace - Office of technology Assessment - Congress of the United States - Washington 1985 - Summary - 43 pages Chapitre 12 - Governmental Activities concerning workers health and safety, page 219 à 254. ,.

"Social and economic determinants of occupational health policies and services" - Bailus Walker Jr. - American Journal of Industrial Medecine - 1989 -16:321-328

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CONSEIL DU PATRONAT DU QUEBEC

LA SANTÉ ET LA SÉCURITÉ DU TRAVAIL AU COURS DES PROCHAINES ANNÉES:

QUELQUES PROSPECTIVES

NOTES POUR UNE INTERVENTION DE M. GHISLAIN DUFOUR

PRÉSIDENT CONSEIL DU PATRONAT DU QUÉBEC

À L'OCCASION DU CONGRES DE L'ASSOCIATION POUR LA SANTÉ PUBLIQUE DU QUÉBEC

QUÉBEC, LE 10 NOVEMBRE 1989

INTRODUCTION

a) Prospectives et non bilan. Les bilans sont d'ailleurs toujours très difficiles à faire dans un dossier comme celui de la santé et de la sécurité du travail, les objectifs des divers groupes n'étant pas toujours les mêmes.

b) Mais il n'est pas plus facile de dégager des prospectives. Outre le fait qu ' il y a quantité d1 intervenants dans le dossier, ceux-ci ont souvent des visions tout à fait différen-tes de ce què sera le futur.

c) Nous mentionnerons d'abord quelques perspectives à court terme (quelques prochaines années), puis nous risquerons quelques prospectives sur un horizon de dix ans.

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A- PERSPECTIVES-A COURT TERME

Dossiers qui seront au centre de l'actualité à court terme en matière de santé et sécurité du travail.

1) Le nouveau mode de tarification et de classification à la CSST

Devant entrer en vigueur le 1er janvier 1990 (même s'il n'a tou-jours pas d'assises juridiques), le nouveau régime retiendra beau-coup 1'attention des employeurs : système rétrospectif, taux personnalisés,. mesures transitoires, etc.

2) La mise en vigueur complète de la loi

Seuls les groupes 1,2 et 3 sont actuellement couverts, et à ce dernier groupe, certains règlements seulement s'appliquent. Au cours des prochaines années, la loi sera appliquée à tous les sec-teurs.

Les groupes actuels seront-ils maintenus cependant, ou nous orien-terons-nous plutôt vers une approche davantage sélective?

3) Le fonctionnement des bureaux de révision paritaires, de l'ar-bitrage médical et de la CALP

Au centre du fonctionnement de l'actuel régime de santé et de sécu-rité du travail, ces diverses instances d'appel sont actuellement l'objet de maintes contestations et interrogations. Les bureaux de révision paritaires seront-ils toujours là dans quelques années?

4) L'implantation du SIMDUT

Dans plusieurs entreprises, il ne s'agit pas là d'une tâche simple.

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Les syndicats et la CSST devront faire preuve de beaucoup de com-préhension dans la gestion de ce dossier.

5) Discussions sur la baisse des coûts

Les "dix ans" de la Loi 17 ne manqueront pas, au cours des prochai-nes années, de susciter plusieurs études sur sa rentabilité.

"Ça prendra dix ans avant qu'on assiste à des résultats", avons-nous entendu de tous les côtés depuis dix ans. Les "dix ans" sont maintenant écoulés: quels sont les résultats de l'application de la loi?

Ces études ne seront par ailleurs pas faciles à mener:

l'arrivée, en 1985, de la nouvelle Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles devra être prise en compte ;

•. i •

la Loi 17 n'est pas en vigueur dans tous les groupes d'entre-i • prises;

il faudra tenir compte d'un ensemble de données qu'il ne sera pas toujours facile de bien identifier.

6) L'inspection

Ce dossier demeurera d'actualité, la CSST réclamant davantage d'inspecteurs, le gouvernement refusant d'en assumer les coûts.

7) Dossiers divers

Mentionnons un certain nombre d'éléments divers qui retiendront l'attention:

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pas de réforme importante des Lois 17 et 42, sauf pour le nouveau régime de classification et de tarification;

amélioration des statistiques compilées par la CSST, et meilleur ciblage des entreprises non performantes en santé et sécurité du travail;

suivant la tendance jurisprudentielle nord-américaine, élargis-sement de la notion d'accident de travail et de maladie profes-sionnelle, au grand dam des èmployeurs qui demandent plutôt des restrictions à ces deux notions;

maintien du climat de revendications en santé et sécurité du travail et plusieurs autres dossiers qui seront soulevés à court terme, qu'il s'agisse de la médecine du travail, de l'in-formatique, du besoin de disposer de davantage de statistiques, etc.

B) PROSPECTIVES À LONG TERME

En vrac, et sans respecter un ordre de priorité:

1) Une gestion davantage intégrée du dossier de la santé et sécu-rité du travail .

L'entreprise appliquera une gestion plus intégrée du dossier de la santé et sécurité du travail. Cette intégration favorisera une prise en charge plus globale de la santé et sécurité du travail.

Les cadres de tous les niveaux seront impliqués davantage: les chefs d'entreprise n'auront pas d'autre choix que de faire de ce dossier une de leurs priorités.

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Selon un recueil intitulé "The. current industrial relations scene in Canada in 1988" (page 827) publié par The Queéns' University, les entreprises gagnantes seront celles qui introduiront en milieu de travail des changements axés sur l'amélioration de la santé et de la sécurité des travailleurs. De plus en plus d'ailleurs, les entreprises reconnaissent qu'il s'agit là d'un défi et elles sont prêtes à relever.

2) Le nouveau profil de la main-d1 oeuvre aura un impact sur la santé et sécurité du travail

a) L'âge moyen des travailleurs deviendra de plus en plus élevé au cours des prochaines années, ce qui laisse présager que de plus en plus de travailleurs souffriront de troubles visuels, que leur temps de réaction sera plus long et que leur condition physique sera généralement plus fragile.

b) Par ailleurs, on assistera à une importante augmentation de la participation des femmes au marché du travail. Or, celles-ci auront des besoins différents en matière de conception ergono-mique des emplois ainsi que des équipements de protection, d'où des besoins de formation différents.

Mentionnons également: l'arrivée de plus d'immigrants (montée de l'analphabétisme fonctionnel: on a déjà le problème avec le SIMDUT); le déplacement des emplois vers le secteur des services, déplacement qui s'accompagne de l'accroissement du travail à domi-cile (bureautique à domicile, services de télécopieur); les modifi-cations dans le contenu des emplois, ce contenu passant de "techni-que moyenne" (métiers traditionnels) à "technique élevée et très élevée" (aérospatiale, aérodynamique).

La venue de technologies nouvelles et complexes, avec ce qu'elles impliquent de nouveaux ' matériaux, procédés et produits, obligera les hygiénistes industriels et les spécialistes en santé et sécuri-té du travail à se familiariser avec cette multitude de nouvelles technologies industrielles.

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Tous ces. divers phénomènes auront un impact direct sur le dossier de la santé et sécurité du travail.

3) Les édifices à bureaux

Ainsi que je l'ai déjà indiqué, nous assisterons à un déplacement des emplois vers le secteur des services, avec pour résultat que plus du tiers des activités des travailleurs s'effectueront dans des édifices à bureaux. Il faudra donc accorder une attention spé-ciale à la qualité de l'air ambiant et au stress relié à ce type de travail.

Or, en matière de qualité de l'air ambiant et de stress, nous en sommes, à nos premiers pas.

4) L'environnement et les maladies industrielles

Comme chacun le sait, les questions environnementales seront omni-présentes au cours des dix prochaines années.

Ce qui ne sera pas sans amener les divers intervenants à établir des liens entre lès maladies industrielles (ou professionnelles) et les problèmes environnementaux.

Par exemple, le stress lié à l'ensemble du fonctionnement de la société et à l'environnement global, sera de plus en plus confondu aivec 1 ' épuisement professionnel, le burn-out. L ' État sera alors tenté de faire absorber les coûts qui en résultent par les entre-prises. C'est tellement plus simple de faire absorber par la CSST, financée en totalité par les employeurs, tous les coûts ou à peu près reliés aux maux de dos, au stress, à la surdité, à l'alcoolis-me , quels que soient leurs liens avec le travail, plutôt que de hausser les impôts pour accroître le budget du régime d'assurance-maladie! Plus simple, mais, inéquitable.

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Comme il l'a fait au cours des dix dernières années en demandant aux employeurs d'assumer seuls tous les coûts du retrait préventif de la travailleuse enceinte ou qui allaite, il faut s'attendre à ce que l'État au cours des dix prochaines années continue de vouloir se désengager de ses responsabilités propres dans le domainè de la santé, en les transférant aux employeurs et aux travailleurs, un peu comme vient de le faire le gouvernement fédéral dans le dossier de l'assurance-chômage.

Mais il est sûr que nous lui opposerons les mêmes objections que celles que nous avons fait valoir auprès du gouvernement fédéral dans le dossier de l'assurance-chômage.

5) La multiplicité des lois et règlements

Contrairement à ce que l'on aurait pu croire, la deuxième moitié de la dernière décennie n'en fut pas une de déréglementation, à tout le moins dans le domaine de la santé et de la sécurité du travail (le rapport Scowen fut à toutes fins utiles relégué aux oubliet-tes) .

Il n'y a pas lieu de croire qu'il en sera autrement .au cours de la prochaine décennie.

Précisons immédiatement: je ne suis pas de ceux qui s'opposent aux lois et règlements en ce domaine.

Mais il y a quand même une limite au fardeau législatif et régle-mentaire que peuvent supporter les entreprises, surtout les PME. À l'intérieur des entreprises, même dans les grandes, le fardeau ad-ministratif qui comprend la connaissance des lois, de la jurispru-dence et des règlements, est devenu insoutenable pour les unités de production qui ne disposent pas des ressources humaines nécessaires à la bonne gestion du dossier de la santé et sécurité du travail.

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Il y a donc lieu de prévoir qu'au cours des prochaines années, les employeurs et leurs associations, sans nécessairement plaider pour une diminution de. la réglementation actuelle (ce serait à peu prés peine perdue !) seront beaucoup plus réticents à 1'imposition de nouveaux règlements, car certains employeurs risquent de ne plus avoir le temps et les moyens de gérer efficacement, leur éntre-prise.

Je pense en particulier au contenu de cet article 54 de la Loi 17 relatif au registre des postes: nous nous y sommes opposés au cours des dix dernières années et nous continuerons de le faire au cours de la prochaine décennie!

6) Vers un éventuel régime intégré de remplacement du revenu?

Il n'y a pas de doute qu'au cours des dix prochaines années, une importante -réflexion sera menée sur la création éventuelle d'un régime universel de remplacement du revenu, comme certains pays, dont la Nouvelle-Zélande, l'ont déjà réalisé,

La société tout entière n'économiserait-elle pas en effet beaucoup de temps et d'argent en arrêtant de se demander qui doit payer quoi? Comme la ligne entre une maladie d'origine professionnèlle et non professionnelle par exemple sera de plus en plus difficile à tirer, et l'origine multifactorielle de plusieurs d'entre elles difficile à identifier, nous serons inévitablement amenés à revoir les divers processus par lesquels les maladies professionnelles sont indemnisées (CSST, RAAQ* assurance-maladie, assurances diver-ses) et à voir si un régime universel de remplacement du salaire ne serait pas supérieur aux divers régimes actuels.

7) Divers

Que prévoir encore?

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a) Que les préoccupations que suscite le dossier de la santé et sécurité du travail seront grandissantes;

b) que la recherche se développera davantage, et que le rôle de l'IRSST sera plus connu et apprécié en ce domaine pour autant qu'il se dirigera davantage vers la recherche en sécurité-ingénierie qu'en santé;

c) que la CSST se rapprochera davantage des ministères à vocation économique et de l'entreprise privée, afin de collaborer à résoudre mieux les problèmes nouveaux reliés à la robotique, à l'automatisation presque complète de certaines usines, à la ventilation dans les tours à bureaux, aux diverses toxicoma-nies, au SIDA, etc.

d) que le paritarisme sera davantage compris et accepté, même dans la formation, un domaine dont les parties (surtout la partie syndicale) ont voulu faire leur chasse gardée au cours des dix dernières années, allant un peu en cela contre 1'expérience allemande ou suédoise;

e) que la réadaptation des travailleurs accidentés sera davantage l'objet de nos préoccupations. Les diagnostics deveneuit de plus en plus précis, la cause exacte d'un handicap étant de plus en plus facile à identifier, il deviendra de plus en plus facile de déterminer le contenu d ' un travail adapté. Les entreprises seront alors appelées à créer davantage de ces postes adaptés;

f) que, finalement, une association comme la vôtre aura toujours sa place dans un dossier de cette envergure qui restera diffi-cile et souvent frustrant.

• • •

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ALLOCUTION DE MONSIEUR CLÉMENT GODBOUT DE LA FTQ

Je voudrais dire tout d'abord que nous faisons nôtre, à la FTQ et sans hésitation, les propos de madame Vaillant quant à l'avenir du concept de la prévention. J'en profite pour remercier au nom de la F.T.Q. les organisateurs de cette conférence, car il est très important d'échanger et de discuter sur la réforme et sur l'état de la situation.

Il faut constater je pense bien, qu'au cours des dernières années, le régime participatif de la prévention établi en 1979, par la Loi 17 a eu la vie passablement dure, mais il est résistant, il a tenu debout. Je voudrais, à la suite de M. Dufour, tracer un portrait, exhaustif celui-là, du fonctionnement de ce régime.

Partant des expériences vécues, des problèmes que nous pouvons rencontrer, je place comme urgence no 1, la levée du moratoire sur les services de santé. Il faut, dans le domaine de la santé au travail, des services de santé et de la surveillance du milieu de travail, donner un coup de main important et ça urge!

Le deuxième problème tout aussi urgent, c'est le fonctionnement à la CSST des niveaux d'appel. Je lisais dans les journaux ce matin: ";..Mission accomplie, les coûts ont diminué..." Moi je serais plutôt tenté de dire que la job a été faite, et qu'il y a eu des problèmes dont on hérite maintenant. Quand on regarde ce qui s'est passé au niveau de la "gestion" des cas d'accidents, la CSST a embauché une quarantaine d'avocats et une trentaine de médecins. Tout ce que ça prenait pour que ça ne marche pas! Et ça, ça coûte cher. Ça coûte cher à tout le monde. Les agents d'indemnisation se retrouvent dans des situations passablement compliquées. Ils font leur travail de bonne foi, mais doivent consulter les avocats et les médecins, et encore aujourd'hui, on me dit qu'il y en a qui sont obligé d'attendre 4 à 5 semaines avant d'avoir des opinions, avant de rendre une décision. Voilà un problème. En même temps, la Commission des accidents du travail a placé une série d'objections, d'appels qui a bloqué la machine et on est rendu aux dernières nouvelles au chiffre de 20,439 cas en attente. Quand est arrivé au niveau de la CSST le temps d'établir une liste d'arbitres médicaux, en vertu de la loi, on est parti des recommandations des Corporations; celles-ci nous ont envoyé une bible de 14,000 nomsl Pas beaucoup de collàboration de ce côté-là. L'arbitrage médical est aussi un dossier qu'il faut regarder, parce que là aussi ça peut bloquer pas mal de choses.

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Une autre erreur qu'il va falloir corriger rapidement si on veut changer de cap, c'est la fusion de l'inspection et de la prévention. On donne à quelqu'un, un homme, une femme deux chapeaux alors qu'il n'y a qu'une tête. C'est un problème! L'inspecteur ou la personne en prévention devrait être un espèce de "conseiller à l'amiable" qui dit à l'employeur, au travailleur ou à la travailleuse le cas échéant, qu'il y a telle ou telle choses qui pourrait être améliorée, corrigée ou surveillée. Mais quand l'inspecteur arrive, c'est un peu comme une contravention. Il est en position d'autorité, donc il est en contestation tout le temps. Il y a eu une erreur de ce côté-là qui est importante et on a mis de côté l'inspection de façon dangereuse. On veut des inspecteurs oui, mais surtout, on ne veut plus que LA PRÉVENTION se retrouve sur la voie d'évitement.

Faut bien dire qu'en 1986, il s'est passé des changements importants: changement à la présidence de la CSST, le rapport dès 3 sages qui orientait une approche vers la médecine et la déréglementation. Les organismes patronaux ont pris position en faveur de ces changements et d'après moi, ce fut assez démobilisateur.

Un autre problème qu'il faut corriger, au niveau de la CSST, c'est l'établissement des statistiques. Présentement, on a des chiffres qui ne s'accordent pas avec la réalité. Il y a des influences importantes qui peuvent jouer sur les chiffres, comme par exemple, l'assignation au travail, l'assignation temporaire ou le travail léger. On peut citer par exemple, plus de 800 dossiers de réassignation rapide au travail au Lac St-Jean, une centaine à Joliette, etc. Et je pense que là aussi, il faut regarder de quelle façon on a tourné les chiffres et toutes les objections qui ont été émises et qui ont retardé ou qui ont empêché des dossiers d'avancer. Mais à cet effet-là, je voudrais dire que les programmes de santé spécifiques à l'entreprise remis à la CSST ont augmenté les programmes de santé: 3,613 en 1988 par rapport à 1884 l'année précédente. Sauf que, quand on va plus loin, on se rend compte que dans le domaine des programmes de prévention, les chiffres ont baissés. On a mis plus de programmes de santé au travail, mais moins de programmes de prévention. Comparativement par exemple, dans le groupe 1:1,315 programmes en 1987 pour 1,165 en 1988. Dans le groupe 2, de 584, on est tombé à 523, dans le groupe 3, de 1,584, on est tombé à 1,458. Donc pour un total de 3,483 on est arrivé à 3,146. L'opération 10% y est pour quelque chose. On a mis de côté la prévention mais il faut retourner le cap là-dessus, ça coûte très cher en réparation lorsqu'on néglige la prévention.

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Mais ceci étant dit, il y a aussi de bonnes choses qui ont été faites; tous les employeurs n'ont pas crû qu'il fallait tourner du côté de la médecine. C'est pourquoi je veux vous donner un exemple de chez nous, de ce qui s'est passé, dans un endroit syndiqué, où le comité a fonctionné et sa méthode de fonctionnement. On a mis la prévention de l'avant pour voir comment les chiffres diminueraient en terme d'accidents.

Je vais vous transporter dans une usine de chez nous à Marieville. 520 travailleurs élisent le représentant en prévention. Il s'agit d'un groupe de syndiqués de secteur prioritaire, fabrication de produits de métaj. C'est pas des usines de Com Flakes, quand ça frappe, le gars se fait mal. En 1985, les représentants en prévention ont pris tout le temps qu'il fallait pour faire leur travail. L'investigation du médecin responsable et de son équipe de santé du CLSC, l'équipe syndicale et les représentants patronaux ont mis au point un plan d'action pour prévenir les lésions au dos plus spécifiquement. L'employeur a décidé d'investir dans la prévention, confiant à un ingénieur la besogne de s'attaquer aux problèmes d'ordre ergonomique et ce, en étroite collaboration avec les travailleurs et travailleuses de l'usine. Plusieurs modifications ont été faites à la source, l'installation de convoyeurs par exemple, d'appareils de lavage, le réglage à la hauteur des plans de travail, la pose de tapis, de sièges orthopédiques et de plaques tournantes, la réduction de la dimension des contenants, des changements à l'organisation du travail. De plus, on a institué l'inspection préventive. Par la suite, au début de 1986, on convient de part et d'autre de donner des sessions d'information aux travailleurs et aux travailleuses sur les lésions au dos dans le cadre de programmes de collaboration avec les gens du CLSC. Les parties ont raffiné leurs tactiques, leurs techniques et leur approche de travail, l'introduction dans les programmes de prévention, l'analyse sécuritaire de la tâche, etc.

Les résultats: la diminution des lésions aux dos est de 12.3% en 1986 par rapport à 1985, malgré une augmentation de 50,000 heures de travail. L'employeur a maintenant plus d'employé-e-s qu'avant, parce que les affaires vont mieux, ça coûte moins cher. Diminution globale de temps perdu de 34%. Dans les cas de maux de dos d'une durée de plus de 10 jours, en 1985 on en comptait 21, pour un total de 1054 jours perdus; en 1986, 17 pour un total de 583 jours perdus; en 1987, 17 cas pour un total de 300 jours perdus; en 1988 seulement 6 cas, pour un total de 91 jours perdus. Ces données ne sont pas le résultat de camouflage.

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Moi je pense que cet exemple-là nous démontre qu'on peut faire quelque chose. Et c'est dans cette voie-là, que toutes les parties ont intérêt à se diriger, c'est l'avenir de notre entreprise, c'est l'avenir de notre industrie, c'est l'avenir de nos jobs, c'est l'avenir de la santé et de la sécurité des gens qui y travaillent. Aussi, dans un contexte de libre-échange où on nous propose une concurrence beaucoup plus difficile, il va falloir se préparer.

Et je dirais en terminant que finalement, dans le domaine de la santé, dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail, à un moment donné, il est possible dans une société qu'un organisme comme la CSST, les représentants patronaux comme les représentants syndicaux, découvre la voie qu'on peut emprunter pour que vraiment les hommes et les femmes qui ont un accident de travajl, se sentent valorisés, protégés, se sentent respectés et qu'ils sachent que tout le monde est capable de les aider, parce qu'ils en ont besoin. Merci.

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ÉCHANGES AVEC L'ASSISTANCE (Ghislain Dufour et Clément Godbout)

L'assistance a réagi aux conférences et a fait ressortir certains aspects qui n'avaient pas été abordés par les conférenciers tout en leur demandant des précisions. Ces questions concernaient quatre thèmes :

1) les groupes prioritaires 2) l'orientation de la recherche. 3) la notion de prévention 4) les structures d'appel

1) le monde de l'éducation

L'Éducation fait partie du groupe 6 et est donc loin d'être dans les groupes prioritaires. Pourtant, c'est le monde de l'éducation qui formera les travailleurs et travailleuses de demain. De plus, des centaines d'accidents d'étude surviennent régulièrement mais la prévention n'a pas encore atteint ce domaine et la CEQ ne siège plus sur le conseil d'administration de la CSST. M. Godbout souhaite que tous les secteurs soient couverts par la loi 17 et ce n'est qu'alors que l'on pourra s'attaquer aux problèmes spécifiques de l'éducation. M. Dufour, pour sa part, soutient que les services de santé devraient aller dans le sens de "risque" et non de "groupe" comme c'est le cas aujourd'hui. C'est alors que l'on pourrait solutionner des problèmes urgents au niveau de tous les groupes en même temps. Il parle de plus de la composition du C.A. de la CSST qui est conflictuelle au niveau patronal. On se retrouve quelques fois avec plusieurs personnes du même secteur et le débat manque alors de richesse. Il souhaite plus de variété pour alimenter les discussions.

2) l'orientation de la recherche

Plusieurs questions ou commentaires reflétaient l'inquiétude des intervenants sur le fait que l'IRSST se dirige vers l'ingénierie pour la réduction des accidents ce qui pourrait se faire au détriment des problèmes de santé au travail. De plus quand on sait qu'aux États-Unis le nombre d'accidents professionnels et de maladies industrielles reconnus représentent environ 2 % de la réalité, on peut craindre qu'en se fiant aux statistiques la recherche négligerait des maladies non reconnues. M. Dufour est d'accord avec cette réflexion d'autant plus que l'on va vers de nouvelles

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maladies professionnelles tels que le burn-out et le stress sur lesquels pourrait se pencher l'IRSST. Du côté patronal, il indique que les maladies professionnelles coûtent plus cher que les accidents et donc il est pleinement d'accord pour poursuivre la recherche en santé. M. Dufour précise que l'orientation de recherche de l'IRSST vers l'ingénierie est simplement un réajustement basé sur les statistique de la CSST. 45 % du budget ira en santé et 55 % en ingénerie; il n'est donc pas question d'éliminer le domaine de la santé.

3) la notion de prévention

L'application du SIMDUT (système d'information sur les matières dangereuses utilisées au travail) a soulevé la question de la notion de prévention. Selon un intervenant, c'est un programme d'information et non un programme de prévention en soi. Les fiches signalétiques permettent aux travailleurs et travailleuses de connaître à quoi ils sont exposés et de réagir soit par le droit de refus, le rétrait préventif ou la recherche par le comité santérsécurité d'équipement de protection ou de substances de substitution. Pour M. Dufour, il est un programme de prévention dans le sens d'une démarché préventive.

4) les structures d'appel

Le mode de contestation actuel doit être revu. Dans l'assistance on a résumé la situation de cette façon : le système est lourd, complexe, non accessible, lent, coûteux, engorgé et innefficace. M. Dufour a convenu de cette situation et a précisé que c'était une priorité du conseil d'administration de remanier ce système. Pour ce faire, un comité spécial a été créé pour étudier le problème des bureaux de révision. Il a été amené au conseil consultatif du travail et de la main d'oeuvre pour le sortir du cadre de la CSST et pèrmettre d'étudier de plus l'arbitrage médical avec des intervenants différents.

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SYNTHÈSE DES ATELIERS PAR LUCIE DAGENAIS

A-1 - LES FORCES DU MARCHÉ COMME INCITATION À LA PRÉVENTION

Si les travailleurs et travailleuses doivent avoir un mot à dire dans leur organisation du travail, si l'on doit tenir compte de leur savoir-faire de prudence, il reste que ce sont les employeurs qui sont responsables du milieu de travail et des conditions de travail. On peut se poser la question si les coûts ou la réduction des coûts pour l'entreprise peuvent constituer une incitation à la prévention. Brian Jenner veut démystifier le potentiel réel des forces économiques sûr ce sujet.

Voici son argumentation: • plus un objet coûte cher à acheter, moins on en achète. Peut-on appliquer

cette loi aux accidents de travail, c'est-à-dire augmenter le prix des. cotisations pour amener les entreprises à agir dans la réduction des accidents de travail? M. Jenner répond NON car l'augmentation des coûts s'appliquent à l'ensemble des établissement d'une unité de cotisation donc collectivement tandis que les actions pour diminuer les accidents sont faites pour chaque établissement individuellement.

• Une participation des travailleurs aux cotisations les ferait-elle agir pour diminuer le nombre d'accidents de travail? M. Jenner répond encore NON. À son avis les efforts individuels ne profitent pas directement à l'individu mais à l'ensemble des travailleurs de l'unité.

• Donc les actions pouvant aboutir à une diminution des accidents de travail seraient plutôt cèlles qui feraient prendre conscience aux employeurs des coûts directs et indirects des accidents, des coûts d'image et de réputation.

L'atelier propose de légiférer pour renforcer les normes, de légiférer sur les contrôles de qualité dans là fabrication des équipements et de faire appliquer beaucoup plus sévèrement les normes qui existent déjà.

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A-2 - PRENDRE LE RISQUE DE PARTICIPER : un secteur, le forage au diamant.

D'où peut venir la dynamique de changement si les coûts aux entreprises ne sont pas vraiment une incitation à la prévention? Dans le cas du secteur du forage du diamant en Àbitibi-Témiscamingue, les conditions de vie et de travail étaient particulièrement difficiles il y a quelques années. Avec l'adoption de la loi en 1979, coïncide le développement des actions accréditives et un bond dans l'exploration minière... et des accidents tragiques. La CSST entreprend alors des démarches auprès de dirigeants d'entreprise et des manufacturiers d'équipement. Le programme de prévention prévu par la loi aurait été l'élément déclencheur de cette démarché. Des comités de santé-sécurité sont mis en place et fonctionnent très activement. On constate aujourd'hui des améliorations dans 75 % des entreprises du secteur. Il semble que le secteur minier est celui qui a le plus progressé depuis dix ans.

Quant aux améliorations, voici une liste de sujets: • des modifications majeures à l'équipement, notamment réduction du bruit

jusqu'à 25 décibels pour certains appareils, des gardes protecteurs, des sorties de. secours, une amélioration de la qualité du campement et du transport, de la communication, en forêt, des conseillers en prévention, des sessions de formation pour les contremaîtres, une.supervision améliorée, une productivité augmentée.

Bref, l'évaluation de ce secteur particulier est extrêmement positive. Alors quels sont les facteurs qui ont favorisé ces changements?

• l'intervention de la CSST; • la concertation entre toutes les parties: fabriquants, employeurs, travailleurs; • un programme de prévention développé à partir des véritables problèmes; • des jeunes travailleurs formés en santé-sécurité à l'université du Québec; • une bonne situation financière des compagnies; • une collaboration entre elles sur la santé-sécurité du travail; • désir des compagnies de recruter les meilleurs foreurs pouvant choisir leur

entreprise selon les normes santé-sécurité mises en place.

C'est donc un secteur de référence car la loi a commencé à y faire sentir ses effets.

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B - LA PRÉVENTION... ÇA RAPPORTE.

Certaines entreprises considèrent encore la santé-sécurité comme un luxe qui leur coûte cher. M. Michel Pérusse affirme que les coûts directs, et indirects des accidents nuisent au bon fonctionnement, à l'efficacité et à la compétitivité de ces mêmes entreprises. Pour lui, la prévention a un effet bénéfique pour l'entreprise car on réalise de plus en plus que si les mesures dè prévention sont bien choisies, elles peuvent avoir des retombées positives sur le volume ou la qualité de la production, le climat des relations de travail, la qualité et la fiabilité de la main-d'oeuvre, la perte de matières premières et toutes sortes de problèmes qui peuvent menacer la survie de l'entreprise.

Il insiste par ailleurs sur le marketing de la prévention : utiliser les bons arguments à la bonne place et aux bonnes personnes! C'est vendre la prévention au-delà de la facture de la CSST! Cependant on a souligné dans cet atelier que cette approche est plus difficile lorsque les maladies professionnelles concernent des lésions qui s'installent lentement car les coûts sont loin d'être aussi évidents pour les entreprises.

. Il souligne aussi la distinction entre la prévention et la réduction des coûts. Une bonne prévention ne consiste sûrement pas à se préoccuper uniquement de la gestion des cotisations et des dossiers d'accidents. Tous ont insisté sur les mécanismes de participation pour impliquer toutes les personnes dans ce processus de prévention. '

Dans le secteur du vêtement, Nicole Bernèche a souligné que les travailleuses souffrent davantage de maladies professionnelles qui ne sont pas nécessairement indemnisées par le système... mais les coûts sociaux n'en sont pas moindres. Un effort est fait par le syndicat pour conscientiser les travailleuses à l'importance de déclarer toutes les maladies professionnelles, tous les accidents. Mais même si on investit dans la sécurité des équipements, si on n'agit pas sur les cadences, il n'y a pas pour elles d'amélioration de la santé.

Il y a donc une nécessité d'agir sur l'ensemble des conditions de travail, y compris sur l'organisation du travail!

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C - SE CONCERTER... UNE VOIE VERS LA RENTABILISATION DES RESSOURCES

Marcel Pépin croit à la valeur de la loi mais estime que cette loi est très difficile d'application. Concertation... OUI, mais pas à n'importe quelles conditions. Une entreprise non syndiquée peut difficilement permettre que les parties prennent en main leur santé-sécurité. Une concertation signifie avoir la même information de qualité et le même temps de préparation.

Un autre problème concerne le nombre d'inspections. Il n'y en a pas assez en ce sens que le recours aux inspecteurs demeurent toujours un peu aléatoire sauf dans les situations d'urgence. La question des normes et règlements doit aussi être renforcée et appliquée.

D'autres questions ont été abordées, notamment l'engorgement de la CALP. La.prévention est souvent reléguée au second rang à cause de toute l'énergie exigée par les procédures et.de tous les efforts qui doivent être mis pour obtenir justice en matière de réparation ou d'application, comme le droit de refus.

Le pouvoir étatique doit exister au-delà des parties et développer des mécanismes de concertation à d'autres niveaux.

D-1 - MICRO ET MACRO ANALYSE DU SYSTÈME ACTUEL

Diane Berthelette questionne les mécanismes de planification et d'évaluation à la CSST. Comment peut-on évaluer le régime en santé-sécurité? Comment en mesurer les impacts? Oh connaît les accidents du travail mais les problèmes de santé et de sécurité donc les besoins d'intervention et de recherche ne sont pas suffisamment connus; il n'y a pas de système statistique et pas suffisamment de recherche pour orienter le travail. L'évaluation n'est pas implantée parce qu'il est difficile d'arriver à un consensus sur ce qu'il faut évaluer. Il n'y a pas non plus d'évaluation des interventions. La conférencière déplore qu'il n'y ait pas eu de projet-pilote: de tels projets auraient permis non seulement de voir la portée et les limités des dispositifs de la loi mais aussi les facteurs qui en favorisent ou contrecarrent la portée.

Sur la question de la prévention primaire et secondaire, elle affirme que le réseau a fait de la prévention secondaire, autrement dit du dépistage, sans être appuyé par la CSST et qu'il tentait de faire de la prévention primaire soit de

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l'élimination à la source. Le programme de prévention a été traité de façon légaliste alors qu'il aurait pu être perçu comme un moyen d'établir un plan d'action.

En conclusion, cet atelier considère que tant que les critères d'évaluation et les besoins seront différents pour les organismes, les conflits persisteront. L'insécurité chez les intervenants crée des problèmes assez sérieux. Certains sont d'avis que les conflits persisteront entre la CSST et le réseau tant que celui-ci ne sera pas indépendant de la CSST. Qui pourrait mettre sur pied et faire cette évaluation? Certains sont d'avis que ce pourrait être l'IRSST, mais comme l'institut est considéré comme un rejeton de la CSST, cela cause des problèmes.

Les mécanismes d'évaluation devraient être établis en concertation avec tous les organismes concernés dans cette affaire.

D-2 - PRÉVENTION, PARITARISME ET EFFICACITÉ

Marcel Simard a fait rapport d'une étude sur les mécanismes de participation et de gestion de la santé-sécurité dans les moyennes et grandes entreprises. Il a évalué le fonctionnement de ces mécanismes et des problèmes rencontrés.

Ces conclusions .sont à l'effet que certaines conditions doivent être réunies pour que ça marche! D'abord l'implication à tous les niveaux, depuis la haute direction jusqu'aux travailleurs, la volonté de chacun des nouveaux d'investir dans la prévention, y compris du temps accordé aux travailleurs ou à leurs représentants, l'importance des appuis que reçoivent les principaux intervenants en santé-sécurité soit l'appui du comité, celui des contremaîtres et l'interaction entre les deux.

Cet atelier a exprimé la nécessité d'étendre les mécanismes de la loi à tous les autres groupes et aux entreprises de moins de 20 travailleurs.

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E - RÉALISER UNE APPROCHE COMMUNAUTAIRE,

Michel Perreault a abordé le sujet de la contribution des services publics de santé au travail dans le développement de la prévention. Il soulève les difficultés et avance des propositions pour réaliser l'approche communautaire. Pour lui, il y a une certaine opposition entre l'approche institutionnelle telle que nous la connaissons et l'approche communautaire. Il déplore un manque de leadership de la part du ministère de la Santé en ce qui a trait à l'intégration de la santé au travail à la santé communautaire. La santé au travail constitue souvent un secteur isolé au sein des CLSC et l'approche communautaire ne pourra jamais se faire sans une certaine solidarité au sein du réseau lui-même. Le cadre logique actuel pourrait permettre une action efficace dans la mesure où il serait possible de négocier une certaine marge de manoeuvre en ce qui a trait aux sphères d'activité et aux priorités à privilégier.

On déplore également la pénurie de ressources dans le secteur et évidemment le fameux moratoire qui est très démobilisant pour tout le monde.

Un autre sujet abordé dans cet atelier concerne la disparité des besoins au niveau des régions rurales ou périphériques dont il faudrait tenir compte davantage dans les programmes.

Il est important de travailler en fonction des priorités (fixées à la CSST) mais en même temps elles ne doivent pas constituer la totalité des opérations. Il serait important de dégager une marge de manoeuvre qui serait reconnue par la CSST.

F - LE MÉDECIN RESPONSABLE : VISION D'UNE GROSSE ENTREPRISE

M. Michel Guillemette a orienté les débats sur le rôle du médecin dans les programmes de santé. Pour lui, le médecin est responsable face au comité de santé-sécurité car c'est ce dernier qui approuve le programme de santé. Cependant certains représentants des DSC insistent sur le fait que c'est le chef du DSC qui a autorité sur le médecin responsable.

Des questions importantes ont été soulevées quant à la formation des médecins en santé au travail, au problème de recrutement et aussi de crédibilité quand le médecin est payé par l'employeur. D'autre part, la perception des équipes

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de santé au travail est parfois mal définie par les parties; beaucoup d'employeurs et de travailleurs se posent des questions sur ces "étrangers" qui viennent chez eux.

Un autre constat: les programmes de santé n'ont pas beaucoup de signification si les programmes de prévention ne fonctionnent pas. C'est une autre contradiction de notre système progressif. Certains secteurs ont des règlements sur les programmes de prévention mais les règlements sur le comité paritaire où siège le représentant à la prévention n'ont pas encore été promulgués. Résultat : il y a une absence totale de participation des travailleurs dans l'élaboration du programme de prévention.

Finalement la discussion s'est terminée sur le point suivant : • pour le médecin, il ne faudrait pas confondre le client et le patron. Mais qui est

le client et qui est le patron? Par cette question, l'atelier a mis en lumière toutes les difficultés que l'on connaît par rapport à la médecine d'entreprises.

Il n'y a pas eu de consensus dans cet atelier mais beaucoup de discussions qui ont fait ressortir l'ambiguïté de la loi sur les rôles et les pouvoirs de chacun.

G - LA PSYCHOPATHOLOGIE DU TRAVAIL : le rapport travail et santé mentale.

Si on veut faire de la prévention comme le dit Marie-Claire Carpentier, une des conférencières de cet atelier, ce n'est pas pour conforter ceux qui la décident mais pour ceux et celles qui la vivent. Dans les deux conférences sur ce sujet, on développe une notion très large de la santé au travail et on essaie de comprendre comment les travailleurs eux-mêmes agissent sur la prévention. La psychopathologie du travail s'intéresse non à la maladie mais à la normalité, à la souffrance et au plaisir au travail de même qu'aux mécanismes de défense que les personnes mettent en place pour ne pas devenir malade. C'est l'organisation du travail qui est questionnée! On part du postulat suivant : spontanément, tout travailleur essaie d'aménager l'organisation de son travail dans un ordre et selon une séquence de gestes qui tiennent compte de ses besoins, de ses désirs et de ses capacités. Il est alors facile à saisir que plus l'organisation du travail est rigide, plus les efforts d'organisation de ce travail risquent d'être troublés et donc la souffrance s'installe.

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Trois volets ont été examinés dans cet atelier : • le contrôle significatif du travail • le contenu ergonomique • l'anxiété reliée aux risques réels, présumés ou imaginés. À partir d'une étude chez les infirmières de soins intensifs, l'auteur a illustré

comment peuvent agir les stratégies collectives de défense : ce qui peut sembler une négation du danger ou une négligence peut indiquer que le moyen préventif prescrit n'est pas efficace ou encore qu'il peut accroître l'anxiété. Plutôt que de considérer les travailleurs et les travailleuses comme des agents inconscients ou irresponsables, il faut essayer de comprendre les solutions qu'ils mettent en place et questionner le pourquoi.

Jean-Pierrè Brun, pour sa part, parlent des contraintes qu'exercent l'organisation du travail sur les travailleurs. Il indique que les travailleurs et travailleuses ne sont pas des êtres qui ne font que subir: ils transforment aussi l'organisation du travail. Le collectif de métier joue un rôle déterminant dans ce processus.

L'atelier préconise les mécanismes collectifs de défense comme déterminants dans la prévention et dans le plaisir au travail.

H-1 ET H-2 - LE RETRAIT PRÉVENTIF DE LA FEMME ENCEINTE

Cette question est au coeur.du débat.actuel. En effet, en regard des coûts, des rôles des divers intervenants dans ce domaine et de la conception que l'on se fait dans ce domaine-là, on dirait que le retrait préventif exprime toutes les contradictions du régime. Il faut se rappeler que c'est une mesure de prévention et que l'objectif n'est pas le retrait mais l'assainissement des lieux de travail. Micheline Bail pose alors certaines questions :

• A partir des retraits et à cause du coût de cette mesure, est-ce que les employeurs sont incités à assainir leur milieu de travail? À cette question, il semble que les employeurs n'ont pas toujours une attitude responsable. Certains s'en remettent à la CSST, i.e. retrait préventif accepté sans faire aucun effort pour corriger la situation. D'autres tendent à la réaffectation que, quelquefois, l'on peut qualifier de

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sauvage. En résumé, on a pas l'impression, malgré le grand nombre de retraits préventifs, qu'il y a eu un effort systématique pour assainir le milieu de travail.

• Est-ce que la CSST et donc le gouvernement vont résister aux pressions des employeurs pour mettre fin à cette mesure? Est-ce qu'on peut la considérer comme un droit acquis? Il appartient aux gens de la santé au travail de défendre ce droit et de démontrer que ce qui est dangereux pour une femme enceinte est généralement dangereux pour les autres travailleuses.

• Est-ce que la CSST va accepter d'appliquer la loi comme elle est, c'est-à-dire reconnaître la prépondérance du diagnostic du médecin traitant? Cette question a soulevé plusieurs débats sur la formation des médecins, sur les problèmes d'équité dans l'application de la loi. D'un côté on souhaite plus d'harmonisation dans l'évaluation que font les DSC; par contre on ne veut pas se retrouver avec une grille d'analyse qui ne tiennent pas compte de la réalité de chacune des travailleuses et on maintient l'espoir que la présomption en cas de doute sera toujours à l'avantage de la travailleuse.

• Est-ce que le retrait préventif pourrait amener une certaine discrimination dans l'embauche? Est-ce que les travailleuses devront s'abstenir d'utiliser ce droit pour protéger leur droit au travail? C'est une préoccupation de plus en plus présente.

Le fait que la loi s'applique par morceaux occasionne plusieurs problèmes car c'est justement dans les groupes non prioritaires que se retrouvent le plus de femmes et la démarche de prévention proposée par la loi ne s'applique pas dans les groupes non prioritaires. Bernard Chabot de la CSST a déploré que les travailleuses ne soient pas suffisamment informées de leurs droits car il est évident que ce sont les plus organisées, les plus informées qui peuvent se prévaloir de ce droit.

L'atelier souligne la nécessité d'harmoniser les règles d'application et d'avoir des stratégies d'intervention qui s'attaquent au milieu de travail.

I - L'ENVIRONNEMENT, AU-DELÀ DES ZONES DE TRAVAIL

L'environnement est une préoccupation de plus en plus présente et cela contribue à sensibiliser les travailleurs à la prévention et à élargir cette notion de prévention. Il est important de faire des liens entre l'environnement extérieur et

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intérieur. Les travailleurs, étant doublement exposés, on doit reconnaître le droit d'intervention des syndicats sur ce doublé champ d'intervention. Qu'il s'agisse de santé au travail ou de protection de l'environnement , on fait face aux mêmes pollutions et il faut viser l'élimination à la source plutôt que d'aller vers des normes quantitatives plus ou moins scientifiques que l'on peut qualifier de "mesurite". En matière criminelle, on est présumé innocent jusqu'à preuve du contraire! en santé environnementale, cela devrait être le contraire : il ne faudrait pas attendre une preuve certaine du danger pour agir. -

Plusieurs problèmes; soulevés à cet atelier se retrouvent en santé du travail; deux ont été signalés en particulier:

• Les règlements, quand ils existent, ne sont pas toujours appliqués • Y a-t-il suffisamment d'implication de la part dû réseau de santé publique,

suffisamment de ressources et de coordination entre les diverses fonctions du réseau de santé?

K - INTÉGRATION STRATÉGIQUE DE LA SANTÉ-SÉCUR|TÉ DU TRAVAIL

Cet atelier a examiné une proposition nouvelle sur le problème suivant : il n'y a pas d'assise économique pour promouvoir la prévention. Il existe donc un vide économique dans ce domaine.

On propose un processus macroéconomique qui serait à fins d'investissements et un éventuel fond de placement, déjà existant à la CSST (3 milliards de réserve), qui pourrait être utilisé non seulement pour la réparation mais aussi pour la prévention. On pense à une formule qui s'apparenterait aux REA où aux REER ou au fond de solidarité de la FTQ avec des avantages fiscaux pour investir dans la transformation préventive du milieu de travail.

L'atelier souhaite que cette idée soit retenue et qu'il y ait une étude exploratoire et une recherche de faisabilité sur cette proposition.

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L- LA PRÉVENTION AU TRAVAIL...ÇA COMMENCE À L'ÉCOLE?

Solange Pronovost affirme que la prévention dans le monde de l'éducation, ce n'est pas pour aujourd'hui. Les écoles ne sont pas un secteur prioritaire bien qu'il y ait de réels problèmes de santé et de sécurité. On pense à la mauvaise qualité de l'air, à la violence, à l'épuisement professionnel, à la surcharge face aux coupures. Il y aussi des accidents puisque plusieurs commissions scolaires sont impliquées dans l'opération du 10 %. L'école est aussi le reflet de notre société quant à sa conception étroite des notions de santé et de prévention. Elle ne. donne pas l'exemple .aux élèves ni sur la prévention ni sur la concertation. Dans l'enseignement il y a un peu de formation professionnelle en santé-sécurité mais on ne peut affirmer que la culture santé-sécurité soit largement-répandue dans l'ensemble des programmes.

Si l'ensemble du personnel de l'éducation, y compris les enseignants n'est pas conscient de l'importance de cette question, ce sera beaucoup plus difficile d'y intéresser les érèves. La CEQ avec les commissions scolaires dans un programme où le ministère de l'Éducation était impliqué ont fait un projet de simulation de l'application des mécanismes paritaires de la loi dans quelques commissions scolaires. Certaines erreurs ont cependant été commises. Des enseignants en disponibilité se sont vu confier la tâche de la fabrication des programmes de prévention qui dépendent habituellement des employeurs plutôt que de leur faire jouer leur vrai rôle de représentants syndicaux à la prévention. Le dossier doit maintenant être pris en charge

Il faut faire de la formation et de l'information, la plus complète possible, adaptée aux besoins; il faut aussi recycler le personnel et améliorer le milieu de travail. La CEQ fait des revendications dans ce sens.depuis plusieurs années mais il manque un écho de la part du ministère de l'Éducation et des commissions scolaires. Une suggestion à l'effet de noter les élèves en prévention comme on le fait sur la qualité de la production a été discutée dans cet atelier.

On demande donc que la loi s'applique dans son Intégralité dans ce secteur! que l'on passe au parltarlsme, qu'on prévoit une place aux élèves et que les services soient donnés dans la même perspective.

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M - LIBRE-ÉCHANGE ET SANTÉ-SÉCURITÉ DU TRAVAIL

Jean-Louis Bertrand soutient que le libre-échange aura trois impacts: • effet au niveau canadien : renforcer l'autorité canadienne en matière de santé

au travail. • effet au niveau de l'Amérique du Nord : les standards américains sont souvent

plus élevés qu'ici; il y aura donc des pressions pour élever nos standards en matière d'environnement sinon on pourrait être accusé d'avoir des barrières non tarifaires.

• effet au niveau international : en 1992, il y aura augmentation des standards en matière de santé et sécurité du travail en Europe et cela pourrait avoir un impact au Québec.

La survie pour les entreprises, c'est la production de biens, et de services d'excellente qualité. Si on veut gagner dans le jeu du libre-échange, il faudra performer à tous les niveaux y compris en matière de santé-sécurité du travail et de prévention. Le libre-échange amènera des modifications au type d'industries que ce soit par des regroupements ou des industries à technologie plus élevée. Mais pour faire le pont avec l'avenir, il faut devenir innovateur. Les entreprises qui vont survivre au libre-échange devront exceller partout et même sur le plan santé-sécurité.

Cet atelier a émis une recommandation sur l'importance d'établir un système statistique sur les investissements en prévention. -

N - LES CONSÉQUENCES DE LA DIVISION SEXUELLE DU TRAVAIL

Cet atelier s'est penché sur la question des problèmes de santé au travail dans des ghettos d'emplois féminins. Il y a peu d'études sur ce sujet et le fait de la double ou triple charge de travail pour les femmes est rarement pris en considération. Ce volet est d'autant plus intéressant que les femmes tentent d'aller dans d'autres métiers où eiles ont à faire face à des conditions de travail qui sont admises comme normales pour les hommes.

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O - FORMATION DES TRAVAILLEURS

Une bonne formation doit se faire à partir des besoins et des projets des travailleurs. Récemment une collaboration s'est traduite par le développement d'une méthodologie de l'évaluation de l'efficacité éducative. Dans l'atelier, même si on connaît les difficultés de ce type d'analyse, on attend beaucoup de cette recherche mais déjà on souligne que la formation doit être vraiment adaptée à chaque milieu.

D'autre questions ont été soulevées dans cet atelier : la variété des intervenants. La formation est dispensée par divers niveaux comme les syndicats, les associations sectorielles, les CLSC, DSC et les universités. On croit que les diverses formations sont assez complémentaires et différentes expériences ou méthodes se sont développées qu'il y aurait avantage à faire connaître. Pour ce qui est de la formation par le milieu universitaire, l'atelier souligne qu'elle est essentielle pour orienter la recherche qui se fait dans ce milieu et pour diffuser les résultats de ces recherches. L'interrelation entre la recherche et la formation est très propice à l'avancement des deux milieux.

On souhaite qu'il y ait beaucoup plus de circulation de l'information et une diffusion plus systématique des instruments de formation qui sont développés à un endroit ou à un autre.

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EN CONCLUSION

IMPORTANCE DE LA PRÉVENTION

Il ressort de tous les ateliers qu'il'faut aller vers une conception plus large de la prévention, qu'il faut se préoccuper autant de questions de santé que de sécurité et ceci dans tous les secteurs. On mentionne aussi la nécessité de s'engager résolument dans le développement des services de prévention primaire et non seulement secondaire.

ÉTATS GÉNÉRAUX DE LA PRÉVENTION

Certains ont considéré le présent colloque comme un atelier des États généraux suggérés par Madame Vaillant.

MSSS ET CSST

Il y a consensus sur un nécessaire leadership du ministère de la Santé et des Services sociaux en matière de prévention. Certains souhaitent une certaine indépendance des DSC et CLSC par rapport à la CSST ou au moins une réelle marge de manoeuvre dans le domaine de la prévention.

ÉGALITÉ DEVANT LA LOI

Pour intensifier l'action, il fîaut rattraper le retard pris depuis 1985 sur la promulgation des règlements. Au nom du principe de l'égalité de tous et de toutes et pour une plus grande efficacité des mécanismes qui s'appliquent déjà, la loi doit être appliquée dans son intégralité à tous les travailleurs et travailleuses du Québec.

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ALLOCUTION DE MONSIEUR MARC DIONNE DU MINISTÈRE DE LA SANTÉ ET DES SERVICES SOCIAUX

M. le ministre, mesdames et messieurs, permettez-moi en premier lieu de remercier et de féliciter l'Association pour la santé publique du Québec d'avoir organisé ce colloque réunissant les intervenants et intervenantes de différents organismes impliqués en santé et sécurité au travail.

Ce dixième anniversaire de la Loi sur là santé et sécurité au travail, nous amène à réaffirmer avec conviction la nécessité que se parachève la réforme en santé et sécurité du travail. Pour y arriver, nous devrons selon le terme de ce colloque, intensifier l'action entre les acteurs en prévention avec les milieux de travail et enfin, auprès de l'ensemble de la population du Québec. Le ministère de la Santé et des Services sociaux que je représente, veut reprendre son rôle privilégié dans cet exercice que constitue l'actualisation de la loi sur la santé et sécurité au travail. Il le fera en collaboration avec le réseau public de santé communautaire qui est un partenaire à part entière de cette réforme. Nous sommes convaincus à la Direction pour la santé publique de la responsabilité propre de notre ministère et de son réseau à l'égard de la protection et de la promotion de la santé des travailleurs. Certes, le rôle de la Commission de la santé et sécurité au travail en cette matière est important mais il n'est certainement pas exclusif. Au niveau de notre ministère, non seulement le directeur pour la santé publique et son équipe sont'impliqués mais nos nouveaux sous-ministres nous donnent un appui de tous les instants et notre nouveau ministre monsieur Côté, nous en sommes sûrs, continuera à appuyer notre action au même titre que Mme Lavoie-Roux l'avait fait ces derniérs mois et ces dernières années.

Ce dixième anniversaire de la loi nous rappelle que la réalisation des objets de la réformé en santé au travail repose sur l'implication de plusieurs intervenants qui ont des responsabilités complémentaires. Nous avons dû au cours des dernières années nous ajuster entre partenaires en fonction de nos responsabilités respectives aux fins de la mise en application de la réforme. Pour continuer à progresser nous devons adopter des objectifs communs, reconnaître le potentiel de chacun des intervenants et établir des rapports ouverts entre les partenaires. Le travail qui reste à accomplir est énorme, il nous faut augmenter le pourcentage de la population des travailleurs qui peut bénéficier des services de la santé au travail, augmenter l'efficience de notre propre réseau de santé publique, reprendre une certaine autonomie dans la gestion de nos ressources (autonomie qui a été grandement menacée par le moratoire sur le

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remplacement des ressources) et il nous faut assurer l'encadrement réglementaire. Il faudra que l'on nous donne cet encadrement réglementaire afin de supporter les interventions des services de santé. Vous le savez, les activités des services de santé, sans le cadre en milieu de travail pouvant bonifier ou actualiser les recommandations, risquent d'être sans lendemain. Et finalement, il nous faudra mieùx intégrer les diverses interventions de prévention et en particulier, ceux des services de santé dans l'actualisation des programmes de prévention.

Ces enjeux nécessitent une collaboration franche et positive. Nous souhaitons ardemment que la Commission de la santé et sécurité au travail sache mieux utiliser les forces vives des différents acteurs en place aux fins de l'application.harmonieuse des actions préventives et curatives auprès des différents milieux de travail. Souhaitons que soit reconnue la contribution du réseau public de santé à la réalisation de l'objet même de la loi, soit l'élimination à la source des risques qui menacent la santé des travailleurs. Nous ne voulons pas, ni au ministère ni dans le réseau, que l'action des services de santé se réduise à simplement faire passer des examens médicaux, à pratiquer une prévention secondaire qui consisterait à diagnostiquer les altérations à la santé.

Notre présence comme réseau public auprès des milieux de travail ne pouvait que normalement créer certaines réticences et même de la résistance. Notre pratique est centrée sur la protection de la santé, la prévention des problèmes pouvant causer des dangers pour la santé, la sécurité et l'intégrité physique des travailleurs et enfin, sur la promotion de leur santé. Notre apport doit être complémentaire à celui des autres partenaires légitimes dans le cadre de la loi sur la santé et la sécurité au travail. Mais notre apport doit se faire aussi selon les approches de la santé publique et de la santé communautaire. Notre participation à la prévention et à l'élimination à la source se fera dans les champs de nos compétences et des mandats que nous confient le législateur, soit l'identification des risques auxquels sont exposés les travailleurs, l'identification des altérations à la santé et des possibilités d'être affecté par les risques et finalement, l'arme la plus puissante dont nous disposons, l'information sur les risques, l'information sur les effets, l'Information sur le potentiel de danger. Et c'est cette capacité de transmettre aux milieux de travail, aux entreprises, aux responsables des travailleurs cette information, qui fera que nous contribuerons à l'objet même de la loi, soit l'élimination à la source des dangers.

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Comme vous le savez, l'imposition du moratoire et la réévaluation des services de santé au travail par le conseil d'administration de la CSST nous ont amené à examiner plusieurs scénarios en vue d'assurer à la population active des services de santé accessibles en santé-sécurité au travail. Notre ministère a fait connaître à la Commission de la santé èt de la sécurité des propositions d'actions susceptibles de rencontrer les objectifs du législateur en donnant accès à l'ensemble de la population active aux services de santé en fonction des risques auxquels elle peut être exposée. Ainsi, nous avons proposé un réajustement de l'organisation des services actuels, en vue de répondre plus adéquatement aux entreprises sur l'ensemble du territoire du Québec. Cet ajustement vise aussi à créer un environnement professionnel susceptible de maximiser l'utilisation des ressources actuellement consenties par la Commission de la santé et sécurité au travail et celles que supportent les établissements du réseau public. Plus précisément, la réalisation de ces propositions se fera par l'élaboration de plans régionaux d'organisation des services de santé au travail qui seront respectueux des aspects législatifs des règlements et de la loi et des intentions et dès orientations du conseil d'administration de la CSST. . Ils nous permettront de constituer des équipes consolidées, multidisciplinaires, plus près des milieux de travail, dédiées à la prestation des services en santé au travail. Nous souhaitons conserver le caractère multidisciplinaire de ces équipes.

Nous désirons éviter des affrontements stériles entre Départements de santé communautaire et CLSC pour réellement réaliser des équipes compétentes en santé au travail et non pas déterminer qui, des CLSC ou des DSC, tirera les marrons du feu. Ce qui nous importe à ce moment-ci, c'est réellement de créer des équipes, de constituer un environnement professionnel intéressant et motivant pour ceux qui travaillent dans le domaine. Nous voulons évidemment assurer les responsabilités du chef du Département de santé communautaire qui sont très clairement écrites dans la loi et celles du médecin responsable. Nous cherchons à obtenir une souplesse administrative qui redonnera aux équipes une marge de manoeuvre, une capacité à la fois de répondre aux priorités centrales et aux priorités locales. La consolidation de notre réseau par la réalisation de ce plan d'organisation, devrait nous permettre de mettre de l'avant un programme d'activités pour offrir des services dans le cadre prescrit par la loi en intégrant le plus possible le programme de prévention au programme de santé. Les propositions déposées par le ministère et les partenaires du réseau (DSC, CLSC) visent à offrir à l'ensemble de la population active des services, en axant les priorités sur le plan local, régional et provincial. Pour réaliser une telle programmation, il nous faut intensifier l'action par une étroite collaboration

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entre , tous les acteurs en prévention, pour ce qui est de définir, d'identifier les problèmes de santé prioritaires au niveau provincial et d'établir les programmes-cadres qui nous permettront de nous attaquer à ces problèmes. Il nous faut offrir des services de santé auprès d'établissements et de milieux de travail qui sont confrontés de façon importante à ces problèmes de santé prioritaires, mais aussi pouvoir offrir sur les milieux de travail des services qui répondent aux besoins locaux.

Et finalement, nous croyons que dans les prochains mois nous devrons mobiliser nos équipes pour permettre justement d'identifier dans chacun des territoires l'existence même des risques, et l'existence en milieux de travail (qu'il soit dans les groupes 1, 2, 3, 4, 5 ou 6) de problèmes qui justifieraient une intervention rapide de prévention en de santé au travail. Évidemment il nous faudra nous ajuster à l'absence dans certains cas des règlements et il nous faudra convenir avec les partenaires du conseil d'administration en particulier, de nouvelles modalités respectueuses de la loi pour intervenir dans l'ensemble des secteurs.

Les pistes d'action qui ont été proposées doivent être réalisées avec tous les partenaires impliqués et engagent le réseau public vers l'innovation quant à l'organisation et à la réalisation des services auprès des milieux du travail. En ce sens, nous favorisons l'entrepreneurship de nos équipes et nous croyons tout à fait souhaitable à ce moment-ci que justement, dans le contexte de cette réorganisation, des équipes consolidées, remotivées puissent développer une approche d'expert-conseil vers les milieux de travail et finir par non seulement imposer leur présence, mais faire en sorte que ce soit les milieux de travail qui y recourent. Et pourquoi pas, peut-être verrons-nous un jour, les patrons faire appel spontanément aux services de nos équipes de santé-sécurité au travail et leur assurer un financement direct...

Les prochaines années nous confrontent à l'étape de consolidation de la réforme et le défi est de taille. Le réseau public est déterminé à assumer des responsabilités qui lui sont confiées par la loi. Les réalisations passées sont gages de l'avenir et le ministère entend supporter les intervenants du réseau dans l'actualisation de la loi. Le développement du système SMEST (système médico-environnemental de la santé des travailleurs) est un exemple réalisé en collaboration avec les conseils régionaux, les CHDSC, les CLSC et la CSST qui nous permet de développer un outil unique, en vue de rendre compte systématiquement des réalisations sur le suivi médico-environnemental de la santé des travailleurs. Ce système d'information souple, adapté aux besoin des équipes locales, permettra de consolider l'information aux

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niveaux régional et central. Je n'ai pas besoin de vous dire que notre système ne coûtera pas 127 millions. Mais il devrait être nous l'espérons, excessivement efficace pour faire la démonstration, non seulement des activités mais des résultats en terme de diminution des impacts sur la santé et en terme de diminution des agresseurs dans les milieux de travail.

Nous préconisons d'autres dossiers de collaboration, en particulier nous souhaitons que puissent se poursuivre les campagnes de promotion en santé au travail et que ces campagnes dans l'avenir puissent se faire dans une collaboration plus étroite entre le ministère, son réseau et la Commission de santé-sécurité au travail. Nous souhaitons aussi pouvoir collaborer avec la Commission à la réalisation des programmes-cadres. Depuis des années vous attendez ces fameux programmes-cadres; nous sommes encore, après 7 ou 8 ans, à espérer pouvoir en disposer pour orienter l'action. Il m'apparaît que ces programmes-cadres devront se développer en collaboration entre le ministère de la Santé et la CSST.

Il semble intéressant aussi que l'établissement de normes d'application de programmes puisse se faire en collaboration entre le ministère de la Santé et la CSST, en particulier dans le dossier du retrait préventif. Nous pouvons supposer qu'une partie des difficultés d'application du programme aurait pu être diminuée, si un travail de collaboration entre nos médecins en particulier et les responsables de la CSST s'était fait depuis le début. Et permettez-moi de soulever l'opportunité de joindre nos efforts à ceux de l'IRSST et du réseau de la santé dans la constitution de notre éventuel Centre d'excellence en santé au travail. Il sera certainement intéressant d'établir des liens fonctionnels entre l'expertise que nous souhaitons développer au niveau provincial et celle que détient actuellement l'IRSST.

En conclusion, nous réitérons l'importance du travail réalisé par les services de santé des Départements de santé communautaire et des Centres locaux de services communautaires dans un contexte souvent difficile. Ces efforts ont permis l'évolution de la prévention en milieu de travail; les prochaines années nous invitent à une concertation étroite entre les différents partenaires et les milieux de travail. Nous sommes convaincus de l'apport de tous et chacun à l'amélioration des conditions pouvant affecter la santé-sécurité et l'intégrité physique des travailleurs et travailleuses. Je vous remercie.

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ALLOCUTION DU MINISTRE DU TRAVAIL M. YVES SÉGUIN.

Je voudrais vous remercier de m'avoir inviter à votre colloque dont le sujet tombe à point car la santé et sécurité du travail est une préoccupation majeure. La durée de votre colloque en est le reflet : deux jours sur des sujets profonds et d'actualité. J'espère que les documents relatifs à ce colloque seront disponibles car un compte-rendu des divers ateliers nous permettrait d'approfondir des idées intéressantes. Je voudrais ici vous livrer quelques réflexions personnelles sur le sujet et vous indiquer certains éléments de réflexion sur lesquels à titre de ministre du travail, je voudrais agir.

Nous sommes tous, que ce soit du côté patronal, syndical ou gouvernemental, du côté de la médecine, de l'amélioration de la santé, de la prévention et de l'élimination des accidents de travail, c'est évident! Mais, après les discours, nous devons passer à l'action, agir et ce n'est pas toujours aussj évident. Il faut aller plus loin que simplement constater des choses! Et c'est dans ce sens que je veux vous faire partager mes idées pour que l'on collabore ensemble non pas pour y penser mais pour passer à certaines actions.

En tant que ministre du travail, j'ai un domaine très large à couvrir. Dans un premier volet, je suis responsable de la sécurité dans les édifices publics, du code du bâtiment, du code de l'électricité, de la plomberie, bref des normes en général et même de la sécurité dans les piscines. Une dimension oubliée de ce volet et qui pourtant est une vocation importante c'est de s'assurer qu'un bâtiment en général n'est pas seulement sécuritaire mais qu'il est aussi "sain"! Nous devenons de plus en plus vigilant sur l'intégrité des bâtiments comme lieux publics dans le sens de ('interrelation entre les personnes et le bâtiment et dans le sens de la qualité de vie des personnes qui y vivent. C'est du domaine de la responsabilité publique.

Le deuxième volet de mon mandat et qui vous touche de plus près, c'est ma responsabilité envers l'application de la loi santé-sécurité du travail, administrée par la CSST. À ce titre-là, je suis responsable d'une application selon la philosophie de cette loi, votée par le parlement, donc par des élus et dans ses effets comme on estime qu'elle a été voulue. Mon intervention en mai dernier sur le retrait préventif de la femme enceinte allait dans ce sens. J'ai souhaité que l'on retrouve davantage la philosophie de la loi qui est une présomption favorable face à une demande de la

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femme enceinte: en autant que les pièces au dossier sont conformes aux exigences de la loi, on ne devrait pas exiger davantage d'enquête. Et on avait développé à la CSST, on doit bien l'admettre, une rigueur dans l'application des règlements qui amenait un plafonnement et des décisions jugées négatives par rapport à l'évolution de ce programme. La conclusion au mois de juin sur ce dossier fut - et c'est une première étape car une deuxième devrait être finalisée dans les prochaines semaines - une nouvelle directive à l'effet que lorsque le rapport du médecin traitant de la femme enceinte et du médecin du DSC est conforme au dossier, il n'y a plus d'autres demandes de la part de la CSST. C'est un changement important et qui se confirme dans son importance car les demandes augmentent.

Il doit y avoir une saine évolution dans ce dossier, non pas une évolution abusive ou contraignante mais une évolution selon ce que la loi souhaite. Et si jamais nous arrivions à une demande telle que nous ne pourrions plus assumer les frais de ce programme, cè serait que le taux de natalité a beaucoup changé et il serait alors temps de s'ajuster. Pourquoi anticiper une catastrophe financière? L'an passé, le programme avait coûté 39 millions alors que cette année le gouvernement lui octroie 42 millions. Donc si la question se pose chez vous sur l'avenir du retrait préventif, je pense qu'on peut le qualifier de bon avenir. J'y donnerai tout l'appui que je pourrai en tant que ministre responsable de l'application de la loi car j'ai un préjugé favorable pour ce programme étant père de trois jeunes enfants.

Passons à la question de l'inspection qui allie évidemment la prévention. Il ne suffit pas, comme le disait mon prédécesseur, de consacrer de l'argent, de l'éducation et toutes sortes d'énergie à guérir ou à indemniser. Tout le monde est très sensible à l'importance de la prévention. C'est un discours permanent mais malheureusement, on n'en fait jamais assez. Il y a la prévention que j'appellerais systémique c'est-à-dire de la publicité, des rappels, des brochures; il y a aussi l'approche par l'éducation, réformer les gens eux-mêmes. Je lisais récemment un commentaire assez intéressant sur la campagne de la CSST : "Est-ce que c'est suffisant d'axer un programme de prévention sur le travailleur afin qu'il porte son chapeau, ses bottines ou ses lunettes, etc... ?" Je suis bien d'accord avec ce commentaire. En fait, un programme de prévention pour qu'il soit efficace doit être fait sur plusieurs niveaux en même temps: oui c'est bon de la publicité, oui, c'est bon de l'éducation, oui c'est bon des inspections et même des amendes car des accidents de travail ça coûte cher à tout le monde, à la victime, à l'employeur et à la société. D'aiileurs, les recommandations

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émanant des inspecteurs demandent rarement des investissements énormes pour améliorer la situation.

Prenons par exemple, l'application de la loi sur l'affichage de tous les produits dangereux qui doivent être manipulés par le travailleur: cela implique des changements d'habitude, une période d'adaptation, de transition. Le droit de refus de la part du travailleur s'il estime que c'est dangereux pour lui, c'est innovateur comme mesure préventive pour le travailleur. Et malgré les représentations à l'effet de retarder la mise en vigueur de cette loi de cinq ou six ans pour donner à l'employeur le temps de se préparer, je suis demeuré ferme et la loi est en vigueur maintenant. D'ailleurs l'ensemble des employeurs était favorable au principe et l'urgence se faisait sentir. C'est un petit pas mais quand même un pas dans la bonne direction.

Une autre directive, moins connue du public car elle sera rendue officielle dans les prochaines semaines, est celle-ci: la CSST ne fera plus de contestations de dossiers d'accidentés du travail devant la CALP. C'est important puisque la tendance des dernières années voyait augmenter le pourcentage d'appels par la CSST elle-même. La deuxième étape est l'objet d'intenses consultations entre moi, la CSN, la FTQ, le conseil du patronat pour une réforme majeure des mécanismes de décisions de la CSST et des mécanismes d'appel.

Je crois que dans l'ensemble, tout le milieu concerné reconnaît à la loi, dans son principe, beaucoup de mérite. Il ne s'agit donc pas de la changer mais j'identifie, me semble-t-il un problème majeur dans le sens de la prise de.décision au premier palier et ensuite par ce mécanisme du bureau paritaire et finalement du processus d'appel à la CALP. C'est ce que j'appelle la chaîne de montage de la décision, de la révision et de l'appel. C'est sur ce mécanisme qu'on se penche actuellement pour régler le problème des délais endémiques (moyenne de 23 mois pour prendre une décision) qui sont inacceptables. Présentement plus de 10,000 dossiers à la CALP sont en attente de plus de 20 mois. Il y a donc un malaise et il faut redessiner le système dans la ligne de pensée de la loi i.e. de favoriser la présomption au bénéfice de l'accidenté du travail. C'est l'approche que nous favorisons présentement. Je pense que cela va permettre un virage assez intéressant.

Je veux souligner, pour terminer, un autre point qui vous touche de très près. Quand on parte de prévention, que l'on parle de mission de la loi, que l'on parle de tous lés

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efforts qui peuvent être fait soit au ministère dè ia santé, soit à la CSST, soit dans le réseau de santé, il y a un partenaire qui existe présentement et ce partenaire, ce sont les CLSC. Je dis partenaire de l'application de la loi puisque il y a à l'intérieur de l'ensemble des CLSC une préoccupation reliée à la prévention des accidents du travail. Il y a eu dans l'ensemble du réseau depuis un an ou deûx un crescendo d'inquiétude à voir peut-être disparaître cette forme d'association. On a carrément dans certaines officines remis en cause l'utilité de consacrer à l'intérieur des CLSC une mission prévention-accidents de travail ou à tout le moins, si cela devait se faire c'était détaché de la CSST. Mon point de vue est plutôt le contraire. Il y a lieu de conserver et même de renforcer le rôle que peuvent tenir les CLSC dans l'application de la loi santé-sécurité du travail, soit comme partenaire de la CSST mais aussi et surtout comme premier joueur, comme premier éducateur auprès de l'ensemble des entreprises et des travailleurs sur l'importance de la prévention. Je fais mienne la préoccupation des CLSC d'y jouer ce rôle et je m'engage à l'appuyer et même à l'améliorer que ce soit en effectifs ou en budget. J'ai des discussions à ce niveau-là avec la CSST en terme de budget et je dois dire que s'il y a eu dans les derniers temps un arrêt de développement de dossier qui voulait favoriser ce détachement c'est grâce à mon intervention en mai dernier. Maintenant, il est peut-être opportun de redécouvrir cette vocation et de l'enrichir. Dans les prochains mois, je vais rendre public ce projet de réforme et engager une vaste consultation avec l'ensemble des

. intervenants du milieu : syndicats, patronat, associations comme la vôtre, le réseau de santé, les CLSC, mes collègues concernés afin justement que la réforme, envisagée dans les structures de la CSST et dans quelques modalités de la loi, se concrétise par. une autre action qui est le rôle que va jouer les CLSC, un rôle très utile dans le passé, maintenant et demain. Mercj.

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ÉCHANGES AVEC L'ASSISTANCE (Marc Dionne et Yves Séguin)

Dans les questions et commentaires qui ont suivi les deux conférences, deux préoccupations majeures venant de l'assistance ont ressorti:

1) Quel sera le rôle des CLSC dans l'avenir? 2) Jusqu'où ira le projet de modification de la loi?

1) Rôle des CLSC M. Séguin a précisé sa conception du rôle des CLSC. En fait, il ne veut plus

que la question concerne la présence ou non des CLSC mais bien l'amélioration de la collaboration entre les diverses instances sur ce dossier. Il considère les CLSC irremplaçables dans le domaine de la prévention.. La CSST voulait renégocier les coûts engagés dans ce service soit pour faire appel à des cliniques privées ou des inspecteurs additionnels soit pour engager son propre personnel. M. Séguin est d'avis que l'on ne pourra pas remplacer ce que peut faire les CLSC dans chacun des territoires par ce genre de modifications. Un inspecteur a un peu le rôle d'un policier qui colle des amendes mais il n'a pas ce rôle éducationnel ni cette approche préventive qu'ont développé les équipes des CLSC. C'est pourquoi après une consultation de près de trois mois sur la réforme, il rencontrera sous peu madame Vaillant, nouvelle directrice de la Fédération des CLSC pour étudier les diverses méthodes de collaboration. Quels sont les programmes à développer, les thèmes à aborder, l'approche, le support à donner, les effectifs, le budget...? Autant de questions qui permettront une bonne assise pour une collaboration future.

M. Dionne, du ministère de la Santé et des Services sociaux, a souligné la difficulté de maintenir des équipes suffisantes dans les CLSC. Il a parlé d'une nécessité de regroupement car le ministère souhaite conserver une présence des CLSC dans la santé au travail mais par le biais d'équipes-terrain au niveau DSC-CLSC. Cela permettrait d'avoir des équipes plus autonomes sur le plan professionnel comme sur le plan administratif.

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2) Modifications à la loi

•Groupes prioritaires À une question précise sur ce sujet, M. Séguin a confirmé qu'il fallait ouvrir le

nombre de groupes pouvant bénéficier de la loi car actuellement près de 85 % des travailleurs ne sont pas couverts. Ce thème fait partie du projet d'amélioration et de modification soit à la réglementation* soit à la loi, soit aux programmes de la CSST.

•Retrait préventif Concernant sa directive sur ce sujet, M. Séguin admet qu'elle a besoin de

clarification mais soutient qu'elle doit être enchâssée dans la loi pour assurer l'orientation du programme dans l'esprit de la loi.

•Contestations et délais M. Séguin est d'avis qu'il faudra ouvrir la loi car le système entier a besoin de

révision. Selon lui, ce n'est qu'en modifiant la loi par des amendements que sera, favorisée une nouvelle approche du comité paritaire. Il y augmentation de judiciarisation ce qui veut dire des délais, des procédures qui alourdissent considérablement le système. M. Séguin est en faveur d'un remaniement de la formule de contestation vers une approche plus souple qui reposerait sur la présomption de la conformité de la demande. La mécanique serait alors pour ceux qui ne sont pas d'accord avec la présomption et cela irait beaucoup plus dans le sens de la loi et d'un traitement plus respectueux de la demande.

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ÉÊ J ^ ^ t M ASSOCiATiCiN POU ri LA

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P U B L I Q U E DU

^ B M É M Q U É B E C Association pour ia santé publique du Québec 6865. rue St-Denis Montreal, (Québec) H2S 2S3

SYNTHESE PARTIELLE •DES CONFERENCES

COLLOQUE L1HEURE JUSTE EN SANTE-SECURITE DU TRAVAIL: INTENSIFIER L'ACTION

9-10 NOVEMBRE 1989

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CONFERENCE D'OUVERTURE •RESUME

UN POINT DE VUE GLOBAL SUR LE REGIME QUEBECOIS EN MATIERE DE SANTE ET SECURITE DU TRAVAIL

La conférence intitulée «Un point de vue global sur le régime qué-bécois en matière de santé et sécurité du travail» traite dans-une pre-mière partie de lfhistorique et des grandes lignes de la réforme de .1979. En deuxième partie, une lecture de la situation en santé et sé-curité du travail est faite dix ans après, à partir d'une grille d'ana-lyse qui porte sur les objectifs de la réforme, les règles du jeu (droits et obligations des parties) les mécanismes de participation (comité de santé et de sécurité du travail, association sectorielle paritaire etc), l'organisation et la dispensation des services qui doivent être mis à la disposition dès travailleurs et des employeurs en vertu de la loi (information, formation, recherches, santé au travail etc.)

Jeflnne-D'Arc Vaillant

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ATELIER A-l RESUME

Les forces du marché comme incitatifs à la prévention: science et fiction

par

Brian Jenner B.A., M.A.P.

Directeur exécutif Association québécoise des transporteurs aériens

Cette conférence se veut une démystification du potentiel réel des forces économiques du marché comme incitateur de mesures préventives dans le domaine des accidents de travail et maladies professionnelles. Le conférencier exposera quelques faux raisonnements économiques souvent appliqués aux problématiques et expliquera la véritable dynamique du marché par rapport à la prévention.

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Présentation de M. Brian Jenner

Diplômé en pilotage de Canadore College, M. Brian Jenner'possède un baccalauréat de

l'Université Laval avec majeure en administration des affaires et mineure en pédagogie

ainsi qu'un certificat en sciences humaines de l'Université du Québec. Diplômé de l'Ecole

Nationale d'Administration Publique; sa thèse de maîtrise s'intitule « Mode de tarification

de la CSST 1979 à 1989: via l'industrie du transport aérien ».

Pilote d'hélicoptère chevronné, il occupe en cours de carrière un poste de directeur régional

pour un important exploitant d'hélicoptère. La ville de Québec étant au centre .de sa

région, il se spécialise dans les relations gouvernementales et avec l'administration publique.

En 1985, il devient directeur exécutif de l'Association québécoise des transporteurs aériens.

C'est en tant qu'analyste politique et démarcheur pour le compte de l'industrie du transport

aérien que M. Jenner fut appelé à étudier en profondeur la relation entre les taux de

cotisation et la prévention des accidents de travail.

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ATELIER A-2 RESUME

Prendre le risque de participer; un secteur; "le forage au diamant"

Le secteur du forage au diamant, avant 1*adoption de la L.S.S.T. était laissé à lui-même. Les démarches entreprises auprès des dirigeants des principales compagnies de forage et des manufacturiers d'équipement ont apporté des changements notoires dans la correction des risques à la santô et à la sécurité occasionnés par le travail à haut risque. Des modifications importantes & 1•équipement ont été apportées par les travailleurs et les employeurs par le biais de leur comité santé et sécurité.

Denise Plamondon, Spécialiste en Prévention/inspection Direction Abitibi-Témiscamingue

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ATELIER A-l RESUME

La prévention ca rapporte!

Résumé de conférence

par: Michel Pérusse, UniVersitê Lavai

Certaines entreprises considèrent encore la santé ët la sécurité du travail comme un luxe qui leur coûte cher. Or les coûts directs et indirects des accidents nuisent à leur bon fonctionnement, à leur efficacité, à leur compétitivité. Dans un premier temps, la prévention a un effet bénéfique sur ces pertes pour l'entreprise. Mais on réalise de plus en plus que, si elles sont bien choisies^ les mesures préventives peuvent également avoir des retombées positives sur le volume ou la qualité de la production, le climat des relations de travail, la qualité et la stabilité de la main-d'oeuvre, les arrêts incontrôlés de production, la perte de matière première, et toutes sortes d'autres problèmes qui menacent la survie de l'entreprise. C'est cela, la rentabilité de la prévention!

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ATELIER A-l RESUME

DIANE BEIRTHELETIE DÉPARTEMENT DES SCIENCES ADMINISTRATIVES

UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À M3NTFÉAL

ÉVALUATION DU RÉGIME DE SANTÉ ET DE SÉCURITÉ DU TRAVAIL

V adoption de la Loi sur la santé et la sécurité du travail faisait suite à trois constats:

1. Fréquence et gravité élevés des lésions professionnelles. 2. Morcellement des responsabilités en matière de SST associé à des

problèmes de coordination des ressourcés et de duplication des services.

3. Faible accessibilité des services de santé au travail.

Dix ans plus tard, nous pouvons soulever des questions relatives aux 5 aspects suivants: - . r. '

1. Le degré d'implantation de la réforme; 2. La qualité et la quantité de services dispensés par le réseau de

SST; 3. La disponibilité des ressources; 4. Les effets du régime; 5. Le rapport coût / avantage de la réforme.

Aucune stratégie cohérente n'a été développée par les Instances décision-nelles pour dresser un bilan exhaustif de la situation. Toutefois plusieurs outils d'évaluation sont disponibles.

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ATELIER A-l RESUME

REALISER UNE APPROCHE COMMUNAUTAIRE. DANS UN CONTEXTE LEGAL ET INSTITUTIONNEL

Après dix ans, quel bilan peut-on réaliser d'une appro-che communautaire considérée selon l'ensemble des mandats en santé communautaire et non seulement selon les mandats spécifiques de la loi SST tels qu'appliqués par la CSST.

Sur quoi devrait-on tabler pour améliorer cette approche en tenant compte des contraintes passées, présentes et à prévoir.

S T I , D L ^ ^ A ^ ^ ^ -Michel Perreault

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ATELIER G RÉSUMÉ

LA PSYCHOPATHOLOGIE DU TRAVAIL: LE RAPPORT TRAVAIL ET SANTE MENTALE

Parallèlement aux recherches bien connues, au Québec, sur te stress au travail, existe une autre approche qui, sans vouloir coloniser la première, prétend à une certaine complémentarité dans ce champ d'étude complexe qu'est la santé mentale au travail; il s'agit de la psychopathologie du travail.

Cette approche postule une relation de causalité entre les différentes facettes de l'organisation du travail et la santé mentale des individus impliqués et dès lors, elle s'installe dans Taxe plus préventif que curatif de la santé mentale. Ces différentes facettes sont, à l'évidence, reliées aux connaissances et savoir-faire des travailleur-euses, mais aussi à leurs "affects" mobilisés sur. les. lieux du travail. La psychopathologie du travail propose de prendre en compte ces "affects" afin de mieux comprendre ce qui est source de plaisir ou de souffrance psychique au travail et donc, source d'équilibre ou de déséquilibre.

C'est un chemin heuristique qui peut à la fois aider à saisir le sens des comportements vis-à-vis les mesures préventives existantes et également servir de guide pour la mise en place de mécanismes susceptibles d'assurer une véritable sécurité du travail.

î^rie-Claire Carpentier-Roy Collectif de recherche en psychopathologie du travail

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ATELIER A-l RESUME

LE COLLECTIF DE METIER: LES REGLES ET LES SAVOIR-FAIRE DE PRUDENCE

La paychopathologie du travail a clairement identifié les contraintes, et leurs conséquences; qu'exerce l'organisation du travail sur les travailleurs-euses. Mais elle a aussi fait voir que ces mêmes travailleurs-euses ne sont pas des êtres qui ne font que subir, ils transforment aussi l'organisation du travail. Le collectif de métier joue un rdle déterminant dans ce processus de transformation. C'est dans ce lieu que s'élabore les règles de métier, lés savoir-fairé de prudence et les stra-tégies de défense. Après avoir définit ce que nous entendons par collectif de métier, nous nous servirons d'une recherche en cours sur les monteurs de lignes électriques pour décrire concrètement les concepts que nous venons de proposer.

sac/a/ IRSST

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ATELIER H-2 RESUME

LE PROGRAMME D'AFFECTATION ET DE RETRAIT PRÉVENTIF DE LA TRAVAILLEUSE ENCEINTE

OU QUI ALLAITE

DEPUIS 1981, LA CSST ADMINISTRE UN PROGRAMME UNIQUE AU MONDE SOIT LE RETRAIT PRÉVENTIF DE LA TRAVAILLEUSE ENCEINTE OU QUI ALLAITE.

LORS DE LA MISE EN PLACE DU PROGRAMME DE RETRAIT PRÉVENTIF EN 1981, ON PRÉVOYAIT ENVIRON 1 500 DEMANDES PAR ANNÉE ET DES DÉBOURSÉS DE L'ORDRE DE 3 MILLIONS $. CES PRÉVISIONS ONT ÉTÉ LARGEMENT DÉPASSÉES.

AINSI, EN 1988, LA COMMISSION RECEVAIT PLUS DE 16 000 DEMANDES GÉNÉRANT PRÈS DE 40 MILLIONS $ EN INDEMNITÉS VERSÉES. ACTUELLEMENT 29% DES FEMMES QUI TRAVAILLENT AU MOMENT DE LEUR GROSSESSE DEMANDENT UNE AFFECTATION OU OBTIENNENT UN RETRAIT.

MALGRÉ CETTE CROISSANCE INATTENDUE, IL SERAIT FAUX DE PRÉTENDRE AVEC LE PEU DE RECUL DONT NOUS DISPOSONS QUE TOUTES LES FEMMES QUI DEVRAIENT BÉNÉFICIER DE CE PROGRAMME Y ONT ACCÈS.

DANS CE CONTEXTE ET À LA SUITE DE PLUSIEURS JUGEMENTS DE LA COMMISSION D'APPEL, LA CSST A DÉCIDÉ DE MODIFIER SON APPROCHE. UNE RÉVISION DU PROGRAMME EST ACTUELLEMENT EN COURS ET DE NOUVELLES DIRECTIVES ONT ÉTÉ ÉMISES POUR CLARIFIER LA MARCHE À SUIVRE LORS DE L'ADMISSIBILITÉ DES DEMANDES.

LE RÔLE DU MÉDECIN TRAITANT ET DU MÉDECIN RESPONSABLE DES SERVICES DE SANTÉ EST MAINTENANT MIEUX DÉFINI MAIS LES DÉFIS DEMEURENT NOMBREUX. EN EFFET, COMMENT S'ASSURER DE L'UNIFORMITÉ DE L'APPLICATION DE CE PROGRAMME? COMMENT

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ARRIVER À IDENTIFIER ET À ÉLIMINER LES DANGERS À LA SOURCE ET À PROCÉDER À DES AFFECTATIONS QUI NE COMPORTENT PAS DE NOUVEAUX DANGERS? ENFIN, COMMENT S'ASSURER QUE TOUTES LES FEMMES QUI DEVRAIENT BÉNÉFICIER DE CE PROGRAMME SOIENT REJOINTES?

Bernard Chabot Chef de service de l'indemnisation Direction programmation réadaptation-indemnisation CS ST . . r -

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ATELIER A-l RESUME

L'ENVIRONNEMENT. AU-PLA DBS ZONES DE TRAVAIL QUSSAI SAMAK*

Il existe plusieurs parallèles entre les problèmes de santé et de sécurité au travail d'une . part, et les problèmes de la qualité de l'environnement d'une autre part. De tels parallèles découlent essentiellement du fait que le milieu intérieur du travail et 1'environne-ment extérieur sont assujettis aux mêmes lois naturelles, et que la dégradation de leurs qualités comporte qualitativement les mêmes effets sanitaires.

De plus, on peut faire la démonstration que les entra-ves empêchant un véritable assainissement des deux domaines sont souvent du même ordre, que cela soit sur le plan juridique, conceptuel, économique, technique, ou scientifique.

Il se dégage de ces constats deux conclusions capi-tales : 1'urgence de repenser 1'approche juridique qui sous-tend la réglementation du milieu du travail et de l'environnement; et la nécessité de développer, face aux problèmes qui pèsent sur les deux milieux, une approche intégrée.

s

* Ingénieur-chimiste, conseiller en matière de protection de l'environnement à l a C S N et membre du groupe-conseil de la Commission Charbonneau sur les déchets dangereux.

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ATELIER N RESUME

"Le d é f i des années 90 : l ' i n t é g r a t i o n

s t ra tég ique de l a santé e t de l a s é c u r i t é

du travai l 1 1

Florian Ouel let

UNIVERSITE DE MONTREAL

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RESUME

En 1979, l e l ég i s la teur québécois a proclamé, par une l o i , que la santé et la sécurité du travail sont des valeurs inal iénables et . inv io lab les , des biens supérieurs. Il semble bien évident que la soc ié té québécoise n*a pas intérêt à cacher la morbidité historique du t r a v a i l , i l semble aussi évident que l es mi l l iards des coûts d irec t s e t indirects que c e t t e soc i é t é paie annuellement ruinent son économie. Cela s u f f i t à i l l u s t r e r l ' i n t é r ê t social et macro-économique d'une intégration stratégique de la SST. Mais par quels mécanismes f a i r e en sorte que cet intérêt global se traduise en action loca le , en investissement dans la prévention. Répondre à ce t t e question est .un défi . . . la mise en oeuvre des moyens que suppose la réponse en es t un bien plus grand encore; e l l e débordera certainement le cadre des années 90.

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ATELIER N RESUME

RESUME

La prévention au travail ça commence à l'école

De par sa mission éducative, l'école est un lieu d'appren-tissage qui prépare les jëunes aujourd'hui pour pouvoir agir dans la société demain. En se demandant si l'école est un lieu sécuritaire, comment elle se situe eu égard à la Loi sur la santé et la sécurité du travail; en examinant ce qui s'y fait en matière de santé et de sécurité; nous pourrons déterminer si l'école atteint son objectif de former adéquatement la main-d ' oeuvre afin que cette dernière entre sur le marché du travail avec des con-naissances, des attitudes et comportements lui permettant d'assurer sa santé, sa sécurité et son intégrité physiques. Suite à ces constats, nous proposerons des démarches concrètes pour que véritablement, la prévention au travail... ça com-mence à l'école.

Vice-présidente CEQ

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ATELIER N RESUME

LES CONSEQUENCES DE LA DIVISION SEXUELLE DU TRAVAIL SÛR LA SANTE DES TRAVAILLEUSES

Voici le résumé de ma conférence: Les femmes travaillent actuellement dans des "ghettos d'emploi" à forte concentration féminine. Ce? emplois comportent leur propres risques pour la santé et la sécurité, qui n'ont pas été beaucoup étudiés: conséquences du travail à gestes répétés pour les articulations, de la pollution de l'air des bureaux, du travail à un rythme élevé. De plus, le travail à double et triple quart que représentent les responsabilités familiales ajoute aux risques pour la santé de la travailleuse.

Dans une tentative d'accès à l'égalité au travail, les femmes ont demandé des postes anciennement réservés aux hommes. Mais ces postes ont évolué en fonction d'un corps qui n'est pas celui de la moyenne des femmes. En l'absence d'une tentative d'ajustement de ces postes aux dimensions et proportions des corps de femmes, on pourrait conclure, à tort» que le travail traditionnel des hommes est dangereux pour les femmes.

Karen Messing Groupe de recherche-action en biologie du travail, Université du Québec à Montréal

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ATELIER A-l RESUME

L'Université et la formation des travailleurs en santé et sécurité au travail

Luc Desnoyers, Sciences biologiques. Université du Québec à Montréal

Dans le cadre d'une entente entre TUQAM et les centrales syndicales, plusieurs projets de formation et d'information se sont développés. Les activités de formation impliquent la participation de professeurs à la conception et à la prestation de sessions de formation thématiques sur des sujets tels que le travail sur terminal à écran. Récemment, cette participation s'est traduite par le développement d'une méthodologie d'évaluation de l'efficacité éducative des sessions,, qui fait l'objet d'un programme de recherche. D'autre part, la contribution des professeurs à l'information se . fait sous la forme de la production de documents thématiques, par exemple sur l'aspiration à la source des contaminants aéroportés, ou par la traduction-adaptation de monographies d'origine étrangère, par exemple sur l'impact des conditions de travail sur le fonctionnement de l'organisme. Dans toutes ces situations, le role de l'universitaire est celui d'un intervenant expert, qui se porte garant de la qualité scientifique et technique de l'information traitée.

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F 5 9 6 4 V a i l l a n t , Jeanne D'Arc et «rh:

C o m p t e - r e n d u du c o l l o q u e tenu les 9 et 10 n o v e m b r e 1989: " L ' h e u r e ^

F 5964