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COOPERATION TCHAD – UNION EUROPEENNE
Renforcement des capacités des Médias pour promouvoir le développement collaboratif au Tchad Evaluation finale
Septembre-Décembre 2014
Evaluateur principal: ATCHENEMOU AZOUDOUM Samuel
Contacts:
Maud Bakirdjian
Associée Régionale CSE Sahel
Institutional Learning Team SFCG
(+235) 68 07 29 09
mbakirdjian@sfcg.org
Atchenemou Azoudoum Samuel
Coordinateur en Conception, Suivi et
Evaluation (CSE)
SFCG Tchad
(+235) 63 64 01 02
sazoudoum@sfcg.org
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Table des matières
Table des matières .................................................................................................................... 2
1. Résumé exécutif .................................................................................................................... 3
2. Contexte du projet .................................................................................................................. 8
3. Méthodologie ........................................................................................................................11
4. Résultats de l’évaluation .......................................................................................................16
4.1. Efficacité du projet ..................................................................................................16
4.2. Impact du Projet .....................................................................................................24
5. Conclusions ..........................................................................................................................33
L’efficacité de l’intervention ............................................................................................33
L’impact du projet ..........................................................................................................35
6. Recommandations ................................................................................................................38
6.1. Recommandations à SFCG ....................................................................................38
6.2. Recommandations à l’AEPT ...................................................................................38
6.3. Recommandations aux médias partenaires ............................................................38
Document Séparé
Annexe 1 : Tableaux et figures additionnelles………………………………………………….
Annexe 2 : Visuel logique du projet……………………………………………………………..
Annexe 3 : Termes de références de l’évaluation……………………………………………..
Annexe 4: Outils d’évaluation…………………………………………………………………….
Annexe 5: Calendrier de l’évaluation……………………………………………………………
Annexe 6: Liste des personnes rencontrées…………………………………………………...
Annexe 7: Liste des documents consultés……………………………………………………..
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1. Résumé exécutif
Le projet
Le projet « Renforcement des capacités des Medias pour promouvoir le Développement collaboratif au
Tchad » est un projet de de trente-six mois (juin 2011-juin 2014) mis en œuvre par l’ONG Search for
Common Ground, grâce à un financement de l’Union Européenne. Le projet a été mis en œuvre en
partenariat avec l’Association des Editeurs de la Presse privée au Tchad (AEPT) dans trois grandes villes
du Tchad à savoir : Ndjamena, Moundou et Sarh.
Ce projet avait pour objectif général de renforcer les capacités du secteur médiatique pour
promouvoir un dialogue social, le développement, et la participation citoyenne à travers deux
objectifs spécifiques (O.S.) :
O.S.1 : Améliorer l’accessibilité à l’information et l’inclusion des populations par le biais
d’organes de médias privés.
O.S.2 : Renforcer le rôle des leaders des médias privés, publics et représentants des organes
régulateurs, dans la construction de la paix et la promotion du développement collaboratif.
Objectifs de l’évaluation
L’évaluation finale de ce programme est prévue dans les documents de partenariat entre SFCG et l’Union
Européenne, en harmonie avec la politique de transparence et le souci permanent d’apprentissage de
Search for Common Ground. Cette évaluation fournit aux instances décisionnelles de SFCG et de l’Union
Européenne ainsi qu’à l’AEPT des éléments d’information sur l’efficacité et l’impact du projet. Plus
spécifiquement, elle met en lumière les réalisations du programme, les difficultés rencontrées et les
recommandations correctives permettant d’orienter des projets similaires mis en œuvre par SFCG ou
d’autres partenaires.
Critères d’évaluation
SFCG, à travers cette évaluation finale, s’est conformée aux normes et standards d’évaluation adoptés par
l’Organisation pour la Coopération au Développement Economique (OCDE). A ce titre l’équipe
d’évaluation a axé son investigation et son analyse sur les deux critères suivants :
L’efficacité : estime la contribution apportée par les résultats à la réalisation des objectifs du
projet et de la façon dont les hypothèses ont affecté cette réalisation.
L’impact : mesure la contribution du projet à l’objectif général du projet en question
Méthodologie d’évaluation
Cette évaluation finale est basée sur une méthodologie mixte combinant une approche qualitative et
quantitative. L’équipe d’évaluation a réalisé les activités suivantes de collecte de données :
14 Interviews Semi-Structurées (ISS) avec des informateurs clés (journalistes, responsables
médias, responsables du projet)
Un micro-sondage d’opinion avec 600 auditeurs des radios dans les zones du projet, tirés sur un
échantillon représentatif
Analyse des documents du projet, y compris les documents de suivi et évaluation du projet :
Descriptif du projet, Rapport narratif intermédiaire (RNI) Juillet 2011 - Juin 2012,
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RNI Juin 2012 - Juin 2013, Evaluation à mi-parcours (mai/juin 2013), ROM 2012, ROM 2013,
Rapports de missions
Résultats majeurs de l’évaluation
Efficacité du projet
Concernant les actions à mener pour renforcer l’accès du public, y compris les femmes, à une
information de qualité (Résultat 1.1), 9 radios et 5 journaux ont pu recevoir des formations in situ, soit
un dépassement de la cible initiale (7 radios et 5 journaux). Cependant, concernant l’accès des femmes en
particulier à cette information de qualité, les conditions supposées à cette amélioration de l’accès
(présence de voix féminines nouvellement formées dans les médias, production d’émissions ayant trait
aux femmes) ne sont que faiblement réunies ; seules 18% des participants aux différentes
formations étaient des femmes et le nombre d’émissions produites ayant trait aux femmes est inférieur à
celui attendu. L’efficacité du projet pour l’atteinte du Résultat 1.1 a été mitigée.
Concernant les actions menées pour renforcer l’inclusion des populations dans la gouvernance locale
par le biais de nouveaux formats d’information, véritables plateformes d’échange entre autorités et
administrés (Résultat 1.2), les radios ont été formées à utiliser de nouveaux formats d’information plus
interactifs. Cependant, elles n’ont pu produire que 38 émissions au lieu des 140 initialement prévues, soit
un taux d’exécution de 27%. Divers facteurs sont mis en évidence pour expliquer ce faible taux, tels que
le retard dans la réalisation des formations, l’absence d’un bureau et d’un personnel permanent de SFCG
au Tchad, la fermeture de deux radios partenaires en 2013, le manque de clarté par rapport aux attentes de
SFCG et de l’AETP quant au rôle des radios partenaires, et le manque de suivi des radios qui se sont
engagées à produire. Les formats interactifs ont été utilisés dans ces 38 émissions, mais la majorité
d’entre elles ont été produites par un consultant extérieur, embauché lors des derniers mois du projet pour
accélérer les activités, ce qui limite le renforcement des capacités des radios. En outre, il n’y a pas de
preuves que les 9 radios et 5 journaux les utilisent chaque semaine, comme initialement visé par le projet.
L’efficacité du projet pour l’atteinte du Résultat 1.2. a été très faible.
Concernant les actions menées pour que des journalistes influents auprès de leurs pairs, pratiquent
une approche non confrontationnelleet compréhensive des conflits (Résultat 2.1), 3 formations à
l’Approche Common Ground (ACG) ont eu lieu, touchant ainsi 90 journalistes tel que prévu initialement.
De plus, le stage international d’approfondissement a bien eu lieu ; cependant seuls 8 journalistes ont été
atteints contre 10 initialement prévus. Le taux de participation des journalistes/ producteurs femmes a été
presque atteint pour les formations en ACG (26% contre 30% visé), mais pas pour le stage international
(seulement 25% contre 50% visé). Seuls quatre « reportages conjoints » sur les 14 prévus ont été produits
suite à la phase théorique de formation, dû à l’indisponibilité de l’autre partenaire et la différence dans la
programmation des partenaires. L’efficacité du projet pour l’atteinte du Résultat 1.2. a été très
mitigée.
Concernant les actions à mener pour qu’un cadre d’échange informel entre les différents acteurs des
médias (publics, privés) soit créé (Résultat 2.2), aucune réunion d’échange informel entre les différents
médias n’a été tenue au cours du projet. L’efficacité du projet pour l’atteinte du Résultat 1.2. a été
nulle.
Enfin, concernant les actions à mener afin que les capacités organisationnelles de l’AEPT soient
renforcées, trois formations ont été données aux membres de la coordination de cette association. Ces
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formations délivrées par SFCG ont porté sur les procédures administratives et financières, la gestion des
médias et la gestion de projets. Le coaching régulier de SFCG à l’AEPT en gestion financière a été
momentanément interrompu lors de la suspension du protocole d’accord, n’assurant pas sa continuité
durant 6 mois ; il a cependant pu reprendre à la reprise du protocole d’accord. L’efficacité du projet
pour l’atteinte du Résultat 1.2. a été mitigée.
En conclusion, l’efficacité du projet en termes d’atteinte des résultats est inégale selon les résultats
visés. Mais, de manière générale, l’efficacité de ce projet est faible.
Impact du projet
L’impact du projet afin d’améliorer l’accessibilité à l’information de qualité et l’inclusion des
populations par le biais d’organes de médias privés (Objectif Spécifique 1) est très mitigé.
D’une part, les formations ont apporté aux journalistes et responsables médias une réelle valeur ajoutée
dans l’exercice de leur métier. Ces derniers ont notamment renforcé leurs capacités en processus de
production d’une émission, maitrise de l’antenne, techniques rédactionnelles, genres radiophoniques,
utilisation de formats interactifs et traitement de sujets conflictuels. Leurs capacités ont aussi été
renforcées sur le point de vue matériel. Les auditeurs des radios partenaires ont constaté des changements
dans la qualité des émissions, notamment le contenu, la façon de présenter des émissions et la qualité de
la diffusion. Cela semble renforcer leur fidélité et leur intérêt pour les émissions produites par ces radios.
Cela devrait permettre aux médias d’avoir un plus grand impact en termes de promotion du dialogue
social, développement et participation citoyenne. Toutefois, quelques facteurs ont ralenti l’impact de
l’intervention sur l’accessibilité de la population à une information de qualité : les difficultés à produire
des émissions conjointes de qualité, le manque de moyens pour se rendre sur le terrain afin de parler avec
les populations et l’instabilité du personnel au sein des radios. De plus, l’inefficacité du projet en termes
de favoriser les conditions supposées à l’amélioration de l’accès des femmes à l’information de qualité
(présence de voix féminines nouvellement formées dans les médias, production d’émissions ayant trait
aux femmes), l’impact du projet concernant les femmes n’a pu avoir lieu de la manière escomptée.
En outre, aucune conclusion n’a pu être tirée concernant l’impact du projet en termes de renforcement de
l’inclusion des populations dans la gouvernance locale par le biais de nouveaux formats d’information, dû
à l’invalidité des données collectées à ce sujet.
L’impact du projet afin de renforcer le rôle des leaders des médias privés, publics et représentants
des organes régulateurs, dans la construction de la paix et la promotion du développement
collaboratif est très faible.
D’une part, les journalistes formés ont acquis des techniques permettant de mieux traiter les informations
conflictuelles et disent être régulièrement appelés à couvrir de tels sujets par leurs responsables.
Cependant, l’impact de ces formations aurait pu être fortement augmenté si les formations reçues avaient
été restituées à d’autres journalistes pairs, ce qui n’a pas été fait, faute de suivi tout au long du projet. De
plus, l’impact des actions menées est limité en raison du très faible nombre de reportages conjoints à
plusieurs médias réalisés.
D’autre part, 94% des interviewés dans les localités des projets disent écouter la radio et 73,7% disent
écouter au moins une des radios partenaires. Les émissions produites avaient donc un fort potentiel
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d’atteindre les populations ciblées. Cependant, le faible taux de réalisation des activités de production
média (27%) nous indique qu’il est peu probable que les émissions aient eu l’impact désiré.
Enfin les réunions d’échanges informels entre les différents acteurs des médias n’ont pas eu lieu, ce qui ne
permet pas d’atteindre l’impact escompté en termes de collaboration entre les médias privés afin de
renforcer leur rôle dans la construction de la paix et la promotion du développement collaboratif.
Enfin, les capacités organisationnelles et financières de l’AEPT apparaissent renforcées à la fin du projet.
L’AEPT est désormais capable de soumissionner des projets auprès de bailleurs différents, dont l’Union
Européenne, ce qui lui permet de diversifier la source de ses financements. Cependant, les problèmes
constatés de gestion du partenariat lors de la mise en place du projet ont limité l’impact escompté.
L’impact en termes de renforcement des capacités du partenaire AEPT est mitigé.
En conclusion, il apparait de cette évaluation finale que le projet a eu un faible impact. Les impacts
du projet apparaissent trop faibles pour que les 2 objectifs spécifiques soient atteints.
Recommandations
Recommandations à SFCG :
Avoir des critères précis pour choisir les partenaires d’exécution des projets que SFCG ne peut
pas directement mettre en œuvre ;
Faire une évaluation des capacités du partenaire afin de mieux répartir les responsabilités lors de
la conception des projets ;
S’assurer à l’avenir de la mise en place d’un système de suivi par le partenaire d’exécution ;
Si besoin, coacher l’équipe de suivi-évaluation du partenaire sur l’importance du suivi, de
rapportage ainsi que de la fréquence ;
S’assurer du respect d’un délai règlementaire pour le virement financier vers le partenaire ;
Améliorer le système de communication avec le partenaire ; garder les traces des communications
sous forme de tableau récapitulatif à mettre à jour régulièrement
Prévoir un cahier de charge pour les journalistes devant suivre des stages à l’étranger
S’assurer d’outiller suffisamment l’équipe administrative du partenaire à l’utilisation de vos
outils tels que le cadre logique et surtout la gestion budgétaire;
Suivre conjointement avec le partenaire, les clauses de productions des émissions ;
Exiger des organes médias partenaires, la restitution entre confrères les formations reçues ;
S’assurer à l’avenir que les critères de sélection des participants à des formations privilégient les
femmes
Recommandations à l’AEPT :
Mettre en place dans l’avenir un système de suivi et évaluation capable de produire des rapports
de suivi permanent ;
Mettre à la disposition des radios des outils (calendrier et fiches) permettant de suivre
correctement les productions ;
Coacher davantage les médias formés pour une bonne qualité de la production des émissions ;
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Communiquer clairement avec le partenaire SFCG ; Accepter que les partenaires coordonateurs
d’un projet mis en œuvre ensemble puissent demander une clarté dans la gestion sans que cela ne
soit pris comme un manque de confiance ;
Partager avec le partenaire de mise en œuvre, les différents rapports.
Recommandations aux médias partenaires :
Respecter les clauses de production des émissions ;
Encourager les journalistes formés à organiser des séances de restitution au niveau de leur
structure ;
Solliciter auprès des journalistes stagiaires, la soumission d’un rapport de fin de stage pour les
partenaires ;
Encourager la participation des productrices à des formations en journalisme ;
Encourager l’embauche de journalistes femmes et la représentation de leur voix à la radio ;
Encourager la production des reportages conjoints avec d’autres médias confrères
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2. Contexte du projet
Le projet Renforcement des capacités des médias pour promouvoir le développement collaboratif au
Tchad est un projet de trente-six mois qui a été financé par l’Union Européenne et mis en œuvre entre juin
2011 et juin 2014 par Search for Common Ground (SFCG). Ce projet a été mené en collaboration avec
l’Association des Editeurs de la Presse Privée du Tchad (AEPT) dans les localités de N’Djamena,
Moundou et Sarh, en République du Tchad.
Malgré ses ressources naturelles, le Tchad est l’un des pays les moins développés au monde (183ième
sur
187 pays sur l’Indice de Développement Humain en 20141). Ce retard de développement peut être
attribué, entre autres, à une mauvaise gouvernance qui se traduit par une absence de transparence dans
l’utilisation des ressources et un manque de dialogue politique. L’exclusion des populations dans le
processus de décision a été d’autant plus forte ces dernières années du fait d’une succession de crises
politiques intérieures et extérieures qui déstabilisent certaines régions du pays et encouragent davantage
un recul de la transparence et du partage du pouvoir de décision dans la
gestion des biens publics. Ainsi, sur l’Indice de Gouvernance de la Fondation Mo Ibrahim pour le
continent africain, le Tchad est classé 49e sur 52
2.
Dans ce contexte de tension et d’absence de dialogue, les médias peuvent jouer un rôle crucial dans la
promotion d’un développement et d’une gouvernance collaborative. En 2011, date du début du projet,
plusieurs défis avaient été constatés, qui empêchaient les médias de pleinement jouer ce rôle. Les médias
tchadiens ont eu à souffrir de graves entraves à leur liberté d’expression à cause de la situation politique
du pays. En effet, les gouvernements successifs, au pouvoir depuis 1990, avaient adopté des mesures
restrictives concernant la liberté de la presse à la suite de crises internes et externes au pays. Le Haut
conseil de la Communication (HCC) a été l’une des toute premières institutions mise en place à l’issue de
la Conférence nationale Souveraine de 1993. La première équipe a été installée en 1994, bien avant la
promulgation de la Constitution de 1995. Il est créé par la Loi avec une double compétence, à savoir
réguler la presse et les médias audiovisuels. Mais cet organe ne joue pas vraiment son rôle auprès des
journalistes. Les relations entre cet organe de régulation et les journalistes, notamment des médias privés,
sont plus confrontationnelles que collaboratives. Ainsi, les articles critiques des actions du gouvernement,
la production de reportage sur les attaques des rebelles ou sur le conflit avec le Soudan étaient considérées
comme susceptibles d’affaiblir le gouvernement et donc subversifs.
D’après un rapport d’Amnesty International3, il existe à l’heure actuelle toujours une répression violente
de toute forme de critique par le gouvernement et des restrictions à la liberté d’expression dans le pays.
Des centaines de personnes – dont des députés de l’opposition, des journalistes et des universitaires – sont
détenues illégalement au Tchad, souvent sans inculpation et dans des conditions déplorables. Ces
dernières années, il a été permis de remarquer que la presse locale, notamment écrite, est soumise à une
contrainte liée à la liberté de ton des journalistes de journaux indépendants. Ces derniers étaient
auparavant virulents à l’encontre du pouvoir en place ; du fait des pressions exercées, ils font désormais
1 A la date du début du projet, juin 2011, le Tchad était classé 162
e sur 169 selon l’Indice de Développement
Humain. 2 A la date du début du projet, le Tchad était 52ième sur 53 pour le continent africain.
3 Au nom de la sécurité ? Arrestations, détention et restrictions à la liberté d’expression au Tchad, Rapport
d’Amnesty International, 2013
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profil bas pour la plus part d’entre eux. Ce retournement médiatique sur l’actualité politique tchadienne
affecte la qualité de l’information, certains journalistes faisant mine d’ignorer leur responsabilité
d’informer de manière objective.
Cependant, cette restriction de la presse est en partie imputable au manque de professionnalisme de
certains journalistes tchadiens qui ont adopté une attitude d’opposition et de confrontation systématique
vis-à-vis du gouvernement d’Idriss Déby4. L’absence, pendant longtemps, d’une école de journalisme au
Tchad a été l’un des principaux facteurs qui a limité la formation professionnelle des journalistes. La
première faculté de formation en journalisme a ouvert ses portes seulement en 2012 à l’Université de
Ndjamena. A part la vieille génération de journalistes qui a été formée dans les universités à l’étranger,
grâce à des bourses d’Etat, et quelques rares diplômés en communication et journalisme du récent
IUSTA5, la majorité des journalistes sur le terrain au Tchad sont encore des « pigistes » ou des étudiants
en communication d’entreprise.
C’est dans ce contexte de faible gouvernance démocratique, d’absence de dialogue entre autorités et
population et de capacités limitées des médias tchadiens, que le projet « Renforcement des capacités des
medias pour promouvoir le développement collaboratif au Tchad » a été élaboré et mis en œuvre.
Ce projet avait pour objectif général de renforcer les capacités du secteur médiatique pour
promouvoir un dialogue social, le développement, et la participation citoyenne à travers deux
objectifs spécifiques (O.S.) :
O.S.1 : Améliorer l’accessibilité à l’information et l’inclusion des populations par le biais
d’organes de médias privés. Pour cela, le projet vise à contribuer aux résultats suivants :
Résultat 1.1. Renforcer l’accès pour le public, et en particulier les femmes, à une
information de proximité et de qualité
Résultat 1.2. Renforcer l’inclusion des populations dans la gouvernance locale par le biais
de nouveaux formats d’information, véritables plateformes d’échange entre autorités et
administrés
O.S.2 : Renforcer le rôle des leaders des médias privés, publics et représentants des organes
régulateurs, dans la construction de la paix et la promotion du développement collaboratif, à
travers l’atteinte des résultats suivants :
Résultat 2.1. Des journalistes influents auprès de leurs pairs, pratiquent une approche non
confrontationnelleet compréhensive des conflits.
Résultat 2.2. Un cadre d’échange informel entre les différents acteurs des médias (publics,
privés) est créé.
En outre, le projet visait l’atteinte d’un résultat transversal :
Résultat Transversal. : Renforcer les capacités organisationnelles de l’AEPT pour la poursuite
de ce type de projet dans l’avenir.
4 Carson, Katherine. « Tchadien Media Sector : Current State of Affairs ». Search for Common Ground. Janvier
2011 5 Institut Universitaire des Sciences et Techniques d’Abéché
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Les principales cibles visées par le projet étaient les acteurs-clés et institutions dans le secteur des médias
du Tchad. Ces cibles ont été sélectionnées afin de permettre de toucher les bénéficiaires finaux prévus
par l’action : la population des villes de N’Djamena, Moundou, et Sarh.
Pour atteindre les résultats attendus du projet ci-dessus énumérés, les actions suivantes avaient été
prévues:
Formation et coaching in situ pour 7 radios et pour 5 journaux à N’Djamena, Moundou et Sarh
(R.1.1)
Atelier de formation axé sur la production de nouveaux formats d’information (R.1.2)
Production conjointe SFCG et radios de proximité de 140 émissions sur la bonne gouvernance
locale (R.1.2)
Formation des Leaders du secteur des médias dans l’Approche Common Ground destinée à 90
journalistes (R.2.1)
Productions conjointes de 14 reportages à N’Djamena (R.2.1)
Stages d’approfondissement au profit de 10 journalistes (R.2.1)
Rencontres régulières de suivi et consolidation du réseau et transfert des ressources (R.2.2)
Coaching sur la gestion financière et administrative du personnel de l’AEPT (R. Transversal)
Evaluation finale « Renforcement des capacités des Médias pour promouvoir le développement collaboratif au Tchad » | PAGE 11
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3. Méthodologie
Objectifs de l’évaluation et utilisateurs
Cette évaluation finale a pour objectif de fournir aux instances décisionnelles de SFCG et de l’Union
Européenne ainsi qu’à l’AEPT des éléments d’information sur les réalisations du programme, les
difficultés rencontrées et les mesures correctives permettant d’orienter des projets similaires mis en œuvre
par SFCG ou d’autres partenaires.
De façon spécifique, cette évaluation vise les objectifs suivants :
Evaluer l’efficacité du projet ;
Evaluer l’impact du projet ;
Tirer les leçons de l’intervention du programme et formuler des recommandations pour un
ajustement de la gestion stratégique au sein d’autres programmes SFCG.
Critères d’évaluation
Pour cette évaluation finale SFCG s’est conformée aux normes et standards d’évaluation adoptés par
l’OCDE6. A ce titre l’équipe d’évaluation a axé son investigation et son analyse sur les points suivants :
L’efficacité: estime la contribution apportée par les résultats à la réalisation des objectifs du
projet et de la façon dont les hypothèses ont affecté cette réalisation.
L’impact: mesure la contribution du projet à l’objectif général du projet en question
L’analyse du projet à partir de ces critères d’évaluation s’est faite grâce aux questions évaluatives
principales suivantes :
Efficacité du projet :
Quelle est l’efficacité des actions liées au résultat 1.1 "L’accès du public, en particulier
les femmes, à une information de proximité et de qualité, est renforcé" ?
Quelle est l’efficacité des actions liées au résultat 1.2 " L’inclusion des populations dans
la gouvernance locale est renforcée par le biais de nouveaux formats d’information,
véritables plateformes d’échange entre autorités et administrés" ?
Quelle est l’efficacité des actions liées au R2.1: "Des journalistes influents auprès de
leurs pairs, pratiquent une approche non confrontationnelle et compréhensive des
conflits" ?
Quelle est l’efficacité des actions liées au R2.2 : "Un cadre d’échange informel entre les
différents acteurs des médias (publics, privés) est créé" ?
Quelle est l’ efficacité des actions liées au Résultat Transversal ?
Impact du projet
Le projet a-t-il permis de renforcer l’accès pour le public, et en particulier les femmes, à
une information de proximité et de qualité?
6 Organisation pour la Coopération au Développement Economique
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Le projet a-t-il permis de renforcer l’inclusion des populations dans la gouvernance locale
par le biais de nouveaux formats d’information, véritables plateformes d’échange entre
autorités et administrés?
Le projet a-t-il permis que des journalistes influents auprès de leurs pairs, pratiquent une
approche non confrontationnelle et compréhensive des conflits?
Le projet a-t-il permis de créer un cadre d’échange informel entre les différents acteurs
des médias (publics, privés) ?
Les capacités organisationnelles de l'AEPT sont-elles renforcées pour la poursuite de ce
type de projet?
Période d’évaluation et zone cible :
Cette évaluation finale s’est déroulée du 17 juillet au 20 décembre 2014. Elle s’inscrit dans la dynamique
de SFCG qui vise à mesurer la qualité de ses différents programmes à travers des évaluations.
L’évaluation s’est déroulée selon les phases suivantes : étapes préparatoires du 17 juillet au 04 septembre
2014, collecte de données sur le terrain de 08 au 18 septembre 2014, saisie des données du 02 au 20
octobre 2014, analyse et rédaction du 23 octobre au 20 décembre 2014.
La collecte de données a eu lieu dans les villes de N’Djamena, Moundou et Sarh ; ces zones sont celles
dans lesquelles le projet, objet de la présente évaluation, a été mis en œuvre. En vue de rendre cette
évaluation la plus crédible et la plus indépendante possible, SFCG y a associé un représentant de la
Direction des ONG (DONG) et un représentant du Ministère de la Communication.
Type de méthodologie, cibles de l’évaluation et activités de collecte de données
Cette évaluation finale est basée sur une méthodologie mixte combinant une approche qualitative et
quantitative. L’équipe d’évaluation a utilisé les activités suivantes pour collecter les données nécessaires à
la réalisation de cette évaluation : la revue documentaire, des interviews semi-structurées avec des
informateurs clés et un sondage. Les personnes ciblées par cette évaluation sont les responsables de
médias partenaires du projet, des journalistes ayant participé à au moins une formation dans le cadre de ce
projet, les auditeurs des radios dans les zones de mise en œuvre du projet et les responsables du projet au
sein de SFCG et l’AEPT.
Dans le cadre de la collecte des données pour cette évaluation, les activités suivantes ont été réalisées :
Revue documentaire :
Nous avons passé en revue tous les rapports relatifs à ce projet, ainsi que les documents du projet:
Descriptif du projet, Rapport narratif intermédiaire (RNI) Juillet 2011 - Juin 2012, RNI Juin 2012 - Juin
2013, Evaluation à mi-parcours (mai/juin 2013), ROM 2012, ROM 2013, Rapports de missions. Cette
revue documentaire avait pour objectif de nous permettre de faire la triangulation de données relatives au
projet.
12 interviews semi-structurées :
Cinq interviews semi-structurées ont été conduites avec les responsables des radios partenaires et sept
avec des journalistes formés dans le cadre de ce projet. Les données chiffrées des personnes consultées se
présentent comme suit :
Evaluation finale « Renforcement des capacités des Médias pour promouvoir le développement collaboratif au Tchad » | PAGE 13
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Tableau 1 : Répartition des personnes interviewées par genre et par localité
Types de personnes Genre Localités Total N’Djamena Moundou Sarh
Responsables des radios
partenaires
Femmes 0 0 0 0
Hommes 1 2 2 5
Total 1 2 1 5
Journalistes formés
Femmes 1 0 1 2
Hommes 1 3 1 5
Total 2 3 2 7
Un sondage auprès de 600 personnes :
L’échantillon du sondage a été de 600 personnes pour les 3 localités, soit 200 personnes par localité. Les
enquêtés ont été sélectionnés de manière aléatoire, tout en portant une attention particulière à l’équilibre
du genre ; ainsi, les enquêteurs sélectionnaient une personne sur trois dans la rue des localités visées par
l’évaluation, tout en faisant l’effort d’enquêter autant d’hommes que de femmes. La répartition par genre
prévue était de 51% de femmes et de 49% d’hommes. Le tableau suivant récapitule le genre des enquêtés
selon les villes d’enquête :
Tableau 2 : Genre des a enquêtés selon les villes d’enquête (N=600 personnes)
Ville Féminin Masculin
Moundou 54,8% 45,2%
N’Djamena 48,2% 51,8%
Sarh 48,8% 51,2%
Total 50,6% 49,4%
Outils de collecte de données
Les outils de collecte de données utilisés lors de cette évaluation sont les guides d’interviews et le
questionnaire pour le micro-sondage. Ces outils ont été préparés par le Coordinateur DM&E de Search for
Common Ground Tchad, avec l’appui technique de l’Equipe ILT de l’Afrique de l’Ouest. Il y avait au
total pour cette évaluation: un guide d’entretien avec les responsables des radios partenaires, un autre
guide d’entretien pour les journalistes participants à la formation dans le cadre de ce projet et un protocole
de sondage.
Analyse des données :
Les données quantitatives collectées à partir des micro-sondages ont été saisies sous Sphinx Plus et
analysées avec le logiciel Excel en utilisant des tableaux croisés dynamiques. Les données des interviews
semi-structurés ont été saisies sous Microsoft Word. Sur la base d’une matrice d’analyse de données,
nous avons procedé au regroupement des données qualitative et quantitatives par thème d’évaluation et
question précise, par grand groupe d’informateurs clés. Les données collectées ont également été
traingulées avec les données collectées dans la revue documentaire ; cette triangulation des données
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collectées faite lors de l’analyse (par groupe d’informateurs clés, localités et outils de collecte) nous a
permis de pouvoir répondre aux questions précises de cette évaluation. La transcription des résultats dans
le rapport est faite de facon anonyme pour préserver la sécurité physique et morale des personnes qui ont
été interviewées. Le sondage effectué a eu pour objectif principal de collecter les perceptions des
populations des zones de mise en œuvre sur les changements opérés dans la production, le contenu et la
qualité des émissions des radios partenaires ainsi que les effets de ces productions sur la gouvernance
locale et la cohésion sociale.
Equipe d’évaluation :
L’évaluation finale de ce projet a été gérée par la Coordination DM&E de Search For Common Ground
Tchad en collaboration avec la Direction des ONG (DONG), structure sous tutelle du Ministère de
l’Economie, du plan et de la coopération Internationale, tel que spécifié dans le protocole d’accord signé
entre SFCG et le Gouvernement du Tchad, à travers le Ministère de la Communication.
Sur le plan humain, cette équipe était constituée de :
Samuel Atchenemou Azoudoum, Coordinateur DM&E de Search for Common Ground
Tchad, évaluateur principal. Il a été en charge de la conception des outils de collecte, la
formation des enquêteurs et agents de saisie, la conduite des entretiens dans la localité de
Sarh et N’Djamena, la supervision des enquêteurs et agents de saisie, l’analyse des données et
la rédaction du rapport;
deux superviseurs, chargé de contrôler les enquêteurs et vérifier le remplissage du
questionnaire sondage sur le terrain. L’un d’eux a par ailleurs été chargé de conduire les
entretiens dans la ville de Moundou ;
douze enquêteurs ou agents de collecte des données dont six femmes, répartis en quatre
enquêteurs par localité de l’évaluation ;
un agent de saisie, pour l’entrée de données collectées sous Sphinx Plus, et un agent
vérificateur de saisie ;
Vouloumso Dalam Vinto, Responsable de suivi-évaluation de la Direction des ONG au
Ministère de Plan et de la Coopération Internationale et Topona Celestin, conseiller en
communication au Ministère de la Communication, tous deux délégués par la DONG pour la
supervision générale de l’évaluation;
L’Equipe de support de l’Institutional Learning Team (équipe d’apprentissage institutionnel)
de SFCG, basée à Abidjan et N’Djamena. Charline Burton (Spécialiste DME pour l’Afrique)
a assuré la qualité de la méthodologie, des outils de collectes de l’évaluation et du plan
d’analyse des données. Maud Bakirdjian (Associée DME pour le Sahel) a réalisé la revue
documentaire du projet, vérifié la saisie des données, contribué à l’analyse des données et a
rédigé une partie du rapport.
Les enquêteurs et les superviseurs ont été recrutés dans les localités de la mise en œuvre de l’évaluation
afin de minimiser les différences linguistiques et la difficulté de la connaissance du milieu. De plus, pour
réduire le risque que les femmes refusent de se prêter au sondage, nous avons équilibré la proportion des
femmes et des hommes parmi les enquêteurs recrutés.
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Difficultés et limites de la méthodologie :
L’état de santé du personnel de la DONG qui avait été délégué par sa structure pour réaliser la supervision
générale de l’évaluation dans les zones de Moundou et de Sarh, ne lui a pas permis de jouer entièrement
son rôle auprès de l’équipe dans ces zones. L’équipe a donc été laissée à la seule responsabilité du
superviseur de chaque localité. L’absence partielle de la DONG a aussi représenté un handicap non
négligeable dans les contacts avec les autorités ainsi que les responsables de médias partenaires du projet
dans les zones sous sa responsabilité.
L’indisponibilité et le refus de certains journalistes à se prêter à notre entretien ont réduit
considérablement le nombre de journalistes à interviewer prévus selon notre méthodologie (un homme et
une femme par radio, soit 18 journalistes au total). Les raisons évoquées pour justifier ce refus sont que
certains d’entre eux ne font plus partis de l’équipe de la station. A cela s’ajoute la fermeture de deux
radios partenaires dont le personnel n’était plus disponible à se prêter à nos entrevues. Au total, nous
avons donc rencontré 07 journalistes au lieu des 18 prévus initialement.
Des difficultés sont également survenues pour s’entretenir avec les responsables de l’AEPT. En effet,
ces derniers gardaient de Search for Common Ground un mauvais souvenir pour diverses raisons
évoquées dans ce rapport, et ont dès lors refusé à plusieurs reprises de rencontrer le personnel de SFCG
en charge de cette évaluation. Un entretien de courte durée a finalement été accordé aux évaluateurs en
novembre 2014.
En ce qui concerne le questionnaire, celui-ci était conçu en français, et la traduction du questionnaire a
été omise lors de la formation des enquêteurs. Ceux-ci ont donc dû traduire en langue locale en direct
lorsque les enquêtés ne parlaient pas français. De même, ils ont dû faire correspondre les réponses
données par les enquêtés en langue locale à des réponses pré-conçues en français dans le questionnaire.
Des problèmes de traduction et d’interprétation ont pu survenir à ce niveau.
De plus, la formulation de certaines questions du sondage n’a pas été suffisamment précise pour
s’assurer de la bonne compréhension des questions par les enquêtés et ainsi s’assurer qu’ils ont répondu
en toute compréhension de la question. Cette difficulté concerne spécifiquement les questions liées à
l’organisme producteur des émissions (cf. Annexe 4: questionnaire, section 6) au cours desquelles il est
possible que les enquêtés aient eu des problèmes à identifier le nom de Search for Common Ground et
AEPT. Le jingle ne leur étant pas diffusé lors des enquêtes, il n’est pas sûr qu’ils aient répondu aux
questions en comprenant que l’on parlait spécifiquement des émissions de Search for Common Ground et
AEPT. Cela pourrait avoir biaisé les réponses de la section 6 du questionnaire, notamment concernant
les effets des émissions sur la bonne gouvernance et sur la cohésion sociale. Etant donné l’absence
d’autres données pour trianguler ces données quantitatives, et l’impossibilité de collecter les données de
nouveau, l’équipe d’évaluation du projet a décidé d’invalider les résultats liés à l’exploitation des
données de la section 6 du questionnaire. Cela résulte dans une absence de données quantitatives
concernant les effets des émissions produites dans le cadre de ce projet sur la bonne gouvernance et la
cohésion sociale.
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4. Résultats de l’évaluation
4.1. Efficacité du projet
Le critère de l’efficacité est utilisé pour mesurer la contribution apportée par les résultats à la réalisation
des objectifs du projet et la façon dont les hypothèses ont affecté cette réalisation. Cette partie évalue
donc dans quelle mesure les différents sortants et résultats du projet ont été atteints. Cette section est
structurée autour des différents objectifs et résultats escomptés du projet.
4.1.1. Efficacité des actions liées au résultat 1.1 : "L’accès du public, en
particulier les femmes, à une information de proximité et de qualité est
renforcé"
Afin de renforcer l’accès du public, et en particulier des femmes, à une information de proximité et de
qualité, le présent projet prévoyait la réalisation de formations in situ au sein de 7 radios et 5 journaux
afin d’améliorer la qualité du contenu des articles et des émissions.
Au total, ce sont 14 médias qui ont été formés par SFCG et l’AEPT7:
9 radios : 4 à N’Djamena (Radio Liberté FM, Radio Dja FM, Arc-en-Ciel et Ngato FM), 2 à Sarh
(Radio Lotiko et l’ONRTV8) et 3 à Moundou (Radios Kar Uba, DujiLokar et ONRTV)
5 journaux à N’Djamena : Le progrès, Le temps, Notre temps, L'observateur et Ndjamena bi
hebdo
Le projet a donc dépassé le nombre de sortants prévus, avec la formation de 9 radios au lieu de 7
initialement prévues9 , répondant à l’intérêt suscité par certains journalistes de médias publics et privés de
pouvoir bénéficier des formations.
De plus, afin d’accroitre l’accès des femmes à une information de proximité et de qualité, le projet visait à
renforcer la prise en compte des voix des femmes dans les médias. Pour cela, SFCG et l’AEPT devaient
privilégier la formation d’acteurs des médias féminins à hauteur de 30% et sensibiliser l’ensemble des
journalistes touchés par le projet à l’approche genre de l’information, en les encouragent à produire un
reportage chaque semaine ayant trait aux femmes. La logique sous-jacente était que les auditrices auraient
un intérêt accru pour les émissions produites qui s’adressent à elles.
Au total, 168 journalistes ont pu être directement formés au cours des formations in situ, les formations à
l’Approche Common Ground (ACG) ou les stages d’apprentissage à l’extérieur du Tchad. Tout au long
du projet, le taux de participation des femmes à ces formations est de 18%, inférieur au taux visé de
7 Rapport Narratif Intermédiaire (RNI) 2011-2012 et 2012-2013 ; Interview avec le Président de l’AEPT.
8 L’Office National Régional de Radiodiffusion et Télévision du Tchad
9 ROM 2013
O.S.1. Améliorer l’accessibilité de l’information et l’inclusion des populations par le biais
d’organes de médias privés
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30%10
. Il faut cependant noter que ce taux de 18% a été atteint grâce aux efforts de SFCG et l’AEPT en
2012, tels que la mise en œuvre d’une formation ACG dédiée exclusivement aux femmes des médias
(décembre 2012). En effet, en 2011, le taux de participation des femmes n’était que de 5%11
. Lors de
l’évaluation finale, une journaliste femme ayant participé aux formations donne une raison à cette faible
participation des femmes aux formations du projet: ‘L’absence des femmes dans le métier et l’orgueil de
l’homme qui ne favorise pas les femmes’. Un journaliste homme évoque de son côté que ‘les femmes
s’affirment difficilement dans ce genres d’activité, elles sont plus animatrices que productrices’. Ceci
explique la faible présence de journalistes féminins mentionnée dans la proposition de ce projet, et la
place donnée aux femmes tchadiennes dans les médias12
.
En outre, selon les directeurs des radios partenaires, toutes les radios formées ont produit des reportages
ayant trait aux femmes. Cependant, l’équipe n’a pas pu accéder à des données qui permettraient de
confirmer cela. De plus, ces émissions n’ont pas été produites à la fréquence escomptée. En effet, 4
responsables de radios sur 5 interviewés disent que des reportages ayant trait aux femmes ont été réalisés
mais pas au nombre escompté, ce qui est confirmé par les journalistes formés. Un seul responsable
déclare avoir deux émissions par semaine consacrées aux femmes mais ce résultat n’est pas imputable au
projet : avant même la formation de SFCG, il avait 2 émissions de ce genre par semaine dans sa grille de
programme.
Une explication est que certains journalistes ont été formés tardivement, suite au retard dans la mise en
œuvre des activités, liés eux-mêmes à des retards dans le décaissement des fonds destinés à la mise en
œuvre du projet13
au début du projet. Toutefois, même si la fréquence et le nombre escomptés ne sont pas
atteints, selon le rapport de suivi du projet réalisé de façon indépendante par un expert contracté par le
bailleur de fonds en 201314
, ces émissions ont encouragé les professionnels des médias à être plus
sensibles aux questions de genre et à la problématique de la violence contre les femmes.
En conclusion, l’efficacité des actions liées au résultat 1.1 a été mitigée : d’une part, le nombre de
formations in situ et de médias et journalistes formés au cours de ces formations in situ a dépassé les
prévisions initiales du projet. En effet, quatorze radios et journaux ont été formés, au lieu de douze prévus
initialement, ceci représente un taux de mise en œuvre de 117%. 168 journalistes ont participé aux
activités de renforcement de capacité, contre 90 prévus initialement (taux d’exécution de 186%).
Néanmoins, malgré les efforts réalisés en ce sens, le projet n’a pas réussi à atteindre les cibles féminines
prévues : seulement 18% des journalistes formés étaient des femmes, contre 30% prévus initialement. De
plus, les émissions et reportages ayant traits aux femmes qui devaient être produits à la suite des
formations n’ont pas été produits tels que prévus.
10 Annexe 1 Tableau 1; RNI 2012. Il est à noter cependant que ce taux pourrait être légèrement plus élevé compte
tenu de l’absence de données concernant le genre des participants aux premières formations in situ. 11
RNI 2012 12
RNI 2012 13
RNI 2011 - 2012 14
ROM 2013
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4.1.2. Efficacité des actions liées au résultat 1.2 : " L’inclusion des populations
dans la gouvernance locale est renforcée par le biais de nouveaux formats
d’information, véritables plateformes d’échange entre autorités et administrés"
Dans le but d’inclure les populations dans la gouvernance locale, le présent projet avait pour objectif de
renforcer les capacités des médias pour qu’ils puissent jouer un rôle constructif dans la création d’un
dialogue entre autorités publiques locales et administrés. Pour cela, les journalistes et les responsables
médias ont été formés par SFCG et l’AEPT à utiliser des formats journalistiques interactifs, tels que les
micros-trottoirs, les reportages-enquêtes et les tables rondes. Après les formations in situ, le projet
prévoyait que SFCG et l’AEPT produisent 20 émissions sur la gouvernance locale, avec chacune des 7
radios de proximité, soit 140 émissions au total. Ces émissions devaient permettre d’exposer de manière
non confrontationnelle les besoins des populations mais aussi les contraintes des autorités locales afin de
créer un dialogue constructif.
Au total, ce sont 38 émissions sur la gouvernance locale qui ont été produites15
, au lieu des 140
émissions prévues. Cela représente un taux de mise en œuvre de 27%. Lors de l’évaluation finale, les
responsables médias et les journalistes confirment que le nombre d’émissions sur la bonne gouvernance
n’a pas été atteint. Plusieurs raisons sont évoquées : tout d’abord le retard dans la mise en œuvre des
formations in situ en 2011-2012, tel qu’évoqué ci-dessus, a entrainé le retard dans la production de ces
émissions16
. Ensuite, les producteurs ont eu des problèmes de compréhension du projet et de la différence
entre partenariat et prestation de service17
. Tout ceci a retardé la production des émissions conjointes qui
n’a commencé qu’en mars 2013, suite aux réunions de production avec les radios partenaires de
N’Djamena pour définir les sujets à traiter dans les émissions.
Initialement, le projet avait été conçu pour être coordonné par l’AEPT après des sessions de renforcement
des capacités de SFCG au profit des membres de l’AEPT. Mais ayant constaté la lenteur dans
l’assimilation des formations données afin de permettre à l’AEPT de pouvoir coordonner efficacement le
projet, SFCG a décidé d’ouvrir un bureau au Tchad. Nous pouvons donc dire raisonnablement que
l’absence d’un bureau, ou d’un personnel permanent de SFCG au Tchad a été pour beaucoup dans ces
différents manquements constatés. En effet, ce n’est qu’en septembre 2012, soit plus de an après la mise
en œuvre du projet, que SFCG a ouvert un bureau et affecté un personnel permanent au Tchad. Des
mesures correctives ont été entreprises par SFCG, pour tenter de dissiper les incompréhensions qui se sont
installées entre l’AEPT et les radios partenaires au sujet de la portée du projet.
En outre, après le lancement des émissions, certaines radios, notamment à Moundou et à Sarh, ont
rencontré des difficultés telles que celle d’avoir des interlocuteurs pour les interviews, notamment au
niveau local18
. De plus, selon les journalistes formés et le ROM 2013, deux radios partenaires, Arc-en-ciel
et Kar Uba, ont fermé au cours de l’année 2013 pour raisons financières, ce qui a empêché les journalistes
formés de continuer à travailler sur les coproductions. Ainsi, entre mars 2013 et juin 2013, seules 9
émissions ont pu être produites : 3 par la radio FM Liberté (N’Djamena), 3 par les radios Duji Lokar et
15 AEPT I1 nous renseigne que 80 émissions ont été produites mais cela n’est percevable dans aucun rapport
narratif, ROM ou évaluation, et n’a pas pu être vérifié par l’équipe d’évalution. Par ailleurs, cela est en discorde
avec le nombre annoncé par SFCG I1. De plus, seuls les fichiers de 38 émissions ont pu être consultées par l’équipe
d’évaluation, qui a donc retenu le nombre de 38 émissions. 16
RNI 2011-2012 17
RNI 2012-2013 18
RNI 2012-2013
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Kar Uba (Moundou) ainsi que 3 par les radios Lokito ONRTV à Sarh. Elles ont été diffusées après
vérification de la qualité des émissions par le Panel des Experts19
entre juin 2013 et mars 2014, chacune
par la radio qui les avait produites.
Constatant le retard dans la production et diffusion des émissions, un consultant extérieur a été embauché
par l’AEPT avec l’appui du Chargé de Programme SFCG au cours du premier semestre 2014 afin
d’accélérer la production d’émissions : 25 émissions ont pu être produites dans ce cadre, sur la base de
discussions des sujets à traiter avec les radios partenaires. Quelques exemples de sujets choisis sont la
gestion des bornes fontaines, le rôle des autorités telles que le gouverneur ou le maire, l’implication des
jeunes et des femmes dans la gouvernance locale. Plusieurs formats interactifs ont été utilisés pour ces
émissions, tels que des micro-trottoirs, des tables rondes, des spots et des entretiens.
En conclusion, l’efficacité du projet a été très faible par rapport au résultat 1.2. En effet, seules 38
émissions ont été réalisées dans le cadre de ce projet, contre 140 prévues initialement, ce qui représente
un taux d’exécution de 27%. Divers facteurs sont mis en évidence pour expliquer ce faible taux, tels que
le retard dans la réalisation des formations, l’absence d’un bureau et d’un personnel permanent de SFCG
au Tchad, la fermeture de deux radios partenaires en 2013, le manque de clarté par rapport aux attentes de
SFCG et de l’AETP quant au rôle des radios partenaires. Ces raisons semblent néanmoins insuffisantes
pour justifier entièrement le non accomplissement des produits prévus dans le cadre de ce résultat.
4.1.3. Efficacité des actions liées au R2.1: "Des journalistes influents auprès de
leurs pairs, pratiquent une approche non confrontationnelleet compréhensive
des conflits."
Constatant un manque de professionnalisme et de formation de certains journalistes tchadiens qui
adoptent une attitude systématique d’opposition et de confrontation vis-à-vis des autorités, menaçant leur
crédibilité, SFCG avait identifié le besoin de former les journalistes à un journalisme sensible aux
conflits. Pour cela, SFCG et l’AEPT prévoyaient d’organiser 3 formations à l’Approche Common
Ground (ACG) au cours du projet, à l’attention de 90 journalistes. Ces dernières visaient à renforcer les
capacités des participants en matière de pratique du journalisme responsable et sensible aux conflits.
Trois formations spécifiques à l’ACG ont eu lieu entre octobre 2011 et décembre 2012, soit un taux
d’exécution de 100%, avec un total de 50 participants (Annexe 1, Tableau 1). Cela représente un taux de
55,5% par rapport à la cible prévue initialement. Les raisons évoquées sont le fait que toutes les personnes
conviées aux différentes formations ne se présentent pas tous le jour de la formation, et les places
réservées aux femmes sont restées le plus clair du temps inoccupées. De plus, dans le cadre de ce projet,
SFCG et l’AEPT se sont engagés à faire en sorte que 30% des professionnels des médias du Tchad
touchés par les formations soient des femmes. Parmi ces 50 participants, 13 étaient des femmes, soit 26%.
19 « Le panel des experts » c’est le comité d’écoute des émissions qui a été mis en place pour écouter et valider les
émissions. Il est composé de SFCG, AEPT, HCC et un journaliste choisit par l’AEPT.
O.S.2. Renforcer le rôle des leaders des médias privés, publics et représentants des organes
régulateurs, dans la construction de la paix et la promotion du développement collaboratif
Evaluation finale « Renforcement des capacités des Médias pour promouvoir le développement collaboratif au Tchad » | PAGE 20
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Le taux visé de participation des femmes a donc été presque atteint. A ce sujet, il faut noter les efforts
faits par SFCG et AEPT envers l’équilibre genre ; constatant un très faible taux de participation des
femmes après la 1ère formation, les deux partenaires ont convenu stratégiquement d’organiser une
formation en méthodologie ACG exclusivement dédié aux femmes des médias (comme mentionné dans la
section 4.1), et une 3e rassemblant hommes et femmes
20.
Après la phase théorique de formation de 3 jours, les journalistes devaient réaliser des exercices pratiques
ou « reportages conjoints ». Ceux-ci consistent à regrouper des journalistes de tendances différentes (y
compris publics et privés) afin qu’ils élaborent ensemble des reportages en appliquant les principes et
outils interactifs présentés lors de la phase théorique. Le projet visait la réalisation de 14 reportages
conjoints. Quatre reportages conjoints ont pu être réalisés dans ce cadre, dans lequel 4 émissions ont été
produites conjointement entre une radio privée (FM Liberté), une radio publique (l’ORNTV) et une radio
confessionnelle (Lotiko) (SFCG I121
). Cependant, les responsables radios mentionnent avoir produit à la
suite des formations des reportages conjoints sur le terrain. Le nombre précis de ces reportages est
inconnu, suite à des faiblesses dans le suivi des radios partenaires, néanmoins les responsables radios
évoquent ne pas avoir pu produire le nombre escompté de reportages (14). Ils mentionnent deux raisons
principales: l’indisponibilité de l’autre partenaire et la différence dans la programmation. En effet, les
responsables radios expliquent que chaque station a sa grille de programme ce qui fait que les reportages
prévus par un partenaire n’entrent pas forcement dans le programme de l’autre partenaire.
En outre, le projet prévoyait un stage d’approfondissement pour 10 journalistes de haut potentiel, afin
de renforcer leur capacité dans la mise en application de l’approche « Common ground ». Se déroulant à
Abidjan et à Bujumbura pour une durée de 45 jours, ils avaient pour objectif d’amener les journalistes à
visiter et étudier les médias du pays hôte et à réfléchir sur le développement du secteur médiatique, en se
focalisant sur son rôle et son influence dans un processus de réconciliation nationale. Au total, ce sont 8
journalistes, 4 envoyés à Abidjan et 4 à Bujumbura, qui ont pu participer à cette expérience, soit un taux
d’atteinte de 80% de la cible. La fermeture de deux radios partenaires au cours de la mise en œuvre du
projet n’a pu permettre d’atteindre cet objectif. Mais pour permettre d’approcher le chiffre initialement
prévu, SFCG et AEPT ont décidé d’accorder deux places à deux radios partenaires qui avaient une grande
capacité en terme de personnel ce qui leur a permis d’affecter deux producteurs à la réalisation des
émissions. Il s’agit de la station régionale de l’ONRTV de Sarh et de FM Liberté de N’Djamena.
Ce stage était composé de cours intensifs de formation de 20 heures par semaine, complétés par 20 heures
de travail pratique au sein du studio radio de SFCG ou d’un autre média. Ceci a eu lieu au cours du 2e
semestre 2013. Les journalistes ont été sélectionnés par les responsables des médias selon les critères
suivants élaborés par SFCG et AEPT : être producteur/productrice permanent dans l’une des radios
impliquées dans la mise en œuvre du projet ; être impliqué dans la production des émissions conjointes
dans le cadre du projet ; avoir produit au moins deux émissions jugées de bonne qualité par SFCG et
AEPT dans le cadre du projet ; avoir un âge compris entre 25 et 40 ans. En outre, le projet prévoyait
l’équilibre du genre parmi les stagiaires ; cependant, parmi les 8 participants, seules deux étaient des
femmes. L’absence des femmes dans les rédactions des radios partenaires est la raison de ce déséquilibre.
Les deux femmes sélectionnées étaient les deux seules qui participaient aux productions des émissions.
20 RNI 2012-2013. Le genre des participants pour chaque formation est disponible dans le Tableau 1 de l’Annexe 1.
21 SFCG I1 fait référence à l’entretien réalisé avec le responsable du projet au sein de SFCG.
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En conclusion, l’efficacité du projet liée au résultat 2.1 a été mitigée. D’une part, les 3 formations à
l’Approche Common Ground prévues à l’intention des journalistes dans le cadre de ce projet ont bien été
réalisées, ainsi que le stage d’approfondissement à l’étranger pour des journalistes de haut potentiel afin
de renforcer leur capacité dans la mise en application de l’ACG. De plus, grâce à une mesure stratégique
corrective prise par SFCG et l’AEPT, le taux de participation des femmes des médias aux formations
ACG a été de 26%, soit très proche du taux visé par SFCG et l’AEPT (30%). Cependant, le niveau
d’atteinte global des bénéficiaires aux formations ACG est faible par rapport à la cible prévue : 50
journalistes formés contre 90 initialement prévus (55,5%). A cela s’ajoute un faible taux de réalisation
des exercices pratiques ou « reportages conjoints » qui devaient être produit à la suite de la phase
théorique de la formation. Les données de suivi du projet et de l’évaluation finale ne permettent de
s’assurer que de la production de 4 reportages conjoints sur les 14 prévus ; les raisons évoquées sont
l’indisponibilité de l’autre partenaire et la différence dans la programmation. Enfin, le projet n’a permis
de former que 8 journalistes de haut potentiel sur les 10 prévus à travers le stage d’approfondissement, dû
à la fermeture de 2 radios partenaires. Malgré l’attention portée à l’équilibre genre, seules 2 des 8
journalistes étaient des femmes.
4.1.4. Efficacité des actions liées au R2.2 : "Un cadre d’échange informel entre
les différents acteurs des médias (publics, privés) est créé"
Afin de renforcer le rôle des leaders des médias privés, publics et représentants des organes régulateurs
dans la construction de la paix et la promotion du développement collaboratif, le projet prévoyait de créer
un cadre d’échange informel entre les différents médias publics et privés afin qu’ils puissent échanger
chaque mois sur le traitement de certaines informations. Il était prévu qu’un coordinateur ou animateur de
l’AEPT prenne le leadership de cette activité de suivi en encourageant la participation des journalistes et
en garantissant l’équilibre de celle-ci. Cela devait aussi permettre à l’AEPT de renforcer son rôle de
médiateur et coordonnateur des médias, ainsi que de consolider les liens entre les participants aux
formations. Cependant, toutes les personnes impliquées dans le projet assurent que ces réunions
d’échange informel n’ont jamais eu lieu.
Selon SFCG22
, les problèmes de gestion de l’AEPT sont une raison majeure au manque de mise en œuvre
de cette activité. De son côté, le responsable de l’AEPT23
nie ces problèmes de gestion, à part le fait qu’ils
ne savaient pas que l’on ne pouvait pas utiliser les fonds d’un projet pour aider à la mise en œuvre d’un
autre projet. De plus, comme raison principale l’AEPT évoque plutôt de manière générale, un retard dans
l’avancement du projet dû au fait que selon le responsable, l’AEPT est très sollicitée au Tchad et à
l’international. L’absence d’une personne qui encadre le projet à N’Djamena aurait pesé sur la bonne
marche du projet, du fait d’un manque de personnel. Cependant cette raison n’est pas très
compréhensible ; selon SFCG24
, il avait été demandé à l’AEPT en début de projet de désigner parmi ces
membres une personne qui serait formée en tant que formateur, un autre chargé du suivi et évaluation et
qui devraient par la suite suivre au quotidien la mise en œuvre, même quand le Président est indisponible.
De plus, dès lors qu’un bureau de SFCG a été installé à N’Djamena, cette situation aurait pu être
corrigée. Mais le chargé de programme de SFCG, chargé de superviser la mise en œuvre du projet,
affirme avoir eu des difficultés de de collaboration de l’AEPT ce qui n’a pas facilité l’avancement de la
22 SFCG I1
23 AEPT I1: Responsible de l’AEPT
24 SFCG I1
Evaluation finale « Renforcement des capacités des Médias pour promouvoir le développement collaboratif au Tchad » | PAGE 22
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mise en œuvre du projet davantage25
. Sur ce point, l’AEPT26
reconnait donc un retard dans la mise en
œuvre mais s’attendait à recevoir un technicien/ conseiller de SFCG, et n’a donc pas apprécié l’arrivée
d’un coordinateur de programme ; un manque de communication et de confiance est évoquée par l’AEPT
pour justifier les mauvaises relations avec SFCG dès lors de son installation à N’Djamena. De son côté,
SFCG mentionne également une insuffisance dans la réactivité et communication de l’AEPT, ainsi qu’une
non-appréciation du nouveau regard et contrôle de proximité que SFCG a conduit afin de pallier à la
mauvaise gestion financière du projet de la part de l’AEPT mettant en retard tout le projet.
En outre, le projet ayant prévu que le partenaire AEPT la mette en œuvre, le bailleur n’a pas autorisé
SFCG à le faire seul le temps de la suspension afin d’une réorganisation de l’AEPT27
. En effet, compte
tenu de l’absence répétée des membres de la coordination du projet au niveau de l’AEPT, SFCG s’était
résolu à avancer tout de même sur ces activités, même en l’absence de l’AEPT. Dans cette optique, deux
réunions avaient été initiées avec le haut Conseil de la Communication (HCC) en vue d’organiser un
échange sur le système de régulation et d’auto régulation au Tchad. SFCG a été menacée de suspension
du contrat par la DUE si des initiatives étaient menées en dehors du partenaire AEPT. Deux réunions ont
été organisées avec la DUE à N’Djamena pour les informer de la situation d’indisponibilité de l’AEPT,
mais cela n’a pas changé la position de la DUE. SFCG est donc revenu sur sa position et n’a pas organisé
de telle activité28
.
En conclusion, l’efficacité des actions liées au R2.2 a été nulle.
4.1.5. Efficacité des actions liées au Résultat Transversal : "les capacités
organisationnelles de l’AEPT sont renforcées pour la poursuite de ce type de
projet à l’avenir "
Dans le but de garantir la pérennité de l’association AEPT et de leurs activités, SFCG prévoyait deux
formations à leur profit sur la gestion administrative et financière et sur la mobilisation des ressources.
L’objectif était double : harmoniser les systèmes de gestion dans le cadre de ce projet et renforcer leurs
capacités aux bonnes pratiques internationales afin de pouvoir soumissionner des projets auprès de
bailleurs et diversifier la source de leurs financements.
Ces deux formations ont bien eu lieu, soit un taux d’exécution de 100%. En octobre 2011, quatre
membres de l’équipe administrative et financière de l’AEPT ont suivi une formation en procédures
administratives et financières menée par SFCG. L’objectif était de renforcer de manière durable les
capacités de gestion administrative et financière de l’AEPT ainsi que de s’assurer que les systèmes et les
procédures administratives et financières de l’AEPT sont en conformité avec les normes établies par
l’Union européenne et par SFCG. Dans ce but, les thèmes suivants ont été abordés : les systèmes et
procédures financières, la gestion financière des projets UE, la gestion des ressources humaines, la
rédaction d’un rapport financier29
. En novembre 2011, 17 membres de l’AEPT, dont des directeurs de
publications et des responsables des services administratifs et financiers de différents médias tchadiens
ont suivi une formation en gestion des Médias. Les objectifs étaient de : 1) doter les responsables
25 SFCG I1 (Chargé de programmes SFCG Tchad), SFCG I2 (Vice-président SFCG, chargé des programmes
26 AEPT I1
27 SFCG I1
28 SFCG I1
29 RNI 2011-2012 ; Evaluation à mi-parcours 2013.
Evaluation finale « Renforcement des capacités des Médias pour promouvoir le développement collaboratif au Tchad » | PAGE 23
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administratifs et financiers des médias tchadiens d’outils de gestion modernes ; 2) renforcer les capacités
en marketing des responsables administratifs, financiers et commerciaux des médias ; et 3) structurer les
services financiers et administratifs des médias tchadiens. Pour cela, les thèmes suivants ont été abordés :
la chaîne de cohérence, le cycle de projet, le statut et le mode de gestion des organes de presse, et les
fonctions et responsabilités au sein d’un organe de presse30
.
Enfin, les membres de l’AEPT impliqués dans la mise en œuvre du projet ont été formés en gestion de
projets, dont mobilisation des ressources, et ont été coachés en gestion financière de manière continue,
notamment lorsqu’ils ont démontré des problèmes de gestion31
. En effet malgré les difficultés dans les
relations entre SFCG et AEPT dans la gestion du projet, SFCG a continué de suivre l’AEPT dans son
fonctionnement. La formation sur la gestion des projets a été préparée pendant que le protocole d’accord
entre les deux parties était suspendu. Elle a été réalisée à la reprise du protocole. Chaque mois, le chargé
administratif et financier de SFCG coachait celui de l’AEPT dans la rédaction de ses rapports32
. Lors de
l’entretien de courte durée avec le responsable de l’AEPT33
, l’AEPT reconnait le coaching régulier de
SFCG en matière de gestion financière des projets, sans pour autant pouvoir mentionner la fréquence de
manière précise.
En conclusion, l’efficacité du projet liée au Résultat Transversal a été mitigée. D’une part, les 2
formations prévues ont bien eu lieu, en procédures administratives et financières, gestion des Médias et
gestion de projets, dont mobilisation des ressources, soit un taux d’exécution des activités égal à 100%.
Le projet prévoyait également le coaching de l’AEPT par SFCG en gestion financière de manière
continue ; cela a été perturbé par la suspension durant 6 mois du protocole d’accord entre les deux parties,
mais a tout de même eu lieu outre cette période.
30 RNI 2011-2012.
31 SFCG I1
32 SFCG I1
33 AEPT I1
Evaluation finale « Renforcement des capacités des Médias pour promouvoir le développement collaboratif au Tchad » | PAGE 24
Search for Common Ground | Tchad
4.2. Impact du Projet
Evaluer l’impact du projet signifie mesurer dans quelle mesure le projet contribue aux objectifs
spécifiques et donc à l’objectif général du projet en question. Cette partie évalue donc dans quelle mesure
les différents objectifs spécifiques du projet ont été atteints. Cette section est structurée autour des
différents objectifs et résultats escomptés du projet.
4.2.1. Le projet a-t-il permis de renforcer l’accès du public, en particulier les
femmes, à une information de proximité et de qualité (R1.1.) ?
Dans quelle mesure le projet a permis de renforcer progressivement la capacité des radios et
des journaux ?
La situation initiale (2011) montre qu’il y a un manque de formation professionnelle dédiée au
journalisme au Tchad. A la date du début du projet (juin 2011), aucune formation universitaire en
journalisme n’existe. Tandis que parmi les anciennes générations de journalistes, certains ont pu se former
à l’étranger, bénéficiant de bourses d’état, la majorité des jeunes journalistes n’a pas été formée de
manière professionnelle. En effet, la première université offrant une formation en journalisme a ouvert ses
portes en 2012. Ainsi, selon le rapport à mi-parcours de juillet 2013, les journalistes sont la plupart du
temps des femmes et surtout des hommes passionnés de journalisme qui exercent le métier très souvent à
temps partiel, à côté de leur principale formation professionnelle. Ces personnes sans formation de base à
ce métier sont en quête d’amélioration de leurs compétences professionnelles dans ce domaine34
.
Il apparait que le présent projet ait répondu à cette quête en ce sens que 100% des journalistes interrogés
lors de l’évaluation à mi-parcours de juillet 2013 reconnaissent que la formation organisée dans le
cadre de ce projet a réellement apporté une valeur ajoutée à leur connaissance du journalisme,
notamment sur trois sujets : le processus de production d’une émission, le journalisme sensible aux
conflits et les genres radiophoniques. Ceci est confirmé par le ROM 2013 qui note, au bout de deux ans
de mise en œuvre des activités, que le projet a permis de renforcer les capacités du secteur médiatique à
promouvoir un dialogue social, un développement et une participation citoyenne. Ainsi en mai 2013 il
était attendu qu’à la fin du projet les professionnels de médias soient capables de traiter l’information de
manière équilibrée et aussi que la qualité générale des émissions et de publications de médias partenaires
soit largement améliorée. Aucune donnée quantitative n’a cependant pu être collectée par rapport au
niveau d’augmentation des capacités des journalistes à la suite des formations in situ, due à l’absence de
données à ce sujet dans le système de suivi du projet35
.
Ces conclusions des différents ROM et du Rapport d’évaluation à mi-parcours sont confirmées par les
propos des professionnels du secteur de médias lors de l’évaluation finale du projet. Les journalistes
34 ROM 2012
35 Des pré et post tests ont cependant été menées lors des formations à l’ACG destinées aux leaders des médias, afin
de mesurer leur augmentation de connaissances grâce aux formations. Ces données sont présentées dans la section
4.2.3.
O.S.1. Améliorer l’accessibilité de l’information et l’inclusion des populations par le biais
d’organes de médias privés
Evaluation finale « Renforcement des capacités des Médias pour promouvoir le développement collaboratif au Tchad » | PAGE 25
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formés constatent avoir appris en termes de maitrise de l’antenne, technique rédactionnelle et
traitement des sujets liés aux conflits, et ce notamment grâce à la formation en ACG et/ou aux stages
internationaux de formation leur offrant une compréhension de ce qui se passe à l’extérieur. Un des
journalistes interviewés a ainsi déclaré « la technique de Search m’a permis d’aller dans un village en
plein conflit intercommunautaire, réaliser les interviews avec ces communautés selon l’approche
Common Ground du journalisme et cela a aidé la population ».
A ces propos s’ajoutent ceux d’un responsable d’une station radio qui déclare: « il y a une nette
amélioration dans la réalisation des émissions, surtout la prise de position du journalisme dans les
conflits a été modifiée. » Ce responsable constate notamment un changement dans la manière de traiter
les informations au sein de sa radio. Il raconte qu’un producteur de sa station avait réalisé une émission
sur les conflits entre agriculteurs et éleveurs avant que les formations avec SFCG ne commencent. Ce
producteur avait été convoqué par une autorité de la région à cause de cette émission, le menaçant de
l’arrêter car selon cette autorité, il créait des tensions entre éleveurs et agriculteurs. Après les formations
SFCG, le même producteur a réalisé une émission sur un thème similaire ; le responsable du média
raconte que l’émission a cette fois-ci connu du succès, à juger des nombreux appels des auditeurs. Ceci
confirme un résultat observé dans le rapport à mi-parcours, d’après les entretiens avec les journalistes:
avec le traitement des différents conflits agriculteurs-éleveurs, citoyens-gouvernants, et des sujets
sensibles, la formation a permis aux différents journalistes des différents medias de renforcer leurs
compétences techniques afin de traiter ces différents sujets de manière plus professionnelle. Cela
affecte donc positivement la qualité des émissions, leur écoute et leur appréciation par les auditeurs.
Enfin, selon certains journalistes et responsables médias, le projet a permis de renforcer les capacités
des médias sur le plan matériel avec l’acquisition de matériel pour la production des émissions
(ordinateurs, enregistreurs, microphone).
Les différents rapports font état d’un changement constaté non seulement par le personnel du secteur des
médias mais aussi par les auditeurs. Déjà dans le rapport à mi-parcours de 2013, sur les 300 enquêtés
choisis aléatoirement à N’Djamena, Moundou et Sarh, il ressort que la majorité des auditeurs avaient
constaté une amélioration de la qualité des productions des radios partenaires situées dans ces localités.
De même, les résultats de l’évaluation finale montrent que 72,9% des auditeurs des radios partenaires
(N=443) ont constaté des changements au niveau de la radio (Figure 2 ci-dessous). La Figure 1 ci-dessous
montre que les plus importants changements constatés par les auditeurs des radios partenaires sont : la
qualité des émissions (38,8% des auditeurs), le contenu des émissions (26,2%) et la façon dont les
journalistes animent leurs émissions (23,5%) (N=323).
Evaluation finale « Renforcement des capacités des Médias pour promouvoir le développement collaboratif au Tchad » | PAGE 26
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Figure 1 : Les changements constatés par les auditeurs des radios partenaires (N=323)
La désagrégation par ville36
montre des écarts: la principale différence apparait entre les auditeurs de
Moundou qui sont 60,3% à constater un changement, et ceux des deux autres villes, N’Djamena et Sarh,
dont les auditeurs sont beaucoup plus nombreux à constater un changement (respectivement 88,8% et
74%). Cependant, dans chacune des trois régions, le changement est constaté par la majorité des auditeurs
des radios partenaires.
De plus, lorsque l’on désagrège les données par radio37
, on constate que c’est au sein de FM Liberté, une
radio partenaire de N’Djamena, que les auditeurs sont les plus nombreux à constater un changement
(92,7% d’entre eux). La station ORNTV est au contraire celle où les auditeurs sont les moins nombreux à
constater un changement (57,9% d’entre eux).
Ces données confirment les hypothèses étayées dans le rapport d’évaluation à mi-parcours et de suivi du
projet, concernant les impacts potentiels de ce projet pour l’amélioration de la capacité des médias
partenaires ou bénéficiaires.
Quelques défis au renforcement des capacités des radios ont cependant été constatés, tels que le
manque de moyens pour se rendre dans les villages et les communautés afin de parler avec la
population et l’instabilité du personnel au sein des radios38
. Selon l’AEPT39
, le manque de moyens
financiers des stations de radio pousse certains journalistes à quitter le métier, après avoir acquis les
formations, pour aller là où il y a de meilleures opportunités. Ceci limite donc l’impact des formations
réalisées dans le cadre du projet. Cependant, le RNI 2011-2012 notait que certaines expertises restent tout
de même du fait des formations in situ, c’est-à-dire des formations réalisées au sein même des radios avec
l’ensemble du personnel. De plus, il semble qu’il y ait eu des difficultés à produire des émissions
conjointes de qualité: sur l’ensemble des émissions produites par les radios partenaires entre mars 2013
36 Figure 2, voir Annexe 1
37 Tableau 2, voir Annexe 1
38 RNI 2012-2013
39 AETP I1
La qualité des émissions
38,8%
Le contenu des émissions
26,2%
La façon d'animer des journalistes
23,5%
La durée des émissions
9,0%
Autres 2,5%
Evaluation finale « Renforcement des capacités des Médias pour promouvoir le développement collaboratif au Tchad » | PAGE 27
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et juin 2013, seulement neuf ont été retenues pour la diffusion. Cette limite a conduit au recrutement
d’un consultant pour appuyer les radios partenaires à la fin du projet. Le consultant devait travailler en
partenariat avec les radios partenaires pour produire les émissions. Cependant, compte tenu du délai de
consultance qui lui a été notifié (lié au besoin de rattraper le retard dans la mise en œuvre du projet) et de
la disponibilité des producteurs des radios partenaires, ce consultant a seulement discuté des sujets à
traiter avec les radios. Il a ensuite réalisé de manière autonome la production de ces émissions40
. Cela
représente une limite importante au renforcement de capacités des radios partenaires.
Dans quelle mesure le projet a permis d’améliorer les intérêts des auditeurs ?
Au niveau des relations avec les auditeurs, les différentes radios et journalistes rencontrés au cours de
l’évaluation à mi-parcours, ont reconnu qu’ils reçoivent de plus en plus d’appels d’encouragement en
« off » après les émissions. Ces appels témoignent selon eux du degré de satisfaction des auditeurs quant
à la qualité des émissions produites.
Cette même reconnaissance est soulevée par les responsables médias et journalistes interviewés lors de
l’évaluation finale . Un des responsables dit: « les auditeurs appellent pour demander la rediffusion des
émissions ». Cela témoigne selon lui que ces émissions les ont intéressés. C’est pourquoi ils souhaitent
encore les rediffusions pour permettre à d’autres personnes de les suivre aussi.
Dans les sondages réalisés dans le cadre de l’évaluation finale, il ressort que 85,5% des auditeurs des
radios partenaires41
sont restés fidèles à la radio qu’ils écoutent d’habitude. Le graphique ci-dessous
récapitule la proportion par radio partenaire suivant la fidélité ou non à la radio.
Figure 2: Statut de fidélité des auditeurs par radio partenaire à N’Djamena, Sarh et Moundou (N=440)
40 SFCG I1 ; Cette information est également tirée d’une discussion informelle avec le consultant.
41 Les radios partenaires considérées dans l’analyse des résultats sont les 7 radios qui sont restées fonctionnelles tout
au long du projet (exclues sont les radios Kar Uba et Arc-en-ciel qui ont fermé pendant le projet).
0% 20% 40% 60% 80% 100%
Duji Lokar Moundou
FM Liberté N'Djamena
Lotiko Sarh
Radio Kar Uba Moundou
Station Régionale ONRTV Moundou
Station Régionale ONRTV N'Djamena
Station Régionale ONRTV Sarh
4,0%
2,1%
66,7%
96,0%
100,0%
100,0%
97,9%
33,3%
100,0%
100,0%
Pas fidèle Fidèle
Evaluation finale « Renforcement des capacités des Médias pour promouvoir le développement collaboratif au Tchad » | PAGE 28
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La principale raison évoquée par les auditeurs des radios partenaires pour justifier leur fidélité concerne
les thèmes débattus (79% d’entre eux le rapportent). Ces auditeurs témoignent ainsi qu’il y a une nette
amélioration dans la façon dont les producteurs choisissent les thèmes à débattre et les traitent. Les deux
autres raisons majeures de la fidélité des auditeurs aux radios partenaires sont la qualité de diffusion et la
couverture (évoquée par 38,9% d’entre eux) et la façon de présenter du journaliste (évoquée par 35,2%
d’entre eux).
Figure 3: Raisons de la fidélité des auditeurs des radios partenaires42
(N=440)
Notons que les raisons de fidélité des auditeurs sont semblables aux principaux changements constatés
(qualité des émissions, contenu/thèmes débattus, façon de présenter du journaliste), évoqués ci-dessus
(voir Figure 1). De plus, la radio pour laquelle la plus grande proportion d’auditeurs a constaté des
changements (FM Liberté) est aussi celle à laquelle les auditeurs sont le plus fidèles. Inversement,
ORNTV est la radio pour laquelle moins d’auditeurs ont constaté des changements ; c’est aussi celle à
laquelle les auditeurs sont le moins fidèle. Il semble donc que les changements opérés au sein des
stations radios, ayant permis une amélioration de leur qualité en termes de façon de présenter des
journalistes, contenu des émissions et qualité de diffusion, contribuent à rendre plus fidèles les
auditeurs à une radio. Cela devrait permettre aux médias d’avoir un plus grand impact en termes de
promotion du dialogue social, développement et participation citoyenne.
En conclusion, l’impact du projet lié au résultat 1.1. est mitigé. Les formations in situ ont permis de
renforcer progressivement les capacités des radios et des journaux, notamment en termes de maitrise de
l’antenne, technique rédactionnelle, traitement des sujets liés aux conflits et sur le plan matériel. La
grande majorité des auditeurs des radios partenaires (72,9%) notent un changement notamment en termes
de qualité des émissions, contenu des émissions et manière dont les journalistes animent les émissions.
Les changements opérés au sein des radios partenaires apparaissent être appréciées par les auditeurs, à
juger des appels d’encouragement « «off » des auditeurs après les émissions qui sont de plus en plus
nombreux. Cela parait aussi faciliter la fidélité des auditeurs, puisque les 85,5% des auditeurs des radios
partenaires qui sont restés fidèles à une radio partenaire citent comme raisons principales à leur fidélité les
42 Les enquêtés pouvaient donner plusieurs réponses à cette question.
Autres
les musiques proposées
les horaires de diffusion
la façon de présentation du journliste
la qualité de diffusion et la couverture
Les thèmes débattus
9,7%
16,5%
20,8%
35,2%
38,9%
79,0%
Evaluation finale « Renforcement des capacités des Médias pour promouvoir le développement collaboratif au Tchad » | PAGE 29
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thèmes débattus, la qualité de la diffusion et la couverture ainsi que la façon de présenter du journalisme.
Bien que le lien de cause à effet entre les changements opérés au sein des radios suite aux formations in
situ de ce projet et la fidélité des auditeurs ne peut être clairement établi (d’autres facteurs internes et
externes ayant pu interagir), notons que deux de ces 3 raisons de fidélité sont des éléments sur lesquelles
le projet a eu des effets positifs.
Cependant, quelques défis importants à l’impact du projet lié au résultat 1.2. ont été noté : le manque de
moyens des radios pour se rendre sur le terrain afin de parler avec la population et réaliser des émissions
interactives ; l’instabilité du personnel au sein des radios ; et les difficultés des radios à produire des
émissions conjointes de qualité, mettant en relief des lacunes persistantes dans leurs capacités
journalistiques. De plus, le taux de participation des femmes aux formations in situ a été faible (18%
contre 30% prévus), ainsi que le taux de production des émissions et reportages ayant traits aux femmes à
la suite des formations, comme analysé ci-dessus. Ainsi, il est peu probable que les formations in situ
aient eu un impact important pour renforcer l’accès à l’information de proximité pour les femmes en
particulier.
4.2.2. Le projet a-t-il permis de renforcer l’inclusion des populations dans
la gouvernance locale par le biais de nouveaux formats d’information,
véritables plateformes d’échange entre autorités et administrés (R1.2.)?
Comme mentionné dans la partie sur l’efficacité du projet, les journalistes ont pris part à plusieurs
formations dont certaines leur ont fait découvrir des nouveaux formats journalistiques. Les journalistes
formés devaient ensuite être encouragés à utiliser ces formats et à les vulgariser auprès de leurs confrères
n’ayant pas pris part à ces formations.
Les données collectées lors de l’évaluation finale concernant les effets des émissions produites dans le
cadre de ce projet ont été invalidées par l’équipe d’évaluation, pour des raisons évoquées dans la section
Limites du Chapitre 3 de ce rapport43
. Aucune conclusion ne peut donc être tirée concernant l’impact
du projet en termes de renforcement de l’inclusion des populations dans la gouvernance locale par
le biais de nouveaux formats d’information (impact lié au R1.2).
4.2.3. Le projet a-t-il permis que des journalistes influents auprès de leurs
pairs pratiquent une approche non confrontationnelleet compréhensive
des conflits (R2.1.)?
Les effets de la formation à l’approche Common Ground sur les professionnels du secteur des
médias
La formation à l’approche Common Ground avait pour objectif de rendre les producteurs plus
professionnels dans le traitement des sujets conflictuels. Les responsables des médias partenaires, dont les
producteurs avaient participé à cette formation, reconnaissent que ces producteurs ont acquis des
techniques permettant de mieux traiter les informations conflictuelles. Cette affirmation est soutenue par
la majorité des journalistes bénéficiaires de cette formation. Ils affirment tous que depuis cette formation,
ils se voient attribuer les taches de couvrir les sujets conflictuels et ne trouvent pas de difficulté à
43 Voir p.14 du présent rapport.
Evaluation finale « Renforcement des capacités des Médias pour promouvoir le développement collaboratif au Tchad » | PAGE 30
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faire ce travail. D’autres affirment être spécialiste en résolution des conflits au sein de leur structure mais
aussi en dehors de leur structure : « Avec l’approche Common Ground du journalisme, j’utilise ces
techniques même en dehors de la radio pour résoudre certains problèmes et d’autres personnes font aussi
appel à moi ».
Un aspect de la formation qui n’a pas été mis en place est la restitution auprès de leurs confrères. La
plupart de journalistes formés disent qu’ils avaient bien l’intention de le faire mais que la responsabilité
de planifier ces genres d’activités est dévouée à la hiérarchie qui n’y a pas pensé. Ces journalistes formés
ont déposé auprès de leur structure un rapport de leur stage et formation en attendant qu’il leur soit
demandé de faire une restitution. Ils déclarent cependant qu’ils sont restés disponibles pour aider leur
confrères et à partager les techniques de pacification des conflits acquises. Le manque de suivi tout au
long de ce projet est une raison majeure à ce manquement en termes de restitutions des formations suivies
en ACG, et limitant ainsi les effets de la formation à l’ACG sur les professionnels du secteur des médias,
l’effet boule de neige escompté ayant été affaibli par l’absence de restitutions. Sur ce point, SFCG44
explique avoir découvert après les formations que la personne désignée comme étant le formateur de
l’AEPT n’était qu’un consultant. Après, le formateur aurait dû, selon SFCG, faire le suivi des restitutions
et de la production des émissions (phase pratique de la formation) mais une fois les formations données, il
est retourné à ses activités qui ne sont pas en lien avec le projet.
Les effets de ces émissions sur les populations en termes de cohésion sociale et résolution des
conflits
Les données collectées montrent que 94,9% des interviewés dans les localités du projet disent écouter
la radio; en particulier, 73,7% disent écouter au moins une des radios partenaires du projet. Ceci
confirme que la diffusion d’émission radio produites pourrait avoir un fort potentiel d’atteindre les
populations ciblées, leur donnant accès à des informations sur la gouvernance locale tout en ouvrant la
possibilité de dialoguer entre population et autorités afin d’améliorer la gouvernance.
Mais ce potentiel d’impact est affaibli par le faible taux de réalisation des activités de production média
(38 émissions produites sur les 140 prévues). Dès lors, il est probable que les quelques émissions
produites n’aient pas eu l’impact désiré. Cependant, les données collectées ne nous permettent pas de
tirer des conclusions claires quant à l’effet des émissions produites et diffusées, dû à l’invalidité des
données collectées à ce sujet telle que mentionné dans le chapitre 3 de ce rapport45
.
4.2.4. Le projet a-t-il permis de créer un cadre d’échange informel entre
les différents acteurs des médias (publics, privés) (R2.2)?
Le projet a-t-il permis d’améliorer les relations entre les différents acteurs des médias publics,
privés et autorités régulatrices ?
Comme indiqué dans la section « efficacité », les réunions d’échange informel que devait créer ce projet
entre les différents acteurs des médias n’ont pas eu lieu. Certaines données collectées lors de l’évaluation
pointent cependant vers une amélioration des relations entre les médias et les autorités régulatrices.
44 SFCG I1
45 Limites, p.14.
Evaluation finale « Renforcement des capacités des Médias pour promouvoir le développement collaboratif au Tchad » | PAGE 31
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Ainsi, le soulignait le ROM 2013 déjà: « les relations entre AEPT et les autorités notamment le Haut
Conseil de la Communication se sont améliorées grâce aux dynamiques de concertation créées par le
projet ». Lors de l’évaluation finale, l’AEPT46
confirme cela : les multiples réunions que l’AEPT a eu
avec le Ministère de Communication ainsi que la présence quasi permanente du personnel dudit ministère
à l’ouverture des différentes formations aurait permis d’améliorer les relations entre l’AEPT et l’autorité
régulatrice. Cependant les données collectées lors de l’évaluation finale et le manque de données de suivi
tout au long du projet ne nous permettent pas de trianguler ces informations apportées lors de cet entretien
de courte durée avec l’AEPT.
De plus, concernant les relations entre les médias (publics, privés) entre eux, aucune activité de suivi que
devait prévoir l’AEPT pour continuer la dynamique de travail et consolider les liens entre les participants
dans la formation, y compris les réunions d’échange informel entre les différents acteurs des médias, n’a
eu lieu. De fait, le projet n’a pas pu avoir l’effet escompté en termes de création d’un cadre informel
d’échange entre les différents acteurs des médias afin de renforcer leur rôle dans la construction de la paix
et le développement collaboratif.
En conclusion, l’impact du projet en lien avec le résultat 2.2. est très faible.
4.2.5. L’impact des actions liées au résultat transversal : renforcement
des capacités organisationnelles de l'AEPT
Initialement, l’AEPT renouvelait son équipe administrative à chaque projet sans se rendre compte du
départ de compétences de son équipe, qu’elle devait au contraire fixer afin de renforcer ses capacités
administratives et financières suivant les exigences du bailleur avec lequel elle signait ses convention. De
plus, l’AEPT avait tendance à faire exécuter par la maison des médias les projets qu’elle signait et par
conséquent, elle n’était pas directement acteur de ses projets mais seulement une entité à laquelle la
coordination du projet rendait compte. Pour ce partenariat avec SFCG, elle a dû être directement le
partenaire de mise en œuvre.
Le Rapport Narratif Intermédiaire de 2011-2012 mentionne que les activités préparatoires et la formation
en gestion administrative et financière ont permis de renforcer sur le long terme les capacités du
partenaire local à gérer administrativement et financièrement ce type de projet. Cette même situation est
partagée dans le rapport à mi-parcours qui faisait mention que ce partenariat a permis à l’AEPT de murir
et de grandir surtout dans l’amélioration de la rédaction des rapports financiers mais soulignait aussi qu’il
restait des efforts à fournir dans le respect des normes de gestion financières. Cette inquiétude soulevée
lors du Rapport à mi-parcours semble avoir été, du moins en partie, résolue à en croire le responsable de
l’AEPT; il affirme que l’Administration Finance de l’AEPT est de nos jours capable d’appliquer les
procédures Bailleurs type Union Européenne. L’AEPT est aussi désormais capable de soumissionner
des projets auprès de bailleurs différents et ainsi de diversifier la source de ses financements; elle a
actuellement des projets financés par le Canada47
et l’Ambassade de France48
. L’AEPT mentionne aussi
être en cours de négociation avec UNICEF et le PNUD pour de nouveaux projets49
. En outre, il affirme
que depuis les formations de SFCG, la réalisation annuelle d’un bilan financier complet est devenue un
46 AEPT I1
47 SFCG I; AEPT I1
48 AEPT I1
49 AEPT I1
Evaluation finale « Renforcement des capacités des Médias pour promouvoir le développement collaboratif au Tchad » | PAGE 32
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acquis. Néanmoins, ces informations n’ont pas pu être confirmées par l’équipe d’évaluation, du fait du
manque de sources d’informations à ce sujet.
Les indicateurs pour ce résultat semblent donc être atteints, si ce n’est l’augmentation du budget annuel
de 30% à la 3e année du projet qu’il n’a pas été possible de vérifier. AEPT I1 affirme que les fonds ont
augmenté suite à la diversification des financements, mais ne peut donner d’informations précises sur le
montant. Cependant ces informations n’ont pu être triangulées et confirmées par d’autres sources
d’informations. L’équipe d’évaluation se réserve donc de conclure sur le niveau d’atteinte de ces
indicateurs du résultat transversal.
L’impact en termes de renforcement des capacités du partenaire AEPT a été mitigé.
Evaluation finale « Renforcement des capacités des Médias pour promouvoir le développement collaboratif au Tchad » | PAGE 33
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5. Conclusions
Le projet de renforcement des capacités des medias est un projet mis en œuvre par Search for Common
Ground, en partenariat avec l’Association des Editeurs de la Presse Privée au Tchad sur financement de
l’Union Européenne. C’est un projet de trois ans qui a débuté en 2011 et a pris fin en 2014.
Ce projet avait pour objectif général de renforcer les capacités du secteur médiatique pour
promouvoir un dialogue social, le développement, et la participation citoyenne à travers deux
objectifs spécifiques (O.S.) :
O.S.1 : Améliorer l’accessibilité à l’information et l’inclusion des populations par le biais
d’organes de médias privés.
O.S.2 : Renforcer le rôle des leaders des médias privés, publics et représentants des organes
régulateurs, dans la construction de la paix et la promotion du développement collaboratif, à
travers l’atteinte des résultats suivants
Cette évaluation finale avait pour objectifs de mesurer l’efficacité du projet ainsi que son impact. Sur
base des données présentées dans le rapport, nous pouvons tirer les conclusions suivantes :
L’efficacité de l’intervention
Le critère de l’efficacité est utilisé pour mesurer la contribution apportée par les résultats à la réalisation
des objectifs spécifiques du projet.
Concernant le résultat 1.1. « l’accès du public, et en particulier des femmes, à une
information de proximité et de qualité, est renforcé »
Dans le cadre du projet, 9 radios et 5 journaux ont pu suivre des formations in situ, ce qui est supérieur à
la cible initiale (7 radios et 5 journaux). Cependant, seule une minorité de femmes a pu y participer (18%)
contre 30% initialement prévu, malgré les efforts de SFCG et l’AEPT réalisés en ce sens. De plus, le
nombre d’émissions produites ayant trait aux femmes a augmenté mais dans des proportions bien
moindres que celles escomptées. L’accès du public en général à une information de qualité semble donc
renforcé ; mais concernant celui des femmes en particulier, les conditions supposées à cette amélioration
de l’accès (présence de voix féminines nouvellement formées dans les médias, production d’émissions
ayant trait aux femmes) ne sont que faiblement réunies. L’efficacité du projet en lien avec le résultat 1.1 a
été mitigée.
Concernant le résultat 1.2. « l’inclusion des populations dans la gouvernance locale est
renforcée par le biais de nouveaux formats d’information, véritables plateformes d’échange
entre autorités et administrés »
Les radios ont été formées à utiliser de nouveaux formats d’information, plus interactifs, qu’elles ont mis
en pratique notamment lors de la production des émissions conjointes sur le thème de la gouvernance
locale. Cependant, elles n’ont pu produire que 38 émissions au lieu des 140 initialement prévues, soit un
taux d’exécution de 27% seulement. De plus la majorité de ces 38 émissions ont été produites par un
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consultant extérieur, embauché lors des derniers mois du projet pour accélérer les activités. Les formats
interactifs ont été utilisés dans ces 38 émissions, mais il n’y a pas de preuves que les 9 radios et 5
journaux les utilisent chaque semaine, comme initialement visé par le projet. Plusieurs raisons, toutefois
insuffisantes, sont évoquées pour expliquer ce faible taux d’exécution : le retard dans la réalisation des
formations, l’absence d’un bureau et d’un personnel permanent de SFCG au Tchad, la fermeture de deux
radios partenaires en 2013, le manque de clarté par rapport aux attentes de SFCG et de l’AETP quant au
rôle des radios partenaires. L’efficacité du projet en lien avec le résultat 1.2 a été très faible.
Concernant le résultat 2.1. «des journalistes influents auprès de leurs pairs, pratiquent une
approche non confrontationnelleet compréhensive des conflits »
Dans le cadre de ce projet, 3 formations à l’Approche Common Ground ont eu lieu, touchant ainsi 90
journalistes tel que prévu initialement. De plus, le stage d’approfondissement en extérieur a bien eu lieu ;
cependant seuls 8 journalistes ont été atteints contre 10 initialement prévus. De plus, si le taux de
participation des journalistes/ producteurs femmes a été presque atteint pour les formations en ACG (26%
contre 30% visé), l’équilibre genre visé pour le stage en extérieur n’a pu être atteint avec seulement 2
femmes participantes. A cela s’ajoute un faible taux de réalisation des exercices pratiques ou « reportages
conjoints » qui devaient être produit à la suite de la phase théorique de la formation. Les facteurs évoqués
sont l’indisponibilité de l’autre partenaire et la différence dans la programmation. L’efficacité du projet en
lien avec le résultat 2.1. a été mitigée.
Concernant le résultat 2.2. «un cadre d’échange informel entre les différents acteurs des
médias (publics, privés) est créé »
Aucune activité de suivi que devait prévoir l’AEPT pour continuer la dynamique de travail et consolider
les liens entre les participants dans la formation n’a été organisée ; ainsi aucune réunion d’échange entre
les différents médias n’a été tenue au cours du projet. L’efficacité du projet en lien avec le résultat 2.2 a
dont été nulle.
Concernant le résultat transversal « : Les capacités organisationnelles de l'AEPT sont
renforcées pour la poursuite de ce type de projet »
L’AEPT a été formée en procédures administratives et financières, en gestion des Médias et gestion de
projets, dont mobilisation des ressources. Cependant dû à la suspension du protocole d’accord entre
l’AEPT et SFCG durant 6 mois lié à des relations difficiles entre les 2 parties, le coaching initialement
prévu dans le projet en gestion financière n’a pas pu avoir lieu de manière continue, bien qu’ayant été
repris lors de la reprise du protocole d’accord en janvier 2014. L’efficacité du projet en lien avec le
résultat transversal est donc mitigée.
En conclusion, l’efficacité du projet en termes d’atteinte des résultats est inégale selon les résultats
visés ; les résultats 1.1., 2.1. et le résultat transversal ont été en partie atteint. Cependant les
résultats 1.2. et 2.2. ne sont pas du tout atteints. De manière générale, l’efficacité de ce projet est
donc jugée faible par l’équipe d’évaluation.
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L’impact du projet
Evaluer l’impact du projet signifie évaluer dans quelle mesure le projet contribue aux objectifs
spécifiques et donc à l’objectif général du projet en question.
Concernant l’impact du projet pour l’atteinte de l’objectif 1: Améliorer l’accessibilité à
l’information et l’inclusion des populations par le biais d’organes de médias privés
Le projet a-t-il permis de renforcer l’accès du public, et en particulier des femmes, à une
information de proximité et de qualité ?
La situation initiale au début du projet (2011) montrait un manque de formation professionnelle dédiée au
journalisme, et donc de crédibilité des journalistes. Selon les journalistes et les responsables des médias
interviewés, les formations dans le cadre de ce projet ont réellement apporté une valeur ajoutée dans
l’exercice de leur métier ; notamment concernant le processus de production d’une émission, la maitrise
de l’antenne, les techniques rédactionnelles, les genres radiophoniques et le traitement de sujets
conflictuels. De plus le projet a permis de renforcer les capacités des médias sur le plan matériel avec
l’acquisition de matériels performants pour la production des émissions au niveau local.
Ces différentes formations et ces matériels acquis ont contribué à améliorer la qualité des émissions,
notamment le contenu et la façon de présenter des émissions d’après les changements constatés par les
auditeurs qui écoutent les radios partenaires. A juger de l’augmentation des appels d’encouragement en
«off» après les émissions et des raisons de la fidélité des auditeurs qui correspondent aux changements
constatés, il semble que leur intérêt pour les émissions des radios partenaires ait été renforcé. Cela devrait
permettre aux médias d’avoir un plus grand impact en termes de promotion du dialogue social,
développement et participation citoyenne.
Quelques défis au renforcement de capacités des médis ont été notés tout au long du projet et lors de
l’évaluation finale : des difficultés à produire des émissions conjointes de qualité, le manque de moyens
pour se rendre sur le terrain afin de parler avec les populations et l’instabilité du personnel au sein des
radios. De plus, le taux de participation des femmes aux formations in situ a été faible (18% contre 30%
prévus), ainsi que le taux de production des émissions et reportages ayant traits aux femmes à la suite des
formations, comme analysé dans l’efficacité du projet. Ainsi, il est peu probable que les formations in situ
aient eu un impact important pour renforcer l’accès à l’information de proximité pour les femmes en
particulier.
L’impact du projet lié au résultat 1.1 pour l’atteinte de l’objectif spécifique 1 est mitigé.
Le projet a-t-il permis de renforcer l’inclusion des populations dans la gouvernance locale par le
biais de nouveaux formats d’information, véritables plateformes d’échange entre autorités et
administrés?
Les données collectées dans le cadre de cette évaluation finale sur les effets des émissions sur la bonne
gouvernance et la cohésion sociale n’ont pas pu être considérées pour l’analyse en raison d’imprécisions
dans la formulation des questions de la section 6 du questionnaire, ce qui pourrait avoir biaisé les
réponses des enquêtés. De ce fait, aucune conclusion n’a pu être tirée concernant l’impact du projet en
termes de renforcement de l’inclusion des populations dans la gouvernance locale par le biais de
nouveaux formats d’information (impact lié au R1.2).
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Concernant l’impact du projet pour l’atteinte de l’objectif 2 : Renforcer le rôle des leaders
des médias privés, publics et représentants des organes régulateurs, dans la construction de
la paix et la promotion du développement collaboratif.
Le projet a-t-il permis que des journalistes influents auprès de leurs pairs pratiquent une approche non
confrontationnelle et compréhensive des conflits (R2.1.)?
Les résultats de cette évaluation finale montrent que les journalistes formés ont acquis des techniques
permettant de mieux traiter les informations conflictuelles et disent être régulièrement appelés à couvrir
de tels sujets par leurs responsables. Cependant, l’impact de ces formations aurait pu être augmenté si les
formations reçues avaient été restituées à d’autres journalistes pairs ; cela n’a pas été réalisé en raison de
manque de suivi tout au long du projet. Cela limite les effets de la formation à l’ACG sur les
professionnels du secteur des médias, et donc l’impact du projet pour renforcer leur rôle dans la
construction de la paix et la promotion du développement collaboratif.
Etant donné que 94% des interviewés dans les localités des projets disent écouter la radio et 73,7% disent
écouter au moins une des radios partenaires, ces émissions ont un fort potentiel d’atteindre les populations
ciblées. Cependant, les données concernant les effets des émissions produites dans le cadre de ce projet
sur la cohésion sociale ayant été invalidées pour les mêmes raisons évoquées ci-dessus, il est impossible
de tirer une conclusion sur l’impact de ces émissions en termes de renforcement de la cohésion sociale et
résolution des conflits. Le faible taux de réalisation des activités de production média (27%) nous indique
qu’il est peu probable que les émissions aient eu l’impact désiré.
Le projet a-t-il permis de créer un cadre d’échange informel entre les différents acteurs des médias
(publics, privés) (R2.2)?
Le présent projet n’a pas abouti à la tenue de réunions d’échanges informels entre les différents acteurs
des médias tels que prévu initialement, comme analysé par rapport à l’efficacité du projet. Le projet n’a
donc pas pu avoir l’effet escompté en termes de création d’un cadre informel d’échange entre les
différents acteurs des médias afin de renforcer leur rôle dans la construction de la paix et le
développement collaboratif. L’impact du projet sur ce point est très faible.
Concernant l’impact des actions liées au résultat transversal : renforcement des capacités
organisationnelles de l'AEPT
Le partenariat entre SFCG et l’AEPT a permis à l’AEPT de renforcer ses capacités organisationnelles et
financières en tant que partenaire de mise en œuvre. L’AEPT est désormais capable de soumissionner des
projets auprès de bailleurs différents, dont l’Union Européenne, ce qui lui permet de diversifier la source
de ses financements.
Cependant, il faut noter que des problèmes ont été constatés tout au long du projet concernant la gestion
financière de l’AEPT, ce qui a mené à organiser plusieurs missions techniques d’appui à l’équipe projet
en 2011-2012 et finalement l’ouverture d’un bureau SFCG au Tchad afin de mieux suivre le projet. Cela a
entrainé des difficultés dans le partenariat, dû à des problèmes de communication entre SFCG et l’AEPT.
Ces difficultés ainsi que le retard courant des versements financiers pour la poursuite des activités sont les
principales raisons du retard dans la mise en œuvre des activités du projet. Cela explique en partie le
niveau d’atteinte des impacts dudit projet à la date de l’évaluation finale.
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En conclusion, il apparait de cette évaluation finale que le projet a eu un faible impact. Bien que
certains facteurs montrent que le projet a contribué à accroitre l’accès pour le public en général à
une information de qualité et de proximité, ainsi qu’à ce que des journalistes pratiquent une
approche non confrontationnelle et compréhensive des conflits, les impacts du projet apparaissent
trop faibles pour que les 2 objectifs spécifiques soient atteints.
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6. Recommandations
Au vu de déroulement de ce projet et se basant sur les résultats auxquels le projet est arrivé à sa fin
suivant les différents rapports, il est du devoir de l’équipe d’évaluation de formuler quelques
recommandations en vue d’améliorer la mise en œuvre d’autres programmes de partenariat de SFCG ou
de l’AEPT.
6.1. Recommandations à SFCG
Avoir des critères précis pour choisir les partenaires d’exécution des projets que SFCG ne peut
pas directement mettre en œuvre ;
Faire une évaluation des capacités du partenaire afin de mieux répartir les responsabilités lors de
la conception des projets ;
S’assurer à l’avenir de la mise en place d’un système de suivi par le partenaire d’exécution ;
Si besoin, coacher l’équipe de suivi-évaluation du partenaire sur l’importance du suivi, de
rapportage ainsi que de la fréquence ;
S’assurer du respect d’un délai règlementaire pour le virement financier vers le partenaire ;
Améliorer le système de communication avec le partenaire ; garder les traces des communications
sous forme de tableau récapitulatif à mettre à jour régulièrement
Prévoir un cahier de charge pour les journalistes devant suivre des stages à l’étranger
S’assurer d’outiller suffisamment l’équipe administrative du partenaire à l’utilisation de vos
outils tels que le cadre logique et surtout la gestion budgétaire;
Suivre conjointement avec le partenaire, les clauses de productions des émissions ;
Exiger des organes médias partenaires, la restitution entre confrères les formations reçues ;
S’assurer à l’avenir que les critères de sélection des participants à des formations privilégient les
femmes
6.2. Recommandations à l’AEPT
Mettre en place dans l’avenir un système de suivi et évaluation capable de produire des rapports
de suivi permanent ;
Mettre à la disposition des radios des outils (calendrier et fiches) permettant de suivre
correctement les productions ;
Coacher davantage les médias formés pour une bonne qualité de la production des émissions ;
Communiquer clairement avec le partenaire SFCG ; Accepter que les partenaires coordonateurs
d’un projet mis en œuvre ensemble puissent demander une clarté dans la gestion sans que cela ne
soit pris comme un manque de confiance ;
Partager avec le partenaire de mise en œuvre, les différents rapports.
6.3. Recommandations aux médias partenaires
Respecter les clauses de production des émissions ;
Encourager les journalistes formés à organiser des séances de restitution au niveau de leur
structure ;
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Solliciter auprès des journalistes stagiaires, la soumission d’un rapport de fin de stage pour les
partenaires ;
Encourager la participation des productrices à des formations en journalisme ;
Encourager l’embauche de journalistes femmes et la représentation de leur voix à la radio ;
Encourager la production des reportages conjoints avec d’autres médias confrères
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