il suffit d’une nuit, vol -...
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Ilsuffitd’unenuit,vol.1
FrédériqueArnould
Illustration:CLM
LaRomance,coll.dirigéeparL.S.AngeÉditionsL’ivre-Book
Chapitre1Adossée contre le pied de son lit, Théa pleurait.Des larmes incandescentes ruisselaient sur ses
jouesfroidesbrûlantsapeaud’uneterribleamertume.Lagorgesècheàcausedufeudelatristessequilaconsumait,ellen’arrivaitplusàrespirer.Elleneparvenaitplusàfairetaireceflotdesanglots,et cela faisait plus d’une heure que son chagrin coulait. Elle avait la sensation d’avoir noyé sachambre,des’êtrevidéedetoutliquide.
C’étaitsiinjuste!Pourquoiest-cequecelatombaitencoresurelle?Commesilavien’étaitpasdéjàassezdure, elle en remettaitunecouche.Sonmonde s’écroulait.Elle avait eu tantdemalà lereconstruire…
Théaentenditlaportes’ouvrir.Elleramenasescheveuxchâtainsenarrièreetselevaenhâte,nevoulantsurtoutpasquesasœuretsonfilsdesixanslavoientdanscetétat.Ellefonçadanslasalledebain qui se trouvait juste à droite de sa chambre, se déshabilla, entra dans la douche,mit l’eau enrouteetcontintunpetitcrienpercevantlafroideurdespremièresgouttes.Elleplaçasonvisagesouslejetpourtenterdecacherleslarmesquicoulaientencore.
Desbruitsdetalonsmartelaientlecarrelage,ilsétaientdeplusenplusnets.Enfin,laportes’ouvritetCarolineypassalatête.
—Est-cequejepeuxentrer?—Biensûr,Caro.—Qu’est-cequit’arrive?Cen’estpasl’heuredeladouche.Théasouffla,ellechassalessanglotsquisepressaientdanssagorgepouravoirunevoixclaire
quinelatrahissepas.—Jesuistoutecollanteaveccettechaleur,j’avaisbesoindemerafraîchir.—Moiaussi,çameferaitdubien.Théa se frotta le visage espérant effacer les affres de son chagrin, mais elle sentait ses yeux
gonflés. Elle se mordit le bas de la lèvre, cherchant quelque chose à répondre à sa sœur si elleremarquaitcedétail.Maisrienneluivintàl’esprit.
Carolineavançadequelquespasets’appuyacontrelelavabo.Elleplaçasesmainssoussesbras,attendantqueThéaluiparledesonrendez-vous.Nevoulantriendévoiler,Théachoisitd’orienterlesujetverssonfils.
—OùestBastien?—IljouedanslebacàsableavecLysie.—Ah !Ce fichubacà sable ! J’avaisdit àFabiendenepas le faire.Àchaque fois,Bastienen
ramènepleinlespoches,etautomatiquement,yenapartoutdanslamaison.Théase tut,sentant lechagrinrevenirensongeantàsonmari.Cedernieravaitpériunpeuplus
d’un an auparavant dans un accident de voiture. Il était resté onze jours dans le coma, puis avaitsuccombéàsesblessures.Théaavaiteubeaucoupdemalàremonterlapente,etdèsqu’elleévoquaitFabien, la tristesse l’envahissait.Sa sœur,qui connaissait pertinemment la raisondece silence, eutcommeunpincementaucœur.Théaavaitbientropsouffert,etelles’envoulaitdenepasarriveràlatirerverslehaut.
—Est-cequeçava,Théa?—Oui,net’inquiètepas.J’aisurmontétoutça.—Jemeledemande.Tuparaissitriste…
Incommodéeparlatournuredelaconversation,Théachangeaunefoisencoredesujet,revenantunenouvellefoissursonfils.
—Lajournées’estbienpasséeavecBastien?—Trèsbien,ils’estamusécommeunfou.Tudevraislelaisservenircheznousplussouvent.—Oui,jesais,maisjen’yarrivepas.Tupeuxmedonneruneserviette?Carolinesebaissa,pritunlingedanslemeublesouslelavaboetletenditàsasœur.Théas’essuya
lentement, commepour retarder sa sortie.Elle eutunpincement auventre à l’idéede se retrouverfaceàCaroline.Parviendrait-elleàluicacherlavérité?Ellepassalaservietteautourd’elleetquittaladouche.Envoyantsesyeuxrougis,Carolines’inquiéta.
—Necommencepas,jemesuismaquilléepourmonrendez-vousetj’aifaituneallergie.—Tuessûre?—Pourquoiveux-tuquejetemente?—Afinquejenem’affolepas.—Jevaisbien,Caro.Tun’asplusbesoindemematerner.—C’estdifficile.J’aitellementpeurqueturetombesdansladépression.—C’estimpossible,ditThéaensemoquant.Tuveillesàcequecelaneseproduisepas.Carolinesourit,voyantsasœurenfaireautant.Qu’est-cequeçaluiavaitmanqué!Celafaisaitdes
moisqueThéaavaitperdulegoûtdevivre;constaterqu’ellereprenaitledessuslarassurait.—Alors,tonrendez-vous?—R.A.S.mentitThéa.Toutvabien.Carolinesouffla,apaisée.Elleavaiteusipeur.Théaavaitdéjàbienassezsouffert,ellen’avaitpas
besoind’uneépreuvesupplémentaire.—Jetelaissetepréparer.Caroline quitta la salle de bain et partit voir les deux petits. Pendant ce temps, Théa était figée
devantlemiroir.Elleregardaitsonrefletavechonte.Commentavait-ellepumentiràCaroline?Ellequil’avaittantsoutenuedurantcetteannée.Elleexpiraettentadeseconvaincrequec’étaitunebonnechose.Ellerefusaitd’inquiéterdavantagesasœur.Elleenavaitdéjàbienassezfaitpourelle.Lapeinerepritpossessiondesesyeux.Unelarmeallaitcoulerlorsqu’unepetitevoixcria:
—Maman!Laportes’ouvritbrusquementetBastiensejetadanslesbrasdesamère.—Oh!Doucement,mafripouille!—Tum’asmanqué.—Toiaussi,macrevette.—Jenesuispasunecrevette,jesuisBastien.Théasemitàrireetl’embrassaavecfougue,commesiellenel’avaitpasvudepuislongtemps.—Comments’estpasséetamatinéecheztataCaro?—C’était super !Ona faitde labalançoireetdu toboggan. J’aimême faitunevoitureavecdu
papier.Tuveuxquejetelamontre?—Biensûr,dèsquej’auraifinidemepréparer.D’accord?CarolinearrivaavecLysie,safille.Elles’appuyacontrelechambranledelaportependantquela
petitesejetaitdanslesbrasdeThéa.—Tata!Est-cequeBastienpeutveniravecnousenvacances?—Oh,oui,s’ilteplaît,maman.—Jenecroispasquecesoitunebonneidée.VouspartezquatresemainesdansleSud.—Jeseraisraviedeleprendreavecnous.—EtquediraMarc?—Rien,iln’aurapaslechoix.
—Tata!s’écriaLysie.Théasourit,maisnetrouvapasquoirépondre.EllenedésiraitpasqueBastiens’éloigned’ellesi
longtemps, mais en même temps, cela était nécessaire pour digérer la mauvaise nouvelle qu’ellevenaitd’apprendre.
—Alors,maman?s’impatientalepetit.—Jenesuispasconvaincuequec’estunebonneidée.Est-cequetuveuxvraimentyaller?—Oh,oui!Théa leva les yeux vers Caroline, lui demandant son aide pour dissuader son fils, mais elle
semblaitducôtédeBastien.Elleencourageasasœur,et finalement,Théaaccepta.CelanepourraitquefairedubienàBastien.Cesdernierstemps,ellelecouvaitdetropetellelesavait.
—C’estd’accord.Maistumeprometsd’êtrebiensageetdem’appelertouslesjours.— Ouais ! s’écrièrent les deux enfants à l’unisson avant de quitter la salle de bain pour aller
préparerlesaffairesdeBastien.Théa les regarda partir avec un pincement au cœur. Bastien avait l’air si content. Pourquoi ne
s’était-ellepas renducompteavantqu’il souhaitait avoirplusde liberté ?Elle soupira et se tournaverslemiroir.Ellesaisitunebrosseetentrepritdecoiffersescheveuxmouillés.
—Veux-tuveniravecnous?demandaCaroline.—Net’inquiètepas, jem’ensortirai trèsbientouteseule.EtpuisBastienabesoindevoirautre
chose.Jelesurprotège.—C’estbienquetut’enaperçoives.Maisneteblâmepaspourcela,c’estnormalaprèslaperte
quevousavezsubie.Théagardalesilence.Elleposasabrosse,saisitsacrèmeets’enappliquasurlevisage.Toutça
sousleregardinsistantdeCaroline.—Tuestenace,petitesœur.—Eneffet.Etdonc?—Non,jeneviendraipas.—D’accord,maissituasuncoupdeblues,tum’appellesettunousrejoins.—Pasdesoucis.Deuxheuresplustard,CarolineemmenaitBastien.L’enfantétaitenchanté,ilpartaitàlamerpour
lapremièrefois.Théa,beaucoupplussurlaréserve,leregardas’éloigneravecunebouleauventre.Elle allait se retrouver seule face à son problème et passerait sans doute de longues journées àpleurer.
Chapitre2Lanuitfut trèsdurepourThéa.Seuledanssongrandlit,danscette immensemaison,sessoucis
semblaientlapourchasser.Ellen’arrivaitpasàtrouverlesommeil.Elleauraitaiméprofiterdecettesolitudepoursereposer,maisellen’yparvenaitpas.Lesparolesdumédecinqu’elleavaitvulaveillelahantaient.
—Nousavonseulesrésultatsdevosanalyses,etjenevouscachepasqu’ellesnesontpasbonnes.Vousavezuncancer,madameMartins.
Théa était restée sans voix.Ne sachant pas comment réagir.C’était une nouvelle bombe qui luitombaitdessus,etellen’étaitpascertained’arriveràysurvivre.
—Est-cequeçava?luiavaitdemandélemédecin.—Oui,nevousinquiétezpas.C’estmalheureusementlavie.Ilfautfaireavec.Encetinstant,ellen’étaitplussûredepouvoirfaireface.Pourtant,elleledevaitpourBastien.Elle
soufflaensongeantàsonpetitgarçon;ilétaitsiheureuxdepartirenvacances.LeremordsenvahitThéa,etellesesentitencoreplusmal.
Elleselevasansaucuneenvieetsetraînajusquedanslacuisine.Parhabitude,ellesortitunbol,dulaitetdescéréaleset lesmangeasansfaim.Ellepassaensuitedans lasalledebainets’habilla.Uncoupd’œilsurl’horlogeluiindiquahuitheures.Ingrid,sameilleureamie,devaitêtreréveillée.Théaprit ses clés et partit une rue plus bas. Ingrid était une personne optimiste qui aimait la vie. CettedernièreavaittoujourssuréconforterThéa,c’estpourquoiellechoisitd’allerlatrouver.
Lesdeuxfemmesrésidaientdanslamêmeville,Commercy,etytravaillaientaussi.C’estunepetitecommuned’environseptmilleâmes,célèbrepoursesmadeleinesetoùlesgensavaientlafâcheusetendanceàs’occuperdetout.Théaavaitfaitconstruireunpavillondeplain-piedruedeMenaufile,etIngrid habitait juste en dessous, rue des Capucins, dans la demeure familiale où elle avait grandi.C’étaitunebellemaisondemaîtreenpierreblancheet entouréed’unmagnifique jardin.Àchaquefoisqu’elleyvenait,Théasentaitlasérénitélagagner.Celieuavaitquelquechosed’apaisant.
Elle ouvrit le portail, faisant grincer les gonds,monta les troismarches qui la séparaient de laporte et s’arrêta brusquement, doutant de sa décision. Pourtant, elle avait besoin d’en parler àquelqu’un.Cepoidsétaittroplourdàporter.Elledevaitselibérersiellenevoulaitpasretomberdanslesbrasdeladépression.Etquimieuxqu’Ingridpouvaitlasoutenir?
Cesdeux-làs’étaientrencontréesdansl’établissementscolaireoùThéaavaitprissonposteentantque professeur d’histoire. Ingrid y travaillait comme conseillère d’éducation. Il n’avait pas fallulongtemps pour qu’elles deviennent comme les deuxdoigts de lamain.C’estmême Ingrid qui luiavaitvenduunterrainafinqu’elleyconstruisesamaisonavecsonépoux.Ellesétaienttrèsdifférentes—sil’uneétaitextravertieetimpulsivetoujoursprêteàfairelafête,l’autreétaitplutôtlecontraire—,etelless’entendaientàmerveille.
Théafrappatroisfoisetattenditunmoment.Ingridnerépondaitpas.Pourtant,elleétaitchezelle,savoitureétaitdevantsongarage.Elleinsista,etIngridconsentitàouvrirlevoletdesachambre.EllepassasatêteparlafenêtreetfutsurprisedevoirThéa.
—Théa!Qu’est-cequit’amèneàcetteheure-ci?Lajeunefemmerestasilencieuseetsefrottalevisage,anxieuse.Elletentaitdechasserlechagrin
qui se pressait au bord de ses yeux. Devant lamine affreuse de son amie et la tristesse qu’elle ydécelait,Ingriddescenditlarejoindre.Théaentraets’assitdanslesalon,surunfauteuildecuirnoir.
Elle avait à peine franchi le pas de la porte que les larmes eurent raison de sa détermination.Cesdernièresroulaientavecardeursurlesjouesfroidesdelajeunefemmeavantdetomberparterre.
Elle laissa ses yeux divaguer sur ce qui l’entourait et sourit en se souvenant des heures qu’elleavaitpasséesavecsonmarietIngridàfairedestravauxpourrendrecettemaisonplusfonctionnelleetconviviale.Ingridsedirigeaverslacuisinequiétaitouvertesurlesalonetlasalleàmanger.Ellesaisitdesmouchoirsetlesapportaàsonamie,puiselles’installaàsescôtés.
—Cesonttesanalyses,n’est-cepas?Ellesnesontpasbonnes.—J’aiuncancer.Le visage d’Ingrid devint livide. Elle se frotta nerveusement les mains sur son peignoir avant
d’attrapercellesdeThéaetdelesserreravecaffection,aveccompassion.—Jesuistellementdésolée,machérie.C’estinjuste.Tuasdéjàtantsouffert.Quepuis-jepourtoi?—J’auraibesoindetonsoutien.Jenepeuxpassupporterçatouteseule.Jepensaisyarriver,mais
c’esttropdur.—Tupeuxcomptersurmoi,mabelle.Jenetelâcheraipas.Commentl’aprisCaroline?Théabaissa leregardvers lesdallesdepierrequirecouvraient lesol.Ellesegratta la têteetse
morditlalèvredubas.Envoyantsoncomportement,Ingridcompritqu’elleneluiavaitriendit.Elleaurait aimé la sermonner, mais elle s’abstint de peur de braquer Théa. La jeune femme n’avaitcertainementpasbesoinqu’onluidictecequ’elledevaitfaire,surtoutencemoment.
—Jedoismefaireretirerlagrosseurletrentejuillet,puisj’enchaînerailachimioàraisond’uneséancetouteslestroissemainespendantsixmois.
—Maisc’estdansmoinsd’unmois!—Eneffet.Apparemment,ilnefautpasperdredetemps.—Quet’aditlemédecin?Est-iloptimiste?—Ilnes’avancepas.—Oh!mapauvrechérie.Jemedoutequeçanevapasêtrefacile,maistunedoispasypenser.Tu
doisprendrelesdevantsettebattre.Nelaissepaslatristesset’envahir.Théaétaitconvaincuequ’Ingridavaitraison,maispourlemoment,ellen’arrivaitpasàfaireautre
chosequepleurer.Ingridenlaçasonamieetlaserraavecforce.Ellenesavaitpasquoifaired’autre.Difficiledeconsolerquelqu’undanscegenredesituation.
Julien, le fils d’Ingrid, descendit les escaliers en caleçon. Il s’arrêta sur la dernièremarche enapercevantThéa.Soncœurbonditdanssapoitrineen lavoyant.Elleétait aussibellequedanssonsouvenir. Pourtant, en cet instant, elle était bien différente. Il fixa ses yeux, la petite flamme qui ybrillait ordinairement avait disparu. Elle avait l’air complètement abattue, comme si le poids dumondeluiétaittombédessus.
D’unemaintremblante,Théaessuyaitleslarmesquiruisselaientsursesjoues.Julieneutcommeunpincementdansleventre;ilauraittantaiméeffacersatristesse…S’iln’yavaitpassamèreetsaraisonquileretenaient,ilauraitcouruversellepourlaserrerdanssesbras.
Ilseglissadiscrètementdanslacuisineetouvritlefrigo.Théal’aperçutalorsetsonregardrestabloquésurlui.Celafaisaitplusdedeuxansqu’ellenel’avaitpasvuetelleletrouvabienchangé.Ilavait vingt-quatre ans et était devenuunbel hommed’unmètre quatre-vingt au corpsparfaitementdessiné.Elleneputs’empêcherdes’imaginer le toucheret réprimaunfrissonàcettepensée.Maisqu’est-cequiluiarrivait?
—Julien,cen’estpasunetenue!ditsamère.—Jenesavaispasquenousavionsdelavisite.Théaessuyaunenouvellefoisses joues.Ellesouritet tentadechasser lapeinequimarquaitses
traits.D’ungesteincertain,ellelesaluadelamain,incapabled’ouvrirlabouchesansqu’unsanglotnes’ypresse.Julienluiréponditdelamêmefaçon.Ilétaitbouleverséparl’étatdeThéa,maiscachait
sonémotiondumieuxqu’illepouvait.Ilsouffladiscrètementetsetournaverslesplacards.Ilavaitfermélesyeuxet tentaitdechasser ledésirqu’iléprouvaitpour la jeunefemme.Iln’imaginaitpasquecedernierreferaitsurface;ilpensaitl’avoiroublié,maisiln’avaitfaitquesommeiller.
—Aurais-tul’amabilitéd’allert’habiller?insistasamère.—Oh ! C’est bon, maman. Théa n’est pas une enfant, elle sait ce que c’est que le corps d’un
homme.—Ah,lançaIngrid.Parcequetuastroispoilssurletorse,tuteconsidèrescommeunhomme!—Trèsdrôle,réponditJulien.Ilfitdemi-tour,montalesescalierstoutenjetantunderniercoupd’œilàThéa.Ilfutravidevoir
qu’aumoinslablaguedesamèrel’avaitfaitsourire.Elleétaittellementplusbelleainsi…—Jesuisnavréepourcettepetitedistraction.—Iln’yapasdemal.Jenesavaispasquetonfilsétaitrentré.Tunem’asriendit.—Ilm’afaitlasurprise,hier.Maisaufait,oùestBastien?—EnvacancesavecCaro.—Tuplaisantes?—Non.—C’estunpasénorme.Celanepourra te fairequedubien. J’enprofiteraipour techanger les
idées.Onvas’amusercommedesfolles,tuoublierastoustessoucis.Théasourit,ellesavaitquevenirvoirIngridseraitbénéfiquepoursonmoral.Mêmesielleavait
peurdecequeluiréservaitsonamie,carlabellen’avaitpasfroidauxyeux.
Chapitre3Lesoirmême,IngridsonnaàlaportedeThéa.Elleaffichaitunlargesourireetsemblaitavoirune
idéederrièrelatête.Ellerentra,tirasonamiedanssachambreetluidemandades’asseoirsurlelit.Théal’observa,intriguée.Ingridcommençaàfouillerdansl’armoireetyattrapaunpantalonnoiretunpetittoprouge.
—Tiens,enfileça.Noussortonscesoir.—C’estgentil,maisjen’enaipasenvie.—Jenetelaissepaslechoix!—Ingrid,n’insistepas.CettedernièreselevaetpriaThéadefairedemême.Ellelaplaçafaceàunmiroiretlaforçaàse
regarder.Théaobservaleurreflet.Ellesesentaitsimocheàcôtéd’Ingridquiétaitunebellefemmed’un mètre soixante-dix-huit. Elle avait des formes voluptueuses qui plaisaient beaucoup auxhommes,et restait jeunemalgrésesquarante-septans.ContrairementàThéa,quiavait lescheveuxplatsetraides,elleavaitunemagnifiquechevelurefriséedelacouleurdufeu.Théafaisaittache.Ellebaissaleregardverslesol.
—Ahnon!s’écriaIngrid.Necommencepascommeça.Tuestrèsjolie,Théa.Ilfautjustequetutemettes en valeur. Tu sais, si tu veux combattre tamaladie, il faut que tu sois optimiste. Tu voiscommeellesemoque?Tudoisreprendreledessus,etpourça,tudoist’appréciertoietapprécierlavie.
—C’estloind’êtrelecas.—Ehbien,nousallonsremédieràça!Filetepréparer.—Etoùm’emmènes-tu?—Aurestaurant.—Touteslesdeux?s’écriaThéa.—Çafaitplaisir!Tun’asqu’àdirequemacompagnien’estpasdrôle.—Non,c’estplutôtlamiennequin’estpasagréableencemoment.Jenesuispascertainequece
soitunebonneidée.—Bienaucontraire.Tuasbesoindeteviderl’espritetdechangerd’air.Plusjepenseàtamaladie
et plus je suis convaincue que tu dois lui rire au nez.Montre-lui que tu ne te laisses pas abattre.Croquelavieàpleinesdentscommesichaquejourétaitledernier.Temorfondreneferapasavancerleschoses.Dépêche-toidetepréparer.Notrecarrossearrivedansuneheure.
—Notrequoi?—Julienvientavecnous,etc’estluiquiconduit.Ilaaussibesoindesechangerlesidées.—Ehbien,cettesoiréeprometd’êtregaie!Es-tusûredevouloirdenouspourdîner?Ingridéclataderire.EllejetaunregardchaleureuxàThéaqui,encouragée,partitdanslasallede
bain.Elleauraitaimérefuser,maisellesavaitqu’Ingridne lepermettraitpas.Elleobtempéradoncsans discuter et fila se préparer. Elle prit une douche rapide et enfila la tenue que son amie avaitchoisiepourelle,puisfitl’effortdesemaquiller.ElleavaitàpeinefiniqueJulienarrivait.
Lejeunehomme,quin’avaitpasvraimentenviedesortirnonplus,avaitchangéd’idéequandsamèreluiavaitditqueThéaseraitlà.Ilseravissaitdelavoir.C’étaitcommeuneboufféed’oxygènepourlui,etcedepuisplusieursannées.Dèsqu’ilapercevaitsonvisage,ilsentaitsoncœurbattrelachamade.Etcettefoisnefitpasexception.
—Jevaischerchermeschaussures,lançaThéa.Ingrid observa son amie partir vers le garage. Elle sortit de la maison et demanda à son fils
d’attendreThéapendantqu’ellepassaituncoupdetéléphone.Julien,ravideseretrouverseulaveclajeune femme, n’émit aucune protestation. Il s’adossa aumeuble dans l’entrée et patienta quelquessecondes. Théa revint chaussée d’une paire d’escarpins qui affinait encore plus sa silhouette. Elles’étonnadel’absenced’IngridetinterrogeaJulienduregard.Illuifitsignequ’elleétaitautéléphone.
—Décidemment,cetoutildevientindispensable.Ellepeutcritiquerlesadosqu’elleconseille,c’estlamême!
—C’estnécessairepourgérersespetitscopains.—Celanetefaitriendevoirtamèreavecdeshommesdifférents?—Jenelacomprendspasforcément,maissielleestheureusecommeça,celanemeposepasde
souci.Tuesprête?—Oui.Ohmince!J’aioubliémesclés.Théafitunpasenarrière,maisn’ayantplusl’habitudedemarcheravecdetelleschaussures,elle
setorditlepiedetfaillittomber.Julien,quiétaitàcôté,eutjusteletempsdelarattraper.Sesdoigtscoururentsurledosdelajeunefemmeavechésitation.Etsesyeuxdétaillèrentchaquepartiedesonvisage.Julienvoulaitlesgraverdanssonesprit.Théasentitlachaleurmonterdepuissespiedsversson ventre, sa poitrine et son cœur.Elle fut comme transpercée par une flèche.Quelle impressionétrange, mais si délicieuse ! Elle aurait aimé rester dans les bras de Julien. Mais gênée par lessensationsquil’envahissaient,elleseredressarapidementetsehâtadesortir.Ellepassasamainsursanuque,perturbéeparlesfourmillementsqu’elleavaitressentisaucontactdujeunehomme.
Julien,quantà lui,étaitaussidéboussoléqueThéa. Iln’aurait jamais imaginéque la toucher luiauraitfaitunteleffet.Ilsefrottalevisage,encoresouslecharmedecettedame.Ellen’avaitpourtantrienfaitquipuisseconduireàunetellesensation.
—Est-cequeçava?luidemandaIngridquivenaitderaccrocher.—Oui,net’inquiètepas.Théafermalaporteàclé,ettouslestroissedirigèrentverslavoiture.Quelquesminutesplustard,
ils étaient au restaurant. La soirée fut beaucoup plus plaisante que Théa l’aurait cru. Il faut direqu’Ingridétaitdouéepourlesfairerire,maisaumilieudurepas,ellereçutunappeletlesabandonna.
—Jesuisnavrée,meschéris,maisJohnvientdemeprévenirqu’ilquittaitplustôtsontravailetqu’ilm’attendait.Jevouslaissefinirtouslesdeux.
ElledéposaunbaiserrapidesurlesjouesdesonfilsetdeThéaetfilaàtoutevitesse,sansleurdonner le temps d’émettre une protestation. Ingrid était une personne impulsive et assez libertine.DepuisquelepèredeJulienlesavaitabandonnés,ellechangeaitdepetitsamispourunouioupourun non. Théa, qui avait appris à la connaître, savait qu’elle faisait ça pour ne pas s’attacher. Ellel’observaseprécipiterhorsdurestaurantetsourit.Onauraitdituneadolescenteenmanquedesexequicouraitrejoindresoncopain.
—Ehbien,nousvoilàseuls,soufflaJulien.J’espèrequemacompagnienetedérangepas.—Bienaucontraire.C’estagréabled’avoirlaprésenced’unhommeàsescôtés.Théasentitsesjoueschaufferensongeantauxparolesqu’ellevenaitdeprononcer.Qu’est-cequi
luiavaitprisdedireunechosepareille?EllelevasonverreetinvitaJulienàfairedemême.—Ehbien,àIngridet…Flûte!Jenemesouviensplusduprénomdesoncopain.—John,réponditJulien.—Ah,oui!AlorsàJohnetIngrid.Ilstrinquèrentaveclégèreté.—Tamèreestuneincorrigibleadolescente.Crois-tuqu’ellegrandiraunjour?—J’endoute.
—Ettoi?—Quoi,moi?—Es-tucommeelle?Théasemorditlebasdelalèvre,comprenantquesaquestionnelaregardaitpas.Elleattrapason
verredevinetbutladernièregorgée.—Non,jenesuispascommeelle,repritJulien.Jesuisplusposé,plusréfléchi.Etjesuisl’homme
d’uneseulefemme.IlsetutetfixaThéa,avantd’ajouter.—Enfin,uneàlafois…Théaéclataderire.—Qu’est-cequit’amuse?—Toi!J’aidumalàt’imagineravecplusd’unepartenaire.Tuparaistropjeune,trop…—Jesuistoutàfaitcapabledecontenterplusieurspersonnesenmêmetemps,réponditJuliend’un
airvexé.Uneserveuseapportalesdesserts,mettantfinàcetteconversationquidevenaitunpeutropgênante
pourThéa.Julienfixaleplatdesavoisineavecdegrosyeux.—Tuvasarriveràmangertoutça?—J’adore lesprofiteroles.Etcelafaitdes lustresque jen’enaipasdégusté.Alorsmêmesi les
boutonsdemonpantalonéclatent,ehbien,tantpis!Théaenpritunepremièrebouchéeetesquissaunlégersourire.Amusé,Juliensaisitsacuillèreet
piochadansl’assiettedeThéa.—Hé!héla-t-elle.Jet’interdisderenouvelercegeste.—Sinon,quoi?Tuvasmemettreunefessée.—Jepourrais,réponditThéa.Faceàl’airdedéfidelajeunefemme,Julien,quiétaitassezjoueur,recommença.Maisc’étaitsans
comptersurlarapiditédesavoisinequi,d’uncoupsec,luifrappalamain.—Aïe!s’écriaJulien.—Sache,moncher,qu’ilesttrèsinconvenantdevolerlesprofiterolesd’unedame.Cen’estpas
ainsiquetuvast’attirermesfaveurs…— M’attirer tes faveurs ? répéta Julien. En voilà, une jolie expression. Je tâcherai de m’en
souvenir.Théasouritpourcachersonembarras.Qu’est-cequiluiavaitprisdedireunetellechose?C’était
sortisansqu’elle leveuillevraiment,encoreunefois.Décidément,Julienavaitundrôled’effetsurelle.
Unefois le repas terminé,Théan’avaitaucuneenviederentrer.Elleétaitbienencompagniedujeunehomme,elleriaitsansseforceretappréciaitcemoment.Elleétaitdétendueetnepensaitplusàsamaladie.Finalement,Ingridavaitraison,elledevaitprofiter.
Théavoulutréglersapart,maisJulienrefusalorsqu’ellesortitsonporte-monnaie.—Jeseraisvexésitunemelaissaispaspayerl’addition.—Cen’estpasàtoidelefaire.—J’insistepourt’inviter.Tun’aspasvoulupartagertondessertetbien,moi,jerefusedepartager
l’addition.Théa sourit et referma son sac. Une fois dans la voiture, Julien, qui n’avait pas plus envie de
rentrerqueThéa,luiproposaunebaladeaubordducanal.Lajeunefemme,raviedeprofiterencoreunpeudelacompagniedeJulien,acceptarapidement.
L’unàcôtédel’autre,ilsmarchaientd’unpaslégertoutenparlantdetoutetderien.Julienessayaitdelafairerireetyparvenaitplutôtbien.
—Tuesaussidrôlequetamère!—Jenesaispassijedoisleprendrecommeuncompliment...Ilmit saphrase en suspens et observaThéaavecunegrimace.Elle rit denouveauet lui frappa
doucementlebras.Théaeutunfrisson.Julienenlevalepullqu’ilavaitsurlesépaulesetleplaçasurcellesdeThéa.Enleposant,ilfrôlalevisagedelajeunefemme.Lesentimentquiletraversaalorsfutindescriptible.Ildésiraittellementl’embrasser...maiscen’étaitpasvraimentlebonmoment.
—Ilestpeut-êtretempsderentrer.Ilcommenceàsefairetard.Théa n’en avait pas la moindre envie. Elle aimait ce qu’elle partageait avec lui. Elle avait
l’impressionqu’unecertainecomplicitéétaitnéeentreeuxetellenevoulaitpaslabriser.Néanmoins,elleaccepta,songeantqu’elleauraitbienl’occasiondeseretrouveraveclui.
Enfinchezelle,Théasecouchaavecunedrôledesensation.Julienl’avaittroublée,intriguée.Aupointqu’elleespéraitlerevoirrapidement.
Chapitre4Ingridnelaissaaucunrépitàsonamie.Elleétaitbiendécidéeàluichangerlesidées.Ellerevint
donc le lendemain afin de l’emmener à La Villa Pompéi. Cet endroit était un lieu de détente parexcellence.Ilyavaittoutpourlebien-être:jacuzzi,sauna,hammam...Théasuivit,portéeparl’éland’Ingrid.Cela lui faisaitdubiend’avoirunepile à côtéd’elle.Ainsi, ellepuisaitdans sonénergiepourseragaillardir.
IngridprofitadutrajetpourparleràThéadesondernierpetitamiendate.Ils’appelaitJohn,ets’iln’étaitpasd’uneintelligenceflamboyante,ilétaitunamantextra.Ingridavaitlechicpourchoisirsescopains.Théanecomprenaitpaspourquoisonamies’intéressaitàcegenredetypes.Sansdoutepourleurcôtémauvaisgarçon.
Après une heure trente de route, les filles arrivèrent enfin aux termes. Théa s’extasia devant ledécor.Celieuressemblaitàunsiteromain.Ilyavaitdescolonnesdepierre,dumarbresurlesmursetausol,ainsiquedesmosaïquesetdespeinturesauplafond.Cetendroitrespiraitlebien-êtreetlarelaxation.Théapénétradansl’eauetsedélectadecettechaleur:trentedegrés,quellemerveille!
Ingridl’emmenaverslebassinextérieuretellesprofitèrentdesjetsmassantsavantdesedirigerverslesauna.
—Pourquoin’avons-nousjamaisfaitcelaavant?chuchotaThéa.—Jel’ignore.—C’estassurémentquelquechoseàrefaire.Ingridmituncoupdecoudeàsonamieenremarquantunhommed’unequarantained’annéesqui
dévoraitThéadesyeux.—Hé!Qu’est-cequiteprend?—As-tuvucebeaublondassisenfacedetoi?Ilnetelâchepasduregard.Théal’observauneseconde,puissetournaversIngrid.—Alors?—Alors,quoi?—Tudevraisenprofiter,Théa.IlesttempsqueturefermeslapagedulivreFabien.L’histoireest
malheureusementterminée.Théabaissalesyeuxverssonannulaireetfixasonalliance.Ellen’étaitjamaisarrivéeàl’enlever.
C’étaittropdur;elleavaitperduFabien,maisellenesouhaitaitpasl’oublier.Elleexpiralentementetsecoualatête.
—Jenesuispasprête,Ingrid.—C’esttoiquivois.Elles se relaxèrentpendant troisheuresavantde reprendre la routepourCommercy.Théaavait
passéuntrèsbonmoment,etsesdiscussionsavecIngridlapoussaientàréfléchir.Ilétaitsansdoutetemps pour elle de refaire sa vie.Mais à quoi cela servait-il ? Pourquoi s’attacher à quelqu’un sic’étaitdenouveaupourêtreséparésparlamaladie?
—Crois-tuqu’ilestenvisageabledeselancerdansunenouvellerelationalorsquej’aiuncancer?—Biensûr,réponditIngrid.L’amourestunremèdepuissant.Jesuiscertainequesituretrouvais
quelqu’un,tuseraisplusfortedanscecombat.—Tuasvraisemblablementraison.Ingridsourit.Bienentenduqu’elleavaitraison!
—Veux-tuquejeteprésentedesmessieurs?— Doucement, papillon. Je n’ai pas dit que je souhaitais rencontrer des hommes. J’envisage
seulementcettepossibilité.—Alors,c’estunbondébut.IngriddéposaThéachezelleetl’invitapourledîner.Théarentraépuisée.Cetaprès-midil’avait
vidée de toute son énergie,mais aussi de tous ses soucis. Que cela faisait du bien de se sentir sisereine!Ellese jetadanssoncanapéet fixasamain.Duboutdesdoigts,elleeffleurasonallianceavantdeprendre ladécisionde l’enlever.Ellen’eutaucunmalà la retirer.Était-ceunsigne?Elleallumalatéléetzappasansvraimentregarderleschaînes.Elleétaitbientroppréoccupéeàpenseràsavieamoureuse.Jusque-là,aucunhommeneluiavaitdonnél’enviede toutrecommencer.Aucun,saufpeut-être…
Elle secoua la tête pour ôter cette image de son esprit.Non, elle ne devait pas songer à lui, iln’étaitpaspourelle.Pourtant,lepeudetempsqu’elleavaitpasséavecluil’avaitragaillardieaupointqu’elleavaitsouhaitéquecemomentnefinissejamais.Iln’yavaitrieneuentreeux.Ilsavaientjusteparléetpartagéquelquesheuresensemble,maiscelaavaitréchauffélecœurblessédeThéa.Elleseleva,etsortitdesamaison,elleavaitbesoindeprendrel’air.Tropdechosessebousculaientdanssatête.EllemarchaàtraverslesruesetdébouchasurlaplaceduvillagedevantlemagasinLaClochelorraine.Ellesetournaverslavitrineeteutl’enviesoudainededégusterunemadeleine.
Cepetitgâteauàlaboudottejauneétaitlepréférédesonépoux.Ilenmangeaitdestonnesetdisaitqu’il était fier de ce patrimoine gastronomique. Théa esquissa un léger sourire à cette pensée, cen’étaitqu’unesimplepâtisserie.Elleentradans lemagasinets’arrêtafaceà lasplendeurdes lieux.Ellesavaitqu’ilsavaientrénovécetendroit,maisellen’yavaitjamaisremislespiedsdepuislamortde Fabien. Elle s’extasia devant les étagères remplies de gâteaux. Il y en avait de toute sorte : auchocolat, à lamirabelle, à la bergamote ou nature. Une délicieuse odeur emplissait l’air, donnantenvieàn’importequidedévorercesmerveilles.Enfacesetrouvaientunmurenpierreetunescalieren colimaçon.Elle s’avança et aperçut le comptoir entièrement recouvert demoules àmadeleines.Ellerestaainsiàcontemplercelieu,ébahieparcetteambianceauthentiqueetancienne.
—Puis-jevousaider?demandauneserveuse.Théalaregarda.Elleglissalesmainsdanssespochesetensortitunbillet.—Jevoudraisdesmadeleinesroyales,s’ilvousplaît.—Ilssontàvotredroite.Théasetourna,attrapaunsachet,lepayaetquittalemagasin,heureuse.Ellecheminajusqu’auquai
Neptune, où elle s’assit de façon à voir l’arrière du château Stanislas. Ses pieds battaient l’air au-dessus de l’eau, et elle admirait cette imposante bâtisse. Elle saisit l’objet de sa gourmandise, ladégustaavecplaisir,puisenpritunesecondeavantdeseperdredanssespensées.Ilétaittempspourelled’avancer,depasseràautrechose.Vivredansladouleurdevenaitinsupportable;elleavaitbientropportécedeuil.
Unevoixfamilièrelasortitdesesréflexions.—Théa!Quellebonnesurprise!Celafaituneéternitéquel’onnes’estpasvus.La jeune femme souffla discrètement et semordit le basde la lèvre.Cen’était vraiment pasde
chancedetombersurlui!Ellechassasacontrariétéetseleva.Elleétaitàpeinedeboutquel’hommeposaitsesmainssursesépaulespourl’embrasser.
Maximeétaitunenseignantquiexerçaitdanslemêmecollègequ’elle.Ilétaitdetaillemoyenneetavaitunesilhouetteplutôtfine.Sonvisageétaitplaisantetsabarbenaissanteluiconféraitunairvirilquicontrastaitaveclerestedesonapparence.
—Disdonc,çafaitunbail!Commentvas-tu?—Bien,merci.
— Je suis navré pour tout ce qui t’est tombé dessus. J’espère que tout ça est derrière toiaujourd’hui.
Théasouritmalgréelleethochalatêtepouracquiescer,mêmesiellen’avaitpasvraimentenviedeluirépondre.Celaneleregardaitpas.
—Tufaislarentréeavecnous,cetteannée?—Normalement,oui.—Oh,super!Tabonnehumeurnousmanqueensalledesprofs.Ilattrapalebrasdelajeunefemmeetlatirasansluipermettredeprotester.—Viens,jet’offreunverre.Onabeaucoupdechosesàsedire,depuisletempsquel’onnes’est
pasvus.Tusais,tuaseudelachancedenepastravaillerl’anpassé.Aumoins,tuaséchappéaux6e7.C’étaitunesacréecuvée!Priepournepaslesavoir.
Théasedéfitdesonemprise.Ellefixafurtivementsamontreets’arrêta.—Maxime,cen’estpasquetacompagniemedérange,maisjedoisrentrer.—Oh,allez!Justeunverre.Celaneserapaslong.Théaneputrefuseretlesuivitsansaucuneenvie.Assise à la terrasse du café, ses yeux se perdaient dans la foule. Elle cherchait un moyen
d’échapperàcemoulinàparoles,maisn’yparvenaitpas.Dèsqu’elleouvraitlabouchepourluidirequ’il se faisait tard, il enchaînait avecautrechose.Machinalement, elle remuait sondiabolo fraise,n’écoutantsoninterlocuteurqued’uneoreille.Ellesemauditd’êtresortie,elleauraitmieuxfaitderesterchezelle.
Elle frissonnaquandunemainseposasursonépaule,elle leva lesyeuxetdécouvrit Julien.Ungrandsoulagementselutalorssursonvisage,maisMaximen’yprêtaaucuneattention.
—SalutThéa.Tu n’es pas encore à lamaison ? Ilme semble pourtant quemamère t’y attenddepuisunpetitmoment.
—Oui,jesais.MaisMaximem’agentimentinvitéeetjen’aipaspurefuser.—Il fallaitmedireque tuavaisdesprojetspour la soirée,ditMaximegêné. Jene t’auraispas
retenuesilongtemps.Théa terminasonverred’uneseule traiteet se levaenhâte.EllesaluaMaximed’unsignede la
main,pritsonsachetdemadeleinesets’éloignaavecJulien.—PasselebonjouràIngrid,lançaMaxime.—Jen’ymanqueraipas.Ellemarchad’unpaspresséjusqu’audétourdelaplace.UnefoiscertainequeMaximen’étaitplus
envue,ellesoufflabruyamment.—Merci,jen’arrivaispasàm’endépêtrer.—J’avaisremarqué,c’estpourcelaquejesuisintervenu.—Ahoui?Etqu’est-cequit’afaitpenserquej’avaisbesoind’aide?—Tonregardfuyantettesmainsquiremuaientnerveusementtaboisson.—Ehbien,tuesobservateur.—Eneffet.Ilsmarchèrentquelquesmètressansunmot.Devantcesilencequipesait lourdsurThéa,ellelui
proposa un gâteau. Julien accepta avec plaisir. Il l’ouvrit sans aucune délicatesse et se jeta sur laboudotte.Théalefixaavecdegrosyeux.
—Non,jen’ycroispas!s’écria-t-ellesurprise.Commentpeux-tuavalerunemadeleinecommeça?Ellesesavoure!
—Jenesavaispasqu’ilyavaitunemanièreparticulièredelesmanger.—Ehbiensi,monsieur!
Théaattrapaunemadeleine.Elleenleval’emballage,lapritentresesdoigtsetlaplaçadevantsonvisage.
—Vois-tucettebellecouleurdoréeetcetteformerainurée?Ilfautd’aborddégusterlestoursetfinirparcerenflement.C’estlemeilleur.
Elleportalegâteauàseslèvresetcroqualesdeuxextrémitésavecdouceur.Lorsqu’ilnerestaplusquelaboudotte,ellelamontraàJulienetlaluipassadevantlenez.Cedernierouvritlaboucheetlaluivola.
—Hé!s’écriaThéaenfaisantminedebouder.—Désolé,maisjen’aipaspurésister.Théaéclataderirebienvite,suiviepar le jeunehomme.Elleétaitheureuse.Cepetit instant tout
simpleavaitégayésonêtre.Elle rentradécontractée,etsepressadesepréparerpoursondînerdusoirchezIngrid.ElleavaitenviederevoirJulienetdepartagerl’undecesmomentsquiluifaisaienttellementdebien.
Peuaprès,elleseretrouvachezIngridpour le repas.Elleavaitàpeineentamélasaladeniçoisequecettedernièrel’abandonnait,encore.
—Tunevaspasmefaireça?—Jesuisdésolée,Théa,maisledevoirm’appelle.—Toutçapourunmec…—Non,toutçapourdusexe!Tudevraisessayer,iln’yariendemieux.N’oubliepasdefermer
quandtuaurasfini.Ingridembrassasonamieetquittasamaison,laissantThéaseulefaceàdeuxassiettesremplies.La
jeune femme soupira ; elle prit le saladier et le rangea dans le frigo. Julien fit son apparition. Ilportaitunjoggingbleuetunt-shirtnoir.Sescheveuxétaientenbataille,etilavaitunlivreàlamain.QuandilaperçutThéa,ils’assitsuruntabouretdevantlepetitmurquiséparaitlacuisinedelasalleàmanger.
—Elleestencorepartieprécipitamment?—Ehoui,onnelachangerapas!Théarangeait le repasetJulienne la lâchaitpasdesyeux.Sentantsonregardposésurelle,elle
s’interrompitetsedirigeaverslui.Elles’installaàsescôtésetluipritsonlivredesmains.—Lafloredenosrégions.Intéressant,maiscelanedoitpasêtretrèsdistrayant.—Çal’estpourmoi.Ettoi,qu’est-cequetuaimeslire?— Tout ce qui touche à l’imaginaire : la fantasy, le fantastique. J’adore rêver, voyager dans
d’autresunivers.CommedansEragonouLesChevaliersd’émeraude.—C’estétonnantpouruneprofd’histoire.—Jenevoispaspourquoi!Juliensourit.Ilrepritsonlivreetlecollacontresontorse.Intriguéparcequiluipassaitparlatête,
Théalefixaavecinterrogation.—Tuesunepersonneàpart,ThéaMartins.La jeune femme resta silencieuse. Elle sentit les poils de ses bras se dresser, comme si ce que
venaitdeluidireJulienétaitlaplusmerveilleusedeschoses.Elleselevaetcontinuadedébarrasserla table.Lejeunehommerestaunmomentmuet,puis,ne
supportantpluscesilencequilesséparait,ilrepritlaparole.—Tuastoujourssouhaitéêtreprofesseurd’histoire?ThéaarrêtasongesteetvintseremettrefaceàJulien.Elleavaitunlégersourirequiflottaitsurses
lèvres,etsesyeuxétaientsoudainementpluspétillants.Ellefrottasesmainscontresonjean,puislesposadevantelle.
— À la base, je désirais être archéologue. Je voulais voyager et vivre des aventuresextraordinaires.
—UnpeucommeIndianaJones.Théaéclataderire.—Oui,commelui.—Jet’imagineparfaitementavecunchapeauetunfouet.—Cen’estpasl’imagequej’aidelui.—Non,maisc’estassurémentcellequej’auraidetoidèsquejeverraicefilm,maintenant.Théaluifrappal’épaule.—Ettoi,qu’est-cequiteplaîtdanslanature?—Tout.La nature ; c’est la vie. Sans elle, nous ne sommes rien.Elle estmagnifique, douce et
fragile.Ellerecèledestasdesecretsetmetransportequandjesuisencommunionavecelle.—J’ail’impressionquetuparlesd’unefemme.—Oui,cettedescriptionpeutaussis’appliqueràtoi.—Àmoi?s’étonnaThéa.— Tu es magnifique et fragile. Tu es mystérieuse, et tout comme cette belle nature, tu me
transportesquandjeteregarde.Théarestasansvoix.Elleétaitfigée,commesubjuguéepar lesmotsdeJulien.Essayait-ildelui
direquelquechose?Illacontemplaitavectendresse,attendantcertainementqu’elleréponde.Gênée,Théa se leva et continua ce qu’elle était en train de faire quelques instants plus tôt.Mais elle étaitperturbéeparsesparolesquitournaientenboucledanssatête.Julienvenaitdetouchersoncœuretellenesavaitpascommentfairepourlechasser.Sielles’imaginaitdenouveauouvrirlaportedesonâmeàunhomme, ellenepouvaitpas le faire avec lui. Il y avait tropdechosesqui les séparaient.Pourtantcen’étaitpasl’enviequiluienmanquait…
Chapitre5Théaétaitsursoncanapé;elleavaitmisunDVDetpréparéunsaladierdepopcornquiavaitpris
place sur ses genoux. Le générique commença. D’ordinaire, elle aurait plongé dans cet universfantastique,maiselleétaitperturbée.Julienhantaitsespensées.
ElleexpiralentementpourvidersonespritetseconcentrasursonDVD:HarryPotter.Théa avait beau avoir trente-six ans, elle aimait ce genre de films. Elle adorait quitter sa triste
réalitéquotidiennepoursechangerlesidéesetimaginerleschoseslesplusfollesauxcôtésdeceshéros.Ellesursautalorsquelasonnetteretentit.Elleselevasansenvie,enfilasespantouflesenformedevachesetmarchanonchalammentverslaporte.EllefutsurprisededécouvrirJulien.
—Salut.—Quemevauttavisiteàcetteheure?—Mamèreessaiedetejoindredepuisunmoment,maisn’yparvientpas.Elles’inquiète.Jeluiai
doncproposédevenirvoirsitoutallaitbien.Théaattrapasontéléphonedanslapochedesonpeignoirblancdécorédepetitscœursroses.Elley
jetaunœilets’aperçutqu’ilétaitéteint.—Jen’aiplusdebatterie.Tupeuxlarassurer,jemeporteàmerveille.Jeregardetranquillement
HarryPotter.—Àtonâge?s’écriaJulien.—Commentça?réponditThéa,offensée.Sachequecegenredefilms’adresseàunlargepublic.—Situledis!Perso,jen’aijamaisvuundecesépisodes.Pourtant,c’estdemagénération.—Tuplaisantes?—Non.J’aitoujourspréférélanatureàlatélévision.—C’estunsacrilège.Viensdonc,jevaistefairedécouvrircettemerveille.Juliennesefitpasprier.IlentraetsuivitThéadanslesalon.Ils’installasurlecanapépendantque
cettedernièrepartait chercherunebouteilledevinblanc. Il était si charmé, si contentdepasserdutempsavecThéaqu’ilenoubliacepourquoiilétaitvenuet,ducoup,omitcomplètementderassurersamèresurlesortdeThéa.
—Unverre,çatedit?—Avecplaisir.Aprèsavoirservilaboisson,ellerepritsaplaceetsonsaladierdepopcorn.Julienl’observait.Ilrestaitsansvoixdevantsabeauté.Elleétaittellementravissante!Mêmedans
sonpyjamaroseàcarreauxviolets.Ilaimaittoutchezelle:sonvisagefin,sabouchepulpeuse,sesmerveilleuxyeuxverts, ses longscheveuxchâtainet ses seinsvoluptueux. Il était tombéamoureuxd’elleilyavaitdecelaquatreans.Maiselleétaitmariée,àl’époque.IlavaitdoncchoisidepartirauCanada, espérant oublier ses sentiments, mais dès qu’il revenait, ses émotions remontaient à lasurface et il la désirait plus que tout. Et aujourd’hui plus qu’un autre jour, il avait du mal à lescontenir.
Seretrouverseulavecellecesoir lefaisaitvibrer.Etsic’était lemomentdesedéclarer?Maisserait-elleréceptive?Ellen’avaitpasl’aird’avoirappréciésesparolestoutàl’heure.Etilnefallaitpas oublier qu’ils avaient douze ans d’écart. Julien était partagé entre sa raison et son cœur, il nesavaitpascequ’ildevaitfaire.
Théa remarqua le regardde Julienposé sur elle ; elle le fixa avec interrogation. Il sourit et fitminedesemoquerdesonpyjamapourmasquerlesapparences.
—Qu’est-cequisepasse?—C’esttatenuequimeperturbe.J’adoreteschaussons,railla-t-il.Théa saisit l’oreiller qui se trouvait à côté d’elle et le lui balança. Pour répondre, Julien fit de
même;ilripostaunefois,deuxfois,jusqu’àcequ’ilsseretrouventcollésl’unàl’autre.Julienarrêtasongeste,illançal’objetdeleurchamaillerieàterre.Avecforceetdouceur,sesmainsencerclèrentlatailledelajeunefemme.IlpenchasonvisageetThéaredressalesien.Leurslèvresn’étaientplusqu’àquelquescentimètres.
Théaavaitl’envieardentedelesattraper.Ellevoulaitsentirleurchaleur,leurgoût.Ellepassasalanguesursabouchecommepourl’encourager,maisJuliendétournalatête.Ileffleurasonoreillegauche avec son nez pendant que son souffle chaud caressait la nuque de cette dernière. Théapercevaitsondésirs’accroître.Etellefondaitcommelaneigeausoleil.
Julien inspira bruyamment et s’écarta une seconde. Il dévorait son visage des yeux et la fixaitcomme si elle était le plus beau paysage qu’il ait jamais vu. Il sourit affectueusement, ne pouvants’empêcherdevouloirdécouvrirchaqueparcelledesonêtre.Théal’observaitavecenvie,maisellenepouvaits’abandonneràlui.Cen’étaitpaspossible.
—Jesuisdésolée,Julien.Cen’estpaslemoment,j’aitropdesoucisentête.Enplustuimaginessitamèrevientàl’apprendre,ellevametu…
Julien resserra son étreinte pour la calmer, la rassurer. Il la fixa avec des yeux débordantsd’amour. Théa sentit ses jambes trembler. Elle se mordit la lèvre du bas, comme pour éviter desuccomberàsoncharme.
—Ceneserajamaislemoment,rétorqua-t-il.Quantàmamère,jesuisassezgrandpourdéciderdecequiestbonpourmoi.Etcequejedésireplusquetout,c’esttoi.
—Moiaussi,jeteveux,s’entenditrépondrelajeunefemme.Théarestasansvoixfaceàcettedéclaration.Ellenes’étaitpasattendueàuntelretournementde
situation.Commentavait-ellepu lâchercesquelquesmots?Ilsétaientsortissinaturellement!Elletenta de démêler ce flux de sentiments qui se pressaient dans son cœur brisé, et s’aperçut qu’ellebrûlaitdedésirpourlui.Ellen’avait jamaisressentiçadepuislamortdesonmari.Ellenepouvaitpasl’ignorer.
Les doigts du jeune homme passèrent sous la chemise de Théa et virevoltèrent sur sa poitrine.Théafermalespaupièresetlaissalachaleurprendrepossessiondesoncorps.Juliendéboutonnasonpyjamaaveclenteur,puisglissasabouchesursapeaubouillante.
Théasentitsonventresecontracteretdescentainesdefourmillementsenvahirentsesmains,sespieds,sesjambes.Sonsouffleétaitsaccadéetl’airdevenaitdeplusenpluslourd,irrespirable.Julienl’encercladavantage.Théapressasapoitrinecontreluietperçutlesbattementseffrénésdesoncœur.Il battait pour elle, rien que pour elle, et elle ne souhaitait pas que ce moment s’arrête. Bien aucontraire,ellevoulaitplus.Elledésiraitgoûteràsoncorpsetengardertoutelasaveur.Avecforce,elletirasursont-shirtetdécouvritsontorse.Ellepassasesdoigtssurlescontoursdesespectoraux,puislesglissajusqu’àsonpantalonqu’elleluiretira.
JulienselevaetThéal’imita.Ilentrelaçasesmainsdansceuxdesamaîtresseetlapoussaverslemur. Il frottait son sexe contre la jeune femme pendant que leurs langues s’entremêlaient avecpassion.Ledésirlesconsumaitavecardeur,sibienqueJulienrenversaThéasurlecanapéquin’étaitqu’àquelquespasdelà.Illuienlevalerestedesatenue,seplaçaau-dessusd’elleetlapénétraavecdélicatesse.
ThéapromenaitsesdoigtssurledosdeJulien;sapeauétaitsidouce!Ellel’admiraavecenvie.Ilétaittellementbeau.Toussessensétaientenémoi.Desfrissonslaparcouraient.Elleaffichaitunlarge
sourireetsesyeuxbrillaientdemillefeux.Théaavait l’impressionderedécouvrir l’amour;ellefrémissaitdebonheur.Ilétaitsidélicat,si
attentionné. Ilprenait soinde luioffrirduplaisir commepour luimontreràquelpoint il l’aimait.Leurscorpsnustoutensueursemêlèrentdelonguesminutes,faisanttoutoublieràlajeunefemme.Ellenepensaitplusàrienetselivraittoutentièreàsonpartenairequifitdecemomentl’undesplusbeauxdecetteannée.ThéajouitetcelaenchantaJulien.Ilétaitheureux.
Chapitre6Blottiecontre le torsedeJulien,Théaavaitoublié l’espaced’un instant toutes leschaînesqui la
retenaientprisonnièrede sa tristesse.Elle se sentait renaître.Elle avait l’impressiond’êtrevivante,elleavait lasensationd’exister.EllesetournaversJulienetcherchaseslèvres.Il lesluioffritsanshésitationetluicaressalajoue.
Le téléphone de Julien semit à sonner, tirant les deux amants de cet état de bien-être.Le jeunehommeselevaetsaisitsoniPhone.
—Flûte!C’estmamère.Elledoits’inquiéter,jeneluiaipasdonnédetesnouvelles.Ildécrochaetrestasilencieuxunmoment,écoutantlesplaintesd’Ingrid.Théapercevaitlavoixde
sonamie,maisellenepouvaitdirecequ’elleracontaitàJulien.—Jesuisdésolé.J’aioubliédet’appeler.Théavabien.Onseretrouvetoutàl’heure.Ilposasonsmartphoneetrevintverslajeunefemme,unlargesourireauxlèvres.Illuiembrassa
lecou,puislapoitrine,avantdesaisirsont-shirt.—Jedoispartir.Enlevoyantserhabiller,Théafutdenouveaugagnéeparlechagrin.Elleseredressa,attrapason
pyjamaetimitaJulien.Ils’agenouilladevantsamaîtresse.—Jenesupportepasdetesavoirsitriste.Tuestellementplusbellelorsquetusouris.Ilpassasamainsursajoueetellepenchalatête.Cespetitsmots,cesgestesluifaisaientunbien
fou.Elleavaitbesoindelesentendre,besoind’êtreaiméecommeça.Pourquoines’enétait-ellepasrenducompteavant?Maisencetinstant,elleavaitpeurquetoutçanesoitqu’éphémère.Comprenantsonangoisse,Juliententadelarassurer.
—Cen’étaitpasjustel’histoired’unenuit,luisouffla-t-ilàl’oreille.Jeveuxterendreheureuse,Théa.Jesouhaiteconstruirequelquechoseavectoi.
Théarestasansvoix.Commentavait-ilsucequil’ennuyait?Ilétaitsiattentionnéavecellequ’ellesedemandaitsitoutçan’étaitpasunrêve.Était-cepossible?
C’étaitcommeunnouveaudépartpourelle.Pourtant,ellenepouvaitpascontinueraveclui.Ilyavaitbien tropdechosesqui lapoussaientà s’éloigner. Ilétait trop jeuneet le filsdesameilleureamie,quiplusest.IlhabitaitauCanada,etsurtout,elleétaitmaladeetn’étaitpascertainedesurvivre.Il y avait tant de barrières qui se mettaient en travers de cette belle histoire ! Tout commençaitpourtantsibien…
Elle alla se coucher avantmême la finde sonDVD.Elle était épuisée,mais sereinemalgré sesdoutes. Pour la première fois depuis longtemps, elle passa une bonne nuit. Elle se leva touteguillerette avec une nouvelle ligne de conduite à suivre. Cette soirée avec Julien avait étémerveilleuse,etellen’arrivaitpasà lachasserdesonesprit.Ellesentaitencorelesmainsdujeunehommecaressersapoitrineetelleenfrissonnait.Pourtant,ellenevoulaitplusypenser,maisc’étaitplusfortqu’elle.
Elle se vêtit et commença ses activités quotidiennes. Elle était en train de passer l’aspirateurlorsquel’onsonna.Ellearrêtasonappareiletsehâtaverslaporte,espérantdécouvrirsonamantdelaveille.
Pourtant,ellenedevaitpassongeràlui.Leurhistoireétaitimpossible.Elleétaitmalade,etsachanttrès bien lemal que lui avait causé la perte de samoitié, elle ne pouvait pas lui infliger une tellechose. C’est pourquoi elle prit la douloureuse décision de considérer cette incartade comme un
accident de parcours. Elle secoua la tête et se répéta une fois encore que c’était un accident deparcours.
Lorsqu’elleaperçutJulienderrièrelaporte,sonvisages’illuminaetsesyeuxpétillèrentd’envie.C’étaitplusfortqu’elle,elleétaitheureusedelevoir.Qu’est-cequ’ilétaitbeau!Et,enplus,ilétaitàelle!Julienentrasansattendredesefaireinviter.IlfermalaporteetattiraThéacontrelui.Théamitsesmains autourde son cou et frotta le bout de sonnez contre celui de Julien.Encouragépar cetaccueil,ill’embrassaavectendresseavantdepassersesdoigtssursajoue.Ill’étreignitensuiteavecforce,humantleparfumfruitédesescheveux.
Lajeunefemme,complètementbouleverséeparlamyriaded’émotionsquitourbillonnaitdanssatête,sentitsoncœursesoulever.Ellequiavaitpourtantditquecen’étaitqu’unaccidentpritplaisiràrendresonbaiseràJulien.
—Unesortierienquetouslesdeux,est-cequeçatetente?luisouffla-t-ilàl’oreille.—Quoi?Ici,danslevillage?réponditThéaenseraidissant.—Biensûrquenon,jemedoutequec’esttroptôtpourtoi.Jet’emmèneenville.—Etsil’onrencontrequelqu’unquel’onconnaît?—Jepeuxt’assurerquelàoùonva,tuneverraspersonnedenotreentourage.Théafronçalessourcilsetplissalefront.Sielleétaitheureusedecetteopportunité,ellenepouvait
s’empêcherd’avoirpeur.Et cepourplusieurs raisons.Toutd’abord, lanuitdernièredevait être laseule;sortiravecJuliencejourvoulaitdirequ’ellecommençaitunenouvellerelation.Etsielleenavait terriblementenvie,celal’effrayaitbienplusencore.Ensuite, leurdifférenced’âgel’inquiétait.Elleredoutaitplusquetoutlaréactiondesameilleureamie.
Julien resserraunpeuplussonétreinte. Il soulevasescheveuxet luiparsema lecoudebaisers.Théapenchala tête ; lesyeuxfermés,ellesedélectaitdeses tendrescaresses.Commec’étaitbon!Prise d’une envie soudaine de le tirer dans sa chambre et demêler leurs corps pour ne faire plusqu’un,Théalerepoussadoucementetfinitparaccepter.Siellel’avaitlaissécontinuer,ellen’auraitplusétémaîtressedesesactes.
—Ilmefautquelquesminutespourmepréparer.—Tuestrèsbiencommeça.Théaluisourit,puiselledisparutdans lasalledebain.Ellesepassaunpeud’eausur levisage,
attrapa une crème et l’appliqua avant d’attacher ses cheveux en un chignon grossier. Puis ellerejoignitJulien.
—Tuasraison,seraillalejeunehomme.Là,çachangetout.—Serais-tuentraindetemoquerdemoi?Ill’attiradenouveaucontrelui.—Tuesmagnifique,Théa.Peuimportecequetuportesoucommenttutecoiffes.Pourmoi,tues
laplusbelle.—Tun’esqu’unvilflatteur.—Oui,jesais.Théa chercha ses lèvres et l’embrassa avant d’ouvrir la porte et de le tirer dehors.Après trois
quartsd’heurederoute,lesdeuxamantsarrivèrentenfinàdestination.Théaregardal’environnementquil’entouraitetfutsoulagéedevoirunlieupeufréquenté.
—Oùsommes-nous?luidemanda-t-elle.—Aujardinbotanique.Jesouhaitetemontrermonunivers.Théaauraitputrouvercettesortiebizarre,maislorsquel’onconsidéraitqueJulienétaitbotaniste
cela s’avérait plus que naturel. Elle le suivit donc avec ravissement, heureuse qu’il ait envie departagerçaavecelle.Théaétaitauxanges,ellepassaitunmomentagréable.Etsielleavaitessayédeseconvaincrequecequis’étaitpasséentreeuxn’étaitrien,désormais,elleétaitcertaineducontraire.
Enplusdecetteattirancephysiquequ’ilopéraitsurelle,lajeunefemmeavaitdessentimentspourlui,etelleétaitmaintenantsûrequec’étaitréciproque.Maiscommentallait-ellefairepoursedépêtrerdecettesituation?Saraisonluidictaitd’êtreprudente,denepasselaisserembarquer,maissoncœurluidisaittoutlecontraire.Etencetinstant,ellen’écoutaitquesoncœur.
Julien l’emmena à travers les allées, lui expliquant avec passion chaque particularité de cesénormesvégétauxquilesdominaient.Théaétaitsubjuguéeparlesparolesdesoncompagnon.Ellenesaisissait pas toujours tout ce qu’il racontait, mais elle trouvait ça fascinant et commençait àcomprendre pourquoi il aimait autant la nature. Il mettait une si grande conviction dans ce qu’ildisait!
Elles’arrêtasoudainementet le tiracontreelle.Julienposasespaumessursonvisageet lafixaavec tendresse.Théa contempla les yeuxbleus de son compagnon, ils étaient d’un bleu aussi clairqu’uneeautranslucide.Elleyplongeasansaucunehésitation,sedélectantdel’amouretdelachaleurqu’elleydécelait.Julienglissasamainsoussont-shirteteffleuralesseinsdelajeunefemme.Théafrémit,commeàchaquefoisqu’illatouchait.Soudain,sondésirseréveilla.Elleluifrôlalajoueduboutdunez.Ellearrêtasongesteetledévisageaavecenvie.Ellesuivitdesyeuxlalignedesabouche,desoncou,desontorse....Maisqu’est-cequiluiprenait?Ilsétaientdansunlieupublic.Elleessayadepenseràautrechose,maisseull’appelducorpsdesoncompagnonemplissaitsonesprit.
Julien,quisentaitsapartenairefrémirdedésir,mitfinàleurvisite.Ilsmontèrentdanslavoitureetillaconduisitdanslesbois.Àpeineétait-ilsortiduvéhiculequeThéafondaitsurlui.Onauraitditunanimalenchaleur.Elleembrassasauvagementlejeunehommeetcommençaàluidéboutonnersonpantalon.Julienarrêtasongeste.
—Non,pascommeça.Tuméritesbienmieux.Ilsedirigeaverslecoffreetensortitunecouverture.Ill’étalasurlesolàquelquesmètresdelà,
puiscueillitquelquesfleursqu’il jetaautour.Enfin,ilsetournaversThéaetlaportadanssesbras.L’intensitéduregarddecedernierfitchavirerlajeunefemme.Elleenfrémitavantd’enfouirsatêtedanssoncouetdedévorersapeauavecdouceur.
Julienladéposasurlacouvertureetattrapasonmentonavecdélicatesse.—Tuesmagnifique.—Embrasse-moi.Ilplaçasamainsurleflancdesacompagneetlatiracontreluiafinqueleurscorpssetouchent.
Théapassasesbrasautourdesanuqueetl’embrassaencoreetencore.Ellenesouhaitaitpasqueças’arrête.Elleavaitbesoindececontact,besoindesentirlachaleurquilesconsumait.Juliens’écartauninstant;ilfrôlalajouedecettedernièreavecseslèvresavantquesonsoufflebrûlantn’effleuresoncou.
—Jedésireterendreheureuse,luimurmura-t-ildanslecreuxdel’oreille.Illabasculasurlacouvertureetsepenchaau-dessusd’elle,admirantchacunedesescourbes.Elle
étaitsibelle,siattirante!Puis,avecdélicatesse,illuiôtasesvêtementspourseconfondreavecelle.Commec’étaitbondesesavoiraimée!Commec’étaitbondevibrer !Théaétaitaucombledu
bonheur et elle n’avait plus aucune envie de le quitter. Elle avait trouvé son âme sœur et avaitl’impressiond’être incomplètesans lui.Jamaisellen’avaitressenticela,mêmeavecsonmari.Ellesoupira lentement, remerciant le ciel de cette soirée passée avec lui. Il avait suffi d’une nuit pourchangerlecoursdesavie.
Chapitre7Théaétaitauxanges.Elleavaitvéculesdeuxjourslesplusmerveilleuxdesavie.Deboutdevantle
miroir de la salle de bain, elle fixait son reflet avec un léger sourire. Elle était heureuse commejamais. Si auparavant le chagrin guidait ses actes, aujourd’hui, elle l’avait chassé. L’espoir l’avaitprisedanssesbras.Decefait,Théaosaitimaginerunavenirmeilleuretcelaluidonnaitl’enviedesebattre.
Cesmoments passés avec Julien lui avaient ouvert les yeux sur beaucoup de choses. Elle étaitcertesmalade,maiselleétaittoujourslà,etplusvivantequejamais.Ilétaithorsdequestionqu’elles’apitoiedenouveausursontristesort.Lavieétaitdureavecelle,ehbienqu’àcelanetienne,elleallaitluirireaunez,luiprouverquemalgrélesépreuves,elleétaitforte.
Elle secoua la tête devant son reflet. Elle avait passé cette dernière année à se morfondre, àdéprimer et se replier sur elle-même. Si Fabien la regardait d’en haut, il devait être bien triste. Iln’aurait jamaisvoulu lavoirdansun telétat. Il luidisaitsouventque lavieétaituncadeauetqu’ilfallaitenprofiter.Ellecomprenaitdésormaislesensdecettephrase.
Elles’aspergea levisageavecde l’eauet filadanssachambre.Plantéedevantsonarmoire,ellerestalàdurantunlongmoment.Ellenetrouvaitrienàmettre.Ellepritdoncunjeanetunt-shirtauhasard,etsehâtad’allerenville.Ilétaittempsqu’ellerenouvellesagarde-robe.Elleavaitbesoindesesentirjolieetdeplaire.Audiablecettefichuemaladie!Julienavaitfaitrenaîtrequelquechoseenelle.
Après avoir passé lamatinée au centre commercial, elle fila chez le coiffeur.Elle rentra et eutenvied’appelerJulien.Ellesaisitletéléphone,maislereposarapidement.D’unepart,ellen’avaitpassonnuméro,etd’autrepart,était-cevraimentraisonnable?
«C’étaitunaccidentdeparcours!»lança-t-ellepourelle-mêmesansenpenserlemoindremot.Ellerépétacettephraseenboucle,espérantoublierlessentimentsquicommençaientànaître.Au
boutdelonguesminutes,ellerepritsoniPhone;cettefois,elleappelaIngrid.—Salut,Ingrid.Dis-moi,pourrais-tuveniràlamaison?J’aibesoindeteparler.—Est-cequetoutvabien?—Oui,net’inquiètepas.Cen’estriendegrave.—Trèsbien.Danscecas,jeserailàdansunedemi-heure.Théaenprofitapoursechanger.Elleenfilaunepetiterobecintréedecouleurchocolatquimettait
sasilhouetteélancéeenvaleur.Puisellesemaquilla.Ingridtintparoleetseprésentachezsonamiepeudetempsaprès.Lorsquecelle-ciouvritlaporte,Ingridrestabouchebéedevantlajeunefemme.Maisques’était-ilpassé?Levisageilluminéparcettetransformation,elleentraetl’enlaça.
—Tuesmagnifique ! J’ai eubiendumal à te reconnaître.Sur le coup, j’ai cruque jem’étaistrompéedemaison.
Théasourit,heureusedelaréactiond’Ingrid.Ellen’enattendaitpasmoinsd’elle.Cettedernièrefittournerlajeunefemmesurelle-mêmeetlaregardasoustouteslescoutures.Ellen’enrevenaitpasdecettetransformation.Finislesjeanslargesetlest-shirtstropgrands,Théaétaitinfinimentféminineetd’une élégance à couper le souffle. Ingrid avait l’impression de la revoir dix ans en arrière,lorsqu’ellel’avaitrencontrée.
— J’ai décidé de reprendre ma vie enmain. Je ne peux pas laisser la mort de Fabien et cettemaladiemegâcherletempsqu’ilmeresteàpasserici.Pourquoipleureretm’apitoyersurmonsort?
Tusais,j’aibeaucoupréfléchi,etsic’estmonheure,alorsjedoisenprofiter.Jeneveuxpasquemesproches,etsurtoutmonfils,gardentdemoil’imaged’uneloque.Jevaismebattrejusqu’auboutetfairebonnefigure.C’estcequej’auraisdûfaireàlamortdeFabien.
—J’aimetevoircommeça.Jeretrouvelapersonnecombativequetuétais!Théalatirajusquedanssachambreetluimontratoutessesemplettes.Celapritpresqueuneheure.
Lajeunefemmeétaitauxanges,lanuitqu’elleavaitpasséeavecJulienetlajournéed’hierluiavaientouvertlesyeux.
EllediscutalonguementavecIngriddesesnouveauxchoix,etsonamienesutquerépondre.Elletentadelaquestionnersurcerevirementsoudain,maisThéarestamuette.Intriguée,Ingridlafixaitavecinterrogation.Elleremarquaquelatristesseavaitquittésonvisage.Àlaplace,iln’yavaitplusqu’une chaleureuse lueur. Son regard vert était pétillant et débordant d’envie de vivre. Ingrid n’ycomprenait rien, mais elle n’insista pas. Le principal pour elle, c’était que Théa se sente bien etqu’ellesebatte.
—Çateditdesortircesoir?luidemandaThéa—Pouralleroù?—Enboîtedenuit.Onm’adonnéunprospectusaucentrecommercialtoutàl’heure,etj’aibien
enviedem’yrendre.Celafaitlongtempsquejenemesuispasamusée.EtpuisqueBastienn’estpaslà,autantquej’enprofite!
ElleletenditàIngridquilelutavecsérieux.Cetteboîteétaitl’endroitàlamodedumoment.Biensouvent,elleavaittentéd’ytraînerThéa,maiscettedernièreavaittoujoursrefusé.
—Onseretrouvedansdeuxheures.Jepassetechercher.Onseferaunrestoavant.Ingridselevaetsedirigeaverslasortieavecunlargesourireauxlèvres.Ellefranchitlaporte,
maiss’arrêtabrusquementavantdeseretournerversThéa.—Jenesaispascequi t’a ragaillardieainsi,mais j’ensuisheureuse. Je retrouvemonamie,et
pourtouttedire,tum’asbeaucoupmanqué.Ellerentrachezelle,contente,maisintriguée.Qu’est-cequiavaitdéclenchécechangement?Elle
chercha une raison possible,mais ne trouvant rien de plausible, elle n’y pensa plus. Le principal,c’était ce résultat surprenant. Ingrid monta dans sa chambre et retourna toute son armoire pourdénicherlarobequ’illuifallait.Ellesefrappalatêteensongeantqu’ellel’avaitmisedanslapenderiedesonfils.Elleycourutensous-vêtements,espérantqu’ilnesoitpaslà.Elleouvritlaporteettrouvalapiècedéserte.Elleenprofitapourprendresatenueetl’enfileravantdepasseràlasalledebain.
Unefoisprête,elledescenditàlacuisineettombasursonfilsquimangeaituncasse-croûte.—Disdonc,tuesravissante,maman!Tusors?—Oui,jevaisaurestaurant,puisenboîteavecThéa.Julien,quiétaitavachisurunechaise,seredressasoudainementenentendant leprénomdecelle
qui faisait vibrer soncœur. Il se levaet s’approchade samère, faisantminede se servirunverred’eau.
—Puis-jemejoindreàvous?—Pardon?s’écriaIngrid.Ilmesemblaitquelesboîtesdenuitn’étaientpastatassedethé.—C’estvrai,maisj’aibesoindem’amuserunpeu.Ingridfronçalessourcils,hésitante.Ellen’avaitpasforcémentenviedesortiravecsonfils,mais
elle était heureuse de voir qu’il voulait se changer les idées. Ingrid n’avait pas cru à son retoursurprise, elle connaissait si bien Julien qu’elle savait qu’il n’était pas revenu pour lui fairesimplementplaisir.Auboutd’unelonguediscussion,ilenétaitvenuàluiavouerqu’ilavaitquittéleCanadasuiteà sa ruptureavecsacopine. Il s’était enfermédeux joursdans sachambre,puis,d’uncoup,satristesses’étaitévaporéepourlaisserplaceàunjeunehommeplusserein,plusheureux.Elle
ne savait pas ce qui s’était passé, mais elle était contente de ce changement, c’est pourquoi elleaccepta.Théan’yverraitsansdouteaucuneobjection.
Chapitre8Ingridpassauncoupdefilavantdepartir,puisellemontadanslavoituredesonfils.Cedernier
s’arrêtadevantchezThéa.Ilenlevasaceintureetproposaàsamèredenepasbouger.Ilavaitunlargesourireauxlèvres,etsesyeuxbleuspétillaientdebonheuràl’idéederevoirsabelle.Ilsonnaetlaportes’ouvrit.LesouffleluimanquaendécouvrantThéa.Elleétaitresplendissante.
—Qu’est-cequetufaislà?luidemanda-t-ellesurprise.—Jesuisvenutechercher.—Jesuisnavrée,maisjesorsdéjàavectamère.—Jesais,jevousaccompagne.Théa contempla le jeune homme, sans unmot.Qu’il était beau dans sa chemise blanche et son
pantalon noir ! Son cœur semit à battre plus fort et sesmains devinrentmoites. Julien lui fit unsouriredoux,etellesentitsesjambesflageoler.C’étaitterriblel’effetqu’ilavaitsurelle.
Julienlapoussaàl’intérieuretfermalaporte.Ilcollasontorsecontresapoitrineetl’embrassatendrement.Théaneputrésisteràsonbaiseretpassasesbrasautourducoudujeunehomme,commepourl’encourager.
Leklaxond’unevoitureretentit,lesforçantàmettrefinàleurétreinte.—Jecroisquemamères’impatiente.—J’aimeraisquetufassescommesiderienn’étaitcesoir.Jeneveuxpasqu’Ingridl’apprenne.
C’esttroptôt.Nousignoronsnous-mêmesoùnousallons.—Trèsbien.Maiscelaneserapasfacile.J’aitellementenviedetetoucheretdet’embrasser…—Tudevrastecontrôler.Elleluivolaunbaiseretlepoussadehorsafindenepassuccomberàlatentationquilaconsumait.
Ellenecomprenaitpasl’attractionquecejeunehommeavaitsurelle.Pourquoimaintenant?Elleleconnaissaitpourtantdepuissi longtemps…Elleavaitespéréqu’ellen’éprouvaitrienpour lui,maispluslesjoursdéfilaientetpluselletombaitamoureusedelui.Elleleregardarepartirdanslavoitureet ferma sa porte à clé. Un large sourire se dessina sur ses lèvres. Cette sensation était tellementinattendue qu’elle s’en réjouissait. Elle savaitmaintenant que c’était pour lui si elle avait passé lajournéedanslesmagasins,ellevoulaitluiplaire.
Elle rejoignit le véhicule et retrouva Ingrid qui s’impatientait. Elle avait eu peur que son amiechanged’avis.
—Tuasétébienlongue.J’aicruqueturenonçaisànotresortie!—Ilfallaitquejevérifiemonmaquillage.—Jetetrouvebiencoquette.Comptes-tuenfinmettrefinàtoncélibat?—J’ysongeeffectivement.Maisnemettonspaslacharrueavantlesbœufs,tuveux!Commençons
parcettesoiréeetnousverronsaprès.Théa jeta un œil dans le rétroviseur central. Elle croisa les yeux de son amant et lui lança un
regard enflammé. Oui, c’était bien à lui qu’elle pensait lorsqu’elle avait parlé à Ingrid. Julien luisouritetdémarralavoiture.
Aprèsunpeuplusd’unedemi-heuredetrajet,ilsarrivèrentaurestaurant.Àpeineavaient-ilsmislepiedhorsduvéhiculequ’unhommeleurtombadessus.
—Bonsoirmesdames,lança-t-ilpoliment.—Maxime,s’étonnaThéa.Quellebonnesurprise!
Théa fit les gros yeux à Ingrid, comprenant que c’était elle qui l’avait convié à leur soirée.Lajeune femme inquiète jeta un œil discret vers Julien qui, comme elle s’y attendait, n’était guèreenchanté de cette présence. Il allait être dur pour lui de se contenir et de rester serein devant lestentativesdeséductiondeMaxime.Théaétaitàlui,etiln’étaitpasprêtàlapartager.
MaximeseplaçaàcôtédeThéa,etJuliendutsecontenterdes’installerenfacedesonrival.Lesdentsserrées,ilneditpasunmotdetoutlerepasetécoutaleprofesseurdelittératureparler.Samèresemblaitcaptivéedevantlediscoursdecethomme,contrairementàThéa,quicherchaitàdétournerlaconversation,envain.Lorsqu’ileutfini,ilsemitàfairelacouràlajeunefemme.C’étaitgrossierettout à fait déplacé. Cela agaçait sérieusement Julien, qui, ne supportant plus de l’entendrecomplimenter sa maîtresse, quitta la salle pour s’aérer. Théa aurait aimé le rejoindre. Elle auraitvoulu le prendre dans ses bras pour le rassurer, mais elle n’en fit rien. Elle avait bien trop peurqu’Ingridcomprennecequ’ilsepassaitentreeux.Ellechoisitdoncuneautre tactiqueetsemontraréceptiveauxavancesduprofesseur,sanstoutefoisl’encourager.
LasoiréecontinuaàlaDansedesanges,laboîtedenuitàlamodeoùilfallaitêtre.Théadécouvrituneambiancefeutrée.Deslumièresbleueséclairaientàpeinelasalle,desdizainesdesiègesétaientéparpillésautourdelapisteoùquelquespersonnessedéhanchaientdéjà.
MaximeattrapalamaindeThéaetlatiraversunebanquettelibre.IngridetJulienlessuivirentensilence.Sil’unavaitunlargesourireenvoyantcespectacle,l’autre,enrevanche,étaittrèsirrité.Ilauraittantaimémettresonpoingdanslevisagedecetabruti.Ils’installaenfacedeThéaetlafixaavecmécontentement.Lajeunefemme,quiavaitremarquésonagacement,nepouvaitrienfairepourapaiserlacolèrequisemblaitconsumersonamant.
Aprèsavoirpartagéplusieursverres,Ingridseretrouvainvitéeparunbeaublond,etMaximeenprofita pour attirer Théa sur la piste de danse pour un slow. Il se colla contre elle, un peu trop,même!Théasentaitsonsoufflechaudsursoncoudénudé,etelleavaitpeurqu’il l’embrasse.Queferait-elle?Elledevaitluifairecomprendrequecen’étaitpaspossible.Maiscommentlerepoussergentiment ? Sans compter que ce dernier était assez dur à la détente et que ses intentions étaientclaires. Comprendrait-il seulement les intentions de Théa ? Elle se retrouvait dans une drôle desituation pour sa première sortie. Maxime glissa ses mains juste au niveau des reins de la jeunefemmeet,parchance,n’allapasplusloin.
CegesteétaitdetroppourJulien;ilselevaetquittalasallelorsqu’unebelledemoisellel’invitaàdanser.Ilvoulutrefuser,maisfinitparaccepter.Aprèstout,luiaussiavaitledroitdes’amuser,sanscompterqueThéanesemblaitpassesoucierdelui…Lajeunefillesemontraitplutôtentreprenante,elleavaitglissélesmainssouslachemisedeJulienetluicaressaitletorsesansaucunegêne.LorsqueThéa les aperçut ensemble, son souffle se coupa et ses jambes se dérobèrent. Heureusement queMaximelatenaitfermement,sinon,elleauraitputomber.
—Jesuisnavrée,Maxime,mais jenemesenspasbien.Pourrions-nousretournernousasseoir,s’ilvousplaît?
—Biensûr!Théas’installasurunfauteuilbleunuit.Ellesaisitsonverredevodkaetlebutd’uneseuletraite,
avantd’enrecommanderunsecondquineduraquequelquessecondesdeplusquel’autre.Irritée,elleregardaitJulienetcettepetitebrunequinelelâchaitplus.Julienavaitl’airsatisfait.Ilnequittaitplussa partenaire des yeux et semblait rentrer dans le jeu de séduction de la jeune fille. Théa eut unénormepincementaucœuret,toutàcoup,elleeutenviedepleurer.
Ingridarrivacouvertedesueur;ellepritsonverreetenbutunegorgéeavantderemarquerlatêtedeThéa.Elles’assituninstanttoutenfaisantsigneàl’hommeaveclequelelledansaitqu’elleallaitrevenir.
—Quesepasse-t-il?demandaIngrid.
Théadétournaleregardverssonamie.Ellerestaunmomentsansvoix,nesachantquerépondre,puiselleprofitadecetteoccasionpourannoncersondépart.
—Jenesenspastrèsbien.Jen’auraispasdûboireautant.Jevaisrentrer.—Attends,Julienvateraccompagner!—Non,laisse-le,ilal’airdebiens’amuser.Maximeseraravides’encharger.—Biensûr,ditleprofesseurheureuxdeseretrouverseulaveclajeunefemme.—Veux-tuquejevienneavectoi?proposaIngrid.—Inutile.Reste,jevoisquetuasfaitmouche.Ingridsourit.ElleembrassaThéaetrejoignitsonpartenaire.Maximeselevaalorsetlaconduisità
savoiture.Enbongentleman,illuiouvritlaportièreetlareferma.Puisilsemitauvolant.Quelquesminutesplustard,ils’arrêtadevantchezThéaetlasuivitjusqu’àsaporte.Ilsdiscutèrentuntrèstrèslong moment avant que ce monsieur comprenne que Théa ne souhaitait pas l’inviter à boire undernierverre.
—Mercipourcettesoirée.—C’estmoiquiteremercie,Maxime.Cefuttrèsagréable.Théa n’eut pas le temps de finir sa phrase que celui-ci l’embrassait. Prise au dépourvu, elle le
laissafaire,maisnetrouvaaucungoûtàcebaiser.Par politesse, elle attendit queMaxime se recule avant de faire quoi que ce soit et se pressa de
rentrerchezelle.Ill’arrêtatoutefoispourluidemanders’ilpouvaitutilisersestoilettesavantderepartir.Lajeune
femmeaccepta,n’arrivantpasàluirefusercettefaveur,puis,unefoisqu’ileutfini,ellesehâtadelemettredehors.Elleavaitbientroppeurqu’ilveuillepasserlanuitavecelle.
Ledos appuyé contre saporte, elle sentit les larmes rouler sur ses joues en songeant à Julien.Était-ilencoreaveccettefille?Ilavaitl’aird’apprécierlesmainsdecettedébauchéesoussachemise.Théa se traîna jusqu’à son lit, uneboule auventre.Tout avait pourtantbiencommencé.Elle savaitqu’ellen’auraitpasdûselaisserporterparcettesoudainevaguedesentiments.Celaétaittropbeau.
Chapitre9Théa se leva enmilieu dematinée, l’estomac tout retourné.Elle avait abusé de la vodka et elle
ressentaitseseffets.Elleétaitvaseuseetavait leslèvressèches.Ellemarchajusqu’àlacuisineetseservitunverred’eau.Ellesaisituncachetd’ibuprofèneetl’avalaavantd’ouvrirsesvolets.
EllefutétonnéedevoirlavoituredeJuliendevantsaporte.Cedernierattendaitbiensagementàl’intérieur.Illafixaunmoment,avecunregardsombrequiladéstabilisa,puisilsortitduvéhicule.Théa ferma sa fenêtre et se rendit dehors. Il entra sansmême lui adresser unmot, un geste. Ellel’invitadans lacuisineet il la suivit.Théaétaitperturbéepar sa réaction.Elle sedoutaitbienqu’iln’étaitpascontentàcausedeleursoiréedelaveille.
Ilss’installèrentdansunsilencelourd.Théanesavaitpascommentaborderlesujet.Etaulieudel’évoquer,elleattenditqueJulienouvre labouche,mais il semblaitavoirperdu laparole.Ellepritdoncsurelleettentad’entamerlaconversation
—Désires-tuquelquechoseàboire?luiproposa-t-elle.—Non,merci.Savoixétaitdure,presqueblessante,unpeucommes’illuienvoulait,maisellenecomprenaitpas
pourquoi.Ellen’avaitrienfaitdemal.Elleauraitaiméluiprendrelamain,maisillaretira.Surprise,Théanesavaitpluscommentréagir.Qu’avait-ellefait?
—Qu’est-cequisepasse?—Jet’aivuhier,continua-t-ilsurlemêmeton.—Dequoiparles-tu?—Tul’asembrassé.Jepensaispourtantquetuvoulaisêtreavecmoi.—Tuétaislà?s’écria-t-elle,embarrassée.—Oui,lorsquemamanm’aditquetunetesentaispastrèsbien,jemesuisinquiété.Jesuisdonc
rentré.Quandjesuisarrivédevantcheztoi,tuétaisdanslesbrasdecetype.—Jenel’aipasembrassé,c’estlui…—Maistunel’aspasrepoussé.—Parpolitesse,c’esttout.—C’estparpolitessequetul’asfaitrentrercheztoi?—Ilnes’estrienpassé.—Ça,c’estcequetudis…Théasentitlacolèreluimonteraunez.Commentosait-ilmettreendoutesaparole?Ellen’avait
rienfaitdemal.Elles’étaitjustemontréegentille.Voilà,celaluiapprendrait!Etlui?Iln’avaitpashésité à se frotter à une fille devant ses yeux. Comment pouvait-il se permettre de lui faire desreproches?
—Jecroisquetuesmalplacépourm’envouloir.Tut’eslaissétripoterdurantdelonguesminutesparuneinconnue.Tupensesàcequej’aipuressentir?
—Jel’aifaituniquementparcequejenesupportaisplusdetevoircolléeàMaxime.—Ce n’est pas un jeu, Julien. C’est sérieux. Et je refuse que tu m’entraînes dans ce genre de
relationchaotique.Jecroisqu’ilvautmieuxqu’onarrêteavantd’allertroploin.Juliennerépliquapas;ilselevaetquittalamaisonsansunmot.Ilfitclaquerlaported’entréeet
crisserlespneusdesavoiturecommepourluimontreràquelpointilluienvoulait.Ilétaittellement
en colère ! Théa se frotta les yeux. Elle plaça son visage dans ses mains et pleura de nouveau.Pourquoicelafaisait-ilsimal?
Théarestadelonguesheuressansbouger.Ellerepassaitcettehorribleconversationenboucledansson esprit. Comment cela avait-il pu prendre une telle tournure ? Tout avait pourtant si biencommencé, etvoilàqu’àcaused’une soirée, tout était terminé.Elle secoua la tête, commepour seconvaincre que tout ça n’était qu’un rêve. Julien allait revenir vers elle et tout serait oublié.Malheureusement, ce ne fut pas le cas. Son cœur se plomba et elle eut l’impression de perdre saraisondevivre.
Son téléphone sonna. Elle l’attrapa avec hâte, espérant avoir son amant à l’autre bout. Maislorsqu’ellevitlenuméro,ellereconnutceluideCaroline.Elleinspiraungrandcouppourchassercequilaperturbaitetréponditd’unevoixclaire.
—Allo.—Allo,maman?Ellesesentitbeaucoupmieuxenentendantsonfils.—Coucou,macrevette.Commentsepassenttesvacances?—C’estsuper.Jesuisdansunepetitemaisonetjevaisàlamertouslesjoursavectataettonton.Elle discuta de longuesminutes avecBastien et retrouva son entrain. Il luimanquait beaucoup,
maissavoirqu’ilétaitheureux,laremplissaitdejoie.IldonnaensuitelecombinéàCaroline.—Bonjour,Théa.Commentvas-tu?—Bien,net’inquiètepas.JevoisqueBastienestcontent.—Oui,ils’amusecommeunfou.Celaluifaitbeaucoupdebien.—Tantmieux.—Ettoi,commentoccupes-tutesjournées?—Commetoutlemonde,réponditThéa.J’aifaitdushoping,jemesuiscoupélescheveux…—Non?s’exclamaCaroline,surprise.C’estsuper!Qu’est-cequit’arrive?—Jemesuisrenducomptequ’ilétaittempsquejereprennemavieenmain.—Etquenousvautcechangement?—Rienenparticulier.—Ehbien,jesuiscontentepourtoi.Bon,jetelaisse.Nousallonsàlaplage;lespetitstrépignent
d’impatience.Onterappelleraplustard.—Pasdesoucis.Théaavaitàpeineraccrochéqu’elleavaitunenouvellevisite.Ingridvenaits’enquérirdel’étatde
cettedernière.Elleétaitinquiète.Elleavaitbiensentiquesonamieavaitfuilasoiréed’hier,maisellenecomprenaitpaspourquoi.Théal’invitaàboireuncafé,etIngridremarquaquelesyeuxdelajeunefemmenebrillaientpluscommelaveille.Elle tentade l’interroger,maisThéarestamuette.Têtue,Ingridnebaissapaslesbraspourautant,ellecontinuajusqu’àlafairecéder.
—J’airencontréunhomme,ilyapeu.—Ah !Ehbien, je comprendsmieux cenouvel engouement.Pourquoi nem’as-tu riendit ? Je
n’auraispasconviéMaximehier,sij’avaissu.Parle-moidelui.Commentest-il?Théasouritenpensantàl’imagedesonamant.— Il estmerveilleux, répondit-elle le visage resplendissant. Il est beau,musclé, attentionné. Ses
mots,sescaressesmefontvibrer.Quandjepenseàlui,jesensledésirgrandirenmoietletempsestcommesuspendu.
Ingriddévisageasonamieavecbonheur.Ilyavaitunsacrémomentqu’ellenel’avaitpasvueainsi.Ellerayonnaitdejoierienqu’enparlantdelui.
—Tuesamoureuse!s’exclamaIngrid.—Non,celanefaitquequelquesjours.
—Lessignesnetrompentpas,mabelle.Jelesensbienlorsquetumeledécris.Quand,oùl’as-turencontré?Etpourquoinepasmel’avoirdit?
Théa baissa la tête vers sa tasse. D’un coup de souffle, elle chassa la fumée qui s’élevaitparesseusementdesatasse.
—Qu’est-cequisepasse?demandaIngrid.—J’aimisfinàcetterelation.IngridobservaThéaetremarqualatristessequitoutàcoupremplissaitsonregard.Lalumièrequi
avaitilluminélesirisdeThéas’éteignitetsesyeuxseretrouvèrentnoyésdelarmes.—Pourquoias-tufaitça?—C’estcompliqué!Jesuismaladeetjenepensepasquecesoitlebonmomentpourentamerune
vieàdeux.Enplus,ilestbeaucoupplusjeunequemoi.—Combien?—Plusdedixans.—Ahoui,quandmême!Ingridsetut,cherchantlesmotsquipourraientréconfortersonamie.Elleposasesmainssurles
siennesetlesserraavecforce.Sijusque-làellel’avaittoujourssoutenue,refusantdelabousculer,àcetinstant,elleoptapouruneautretactique.Ellenepouvaitpaslalaissertoutplaqueretrisquerdetomberdenouveaudansladépression.Elleparaissaitsicombléequelquesjoursplustôt…
—Écoute,Théa.Celafaisaitlongtempsquejenet’avaispasvuesiheureuse.Turespiraislajoiedevivre.Tun’auraispasdûtoutarrêterpourça.Cenesontquedesexcusespourfuirlebonheur.Tuasbesoind’amouretdesoutien.Jetrouveaucontrairequec’étaitlebonmoment.Jepensequetuasfaitunegrosseerreur.
Théaexpira lentement.Ellese frotta levisage,nesachantpluscequ’elledevait faire. Jusque-là,Ingridallaittoujoursdanssonsens,maiscettefois,c’étaitdifférent.Cependant,c’étaitpoursonbien.
—Tupeuxrecollerlesmorceaux.Jesensquetuenasenvie.—Jenesuispascertainequecesoitbien.—Maistun’attendsqueça!Appelle!Théarestalàsansbouger.Elleenavaitvraimentledésir,maisquelquechoselaretenait—Ets’ilnelevoulaitpas?—S’ilt’aime,iln’hésiterapas.—Tuarrivestoujoursàmeréconforter,Ingrid.J’aidelachancedet’avoirauprèsdemoi.—Oui,eneffet.Tuvasdoncl’appeler?—Jenesaispas.J’aibesoindetempspourréfléchir.—Maistuenmeursd’envie.—Cequejeteproposec’estdeveniravecmoichoisirdenouvellespeinturespourrafraîchirma
décod’intérieur.Après,jeverrai.—C’estunbondébut.Dis,tumeleprésenteras?—Lemomentvenu.
Chapitre10Théaauraitvouluécouterleconseild’Ingrid,maisellen’arrivaitpasàprendreletéléphonepour
appeler Julien.Pourtant, il luimanquait terriblement.Sans lui, elle se sentait incomplète.Elle avaitconscience qu’elle s’était emportée pour rien et, du coup, elle regrettait ses paroles. Elle n’auraitjamaisdûlemettreàlaporte.Elleavaittellementbesoindesesbras,desescaresses,delui…Maisellenepouvaitpasluifairelapromessed’unerelationàlongterme,ellenesavaitpaselle-mêmeoùlamaladieallaitlamener.
ElleexpiradoucementpourchasserJuliendesespensées,maisrienn’yparvenait.D’ungestelentet sans aucun entrain, elle peignait lesmurs de sa chambre. Elle n’avait pas changé la décorationdepuisqu’elleavaitfaitconstruiresamaisonavecsonmari.Aujourd’hui,elleserendaitcomptequ’ilétaittempsdetournerlapage,etellesouhaitaittantlefaireavecJulien!
Quelqu’unfrappaàlaporte.Croyantquec’étaitIngrid,Théanebougeapasdesonescabeau.Ellecontinuadepasserlerouleau.Ellesegrattalefrontaveclepoignetetsemitunpeudepeinture.
—Flûte,lança-t-elle.Ellesefrottaavecunchiffon,maisneréussitqu’àl’étalersursapeau.Uncouinementretentitet
Théaperçutlaprésencedesonamiederrièreelle.—Tuviensenfinm’aider!Ilesttemps,ilmeresteplusquecettepièce.Ingridneréponditpas.Intriguée,Théaposasonrouleauetseretourna.Sonsangsefigeadevant
Julien.Sansunmot,elledescenditlestroismarchesquilesséparaientetluifitface.Elleauraitvoulului sauterdans lesbras,mais il avait levisage ferméet lesmainsdans lespoches.Théa sentit soncœursebriser.Elleavaitpeurqu’illuiannoncesondépart.
—Tumemanques, finit-ilpardire.Jen’arrivepasà techasserdemonesprit.Tufaispartiedemoi.
—Ettoidemoi,réponditThéaenserapprochantdelui.Julien s’avança d’un pas hésitant jusqu’à coller son torse contre la poitrine de Théa. Le
soulagement envahit son visage et ses yeux lui dévoilèrent l’ampleur de son amour. Elle lui avaittellementmanqué!IlpenchalatêteverscelledeThéaet,avecdélicatesse,capturaseslèvres.Ilposaensuitesonfrontcontreceluidelajeunefemme.
—Jeteprometsqu’ilnes’estrienpasséavecMaxime,luisouffla-t-elleàl’oreille.—Tunepeuxpast’imaginercommej’aieumaldevousvoirvousembrasser.— Je n’ai jamais voulu te faire souffrir. Tu es le seul, Julien. Tu es celui qui a refermé mes
blessures.Moncœurt’appartient,jet’appartiens.—Alors,annonçonsnotrerelation.—Jenepense…Théamitsaphraseensuspens.Ellelevalesyeuxverssoncompagnonetydécelasapeine.—Qu’est-cequit’enempêche?C’estlaréactiondemamère?—Entreautres.C’estcompliqué.—Jenevoispasenquoi!—Jet’enprie,nemefaispasça.Théasemorditlebasdelalèvre.Elleauraitaiméluiavouerqu’elleétaitmalade,queleurrelation
nepouvaitpasaboutir.Maiselleseretient.Àquoibonluidire?
—Profitons de cemoment sans nous poser de questions. Tu vas bientôt repartir auCanada, etBastien,monfils,seralàdansquelquessemaines.Toutseraalorsdifférent,etjenesuispassûrequenotrehistoirepourrasurvivre.
—MessentimentsseronttoujourslesmêmesauCanada.Etjepeuxtoutaussibienrevenirici.—Jet’enprie,Julien.Jenesuispascertainequenousayonsunavenircommun.—Etmoi,jesuispersuadéducontraire.—Ehbien,tutetrompes.Lejeunehommevoulutrépondre,maisThéal’enempêcha.Elleposasonindexsurseslèvreset
lescaressaavecdouceuravantdel’embrasser.Julienselaissaporterparcettedélicieusesensation.Illuieffleuraledos,puisleventre,ets’éloignasansplusunmot.Iln’étaitpasquestionqueçadérape,dumoinspasaujourd’hui.C’estcequ’elleauraitaimé,maispuisqu’ellerefusaitdeluidonnercequ’ilvoulait,ilenferaitautant,mêmesicelaluiencoûtait.
—J’arriveraiàteconvaincreducontraire,luisouffla-t-ilàl’oreille.Noussommesfaitspourêtreensemble.Tuesmonâmesœuretjesuislatienne.
Sur ces mots, il quitta la chambre, laissant Théa sans voix. Des dizaines de fourmillementsl’avaientenvahie,etelleseretrouvatellementfrustrée!Ellesavaitpertinemmentquelejeunehommeavaitraison.Maispourquois’obstinait-elleàrésister?
Elle s’assit sur son lit et souffla bruyamment. Le regard rivé vers la porte, elle repensa à leurconversation. Elle ne pouvait nier qu’ils étaient faits l’un pour l’autre. Ils étaient faits pour êtreensemble,maisilyavaittellementdechosesquisemettaiententraversdeleurhistoire...Pourquoi?
Julien revint le soir même chez Théa. Il semblait avoir fait l’impasse sur leur discussion. Ilparaissait plus heureux et amoureux que jamais. Son regard clair pétillait et un large sourireilluminaitsonvisage.Pourlui,cetteépreuveavaitrenforcésessentimentsenversThéa,etilétaitbiendécidéàouvrirlesyeuxdelajeunefemme.
—Préparetonsacetsuis-moi!—Maispouralleroù?—Neposepasdequestion.Théalefixa,intriguée.Queluiavait-ilréservé?Ellerestaunmomentstoïque,cherchantcequ’il
manigançait.—Tuasexactementdeuxminutes.Théaserenditdanssachambre;ellepritunevalisedanssonplacardetlajetasursonlit.—Quedois-jeemporter?—Cequetuveux,maisilestinutiledet’encombrer.Théasaisitquelquessous-vêtementsetdeuxrobesqu’ellebalançadedans,puisellesedirigeavers
lasalledebain,elleattrapaquelquesproduitsdepremièrenécessitépourunefemme:brosseàdents,àcheveux...etrefermaletout.
—Ilneterestequedixsecondes!criaJuliend’unairamusé.Ilcommençaledécompte:«Dix,neuf,huit…»Théacourutverssacommode,ellel’ouvritetprit
une tenuequ’elleavaitspécialementachetéepourJulien.Elle lagardaitpourunesoiréespécialeetellesedoutaitquecemomentétaitvenu.
—Quatre,trois,deux…Julienn’eutpasletempsdedire«un»quesabelleluifaisaitface.Lajeunefemmes’avançad’un
pasversluiavecl’intentiondeluivolerunbaiser.MaisJulienpritsavalised’unemainetThéadel’autre avantde l’entraînerdehors.Frustréeunenouvelle fois,Théa suivit Julien enboudant.Théaavait l’impression d’être une adolescente qui fuyait son foyer avec le garçon dont elle étaitamoureuse. Cette sensation la remplissait de joie ; c’était si excitant tout ce mystère et cetteprécipitation…
Pendant le trajet,Julienrestaétonnammentsilencieux. Ilavaitmis la radioetchantonnaitsur lesairsquipassaient,évitantainsilapluiedequestionsdeThéa.Detempsàautre,illuilançaitunregardcoquinquiavaitjustepoureffetd’attisersacuriosité.Iladoraitl’embarquerdanscepetitjeu,etcelamarchait;Théayplongeaitlesdeuxpiedsdedans.L’atmosphèredel’habitacledevenaitchaude,trèschaude. Il n’avait pas besoin de dire un mot pour faire monter la température. Il suffisait d’unecaresse,d’unsouffle.Théan’enpouvaitplus,ellen’espéraitqu’unechose,arriveràbonportpoursejetersursonamant.Ellevoulaitsentirsesmainssursapeau.
D’ungestedélicat,elleglissasamainsursacuisse.MaiscedernierluimitunetapesurlesdoigtsetThéal’observaenfronçantlessourcils.
—Hé!lança-t-elleàbrûle-pourpoint.Tun’aspasledroitdefaireça.—Ettoi,tudevrasattendre.—Jenesuispassûred’yparvenir.—Illefaudra,pourtant.Lajeunefemmesouffla,puis tournala têtevers lafenêtre,commepourchasser les idéesquise
pressaientdanssonesprit.Aprèsdeuxheuresderoute,Juliens’arrêtasuruneairederepos.Ilsaisitune écharpe dans le vide-poche et la fit glisser sensuellement entre ses doigts. Théa percevait denouveaulefeudelapassionlaconsumer.Commentpouvait-illafaireautantlanguir?Elleobservalemorceaude tissu, s’imaginantoù ilvoulait envenir.Elle semordit lebasde la lèvreet se tourna.Julienluibandalesyeux,puispassalamaindanssescheveuxpourdécouvrirsanuquequ’ilparsemade baisers enflammés. Son souffle chaud caressait la peau de la jeune femme avec désir. C’étaitcommeunappelauquelelleneparvenaitplusàrésister.Sarespirationétaitsaccadée,rythméeparlefeuquibrûlaitenelle.EllesetournaversJulienetcherchasonvisagepourl’embrasser.Cedernierluiaccordacettefaveur,maisymitfinrapidement.
—Noussommesbientôtarrivés,luisouffla-t-ilàl’oreille.
Chapitre11Julienstoppalavoiture.IlcaressalajouedeThéaduboutdesdoigtspuisfrôlaseslèvres.Théa
sentit ses poils se dresser de plaisir. Quand arrêterait-il ce supplice ? Elle agrippa son siège etenfonçasesonglesdedans.Ellen’enpouvaitplus,celafaitdetroplonguesminutesqu’elleattendait.
—Nebougepas,j’enaipouruneseconde.Il descendit du véhicule etmonta l’escalier pour aller ouvrir la porte. Il s’assura que tout était
conformeàsademandeetcourutrejoindreThéa.Illapritdanssesbrasetlaportajusqu’àleurniddouillet.Théaétaitagrippéeàlui,latêtecontresontorse;elleprofitaitdesachaleurenivrante.Elleperçutuneodeurdepinetcompritqu’ellesetrouvaitaumilieudesbois.
Julien la déposa délicatement sur un lit, puis se mit derrière elle. Il lui enleva l’écharpe quimasquaitsesyeuxtoutencontinuantàglisserseslèvressursoncou.
Lajeunefemmerestasansvoixdevantcetendroit,ellen’avaitjamaisrienvudepareil.Nonquecelieusoitinsolite,maissoncompagnonavaitfaitensortedelerendremagique.Ilyavaitdespétalesderosesrougesetblancsparsemésunpeupartout,desdizainesdebougieséclairaientleurchambre,apportantuneambiancefeutrée,etunedélicieuseodeurdemuguetremplissait l’air.Théase tournaverssonamant,desétoilespleinlesyeux.
—C’estmagnifique.Tun’auraispasdûtedonnerautantdemal.—Jesoulèveraisdesmontagnespourtoi.Ilss’allongèrentsurlelit.Ellepassasesmainssoussachemiseetluieffleuraletorseduboutdes
doigts.Ellesuivitleslignesdesesbrasmusclés,puisseleva.—Tum’asfaitattendre,lança-t-elleavecunsourire.Maintenant,c’estàtontour.Elleselevaetsedirigeaversl’entrée,elleavaitbesoinderécupérersesaffairesquiétaientdansla
voiture.Julienseredressasursescoudesetdétaillachaquepartiedecettemerveilleusesilhouette.Surlepasdelaporte,Théaeutunmouvementdereculenapercevantlahauteurquilaséparaitdelaterreferme.C’était une cabane dans les arbres, elle aurait dû s’en douter. Elle descendit rapidement lesescaliers,attrapasavaliseetremontas’enfermerdanslasalledebain.Ellesaisitlajolietenuequ’elleavaitapportéeetlapassa,elleenfilaensuitesesbas,lâchasescheveuxetlesgonflapourleurdonnerunpeuplusdevolumeavantd’enfinsortir.
Julienétaitallongénu,surledos,etfixaitleplafondd’unairpaisible.Ilétaittellementheureux.Enpercevantlebruitdelaportedelasalledebain,ilseredressasursescoudesetrestamuetfaceàlasplendeurdesacompagne.S’ilavaittrouvéletempslong,ilneregrettaitpassonattente.Sonvisages’illumina et ses yeux brillèrent comme des braises dans la nuit. Elle était vêtue d’un body rougeouvertsurlapoitrineetsurlesflancs.Iln’enfallaitpaspluspourqueJuliencraque.Théas’approchalentement,d’unedémarchegracieuseetélégante,transportéeparleregardardentdesoncompagnon.Qu’ilétaitagréabled’êtredésirée!
Lejeunehommeluiattrapalamainetl’attiracontrelui.Ilserrasonétreintecommes’ilavaitpeurqu’elle lui échappe.Théa sourit, elle passa ses doigts dans ses cheveux puis glissa sur sa joue, sabouchesoyeuse.Ellene résistapasà l’appeldeses lèvreset lesdévoraavecune infinie tendresse.Julienparsemasoncorpsdecaresses.
L’atmosphèreétait chargéed’électricité.Théa respiraitdeplusenplusvite et avait l’impressionquesoncœurallaitexplosertantilbattaitfort.JulienrenversaThéasurledosetseplaçaau-dessusd’elle.Lesbras tendus, il s’écarta pour contempler les formesde samaîtresse. Il sourit et posa sa
bouche sur son sein. Ses lèvres se refermèrent sur son téton. Théa se cambra et perdit pied. Lasensationétaitsidouceetbrûlante!Soncorpssuppliaitcedernierdeluioffrirplus.Julienexauçasonsouhaitets’insinuaenelle.Lajeunefemmehurladeplaisir,c’étaitsibon!
Théaétaitsurunnuage.Ellen’avait jamaisconnuune tellesatisfaction.Allongénus l’uncontrel’autre,ilsprofitèrentdecetinstantavantdetomberdanslesbrasdeMorphée.
Théaseréveillaavecunlargesouriresur les lèvres ;ellese tournafaceàJulienetobservasestraitsdélicats.Mêmeendormi,ilétaitmagnifique.Elleluicaressalevisageetilouvritlespaupières.Sesyeuxpétillèrentenvoyantlajeunefemme.
—Bonjour,souffla-t-il.—Coucou,réponditThéa.Ilpritunemèchede sescheveux, l’enroulaautourde sondoigt,puis laglissaderrière l’oreille
avantdeluiembrasserleboutdunez.—Que c’est bon de se réveiller auprès de toi ! murmura-t-elle. J’aimerais que cemoment ne
s’arrêtejamais.—C’esttoutàfaitpossible.Laisse-moientrerdanstavie.—Tuyesdéjà.—Pascommejelesouhaiterais.—TuhabitesauCanada,Julien.Jenevoispascomment...—EtsijerevenaisvivreenFranceavectoi?Théaseredressaettournalesyeuxpourfuirceuxdesoncompagnon.Illuisaisitdélicatementle
mentonetlaforçaàleregarder.—Jecroyaist’avoirditcequejepensaisdetoutça…—Jesaisquecen’estpascequetuveux.Jesenspourtantquetuastoutautantenviequemoique
l’onfassenotrevieensemble.Dis-moicequitebloque.Pourquoirefuses-tudem’enparler?Théa garda le silence. Effectivement, son bonheur serait total si Julien restait à ses côtés.Mais
comment lui demander de tout quitter pour elle alors qu’elle était malade ? Elle considéra cettechancequeledestinluioffraiteteutunpincementaucœurensongeantquecelapouvaitsefinir.Ellen’enavaitpaslamoindreenvie.Ellevoulaitvivreaveclui,etpeuimportecequelesgensdiraient!
—J’accepte,maisavant,tudoissavoir…Julienneluilaissapasletempsdeprononcerunmotdeplus,ilétaitsiheureuxqu’illarenversa
surledosetl’embrassaavantdesuccomberunenouvellefoisàlapassionquiladévorait.Juliennepouvaitdécrirelebonheurqu’ilressentait.Cemoment,ilenavaittellementrêvé…etil
allaitseconcrétiser!Illuiproposaunepromenadeetelleaccepta.Deretourdansleurniddouillet,Théafutsurprisedevoirunetablecouverted’undélicieuxrepas.Julienl’yconduitettiralachaiseenparfaitgentleman.
—Ceséjourestdécidémentparfaitentouspoints.—Etiln’estpasfini!Il s’installa ensuite en face d’elle et profita du dîner.Quand vint le dessert, Théa, qui était une
grandegourmande,eutleslarmesauxyeuxentrouvantàcôtédesongâteauunpetitécrinnoir.ElledirigeasonregardversJulien,quisemitàgenoudevantelle.Affoléefaceàcequisepréparait,Théasecoua la tête comme pour dire au jeune homme de ne pas aller plus loin.Mais celui-ci continuamalgrétout.Illuipritlamainetlafixadroitdanslesyeux.
—Théa, dès notre premier baiser, j’ai tout de suite su que tu étais la femme dema vie. Cettesemainepasséeavectoinefaitqu’accroîtremonamouretrenforcercetteconviction.Tuesmonâmesœur.
—Julien,jet’enprie.—Celaveut-ildirequetuacceptes?
—Jenepeuxpas.Théareculasachaise.Aprèss’êtrelevée,ellecourutdehorspourpleurer.Commecelaluifaisait
malderefusercettedemandemagnifique.Maisquelautrechoixavait-elle?Surpris,Julienlasuivit.Illapritdanssesbrasetl’enlaçaavecamour.
—Dis-moicequiteretient.Il essuya ses larmesavec sonpouceetdéposaundouxbaiser sur ses lèvrespour l’encourager.
Théasedéfitdesonétreinteetagrippalabarrièredeboisquilesprotégeaitduvideavecforce.Ellesoufflaunboncoup,etfinitparavouerlavérité.Detoutefaçon,ellenepouvaitpluslaluicacher.
—Jesuismalade,Julien.J’aiuncancer.Lejeunehommesentitsesjambessedérober.Ilpassalesmainssursonvisagedépitépourtenter
dedissimulerleslarmesquisepressaientauborddesesyeux.Non,cen’étaitpaspossible,paselle!Toutétaitpourtantparfait.Pourquoifallait-ilqu’uneombreviennes’installerentreeux?Ill’aimaitdetoutsoncœuretiln’accepteraitpasdelaperdre.Unpincementdésagréableluitransperçalecœur,etileutsoudainementfroid.Faceàcetterévélation,ilnesavaitpasquoidire.Ilfitalorslaseulechosequesonespritluidictait.Ilpritlajeunefemmedanssesbrasetl’enlaçaavecforce.
—Jet’aime,Théa.Quetusoismaladeounon,celanechangerien.Ilesthorsdequestionquejet’abandonne.
—Je ne connais pasmon avenir, et il s’avère plus qu’incertain.Gérer le cancer ne va pas êtresimple,etjenedésirepastefairesubirça.
—Jenelaisserairiensemettreentrenous.Écoute,onm’aproposéunposteaujardinbotaniqueoùjet’aiemmenée.J’aidécidéd’accepter.Jeveuxm’occuperdetoi.
—Jerefused’êtreunfardeau.—Tuneleseraspas.Jet’aime,etquoiqu’ilarrive,tuserastoujoursmamoitié.Théaseretournaetfitfaceaujeunehomme.Elleluisourittristementetcachasonvisagedansson
cou.Commeelleétaitbienaveclui!Julienluicaressalescheveuxetluibisalefront.—Est-cequemamèreestaucourant?—Oui,c’étaitlaseuleàlesavoirjusqu’àmaintenant.Le téléphone de Théa sonna, interrompant leur discussion. Elle prit son iPhone et le montra à
Julien.—Quandonparleduloup…Il se pencha, lui déposa un doux baiser sur les lèvres avant de s’éloigner. Il ne souhaitait pas
assisteràcetteconversation.—Allo?réponditThéa.—Bonjour,Ingrid.Commentvas-tu?—C’est à toi qu’il faut demander ça ! Tu es partie sans unmot d’explication. Est-ce que tu te
morfondsdansuncointouteseuleouest-cequetut’esréconciliéeavectonjeuneamant?—J’optepourlasolutionnumérodeux.—Ah!Mevoilàrassurée.J’ensuisheureusepourtoi.Alors,oùes-tu?—Aumilieud’uneforêtdepins,dansunecabanesuspendueàunarbre.—Tuplaisantes?—Non,pasdutout.Etc’estmerveilleux.—Jeveuxbientecroire.Ilfaudraquetumeracontestoutçaàtonretour.—Peut-être…—Tunevastoutdemêmepasgardertoutçapourtoi.Tuseraisbienégoïstedenepasenfaire
profitertameilleureamie.Théaéclataderire;Julien,quilaguettaitauloin,soufflalentement.Qu’est-cequ’ilaimaitlavoir
comme ça, elle était tellement belle ! Il semordit le bas de la lèvre et passa lamain sur sa barbe
naissanteensongeantaucancerdeThéa.Ilsesentaitsidémuni…IleffaçasapeineparunsourireenapercevantThéarevenirverslui.Elles’assitsursesgenouxetglissasesbrasautourdesoncouavantd’embrasserlejeunehomme.
—Alors?demanda-t-il.—Ehbien,jesuisconviéeàunrepascheztoidemainsoir.Tamèreàunenouvelleàm’annoncer.
Maisellevasûrementt’enparler.Théan’eutpasfinisaphrasequecefutautourdeJulienderecevoirunappel.Illuifitunegrimace
pourluiconfirmerquec’étaitbienIngrid.Lajeunefemmepatientasurlelit,maisnevoyantpassonamant revenir, elle se dirigea vers la salle de bain.Elle se dévêtit et se glissa dans le jacuzzi.Lesbulleschaudesquiremontaientlelongdesoncorpsladétendirent.Lesyeuxfermés,elleappréciaitcemomentderelaxation.
Julienvintlarejoindrepresqueunedemi-heureplustard.Ilsedéshabillaets’installaàcôtéd’elle.—Alors?dit-elleàsontour.—Jel’aitrouvéebienétrange.—Ahoui?—Ellem’afaitunlongsermonsurlepardonetsurlaviedecouple.—Tucroisqu’ellesaitpournous?—Non,jenepensepas.Julien semit face à Théa et la jeune femme passa ses jambes autour de son buste. Collés l’un
contrel’autre,Théaperçutlachaleurdel’eausepropagerdanstoutsoncorps.EllevoulutembrasserJulien,mais celui-ci n’avait pas lesmêmes préoccupations. Il lui posa des tas de questions sur samaladieetluidemandaderelaterchaquemotdumédecin.Ilcherchaitdanscediscoursquelquechosederassurantquilaisseraitentrevoirunebonneguérison,maisenvain.
Théaseblottitdanssesbras;elleluicaressaletorseavantdeglissersamainplusbas.Ellen’avaitplusenvied’évoquercetristesujet.Ellenevoulaitpaspenseràtoutça.Cequ’elledésirait,c’étaitdeprofiterdecemomentquelavieluioffrait.
Chapitre12LanuitfutpaisiblepourThéa.S’endormirdanslesbrasdeceluiqu’elleaimaitétaitquelquechose
deréparateur.Aveclui,elleoubliaittoussessoucis.Iln’yavaitplusqu’euxetleurbonheur.Théaétaitsoulagéed’avoiravouélavéritéàJulien.Elleavaiteusipeurqu’ilsesauveencourant…Ellesavaitquecen’étaitpaslegenredesoncompagnon,maislesréactionshumainessontsiimprévisiblesdansdetelsmoments!AvecJulien,ellesesentaitplusfortepourcombattrelamaladie,etelleavaitmêmel’impressiondepouvoirlavaincre.
Julien, lui, n’avait pas fermé l’œil. Il avait passé la nuit à contempler Théa et à pleurersilencieusement.Ilavaitsipeurdelaperdre!Encetinstant,ledouteetl’incertitudeleconsumaient.Ilsavaitpertinemmentqu’ildevaitrestercourageuxpourThéa,mais iln’étaitpassûrd’yparvenir.Ilcomprenaitmaintenantpourquoiellen’avaitrienvoululuidire.
Ilglissalamaindanslescheveuxdesabelleetluisoufflatroismotsdanslecreuxdel’oreille.—Jet’aime.Théa sourit comme si elle avait entendu. Elle se retourna encore endormie et se blottit contre
Julien.Elleavait la têtecontre le torsedu jeunehommeet l’unede ses jambespar-dessuscelledeJulien.Cedernierl’entouradesesbraspuissantsetfermalesyeux,rêvantquecemomentnes’arrêtejamais.Siseulementilpouvaitfigerletemps…
Théaseréveilladanslesbrasdecebeaubrun,unlargesourireauxlèvres.Qu’est-cequec’étaitbondenepastrouveruneplacevideàsoncôté!EllelevalesyeuxversJulienquilacontemplaitavectristesse. En comprenant ce qui le chagrinait, Théa se redressa à demi. Elle lui caressa le visage,commepourchassercequileperturbait.
—Jet’enprie,nefaispasça.—Dequoiparles-tu?—Jen’auraisjamaisdûteledire.Tuesdifférentdepuis.Tumeregardesavecpeineetcelamefait
mal.—Oui,maisj’aipeur,Théa.Jeneveuxpasteperdre.Jesuissibienavectoi.—Moinonplus jeneveuxpas tequitter,mais c’est ledestinquidécidera.Par ta réaction, j’ai
l’impressiond’êtremourante, alorsque jeneme sensmêmepasmalade.Pour lemoment, toutvabien.Je t’enprie,faisonscommeavant.Nelaissepascettemauvaisenouvelle teminer lemoral,etsurtoutgâchercequel’onvit.Peudepersonnesontlachancedetrouverleurmoitié.Etmêmesicen’estquepourquelquesmois,jesouhaiteêtreheureuse.
ThéaposasesdoigtssurlementondeJulienetlerelevadesortequ’ilaffrontesonregard.—Jen’arrêtepasd’ypenser,c’estplusfortquemoi.—Jenesupporteraipaslongtempscecomportement.Jeveuxretrouverl’hommequej’aime.—Jesuistoujourslemême.—Non,pasencetinstant.Juliensoupirabruyamment.Théaavaitraison,cen’étaitpasainsiqu’ill’aiderait.Ildevaitfairedes
effortspournepaslaisserlecancergâchercequ’ilvivait.Ilsouritetplongeasonregarddansceluide la jeune femme. Il repensa à tous les moments qu’ils avaient passés ensemble et sa peine futamoindrie.
Ilsetourna,attrapalepetitécrinqu’ilavaitposésursatabledechevetetletenditàThéa.Ellesaisitsonprésentd’unemainhésitante.
—Nerefusepas.—Jenesaispascequenousréservel’avenir,maisjeveuxêtreavectoi.Lemariageestprématuré,
maissicelateconvient,jesuisd’accordpourquel’onannoncenotrerelation.Àlaconditionquetusoissûrd’êtreassezfortpoursurmontertoutça.Jerefusequetusouffresàcausedemoi.
Julienpritl’écrin,ilsortitlabagueetlaglissaaudoigtdeThéaavecunpetitsourire.—Julien…—Disonsquec’estjusteunepreuved’amour.Celan’engageàrien.—Jenepeuxpasl’accepter.—Tuesobligée.Théa tendit samain devant elle et admira cemagnifique bijou. Julien avait bien choisi, il était
simpleetsibeauenmêmetemps.C’étaitdeuxanneauxfinsenorblancquisecroisaientsurledessuspourformeruncœur.Iln’yavaitaucundiamant,aucunétalageclinquant,etc’étaitbiencommeça.
Théal’enlaçaavecamour,puisdéposaundouxbaisersurseslèvres.Julienessayaalorsdechassersatristessepourlebiendesacompagne.Ilavaitcompriscequ’elleavaitvoululuidire,maisc’étaitsidurdefairecommes’ilnesavaitrien…
Illuicaressalajoueetreplaçaunemèchedesescheveuxquiluitombaitdevantlesyeux.—Jeteproposeunebaladeenvéloavantd’allerannoncerlanouvelleàmamère.—Oh,queoui!J’aibesoindemedéfoulerpourchassercetrop-pleind’angoissequisebouscule
dansmatête.—Toutsepasserabien,jesuiscertainqu’elleseraenchantée.—Siseulementtudisaisvrai!Théaseleva,elleavalaunverredejusd’orangeetdeuxtartinesdebeurre,puispartitsepréparer.
Elledescenditlesescaliersettrouvadeuxvélossouslesapin.Julienl’attendait,uncasqueàlamain.Ils’avançadoucementetluimitlaprotectionsurlatête.
—Jedoisêtreridiculeavecça.—Non,tuesmerveilleuse.—Tun’espasobjectif.—C’estvrai.Il s’approchad’elleet la tiracontre luiavantde luioffrir leplus tendredesbaisersqu’ilsaient
échangés.Théaeneutlesoufflecoupé.EtelleétaitcontentedevoirqueJulienavaitdécidédesuivreson conseil. Elle se doutait bien que cela lui coûtait beaucoup et elle ne pourrait jamais assez leremercierpourça.Ellegrimpasurlevéloetpartitsansattendre.
Un large sourire aux lèvres, Julien l’imita et la rattrapa.Théa s’amusait commeune enfant.Detempsàautre,elledonnaitdefortscoupsdepédalepourprendredel’avanceetfairecommesiellefaisait la course. Julien rentrait dans son jeu et faisait de même. Après l’effort, le réconfort : ilspassèrentunebonnepartiedel’après-mididanslejacuzzietlaissèrentleuramouréclater.Théaneselassaitpasducorpsdesoncompagnon,elleadorait le toucheret le sentircontreelle.Elleavait lasensationd’êtreplusvivantequejamais.
Lesoirarrivarapidementet ilsdurent repartir. Ilétait tempsderentreretd’annonceraumondequ’ilss’aimaient.Théaauraitcruêtrebienplusstresséedurantletrajetderetour.Ellenesavaitpassic’étaitdûàlaprésencedeJulien,maiselleétaitsereine.Elleavaitl’impressiond‘avoirprislabonnedécision. Samain serrée dans celle de Julien, elle ne voulait plus le lâcher. Elle sentit la pressiongrandirlorsqu’ilsarrivèrentdevantlamaisondesonamie.Julienluiouvritlaporteetl’aidaàsortir.
—Çava?—Non,pasvraiment.J’aipeur.—Toutirabien.
Ilglissasesdoigtssursonvisageet l’embrassa.Théaeutunmouvementdereculenapercevantuneombreparlafenêtredusalon.Pendantquelquessecondes,elleavaitcruvoirunejeunefemmelesépier.
—Qu’est-cequisepasse?—Rien,ilm’asemblé…Ellemitsaphraseensuspens.C’étaitl’angoissequiluifaisaitimaginerdeschoses.—Allons-yavantquejenechanged’avis,reprit-elle.Julien l’enlaça, puis il la tira vers l’entrée, la main toujours agrippée à la sienne. Il saisit la
poignéedeporte,maiscelle-cis’ouvritdevantunefemmeblonde.Interdit,Julienrestasansvoix.Cen’étaitpaspossible!Lajeunefilles’avançaversJuliensansfaireattentionquecederniertenaitThéa.Elleglissasesbrasautourdesoncouetneluilaissapasletempsdedireunmotoudefaireungestequ’ellel’embrassa.Stupéfaite,Théalesregarda,unpincementaucœur.Qu’est-cequiétaitentraindesepasser?
JulienlâchaThéapourrepoussersonassaillante.—Qu’estcequetufaisici,Chloé?—Ilfallaitquejetevoie.—As-tupenséquejen’enavaispeut-êtrepasenvie?Ingridarrivaavecunlargesourire;elleembrassasonfilsetaperçutThéa.Ellelatiraparlebras
sansmêmefaireattentionàlaminedéfaitedesonamie.—Viens,ilsontbesoind’êtreseuls.—Quiest-ce?demandasèchementThéa.—LafiancéedeJulien.—Laquoi?Ses jambessemirentà trembler.Non,pasencore!Décidément, ledestins’acharnaitcontre leur
histoire.Pourquoineluiavait-ilriendit?Ellepensaitqu’ilétaitcélibataire.Ellesefrottalevisageetexpiralentementpourchasserleslarmesquinoyaientsesyeux.ElledevaitfairebonnefiguredevantIngrid.Ellenepouvaitpasavoueràsonamiecequilaperturbait,pasavantdeparleravecJulien.Lesdeuxjeunesgensrentrèrent.Juliensemblaitencolère,etenmêmetempsinfinimentdésolé.IllançaitdegrandsregardsremplisderemordsàThéa.Ilallaitvenirverselle,maisChloésemitentraversdeson chemin. Elle lui saisit la main et le tira près d’elle. Julien émit une résistance et la poussa.Choquée,Ingrids’interposa.
—Julien!C’estunemanièredetraitersacopine?—Ellenel’estplus,etcedepuisplusieurssemainesmaintenant.Etcen’estpasparcequ’elleafait
levoyagejusqu’iciquecelavachanger.Elledevraitlesavoir,ettoiaussi.Théafutsoulagéed’entendrecesparoles ;pendantuninstant,elleavaitcruavoirperdule jeune
homme.Ilneluiavaitdoncriencaché.—Tudevraislalaissers’expliquer,insistaIngrid.—Jecomprendsmieuxtonpetitdiscoursd’hier.J’ignorequelsbonimentsellet’aracontéspourte
convaincre,maismoi,jerefused’écoutersesmensonges.Juliens’éloignaetfitdeuxpasversThéa.DevantlesyeuxassassinsdeChloé,lajeunefemmese
sentitmalàl’aise.Théan’avaitpasrêvé,ilyavaitbienquelqu’underrièrelafenêtreetc’étaitChloé.Elleavaitdoncdûlesvoirs’embrasser.Pasétonnantqu’ellelafusilleduregard.
—Soitraisonnable,repritIngrid.Chloéaquelquechoseàtedire.—Ehbien,moiaussi!Constatantqu’ilserapprochaitdeplusenplusdeThéa,Chloés’interposaentreeuxetluilançasa
bombeauvisage.—Jesuisenceinte,Julien.
LejeunehommesetournaversThéaquiavaitchangédecouleur.Avait-ilbiencompris?
Chapitre13Théasentitsesjambesflageoler,etellefutprised’unesortedemalaise.Toutetremblante,ellese
dirigeaversunechaisepours’yappuyer.Ingrid,quifixaitsonfilsenattendantdevoirsaréaction,nes’aperçutpasdel’étatdesonamie.Théasaisitunverred’eauet lebutd’uneseule traite.Elleavaitl’impression qu’on lui avaitmarché dessus durant des heures.Elle avaitmal partout, et surtout aucœur.Deslarmescoulèrentsursajoue,carelleavaitcomprisqu’elleallaitperdreJulien.
— Je ne voulais pas te l’annoncer comme ça, dit Chloé d’une voix plus douce.Mais tu nemelaissespasvraimentlechoix.
Julienrestamuet,encoresouslechocdecetterévélation.Ilcroulaitsouslesinterrogations.Non,cen’étaitpaspossible.Cetenfantn’étaitpasdelui.Aprèstout,Chloél’avaittrompé!
—Celanechangerien.Jenet’aimeplus,Chloé.D’ailleurs,commentêtresûrquecebébéestbienlemien?
—Jesuisenceintedetroismois.—Celaneprouverien.—Jet’enprie,Julien.Théa,quisesentaitdetrop,s’éclipsadiscrètement.Ellefranchitlaporte,maisJuliens’enaperçut.
Ilcourutimmédiatementderrièreelle,laissantsamèreetsonanciennefiancée.—Théa,attends.Lajeunefemmepleuraitàchaudeslarmes.Cetteépreuveétaitdetrop.Ellesecoualatêteetpressa
lepas,espérantqu’ilnelasuivepas.Maisiln’enfutpasainsi.Illarattrapaetlaserradanssesbras.Théacachasonvisagecontresontorse,complètementdépitée.
—Etmaintenant?demanda-t-elleensanglotant.—IlesthorsdequestionquejeretourneauCanada.Jeveuxresteravectoi.—Tuvasêtrepapa,Julien.Jerefused’êtrecellequisépareunenfantdesonpère.Jesaisàquel
pointc’estdurd’éleverunpetittouteseule.Ilaurabesoindetoi.—Théa,nefaispasça.Jenelesupporteraipas.—Jesuisdésolée,Julien.Lajeunefemmesedéfitdesonétreinteetremontalarueencourant.Julienlaregardas’éloigner,
lecœurenmiettes.Unelarmecoulasursajoue.Celanepouvaitpassefinirainsi,ilenétaithorsdequestion!Ilsetournaverslaporteetaperçutsamèrequilefixaitavecstupeur.
—Nemedispasquec’esttoi,l’amantdeThéa?—Si,c’estmoi!Ingridrestamuette,maisellesentitlacolèrel’envahir.Commentsonamieavait-ellepuluifaireun
couppareil?Ellesecouaitlatête,toutenfusillantsonfilsduregard.Julienpassaàcôtéd’ellesansunmot,ilignoraChloéetcommençaàmonterlesmarchespourrejoindresachambre.
—Julien!s’écriaChloé.Ilne fitmêmepassemblantetcontinuasonchemin.Dévastéeparcequ’ellevenaitd’apprendre,
IngridsedirigeaversChloéetlapritdanssesbraspourlaconsoler.Lajeunefilleseblottitcontreelle.
—Illuifautunpeudetemps.—J’espèrevraimentquecen’estqueça…
Juliensejetasursonlit.Ilenfouitsatêtedanssonoreilleretlaissalatristessel’envahir.Iln’avaitjamaispleurépourunefemme,maislà,c’étaitdifférent,c’étaitpourThéa,samoitié,sonâmesœur.Ilpassa la soirée ainsi sans que personne ne vienne le voir.À une heure plus que tardive, il décidad’allerlaretrouver.Ilnepouvaitpasaccepterqueleurhistoiresoitterminée.
Il descendit lesmarchesdiscrètement et tomba sur samère. Ingrid avait unemine affreuse, elleattrapauncachetcontrelemaldetêteetl’avala.Julienlaregardapeiné,maisneluiditpasunmot.Ilsedirigeaverslaported’unpaspressé,maisfutinterrompu.
—Oùcours-tucommeça?—J’aibesoindeprendrel’air.—TuvasretrouverThéa,n’est-cepas?—Ilfautquejeluiparle.—Maisbonsang!Àquoipensais-tu?Théaestfragile.—Jel’aimeetjeneveuxpasluifairedemal.—Tuasvingt-quatreansetelleenatrente-six.C’estimmoral!—L’âgenecomptepas.— Julien ouvre les yeux. Théa est mon amie et je suis triste pour elle, mais tu ne peux pas
continuervotrehistoire.Tuvasêtrepapa.Etilesthorsdequestionquetufuiescetteresponsabilité.C’estcequetonpèreafaitetjeneveuxpasquetureproduiseslamêmeerreurquelui.
— Comment pourrais-je rester avec une femme que je n’aime plus ? Et qui te dit que je suisréellementlepèredecepetit?Chloém’atrompé,elleaffirmequecelanes’estproduitqu’unefois,maisjenelacroispas.Elleestvicieuseetmanipulatrice.
—Jet’enprie,réfléchisbien.JulienquittalamaisonpoursedirigerchezThéa.Ilétaittrèstard,maisilétaitcertainqu’ellene
dormiraitpas.Ilfrappadoncjusqu’àcequelajeunefemmedaigneluiouvrir.Sansattendre,ilsejetadans sesbras et l’embrassa.Théa le repoussadoucement, sansvraiment en avoir envie.Dépité, envoyantsesyeuxrougis,Juliennesavaitplusquoifaire.Ilessayadeluicaresserlevisage,maiscettedernièreluisaisitlamainpourl’enempêcher.
—Nerendspasleschosesplusdifficilesqu’ellesnelesontdéjà.—Jerefusequenotrehistoires’arrêteainsi.—C’estunsigne,Julien.—Tunecroispasunmotdecequetudis.Ons’aime.—Celanesuffitpas toujours.C’estpeut-êtreaussibiencommeça.Aumoins, tuas l’avenirqui
t’ouvrelesbras.Jesuissincèrementdésolée.ThéarefermalaportesansqueJuliens’yoppose.Lefrontposécontrecettedernière, ilpleurait
commeunenfant.Commecelafaisaitmal!Ilerradelonguesheuresdehors.Ilrefusaitderentrer.Ilnevoulaitpasaffronterleregarddesamère,etencoremoinsvoirChloé.C’étaitàcaused’ellesitoutçaétait arrivé. Ilprit savoitureetpartit loindechez lui. Il avaitbesoinde solitudepouravoir lesidéesclaires.
Théaétaiteffondrée.Ellesejetasursonlitetenfouitsatêtedanssonoreiller.Elleespéraitquetoutçanesoitqu’uncauchemar,mais lablessuredesoncœurne lui laissaitpascedoute.Toutavait sibiencommencé!Ellesaisitlaboîtedemouchoirsetessuyasesjoues,maisleslarmescontinuaientdeserpentersursapeauenfeu.Commentl’oublier?
Elle s’endormit après avoir pleuré durant des heures. Le lendemain, la douleur était toujoursprésente, trop au goût de la jeune femme qui n’arrivait pas à chasser Julien de ses pensées. Ellen’avaitqu’uneenvie : l’appeler.Elledésirait seblottircontre luietpouvoirdenouveau le toucher,sentir sonodeur. Il étaitdevenusadrogueet il luiétait impossiblede s’enpasser.Alors,commentfaire?Ellemarchajusqu’àsachambred’unpaspressé,ellesaisitsavaliseetjetadedansvêtementset
accessoires indispensables pour un voyage, puis se rendit dans son garage. Elle plaça son bagagedanslecoffreetpartitloindesaville.Elleavaitbesoinderetrouversonfils,besoindevoirsasœuretdechangerd’air.Ellesavaitpertinemmentquesiellerestait,elleseraitdenouveauconfrontéeaujeunehomme.Etellenepourraitpasrésister.Elleétaittellementaccrocàluiqu’elleétaitcertainederetomberdanssesbras.
Chapitre14Théa roula pendant presque huit heures sans faire aucune pause.Durant le trajet, son téléphone
n’avaitpasarrêtédesonneraupointquepouréviterderépondre,ellel’avaitjetésoussonsiège.Ellesavaittrèsbienquec’étaitJulienetilluiétaitdifficilederésister.ElledevaitsefaireviolencepournepasgarerlavoitureetsaisirsoniPhone.Elleavaittellementenvied’entendrelavoixdesonamant,tantenviedeleretrouver.Mais,quelsquesoientsessentimentsàl’égarddujeunehomme,ellenelepouvaitpas.Ilallaitêtrepapaavecuneautrefemme.Ellenesavaitquetropcommeilétaitdifficiled’éleverunbambinsansuneprésencemasculine.
Àbout,elles’arrêtasurl’airedereposlaplusproche.Ellesortitdelavoitureets’appuyacontrelaportière. Elle se frotta les yeux comme pour effacer sa fatigue, puis fit quelques pas pour sedégourdir les jambes.Lorsqu’elle revint, la sonneriede son téléphone retentit.Elle sepenchasoussonsiègeetfixal’écran.EnvoyantlevisagedeJulien,soncœursemitàsaigner.Lamaintremblante,elleallaitrépondre,maiselleréussitàladernièresecondeàrejeterl’appel.Elleallaitbalancersontéléphonelorsquecelui-cisonnadenouveau.Surl’écranétaitaffichélenomdesasœur.
Ellesoufflaetravalaunsanglotquisepressaitdanssagorge.Elleétaitcomplètementperdueet,tout à coup, elle ne savait plus ce qu’elle devait faire.Devait-elle répondre ?De doute façon, ellen’avaitguèrelechoix.Siellenelefaisaitpas,Carolineseferaitunsoucimonstre,etellevoulaitluiéviterça.
—Théa,oùes-tu?Qu’est-cequisepasse?J’essaiedetejoindredepuisdesheures…Les larmes envahirent les yeux de la jeune femme et il lui fallut un long moment pour se
reprendre,cequiaccentual’angoissedesasœur.Elleessuyasonchagrinquiroulaitdoucementsursesjouesetinspiraungrandcouppouravoirunevoixclairequinelatrahissepas.
—Salut,Caro.Net’angoissepas,toutvabien.—Non,jenecroispas.Ingridm’acontactéeetelles’inquiètepourtoi.Ellenonplusn’arrivepasà
tejoindre.—Jesuisdésolée,maisj’étaisentraindeconduire.—Duranttoutcetemps?Maisoùes-tu?—Bastienmemanque.Etjenesupportaisplusdelesavoirloindemoi.J’aibesoindeleserrer
dansmesbras.J’aidoncprisladécisiondevousretrouver.—Tuauraisdûmeprévenir,celaauraitévitéquejem’inquiète.Oùes-tu?—Àquelquesminutesducamping.—Es-tucertainequetoutvabien?Tavoixparaîttremblante.—Tutefaisdesidées.—Bastienseraravidetevoir.Ilcommençaitàteréclamer.—Jem’endoute.Bon,jetelaisse,jereprendslaroute.Théaraccrocha,elleexpiralentementpourchassertouslessentimentsqu’elleavaitcontenuspour
nepasangoisserdavantageCaroline.Elleessayaderangersessombrespenséesdansunepetitecasedesatêteetseconcentrasursonfils.
Ellearrivaquelquessecondesplustardaucamping.Sasœurl’attendaitàl’entrée.EllemontadanslavoitureetguidaThéajusqu’àleurbungalow.
—Bon,maintenantquetueslà,dis-moicequinevapas!—Pardon?s’étonnaThéa.
—Jeteconnaisparcœur,Théa.JeveuxbiencroirequeBastientemanqueetquetuasbesoindelevoir,maisjamaistuneseraisvenuesansmeprévenirniavertirIngrid.
Théa baissa les yeux une seconde, ne sachant pas quoi répondre. Puis finalement, elle décidad’avouertoutelavéritéàCaroline,quecesoitàproposdesoncanceroudeJulien.
—Oùpouvons-nousparler?—Faisdemi-tour.Allonsauvillaged’àcôté,ilyaunpetitbar.—EtBastien?—Jeneluiaipasditquetuvenais,j’aitoutdesuiteperçutonmalaise.Encemoment,ilestàla
plage.—Tumeconnaissibien!—Eneffet.ThéaécoutalesconsignesdeCarolineetseretrouvarapidementàdestination.Ellesprirentdeux
diabolos à la fraise et Théa lui avoua ses secrets. Caroline ne fit aucun commentaire, elle avaitcomprisquesasœuravaitbesoindeselibérer,maisellefuttouchéeparsonhistoire.Pourquoicelatombait-il encore sur elle ?Elledissimula son angoisse afindenepas inquiéterThéa.Mais ce futl’effetinversequiseproduisit.
—Tun’asrienàmedire?s’enquitThéa.—Quepuis-je tedire?Jesuisdésolée.Jesuisécœuréedesavoirque tuasuncanceret jesuis
navréepour toietJulien.J’aibiensenti lorsquetuparlesdeluiquetu l’aimes.J’enaiassezquetusouffresainsi.Jesouhaiteraispouvoirtelibérerdetoutecettedouleur…
Carolinemit saphraseen suspens.Bouleverséepar toutça, elleneputcontenir ses larmes.Cesdernièresglissaient sur sapeau, avec lenteur.Émuepar sa réaction,Théa semontrabrave.EllenesupportaitpasdevoirCarolinetristeàcaused’elle.Ellesrestèrentunelongueminuteenlacées,puisCarolinerelevalatête.ElleposasesdoigtssurlementondeThéaetlaforçaàlaregarder.
—Nelelaissepaspartir.—Pardon?— Retiens Julien. Si vous vous aimez vraiment, tu ne dois pas abandonner. Ta vie sera assez
compliquéeaveccettefichuemaladie,tudoislegarderauprèsdetoi.Accroche-toiaubonheur.Théarestasansvoix.Ellenes’attendaitpasàentendrecesmotsdelabouchedesasœur.—Maisilvaêtrepapa!—Crois-tuque lepetit seraheureuxdevivreavecunpèrequi le tientpour responsabledeson
malheuretquinevoulaitpasdelui?D’aprèscequetum’asdit,ilestaussiamoureuxdetoiquetoidelui.
—Oui,c’estvrai,maisiln’estpascommeça.Théamitfinàcetteconversation,perturbéeparlesparolesdeCaroline.Sontéléphonevibra;elle
jetaunregardfurtifdessusetvitlevisagedeJulien.—C’estlui?demandaCaroline.Réponds.Théarejetal’appeletrangeasoniPhone.— Laisse-moi quelques jours pour démêler tout ce sac de nœuds. Après, quelle que soit ma
décision,jeteprometsdelecontacter.Carolinesouffla,exaspérée.C’étaitàcroirequeThéafuyait lebonheur.Elleneditplusunmot,
maissentitsoncœurseserrer.Ellenesupportaitpasdevoirsasœursouffrircommeça.Elle laconduisit jusqu’aucampingoùelleputretrouverBastien.Enapercevantsamère,Bastien
affichaunlargesourire.Ilcourutetluisautaaucou.—Maman!—Tata!criaLysie,aussiraviequesoncousin.—Bonjour,macrevette.
—Jenesuispasunecrevette!Tuvienspasserlesvacancesavecnous?—Est-cequecelateferaitplaisir?—Ohoui,alors!—Danscecas,jereste.Bastien resserra son étreinte. Il enfouit sa petite tête contre la poitrine de Théa et s’y réfugia
commes’ilavaitpeurqueThéas’enaille.Carolinelesregardaavecmorosité.Ilsétaientheureuxcommeça.Maispourcombiendetemps?
Est-ce que Bastien se retrouverait privé de sa mère ? David, le mari de Caroline s’approchadoucement.Ilavaitremarquélaminedéfaitedesafemme,illapritdoncàpartetelleluiracontadansles grandes lignes ce que Théa lui avait expliqué quelques minutes plus tôt. David encaissa lamauvaisenouvelleetessayadefairecommes’ilnesavaitrien.
—Unpetitrestaurantsurlaplageçavousdit?demanda-t-il.—Pourquoipas?réponditThéa.ThéaposaBastienàterreets’agenouillapourétreindresanièce.—Jesuiscontentequetusoislà,tata.—Moiaussi,mapuce.Moiaussi.
Chapitre15CelafaisaittroisjoursqueJulienétaitparti.UnefoisqueThéal’eutéconduit,iln’avaitpaseule
cœurderentrer.IlétaittellementencolèrecontreChloéqu’ilavaitpeurdelabrusquer.Etiln’avaitpasenvied’entendrelessermonsdesamère.Ilavaitdonctrouvérefugechezl’undesescopainsdelycéequiluiavaitlaissésonappartementsurNancypendantqu’ils’amusaitenvacances.
Duranttoutcetemps,ilavaitmaintesfoistentédejoindreThéa,maisellerefusaitdeluirépondre.Ilavaitdonclaissédenombreuxmessagesetespéraitquecettedernièrel’appelle.Malheureusement,ellesemblaitvraimentavoirenviedel’oublier.Ilavaitlecœurenmiettescommejamaisilnel’avaitété.Etcelafaisaitmal!
Ilavaitl’impressiondeseretrouverpiégé.IlenvoulaittellementàChloé!Commentpouvait-ellevenirbrisersonbonheur?Ellequil’avaitdéjàtantfaitsouffrir.Ilsongeaaupetitêtrequigrandissaitenelle.Iln’avaitjamaispenséavoird’enfant,enfinjusqu’àcequ’ilrencontreThéa.Maisc’estavecellequ’ilauraitsouhaitéenavoir,pasavecChloé.Iln’arrivaitpasàconcevoirquec’étaitbienluilegéniteurdecebébé.Elleluiavaittellementmenti,l’avaittantdefoistrompé.Commentêtresûrquecen’étaitpasencoreunerusepourl’attirerdenouveauverselle?
Ilsejetadanslecanapéetsefrottalevisageavecsesmains.Ilétaitperdu.Commentassumersonrôle de père et reconquérir Théa en même temps ? Cela lui paraissait impossible. Il attrapa sontéléphoneetcontactaunenouvellefoissamaîtresse,envain.Ellenerépondaitpasetsaboîtevocaleétaitsaturée.Ilétaitpersuadéqu’ellen’avaitmêmepasprislapeined’écoutersesmessages.Samainsemitàtrembler;au-delàdelatristesse,c’étaitlacolèrequil’envahissait.Iljetasonsmartphoneparterre et frappa le canapé.Une fois sa crisepassée, il saisit ses affaires et retournachez lui. Il étaittempsd’avoirunediscussionavecsamèreetChloé.
Aprèsquarante-cinqminutes,ilseretrouvadevantchezIngrid.Lavoitureavaitàpeinefranchileportailquecettedernièreseprécipitaitdehors.Ill’observauninstantpourprendrelatempératureetfut rassuré de ne voir aucune colère marquer son visage. Elle semblait plutôt attristée. JuliendescenditduvéhiculeetfitfaceàIngrid.Celle-cirestastoïque,puisavançaversluipourl’enlacer.
—Jesuisdésoléequetuteretrouvesdansunetellesituation.Cen’estpascequej’avaissouhaitépourtoi.
—Moinonplus,maman.Jemesenscontraint,brisé.J’aimeThéadetoutmoncœuretjeneveuxpaslaperdre.
—Maisvotrehistoireestimpossible,Julien.Elleadixansdeplusquetoi.—Celanetegêneguèrelorsquecesonttesamants.—Oh,Julien,net’engagepassurceterrain…—C’esttoiquim’ypousses.Jeneveuxpasêtrecommetoi,maman.Jesouhaitefairemavieavec
unefemmequej’aimeetavoirdesenfantsavecelle.—Celapeut-êtrelecasavecChloé.C’estunefillecharmante.Jesuiscertainequetuserasheureux
avecelle.—Ellem’atantfaitsouffrir!Jen’aiplusaucuneconfianceenelle.Etcen’estpasparcequ’elleest
enceintequecelavachanger.JesuisamoureuxdeThéaetc’estavecellequejedésireêtre.—Maiselleestmalade!—Etalors,ellen’estpascontagieusequejesache!—Non,maisquisaitsiellearriveraàcombattrececancer?
—Jen’enrevienspasquetuparlesd’elleainsi.—Jesuisréaliste,Julien.Etjeneveuxpasquetusouffres.—Alors,acceptemonchoix.Ingridrestasilencieuseetleregardarentrer.Ellelesuivitquelquesinstantsplustardensecouantla
tête.Comment faire comprendre à son fils qu’il était sur lamauvaise voie ? Julienmonta dans sachambreenespérantnepastombersurChloé.Iln’avaitaucuneenviedelavoir,dumoinspastoutdesuite.Malheureusement,lajeunefemmesetrouvaitdanslecouloir.
—Julien, souffla-t-elleavecun légersourire.Tuesenfin rentré.Tunepeuxpassavoircommej’étaisinquiète.
Elle s’approcha doucement et glissa ses bras autour de son cou. Elle n’avait pas refermé sonemprisequecedernierlarepoussait.Ilrespira,bruyammentcommepourluimontrersacontrariété,puispassamamainsursonmenton.
—JenereviendraipasauCanadaavectoi,Chloé.Mavieestici,avecThéa.—Tunepeuxpasm’abandonner.Jesuisenceinte.Leslarmescommencèrentàremplirlesyeuxdelajeunefille.Julien,bienqu’iln’éprouvaitplus
rienàsonégard,sentituneoncederemordsl’envahir.Iln’aimaitpasfairesouffrirlesautres.Ilsemorditlebasdelalèvre.Ilauraitvoulul’étreindrepourlaconsoler,maiss’ilfaisaituntelgeste,ellecontinueraitàespéreretilnelesouhaitaitpas.Elledevaitcomprendrequetoutétaitfinientreeux.
Chloé le regarda partir sans bouger.Une fois la porte refermée derrière le jeune homme, ellelaissa couler ses larmes. Ingrid, qui montait au même moment, la prit dans ses bras et la cajolacommesic’étaitsafille.
—Puis-jeallerdansvotrebureaupourmeservirdevotreordinateur?J’aibesoindecontactermonamie.
—Biensûr.IngridsedirigeaverslachambredeJulien.Elleentrasansyêtreinvitéeetsepostafaceàlui.Elle
étaittendueetnerveuse.Ellenecomprenaitpassadécisionetavaitladésagréablesensationdefaireun retour en arrière lorsque le père de Julien lui avait annoncé qu’il ne voulait pas assumer sagrossesseetlepetit.
—Alors,c’estçatonchoix?Tuvasabandonnertonenfantcommetonpèrel’afaitavectoi!Jenepensaispasquetuferaislamêmeerreur.N’as-tupassouffertdesonabsence?
—Maman,jet’enprie.— Non, Julien. Tu es irresponsable ! Que crois-tu ? Théa ne reviendra pas vers toi. Elle
n’accepterajamaisd’êtrecellequiabriséunefamille.IngridnelaissapasletempsàJulienderépondre.Ellequittalapièceetclaqualaporte.Elleétait
tellementencolère!Ellenelereconnaissaitplus,ellenel’avaitpourtantpasélevédecettemanière.EllemontaaudernierétagepourallerretrouverChloé.Cachéederrièrelebattantquiétaitentrebâillé,ellepatientasilencieusementdepeurdedérangerlajeunefillequiétaitenpleineconversationavecsonamie.
— Je t’avais bien dit qu’il ne reviendrait pas, lança l’amie deChloé.Avec tout ce que tu lui asfait…
—Jepensaisquelepetitquejeporteleferaitchangerd’avis.—Tuleconnaismal,Chloé.Quevas-tufairemaintenant?—Jel’ignore,maisilestcertainquejenepeuxpasassumercetenfanttouteseule.J’aibesoind’un
hommeàmescôtés.—Pourquoin’as-tupasdemandéà sonvéritablegéniteur?Paulest certesbizarre,mais je suis
persuadéequ’ilnetelaisserapastomber.JenecomprendspasquetusoispartieretrouverJulien.
—Nousavonsdéjàeucetteconversation,Emma.Julienétaitlepèreidéalpourcetenfant.Paulestinstable,c’estencoreungaminlui-même.Etsijetecontacte,cen’estcertainementpaspourquetumefasseslamorale.J’aibesoindetonsoutien.Jemesenstellementmal!
Ingridrestasansvoix.Commentcettefilleavait-ellepuluimentir?Julienn’étaitpaslepèredecetenfant.Elledescenditdans lacuisineet seservitunverredevinqu’ellebutd’uneseule traite.Elledevait absolument parler à Chloé. Elle voulait lui dire le fond de sa pensée, mais il valait mieuxqu’ellesecalmepourlemoment.Ellesortitdoncpendantuneheureetrevintensuite.
Elle trouvaChloé sur le canapé en trainde regarder la télévision.Sesyeuxvides et remplis detristesseétaientfixéssurl’écranet,decefait,ellen’entenditpasIngridrentrer.Cettedernièreallaitsedirigerverselle lorsqueJuliendescendit lesescaliers.Ellepritunegrande inspirationet l’invitaàveniravecelleprèsdelajeunefille.
—Maman…ElleluilançaunregardduretJulienneputterminersaphrase.Illevalesyeuxaucieletsuivitsa
mèresansaucuneenvie.Ils’installasurunfauteuil,leplusloinpossibledeChloé.—Bon,ilesttempsquenousayonsunediscussiontouslestrois.Chloé se redressa tout enobservant sonex-petit ami.Elle se tortilla lesdoigts, espérantquecet
entretienfassechangerJuliend’avis.—Chloé,jet’aiaccueilliechezmoiavecplaisiretjet’aifaitconfiance.Maiscequej’aientendu
toutàl’heuremefendlecœur.LaCanadiennelafixaaveceffroi,n’appréciantguèrelatournurequeprenaitlaconversation.Elle
fronçalessourcilsetbaissalatête.Est-ilpossiblequ’ellesoitaucourant?Ellesemorditlebasdelalèvre.
—Ilesttempsquetunousdiseslavérité,continuaIngrid.—Je,jenecomprendspas…—Tusaisparfaitementdequoijeparle.Julienseredressa.Queltouravait-elleencoreimaginé?Illafixaitavecinsistance,maiscelle-ci
restaitmuette.—Trèsbien,puisquetunetedécidespas…—Non,s’écrialajeunefille!S’ilvousplaît.Elle pencha la tête vers le sol et souffla un bon coup avant demarmonner quelquesmots que
personnenesaisit.—Pardon?lançaIngrid.—Julien,tun’espaslepèredecetenfant.C’estPaul.—Jelesavais,criaJulien.Tun’esqu’unementeuse.Commentas-tupu?Il se leva furieux. Il se dirigea vers la jeune fille et l’attrapa par le bras, la forçant à semettre
debout.—Tumefaismal.—Jem’enmoqueéperdument.As-tupenséàlapeinequetuasinfligéeàThéaetàlasouffrance
quejeressensencetinstant?Tuasbrisémoncœurunefoisencore.Ingrids’interposaentresonfiletChloé.Julienposalesmainssursatêteetfitlescentpas.Iln’en
revenaitpas.Cettefilleétaitvraimentunepeste.—Pourquoias-tufaitça?demandaIngrid.—J’aipeurdemeretrouverseuleàélevercetenfant.Paulestimmature,iln’arrivepasàgarder
untravailetsesoucieplusdesesjeuxvidéoquedureste.Jevoulaisunbonpèrepourcepetit.Julienétaitl’hommedelasituation.
—Terends-tucomptedecequetuviensdefaire?Es-tucertainequePaulestlegéniteur?—Oui,jesuisenceintedequatremois.
Juliense tournaverselleet lafixaavecfroideur.Àcettepériode, ilétaitpartienstageà l’autreboutduCanada,etcepourplusieurssemaines.Iln’enrevenaitpasd’apprendrequ’ellel’avaittrompédepuissilongtemps.Maisenmêmetemps,ilétaitsoulagé.IlallaitpouvoirretrouverThéa.Soncœursemitàbattreplusfortensongeantàlajeunefemme.
Chapitre16Chloéquitta lamaisond’Ingriddans l’heurequisuivit.Juliennepritpas le tempsde luidireau
revoirnimêmedeluiadresserunderniermot.Illaissasamèrelaconduirejusqu’àlagare.Iln’avaitplusqu’uneidéeentête:retrouverThéa,sesbras,sesbaisers.Ilsouffraitdelasavoirloindeluietilavaitplusquejamaisbesoindelasentircontrelui.
Il essaya par tous les moyens de la joindre, mais celle-ci continuait d’ignorer ses appels. Ilsoufflait,pestaitetsefrottaitnerveusementlevisage.Àbout,ilsaisitsavesteetdécidadeserendrechezelle.Devantsaporte,iltoqua,sonna,maissanssuccès.Ilfitalorsletourdujardinettrouvaunemaison vide. Il était au bord du précipice. Il n’en pouvait plus. Il allait devenir fou. Où était-ellepartie?
Ilrentrachezluientraînantlespieds.Ilavaitlecœurenmiettes.Ilsejetadanslecanapéetrestalàsansbouger.Ingriddescenditlesdernièresmarchesdesescaliersetsedirigeaverslacuisine.Elleseservitunverred’eauetenbutunegorgée.
—Oùétais-tu?—Chez Théa. Il faut absolument que je lui parle. Comme elle ne répond pas au téléphone, je
pensaisqueceseraitdifférentsij’allaislavoir,maiscenefutpaslecas.—Ellen’estpaschezelle.Juliensetournasubitementverssamère.Il lafixaavecinterrogation.Devantsonmutisme,ilse
levaetfitquelquespasdanssadirection.—Oùest-elle?Tuaseudesesnouvelles?—Pasdirectement.C’estCarolinequim’enadonné.J’aibienessayédel’appeler,maisellerefuse
demerépondre.Commentpuis-jeluienvouloir?—Est-cequ’ellevabien?—Disonsqu’elletientlecoup.Tul’aimesvraiment,n’est-cepas?—Detoutmoncœur,maman.Elleestmonrayondesoleil,maraisondevivre.Quandjesuisavec
elle,toutmeparaîtplusbeau.Ingridbaissalesyeuxverslesoletsesouvintdesparolesdesonamielorsqu’elleluiavaitdécrit
son amant. Elle en avait parlé avec une telle conviction, avec tant de passion. La même quiapparemmentdévoraitsonfils.
—J’aipeurquecesoituneerreur, Julien.Elleestplusâgéeque toi.As-tusongéauregarddesautres?Àcequel’onvadiresurelle?Survous?
—Jem’enmoqueroyalement.Cequicompte,c’estcequel’onéprouvel’unpourl’autre.—Théaestfragile.Ellenesupporterapasunnouveléchecsentimental,surtoutdanssonétat.—Maman,jet’enprie,dis-moioùellesetrouve.Ingridselaissatombersursachaise.Elleétaitperdue.Devait-ellepoussersonfilsàrejoindreson
amie?Ellevoulaitleurbonheuràtouslesdeux,maisellen’arrivaitpasàconcevoirqu’ilpuisseêtrecommun.Julienseprécipitaverselleets’agenouilla.Illuisaisitlesdoigts,lesserraavecforceetlasuppliaduregard.Ingridlefixaitavectristesseenconstatantquesonpetitgarçonavaitbiengrandi.Ilétaitdevenuunhomme.
Ellefermalesyeuxetexpiralentement.—ThéaestaucampingLesTamarisàBarcarès.Elleestpartierejoindresasœuretsonfils.
Juliensouritàpleinesdents,ilembrassalesmainsdesamèreetseleva.Sansréfléchir,ilattrapalesclésdesavoitureposéessurunmeubledansl’entréeetouvritlaporte.
— Julien ! l’interpella Ingrid. Sois prudent. Il ne sert à rien de rouler comme un fou. Théa nes’envolerapas.
—Promis.Ilavaitàpeinefinisaphrasequ’ilétaitdéjàparti.Ingrids’emparaalorsdesontéléphoneetappela
Caroline.—BonjourIngrid.Commentçava?—Disonsqueçapourraitallermieux.JesuisinquiètepourJulien.IlestenroutepourBarcarès.—C’estuneblague?—Non.Ingridracontatoutel’histoireàCaroline,quirestabouchebée,maiselleétaitsoulagée.Elleétait
heureuse de la tournure que cela prenait.Après tout, sa sœur avait bien le droit au bonheur.Maiscommentlaconvaincrederencontrerlejeunehomme?Ellerefusaitsesappelsetn’avaitpasécoutélesnombreuxmessagesqu’illuiavaitlaissés.
—TudevraisluidirepourlemensongedeChloé.— Ces derniers jours, Julien est devenu un sujet prohibé. Je vois bien qu’elle souffre de son
absence et qu’elle s’efforce de ne pas songer à lui. C’est pourquoi elle m’a fait clairementcomprendredeneplusenparler.Jepensequ’ilvautmieuxgarderl’effetdesurprise.Sielleapprendqu’ilvientici,elleestcapabledefuir.Tusaiscombienellepeutêtretêtue.
—Ohqueoui!Bon,ehbien,danscecas,jevaisenvoyertonnuméroàJulien,etiltecontacteradèsqu’ilseraarrivé.
—C’est préférable. Jem’arrangerai pour qu’ils se retrouvent seuls dans un endroit où elle nepourrapaspartir.
—J’ail’impressiond’êtredansunfilm,repritIngrid.C’estàlafoisexistantetinquiétant.D’autantqu’ils’agitdemonfils.
—Oui,maisc’estpoursonbonheur.—As-tudéjàuneidéeentête?—Peut-êtrebien.Quandarrivera-t-il?Ingrid regarda samontre, il était treize heures. Si Julien respectait les limitations, il devrait en
avoirpourhuitheuresenviron.—Vingtetuneheures.—Parfait,pilepourlemomentdurepas!Jeterappellepourt’expliquercequej’aiimaginédès
quetoutseraréglé.—OK.Quantàmoi,jevaistâcherdejoindreJulienpourluidonnertonnuméro.Ingridraccrocha,elleposal’appareilsurlatableetpassaunemaindanssescheveux.Elleavaitle
cœurquipalpitaitàviveallure.Finalement,elleavaitprislabonnedécision.CommeJulienluiavaitdit,l’âgen’avaitaucuneimportance,c’étaitlessentimentsquicomptaient.
Chapitre17Seul au volant de son véhicule, Julien roulait avec empressement. Il essayait de respecter les
limitations de vitesse,mais avait dumal de s’y tenir. Il avait tellement hâte de retrouver Théa, depouvoirlaserrerdanssesbrasetdeluidirecombienil l’aimait.Ilnelaisseraitplusriensemettreentreeux,pasmêmelamaladiedecettedernière.
Ils’arrêtadansunepetitestation,aprèsquatreheuresderoute.Ilbutuncaféetappelasamèrequiavaittentédelejoindreàtroisreprises.
— Julien, je ne souhaite pas teminer lemoral,mais d’aprèsCaroline,Théa est bien décidée àt’oublier.Ellerefusequel’onparledetoidevantelle.Ilestdoncplusqueprobablequ’ellerefusedetevoir.
—Jeneluilaisseraipaslechoix.—Théaestbornée.Sielleneveutpasterencontrer,elleneleferapas.—Jenedispascommetoi.Ellem’écoutera.—Tulaconnaismal.EllecroiraquetuluimenspourChloéjustedanslebutqu’elleterevienne.
Carolineadoncimaginéunpetitstratagème.—Unstratagème?répétaJuliendubitatif.Tumefaispeurlà.—Oh!Nejouepaslesrabat-joie.Tuveuxlaretrouver,ouiounon?—Évidemment.—Alorsvoilà.CarolinevaemmenerThéasurunbateaupourunebalade.Unefoisàbord,elle
s’éclipseraettuferastonapparition.Biensûr,elleaprévuunrepasettoutletralala.—C’estunpeutiréparlescheveuxvotrehistoire,tunecroispas?—En effet,mais c’est romantique.Et aumoins elle nepourra pas sauter par-dessusbordpour
essayerdetefuir.—Tutrouvesçadrôle,maman?Julienrepritsonchemin,latêterempliededoutes.David,lemarideCaroline,l’attendaitauport
prèsdunavire.Il luidonnaunsacavecdesvêtementspropresetélégantset ilallasechanger.Unefoistoutmisenplace,ilpatientanerveusement.
Théaarrivaquelquesminutesplus tardencompagniede sa sœur.Ellene semblaitpasvraimentheureused’êtrelà.
— Je ne comprends pas pourquoi tu m’as demandé de passer cette robe. Elle est un peu trophabilléepourunebaladeenbateau,non?
—Elleestparfaite.—Jetevoisvenir.Situessaiesdemefairerencontrerquelqu’unpourmesortirJuliendelatête
c’estpeineperdue.—Maisnon,tutetrompes.—Alors,pourquoiavoirrefuséqueBastiennousaccompagne?—Tuposestoujourstropdequestions.Théas’arrêtabrusquementetfitdemi-tour.Carolinedutluicouriraprèsetlatirerparlebraspour
lafairemontersurlenavire.Ellelaconduisitàl’avantetluidemandad’attendrependantqu’elleallaitchercherquelquechose.Lebateaus’éloignaduportetThéa,quinevoyaitplusCaroline,sedirigeaverslasortie.Ellesemitàcrierendistinguantsasœursurlaberge.C’estàcetinstantqueJulienfitsonapparition.Ilseplaçaderrièresabelleetadmirasasublimesilhouette.Danscetterobeverte,elle
étaitmagnifique.Ils’avançad’unpasetfitcraquerleparquet.Elleseretourna.Ellerestabouchebéeenapercevantlejeunehomme.
—Julien,murmura-t-elle.Maisqu’est-ceque…Elleétaitsiperturbée,siémuequ’elleneputfinirsaphrase.Elleavaittantenviedesejeterdans
sesbras,maiselles’yrefusait.Celaneferaitqu’accroîtresadouleur.Ellereculatoutetremblanteensongeantàleurrupture.Ilétaithorsdequestionqu’ellereviennesursadécision.
—Théa,attends.Julien la rattrapa et l’enlaça. Puis, sans lui laisser le temps de protester, il l’embrassa avec
tendresse. Cette dernière s’abandonna à cette chaleur enivrante et à ce parfum envoûtant. Elle nepouvaityrésister.Deslarmessemirentàglissersursesjoues.Toutçaétaitimpossible.Ellesedéfitdesonétreinteets’éloigna.C’étaittropdurderesterprèsdelui.
—Non,Julien,jenepeuxpas.—Jet’enprie,écoute-moi.—Àquoibon?VoyantleregardfuyantdesacompagneJuliendécidadeluiavouerlavéritésurlechamp.—Jenesuispaslepèredel’enfantdeChloé.Elleamenti.Théarestasansvoix.Jamaisellen’aurait imaginéqu’ilpuisseinventerunetellehistoirepourla
fairerevenirauprèsdelui.Ellesecoualatêtenerveusementrefusantdecroiresesparoles.—Pourquoiaurait-ellefaitça?Çan’aaucunsens.Toutcommecettemascarade.Commentas-tu
pumettremasœurdanslecoup?—C’estellequiaeucetteidée.Elleétaitconvaincuequetunevoudraispasmeparler,etencore
moinsmevoir.Ici,aumoins,elleétaitsûrequetunet’enfuiraispas.Théafronçalessourcils.C’étaittoutàfaitlegenredeCaroline,maispourquoiaurait-ellefaitune
chosepareille? Julienprofitadu faitqueThéasoitperduedanssespenséespourse rapprocher. Ill’encercladesesbrasetlaserraavecforce.
—Jenetemenspas.MamèreouCarolinepourrontteleconfirmer.Théa plongea son regard dans celui du jeune homme. Elle fut déstabilisée par la sincérité et
l’amourqu’elleydécela.Elleouvritlabouche,maisaucunsonn’ensortit.Elleposasatêtecontreletorse de Julien et ferma les yeux. Si seulement tout était vrai... Il luimanquait tellement. Julien luirelevalementonetcapturaseslèvres.
—Jenelaisseraiplusriensemettreentrenous,Théa.Jet’aimeetjeveuxterendreheureuse.—Moiaussi,jet’aime.—Alors,oublionstoutçaetrepartonsàzéro.Ils’écartadequelquespasetluitenditlamain.—Bonjour,jem’appelleJulien.Théalasaisitavecunlargesourire.—Enchantée.Moi,c’estThéa.Àsuivre…
L’Auteur
FrédériqueArnouldestnéeennovembre1983dansunecommunedelaMeuse.Pousséeparune
grossessemalheureuse,ellevaseprendred’affectionpourlalectureetsurtoutcelledel’imaginaire.À force de plonger de monde en monde en compagnie de créatures fantastiques et de magie,Frédériqueafiniparprendrelaplumeet inventersonpropreunivers.D’abordpourfuir laréalité,puispour faire rêver les autres.Et elle espère sincèrement réussir à entraîner les lecteursvers ceshorizonslointains.
Notedel’éditeurTousleslivresdeséditionsL'ivre-BooksontsansDRM,sansprotection.Il est possible que, selon le site où vous avez téléchargé cet ebook, des verrous aient été rajoutésmalgrénotredésirdevousfaireprofiterpleinementetlibrementdesoeuvresdenosauteurs.Sitelestlecas,nousnousengageonsàvousfournirgratuitementuneversionnonprotégéedulivrenumériquequevousavezacheté.Pourcefaire,mercidenouscontacterparmail(ivrebook@yahoo.fr)ennousjoignantlapreuvedevotre achat (facture) et l'identification de votre mail correspondant à votre compte client sur lalibrairiequivousavenducetebook.Notrebutestdevousvendrenoslivres,nonderestreindrevotrelibertédanslalecturedenosœuvres.
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©L’ivre-Book2016
ISBN:978-2-36892-291-0
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