hyponcondriaques cesmaladespassi · 2014-05-12 · peau d'un hypocondriaque, est certes peu...

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I

HYPONCONDRIAQUES

CESMALADESPAS SIIMAGINAIRESQUEÇA !De ces patients là, on ne parle presque jamais... sauf au cinéma ! Et pourtant, ils remplissent vossalles d'attente et envahissent la Toile.Selon un sondage récent, un peu plus d'un Français sur dixsouffre d'hypocondrie mais la pathologie n'existe plus dans la classification des psychiatres, le fameuxDSMV ! Resteque ces «malades »pas comme les autres, thème de la comédie de Dany Boon, ensalles depuis mercredi, sont un authentique casse-tête pour leur médecin. Témoignages...

Dossier réalisé par Giulia Gandolfi, avec Alain Letot et le Dr Jean-Pierre Rageau

On en a tous un dans sa salle d'attente. Celuiqui a le chic pour se découvrir un cancer tousles quatre matins. Celle qui abuse du gel antibactérien. Et, depuis qu'ils sont connectés,

ils n'arrivent plus seulement avec des questions maisavec. .. un diagnostic ! Eux, ce sont les hypocondriaques.Le dernier film de Dany Boon, « Supercondriaque », sortien salles mercredi [voirp. 10), leur est consacré. Le portrait qu'il en fait, en se mettant lui-même en scène dans lapeau d'un hypocondriaque, est certes peu flatteur mais ilaura au moins le mérite de détendre les nombreux Français qui souffrent d'hypocondrie.

En effet, à en croire un sondage Ifop/Capital Imagespublié dimanche, un peu plus d'un Français sur dix seraitdans ce cas. Alors que 520Zodes personnes interrogées disent avoir peur d'être atteintes d'une maladie,ou d'être en train d'en développer une, lorsquecertains signes ou symptômes les inquiètent,13^0 s'angoissent même en l'absence de toutsymptôme. Un phénomène tout sauf marginalqui est vécu au quotidien par les médecins quenous avons interrogés. «Des patients hypocondriaques, on en a tous », affirme le Dr Charles-Henri Guez. Généraliste à Sainte-Foy-Lès-Lyon,il estime en voir « deux ou trois par semaine ».Mais loin d'être agacé par leur présence, leDr Guez affectionne plutôt ces patients à la fois« gentils »et « inquiets ». « Ilssouffrent d'une vraie inquiétude et, pour être rassurés, ils ont besoin de preuves objectives », d'où les demandes parfois pressantes d'examenscomplémentaires.

Alors qu'en 2012 un sondage TNSpour la FédérationHospitalière de France (FHF) révélait qu'environ un actesur quatre était superflu, on peut évidemment s'interrogersur la multiplication des consultationset des examens complémentaires. Le Dr Guez a la réponse : pour lui, si cer-

Prendrele temps,dialoguer,rentrer

en contact avec sonpatient

hypocondriaquepermettrait de« creverl'abcèsd'inquiétude »

tains actes demandés par les patients ne sont pas «techniquement justifiés », ils le sont toujours « médicalement »parlant.

Céder ne suffit pas toujours à rassurerReste que quand le médecin cède et envoie les patients hypocondriaques fairedes examens, celane suffitpas toujoursà les rassurer. « On les revoit le lundi avec les résultats desanalyses. Sije n'ai rien, c'est que c'est ailleurs, docteur, disent-ils ».Que fairealors pour éviter de rentrer dans un cercle vicieux ? LeDr Guezest convaincu que la clé de la réussite estdans l'écoute.«Enprenant un peu de temps,on arriveà lesrasséréner». Etde raconter le casd'une de ses patientesqui va beaucoup mieux depuisqu'elle consultetous les moispour des kystes rénaux tout à fait bénins mais qui l'in

quiètent. « Avant j'essayais de repousser laconsultation. Aujourd'hui que j'ai acceptéde lavoir de façon régulière,elle est rassurée, ce quipermet de repousser la date du scanner ».

Cemilitant SMLverrait d'un bon œil la miseen place d'une "-consultation longuede soutien» afin de s'occuper de ce type de patients. Prendre le temps, dialoguer, rentrer en contact avecson patient permettrait, selon les mots du DrGuez, de «creverl'abcès d'inquiétude ». Commepour cette autre femme qui se plaignait d'unesensation de boule dans la gorge : l'interroga

toirea permis de révélerque sa sœur avait souffertd'un cancer de la gorge, d'où sa peur.

Généraliste à La Cuerche de Bretagne, le Dr FrançoisLe Hetct a vécu à peu près la même expérience il y a deuxsemaines,quand il a reçu un jeune de 23 ans victimede boufféesd'angoissesdues à lapeur d'avoir un cancer.Lorsde l'interrogatoire, il ne s'est donc pas limité à la description dessymptômes. «Je l'ai interrogésur sa vie, sur son enfance...J'ai donc appris que son papa avait été en prison pendant

Tous droits de reproduction réservés

Date : 28/02/2014Pays : FRANCEPage(s) : 8-10Rubrique : ACTUALITÉ PROFESSIONN…Diffusion : (45000)Périodicité : HebdomadaireSurface : 196 %

24 mois alors qu 'il était à peine âgé de 7 ans ». S'étant retrouvé dans la misère, il avait eu la sensation d'avoir étéabandonné... Lfndiagnostic d'angoisse due a un traumatisme doue. « Aller le rechercherestproductif et cela économise bien des explorations complémentaires inutiles », souligne ce Breton syndiqué à la FMF.Deson côté, le présidentde la FMF,Jean-Paul Hamon, qui exerce à Clamait, affirmese méfier de ces patients croyant dur comme ferêtre atteintsde maladies incurables. « J'en avais un qui avait toujoursunpet de travers, de préférenceun cancer ou un infarctus : ilafini par en faire un vrai à la Samaritaine !», ironise-t-il.

Une maladie... ou un symptôme ?Si le DrGuez et le Dr LeHetet savent écouter leurs patientshypocondriaques, le Dr Christine Bertin-Belot tente de venir à bout de leurs angoisses et même de les guérir. Parceque s'il y a bien une pathologie dont les hypocondriaquesne croient pas être atteints, c'est bien l'hypocondrie !Pourcette homéopathe syndiquée au SML et installée àBesançon, les patients hypocondriaques sont son lot quotidien. «J'en voisénormément », affinme-t-elle. Et d'expliquer comment son expertise particulière lui a « facilitéla vie » dans la prise en charge de ces patients. « L'hypocondrie n 'est pas à proprement dit une maladie mais unsymptôme, comme l'anxiété et l'angoisse qui s'inscrit dansle trouble anxieux généralisé ». explique-t-elle. De là les« plaintes multiples et disproportionnées » qui caractérisent les interrogatoires de ces patients.

Cependant, il faut toujours examiner le patient «pour éliminer une éventualité rare mais qui existe» qu'il souffre effectivementd'une maladiegrave.Pourensuite,si tout estdansla norme, « le rassurer et lui prescrireun remèdeadapté à sasituation ». Mais « sûrement pas des anxiolytiques ni desantidépresseurs», le Dr Bertin-Beloty est opposée.Quandelleest confrontéeà ces patients, elle leur conseilleplutôt de fairedes exercices de relaxation ou de s'adonner à des activitéscomme le théâtre, utiles pour l'équilibre personnel. Et si çane suffisait pas, l'homéopathe les dirige vers un psychiatreou un psychologue psychothérapeute. « Les thérapies cogni-tivo-coportementalesmarchent bien »,assure-t-elle.

La Toile pour se défouler..Mais si c'est au cabinet que les patients hypocondriaquesharcèlent leur médecin, ces angoissés de la maladie se défoulent aussi sur la Toile. La preuve ? Le succès des »

Dr DOMINIQUE DUPACNE*

« Cespatients doivents'interdire les recherchessanté sur Internet »Internet et l'essor de l'informationsanté rend-il hypocondriaque ?Dr Dominique Dupagne Non, on ne devient pashypocondriaque à caused'Internet, En revanche, Interneta un effet dévastateur chez leshypocondriaques, en leur fournissant matière à s'angoissersans fin face au moindre symptôme. Les hypocondriaques doivent s'interdire les recherchessanté sur Internet, comme unjoueur pathologique se fait interdire de casino.Si Internet ne rend pas hypocondriaquecontribue-t-il à rendre plus visibleet publique l'hypocondrie ?Dr D. d. Oui, c'est exactement cela. Internet permetde mettre des chiffres sur l'hypocondrie. Je pensenotamment aux discussions sur mon forum concernant le risque de contamination par le HIV : desmilliers de messages, plus d'un million de lectures...Les patients peuvent-ils être plus efficacesque les médecins pour rassurer les patientshypocondriaques ?Dr D. D. Généralement non. Les hypocondriaquessont très sensibles à l'argument d'autorité. La seuleexception concerne les « pairs », c'est-à-dire deshypocondriaques souffrant d'angoisses identiques,qui ont réussi à surmonter leur peur face à unemême maladie. Ils rédigent parfois des synthèsesprécieuses et savent utiliser les mots et lesarguments susceptibles de convaincre leurscompagnons d'infortune. C'est un des rares apportspositifs du web pour l'hypocondriaque. «*6énéra1isteparisienetfondateurdela commuaautédepatientsAteute.org

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» sites d'information santé mais surtout des forums participatifs.Le Dr Dominique Dupagne en sait quelque chose[lire p. 9). Ce généraliste parisien est, en effet, à l'origined'une communauté web de patients : le site atoute.org qu'ila fondé en 2000. Pourtant, pour lui, l'hypocondrie n'estpas forcement liée à l'essor de l'information santé sur Internet. « Cetroublesembleaussi ancien que l'horno sapiens.Je trouve qu'il est parfaitement résumé par WoodyAllen :"Tant que l'homme sera mortel, il ne pourra pas être totalement décontracté ".Je suis plutôt empathique devant mesmalades imaginaires, mais il faut reconnaître qu'ils sontépuisants », avoue-t-il.

Les hypocondriaques qu'il voit au cabinet ne sonl passi différents pourtant de ceux qu'il rencontre virtuellementsur la Toile : « Le trouble est rigoureusement le même. Lespeurs et les mécanismes de l'angoisse crééepar l'écoute excessivedu corps sont identiques », analyse-t-il. Cependant,pour lui, si le dialogueau cabinetpermet d'apaiser, au moinstransitoirement, l'angoisse de l'hypocondriaque, lesforumsseraient beaucoup moins efficaces : «H a besoin d'une relation personnalisée.Pour lui, sonproblèmeest unique et liredes réponsesfaites à d'autres nesuffitpas à le rassurer ». UneTéflexionqui va dans le même sens que celle du Pr MichelLejoyeux,psychiatre : «La seuleconnaissance rassurante estune connaissance personnalisée, c'est-à-dire avec le médecin ». Une façon de dire que même quand le malade estimaginaire, le médecin, lui, reste incontournable, m

« SUPERCONDRIAQUE» :UN RIRE PEU CONTAGIEUXChaquematin, RomainFaubertse réveilleà l'articlede lamort... Ilfautbien dire que lemétier qu'ilexerce,photographepour un site médicalgrandpublic,est pourbeaucoupdans l'hypocondriemaladivequia faitde luiun

peureuxnévropathe.Enfait,Romainn'a qu'un seulami,son médecintraitant, leDrDimitriZvenkaquia finipar le prendre en pitiéà le

r ^^ voirdébarquerau moindre' ^^ symptômedans son

i ^M cabinet... Maisle bondocteurvafinirpar selasser

de cemaladetrop imaginairequilui gâchejusqu'à sa viefamiliale... S'ils'en était tenulà, DanyBoon(photo),qui se dit lui-mêmehypocondriaque,aurait signéavec«Supercondriaque»une comédiesympathiqueavecquelquesscènes debon aloicomme celleoù,dans la salled'attente duDr Zvenka,Faubertmet en gardeles autrespatients contrelesvieillesrevueslaisséesvolontairementà leur dispositionpar le fourbemédicastre,car ellessont pleinesde bactériesqui lesrendrontplus maladesencore...Maisn'est pasWoodyAllen qui veut et la comédie finit par faire long feu...

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