amnesty international document interne origine : … · gaafar yassin ahmad abdullah torturé...

34
AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Index AI : AFR 54/44/94 - ÉFAI - Diffusion aux seuls membres d'Amnesty International Londres, octobre 1994 Origine : Service des campagnes Service de recherche Afrique Destinataires : toutes les sections coordonnateurs/campagnes coordonnateurs/recherche de soutiens extérieurs coordonnateurs Soudan coordonnateurs EAFRAN CAMPAGNE SOUDAN 25 janvier 1995 - fin juillet 1995 Cas d'appel *1 Résumé Le document externe ci-joint contient 15 cas d'appel à utiliser pour la campagne sur le Soudan – qui se tiendra du 25 janvier 1995 à la fin juillet 1995 –, ainsi qu'une brève introduction relative à la situation des droits de l'homme dans ce pays. Ces cas d'appel illustrent l'ampleur des préoccupations d'Amnesty International au Soudan. Celles-ci sont décrites plus en détail dans le livre intitulé Soudan. Quel avenir pour les droits de l'homme ? (index AI : 54/02/95), ainsi que dans le briefing intitulé Soudan. Désastre humanitaire et violations des droits fondamentaux (index AI : AFR 54/01/95), qui seront publiés le 25 janvier 1995. Le document ci-joint est destiné à être largement utilisé par les sections et les groupes participant à la campagne, afin qu'ils puissent diffuser l'information auprès du public et rechercher des soutiens extérieurs. Les adresses où doivent être envoyés les appels sont indiquées après chacun des cas, afin que ceux-ci puissent être diffusés séparément, si nécessaire. Diffusion Le document ci-joint est envoyé directement par le Secrétariat international (SI) à tous les destinataires mentionnés dans l'en-tête de la présente circulaire. Il incombe aux coordonnateurs/campagnes de faire le nécessaire pour que les réseaux ou groupes de leur section * La version originale en langue anglaise du document résumé ici a été publiée par Amnesty International, Secrétariat international, 1 Easton Street, Londres WC1X 8DJ, Royaume-Uni, sous le titre Sudan campaign (25 January 1995 to end July 1995): Cases for appeals. Seule la version anglaise fait foi. La version française a été traduite et diffusée aux sections francophones et au Secrétariat international par LES ÉDITIONS FRANCOPHONES D'AMNESTY INTERNATIONAL - ÉFAI - décembre 1994.

Upload: others

Post on 23-May-2020

15 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Index AI : AFR 54/44/94 - ÉFAI - Diffusion aux seuls membres d'Amnesty International Londres, octobre 1994 Origine : Service des campagnes Service de recherche Afrique Destinataires : toutes les sections coordonnateurs/campagnes coordonnateurs/recherche de soutiens extérieurs coordonnateurs Soudan coordonnateurs EAFRAN CAMPAGNE SOUDAN 25 janvier 1995 - fin juillet 1995 Cas d'appel*1

Résumé Le document externe ci-joint contient 15 cas d'appel à utiliser pour la campagne sur le Soudan – qui se tiendra du 25 janvier 1995 à la fin juillet 1995 –, ainsi qu'une brève introduction relative à la situation des droits de l'homme dans ce pays. Ces cas d'appel illustrent l'ampleur des préoccupations d'Amnesty International au Soudan. Celles-ci sont décrites plus en détail dans le livre intitulé Soudan. Quel avenir pour les droits de l'homme ? (index AI : 54/02/95), ainsi que dans le briefing intitulé Soudan. Désastre humanitaire et violations des droits fondamentaux (index AI : AFR 54/01/95), qui seront publiés le 25 janvier 1995. Le document ci-joint est destiné à être largement utilisé par les sections et les groupes participant à la campagne, afin qu'ils puissent diffuser l'information auprès du public et rechercher des soutiens extérieurs. Les adresses où doivent être envoyés les appels sont indiquées après chacun des cas, afin que ceux-ci puissent être diffusés séparément, si nécessaire. Diffusion Le document ci-joint est envoyé directement par le Secrétariat international (SI) à tous les destinataires mentionnés dans l'en-tête de la présente circulaire. Il incombe aux coordonnateurs/campagnes de faire le nécessaire pour que les réseaux ou groupes de leur section

* La version originale en langue anglaise du document résumé ici a été publiée par Amnesty International, Secrétariat international, 1 Easton Street, Londres WC1X 8DJ, Royaume-Uni, sous le titre Sudan campaign (25 January 1995 to end July 1995): Cases for appeals. Seule la version anglaise fait foi. La version française a été traduite et diffusée aux sections francophones et au Secrétariat international par LES ÉDITIONS FRANCOPHONES D'AMNESTY INTERNATIONAL - ÉFAI - décembre 1994.

Page 2: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

2

qui participent à la campagne mais ne sont pas inclus dans la diffusion du SI puissent disposer de ce document. Actions recommandées 1. Avant de copier et de diffuser à l'extérieur le document externe ci-joint, n'oubliez pas de détacher la présente feuille, dont la destination est interne. Vous pouvez diffuser le document ci-joint au public, aux organisations non gouvernementales (ONG), à vos soutiens extérieurs, aux médias, aux membres de votre gouvernement, à des parlementaires et à d'autres personnes, en fonction de la stratégie nationale adoptée pour cette campagne. Veuillez noter que les cas d'appel ne font qu'illustrer les sujets de préoccupation d'Amnesty International au Soudan. Ils viennent en complément d'autres outils d'information préparés pour cette campagne, qui donnent plus de détails sur les violations des droits de l'homme pratiquées de façon persistante au Soudan. 2. La totalité des recommandations pour cette campagne, y compris celles concernant les cas d'appel, se trouvent dans les deux principales circulaires d'action relatives à la campagne, intitulées Informations de base et stratégie (index AI : AFR 54/33/94) et Principales actions recommandées (index AI : AFR 54/34/94). La liste complète de tous les outils d'information préparés par le SI pour la campagne sur le Soudan figure aux pages 26 à 28 de la circulaire AFR 54/33/94. 3. Les indications pour écrire les lettres, ainsi que les adresses des autorités soudanaises, sont données à la fin de chacun des cas afin que ceux-ci puissent être utilisés séparément. 4. Encouragez les membres à écrire en arabe ou en anglais aux autorités gouvernementales soudanaises, lorsque cela leur est possible, et en anglais aux responsables de l'APLS. Il est cependant toujours possible de rédiger le courrier dans sa propre langue. 5. Un grand nombre de photographies illustrant les cas d'appel peuvent être obtenues auprès du SI en remplissant le bon de commande photos (index AI : AFR 54/47/94) envoyé aux sections et aux coordonnateurs/campagnes. Le SI a aussi préparé une exposition d'affiches pour cette campagne. Il est possible de se la procurer auprès du SI en remplissant le bon de commande pour l'exposition d'affiches sur la campagne Soudan (index AI : AFR 54/39/94). Cette exposition illustre les sujets de préoccupation d'Amnesty International plutôt que des cas individuels. 6. Le SI mettra à jour, si nécessaire, les informations contenues dans le document externe ci-joint, afin de vous tenir informés de l'évolution éventuelle des cas décrits. 7. Si vous avez des questions sur les cas d'appel ou sur la campagne Soudan en général, prenez contact avec Carina Tertsakian, du Programme Afrique, au SI.

Page 3: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

3

AMNESTY INTERNATIONAL ÉFAI Index AI : ASA 54/44/94 DOCUMENT EXTERNE Londres, octobre 1994 SOUDAN Quel avenir pour les droits de l'homme ? Cas d'appel Le 30 juin 1989, un groupe de militaires dirigés par le général de brigade Omar Hassan Ahmad el Béchir a renversé le tout récent gouvernement pluraliste du Soudan et promis une révolution de « salut national ». Du point de vue des droits de l'homme, c'est une véritable catastrophe qui s'en est suivie. La dictature militaire se maintient au pouvoir par une politique de répression tous azimuts. Dans tout le pays, du Nord au Sud, le gouvernement de Khartoum bafoue les droits des Soudanais en écrasant toute opposition à sa propre idéologie d'islam politique. Musulmans et chrétiens, citadins et paysans, personne n'est épargné par les violations des droits de l'homme qui ravagent de façon persistante le Soudan. Le gouvernement a démantelé la société civile. Des purges ont été opérées dans la presse, le pouvoir judiciaire, les partis politiques, les syndicats et les universités. Les personnes qui tentent de résister de façon non violente au gouvernement s'exposent à être emprisonnées, torturées et parfois tuées. Le Sud et les régions voisines continuent d'être en proie à une guerre civile féroce, qui a éclaté en 1983 et oppose les forces gouvernementales à l'Armée populaire de libération du Soudan (APLS). En 1991, ce mouvement d'opposition armée s'est scindé en deux factions. La guerre civile a causé la mort de plus d'un million de personnes. Toutes les parties au conflit ont, de propos délibéré, pris pour cible les populations civiles. Des milliers de Soudanais ont été victimes d'homicides à caractère politique imputables tant aux forces de sécurité qu'à l'APLS. Des millions de personnes ont dû fuir de chez elles et ne doivent leur survie qu'à l'aide alimentaire qui leur est dispensée. Les 15 cas décrits ici illustrent l'ampleur des atteintes aux droits de l'homme commises tant par le gouvernement soudanais que par les deux factions de l'APLS. Ils ne représentent qu'une infime fraction de tous ceux, hommes, femmes et enfants, qui continuent de souffrir aux mains du gouvernement ou de l'opposition armée. En faisant connaître ces cas et en envoyant des appels aux autorités soudanaises, vous pouvez contribuer à faire cesser les atteintes aux droits de l'homme au Soudan et montrer au peuple soudanais que la situation dans le pays vous préoccupe. Soutenez le peuple soudanais dans sa lutte pour les droits de l'homme !

Page 4: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

4

Abdelrahman Abdallah NUGDALLAH Procès inéquitable et torture d'un ancien ministre du gouvernement Abdelrahman Abdallah Nugdallah est né à Omdourman en 1945. Il est marié et père de sept enfants. Vers la fin des années 70, il a étudié l'économie dans l'ex-Yougoslavie puis, dans les années 80, a vécu deux ans en Arabie Saoudite. Ancien député et membre du parti Oumma, aujourd'hui interdit, Abdelrahman Abdallah Nugdallah est une figure éminente de la confrérie islamique Ansar. Entre 1986 et 1989, il a dirigé le Conseil pour les affaires religieuses au sein du gouvernement élu de Sadek el Mahdi. Le gouvernement actuel a pris le pouvoir à la faveur d'un coup d'État en 1989. Le 20 août 1991, les autorités ont annoncé qu'elles avaient déjoué un complot visant à renverser le gouvernement. Au cours des jours qui ont suivi, au moins 80 civils et officiers de l'armée ont été arrêtés. Nombre d'entre eux entretenaient des liens avec l'Oumma et le Parti unioniste démocratique (PUD), tous deux interdits ; il s'agissait des deux principales formations politiques au Soudan avant que l'actuel gouvernement ne s'empare du pouvoir. Abdelrahman Abdallah Nugdallah était au nombre des personnes arrêtées. Les prisonniers ont d'abord été détenus au siège des services de sécurité à Khartoum, où nombre d'entre eux ont été sauvagement torturés. Abdelrahman Abdallah Nugdallah a ensuite été transféré dans un des centres de détention secrets du Soudan, connus sous le nom de "maisons fantômes", où il aurait subi des tortures. Le 11 octobre 1991, 53 détenus, dont Abdelrahman Abdallah Nugdallah, ont comparu devant des tribunaux militaires ad hoc. Les procès se sont déroulés de nuit, alors que le couvre-feu était en vigueur. Les accusés n'ont pas été autorisés à être assistés par des avocats et la procédure n'a duré que quelques minutes pour chacun d'eux. La famille et les amis d'Abdelrahman Abdallah Nugdallah ne savaient pas que les détenus étaient passés en jugement jusqu'à ce que la télévision soudanaise diffuse, début décembre 1991, un film sur leurs procès. C'est ainsi qu'ils ont appris qu'Abdelrahman Abdallah Nugdallah avait été condamné à mort, sentence commuée par la suite en une peine de détention à perpétuité. En juillet 1992, sa peine a été ramenée à dix ans d'emprisonnement à la faveur d'un décret gouvernemental. Certains prisonniers ont été libérés. Le ministre de la Justice a déclaré lors d'une conférence de presse que le décret « claquait la porte au nez de ceux qui prétendaient que les procès n'avaient pas été conformes à la justice ». Abdelrahman Abdallah Nugdallah est maintenu en prison à Shalla, dans l'extrême ouest du Soudan, sans avoir le droit d'interjeter appel de la sentence rendue à l'issue d'un procès manifestement inéquitable. Il avait conclu l'exposé de sa défense devant le tribunal par ces mots : « J'ai aimé le peuple soudanais et je me sens fier d'en faire partie. J'adore ce pays et je continuerai à donner ma vie, mon sang et mon âme en sacrifice pour lui. »

Page 5: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

5

Ce que vous pouvez faire ) À qui adresser vos appels :

Monsieur le Président de la République adresse : Président de la République Lieutenant-General Omar Hassan Ahmad al Bashi President People's Palace P.O. Box 281 Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de la Justice Mr Abd al Aziz Shiddo Minister of Justice & Attorney-General Ministry of Justice Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de l'Intérieur Dr al Tayib Ibrahim Mohamed Kheir Minister of the Interior Ministry of the Interior Khartoum Soudan

– exprimez votre préoccupation concernant le procès inéquitable à l'issue duquel Abdelrahman Abdallah Nugdallah a été condamné ; – réclamez qu'il soit libéré s'il n'est pas appelé à être rejugé dans un délai raisonnable, pour des infractions prévues par la loi, par un tribunal respectant les normes universellement reconnues en matière d'équité ; – demandez aux autorités d'enquêter sur les informations faisant état de tortures infligées à Abdelrahman Abdallah Nugdallah et à d'autres détenus après leur arrestation. Veuillez envoyer une copie de vos appels à la représentation diplomatique du Soudan dans votre pays.

Page 6: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

6

Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université de Khartoum. Il s'est marié en mars 1993. Lui et sa femme sont allés passer leur lune de miel en Jordanie et en Syrie, puis sont revenus à Khartoum le 22 avril. Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a été arrêté dès sa descente d'avion. Emmené au siège des services de sécurité, il y a subi un interrogatoire. Les agents qui l'interrogeaient lui ont dit qu'ils savaient qu'il avait reçu des explosifs de l'ambassade d'Égypte, et ils l'ont accusé de comploter en vue de perpétrer des actes de sabotage. Gaafar Yassin Ahmad Abdullah leur a déclaré qu'il n'était au courant de rien. Cependant, comme cela se passe pour des centaines de personnes détenues secrètement par les services de sécurité soudanais, cet homme a été soumis à de cruelles tortures physiques et mentales afin qu'il "avoue" le crime dont il était accusé. En même temps que plusieurs autres hommes arrêtés sous l'accusation de complot contre le gouvernement, il a été battu, brûlé au fer rouge, fouetté à coups de tuyau en plastique et contraint de demeurer pieds nus sur du métal brûlant. Il s'est vu interdire de manger, de dormir, d'aller aux toilettes et même de prier. Un jour, les détenus ont été extraits de leurs cellules ; on leur a dit qu'ils allaient être exécutés et qu'ils devraient tous faire leur testament. Gaafar Yassin Ahmad Abdullah était si faible qu'il a fallu le transporter hors de sa cellule. Les détenus n'ont pas été tués. Au lieu de cela, des responsables ont fait une vidéo d'eux, qui les montrait en train d'avouer les crimes dont il étaient accusés. Les tortures n'ont pas cessé pour autant. Gaafar Yassin Ahmad Abdullah s'est trouvé dans l'incapacité de se déplacer durant trois semaines et ses blessures se sont infectées. Début 1994, 12 accusés, dont Gaafar Yassin Ahmad Abdullah, ont été jugés publiquement pour complot contre l'État et espionnage. Dix-sept autres personnes, toutes en exil, ont été jugées par contumace. Il s'agissait-là de l'un des premiers grands procès politiques à se dérouler publiquement à Khartoum sous l'actuel gouvernement. Au cours du procès, des éléments circonstanciés étayés par des rapports médicaux ont fait apparaître qu'au moins cinq des accusés, dont Gaafar Yassin Ahmad Abdullah, avaient été sauvagement torturés. La thèse de l'accusation reposait sur des aveux arrachés sous la torture ; malgré cela, et tout en admettant qu'il y avait eu torture, le juge a refusé de déclarer ces aveux irrecevables à titre de preuve. Gaafar Yassin Ahmad Abdullah, ainsi que cinq autres personnes présentes à l'audience, s'est vu infliger une peine d'emprisonnement. Les autres accusés ont été remis en liberté. Neuf des personnes jugées par contumace ont été condamnées à dix ans d'emprisonnement. Aujourd'hui, Gaafar Yassin Ahmad Abdullah est très souvent transféré d'une prison à l'autre, ce qui rend difficile toute visite de sa famille. Un recours sera prochainement présenté pour faire appel de la sentence. « Depuis le début de la révolution, on a beaucoup parlé de torture [...] Les personnes qui ont été arrêtées sont à présent dans les rues, libres [...] Vérifiez par vous-même. Tout ce que l'on raconte n'est que mensonges. Les maisons fantômes, la torture, tout cela n'existe pas. » (Général Omar Hassan Ahmad el Béchir, président du Soudan) Ce que vous pouvez faire ) À qui adresser vos appels :

Monsieur le Président de la République adresse : Président de la République Lieutenant-General Omar Hassan Ahmad al Bashir President People's Palace P.O. Box 281 Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de la Justice Mr Abd al Aziz Shiddo Minister of Justice & Attorney-General Ministry of Justice Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse :

Page 7: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

7

Ministre de l'Intérieur Dr al Tayib Ibrahim Mohamed Kheir Minister of the Interior Ministry of the Interior Khartoum Soudan

– demandez que des enquêtes indépendantes et impartiales soient menées promptement sur les tortures infligées à Gaafar Yassin Ahmad Abdullah, ainsi que sur toutes les autres informations faisant état de torture, en insistant pour que les conclusions de ces enquêtes soient rendues publiques ; – priez instamment le gouvernement de veiller à ce que les auteurs d'actes de torture soient traduits en justice ; – demandez qu'il soit mis fin à la pratique selon laquelle les aveux extorqués sous la torture sont retenus à titre de preuve devant un tribunal ; – exhortez le gouvernement à prendre immédiatement des mesures efficaces en vue de prévenir tout nouvel acte de torture ; – demandez instamment que Gaafar Yassin Ahmad Abdullah soit libéré s'il n'est pas appelé à être rejugé pour des infractions prévues par la loi par un tribunal res pectant les normes universellement reconnues en matière d'équité. Veuillez envoyer une copie de vos appels à la représentation diplomatique du Soudan dans votre pays.

Page 8: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

8

Sara Abdallah Abdelrahman NUGDALLAH Militante politique arrêtée à maintes reprises Sara Abdallah Abdelrahman Nugdallah, proche de la quarantaine, est diplômée en lettres et sciences humaines de l'université de Khartoum. Assistante à l'université, elle est aussi un membre éminent du parti Oumma, aujourd'hui interdit. Sa famille est depuis longtemps associée à l'existence de ce parti : son père en a été le secrétaire général, et elle-même est membre du comité exécutif et de la commission des femmes. Depuis que l'actuel gouvernement s'est emparé du pouvoir à la faveur d'un coup d'État en 1989, Sara Abdallah Abdelrahman Nugdallah a été arrêtée et détenue à quatre reprises dans le quartier des femmes de la prison d'Omdourman. Appréhendée pour la première fois le 5 septembre 1989, en même temps que deux autres militantes politiques, elle a été placée en détention avec les prisonnières de droit commun dans la prison d'Omdourman, où les conditions carcérales sont très dures. Les trois femmes ont été remises en liberté le 12 octobre 1989, sans avoir été inculpées. Deux jours plus tard, elles étaient convoquées par les autorités, qui leur ordonnaient de signer une déclaration par laquelle elles s'engageaient, à l'avenir, à ne pas s'opposer au gouvernement. Devant leur refus, elles ont immédiatement été de nouveau arrêtées, puis détenues sans inculpation, jusqu'au 6 novembre 1989, date de leur libération. L'arrestation la plus récente de Sara Abdallah Abdelrahman Nugdallah a eu lieu le 7 avril 1994. Aucune raison officielle n'a été donnée à ce sujet et elle a finalement été remise en liberté le 20 juin 1994. Chaque fois que Sara Abdallah Abdelrahman Nugdallah a été appréhendée, elle a été détenue uniquement pour s'être opposée de façon non violente au gouvernement. À chaque nouvelle arrestation, la famille et les amis de Sara craignent pour sa sécurité. De telles arrestations procèdent d'une stratégie de harcèlement systématique à l'encontre des détracteurs du gouvernement connus pour être de fervents musulmans. Les autorités, qui cherchent à faire passer toute critique du gouvernement pour une attaque contre l'islam, sont particulièrement sensibles à l'opposition exprimée par des membres de confréries musulmanes ou de partis politiques interdits liés à ces confréries. Le parti Oumma est pour sa part associé aux Ansar, l'une des confréries de l'islam traditionnel au Soudan.

Page 9: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

9

Ce que vous pouvez faire ) À qui adresser vos appels :

Monsieur le Président de la République adresse : Président de la République Lieutenant-General Omar Hassan Ahmad al Bashir President People's Palace P.O. Box 281 Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de la Justice Mr Abd al Aziz Shiddo Minister of Justice & Attorney-General Ministry of Justice Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de l'Intérieur Dr al Tayib Ibrahim Mohamed Kheir Minister of the Interior Ministry of the Interior Khartoum Soudan

– exhortez le gouvernement soudanais à libérer immédiatement et sans condition tous les prisonniers détenus en raison de leurs opinions, sous réserve qu'ils n'aient pas eu recours à la violence ni prôné son usage ; – demandez au gouvernement de mettre fin à la détention arbitraire, sans inculpation ni jugement, de personnes telles que Sara Abdallah Abdelrahman Nugdallah, qui sont soupçonnées d'être des opposants politiques ; – priez le gouvernement de supprimer toutes les dispositions inscrites dans la législation et la Constitution autorisant la détention administrative. Veuillez envoyer une copie de vos appels à la représentation diplomatique du Soudan dans votre pays.

Page 10: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

10

Karshum Mango ATIA Instituteur – "disparu" Karshum Mango Atia, originaire de Kadugli, appartient à l'ethnie nouba. Musulman, âgé d'une quarantaine d'années, il est marié et père de quatre enfants. Il a vécu un certain temps dans le Kordofan avant de s'installer en 1988 à Port-Soudan, sur la côte de la mer Rouge. Là, il a enseigné dans une école primaire. Le 10 novembre 1992, quelqu'un s'est présenté à l'école et lui a demandé de se rendre à une réunion pédagogique au centre de la ville. Karshum Mango Atia a alors fait remarquer à un collègue, en s'exprimant dans sa langue natale, qu'il n'était pas sûr qu'il s'agissait vraiment d'une réunion pédagogique, et que c'était peut-être seulement un prétexte pour l'éloigner. Karshum Mango Atia n'est jamais revenu ; il a été arrêté par des agents des services de sécurité. Karshum Mango Atia a d'abord été détenu dans les bureaux des services de sécurité de Port-Soudan. Quatre jours plus tard, il a été ramené chez lui sous escorte pour y prendre quelques effets, puis mis dans un avion militaire à destination de Khartoum. Un de ses proches a tenté de le suivre mais, une fois arrivé à Khartoum, il a été informé que Karshum Mango Atia avait été transféré la veille à el Obeid. Il avait laissé derrière lui son sac de vêtements. Un autre des proches de Karshum Mango Atia a découvert que celui-ci était brièvement passé par Kadugli, sa ville natale. On l'aurait ensuite ramené à el Obeid ; toutefois, Karshum Mango Atia n'a plus jamais été revu. Des amis à el Obeid se sont entendu dire qu'il était en prison dans le Darfour, puis qu'il se trouvait à Atbara et ensuite à Souakin. Ils ont vérifié dans chacune des prisons concernées, en vain. Karshum Mango Atia avait "disparu". De nombreux Nouba qui, comme Karshum Mango Atia, avaient quitté leur région natale dans les monts Nouba ont été soupçonnés de se livrer à des activités politiques contre le gouvernement. La famille de Karshum Mango Atia n'a pas été informée des motifs de son arrestation ni du lieu où il se trouve actuellement. Certaines informations laissent à penser qu'il pourrait être incarcéré à el Obeid ; d'autres sources affirment qu'il aurait été tué. Avant de quitter Port-Soudan, Karshum Mango Atia a déclaré : « Ils peuvent m'ôter la vie, mais ils ne peuvent tuer mon âme. »

Page 11: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

11

Ce que vous pouvez faire ) À qui adresser vos appels :

Monsieur le Président de la République adresse : Président de la République Lieutenant-General Omar Hassan Ahmad al Bashir President People's Palace P.O. Box 281 Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de la Justice Mr Abd al Aziz Shiddo Minister of Justice & Attorney-General Ministry of Justice Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de l'Intérieur Dr al Tayib Ibrahim Mohamed Kheir Minister of the Interior Ministry of the Interior Khartoum Soudan

– faites part de votre préoccupation concernant la détention et l'apparente "disparition" de Karshum Mango Atia ; – réclamez l'ouverture immédiate d'une enquête pour savoir où il se trouve et exhortez le gouvernement à dire publiquement ce qu'il est advenu de lui ; – demandez instamment que, s'il se trouve en détention, il soit traité humainement et puisse voir son avocat et sa famille ; – insistez pour que, s'il est détenu, il soit immédiatement remis en liberté à moins d'être inculpé d'une infraction prévue par la loi et de bénéficier dans un délai raisonnable d'un procès équitable. Veuillez envoyer une copie de vos appels à la représention diplomatique du Soudan dans votre pays.

Page 12: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

12

Nadir Abdel Hamid Khairi Mort sous la torture Nadir Abdel Hamid Khairi, né en 1964, a commencé à travailler au ministère de l'Agriculture en qualité d'ingénieur en 1988. Marié et père de deux jeunes enfants, il vivait à Khartoum. À partir de la mi-93, il a été arrêté à diverses reprises et a affirmé avoir été torturé. Il semble que le motif de ces arrestations était les liens qu'il était soupçonné d'entretenir avec le parti Oumma. Cette formation politique, l'une des plus importantes du pays, a été interdite par l'actuel gouvernement qui, en 1989, s'est emparé du pouvoir à la faveur d'un coup d'État militaire. La quatrième et dernière arrestation de Nadir Abdel Hamid Khairi a eu lieu le 4 janvier 1994. Quelques jours plus tôt, il avait été licencié du ministère de l'Agriculture pour des raisons de « sécurité publique ». Son épouse a elle aussi été renvoyée pour le même motif ; elle a demandé sa réintégration, mais sa demande a été rejetée. Lorsque Nadir Abdel Hamid Khairi a été appréhendé, sa famille n'a été informée ni de son lieu de détention ni des raisons de son arrestation. Ce n'est que le 4 avril 1994 que sa femme a appris, par des agents des services de sécurité venus la voir, que Nadir se trouvait à l'hôpital militaire d'Omdourman. Le jour même, elle est allée lui rendre visite et a été bouleversée en le voyant. Il présentait, en effet, des traces manifestes de sévices – son visage était défiguré et son corps était couvert de contusions et de tuméfactions importantes. Le lendemain, la famille de Nadir Abdel Hamid Khairi s'est rendue à l'hôpital militaire pour le voir. On leur a alors déclaré qu'il était mort et que les services de sécurité avaient emporté le corps. Le cadavre de Nadir n'a jamais été rendu à sa famille. Celle-ci est persuadée que sa mort est la conséquence directe des tortures qu'il a subies en détention. De nombreux témoignages d'anciens prisonniers font état des tortures et des sévices cruels auxquels ils ont été soumis par les agents des services de sécurité. Le gouvernement soudanais n'en continue pas moins à nier que la torture soit une pratique institutionnalisée. Si une victime a le courage de porter plainte, il est rare que ses accusations donnent lieu à une enquête et que les responsables soient traduits en justice. La mise en détention de personnes telles que Nadir Abdel Hamid Khairi fait partie d'une politique d'intimidation systématique à l'égard des opposants. Toute opposition au gouvernement, quelque forme qu'elle prenne, est illégale. Tous les partis politiques demeurent interdits.

Page 13: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

13

Ce que vous pouvez faire ) À qui adresser vos appels :

Monsieur le Président de la République adresse : Président de la République Lieutenant-General Omar Hassan Ahmad al Bashir President People's Palace P.O. Box 281 Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de la Justice Mr Abd al Aziz Shiddo Minister of Justice & Attorney-General Ministry of Justice Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de l'Intérieur Dr al Tayib Ibrahim Mohamed Kheir Minister of the Interior Ministry of the Interior Khartoum Soudan

– demandez qu'une enquête indépendante soit ouverte sur la mort en détention, apparemment des suites de tortures, de Nadir Abdel Hamid Khairi, et que les conclusions de cette enquête soient rendues publiques ; – priez instamment les autorités soudanaises de faire en sorte que les responsables de sa mort soient déférés à la justice et que sa famille soit indemnisée ; – demandez au gouvernement de prendre des mesures efficaces pour prévenir tout nouvel acte de torture, de condamner publiquement et sans ambiguïté le recours à la torture et de ratifier la Convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Veuillez envoyer une copie de vos appels à la représentation diplomatique du Soudan dans votre pays.

Page 14: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

14

Les châtiments cruels inscrits dans la législation Les conséquences pour les femmes au Soudan « Les peines corporelles considérées comme des « sanctions légitimes » dans la législation nationale peuvent constituer, aux termes du droit international, « une douleur ou des souffrances aiguës ». Il faut donc que ce type de châtiment soit révisé de manière à éviter la torture, notamment les amputations, la canne ou le fouet. » (le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, 1986) Au Soudan, une grande variété d'infractions sont punies par des châtiments cruels, inhumains ou dégradants, tels que la flagellation et l'amputation. Les femmes sont plus particulièrement victimes de certains de ces châtiments. Des centaines d'entre elles, dont beaucoup sont issues de communautés pauvres et défavorisées, ont été condamnées à une peine de flagellation. Les infractions liées à l'alcool De nombreuses personnes ont été chassées de chez elles par la guerre civile qui fait rage dans le sud du Soudan. Elles se sont regroupées dans des camps de personnes déplacées dans les villes du nord du pays, et plus particulièrement dans la capitale, Khartoum, ou alentour. Pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs familles, beaucoup de femmes originaires du Sud distillent et vendent de l'alcool, une activité qui est illégale dans le Nord mais une source traditionnelle de revenus pour les femmes du Sud. Nombre d'entre elles affirment qu'elles sont fouettées si elles sont prises sur le fait. Une femme qui avait fui avec ses cinq enfants les combats qui se déroulaient à Juba, puis s'était installée dans le camp de personnes déplacées d'el Mayo, à Khartoum, a dû payer une amende, s'est vu infliger 40 coups de fouet, puis a été incarcérée durant six mois pour avoir distillé de l'alcool : « J'ai très mal supporté d'être fouettée. J'avais de nombreuses blessures, mais pas d'argent pour aller à l'hôpital. Quand je suis sortie de prison, j'ai dû recommencer à distiller de l'alcool afin d'avoir un peu d'argent pour m'acheter des médicaments. De plus, j'ai des enfants, et il faut bien les nourrir, il n'y a donc pas d'autre moyen. » Les infractions aux bonnes mœurs Officiellement, il n'existe pas de "code vestimentaire" s'appliquant aux femmes au Soudan. Toutefois, la section 152 du Code pénal dispose que le fait de porter un vêtement « obscène ou contraire aux bonnes mœurs » est une infraction. Cette disposition, rarement sinon jamais appliquée aux hommes, est en revanche souvent invoquée en ce qui concerne les femmes. L'une d'entre elles, qui a fui le sud du pays pour gagner Omdourman, dans le Nord, décrit l'épreuve qu'elle a subie fin 1991 : « Je suis sortie un après-midi, vêtue entre autres d'un pantalon. Tandis que j'attendais à l'arrêt d'autobus, un policier est brusquement sorti du commissariat situé juste en face et m'a hélée : « Eh ! Toi ! Viens voir ici ! Qu'est-ce que c'est que

Page 15: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

15

ce truc insensé que tu portes ? » Moi « Quel truc insensé ? » Lui « Tu ne sais pas qu'il est interdit de porter le genre d'ordure que tu as sur toi ? » Moi « Est-ce qu'ils ont interdit le port du pantalon et de la chemise ? » (Le nom des femmes dont l'histoire figure ici a été tenu secret) Cette femme a été arrêtée. Déclarée coupable par un juge, elle a été condamnée à 30 coups de fouet et à une amende : « J'ai payé l'amende, mais j'ai refusé de subir le fouet. Le juge a immédiatement fait venir un policier. Celui-ci a pris son fouet et, sans prévenir, m'a frappée dans le dos [...] J'ai réagi violemment : j'ai saisi le fouet et je l'ai tordu. Deux ou trois policiers se sont alors emparés de moi et m'ont ligoté les mains dans le dos. [...] puis ils m'ont fouettée [...] J'étais en colère après avoir reçu les coups de fouet ; je me suis levée et lui ai lancé un regard haineux. Il l'a remarqué et m'a fait donner cinq autres coups. » Cette politique qui consiste à arrêter et fouetter les femmes – et plus particulièrement les femmes musulmanes – en raison de leur habillement a été appliquée avec une rigueur accrue à certaines époques. Fin 1991, des centaines de femmes ont été arrêtées et soumises au supplice du fouet durant ce qui semblait être une campagne officielle en faveur du port de vêtements "convenables". On a notamment vu, au cours de cette campagne, des policiers et des miliciens munis de seaux d'eau et d'éponges obliger des femmes à se débarrasser de leur maquillage en public. Introduit en 1991, le Code pénal actuellement en vigueur a remplacé celui de 1983, qui était fondé sur l'interprétation de la charia (loi islamique) d'un gouvernement antérieur, mais qui prévoyait également des peines cruelles, inhumaines ou dégradantes. De nombreux secteurs de la société soudanaise, y compris les musulmans, ont marqué leur opposition aux différents codes pénaux soudanais fondés sur une interprétation de la charia. Ce que vous pouvez faire ) À qui adresser vos appels :

Monsieur le Président de la République adresse : Président de la République Lieutenant-General Omar Hassan Ahmad al Bashir President People's Palace P.O. Box 281 Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de la Justice Mr Abd al Aziz Shiddo Minister of Justice & Attorney-General Ministry of Justice Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de la Justice Mr Abd al Aziz Shiddo Minister of Justice & Attorney-General Ministry of Justice Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de l'Intérieur Dr al Tayib Ibrahim Mohamed Kheir Minister of the Interior Ministry of the Interior Khartoum Soudan

– exhortez le gouvernement soudanais à amender le Code pénal de 1991, afin de supprimer de la législation nationale les peines cruelles, inhumaines ou dégradantes telles que la flagellation ; – demandez au gouvernement de suspendre, comme mesure de transition en vue d'une abolition totale, l'exécution de toutes les sentences de flagellation, ainsi que des autres condamnations à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Veuillez envoyer une copie de vos appels à la représentation diplomatique du Soudan dans votre pays.

Page 16: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

16

Alfred Yoron MODI "Disparu" Alfred Yoron Modi était présentateur à Radio Juba, station contrôlée par le gouvernement, et président de la Commission Justice et paix de l'Église catholique à Juba. En juin 1992, des unités de la faction APLS-Courant principal – née d'une scission de l'Armée populaire de libération du Soudan (APLS), un mouvement d'opposition armée – ont lancé une formidable offensive contre Juba, la plus grande ville du sud du Soudan, placée sous contrôle gouvernemental. Depuis de nombreuses années, l'APLS mène une guerre civile sans merci contre le gouvernement dans le sud du pays. Ripostant à l'attaque, les forces gouvernementales ont tué des soldats de l'APLS capturés, ainsi que des civils soupçonnés de collaborer avec le mouvement armé. Les troupes régulières ont également arrêté au moins 290 soldats, policiers, gardiens de prison et personnalités civiles. Alfred Yoron Modi figurait parmi les personnes arrêtées à la suite de l'offensive de juin. Ce n'était pas la première fois qu'il était appréhendé. En février 1992, il avait été détenu durant trois mois : il était accusé d'avoir incité les étudiants à s'opposer aux tentatives du gouvernement d'introduire l'arabe comme langue d'enseignement dans les écoles du sud du Soudan. Dans cette partie du pays, l'anglais est la langue communément utilisée par les enseignants. En mai 1992, Alfred Yoron Modi avait de nouveau été arrêté, cette fois pour avoir annoncé la béatification prochaine de Josephine Bakhita, religieuse soudanaise ayant vécu au siècle dernier. Accusé d'avoir diffusé sur les ondes une « nouvelle choquante et subversive », Alfred Yoron Modi avait été emmené au quartier général de l'armée pour y être interrogé. Les autorités n'avaient, semble-t-il, pas apprécié qu'il ait mentionné le fait que Josephine Bakhita avait été enlevée et vendue comme esclave. Alfred Yoron Modi avait été remis en liberté au bout de dix jours et une rediffusion de l'émission avait été autorisée, sous réserve que la réduction en esclavage de la religieuse ne soit pas évoquée. Personne n'a revu Alfred Yoron Modi ni eu de ses nouvelles depuis sa dernière arrestation, en juin 1992. Il a "disparu" et l'on craint vivement pour sa sécurité. Dans la grande majorité des cas, le gouvernement soudanais a fourni des informations contradictoires, voire des renseignements qui se sont avérés faux, ou n'a tout simplement donné aucune explication concernant le sort des centaines d'habitants de Juba qui ont été arrêtés. À la suite des événements de Juba, les protestations inter-nationales ont incité le gouvernement à mettre en place une commission chargée d'« enquêter sur les événements qui s'étaient produits dans la ville de Juba en juin et en juillet, ainsi que sur leurs conséquences pour les citoyens et l'État ». Rien n'indique que cette enquête ait été menée à bien. La famille d'Alfred Yoron Modi poursuit ses efforts pour tenter de retrouver sa trace, tout comme les familles et les amis de tous ceux qui ont "disparu" à Juba. Ce que vous pouvez faire ) À qui adresser vos appels :

Monsieur le Président de la République adresse : Président de la République Lieutenant-General Omar Hassan Ahmad al Bashir President People's Palace P.O. Box 281 Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de la Justice Mr Abd al Aziz Shiddo Minister of Justice & Attorney-General Ministry of Justice Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Gouverneur de l'Équatoria oriental Mr Caesar Paia Loyala Governor of Eastern Equatoria c/o People's Palace

Page 17: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

17

P.O. Box 281 Khartoum Soudan

– demandez aux autorités de dire ce qu'il est advenu d'Alfred Yoron Modi et de tous ceux dont on est sans nouvelles depuis leur arrestation à Juba entre juin et août 1992 ; – exhortez le gouvernement à rendre immédiatement public le rapport d'enquête sur les événements de Juba et à faire connaître les mesures qui sont prises en conséquence ; – demandez instamment que les détenus soient humainement traités, qu'ils puissent voir leurs avocats et leurs familles, et qu'ils soient inculpés d'une infraction prévue par la loi ou immédiatement remis en liberté ; – exhortez le gouvernement à prendre des mesures efficaces afin de prévenir toute nouvelle "disparition" et à traduire en justice toute personne responsable d'un tel acte. Veuillez envoyer une copie de vos appels à la représentation diplomatique du Soudan dans votre pays.

Page 18: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

18

Martin Majier GAI Tué de façon délibérée et arbitraire par la faction APLS-Courant principal 2 Martin Majier Gai, né en 1941, était marié et père de neuf enfants. Il a mené une brillante carrière dans le sud du Soudan en tant que juge et homme politique dinka de premier plan. Il était l'un des membres fondateurs de l'Armée populaire de libération du Soudan (APLS), un mouvement d'opposition armée qui, depuis 1983, livre une guerre sans merci au gouvernement dans le sud du pays. Martin Majier Gai se serait toutefois montré critique à l'égard de la politique menée par l'APLS sous la direction de John Garang de Mabior. Martin Majier Gai est originaire du sud de Bor, l'un des principaux fiefs de l'APLS. En raison de sa popularité dans la région, ses désaccords sur la politique de l'APLS représentaient donc une menace pour la direction du mouvement. Il a été arrêté en 1985 en Éthiopie, où l'APLS, soutenue par le gouvernement de Mengistu Haïlé-Mariam, avait alors sa principale base arrière. Il a ensuite été gardé durant sept ans dans différents camps de détention de l'APLS, d'abord en Éthiopie jusqu'à la chute du régime de Mengistu en 1991, puis dans le sud du Soudan. Pendant toutes ces années passées aux mains de l'APLS, Martin Majier Gai n'a jamais été inculpé ni jugé. Bien qu'il soit marié et père de neuf enfants, sa famille n'a pas été autorisée à lui rendre visite. Il s'est en outre vu refuser tous soins médicaux. Martin Majier Gai a été remis en liberté en septembre 1992, mais il a été assigné à résidence dans la ville de Kaya. En décembre 1992 ou en janvier 1993, il a de nouveau été arrêté par la faction APLS-Courant principal qui, semble-t-il, le soupçonnait d'avoir fomenté un complot contre la direction de la faction. Peu de temps après, il était tué. La faction APLS-Courant principal a affirmé que Martin Majier Gai et deux autres détenus avaient été abattus alors qu'ils tentaient de s'évader. D'autres sources donnent à penser qu'ils auraient été tués de façon délibérée et arbitraire par la faction APLS-Courant principal en janvier ou en avril 1993.

. L'Armée populaire de libération du Soudan (APLS) est aujourd'hui divisée en deux

factions : l'APLS-Courant principal dirigée par John Garang de Mabior et l'APLS-Unifiée

conduite par Riek Machar.

Page 19: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

19

Ce que vous pouvez faire ) À qui adresser vos appels :

Monsieur (mon Commandant, si l'appel est adressé par un homme) adresse : Association soudanaise pour l'aide et la réhabilitation Commander John Garang de Mabior Sudan Relief & Rehabilitation Association P.O. Box 39892 Nairobi Kénya

Monsieur (mon Commandant si l'appel est adressé par un homme) adresse : Président de la Commission des affaires militaires et de sécurité, auprès de l'Association soudanaise pour l'aide et la réhabilitation Commander Oyai Deng Ajak Chair of the Military and Security Affairs Committee c/o Sudan Relief & Rehabilitation Association P.O. Box 39892 Nairobi Kénya

Monsieur le Président adresse : Président de la Commission des droits de l'homme de l'APLS-Courant principal Mr Henry Wani Rondyang Chair of the SPLA-Mainstream Human Rights Committee 68 Cavanagh Close Manchester M13 9DF Royaume-Uni

–demandez à la faction APLS-Courant principal de mener dans les plus brefs délais une enquête impartiale sur le meurtre de Martin Majier Gai ; –exhortez la faction APLS-Courant principal à prendre des mesures efficaces pour prévenir tout homicide délibéré et arbitraire d'opposants présumés et à respecter les principes du droit humanitaire ; –demandez instamment que personne ne soit détenu en raison de ses convictions.

Page 20: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

20

Femmes nuer Tuées de façon délibérée et arbitraire par la faction APLS-Courant principal Pagau, à quelque 12 kilomètres d'Ayod, est un village nuer typique situé dans l'État du Haut-Nil, dans le sud du Soudan. La vie quotidienne y est centrée sur la surveillance des troupeaux, principale ressource économique. Les hommes conduisent le bétail aux pâturages, tandis que les femmes s'occupent de traire les vaches, d'aller chercher l'eau et de préparer le repas familial. À la campagne, les femmes doivent donc piler le grain, lorsqu'il y en a, pour faire de la farine ; ce travail, qui est pénible, peut leur prendre une grande partie de la journée. En mars 1993, des troupes dinka de la faction APLS-Courant principal, dirigée par John Garang de Mabior, ont attaqué le village. Trente-deux femmes ont été alignées, puis abattues d'une balle dans la tête. Leur seul crime était d'appartenir à l'ethnie nuer, ce qui les rendait suspectes de loyauté à l'égard de la faction rivale, l'APLS-Unifiée. D'autres atrocités ont été commises par ces troupes, qui auraient notamment enfermé des enfants dans une case, avant d'y mettre le feu. Trois enfants qui tentaient de s'enfuir ont été abattus. L'APLS, un mouvement d'opposition armée qui s'est constitué en 1983, livre une guerre civile sans merci au régime de Khartoum dans le sud du Soudan. Depuis la scission de l'APLS en 1991, des combats opposent également les deux factions du mouvement - aujourd'hui connues sous le nom d'APLS-Courant principal et d'APLS-Unifiée – entre elles. Cette lutte intestine revêt un caractère ethnique de plus en plus marqué, qui a conduit les deux factions à lancer des attaques contre des villages soupçonnés de soutenir la faction rivale. Il semble que certaines attaques aient été menées en représailles de meurtres commis précédemment. Entre 1991 et 1993, des centaines de civils non armés, dont de nombreuses femmes, ont été massacrés par chacune des deux factions. Les raids effectués par la faction APLS-Courant principal, en mars et en avril 1993, dans d'autres villages situés dans les environs d'Ayod se sont également soldés par le massacre d'un grand nombre d'hommes, de femmes et d'enfants nuer. Des femmes ont été enfermées dans des étables qui ont été ensuite incendiées, d'autres ont été massacrées à coups de gourdin ou de machette. Des milliers de Nuer ont aussi été chassés de chez eux. En mai 1993, les deux factions ont conclu un accord de cessez-le-feu, assorti d'un retrait de leurs troupes de la région centrale du Haut-Nil. La date limite avait été fixée au 5 juin 1993. Aucune des deux factions n'a honoré ses engagements. Quelques jours plus tard, Pagau était à nouveau attaqué et d'autres villageois sans défense tués.

Page 21: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

21

Ce que vous pouvez faire ) À qui adresser vos appels :

Monsieur (mon Commandant, si l'appel est adressé par un homme) adresse : Association soudanaise pour l'aide et la réhabilitation Commander John Garang de Mabior Sudan Relief & Rehabilitation Association P.O. Box 39892 Nairobi Kénya

Monsieur (mon Commandant, si l'appel est adressé par un homme) adresse : Président de la Commission des affaires militaires et de sécurité, auprès de l'Association soudanaise pour l'aide et la réhabilitation Commander Oyai Deng Ajak Chair of the Military and Security Affairs Committee c/o Sudan Relief & Rehabilitation Association P.O. Box 39892 Nairobi Kénya

Monsieur le Président adresse : Président de la Commission des droits de l'homme de l'APLS-Courant principal Mr Henry Wani Rondyang Chair of the SPLA-Mainstream Human Rights Committee 68 Cavanagh Close Manchester M13 9DF Royaume-Uni

– demandez qu'une enquête impartiale et approfondie soit menée sur le massacre de femmes et d'enfants perpétré à Pagau, et que d'autres enquêtes soient conduites sur toutes les tueries de civils imputables à la faction APLS-Courant principal ; – insistez pour que les auteurs de tels actes se voient écartés de tout poste comportant des responsabilités ; – demandez instamment que la direction de la faction APLS-Courant principal prenne immédiatement des mesures afin d'empêcher que ne soient commis de nouveaux homicides délibérés et arbitraires, que pour ce faire elle instaure une structure de commandement claire permettant d'exercer à tout moment un contrôle strict sur ses troupes et qu'elle donne des instructions sans ambiguïté avertissant que de tels homicides ne seront plus tolérés ; – soulignez que le meurtre de personnes qui ne participent pas directement aux hostilités est contraire aux principes du droit humanitaire, et notamment à l'article 3 des Conventions de Genève.

Page 22: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

22

Civils dinka Tués de façon délibérée et arbitraire par la faction APLS-Unifiée En novembre 1991, des forces loyales à la faction Nasir de l'Armée populaire de libération du Soudan (APLS) – faction qui a fusionné en 1993 avec le groupe Unité pour former l'APLS-Unifiée – ont attaqué des villages dinka dans le Haut-Nil, faisant main basse sur les biens, la nourriture et le bétail. Certains civils, craignant pour leur vie, ont tenté de fuir vers le sud. D'autres se sont cachés dans les hautes herbes et les broussailles entourant leur village. Pour nombre d'entre eux, ces tentatives d'échapper au massacre se sont avérées vaines. Ils ont été délibérément et arbitrairement tués. Une fois les troupes parties, les survivants ont commencé à sortir de leurs cachettes. Ils ont trouvé les corps de leurs amis et de leurs proches ligotés au niveau des chevilles et des poignets, et transpercés de coups de lance. D'autres victimes avaient autour du cou la corde ou la ceinture qui avait servi à les étrangler. Depuis qu'a éclaté, en 1983, la guerre civile opposant l'APLS au gouvernement soudanais dans le sud du Soudan, des milliers de civils ont été tués et des millions d'habitants du Sud déplacés. Parallèlement à cette guerre mettant aujourd'hui aux prises les factions du mouvement avec le régime de Khartoum, les combats que se livrent les factions entre elles ont également conduit au massacre de nombreux civils innocents. En août 1991, une scission s'est en effet opérée au sein de l'APLS, donnant naissance à deux factions connues actuellement sous le nom d'APLS-Courant principal et d'APLS-Unifiée. Les deux groupes se sont rapidement polarisés sur des critères ethniques : la faction APLS-Courant principal s'appuie essentiellement sur les Dinka ; la faction APLS-Unifiée est principalement soutenue par les Nuer et, comme la faction Nasir dont elle est notamment issue, elle est dirigée par Riek Machar Teny Dhurgon. Dans les mois qui ont suivi la scission, les deux factions ont commis d'effroyables atteintes aux droits de l'homme à l'encontre de civils supposés soutenir la faction rivale. La faction APLS-Unifiée s'est rendue coupable du massacre de centaines de civils dinka innocents.

Page 23: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

23

Ce que vous pouvez faire ) À qui adresser vos appels :

Monsieur le Président adresse : Président de la faction APLS-Unifiée Dr Riek Machar Teny Dhurgon Chairman SPLA-United c/o P.O. Box 30770 Nairobi Kénya

Monsieur (mon Commandant, si l'appel est adressé par un homme) adresse : Commandant de la faction APLS-Unifiée Mr Elijah Hon Top SPLA-United Commander Central/Upper Nile c/o P.O. Box 30770 Nairobi Kénya

– demandez que des enquêtes approfondies et impartiales soient menées sur tous les homicides délibérés et arbitraires de civils, et que les auteurs de tels actes soient écartés de tout poste comportant des responsabilités ; – priez instamment la direction de la faction APLS-Unifiée de prendre immédiatement des mesures afin d'empêcher que ne soient commis de nouveaux homicides délibérés et arbitraires, que pour ce faire elle instaure une structure de commandement claire permettant à tout moment d'exercer un contrôle strict sur ses troupes et qu'elle donne des instructions sans ambiguïté avertissant que de tels homicides ne seront plus tolérés ; – faites remarquer que le meurtre de personnes qui ne participent pas directement aux hostilités est contraire aux principes du droit humanitaire, et notamment à l'article 3 des Conventions de Genève.

Page 24: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

24

Vingt-huit officiers de l'armée Condamnés à mort et sommairement exécutés Le 24 avril 1990, après avoir été reconnus coupables par un tribunal militaire appliquant une procédure sommaire d'avoir fomenté un complot visant à renverser le gouvernement, 28 officiers de l'armée ont été passés par les armes à Khartoum. Leur procès, qui n'a duré que quelques minutes, a été une parodie de justice. Les droits les plus élémentaires, notamment ceux d'être assisté par un avocat et de pouvoir interjeter appel devant une juridiction supérieure, leur ont été refusés. Mais, avant tout, l'exécution de ces hommes constituait une violation du droit à la vie. Entre 60 et 90 sous-officiers et hommes de troupe auraient également été exécutés à peu près à la même époque. Un grand nombre de soldats avaient été arrêtés, pour la plupart seulement vingt-quatre heures plus tôt. Les familles des victimes n'ont depuis lors cessé de dénoncer l'exécution de ceux qu'elles appellent les « martyrs de la démocratie ». Il existe au Soudan toute une série d'infractions pour lesquelles la peine de mort peut être prononcée, notamment les actes de guerre contre l'État, l'apostasie, le meurtre, le viol commis par une personne mariée et l'importation illégale de stupéfiants. Depuis que le gouvernement actuel s'est emparé du pouvoir, de nombreuses personnes ont été exécutées ; la majorité d'entre elles appartenaient aux forces armées et avaient été reconnues coupables d'infractions liées à la trahison à l'issue de procès sommaires et inéquitables. À la suite des incursions de l'Armée populaire de libération du Soudan (APLS) dans la ville de garnison de Juba, vers la mi-92, quelque 300 sympathisants présumés de ce mouvement d'opposition armée, dont des policiers, des soldats et des civils, ont été arrêtés. Le gouvernement a reconnu que trois membres d'organisations humanitaires avaient été exécutés à l'issue de procès sommaires. Beaucoup d'autres personnes, dont on est sans nouvelles, ont peut-être connu le même sort. Un soldat qui faisait partie d'un autre groupe de 23 officiers de l'armée, arrêtés en mars 1990, a été jugé par un tribunal militaire en mai 1990. Il a réussi par la suite à s'évader et à fuir le pays. Il a déclaré que le temps consacré à chaque personne durant le procès avait été d'environ deux minutes : « Ils ont lu l'acte d'accusation : « Vous êtes accusé d'avoir fomenté un complot contre le gouvernement aux termes de... » et mentionné les lois applicables. Puis ils m'ont demandé : « Êtes-vous coupable ? » J'ai répondu : « Non. » Ils ont alors donné lecture des réquisitions et conclu : « Le tribunal vous déclare coupable. » Je n'avais pas d'avocat et n'étais pas autorisé à faire citer des témoins. »

Page 25: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

25

Ce que vous pouvez faire ) À qui adresser vos appels :

Monsieur le Président de la République adresse : Président de la République Lieutenant-General Omar Hassan Ahmad al Bashir President People's Palace P.O. Box 281 Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de la Justice Mr Abd al Aziz Shiddo Minister of Justice & Attorney-General Ministry of Justice Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de la Défense Major-General Hassan Abd al Rahman Ali Minister of Defence Ministry of Defence Khartoum Soudan

– demandez l'abolition de la peine de mort, qui constitue une violation du droit le plus précieux de tout être humain : le droit à la vie ; – exhortez le gouvernement à mettre fin aux procès devant des tribunaux militaires appliquant une procédure sommaire, lesquels devraient être remplacés par des tribunaux offrant les garanties de procédure nécessaires à la protection des droits de l'homme ; – demandez que tous les procès jugés par de tels tribunaux respectent les normes universellement reconnues en matière d'équité. Veuillez envoyer une copie de vos appels à la représentation diplomatique du Soudan dans votre pays.

Page 26: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

26

Les familles des officiers exécutés en 1990 Harcèlement et arrestations répétés Le 24 avril 1990, soit le vingt-huitième jour du ramadan, 28 officiers de l'armée ont été sommairement exécutés. Depuis lors, les proches des victimes n'ont cessé d'organiser des réunions et des manifestations pour commémorer leurs morts et protester contre leur exécution. En conséquence, ils ont été régulièrement harcelés et fréquemment arrêtés. En octobre 1991, des agents des services de sécurité ont brutalement interrompu une réunion de parentes des victimes qui se tenait dans une habitation privée. Toutes les personnes présentes, les femmes, les enfants et même les domestiques, ont été arrêtées. Maja Awad Khojali et Widad Ali Karrar ont été détenues toute la nuit, en compagnie de deux autres femmes. L'année suivante, en 1992, les familles des victimes ont organisé une manifestation dans le centre de Khartoum, le vingt-huitième jour du ramadan. Elles ont bloqué la circulation, distribué des tracts, des photographies et des poèmes commémorant les officiers exécutés. Des agents des services de sécurité sont alors intervenus et ont arrêté dix femmes, dont les sœurs et la mère du capitaine Mustafa Awad Khojali et les sœurs du lieutenant-colonel Abd el Moneim Hassan Ali Karrar. Ces dix personnes ont été emmenées à la prison de femmes d'Omdourman. Le lendemain, elles ont entamé une grève de la faim. L'une d'elles, une femme âgée, est tombée malade. Au bout de trois semaines, toutes les femmes avaient été remises en liberté après avoir été contraintes de signer une déclaration : « [La déclaration] disait que nous ne devions pas insulter la révolution de juin, ne pas nous livrer à des activités antigouvernementales ni quitter Khartoum sans autorisation. Nous n'en avons pas tenu compte. » Les familles ne se sont pas résignées. Elles continuent à se rencontrer pour honorer le souvenir de leurs chers disparus. En octobre 1993 et en mars 1994, des membres des services de sécurité ont à nouveau brutalement interrompu leurs réunions. D'autres arrestations ont été opérées, frappant cette fois aussi les hommes des familles des victimes. Ainsi, en octobre 1993, le frère de l'un des officiers tués a été détenu durant un mois après avoir assisté à une réunion. Le 10 mars 1994, un rassemblement a conduit à l'arrestation d'une trentaine d'autres hommes. Six jours plus tard, tous étaient remis en liberté – à l'exception de quatre d'entre eux –, après avoir semble-t-il été battus à coups de tuyau en plastique. Le 5 avril 1994, ceux qui étaient encore en détention ont été libérés. En dépit de ce harcèlement continuel, les familles refusent de passer sous silence l'exécution de leurs proches.

Page 27: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

27

Ce que vous pouvez faire ) À qui adresser vos appels :

Monsieur le Président de la République adresse : Président de la République Lieutenant-General Omar Hassan Ahmad al Bashir President People's Palace P.O. Box 281 Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de la Justice Mr Abd al Aziz Shiddo Minister of Justice & Attorney-General Ministry of Justice Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de l'Intérieur Dr al Tayib Ibrahim Mohamed Khei Minister of the Interior Ministry of the Interior Khartoum Soudan

– exhortez le gouvernement soudanais à libérer immédiatement et sans condition toute personne détenue pour avoir usé de ses droits fondamentaux et universellement reconnus à la liberté d'expression et d'association ; – demandez au gouvernement de mettre fin à la détention arbitraire sans inculpation ni jugement de personnes soupçonnées d'être des opposants politiques ; – priez le gouvernement de supprimer toutes les dispositions inscrites dans la législation et la Constitution qui autorisent la détention sans inculpation ni jugement. Veuillez envoyer une copie de vos appels à la représentation diplomatique du Soudan dans votre pays.

Page 28: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

28

Apiu et Acuir MAJOK Enfants enlevés par les forces gouvernementales En avril 1993, les Forces de défense populaire (FDP), une milice à la solde du gouvernement, ont pénétré dans le village lwo de Pankuel, dans le nord du Bahr el Ghazal (État situé dans le sud du Soudan). Les soldats ont pillé le village, emportant nourriture, bovins, chè vres... et enfants. Un certain nombre de filles ont été enlevées, notamment Apiu Majok, âgée de douze ans, et sa sœur Acuir, neuf ans. Terrifiées, elles ont été contraintes de monter à bord d'un train gouvernemental où se trouvaient déjà d'autres enfants, et qui faisait route vers le nord. Les deux sœurs ont vraisemblablement été séparées avant de monter dans le train, mais cela a pu se produire alors qu'elles se trouvaient déjà à l'intérieur. Quelles que soient les circonstances exactes de ce cauchemar, Acuir a été libérée par la police à Aweil, la principale ville de garnison dans le nord du Bahr el Ghazal, bien loin de son village natal. Mais sa sœur aînée, Apiu, n'a pas eu autant de chance. On ignore toujours où elle se trouve. Apiu Majok et sa sœur sont deux enfants qui se trouvaient au mauvais endroit au mauvais moment. Leur village est situé le long de la voie ferrée dans le nord du Bahr el Ghazal ; cette voie est d'une importance stratégique pour le gouvernement, qui l'utilise pour convoyer des troupes, des équipements militaires et de la nourriture vers ses villes de garnison dans le Sud. Les territoires environnants sont contrôlés par l'Armée populaire de libération du Soudan (APLS), qui livre une guerre sans merci au gouvernement dans le sud du Soudan. Des troupes à cheval des FDP escortent les trains gouvernementaux, pourchassant civils et membres de l'APLS sur une large bande de territoire de chaque côté de la voie ferrée. De très nombreuses informations font état de meurtres et de viols de femmes et d'enfants commis par les miliciens des FDP. Il semble que nombre des personnes enlevées soient destinées à devenir des esclaves domestiques. En juin et en juillet 1993, un train gouvernemental se dirigeant vers le Sud est arrivé à Wau avec à son bord quelque 217 enfants enlevés en cours de route. Ces derniers ont été gardés durant dix-sept jours à la gare de Wau, puis le train est reparti vers le Nord. Il semble qu'à Aweil les autorités locales soient une nouvelle fois intervenues et aient réussi à libérer quelque 150 enfants. Toutefois, aucune mesure n'a apparemment été prise à l'encontre des FDP. Un jeune interrogé à Akon, en juin 1994, a raconté comment il avait été emmené par les FDP et contraint de monter à bord du train : « Le train se dirigeait vers le nord. Les FDP m'ont attrapé dans la forêt, avec des vaches et des chèvres. Ils m'ont un peu battu, puis m'ont emmené de force en direction d'Aweil. En arrivant à Kuom, ils ont commencé à mettre les petits enfants dans des sacs. J'ai été enfermé dans des toilettes avec cinq autres jeunes garçons. Je connaissais trois d'entre eux [...] À Aweil, les policiers ont fouillé le train. Ils nous ont trouvés et nous ont libérés. » Apiu n'a toujours pas été retrouvée. On ne sait rien non plus du sort d'au moins 80 autres enfants.

Page 29: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

29

Ce que vous pouvez faire ) À qui adresser vos appels :

Monsieur le Président de la République adresse : Président de la République Lieutenant-General Omar Hassan Ahmad al Bashir President People's Palace P.O. Box 281 Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de l'Intérieur Dr al Tayib Ibrahim Mohamed Kheir Minister of the Interior Ministry of the Interior Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Major-General Hassan Abd al Rahman Ali Minister of Defence Ministry of Defence Khartoum Soudan

– faites part de votre préoccupation concernant les enfants emmenés en captivité par les Forces de défense populaire, une milice à la solde du gouvernement ; – demandez qu'une enquête impartiale et approfondie soit ouverte sur la "disparition" d'Apiu Majok et de tous les autres enfants enlevés sans laisser de trace, ainsi que sur les informations selon lesquelles ces enfants seraient utilisés comme esclaves ; – exhortez le gouvernement à prendre immédiatement des mesures pour empêcher que des civils sans défense ne soient emmenés en captivité, à instaurer en conséquence une structure de commandement claire permettant d'exercer à tout moment un contrôle strict sur les troupes des FDP et à donner des instructions sans ambiguïté avertissant que de telles violations des droits de l'homme ne seront plus tolérées. Veuillez envoyer une copie de vos appels à la représentation diplomatique du Soudan dans votre pays.

Page 30: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

30

Joseph, jeune garçon de onze ans Détenu de force et maltraité Joseph (il ne s'agit pas de son vrai nom) a onze ans. C'est un enfant dinka originaire du sud du Soudan, que ses parents ont envoyé vivre auprès d'une tante à Khartoum, la capitale, afin qu'il puisse aller à l'école. Fin 1992, Joseph se promenait dans le marché de Kalakala, un faubourg de Khartoum, lorsque la police a encerclé la place à la recherche d'enfants des rues. Vingt enfants de trois à onze ans originaires du sud du Soudan, dont Joseph, ont été embarqués de force dans un minibus et conduits dans un poste de police de Soba, au sud de la ville. Là, un certain nombre d'entre eux ont été accusés d'être des voleurs et sauvagement battus à coups de fouet en cuir de chameau. Ils ont passés les cinq jours suivants enfermés ensemble dans une cellule, tandis que d'autres enfants étaient amenés par la police. Lorsqu'une trentaine d'enfants ont été rassemblés, Joseph et ses camarades ont été emmenés dans un camp d'enfants au nord de Khartoum. Il se pourrait, d'après les descriptions qui en ont été faites, que ce camp soit celui d'Abu Dom, situé à 90 kilomètres de la capitale. Tout enfant qui tentait de s'échapper était sévèrement puni et roué de coups. À l'issue d'une première tentative d'évasion, Joseph et trois autres enfants ont été fouettés, puis contraints de rester une grande partie de la journée debout, les bras levés au-dessus de la tête, avec une brique dans chaque main. Joseph a réussi à s'échapper deux mois plus tard. Après s'être caché dans un canal d'irrigation, il a dû marcher plusieurs jours avant de pouvoir se retrouver en sécurité chez des membres de sa famille, à Khartoum. Le nombre de personnes déplacées augmentant au Soudan, celui des enfants livrés à eux-mêmes dans les rues de la capitale s'accroît proportionnellement. En septembre 1992, les autorités de Khartoum ont lancé un programme visant à retirer des rues tous les enfants vagabonds. Depuis lors, au moins six écoles et camps spéciaux – dont celui d'Abu Dom – ont été créés à leur intention. Les autorités prétendent que le regroupement forcé des enfants des rues est une mesure d'assistance publique destinée à les protéger contre « les risques et les dangers multiples auxquels [ils] sont exposés, notamment la drogue, la pornographie, la prostitution et la vente d'organes ». Quelles que soient les intentions motivant une telle mesure, Amnesty International est préoccupée par la façon dont celle-ci est mise en œuvre. Selon plusieurs informations, le rassemblement des enfants s'effectue de manière arbitraire et ceux-ci sont souvent gardés dans des cellules de police avant d'être acheminés de force vers les camps. Les enfants qui sont parvenus à s'enfuir, ainsi que les parents qui tentent de localiser leurs enfants disparus, affirment que, bien souvent, la police ne tient pas compte des renseignements fournis par les enfants concernant leurs familles. Les châtiments cruels, inhumains ou dégradants auxquels sont soumis les enfants qui ont tenté de s'échapper des camps sont un motif de très vive inquiétude. Selon certaines sources, la flagellation et la mise aux fers seraient des punitions couramment infligées. L'histoire de Joseph ressemble à celle de beaucoup d'autres enfants du sud du Soudan. Les autorités soudanaises clament avec insistance que les camps mis en place sont destinés aux enfants des rues. Or Joseph et d'autres enfants comme lui ont été emmenés dans ces camps alors qu'ils pouvaient justifier d'un domicile et de parents qui s'occupaient d'eux à Khartoum. Ce que vous pouvez faire ) À qui adresser vos appels :

Monsieur le Président de la République adresse : Lieutenant-General Omar Hassan Ahmad al Bashir President People's Palace P.O. Box 281

Monsieur le ministre adresse : Dr al Tayib Ibrahim Mohamed Kheir Minister of the Interior Ministry of the Interior Khartoum Soudan

Page 31: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

31

Khartoum Soudan

Colonel (mon Colonel, si l'appel est adressé par un homme) adresse : Directeur général de la police Lieutenant-Colonel Hamad Ahmed Sadiq Director General of Police Sudan Police Headquarters P.O. Box 981 Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Dr Ibrahim Abu Awf Minister of Social Planning Ministry of Social Planning Khartoum Soudan

– faites part de votre préoccupation concernant le fait que des enfants sont apparemment détenus par la police de Khartoum, puis envoyés dans des camps spéciaux, et qu'ils sont fouettés et frappés lorsqu'ils tentent de s'enfuir ; – priez instamment les autorités de donner à la police et aux responsables des camps d'enfants des directives leur indiquant que les traitements ou châtiments cruels, inhumains ou dégradants à l'encontre d'enfants constituent une violation de leurs droits fondamentaux, et que cela ne sera pas toléré ; – exhortez le gouvernement soudanais à honorer ses engagements en matière de droits de l'homme en vertu des instruments internationaux auxquels il est partie, notamment la Convention des Nations unies sur les droits de l'enfant. Veuillez envoyer une copie de vos appels à la représentation diplomatique du Soudan dans votre pays.

Page 32: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

32

Pêcheurs dinka Tués par les troupes gouvernementales En avril 1994, des soldats du gouvernement qui patrouillaient dans les environs d'Aweil, principale ville de garnison dans le nord du Bahr el Ghazal, sont tombés sur trois Dinka qui pêchaient à proximité de leur village, Awulic. Kir Lual Dut, Majok Akon Dut et Mayom Bol Acien étaient debout dans la rivière, de l'eau jusqu'à la taille, en train de pêcher à la manière traditionnelle avec des filets et des lances. Les soldats ont intimé aux trois hommes l'ordre de venir vers la rive ; là, ils les ont abattus. L'un d'eux a reçu sept balles dans le dos, un autre quatre. Le dernier a été tué d'une seule balle dans le front. Les soldats ont alors poursuivi leur chemin. Les villageois accourus au bruit des détonations ont trouvé les trois cadavres alignés sur la rive. Environ quarante-huit heures plus tard, le village d'Awulic était attaqué de nuit par les troupes gouvernementales. Les villageois qui cherchaient à fuir ont été abattus. Aghok Luac Amuk a raconté par la suite que son bébé avait été tué dans ses bras alors qu'elle tentait de s'échapper. Les forces gouvernementales cherchent à reprendre le contrôle des territoires tenus par l'Armée populaire de libération du Soudan (APLS) et leur tactique consiste à s'en prendre délibérément à la population rurale. Les soldats auraient attaqué un certain nombre de villages dans cette région du nord du Bahr el Ghazal en avril 1994. Depuis 1983, l'APLS est engagée dans une guerre sans merci contre le gouvernement dans le sud du Soudan. Des centaines de civils ont été victimes d'exécutions extrajudiciaires imputables aux troupes gouvernementales lors d'attaques de villages ; l'objectif est apparemment d'anéantir l'APLS dans les différentes localités en en chassant purement et simplement les habitants. Malgré plusieurs déclarations de cessez-le-feu de la part du gouvernement, il semble que les massacres de civils continuent au même rythme. Soit ces derniers vivent dans le crainte des attaques des troupes régulières, soit ils sont forcés de quitter leur région. Environ trois millions de personnes ont été chassées de leurs villages et contraintes de refaire leur vie loin des zones touchées par la guerre.

Page 33: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

33

Ce que vous pouvez faire ) À qui adresser vos appels :

Monsieur le Président de la République adresse : Président de la République Lieutenant-General Omar Hassan Ahmad al Bashir President People's Palace P.O. Box 281 Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de l'Intérieur Dr al Tayib Ibrahim Mohamed Kheir Minister of the Interior Ministry of the Interior Khartoum Soudan

Monsieur le ministre adresse : Ministre de la Défense Major-General Hassan Abd al Rahman Ali Minister of Defence Ministry of Defence Khartoum Soudan

Monsieur le Gouverneur adresse : Gouverneur du Bahr el Ghazal septentrional Mr Joseph Ajuong Governor of Northern Bahr al Ghazal State c/o People's Palace P.O. Box 281 Khartoum Soudan

– demandez que des enquêtes impartiales et exhaustives soient menées sur toutes les exécutions extrajudiciaires, que les auteurs de tels agissements soient traduits en justice et qu'ils soient écartés de tout poste comportant des responsabilités ; – exhortez le gouvernement à prendre immédiatement des mesures pour empêcher de nouvelles exécutions extrajudiciaires, à instaurer en conséquence une structure de commandement claire permettant d'exercer à tout moment un contrôle strict sur ses troupes et à donner des instructions sans ambiguïté avertissant que de tels homicides ne seront plus tolérés ; – soulignez que le meurtre de personnes qui ne participent pas directement aux hostilités constitue une violation des principes du droit humanitaire, et notamment de l'article 3 des Conventions de Genève. Veuillez envoyer une copie de vos appels à la représentation diplomatique du Soudan dans votre pays.

Page 34: AMNESTY INTERNATIONAL DOCUMENT INTERNE Origine : … · Gaafar Yassin Ahmad ABDULLAH Torturé Gaafar Yassin Ahmad Abdullah a obtenu en 1986 son diplôme en pharmacie à l'université

34

La version originale en langue anglaise de ce document a été publiée par Amnesty International, Secrétariat international, 1 Easton Street, Londres WC1X 8DJ, Royaume-Uni, sous le titre Sudan: "The tears of orphans". No future without human rights. Cases for appeals. Seule la version anglaise fait foi. La version française a été traduite et diffusée aux sections francophones et au Secrétariat interna-tional par LES ÉDITIONS FRANCOPHONES D'AMNESTY INTERNATIONAL - ÉFAI - décembre 1994. Pour toute information complémentaire veuillez vous adresser à :