À l'ecole de la géographie, phosphore, mai 2012

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our que vous puissiez naviguer sur Google Earth ou que vos parents se servent du GPS, il faut de sacrés spécialistes ! Comme elle. « On fait de la “géomatique”, explique Lila, 21 ans. Cette contraction des mots “géographie” et “informatique” regroupe l’ensemble des sciences et techniques qui permettent de mesurer la Terre, de la représenter et de l’analy- ser grâce à des données géographiques.» On est bien loin des cartes à colorier de l’épreuve du bac… « J’ai fait une prépa scientifique maths-physique, avant d’intégrer cette école. Au départ, je n’avais jamais enten- du parler de l’ENSG, avant de rencontrer des étudiants sur un forum. » Il faut dire que l’école ne compte que 260 étudiants, futurs ingénieurs, géomètres ou dessina- teurs cartographes. C’est une « petite » grande école. En arrivant devant le bâti- ment à l’architecture innovante, on découvre avec surprise qu’elle le partage avec une autre : l’École des Ponts Paris- Tech (ENPC). «En plus, tous les étudiants ne sont pas là, puisque la première année d’ingénieur s’effectue au Mans, au sein de l’ESGT (École supérieure des géo- mètres et topographes), précise Lila. Les métiers de géomètres et topographes sont complémentaires aux nôtres. » Résultat, sa promo compte à peine trente élèves, ce qui rend l’enseignement plus familial. Autre particularité: l’école est gérée par l’Institut géographique national (IGN)*. «Quand on veut intégrer le cycle ingénieur comme moi, on a deux possibilités : passer le concours “classique” ou le concours “fonctionnaire IGN”. J’ai été reçue au second. Ce qui signifie que j’ai été embauchée dès mon entrée à l’école par l’IGN, en vue d’intégrer le corps d’Ingénieurs des travaux géogra- phiques et cartographiques de l’État (ITGCE). Je devrais y rester ensuite huit ans. Je gagne déjà 1 300 euros nets par mois. C’est pratique car je voulais vraiment être indépendante financièrement. » (*) Sous tutelle du ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de la Mer. P Je gagne déjà 1 300 euros par mois. Portes ouvertes Par Sandrine Pouverreau. Reportage photo Eric Larrayadieu C’est à Marne-la-Vallée, à 30 km de Paris, qu’étudie Lila, en 2 e année à l’École nationale des sciences géographiques (ENSG). Lila sait lire une carte comme personne et nous guide, tout naturellement. Bienvenue à l’École de la géographie

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Page 1: À l'Ecole de la Géographie, Phosphore, Mai 2012

our que vous puissiez naviguer sur Google Earth ou que vos parents se servent du GPS, il faut de sacrés spécialistes ! Comme elle. « On fait de la “géomatique”, explique Lila,

21 ans. Cette contraction des mots “géographie” et “informatique” regroupe l’ensemble des sciences et techni ques qui permettent de mesurer la Terre, de la représenter et de l’analy-ser grâce à des données géographi ques. » On est bien loin des cartes à colorier de l’épreuve du bac… « J’ai fait une prépa scientifique maths-physique, avant d’intégrer cette école. Au départ, je n’avais jamais enten-du parler de l’ENSG, avant de rencontrer des étudiants sur un forum. » Il faut dire que l’école ne compte que 260 étudiants, futurs ingénieurs, géomètres ou dessina-teurs cartographes. C’est une « petite » grande école. En arrivant devant le bâti-ment à l’architecture innovante, on découvre avec surprise qu’elle le partage avec une autre : l’École des Ponts Paris-

Tech (ENPC). « En plus, tous les étudiants ne sont pas là, puisque la première année d’ingénieur s’effectue au Mans, au sein de l’ESGT (École supérieure des géo-mètres et topographes), précise Lila. Les métiers de géomètres et topographes sont complémentaires aux nôtres. » Résultat, sa promo compte à peine trente élèves, ce qui rend l’enseignement plus familial. Autre particularité : l’école est gérée par

l’Institut géographique national (IGN)*. « Quand on veut intégrer le cycle ingénieur comme moi, on a deux possibilités : passer le concours “classique” ou le concours “fonctionnaire IGN”.

J’ai été reçue au second. Ce qui signifie que j’ai été embauchée dès mon entrée à l’école par l’IGN, en vue d’intégrer le corps d’Ingénieurs des travaux géogra-phiques et cartographiques de l’État (ITGCE). Je devrais y rester ensuite huit ans. Je gagne déjà 1 300 euros nets par mois. C’est pratique car je voulais vraiment être indépendante financièrement. » (*) Sous tutelle du ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de la Mer.

PJe gagne déjà 1 300 euros

par mois.

Portes ouvertes

Par Sandrine Pouverreau. Reportage photo Eric Larrayadieu

C’est à Marne-la-Vallée, à 30 km de Paris, qu’étudie Lila, en 2e année à l’École nationale des sciences géographiques (ENSG). Lila sait lire une carte comme personne et nous guide, tout naturellement.

Bienvenue à l’École de

la géographie

Page 2: À l'Ecole de la Géographie, Phosphore, Mai 2012

J’ai toujours été fascinée par les images satellites. Et par la géographie.

« Je vais souvent travailler au centre de documentation.

Je consulte les revues scientifi ques en anglais. Ou je fais

des recherches quand je travaille sur un projet, comme

celui que j’ai mené au début de la 2e année. J’ai étudié les

données du satellite Grace pour voir les mouvements des

masses sur la Terre, en l’occurrence la fonte des glaces. »

« En 1re année, on apprend les bases : photogrammétrie, topométrie, géodésie… Et, à la fi n de l’année, toute la promo part à Forcalquier, dans le Sud, pendant deux mois, pour mettre en pratique ce qu’on a appris. »

« À l’ENSG, on a évidemment des cours de géomatique,

dont certains sont très “informatiques” (systèmes d’infor-

mation, programmation et cartographie web…), des cours

de sciences (maths, sciences de l’ingénieur, sciences

humaines) et des enseignements plus généraux (droit,

aménagement, environnement…). On doit aussi étudier

deux langues étrangères. Je fais de l’anglais et du chinois. »

« On ne travaille plus que sur informatique. Avant, il fallait des machines perfectionnées pour voir une image en 3D à partir de deux images aériennes. Aujourd’hui, on a des logiciels pour ça. D’ailleurs la fi lière Dessinateur-cartographe de l’école va s’arrêter. Actuellement, je vais beaucoup en salle informatique, car j’étudie la mobilité professionnelle à partir de cartes. »

À la pause, les étudiants fi lent s’informer de leur futur stage. Chaque année se termine en effet par un stage de 2 à 4 mois dont un doit être fait à l’étranger. « Moi, je pars en Crète onze semaines étudier l’évolution de la température en surface. »

« J’ai environ 27 heures de cours par semaine, entrecou-

pées de pauses fréquentes à la cafétéria que l’on partage

avec les étudiants des Ponts. On partage aussi le self…

mais on ne se fréquente pas beaucoup. Sauf lors des

soirées qu’organisent les différents Bureaux des élèves. »s’arrêter. Actuellement, je vais beaucoup en salle informatique, s’arrêter. Actuellement, je vais beaucoup en salle informatique,

« Ma mère travaillait pour l’Agence française de l’espace, à Toulouse, raconte Lila. J’ai toujours été fascinée par les images satellites. Et par la géographie. Mais il faut croire que c’est rare… C’est plutôt un truc de garçons : ils sont

majoritaires dans l’école. Quand je participe à des forums et que je commence à expliquer que l’on fait beaucoup de maths et d’informatique, ça fait fuir les fi lles. Pourtant, on s’y met rapidement… »

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f En 2de Pas d’exams en vue… Profitez-en pour partir à la décou-verte d’une région ou d’un milieu naturel (la vallée de la Loire, les Landes…), en allant rendre visite à une tante, un cousin, des potes, etc. Sachez éga-lement que certains organismes organisent des séjours pour ados sur le thème de la découverte des milieux

naturels. Un moyen intelligent et ludique de passer vos vacances.

f En 1re Si vous n’en-visagez pas de devenir prof d’histoire-géo, dirigez-vous plutôt vers une série scientifique. Dernier conseil : commencez dès cette année à aller discuter avec les étudiants en géo (en fac ou dans des écoles spécialisées)

lors des journées portes ouvertes des écoles et des salons étu-diants… Vous aurez beaucoup moins de temps en Tle.

f En Tle Suivez l’ac-tualité. De nombreux événements, conflits, catastrophes naturelles, déplacements de popu-lation… ont rapport avec les sciences géographiques.

Comment s’y préparer dès le lycée ?

p Faites-vous un petit week-end à Saint-Dié (Vosges), à la mi-octobre, pour le célèbre Festival international de géographie. Vous y rencontrerez des géographes, découvrirez de nouveaux pays, etc. www.saint-die.eu/accueilfig.html

p Le site du National Geographic Channel, pour découvrir de nouvelles contrées ou trouver réponses à certaines de vos questions en géo. http://natgeotv.com/fr/enviedesavoir

ZONE wifi Pour les fans de géo

fMieux vaut se renseigner sur les parcours proposés par les facs.VRAI – Des parcours sont généralement proposés en cours de licence afi n de vous orienter vers un secteur d’activité. Par exemple, la mention Histoire conduit à devenir prof d’histoire-géo en collège ou lycée. La mention Aménagement est adaptée à ceux qui veulent travailler dans l’urbanisme, le dévelop-pement territorial ou la cartographie. La mention Environnement permet d’acquérir des compétences dans la maîtrise et la gestion des risques naturels et environnementaux. La mention Géomatique (également proposée à la fac) mène aux mêmes métiers que ceux de l’ENSG.

f La géo, c’est pour les littéraires.VRAI ET FAUX – La géographie étudie les relations entre les activités humaines et les milieux physiques. Elle se situe donc à la croisée des sciences de l’homme et de la nature. Pour suivre cette discipline, mieux vaut être à la fois littéraire (qualités d’écriture pour décrire une situation) et scientifi que (statistiques, aisance en bureautique pour l’utilisation des logiciels). Si vous êtes littéraire ou porté(e) sur l’économie, vous pouvez tenter une licence de géographie à la fac. Mais sachez que vous aurez des cours de géographie physique (étude des reliefs et des sols), de géographie des populations et des socié-tés, des cours sur les régions, les nations... Et en travaux dirigés, vous apprendrez aussi les tech-niques de la cartographie et de l’analyse spatiale.

f Les études de géographie se suivent essentiellement en fac.VRAI – En dehors de quelques écoles d’ingé nieurs spécialisées telles l’ENSG ou l’École nationale de la météorologie (ENM), à Toulouse, les études se déroulent essen-tiellement à l’université. Comme l’ENSG, l’ENM est ouverte sur concours après le bac (pour la fi lière Technicien), une prépa ou une licence (pour la fi lière Ingénieur), et forme des salariés qui travailleront essentiellement à Météo-France. Pour intégrer ces deux cursus, un bac S ou STI est indispensable.

f À la sortie, c’est prof ou chômage.ARCHI-FAUX ! – L’enseignement n’est pas le seul débouché des géographes (580 postes offerts au Capes d’histoire-géo en 2012 contre 610 en 2010 ; les taux de réussite oscillent entre 17 et 25 %). Ils peuvent travailler dans l’urbanisme, l’amé-nagement du territoire, le développement local, l’environnement, voire le tourisme... Surtout, les débouchés sont énor mes dans la géomatique : statisticien (pour l’Insee, par exemple), cartographe, analyste de photos satellites dans l’armée, ingénieur dans des organismes internationaux de développe-ment ou de coopération, ingénieur à l’IGN, gestionnaire de réseaux (eau, assainisse-ment, électricité, télécommunications…), ingénieur dans des bureaux d’études, SSII, parcs naturels, etc. D’ailleurs, à la sortie de l’école, la plupart des ingénieurs (hors fonc-tionnaires) de l’ENSG sont déjà embauchés !

Faire des études de géographie