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BTS Tertiaire 1 re année Annie Ruard – Yolande Schaan Droit Cours 1 Directrice de publication : Valérie Brard-Trigo Les cours du Cned sont strictement réservés à l’usage privé de leurs destinataires et ne sont pas destinés à une utilisation collective. Les personnes qui s’en serviraient pour d’autres usages, qui en feraient une reproduction intégrale ou partielle, une traduction sans le consentement du Cned, s’exposeraient à des poursuites judiciaires et aux sanctions pénales prévues par le Code de la propriété intellectuelle. Les reproductions par reprographie de livres et de périodiques protégés contenues dans cet ouvrage sont effectuées par le Cned avec l’autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie (20, rue des Grands Augustins, 75006 Paris).

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BTS Tertiaire 1re année

Annie Ruard – Yolande Schaan

Droit

Cours 1

Directrice de publication : Valérie Brard-TrigoLes cours du Cned sont strictement réservés à l’usage privé de leurs destinataires et ne sont pas destinés à une utilisation collective. Les personnes qui s’en serviraient pour d’autres usages, qui en feraient une reproduction intégrale ou partielle, une traduction sans le consentement du Cned, s’exposeraient à des poursuites judiciaires et aux sanctions pénales prévues par le Code de la propriété intellectuelle. Les reproductions par reprographie de livres et de périodiques protégés contenues dans cet ouvrage sont effectuées par le Cned avec l’autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie (20, rue des Grands Augustins, 75006 Paris).

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Séquence 1

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Séquence 1

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Sommaire

Séquence 1 ...................................................................................................................................... 5 Chapitre 1 : Le droit et l’activité économique ..................................................................................... 7

Séquence 2 .................................................................................................................................... 49 Chapitre 2 : Les pouvoirs politiques économiques centraux et la déconcentration........................... 53 Chapitre 3 : La décentralisation et les pouvoirs publics économiques territoriaux ........................... 68 Chapitre 4 : Les autorités administratives indépendantes (AAI) et les pouvoirs privés économiques 96

Séquence 3 .................................................................................................................................. 131 Chapitre 5 : L’organisation judiciaire .............................................................................................. 135 Chapitre 6 : Les sources du droit ..................................................................................................... 187

Séquence 4 .................................................................................................................................. 229 Thème 1 : L’impact du droit européen sur le droit interne ............................................................... 229

Séquence 5 .................................................................................................................................. 239 Chapitre 7 : Les actes et les faits juridiques..................................................................................... 241

Conseils généraux

Examen : soyez vigilant !

Vous devez contacter dès le mois d’octobre le rectorat de l’académie dont vous dépendez.

Attention à la date de clôture des inscriptions à l’examen.

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Séquence 1

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Séquence 1

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SÉQUENCE 01

CHAPITRE 1 : LE DROIT ET L’ACTIVITE ECONOMIQUE ................................................................... 7

I. PRINCIPES GENERAUX QUI SOUS-TENDENT L’ACTIVITE ECONOMIQUE.................................. 7 A. LE CADRE JURIDIQUE ....................................................................................................................................... 7 B. L’ACTIVITE ECONOMIQUE............................................................................................................................... 7

II. LES LIBERTES PUBLIQUES : LES LIBERTES SOCIALES ET ECONOMIQUES............................ 12

III. NOTION D’ORDRE PUBLIC ET D’ORDRE SOCIAL......................................................................... 18 A. LA NOTION D’ORDRE PUBLIC........................................................................................................................ 18 B. L’ORDRE PUBLIC ECONOMIQUE ET SOCIAL .............................................................................................. 19

IV. L’INTERDEPENDANCE DU DROIT ET DE L’ECONOMIE.............................................................. 28 A. L’ECONOMIE AGIT SUR LE DROIT ................................................................................................................ 28 B. LE DROIT AGIT SUR L’ECONOMIE................................................................................................................. 28

EXERCICES D’ENTRAINEMENT A NE PAS ENVOYER A LA CORRECTION................................... 35

CORRIGE DES EXERCICES D’ENTRAINEMENT................................................................................... 37

POUR ALLER PLUS LOIN .......................................................................................................................... 40

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Séquence 1

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PRÉSENTATION DE LA SÉQUENCE 01

NUMERO DU CHAPITRE ET DUREE D’ETUDE THEORIQUE MOYENNE COMPETENCES MOTS-CLES

Chapitre 1 Le droit et l’activité économique (2 heures)

– Mettre en évidence la nécessité d’un cadre juridique pour organiser et préciser les droits et les obligations des acteurs économiques.

– Repérer parmi les libertés publiques celles qui ont le caractère de libertés économiques et sociales.

– Justifier les enjeux de cet ordre public.

– Montrer l’interdépendance du droit et de l’économie.

Droit Droit de propriété Libertés individuelles Libertés économiques Libertés publiques Libertés sociales Loi impérative Ordre public

À retenir Exercices d’entraînement à ne pas envoyer à la correction

QCM Développement structuré

Pour aller plus loin – Dossier documentaire 1 Depuis 1997, 185 collectivités locales ont installé des caméras.

– Dossier documentaire 2 Les droits de l’homme forment un ensemble indissociable (extraits).

– Dossier documentaire 3 Charte des droits fondamentaux de l’Union (extraits).

– Dossier documentaire 4 Le casse-tête du service minimum.

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Séquence 1

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CHAPITRE 1 : LE DROIT ET L’ACTIVITE ECONOMIQUE

I. Principes généraux qui sous-tendent l’activité économique

Être capable de

Mettre en évidence la nécessité d’un cadre juridique pour organiser et préciser les droits et obligations des acteurs économiques.

Pour fonctionner sereinement, l’économie doit être organisée par des règles. En effet, s’il n’existait pas de règles sociales obligatoires, ce serait la loi de la jungle, c’est-à-dire celle du plus fort. Le droit va organiser les relations entre individus et entre les individus et les pouvoirs publics en définissant des droits et des obligations réciproques.

A. Le cadre juridique Vous retiendrez que :

1. Le droit est l’ensemble des règles générales et obligatoires applicables dans un État, ou droit objectif. Le droit objectif présente deux caractères : a. la règle de droit est générale : elle ne vise aucune personne déterminée ; sa formulation est impersonnelle (« quiconque »…, « chacun »…) ; b. la règle de droit est obligatoire : quiconque ne la respecte pas encourt des sanctions.

Le droit objectif est divisé en deux branches (le droit international, le droit national) subdivisées en deux sous-branches (droit public, droit privé) qui comportent de nombreuses ramifications.

2. Les droits subjectifs sont des prérogatives particulières dont peut se prévaloir une personne déterminée. Ces prérogatives concernent : c. sa personne ; ce sont les droits extra-patrimoniaux : nom, famille, honneur, liberté… d. son patrimoine : ce sont les droits patrimoniaux : propriété, contrats, obligations…

B. L’activité économique Le droit naît et s’enrichit simultanément avec le développement de la société dans laquelle il a été fondé. Il permet également à cette société de rendre son système économique plus efficace en le structurant (documents 1 à 4).

L’activité économique concerne tous les faits de production, répartition, échange et consommation de richesses.

Tous les acteurs qui évoluent au sein de cette activité dans un cadre juridique peuvent alors exercer et développer leur activité.

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Séquence 1

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DOCUMENT 1

Nouveaux enjeux de la justice

De la justice des marchands à la justice de l’entreprise et des marchés

Signe du rôle croissant joué par le juge dans le domaine économique et financier, la presse ne fréquente plus seulement les assises ou les grands procès civils.

Marie-Charlotte Piniot montre que la complexité croissante des relations d’affaires a entraîné une évolution, non seulement des normes en matière des droits du commerce, de la faillite ou boursier mais aussi de la sanction des comportements irréguliers, le rôle du juge s’articulant alors selon un triptyque punition-réparation-prévention. En se développant et en se spécialisant, l’intervention du juge suppose une spécialisation des juridictions et une évolution du rôle du ministère public. Enfin, l’existence d’un ordre public économique devrait renforcer le dialogue et les échanges entre le juge et l’entreprise.

C. F. « La Justice », Cahiers français n° 25, La Documentation française, 1er mars 1991

Questions

1. Quelle est l’évolution du comportement de la presse ? 2. Pour quelles raisons ? 3. Quel est le nouveau rôle du juge selon Marie-Charlotte Piniot ? 4. Quels sont les moyens mis à sa disposition ?

Votre réponse

Réponses

1. La presse s’intéresse de plus en plus aux « affaires économiques ». Ex. : Enron ; Coca-Cola/Orangina… 2. Le public est plus sensible aux évolutions économiques et sociales : études plus longues ; pluralité des médias… 3. Le nouveau rôle du juge s’articule selon un triptyque : punition-réparation-prévention. 4. Les moyens mis à la disposition du juge sont un ensemble de normes écrites.

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Séquence 1

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DOCUMENT 2

« La Justice », Cahiers français n° 25, La Documentation française, 1er mars 1991

Questions

1. De combien de Codes l’empire français disposait-il ? 2. Nommez-les.

Votre réponse

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Séquence 1

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Réponses

1. L’empire français disposait de cinq codes. 2. Il s’agissait des codes suivants : – Code Napoléon. – Code de procédure civile. – Code de commerce. – Code d’instruction criminelle. – Code pénal.

DOCUMENT 3

Codes Éditions annuelles Codes Éditions périodiques Mois de parution Millésime

Code des assurances Code civil Code de commerce Code de la consommation Code général des collectivités territoriales Code général des impôts Code pénal Code de procédure pénale Code de la santé publique Code de la sécurité sociale, Code de la mutualité Code des sociétés et des marchés financiers Code du travail Nouveau Code de procédure civile Nouveauté : Code Expert – Code du travail Code Expert – Code civil Code Expert – Code de commerce Code Expert – Code pénal et Code de procédure pénale

Mai Septembre Octobre Juin Octobre Avril Septembre Septembre Juin Octobre Avril Mars Avril Mars Septembre Octobre Septembre

Code administratif Code administratif avec CD-ROM Code des baux, commenté Code de la communication Code de la construction et de l’habitation, commenté Code de la copropriété, commenté Code électoral Code de l’environnement, commenté Code de la fonction publique Code de procédure fiscale Code de la propriété intellectuelle Code de la route, commenté Code rural, Code forestier Code du sport Code de l’urbanisme, commenté Mégacode civil Mégacode de commerce

2003 2003 2002 2001 2004 2004 2002 2002 2003 2003 2002 2003 2003 2001 2004 2003 2002

Code de commerce, édition 2004 Dalloz, Introduction

Questions

1. Quelle évolution notez-vous par rapport à 1812 ? 2. Citez des codes applicables en droit des affaires. 3. Qu’est-ce qui vous permet de dire que l’évolution est rapide ? 4. À quoi est-ce dû selon vous ?

Votre réponse

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Séquence 1

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Réponses

1. Par rapport à 1812, on peut noter une multiplication et une spécialisation des codes. 2. En droit des affaires, sont applicables les codes suivants : – Code civil. – Code des impôts. – Code du travail. – Code de la consommation. – Code pénal. – Code monétaire et financier (partie législative promulguée par l’ordonnance du 14 décembre 2000). – Code de l’environnement. 3. La fréquence des éditions nous permet de dire que cette évolution est rapide : – annuelle pour certains : ex. : Code de commerce ; Code de la consommation ; Code du travail… – périodique pour d’autres : ex. : Code électoral (2002) ; Code de l’environnement (2002) ; Code de la

communication (2001)… 4. Cela est dû à l’évolution de l’environnement socioéconomique qui a fait exploser le contentieux économique.

DOCUMENT 4 Veille de textes – Du 10 mars au 10 mai 2004

Domaine Date Titre

Nouvelle criminalité JO 10 mars 2004, p. 4567 Loi n° 2004-204 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité (art. 1 et 5 : interception de correspondances ; art. 7 : diffusion par tous moyens de procédés permettant la fabrication de bombes ; art. 23 : loteries et loteries on line ; art. 34 : contrefaçon ; art. 45 : prescription allongée des délits de presse relatifs au racisme).

Agent artistique JO 10 mars 2004, p. 4685 Décret n° 2004-206 relatif à l’exercice de l’activité d’agent artistique par des ressortissants d’un État membre de la Communauté européenne ou d’un État partie à l’accord sur l’Espace économique européen et modifiant le Code du travail.

Agences de presse JO 18 mars 2004, p. 5275 Arrêté du 21 janvier 2004 modifiant la liste des organismes constituant des agences de presse au sens de l’ordonnance n° 45-2646 du 2 novembre 1945 portant réglementation des agences de presse.

Conseil stratégique des techniques de l’information

JO 23 mars 2004, p. 5536 Décret n° 2004-255 du 22 mars 2004 portant création d’un conseil stratégique des techniques de l’information.

Agence pour le développement de l’administration électronique

JO 25 mars 2004, p. 5680 Arrêté du 22 mars 2004 relatif à la création par l’agence pour le développement de l’administration électronique d’un site sur Internet.

Publications non périodiques JO 30 mars 2004, p. 6063 Arrêté du 16 mars 2004 complétant l’arrêté du 26 février 2002 relatif aux publications non périodiques sur support papier et électronique et aux bases de données électroniques de l’INSEE.

Élections JO 15 avril 2004, p. 6952 Conseil supérieur de l’audiovisuel, Recommandation n° 2004-3 du 6 avril 2004 du Conseil supérieur de l’audiovisuel à l’ensemble des services de télévision et de radio en vue de l’élection des représentants au Parlement européen du 13 juin 2004.

Publicité JO 4 mai 2004, p. 7941 Décision du 31 mars 2004 interdisant des publicités pour des médicaments mentionnés à l’article L. 5122-1, premier alinéa, du Code de la santé publique, destinées aux personnes appelées à prescrire ou à délivrer ces médicaments ou à les utiliser dans l’exercice de leur art.

CNIL JO 5 mai 2004, p. 8024 Commission nationale de l’informatique et des libertés, Délibération n° 2004-022 du 8 avril 2004 portant modification des articles 18 à 22 du règlement intérieur de la commission.

Télécommunications JO 7 mai 2004, p. 8189 Autorité de régulation des télécommunications, Décision n° 2004-348 du 6 avril 2004 relative à la mise en place d’une enquête statistique trimestrielle pour l’année 2004 dans le secteur des télécommunications.

Revue mensuelle du JurisClasseur, Communication, Commerce électronique, page 7, mai 2004

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Séquence 1

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Questions

1. À quelle technologie de l’information et de la communication est-il fait allusion dans le tableau ? 2. Quels sont les domaines concernés par la « veille de textes » durant la période du 10 mars au 10 mai 2004 ? 3. Quelle caractéristique commune présentent-ils ?

Votre réponse

Réponses

1. Il est fait allusion dans ce tableau à Internet et au contentieux né de son développement. 2. Les domaines concernés par la veille de textes sont la nouvelle criminalité ; l’activité d’agent artistique ; la réglementation des agences de presse ; la création d’un conseil stratégique des techniques de l’information… 3. Ils concernent tous les aspects de notre société, signe que l’Internet est partie intégrante de l’économie. Peut-être un jour verrons-nous la rédaction d’un Code de l’Internet ?

II. Les libertés publiques : les libertés sociales et économiques

Être capable de

Repérer, parmi les libertés publiques, celles qui ont le caractère de libertés économiques et sociales (droit de propriété, liberté contractuelle, liberté de travail, droit syndical…).

Les libertés publiques sont les droits fondamentaux de la personne humaine juridiquement reconnus et protégés par le Préambule de la Constitution de 1946, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (1789) et, au niveau international, par la Convention européenne des droits de l’homme et par la Déclaration universelle des droits de l’homme.

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Séquence 1

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Libertés individuelles

Droits du citoyen Exemples : – liberté d’aller et venir, – liberté de circuler en tous lieux et par tous moyens (à pied, en voiture, en bateau,

en avion), sous réserve du respect des diverses réglementations comme le code de la route,

– liberté d’expression, – droit de vote.

Droits de la personne Exemples : – droit à la vie privée et à l’image, – droit à l’intégrité physique : protège le corps humain contre les tiers (coups,

blessures…) et contre l’individu lui-même qui ne peut vendre ou louer tout ou partie de son corps. Il peut seulement donner (son sang ou ses organes),

– droit à l’intégrité morale : protège les éléments de la personnalité (dignité, honneur…).

Libertés publiques à caractère économique et social

Liberté de commerce et d’industrie instituée par le décret d’Allarde en 1791 Exemples : – liberté d’entreprendre : libre choix de son activité pour un individu, – liberté d’exploiter et de concurrence : liberté de choisir les moyens de vendre ses

produits.

Liberté contractuelle (article 1134 du Code civil) Exemples : – liberté de contracter ou non : on ne peut être contraint à passer un contrat, – liberté de choisir ses partenaires : acheter au fournisseur de son choix, – liberté de négocier le contenu du contrat : libre fixation du prix, des conditions de

paiement, de livraison.

Libertés individuelles à caractère économique et social

Droit de propriété (reconnu par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789). (document 5) Ce droit est absolu, exclusif (n’appartient qu’au propriétaire) et perpétuel (à vie et transmissible aux héritiers). Il contient : – le droit d’utiliser un bien (usus), – le droit d’en percevoir le loyer (fructus), – le droit de s’en séparer (abusus). Liberté du travail (document 6) Exemples : – droit de chacun au travail et de choisir librement son emploi, – liberté syndicale : constituer un syndicat, adhérer ou ne pas adhérer à un syndicat,– droit de grève : reconnu par la Constitution de 1946, – libertés dans l’entreprise : droit à la formation, droit à l’information, droit

d’expression…

Mais

Aucun droit n’étant pleinement absolu, les libertés publiques sont généralement restreintes dans l’intérêt général ; toutes connaissent des limites. Des règles précises d’exercice de ces libertés sont nécessaires pour leur mise en œuvre.

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Séquence 1

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DOCUMENT 5

PROPRIETE INTELLECTUELLE

53 – Loi Perben II : durcissement législatif de la répression pénale de la contrefaçon

Les sanctions pénales de la contrefaçon du droit d’auteur, du droit des marques et du droit des brevets d’invention sont plus sévères.

L. n° 2004-204, 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, art. 34 : JO 10 mars 2004, p. 456.

Section 7. – Dispositions relatives à la contrefaçon

Art. 34 : Le Code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :

I. – L’article L. 335-2 est ainsi modifié : 1° À la fin du deuxième alinéa, les mots : « deux ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende » sont remplacés par les mots : « trois ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende » ; 2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé : « Lorsque les délits prévus par le présent article ont été commis en bande organisée, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 500 000 euros d’amende. »

II. – L’article L. 335-4 est ainsi modifié : 1° Dans le premier alinéa, les mots : « deux ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende » sont remplacés par les mots : « trois ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende » ; 2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé : « Lorsque les délits prévus au présent article ont été commis en bande organisée, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 500 000 euros d’amende. »

III. – L’article L. 343-1 est ainsi rédigé : « Art. L. 343-1. – Est puni de trois ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende le fait de porter atteinte aux droits du producteur d’une base de données tels que définis à l’article L. 342-1. Lorsque le délit a été commis en bande organisée, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 500 000 euros d’amende. »

IV. – Le premier alinéa de l’article L. 521-4 est ainsi rédigé : « Toute atteinte portée sciemment aux droits garantis par le présent livre est punie de trois ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende. Lorsque le délit a été commis en bande organisée, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 500 000 euros d’amende. »

V. – Le I de l’article L. 615-14 est ainsi rédigé : « I. Sont punies de trois ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende les atteintes portées sciemment aux droits du propriétaire d’un brevet, tels que définis aux articles L. 613-3 à L. 613-6. Lorsque le délit a été commis en bande organisée, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 500 000 euros d’amende. »

VI. – L’article L. 623-32 est ainsi rédigé : « Art. L. 623-32. – Toute atteinte portée sciemment aux droits du titulaire d’un certificat d’obtention végétale, tels qu’ils sont définis à l’article L. 623-4, constitue un délit puni d’une amende de 10 000 euros. Lorsqu’il a été rendu contre le prévenu dans les cinq années antérieures une condamnation pour le même délit ou en cas de commission du délit en bande organisée, un emprisonnement de six mois peut, en outre, être prononcé. »

VII. – L’article L. 716-9 est ainsi rédigé : « Art. L. 716-9. – Est puni de quatre ans d’emprisonnement et de 400 000 euros d’amende le fait pour toute personne, en vue de vendre, fournir, offrir à la vente ou louer des marchandises présentées sous une marque contrefaite : « a) D’importer sous tout régime douanier, d’exporter, de réexporter ou de transborder des marchandises présentées sous une marque contrefaite ; « b) De produire industriellement des marchandises présentées sous une marque contrefaite ;

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Séquence 1

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« c) De donner des instructions ou des ordres pour la commission des actes visés aux a et b. « Lorsque les délits prévus au présent article ont été commis en bande organisée, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 500 000 euros d’amende. »

VIII. – L’article L. 716-10 est ainsi rédigé : « Art. L. 716-10. – Est puni de trois ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende le fait pour toute personne : « a) De détenir sans motif légitime, d’importer sous tous régimes douaniers ou d’exporter des marchandises présentées sous une marque contrefaite ; « b) D’offrir à la vente ou de vendre des marchandises présentées sous une marque contrefaite ; « c) De reproduire, d’imiter, d’utiliser, d’apposer, de supprimer de modifier une marque, une marque collective ou une marque collective de certification en violation des droits conférés par son enregistrement et des interdictions qui découlent de celui-ci ; « d) De sciemment livrer un produit ou fournir un service autre que celui qui lui est demandé sous une marque enregistrée. « L’infraction, dans les conditions prévues au d, n’est pas constituée en cas d’exercice par un pharmacien de la faculté de substitution prévue à l’article L. 5125-23 du Code de la santé publique. « Lorsque les délits prévus aux a à d ont été commis en bande organisée, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 500 000 euros d’amende. »

NOTE : Les sanctions pénales de la contrefaçon ont varié avec les époques. Lointain est, en effet, le temps des poignets coupés ou des expositions des contrefacteurs, sur une place publique, enfermés dans un carcan avec des échantillons des marchandises contrefaites (V. A. Allart, Traité théorique et pratique de la contrefaçon : Paris 1908, p. 10-11). De nos jours, ceux qui violent les droits de propriété intellectuelle risquent tout au plus de payer des amendes et de séjourner dans ces prisons que le droit d’auteur communautaire qualifie pudiquement d’« institutions sociales sans but lucratif » (V. Dir. 22 mai 2001, art. 5.1.e). Néanmoins, la mansuétude à l’égard des contrefacteurs n’est plus de mise, comme le prouve l’article 34 de la loi du 9 mars 2004, dite loi « Perben II » (V. F. Le Gunehec, Loi n° 2004-204, 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité » : JCP G 2004, act. 177 et 188). Il est intéressant de constater que la répression de la contrefaçon retient ainsi l’attention du législateur national et coexiste, au sein de ce texte, avec les crimes et délits les plus importants.

La principale innovation de la loi consiste à augmenter le plafond maximum des amendes et la durée maximale d’emprisonnement. Ainsi, pour le droit d’auteur, le droit des producteurs de bases de données, le droit des producteurs de vidéogrammes et de phonogrammes, le droit des dessins et modèles et les brevets d’invention, les amendes peuvent dorénavant être de 300 000 euros (contre 150 000 euros auparavant) et les peines de prison peuvent aller jusqu’à trois ans (au lieu de deux ans). Cette répression accrue est, non seulement symbolique, mais montre également une volonté de lutter contre la contrefaçon que ne contredirait pas le droit communautaire (V. Proposition de directive, 30 janv. 2003, Com. (2003) 46 (01) final.

Revue mensuelle du JurisClasseur, Communication, Commerce électronique, page 30, mai 2004

Questions

1. Quelles étaient, autrefois, les sanctions pénales de la contrefaçon ? 2. Quelle était la situation en 2001 ? 3. Quelle est l’évolution constatée en 2004 ?

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Séquence 1

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Votre réponse

Réponses

1. Autrefois, les sanctions de la contrefaçon étaient de couper les poignets et d’exposer les contrefacteurs en place publique dans un carcan avec des échantillons des marchandises contrefaites. 2. En 2001, ceux qui violaient les droits de propriété intellectuelle risquaient le plus souvent de payer des amendes et exceptionnellement la prison. 3. En 2004, la mansuétude n’est plus de mise. La loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 dite loi « Perben II » augmente le plafond maximum des amendes (300 000 euros au lieu de 150 000 euros) et la durée maximale d’emprisonnement (3 ans au lieu de 2).

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Séquence 1

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DOCUMENT 6

Nice-Matin, jeudi 9 septembre 2004

Questions

1. Qu’est-ce que le « service minimum » ? 2. À quoi s’attaque le principe du « service minimum » ? 3. Sur quel principe s’appuie cette volonté du « service minimum » ? 4. Pourquoi le titre « Alarme sociale » ?

Votre réponse

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Séquence 1

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Réponses

1. Le service minimum est l’obligation, dans l’intérêt général, d’assurer une partie de l’activité concernée (ex. : pour la RATP, ce peut être l’obligation d’assurer un service pendant les heures de pointe, système qui existe déjà en Europe, notamment en Italie). 2. Le principe du service minimum s’attaque au droit de grève. 3. Cette volonté de service minimum s’appuie sur la volonté de continuité des services publics. 4. François Chérèque (secrétaire général de la CFDT) propose de généraliser « l’alarme sociale ». Il s’agit d’améliorer les conditions du dialogue employeur/salariés dès qu’un certain nombre d’indices de mécontentement sont réunis. Par un meilleur dialogue, le conflit peut être évité.

REMARQUE Vous pouvez réfléchir à des solutions alternatives au service minimum. Cette réflexion peut vous permettre de rédiger une ouverture, par exemple, à la fin d’un développement structuré. Voir « Le casse-tête du service minimum », rubrique « Pour aller plus loin » à la fin de la série.

III. Notion d’ordre public et d’ordre social

Être capable de

Justifier les enjeux de cet ordre public.

A. La notion d’ordre public L’ordre public est l’ensemble des règles impératives régissant l’organisation politique, économique et sociale d’un État auxquelles nul ne peut déroger et les droits fondamentaux des citoyens.

Il traduit l’intérêt général et se partage entre : – la défense de la paix publique (répression des individus qui troublent l’ordre), – la protection de certains intérêts individuels (salariés, consommateurs…), – la protection des intérêts de la collectivité (emploi…).

L’État doit donc, par l’application de règles de droit, organiser l’ordre public économique et social.

Aujourd’hui, l’ordre public comprend : – des dispositions de droit public, par exemple, l’organisation de l’administration, – des dispositions de droit privé qui concernent plus particulièrement les individus, – des dispositions de droit économique selon lesquelles l’État intervient dans la vie économique soit comme

entrepreneur (services publics), soit pour assurer les grands équilibres économiques (lutte contre l’inflation),

– des dispositions de droit social (réglementation des licenciements).

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Séquence 1

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B. L’ordre public économique et social L’ordre public dirige l’économie dans l’intérêt général, mais cherche également à protéger les plus faibles contre les plus forts.

1. L’ordre public économique a pour objectif de limiter les libertés économiques pour éviter qu’elles ne s’exercent dans un sens contraire à l’intérêt général ou dans des conditions susceptibles de porter atteinte à la sécurité publique et aux bonnes mœurs ; par exemple, la liberté de commerce et la liberté contractuelle ne suffisent pas à rendre licite un contrat de vente de drogue.

On parle dans ce cas d’ordre public de direction qui oriente l’activité économique au nom de l’intérêt général. Ainsi, des textes de droit assurent le bon fonctionnement de la concurrence sur le marché (répression des abus de position dominante) (documents 7 et 8).

2. L’ordre public social est le principe selon lequel une disposition conventionnelle peut, en droit du travail, déroger à une disposition légale dans la mesure où elle est plus favorable au salarié. Ainsi, l’article 6 du Code civil doit être nuancé en droit du travail : « on ne peut déroger par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l’ordre public ».

En effet, les dispositions légales ou réglementaires prises dans le domaine du droit du travail présentent un caractère d’ordre public dans la mesure où elles garantissent aux salariés des avantages minimaux ; par exemple, la convention et l’accord adaptent à la branche ou à l’entreprise les dispositions légales ou réglementaires. Cette adaptation ne peut se faire au détriment des salariés.

L’ordre public social apparaît comme la protection minimum du salarié.

On parle d’ordre public de protection qui vise à protéger un intérêt particulier : les salariés contre les employeurs, les consommateurs contre les vendeurs. D’une façon plus générale, l’ordre public social vise à protéger les individus les plus vulnérables contre les plus forts (documents 9 et 10).

DOCUMENT 7

IV. – NOUVELLE DEFINITION DU COMMERCE ELECTRONIQUE ET CONFIRMATION D’UNE « RESPONSABILITE CONTRACTUELLE DE PLEIN DROIT » DES PROFESSIONNELS PROPOSANT LEURS BIENS OU SERVICES PAR INTERNET

La définition du commerce électronique n’est toujours pas stabilisée. La dernière version adoptée par le Sénat, en l’article 6 alinéa 1er de la loi, indique que « le commerce électronique est l’activité économique par laquelle une personne propose ou assure à distance et par voie électronique la fourniture de biens ou de services ». On observera que, contrairement à la définition des députés, la « personne » visée n’agit pas nécessairement à titre professionnel.

En outre, députés et sénateurs ont adopté un article 6 bis nouveau qui affirme, en substance, une responsabilité de plein droit de la bonne exécution des prestations promises par un professionnel opérant via le réseau Internet. Le II de ce même texte prévoit d’ajouter la même disposition à la fin de l’article L. 121-20-3 du Code de la consommation, qui prend place dans la section consacrée à la vente et à la fourniture de prestations de services à distance. Il est indiqué, toutefois, que la faute de « l’acheteur », le fait du tiers ou la force majeure sont susceptibles de justifier une exonération partielle ou totale du professionnel. Ce texte est ambigu et inutile. L’ambiguïté naît de l’incertitude sur les contrats visés : s’agit-il restrictivement de la seule vente ou bien les prestations de services sont-elles également visées ? Le renvoi aux personnes visées par l’article 6 plaide en faveur d’une interprétation large. De surcroît, on ne voit guère d’utilité à cette disposition qui ne fait que reprendre l’obligation de droit commun de résultat qui pèse sur un vendeur ou un entrepreneur.

Revue mensuelle du JurisClasseur, Communication, Commerce électronique, page 38, mai 2004

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Questions

1. Quelle définition le Sénat donne-t-il au commerce électronique ? 2. Qu’affirme l’article 6 bis adopté par les députés et sénateurs ?

Votre réponse

Réponses

1. « Activité économique par laquelle une personne propose ou assure à distance et par voie électronique la fourniture de biens ou de services. » : telle est la définition donnée par le Sénat du commerce électronique. 2. L’article 6 affirme l’existence d’une responsabilité contractuelle de plein droit de la bonne exécution des prestations promises par un professionnel opérant via le réseau Internet.

DOCUMENT 8

22 – De la LSI à la LCEN

La loi pour la Confiance dans l’économie numérique est tombée comme une masse, écrasant la subtilité des nombreuses controverses qui ont accompagné sa gestation. Préparée par une loi du 13 mars 2000 sur la preuve, qui était caractérisée par sa concision et la précision de son style, elle vient coiffer le droit de l’informatique avec un texte aux qualités définitivement contraires. Résultat de maints ajustements et de nombre d’arbitrages ce texte lourd pourrait s’attirer de nombreuses critiques formelles, en dehors de son plan, assez généralement cohérent. Mais notre devoir de citoyen et d’usager nous contraint à procéder à un inventaire objectif et il faut convenir que ce document, certes difficile à déchiffrer, apporte des réponses à des questions importantes (I), même s’il laisse perdurer certaines ambiguïtés (II).

I. LES AFFIRMATIONS CLAIRES

A. Les principes

1. Une loi destinée au marché

1. On notera dans un premier temps que le nom attribué à cette loi a changé depuis les premières ébauches. Elle s’est d’abord intitulée LSI, « loi pour la société de l’Information », pour ressurgir, un an après, sous celui de « loi pour la confiance dans l’économie numérique ».

Cette évolution n’est pas indifférente ; elle traduit de la part des rédacteurs la volonté de se concentrer sur les aspects purement économiques du nouvel ordre informatique, c’est-à-dire essentiellement le commerce électronique. Les objectifs culturels et sociétaux des premiers jets (réduction de la fracture numérique, protection renforcée des libertés de la vie privée) ont été relativement éludés au profit d’une recherche de sécurisation du système marchand. Nous sommes désormais devant une loi destinée au marché plus qu’à la culture. Sous cet éclairage, ce qui pourrait passer pour une lacune dans la nouvelle loi n’est pas la conséquence d’un oubli, mais celui d’un changement de cap. Ceux qui souhaitaient que les motifs de cette loi répondent à des préoccupations humanistes en seront pour leurs frais(1).

C’est ainsi que l’on trouvera peu de chose sur la propriété intellectuelle, comme le souligne dans son article Christophe Caron (V. infra étude 23), peu de choses également de nature à alimenter substantiellement le dossier « Informatique et libertés » en dehors d’une sévérité accrue de l’existant, comme on pourra s’en rendre compte à la lecture de l’article d’Agathe Lepage (V. infra étude 24). De même, l’accès aux données publiques, qui devait figurer dans la loi ne bénéficie d’aucune disposition particulière(2).

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Séquence 1

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Le marché contemplé est essentiellement le B2C et non le B2B : la confiance dont on recherche le renforcement est évidemment celle du consommateur et non celle du professionnel que l’on suppose dûment armé pour affronter les risques du commerce à distance. De ce point de vue la loi confirme la tendance forte du droit contemporain à opposer le professionnel au consommateur à l’avantage du second. D’où la présence dans la loi d’un chapitre sur la publicité électronique

(Titre II. Chapitre II. – V. infra étude 25. J.-M. Coblence), chapitre bienvenu dans un domaine où la doctrine administrative manquait de stabilité(3).

2. L’affirmation de la liberté de communication

2. Dans le cadre strictement économique qui lui est fixé, la loi affirme d’une façon claire le choix de la liberté : elle ajoute à la loi du 30 septembre 1986 un principe : « Art. 1er. – La communication au public par voie électronique est libre ».

Certes, cette pétition de principe est nuancée par plusieurs restrictions tenant aux libertés et à l’ordre public ; mais on constatera qu’aucune référence aux bonnes mœurs n’y figure. Sachant que la presse nous rappelle régulièrement que, dans certains pays, même intellectuellement évolués, l’accès à l’Internet peut être gravement puni, on appréciera la portée démocratique de cette inscription ainsi placée au fronton du temple de la modernité. La liberté a bien sûr ses inconvénients : ainsi, en prenant ses distances avec toute référence à la censure, cette loi, par exemple, affranchit l’essentiel du matériel vendu sur le net, à savoir la pornographie.

On s’étonnera toutefois de deux indications : – une superfétatoire, « les contraintes techniques inhérentes aux moyens de communication », car on s’en serait douté ; – une autre plus mystérieuse, « la nécessité, pour les services audiovisuels, de développer la production audiovisuelle ». S’agirait-il par exemple de mettre à l’abri de la concurrence et de réserver à certains monopoles les moyens de communication nouveaux en ne laissant au public que les moyens déjà généralisés ? On se perd un peu en conjectures. À moins d’y voir, ce qui est une autre piste, la volonté de faire prévaloir l’audiovisuel à l’encontre des réseaux en cas de conflit technique ou juridique. À méditer.

La liberté de communication s’accompagne de la liberté d’utilisation des moyens de cryptologie qui font l’objet du Titre III, chapitre 1er (art. 29 à 40) sur la sécurité dans l’économie numérique. Il est ainsi mis fin de façon historique à des hésitations spécifiquement françaises sur ce sujet qui ont engendré une réglementation en dents de scie dans les années 1990.

Sur un plan plus général, la liberté de communication implique une certaine maîtrise nationale des systèmes de télécommunication et notamment des satellites, ce qui explique la présence dans la loi d’un titre entier consacré à ce sujet dont Philippe Achilléas apporte ci-après la synthèse (V. infra étude 26). Comme la communication n’est pas qu’une affaire de contenu mais aussi de tuyaux, il est assez logique que la loi se soit également préoccupée dans son titre V d’envisager tant la couverture du territoire par les services numériques que la liberté concurrentielle dans le secteur des télécommunications.

(1) I. Huet, Quelle culture pour le Cyberespace et quels droits intellectuels pour cette cyberculture ? : D. 1998, p. 185. La diversité culturelle sur le net : Computer Law in the Millennium perspective, AFDIT-Ifcla 2000. (2) Lors du colloque CEIEM-Communication-Commerce électronique du 3 juin 2004, I.-M. Brugière, après avoir déploré l’absence de tout développement sur ce point a conclu en disant qu’il valait mieux une absence du sujet qu’une dissertation incomplète. (3) DGCRF notamment pour la publicité en ligne des offres de prêts.

Xavier LINANT de BELLEFONDS, Professeur à l’Université de Paris XII Revue mensuelle du JurisClasseur, Communication, Commerce électronique,

page 9, septembre 2004

Questions

1. Qu’appelle-t-on LSI et LCEN ? Pourquoi y a-t-il eu évolution ? 2. Quels principes nuancent cette volonté d’évolution ? 3. De quoi la loi s’est-elle préoccupée ?

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Votre réponse

Réponses

1. LSI signifie Loi pour la Société de l’Information. LCEN signifie Loi pour la Confiance dans l’Économie Numérique. Cette évolution peut s’expliquer par le fait que, dans le sigle LCEN, le terme « économie » apparaît et montre une volonté de se concentrer plus sur les aspects purement économiques d’un système, sur sa sécurisation pour l’utilisateur que sur son aspect culturel. 2. Cette volonté est nuancée par les libertés et l’ordre public mais on peut s’inquiéter de l’absence de référence aux bonnes mœurs (pornographie). 3. Dans son titre V, la loi a envisagé la couverture du territoire par les services numériques (« tuyaux ») et la liberté concurrentielle dans le secteur des télécommunications.

DOCUMENT 9

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Séquence 1

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Les problèmes liés à l’emploi

Exclusions et discriminations

De l’insécurité sociale à l’insécurité civile

Hasard du calendrier, deux ouvrages publiés presque au même moment traitent des questions de « l’insécurité sociale » et de « l’insécurité civile ». Dans son livre, Robert Castel décrit d’abord la remise en cause de l’État social comme porteur d’un modèle de société où « c’est l’instance du collectif qui peut sécuriser l’individu »(1). Dès le début des années 1970, la concurrence internationale exige « une gestion fluide et individualisée du monde du travail » qui désagrège les modes de défense des intérêts des salariés. La dévalorisation de la force de travail incite les classes populaires à attribuer la responsabilité de leur « insécurisation » aux représentants politiques et aux exclus « des quartiers sensibles », où s’annonce « le retour des classes dangereuses ». Dès lors, les espaces de concentration de la misère sociale cristallisent les peurs collectives de la société. Castel met en perspective la fragilisation de la protection sociale et la « demande de sécurité » avec la sensibilité exacerbée des individus à une modernité productrice de menaces non maîtrisables. Dans ce contexte, l’auteur s’interroge sur l’insécurité sociale en s’appuyant sur ce qu’il nomme le « régime homogène des droits » et de « sécurisation des situations de travail et des trajectoires professionnelles ». Comment réunir les conditions d’existence d’« une société de semblables » qui protège de la déchéance sociale ? C’est la question essentielle posée par Robert Castel, qui renvoie aux constatations de Stéphane Beaud et Michel Pialoux à Sochaux-Montbéliard(2). Les auteurs donnent la parole à ceux qui subissent la précarité structurelle, aux disqualifié(e)s du marché du travail dont les « manières d’être et de parler » ne sont pas conformes aux attentes des managers.

À partir de la « mission locale », les jeunes – immigré(e)s et (ou) faiblement diplômé(e)s de l’enseignement technique – entament des trajectoires professionnelles « en pointillé ». L’accumulation des stages de formation et des contrats d’intérim empêche de « pouvoir s’établir dans le stable » et alimente « une vision du monde fondée sur la persécution ». En fait, la « violence subie » compromet de façon prématurée les chances d’accès à la dignité sociale, le champ des possibles se rétrécissant à mesure que, dans l’entreprise, les mécanismes d’individualisation qui président à une gestion brutale de la main-d’œuvre « naturalisent » l’insécurité. En 1998, en dépit de la reprise économique et du reflux du chômage, la résignation et le ressentiment continuent à gagner du terrain et, le 12 juillet 2000, la zone urbaine prioritaire (ZUP) de la Petite-Hollande, à Montbéliard, est secouée par une émeute dont les sociologues restituent la profondeur sociohistorique(3). Beaud et Pialoux contribuent de façon décisive à faire comprendre comment le poids de l’ensemble des sanctions sociales subies conduit les jeunes « sacrifiés » à exprimer violemment leur refus des vies pitoyables imposées par la société.

(1) L’Insécurité sociale. Qu’est-ce qu’être protégé ? Seuil, coll. La République des idées, Paris, 2003, 93 pages, 10,5 euros. (2) Violences urbaines, violence sociale. Genèse des nouvelles classes dangereuses. Fayard, Paris, 2003, 425 pages, 22 euros. (3) Lire Stéphane Beaud et Michel Pialoux, « Émeutes urbaines, violence sociale », Le Monde diplomatique, juillet 2001.

Sylvain BORDIEC Le Monde diplomatique, janvier 2004

Questions

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Séquence 1

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1. Que remet en cause Robert Castel dans son livre ? 2. Selon lui, quelle est l’origine de la dévalorisation de la force de travail ? 3. De quel type de précarité s’agit-il ? 4. Comment l’État tente de pallier le problème ? 5. Quelle est la conséquence de cette misère sociale ?

Votre réponse

Réponses

1. Robert Castel remet en cause l’État social comme porteur d’un modèle de société. 2. L’origine de la dévalorisation de la force de travail est la concurrence internationale accrue dès le début des années 70. 3. Il s’agit d’une précarité structurelle qui touche les moins qualifiés. Stéphane Beaud et Michel Pialoux parlent de « disqualifié(e)s du marché du travail ». 4. L’État tente de pallier ce problème en mettant en place des « missions locales » qui ne permettent malheureusement pas de sécuriser les « situations de travail » et les « trajectoires professionnelles ». 5. Cette misère sociale cristallise les peurs collectives de la société et entraîne une demande de sécurité accrue de la part des classes populaires.

Document 10

Quelle politique pour lutter contre l’esclavage en France aujourd’hui ?

Aujourd’hui, sur notre territoire, par milliers, des personnes sont réduites à l’état d’objets, qu’il s’agisse d’exploitation sexuelle, d’esclavage domestique, voire de soumission à la mendicité ou au vol. La protection judiciaire et la réinsertion des victimes sont nécessaires. La punition des trafiquants est indispensable. Christine Lazerges, présidente de la mission d’information parlementaire sur les diverses formes de l’esclavage moderne, rend compte des conclusions de ses travaux.

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Séquence 1

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Henri-Frédéric Amiel écrivait en 1852 : « Nous avons aboli l’esclavage, mais sans avoir résolu la question même : en droit, il n’y a plus d’esclaves, en fait, il y en a. » Cent cinquante ans plus tard, le constat est identique, mais une politique volontariste est échafaudée dans les propositions de la mission d’information parlementaire sur l’esclavage, en France, aujourd’hui. Nombre de ces suggestions ont été reprises par la proposition de loi déposée par le groupe socialiste et adoptée à l’unanimité à l’Assemblée nationale le 24 janvier 2002 puis transmise au Sénat qui ne l’a pas inscrite à son calendrier. Cependant, lors de l’examen du projet de loi pour la sécurité intérieure devenu loi du 18 mars 2003, la commission des lois du Sénat a intégré, pour partie, cette proposition de loi et a été suivie par la commission des lois de l’Assemblée nationale.

Sans revenir sur le caractère dramatique de la situation révélée par le travail au quotidien de nombreuses associations, rappelons tout de même que, pendant ses neuf mois d’enquête, la mission a dû constater que la France, patrie des droits de l’Homme, n’était nullement à l’abri de ces formes d’exploitation extrêmes que la communauté internationale tend désormais à désigner sous les termes génériques de « traite des êtres humains ».

Mieux protéger les victimes, mieux réprimer les trafiquants, tel fut notre souci et notre ambition.

Mieux protéger les victimes

L’écoute de ceux qui sont sur le terrain, la rencontre directe de victimes, la lecture de livres comme L’histoire d’une prostituée de Clara Dupont-Monod (Grasset, 2003) permet d’affirmer que la situation est insoutenable. Il est terriblement difficile pour les victimes d’échapper aux filières de la traite. Des lieux très sécurisés doivent pouvoir leur être proposés, du type CHRS spécialisés dans l’accueil des victimes de la traite. Le dispositif « accueil sécurisant » mis en place par la coordination ALC en est un exemple très intéressant, soutenu par la Direction générale de l’action sociale, avec la crainte très forte de voir les financements diminuer. On serait là en pleine contradiction, la loi pour la sécurité intérieure préconisant l’ouverture de telles structures.

L’aide d’urgence par un tel hébergement sécurisé doit s’accompagner d’un statut donné aux victimes leur permettant d’envisager l’avenir.

Certaines victimes de l’esclavage ne souhaitent pas retourner dans leur pays parce qu’elles n’y ont plus d’attaches, plus même de repères, pas d’avenir et qu’elles veulent rompre avec un passé. Pour celles d’entre elles qui déposent plainte ou témoignent contre le trafiquant, ou le réseau dans les mailles duquel elles sont prises, une carte de séjour temporaire avec autorisation de travail doit être délivrée à la demande du procureur de la République ou du juge d’instruction, renouvelée jusqu’à l’aboutissement de la procédure engagée. Une carte de résident doit aussi être délivrée à l’étranger dont le témoignage ou la plainte a contribué à la condamnation de la personne mise en cause. La loi Sarkozy substitue à « doit », « peut ». Le document qui devait être délivré ne sera que peut-être délivré. Quelle est alors la victime, prostituée par exemple, qui va oser aller témoigner sans aucune assurance de pouvoir bénéficier d’un titre de séjour et d’une autorisation de travail ? La pénalisation du racolage même passif par la loi pour la sécurité intérieure est une entrave de plus au témoignage des victimes prostituées. À l’évidence pourtant, le témoignage doit être encouragé. Depuis la loi du 15 novembre 2001 sur la sécurité intérieure, il peut être anonyme, donc protégé. Cette protection est inopérante si dans le même temps la victime n’est pas assurée d’un statut lui permettant de commencer à reconstruire sa vie.

Mieux punir les trafiquants

Ainsi que l’établissent les investigations menées par la mission, l’incrimination de la traite des êtres humains manquait cruellement dans le droit pénal français. Elle fut introduite par l’article 1er de la proposition de loi de janvier 2002, texte repris dans l’article 32 de la loi pour la sécurité intérieure. Jusqu’à la mise en application de ce texte, la traite ne pouvait être réprimée en France que de façon indirecte par le biais d’infractions-relais comme le proxénétisme, les conditions de travail et d’hébergement contraires à la dignité de la personne humaine, ou l’aide à l’entrée et au séjour irréguliers d’un étranger sur le territoire. Les textes introduits dans le Code pénal aux articles 225-4-1 et suivants sont très proches de la proposition de décision-cadre de l’Union européenne sur la lutte contre la traite des êtres humains. Les difficultés de poursuite et d’instruction d’infractions de cette nature impliquent la mise en place de pôles spécialisés dans certaines juridictions (Paris, Nice, Marseille, Strasbourg par exemple) et la volonté commune au sein de l’Union européenne de développer l’entraide policière et l’entraide judiciaire. La mission,

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Séquence 1

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outre l’introduction d’une infraction spécifique de traite, préconisait une nouvelle rédaction des articles 225-13 et 14 du Code pénal afin de sanctionner pénalement le seul fait d’offrir des conditions de travail ou d’hébergement contraires à la dignité humaine. Cette nouvelle rédaction fait l’objet des articles 5 et 6 de la proposition de loi adoptée en première lecture le 24 janvier 2002, articles repris par la loi pour la sécurité intérieure dans ses articles 33 et 34.

Il faut se réjouir de l’évolution de la jurisprudence sur les textes anciens. Un arrêt de la Cour de cassation du 3 décembre 2002 confirme une décision de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence anticipant en quelque sorte sur les conclusions de la mission invitant à la modification des articles 225-13 et 225-14 du Code pénal.

La mission proposait également la pénalisation des clients d’un mineur prostitué de moins de 18 ans. Cette mesure a été incluse par voie d’amendement dans la proposition de loi sur l’autorité parentale adoptée définitivement le 4 mars 2002. Pour toutes ces infractions, les sanctions financières doivent être renforcées. Sait-on que la traite des êtres humains, notamment celle organisée en vue de la prostitution, génère des gains considérables du même ordre que ceux du trafic de stupéfiants ?

En bref, faire de la lutte contre la traite une priorité c’est : – créer une structure nationale spécifiquement en charge de la traite La lutte contre la traite et sa prévention exigent une coordination et un renforcement des moyens, adaptés aux diverses formes d’exploitation qu’elle revêt. La situation actuelle n’est pas satisfaisante. La lutte contre le travail clandestin est clairement un échec. Il est d’autres sujets comme celui de l’esclavage domestique qui ne sont pas traités au plan national. La répartition des compétences dans le domaine de la prostitution n’est pas lisible (DDASS, Délégation aux droits des femmes voire conseils généraux). – impliquer davantage les services Outre les pôles spécialisés dans la lutte contre la traite à créer au sein des juridictions, est nécessaire aussi la création d’un pôle spécialisé d’inspecteurs du travail spécifiquement pour la région Île-de-France. Policiers, magistrats, avocats ont unanimement reconnu devant la mission que les affaires de traite des êtres humains exigeaient une formation spécifique à organiser.

Christine LAZERGES, Professeur à l’Université de Montpellier I

Hommes et libertés, n° 122, avril-mai-juin 2003

Questions

1. Que permet la loi sur la sécurité intérieure du 15 novembre 2001 ? 2. Quelle restriction est apportée par la loi Sarkozy ? 3. À quoi correspond l’article 32 de la loi pour la sécurité intérieure ? 4. Et les articles 33 et 34 ? 5. Que réclame Christine Lazerges, présidente de la mission d’information parlementaire sur les diverses formes de l’esclavage moderne ?

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Votre réponse

Réponses

1. La loi sur la sécurité intérieure du 15 novembre 2001 permet de recueillir un témoignage de façon anonyme, donc de protéger la personne qui témoigne. 2. La loi Sarkozy prévoit cependant que les documents administratifs protégeant la victime ne sont plus automatiquement attribués. REMARQUE Une carte de séjour temporaire avec autorisation de travail devait être délivrée aux victimes de l’esclavage jusqu’à l’aboutissement de la procédure engagée et une carte de résident si le témoignage ou la plainte avait contribué à la condamnation de la personne mise en cause. Aujourd’hui, ces documents peuvent être attribués. 3. L’article 32 correspond à l’incrimination, de façon directe, dans le droit pénal français, de la traite des êtres humains. 4. Les articles 33 et 34 concernent la possibilité de sanctionner pénalement le seul fait d’offrir des conditions de travail ou d’hébergement contraires à la dignité humaine. 5. Christine Lazerges réclame : – une plus grande lisibilité des compétences (DDASS, conseils généraux…), – la création d’un pôle spécialisé d’inspecteurs du travail, – la reconnaissance du rôle des associations en rendant pérenne leur financement.

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IV. L’interdépendance du droit et de l’économie

Être capable de

Mettre en évidence ce phénomène à travers quelques exemples

A. L’économie agit sur le droit Le droit doit se moderniser sous l’influence des nouvelles technologies. Ainsi, il a fallu l’adapter : – aux technologies de communication (Internet), nous l’avons vu dans les documents précédents, – à l’utilisation massive et répandue de l’informatique (protection des logiciels, protection des éléments de

la vie privée par la Commission nationale informatique et libertés), – à l’apparition de nouveaux moyens de paiement (carte bancaire).

Le droit concrétise la volonté de certains agents économiques : les accords et conventions collectives ouvrent souvent la voie de la législation.

Le droit s’adapte aux crises économicosociales : par exemple, le passage aux 35 heures avait pour objectif de limiter le chômage et de faciliter l’emploi par le partage d’un travail limité.

B. Le droit agit sur l’économie (documents 11 et 12)

L’État, pour inciter les entreprises à réaliser ses objectifs économiques, adopte des textes leur accordant des baisses de cotisations sociales, des exonérations d’impôts et taxes, des subventions. Par exemple, des entreprises sont encouragées à s’installer dans les zones les plus fragilisées par la crise économique grâce à des exonérations fiscales (banlieues difficiles ou régions dans lesquelles les industries traditionnelles ont disparu).

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DOCUMENT 11

De la déconcentration

Var-Matin – Nice-Matin, vendredi 3 septembre 2004

Questions

1. Quel est le délégué du gouvernement concerné par cet article ? 2. Quel partenariat veut-il renforcer ? 3. Qui sont les collectivités locales ? 4. Quel sujet est concerné par le partenariat ? 5. Quelle est la nécessité induite ?

Votre réponse

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Réponses

1. Le délégué du gouvernement concerné par cet article est le préfet Pierre Dartout. 2. Il veut renforcer ses relations avec les collectivités locales. 3. Les régions, les départements, les communes constituent les collectivités locales. 4. Le partenariat concerne le foncier et le logement directement lié à l’emploi (comme facteurs de cohésion sociale et de développement économique). 5. La nécessité induite est celle de la préservation de l’environnement.

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DOCUMENT 12

De la décentralisation

Nice-Matin, lundi 14 septembre 2004

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Séquence 1

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Séquence 1

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Questions

1. Quelle est la loi concernée ? 2. Que vise-t-elle ? 3. Quel est l’objet de l’article ? 4. Quels sont les acteurs favorables à l’assouplissement ? Pourquoi ? 5. Les acteurs défavorables, pourquoi ? 6. Quelles sont les deux contradictions qui apparaissent ?

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Réponses

1. La loi concernée est la loi Littoral votée en 1986. 2. Elle vise à protéger le littoral en limitant les constructions. 3. L’objet de l’article est l’assouplissement de la loi Littoral. 4. Les acteurs favorables à l’assouplissement sont : – le CIADT : Comité interministériel d’aménagement du territoire, – le Sénat et l’Assemblée nationale dans le cadre du projet de loi sur le développement des territoires

ruraux. 5. Les acteurs défavorables à l’assouplissement sont : – le Conservatoire du littoral, – les associations, – Nature 2000 (dans le cadre des projets européens). Ils estiment que c’est une loi de compromis et d’équilibre qui ménage de larges possibilités de construire. Ils craignent que l’assouplissement projeté ne « la vide de sa substance ». Leur argumentation s’appuie sur les modifications apportées à la loi Montagne en juillet 2003 qui les a amputées de ses dispositions les plus contraignantes. 6. Des contradictions apparaissent : – Le CIADT, le Sénat et l’Assemblée nationale réclament un assouplissement des règles d’urbanisme alors

que la DATAR craint « une occupation prédation de l’espace ». – La DATAR suggère de « s’appuyer sur les volontés locales » alors que les élus locaux subissent la

pression de l’affairisme immobilier.

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Séquence 1

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À RETENIR

Chapitre 1

Le cadre juridique de l’activité économique

Droit objectif Droit subjectif

Ensemble des règles obligatoires qui régissent une société donnée.

Prérogatives particulières dont une personne déterminée peut se prévaloir sur un bien ou sur une autre personne.

Les libertés publiques

Libertés économiques Libertés sociales

Liberté d’accès à la profession commerciale (limites : ex. : protection de l’intérêt général) ; contractuelle (limites : ex. : contrat d’adhésion) ; de la concurrence (limites : ex. : concurrence déloyale).

Protection minimum du salarié, droit au travail, droits sociaux, de grève ; liberté dans l’entreprise, liberté syndicale. Il peut y être dérogé par les conventions collectives et le contrat de travail à condition qu’ils contiennent des dispositions plus favorables que les textes étatiques.

Notion d’ordre public économique et social

Ordre public économique : ordre public de direction Ordre public social :

ordre public de protection

Vise à orienter l’économie au nom de l’intérêt général.

Vise à protéger les individus vulnérables contre les plus forts.

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EXERCICES D’ENTRAINEMENT A NE PAS ENVOYER A LA CORRECTION

I. QCM Oui Non

1. Les libertés publiques sont garanties par le Conseil constitutionnel.

2. Le droit de travailler est une liberté à caractère économique.

3. Le droit à la formation est aussi une liberté à caractère économique.

4. La règle de droit prescrit, interdit, permet.

5. Le droit de propriété est le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue.

6. La jurisprudence est l’ensemble des décisions de justice rendues par les différentes juridictions.

7. La liberté contractuelle est une liberté publique.

8. Les libertés individuelles sont des libertés d’ordre public.

9. Le Smic relève de l’ordre public social.

10. L’intervention de l’État dans la fixation des salaires permet qu’une saine concurrence s’établisse entre les entreprises.

11. Le contrôle de concentration relève de l’ordre public de direction.

12. L’autorisation préalable à l’implantation de grandes surfaces commerciales relève de l’ordre public de direction.

13. Le droit de grève relève de l’ordre public de protection.

14. La réglementation relative à la tenue de la comptabilité par les sociétés commerciales relève de l’ordre public de protection.

15. L’interdiction d’augmenter les salaires relève de l’ordre public de protection.

16. La privatisation de plusieurs grandes entreprises relève de l’ordre public de direction.

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Séquence 1

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II. Développement structuré À l’aide de vos connaissances et en illustrant vos propos d’exemples tirés des documents, vous montrerez, dans un développement structuré, quels sont les deux rôles du droit.

ANNEXE 1

SMIC – À compter du 1er juillet 2001, le Smic horaire est de 6,66 € ; le Smic mensuel brut est de 1 010,89 €. 2,2 millions de personnes (11,5 % de la population active) sont concernées.

ANNEXE 2

Art. L. 141-3 – La garantie du pouvoir d’achat des salariés dont les rémunérations sont les plus faibles est assurée par l’indexation du salaire minimum de croissance sur l’évolution de l’indice national des prix à la consommation. [...]

Art. L. 141-4 – Afin d’assurer aux salariés dont les rémunérations sont les plus faibles une participation au développement économique de la nation, le salaire minimum de croissance est fixé, indépendamment de l’application de l’article L. 141-3, chaque année avec effet du 1er juillet dans les conditions ci-après. [...]

Art. L. 141-6 – Les relèvements annuels successifs devront tendre à éliminer toute distorsion entre la progression du salaire minimum de croissance et l’évolution des conditions économiques générales et des revenus. [...]

Art. L. 141-9 – Sont interdites, dans les « conventions ou accords collectifs de travail », les clauses comportant des indexations sur le salaire minimum de croissance ou des références à ce dernier en vue de la fixation de la révision des salaires prévus par ces conventions ou accords.

Art. L. 132-12 – Les organisations qui sont liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels, se réunissent, au moins une fois par an, pour négocier sur les salaires et, au moins une fois tous les cinq ans, pour examiner la nécessité de réviser les classifications. [...]

Art. L. 123-1 – Sous réserve des dispositions particulières du présent code, et sauf si l’appartenance à l’un ou l’autre sexe est la condition déterminante de l’exercice d’un emploi ou d’une activité, nul ne peut :

[...] c) prendre en considération du sexe toute mesure, notamment en matière de rémunération, de formation, d’affectation, de qualification, de promotion professionnelle ou de mutation.

Code du travail

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Séquence 1

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CORRIGE DES EXERCICES D’ENTRAINEMENT

I. QCM 1. Oui. 2. Oui. 3. Non : c’est une liberté à caractère social. 4. Oui. 5. Oui. 6. Oui. 7. Oui. 8. Non. 9. Oui. 10. Oui. 11. Oui. 12. Oui. 13. Oui. 14. Oui. 15. Non : intérêt général ; elle réduit la demande et permet de lutter contre l’inflation. 16. Oui.

II. Développement structuré Les pièges à éviter !

– Ne limitez pas le contenu aux notions fournies dans la documentation en annexe.

– Attention, si dans ce sujet des documents vous sont fournis en annexe, pour vous aider à illustrer votre développement, il aurait pu en être autrement. C’était alors à vous de puiser, parmi vos connaissances, les précisions qui vous ont été fournies (elles correspondent toutes à des notions abordées dans vos cours). En général, le correcteur attend du candidat qu’il fournisse des informations complémentaires (relevant de l’actualité ou permettant un élargissement).

– Ne vous mettez pas immédiatement à rédiger. Donnez-vous un petit quart d’heure pour vous remémorer et noter au brouillon les différentes missions du Droit. Classez ce qui relève de la protection des libertés publiques et ce qui relève de la protection de l’ordre public et mettez en regard de chaque catégorie les dispositions figurant dans les documents et les exemples que vous avez en mémoire qui s’y rapportent.

– Suivez bien le plan annoncé dans l’introduction et faites-les apparaître clairement.

– N’oubliez pas de faire ressortir les parties de votre devoir, n’hésitez pas à faire apparaître des titres et sous-titres.

– N’oubliez pas de citer de façon précise les références des textes relatifs à la fixation du salaire à l’appui de votre développement.

Introduction

Le Droit organise la société au nom de certaines valeurs (égalité des individus, reconnaissance de la notion d’intérêt général…). C’est à l’intérieur de l’ensemble des règles qui le composent que s’exerce l’activité économique.

Le Droit reconnaît aux individus des droits appelés « libertés publiques » au nombre desquelles figurent la liberté contractuelle et les libertés individuelles (1re partie).

Le Droit doit aussi garantir l’ordre public et, à ce titre, il est amené, au nom de l’ordre public de protection sociale et au nom de l’ordre public de direction économique, à édicter des règles qui limitent ou encadrent la liberté contractuelle (2e partie).

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I. Le principe : le Droit assure le respect des libertés

1. À ce titre, et parmi les libertés économiques, il reconnaît la liberté contractuelle (théorie de l’autonomie de la volonté). En application de ce principe, le salaire est librement fixé par le contrat de travail, contrat négocié entre l’employeur et le salarié. Cette conception, d’inspiration individualiste et libérale, a longtemps prévalu.

2. De même, le Droit protège les libertés individuelles et, de ce fait, sanctionne les discriminations qui relèveraient du sexe ou de la race. Le Droit oblige à des égalités de traitement en matière de salaire. Ainsi, pour un travail égal, il est interdit de payer les femmes à un salaire inférieur à celui des hommes.

(Transition) Limites à l’application de ce principe : il y a inégalité entre les parties au contrat. Le salarié dont le salaire présente un caractère alimentaire vital est souvent en position de faiblesse vis-à-vis de l’employeur potentiel. Des abus sont dès lors possibles ; le Droit va s’efforcer d’y remédier. Il protège ainsi l’ordre public social. De même, toutes les entreprises concurrentes ne disposent pas des mêmes marges de manœuvre dans l’offre de salaire. Il intervient donc au nom de l’intérêt général et de la direction de l’Économie.

II. Le Droit intervient au nom de l’ordre public

1. Au nom de l’ordre public social, le Droit limite la libre fixation du salaire

– Le Droit fixe un minimum légal, le Smic. Citez l’article L. 141-2 qui définit le Smic : « le salaire minimum interprofessionnel de croissance assure aux salariés dont les revenus sont les plus faibles la garantie de leur pouvoir d’achat et une participation au développement économique de la nation ». Le respect du Smic s’impose à toutes les entreprises (sauf dérogations mentionnées spécifiquement). Il s’agit d’une loi impérative. De même, les variations du Smic sont prévues par les textes. L’article L. 141-3 fixe le principe de « l’indexation du Smic sur l’évolution de l’indice national des prix à la consommation ». Lorsque cet indice connaît une hausse d’au moins 2 %, le Smic est relevé dans la même proportion. L’article L. 141-4 prévoit que le Smic sera fixé par décret chaque année au 1er juillet afin de tenir compte des conditions économiques générales. Il existe par ailleurs des minima conventionnels fixés par les branches dans les conventions collectives.

– Le Droit fait obligation d’une négociation annuelle dans l’entreprise sur les salaires effectifs et obligation d’une négociation au niveau de la branche entre les organisations liées par une convention de branche ou un accord professionnel, chaque année sur les salaires et tous les cinq ans sur les classifications.

2. Au nom de l’ordre public économique, le Droit peut apporter des restrictions à la libre fixation des salaires Ainsi, l’interdiction des clauses d’indexation des salaires sur le Smic vise à éviter un effet de contagion à la hausse, générateur d’inflation. De même, il arrive que, dans des périodes de forte inflation, l’État puisse décider du blocage des salaires par des mesures juridiques appropriées. À l’inverse, il peut accorder des dérogations au respect du Smic pour permettre de stimuler les embauches. L’existence du Smic ne joue pas qu’un rôle de protection des salariés aux bas revenus, elle permet qu’une saine concurrence s’établisse entre les entreprises en fixant pour toutes, quels que soient leur santé financière et leur poids économique, les mêmes règles du jeu.

Conclusion Le droit du travail, défenseur de l’ordre public de protection (ordre public social) tend à passer dans l’ordre public de direction (ordre public économique) en créant des règles du jeu social communes à toutes les entreprises et favorisant ainsi une concurrence équilibrée.

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Pour aller plus loin DOSSIER 1

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Séquence 1

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Le Monde, 18 décembre 2002

DOSSIER 2

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Séquence 1

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Le Monde, 14 août 2003

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Séquence 1

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DOSSIER 3

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Séquence 1

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Séquence 1

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Séquence 1

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Le Monde, 18 juin 2003

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Séquence 1

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DOSSIER 4

Le casse-tête du service minimum

À l’occasion de la cérémonie des vœux aux corps constitués, le 7 janvier, le président de la République a estimé que la continuité du service public reste « très insuffisante en cas de grève », notamment dans les transports. « Dès le premier semestre de cette année, nous devons rechercher les moyens d’étendre le système de l’alarme sociale, puis de mettre en place le service garanti », a-t-il souhaité.

L’instauration d’un service minimum dans les transports publics fait partie de ces réformes symboliques que la droite a maintes fois tenté d’amorcer sous les législatives précédentes, sans y parvenir. Depuis 1988, pas moins d’une quinzaine de propositions de loi ont été déposées. En vain. Reste qu’aujourd’hui l’instauration d’un « service garanti » est une promesse de campagne de Jacques Chirac.

Depuis le début de la législature actuelle, les parlementaires ne désarment pas : sept nouvelles propositions de loi sont aujourd’hui sur le bureau de l’Assemblée nationale, dont celle déposée dès juin 2002 par Jacques Kossowski (UMP, Hauts-de-Seine), qui a été cosignée par 311 députés, et celle de Christian Blanc (app. UDF), déposée en septembre 2003, qui a déjà reçu le soutien de 261 députés. Pour l’heure, cependant, les élus de la majorité ont été priés de remiser leurs propositions. Le 9 décembre, les députés ont dû ainsi se contenter, à la demande du gouvernement, d’un débat sans vote sur le service minimum.

Le gouvernement affiche une grande prudence sur cette question. Et pour cause, les syndicats rejettent de manière unanime une loi sur le service minimum et se disent prêts à se mobiliser pour faire échec à toute tentative de porter atteinte au droit de grève. Le ministre des transports, Gilles de Robien, veut privilégier la voie du dialogue. Lors du débat à l’Assemblée, le 9 décembre, il a ainsi tenté de persuader les députés de l’UMP qu’il vaut mieux « convaincre que contraindre » par la loi. Conscient de la difficulté d’arracher aux syndicats un accord franc sur la question, le ministre souhaiterait bénéficier « d’une certaine compréhension » de leur part pour monter un dispositif contractuel permettant de garantir la continuité du service public en cas de grève.

Le gouvernement entend ainsi donner la priorité à la prévention des conflits. « Plus de dialogue, c’est moins de grèves », défend M. de Robien. En janvier, le ministre présentera donc, « après concertation », un projet de loi « d’anticipation et de prévention des conflits » dans les entreprises de transports publics, avec l’objectif que la loi soit adoptée par le Parlement d’ici la fin du premier semestre 2004. La finalité de ce texte est d’étendre à l’ensemble des entreprises de transport un dispositif de prévention et d’anticipation du type du système contractuel d’« alarme sociale » mis en place en 1996 par la RATP.

Parallèlement à l’élaboration de cette loi de prévention des conflits, M. de Robien va travailler avec un groupe d’experts – constitutionnels, sociaux et techniques –, pour étudier, en association avec les syndicats, le moyen d’assurer la continuité du service public en cas de grève. Ce groupe, qui devra rendre ses conclusions au plus tard l’été prochain, vérifiera si une seconde loi est nécessaire ou non. À terme, l’idée du ministre est d’installer une haute autorité, indépendante du pouvoir, qui garantisse le niveau de service auquel les transports publics seraient astreints en cas de conflit. En cas de préavis de grève, ce sera à cette instance de mettre concrètement en œuvre sur le terrain un dispositif, opposable à la direction et aux syndicats, de continuité du service public, selon les modalités prévues par accord d’entreprise.

M. de Robien refuse de s’engager sur une date de conclusion de ce processus de dialogue. Il ne s’agit pas de « renvoyer le dossier aux calendes grecques, a-t-il affirmé devant les députés le 9 décembre. La démarche du gouvernement est résolue. Elle n’est ni partisane ni agressive. Elle est participative. Rien n’est possible sans le dialogue et l’écoute, sans conjuguer prévention et respect du client », a-t-il plaidé face aux députés UMP, qui avaient du mal à contenir leur impatience. Si ces derniers se sont dits favorables à une concertation préalable, ils ont réclamé avec insistance l’instauration rapide d’un service minimum. La majorité se dit prête à accorder six, voire neuf mois, au gouvernement, pour laisser le temps aux partenaires sociaux d’aboutir à un accord. « Il ne faut pas avoir pour le service minimum une ambition déraisonnable, mais, au bout du compte, c’est une loi qu’il nous faut », résume Hervé Mariton (UMP, Drôme).

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À l’approche des élections régionales, nombre d’élus UMP auraient souhaité donner un signe fort à leur électorat. Mais, le 9 décembre, M. de Robien leur a rappelé que « l’enjeu n’est pas électoral », rejetant tout « geste hâtif, plus emblématique qu’efficace ».

Les exemples étrangers

Le gouvernement compte sur les exemples étrangers pour convaincre les syndicats qu’il est possible de concilier le droit de grève et la continuité des services publics. À l’automne, le ministre des transports a effectué avec eux (hors CGT) un tour d’Europe pour étudier les systèmes mis en place. Au sein de l’Union européenne, deux grands blocs de pays se distinguent : en Allemagne, en Italie, en Espagne, au Portugal, au Danemark, au Luxembourg, la loi instaure un service minimum ou réglemente le droit de grève ; en Belgique, en Finlande, en Suède, le service public garanti est instauré par accords conclus par les partenaires sociaux.

En Allemagne, aucune loi ne prévoit un service minimum, mais les fonctionnaires n’ont pas le droit de grève et les non-fonctionnaires sont soumis à un « devoir de paix sociale ». L’efficacité des règles du dialogue social rend les grèves rares et limitées.

En Belgique, la loi du 19 août 1948 concernant « les prestations d’intérêt commun en temps de paix » prévoit que les commissions paritaires du secteur privé doivent déterminer les prestations ou les services devant être assurés en cas d’arrêt collectif et volontaire du travail, afin de satisfaire certains besoins vitaux, d’exécuter certains travaux urgents ou d’accomplir certaines tâches en cas de force majeure ou de nécessité imprévue. Cette loi s’applique aux nombreuses entreprises remplissant une mission de service public.

En Espagne, la Constitution exige, en cas de grève, le maintien des « services essentiels ». Par ailleurs un décret-loi de 1977 prévoit que l’autorité gouvernementale, c’est-à-dire le gouvernement national ou celui de la communauté autonome, fixe par arrêté et de façon très détaillée les modalités du service minimum, qui seront obligatoirement exécutoires.

En Italie, la loi du 12 juin 1990 complétée par celle du 11 avril 2000 a instauré un service minimum. Elle définit les services publics essentiels – santé, collecte des déchets, postes et télécommunications, crédits, instruction publique, transports publics – et précise ensuite, par catégorie, les prestations à maintenir. Les conditions permettant de garantir ces prestations doivent être définies par conventions collectives. La loi fixe aussi un cadre de conciliation : en cas de désaccord, une « commission de garantie », composée de neuf membres désignés par les présidents des deux chambres du Parlement, arbitre sur l’interprétation des accords. Aussi les conventions collectives doivent-elles prévoir des conciliations avant la proclamation du droit de grève.

Au Portugal, la loi d’août 1977 sur le droit de grève, complétée par celle d’octobre 1992, rend obligatoire la mise en œuvre d’un service minimum dans les entreprises assurant des besoins sociaux essentiels, notamment dans le secteur des transports et de la santé. Les services minimum doivent être définis par une convention collective ou par accord avec les représentants des travailleurs. L’interprétation de ces dispositions fait l’objet de nombreux désaccords entre les syndicats et les pouvoirs publics. Une révision du Code du travail est actuellement à l’étude.

Le Monde, Dossiers et documents, « Les Clés de l’info », n° 328, février 2004