3. essais micromécaniques et modèles...

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CHAPITRE 3. ESSAIS MICROMECANIQUES ET MODELES ANALYTIQUES 29 3. Essais micromécaniques et modèles analytiques 3.1 Introduction 3.2 Techniques expérimentales de mesure des contraintes interfaciales 3.2.1 Fibre en sollicitation de tension 3.2.2 Fibre en sollicitation de compression 3.2.3 Fibre en sollicitation de torsion 3.3 Aspects théoriques dans les modèles du glissement interfacial 3.3.1 Concepts généraux 3.3.2 Critères de décohésion à l’interface 3.3.3 Frottement constant et frottement de Coulomb 3.3.4 Résistance par ancrage des aspérités et modèles de dilatance linéaire 3.3.5 Modèles constitutifs de la dégradation à l’interface 3.4 Conclusion 3.1 Introduction La nécessité de développer et de valider des modèles de comportement des interfaces fibre/matrice, exige des mesures précises des propriétés de ces interfaces. Cependant, le degré de cette précision dépend fortement du type d'informations que l'on peut extraire à partir des moyens de caractérisation dont on dispose. A mesure que ces moyens sont plus directs et simples dans le principe, plus grandes seront les chances d'obtenir des résultats fiables de la réponse de l’interface à tel ou tel type de sollicitation mécanique. Cette conséquence, par contre, ne rend pas compte des modèles analytiques, qui doivent manipuler un certain nombre de paramètres qui décrivent le comportement de l’interface. Le nombre de paramètres augmente, bien entendu, à mesure que des observations et réflexions incitent à la prise en compte d’un nouvel effet et donc d’un nouveau paramètre. En général, ceci ne se réalise pas sans difficultés, car, ces modèles complétésdoivent être assez puissants pour isoler ces paramètres, mettre clairement en évidence leur rôle respectif, et permettre de les identifier malgré le nombre restreint de données expérimentales. Cependant, chacun, des essais micromécaniques développés jusqu'à présent, a gardé une part de la simplicité et des particularités qui le différencient des autres essais; tels que type de sollicitation, les dimensions et la nature des éprouvettes et les conditions aux limites des sollicitations. Aucune étude comparative approfondie n’a été réalisée sur l’aptitude de ces tests à décrire les mécanismes de propagation de fissure et de glissement de fibre à l’interface. Cela doit impérativement passer par une phase d’identification des paramètres qui contrôlent ces mécanismes. Dans ce cas, plusieurs types d’essais s’imposent. Plusieurs techniques ont été développées pour la mesure directe du déplacement de la fibre en fonction de l’effort appliqué. La plupart de ces techniques utilisent des éprouvettes monofilamentaires. Parmi celles-ci on distingue des essais dans lesquels la fibre est sollicitée en tension, en compression ou encore en torsion.

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CHAPITRE 3. ESSAIS MICROMECANIQUES ET MODELES ANALYTIQUES

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3. Essais micromécaniques et modèles

analytiques

3.1 Introduction3.2 Techniques expérimentales de mesure des contraintes interfaciales

3.2.1 Fibre en sollicitation de tension3.2.2 Fibre en sollicitation de compression3.2.3 Fibre en sollicitation de torsion

3.3 Aspects théoriques dans les modèles du glissement interfacial

3.3.1 Concepts généraux3.3.2 Critères de décohésion à l’interface3.3.3 Frottement constant et frottement de Coulomb3.3.4 Résistance par ancrage des aspérités et modèles de dilatance linéaire3.3.5 Modèles constitutifs de la dégradation à l’interface

3.4 Conclusion

3.1 IntroductionLa nécessité de développer et de valider des modèles de comportement des interfaces

fibre/matrice, exige des mesures précises des propriétés de ces interfaces. Cependant, le degréde cette précision dépend fortement du type d'informations que l'on peut extraire à partir desmoyens de caractérisation dont on dispose. A mesure que ces moyens sont plus directs etsimples dans le principe, plus grandes seront les chances d'obtenir des résultats fiables de laréponse de l’interface à tel ou tel type de sollicitation mécanique. Cette conséquence, parcontre, ne rend pas compte des modèles analytiques, qui doivent manipuler un certain nombrede paramètres qui décrivent le comportement de l’interface. Le nombre de paramètresaugmente, bien entendu, à mesure que des observations et réflexions incitent à la prise encompte d’un nouvel effet et donc d’un nouveau paramètre. En général, ceci ne se réalise pas

sans difficultés, car, ces modèles ″complétés″ doivent être assez puissants pour isoler cesparamètres, mettre clairement en évidence leur rôle respectif, et permettre de les identifiermalgré le nombre restreint de données expérimentales.

Cependant, chacun, des essais micromécaniques développés jusqu'à présent, a gardéune part de la simplicité et des particularités qui le différencient des autres essais; tels quetype de sollicitation, les dimensions et la nature des éprouvettes et les conditions aux limitesdes sollicitations. Aucune étude comparative approfondie n’a été réalisée sur l’aptitude de cestests à décrire les mécanismes de propagation de fissure et de glissement de fibre à l’interface.Cela doit impérativement passer par une phase d’identification des paramètres qui contrôlentces mécanismes. Dans ce cas, plusieurs types d’essais s’imposent.

Plusieurs techniques ont été développées pour la mesure directe du déplacement de lafibre en fonction de l’effort appliqué. La plupart de ces techniques utilisent des éprouvettesmonofilamentaires. Parmi celles-ci on distingue des essais dans lesquels la fibre est sollicitéeen tension, en compression ou encore en torsion.

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3.2 Techniques expérimentales de mesure des contraintes interfaciales3.2.1 Fibre en sollicitation de tension

Ces essais sont appelés communément tests d’extraction ou ″pull-out test″. Ils ont étédéveloppés au préalable pour les composites à matrice polymère (Broutman (1969)), avantd’être utilisés dans les systèmes à matrice céramique. Les éprouvettes sont représentéesschématiquement sur la Figure 3.1a1. Leur forme, probablement héritée des premiers essaissur les systèmes à matrice polymère, n’est pas bien adaptée pour des mesures plus précises.En effet, ces éprouvettes nécessitent qu’une partie de la fibre soit libre pour être raccordée ausystème d’arrachement. Cela conduit dans la plupart du temps à l’amorçage de la décohésionavant l’essai. De plus, cette partie de la fibre contribue par sa longueur à la diminution de laraideur du système. Cette dernière, influe sur la cinétique de la propagation de la décohésion àl’interface fibre/matrice.

Des améliorations, apportées surtout à la forme des éprouvettes, ont conduit à uneconfiguration optimisée qui est représentée sur la Figure 3.1a2. Il résulte de la géométrie et dumode de chargement, une grande rigidité du système composite. Celle-ci est nécessaire pourobtenir une décohésion progressive de la fibre, et pour simuler proprement le comportementd’une fissure matricielle qui interagit avec une fibre. Mumm et al. (1995) ont pu réaliser, parle biais de ces éprouvettes, des essais extrêmement reproductibles. Dans ce cas, l’effort dechargement est enregistré avec une grande précision en fonction de l’ouverture de la fissure.

3.2.2 Fibre en sollicitation de compressionIls existent plusieurs types d’essais dans lesquels la fibre est sollicitée en

compression. On distingue: l’essai d’impression ″push-down test″, l’essai d’expression ″push-

out test″ et l’essai de compression ″slice compression test″ représentés sur les Figures 3.1b, cet d respectivement.

L’essai d’impression représente le premier test qui a été utilisé pour solliciter uneseule fibre, dans le cas des systèmes à matrice céramique. Cette technique, courammentappliquée pour induire des fissures dans des massifs, est utilisée ici pour pousser une fibre etmesurer l’effort en fonction de l’enfoncement de l’indenteur (Marshall (1984)). Ce dernier, engénéral de forme pyramidale (Vickers), laisse une emprunte sur la fibre (ou une déformationrésiduelle) qui complique les mesures de déplacement, et nécessite des corrections sur lacourbe expérimentale. Cette technique est surtout utilisée pour solliciter des filamentscéramiques de faibles diamètres (< 20 µm) (voir travaux récents, Kerans et al. (1997)).

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(a1)

(e)

(a2)

(b)

(c)

(d)

Figure 3.1 Techniques expérimentales de mesure de l’effort et du déplacement de la fibre sous dessollicitations mécaniques, dans les essais: (a) d’extraction ((a1) ancienne éprouvette et (a2) formeoptimisée), (b) indentation, (c) expression, (d) compression et (e) torsion.

Le terme d’impression ou ″push-down″ est réservé au cas où l’éprouvette estsuffisamment épaisse, et où la décohésion de la fibre n’est pas totale le long de l’interfacefibre/matrice. Cette définition peut être omise dans le cas où l’indenteur est de forme

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pyramidale, car le déplacement de celui-ci reste très faible, pour éviter d’entrer en contactavec la matrice. Quand l’éprouvette est d’épaisseur réduite et que la décohésion est totale, de

telle sorte que la fibre puisse glisser globalement, l’essai est dit d’expression ou ″push-out″1.Ce sont, en général, des fibres de grands diamètres (> 50 µm) qui sont utilisées pour cesessais. A la différence d’un indenteur pyramidal, un poussoir peut être conçu de différentesformes et dimensions, permettant ainsi d’effectuer des essais d’impression ou d’expressionsur des fibres de faibles diamètres (Bright et al. (1989), Chen et Young (1991)), ou de grosdiamètres (Jero et Kerans (1990), Rausch et al. (1992)).

Le glissement global du filament lors d’un essai d’expression a conduit à la mise enévidence d’un paramètre lié à la morphologie de l’interface (Jero et Kerans (1990)), qui seraplus amplement discuté dans les Chapitres 5 et 6.

L’essai de compression ou ″slice compression test″ est un test qui sollicite à la foisles fibres et la matrice. Il consiste à interposer entre la surface du composite et les éléments dela machine de compression, une plaque métallique généralement en aluminium (Brandon etFuller (1989), Shafry et al. (1989) et Kagawa et Honda (1991)). Grâce à la différence derigidité entre les fibres et la matrice, la décohésion aux interfaces s’amorce pendant lechargement. Si les fibres sont plus rigides que la matrice, la déformation de cette dernière estplus grande pendant le déplacement imposé de la traverse. Les fibres débordent de la matriceet laissent des empreintes sur la plaque métallique supposée parfaitement plastique (cf. Figure3.1d). La profondeur de ces empreintes correspond au déplacement maximal des fibrespendant le chargement du composite, leur déplacement résiduel est mesuré directement sur lecomposite.Cette technique est utile notamment pour la caractérisation des composites de structure, dufait qu’elle ne nécessite pas d’éprouvettes de grandes dimensions pour les tests. La mesureindirecte du déplacement des fibres rend ces essais difficiles à interpréter.

3.2.3 Fibre en sollicitation de torsionCette technique n’a pas encore dépassé le stade de la conception. Elle consiste à

solliciter en torsion alternative une éprouvette, du type schématisé sur la Figure 3.1a. Lamatrice, préalablement fendue, permet à la fibre de ponter les deux parties de l’éprouvette etde transmettre le couple de torsion. Des essais ont été effectués2 sur un système SCS-6/Pyrex,sollicité à des amplitudes de rotation de l’ordre de ± 1°. Les résultats obtenus sontencourageants, du fait de la grande précision avec laquelle les essais sont réalisés.L’adaptation de cet essai permettra sans doute de détecter de nouveaux mécanismes. Unmodèle3 de transfert de charge à l’interface fibre/matrice dans un essai de torsion est donné enannexe I, le frottement à l’interface étant supposé constant.

1 Dans ce cas précis d’indentation par un objet qui conduit à un glissement total de la fibre tout en laissant uneemprunte sur celle-ci, le terme d’expression par indentation serait plus adapté.2 David, L., communication privée, GEMPPM INSA de Lyon, 1996.3 Rouby, D., travaux non publiés, 1996.

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Les différents types d’essais énumérés ci-dessus sont des moyens complémentaires.Cependant, ils doivent dans la mesure de la physique qui leur est associée, confirmer ouinfirmer les mécanismes qui sont propres au comportement et à l’évolution de l’interface.

3.3 Aspects théoriques dans les modèles du glissement interfacial3.3.1 Concepts généraux

Le problème de décohésion à l’interface fibre/matrice, a reçu une attentionparticulière et a fait l’objet de plusieurs travaux qui ont débuté vers la fin des années 60. Dansces travaux, deux approches ont été utilisées : l’une est basée sur le critère de contrainte decisaillement maximale, qui prévoit la décohésion lorsque cette contrainte atteint la résistanceau cisaillement de l’interface; l’autre approche est basée sur la mécanique de la rupture quitraite la décohésion comme un cas particulier du problème de propagation de fissures. Enraison de la nouveauté du problème, la majorité de ces modèles ont intégré au début deshypothèses simplistes et ensuite plus raffinées. Dans le cas de la première approche (en termesde contrainte), ces évolutions ont principalement débuté par les travaux de Greszczuk (1969),Lawrence (1972) et Takaku et Arridge (1973). Dans le cas de la seconde approche (en termesde propagation de fissure), on cite les travaux de Outwater et Murphy (1969), Stang et Shah(1986), Gao et Mai (1988) et finalement Hutchinson et Jensen (1990). Ces derniers ont aboutià une analyse plus rigoureuse.

Dans cette section, le modèle de Hutchinson et Jensen (1990) sera introduit d’unemanière succincte avec une perspective plus orientée vers une description physique desphénomènes importants. Ce modèle basé sur des considérations de la théorie d’élasticité,principalement la solution de Lamé4, est plus compréhensible que d’autres (le modèle deMcCartney (1989) à titre d’exemple). Sa particularité réside dans son traitement desconditions de décohésion, de frottement et des contraintes résiduelles en relation avec lespropriétés anisotropes des constituants: fibre et matrice, (Marshall (1992)).

L’extraction (ou l’expression) de la fibre de la matrice est traitée comme unproblème de micro-rupture. Une fissure cylindrique de rayon r (rayon de la fibre) se propage àl’interface fibre/matrice comme une fissure en mode II pure de cisaillement, au moment où lafibre est extraite de (ou poussée à travers) la matrice (cf. Figure 3.4).

3.3.2 Critères de décohésion à l’interfaceDans le cas général, les critères d’amorçage du délaminage relèvent de l’application

de la mécanique de la rupture dans l’étude des interfaces dans les bi-matériaux. Dans ce cas,les critères d’amorçage de la fissure dans l’interface sont définis pour une configurationreprésentée schématiquement sur la Figure 3.2, où une fissure semi-infinie s’approche, d’unemanière quasi-statique, d’une interface perpendiculaire à sa direction de propagation. Cette

4 La solution de Lamé est une approximation valide si l’effort axial dans la fibre varie lentement sur deslongueurs qui sont comparables au rayon de la fibre (les interactions entre les effets radiaux et longitudinaux sontnégligées). Sur la base de la solution de Lamé, l’analyse des effets thermiques dans la direction radiale aux fibresest reprise par Oel et Frechette (1986). Une analyse complète est donnée dans l’article de Hutchinson et Jensen(1990).

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interface est la jonction entre deux solides homogènes linéairement élastique. L’effort detraction appliqué, est supposé symétrique par rapport au plan de la fissure.

Solide 1 Solide 2

Fissuretransversale

Figure 3.2 Fissure transversale à l’approche d’une interface entre deux solides.

Gupta et al. (1993) proposent deux critères de déviation de la fissure dans l’interfaceentre deux solides anisotropes. Le premier est un critère de résistance qui prévoit cettedéviation, au lieu de la rupture du second solide, si la condition suivante est vérifiée :

σσ

σσ

i i*

*2 2

< (3.1a)

où σ i* et σ2

* sont respectivement la résistance ultime de l’interface et la résistance ultime du

solide 2. σi est la contrainte à l’interface des deux solides dans la direction normale, et σ2 est

la contrainte dans le solide 2 qui est perpendiculaire à σi . Ce critère, bien qu’intégrant des

paramètres intrinsèques aux deux solides, est moins utilisé5 du fait du manque de moyensexpérimentaux pour les mesures directes des résistances ultimes de l’interface (Stang et al.(1990), Watson et al. (1992)).

Le second critère est basé sur la mécanique de la rupture et confronte des rapports detaux de restitution d’énergie élastique. Ce critère, utilisé dans de nombreux travaux,caractérise l’adhésion à l’interface par le travail à rupture de celle-ci. Ce paramètre tientcompte seulement de l’effort et de toutes les déformations engendrées sur le système, qui sontdirectement accessibles dans les essais micromécaniques, décrits précédemment (Kerans et al.(1991)).

Ce critère énergétique prévoit la déviation de la fissure, se propageant à l’interface, sila condition (3.1b) est vérifiée. Dans cette condition, le taux de restitution d’énergie pour la

propagation le long de l’interface est défini par Gi* . Celle nécessaire pour la propagation dans

5 À l’exception de Hsueh qui effectue encore des travaux basés sur cette approche (Hsueh (1995)). Lara-Cursioet al. (1994) ont effectué une analyse des essais d’indentation à l’aide de deux modèles basés sur les deuxcritères de décohésion à l’interface, décrits ci-dessus, dont le modèle de Hsueh fait partie.

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le solide 2 (perpendiculairement) est représentée par G2* . Gi définit le travail à rupture pour la

décohésion de l’interface, et G2 est le travail à rupture pour la propagation transversale à

travers le second solide.

G

G

G

Gi i*

*2 2

> (3.1b)

Lorsque la déviation de la fissure se produit, le champ de contrainte au fond de lafissure est tel que les deux modes de rupture, I et II, sont couplés. Ce champ de contrainte sera

la projection du vecteur chargement global, sur le bi-matériau, par un angle de phase ψ. De

sorte que ψ = 0 correspond au mode I pur de chargement et ψ = π/2 correspond au mode IIpur de chargement.

Dans le cas d’une fissure se propageant à l’interface fibre/matrice, le termedécohésion est préféré au terme délaminage, du fait de la forme de l’interface entre les deuxsolides (Figure 3.1) et, notamment, de la présence des contraintes résiduelles axiale et radialeprovenant de l’élaboration. En effet, la présence de ce champ de contraintes résiduelles entreen compétition avec celui qui aurait existé au fond de la fissure si l’interface était au départlibre de contrainte. Cette interférence aura tendance à favoriser l’un ou l’autre des deux modesde propagation de la fissure (Bhihe 1992).

Les deux critères cités ci-dessus sont fortement dépendants des caractéristiquesmécaniques des deux solides. Cette dépendance est caractérisée par le premier paramètre de

Dundurs (α), défini dans le cas de solides isotropes par :

α =−+

( )

( )

* *

* *

E E

E E1 2

1 2

(3.2)

où EE*

( )=

−1 2ν, E et ν sont respectivement le module de Young et le coefficient de Poisson.

Les indices 1 et 2 font référence aux deux solides (fibre et matrice respectivement).

Le seuil de résistance de l’interface, nécessaire pour satisfaire les critères décrits ci-dessus, peut être atteint par un choix judicieux des propriétés élastiques des deux solides.Cependant, le paramètre de Dundurs peut avoir des valeurs positives ou négatives, selon lesvaleurs des constantes élastiques des deux solides (Equation (3.2)). Lors de la conceptiond’une interface, vérifiant le critère de rupture décrit ci-dessus, ce paramètre est souvent choisidans la plage des valeurs positives maximales, afin que le solide (bi-matériaux) puissesupporter de fortes contraintes transversales.

Suivant la définition du paramètre de Dundurs, il est positif pour les valeurs dumodule de Young, du solide cible (solide 2 sur la Figure 3.2), supérieures à celles du solideinitial. Ceci est interprété, dans le cas du composite fibre/matrice, par une fibre plus rigide quela matrice. Cependant, il est difficile, à partir des différentes familles de fibres et matrices, et

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des différents moyens d’élaboration qui existent déjà, d’obtenir la meilleure combinaison

théorique du paramètre (α). Ce dernier est négatif, pour des composites de structure quiexistent actuellement comme : Nicalon/SiC et Nicalon/Si3N4. La solution serait d’introduire,tout en maintenant les différentes combinaisons fibre/matrice, une interphase entre elles. Ceciest effectué par enrobage de la fibre, d’un revêtement dont les caractéristiques mécaniquessont maîtrisées ou peuvent être directement modifiées avant l’élaboration (voir Chapitre 2).

Gupta et al. (1993) ont dressé un tableau donnant les conditions extrêmes pour ladéviation de fissures dans plus de 40 systèmes couramment utilisés, à partir de leurscaractéristiques mécaniques. Ils ont noté, pour la plupart de ces systèmes, que la composantelocale du mode II au fond de la fissure est de 40 à 80% de la composante locale du mode I.Ceci indique la prédominance du mode II et renforce l’hypothèse, retenue dans le modèle deHutchinson et Jensen (1990), de propagation de la décohésion en pur mode II dans lessystèmes fibre/matrice. Il faut noter que cette hypothèse est proposée dans le cas d’uneinterface soumise à une contrainte de compression issue de l’élaboration. Dans le cas d’unecontrainte résiduelle de tension, celle-ci fait croître la composante locale du mode I et favoriseune propagation en mode mixte de la fissure à l’interface. Dans ces deux cas, l’interface estsupposée parfaitement lisse, et ce sont les contraintes résiduelles d’élaboration qui agissentsur le mode de propagation de la fissure.

Pour appliquer des revêtements sur les fibres, on a souvent recours aux techniques dedépôts en phase vapeur. La microstructure et la morphologie du dépôt dépendent des élémentsdéposés et des conditions opératoires du dépôt lui-même. Dans ce cas, le mode II pur dedécohésion de la fibre ne se manifeste pas souvent dans ces interfaces, même si celles-ci sonten compression. Jero et al. (1991) ont décrit trois mécanismes principaux de décohésion àl’interface fibre/matrice, représentés schématiquement sur la Figure 3.3.

La Figure 3.3b représente le cas typique où un revêtement (ou interphase) est absent.La liaison à l’interface est forte et la décohésion se propage, en partie, dans la matrice et àl’interface. Cette configuration est moins intéressante, car le frottement qui précède ladécohésion ne peut pas être stable, à cause des surfaces dures formées après passage de ladécohésion.

En présence d’un revêtement, deux types de décohésion sont observés selonl’épaisseur de celle-ci. La décohésion suit la morphologie de la fibre lorsque l’épaisseur estfaible ou lorsque l’adhésion fibre-interphase est faible (on parle dans ce cas d’une interfacefaible, Figure 3.3a) alors qu’elle se propage librement dans le volume du revêtement, lorsquel’épaisseur est plus importante (Figure 3.3c).

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M M MF F F

C C

(a) (b) (c)

Figure 3.3 Scènes de décohésion de la fibre dans les composites monofilamentaires d’après Jero et al.(1991): (a) décohésion d’une fibre rugueuse le long d’une interface faible, (b) décohésion d’une fibrelisse le long d’une interface forte et (c) décohésion dans un revêtement fragile.

Il est clair que si la décohésion à l’interface suit une trajectoire lisse, le frottement dela zone décollée est la principale cause de l’absorption d’une partie de l’énergie disponiblepour faire progresser cette décohésion6. Par contre, dans les cas représentés sur les Figures3.3a et c, la décohésion est contrainte de suivre des trajectoires non planes : respectivementsuivant la génératrice du profil de la fibre ou dans le cœur du revêtement. Ces trajectoires vontretarder la propagation de la décohésion, par frottement et coincement de ces surfaces auniveau des facettes ou des aspérités. Ces dernières sont créées par la propagation, à l’interface,qui suit un chemin tortueux. Par contre, l’expansion induite par cette rugosité va augmenter lacontribution du mode I.

Les scénarios de décohésion décrits ci-dessus sont les principales configurations dedécohésion entre des solides supposés homogènes (comprenant l’interphase). La réalité de laprogression de la décohésion peut être une combinaison de ces mécanismes (Jero et al.(1991)).

Dans ce cas, il est fortement probable que si l’un des mécanismes qui coexistent,domine le reste, la décohésion de la fibre sera dictée par celui-ci. C’est justement ce degré deprédominance qui est difficile à cerner et qui peut rendre difficile la validation des hypothèsesprises dans les modèles. Ainsi, pendant l’écriture de ces derniers, on retrouve largement admisle frottement constant dans les zones décollées de l’interface, alors que d’autres introduisentun frottement du type Coulomb dans ces zones.

Le modèle de Hutchinson et Jensen (1990) comme il a été déjà évoqué, est unmodèle unidimensionnel qui résulte d’une analyse rigoureuse du problème de décohésion etde frottement de la fibre. Ce modèle présente l’avantage d’établir des expressions purementexplicites des solutions, et prévoit une distribution des champs de contrainte dans la fibre trèscomparable à celle déduite des solutions numériques dans une analyse plus rigoureuse(Kerans et al.(1991). Dans ce qui suit, seront décrites les différentes extensions faites sur le

6 Cela est vrai si le frottement s’étend sur une zone décollée qui est à une distance, du fond de la fissure,supérieure au rayon de la fibre, Charalambides et Evans (1989).

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modèle de Hutchinson et Jensen. Une version revue et améliorée de leur modèle est présentéepar Marshall (1992).

3.3.3 Frottement constant et frottement de CoulombDans le but d’introduire le plus simplement ces modèles, l’analyse sera restreinte au

seul cas du comportement d’une fibre et d’une matrice isotrope. Dans le cas de l’essaid’indentation, le comportement de la fibre est représenté schématiquement sur la Figure 3.4.Le raisonnement dans ce cas précis sera semblable à celui introduit par Kerans etParthasarathy (1991). Les notations et les dénominations considérées ici seront cellesadoptées par ces auteurs; d’autres seront prises en compte si nécessaire.

r

ld

Pa

x

δa

τ

0

Figure 3.4 Modèle axisymétrique d’une fibre enchâssée dans une matrice

Les contraintes résiduelles d’élaboration représentent l’état initial du champ decontraintes dans le composite avant toute sollicitation. Elles représentent un système de forceséquilibré dans le composite sans que leurs composantes de compression et de tension soientégales, ceci indépendamment de la nature isotrope ou anisotrope des constituants (Chawla(1993)). Dans ce problème de symétrie axiale, les solutions thermoélastiques sont obtenuespour les cas de 2 et 3 cylindres coaxiaux (isotropes) que représentent la fibre, la matrice et lerevêtement sur la fibre s’il y a lieu (Oel et Frechette (1986), Budiansky et al. (1986), Chawla(1993)). Ces solutions sont données par Hutchinson et Jensen (1990) pour une matriceisotrope et une fibre isotrope transverse.Notre présentation se limite au cas de constituants isotropes, en supposant que les effets descomposantes axiales et radiales du champ de contrainte sont découplés et que l’interface esten compression (Kerans et al. (1991)).Les deux composantes du champ de contrainte résiduelle de l’élaboration, s’écrivent de lamanière suivante :

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σν νN

th m f

f m m f

qE E

E ET=

−+ + −( ) ( )

( )1 1

∆α∆ (3.3)

P

rT E

k

kr

ffπ ν2

1 2

1 2= − +

( )∆α∆ (3.4)

où σNth est la contrainte normale de compression à l’interface et

P

rr

π 2 est la contrainte axiale

dans la fibre. E et ν sont respectivement le module d’Young et le coefficient de Poisson, lesindices f et m font référence à la fibre et la matrice7.

qE E

EP

PE

f m m f

f m m f

=+ + −

+−

+

+ −

( ) ( )

( )

1 1

1

11

2

2

ν ν

ν ν avec P

f2 1

=

q est un paramètre égal à l’unité dans le cas d’une matrice infinie ou fraction de fibre (f) nulle.

∆α α α= −m f , est la différence entre les coefficients de dilatation thermique, respectivement

de la matrice et de la fibre.

kE

E Em f

f m m f

=+ + −

νν ν( ) ( )1 1

Les relations effort-déplacement sont évaluées sur la base des conventions de signeindiquées sur la Figure 3.4. Dans la zone de l’interface en amont du fond de la fissure, lescontraintes et les déformations sont constantes. Les déformations axiales dans la fibre et dansla matrice sont égales, et les contraintes et les déplacements normaux à l’interface sontcontinus (Marshall (1992)).

Pendant la propagation de la décohésion, il existe une discontinuité dans la contrainteaxiale dans la fibre relative à la position du fond de la fissure. Cette discontinuité est décritepar l’énergie spécifique nécessaire pour faire propager la fissure à l’interface (ou ténacité enmode II de l’interface fibre/matrice), qui s’écrit en terme de contrainte :

P

r

G E

k rd i f

f2 1 22π ν=

−( )(3.5)

7Le rapport de ces deux contraintes est équivalent au rapport a2/a4 dans les équations de Hutchinson et Jensen(1990), avec les hypothèses de matrice infinie et fibre isotrope.

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CHAPITRE 3. ESSAIS MICROMECANIQUES ET MODELES ANALYTIQUES

40

P

rd

π 2 est la contrainte de décohésion. C’est une propriété mécanique de rupture de l’interface,

elle caractérise le seuil pour lequel la décohésion à l’interface progresse pendant lechargement de la fibre, et cela en l’absence de la contrainte axiale résiduelle d’élaboration

P

rr

π 2 .

L’équation d’équilibre de la fibre a la forme suivante :

dP x

dxr x

( )( ) ( )= − 2π τ (3.6)

où τ est la contrainte de cisaillement (ou de frottement), qui peut être constante ouproportionnelle à la contrainte normale de compression à l’interface (frottement de Coulomb).

Le modèle du transfert de charge basé sur le frottement constant, dans la zonedécollée, ne sera pas développé dans cette partie. Il peut être simplement déduit, du présentmodèle, qui est basé sur le frottement de Coulomb. Le passage d’un modèle à l’autre peut êtreeffectué dans le cas limite quand le coefficient k tend vers zéro8 (Marshall (1992)). De tellesorte que la contrainte normale à l’interface, dans le modèle avec frottement constant, estindépendante de la variation de la contrainte axiale dans la fibre.

Dans le cas d’un frottement de Coulomb, la contrainte (τ) fait intervenir lacomposante radiale de la contrainte résiduelle et la contribution de la contrainte axiale parl’effet de Poisson sur la fibre, d’après la loi de Coulomb :

τ µ σ ηπ

( )( )

x kP x

rNth= − −

2

(3.7)

où µ est le coefficient de frottement et η est un paramètre qui permet le passage aux

équations du modèle d’extraction. η est égal à 1 pour le modèle d’indentation et -1 pour le

modèle d’extraction (si le terme entre parenthèses devient positif on a τ(x)). Cette notation estutile pour l’étude du déchargement et du rechargement dans les essais d’indentation, car cesont les mêmes équations différentielles, aux signes près, qui sont à la base des modèles dechargement et du déchargement.Dans l’essai d’extraction, l’effort de traction sur la fibre croit jusqu'à une valeur critique pourlaquelle la contraction de la fibre, du fait de l’effet de Poisson, annule les réactions des effortsradiaux à l’interface. Kerans et Parthasarathy définissent cette valeur critique par P*, dans le

cas où la contrainte radiale résiduelle σ Nth et la seule contrainte qui agit à l’interface :

8 En effet, le paramètre k est déduit dans le cas d’une fibre et matrice isotropes. Il est équivalent au paramètre b1,qui est déduit dans le cas d’une fibre isotrope transverse et une fraction de fibre f non nulle, dans le modèle deHutchinson et Jensen.

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CHAPITRE 3. ESSAIS MICROMECANIQUES ET MODELES ANALYTIQUES

41

Pr

kNth

* = −σ π 2

(3.8)

Ainsi, dans le cas de l’essai d’indentation, le paramètre P* perd toute signification, carl’expansion radiale de la fibre (due à l’effet Poisson) dans cette configuration de compression,augmente plutôt les réactions des efforts à l’interface. Pour la commodité de présentation, leparamètre P* sera considéré ici comme une simple définition d’une expression dans lemodèle.

En combinant les équations (3.6) et (3.7), il résulte une équation différentielle de

l’effort de compression axial dans la fibre en fonction de la position ″x″ dans la zone décolléede l’interface. Le déplacement de l’extrémité de la fibre est le résultat de l’intégration de ladéformation de la fibre, à laquelle est soustraite la déformation résiduelle d’élaboration.

La relation effort-déplacement de l’extrémité de la fibre qui simule l’effort-déplacement de l’indenteur dans les essais d’impression sera la solution du systèmed’équations différentielle suivant :

[ ]P x e P e dx C

xk

r EP x P dx

x x

f

fr

( )

( ) ( ( ) )

*= − +

= −−

+

− ∫

ηζ η ζζ

δν

πη

1 22

(3.9)

où Cest une constante d’intégration et ζµ

=2 k

r.

Les conditions aux limites sur l’effort et le déplacement, en tenant compte des conventions designe, sont les suivantes :

P x P

P x l P Pa

d d r

( )

( )

= = −= = −

0

1

ηη

et δ δδ( )

( )

x

x la

d

= == =

0

01

(3.10)

où Pa est l’effort de compression appliqué à l’extrémité de la fibre (on fait l’hypothèse quel’introduction de l’effort par l’indenteur conduit à une contrainte uniforme dans la fibre). Pr etPd sont respectivement définis par les Equations (3.4) et (3.5).Ainsi, la longueur de décohésion peut être donnée par :

l LnP P

P P Pd

a

d r1

= −+ −

ηζ η

*

* (3.11)

et la relation effort-déplacement de l’extrémité de la fibre par :

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CHAPITRE 3. ESSAIS MICROMECANIQUES ET MODELES ANALYTIQUES

42

δη ν

π ζη

ηa

f

fa d r r

a

d r

k

r EP P P P P Ln

P P

P P P=

−+ − + −

−+ −

( )( )*

*

*

1 22 (3.12)

Dans le but de découpler les paramètres qui interviennent dans l’équation (3.12), on remarqueque si l’essai d’indentation est suivi d’un déchargement et d’un rechargement, les équationsainsi obtenues sont indépendantes de l’énergie de décohésion et de la contrainte axialerésiduelle dans la fibre. Ces équations sont faciles à intégrer, nécessitant simplement la

continuité de l’effort et du déplacement à x ld=2et x ld=

3. ld2

et ld3 sont les distances sur

lesquelles les profils respectifs de déchargement et de rechargement s’établissent (Figure 3.5).

Fibre

Matrice

ld1

ld2

ld3

Figure 3.5 Distances activées pendant le déchargement ld2 et le rechargement ld3

. La longueur de

décohésion pendant le chargement initial étant ld1.

Soient Pa1 et Pa2

(δa1 et δa2

) les efforts extrêmes (les déplacements extrêmes)

atteints pendant le chargement et le déchargement. Remarquons que pendant la décharge, lafibre glisse dans le sens inverse et les équations ci-dessus peuvent être appliquées avec le

paramètre η égale à -1.

Les longueurs activées, ld2 et ld3

, pendant le déchargement et le rechargement sont données

par :

l LnP P

P Pd

a

a2

11

2=

−−

ζ

*

* l Ln

P P

P Pd

a

a3

2

1

2= −

ζ

*

*(3.13)

et l’équation effort-déplacement correspondant au déchargement est :

[ ]δν

π ζδa

f

fa a a a a

k

r EP P P P P P P=

−− − − − − +

1 22 2

2 1 1 1

* * *( ) ( ) (3.14)

pour le rechargement, on aura :

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CHAPITRE 3. ESSAIS MICROMECANIQUES ET MODELES ANALYTIQUES

43

[ ]δν

π ζδa

f

fa a a a a

k

r EP P P P P P P= −

−− − − − − +

1 22 2

2 2 2 2

* * *( )( ) (3.15)

Les solutions (3.14) et (3.15) sont valables si la condition suivante est vérifiée :

l l ld d d3 2 1≤ ≤

Celle-ci assure que, pendant le déchargement et le rechargement, la longueur de décohésion

issue du chargement initial ld1 n’a pas progressé.

Dans ce paragraphe, les équations établies sont relatives au glissement d’une fibre

liée à la décohésion progressive d’une interface ″lisse″ (pas d’interaction hormis unfrottement de Coulomb entre les flancs décollés à l’interface) en mode II pur. Ces équationstraduisent la situation dans laquelle la contrainte, normale à l’interface, est le résultat de lacontribution : (i) de la composante radiale (statique) du champ de contraintes thermiquesrésiduelles, et (ii) de l’effet transverse de Poisson (quasi-statique). Ces deux contributionssont résumées par le second terme de l’équation (3.7). Nous verrons par la suite, que lacontribution à la contrainte normale d’un paramètre, définissant les rugosités de l’interface,peut être statique et/ou quasi-statique.

3.3.4 Résistance par ancrage des aspérités et modèles de dilatance linéaireComme il a été évoqué ci-dessus, la propagation des fissures à l’interface de deux

matériaux n’est pas parfaitement plane. L’effet des interactions des aspérités, présentes sur lessurfaces créées par le passage d’une fissure, a été déjà analysé par Evans et Hutchinson(1989) dans le cas d’une interface plane entre deux matériaux isotropes. En effet, leglissement relatif, des surfaces créées, est gêné par la présence de ces aspérités, quinécessitent un effort axial supplémentaire pour les surpasser.

Le cas de la décohésion d’une fibre est très différent de celle rencontrée dans uneinterface plane. Cette différence réside dans la géométrie cylindrique de l’interface et dans lanature et l’amplitude du chargement radial, que subit la fibre après décohésion. Ceci a été mis

en évidence par la présence d’un phénomène dit ″seating-drop″ (ou repositionnement de lafibre), dans les essais de réimpression menés par Jero et Kerans (1990), et dans les essaisd’extraction inversée9 menés par Carter et al. (1991).

Cependant, la morphologie des surfaces crées par le passage de la décohésion (ou lafissure), peut jouer un rôle important sur le niveau du frottement de la fibre, notamment dansles systèmes où la contrainte résiduelle d’élaboration est faible ou en tension. L’amplitude decette contrainte résiduelle, qui constitue l’état de référence de la contrainte radiale àl’interface, peut être contrôlée par le choix des deux phases (fibre, matrice et interphase). Cechoix est conditionné aussi par le seuil de résistance de l’interface (cf. Section 3.3.2), pour ladéviation de la fissure. La maîtrise de la morphologie des aspérités s’avère donc 9 Après avoir extrait la fibre sur une certaine distance d’un côté de la matrice, l’essai consiste à l’extraire denouveau de l’autre côté.

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CHAPITRE 3. ESSAIS MICROMECANIQUES ET MODELES ANALYTIQUES

44

indispensable, et constitue un moyen supplémentaire de contrôle du comportement del’interface.

La définition de cette morphologie en terme de géométrie, nécessaire pour lamodélisation du comportement de l’interface, est une tâche difficile. D’une part, elle dépendde la manière dont la fissure se propage, et d’une autre part, de la cinétique de son évolutionpendant le glissement relatif des deux surfaces.

Le problème est simplifié si l’on considère le cas où la décohésion suit, dans sapropagation, la morphologie initiale de la fibre (cf. Figure 3.3a). Cela donne au préalable desinformations plus précises sur la morphologie des deux surfaces décollées et qui sera, dans cecas, celle de la surface de la fibre. Ces informations, en contre partie, dépendent desdéfinitions des paramètres de surface, connues en tribologie, et qui font l’objet de récentstravaux (Majumdar et al. (1991)). Pour simplifier, Parthasarathy et al. (1994) définissent lamorphologie de la surface de la fibre, suivant une seule dimension, par une sinusoïde.L’amplitude caractéristique, de celle-ci, correspond au coefficient maximal de la transforméede Fourier, du spectre de la morphologie réelle de la fibre.

La contribution des rugosités de la fibre et de la matrice au glissement de la fibre aété considérée pour la première fois dans les travaux de Kerans et Parthasarathy (1991). Ilsont introduit cet effet par une expansion radiale constante qui s’ajoute à la dilatation radialed’élaboration, qui peut être notée par :

σν νR

m f

f m m f

qE E

E E

A

r=

−+ + −

( ) ( )1 1

(3.16)

où A est l’amplitude caractéristique des rugosités de la fibre.La prise en compte de ce paramètre dans les équations ci-dessus ne modifie pas leraisonnement. Car cet effet, peut être considéré comme une élévation du niveau initial de la

contrainte normale à l’interface, donc une contribution statique. La contrainte σ Nth sera

simplement remplacée par σ N dans les équations (3.7) à (3.15) avec :

σ σ σN Nth

R= + (3.17)

et le paramètre P* devient :

Pr

kr

ET

A

rN f

f

* = − = +

σ ππ

ν

22 ∆α∆ (3.18)

on retrouve ainsi les équations données par Kerans et Parthasarathy (1991).Cette écriture de la contribution des aspérités n’est valable que si le glissement de la fibre,

pendant l’essai d’indentation, est supérieur à la demi-période (λ/2) caractéristique de lamorphologie de la fibre (Kerans et Parthasarathy (1991)). Cette condition est suffisante pour

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CHAPITRE 3. ESSAIS MICROMECANIQUES ET MODELES ANALYTIQUES

45

la continuité de la solution obtenue dans le cas où les contraintes au niveau des contactslocaux à l’interface ont des composantes radiales très grandes par rapport aux composantesaxiales (axe de la fibre). En d’autres termes, cette hypothèse traduit le fait que les génératricesdes contacts locaux restent dans la majorité parallèle à la direction globale du glissement de lafibre. Cependant, des limites physiques doivent être prises en compte comme : (i) l’étenduedu glissement de la fibre dans le cas de longueurs d’ondes d’aspérités assez élevées, (ii)l’intensité du champ de contraintes au niveau des contacts locaux, vis-à-vis des limites à larupture ou en fluage des aspérités en contact. Dans le cas d’un contact frottant d’aspérités

ondulées, une condition numérique sur le rapport (2A/λ), a été tirée d’une approximation del’équilibre entre les efforts générés au niveau de ce contact (Bhihe (1992)) :

20 03

A

λ≤ ,

Si le déplacement de la fibre est inférieur à la demi-période (λ/2), l’effet résultant desinteractions entre les aspérités à l’interface, affecte le champ de contraintes qui agit sur lafibre. De par sa composante radiale, la contrainte nominale entre deux aspérités possède unecomposante axiale du fait de l’évolution continue de la tangente du contact entre ces aspérités.Dans ce cas, le glissement élémentaire de la fibre s’accompagne d’une expansion radiale (oudilatance radiale) progressive de la matrice, qui est due au désancrage des aspérités. Plusieursmodèles analytiques, décrits ci-après, ont été suggérés pour exprimer cette dilatance enfonction de la déformation axiale de la fibre.

Par contre, si le déplacement de la fibre est supérieur à λ/2, la dilatance radiale àl’interface est maximale. Dans ce cas, le frottement est supposé indépendant de l’évolution dela disposition relative de ces aspérités.

Dans le but de s’affranchir des difficultés du paramètrage de la morphologie desaspérités, Parthasarathy et al. (1994) proposent un profil triangulaire symétrique des aspéritésaprès passage de la fissure à l’interface. Dans ce cas, le seul paramètre à prendre en compteest l’angle de la pente d’une aspérité élémentaire (Figure 3.6a). Bhihe (1992) propose unprofil sinusoïdal de ces aspérités (Figure 3.6b).

θ

Fibre

Matrice

Fibre

Matrice

(a) (b)

Figure 3.6 Profil théorique des aspérités après décohésion de l’interface fibre/matrice (a)Parthasarathy et al. (1994), (b) Bhihe (1992).

A partir de la Figure 3.6, la dilatance radiale (ou expansion radiale) à l’interface peut êtredécrite par l’évolution de la génératrice du contact entre les aspérités. Cette génératrice est

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CHAPITRE 3. ESSAIS MICROMECANIQUES ET MODELES ANALYTIQUES

46

constante dans le cas du profil triangulaire (a), et variable dans le cas du profil ondulé (b).Dans certains cas, cette dilatance a été formulée indépendamment du détail de l’évolution desaspérités (Stupkiewicz (1996), Marshall et al. (1995)). Le tableau 3.1 résume les modèles de

dilatance radiale εθ dans quatre situations, en utilisant les mêmes notations des paramètres

que précédemment.

Tableau 3.1 Modèles de dilatance radiale liée à l’interaction des aspérités à l’interface

εθ Paramètres

Parthasarathy etal. (1994)

δθ

( )tan( )

x

r

tan(θ) est la pente de la génératrice de contact

entre deux aspérités triangulaires

Stupkiewicz(1996)

δλ

( )x

r

A2 A et λ sont respectivement l’amplitude et la

période caractéristiques d’une aspérité

Bhihe (1992) 1 0

r

A x P dx

NL

i

le

( , )∫

A x Pi( , ) représente l’amplitude locale d’un point

xi sur la longueur totale de fibre le enchâssée

dans la matrice, et dépend de la déformationrelative entre la fibre et la matrice. P est l’effortappliqué. NL représente la longueur totale de lazone de l’interface activée pendant la dilatance.

Marshall et al.(1995)

∆σ f

mEβ

∆σ f est la contrainte axiale dans la fibre et β et

un coefficient de proportionnalité constant.

L’intégration de ces hypothèses dans le modèle global donne des solutions pluscomplexes comparées à celles présentées précédemment (Parthasarathy et al. (1994),Stupkiewicz (1996)). Dans ce cas, la relation entre l’effort et le déplacement de l’extrémité dela fibre ne peut pas être établie analytiquement, car il est nécessaire de traiter numériquementla longueur de décohésion à l’interface.

Les termes de l’équation (3.18) ne sont alors plus constants et varient avec ledéplacement de la fibre :

P P x rE

Tx

rf

f

* * ( )( )

= = +

πν

δξ2 ∆α∆ (3.19)

ξ est un terme de proportionnalité, qui peut être constant (tang(θ) ou 2A/λ, Tableau 3.1) ou

fonction de la variable (x) comme par exemple, lorsque le profil des rugosités est supposénon-linéaire (Parthasarathy et al. (1994)).

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CHAPITRE 3. ESSAIS MICROMECANIQUES ET MODELES ANALYTIQUES

47

La composante axiale de l’effort, normale à la génératrice du contact entre lesaspérités, s’ajoute à l’effort axial dans la fibre. L’intégration des équations (3.9) nécessite la

prise en compte de cette composante, notée PAδ :

P

r

x

rE

k

kA

ff

δ

πδ ξ

ν2

1 2

1 2= −

+−

( )(3.20)

On remarque que cette composante est définie de la même façon que la contrainte axiale

résiduelle d’élaboration Pr dans l’équation (3.4).

Dans l’équation (3.9) l’effort Pr doit être remplacé par P xr ( ) :

P

r

P x

rT

x

rE

k

kr r

ffπ π

δξ

ν2 2

1 2

1 2= = − +

+−

( ) ( )∆α ∆ (3.21)

et le système d’équation (3.9) devient :

[ ][ ]

P x e P x e dx C

xk

r EP x P x dx

x x

f

fr

( ) ( ( ))

( ) ( ) ( ( ))

*= − +

= −−

+

− ∫

η ζ η ζζ δ

δν

πη δ

1 22

(3.22)

ou encore, si ξ est supposé constant :

dP x

dxd x

dx

C

C C

P x

x

C

C

( )

( )

( )

( )δηζη δ

+ −

=−

1

3 4

2

5

(3.23)

avec les constantes :

CrE f

f1 = ζ

πν

ξ , Cr E

Tf

f2

2

= ζπ

ν∆α ∆ , C

k

r Ef

f3 2

1 2=

− νπ

, C kr4 1 2= +( )ξ

et C k T5 1 2= +( )∆α ∆ .

La résolution de ce système d’équation doit intégrer les mêmes conditions aux limites quecelles données précédemment par les équations (3.10). On remarque que les équations dusystème (3.23) sont couplées ; il est nécessaire pour les découpler de déterminer

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CHAPITRE 3. ESSAIS MICROMECANIQUES ET MODELES ANALYTIQUES

48

numériquement10 la longueur de décohésion ld1 de la fibre (Parthasarathy et al. (1994),

Marshall et al. (1995) et Stupkiewicz (1996)).Les équations ci-dessus sont valables pour le cas d’une décohésion, progressive d’une fibre,sur une longueur inférieure à la longueur totale de la fibre enchâssée dans la matrice. Dans lecas d’une décohésion totale de la fibre, le raisonnement précédent n’est plus valable, car lesconditions aux limites, sur l’effort et le déplacement, doivent être modifiées.

Il faut rappeler que la décohésion totale de la fibre peut intervenir pendantl’augmentation progressive de la sollicitation, ou spontanément si l’effort axial résidueld’élaboration est supérieur à la résistance équivalente donnée par l’énergie de décohésion parunité de surface de l’interface11. Le cas du glissement sur une distance inférieure à la demi-période caractéristique des aspérités de la fibre, sera traité en détail dans le Chapitre 6. Onintroduit succinctement le second cas où la fibre glisse globalement sur une distance

supérieure à cette demi-période (λ/2).

L’effort de décohésion ainsi que l’effort résiduel d’élaboration sont nuls. Le système (3.9) seréduit alors à :

[ ]P x P e dx C ex x( ) *= − +∫ −ζ η ζ η ζ (3.24)

P* étant donné par l’équation (3.18) avec les conditions aux limites suivantes :

P x P

P x ha a( )

( )

= = −= =

δ η0

(3.25)

où h est la hauteur de l’éprouvette (ou longueur de la fibre dans la Figure 3.4).

L’effort de décohésion Pd ainsi que l’effort axial résiduel d’élaboration Pr étant nuls, la

relation entre l’effort et le déplacement de l’extrémité de la fibre s’écrit donc simplement :

[ ]P e Pah a= − −1 η ζ δ( ) * (3.26)

L’équation (3.26) traduit l’effort de glissement de la fibre dans les essais d’extraction (η = -1)

ou les essais d’expression (push-out) (η = 1) en fonction de la diminution de la longueur de la

fibre (h-δa) enchâssée dans la matrice. Dans des cas particuliers, le profil de cet effort rendcompte de l’histoire du contact à l’interface. Cela se manifeste, par exemple, par desondulations qui ont la même période que celles des ondulations de la morphologie de la fibre,

10 Cela consiste à déterminer pas à pas la valeur de la longueur de décohésion ld1

, qui vérifie à la fois les deux

solutions du système d’équation (3.23).11 Voir Chapitre 4 pour plus de détails sur la décohésion progressive de l’interface, après élaboration decomposites modèles avec forte différence entre les coefficients de dilatation de la fibre et de la matrice.

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CHAPITRE 3. ESSAIS MICROMECANIQUES ET MODELES ANALYTIQUES

49

(Warren et al. (1992), Mackin et al. (1992-2)). Le même mécanisme, observé dans le cas dusystème composite SiC Sigma/Pyrex, est analysé dans le Chapitre 5.Les effets de ces interactions d’aspérités, sur de grandes distances, ne doivent pas êtreconfondus avec ceux qui interviennent à des distances inférieures à la demi-période

caractéristique de ces aspérités (λ/2). Le frottement peut être considéré comme constantuniquement dans le premier cas12.Ainsi la prise en compte de ces interactions est introduite sous forme d’une expansion radialeparticulière (elle est différente de la dilatance radiale qui intervient seulement sur des

déplacements inférieurs à λ/2). Cette expansion est due, en première approximation, auglissement relatif de deux corps élastiques (via des aspérités rigides), suivant une génératricepériodique ou aléatoire.

Dans ce cas, la forme du paramètre P* dépend de nouveau de la position (x) sur la fibre :

[ ]P r T xE f

f

* ( )= +π ενθ

2 ∆α ∆ (3.27)

Dans le cas d’une génératrice périodique, Mackin et al. (1992-2) proposent une expressionempirique de cette déformation :

επλ

π δλθ =

−−

A

r

x x asin sin( )2 2

(3.28)

où A est l’amplitude maximale et λ la période caractéristique des rugosités de la fibre.D’autres proposent des génératrices avec des amplitudes exprimées par des séries de Fourier(Liu et al. (1995)), ou par un modèle fractal (Mackin et al. (1992-1)).L’écriture finale de la relation effort-déplacement est la suivante ; dans le cas d’undéplacement global de la fibre :

[ ]P rE

T e e x e dxa

f

f

h x

h

a a

a

= − +

− − ∫π

νηζ εη ζ δ η ζδ

θη ζ

δ2 1∆α ∆ ( ) ( ) (3.29)

3.3.5 Modèles constitutifs de la dégradation à l’interfaceLe concept entrepris pour la déviation de fissure à l’interface par décohésion de

l’interface, suppose que celle-ci ait une résistance assez faible. Cela donne au préalable unecondition matérielle sur la nature des matériaux devant frotter après le passage de ladécohésion. Dans ce cas précis, la dégradation de l’interface est inévitable et cela d’autantplus que la contrainte normale est très élevée en comparaison à celle qui intervient dans lesessais de frottement plus classiques (cf. Heslot et al. (1994) et Dieterich et Kilgore (1994)).

12 Ceci est vrai en l’absence de dégradation.

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CHAPITRE 3. ESSAIS MICROMECANIQUES ET MODELES ANALYTIQUES

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Cette dégradation peut être interprétée par la diminution de la capacité du transfert de charge àl’interface.

Tableau 3.2 Modèles de dégradation par diminution de l’amplitude des aspérités à l’interface

Expression del’amplitude

Paramètres

Mackin et al.(1992) Ae

c a−δλ

δa est le déplacement global de la fibre et c est

une constante de décroissance prise égale à 0,4pour l’identification d’une courbe

expérimentale. λ est la période caractéristique

des rugosités de la fibre.

Liu et al.(1995) A x c x dN

Ta

( ) ( , )− ∫ σ δ δδ

0

A(x) est une description par série de Fourier desrugosités de la fibre et c est un coefficient dedégradation qui varie entre 0 et 0,0075 (en1/GPa). Le second terme représente lacontribution de l’intensité de la contrainteradiale globale (second terme dans l’équation3.7) à la diminution de la hauteur des aspérités

pendant le déplacement δa .

Stupkiewicz(1996) Ae

m f− +

κ κ( ) ( )

κ ( )m et κ ( )f

représentent l’intensité du processusd’usure ou cumul de dissipation du frottementpour les deux surfaces en contact, matrice etfibre.

Du point de vue de la modélisation, Mackin et al. (1992-2) ont introduit un modèleempirique de dégradation uniforme des aspérités : cette dégradation traduit la diminution,suivant une loi exponentielle, de l’amplitude de ces aspérités. Au contraire, Liu et al. (1995)introduisent un modèle non-uniforme de la dégradation à l’interface à partir d’une descriptionpar série de Fourier des amplitudes de la rugosité de la fibre. Enfin, Stupkiewicz (1996) aintroduit un modèle basé sur la cinétique de dissipation du frottement à l’interfacefibre/matrice. Ces modèles sont résumés dans le tableau 3.2 avec les notations adoptéesprécédemment.

Dans ces modèles, le coefficient de frottement µ dans l’équation (3.7) est supposé ne pas êtreaffecté par cette dégradation de l’interface. Cette supposition est cependant trèssimplificatrice, sachant que les contraintes normales à l’interface sont très élevées, et ladiminution de l’effet de l’amplitude des aspérités ne peut s’expliquer que par la réduction deleurs amplitudes, ou par perte de leur rigidité radiale. Dans ces deux cas, ce sont lescaractéristiques physiques des surfaces en contact qui sont concernées. Les conditions sévèresdu contact, entraînent la formation de particules qui seront détachées de ces surfaces.L’évolution du frottement des deux contrefaces dépend, essentiellement de l’évolution de ces

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CHAPITRE 3. ESSAIS MICROMECANIQUES ET MODELES ANALYTIQUES

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particules (ou troisième corps). Il est plus raisonnable, cependant, de décrire la dégradation del’interface en termes de décroissance de la contrainte de frottement. Celle-ci étant le produitdu coefficient de frottement et de la contrainte normale à l’interface (les deux facteurspouvant évoluer). Une loi simple donnant l’évolution de la contrainte de frottement enfonction du déplacement de la fibre est présentée par l’équation suivante :

∂τ∂δ

ςτ= − n (3.30)

où ς est un coefficient de proportionnalité constant. L’exposant ″n″ rend compte de l’acuité

du niveau des contraintes locales sur la cinétique de dégradation à l’interface. Dans cetteéquation, le terme de gauche traduit la dégradation par unité de déplacement relatif, et leterme de droite traduit l’influence de la pression interfaciale sur cette dégradation (si onconsidère la relation simple (3.7)).

ConclusionNous avons noté dans ce chapitre, la nécessité d’utiliser des techniques

micromécaniques pour solliciter la fibre. Ces techniques sont, en général, des moyens directsde mesure, qui donnent accès à la réaction de la fibre pendant une sollicitation donnée. Lanature de cette sollicitation traduit celle à laquelle la fibre est soumise, dans un composite destructure. Il s’agit de sollicitation de tension et de compression, comme c’est le cas dans unchargement cyclique d’une structure fissurée.

L’intérêt de concevoir de nouvelles techniques expérimentales a été signalé, pourpouvoir accéder, de différentes manières, aux paramètres définissant le comportement del’interface. Le but est d’analyser les comportements typiques de l’interface, pendant lesdifférentes sollicitations mécaniques, qui peuvent renseigner sur les caractéristiques del’interface.

Les différents modèles unidimensionnels, qui décrivent le comportement mécaniquede la fibre dans les essais d’expression et d’extraction, sont introduits suivant un ordrechronologique de leurs améliorations. Parmi ces améliorations, on note essentiellement laprise en compte de l’effet des interactions des aspérités à l’interface. Cet effet a été introduitsous forme d’une expansion (dilatance) radiale lorsque le déplacement de la fibre est inférieur

à une certaine distance (λ/2) caractéristique de la rugosité de la fibre.Enfin, nous avons noté la possibilité de modéliser, de différentes manières, l’effet des

interactions des aspérités à l’interface. Afin de mieux décrire le comportement de la fibrependant les essais d’impression, une forme finale du modèle est présentée de telle manièreque de nouvelles expressions de dilatance radiale, puissent être facilement intégrées àl’existant.

L’endommagement de l’interface, pendant le glissement global des fibres dans lesessais d’extraction et d’expression, est illustré simplement par des modèlesphénoménologiques.