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    BUR EAU DE D EP OT: A NTWER P ENX

    NUMR OD'AGR ATION : P303742

    DOSSIER

    Culture dentreprise

    RE V U ETR IMES TR IELLE- P UBLICAT IONDE SD WORX - A NNE3 - N 11

    DCEMBRE 2005 - J A N V IE R- F V R IE R 2006

    SCOOPSUR L'HOMME E T LE TR AVAIL

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    CAHIERSOCIO-JURIDIQUE

    40 - THEME Ouvriers Employs: Un abme? 46 - COMMENTAIRE

    Lemploi des langues dans lentreprise 52 - L'OEILCRITIQUEDE ...

    Koen Magerman 55 - QUESTIONS & REPONSES La conversion

    ouvrier-employ

    SCOOP SUR L'HOMME ET LE TRAVAIL

    SOMMAIRE

    DOSSIER Culture dentreprise

    PROFESSEURDANIELVLOEBERGHSsur la culture

    dorganisation

    LACULTURED'ENTREPRISEDANSLAPRATIQUE Des managers

    propos de la culture dans leur entreprise

    ALAINDUCHATELETPROPOSDELACULTURECHEZLAPOLICEINTGRE La police fait plus que rdiger des P-V.

    CULTUREDENTREPRISE3M Linnovation dans les produits

    et dans les processus

    ESTOUEST La culture dentreprise en Chine et New York

    TOPIC Studio 100 opte pour le dveloppement durable

    INTERVIEW Jannie Haek, administrateur dlgu du holding

    de la SNCB: Aussi longtemps quil y aura des enfants qui

    rveront de devenir machiniste, les choses iront bien pour

    nous.

    RTROSPECTIVE Donald Defoort, Manager RH de lanne 1996,Le dfi numro 1 de la stratgie en matire de ressources

    humaines

    VIEETTRAVAIL Koen Peeters, responsable du sponsoring la

    KBC et crivain

    L'OEILCRITIQUEDE... Hugues Dayez

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    Culture dentreprise

    JANVANDENNIEUWENHUIJZEN

    Dans la vie, il faut toujours faire des choix: le scoutisme ou un club de sport,

    les Beatles ou les Rolling Stones, le Club de Bruges ou Anderlecht et

    chaque club correspond un style particulier.

    Un club nest pas lautre et chacun le peroit trs bien. Ds que vous

    runissez un groupe de personnes, il se forme une culture interne, une

    atmosphre particulire, un propre code de comportement.

    Il en va bien entendu de mme avec les organisations. Chez Microsoft, il rgne

    sans doute une autre culture que dans larme. La situation est dif frente au

    dpartement informatique quau dpartement marketing mais peut-on

    galement orienter cette situation? Existe-t-il ce que lon pourrait appeler

    une gestion de la culture dentreprise?

    Chez SD WORX, nous manions la culture dentreprise tout fait sciemment,

    sachant quelle influence les relations avec les collaborateurs, les candidats

    un emploi, les clients, les fournisseurs. Chez nous, chacune de ces relations

    est guide par le respect, lhonntet et la confiance. Nous nous basons sur

    le principe dgalit. Cette faon de faire peut et doit tre gre, surtout dans

    les grandes entreprises. Par le biais de conventions et de procdures, en

    donnant des instructions aux dirigeants: comment ngocier, comment

    coacher, comment vhiculer un message difficile, mais aussi par votrepolitique de recrutement,

    Evidemment, tout ne se droule pas toujours parfaitement. Il sagit en effet

    dune relation entre personnes. Le cas chant, il faut parfois intervenir. La

    gestion de culture dentreprise existe donc bel et bien. Il est surtout question

    de faire, de prouver et de donner lexemple, pas vraiment den parler.

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    edito

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    Dossier

    Culturedentreprise

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    DENISBOUWEN

    Le professeur Vloeberghs adhre totalement la bonne et claire

    dfinition du terme culture organisationnelle qua donne le

    psychologue des organisations amricain Edgar Schein il y a de

    nombreuses annes dj. M. Schein dcrivait la notion de cultu-

    re organisationnelle comme tant un modle qui repose sur une

    srie daxiomes invents, dcouverts ou dvelopps par un

    groupe dtermin au sein de lorganisation, ce modle stant

    construit au fur et mesure que le groupe apprenait prendre en

    charge des problmes dadaptation externe et dintgration

    interne. Les axiomes ou postulats doivent avoir suffisamment

    fonctionn pour tre considrs comme valables. Ce nest qu

    cette condition quil est possible de les faire assimiler aux nou-

    veaux membres de lorganisat ion comme tant la bonne

    manire de percevoir, doprer des constats et de penser en rela-

    tion avec les problmes.

    Le mot culture est intimement li la manire dont une organi-

    sation aborde lextrieur et fonctionne en interne. explique

    Daniel Vloeberghs Cela peut sembler thorique mais, en fait, a

    ne lest pas. Le fondateur dApple, Steve Jobs, en est un exemple

    classique: il en avait plus quassez des IBM et compatibles etdcida un beau jour de dmarrer sa propre entreprise dans son

    garage. Il dcida de baptiser ses collaborateurs associs, les

    autorisa apposer leur signature dans les PC et prfrait com-

    muniquer oralement que par crit. Lorsquun ingnieur poss-

    dant un beau diplme dHar vard vient frapper la porte dApple,

    il risque de tomber l-bas sur des gens qui vont lui dire: dsols,

    mais vous ne cad rez pas avec notre quipe.

    Fortis

    Les Nerlandais le disent de manire trs claire: chaque entre-

    prise a son style propre et ce nest pas une mince affaire de sy

    adapter. Regardez la Gnrale de Banque et la CGER, qui ont

    fusionn pour devenir Fortis. La fusion a connu de nombreuses

    difficults parce que les deux banques avaient des cultures qui

    divergeaient fortement: la CGER possdait des liens forts avec

    tout ce qui tait rouge, tandis que la Gnrale de Banque tait

    plutt bleue: on y rencontrait beaucoup de fils papa et la

    banque avait une griffe trs francophone.

    Vloeberghs t ient namoins ba layer devant sa porte en faisant

    rfrence la manire dont les anciennes Ruca, Ufsia et UIA ontfusionn pour donner naissance lUniversit dAnvers (UA): Ce

    Danil Vloeberghs (Universit dAnvers, KU Leuven)sur la culture dorganisation

    Chaque entreprise a sonet ce nest pas une mince affairede sy adapter

    Cela fait des annes que le professeur Danil Vloeberghs (Universit dAnvers, KU Leuven)sintresse de trs prs des thmes tels que la culture dentreprise et limportance de la

    communication interne. Rcemment, il a publi chez Lannoo Campus un manuel de GRH intitul

    Human Resource Management: fundamenten en perspectieven. Op weg naar de intelligente

    organisatie, qui approfondit le sujet. Selon M. Vloeberghs, il est bel et bien possible dinfluer

    sur une culture en place mais il est utopique de chercher inventer la culture idale car

    celle-ci nexiste pas.

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    processus de fusion ne sest videmment pas fa it sans tensions et

    celles-ci ntaient pas seulement lies aux diffrences de curricu-

    lums. Les diffrences de culture ont jou un rle bien plus pr-

    pondrant: lUfsia, par exemple, la culture tait celle des jsui-

    tes sous une forme dulcore, certes. La Ruca tait une vritable

    institution publique: jusqu il y a quelques annes encore, les

    professeurs y taient nomms par le ministre! LUIA visait pr-

    senter un profil neutre mais, dans la pratique, elle tait fortement

    politise. Mettez tous ces ingrdients dans une seule et mme

    marmite: les problmes sont invitables.

    En outre, les diffrences jouaient un rle beaucoup plus impor-

    tant pour les professeurs des diffrentes institutions que pour les

    tudiants. Dans un tel processus de fusion, on peut voir que les

    dirigeants de lorganisation ont une vue totalement diffrente de

    celle des membres du personnel. Petit petit, les diffrences

    sattnueront certainement. Les collaborateurs engags lheure

    actuelle ne portent pas les stigmates du pass, et a se sent.

    Circulation deux sens

    Mais revenons-en aux notions de culture dentreprise et

    dorganisation. Toute organisation a une srie de concepts et de

    valeu rs quelle juge fondamentaux. Certa ines entreprises et

    autres organisations les expriment par crit dans un mission

    statement. Un document de ce type peut reprsenter un atout

    pour une organisation, la condition dtre correctement impl-

    ment et dtre port par un nombre suffisant de collaborateurs.

    Et Vloeberghs de mettre en garde contre les systmes de com-

    munication sens unique de haut en bas et de plaider pour

    linstauration dune circulation deux sens. Il faut faire en

    sorte dtablir des interactions entre tous les acteurs de

    lorganisation afin quapparaissent rellement des valeurs qui

    soient partages globalement.Parfois, un mission statement nest rien de plus quun gadget de

    relations publiques. Dans dautres situations, il en va heureuse-

    ment tout autrement. Le gant amricain Johnson & Johnson, par

    exemple, a un credo qui stipule clairement la manire dont le

    groupe va sadresser aux clients, aux collaborateurs, la socit

    en gnral, etc. Llaboration dun mission statement nest perti-

    nente que dans la mesure o elle sinscrit dans un processus plus

    large tel que lorganisation va adapter sa st ratgie, dvelopper de

    nouveaux produits ou changer sa manire de grer le personnel.

    Selon Vloeberghs, le groupe brassicole de niveau mondial InBev

    (ex-Interbrew) est un excellent exemple dune organisation qui

    maintient ses valeurs sur les rails: videmment, InBev doit

    constamment les remettre lpreuve chaque fois quil rachte

    un nouveau brasseur. Il ne faut pas perdre de vue quil sagit

    chaque fois dun ancien concur rent.

    Le professeur Danil Vloeberghs (UA et KU Leuven):

    Faire en sorte dtablir des interactions entre tous les acteurs de

    lorganisation afin quapparaissent rellement des valeurs qui sontpartages globalement.

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    IBM en Microsoft

    Une culture dentreprise forte peut constituer un puissant atout

    pour une organisation. Tant que lenvironnement est en phase

    avec cette culture nuance-t-il : le gant de linformatique IBM

    possdait une culture affirme qui mettait laccent sur la fabrica-

    tion de mainframes et de processeurs puissants. Microsoft, le

    bb de Bill Gates, sest quant lui concentr ds le dpart sur le

    dveloppement de logiciels de qualit. IBM a d user plusieurs

    CEO pour parvenir rellement changer sa culture dentreprise.

    Ce changement tait plus que ncessaire car le monde avait

    grandement volu. Dans une tout autre branche, savoir celle

    de ldition et de limprimerie, le marasme a rgn en matre

    pendant longtemps. Les entreprises sadaptaient peu, ce qui a

    provoqu un dluge de faillites.

    Les cultures organisationnelles peuvent tre catgorises de

    toutes sortes de manires. Le scientifique amricain Charles

    Handy opre une distinction entre la culture du pouvoir, la cul-

    ture des rles, la culture oriente tches et la culture oriente

    individu. La plupart des organisations peuvent se ranger dans

    une de ces catgories.

    Beaucoup dentreprises familiales ont une culture du pouvoir

    explique Vloeberghs : Le pater familias engage et limoge les

    collaborateurs, il est une figure qui soccupe de tout et absolu-

    ment tout, et ce souvent jusquau plus bas de lchelle opration-nelle. De grandes entreprises comme Philips ou lancienne ITT

    Bell en taient des exemples typiques: ces socits taient forte-

    ment hirarchises et communiquaient essentiellement du haut

    vers le bas. Chez Philips, le patron, Jan Timmer, a fait en sorte que

    lentreprise se rforme pour devenir une organisation dont la

    culture met en avant les rles et les tches. Il est courant que les

    entreprises adaptent leurs cultures, ce qui est galement une

    ncessit. Feu John Goossens, par exemple, savait parfaitement

    bien quel point il lui fal lait sattaquer la cultu re dentreprise de

    Belgacom pour ladapter.

    Dans uneculture dentreprise oriente sur les tches, tous les col-

    laborateurs ont un travail prcis effectuer et tout ce qui entrave

    le processus de prise de dcision est cart. Sous la houlette de

    Jack Welch, General Electric tait un excellent exemple de ce

    type dorganisation.

    Une culture axe sur les rlesmet laccent sur laccomplissement

    de fonctions. Larme, la police, ainsi que les a nciens ministres

    hyper-compartiments en sont de parfaits exemples. explique

    le professeur Vloeberghs Les ministres fdraux ont cd laplace aux SPF, lesquels voluent davantage vers une culture

    oriente tches; ils sont plus axs sur les projets et rseaux et ont

    mis en place des systmes de mandats.

    Dans une culture axe sur les individus, comme cest le cas de

    nombreux cabinets davocats et de bureaux de conseil en

    management, les personnes voient dans lorganisation le moyen

    de concrtiser des objectifs personnels. Cest en se constituant

    chacun un rseau de clients propres que les associs contribuent

    la russite du partenariat. Dans les socits de consultance en

    management, on observe souvent que les cl ients sont lis tel ou

    tel consultant.

    Selon Vloeberghs, les cultures orientes tches et orientes indi-

    vidu ont connu ces dernires annes un essor certain: Le main-

    tien dune culture du pouvoir entrane des cots trop levs; de

    plus, ce type de culture est entach de manire inhrente dune

    lenteur et dune rigidit importantes.

    Le maintien dune culture du pouvoir entrane

    des cots trop levs; de plus, ce type de culture

    est entach de manire inhrente dune lenteur et

    dune rigidit importantes.

    DanilDanilVloeberghsDanil Vloeberghs est professeur luniversit dAnvers(facult des sciences conomiques appliques, dparte-ment management) et la KU Leuven (facult des

    sciences sociales, dpartement sciences de la commu-nication). Il est notamment titulaire des cours de GRH,HRM & Organisation, Organizational Behavior &Development, gestion des connaissances et descarrires, ainsi que communication dans les organisa-tions. Le professeur Vloeberghs travaille galementpour le compte de lIOB (Instituut voor Ontwikkelings-beleid), qui consacre lessentiel de ses activits laformation de cadres pour le Tiers-Monde. Actuellement,ses travaux de recherche portent principalement sur lagestion de la diversit, sur les carrires, sur le stress etla vie professionnelle en milieu universitaire, sur les

    ressources humaines, ainsi que sur le management dela communication.

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    Les enqutes dopinion

    Les surveys constituent des outils intressants pour prendre

    la temprature dune organisation, explique le professeur

    Vloeberghs: Tous les deux trois ans, les grandes entreprises

    organisent une grande enqute dopinion dans le but de senqurir

    de la satisfaction des collaborateurs concernant la direction, la

    communication, le niveau de participation dans le processus de

    dcision, la manire dvaluer, etc. Il est ensuite possible de con-

    fronter les rsultats obtenus avec lidal auquel aspire lorga-

    nisation. Au milieu des annes nonante, Alcatel a procd une

    enqute de ce type et en a t ir un grand nombre denseignements.

    De nombreux signaux permettent de remarquer quune culture

    dentreprise sest compltement gare: Les collaborateurs vont

    manifester leur mcontentement et une rsistance, active ou

    passive, peut se faire jour. Quand les gens commencent quitter

    le navire, cest quil y a quelque chose qui cloche. Dailleurs, ce

    sont souvent les meilleurs lments qui sen vont en premier lieu.

    Le constat quune culture sest fourvoye peut galement maner

    des rsultats commerciaux. En tout cas, il y a clairement un lien

    entre culture dentreprise et satisfaction des collaborateurs,dune part, et satisfaction de la clientle, dautre part.

    Et Vloeberghs de recommander dtre vigilant quant lopinion

    des clients au sujet de lorganisation: Quand lUA a fait raliser

    une tude portant sur son image extrieure, il est apparu que

    linstitution souffrait quelque peu de limage globale dAnvers en

    termes de situat ion politique et de problmes de mobilit. De son

    ct, la KUL a su faire montre dun profil nettement plus clair.

    Les valeurs douces

    Le modle traditionnel dit des 7 S peut savrer intressant pour

    susciter une prise de conscience propos de la notion de culture

    dentreprise. Les 7 S correspondent aux concepts de stratgie,

    de structure, de systme, de staff (personnel), de skills (aptitu-

    des), de style et de shared values (valeurs partages) et forment

    le canevas de base de ce modle. Tous ces lments doivent

    concorder de manire satisfaisante. Les managers sont la plupart

    du temps des fanas de chiffres et de statistiques, mme si lon

    observe actuellement que lon tend de plus en plus prendre en

    compte limportance des valeurs douces. Souvent, il faut ciblerdes valeurs a priori contradictoires. Le grand dfi est de dvelop-

    per une culture qui tienne compte dune pression accrue sur les

    cots tout en laissant suffisamment de place la flexibilit et

    linnovation.

    Selon le professeur Vloeberghs, il est bel et bien possible dinfluer

    sur la culture dentreprise: Souvent, les pres fondateurs ont

    fortement marqu la culture de lorganisation de leur empreinte

    et dans la plupart des cas, tout ce que les autres font, cest atten-

    dre quils sen aillent. Pour pouvoir agir sur la culture, il faut que

    ce que lon appelle la coalition dominante soit consciente de la

    ncessit de le faire. Lexemple de M. Timmer durant les annes

    nonante prouve que cela tait bel et bien possible chez Philips.

    Au sein de la chane de magasins de meubles Ikea, on peut voir

    que le fondateur, Ingvar Kamprad, exerait une grande influence

    sur la philosophie de lorganisation: parcimonie, modestie et

    sobrit taient des valeurs phares dans le groupe.

    En Belgique, larchtype de la figure fondatrice ultradominante

    est feu le Dr Paul Janssen, qui a marqu jamais la socit

    Janssen Pharmaceutica: Chez 3M, on observe galement la

    prdominance dune culture dentreprise affirme et le manage-

    ment de la socit fait tout pour maintenir cette culture en vie, et

    ce en dpit des nombreux changements auxquels lentreprise est

    confronte.

    Over my dead body

    Dans lancienne compagnie arienne Sabena, les syndicats tai-ent trs influents. Tant ces derniers que les pouvoirs publics

    portent une lourde responsabilit dans la droute de la compag-

    nie. dclare le professeur Vloeberghs Certaines volutions

    taient taboues dans cette socit, o rgnait la mentalit du

    'over my dead body'.

    Vloeberghs est par ailleu rs davis que, lorsque les dysfonction-

    nements sont imputables la cult ure dentreprise, il ne sert rien

    de faire venir des tas et des tas de consultants externes. Ce quil

    vaut mieux faire, cest faire appel aux forces disponibles en

    interne et ne faire entrer en fonction des consultants externes

    que de manire trs slective et sur base de conventions claire-

    ment dfinies. Ladministration de la Communaut flamande

    la bien compris.

    En outre, Vloeberghs trouve illusoire de chercher bricoler une

    culture dentreprise idale comme on le ferait avec une bote de

    Lego. La culture dentreprise idale nexiste tout simplement pas.

    La situation dans laquelle se trouve lentreprise est primordiale,

    tout comme la question de savoir quelle est la culture qui est aussi

    bien souhaitable que raliste. Si certaines valeurs ne sont pas por-tes par les membres de lorganisation, la rsistance sera forte. x

    Si certaines valeurs ne sont pas portes par les

    membres de lorganisation, la rsistance sera forte.

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    Des managers voquent les usages en cours dans leur organisation

    Ce nest que durant

    les priodes de tempteque lon mesure limportancede la culture dentreprise

    Une culture dentreprise, cest un peu comme le climat. explique Guido Mertens, responsable de lacommunication interne chez Dexia banque Vous ny faites pas attention en temps normal: cest lorsque

    la tempte clate que vous mesurez quel point la culture dentreprise est importante. ce sujet, un

    nombre incalculable de belles thories circulent mais, dans la pratique, comment la culture dentreprise

    apparat-elle au sein dune organisation? Le moment est venu de procder un 'reality check' des

    diffrents secteurs.

    Dossier

    DENISBOUWEN

    De gauche droite:Debout: Alain Nyssen, Christian Dierickx, Michel Vandermeulen, Peter H. Claes. Assis: Brigitte Loveniers, Guido Mertens.

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    Quels sont en fait les lments qui caractrisent la

    culture dans u ne organisation? Par qui ou par quoi la

    culture dentreprise est-elle dfinie?

    Notre entreprise emploie spcifiquement des gens qui aiment

    venir en aide aux autres. dclare Brigitte Loveniers, directrice

    des ressources humaines pour le Benelux chez Inter Partner

    Assistance Un fort lien de solidarit unit nos collaborateurs, y

    compris en cas de problmes relevant de la sphre prive. Dansle groupe Axa Assistance, auquel nous appartenons, des valeurs

    telles que le respect mutuel et le rejet du racisme sont fondamen-

    tales. Bien sr, il y a une marge entre la culture dentreprise id-

    ale et la ralit. Nous avons d endurer les invitables douleurs

    de croissance: Inter Partner Assistance tait autrefois une entre-

    prise traditionnelle, au caractre francophone bien ancr.

    Actuellement, lapport des Flama nds est nettement plus impor-

    tant et des Nerlandais sont galement prsents au sein de

    lorganisation. Lambiance sen ressent: la culture est dsormais

    plus directe et moins axe sur lvitement des conflits

    quauparavant. Je suis arrive chez Inter Partner Assistance il y a

    huit ans; ensemble, le directeur qui est arriv au mme moment

    que moi ainsi que moi-mme, nous avons marqu de notre

    empreinte la culture de lentreprise. Un nouveau directeur vient

    dentrer en fonction, ce qui entranera sans aucun doute de nou-

    veaux changements. Dans le cadre de notre fonction de manage-

    ment, nous voulons mieux structurer lentreprise, et cela suscite

    des rsistances.

    Dans certaines entreprises, on peut parler dune culture dentre-

    prise rsolument mise en avant. Christian Dierickx, responsa-ble des affaires gnrales chez Studiegroep Omgeving: Notre

    entreprise est une entreprise cooprative responsabilit limi-

    te (SCRL), ce qui rsulte dun choix dlibr. La structure dune

    SCRL permet de recruter de nouveaux cooprants ou dcarter

    certains autres aisment. Nous comptons non moins de

    19 cooprants ou associs (collaborateurs propres pour la plu-

    part) et il ny a pas dactionnaire principal. La formule nous aide

    renforcer la participation des collaborateurs et garantir la

    continuit. Studiegroep Omgeving est galement une entreprise

    caractre multidisciplinaire, ce qui implique que des experts

    aux bagages diffrents doivent tre en mesure de collaborer cor-

    rectement. Ce que nous voulons, ce sont des gens qui ont le sens

    du collectif; les lectrons libres ne sont pas les bienvenus.

    Lentreprise cultive une srie de valeurs que chacun doit partager.

    Contribuer lamlioration de lespace environnant est une notion

    que nous considrons comme constitutive de notre objet social.

    Lthique et la culture dentreprise vont souvent de pair.

    C. Dierickx: Lindpendance de notre organisation est un autre

    lment important de notre culture dentreprise: il nous est loisi-

    ble de refuser des missions lorsque nous ny adhrons pas. Nous

    voulons galement agir de manire consquente. Nos gom-

    tres, par exemple, niront jamais effectuer des mesurages dans

    des lotissements situs en zone verte. Nous promouvons gale-

    ment lusage des transports en commun parmi nos collabora-

    teurs. Le fait que nos bureaux se situent proximit de la gare

    dAnvers-Berchem nest pas li au hasard. Nous possdons des

    voitures de socit mais tout le monde na pas la facult de les

    utiliser. La direction ne dispose daucune voiture de socit. Le

    choix de ne pas construire et dopter pour la location et la rnova-tion dun btiment tait galement dlibr.

    Selon Guido Mertens, responsable de la communication inter-

    ne chez Dexia banque, la culture en place chez Dexia est moins

    facilement identifiable: Sur le plan de la culture dentreprise,

    nous naviguons pour ainsi dire entre deux eaux. Suite plusieurs

    oprations de fusion, diverses cultures dentreprise se rencon-

    trent et une nouvelle culture commune est appele merger

    progressivement. Bien videmment, il y a galement des diff-

    rences de culture entre notre rseau dagences et le sige central.

    Au sein du rseau, les collaborateurs sont fortement axs su r le

    rsultat, tandis quau sige central, la manire de travailler est

    plus axe sur les processus. Il sagit l dune situation typique des

    grosses botes comme Dexia. Dex ia et Bacob taient toutes deux

    fortement attaches une approche no-nonsense. Lancien

    Crdit communa l hbergeait bien entendu plusieurs gnrations

    de collaborateurs. Lancienne gnration a toujours en mmoire

    lpoque o la banque tait encore une institution publique. Le

    Crdit communal prsentait plusieurs traits lis la fonction

    publique, il tait pluraliste et linguistiquement paritaire. La nou-

    velle gnration, de son ct, a pris part la mise en place detoutes les oprations de rnovation; cette catgorie de collabora-

    BrigitteBrigitteLoveniersBrigitte Loveniers est la directrice des ressourceshumaines dInter Partner Assistance pour le Benelux.Dorigine espagnole, Inter Partner Assistance est uneentreprise spcialise dans lassistance offrant unevaste gamme de produits et services qui fait prsentpartie du gant franais Axa. Les 185 collaborateursdu Benelux gnrent un chiffre daffaires de 33 millionsdeuros. Nous appartenons un grand groupe maisnous fonctionnons comme une PME. dclareB. Loveniers.

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    teurs est nettement plus dynamique et, dans une certaine

    mesure, tire les anciens. Bacob relevait quant elle du mouve-

    ment ouvrier chrtien et avait un caractre flamand fortement

    ancr. Chez Bacob, les titres navaient nullement limportance

    quils avaient au Crdit communal, o la structure hirarchique

    prdominait largement.

    Axel Miller, le prsident du comit de direction, a fait procder

    une tude qualitative au sein du personnel. Il en est ressorti que

    les membres du personnel ntaient pas particul irement fiers de

    la nouvelle entreprise. La notion de fiert le cas chant tait

    plutt lie au pass. Limage des objectifs et des perspectives

    davenir lies notre banque et au Groupe Dexia auprs des col-

    laborateurs tait mauvaise. M. Miller a ds lors initi la mise en

    place dune toute nouvelle mentalit au sujet de notions telles

    que la mission, la vision et les valeurs de lentreprise. Les efforts

    mens au cours de ces trois dernires annes ont permis

    dinsuffler un nouvel lan au sein de la socit.

    Comparativement la situation complexe dun grand groupe, la

    culture qui rgne dans une entreprise familiale est beaucoup

    plus visible. Peter H. Claes, administrateur dlgu dIGO Post

    Belgique: IGO Post est la proprit dune famille nerlandaise.

    Les entreprises familiales ont leurs forces et leurs faiblesses.

    Chez nous, si vous navez aucun sentiment envers votre entre-

    prise, vous ne tenez pas le coup bien longtemps. Les filiales

    ltranger connaissent une rotation de personnel nettement plus

    importante que la maison mre aux Pays-Bas. Chez nous, le

    patriarche fondateur, un Nerlandais de 80 ans, continue dedfinir les lignes directrices gouvernant laction de chacun. Les

    Nerlandais sont des gens obstins, et ils ne sont pas les derniers

    le savoir. Les Belges ont un esprit pratique avant tout, ils

    naiment pas discuter beaucoup, tandis que les Nerlandais pr-

    frent lancer des ides en groupe avant de passer laction.

    Sur le plan culturel, je remarque quil y a souvent des frictions

    entre les collaborateurs commerciaux et les autres. Les collabo-

    rateurs qui nexercent pas de fonction commerciale ont en moy-

    enne 30 annes danciennet et rflchissent de manire trs

    conservatrice. Lorsque nous avons mis en place, il y a quelques

    annes, une forte automatisation, ce sont surtout les conserva-

    teurs qui ont eu du mal sy faire.

    lIWT (Instituut voor de Aanmoediging van Innovatie door

    Wetenschap en Technologie in Vlaanderen), latmosphre est prin-

    cipalement anime par le dynamisme et par lindpendance.

    Michel Vandermeulen, directeur du personnel et des affaires

    juridiquesexplique: Les termes cls de notre culture organisa-

    tionnelle sont: pragmatisme, crativit, professionnalisme et

    transparence. Nombre de nos collaborateurs sont issus du sec-

    teur priv et doivent sadapter la culture du service public; ilssont dailleurs parfois agrablement surpris. Nos 70 collabora-

    teurs disposant dune formation suprieure sont en permanence

    impliqus dans des projets de toutes sortes, et ce de manire

    dynamique et en fonction de leurs connaissances et disponibili-

    ts. Tantt ils doivent travailler de manire conceptuelle, tantt

    ils doivent se plonger dans des dossiers de PME ou de recherche

    fondamentale de doctorants, ou encore conseiller ou accompag-

    ner des consortiums dentreprises et autres centres consultatifs.

    Chez nous, vous ntes pas l pour rester plant sur votre chaise,

    ce qui suppose un haut niveau de crativit. Cela signifie que,

    dans la mesure du possible, nous cherchons toujours des solu-

    tions pour les entreprises qui font appel nos services. La poly-

    valence et lexpertise sont fondamentales. Les collaborateurs se

    forment beaucoup par eux-mmes et doivent sorganiser de

    manire optimale pour fournir les inputs voulus aux clients.

    Nous attendons donc galement de nos collaborateurs quils

    pilotent eux-mmes leur formation et quils prennent les initia-

    tives qui simposent.

    lIWT Nous avons relativement peu de rgles internes et la

    hirarchie est rduite au minimum; lIWT a un comit de direc-

    tion qui ne compte que quatre personnes et qui est charg de

    dfinir les priorits.

    La transparence est, elle aussi, un aspect important, dautant

    plus que nous fonctionnons avec largent du contribuable. Nous

    devons traiter tous les demandeurs de subsides de manire gale

    et nous devons toujours pouvoir justifier nos dcisions. LIWT

    nest pas une espce de Bancontact o lon retire de largent la

    va-vite.

    Notre cultu re a t clairement mise en place par les gens qui ont

    fond lIWT, en 1991. Notre fondateur, Paul Zeeuwts, estimaitquil tait important de ne jamais crer trop de structures. Au

    ChristianChristianDierickx

    Christian Dierickx est le responsable des affairesgnrales chez Studiegroep Omgeving, une PME ind-pendante active dans le secteur de larchitecture, de laplanification de lespace public et autres activits assi-miles. Lentreprise travaille en majeure partie pour lecompte de services publics et de socits de logementsocial. Lentreprise emploie 55 personnes et enregistreun chiffre daffaires denviron 3,1 millions deuros. Dansle cadre de ses fonctions, M. Dierickx est galement encharge des conventions de travail avec le personnel.

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    dbut, pour des motifs politiques, lInstitut a eu deux personnes

    sa tte, ce qui sest rvl catastrophique. un certain moment,

    cette situation a men lapparition dune vritable fracture cul-

    turelle au sein de linstitution.

    Le groupe Electrolux rsulte de plusieurs oprations de rachat.Chez nous, la culture dentreprise est donc en perptuel mouve-

    ment explique Alain Nyssen, manager du personnel chez

    Electrolux Home Products Belgium Au sein de la socit alle-

    mande AEG, trs guinde, on sadressait aux collaboratrices en

    utilisant le nom de leur conjoint. Chez nos collgues sudois ou

    allemands, les choses se passent de manire totalement diff-

    rente. Chez nous, ce sont les collaborateurs qui, consciemment

    ou non, font et diffusent la culture dentreprise. Souvent, la cul-

    ture est lie la personne qui dirige un dpartement. Au niveau

    mondial, Elect rolux emploie 80 000 personnes environ. Toutefois,

    au sein de la branche belge, nous avons davantage le sentiment

    de travailler dans une PME latmosphre familiale. Tout le

    monde sappelle par le prnom et, contrairement ce qui se pas-

    sait auparavant, les portes des managers sont toujours ouvertes

    chacun.

    Electrolux vise crer de la valeur pour ses actionnaires, satis-

    faire ses distributeurs et consommateurs finaux, ainsi qu tre

    une entreprise qui attire celles et ceux qui ont lesprit dentreprise.

    Notre ambition est daccrotre le niveau dimplication du person-

    nel et de rduire le taux dabsentisme. Nous voulons galementtre une organisation formatrice et mettre sur pied une stratgie

    de formation structure. En seulement quelques annes, notre

    budget formation a tripl. Nous avons galement recours aux

    entretiens dvaluation et aux enqutes de satisfaction mais ce

    sont des procdures auxquelles les gens doivent encore

    shabituer.

    La rotation de personnel est trs basse chez Electrolux, elle est si

    modeste que nous en arrivons mme nous faire du souci ce

    propos: un turn-over trop bas peut en effet mener des situations

    o sinstallent des routines difficiles chasser. Au moins un

    quart de notre personnel a plus de 50 ans.

    Comment la culture dentreprise se traduit-elle

    concrtement, notamment lorsquil sagit de recrutement et

    de slection ou de politique salariale?

    Sur le plan salarial, Inter Partner Assistance adopte une appro-

    che assez simple dclare Brigitte Loveniers: chaque anne,

    nous passons en revue avec les chefs de service la liste des colla-

    borateurs entrant en ligne de compte pour une augmentation de

    salaire. titre dexemple, je mne de prfrence moi-mme les

    entretiens de recrutement car jestime important dinformer cor-

    rectement les candidats propos de notre entreprise et de sa

    culture. Six mois aprs son entre en fonction, je menquiers

    mon tour auprs du nouvel arrivant de la mesure dans laquelle la

    ralit correspond ses attentes.

    lIWT, tout est connu davance. explique Michel Vandermeulen

    en riant LIWT engage ds lors des gens trs curieux. Lvaluationde collaborateurs disposant dune formation suprieure, parti-

    culirement dans une optique RH, est tout sauf simple, croyez-

    moi. Qui plus est, cest prcisment en raison de leur norme

    bagage quil est incroyablement difficile dvaluer nos experts de

    manire satisfaisante. Lorsquun manager doit valuer un expert,

    ce dernier va immdiatement taler sur la table des arguments

    en bton qui tayent sa vision des choses. De nombreux entre-

    tiens dvaluation se droulent donc de manire assez insatisfai-

    sante mais cest avec plaisir que je me dois de prciser que, de

    manire gnrale, nos collaborateurs fonctionnent plutt bien.

    Alain Nyssen est davis quil faut sattacher faire assimiler la

    culture idale dans tous ses aspects: Electrolux a dlibrment

    opt pour une augmentation des bnfices conjugue une

    rduction du chiffre daffaires. Le top management et les cadres

    moyens peroivent une rmunration partiellement variable. Ils

    sont tous jugs sur les mmes critres. Quoi quil en soit, une

    organisation a besoin de changement. Chez AEG, par exemple, il

    y avait auparava nt beaucoup de droits acquis.

    Chez Studiegroep Omgeving, le travail en quipe et louverture

    sont des lments majeurs de la cu lture de lentreprise. ChristianDierickx: Nous avons opt pour un modle fond sur la concer-

    GuidoGuidoMertensGuido Mertens est le responsable de la communicationinterne chez Dexia Banque, une institution bancaire quiprend en charge de nombreuses missions de finance-

    ment pour le compte de villes et communes. DexiaBanque compte 14 000 collaborateurs, parmi lesquelsquasiment 10 000 salaris; le reste des collaborateurssont indpendants ou figurent sur la liste des salarisdun des indpendants. Lancien Crdit communal a tprivatis durant les annes nonante, pour ensuite sas-socier au Crdit Local de France. Cest ainsi quest n leGroupe Dexia, qui sest retrouv propuls dans le top 25des banques europennes. Cest en 2001 que Bacob etArtesia ont t absorbes par le Groupe Dexia.

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    tation. Nos nouveaux collaborateurs sont, entre autres, slecti-

    onns en raison de leur team-spirit et nous les faisons travailler

    dans des bureaux non cloisonns, ce qui favorise la communica-

    tion, dans la mesure o chacun voit ce que ses collgues sont en

    train de faire. chaque tage de notre immeuble, nous dispo-

    sons de zones de discussion o les collaborateurs peuvent

    sasseoir autour de la table pour un brainstorming et, lors du

    temps de midi, nous organisons des lunch causeries permettant

    aux gens de parler de leu rs projets et de leurs problmes.

    Peut-on parler dune culture ayant 'force obligatoire titre

    gnral' o y a-t-il tout de mme des subcultures?

    Guido Mertens: Une culture dentreprise, cest un peu comme

    le climat. Vous ny faites pas attention en temps normal: cest

    lorsque la tempte clate que vous mesurez quel point la cul-

    ture dentreprise est importante. Personnellement, je considre

    la cultu re dentreprise comme tant le patrimoine psychologique

    de lentreprise. Les collaborateurs doivent tre disposs adh-

    rer aux valeurs de lentreprise, lesquelles doivent bien sr tre

    suffisamment en rapport avec les objectifs de celle-ci, sinon tout

    le monde sen moquera comme de lan quarante! titre dexemple,

    la manire doctroyer des crdits lhabitation peut varier dune

    banque lautre. Sur ce point, certaines banques accordent plus

    dautonomie que dautres aux agences. Nous nous penchons sur

    la question de savoir comment nous pouvons concrtiser au

    maximum notre vision dentreprise: cela est possible, par exem-

    ple, en se concentrant sur les moments cls des relations avec la

    clientle et des carrires de nos collaborateurs. Tout comme cela

    fait plaisir au client de voir que le personnel de sa banque le

    reconnat lorsquil passe lagence, les collaborateurs apprcient

    que leur suprieur les reconnaisse dans tous les sens du

    terme.

    Peter H.Peter H.ClaesPeter H. Claes est le directeur dIGO Post Belgique, unesocit de vente par correspondance, filiale dune mai-son nerlandaise. Cest il y a cinq ans que M. Claes estarriv dans la socit avec pour mission de fusionnerdeux socits actives dans notre pays. Actuellement,IGO Post compte toujours 18 collaborateurs en Belgiqueet son chiffre daffaires oscille entre 6,7 et 6,9 millionsdeuros. Au sein du groupe IGO Post, Peter H. Claes estgalement responsable de toutes les matires lies latlphonie et aux call centers.

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    IGO Post est prsent en Belgique, aux Pays-Bas, en France et en

    Allemag ne. explique Peter H. Claes Les diffrences que nous

    observons entre les diverses nationalits sont relles; cest ainsi

    que les Flamands constituent en eux-mmes une subculture.

    Concernant notre branche belge, nous travaillons de manire

    relativement autonome. Notre implantation sur en France est

    dirige par un Flamand qui doit encore demander un aval pour

    pas mal de choses, alors que, de son ct, mon collgue allemand

    nest pas encore en service depuis longtemps et ne peut pour

    linstant quasiment rien dcider tout seul.

    Une autre diffrence culturelle rside dans le foss gnration-

    nel qui spare les jeunes morveux des vieux qui nattendent

    qu partir la retraite. Par ailleurs, les syndicats sont quasi

    absents chez IGO Post, ce qui offre lavantage dune plus grande

    marge de manoeuvre. Malgr labsence de syndicats, les gens

    semblent bien se plaire chez nous. Moi-mme, je suis jug su r les

    rsultats, soyez-en sr.

    Michel Vandermeulen (IWT): Diffrentes subcultures coexi-

    stent au sein de lIWT: ct de nos 70 experts, il y a toujours

    50 collaborateurs qui raisonnent en termes de droits acquis. Il

    est frappant de constater que seuls 30 pour cent des chefs de

    service de ladministration flamande parviennent maintenir

    un certain quilibre entre vie prive et vie professionnelle; dans

    les fonctions dexcution, ils sont 80 pour cent y parvenir. Nos

    experts sont souvent contrai nts de raliser des tches dexcution

    eux-mmes sous peine quelles ne le soient pas. La double cul-

    ture qui rgne au sein de lIWT constitue donc en quelque sorte

    un problme. Nos collaborateurs excutants revendiquent leurdroit au travail temps partiel, au crdit-temps ou linterruption

    de carrire, tandis que les experts se comportent dune manire

    totalement diffrente cet gard."

    La dif frence entre les temps partiels et les plus que temps plein

    nest pas toujours envisage comme un problme. Chez

    Electrolux, un quart de notre personnel travaille temps partiel,

    ce qui nempche pas que notre entreprise fonctionne mieux

    quauparavant explique Alain Nyssen.

    Christian Dierickx: Jai pu mapercevoir que les gens qui tra-

    vaillent en quatre cinquimes temps effectuent bien souvent le

    travail de cinq jours en quatre jours. Le travail domicile et les

    technologies de linformation contribuent la flexibilit vis--vis

    des temps et des lieux de travail.

    Quelle est limportance de la communication interne dans la

    culture dentreprise?

    Alain Nyssen: Dans ce domaine, nous nen sommes quau stade

    initial. Dans certains cas, nous faisons en sorte quemploys et

    cadres suivent les formations ensemble. Nous expliquons nos

    collaborateurs que, en fait, ils ont pass un contrat avec les acti-

    onnaires. Au premier abord, cela peut paratre bizarre mais, par

    la suite, ils comprennent ce que nous voulons dire par l. Je suis

    tout fait partisan de lide que la communication interne doit

    soprer dans les deux sens. Nous communiquons de manire

    rgulire mais de faon judicieusement dose. Quand on veut

    que son message soit bien compris, il faut dabord savoir soi-

    mme ce que lon veut dire. Par ailleurs, vous ne devez pas don-

    ner trop dinformations, car alors, les gens vont commencer couter de manire slective. Par lintermdiaire de notre intra-

    net, nous avons mis en place un systme qui consiste publier

    tous les jours 1 highlight relatif des sujets tels que les affaires

    du personnel, la vente ou le marketing. La pratique nous enseig-

    ne que les collaborateurs consultent rgu lirement le contenu de

    lintranet.

    Guido Mertens tient toutefois mettre en garde contre une

    ventuelle surestimation de linfluence de la communication

    interne sur la culture: Je suis oppos la mthode qui consiste

    engloutir les gens sous des tonnes dinformations, mme si

    javoue que, da ns notre banque, nous sommes confronts un

    flux invraisemblable dinformations. Le rsultat de cette situati-

    on est que, aux yeux des gens, les arbres cachent la fort. La com-

    munication interne est, certes, importante mais il ne faut pas

    exagrer. En outre, les valeurs de lentreprise doivent tre portes

    de manire suffisante par tout le monde, y compris par le

    management, sinon, vous allez crier dans le dsert.

    Nos collaborateurs se plaignent de ce que la communication

    interne laisse dsirer et nous sommes conscients de devoirfournir des efforts supplmentaires dans ce domaine. Cependant,

    MichelMichelVandermeulenMichel Vandermeulen travaille lIWT (Instituut voorde Aanmoediging van Innovatie door Wetenschap enTechnologie in Vlaanderen) en tant que directeur dupersonnel et des affaires juridiques. LIWT est uneinstitution publique flamande cre en 1991 qui octroieun total denviron 250 millions deuros en subsides des entreprises et doctorants. Linstitut emploie120 personnes, dont 70 experts disposant dune

    formation suprieure.

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    il est parfois des circonstances qui rendent une communication

    rapide diffici le. explique Brigitte Loveniers I l marrive souvent

    de me faire des cheveux gris en cherchant savoir comment on

    peut amener les gens poser des questions aux cadres moyens

    lorsquils ne comprennent pas bien quelque chose. Dans la pra-

    tique, cela semble tre extrmement difficile.

    Peter H. Claes: Vous ne devez pas dire vos collaborateurs

    quils peuvent venir vous poser des questions: allez plutt vous-

    mme leur rencontre pour les informer. Les e-mails du patron

    filent la plupart du temps la corbeille; en tant que dirigeant,

    vous devez aller sur le terrain, vous devez descendre de votre

    tour divoire. Lorsque je me rends chez mes collgues nerlan-

    dais, la plupart des ouvriers me connaissent et cest ainsi quil

    doit en tre. Parfois, il est mme judicieux de doter un collabora-

    teur dune fonction dirigeante lorsque quil a une ide excellente.

    Michel Vandermeulen: Il y a un problme de circulation deux

    sens. Les mcanismes traditionnels (comme les briefings/dbrie-

    fings) sont insuffisants ou natteignent quune partie du person-

    nel. La communication face-to-face fonctionne de manire con-

    stante, certes, mais natteint pas tout le monde. Cest ainsi

    quapparaissent dans le dispositif dinformation les trous, mal-

    entendus, et autres lots. Dautre part, la communication interne

    nest pas chose facile dans une organisation ce point ouverte

    son environnement. Leffort en matire de communication inter-

    ne a vite tendance se limiter faire en sorte que les collabora-

    teurs soient au courant des nombreux changements, en omet-

    tant ce petit plus si ncessaire, savoir la question: pourquoifaisons-nous ce que nous faisons ensemble et comment allons-

    nous le faire dans un avenir proche?

    Quelle est votre qualit de vue de 'ce qui se passe sur le

    terrain'? Avez-vous parfois recours des enqutes internes

    pour prendre la temprature?

    Brigitte Loveniers: Au sein du groupe Axa, chaque anne, il est

    demand tout le monde de complter le Scope, une enqute de

    satisfaction. Depuis mai de cette anne, nous disposons dun

    baromtre social mensuel, un instrument qui nous permet de

    prendre le pouls de lambiance qui rgne au sein de la socit, de

    la collaboration entre services, de la communication et de

    lquilibre entre vie prive et vie professionnelle. Au dbut, 50

    60 pour cent des collaborateurs prenaient part ce baromtre

    social, un chiffre qui est dsormais tomb 40 pour cent. De

    toute faon, a ne changera rien, pensent les gens.

    De son ct, Dexia a galement recours aux enqutes de satisfac-

    tion. Guido Mertens: Tous les deux ans, nous menons une

    enqute relative la satisfaction de notre personnel. Nous nousenqurons galement du niveau de stress sur le lieu de travail et,

    dans le cadre de notre communication bottom-up, ont rguli-

    rement lieu des entrevues petit-djeuner.

    Le fait dinterroger de manire rcurrente le personnel fournit

    parfois des informations trs utiles.

    Michel Vandermeulen: Tous les deux ans, nous procdons

    une enqute relative aux rsultats du personnel (ERP), laquelle

    participent 65 pour cent des collaborateurs. Cest grce elle que

    nous avons pu dceler le problme de communication interne etdcouvrir dautres points ngatifs lments auxquels nous

    nous attelons maintenant.

    Chez Studiegroep Omgeving, le feed-back sorganise de manire

    plus informelle, explique Christian Dierickx: Notre entreprise

    est relativement petite. Chaque anne, nous menons des entre-

    tiens dvaluation et de fonctionnement, dont les rsultats sont

    communiqus aux administrateurs, qui peuvent galement sen

    servir dans le cadre de la politique salariale. Lorsque quelquun

    est augment ou ne lest pas, nous y exposons galement la rai-

    son. Chaque mois a lieu chez nous une sorte de happy hour qui

    permet aux gens de se dtendre autour dun verre.

    Alain Nyssen: Nos collaborateurs se voient prsenter une liste de

    24 questions standard. Notre exprience nous a permis de constater

    quun nombre croissant de collaborateurs compltent le question-

    naire. Chaque dpartement peut, par exemple, choisir un ou deux

    points et entreprendre des actions qui y sont lies. Je suis tout fait

    daccord avec lide que les managers doivent tre le plus possible

    prsents auprs de leurs collaborateurs. En ce qui me concerne, cela

    me rassure pleinement de savoir que notre dpartement RH est

    100 pour cent au courant de ce qui se passe au sein du personnel. 13

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    AlainAlainNyssenAlain Nyssen est le manager du personnel dElectroluxHome Products Belgium, une socit de distributiondappareils lectromnagers. Au fil des annes, le grou-pe sudois Electrolux a rachet des entreprises tellesque Zanussi, AEG et Zanker, ce qui lui a permis de se

    rendre compte par lui-mme de la difficult de fondrediffrentes cultures en un seul ensemble. Electroluxemploie 170 personnes en Belgique et le chiffre daffai-res annuel de la socit Electrolux Home ProductsBelgium oscille aux alentours de 100 millions deuros.

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    Dossier

    Alain DuchateletDirecteur Gnral des Ressources Humaines la Police fdrale

    La police fait plus querdiger des P-VLa rforme des polices de 2001 est lorigine de ce qui a peut-tre t une des plus grosses

    volutions sur le plan de la culture dentreprise en Belgique. Aujourdhui encore, la police intgre

    doit faire face un lourd hritage fait de diffrences sur le plan des antcdents, du statut du

    personnel, des mentalits, ainsi que des rmunrations. Alain Duchatelet, le directeur gnral dela Direction gnrale des ressources humaines de la Police fdrale, tient souligner que, ds le

    stade de la slection, laccent est mis sur les nouvelles valeurs de la police. Parce quun agent de

    police est plus que quelquun qui rdige des P-V: il ou elle est aussi quelquun qui doit prendre en

    charge des problmes et trouver des solutions.

    BERTCORNELIS

    Le service que dirige Alain Duchatelet soccupe des intrts du

    personnel et veille ce que chaque service de la Police fdrale

    puisse disposer de collaborateurs comptents. Ses attributions

    comprennent le recrutement, la slection, la formation, ainsi

    que la gestion des salaires du personnel. Par ailleurs, cette

    direction est galement charge des relations avec les syndi-

    cats, de la scurit au travail et du bien-tre du personnel.

    La Direction gnrale des ressources humaines est une des

    cinq directions gnrales de la Police fdrale, cre loccasion

    de la rforme des polices. lorigine de celle-ci, laffaire

    Dutroux, qui a mis en vidence le fait que les services de police

    indpendants (gendarmerie, police communale, police judi-

    ciaire...) continuaient de travailler sans coordination. Au tra-

    vers de laccord Octopus de 1998, le monde politique opta pour

    la formule dune seule police intgre. Dsormais, la police

    sarticule autour de deux niveaux: les brigades de gendarmerie

    et les corps de police communale forment la Police locale, tan-

    dis que la police judiciaire auprs les parquets et la gendarme-

    rie, brigades exceptes, forment dsormais la Police fdrale,

    laquelle prend galement en charge les missions supra-locales. Lensemble reprsente 39 000 policiers. Le service de

    Alain Duchatelet:Un bon leader, ce nest pas quelquun qui ne sait travailler quavecles bons. Un bon leader, cest quelquun qui est capable de faire du bon

    travail avec les gens qui sont sa disposition.

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    M. Duchatelet travaille galement au profit de la Police locale,

    principalement dans les domaines du recrutement, de la forma-

    tion, des relations syndicales, de la mobilit et du statut du per-

    sonnel. La direction gnrale des ressources humaines compte

    940 collaborateurs, coles de police incluses.

    Quels furent prcisment les changements sur le plan de la

    culture dentreprise lors du passage de la gendarmerie la

    police?

    Alain Duchatelet: nos yeux, la culture dentreprise constitue le

    ciment de lensemble de ldifice. Les valeurs, les normes, ainsi

    que le comportement que lon attend de la part des policiers en

    sont les principaux ingrdients. Pour lessentiel, les nouveauts

    relatives la culture dentreprise sont aujourdhui renfermes

    par les disposit ions de la loi sur la fonct ion de police. Tout a com-

    menc entre 1990 et 1992, avec la dmilitarisation de la gendar-

    merie. Cest lpoque que lon a commenc se pencher sur le

    rle et sur limage type de la police. Cette question tournait prin-

    cipalement autour des valeurs de la culture policire. La pre-

    mire diffrence rside dans le passage dune police qui ne fait

    que constater une police qui se charge galement de la rsolu-

    tion de problmes. Pour la gendarmerie, la loi existait pour elle-

    mme, on nallait jamais voir ce quil y avait derrire elle.

    Aujourdhui, la police ne peut plus se contenter de constater une

    infraction, elle doit galement aider rsoudre le problme, et ce

    dans lintrt gnral. Un deuxime changement fondamental

    rside dans les modalits rgissant le recours la violence: celui-ci est-il lgal, justifi? Est-il en rapport avec les valeurs que nous

    voulons dfendre? La lgalit, lopportunit et la proportionna-

    lit sont devenus les principes de base de lintervention policire.

    La 'nouvelle griffe' de la police a donc eu une grande

    influence sur le recrutement, sur la formation, ainsi que sur

    le recyclage du personnel...

    Alain Duchatelet: La formation est le premier levier qui permet

    dinduire le changement. Les profils et objectifs de la formation

    de base ont t redfinis en fonction des nouvelles valeurs.

    Cependant, tout commence au stade de la slection. Auparavant,

    le systme de recrutement tait calqu sur celui de larme.

    Laccent tait surtout mis sur le physique, au dtriment des qua-

    lits comportementales. Nous ne cherchons plus des gens prts

    se servir dune arme ou obir aveuglment en toutes circon-

    stances. Aujourdhui, nous sommes la recherche de gens capa-

    bles dvaluer une situation complexe avec sang-froid et assu-

    rance et dy ragir dans une optique de rsolution de problmes.

    Cet aspect a galement t insr dans la formation. La diff-

    rence daccent fait lobjet dune communication systmatique et

    est incluse dans le code de dontologie actuellement ngociavec les syndicats.

    Cest pour ceux qui taient dj en service avant la rforme des

    polices que le changement doit savrer le plus sensible.

    Alain Duchatelet: videmment. Mais nous prenons cette pro-

    blmatique en charge via la formation continue. Car des

    problmes subsistent relativement lintgration des diffrentes

    cultures dentreprise. Nous venons dune mosaque appele se

    transformer petit petit, en douceur, en tableau monochrome.

    Les objectifs sont dcrits dans les plans zonaux de scurit. Nous

    adoptons une approche essentiellement projectuelle pour que

    tout le monde se tourne vers la mme direction.

    Dans la nouvelle culture, le leadership fait galement lobjet

    dune interprtation nouvelle. ce sujet, on parle prsent

    'dun climat harmonieux entre le chef et son personnel'.

    Alain Duchatelet:La nouvelle approche implique une redfini-

    tion de la tche des chefs: ceux-ci doivent tre plus attentifs la

    manire dont fonctionne le personnel et cesser de sintresser

    uniquement au nombre dinterventions ou de P-V. Un chef ne

    peut se proccuper uniquement des rsultats, il doit galement

    sattacher aux comportements. Un bon leader, ce nest pas

    quelquun qui ne sait travailler quavec les bons. Un bon leader,cest quelquun qui est capable de faire du bon travail avec les

    gens qui sont sa d isposition.

    Comment cela se traduit-il dans lvaluation?

    Alain Duchatelet: Nous avons labor un nouveau systme

    dvaluation bas, entre autres, sur nos valeurs. Tout dabord,

    nous dfinissons le profil en fonction des tches de la personne

    concerne. Puis, nous voyons dans quelle mesure les valeurs sont

    respectes. Enfin, nous explicitons les attentes et les objectifs.

    Selon les valeurs, un fonctionnaire de police doit tre intgre

    et impartial, faire preuve dun comportement irrprochable,

    possder une bonne condition physique, tre toujours

    disponible et pouvoir travailler dans des circonstances

    dangereuses. En ce qui concerne les attitudes, on parle de

    solidarit, dincorruptibilit, de tolrance, de discrtion, de

    loyaut, dautodiscipline, de flexibilit, douverture, de

    motivation, de dynamisme, de crativit... Vous trouvez

    encore des candidats la fonction?

    Alain Duchatelet:Tout fait, nous oprons un screening laide

    dune batterie de tests largie que nous avons mise au point encollaboration avec les universits et qui repose sur une vingtaine

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    Nous sommes la recherche de gens

    capables dvaluer une situation complexe avec

    sang-froid et assurance.

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    de comptences. Ensuite, le candidat doit rpondre une srie

    de 300 questions. Puis viennent un assessment (prsentation

    individuelle, discussion collective et entretien caractre psy-

    chologique) et la slection mdicale. La procdure se clture

    avec une entrevue destine vrifier la manire dont quelquun

    ragit dans certaines circonstances. Exemple: vous tes en train

    de mener une perquisition avec un collgue et vous voyez quil

    drobe quelque chose; que faites-vous? Bien videmment, nous

    vrifions si quelquun a dj eu affaire la justice, ce qui ne veut

    toutefois pas dire que vous ne pouvez pas avoir dj eu une con-

    travention.

    Quel est le pourcentage de russite?

    Alain Duchatelet:Nous nous situons aux alentours de 10 pour

    cent: pour trouver 10 candidats adquats, il nous faut donc enre-

    gistrer 100 inscriptions aux preuves. La motivation est trs

    importante: si vous commencez ds le dbut avec un discours du

    style je viens la police parce que cest ma maman qui me la dit,

    vous ntes pas la personne que nous recherchons. Pour russir,

    une certaine maturit ainsi quun comportement stable sont

    impratifs. Les candidats trop jeunes ne font souvent pas face

    cette exigence et chouent aux preuves. Souvent, ils tentent

    nouveau leur chance par aprs et finissent par russir.

    La police cherche galement recruter des immigrs et des

    femmes. Y a-t-il des critres spcifiques pour ces catgories?

    Alain Duchatelet:: Absolument pas. Les critres sont identiques,

    tant en ce qui concerne le recrutement quen ce qui concerne

    lattribution des fonctions. Nous ne nous attacherons donc pas

    ce quun policier dorigine immigre soit en fonction dans un

    environnement o il a des immigrs. Cela serait tout aussi injus-

    tif i que le fait de confiner les femmes des tches moins lourdes

    comme, par exemple, laide la jeunesse. Pour la plupart, les

    femmes viennent dans la police parce quelles sont attires par

    laction; elles sont particulirement attires par la police de la

    route et par la cavalerie. Chez les immigrs, nous notons souvent

    des freins au fait de poser sa candidature la fonct ion de policier:

    ces gens proviennent souvent dun milieu o lautorit est consi-

    dre avec dfiance. Pour eux, le fait de devenir policier peut

    apparatre, en quelque sorte, comme une trahison. Un autre

    problme rside dans la connaissance de la langue mais ce point

    peut tre rencontr au moyen dune formation complmentaire.

    Nous devons faire passer le message suivant auprs de ces gens:

    ils sont les bienvenus chez nous pour devenir policiers part

    entire. Pour ce qui est du recrutement en lui-mme, nous tra-

    vaillons en collaboration avec des organes intermdiaires telsque les communes et les provinces.

    Trouvez-vous encore assez de femmes?

    Alain Duchatelet: Sans aucun doute. Nous parvenons atteind-

    re 30 pour cent dengagements fminins effectifs. Pour ce qui est

    des fonctions dirigeantes, ce chiffre atteint mme 45 pour cent,

    ce qui est une norme acceptable pour la police, dans la mesure

    o la profession comporte des risques. Cela sobserve galement

    dans le cadre de notre communication externe: vous pouvez voir

    quil y a toujours une femme et un immigr.

    Un problme que la rforme des polices trane comme un

    boulet est celui de luniformit des traitements. Vous vous

    attirez rgul irement les foudres des syndicats.

    Alain Duchatelet:Nous navons pas russi mettre au point un

    systme de rmunration uniforme comportant un volet fixe, un

    volet li la fonction et un volet li au comportement. Traiter tout

    le monde sur un pied dgalit ncessite la mise en place de

    mesures transitoires; on peut galement le constater dans le cas

    de fusions dentreprises. En fait, nous aurions d partir de zro.

    En termes de ressources humaines, nous sommes loin de nosobjectifs sur ce plan.

    AlainAlain

    DuchateletAlain Duchatelet (1944) est ce que lon peut appelerun gendarme de formation acadmique. Durant sestudes lcole royale militaire, il a suivi les cours decriminologie de luniversit de Gand, o il a obtenu sondiplme de licenci avec grande distinction. Il a par lasuite obtenu son diplme de licenci en droit de la VUB lissue dtudes suivies paralllement son serviceactif. Par ailleurs, il a fait carrire au sein du ministrede la dfense nationale, au service des statuts du per-sonnel de la gendarmerie. De 1986 1988 il a occup

    le poste dofficier de liaison au cabinet du ministre dela dfense nationale, pour devenir en 1988 officier deliaison au cabinet du ministre de lIntrieur. De juin 1996 avril 2004, il a occup la fonction de directeur gnraldes ressources humaines de la gendarmerie, puis de laPolice fdrale.Il a entam sa carrire professionnelle en 1968 commecommandant du premier peloton du deuxime escadronde la Lgion mobile, Bruxelles. Il a galement tcommandant de lcole de gendarmerie et professeur lcole royale militaire.

    x

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    Dossier

    Une organisation qui

    fabrique des produits

    innovants est-elle

    novatrice en termes de

    culture dentreprise?Lentreprise 3M sest

    classe deuxime au

    Top 10 amricain des

    entreprises les plus

    novatrices. Un brillant

    rsultat qui est le

    corollaire dune culture

    dentreprise qui vise innover non seulement

    dans les produits mais

    aussi dans les systmes

    et les processus.

    MIANELEN

    Culture dentreprise 3M

    Linnovationdans les

    produitset dans lesprocessusLe rouleau Scotch a dj 75 ans, tandis que le clbre jaune

    des tiquettes Post-it en est dj son 25me anniversaire. Ces

    produits sont probablement les plus connus dune vaste gamme

    principalement marque du sceau de linnovation dans les mat-

    riaux et les applications. Lentreprise 3M a galement remport la

    deuxime place, derrire Apple, du classement annuel des entre-

    prises les plus novatrices tabli par le Boston Consulting Group.

    Un rsultat quelle peut mettre lactif, notamment, du fait que

    ses travailleurs sont habilits mener eux-mmes des projets qui

    les inspirent. Un rsultat li galement aux possibilits de car-

    rire et lapproche Six Sigma, qui sont la base dune culturedentreprise ouverte linnovation.

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    Des carrires transversales

    The sky is the limit: ce slogan, peut-tre quelque peu ringard,

    reflte toujours parfaitement les opportunits quoffre une car-

    rire chez 3M. Le vice-prsident rgional pour lEurope, par

    exemple, est belge et a dmarr sa carrire comme laborantin

    sur le site de production de Zwijndrecht, prs dAnvers. Mais

    Romain Verdurmen, lactuel manager des ressources humai-

    nes, des affaires juridiques et de la logistique au sige princi-

    pal de Diegem, a, lui aussi parcouru un bon bout de chemin

    depuis son arrive au sein de la socit en 1976: Jai commenc

    comme analyste dinventaire Zwijndrecht mais, aprs seule-

    ment six mois, jtais dj superviseur Warehouse, Packaging

    & Distribution, avec une douzaine de collaborateurs sous ma

    responsabilit. Jai instaur les cercles de qualit et dispens

    des formations en vue denseigner cette approche dautres.

    Ces actions se sont tendues aux sessions de brainstorming et

    de training en communication. Cest ainsi que je suis devenu

    Trainer & Qualit y facilitator. Jai galement donn des formations

    dans dautres implantations du groupe, ce qui ma permis de me

    familiariser petit petit avec la totalit de lorganisation. Cest

    comme cela que M. Verdurmen sest retrouv avec un pied dans

    le monde des ressources humaines. En 1985, on lui demandait de

    prendre en charge la totalit de la gestion du personnel sur le site

    de production et, par la suite, il devait galement se voir offrir le

    poste de manager des ressources humaines de la branche ch imie

    pour lEurope. Grce son exprience des relations au travail enmilieu industriel, M. Verdurmen tait le chef de projet idal pour

    la mise sur pied dun conseil dentreprise europen version 3M,

    instaur en 1996.

    Chez 3M, le parcours de carrire est rsolument transversal.

    Romain Verdurmen: En 1997, jai t envoy pour deux ans au

    sige central, dans le Minnesota, en tant que manager des res-

    sources humaines pour les divisions Automotive et Mining, ainsi

    que pour le nouveau dpartement Marine. Une fois revenu en

    Belgique, on ma confi la responsabilit des ressources humai-

    nes pour les marchs europens des produits Medical, Traffic,Graphic and Safety. Par la suite, M. Verdurmen a t impliqu

    dans lintgration dunits reprises en Allemagne et en France

    ainsi que dans le dmantlement de lancienne division char-

    ge de la branche chimie. En 2001, il est devenu HR-operations

    manager pour lEurope et, dans ses fonctions actuelles, il assure

    la direction des services HR en Belgique, ainsi que du dparte-

    ment Facilities & Services Diegem, tout en tant responsable

    des contentieux juridiques pour 3M Belgium.

    Un terreau fertile pour tous

    Selon moi, il est vraiment exceptionnel de pouvoir se btir une

    carrire aussi complte sans devoir changer dentreprise. Ici, les

    opportunits sont lgion. Le fait de travailler dans un si grand

    nombre de pays, implantations et fonctions rend le travail int-

    ressant et vari et chaque jour apporte son lot de dfis., explique

    M. Verdurmen, qui note galement que Tout le monde ne se

    sent pas sa place dans cette entreprise: lors du recrutement,

    nous avertissons les nouveaux collaborateurs que nous atten-

    dons deux quils fassent preuve dun esprit dentreprise affirm

    et quils prennent eux-mmes les initiatives qui leur permettent

    daccomplir leur travail et dobtenir des rsultats. Il faut tre

    capable de grer une pareille libert.

    3M met tout en oeuvre pour que les nouvelles ides aient

    lopportunit de se traduire concrtement. Les systmes de

    botes ides et autres gadgets ont t rangs au placard en

    raison de leur caractre trop artificiel. Ce qui est bel et bien en

    vigueur, par contre, cest la rgle des quinze pour cent. RomainVerdurmen: Les collaborateurs scientifiques employs dans les

    laboratoires peuvent consacrer quinze pour cent de leur temps

    de travail des projets quils ont eux-mmes initis en raison du

    fait quils avaient dtect une possibilit dinnovation. Il peut

    sagir de nouveaux matriaux ou de nouvelles applications et les

    collaborateurs ne doivent pas rendre de compte par rapport ces

    activits. Le principe est tendu tous les niveaux et domaines,

    car au sein de chaque dpartement ou service, il est toujours

    possible de peaufiner les mthodes et processus pour travailler

    de manire sans cesse plus efficace. Le prcepte en vigueur cet

    gard est: il faut tendre faire toujours plus simple; moins les

    choses sont complexes dans leur conception, plus elles peuvent

    tre facilement mises en uvre, voire corriges au besoin. Toutes

    les ides peuvent tre discutes.

    Six Sigma

    Cette culture btie sur la stimulation et la libert ainsi que sur

    un climat ouvert et ax sur la communication suscite un flux

    dchange dinformations, de concertation, de runions et de

    dbats, ce qui nest pas sans entraner lapparition dun champde tension li la pression visant amliorer constamment les

    Le prcepte en vigueur est: il faut tendre

    faire toujours plus simple; moins les choses

    sont complexes dans leur conception, plus elles

    peuvent tre facilement mises en uvre, voire

    corriges au besoin. Toutes les ides peuvent

    tre discutes.

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    rsultats de la socit. Cest pourquoi, il y a quatre ans, la strat-

    gie Six Sigma a t introduite par W. James McNerney, le premier

    CEO engag en externe par 3M. Une analyse des forces et faibles-

    ses a en effet rvl que la culture familiale de la socit avait

    besoin de sang frais pour pouvoir faire face aux volutions du

    march. Lapproche Six Sigma a t mise en place par tout dans le

    groupe, dans le but de produire une amlioration des processus

    en mettant laccent sur les incitants de croissance, sur la rduc-

    tion des cots et sur laugmentation du cash-flow. (voir galement

    le texte contenu dans le cadre)

    Pour les managers 3M de lpoque, cette nouvelle approche, qui

    vhiculait un regard entirement neuf, na pas dclench un

    enthousiasme dmesur son arrive. Ceci dit, cela fait partie

    intgrante de notre culture de donner leur chance aux nou-

    veauts. souligne Romain Verdurmen Les managers ou, en

    jargon Six Sigma, Black Belts suivent un training aux tats-Unis.

    Ensuite, ils sont impliqus durant deux annes dans des projets

    qui nont pas forcment un lien avec leur ancienne fonction. Les

    techniques acquises sont mises en application en vue dapporter

    des amliorations aux processus et procdures. Les ides nouvel-

    les, cest trs bien; mais trop souvent, celles-ci restent trs floues

    car elles sont conues trop grande chelle. Cette approche per-

    met de rendre les ides plus claires et plus facilement uti lisables,

    tout comme elles peuvent susciter lenthousiasme des autres et

    se concrtiser de manire plus fructueuse. Lapproche Six Sigma

    se marque tous les chelons de lorganisation, dans toutes les

    divisions et dans toutes les rgions. Ceci a pour effet immdiat

    de crer un langage commun tous, que lon soit en fonction

    Hong-Kong, Diegem ou dans le Minnesota. Si vous examinez

    les rsultats concrets de la socit, vous pourrez voir que cette

    approche a dj port ses fruits.

    Le chaos organis

    Lvaluation annuelle qui est organise en ligne aborde entre

    autres les sujets de la contribution apporte lorganisation, des

    rsultats au travail, mais galement du dveloppement et des

    ambitions futures de la personne concerne. Celle-ci est inter-

    roge explicitement propos du premier job, du premier rle et

    du premier endroit qui lui viennent lesprit comme entrant

    dans le champ de ses propres possibilits. Et Roma in Verdurmen

    dexpliquer que ces donnes sont cha nges lors de runions de

    management team en vue de se faire une ide au sujet du poten-

    tiel futur en termes de leadership. Des qualits de leadership,

    telles que le fait davoir une vision et de pouvoir la communiquer,

    de pouvoir inspirer et impliquer ses collaborateurs, de produiredes rsultats, de faire preuve dune thique leve, etc. sont des

    caractristiques que nous nous attachons dceler le plus tt

    possible dans le courant de la carrire. Les collaborateurs

    concerns sont alors orients vers dautres missions afin quils

    puissent accumuler un maximum dexpriences varies pour

    que nous puissions au mieux mettre ces capacits profit pour

    leur dveloppement personnel et pour celui de lentreprise.

    Personnellement, la cinquantaine, je reste tout fait apte au

    service mais cela nempche pas que des successeurs aient dj

    t slectionns en vue de me remplacer. En gnral, un mana-

    ger noccupe un poste dtermin que pour trois ans environ,

    poste au sein duquel il peut engranger toute une srie de nouvel-

    les expriences. Parfois, il arrive que lon force le mouvement en

    vue de susciter lapparition de nouvelles opportunits. Selon

    notre manager des ressources humaines, le chaos organis

    serait le terme appropri pour caractriser la culture en place

    chez 3M: Cela veut dire: oser prendre des risques pour rendre

    linnovation possible, mais ce de manire suffisamment taye,

    en sappuyant sur une stratgie et des systmes de pilotage

    qui rduisent les risque dchec et accroissent les chances de

    succs. x

    Lapproche Six Sigma est considre comme unemthode de management de la qualit souvent assimi-le au successeur du TQM, avec une gestion statistiquedes processus en guise de mthodique sous-jacente.La force de cette dmarche rside en cinq lments:des dcisions bases sur des faits, une approcheprojectuelle la structure fixe, des quipes de projetsdont les membres sont correctement forms, la miseen avant de la rduction des cots, des attentes desclients et des priorits pour le management.On ne peut matriser correctement les processus que

    si lon sait comment se droule chacun dentre eux.Savoir, cest mesurer: telle est la base de la dmar-che Six Sigma. Paralllement est mise en uvre unemthodique fixe permettant de perfectionner lesprocessus industriel, savoir le DMAIC: Define-Measure-Analyze-Improve-Control.En outre, Six Sigma renferme galement une orien-tation client affirme en prescrivant, notamment, demener un travail de recherche au sujet des attentesprcises des clients. Ces exigences forment les limitesqui encadrent un produit ou un service au sein dunprocessus industriel.

    Dans sa formule classique, le Six Sigma repose sur uneorganisation spcifique comprenant, entre autres, desBlack et des Green Belts. Les Black Belts sont ceux quitirent les diffrents projets, tandis que les Green Beltssont ceux qui leur viennent en aide pour ce faire.

    Six Sigma:quest-ce que cest?

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    Est ouest

    20

    Des clichs dmods

    Je pourrais entamer ce billet en passant en revue les lieux

    communs sur la culture dentreprise la chinoise, expli-

    quer comment celle-ci, aujourdhui, continue dtre enve-

    loppe dun voile de mystre et exposer la manire dont

    elle repose sur le bagage culturel des Chinois. Jaurais pu,

    en effet, dire quel point les valeurs du confucianisme

    continuent marquer de leur empreinte les entreprises

    chinoises et dbouchent sur un style de management cen-

    tralis, paternaliste et clos. Jaurais aussi pu voquer

    limportance des relations personnelles dans les affaires,

    celle des fameux guanxi, ces personnages issus du mme

    hameau, de la mme universit et qui, parfois, portent le

    mme nom de famille et sont dfinitivement lis les uns

    aux autres.

    Jaurais pu aborder ensuite les us et coutumes des entrepri-

    ses et managers chinois en matire de ngociations, parler

    de la prsence dans les affaires du prcepte de matre Sun,qui commande dviter la confrontation directe avec

    ladversaire: il y a 2500 ans de cela, en effet, dans son livre

    intitul lart de la guerre, matre Sun couchait sur papier

    des formules et perspectives stratgiques permettant

    dviter le confl it et de dfaire un adversaire par la tactique,

    sans devoir livrer bataille. Aujourdhui encore, sa maxime

    la meilleure guerre est celle que lon remporte sans com-

    battre reste la lumire qui guide les chefs dentreprises

    chinois, dont le style est discret, indirect et, surtout, ax sur

    labsence de confrontat ion.

    Vous voulez un cas dcole? Regardez donc la toute nou-

    velle version chinoise de la srie de tlralit The

    Apprentice. Dans cette mission, des cand idats se

    mesurent les uns aux autres avec pour enjeu un emploi

    dans la socit immobilire SOHO China de Pan Shiyi, un

    brillant agent immobilier de Pkin. Voyez donc: ici, Pan

    Shiyi nemploie pas les trois fameux mots you are fired de

    Donald Trump pour dbouter les candidats. Aux candidats

    malheureux, il sort plutt des formules du style Selon moi,

    vous vous panouiriez mieux dans une autre entreprise.

    ou mon avis, vos atouts pourraient mieux convenir unautre secteur. Moins de confrontation, plus de subtilit.

    Mais selon Vincent Lo Hong-shui, un autre agent immobi-

    lier de renom originaire, lui, de Hong-Kong, tout cela nest

    pas encore assez raffin. Il estime en effet que dans The

    Apprentice, les candidats dfaits perdent encore trop la

    face. En outre, il est davis que les tlspectateurs chinois

    ne peuvent apprcier une telle culture dentreprise. Pour

    ces deux motifs et peut-tre aussi en raison du fait quil

    sest engag dans une lutte commerciale sans merci avec

    Donald Trump pour lachat dun bout de terrain New

    York , il est devenu le sponsor dune variante de ce jeu

    intitule Le plus malin raflera tout. Lenjeu de cette mis-

    sion est bien plus ducatif et consiste donner de jeunesChinois une chance de faire leurs preuves en tant que chef

    E

    st

    Nathalie

    de

    spiegeleire

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    dentreprise. Dans le jeu, deux quipes doivent mener bien des

    missions daffaires sous lil critique dun jury spcialis com-

    pos de clbres professeurs de business schools, acteurs du

    capital risque, spcialistes en ressources humaines, consul-

    tants en management et autres figures en vogue fameuses pour

    leurs success stories dans le monde de lentreprise. Les missions

    ne forment que la premire partie de lmission. Pendant la

    seconde partie, les membres du jury peuvent sexprimer en long

    et en large quant aux points forts et aux points faibles des busi-

    ness plans qui leur ont t soumis. En fin de compte, le vainqueur

    de la srie remporte une somme destine lui servir de capital

    de dpart pour mettre en uvre ses plans daffaires. Beaucoup

    plus subtil, beaucoup plus ducatif, et moins direct. Une formule

    qui devrait mieux convenir la culture dentreprise version

    chinoise.

    Un billet sur la culture dentreprise chinoise pourrait encore

    davantage creuser la question en exposant tout un arsenal argu-

    mentatif reprenant les motivations historiques du bagage poli-

    tique que vhiculent grand nombre dentreprises chinoises. Je

    pourrais galement mattarder sur linfluence omnipotente du

    parti communiste, non seulement au sein des entreprises

    publiques mais aussi dans les entreprises prives. En effet, dans

    les entreprises publiques, ce sont les dlgus du Parti qui tirent

    les ficelles, et pas le management qui tient les rnes. Ce sont eux

    qui prennent les dcisions finales, qui tranchent les dilemmes. Et

    en dpit de la diminution drastique du poids de ces entreprises

    lchelle de lconomie chinoise elles ne reprsentent plusquun quart de la production gnre par lconomie nationale

    et du fait que le secteur priv joue dsormais dans la stratosphre,

    le Parti communiste demeure omniprsent dans la culture

    dentreprise chinoise. En 2003, les entrepreneurs privs ont reu

    lautorisation de saffilier au Parti communiste. Depuis lors, ce

    dernier ne compte plus ses nouveaux membres.

    Mon billet pourrait sattarder galement sur la dlicate question

    politique de la corruption dans ladministration et expliquer

    quel point ce flau sest rig en composante part entire de la

    structure entrepreneuriale chinoise, il pourrait voquer, par

    exemple, comment les sommes destines acheter des fonction-

    naires sont comptabilises comme frais ncessaires dans les

    business plans. Et rapporter que, selon un diteur chinois, les

    dessous de table verser pour lobtention dune licence de jeux en

    ligne oscillent entre 35000 et 80000 euros.

    En guise de conclusion, ce billet pourrait galement parler du fait

    que la culture dentreprise chinoise est davantage base sur la

    confiance que sur des dispositifs lgaux, du fait quintenter une

    action en justice pour non-respect daccords conclus est plus

    peru comme lchec de la construction dune relation de con-

    fiance que comme une solution possible un problme.

    Mais un tel bi llet ferait injure la ralit du monde de lentreprise

    en Chine. Au cours des dernires dcennies, la culture

    dentreprise y a pris des tournures bien plus positives. Bon nom-

    bre de ces clichs restent peut-tre valables dans des PME rele-

    vant de secteurs connaissant une croissance plus lente mais,

    dans leur majorit, les entreprises chinoises ont mri, elles se

    sont professionnalises; la qualit, la comptence et lefficacit y

    rgnent en matres et il ny a que peu de place pour le npotisme,

    la corruption et lincomptence. La culture traditionnelle reste

    prsente... tant quelle ne rogne pas les ma rges bnficiaires de la

    socit.

    Quand on considre, par exemple, la propension des jeunes tra-

    vail leurs chinois possdant une formation suprieure changer

    de travail, on ne peut que se dire que le facteur guanxi seffiloche

    et perd de son importance dans les choix de carrire des jeunesChinois. Mais lexemple avec un grand E reste celui de Pan Shiyi,

    notre fameux agent immobilier pkinois. Alors que, dans son

    show tlvisuel The Apprentice, il sattache traiter les candi-

    dats perdants de manire disons plus dlicate que Donald

    Trump dans la version amricaine, il est clbre en Chine pour

    son style de management rude et direct: depuis 1995, tous les

    3 mois, il licencie du jour au lendemain celui ou celle parmi ses

    vendeurs qui prsente les plus mauvais rsultats, tandis quil

    accorde une grosse promotion au meilleur dentre eux. x

    Bio

    Est ouestNathalie De SpiegeleireNathalie De Spiegeleire est sinologue. Elle travaillepour le compte du Conseil conomique et socialBelgique-Chine (BCECC) Bruxelles. Les opinionsexprimes dans le prsent billet ne refltent pasncessairement les positions du BCECC.

    Jacqueline GoossensJacqueline Goossens a grandi en Flandre Occidentale.Elle a dmnag New-York en 1980 do elle observe,crit et parle pour De Morgen, Knack Weekend et laVRT (radio).

  • 7/24/2019 11_RH

    24/42

    Dossieroost westoost west

    22

    Cela peut tre agrable de travailler pour une entreprise

    amricaine. condition de possder des qualifications

    recherches sur le march. Cest le cas de mon ami Josh,qui dcrit sa fonction au sein de la socit de mdias

    Burrelles comme tant celle dun architecte de logiciels.

    Jai un bon salaire explique Josh et mon patron nest

    pas tout le temps en train de me harceler; cest quelquun

    qui comprend que quand le personnel est entour de

    chiens de garde, i l sen va voir ail leurs. L nest pas

    lintention de Josh, mme sil a perdu le privilge qui tait

    la base de son arrive chez Burrelles. Javais le choix

    entre plusieurs entreprises. poursuit-il Jai choisi

    Burrelles parce que cette socit me permettait de travail-

    ler domicile. Cependant, une semaine aprs la naissan-

    ce de ma fille Sophie, on ma dit que jallais devoir venir

    travailler dans les locaux de la socit.

    Le genre de dcisions qui donnent de lurticaire Paul

    Graham, fondateur de la socit de services en ligne

    Viaweb et inventeur dun systme de filt re antispam, qui

    est un partisan inconditionnel de la nouvelle culture

    dentreprise, rendue selon lui possible et ncessaire par

    Internet. Avant quil ne revende sa socit au gant

    Yahoo!, tous les membres de son personnel pouvaient tra-vail ler l o et quand bon leur semblait, tant que le trava il

    tait bien fait. Paul Graham: Dans la plupart des

    bureaux, le groupe des travailleurs dont la prsence est

    rellement ncessaire est trs rduit. Le motif qui justifiela prsence obligatoire des collaborateurs au bureau des

    heures fixes est que lentreprise est incapable de mesurer

    leur productivit. Lide est la suivante: si de toute faon

    on ne peut obliger son personnel travailler, on peut en

    tout cas toujours lempcher de samuser. Mais selon

    M. Graham, un manager avis a tout intrt laisser faire

    ceux parmi ses collaborateurs qui prfrent travailler

    domicile, car quand on prend plus de plaisir son travail,

    on travaille mieux. Jim Collins, le gourou du manage-

    ment, est galement davis que la nouvelle culture

    dentreprise repose sur la confiance. Dans son livre De la

    performance lexcellence: Devenir une entreprise lea-

    der, il crit: Si vous devez tenir quelquun lil, alors

    cest que cette personne nest pas fa ite pour vous.

    Toujours selon lui, les formes traditionnelles de contrle

    ne gnrent quune illusion de contrle. son avis, ce qui

    rend les entreprises performantes, cest une stratgie de

    recrutement parfaitement calibre. La cl se trouve dans

    la capacit attirer les talents. Pas les gnies, toutefois,

    car ceux-ci sont trop individualistes. Non, des gens cra-

    tifs, dous pour le travail en quipe et que le team-spiritpousse sinvestir. Sur ce plan, le manager de Josh nest

    o

    uest

    est ouest

    Jacqu