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OFFENBACH N° 37 Le Barbier de Séville Le Barbier de Séville Avant Scène OPÉRA asopera.fr ROSSINI Extraits audio avec l’appli ASOpéra

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Prix : 25 €ISBN 978-2-84385-496-5

www.asopera.fr

Sommaire

-:HSMIOD=]ZY^[Z:Avec le soutien du

L’ŒUVRE

3 Points de repères

Chantal Cazaux 8 Argument

10 Introduction1. Les ingrédients du succès

Chantal Cazaux 2. Une modernité vivifiante

3. Une vocalité tonique

18 Guide d’écoute

Cesare Sterbini 19 Livret intégral original

Laurent Cantagrel 19 Nouvelle traduction française

Jean-Alexandre Ménétrier 104 La folie organisée

Rodolfo Celletti 110 L’art de déplacer les cartes

Alberto Zedda 114 Pourquoi «édition critique»?

Jacques Gheusi 116 D’une Rosina à l’autre

REGARDS SUR L’ŒUVRE

ÉCOUTER, VOIR ET LIRE

Le Barbier de Séville

Extraits audioavec l’appli ASOpéra

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37

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OFFENBACH

N° 37

Le Barbier de SévilleLe Barbier de Séville

AvantScèneOPÉRAasopera.fr

ROSSINI

Extraits audioavec l’appliASOpéra

Jean Cabourg 122 Discographie

Alfred Caron 138 Vidéographie

Olivia Pfender 148 L’œuvre à l’afficheLe Barbier de Séville à travers le monde (2005-2020)

Chantal Cazaux 106 Bibliographie

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’-wèwUtxnaÈUo�VR)Ewest éditée par

les Éditions Premières LogesSARL au capital de 34 600 eurosdont le siège social est sis

15, rue Tiquetonne 75002 Parisreprésentées par

Frédéric Mériot, Gérant.Associé Unique : Humensis, SAdont le siège social est sis

170 bis, boulevard du Montparnasse75014 Paris www.humensis.comDirecteur général : Frédéric Mériot

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Directeur de la publication :pJyuyJcz�ŒyJcGZ

Directeur de la rédaction :Œcz0Aé�RhÉuJG

Rédactrice en chef : a0hqZhé�ahÉh«D

Secrétaire de rédaction :Véc»ch�RgAquAJ

aGqMAcééAJM�uA�éh�JyuhzZcGq 4Louis Bilodeau, Jean-Michel Brèque,Jean Cabourg, Hélène Cao, Sandro Cometta, Gérard Condé, Joël-Marie Fauquet, Pierre Flinois, Jean-Charles Hoffelé, André Lischke,Pierre Michot, Giuseppe Montemagno,Alain Perroux, Timothée Picard, Pierre Rigaudière, Olivier Rouvière, Didier van Moere, Jean-Claude Yon

Conseil graphique: ŒhDAqzA�nz0AJgGravure musicale: ’h«JAqzA�wJuG«cq

Abonnements, service aux librairesvente par correspondance :UhucqA�sAlJhàLundi – jeudi 9h-13h /14h-17hVendredi 9h-13h

scMZJcl«ZA«J�Aq�pJhqzA�4�dsscMZJcl«ZA«J�Aq�n«cMMA4�w«éGMxŒ«Mczh1204 Genève +41 22 320 72 70 [email protected]«ZA«J�h«�ahqhuh�4�RJGéG1«A

mvbJAMMcGq4 Imprimerie SEPEC1, rue de Prony 01960 Peronnas

syb°Z�éy1hé : 4e trimestre 2019

.cvAMZJcAé�qœ�I91re éd. : 11/1981 / 2e éd. : 11/1989 / 3e éd. :3/1996 / 4e éd. : 5/2005 / Nouv. éd. : 11/2019

mnnU� 58Bx2I92ISBN 978-2-84385-496-5

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L’AVANT-SCÈNE OPÉRA N° 37 3

Points de repères

Une intrigue toute simple…

Un vieillard amoureux prétend épouser demainsa pupille. Un jeune amant plus adroit le prendde vitesse et le jour même en fait sa femme – dansla maison du tuteur et à sa barbe… grâce à sonbarbier. L’action est en deux actes, en formed’opera buffa, inspirée par la célèbre pièce ho-monyme de Beaumarchais écrite en 1775.

Lire l’argument par Chantal Cazaux, p. 8

Le plus célèbre fiasco

On a beaucoup brodé sur la désastreuse première soirée du Bar-bier, au Teatro Argentina de Rome, fiasco qui semble incroyablequand on songe à l’invention mélodique de l’œuvre, à son ir-résistible brio. Se peut-il que les spectateurs du premier soir aientété à ce point bornés ou sourds?

Lire le guide d’écoute de Chantal Cazaux, p. 10-102

et l’étude d’Alberto Zedda, p. 114

Le vrai moteur de la comédie

L’amour entre Rosine et le comte Almaviva se nourrit à dis-tance, par des billets, ambassades, sérénades, allusions ges-tuelles ou à mots couverts, contacts rapides et craintifs. Lesdeux jeunes gens ne se retrouvent seuls que par instants, leurdiscours amoureux se construit par fragments, déductions ouémotions indirectes… et cède le premier plan à une critique so-ciale naissante.

Lire l’étude de Rodolfo Celletti, p. 110

Ci-dessus :

LA LEÇON DE MUSIQUE.Lithographie deLemercier, 1830.Paris, BnF, Bibliothèque-Musée de l'Opéra.

En couverture :

Stéphanie d’Oustrac(Rosina) et ThomasDolié (Figaro), mise enscène de Joan Font,Opéra national deBordeaux 2012.Guillaume Bonnaud.

En page de gauche :

Henriette Sontag(Rosina) à Londres en1849. Lithographie de J. Brandard. Coll. Jacques Gheusi.

Numéro connecté avec notre appli ASOpéraASOpéra :

Flashez les pages marquées de son logo etdécouvrez les contenus enrichis (extraits audio, etc.).

Tous les détails en p. 159

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Figaro est-il barbier ?

Figaro est pluriel : homme du peuple ingé-nieux, il est le factotum de la ville – à ce titre,il a ses entrées chez les notables, suit de prèsles intrigues de la société, et les sert par inté-rêt. Marieur, insolent, dévoué quand il le veutbien : tel est ce « Figaro», dont l’étymologiepossible du nom révèle en partie le caractère(en espagnol, fripon se dit « pícaro», et l’ex-pression « faire la figue», c’est-à-dire se mo-quer, aurait pu influencer la première lettre…).

Lire le livret de Cesare Sterbini et sa traduction par Laurent Cantagrel, p. 19-101

Écrit en quinze jours…

... Le Barbier de Séville est pourtant l’un destitres les plus célèbres de l’opéra italien. De-puis sa création en 1816, il n’a jamais quitté lascène, et ceci malgré une foule de questions

qui entourent son interprétation: les voix le mieux adaptées auxdifférents rôles, la mise en scène la plus appropriée, le genred’ornementation vocale à utiliser…

Lire l’étude de Jacques Gheusi, p. 116

Un compositeur qui va crescendo

«Sans l’invasion des Français en Italie, j’aurais été probablementpharmacien ou marchand d’huile», dira plus tard le composi-teur. Quand il vient au monde, en 1792, la monarchie en Franceest à l’agonie. Il s’est offert le luxe rare de naître un 29 février(si bien qu’on ne fêtera son anniversaire qu’une fois tous lesquatre ans) et de mourir un vendredi 13, à Paris, sous le règned’un autre Bonaparte. Plusieurs villes peuvent réclamer sa pa-ternité : ainsi Pesaro, patrie de sa mère, bourgade de l’Adria-tique où il est né ; Bologne, où il grandira et fera ses études ;enfin Lugo, en Romagne...

Lire l’étude de Jean-Alexandre Ménétrier, p. 104

4 L’AVANT-SCÈNE OPÉRA N° 37

POINTS DE REPÈRES

Rosina dans la pièce deBeaumarchais, par ÉmileBayard. D.R.

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Au disque et à l’écran

La discographie du Barbier de Séville est aujourd'hui riche dequelque 55 intégrales ; sa vidéographie, désormais de 17 ver-sions! Les plus grands ténors di grazia, les plus grands sopra-nos et mezzos de chaque époque et les plus grands barytonsont voulu marquer les rôles respectifs d’Almaviva, de Rosina etde Figaro, pour le meilleur et pour le pire… et dans les misesen scène les plus variées, où Séville se pare d’atours variables.

Lire la Discographie de Jean Cabourg, p. 122

et la Vidéographie d’Alfred Caron, p. 138

L’AVANT-SCÈNE OPÉRA N° 37 5

POINTS DE REPÈRES

Costume de Mlle Sontag (Rosine) et de Santini (Figaro) pour LE BARBIER DE SÉVILLE au Théâtre des Italiens, Paris 1828. Lithographie de Louis Maleuvre. Paris, BnF.

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6 L’AVANT-SCÈNE OPÉRA N° 37

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L’AVANT-SCÈNE OPÉRA N° 37 7

Le Barbier de SévilleTitre original : Almaviva ossia L’inutile precauzione (Il barbiere di Siviglia)

Melodramma buffo en deux actes

Musique de Gioachino Rossini (1792-1868)Création : Teatro Argentina, Rome, 20 février 1816

PersonnagesLe comte Almaviva, ténorBartolo, docteur en médecine, basseRosina, pupille de Bartolo, mezzo-sopranoFigaro, barbier, barytonBasilio, maître de musique, basseFiorello, domestique d’Almaviva, barytonAmbrogio, domestique de Bartolo, basseBerta, femme de chambre de Bartolo, sopranoUn alcade, basseUn notaire, rôle muetAlguazils, musiciens

L’action se passe à Séville.

Personaggiil Conte d’Almaviva, tenore

Bartolo, dottore in medicina, bassoRosina, pupilla di Bartolo, mezzosoprano

Figaro, barbiere, baritonoBasilio, maestro di musica, basso

Fiorello, servitore d’Almaviva, baritonoAmbrogio, servitore di Bartolo, bassoBerta, cameriera di Bartolo, soprano

un Ufficiale, bassoun Notaio, ruolo muto

Soldati, Suonatori

La scena si rappresenta in Siviglia.

Livret de Cesare Sterbinid’après la comédie Le Barbier de Séville ou La Précaution inutile (1775)

de Pierre-Augustin Caron de BeaumarchaisTexte italien intégral conforme à l’édition critique de la partition publiée par Alberto Zedda

© G. Ricordi, Milan 1969

Nouvelle traduction française de Laurent Cantagrel© L’Avant-Scène Opéra 2019

Introduction historique et Guide d’écoute de Chantal Cazaux© L’Avant-Scène Opéra 2005, 2019

En page de gauche:Carlos Chausson (Bartolo), Sophie Koch (Rosina), Dalibor Jenis (Figaro) et Bruce Ford (Almaviva), Opéra de Paris, Opéra Bastille 2002. OnP, Bastille.

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32 L’AVANT-SCÈNE OPÉRA N° 37

GUIDE D’ÉCOUTE

108CONTEEbben, proviamo.(Prende la chitarra e canta accompagnandosi.)

N° 3. Canzone109CONTESe il mio nome saper voi bramate,dal mio labbro il mio nome ascoltate.Io son Lindoroche fido v’adoro,che sposa vi bramo,che a nome vi chiamo,di voi sempre parlando cosìdall’aurora al tramonto del dì.(Di dentro si sente la voce di Rosina ripetere il ritornellodella canzone.)

110ROSINASegui, o caro, deh segui così !

111FIGAROSentite ?... Ah che vi pare?

112CONTEOh me felice !

LE COMTED’accord, essayons.(Il prend la guitare et chante en s’accompagnant.)

N° 3. Chanson LE COMTESi vous désirez connaître mon nom,Apprenez-le de mes lèvres.Je suis Lindoro,Qui fidèle vous adore,Qui pour épouse vous désire,Qui par votre nom vous appelle,Parlant de vous toujours ainsi De l’aube à la tombée du jour.(De l’intérieur, on entend la voix de Rosina qui reprendle refrain de la chanson.)

ROSINAContinue, mon doux ami, ah continue ainsi !

FIGAROVous entendez?… Ah, que vous en semble?

LE COMTEOh! que je suis heureux !

109 L’histoire de la canzone « Se il mio nome» estaussi incertaine que sa musique: on ne possède quequelques accords de l’accompagnement de guitare(ceux du dernier vers de chaque strophe), et encorene sont-ils pas autographes. Rossini voulait-il encou-rager par là son interprète à improviser? Le soir dela première, García a, semble-t-il, chanté un air deson choix – hispanisant ; mais après l’échec cuisantde la soirée, il est ensuite revenu à la pièce prévuepar Rossini. Cette canzone, de facture plus simple et de tonmoins paradant que la cavatina, réussit à rendre leComte touchant et l’instant, émouvant. La guitareseule remplace l’orchestre à l’accompagnement, cequi provoque un effet d’intimité et de fragilité ; ellecisèle le silence – un silence qui se creusera ensuitelors des réponses a cappella de Rosina, dont la nu-dité acoustique et l’écho nostalgique font oublierle contexte buffo et suspendent le cours du temps.Hormis quelques fioritures de séduction, la lignemélodique est sobre ; elle use même de moyens

attendus pour traduire un sentimentalisme assumé;notamment, une sixte mineure à vide, qui définitaussi l’ambitus de la première phrase dans un lami-neur quelque peu sage et statique.

Exemple 6

Les modulations suivent de près le texte, avec unecertaine naïveté : un éclairage en do majeur à l’ar-rivée du nom de « Lindoro» ; deux inflexions desixte napolitaine – clichés de rhétorique harmo-nique particulièrement expressifs – pour le vers « Divoi sempre parlando così». Les fluctuations detempo et de nuance, soigneusement diversifiéespar Rossini, donnent vie à l’ensemble et lui permet-tent d’échapper à la vignette fleur-bleue; on trouvesuccessivement : a mezza voce, ritenuto, a tempo,fortissimo pour le dernier vers, « canta» pour la se-conde strophe où la voix du Comte s’affirme.

116 Après ce moment d’effusion tendre et intimiste,le retour du clavecin, pour le récitatif qui suit, sonnepresque violemment. Il permet de repartir avec unenouvelle énergie sonore dans le tourbillon dubuffo : celui du Comte, avec son emphase témé-raire ; celui de Figaro, avec son acuité pratique dansl’intrigue et sa rétribution – « Lindoro» ne rime-t-ilpas fort à propos avec… « oro»?

N° 3 : Dans une chanson qu’il accompagne à laguitare et que Rosina écoute à sa fenêtre, leComte se présente comme étant Lindoro, amou-reux mais peu fortuné. Rosina commence une ré-ponse favorable, mais s’interrompt : la fenêtre seclôt. Impatient de la rencontrer vraiment, leComte décide de s’introduire le jour même dansla maison de Bartolo, et promet à Figaro de ré-compenser son aide généreusement.

=============== =l &•

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a mezza voceLe Comte

e E lE e

E E E ElE œ» œ» œ» œ» œ» œ» œ» e

Se il mio no-me sa-per voi bra - ma - - - te

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L’AVANT-SCÈNE OPÉRA N° 37 33

113FIGARODa bravo, a voi, seguite.

114CONTE (canta.)L’amoroso e sincero Lindoronon può darvi, mia cara, un tesoro.Ricco non sono,ma un core vi dono,un’anima amante,che fida e costanteper voi sola sospira cosìdall’aurora al tramonto del dì.

115ROSINAL’amorosa e sincera Rosinadel suo core a Lindo…(Si sentono di dentro chiudere le finestre.)

Recitativo116CONTEOh cielo !...

117FIGARONella stanza convien dir che qualcuno entrato sia.Ella si è ritirata.

118CONTE (con enfasi)Ah cospettone ! Io già deliro… avvampo !... Oh adogni costo vederla io voglio… vo’ parlarle : ah tu, tumi devi aiutar…

119FIGAROIh, ih, che furia ! Sì, sì, v’aiuterò.

120CONTEDa bravo : entr’oggi vo’ che tu m’introduca in quellacasa. Dimmi, come farai ?... Via !... Del tuo spirito ve-diam qualche prodezza.

FIGAROCourage, allons, poursuivez.

LE COMTE (chante.)Lindoro amoureux et sincèreN’a nul trésor à vous offrir, mon aimée.Je ne suis pas richeMais je vous offre un cœur,Une âme aimanteQui, fidèle et constante,Pour vous seule soupire ainsiDe l’aube à la tombée du jour.

ROSINARosina amoureuse et sincèreDe son cœur à Lindo…(On entend fermer les fenêtres de l’intérieur.)

Récitatif LE COMTEÔ ciel !…

FIGAROQuelqu’un a dû entrer dans la pièce. Elle s’est reti-rée.

LE COMTE (avec emphase)Ah! par tous les diables ! Je délire déjà… Je brûle !…Oh! je veux la voir à tout prix… Je veux lui parler :et tu vas m’aider…

FIGAROEh! eh ! quelle impatience ! Oui, oui, je vous aiderai.

LE COMTECourage: aujourd’hui même, je veux que tu m’introduisesdans cette maison. Dis-moi, comment t’y prendras-tu?…Allez!… Voyons quelque prodige de ton esprit.

« L’amoroso e sincero Lindoro… »Catherine Trottmann (Rosina), Florian Sempey (Figaro) et Michele Angelini (Almaviva), mise en scène de Laurent Pelly, Théâtre des Champs-Élysées, Paris 2018. Vincent Pontet.

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104 L’AVANT-SCÈNE OPÉRA N° 37

Pesaro

Le 15 mai 1796, le général Bonaparte fit son entrée àMilan, à la tête de cette jeune armée qui venait de pas-ser le pont de Lodi, et d’apprendre au monde qu’aprèstant de siècles César et Alexandre avaient un successeur.Les miracles de bravoure et de génie dont l’Italie fut té-moin en quelques mois réveillèrent un peuple en-dormi…

Par ces premières lignes de La Chartreuse deParme, Stendhal aurait pu tout aussi bien préluderquelque quinze ans plus tôt à sa fameuse Vie deRossini, tant il est vrai que l’enfance de Rossini ressemble à celle de Fabrice Del Dongo. «Sans l’in-vasion des Français en Italie, j’aurais été probable-ment pharmacien ou marchand d’huile», dira plustard le compositeur. Quand il vient au monde, en1792, la monarchie en France est à l’agonie. Il s’estoffert le luxe rare de naître un 29 février (si bienqu’on ne fêtera son anniversaire qu’une fois tousles quatre ans) et de mourir un vendredi 13, àParis, sous le règne d’un autre Bonaparte… Plu-sieurs villes peuvent réclamer sa paternité : ainsiPesaro, patrie de sa mère, bourgade de l’Adria-tique où il est né ; Bologne, où il grandira et ferases études ; enfin Lugo, en Romagne, car son père,inspecteur des boucheries et tubatore municipalà Pesaro depuis 1789, descend d’une illustre fa-mille patricienne de Lugo – un Fabrizio Rossiniétait gouverneur de Ravenne au XVIe siècle – etRossini conclura : « Je suis le cigno (le cygne) de

Pesaro, mais aussi le cignale (le sanglier) deLugo.»

Quand il a quatre ans, la Révolution françaisefait grand bruit jusqu’à Pesaro. Le père enthou-siaste affiche ses idées sur sa porte : «Demeure ducitoyen Vivazza, républicain sincère», et fomenteun petit coup d’État qui rattache Pesaro à l’éphé-mère république Cisalpine. Quand Bonaparte etses armées quittent l’Italie, chassés par l’offensiveaustro-russe du printemps 1799, le jacobin confiel’enfant à la nonna et s’en va jouer du cor, cachéau fond des fosses d’orchestre. Mais il est arrêté àBologne par la police pontificale, ramené à Pesaroet emprisonné pendant dix mois. Son épouse,Anna Guidarini, fille de boulanger et chantantfort bien, s’engage à Bologne au Teatro Civicopour élever son fils. Musique et Italie, idées répu-blicaines, espoir et tyrannie… quel climat stendha-lien! En attendant donc que le père sorte deprison, la mère chante avec succès à Bologne, àFerrare, à Mantoue, à Rovigo: Rossini est pension-naire à Bologne, chez un charcutier. Il y feint d’ap-prendre le latin, refuse de lire et d’écrire. AprèsMarengo, le père délivré par les Français s’installeà Bologne, et confie le bambino à un marchandde vin, Prinetti, qui lui apprend rudement l’épi-nette et l’alto ; puis il le place chez un forgeron oùil «apprend la mesure» : en tirant sur le soufflet…Enfance difficile, ballottée entre les invasions, laprison, les arrière-boutiques, la bohème des théâ-tres, et qui n’est pas sans rappeler la jeunesse deWeber en ces mêmes années.

Bologne

En 1802, Rossini regagne la patrie des ancêtres,Lugo, où un chanoine, don Giuseppe Malerbi, luifait découvrir les classiques viennois. Mais AnnaRossini tombe malade et se voit contrainted’abandonner définitivement la scène. La mêmeannée, en 1804, la famille se fixe à Bologne, oùRossini fera ses années d’apprentissage auprès de

«Nos graves littérateurs des Débats onttrouvé l’action de L’Italienne à Alger folle,sans voir, les pauvres gens, que si ellen’était pas folle, elle ne conviendrait plusà ce genre de musique qui n’est elle-même qu’une folie organisée etcomplète.»

Stendhal, Vie de Rossini, ch. III

JEAN-ALEXANDRE MÉNÉTRIER

La folie organisée

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L’AVANT-SCÈNE OPÉRA N° 37 105

LA FOLIE ORGANISÉE

braves ecclésiastiques. Tout en s’intéressant à plu-sieurs instruments – il joue surtout du cor –, Rossinitravaille sa voix avec un certain Angelo Tesei, etdans les églises de Bologne ce pur soprano fait lajoie des âmes pieuses. Plus tard, sa voix se trans-formera en un chaud baryton qui lui permettrad’interpréter magnifiquement le Largo du Bar-bier. Rien d’étonnant à ce que le grand maître dubel canto, en bon chanteur, ait écrit si pertinem-ment pour Davide, Nozzari ou García. À onze ans,il chante, accompagne et déchiffre admirable-ment. Engagé dans les petites villes de la Ro-magne ou des Marches, il subvient aux besoins desa famille en faisant répéter les chœurs des céré-monies officielles. À Ravenne, en 1804, il remplaceau pied levé un chanteur tombé malade dans unopéra de Fioravanti – il a 12 ans – et paraît sur leTeatro Zagnoni de Bologne dans la Camilla dePaër. Enfin, suprême honneur, il est reçu commeMozart dans la fameuse Accademia filarmonica,en même temps qu’une jeune cantatrice de21 ans, Isabella Colbran, la future Signora Rossini.

En enfant du peuple qui promet, Rossini peutcompter sur quelques protecteurs : un ingénieurbolonais, le chevalier Giusti, lui révèle Dante,l’Arioste et le Tasse. Chez les riches Mombelli, en1806, on lui fait écrire, morceau par morceau, sansqu’il s’en rende compte, un petit opéra, Demetrio

e Polibio, qui sera joué à Rome six ans plus tard.On découvre déjà, dans les charmants soli de boisde l’ouverture, les prodromes de la séduction…Mais en cette même année 1806, Rossini perd savoix de soprano ; on le fait admettre au fameuxLiceo musicale où il lui faudra étudier sous la fé-rule du Padre Stanislao Martini qui avait donnédes leçons à Mozart. Preuve de goût et de discer-nement, Rossini déchiffre seul les quatuors deHaydn, de Mozart, et se réfugie dans les Noces, La Flûte enchantée ou La Création. Aussi se fait-ilsurnommer « il tedeschino» (le petit Allemand)quand il dirige magistralement La Création à Bo-logne. Sous le regard bienveillant de ses anges tu-télaires viennois, il écrit de fort sérieux quatuors,des messes, et même une cantate, Pianto d’Armo-nia per la morte d’Orfeo, dûment corrigée par lebon père Mattei, et qui sera jouée à une distribu-tion de prix du Liceo, le 11 août 1808. Une sym-phonie de la même année est «harmonieuseau-delà de toute vraisemblance et complètementneuve par son style», selon les gazettes locales.

Venise

Grâce à un ménage de chanteurs, les Morandi,Rossini signe un contrat avec un impresario véni-tien, le marquis Cavalli, qui lui donne sa première

Archiginnasio de Bologne, aquarelle de Tomaselli et Zanotti.Bologne, Gabinetto delle stampe.

Isabella Colbran, gravure d’aprèsCarloni. Bologne, Gabinetto delle stampe.

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116 L’AVANT-SCÈNE OPÉRA N° 37

S ans prétendre portraiturer toutes les Rosinacélèbres entre 1816 et 1981, nous voudrions

évoquer les plus marquantes, depuis la première,Geltrude Giorgi Righetti, qui avait connu Rossinià Bologne où elle avait débuté avec succès en1814, à 21 ans. Disons qu’elle compensait un phy-sique assez ingrat par une très belle voix decontralto et entrons dans la ronde des Rosina quilui ont succédé.

Les Rosina du Théâtre-Italien

Dès 1819, le Barbier était joué à Londres au King’sTheatre avec une nouvelle grande Rosina, TeresaGiorgi-Belloc, cantatrice piémontaise qui fit éga-lement sensation dans le rôle à la Scala en 1823 eten 1824. Stendhal, son contemporain, l’a définieen quelques mots : «Madame Belloc est horrible-ment laide, mais c’est probablement la premièreactrice chantante d’Italie». Fort jolie par contreétait Giuseppina Ronzi de Begnis, la créatrice deRosina aux Italiens de Paris le 26 octobre 1819. Làencore, à l’occasion de cette première parisiennetout comme lors de sa houleuse création à l’Ar-gentina de Rome, on opposa Le Barbier de Séville

de Rossini à celui de Paisiello. Le Barbier de Paisiello fut repris quelques jours après, avec lamême distribution que pour celui de Rossini.L’épreuve fut cruelle pour le vieux maître et letriomphe de Rossini fut confirmé aux Italienslorsque, le 14 décembre 1819, on donna son Bar-bier avec, cette fois, en Rosina, l’une des plusdouées et des plus charmantes cantatrices del’époque, la Française Joséphine Mainvielle-Fodor.Sur cette même scène, Laure Cinti, la future Ma-dame Damoreau-Cinti, lui succéda en 1823, avecsuccès également.

Le 7 juin 1825, une toute jeune débutante dedix-sept ans parut au King’s Theatre en rempla-çant dans le rôle de Rosina Joséphine Mainvielle-Fodor souffrante. Il s’agissait de Maria FeliciaGarcía, la fille du grand ténor Manuel García, lecréateur d’Almaviva. Elle faisait ainsi, aux côtés deson père, des débuts éblouissants. Celle qui devaitdevenir la Malibran abordait avec Rosina un rôlequi, pour la première fois, trouvait sa vraie dimen-sion. Avec elle, la filleule de Bartolo n’était plusune ingénue banale mais une jeune fille décidée,pleine de vie et de malice, ainsi qu’une amoureusepassionnée. Tout au long de sa trop courte

Le rôle de Rosina du Barbier de Séville aété depuis la création de l’ouvrage un deceux qui ont le plus attiré les cantatrices,ce qui explique qu’en dehors de sa versionoriginale pour contralto (car telle était latessiture de la créatrice, GertrudeRighetti-Giorgi) il ait été adapté auxautres tessitures vocales féminines, pourpermettre aussi bien aux sopranos légersqu’aux mezzo-sopranos de pouvoirl’aborder.

JACQUES GHEUSI

D’une Rosina à l’autre

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carrière, Malibran chantera le Barbier aussi bien àLondres qu’à Paris ou à travers l’Italie. Elle futl’une des premières à supprimer, dans la leçon dechant de l’acte II, l’air qu’avait composé Rossinipour lui substituer un morceau de son choix : le fa-meux «Di tanti palpiti» du Tancredi du mêmeRossini, qu’elle affectionnait particulièrement.

À la même époque que Malibran, sa rivale di-recte, la ravissante et blonde Henriette Sontag, futune Rosina adulée. Avec une conception toute dif-férente du personnage, elle en faisait ressortirseulement la coquetterie et le charme et le chan-tait avec une voix de colorature d’une éblouis-sante virtuosité. Après Malibran et Sontag, lesItaliens de Paris qui, grâce à elles, étaient devenusle temple du bel canto, présentèrent d’autres mé-morables Rosina comme Rosalbina Caradori-Allan,Henriette Méric-Lalande et surtout la belle GiuliaGrisi qui l’y chanta dès 1833, année de ses débutsdans ce théâtre où elle allait régner en prima

donna assoluta pendant plus de vingt ans. Enmême temps que la Grisi, on pouvait applaudir enRosina aux Italiens l’Anglaise Emma Albertazzi,Pauline Viardot, glorieuse sœur de Malibran, etsurtout l’Italienne Fanny Persiani, créatrice en1835 de la Lucia di Lammermoor de Donizetti.Douée d’une voix de soprano colorature d’unegrande agilité, elle fit sensation avec sa premièreRosina aux Italiens, le 22 octobre 1842. Elle lui ap-portait une fragilité touchante et, hommage auvieux Paisiello, elle y interprétait, dans la leçon dechant, un de ses airs les plus exquis, avec varia-tions, le «Nel cor più non mi sento» de La Moli-nara. Toujours à la même époque, à la Scala, danssa version mezzo, Elena d’Angri imposait une Rosina pleine d’autorité.

Le 7 janvier 1854, aux Italiens, apparut une Rosina plantureuse, à la voix prodigieuse demezzo-contralto : Marietta Alboni. Pendant prèsde dix ans, elle allait y imposer une présence so-lide, faite de force tranquille et d’une virtuosité àcouper le souffle, comme celle dont elle faisait

L’AVANT-SCÈNE OPÉRA N° 37 117

D’UNE ROSINA À L’AUTRE

Maria Malibran. Coll. J. Gheusi.

Page de gauche :

Gertrude Righetti-Giorgi, créatrice de Rosina à Rome en1816. Lithographie, Naples, collection Cuoco.

Ci-contre :Emma Albertazzi en 1838 au Théâtre des Italiens. Coll. J. Gheusi.

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Parmi les opéras du grand réper-toire, Le Barbier de Séville fait figured’exception. Sa mise en scène sem-ble avoir échappé aux relectures dé-capantes auxquelles sont livrésdepuis une cinquantaine d’annéesles titres les plus fréquemment mon-tés. Certes, au fil des décennies, lacouleur locale sévillane d’origines’est estompée: Rosina a perdu soncostume espagnol et Figaro, sa ré-sille et l’habit de majo ; quant à DonBasilio, son chapeau rabattu et sasoutanelle ont laissé la place à d’au-tres coiffures et à des accoutrementsmoins homologués. Mais, si les met-teurs en scène se sont éloignés ducontexte originel de la pièce deBeaumarchais, rares sont ceux quiont tout à fait renoncé à l’élémentespagnol. Simplement, ce qui n’étaitsouvent que folklore s’est mué en unélément concret, capable de vivifierla dramaturgie de la pièce. Danstous les cas, qu’ils aient vu dans lapièce une bouffonnerie ou une co-médie de caractère, la plupart acontinué à faire confiance à son in-trigue, à ses attendus et à la richessede ses ambiguïtés1.

1946 : Mastrocinque / Morelli

Le film de Camillo Mastrocinque mé-rite la palme du script le plus inventifet du plus mauvais play-back. Unefoule de petits détails de mise enscène associée à des récitatifs oùpointe la tentation du dialoguecontribue à la crédibilité de cetteréalisation. Les acteurs donnent l’im-pression d’avoir été dirigés sur untexte parlé puis sonorisés a poste-riori par une version de l’opéra ré-duite à 91 minutes où, à l’inverse dufilm de Loubignac, pas un numérode la partition ne manque mais oùpas un seul ou presque n’a échappéà une réduction drastique. Musicale-ment, le résultat est assez chaotiquemais sauvé par un plateau singuliè-rement convaincant. Certes, l’Alma-viva poupin de Ferruccio Tagliavini

ressemble plus, sous son déguise-ment de soldat ivre, au petit frère deGino Cervi qu’à un jeune aristocrateentreprenant, sa Rosina est une sou-brette au timbre pointu et à la voix ai-grelette, mais l’ampleur du Basiliod’Italo Tajo – dont la seule «Calunnia»a été épargnée par la réduction –, leBartolo bovin de Vito De Taranto et,surtout, la présence du Figaro carnas-sier de Tito Gobbi – plus jeune pre-mier que son maître – suffisent àprouver qu’au-delà des «mauvaises»traditions, le chant italien d’après-guerre préservait tout de même unsens artistique et théâtral capable desuppléer aux déficiences musicales.À l’arrivée, le film reste un beau té-moignage d’une époque dont biendes éléments, à commencer par lapersonnalité et le naturel des chan-teurs, pourraient encore nous faireenvie.

1948 : Loubignac / Cluytens

Le film français de 1947 permetd’imaginer ce que pouvait être uneproduction à l’Opéra-Comique avantle retour de la version originale ita-lienne dans les années soixante-dix.Basé sur une mise en scène tout enfinesse de Jean Loubignac, dans unescénographie de Louis Le Barben-chon que le noir et blanc sauve sansdoute du kitsch, il propose l’adapta-tion française de Castil-Blaze, retail-lée au format standard des 90minutes d’un film de fiction. Le se-cond air d’Almaviva au premier acteet la fin du duo avec Figaro en fontles frais ainsi que l’air de Berta. Levaudeville final est réduit à un cou-plet tandis que l’orage sert de mu-sique de fond à trois scènes parléesqui amènent au dénouement. Letrio «Ah! quel colpo inaspettato» acédé au souci de concision. Les réci-tatifs sont bien sûr remplacés par desdialogues, adaptés de Beaumarchaispar Marc Evenos. Ils contribuent àl’impression de naturel produite parle film dont le ton amuse et séduit.

La troupe de l’Opéra-Comique y faitmerveille dans un style de jeu typémais que tous ont su adapter à la ca-méra. Excellents vocalement, le Bar-tolo de Louis Musy et le Basilio deRoger Bourdin pourraient figurer aupanthéon des seconds rôles du ci-néma français d’après-guerre. Lepremier a du reste un faux air deRaimu qui chanterait et le secondsait éviter avec beaucoup d’intelli-gence la caricature, dans un person-nage où la tendance est souvent àforcer le trait. La soprano coloratureLcienne Jourfier, qui interprète unarrangement de «Di tanti palpiti»de Tancrède en guise de Leçon dechant, est une Rosine très spirituelleet réussit à être charmante sans êtrevraiment jolie. L’Almaviva très légerde Raymond Amade est plus aristo-cratique d’allure que de timbre.Quant à Roger Bussonnet, il campeun Figaro de tradition, plébéien àsouhait. L’ouverture, filmée en studioavec l’orchestre au grand complet,permet de découvrir la silhouetteélégante d’André Cluytens dirigeantsans baguette mais à un train d’enfercette version à l’accent parisien.

1959 : List / Keilberth

La production munichoise appar-tient encore à ce théâtre de réper-toire où le metteur en scène secontentait d’actualiser une traditionbien rodée et où il revenait au talentdes interprètes de donner vie auxpersonnages et aux situations. La«troupe» réunie dans l’écrin rococodu théâtre Cuvilliès s’y emploie avecbrio dans des décors et des costumesque seul le noir et blanc sauve dukitsch et réussit, malgré le handicapde la traduction allemande à la pro-sodie assez peu fluide, à capter l’es-prit de la comédie rossiniennequ’incarne singulièrement le Figarovif-argent du jeune Hermann Preydont la complicité avec Fritz Wun-derlich est patente. Le ténor et son merveilleux timbre, à quelques

Vidéographie ALFRED CARON

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L’AVANT-SCÈNE OPÉRA N°37

VIDÉOGRAPHIE

1945-46Giuseppe MorelliOpéra de RomeFerruccio TagliaviniVito De TarantoNelly CorradiTito GobbiItalo TajoNatalia NicoliniCamillo MastrocinqueLibero PetrassiGiorgio FoeldesVHS Bel Canto SocietyFilm

1947-48André CluytensOpéra-ComiqueRaymond AmadeLouis MusyLucienne JourfierRoger BussonnetRoger BourdinRenée GillyJean LoubignacLouis Le Barbenchon

VHS R. Chateau VideoFilm, en français

1954Carlo Maria GiuliniRAI-MilanNicola MontiMarcello CortisAntonietta PastoriRolando PaneraiFranco CalabreseFernanda CadoniFranco EnriquezG. Villa / L. MuratoriFolcoVHS Bel Canto SocietyFilm

1959Joseph KeilberthOpéra de MunichFritz WunderlichMax ProebstlErika KöthHermann PreyHans HotterIna GernheinHerbert ListMax BignensMax BignensDVD DGCuvilliès-Theater, en all.

1971-72Claudio AbbadoTeatro alla ScalaLuigi AlvaEnzo DaraTeresa BerganzaHermann PreyPaolo MontarsoloStefania MalagùJean-Pierre PonnelleJean-Pierre PonnelleOtto PischingerDVD DGFilm

L E B A R B I E R D E S É V I L L E – V E R S I O N S V I D É O G R A P H I Q U E S

datedirectionorchestreAlmavivaBartoloRosinaFigaroBasilioBertamise en scènedécorscostumesédition/supportproduction

1981Sylvain CambrelingPhilh. de LondresMax-René CosottiClaudio DesderiMaria EwingJohn RawnsleyFerruccio FurlanettoCatherine McCordJohn CoxWilliam DudleyWilliam DudleyDVD Kultur VideoFest. de Glyndebourne

1988Gabriele FerroSymph. de StuttgartDavid KueblerCarlos FellerCecilia BartoliGino QuilicoRobert LloydEdith Kertesz-GabryMichael HampeEzio FrigerioMauro PaganoDVD ArthausFest. de Schwetzingen

1988Ralph WeikertNY, Metropolitan Opera Rockwell BlakeEnzo DaraKathleen BattleLeo NucciFerruccio FurlanettoLoretta Di FrancoJohn CoxRobin WagnerPatricia ZipprodtDVD DG

1992Alberto ZeddaOrch. de ch. HollandaisRichard CroftRenato CapecchiJennifer LarmoreDavid MalisSimone AlaimoLeonie SchoonDario FoDario FoDario FoDVD ArthausThe Netherlands Opera

2001Nello SantiOpéra de ZurichReinaldo MaciasCarlos ChaussonVesselina KasarovaManuel LanzaNicolai GhiaurovElisabeth Rae MagnussonGrisha AsagaroffLuigi PeregoLuigi PeregoDVD EuroArts

datedirectionorchestreAlmavivaBartoloRosinaFigaroBasilioBertamise en scènedécorscostumesédition/supportproduction

2002Bruno CampanellaOpéra National de ParisRoberto SaccàCarlos ChaussonJoyce DiDonatoDalibor JenisKristinn SigmundssonJeannette FischerColine SerreauJ.-M. Stehlé / A. FontaineElsa PavanelDVD Arthaus / TDK

2005Gianluigi GelmettiTeatro Real de MadridJuan Diego FlórezBruno PraticòMaría BayoPietro SpagnoliRuggero RaimondiSusanna CordonEmilio SagiLlorenç CorbellaRenata SchusshelmDVD Decca

2005Maurizio BarbaciniTeatro Regio de ParmeRaul GiménezAlfonso AntoniozziAnna BonitatibusLeo NucciRiccardo ZanellatoGabriella CorsaroBeppe De TomasiPoppi RanchettiArtemio CabassiDVD Hardy

2008Antonino FoglianiTeatro La FeniceFrancesco MeliBruno de SimoneRinat ShahamRoberto FrontaliGiovanni FurlanettoGiovanna DonadiniBepi MorassiLauro CrismariLauro CrismariDVD Dynamic

2009Antonio PappanoLondres, Cov. GardenJuan Diego FlórezAlessandro CorbelliJoyce DiDonatoPietro SpagnoliFerruccio FurlanettoJennifer Rhys-DaviesM. Leiser et P. CaurierChristian FenouillatAgostino CavalcaDVD Virgin

datedirectionorchestreAlmavivaBartoloRosinaFigaroBasilioBertamise en scènedécorscostumesédition/supportproduction

2011Andrea BattistoniTeatro Regio de ParmeDmitry KorchakBruno PraticòKetevan KemoklidzeLuca SalsiGiovanni FurlanettoNatalia RomanStefano VizioliFrancesco CalcagniniAnnemarie HeinreichDVD Arthaus

2016Enrique MazzolaPhilh. de LondresTaylor StaytonAlessandro CorbelliDanielle de NieseBjörn BürgerChristophoros StamboglisJanis KellyAnnabel ArdenJoanna ParkerJoanna ParkerDVD Opus ArteFestival de Glyndebourne

2017Jérémie RhorerLe Cercle de l’HarmonieMichele AngeliniPeter KalmanCatherine TrottmannFlorian SempeyRobert GleadowAnnunziata VestriLaurent PellyLaurent PellyLaurent PellyDVD NaxosThéâtre des Champs-Élysées

datedirectionorchestreAlmavivaBartoloRosinaFigaroBasilioBertamise en scènedécorscostumesédition/supportproduction

Les versions commentées dans notre vidéographie sont signalées par un fond bleu.Nos tableaux recensent exclusivement les versions éditées à ce jour sur le marché légal.

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L’œuvre à l‘affiche

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RECHERCHES: OLIVIA PFENDER

DateVilleThéâtreDirectionAlmavivaRosinaFigaroBasilioBartoloBertaFiorilloDécorsCostumesPremier violon

20 février 1816RomeArgentinaGioachino RossiniManuel García (père)Gertrude Righetti-GiorgiLuigi ZamboniZenobio VitarelliBartolomeo BotticelliElisabetta LoyseletPaolo BiagelliAngelo ToselliFederico MarchesiGiovanni Landoni

Au pianoforte dès la 2e :Camillo Angelin

26 octobre 1819ParisThéâtre des Italiens

Manuel García (père)Giuseppina Ronzi de BegnisFelice PellegriniGiuseppe de BegnisVinzenzo Graziani

L’ŒUVRE À L’AFFICHE publiée dans notre précédente édition (2005) et non reproduite ici est téléchargeable gratuitement au format PDF sur notre site www.asopera.fr (page consacrée au BARBIER DE SÉVILLE).

Cette documentation contient une importante iconographie et présente les principales productions du Barbier de Sévilleentre 1982 et 2005.

CRÉATIONS À ROME ET À PARIS

Le compositeur entouré de ses interprètes. D.R.

Felice Pellegrini, créateur deFigaro au Théâtre des Italiens à Paris en 1819, lithographiede U. Parent.Coll. Jacques Gheusi.

Giuseppina Ronzi De Begnis,première Rosina au Théâtredes Italiens à Paris en 1819.Coll. Jacques Gheusi.

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L’AVANT-SCÈNE OPÉRA N° 37 149

DateVilleThéâtreDirectionAlmavivaRosinaFigaroBasilioBartoloMise en scèneDécorsCostumes

2005Aix-en-ProvenceThéâtre du Grand-St-JeanDaniele GattiLuigi PetroniCamilla TillingPeter MatteiAlex EspositoJohn Del CarloDavid RadokIvan TheimerIvan Theimer

2005StrasbourgPalais de la MusiqueTheodor GuschlbauerJuan José LoperaLaura PolverelliArmando NogueraNicola UlivieriMaurizio PicconiJérôme SavarySerge MarzolffJ. Schmidt et E. Peduzzi

2005ParisOpéra GarnierD. Oren / M. Piollet / P. HuiBruce FordMaría Bayo / Joyce DiDonatoDalibor JenisK. Sigmundsson / V. OgnovenkoAlberto RinaldiColine SerreauJ.-M. Stehlé et A. FontaineElsa Pavanel

2005PesaroPalafestivalDaniele GattiJuan Diego FlórezJoyce DiDonatoDalibor JenisNatale De CarolisBruno De SimoneLuca RonconiGae AulentiGiovanna Buzzi

Repr. Bologne 2006

2005LondresCovent GardenMark ElderToby SpenceJoyce DiDonatoGeorge PateanRaymond AcetoBruno PraticoM. Leiser et P. CaurierChristian FenouillatAgostino Cavalca

L E B A R B I E R D E S É V I L L E À T R A V E R S L E M O N D E ( 2 0 0 5 - 2 0 2 0 )

Joyce DiDonato, Bruno Pratico, Toby Spence et George Petean dans la mise en scène de Moshe Leiser et Patrice Caurier au RoyalOpera House de Londres en 2005. Bill Cooper.

Juan Diego Flórez et Joyce DiDonatodans la mise en scène de Luca Ronconi au Festival de Pesaro en 2005. Studio Amati Bacciardi.

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