« cette exÉcution mÉmorable » : les reprÉsentations … · un écrit – celui-là même que...

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© Études Épistémè, n°15 (juin 2009). Reproduction, même partielle, interdite sans autorisation. « CETTE EXÉCUTION MÉMORABLE » : LES REPRÉSENTATIONS VISUELLES DE L’EXÉCUTION DE CHARLES I er DE MILTON À LA GLORIEUSE RÉVOLUTION Anne-Laure de MEYER ENS-LSH Le récit de l'exécution de Charles I er , relaté par les chroniqueurs officiels Gilbert Mabbott et Walker et repris par des historiens du XX e siècle, est parcouru de symboles christiques, de signes mystiques et de légendes, sans doute largement dus à la mise en scène de soi dont le roi fit preuve lors de ses derniers jours et qui fut fidèlement relayé par ses partisans 1 . Ainsi, nous rappelle-t-on dans ces récits, le roi brillait par son courage et sa sérénité quand il revêtit deux chemises en cette froide journée du 30 janvier 1649 afin que l'on ne crût pas qu'il tremblait de crainte. Sa croyance mystique lui fit apporter un soin tout particulier à sa tenue car c'était le jour de son « second mariage ». Il fut frappé d'entendre l'évangile du jour qui portait sur la crucifixion du Christ et y vit un signe providentiel. Il mangea du pain et but du vin peu avant d'être conduit à l'échafaud. Lors de son dernier discours, à l'instar du Crucifié, il pria pour que ses bourreaux soient pardonnés. Charles I er est ainsi présenté comme un second Christ, un martyr constant, placide et ferme face à l'épreuve de la mort. Le récit des derniers moments mêle histoire et mythe, deux faces d'une réalité qui contribua fortement à figer la légende de martyr royal et donna naissance à un culte qui ne perdit sa vitalité qu'à la fin du XIXe siècle 2 . La même lecture semble avoir été faite des images représentant l'exécution de Charles I er . Si aucune étude systématique de cette iconographie n'a encore été publiée, certains spécialistes du XVII e siècle y font tout de même référence ; l'une note qu'il n'y a aucune image anglaise de l'exécution avant la Restauration, un autre que le roi n'est jamais représenté divisé sur le plan physique, et une troisième 1 Voir C.V. Wedgwood, A Coffin for King Charles, the Trial and Execution of Charles I (1964), Pleasantville, The Akadine Press, 2001, p.188. 2 Voir Andrew Lacey, The Cult of King Charles the Martyr, Woodbridge, The Boydell Press, 2003, p.236-251.

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Page 1: « CETTE EXÉCUTION MÉMORABLE » : LES REPRÉSENTATIONS … · un écrit – celui-là même que le lecteur tient entre ses mains – que ce dernier reçoit révérencieusement,

© Études Épistémè, n°15 (juin 2009). Reproduction, même partielle, interdite sans autorisation.

« CETTE EXÉCUTION MÉMORABLE » : LES

REPRÉSENTATIONS VISUELLES DE L’EXÉCUTION DE

CHARLES Ier

DE MILTON À LA GLORIEUSE RÉVOLUTION

Anne-Laure de MEYER

ENS-LSH

Le récit de l'exécution de Charles Ier, relaté par les chroniqueurs officiels

Gilbert Mabbott et Walker et repris par des historiens du XXe siècle, est parcouru

de symboles christiques, de signes mystiques et de légendes, sans doute largement

dus à la mise en scène de soi dont le roi fit preuve lors de ses derniers jours et qui

fut fidèlement relayé par ses partisans1. Ainsi, nous rappelle-t-on dans ces récits, le

roi brillait par son courage et sa sérénité quand il revêtit deux chemises en cette

froide journée du 30 janvier 1649 afin que l'on ne crût pas qu'il tremblait de crainte.

Sa croyance mystique lui fit apporter un soin tout particulier à sa tenue car c'était le

jour de son « second mariage ». Il fut frappé d'entendre l'évangile du jour qui

portait sur la crucifixion du Christ et y vit un signe providentiel. Il mangea du pain

et but du vin peu avant d'être conduit à l'échafaud. Lors de son dernier discours, à

l'instar du Crucifié, il pria pour que ses bourreaux soient pardonnés. Charles Ier est

ainsi présenté comme un second Christ, un martyr constant, placide et ferme face à

l'épreuve de la mort. Le récit des derniers moments mêle histoire et mythe, deux

faces d'une réalité qui contribua fortement à figer la légende de martyr royal et

donna naissance à un culte qui ne perdit sa vitalité qu'à la fin du XIXe siècle2.

La même lecture semble avoir été faite des images représentant l'exécution

de Charles Ier. Si aucune étude systématique de cette iconographie n'a encore été

publiée, certains spécialistes du XVIIe siècle y font tout de même référence ; l'une

note qu'il n'y a aucune image anglaise de l'exécution avant la Restauration, un autre

que le roi n'est jamais représenté divisé sur le plan physique, et une troisième

1 Voir C.V. Wedgwood, A Coffin for King Charles, the Trial and Execution of Charles I (1964),

Pleasantville, The Akadine Press, 2001, p.188. 2 Voir Andrew Lacey, The Cult of King Charles the Martyr, Woodbridge, The Boydell Press, 2003,

p.236-251.

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Anne-Laure de Meyer

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s'étonne qu'il ne soit pas représenté souffrant3. Jusqu'à présent, les images de

l'événement étaient perçues comme subordonnées à la légende du martyr royal,

toujours respectueuses du corps du roi et de son unité. On a même imaginé que

l'Angleterre se refusait à représenter l'infâme événement. Milton lui-même s'en prit

à l'imagerie développée par le culte du roi martyr et la fustigea dans son célèbre

Eikonoklastes. Or, si beaucoup d'images du roi défunt arborent un réel parti pris

royaliste, toutes ne suivent pas cet usage. La présente étude vise à analyser les

partis pris des images de l'exécution de 1649 jusqu'à la Glorieuse Révolution. Les

images de l'exécution sont-elles une composante de la légende qui entoure le

défunt roi ou au contraire ont-elles une existence séparée qui communique une

interprétation différente de l'événement ?

3 Voir Jane Roberts, The King's Head, London, The Royal Collection, 1999, p.22: « No such records

were published in London, and none appears to have been made there; until the Restoration views of

the King's execution were engraved, printed and published on the Continent ». Voir aussi Kevin

Sharpe, “The Royal Image: An Afterword”, in Thomas N. Corns (ed.), The Royal Image:

Representations of Charles I, Cambridge, Cambridge University Press, 1999, p.294, p.306 et Laura

Lunger Knoppers, Historicizing Milton: Spectacle, Power and Poetry in Restoration England,

Athens, University of Georgia Press, 1994, 19-20.

Figure 1 : The Princely Pellican, Londres, 1649

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« ‘Cette exécution mémorable’… »

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Une royauté christique

La représentation d'un roi déchu et privé de sa tête ne va pas sans poser de

problèmes aux royalistes qui

s'empressent d'user de symboles et

de raccourcis significatifs pour dire

l'événement traumatisant du 30

janvier 1649. Ainsi, bon nombre

des publications royalistes

n'offraient pas d'image de

l'exécution proprement dite, mais

l'évoquaient par le moyen de

symboles aisément accessibles.

Ainsi, le pamphlet anonyme

intitulé « the Princely Pellican »

(fig. 1) montre-t-il un pélican qui,

toutes ailes déployées, se donne à

ses avides petits. Signe

éminemment christique, le pélican

s'offre en nourriture sur un

piédestal qui s'apparente fort à un

autel. Autour du nid, couronne,

sceptre et ruban de Saint Georges

gisent, reliques abandonnées d'un

passé glorieux. En ronde-bosse sur

l'autel de pierre est sculpté un ange placide qui témoigne peut-être de la paix avec

laquelle la mort humiliante de Charles Ier

est perçue par ceux qui soutenaient ses

prérogatives. Les mots du pélican, « Quois pario, pareo » reflètent idéalement la

situation du roi grâce au jeu de mots sur pario et pareo qui signifient engendrer,

donner la vie et obéir, être soumis. Le pronom relatif quois correspondrait au latin

classique quibus, ce qui permet de traduire par « j'obéis à ceux que j'engendre » ou

« je me soumets à ceux à qui je donne la vie ». Le pélican dit ainsi à la fois sa

suprématie paternelle et son humilité christique ; il se présente comme la victime

d'un parricide, offense à laquelle le régicide est souvent comparé, comme c’est le

cas chez Saumaise. Il est probant ici que le roi ne soit pas représenté avec son corps

humain mais par le biais d'un symbole de sa royauté mystique. Le pélican marque

le caractère spirituel du roi qui, rendu comparable au Christ par son onction,

s'abaisse jusqu'à la mort pour ses sujets. La symbolique évidente de l'image permet

de dépasser l'échec de l'exécution de Charles Ier et de lire l'événement selon des

lignes sanctifiantes.

Figure 2 : An Elogie and Epitaph,

[Londres?], 1649

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Dans la même veine, de nombreuses publications royalistes illustrèrent la

mort du roi au travers de symboles qui, en d'artistiques circonvolutions,

permettaient de dire tout le sacrilège de la mort du roi tout en occultant l'infamie de

sa fin. Ainsi, An Elogie and Epitaph (fig. 2) montre le roi allongé sur son lit de

mort, la main tendue vers le Golgotha où rayonne la croix du Christ. C'est

précisément ce geste qui inscrit le roi entre la vie et la mort et donne l'impression

qu'il se meurt non sur un échafaud mais dans un lit. Il est paré de tous les attributs

de la royauté et enveloppé d'un manteau d'hermine. Seul signe de sa mort violente,

la couronne est représentée à l'envers, indiquant là la souveraineté renversée.

Cependant, le roi esquisse un geste vers la croix sur le monticule, surplombée de la

couronne glorieuse portée par des angelots et mise en valeur par l'arche qui

rappelle les arcs de triomphe romains. Le point de fuite ainsi créé fait de la

couronne céleste le pendant ou le double inversé de la croix terrestre. La croix est

représentée sans corps souffrant, évoquant ainsi à la fois le retour glorieux du

Christ après sa victoire sur la mort et établissant un parallèle entre le corps du roi et

la croix du Christ. Enfin, le rideau en haut à droite de l'image place le lecteur en

position de spectateur : il assiste à la mort royale et à la résurrection glorieuse de

Charles Ier et participe implicitement à

sa divinisation en étant témoin de sa

sainteté.

Un autre auteur, John Quarles,

fit illustrer son ouvrage d'une gravure

qui présente non pas un roi accédant à

la gloire divine mais souffrant une

agonie semblable à celle de

Gethsemanie. On retrouve ici encore

les deux couronnes ainsi que le

rideau : nous sommes bien dans une

variation de l'image précédente. Le

roi, bien qu'allongé, est représenté

presque à la verticale, dans un entre-

deux qui permet de dire à la fois sa

mort proche et sa capacité à tendre

toujours vers le ciel. Les épines qui

enserrent sa couronne terrestre et

semblent menacer le roi par leur

prolifération rappellent la couronne

d'épines du Christ, signe d'humiliation

et de souffrance. Des deux

compagnons du roi, l'un est voilée :

sans doute s'agit-il de la reine

Henriette-Marie en habit de deuil,

figurant les femmes de Jérusalem au

Figure 3 : Tiré de John Quarles, Regale

Lectum Miseriae, [Londres], 1649

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pied de la croix. La scène rappelait très certainement au public du XVIIe siècle

l'agonie de Jésus sur le Mont des Oliviers avec ses disciples qui veillent et la

crucifixion. Fatiguée, la tête du roi repose sur sa main, signe discret de la

décollation où tout contrôle sur la tête est perdu, tant pour le sujet que pour le

bourreau4. Ainsi, l'iconographie religieuse est employée au service de la

justification religieuse du martyre de Charles Ier. Immédiatement après l'exécution

de Charles Ier se développa le culte du martyr royal. Il fut inscrit à la Restauration

dans le Livre des Prières Publiques et un jour de jeûne et de commémoration fut

alors fixé pour le 30 janvier. Une des composantes majeures de ce culte est la

proximité entre Charles Ier

dans ses derniers moments, depuis son injuste procès

jusqu'à sa mise à mort

infamante, avec le Christ5. De

nombreuses images et élégies

se font les relais de cette

pensée6.

D'autres images

mettent davantage l'accent sur

la continuité dynastique,

taisant ainsi avantageusement

l'épisode cromwellien. Ainsi,

la gravure de The Kingly

Myrrour représente les adieux

de Charles Ier à son fils. Plutôt

que de représenter le roi

mourant ou souffrant, le

graveur choisit de le montrer

transmettant ses mémoires et

conseils à son fils. Charles Ier

porte dans la main droite le crâne qui préfigure sa mort prochaine. Il porte sur sa

tête une grande couronne dont un modèle plus petit flotte au-dessus de la tête du

jeune prince héritier, futur Charles II. Cette dernière n'est pas encore posée sur la

tête du jeune prince pour signifier que sa royauté est à venir. Le roi tend à son fils

un écrit – celui-là même que le lecteur tient entre ses mains – que ce dernier reçoit

révérencieusement, la main sur le cœur. Par un effet de mise en abîme, l'image met

4 Voir Regina Janes, Losing our Heads: Beheadings in Literature and Culture, New York University

Press, New York, 2005, p.59. 5 Voir Andrew Lacey, op.cit., p.29-32.

6 Voir entre autres R. Brown (attr.) The Subjects Sorrow : or, lamentations upon the death of

Britaines Josiah, King Charles, Londres, 1649 ; Henry Leslie, The martyrdome of King Charles, or

his conformity with Christ in his sufferings, Londres, 1649/1662. Andrew Lacey, “Elegies and

Commemorative Verse in Honour of Charles the Martyr, 1649-1660”, In The Regicides and the

Execution of Charles I, ed. Jason Peacey, Basingstoke, 2001, pp. 225-247.

Figure 4 : Frontispice anonyme de The Kingly

Myrrour, Londres, 1649

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aussi en valeur l'héritage que le roi lègue à ses sujets : un écrit édifiant qui doit

aider tout un chacun à respecter Dieu et à révérer son lieutenant sur terre. Le roi est

donc présenté dans sa fonction de « père nourricier » pour son fils héritier et pour

son peuple7.

Le frontispice de l'Eikon Basilike, massivement reproduit, incarne à

merveille ce parti pris favorable au roi défunt. On y retrouve à la fois un

programme politique de justification dynastique et une légitimation divine, grâce

aux attributs de la royauté et du martyre qui sont associés à Charles Ier8

. L'image est

divisée en deux : sur la gauche, la force est représentée par des éléments naturels.

Le rocher assiégé par la mer évoque à la fois le déluge et l'arche de Noé et invoque

l'image biblique du « roc », qui est la traduction littérale du mot hébreu pour

« force » ; tandis que le palmier qui pousse malgré les poids dont il est chargé

démontre la puissance qu'a la nature à se régénérer. L'ambivalence d'une nature

destructrice et créatrice se fait jour dans un affrontement et une complémentarité

éloquents, alors que sur la droite, dans une loggia italienne, le temps est à la prière

et à la supplication ; un espace d'intimité s'ouvre sur une révélation intime et

personnelle. L'élément qui frappe d'abord le regard est la couronne céleste qui

darde son rayon sur Charles Ier agenouillé, malgré une perspective encore mal

maîtrisée. Trois couronnes sont présentes dans l'image : la couronne de gloire qui

promet béatitude éternelle (« Beatam et Aeternam / Gloria »), la couronne d'épines

qui rappelle l'humiliation de Jésus sur la croix (« Asperam at Levem / Gratia ») et

la couronne temporelle qui gît à terre, signe de la vanité humaine (« Splendidam at

Gravem / Vanitas »). Au-delà de son apparente lisibilité, ce motif renvoie à la

complexe théologie des couronnes décrite par Kantorowicz. Inspirée de l'Empire

Romain, cette croyance postule que l'empereur détient deux couronnes, l'une

matérielle et visible, l'autre invisible et décernée par Dieu lui-même. Cette dernière

comprend tous les droits et privilèges royaux indispensables pour le gouvernement

du corps politique. Ainsi, un roi qui meurt et son successeur sur le trône ne font

plus qu'un du point de vue de la couronne indivisible et perpétuelle qui incarne en

substance l'héritage royal9. La couronne abandonnée au sol est fermée par deux

ponts, signes du pouvoir impérial auquel le roi renonce10

. L'idéologie de l'empereur

7 Sur l'importance de l'image du père nourricier, voir Nombres XI, 12, ainsi que Isaïe XLIX, 22-23.

L'ouvrage de Benjamin Lewis Price fournit un aperçu intéressant de la conception paternelle de la

royauté à la fin du XVIIe siècle : Nursing fathers American colonist's conception of English

Protestant Kingship, 1688-1716, Lanham, Lexington Books, 1999. 8 Elizabeth Skerpan Wheeler rappelle le succès que connut Eikon Basilike dès sa parution : il y eut 35

éditions anglaises pour la seule année 1649 (in Elizabeth Skerpan Wheeler, “Eikon Basilike and the

Rhetoric of Self-Representation”, in Thomas N. Corns [ed.], The Royal Image: Representations of

Charles I, Cambridge, Cambridge University Press, 1999, p.122). 9 Voir Ernst Hartwig Kantorowicz, The King's Two Bodies, A Study in Medieval Political Theology,

Princeton, Princeton University Press, 1957, p.341-342. 10

Voir John Peacock, “The Visual Image of Charles I”, in Thomas N. Corns (ed.), The Royal Image:

Representations of Charles I, Cambridge, Cambridge University Press, 1999, p.180.

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chrétien qui vaincra l'Antéchrist – très répandue aux XVIe

et XVIIe

siècles – est

sous-jacente à cette image11

. Roi et couronne étaient distincts, mais inséparables :

sans le roi, la couronne était incomplète et frappée d'incapacité12

. Dès lors, la

présence des deux couronnes terrestre et céleste revêt un supplément de sens : ces

dernières complètent la présence corporelle du roi et font de son image la

représentation complète de sa personne, tout en l'inscrivant dans une lignée

dynastique. On ne pourra trop insister sur l'importance des représentations de

couronne dans les images étudiées jusqu'à présent.

La présence de la troisième couronne, faite d'épines, vient encore

compliquer le motif de la couronne en inscrivant l'imagerie royale dans la tradition

de la Passion du Christ. D'une certaine façon, elle sert à christianiser l'imagerie

païenne de la couronne en insistant sur la divinité de « l'oint du Seigneur ». Le

parallèle paraissait très clairement à un public tout pétri de textes bibliques. La

couronne d'épines tourna en dérision celui dont on ne prit pas au sérieux les

prétentions à la royauté. De même, dans cette image, Charles Ier la saisit

volontairement, lui dont on nie désormais la légitimité royale. Un divin échange

rétablit la justice et le roi reçoit la couronne de gloire et son « éternité de délices ».

Le frontispice allie de la sorte une imagerie religieuse avec une tradition de

représentation politique et fait de l'image un puissant instrument de propagande.

Milton et les images du régicide

John Milton perçut bien les implications de l'image de William Marshall –

et s'aperçut peut-être aussi du consensus visuel qui semblait se faire autour de la

christologie royale. Il en fit l'objet de sa vindicte dans la préface d’Eikonoklastes :

« Je ne peux que louer la franchise de celui qui a composé le titre du son livre,

Eikon Basilike, c'est à dire l'Image du Roi, et qui lui dresse ainsi une châsse afin

que le peuple vienne l'adorer»13

. L'image du roi devient le lieu univoque de

l'adoration idolâtre – voilà bien le fer de lance de la critique miltonienne. Les

royalistes cherchent à gagner les cœurs par le biais de l'émotion et de la

représentation, et l'émotion débordante représentée dans l'eau-forte de Charles Ier

devant le Palais des Banquets confirme bien cette intuition :

Que l'intention de ceux qui publièrent ces apologies et méditations tardives

ait été d'émouvoir le peuple et de susciter pour le corps du défunt l'honneur,

l'affection, et par conséquent, la revanche que, de son vivant, il n'avait pu

obtenir pour lui-même, apparaît dans la peinture affectée mise en frontispice

11

Voir Kantorowicz, op.cit., p.292. 12

Voir Kantorowicz, ibid., p.372-385. 13 Ma traduction. « In one thing I must commend his openness who gave the Title to his Book, Eikon

Basilike, that is to say, The King's Image; and by Shrine he dresses out for him, certainly, would have

the people come and worship him » (John Milton, Eikon Basilike with selections from Eikonoklastes,

Jim Daems & Holly Faith Nelson [eds.], Peterborough, ON: Broadview, 2006, p.224.)

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de son livre, contrefaite au point de représenter une scène de masque, et mise

là afin d'attraper les spectateurs sots et malavisés.14

Il poursuit sa diatribe contre l'image-même du frontispice :

On peut remarquer ici la curieuse négligence et légèreté de ceux qui

entreprirent d'orner le frontispice de ce livre, car bien que l'image mise au-

devant veuille le faire passer pour martyr ou saint afin de tromper le peuple

[...], ces emblèmes et devises désuets empruntés de quelque fastueux

spectacle donné à Whitehall pour la fête des Rois sont bien peu propres à en

faire un saint ou un martyr.15

Ainsi, Milton attaque l'image posthume du roi sur trois aspects : elle

engendre l'idolâtrie – péché majeur dans une religion réformée qui cherche à se

purifier de toute fausse image de Dieu, elle pose faussement Charles Ier comme

martyr et trompe ainsi ses lecteurs, et enfin elle suscite une réaction affective et

non raisonnable. Fallacieuse et mensongère, l'image du roi est à décoder et à

rejeter.

14 Ma traduction. « And how much their intent, who published these overlate Apologies and

Meditations of the dead King, drives to the same end of stirring up the people to bring him that

honour, that affection, and by consequence, that revenge to his dead Corpse, which he himself living

could never gain to his Person, it appears both by his conceited portraiture before his Book, drawn

out to the full measure of a Masking Scene, and set there to catch fools and silly gazers » (Milton,

Eikon Basilike, ibid., p. 223-224). 15

Ma traduction. « And here may be well observed the loose and negligent curiosity of those who

took upon them to adorn the setting out of this Book ; for though the Picture set in Front would

Martyr him and Saint him to befool the people (...). But quaint Emblems and devices begged from the

old Pageantry of some Twelfth-night's entertainment at Whitehall, will do but ill to make a Saint or

Martyr» (Milton, Eikon Basilike, ibid., p.224).

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Il existe donc tout un corpus d'images qui présentent la mort de Charles Ier

en termes de continuité dynastique ou de ressemblance christique et qui se gardent

de traiter de la question de la décollation, autrement que par des raccourcis

symboliques. Cependant, il convient de s'interroger sur l'univocité que semble

présenter une telle lecture des images de l'exécution du roi. S'il est indéniable que

Charles Ier est montré davantage comme roi que comme un condamné dans les

images étudiées jusqu'à présent et que son aura de martyr y est un thème récurrent,

la lecture royaliste de l'événement du 30 janvier 1649 est loin d'être univoque – et

loin de faire l'unanimité picturale.

L'exécution devant le Palais des Banquets

D'autres images ambitionnent de rendre compte des événements du 30

janvier de façon historique. Celles-ci laissent une grande part au cadre – on y

Figure 5 : William Marshall, frontispice de Eikon Basilike, 1649.

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distingue toujours Whitehall, même largement imaginé – au public varié, et aux

personnages sur l'échafaud. La célèbre peinture de l'exécution, maintenant à la

Scotland National Portrait Gallery, a justement été attribuée à l'artiste Weesop,

parce qu'il se trouvait à Londres au moment des événements. Or, il est fort possible

que la peinture ait été faite à partir des gravures qui circulaient largement (fig. 6),

tant en Angleterre que sur le continent16

. L'importante présence du Palais des

Banquets est en soi assez ambigüe ; lieu de faste royal et exemple architectural de

la grandeur monarchique et du triomphe des arts, cet édifice dissone avec la

déchéance du corps du roi. Loin de contribuer à la désacralisation de la monarchie,

Figure 6 : Enthauptung des Konigs Engelandt, Allemagne, 1649

il rappelle plutôt sa grandeur passée et accentue le tragique de la scène.

Les gravures de Charles Ier

exécuté devant le Palais des Banquets sont les

représentations les plus courantes et servent encore bien souvent à illustrer des

manuels scolaires ou des articles d'encyclopédie. Il convient ici d'en parler au

pluriel dans la mesure où l'image a été reprise par de nombreux graveurs un peu

16 Voir Jonathan Brown & John Huxtable Elliott, The Sale of the Century, Artistic Relations Between

Spain and Great-Britain, 1604-1655, New Haven, Yale University Press, 2002, p.222.

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partout en Europe et où ses détails ont été adaptés, nous livrant ainsi des

interprétations diverses d'un même événement. Si le parti pris royaliste y est moins

visible, l'eau-forte allemande reproduite ci-dessus nous révèle un certain nombre de

symboles qui montre un préjugé favorable au roi défunt.

La première chose qui frappe le spectateur attentif est

l'émotion qui envahit l'ensemble de l'image. Une femme

évanouie dans l'angle inférieur gauche de l'image montre

l'ampleur de la tragédie qui se déroule sur la place. Elle

rappelle les femmes de Jérusalem qui se lamentent lors de la

Passion, ainsi que la « Madonna Vulnerata », l'allégorie

féminine de l'Angleterre qui pleure ses enfants17

. Le vieillard

qui se retourne pour pleurer incarne l'expérience qui s'indigne

et s'effraie d'un présent si cruel. Tous pointent le roi défunt du

doigt, dans une reprise du thème pictural de l'Ecce Homo, la

monstration du souffrant qui le sépare, l'incrimine, l'isole,

mais met aussi en valeur sa qualité d'exemple. Ces doigts

pointés soulignent la compassion qui habite la foule et font de

Charles mort un sujet digne de pitié. Le geste frappe par son

unanimité et semble rassembler la foule dans un sentiment

commun.

Un détail spécifique à cette gravure a été dessiné sous

la femme évanouie ; il s'agit d'un petit chien, tourné en

direction du spectateur, tapi sous le bras de la femme

évanouie, les oreilles pendantes. La légende royaliste veut

que le chien favori de Charles Ier ait assisté à l'exécution de

celui-ci18

. Au-delà de l'anecdote, le chien est symbole de

fidélité et sa discrète présence dans la scène témoigne du parti

pris du graveur. Tourné vers le lecteur, son regard va en sens

inverse de tous, comme si la vision de la scène lui était

insupportable. Est-ce à dire que les véritables royalistes se

refusaient à contempler l'exécution ? Sa modeste participation contribue à renforcer

le thème de la fidélité au roi défunt.

Certains détails atténuent la violence de l'image et soulignent un certain

préjugé royaliste. Ainsi, le visage de Charles Ier est présenté de trois-quarts ou

presque de face, comme les médaillons de l'époque. Le visage ne paraît ni vieilli, ni

fatigué, ni souffrant, mais il a simplement les yeux fermés, paisiblement. Cet angle

17

Voir Brown, ibid., p.175. 18

Voir Geoffrey Robertson, The Tyrannicide Brief, London, Chatto & Windus, 2005, p.27.

Figure 8 : le

petit chien,

détail.

Figure 7 : la

monstration,

détail.

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Anne-Laure de Meyer

© Études Épistémè, n°15 (juin 2009).

de vue correspond aux médailles de souvenir de Charles Ier réalisées par Heinrich

Reitz le jeune ou les médailles commémoratives de la bataille de Edgehill

attribuées à Thomas Rawlins19

.

Il est surprenant que le sang jaillisse

d'une façon aussi grossière du cou du roi

décapité. Ce motif quelque peu cru, voire

irrévérencieux, est lié à la tradition qui veut

qu'après une exécution, le bourreau

brandisse la tête coupée comme un trophée

et s'exclame « Voici la tête d'un traître ! »20

.

Comment alors expliquer ce qu'affirment

certains spécialistes qui prétendent que

« contrairement aux œuvres de la

Révolution Française, les gravures pro-

royalistes ne représentaient pas le corps du

roi mort »21

? Un corps sanglant est la

preuve irréfutable d'une mort violente, alors

pourquoi le représenter ? Charles Ier avait

été accusé de « l'offense du sang », une

imputation qui ne se réduisait pas à une

figure de style, comme l'a si bien montré

Patricia Crawford22

. Ce crime, selon

l'interprétation biblique qu'on en faisait au

XVIIe siècle, anéantissait la sacralité du roi et annulait toute prétention à une

charge sacrée. Le pays tout entier était souillé par l'offense, ce qui nécessitait une

réparation de taille. Cependant, la gravure présente non le sang que Charles Ier avait

fait verser, mais bien le sien propre. L'ambivalence du motif se révèle ici car sitôt le

roi exécuté, les royalistes s'emparèrent du concept et l'appliquèrent aux régicides :

puisqu'ils avaient versé du sang et – qui plus est – le sang d'un roi, ces derniers

s'étaient rendus coupables de cette même offense du sang. Ceci explique pourquoi

il est si important de montrer le sang en abondance ; loin de signifier la simple mort

du roi, il désigne soit le sang versé pour le rachat des fautes du roi, soit la

culpabilité des parlementaires.

La question de la tête sanglante arborée en trophée n'en demeure pas moins

19

Voir Peacock, op.cit., p.196. 20

Voir Knoppers, op.cit., p.15. 21

Voir Janes, op.cit, ch. 2. 22

Voir Patricia Crawford, « Charles Stuart, That Man of Blood » in The Journal of British Studies,

vol. 16, n°2, printemps 1977, p.41.

Figure 9 : Fairfax tenant la tête de

Charles Ier, médaillon de la

peinture de Weesop.

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« ‘Cette exécution mémorable’… »

© Études Épistémè, n°15 (juin 2009).

déroutante et oblige à reconsidérer la question du parti pris royaliste de cette

représentation du régicide. De fait, cette image devait paraître sacrilège aux

partisans de Charles Ier, tout comme le médaillon de Fairfax affichant la tête du roi

dans une main et la hache sanglante dans l'autre placé dans le coin supérieur droit

de la peinture de Weesop et reproduit ci-contre (fig. 9). Cette image montre de

façon directe et crue la séparation physique, et il convient de ne pas surestimer les

obstacles à une telle représentation. Il ne faut pas oublier que les gravures visaient

plusieurs objectifs et tout laisse à penser que celles-ci en particulier servaient de

témoignage pour ceux qui n'avaient pas assisté à la scène. Leur diffusion à

l'étranger reflète bien cette prétention à l'information. Dès lors, si certaines de ces

gravures ont été utilisées dans des publications royalistes comme celle de Peter Du

Moulin, étant donnée la vaste circulation des gravures, on peut supposer que celles

de Charles devant Whitehall ont aussi illustré des périodiques de tous bords.

Un autre détail moins évident souligne aussi la perte du roi. Deux

personnages sur l'échafaud – peut-être le Colonel Thomlinson et un officier –

portent les vêtements du roi. De fait, la journée du 30 janvier 1649 était

extrêmement froide et le roi avait revêtu une chemise de plus pour que l'on ne croie

pas que c'était de peur qu'il tremblerait. Dans une narration contemporaine de

l'exécution, le chroniqueur rapporte que « Sa Majesté s'agenouilla sur l'échafaud et

se mit à prier avec l'évêque ; s'étant préparé à la mort, il retira son manteau, donna

sa décoration de Saint Georges et son ruban au Dr. Juxon et ôta sa doublure »23

.

Ceci explique que, loin d'être une invention, les deux vêtements correspondent à ce

que les gens lurent à propos de l'exécution. En outre, le manteau était un symbole

avéré de protection et de pouvoir. L'iconographie de Notre-Dame la représente

parfois avec un manteau de miséricorde, ouvert pour que tous puissent voir les

fidèles qui se placent sous son manteau et recueillent ainsi sa bénédiction. Ce motif

médiéval a non seulement une valeur religieuse, mais aussi une valeur juridique,

tirée de la seconde épître aux Corinthiens : « Aussi gémissons-nous dans cet état,

ardemment désireux de revêtir par-dessus l'autre notre habitation céleste, si

toutefois nous devons être trouvés vêtus, et non pas nus » (2 Co 5, 2). Dans la

théorie de l'État, le manteau protecteur fut réinterprété comme le vêtement royal et

conserva toute sa symbolique de défense et d'abri. Nous évoquions plus tôt les

représentations de Charles Ier agonisant, vêtu de son manteau d'hermine : celui-ci

symbolise son pouvoir terrestre d'accorder protection et asile à son peuple. S'il est

représenté couché et ainsi vêtu, c'est bien pour signifier qu'il ne s'est pas départi de

cette prérogative. Or ici, le manteau n'est pas flanqué à terre mais un autre

personnage le tient – sans le revêtir – signe du respect que l'on porte encore à sa

valeur symbolique. Charles Ier est ainsi représenté privé non seulement de son chef,

23

Voir R. W., His Majesties speech on the scaffold at White-Hall on Tuesday last Jan. 30 ..., London,

1649, p.6.

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Anne-Laure de Meyer

© Études Épistémè, n°15 (juin 2009).

mais surtout de son pouvoir de protection. Au premier plan, précisément en

dessous du corps décapité, un homme montre la scène du doigt, son manteau posé

sur une épaule, comme s'il glissait de son corps et ne pouvait plus l'abriter. S'agit-il

d'un effet de mode, ou est-ce une transposition du geste de la perte du manteau ?

On pourrait en effet voir là une transposition visuelle : l'attribut que le roi vient de

perdre, le spectateur central le perd aussi, mais de manière plus visible, afin que

tout un chacun prenne conscience du manque que provoque la mort du roi. En

outre, le symbole évoque les vêtements du Christ que les Romains se partagèrent

en tirant au sort. La perte du vêtement marque le moment du dénuement final – et

permet utilement de comparer le défunt roi au Christ.

Le roi est ainsi représenté dénué, vulnérable et divisé. La violence de

l'image – bien qu'atténuée par de nombreux signes d'émotion et de fidélité – est

bien réelle et met en cause le parti pris royaliste de la représentation. L'image se

veut une lecture fidèle des événements, non un panégyrique royaliste.

Des représentations ambigües

Kevin Sharpe s'étonne que le roi ne soit jamais représenté divisé sur le plan

physique dans les gravures contemporaines à l'événement24

. Cette affirmation

excessive venant de l'un des grands spécialistes de l'imagerie du XVIIe siècle

montre combien est nécessaire une étude plus approfondie des images visuelles du

régicide. Le corps du défunt roi n'est pas universellement respecté au XVIIe siècle,

et sa division physique trouve des échos dans certains symboles.

La théorie des deux corps du roi, bien connue depuis qu'Ernst H.

Kantorowicz a publié son œuvre-phare,

prend un sens particulier dans

l'Angleterre de 1649. Les théoriciens du

Moyen-Âge faisaient une distinction entre

le corps naturel du roi, avec les fonctions,

les droits et les besoins de tout être

humain, et le corps politique. Ce dernier,

plus complexe, faisait l'unité de la

communauté du royaume, ce qu'on

appellerait aujourd'hui la société civile.

L'articulation entre ces deux corps est

semblable aux deux natures du Christ : de

même que Jésus est vrai Dieu et vrai

homme et que ces deux natures ne

s'opposent pas mais s'unissent en un seul

24

Voir Sharpe, op.cit., p.294.

Figure 10 : Peeter Huybrechts, Projiis

inventum caput Angla Ecclesia, détail

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« ‘Cette exécution mémorable’… »

© Études Épistémè, n°15 (juin 2009).

être, de même le roi est corps naturel et politique et unit en son être une nature

humaine et une nature mystique. Dans son premier chapitre, Kantorowicz évoque

les problèmes que cette théorie politique pouvait provoquer dans les années 164025

.

Quand le Parlement refusa de se dissoudre en 1642 et en vint aux armes, pour la

première fois un organe d'État se souleva contre son monarque, ce qui requérait

une justification théorique. La théorie officielle de résistance au roi, adoptée par les

parlementaires, avançait que le roi n'était tel que dans la mesure où il siégeait au

sein de son Parlement, idée que résume la formule King-in-Parliament. Or, à partir

du moment où le roi ne siège plus – comme lors des « onze années de tyrannie » –

il ne pouvait légitimement plus incarner le corps politique. A l'inverse, le

Parlement perdait toute signification si le roi n'y siégeait pas. A cela s'ajoutait l'idée

de « lutter contre le roi pour défendre le roi ». De fait, le roi était perçu comme

infaillible, mais potentiellement mal conseillé ; ceci explique les affrontements

entre le Parlement et Thomas Wentworth, comte de Strafford, puis l'archevêque de

Cantorbéry William Laud, qui furent tous deux décapités après les procédures

d'empêchement judiciaire en 1641 et 1645. Le roi ne pouvant avoir tort, ce sont ses

conseillers qui portent la responsabilité du mauvais état du pays. Au cœur de la

résistance au roi se trouve donc la métaphore du corps politique ; le roi, tête du

corps, demeure intouchable tandis que l'on soigne le

corps par amputation. La métaphore du corps politique

était donc bien présente dans la première moitié du

XVIIe siècle, depuis Jacques I

er qui proclamait en 1603

dans le pur esprit de Henri VIII : « Je suis le mari et l'île

toute entière est ma femme légitime ; je suis la tête et

elle est mon corps »26

, jusqu'aux

parlementaires qui cherchaient un

mode de résistance au roi.

Cependant, la métaphore du

corps politique allait petit à petit

prendre un sens nouveau. Si la

métaphore était souvent employée,

elle ne l'était que brièvement et sans

l'éclat, ni l'originalité que l'on trouvait

auparavant. Lors du Court Parlement

en avril et mai 1640, John Pym qui prit

la tête de l'opposition parlementaire

refusa de voter les subsides demandés

par le roi tant que les abus royaux ne seraient pas débattus, car le

25

Voir Kantorowicz, op.cit., p.20-23. 26

Cité dans David G. Hale, The Body Politic, La Haye, Mouton, 1971, p.111.

Figure 11 : Le

discours de Charles,

détail de To the

sacred memorie...,

Londres, 1649

Figure 12 :

Le geste du

roi, détail de

A list of the

names...

Londres,

1649

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Anne-Laure de Meyer

© Études Épistémè, n°15 (juin 2009).

Parlement était « au bien public ce

que l'âme était au corps »27

. Ainsi,

insensiblement, le Parlement passe-t-

il du rôle de corps politique à celui

d'âme puis à celui de tête avec la mort

du roi. Avec la mort du roi, note

David Hale, la métaphore politique

des deux corps du roi s'éteint,

subsumée dans les théories de contrat,

notamment celle de Hobbes où le

corps devient politique et artificiel28

.

Dans The Tenure of Kings and

Magistrates, Milton n'hésita pas à

fustiger l'hypocrisie de que cachait la

théorie de deux corps. De fait, si les

Presbytériens « jurèrent de protéger le

roi ainsi que sa couronne et sa

dignité », ils n'hésitèrent pas à « s'en

prendre à lui et à mettre sa vie en

danger par leurs méfaits »29

. Le corps

juridique du roi, loin d'être protégé

contre les abus perpétrés par le corps

naturel, souffre et meurt avec lui

selon Milton. Le terme « roi » ne doit

faire référence qu'à la seule fonction

et non à la personne qui l'occupe, ou tout au moins, n'est roi que celui qui en

occupe l'emploi, un roi démis n'est donc plus un roi. Dès lors, pour tuer un roi, il

faut s'en prendre à lui tant qu'il occupe le trône, au risque de perpétrer un

homicide30

. Dans la perspective de Milton, il n'y a qu'un seul corps, celui de la

royauté, ne serait-ce parce qu'il est impossible pour une seule personne de se

trouver doublée : « L'hostilité et la soumission à un seul et même roi ne peuvent

pas plus coexister qu'une personne ne peut être en deux lieux différents en même

temps »31

. Milton considère le roi en termes de fonction plus qu'en termes de

27

Hale, op.cit, p.118. 28

Hale, op.cit., p.116. 29

Ma traduction. « Yet, while they thus assaulted and endangered it with hostile deeds, they swore to

defend it, with crown and dignity » (John Milton, The Major Works, Stephen Orgel & Jonathan

Goldberg (eds.), Oxford, Oxford University Press, 2003, p.292) 30

Ma traduction. « Who knows not that the king is the name of dignity and office, not of person? Who

therefore kills a king, must kill him while he is a king » (Milton, ibid., p.294). 31

Ma traduction. « Hostility and subjection [...] can no more in one subject stand together in respect

of the same king than one person at the same time can be in two remote places » (Milton, op.cit.,

p.292).

Figure 13 : Peter Huybrechts, Projis

inventum caput..., 1649

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« ‘Cette exécution mémorable’… »

© Études Épistémè, n°15 (juin 2009).

personne, et refuse ainsi la fiction légale qui faisait du roi une personne sacrée.

La notion de corps politique est donc en pleine transition sur le plan

idéologique, ce qui a des incidences sur ses représentations visuelles. De fait, la

décollation de Charles Ier met elle aussi la théorie des deux corps à mal. L'acte de la

décapitation est en lui-même problématique : fortement symbolique, celle-ci

consiste à séparer un corps de son chef, au sens propre et figuré. Un tel choix ne

pouvait laisser indifférent, car ce symbolisme diffère de celui d'autres exécutions.

Par exemple, la pendaison ou l'étranglement ne suppriment pas l'unité du corps

supplicié ; quant à l'empoisonnement, il préserve le corps dans son unité à défaut

de respecter son intégrité. La décapitation offre un symbole fort sous plusieurs

aspects : elle prive le condamné de la source de ses actes mais, selon la métaphore

de la société comme corps, elle prive le peuple de son dirigeant. Si le roi est,

comme l'affirmait Jacques Ier

, la tête du corps que forme le pays, lui couper la tête

revient à rendre la nation inopérante. Un tel symbole ne pouvait laisser indifférent

un peuple habitué à la théorie des deux corps du roi et sensible à la symbolique.

De toutes les gravures des années 1649-1653 retrouvées, beaucoup – à

l'exception de celles de Charles devant Whitehall – ne présentent pas l'exécution

proprement dite mais le discours final ou la dernière prière de Charles Ier. Ce choix

a des incidences avantageuses : il permet de ne pas représenter le roi mort ou

divisé mais d'un seul tenant, debout ou à genoux. Ainsi, deux gravures de Londres

de 1649 le montrent-elles très digne, le bras tendu. Dans l'une, il nie avoir peur en

montrant au bourreau le billot. De l'autre main, il tient un parchemin – son discours

– signe non seulement de sa dernière volonté mais aussi de sa royauté puisqu'il est

l'origine des lois, la source des écrits légaux (fig. 11). Dans l'autre gravure, il

désigne le billot d'un geste magnanime, comme pour dire son auguste pardon aux

responsables de sa mort prochaine (fig. 12). La fenêtre à l'arrière-plan encadre

favorablement sa silhouette, il reste le centre de toute l'attention, comme du temps

de sa royauté resplendissante. Le corps politique ne témoigne d'aucune

vulnérabilité : la division qui l'attend est évoquée mais non montrée.

Une gravure qui illustre les

confessions de Richard Brandon,

bourreau de son état, attire tout

particulièrement l'attention (fig.

14). En sus de son absence de cadre

architectural, elle présente le cou du

roi grossièrement tranché et

remplacé par un blanc, raccourci

visuel qui évoque bien la vacance

mais occulte tout détail sordide. Ce Figure 14 : frontispice de The confession of

Richard Brandon... détail

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Anne-Laure de Meyer

© Études Épistémè, n°15 (juin 2009).

qui paraît irrévérencieux ici n'est pas l'absence de sang mais plutôt le corps écrasé

du roi. Le plan en plongée donne en effet une impression d'humiliation,

d'écrasement, de défaite du souverain. Cependant, cette illustration, par le fait

même qu'elle faisait sans doute partie des images-type utilisées pour toutes les

exécutions, n'est pas nécessairement un cas d'absence de révérence pour le corps du

roi. Il est difficile de savoir si elle a d'abord été gravée pour le 30 janvier ou pour

une autre exécution, mais l'effet reste le même : en la choisissant pour illustrer sa

ballade, l'auteur ne met pas l'accent sur la dignité du roi mais bien plutôt sur

l'aspect spectaculaire de la mort d'un exécuté.

De nombreuses gravures étrangères ne reculent pas devant la description de

l'horreur de la scène. Ainsi, la gravure allemande de Peeter Huybrechts figure un

public indifférent (fig. 13). Le

bourreau qui tient la tête se penche

pour la regarder avec un peu de

curiosité. Le sang jaillit à flots, le

corps décapité semble effondré et le

roi a les yeux mi-ouverts. Les autres

individus présents sur l'échafaud ne

s'intéressent pas beaucoup à la

scène : l'un regarde les vêtements et

la décoration de Saint Georges qu'il

porte dans ses bras, l'autre n'est

guère plus attentif. Seul le

personnage de droite regarde la tête

coupée avec un certain sérieux. Une

autre gravure néerlandaise présente

aussi l'exécution de façon fort crue :

au second plan se trouve l'échafaud

sanglant, strié de biffures qui

jaillissent de la bouche de l'hydre au

premier plan (fig 15). Dans l'angle

inférieur droit de l'image, l'hydre écrase de sa patte la tête tranchée de Charles Ier

.

Ainsi, les graveurs du continent avaient-ils peu d'inhibitions à représenter le roi

séparé de sa tête. Peut-être les gravures hollandaises ont-elles bénéficié d'un

contexte politique favorable avec le rejet de la monarchie espagnole.

Certaines images anglaises n'hésitent pas non plus à dénigrer le corps du

roi. Ainsi, le jeu de cartes « the Knavery of the Rump » présente en dix de trèfle

Olivier Cromwell en train d'implorer la grâce de Dieu avec ses compagnons tandis

que Charles Ier est exécuté au second plan (fig. 16). Les illustrations satiriques de

Figure 15 : Het Tooneel Der Engelsche

Ellenden. Thomason Tracts. Amsterdam,

1649

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« ‘Cette exécution mémorable’… »

© Études Épistémè, n°15 (juin 2009).

ce jeu de cartes furent tirées des gravures de Francis

Barlow et publiées par Randal Taylor en 1679. Les

éléments architecturaux permettent de séparer

clairement les deux plans et confèrent à l'image une

portée symbolique : Cromwell, à l'intérieur, est

dessiné en-dessous d'une fenêtre et s'inscrit dans une

diagonale dynamique qui suit les mains tendues en

prière et monte vers l'angle supérieur gauche. À

l'inverse, une autre diagonale marquée par les tons

plus foncés des ombres dans les vêtements attire l'œil

vers la scène extérieure et se trouve renforcée par le

corps allongé de Charles Ier. Cette grande croix

visuelle rend la lecture de l'image difficile : au lieu de

créer un point de convergence vers lequel le regard

irait se reposer ou de créer une circularité qui serait

attendue dans un sujet narratif, l'illustrateur choisit

d'éclater le regard par cette grande croix de lignes de

force dans un hiatus visuel. Une impression

d'éparpillement, de dissémination, voire même de

dislocation en ressort. Cependant, si le jeu de cartes

est résolument en faveur du roi, Francis Barlow n'hésite pas à montrer le roi

allongé et menacé. Doit-on y voir une contradiction ? Au contraire, il s'agit peut-

être d'un signe de la limite de la théorie des deux corps du roi. La division et

l'humiliation du corps du roi ne sont plus l'infamie qu'on a cru, elle reflètent un

événement historique dont la portée symbolique n'a pu être surévaluée.

En fin de compte, les images prouvent combien le spectacle du 30 janvier

1649 échappa à la maîtrise de ses instigateurs et ne fut pas sujet à une lecture

univoque. Les représentations n'illustrent pas le triomphe de l'idéologie

républicaine, pas plus que la résistance du corps du roi à la mort. Elles montrent le

roi dans tous ses états : tantôt saint et martyr, tantôt en pleine déclamation, parfois

privé de sa tête, parfois menacé par la hache, ou encore imperturbable malgré la

menace de sa mort. Si beaucoup arborent un parti pris royaliste, ce n’est pas le cas

de toutes. La plupart visent à dresser un tableau de la scène du 30 janvier 1649, de

façon plus ou moins historique. Loin d'être des instruments d'une propagande

royaliste hypothétique, les représentations sont davantage des chroniques d'un

événement qui fit sensation.

Figure 16 : le dix de

trèfle, carte à jouer

gravée par Francis

Barlow

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