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Page 1: Web viewThème 4 : Les échelles de gouvernement du monde : L’échelle continentale. Le projet d’une Europe politique depuis le Congrès de la Haye en 1948

Thème 4 : Les échelles de gouvernement du monde : L’échelle continentale.

Le projet d’une Europe politique depuis le Congrès de la Haye en 1948

Introduction :

Ce chapitre porte sur la construction européenne. Cette expression (à apprendre comme toutes celles en gras !) est utilisée pour parler du processus historique d’intégration régionale des pays d’Europe.

Intégration régionale : Processus de rapprochement entre plusieurs Etats géographiquement proches à travers la mise en place d’organisations politico-économiques. Jusque là nous avons surtout vu des exemples de zones de libre-échanges, ou d’unions douanières (intégration seulement économique), mais l’Union   Européenne   (UE)   est l’exemple   le   plus   aboutit d’intégration régionale et elle concerne aussi le domaine politique. (Rappel pour la géographie : en général, en géographie, on parle beaucoup d’intégration régionale car les organisations économiques (Mercosur, Alena) permettent une augmentation des flux et des réseaux d’échanges entre les territoires concernés. Du coup ces territoires se retrouvent intégrés dans les flux mondiaux et donc dans la mondialisation !).

Le projet d’unir tous les pays du continent est très ancien. Victor Hugo, en 1848 déjà, voulait une union des nations du continent dans le respect des cultures nationales. Mais ce projet pose une question fondamentale qui tourne autour du concept de souveraineté. La souveraineté est le droit exclusif que possèdent les Etats à gouverner un peuple sur un territoire (ça veut dire que normalement, seulement l’Etat a le droit de prendre des décisions politiques). Or, le projet européen cherche à mettre en place une autorité qui serait au-dessus de celle des Etats et donc elle menace la souveraineté des Etats. Du coup, on trouve trois postures principales autour de cette relation  entre   souveraineté  nationale  et   intégration régionale.

Le fédéralisme : les acteurs qui veulent créer une Europe fédérale, c’est à dire un modèle d’intégration où tous les pays d’Europe mettraient en commun leur souveraineté au sein d’une seule autorité politique européenne élue démocratiquement et dont les lois s’appliqueraient dans tous les Etats membres. Ce serait un peu comme la Suisse (pays fédéral) : il y a un gouvernement national mais les cantons ont une certaines autonomie (donc il y aurait un gouvernement européen mais les pays garderaient une certaine autonomie). L’idée de mettre une autorité européenne au-dessus de la souveraineté des Etats s’appelle la supranationalité (supra = au-dessus, donc au-dessus des nations).

L’unionisme ou confédéralisme :  les acteurs de ce courant veulent une Europe des Etats, c’est-à-dire une simple coopération entre les Etats qui conserveraient donc leur souveraineté. Cette idée s’appelle l’intergouvernementalité.

Le souverainisme : c’est le courant politique qui s’oppose au projet d’une Europe politique et fédérale, et souhaite l’affaiblissement, voire la suppression des institutions européennes.

Les unionistes sont donc plus souverainistes que les fédéralistes même si les deux courants sont pour la construction européenne.

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Plan du cours :I. Les premières étapes du projet politique européen (1948-fin des années 1960)

II. La définition du projet européen : de la CEE à l’Union européenne (1969-1993)III. Une Union Européenne en crise ?

I. Les   premières   étapes   du   projet   politique   européen (1948-fin des années 1960)

a. Contexte :

L’après-guerre : La construction européenne est une idée ancienne, mais elle se commence à se

concrétiser à la fin de la Seconde Guerre mondiale. C’est assez logique : dans l’après-guerre, on cherche à éviter un nouveau conflit donc les Etats fassent la paix et collaborent plus facilement entre eux. En 1945, les Etats européens cherchent donc des points communs sur lesquels baser cette coopération. Ils en trouvent en tous cas trois qui sont aujourd’hui encore les piliers du projet européen : la démocratie libérale, la volonté de maintenir la paix et le libéralisme économique.

Une des figures clés de cette époque est l’ancien premier ministre britannique Winston Churchill qui, dès 1946, prononce un célèbre discours à l’université de Zurich dans lequel il invite les pays européens à constituer les « Etats-Unis d’Europe ».

Les partisans de cette collaboration entre les pays d’Europe s’appellent les européistes. Ils se réunissent du 7 au 10 mai 1948 au Congrès de La Haye qui réunit 17 pays européens. C’est la date officielle des débuts de la construction européenne.

Ce congrès voit déjà s’opposer les  fédéralistes  (qui veulent une autorité supranationale) et les unionistes  (qui veulent une coopération économique intergouvernentale), représentés par Churchill. Ce sont les unionistes qui l’emportent : ce n’est pas une fédération qui est créée lors du Traité de Londres mais un Conseil de l’Europe (mai 1949), dont le siège est placé à Strasbourg. Les objectifs à long terme de ce conseil seraient la libre-circulation des marchandises, la coordination des politiques économiques, la mobilité de la main-d’œuvre. Une des réalisations les plus célèbres de ce Conseil : en 1950, il rédige la Convention Européenne  des  Droits  de   l’Homme (encore en vigueur).

Les hommes politiques ou hauts fonctionnaires qui ont mis en place les premières coopérations économiques et politiques entre les Etats sont appelés les « pères fondateurs » de l’Europe. Les plus importants sont Pierre Monnet et Robert Schuman (France), Alcide de Gasperi (Italie), Konrad Adenauer (Allemagne), Paul-Henri Spaak (Belgique).

La guerre froide Il existe (encore !) une autre opposition à cette époque-là : celle qui oppose les

européistes et les atlantistes. L’atlantisme est un courant politique se fondant sur le soutien militaire américain et l’alignement sur les positions américains en politique étrangère. L’objectif de cette alliance est de défendre les valeurs communes des Etats membres : démocratie, droits de l’Homme, libertés individuelles. Ainsi, dans le domaine politique et  militaire, l’intégration ne se fait pas à l’échelle du continent européen mais à l’échelle de l’Atlantique Nord (Etats-Unis et Europe de l’Ouest) dans le cadre des débuts de la Guerre Froide et de la lutte contre le bloc soviétique. Les pays européens préfèrent la protection militaire américaine à un projet européen

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autonome. Ainsi, le 4 avril 1949, dix Etats d’Europe de l’Ouest signent le traité de l’Atlantique Nord, fondateur de l’OTAN.

Mais dans le domaine économique, l’européisme avance. A partir de 1947, la doctrine de l’endiguement du Président Truman se concrétise par le Plan Marchall pour aider les Européens à se reconstruire. Pour se répartir cet argent, les Européens créent l’Organisation  Européenne   de   Coopération  Economique   (OECE) en 1948 (c’est la première organisation économique européenne).

b. Une construction surtout économique dans ses débuts

La CECAL’OECE se borne à coordonner l’aide économique mais elle ne prévoit pas d’harmoniser les économies des différents pays européens (de faire en sorte qu’elles se complètent). Pour palier à se manque, le ministre français des Affaires étrangères Robert Schuman propose de créer la Communauté   européenne   du   charbon   et   de   l’acier   (CECA) (2e organisation économique européenne). Le « plan Schuman » est mis en place le 18 avril 1951 : la sidérurgie de 6 pays (RFA, Italie, France, Luxembourg, Belgique, Pays-Bas) est administrée par une autorité supranationale indépendante des Etats, basée à Luxembourg. Cette organisation est économique, mais elle a aussi des conséquences politiques : des pays s’échangeant des produits stratégiques ne se font pas la guerre. La CECA marque ainsi les débuts de la réconciliation franco-allemande.

La CEDDans le domaine politique et militaire, le projet européen vit sa première crise au début des années 1950 :

Les Etats-Unis envisagent alors de réarmer la RFA (Allemagne de l’Ouest) dans le cadre de la Guerre Froide. La France s’oppose à cette initiative mais face à l’insistance des Etats-Unis, un compromis est proposé. La RFA pourra avoir une armée mais non pas sur une base nationale, qui lui redonnerait sa pleine souveraineté, mais dans un cadre européen supranational.

En 1952, les six membres de la CECA signent le projet de Communauté Européenne de Défense (CED) pour créer une armée européenne avec toutes les armées de ces pays, dont l’armée allemande. Mais ce projet soit ensuite être accepté par les Parlements de tous ces pays pour être mis en œuvre1. Or, en France, les députés gaullistes (opposés au réarmement de l’Allemagne et souverainistes) et les communistes (qui dénoncent un projet militaire dirigé contre le bloc soviétique) s’opposent au projet et il est rejeté en 1954, ce qui marque la fin du projet d’une union politique.

La CEE Les pères de l’Europe renoncent donc à créer une union politique et vont focaliser

leurs efforts sur l’union économique (mais dans leur logique, tout rapprochement économique devrait favoriser un rapprochement politique futur, les deux éléments ne sont donc pas si détachés). En 1955, lors de la Conférence de Messine, ils lancent le projet de créer un marché commun. Leurs initiatives aboutissent le 20 mars 1957 sur la signature des deux traités de Rome. Le premier crée la Communauté Economique Européenne (CEE) et le second traité (traité « Euratom ») cherche à coordonner les politiques énergétiques nucléaires des différents pays.

1 Comment on crée un traité international ? Ce sont d’abord les représentants de chaque pays qui signent le traité, mais ensuite le traité doit être accepté soit par la population (référendum au suffrage universel), soit par un vote du Parlement. Ce vote s’appelle une ratification. Chaque traité doit donc être à la fois signé et ratifié pour être mis en œuvre.

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Le but de la CEE est de créer un marché commun sans douanes où les hommes, les marchandises et les capitaux circuleront librement. Les institutions de la CEE sont complexes car elles tiennent compte de la division entre fédéralistes et unionistes. Les deux principales :

o La Commission   européenne installée à Bruxelles fait des propositions et exécute les décisions => fonctionnement supranational.

o Le Conseil des ministres a l’essentiel du pouvoir : il prend toutes les décisions qui doivent être acceptées à l’unanimité quand elles sont importantes (sinon, à la majorité) => fonctionnement intergouvernemental (ce sont les ministres des Affaires étrangères que chaque pays qui y siègent).

Au niveau économique, la CEE connaît un certain nombre de succès (contexte des Trente Glorieuses !) : zone de libre-échange protégée par un tarif extérieur commun, croissance économique qui relance les entreprises européennes et stimule les progrès techniques… Elle met en place une série de politiques communes : la Politique Agricole   Commune   (PAC)  entre en vigueur en 1962, elle permet à la CEE d’être autosuffisante et même excédentaire dans le domaine agricole. Dès 1968, les travailleurs peuvent circuler librement dans ces pays. Les économiques  des  pays membres deviennent de plus en plus interdépendantes.

Les tensions au sein de la CEE Comme nous l’avons vu, les gaullistes sont généralement défavorables à la

construction européenne car ils sont souverainistes. Or, en 1958, De  Gaulle est rappelé au pouvoir. Il ne peut pas vraiment remettre en cause la participation française à la CEE car elle est très profitable pour l’économie, du coup, il devient le principal porte-parole des unionistes contre les fédéralistes et freine les projets. Son objectif : utiliser la CEE pour augmenter la puissance française  (surtout vis-à-vis des Etats-Unis alliés mais aussi rivaux), mais sans perdre de souveraineté.

Il privilégie donc la coopération avec l’Allemagne fédérale plutôt qu’avec les autres pays, c’est les débuts de l’axe Paris-Bonn ou « couple franco-allemand » qui s’avérera un des moteurs de la construction européenne. Cette coopération s’explique aussi par le fait que De Gaulle est contre l’atlantisme, il veut que la France regagne son autonomie vis-à-vis des Etats-Unis et donc il se rapproche d’un autre pays de l’OTAN pour peser plus lourd dans les relations internationales.

Les britanniques posent aussi problème. Ils se sont tenus à l’écart de la construction européenne jusque là (pas membres de CECA, CED ni CEE) car ils souhaitent garder des liens privilégiés avec les Etats-Unis et le Commonwealth (organisation qui regroupe les anciennes colonies britanniques). Pour concurrencer la CEE, ils créent l’Association Européenne de Libre-échange (AELE) en 1960 (avec la plupart des pays d’Europe de l’Ouest qui ne sont pas membre de la CEE). Mais la croissance économique de l’AELE est inférieure à celle de la CEE alors le Royaume-Uni se porte candidat pour adhérer à la CEE en 1961.

De Gaulle s’oppose   à   cette   candidature car pour lui, les Britanniques sont politiquement dépendants des Etats-Unis et donc ne peuvent pas entrer dans une organisation qui cherche à s’affranchir de la domination américaine. Il met son véto de 1963 à 1967. En 1965, la France refuse même de participer aux négociations. Le Conseil veut que les décisions ne soient plus prises à l’unanimité mais à la majorité, alors de Gaulle ne se rend plus aux réunions (politique de la chaise vide) et bloque ainsi toutes les décisions jusqu’à ce que la règle de l’unanimité soit rétablie.

En résumé : de 1948 à la fin des années 1960, la construction européenne avance bien dans le domaine économique mais elle est freinée dans le domaine politique par les divisions entre fédéralistes, unionistes, européiste, souverainistes et atlantistes !

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II. La définition du projet européen : de la CEE à l’Union européenne (1969-1993)

Question centrale : quelles sont les étapes qui permettent de passer d’un projet resté économique à une construction plus politique ?

a. Approfondissements et élargissements L’intégration européenne se caractérise par deux processus principaux :

l’élargissement et l’approfondissement. L’élargissement désigne l’adhésion de nouveaux Etats membres à l’Union européenne. l’approfondissement  est synonyme d’une intégration sans cesse plus étroite entre les membres appartenant déjà à l’Union (par exemple, les accords de Schengen ou l’adoption de l’euro marquent un approfondissement de l’intégration européenne).

En 1969, après le départ du général de Gaulle, et l’arrivée au pouvoir de nouveaux dirigeants en France (Georges Pompidou) et en Allemagne (Willy Brandt), la construction européenne prend un nouvel élan et surtout, elle s’élargit. Le 1e  janvier 1973, le Royaume-Uni, l’Irlande et le Danemark intègrent la CEE (l’Europe des six devient l’Europe des neuf). En 1981, c’est au tour de la Grèce d’entrer dans la CEE, puis en 1986 de l’Espagne et du Portugal.

L’approfondissement : Dans les années 1970, à côté de cet élargissement, il y a aussi approfondissement. En

1974, lors du sommet de Paris, la CEE décide de créer un Conseil européen, composé des chefs d’Etat et de gouvernement, pour décider des politiques de la communauté européenne. On a donc (voir schéma PPT) :

o Un Conseil   européen (fonctionnement intergouvernemental) qui oriente désormais le Conseil des ministres (aussi intergouvernemental) qui lui met en œuvre des décisions.

o Dès 1979, le Parlement européen, dont les députés étaient jusque là élus par les gouvernements de chaque pays, est élu au suffrage universel direct, c’est-à-dire par les citoyens, ce qui lui confère plus d’autorité. Ce parlement contrôle la Commission   européenne, désormais nommée par le Conseil européen.

La création de ce Parlement s’accompagne donc de la création de partis politiques supranationaux (pas liés à un seul pays). De manière intéressante, ces partis ne sont pas divisés par le clivage habituel gauche/droite mais par celui entre fédéralistes et unionistes !

Sur le plan économique, en 1979, le Système Monétaire Européen (SME) est mis en place, ainsi qu’une monnaie de compte : l’ECU (Unité de compte européenne) qui remplace le dollar comme monnaie de référence pour décider des taux de change (ce n’est pas une vraie monnaie, elle sert juste à déterminer la valeur des autres monnaies. Comme elle est plus stable que les autres monnaies, elle dote la CEE d’une zone de stabilité monétaire).

Dans les années 1980, cet approfondissement s’accélère, notamment grâce à François Mitterrand (France) et Helmut Kohl (Allemagne) (toujours le couple franco-allemand !). En 1985, les accords de Schengen permettent la libre circulation des personnes entre

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les pays signataires (mais il s’agit seulement de France, RFA, Belgique, Pays-Bas et Luxembourg à ce moment-là).

Le 17   février   1986, les membres de la CEE signent l’Acte   unique   européen qui augmente le pouvoir de la Commission et du Parlement, étend largement le vote à la majorité (presque plus de décisions ne doivent être prises à la majorité), prévoit pour 1993 un marché européen sans frontières intérieures et renforce la coopération technologique, environnementale et dans les affaires étrangères. C’est l’avancée la plus importante pour la construction européenne depuis le traité de Rome.

Les tensions liées à l’élargissement et à l’approfondissement : L’approfondissement de l’intégration se fait donc au profit des fédéralistes et suscite

naturellement des réticences chez les unionistes. Le principal pays unioniste est le Royaume-Uni. Son premier ministre, Margaret Thatcher est même souverainiste. Dès 1973 (contexte de crise économique), elle exige que les conditions de son adhésion soient renégociées car elle refuse que la participation financière du Royaume-Uni à la CEE soit plus élevée que les bénéfices qu’il en retire. Du coup, elle obtient une forte réduction de la contribution financière de son pays à la CEE.

La crise économique des années 1970 voit aussi l’apparition de l’euroscepticisme. Ce terme désigne l’ensemble des doutes ou des critiques formulés à propos du projet, des institutions et des résultats des politiques mises en œuvres par l’UE. C’est donc un courant varié (il peut aussi bien être à droite qu’à gauche, mais très souvent, il remet en cause le libéralisme économique).

A la fin des années 1980, la CEE reste donc une entité purement économique, sans dimension sociale et avec des institutions politiques renforcées, mais qui demeurent faibles. Chaque Etat membre lui verse une contribution financière inférieure à 1% de son PIB.

b. L’Europe de Maastricht

Contexte :La fin de  la  Guerre Froide amène de profonds bouleversements en Europe. En novembre 1989, le Mur de Berlin est ouvert et moins d’un an après, l’Allemagne est réunifiée. A partir de 1991, l’ordre bipolaire qui réglait les relations internationales et coupait l’Europe en deux depuis 1945 prend fin. La CEE cherche alors à imposer son indépendance vis-à-vis des Etats-Unis, mais aussi de se rapprocher de l’Europe de l’Est. De nombreux pays d’Europe centrale et orientale demandent à adhérer à la CEE pour consolider la démocratie et adopter le libéralisme économique. La construction européenne doit donc désormais se faire à l’échelle de tout le continent. Pour faire face à ce défi, la CEE décide d’évoluer et de devenir une union politique.

Le traité de Maastricht :Le 2 février 1992, les 15 pays membres de la CEE signent le traité de Maastricht. La CEE change de nom : elle devient l’Union Européenne (UE).

Au niveau économique, le traité prévoit l’instauration d’une monnaie unique, l’euro régit par la Banque centrale européenne. En 1999, l’euro est introduit sur les marchés financiers, puis mis en circulation en 2002. Les pays qui ont adopté l’euro sont appelés les pays de la « zone euro » (17 membres). La monnaie unique est donc un élément unificateur de l’Europe.

Mais le traité prévoit surtout un approfondissement de l’intégration politique : o Coopération en matière de Politique   Etrangère   et   de   Sécurité   Commune 

(PESC) (par exemple, délivrance des visas, droit d’asile, contrôle de l’immigration) et coopération juridique et policière.

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o Une citoyenneté européenne est mise en place : un européen vivant dans un autre pays de l’UE peut y voter et être élu aux élections locales et européennes.

o Les pouvoirs du Parlement européen sont augmentés. Dès 1997, avec le traité d’Amsterdam, la convention de Schengen est intégrée aux

accords de l’UE et sa zone est donc agrandie.

Les limites de Maastricht Le sentiment eurosceptique augmente en Europe au début des années 1990. Les

Danois votent contre l’adoption du traité de Maastricht et en obtiennent un remaniement afin de rester dans l’UE. Les Français (qui sont les champions de l’euroscepticisme) ne l’adoptent qu’à une faible majorité (51%). Ils accusent l’UE d’être responsable de la montée du chômage.

Une autre critique est le manque  de   transparence  des  procédures. Les décisions importantes doivent toujours être prises à l’unanimité et on se sait pas comment ont lieu les négociations. Les Etats se font pression les uns sur les autres et recourent parfois au marchandage. Les pays puissants ont donc plus facilement gain de cause…

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III. Une Union européenne en crise ?

a. Une Europe à géométrie variable

Les élargissements consécutifs au traité de Maastricht : En 1995, l’UE accueille l’Autriche, la Finlande et la Suède. En vue de l’élargissement de l’UE vers les pays de l’Europe de l’Est, l’UE adopte le 1e 

février 2003 le traité de Nice pour modifier ses institutions. Il définit un équilibre entre les grands et les petits Etats, plus nombreux mais avec des populations moins grandes, et remplace le vote à l’unanimité par le vote   à   la  majorité dans le Conseil des ministres.

Le 1e mai 2004, s’opère le plus grand élargissement jamais réalisé par l’UE, avec 8 pays d’Europe centrale et orientale (Estonie, Lettonie, Lituanie, Slovaquie, Slovénie, Pologne, République tchèque, Hongrie) ainsi que Chypre et Malte. Le 1e janvier 2013, la Croatie y entre à son tour.

Donc avec l’élargissement et l’approfondissement de la communauté européenne on arrive à un modèle d’intégration régionale ni fédéraliste, ni unioniste (un peu des deux). Mais au fur et à mesure qu’elle s’élargit et se complexifie, elle rencontre de plus en plus de résistances.

Une Europe encore très divisée Tous les Etats ne sont pas volontaires pour toutes les politiques européennes, c’est

pourquoi on parle d’une Europe à géométrie variable. La limite de l’Europe dépend de si on prend en compte les pays membres de la zone euro, ceux qui ont signé les accords de Schengen, les pays candidats, etc. Le Danemark, la Suède et le Royaume-Uni ne font par exemple pas partie de la zone euro.

De même, l’intégration européenne ne concerne pas tout le continent. Certains pays refusent actuellement toute participation à l’UE. Par exemple, la Suisse refuse d’adhérer à l’UE car cette adhésion remettrait en cause le secret bancaire et

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menacerait le secteur agricole qui devrait s’adapter au PAC. La Norvège refuse également d’adhérer car les lois sur la pêche de l’UE ne lui conviennent pas et qu’en tant que puissance pétrolifère et gazière, elle est autonome économiquement.

Par ailleurs, les Britanniques continuent à privilégier l’atlantisme (en d’autres termes, leurs liens privilégiés avec les Etats-Unis) à l’européisme. Encore aujourd’hui, il y a une forte division entre les pays partisans d’une Europe-puissance comme la France et l’Allemagne (fédéralistes) et ceux qui préfèrent un simple marché commun avec des règles flexibles comme le Royaume-Uni (unioniste). Les divergences au sujet de l’union politique restent donc très fortes.

Les pays de l’UE cherchent à parler d’une seule voix dans les relations internationales mais ils peinent beaucoup. Par exemple, les pays se sont divisés sur la guerre en Irak (2003), l’intervention en Lybie (2011) et aucun Etat ne soutient concrètement l’intervention française au Mali (2012). La politique étrangère commune n’est donc pas effective.

Autre facteur de division : l’arrivée des pays de l’Europe de l’Est augmente les disparités et déséquilibres économiques entre les pays membres (les pays du centre de l’Europe sont beaucoup plus puissants que les autres). Certains pays comme la France et l’Allemagne ont ainsi une position de puissance, contrairement aux pays de l’Est qui doivent souvent se plier à leurs décisions.

b. L’UE en crise ?

Le projet de Constitution européenne Le projet de Constitution européenne est adopté le 29 octobre 2004 (c’est le projet de

créer une constitution (ensemble des lois) partagée par tous les pays d’Europe et donc supranationale : pour régler un litige judiciaire, c’est la constitution européenne qui aurait été plus importante que celle des Etats). Mais cette constitution devait ensuite être ratifiée (acceptée) par les populations de tous les 25 pays membres. En 2005, les Français et les Néerlandais votent contre cette constitution… Cet événement constitue l’un des échecs les plus importants de la construction européenne.

Ce refus s’explique par l’euroscepticisme : o Ce refus peut s’expliquer par le désintérêt ou l’incompréhension du traité par

la population mais aussi par un sentiment nationaliste trop fort qui mène au souverainisme…

o Ce refus montre aussi que l’UE a ce que l’on appelle un « déficit démocratique », c’est-à-dire que les citoyens des pays concernés n’ont pas l’impression d’être associés ou d’avoir leur mot à dire dans la construction européenne qui se fait surtout entre chefs d’Etat.

o Malgré les avancées de la construction européenne, il n’existe pas vraiment de sentiment d’appartenance à l’UE de la part des citoyens souvent opposés à la perte de souveraineté qui accompagne l’intégration régionale.

Le traité de Lisbonne Pour surmonter l’échec de 2005, le Conseil européen adopte le 23 juin 2007 le traité 

« modificatif »   de   Lisbonne qui reprend les aspects principaux de la constitution européenne et est ratifié par tous les Etats membres (en France par voie parlementaire et non pas par suffrage universel).

Ce traité définit les règles de vote à la majorité qualifiée (c’est-à-dire que le vote tient compte du poids démographique des Etats membres : plus un Etat a de population, plus il a de voix) et non plus à l’unanimité, crée un poste de Président de l’UE et renforce le pouvoir du Parlement et des citoyens.

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Actuellement, pour décider une loi (excepté pour la politique étrangère et de défense, qui suit la règle de l’unanimité) la « méthode   communautaire » domine : la Commission européenne propose lois et directives, le Conseil européen des chefs d’Etat et de gouvernement adopte à la majorité qualifiée et le Parlement amende le projet et vote. Chaque Etat membre intègre ensuite le texte à ses lois nationales.

La crise financière (2008) La crise économique de 2008, suivie de celle de la dette qui secoue la zone euro en

2011, augmente les tensions entre les Etats membres. L’Europe oblige à une solidarité continentale mal vécue par les peuples appelés à l’aide d’une part (les Allemands, par exemple qui ne veulent pas payer pour la dette des autres) et par ceux soumis à de sévères politiques d’austérité d’autre part (Grecs, Espagnol ou Portugais). Les tensions entre les Etats sont donc exacerbées (c’est malheureusement assez logique : quand l’intégration régionale favorise l’économie on est pour, et quand ce n’est plus le cas on ne veut plus s’entraider).

Par ailleurs, l’UE est critiquée car elle met l’accent sur les avancées économiques mais pas assez sur les avancées sociales. Ainsi, pour concurrencer les autres pôles de la Triade et les puissances émergentes, l’UE met en place des politiques économiques qui plongent une partie de la population dans la précarité (par exemple, elle favorise les délocalisations qui profitent aux FTN européennes mais qui font que de nombreux ouvriers européens se retrouvent au chômage, ce qui n’est pas pris en compte). C’est une autre des causes de l’euroscepticisme : la perte de souveraineté liée à l’intégration européenne a amené le démantèlement de l’Etat-providence dans de nombreux pays (les Etats se désengagent au niveau des politiques sociales).

Conclusion :  Grands avancements au niveau de l’intégration économique européenne : l’euro a

permis à l’UE de devenir un des trois pôles de la Triade, ce qui marque sa puissance économique.

Ces avancées économiques ont permis diverses avancées dans l’intégration politique (Maastricht, Lisbonne). Les pays de l’UE lui transfèrent une part de plus en plus grande de leur souveraineté mais cette tendance est actuellement remise en cause :

o Par la division entre Etats partisans du fédéralisme (France, Allemagne) et ceux partisans de l’unionisme (Royaume-Uni).

o Par la division entre les eurosceptiques (souverainistes, partisans de l’Etat Providence) et l’UE.

o Par les divisions entre Etats riches et puissants et Etats moins riches et puissants au sein de l’UE.

Les dates à retenir :

1948 (7-10 mai) : congrès de La Haye.1951 (18 avril) : traité de Paris fondant la CECA (6 États).1954 : échec de la CED.1957 (25 mars) : traité de Rome fondant la CEE (6 États).1985 (14 juin) : accords de Schengen.1986 (17 février) : Acte unique.1992 (7 février) : traité de Maastricht fondant l’UE.

2002 : mise en circulation de l’euro.2004 (1er mai) : élargissement de l’UE (25 États).2005 : échec du projet constitutionnel.2007 : élargissement de l’UE (27 États) ; traité de Lisbonne (23 juin).2013 (1er juillet) : adhésion de la Croatie à l’UE (28e État).

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