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N° 9 SEPTEMBRE 2004 LA BIBLIOTHÈQUE DE DOCUMENTATION INTERNATIONALE CONTEMPORAINE & SES LECTEURS ÉDITORIAL Directrice de la publication : Geneviève Dreyfus-Armand Rédactrice en chef : Anne-Marie Pavillard Collaboration à ce numéro : C. Ajam, P. Artières, A. Bach, N. Bienvenu, T. Blondet-Bisch, S. Combe, J.-J. Compain, M.-F. Dumoulin, J.-C. Famulicki, M. Franco, M. Lemaître, J.-C. Mouton, C. Penin, F. Pouget, F. Rodriguez, V. Roy, A. Sackman, Y. Tomic, F. Veyron, M. Vidalie P.A.O. et Imprimerie : SPEI BIBLIOTHÈQUE DE DOCUMENTATION INTERNATIONALE CONTEMPORAINE 6, allée de l’Université 92001 Nanterre Cedex (RER A : station Nanterre Université, direction Saint-Germain-en-Laye ou SNCF départ de la gare Saint-Lazare. La BDIC est sur le campus de l’Université de Paris-X-Nanterre) Internet : http://www.bdic.fr Email : [email protected] Vers un système d’information documentaire en histoire contemporaine L a rentrée 2004 correspond à la mise en place de la première des deux phases d’ins- tallation d’un système d’infor- mation documentaire. Il s’agit de l’ouverture au public – via l’Internet – d’un logiciel de consultation de documents nu- mérisés, produits par la BDIC elle-même ou provenant de sources extérieures. Depuis plu- sieurs mois, un groupe de projet travaille au paramétrage de ce système de gestion électronique de documents, en collaboration avec une société informatique choisie par appel d’offres. Les chercheurs auront ainsi accès, sur le site de la BDIC, non seu- lement aux références présentes dans les catalogues informa- tiques de la BDIC, mais aussi aux Vers un système d’information documentaire en histoire contemporaine images et aux archives numérisées. Un annuaire de ressources, en constante évolution, permet déjà d’accéder aux sites WEB relatifs à des questions de po- litique internationale, telles l’élargisse- ment de l’Europe, les droits de l’homme, les conflits du Proche et Moyen-Orient ou les réactions à la mondialisation. De nombreux débats politiques et une grande partie de l’information passent aujourd’hui largement par l’Internet et l’archivage – à intervalles réguliers – d’une sélection pertinente de sites s’im- pose à court terme pour une bibliothè- que consacrée au temps présent. La seconde phase permettant de pa- rachever ce système d’information do- cumentaire en histoire contemporaine devrait être la réalisation d’un portail documentaire, prévue en 2005, dans le cadre du prochain contrat quadriennal actuellement en cours de discussion avec le ministère. Dans une même démarche de recherche, ce portail per- mettra d’accéder aux catalogues de la BDIC, aux images du Musée, mais aussi aux catalogues d’autres bibliothèques et à des sources d’information diversifiées. La conversion numérique des cata- logues manuels – notamment ceux des périodiques et des publications en caractères cyrilliques – devra être ache- vée. Le portail proposera au public un certain nombre de services personnali- sés. Il s’agira d’offrir un outil performant pour la recherche historique permettant de répondre tant aux besoins d’un public spécialisé que d’un public plus large, afin de mieux répondre à la demande sociale grandissante par rap- port à l’histoire de notre temps. D’ores et déjà, à l’automne 2004, plus de 10 000 documents numérisés seront accessibles sur le site de la BDIC, résultat de la première campagne de numérisation d’ampleur menée par la bibliothèque. L’accent a été porté sur la Première Guerre mondiale, tout à la fois période décisive pour la compréhension du XX e siècle et époque de fondation de la BDIC marquant une distance tempo- relle suffisante pour amenuiser les ques- tions de droits. Plus de 6 000 feuillets d’archives seront ainsi consultables : une partie de l’inestimable fonds Paul Mantoux – historien et officier inter- prète lors des conférences interalliées –, des lettres de soldats allemands saisies en France, la campagne de réhabilita- tion du caporal Maupas – fusillé pour l’exemple – menée par sa veuve et l’affaire du Bonnet rouge. Quelques 1 400 clichés photographiques sur Verdun seront visibles sur le WEB ainsi que 303 estampes et peintures originales (de Étienne-Auguste Krier, Karl Lotze, Théophile Alexandre Steinlen et Félix Vallotton). Sur d’autres périodes, seront accessibles les carnets d’Antonio Blanca, républicain espagnol interné en 1939 dans un camp en Algérie, et une sélection du riche fonds Élie Kagan rela- tive à des événements marquants du second XX e siècle (17 octobre 1961, l’Algérie en 1963, le bidonville de Nanterre et Mai 68). D’autres pro- grammes de numérisation sont à l’étu- de, en coopération avec la Bibliothèque nationale de France, dont la BDIC est devenue l’un des pôles associés. Geneviève Dreyfus-Armand

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N° 9 SEPTEMBRE 2004

LA BIBLIOTHÈQUE DE DOCUMENTATION INTERNATIONALE CONTEMPORAINE & SES LECTEURS

É D I T O R I A L

Directrice de la publication :Geneviève Dreyfus-Armand

Rédactrice en chef :Anne-Marie Pavillard

Collaboration à ce numéro :C. Ajam, P. Artières, A. Bach,N. Bienvenu, T. Blondet-Bisch,S. Combe, J.-J. Compain,M.-F. Dumoulin, J.-C. Famulicki,M. Franco, M. Lemaître, J.-C. Mouton,C. Penin, F. Pouget, F. Rodriguez,V. Roy, A. Sackman, Y. Tomic,F. Veyron, M. Vidalie

P.A.O. et Imprimerie : SPEI

BIBLIOTHÈQUE DE DOCUMENTATIONINTERNATIONALE CONTEMPORAINE6, allée de l’Université92001 Nanterre Cedex(RER A : station Nanterre Université,direction Saint-Germain-en-Laye ouSNCF départ de la gare Saint-Lazare.La BDIC est sur le campusde l’Université de Paris-X-Nanterre)

Internet : http://www.bdic.frEmail : [email protected]

Vers un système d’information documentaireen histoire contemporaine

L a rentrée 2004 correspondà la mise en place de la

première des deux phases d’ins-tallation d’un système d’infor-mation documentaire. Il s’agitde l’ouverture au public – vial’Internet – d’un logiciel deconsultation de documents nu-mérisés, produits par la BDICelle-même ou provenant desources extérieures. Depuis plu-sieurs mois, un groupe de projettravaille au paramétrage de cesystème de gestion électroniquede documents, en collaborationavec une société informatiquechoisie par appel d’offres. Leschercheurs auront ainsi accès,sur le site de la BDIC, non seu-lement aux références présentesdans les catalogues informa-tiques de la BDIC, mais aussi aux

Vers un système d’information documentaireen histoire contemporaine

images et aux archives numérisées. Unannuaire de ressources, en constanteévolution, permet déjà d’accéder auxsites WEB relatifs à des questions de po-litique internationale, telles l’élargisse-ment de l’Europe, les droits de l’homme,les conflits du Proche et Moyen-Orientou les réactions à la mondialisation. Denombreux débats politiques et unegrande partie de l’information passentaujourd’hui largement par l’Internet etl’archivage – à intervalles réguliers –d’une sélection pertinente de sites s’im-pose à court terme pour une bibliothè-que consacrée au temps présent.

La seconde phase permettant de pa-rachever ce système d’information do-cumentaire en histoire contemporainedevrait être la réalisation d’un portaildocumentaire, prévue en 2005, dans lecadre du prochain contrat quadriennalactuellement en cours de discussionavec le ministère. Dans une mêmedémarche de recherche, ce portail per-mettra d’accéder aux catalogues de laBDIC, aux images du Musée, mais aussiaux catalogues d’autres bibliothèques età des sources d’information diversifiées.La conversion numérique des cata-logues manuels – notamment ceux despériodiques et des publications encaractères cyrilliques – devra être ache-vée. Le portail proposera au public uncertain nombre de services personnali-sés. Il s’agira d’offrir un outil performantpour la recherche historique permettantde répondre tant aux besoins d’unpublic spécialisé que d’un public pluslarge, afin de mieux répondre à lademande sociale grandissante par rap-port à l’histoire de notre temps.

D’ores et déjà, à l’automne 2004,plus de 10 000 documents numérisésseront accessibles sur le site de la BDIC,résultat de la première campagne denumérisation d’ampleur menée par labibliothèque. L’accent a été porté sur laPremière Guerre mondiale, tout à la foispériode décisive pour la compréhensiondu XXe siècle et époque de fondation dela BDIC marquant une distance tempo-relle suffisante pour amenuiser les ques-tions de droits. Plus de 6 000 feuilletsd’archives seront ainsi consultables :une partie de l’inestimable fonds PaulMantoux – historien et officier inter-prète lors des conférences interalliées –,des lettres de soldats allemands saisiesen France, la campagne de réhabilita-tion du caporal Maupas – fusillé pourl’exemple – menée par sa veuve etl’affaire du Bonnet rouge. Quelques1 400 clichés photographiques surVerdun seront visibles sur le WEB ainsique 303 estampes et peintures originales(de Étienne-Auguste Krier, Karl Lotze,Théophile Alexandre Steinlen et FélixVallotton). Sur d’autres périodes, serontaccessibles les carnets d’AntonioBlanca, républicain espagnol interné en1939 dans un camp en Algérie, et unesélection du riche fonds Élie Kagan rela-tive à des événements marquants dusecond XXe siècle (17 octobre 1961,l’Algérie en 1963, le bidonville deNanterre et Mai 68). D’autres pro-grammes de numérisation sont à l’étu-de, en coopération avec la Bibliothèquenationale de France, dont la BDIC estdevenue l’un des pôles associés.

Geneviève Dreyfus-Armand

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2 audiovisuel

Les combats pour les libertés1

Le Mois du film documentaire – Novembre 2004

P articiper au Mois du film documentaire, événement culturel national organisé par l’association Images en bibliothèques2

depuis 2000, est toujours, pour la valorisation des collections audiovisuelles de la BDIC, un événement extrêmementporteur et enrichissant.

• Porteur, car ce festival permet de présenter au public, à l’extérieur du campus de Nanterre, des documentaires souventpeu connus dont les réalisateurs n’ont pas eu de moyens suffisants pour les diffuser ou ont abordé des sujets difficiles qui ontété écartés des réseaux traditionnels de diffusion (cinéma, télévision, …).

Les documentaires que nous sélectionnons dans le cadre de ce festival sont souvent réalisés à partir d’entretiens avec destémoins ou des acteurs de la vie politique, économique ou culturelle, qui ont vécu des périodes marquantes de l’histoire surlesquelles ils témoignent. Les entretiens filmés et/ou enregistrés sont ensuite déposés dans leur intégralité à la BDIC, à titred’archives, et communiqués aux chercheurs.

• Enrichissant, car les débats organisés à l’issue des projections, qui font se rencontrer les réalisateurs, des universitairesspécialistes des questions abordées, des témoins et le public, permettent d’échanger et de confronter toutes formes d’analysesqui resituent l’événement et le confrontent à l’actualité. Initiative de réflexion indispensable au volet « recherche » de la BDIC.

Pour cette cinquième édition notre programmation s’est intéressée aux combats pour les libertés, en quatre volets.

Les combats pour les libertés1

Le Mois du film documentaire – Novembre 2004

LA LIBÉRATION DE LA FRANCELundi 8 novembre, de 18 h 30 à 21 h

1944-1994, l’été de la libertéde Fernando Malverde,

France 3-Ile-de-France-Centre, 1994, 58’

Cette année marque le soixantième anniversaire de la libé-ration de la France : il nous a semblé nécessaire de pré-senter, en ouverture de ce festival, les nombreux témoi-gnages de combattants et de personnes de la société civileprésents dans les collections filmiques de la BDIC. Cestémoignages constituent des richesses patrimoniales ines-timables. Des témoins qui, pour quelques-uns, ont aujour-d’hui disparu, mais dont les noms font partie de notrehistoire. Il nous reste leurs images, leurs voix, leurs récits.Citons à titre d’exemple : Geneviève de Gaulle-Antonioz,Jacques Massu, Daniel Mayer, Henri Rol Tanguy, MauriceSchumann.Historiens pressentis : Jean-Pierre Bertin Maghit, PascalOry. En présence du réalisateur.

LES GUÉRILLAS EN ESPAGNE,1939-1975

Lundi 15 novembre, de 18 h 30 à 21 h

La DesmemoriaProductions BDIC, 2003, 26’

Film d’Isabelle Brémond, Odette Martinez, Jean-ClaudeMouton. Enquête auprès des témoins et acteurs de ces gué-rillas, filmés dans le cadre des « Caravanes de la mémoi-re » en 2000 et 2002. Caravanes qui se sont déplacéesdans toute l’Espagne afin de transmettre la mémoire de cesguérilleros auprès de la population et de faire connaîtreleurs actions dans la lutte contre la dictature franquiste.

Siempre será la PastoraKerala films, 2004, 75’

Documentaire d’Ismaël Cobo et de Pierre Linhart. Après laguerre civile espagnole, des guérilleros, nourris par unespoir de liberté à retrouver, continuent le combat contrele franquisme dans différentes régions. Francisco Martínez-Lopez, « El Quico », et (sous réserve) Consuelo Rodriguez,anciens acteurs de ces guérillas, seront présents ce soir-là.Historienne pressentie : Mercedes Yusta. En présence desréalisateurs.

LES FEMMES ET LEURS COMBATSLundi 22 novembre, de 18 h 30 à 21 h

Debout ! Une histoire du Mouvementde libération des femmes, 1970-1980

Prospective Image, 1999, 90’.

Film de Carole Roussopoulos, retraçant l’histoire du mou-vement féministe en France et en Suisse. Un mouvementqui a contribué à profondément transformer notre société…Débat en présence de la réalisatrice, avec Françoise Picq,une des témoins du film, auteur de Libération des femmes,les années mouvement (1993), et l’historienne MichelleZancarini-Fournel, professeur à l’IUFM de Lyon.

AFRIQUE :LES LIBERTÉS CONFISQUÉES

Lundi 29 novembre, de 18 h 30 à 21 h

Afrique 50Cinémathèque de Bretagne, 1950, 17’

Film de René Vautier réalisé en 1950 : le premier filmanticolonialiste de l’Hexagone. Interdit, puis récemmentprimé par le ministère des Affaires étrangères.

Afrique je te plumeraiLes films du Raphia,

1992 (nouvelle sortie 2002), 88’

Film de Jean-Marie Téno, réalisé en 1991. Une trentained’années après les indépendances africaines, quelquesmois après la chute du mur de Berlin et l’effondrementdu « Bloc communiste », de jeunes Africains, au péril deleurs vies, descendent dans la rue pour réclamer la démo-cratie et de meilleures conditions de vie. Ce film est lacontribution personnelle d’un Africain à la réflexion surles moyens de sortir le continent africain du marasmeactuel.Soirée en présence des réalisateurs, avec la participation(sous-réserve) de Catherine Coquery-Vidrowitch, histo-rienne, spécialiste de l’Afrique contemporaine, et de Jean-Pierre Chrétien, directeur de recherches au CNRS.

Toutes ces projections auront lieu au FORUM des IMAGES,et l’entrée sera gratuite.

Martine Lemaître, chargée de l’audiovisuel

(1) Renseignements : [email protected] ou www.bdic.fr(2) [email protected]

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3audiovisuel

SLON-ISKRA : renouveau du cinéma ouvrier militant

A l’heure où l’on reparle du cinémamilitant (voir le dernier numéro de

la revue CinémAction : « Le cinéma mili-tant reprend le travail », le programmedu festival « Côté-Court » à Pantin ouencore le premier festival « Bobinessociales »), la BDIC vient d’acquérirune quarantaine de films produits parl’ancien collectif SLON-ISKRA, sociétéindépendante de production et de diffu-sion de films. Parmi ceux-ci, ceux duGroupe Medvedkine produits pendantles grandes années du cinéma militant,entre 1967 et 1974.

Tout avait commencé à la fin desannées soixante, sous l’impulsion deChris Marker, avec la création deSLON (« éléphant » en russe, acro-nyme de Service de lancement desœuvres nouvelles) à la suite de la sor-tie du film Loin du Vietnam (film col-lectif de Joris Ivens, William Klein,Agnès Varda, Claude Lelouch, Jean-Luc Godard, Alain Resnais, réalisé à lademande de Chris Marker en 1967).Cette structure de production et de dif-fusion, située en Belgique car la cen-sure y était moins présente, organisa larencontre entre ouvriers et intellectuelset le retour de la caméra à l’usine aprèsde longues années d’absence.

Dans cette période d’avant Mai 68,À bientôt, j’espère, le film de ChrisMarker sur la grève de la Rhodia àBesançon, marqua le renouveau ducinéma ouvrier militant. Sur place dansl’usine, il débouche sur la naissance dugroupe Medvedkine, du nom du réali-sateur russe Alexandre Medvedkine,créateur des « ciné-trains » qui, audébut des années trente, traversaientl’Union soviétique pour filmer la viequotidienne et les problèmes du peuple.Développés, montés et projetés dans letrain, les films pouvaient donc être vusen « quasi-temps réel » par les popula-tions filmées.

Chris Marker proposait donc auxouvriers de Besançon et de Sochaux dese saisir de la caméra, de s’approprierles outils de leur propre représentation.Fruits de cette expérience « d’ouvriers

cinéastes », restent plusieurs films surles luttes et les conditions de vie ouvriè-re, visibles à la BDIC : Classe de lutte,la série Nouvelle société, Cléon (pre-mière usine en grève en mai 1968),L’ordre règne à Simcaville, Sochaux,11 juin 1968, Scènes de grève en Ven-dée, mais aussi Week-end à Sochauxet Avec le sang des autres réalisés parBruno Muel, témoignage sur la duretédu travail à la chaîne.

Témoignages directs d’une époque,ces documents ont une véritable valeurhistorique quand on connaît la sous-représentation du monde ouvrier aucinéma. Cette notion de sous-repré-sentativité avait été évoquée parStéphane Beaud (co-auteur avecMichel Pialoux du livre Retour sur lacondition ouvrière), lors de notre der-nière participation au Mois du filmdocumentaire dont le thème était « lemonde du travail ». En effet, il y aaujourd’hui plus de 7 millions d’ou-vriers, et encore peu de documentairesles évoquent.

En 1973, SLON devint ISKRA enFrance (« étincelle » en russe, en réfé-rence au journal de Lénine, acronymede Images, Sons, Kinescope, Réalisa-tion audiovisuelle) et poursuit son tra-vail de production et de diffusion hors

des structures traditionnelles du ciné-ma, offrant aujourd’hui un cataloguede plus de 160 titres. Il continue au-jourd’hui de produire des films traitantdes luttes ouvrières, notamment : lafermeture de l’usine Moulinex (Montravail c’est capital de Marie-PierreBrêtas, Raphaël Girardot et LaurentSalters, 2000), ou encore les grèves dedécembre 1995 (Jours de grève à Paris-Nord de Jean-Louis Comolli et GinetteLavigne, 2003). La production de filmsmilitants a diminué depuis 1981 etceux-ci sont plus rarement réalisés parles acteurs des luttes que par descinéastes qui les suivent.

On trouve également, parmi lesfilms de leur catalogue que nous pos-sédons dans notre fonds, Cinés-tracts(courts films d’agit-prop de 1968), LaParcelle (sur le monde paysan) et lasérie de On vous parle, dont ChrisMarker, fondateur de SLON, réalisaquelques titres : On vous parle duBrésil : tortures, On vous parle duBrésil : Carlos Marighela et On vousparle du Chili : ce que disait Allende.Ceux-ci sont déjà consultables au ser-vice audiovisuel de la BDIC et réfé-rencés dans le catalogue général.

Jean-Jacques Compain

SLON-ISKRA : renouveau du cinéma ouvrier militant

Site web SLON-ISKRA. DR.

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Mohamed Amri et Émile Temime.Photo Pierre Orcel, Renault.

4 audiovisuel

L’Île Seguin : histoire et mémoiresTrois approches de Renault-Billancourt

L e mardi 23 mars eut lieu au bâti-ment L du campus de l’université

de Paris-X-Nanterre, une soirée dédiéeà l’histoire de l’Île Seguin, à Boulogne-Billancourt. Cette soirée organisée parla BDIC, avec la participation des édi-tions Autrement et de France 3 ParisIle-de-France-Centre, présenta à unlarge public trois approches de lamémoire de l’Île Seguin : un livre, unfilm documentaire, une exposition dephotographies. Juste avant la démoli-tion de ce site historique de premierplan – « lieu de croissance et de déve-loppement d’une des plus grandesentreprises françaises, mais égalementlieu privilégié du combat ouvrier (site-clef des grandes grèves de 1936 ainsique des événements de mai 1968).L’Île Seguin fut durant ces 60 annéesun des centres de la vie économiqueet sociale française1 » –, il nous sem-blait intéressant de pouvoir présenterces travaux au public.

• Un livre de Émile Temime et Jac-queline Costa-Lascoux, Les Hommesde Renault-Billancourt : mémoireouvrière de l’Île Seguin, 1930-1992(éditions Autrement, mars 2004. Col-lection Français d’ailleurs, peuple d’ici.Prix : 19 € - 232 pages et 50 photo-graphies N&B).

Ce livre se propose avant tout « derecueillir la mémoire ouvrière, d’êtrele dépôt de toutes les histoires decopains, de fraternité, de solidarité quiont fait la vie et la spécificité de ce siteindustriel. Il est assorti de nombreuxtémoignages d’ouvriers français etimmigrés et est richement illustré del’extraordinaire fonds photographiquede Renault ».

À l’espace Reverdy, une table designatures, tenue par les éditionsAutrement, a permis aux auteurs derencontrer leur public.

• Une exposition à deux volets : l’uneconstituée de quinze photographiesextraites du fonds photographique deRenault, prêtées gracieusement parPierre Zigman, directeur de Renaultcommunication (que nous remercionsvivement).

Ces photographies présentaient desscènes de vies ouvrières prises dansl’usine à différentes époques : le bureau

d’embauche (en 1930), l’école profes-sionnelle d’apprentissage (en 1946), lachaîne de montage (en 1947), révélantaussi l’inoubliable banc d’essai de la4CV (en 1954), montrant des ouvrierssur des presses (en 1956). Des photo-graphies plus récentes du site complé-taient l’ensemble.

Quinze photographies d’HélèneBozzi, prises en 1998 sur le lieu désaf-fecté de l’usine, à l’initiative de cettejeune photographe de talent, furentprésentées également ce soir-là sous lethème Âme ouvrière : comment lesmurs lui semblèrent empreints de cesvies qui furent ?

Toutes ces photographies ont étéensuite exposées dans le hall de laBDIC et de la BU durant le mois demai.

• Un documentaire : hélas, pour desraisons techniques, la projection enavant-première du film Retour surl’Île Seguin, de Mehdi Lallaoui, n’a puavoir lieu ce soir-là. Nous l’avonsreprogrammée rapidement au Forumdes images, le mardi 11 mai en soirée,afin de rendre hommage à ceux quinous avaient honorés de leur présen-ce : le réalisateur, les témoins, le pu-blic, venus nombreux ce soir-là.

Le film de Mehdi Lallaoui, construitavec une grande sensibilité, met enscène les témoins un à un, sur le lieumême de ce qui a été leur quotidien.Des prises de vue remarquables rensei-gnent au mieux sur ce qu’a été ce lieu,mêlant ainsi l’histoire, la mémoire et lecinéma. La projection fut suivie d’unerencontre-débat en présence de MehdiLallaoui, d’Émile Temime et des mem-bres de l’Association des Anciens tra-vailleurs de Renault-Île Seguin (ATRIS),témoins présents dans le documentaire :Ahmed Aïb Amouch, Arezki Amozona,Mohamed Amri, Louisa Boumrar-Delvorias, Gilbert Devillard, PhilippeDoumane, Etienne Lumvumba. Lepublic posa de nombreuses questionsquant au devenir de ce site. L’ATRIS pré-senta l’action menée aujourd’hui auprèsde la ville de Boulogne-Billancourt pour

obtenir un lieu de mémoire dans l’ac-tuelle réurbanisation de l’Île Seguin, afinque perdure, pour les générations àvenir, la mémoire de cette vie ouvrièreet de cette usine « mythique ».

Pour clore agréablement la soiréedu 23 mars, un sympathique apéritif futoffert par la BDIC.

Martine Lemaître

L’Île Seguin : histoire et mémoiresTrois approches de Renault-Billancourt

(1) Extrait de l’ouvrage de Émile Temime et Jacqueline Costa-Lascoux présenté lors de cette soirée.

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Les hommes de l’industrie automobile

5recherche histor ique

Vendredi 1er octobre matin9 h 00 Accueil des participants9 h 30 Ouverture du colloque par Jean-Pierre Fourcade,

ancien ministre, sénateur-maire de Boulogne-Billan-court, et Geneviève Dreyfus-Armand, directrice dela BDIC.

9 h 50 Quelques mots d’introduction par Emile Temime,professeur émérite en histoire contemporaine, direc-teur du Groupe histoire des migrations internatio-nales à l’EHESS.

Présidence de séance : Geneviève Dreyfus-Armand10 h 00 La mobilité des hommes

– Aimée Moutet, professeur émérite en histoirecontemporaine, et Emmanuel Quenson : Formationprofessionnelle, formation technique et carrièreindustrielle aux usines Renault au cours des Trenteglorieuses.– Laure Pitti, docteur en histoire, chercheuse asso-ciée à l’IHTP : Trajectoires professionnelles d’ouvriersalgériens à Renault-Billancourt : la carrière d’OS.

11 h 00 témoignages et débat avec la salle.11 h 30 pause.11 h 45 Les conditions de travail

– Patrick Fridenson, directeur d’études à l’EHESS :Cadres et organisation de l’entreprise.

12 h 15 témoignages et débat avec la salle.

Vendredi 1er octobre après-midiPrésidence de séance : Pierre Milza14 h 30 Organisation du travail ouvrier

– Nicolas Hatzfeld, maître de conférences en his-toire contemporaine, université d’Évry : Repères pourune histoire comparative du second XXe siècle.– Jean-Louis Loubet, professeur de science politique,université d’Évry : Les stratégies industrielles et leshommes 1929-1984.

15 h 30 témoignages et débat avec la salle.16 h 00 pause.16 h 15 Conflits et solidarités

– Xavier Vigna, enseignant, docteur en histoirecontemporaine : Billancourt à l’avant-garde ? Lesusines Renault pendant les luttes des ouvriers de l’au-tomobile des années 68.– Alain Michel, chercheur au Centre de rechercheen histoire des sciences et des techniques : Filmer etphotographier Billancourt en 68.– Delphine Corteel, chercheuse au Centre derecherche interdisciplinaire sur l’Allemagne : La grèvedes OS chez Ford-Cologne en 1973.

17 h 15 témoignages et débat avec la salle.18 h 30 Inauguration de l’exposition Le Renault de Doisneau.

Samedi 2 octobre matinPrésidence de séance : Gildas Simon9 h 00 L’homme dans la ville

– Catherine Omnes, professeur d’histoire contempo-raine à l’Université de Saint-Quentin-en-Yvelines, etNahid Bouakline : Billancourt et la politique de loge-ment de la Régie.

– Jacqueline Costa-Lascoux, directrice de rechercheau CNRS, directrice de l’Observatoire des statistiquesde l’immigration et de l’intégration : Femmes au tra-vail et femmes de travailleurs.

10 h 15 pause.10 h 30 – Nicolas Hatzfeld, Laure Pitti et Émile Temime :

L’usine dans la ville, trajets dans Billancourt. La villeouvrière et son devenir.– Jean-Luc Richard, maître de conférence à l’Univer-sité de Rennes : Mémoires dans la ville.

11 h 45 témoignages et débat avec la salle.12 h 30 Conclusions du colloque et projets d’avenir par

Jacqueline Costa-Lascoux.

Samedi 2 octobre après-midi de 15 h à 17 hTable ronde sur la préservation de la mémoiredu site industrielExposés introductifs : Jacques Toubon, ancien ministre, prési-dent de la Mission de préfiguration du Centre de ressources etde mémoire de l’immigration, et Jean-Pierre Fourcade, ancienministre, sénateur-maire de Boulogne-Billancourt.

Participants à la table ronde :Mohamed Amri, Michel Auroy, Jacqueline Costa-Lascoux,Émile Temime.

Entrée libre dans la mesure des places disponibles.Inscriptions auprès de :Stella AgliecoTél. : 01 55 18 41 03Fax : 01 55 18 41 [email protected]

Les hommes de l’industrie automobile

Colloque organisé avec l’aide de la ville de Boulogne-Billancourt et sous le parrainage de la Bibliothèque de documentation internationale contemporaine

et de l’École des hautes études en sciences sociales

1er et 2 octobre 2004Espace Landowski - 28, avenue André-MorizetBoulogne-Billancourt (métro : Marcel Sembat)

Usine de Billancourt (sortie du personnel), Pont de l’Île Seguin, 1964(Renault Communication).

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6 audiovisuel

Ouvrières du monde

«C e carnet de voyage en sixétapes est dédié aux oubliés

de la France contemporaine : lesouvriers » : ainsi débute le film deMarcel Trillat, Les Prolos, que la BDICa projeté, en novembre 2003, enouverture des séances du Mois du filmdocumentaire consacrées cette annéelà au thème : « Le monde du travailen questions et en images ».

Mais il y a encore plus oublié queles ouvriers : les ouvrières, qui repré-sentent pourtant 20 % de la classeouvrière. C’est pourquoi la BDIC avaitdécidé de leur dédier une des quatreséances de ce Mois du film documen-taire, avec le film Ouvrières du mondeque sa réalisatrice, Marie-France Collard,est venue présenter à Paris.

Marie-France Collard a construit sonfilm à partir de la fermeture de quatreusines de l’entreprise Levi’s, la premiè-re marque de jeans au monde : trois enBelgique (Anvers, Gits, Wervick) et uneen France (La Bassée). Fermeture quia signifié, en 1999, le licenciement de931 personnes en Belgique et 541 enFrance, dont 86 % de femmes. La réa-lisatrice nous montre le combat desouvrières pour garder leur emploi, avecle portrait de deux d’entre elles, Rosa enBelgique et Marie-Thérèse, déléguéeCGT à La Bassée. Un combat qui setermine par un échec et le départdes ouvrières quittant dans les larmesl’usine où elles travaillaient pour la plu-part depuis vingt ou trente ans.

Mais l’intérêt de ce film ne s’arrêtepas là : il nous montre très concrètementce que signifie la mondialisation del’économie aujourd’hui. Le 30 septem-bre 1998, l’entreprise Levi-Strauss Euro-pe avait annoncé la fermeture de cesquatre usines en invoquant une « surca-

pacité » de pro-duction et descoûts de salairestrop élevés. Lesouvrières réali-sent vite qu’ils’agit en faitd’une entreprisede délocalisationvers des pays oùla main d’œu-vre est beaucoupmoins chère. M.F.Collard s’est doncrendue en Tur-quie et en Indo-nésie et rend compte de ce que sont lesconditions de travail de ces nouveauxsalariés de Levi’s, essentiellement desfemmes là aussi : des salaires de misè-re, des heures supplémentaires obliga-toires (jusqu’à 80 heures de travail parsemaine !), une surveillance perma-nente sur le lieu de travail. « Je travailletous les jours, y compris le dimanche,raconte Ialti, une ouvrière de Djakarta.La direction a installé des caméras pournous surveiller, contrôler si l’on parlebeaucoup, si l’on va souvent aux toi-lettes. La vie que j’ai n’est pas unevie décente ! ». Et dans ces pays, lesentreprises n’hésitent pas à employerdes enfants de 10 à 15 ans, comme cejeune garçon turc que l’on voit entrain de mettre sous plastique les vête-ments terminés, à une cadence ultrarapide.

Une scène de ce film nous montreencore mieux la réalité que vivent cesouvrières : Marie-France Collard a pro-jeté, devant elles, les séances de son filmtournées en France et en Belgique.Stupéfaction de Ialti et de ses collèguesregardant les ouvrières françaises mani-fester : « Est-ce que la direction sait

qu’elles manifes-tent ? Elles n’ontpas peur d’êtrerenvoyées ? ». Etl’on voit ensuiteIalti traduire pourses collègues laréponse de la réa-lisatrice : « Non,chez eux, les ou-vriers ont le droitde faire grève.Cela veut direque le syndicatn’est pas formépar la direc-tion ! ». En quel-

ques minutes, tout est dit : dans ces paysles droits sociaux sont inexistants. Inutilede préciser que Marie-France Collardn’avait pas reçu l’autorisation de ladirection de Levi Strauss Europe pouraller filmer dans ces entreprises.

Le film se termine aux Philippines,dans une zone franche d’exportationqui regroupe plus de deux cents usinesde textile ou d’électronique et fait tra-vailler 48 000 personnes, en majoritédes femmes de 18 à 25 ans : « Danscette zone, explique Collard, les taxessont réduites ou même annulées, et lessyndicats ne sont pas admis. Le travaily est proche de l’esclavage moderne :bas salaires, horaires très lourds,contrats précaires, stress maximal ».Passé 25 ans, ces femmes ne sont plusconsidérées comme assez produc-tives… Une affichette résume bien lasituation : « Recherchons couturièrespouvant travailler sous pression ».

« Le but principal de mon film, aexpliqué Marie-France Collard lors dudébat qui a suivi la projection, est decombattre l’idée que les ouvrières duSud prennent le travail des ouvrières deFrance ou de Belgique. J’ai voulu mon-trer qu’elles sont toutes victimes de lamême multinationale et du même sys-tème économique ». Un sujet hélas plusque jamais d’actualité : si la fermeturede ces quatre usines a eu lieu en1998/99, d’autres usines ferment tousles jours en France, pour être délo-calisées en Europe de l’Est ou en Asie –et notamment des entreprises du tex-tile employant une majorité de fem-mes…

Anne-Marie PavillardOuvrières du monde

de Marie-France Collard(Belgique, 2000. 84 mn)

Ouvrières du monde

Rosa la Belge.

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7archives

Archives microfilmées de la politique étrangère des Etats-Unis

D epuis plusieurs années, le sec-teur anglo-américain a entrepris

un effort pour mettre à la dispositiondes chercheurs de nombreuses collec-tions – sous forme de microfilms et demicrofiches – d’archives américainesrelatives à la politique étrangère desÉtats-Unis et à l’évolution politique,militaire, sociale et économique dumonde. C’est ainsi que plus d’un mil-lier de microfilms sur la politique exté-rieure américaine ont déjà été acquiset sont exploitables pour la recherche.

Déclassification des archiveset accès aux sources

Le FOIA (Freedom of InformationAct) est publié en 1966. Modifié par denombreux amendements, ce texte fondele droit d’accès aux données détenuespar l’administration américaine.

En 1972, le président Richard Nixonsigne un décret permettant la déclassi-fication de milliers de documents de laCIA classés « top secret » ou « confiden-tiels ». Depuis 1985, une bibliothèque-institut de recherche, située à l’univer-sité George Washington, à WashingtonDC, le NASA (National Security Archi-ves) procède à la conservation d’archi-ves déclassifiées. Au sein de cette insti-tution non gouvernementale, les cher-cheurs du Committee on Research andAccess to Historical Documentationauprès du Départe-ment d’État militentpour la déclassification des documents« secret-défense », contrôlant le respectdu délai trentenaire au-delà duquel lesarchives sont accessibles au public.Tandis que le National Security Archivenumérise, microfilme et commercialiseles reproductions, de son côté l’UPA(University Publications of America),fondée en 1974, édite des microfilmsen collaboration avec le NARA (Natio-nal Archives and Record Administration)fondé en 1934. Le CIS (CongressionalInforma-tion Service), éditeur privé,microfiche et microfilme, quant à lui, lesdocuments du Congrès.

Adresse du site du National SecurityArchive (The George Washington Uni-versity) : www.gwu.edu. Chercher dansla rubrique « Archive ». Dans la plu-part des cas, on n’accède gratuitementqu’à un résumé des documents. Pourla consultation du document numé-risé, il faut être abonné.

Sources de l’histoiredes relations extérieuresdes États-Unis

• Conflits

Les rapports déclassifiés de l’Officeof Strategic Services (OSS) et duDépartement d’État, pour la période1941-1961, puis ceux de la CIApour la période 1946-1976, informentlargement sur la politique extérieuredes États-Unis après la DeuxièmeGuerre mondiale ainsi que pendant

la guerre froide. On notera égalementles rapports de la CIA, préparés pourle président et le National SecurityCouncil, afin de les informer de lasituation politique des États et de l’im-pact du communisme : Documents ofthe National Security Council, 1947-1977.

Guerre 1939-1945 : Potsdam Confe-rence documents et Holocaust erarecords of the Jewish Labor Committee,1931-1947.

Guerre du Vietnam : plusieursséries : opérations sur le terrain, VietCong, opposition des soldats à laguerre, opinion publique américaine,conférences sur la paix à Paris, 1968-1973.

• Documents diplomatiques,correspondance et dossiers del’administration présidentielle

Un fonds particulièrement richepour l’étude de la politique étran-gère sous l’administration Eisenhower1953-1961, Johnson 1963-1969 etNixon 1969-1974 : Diaries of DwightD. Eisenhower, Minutes and docu-ments of the Cabinet meetings ofPresident Johnson, Papers of the NixonWhite House, Papers of John FosterDulles & of Christian A. Herter.

Etudes régionales• Afrique : de 1946 à 1976 les

rapports de la CIA constituent unesource sur les relations États-Unis/Afrique et sur les conditions africai-nes internes : Records of the Ameri-can Committee on Africa et Africaspecial studies.

• Interventions militaires dansles pays d’Amérique latine et dansles Caraïbes (Cuba, Haïti…) de1910 à 1944 : microfilms du NARA,1960 : Records relating to politicalrelations.

• Rapports secrets de l’arméeaméricaine sur l’Allemagne de 1919à 1941 : US Military intelligencereports.

• Politique étrangère de la Fran-ce de 1945 à 1954 : ConfidentialUS State Department central files.France foreign affairs.

• Les dernières acquisitions con-cernent le Moyen-Orient : Confi-dential US State Department central

files, Middle Eastern Studies (Iran, Iraq,Palestine-Israël de 1945 à 1963 et lesNations Unies de 1945 à 1949). L’UPAet le CIS publient cette collection demicrofilms de documents diploma-tiques en collaboration avec le NARA.

Ces fonds complètent les documentssous forme papier : Public papers of thePresidents et la série des Foreign rela-tions of the United States édités par leGPO (Government Printing Office) amé-ricain.

L’accès se fait dans le catalogue in-formatisé au titre, à l’auteur, à la collec-tion et prochainement sur le site de laBDIC, avec une description complètedu fonds et les cotes des microfilms.

Françoise Pouget

Archives microfilmées de la politique étrangère des Etats-Unis

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8 musée d’histoire contemporaine de la BDIC

Le Musée, section iconographique de la BDIC

I nstallé dans l’Hôtel national des Invalides depuis trenteans, le Musée d’histoire contemporaine de la BDIC mène

de front le travail de conservation, d’informatisation et denumérisation de ses fonds d’originaux (tableaux, gravures,dessins, objets, etc.), d’affiches et de photographies, la com-munication des documents iconographiques aux chercheurset aux usagers ainsi que l’organisation d’expositions tempo-raires. Après celle de l’année 2003 consacrée aux Images desBrigades internationales dans la guerre d’Espagne, l’exposi-tion Droits de l’homme, combats du siècle a été ouverte aupublic du 30 avril au 2 juillet 2004 et le sera de nouveau du5 octobre au 18 décembre 2004. Elle s’accompagne de visitescommentées pour les enseignants, comme le 6 octobre à 14 h,

de tables-rondes (« Débats, limites et problèmes dans la dé-fense des droits de l’homme en France au XXe siècle », le17 novembre à 14 h, avec Robert Badinter, Michel Wievior-ka, Ronny Brauman notamment), de projections de films(« Immigrés, réfugiés et demandeurs d’asile en France auXXe siècle », le 8 décembre, de 14 h à 18 h) et de petits ate-liers animés par des doctorants travaillant à la BDIC quiaccueillent des groupes d’élèves et leurs enseignants, enoctobre et décembre. Les responsables des différents fonds etdes stagiaires présentent ici la richesse de cette section ico-nographique de la BDIC.

Jean-Claude Famulicki

Le Musée, section iconographique de la BDIC

Le fonds photographique de la Première Guerre mondiale

D essins, peintures, estampes,sculptures, objets du quotidien,

affiches forment avec l’importantecollection photographique du Muséed’histoire contemporaine, un vasteet riche ensemble cohérent, représen-tatif de l’histoire du premier conflitmondial. Et de celle de la photogra-phie.

Riche d’environ 300 000 pièces(tirages originaux, plaques de ver-res, vues stéréoscopiques ou photo-graphies d’amateur), la collection estactuellement, très probablement, laplus importante quantitativement etqualitativement de France voired’Europe.

Elle est constituée à partir de di-vers fonds entrés dans les collectionsau fil du temps. Mais surtout, dans lesannées 1950, avec l’arrivée massi-ve de la collection dite Valois en pro-venance de l’ancien ministère del’Instruction publique, sous-secréta-riat aux Beaux-Arts situé à Paris,1bis rue de Valois. Ce sont 540 al-bums classés par départements, rela-tifs aux fronts occidentaux, contenantchacun entre 100 et 150 photos da-tées, légendées et souvent commen-tées. Ce sont aussi 90 tiroirs en boisclassés par départements, pays alliés,colonies françaises puis par théma-tiques, contenant chacun entre 1 000et 1 200 photos. Ces photos représen-tent l’intégralité de la production offi-cielle française durant la GrandeGuerre.

À côté de cet-te masse impo-sante se trouveun fonds hétéro-clite composé dephotographies detous formats (4,5x 6 et de 6 x 6 à24 x 30), d’ori-gines extrême-ment diverses,c o m m e l e sagences photo-graphiques oules services offi-ciels de pressedu monde entiere t m ê m e d er é g i m e n t s d el ’Empire al le-mand. Son clas-sement est direc-tement lié à celui de la PremièreGuerre mondiale élaboré pour les col-lections d’ouvrages ou de périodiques.

Une dernière source, et non lamoindre mais pas totalement compta-bilisée, réside dans les carnets de guer-re confectionnés par les soldats eux-mêmes. Ces objets d’une grandefragilité, placés dans des boîtes chimi-quement neutres, sont conservés dansune armoire de réserve. Des images,d’une beauté parfois surprenante auregard de cette période noire, racon-tent de manière individuelle une guer-re sans fin. Jamais la narration n’y estoutrancière et, de manière implicite,souvent en cohésion avec la produc-tion officielle.

Dans l’importante donation Lotze,signalée dans l’article consacré à lasection des originaux et des estampes,se trouvent des photographies relatantla vie de Karl Lotze à Laon ainsi quedes reproductions de ses peintures.C’est avec l’une d’elles que nous avonspu identifier un portrait.

Ces documents sont accessiblespour une infime partie dans la base dedonnées informatiques. Mais surtoutsont consultables sur place, après ren-dez-vous, les lundi, mercredi toute lajournée et le vendredi matin.

Thérèse Blondet-Bisch01 44 42 54 92

[email protected]

Le fonds photographique de la Première Guerre mondiale

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9musée d’histoire contemporaine de la BDIC

En mai 1915, le gouvernement français décide de créerla SPA (Section photographique de l’Armée) afin d’être leseul producteur et diffuseur d’images de la guerre. En mai1916, une soixantaine de photographes est mobilisée.

La photothèque de la BDIC conserve aujourd’hui lestirages originaux. Ceux-ci sont placés dans des albums etdes meubles réalisés durant la guerre par le ministère del’Instruction publique et des Beaux-Arts. Le classementsuit une logique géographique et thématique. Nous avonsreclassé quatre tiroirs concernant, selon les intitulés d’ori-gine, la Vie en campagne et l’Intendance. L’ensemblecompte environ 4 300 photographies originales légen-dées. Les légendes, portées au crayon papier ou à l’encre,donnent des indications de lieu, de date de la prise devue, un commentaire orientant la lecture de l’image et lecode du photographe. Parfois, les informations sont rayéesen rouge ou jointes d’une mention de restriction de diffu-sion, telle que « Ne pas communiquer le lieu » à propos

d’un poste de commandement. Les historiens notentquelques erreurs d’identification des troupes photogra-phiées ou d’interprétation de l’action.

À l’aide du fichier original, nous avons restructuré desthématiques afin de rendre le fonds plus lisible pour les cher-cheurs. Ainsi, Camps, cantonnements et Cuisines ont étéclassés par département ; une thématique Toilette et lessiveest apparue, de même que des thèmes comme Artisanat detranchée ou SPCA (images montrant les opérateurs àl’œuvre). L’autre aspect de notre travail a été d’étudierchaque photographie pour la classer dans la thématique laplus juste. Ceci appelle un choix pour les images pouvanttraiter plusieurs sujets. Nous avons pu reconstituer desséries datées du même jour par un même photographe. Ellesmontrent l’évolution de l’opérateur autour de son sujet,mais aussi décrivent le déroulement d’une action (ainsi,dans la rubrique Aviation, l’atterrissage d’un ballon d’obser-vation).

Ce travail a révélé de très belles images inconnues etnous interroge sur leurs conditions de réalisation et dediffusion. Il a aussi soulevé un problème : le fonds étantdirectement accessible aux chercheurs (et il serait dom-mage qu’il n’en soit pas ainsi), les images sont souventdéplacées. Le travail d’inventaire en cours, par lots thé-matiques, suivi autant que possible de la numérisationdes principaux clichés, permettra de limiter la consulta-tion des originaux. C’est un travail de longue haleine étantdonné la richesse de l’ensemble.

Marthe Vidalie et Apple Sackman,Stagiaires dans le secteur photographique

(juin 2004)

Le fonds d’affiches

L e Musée conserve un fonds deprès de 100 000 affiches consti-

tué dès le début de la Première Guerrepar les Leblanc. Enrichi chaque annéede près d’un millier d’affiches, on peuty trouver des affiches étrangères excep-tionnelles et d’une grande rareté. À cetitre, c’est une collection unique quin’a pas d’équivalent dans le monde.

Outre les deux guerres mondiales(avec un intérêt particulier pour la pro-pagande pétainiste, éditée par le gouver-nement de Vichy), les affiches les plusdemandées sont les affiches russes (laRévolution, la période stalinienne, et laPerestroïka), les extraordinaires afficheschinoises, celles éditées par les asso-ciations humanitaires et les organismesinternationaux contre le racisme, la faimdans le monde, la prolifération des

armements, le nucléaire, et toutes lesatteintes aux droits de l’homme. L’année1968 est très recherchée pour l’extrêmeliberté de ton, la créativité intense, l’in-solence propre à cette période.

Cet art populaire révèle ainsi sesgrands créateurs : Abel Faivre, Hansi,Cappiello, Steinlen, Poulbot, Paul Colin,Granger, Quarez, Topor, Savignac, etc.

En prévision de la prochaine ex-position, nous avons tiré du fondspolonais, riche de plus de milleaffiches, une magnifique sélection degraphistes polonais : Pagowski, Cies-lewicz, Lenica, Sadowski, Tomaszew-ski, Gorowski, etc.

Nous conservons au Musée un nom-bre presque aussi important d’affichestextes que d’affiches illustrées. Toutefois

de nombreux chercheurs limitent leursrecherches à l’affiche illustrée, au détri-ment de l’affiche texte. C’est souventl’intérêt artistique et graphique qui estprivilégié. L’affiche texte comme lesavis publics, les annonces de réunionsou de débats publics, les slogans révo-lutionnaires et idéologiques et autresexplications pédagogiques sont tropsouvent méprisés. On a perdu de vueque l’affiche typographique parle toutaussi bien des préoccupations de lapopulation à qui elle est destinée à unmoment donné. C’est avec émotion parexemple que nous découvrons la tra-gédie de toute la population d’un petitvillage belge en 1915. L’avis à la popu-lation placardé par l’occupant allemandnous interpelle sur la déportation desréfugiés du village voisin, l’interdictionde leur venir en aide, l’ordre de s’en-

Le fonds d’affiches

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10 musée d’histoire contemporaine de la BDIC

fermer dans les maisons en occultantles fenêtres pendant l’opération. Ondit souvent qu’une image bien faite n’apas besoin de mot. L’inverse est toutaussi valable.

Notre politique d’acquisition est desuggérer les dons, d’aller aux devantsdes réseaux et des associations… L’actua-

lité et les questions politiques et socia-les nationales et internationales passentau premier plan des préoccupations :la guerre d’Irak, la mondialisation, leconflit israélo-palestinien, l’élargisse-ment de l’Europe provoquent de grandsbouleversements. De nouveaux mes-sages apparaissent sur les murs commeautant d’appels au rassemblement :

mouvements altermon-dialistes, enga-gements pacifistes et citoyens, mais éga-lement réapparition de certains vieuxdémons comme la montée des natio-nalismes, du racisme, de l’antisémitis-me, etc. L’affiche témoigne ainsi de lamémoire collective d’un peuple.

Cette documentation historique par-fois exceptionnelle sort très rarement denos réserves.

Pour des raisons de conservationévidente, les manipulations doivent êtreréduites au minimum. A l’exception desrecherches iconographiques pour lesexpositions, le fonds n’est donc pasdirectement consultable. Il faut passerpar un fonds de substitution destiné pré-cisément à la recherche sous forme dediapositives ou d’images numériquessur cédérom, en prenant rendez-vouspar téléphone.

Une bonne partie du fonds est déjàreproduit mais il reste encore beau-coup à faire. Avec le soutien du minis-tère de la Culture et de la Bibliothèquenationale de France en qualité de pôleassocié, des projets de numérisation ennombre sont prévus dès 2004.

Véronique Roy01 45 51 93 02

[email protected]

Le papier granuleux et jauni glisse entre mes doigts.Fragments de destins croisés, brisés ou glorifiés, lesaffiches nous confrontent à nos doutes, nos interrogationset nos étonnements les plus instinctifs. Nos grands-parentset arrière-grands-parents en ont été les témoins inatten-dus et parfois malheureux aux heures les plus noires denotre histoire, lors de la Première et de la Seconde Guerremondiale. Chacune des pochettes d’affiches nous inviteà nous projeter à travers le temps pour retrouver desodeurs, des ambiances et des musiques.

Steinlen nous plonge dans la boue du Chemin desDames, Abel Faivre nous entraîne dans la bataille avecun soldat prêt à l’assaut, Paul Colin agresse et interpelleles consciences les plus hermétiques. Les formes et lesstyles ne se ressemblent pas, les traits s’entrelacent et véhi-culent les messages les plus simples comme les plus inat-tendus. Là où les photographies ne figeaient que des ins-tantanés de vie quotidienne, là où les actualitéscinématographiques restaient cantonnées dans les salles

obscures, les affiches prenaient le relais dans les rues pours’insinuer dans toutes les pensées.

2004 est une année riche en souvenirs, commémora-tions et émotions. La commémoration du 6 Juin 1944 aouvert la voie et amène de plus en plus de Français à redé-couvrir un passé qu’ils croyaient enfoui dans les livres. Leslangues se délient au fur et à mesure pour livrer les secretsde familles les plus incroyables. Chaque objet, couleur,parfum, sonorité a le pouvoir de nous transporter auxmoments les plus heureux et douloureux de notre vie.

Les affiches ont cette capacité incroyable et uniquede le faire. Le Musée d’histoire contemporaine-BDIC recè-le un fonds considérable de plus de 100 000 affiches. Surcet ensemble, l’actuel logiciel de gestion des documentsn’en répertorie qu’une petite partie. C’est dans un espritde diffusion du savoir et de transmission du patrimoineculturel que depuis peu le musée s’est lancé dans un vastechantier d’inventaire et de numérisation.

Nicolas BienvenuStagiaire dans le secteur affiches

Trésors de papier...Trésors de papier...

Cette affiche de 1945 représente le roi polonais Boleslawa III Krzywoustego (Boleslas Bouche-torse),conquérant de la Poméranie en 1113-19, et symbolise la reconquête, en 1945,

des frontières occidentales par le pouvoir polonais.

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11musée d’histoire contemporaine de la BDIC

Le fonds Estampes et originaux

F ernand Léger, Édouard Vuillard,Théophile-Alexandre Steinlen,

Ossip Zadkine… quelques-uns despeintres présents dans les collections duMusée d’histoire contemporaine-BDIC.Qu’ils soient illustres ou inconnus dugrand public et parfois anonymes, lesauteurs du fonds d’estampes et d’origi-naux témoignent de leur propre vie etde l’histoire du XXe siècle.

Typologies et chiffres– 13 000 dessins et peintures ;

– 10 000 estampes ;

– 4 000 objets : sculptures, faïences,verreries, jouets, éventails, armes,vêtements de déportés, etc. ;

– 4 000 monnaies et médailles ;

– une collection de timbres ;

– des dossiers d’archives thématiques(tracts, pièces d’identité, menus, ti-ckets de rationnement, lettres manus-crites…) et biographiques (sur lesartistes présents dans les collections).

Lignes de force et histoireLe fonds a été constitué à l’origine

par Louise et Henri Leblanc au mo-ment de la Première Guerre mondia-le. Conti-nuellement enrichi, il est surcette période d’une richesse incompa-rable : peintures et dessins d’artistescélèbres, carnets de croquis de soldatsillustrant la vie quotidienne des tran-chées, manuscrits et correspondances,jouets français et allemands.

Autre point fort : la Seconde Guerremondiale. Au travers de tracts, estam-pes, aquarelles sont évoqués les com-bats et la Libération, mais aussi l’an-ti-sémitisme, les camps de déportation,le Service du travail obligatoire, la

propagande. Le musée a égalementreçu en dépôt en 1949 le fonds Pétain :objets et documents ayant appartenu àPhilippe Pétain.

Le dessin de presse est l’un des fleu-rons du musée. Du début du siècle ànos jours, il illustre l’actualité avechumour et ironie : Sennep, Cabrol,Galland, Hermann-Paul hier et aujour-d’hui Cabu, Wiaz, Wolinski, Chapatte,pour ne citer que quelques dessinateurs.

Dons et acquisitions permettent decontinuer à enrichir les fonds. Ainsi, ledon Karl Lotze a permis d’accroître lefonds allemand.

Karl Lotze était un soldat de l’arméeallemande sur le front français en 1914.Dessinateur et peintre de formation,il ne cessa de dessiner pendant samobilisation. Hospitalisé à Laon denovembre 1914 à juillet 1915, puis demars à avril 1916, il nous a laissé denombreux croquis, dessins achevés oupeintures de la ville, de ses habitants etdes environs. Son regard se pose par-fois sur la guerre : explosion d’un obus,mort d’un soldat, armée allemandeentrant dans la ville de Laon. Mais leplus souvent, il saisit sur le vif desscènes de la vie quotidienne (femmesau marché, joueur d’accordéon), s’in-téresse à l’architecture (fortifications,manoirs, églises de Thiérache), dressedes portraits (amis allemands et fran-çais, infirmiers, mendiant). Le regardprécis et passionné du peintre sembleplus fort que celui du soldat en guerre.De retour en Allemagne en 1918, KarlLotze deviendra peintre animalier.

Plus de 130 dessins et peintures(crayon, fusain, sanguine, pastel, encrede Chine, huile), plus de 60 gravures

(sur bois et sur cuivre), photographies etarchives du peintre ont été donnés parsa fille Gertrud Kothe et viennent enri-chir magnifiquement le fonds 14-18.

Ces œuvres restaurées, cataloguéeset numérisées seront accessibles pro-chainement sur le site Internet de laBDIC. En septembre 2004, 60 œuvresprêtées par le musée seront exposéesà la Maison des Arts et Loisirs de Laondans le cadre de l’exposition KarlLotze, Ernst Jünger : un peintre et unécrivain en campagne à Laon.

Catalogues, bases de donnéeset numérisation

Un catalogue sur fiches recenseestampes, originaux et médailles.

Depuis 1997, tous les documents dufonds estampes et originaux entrant aumusée ont été décrits et numérisés dansune base informatisée, qui sera acces-sible sur le site WEB de la BDIC fin 2004.

De nouveaux projets de conversionrétrospective des anciens fichiers et denumérisation des documents permet-tront d’accéder plus directement auxœuvres sur le site WEB de la BDIC.

Marie-France Dumoulin

Le fonds Estampes et originaux

Manoir, 1916.Or.7422

Portrait d’un infirmier, 1916-1917.Or.7417

Laon, 8.1.1916.Or.7356

Consultation du fondssur rendez-vous

Les lundi, mardi, jeudi, vendredide 10 h à 13 h et de 14 h à 17 h

Marie-France Dumoulin01 44 42 42 44

[email protected]

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12 histoire de la BDIC

L’incendie du 24 août 1944

Depuis 1920 la Bibliothèque-Musée de la Guerre, fondée par Louiseet Henri Leblanc et devenue ensuite laBDIC, était installée au Château deVincennes, dans les bâtiments duPavillon de la Reine. Le château étantterritoire militaire, elle en fut chasséeen novembre 1939 par le généralGamelin, qui y installa le Quartiergénéral des troupes françaises. La BDICfut transférée dans un hôtel particulierréquisitionné à Paris, rue du Bac, maisbeaucoup plus petit que les locaux deVincennes : on ne put y installer queles bureaux du personnel, une salle delecture, le catalogue et quelques mil-liers d’ouvrages seulement, les plusconsultés. La plus grande partie descollections resta donc dans le Pavillonde la Reine.

Puis, en juin 1940, les bâtimentsfurent occupés par l’armée allemande.

Août 1944Confrontées au déclenchement de

l’insurrection parisienne et à l’avancéedes troupes alliées, en août 1944, lesforces allemandes commencèrent à sereplier, se retrouvant dans l’enceinte duChâteau de Vincennes pour s’approvi-sionner en vivres et carburant.

Le directeur de la BDIC, Félix De-byser, très inquiet pour ses collections,se réinstalla alors dans son apparte-ment du Pavillon de la Reine, craignantavant tout un bombardement allié surla cour du Château, remplie de troupesallemandes, de matériels et de muni-

tions. Le 20août, le télé-phone fut cou-pé ; le direc-teur, le concier-ge de la biblio-thèque et leursfamilles reçu-rent interdictionde communi-quer avec l’ex-térieur et restè-rent ainsi plu-s i eu r s j ou r scomplètementisolés du restedu monde. Jus-qu’au 24 aoûtoù, en fin dejournée, ils as-sistèrent au dé-part de la dernière colonne allemande ;mais un sous-officier vint les prévenirqu’il leur faudrait quitter le château dèsque la dernière voiture serait passée :« Danger ! Mieux vaut ne revenir quedemain matin. »

En effet, un quart d’heure après ledépart des Allemands, une explosiond’une violence inouïe se produisit :c’étaient les dépôts de munitions,entreposés dans les casemates conti-guës au Pavillon de la Reine, qui sau-taient (à peu près au même moment,ce 24 août en fin de journée, toutes lescloches de Paris se mettaient à sonnerpour fêter l’arrivée des premiers blin-dés du capitaine Dronne sur la placede l’Hôtel de Ville).

Dans le Château de Vincennes, lesdétonations se succédèrent pendant uneheure, projetant d’énormes blocs depierre à plusieurs dizaines de mètres etprovoquant l’éboulement d’une partiedu mur d’enceinte dans le fossé du châ-teau. Quand enfin les pompiers purententrer en action, toute une partie duPavillon de la Reine « brûlait commeune torche », raconte Félix Debyserdans le rapport qu’il établit ensuite pourle ministère1 : « Tout ce qu’avaient purassembler trente ans d’efforts persévé-rants de peine patiente, de recherches,de soins, d’intelligence, tout cela s’en-volait en flammes, parce qu’en avaitainsi décidé la sauvage imbécillité d’unordre qui n’aurait même pas, pour ceuxqui l’ont donné, retardé d’une heurel’échéance de la défaite. » – cet ordrequ’Hitler avait donné au général vonCholtitz, commandant des forces alle-

mandes dans la capitale : « Paris nedoit pas tomber aux mains de l’enne-mi, ou il ne doit trouver qu’un champde ruines », et auquel le général déso-béit assez vite en acceptant de signer,le 25 août, l’acte de reddition à la pré-fecture de police de Paris.

Des pertes irréparablesL’incendie du château de Vincennes

fut tellement fort que les flammes durè-rent huit jours. Au total, le rapport dudirecteur de la BDIC chiffre les pertesde la bibliothèque à un sixième de sesfonds : 17 000 ouvrages et 11 000 pièces

…/…

L e mois d’août 1944 a été large-ment commémoré, en cette année

2004, comme le soixantième anniver-saire de la libération de Paris et de plu-sieurs autres villes de France. Un anni-versaire fêté dans la joie et le réconfort !Mais un mois qui reste aussi marquépar de nombreuses tragédies : plusieursrésistant(e)s, ou simples citoyen(ne)s,fusillé(e)s par l’occupant ou tué(e)s surles barricades, les principaux monu-ments et ponts parisiens minés par lesAllemands avant leur départ…

La BDIC garde elle aussi le souve-nir d’une date sinistre : le 24 août 1944,le jour où un incendie provoqué par lesforces allemandes détruisit toute unepartie de ses collections. C’est pour-quoi, à l’occasion de ces commémora-tions, il nous a semblé important derevenir sur cet événement.

L’incendie du 24 août 1944

Incendie du Pavillon de la Reine.Collection BDIC.

Les pertesdu Musée de la Guerre

Le Musée de la Guerre, qui étaità l’époque avec la bibliothèque dansle Pavillon de la Reine à Vincennes,subit lui aussi des pertes importantes,même si, heureusement, toute unepartie de ses collections avait été éva-cuée dès la déclaration de la guerreau Château de Chambord : les objetset tableaux de valeur furent ainsipréservés. Mais toutes sortes d’objetsd’un intérêt documentaire importantdisparurent dans cet incendie : descollections de photos, des objets fa-briqués par des soldats de la Premiè-re Guerre, des insignes, des jouets,des albums divers, ainsi que les ob-jets trop lourds pour être évacués :maquettes en plâtre de monuments,bronzes et statues, …

(1) Félix Debyser, Rapport du directeur de la BDIC et Musée de la Grande Guerre sur l’incendie du 24 août 1944. 7 feuillets dactylographiés, s.d.(2) Félix Debyser, « La BDIC et la documentation de la Deuxième Guerre mondiale », Revue de synthèse, tome LXI, 1946-1947, p. 21-28.

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13histoire de la BDIC

(l’ensemble des collections comprenaitalors 170 000 ouvrages et pièces), et à2 300 collections de périodiques :« Pertes graves en ce qui concerne lescollections des grands journaux euro-péens et américains pour la périodedécisive de 1933 à 1939, mais irrépa-rables pour une partie de nos pério-diques russes antérieurs ou contempo-rains de la révolution de 1917 », estimeF. Debyser dans un autre article2 : « Lecoup, bien qu’il n’affecte en rien la vita-lité de la bibliothèque, a néanmoins ététrès rude ; une longue patience seranécessaire pour compenser les pertesainsi subies. »

Tout le personnel de la BDIC s’effor-ça de sauver ce qui restait des collec-tions endommagées : les magasiniers éta-lèrent livres et journaux sur les pelousesdu Château pour les faire sécher. Et desappels furent lancés un peu partoutpour tenter de compenser ces pertes, et

compenser également toutes les acqui-sitions qui n’avaient pu être faites pen-dant ces cinq années de guerre (voir ci-contre, par exemple, l’annonce publiéedans L’Université libre, organe desComités universitaires du Front national).

Heureusement, des réponses posi-tives arrivèrent très rapidement d’unpeu partout, notamment des comités

de libérationbelges, hollan-d a i s , t c h è -ques, polonais,yougoslaves,grecs réfugiés àLondres ou auxÉtats-Unis etde la Résistan-ce française àl ’ é t r a n g e r .Plusieurs orga-nismes de do-cumentat ionanglais et amé-ricains appor-tèrent égale-ment une aideimportante à laBDIC . Ma i snombre de do-cumen t s nepurent jamaisêtre remplacés.Ce qui expli-que la mention« Brûlé » queles lec teur speuvent enco-re trouver surcertaines fichesquand ils fontdes recherchesdans les cata-logues papierde la BDIC…

Anne-Marie Pavillard

L’aigle et le coq

A l’occasion de leur départ en retraite, en 1985, Louis et Simone Dufourd,magasiniers à la BDIC, évoquèrent pour la revue Matériaux tous ces événe-ments qu’ils avaient vécus en direct au Pavillon de la Reine où ils habitaientalors avec le père de Louis, Joseph Dufourd, concierge de la BDIC :

« Une mission allemande avait annoncé sa visite au Musée. On savaitqu’une mission composée de policiers et de spécialistes de la guerre de 1914-1918 avait procédé à l’ouverture des paquets et caisses déposés à Chambordet avait fait un prélèvement systématique de toutes les pièces « attentant àl’honneur et à la dignité de l’Armée allemande ». Cette annonce inquiéta JosephDufourd car en haut de l’escalier d’honneur du Pavillon de la Reine se trou-vait un grand bronze représentant un coq gaulois picorant la tête de l’aigleallemand aux ailes déployées. Il fallait au plus vite faire quelque chose.Impossible de déplacer l’objet, trop lourd. Dans la nuit, Joseph Dufourd sciedonc le coq et le cache derrière des rayonnages. Malheureusement, après laguerre, il a été impossible de retrouver ce pauvre coq, qui a dû fondre dansl’incendie de 1944. »

Extrait de l’interview de Simone et Louis Dufourd, in : « D’un donjon à l’autre, ou Lesmagasiniers ont la parole », Matériaux pour l’histoire de notre temps, n° 2, avril/juin 1985.(l’aigle, lui, est demeuré dans les locaux de la BDIC...)

L’aile du Pavillon de la Reine, 1944.Collection BDIC.

Dépôt non légal

« Dans le domaine de la littéra-ture clandestine d’origine françaiseou anglaise, la Bibliothèque possèdedes collections très riches qu’elle s’at-tache à compléter tous les jours paréchange de doubles avec des collec-tions constituées par d’autres biblio-thèques ou par des collectionneursprivés et par photographies de piècesparticulièrement rares dont le déten-teur ne veut se dessaisir.De Belgiqueet de Hollande elle a reçu égalementdes dons généreux de tracts de résis-tance.Ajoutons à cela une collectiond’affiches de propagande allemandeapposées dans la région parisienneet d’affiches de représailles qui secomplète tous les jours.Ces dernièresont été recueillies de façon assezcurieuse à la faveur d’une sorte de« dépôt non légal », un colleur d’af-fiches compréhensif nous ayant ré-servé pendant plus de trois ans deuxexemplaires de celles qu’il était char-gé d’apposer sur les murs d’un quar-tier. »

Extrait de : F. Debyser, op. cit. note n° 2.

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14 act iv i tés de la BDIC

Exposition Michel Foucault, philosophe militant Octobre 2004, hall de la BDIC

A l’occasion du vingtième anniversaire de la mort deMichel Foucault, la BDIC et le Centre Michel Foucault

rendent hommage au philosophe disparu en présentant unesérie de photos inédites prises par Élie Kagan le 17 janvier1972 ; ce jour-là, un an après l’annonce de la création duGroupe Information Prison par Michel Foucault, Pierre Vidal-Naquet et Jean-Marie Domenach, une conférence de pres-se sauvage a lieu dans le hall du ministère de la Justice,place Vendôme. Michel Foucault prend la parole pour lireles revendications des détenus qui, depuis décembre 1971,sont en révolte. Gilles Deleuze, mais aussi Jean-Paul Sartre,se sont joints à cette manifestation qui rassemble famillesde détenus, militants anonymes et intellectuels.

Élie Kagan, photographe de toutes les « agitations » desannées 68 est présent et saisit dans son objectif le philo-sophe militant.

Cette exposition a été préparée par Philippe Artières etCarmen Gallego. Elle s’inscrit dans le cadre du Festival d’au-tomne. Elle est d’ores et déjà retenue pour être présentéedans d’autres lieux, notamment au Salon des revues et àl’École normale supérieure-Lettres-sciences humaines à Lyon.

La BDIC ouvrira le cycle annuel de ses « Lundis » parune conférence sur le thème de Michel Foucault, philosophemilitant, avec Philippe Artières (historien) et Alain Jaubert(écrivain). La date sera précisée ultérieurement.

Exposition Michel Foucault, philosophe militant Octobre 2004, hall de la BDIC

Nouveaux fonds dans le secteur ibéro-américain à la BDIC

L e secteur ibéro-américain de la BDIC mène actuelle-ment un programme de récupération des archives du

Comité pour le boycott de la Coupe du monde de footballen Argentine (COBA), que ce pays organisa en 1978, enpleine dictature militaire. Ces archives portent sur le mou-vement de solidarité organisé en France pendant ces annéesde répression. C’est ainsi que nous venons de recevoir etde faire l’inventaire des archives données par François Gèze,qui fut l’un des principaux animateurs du COBA et des comi-tés français de solidarité avec l’Argentine.

Les archives de François Gèze, qui seront prochaine-ment mises à disposition du public, viennent compléter un

fonds assez important concernant ce pays, notamment lapériode de la dictature militaire entre 1976 et 1983. Cesdocuments permettent d’étudier la solidarité française pen-dant les années les plus dures de violations des droits del’homme dans le Cône Sud. Ils apportent aussi des infor-mations sur les mouvements politiques de gauche en Franceaprès 1968.

Le secteur ibéro-américain vient également d’obtenirl’accord de Daniel Denis et Alain Dantou, qui animèrentles comités du COBA, pour la donation de leurs archivespersonnelles. Il va continuer de contacter d’autres personnesqui participèrent à ces comités.

Nouveaux fonds dans le secteur ibéro-américain à la BDIC

Catalogue en caractères cyrilliques sur le WEB

L e changement de version du système Aleph a permis lamise en ligne tant attendue du catalogue informatisé en

caractères cyrilliques. La base peut donc être interrogée à dis-tance, soit à l’aide d’un clavier virtuel, soit directement encyrillique si votre système d’exploitation le permet.

Rappelons que le catalogue recense les monographiesen caractères cyrilliques, principalement en russe et en bul-

gare, depuis 1997 (environ 7 500 notices à ce jour). Pourla période antérieure, il faut consulter le fichier « papier »dans l’attente d’une conversion rétrospective.

Notons que la BDIC est actuellement la seule biblio-thèque en France dotée d’une base informatisée en carac-tères cyrilliques.

Catalogue en caractères cyrilliques sur le WEB

Des sources audiovisuelles pour l’histoire du féminisme20 novembre 2004, 9 h 15 – 18 h 30, petit auditorium de la BnF

C omment rechercher, conserver, inventorier et mettre àdisposition les images des grands moments du mou-

vement féministe, ou des débats sur le viol et les femmesbattues, ou encore des films de fiction « militants » ? Quellessont les initiatives audiovisuelles nées du féminisme ?Comment construire une mémoire audiovisuelle du fémi-nisme et l’utiliser dans la recherche ?

Autant de questions auxquelles l’association Archives duféminisme souhaite apporter des réponses lors du colloqueorganisé en partenariat avec la Bibliothèque nationale de

France, le samedi 20 novembre prochain, au petit audito-rium de la BnF, toute la journée à partir de 9 h 15 : « Dessources audiovisuelles pour l’histoire du féminisme ».

La BDIC, membre de cette association depuis sa créationen 2000, participe à l’une des tables rondes, l’après-midi :« De la mémoire à l’histoire », et invite tous ses lecteurs etlectrices à venir assister à ce colloque, qui se terminera parla projection d’un film en présence de sa réalisatrice.

http://bu.univ-angers.fr/ARCHFEM/

Des sources audiovisuelles pour l’histoire du féminisme20 novembre 2004, 9 h 15 – 18 h 30, petit auditorium de la BnF

Fonds Élie Kagan. BDIC.

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Début septembre, la BDIC et l’Université de Paris-Xaccueilleront les travaux de la seconde journée de la35e conférence annuelle de l’IALHI (International Associationof Labour History Institutions), co-organisée cette année parles institutions françaises membres de l’IALHI (dont la BDIC,qui appartient au Comité de coordination de l’association)et le CODHOS, Collectif des centres de documentation enhistoire ouvrière et sociale (sorte de pendant national del’IALHI, le CODHOS vise d’abord à faciliter la conservationdes archives du mouvement ouvrier et social français. Aprèsquatre ans d’existence, il regroupe déjà plus de trente ins-titutions spécialisées, publiques ou privées : bibliothèques,centres d’archives, centres de recherche, etc. Cf. www.codhos.asso.fr).

Créée en 1970, l’IALHI a pour objectif de favoriserla coopération internationale, scientifique et technique,entre institutions spécialisées en histoire ouvrière et socia-le, et regroupe aujourd’hui plus de cent membres, prin-cipalement européens et américains (cf. www.ialhi.org).

Sa conférence annuelle constitue évidemment un momentfort de ses activités.

Après l’assemblée générale de l’association, qui setiendra le matin du 9 septembre, une table-ronde, ou-verte à tous, sera organisée le jeudi après-midi dans lasalle de conférence de l’Université Parix-X. Placée sousla présidence d’Antoine Prost, elle regroupera plusieurshistoriens et sociologues (Stéphane Beaud, Michel Drey-fus, Nicolas Hatzfeld, Gérard Noiriel, Michel Pialoux,Michel Pigenet et Michelle Zancarini-Fournel) invités àdébattre du thème suivant : La classe ouvrière en Franceà l’aube du XXIe siècle.

La conférence de l’IALHI se poursuivra le lendemainà Roubaix, accueillie par le Centre des Archives duMonde du Travail, dans les locaux duquel sera inaugu-rée l’exposition Le monde ouvrier s’affiche, réalisée pourl’occasion par le CODHOS à partir des fonds de ses dif-férents adhérents.

Dans le prochain numéro, nous rendrons compte destravaux de la conférence, qui se terminera le samedi11 septembre par une visite de quelques sites du patri-moine industriel de Seine-Saint-Denis.

15recherche histor ique

XXXVe Conférence de l’IALHIUne journée à NanterreXXXVe Conférence de l’IALHIUne journée à Nanterre

– le gouverneur militaire de Paris,garant du maintien de l’ordre contreles troubles ou le coup d’État mili-taire. Un seul titulaire sur 14 ans : legénéral Saussier (1884-1898) ;

– fraîchement institutionnalisé(1890), un nouveau centre de pouvoir :l’état-major général, chargé de prépa-rer la guerre sur le modèle allemand,en butte en particulier à l’hostilité desdirecteurs qui freinent son implanta-tion.

L’armée et DreyfusDreyfus débute aussi brillamment

que son aîné Valabrègue : né en 1859,Polytechnique en 1878-1880, capitai-ne en 1889, sorti 9e sur 81 de l’Écolede Guerre avec mention Très Bien.

Dreyfus est en grande partie victi-me du pouvoir éclaté, peu communi-quant, décrit plus haut. Il est confron-té à trois événements, défavorablespour lui :

• une ambiance d’espionnite qui aété renforcée par Boulanger en 1886-87, avec des lois très dures et la venueà Paris du lieutenant-colonel Sandherrpour créer un service de contre-espion-nage performant ;

• l’existence d’un grand projetsous le boisseau : le canon de 75, misau point dans le plus grand secret avecpeu de monde dans la confidence, ni

le Service de renseignements, ni l’état-major général ;

• la montée en puissance de l’état-major général de Miribel, où le recru-tement se fait par cooptation, en par-ticulier au 4e Bureau, chargé en tempsde paix de préparer la concentrationsuccédant à la mobilisation, tâche émi-nemment bureaucratique mais riche engratification et réputation. Des officiersy font carrière : Gonse pendant 15 ans,le lieutenant-colonel d’Abboville pen-dant neuf ans avec une seule inter-ruption.

Le destin de Dreyfus s’est forgéquand, en 1891, de Miribel a imposéà l’état-major général de recevoir enstage pour deux ans les officiers sortisdans les douze premiers de l’ESG.Dreyfus a fait partie de la 2e promo-tion à bénéficier de cette réforme. Ila été partout très bien noté, sauf au4e Bureau. Or, c’est le 4e Bureau quiva l’accuser d’emblée quand on vachercher un coupable.

Dreyfus est dénoncé par un desbureaux de l’état-major. Pour son chef,le général de Boisdeffre, c’est un évé-nement fâcheux. Chef d’état-major defraîche date, il est arrivé trop jeune àce poste, suite au décès subit de sonchef, le général de Miribel. Il ne peuts’appuyer ni sur Saussier, qui le regar-de de haut, ni sur les directeurs qui luicontestent sa prééminence. Son choix,

dans cette affaire, est de coller à ladécision ministérielle tout en se ména-geant une distanciation obtenue enconfiant la gestion de l’affaire augénéral Gonse. Choix fatal, qui l’amè-nera à la démission suite à la gestioncatastrophique de l’ensemble parGonse.

Tous les ingrédients sont en placepour que, à partir d’une erreur judi-ciaire, on assiste à une accumulationde fautes qui vont maintenir au bagnependant près de cinq ans un innocent.

Général (2° S) André Bach

L’affaire Dreyfus et les droits de l’homme, suite de la page 16L’affaire Dreyfus et les droits de l’homme, suite de la page 16

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16 recherche histor ique

L’affaire Dreyfus et les droits de l’homme

L e général André Bach, qui a dirigéles archives du Service historique

de l’armée de terre (SHAT), est l’auteurde plusieurs ouvrages historiques mar-quants. Il vient de publier L’Armée deDreyfus. Une histoire politique del’armée : de Charles X au déclenche-ment de l’Affaire chez Taillandier en2004. Nous le remercions vivementde nous avoir autorisé à reproduiresa communication à la conférence-débat, « L’armée, les intellectuels etles associations dans la défense desdroits de l’homme », organisée par leMusée d’histoire contemporaine-BDIC,en liaison avec l’exposition en cours, le16 juin dernier.

Je ne traite pas ici de l’affaireDreyfus sous son aspect politique voireuniversel. En scrutant les archives del’armée, j’ai essayé de comprendrecomment le capitaine Dreyfus, alorsqu’il avait été formé pour accéder auxplus hautes responsabilités, a pu êtreaussi rapidement et ignominieusementcondamné par la majorité de ses pairs,et sa réhabilitation ultérieure acceptéed’aussi mauvaise grâce.

Quel est l’état de l’institutionmilitaire en 1898 ?

Le traumatisme de 1870 a entraînéla mise sur pied, en particulier enEurope continentale, d’institutions mili-taires gigantesques pesant d’un poidsinaccoutumé sur les gouvernements etabsorbées dans une planification de laguerre les incitant à développer sansfrein une bureaucratie technocratiquemilitaire.

Une armée fonctionnariséeDepuis 1832, par la grâce des lois

Soult, l’officier est devenu un fonction-naire : il a obtenu des protections destatut, contre son obéissance à l’État.Tout jeune dont les parents avaient réus-si à financer les études jusqu’au bac-calauréat, passé vers 17 ans, pouvaitpostuler aux concours des deux écolesmilitaires, le système permettant, en casde constatation de ressources insuffi-santes, l’octroi de bourses dont le mon-tant couvrait les frais d’études et d’in-ternat pendant les deux années àSaint-Cyr ou Polytechnique.

Ainsi, le général Gonse est le fils d’unemployé des postes, le général Roger,

autre tourmen-teur de Dreyfus,est le fils d’un

L’affaire Dreyfus et les droits de l’homme

suite en page 15

gendarme à la retraite au moment oùson fils présente le concours. Le géné-ral de Pellieux a pour père un soldatmonté par le rang qui a atteint à saretraite le grade de capi-taine et a doncvécu une bonne partie de sa carrièrecomme sous-officier. Ces deux derniersont été boursiers, de Pellieux non seu-lement à Saint-Cyr mais aussi aupara-vant à La Flèche.

Au sein de ce corps tout un chacunessaie, par ses relations, par des actionsd’éclat ou par l’accès sur concours àl’École d’Application d’état-major, dejouer avec les règles d’ancienneté pourse hisser au dessus de la moyenne etparvenir aux plus hauts postes.

1870 n’a pas changé d’un iota ceprocessus.

Y a-t-il un ostracismeantijuif ?

Non, à-priori, comme le montrela carrière du général MardochéeValabrègue, officier juif entré dansl’armée seulement quelques annéesavant Dreyfus. Né en 1852, le jeuneMardochée avait été reçu à Poly-technique en 1871. En 1878, il entraità la première session de l’École supé-rieure de Guerre et en sortait 2e sur 66.Officier d’ordonnance du généralBoulanger, ministre de la Guerre, en1887, chef de cabinet du généralAndré en 1904-1905, il commandel’École de Guerre de 1905 à 1907,un corps d’armée en 1911 puis le4e Groupe de divisions de réserve en1914. En 1917, avant son passage à laretraite, il est inspecteur général deseffectifs aux armées.

Un officier d’origine israélite, aînéde Dreyfus de sept ans seulement, pou-vait donc faire carrière sous la IIIe Répu-blique, ce qui était inconcevable à lamême époque dans les armées russe,britannique ou allemande.

Un pouvoir éclatéEn 1898, il n’y a pas un centre

unique de pouvoir dans les arméesmais trois :

– le ministre, avec ses directeurs quiluttent pour accaparer le temps duministre afin d’asseoir leur pouvoir,un ministre général fragilisé par l’ins-tabilité parlementaire : en treize ansdouze ministres mais uniquement deuxdirecteurs de l’artillerie ;