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Journées Nationales de Géotechnique et de Géologie de l’Ingénieur JNGG2014 Beauvais 8-10 juillet 2014 UTILISATION DE BOIS LOCAUX COMME SOLUTION DE SOUTENEMENT POUR LA RENOVATION D'UN PORT USE OF REGIONAL WOOD IN A SOLUTION OF RETAINING WALL FOR THE RENOVATION OF A PORT Marie CHRETIEN 1 , Igor PONCHART 2 1 G.T.S. (groupe NGE), Saint Priest, France, [email protected] 2 SUD FONDATIONS, Martignas-sur-Jalle, France, [email protected] RÉSUMÉ Contrairement à d'autres pays européens ou internationaux, la technique des pieux bois n'est plus une solution courante de fondations profondes ou de renforcement de sols, au bénéfice de l'emploi du béton et de l'acier. Le projet de recherche collaborative "Pieux Bois en Aquitaine", coordonné par SUD FONDATIONS, avait pour objectif de réhabiliter l'utilisation de pieux en bois local battus dans le sol, en rétablissant un mode opératoire et un cadre normatif. Mandataire d'un marché pour la réfection d'un îlot sur le port ostréicole de PIRAILLAN (33), SUD FONDATIONS a proposé et dimensionné une solution de base avec un soutènement définitif entièrement en bois, et la mise en fiche de 235 pieux en bois traités classe IV (pin maritime) soumis aux marées. L'article présente le contexte du projet avec ses contraintes environnementales, ainsi que les choix constructifs. ABSTRACT Wood piles is no longer a common solution of deep foundations or soil improvement in France, for the benefit of the use of concrete and steel. The collaborative research project "Wood Piles in Aquitaine", coordinated by SUD FONDATIONS, rehabilitate the use of local wood piles as an available foundation system by restoring a technical and design procedure. Representative of a contract for the renovation of a part on the oyster port Piraillan (33), SUD FONDATIONS proposed and realized an alternative retaining wall solution, composed completely with a wooden support and 235 wood piles. A local wood treated class IV (maritime pine) was used for this application, as wanted by the contracting authority. The article presents the project context with environmental constraints and constructive choices in maritime conditions. 1. Introduction Les deux îlots centraux du port de Piraillan, situés sur la commune de Lège-Cap- Ferret sur le Bassin d'Arcachon (33), avaient été construits il y a plus de 40 ans afin de servir de lieu de stockage de matériels pour les ostréiculteurs du port. Ces îlots avaient été réalisés à l'aide d'un soutènement composé de matériaux très variés selon les zones (poteaux en bois, poteaux téléphoniques en béton, blocs béton, un remblai à base de coquilles d'huîtres, etc.) (Figure 1). L'ancien soutènement était

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Journées Nationales de Géotechnique et de Géologie de l’Ingénieur JNGG2014 – Beauvais 8-10 juillet 2014

UTILISATION DE BOIS LOCAUX COMME SOLUTION DE SOUTENEMENT POUR LA RENOVATION D'UN PORT

USE OF REGIONAL WOOD IN A SOLUTION OF RETAINING WALL FOR THE RENOVATION OF A PORT

Marie CHRETIEN1, Igor PONCHART2

1 G.T.S. (groupe NGE), Saint Priest, France, [email protected] 2 SUD FONDATIONS, Martignas-sur-Jalle, France, [email protected]

RÉSUMÉ — Contrairement à d'autres pays européens ou internationaux, la

technique des pieux bois n'est plus une solution courante de fondations profondes ou

de renforcement de sols, au bénéfice de l'emploi du béton et de l'acier. Le projet de

recherche collaborative "Pieux Bois en Aquitaine", coordonné par SUD

FONDATIONS, avait pour objectif de réhabiliter l'utilisation de pieux en bois local

battus dans le sol, en rétablissant un mode opératoire et un cadre normatif.

Mandataire d'un marché pour la réfection d'un îlot sur le port ostréicole de

PIRAILLAN (33), SUD FONDATIONS a proposé et dimensionné une solution de

base avec un soutènement définitif entièrement en bois, et la mise en fiche de 235

pieux en bois traités classe IV (pin maritime) soumis aux marées. L'article présente le

contexte du projet avec ses contraintes environnementales, ainsi que les choix

constructifs.

ABSTRACT — Wood piles is no longer a common solution of deep foundations or

soil improvement in France, for the benefit of the use of concrete and steel. The

collaborative research project "Wood Piles in Aquitaine", coordinated by SUD

FONDATIONS, rehabilitate the use of local wood piles as an available foundation

system by restoring a technical and design procedure. Representative of a contract

for the renovation of a part on the oyster port Piraillan (33), SUD FONDATIONS

proposed and realized an alternative retaining wall solution, composed completely

with a wooden support and 235 wood piles. A local wood treated class IV (maritime

pine) was used for this application, as wanted by the contracting authority. The article

presents the project context with environmental constraints and constructive choices

in maritime conditions.

1. Introduction

Les deux îlots centraux du port de Piraillan, situés sur la commune de Lège-Cap-

Ferret sur le Bassin d'Arcachon (33), avaient été construits il y a plus de 40 ans afin

de servir de lieu de stockage de matériels pour les ostréiculteurs du port. Ces îlots

avaient été réalisés à l'aide d'un soutènement composé de matériaux très variés

selon les zones (poteaux en bois, poteaux téléphoniques en béton, blocs béton, un

remblai à base de coquilles d'huîtres, etc.) (Figure 1). L'ancien soutènement était

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dans un état de dégradation très avancé, avec des zones partiellement effondrées et

le passage central entre les îlots était bouché (Figure 1).

Figure 1 . Etat des lieux initial des îlots avant les travaux.

Le projet prévoit la démolition des anciens îlots et la reconstruction d'un îlot central,

sur la même emprise qu'auparavant mais de plus petites dimensions. Le nouveau

soutènement devait répondre à la fois à des exigences techniques et

environnementales fortes, tout en conservant une esthétique en adéquation avec la

région. Cela consistait à démolir entièrement les 720 ml de quais existants pour

réaliser un seul îlot central, et à le surélever légèrement de façon à résister aux

vagues de tempêtes lors de grandes marées (risque de submersion important). Ce

rideau autostable de 440 ml devait également s'insérer visuellement dans le

paysage. L'intégration du bois local permettait de répondre à l'ensemble de ces

critères, ainsi qu'à une volonté de la commune d'employer des matériaux de

provenance locale. Un soutènement inédit dans la région, avec 1 500 m2 de

parement et de 235 pieux en pin Maritime, ont ainsi été dimensionnés pour réaliser

ces travaux de rénovation. La mise en œuvre de cette technique sur ce projet a été

optimisée grâce au retour d'expérience des recherches menées dans le cadre du

projet de recherche "Pieux Bois en Aquitaine" (Gardet et al., 2013), ainsi que du

projet national C2D2 Pieux Bois coordonné par l'IFSTTAR (Christin et al, 2012).

Nous présenterons dans cet article le contexte géotechnique du site, la technique de

soutènement retenue avec le choix du bois et le dimensionnement des pieux en bois.

Les dispositions constructives prises pour assurer la pérennité du pin Maritime dans

ces conditions de marnage seront exposées.

2. Présentation du projet

2.1. Contexte géotechnique et hydraulique du site

Le port de Piraillan est situé dans la partie nord-ouest du Bassin d'Arcachon, qui est

une lagune naturelle ouverte sur l'Océan Atlantique avec des marées semi-diurnes.

Du point de vue géologique, on retrouve des formations de surface constituées de

remblais anthropiques (à base de coquilles d'huîtres) et des sables plus ou moins

argileux à vasards, surmontant la formation des sables des Landes datant du

Pléistocène inférieur.

Une campagne de reconnaissance géotechnique a permis de déterminer les

caractéristiques géo-mécaniques des sols en place, synthétisées dans le Tableau 1

ci-après.

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Tableau 1 . Caractéristiques géotechniques des sols en place

Nature du matériau

Profondeur

(m)

Ple*

(MPa)

Poids volumique saturé [kN/m3]

Caractéristiques drainées

c’ [kPa] φ’ [°]

Remblai 0 à 1,50 - 20 0 25

Sables peu argileux

Au-delà de 1,50

1,6 18 5 35

Le projet est soumis à un marnage variant entre 1,10 m (pour un coefficient de 20) et

4,95 m (pour un coefficient de 120). Le Tableau 2 résume les cotes de marées qui

vont conditionner le phasage des travaux dans le dimensionnement.

Tableau 2 . Données sur les niveaux d'eau

Marée Basse mer vive-

eau (NGF) Niveau à mi-marée (NGF)

Pleine mer de vive-eau (NGF)

Pleine mer de vive-eau exceptionnelle (NGF)

Arcachon - 1,58 m + 0,39 m + 2,07 m + 2,53 m

NB: Surcote = 1 m ; Gradient hydraulique de 1 m entre l'amont et l'aval et une cote de dragage du port = + 0,75 m NGF

2.2. Contraintes environnementales du site

Le Port de Piraillan se situe au cœur de l'activité ostréicole du Bassin d'Arcachon.

L'enjeu du projet était de s'assurer que les travaux ne viennent pas interdire la

consommation des huîtres suite au remaniement des sédiments déposés à chaque

marée. Des seuils de concentrations à ne pas dépasser ont été ainsi définis et

vérifiés par des prélèvements d'eaux réguliers, où la salinité et la présence de micro-

algues sont recherchées. Pour surveiller les teneurs en matières en suspensions

(MES), un turbidimètre a été mis en place avant le démarrage des travaux à la sortie

du port. Il était relié à une centrale d'acquisition automatique pour assurer un

monitoring en temps réel. Les résultats de cette instrumentation ne seront pas

présentés dans cet article.

3. Technique de soutènement retenu

3.1. Principe retenu

Le projet imposait de trouver une solution technique pour réaliser un soutènement

définitif en bois (parement et pieux) et autostable. Pour répondre à ces exigences,

l'ouvrage proposé est un écran de soutènement type berlinoise de 440 ml, avec la

pose de 1 500 m2 de parement en bois et la mise en fiche de 235 pieux battus en

bois, espacés tous les 2 m. Une inclinaison des pieux de 14° par rapport à la

verticale était également demandée, afin d'obtenir un ouvrage esthétique et

s'intégrant parfaitement dans le paysage. Une cale à bateau a été aménagée pour

que les ostréiculteurs puissent accéder à l'îlot, et entreposer leur matériel. Une

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rampe d'accès a ainsi été créée avec une dalle béton (cf. Figure 2). Le plan de

principe du projet est illustré à la Figure 2 ci-dessous.

Figure 2 . Vue en plan du projet de soutènement de l'îlot central, au 1/175° (Source:

SUD FONDATIONS).

3.2. Dimensionnement du soutènement

Le soutènement a été dimensionné selon la norme NF P94-282 (Ecrans), en prenant

en compte des modules d'élasticité et des contraintes d'un bois de classe de

résistance C18 (NF EN 338) pour le parement et les pieux de l'écran composite (voir

§3.3). La détermination des efforts le long du pieu à partir des efforts horizontaux

appliqués en tête (marée, vent) a été effectuée à l’aide du logiciel RIDO v4.20. Les

pieux bois sont de section rectangulaire (250 x 200 mm), écorcés, aplanis sur les 4

faces et de 5 m de longueur avec une fiche mécanique et hydraulique de 3 m dans

les sables. La vérification de la portance des sols s'est appuyée sur les

recommandations de l'IFSTTAR "Proposition d'une méthode de dimensionnement

des pieux en bois à partir de la méthode pressiométrique" (Livrables du projet, 2013),

en prenant des valeurs de kp et α pieu dans les sables respectivement de 3,1 et 1,1.

Les calculs en élasto-plasticité ont montré que pour des pieux de 5 m de longueur,

l'autostabilité de la paroi composite ne serait pas assurée. Or la longueur standard

pour des grumes en bois est de 5 m. Donc pour que cette paroi soit autostable tout

en conservant des pieux bois de 5 ml pour le soutènement, le meilleur compromis

technico-économique était de prévoir un contre-rideau "caché" en arrière du

parement sur tout le linéaire de l'ouvrage. Ce contre-rideau est composé de 235

pieux métalliques battus (HEB 160 de 2 m de longueur), mis en œuvre tous les 2 m

dans l'alignement des pieux bois du soutènement en amont (voir profil à la Figure 3).

Nouvel îlot central, avec soutènement

bois

Accès cale à bateau

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Ancien quai démoli

Nouveau quai bois

HEB 160 – Lg = 2 m

Tirant métallique Ø16 mm

2,00 NGF

Tasseau fixation couronnement en pin

Lambourde en pin

TN 2,80 NGF

0,75 NGF

Planche de retenue Pin

Pieu bois Pin, Lg = 5 m

Contre-rideau

Remblai avec matériau du site

Figure 3 . Coupe du soutènement modélisé (Source: SUD FONDATIONS).

Avec ce contre-rideau, le soutènement est autostable pour une hauteur hors sol de 2

m, avec un déplacement calculé maximum de 15 mm (pour le soutènement bois)

pour un moment maximum à l'ELS de 1,34 t.m par pieu. La Figure 4-a présente les

résultats de la modélisation de la phase "mise en place du soutènement bois" et la

Figure 4-b illustre celle de la phase "mise en place du contre-rideau". Un calcul

prenant en compte une perte d'épaisseur de 5 cm sur les poteaux bois a été simulé

pour vérifier le comportement à long terme du bois (durabilité au bout de 15 ans). Ce

calcul a montré une augmentation de l'effort repris par l'ancrage passif, passant de 4

à 6,8 tonnes, et un déplacement maximum théorique de 29 mm. Ce comportement

est admissible par rapport au critère fixé par les conseils du maître d'ouvrage pour ce

type d'ouvrage. Pour garantir la jonction et le transfert des charges entre les pieux

bois et métalliques, 235 tirants en acier galvanisé ont été boulonnés en tête de pieux.

Malgré la présence de ces pieux métalliques, le matériau bois reste prépondérant

dans l'ouvrage. L'essence de bois constituant le parement est identique à celui des

pieux, il s'agit de pin maritime traité classe 4. Le parement est réalisé à l'aide de

panneaux en bois, de dimensions 100 x 200 mm (épaisseur : 3 cm), renforcés par

deux lignes de tasseaux en bois. Pour garantir l'étanchéité de la face arrière du

parement bois (départ de remblais), un géosynthétique a été fixé sur la face arrière

des panneaux, avec un recouvrement sur les pieux bois. Une poutre bois de

couronnement finalise le soutènement.

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Figure 4 -a. Résultat graphique du calcul de déformation RIDO de la phase "mise en

place soutènement bois"

Figure 4-b. Résultat graphique du calcul de déformation RIDO de la phase "mise en

place du contre-rideau"

3.3. Choix du bois et dispositions constructives

Dans ce dossier, il était demandé d'utiliser un bois local certifié PEFC répondant à

une classe d'exposition minium type 4, soit au contact permanent du sol ou de l'eau

douce conformément à l'EN 335-1, ainsi qu'une durée de service minimale de 15

ans. Au vu de l'absence avérée du ver marin "térébrant" dans le port de Piraillan,

cela aurait été peu écologique et peu économique de faire venir du bois exotique

pour ce chantier situé à proximité de la forêt des Landes. Il a été ainsi proposé de

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réaliser tous les éléments bois du soutènement (pieux, panneaux, tasseaux,

planches de couronnement) en résineux type pin Maritime traité.

Vu que ce soutènement se situe au milieu d'un port, la partie des pieux encastrés

dans le sol seront toujours immergés, ce qui garantit la bonne conservation du bois

dans le temps. C'est la partie du pieux bois soumise au marnage des marées, qui va

subir des cycles d'humidification-séchage répétés et intenses, favorisant la

dégradation plus rapide de cette zone si on ne traite pas le pin. C'est pourquoi, pour

assurer la bonne tenue des pieux bois pour la durée de service minimale, un

traitement des pieux est indispensable. Après traitement de l'aubier par le procédé dit

"autoclave", le pin maritime est considéré de classe 4, avec une résistance

structurelle équivalente de C18 (selon l'EN 338). Rappelons que les classes de

résistance ont été réalisées pour des bois de structure sciés et séchés, et non pour

des bois bruts verts ou secs, c'est pourquoi nous parlons ici "d'équivalence". Le pin

maritime traité a été écorcé et non épointé à la base, car des tests ont montré que

l'épointage des pieux n'apportait rien lors du lançage à l'eau. Le Tableau 3 donne les

caractéristiques mécaniques du bois pris en compte dans le dimensionnement, pour

des bois avec un taux d'humidité de 12 %.

Tableau 3 . Caractéristiques mécaniques du pin maritime mis en œuvre.

Nature du bois

Module d'élasticité

(MPa)

Contrainte de rupture en compression axiale

(MPa)

Contrainte de rupture en flexion statique

(MPa)

Pin maritime 10 000 20 22

Suite à des essais statiques de compression axiale (selon la NF P 94-150-1),

effectués sur des pieux en bois réalisés dans le cadre des trois plots expérimentaux

du projet de recherche Pieux Bois, nous avons une estimation du comportement de

pieux en bois "flottants" dans les limons argileux et sols sableux. Pour des pieux en

pin maritime de longueur 5 m (non épointés et non écorcés), les capacités portantes

ultimes mesurées sont comprises entre 19 et 36 t (moyenne de 25 t) pour des

diamètres allant entre 200 et 260 mm (Gardet et al., 2013). Ces résultats sont donc

largement suffisants pour cette application.

4. Exécution des travaux

Avant les travaux, les anciens îlots ont été démolis, engendrant un volume de

déblais/ remblais d'environ 5 500 m3 avec 60 tonnes de déchets évacués du site.

4.1. Adaptation de la technique d'exécution

Au démarrage du chantier, des tests de mise en œuvre ont été réalisés sur site afin

de déterminer la meilleure méthodologie de battage, réduisant au maximum les

nuisances sonores vis-à-vis des riverains et n'abimant pas le bois. Le premier test a

consisté à battre les pieux bois à l'aide d'un marteau de battage pneumatique par

trépidation de 1 400 kg. La trépidation permet de battre un pieu avec une cadence de

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250 à 300 coups/minute, soit une énergie par coup développée de 6 030 joules à

une pression constante de 7 bars (documentation technique PAJOT). Dans les

sables dunaires sous nappe, cette méthode permettait de ficher le pieu avec un

temps d'enfoncement par pieu de l'ordre de 5 à 10 minutes pour un pieu de 5 m.

Mais il était difficile d'obtenir l'inclinaison à 14° et la précision d'implantation.

Le second test a consisté à mettre en place un système de lançage à l'eau, avec une

pompe spécifique pour l'eau saline. Le lançage a pour principe de mettre en place

une canne d'injection à la pointe du pieu, puis d'injecter à haute pression l'eau pour

déstructurer provisoirement le sol autour de la base du pieu, afin de permettre

l'enfoncement progressif de ce dernier dans le sol. Pour assurer le guidage vertical et

l'inclinaison à 14° des pieux bois dans le sol, un guide métallique spécifique de 12 m

de long a été fabriqué, à partir de HEB soudés, et ce guide était à chaque fois ancré

dans le sol. Une fois la profondeur d'ancrage atteinte, le lançage est arrêté et on

maintient le pieu en place dans le guide pendant 24h, de façon à dissiper les

pressions interstitielles après le lançage et vérifier l'absence de liquéfaction des sols.

Lors du lançage, des courbes de battage ne sont pas réalisables.

La Figure 5 permet de visualiser le système de guidage au sol mis en œuvre sur site.

La Figure 6 illustre la méthode par lançage à l'eau pour la mise en fiche des pieux

bois dans les sols sableux saturés. La Figure 7 montre le chantier avant le recépage

des pieux et la pose de la poutre de couronnement en bois (dernière étape).

Figure 5 . Mise en œuvre des pieux bois à l'aide d'un système de guide en pied

ancré dans le sol (Photos: P. Roy, 2013).

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Figure 6 . a et b) Lançage à l'eau pour la mise en fiche des pieux dans les sables ; c)

Vue des pieux bois après la reconsolidation des sols (Photos: P. Roy, 2013).

Figure 7 . Mise en œuvre des pieux bois et du soutènement terminé, en décembre

2013 (Photos: P. Roy, 2013).

4.2. Suivi de l'ouvrage

Le suivi de l'ouvrage a consisté à réaliser un levé topographique journalier du

positionnement des pieux, de leur déviation éventuelle ainsi que du niveau de la

plate-forme à chaque étape de terrassement. Il s'agissait de vérifier au moment de la

fin des travaux, et après les fortes marées de début janvier 2014 (forte houle qui a

submergé l'ouvrage à deux reprises consécutivement), que le tassement admissible

de l'ouvrage, fixé à 15 cm, n'était pas dépassé. Le contrôle du "ventre" du

soutènement n'a pas pu être vérifié au vu du contexte du chantier.

5. Conclusion

Ce premier chantier de soutènement entièrement en bois (pieux et panneaux) a

permis de valider un dispositif de mise en œuvre dans les sols sableux saturés,

permettant ainsi d'atteindre un rendement élevé sans nuisance sonore pour les

riverains et sans impact écologique pour l'environnement du port. Les essais

réalisés, ainsi que le suivi de l'ouvrage, ont validé nos hypothèses de calcul et le

chantier a pu être terminé dans le délai fixé de 3 mois de travaux. Le pin Maritime

traité a montré que ses performances mécaniques en compression et flexion étaient

a) b) c)

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adaptées à notre méthodologie d'exécution et pour reprendre les efforts de ce

soutènement. De plus, l'emploi de ce bois local offre un apport esthétique au projet,

ce qui a satisfait les élus et riverains de la commune.

Ce projet était l'occasion de rétablir l’utilisation de pieux en bois locaux, comme un

procédé alternatif et concurrentiel à faible impact carbone pour les fondations

d’ouvrages. Dans le cadre de cette démarche QFSE, Sud Fondations a cherché à

utiliser les produits non valorisés de la filière bois en Aquitaine pour développer une

catégorie de pieux durables, ayant des caractéristiques mécaniques et géométriques

permettant de s’adapter aux contraintes des projets, tout en apportant une plus-value

environnementale.

Remerciements

Les auteurs remercient les membres des services techniques et les élus de la

commune de Lège-Cap-Ferret pour leur soutien au projet, la maîtrise d'œuvre pour

son suivi des travaux (ARTELIA) ainsi que les entreprises partenaires de SUD

FONDATIONS pour la réalisation de ce projet (SLE et RONCAROLO).

Références bibliographiques

Afnor (2007). NF EN 335 - 1, Durabilité du bois et des matériaux dérivés du bois, Définition des

classes d'emploi - Partie 1 : Généralités, 13 pages

Afnor (2009). NF EN 338, Bois de structure - Classes de résistance, 15 pages

Afnor (1999). NF P 94-150-1, Essai statique de pieu isolé sous un effort axial – Partie 1 : En

compression, 28 pages

Christin J., Reiffsteck P., Le Kouby A., Barthram C. Bocquet J-F (2012). Projet Pieux Bois: Construction

d’un plot expérimental et instrumentation des pieux en bois, Journées Nationales de

Géotechnique et de Géologie de l’Ingénieur JNGG 2012, Bordeaux, 4 au 6 juillet 2012, pp. 641-648

Gardet S., Chrétien M., Martinez C. (2013). Expérimentation et valorisation de l'utilisation de bois

locaux comme solution de fondation et de renforcement de sols, 21ème Congrès Français de

Mécanique, Bordeaux, 26 au 30 août 2013, 6 pages

Livrables du projet Pieux Bois, (2013), téléchargeables à l’adresse http://www.geotech-

fr.org/ressources-documentaires/projets/pieuxbois