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1 1 Auguste Truelle Le jardin familial des plantes médicinales 1925

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Auguste Truelle

Le jardin familialdes plantes médicinales

1925

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Présentation générale

Utilité.La création de ces jardins, outre la petite contribution qu’elle apporterait à notre libération de l’étranger,justifierait son utilité par les buts suivants qui ressortissent à la médecine humaine et à l’art vétérinaire. I°Elle mettrait à la disposition de leurs possesseurs un certain nombre de plantes médicinales choisies parmicelles qui sont pourvues de propriétés plus ou moins actives reconnues par des essais thérapeutiques ou bienadmises empiriquement par un usage ancestral et constituant souvent la base des remèdes populairestoujours si vivaces dans tous les pays ; 2° Elle permettrait, par leur emploi, de soulager rapidement, enl’absence du médecin, certaines indispositions fugaces, ou d’entreprendre sous sa direction le traitement àlongue échéance de maladies d’ordre divers ; 3° Elle donnerait le moyen de tirer parti des propriétés spécialesde plusieurs d’entre elles pour confectionner des condiments et des liqueurs.

Relativement à la médecine animale, le cultivateur trouverait souvent aussi dans l’emploi de ces plantes unremède pour ses bestiaux, en attendant l’arrivée du vétérinaire.

Enfin, en dehors de son utilité directe d’ordre familial, la création de ces jardins présenterait, pour les lycées,collèges et surtout les écoles primaires des campagnes, un intérêt assez grand du point de vue hygiénique etsanitaire, sans compter l’enseignement des premières notions de botanique sous forme d’une attrayante leçonde choses.

Étendue.Elle serait subordonnée au nombre de plantes qu’on y introduirait et à l’importance donnée à leur culture,mais pour justifier le nom de Jardin familial, ce nombre ne devrait comprendre que les plantes dont les «vertus » sont les plus reconnues et les usages les plus répandus dans la médecine populaire. Il résulteraitd’un choix judicieux et adéquat aux besoins de la famille, du personnel à son service et du cheptel, s’il yavait lieu. Pour ces raisons, il est presque impossible d’en fixer l’étendue, mais, quelle qu’elle fût, elle devraitgénéralement, sinon toujours, constituer un jardin distinct du jardin fruitier, potager ou fleuriste, ce quiserait facile à réaliser dans les grandes propriétés et les fermes importantes. Toutefois, comme il est d’intérêtgénéral et particulier que cette création se répande partout chez nous, quiconque possèderait un jardindevrait y réserver un petit emplacement pour la culture de ces « simples » qu’on a surnommées poétiquement« les sœurs de charité de la nature ». De là, pratiquement, la raison d’être d’un grand et d’un petit jardinfamilial de plantes médicinales.

Composition.

Grand jardin familial. — Parmi les plantes si abondamment répandues sur notre sol, je limite,conformément aux raisons ci-dessus, à 50 le nombre maximum de celles qui composeraient le grand jardin ;en voici les noms par ordre alphabétique :Absinthe, Angélique, Anis, Armoise, Asperge, Bardane, Bouillon blanc, Bourdaine, Bourrache, Camomille,Centaurée (petite), Chicorée, Cochléaria, Consoude, Coquelicot, Coriandre, Cresson, Douce-Amère, Fenouil,Fumeterre, Gentiane, Guimauve, Houblon, Hysope, Laitue, Lierre terrestre, Mauve, Mélisse, Menthe,Mercuriale, Moutarde, Nerprun, Pavot, Pensée sauvage, Pied de chat, Pyrèthre, Raifort, Réglisse, Reinedes prés, Rhubarbe, Saponaire, Sauge, Sureau, Tanaisie, Tilleul, Tussilage, Valériane, Verveine, Violette.

Ce choix pourrait, certes, être modifié, mais tel quel il me paraît répondre largement et sans danger auxbesoins d’une thérapeutique immédiate ; toutefois, je ferai remarquer que j’en ai exclu :

1° malgré leurs propriétés bien accusées, les plantes toxiques, comme l’Aconit, la Belladone, laDigitale, etc., à cause précisément de leur toxicité qui défend de les employer sans l’avis formel du

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médecin. Il en serait tout autrement, s’il s’agissait de leur culture en grand au point de vuecommercial ;

2° Les plantes à essence que leurs propriétés rattachent plus à la parfumerie qu’à la droguerie, tellesque : la Lavande, la Rose, le Romarin, etc., qu’on peut, d’ailleurs, cultiver dans le jardin fleuriste.

Pour restreindre l’étendue du jardin, il serait facultatif :

d’en retirer les plantes qu’on trouve souvent dans la plupart des jardins potagers : l’asperge, lachicorée, la laitue, le cochléaria, etc. ;

b) ou de planter dans les haies formant l’enclos, les arbres ou arbustes dont elles sont les principauxhabitats la bourdaine, la douce-amère, le nerprun, le sureau, le tilleul et même le houblon ; la roncepourrait y pousser par surcroît.

Petit jardin familial.Il serait composé des vingt plantes. arbres ou arbrisseaux choisis dans les 50 énumérées ci-dessus, dont lespropriétés absolument médicamenteuses correspondent le mieux aux usages les plus divers de lathérapeutique ordinaire, base de la généralité des remèdes populaires. Ce sont, par ordre alphabétique :Absinthe, Anis, Armoise, Bourdaine, Bourrache, Camomille, Douce-Amère, Guimauve, Houblon, Hysope,Mélisse, Menthe, Nerprun, Pyrèthre, Réglisse, Sauge, Sureau, Tilleul, Valériane, Violette.

De la sorte, comme la culture ne porterait réellement que sur quatorze plantes réunies, les six autres faisantpartie des haies, la surface du terrain en serait assez réduite. Enfin, comme dernière limite, même dans lejardin potager le plus ordinaire, il serait toujours possible de réserver un petit emplacement, ne serait-cequ’en bordure, pour y cultiver quelques touffes des sept plantes les plus utiles d’entre elles : anis , armoise,bourrache, camomille, guimauve, mélisse et menthe, dont les usages sont, pour ainsi dire, journaliers ; ellesfigurent déjà dans nombre de jardins potagers ou maraîchers.

Culture.Étant donnée l’impossibilité dans laquelle on se trouve d’accorder à chaque plante le terrain et le milieuqu’elle possède à l’état naturel, le terrain du jardin serait découvert, aéré et non ombragé, de fertilitémoyenne qu’il est toujours facile d’augmenter par une fumure appropriée aux exigences du végétal.

Lorsqu’il s’agit de culture en grand, la division du terrain se fait en planches dont la largeur varie de 1m.50à 2m. en raison du développement que les plantes sont susceptibles d’acquérir, mais pour ce jardin il suffiraitque ces planches aient une largeur de 1m.20 à 1m.50 et soient séparées entre elles par un sentier de 0m.35 à0m.50. La distance de plantation irait de 0m.25 à 0m.40 dans la rangée avec un écartement de 0m.60 à0m.80 entre les rangées. Quant au nombre d’exemplaires de chaque plante, il est très difficile de le fixer, caril dépendrait des propriétés médicinales qu’on lui reconnaîtrait et des emplois qu’on en ferait. Il est certainque chacune des sept plantes sus-désignées mériterait une surface de quelques mètres pour elle seule, tandisqu’une demi-douzaine de touffes suffirait pour la plupart des autres plantes ; mais ce serait au possesseurdu jardin d’en décider en toute connaissance de cause. Il aurait à tenir grand compte de ces données lors dela création du jardin, parce qu’elles contribueraient essentiellement, d’une part, à déterminer la surface duterrain qu’il doit occuper et, d’autre part, à faciliter les opérations culturales : semis, repiquage, binage,récolte, que réclament les plantes.

Classement des plantes.Dans tout jardin botanique, qu’il soit d’ordre médical ou non, le classement et la mise en place des plantesreposent presque toujours sur les embranchements et les familles botaniques d’après le savant dont onadopte le système ; il pourrait en être de même dans le « Jardin familial des plantes médicinales », encorebien que leur groupement, suivant leurs principales propriétés thérapeutiques, paraisse a priori d’ordre pluspratique.

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On y grouperait ensemble, par exemple, les plantes apéritives et dépuratives, les plantes adoucissantes etbéchiques, les plantes digestives et stimulantes, les plantes emménagogues, vulnéraires, etc.Malheureusement, ces propriétés sont rarement uniques dans la même plante qui, au contraire, en réunitplusieurs. Ainsi, pour n’en citer qu’un exemple, la mélisse, qui est une plante populaire par excellence, aupoint que l'on en dit, paraît-il, dans le Dauphiné :« Si femme savait ce que vaut la mélisse, elle en mettrait jusque dans sa chemise »

(A.. Rollet et D. Bouret) ;cette plante qui doit son action à un principe amer et à une essence à fonction d’aldéhyde, le citral, estconsidérée à la fois comme stimulante du système nerveux, carminative, digestive, stomachique,céphalalgique, antispasmodique, sudorifique, emménagogue et vulnéraire !...

Aussi, en présence des difficultés d'un tel classement, le plus simple, à mon avis, est de placer ces plantes parordre alphabétique, et c’est lui que je suivrai dans cette étude que, pour les raisons d’utilité sus-énoncées, jecommencerai par celle des sept plantes les plus utiles du « Petit jardin familial », les autres suivront dans lemême ordre.

Enfin, en dehors de sa culture, chaque plante comportera l’indication de sa composition chimique, de sespropriétés thérapeutiques et de ses principaux emplois pharmaceutiques et autres.

Si cette étude pouvait inciter quelques personnes à entreprendre en grand la culture de ces plantes, je leurrecommanderais deux excellents livres portant le même titre « La culture des plantes médicinales », l’un, parMM. A. Goris et J. Demilly ; l’autre, par MM. A. Rollet et D. Bouret, que complèterait très utilement,surtout par ses beaux dessins coloriés, la publication « Nos plantes médicinales de France », sous la directiondu Comité interministériel des plantes médicinales et à essences.

Le jardin familial des plantes officinales

Le jardin familial de plantes médicinales est une série d’articles publiés dans les pages de supplément de LaNature à partir du 7 mars 1925. Le dernier article a été publié dans le numéro 2760 du 1er mai 1927.L’objectif de l’auteur, Auguste Truelle, est de donner au lecteur les informations utiles à la culture et àl’exploitation des plantes médicinales les plus importantes. Ceci afin de permettre à chacun de cultiver lesplantes médicinales qui lui sont utiles mais aussi, pourquoi pas, s’assurer un complément de revenu en enfaisant le commerce.

A. Truelle était un agronome et vulgarisateur scientifique français. Il était né à Pont-Audemer en 1849.Après des études de pharmacie, il soutint une thèse sur la cidrerie qui lui valut la grande médaille d’or desthèses. Il s’établit alors à Trouville et y continua ses recherches sur le sujet. Ces travaux lui valurent d’êtreélu membre de l’Académie d’Agriculture.

Ses principales publications Art de reconnaître les fruits du pressoir

Guide des meilleurs fruits de pressoir

Manuel du fabricant de cidres mousseux et gazéifiés

Des poires et des pommes (fruits de table et de pressoir) : choix, classement, commerce basés sur l’analyse chimique, A. Parent, 1878

Guide pratique des meilleurs fruits de pressoir employés dans le pays d’Auge pour la composition d’un verger rationnel : descriptions- analyses - produits, Octave Doin, 1895

Atlas illustré des meilleures variétés de fruits à cidre, O. Doin, 1896

Pomologie comparée des fruits de pressoir : note sur les fruits de pressoir allemands (pommes et poires), Impr. rennaise, ve L. Caillot,1899

La limitation raisonnée des variétés de fruits de pressoir (pommes et poires), Chamerot et Renouard, 1900

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Descriptions et vertusdes

plantes médicinales

AbsintheGrandeabsinthe

Dans le groupe des absinthes, la principale espèce est la Grande Absinthe (ArtemisiaAbsinthium) L. Synanthérées Sénécionidées, la seule dont il est question ici.Les plus importants de ces synonymes sont : Absinthe officinale, Absinthecommune, Absinthe amère, Armoise-absinthe, Aluine, Alvine, Herbe aux vers, etc.Son nom dérive de deux mots grecs, a, privatif et « psinthos », douceur, à cause de sasaveur amère.

Habitat. — Elle croît dans les lieux incultes et arides, le long des rochers et desmurs, sur les talus des régions centrales et méridionales de l’Europe Elle est assezabondante en France.Description sommaire. — Plante rustique et vivace de 0m.60 à 1 m. 50 de hauteur,à tiges herbacées, cylindriques, cannelées dans leur longueur, à rejets stériles. Feuillesalternes, longuement pétiolées, très découpées, soyeuses, d’un gris-blanchâtre en

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dessous. Fleurs, de juin à septembre, en petits capitules formant une grande paniculefeuillée ; les fleurs femelles à la circonférence et les hermaphrodites au centre. Akènestrès petits, obovés, sans aigrette. Toute la plante exhale une odeur aromatiquepénétrante.

Culture. — On la cultive depuis bien longtemps dans les jardins et elle occupait degrands espaces dans l’Est avant l’interdiction de la fabrication, de la vente en groset au détail ainsi que de la circulation de la liqueur, par le décret du 7 janvier 1915et la loi du 16 mars 1915.Multiplication. — Elle se fait de deux façons : a) par graines ; b) par éclats detouffes, mais la première est la plus employée. Les graines de la grande absinthe sonttrès fines et au nombre d’environ 1l 500 dans un gramme. Le litre pèse de 620 à650gr. Leur faculté germinative est de deux à quatre ans, leur germination estparfois difficile.

L’absinthe étant peu exigeante se plaît à peu près dans tout terrain qui n’est pastrop humide, trop léger ou trop argileux, mais elle réussit mieux sur un terrain sec,profond, argilo-calcaire, notamment sur les coteaux perméables et pierreux à uneexposition sud ou sud-est. La préparation du terrain comporte, selon l’endroit,bêchage ou labour de 0m.20 de profondeur et l’enlèvement des mauvaises herbes,puis une fumure au fumier de ferme additionné de superphosphate et de sulfate depotasse.

a) Semis. — On l’effectue en pépinière de mars à mai sur une terre bien préparée,profonde et fraîche, absolument nivelée, ce qui est facile à faire au râteau dans leJardin familial, et à la herse sur les champs. Quand il en est ainsi, on sème à la voléeles graines qui, en raison de leur finesse, n’ont pas besoin d’être enterrées. On secontente de les faire adhérer au sol par un plombage au moyen d’un léger coup debatte. On laisse les plants un an dans la pépinière où on les éclaircit en cas de besoin,puis on les arrache et, après l’habillage ayant pour but de raccourcir leurs longuetracines, on les repique dans un terrain bien préparé et fortement fumé, en choisissantpour cela un temps humide.On les dispose en quinconce à 0m.4o de distance sur Iles lignes préalablement tiréesau cordeau et espacées de 0m.50 à 0m.60 Deux précautions sont à prendre lorsqu’onopère en grand : a) n’arracher les plantes de la pépinière qu’au fur et à mesure de leurrepiquage pour éviter tout flétrissage ; b) mettre trois pieds dans chaque trou, afinque la touffe prenne le plus grand développement possible pendant l’année qui suit

la transplantation.Les soins culturaux au printemps et à l’été consistent en plusieurs binages etsarclages pour que le sol soit toujours propre. Les binages sont faits à la main dansle Jardin familial et à la houe à cheval dans les grandes plantations. Il est bon, dansla deuxième et la troisième année, de faire en mars quelques arrosages de purinétendu d’eau, ou d’enfouir par un léger binage une petite quantité de sulfate

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d’ammoniaque ou de nitrate de soude. En cas de gelée, il est utile, à cause de lasusceptibilité de l’absinthe, de recouvrir les plantes avec des feuilles, de la paille oudu fumier.La durée d’une plantation, pour être très rémunératrice, est de trois années, niais onpeut la prolonger avec des soins culturaux bien appropriés. Dans le Doubs, pays detrès grande culture avant la guerre, la durée était de six ans.b) Par éclats de touffes. — L’opération a lieu à la fin de la troisième année. Onplante de suite après division des souches mères (A. G. et J. D.). Les distances deplantation et les soins consécutifs sont les mêmes que ceux décrits plus haut.

Récolte. — Elle commence la deuxième année dès l’apparition des bourgeonsfloraux. Dans le Jardin familial, on coupe les tiges à 5 à 6 cm du sol avec unsécateur ou une serpette ; sur les champs on -recourt à la faucheuse mécanique.

Rendement en vert. — D’après MM. Goris et Demilly, dans une culture bien faite,le rendement par hectare est d’environ 12 000 kg de plantes fraîches la premièreannée, 20 000 kg la deuxième année et 25 000 kg la troisième année.

Séchage. — Pour la récolte du Jardin familial, il suffit d’étaler les feuilles mondéessur des claies placées dans un endroit ventilé, à l’ombre, et de les y retournersouvent ; quant aux sommités fleuries, on en fait des petits paquets assez lâchesqu’on suspend dans le grenier. On prend les précautions nécessaires pour qu’ellesconservent le plus de feuilles possibles et que le tout possède après dessiccation unecouleur verte nuancée de jaune. A ce point, on coupe les tiges, en fragments de 8 à 10cm, on les comprime dans des sacs en toile que l’on garde dans un local sec et aéré.Dans la culture en grand, on suit un procédé dont les détails sont donnés dansCulture des plantes médicinales par MM. Rolet et Bouret.

Rendement. — On estime qu’un kilogramme de feuilles fraîches laisse 260gr.defeuilles sèches. D’autre part, on a évalué le rendement moyen d’un hectare dans lesenvirons de Paris entre 2500 à 3000 kg de plantes sèches correspondant à 10 000 kgenviron de plantes fraîches.

Composition chimique. — La grande absinthe contient huile volatile, deux matièresamères, l’une azotée, l’autre résineuse, matière azotée insipide, chlorophylle,albumine, fécule particulière, tanin, des sels et entre autres de l’absinthate depotasse (Dr Héraud). Les deux principes les plus actifs sont l’huile essentielle ouessence d’absinthe et le principe extrêmement amer ou absinthine.L’essence d’absinthe est plus légère que l’eau, d’abord brune elle. devient bleue ouverte après rectification. Elle contient de la thuyone, de l’alcool thuylique, soit àl’état libre, soit à l’état d’éthers acétique, isovalérianique et palmitique, duphellandrène, du pinène, du cadinène, de la céruléine. 100 kg de grande absintheverte donnent 120 gr. d’essence brute.

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Propriétés thérapeutiques. — Les parties de la plante usitées sont les feuilles et lessommités fleuries. Parmi les propriétés attribuées à cette absinthe : apéritives,stimulantes, toniques, fébrifuges, vermifuges, emménagogues, etc., les deux connuesdès la plus haute antiquité sont les propriétés anthelmintiques ou vermifuges, et lespropriétés toniques amères ou apéritives. D’après le Dr H. Leclerc, Soranus, Sylvius,Mérat et de Lens la prescrivaient sous des formes différentes contre les parasitesintestinaux. Son action ascaricide est due à son huile essentielle de ,même que sonaction apéritive et tonique résulte de l’absinthine qui n’est pas toxique. L’Ecole deSalerne tenait une macération d’absinthe dans du vin comme un sùr préservatifcontre le mal de mer, et son mélange avec du fiel de bœuf comme un remède contre lesbourdonnements d’oreille. Trousseau la recommandait dans les cachexies et leslésions organiques diverses résultant des fièvres intermittentes. On l’utilise aussiavec succès contre certains cas de chlorose, d’anémie, de neurasthénie etd’aménorrhée, mais on doit en faire un usage modéré.

Préparations pharmaceutiques. — Voici les principales avec leurs doses : alcoolatd’absinthe 10 à 20 gr., eau distillée 25 à 100gr., extrait aqueux 0gr.20 à 2 gr.,poudre 1 à 2 gr. comme tonique, 4 à 16 gr., comme vermifuge, sirop 50 à 100 gr.Teinture 20 à 30 gouttes, tisane 5 gr. par litre en infusion, vin 30 à 125 gr., mais ilne faut pas dépasser cette dose. Le sel d’absinthe, obtenu par incinération, autrefoissi usité, ne l’est plus aujourd’hui. La plante fraiche est toujours plus efficace que laplante sèche. Les feuilles d’absinthe entrent dans les espèces vermifuges avec latanaisie, la camomille et le semen contra, ainsi que dans l’elixir tonique de Gendrin.La grande absinthe est employée dans la fabrication de liqueurs très répandues :l’absinthe, le bitter, le vulnéraire, le vermouth, etc. La première est interdite commeje l’ai dit plus haut, à cause des accidents que produit son essence par un usagerépété, accidents dont l’ensemble constitue ce qu’on appelle l’ « absinthisme », Lesrecherches qui ont été effectuées sur cette essence en vue de déterminer sa toxicitéont conduit à des résultats contradictoires [1]. Tandis que d’après certains savantsl’essence d’absinthe est la moins toxique de toutes celles qui entrent dans cetteliqueur ; pour d’autres, les propriétés épileptisantes de celle-ci sont dues uniquementà l’essence même d’Absinthe.La plante a été quelquefois employée comme condiment. Quand elle est broutée, ellecommunique au lait des vaches une saveur amère et désagréable, ainsi d’ailleurs qu’àla chair de tous les animaux.

Observations commerciales. — Bien que la culture de. la grande absinthe ne soitplus ce qu’elle était avant l’interdiction de la vente de la liqueur en 1915, elle estencore assez importante pour répondre aux besoins de la thérapeutique, car laFrance en importait avant la guerre pour 80 000 francs Le prix des feuilles sèchesmondées vaut, selon les années, 1 fr. à 1 fr. .25 le kilogramme ; il a varié l’an dernierdei fr. 4o à i fr. 60, tandis que celui des sommités fleuries n’a atteint que 0 fr.75 à 0fr. 90.

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Angéliqueofficinale

L’Angélique (Angelica Archangelica L.). Ombellifères, tire son nom du grec « aggelos» ange, par allusion à de prétendues propriétés merveilleuses. Elle a pour synonymes: Angélique cultivée, Angélique de Bohème, Herbe aux Anges, Herbe du SaintEsprit.

Habitat. — Originaire des montagnes du Nord de l’Europe où elle croitnaturellement, elle pousse aussi en Autriche dans les Alpes et les Pyrénées, dans leslieux humides, le long des fleuves et des rivières.

Description sommaire. — Plante bisannuelle susceptible d’un grand développement.Racine grosse, fusiforme, se divisant en un grand nombre de rameaux s’enfonçantperpendiculairement dans la terre. Tige droite, fistuleuse, épaisse, pouvant atteindre1 m. 50 à 2 m. de hauteur. Feuilles très grandes, alternes, bipinnatiséquées, à pétiolefistuleux, embrassant par une gaine très large, tombant à l’automne aux premiersfroids’. Fleurs odorantes, nombreuses, verdâtres, apparaissant en juillet-août. Ellessont réunies en ombelles dont la supérieure très développée peut mesurer o m. 3o dediamètre, les latérales étant beaucoup moins grandes. Fruit (akène), ovoide, allongé,contenant des graines nues, aplaties d’un côté, convexes de l’autre. Toutes les partiesde la plante exhalent une odeur suave et une saveur chaude et aromatique.

Culture. — L’angélique croît bien partout où le climat n’est pas froid ni humide. Leterrain qui lui convient le mieux est celui qui dérive des formations volcaniques,comme dans la Limagne d’Auvergne (A. R. et D. B.). Elle prospère dans les solsd’alluvion profonds, frais et sablonneux, si possible, mais elle craint les sols argileuxet compacts. Toutefois, si l’on veut qu’elle prenne tout son développement, il est

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nécessaire que le sol soit bien fumé, ’et comme sa racine est pivotante et qu’elles’enfonce profondément, on devra enfouir par un labour préalable le fumier biendécomposé. L’angélique est cultivée sur une grande échelle surtout dans deuxdépartements : le Puy-de Dôme, région de Clermont-Ferrand, et les Deux-Sèvres,région de Niort.

Multiplication. Semis. — Elle a lieu par semis, mais l’époque de celui-ci varie avecles régions. Sous le climat de Paris, on sème en juillet et repique en octobre. Dans lesDeux-Sèvres, on sème sur couche en mars, et dans la région de Clermont-Ferrand, lesemis se fait en pépinière en décembre ou février avec repiquage de juillet à octobre.D’une façon générale, les graines semées au printemps, vers le mois de mars, lèverontvers le mois de juin et si le semis est fait à l’automne, la germination aura lieu auprintemps, ce qui est préférable. Il importe de semer immédiatement après lamaturation des graines qui perdent assez rapidement leur faculté germinative. On yprocède en grand en établissant des planches de 1m.30, environ, en laissant entrechacune d’elles un sentier de 0 m. 30 de largeur. On trace au cordeau des lignesécartées de 0 m. 30 en leur donnant une profondeur d’environ 0 m. 03, puis ondépose les semences dans les sillons et on les recouvre de terreau sableux. (A. G. et J.D.)

Plantation ou repiquage. — Le terrain ayant été bien fumé, ameubli, hersé et roulé,on trace des lignes espacées de o m. 8o et on plante au plantoir les petits plants à om 6o les uns des autres. La reprise est souvent rapide, si l’on a choisi un temps fraisou pluvieux. Dans le Jardin familial, la place ’à accorder à la culture de l’angéliquedépendra des emplois qu’on a en tête, et surtout si, en outre de l’usagethérapeutique, on veut confire les tiges.

Soins culturaux. — Ils consistent d’abord en binages tant que la plante n’a pasatteint la moitié de son développement, puis en arrosages dont la fréquence varieavec la nature du sol et du climat. Il existe un adage : « l’Angélique doit avoir lesracines dans l’eau et la tête au soleil ». La durée de la plantation est généralementde trois ans et même davantage, si l’on a soin de couper la tige avant la floraison.Récolte. Dessiccation. Rendement. — La récolte comprend les tiges, feuilles, graineset semences. Celle des tiges et pétioles peut avoir lieu la première année de juin àaoût, niais il vaut mieux attendre la seconde année. Les tiges sont coupées le matinà la rosée ; on les tranche en biseau au ras du sol ; on en enlève les feuilles et on metles bâtons en bottes qu’on livre de suite aux confiseurs. On sèche les feuilles àl’ombre. Les graines sont récoltées en août au fur et à mesure de la maturité desombelles qu’il faut surveiller, car si elle est trop avancée elles laissent tomber lesgraines sur le sol, et si elle est insuffisante, il est nécessaire d’exposer les ombellescoupées quelques jours au soleil pour que les semences se détachent facilement.L’obtention des graines résulte du battage des ombelles avec un léger fléau ; on lespasse au crible et au van, puis on complète leur dessiccation. On évalue le poids del’hectolitre e entre 14 et 6 kilogrammes. Les- racines sont arrachées en hiver. On les

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nettoie et, après les avoir coupées en deux ou en quatre, on les met sécher en pleinsoleil : 10 kg de racines fraîches laissent 2 kg 630 à 3 kg de racines sèches. Les,meilleures proviennent de plantes d’un an n’ayant donné ni tiges, ni feuilles, nigraines (A. R. et D B.). On les conserve dans des boîtes en bois, mais leur vente doitavoir lieu assez tôt, parce qu’elles perdent facilement leurs propriétés et sontattaquées par les insectes. Aux environs de Clermont-Ferrand, on estime le produitd’un hectare entre 8000 et 12 5oo kg pour une dépense culturale de. 1276 francs.Un hectare peut fournir 1200 kg de semences.

Composition chimique. — L’angélique contient : huile volatile et acide angélique,angélicine, résine amorphe, acide malique et malates, sucre, gomme, amidon, etc. Lesessences des trois parties de la plante ont une composition un peu différente, bienqu’elles soient constituées par des terpènes pour une grande partie, mais avec uneteneur variable en cymène, phellandrène, acide valérianique, etc. La proportiond’essence est d’environ 0,35 à 1,0 pour 100 dans les racines, 1 à 1,2 pour 100 dansles semences et 0,10 pour 100 dans la plante verte. A noter que l’essence contenuedans les semences renferme 75 pour 100 de térébangélène ; elle se combine dans laracine et dans la tige avec des principes résineux pour former une gomme résined’odeur musquée très suave : le baume d’angélique.

Propriétés thérapeutiques. — L’Angélique a joui en son temps d’une certaineréputation près des médecins de la Renaissance qui, d’après l’érudit D’ H. Leclerc,appelaient sa racine « racine du Saint-Esprit », à cause des « grandes et divinesproprietez quelle a contre de très griefves maladies. » Ils la regardaient comme «céphalique et propre à récréer le cœur ». En réalité, elle est stimulante, stomachique,carminative et antispasmodique ; elle constitue un excellent remède de l’anorexiesurtout de cause psychique.

Préparations pharmaceutiques. — Elles sont peu nombreuses et ne concernent queles racines et les semences. Infusion 20 gr. des unes ou des autres par litre d’eaubouillante ; teinture 2 à 10 gr. en potion ; poudre 2 à 6 gr. Ces préparations sontfaites avec des racines et des semences sèches, mais on a tendance aujourd’hui à lesemployer fraîches quand il s’agit d’une infusion. L’angélique entre dans lacomposition du Baume du Commandeur, de l’Eau de mélisse des Carmes. La poudrede semences est utilisée pour détruire les poux. La liquoristerie l’emploie dans laconfection de plusieurs liqueurs de table : Chartreuse, eau et crème d’Angélique,Raspail, Bitter, Vermouth. La confiserie se sert des tiges fraîches sur une grandeéchelle pour préparer l’Angélique de Niort, de Clermont-Ferrand, de Nevers et deChâteaubriant. Enfin, dans quelques pays du Nord, on consomme la tige et lespétioles crus ou cuits comme légumes.

Observations commerciales. — L’Angélique mérite d’être beaucoup plus cultivéequ’elle ne l’est, car nous avons importé de Bohême entrer à 2 millions de francs pourdes semences et des racines et nous en importons encore. Les dernières sont plus

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estimées que les nôtres et payées un peu plus cher. Cette plante figure d’ailleursparmi celles dont la culture est officiellement recommandée. L’herboristerie a payé, ily a quelques années, les feuilles 0 fr. 50 à 0 fr. 60 le kilogramme ; les semences ï fr.25 à 2 fr. ; les racines o fr. 75 à i fr. En 1924, les prix sont montés entre i fr. à i fr.20 pour les feuilles mondées, 3 fr. 75 à 4 fr. pour les racines entières, 3 fr. 50 à 4 fr.pour les semences criblées, mais la vente n’est réellement forte que pour les deuxderniers produits.

Anis vert

Habitat. — L’anis vert (Pimpinella Anisum L. Ombelliteres) Anis officinal,Boucage, Pimpinelle anis, a été introduit du Levant en Europe au milieu du XVIe

siècle. Il y croît spontanément dans les bois humides ; en France on le cultive dansplusieurs départements du Centre et dia Midi et dans un grand nombre de jardins.Description sommaire — Plante herbacée annuelle dont les liges sont hautes de 0m50 à 0 m 75, les feuilles peu nombreuses, plus ou moins découpées selon leursituation, les fleurs petites et blanches en ombelles, les fruits d’abord pubescentspuis verdâtres, pourvus d’une odeur aromatique agréable et d’une saveur chaude etpiquante –

Culture. — L’anis préfère les terres légères, f aiches, perméables, calcaires siliceusesou inversement, celles oui sont argileuses et humides ne lui conviennent pas. Ellesdoivent être bien préparées et fumées avant de recevoir les graines récoltées l’annéeprécédente, bien que leur durée germinative soit de trois ans. Un gramme contientenviron 200 grains.

Multiplication. — Elle n’a lieu que par semis qui est effectué lorsque les gelées nesont plus à craindre, et suivant les régions, de février ou de mars à mai Quand onopère en grand, on le fait. d’après les uns, à la volée ou en sillons rapprochés de0m.35 à 0m.40 (A. G. et J. D ) et, d'après d’autres, en planches de 2 m. de largeur,ou encore en lignes distantes de 0m.70 à 1 m. avec 15 à 20 cm sur ia ligne (A R. et DB.). On emploie de 12 à 20 kg de graines à l’hectare.

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On recouvre les graines très légèrement de terre au râteau dans le jardin et à la hersesur le champ ; on plombe ou l’on roule selon l’endroit pour conserver au sol safraîcheur qu’on assure dans les terrains secs par des arrosages qui favorisent lagermination Celle-ci est lente et n’apparaît qu’au bout de 20 à 30 jours On sarcle, onbutte les lignes quand les plantes out 0m.15 à 0m.20 ; on les éclaircit de manière quel’écartement soit entre chacune d’elles de 0m.75. La floraison a lieu en juillet et lamaturation des fruits à partir du milieu d’août jusqu’en septembre.

Récolte. Dessiccation. Conservation. — La récolte se fait lorsque les graines ontacquis une teinte brun verdâtre et une dureté suffisante. Dans le jardin, on coupegénéralement les ombelles à la main et on les met sécher dans un endroit aéré plutôtqu’au soleil, mais sur le champ, tantôt on arrache les pieds, tantôt on coupe les tigesà la faucille, puis dans les deux cas on les met en javelles en prenant de grandesprécautions, car les semences se détachent facilement des ombelles et tombent à terre.Il faut éviter la pluie qui les noircit.

L’obtention des graines comprend leur battage sur une toile avec des baguettesflexibles plutôt qu’avec un fléau, leur vannage, puis séchage dans un endroit aéré etleur mise en sac ou en tonneau placé dans un endroit très sain pour que leur bonarôme soit conservé.

Production. — Il n’est pas sans intérêt de savoir : a) Qu’un hectare produithabituellement en France de 500 à 800 kg de semences ; b) qu’un hectolitre pèse 35kg, environ ; c) que le prix très variable oscille entre 60, 80,90 francs les l00 kg, selonla qualité et la provenance.

Propriétés thérapeutiques. — De l’anis on n’emploie que les fruits qui constituentun excitant carminatif par excellence, dont l’action se fait surtout sentir surl’appareil gastro-intestinal et favorise l’acte digestif en provoquant soit par le haut,soit pas le bas, une expulsion de gaz. Connu déjà du temps de Pline, l’anis est un desplus vieux médicaments de la médecine populaire qui en fait grand cas surtout dansles infections stomacales. flatuosités, coliques venteuses. etc. On l’administre mêmedans les tranchées des enfants à la mamelle, ou le donne dans ce cas à la nourrice.Son action excitante sur l’estomac est mise à contribution pour faciliter la digestionde certains légumes tels les choux et les navets (Dr A. Héraud). On lui attribue aussila vertu d’augmenter la sécrétion lactée.On prétend depuis quelques années que l’anis est supérieur à la menthe au regardd’une digestion régulière ; quant à l’action de l’essence d anis elle est controversée.Bien que des recherches spéciales aient permis à plusieurs savants d’affirmer qu onpeut en prendre de fortes doses sans danger d intoxication, il en est d’autres quiavancent que, de toutes les essences qui entrent dans la liqueur d’absinthe, celle del’anis est la plus nocive.

Composition chimique — Les graines renferment : résine, stéarine, chlorophylle,

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huile grasse, huile essentielle. Cette dernière ou essence d’anis est formée de deuxcorps principaux isomères : l’anéthol solide à la température ordinaire et leméthylchavicol, liquide. L’anéthol forme les 80 à90 pour 100 de l’essence et c’est àlui qu’elle doit ses principales propriétés. L’essence est liquide à + 20° et se solidifieentre 15° et 19°. 10 kg de semences en contiennent 118 à 200 gr.

Préparations pharmaceutiques et doses. — À l'intérieur, le principal usage dessemences d’anis consiste dans 1 infusion pour laquelle le dernier Codex de 1908prescrit la dose de 10 gr. pour un litre d eau bouillante pendant une demi-heure. Onen prend une tasse très chaude après chaque repas. On emploie les préparationssuivantes : poudre i à 4 gr. ; hydrolat 25 à 150 gr. ; teinture 4 à 30 gr. ; sirop 15 à60 gr. L’oléosaccharure peut être pris à la dose de 2 à 10 gr. ; l’huile essentielle, uneà dix gouttes dans une potion ou sur un morceau de sucre, le baume de soufre anisé 6à 8 gouttes dans une potion. On fabrique des dragées : anis couvert, anis deFlavigny, de Verdun. L’essence entre dans l’élixir parégorique, dans la fameuse thé-risque, etc., elle sert à masquer la saveur de certains médicaments. Les graines fontpartie des espèces carminatives : anis, fenouil, coriandre, carvi, à parties égales.A l’extérieur, on en prépare une pommade contre l’ozène, des lotions, fomentations,cataplasmes, pour dissiper les engorgements laiteux.La médecine vétérinaire emploie souvent les semences d’anis associées à celles desautres ombellifères, notamment de la coriandre et du fenouil, qu elle fait infuserdans du gros cidre (en Normandie), après les avoir concassées grossièrement. Cetraitement est réservé spécialement aux ruminants dans les affections gastro-intestinales et la météorisation. D’après le Dr J.-B. Dubois on augmente la sécrétionlactée chez les chèvres, les brebis et les vaches en donnant par jour, aux deuxpremières, 20 à 30 gr. de ces graines et aux troisièmes 80 à 100 gr. On a constaté queson odeur passe dans le lait.

Liquoristerie. — Les graines entrent dans une proportion plus ou moins grandedans la fabrication d’une foule de liqueurs que je ne puis citer ici, mais dont les plusrépandues dans les familles sont l’anisette et le vespétro.Anisette. — Parmi les nombreuses formules qui varient plus par leurs noms que parleur composition : anisette de Bordeaux, de Lyon, de Paris, de Russie, les meilleuressont celles qui sont préparées par macération des plantes dans l’alcool durant 24heures, distillation et sucrage du produit alcoolique. Mais comme la distillationexige un alambic dont la possession oblige à une déclaration et à des formalitésgênantes, je ne donnerai que la formule ci-dessous permettant la préparation d’uneanisette dite surfine, par simple mélange d’essences dans l’alcool et le sirop de sucre ;les doses sont pour un litre.

Essence de badiane 0gr.70

Essence d’anis 0gr.20

Essence de fenouil doux dix gouttes

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Essence de coriandre deux gouttes

Essence de sassafras huit gouttes

Extrait d’ambre non musquée dix gouttes

Extrait d’iris 0gr.6o

On dissout les essences dans 300 cm3 d’alcool à 85° ; on verse la solution dans unsirop fait avec 560gr. de sucre et 260 gr. d’eau distillée, lorsqu’il est refroidi. Onmélange intimement et l’on filtre s’il y a lieu.

Vespétro. — Très répandue en Normandie, cette liqueur, dont le nom rabelaisienévoque, en les voilant à peine, ses principaux effets physiques, se prépare pardistillation et par simple mélange, mais pour les raisons précitées, la formule surfineci-dessous, pour un litre, appartient à cette dernière catégorie.

Essence d’anis 0gr.40

Essence de carvi 0gr.30

Essence de fenouil doux 0gr.80

Essence de coriandre huit gouttes

Essence de citron 0gr.20

Le traitement des substances est le même que pour l’anisette. La culture de l’anismérite, en raison de ses différents emplois médicinaux et économiques, une placeimportante dans le jardin familial, et surtout dans tout le pays, car nous importonsdes graines de l’Espagne, de Tunis, de Russie, etc., entre 600 000 francs et unmillion. Elle est d’autant plus justifiée que, depuis la loi du 30 janvier 1907,interdisant la fabrication de l’absinthe, l’essence d’anis, plus que toute autre, entredans la préparation des liqueurs considérées comme « similaires d’absinthe ».

Qu’il me soit permis de rappeler, à propos de son utilité dans le jardin familial, cequ’en pensait (d’après la traduction de M. Meaux Saint-Marc) la fameuse École deSalerrne (Schola Salernitana). « Propice à l’estomac, il éclaircit la vue ; Que d’anisexcellent ta maison soit pourvue »

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Armoisecommune

L’Armoise commune (Artemisia vulgaris L.), Synanthérées-Sénécionidées, tire sonnom de la déesse Artémise, divinité grecque correspondant à la Diane des Romains,laquelle secourait les femmes avec cette plante. Le populaire lui a donné les surnomssuivants : Couronne de Saint Jean, Ceinture de Saint Jean, Herbe de Saint Jean,Fleur de Saint Jean, Herbe à cent goûts, Herbe de feu, Remise.

Habitat. — Elle est spontanée en Europe et très commune dans les lieux incultes etplus spécialement dans les terrains qui avoisinent les habitations, le long deschemins, près des vieux murs, dans les décombres, sur les talus des chemins de fer,etc...

Description sommaire. — Plante vivace, herbacée, à saveur amère et à odeuraromatique peu agréable. Tiges nombreuses formant souvent de larges touffes hautesde 0m.60 à 1 m. et plus, très ramifiées, cannelées, souvent rougeâtres et chargéesd’un duvet blanchâtre. Feuilles alternes, d’un vert sombre en dessus, cotonneuses endessous. Fleurs en petits capitules ovoïdes, verdâtres, axillaires, formant une grappeou panicule irrégulière et étroite. La floraison dure depuis le mois de juin jusqu’enautomne.

Culture. — L’armoise demande un terrain de bonne qualité, léger, profond, à uneexposition découverte. Il est bon de préparer le terrain par un labour en automne etde le fumer au fumier de ferme ou avec un compost de gadoues ou de décombres sipossible. L’expérience a montré qu’un engrais potassique lui est très favorable onpourrait le lui fournir sous forme de sulfate de potasse, si sou développement laissaità désirer. L’armoise poussée dans les terrains secs est plus active que dans les autressols.

Multiplication. — Elle se fait : 1° par semis ; 2° par éclats de vieilles touffes. 1°Par semis. — On y procède en pépinière du mois de mars au mois de mai. Quand onopère en grand, on sème clair à la volée sur des planches de 0m. 20 de largeur, aprèsqu’on a eu soin d’en rendre la surface bien plane, et comme le. semences fines ne

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demandent pas à être enterrées, on se sont’ nte de les plomber légèrement pour lesfaire mieux adhérer à la terre. Au bout d’un au dans la pépinière, lorsque les plantessont assez fortes, on les soumet à l’habillage et on les place à demeure, en lesespaçant de 50 cm sur des lignes distantes entre elles de 50 à 70 cm. Au cours de lacroissance des jeunes plants, on doit s’attacher à maintenir le sol propre et, pourcela, on exécute plusieurs binages à la main dans le jardin, tandis que sur le champon les entreprend avec la houe à cheval.2° Par éclats. — L’opération se fait, au mois de septembre, sur de vieilles touffes,figées de trois ans. On observe les mêmes distances que ci-dessus dans leurplantation et on prend les mêmes soins pour leur culture. J e dois ajouter, cependant,qu’il y a des régions en France où l’armoise est naturellement si commune qu’il n’y apas lieu de la cultiver ; il est préférable de la récolter à l’état sauvage.

Récolte. — L’armoise peut donner, dès la première année, une assez bonne récolte.Les parties usitées en thérapeutique sont : les feuilles mondées, les sommités fleurieset les racines, mais surtout les deux premières. La cueillette des feuilles st lieu enjuin dès l’apparition des boutons, celle des sommités fleuries au moment de lafloraison ; les racines sont arrachées à l’automne.

Séchage ou dessiccation. — Il faut le faire avec soin afin d’obtenir des produits biensecs en pleine possession de leur valeur médicinale et commerciale. Un kilogramme defeuilles fraîches laisse après dessiccation entre 220 et 240g de feuilles sèches.Règles générales à suivre. — C’est ici le lieu de donner une fois pour toutes les règlesgénérales qu’il est indispensable de suivre pour une dessiccation normale, opérationsouvent délicate, car, pour que les plantes ou leurs parties conservent leur qualité etleur valeur, il faut qu’elles aient gardé leur couleur et leur bonne odeur naturelles, oudu moins autant qu’il est possible, étant donnés les procédés que l’on emploieactuellement. Voici ces règles très succinctement :1° Ne laisser jamais en tas les plantes ou leurs par-lies, mais les débarrasser, aussitôtla récolte terminée, par mondage ou lavage, de tout ce qui peut nuire à leur valeurthérapeutique et commerciale.2. Procéder à leur séchage le plus rapidement possible et à la plus basse températureappropriée à leur structure anatomique et à leur composition chimique.Par « rapidement », il faut entendre une durée de 5 à 6 jours au plus à l’air libre,sans quoi l’on s’exposerait à détruire les principes médicamenteux actifs : alcaloïdes,glucosides, huiles essentielles, etc., dans une proportion plus ou moins grande. Par «basse température », il faut comprendre, le plus souvent, l’air ou la températureextérieure dans un milieu sec et très aéré, tels qu’un grenier, un hangar, une grange,.quand on opère sur des quantités relativement faibles ou des séchoirs de formes trèsdiverses, ou des étuves, s’il s’agit de grandes quantités.Cependant, lorsque les années sont pluvieuses, ou quand les plantes sont trèsaqueuses ou sujettes à un noircissement rapide, il est prudent d’utiliser un courantd’air chaud, d’abord à la température de 20° à 15°, puis de 30°, 35° et même 40°,au moyen d’une étuve ou, préférablement, d’un séchoir à chaud du type recommandé

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par le Syndicat général de la droguerie française. Toutefois, quand on ne dispose quede quelques plantes, on emploie le four de boulanger, mais à la condition expresseque les températures précitées soient observées, afin de ne point cuire les végétauxdans leur eau de végétation ; on a soin, auparavant, d’enlever les cendres quipourraient s’y trouver.Pour les petites quantités récoltées dans le jardin familial, la dessiccation à l’air libresuffira dans la plupart des cas, surtout si l’on prend les précautions suivantes.Racines, rhizomes. — Enlever la terre, le collet, les radicelles ; couper en deux ou enquatre les racines charnues, les étaler sur des claies ou en faire des chapeletstraversés par une ficelle et suspendus.Bois, écorces, tiges. — Les étendre sur des claies le séchage est facile et rapide.Feuilles, sommités fleuries, plantes entières. —. Les étaler sur des claies en couchesminces, ou en faire des « bouquets s suspendus en guirlandes à l’abri des intempérieset des poussières.Fleurs. — Les étaler sur des toiles plutôt que sur des claies, ou encore dans destamis au-dessus d’une feuille de papier gris, le tout recouvert d’une autre feuille.Leur dessiccation est délicate et certaines exigent des précautions particulières quej’indiquerai quand il en sera question. Ne les exposer ni au soleil, ni à la lumière vive; recourir, en cas de besoin, à un courant d’air de 20° à 25° et les remuer le moinspossible ; 12 à 24 heures suffisent souvent. Cette digression utile étant terminée, jereviens à l’armoise.

Composition chimique. — L’armoise doit son activité à une essence de saveur amèreet brûlante contenant du cinéol, et, en outre, à un autre principe amer.Propriétés thérapeutiques. — Cette plante a été préconisée dès la plus hauteantiquité, d’abord par Artémise II, reine d’Halicarnasse, en Carie, 353 ayant Jésus-Christ, puis par Hippocrate, Dioscoride, Pline, l’Ecole de Salerne, etc., qui en ontfait un puissant emménagogue, on y a même vu d’autres propriétés plus actives,mais à tort. L’armoise a toujours joui dans la médecine populaire d’une réputationqui est encore vivace, et elle donne des résultats satisfaisants dans l’aménorrhéechlorotique. Elle est encore employée comme stimulant, antihystérique, vermifuge,etc. La racine passe même pour antiépileptique, contre la danse de Saint Guy.Préparations pharmaceutiques et doses. — L’armoise fait partie des espècesemménagogues ; armoise , absinthe, feuilles d’ambroisie du Mexique, 10gr. dechaque, safran 0gr.50. Son principal emploi est l’infusion durant une demi-heure10gr. par litre d’eau bouillante (Codex 1908), mais cette dose s’est élevée jusqu’à30gr.On tend aujourd’hui à la remplacer par son extrait aqueux, sous forme depilules, à la dose de 0gr.60 à 2 gr. par jour.On administre 2 à 8 gr. de poudre par 24 heures dans du vin chaud ; 30 à 60gr. desirop ; 30 à 150gr.d’eau distillée comme véhicule de potion ; 15 à 30gr.de suc frais ;un ou plusieurs petits verres de vin par jour ; 20 gr. en infusion dans un demi-litred’eau, en lavement. En Allemagne, la poudre de Bresler : poudre de racine d’armoise50 gr., sucre eu poudre, 200 gr. à prendre 4 cuillerées à café par jour, e été vantéecomme antiépileptique.

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A l’extérieur, on la fait servir à des fumigations spéciales dans la proportion de 50 à100gr.pour un litre d’eau. Le résidu cotonneux, formé par le duvet mêlé de fibresqu’on obtient pendant la pulvérisation des feuilles, servait autrefois à préparer des «moxas sortes de cautères usités en Chine et au Japon.L’armoise a été employée quelquefois en cuisine comme condiment : on en a farci desvolailles, notamment des oies, pour rendre leur chair plus tendre. Les bestiaux lamangent quand elle pousse avec d’autres herbes. D’après Sédir, dans le Bocagenormand, l’armoise cueillie la veille de la saint Jean détruisait les maléfices quiempêchaient les vaches de donner du beurre ! La vente de l’armoise est importanteen herboristerie.

Asperge

L'asperge est une plante vivace aux nombreuses racines charnues rayonnant en étoile(l'ensemble est appelé « griffe »), aux tiges droites pouvant atteindre 1,5 mètre dehauteur, et au feuillage fin et ramifié.C'est une espèce diaulique : les pieds mâles donnent des fruits stériles tandis que lespieds femelles portent de petites baies rouges contenant plusieurs graines noires. Lecoût métabolique pour produire ces graines épuise les pieds femelles, aussi emploi-t-on plutôt les plants mâles dans les aspergeraies.

OrigineCette espèce est originaire de régions tempérées de l'Eurasie : Europe centrale etméridionale, Afrique du Nord, Asie centrale et occidentale. Elle pousse dans lesterrains sablonneux à l'état sauvage. Elle est cultivée depuis l'Antiquité mais la mise

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au point des variétés date du XVIIIe siècle. À partir de 1805, elle fait la réputationd'Argenteuil, où elle n'est plus cultivée. Elle est aujourd'hui largement cultivée dansde nombreux pays sur tous les continents, bien que le premier exportateur mondiald'asperges en conserves soit la Chine2. Le Chili et le Pérou demeurent desproducteurs importantsÀ l'état sauvage il en existe douze espèces en Europe, dont cinq en France selon TelaBotanica : Asparagus officinalis, Asparagus acutifolius très commune dans le midi,Asparagus maritimus, Asparagus albus et Asparagus tenuifolius. Toutes sontcomestibles mais l'asperge maritime est très amère.

HistoriqueLes asperges sont depuis longtemps utilisées comme légumes et plantes médicinales,en raison de leur saveur délicate et leurs propriétés diurétiques. Une fresqueégyptienne datant de 3000 ans av. J.C.la montre en offrande aux dieux. Elle estégalement appréciée pour son goût délicat par les Grecs et les Romains qui lacultivent dans des fosses et la mangent fraîche en saison de récolte et sèche en hiver3.Elle est révérée comme aphrodisiaque, en raison de sa forme, dans le conte arabe LesMille et Une Nuits. Cultivée dès le XIe siècle à Byzance, l'Europe occidentalesemble avoir ignoré l'asperge pendant quelques siècles et ce n'est que vers leXVe siècle qu'on trouve des traces de culture de l'asperge verte en France. Lesproducteurs mettent au point une nouvelle technique : ils recouvrent les pousses pardes coiffes pour les protéger des parasites et retenir la chaleur, découvrant ainsil'asperge blanche, puis remplacent bientôt les coiffes par le buttage. On la considèrecomme la reine des légumes depuis au moins le XVIe siècle tant elle est appréciée à lacour de France où elle est appelée le « légume royal », le « printemps en tiges » oul'« ivoire à manger ». Prisées par Madame de Pompadour pour cette réputationd’aphrodisiaque, ses extrémités sont appelées « pointes d’amour » à son époque4,1.Au début du XVIIIe siècle, la « Gewone Hollandse », une grosse variété venant desPays-Bas et de Pologne est introduite en France. Cette « asperge violette deHollande », dite aussi « de Pologne », supplante progressivement la petite aspergecommune. En 1750, des cultivateurs d'Argenteuil mettent au point la variétéd'Argenteuil. Au XIXe siècle, plusieurs villages autour de Paris se spécialisent dansla culture de variétés, Aubervilliers, Bezons, Épinay ou Sannois. Les travaux desélection menés à l'INRA à partir des années 1960 ont conduit à lacommercialisation de variétés hybrides choisies selon leur productivité, leur précocité,leur tolérance aux maladies, leur mode cultural (asperge verte au goût plus prononcéet plus concentrée en vitamines, asperge blanche plus fine et plus tendre, aspergeviolette plus fruitée), leur présentation (qualité de la pointe) ou leur qualitégustative et nutritionnelle (amertume et fibrosité, richesse en rutine)5.

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Aunéeofficinale

L’Aunée (Inula Helenium L.) Synanthérées, compte de nombreux synonymes dontles principaux sont : Aunée commune, Aulnée, Grande Aulnée, Inule hélénière, etc.La légende la fait naître dans les larmes d’Hélène qui lui aurait découvert lapropriété de faire oublier les chagrins et de ramener la gaîté.

Habitat. — Très répandue dans l’Europe centrale, elle croît spontanément, enFrance, dans les lieux humides, les bois et les friches, notamment dans les aunaies.Description sommaire. — Plante vivace à racine grosse comme une carotte moyenne,jaunâtre au dehors, blanche en dedans, longue de 0 m. 30 à 0 m. 40. Tige rameuse,haute de 1 à 2 m., en raison de la nature du terrain. Feuilles grandes, bien plusdéveloppées à la base qu’au sommet où elles deviennent semi-amplexicaules, dentéeset duveteuses en dessous. Fleurs (juillet-août) d’un jaune vif, réunies en corymbesterminaux. Fruits (akènes) nombreux, tétragones, aigrettés.

Culture. — L’année réclame une terre profonde et fraîche, très meuble ou biendéfoncée, afin que sa racine pivotante puisse y pénétrer facilement et acquérir toutson développement.

Multiplication. — On la fait de deux façons : par semis et par éclats de pied. Lapremière est la plus employée ; cependant, pour le Jardin familial, on peut utiliser leséclats, si l’on a des souches dans le voisinage.Par semis. — On l’effectue au mois de mars sous châssis ou en avril-mai enpépinière, et pour éviter l’étiolement des petits plants, on les repique une fois avantde les mettre en pleine terre. Leur plantation assez rapprochée, 0 m. 25 sur les lignesavec un écartement entre celles-ci de 0m. 70, donne un rendement bien supérieur enracines.Par éclats de pied. — On les plante en automne ou au printemps à o m. 8o sur leslignes distantes de m. environ. Ce système ne donne pas des sujets très vigoureux, lesradicelles ne se développant pas facilement. (A. G. et J. D.). Les soins culturaux, en

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dehors des arrosages pour faciliter la reprise et des binages, sarclages et buttages,comportent en hiver un apport de fumier pour faire grossir la racine.Récolte. — On arrache les racines âgées de 2 à 3 ans, en octobre ou au printemps, et,après nettoyage, on les coupe en tronçons de 2 cm que l’on fait sécher au soleil ou àune douce chaleur à l’étuve. Le rendement est de 1 kg 870 par 10 kg de racinesfraîches. Leur odeur, quand elles sont sèches, se rapproche de celle de l’iris et de laviolette.

Composition chimique. — La racine contient : résine âcre, huile volatile, extraitamer, hélénine constituée par quatre éléments : hélénine proprement dite, camphred’aunée, l’anhydride alantique et l’alantol, plus l’inuline, fécule qui se colore enjaune par l’iode.

Propriétés thérapeutiques. — La racine est la seule partie employée. Sa réputationest ancienne, car Dioscoride la recommandait déjà contre certaines affections dupoumon, ce qui a été confirmé par les médecins modernes. De Korab a reconnu quel’hélénine s’opposait au développement du bacille de Koch ; d’autres lui ont accordédes vertus bactéricides parfois contestées, mais le Prof. Louis Rénon l’a employéeavec succès à la dose de o gr. o6 par jour contre la toux des phtisiques. L’année estregardée aussi comme tonique, excitant, etc. On lui a donné parfois le nom dequinquina indigène.

Préparations pharmaceutiques. — L’infusion est prescrite à la dose de 5 pour 100et’ la teinture à celle de 2 à 5 gr. par jour contre la toux quinteuse et l’expectorationqui succèdent à la grippe. La macération pendant 8 jours de 80 gr. de racines dansun litre de vin d’Espagne est efficace par ses propriétés béchiques et toniques (Dr H.Leclerc). La racine entre dans les sirops d’erysimum et d’armoise composé. Lamédecine vétérinaire l’emploie à l’état de poudre, de décoction ou d’extrait.Observations commerciales. — En 1916, la racine sèche et coupée valait 0 fr. 40 à 0fr. 50 le kilogramme ; son prix est passé ensuite à 1 fr. 20 et en 1924, il s’est élevéentre 2 fr. et 2 fr. 25. La vente en est assez forte.

Bardane Sous ce nom, la racine qu’on trouve dans le commerce peut être fournie par troisvariétés mais surtout par deux : la Bardane à grosses têtes (Lappa major) et la B. àpetites têtes (Lappa minor. D. C.) Synanthérées. Le mot Bardane dériverait de «Barda » qui, en italien, signifie « couverture de cheval », à cause de l’extrêmeampleur des feuilles. Ses principaux synonymes sont : Glouteron, Herbe auxteigneux, Napolier, etc.

Habitat. — Ces plantes sont très communes sur le bord des routes, dans les lieuxincultes et stériles, le voisinage des habitations.

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Description sommaire. — Plante bisannuelle par sa racine qui est épaisse, charnue,cylindrique, pivotante, noirâtre au dehors et blanche en dedans. Tige de 1m. à 1m.50 de hauteur, grosse, rameuse, striée, rougeâtre. Feuilles alternes, très larges à labase, pétiolées, vertes en dessus, cotonneuses en dessous. Fleurs (juin- juillet)nombreuses, purpurines, agglomérées en une petite tête globuleuse, armée de pointesrecourbées en crochet qui font adhérer ces fleurs aux vêtements ou aux poils desanimaux d’où le nom de « grippons » qu’on leur donne pour cette raison. Fruit(akène) à disque plissé surmonté d’une aigrette.

Culture. — Très rustique, la bardane s’accommode de tous les terrains ; elle préfèrecependant ceux quelque peu compacts mais qu’on a défoncés en temps voulu et bienfumés surtout en engrais azotés.

Multiplication. — Il est bon de savoir qu’un gramme de graines en contient 8o, quele litre pèse 63o gr. et que la durée germinative est de cinq ans. On procède au semisdu printemps au mois de septembre. On peut opérer en plein champ à cette dernièredate en traçant des lignes écartées de 0 m. 60 et profondes de 0 m. 04 environ. 20 cmet on roule le sol. Le roulage fixe et enterre les semences suffisamment.

Récolte. — On n’arrache les racines à la fin de la première année, en octobre-novembre, que lorsque les plantes ont atteint leur complet développement, mais il estpréférable de ne le faire que l’année suivante, c’est-à-dire après 18 mois d’existence.

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Il ne faut jamais attendre la floraison, parce qu’elles deviennent ligneuses et perdenttoutes leurs propriétés. Il est nécessaire d’apporter beaucoup de soin dansl’arrachage qui est assez difficile à cause de la longueur de la racine. L’arrachageterminé, on nettoie les racines et on les coupe en rouelles de 2 cm ; on les fait sécherau soleil ou au four modérément chauffé ou encore à l’étuve. On ne les met en sacque lorsqu’elles sont bien sèches, autrement elles noircissent et se détériorent. Lerendement est de 3 kg010 par 10 kg de racines fraîches. Les feuilles mondées sontcueillies au moment de l’arrachage et desséchées dans un local aéré, mais on s’en sertsurtout à l’état frais.

Composition chimique. — La racine contient de l’inuline, une gomme insoluble quise gonfle dans l’eau, une huile essentielle, du tanin, des sulfates et des phosphates depotasse, de chaux et de magnésie et une matière oléo-résineuse (Poinsot).Propriétés thérapeutiques. — Le Dr H. Leclerc, qui a étudié spécialement labardane, relate : 1° qu’elle eut jadis la réputation d’avoir guéri de la syphilis le roiHenri III ; 2° que le D’ Leconte, de Condé-sur-Noireau, l’a utilisée fraîche etrécoltée au printemps dans le traitement abortif de la furonculose ; elle faisait cesserla douleur, hâtait la sortie du bourbillon et entravait la formation d’autres furoncles; 3° qu’il en a lui-même.La bardane est un remède populaire considéré comme undépuratif énergique dans les maladies de la peau, en même temps qu’un diurétique etun sudorifique sérieux.

Préparations pharmaceutiques. — Pour le docteur précité, comme la dessiccationrend la racine de bardane à peu près inerte, mieux vaut employer l’extrait moustabilisé à la dose moyenne de 1 à 2 gr. par jour, en pilules, ou encore en élixir, 2 à 3cuillerées à soupe par jour. Le Dr E. Savini préconise l’extrait fluide à la dose de 4 à6 cuillerées à café comme ayant une efficacité constante contre les coliqueshépatiques. La racine sèche entre dans les tisanes antiherpétiques et sudorifiques.lmportée du Japon, la Bardane géante ou Bardane comestible est parfois cultivéechez nous ; on mange ses racines à l’état jeune, car elles durcissent rapidement.Observations commerciales. — La vente de la racine est forte. On l’a payée d’abord,sèche et coupée, 1 fr. 20 à 1 fr. 50 le kilogramme ; en 1924, elle a valu 3 fr. à 3 fr.25.

BouillonblancDans le groupe des Molènes, la plante la plus importante pour la thérapeutique estle Bouillon blanc ( Verbascum Thapsus), Scrofulariacées, ou plutôt sa variétéVerbascum Thapsiforme adoptée par le Codex de 1908, à cause de la grandeur de sacorolle. Son nom « Verbascum » est une abréviation de « barbascum », barbu, pourfaire allusion aux poils de la plante. Principaux synonymes : Molène officinale,Bouillon mâle, Herbe à Bonhomme, etc.

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Habitat. — Il est commun dans toute la France, notamment dans les lieux inculteset pierreux, les décombres, sur les bords des chemins, dans les champs en jachère.Description sommaire. — Plante bisannuelle, à tige robuste, duveteuse, donthauteur varie de 60 cm à m. et en atteint parfois 2. Racine grosse et pivotante.Feuilles épaisses, molles, tomenteuses, les inférieures grandes, oblongues, lessupérieures aiguës et lancéolées. Fleurs grandes, jaunes, disposées en un long épis’épanouissant successivement de bas en haut, de juin en août ; corolle de 0 m. 03environ de diamètre, divisée en 5 lobes. Fruit (capsule) à deux valves ; grainespetites et chagrinées.

Culture. — Le Bouillon blanc n’est pas difficile sur la nature des terrains, quoiqu’ilpréfère ceux qui sont profonds, meubles, chauds et à une bonne exposition au soleil.D’après la Notice du Ministère de l’Agriculture, on en cultive déjà, depuis quelquesannées, 20 à 25 hectares dans le département du Nord, surtout dansl’arrondissement de Valenciennes, et une petite surface dans l’Aisne.Multiplication. — Elle se fait par semis à l’automne. On consultera avec grandprofit, sur ce point, le livre de MM. A. Goris et J. Demilly, La Culture des plantesmédicinales, en voici un résumé. Semer à l’automne en planches dans une bonne terrede jardin (ce qui est facile dans le Jardin familial), sous châssis, les grainesdonneront des plants prêts à repiquer vers le mois d’avril de l’année suivante.Comme chaque pied replanté peut prendre une assez grande extension, mettre unedistance de o m. 8o entre les lignes et de o m. 5o entre les pieds. Avec un plantoir, unouvrier est capable d’en planter 1200 pieds par jour ; un arrosage suffit. Lesauteurs, contrairement à l’opinion admise, prétendent que les plants s’enracinentrapidement et souffrent peu de la transplantation. On opère quelques binages et

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sarclages pour détruire les mauvaises herbes.

Récolte et rendement. — On y procède la deuxième année de la plantation. Ellecommence pour les fleurs dans les premiers jours de juillet et se continue tous lesjours, jusqu’en octobre, en raison de leur épanouissement successif. Il ne fautl’effectuer, autant que possible, qu’après la tombée de la rosée. On cueille les feuilleslorsque la récolte des fleurs est terminée et l’on arrache ensuite les racines, dans lecas où celles-ci sont acceptées par l’herboristerie de la région. Le rendement en fleursest estimé, dans le Nord, à 500 kg par hectare. Séchage et conservation. —Débarrassées de leur calice et réduites à leur corolle qui s’en détache facilement, lesfleurs doivent être desséchées rapidement pour éviter qu’elles ne noircissent, ce quileur enlèverait une grande partie de leur valeur marchande. Dans ce but, on les étaleen couche très mince, dans un local très aéré et chaud ou encore dans une étuve ouun four légèrement chauffé, et l’on a soin de ne pas les remuer. Les feuilles, à causede leur épaisseur, sont soumises au même traitement, mais leur dessiccation est assezlente. Il en est ainsi pour les racines qu’il faut d’abord couper en rondelles, puissécher, de préférence, à l’ombre, quand le temps s’y prête. Dix kilogrammes de fleursfraîches laissent 1 kg 750, environ, de fleurs sèches et 10 kg de feuilles fraîches kgI8o de feuilles sèches. Pour conserver les fleurs sans qu’elles noircissent, il faut lestenir bien tassées en vase clos, à l’abri de la lumière et de l’humidité.

Composition chimique. — Les fleurs contiennent huile volatile jaunâtre, matièregrasse acide, principe colorant jaune, mucilage, sucre incristallisable, sels.Bourquelot et Bridel ont trouvé dans les racines d’un an un sucre cristallisable qu’ilsont nommé cerbasrose.

Propriétés thérapeutiques. — Leurs propriétés, béchiques, émollientes,adoucissantes, sudorifiques et diurétiques sont connues depuis très longtemps. Le Dr

H. Leclerc, toujours si bien documenté, rappelle que Dioscoride prescrivait la racineet Pline les feuilles dans les affections pulmonaires, et que la décoction des fleursétait considérée par sainte Hildegarde comme un remède ’infaillible de l’enrouement.En outre, qu’en 1884, un médecin anglais, Quinlam, a préconisé les fleurs fraîchesbouillies dans du lait comme un médicament remarquable de la tuberculosepulmonaire, analogue à l’huile de foie de morue et au koumys !...

Préparations pharmaceutiques. — Les parties utilisées sont les fleurs et les feuilles,très rarement les racines. On emploie les fleurs en infusion, 5 gr. par litre (Codex1908) ; la dose peut être portée à 10 et 30 gr. Passer l’infusion à travers un lingepour retenir les poils qui pourraient irriter la gorge. En décoction, 30 à 60 gr., mêmedose pour les feuilles qui servent de cataplasmes. Les fleurs font partie des espècespectorales.

Observations commerciales. — La culture du Bouillon blanc a été recommandéeofficiellement en 1916 par la Feuille d’Informations du Ministère de l’Agriculture.

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La vente des fleurs est toujours forte et a un prix qui varie aveo leur qualité. De t fr.50 à 2 fr. 50 le kilogramme pour les fleurs ordinaires, il est monté à 5 et 6 fr. pour lesplus belles et il a même atteint 8 et 10 fr. en 1924. Les feuilles n’ont qu’une ventemoyenne et n’ont été payées que 0fr. 50, 1 fr. et 1 fr. 50, au maximum, lekilogramme.

Bourdaine

La Bourdaine (Rhamnus frangula. L.) Rhamnacées, a pour principaux synonymes,Bourgène, Aulne noir, Bois noir, Nerprun Bourdaine, Rhubarbe des paysans.Habitat. — On la trouve dans toute la France, dans les bois, les taillis, les haies, lelong des ruisseaux surtout dans les terrains frais et humides.

Description sommaire. — Arbrisseau non épineux atteignant, selon les endroits 3 à6 m. Tiges droites très ramifiées, dont la jeune écorce est brun rouge et la vieille grisbrunâtre, tachetée de blanc. Feuilles alternes, pétiolées, entières, à nervuressaillantes. Fleurs de mai à juin, parfois jusqu’en août, très petites, rose verdâtre, enfascicules à l’aisselle des feuilles, très recherchées par les abeilles. Baies d’abordrouges, puis noires et luisantes mûrissant en août-septembre.

Culture. — Dans le Jardin familial sa place est dans la haie de clôture. On luidonnera un sol riche en humus, très frais ou légèrement humide et ombragé.Multiplication. — On y procède de deux façons : par le bouturage de rameaux prissur des sujets de six ans environ ou par le semis en pépinière. (A. R. et D. B.).

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Récolte et séchage. — On récolte les tiges au moment de la floraison, de maijusqu’en août, et même en septembre. On enlève l’écorce en longues lanières étroitessur les tiges un peu fortes et on la découpe en petits fragments que l’on dessèche enun endroit bien aéré. On reconnaît que le séchage est terminé quand les fragmentss’enroulent en forme de cornets.

Composition chimique. — Le Dr Leclerc, qui a fait une étude complète de labourdaine, relate que d’après Aweng, l’écorce renferme quatre principes tous douésd’une action purgative : émnodine, franguline, chrysophane, acide frangulique.Propriétés thérapeutiques. — D’après le même auteur, la bourdaine a été signaléepour la première fois au moyen âge par Pierre des Crescences sous le nom d’ Anormisou d’ Avornus,- toutefois, ce n’est qu’à la Renaissance qu’elle a été exactementdécrite par Tragus et Mathiole. Ce dernier recommandait très judicieusement de nel’employer que préalablement desséchée : « D’en user lorsqu’elle est verde il n’est bon,attendu qu’elle ferait vomir ». Cette assertion et d’autres qui sont dues à desmédecins de cette époque ont été confirmées depuis. En somme, il faut donc rejeterabsolument l’écorce verte de bourdaine et ne se servir que de l’écorce vieille de deuxans ou plus. En cet état c’est un des meilleurs laxatifs ou purgatifs végétaux, carelle n’irrite jamais l’intestin même par un usage prolongé ; elle remplaceavantageusement la rhubarbe, aussi l’appelle-t-on parfois, rhubarbe des paysans. Onl’a utilisée aussi comme vermifuge et dépurative. Les fruits sont inusités ; ils ontpassé pour purgatifs, mais comme leur action est incertaine et très variable, il vautmieux s’en abstenir.

Préparations pharmaceutiques. — La poudre de l’écorce s’emploie à la dose de 1 à 2gr. en cachets de 0gr.50 avant les repas ; l’extrait fluide 1 à 2 gr. mais la meilleurepréparation, selon H. Leclerc est une décoction de 2 à 5 gr. d’écorce de 2 ans d’âgedans 250gr. d’eau pendant 25 minutes ; on laisse ensuite infuser à froid de 4 à 6heures ; la liqueur décantée est alors absorbée au coucher.

Observations commerciales. — En raison de son utilité thérapeutique journalièrepour nombre de familles, il y a lieu d’accorder à la bourdaine une place assez grandedans le Jardin familial. Elle est d’ailleurs très demandée dans le commerce del’herboristerie. Le kilogramme d’écorce sèche entière vaut, environ, 1 fr. 40 à 1 fr. 60et coupée 1 fr. 60 à 1 fr. 80. La culture de cet arbrisseau peut encore fournir aucommerce son bois qui est employé pour la fabrication de la poudre et des allumettes.

Bourracheofficinale La Bourrache (Borrago officinalis L.), famille des Borraginées, a pour étymologiedeux mots arabes : Abou, père, et rash, sueur, de même que son nom latin dérive de «cor ago », par allusion à de prétendues propriétés cordiales.Habitat. — Originaire du Levant, la bourrache a été introduite dans l’Afrique duNord, puis en Espagne avec les Maures, en Corse et en France où elle est trèsrépandue. Aimant les sols riches en azote, on la rencontre dans les champs cultivés,sur des tas de décombres et dans un grand nombre de jardins ; elle se sème d’elle-

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même.

Description sommaire. — Plante annuelle de 0m.30 à 0 m 70 de hauteur, couvertede poils rudes et piquants, d’odeur légèrement vireuse, de saveur herbacée etmucilagineuse. Tige ronde, épaisse, creuse, juteuse, très rameuse ; feuilles alternes,hérissées, ovales, épaisses la base, plus petites vers la tige. Fleurs grandes, engrappes, d’un beau bleu de ciel, rarement roses ou blanches, étamines à anthèresnoires munies d’un appendice. Fruit composé de quatre achaines noirs à la maturité.Racine longue, pivotante et blanche.

Culture.Multiplication. — Le procédé employé est le semis. Plante à végétation rapide, labourrache demande une bonne terre exposée de préférence au midi, ayant reçu deuxlabours, le premier à l’automne, le second vers la fin du mois de mars. Le semis alieu, soit fin mars au début d’avril (A. G. et J. D.) soit, préférablement, à l’automne(A. R. et D. B.). On y procède à la volée ou en lignes dans les petites cultures, tandisque dans les grandes on l’effectue, d’après J. Demilly, en ligne au moyen du semoir àharicots, en surveillant la tombée des graines qui sont beaucoup plus petites quecelles du haricot.Dans le jardin familial, on peut la propager en une ou plusieurs planches de 1 m. 20à 1 m. 40 entourées des sentiers nécessaires pour en faciliter la récolte. Dans laculture en grand, les planches ont 1 m. 40 et les rangées sont distantes d’environ 70cm et, dès que les plants apparaissent, on les éclaircit à la binette, tandis qu’on lefait à la main dans le jardin. On a soin, alors, de laisser entre eux un écartement de25 à 30 cm. Malgré cette précaution, les sujets bien soignés finissent par prendre untel développement qu’ils parviennent à se toucher.

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Récolte. — Elle porte surtout sur les feuilles, les fleurs, les sommités fleuries, maiselle comprend souvent aussi la plante entière et les racines. On y procède pour lesfeuilles et les sommités quand les fleurs sont à peine épanouies ; pour les fleursséparées, à partir de la fin de mai, date de leur première apparition, jusqu’à la mi-juillet, temps durant lequel la floraison est continuelle, et pendant toute la bellesaison pour les tiges non fleuries. Dans plusieurs régions, on arrache aussi les racinesau moment de la floraison. Les possesseurs d’un jardin familial peuvent se borner àrécolter les fleurs et les sommités fleuries qui contiennent les principes de la planteen plus grande quantité. Production. — Dans l’Aisne, où cette plante est cultivéesur une grande échelle, on estime qu’un hectare de bourrache bien cultivé peutproduire 5000 kg de sommités fleuries fraîches.

Séchage. — Comme les feuilles et les sommités sont remplies d’un abondant sucmucilagineux, il faut les dessécher avec les précautions générales que j’ai indiquéesprécédemment, car la bourrache mal séchée est jaune ou noire. Il importe donc derenouveler fréquemment la surface des plantes exposées à l’air libre sur des claies, àmoins que les sommités n’aient été mises en bouquets suspendus en guirlandes. Ladessiccation doit, généralement, être terminée à l’étuve ou au four en s’assurant bienqu’il n’est pas trop chaud. Quant aux fleurs, l’attention doit être encore plus grande,afin de leur conserver leur belle coloration bleue.

Rendement. — La bourrache est peut-être la plante qui donne le plus faiblerendement en matière sèche : Io kg de plantes fraîches laissent 1 kg 1 i 5 et 10 kg defleurs fraîches, 960 gr. de fleurs sèches.Conservation. — Voici quelques observations d’ordre général. Lorsque ladessiccation est complète, ce que l’on constate par la façon dont les différentesparties sont devenues cassantes, on laisse celles-ci durant quelques heures à l’airextérieur et à l’ombre jusqu’à ce qu’elles aient absorbé un peu de l’humiditéatmosphérique, puis on les conserve différemment en raison de leur nature.Pour la consommation familiale, la seule à considérer ici, on met les fleurs dans desboîtes ou des estagnons en fer-blanc, dans des bocaux en verre ou dans des vases enterre vernissée (faïence, grès, porcelaine) fermés par une coiffe de papier ou deparchemin. Les feuilles et les sommités fleuries sont placées dans des sacs en toile ouen papier fort ; les tiges, écorces et racines dans des caisses en bois ou en métal. Letout doit être tenu à l’abri de la lumière, de l’air, des poussières, des insectes, etc.,dans un local frais et très sec.

Composition chimique. — La bourrache contient, surtout au moment de lafloraison, un suc épais et mucilagineux, des sels organiques et une forte proportionde nitre. Propriétés thérapeutiques. — La bourrache, médicament très populaire, estclassée, aujourd’hui surtout, comme sudorifique, dépuratif et diurétique, mais on luireconnaît aussi des propriétés émollientes, béchiques, expectorantes. Le I)’ HenriLeclerc, dans son excellent Précis de Phytothérapie, relate que J. Bauhinrecommandait la conserve de ses fleurs contre toutes les fièvres et pour purifier le

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sang, et que Dom Alexandre prescrivait un verre de son suc aux pleurétiques pourexciter la sueur qui les guérit. Et, à propos de cette dernière propriété, le savantthérapeute qu’est le D’ Leclerc ne m’en voudra pas si je rapporte le fait suivant dontil fut témoin dans sa jeunesse.« C’était dans le service de Brissaud : une infirmière s’efforçait de faire accepter unbol d’infusion de bourrache à un pneumonique qui repoussait le breuvage salutaireen termes énergiques : « Laissez-moi tranquille avec votre sale tisane, hurlait-il, vousme faites suer à la fin ! » A ces mots, Brissaud se tourna vers ses élèves et leur dit : «J’espère maintenant, Messieurs, qu’aucun de vous ne mettra en doute les vertusdiaphorétiques instantanées de la bourrache. »Ses propriétés ont été tour à tour exaltées et dénigrées au cours des âges, mais de nosjours le Dr de Savignac l’a recommandée comme un dépuratif utile dans lesmanifestations cutanées de la scrofule et de l’herpétisme, et le Dr Pic comme un bondiurétique, ce qui est rationnel, étant donné sa forte. proportion do nitrate de soude.Parties les plus employées. — Ce sont les fleurs et les feuilles, puis les sommitésfleuries ; on se sert aussi des racines dans quelques régions. Préparationspharmaceutiques et doses. — L’infusion de fleurs, à la close de 5 gr. par litrependant une demi-heure (Codex 1908) ; dose qu’on porte souvent à 10 et 15 gr. ; ladécoction de feuilles et de sommités fleuries, sèches 5 à 15 gr., vertes 30 à 90gr. sonttoujours des remèdes très populaires et fréquemment employés pour favoriser latranspiration dans les maladies inflammatoires, rougeole, scarlatine, etc. On aprescrit également l’extrait à la dose de 1 à 4 gr. ; l’hydrolé 50 à 125 gr. ; le sirop 10à 50gr. ; le suc de bourrache seule 50 à 100 gr. Ambroise Paré conseillait déjà «d’user de bouillons auxquels auront cuit bourrache, buglosse, etc. On prépare parfoisun suc dépuratif composé avec des feuilles fraîches de bourrache, de cresson et depissenlit pilées ensembles puis exprimées.En dehors des emplois thérapeutiques, les feuilles et fleurs de bourrache répondent àdes usages culinaires : damas la région méditerranéenne et en d’autres pays, lesfeuilles à l’état jeune et vert, sont mangées en salade, ou cuites, en guise d’épinards,tandis que les fleurs servent comme celles de la capucine à l’ornementation dessalades.

Observations commerciales. — La culture de la bourrache est une de celles qui,d’après la Feuille du Ministère de l’Agriculture, peuvent être entreprises, enpremière ligne, sur une grande échelle, ce qui s’explique tout naturellement puisqueles Services de Statistique de la Direction générale des Douanes mentionnent qu’onimportait encore, en 1922, 17 000 kg de fleurs de bourrache. Cette publication, dansun aperçu du prix des plantes médicinales les plus communément employées,estimait, en 1916. le prix des fleurs à 3 fr. 50 le kilogramme et celui des feuilles debourrache à 0 fr. 75, avec la mention vente forte pour les premières et vente bonnepour les secondes.Toutefois, il importe beaucoup de savoir que les plantes médicinales sont l’objet detrès’ grandes variations dans leur cours qui, dans une même année, peut subir degrandes fluctuations. Aussi, ne faut-il voir, dans les prix que je cite aujourd’hui

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pour la bourrache et citerai plus tard pour d’autres plantes, que de simplesindications pour fixer les esprits, attendu qu’ils peuvent être considérablementmodifiés dans le sens de la baisse comme dans celui de la hausse.Voici, dans cet ordre d’idées, les prix approximatifs qui ont été pratiqués en 1924pour le kilogramme : feuilles mondées, t fr. 50 à 1 fr. 60 ; sommités fleuries, 1fr. 50 à1 fr. 60 ; fleurs mondées, 5 à 6 fr. ; racines, 1fr. 75 à 2 fr. Si ces prix semaintenaient, la culture en grand de cette plante serait bien rémunératrice.

Camomilleromaine

La camomille romaine (Anthémis nobilis L.), Composées ou Synanthérées, est encoreappelée Anthémide ou Anthémis, Camomille officinale, C. noble, C. odorante, C.blanche, C. des jardins. Il y en a d’autres espèces, notamment la MatricaireCamomille, mais il n’y a pas lieu d’en parler ici.

Habitat. — Cette camomille est assez répandue en France, en Italie et en Espagne.Chez nous elle croît à l’état sauvage dans les terres incultes et sèches du Midi, dansles allées sablonneuses, les pelouses des bois, etc. Elle est très souvent cultivée dansles jardins et en grand dans quelques départements.

Description sommaire. — Plante vivace dont les tiges peuvent atteindre 20 à 25 cmà l’état sauvage et environ 30 à 40 cm dans la culture ; elles sont très ramifiées etsurtout rampantes. Feuilles alternes, découpées en segments très petits, pubescentes.Fleurs en capitules solitaires, à fleurons jaunes, hermaphrodites, au centre, à demi-fleurons sur la circonférence, blancs, femelles, à odeur balsamique, assez agréable,pénétrante ; floraison de juin à septembre. Fruit, achaine petit et verdâtre.Culture. — Il y a lieu de distinguer deux variétés dans la camomille romaine : l’uneà fleurs simples, l’autre a fleurs doubles qui est, à beaucoup près, la plus cultivée àcause du plus grand développement de ses capitules. On la désigne habituellementsous le nom (le Camomille de Paris et l’autre sous celui de Camomille du Nord.

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Multiplication. — Il existe deux modes a, par semis ; h) par éclats de souches. Ilssont eux-mêmes subordonnés à la variété qu’on veut cultiver, ou plutôt à la facultéde produire des graines. Aussi, étant donné que la camomille à fleurs simples enfournit beaucoup et celle à fleurs doubles très peu, il en résulte qu’on multiplie lapremière par semis et la seconde par éclats de souches.Mais quel que soit le mode suivi, bien que la camomille vienne à peu prés dans tousles sols, il vaut mieux qu’ils soient légers, argilo-calcaires, substantiels, exposés aumidi, assez frais ou pouvant être arrosés, quoique la plante craigne une trop grandehumidité en hiver comme une forte sécheresse en été.Dans le jardin familial, la terre doit être bêchée deux ou trois mois auparavant, et sil’on ne peut la fumer au fumier de ferme, on y répandra, par mètre carré, 10gr. desulfate d’ammoniaque ou 8 gr. de nitrate de soude enterrés par un léger binage. Dansle champ, on fait deux labours préalables, on fume dans la proportion précitée, oubien l’on épand, par are, 2 kg 500 de superphosphate de chaux et t kg de sulfate depotassium. (A. R. et D. B.).

Par semis. — On sème en deux saisons : au printemps et à l’automne, en lignesdistantes de 0m.60 ; on éclaircit en temps voulu en laissant un intervalle de 25 à 30centimètres.Par éclats. — C’est le mode à préférer ; on peut l’entreprendre à l’automne ou auprintemps, mais M. J. Demilly, qui est très expert dans la culture des plantesmédicinales, conseille l’automne et le procédé suivant. On divise les souches decamomille en plusieurs pieds suivant la force de la plante et on les met en pépinière.Les éclats émettent des racines pendant l’hiver et ils sont prêts à être mis en place auprintemps dans un sol siliceux et frais autant que possible. A ce moment, on tracedes lignes espacées de 60 cm, de façon à pouvoir. biner mécaniquement (ou à la maindans le jardin), et on place les plantes à 30 cm sur la ligne. Il faut bien tasser la terreautour des pieds.Les soins consistent en binages répétés trois à quatre fois la première année, tandisque deux suffisent la seconde année. On_ arrache les plantes au bout de la quatrièmeannée pour les diviser et refaire une nouvelle plantation.

Récolte. —On y procède dès la seconde année en commençant vers le mois de juin etne s’arrêtant qu’au mois de septembre. On a soin de cueillir les capitules très peuavant leur complet épanouissement : trop tard, les ligules pourraient se détacherfacilement ; trop tôt, les fleurs ne seraient pas assez développées et retiendraient unelégère teinte verte qui leur serait préjudiciable. Il faut choisir un beau temps sec etensoleillé pour faire cette récolte, car elles ne doivent être mouillées ni par la pluie nipar la rosée, afin qu’elles ne soient pas exposées à noircir pendant le séchage.Pour la récolte dans les champs de culture, on se sert, dans certains pays, d’un outilen bois nommé « peigne à airelles. » (J. Demilly).

Production. — Dans le Maine-et-Loire, on estime que l’hectare donne 1200 kg defleurs, et dans la région de Valenciennes 800 à 900 kg. (A.R. et D.B.).

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Séchage. — ll faut sécher les fleurs le plus tôt possible en les étalant en couchemince sur des toiles placées dans un endroit très aéré, séchoir ou grenier, et nonexposé aux poussières ; éviter, autant que faire se peut, d’employer la chaleur, commec’est Tailleurs la règle pour toutes les plantes aromatiques, afin que les huilesessentielles ne se volatilisent pas en partie. On n’y recourrait que si les fleurs avaientété mouillées ; on chaufferait le local et l’on aurait soin de les remuer très souvent. Ilimporte de ne pas oublier que la blancheur est un facteur essentiel de leur valeurcommerciale ; aussi, leur conservation doit-elle être faite avec tous les soins que j’aiindiqués précédemment. 10 kg de fleurs fraîches donnent 2 kg à 3 kg 500 de fleurssèches.

Composition chimique. — Les fleurs de camomille contiennent : camphre, principegommo-résineux, tanin, acide anthémique et de l’huile volatile (D’ A. H.). Cetteessence constitue le principe le plus actif, mais les chimistes ne sont pas d’accord sursa coloration : pour les uns elle est bleue et verte pour les autres ; ces derniersparaissent avoir raison. Sa composition est formée surtout d’éthers butyrique,angélique et tiglique, d’alcools amylique et hexylique ; elle contient de l anthémol etun peu de strychnine. Elle a pour densité 0.905 à 0.915 et se dissout dans 6 partiesd’alcool à 70°. 10 kg de fleurs en contiennent de 8 gr. 4 à 40gr.

Propriétés thérapeutiques. La camomille est amère, aromatique, stimulante ettonique. Elle a, d’abord, été employée par Galien comme fébrifuge et Trousseau,depuis, l’a appelée « le quinquina de l’antiquité e. Cette action est certaine, d’aprèsle D Héraud, dans des fièvres intermittentes mal définies ayant résisté au sulfate dequinine. Elle réussit aussi contre la courbature, les névralgies faciales et lacéphalalgie grippale. Toutefois, parmi les propriétés qu’on attribue à la camomilleromaine, la principale paraît être, aujourd’hui, son action antispasmodique. Elleconstitue un remède populaire comme digestif, carminatif, stomachique dans lesdigestions difficiles, les coliques venteuses, etc. ; comme stimulant etantispasmodique dans les fièvres typhoïdes et surtout comme emménagogue pourrégulariser les règles, comme anthelminthique contre les vers intestinaux ; commevomitif quand elle est prise en grande quantité.

Préparations pharmaceutiques et doses. — La seule partie usitée est la fleur. Commepresque toujours le remède le plus populaire contre les embarras gastriques estl’infusion, 5 gr. par litre ;Codex, 1908), mais le plus souvent on met deux à quatrefleurs par tasse. Il importe de bien se rendre compte de la différence qui existe entrel’infusion et la décoction. La première consiste à verser de l’eau boitillante sur lesfleurs et à laisser en contact durant une demi-heure, la seconde à faire bouillir lesfleurs et l’eau pendant 2 à 5 minutes. L’infusion est tonique et la décoctionexcitante et antispasmodique.On emploie encore à l’intérieur pour, 24 heures : l’extrait 0gr.25 à 0gr.50, l’eaudistillée 25 à 100 gr. : la poudre récente 1 à 8 gr. en cachets ; le sirop 10 à 50 gr ;l’huile volatile 1 à 2 gouttes. A l’extérieur, on se sert en friction de l’huile de

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camomille obtenue en faisant digérer 3 heures au bain-marie couvert, et en agitantde temps en temps, z00 gr. de fleurs sèches dans 1000 gr. d’huile d’œillette (Codex1908), ou de l’huile de camomille camphrée préparée en introduisant 100 gr. decamphre râpé dans 900 .gr. d’huile de camomille, laissant en contact, en agitant detemps en temps jusqu’à dissolution complète. L’infusion de 10gr. de fleurs par litred’eau sert en lotions très chaudes contre la conjonctivite.L’art vétérinaire emploie également pour les animaux l’infusion de camomille à doseélevée pour les différentes affections signalées plus haut.

Observations commerciales. — La culture de la camomille en grand est une des plusrecommandées, car sa vente est très forte. Elle l’est d’ailleurs dans le Nord, leMaine-et-Loire et l’Indre-et-Loire. D’après la Feuille du Ministère de l’Agriculture,les fleurs de camomille étaient, en 1916, cotées 2 fr. 50 à 3 fr. le kilogramme, selon laqualité. On l’établit en faisant passer les fleurs dans des cribles à mailles dedifférentes grandeurs. Le premier criblage donne des capitules gros et de premierchoix pouvant valoir environ 250 à 300 fr. les 100 kg ; le second, des capitulesmoyens ou 2e qualité, 160 à 165 fr. ; le troisième, des petites fleurs à 135-140 fr. Lesfleurs tachées perdent jusqu’à la moitié de leur valeur et servent souvent, comme lestrès petits capitules ; à la distillerie. Les prix sont très instables : ils ont atteint 32fr. le kilogramme en 1923 et sont tombés l’an dernier entre 3 à 5 francs.

CentauréePetiteCentaurée

La Petite Centaurée, qu’on appelle aussi Erythrée Petite Centaurée (ErythrœaCentaurium) Pers. Gentianées, tire son nom de Centaurée de la légende qui luiattribue la guérison d’une plaie faite par Hercule au pied du centaure Chiron. Elle apour principaux synonymes : Gentianelle, Herbe à la fièvre, Herbe au Centaure,

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Herbe à Chiron, Herbe élégante, Fiel de terre, etc.Habitat. — Elle est très commune dans les bois, les prés, les terres légères ethumides, le bord des haies.

Description sommaire. — Plante élégante, bisannuelle, haute de 0 m. 25 à 0 m. 30,à tige grêle, quadrangulaire, à rameaux dichotomes. Feuilles opposées, sessiles, àtrois nervures, les inférieures ovales, en rosette, les supérieures lancéolées et plusétroites que celles de la base. Fleurs (juin-août) d’un beau rose vif insérées sur despédoncules courts, à l’aisselle de petites feuilles ou réunies au sommet de rameauxbifurqués, formant des corymbes terminaux. Fruit (capsule) s’ouvrant en deux valvesrenfermant beaucoup de graines très petites, jaune orangé et fortement ridées.Culture. — La petite centaurée se plaît dans les terres qui ne sont ni trop fortes, nitrop humides.

Multiplication. — On l’effectue par semis, en mars-avril, dans une terre légère ou deconsistance moyenne, assez fraîche et bien fumée, ce qui est facile à réaliser dans leJardin familial. Récolte et séchage. — Elle comprend les sommités fleuries qu’oncoupe en pleine floraison, en juillet-août. On en fait, à ce moment, de petites bottesqu’on enveloppe de papier, afin de conserver la couleur des fleurs. On les dessècherapidement dans un grenier ou un local très aéré, et non, comme le font souvent lesherboristes des villes, en les suspendant à la devanture de leurs boutiques où ellesrecueillent, avec la poussière des rues, les microgermes nuisibles qui s’y trouvent. Onestime que 10 kg de sommités fraîches donnent 2 kg 950, environ, de plante sèche.Composition chimique. — La petite centaurée contient un principe cristallisé, l’érythrocentaurine, isolé par Méhu ; un glucoside, l’érytaurine ; une matière amère,l’érythramarine ; une lactone, l’érytaurone, et des matières cireuses. Propriétésthérapeutiques. — Les sommités fleuries ont joui jadis d’une très grande réputation.L’Ecole de Salerne les vantait pour la cicatrisation des plaies. Plusieurs auteurs ontprétendu qu’après le quinquina il n’était pas de meilleur fébrifuge que la petitecentaurée. Elle constitue toujours un remède populaire contre les fièvresintermittentes ; mais on la considère surtout, aujourd’hui, comme un bon toniqueamer qui réveille les fonctions motrices et sécrétoires des voies digestives, en mêmetemps qu’elle exerce une action sédative dans certaines dyspepsies douloureuses.Préparations pharmaceutiques. — Le Codex de 1908 la prescrit en infusion à ladose de 10 gr. qu’on a portée à 20 et même à 3o gr. par litre. L’extrait aqueux a étédonné au taux de 0 gr. 60 à 1 gr. ; la teinture 2 à 10 gr. par jour. Elle fait partie desespèces amères, du baume vulnéraire, de l’esprit carminatif de Sylvius. Elle entreaussi dans la composition de certains vermouths. Sa décoction a été employée enlavements, en lotions, etc.

Observations commerciales. — La culture de cette plante a été recommandéeofficiellement en juillet et en novembre 1916. A l’état sec, sous forme de bouquets,les sommités fleuries ont varié de 1 fr. 80 à 2 fr. le kilogramme

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Chicoréesauvage Il ne s’agit ici que de la chicorée sauvage (Cichorium Intybus L.), Synanthéréeschicoracées, qui a pour synonymes Chicorée amère, herbe à café, Herbe amère, etc., etnon des nombreuses variétés cultivées dans les jardins et provenant du CichoriumEndivia (L.).

Habitat. — Elle croit partout, dans toute la France, sur les bords des chemins etdans les lieux incultes.

Description sommaire. — Plante vivace, bisannuelle. Racine longue, pivotante, dela grosseur du doigt, brune au dehors, blanche en dedans, renfermant un suc laiteux.Tige droite, cylindrique, atteignant 0 m. 80 à 1 m. Feuilles alternes, velues, lesinférieures profondément découpées, les caulinaires petites, lancéolées, entières.Fleurs (juillet-septembre), en capitules sessiles, géminés, d’un beau bleu, rarementblanches ou roses. Graines (achaines), tétragones, surmontées d’une couronned’écailles.

Culture. — Elle est semblable à celle de la chicorée à café si répandue dans le Nordde la France. Elle demande une terre profonde et saine, bien ameublie, afin de nepoint diviser les racines. La terre de jardin argilo-siliceuse, fraîche, sans excèsd’humidité, lui convient bien. Il faut, cependant, la fumer à l’automne avec dufumier décomposé ou avec du superphosphate de chaux : 4 kg à l’are ou 3 kg denitrate de soude.

Multiplication. — Elle a lieu par semis qu’on peut faire à toute époque de l’année,mais de préférence à fin avril. Il est bon, d’après MM. A. Goris et .1. Demilly, demettre tremper les graines, comme il est d’usage en Flandre, pendant deux jours

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avant le semis, afin qu’étant gonflées leur germination soit hâtée. On sème à lavolée, en planche ou mieux en lignes espacées de 30 ou de 60 cm selon le cas. Onemploie 250 à 300 gr. de graines par are avec le semis en lignes et r litre 500 avec lesemis à la volée (A. R. et D. B.). Elles doivent être semées « claires » quand on visela production des racines et un peu plus épaisses lorsqu’il s’agit des feuilles. On roulepour fixer les graines au sol ; dans le Jardin familial on se contentera de les couvrirlégèrement de terre et de les arroser. La levée peut avoir lieu entre 6 et 15 jours.Soins culturaux. — On effectue le premier binage lorsque les plantes ont quelquescentimètres de hauteur, pour détruire les mauvaises herbes dès leur apparition. Aumoment du second binage, qui est fait un mois après, on éclaircit les plantes quiseront laissées à 12 cm les unes des autres. Il est utile de procéder, en été, à defréquents arrosages, mais l’important est de tenir le sol très propre, afin de favoriserle développement des plantes. La culture peut durer 2 à 3 ans, mais la productionserait plus avantageuse si les semis étaient annuels.

Récolte. — Elle doit avoir lieu la première année, aussi bien pour les feuilles quepour les racines Les premières, généralement destinées à l’herboristerie, sont plusdéveloppées et l’on peut en faire plusieurs coupes de juin à septembre avant que laplante ne monte. Les secondes sont plus charnues et faciles à traiter, tandis qu’ellestendent à devenir ligneuses la seconde année. On les arrache de septembre à octobre.Séchage et conservation. — On étale les feuilles en couches minces dans un grenierou un local très aéré et on les remue peu ; elles perdent leur couleur en se desséchant.Comme elles attirent facilement l’humidité, il est indispensable de les conserver dansun endroit sec. Les racines bien nettoyées sont coupées en morceaux de 2 cm et misesà sécher au soleil ou, de préférence, à l’étuve. On estime que 10 kg de feuilles fraîchesdonnent 1 kg 55o de feuilles sèches.

Composition chimique. — Les feuilles contiennent : extractif amer, chlorophylle,albumine, sucre, plusieurs sels, entre autres du nitrate de potasse. Les racinesrenferment de l’inuline. (Dr H.).

Propriétés thérapeutiques. — Les feuilles constituent toujours un remède populairecomme dépuratif dans les différentes maladies de la peau. En outre, elles sontregardées comme apéritives, digestives, stomachiques, toniques, etc. Elles entrentdans le suc d’herbes, à parties égales avec le cresson, la fumeterre et la laitue, ainsique dans la médecine du curé de Deuil. La racine figure dans les sirops de chicoréesimple et composé, excellent dépuratif et laxatif pour les enfants. Je rappelleraiqu’elle sert de base à l’industrie du « café-chicorée », laquelle fait consacrer dans leNord de nombreux hectares à sa culture. Les graines entraient dans les 4 semencesfroides.

Préparations pharmaceutiques. — Le dernier Codex prescrit une infusion de 10 gr,pour un litre d’eau bouillante. Racines 20 pour 1000 ; sirop de chicorée composé 40gr. pour les enfants ; suc dépuré de feuilles 50 à 250 gr. ; extrait 1 à 5 grammes.

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Observations commerciales. — La vente des feuilles et des racines de chicorée estforte. Les prix payés par l’herboristerie ont varié pour les feuilles de 0 fr. 50 à 2 fr. lekilogramme et, pour les racines, de 0 fr. 90 à 1 fr. 75.

Cochléariaofficinal

Le cochléaria officinal (Cochlearia officinalis L,), Crucifères, a pour synonymes,Cranson officinal, Herbe aux cuillers, nom qui lui vient de la forme du limbe de sesfeuilles.

Habitat. — En France, on le rencontre au bord des ruisseaux, sur le rivage de lamer, notamment sur les côtes de Normandie et de Bretagne.

Description sommaire. — Plante bisannuelle atteignant 0m20 à 0m. 30 de hauteur.’fige ramifiée, vert pale. Feuilles charnues, longuement pétiolées, courbées en cuiller,les caulinaires petites, sessiles, embrassant la tige. Fleurs (mai-août), blanches,pédonculées, disposées en grappes corymbiformes. Fruit (silicule) ovale : graines peunombreuses, d’un brun clair.

Culture. — Elle est facile surtout dans les jardins maraîchers. Le cochléariademande une terre légère, fraiche, pouvant être arrosée sans difficulté. On luidonnera donc, autant que possible, dans le Jardin familial, la place la plus fraîchesinon la plus humide et exposée au nord.

Multiplication. — On y procède par semis à l’automne ou au début du printemps,par une température basse 5° à 12°, parce que les graines germent difficilement parun temps chaud. On nivelle le sol et on sème les graines tous les 25 cm sur des lignesdistantes de 0m. 70, puis on plombe pour bien fixer les semences. Dans cesconditions, la germination peut avoir lieu en jours (A. G. et J. D.). On donne ensuite

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les soins culturaux habituels et surtout de fréquents arrosages.Récolte et séchage. — On cueille les feuilles un peu avant la floraison, au début demai, et l’on peut eu faire plusieurs coupes. Le séchage doit être fait rapidement parceque les feuilles sont pleines d’un sucre àcre et piquant. Elles perdent leurs propriétéspar la dessiccation.

Composition chimique. — Les feuilles l’enferment, après avoir été contusées, uneessence qui n’y préexistait pas, mais qui s’y développe sous l’influence de l’eau etd’un principe azoté, très probablement analogue à la myrosine. Cette essence,d’odeur irritante, est composée d’isosulfocyanate de l’alcool butylique, assez prochede l’essence de moutarde. On y trouve également une substance acre : la cochléarine,un peu d’iode, etc.

Propriétés thérapeutiques. — Les feuilles fraîches et les sommités fleuries sontantiscorbutiques, dépuratives, stimulantes, stomachiques, etc. On les emploie contreles scrofules et les maladies de la peau ; on les a proposées aussi contre l’obésité.Préparations pharmaceutiques. — A l’état frais, les feuilles entrent dans lapréparation du sirop antiscorbutique, de la bière et des vins antiscorbutiques ainsique dans certaines eaux ou alcoolats dentifrices servant aux soins de la bouche. On aprescrit l’infusion de feuilles fraîches, 20 gr. pour 1000 ; alcoolats simple et composé10 à 30 gr. ; conserve 50 gr. ; sirop 20 à 60 gr. ; suc frais 16 à 80 gr. ; vin 5o à 100gr. Comme la dessiccation leur fait perdre toute efficacité, il est tout indiqué den’employer que le suc frais en nature ou sous forme de sirop.Observations commerciales — La vente n’a quelque importance que pour les feuillesfraîches (lui entrent dans la préparation du sirop antiscorbutique ; elles sont payées0 fr. 25 à 0fr. 30 le kilogramme. Quant aux feuilles sèches dont la vente est faible,leur prix a varié de 1 fr. 50 à 5 fr. le kilogramme.

Consoudeofficinale

Souvent désignée sous le nom de Grande Consoude, la Consoude officinale(Symphitum officinale. L.), Borraginées, a encore pour principaux synonymes

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Langue ou Oreille de Vache, Herbe à la coupure, Herbe aux charpentiers, etc.Elle tire son nom du mot latin.« consolidare », affermir, consolider.

Habitat. — Elle est commune dans les terrains humides : friches, prairies, bordsdes ruisseaux, etc. Répandue dans le Nord et le Centre, elle est rare dans le Midi.Description sommaire. — Plante vivace, haute de 0,30m à 0,60m, atteignantparfois un mètre. Tige rameuse, forte, quadrangulaire, hérissée de poils. Feuilleslarges, les inférieures alternes, ovales, les supérieures souvent opposées, sessiles,lancéolées. Fleurs (mai-juin) d’un blanc jaunâtre, parfois roses ou violettes, encloche, formant par leur réunion une grappe recourbée, à fleurs pendantes toutesdu même côté. Racines épaisses, fibreuses, allongées, noires en dehors, blanchesen dedans de la grosseur du doigt, longues de 0,20m à 0,30m, renfermant unmucilage douceâtre, visqueux, abondant. Fruits formés de quatre akènesdistincts et rugueux.

Culture. — Le sol doit être léger, riche en humus, très frais, quelque peu ombragéet bien préparé par un labeur profond en automne ou en hiver. Multiplication.— Elle est facile par éclats de pieds, racines ou surgeons, plus rarement parsemis de graines, car la plante en donne peu. La plantation des éclats de pieds sefait en février-mars, en lignes distantes de 0,60m à 0,70m, en laissant unespacement de 0,50m sur la ligne. Le semis des graines s’effectue en terre meubleet, quand elles sont bien mûres, elles lèvent et prospèrent sans difficulté. Lessoins culturaux consistent en binages et sarclages, puis, en hiver, en une fumureavec du fumier enfoui à la bêche. Dans le Jardin familial, la place de laConsoude est dans la partie la plus fraîche.

Récolte. Séchage. Rendement. — La partie de la plante qu’il importe de récolterest surtout la racine que l’on arrache à l’automne. On la nettoie aussitôtcomplètement ou bien on la racle et on la coupe en rondelles de deux centimètresque l’on met sécher au soleil ; on fend en deux les grosses racines. La partiecoupée jaunit, puis brunit par la dessiccation. Les feuilles se récoltent après leurcomplet développement, les fleurs en mai-juin et sont séchées à l’ombre. On atrouvé que 10 kilos de racines fraîches récoltées en juin peuvent donner 5 kg 355de racines sèches, et, récoltées en novembre, 3 kg 200 (A. R. et D. B.)Composition chimique. — La racine contient un mucilage abondant, du tannin,un peu d’huile essentielle, beaucoup d’hydrates de carbone et de l’allantoïne (ogr. o6 à o gr. o8 p. 100, d’après MM. Thiterley et Coppin).

Propriétés thérapeutiques. — Les anciens avaient la plus haute idée des vertusde cette plante qu’ils vantaient pour consolider les fractures, cicatriser lesblessures et arrêter les hémoptysies par son astringence. D’aprèsMM. Thompson, Macalister et Bramwell, « la consoude doit ses propriétéscicatrisantes à l’allantoïne qui favorise la croissance de nouveaux tissus à lasurface irritée et congestionnée de l’ulcère gastrique ». Elle est employée comme

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adoucissante et béchique ; en outre, le D’ H. Leclerc, qui en a fait une sérieuseétude, dit que sa pulpe fraîche et son infusion concentrée lui ont rendu servicedans le traitement des brûlures et des crevasses du mamelon, et qu’elles lui ontréussi, à l’intérieur, dans l’entérite des tuberculeux.

Préparations pharmaceutiques. — Il n’y en a guère que trois : l’infusion 20 p.1000, la décoction 60 p. 1000 et le sirop 50 à 100 gr. D’après le docteur précité,l’infusion concentrée (2 heures de contact) à 100 ou même 200 pour 1000 est laseule préparation efficace. Il faut éviter, comme pour tous les végétauxcontenant du tannin, de se servir d’un récipient en fer qui communiquerait à lapréparation une saveur et une couleur d’encre.

Observations commerciales. — La culture de la consoude a été recommandée. Lavente de ses racines sèches coupées est bonne. L’herboristerie les a d’abord payées0 fr. 60 à 0 fr. 80 le kilo, puis 2 fr. et 2 fr. 20. . La vente des feuilles, qui estfaible, a varié de 0fr. 40 à 0 fr. 50 pour monter jusqu’à 1fr. le kilo.

Coquelicot

Le Coquelicot (Papaver Rhœas), Papavéracées, porte plusieurs noms : Pavot-Coquelicot, Pavot des champs, Ponceau, Gaougalin, Raoulé, etc.

Habitat. — Cette élégante plante est très répandue dans les moissons où brillent sesbelles fleurs écarlates. Elle y est, malheureusement, d’autant plus abondante que leterrain est calcaire, et elle s’y propage rapidement à cause de la grande quantité deses graines pourvues d’une longue conservation. Elle appartient aux « mauvaisesherbes » qui pullulent dans les champs cultivés, mais on la rencontre aussi sur lesremblais des chemins de fer.

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Description sommaire. — Plante annuelle à tige droite, rameuse, hérissée de poils,mesurant trente à soixante centimètres de hauteur. Feuilles alternes, à lobes aigus, àdents terminées par une soie. Fleurs (mai à juillet) grandes, terminales, d’un rougeplus ou moins foncé, tachées de noir à la base de leurs pétales et portées sur de longspédoncules. Fruit (capsule), ovale ou subglobuleux, très glabre, Graines réniformes,très nombreuses. ’route la plante exhale une odeur vireuse, désagréable ; elle peutlaisser suinter un suc blanc, laiteux, âcre et narcotique.

Culture. — Elle ne présente aucune difficulté, car presque tous les terrainsconviennent à cette plante ; elle préfère, cependant, les sols légers, argilo-calcaires etsecs. Dans certaines régions, on cultive en grand le coquelicot pour la pharmacie,mais comme la cueillette de ses fleurs demande une abondante main-d’œuvre, il estprudent de n’entreprendre cette culture que là où l’on peut la trouver suffisante et,relativement, à bon marché.

Multiplication. — Elle a lieu par semis à la volée, au printemps dans le Nord ou àl’automne dans le Midi. Comme les graines sont tres fines, on les mélangeauparavant avec vingt fois leur poids de sable sec. Il suffit d’en avoir quelques piedsdans le Jardin familial, car ils se reproduiront d’eux-mêmes très facilement.Récolte, séchage et rendement. — La récolte des pétales se poursuit pendant toutela floraison, c’est-à-dire à mesure qu’ils s’épanouissent. Leur séchage très délicatexige beaucoup de soin et doit être mené rapide. ment, afin qu’ils ne noircissent ni nese décolorent. On les étend en couche très mince, sans les froisser, sur des claiesrecouvertes d’une toile, qu’on place dans un grenier bien aéré et chaud. On les remuepourtant de temps à autre pour empêcher leur agglomération. Lorsque le temps esthumide, il faut activer la dessiccation par la chaleur artificielle modérée, en plaçantles fleurs au-dessus d’un four. Leur couleur rouge vif doit passer au rouge foncé oulie de vin. Le rendement moyen de io kilos de pétales frais est de 840 grammes depétales secs.

Conservation. — La dessiccation terminée, on crible les fleurs pour en séparer lesétamines et les œufs d’insectes, puis on les renferme encore toutes chaudes dans dessacs où on les tasse fortement, et l’on conserve ces derniers dans un endroit sec et àl’abri de la lumière.

Composition chimique. — Les pétales contiennent : albumine, gomme, amidon,résine, rhœadinine, acides rhœadinique et erratique. La rhœadinine est de naturealcaloïdique et les acides rhœadinique et erratique sont combinés à la chaux ; ce sontces acides qui donneraient aux pétales leur couleur rouge ( Dr A. Hénaud). Lechimiste Hesse a trouvé dans toutes les parties de la plante un alcaloïde qu’il aappelé « rhœadine » différant totalement de la morphine.Propriétés thérapeutiques. — Vantées autrefois par les médecins de la Renaissancecontre la pleurésie, les fleurs sont employées aujourd’hui comme calmantes,

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émollientes, sudorifiques dans les affections pulmonaires, toux, bronchites, etc.Toutes les parties de la plante sont vénéneuses et peuvent produire des accidentschez les animaux qui les consomment vertes.

Préparations pharmaceutiques. — L’infusion est prescrite par le Codex de 1908 à ladose de 5 p. 1000, mais elle l’a été aussi à 10 p. 1000. Teinture 1 à 2 gr. ; sirop 10 à30 gr. Les fleurs entrent dans la composition des espèces pectorales, à parties égales,avec Bouillon blanc, guimauve, mauve, pied de chat, tussilage et violette. Lorsqu’onpensait que les fleurs renfermaient de la morphine, on déconseillait leur emploi pourles enfants, comme étant un narcotique. Le docteur H. Leclerc, qui a bien étudiél’action thérapeutique du coquelicot, a écrit : « qu’il n’est pas illogique de leprescrire, pour calmer la toux ou dompter l’insomnie, aux enfants, aux vieillards,aux sujets délicats, chez qui les narcotiques peuvent provoquer des phénomènesd’anaphylaxie. » Il leur conseillerait « l’infusion (une pincée de fleurs sèches pourune tasse d’eau bouillante), soit le sirop 20 à 30 gr. aux enfants, 20 à 60 gr. auxadultes).

Observations commerciales. — La vente des fleurs sèches de coquelicot est forte,d’un prix assez élevé mais variable. L’herboristerie les a payées 2 fr. 50 à 3 fr. lekilo, puis 4 fr. à 4 fr. 50 et même jusqu’à 8 fr. et 8 fr. 50, en 1924.

Coriandre

La Coriandre (Coriandrum sativum L.), Ombellifères, tire son nom du grec « Koris »punaise, à cause de l’odeur forte et fétide de toutes les parties vertes de la plante, quirappellent celle de cet insecte, surtout quand on les froisse entre les doigts.Habitat. — Elle est originaire des contrées méridionales de l’Europe. Indigène enGrèce, Italie, Espagne, elle y est cultivée ainsi que chez nous où on la trouve parfoisspontanée.

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Description sommaire. — Plante annuelle, herbacée, d’une odeur désagréable àl’état vert, mais devenant agréable par la dessiccation. Tige dressée de 6o à 65 cm dehauteur, lisse, rameuse au sommet. Feuilles inférieures à segments larges, dentées, lessupérieures découpées en lanières fines. Fleurs (juin à août) petites, blanches ourougeâtres, en ombelles terminales. Fruits (diachaines) globuleux, jaunâtres,possédant à l’état sec une saveur chaude, aromatique et une odeur suave et agréable.(Le litre pèse en moyenne 320 gr. et 1 gr. en contient environ 90. De Vilmorin.)Culture. — La Coriandre était cultivée surtout en Touraine où ses graines passaientpour les meilleures de toutes, dans les Bouches-du-Rhône, dans les environs de Paris,notamment dans la plaine Saint-Denis.

Multiplication. — Elle a lieu par semis. La plante demande une terre fraîche,légère, faiblement calcaire, une exposition assez ensoleillée et aérée, bien fumée, àl’exclusion des sols argileux et froids.

Semis. — On peut les faire à deux époques : au printemps, en mars-avril et en été,au mois d’août. On estime que cette dernière époque est préférable. Selon MM. A.Goris et J. Demilly, « dans les semis faits à cette date, les jeunes plants passentl’hiver et, l’année suivante, les plantes sont robustes et peuvent atteindre 5o à 6o cmde hauteur. Elles mûrissent leurs fruits plus tôt. » Au mois de mars, les plantes sedéveloppent bien, mais deviennent moins hautes qu’avec le semis du mois d’août. Lesemis est fait à la volée ou mieux en lignes distantes de 6o cm. Dans le Jardinfamilial, on trace des rayons profonds de 2 cm en se servant d’un râteau ou d’untraçoir mécanique pour la culture en grand. La levée a lieu en 2 semaines environ.Récolte. — On l’entreprend, selon l’époque primitive du semis, de juin à septembre,mais généralement à la fin d’août. On coupe les ombelles avec des ciseaux, au fur età mesure de leur maturité qui s’annonce par la teinte jaunâtre des fruits. On yprocède le matin, à la rosée, pour éviter leur égrenage quand elles sont très mûres.Lorsque leur exposition au soleil sur une toile les a rendues bien sèches, on bat lesombelles avec un fléau léger, on vanne les graines et on les remet au soleil ; puis,après séchage, on les conserve à l’abri de l’humidité. En France, le rendement, parhectare, est d’un millier de kilogrammes. L’hectolitre pèse 3o à 32 kg. (A. R. et D.B.).

Composition chimique. — Les semences renferment une essence constituée par 80pour 100 de coriandrol, ou de linalol (A. R. et D. B.).

Propriétés thérapeutiques. — Les semences ont joui d’une très mauvaise réputationchez les Anciens. Les recherches de Cadéac et de Meunier ont montré que ce n’étaitpas absolument à tort, à cause de l’action de leur essence analogue à celle de l’alcooléthylique : elle excite pour déprimer ensuite (Dr H. L.). Elles sont considéréesaujourd’hui comme carminatives, stomachiques, etc., ainsi que le sont les autresombellifères aromatiques, et elles sont usitées surtout dans les digestions difficiles.Préparations pharmaceutiques. — Infusion 10 à 30 gr. pour 1000 ; eau distillée 30

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à 100 gr. ; poudre 1 à 4 gr. ; teinture 2 à 4 gr. ; alcoolat 4 à 20 gr. Elles font partiedes espèces carminatives ou quatre semences chaudes de l’ancien Codex. Elles serventpour fabriquer des liqueurs spéciales, absinthe, anisette, chartreuse, eau de mélisse,kummel, etc. La médecine vétérinaire les emploie beaucoup dans certaines maladiesdes bovidés.

Observations commerciales. — L’importation des semences de l’étranger a faitrecommander officiellement sa culture chez nous. Le prix des 100 kg, pour laliquoristerie, a varié de 35 à 60 fr., et celui du détail en herboristerie de 1 fr. 50 à 2fr. le kilogramme.

Cressonofficinal

Appelée aussi souvent Cresson de fontaine que Cresson officinal (Nasturtiumofficinale R. Br.(, cette crucifère a encore pour synonymes Cresson d’eau, Cressonaquatique, Santé du corps.

Habitat. — Il croît spontanément dans les eaux courantes de toute l’Europe et ilest très répandu chez nous.

Description sommaire. — Plante vivace, aquatique, d’un vert luisant, à tigecouchée, rameuse, radicante. Feuilles alternes, épaisses, pennatiséquées, à pétioleauriculé, embrassant. Fleurs (juin à septembre) blanches, en grappes terminales ouoppositifoliées. Fruit (silique) bosselé, étalé ou réfléchi, plus long que le pédicelle.Graines fines, brunes, arrondies. (i gr. en contient environ 4000 et le litre pèse 580

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gr. Leur durée germinative est de 5 années. De Vilmorin).

Culture. — Etant donnée la grande consommation que l’on fait partout du cresson,il est cultivé aux environs des grandes villes, mais plus spécialement dans la grandebanlieue parisienne et dans quelques localités de Picardie. La culture en a produit,d’ailleurs, plusieurs variétés qu’on trouve dans la plupart des jardins-maraîchers.

Multiplication. — Elle se fait de deux façons : par semis ou par boutures enracinéesIl importe, dans les deux cas, pour obtenir une production abondante et régulière,que l’eau soit fraîche, vive et courante, et de plus un emplacement approprié nommécressonnière. Je ne puis m’étendre ici sur l’établissement de ces cultures quidemandent beaucoup de soins pour constituer un bon rapport, mais l’on trouveratous les renseignements désirables dans le Dictionnaire d’horticulture et dejardinage, de Nicholson, et dans Culture des plantes médicinales, par A. Rolet et D.Bouret. Au point de vue historique, l’Histoire des légumes, de mon érudit ami,M. Gibault, renferme des documents d’un puissant intérêt. Dans le Jardin familial,il est indiqué de cultiver le cresson de fontaine amélioré à larges feuilles qui est trèsen faveur sur le marché de Paris. On lui réservera la partie la plus humide etombragée qu’on arrosera tous les jours, ou bien des baquets à moitié remplis de terreet recouverts d’eau qu’on renouvellera de temps en temps pour l’empêcher de secorrompre. (D’après le Dr Héraud, l’eau ferrugineuse est très favorable au cresson.)Si la propriété renferme ruisseau ou fossé, il va de soi qu’on l’utilisera dans ce but.Entre les deux genres de multiplication, les boutures racinées sont à préférer ; oneffectue leur plantation en mars ou plus souvent en aoùt, en en mettant 3 ou 4 partrou en lignes espacées de 8 à 10 cm. Les principaux soins consistent à éviterl’envahissement par les plantes aquatiques, notamment la lentille d’eau et lesattaques des altises, qui percent les feuilles et les tiges en submergeanttemporairement les plantes.

Récolte. — Elle a lieu, généralement, quand le cresson atteint 16 à 20 cm de long,mais surtout de mai à septembre quand il est destiné à la pharmacie ; on attend qu’ilsoit en fleurs, parce qu’il est alors plus actif. Pour l’herboristerie, le séchage desfeuilles doit être rapide, dans un local aéré, mais non au soleil. Il leur fait perdreleurs propriétés.

Composition chimique. — Le cresson contient une huile essentielle sulfo-azotée, unextrait amer, de l’iode, du fer, des phosphates (et une huile brune constituée par dusénevol. Schmidt).

Propriétés thérapeutiques. — Les Anciens connaissaient l’action stimulante ducresson et le vantaient dans le traitement du scorbut, de la phtisie et des catarrheschroniques des bronches. Il en est encore de même aujourd’hui, mais l’on y ajoute despropriétés apéritives, diurétiques, rafraîchissantes, toniques, etc.

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Préparations pharmaceutiques. — À l'intérieur, on n’emploie guère que le suc à ladose de 6o à 150 gr., car la cuisson lui fait perdre ses propriétés. 11 entre dans lapréparation du sirop antiscorbutique et du jus d’herbes. À l'extérieur, on en fait descataplasmes contre les ulcères scorbutiques et scrofuleux. Toutefois, son plus grandemploi est comme condiment, soit associé aux viandes rôties, soit seul en salade, caril est d’une digestion facile. C’est un aliment hygiénique très populaire sous le nompittoresque de « Santé du corps ».

Observations commerciales. — Le commerce du cresson à l’état frais a une trèsgrande importance et, étant donné la consommation ménagère qui en est faite danstoutes les classes de la société, il doit se chiffrer annuellement par plusieurs millionsde francs. Il en est tout autrement de la vente à l’état sec, car elle est tout au plusmoyenne. L’herboristerie a payé la plante sèche et mondée, c’est-à-dire sans racines,1 fr. 20 à 1 fr. 80 le kilogramme.

Douce-amère

La Douce-amère (Solanum dulcamara L.) Solanacées, est encore appelée Morellegrimpante, Vigne grimpante, Vigne sauvage, Herbe à la fièvre, Loque, etc. Elle doitson nom à sa saveur d’abord amère, ensuite douceâtre lorsqu’on la mâche.Habitat. — La plante est commune dans les haies, les bois, les lieux frais etombragés, au bord des ruisseaux.

Description sommaire. — Sous arbrisseau, à tiges grêles, grimpantes, de 1 à 3 m. delongueur. Feuilles entières et cordiformes à la base, les supérieures divisées en troislobes dont un médian plus grand. Fleurs de juin à septembre, violettes, parfois

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blanches avec une tache jaune ou verte à la base de chaque pétale. Fruit ou haied’un beau rouge. Toute la plante exhale par le frottement une odeur désagréable.Culture. — Dans le Jardin familial sa place est dans les haies de clôture à moinsqu’on ne l’utilise pour revêtir et décorer une tonnelle ou des treillages de ses souplesrameaux et de ses jolies grappes de fruits au ton de corail.

Multiplication. — On compte quatre moyens : 1° par éclats de pied ; 2° parmarcottes ; 3° par boutures ; 4° par graines.1° Par éclats de pied. — On plante, à la distance de in. à 1 m. 50, ceux qu’on aenlevés dans les haies à l’automne ;2° Par marcottes. — On incise des fragments sarmenteux, on les enfonce un peudans un sol frais en le tassant avec soin autour d’eux et, quand ils sont bienenracinés, ou les enlève pour les planter à demeure ;3° Par boutures. — On prend des rameaux possédant un oeil à la base et l’autre ausommet, on les enfonce dans le sol comme précédemment en ne laissant au dehors quel’oeil supérieur, et on les traite de même par la suite ;4° Par graines. — On les sème en mars-avril dans de la terre bien préparée, meubleet fraîche à une profondeur de 2 cm en mettant entre elles un espace de Io cm. On leslaisse en pépinière jusqu’à ce que les plants soient assez forts ; alors on les enlèvepour les repiquer en les espaçant de 60 cm à 1 mètre.Récolte et séchage. — On y procède au printemps ou à l’automne sur des tiges âgéesd’un ou de deux ans que l’on coupe soit en tronçons de 50 cm liés en bottes, soit enpetits fragments de 3 à 4 cm qui sont fendus longitudinalement quand les tiges sonttrop grosses . Le séchage est facile et il peut avoir lieu au soleil.Composition chimique. — Les tiges renferment de la solanine, dulcamarine etdulcamarétine (Geissler) ou, d’après Masson, un saponoïde acide glucosidique,l’acide dulcamarique, un saponoïde non glucosidique, l’acide dulcamarétique et unglucoside alcalin, la solacéine.

Propriétés thérapeutiques. — Les premières connaissances paraissent remonter àBoerhaave qui lui a reconnu des propriétés diaphorétiques, puis elle a étérecommandée par Linné dans la syphilis et le rhumatisme et enfin par plusieursmédecins comme dépurative. On lui accorde aujourd’hui des propriétés stimulantes,dépuratives, sudorifiques et diurétiques, mais on la classe plutôt parmi lesmédicaments sudorifiques et dépuratifs. On a proposé de la substituer à lasalsepareille. Sa décoction est toujours populaire contre certaines maladies de la peauet contre les rhumatismes.Ses baies ont été considérées comme purgatives, mais comme leur action n’est pasencore bien définie, surtout quand elles sont vertes, il est prudent de s’en abstenir etd’empêcher les enfants d’en manger.

Préparations pharmaceutiques. — La tige est aujourd’hui la seule partie usitée. LeCodex de 1908 indique une infusion de 20 gr. de tiges coupées dans un litre d’eaubouillante durant 2 heures. On a prescrit une décoction de 30gr.par litre, l’extrait

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aqueux à la dose de 2 à 4 gr. et le sirop à la dose de 20 à I00 gr. Le D’ Leclercrecommande la formule suivante : douce-amère 100 gr., eau bouillante 1500 gr.Faire infuser 6 heures, passer avec expression, décanter la liqueur déposée, y ajouter180 gr. de sucre pour 100 gr. de colature et passer après une ébullition rapide. De 50à 100 gr. par jour. Les feuilles, -qui sont émollientes, ont été employées autrefois encataplasmes.

Observations commerciales. — La douce amère donne lieu à une demandeimportante dans le commerce de l’herboristerie. Les tiges coupées en petits fragmentset bien séchées valent, environ, 0fr.60, 0fr. 75 et 1 fr. le kilogramme, suivant lademande

Fenouil

Le Fenouil officinal (Foeniculum officinale All.), Ombellifères, est encore appeléFenouil doux (Foeniculum dulce D. C.) Aneth doux, Aneth fenouil, etc.Habitat. — Il croît spontanément dans les vignes, les lieux secs, les terrainspierreux dans le Midi de la France, et plus spécialement en Provence.

Description sommaire. — Plante bisannuelle pouvant atteindre I à 2 m., d’un vertsombre, exhalant une odeur agréable. Racine épaisse, fusiforme et blanchâtre. Tigedroite, glabre, rameuse. Feuilles alternes, filamenteuses à pétiole membraneuxembrassant la tige. Fleurs jaunes, petites en ombelles, s’épanouissant en juillet etaoût. Fruit formé de deux achaines d’un brun verdâtre appliqués l’un contre l’autreet marqués chacun de cinq côtes.

Culture. — Le fenouil est cultivé en France dans plusieurs départements parmilesquels la Feuille d’Informations du Ministère de l’Agriculture mentionne qu’il aoccupé dans le Gard jusqu’à 300 hectares donnant 300 000 à 350 000 kg de graines,et, dans l’Ardèche, 250 hectares, etc. Bien qu’il s’accommode d’un grand nombre deterrains, il préfère un sol léger, calcaire ou silico-calcaire, assez riche, perméable,frais sans excès d’humidité, bien préparé, bien exposé et fumé avec du

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superphosphate et du sulfate de potasse.L’acide phosphorique favorise la formationdes graines.

Multiplication. — On l’effectue par semis, mais quoique la durée germinative desgraines soit de quatre années environ, il est prudent de les choisir, autant quepossible, dans celles de la dernière récolte. Un gramme de graines en contient 125,environ, et le litre pèse 235 grammes.On sème les graines dans des sillons peuprofonds, dirigés du nord au sud. Avec une distance de 0m80 à 1 m., on emploie 10kg de graines par hectare (Farcy) ; pour 0m 70 à 1 m. et 15 à 20 cm sur la ligne, 5 à6 kg (Zaccharrewicz). On met, aussi, à 40 à 50 cm en tout sens. Dans le Jardinfamilial, on peut semer en rayons distincts d’environ 0m40 à 0m45, principalement àl’automne, pour produire au printemps et pendant le cours de l’été.On éclaircit lesplants après la levée et on donne des arrosages copieux et fréquents.Dans la cultureen grand l’ensemble des frais est estimé entre 250 et 300 francs par hectare ; lebénéfice varie selon le terrain et la récolte entre 200 et 600 francs.

Récolte et rendement. — Sous le climat de Paris, la récolte des semences se faitsuccessivement de la mi-septembre à la première quinzaine d’octobre, tandis que,dans le midi de la France, elle a lieu fin juillet et en août.On attend que les grainesaient pris une coloration jaune clair, on coupe alors les tiges avec une faucille, (unsécateur suffit dans le Jardin familial) et on les met en javelles pour que les grainesmûrissent en brunissant.Lorsque les ombelles sont sèches, on les étale au soleil surdes toiles ou des claies et on les bat avec un léger fléau. Les graines obtenues sontpassées ensuite au tarare ou au van. On peut en récolter, par are, 10 à 20 kg.L’hectolitre pèse 36 à 40 kilogrammes. Quand on cultive le fenouil pour ses racines,il est nécessaire de les arracher la première année, car les racines devenues ligneusesdans la seconde année ne pourraient être employées. L’arrachage se fait en automneet en hiver.

Composition chimique. — Les semences renferment surtout une huile essentielle serapprochant beaucoup de l’essence d’anis. Elle contient de l’anéthol, de la fénone, del’estragol et des terpènes. La plante et notamment les racines sont riches en selsalcalins à acides organiques.

Propriétés thérapeutiques. — Les parties usitées sont surtout les semences et lesracines, les feuilles ne le sont, plus aujourd’hui. Les Anciens connaissaient lespropriétés du fenouil, et Dioscoride considérait la racine comme un bon diurétique.Les semences sont tenues, comme celles de la plupart des ombellifères, pourapéritives, carminatives, stomachiques, diurétiques, etc. Elles passent pouraugmenter le lait des nourrices, et « honni soit qui mal y pense » du rapprochement,on les donne en décoction pour exciter la sécrétion lactée des bêtes laitières.Préparations pharmaceutiques. — Infusion des semences, 10 pour 1000 ; infusiondes racines, 30 pour 1000 ; alcoolat, 4 à 20 gr. Poudre 1 à 5 gr.Les semences fontpartie des quatre semences chaudes ; elles entrent dans la composition de plusieurs

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liqueurs : anisette, absinthe, chartreuse. Les racines servent, avec celles d’asperge,d’ache, de petit houx et de persil, à préparer le sirop des cinq racines. La médecinevétérinaire les emploie beaucoup contre la météorisation des ruminants.Dans le midide la France, le fenouil, et particulièrement le fenouil doux, est consommé cru oucuit. Dans ce dernier état sa saveur rappelle un peu celle du céleri avec un goût sucréet un parfum plus délicat.

Observations commerciales. — La culture du fenouil est à recommander, car nous enimportons toujours une quantité notable : Marseille a reçu 1 500 000 kg de graines,provenant en partie de Salonique, Malte, Smyrne et les Indes. Par petite quantité,l’herboristerie a payé la plante entière 1 fr. à 1 fr. 20, les racines coupées 2 fr. à 2 fr.20 et les semences 2 fr. 80 à 3 fr. le kilogramme. En gros, le prix du quintal a oscilléentre 40 et 55 francs.

Fumeterre

Cette élégante petite plante tire son nom « Fumeterre » (Fumaria officinalis L.)Fumariacées, de « fumas terrée », fumée de terre, ce qui est, d’après Olivier de Serres,une allusion soit à l’amertume de la plante, soit à l’odeur de fumée qu’elle répand« fumaria », parce que son jus fait pleurer les yeux comme la fumée. Elle a poursynonymes : Fiel de terre, Fumée de terre, Pisse-sang, etc. Il existe plusieurs autresespèces de fumeterres qu’on peut employer également.

Habitat. — Venue de l’Orient, la fumeterre est très commune dans les champs, lesjardins, les vignes, les décombres et même sur les montagnes où elle peut s’éleverjusqu’à 17oo m. d’altitude.

Description sommaire. — Plante annuelle de 0m. 20 à 0m. 80 dont l’odeur estherbacée quand on la froisse entre les doigts et la saveur amère. Tige grêle, rameuse,anguleuse ou carrée, souvent couchée ou s’accrochant parfois par ses pétioles

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recourbés. Feuilles alternes, d’un vert glauque ou vert cendré, très divisées. Fleurss’épanouissant de mai à fin septembre, d’un blanc rougeâtre, tachetées de pourpre ausommet, disposées en longues grappes terminales lâches d’un joli aspect. Fruit petitet globuleux renfermant une seule graine.

Culture. — Dans le cas où le terrain du Jardin familial donnerait naissancespontanément à un grand nombre de ces plantes qui se ressèment très facilementd’elles-mêmes, il n’y aurait pas lieu de la cultiver séparément. Autrement, onrecourrait au semis dans un sol léger et rendu bien meuble. Le semis des graines sefait à la volée au printemps.

Récolte. — On y procède vers le mois de juin, parce que c’est à ce moment que lafumeterre a beaucoup de -feuilles et peu de fleurs. On ramasse la plante entière donton fait parfois des bouquets ou des petits paquets. Il importe de la dessécher trèsrapidement et à l’ombre, soit en couches aussi minces que possible sur des claies, soit,de préférence, sur des fils de fer ou des ficelles tendues en plein air, soit enfin dansun local très aéré. Dix kilogrammes de plante fraiche donnent 1 kg 700 de plantesèche.

Composition chimique. — La fumeterre contient dans toutes ses parties unalcaloïde, la fumarine et de l’acide fumarique qui donne des fumarates de chaux, desoude et de potasse.

Propriétés thérapeutiques. — Cette plante est reconnue depuis longtemps commetonique, reconstituante, dépurative, apéritive. On l’emploie contre les maladies depeau chroniques, la scrofule, la jaunisse et certaines maladies de l’estomac.Préparations pharmaceutiques. — Infusion 20 pour 000 ; extrait 2 à 10 gr. ; sirop20 à 100 gr. ; suc dépuré 50 à 200 gr. Elle entre, à parties égales, dans lacomposition du suc d’herbes qui est préparé avec des feuilles de chicorée, de cressonet de laitue. Voici comment on prépare ce suc d’herbes qui jouit encore d’une certainepopularité dans plusieurs régions. On réunit une quantité suffisante de feuilles deces quatre plantes, on les contuse dans un mortier en marbre, on exprime la pulpe àla presse et ou filtre le jus au papier. La dose habituelle de ce suc dépuré est de 120gr. qu’on peut prendre le matin à jeun en une fois. La fumarine a été prescrite à ladose de 20 à 30 centigrammes comme stimulant et apéritif.

Observations commerciales. — La vente de la fumeterre est assez forte.L’herboristerie a payé le kilogramme de plante sèche 0fr. 75 à 1 fr. 20

Gentiane Parmi les nombreuses espèces de gentianes qui croissent en France, la Gentiane jaune(Gentiana lutea L.) Gentianacées, appelée très souvent encore Grande Gentiane, estla plus employée en thérapeutique. Nombre d’auteurs font venir son nom de Gentius,roi d’Illyrie, qui vivait 172 ans avant Jésus-Christ, tandis que, d’après l’éruditthérapeute qu’est le D’ H. Leclerc, il faut l’attribuer à un médecin de l’antiquité

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porteur de ce vocable.

Habitat. — La Gentiane croît dans nos principales contrées montagneuses : lesAlpes, les Vosges, les Pyrénées, les Cévennes, l’Auvergne, la Bourgogne, le Queyras,le Briançonnais et toute la région comprise entre 800 et 2500 m. d’altitude.

Description sommaire. — Plante vivace, à tige haute de 0m. 80 à 1 m. 50, dressée,creuse en dedans. Feuilles inférieures, larges, elliptiques, les supérieures sessiles,opposées, embrassantes. Fleurs s’épanouissant en juillet, d’un beau jaune d’or,disposées en verticilles successifs au sommet de la tige. Racine longue, grosse parfoiscomme l’avant-bras, d’un brun noirâtre à l’extérieur, d’un jaune rougeâtre àl’intérieur, d’une odeur forte et d’une saveur très amère. Graines nombreuses,arrondies, très minces.

Culture. — Comme on la trouve en abondance dans les contrées montagneusesprécitées, on ne la cultive que dans certaines régions qui ne le sont pas. On peu lamultiplier par le semis ou par la division des souches, au printemps, dans une terrefranche, profonde, un peu humifère ou tourbeuse, plutôt humide et à mi-ombre. Lalevée des graines est capricieuse ; elle se fait souvent attendre très longtemps (A. R.et D. B.).

Récolte, séchage et rendement. — D’accord sur le fait que les racines n’atteignent lemaximum de leurs vertus qu’à la fin de la deuxième année de végétation, certainsauteurs diffèrent sur le meilleur moment de leur récolte. Tandis que les unsconseillent de les arracher à ce moment-là, d’autres suggèrent de ne le faire que versla cinquième année, alors qu’elles ont atteint au moins la grosseur du poignet. Danstous les cas, l’arrachage, qui est assez difficile, doit avoir lieu, de préférence, à la finde l’automne, après la chute des feuilles, ou même jusqu’en février, si l’état duterrain le permet. On attend parfois jusqu’au printemps. Les racines arrachées, on les

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nettoie sans les laver, on les laisse entières ou on les coupe en petits morceaux de 2cm, et on les fait sécher rapidement en plein air sous des hangars ou dans le séchoir.On les conserve, selon la quantité, dans des caisses ou des bocaux pouvant être trèsbien fermés ou bouchés. Les racines perdent par la dessiccation les deux tiers environde leur poids.

Composition chimique. — La racine de gentiane est la seule partie usitée. Ellerenferme comme principales substances trois glucosides : la gentiopicrine, lagentiamarine et la gentisine, deux ferments, l’un hydratant, l’autre oxydant, unematière colorante, la gentisine, une essence et des traces d’un tanin, l’acidegentiotannique. La gentiopicrine se dédouble, au contact des acides, en glucose etgentiogénin. Bourquelot et Hérissey ont isolé, de la racine fraîche, du sucre de canneet un autre sucre tout à fait spécial : la gentianose.

Propriétés thérapeutiques. — Cette racine est très appréciée depuis longtemps pourses remarquables propriétés toniques, apéritives, stomachiques et fébrifuges. On laconsidère comme la reine des amers indigènes et le meilleur succédané du quinquina,d’où le nom de « quinquina indigène » qu’on lui a donné parfois. Des recherchesrécentes, poursuivies sur un des points les plus impaludés de la Corse, ont conduitM. Tanret à reconnaître à la plante, et tout spécialement à la gentiopicrine, despropriétés antipériodiques très nettes, capables de rendre des services quand laquinine n’a pas donné tout ce qu’on en attendait : le même auteur a constaté que lagentiopicrine tuait rapidement les infusoires, ce qui expliquerait son influence sur leshématozoaires du paludisme (Dr H. L.).

Préparations pharmaceutiques. — Extrait o gr. 20 à 2 gr. ; infusion 5 pour 100 ;macération 20 à 30 gr. pour 1000 ; poudre 0 gr. 50 à 5 gr. ; sirop 10 à 100 gr. ; vin60 à 120 gr. La racine fraîche et surtout stabilisée est plus active que la racine sèche.Elle entre dans la composition de l’élixir de Peyrilhe. On fait avec elle des pois àcautères et des drains. La médecine vétérinaire en emploie beaucoup pour remplaceréconomiquement le quinquina. La gentiane constitue la base essentielle de la plupartdes apéritifs commerciaux : bitters et vermouths. On fabrique avec elle une eau-de-vie spéciale dans l’Est de la France, Côte d’Or, Jura et Vosges, en mettant fermenteravec de l’eau portée entre 15° et 18° des fragments de racines qui contiennent unequantité notable de sucres.

Observations commerciales. — Contrairement à ce qui se produit avec nombre deplantes médicinales, nous \ exportons des racines de gentiane.-Avant la guerre, onestimait que 150 000 balles de 100 kg, valant de 34 à 40 francs le quintal, étaientexportées chaque année par le port de Bordeaux ou par celui de Marseille àdestination de l’Amérique du Nord. L’herboristerie payait alors pour ce poids 35 à45 francs. Depuis, le prix en gros s’est élevé entre 50 et 100 francs le quintal, et audétail le kg a été coté 1 fr. 25 à r fr. 40 pour les racines entières et 1 fr. 60 à r fr. 8o

pour les racines coupées.

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Guimauve

La Guimauve officinale (Althœa officinalis. L.) Malvacées tire son nom du mot grec« althaia » de « althein », guérir. On l’appelle parfois Mauve blanche. Il en existed’autres espèces qui croissent dans les champs.Habitat. — Elle est commune dans les marais et lieux humides des côtes de laMéditerranée et de l’Océan. Elle est souvent cultivée dans les jardins depuislongtemps et aujourd’hui dans quelques départements.Description sommaire. — Plante vivace atteignant selon les terrains 0m.60 à I m.50 de hauteur ; tige et feuilles tomenteuses, celles-ci grandes, épaisses, arrondies, lesinférieures à 5 lobes, les supérieures à 3 seulement. Fleurs blanches, parfois avec uneteinte rosée. Racine longue, blanche en dedans et recouverte d’un épiderme jaune,charnue et branchue.

Culture. — Peu difficile sur la nature des sols, la guimauve préfère cependant desterres profondes et fraîches, pas trop humides, mais elle se développe mal en terrainssecs. Pour avoir une bonne récolte, il est nécessaire de bien ameublir et fumer le sol.Multiplication. — Elle se fait de deux façons : 1° par semis ; 2° par éclats desouches.

I° Par semis. — C’est à eux qu’on recourt quand on veut entreprendre uneplantation de début et qu’on ne peut disposer de souches. Ils ont lieu au printempsou à l’automne avec des graines d’un an ou deux, Dans le premier cas, de mars àmai, en pépinière. Les graines germent assez vite et l’on peut mettre les petits plantsà demeure peu de temps après en les espaçant de 0m.40 dans le rang avec unedistance de 0m.80 entre les rangs. On sème aussi en juillet-août, ou encore àl’automne, mais plutôt alors sous châssis.

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2° Par éclats de souches. — On ne peut le faire que lorsque la plantation est âgée dedeux et plutôt de trois ans, au moment de la récolte des racines en octobre. On sépareles souches en plusieurs éclats pourvus à leur partie supérieure d’un ou deuxbourgeons et on les plante aux distances indiquées ci-dessus. Si l’on tient à lesconserver pendant l’hiver, on les stratifie dans du sable et on les place dans unendroit sain et aéré. Il faut les surveiller parce qu’ils peuvent s’altérer ; on lesrepique au printemps. (A. R. et D. B.).

Étant donné la multiplicité des emplois de la guimauve, c’est elle qui doit occuper laplus grande place dans le Jardin familial.Énnemis. — Cette plante est souvent attaquée par un champignon, le Pucciniamalvacearum, qui se développe sur les feuilles et nuit beaucoup à leur végétation.MM. A. Goris et J. Demilly recommandent de ne pas planter « trop serré » pouréviter la contagion.Les champignons du Pourridié peuvent, d’après MM. A. Rollet et D. Bouret, altérerses racines • d’autre part, M. Diffloth a indiqué en i 9o I que, dans le Nord, lesfeuilles sont attaquées par des pucerons et par une altise et il a recommandé de lescombattre avec l’émulsion pétrole-savon-nicotine.

Récolte. —Feuilles. — Elle a lieu aux mois de juin-juillet avant l’épanouissement des fleurs.Fleurs. —- Commencée à partir du mois de juillet, la récolte peut durer sansinterruption jusqu’à la mi-septembre.Racines. — C’est surtout pour ses racines que la guimauve est cultivée. Il fautattendre au moins la deuxième année pour en faire l’arrachage, mais la troisième estpréférable. On doit y apporter assez de soin pour ne pas en laisser des fragmentsdans la terre.

Production. — Dans l’arrondissement de Valenciennes où sa culture comprend 170à 180 hectares, on a cité un rendement de 1 200 kg de racines et de 400 kg de fleursà l’hectare, ce qui représente un produit brut de 1400 francs environ, et un débourséde 400 francs pour les frais. D’autre part, M. Blin a évalué rendement et fraiscomme suit : racines 900 kg, fleurs 450 kg ayant donné un produit brut de 1719francs pour des frais s’élevant à 376 francs.

Séchage. — On fait sécher les feuilles et les fleurs en les étalant sur des claies encouche mince dans un endroit bien aéré ; on les remue souvent, afin que l’air soit trèsrenouvelé surtout pour les feuilles qui sont épaisses et mucilagineuses. Pour lesracines brutes, on peut ou les laver avant de les mettre sécher, ou bien les étaler àl’air sur le sol jusqu’à ce que la terre desséchée puisse être enlevée avec une brosse dechiendent. Pendant ce temps, on les remue fréquemment avec un râteau. A cause dumucilage qu’elles contiennent le séchage à l’air chaud est préférable quand on peut lepratiquer, afin qu’il soit aussi rapide que possible. Pour cette dernière raison, après

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avoir enlevé leur épiderme jaunâtre, on fend les plus grosses ou bien on les coupe enpetits fragments de quelques centimètres. Dans la culture en grand dans le Nord, onemploie des tourailles ayant quelque ressemblance avec celles des malteries ou desproducteurs de chicorée (A. R. et D. B.).Pour la consommation familiale, le procédé le plus simple est de former plusieurspetits faisceaux des racines entières très propres et de les suspendre dans un fourquelque temps après la sortie du pain, afin d’éviter un excès de chaleur qui lescuirait. Il sera souvent utile de mettre de côté les racines les plus droites et les plusgrosses pour servir de hochets aux enfants lors du travail de la dentition, Dans lesfermes où l’on dispose presque toujours d’un coupe-racines, on coupera les racinesfraîches en petits morceaux après les avoir bien nettoyées et décortiquées, de manièreque la dessiccation marche rapidement.

Conservation. — Selon la quantité récoltée, on conserve les racines sèches dans destonneaux ou des caisses, les fleurs dans des ,estagnons ou des boîtes en métal ou enbois fermant hermétiquement, en ayant soin de maintenir les récipients dans unendroit très sec et aéré. Si l’on désire conserver une petite quantité de racines à l’étatfrais, il n’y a qu’à les stratifier en couches minces dans du sable sec, mais il fautavoir soin de surveiller le tas de temps en temps pour enlever celles qui pourraientmoisir ou pourrir.

Rendement. — On estime, au regard de la dessiccation, que 100 kg de racinesfraîches donnent 40 kg de racines sèches et 100 kg de fleurs fraîches 70 kg de fleurssèches.

Composition chimique. — La racine contient une quantité de mucilage beaucoupplus grande que les autres parties de la plante, et, en outre, de l’amidon, matièrecolorante jaune, albumine, asparagine, sucre, huile fixe (Dr A. H.). Laroque y atrouvé, de plus, la bétaïne et une matière azotée jouant le rôle d’un fermentpuissant.

Propriétés thérapeutiques. — Les Anciens faisaient le plus grand cas de laguimauve comme l’indique son nom. Théophraste, puis Albert le Grand en ont faitressortir les propriétés émollientes et lénitives. L’École de Salerne la recommandaitcontre la scrofule, la pierre, la grosseur du sein, etc. Aujourd’hui, elle est classéesurtout parmi les plantes béchiques. Elle doit à l’abondance de son mucilagel’ensemble de ses propriétés et la raison de ses nombreux et fréquents emplois tantinternes qu’externes pour les affections de la gorge, des voies respiratoires etintestinales ; en résumé, contre tout état inflammatoire.

Préparations pharmaceutiques et doses. — Les parties employées sont les feuilles,les fleurs et les racines, mais en proportion inverse de cette transcription. On prépareI° avec les racines, un gargarisme émollient : on en fait bouillir 10gr. avec une demi-tête de pavot dans 150gr.d’eau durant Io minutes, on passe et l’on ajoute 50gr.de

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miel blanc, une décoction pour lavages, lavements, etc., 30 à 45 gr. par litre ; 2° avecles fleurs, une tisane par infusion d’une demi-heure, de Io gr., qu’on peut remplacerpar autant de racines (Codex 1908). On a conseillé de leur substituer la macération àfroid de la racine pulvérisée qui donnerait ainsi un liquide onctueux, assez limpide,mais dont le goût et l’aspect seraient bien plus agréables. Les fleurs entrent dans lacomposition des « espèces pectorales » plus connues sous le nom populaire de « fleurspectorales » qui comprennent : bouillon blanc, coquelicot, guimauve, mauve, pied dechat, tussilage, violette, 100 gr. de chacune (Codex 1908). Bien que ces fleurs soientau nombre de 7, on les désigne souvent encore sous le nom de « quatre fleurs ». Lesirop de guimauve 30 gr pour 1000 ; enfin, on en prépare aussi de la pâte et despastilles.A l’extérieur, pour les bains locaux, la dose de racines est de 30 à 60gr.en décoction ;celle-ci peut également servir à délayer la farine de lin pour faire un cataplasme.Les feuilles ont fait partie des « espèces émollientes » ; on en préparait descataplasmes, mais elles ne sont plus guère usitées aujourd’hui.La médecine vétérinaire prescrit la poudre de guimauve en mélange avec celle degentiane et une certaine quantité de kermès minéral pour combattre les affectionsdes voies respiratoires des chevaux et des bovidés.

Observations commerciales. — La culture en grand de la Guimauve ne saurait êtretrop recommandée, car ses fleurs et ses racines sont l’objet d’une grande vente,tellement ses emplois sont divers dans toutes les classes de la Société. En 1916, laFeuille d’Information du Ministère de l’Agriculture cotait les fleurs entre fr. 50 et 3francs le kilogramme. L’an dernier, les feuilles ont valu, le kilogramme o fr. 90 àfranc ; les fleurs 8 francs à 8 fr. 50 ; les racines 2 fr. 50 à 3 fr. 25, mais les prix sonttrès variables surtout pour les racines, selon leur blancheur, et selon qu’elles sontentières ou coupées. Les prix de gros par 100 kg peuvent varier entre 1 franc et 1 fr.75, mais sans engagement.

Houblon Le Houblon (Humulus lupulus. L.) Urticacées, a pour synonymes : Houblonvulgaire, Houblon à bière, Vigne du Nord.

Habitat. — Il croît spontanément dans les endroits buissonneux et humides, dansles bois, les haies où ses rameaux longs et flexibles trouvent un support favorable.Description sommaire. — Plante dioïque, vivace par ses racines. Tige grimpante,volubile de gauche à droite, atteignant à l’état sauvage 3 à 4 m de hauteur et 10mdans la culture. Feuilles opposées, ressemblant assez à celles de la vigne vierge.Fleurs (juillet-août), les mâles et les femelles sur des pieds différents, ces dernièresgroupées à la maturité par deux à la base de larges bractées foliacées formant descônes en se recouvrant les unes les autres. A la face interne de ces bractées setrouvent deux akènes environnés d’une poussière nommée lupulin, qui donne auhoublon son arôme et son amertume spéciale. Fleurs mâles petites, en grapperameuse peu fournie.

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Culture. — En France, elle paraît remonter au VIIIe siècle. Comme planteindustrielle, elle a lieu en grand depuis longtemps dans plusieurs départements ; jerecommande à cet égard l’excellent livre de MM. A. Rolet et D. Bouret.Dans le Jardin familial la place du houblon est dans les haies de clôture où iltrouvera ses supports naturels. Il préfère un terrain de consistance assez forte, pluscalcaire qu’argileux sans excès du premier. Il est plus sensible au climat qu’à lanature du sol, qui doit être bien ameubli en automne ou en hiver sur une épaisseur de0,70m à 1 mètre. On a recommandé l’emploi du fumier de ferme, du superphosphatede chaux et du sulfate de potasse lors du défoncement avec une addition de nitratede soude quand les tiges se développent.Il existe plusieurs variétés de houblon, précoces et tardives, dont on apprécie lavaleur d’après leur teneur en lupulin ; il faut choisir les plus réputées dans la régionoù l’on habite.

Multiplication. — Bien qu’elle puisse avoir lieu par semis, dans la pratique onn’emploie que le bouturage. Il est souvent préférable de le faire en pépinière, quoiquecertains l’effectuent à la place définitive.

Bouturage. — Deux époques conviennent pour y procéder : en mars-avril (bouturesd’hiver), en juin (boutures d’été), les premières proviennent de portions de tigesprélevées sur la souche au moment de la taille, les secondes d’éclats de racines ouplutôt de tiges souterraines. Il va de soi que, si l’on recourt à la pépinière, il estnécessaire que le sol soit bien fumé, frais et même un peu humide plutôt que sec, afind’être plus certain de la reprise des boutures. Si l’on se sert de fragments de tigedépourvus de racines, il est prudent de les faire tremper un peu auparavant. Lesboutures sont mises en terre à 25 cm dans la ligne qui est distante de la suivante

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d’un intervalle de 75 centimètres.

Plantation à demeure. — Le meilleur moment est de la fin février au début d’avrilsuivant les régions, pour que les boutures tirées de la pépinière soient à l’abri desfortes gelées auxquelles elles sont très sensibles.On dispose des trous de 0m.25 de côté s’ils sont carrés ou de 0m.40 de diamètre s’ilssont ronds, et suffisamment profonds pour qu’après avoir mis au fond du fumierbien décomposé, du terreau ou du compost, du superphosphate et un peu de terre, labouture en place sur le tout ait son sommet à quelques centimètres au-dessous duniveau du sol. Les pieds enracinés sont disposés comme ils l’étaient en pépinière, lesujet est mis au milieu et l’on tasse suffisamment la terre autour, puis on fait unepetite butte au-dessus de la bouture. (A. R. et D. B.)

Soins culturaux. — Les principaux comprennent le remplacement des pieds morts,l’attachement des tiges à leurs supports naturels ou autres, l’entretien du sol en bonétat de culture, l’enlèvement des rejets trop abondants, la taille, les binages,sarclages, arrosages, etc.

Durée de la plantation. — Elle dépend surtout de la nature du sol. En grandeculture, elle compte 8 à 12 ans généralement ; on en connaît en Angleterre qui ont puatteindre, paraît-il, 150 à 200 ans. Il en est probablement de même pour le houblonqui croît à l’état sauvage dans les haies si épaisses de la Normandie.

Récolte et rendement. — Chez nous, elle va de la fin août au 5 ou 6 septembre pourles variétés précoces et du 8 au 20 septembre pour les variétés tardives. Onl’entreprend par un beau temps, mais étant donné l’entremêlement des tiges avec lesarbustes de la haie du jardin familial, il est tout indiqué de faire des récoltessuccessives en coupant un à un avec des ciseaux, en leur laissant 1 cm 1/2 depédoncule, les cônes arrivés à une maturité convenable, ce qu’on reconnaît à leurcoloration jaunâtre, rougeâtre, etc., en raison de leur variété. La récolte terminée, onenlève toutes les ramifications.On estime qu’un hectare peut fournir de 600 à 2000 kg ; en France, quand la récolteest bonne, le rendement varie entre 900 à 1000 kg.Séchage, Rendement, Conservation. — On étale les cônes à l’ombre sur des claies ousur le plancher d’un local bien aéré, sur une épaisseur de 5 à 10 cm, en ayant soin deles agiter le moins possible pour éviter la perte du lupulin. La dessiccation, qui dure1 mois ou 2, selon le procédé mis en œuvre, est complète lorsque les cônes pressésentre les mains bruissent légèrement. Dans la culture en grand, on emploie desséchoirs à air chaud ou parfois des tourailles.Le rendement en cônes secs varie, selon les années, entre 25 et 33 pour 100 du poidsdes cônes frais quand les bonnes conditions sont réunies ; dans le cas contraire, iltombe à 20 et même à 12,5 pour 100.La conservation demande un ensemble de précautions, car le houblon est trèsaltérable. Il faut le maintenir à l’état comprimé dans des sacs, des caisses ou des

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tonneaux placés dans un local sec, aéré, mais surtout le plus froid possible, pouréviter qu’il ne s’échauffe par fermentation. D’ailleurs, il ne faut pas le conserverlongtemps, car il peut perdre en un an 80 pour t00 de sa valeur, et, au bout de deuxans, son odeur et sa saveur deviennent désagréables.

Composition chimique. — Deux parties sont à considérer, les bractées et le lupulin.Les bractées contiennent : matière astringente âpre, matière colorante inerte,chlorophylle, quelques sels, etc. Les propriétés médicinales résident dans le lupulin,poussière jaune, granuleuse, onctueuse ressemblant au pollen des végétaux. Sasaveur est ni acide, ni alcaline, mais d’une franche amertume. On en trouve dans lescônes 9 à 18 pour 100 environ. Il renferme une huile essentielle qui irrite la peau,une résine analogue à celle du chanvre indien, un principe amer se rapprochant del’absinthine, un alcaloïde, la lupuline et un tannin l’acide humulitannique.Propriétés thérapeutiques. — Dans l’antiquité, Pline relate qu’on employait lehoublon contre les affections scrofuleuses ; plus tard, on l’a préconisé dans lesfièvres bilieuses. Aujourd’hui, on lui reconnaît surtout des propriétés toniques,apéritives, sédatives et narcotiques, et on le range parmi les toniques amers à la suitede la gentiane. C’est, en effet, un médicament sérieux par son action sur l’appareildigestif. A dose légère, il excite l’appétit, favorise la digestion et augmente l’énergie ;à dose élevée, il agit comme calmant des excitations nerveuses.Son action hypnotique et sédative est due au lupulin qui est prescrit commeanaphrodisiaque dans plusieurs affections de l’appareil génital. A noter aussi,d’après le Dr H. Leclerc, l’influence remarquable qui lui a été reconnue par leprofesseur L. Rénon. Celui-ci l’a employé avantageusement comme équilibrant dusystème nerveux dans l’angoisse de guerre. Enfin, on a conseillé aux sujets qui nepeuvent supporter les opiacés de substituer aux oreillers de plume des oreillersremplis de cônes de houblon.

Préparations pharmaceutiques. — Les deux parties vraiment usitées sont les côneset le lupulin, très rarement les racines. L’infusion se prépare avec 10gr. de houblonpour un litre d’eau bouillante ; l’extrait aqueux se prend à la dose de 0gr.25 à0gr.75 ; le sirop 20 à 100 gr., comme tonique. Le lupulin est prescrit comme sédatif,en nature 0gr.25 à 1 gr. en cachets ; en extrait 0gr.10 à 0gr.50 ; en teinture, 2 à 4gr. ; en pommade, extrait alcoolique 3 gr. pour 30gr.d’axonge ou de vaseline. Cesdoses sont pour des adultes ; il faut employer des doses bien plus faibles dans lamédecine infantile, et selon le conseil du médecin.En brasserie, le houblon joue un rôle très important dans la fabrication desdifférentes bières industrielles auxquelles il communique une odeur et une saveuragréables tout en assurant leur conservation par son lupulin et son tannin. Il sertaussi à la confection des bières de ménage, soit seul, soit en mélange avec d’autresplantes comme la gentiane, le frêne, le noyer, etc. C’est ce qui explique l’étenduequ’on accorde à sa culture dans un grand nombre de pays, surtout en Europe.On utilise dans le Nord, en Belgique et en Allemagne, ses jeunes pousses commelégumes, au moment où elles sortent de terre ; on les prépare à la façon des asperges

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et des salsifis.

Observations commerciales. — Le houblon est au nombre des plantes qui méritentUne large place dans le Jardin familial, car, en dehors de ses emplois thérapeutiqueset industriels, il compte à son avoir ses usages économiques dans la préparation desboissons. Sa vente pour l’herboristerie est très importante ; les prix en sont trèsvariables : 1 à 4 fr., 2 fr. en moyenne le kilo pour les cônes ; 1 fr. à 1 fr. 20 pour lesracines sèches, qui sont très peu demandées.

Hysope

L’Hysope officinale (Hyssopus officinalis. L.) Labiées, tire son nom du grecHussopos. C’est une des plantes les plus anciennement connues, aux originesbiblique et sacrée. La Bible l’oppose au cèdre du Liban et l’Eglise en fait le véhiculede son eau lustrale : « Asperges me, Domine, hyssopo, et mundabor.... »

Habitat. — Bien qu’on la rencontre dans plusieurs régions de la France, sonvéritable habitat chez nous est la région méditerranéenne, notamment dans lesAlpes-Maritimes et le Var, et d’ailleurs partout où croissent la lavande, le romarinet le thym, sur les coteaux dénudés et pierreux exposés au midi. Elle est trèsrépandue dans les pays qui bordent la Méditerranée.

Description sommaire. — Plante à tiges un peu ligneuses à la base, formant unetouffe atteignant 40 à 50 cm de hauteur. Feuilles opposées, oblongues, glanduleuses,caduques, tombant aux premiers froids. Fleurs sessiles (floraison de juillet àseptembre) disposées en un épi terminal, placées toutes du même côté de l’axe ;

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corolle bleue, quelquefois rose. Fruit consistant en quatre achaines. Racine grosse,rameuse, revêtue d’un abondant chevelu. L’odeur de la plante est aromatique etcamphrée, ce qui la fait rechercher par les abeilles, mais éviter par les troupeaux.Culture. — L’hysope aime les terres légères, sèches et calcaires, bien ensoleillées, ellene demande pas d’humidité. On la cultive depuis longtemps dans les jardins commeplante médicinale et comme plante d’agrément.

Multiplication. — 1° Par semis ; 2° par éclats de souches ; 3° par touffes entières.1° Par semis. — Les graines sont noires, rugueuses, très petites et conservent troisans leur faculté germinative. Le semis se fait sous châssis ou en pleine terre bienfumée et nivelée. On y procède sous châssis en février ou au début de mars ; la levéea lieu en l’espace de 3 semaines, tandis qu’en pleine terre elle demande I mois à 5semaines environ (A. G. et J. D.).En pleine terre, on sème à la volée en juillet dans les environs de Paris, fin mars-avril dans le Midi, sur des planches d’environ 1 m. 30 de largeur, après avoir eu soinde mélanger les graines avec du sable pour en obtenir une distribution plus uniforme.On peut aussi répartir ce mélange dans des lignes espacées dé 0m.30. On plombelégèrement et l’on arrose.D’après MM. Rolet et Bouret, si l’on couvre le sol d’un léger paillis (poussier de blé,aiguilles de pin, crottin de cheval) qui empêche la formation d’une croûte à lasurface, la levée peut, dans ces conditions, atteindre 95 pour Io°.De l’avis des gens compétents, notamment de M. Lamothe, spécialisé dans cetteculture, il faut préférer le semis, bien qu’il entraîne un retard de 3 mois sur laplantation des touffes, mais l’on a ainsi de jeunes sujets sains et vigoureux.2° Par éclats de souches ou 3° par souches entières. — On les plante dans un solbien fumé en laissant un intervalle de 0m.50 entre les lignes et de 0m.30 entre lespieds. On adopte aussi 0m.35 à 0m.4o au carré. Le repiquage a lieu en octobre ou auprintemps et même en été suivant les régions. On y apporte les soins culturauxhabituels avec un minimum de trois binages. Au printemps, il est utile d’enterrer unpeu de fumier bien décomposé, 2 kg 500, à l’are, de nitrate de soude en deux fois(avril et juin) et 5 kg de superphosphate. La durée de la plantation est de 4 ans dansles environs de Paris.Récolte et rendement. — Les dates varient selon les régions, mais d’une façongénérale, c’est au moment de la pleine floraison, de juillet à août. Dans le Jardinfamilial, on peut couper au sécateur les sommités fleuries, tandis que sur les champson emploie la faucille ou la serpe.Selon MM. Goris et Demilly une bonne plantation permet de faire, dès la secondeannée, deux coupes par an, la première en juin, la seconde en septembre. L’hectarepeut fournir environ 2500 kg et la deuxième cueillette presque autant, ce qui est unrendement appréciable, mais, d’après M. Lamothe, un terrain ordinaire ne produitque 1800 kg. On estime qu’une plante cultivée en bon sol fournit jusqu’à 450gr.deramilles.

Séchage et rendement.— Si l’on récolte la plante entière ou les sommités fleuries, on

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en forme des bouquets que l’on suspend en guirlandes, si l’on ne cueille que lesfeuilles, on les étale sur des claies, mais, dans les deux cas on les fait sécher à l’ombreaussi rapidement que possible pour conserver l’arôme et la couleur verte de la plante.On emploie aussi des séchoirs à l’air libre quand on dispose de grandes quantités.Le rendement est variable : 100 kg de sommités fleuries laissent 23, 25 et même 30kg de sommités sèches.

Composition chimique. — L’hysope contient : huile essentielle, soufre, hysopine. Laplante des pays chauds donne par la distillation du camphre analogue à celui desLaurinées. L’huile essentielle est liquide, d’une saveur brûlante, jaunâtre et serésinifiant au contact de l’air. L’hysopine est une substance neutre soluble dansl’eau, l’alcool et l’éther (D’ A. Héraud)L’huile essentielle est très fluide, ambrée ou incolore et rappelle par son odeur cellede l’essence de tanaisie ; l’hysope en renferme o,4 pour Io°. Les recherches de Cadéacet de Meunier ont montré qu’elle constitue une substance très active exerçant sur lebulbe des effets épileptogènes ; contiendrait deux fois plus de ces principes quel’essence d’absinthe.

Propriétés thérapeutiques. — L’hysope est une des plantes les plus anciennementemployées. Hippocrate la prescrivait dans la pleurésie. L’Ecole de Salerne la vantaitdans des termes que Meaux Saint-Marc a traduits de la façon suivante :L’hysope du poumon purge le phlegme humide ; D’hysope cuit au miel le poumon estavide ; Lorsqu’une toux chronique allume sa chaleur, L’hysope du visage embellit lacouleur.On lui accorde beaucoup de propriétés : excitante, stimulante, béchique,expectorante, stomachique, carminative, sudorifique, vulnéraire, vermifuge,antiseptique, aromatique, emménagogue. Aujourd’hui, elle est surtout classée parmiles plantes béchiques et, à ce titre, elle est conseillée principalement contre lesrhumes, la toux et les refroidissements.

Préparations pharmaceutiques. — La préparation la plus employée est la tisane quele Codex de 19o8 prescrit de faire avec 5 gr. de sommités fleuries par litre et uneinfusion d’une demi-heure. Eau distillée 50 à z00 gr. ; sirop 30 à 60gr.Lethérapeute, Dr Henri Leclerc, dans son Précis de Phytothérapie aussi savantqu’intéressant, conseille les préparations suivantes : Infusion à 2 pour 1 00 (2 à 3tasses par jour) ; l’alcoolature (X à XXX gouttes) dans un verre, ou le sirop suivant :Sommités fleuries d’hysope . . 100 grammes.Eau bouillante 1000 grammesSucre1600 grammesPrendre 100 gr. par jour. On peut le préparer comme suit. Verser l’eau bouillante surles sommités, laisser infuser 6 heures dans un récipient couvert, passer avecexpression, filtrer et faire avec le sucre un sirop par solution au bain-marie.En dehors de la thérapeutique, l’hysope entre dans la liquoristerie industrielle :Absinthe, Chartreuse, Eau de mélisse des Carmes, Eau-de-vie de Dantzig, Esprit

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d’hysope, Vulnéraire. Enfin les feuilles ainsi que les sommités fleuries sontemployées comme condiment dans la cuisine, surtout dans les pays du Nord.Observations commerciales. — Étant donnée la grande consommation de l’hysope enherboristerie, la Feuille d’information du Ministère de l’Agriculture l’arecommandée, dans ses numéros du i 1 juillet et 17 novembre 1916, au nombre desplantes qui méritent d’être cultivées en première ligne. Pour cette raison, il y a lieude lui réserver une assez grande place dans le Jardin familial, à moins qu’on ne lafasse entrer également dans le jardin fleuriste, car elle possède aussi certainesqualités ornementales.En France, les prix de gros pratiqués pour l’herboristerie ont varié, d’après certainsauteurs, entre 20 à 30 francs les z00 kg pour les sommités fleuries en bouquets etentre 60 à 70 francs pour les feuilles mondées.Dans le Midi, la plante en bouquets a été cotée z fr. 50 à 2 francs, les feuilles etfleurs mondées 3 à 4 francs le kilo. L’an dernier (1924), l’herboristerie de Lyon apayé l’hysope mondée entre 2 f r. 50 à 3 francs le kilo.

Laitue

La laitue se décline en une multitude de variétés. Qu'on les mange cuites ou crues, il y en a pour

tous les goûts, pour toutes les époques et pour toutes les régions de France et d'ailleurs !

La laitue se sème de décembre à mars sous un abri chauffé pour obtenir une récolte au printemps.

De mars à juin, vous sèmerez en place pour une récolte pendant la période estivale. Pour des

salades en hiver, semez à la fin de l'été, en août ou septembre pour obtenir des plants que vous

protégerez du froid par un tunnel ou un châssis. Certaines variétés sont plus adaptées que d'autres

aux saisons, vous trouverez ainsi des salades d'hiver ou des salades d'été.

CaractéristiquesFamille: Astéracées, Composées

Origine: Asie

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Période de floraison: été

Couleur des fleurs: jaune

Exposition: soleil

Type de sol: léger, riche en humus

Acidité du sol: neutre

Humidité du sol: normal

Utilisation: potager

Hauteur: 30 cm

Type de plante: légume

Type de végétation: annuel

Type de feuillage: persistant

Rusticité: rustique

Plantation, rempotage: printemps

Méthode de multiplication: semis

Espèces, variétés intéressantes: Les différents types de laitue

- les pommées rouges ou blondes, de printemps, d'été ou d'hiver

- les romaines aux feuilles aux nervures très apparentes

- les batavias blondes ou rouges aux feuilles cloquées

- les laitues à feuilles grasses sont de petites salades

- les laitues à couper comme 'La feuille de chêne' ou les variétés de 'Lollo'

Maladies et ravageurs: la fonte des semis, le mildiou, le botrytis, les limaces, les pucerons

Propriétés thérapeutiquesUne des propriétés peu connue de la laitue provient d'une de ses molécules qui se rapproche del'opium, sans en présenter les effets toxiques, qui font de ce légume le secret le mieux gardé pourlutter contre la nervosité et l'insomnie.

Riche en vitamines et minéraux hautement assimilables:De même que le corps humain, la laitue est très riche en eau, avec 95%, et elle absorbe du sol ungrand nombre de vitamines et minéraux hydrosolubles, principalement des vitamines du groupe B,particulièrement en acide folique, une vitamine importante qui contribue à la formation dumatériel génétique des cellules ainsi qu'à l'élaboration des globules rouges. L'acide folique estparticulièrement utile pour les femmes enceintes. Seulement 100 grammes de laitue apporteront75% de la quantité minimum quotidienne recommandée. La laitue contient également de lavitamine C, du potassium, de l'iode, du cuivre, du manganèse, du zinc, du fer et du magnésium,du bêta carotènes et de la vitamine E.

La laitue est également le légume le plus riche en silice organique. Ce minéral joue un rôle essentieldans l'assimilation et l'élaboration du calcium. La silice joue également un rôle protecteur dusystème cardio-vasculaire, de l'ostéoporose et il agit comme un antidote de l'aluminium qui seraitabsorbé dans l'organisme.La laitue est très riche en cellulose et en chlorophylle. Celle-ci possède un grand pouvoirantiseptique dans le corps et contribue à nettoyer et nourrir le système sanguin.La laitue possède d'autres vertus, notamment d'augmenter la lactation chez le mère allaitant.

Un excellent calmant et somnifère:

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Une des propriétés les plus intéressante de la laitue et probablement une des moins connues, estcelle d'agir comme somnifère naturel. En effet, même si c'est en quantité moindre que la variétésauvage, la laitue vireuse (Lactuca virosa), la laitue conventionnelle (Lactuca sativa) possèdeégalement du lactucarium, une substance qui se rapproche de l'opium, sans en présenter lesinconvénients de toxicité. Cette substance confère à la laitue ses propriétés calmantes et en faitun remède très efficace dans les cas d'insomnie, mais également de spasmes viscéraux ou génitaux,d'incontinence d'urine, de douleurs névralgiques, de palpitation cardiaques, de toux nerveuse etd'excitation.

Pour bénéficier de ces vertus de la laitue on peut bien entendu en consommer de bonnes quantitésen salade (par exemple assaisonnée de vinaigre de cidre), de préférence lors du repas du soir.Mais la meilleure façon d'en retirer toutes les vertus médicinales, comme calmant, sera d'en faireune décoction. Pour le contenu d'une tasse d'eau bouillante, utiliser deux feuilles de laitue, porterà ébullition, laisser bouillir une minute et ensuite infuser dix minutes. La laitue cultivée de façonconventionnelle contient beaucoup de nitrites qui sont dommageables à la santé. Il est doncconseillé de consommer de la laitue de culture biologique.

Lierreterrestre

Le lierre terrestre (Glechoma hederacea L.) Labiées a plusieurs synonymes dont lesprincipaux sont : Gléchome hédéracé, Herbe de Saint Jean, Couronne de terre,Rondote. Il tire son nom de ce que ses tiges rampent sur le sol comme le lierrecommun (Hedera helix L.) le long des murailles ou des arbres.Habitat. — Cette petite plante printanière croît en abondance dans les haies, lesprairies, au bord des chemins, le long des murs et dans les endroits incultes et frais.

Description sommaire. — Plante vivace de 10 à 30 cm de hauteur, à tigesquadrangulaires, plus souvent couchées et rampantes que dressées, pourvues de

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racines ou stolons. Feuilles pétiolées, opposées, crénelées, odorantes. Fleursapparaissant dès février, mais continuant à s’épanouir, selon les régions, jusqu’enjuin et juillet, d’un violet clair en glomérules à l’aisselle des feuilles. Toute la plantea une odeur forte et aromatique, une saveur amère, balsamique et un peu âcre.Culture. — D’après le D’ Héraud, on ne cultive pas le lierre terrestre, car la planteobtenue par la culture est moins active que celle venue spontanément. Cette opinionme paraît personnelle, ne l’ayant pas retrouvée dans d’autres auteurs, mais il n’enest pas moins prouvé que la composition du sol, les engrais et les soins culturaux prisdans leur ensemble exercent sur certaines plantes une réelle influence sur la teneur deleurs principes actifs. Dans tous les cas, on lui accordera une place un peu moinsgrande dans le Jardin familial, s’il est très abondant dans la région.Multiplication. — On y procède par le semis et par les stolons ou racines desportions rampantes. Dans leur excellent livre, Culture des plantes médicinales,MM. A. Rolet et D. Bouret donnent la préférence aux stolons qu’on plante auplantoir à 15 cm, sur des lignes distantes de 20 à 30 cm dans un terrain bien labouré.Choisir un lieu frais, ombragé, par exemple, les pentes fraîches exposées au nord.Arroser pour faciliter la reprise et donner les soins habituels : binages et sarclages.La plantation peut durer plusieurs années.

Récolte. — On ramasse la plante entière aussi proprement que possible et sansracines, les feuilles et les sommités au moment de leur, floraison. Il faut les fairesécher rapidement à l’ombre et au besoin au soleil ou à l’étuve. Les feuilles sontétalées sur une claie, et les sommités, réunies en bouquets, suspendues en guirlandes.On doit les conserver très sèches, car l’humidité les noircit facilement.

Composition chimique. — Faute d’une analyse complète, on n’a décelé dans cetteplante qu’une huile essentielle et une matière résineuse amère. Propriétésthérapeutiques. — Tous les auteurs anciens qui ont parlé du lierre terrestre se sontaccordés à vanter son efficacité contre la phtisie. Si on ne la lui reconnaît plusaujourd’hui, on admet qu’il exerce sur les muqueuses de l’appareil respiratoire uneaction analogue à celle de l’hysope qui en légitime l’emploi dans les hypercriniesbronchiques (Dr H. L.). Il constitue encore, actuellement, ’un remède très populairecomme tonique, pectoral, vulnéraire, efficace dans les maladies chroniques de lapoitrine.

Préparations pharmaceutiques. — On l’emploie en infusion 10 gr. par litre, et ensirop 30 à 60 gr.

Observations commerciales. — Le lierre terrestre est toujours très demandé enherboristerie. La vente des feuilles mondées, entre 1fr. 75 et 2 francs le kg, est plusimportante que celle de la plante entière qui n’a guère dépassé 0 fr. 80.

Mauvesylvestre Bien que la plupart des espèces de mauves puissent être employées en thérapeutique,il en est une qui, à cet égard, les prime toutes., c’est la Mauve sylvestre (Malva

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sylvestris L.), Malvacées, qu’on nomme encore Mauve sauvage, Grande Mauve,Fromageon, Fouassier, etc. C’est elle seule qu’il faut cultiver dans le Jardin familial.Habitat. — Elle est très commune dans les champs, le long des haies, sur le bord deschemins, auprès des habitations et dans presque tous les lieux incultes.

Description sommaire. — Plante bisannuelle de o m. 3o à o m. 6o de hauteur,couverte de poils simples. Tige cylindrique, dressée. Feuilles alternes, longuementpétiolées, larges, à lobes profonds et dentés. Fleurs, de juin à septembre, grandes,purpurines, puis violettes avec des veines plus pâles, rassemblées par 4 à 5 à l’aisselledes feuilles ou au sommet des rameaux. Fruits (akènes) réunis en cercle autour del’axe ; graines réniformes.

Culture. — La mauve, est cultivée dans plusieurs centres de production de plantesmédicinales dont le plus important est le département du Nord, arrondissement deValenciennes, sur une surface de 55 à 60 hectares. On y cultive surtout la variété àtrès grandes fleurs et à feuilles glabres (Malvasylvestris, var. glabra qui fournit unproduit très estimé de l’herboristerie, en raison de la grosseur et du coloris des fleurs.Sa culture existe également à Etréchy (Seine-et-Oise) et dans l’Aisne.Multiplication. — Le semis est seul usité, et comme la mauve est une plante trèsrustique, elle croit dans presque tous les sols, bien qu’elle préfère une terre légère,douce, chaude, riche en humus et quelque peu ombragée. On la sème au printemps (leplus souvent en avril-mai), en place plutôt qu’ea pépinière, ou encore dès que lagraine est mûre. On repique les petits plants, quand ils ont 0m. 05 à 0 m.10 dehauteur, en lignes distantes de o m. 6o et à o m. 5o sur la ligne, et on leur donne lessoins culturaux ordinaires.

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Récolte. — Elle porte à la fois sur les feuilles et les fleurs, mais ces dernièresl’emportent de beaucoup en importance. On cueille les fleurs, de juin à septembre, outant que dure la floraison, un peu avant leur complet épanouissement, le matin aprèsla rosée : la récolte doit être journalière. Les feuilles sont ramassées au milieu de lafloraison.

Séchage. — En principe, la dessiccation doit se faire à l’abri du soleil dans unendroit très aéré, ou bien dans une étuve chauffée d’abord à 250, puis graduellementà 360. Toutefois, dans le Nord, on commence le séchage des fleurs au soleil enprenant la précaution de les recouvrir avec du papier. On le termine au séchoir à airchaud où on les étale sur des lattes en bois. Lorsque la dessiccation a été bien faite,les fleurs ont pris une teinte bleu pâle, mais comme cette nuance est promptementdétruite à la lumière et à l’humidité, il faut avoir soin de les conserver dans un lieusombre et sec. On estime que 10 kg de fleurs fraîches laissent 2 kg 150 de feuillessèches.

Rendement à l’hectare. — D’après MM. Difloth et Blin, on peut admettre que,dans la région de Valenciennes, un hectare donne 5oo à 6oo kg de feuilles et defleurs. Si l’on se base sur un prix de vente de 2 fr. 50, l’on aurait une recette brute de1250 francs à l’hectare. Composition chimique. — Toutes les parties de la plante,mais surtout les fleurs, renferment en abondance une matière mucilagineuse àlaquelle leurs propriétés médicinales sont dues en grande partie.Propriétés thérapeutiques. — Elles ont été bien connues des anciens qui, comme denos jours, les tenaient pour émollientes, adoucissantes, béchiques, pectorales etlaxatives. La mauve est assez efficace dans certaines constipations opiniâtres etdans le cas de l’atonie de l’intestin. Et au sujet de cette dernière propriété, le Dr H.Leclerc rapporte « que les vertus exonérantes de la Mauve ont été magnifiées pard’illustres personnages de l’antiquité, et que Cicéron fut purgé copieusement aprèsavoir fait usage d’un ragoût de mauve et de bette ».

Préparations pharmaceutiques. — Les fleurs et les feuilles sont encore en grandeestime dans la médecine populaire : l’infusion de fleurs à 10 gr. par litre, ladécoction de feuilles entre 25 et 5o gr. pour 1000 en lavement. On les emploie, enoutre, en gargarisme, cataplasme, bain, etc. Les fleurs entrent dans la compositiondes espèces pectorales avec celles de Pied de chat, Pas d’Ane, Coquelicot, Bouillonblanc, Guimauve, Violettes. La mauve était cultivée jadis comme plante potagère, etl’on mangeait ses feuilles en guise d’épinards.

Observations commerciales. — La demande en herboristerie est très importante pourles fleurs et les feuilles. Avant la guerre, les fleurs ont valu, en gros, 100 à 175francs les 100 kg : au détail 2 fr. à 2 fr. 75 et 3 fr. le kilogramme pour celles de lavariété Malva glatira. Depuis, on les a cotées 4 fr. à 4 fr. 50, et les feuilles 1 fr. 60 à1 fr. 70.

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Mélisse officinale

La mélisse officinale (Melissa officinalis, L.), Labiées, est également connue sous lesnoms de Mélisse citronnelle, Citronnelle, Citronnade, à cause-de l’odeur de citronque répandent ses feuilles quand on les froisse entre les mains. On l’a appelée aussi le« Thé de France ».

Habitat. — Elle croît à l’état subspontané dans presque toute la France, maisspécialement dans les lieux incultes frais du Midi, dans les Alpes, les- Pyrénées ; onla rencontre même aux environs de Paris. Elle est cultivée depuis longtemps dansnombre de jardins et depuis quelques années dans les champs de plusieursdépartements.

Description sommaire. — Plante à tige rameuse, carrée, plus ou moins velue, hautede 0m.30 à 0m.80. Feuilles pétiolées, opposées, ovales, crénelées. Fleurs de juin àseptembre, d’abord jaunes puis blanches, parfois bleu pâle, axillaires 6 à 12 ; corollemoitié plus grande que le calice, à lèvres inégales, bi ou trifides. Fruit formé de 4achaines. Les graines sont brunes, oblongues, en nombre d’environ 2000 dans ungramme ; le litre pèse, en moyenne, 550gr.Leur durée germinative ordinaire est dequatre années.

Culture. — Bien qu’elle ne soit pas très difficile sur la nature du terrain pourvuqu’il ne soit pas très humide, la mélisse préfère une terre profonde, saine, un peufraîche, bien exposée et même ensoleillée, car elle est sensible aux froids de certainesde nos régions. Il faut éviter les sols légers et secs, à moins qu’ils ne soient -arrosables, parce que les feuilles y jaunissent et l’on n’a qu’un faible rendement.Dans les champs où on la cultive en grand, on recommande, d’après MM. Rolet etBouret, de les préparer par un premier labour de 0m.30 à 0m.35 et au secondd’enfouir 30 000 kg de fumier de ferme, 400 de scories et 75 de sulfate de potassepar hectare. Dans le Jardin familial, il suffit de fumer avec 3 à 4 kg de terreau par

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mètre carré avec un peu de nitrate de soude quelque temps avant la plantation.Multiplication. — Elle comporte deux procédés : par semis et par division destouffes.

Par semis. — Il paraît préféré par les cultivateurs de la région parisienne. On lepratique de trois façons : a) on sème les graines sous châssis au mois de février et, sil’on réussit, on peut avoir dans un châssis de 1m. 30 X 1m. 30 mille petits plantsprêts à mettre en pleine terre au 20 mai (A. G. et J. D ) ; b) on sème en juillet enpépinière et on plante en octobre ; c) ou bien, ce qui est plus rare, on sème en place enavril ; cependant, à cause de sa simplicité, on pourrait l’adopter dans le Jardinfamilial bien exposé.Dans les champs, la plantation a lieu sur des planches de 1 m. 50 à 1 m. 80 delargeur, mais de 1 ni. 20 à I ni. 50 dans le jardin, sur des lignes écartées de 0m.50 à0m.60 avec une distance de 0m.30 entre les plants ; on arrose pour favoriser lareprise.Par division des touffes. — On opère sur des touffes de deux ans de plantation quipeuvent donner en raison de leur volume 15 à 20 éclats en moyenne. On les plante àl’automne aux mêmes distances que ci-dessus ; d’aucuns, cependant, mettent entreles pieds un espace de 50 cm en tous sens.Les soins culturaux consistent en binages et sarclages répétés pour protéger lesplantes contre les mauvaises herbes. On arrose aussi quand le terrain est sec, sans enabuser cependant, l’excès d’eau étant nuisible à la qualité. Si l’exposition du terrainlaisse à désirer, il sera prudent de rabattre les plantes à l’approche des gelées et decouvrir la souche au moyen de feuilles sèches et de paille.La plantation peut durer Io ans, il est préférable de ne la garder que quatre ans pouren avoir un meilleur rendement. La mélisse mérite, après la guimauve, la camomille,la menthe et la bourrache, d’occuper une grande partie du Jardin familial. Ellefigure d’ailleurs officiellement parmi les plantes médicinales dont la culture doit êtretentée tout d’abord.

Récolte. — On coupe la plante aussitôt l’apparition des premières fleurs, de manièreque les feuilles de la base qui sont les plus larges ne soient ni étiolées, ni jaunies, plustard, les sommités fleuries prendraient un vague relent de punaise. On a tout intérêtà couper de bonne heure lorsque la plante est en pleine vigueur, ce qui permet defaire deux coupes. La première a lieu en fin mai ou commencement de juin, laseconde en septembre.

Production. — On estime que les deux coupes peuvent donner dans une culturesoignée 15 000 et même 20 000 kg à l’hectare. Il faut opérer, comme pour lagénéralité des plantes, par un beau temps et quand la rosée est tombée, afin d’éviterque les feuilles mouillées ne noircissent en séchant.

Séchage. — Il doit avoir lieu très rapidement, mais non en plein soleil,contrairement à ce qui a été avancé par certains auteurs. MM. Goris et Demilly, qui

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le savent par expérience, trouvent cette méthode défectueuse, et ils recommandentd’opérer dans un séchoir à air libre ou à air chaud. On monde auparavant les feuilleset les sommités à peine fleuries ; les premières sont étalées sur des claies et lessecondes sont réunies en bouquets et suspendues. L’odeur fine disparaît en partiependant la dessiccation si la chaleur est élevée, mais la saveur citronnée persiste.Rendement. — On admet que les feuilles de mélisse fraîche laissent par kilogramme220 gr. de feuilles sèches. Dans l’Anjou on obtient 1800 kg de feuilles mondéessèches à l’hectare. (A. R. et D. B.).

Composition chimique. — La mélisse contient surtout un principe amer soluble enpartie dans l’eau et en partie dans l’alcool, une huile essentielle qui est incolorequand elle a été rectifiée. On en obtient une très petite quantité par distillation,aussi le produit que l’on trouve dans le commerce n’est-il pas pur. C’est, en général,un mélange d’essence de mélisse et d’essence de citron. L’essence pure est plus légèreque l’eau, elle renferme du citral et du citronellal à fonction d’aldéhyde.Propriétés thérapeutiques. — Cette plante a été très vantée par les médecins arabeset recommandée par Dioscoride, Pline, Sérapion, Paracelse, Avicenne parmi lesAnciens, et même par Trousseau dans les temps modernes. Entre toutes les vertusqu’on lui a reconnues, les plus importantes la désignent comme cordiale, excitante dusystème nerveux, antispasmodique, stomachique, céphalagique, sudorifique, etc.,cependant celle qui paraît l’emporter aujourd’hui est la propriété antispasmodique,aussi l’emploie-t-on, et surtout ses préparations pharmaceutiques, contre lesdéfaillances, syncopes et vertiges, les digestions pénibles, les maux d’estomac, etc.Pour ces raisons c’est une des plantes les plus populaires, ce que met si ’drôlement enrelief le vieux dicton répandu dans le Dauphiné et rapporté par MM. A. Rolet et D.Bouret : « Si femme savait ce que vaut la mélisse, elle en mettrait jusque dans sachemise. »

Préparations pharmaceutiques et doses. — Les feuilles et les sommités fleuries sontles parties de la plante usitées en thérapeutique. Le nombre des préparations où ellesentrent seules est limité. L’infusion se prépare d’après le Codex de 1908 avec 5 gr. defeuilles par litre durant une demi-heure, mais on porte souvent la dose à 10 gr.L’hydrolat ou eau distillée de mélisse 60 à 90 gr. ; l’alcoolat simple 4 à 10 gr., maisce qui a fait et continue la grande réputation de la mélisse, c’est son alcoolatcomposé ou « Eau de mélisse des Carmes déchaussés » fabriquée dès 1611 par lesCarmes de la rue de Vaugirard.M. H. Leclerc a pu, avec raison, lui accorder, dans son Précis de Phytothérapie, leslignes suivantes : « Il est resté l’antispasmodique le plus populaire, celui auquel ontrecours toutes les classes de la société dans les moments pathétiques de l’existence,dans les indigestions, syncopes, crises de nerfs, scènes de ménage. On l’emploie à ladose de 2, 3 cuillerées à café dans un peu d’eau sucrée, ou encore sur un morceau desucre bien imbibé.La mélisse entre dans l’alcoolat vulnéraire du Codex ainsi que dans l’alcoolaturevulnéraire ou Eau vulnéraire rouge qui sert à préparer le vin aromatique si usité

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pour le pansement de certaines plaies. Elle figure à côté de plusieurs autres dans lafabrication de deux liqueurs très répandues, l’Absinthe et la Chartreuse, sans oublier« le Vulnéraire », qui ne répond guère à la préparation pharmaceutique, mais qui eutson heure de vogue sur le comptoir du marchand de vin. Enfin la cuisine n’a pasdédaigné d’en faire un condiment.À l'extérieur, les alcoolats de mélisse et vulnéraire sont souvent employés enfrictions, et la parfumerie utilise son essence pour la composition de ses eaux desenteur.

Observations commerciales. — La Feuille d’Information du Ministère del’Agriculture, dans son aperçu des prix auxquels les plantes médicinales étaientpayées au kilogramme après dessiccation, a indiqué, en 1916, 0 fr. 80 pour lesfeuilles de mélisse, avec mention de vente forte. Les bouquets valent généralement 0fr. 90 à fr. le kilogramme et les feuilles mondées o fr. 80 à fr. 50. D’après desrenseignements spéciaux, l’herboristerie dans la région de Lyon aurait payé en mars1924 les bouquets 3 fr. à 3 fr. 25 et les feuilles mondées 5 fr. à 5 fr. 50 lekilogramme, mais. ce sont là des prix très rarement pratiqués dans le commerce.

Menthes

Le groupe des Menthes renferme de nombreuses espèces, variétés ou hybrides dont lesprincipaux représentants sont : la Menthe poivrée, et les M. à feuilles rondes ;M. crépue ; M. sauvage ; M. verte ou romaine ; M. aquatique ; M. pouliot, etc.,mais il n’est question ici que de la plus connue, la menthe poivrée (Mentha piperita.L) Labiées, qu’on appelle aussi menthe anglaise.

Habitat. — La menthe poivrée, si répandue en Angleterre, est une plante des

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régions tempérées. On la rencontre dans les endroits humides, sur le bord des fossés.Cultivée depuis longtemps dans les jardins, elle est devenue assez récemment l’objetd’une grande culture dans plusieurs départements, notamment dans la Seine-et-Oiseà Milly et à Houdan, en Provence, dans les Alpes-Maritimes où l’on y consacre descentaines d’hectares.

Description sommaire. — Plante vivace à souche rampante, haute de 0m.30 à0m.60 ; tiges carrées, dressées. Feuilles opposées,- à pétiole court, dentées, un peupubescentes. Fleurs petites, rougeâtres, violacées, en glomérules s’épanouissant dejuillet à septembre. Les feuilles et les sommités ont une odeur pénétrante, une saveurpoivrée, faiblement camphrée, chaude d’abord mais laissant ensuite une sensation defroid.

Culture. — Les terrains frais non marécageux, ni trop ensoleillés, ni trop ombragéssont ceux qui lui conviennent le mieux ; une terre de jardin fraîche, meuble etprofonde lui plaît également. L’important est qu’il n’y ait pas d’excès d’humidité,car celle-ci favorise la rouille. Elle pousse vigoureusement dans un terrain biendéfoncé et fumé. On peut employer tous les fumiers, jusqu’à 20 000 kg à l’hectare, etcertains engrais chimiques, tels que le nitrate de sodium, le sulfate d’ammonium, lesuperphosphate minéral, influencent favorablement la composition et la proportionde l’essence. Dans le Jardin familial, ces trois sels peuvent être répandus à la dose de30gr.par mètre carré.

Multiplication. — Comme la menthe poivrée ne donne pas de graines, du moins degraines fertiles, on ne la multiplie que par les drageons provenant de la division desvieux pieds. Bien qu’on puisse faire cette opération à l’automne comme auprintemps, la première époque est préférable parce que, en plantant ces racinesfibreuses au moment où la végétation est en repos, on ne brise pas les bourgeons quise sont déjà formés dans les plantes mères au début du printemps. (A. G. et J. D.).Toutefois, si les producteurs des environs de Paris l’entreprennent à l’automne, ceuxde la région méditerranéenne ne s’y livrent qu’au printemps.Dans le jardin, on creuse à la bêche de larges raies, mais peu profondes, 5 cmenviron, tandis que sur les champs la plantation peut se faire à la charrue dans delarges sillons de cette profondeur, dans lesquels on étale avec soin les plants dementhe, en lignes distantes de 15 à 20 cm (A. G. et J. D.), 25 à 60 cm (A. R. et D.B.), et si le terrain n’est pas suffisamment frais, on facilite la reprise par plusieursarrosages.D’après MM. Goris et Demilly, il faut veiller, ce qui est difficile, à ce que la charruene donne pas un sillon trop profond, et d’autre part, c’est à dessein que l’on fait uneplantation aussi serrée (0m.15 à 0m.20), car elle est beaucoup plus avantageuse aupoint de vue de la récolte future. Les plants de menthe se touchent bientôt et, dès ladeuxième année, la plantation est uniforme. On ne reconnaît plus les lignesprimitives et c’est ce qu’il faut rechercher pour avoir en peu de temps une bonnerécolte.

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Les soins culturaux, binages et sarclages, sont assez nombreux et se font à la maindès que les jeunes pousses ont Io à 15 cm ; ils ne doivent cesser que lorsque lesplantes sont assez développées pour que les mauvaises herbes ne puissent leur nuire.Dans les environs de Paris, une plantation de menthe poivrée peut durer 4 à 6 ans,mais comme son rendement diminue à partir de la seconde année à cause del’envahissement par les mauvaises herbes, les producteurs, après la deuxième coupe,la recouvrent de fumier et la labourent de manière à la retourner, puis ils la hersentau printemps et ils en obtiennent ainsi une végétation et une récolte abondantes.Mais, en fait, la plantation est renouvelée tous les 3 ou 4 ans, sauf dans les Alpes-Maritimes où elle ne dure qu’un an.

Récolte et rendement. — Dans le jardin, on coupe les plantes, sur les champs on lesfauche un peu avant la floraison dès le mois de juillet, en prenant les précautionsque j’ai indiquées précédemment. Pour avoir deux récoltes, il faudrait disposer d’unterrain irrigué et bien fumé comme cela a lieu dans la région du Midi et spécialementdans les Alpes-Maritimes. Selon MM. Rolet et Bouret, les deux récoltes de cedépartement donnent jusqu’à 30 000 kg de matière verte à l’hectare ; 20 000 kgconstituent encore un bon rendement. Ailleurs, on compte généralement 15 000kilogrammes.

Séchage. — Pour la consommation familiale, on étale les feuilles ou les sommitésfleuries sur des claies ou sur le plancher dans un local très aéré, dans le grenier, parexemple, à l’abri des rayons du soleil, afin de leur conserver leur couleur vertenaturelle. On peut aussi réunir les sommités fleuries en bouquets et les suspendre enguirlandes dans le même endroit ou dans un séchoir spécial, lorsque la culture estfaite sur une grande échelle.Pour l’herboristerie, on ne fait guère sécher que les feuilles mondées. La dessiccation,même la mieux conduite, fait toujours perdre une certaine partie de l’huileessentielle. Pour la distillerie et la liquoristerie, on livre les plantes à l’état vert.Rendement. — En France, on estime qu’un kilogramme de feuilles de menthepoivrée laisse 215 gr. de feuilles sèches. On a trouvé, d’autre part, que 100 kg deplante fraîche se réduisent à 15 kilogrammes.

Composition chimique. — Cette menthe contient surtout : principe amer, matièrerésineuse, tanin, huile essentielle. A vrai dire, c’est cette dernière qui constitue sonprincipal élément ; elle a été l’objet, dé la part de plusieurs chimistes, de recherchesscientifiques très étendues dont le compte rendu serait, ici, hors de propos. Au pointde vue pratique, il importe de dire que c’est une essence plus légère que l’eau, qu’elledevient incolore après rectification et que ses caractères comme sa compositionvarient sous l’influence de plusieurs facteurs, notamment des milieux de culture etdes origines. Son odeur est d’autant plus suave que la plante est cultivée dans unpays plus septentrional ainsi que le prouve l’essence de menthe anglaise Mitcham quiest la marque la plus réputée entre les essences françaises, américaine et japonaise.Le rendement moyen est de 200 gr. pour I00 kg de menthe fraîche -Son principe

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constituant le plus important est le menthol dont elle contient, au total, entre 58 et66 pour 100, puis viennent les terpènes pour 30 à 40 pour I00, et enfin les produitsaccessoires.

Propriétés thérapeutiques. — Hippocrate, Aristote et Mathiole employaient lamenthe pour des propriétés spéciales et parfois contraires qu’on ne lui demande plusaujourd’hui. On sait qu’elle possède plus que les autres menthes des propriétésstimulantes, excitantes, toniques , digestives , stomachiques , antispasmodiques, etc.,entre lesquelles la principale la fait classer parmi les stimulants généraux. Aussi est-elle un des remèdes populaires très usités, et même prescrite dans l’atonie des voiesdigestives, les flatuosités, les palpitations, les tremblements et les vomissementsnerveux. On l’a administrée aux enfants tourmentés par les vers et aux nourricespour faire passer le lait. Elle a joui jadis, et surtout son essence, d’une certaineréputation contre la dysenterie et même le choléra ; sa « vertu » contre l’intoxicationd’origine gastro-intestinale provenait, sans doute, du menthol qu’elle renferme. Il estprobable que c’est également à lui qu’était due l’heureuse influence, dont parle le Dr

H Leclerc, des applications de pulpe de la plante fraîche contre le prurit desvieillards.

Préparations pharmaceutiques. — Les feuilles et les sommités fleuries sont lesparties de la plante usitées. Le Codex de 1908 prescrit l’infusion de menthe pendantune demi-heure à la dose de 5 gr. par litre d’eau bouillante, mais ce poids est souventdoublé. Le Dr H. Leclerc conseille l’infusion à 2 ou 3 pour 100, préparée avec laplante fraîche comme fournissant une boisson d’une délicatesse exquise. L’alcoolatse prescrit à la dose de 2 à 10gr. dans une potion ; 15 à 20 gouttes dans un verred’eau donnent un liquide très frais, utile aux dyspeptiques. L’hydrolat 20 à 100 gr. ;l’essence 2 à 5 gouttes sur du sucre ; le sirop 20 à 100 gr. dans les 24 heures ; lespastilles presque à volonté. Les feuilles entrent dans les espèces aromatiques etl’alcoolat vulnéraire du Codex ainsi que dans plusieurs liqueurs : alcool de menthe,Chartreuse, Kummel, etc. L’essence constitue la base de nombre d’eaux dentifrices.Le menthol est aussi très employé comme antinévralgique et antiseptique,notamment pour calmer les douleurs de dents, les affections de la gorge et du nez ;les crayons de menthol soulagent beaucoup les migraines. Les feuilles sont parfoisusitées dans la cuisine comme condiments.

Observations commerciales. — La menthe poivrée est au nombre des plantes quiméritent d’être cultivées sur une grande échelle, car sa consommation estconsidérable. La plante entière sèche vaut habituellement 0fr. 80 à 1 fr. le kilo.Quant aux feuilles mondées, les prix ont varié de 1 fr.90 à 2 francs ; l’an dernierelles ont atteint 5 fr. 50 à 6 francs dans la région de Lyon. A l’état vert, lesdistillateurs les achètent entre 10 et 14 francs les 100 kilos.

Mercuriale En dépit de son nom dédié à une divinité romaine, évocateur de bien des images épiques, difficiled’imaginer plante plus anodine que la mercuriale : voilà une mauvaise herbe de taille modeste,

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portant de petites fleurs vertes tout à fait insignifiantes, et dégageant au moindre contact uneodeur nauséabonde. Et pourtant… il s’agit bel et bien d’une plante mellifère, butinée en arrière-saison pour son pollen.Mercurialis,lui, ne comporte qu’une seule autre espèce : il s’agit de la mercuriale vivace(Mercurialis perennis L.), plante elle aussi très commune mais plus forestière que M. annua.

Port et cycle de vieComme son nom l’indique, la mercuriale annuelle est une plante annuelleà port herbacé.

Appareil végétatifLa tige herbacée, dressée, aux nœuds bien marqués, est feuillue et densémentramifiée dès la base : elle confère à la plante une allure de touffe assez compacte, d’une hauteurcomprise entre 10 et 50 cm environ (fig. 1).Les feuilles sont insérées de façon opposée le long des tiges, par un court pétiole.Le limbe, vert pâle, ovale-lancéolé et de texture relativement molle, est recouvert d’une pilositélâche. Il présente une marge assez profondémentcrénelée à dentée. Les feuilles dégagent une odeur âcre et nauséabondelorsqu’on les froisse.

FleursLa mercuriale des jardins est une plante majoritairement dioïque, c’est-à-dire que les fleurs mâleset femelles sont portées par des individus distincts, pouvant donc eux-mêmes être qualifiés demâles et femelles. On peut cependant parfois rencontrer des individus monoïques, portant à la foisdes fleurs mâles et des fleurs femelles.Les fleurs, de petite taille et de couleur jaune verdâtre, sont très discrètes.Elles ne comportent à leur base qu’uncercle de 3 petites pièces stériles de couleur verte, qui

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correspondent à des sépales ; il n’y a pas de pétales.Les fleurs mâles sont rassemblées à l’aisselle des feuilles supérieures en épis allongés (fig. 1).Chaque fleur mâle est constituée d’un bouquet de 10 étamines, à anthère jaune et filet grêle (fig.2). Les fleurs femelles sont solitaires à l’aisselle des feuilles supérieures, où elles s’insèrent par unpédoncule très court, voire nul.Chaque fleur femelle est constituée d’un ovaire globuleux à deux loges, surmonté de deux stigmatesvelus.

FruitsAprès pollinisation, les fleurs femelles évoluent en une petite capsule à deux coques globuleusesdont la surface est hérissée de poils crochus. Le fruit est ainsi capable de s’accrocher au pelage d’unanimal de passage ou aux vêtements du jardinier, participant ainsi à la dissémination de la plante.Chaque capsule contient une graine grise, pourvue d’une expansion charnue appelée élaïosome, quiproduit une huile dont raffolent les fourmis. Ces dernières transportent les graines à la fourmilièreafin d’y consommer l’élaïosome ; cela fait, la graine est rejetée… souvent à grande distance dupied qui l’a produite ! Est-ce l’observation de ce double mode de dissémination qui a valu à lamercuriale d’être dédiée à Mercure, dieu romain des voyages et du commerce ?

FloraisonBien qu’annuelle, la mercuriale présente une période de floraison remarquablement longue, dudébut du printemps au début de l’hiver.

Milieux et répartitionLa mercuriale des jardins est une plante extrêmement commune sur tout le territoire, Corse etBassin méditerranéen compris. C’est une « mauvaise herbe » typique, capable de coloniserrapidement les champs cultivés, les friches, les terrains vagues, chantiers urbains et autres talusfraîchement retournés, grâce à sa dissémination efficace et sa croissance vigoureuse. Elleaffectionne particulièrement les terrains enrichis en azote par les rejets issus de l’activitéhumaine, et est donc fréquemment retrouvée dans les jardins potagers etaux abords des habitations.

Intérêt apicoleEn arrière-saison comme au début du printemps, les abeilles visitent les fleurs mâles de lamercuriale des jardins afin d’y récolter des quantités substantielles de pollen. Ce dernier constitueune source de nourriture d’appoint appréciable pour la colonie, en vue de la préparation del’hivernageen fin d’automne, comme de la reprise du couvain au début du printemps.

Autres usagesLa mercuriale est une plante légèrement toxique, comme la plupart des Euphorbiacées. Elle auraittoutefois été occasionnellement consommée comme légume au Moyen Âge, mais cet usage a étéperdu du fait de sa saveur particulièrement âcre et amère.La mercuriale possède en outre de puissantes propriétés laxatives, qui lui ont valu certains de sessurnoms les plus évocateurs, comme « cagarelle», «chimou » ou « caquenlit »…

Stratégies de pollinisationLe principal agent de pollinisation des fleurs de mercuriale est le vent.Ainsi les fleurs ne sont-elles pas attractives pour les insectes : elles ne produisent pas de nectar, etle périanthe (c’est-à-dire l’ensemble des pièces stériles de la fleur) est très réduit, alors qu’il esthabituellement coloré et/ou de grande taille chez les espèces pollinisées par les insectes.Au contraire, les étamines aux filets longs et grêles s’agitent au moindre souffle, favorisant ladispersion des grains de pollen et leur transport sur les styles des fleurs femelles.Les fleurs mâles de la mercuriale présentent en outre un mécanisme remarquable de projection desfleurs, qui se produit surtout le matin.

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Sur certaines fleurs, à l’ouverture des anthères, l’éclatement de cellules spécialisées provoque ledétachement des fleurs mâles et leur brusque projection à près de 30 cm de l’inflorescence ! Ainsiprojetées, ces fleurs mâles ont de grandes chances de rentrer en contact et de polliniser les fleursd’un pied femelle situé à quelque distance, la mercuriale formant souvent despopulations denses.Les abeilles figurent parmi les rares insectes à butiner les fleurs de la mercuriale. Mais comme ellesvisitent exclusivement les fleurs des pieds mâles afin d’en récolter le pollen, elles ne contribuentjamais au transport des grains de pollen sur les fleurs portée par les pieds femelles

Moutarde noire

La dernière pharmacopée française (Codex de 1908) admet dans son tableausynoptique des plantes médicinales indigènes deux variétés de Moutardes, laMoutarde noire (Brassica nigra K.) et la Moutarde blanche (Brassica alba K )Crucifères, mais comme la première est de beaucoup la plus employée, c’est elle qu’ilvaut mieux cultiver dans le Jardin familial.

Habitat. — Commune dans presque toutes les parties de l’Europe, on trouve lamoutarde noire dans les champs, les lieux pierreux, les décombres, etc.Description sommaire. — Plante à tige dressée de 0m. 20 à 1 m., velue dans sapartie inférieure. Feuilles pétiolées, lobées èt presque glabres. Fleurs (juin-août)petites, jaunes et disposées en grappes terminales. Fruits (siliques), courts, grêles,tétragonaux, s’appliquant contre l’axe floral ainsi que leur pédicelle. Graines trèspetites, comprimées, brunes ou noirâtres.

Culture. — En France, la moutarde noire est cultivée en grand surtout en Alsace,puis en Flandre, en Picardie et dans la Charente-Inférieure. Elle demande un bon solbien préparé, parce qu’elle végète rapidement. Les terres à blé, un peu légères, argilo-calcaires, assez riches en humus, sont celles qui lui conviennent le mieux.

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Multiplication. — Elle a lieu par semis en mars-avril. Dans le Jardin familial desfermes d’élevage, où on doit lui accorder une assez grande place, on sème à la main,mais, dans les champs de grande étendue, on recourt au semoir mécanique, en lignesespacées de 0m. 50 pour faciliter les binages. On estime que, selon le procédéemployé, il faut de 5 à 6 kg ou 3 à 4 kg à l’hectare. Les graines sont recouvertessuffisamment de terre par râtelage ou hersage, en raison de l’endroit où le semis estfait. On effectue le premier binage quand les petits plants ont trois ou quatre feuilleset le second lorsqu’ils atteignent 0m. 15 à 0m. 20 de hauteur.

Récolte et rendement. — On y procède, selon la région, de fin juin à septembre ou dejuillet à août, dès que les feuilles commencent à tomber ou quand les grainescontenues dans les siliques deviennent jaunâtres. Il importe de saisir le momentconvenable, car si les siliques sont complètement mûres, elles ont beaucoup detendance à s’ouvrir et laisser tomber leurs graines. Pour la récolte dans les champs, jerenvoie le lecteur aux ouvrages de MM. A. Rollet et D. Bouret, ou de MM. A. Goriset J. Demilly, dans lesquels il trouvera tous les renseignements nécessaires. Dans leJardin familial, on coupe les tiges avec un sécateur en opérant le matin ou le soir etnon au soleil ; on les laisse sécher sur le sol en les couvrant d’une toile pour protégerles graines contre les oiseaux. Lorsque -les tiges sont sèches, on les bat avec desbaguettes pour ne pas écraser les graines, puis on dépose celles-ci dans un endroit secoù on les remue de temps à autre pour éviter les fermentations. Le rcndement moyenà l’hectare est de 15 à 20 hectolitres pesant chacun de 65 à 68 kilogrammes.Composition chimique. — D’après Moride, les semences contiennent, pour 100,63,o’ de matières organiques ; 27,36 d’huile ; 3,3z de phosphates ; 1,10 de silice et5,20 d’eau. Elles renferment de la sinapine, de l’acide sinapique, un ferment lamyrosine, un glucoside le myronate de potasse appelé sinigrine, qui se décomposesous l’influence de la myrosine, en présence de l’eau froide ou inférieure à latempérature de 400, en essence de moutarde (isosulfocyanate d’allyle) en glucose eten sulfate de potasse. Il se forme, en outre, un peu de cyanure d’allyle et de sulfurede carbone.

Propriétés thérapeutiques. — Elles sont connues depuis fort longtemps et siColumelle est le premier qui ait indiqué la moutarde comme condiment, Galien,Arétée, Théophraste, Dioscoride, Pline, etc., etc., s’en servaient comme médicamentou connaissaient son action. A l’intérieur, on la considère encore pour excitante,antiscorbutique, purgative, selon la dose, mais elle est très peu usitée ; c’est, enréalité, bien plutôt un condiment qu’un médicament et elle constitue un desexcitants les plus énergiques de la digestion. A l’extérieur, sa principale action enfait un révulsif toujours très employé et même le plus populaire de tous.Préparations pharmaceutlques. — On ne prescrit plus aujourd’hui que celles qui serapportent à l’usage externe, parmi lesquelles la plus usitée est assurément lesinapisme qu’on prépare de différentes manières, mais pas toujours comme il lefaudrait. Voici, à ce sujet, quelques détails qui ne seront pas superflus pour tout lemonde. Si l’on ne peut écraser soi-même les semences, on doit s’assurer, tout d’abord,

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si la farine est récente et si elle a été conservée en lieu sec, et, autant que possible, àl’abri de l’air ; on donnera la préférence à celle qui est déshuilée, parce qu’elle estbeaucoup plus active et de meilleure conservation. Le procédé à suivre varie selonqu’on veut appliquer un véritable sinapisme ou un cataplasme sinapisé. Dans lepremier cas, on prend 200 gr. environ, de farine et on la délaye dans une quantitésuffisante d’eau tiède (40° au maximum) de façon à obtenir une bouillie assezépaisse pour ne pas couler à travers les mailles de la tarlatane qui la contiendra.Dans le second cas, on confectionne un cataplasme de farine de lin à la manièreordinaire et, quand il est tiède, on le saupoudre plus ou moins de farine de moutarde,et cc n’est qu’après que l’on replie la tarlatane. En agissant ainsi, on évitel’adhérence des fragments de moutarde sur la peau, ce qui se produirait non, parfois,sans inconvénient pour les émules d’Esaü, si l’addition était faite sur la tarlatanemême. Un autre procédé consiste dans l’incorporation de la moutarde à la farine delin quand le cataplasme est assez refroidi.Selon les effets qu’on désire, le mélange doit varier dans la proportion d’une partiede farine de moutarde pour quatre parties de farine de lin ou d’un tiers de lapremière pour deux tiers de la seconde. Pour en obtenir les meilleurs résultats, il fautavoir soin : a) de ne pas dépasser 40°, car une température supérieure diminuerait ouannihilerait la formation de l’essence révulsive ; b) de ne pas ajouter de vinaigre,comme on le fait parfois, ni même d’alcool ou de sel de cuisine, qui nuiraient plus oumoins à la rubéfaction. On prépare encore un bain de pied sinapisé avec 15o gr. defarine de moutarde et un grand bain avec kg de farine que l’on a bien soin derenfermer dans un sachet en toile. On prend dans ces deux cas les précautionsindiquées ci-dessus. Enfin, on recourt aussi à l’essence de moutarde comme épithèmerubéfiant : 20 gr. d’essence dans 300 gr. d’alcool à 30°, ou comme liniment révulsif :2 gr. d’essence dans 100 gr. d’alcoolat de Fioraventi.

Observations commerciales. — La consommation toujours croissante des graines demoutarde noire, pour les besoins de la médecine humaine et de l’art vétérinaire, a faitrecommander officiellement la culture de cette plante. Le prix avant la guerrevariait de 4o à 5o francs les 100 kilogrammes

Nerpruncathartique Le Nerprun cathartique (Rhamnus catharticus L.), Famille des Rhamnacées, a

plusieurs synonymes : Nerprun purgatif, Noirprun, Bourgépine , Bourguépine,Epine de Cerf, Rhamnée.Si l’on en croit la tradition, ce serait une plante historique et sacrée : les branchesépineuses de l’arbrisseau auraient servi à tresser la couronne d’épines du Christ.Habitat. — Le nerprun est fréquent dans les bois, les haies, les taillis humides d’unegrande partie de la F rance.

Description sommaire. — Petit arbre très rustique atteignant 2 à 4 m., à tigedressée, rameuse, branches opposées, grisâtres, terminées en pointe épineuse à leursommet. Feuilles pétiolées, caduques, ovales, opposées sur les jeunes rameaux,

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fasciculées sur les anciens, dentées. Fleurs apparaissant d’avril à juin, d’un jauneverdâtre, petites, plus souvent dioïques que polygames, groupées en petits paquets àla base des jeunes rameaux. Fruits (baies) de la grosseur d’un pois, d’abord verdâtres,puis devenant noirs à la maturité, en septembre-octobre, contenant 2 à 4 graines,trigones, marquées du côté extérieur d’un sillon plus large à la base.

Culture —. Dans le Jardin familial la place du nerprun est dans les haies où sesépines jouent un rôle assez défensif contre les animaux Sa culture est facile étantdonnée sa rusticité et qu’il ne craint pas le froid. Il prospère dans tous les terrains,bien qu’il préfère un sol frais ; il se plaît à toutes les expositions. Comme le sirop denerprun est employé souvent dans la médecine vétérinaire, il est utile dans les fermesimportantes d’avoir plusieurs pieds de ces arbrisseaux pour être sûr de recueillir unequantité suffisante de baies.

Multiplication. — Elle peut avoir lieu de trois façons : par marcottes ou boutures,par semis.Par marcottes. — On les fait par buttage en cépée et par couchage simple qu’onpeut entreprendre à peu près toute l’année, mais plutôt au printemps ; on les relèveau printemps suivant.Par boutures dites « boutures-plançons ». On aiguise les branches à la base, et, aprèsun court séjour le pied dans l’eau, on les met en place en les enfonçant dans le sol àforce de bras, ce qui est plus facile si, auparavant, l’on a pris soin d’arroser leterrain. 11 est encore plus simple de faire, préalablement, un trou au moyen d’unpieu ou d’une pince pour y planter la bouture ; finalement, on tasse la terre toutautour avec le pied.Par semis. —- On choisit des graines assez récentes, car la durée germinatrice est de

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deux mois. Le litre de ces graines pèse 400 gr. environ. On sème en pleine terre, àl’automne, les graines dépouillées de la pulpe qui les entoure ; on sème dru en rayonsou en paquets. On repique au printemps de la seconde année. Le semis fait en marsavec des graines lavées non stratifiées donne de bons résultats. (Ch. Ballet).Récolte. — On y procède quand les baies sont mûres, pendant les mois de septembreet d’octobre. Si la récolte est abondante, on choisit les plus grosses, les plus luisantes,les plus riches en jus. Étant donnée leur violente action purgative, on ne doit pas enmanger, les enfants surtout, de crainte qu’il ne se produise de graves inflammationsde l’appareil intestinal. A l’état frais, les baies ont une odeur désagréable, un peunauséabonde, une saveur amère et âcre. Elles renferment un suc visqueux, d’abordsafrané, puis qui passe successivement aux diverses nuances du rouge et devientfinalement rouge violet.Séchage. — Pour les divers usages auxquels on les destine, il est ’préférable debeaucoup de s’en servir à l’état frais, d’autant plus que d’après le D’ Héraud ellesperdent en partie leur propriété par la dessiccation. Cependant, comme l’on en venddans le commerce à l’état sec, il peut être utile de les dessécher. On les traite alorscomme les baies aqueuses et mucilagineuses en leur faisant subir une températureassez élevée, puis en les exposant au soleil (en septembre) et en terminant le séchageà une douce chaleur.

Composition chimique. — Le suc des baies, qui constitue aujourd’hui la seule partieservant de base aux préparations pharmaceutiques, contient : rhamnégine,cathartine, acide acétique, mucilage, sucre, matière azotée (D’ H.). Les recherches deWinckler en ont extrait la rhamno-cathartine qui est le principe purgatif. C’est unproduit fort complexe composé d’émodine, de rhamnégine, de rhammosine, degestérine, de rhamnogénine, de rhamnose.

Propriétés thérapeutiques. — Elles sont connues depuis longtemps. Selon le D’ H.Leclerc, Mathiole a enseigné le premier le moyen de préparer avec le nerprun un siroppropre à « évacuer le flegme et les humeurs grosses et visqueuses », mais c’est Alibertqui l’a considéré comme un purgatif très énergique « à réserver aux individusrobustes qu’il est difficile d’émouvoir ». Les baies constituent donc un purgatifénergique, drastique qui occasionne des coliques assez vives quand on l’administre ennature. Aussi l’irritation, que les préparations de nerprun causent dans tout le canalintestinal, nécessite-t-elle l’usage, immédiatement après la purgation, d’une boissonmucilagineuse telle qu’eau de veau ou infusion de fleurs de guimauve. L’emploi de cemédicament est indiqué pour obtenir une tris forte purgation dans les paralysies etles hydropisies.

Préparations pharmaceutiques. — La principale est le sirop de nerprun qu’onprépare en chauffant à feu doux parties égales de suc clarifié et de sucre. La dose estde 20 à 60gr.que l’on prend le matin à jeun dans une tasse de thé. Une mixturepurgative fréquemment prescrite est la suivante : eau-de-vie allemande r o à 20 gr. ;sirop de nerprun 20 à 40gr.On la prend également dans une tasse de thé ; c’est une

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purgation qu’il ne faut absorber qu’après conseil d’un médecin.Le suc clarifié s’emploie à la dose de 15 à 30gr.après l’avoir édulcoré avec du sucre,du miel ou de la mélasse. Le rob ou extrait de nerprun, qui jouit jadis d’une certainereputation comme dépuratif, était préparé pat évaporation en consistance de miel dusuc de nerprun préalablement filtré.Les baies de nerprun constituent un remède populaire dans les campagnes decertaines régions ; 15 à ’20 baies fraîches suffisent pour produire une foi tepurgation. Dans les Vosges, les paysans se purgent en prenant le matin dans leursoupe une trentaine de baies desséchées.De l’arbrisseau, on a encore employé jadis l’écorce moyenne à laquelle on a reconnules propriétés émétocathartiques de laBourdaine (Rhamnus frangula), et les feuillesqui, prises en infusion, jouissaient d’une action anti-laiteuse ; elles passaient pourdiminuer et meme arrêter la sécrétion lactée des nourrices. Dans cette crainte, on amême attiré l’attention des cultivateurs sur ce fait, en leur recommandant de ne -paslaisser manger ces feuilles par les vaches et les chèvres. Je n’ai pas observé dans lesfermes normandes, dont les haies renferment souvent des nerpruns, que l’on ait prisdes précautions contre cette très fâcheuse influence, si elle est justifiée.En dehors de la médecine humaine, la médecine vétérinaire fait un fréquent usage dusirop de nerprun, notamment pour les chiens auxquels on en fait absorber commepurgation, selon la force des animaux, 15 à 60gr.en mélange dans du lait.L’industrie utilise les baies de nerprun pour la préparation du vert de vessie enfaisant agir sur elles la chaux et l’alumine, et l’écorce de l’arbrisseau fournit à lateinture une couleur jaune. La chimie s’est servie du sue de nerprun comme réactifpour reconnaître la présence des acides et des alcalis les acides le rougissent et ilverdit par les alcalis. Dois-je rappeler, maintenant qu’elle n’existe plus, la fraude quiconsistait à se servir des baies comme colorant du vin, au mépris de la sauté desconsommateurs.

Observations commerciales. — Les haies de nerprun fraîches sont vendues auxdroguistes et aux pharmaciens des campagnes qui préparent eux-mêmes le suc denerprun. Les baies sèches ont un cours très variable, 1 fr. 25 à 1 fr.75 lekilogramme ; cependant l’année dernière (1924), l’herboristerie en gros de la régionde Lyon les a payées 3 fr. à 3 fr. 50 le kilogramme. Il est à peine besoin de direqu’elles ne doivent pas, comme cela s’est produit parfois, être mélangées à de petitesprunelles et à des baies de troène. La fraude est d’ailleurs Facile à reconnaître, carles prunelles n’ont qu’un . noyau, les baies de troène deux et les baies de nerprundeux à quatre et plus souvent trois.

C’est surtout aux « ramasseurs » de plantes qu’il importe d’apporter la plus grandeattention pour ne pas confondre les baies de nerprun et de troène au moment de larécolte ; les premières sont rassemblées à la base des rameaux, tandis que les secondessont groupées en panicule terminale.

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Pavot blanc

Des différentes variétés de pavots cultivées pour l’extraction de l’opium, celle quimérite la préférence pour le Jardin familial, non pas pour l’obtention de ce suc que jene saurais conseiller, mais pour la production de ses capsules, c’est le Pavot blanc(Papaver somniferum album L.) Papavéracées, qu’on nomme encore Pavot à opium,P. officinal, P. somnifère, P. à fleurs blanches, etc. On en connaît deux races, celle àcapsules oblongues ou déprimées et celle à têtes rondes, et l’on peut y joindre, d’aprèsMM. .A. Goris et J. Demilly, une variété à grosse capsule très cultivée en Europecomme pavot médicinal pour le produit connu sous le nom de « Tête de Pavot. »Habitat. — Le pavot à opium est originaire de l’Orient et de l’Extrême-Orient où setrouvent les différentes régions qui le cultivent pour ce produit.

Description sommaire. — Plante annuelle plus ou moins glabre, exhalant à l’étatvert une odeur vireuse. Tige de 1 m. à 1 m. 20 de hauteur, fistuleuse. Feuillesalternes, sessiles, embrassantes, incisées et dentées sur le bord, d’un vert bleu cendré.Fleurs s’épanouissant de juin à juillet, variant du blanc au violet, noirâtres à labase. Fruit, capsule indéhiscente, surmontée de 10 à 12 stigmates élargis etpersistants, possédant à l’intérieur des lames longitudinales supportant les semencesavant maturité. Graines blanches ou jaunâtres, très petites et nombreuses, 15 000 à30 000 environ.

Culture. — Le Pavot à opium a été introduit en France par Tournefort. Des essaisde culture ont été entrepris en Picardie, en Auvergne, en Algérie ainsi que dans larégion parisienne, et les opiums obtenus aux environs d’Amiens et dans la Limagneont fourni à l’analyse entre 20 à 22 pour 100 de morphine. En outre, il a été reconnupar MM. Gillet et Millant que, pour les usages médicaux, ils n’auraient rien àenvier, au point de vue de la qualité, aux opiums recueillis en Orient. On trouveradans le livre Culture des plantes médicinales, de MM. A. Rolet et D. Bouret, tous

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les renseignements désirables que je ne puis donner ici sur ce sujet. Le pavot estexigeant sur la nature du sol où l’on doit le cultiver. Pour sa culture en grand, il luifaut une terre profonde, légère, calcaire-argileuse ou calcaire-siliceuse, substantielle,bien fumée, et surtout rendue aussi meuble que possible par deux labours dont ledernier à l’époque des semailles, à cause de la finesse des graines. Dans le Jardinfamilial, ces conditions sont faciles à remplir, surtout s’il a été fait surl’emplacement d’un ancien jardin fleuriste, car le pavot une fois semé se reproduitensuite de lui-même, ce qui est appréciable, étant donnés les fréquents usagesjournaliers que l’on fait de ses capsules.

Multiplication. — On y procède par semis. On l’effectue vers la fin de février ou audébut de mars par un temps sec, en ayant soin de mélanger les graines avec 3 à 4 foisleur volume de sable fin bien sec. On suivra, en petit, dans notre jardin, lesrecommandations de MM. A. Colis et J. Demilly. On opère au moyen d’une bouteilledont on a préalablement percé le bouchon, ou bien à la main en procédant par petitespincées, car il importe de semer très clair pour n’avoir pas de plants trop serrés etformant excédent, l’éclaircissement étant très difficile. La graine ne doit être quelégèrement recouverte. Il faut par hectare kg à z kg 5oo, environ, de semences. Dansle but de détruire les mauvaises herbes, l’éclaircissage est pratiqué de bonne heure,lorsque les plants ont 3 à 4 feuilles, en laissant 18 à 25 cm de distance entre eux ; oneffectue ensuite deux binages, le dernier suivi d’un buttage. Dans les conditionsculturales favorables, les plantes poussent rapidement et fleurissent vers lequatrième mois qui suit la germination. Un pied de pavot donne, en moyenne, 4 tèteset un hectare 200 à 250 000.

Récolte et séchage. — Comme la culture du pavot dans le Jardin familial n’a en vue,ainsi que je l’ai dit, que la production de ses têtes et non celle de l’opium, on leslaisse .croître, sans les inciser pour en extraire le latex, jusqu’à ce qu’elles cessent degrossir et soient presque mûres. On n’est pas d’accord sur leur maturité, complète ouincomplète ; on allègue, dans l’un ou l’autre cas, une plus grande quantité desprincipes actifs ; qui a raison ? On plie les tiges à mi-longueur et on les abandonneainsi jusqu’à ce que les têtes soient bien fermes. On les cueille alors avec un bout dequeue de 0m. 20 environ. On les réunit dans un endroit bien aéré en les remuant detemps à autre en attendant qu’elles craquent sous la pression, ou bien on les dessècheà l’étuve. On les réunit en guirlandes ou en paquets que l’on suspend dans un localsec à l’abri des rongeurs.

Composition chimique. — Le séchage des capsules ne leur enlevant pas leursprincipes vénéneux, elles contiennent par suite les nombreux alcaloïdes de l’opium(on en compte environ 17 plus ou moins toxiques) qu’elles peuvent céder à unsolvant approprié comme l’eau bouillante.

Propriétés thérapeutiques. — Elles sont connues dès la plus haute antiquité où lepavot était prescrit contre l’hystérie, la dysenterie, le choléra et l’insomnie ; il servait

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de base à la fameuse thériaque si oubliée depuis assez longtemps. Les capsules sontregardées comme béchiques, pectorales, sédatives et légèrement narcotiques ; lesfeuilles comme narcotiques.

Préparations pharmaceutiques. — Infusion des capsules, 10 gr. par litre (avoir soinde jeter les graines qui sont inactives et cèdent une certaine quantité d’huile), sirop10 à 40 gr. Il faut être prudent dans leur emploi pour les enfants auxquels on nedoit les faire servir, comme les opiacés, que sur la prescription formelle d’un médecin.Elles entrent très fréquemment dans la médecine populaire sous forme defomentations, gargarismes, injections et lavements, à la dose de 20 gr. par litre. Lesfeuilles fraîches font partie de l’onguent populéum et du baume tranquille. L’artvétérinaire se sert aussi des capsules pour les mêmes usages que la médecine humaine.Quant aux graines qui ne possèdent pas les mêmes propriétés que les autres partiesde la plante, on en extrait de l’huile et le tourteau peut être mangé sansinconvénient par les animaux.. Les anciens préparaient avec la farine des grainesune sorte de gâteau ; il en est encore de même en Orient et en Italie où on le nomme« paverata ».

Observations commerciales. — La culture du pavot a été recommandée.L’herboristerie préfère les capsules rondes aux capsules oblongues et les paie pluscher, Les feuilles, dont la vente est faible, valent de 0 fr. 70 à 0fr. 80 le kilogramme.

Pensée sauvage

Parente très proche des violettes, la Pensée sauvage (Viola tricolor arvensis. D. C.)Violariées, porte encore selon les régions les noms de Violette tricolore, Herbe de laTrinité, Fleur de la Trinité, Herbe à la Clavelée, etc.

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Habitat. — On la trouve en abondance dans les montagnes, les champs cultivés, lesterres à blé, etc.

Description sommaire. — Plante annuelle, glabre, velue, haute de 0m.15 à 0m 25.Tiges anguleuses, simples, étalées ou dressées. Feuilles inférieures arrondies, étroitesvers le sommet, à stipules foliacées, très divisées. Fleurs (avril-octobre) de couleurjaune ou violette ou mélangées des deux, munies d’un éperon formé par le pétaleinférieur. Fruit (capsule) ovoïde, s’ouvrant en trois valves, contenant de nombreusesgraines petites et blanches.

Culture. — Bien que la plante soit abondante à l’état sauvage, les demandes étantdevenues de plus en plus grandes, elles ont poussé à sa culture dans les terrespauvres, sableuses, qui ne peuvent guère être utilisées pour des cultures de rapport.(A. G. et J. D.). Cependant, elle prospère naturellement beaucoup plus dans lesterrains bien fumés et exposés au midi.

Multiplication. — Elle a lieu surtout par semis qu’on peut faire au printemps, dansle courant de l’été, fin juin à août et dans le courant de septembre. Le terrain étantbien préparé, on trace des lignes écartées de 0m. 35 et l’on sème sur ces lignes aprèsavoir pris la précaution de mélanger les graines avec du sable lin très sec ou de lacendre ; c’est ainsi que l’on procédera dans le Jardin familial. En grande culture, sil’on voulait faire les binages mécaniquement, l’écartement des lignes devrait être de80 cm. (A. G. et D.). On repique en planche entre 25 à 30 cm quand la plante a troisou quatre feuilles, généralement en septembre-octobre, et la floraison survient auprintemps suivant.

Récolte et séchage. — Lorsque le semis a été fait en septembre, la récolte de laplante entière s’effectue à partir de juin jusqu’à fin octobre. On arrache les plantesentières fleuries dont on forme des bouquets que l’on attache sur des cordes tenduesdans un local aéré. Cependant, comme le séchage doit être rapide, il est utile derecourir à des séchoirs spéciaux ou à l’étuve. La récolte sera de plus bel aspect et demeilleur qualité. Quand il s’agit des fleurs, on les cueille à peine épanouies, on lesétale sur une claie ou une aire très propre. On estime que 10 kg de fleurs de penséesfraîches donnent r kg 470 de fleurs sèches.

Composition chimique. — La pensée sauvage contient : matière amère extractive,résine, albumine végétale, gomme, violine. Desmoulière a trouvé qu’elle renferme, enoutre, un glucoside qui, par suite de son dédoublement en présence de l’eau et d’unferment, produit du salicylate de méthyle.

Propriétés thérapeutiques. — La pensée sauvage, notamment les fleurs, sontconsidérées comme dépuratives, antiscrofuleuses ; à haute dose purgatives et mêmesvomitives. Elles sont toujours très employées contre les maladies de la peau, surtoutdans le traitement des dermatoses, manifestations de la diathèse névro-arthritique.

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Sous leur influence, l’urine acquiert une odeur fétide qui rappelle celle de l’urine dechat.

Préparations pharmaceutiques. — Infusion, 10 à 20 gr. de plante sèche, pour 1000 ;30 à 60gr. de fleurs fraîches ; cette dose doit être diminuée pour les personnes dont lapeau est sensible aux boutons ; suc de la plante 60 à 120 gr. ; sirop 30 à 120 gr.Observations commerciales. — La vente est assez forte pour la plante entière qui aété payée 0fr. 75 à 2 fr. le kilogramme, et très forte pour les fleurs mondées qui outatteint jusqu’à 14 fr. pour le premier choix.

Pieddechat

Cette gracieuse petite plante, que le Codex appelle Pied-de-Chat (Gnaphaliumdioïcum L.) ou Antennaria dioïca), Synanthérées Sénécionidées, a reçu de certainsauteurs les noms de Gnaphale dioïque ou d’Antennaire dioïque, qui tirent leurorigine, le premier, du grec gnaphalon bourre, c’est-à-dire plante cotonneuse, ouencore de ce que les capitules de fleurs bien épanouis représentent le dessous de lapatte du chat ; le second, du latin antenna, antenne, pour rappeler que les soies desfleurs mâles sont épaissies au sommet comme les antennes de certains insectes. On lanomme encore Immortelle dioïque, Herbe blanche, Oeil-de-chien.

Habitat. — Elle est commune dans nombre d’endroits sablonneux des bois,pâturages, pelouses, collines ou montagnes, notamment dans le centre de la France ;l’Ardèche en fournit beaucoup ; à une certaine altitude on la trouve en abondance.

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Description sommaire. — Plante vivace, cotonneuse, radicante, émettant desrosettes de feuilles alternes et des tiges florifères de 10 à 20 cm portant de petitesfeuilles lancéolées. Fleurs s’épanouissant en mai juin, petites, dioïques, disposées encapitules en un corymbe terminal, blanches (capitules mâles) ou roses (capitulesfemelles). Fruit (akène) à peu près cylindrique, glabre, surmonté d’une aigretteplumeuse qui forme un fin duvet.

Culture. — Le Pied-de-Chat demande, autant que possible, un terrain léger,sablonneux. On le multiplie de deux manières : i° par division de pieds ou touffes ;2• par semis, mais la première est la plus employée.Par division de touffes. — Comme les tiges rampantes sont pourvues de nombreusesracines adventives, on les divise en petites touffes ou éclats qu’on plante, en mars,en lignes distantes de 30 cm et à 20 cm sur les lignes (A. R, et 1). B.), ou encore enlignes très rapprochées, 15 cm en tous sens. De cette façon, on arrive à avoir unvéritable tapis de Pied-de-Chat (A. G. et J. D.). On donne en cours de végétation lessoins habituels, binages et sarclages.Par semis. — D’après MM. A. Goris et J. Demilly on peut également multipliercette plante par les graines semées sous châssis froid au printemps. Les graines étanttrès petites, il ne faut pas les couvrir, l’arrosage seul suffira.Récolte et séchage. — On ne récolte que les fleurs, de mai à juillet, en ayant soinqu’elles n’aient pas atteint leur complet épanouissement qui s’achève pendant leséchage. Si l’on attendait trop, les fleurons et les aigrettes se sépareraient. Pour cettemême raison, le séchage demande une certaine attention et doit se faire rapidementsur des claies, des toiles ou un plancher très propre dans un local ou sous un hangartrès aéré. Les fleurs perdent pendant le séchage les trois quarts de leur poids. Il fautles conserver à l’abri de l’humidité et de la lumière pour maintenir, aussicomplètement que possible, leur belle coloration rose qui forme une grande partie deleur valeur commerciale. Quand leur dessiccation est complète, on les garde sansinconvénient dans des sacs bien pressés.

Propriétés thérapeutiques. — On tient les fleurs pour adoucissantes, béchiques,vulnéraires, et on les emploie dans les affections catarrhales chroniques, ce qu’ellesdoivent au mucilage qu’elles renferment.

Préparations pharmaceutiques. — On en fait une tisane à la dose de 10 à 30 gr. parlitre d’eau bouillante. Elles font partie des espèces pectorales à parties égales avecles fleurs de bouillon blanc, coquelicot, guimauve, mauve, tussilage et violettes.

Observations commerciales. — La vente de ces fleurs est forte, l’herboristerie endemande une grande quantité. Le prix en est assez élevé selon les années et laconservation de leur coloris rose. Le kilogramme a valu de 4 fr. 50 à 5 francs pour lesfleurs blanches et de 5 fr. 50 à 6 francs pour les fleurs blanches et roses.

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Pyrèthre

Le groupe des Pyrèthres comprend plusieurs plantes de la famille des Synanthérées.Parmi celles qui croissent en France, les deux principales au point de vue médicinalsont la Camomille Pyrèthre (Anthemis pyrethrum) et le Pyrèthre matricaire(Pyrethrum Parthenium), et entre celles cultivées à l’étranger, dont les produits fontdepuis longtemps l’objet d’une grande importation chez nous, figurent d’abord lePyrèthre de Dalmatie, puis celui du Caucase. Ne pouvant malgré leur utilitéintroduire ces différentes plantes dans le Jardin familial, j’ai choisi le Pyrèthre deDalmatie qui, actuellement, jouit d’une grande vogue par son action insecticide surles divers déprédateurs de nos jardins, vergers et vignobles, sans oublier les parasitesindésirables sur nous et nos animaux domestiques.

Habitat. — Le Pyrèthre de Dalmatie (Pyrethrum cinerariaefolium) est très cultivédans la péninsule des Balkans où il vient spontanément sur les pentes rocailleuses.des divers pays, notamment sur les côtes Dalmates. On le rencontre aussi dans leCaucase et en Perse à côté du Pyrethrum caucasicum qui présente deux types : lesPyrethrum carneum et P. Roseum.

Description sommaire. — Plante rustique formant une touffe rappelant parplusieurs côtés le port et l’aspect floral de la Grande Marguerite des prés et des boisde notre pays. Feuilles alternes, d’un vert blanchâtre, longuement pétiolées et trèsdivisées. Fleurs en capitules terminaux, peu odorantes à l’état frais, possédant aprèsdessiccation une odeur forte et pénétrante.

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Culture. — Depuis les premiers travaux de P. Duchartre et C. Villemot, en 1858, lapropagation du Pyrèthre de Dalmatie en France n’a cessé de faire des progrès sous laconstante impulsion de chercheurs et de savants dont les plus connus chez noussont : MM. E. Heckel, A. Juillet, F. Willaume, P. Marchai, Paillot et Faure,Gaumont, Poutier, Régnier, etc. Grâce à eux ’et au puissant soutien qu’ils ont reçude l’Office national des Matières premières pour la Droguerie, la Pharmacie, laParfumerie et la Distillerie du Comité interministériel des Plantes médicinales ainsique des Stations entomologiques de l’Institut des Recherches agronomiques et deplusieurs Offices agricoles, les avantages économiques de la culture familiale oucommerciale sont déjà très importants. On compte actuellement une centained’hectares répartis en Languedoc, en Roussillon, en Provence, en Anjou, enAuvergne, dans le Poitou, dans le Dauphiné, en Alsace, etc.Le pyrèthre a été acclimaté en France, à plusieurs reprises, dans sa zone naturelle devégétation, c’est-à-dire approximativement dans la région de l’olivier, mais M. leprofesseur P. Marchai a indiqué, en 1923, dans une communication à l’Académied’Agriculture de France, que cette plante peut prospérer d’une façon remarquabledans la région parisienne tout en conservant ses propriétés insecticides. D’ailleurs,M. H. Faes, directeur de la Station fédérale d’Essais viticoles de Lausanne (Suisse),avait entrepris le premier, en 1912, une véritable culture vers le Nord, dans lesterrains les plus ensoleillés du Valais.

Multiplication. — J’emprunte aux intéressants articles de MM. F. Willaume et A.Juillet sur le Pyrèthre de Dalmatie, publiés en 1924 et 1925 dans « Culturesfruitières et industries annexes », une grande partie des renseignements ci-dessous.La multiplication a lieu d’abord par semis, puis par repiquage des plantes.Semis. — Jusqu’à présent, on a cultivé le pyrèthre un peu partout en France, ensemant au printemps ou à l’automne. Aucun conseil ne peut être donné à ce sujetjusqu’à ce qu’une expérience générale bien conduite, précise la meillleure date pourles semailles, suivant les différentes régions. On sème de préférence en pépinière dansdes plates-bandes ensoleillées ou même sous châssis en épandant clair et sans enterrerles graines, qui sont très fines, au delà d’un centimètre, en lignes espacées de 0m.20(M. Juillet recommande de ne pas les enterrer du tout), puis on tasse le sol et on lepaille avec du fumier demi-fait. Les jours suivants on entretient l’humidité par desbassinages effectués le soir, La germination se produit 2 ou 3 semaines après lesemis.On continue les arrosages jusqu’à ce que les jeunes plants possèdent quatre ou cinqfeuilles.Il faut compter en moyenne 920 graines par gramme ; un lot de trois grammespermet d’assurer un minimum de plus de 700 plants capables de couvrir une surfacede 150 m2 environ.

Plantation à demeure. — On choisit un terrain chaud exposé au midi, caillouteux etperméable, car le pyrèthre se plaît dans les sols maigres, caillouteux, silico-calcaires.

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Cependant, il prospère aussi dans des sols différents, M. P. Marchai a obtenu unrendement de 900 kg de fleurs fraîches à l’hectare dans un terrain froid et compact,sablo-argileux avec excès de sable. 11 est bon de fumer le terrain avec dessuperphosphates qui augmentent la teneur des fleurs en principes actifs. Lerepiquage a lieu sur des lignes espacées de 0m.60 en plaçant les plantes en quinconceà 0m.50 de distance. On réserve 10 pour 100 des plantes en vue de combler les videsqui peuvent se produire ; on a même conseillé 15 à 30 pour 100. On arrosemodérément et l’on bine le sol de temps à autre. Malgré la longévité des pyrèthres, ilest préférable, au point de vue pratique, de retourner la plantation après quatrerécoltes pour éviter l’envahissement progressif par les mauvaises herbes.Récolte. — Il faut attendre deux ans avant que la plantation soit en plein rapportet alors on peut faire deux -récoltes. (M. Juillet estime que dans le midi de la France,il n’y a qu’une récolte vraiment utilisable.) On l’effectue au moment où la majoritédes fleurs est épanouie ; on choisit un temps sec et ensoleillé et l’on coupe lespédoncules au niveau supérieur des feuilles. Dans les champs, on se sert de lafaucille, mais dans le jardin familial, un sécateur suffit. Chaque touffe peut porter200 fleurs de 4 cm de diamètre, en moyenne. On fait sécher la récolte en l’étendant àl’ombre sous un abri sain, afin d’éviter les fermentations. On a recommandé deconserver les capitules à l’abri de l’air et de la lumière dans des flacons bien bouchés.C’est bien pour une très petite production, mais si elle était importante, il faudraitde grandes conserves en verre comme il y en a encore dans les vieilles pharmacies deprovince, ou, de préférence, des boîtes ou des estagnons en fer-blanc fermanthermétiquement.Si l’on veut obtenir de la graine, il faut réserver une partie de la récolte et ne couperles fleurs qu’après complet épanouissement et début de dessiccation. On peut obtenir3 kg 5 de semences par 50 m2 de plantation.Rendement. — En France, M. Juillet a obtenu dans une exploitation de 10hectares, en région méditerranéenne, 350 kg de capitules secs ou 1100 kg de tigesfleuries, à l’hectare, et M. P. Marchai 900 kg de fleurs fraîches : MM. Paillot etFaure ont pu fabriquer 56 kg de poudre brute en partant de la récolte d’un champ depyrèthre de 300 m1 de superficie, soit 19 kg, environ, par 100 m2.Préparation de la poudre. — Lorsque la récolte est, complètement sèche, on lasoumet, quand elle est importante, à un broyage à la meule qui la réduit en poudre,mais on manque d’un petit appareil permettant ce travail à la ferme, car le moulinde ménage et la râpe d’épicier ne donnent pas de très bons résultats, selon M. Juilletqui en obtient de meilleurs en écrasant entre les doigts les capitules secs. La poudredoit être renfermée dans des récipients hermétiquement clos et remplis jusqu’au bord,afin d’enfermer le moins d’air possible et de lui conserver toute son efficacité qui estdue à une huile essentielle et à une oléo-résine solubles dans l’éther. Elle peut seconserver longtemps, mais il est prudent de l’employer au fur et à mesure de safabrication.

Modes d’emploi. — Aux premiers emplois de la poudre de pyrèthre consistantpendant longtemps en produits insecticides connus sous les noms d’ « insecticides

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Vicat », de « poudre persane », de poudre à punaises limités surtout aux parasites del’homme et de l’animal, ont succédé ceux qui concernent les innombrables ennemisque comptent les différentes branches de l’agriculture.Ces emplois ont conduit à plusieurs préparations, sans danger pour l’homme et lesanimaux, préconisées par leurs inventeurs, MM. Faes, Willaume. Malgré leurmodalité différente, elles possèdent une grande activité. On les désigne sous le nomgénérique de « Savon Pyrèthre « dont je ne puis, présentement, parler avec détails.Propagation. — Dans le but de diffuser sa culture et de vulgariser son exploitationpour nous affranchir de l’importation de la poudre des Balkans qui a atteint, paran, de 100 à 130 tonnes, je ne saurais trop recommander de lui faire une large placedans le jardin familial, à côté des plantes médicinales, en raison des grands servicesqu’il peut rendre comme le représentant d’un de nos meilleurs insecticides. Pourobtenir des graines ou des plants à repiquer, il faut s’adresser aux Offices agricolesde l’Hérault ou de Seine-et-Oise.

Raifort

Ainsi que deux autres crucifères, le Cresson de fontaine et la Moutarde, le Raifortou Cochlearia de Bretagne (Cochlearia Armoracia L.) joue un rôle assez actif dansl’art médical et dans l’art culinaire. Très connu sous les noms de Rorique rustique etde Cran de Bretagne, il l’est encore, quoique de façon moindre, sous ceux de Cran desAllemands, Cranson rustique, Granson des Anglais, Moutarde des moines,Moutarde des Allemands, Moutardelle, Radis de cheval, Rave-luque, Ravenelle,Rave sauvage, etc.

Habitat — On le suppose originaire de l’Europe orientale. En. France, il croit

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naturellement sur les bords des ruisseaux dans les pays humides, sur les côtes de lamer, notamment en Bretagne.Description sommaire. — Plante vivace, dont la tige dressée, fistuleuse, glabre,rameuse au sommet, atteint 0m. 60 à un m. Feuilles inférieures bien développées,longuement pétiolées, ovales, oblongues, dentées en scie. Fleurs (mai-juin), petites,blanches, très nombreuses, disposées en grappes terminales. Fruit (silicule), petit,ovoïde, couronne par le stigmate persistant. Graines ovoïdes, lisses, maisgénéralement stériles. Racine épaisse, charnue, pouvant atteindre 75 à 80 cm delongueur et jusqu’à 5 cm de diamètre dans sa partie moyenne. Elle est pourvue d’unesaveur âcre, brûlante, piquante, rappelant, quand on la râpe ou l’écrase, celle de lamoutarde, mais qui provoque le larmoiement.Culture. — Elle existe partiellement depuis longtemps dans de nombreux jardinsmaraîchers et, depuis plusieurs années, sur une plus grande échelle, dans quelquescommunes de la Seine, spécialement à Montreuil et à Orly. Le raifort demande unebonne terre profonde et fraîche que l’on a eu soin, avant la plantation, de défoncer à40 cm, environ, et de fumer fortement au fumier bien décomposé. Dans cesconditions, il se développe vigoureusement, mais il faut bien choisir l’endroit où l’onveut le planter, car il est très difficile de l’en extirper quand il s’y est bien acclimaté.Aussi, pour cette raison, convient-il de lui réserver, dans le Jardin familial, un coinde terre très fraîche et ombragée.

Multiplication. — Étant donné que les graines, même les plus récentes, sont presquetoujours stériles, il ne faut pas songer au semis pour le propager, mais n’employerque les éclats ou tronçons de racine. Ceux-ri ont généralement de 8 à 10 cm delongueur et possèdent un œil ou bourgeon. On les prend, habituellement, parmi lespetites racines que l’on a séparées à la récolte et que l’on a conservées dans du sable.Ce sont d’ailleurs ces jeunes plants qui sont vendus par les marchands grainiers oules pépiniéristes (A. G. et D.). Selon ces auteurs, il est un moyen assez rapide quiconsiste à sectionner des racines de raifort en morceaux de grosseur quelconque, maisde 3 à 5 cm de longueur. Ils sont plantés en lignes tous les 25 cm en écartant celles-cide 70 cm environ. On a, par ce moyen, une plantation moins coûteuse qu avec lejeune plant et qui réussir tout aussi bien. On lui donne la première année les soinsculturaux nécessaires pour empêcher l’envahissement par les mauvaises herbes. Ontrouvera de plus amples détails dans Culture des plantes médicinales, par A. Rolet etD. Bouret.

Récolte et conservation. — On peut récolter à l’automne qui suit la plantation faitepar éclats au printemps, mais, de l’avis général, il vaut mieux attendre la deuxièmeet la troisième année parce que les racines sont plus grosses. Le meilleur moded’arrachage se fait à la bèche avant la floraison ; il est bien rare qu’on obtienne lesracines entières. On prive les grosses de leur collet et de leurs radicelles lorsqu’on lesdestine à la vente ou à la consommation et on les conserve à la cave dans du sablefin.

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Composition chimique. — Le principe le plus actif de la racine est une huile volatilesulfurée extrêmement irritante qui provoque les larmes et répand une odeur trèsdésagréable. Appliquée sur la peau elle l’enflamme et produit de la vésication, Ellene préexiste pas dans la racine et ne se forme que sous l’influence de l’eau devégétation mise en liberté.

Propriétés thérapeutiques. — On n’a commencé à les connaître qu’au XVIIIe siècle.Le raifort est considéré comme puissant antiscorbutique, antigoutteux, stimulanténergique, diurétique et rubéfiant. Son action dominante est d’exciter les muqueuseset de modifier la nutrition générale.

Préparations pharmaceutiques. — La racine fraîche est la seule partie employée.Elle entre dans plusieurs médicaments : la tisane de raifort, la teinture de raifortcomposée, l’alcoolat de cochléaria composé, le vin et le sirop antiscorbutique, la bièreantiscorbutique, tout autant connue sous le nom de " sapinette » et dont voici lacompostion : Ilaifort récent 60 gr., feuilles de cochléaria 80 gr. ; bourgeons de sapin30 gr. : bière nouvelle, deux litres. Faire macérer ou 4 jours et filtrer. Le docteur H.Leclerc a donné une excellente formule du sirop de raifort préparé à froid : couper lesracines en rondelles, les disposer en couches sur un filet tendu au-dessus d’un plat etles recouvrir de sucre ; donner le liquide sirupeux qui s’écoule à la dose de 1 à 2cuillerées à soupe par jour. A l’extérieur, les cataplasmes de pulpe froide de raifortexercent une action révulsive et méme vésicante supérieure à celle de la farine demoutarde. On pourrait, d’après le D Héraud, se servir de la racine sèche, si on l’avaitdesséchée avec soin, car elle reprend toutes ses propriétés au contact de l’eau. Laracine crue et râpée, seule ou avec du vinaigre et du sel, s’emploie comme condimentà la manière de la moutarde.

Observations commerciales. — Les racines fraîches ont été vendues en gros 15 à 30francs le cent ; les racines sèches 1 Franc à 1 fr. 25 le kilogramme.

Réglisse officinaleLa Réglisse officinale (Glycyrrhiza globra. L.), Légumineuses Papilionacées, tire sonnom de deux mots grecs « Glucus » doux et « riza » racine ; elle possède plusieurssynonymes : Réglisse glabre, Bois doux, Racine douce, Racine bonne, Racine sucrée.Il en existe plusieurs espèces.

Habitat. — Elle est indigène dans le Midi de l’Europe, notamment dans la Sicile,l’Espagne, etc. On la cultive depuis longtemps en France dans le départementd’Indre-et-Loire. D’après la Notice du Ministère de l’Agriculture sur le Commercedes produits agricoles, la culture, en 1906, était de plus en plus délaissée, la surfacecultivée était d’environ 12 hectares. Les principaux centres étaient Ingrandes,Bourgueil, la Chapellesur-Loire et principalement Benais et Restigné.

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Description sommaire. — Racines vivaces, rampantes, atteignant 1 à 2 m., brunes àl’extérieur, jaunes à l’intérieur, à saveur sucrée et agréable ; tiges annuelles presqueligneuses, pouvant atteindre 1 m. à 1 m. 50. Feuilles alternes, glabres, à 4-7 pairesde folioles ovales lancéolées. Fleurs (juin-août) petites, violettes ou bleu pâle,disposées en grappes pédonculées, atteignant la moitié de la longueur des feuilles.Fruit (gousse), 2 à 3 cm de long, comprimé, contenant 3 à 4 graines brunes.Culture. — Elle est relativement facile parce que la réglisse, étant très rustique, necraint pas les gelées. Elle demande, cependant, des sols profonds, silico-argileux,fertiles et meubles pour que ses racines puissent s’étendre, mais elle redoute les terrestrop compactes, trop humides ou trop sablonneuses, sujettes à se dessécher pendantl’été. On doit défoncer à 50 ou 60 cm à l’automne et labourer en février ou mars, etcomme cette plante est épuisante, on fume abondamment au fumier de ferme à demidécomposé.

Multiplication. — On y procède de deux façons : 1° Par éclats de souches ; 2° Parsemis.1° Par éclats de souches. — C’est le procédé le plus employé. On se sert d’éclatssuffisamment pourvus de bourgeons et de racines que l’on a mis de côté, lors del’arrachage effectué la troisième année après la plantation. Les meilleurs éclats ont 2à 3 bourgeons. On les plante par 4 ou 5 à la fois, de l’automne à la fin de l’hiver ouau printemps, selon les régions, à 30 ou 35 cm sur des lignes espacées de 60 cm ; ou à50 cm en carré, et on les enfouit de 4 à 5 cm (A. R. et D. B.).Sous le climat de Paris, ces éclats sont plantés pendant le mois de mars sur des lignesécartées de 80 cm et à 50 cm de distance les uns des autres (A. G. et J. D.).

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Soins culturaux. — Ils consistent en binages qu’on exécute au cours dudéveloppement de. la végétation. A l’automne, quand les tiges ont pris la teintejaune foncé indiquant qu’elles se dessèchent, on les coupe au ras du sol, puis ondonne un léger labour, à la bèche dans le Jardin familial, à la charrue dans leschamps. On étend du fumier en couverture et on l’enterre au mois de mars par undeuxième labour. Ces soins sont continués pendant les deux premières années.2° Par semis. — On sème en mars ou en avril sur une terre bien préparée, enplanches de 1 m. 20 de largeur, mais lorsqu’on peut opérer sous châssis on gagne dutemps, car la germination en est avancée de 15 jours.

Récolte et rendement. — La récolte a lieu à la fin de la troisième année, car c’est àce moment que les racines ont acquis les qualités requises : On arrache les racines àl’automne au moment de la chute des feuilles. Il faut y apporter assez de soin pourne point briser les racines dont la longueur et la grosseur sont des facteurs de laqualité marchande. On trie les plus belles qu’on destine à la vente et on réserve lesplus petites pour le renouvellement de la plantation. On enlève les bourgeons et lechevelu, puis la terre ; on lave, s’il y a lieu, et on fait sécher au soleil ou au grenier.On peut aussi les conserver à l’état vert, dans du sable fin et bien sec.Le rendement à Bourgueil a été de 4000 à 5000 kg de racines sèches, mais la Noticedont j’ai parlé plus haut a indiqué une production de 12 000 kg à l’hectare tous les 4ou 5 ans ; le poids a été pris, très probablement, à l’état vert.Composition chimique. — La racine contient de la glycyrrhizine, saccharose,mannite, fécule, huile, asparagine, résine, albumine, acide malique, matièrecolorante, sels, etc. La saveur sucrée est due à la glycyrrhizine qui s’y trouve à l’étatde glycyrrhizate d’ammoniaque.

Propriétés thérapeutiques. — On lui reconnaît des propriétés pectorales, béchiqueset adoucissantes ; on la classe parmi les plantes béchiques. Théophraste lapréconisait déjà pour calmer la toux, et, à ce point de vue, elle constitue encore unremède populaire sous forme de jus noir.

Préparations pharmaceutiques. — La partie usitée est la racine qu’on appellehabituellement bois de réglisse. On doit la ratisser préalablement pour lui enleverl’écorce qui lui donne de l’amertume. La tisane peut être préparée de trois manières :par infusion, macération et décoction. Le dernier Codex de 1908 prescrit unemacération de 5 heures avec 10 gr. de racines par litre. C’est sous cette forme que latisane est la plus agréable, parce que, à froid, l’eau ne dissout pas le principe âcre dûà la résine. On en fait aussi une infusion à la manière ordinaire à la dose de 15 à 60gr par litre. Grâce à la glycyrrhizine, la racine de réglisse sert surtout à édulcorer lestisanes auxquelles on l’ajoute quand elles sont tièdes. D’après Gubler leglycyrrhizate d’ammoniaque a, sur le sucre, l’avantage de résister aux fermentations,notamment aux spores de l’oïdium albicans. La racine forme avec l’orge et lechiendent la base des tisanes les plus employées dans les hôpitaux.La décoction n’est guère employée que pour la préparation de l’extrait de réglisse,

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bien plus connu sous les noms de « suc ou jus de réglisse, jus noir, sucre noir ». On lefabrique dans le commerce sous forme de bâtons de 12 à 15 cm de long et de 1,5 à 2cm d’épaisseur. Cet extrait ou « suc » est usité tel quel ou sous forme de pâte,pastilles, etc. Le D’ H. Leclerc recommande au début des trachéites et des bronchiteslégères, comme très adoucissante, la boisson obtenue en faisant fondre 2 gr. d’extraitde réglisse dans une tasse de lait bouillant, et il ajoute à ce sujet l’anecdote suivanteque j’emprunte à son excellent Précis de Phytothérapie. « Un vieux praticien que j’aiconnu dans mon enfance donnait à ce mélange le nom de « lait de corbeau ». Cela luiavait attiré de la part d’une de ses clientes, assez peu au courant de la zoologie,cette observation vaudevillesque : « Voyous, Docteur ! Ce ne sont pas les corbeaux,mais les corneilles qui ont du lait ! »La poudre de réglisse sert souvent d’excipient pour les pilules et à les enrober ; elleentre dans la composition de la Poudre de réglisse composée, qui constitue unagréable laxatif dont voici la formule : réglisse pulvérisée 60gr. ; Séné pulvérisé60gr. ; Fenouil pulvérisé 30gr. ; soufre lavé 30gr. ; sucre en poudre 180 gr. Dose uneà deux cuillerées à café.La boisson rafraîchissante si populaire connue sous le nom de « Coco », parce qu’onla débitait jadis dans une tasse faite d’une noix de coco. (D’ H. L.), a pour baseaujourd’hui une macération de racines de réglisse, additionnée de coriandre, anis etcitron, mais en ’voici la formule primitive donnée par Antoine Pasquier dans sonTraité des Boissons, publié en 1742. Les mesures anciennes ont été transformées enmodes nes par C. B. Renaudet. Racines de réglisse 200 gr., Eau-de-vie un quart delitre ; Ecorce de deux citrons ; Orge perlé 125 gr. En médecine vétérinaire, la poudrede réglisse associée à celle de guimauve et au kermès minéral est conseillée contre latoux des chevaux et des ruminants. Par suite, étant donné les différents emplois decette plante tant pour la médecine humaine que vétérinaire, je conseille de luiaccorder une assez grande place dans le Jardin familial, et surtout dans celui desfermes qui possèdent un important cheptel.

Observations commerciales. — Les bottes de racine de réglisse cultivées en Francemesurent 1 m. 50 à 2 m., pèsent de 50 à 100 kg et valent 45 fr. les 200 kg. Chez lesdroguistes, la racine sèche vaut o fr. 80 le kilogramme ; mondée au vif 2 fr. 80. (A.R. et D. B.).Je suis étonné que la culture de la Réglisse officinale n’ait pas été recommandée, en1916, par les Feuilles officielles du Ministère de l’Agriculture au même titre quebeaucoup d’autres plantes, car nous importons de différents pays : Espagne,Turquie, Russie, Grèce, Italie, une grande quantité de racines et de jus de réglisse.Pour en donner une idée, je relaterai que la Statistique agricole annuelle de 1919, ladernière qui rend compte de nos importations et exportations, indique pour lespremières, au Commerce spécial 25 157 quintaux métrique de racines pour 32 123700 fr. et 3041 quintaux de jus de réglisse pour 4 561 500 fr. Plus que jamais, il està souhaiter que ces 36 millions ne sortent pas de France.

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Reine des prés

Cette plante qui, par l’élégance de son port, a mérité son joli nom de Reine des prés(Spirœa ulmaria L.) Rosacées Spirées, est appelée, presque aussi souvent, SpiréeUlmaire, et répond, en outre, aux synonymes ci-contre : Ormère ou Ornière, Barbe deBouc, Herbe aux Abeilles, Vignette, etc.

Habitat. — On la rencontre communément le long des ruisseaux, dans les endroitshumides, les bois, les prés, les haies.

Description sommaire. — Plante vivace, herbacée, dépassant souvent 1 m. dehauteur. Tige rougeâtre, rameuse au sommet ; feuilles grandes, composées, vertrougeâtre en dessus, blond cendré et pubescentes en dessous, comptant 5 à 9 pairesde segments inégaux dont le terminal est le plus grand et possède 3 à 5 lobes. Fleurss’épanouissant de juin en août, blanches, petites, nombreuses, fugaces, trèsagréablement odoriférantes, formant à l’extrémité des rameaux de larges paniculescorymbiformes.

Culture. — La terre doit être riche et assez légère. La multiplication de la Reine després se fait de deux façons : par semis et par division des souches. On y affecte dansle Jardin familial un endroit placé à mi-ombre, frais ou faiblement humide ; aubesoin on le rend ainsi par un arrosage assez fréquent.Le semis est effectué enpépinière, en mars-avril et le repiquage en mai-juin ; quant à la division des souches,on peut l’entreprendre au printemps.

Récolte et séchage. — La récolte des inflorescences ou sommités fleuries doit avoirlieu dès que les premières fleurs s’entr’ouvrent, mais surtout avant leur complet

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épanouissement qui a lieu en juin-juillet, car leurs pétales tombent facilement. Onpeut, également, selon les régions, récolter la plante entière et les feuilles mondées.Ladessiccation des fleurs doit être menée rapidement pour empêcher leur jaunissement,car, dans cet état, leur arome primitif est légèrement atténué. La dessiccation desfeuilles leur fait souvent prendre une teinte vert grisâtre.

Composition chimique. — D’après Dorvault, les fleurs renferment du salicylate deméthyle, de l’acide salicylique, une huile essentielle composée surtout par del’hydrure de salicyle et une faible quantité d’héliotropine. Soumises à la distlilation,les fleurs fournissent une essence presque entièrement composée d’aldéhydesalicylique. Fructus a trouvé que cette essence n’existe plus dans le plante sèche oùelle est remplacée par de l’acide salicylique libre et par des salicylates alcalins etalcalino-terreux.

Propriétés thérapeutiques. — Les fleurs sont tenues pour anti-catarrhales,sudorifiques et diurétiques par leurs dérivés salicylés, et amères et astringentes parleur tanin. Elles sont utilisées dans la goutte, la gravelle, les rhumatismes et lesaffections cardiaques. Leur action diurétique a été mite eu lumière par Hannon,Guitard de Toulouse, II. Leclerc. Ce dernier dit en avoir obtenu d’excellentsrésultats dans le traitement du rhumatisme articulaire aigu.

Préparations pharmaceutiques. — L’infusion est la plus employée à la dose de 10 à30 gr. par litre, quantité que l’on prend en 3 ou 4 fois dans les 24 heures. On doit enfaire un usage assez long, d’ailleurs, sans fatigue pour l’estomac. D’aucuns laprennent en guise de thé. Il faut avoir soin, selon Fructus, dè ne pas employer d’eaubouillante pour l’infusion, la vapeur d’eau entraînant l’acide salicylique. Le D’Leclerc recommande la température de 80°.

Observations commerciales. — L’herboristerie a payé les prix suivants pour le kg desdifférentes parties de la Reine des prés : bouquets fleuris, 1 fr. 25 à i fr. 50 ; planteentière, 0fr. 80 à 1 fr. ; fleurs en grappes, 2 fr. 50 à 2 fr. 75 ; fleurs mondées, 3 à 3fr. 5o ; feuilles mondées, 1,40 à 1 fr. 50.

RhubarbeIl ne s’agit point ici de la vraie Rhubarbe officinale, la plus employée en pharmacieet dont la racine est fournie d’après quelques botanistes par le Rheum australe,tandis que, pour la majorité, elle provient, sous les noms de Rhubarbe de Moscovie etde Rhubarbe de Chine, du Rheum officinale et du Rheum palmatum.La Rhubarbe de France, dont il est question, est le nom collectif sous lequel on rangetrois types : Rhubarbe ondulée, Rhubarbe Rhapontic, Rhubarbe à feuilles serrées,qui sont indigènes dans les montagnes de la Turquie d’Europe. Ces plantes sontclassées parmi les rhubarbes médicinales et comme elles dans la famille desPolygonacées.

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Habitat. — Les rhubarbes ne croissent pas chez nous à l’état spontané, on les ycultive comme plantes médicinales, alimentaires ou ornementales.Description sommaire. — Plante herbacée, vivace, à feuilles radicales cordiformestrès développées pouvant mesurer jusqu’à 0m. 80 de longueur sur 0m. 60 à 0 m. 70de largeur, pourvues de longs pétioles diversement colorés atteignant parfois undiamètre de 0m. 04 à 0m. 05 et une longueur de 0m. 30 à 0m. 40 qu’une culturespéciale augmente encore. Tiges grosses, cylindriques, creuses, s’élevant entre 2 et 3mètres de hauteur et portant de courts rameaux garnis de petites fleurs verdâtres.Graines (akènes) à trois angles membraneux, ailés. 1 gr. en contient 35 à 60 et le litrepèse, selon la variété, 80 à 120 gr. Elles conservent leur faculté germinative duranttrois ans. Racines fortes descendant dans le sol jusqu’à 1 m. ou 1m. 20.

Culture. — Les rhubarbes demandent une terre franche, fraîche, profonde, bienpréparée et bien fumée, à l’exclusion des terres argileuses, très humides ou de qualitémédiocre. Dans le Jardin familial, on leur accordera un coin frais et un peu ombragé.Multiplication.— On y procède de deux façons : 1° par drageons ou par divisions dela souche ; 2° par semis.Par drageons. — On les emploie de préférence au semis parce que celui-ci nereproduit pas toujours fidèlement la variété. On prélève les drageons sur les plusbeaux pieds, au début du printemps, lors de l’apparition des bourgeons, et on les meten pépinière jusqu’à ce qu’ils aient formé un bon chevelu. On les plante alors àdemeure, à environ 1 m. ou 1 m. 50 en tous sens.Par semis.. — On peut l’effectuer à deux époques :1° en août-septembre, enpépinière ou en terrine. Le plant repiqué en pot et hiverné sous châssis froid estplanté à demeure en mars-avril ; 2° de mars en mai. Le plant repiqué est mis en placeà l’automne ou au printemps suivant. Les soins culturaux consistent en binages,sarclages, arrosages et labours pour entretenir la fraîcheur, et un paillis de feuillessèches quand l’hiver est rigoureux. Il est utile, parfois, de supprimer toutes les tigesflorales pour empêcher l’épuisement de la souche,

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Récolte et séchage. — La récolte varie en raison de la partie de la plante, racines oufeuilles. Pour les premières, on l’entreprend à la fin de la 4e ou de la 5e année deplantation. Les racines nettoyées et pelées sont divisées en morceaux de 8 à 10 cmque l’on expose à l’air pour faire évaporer une partie de leur eau, après quoi on lesporte au séchoir. La récolte des feuilles peut commencer dès le printemps suivant laplantation et se continuer pendant 4 ans, au minimum, et même 10 ans si laplantation est bien entretenue.

Composition chimique. — La rhubarbe renferme de nombreux principes dont les plusimportants sont : des acides, chrysophanique, oxalique, malique, tannique, unglucoside, la chrysophane, de l’émodine, de la rhaponticine, une matière colorante,etc.

Propriétés thérapeutiques. — La rhubarbe est considérée, à petite dose, commetonique et laxative, et, à haute dose, comme purgative.

Préparations pharmaceutiques. — Elles sont les mêmes que pour les véritablesrhubarbes, mais à une dose plus élevée. D’après le D’ H. Leclerc, on peut prescrire0gr. 50 à1 gr. de poudre comme tonique, 4 à 8 gr. comme purgatif, en cachets ou sousforme de pilules ; 0gr. 20 à s gr. d’extrait et 5 à 10 gr. de teinture.Emplois alimentaires. — Les rhubarbes de France médicinales sont susceptibles,bien qu’à un moindre degré, des mêmes emplois alimentaires que les rhubarbescultivées spécialement pour les pétioles de leurs feuilles avec lesquels on prépare destartes, des confitures et des compotes.Dans le cas où l’on voudrait les utiliser dans ce but, il faudrait, pour augmenter lalongueur de leurs pétioles, mettre au printemps sur les pieds de rhubarbe un grandpot de jardin sans fond, un cylindre de poterie ou encore un petit baril défoncé.

Saponaire

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DescriptionC'est une plante assez grande (de 30 à 80 cm), foisonnante, à feuilles ovalesopposées, les inférieures pétiolées, aux fleurs rose pâle (de 2 à 4 cm, odorantes). Ellese trouve fréquemment dans des endroits chauds et secs. Se rencontre en colonie aubord des talus, sur le bord des routes, des terrains vagues, des plaines, sur les sables,le bord des rivières... Elle peut parfois se développer jusqu'à 1 500 m d'altitude.Sa floraison dure généralement de juin à octobre.Espèces

Saponaria bellidifolia Sm. - Saponaire à feuilles de Pâquerette Saponaria caespitosa DC. - Saponaire gazonnante Saponaria lutea L. - Saponaire jaune Saponaria ocymoides L. - Saponaire de Montpellier Saponaria officinalis L. - Saponaire officinale ou saponaire commune Saponaria orientalis L. - Saponaire d'Orient

CultureLa multiplication peut se faire par semis au printemps ou en automne, ou parbouture au début du printemps. Elle a besoin d'un sol léger et humide ainsi que d'unbon ensoleillement.

UtilisationSaponaire officinale (Saponaria officinalis)Par mesure de précaution, sachez que la saponaire peut produire des intoxicationspar voie interne.

Propriétés médicinalesLa saponaire est utile pour les maladies de la peau (les Romains en mettaient dansleur bain pour guérir les démangeaisons), les rhumatismes et les insuffisanceshépatiques. C'est un bon dépuratif ainsi qu'un diurétique, un diaphorétique et unvermifuge remarquable. La saponaire est aussi expectorante, sudorifique et tonique.

Indications internes :Herpès, Zona, insuffisance hépatique, vices de sang, catarrhes des voiesrespiratoires, dermatologie (problèmes prurigineux), engorgement lymphatique

Indications externes :Démangeaisons, eczémas et éruptions de la peau, urticaire, acné, psoriasis, pellicules

Préparations :En décoction: 5 à 15 grammes par litre d'eau, faire bouillir 10 minutes.Boire 2 tasses par jour ou l'utiliser en compresse pour les soins de la peau (eczéma,urticaire, acné, herpès, dartres).

Usage domestiqueGrâce à la saponine qu'elle contient, la saponaire est naturellement moussante etnettoyante. Sa racine broyée et ses pétales peuvent être utilisés dans la fabrication

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de lessives, shampoings, savons... La lessive à base de saponaire peut être utiliséepour les linges délicats. (voir Lessive à la saponaire)Plus simplement, prenez quelques pétales et un peu d'eau dans votre main et frottez.Ceci est particulièrement pratique pour se laver les mains avant le pique-nique lorsd'une excursion en pleine nature.

Sauge

La sauge officinale (salvia officinalis) était très utilisée au Moyen-Âge carconsidérée comme remède universel : salvia signifie "sauver" en latin.C'est une plante qu'on trouve facilement dans nos contrées, et qu'il est facile de fairepousser en pots (à mettre parfois à l'intérieur en hiver).La sauge officinale est aussi une plante sauvage comestible qui est une plantemellifère.

Utilisations spirituellesLa sauge a des vertus purificatrices.

Utilisations en cuisineLa sauge est une plante aromatique, ajoutée communément en petite quantité pourparfumer les plats, les soupes ...Certaines personnes sont allergiques à la sauge, faites attention si vous êtes sujetsaux allergies à la menthe ou autre allergie "alimentaire".

Utilisations thérapeutiqueElle possède diverses propriétés pharmacologiques :

Antiseptique Antisudorale

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Bactéricide Emménagogue Digestive Fébrifuge

et également : antispasmodique, apéritive, tonique, diurétique léger.La sauge est en infusion efficace contre le rhume, la fièvre (entre autres, elle faittranspirer), bonne pour la digestion (on peut dans ce cas la mélanger 1/2 sauge+ 1/2menthe). Brûlée, elle purifie l'air.Attention toutefois, utilisée quotidiennement au-delà de plusieurs jours, elle devienttoxique ! en effet, elle contient de la thuyone (comme dans l'absinthe), une cétonemonoterpénique, qui est un neurotoxique (actions convulsivantes). Veuillez donc àne pas dépasser 4 jours de traitement consécutifs.

Sureau noir

Le Sureau noir (Sambucus nigra L.) Caprifoliacées est souvent désigné sous le nomde Sureau commun et parfois sous ses synonymes : Haut-bois, Seuillet, Seuillon,Sullion, Suin, Sambu, Seon.

Habitat. — Le sureau est commun dans les haies, près des habitations, à la lisièredes bois, le long des cours d’eau, sur le talus des routes ; il grimpe jusque vers 1200m. d’altitude.

Description sommaire. — Arbrisseau de 2 à 6 m. de hauteur, à tronc rugueux, écorcegrise ; bois blanc à canal médullaire rempli d’une moelle blanche très développée.Feuilles opposées à 5-7 segments, presque sessiles, acuminés, dentés, d’un vert foncé,répandant une odeur désagréable quand on les froisse. Fleurs blanches, juin-juillet,en corymbes ombelliformes très fournis, dont l’odeur, presque nauséeuse quand elles

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sont fraîches, devient assez agréable par la dessiccation. Baies globuleuses, noires,luisantes, rarement vertes ou blanches, contenant trois petits noyaux.Culture. — Elle est facile, car le sureau se plaît dans presque tous les terrains, bienqu’il préfère ceux qui sont frais et légers, à demi ombragés. On doit lui accorder uneplace assez grande dans les haies du Jardin familial où, en raison de son odeurspéciale désagréable, il ne sera pas attaqué par les animaux de la ferme.Multiplication.— Elle peut se faire de trois façons : par semis, par marcottage, parbouturage, mais comme cette dernière est la plus répandue, je ne parlerai que d’elleseule.

Bouturage. — On coupe les rameaux ligneux à la chute des feuilles et on les prépareen hiver en leur donnant la longueur voulue, puis on les réunit en petits paquets quel'on fait hiverner en jauge dans une terre légère, sèche, en plein air, couverts en entieret placés la tête en bas ou ensablés dans un silo. On les plante en avril et on lesrecouvre de terre jusqu’à l’œil de tête. On paille de suite et on arrose pour faciliter lavégétation.

Récolte. — Elle comprend surtout. les fleurs, les feuilles, les baies et les écorces. Lesfleurs sont recueillies quand elles sont bien épanouies mais non mouillées par la roséeou la pluie. Il ne faut prendre que les ombelles sans les tiges qui les supportent. Lacueillette des feuilles peut avoir lieu au même moment ou peu après. La récolte desbaies a lieu dès le début de leur maturité, en septembre ; quant aux écorces des jeunesbranches on les enlève à l’automne après la chute des feuilles, lorsque l’épiderme quiest d’abord vert est devenu grisâtre. Il faut avoir soin de racler auparavant cetépiderme avec un instrument assez tranchant ; on enlève ensuite par lambeauxl’écorce qui est placée au-dessous et que, pour cette raison, l’on appelle « deuxièmeécorce ».

Séchage. — Les fleurs doivent être desséchées aussitôt récoltées et, de préférence, surdes claies tapissées de papier et à l’ombre, de façon à leur conserver leur couleurblanc jaunâtre. Séchées quand elles sont encore mouillées, elles prennent une teintebrune qui leur fait perdre une grande partie de leur valeur marchande. On estime que10 kg de fleurs fraîches donnent 2 kg 500 de fleurs sèches. On les conserve dans dessacs ou des boîtes de grandeur proportionnée à l’importance de la récolte, et on lesplace dans un local sec et aéré. Le séchage des feuilles a lieu à peu près de même. Lesbaies sont souvent employées à l’état frais ; toutefois, leur dessiccation se faitcomme celle des baies aqueuses et mucilagineuses ; on les soumet d’abord à unetempérature élevée, puis on les expose au soleil pour les reporter ensuite au four oudans une étuve modérément chauffée. Les écorces sont mises à sécher au soleil ou aufour, elles prennent alors la forme de lanières d’un blanc verdâtre, possédant uneodeur faible, une saveur mi-douceâtre, mi-astringente.

Composition chimique. — Les fleurs contiennent une huile volatile solide ; les baies,des acides malique et citrique, du sucre, de la gomme et une matière colorante rouge

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qui, traitée par un alcali, bleuit d’abord et verdit ensuite quand la proportion decelui-ci est trop forte. L’écorce renferme des acides valérianique et tannique, dusucre, de la gomme, une matière extractive, de la pectine et des sels. Berthelot atrouvé que cette écorce est riche en nitrate de potasse et des recherches relativementrécentes ont permis à Guignard et à Bourquelot d’y découvrir un alcaloïde, lasambucine, et un glucoside cyanhydrique, la sambunigrine.Propriétés thérapeutiques. — Les fleurs de sureau, à l’état frais, sont purgatives ; àl’état sec, diaphorétiques, sudorifiques et diurétiques. On les emploie au début desrhumes et des angines pour rappeler la transpiration cutanée ; elles agissent aussicontre les inflammations superficielles de la peau. L’Ecole de Salerne leurreconnaissait des propriétés anthelmintiques contre les ascarides et les lombrics. Lesbaies, sous forme d’extrait (rob de sureau), sont purgatives et sudorifiques. L’eaudistillée de la racine et celle de l’écorce étaient connues dès le Moyen Age et utiliséescontre l’hydropisie et, plus tard, contre l’ascite, en raison de leurs vertus diurétiqueset hydragogues. Le Dr H. Leclerc relate que, d’après le Dr Lecoq, l’extrait de laseconde écorce peut être employé comme succédané de la caféine et de la digitale etréussir là où le premier de ces médicaments avait échoué. Les feuilles ont été parfoisusitées à l’intérieur comme purgatif, et, à l’extérieur, comme émollientes pour leshémorroïdes et les brûlures. La place du sureau est parmi les médicamentsdiurétiques ou sudorifiques.

Préparations pharmaceutiques. — Les parties les plus employées sont, aujourd’hui,dans l’ordre décroissant, les fleurs, l’écorce, les baies, la racine et les feuilles. Al’intérieur, les fleurs forment la base d’une infusion à la dose de 4 à 5 gr. par litre, àprendre par tasse. Elles entrent dans la composition du Thé de Saint-Germain. Lesbaies de sureau, appelées autrefois grana actes du grec « akten », sureau, ont jouinaguère d’une assez grande réputation, sous la forme de rob de sureau qui n’estautre qu’un extrait qu’on préparait en exprimant le suc des fruits et en leconcentrant par évaporation au bain-marie en consistance de miel épais. On lefaisait prendre à la dose de 4 gr. comme sudorifique contre le rhumatisme chronique,et à la dose de 16 à 24 gr. comme purgatif énergique. Le suc de l’écorce a étéadministré à la dose de 15 à 60 gr. Le Dr Leclerc conseille, comme diurétique, le vinsuivant : Écorce moyenne de sureau 150 gr., vin blanc 1000 gr. Laisser macérer 48heures ; prendre 100 à 150 gr. par jour.A l’extérieur, les fleurs constituent un médicament populaire en compresses, lavageset bains locaux contre la conjonctivite, l’érysipèle, l’eczéma, les panaris, furoncles,etc. L’ancien Codex prescrivait 30 gr. par litre en infusion, mais on peut doubler cepoids.La médecine vétérinaire utilise les fleurs et l’écorce du sureau, à la dose, par litre, de15 à 30 gr. pour les premières et à celle de 80 gr. pour la seconde, comme sudorifiqueet excitant général.En dehors des usages thérapeutiques, les baies de sureau ont servi, autrefois, àcolorer le vin et à lui communiquer un goût de muscat. Aujourd’hui, on lestransforme en gelée, en boisson et en eau-de-vie. La parfumerie fait avec les fleurs

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un lait et un extrait de fleurs de sureau. Elles passent même, à l’état sec, pour unsuccédané du tabac. Enfin, la moelle du sureau sert dans les laboratoires demicrobiologie et en horlogerie.Il existe encore d’autres espèces de sureau parmi lesquelles je ne mentionnerai que leSureau Yèble (Sambucus Ebulus L., très répandu également dans les lieux incultes,sur le bord des fossés et des chemins. On en utilise les mêmes parties, qui possèdentde semblables propriétés thérapeutiques, pour des emplois identiques.Observations commerciales. — Toutes les parties de la plante sont demandées, maisspécialement les fleurs dont la vente est toujours assurée. En 1916, la Feuilled’informations du Ministère de l’Agriculture cotait le kilo de fleurs 0fr. 80 à 0fr. 90,avec la mention « vente bonne ». L’année dernière (1924), l’herboristerie en gros apayé le kilo : fleurs en grappes 3 fr. 75 à 4 fr. ; fleurs mondées 4 fr. 75 à 5 fr. ; lesfeuilles mondées fr. 25 à r fr. 40, les baies 1 fr. 25 à 1 fr. 5o ; les racines coupées 1 fr.à 1 fr. 20, et la deuxième écorce également 1fr. à 1 fr. 20. Dans le Midi et le Sud-Est, on récolte les racines, les feuilles et les baies qui, bien que de vente peucourante, atteignent, paraît-il, des prix identiques à ceux du sureau noir.

Tanaisie

Tanacetum vulgareFamille: AsteracéesLe Tanacetum vulgare allie de multiples qualités : officinale, aromatique, décorativeet facile. Il forme de grandes touffes dressées avec un feuillage finement découpé. Lafloraison apparait en haut des tiges par des plateaux de petites fleurs jaune vif trèsserrées.

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Cultivez-là dans un sol plutôt sableux en plein soleil.Utilisez la Tanaisie dans vos massifs, au potager, sur la terrasse en pot pour écarterles insectes.

CARACTERISTIQUESArrosage : modéréAttribut : aromatique, parfuméeComposition du sol : normal, sableux, riche en humusCouleur feuille : vertCouleur fleur : jauneDensité de plantation : 4 m²Espèce : vulgaire

Tilleul

Dans le groupe des Tilleuls, le plus employé de beaucoup comme plante médicinaleest le Tilleul d’Europe (Tilia europaea L.). Tiliacées, qu’on appelle parfois Til, Tillet,Tillaut ; viennent ensuite ses variétés : Tilleul sauvage, Tilleul à petites feuilles(Tilia sylvestris), Tilleul à larges feuilles ( Tilia platyphylla) ; argenté (Tiliaargentea), sans compter les variétés américaines.

Habitat. — Tous ces tilleuls sont cultivés en France, mais les premiers, notammentle tilleul sauvage, sont communs dans presque toutes nos forêts ; on les rencontredans les parcs et les jardins publics ; quant au tilleul argenté, il est originaire de laHongrie où il est abondant ainsi que dans l’Europe orientale.

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Description sommaire. — Les tilleuls sont de beaux arbres qui, en dehors de nosforêts, contribuent à l’ornement des avenues et promenades publiques, leur hauteurpeut atteindre chez les tilleuls sauvages, quand ils croissent dans des terrainsconvenables, 15 à 20 m. Ch. Baltet, cite un tilleul de Hollande ( Tilia platyphylla)existant à Gérardmer (Vosges), et mesurant 30 m. de hauteur et 8 in. decirconférence du tronc. Feuilles alternes, pétiolées, cordiformes, dentées en scie,velues à l’aisselle. Fleurs apparaissant en juillet, d’un blanc un peu jaune, disposéesen corymbes, accolées à leur base par une bractée dont elles semblent naître ; calice àcinq divisions caduques ; corolle à cinq pétales concaves. Fruit (capule) globuleux,indéhiscent à cinq loges contenant une ou deux graines.

Culture. — Les tilleuls prospèrent dans les terrains légers, profonds, riches et assezfrais, mais à condition de n’être pas trop exposés aux intempéries. Dans le Jardinfamilial sa place est dans les haies et surtout dans celles de la ferme.

Multiplication. — Elle peut être effectuée de trois façons différentes : a) par semis ;b) par marcottes ; c) par greffage ; comme les deux premières sont les plus employées,je ne parlerai que d’elles seules.

Par semis. — Etant donné que la durée germinative de la graine est très variable enraison de sa qualité, il importe, d’après Baltet, de la stratifier aussitôt après larécolte ; on peut alors attendre vingt mois, s’il le faut, pour faire le semis en pleineterre. Il a remarqué que la graine récoltée peu de temps avant sa maturité, si on lastratifie à part, germe souvent plus vite au premier printemps. On sème dru, parrayons, à l’air libre, plutôt au nord, mais en terre légère ; on repique au printemps.Par marcottage. — On butte la cépée de tilleul au printemps ; on sépare à la fin del’été ; on met en jauge, immédiatement, et l’on repique en mars avec écimage duplant. Le tilleul, même assez développé, subit facilement la transplantation, àcondition que l’on ne coupe les racines qu’à une certaine distance du tronc, i m. à im. 20 environ.

Récolte. — Elle comprend les fleurs seules qui constituent alors les fleurs mondées,ou, ce qui est le cas le plus fréquent, les fleurs avec la bractée (c’est-à-dire la petitefeuille d’où les fleurs semblent sortir), on leur donne le nom de « tilleul bractées ». Onprocède à la cueillette du 15 juin au 15 juillet, selon la région, en juillet dans celle deParis, mais toujours avant que toutes les fleurs de l’inflorescence se soientépanouies, et, en tout cas, avant que le fruit ne soit formé, car, autrement, le tilleulne serait par marchand. Il faut, en outre, apporter dans cette récolte une certaineprécaution, car le bois de tilleul est assez cassant et, d’autre part, l’on ne peutcueillir sur l’arbre les fleurs une à une à cause du temps que cela demanderait. Onrecourt, alors, à une échelle double et à un sécateur, ou encore, en raison de lahauteur des branches, à un croissant bien affilé et pourvu d’un long manche afin depouvoir couper l’extrémité des branches chargées de fleurs. L’émondage terminé, onprocède à la cueillette en séparant les fleurs des bractées ou en mélangeant les deux

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selon le genre de tilleul qu’on veut obtenir. Séchage. Rendement.

Conservation. — Il importe de faire sécher les fleurs le plus rapidement possiblepour éviter qu’elles ne s’échauffent ou brunissent plus ou moins, selon le cas, etn’altèrent sensiblement leur teinte et arome naturels. Bien séchées, les feuillesdeviennent vert jaune ambré et les bractées jaune verdâtre, autrement, elles virent àla nuance, rougeâtre. Quelques auteurs conseillent de les exposer une heure ou deuxau soleil avant de les étaler à l’ombre en une couche peu épaisse, mais on risquedavantage ainsi de leur faire perdre une partie de leur agréable odeur naturelle. Ladessiccation est généralement rapide et dure tout au plus une semaine. On admetcomme moyenne de rendement 3 kg 200 à 3 kg 280 de fleurs sèches pour io kg defleurs fraîches. On conserve les fleurs ainsi que leur mélange avec les bractées dansdes sacs ou des caisses qu’on suspend ou place dans des locaux secs, bien aérés, àl’abri de l’humidité et de la lumière.

Composition chimique. — Les fleurs de tilleul contiennent : huile volatile ( 38 pour100 environ), tanin, glucose, gomme, chlorophylle. On y a trouvé assez récemmentune oxydase et une forte proportion de sels de manganèse, et ces éléments joints àl’huile volatile odorante autorisent, avec quelque raison, à leur attribuer les effetsantispasmodiques du tilleul considéré toujours comme un de nos remèdes les pluspopulaires.

Propriétés thérapeutiques. — Les fleurs de tilleul ont été employées, de tout temps,pour leurs propriétés calmantes, sudorifiques et surtout antispasmodiques. Nul n’afait ressortir leur action bienfaisante dans toutes les classes de la société avec plusde justesse, d’observation et de charme pénétrant que le Dr H. Leclerc dans sonPrécis de Phytothérapie. « La mondaine dont une existence bruyante et vide fait lesdents crissantes de névrose, l’homme des champs qui regagne le soir, courbé par undur labeur, sa chaumière enfumée, le savant dont les veilles prolongées ont ceint lefront d’une couronne migraineuse, tous recourent à l’infusion parfumée que sonarome gracieux, sa saveur discrète, ses propriétés tempérantes leur font rechercher. »Préparations pharmaceutiques — Parmi ces préparations, la tisane est celle quil’emporte de beaucoup. Le Codex de 1908 prescrit 10 gr. par litre en une infusiond’une demi-heure. L’eau distillée sert comme véhicule de potions, 60 à 120 gr. Lesfleurs entrent dans les espèces antispasmodiques avec les fleurs de camomille, lesfeuilles d’oranger et de mélisse. Lorsqu’elles sont pourvues de leurs bractées, ellesdonnent une boisson moins agréable et moins active que les fleurs seules. L’usage aprévalu, mais à tort, d’employer le tilleul-bractées pour la préparation d’un baincalmant à la dose de 5oo gr. pour la quantité d’eau nécessaire, soit 5 pour 100. Onfait servir quelquefois les feuilles et l’écorce pour la préparation de lotionsémollientes. Il n’est pas jusqu’au bois qui ne soit utilisé pour fournir un charbon trèsléger que l’on a recommandé contre la gastralgie et les dyspepsies.

Observations commerciales. — La consommation du tilleul est très importante ;

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c’est une des plantes que nous importons le plus de l’étranger. D’après les Services destatistiques de la Direction générale des Douanes, nous avons importé d’Autriche etde Moravie 686 700 kg de fleurs de tilleul. On ne saurait donc trop recommander derécolter celles qui s’épanouissent sur les nombreux tilleuls de nos bois et sur ceux quifont l’ornement de nos avenues et places publiques, et d’autant plus que notre tilleulest bien plus apprécié et coté à un prix plus élevé que celui de l’étranger. Il est justede dire que, depuis la guerre, l’on s’en préoccupe davantage et qu’on récolte un peupartout le tilleul dit de pays. La sorte commerciale la plus estimée provient desdépartements de Vaucluse, Alpes-Maritimes et Basses-Alpes ; c’est le tilleul deCarpentras recherché pour son parfum très prononcé (A. R. et D. B.). Les prix dutilleul sont très variables en raison de sa qualité et de la récolte de l’année. En 1916,la Feuille d’Informations du Ministère de l’Agriculture cotait, au kilogramme, letilleul-bractées 2 fr. 50 à 2 fr. 75, le tilleul mondé (fleurs seules) 4 fr. 5o à 5 fr. avecmention : vente forte. Depuis, les prix ont oscillé, en 1921, de 4 fr. à 5 fr., tilleul-bractées, 8 à 10 fr. sans bractées. L’an dernier (1924) l’herboristerie en gros a payéles prix suivants pour les différentes sortes tilleul-bractées double 4 fr. à 4 fr. 25 ;tilleul Pays, Alpes ou Auvergne 6 fr. 5o à 7 fr. ; tilleul Carpentras 7 fr. à 7 fr. 50.Les écorces coupées de tilleul 1 fr. à 1fr, 25 le kilogramme. Les fleurs du ’tilleulargenté se vendent également, mais comme leur qualité et leur prix sont inférieurs, ilne faut pas les mélanger avec les sortes précédentes.

Tussilage

Vulgairement appelé Pas d’âne, parce que l’on a comparé la forme de ses feuilles àl’empreinte du sabot de cet animal, le Tussilage (Tussilago Farfara L.). SynanthéréesEupatoriées, tire son étymologie de deux mots latins : tussis, toux et agere, chasser,ce qui indique clairement ses propriétés. On le nomme encore Bechion, Chou de vigne,

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Herbe de Saint Quirin, Taconnet, etc.

Habitat. - Le Tussilage est très répandu dans toute la France, notamment dans tousles terrains humides et argilo-calcaires où il est envahissant, sur les bords des fosséset des rivières et même dans les vignobles.

Description sommaire. - Plante herbacée, vivace, à racine rampante, ramifiée,brunâtre, de la grosseur du petit doigt, émettant des rameaux aériens ou tigesflorifères, cotonneuses, de 10 à 25 cm, apparaissant avant les feuilles et portant desécailles rouges et sessiles. Chacune de ces tiges est terminée par un capitule de fleurs.Feuilles radicales, blanches et cotonneuses en dessous, vertes en dessus, longuementpétiolées, cordiformes ou rappelant, comme il est dit plus haut, l’empreinte du piedde l’âne. Fleurs en capitules solitaires, apparaissant en mars-avril, d’un beau .jauned’or semblable à celui des fleurs du Pissenlit. Fruits (akènes), bruns, oblongs,cylindriques, dont l’ensemble forme une houppe d’aigrettes soyeuses très longues ettrès fines.

Culture. - La multiplication du Tussilage se fait par division des touffes ou parséparation des rhizomes aussitôt après l’arrêt de la végétation indiqué par ladessiccation. des feuilles. (A. R. et D. B.).Dans le Jardin familial, on lui réservera, si possible, un endroit compact, argileux,humide à une exposition demi-ombragée. Dans les jardins botaniques, on obtient laplante à l’aide des graines et elle se reseme d’elle-même. On lui donne les soinsculturaux habituels.

Récolte et séchage, - La récolte des capitules ou fleurs a lieu au printemps. On lescoupe quand ils sont encore en bouton, leur épanouissement complet s’achevantpendant le séchage. Celui-ci doit être effectué rapidement dans un courant d’air enévitant de les remuer beaucoup ; il est même préférable de les porter dans une étuve,afin de chasser complètement l’humidité et de conserver leur belle coloration jaune.Faute de cette précaution, les fleurs noircissent, s’altèrent promptement et perdenttoute valeur marchande.Dix kilogrammes de fleurs fraiches laissent, après dessiccation, 1 kg 920 de fleurssèches.Les feuilles sont ramassées lorsqu’elles ont acquis leur complet développement : ellesdeviennent friables en se desséchant.Composition chimique. - Le Tussilage renferme du tanin, du fer, de faiblesproportions d’huile volatile et une matière résineuse qui, d’après Bondurant, seraitdu caoutchouc.Propriétés thérapeutiques - Les Anciens attribuaient aux feuilles du tussilage,comme principale vertu, celle de combattre la toux, ce qu’indique, d’ailleurs, sonétymologie. Ils en faisaient aspirer la fumée aux asthmatiques ; ce traitement s’estmaintenu encore de nos jours, du moins dans quelques pays ; de plus, l’usage a existépendant assez longtemps en Normandie de mélanger de petites lanières de fleurs

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sèches à du tabac ordinaire dans la proportion de 20 gr. environ de ce dernier pour 5gr. de tussilage.

Préparations pharmaceutiques - On emploie l’infusion de fleurs sèches à la dose de 5gr. par litre (Codex de 1908), mais on la double souvent ; le sirop, entre 30 et 60grammes.Les fleurs entrent dans la composition des espèces pectorales avec les fleurs demauve , de pied-de-chat, de coquelicot, de bouillon blanc, de guimauve et deviolettess, à parties égales ; il en est de même dans la préparation des siropsd’érysimum (vélar) et de grande consoude. Enfin, on utilise parfois les feuilles et lesfleurs en cataplasmes contre certains abcès.

Observations commerciales - La vente des fleurs est forte. L’herboristerie les apayées 1 fr. 50, 4 fr., 4 fr. 50 et même 5 f r. le kilogramme, tandis que les feuillesn’ont atteint que 1 fr. à 1. fr. 20.

Valériane officinale

La Valériane officinale ( Valeriana officinalis L. Valérianacées paraît tirer son nomdu latin « valere » être en bonne santé. Elle a pour synonymes : Valériane sauvage,Herbe aux chats, Herbe de Saint-Georges, Herbe à la meurtrie. Il existe d’autresespèces dont les deux plus connues sont : la Valériane Phu ou grande valériane (Valeriana Ph) et la Valériane des marais ou Valériane dioïque ( Valeriana dioica).Mais bien qu’elles aient, à peu près, les mêmes propriétés que la Valériane officinale,elles ne sont guère employées.

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Habitat. — Très répandue en France, elle croît surtout sur le bord des ruisseaux, desfossés, dans les bois humides, mais parfois aussi au bas des coteaux, dans une terresèche et sablonneuse qui influe sur la coloration des racines. Elle est cultivée depuisquelques années dans le Nord et un peu sur les bords de la Loire.

Description sommaire. — Plante vivace, à tige florifère atteignant jusqu’à i m. 5o dehauteur. Racine tronquée brune en dehors, blanchâtre en dedans, inodore à l’étatfrais, mais prenant par la dessiccation une odeur très désagréable qui plaît beaucoupaux chats et lui a valu un de ses synonymes. La souche forme des stolons nombreuxpouvant donner autant de plantes nouvelles. Feuilles opposées, les inférieurespétiolées, les supérieures sessiles, très découpées en segments nombreux et dentés.Fleurs (juillet-août), d’un blanc rosé, réunies en corymbes au sommet de la tige, àodeur agréable. Corolle infundibuliforme, à limbe évasé. Fruit (achaine) couronnépar une aigrette plumeuse.

Culture. — La valériane croît dans tous les sols ; toutefois, elle préfère ceux quisont frais, aussi doit-on choisir les terrains bas non inondés et peu ensoleillés. Si leJardin familial possède un endroit un peu humide on le lui accordera de préférence,et, s’il se trouve un fossé dans la ferme, l’on en garnira les bords.

Multiplication. — Elle a lieu de deux façons : par semis et par éclats de souche,mais la première est bien plus longue que la seconde qu’il convient de préférer pour larapidité de la production. On consultera avec avantage pour la culture de cetteplante (10 hectares lui sont attribués à Etrechy sous la direction de M. J. Demilly) lelivre de MM. A. Goris et J. Demilly, La culture des plantes médicinales. En voici unrésumé.Par semis. — Vers le mois de juillet, récolter dans une bonne plantation les grainesprovenant d’exemplaires vigoureux et donnant un poids supérieur de racines.Prendre les précautions nécessaires, car les graines très petites et munies d’uneaigrette de poils s’envolent rapidement. Les semer immédiatement sur un bon sol quel’on conservera, autant que possible, humide. Semer sur des planches pour que letravail soit plus facile et ne recouvrir les graines que très légèrement de terre. Lagermination se fera pendant l’automne et les plants continueront à végéter au coursdu printemps. On aura de cette façon, vers le mois d’août de l’année suivante, destouffes déjà d’une certaine vigueur qui pourront alors être replantées à l’automne,mais ce procédé fait perdre un an au point de vue de la récolte, si on le compare àl’emploi de souches.Par éclats de souches. — Sur un sol bien préparé, effectuer, vers le 1er octobre, laplantation de la façon suivante. Diviser les souches de valériane arrachées dans lesbois ou, de préférence, dans une bonne culture, pour avoir du beau plant. Laisser àchaque segment un oeil bien constitué muni de racines à sa base. Une souche devalériane pourra donner suivant sa force 15 à 20 petits plants. Les planterimmédiatement en plein champ à o m. 30 en lignes et à o m. 8o d’écartement, en seservant soit de la charrue, soit d’une pioche, à o m. 10 de profondeur. Recouvrir le

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plant par un léger hersage, puis rouler pour que les racines adhèrent au sol. Dans leJardin familial un gros plantoir adroitement manié suffira. On donnera ensuite lessoins culturaux nécessaires, binages et sarclages, pour empêcher l’envahissement parles mauvaises herbes.

Récolte. — D’après M. J. Demilly, il faut procéder à l’arrachage des racines au moisd’octobre-novembre qui suit la plantation, parce que, d’une façon générale, il fautcultiver la valériane comme une plante annuelle. C’est à tort qu’on pourrait croireque les souches prennent chaque année un plus grand développement et donnent unerécolte de racines de plus en plus abondantes. Il n’en est rien, parce que la tigeélancée formée au moment de la floraison se fane et, en se détruisant, amène ladestruction de toutes les racines qui avaient servi à son développement. Mais commecette tige florifère ne se forme que sur des souches de deux ans, si l’on arrache lesracines la première année, elles seront naturellement plus abondantes. Néanmoins,certains auteurs sont d’avis de préférer les racines de trois ans au moins. Arrachées àla pioche, les racines doivent être nettoyées aussitôt à l’eau courante. Cetteopération est très simple quand elles proviennent d’un terrain sablonneux, maisdevient très difficile lorsqu’elles ont poussé dans un sol argileux ; il faut alors lesfaire tremper quelque temps auparavant pour que la terre se détache mieux.Séchage. Rendement. Conservation. — On étale les racines en couche mince sur desclaies placées dans un grenier ou un hangar très aéré et l’on a soin de les remuerfréquemment. Lorsque les racines sont trop grosses on les fend en deux. Ladessiccation ainsi faite est lente et demande au moins une quinzaine de jours ; aussi,quand la récolte est importante, vaut-il mieux recourir à un séchoir à air chaud. Onestime que le rendement de 10 kg de racines fraîches varie entre 2 kg 5oo et 2 kg 890de racines sèches. La conservation s’effectue dans des sacs ou des caisses placés dansun local très sec et bien aéré. La durée ne doit pas dépasser une année.Composition chimique. — Pendant longtemps on a estimé que la racine de valérianene contenait que : acide valérianique, huile essentielle, matière insoluble dansl’alcool, gomme, ligneux et sels, mais depuis les travaux de MM. J. Chevalier et G.Pouchet, on sait que l’acide valérianique n’existe que dans la plante sèche où il seforme, sous l’influence d’une oxydase, un glucoside et un alcaloïde qui sontpartiellement détruits par la dessiccation. L’action de la valériane est due, non àl’acide valérianique, mais aux éthers du bornéol et surtout à l’alcaloïde et auglucoside.

Propriétés thérapeutiques. — La racine de valériane a été considérée, peut-être àtort, par les Anciens, comme guérissant l’épilepsie ; aujourd’hui, on la reconnaîtsurtout comme un puissant antispasmodique possédant une réelle action dans lesnévroses, l’hystérie, les états neurasthéniques. On l’a préconisée aussi commevermifuge et fébrifuge. D’après certains auteurs, la valériane, à petite dose,augmente l’action des organes digestifs, à dose moyenne, elle excite le systèmenerveux et, à dose trop élevée, elle provoque la sueur et peut occasionner des vertigeset des migraines.

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Préparations pharmaceutiques. — Les nombreuses préparations contenues dans lesformulaires reposent encore en grande partie sur l’emploi de la racine sèche. Al’intérieur : extrait 1 à 10 gr. en pilules ; infusion 10 gr. pour r 000 ; poudre 1 à 20gr. ; sirop 20 gr. ; teinture alcoolique à 20 gr. ; teinture éthérée 2 à 5 gr. Al’extérieur ; décocté 30 gr. pour 1 000. Depuis les travaux de Bourquelot, Goris,Perrot, Arnoud, etc., sur la stérilisation ou stabilisation des plantes médicinales, etdepuis que l’on connaît l’altérabilité des principes de la valériane pendant sadessiccation, il faut préférer les préparations obtenues avec la racine fraîchestabilisée dont voici les principales : extrait mou 1 à 3 gr. ; extrait fluide 10 à 15gr. ; intrait 0gr. 20 à 0gr. 60 ; alcoolature 2 à 10 gr. ; eau distillée 20 à 40 gr.Cependant, si l’on ne dispose que de racine sèche, le Dr H. Leclerc conseille, non soninfusion, mais sa macération à la dose de 10 gr. pour un verre d’eau froide ; laisseren contact 1 2 heures. La poudre de racine est encore utilisée dans la médecinevétérinaire aux doses suivantes : 15 à 30 gr. pour le cheval, 30 à 8o gr. pour le bœuf,5 à 10 gr. pour le mouton et le porc et 0gr. 50 à 3 gr. pour le chien, sous forme debreuvages, d’électuaires ou de lavements contre certaines maladies nerveuses.Observations commerciales. — La consommation et la vente de la valériane à l’étatsec sont toujours très grandes. Avant la guerre nous en importions des quantitésnotables de la Belgique et de l’Allemagne, aussi sa culture a-t-elle été conseillée, enpremière ligne, par la Feuille d’Informations du Ministère de l’Agriculture dans sesnuméros des 11 juillet et 7 novembre 1916. Cet organe eu avait alors établi le prix à0 fr. 45 le kilogramme avec la mention « vente forte ». Ce prix a été souvent dépassédepuis ; en 1924, l’herboristerie en gros a payé les racines sèches 2 fr. 25 à a fr. 50. Ily a donc un réel intérêt à cultiver cette plante en grand, et d’en proposer la vente àl’état frais, maintenant que l’activité des préparations faites avec les racinesfraîches est bien établie comme supérieure à celle des produits obtenus avec lesracines sèches.

Verveine officinale

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Plante merveilleuse des temps antiques, la Verveine Officinale (Verbena officinalis,L.), Verbenacées, qu’il ne faut pas confondre avec la Verveine odorante ouCitronnelle, a pour principaux synonymes, Verveine commune, Verveine sauvage,Herbe sacrée, Herbe de sang. Herbe à tous les maux. L’étymologie de son nom latinVerbena a fait l’objet de plusieurs interprétations. On l’a fait d’abord dériver dusanscrit « vardh » qui veut dire croitre , puis de Vénus ou de veina, veine ; du verbe« verrere », balayer, parce que l’on se servait de cette plante pour balayer les autels.C’était l’Herbe sacrée des anciens Grecs et l’Herbe de Vénus des Romains ; elle étaitégalement vénérée chez ces deux peuples qui s’en servaient dans . leurs solennités enl’honneur de leurs dieux. Les pythonisses ainsi que les druides s’en couronnaientpour rendre leurs oracles. Au Moyen Age on ceignait de ses tiges le front des soldatsvictorieux.

Habitat. - Elle est commune aussi bien dans le nord que dans le midi de la France,sur le bord des chemins, an pied des haies, dans les lieux secs et les terrains incultes.Description sommaire. - Plante herbacée, vivace, à tige carrée, haute de 0,50m à0,80m, dressée ou ascendante, rameuse. Feuilles opposées, longues, profondémentdivisées en lobes inégaux. Fleurs s’épanouissant de juin à septembre, bleu pâle,petites, sessiles, à l’aisselle de petites bractées, réunies en longs épis lâches et trèsgrêles.

Culture. - On multiplie la verveine de graines et de boutures dans toutes les terressubstantielles bien préparées. On sème les graines à l’automne et mieux auprintemps ; on repique les plantules lorsqu’elles sont assez fortes. et on leur donne,en cours de végétation, les soins culturaux habituels.

Récolte et séchage. - La récolte a lieu du mois de juin jusqu’en septembre ; ellecomprend la plante entière ou les feuilles seules mondées, mais toujours avant lecomplet développement des fleurs.Le séchage doit se faire rapidement afin de conserver la couleur des tissus. Dans cebut les bouquets de plantes entières ou de sommités fleuries sont attachés par deuxou trois aux extrémités d’un lien et chaque paquet est ensuite placé à cheval sur unfil de fer ou une corde tendus dans un local très aéré ou un séchoir. Les feuillesmondées sont auparavant étalées en couche mince sur des claies.Composition chimique - La verveine officinale doit sa saveur amère et astringente àun tanin particulier qui, très probablement sous l’influence d’une oxydase, acquiertla propriété de colorer en rouge la partie de l’épiderme sur laquelle on applique laplante pilée. Ce phénomène lui a fait attribuer le pouvoir d’attirer le sang, de là sonnom d’herbe de sang. Elle renferme, en outre, un glucoside, la Verbénaline, isolé parM, Bourdier, et une essence dont la proportion ne devient notable que lorsque laplante est cultivée dans le Midi.

Propriétés thérapeutiques - Il n’y a que très peu de plantes qui aient joui chez les

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Anciens de propriétés aussi merveilleuses que la verveine officinale, tant au point devue surnaturel que thérapeutique, Elle guérissait la fièvre, préservait de la morsuredes serpents venimeux, détruisait les maléfices, conciliait l’amitié et faisaitdisparaître les haines ... Elle servait à composer un philtre d’amour irrésistible. Aumoyen âge et longtemps après, la crédulité et les préjugés populaires lui ont conservéses vertus légendaires contre des maladies les plus différentes : fièvresintermittentes, jaunisse, hydropisie, pierre, pleurésie, etc. Elle augmentait lasécrétion du lait chez les nourrices, d’où le nom d’Herbe à tous les maux qui lui futdonné. Toutefois, les médecins les plus sensés l’employaient comme antispasmodiqueet vulnéraire, et plus spécialement comme antinévralgique et fébrifuge.Après avoir été préconisée comme une panacée universelle, elle est devenue presqueinusitée, cependant son action antithermique a été remise en honneur par le Dr Rocciqui prétend même qu’elle est supérieure à celle de la quinine ! D’après MM. A. Roletet D. Bouret, on l’utilise encore dans les campagnes en décoction ou en infusion,comme résolutif et antiscorbutique. Les feuilles écrasées dans du vinaigre sontappliquées en cataplasme sur le coté ou sur la tête pour calmer le point de côté despleurésies ou les migraines .L’art vétérinaire fait prendre parfois aux animaux l’infusion ou le suc commevulnéraire, astringent, fébrifuge.

Préparations pharmaceutiques - Dans les formulaires qui mentionnent encore laverveine, on ne trouve généralement que l’infusion, à la dose de 5 à 10 grammes parlitre. Cependant le Docteur H. Leclerc , qui a fait l’étude de cette plante, dit avoirobtenu de bons effets de l’extrait fluide de la plante stabilisée, à la dose de 1 à 2cuillerées à café par jour, dans certaines formes légères de névralgie du trijumeau.Observations commerciales - Cette plante est peu demandée par l’herboristerie qui lapaye 1 fr-. 50 à 1fr. 75, environ, le kilogramme.Avec la Verveine officinale se termine l’étude des 50 plantes médicinales quicomposent le Jardin familial dont j’ai indiqué, dès le début, l’utilité de la créationsous ses deux modalités, grand et petit jardin , pour répondre aux nécessités del’heure présente. Malgré la forme condensée sou laquelle j’ai dû traiter chaqueplante, je crois, cependant avoir réuni l’ensemble des renseignements qu’il importe deconnaître surtout en ce qui concerne les trois points de vu les plus importants :culture, propriétés thérapeutiques préparations pharmaceutiques, pour en retirer lesmeilleur résultats pratiques. Et. il me reste à souhaiter que cette étude ait pu fairenaitre dans l’esprit de nombreux lecteurs le désir de réaliser au plus tôt, dans lalimite du possible l’idée mère qui l’a inspirée : la création de petits ou de grandsjardins familiaux de plantes médicinales.Leur utilité est toujours très grande, car, d’après les renseignements que je dois à lacomplaisance de M. le Directeur de l’Office des Matières premières et du ComitéInterministériel , si sous l’influence de ces deux grands organismes la productionfrançaise en plantes médicinales a augment, d’une façon sensible, cependant, on nepeut encore constate. une diminution notable des importations qui se chiffrent, enmoyenne, depuis quelques années, par 8 à 10 tonnes annuellement.

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Par contre, les exportations ont augmenté considérablement. En 1919, ellesn’étaient pour racines, fleurs, feuilles écorces, lichens, baies, fruits et graines, que de5070 tonnes tandis qu’en 1925 elles ont atteint pour les mêmes espèce, 11450tonnes.Pour les herbes, fleurs et feuilles médicinales, la quantité exportée en 1925 a dépasséde 1441 tonnes celle de 1924.Parmi les plantes communes en France ou susceptibles d’être cultivées, certainessont importées en assez grande quantité. On ne peut, à ce sujet, indiquer des chiffresexacts, car l’on ne connaît pour 1926 que les importations du premier semestre. Voiciquelques-unes des plantes dont la quantité importée a dépassé 10 tonnes pour laditepériode : Bardane (racine) Fougère mâle (rhizome) Saponaire Belladone (feuilles) Iris Thym Bourrache Mauve Uva-Ursi ou Busserole Camomille Menthe Chiendent Pissenlit (feuilles et racines) Valériane Datura Queues de cerise

Je signale à l’attention des personnes qui, à un titre quelconque, s’intéressent à laproduction de nos plantes médicinales, celles qui figurent sur cette liste, afin qu’ellespuissent en entreprendre ou intensifier la culture.

Violette Le groupe des violettes a pour seul représentant officinal, mais non thérapeutique, laViolette odorante ( Viola odorata L.) Famille des Violariées, appelée parfois Fleurde Mars, Violette de Mars, Violette cultivée. On lui mélange très souvent laViolette bleue d’Auvergne et la Violette des Cévennes ( Viola sudetica) ; la Violetteou mieux la Pensée des Alpes ( Viola calcarata), ainsi que la Violette à grande fleur (Viola grandiflora). On lui substitue même parfois la Violette inodore ou Violette deschiens ( Viola canina) dont l’action, d’ailleurs, est peu différente.Habitat. — Elle est assez répandue, en France, dans les bois, les haies et les lieuxombragés.

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Description sommaire. — Petite plante herbacée à rhizome rampant, noueux,produisant des stolons traçants, très allongés. Feuilles radicales ovales, un peucordiformes, celles des stolons réniformes. Fleurs (mars à mai), violettes ou bleupourpre, rarement blanches, très odorantes, solitaires à l’extrémité de pédonculesaxillaires ou radicaux. Fruit (capsule) globuleux, uniloculaire, polysperme. Grainesturbinées et blanchâtres.

Culture. — Elle réussit à peu près dans tous les sols, excepté dans ceux qui sont tropsecs ou trop humides, argileux, calcaires ou légers en excès. Elle prospère surtoutdans un terrain bien ameubli, profond, frais, riche en humus et dans une situation àdemi ombragée. Un terrain contenant de l’oxyde de fer avive la couleur des fleurs etdes feuilles. La violette est très cultivée en Provence comme plante à parfum auxcôtés de la violette de Parme ou violette double ; elle l’est aussi aux environs deToulouse pour le bouquet et la confiserie.

Multiplication. — On l’effectue de trois manières différentes : a) par les graines ; b)par les stolons ou coulants ; c) par la séparation des, touffes, mais comme les deuxderniers sont à peu près les seuls employés, je ne parlerai que d’eux. Le terrain doitêtre préparé quelques mois à l’avance par un défoncement estimé par certains à o m.30 à o m. 40 et, par d’autres, entre o m. 60 à o m. 7o, convenablement fumé par desengrais à décomposition lente comme le fumier de ferme : on donne une dernièrefaçon un peu avant la plantation.Par stolons et par séparation des touffes. — Les stolons séparés du pied mère sontmis en pépinière en septembre-octobre pour les planter en mars-avril, ou bien, maisplus rarement, on leur réserve un carré ou une planche inclinée au sud, à une bonneexposition. Subordonné à .la région, le moment de la plantation varie depuis

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l’automne jusqu’au printemps. L’espacement entre les pieds est également variable,tantôt en lignes distantes de o m. 50, tantôt de o m. 40 à o m. 50 dans tous les sens.L’intervalle dans la ligne mesure o m. 25 à o m. 30 ; les planches possèdenthabituellement 2 m. de largeur et sont séparées par de petits ados. On met souventplusieurs pieds dans le même trou.

Soins culturaux. — lls consistent, comme dans presque toutes les plantations, enarrosages pour faciliter, d’une part, la reprise et, d’autre part, le promptdéveloppement de la plante, puis en binages, sarclages et fumures. A l’égard decelles-ci, MM. A. Rolet et Bouret conseillent de répandre après la plantation 15 à20 gr. de nitrate de soude par mètre carré. A l’automne suivant, si la végétation estlanguissante, si les plantes sont éprouvées par les maladies et les insectes, on répandencore la même dose de cet engrais. Enfin, en novembre, avant l’arrosage, on sèmeentre les lignes 15 à 20 gr. de nitrate ou de sulfate d’ammoniaque, 50 à 6o gr. desuperphosphate et 15 à 20 gr. de sulfate de potassium. Dans le Jardin familial, oùl’on ne tient pas autant à la production hivernale des fleurs, on peut se contenter dela première fumure et d’arroser les touffes avec de l’engrais humain mélangé d’eaudans la proportion de 2/3 de celle-ci avec un tiers d’engrais.

Rendement. — Sur le littoral de la Méditerranée, M. Sauvaigo a observé qu’un piedn’est en plein rapport qu’à la deuxième année de sa plantation, et qu’un mètre carréde violettes peut donner, en môyenne, 300 à 400 gr. de fleurs la troisième année.D’après lui, on refait les plantations tous les 4 ans, d’autres reculent à 5 ans ; maïs,s’il s’agit de fournir en même temps des fleurs d’hiver pour la bouqueterie, en terrainfrais ou arrosable, on a intérêt à créer de nouvelles cultures tous les deux ans (A. R.et D. B.).

Récolte. — Elle se fait, par temps sec, pendant toute la durée de la floraison demars à mai. On a soin de ne cueillir que les violettes à peine épanouies mais sans leurpédoncule ; c’est ainsi qu’on doit opérer dans le Jardin familial et non pas avec leurqueue comme on a tendance à le faire. Toutefois, lorsque les fleurs sont abondantes,on a conseillé, dans les Hautes-Alpes, pour aller plus vite, de se servir d’uninstrument à la portée de tous, d’un grand peigne ou démêloir qui permet deramasser une certaine quantité de fleurs à la fois. Comme cet instrument doitramasser en même temps des débris de feuille, on peut se demander si leurenlèvement, qui est obligatoire, ne fait pas perdre le temps gagné sur la cueillette à lamain. Dans certaines régions on récolte aussi, mais en bien moindre quantité, lesfeuilles au moment de la floraison et les racines à l’automne.Séchage et conservation. — Il faut sécher les fleurs le plus tôt possible en les étalanten couches minces sur du papier ou sur des toiles dans un grenier ou hangar très aéré,ou de préférence dans une étuve quand la récolte est abondante ; il ne faut pas lesremuer. D’aucuns ont conseillé la dessiccation au soleil en prenant la précaution derecouvrir les fleurs avec un papier, afin de ne point altérer leur couleur et leurparfum. Aussitôt le séchage terminé, ce qui demande une semaine environ, on met en

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sacs, ou mieux dans de grands bocaux bien bouchés, les fleurs encore tièdes, et on lesgarde dans un local sec, sain, à l’abri de la lumière qui, en les décolorant, leurenlèverait une partie de leur valeur marchande.

Composition chimique. — Les fleurs de violette contiennent de la violine dont lespropriétés se rapprochent beaucoup de celles de l’émétine et lui out valu le nomd’émétine indigène ; en outre, des traces d’acide salicylique, un glucoside (violaquercitine), une huile essentielle, deux acides, une matière colorante qui rougit parles acides et verdit par les alcalis.

Propriétés thérapeutiques. — Si les Modernes ont fait de la violette « l’emblème dela modestie », il n’en est pas de même chez les Anciens qui, entre autres « vertus »,lui reconnaissaient celle de dissiper l’ivresse ; aussi, comme l’a rappelé le D’ H.Leclerc, dans son « Étude sur la Violette » (Courrier médical, 1920), les Anciensavaient-ils l’habitude de s’en ceindre le front dans les festins. L’École de Salerne laconsidérait comme le remède (prou pudor !) le plus efficace de la migraine a crapula.De nos jours les fleurs constituent encore un remède populaire pour leurs propriétéssudorifiques, béchiques et expectorantes ; elles font partie des fleurs pectorales duCodex. Les feuilles sont réputées émollientes et diurétiques, les racines purgatives etvomitives.

Préparations pharmaceutiques. — On peut employer les fleurs, les feuilles et lesracines, mais les premières sont toujours, à vrai dire, les seules très fréquemmentusitées toutefois les dernières ont été regardées depuis longtemps comme le meilleursuccédané de l’ipécacuanha. Le Codex prescrit comme infusion 10 gr. de fleurs dansun litre d’eau bouillante pendant une demi-heure. Le savant thérapeute sus-désignéconseille, comme émétique, de faire bouillir 15 à 20 gr. de racines finement inciséesdans 300 gr. d’eau jusqu’à réduction de moitié, et, comme expectorant, 4 ou 5 gr., etd’édulcorer la décoction avec 50 gr. de sirop de fleurs fraîches. Celui-ci est préparéavec ioo gr. de pétales frais de violettes mis à infuser 12 heures dans un litre d’eaubouillante dans un récipient couvert, L’infusion, après dépôt de quelques heures etdécantation, est additionnée de 1800 gr. de sucre blanc qu’on fait dissoudre au bain-marie couvert. Ce sirop d’un vert foncé, quand il est bien préparé, est de goûtagréable. On l’administre aux jeunes enfants par cuillerées à café. En chimie, cesirop étendu d’eau a servi, pendant quelque temps, comme réactif des alcalis et desacides pour les raisons indiquées plus haut. En teinturerie, les fleurs de violettepeuvent donner une couleur bleu-pourpre.

Observations commerciales. — La culture de la violette odorante est fortement àrecommander ainsi que sa récolte à l’état sauvage, car sa consommation est trèsgrande et dépasse la quantité recueillie en France. Le commerce français de ladroguerie a importé, en 1922, 22 000 kg de fleurs. Le prix moyen des violettesd’Auvergne, tablie en juillet 1916, était de 3 à 4 francs le kilogramme. Depuis, il abeaucoup varié ; il est monté d’abord entre 6 à 7 fr., et, en 1925, l’herboristerie en

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gros a payé 10 à 12 fr. les fleurs des Alpes et 12 14 fr. celles d’Auvergne. Les feuillesont valu 1 fr. 50 à 1 fr. 75 et les racines 4 fr. à 4 fr. 50 le kilogramme.