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Triste solitude, fidèle compagne Daniel Dugouchet

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Triste solitude, fidèle compagne

Daniel Dugouchet

7.04 659559

----------------------------INFORMATION----------------------------Couverture : Classique

[Roman (134x204)] NB Pages : 72 pages

- Tranche : 2 mm + (nb pages x 0,055 mm) = 5.96 ----------------------------------------------------------------------------

Triste solitude, fidèle compagne

Daniel Dugouchet

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Ma vie d’avant

n avril-mai 2001, j’avais commencé à écrire mes mémoires. Disons que c’était plutôt un résumé de ma simple existence, depuis ma modeste

naissance, le 31 juillet 1943, jusqu’au 21 décembre 1984, date à laquelle nous réaménagions dans une tour du « bon vieux » quartier de l’Europe que nous avions quitté durant quelques années, après avoir vécu une expérience pas très concluante dans un petit pavillon de plain-pied. Enfin, passons ; ceci appartient au passé.

A la fin de la dernière période que j’avais intitulé « ma troisième vie », je faisais mention d’une certaine Claudie qui, peu à peu, était entrée dans mes rêves en même temps que dans mes idées et mon esprit et enfin, dans ma vie. A l’époque, j’avais clos le chapitre en disant que « les gens heureux n’ont pas d’histoire » ; ce qui est partiellement vrai.

En fait, cette petite brunette a commencé à attirer mon attention quelque temps après son arrivée dans cet atelier qui, rappelons-le, était mixte. Cela devait se

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situer aux alentours d’avril 1974. Ainsi que vous le remarquerez, beaucoup de temps s’est écoulé avant la date capitale du 24 septembre 1977. Mais, en ce temps-là, nous ne montrions pas pressés comme maintenant en matière d’impressions. Nous passions d’agréables moments ensemble, tout en s’interrogeant l’un et l’autre sur notre avenir. Peut-être aussi que les conseils judicieux d’un ami ont fait pencher « la balance de ses tendres sentiments » en ma faveur : ça, on ne le saura jamais.

Certes, au cours de ces 36 longues années de vie commune, nous avons connu (il en est de même généralement pour la majorité des couples), tous les aléas rencontrés dans l’existence : des bons moments, des médiocres… et des franchement mauvais ! Nous avons été parfois « au creux de la vague », mais nous avons su, avec notre volonté inébranlable, le remonter. Seulement, à cette époque, nous étions deux : ma petite Claudie, mon véritable rayon de soleil était là pour me soutenir, me stimuler, m’encourager, mais il m’arrivait aussi de faire pareil à son égard. La force tranquille et inéluctable du couple indestructible était toujours présente.

La puissance d’être deux est indéniable ; hélas, lorsque vous vous retrouvez brutalement seul, toutes vos volontés, toutes vos forces morales vous abandonnent brusquement ! C’est ce que je vis présentement et je ne souhaite à quiconque de le vivre !

Evidemment, au cours de cette vie communautaire

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riche en événements divers, il y eut parfois quelques frictions, quelques discordances certains jours ; pourquoi s’en cacher, cela se produit couramment au sein de la plupart des couples. Cela est un peu le sel, le piment du repas quotidien, mais aussi, le ciment qui consolide, renforce le rempart contre les attaques brutales et sournoises de cette même vie journalière. Ces disputes, généralement, étaient de courte durée, car l’un et l’autre, nous n’avions pas la rancune tenace comme chez certaines personnes : ces éclats de voix se limitaient, en moyenne, à quelques minutes, au pire, à quelques heures. Une fois la « tempête » passée, le soleil brillait à nouveau dans un ciel où subsistaient juste des nuages insignifiants.

Ainsi, nous avons vogué au long des ans sur les flots de l’existence en essayant d’atteindre la rive, d’accéder au port sans trop d’encombre ; ce ne fut pas toujours facile mais, bon an, mal an, nous tenions fermement la barre et maintenions le cap contre vents et marées. Nous avons mené une vie paisible et partiellement normale (hormis les aléas courants et habituels) jusqu’en juillet 2011 environ. A partir de cette période, elle commence à rencontrer des difficultés pour marcher ; de la canne, elle doit progressivement passer au déambulateur.

De ce fait, elle ne peut plus s’occuper de moi comme auparavant, quand elle était encore ma tierce personne, de même en ce qui concerne la cuisine et le ménage. Par conséquent, à partir de cette période,

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nous avons du faire appel à un infirmier pour le coucher et le lever et à une auxiliaire de vie pour la préparation des repas. Déjà, notre rythme d’existence était différent, mais nous nous en contentions malgré tout : d’ailleurs, nous n’avions pas le choix !

Au cours de ce laps de temps, elle effectue plusieurs brefs séjours à l’hôpital et un plus long en septembre 2012 à Maison Blanche : elle en sort… avec des escarres aux talons, ce qui la condamne au fauteuil roulant ! En dépit de ces malheurs, elle garde néanmoins le moral et moi, je conserve le mien, bon gré mal gré.

Puis, fin juin 2013, elle rencontre quelques petits problèmes de santé et, pour cette raison, le médecin traitant ordonne une hospitalisation du 23 juillet au 4 septembre 2013 pour un bilan complet. Premier diagnostic : sa vésicule biliaire fonctionne mal, ce qui lui donne un teint cireux et jaune ! Après une intervention chirurgicale, ça va mieux. Cependant, au cours de ce même mois, le second diagnostic tombe tel un couperet : cancer du pancréas ! Commence alors les séances de chimio auxquelles Claudie réagit plutôt bien dans l’ensemble, ce qui lui permet de revenir à la maison durant environ une quinzaine de jours.

Le 19 septembre de cette même année, dans le service ambulatoire où elle doit subir une nouvelle séance de chimio, les médecins découvrent qu’elle a une très forte fièvre occasionnée par un cathéter mal

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posé, d’où une grave infection : elle s’en sortira difficilement après un lourd traitement aux antibiotiques ! Evidemment, pendant cette période, elle ne peut recevoir de chimiothérapie. Elle est donc hospitalisée à Robert Debré jusqu’au 15 octobre.

Au cours de cette période, son état de santé se dégrade assez rapidement : ses sœurs et moi-même, souvent à son chevet, nous nous en apercevons mais, au fond de notre esprit, je crois que nous ne voulons pas le reconnaître. De son côté, courageuse comme elle a toujours su l’être, Claudie ne se plaint jamais : en dépit de tout, sa volonté force l’admiration ! Quand on l’interroge, « ça va toujours » ; elle ne dit rien mais, en elle-même, je pense qu’elle se sent, qu’elle se sait condamnée !

Le 15 octobre, elle rentre chez nous où nous devons installer un lit médicalisé dans la petite chambre dans laquelle nous avons du faire rapidement le vide pour que celui-ci puisse y entrer. En dépit de ces préparatifs, les choses se précipitent. En moins d’une semaine, elle ne s’alimente pratiquement plus, elle éprouve des difficultés à mastiquer, à déglutir, à boire, puis à respirer ; ses bronches sont encombrées !

Le 21 octobre 2013, la date fatidique ; vers 14 h 30, lorsque je remonte du courrier, un silence bizarre pèse dans la pièce : Claudie a rendu son dernier souffle ! Vous dire ce que j’ai vécu à partir de cet instant ; j’étais comme dans un état second.