transmission des savoir-faire traditionnels du bâtiment, mise ......sance professionnelle pour les...

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10 INTERREG A SUIVRE N o 64, SEPTEMBRE 2014 Un projet de coopération «Interreg» a été construit à l’échelle des territoires du Haut- Jura franco-suisse avec pour maîtres d'ou- vrage l'Association romande des métiers du patrimoine bâti (ARoMPB), chef de file côté suisse, le Parc naturel régional du Haut-Jura (chef de file français) et le Musée de plein- air des maisons comtoises de Nancray. Plu- sieurs collaborations sont en cours et font appel à divers prestataires: écoles et asso- ciations professionnelles, service cantonaux des monuments et des sites, parcs naturels régionaux, fondations, etc. Le financement de ce projet est assuré pour le volet suisse par «Interreg», les cantons de Berne, Fribourg, Neuchâtel, Vaud, la Loterie romande, la fondation Sandoz Family Office SA, la Fédération vaudoise des entrepre- neurs et le Centre patronal vaudois. Un manque avéré au niveau de la formation touche plusieurs métiers liés au patrimoine bâti. Certains des savoir-faire traditionnels sont en voie de disparition, car les artisans maîtrisant ces techniques sont devenus peu nombreux et n'ont pas toujours la possibilité de transmettre leur métier. Trois domaines ont été retenus pour ce projet Interreg qui s'achèvera en juin 2015: les couvertures et bardages de façades en bois fendu (bar- deaux, appelés aussi anseilles, tavillons); les murets et murs de soutènement en pierres sèches et enfin les enduits et badigeons de chaux. D'autres domaines pourraient rejoin- dre, après cette échéance, les préoccupa- tions de l'ARoMPB, comme la taille de pierre, la restauration des charpentes, la res- tauration et la construction de poêles en faïence, etc… Ces savoir-faire et techniques ont une im- portance primordiale pour la bonne conser- vation du bâti et des paysages de nos territoires auxquels ils sont adaptés techni- quement et esthétiquement. Leur intérêt réside également dans une mise en œuvre respectueuse de l'environnement et ré- pondant aux exigences du développement durable. Ce projet poursuit ainsi un double objectif: 1. Le préservation et de protection du pa- trimoine bâti, centré surtout sur le patri- moine rural, celui du quotidien, qui a été adapté aux modifications familiales, aux changements d’activités économiques. Les interventions qui le concernent sont menées souvent sans maîtres d’œuvre et plusieurs artisans se succèdent sur un chantier, sans toujours mesurer les enjeux de conservation ou les interfaces à gérer entre corps d’état. Il est donc primordial d’apporter aux artisans des territoires des notions générales sur le patrimoine bâti, ses caractéristiques essen- tielles, les éléments à conserver ; 2. Le développement local et de reconnais- sance professionnelle pour les artisans qui s’inscrivent dans des démarches de préser- vation des savoir-faire traditionnels. Ils doi- vent être confortés, identifiés et reconnus professionnellement afin d’être à même de développer leur activité. Cette reconnais- sance doit être individuelle, mais également collective à travers la mise en réseau des ar- tisans spécialistes du patrimoine du Haut- Jura franco-suisse. Le projet «Interreg» Transmission des savoir- faire traditionnels du bâtiment – Mise en ré- seau et valorisation des artisans a fait l’objet d’une candidature au titre du programme Interreg IVA France-Suisse dans le cadre de la Mesure 1.1: Appui aux entreprises, «par- tenariats entre entreprises et organismes de recherches» et de la Fiche-action 1: «Appui aux entreprises et accompagnement dans le cadre de démarches collective». INTERREG Transmission des savoir-faire traditionnels du bâtiment, mise en réseaux et valorisation des artisans

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INTERREG A SUIVRE No 64, SEPTEMBRE 2014

Un projet de coopération «Interreg» a étéconstruit à l’échelle des territoires du Haut-Jura franco-suisse avec pour maîtres d'ou-vrage l'Association romande des métiers dupatrimoine bâti (ARoMPB), chef de file côtésuisse, le Parc naturel régional du Haut-Jura(chef de file français) et le Musée de plein-air des maisons comtoises de Nancray. Plu-sieurs collaborations sont en cours et fontappel à divers prestataires: écoles et asso-ciations professionnelles, service cantonauxdes monuments et des sites, parcs naturelsrégionaux, fondations, etc.

Le financement de ce projet est assuré pourle volet suisse par «Interreg», les cantons deBerne, Fribourg, Neuchâtel, Vaud, la Loterieromande, la fondation Sandoz Family OfficeSA, la Fédération vaudoise des entrepre-neurs et le Centre patronal vaudois.

Un manque avéré au niveau de la formationtouche plusieurs métiers liés au patrimoinebâti. Certains des savoir-faire traditionnelssont en voie de disparition, car les artisansmaîtrisant ces techniques sont devenus peunombreux et n'ont pas toujours la possibilitéde transmettre leur métier. Trois domainesont été retenus pour ce projet Interreg quis'achèvera en juin 2015: les couvertures et

bardages de façades en bois fendu (bar-deaux, appelés aussi anseilles, tavillons); lesmurets et murs de soutènement en pierressèches et enfin les enduits et badigeons dechaux. D'autres domaines pourraient rejoin-dre, après cette échéance, les préoccupa-tions de l'ARoMPB, comme la taille depierre, la restauration des charpentes, la res-tauration et la construction de poêles enfaïence, etc…

Ces savoir-faire et techniques ont une im-portance primordiale pour la bonne conser-vation du bâti et des paysages de nosterritoires auxquels ils sont adaptés techni-quement et esthétiquement. Leur intérêtréside également dans une mise en œuvrerespectueuse de l'environnement et ré-pondant aux exigences du développementdurable.

Ce projet poursuit ainsi un double objectif:

1. Le préservation et de protection du pa-trimoine bâti, centré surtout sur le patri-moine rural, celui du quotidien, qui a étéadapté aux modifications familiales, auxchangements d’activités économiques. Lesinterventions qui le concernent sont menéessouvent sans maîtres d’œuvre et plusieursartisans se succèdent sur un chantier, sans

toujours mesurer les enjeux de conservationou les interfaces à gérer entre corps d’état.Il est donc primordial d’apporter aux artisansdes territoires des notions générales sur lepatrimoine bâti, ses caractéristiques essen-tielles, les éléments à conserver;

2. Le développement local et de reconnais-sance professionnelle pour les artisans quis’inscrivent dans des démarches de préser-vation des savoir-faire traditionnels. Ils doi-vent être confortés, identifiés et reconnusprofessionnellement afin d’être à même dedévelopper leur activité. Cette reconnais-sance doit être individuelle, mais égalementcollective à travers la mise en réseau des ar-tisans spécialistes du patrimoine du Haut-Jura franco-suisse.

Le projet «Interreg» Transmission des savoir-faire traditionnels du bâtiment – Mise en ré-seau et valorisation des artisans a fait l’objetd’une candidature au titre du programmeInterreg IVA France-Suisse dans le cadre dela Mesure 1.1: Appui aux entreprises, «par-tenariats entre entreprises et organismes derecherches» et de la Fiche-action 1: «Appuiaux entreprises et accompagnement dans lecadre de démarches collective».

INTERREG

Transmission des savoir-faire traditionnels du bâtiment,mise en réseaux et valorisation des artisans

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INTERREGA SUIVRE No 64, SEPTEMBRE 2014

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Il est organisé en quatre axes principaux:

1. Synthèse des connaissances et mise à dis-position de celles-ci pour les formations

2. Transmission des savoir-faire traditionnels,formation des artisans

3. Mise en réseau et promotion des artisans,

4. Communication sur les savoir-faire tradi-tionnels à destination du grand public,

Le premier axe consiste: à recenser les étudesexistantes sur la base des publications, re-cherches menées par l'Étude des maisons ru-rales de Suisse, le Musée de plein-air desMaisons Comtoises, et le Parc naturel régio-nal du Haut-Jura portant sur les trois savoir-faire retenus; à établir des documentspédagogiques de cours présentant les tech-niques et savoir-faire traditionnels retenus.Pour chacun de ces savoir-faire les supportsde cours seront établis en mettant en reliefles similitudes et différences des pratiquesfrançaises et suisses.

Le deuxième axe poursuit un but de forma-tion aux savoir-faire traditionnels avec desgénéralités et des formations spécifiques enlien avec des organismes de formationscontinues. En Suisse, plusieurs écoles pro-fessionnelles ont été identifiées pour mettreen œuvre ces cours, avec pour objectif dedéboucher sur un brevet fédéral. En France,des contacts ont été pris avec des orga-nismes de formations continues dans le do-maine des métiers du bois, de l’aména-gement et de l’agriculture afin que des mo-dules spécifiques puissent être intégrés dansdes formations préexistantes.

Le troisième axe consiste à créer des réseauxd’artisans du patrimoine franco-suisse et deconcrétiser ce réseau par l’attribution d’unemarque, reconnaissance, label collectif dontles critères d’attribution seront élaborés avecles artisans et leurs représentants.

Le quatrième axe consacré à la communica-tion se décline en deux volets:

– rédiger et éditer un ouvrage commun afinde faire connaître et reconnaître les savoir-faire traditionnels mis en œuvre. Il sera éga-lement proposé de montrer, au traversd’exemples, l'adaptation technique relativeaux enjeux du développement durable.

L’ouvrage s’appuiera sur des témoignagesd'architectes, d'artisans, de maîtres d'ou-vrages et présentera des projets de restau-ration ainsi que des projets contemporains.Les éléments bibliographiques issus du re-censement seront repris ainsi qu’une liste depersonnes ressources: artisans, architectes,maîtres d’ouvrage... en lien avec le projet In-terreg.

– Création de films et d'une exposition iti-nérante valorisant les savoir-faire des arti-sans et le projet Interreg dans son ensemble.

– Réalisation de manifestations grand publicdestinées à faire connaître le projet et les ar-tisans y participant, à débattre sur la notionde patrimoine bâti et de territoire, et leschamps d’actions ouverts par cette question.

Les formations en Suisse romande

Les formations prévues en Suisse romandesont développées en collaboration avec qua-tre écoles professionnelles. Elles débouche-ront sur des certifications par celles-ci, lesassociations professionnelles et l'ARoMPBdans un premier temps, avec en point demire la mise en place de brevets fédérauxdans un second temps.

Tavillons et bardeaux

Le projet de cours sur les matériaux de cou-verture se déroule en étroite collaborationavec le Centre de perfectionnement inter-professionnel de Fribourg (CPI) et l'Associa-tion romande des tavillonneurs (ART).

Le programme se déclinera en quatre mo-dules: fabrication, préparation avant pose,pose et pose avancée. Les cours débuterontdans le courant de cet hiver, l'été et l'au-tomne n'étant pas favorables à leur orga-nisation en raison de l'occupation desparticipants pressentis sur les chantiers,comme d'ailleurs pour les autres modules.

Chape en tavillons au Crêt-Lecloultre (c. du Chenit)

Détail de toiture sur le chalet

du Creux-du-Croue (c. d’Arzier)

Pose de tavillons sur une façade à Sainte-Croix

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Maçonneries et enduits à la chaux

Les cours sur les maçonneries et enduits à lachaux seront placés sous la direction duCentre professionnel des métiers du bâti-ment de Colombier (Neuchâtel) en collabo-ration étroite avec la Section conservationde l'Office du patrimoine et de l'archéologiede la République et canton de Neuchâtel.

Ils seront dispensés par M. Roger Simond,expert sur le plan romand en maçonnerie àla chaux touchant au domaine patrimonial.Les premiers cours seront organisés dansune halle du Centre de Colombier. Une pre-mière date est réservée: du 9 au 21 février,avec une option de réserve du 2 au 14 mars,si le nombre d'inscriptions justifie un courssupplémentaire. Une visite introductive sur leterrain comptant des exemples sera organi-sée préalablement au cours proprement dit.

Murs de pierres sèches

La formation des maçons de pierres sèchesse déroulera en étroite collaboration avec laFédération suisse des maçons de pierressèches. Plusieurs cours partiels, principale-ment de «sensibilisation» sont déjà présentsdans ce domaine et dispensés par diversesorganisations. L'école des métiers de la terreet de la nature à Cernier a pour vocation demettre en place des post-formations, et deprolonger celle destinée aux paysagistes, quicomprend un volet théorique sur les mursde pierres sèches. Nous prévoyons égale-ment de joindre à notre démarche l'Ecoled'agriculture de Châteauneuf en Valais quidispense depuis plusieurs années des courssur la construction des murs de soutène-ment en pierres sèches. Les examens de finde module et celui de fin d'étude seront or-ganisés pour les murs de clôture en pierressèches à la Halle des maçons de Moutier. LesParcs jurassiens (Parc naturel régional Juravaudois, Parc naturel régional Chasseral,Parc naturel régional du Doubs) sont de-mandeurs dans ce domaine et participentactivement comme partenaires de ce projet.Le prochain cours se déroulera dans la ré-gion de La Montagne-de-Cernier – LesVieux-Prés, les 18, 19, 24, 25 et 26 septem-bre prochains.

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Reconnaissance des cours

Toutes ces formations se dérouleront selondes modules qui feront chacun l'objet d'unereconnaissance par le biais de certificats dé-livrés par les Ecoles et Associations profes-sionnelles concernées ainsi que parl'ARoMPB qui pilote ce projet Interreg. Desexamens finaux couronneront la formation.

Brevet fédéral

Une reconnaissance par la Confédération deces post-formations est hautement souhai-table en suivant la voie d'un brevet fédéral.Des démarches sont en cours pour les ma-çons de pierres sèches afin d'analyser, encollaboration avec l'Institut fédéral deshautes études en formation professionnelle(IFFP) de Renens près de Lausanne, l'oppor-tunité de développer un brevet fédéral.Cette démarche pourra également être en-visagée pour les tavillonneurs.

Pour les maçonneries de moellons à lachaux, une intégration à la formation Arti-san en conservation du patrimoine culturelbâti peut être envisagée. Les cours, dispen-sés actuellement uniquement en langue al-lemande, débouchent sur un brevet fédéral.Des cours en français devraient être organi-sés en Suisse romande; les artisans suivantnos formations pourront ainsi poursuivre parce biais leur cursus jusqu'à l'obtention d'unbrevet fédéral.

L'action de l'Association romande du patri-moine bâti se poursuivra après l'échéancedu projet «Interreg», de manière à pouvoirsuivre le projet de brevets fédéraux jusqu'àleur terme et faire bénéficier de son expé-rience d'autres projets dans le domainecomplexe du patrimoine construit.

Contacts :

Association Romande des Métiers du Patrimoine Bâti, Daniel Glauser, secrétaireRue de la Charmille 8. CH -1450 Sainte-Croix tél.: 0041 (0)24 454 28 65, courriel: [email protected].

Couvertures et revêtements en bois

Centre de perfectionnement interprofessionnel,Stéphane Rolle, directeurRoute des Grives 2CH -1763 Granges-PaccotTél.: 0041 79 447 18 46courriel: [email protected]

Murs de pierres sèches

EMTN – CernierPierre-Alain Berlani, directeurRoute de l'Aurore 3CH - 2053 CernierTél.: 0041 (0)32 717 4500, courriel: [email protected]

Maçonnerie à la chaux

Centre professionnel des Métiers du BâtimentChristophe Pétremand, coordinateur formation d’adultesCP 48 - Les Longues-Raies 11CH - 2013 ColombierTél.: 0041 (0)32 843 48 40, courriel: [email protected]

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51. Détail de crépi sur une ferme du Val-de-Ruz

2. Encadrements peints en gris, à Lutry

3. Mur en pierres sèches sur le pâturage du Couchant (c. du Chenit)

4. Murs en pierres sèches entourant une doline au Croue (c. d’Arzier)

5. Détail d’un mur en pierres sèches, dans la combe des Amburnex