tosani à cheval français

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Cher François, Tu as raison de remémorer tous ces projets dont tu as été l‘initiateur, le maître d’ouvrage et que le Musée Niépce a produit. Nous en avons assuré la maîtrise d’œuvre chacun à notre façon pour reprendre les termes de l’architecture car c’est en l’occurrence les villes, les territoires, les lieux qui nous rapprochent dans ces projets passés comme ceux à venir… La notion de lieu (être là) en photographie m’apparaît de plus en plus primordiale et il me semble que l’écart s’amplifie encore avec l’ubiquité latente de la société mondialisée et de ses moyens de communication. Que dire d’une cuillère agrandie, d’une pluie battante, d’un portrait Braille, de la naissance d’une tête, de chaussures remplies de lait… si ce n’est qu’il s’agit d’amplifier notre proximité à un réel bien tangible où la photographie ferait l’expérience de cette tangibilité. Si l’on revenait à l’étymologie de ce mot, il s’agirait littéralement de toucher le réel. C’est pour cette raison que la photographie aujourd’hui reste pour moi le médium essentiel des recherches artistiques contemporaines en tout cas que je l’utilise sans lassitude et de ton coté je crois que tu l’interroges sans limite dans l’immensité de son champ et la diversité de ses pratiques. Et curieusement, j’oserai un autre raccourci que le réel est fortement politique, celui de nos vies par ses engagements, ses résistances, ses mises à distance. J’ai l’impression que dans tes lignes, tu as mis en avant ces attitudes ou chacun peut s’y reconnaître ou se les approprier. C’est aussi peut-être l’anthropologie qui nous rapproche, toi au cœur de la question dans ta réflexion, ton regard et ton action, Claire dans son questionnement sur la place de l’homme dans la ville, dans l’espace et moi sans doute comme Mr Jourdain ou l’importance des objets (de l’objectivation) a longtemps masqué la question. Tu as rappelé « l’épopée « du Grand Tour, le voyage en Palestine et en Syrie qui a marqué un tournant dans mon travail justement à révéler cette question du politique. Des propositions formelles qui ne sont pas un commentaire sur le politique (l’événement) mais une imprégnation du politique dans la forme, du visage dans la couleur… Ce travail a été difficile dans sa conceptualisation, dans sa réalisation. Il a suscité de l’incompréhension auprès du public mais il m’aura permit de révéler la présence du politique dans d’autres séries et de constater la proximité que je peux avoir avec des travaux comme celui de Claire proche d’un réel déplié et ouvert. Ce qui nous amènera progressivement à notre projet « Rapprochement » de Cuenca… Bien amicalement Patrick

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Que dire d’une cuillère agrandie, d’une pluie battante, d’un portrait Braille, de la naissance d’une tête, de chaussures remplies de lait… si ce n’est qu’il s’agit d’amplifier notre proximité à un réel bien tangible où la photographie ferait l’expérience de cette tangibilité. Si l’on revenait à l’étymologie de ce mot, il s’agirait littéralement de toucher le réel. Bien amicalement Cher François, Patrick

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Cher François, Tu as raison de remémorer tous ces projets dont tu as été l‘initiateur, le maître d’ouvrage et que le Musée Niépce a produit. Nous en avons assuré la maîtrise d’œuvre chacun à notre façon pour reprendre les termes de l’architecture car c’est en l’occurrence les villes, les territoires, les lieux qui nous rapprochent dans ces projets passés comme ceux à venir… La notion de lieu (être là) en photographie m’apparaît de plus en plus primordiale et il me semble que l’écart s’amplifie encore avec l’ubiquité latente de la société mondialisée et de ses moyens de communication. Que dire d’une cuillère agrandie, d’une pluie battante, d’un portrait Braille, de la naissance d’une tête, de chaussures remplies de lait… si ce n’est qu’il s’agit d’amplifier notre proximité à un réel bien tangible où la photographie ferait l’expérience de cette tangibilité. Si l’on revenait à l’étymologie de ce mot, il s’agirait littéralement de toucher le réel. C’est pour cette raison que la photographie aujourd’hui reste pour moi le médium essentiel des recherches artistiques contemporaines en tout cas que je l’utilise sans lassitude et de ton coté je crois que tu l’interroges sans limite dans l’immensité de son champ et la diversité de ses pratiques. Et curieusement, j’oserai un autre raccourci que le réel est fortement politique, celui de nos vies par ses engagements, ses résistances, ses mises à distance. J’ai l’impression que dans tes lignes, tu as mis en avant ces attitudes ou chacun peut s’y reconnaître ou se les approprier. C’est aussi peut-être l’anthropologie qui nous rapproche, toi au cœur de la question dans ta réflexion, ton regard et ton action, Claire dans son questionnement sur la place de l’homme dans la ville, dans l’espace et moi sans doute comme Mr Jourdain ou l’importance des objets (de l’objectivation) a longtemps masqué la question. Tu as rappelé « l’épopée « du Grand Tour, le voyage en Palestine et en Syrie qui a marqué un tournant dans mon travail justement à révéler cette question du politique. Des propositions formelles qui ne sont pas un commentaire sur le politique (l’événement) mais une imprégnation du politique dans la forme, du visage dans la couleur… Ce travail a été difficile dans sa conceptualisation, dans sa réalisation. Il a suscité de l’incompréhension auprès du public mais il m’aura permit de révéler la présence du politique dans d’autres séries et de constater la proximité que je peux avoir avec des travaux comme celui de Claire proche d’un réel déplié et ouvert. Ce qui nous amènera progressivement à notre projet « Rapprochement » de Cuenca… Bien amicalement Patrick