thème 3 dynamiques géographiques de grandes aires

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1 Thème 3 – Dynamiques géographiques de grandes aires continentales L'Amérique : puissance du nord, affirmation du sud Chapitre 3. Le continent américain entre tensions et intégrations régionales Le sujet de composition envisageable : - Le continent américain : entre tensions et intégrations régionales Introduction : Deux ensembles issus des colonisations européennes se sont construits sur un même territoire amérindien avec des bases politiques, économiques et culturelles différentes, ouvrant la voie au grand clivage qui oppose aujourd’hui encore l’Amérique anglo-saxonne et l’Amérique latine, elle-même divisée en deux aires : hispanophone et lusophone. * Diaporama : traité de Tordesillas + 13 colonies : qui le 7/6/1494 partage le nouveau monde entre Espagne et Portugal Le continent américain s'étend sur une superficie de 42 M de km², 15000km du N au S, 44 états et 1 Md d'habitants, c’est le deuxième après l’Asie En terme géoéconomique et géopolitique, le continent reste caractérisé par la fracture Nord-Sud, de grands écarts de richesse et par le poids des États-Unis ; les États-Unis représentent 23% de la superficie du continent, un tiers de sa population et 80% de son PIB. Mais on assiste à une montée en puissance de l’Amérique latine, à l’émergence de certains pays, grâce notamment à des politiques d’intégration régionale. Rappel : l’Intégration régionale désigne : une association d’États appartenant à une même région du monde qui ont pour objectif de créer un ensemble régional plus vaste. Cet élargissement se traduit par l’intensification des échanges et des flux entre ces États et par des relations privilégiées au sein des espaces transfrontaliers. PROBLEMATIQUE : quelles sont les dynamiques territoriales du continent et les initiatives d’intégration régionale reflètent-elles ou résorbent-elles les tensions qui affectent le continent américain ? I. L'Amérique : un Nord et des Suds ? A) Un continent structuré mais soumis à de forts contrastes de développement 1 ) Un espace structuré par des flux Les flux de personnes, de marchandises, de capitaux, Sud-Nord et Nord-Sud participent à la structuration du continent. Quels sont-ils ? a) Diasporas* et flux migratoires *Désigne l'existence de communautés de migrants sur un territoire étranger (historiquement juifs, arméniens ou encore chinois). Aujourd’hui, les Etats-Unis sont la première terre d’accueil pour les nouveaux immigrants : 52% viennent d’Amérique latine, 26% d’Asie soit entre les légaux et illégaux près de 1M d’immigrés par an. Depuis les années 1960 les entrées légales sont nombreuses : 700000/an = la moitié des entrées de toute la planète, Une immigration surtout choisie : phénomène de brain drain = « drainage des cerveaux » : départ vers les Etats- Unis d’élites scientifiques et intellectuelles d’autres pays. Les besoins de main-d’oeuvre sont réels et les flux autorisés ne suffisant pas, les entreprises utilisent souvent les services d’immigrants clandestins, tout particulièrement dans les Etats fédérés du sud.

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Thème 3 – Dynamiques géographiques de grandes aires continentales

L'Amérique : puissance du nord, affirmation du sud

Chapitre 3. Le continent américain entre tensions et intégrations régionales

Le sujet de composition envisageable : - Le continent américain : entre tensions et intégrations régionales

Introduction :

Deux ensembles issus des colonisations européennes se sont construits sur un même territoire amérindien avec des bases politiques, économiques et culturelles différentes, ouvrant la voie au grand clivage qui oppose aujourd’hui encore l’Amérique anglo-saxonne et l’Amérique latine, elle-même divisée en deux aires : hispanophone et lusophone.

* Diaporama : traité de Tordesillas + 13 colonies : qui le 7/6/1494 partage le nouveau monde entre Espagne et Portugal

Le continent américain s'étend sur une superficie de 42 M de km², 15000km du N au S, 44 états et 1 Md d'habitants, c’est le deuxième après l’Asie

En terme géoéconomique et géopolitique, le continent reste caractérisé par la fracture Nord-Sud, de grands écarts de richesse et par le poids des États-Unis ; les États-Unis représentent 23% de la superficie du continent, un tiers de sa population et 80% de son PIB. Mais on assiste à une montée en puissance de l’Amérique latine, à l’émergence de certains pays, grâce notamment à des politiques d’intégration régionale.

Rappel : l’Intégration régionale désigne : une association d’États appartenant à une même région du monde qui ont pour objectif de créer un ensemble régional plus vaste. Cet élargissement se traduit par l’intensification des échanges et des flux entre ces États et par des relations privilégiées au sein des espaces transfrontaliers.

PROBLEMATIQUE : quelles sont les dynamiques territoriales du continent et les initiatives d’intégration régionale reflètent-elles ou résorbent-elles les tensions qui affectent le continent américain ?

I. L'Amérique : un Nord et des Suds ?

A) Un continent structuré mais soumis à de forts contrastes de développement

1 ) Un espace structuré par des flux ► Les flux de personnes, de marchandises, de capitaux, Sud-Nord et Nord-Sud participent à la structuration du continent. Quels sont-ils ? a) Diasporas* et flux migratoires *Désigne l'existence de communautés de migrants sur un territoire étranger (historiquement juifs, arméniens ou encore chinois). ► Aujourd’hui, les Etats-Unis sont la première terre d’accueil pour les nouveaux immigrants : 52% viennent d’Amérique latine, 26% d’Asie soit entre les légaux et illégaux près de 1M d’immigrés par an. Depuis les années 1960 les entrées légales sont nombreuses : 700000/an = la moitié des entrées de toute la planète, ► Une immigration surtout choisie : phénomène de brain drain = « drainage des cerveaux » : départ vers les Etats-Unis d’élites scientifiques et intellectuelles d’autres pays. Les besoins de main-d’oeuvre sont réels et les flux autorisés ne suffisant pas, les entreprises utilisent souvent les services d’immigrants clandestins, tout particulièrement dans les Etats fédérés du sud.

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Les migrations des latinos aux EU peuvent être qualifiées de fulgurante : Les latinos sont devenus la première minorité du pays en dépassant les afro-américains ; croissance de plus de 58% entre 1990 et 2000, par immigration ou accroissement naturel soit 50,6M de latinos aux EU, 16% de la population totale. Mexicains 63%, Portoricains 9,2%, Cubains 3,5%. Pour la droite conservatrice aux EU la croissance démographique représente un danger, celui de la remise en cause de la suprématie de la population Wasp (voir texte de Samuel Huntington), et de « l’american way of life ». Pourtant, depuis la crise des subprimes, on observe un ralentissement des flux migratoires vers les EU (La crise a touché des secteurs particulièrement marqués par l’immigration latino, notamment le bâtiment). Ces éléments ont été très présents dans le discours du président Donald Trump. - Les zones historiques de concentration sont dans le Sud du pays, du Texas à la Californie, en Floride (Miami) + dans et autour de NY. Ces flux migratoires illustrent des solidarités multiples. L’importance en retour des remises migratoires (ou transfert de devises) : Exemple entre le Mexique et les EU. En 2007 l’Amérique latine aurait reçu environ 60 milliards de dollars, c’est plus que le total combiné des IDE et de l’aide étrangère des EU dans la région ! Ces transferts ont cru de 19% / an en moyenne entre 2000 et 2006. - Exemple du Mexique : Le transfert d’argent atteint des niveaux records et stimule la croissance. Le montant des ‘remesas’ s’élevait à 3,6 milliards de dollars en 1995 et atteint 20 milliards en 2005. Les effets de ces flux d’argent sont visibles par, notamment, la modification ponctuellement de certains villages : exemple de Pancho Villa dans le Michoacan : passage des maisons an adobe aux briques + baies vitrées, portails électriques, véranda. Ces flux migratoires ont pour conséquences : le fort brassage culturel, le cosmopolitisme des villes. ►L’usage de l’espagnol dans le Sud des EU mais aussi à NY et à Chicago. Utilisation aussi du Portugnol : langage hybride empruntant au portugais et à l’espagnol. Fêtes : Exemple du festival Caribana à Toronto : festival annuel qui dure deux semaines et qui accueille plus d’un million de personnes par an et a pour but de célébrer la culture des Caraïbes. b) Un tourisme essentiellement nord/sud ► Les flux touristiques sont principalement intra-américains : + de 80% des touristes au Costa-Rica, environ 80% en Argentine, + de 70% au Pérou. Ces flux touristiques sont principalement de direction Nord/ Sud.

c) Des flux commerciaux et financiers Les échanges commerciaux sont massifs, notamment en ce qui concerne les matières premières. Le Canada, les EU et le Brésil sont parmi les premiers producteurs mondiaux ; les EU sont aussi le premier importateur mondial de matières premières. L’énergie forme un enjeu majeur de l’intégration en Amérique : continent riche en ressources mais des disponibilités très inégales. Actuellement le Nord apparaît comme un « ogre énergétique » tandis que le Sud tente d’organiser son approvisionnement. Le rôle prédominant des EU apparaît nettement : principaux partenaires commerciaux des Etats-Unis = autres pays du continent américain, logique de proximité, dans le cadre de l’ALENA. Ainsi les échanges commerciaux sont-ils très centrés sur les Etats-Unis qui attirent 75% des exportations canadiennes et 78% des exportations mexicaines. Depuis la mise en place de l’ALENA , les échanges commerciaux ont plus que triplé entre ses membres. ► Flux financiers : IDE illustre le poids des EU. Baisse de la part de l’Amérique du Sud, hausse du bassin des Caraïbes, hausse du Mexique avec la mise en place de l’ALENA. Concernant l’aide publique, qui entre dans les flux financiers, la Colombie a été longtemps la principale destinataire des ces financements pour l’aider dans sa lutte contre le narco trafic qui s’est aujourd’hui beaucoup déplacé au Mexique. * diaporama 1 Pont Tancredo Neves Argentine Brésil 2 Pont Ambassador EU Canada 3 carte p.157 Magnard Le Bassin Caraïbe Arrière-cour des EU 2) Un Nord développé, un Sud entre émergence et pauvreté ► Le continent américain oppose une Amérique du Nord développée à une Amérique latine fragmentée et contrastée ; les indicateurs démographiques et socioéconomiques (IDH et PIB) soulignent la fracture nord-sud et la grande hétérogénéité entre les États d’Amérique latine.

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► Des inégalités plus fortes au sein des Sud que dans les États du nord ainsi coefficient de Gini* plus élevé dans la plupart des États d’Amérique latine démontrent l’inégale répartition des richesses au sein des populations. * Diaporama Quelques indicateurs démographiques et sociaux 3) Deux Amériques latines L’Amérique latine est un sous-continent composé de 45 pays divers (géants comme le Brésil « la moitié de tout » ou minuscules et insulaires (Bahamas/Haïti), dont la population = 650 millions d’habitants marqués par un pluralisme lingusitique (espagnol, portugais mais aussi des langues indiennes qui ne sont pas des langues mortes ! 43 langues indiennes sont parlées en AM latine et cela correspond à 10% des locuteurs ! (ex de la Bolivie où la moitié de la population est indienne). Du point de vue économique, l’Amérique Latine est la première puissance agricole mondiale et détentrice de ressources majeures : 40% des réserves d’eau du monde, (la frontière Brésil/Paraguay, surexploitée) concentre à elle seule 30% des réserves mondiales. Il faut ajouter des richesses énergétiques (Le Vénézuela est la première réserve de pétrole au monde, et la 4ème pour le gaz. Si on veut proposer une typologie des puissances on distingue : - Une nouvelle Amérique latine se dessine donnant naissance à une Amérique émergente caractérisée par une croissance élevée (entre 5 et 7%) ; ainsi, Argentine, Chili et Mexique (qualifiés parfois de « Jaguars » en comparaison avec les Tigres asiatiques ou NPIA) ont soutenu leur croissance en signant des accords commerciaux avec l’UE et les pays d’Asie. - Le Brésil est la puissance régionale recherchant des liens étroits avec les autres puissances régionales émergentes du monde (BRICA). - L’«Autre Amérique », présente une grande diversité entre les pays disposant de ressources pétrolières ou de ressources naturelles (Venezuela, Colombie et Pérou ou « pays intermédiaires »), des pays en développement (Bolivie, Paraguay, Equateur, Honduras, Cuba) et des pays les plus défavorisés comme Haïti (seul PMA d'Amérique). * Diaporama Texte Haïti + Typologie schématique

Il faut signaler en outre que les réseaux de transport sont relativement limité à l’échelle continentale et que cela accentue le caractère déséquilibré des flux. Les réseaux viaires et ferroviaires sont plutôt disposés ouest-est. La dimension méridienne est relativement limitée. Hormis la transaméricaine, il n’y a aucun réseau qui unifie l’ensemble du continent américain. (et interruption de la panaméricaine (ou Transaméricaine) par la parc national de Darien Gap au Panama). Les réseaux sont structurés à l’échelle sous-continentale, principalement en reliant le Pacifique et l’Atlantique.

Ex : Les pays d’Amérique du Sud ont récemment lancé des projets d’infrastructures pour interconnecter leurs territoires : axes routiers transcontinentaux, aménagement du bassin du Parana, possible ouverture sur l’Atlantique pour la Bolivie et la Paraguay, gazoduc du Venezuela à l’Argentine, tentative de valorisation concertée des ressources énergétiques. Une banque du Sud a d’ailleurs été créée pour le financement de ces opérations.

Transition : On remarque une intégration fonctionnelle du continent, par les flux de personnes, de marchandises et

de capitaux. Néanmoins plusieurs exemples font déjà apparaître que cette intégration est souvent bien plus forte

à l’échelle du sous-continent Amérique du Nord ou à l’échelle du continent Amérique du Sud qu’à l’échelle du

continent américain tout entier

B) Le Nord : une domination écrasante 1) Une domination économique Le continent reste largement dominé par les territoires du nord constitués de pays riches et développés. Mais cette domination est surtout le fait des États-Unis, première puissance mondiale : - ils sont les 1ers investisseurs dans le continent (et surtout au Canada et au Mexique du fait de l’ALENA*). - Les États-Unis sont un espace attractif : ils sont le 1er pays d’accueil d’immigrants venant d’Amérique latine. - Certains espaces comme le bassin Caraïbe sont ainsi totalement dominés par les EU à tel point qu'on peut parler d'arrière-cour des EU. 2) Une domination par le « soft-power » US Et évidemment la culture anglo-saxonne et l’américanisation des modes de vie se diffusent dans tout le continent mais l’influence hispanique progresse fortement dans le sud des États-Unis au point d’imposer une mixité culturelle (citez des exemples, Jennifer Lopez, Shakira, les restaurants mexicains etc.

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II. Un continent de plus en plus intégré

A) Une intégration au bénéfice des États-Unis 1) L'ALENA : quel bilan ? ► L’Accord de Libre Échange Nord-Américain (ALENA ) entré en vigueur en 1994 entre Canada, Mexique et États-Unis organise la libre-circulation des capitaux et des marchandises entre les 3 pays mais exclut la libre circulation des personnes. L’ALENA forme un marché de plus de 460 millions d’h et constitue la 1ère aire de puissance de la planète avec un RNB de 17 000 milliards de dollars en 2010 (+ du ¼ de la richesse produite dans le monde). Cette intégration éco est très centrée sur les États-Unis qui attirent 75% des exportations canadiennes et 78% des exportations mexicaines. ► Cette intégration régionale a conduit à l’émergence d’espaces transfrontaliers dynamiques : Main Street America* et la Mexamerica (Mexamérique) : phénomène de Twin Cities* et de Maquiladoras* du côté mexicain voir diaporama photo + carte US border + schéma Mexamerica Si les échanges entre le Mexique et le Canada ont augmenté depuis l’entrée en vigueur de l’accord, l’intégration nord-américaine est surtout bilatérale : elle se fait surtout entre États-Unis et Mexique d’une part, et entre États-Unis et Canada d’autre part. Les États-Unis restent le pivot de cet accord. Ex. : le Mexique dépend des États-Unis qui représentent 80% de ses exportations, alors que le Canada n’en représente que 3,6 %. L’ALENA n’a rempli qu’une partie de ses objectifs. Les chiffres traduisent une forte dépendance du Canada et du Mexique par rapport aux EU. Les exportations canadiennes vers les EU constituent 72% de l’ensemble des exportations. A l’inverse les exportations étasuniennes vers le Canada = moins de 20% de ses exportations. (pour le Mexique 80% / 10%). Le Canada tente de diversifier ses partenaires commerciaux mais avec difficulté. De plus, peu de liens relatifs entre le Canada et le Mexique : les importations mexicaines provenant du Canada = 2,4% des importations mexicaines par exemple. L’ALENA est donc caractérisée par une importante asymétrie des échanges commerciaux, qui témoigne de la domination des États-Unis sur ses deux voisins :

- Exportations : le Canada et le Mexique réalisent chacun au moins les 3/4 de leurs exportations vers les États-Unis ; les États-Unis, en revanche, réalisent à peine 1/3 de leurs exportations vers leurs deux partenaires réunis ;

- Importations : le Canada et le Mexique réalisent chacun la moitié de leurs importations depuis les États-Unis ; les États-Unis, eux, ne réalisent que le 1/4 de leurs importations depuis leurs deux partenaires réunis.

Les États-Unis sont ainsi le centre de gravité des échanges intrazone. De plus, le bilan économique de l’ALENA ne doit pas faire oublier un bilan social mitigé. Les écarts de salaires par habitant restent élevés. Exemple de l’impact de l’ALENA sur la paysannerie mexicaine. Ainsi dans l’article « Le point de vue des paysans mexicains sur le bilan de l’ALENA » (extrait d’un article du Monde diplomatique, Anne Vigna, 2008) : la journaliste indique que « L’ALENA a eu des effets dévastateurs sur l’agriculture du Mexique. Les productions américaines (subventionnées) ont inondé ce pays et ruiné des millions de petits paysans». => En effet l’agriculture mexicaine a souffert de la concurrence états-unienne. Le renforcement des échanges commerciaux de produits agricoles au sein de l’Amérique du Nord s’est accompagné d’une spécialisation des espaces agricoles. Au Mexique, la modernisation de l’agriculture a privilégié les cultures commerciales pour l’exportation au détriment de la sécurité alimentaire nationale. Les investissements se sont concentrés sur les terres agricoles les plus rentables, situées dans les régions les plus accessibles. Le secteur agricole mexicain s’est spécialisé dans la culture des produits d’exportation les plus rentables, en fonction de la demande internationale et non en fonction de la demande intérieure. Les cultures spéculatives de fruits et légumes (raisins, mangues, ananas) se sont développées aux dépens des produits alimentaires de base, comme le maïs, le blé et le riz (cultures vivrières). D’où le paradoxe suivant : le Mexique est un pays exportateur de produits agroalimentaires mais n’est pas autosuffisant pour la production des produits de base. Il doit importer des États-Unis les céréales de base pour répondre à la demande intérieure. À l’écart de la modernisation, les régions de montagnes les plus reculées sont touchées par la pauvreté. Les inégalités interrégionales se sont creusées avec la libéralisation des échanges: 2) De l'ALENA aux accords bilatéraux ► De nombreux échanges ont lieu en marge de l’ALENA ou des blocs régionaux : près de 50% des migrants qui entrent aux États-Unis viennent du sud du continent ; les remises (remesas) représentent plus de 30% du PIB en Haïti

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; Beaucoup d’accords bilatéraux sont conclus entre les États-Unis et Chili, Pérou, Mexique et Colombie (accord de lutte contre le trafic de drogue par ex) * Diaporama Article Narcotrafic Colombie FARC

B) La montée en puissance de l’Amérique latine 1) Les premières solidarités régionales et les structures d'intégration Les organisations régionales (ou marchés communs) sont anciennes et nombreuses en Amérique Latine

La CAN (Communauté andine des Nations) : organisation économique créée en 1969 regroupant la Bolivie, la Colombie, l’Équateur et le Pérou

Le MERCOSUR* (Marché Commun du Sud), (de l'espagnol Mercado Común del Sur) ou Mercosul (du portugais Mercado Comum do Sul), crée en 1991 par le Brésil, Argentine, Paraguay et Uruguay veut s’affirmer comme un pôle économique ; d’abord zone de libre-échange puis union douanière en 1994, il s’est élargi à de nouveaux pays et a permis le développement des échanges commerciaux en son sein. Aujourd’hui : Venezuela en est devenu membre et sont pays associés le Chili, Colombie, Bolivie, Pérou et Équateur. Ses buts sont la libre circulation des biens, des services et des facteurs de production, la création d'un tarif extérieur commun, le rapprochement des politiques économiques et l'harmonisation des législations entre les membres.

Mais cette intégration réalisée entre pays de poids inégaux profite surtout au Brésil.

La Banque du Sud* : le projet de cet organisme présenté comme une riposte latino-américaine au Fonds monétaire international (FMI) et qui doit permettre de financer des programmes de développement économique et social dans les Etats membres (Argentine, le Brésil, la Bolivie, l'Equateur, le Paraguay, l'Uruguay et le Venezuela) avait été lancé en décembre 2007. (Courrier International sept 2009)

https://blogs.mediapart.fr/jjmu/blog/130713/l-amerique-latine-lance-la-banque-du-sud-etdefie- le-fmi 2) D’autres structures d’intégration sont apparues depuis le début du XXIème siècle

l’ UNASUR* (Union des Nations sud-américaines) : Dans les années 1990, le projet a pris naissance dans un contexte d'opposition à la zone de libre-échange des Amériques (ZLEA*), « Initiatives pour les Amériques », lancé par le président américain George Bush puis concrétisé en 1994 au Sommet des Amériques, et donc dans un contexte d'opposition à l'ingérence nord-américaine dans les affaires politiques et économiques latino-américaines. À court terme, il vise notamment à contourner le recours à l'Organisation des États américains (OEA), dont les États-Unis sont parties prenantes, lors du traitement de problèmes spécifiquement sud-américains. C’est à la fois un forum de discussion et un organisme de financement d’infrastructures permettant de désenclaver l’intérieur des terres puisque le manque d’infrastructures routières et ferroviaires est criant sur le sous continent, dès que l’on s’éloigne du littoral. L'UNASUR est donc une organisation intergouvernementale intégrant deux unions douanières présentes dans la région : le Marché commun du Sud (Mercosur) et la Communauté andine (CAN), dans le cadre d'une intégration continue de l'Amérique du Sud s'inspire de l'Union européenne. Son objectif est de « construire une identité et une citoyenneté sud-américaine et [de] développer un espace régional intégré ». Elle est composée des douze États d'Amérique du Sud.

La CELAC (Communauté des États latino-américains et des Caraïbes) : forum culturel et politique créé en 2011 pour le développement de l’ensemble de la région Amérique latine-Caraïbe ; organisme intergouvernemental régional qui regroupe les 600 millions d'habitants des 33 États d’Amérique latine et de la communauté caribéenne (Caricom). Il fut créé le 23 février 2010 lors du sommet du Groupe de Rio à Cancún, Mexique. Sont absents de ce groupe le Canada et les États-Unis, ainsi que les territoires outremers de la France, des Pays-Bas, du Danemark et de l'Angleterre dans les Amériques. La CELAC veut faire contrepoids à la domination des Etats-Unis et du Canada.

L’UNASUR et la CELAC souhaitent renforcer les échanges intra-régionaux qui ne représentent que 16% du total alors que les échanges entre l’Amérique latine et le reste du monde = 84% du total ! Signalons ici que la croissance économique des années 2000 en Amérique Latine a été tirée par la Chine qui a multiplié ses importations de matières premières (métaux, pétrole, soja, viande bovine, bois) et que la Chine est devenue le 2ème partenaire commercial du sous continent derrière les Etats-Unis, mais devant l’UE) et que Pékin est aussi le premier bailleur de crédits pour l’Amérique latine.

CARICOM (Communauté caribéenne) : association régionale de coopération économique des Caraïbes qui regroupe les États anglophones + le Surinam et Haïti

Rappels :

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Zone de libre-échange : Espace à l’intérieur duquel les pays partenaires abolissent ou réduisent les droits de douane pour leurs échanges commerciaux réciproques. Union douanière : Zone de libre-échange dont les pays membres ont un tarif commun pour leurs échanges avec les pays tiers * Voir Diaporama carte Processus d'intégration régionale dans les Amériques en 2012. voir Schéma diaporama Mais L’intégration sud-américaine se manifeste aussi par la mise en œuvre de projets transfrontaliers, notamment des infrastructures communes à des pays limitrophes et la construction d’infrastructures favorise aussi l’intégration régionale : Exemples : - Couloirs bi-océaniques de transports multimodaux , axes routiers transcontinentaux traversant l’Amazonie, gazoduc entre le Venezuela et l’Argentine, élargissement du canal de Panama et projet de construction d’un nouveau canal transocéanique traversant le Honduras - le barrage d’Itaipu, situé à la frontière entre Brésil et Paraguay sur le fleuve Paraná, et construit au terme d’un accord entre les deux États entre 1975 et 1991. Ce barrage alimente une centrale hydroélectrique binationale qui est la première du monde ; elle fournit 90% de l’électricité consommée au Paraguay et 20% de celle consommée au Brésil. - le pont sur le fleuve Oyapock, entre le Brésil et la Guyane française. Sa construction a été achevée en 2011, sa mise en service est prévue en 2013. Paradoxe : le pont est censé relier les deux rives, mais de fait il est devenu un point de contrôle très important de la frontière côté français, et côté brésilien la voie d’accès n’est pas achevée, seule une piste traversant la forêt y conduit. Il faut savoir que la frontière entre le Brésil et la Guyane française, mais aussi entre celle-ci et le Surinam, est une interface très active pour la migration illégale ; elle est très difficile à contrôler en raison de la présence de deux longs fleuves frontaliers, le Maroni et l’Oyapock, et de la forêt amazonienne. Les pirogues des passeurs vont régulièrement d’un bord à l’autre. Chaque année depuis 2006, 8000 à 9000 étrangers sont éloignés, essentiellement des Brésiliens et des Surinamiens, parfois des Haïtiens. Une même personne peut être reconduite vers le Brésil ou le Surinam jusqu’à 4 ou 5 fois au cours d’une même année.

III. Des tensions qui sont autant de limites à l’intégration

A) Des tensions liées à l’hégémonie des EU 1) Une forte remise en cause de l'ALENA ► Au sein de l’ALENA : le Canada et le Mexique ont bénéficié de la croissance de la zone mais ont aussi accru leur dépendance à l’égard des États-Unis ; l’ALENA après avoir suscité beaucoup d’espoirs jusqu’en 2000 est aujourd’hui source de tensions pour le Mexique : - Les FTN ont investi au Mexique mais l’immigration mexicaine est jugée indésirable ; le mur sur la frontière est prolongé (voir diaporama campagne Trump et caricature) - Loi anti-immigration récente des états frontaliers (voir article :http://www.courrierinternational.com/article/2010/05/12/ces-immigres-qui-effraient-lamerique) - Maquiladoras délocalisées - Fragilisation de ses relations avec son aire culturelle au Sud. L’interface constituée de l’espace transfrontalier de la « Mexamérique » espace autrefois d’intégration est devenu un espace de fracture Interface : zone de contact entre deux ensembles géographiques différents. Cette discontinuité spatiale peut générer des tensions ou des échanges et influences réciproques L’histoire et les rapports de domination ont nourri en Amérique latine un sentiment d’antiaméricanisme récurrent ; en effet, au nom de la doctrine Monroe, les États-Unis ont mené de nombreuses interventions militaires ou soutenu des coups d’État (Chili 11 sept 1973). La dénonciation de l’impérialisme américain a été le fait du régime communiste de Castro à Cuba et plus récemment repris par le président Lula au Brésil, Hugo Chavez au Venezuela et Evo Morales en Bolivie 2) Une hégémonie économique qui entraîne la création de l’ALBA ► ALBA (Alliance bolivarienne pour les Amériques ) Née en 2005 dans un contexte d’opposition aux États-Unis et à la volonté de G. W. Bush de créer une organisation éco pour l’ensemble du continent (ZLEA : zone de libre-échange éco des Amériques) est une organisation politique, sociale et économique pour promouvoir l'intégration des pays de l'Amérique latine et des Caraïbes, construite sur les

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principes de solidarité, de complémentarité, de justice et de coopération. Le But : Sur le plan économique, l'ALBA vise à favoriser la logique coopérative, plutôt que la création d'une zone de libre-échange. Elle s'oppose ainsi directement au « consensus de Washington » qui prônait dans les années 1990 la déréglementation et la mise en place de mesures néolibérales. Plutôt que d'ordonner des privatisations, l'ALBA favorise au contraire le secteur public. Les Etats membres : Venezuela, Cuba, Bolivie, Équateur, Nicaragua avec pays observateurs : Russie et Iran B) Des tensions Sud-Sud 1) Des Etats anti-impérialistes La domination états-unienne divise l’Amérique latine entre les États qui se définissaient comme anti impérialistes et anti-capitalistes (sentiment anti-yankee) (Venezuela de Chavez) et ceux qui souhaitent entretenir de bonnes relations avec les États-Unis. 2) D'autres réponses institutionnelles ► Créée en 2012, l'Alliance du Pacifique associe le Chili, le Pérou, la Colombie et le Mexique qui forment la huitième économie mondiale et représentent 35% du PIB (Produit Intérieur Brut) d’Amérique latine en 2012. Le Mexique, le Chili et le Pérou constituent avec le Panama et le Costa Rica le moteur économique de la croissance latino-américaine depuis deux ans. L'initiative de créer une zone de libre-échange entre les quatre pays revient au Pérou, désireux de favoriser l'insertion de l'Amérique latine dans la zone Asie – Pacifique et de faire contrepoids idéologiquement à l’ALBA et économiquement au MERCOSUR, miné dernièrement par le protectionnisme. L'AP se démarque du MERCOSUR ou du régionalisme post-commercial de l'UNASUR. En 2013, le Costa Rica a rejoint le groupe. L’Alliance du Pacifique bouleverse les équilibres régionaux actuels et amplifie la fracture existant entre les deux modèles économiques présents en Amérique latine. La naissance de cette récente organisation est aussi une illustration de la rivalité entre le Mexique et le Brésil. Le Mexique et le Brésil sont les deux principales puissances - et par conséquent rivales – en Amérique latine. Le Brésil, sixième puissance mondiale en 2013, démontre son ambition d’être reconnu comme leader régional. De son côté, le Président mexicain élu en juillet 2012 Enrique Peña Nieto place le développement économique en priorité de son programme politique depuis son entrée en fonction en décembre 2012 et affiche clairement son souhait de mesurer la puissance du Mexique à celle du Brésil. Bien que les deux grands émergents n’utilisent pas les alliances régionales comme plateforme pour se positionner sur la scène internationale, ils y avancent leurs intérêts et révèlent leurs velléités de puissance. L’Alliance du Pacifique peut être considérée comme le vecteur de la politique économique du Mexique en Amérique latine, mais aussi vers l’Asie alors que le Brésil est le fer de lance du Mercosur (source : http://www.diploweb.com/L-Alliance-du-Pacifique-enjeux-et.html) 3) Et toujours des entraves à l'intégration La coopération dans le cadre du Mercosur, même si des progrès ont pu être notés dans le développement des échanges et dans la volonté d'un développement de la démocratie (disparition des coups d'États militaires sous peine d'exclusion possible du Mercosur) souffre toujours de la relative pauvreté de la zone (même si elle reste moins élevée que dans le reste de l'Amérique latine) et surtout de la rivalité économique et politique entre les deux « grands » que sont le Brésil et l'Argentine. ► Les fortes inégalités sociales sont sources de violence : Salvador, Venezuela et Honduras et Mexique connaissent les plus forts taux d’homicide au monde. Cette criminalité est liée au narcotrafic. Rôle des maras en Amérique centrale. Exemple du Brésil et des favelas (La cité de Dieu). Les violences se concentrent surtout dans les bidonvilles / ghettos pour les EU. Malgré de réels progrès de reconnaissance, le rejet des Amérindiens (60% des Boliviens et des Guatémaltèques) formant les classes sociales les plus pauvres les conduise à des revendications territoriales et culturelles. ► Enfin, des tensions peuvent être liées à des revendications territoriales entre États :

revendication d’un accès à la mer de la part de la Bolivie à l’égard du Chili ; ou au sujet des eaux territoriales entre la Colombie et le Venezuela ou entre les petits États de l’isthme (Nicaragua/ Costa Rica) .

Tensions sur les ZEE : Exemple entre les EU et le Canada au niveau de la frontière maritime séparant l’Alaska et le Canada : point de divergence concernant le passage du Nord-ouest, qui relier l’Atlantique au Pacifique. Passage qui n’est praticable que durant le bref été arctique mais qui va devenir de plus en plus intéressant avec le réchauffement climatique (parallèle à faire avec le chapitre sur la Russie). Il pourrait représenter dans les années à venir une voie maritime pus courte entre l’Europe et l’Asie du Nord. Presque 2000 km de moins pour faire Rotterdam – Tokyo. Les EU estiment que ce passage doit être considéré comme un détroit international, où les navires pourraient circuler sans restriction. Le Canada considère qu’il s’agit d’eaux intérieures, où il a la souveraineté pleine et entière.

Page 8: Thème 3 Dynamiques géographiques de grandes aires

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Tensions aussi sur les ZEE dans le bassin des Caraïbes : notamment entre la Colombie et le Venezuela mais aussi entre plusieurs Etats d’Amérique centrale.

Conclusion : Le continent américain est traversé par de multiples tentatives concurrentielles voire hostiles d’intégration régionale. L’intégration fonctionnelle, par des flux diversifiés est réelle mais l’intégration politique et économique a du mal à se réaliser. Aucune intégration continentale ne peut se faire complètement hors de la présence des Etats-Unis mais ils ne président plus non plus seuls aux destinées du continent. En fait, il semble bien qu’à l’échelle continentale, les inégalités et les tensions existantes maintiennent des concurrences et entravent une intégration poussée. Le Brésil émergent joue un rôle structurant en Amérique Latine, le Pérou enregistre une forte croissance et se présente comme un nouveau « dragon » latino-américain, et les Etats-Unis continuent de dominer l’ALENA . Toutefois L’élection récente de Donald Trump et son projet de mur avec le Mexique fait planer des incertitudes sur l’évolution des relations entre les pays de cet espace continental.