these professionnelle j_cathala_2012
DESCRIPTION
Thèse professionnelle réalisée pour l'obtention d'un mastère spécialisé à l'ESC de ToulouseTRANSCRIPT
GROUPE ESC TOULOUSE
ANNEE UNIVERSITAIRE 2011-2012
Programme Mastères et 3° cycles
« Gestion Responsable des Territoires »
THESE PROFESSIONNELLE
« Les interactions communicationnelles entre élus et entreprises pour la mise en
œuvre de projets de mobilité et de transports : enjeux, dynamiques, arguments »
Julie CATHALA
Sous la direction de Michel FARENG
CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE TOULOUSE
I
Avertissement
Le contenu de ce document n‟engage que son auteur et non la structure dans laquelle la
mission professionnelle a été effectuée ni les structures citées.
II
Remerciements
Je tiens tout d‟abord à remercier mon tuteur de thèse, Michel Fareng, pour ses conseils et
sa disponibilité.
Je voudrais également adresser mes remerciements à Vincent Fanguet, directeur de stage,
qui m‟a inspiré ce sujet d‟étude.
Je remercie également l‟équipe de la direction de la prospective pour son accueil agréable
et chaleureux et plus particulièrement Alexis, Elena et Mathilde, avec qui j‟ai eu le plaisir de
partager pendant six mois ce bureau plein d‟entrain.
III
Sommaire
AVERTISSEMENT ............................................................................................................................................................ I
REMERCIEMENTS ......................................................................................................................................................... II
SOMMAIRE ..................................................................................................................................................................... III
TABLES DES FIGURES ................................................................................................................................................ IV
INTRODUCTION ............................................................................................................................................................. 1
CHAPITRE 1 : PRECISION DU PERIMETRE D’ETUDE ET DES ENJEUX .......................................................................................... 5
I. La mobilité, quels enjeux aujourd’hui ? ............................................................................................................... 5
II. La communication : un processus à définir ..................................................................................................... 19
CHAPITRE 2 : LA RELATION ELUS – ENTREPRISES : ENJEUX ET DYNAMIQUES DE COMMUNICATION ................................ 27
I. Connaître les élus et leurs logiques d’actions ................................................................................................. 27
II. Connaître l’entreprise et ses logiques d’action .............................................................................................. 33
III. Les rapports élus – entreprises : enjeux et dynamiques ............................................................................. 37
CHAPITRE 3 : TYPOLOGIE DES ARGUMENTS DES ELUS ET DES ENTREPRISES LORS DE LA MISE EN ŒUVRE DE PROJETS
DE MOBILITE ........................................................................................................................................................................................... 49
I. L’utilité économique d’un projet .......................................................................................................................... 51
II. Les arguments en faveur de l’aménagement du territoire et de l’amélioration des déplacements
................................................................................................................................................................................................57
III. Les arguments en lien avec le développement durable et la protection de l’environnement ...... 63
IV. La mise en avant de la capacité de financement du projet ....................................................................... 66
CONCLUSION ................................................................................................................................................................ 68
OUVERTURE ET PISTES DE REFLEXION ............................................................................................................. 70
BIBLIOGRAPHIE ......................................................................................................................................................... 72
TABLES DES MATIERES ............................................................................................................................................ 75
RESUME DE LA THESE PROFESSIONNELLE ....................................................................................................... 77
ABSTRACT OF THE DISSERTATION ..................................................................................................................... 78
IV
Tables des figures
Figure 1 : Conceptualisation schématique de la mobilité .................................................................................... 7
Figure 2 : Impact des infrastructures de transport sur l'économie locale .................................................... 9
Figure 3 : Répartition des prérogatives institutionnelles en matière de gestion des mobilités ........ 12
Figure 4 : Illustration schématique de différents scopes d'un déplacement ............................................. 15
Figure 5 : Représentation schématique de la communication des collectivités territoriales ............. 22
Figure 6 : Importance des différentes cibles pour la communication d’entreprise en 2007 .............. 24
Figure 7 : Evolution de l’importance des différentes cibles de la communication d'entreprise ........ 25
Figure 8 : Les entreprises dans le domaine de la mobilité et des transports ............................................ 34
Figure 9 : Les formes de la communication d'acceptabilité ............................................................................. 42
Figure 10 : Représentation schématique des rapports élus-entreprises lors des différentes phases
d'un projet ................................................................................................................................................................ 47
Figure 11 : Représentation schématique des dynamiques entre élus et entreprises ............................ 48
Figure 12 : Modification des espaces accessibles en un temps donné (exemple vers le Lot et le Tarn-
et-Garonne depuis Toulouse) ........................................................................................................................... 52
Figure 13 : Performance économique des territoires français ....................................................................... 53
Figure 14 : Carte anamorphose de la France en 2008 ........................................................................................ 58
Figure 15 : Evolution de l'accessibilité au mode autoroutier entre 2000 et 2007 .................................. 59
1
Introduction
La communication est un phénomène difficile à décrire. Tout d‟abord parce qu‟il est
présent partout et ensuite parce que ce terme recouvre des réalités très différentes. Dans un
langage courant, il est en effet utilisé à des fins très diverses1 : voies de communication, outils
de communication ou encore processus sociaux aussi dissemblables que la publicité, les
interventions scientifiques ou conversations entre amis. Si l‟on se limite aux relations
interpersonnelles, elle représente la cohabitation, le vivre ensemble entre deux personnes
différentes qui tentent de se comprendre. Il s‟agit donc d‟un phénomène omniprésent et
essentiel. Concernant la communication des organisations, Libaert et Westphalen ouvrent
d‟ailleurs leurs propos dans l‟ouvrage La communication externe des entreprises en
annonçant que « le débat du „pourquoi communiquer ?‟ est aujourd‟hui dépassé, la cause étant
définitivement entendue ». Il n‟apparaît alors plus étonnant que deux entités si différentes,
mais interdépendantes, telles que les élus et les entreprises, ressentent le besoin de
communiquer entre eux. La collaboration entre les domaines public et privé est par ailleurs de
plus en plus importante ce qui nécessite forcément des échanges même si les élus ne sont pas
les seuls représentants de la sphère publique et qu‟il en va de même pour les entreprises et la
sphère privée.
Cette thèse professionnelle se propose d‟étudier ces interactions communicationnelles
entre élus et entreprises. Nous nous concentrerons sur les interactions concernant un thème
précis : la mise en œuvre de projets de mobilité. Cela permettra de fournir un cadre précis et
concret à notre étude mais aussi d‟aborder un sujet majeur et porteur de nombreux enjeux
actuels et pour les territoires. En effet, si nous avons affirmé qu‟il n‟existe pas de société sans
communication, il n‟existe pas non plus de société sans mobilité. Les activités de transports,
nous détaillerons ce point plus précisément, sont en effet essentielles à l‟économie et pour les
individus. Ils représentent en 2008, 4,5% du PIB de la France2. Enfin, ce choix s‟inscrit dans
la logique des sujets abordés dans mon parcours depuis plus d‟un an et est très lié à la mission
professionnelle effectuée entre mai et octobre 2012 pour la validation du mastère spécialisé.
1 E. Dacheux, « La profonde ambivalence de la communication » in E. Dacheux dir., La communication,
Collection Les Essentiels d‟Hermès, CNRS éditions, 2010
2 A. Frémont, Les transports en France, Quelles mobilités pour quelle société ?, Paris, La documentation
française, novembre-décembre 2008, p. 1
2
La mission professionnelle effectuée a en effet joué un rôle prépondérant dans le choix du
sujet d‟étude. Sans reprendre le contenu des missions, le thème abordé en est très proche et en
relation directe. La majeure partie de mon travail a consisté en la rédaction de supports de
communication sur le thème de “l‟autoroute de demain”, à destination des élus. Constatant
que la route souffre d‟une image qui s‟est dégradée, l‟objectif de ces supports était de mettre
l‟accent sur les solutions qui peuvent être trouvées pour faire de la route un instrument de
réponse aux enjeux actuels. Il apparaissait donc à la fois stratégique et intéressant d‟aborder le
thème général de la communication pour être en cohérence avec la mission réalisée en
entreprise mais aussi pour aborder un aspect encore peu balayé dans ma formation.
Pour définir ce que nous considérons comme un projet de mobilité, nous allons nous
appuyer sur les quatre piliers constitutifs d‟un déplacement selon Plassat3.
L‟énergie, nécessaire pour la propulsion et le mouvement, elle peut par exemple être
fossile, électrique ou musculaire ;
Le véhicule, qui « transforme l‟énergie en mouvement » ;
L‟infrastructure, qui rend possible le déplacement ;
Et l‟information, facteur qui facilite le déplacement et qui permettra, demain, de
l‟optimiser.
Nous nous concentrerons sur deux de ces piliers : le véhicule et l‟infrastructure ou, comme
les appelle Latour les mobiles et immobiles4. Nous écartons les projets en lien avec l‟énergie
car ils ont un impact direct sur les véhicules, c‟est donc un aspect que nous pouvons traiter
lorsque nous évoquons ces derniers. Ensuite, les projets d‟informations nécessitent de
s‟intéresser aux nouvelles technologies ce qui viendrait alourdir notre propos. Il faut
également que les problématiques abordées soient de nature à concerner les élus et les
entreprises. Ainsi, nous entendrons par projets de mobilité et de transport, les projets en lien
avec les véhicules, leur usage ou les infrastructures.
3 G. Plassat, Mobilités et Transport du Futur, Quelles rencontres pour le 21
ème siècle, p. 12
4 B. Latour, « Les moteurs immobiles de la mobilité », dans M. Flonneau et V. Guigueno dir., De l’histoire des
transports à l’histoire de la mobilité ?, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2009, p. 8
3
Les questions qui seront posées dans cette thèse professionnelle ont été déterminées grâce
à une méthode d‟analyse, le QQOQCCP : Qui fait Quoi, Où, Quand, Comment, Combien et
Pourquoi ? Plutôt utilisée en management de la qualité, elle présente l‟avantage de forcer à
parcourir tous les domaines possibles. Ainsi nous avons déjà défini :
Le paramètre « qui » : les élus et les entreprises, cibles de notre étude ;
Le paramètre « quoi » : nous cherchons à analyser les dynamiques de
communication entre élus et entreprises pour la mise en œuvre de projets de
mobilité ;
Le paramètre « où » : nous resterons en France, mais on peut aussi envisager ce
paramètre comme une question d‟échelle : locale, nationale. Nous incluons les
deux.
Les questions proviendront donc des paramètres « quand », « comment », « combien » et
« pourquoi ». Ainsi, nous souhaitons observer les logiques entre élus et entreprises et nous
déterminons pour cela trois grandes familles d‟interrogations :
« Pourquoi ? » : il s‟agira ici de s‟intéresser à la justification des démarches
engagées par les entreprises et les élus. Quelles sont leurs motivations et les enjeux
rattachés à la mobilité qui expliquent qu‟élus et entreprises se saisissent de ce sujet
?
« Comment ? » : nous nous intéresserons à la fois aux outils et aux messages. Quels
types de communication et quels types d‟arguments sont utilisés par les élus et les
entreprises pour la mise en œuvre de projet ? Ce peut être aussi le sens : Les élus
sont-ils à l‟origine ? Ou est-ce que ce sont les entreprises ?
« Quand ? » : Est-ce qu‟il existe une période plus propice à la communication
qu‟une autre ? Nous tenterons de résumer cette question sous la forme de schémas
illustrant les différentes dynamiques sur les différents temps d‟un projet.
Enfin, la question du combien, qui se rapporte au coût, ne sera pas abordée. Ce paramètre
pourrait aussi se rapporter au nombre d‟actions de communications engagées, par exemple,
mais parce qu‟il est difficile de les quantifier, nous l‟avons écarté.
4
Dans un premier temps, nous allons définir beaucoup plus précisément notre cadre d‟étude
en nous intéressant à la définition du terme de mobilité et aux enjeux qui y sont rattachés, à la
fois pour les élus et les entreprises. Cela nous permettra d‟expliquer l‟intérêt de ce sujet pour
les deux parties. Nous nous intéresserons également à la définition de la communication et
aux enjeux que cela représente pour les élus et les entreprises. Dans un deuxième temps, nous
tenterons d‟analyser les outils et dynamiques de communication entre entreprises et élus
autour de projets de transports et de mobilité. Enfin, dans une troisième partie, nous
essaierons d‟établir une typologie des arguments avancés par les deux parties pour appuyer un
projet ou pour le contrer.
Il est bien entendu difficile de prétendre à l‟exhaustivité lors d‟un tel exercice. D‟une part,
sa forme, d‟autre part, le temps imparti pour sa réalisation ne nous permettent pas de répondre
à toutes les questions avec précision. Peut-être n‟est-il d‟ailleurs pas possible ni préférable d‟y
répondre de façon tranchée ? Pour cela nous préférons terminer, après avoir conclu notre
propos, sur une série d‟interrogations et de points de discussions afin d‟élargir et de mettre en
perspective le travail effectué.
5
Chapitre 1 : Précision du périmètre d’étude et des enjeux
I. La mobilité, quels enjeux aujourd’hui ?
Le terme de transport semble aujourd‟hui avoir laissé sa place au profit de celui de
mobilité, tout du moins en ce qui concerne les individus. On parle en effet aujourd‟hui plus
volontiers de mobilité des personnes5. Comment expliquer l‟usage de ce nouveau terme et ce
que cela implique ?
1. Des transports à la mobilité : un changement de paradigme6
Il nous faut commencer par définir ce terme de mobilité et expliquer ici en quoi il est plus
pertinent de l‟utiliser. Pour expliquer ce changement, il faut revenir sur l‟histoire des
transports. Envisagés au départ mode par mode, la route et le ferroviaire ayant été considérés
par ailleurs comme concurrents pendant longtemps, il était plus facile de parler de transports
en évoquant un mode particulier. La conception spatiale des déplacements se limitait alors à
l‟analyse de flux existants entre une origine et une destination car les lourds investissements
demandés par les infrastructures, autoroutières et ferroviaires pour la plupart, demandaient
une certaine expertise. Mais cette approche a été contestée dans les années 1970, à la suite des
chocs pétroliers. Le tout-automobile, basé sur un pétrole bon marché, est un modèle qui
apparaît déjà comme étant non pérenne. Se fait alors sentir « le besoin d‟une connaissance et
d‟une compréhension plus fine des pratiques individuelles de déplacements »7. On commence
alors à s‟intéresser aux « déterminants individuels de la demande de déplacements »8,
caractéristiques diverses et propres à chacun qui induisent un choix modal. Ce choix d‟un
5 Pour les marchandises en revanche, le terme de „transport‟ reste le plus approprié.
6 Cette partie reprend des éléments de mon mémoire : « L‟articulation entre les besoins de mobilité dans les
espaces urbains et périurbains et les principes du développement durable : comment conduire un changement
nécessaire dans les pratiques de mobilité ? »
7 C. Gallez, V. Kaufmann, « Aux racines de la mobilité en sciences sociales : contribution au cadre d‟analyse
socio-historique de la mobilité urbaine », dans M. Flonneau et V. Guigueno dir., De l’histoire des transports à
l’histoire de la mobilité ?, opus citi, p. 45
8 Ibidem
6
mode de déplacement plutôt qu‟un autre répond alors à des caractéristiques qui dépassent le
simple fait de se déplacer d‟un point A à un point B.
Si l‟on reprend Plassat9 et les critères de performances d‟un déplacement
10 :
« Type de rencontre recherché permettant de décider du besoin d‟un déplacement
physique ou d‟un échange numérique ;
Temps porte à porte ;
Coût : investissement, utilisation (au kilomètre), avec des considérations multiples :
fixe/marginal, subvention d‟exploitation pour les collectivités ;
Qualité : robustesse aux aléas, connectivité permanente ou nulle, bruit, conformité des
produits reçus ;
Sécurité : perçue, réelle ;
Performances environnementales : connues ou inconnues, la connaissance conduit
généralement à l‟optimisation. Le fait qu‟elles soient connues est une étape de progrès :
o Polluants, gaz à effet de serre
o Diversification énergétique
o Déchets directs et indirects
o Bruit généré
o Espace urbain utilisé
o Lien santé/mobilité (modes doux, pollution habitacle)
Résilience de ces critères à des chocs énergétiques, économiques ou sociaux »
Ces critères représentent autant d‟arbitrages qu‟une personne doit effectuer afin de choisir
si elle doit se déplacer, et le cas échéant, avec quel mode. Nous voyons poindre ici, la
complexité du choix modal et combien il est important de le prendre en compte. Le terme de
mobilité renvoie à une réalité plus large que celle de déplacement et permet justement de tenir
compte de cette complexité.
9 G. Plassat, Mobilités et Transport du Futur, Quelles rencontres pour le 21
ème siècle
10 G. Plassat, Mobilités et Transport du Futur, Quelles rencontres pour le 21
ème siècle, p. 13-14
7
Prenons les définitions de ces termes. « Transporter » signifie « porter, déplacer d'un lieu
dans un autre » et « mobilité », « facilité à se mouvoir, à être mis en mouvement, à changer, à
se déplacer ». On peut bien voir que cette dernière définition considère non seulement la
notion de déplacement mais, également, la capacité (ici « facilité » dans le sens « aptitude ») à
se déplacer. On ne raisonne donc plus en trajet mais en capacité de mouvement d'un point à
un autre. Si, pour être plus exact, on compare des noms, « transport » « déplacement » et «
mobilité », la différence est d'autant plus indéniable. Les deux premiers désignent une action,
le fait de se déplacer, de changer de lieu, tandis que le dernier considère à la fois le
mouvement, cette même action, mais aussi les capacités requises pour l'effectuer. Cela met
tout l‟accent sur qu‟est réellement la mobilité : « un attribut de la personne »11
. Ce terme
représente donc mieux les enjeux actuels car il replace les individus au cœur du processus de
choix modal et permet d‟intégrer dans la réflexion des éléments essentiels tels que
l‟accessibilité ou l‟appropriation.
Figure 1 : Conceptualisation schématique de la mobilité
Source : Kaufmann et Jemelin12
11 S. Allemand, Apprendre la mobilité, les ateliers de mobilité, une expérience originale, Paris, Le Cavalier Bleu,
2008, p. 33
12 V. Kaufmann, C. Jemelin, La motilité, une forme de capital permettant d’éviter les irréversibilités socio-
spatiales ? , Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne, Laboratoire de sociologie urbaine, 2004
8
Enfin, signe que le changement est en cours, Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé
des Transports, de la Mer et de la Pêche annonce que le Schéma National des Infrastructures
de Transport deviendra le « Schéma National de la Mobilité Durable ».
2. Les grands enjeux actuels en lien avec la mobilité et les transports13
a) Les limites du schéma actuel et l’impératif du durable
La mobilité est essentielle à tout territoire ainsi qu‟à tout individu. Elle est en effet un
vecteur de socialisation et d‟intégration important. On peut l‟affirmer, ne pas être mobile
aujourd‟hui signifie être exclu. Ne pas accéder au marché du travail, aux lieux de loisirs ou de
soins représente un handicap subi par de nombreuses personnes. Selon l‟association
Voiture&Co, le fait de ne pas être mobile constitue un des trois grands handicaps pour l‟accès
à l‟emploi avec la barrière de langue et les problèmes de garde d‟enfants. Le sociologue
LeBreton confirme cette problématique et estime qu‟environ sept millions de personnes sont,
en France, dans une situation où leur « intégration sociale et professionnelle est compliquée
par les problèmes de mobilité »14
.
La mobilité rend également possible l‟activité économique d‟un pays. Les transports sont
essentiels à l‟activité et à l‟attractivité économiques d‟un territoire car sans échanges, il n‟y a
pas de création de valeur. Le schéma ci-dessous illustre les effets induits par l‟installation
d‟infrastructures de transport sur un territoire.
13 Pour des raisons pratiques et de rédaction, nous continuerons d‟utiliser les deux termes dans ce document.
14 L. Bu, M. Fontanès, O. Razmon, Les transports, la planète et le citoyen, en finir avec la galère, découvrir la
mobilité durable, Paris, Rue de l‟échiquier, Collection les petits ruisseaux, 2010, p. 28
9
Figure 2 : Impact des infrastructures de transport sur l'économie locale
Source : Revue Générale des Routes et de l’Aménagement
Mais, parler de la place des transports dans l‟économie c‟est surtout parler de mobilité
routière. En effet, la route assure en 2011 respectivement 88,7% et 84,6% du trafic de
personnes et de marchandises15
. Ce modèle est aujourd‟hui confronté à de nombreuses
limites, et l‟automobile individuelle, qui continue tout de même d‟assurer en 2010, 64,8%16
des déplacements17
, laisse transparaître quelques faiblesses.
Premièrement, les ressources énergétiques fossiles s‟amenuisent. Or la mobilité routière
repose majoritairement sur l‟utilisation du pétrole. Le peak oil, point de non-retour où
l‟extraction de pétrole ne pourra plus que chuter, a-t-il été atteint ? Si le consensus ne semble
pas encore formé sur cette question, ce que l‟on peut affirmer c‟est que l‟augmentation du
nombre de véhicules en circulation dans les prochaines années à un niveau mondial va
accroître la compétition autour de l‟accès à ces ressources. Les ressources économiques
15 Ministère de l‟Ecologie, du Développement Durable, des Transports et du Logement, Chiffres clés du
transport, Repères, 2011
16 Commissariat Général au Développement Durable, La mobilité des français, Panorama issu de l’enquête
nationale transports et déplacements 2008, La revue du CGDD, décembre 2010
17 Voir également l‟annexe 1 pour la répartition modale des déplacements en France
Infrastructures
Augmentent la
productivité
Attirent des acteurs
Augmentation de la
production
10
diminuent également. Que l‟on parle de l‟épargne des populations ou des fonds publics, il
devient de plus en plus difficile de financer des projets ou d‟assumer les coûts de la mobilité.
Le prix de l‟essence augmente, ce à quoi il faut ajouter les coûts d‟entretien et d‟assurance
d‟un véhicule, ce qui porte la dépense annuelle aux alentours de 6 777€ selon l‟ADEME18
.
Enfin, les ressources spatiales se font plus rares. En effet, chaque année, 800 kilomètres
carrés19
(l‟équivalent d‟un département tous les six à sept ans) sont sacrifiés pour la
construction de routes, bâtiments, ce qui entraîne une diminution des terres agricoles
disponibles. Cela suppose également une artificialisation20
des sols qui augmente le
phénomène de ruissellement et empêche l‟absorption de l‟eau par les sols.
De par les implications qu‟a la mobilité dans les trois domaines du développement durable
et parce que cette notion est devenu un critère impératif, il est nécessaire de repenser notre
modèle. Comme nous venons de le voir, il devient de plus en plus coûteux de se déplacer.
Socialement, cela revient à exclure les populations les plus en difficulté. Or, cette mobilité est
essentielle. Economiquement, cela pèse sur la productivité. En sus, tous ses effets néfastes sur
l‟environnement ne sont plus ignorés. Les émissions de gaz à effet de serre dues au secteur
transport représentent en 2009, 26,4 %21
du total des émissions du pays et 33,7% des
émissions de CO2. La mobilité étant essentiellement routière, elle représente 93,8%22
des
émissions de CO2 du secteur. Il faut ajouter à cela, l‟émission de polluants, de bruit et
l‟impact des infrastructures sur les paysages et l‟environnement.
La mobilité telle que nous la pratiquons aujourd‟hui montre ses limites et les initiatives en
faveur de son amélioration intègrent toujours plus ces critères de durabilité, éléments devenus
impératifs.
18 Selon l‟ADEME, pour un total annuel de 15 000 kilomètres (40% en ville, 35% sur route et 25% sur
autoroute), le coût annuel est estimé à 4 165 € pour une petite voiture roulant à l‟essence, à 6 404 € pour une
voiture moyenne roulant au diesel et 9 763 € pour un monospace roulant au diesel.
19 M. Domergue, « L‟agriculture grignotée par la ville », Alternatives économiques, juin 2012, p.33
20 L‟artificialisation est le passage d‟une surface à l‟état naturel (friche, prairie naturelle, zone humide etc.)
forestier ou agricole à un état plus artificiel (espaces bâtis, revêtus, espaces verts urbains etc.). Définition issue
de l‟article « L‟agriculture grignotée par la ville », Alternatives économiques, juin 2012, p.33
21 Ministère de l‟Ecologie, du Développement Durable, des Transports et du Logement, op. cit.
22 Ministère de l‟Ecologie, du Développement Durable, des Transports et du Logement, op. cit.
11
b) Les enjeux de la mobilité pour les élus
La question des transports concerne tous les échelons d‟élus locaux. L‟enchevêtrement de
compétences qui caractérise l‟action publique française trouve en effet une illustration
particulièrement intéressante lorsque l‟on s‟intéresse à la question des transports. Le tableau23
ci-dessous synthétise les compétences de chaque niveau territorial en la matière. L‟Etat garde
la main sur les réseaux structurants pour le territoire. Même s‟il ne s‟agit pas d‟élus, nous ne
l‟écartons pas pour autant car il décide de grands projets et reste à l‟écoute du législatif et des
collectivités.
23 Assemblée des Communes de France, Clarification des compétences dans le champ des transports et de la
gestion de la mobilité, Audition de Daniel Delaveau, président de l’AdCF, par Yves Krattinger, vice-président de
la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, 30 novembre 2010 [En ligne]
12
Figure 3 : Répartition des prérogatives institutionnelles en matière de gestion des mobilités
Source : Olivier Crépin
Transports en
commun
Tarification,
intermodalité Voirie Stationnement
Management de
la mobilité
Promotion des
modes actifs
Transport et
livraison de
marchandises
Sécurité
routière
Communes
(Communes non
Autorités
Organisatrices de
Transport)
Maîtrise
d’ouvrage de la
voirie locale ;
police de la
conservation
Police de
circulation sur
l’ensemble du
réseau viaire
Ediction de
normes dans les
Plans Locaux
d’Urbanisme ;
aménagements
sur voirie,
récupération
d’une partie du
produit des
amendes
Ecomobilité des
scolaires
Aménagements
de pistes
cyclables ;
nouveaux
services à la
mobilité (type
Vélo en Libre
Service)
Police de
stationnement
sur voirie et
police de la
circulation
(arrêtés
municipaux) ;
Article 12 des
PLU (aires de
livraison
privatives) ;
Espaces
logistiques
urbains
Police de
circulation,
prévention
routière en lien
avec les services
de police et de
gendarmerie
Agglomérations24
(Autorités
Transports
collectifs
urbains,
organisation de
Tarification –
réseaux urbains
Centrales de
mobilité (conseil
Entretien de la
voirie d’intérêt
communautaire
; voirie
Pôles
d’échanges
d’intérêt
communautaire
Incitation à la
mise en place de
Plan de
Déplacements
Schémas
directeurs
cyclables ;
Aménagement
Harmonisation
des horaires ;
article 12 des
PLU (aires de
Volet sécurité
routière du Plan
de
Déplacements
24 Les groupements de communes ne sont pas reconnus comme collectivités territoriales.
13
Organisatrices de
Transports
Urbains
communautaires
ou syndicales)
services
réguliers et à la
demande
et information
multimodale)
Coopération
intermodale et
tarifaire
communautaire
(pour les
communautés
urbaines
seulement)
; Parc de
stationnement
hors voirie pour
les
communautés
seulement
d’Entreprises ;
Ecomobilité des
scolaires ;
Financement du
transport à la
demande,
autopartage
de pistes
cyclables
communautaire
s ou d’intérêt
communautaire
Nouveaux
services à la
mobilité (Vélo
Libre Service)
livraisons
privatives), si
PLU
communautaire ;
Zones logistiques
portuaires et
aéroportuaires
d’intérêt
nationaux
(communautés
urbaines) et
autres espaces
logistiques
urbains
Urbains (action
de prévention)
Départements
(Conseils
Généraux)
Transport en
commun
interurbain ;
Transport
scolaire
conventionné
Tarification
réseaux
départementaux
Coopération
intermodale et
tarifaire
Entretien de la
voirie
départementale
Ecomobilité des
scolaires ;
Financement du
transport à la
demande en
milieu
périurbain et
rural (y compris
convention
taxis)
Aménagement
de véloroutes et
voies vertes
Zones logistiques
portuaires et
aéroportuaires
départementales
; Ports et
aéroports
décentralisés
Prévention
routière
Régions
(Conseils
Organisation
du transport
ferroviaire
régional
Tarification du
réseau TER
Coopération
intermodale et
tarifaire
Incitation à la
mise en place de
Plan de
Déplacements
Entreprises en
liaison avec
Financement de
parcs vélos en
gare TER
Financement de
l’aménagement
de véloroutes et
Ports et
aéroports
décentralisés
Volet fret du
Schéma Régional
des
14
Régionaux) l’AOTU voies vertes Infrastructures
de Transport
Autres
(Etat et
opérateurs de
transports
principalement)
SNCF et autres
opérateurs
interrégionaux
SNCF et autres
opérateurs
privés
périurbains et
interurbains
Directions des
routes, DDT sur
les axes relevant
encore de la
maîtrise
d’ouvrage de
l’Etat,
Préfecture de
Police
(département
de Paris)
Services de
l’Etat (régime
pénal de
l’infraction aux
règles de
stationnement)
Sociétés
d’économie
mixte pour le
compte des
communes et
AOTU (parcs
hors voirie)
Centrales de
mobilité,
associations
locales,
chambres de
commerce et
d’industrie,
entreprises,
administrations
dans le cadre de
Plans de
Déplacements
de
l’Administration
(obligatoire
pour les
agglomérations
de plus de 100
000 habitants)
Associations
locales,
opérateurs
privés
Autorité de
régulation des
activités
ferroviaires
(ARAF) et Réseau
Ferré de France
(attribution de
sillons)
Aéroports non
décentralisés,
grands ports
maritimes et
autres
Opérateurs
Ferroviaires de
Proximité
Services de
l’Etat
compétents
Intervention forte
Intervention croissante
15
Un même déplacement peut donc concerner plusieurs niveaux d‟élus, surtout si celui-ci se
fait sur une longue distance. Cela peut se traduire par des incohérences ou des ruptures de
charges qu‟il faut toujours tenter de minimiser pour l‟usager. Cela nécessite des relations
étroites entre différentes autorités organisatrices de transport (AOT), ce qui n‟est pas toujours
le cas. Le Premier Ministre, en visite dans le département des Bouches-du-Rhône constatait
justement le trop grand nombre d‟AOT dans le département, nuisant au confort des passagers.
Le premier enjeu des élus pour la mobilité consiste donc en cette complémentarité pour
assurer à l‟usager un trajet efficace.
Figure 4 : Illustration schématique de différents scopes d'un déplacement
Source : Julie Cathala
Scope régional
Scope national
Scope AOT
16
Les problématiques liées à la mobilité des personnes pour les élus sur un territoire
concernent prioritairement les trajets pendulaires et de vie quotidienne. L‟élasticité de ces
déplacements atteint aujourd‟hui son maximum. C‟est particulièrement le cas en Île-de-
France où les habitants de la région passent en moyenne une heure et demi dans les transports
tous les jours25
. Lorsqu‟ils prennent leurs voitures, ils passent environ 58h par an26
dans les
encombrements. Avec une moyenne de 38,7 heures perdues dans les bouchons en France, la
ville de Paris et sa région ne sont pas les seules concernées. Tout ceci indique que les réseaux,
routes comme réseaux de transports en communs (en témoigne la ligne 13 à Paris par
exemple, empruntée par plus de 500 000 personnes par jour27
) sont saturés. La capacité
maximale (dans les conditions actuelles d‟exploitation) des infrastructures est en effet atteinte.
Ces heures perdues représentent à la fois un manque pour l‟économie mais aussi une baisse de
la qualité de vie pour les personnes. Les engorgements coûteraient à l‟économie européenne
environ 1% du PIB par an28
.
Pour les raisons que nous avons évoquées précédemment, se déplacer coûte également de
plus en plus cher pour ceux qui dépendent de leur voiture. Ils sont nombreux, la
périurbanisation ayant entraîné une dépendance forte à l‟automobile. Cela représente un
véritable enjeu pour les élus, responsables de l‟organisation des transports et de l‟urbanisme.
Mais les transports en commun coûtent également de plus en plus cher aux AOT. En effet, le
déficit des réseaux de transport public se creuse, passant ainsi de 922€ à 1 612€29
par
voyageur et par an. La question de la gratuité des transports en commun abordée dans
certaines communes renforce ce point, le taux de participation de l‟usager étant au minimum,
les coûts doivent être totalement couverts par d‟autres sources, sources qu‟il faut encore
identifier pour assurer la mise en œuvre du service.
Les élus font donc face à un triple problème concernant la mobilité. Elle est en effet
entravée par la congestion des réseaux, les limites du modèle de l‟automobile individuelle et
25 Chronos, ATTOMA, Nouvelles mobilités, des mobilités libres, durables et responsables : un discours, des
outils, août 2009, 118 pages.
26 INRIX, Le trafic routier recule dans le monde entier : le relevé statistique d’INRIX, juin 2012, communiqué
de presse. (Etude en ligne)
27 L. Bu, M. Fontanès, O. Razmon, op. cit. , p. 25
28 Chiffre selon Isabelle Durant, membre de la Commission transports et tourisme du Parlement européen
29 Chronos, ATTOMA, op. cit. , août 2009, 118 pages
17
le manque de financements disponibles pour engager des actions. En sus, ces actions ne sont
pas évidentes à identifier. Comment assurer de nouvelles solutions de mobilité dans des
territoires périurbains où la densité ne permet pas la desserte en transports en commun ?
Comment favoriser l‟intermodalité, c‟est-à-dire la complémentarité efficace entre les
différents modes ? Autant de questions auxquelles les élus doivent tenter d‟apporter une
réponse.
c) Les enjeux de la mobilité pour les entreprises
Si les décideurs publics sont très concernés par les questions de mobilité et de transports,
les entreprises le sont tout autant. En effet, la mobilité représente à la fois un enjeu et un
marché pour elles.
Un enjeu tout d‟abord car les salariés d‟une entreprise sont ces mêmes personnes dont nous
parlions, bloquées dans les encombrements et freinées dans leurs déplacements par le coût
croissant du carburant. Les entreprises sont donc concernées par ces problèmes même si elles
disposent de peu de marge de manœuvre pour agir. Toutefois, les démarches nommées „plan
de déplacements30
‟ se multiplient et offrent un levier d‟action pour les entreprises. Il s‟agit de
démarches de rationalisation et de limitation des déplacements engendrés par l‟activité d‟une
organisation qui visent à améliorer les déplacements domicile-travail ainsi que les
déplacements dans le cadre du travail. L‟intérêt d‟un plan de déplacements est d‟identifier des
pistes d‟amélioration qui pourront par la suite faire l‟objet de propositions auprès d‟une AOT
par exemple. L‟association Horizon Employeur rassemblant des entreprises sur la zone
d‟emplois de Vélizy-Villacoublay, dont trois tenues de réaliser un plan de déplacements, a
ainsi pu identifier des carences dans l‟offre de transports en commun sur la zone pour porter
un projet d‟amélioration devant les transporteurs et l‟AOT (dans le cas de l‟Île-de-France, le
STIF, Syndicat des Transports en Île-de-France).
Par ailleurs, les entreprises ont un besoin de mobilité et de transports de marchandises qui
peut être conséquent en fonction de leurs domaines d‟activités. Les entreprises de services
30 La notion de plan de déplacements est apparue avec le Plan de Déplacements Urbains (PDU) instauré par la
loi n°82-1153 du 30 décembre 1982 d‟Orientation des Transports Intérieurs et renforcé par la loi n°2000-1208 du
13décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains. Le PDU a été rendu obligatoire par la loi
n°96-1236 du 30 décembre 1996 sur l‟air et l‟utilisation rationnelle de l‟énergie pour les périmètres de transports
urbains, sur lesquels s‟applique le PDU, des agglomérations de plus de 100 000 habitants.
18
peuvent avoir besoin d‟envoyer leurs salariés aux quatre coins d‟une ville tout comme un
supermarché a besoin d‟être réapprovisionné régulièrement. L‟activité de transport et les
solutions de mobilité sont capitales pour le fonctionnement de ces entreprises.
Elles sont également des fournisseurs de solutions de mobilité et de véhicules. La mobilité
représente alors pour elles un marché. En effet, il est nécessaire de fabriquer des trains, des
voitures ou des bus et de nombreux industriels se partagent le secteur. Et lorsque les régions
ne sont pas en mesure d‟honorer les commandes de matériels roulants qu‟elles avaient
prévues pour les Trains Express Régionaux (TER), cela met en difficulté les constructeurs. Si
l‟on y ajoute les doutes sur les commandes de la part de l‟Etat également, « les conséquences
sur l‟emploi risquent donc d‟être redoutables »31
puisque l‟usine Bombardier se trouvant dans
le Nord affiche selon sa direction « un avenir incertain après 2015 ». Les entreprises peuvent
aussi exploiter des réseaux de transports, les collectivités ayant la possibilité de déléguer la
gestion de leurs réseaux à un transporteur. Les entreprises sont aussi gestionnaires de
solutions de mobilité plus innovantes telles que l‟autopartage ou la mise à disposition de vélos
en libre service.
Enfin, les entreprises sont importantes en matière de transport et de mobilité car elles
contribuent au financement des solutions de transport en commun. Toute entreprise de plus de
neuf salariés en milieu urbain est en effet obligée de payer un impôt appelé « versement
transport », proportionnel au montant de la masse salariale. Il est aujourd‟hui reversé aux
AOT qui peuvent décider d‟une augmentation s‟il est nécessaire de financer une infrastructure
particulière. Elles participent également à ce financement via le remboursement obligatoire du
titre de transport de leurs salariés, à hauteur de 50% minimum.
31 « Les Régions vont-elles faire dérailler Alstom et Bombardier », La Tribune, 26/10/12, p. 3
19
II. La communication : un processus à définir
1. La communication : un processus multiforme
La définition de la communication que nous prenons détermine le périmètre de notre étude
tant elle peut recouvrir diverses réalités. L‟enjeu de la communication selon Dacheux, c‟est la
cohabitation, la compréhension de l‟autre. Et c‟est un impératif d‟autant plus vrai dans la
société actuelle qui a connu la révolution des modes de communication. L‟arrivée de
l‟Internet notamment a ouvert la possibilité pour de nombreux acteurs de s‟exprimer. Il est
alors bien loin « ce temps où l‟on considérait l‟acte de communication comme un couple
émetteur-récepteur »32
. Il est devenu une activité complexe, riche et variée. Pour une approche
plus opérationnelle de la communication, nous pouvons utiliser la définition donnée par
Westphalen et Libaert :
« La communication des organisations est le processus d‟écoute et d‟émission de messages
et de signes à destination de publics particuliers, visant à l‟amélioration de l‟image, au
renforcement de leurs relations, à la promotion de leurs produits ou services, à la défense de
leurs intérêts. »33
Les points importants à retenir de cette définition selon Libaert34
sont que la
communication est un processus qui commence par une activité d‟écoute avant d‟émettre un
message, qui peut avoir plusieurs finalités et est destiné la plupart du temps à un public bien
précis. On peut alors établir un inventaire des différents types de communication que l‟on
peut rencontrer en fonction de ces différents publics et objectifs visés. Nous n‟allons bien
entendu pas les détailler ici car tous ne rentrent pas dans notre périmètre d‟étude et ceux
auxquels nous nous intéresserons seront détaillés plus loin :
La communication produit pour le marketing d‟un produit spécifique ;
La communication B to B qui a lieu entre industriels ;
La communication financière, principalement à destination des publics financiers ;
32 M-H Westphalen, T. Libaert, Communicator, toute la communication d’entreprise, Paris, Dunod, 5
ème édition,
2009
33 M-H Westphalen, T. Libaert, Communicator, toute la communication d’entreprise, op. cit., p. 10
34 T. Libaert, Introduction à la communication, Paris, Dunod, Collection Les Topos, 2009, p. 19
20
La communication d‟influence pour défendre ses intérêts ;
La communication institutionnelle, destinée à améliorer l‟image d‟une entreprise et qui
peut s‟adresser à plusieurs publics ;
La communication sensible, différente de la communication de crise, elle vise à l‟éviter et
concerne des sujets sensibles comme le tabac ou les OGM ;
La communication d‟acceptabilité qui accompagne des projets et vise à convaincre de
l‟utilité de ces derniers ;
La communication de crise ;
La communication de proximité, communication de terrain qui vise « les relations entre
l‟implantation et les acteurs locaux : élus locaux, presse locale, riverains » ;
La communication de recrutement ;
La communication interne, envers les salariés ;
La communication internationale ;
La communication sur le développement durable ;
La communication non marchande qui représente la communication des ONG,
associations et fondations ;
La communication publique qui regroupe la communication du gouvernement, des
territoires ;
Et la communication politique.
Certains types de communication se définissent plus par le type de cible visé, d‟autres par
le contenu des messages. Les types de communication qui sont plus susceptibles de nous
intéresser sont les suivantes :
La communication d‟influence, parce qu‟elle a pour cible principale les élus ;
La communication institutionnelle, parce qu‟elle peut s‟adresser aux élus et permet de
mettre en avant un point favorable pour un projet ;
La communication d‟acceptabilité car elle entre en jeu lors de la mise en œuvre de grands
projets d‟infrastructures ;
La communication de crise ;
La communication de proximité qui prend également pour cible les élus mais dans un
cadre plus restreint ;
Et la communication publique, les élus faisant partie de notre cible d‟étude.
21
2. La communication des élus et des entreprises
a) La communication des élus
On serait tenté de résumer la communication des élus à ce qu‟on appelle la communication
politique. Il nous faut alors distinguer la communication des élus parlementaires et celle des
élus locaux. Il apparaît néanmoins évident que, pour chacune, le caractère spécifique de cette
communication réside dans son aspect politique. Lorant35
définit ainsi ce terme et les deux
sphères dans lesquelles s‟inscrit la communication pour les collectivités :
La sphère politique, relative à la conquête et à l‟exercice du pouvoir ;
Et la sphère du projet, relative à la mission de la collectivité en politique, signifiant
littéralement la „gestion de la cité‟.
Depuis quelques années en effet, les collectivités se sont lancées dans des activités de
communication, au même titre que les entreprises et selon des méthodes similaires. Lorant
nous propose les quatre formes suivantes pour la communication d‟une collectivité,
représentées sur le schéma ci-après36
:
La communication politique, partagée entre une communication électorale et une
communication de projet ;
La communication avec les habitants/usagers/citoyens, qui peut prendre quatre formes
différentes ;
La communication avec l‟environnement de la collectivité ;
Et la communication avec les agents de la collectivité, similaire à la communication
interne d‟une entreprise.
35 G. Lorant, Les collectivités locales face aux défis de la communication, Paris, L‟Harmattan, 2005, p. 15
36 G. Lorant, Les collectivités locales face aux défis de la communication, op. cit.
22
Figure 5 : Représentation schématique de la communication des collectivités territoriales
Source : Julie Cathala d’après G. Lorant
Bien que comparable à la communication d‟entreprise, les collectivités font face à des
enjeux différents : politiques, sociétaux, de développement et de service public. Les
différentes formes de communication pour répondre à ces enjeux engagent très différemment
la personnalité de l‟élu. La communication électorale par exemple, engage l‟élu et lui seul. La
communication de projet se rapporte davantage à la mise en œuvre d‟un projet pour un
territoire et engage l‟élu sur ses fonctions. Pour les élus parlementaires, la communication
prend un aspect plus personnel car ni l‟Assemblée Nationale ni le Sénat ne disposent d‟un
service de communication dédié. La multiplication des canaux a rendu cette tâche de plus en
plus difficile. Une information met désormais sept minutes pour faire le tour du monde, tout
se sait plus ou moins rapidement. Communiquer seul nécessite alors une grande maîtrise.
La communication des élus semble donc divisée entre une communication tournée sur la
personnalité de l‟élu et ses accomplissements et une communication plus politique, dans le
sens de projet pour la cité.
23
b) La communication des entreprises
La communication des entreprises peut être divisée en deux grands champs : la
communication interne et la communication externe. La première concerne les publics
internes de l‟entreprise : les salariés. Cette communication est très importante pour la
structure car elle permet de faire adhérer à un projet et rend possible l‟autonomie des salariés.
En effet, il est nécessaire qu‟ils connaissent le projet de l‟entreprise et vers où on souhaite la
faire aller pour qu‟ils comprennent leurs rôles. Bien qu‟essentielle, elle ne sera bien
évidemment pas abordée dans ce propos qui souhaite étudier les relations entre l‟entreprise et
les élus. Cela relève de la communication externe. Comme son appellation l‟indique, elle
s‟adresse aux publics extérieurs à l‟entreprise.
Ces publics se sont diversifiés avec le temps. Comme nous l‟annoncions, l‟arrivée de
l‟Internet a ouvert le champ d‟expression à une large palette d‟acteurs. La communication
extérieure d‟une entreprise ne comprend plus seulement les acteurs institutionnels mais tout
les acteurs se trouvant dans l‟environnement de celle-ci37
. Les graphiques ci-dessous38
illustrent cette multiplication d‟acteurs et montrent la répartition des publics visés en 2007.
37 M-H Westphalen, T. Libaert, Communicator, toute la communication d’entreprise, op. cit., p. 69
38 Les données exploitées dans les deux graphiques proviennent de l‟ouvrage suivant : M-H Westphalen, T.
Libaert, Communicator, toute la communication d’entreprise, op. cit., p. 70
24
Figure 6 : Importance des différentes cibles pour la communication d’entreprise en 2007
Source : Julie Cathala d’après M-H Westphalen et T. Libaert
25
Figure 7 : Evolution de l’importance des différentes cibles de la communication d'entreprise
Source : Julie Cathala d’après M-H. Westphalen et T. Libaert
26
Nous pouvons voir que les pouvoirs publics français ainsi que les collectivités occupent
une place plus importante dans les cibles de communication des entreprises en 2007 qu‟en
1992. Nous verrons en effet que les entreprises ont pris conscience de l‟intérêt de
communiquer avec les décideurs publics et en quoi consiste cette communication envers cette
cible. Par ailleurs, les pouvoirs publics ainsi que les collectivités sont également parmi les
cibles les plus importantes dans le spectre de la communication d‟entreprise.
De la définition donnée de la communication, nous sortons quatre objectifs qui
représentent autant d‟enjeux pour les entreprises :
L‟amélioration de son image ;
Le renforcement de ses relations ;
La promotion de ses produits ;
Et la défense de ses intérêts.
L‟entreprise doit donc gérer une communication multiforme et aux objectifs multiples,
bien que ces derniers ne soient pas indépendants les uns des autres. L‟image semble
cependant être le point déterminant pour une entreprise, conditionnant l‟atteinte des autres
objectifs. En effet, construire une image juste, positive, durable et originale39
ne peut que
servir l‟entreprise.
39 Termes issus de l‟ouvrage Communicator, tout la communication d’entreprise, op. cit.
27
Chapitre 2 : La relation élus – entreprises : enjeux et dynamiques
de communication
Avant de nous intéresser à l‟étude des dynamiques qui animent les relations entre élus et
entreprises, il paraît intéressant dans un premier temps de se pencher sur les caractéristiques et
les logiques d‟actions de chaque partie. Cela permettra à la fois de mieux les connaître afin
d‟appréhender plus facilement les relations qu‟ils entretiennent ainsi que la nature de celles-
ci.
I. Connaître les élus et leurs logiques d’actions
Le public des « élus » que nous souhaitons étudier n‟est pas complètement homogène et
mérite d‟être détaillé plus longuement ici.
1. Une multitude de fonctions électives
Il existe plusieurs niveaux d‟exercice pour un mandat et les élus ne cumulent pas tous un
mandat au niveau local et au niveau parlementaire. Peut-on en conclure qu‟il y a des élus qui
auront plus de poids que d‟autres et aussi, plus de ressources ? Ces élus sont-ils plus écoutés
et plus influents ? Quelles sont ces ressources qu‟ils peuvent mobiliser ?
Nous considérons ici tous les niveaux et ce pour trois raisons :
La mobilité, nous l‟avons vu, concerne les trois échelons de collectivités territoriales ;
Beaucoup d‟élus, nous allons le voir, exercent à la fois un mandat local et un mandat
parlementaire, ce qui rend difficile de dissocier leur activité ;
Et les élus parlementaires sont ceux qui votent les lois et influencent des grands projets.
28
a) Les élus de l’Assemblée Nationale
Les élus de l‟Assemblée Nationale constituent un public intéressant à plusieurs titres.
D‟une part, on y retrouve beaucoup d‟élus locaux, comme nous allons le détailler, d‟autre part
car il s‟agit de la chambre qui, sur avis du gouvernement, a le pouvoir de trancher en dernier
recours sur le vote d‟une loi.
L‟Assemblée Nationale française est la chambre basse européenne qui compte le plus de
« cumulards »40
. 83% des députés exercent un mandat au niveau local. A l‟issue des dernières
élections, seuls 139 députés sur 577 n‟exercent pas un mandat au niveau local41
. Ce qui veut
dire que 76% des députés cumulent deux mandats ou plus. Car il est en effet possible de
cumuler quatre mandats au maximum, la loi ne tenant pas compte des communes de moins de
3 500 habitants ni des intercommunalités. Dans les faits, le cumul le plus rencontré est celui
de député-maire. 250 députés sont dans ce cas suite aux dernières élections. Viennent ensuite
les députés qui détiennent un mandat de conseiller local (155), de président
d‟intercommunalité (91) et enfin de président d‟un exécutif local (16). Si l‟on totalise ces
chiffres, on obtient le nombre de 651. Or, l‟Assemblée Nationale ne compte que 577 députés.
Cela signifie qu‟il existe en effet des élus qui cumulent plus de deux mandats. C‟est le cas
pour 161 d‟entre eux, 33 cumulent quatre mandats, 128 en cumulent deux42
.
Les élus de l‟Assemblée Nationale n‟ont pas de compétences opérationnelles en termes de
mobilité mais ils peuvent néanmoins se saisir de certains sujets. Si l‟on regarde les questions
posées au gouvernement depuis le début de la XIVème
législature, ont ainsi pu être évoqués les
grands projets, la question de la desserte aérienne de Strasbourg, le Grand Paris et les projets
d‟infrastructures de transport43
. Nous verrons également que le cumul des mandats que nous
évoquions peut influencer leur travail au sein du Parlement.
40 T. Pech, « Cumul des mandats : un mal français », Alternatives Economiques, op. cit., p. 30-32
41 S. Laurent, « Cumul des mandats, pour y voir clair », Le Monde, 27/06/12, (En ligne)
42 S. Laurent, A. Léchenet, « Les trois quarts des députés cumulent les mandats », Le Monde, 27/06/12, (En
ligne)
43 Source : www.assemblee-nationale.fr (consulté le 14 octobre)
29
b) Les élus du Sénat
Le Sénat est la chambre haute du Parlement français et représente les collectivités
territoriales. Le cumul entre une fonction de sénateur et un mandat local semble donc moins
problématique. Il apparaît en effet plus logique qu‟un élu local représente les collectivités au
sein du Sénat plutôt qu‟au sein de l‟Assemblée Nationale, représentante du peuple. En
revanche, l‟Assemblée Nationale détenant le dernier mot sur les textes votés, le pouvoir du
Sénat semble limité. Pour autant, la qualité des analyses qu‟il fournit incite bien souvent les
députés à suivre leur avis et il exerce également, comme l‟Assemblée Nationale, un pouvoir
de contrôle sur le gouvernement.
La fonction de sénateur, moins médiatique que celle de député, n‟empêche toutefois pas
ces élus de s‟exprimer sur des projets en faveur d‟un territoire. Ainsi le sénateur des Hautes-
Alpes, Pierre Bernard-Reymond, continue de défendre le projet de construction du chaînon
manquant de l‟A51 entre Grenoble et Gap, utile selon lui au désenclavement du département.
Enfin, les sénateurs jouent en rôle dans la définition de l‟orientation des grands projets
d‟infrastructures pour le pays et qui auront un impact sur les territoires et les entreprises. Le
17 octobre 2012, le ministre délégué aux Transports, à la Mer et à la Pêche, Frédéric Cuvillier
a ainsi annoncé la composition de la commission chargée de réviser le Schéma National pour
les Infrastructures de Transport, élaboré suite au Grenelle de l‟Environnement. Elle est
composée de quatre députés mais aussi de deux sénateurs.
30
c) Les élus des collectivités territoriales
Comme nous l‟avons vu, les élus de collectivités territoriales se retrouvent à l‟Assemblée
Nationale et, plus logiquement, au Sénat. Mais cela ne représente au final qu‟une proportion
infime des mandats. En effet, il existerait en France pas moins de 500 000 fonctions
électives44
réparties dans les régions, départements, communes et intercommunalités.
Les élus des collectivités sont les plus directement concernés par les questions de mobilité.
Leurs prérogatives en la matière ont été précisées dans le tableau en figure 3. Néanmoins, on
peut repréciser sommairement ici la répartition entre ces trois échelons :
La commune a en charge l‟organisation des transports en commun sur son périmètre,
fonction de plus en plus assumée par les groupements de communes ;
Le département est responsable des liaisons interurbaines et des transports scolaires ;
Enfin, la région organise les transports ferroviaires d‟intérêt régional (Trains Express
Régionaux).
On peut ajouter à ces compétences celles en lien avec l‟aménagement du territoire qui sont
également importantes. En effet, les questions d‟urbanisme et de mobilité sont très liées.
Ainsi, comme le précise Lévy, « la mobilité est centrale pour la forme urbaine ». Il continue
en expliquant que la ville peut être vue comme une « dynamique contradictoire entre des lieux
et des liens entre ces lieux », que « la ville organise une cospatialité entre réseaux et
territoires »45
. Nous ne souhaitons bien sûr pas rentrer dans le détail de cette question mais il
faut alors bien noter que les outils en matière d‟urbanisme et d‟aménagement dont disposent
les élus sur leurs territoires sont capitaux lorsqu‟il s‟agit de mettre en œuvre des projets de
mobilité.
44 L. Bu, M. Fontanès, O. Razemon, Les transports, la planète et le citoyen : En finir avec la galère, découvrir la
mobilité durable, op. cit., p. 146
45 J. Lévy, « Quelle mobilité pour quelle urbanité ? », interview du 5 Janvier 2006 pour la vidéothèque
numérique de l‟enseignement supérieur, (En ligne)
31
2. La fonction d’élu
Les ouvrages traitant du lobbying, parce que ce dernier prend pour cible principale les élus,
permettent de mieux les connaître ainsi que leurs logiques d‟actions et de choix. Nous nous
appuierons donc sur ces derniers. Les logiques d‟actions des élus sont guidées par deux
grands principes :
Une volonté de se mettre au service de leurs électeurs, tenant leur pouvoir d‟une confiance
accordée par ces derniers ;
Et un besoin de rassembler des conditions favorables à leur réélection.
Le principal but d‟un élu est en effet de voir son mandat reconduit. Il essaie donc d‟aller
dans le sens des demandes qu‟on peut lui formuler, de rester à l‟écoute des besoins de ses
électeurs. Beaucoup d‟actions, de prises de positions et de mises en valeur médiatique ont
pour but final de permettre leur reconduite à leur poste. Il est cependant tenu par d‟autres
logiques, notamment une logique de parti lors du vote à l‟Assemblée Nationale et, bien sûr,
ses propres convictions et idées. Le mandat impératif est l‟écueil que tout élu doit éviter.
Nous avons noté que beaucoup de députés sont également détenteurs d‟un mandat local.
Selon une étude menée par Laurent Bach, les cumulards, parce qu‟ils sont environ 20% à
combiner travail parlementaire et mandat local lourd (député et mandat de maire d‟une ville
de plus de 30 000 habitants ou président d‟un conseil général ou d‟un conseil régional) et 15%
à cumuler travail parlementaire et mandat local moyen (député et mandat de maire d‟une ville
de moins de 30 000 habitants qui est soit chef-lieu de circonscription soit qui a plus de 9 000
habitants), sont moins présents à l‟Assemblée. Cela les conduit également à s‟inquiéter plus
fréquemment des sujets qui concernent particulièrement les collectivités territoriales et à
développer des « logiques de fief ». Ils entretiennent ainsi une relation particulière avec un
territoire et ses électeurs. Cela les incite à privilégier les préoccupations locales, se constituant
ainsi en relais des doléances portées par leurs électeurs. Ces logiques de fief sont
particulièrement intéressantes lorsque l‟on évoque la mobilité car il s‟agit d‟un problème qui
s‟étudie sur un territoire spécifique. Laurent Bach le souligne, ces élus soulèvent plus de
questions en rapport avec leur territoire plutôt que sur des questions d‟intérêt général. Par
ailleurs, les élus cumulant un mandat local et un mandat national sont en général mieux
renseignés et disposent de plus d‟informations sur le terrain qu‟ils pratiquent de façon presque
32
quotidienne. Ainsi, l‟information qui leur sera utile pour défendre un dossier leur sera
certainement plus facilement accessible.
Les élus cherchent donc soit à se mettre en avant pour favoriser leur réélection, soit à
mettre en avant leur territoire et ses besoins. Le fil conducteur reste la réunion d‟éléments
favorables pour leur réélection.
33
II. Connaître l’entreprise et ses logiques d’actions
1. Une multitude d’entreprises
Le public des entreprises est également très hétérogène puisqu‟il existe différentes tailles
d‟entreprises ainsi que différentes formes juridiques. On peut y trouver des grands groupes
tout comme de jeunes entreprises de plus petite taille. Habituellement, les critères de tri se
basent soit sur la taille de ces entreprises, soit sur leur forme juridique ou leur secteur
d‟activités. Ainsi on distingue46
:
Les micro-entreprises : dont le chiffre d‟affaire est inférieur à 81 500 euros ou 32 600
selon leur type d‟activité ;
Les très petites entreprises47
(TPE) : structures de moins de 10 salariés;
Les petites et moyennes entreprises (PME) : entre 10 et 49 salariés pour les petites
entreprises, entre 50 et 249 pour les moyennes entreprises ;
Les grandes entreprises : 250 salariés et plus ;
Les groupes d‟entreprises : qui rassemblent une société mère et ses filiales ;
L‟entreprise étendue : qui rassemble une entreprise pilote et ses nombreuses entreprises
partenaires.
Connaître ces catégories est important car les modes d‟actions ainsi que les moyens ne sont
pas les mêmes selon qu‟il s‟agira d‟une grande entreprise ou d‟une PME. Certaines formes
sont par ailleurs plus propices à certaines solutions. C‟est particulièrement vrai dans le cas de
la mobilité et des transports où de nombreuses solutions innovantes sont susceptibles de voir
le jour avec de petites entreprises. Par ailleurs, le monde des transporteurs routiers de
marchandises est un monde de PME plutôt que de grands groupes.
46 Source des informations : Wikipédia
47 Des critères de chiffres d‟affaires sont aussi appliqués pour les autres entreprises pour déterminer dans quelles
catégories elles se situent.
34
Ainsi, on peut résumer à l‟aide du tableau suivant, les différentes entreprises
particulièrement concernées par les questions de mobilité, appartenant pour la plupart, au
secteur des transports.
Conception de
véhicules
Conception et gestion
d’infrastructures Transporteurs
Conception de
solutions de
mobilité
Entreprises dont
l’activité est
fortement liée aux
questions de
transport
Industries
automobiles,
poids-lourds et
véhicules
transports en
commun ;
Industries deux
roues ;
Constructeurs
matériel roulant
pour le
ferroviaire ;
Industries vélo ;
Chantiers
navals
Entreprises du
BTP ;
Sociétés
concessionnaires
d’autoroutes ;
Sociétés
gestionnaires de
parking ;
Réseau Ferré de
France ;
Télécoms ;
ErDF ;
GrDF ;
Entreprises
gestionnaires de
gares,
d’aéroports, de
plateformes
logistiques
Entreprises
exploitant des
réseaux
publics ;
Entreprises de
livraison et de
transport de
marchandises
Nouveaux
acteurs ;
Acteurs se
repositionnant
sur le secteur
de la mobilité ;
La Poste ;
Autres
entreprises
Figure 8 : Les entreprises dans le domaine de la mobilité et des transports
Source : Julie Cathala d’après G. Plassat
35
2. Les stratégies de l’entreprise
L‟entreprise est un projet qui peut être défini, pour sa partie économique, comme suit :
« organisation économique qui combine un ensemble de moyens humains, financiers et
matériels afin de produire des biens et services et de les commercialiser sur le marché »48
.
La raison d‟être d‟une société dépend du marché sur lequel elle se situe et des fonctions
qu‟on souhaite lui attribuer. Elle peut ainsi avoir pour objectif de49
:
Servir le marché : c‟est la partie économique de la définition d‟une entreprise ;
Gagner de l‟argent : principalement pour la rémunération d‟actionnaires ou pour favoriser
la venue d‟investisseurs ;
Produire un excédent de trésorerie : les ressources ainsi collectées pourront servir, dans le
cas de stratégies de groupes, à financer d‟autres activités mises en œuvres par des sociétés
différentes ;
Maximiser l‟utilité sociale ou le profit ;
Atteindre un but technique.
En somme, l‟entreprise cherche tout de même à atteindre un certain équilibre et à s‟assurer
une activité pérenne.
De plus en plus, les entreprises se regroupent en fonction des branches d‟activités afin de
faire valoir, au-delà de la concurrence qu‟elles peuvent se livrer entre elles, des intérêts
communs. Dans le domaine des transports et de la mobilité on peut par exemple citer l‟ASFA,
l‟Association des Sociétés Françaises d‟Autoroutes, qui regroupe les sociétés
concessionnaires ou exploitantes d‟autoroutes ou encore la toute récente Alliance Française
du Transport Routier de Marchandises, issue des regroupements de quatre fédérations
professionnelles et groupements de transporteurs. L‟ASFA cite notamment parmi ses
48 R. Soparnot, Organisation et gestion de l’entreprise, Les Topos, éditions Dunot Paris, 2012, p. 3
49 Source : Wikipédia
36
missions : « la représentation et la défense des intérêts de la profession » et « la politique de
communication sur les thèmes d'intérêt commun »50
.
Il s‟agit donc de porter des opinions et des valeurs d‟une seule voix et d‟avoir ainsi plus de
poids face aux pouvoirs publics. Il est en effet plus facile de dialoguer lorsque le discours est
cohérent et uniforme et d‟identifier la personne adéquate lorsque celle-ci est clairement
établie. Les revendications portées seront différentes selon que la mobilité représente un enjeu
ou un marché pour les entreprises mais le regroupement en fédération est un passage presque
obligé pour espérer avoir du poids.
50 www.autoroutes.fr
37
III. Les rapports élus – entreprises : enjeux et dynamiques
Nous allons à présent nous intéresser plus spécifiquement aux dynamiques de
communication entre élus et entreprises. Nous rappellerons également les enjeux des
interactions communicationnelles entre ces deux parties. Cela permettra d‟aborder les liens
entre ces deux entités de façon plus globale car toutes les relations qu‟ils entretiennent
n‟entreront pas par la suite dans le cadre de l‟étude des interactions pour la mise en œuvre de
projets de mobilité et de transports.
1. Une relation nécessaire mais délicate
Les élus et les entreprises répondent à des logiques tout à fait différentes, qu‟il s‟agisse de
logiques d‟action, de réflexion ou de positionnement. Mais en fait, les deux parties ont un
objectif commun qui est la pérennisation de leur activité. L‟atteinte de cet objectif dépend
simplement de facteurs et conditions très différents. Là où les pouvoirs publics vont
privilégier la recherche de l‟intérêt général, les milieux civils sont davantage tournés vers des
problématiques de terrain et d‟efficacité. La recherche de valorisation de leur image semble
toutefois constituer un point commun entre les deux entités.
Il faut également rappeler que les élus sont, pour reprendre la formule de Clamen, « ceux
qui établissent les règles du jeu »51
. Les entreprises sont soumises aux lois, votées par le
Parlement, textes qui viendront faciliter ou, au contraire, rendre plus difficile leur activité.
Rien d‟étonnant alors à ce que les entreprises cherchent à informer les élus sur leur secteur et
sur les retombées potentielles d‟un texte qu‟ils s‟apprêtent à voter ou à discuter. Ces relations
sont, selon Isabelle Rich, « vitales pour l‟entreprise qui espère ainsi influencer le processus de
décision tout en valorisant son image »52
.
De leur côté, les élus ont des connaissances mais ne sont pas des techniciens. Ils ne
peuvent donc pas connaître tous les éléments inhérents à un secteur d‟activité. C‟est justement
51 M. Clamen, Manuel de lobbying, Paris, Dunod, 2005
52 I. Rich, « Les rapports élus entreprises ou les âpres difficultés du vouloir vivre ensemble », La Revue
Parlementaire, Novembre 2005, p. 50
38
ce besoin d‟information qui a constitué la base des relations élus-entreprises. Les élus ont en
effet besoin d‟informations pour décider, et surtout, ils ont besoin d‟informations précises et
utiles. Comment décider d‟une loi sans en comprendre plus précisément les enjeux et les
retombées pour les acteurs économiques concernés ? Il est aussi important de rappeler que les
élus ont pour principal objectif de voir leur mandat reconduit. Or, toutes les entreprises
représentent un potentiel d‟électeurs important. Rester à leur écoute est donc primordial pour
l‟élu. Rester à l‟écoute ne veut pas pour autant dire que l‟élu devient un instrument aux ordres
de l‟entreprise mais plutôt qu‟il constitue une ressource pour tenter de faire valoir son
argument.
Les entreprises ont donc besoin d‟informer les élus et ces derniers sont demandeurs
d‟informations afin de pouvoir décider. La difficulté réside en la compréhension mutuelle
face à des préoccupations qui peuvent être bien différentes : l‟intérêt général et l‟efficacité
économique. L‟économique et le politique sont deux mondes distincts mais qui tendent à
vouloir se rapprocher depuis la fin des années 1980. Les entreprises étaient avant cela très
éloignées de la sphère publique et les organisations professionnelles étaient en charge des
relations avec les acteurs publics. Puis, face à la multiplication de sujets complexes, les élus
ont fait part de leur volonté de recevoir « directement le plus grand nombre d‟informations
pour mieux forger leur conviction et connaître les enjeux »53
. Les entreprises ont également
pris conscience du poids des décisions des élus sur leurs activités et ont ainsi décidé d‟être
mieux entendues. Ce sont d‟abord les entreprises publiques qui se sont avancées vers les élus
pour leur fournir des informations, suivies par les entreprises privées, principalement celles
qui travaillaient déjà avec les élus locaux ou dans des domaines très réglementés. Les
échanges entre élus et entreprises sont donc essentiels même si peu évidents. Des sessions
d‟immersions de sénateurs en entreprises ont été organisées afin « de favoriser la
compréhension mutuelle entre parlementaires et chefs d‟entreprise et de permettre aux
sénateurs qui le souhaitent de mieux appréhender les nouvelles réalités de l‟économie »54
.
53 M-J. Ranno, « Les entreprises et le Parlement », La Revue Parlementaire, Novembre 2005, p.54
54 Rencontres sénatoriales de l‟entreprise, http://www.senat.fr/evenement/immersion/index.html
39
2. Des outils et dynamiques variés
Afin d‟étudier quelques dynamiques de communication, l‟appui sur des cas concrets ainsi
que sur des informations plus théoriques semble assez pertinent. Cela permet à la fois
d‟aborder les grands principes tout en les mettant en perspective grâce à des exemples
concrets. Nous privilégions ainsi une approche multiscalaire :
Théorique : nous nous appuierons sur des définitions et informations basiques en lien avec
les dynamiques que nous souhaitons étudier ;
Et pratique : à l‟aide d‟études de cas, nous allons tenter de voir ce qu‟il se passe sur le
terrain et ainsi illustrer les informations théoriques évoquées.
Le choix des cas est toujours difficile car subjectif. Néanmoins, il a été guidé par trois
critères :
L‟accessibilité des informations ;
L‟actualité du projet ;
Et la nature du projet. Nous avons en effet souhaité étudier des sujets en rapport avec les
infrastructures (les immobiles, nécessaires aux déplacements), des sujets en rapport avec
un mode de déplacement en particulier (un mobile, la route rappelons-le, comme le
ferroviaire, n‟étant pas un mode mais une infrastructure) ainsi que des sujets en lien avec
un service de mobilité, c‟est-à-dire qui ne concerne ni une infrastructure, ni un mode de
déplacement directement.
40
a) La communication d’influence
La communication d‟influence rassemble toutes les actions qui pourront permettre de faire
peser la balance d‟un côté favorable à l‟entreprise. En effet, les élus décident bien souvent des
règles concernant un secteur ou un projet et l‟entreprise a tout intérêt à manifester ses intérêts.
Le terme d‟influence ne doit pas pour autant faire penser à des actions de pressions sur les
élus. Le lobbying, autre nom de la communication d‟influence, est un acte de communication
à part entière, c‟est-à-dire qu‟il s‟agit d‟un échange. Les élus gardant par ailleurs la main sur
la décision finale, il s‟agit plus de « persuasion » que de « négociation »55
.
Les bénéfices d‟une telle démarche pour une entreprise sont multiples :
« réduire les contraintes imposées par une réglementation (ou parfois en bénéficier) ;
infléchir un projet public (par exemple en matière d‟aménagement du territoire) ;
obtenir les autorisations indispensables à un projet privé ;
voir sa position soutenue dans les débats entre les Etats, notamment dans les débats
européens et dans ceux du commerce international ;
faire évoluer les méthodes propres à l‟Administration, notamment en termes de
concertation ;
Ou bénéficier de dispositions financières avantageuses (subventions, aides d‟Etat,
modalités financières, douanières et fiscales) »56
.
Concrètement, l‟élu peut appuyer la cause d‟une entreprise (ou d‟un groupement) de
plusieurs façons. Il peut tout d‟abord « infléchir sur le travail réglementaire »57
. L‟intérêt
pour les entreprises n‟est pas seulement de faire valoir une position auprès des élus de
l‟Assemblée Nationale mais bien de s‟intéresser à tous les niveaux d‟élus et de repérer celui
qui semble le plus pertinent. Tout cela même si « la règle par excellence » reste la loi votée au
Parlement. Les élus peuvent également « défendre un avantage » ou encore « poser une
question » et ainsi interpeller l‟exécutif sur un sujet particulier. En retour, l‟élu peut y trouver
55 M. Clamen, Manuel de lobbying, op. cit., p. 12
56 Ibid., p. 19
57 Ibid., p. 266
41
des atouts pour se mettre en avant et se valoriser. Il apparaît évident ici que ce travail de
communication d‟influence est un travail sur le long terme qui nécessite un travail de veille et
de suivi important. Ainsi, il se situe très en amont des projets et demande une très bonne
connaissance des processus de décisions pour être efficace. En effet, le temps de la « décision
institutionnelle » est un temps long et dont le contenu évolue, notamment au fur et à mesure
des navettes entre Assemblée Nationale et Sénat. Aux autres niveaux également, chaque
décision dispose d‟un processus particulier, c‟est le « maquis des procédures ».
Les fédérations professionnelles sont alors très utiles dans cette démarche car, comme nous
l‟avons précisé, il est plus facile de dialoguer avec un seul acteur, à un niveau plus élevé,
qu‟avec une entreprise seule. Elles portent les « intérêts catégoriels » et permettent aux
entreprises de rester informées. Cela n‟empêche pas une entreprise de s‟adresser plus
directement aux élus ou à l‟Etat pour défendre des intérêts plus particuliers. Il en a été ainsi de
l‟autoroute entre Toulouse et Castres. Ce projet provient d‟un dossier qui prévoyait
auparavant la mise à 2x2 voies de la RN 126. Dès les années 1990, l‟Etat étudie cette
possibilité et des aménagements sont effectués dans ce sens. En 2007, des études sont
engagées pour mettre en œuvre une concession autoroutière sur cet axe et terminer ainsi les
aménagements. En 2010, cette décision est entérinée. Le président du groupe Pierre Fabre,
implanté à Castres aurait porté ce projet devant le ministre des transports d‟alors, Dominique
Perben, afin de montrer en quoi cet aménagement autoroutier permettrait de poursuivre le
développement des entreprises dans le Tarn.
Parfois, nul besoin d‟aller voir un élu au niveau national pour défendre un projet. Les
entreprises peuvent aussi trouver ressource suffisante auprès d‟élus locaux. Ainsi la société
Autoroutes et Tunnel du Mont-Blanc et le conseil général de Haute-Savoie ont cofinancé une
aire de covoiturage. Partant au départ d‟un souci de sécurité, le stationnement sauvage des
covoitureurs pouvant en effet s‟avérer dangereux, les collectivités ont été associées à ces
réflexions car elles sont également concernées. Les stationnements sauvages ont ainsi lieu
indifféremment sur des « emprises autoroutières, accotements d‟une route départementale,
chemins d‟accès aux aires de services, trottoirs »58
. Cette « juxtaposition de propriétés
foncières » justifie le co-financement et la collaboration entre entreprises et élus. Ces derniers
58 C. Cabiron, « Covoiturage : les sociétés d‟autoroutes s‟emparent du sujet », Transport Public, octobre 2012, p.
34-40
42
y gagnent en termes de trafic routier, moins dense, et de fréquentation des transports en
commun, à la hausse.
La communication d‟influence trouve ainsi sa justification dans la nécessité de rapprocher
l‟élu du terrain en lui apportant des éléments concrets. A l‟échelle locale, les élus connaissent
mieux le terrain mais cela n‟empêche pas l‟entreprise d‟éprouver la nécessité de le convaincre
d‟une solution particulière. Il faut également noter que les élus eux-mêmes peuvent être à
l‟origine de démarches de lobbying, principalement envers des niveaux „supérieurs‟. Il n‟est
pas rare de voir un élu interpeller un parlementaire ou un membre du gouvernement sur une
situation. Une entreprise n‟a donc pas forcément besoin d‟aller porter un projet directement
devant le niveau le plus élevé, tirant ainsi profit de la légitimité de l‟élu à s‟exprimer sur des
questions concernant « son » territoire et ses compétences.
b) La communication d’acceptabilité
La communication d‟acceptabilité est le processus qui accompagne un « projet pouvant
être rejeté »59
. Selon son périmètre et son thème, on distingue quatre types de communication
d‟acceptabilité :
La communication d’acceptabilité
Territorialisée Thématique
Technico-économique Sociale Industrielle Publique
Exemple : construction
d’une autoroute
Exemple : logement
social Exemple : OGM
Exemple : réforme des
retraites
Figure 9 : Les formes de la communication d'acceptabilité
Source : T. Libaert
Pour notre propos, la communication d‟acceptabilité qui nous intéresse est celle qui a lieu
sur un territoire et sur des sujets technico-économiques. Mais la communication thématique
59 T. Libaert, Introduction à la communication, op. cit., p. 60
43
peut également être intéressante en ce sens qu‟elle peut s‟inscrire dans une démarche
d‟influence de long terme. Plutôt que de défendre un projet il s‟agira alors de défendre
l‟autoroute ou la route en général par exemple.
La communication d‟acceptabilité accompagne très souvent les projets d‟infrastructures
dont la mise en œuvre doit faire face au phénomène NIMBY (Not In My BackYard). Les
riverains ou élus comprennent les enjeux du projet et ne remettent pas forcément en cause son
bien fondé mais ils sont en revanche opposés à voir ce projet prendre forme près de chez eux.
La construction du Duplex A86 (cf. annexe 2) a dû faire face à ce type de résistances et vingt
ans de communication ont été nécessaires pour l‟implantation de ce projet. L‟A86 est une
autoroute qui a été construite par sections successives depuis les années 1960. A l‟ouest de
Paris, un tronçon manque mais sa construction doit faire face à plusieurs problèmes. Tout
d‟abord, la topographie de la zone est orientée Ouest-Est alors que les besoins de
déplacements sont plutôt orientés Nord-Sud. De nombreuses forêts domaniales et différents
patrimoines culturels sont par ailleurs présents sur la zone. Ensuite, les élus locaux sont
depuis longtemps opposés à un passage d‟infrastructures en surface. De 1972 à 1988, des
études de tracés sont menées mais il faut composer avec les nombreuses mobilisations.
L‟Etat, n‟ayant pas les moyens d‟achever la construction de l‟A86, lance un appel d‟offre en
1988 pour mener le projet sous la forme d‟une concession.
Cofiroute propose alors une solution originale, un tunnel, afin d‟allier nécessité
d‟infrastructure et intégration dans un environnement urbanisé. De nombreuses actions ont été
menées pour faire adhérer les élus locaux à ce projet. Un pavillon d‟exposition a été créé et un
bus circulait dans les communes. Les réunions d‟information publiques ont été co-organisées
par l‟Etat et l‟entreprise. Cet accompagnement était nécessaire tant en amont que pendant la
conduite des travaux. Ces derniers sont en effet sources de nuisances pour les riverains. Par
ailleurs, l‟infrastructure souterraine n‟a pas été sans conséquence en surface. Suite à l‟accident
du tunnel du Mont-Blanc, de nouvelles normes de sécurité, plus strictes, ont été adoptées.
Cela a notamment contraint Cofiroute à construire des puits supplémentaires. A Saint-Cloud,
le marché a ainsi dû être déplacé de 50 mètres pour accueillir ce puits de secours.
La communication d‟acceptabilité est donc ponctuelle mais pas de courte durée. Elle peut
même se poursuivre après la mise en œuvre d‟un projet pour continuer de prouver son utilité à
postériori via des visites notamment. Elle est principalement menée par les entreprises pour
convaincre les élus locaux. Si elle est efficace, les élus locaux pourront à leur tour devenir de
44
bon relais auprès de la population. Cela permettra à l‟entreprise d‟effectuer un travail en
faveur de son image. En effet, peu importe que le projet ait été décidé par l‟Etat, par exemple
pour une autoroute, l‟entreprise est l‟acteur présent au quotidien sur le territoire, c‟est elle qui
a effectué les travaux. Faire accepter ce projet représente un enjeu pour elle et sa perception.
c) Les outils institutionnels des élus
Les entreprises peuvent influencer les décisions des élus pour les faire pencher en leur
faveur mais les élus peuvent également solliciter les entreprises pour mettre en œuvre un
projet et disposent pour cela d‟un panel d‟outils réglementés. Parce qu‟ils recherchent l‟intérêt
général, ces dynamiques peuvent paraître asymétriques, donnant plus de poids aux pouvoirs
publics. Ils sont pourtant soumis à des règles strictes et ne peuvent déléguer une activité que si
celle-ci est qualifiée de service public.
Les élus vont définir le contenu du projet et sélectionner l‟entreprise qui répondra le mieux
à ses attentes. Il existe cependant plusieurs procédures qui font évoluer quelque peu la
dynamique entre les élus et les entreprises. Les élus peuvent avoir recours :
A un marché public ;
A une délégation de service public ;
Ou à un partenariat public-privé.
En fonction des types de contrats conclus, les entreprises auront une marge de manœuvre
plus ou moins grande. Les procédures de sélection sont également différentes et offrent divers
degrés de communication et de négociation entre les élus et entreprises répondantes.
Le service Autolib‟ Paris est un exemple intéressant de définition d‟un projet par les élus.
La teneur du service a en effet été définie par les collectivités adhérentes au projet. Lancé au
départ par le maire de Paris, Bertrand Delanoë, celui-ci a réussi à fédérer beaucoup de
collectivités autour de cette idée : la mise à disposition de voitures électriques. Cette
technologie électrique a par ailleurs été imposée par les collectivités elles-mêmes60
. La qualité
60 G. Delabie, « Le service Autolib‟ », blog personnel : http://innovation-mobilite.fr/
45
de service public avérée, le syndicat mixte regroupant les collectivités a confié à une
entreprise, Autolib‟, la gestion du service.
Comme dans toute délégation de service public (il en va de même avec les marchés publics
ou les partenariats public-privé), les relations entre élus et entreprises (ou entre Etat et
entreprises) sont alors réglementées et l‟entreprise, même si elle peut voir son contrat évoluer
par le biais d‟avenants, est tenue de respecter les souhaits des élus. La marge de manœuvre
d‟une entreprise semble limitée mais elle reste libre de proposer des améliorations
susceptibles d‟intéresser les élus et tenter d‟obtenir des contreparties qui lui sont favorables.
d) La concertation, un mode et un espace de dialogue privilégiés ?
La concertation est l‟action qui permet à plusieurs personnes de s‟exprimer en vue de se
mettre d‟accord sur un projet. Elle cherche principalement à préparer la décision et celle-ci
n‟est pas un résultat du processus. Dans le cadre de l‟action publique, surtout en matière
d‟environnement et d‟aménagement du territoire (notamment en ce qui concerne la
construction d‟infrastructures), la concertation est un procédé qui s‟est imposé depuis les
années 1970, compte tenu de l‟impact des décisions sur le cadre de vie et l‟environnement.
Dans le cas de projets d‟infrastructures concédées, après les enquêtes et études précédant la
déclaration d‟utilité publique menées par l‟Etat, le concessionnaire a à sa charge
l‟organisation de la concertation locale. Ainsi, dans le cadre de la construction de la section de
l‟A89 entre Balbigny et La Tour de Salvagny, les missions d‟ASF sont décrites ainsi :
« Dans la recherche du tracé définitif de l‟autoroute et de la conception des éléments
annexes tels que les aires, les échangeurs ou les gares de péage, ASF doit veiller à réduire les
impacts environnementaux et doit tenir compte de l‟avis des collectivités concernées par le
tracé. »61
.
Pourtant, les élus concernés par ce projet semblent trouver des lacunes dans le processus de
concertation mené. Ainsi le maire de la commune de Dommartin et président de la
communauté de communes du Pays de L‟Arbresle, là où est implantée une partie de
61 Les missions d‟ASF, http://www.asf-a89.com/4-le-projet-les-missions-d-asf.html
46
l‟autoroute, annonce qu‟il n‟a pas été convié aux réunions préparatoires. Elles avaient pour
but de prévoir des mesures pour absorber le trafic généré par l‟ouverture de l‟A89. L‟élu
estime que l‟A89 aura des conséquences sur l‟exercice de ses compétences et qu‟il aurait ainsi
dû être consulté62
. Le conseiller général du canton de l‟Arbresle se pose également ces
questions. Sur le chantier de la ligne à grande vitesse Sud Europe Atlantique également,
certains élus critiquent les méthodes du concessionnaire63
Liséa. Selon le maire de
Villeperdue en Indre-et-Loire, « les collectivités ne sont pas consultées sur le déroulement du
chantier »64
.
La concertation semble être un processus complexe, susceptible de faire ressortir des
différences de positions entre l‟Etat concédant, l‟entreprise concessionnaire et les élus locaux.
Ceci est particulièrement observé sur de grands projets aux conséquences importantes sur le
cadre de vie et l‟environnement.
En revanche, sur d‟autres types de projets, la collaboration entre entreprises et élus
semblent mieux se passer. On peut citer l‟exemple de la mise en œuvre de parkings de
covoiturage qui illustre la coopération qui peut s‟installer entre ces deux entités. Le principal
levier d‟une telle collaboration est l‟outil foncier, réparti entre différents acteurs et qui
poussent entreprises et élus à s‟associer.
e) Différents types d’interactions pour différentes phases de projet
Les élus et les entreprises utilisent différents outils et types de communication pour mener
à bien des projets de mobilité et de transports. Les échanges ne s‟arrêtent pas lorsqu‟un accord
a été conclu ou lorsqu‟un projet a été décidé. Communication d‟acceptabilité et
communication d‟influence sont des processus qui s‟inscrivent dans le temps long. D‟autres
semblent beaucoup plus ponctuels telles que la concertation.
62 Interview par G. Urbin pour Le Progrès
63 La ligne est en effet exploitée sur un modèle de PPP.
64 Ville, rail et transports, 21/10/12
47
Figure 10 : Représentation schématique des rapports élus-entreprises lors des différentes phases d'un
projet
Source : Julie Cathala
Parmi les caractéristiques dégagées des quelques observations que nous avons faites, il
semble important de retenir les suivantes :
Entreprises comme élus ont un intérêt à défendre un projet et cela ne semble pas être
facilité par un statut plutôt qu‟un autre ;
Les élus gardent cependant un certain pouvoir du fait de leur fonction ;
Il existe un décalage entre le temps d‟un projet, long, et le temps du politique, plus court,
même s‟il est possible de voir son mandat reconduit ;
Enfin, il ne semble pas se dégager une polarisation particulière quant à l‟initiative de
projets mais plutôt une conscience de l‟utilité de chaque partie dans le processus et une
complexité dans le jeu d‟acteurs.
Mise en œuvre du
projet Avant le projet Après le projet
Collaboration
montage de
projet
Communication
d’influence
Communication
d’acceptabilité
Appel d’offre
Concertation
Communication
d’acceptabilité
Relations
contractuelles
Communication
d’acceptabilité
Communication
d’influence
Relations
contractuelles (si
exploitation)
48
Le schéma ci-dessous résume quelques unes des dynamiques observées et illustre la
complexité que nous évoquions.
Figure 11 : Représentation schématique des dynamiques entre élus et entreprises
Source : Julie Cathala
49
Chapitre 3 : Typologie des arguments des élus et des entreprises
lors de la mise en œuvre de projets de mobilité
Après avoir tenté d‟observer les logiques de communication entre les élus et les
entreprises, nous allons à présent nous intéresser aux différents arguments avancés par les
deux parties pour aller contre ou soutenir un projet.
Le but de cette tentative de typologie est de pouvoir discuter de chaque argument afin de
voir en quoi il est pertinent et important. Ceci a pour but final de déterminer s‟il existe des
éléments à mettre en avant ou, au contraire, à atténuer afin de faire valoir sa position, pour ou
contre un projet. Cette démarche s‟inscrit pleinement dans la continuité des missions
effectuées lors de ma mission professionnelle. Par ailleurs, il est intéressant de se demander si
des arguments sont plus utilisés par une partie ou par une autre.
Ici encore, nous tenterons de privilégier une approche multiscalaire, mêlant informations
théoriques et études de cas pour appuyer notre propos. L‟étude des arguments s‟appuie sur
une veille presse ainsi que des recherches spécifiques sur certains projets. Le choix des projets
a été guidé par l‟actualité, les projets étudiés pour la partie précédente mais aussi, par les
thèmes abordés lors de la mission en entreprise. Ainsi, les différents projets sur lesquels cette
étude s‟appuie sont les suivants :
Projets concernant l‟aspect „véhicule‟ :
o Divers projets d‟implantation de parkings de covoiturage ;
Projets d‟infrastructures linéaires :
o Le Duplex A86 (cf. annexe 2) : une infrastructure remarquable qui s‟insère
dans un environnement contraint, géré par la société Cofiroute.
o Le grand contournement ouest (GCO) à Strasbourg, l‟A89 (cf. annexe 5) et
l‟autoroute Toulouse-Castres.
o Les lignes à grande vitesse et plus particulièrement la section Tours-
Bordeaux (cf. annexe 3).
o Le Grand Paris (cf. annexe 7) ;
o Le canal Seine-Nord Europe (cf. annexe 4) ;
50
Projets de services de mobilité :
o Le service d‟autopartage Autolib‟ : une initiative présente dans l‟actualité
malgré elle pour cause de dispute sur le nom de la marque mais il s‟agit
avant tout d‟un service de mobilité, par opposition aux infrastructures.
Il est évident que le découpage des arguments est un acte subjectif et il est parfois difficile
de les séparer strictement car ils sont bien souvent reliés. Néanmoins, pour notre propos, il est
plus facile de les étudier séparément. Nous ne traiterons pas ici des arguments techniques qui
peuvent venir appuyer ou contrer un projet car nous ne disposons pas des connaissances
techniques suffisantes pour les étudier. On peut simplement noter qu‟il s‟agit d‟un argument
qu‟il est assez facile de contourner en proposant de nouvelles solutions techniques mais qui
ont, par la suite, des répercussions sur les autres aspects du projet, notamment le coût.
51
I. L’utilité économique d’un projet
Le premier argument que nous allons étudier est celui de l‟utilité économique du projet
pour un territoire ou pour une entreprise.
1. L’utilité des infrastructures pour l’économie locale
Selon Poulit, un territoire bien desservi « permet aux hommes de travailler en coopération
et induit, grâce à un meilleur échange de savoir-faire, la création de richesses plus
nombreuses »65
. Il part d‟un constat : le temps consacré aux déplacements par les Français n‟a
pas évolué, il reste d‟une heure et trente minutes par jour. Il nous explique alors que pendant
ce temps invariant, « les hommes souhaitent établir les contacts les plus pertinents possibles,
ceux qui leur permettent de résoudre efficacement les problèmes qui se posent à eux :
produire des biens ou des services, acheter des biens répondant à leur attente, recevoir une
formation de qualité, accéder à des espaces naturels variés et agréables »66
. Une amélioration
dans les infrastructures de transport induit alors une augmentation de la vitesse pour les
modes motorisés et les distances qu‟il est possible de parcourir pour un même temps de
déplacement sont alors plus importantes. C‟est notamment le cas lors de la construction
d‟autoroutes qui augmente considérablement la portée des déplacements.
65 J. Poulit, « Des territoires métropolitains bien desservis pour soutenir la croissance », La jaune et la rouge,
66 Ibid.
52
Figure 12 : Modification des espaces accessibles en un temps donné (exemple vers le Lot et le Tarn-et-
Garonne depuis Toulouse)
Source : S. Le Corre pour un entretien67
sur http://www.canal-u.tv
La taille des marchés accessibles est alors beaucoup plus grande et les problèmes
qu‟évoquait Poulit ont alors plus de chances d‟être résolus et ce, de façon efficace.
Notamment, « il y a, pour les déplacements à vocation économique, amélioration de la
productivité, création de richesses et soutien de l'emploi »68
. Ce qui est valable pour les
individus l‟est également pour les entreprises puisque « lorsque le nombre d'actifs auquel un
employeur peut commodément accéder double, la productivité de son entreprise s'améliore
d'une quantité donnée »69
.
C‟est parce que les infrastructures performantes sont nécessaires pour l‟activité
économique et qu‟elles induisent une plus grande productivité que le président du groupe
Pierre Fabre, implanté à Castres et, plus largement, dans le département du Tarn, se
67 Les autoroutes en France : un outil d‟aménagement ?
68 Poulit, « Des territoires métropolitains bien desservis pour soutenir la croissance »
69 Ibid.
53
positionne en faveur de la construction d‟une autoroute entre Toulouse et Castres. Après tout,
grâce à la corrélation que nous venons d‟expliquer, un gain de vitesse de 10% entrainerait un
gain de productivité de 3%. Pour cela, après s‟être prononcé auprès de l‟Etat en 2007, Pierre
Fabre a rappelé début juin 2012 « à tous les acteurs du développement local à quel point ce
projet conditionne l'avenir de ce territoire, notamment en termes d'économie et d'emploi »70
.
Il ajoute : « A l'heure de la mondialisation et d'une compétitivité exacerbée entre les
entreprises, la mobilité ne peut plus être un frein. Comme nous, beaucoup de chefs
d'entreprises veulent développer leur société et créer des emplois ici plutôt qu'ailleurs ».
Une carte représentant la performance économique des territoires redessine ainsi peu ou
prou le réseau autoroutier, illustrant la corrélation entre une infrastructure et son utilité
économique.
Figure 13 : Performance économique des territoires français
Source : J. Poulit
70 Castres. Pierre Fabre : "L'autoroute conditionne notre avenir", La Dépêche du Midi, juin 2012 (En ligne)
54
Face à ces arguments économiques, l‟entreprise implantée ou qui souhaite s‟implanter sur
un territoire est donc fortement intéressée par le fait de disposer d‟infrastructures
performantes non loin d‟elle.
Les élus ont également un intérêt à défendre ces grands projets puisque s‟ils attirent des
entreprises, cela crée à la fois de l‟emploi et de nouvelles ressources fiscales (dont le
versement transport dont nous avons noté l‟importance pour le financement des transports).
Le canal Seine-Nord par exemple, destiné à relier Paris au nord de l‟Europe, est une
infrastructure largement défendue par les élus locaux. Mis à mal par un financement jugé trop
important et instable, les élus avancent l‟exemplarité du projet sous bien des aspects,
notamment celui de la création d‟emplois et d‟activité économique. De nombreuses
communes ont ainsi déjà beaucoup investi dans le réaménagement de berges pour inciter les
entreprises à venir s‟y installer. Si le projet ne voit pas le jour, il s‟agira pour eux d‟une grosse
perte en termes financiers et économiques.
Par ailleurs, les nombreux abandons annoncés concernant la construction de lignes
ferroviaires à grande vitesse ont mis à mal les attentes fortes de nombreux élus (cf. annexe 6).
Pourtant, ces projets à grande vitesse sont avant tout des projets qui polarisent les territoires.
Ainsi, Crozet rappelle que le « TGV profite d‟abord aux extrémités, c‟est-à-dire Paris et
Bordeaux »71
dans le cas de la ligne en construction entre Tours et Bordeaux. Ils profitent
donc à des zones restreintes et ne sont pas exemplaires en termes de retombées économiques
pour les territoires traversés. Car comme le terme employé l‟indique, ils ne sont que traversés
par l‟infrastructure. Les effets bénéfiques ne valent donc que si l‟infrastructure est accessible
et non pas seulement présente.
71 F. Niedercorn, « La LGV Tours-Bordeaux : un chantier de 6 milliards », Les Echos, journal du 19/09/12, p. 5
55
2. Construire des infrastructures, une source d’emplois à long terme ?
Ce qui est par contre certain, c‟est que la construction d‟infrastructures nouvelles peut faire
fonctionner les entreprises locales. S‟il s‟agit d‟un effet bénéfique à court terme, ce sont tout
de même pas moins de 2 500 emplois (4 500 en 2013) qui ont vu le jour avec le chantier entre
Tours et Bordeaux. Les entreprises de la région Poitou-Charentes ont également bénéficié de
75 millions d‟euros de contrats72
. Après la période de construction, de nouvelles entreprises
sont attendues, attirées par ce nouvel outil. Ainsi, un million d‟emplois devraient voir le jour
après l‟achèvement du Grand Paris73
. Ce métro a pour but de relier entre elles les villes
périphériques de Paris et d‟améliorer les conditions de déplacements de nombreuses
populations de la petite couronne.
A plus long terme cependant, les effets positifs de l‟implantation d‟une nouvelle
infrastructure ne semblent pas aussi certains. Nombreux sont ceux qui attendent encore ces
retombées économiques. Et pour cause, cela ne saurait être le seul critère de choix d‟une
entreprise lorsqu‟elle décide de s‟implanter quelque part. Les créations d‟emplois portées par
le Grand Paris s‟accompagnent de contrats de développement territoriaux destinés à encadrer
l‟urbanisation autour des gares. Cela permet de rapprocher les emplois des zones
d‟habitations urbaines. La question de l‟attractivité d‟un territoire ne repose pas seulement sur
le simple fait de faire venir des entreprises74
. Il faut y ajouter d‟autres éléments,
particulièrement dans le cas de grandes villes, tels que « l‟offre culturelle, environnementale,
sportive, de mobilité et d‟enseignement »75
. Il apparaît donc nécessaire de considérer le
territoire comme une offre plus riche et globale et apparaît alors ici le lien entre utilité
économique d‟une infrastructure et aménagement du territoire.
72 Ibid.
73 M. Vicuña, « 70 000 logements et un million d‟emplois attendus avec le supermétro », Le Parisien, 24 octobre
2012, p. 5
74 G. Lorant, Les collectivités locales face aux défis de la communication, op. cit., p. 49
75 Ibid.
56
3. L’utilité économique des services pour la mobilité
En réalité, l‟utilité économique des infrastructures n‟est effective que si celles-ci offrent
une qualité de service suffisante. En effet, si trop peu de trains circulent ou si les routes sont
engorgées, les bénéfices sont certainement perdus. La congestion étant particulièrement
importante dans beaucoup de zones urbaines, nous nous concentrerons sur ce point. Plusieurs
leviers sont disponibles pour améliorer la fluidité des déplacements. Tout d‟abord, il est
possible d‟augmenter la capacité des voies. Il ne s‟agit pas forcément d‟élargir l‟infrastructure
mais plutôt d‟utiliser la vitesse pour faire augmenter cette capacité. En effet, sur voie rapide,
le débit maximum est atteint lorsque la vitesse des véhicules avoisine les 70 km/h.
Le deuxième levier consiste en la diminution des voitures en circulation en augmentant le
nombre de personnes transportées par véhicules. Le taux moyen d‟occupation des véhicules
est en effet d‟1,276
. Pour favoriser cet axe d‟amélioration, des parkings de covoiturage voient
le jour et ponctuent les réseaux routiers de toutes sortes (autoroutiers, départementaux). Un
moindre engorgement permet de retrouver les bénéfices d‟une infrastructure performante.
Mais le soutien au covoiturage porte d‟autres effets positifs. Il contribue en effet à réduire le
coût de la mobilité pour les individus en organisant un partage des frais et permet également
de diminuer les émissions de gaz à effet de serre.
Autant les entreprises que les collectivités s‟emparent de ce sujet et cherchent à favoriser le
covoiturage. Ils portent des projets de parkings de covoiturage afin de développer l‟usage de
ce mode partagé ou la mise en place de plateforme de mise en relation. Vinci Autoroutes est
une entreprise qui se positionne fortement sur créneau ainsi que Nantes Métropole qui
propose même des « défis » aux entreprises pour favoriser cette pratique.
76 Selon G. Plassat
57
II. Les arguments en faveur de l’aménagement du territoire et de
l’amélioration des déplacements
Nous plaçons dans cette catégorie d‟arguments, ceux qui défendent l‟effet structurant des
infrastructures ou des solutions de mobilité pour le territoire concerné. Cela peut être en lien
avec le désenclavement d‟un territoire, la mise à disposition d‟une nouvelle infrastructure
pour renforcer l‟existante, saturée, ou l‟opportunité qu‟un projet offre pour repenser un
territoire. Ces types d‟arguments sont très liés à ceux qui défendent l‟utilité économique d‟un
projet car par exemple un gain de fluidité se transformera en un gain pour l‟économie sur le
territoire.
1. Les infrastructures de transport, une nécessité pour désenclaver les
territoires ?
La loi 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du
territoire déclarait :
« Art. 17. - I. - En 2015, aucune partie du territoire français métropolitain continental ne
sera située à plus de cinquante kilomètres ou de quarante-cinq minutes d'automobile soit d'une
autoroute ou d'une route express à deux fois deux voies en continuité avec le réseau national,
soit d'une gare desservie par le réseau ferroviaire à grande vitesse. »
« Art. 18. - I. - Le schéma directeur routier national définit les grands axes du réseau
autoroutier et routier national dans un objectif de desserte équilibrée et de désenclavement de
l'ensemble du territoire, quels que soient les trafics constatés. »
58
Cette loi, modifiée depuis, montre à quel point les infrastructures peuvent avoir un effet
structurant pour le territoire. Pour preuve, cette carte anamorphose de la France qui redessine
le pays en fonction des distances en train entre les villes77
.
Figure 14 : Carte anamorphose de la France en 2008
Source : A. Frémont
L‟accessibilité des territoires est une préoccupation prioritairement pour les élus pour des
questions d‟attractivité et d‟équité territoriale. On appellera accessible par le mode routier, un
territoire situé à moins de 45 minutes de trajet en automobile d‟un diffuseur donnant accès à
77 A. Frémont, « Transports rapides, le phénomène TGV », Les transport en France, quelles mobilités pour
quelle société ?, op. cit., p. 59
59
une autoroute ou à une route express 2x2 voies dénivelées, selon la définition utilisée dans la
loi citée précédemment.
Figure 15 : Evolution de l'accessibilité au mode autoroutier entre 2000 et 2007
Source : Sétra
On constate en effet que les segments d‟autoroutes construits entre 2000 et 2007 ont
fortement contribué à réduire la proportion du territoire français peu accessible. Mais il reste
néanmoins des zones du territoire de moindre accessibilité qui posent des enjeux de
développement économique, d‟accès à l‟emploi, d‟intégration sociale ou d‟accès aux services
60
publics78
. Dans ces zones là, les élus sont souvent très actifs pour défendre l‟arrivée d‟une
infrastructure ou l‟achèvement d‟une portion d‟infrastructure manquante. La route et
l‟autoroute semblent être plus propices au désenclavement de ces territoires, tout simplement
parce que les échangeurs sont plus facilement aménageables qu‟une gare et qu‟ils sont plus
réguliers le long d‟une autoroute que les gares sur une ligne à grande vitesse.
Un autre point soulevé contre la construction de lignes à grande vitesse est celui du gain en
temps par rapport au coût du projet. En effet, nous avons déjà précisé qu‟il ne s‟agit pas
seulement d‟implanter une infrastructure, il faut qu‟elle soit efficace. Par exemple, la
prolongation de la branche Rhin-Rhône entre Dijon et Mulhouse coûterait 1 milliard d‟euros
pour 50 kilomètres mais le gain en temps ne serait que de dix minutes. Dépenser une somme
aussi conséquente pour un gain aussi minime ne refléterait qu‟un geste politique et non un
projet structurant pour le territoire. Au contraire, mettre Toulouse à 3h15 de Paris au lieu des
5h30 actuelles serait un véritable acte structurant pour la ville et sa région, très dynamiques.
2. La construction d’infrastructure, un geste politique fort ?
Nous avons précisé que les élus locaux ont des compétences en termes d‟aménagement.
Cependant, lorsqu‟il s‟agit d‟infrastructures de grande ampleur, les décisions sont portées par
le gouvernement. Mais appuyer un projet pour son territoire est un acte politique fort qui peut
les servir. Nombreux sont les élus qui avancent des revendications ou qui se félicitent de
décisions prises par le gouvernement. Ainsi le maire-sénateur de Beauvais souhaite relancer
l‟idée de la construction d‟une ligne à grande vitesse entre Paris et Calais, passant par
Beauvais. Il est d‟ailleurs appuyé dans cette démarche par le président de la Chambre de
Commerce et d‟Industrie et avancent à eux deux, un projet qu‟ils disent « cohérent et
structurant »79
pour le territoire.
78 Centre d‟Analyse Stratégique, Nouvelles mobilités dans les territoires périurbains et ruraux, 2012
79 F. Chadri, « La ville et la chambre de commerce relancent leur idée du TGV Picard », Le Parisien, 29
septembre 2012, p. 4
61
On peut aussi évoquer ici des infrastructures plus légères telles que les bornes de recharge
pour le service Autolib‟ Paris. Ces stations réparties dans Paris et les villes partenaires du
projet participent à la fois à la redéfinition de l‟espace dans la ville mais aussi à son
marquage. Le projet est avant tout politique puisqu‟il s‟inscrit dans un cadre plus large
d‟éviction de la voiture des rues de Paris par Bertrand Delanoë. Nous avons par ailleurs
précisé que le mot « politique » renvoyait à la gestion de la cité, mission des élus. Il est alors
logique pour un élu de s‟investir pour défendre des projets de mobilité et de transports pour
aménager son territoire, y laisser une trace visible qui participera à la construction de son
image.
Preuve que le poids politique d‟un élu a suffi à imposer des projets, les arbitrages
nécessaires entre tous les grands travaux inscrits dans le SNIT seront évalués « à l‟aune de
leur utilité sociale, et non plus, comme autrefois, en fonction du poids politique de l‟élu qui
les défend »80
. On peut ici citer en exemple, une ligne à grande vitesse entre Poitiers et
Limoges, imposée à l‟Etat par Bernadette Chirac pour favoriser le désenclavement de son
département.
3. Des projets pour l’amélioration des déplacements
Un autre point à prendre en compte est la qualité du service rendu. Pour un train, il s‟agit
d‟un service cadencé et ponctuel, pour les routes, il s‟agit d‟offrir des conditions qui assurent
effectivement un déplacement rapide. Or comme nous l‟avons dit, beaucoup de ces voies,
notamment en zones périurbaines et urbaines sont engorgées. La construction d‟un itinéraire
de délestage n‟y changera souvent pas grand chose ou amènera à son tour son lot de
contraintes. En effet, Bräss a démontré « que l‟ajout d‟un itinéraire de délestage peut
provoquer des congestions et allonger les temps de parcours au lieu de les raccourcir »81
. La
route a beau être un « tuyau », l‟intelligence humaine empêche les déplacements collectifs de
suivre la mécanique des fluides, ce qui laisserait supposer qu‟avec une voie d‟écoulement
80 L. Dequay, « Le scandaleux héritage de Fillon la rigueur », Marianne, octobre 2012
81 L. Bu, M. Fontanès, O. Razemon, Les transports, la planète et le citoyen : En finir avec la galère, découvrir la
mobilité durable, op. cit., p. 58
62
supplémentaire, le trafic serait plus fluide. Aux abords de grandes villes cependant, des
projets de contournement visant à séparer les flux, pendulaires et de transit, sont
régulièrement discutés.
L‟exemple le plus marquant dernièrement en termes de propositions d‟itinéraires de
délestage est celui du Grand Contournement Ouest (GCO) à Strasbourg. Ce projet a pour but
de décharger l‟A35 qui traverse la ville et qui voit passer jusqu‟à 165 000 véhicules par jour82
,
chiffre en hausse depuis la mise en place de la taxe poids-lourds en Allemagne, les camions
venant alors profiter des autoroutes gratuites côté français pour y échapper. Le problème est
reconnu par tous les acteurs mais les solutions à adopter pour améliorer la circulation sur cet
axe divergent. Le maire de la ville souhaite lancer un débat sur l‟accessibilité de sa ville
tandis que la Chambre de Commerce et d‟Industrie, représentante des intérêts des entreprises
et industries du département, a lancé fin septembre une campagne de mobilisation et de
communication pour montrer son soutien au GCO.
Une autre piste d‟amélioration que nous avons évoquée est celle de la création
d‟infrastructures visant à favoriser des pratiques telles que le covoiturage. L‟augmentation du
taux d‟occupation permet en effet de réduire le nombre de véhicules en circulation. Sur ce
point, autant les entreprises que les élus tentent de s‟investir et de proposer des solutions. Les
parkings de covoiturage sont ainsi de plus en plus nombreux. Ils participent à l‟essor de cette
pratique en mettant à disposition des usagers un point de rencontre fixe, identifié et sécurisé.
Cet aspect est particulièrement important aux abords de grands axes. Les outils de mise en
relation sont également essentiels pour une augmentation de la pratique. Les collaborations se
multiplient sur ces deux aspects, soit entre entreprises et collectivités pour l‟aménagement de
parkings soit entre collectivités pour les outils de mise en relation. En effet, Vinci Autoroutes
a installé quatre parkings sur l‟A7 en partenariat avec les conseils généraux de la Drôme et de
l‟Ardèche et les plateformes de Nantes Métropole et du conseil général de Loire-Atlantique
ont été fusionnées pour une plus grande visibilité.
82 A 355, Grand Contournement Ouest de Strasbourg, http://www.info-projet.fr/
63
III. Les arguments en lien avec le développement durable et la
protection de l’environnement
Le secteur des transports est le premier émetteur de gaz à effet de serre, émissions
directement liées au type d‟énergie utilisée pour propulser les véhicules ainsi qu‟à l‟usage que
nous en faisons. Il est également à l‟origine de pollutions atmosphériques et sonores. Enfin,
les infrastructures ont des conséquences à la fois sur l‟environnement et les paysages. La
construction d‟une autoroute par exemple conduit à l‟artificialisation de sols, augmentant
ainsi le phénomène de ruissellement et diminuant l‟absorption de l‟eau par les sols. Avec le
Grenelle de l‟environnement en 2007, la France se donnait pour objectif de devenir
exemplaire en matière environnementale. Etait notamment affirmée la volonté de diviser par
quatre les émissions de gaz à effet de serre d‟ici 2050. Cet objectif ainsi que celui de la
protection de l‟environnement passent à la fois par des contraintes de plus en plus fortes pour
la construction d‟infrastructures et par la mise en œuvre de projets de mobilité durable.
1. Des contraintes toujours plus fortes appliquées à la construction
d’infrastructures
Depuis 1982 et la loi n° 82-1153 d‟Orientation des Transports Intérieurs (LOTI) du 30
décembre, il est devenu obligatoire de mener des bilans intermédiaires et finaux des impacts
sociaux, économiques et environnementaux des infrastructures de transport. Cette mesure a
été étendue avec la circulaire Bianco du 15 décembre 1992. En effet, les infrastructures
linéaires induisent des coupures qui scindent à la fois les territoires et les paysages. Elles
empêchent les déplacements de la faune environnante tout comme les pollutions qu‟elles
entraînent peuvent être néfastes pour les zones alentours. Enfin, elles sont également
génératrices de nuisances pour l‟Homme.
Aujourd‟hui, le risque environnemental est plutôt bien pris en compte, mieux en tout cas
qu‟il y a 30 ans. Pourtant, le chantier de la ligne à grande vitesse entre Tours et Bordeaux a
été suspendu pendant deux mois suite à la découverte d‟une nouvelle race de triton. Et les
difficultés ne s‟arrêtent pas là puisque « dans les prochains mois, Vinci sera obligé de
64
demander des autorisations liées à la protection de l‟environnement pour 1 000 hectares
supplémentaires car le tracé de la LGV a évolué »83
. Pour éviter que cela ne se répète, la
coopération en amont entre acteurs semble indispensable afin d‟identifier les zones à protéger.
Ainsi, selon Alain Quinet, directeur général délégué de Réseau Ferré de France, « 60% du
tracé final d‟une ligne TGV est désormais le résultat de la concertation »84
. Les autoroutes
font également l‟objet d‟observations attentives pour limiter leurs impacts sur
l‟environnement. Ainsi, à Fleurieux-sur-l‟Arbresle, commune où passe le tronçon manquant
de l‟A89, un cours d‟eau a été détourné, des essences locales ont été plantées le long de
l‟autoroute. Malgré cela le maire considère que cela a été un « désastre écologique »85
et les
riverains souhaitent surtout aborder la question des nuisances causées par la circulation.
La circulation automobile entraîne en effet bruit et pollution. Dans des contextes très
contraints cependant, des solutions techniques sont envisageables afin de respecter autant les
paysages que l‟environnement. Le Duplex A86 est un exemple d‟infrastructure exemplaire de
ces points de vue. Ce tunnel était en effet indispensable pour terminer le bouclage de l‟A86
mais dont le tracé passait dans une zone très urbanisée, opposée à un tracé en surface. Des
solutions techniques comme celles-ci sont en revanche très coûteuses. Elle a néanmoins
permis de concilier le besoin d‟infrastructure avec la nécessité et le souhait pour les maires et
riverains de protéger le cadre de vie dans lequel ils évoluent.
L‟environnement et le développement durable sont devenus aujourd‟hui des arguments
susceptibles de faire revoir un projet, surtout avancé par les élus soit pour préserver le cadre
de vie de leur territoire ou se faisant le relais des doléances des riverains. En effet, les grands
projets d‟infrastructures sont victimes du phénomène NIMBY (Not In My BackYard) qui
consiste à refuser un projet du fait de sa localisation et non parce que l‟on remet en cause son
bien fondé. La conservation d‟espèces en voie de disparition est également très souvent
mentionnée. La sauvegarde du Grand Hamster en Alsace par exemple est un argument
régulièrement avancé pour manifester contre le projet de GCO, démontrant que
83 J-Y. Guérin, « Le chantier de la LGV Tours-Bordeaux ralenti par un triton », Le Figaro Economie, 17/09/12,
p. 25
84 « Le risque biodiversité intègre l‟entreprise », Les Echos, 24/10/12, p. 11
85 Selon les mots de Bernard Sage, maire de Fleurieux-sur-l‟Abresle, interviewé par Le Progrès
65
l‟infrastructure ne pourrait qu‟avoir des impacts négatifs sur les efforts de sauvegarde de cette
espèce.
2. De la mise en œuvre de nouvelles solutions pour une mobilité durable
Face aux enjeux environnementaux posés par le modèle actuel de mobilité, usage
individuel de l‟automobile, pollution et congestion, la nécessité de mettre en œuvre de
nouvelles solutions se fait sentir. Autolib‟ Paris, le service d‟autopartage, trouve sa
justification dans le projet que mène le maire de Paris de faire sortir les automobiles de la
ville. Sans pour autant nier l‟utilité qu‟elles peuvent avoir, les élus de la ville de Paris et des
communes alentours ont souhaité mettre en place un système d‟autopartage qui permettrait à
la fois de réduire pollutions et émissions de gaz à effet de serre grâce aux véhicules
électriques et de limiter l‟encombrement dû au stationnement de véhicules particuliers.
L‟échelle du service parisien est exceptionnelle mais beaucoup d‟autres solutions
d‟autopartage se développent sur d‟autres territoires. Elles illustrent le passage de la notion de
propriété à celle de service : il n‟est plus nécessaire de posséder l‟objet „voiture‟ mais d‟avoir
la possibilité d‟utiliser cette solution lorsqu‟elle est nécessaire. Ce partage de l‟automobile
passe également par le recours au covoiturage dont nous avons déjà longuement évoqué les
bénéfices.
Autant les entreprises que les élus ressentent la nécessité d‟aller au delà du schéma actuel
afin de trouver des solutions qui répondent aux enjeux posés. Ainsi, Frédéric Cuvillier
l‟annonce : « il s‟agit de passer d‟une politique uniquement basée sur les infrastructures à une
politique intégrant les services, axée sur les besoins de déplacements des usagers et
envisageant la meilleure façon d‟y répondre »86
. Repenser la politique de transport offre ainsi
de nouvelles possibilités pour l‟amélioration des déplacements mais aussi pour la stimulation
de nouveaux marchés pour les entreprises.
86 L. Radisson, « Transports : les grandes orientations du Gouvernement », Actu-environnement, (En ligne)
66
IV. La mise en avant de la capacité de financement du projet
L‟infrastructure de transport est un outil économique, un outil politique mais également un
investissement. En effet, les sommes engagées sont plus qu‟importantes et un projet s‟avère
rarement moins coûteux que ce que les prévisions avaient annoncé. A titre d‟exemple,
rappelons qu‟un kilomètre de tramway coûte entre 25 et 35 millions d‟euros, un kilomètre de
bus à haut niveau de service, entre 5 et 15 millions d‟euros et un kilomètre de métro coûte
environ 100 millions d‟euros. Plus un projet comporte des aspects techniques compliqués, ce
qui tend à devenir le cas considérant les normes de sécurité ou de respect de l‟environnement
qu‟il faut respecter, plus il coûte cher. Ainsi, si un kilomètre d‟autoroute coûte en moyenne 6
millions d‟euros, la présence d‟ouvrages d‟art sur le tracé peut alourdir le budget.
La question du financement d‟un projet est un point d‟achoppement récurrent. Les élus
semblent d‟ailleurs se montrer souvent plus intéressés par le coût que par d‟autres aspects, les
contraintes budgétaires se faisant toujours plus importantes. D‟intérêt général, les
infrastructures doivent logiquement être financées par des fonds publics. Cependant, des
modalités de financements permettent de faire appel aux fonds privés pour pallier le manque
de ressources publiques et sont de plus en plus utilisées. Que cela soit via la concession ou les
plus récents partenariats public-privé, les sources se diversifient et les montages deviennent
plus complexes. Bien souvent les entreprises mettent en avant leurs capacités de financement
importantes pour appuyer leurs dossiers, assurant qu‟elles peuvent alors remplir la mission au
nom de l‟intérêt général. Pourtant, les collectivités et l‟Etat empruntent sur les marchés à des
taux bien plus bas, taux auxquels ne pourront jamais prétendre les entreprises. Les deux
parties semblent alors pouvoir avancer cet argument.
Les élus ont récemment utilisé l‟argument financier pour en faire un moyen de „pression‟
pour peser en faveur du projet de ligne à grande vitesse jusqu‟à Toulouse. Les collectivités de
la région Midi-Pyrénées ont en effet avancé l‟argument suivant :
« Les collectivités de Midi-Pyrénées se retirent du financement Tours-Bordeaux Sud pour,
en contrepartie, prendre à leur compte la totalité de la charge Bordeaux Sud-Toulouse
incombant aux collectivités locales ou, pour le moins, que leur participation sur Tours-
Bordeaux soit considérée comme une avance qui viendrait en déduction du financement des
collectivités d‟Aquitaine, ces dernières remboursant à RFF à partir du début des travaux sur
67
Bordeaux-Toulouse le montant des sommes qu‟elles auraient consacrées à cette partie de la
ligne »87
.
Depuis le lancement du projet, la participation financière des collectivités est passée de 400
à 800 millions d‟euros pour la région Midi-Pyrénées et de 200 à 400 millions d‟euros pour le
département de la Haute-Garonne. Les collectivités d‟Aquitaine, qui attendaient fortement
l‟arrivée du TGV jusqu‟à la frontière franco-espagnole et les aménagements allant de pair, ont
également utilisé ce levier pour soutenir leur projet. Ils ont alors expliqué que leur
participation au financement de la section entre Tours et Bordeaux était conditionnée par
l‟assurance de la réalisation de la partie du projet concernant le sud de l‟Aquitaine.
L‟aspect financier d‟un projet pose également la question de la rentabilité ultérieure de
celui-ci. Aujourd‟hui, les projets jugés non rentables semblent devoir être écartés au profit de
ceux qui le seront certainement. Pourtant, le souci de désenclavement du territoire, thème cher
à de nombreux élus, a conduit à construire des portions d‟autoroutes non rentables. Cela a été
permis par un système de solidarité territoriale entre les financements provenant d‟une section
rentable pour assurer la construction d‟un tronçon dont la rentabilité était difficilement
envisageable. Cette pratique est aujourd‟hui condamnée par la Commission Européenne qui y
voyait une entrave à la concurrence. Pourtant les coûts à supporter pour un nouvel acteur
seraient si importants qu‟ils constitueraient à eux seuls, une entrave à leur entée. Depuis 2000
cependant, cette pratique reste utilisée pour de petits tronçons.
Parce qu‟il n‟est plus possible aujourd‟hui de tout financer (Frédéric Cuvillier estimait
qu‟il lui faudrait environ 120 ans pour tenir les engagements financiers du SNIT !), la
rentabilité future du projet apparaît être un argument indispensable à avancer pour le mettre
en avant et le défendre. La capacité de financer un projet reste par ailleurs un moyen de
négociation même si cet argument ne semble plus suffisant, d‟autres critères étant désormais
considérés avec plus de poids tels que l‟impact environnemental et paysager.
87 « Le difficile financement de la LGV Sud-Ouest », Ville, Rail et Transports, 16/05/12
68
Conclusion
« L’existence d’infrastructures et de services de transport performants est une condition
essentielle à la croissance de notre économie et à l’aménagement du territoire. La mise en
place d’une politique des transports efficace et responsable, apportant des réponses concrètes
aux besoins de nos concitoyens et de notre économie, est ainsi une priorité pour le
Gouvernement. »
Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des Transports, de la Mer et de la Pêche
Par ces mots, Monsieur Cuvillier résume pleinement les enjeux que nous avons évoqués et
les défis qu‟il reste à relever. La mobilité est essentielle à l‟activité économique ainsi qu‟à
l‟intégration sociale et influence largement l‟aménagement du territoire. Elus et entreprises
sont donc fortement concernés par ces questions, que la mobilité représente pour eux une
compétence, un enjeu ou un marché.
Les compétences des élus en la matière justement en font une cible pour l‟entreprise qui
souhaite avoir une influence à la fois sur le contexte de son activité et sur son activité elle-
même. Les élus pour leur part ne peuvent se passer des entreprises pour réaliser les projets sur
leurs territoires et, à plus long terme, voir leur mandat reconduit. Une collaboration entre ces
deux mondes apparaît alors évidente mais non naturelle, l‟un et l‟autre obéissant à des règles
et dynamiques bien différentes. Le jeu entre ces différents acteurs est d‟autant plus complexe
que la compétence „transport‟ est partagée entre les trois échelons de collectivités et l‟Etat.
Les élus parlementaires se saisissent également de ces questions, souvent de par leurs mandats
locaux ou leurs fonctions par ailleurs.
Dans ce contexte complexe, il apparaît difficile de désigner avec certitude les acteurs qui
initient le plus de projets. Ce qui semble ressortir en revanche, c‟est la collaboration de plus
en plus importante, nécessaire à la bonne mise en œuvre des projets. Par ailleurs, si
l‟entreprise est capable de déployer des actions de communication pour supporter un projet,
les élus gardent un certain avantage de par leurs compétences et le fait qu‟ils représentent
l‟intérêt général. L‟entreprise peut toutefois se montrer habile et avancer les bons arguments
pour les convaincre de l‟utilité d‟un projet.
69
Il semble d‟ailleurs se dessiner une complexification de la justification d‟un projet. De plus
en plus de critères doivent être réunis : intérêt économique, intérêt pour l‟aménagement du
territoire, respect de l‟environnement ainsi que financement assuré et rentabilité financière.
Peut-être que ce dernier critère, aujourd‟hui soumis à de fortes contraintes, pousse à revoir les
autres critères de choix qui sont autant d‟arbitrages politiques et de choix de société. Voulons-
nous favoriser l‟emploi au détriment de l‟environnement ? Préférons-nous financer des
infrastructures non rentables ou aménager des territoires à l‟aide d‟autres solutions ? Ces
questions font partie du domaine de la politique et ce sont ceux qui nous gouvernent qui
devront trouver un équilibre satisfaisant entre tous les points évoqués sans pour autant ignorer
les conséquences que cela aurait sur les entreprises. A la fois parce que les élus ne peuvent
pas se passer des entreprises mais aussi parce qu‟ils ne peuvent plus décider seuls.
70
Ouverture et pistes de réflexion
Les conclusions de notre propos résultent de données que nous avons considérées comme
acquises mais qui pourraient elles aussi être discutées. Tout d‟abord, nous n‟avons pas remis
en cause l‟organisation de la compétence transport entre les différents échelons de
collectivités et l‟Etat. Pourtant, Jean-Marc Ayrault en visite dans le département des Bouches-
du-Rhône remarquait qu‟il y a trop d‟AOT dans le département ce qui nuit à la coordination
des politiques tarifaires et des offres. Bu, Fontanès et Razemon critiquent également ce
« mille-feuille » concernant la mobilité qui limite le « développement d‟une politique
harmonieuse de transport »88
.
La réforme territoriale permettra-t-elle d‟aller vers un modèle plus cohérent et adapté aux
besoins ? Le rapprochement entre la région et le département avec la création du conseiller
territorial devrait en tout cas permettre aux élus d‟envisager le territoire de façon plus globale
et intermodale. La région a en effet à sa charge la définition de l‟offre TER et le département
les transports interurbains routiers. Une plus grande complémentarité entre ces deux offres
pourrait ainsi voir le jour. Cette réforme simplifierait également certainement la recherche
d‟influence de la part de l‟entreprise qui aurait alors moins d‟interlocuteurs et plus de
visibilité sur les rôles de chacun.
Nous avons également pris comme acquis le modèle économique que nous connaissons
actuellement. Nous sommes en effet partis du principe que la base de l‟économie repose sur la
notion de croissance du PIB. Or d‟autres modèles de croissance sont défendus, notamment
dès les années 1960 avec le mouvement zero growth ou dans les années 1970 avec le Club de
Rome et son rapport : The limits of growth. D‟autres modèles de mobilité sont également
discutés. Pour certains, il faut en passer par la réduction des déplacements c‟est-à-dire, par la
remise en cause de ce que certains nomment un « droit à la mobilité ». Sur cette base, nous
avons évoqué les théories selon lesquelles les infrastructures contribueraient à la création de
richesses et donc, de croissance. Pourtant, se dessine aujourd‟hui une réflexion sur l‟avenir
même de ces grands projets.
88 L. Bu, M. Fontanès, O. Razemon, Les transports, la planète et le citoyen, En finir avec la galère, découvrir la
mobilité durable, op. cit., p. 146
71
Enfin, nous n‟avons pas critiqué les modèles de communication observés. Pourtant, si le
besoin de communication n‟est pas remis en cause, les outils utilisés pourraient l‟être. Il aurait
également pu être intéressant de se pencher davantage sur l‟efficacité des démarches engagées
et sur leur pertinence.
72
Bibliographie
OUVRAGES
S. Allemand, Apprendre la mobilité, les ateliers de mobilité, une expérience originale,
Paris, Le Cavalier Bleu, 2008, 136 pages
L. Bach, Faut-il abolir le cumul des mandats ?, Paris, Editions Rue d‟Ulm, collection
CEPREMAP, 2012, 119 pages
L. Bu, M. Fontanès, O. Razemon, Les transports, la planète et les citoyens : En finir avec
la galère, découvrir la mobilité durable, Paris, Rue de l‟échiquier, collection les petits
ruisseaux, 2010, 189 pages
M. Clamen, Manuel de lobbying, Paris, Dunod, 2005, 432 pages
E. Dacheux dir., La communication, Collection Les Essentiels d‟Hermès, CNRS éditions,
2010, 180 pages
M. Flonneau et V. Guigueno dir., De l’histoire des transports à l’histoire de la mobilité ?,
Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2009, 331 pages
T. Libaert, Introduction à la communication, Paris, Dunod, 2009, 121 pages
G. Lorant, Les collectivités locales face aux défis de la communication, Paris,
L‟Harmattan, 2005, 182 pages
M-H Westphalen, T. Libaert, Communicator, toute la communication d’entreprise, Paris,
Dunot, 5ème
édition, 2009, 493 pages
PUBLICATIONS
Assemblée des Communes de France, Clarification des compétences dans le champ des
transports et de la gestion de la mobilité, Audition de Daniel Delaveau, président de
l‟AdCF, par Yves Krattinger, vice-président de la délégation sénatoriale aux collectivités
territoriales et à la décentralisation, 30 novembre 2010 [En ligne]
Chronos, ATTOMA, Nouvelles mobilités : des mobilités libres, durables et responsables :
un discours, des outils, août 2009, 118 pages
Commissariat Général au Développement Durable, La mobilité des français, Panorama
issu de l’enquête nationale transports et déplacements 2008, La revue du CGDD,
décembre 2010
73
Kaufmann, C. Jemelin, La motilité, une forme de capital permettant d’éviter les
irréversibilités socio-spatiales ?, École Polytechnique Fédérale de Lausanne, Laboratoire
de sociologie urbaine, 2004
Ministère de l‟Ecologie, du Développement Durable, des Transports et du Logement,
Chiffres clés du transport, Repères, 2011
G. Plassat, Mobilités et Transport du Futur, Quelles rencontres pour le 21ème
siècle
PRESSE
Alternatives économiques
La Dépêche du Midi
Les Echos
Le Figaro Economie
Le Figaro
Le Monde
La Revue Parlementaire
Le Parisien
Ville, Rail et Transports
Sites internet
ADEME, Agence De l‟Environnement et le Maîtrise de l‟Énergie : www.ademe.fr
La revue de la communauté polytechnicienne, La Jaune et la Rouge :
http://www.lajauneetlarouge.com/
Blog personnel de G. Delabie, directeur de l‟innovation chez DeWays : http://innovation-
mobilite.fr/
Le Sénat : www.senat.fr
L‟Assemblée Nationale : www.assemblee-nationale.fr
74
Supports vidéo
La vidéothèque numérique de l‟enseignement supérieur : http://www.canal-u.tv/
75
Tables des matières
AVERTISSEMENT ............................................................................................................................................................ I
REMERCIEMENTS ......................................................................................................................................................... II
SOMMAIRE ..................................................................................................................................................................... III
TABLES DES FIGURES ................................................................................................................................................ IV
INTRODUCTION ............................................................................................................................................................. 1
CHAPITRE 1 : PRECISION DU PERIMETRE D’ETUDE ET DES ENJEUX ......................................................... 5
I. LA MOBILITE, QUELS ENJEUX AUJOURD’HUI ? ..................................................................................................................... 5
1. Des transports à la mobilité : un changement de paradigme ..................................................................... 5
2. Les grands enjeux actuels en lien avec la mobilité et les transports ........................................................ 8
a) Les limites du schéma actuel et l’impératif du durable .............................................................................................. 8
b) Les enjeux de la mobilité pour les élus ............................................................................................................................ 11
c) Les enjeux de la mobilité pour les entreprises............................................................................................................. 17
II. LA COMMUNICATION : UN PROCESSUS A DEFINIR ........................................................................................................... 19
1. La communication : un processus multiforme ............................................................................................... 19
2. La communication des élus et des entreprises ............................................................................................... 21
a) La communication des élus ................................................................................................................................................... 21
b) La communication des entreprises .................................................................................................................................... 23
CHAPITRE 2 : LA RELATION ELUS – ENTREPRISES : ENJEUX ET DYNAMIQUES DE
COMMUNICATION ............................................................................................................................................................ 27
I. CONNAITRE LES ELUS ET LEURS LOGIQUES D’ACTIONS .................................................................................................. 27
1. Une multitude de fonctions électives ................................................................................................................. 27
a) Les élus de l’Assemblée Nationale ..................................................................................................................................... 28
b) Les élus du Sénat ........................................................................................................................................................................ 29
c) Les élus des collectivités territoriales .............................................................................................................................. 30
2. La fonction d’élu ........................................................................................................................................................ 31
II. CONNAITRE L’ENTREPRISE ET SES LOGIQUES D’ACTION ................................................................................................ 33
1. Une multitude d’entreprises .................................................................................................................................. 33
2. Les stratégies de l’entreprise ................................................................................................................................ 35
III. LES RAPPORTS ELUS – ENTREPRISES : ENJEUX ET DYNAMIQUES .................................................................................. 37
1. Une relation nécessaire mais délicate ............................................................................................................... 37
2. Des outils et dynamiques variés ........................................................................................................................... 39
a) La communication d’influence ............................................................................................................................................. 40
b) La communication d’acceptabilité ..................................................................................................................................... 42
c) Les outils institutionnels des élus ...................................................................................................................................... 44
d) La concertation, un mode et un espace de dialogue privilégiés ? ....................................................................... 45
e) Différents types d’interactions pour différentes phases de projet..................................................................... 46
76
CHAPITRE 3 : TYPOLOGIE DES ARGUMENTS DES ELUS ET DES ENTREPRISES LORS DE LA MISE
EN ŒUVRE DE PROJETS DE MOBILITE ..................................................................................................................... 49
I. L’UTILITE ECONOMIQUE D’UN PROJET .............................................................................................................................. 51
1. L’utilité des infrastructures pour l’économie locale .................................................................................... 51
2. Construire des infrastructures, une source d’emplois à long terme ? .................................................. 55
3. L’utilité économique des services pour la mobilité ...................................................................................... 56
II. LES ARGUMENTS EN FAVEUR DE L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L’AMELIORATION DES DEPLACEMENTS
57
1. Les infrastructures de transport, une nécessité pour désenclaver les territoires ? ......................... 57
2. La construction d’infrastructure, un geste politique fort ? ....................................................................... 60
3. Des projets pour l’amélioration des déplacements ...................................................................................... 61
III. LES ARGUMENTS EN LIEN AVEC LE DEVELOPPEMENT DURABLE ET LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT ...... 63
1. Des contraintes toujours plus fortes appliquées à la construction d’infrastructures ..................... 63
2. De la mise en œuvre de nouvelles solutions pour une mobilité durable .............................................. 65
IV. LA MISE EN AVANT DE LA CAPACITE DE FINANCEMENT DU PROJET ............................................................................. 66
CONCLUSION ................................................................................................................................................................ 68
OUVERTURE ET PISTES DE REFLEXION ............................................................................................................. 70
BIBLIOGRAPHIE ......................................................................................................................................................... 72
TABLES DES MATIERES ............................................................................................................................................ 75
RESUME DE LA THESE PROFESSIONNELLE ....................................................................................................... 77
ABSTRACT OF THE DISSERTATION ..................................................................................................................... 78
77
Résumé de la thèse professionnelle
Cette thèse professionnelle se propose d‟étudier les interactions communicationnelles entre
élus et entreprises sur un sujet précis et d‟actualité : la mise en œuvre de projets de mobilité et
de transports. En effet, les réseaux de transports arrivent à saturation en même temps qu‟il
devient difficile d‟assumer les coûts de la mobilité, à la fois pour les usagers et pour les
pouvoirs publics. A cela vient s‟ajouter un critère de durabilité qui met à mal le modèle tant
répandu de la voiture individuelle. Il est donc impératif de réfléchir à des nouvelles solutions.
Lié au sujet du stage effectué pour valider le Mastère Spécialisé, ce document étudiera trois
grandes familles d‟interrogations à la lumière d‟informations théoriques et d‟exemples
concrets.
Tout d‟abord, la question de l‟intérêt à agir sera abordée : pourquoi élus et entreprises ont-
ils intérêt à se pencher sur ces questions de mobilité ? Nous détaillerons ainsi les enjeux de ce
sujet pour chacune des parties ainsi que les enjeux liés à leurs communications.
Par la suite, les éléments relatifs aux moyens de mettre en avant une position seront
étudiés : comment et quand défendre un projet ? Différents types de dynamiques seront
évoqués ainsi que leur mise en œuvre dans le temps afin de montrer qu‟il n‟existe pas de
règles mais plutôt une collaboration toujours plus importante et nécessaire entre élus et
entreprises.
Enfin, la dernière partie se propose de revenir sur les arguments avancés lors des
discussions afin de clarifier les éléments du débat. Cela permettra également d‟observer
l‟utilisation de ces arguments par les deux parties et de voir ainsi si certains arguments sont
plus utilisés par les élus ou les entreprises ou si un argument semble plus efficace qu‟un autre.
78
Abstract of the dissertation
This dissertation tackles the issue of communication between elected representatives and
businesses on a specific and topical subject: the implementation of transport and mobility
projects. Indeed, networks reach overloading and in the meantime, it becomes more difficult
to bear the costs of mobility for both users and governments. Adding up to that, sustainability
has become an imperative criterion that compromises the dominant pattern: the individual use
of a car. It is urgent that we think about new solutions. The theme of this document is related
to the internship mission. This dissertation will try to approach three types of questions by
using theoretical information as well as examples.
We will begin by addressing the question of the particular interest of both elected
representatives and businesses: what would be the point in them getting involved in mobility
projects? We will explain what is at stake for each side concerning mobility and transport and
we will do as well concerning their communication.
Subsequently, we will study how to support a project. Different types of dynamics will be
discussed as well as their implementation in time to show that there are no rules but rather an
increasingly important and necessary collaboration between elected representatives and
businesses.
The last section of this dissertation will give us an opportunity to discuss the arguments
used so as to clarify the elements of the debate. It will allow us to see whether they are
relevant, effective and more used by one side than the other.