termes de référence: projet de loi sur la confiscation civile
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Financé par
l'Union européenne
Sous le Haut Patronage du Président du Gouvernement, le Ministère des Domaines de l’État
et des Affaires Foncière organise
en collaboration avec l'Institut Interrégional de recherche des Nations Unies en matière de
Crime et de Justice (UNICRI) et l'Union européenne le :
SEMINAIRE INTERNATIONAL SUR
LE PROJET DE LOI SUR LA CONFISCATION CIVILE
COMME INSTRUMENT DE LUTTE CONTRE LA CORRUPTION
Hôtel Regency, Gammarath, 3-4 Mars 2016
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Termes de Référence et agenda
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1. Contexte
- Notion de confiscation 'civile' -
La confiscation des avoirs dits 'mal acquis' est un axe essentiel des efforts de la Tunisie en
matière de lutte contre la corruption. Le recouvrement de ces avoirs poursuit plusieurs objectifs.
Outre leur concours au développement économique du pays, leur récupération répond à d'évidents
impératifs de justice. Des actions fortes et effectives en matière de recouvrement des avoirs sont
autant de signaux qui portent le message de la lutte contre l'impunité, face à quiconque s'adonnerait
à des actes de corruption ou au blanchiment des fonds qui en découlent.
La confiscation est un instrument consacré dans plusieurs textes du système normatif
mondial. La Convention des Nations Unies contre la corruption, signée par la Tunisie et approuvée
par la loi n° 2008-16 du 25 février 2008 et par le décret n° 2008-763 du 24 mars 2008, reconnaît la
confiscation comme instrument juridique de lutte contre la corruption, tout en consacrant différentes
approchent pour confisquer les avoirs illicitement acquis.
Dans les systèmes juridiques inspirés du droit romano-germanique, la confiscation est
traditionnellement conçue comme une sanction complémentaire de nature pénale, c’est-à-dire
qu'elle accompagne une décision de condamnation pénale d'un individu. Toutefois, face aux
difficultés liés au recouvrement effectif des avoirs dans le cadre des procédures judiciaires pénales,
notamment dans leur dimension de coopération internationale, la Convention susmentionnée, ainsi
que plusieurs autres standards internationaux, tels les Recommandations du Groupe d'Action
Financière (GAFI), plaident en faveur d'une diversification des approches et de nouveaux modes de
concevoir les procédures, en introduisant une dimension civile dans les aspects patrimoniaux des
dossiers de corruption et de blanchiment.
Une condamnation pénale classique met l'accent sur l'individu poursuivi, et vise à priver
celui-ci de sa liberté. Dans cette logique, la confiscation 'pénale' est une peine accessoire qui
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accompagne la privation de liberté. Plutôt, une approche civile de la confiscation se focalise sur
certains biens, indépendamment de la question de la responsabilité pénale d'un individu, ou des
implications concernant la liberté ou l'intégrité physique des personnes concernées par cette mesure.
Dans cette nouvelle approche, il n'importe plus de démontrer la culpabilité d'une personne, mais
uniquement le caractère illicite de certains avoirs.
Cette approche 'civile' connaît plusieurs modalités d'application, et permet de pallier à
certaines lacunes identifiées dans l'approche classique, par exemple lorsque le prévenu décède avant
que n'intervient un jugement, en cas de difficultés de prouver juridiquement le lien entre le
patrimoine du prévenu et certaines infractions pénales, ou encore en cas de soupçons
d'enrichissement illicite. Contrairement à certaines idées préconçues, cette approche n'est pas
propre aux systèmes de droit ango-saxon. Dans plusieurs pays aux traditions juridiques inspirées du
droit romano-germanique, l'introduction de présomptions (réfragables) et de mécanismes de
confiscation sans condamnation pénale, ont permis des de recouvrir des avoirs dans des cas où
l'approche classique n'aurait pas abouti aux mêmes résultats. Il s'agit notamment de cas de grande
corruption ou de criminalité organisée à l'échelle transnationale.
Il est important de noter que dans tous les pays où de tels mécanismes ont été soumis au test
de constitutionnalité, la jurisprudence a toujours considéré qu'ils n'étaient pas contraires aux droits
de la défense, ni à la présomption d'innocence.
- cas de la Tunisie -
Le Décret-loi n° 2011-13 du 14 mars 2011, portant confiscation d'avoirs et de biens meubles
et immeubles, s'inscrit dans cette logique, dans la mesure où elle introduit un mécanisme de
confiscation sans condamnation pénale des personnes visées. Toutefois, sa mise en œuvre a suscité
certaines questions d'ordre pratique et juridique (personnes décédées, droits de tiers et de mineurs,
etc.). Ce texte est également appelé à être révisé, suite à la décision du Tribunal administratif de
l'annuler, et à la polémique juridique qui en a découlé.
La réforme du décret-loi sur la confiscation s'inscrit dans le cadre du renforcement des
instruments de lutte contre la corruption et de la recherche d'une plus grande efficacité du
recouvrement des avoirs illicites. La confiscation civile permet d'attendre deux objectifs majeurs
de lutte contre la corruption, à savoir :
- permettre à l'Etat de priver la personne concernée de la jouissance du patrimoine généré
par ses actes ;
- compenser la communauté des pertes engendrées par la corruption.
Par ailleurs, cette réforme ambitionne d'introduire des règles et principes de « bonne
gouvernance », telles la « transparence » et la « réactivité ». Dans le cadre de cette réforme sera
introduite une mesure nouvelle, à savoir la lutte contre « l'enrichissement illicite ». Ce concept,
également consacré par la Convention des Nations Unies contre la Corruption, implique qu'une
personne pourra être amené à démontrer la provenance de son patrimoine, par la mise en œuvre de
mécanismes de partage de la charge de la preuve.
La confiscation civile est un pas vers la réconciliation, dans la mesure où la nouvelle loi
pourrait offrir aux personnes concernées l'opportunité de s'auto-dénoncer. Cette réconciliation doit
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se faire en concertation avec la démarche de la justice transitionnelle, ce qui justifie l'implication
d'un large éventail d'intervenants dans la rédaction et la finalisation du projet de loi.
- partenariats -
Le Séminaire international qui se tiendra à Tunis, les 26-27 janvier 2016, bénéficie de
l'appui de l’Institut Interrégional de Recherche des Nations Unies en matière de Crime et de Justice
(UNICRI), au travers un programme sur le recouvrement des avoirs, financé par l'Union
européenne. Ce programme vise à renforcer les efforts de certains pays dits 'du printemps arabe',
dont la Tunisie, dans leurs efforts de recouvrement des avoirs, en permettant aux acteurs concernés
par cette question d'identifier des solutions aux obstacles rencontrés, notamment au travers les
échanges et la coopération entre eux.
Pour rappel, des sanctions ont été introduites par l'Union Européenne dès le 31 janvier 2011,
ordonnant le gel des avoirs de l'ancien président Zine El Abidine Ben Ali, sa femme et 46 autres
personnes. Depuis, elles ont été reconduites chaque année. Le 28 janvier 2016, le Conseil de
l'Union Européenne a prolongé jusqu'au 31 janvier 2017 le gel des avoirs de 48 personnes
considérées comme responsables du détournement de fonds publics tunisiens et de personnes et
entités qui leur sont associées. La décision est publiée au journal officiel de l'UE du 29 janvier
2016. Les mesures de gel décidées par l'Union européenne continueront de faire l'objet d'un suivi
constant. Par ailleurs, le Conseil de l'UE encourage les États membres de l'Union à œuvrer pour
que le gel des avoirs mène à des décisions judiciaires, prises au niveau national, permettant la saisie
et la confiscation de ces biens, et ce dans le cadre d'une coopération étroite avec les autorités
Tunisiennes.
L'Union européenne considère que le recouvrement des avoirs est une dimension importante
de son partenariat avec ses voisins du Sud, dont la Tunisie. Au travers le projet sus-mentionné, elle
répond aux appels exprimés notamment par les autorités nationales. Elle a fait appel à l'UNICRI,
qui dispose d'un vaste réseau d'expertise dans le domaine du recouvrement des avoirs, afin de
mettre en œuvre ce programme.
L'UNICRI est une institution autonome du système des Nations Unies, qui appuie des entités
inter-gouvernementales, gouvernementales et non-gouvernementales dans leurs efforts de lutte
contre les menaces du crime sur la paix, la sécurité et le développement durable. L'Institut opère
sur des thèmes spécifiques liés aux questions de criminalité, de justice, de sécurité et de lutte contre
le terrorisme. Il contribue à la prévention du crime, à la promotion de la bonne gouvernance et au
respect des droits de l'homme. L'UNICRI offre également un cadre de concertation neutre, où tous
les acteurs concernés par une question particulière peuvent se rencontrer et élaborer des approches
communes et lever les obstacles. Dans cet esprit, l'UNICRI travaille en étroite concertation avec les
autorités tunisiennes afin de faciliter le recouvrement des avoirs conformément aux bonnes
pratiques identifiées de par le monde.
2. Objectifs du Séminaire
Le Séminaire international sur la Confiscation civile poursuit les objectifs suivants :
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(a) préciser la notion de confiscation 'civile' ou 'non pénale', en présentant différents
mécanismes qui correspondent à cette notion, ainsi que différents cas de figure pour lesquels elle
permet d'offrir une solution juridique.
(b) identifier les principales contraintes juridiques et pratiques liées à la mise en œuvre du
Décret-Loi 2011-13 du 14 mars 2011, portant confiscation d'avoirs et de biens meubles et
immeubles.
(c) présenter les grands axes d'un avant projet de texte qui permettra de remédier aux
dysfonctionnements dudit Décret-Loi.