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N°95 - NOVEMBRE 2017 - GRATUIT STATUE DE LA PLACE BELLECOUR “SAUVEZ AU MOINS LE CHEVAL !”

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N°95 - NOVEMBRE 2017 - GRATUIT

STATUE DE LA PLACE BELLECOUR

“SAUVEZ AU MOINSLE CHEVAL !”

La ficelle de novembre s’intéresse auxavatars d’une statue : icone royaledéboulonnée par une première

république, restaurée par une nouvellemonarchie et conservée par lesrépubliques suivantes. En septembre 1870, Lyon est presque

devenue la capitale de l’Anarchie lors d’une insurrectionouvrière organisée par la Première Internationale et parMichel Bakounine, révolutionnaire russe.Bonne lecture.

Julie Bordet-Richard

La Ficelle Novembre 2017 / Page 3

Directrice de la publication Julie Bordet-Richard (06 14 03 75 34)

Rédaction : Julie Bordet-Richard (09 53 16 34 19)Josette Bordet (04 78 28 16 58)

Publicité Véronique SegardSecteur Lyon(06 51 30 00 71)[email protected]

Françoise PeltierSecteur [email protected]

La Ficelle. 94 bd de la Croix-Rousse69001 Lyon Tél. 04 78 28 16 [email protected]

Impression : IPS (Reyrieux -01)Edité à 15 000 exemplaires

Distribution : Société Goliath, Lyon 1er

La ficelle SARLCapital : 8000 euros. Siège social :94 boulevard de la Croix-Rousse69001 Lyon. Objet social : éditionde publications de presse et desites InternetGérant : A. Bordet. RCS : 503 200 487 RCS LYONISSN 2111-8914

Toute reproduction ou représentationintégrale ou partielle par quelquesprocédés que ce soit, des pages et despublicités publiées dans la présentepublication, faite sans autorisation del'éditeur est illicite et constitue unecontrefaçon.

Retrouvez La ficelle en téléchargement sur

www.laficelle.comLes lieux de dépôt dujournal figurent surwww.laficelle.com

Édito

N°95 - Novembre 2017

Sommaire

La Ficelle démêleStatue de la PlaceBellecour :“Sauvez au moinsle cheval !”

Le gone du moisBakounine en1870 : Lyon,“Romedu socialisme”

En imagesLyon d’autrefois

Les rendez-vous de La ficelleL’agenda de novembre

Ombres de la Croix-Rousse Montée de laGrande-Côte

Les lieux où trouver La ficelle

Le journal ne vit que par ses annonceurs, en les privilégiant lors de vos achats, vous

aiderez La ficelle.

Croix-Rousse d’automne

La Ficelle Novembre 2017 / Page 4

La ficelle démêle

STATUE DE LA PLACE BELLECOUR

“SAUVEZ AU MOINSLE CHEVAL !”

A Lyon, place Bellecour, le cheval et son cavalier font partie du paysageurbain. Le monument actuel sculpté par Lemot au début du XIXe siècle,

remplace celui de Desjardins détruit pendant la Révolution.Histoire de deux statues.

Première statuePendant le règne de Louis XIV, afin de mag-nifier la grandeur du roi, le Consulat de Lyondécide d’ériger une statue du monarque surle site de l’ancienne place d’armes. On a faitappel au sculpteur du Roi-Soleil, Martin Des-jardins, pour dessiner le monument. Sur lafuture place royale dont les plans d’aména-gement ont été confiés à M.de Cotte premier

architecte du roi, la statue équestre ornera l’es-pace. Encadré de deux ensembles de bâti-ments, de plusieurs rangées de tilleuls et agré-menté de deux fontaines, le terrain de jeuxdeviendra place Louis le Grand. Bien avant l’aménagement de la place, la sta-tue terminée arrive à Lyon en 1701, achemi-née par bateau depuis une fonderie pari-sienne. Embarquée sur la Seine, conduite à

Vue de la place Bellecour dessinée par Lallemand 1716 /1803 - Source Gallica BNF

Page de droite : Monument à la gloire deLouis le Grand- Graveur : Jean Audran

1667-1756. Sous l’image : “Ce monumenta été érigé dans la ville de Lyon / à la

gloire de Louis le Grand / Par les ordresde Monseigneur le Maréchal Duc de

Villeroy / Et par les soins de Messieurs lesPrévôt des Marchands et Echevins”.

Source Gallica

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La Ficelle démêle

Rouen puis au Havre, elle a traversé l’océan,la Méditerranée et rejoint l’embouchure duRhône pour une remontée du fleuve par ha-lage humain jusqu’à Lyon (voir ficelle 87). Elleva résider pendant douze ans, entourée deplanches, dans le clos d’un hôtel particulierde la place Bellecour, en attendant son instal-lation.La cérémonie solennelle d’élévation de la sta-tue sur son piédestal a lieu en décembre 1713.C’est au son du canon, des tambours ettrompettes, en présence du consulat, despennons de tous les quartiers, marchands etéchevins, arquebusiers et plusieurs dizaines demilliers de spectateurs, que la figure debronze est dégagée de sa charpente à l’aide de

cordages et de poulies et déposée sur son so-cle.Une cérémonie mémorable avec feux d’ar-tifice et vin à volonté. « Depuis midi jusqu’àneuf heures du soir, on fit couler quatre fon-taines de vin dans la place Bellecour, pour aug-menter la joie publique.. » (1)

Le monument est majestueux. Sur un piédes-tal de marbre, se dressent le cheval et son ca-valier à la manière des empereurs romains. Encuivre rouge et jaune, l’ensemble rutilecomme le désire le monarque. Pour orner le piédestal, arrivent à Lyonquelques années plus tard, les fontes de Nico-las et Guillaume Coustou, sculpteurs lyonnaischargés des hauts-reliefs. Le premier exécutel’allégorie de la Saône, et le second celle du

La Saône - Nicolas Coustou

La statue terminée arrive àLyon en 1701, acheminée

par bateau depuis unefonderie parisienne.

Embarquée sur la Seine,conduite à Rouen puis au

Havre, elle a traversé l’océan,la Méditerranée et rejoint

l’embouchure du Rhône pourune remontée du fleuve parhalage humain jusqu’à Lyon.

Le Rhône - Guillaume Coustou

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Rhône, encore en place au-jourd’hui. « Guillaume Coustoureprésente le Rhône sous les traitsd’un vieillard barbu couronné depampres et d’épis de blé, allongésur un lion couché, la maingauche posée sur un aviron, unetouffe de joncs à sa gauche. Lapatte avant droite du lion reposesur un poisson, des fruits et des lé-gumes. Nicolas Coustou, frèreaîné de Guillaume, représente laSaône sous les traits d’une femmenue couronnée de fleurs, d’épis etde joncs, allongée sur un lion cou-ché, le bras gauche appuyé sur untronc d’où sort une corne d’abon-dance laissant échapper les pro-duits de la nature. »(2)

Pendant une cinquantaine d’an-née, depuis 1738 date de fin detravaux, la place royale figureparmi les plus belles d’Europe.En 1789, la Révolution françaisemet fin à l’Ancien Régime et àtoutes ses représentations. En1792 Louis XIV est déboulonnéde son socle malgré les contesta-tions de certains et du maire Vi-tet, qui essaient de faire respecter

« un si bel ouvrage » en proposantde mettre le bonnet de la libertésur la tête du prince, ou au moinsde conserver le cheval « Quel em-blème plus propre pour figurer unpeuple généreux & fier que le che-val, le plus beau des animaux, leplus intelligent & le plusdocile, emblème pour figurer unpeuple généreux.» (3) Doléancenon prise en compte. La statuerenversée est découpée et livréeaux fondeurs pour en faire des ca-nons. C’est là, que l’on découvrela présence d’une porte sous leventre du cheval ainsi que des re-liefs de repas à l’intérieur dubronze. Une cachette potentiellepour les voleurs et leur butin. (4)

Il ne reste plus de traces du mo-nument. Seuls les hauts-reliefs desfrères Coustou, mis à l’abri àl’Hôtel de Ville, ont pu être sau-vés de la fonderie.

Deuxième statueUne trentaine d’années plus tard,le retour des Bourbons fait renaî-tre les effigies royales. C’est ainsique place Bellecour le nouveau

Pendant une cinquantaine d’année, depuis1738 date de fin de travaux, la place royale

figure parmi les plus belles d’Europe.En 1789, la Révolution française met fin à

l’Ancien Régime et à toutes sesreprésentations.

Lion du haut-relief de Guillaume Coustou

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La Ficelle démêle

cheval caracole emportant son jeune cavalier.La représentation de Louis XIV est sublimée.Le Roi monte à cru, à la romaine (sans selleni étriers). Revêtu de la cuirasse et des brode-quins antiques, la tête ceinte d’une cou-ronne de laurier, il symbolise le héros mytho-logique. La réalisation de la sculpture a été confiée àLemot, grand prix de Rome. Celui-ci modèlele cheval et le cavalier dans l’argile à l’intérieurde son atelier lyonnais. L’imposante sculpturenécessite échelles et échafaudages pour per-mettre le travail de l’artiste. Le roi et sa mon-ture, modelés ensemble avant la fonte suivantle désir du sculpteur, exigent un mode detransport adapté au chargement. Un fardier,sorte de brancard à roues, est spécialementconstruit pour supporter le poids du monu-ment tout en l’empêchant de dévier. La sta-tue, amarrée à l’imposante charpente, prendla route en direction d’une fonderie parisienne.Tiré par une vingtaine de chevaux, le char-gement traverse les villages aux rues étroitesavec succès grâce aux bonnes proportions dufardier et à l’habileté du convoyeur. Après lafonte, la statue coulée d’un seul bloc reprendla route de Lyon mais cette fois parée de sym-boles royaux et « précédée d’un nombreux dé-

tachement de la gendarmerie royale de Paris,aux cris répétés de vive le roi ! […] A la mon-tée de Limonest, on a ajouté douze chevauxaux vingt qui trainaient cet équipage colos-sal […] enfin, le 15 octobre 1825, vers deuxheures après-midi, le chariot fait son entréetriomphale sur la place Bellecour […] les che-vaux tout couverts de poussière, stimulés parleur conducteur autant que par les cris et lemouvement de la foule, sont arrivés au grandtrot au milieu de la place.»* (4)

L’érection de la statue sur son piédestal est leprétexte d’une grande cérémonie le jour dela Saint-Charles en l’honneur du roi CharlesX (en réalité deux jours plus tard pour causede pluie incessante), L’architecte Chenavard

a été chargé d’élever une estrade destinée à re-cevoir les autorités. « C’était un portique enhémicycle composé de colonnes et de gradinsà la manière antique [..] Les marches par les-quelles on y montait étaient flanquées de deuxcolonnes surmontées de victoires qui rappe-laient celles de l’autel de Lyon figurées sur lesmédailles d’Auguste.»(4) Fanfares, tambours,coups de canons et acclamations « vive le Roi !vivent les Bourbons!», distributions de mé-dailles, simulations de batailles, embrase-ment du fort de Fourvière et danses animè-rent la ville jusqu’au lendemain. Quelques années auparavant, avait étéconstruit le piédestal destiné à recevoir la sta-tue. Composé de plusieurs blocs de marbresvenus des carrières de Carrare, il nécessita luiaussi des modes de transport appropriés, cha-riots et embarcations fortement charpentés.Le bloc principal trainé sur des rouleaux, met-tra plusieurs jours pour parcourir la distanceentre le port du Rhône et Bellecour. La posede la première pierre a été l’objet d’une céré-monie officielle le 1er mai 1821. Un cortègecomposé des plus hautes personnalités repré-sentant le pouvoir et le roi ont accompagnéle duc d’Angoulême chargé de sceller la cavitécontenant une boite de plomb renfermant des

Le roi monte à cru, à laromaine, sans selle ni étriers.Revêtu de la cuirasse et desbrodequins antiques, la têteceinte d’une couronne de

laurier, il symbolise le hérosmythologique.

A. Leclerc : Dessin géométral de la machine qui a servi pour l’élévation et le placement de la statue équestre du Roy. BMLyon

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objets et textes commémoratifs. Le marteauet la truelle en vermeil ayant servi au scel-lement ont été remis à M.Artaud,* pour êtreconservés au musée Saint-Pierre dont il étaitle directeur.Le Roi-Soleil a retrouvé son piédestal sur laplace, et depuis ce jour, trône au centre dela ville. On peut seulement regretter que laRépublique, décalée sur la place Carnot, n’aitpas eu les honneurs de la place principale deLyon.(Voir La ficelle 78)Les hauts-reliefs des frères Coustou, accu-sés par Artaud de maniérisme et théâtraliténuisant à la majesté de l’ensemble, restèrentà l’Hôtel de Ville jusqu’en 1957 date de leurretour place Bellecour.

Sources*F. Artaud, Lyon, 1826. né à Avignon le 17 avril 1767 et mortà Orange le 27 mars 1838. Il a principalement œuvré surles sites archéologiques de la ville antique de Lyon, Lugdu-num.(1) Description de la cérémonie P17 de l’ouvrage de Artaud« ancienne statue équestre de Louis XIV » (2)ANNE FOREST -Les sculptures du pont Lafayette : del’art de la réplique (3) Jean BURDY Un cheval de bronze à Bellecour(4)Artaud –Nouvelle statue équestre de Louis XIV -Pro-cès-verbal de l’inauguration de la statue

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Affiche Premiè� re Commune de Lyon, 1870 - Archives municipales de Lyon

En 1870, Lyon n’a pas oublié les révoltessanglantes qui se déroulèrent il y a seu-lement quelques décennies.

« L’empire avait donné le signal de la « fête desprofits » sous la bannière d’un libéralisme éco-nomique aidé dans ses entreprises par l’ap-pareil d’Etat. Sa politique des grands travauxavait favorisé l’essor de la banque et l’exten-sion du maillage ferroviaire, le développementindustriel et la transformation des villes. »*Dans le centre ville, les rues sont organiséesdifféremment : les petites rues sinueusesd’avant ont laissé la place à deux artères bien

droite : la rue Impériale (future rue de la Ré-publique) et la rue de l’Impératrice, (futurerue Edouard Herriot). Un boulevard de 40mètres de large remplace les anciennes forti-fications de la Croix-Rousse. Tout est fait pourmaitriser facilement une révolte ouvrière. « Lyon peut se résumer dans le schéma sui-vant : un centre de l’opulence, des affaires, dela vie brillante et de la consommation de luxe,entouré de faubourgs où un petit peuple la-borieux connaît une existence médiocre etsouvent aléatoire. »*C’est dans ce contexte que débute la guerre en-

tre la France et la Prusse le 19 juillet 1870.L’Empire de Napoléon III face au futurReich.Dès le 20 juillet, des manifestations pacifistessont organisées à Lyon par l’Association In-ternationale des Travailleurs (AIT), dite Pre-mière Internationale.En réaction aux défaites successives de l’arméenapoléonienne, Lyon proclame la Répu-blique le 4 septembre. Avant Paris.Le drapeau rouge est accroché au sommet duBeffroi de l’Hôtel de Ville de Lyon, à la placedu drapeau tricolore.

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Le gone du mois

BAKOUNINE EN 1870LYON, “ROME

DU SOCIALISME”En septembre 1870, Lyon est presque devenue la capitale de l’Anarchielors d’une insurrection ouvrière organisée par la Première Internationale

et par Michel Bakounine, révolutionnaire russe.

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C’est alors que Bakounine intervient…Michel Bakounine est un révolutionnairerusse. Il est le principal adversaire de Karl Marxau sein de la Première internationale. Il s’op-pose « à l’autoritarisme marxiste et se pose endéfenseur de l’autogestion et de la liberté in-térieure des organisations ouvrières ».**Dans son ouvrage Dieu et l’Etat, il explique :« Nous repoussons toute législation, toute au-torité et toute influence, privilégiée, patentée,officielle et légale, même sortie du suffrage uni-versel, convaincus qu’elle ne pourrait jamaistourner qu’au profit d’une minorité domi-nante et exploitante, contre les intérêts de l’im-mense majorité asservie. Voilà dans quelsens nous sommes réellement des anar-chistes ».Michel Bakounine arrive à Lyon mi-septem-bre. « Il pense que Lyon, ville de la révolte desCanuts de 1831 et des Voraces, est la « Romedu socialisme » et que la situation de guerrepeut permettre d’y lancer la révolution socialeinternationale qui doit achever la grande Ré-volution de 1789 et la révolution des peuplesde 1848 ».***Jacques Hénon vient d’être élu maire de Lyon.Bakounine, arrivé à Lyon, crée un Comité cen-tral de salut de la France, chez son ami Gas-pard Blanc, avec Albert Richard.Lors de son lancement devant une salle de6000 personnes aux Brotteaux le 17 septem-bre, il est décidé de créer des comités de sa-lut de la France dans tout le pays. « La guerrepatriotique et sociale doit se mettre enmarche à partir de Lyon. Pour arriver à cet ob-jectif, le comité lyonnais, coordonnateur dela dynamique de résistance patriotique à« l’Empire knouto-germanique », doit pren-dre le pouvoir à l’occasion d’une journée ré-volutionnaire. »***« On trouve des appuis au Comité de suretégénérale et sur les chantiers des travaux de dé-fense où les ouvriers manifestent leur mécon-tentement à la suite de la diminution de leursalaire journalier. Ce sont ces derniers qui four-nissent l’appui nécessaire à l’opération envi-sagée contre l’Hôtel de Ville de Lyon ».*Le 28 septembre, 6 à 8000 travailleurs se ras-semblent sur la place des Terreaux pour re-vendiquer le maintien de leur salaire journa-lier et une prime pour les jours de pluie. Unedélégation est reçue par le conseil municipalvers midi. Mais un groupe de manifestants pé-nètre dans la salle guidés par Saignes qui s’ins-talle sur le balcon et harangue la foule qui gros-sit de plus en plus sur la place. Toujours surle balcon, il nomme Cluseret chef des arméesrévolutionnaires et fédératives du midi de laFrance. « Pendant ce temps, par la petite portelatérale de la rue Puits Gaillot, Bakounine etson état major pénètrent dans la cour de l’Hô-tel de Ville. La confusion est totale. Les enva-hisseurs et les membres du conseil municipals’affrontent, certains autour d’une table rédi-gent des appels et des décrets mort-nés. »*Hénon, ainsi que le préfet, demande l’aide dela Garde nationale. Ils parviennent à pénétrerdans le bâtiment, à isoler Bakounine dans unepièce et lui prendre son revolver, son carnet,

ses papiers et un plan de Lyon. Cluseret est éga-lement intercepté par les Gardes nationaux.De son côté, Saignes parvient à réunir les ma-nifestants pour envahir l’Hôtel de Ville et li-bérer Bakounine et Cluseret. Hénon est faitprisonnier.« Il est alors dix-huit heures trente, la confu-sion règne, Hénon, grâce à des complicités, ar-rive à sortir de l’Hôtel de Ville et à battre le rap-pel de la Garde nationale. Le rapport de forcessur la place des Terreaux évolue en faveur deHénon, car des bataillons de gardes nationauxde la Croix-Rousse, dont l’un commandé parAntoine Arnaud, viennent défendre la muni-cipalité, expulsent les émeutiers qui quittentl’Hôtel de Ville, libèrent le préfet qui est ac-clamé. A dix-neuf heures, trente mille gardesnationaux campent aux Terreaux et ramènentle calme ».***Bakounine s’enfuit vers Marseille. Lyon ne serapas la Capitale de l’Anarchie.Il sera moqué par Marx et Engels dans un textede 1873 : « Le 28 septembre, jour de son ar-

rivée, le peuple s’était emparé de l’Hôtel deVille. Bakounine s’y installa : alors arriva le mo-ment critique, le moment attendu depuis biendes années où Bakounine put accomplirl’acte le plus révolutionnaire que le monde aitjamais vu : il décrêta l’abolition de l’Etat. Maisl’Etat, sous la forme et l’espèce de deux com-pagnies de gardes nationaux bourgeois, en-tra par une porte qu’on avait oublié de gar-der, balaya la salle et fit reprendre à la hâte lechemin de Genève à Bakounine. »L’antagonisme entre Bakounine et Marx estévident. Le texte ne reflète évidemment pasla réalité des faits, notamment sur la date d’ar-rivée du révolutionnaire, mais il représentebien l’image qu’on pouvait alors avoir de Ba-kounine à l’époque dans le cercle de Marx :un révolutionnaire opportuniste et brouillon.

* Quand Lyon rugit, de Bruno Benoit et Raymond Curtet** Encyclopedia Universalis*** Dictionnaire historique de Lyon

Le gone du mois

Portrait de Makhail Bakounine par Felix Nadar.

“Pendant ce temps, par la petite porte latérale de la ruePuits Gaillot, Bakounine et son état major pénètrent dans lacour de l’Hôtel de Ville. La confusion est totale.”

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Lyon d’Autrefois1911

Pour les besoins de notre rubrique “Lyon autrefois”, La ficelle recherche tout document photographique relatif à Lyon : objets, photographies,affiches… Merci de nous contacter : [email protected] - Nous remercions les lecteurs pour leurs envois.

Une entrée monumentale est construite en 1821 pour accéder au Jardin des Plantes, ancien clos du couvent desDames de la Déserte. A gauche, une partie de l’ancien bâtiment du couvent abrite la mairie du 1erarrondissement. De chaque côté du perron, une fontaine au lion. Les lions couchés, sur le modèle de ceux de laFontana dell ‘Acqua Felice bâtie au XVIe siècle à Rome, ont été coulés en 1823 à la fonderie royale du Creusot.Au sommet, un monument rend hommage à Burdeau défenseur de la laïcité, élu député du Rhône de 1885 à1894. L’école des Beaux-Arts n’est pas encore construite (inaugurée en 1960).

Document photographique Murielle Mathieu

MONTÉE DE L’AMPHITHÉÂTRE

La Ficelle Novembre 2017 / Page 14

Agenda NO V EMB R E

L’édition 2017 de Novembre des canuts :Industrialisation volet 2, l’Humain, leTravail et la Cité, poursuit la réflexion

entamée en 2016 sur les relations complexes quilient progrès techniques et mutations sociétales.S’il est indéniable que les innovations industriellesont largement contribué à l’amélioration desconditions de vie du plus grand nombre, on nepeut nier que nous subissons aujourd’hui, àl’échelle mondiale, les conséquences de la marcheeffrénée d’un progrès érigé comme une fin en soi.Au cours de cette quinzaine Novembre des canuts,conférences, débats, spectacles invitent à uneréflexion commune sur les alternatives proposéesdepuis la première moitié du XIXe siècle à nosjours afin de combiner inventions techniques etindustrielles avec l’épanouissement et le respectdes individus dans leur environnement au senslarge.Novembre des canuts 2017 rend hommage au co-fondateur du festival, Robert Luc, notre amidisparu au printemps dernier. Passionné parl’histoire des canuts, Robert nous a insufflél’énergie de faire découvrir au grand public larichesse du passé industriel et ouvrier de Lyon, saville natale. Le collectif Novembre des canuts luidédie cette édition.Du 17 novembre au 3 décembre, expositions,conférences, débats, spectacles et visites urbainesinvitent à une réflexion commune sur le sujet, duXIXe siècle à nos jours.Attention : agenda non exhaustif

JEUDI 16 NOVEMBRE à 18H30 AVANT PREMIÈRE / VERNISSAGE Les industries à Lyon au XIXe siècle Cartographie de l’impact de la soierie sur ledéveloppement des industries à Lyon.Exposition par la Maison des Canuts.Maison des Canuts, 10-12 rue d’Ivry, Lyon 4e Du lundi au samedi de 10h à 18h, exposition enaccès libre, renseignements au 04 78 28 62 04

VENDREDI 17 NOVEMBRE à 18H30 SOIRÉE D’OUVERTURE RENCONTRE 10 ans déjà ! Novembre des canuts, imaginé en2008 par Robert Luc et Valérie Zipper a traverséune décennie et s’inscrit aujourd’hui dans lepaysage culturel de la Ville de Lyon. Cetanniversaire donne lieu à une édition touteparticulière, riche en émotions et en événements.Notre complice et ami Robert Luc nous a quittésau mois de mars dernier, le Collectif Novembredes canuts lui dédie cette quinzaine, persuadé qu’iln’y a pas plus bel hommage à lui rendre que decontinuer à faire connaître à un public toujoursplus nombreux, la facon dont l’histoire desouvriers en soie lyonnais éclaire notre époquecontemporaine. Cette soirée aura lieu en Salle du Conseil de laMairie, ou seront exposés, tout au long de laquinzaine, les clichés pris lors de l’édition précédentepar les élèves en section photo de la SEPR, partenaireincontournable de Novembre des canuts. Par leCollectif Novembre des canuts, la Compagnie duChien Jaune et les élèves en section photo de la SEPR.

Salle du Conseil de la Mairie du 4e, 133 bd de laCroix-Rousse, Lyon 4e Entrée libre / Expositionvisible jusqu’au 2 décembre

SAMEDI 18 NOVEMBRE À 20H 10 ANS DE CRÉATIONSDepuis 10 ans nous nous sommes attachés àtraiter, chaque année, un thème qui préoccupaitdéjà les canuts et qui persiste dans la sociétéactuelle. De la condition ouvrière féminine auxprud’hommes, de l’habitat à l’apprentissage,chacune des éditions s’est attachée à proposerconférences, débats, balades mais aussi créationsartistiques afin d’élargir le regard sur lesproblématiques. Valérie Zipper, metteure en scène,a ainsi écrit et adapté des spectacles pour la scèneou l’espace public sur chacune des thématiques.Elle vous propose un florilège des temps forts des9 éditions passées, une création qui donnera à voiret à entendre l’extraordinaire bouillonnementintellectuel qui animait les ouvriers lyonnais dudébut du XIXe siècle Par la Compagnie du Chien Jaune (adaptation etmise en scène Valérie Zipper). Musées Gadagne, 1 Place du Petit Collège, Lyon 5eGratuit sur réservation au 04 78 42 03 61 ouwww.gadagne.musees.lyon.fr

DIMANCHE 19 NOVEMBRE DE 14H À 18HLA VIE MODE D’EMPLOI Novembre des canuts et le Musée Urbain TonyGarnier s’étaient déjà associés lors de l’édition2013 consacrée à l’Habitat « De la nécessité de seloger au rêve d’habiter ». Avec l’exposition « La Viemode d’emploi » le Musée Tony Garnier invite lesartistes de la Compagnie du Chien Jaune àaccompagner les visiteurs dans leur découverte del’évolution de l’habitat avec des lectures de textes :Georges Pérec, Victor Hugo, extraits de l’Echo dela Fabrique... Une balade poétique dans l’histoiredu vivre ensemble. Par la Compagnie du Chien Jaune et le MuséeUrbain Tony Garnier. Musée Urbain Tony Garnier, 4 rue des Serpollières,Lyon 8e 5 € / Renseignements et réservation au 04 78 75 16 75 (du mardi au vendredi entre 14h et 18h) Séance supplémentaire le dimanche 3 décembre

LUNDI 20 NOVEMBRE À 18H30 INAUGURATION 9eSPECTACLE La commune indépendante de Vaise est rattachéeà la ville de Lyon depuis 1852. Ce quartier peupléde canuts au XIXe fut fortement impliqué aucours des révoltes de 1831 et 1834. Lors deséditions Novembre des canuts dédiées à ces deuxinsurrections, la mairie du 9e arrondissementavait marqué son intérêt pour la manifestation. En2017, une soirée de lancement dans le 9e seral’occasion de découvrir l’exposition JacquArtsproposée par l’école d’Arts appliqués Presqu’île etde présenter la quinzaine, notamment lesévénements programmés dans le 9earrondissement. La Compagnie Datcha, clôtureracette soirée par une lecture d’extraits de leur

spectacle « Table ronde aux assises de l’immobilier- ou la grande arnaque du progrès », en écho ànotre grande thématique de l’industrialisation. Par Le Collectif Novembre des canuts, Archi’Graph,l’école Presqu’île, la Mairie du 9e arrondissement, etla Cie Datcha.Mairie du 9e, 6 Place du Marché, Lyon 9eEntrée libre et gratuite

MARDI 21 NOVEMBRE à 19H GRAND DÉBAT : L’HUMAIN, LE TRAVAIL ET LA CITÉ En 2016, lors de l’édition « Industrialisation / Volet 1 », notre grand débat s’attachait à observercomment le progrès technique et l’innovationtransformaient profondément l’organisation dutravail. Pour l’édition «Industrialisation / Volet 2»,nous nous intéresserons aux mutations des modesde vie, de l’environnement urbain et parconséquent de l’humain, induites par lemouvement industriel. D’hier à aujourd’hui,comment l’industrialisation modifie la ville,l’habitat, et les rapports sociaux ? Par Vincent Porhel, Maître de Conférence en histoirecontemporaine, Michelle Zancarini-Fournel (sousréserve), professeure d’histoire contemporaine, LouisLevêque, ancien adjoint du Maire de Lyon délégué àl’habitat, au logement et à la politique de la ville,Catherine Chambon, directrice du Musée UrbainTony Garnier, et Roger Gay, Institut CGT d’Histoiresociale. Débat modéré par Jean-Francois Cullafroz,journaliste professionnel honoraire. Salle du Conseil de la Mairie du 4e, 133 bd de laCroix-Rousse, Lyon 4e Entrée libre

DIMANCHE 26 NOVEMBRE À 10H VISITE URBAINE « BAMBANE : SUR LES PAS DEROBERT LUC » Journaliste, écrivain, historien de la Croix-Rousseet co-fondateur du festival Novembre des canuts,Robert Luc nous a quittés en mars 2017. Tempsfort de la quinzaine, les bambanes de Robert Luc,accompagnées par les artistes de la Compagnie duChien Jaune ont toujours remporté un vif succès.La bambane 2017, née à partir du travail deRobert Luc, est conduite par les artistes qui l’ontaccompagné lors de ces balades urbaines. Leparcours se terminera par une découverte del’atelier de tissage Soierie Vivante de la rue JustinGodart, qui nous ouvre ses portes pour l’occasion. Inspiré des travaux de recherches de Robert Luc.Par la Compagnie du Chien Jaune (directiond’acteurs et mise en espace Valérie Zipper), et SoierieVivante. Rendez-vous à 10h sous la statue Jacquard,Place de la Croix-Rousse, Lyon 4e Accès libre

LUNDI 27 NOVEMBRE à 18H L’ECOLE AVEYRON OUVRE SESPORTES Cette année encore, les professeurs et élèves del’école Aveyron s’engagent pleinement aux cotésde Novembre des canuts, avec pas moins de 9classes participantes. Après 5 ans de travauxcommuns, ce partenariat est devenu un parcours

NOVEMBRE DES CANUTS FÊTE SES 10 ANS !

La Ficelle Novembre 2017 / Page 15

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pédagogique qui permet aux élèves de découvrir lagrande Histoire par le biais de celle de leurquartier, et ce tout au long du cycle de l’écoleprimaire. Pour ce second volet surl’industrialisation, les enfants et leurs professeursprésenteront, sous forme d’exposition, leursrecherches : comment l’ère industrielle a-t-elletransformé leur quartier au fil du temps ? Par les professeurs et élèves de l’école Aveyron. école Aveyron, 2 bis rue Vaucanson, Lyon 1er Entréelibre

MARDI 28 NOVEMBRE À 18H DU MUTUELLISME CANUT À L’ÉCONOMIE sociale et solidaire contemporaine Lieux auto-gérés, coopératives, économie sociale etsolidaire : autant de termes qui s’ancrentaujourd’hui dans l’inconscient général tant cesinitiatives sont en pleine expansion.Si ces démarches trouvent aujourd’hui leurséléments de langage, nous en décelons, dansl’histoire, des traces qui n’en portent pas le nom.Compagnonnage, mutuellisme et coopérativesétaient les fers de lance des canuts, qui ne sontcertainement pas étrangers aux principessolidaires et responsables qui prennentaujourd’hui leur envol. Nous nous questionnerons ensemble sur lescaractéristiques inhérentes à ces initiatives.Une introduction par Jacques Réty (« à ladécouverte de l’économie sociale et solidaire »), et

des témoignages d’acteurs de l’économie sociale etsolidaire d’aujourd’hui précèderont le dialogueavec la salle. Alter Hostel, 32 Quai Arloing, Lyon 9e Entrée libre

JEUDI 30 NOVEMBRE à 19H LES CANUTS OU LA DÉMOCRATIETURBULENTE «Vivre en travaillant, mourir en combattant » :c’est le mot d’ordre que les canuts de Lyonscandent, les armes à la main en novembre 1831d’abord et en avril 1834, pour protéger leurautonomie et leur liberté face aux « experts » dutemps qui entendent transformer radicalement lemodèle de la Grande Fabrique. Alors qu’unenouvelle ère industrielle s’ouvre, ils créent l’échode la Fabrique, le premier grand journal ouvrierpérenne, publié en France. A l’origine de l’éditionen ligne du journal canut L’écho de la Fabrique,l’économiste et historien des idées Ludovic Frobertconsacra un livre à ces canuts qui s’informent etdébattent par voie de presse afin d’adapter lemodèle complexe de la Grande Fabrique àl’évolution industrielle en cours. à l’occasion de sa réédition par les éditions Libel,nous vous invitons à échanger avec l’auteur et à lerencontrer.Par Ludovic Frobert, auteur, directeur de recherchesau CNRS (Laboratoire Triangle), les éditions Libel etla Bibliothèque du 2e. Bibliothèque Municipale du 2e, 13 rue de Condé,Lyon 2e Entrée libre

SAMEDI 2 DÉCEMBRE À 12H30 NOVEMBRE DES CANUTS : AU FIL DE LA SOIE ! Les jeunes des centres sociaux de la Croix-Roussevisitent le samedi 2 décembre au matin de 10h à11h30 l’Atelier de Matelon. Cette visite a pourobjectif de faire connaître le processus historiquede création et de fabrication de la soie à un groupede jeunes qui participent à la Biennale de la Danse2018. Dans ce cadre, ils seront amenés àconfectionner des costumes de danse. Il noussemblait important de les sensibiliser à cesprocessus de création. à la suite de cette visite, un repas typiquementlyonnais organisé au Centre Social Pernon par lesjeunes de l’espace 11-16 ans vous sera proposé àpartir de 12h30. A cette occasion, ils nous feront part deleurs premières impressions et expliqueront leurprojet futur.Par l’équipe et les jeunes du Centre Social Pernon.Centre social Pernon, 27 rue Pernon, Lyon 4e Surréservation.Tarif du repas : 8€ par adulte et 4€ parenfant (- de 10 ans) Renseignements et réservation au 04.78.29.90.44(contacter Amélie Dalla Piazza)

Montée de la Grande-CôteJosette Aschenbroich-Bordet

Ombres de la Croix-Rousse